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Prétentieux,insolent,maisirrésistible

Elleestambitieuse,loyale,drôle;ilestsexy,brillant,protecteur.Entiers,àfleurdepeau,touslesdeuxontunevolontéd'acier…quelessentimentsviennentmettentàmal.Etquandlepassélesrattrape,l’avenirdeleurhistoired’amourestplusqu’incertain.Trahisons,jalousies,coupsdudestin…Lapassionpourra-t-elletriompherdetout?

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Lejeudumilliardaire

CelafaitdixansqueSarahLyndonn’apasvuHaroldAscott,dixansqu’elleseposedesquestionssurlaraisondesondépart,qu’ellesedemandesiellecomptaitréellementàsesyeux,elle,lapetitesœurdeMark,lemeilleuramid’Harold,tragiquementmortàl’aubedeses20ans.Depuis,Sarahagrandi,elles’estconstruiteloindeceluiquicomptaittantdanssoncœurd’adolescente,elleestdevenueunefemme.QuantàHarold,ilestaujourd’huiàlatêted’AscottCommunications:charismatique,talentueux,déterminéet…multimilliardaire.Parviendra-t-ilàréparerseserreurspassées?Etelle,pourra-t-elleluipardonner?

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Désirsetdésastres

Lunaire,attachanteetimprévisible,ElenaLavignevitl’unedespiresjournéesdesavie.Envingt-quatreheures,cettejeuneétudianteenartestrefouléedelagalerieoùellevientprésentersesœuvresetseretrouveàjouerlesnaturistesenpleingaladansunpalace.C’estlacatastrophe!Jusqu’àcequ’ellecroiselarouted’unséduisantinconnuensetrompantdevestiaire.Leproblème?Elleestensoutien-gorge,luiensmoking.Cequin’empêchepaslecoupdefoudre…

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Bliss-Lefauxjournald'unevraieromantique,1

Emmaestuneauteureàsuccès,elleinvente,décritetfaitvivredesmultimilliardaires.Ilsontbeaux,ilssontjeunesetincarnenttouteslesqualitésdontunefemmepeutrêver.Quandunbeaujourelleencroiseunenvrai,elledoitaffronterlaréalité:beauàsedamnermaisunegosurdimensionné!Etarrogantavecça…Maiscontrairementauxprincescharmantsdesesromans,ilestbienréel.BienvenuedansBliss,lejournalintimed'EmmaGreen,quivousracontepresquetout.Non,vraimenttout!

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DarkFever

AlbaClancyfaitsonentréeàlabrigadedesStupsdelapolicedeMiami.Pleinedeconvictionsetd’idéauxdejustice,ellecomptebiensedonneràcentpourcentdanssontravail.Maisc’estsanscompterlecoupdefoudrequ’ellevavivreencroisantlechemindeMatthewFerris,multimilliardaireetfilsduredoutableBobbyDragonFerris,lechefd’uneimportanteorganisationcriminelledeMiami.Etcontrelescoupsdefoudre,lesidéauxnepeuventpasgrand-chose.AlbaetMatthewsontemportésdansleurpassionirraisonnée,semettantl’unetl’autreenpérildansleursuniverssidifférents.Maissisonmystérieuxamantn’étaitpasceluiqu’ellecroit?

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AmberJames

BLOODYLILYSOUSL'EMPRISEDUVAMPIRE

Vol.10

1.Unmairerécalcitrant

UnevivelumièreilluminelesquaisduportdeYesterday.Ilfaitbeauencelundimatin.Jem’étiredansmonlitetjerepenseàmonétrangeweek-end.Ils’estdéroulécommeauralenti.J’aitraînaillélesamedià regarder lapluieà travers labaievitrée tout enm’abrutissantdemusique. J’ai essayédejoindreWilmapouravoirdesesnouvellesmaisellerestaitinjoignable.J’étaispourtantcurieusedesavoirsilesvoixqu’elleentenddepuismavenueàYesterdayluiavaientencoreparlé.Lesoirvenu,commeLukasn’étaitpaslibrepourboireunverreetquejen’avaispasenviedemeretrouverencoretouteseuleauBlood&Food,jemesuispréparéunplateautéléetjemesuisplantéedevantunfilmquiracontait une histoire abracadabrante mais assez drôle de vampires et de sorcières. L’une d’entreelles,particulièrementeffrayante,ressemblaitàMaracommedeuxgouttesd’eau.

Chaquefoisqu’Isaacessayaitd’entrerdansmatête,jeluieninterdisaisl’accèsenmemordantlalèvreinférieure.Parfoisjusqu’ausangtantl’exerciceétaitdifficileàréussir.Lequitterestunechose,m’enteniràcettedécisionenestuneautre!Maisj’ailaconvictionquec’estleseuletuniquemoyende lemettreà l’abridessorcièresetdesNobodies.J’aidonc toutessayépourfaireensorteque leweek-end passe le plus vite possible, m’occupant à diverses tâches et loisirs. J’ai même tenté dem’intéresser au livre sur les pierres mais la magie n’opérait pas. Il ne m’appelait pas comme àl’accoutumée,unpeucommes’ilavaitdécidédemefairedesvacances.

Çaparaîtfoumaisc’estainsiquejel’aiinterprété!

Dansmon esprit ne dansait qu’un seulmot, un seul jour : lundi ! Cet instant tant attendu où jepourrais mettre enfin mon plan à exécution, à savoir obtenir les fameux plans d’urbanisation deYesterdayetsesenvironsàlamairie.Pouravancerdansmonenquête,obtenirtouteslesréponsesàmesquestionset…retrouverIsaacauplustôt.Lesheurespassaientparfoissilentement,d’unefaçonsidésespérante,quej’aimêmeenvisagéàplusieursreprisesdefileràmotojusqu’àlamairiepouryentrer par effraction ! Seule la certitude que cela ne pourrait que mettre la puce à l’oreille dessorcièresm’enaempêchée.Ilfallaitagirdiscrètementetintelligemment.

Dimanche,àlatombéedusoir,j’ailâchementdéclinéuneoffredeLukasmeproposantdeboireunverre auBlood&Food, prétextant unegrosse fatigue alors que j’avais tout simplement peur d’ycroiserIsaacetdenepasêtrecapabledem’enteniràmadécision.Sanscompterquej’étaisinquièteàl’idéequelessorcièrespuissents’enprendreàLukasmaintenantquej’avaisquittéIsaac.

Je repoussemacouetteet jebondishorsdu lit telundiablotinmontésur ressort. Jemesensenforme,prêteàattaquercette journéeavecénergie.Je filesous ladouchesansréfléchir,manquedem’ébouillanterenréglantlemitigeurquin’asansdoutepasconnudeserviceaprès-ventedepuisdessiècles,puis jeme laisseallersous lacaressedu jet tiède.Cemomentdumatinest importantpourmoi,j’enprofite.Desidéesétrangesmecaressentetjemesurprendsàglissermesmainsentremescuisses.JemerendscomptequejesuisenpassedemedonnerduplaisirenpensantàIsaac,commesi

cetespaceclosethumideremplidebuéeétaitunnoman’slandoùtoutestpermis.Maismêmesij'enai trèsenvie, follementenviemême, jedoisà toutprixmeconcentrer surmamissionpremière,àsavoir récolter des infos à la mairie pour avancer dans mon enquête et tenter de retrouverl’emplacement où s’érigeait jadis l’Autel, ce fameux dolmen auprès duquel Savannah posait il y avingt-cinqans,justeavantdemystérieusementdisparaître.Etpourça,ilmefautlesplansducadastre.Jeprendsdoncsurmoipourrésisteraudésirquimerenddéjàtoutechoseetjem’empressedesortirde ladouche.Jepasseunpeignoiret j’essuie labuéesur lavitre.Monvisageestplus reposé,mesyeuxvertsbrillentd’unéclatparticulierquejeneleurconnaissaispas.Jemedemandesic’estliéàmatransformation.Machinalement,jem’offreunsourire.

Onn’estjamaismieuxserviqueparsoi-même!

Jem’habille face à la baievitrée en écoutant quelquesmorceauxd’uneplaylist d’Oasis. Je boismoncaféenquatrièmevitesse,meretiensde lecracherparcequ’il estpresque froid.Pas le tempsd’enfaireunautre, lamairieouvresesportesdanscinqminuteset jesuistropimpatiente.Jepassemonblousondecuir,j’attrapemonsac,moncasqueetjevaisrécupérermaHarley.

***

Pileaumomentoùjecoupelecontactdemamoto,j’aperçoisAllanMarshallquisortd’unlongvéhicule sombre qui doit mesurer pas loin de cinq mètres et m’évoque un croisement entre lecorbillardetlalimousinedestar.

Cetypem’atoutl’aird’êtreunvraimégalo…

Vêtudesonéternelsmokingnoir,chaussédelunettesdesoleil, ilsediriged’unpaspresséversl’entrée de lamairie. Sonbouc à contre-jour lui confère réellement l’air du diable. Je réprimeunfrisson.AllanMarshallmemetfranchementmalàl’aise.

Pasquestiondeselaisserimpressionner…

Jeluiemboîtediscrètementlepas,prenantgardeànepaslecollerdetropprès.Jesursautequandilseretournebrusquementaumomentd’emprunterlesmarchesdumajestueuxperrondelamairie.Commes’ilpossédaitunœildansledos!Ilretireuninstantseslunettesetsonregardesttoutsaufaimable.Sesyeuxressemblentàceuxd’unserpents’apprêtantàcrachersonvenin.Lesbattementsdemoncœurs’accélèrentmaisjenelaisserienparaîtredutroublequim’habite.Ilmefaitsignedelerejoindreetjem’exécutetoutensongeantquejeferaispeut-êtremieuxderebrousserchemin.

–Vousdésirez?demande-t-ilsuruntonpeuamènequandjeparviensàsahauteur.–Jevienschercherdesplans,dis-jeavecaplomb.–Donnez-vouslapeined’entrer,mademoiselle…–Cooper,LilyCooper.JesuisétudianteàlafacdeYesterday.

JenesaispaspourquoijeluidressemonCVétantdonnéqu’ildoitconnaîtremonidentité.ComptetenudesesrapportsavecJudithBastbergetErnstWaldorff,ilsaitforcémentdeschosessurmoi.Jeserais en effet bien surprise que le maire de Yesterday, propriétaire du Yesterday News et

administrateurdel’université,n’aitjamaisentenduparlerdemoi.Sonregardsubrepticedirigéversl’anneau que je porte à mon auriculaire confirme qu’il me joue la comédie. Je n’aime pas sonparfum,unmélangedecamphreetd’eaudeColognebonmarchéquimedonnelanausée.

Ilmefaitsignedeleprécéderetjegrimpelesmarchesquimènentàl’entréedelamairie.Surleparvis,jecroiseleregardimplacabled’unvigiledéjààsonposte.

Pourquoiplacerunvigileàl’entréedel’hôteldevilled’unestationbalnéaire?

Nouspénétronsdansunvastehallausoldemarbrenoirquiévoquel’antichambred’uneentreprisedepompesfunèbres.AllanMarshallsaluegrossièrementunejeunehôtessed’accueilquipréparelamachine à café et me fait signe de le suivre sans même se retourner. Nous traversons la pièce,contournons le comptoird’accueil.Leclaquementdesbottinesà talonsdeMarshallme faitpenserauxpasd’unzombiedansunfilmd’horreur.Undesespiedstraînesurlesolcommes’ilavaitunejambelégèrementpluslonguequel’autre.J’ail’impressiondésagréabled’êtreunpetitchienquisuitsonmaître.J’appréciedemoinsenmoinscepersonnagehautain.Parvenusàl’extrémitéduhall,nousempruntonsl’ascenseurquinousconduitjusqu’audernierétageconstituéd’uneseuleetuniquepièce.C’est immense, le sol est garni demoquette blanche. J’ai à peine passé le seuil de ce bureau quipourrait être celui d’un magnat du pétrole que le maire retire ses bottines et m’intime l’ordresilencieuxdemedéchausser.

Ilplaisantelà?

–Leblancesttrèssalissant,vouslesaviez?précise-t-ilavecgravitépourmeconfirmerqu’ilesttoutàfaitsérieux.

Sans attendre de réponse à sa question idiote, ilmet le cap au centre du bureau où se tient uneimmensetabledeverreautourdelaquelleondoitpouvoirréunirunetrentainedepersonnes.Jemedéchausseenréprimantunrirenerveuxetjelerejoinssansmepresser,partagéeentrelaméfianceetlacuriosité.Ils’installedansunfauteuilencuiràl’unedesextrémitésdelatablegéanteetm’inviteàm’asseoir face à lui, c’est-à-dire à l’autre bout. Une dizaine demètres doivent nous séparer, sansplaisanter ! Je prends place sur une chaise design en métal très inconfortable. Et j’attends queMarshall prenne la parole. Je souris intérieurement en songeant que j’aurais peut-être dû penser àm’équiperd’unmégaphonetellementnoussommeséloignésl’undel’autre.

Etcedérangéquinesedécidetoujourspasàprononcerlemoindremot!

Pour tromper le silence oppressant qui règne dans la pièce, je regarde autour demoi.C’est undéballagedeluxedansundécorhigh-techqu’onn’imagineraitvraimentpasdécouvrirdanslebureaud’unemairie.D’unautrecôté, ilne fautpass’attendreàdeschosesordinairesdès lorsqu’il s’agitde…Yesterday!

AllanMarshall se penche alors vers unmicro : sa voix désagréable, grinçante et syncopée, sepropage aux quatre coins du bureau, diffusée par des haut-parleurs apparemment intégrés dans lefauxplafond.J’espèrequ’ilnem’apasvuesursauter,maisrienn’estmoinssûr.Quoiqu’ilensoit,plusdedoute,jesuisbienenprésenceduchampiondumondedesmégalomanes.Ilressembleàtout

saufàunmaireouunadministrateurd’université.Passélecapdelasurprise,j’aiànouveauenviederiretellementlasituationest…surréaliste.

–Desplans,vousdisiez?lance-t-ilsansdétour.–Oui,desplansd’urbanisme.Jenecomptaispasvousdéranger,jepensaism’adresserauservice

ducadastrequandvousm’avezfortgentimentproposédevoussuivre.Enfait,j’aisimplementbesoinde…

–N’yallonspasparquatrechemins,m’interrompt-il.Jem’occupedetoutici.Soitditenpassant,sivousparliezdanslepetitmicroquisetrouvedevantvous,ceseraitidéal.Ils’interromptuninstantetajouteenouvrantlapaumeàcôtédesonoreille:ilsetrouvequej’aiunedéficienceauditiveetj’aidumalàvouscomprendre.

C’estmoiquiaidumalàtecomprendre,espècedevieuxfou!Qu’est-cequejefaislà?

–D’accord, acquiescé-je enm’efforçant de parler dans lemicro afin dem’épargner une autreremarque.Jedisaisdoncquej’auraisbesoind’étudierlesplansd’urbanismedeSweetValleydepuislacréationdeYesterday.

–Rienqueça,siffle-t-il,mi-amusémi-agacé,etpourquoidonc?

Touslespetitsmécanismesdemoncerveausemettentenbranle.

–Enfait,c’estenrapportavecmesétudesuniversitaires.Jesuischargéededresserunesortedecartographie des sites de la région, la plupart d’entre eux recelant des trésors dans le domaineminéral.Etcommevous lesavezpeut-être,certainsminérauxsontparfois trèsutilesenmatièredebiologie.

Jemeforceàm’arrêter,jeneveuxpastropenfaire.Àbrûle-pourpoint,j’aiquandmêmeréussiàinventeruneexcuseassezprochedelaréalité.C’étaitunebonneexplicationpourjustifiermondésirtouten testant la réactiondeMarshall.Quoiqu’ilensoit, saminesoudainsoucieusemepermetdemesurerqu’iln’apasl’airdupe.

–Le problème,m’explique-t-il, c’est que je ne peux rien faire pour vous.Oh, j’adorerais vousaiderpourvotre…cartographie,maisjen’aipaslesdocumentsenmapossession.Toutefois,dèsqueje trouverai un moment, j’en toucherai un mot au responsable du cadastre. Et si j’ai de bonnesnouvelles,soyezcertainequevousenserezlapremièreinformée.

Là,c’estmoiquitique.Àsafaçondeparler,àlafoissuffisanteetfaussementbienveillante,j’ailanetteetdésagréableimpressionqu’ilmentetqu’iln’enferarien.

–C’esttrèsgentildevotrepart,maisépargnez-vouscettepeine.Jepeuxmerendredirectementaudépartementdesarchivespourenparlerauresponsable,celavouséviteraledérangement!

– En fait, c’est un peu compliqué,mademoiselle Cooper. Nous sommes actuellement en pleinerestructuration,c’estunbazarincroyableauxarchives.

AllanMarshallsecouelatêteenfeignantd’êtredésolé.Danssesyeux,jepeuxlirequec’esttoutlecontraire.Sespupillesétréciesluiconfèrentunregarddesplustroubles,indiquantqu’ilsembleplutôtsatisfaitdesonpouvoir.Jemerappellel’articlequ’ilacommandéauYesterdayNewsvoiciquelque

tempspourtenterdediscriminerIsaacetraillersestravauxmenésavecKurtEpstein.Jepensequecetype est capable du pire. Ce n’est qu’une sensation qui prend au fil des secondes des alluresd’intuition.

Ilcaressesonboucdediable,avantdem’offrirleplusfauxdessourires.

–Maisjesuispersuadéquenousyverronsplusclairdansquelquesmois,ajoute-t-ilenselevant.

Quelquesmois?N’importequoi,jen’attendraijamaistoutcetemps!

Dansunélandésespéré,jemonteaufiletdansl’espoirdel’acculerenfonddecourt.

–Maisnecroyez-vouspasquejepourraisquandmêmeessayerdevoirdirectementavecvotre…– Je vous en prie,me coupe-t-il à nouveau, n’insistez pas.Croyez bien que j’aurais été ravi de

pouvoirsatisfairevotredemande,maisc’estindépendantdemavolonté.Sivousvoulezbiensortiràprésent,majournées’annoncetrèschargée.

S’ilrestepoli,sontonestautoritaire,sadécisionsansappel.Etilsefichedemoi.Ilestclairquemacuriositéconcernantl’urbanismedeSweetValleyneluiplaîtpaslemoinsdumonde.Etilusedesafonctionpourfairebarrageàmesattentes.Jememaudisd’avoircroisésonchemin.Sij’étaisalléedirectement aux archives du cadastre, peut-être aurais-je réussi à obtenir ce que je désire. Etmaintenant,c’esttroptard.Dèsquej’auraiquittécebureau,AllanMarshalls’empresseradeprévenirlapersonneenchargedeceservice.Jesuissansvoix,jemesensstupide.Jesaisqu’ilneserviraitàriend’insistermaiscettesensationd’humiliationquigranditenmoiestdifficileàendurer.Jemevoisbienbalayertouslesdossiersdesonbureau,renverseruneàunesesjoliesbibliothèquesrempliesdelivresreliésetd’objetsdecollectionvenusdesquatrecoinsdumonde.Toutdétruiredanssonespacedemégalojusqu’àcequ’ilcèdeenfin.Maisjemeretiensenpensantauxconséquences.Jevisualiselevigileauphysiquedevideurdeboîtedenuit,jel’imaginemeforçantàquitterleslieuxcommeunemalpropre.Ilestpréférabledefaireprofilbas,denepasinsisteraupointdetropluimettrelapuceàl’oreille. J’ai tout à gagner pour l’instant en faisant croire àMarshall que ce n’est pas tellementimportant pourmoi d’obtenir ces plansmême si j’imagine bien qu’il n’est pas dupe. Je viens depensereneffetqu’ilseraitbiencapabledelesdétruires’ilvenaitàdevinerlaraisonréelledel’intérêtquejeleurporte.

Non,surtoutpasça,ceseraitunecatastrophe!C’estprobablementnotreseulechancedelocaliserl’emplacementdudolmen.

Jesuissoudainglacéed’effroià l’idéequ’AllanMarshallsoitcapablede liredansmespensées,puisjemerassuredumieuxquejepeuxenmepersuadantquec’estunpouvoirréservéauxvampiresetauxsorcières.Jemelaissegentimentraccompagnerjusqu’auseuildesonbureau.

–Enchantéd’avoirfaitvotreconnaissance,mademoiselleCooper.Àuneprochainefoispeut-être.– Merci pour votre accueil, minaudé-je en m’efforçant d’adopter un air innocent, lui souriant

presqueniaisementtoutenvisualisantl’imagedemesdentss’enfonçantdanslachairdesonlongcou.

C’estnouveaupourmoid’éprouvercegenrededésirs.C’estmêmeunpeu…flippant!

Jefaisvolte-faceavantdemelaisseralleràunéventuelréflexeincontrôlableliéàcettenouvellenatureengestation.Ilnefautsurtoutpasqu’onpuissedevinerquejesuisentraindemetransformerenvampire.SeulsIsaac,KurtetLukassontaucourant.Et j’espèrequelorsdenotrepetitevisiteaumanoir,ClaraBastbergnes’estpasrenducomptedecetteparticularitéquisemblesedévelopperdeplus en plus. Jeme suis quandmême dégagée de sa poigne et l’ai envoyée valser avec une forceassez…surhumaine!Avecunpeudechance,elleaattribuécettesoudainecombativitéàl’anneau…

Unefoisdanslarue,jesuistellementdépriméeparcefiascoquejedécidederentrerdirectementchez moi et faire tranquillement le point. Je regarde la façade de la mairie tout en démarrant laHarley.Aumomentoùjelèvemachinalementlatêteversledernierétage,j’ailetempsd’apercevoirlasilhouettedeMarshallquidisparaîtbrusquementcommesijevenaisdelesurprendreentraindem’espionner.Unfiletdesueurglissedemanuqueversmondos.Cedrôledepersonnagemefichelittéralementlatrouille.Jevaisdevoirsérieusementmeméfierdelui.J’enclenchelapremièreet jedémarrecommesiderienn’était,commesilavieétaitbelleetquejen’étaispasénervée.Maisdèsquejesuishorsdeportéed’éventuelsregards,jetournelapoignéeàfondetlaHarleys’élancesurlaroutedansunecacophoniedecylindresemballés.

MERDE,ils’estbienfoutudemoi!

Seul le vacarme dumoteur lancé à plein régime étouffe le cri de rage que j’expulse pourmelibérerdemafrustration.Crispéesurleguidon,jedévorelebitumepourmedéfouler.C’estalorsquej’aperçoislecapotnoird’unevoiturequigrossitàvitessegrandVdansmonrétroviseur.Monrythmecardiaques’accélère,jem’efforcedeconservermoncalmemalgrétout.Soitc’estAllanMarshallquiadécidédemefairesuivre,soitc’estuntypequirouleviteetjemefaisunfilm.J’accélèrelacadencepourétudierlaréactionduvéhiculequimetalonne.

C’estquoiça?

Jedécidederalentirpourlelaisserdoubleretenavoirlecœurnet.

Alorstumedépassesouquoi?

Jecommenceàmeposerdesérieusesquestionscarmonpoursuivantabrusquementralentietn’apas l’air décidé à doubler. Il semet simplement àme lancer des appels de phares. Je ne peux pasm’empêcher de penser aux yeux jaunes d’un gros chat sauvage qui s’apprêterait à me dépecer.Habitéeparunmélangedepeuretderage,j’accélèreànouveaupouressayerdeluifairecomprendrequejen’appréciepastropcettepetitecomédie.

Merde,àquoiiljoue?

À nouveau, mon poursuivant accélère comme pour ne pas me perdre de vue. Et les appels depharesencore, incessants, intermittents…auxquelss’ajoutentdescoupsdeKlaxon intempestifs !Jecommence à sérieusement m’inquiéter. Je ne vois qu’une solution qui m’effraie mais je doisnéanmoinsenavoirlecœurnet.D’ailleursmonsangbouillonneànouveaudansmesveines,c’estlesignal quema nature de vampire en puissance fait à nouveau des siennes.Une part demoi refused’être ainsi traquée. Et je neVEUXplus être celle à qui on fait peur ! Je décide donc de ralentir,

rétrogradantjusqu’àimmobiliserlaHarleysurlebas-côté,avantdelabéquiller.Jeréprimedumieuxquejepeuxlestremblementsquis’emparentdemoncorps.Jemepostedeboutàcôtédelamoto,biencampéesurmesdeuxjambes,toutencaressantmachinalementmonanneaucommepourluirappelerdemeprotéger.Levéhiculeralentitàsontour,leconducteurmetsonclignotantetsegaresurlebas-côtéàmoinsdedixmètresdemoi.Jenepeuxrienvoiràl’intérieurdelagrosseFordMustangnoiredontlesvitressontteintées.

–Vousdescendez,ouiounon?

Jen’avaispasprévudeprononcercesmots, ilssontsortis toutseuls.Et jesuisassezétonnéedeconstaterquemavoixnetremblepas.Leclaquementcaractéristiquedelaportièrequisedéverrouilleme fait frissonner. Et comme dans mon rêve avec Judith Bastberg et Ernst Waldorff, mon fluxsanguin semble semodifier.Une certaine sérénité s’empare demoi, avec la sensation inexplicablequejesuisprêteàaffrontermonennemiquelqu’ilsoit.

–Ahquandmême,Lily,j’aicruquetunet’arrêteraisjamais.–Ephrem!m’exclamé-jeendécouvrantsalonguesilhouettequisedépliehorsdel’habitacle.

IlposeunemainsurletoitdelaMustangetmedévisageensouriant.

–Pfff,soufflé-jeenrelâchantlatension,tum’asfaitsuperpeur,j’aicruquej’étaissuivie!–Désolé,Lily,jetesuivaisc’estvraimaisc’étaitpourtesignalerque…

Ils’interromptets’approchedemoi.Ilestcharmantdanssonjeanélimé,avecsontee-shirtblancquisoulignesontorsemadeinShine.

–Taplaqueminéralogiqueestentraindesefairelamalle!–Maplaque!

Jemepencheetjeconstateeneffetqu’ellenetientplusqueparunrivet.C’estleproblèmedecettemoto,çavibretellementqueparfoisdespiècessedévissent.

–Tuasraison,jevaisdevoirm’enoccuper.–Un instant, déclare Ephrem en retournant vers la voiture et en ouvrant le coffre à l’intérieur

duquelilfouillependantquelquessecondesdansunecacophonieassourdissantedesonsmétalliques.–Nemedispasque…–Si,j’aidesrivets!s’exclame-t-ilenrevenantversmoi,arborantunjolisouriretriomphant.J’ai

mêmelapince.–Alorslà,lâché-jesuruntonadmiratif,jesuisbluffée.

Ephreméclatederireet je retrouveavecunpincementaucœurunpeudecettemusiquequimetransportedebonheurchaquefoisqu’Isaacrit.Toutens’occupantderefixerlaplaque,ilreprendsonsérieuxetmedemande:

–J’aicrucomprendrequ’entreIsaacettoi,c’est…fini?–Jevoisquelesnouvellesvontvite!Quit’aditça?–Larumeurcircule,Lily,répond-ilenlevantlesyeuxversmoi.

Jemedisquec’estunebonnechose.Çaveutdirequemarusedeséparationfonctionne.Ceweek-end,j’aifaitunpassageéclairauBlood&Foodpourenfairecourirlebruit,enparticulieràproximitédu bar de Wilmore, le lieu idéal pour lancer des rumeurs. Les mains sur les hanches, j’admireEphremqui a l’aird’êtreun superbricoleur. J’aiunepenséeémueau souvenirdu jouroù IsaacapratiquédesréglagessurlemoteurdelaHarley.Ephremvérifielafixationdelaplaqueetseredresseenfin.

–Missionaccomplie, tupeuxànouveauroulerdesmécaniques!plaisante-t-il.Etmêmesionsefichedelapolice,c’esttoujoursmieuxd’éviterleurfréquentation.Àpartça,leplusbeaucoupledeYesterdayenfroid,çafaitjaser,crois-moi.

Je hausse les épaules, emplie d’une soudaine tristesse.C’est vrai qu’on formait unbeau couple,Isaacetmoi.Maisentendreparlerdu«plusbeaucoupledeYesterday»parlabouched’EphremmereplongeaussitôtdanslesouvenirdemesmerveilleuxmomentsavecIsaac.JerevoisnotrepremierdéjeuneraurestaurantChezDimitri,nosmomentsdevitesseetdelibertéenvoitureouàmoto,notrenuitdeplaisiràEndingBeach,lamaisonencèdrerougeettantd’autreschosesoùsemélangeaientledésiretleplaisir.Jesursautequandlavoixd’Ephremajoute:

–Saufquejen’ycroispasunseulinstant,tuvois?–Commentça?–Çamefaitmaldel’avouer,maislefaitestquevousalleztropbienensemble.Tuesencoreplus

lumineusequandtuesaveclui.Etjen’aijamaisvuIsaacaussipassionnéetheureuxdepuisqu’ilt’arencontrée.

Ilpenchelatêtesurlecôté,exactementcommesonfrèreetilmurmure:

–Lily,vousêtesfaitspourêtreensemble!Alorsàquoivousjouez?–C’estdema faute,Ephrem. Isaacestendangeravecmoi, les sorcièreset lesNobodiesenont

aprèscetanneauquejeporte.Etladernièrefois,Isaacestpassétoutprèsdelamort.Jeneveuxplusça,c’estpourcetteraisonquejel’aiquitté.

Ephremmeregardeavecdouceur.

–Leproblème,mabelle,c’estqu’endehorsdesondésirderetrouverSavannah,tuesdevenuesaraisondevivre.

–Oui,mais…–Laisse-moifinir,Lily.Jel’aicroiséhier,ilétaitcomplètementéteint.Chacundesesregards,le

moindredesessourires, toutcelan’étaitqu’unefaçade. Il s’enfichedurisquedemourirpuisqu’ilmeurtàpetitfeuquandilestsanstoi.

–Nemedispasdeschosescommeça,c’estdéjàassezdifficile.–C’estlavérité,Lily,riend’autre.Maistueslibredefairecequetuveux.–Oui,jesuislibre.Cequej’aifaitétaitsansdoutelachoselaplusdifficilequej’aidûaccomplir

depuisque je suisenâgedeprendredesdécisions.Maisc’estplus fortquemoi, je suispersuadéed’avoirraison.Jedoistenirlecoupenattendantque…

–Quequoi,Lily?–Quejeretrouveledolmenetquejefasseréagir lessorcières.Souviens-toiquenousenavons

parlétousensembleaulabo,enattendantqu’Isaacseremettedesonsort.–Ça,j’aicompris,maistucomptesvraimenttedébrouillertouteseule?–Jen'aipaslechoix,Ephrem.Maintenant,jevaisrentrer.

Sansluilaisserletempsdemecontredire,tropinquièteàl’idéequ’ilréussisseàmeconvaincredechangerd’avis,j’enfourchelaHarley.JesuistoujourscontentedeparleravecEphrem,maisjesuisagacée de constater qu’il s’efforce à chaque fois de trouver une faille enmoi. Je ne veux pas luilaisserletempsdecomprendrequetoutemonâmen’estqu’unefaille.Quesouvent,tropsouvent,jesuisobligéedemeforceràoublierlenommêmed’Isaacpourrésisteràlatentationdemejeteràsespiedspourquetoutrecommencecommeavant.

–Mercipourlaplaque,Ephrem.–Prendssoindetoi,Lily,déclare-t-il,l’airsoucieux,enposantunemainsurmonépaule.

Jehochelatêteetjedémarresansdemandermonreste.

***

Mettrelamainsurlesplansd’urbanisme…Àtoutprix!Avantquelemairen’aitlamauvaiseidéedelesdétruire!

Installéeàlatabledemonpetitstudio,jeregardecesmotsquejeviensd’écrire.C’estl’évidencemême mais j’avais besoin de l’inscrire noir sur blanc. Comme pour exorciser et me galvaniser.Quantàmoninquiétudegrandissantesuruneéventuelledestructiondesplans,jemedisqueMarshallenestcapable.Jerepenseàlafaçondontils’estexprimé.Certainsdesesmotssonnaientcommedesmenaces.J’ai lepressentimentdeplusenpluspuissantquece typereprésenteunsérieuxdanger.Àl’avenir, jesuisbeletbiendécidéeànepasm’approcher tropprèsde lui.Commeondit toujours,moinsnousnousverronsmieuxjemeporterai.

J’éprouve le besoin soudain de parler à mes parents. À cet instant précis, plus encore qu’àl’accoutumée,ilsm’apparaissentcommeunpointd’équilibrevital.J’aibesoind’entendreleursvoixtendresetchantantes.C’estmamèrequidécroche.

–Machérie,nouspensionsàtoijustement.

Jeretiensmeslarmesauxpremiersmotsénoncésparmamère.Parcequ’ellemeditçapresqueàchaque fois, parce que je sais qu’ils pensent tellement souvent à moi, et parce que, plus que toutaujourd’hui, j’avais besoin d’entendre de telles paroles. J’ai l’impression d’exister, je sais quequelque part je compte plus que tout pour ces deux êtres exceptionnels que sont mes parents. Jeressenschaque jour tout l’amourqu’ilséprouventpourmoidepuismonadoption.Etsi jemesensfragilejusteàcetinstant,jesaisquecelavamedonnerdesforces.

–Moiaussi,jepensesouventàvousdeuxmaman.Commentallez-vous?–TonpèrecouveunegrippemaisàpartçatoutvabienmaLily.Ettunousmanquestouslesjours,

tusais?–Vousmemanquezaussi,onvas’arrangerpoursevoirtrèsvite,c’estpromis.

Je prends de leurs nouvelles et je leur en donne desmiennes. Ils envisagent un petit périple enFranceet jetrouvequec’estunetrèsbonneidée.JeparledemescoursàlafacetdeLukasquiestmonmeilleuramiàYesterday.Enrevanche,jen’évoquepasIsaac.C’esttropcompliquéetjeneveuxpas qu’ils se fassent du souci pourmoi. Et bien sûr, je ne leur dis pas que je suis en train demetransformeren…vampire!Maisjedétestevraimentcettesensationdeleurmentir.J’aicommeunebouledans leventre rienqued’ypenser.Parlerau téléphoneavecmamèremepermetdemesureravecunesoudaineacuitélagravitédemasituation.ÀYesterday,jesuisdansuncadreplutôtpropiceàcegenredemétamorphoses.Maislà,jemesouviensd’unseulcoupdemonenfanceetc’estétrangedepenseràcequejevaisdevenir.Jechassetoutescesidéesdemonesprit.Mamèremepassemonpèrequiaeneffetunepetitevoix.Jeluifaispromettredeprendresoindelui.

–J’enaivud’autres,mapuce,cen’estpasunegrippequivam’impressionner.–Oui,maisévitequandmêmedefairedestoursencabriolet,d’accord?–Oui,chef,merépond-ilenriant,avantd’ajouter:excuse-moi,maisjevaisdevoirraccrocher,ta

mèreabesoindemoipourmonteraugrenier.Noussommesentraindefaireleménagedanscettemaison.

–Nejetezpasmonvieiloursenpeluchetoutdemême,m’exclamé-jesansréfléchir,merappelantdanslemêmetempsquejevaisbientôtavoir25ansetquejedoisdoncêtreparticulièrementfragilepourm’inquiéterdeça.

–Pasquestion,merassuremonpère.Nousn’oserionspascommettreuntelsacrilège.Bingoresteàlamaison.

Bingo ! J’avais ainsibaptisémonourspourqu’ilmeporte toujours chance.Et là, j’aimerais leserrercontremoi.Commej’adoreraisêtreavecmesparentspourpouvoirmeblottirdansleursbras.J’en éprouve le besoin physique.Nous nous embrassons et finissons par raccrocher. Je suis alorsenvahieparuntelbluesquej’appelleaussitôtSamantha.

Nouspassonsunepetiteheureàparlerdetoutetderien.Samanthaestunespécialistepourvousremettreenformeavecquelquesphrasesbiensenties.Sonhumouretsonfranc-parlermeremettentd’aplombetjemesenstellementbienquejenesuispasloindelâcherlemorceauencequiconcernematransformation!Seulel’énormitédelasituationmecontraintàremettrecetteconfessionàplustard.

–Onsevoit trèsvite,Lily,c’estpromis.J’ai tropbesoindevacancesetYesterdaym’atout l’aird’êtreunchouettecoinpourrechargersesbatteries.

Toutestrelatif,situsavais,Samantha…

Jerépondsquejemeréjouisàcetteperspectiveetnousnousquittonsaprèsnousêtreembrassées.J’aiàpeineraccrochéquemontéléphonesemetàvibreràcôtédulivresurlespierres.J’encaresselacouvertureensoupirantavantderegarderlabouillerieusedeLukassurl’écrandel’iPhone.J’aipriscettephoto ladernière foisquenoussommesallésboireuncocktailauBlood&Foodetc’étaittellementluiquej’aichoisidel’installersurleprofildesoncontact.J’hésiteuninstant,jesaisdéjàcequ’ilvamedire,puisjefinispardécrocher.

–Oui,Lukas,commentçava?

–Ceseraitplutôtàmoideteposerlaquestion,non?–Commentça?fais-jeminedem’étonner.–Lafac,Lily,soupire-t-il,onacoursaujourd’huiettun’étaispaslàdelamatinée!Va-t-ilfalloir

quejepassetouslesmatinsaustudio,t’attraperparlapeauducoupourterappelerquetuesétudianteenbiologie?

–Jenesuispasdansmonassietteencemoment, j’aibesoindeprendredureculsurpasmaldechoses.

–Jecomprendsbien,machère,concède-t-ilsuruntonhumoristique,maissécherlafacn’estpaslemeilleurmoyendeprendredurecul,non?

–Jesais,mais…–Maistufaiscequetuveux,m’interrompt-ilgentiment,c’estjustequejem’inquiètepourtoices

derniersjours.Tun’esplustoutàfaitpareilledepuisque…–Chut,s’ilteplaît,coupé-je,neprononcepassonnom.

Là,çadevientgrave!

–Parfait,Lily!Sinon,tucontinuestesétudesoupas?dit-ilsuruntonassezcomique.

Jenepeuxpasm’empêcherd’éclaterde rire.Çame fait tellementdebien.Et jemedisquedesparentsetdesamis,c’estçaaussi:desgenscapablesdevousfairetoutoublier.

–Jevaisréfléchir,Lukas,plaisanté-jeàmontour.Jeteprometsquesij’abandonnemesétudes,jenet’abandonnepastoi!

–Çamevatrèsbien,dit-ilenriantàsontour.

2.Seuleaumonde

Combiendetempsencore?

Jene cessedemeposer cettequestiondepuismaintenant trois jours sans entendrenivoir IsaacShine. C’est une éternité que j’ai beaucoup de mal à supporter. Pourtant je fais vraiment monmaximumpouroublier.Aprèsmonpassageàlamairie,nesachantpascommentfaireavancermonenquête, j’ai essayéde lire le livre sur lespierres, fait une longuebalade àmoto sur les sublimesroutesdeSweetValley,organiséunfestivaldeplaylist,lecasquerivésurlesoreilles…Envain!Audétour de chaque minute, le profil de mon vampire magnifique m’apparaît avec fulgurance, dessouvenirs me reviennent et me bouleversent, des sourires me caressent, j’entends l’écho degémissements qui font frissonnermon âme, le corps d’Isaac…Et cette question encore et encore,sousdifférentesformes :combiende tempsencoreavantd’espérerdesretrouvailles?Combiendetempsavant lebonheur ànouveau? J’en ai franchement touteune collectionde ces interrogationsobsédantes.Jen’aicependantpasledroitdemelamenter.Isaacnem’apasquittée,c’estMOIquisuispartie.Pourqu’ilsoità l’abridemesennemis!Carc’estàmoi,seulementàmoiques’intéressentJudithBastbergetsonarméedesorcières,ainsiqu’ErnstWaldorffetsacliquedeNobodies.IlsontenlevéIsaacdansleseulbutdem’atteindre.Alorsj’aiprislesdevantsàmafaçon,enlequittantetenespérant leur faire croire qu’Isaacn’avait plus d’importance àmesyeux, quenotre histoire n’étaitqu’unepassade. Il a bien essayédeme retenir,m’affirmant que le seul danger qu’il craignait étaitceluideneplusmevoir,maisj’aiinsisté.Aprèsnotredernièrenuitd’amoursurlevoilier,j’aiprislelarge,résolueàfairecourirlarumeurselonlaquelletoutétaitfinientreIsaacetmoi.

JeVEUXqu’ontelaissetranquille,tucomprends?

Jeviensdemeglisserdansmonlit,cen’estpourtantpasl’heurededormir,maisjen’aienviederien.Pourcouronner le tout, j’ai réintégrémonstudiominuscule.D’unepart, jenemesentaispascapabledem’installerdanslamaisonquem’aofferteIsaac,d’autrepart,jetiensàfaireensortequeJudith,Ernstetlesautrescroientdurcommeferqu’Isaacetmoionnes’aimeplus.

Ettoi,quefais-tuaujourd’hui,monamour?

Ilvafalloirquejemecalmeunpeu,quejemevidelatêtesijeneveuxpasdevenirzinzin.Ilestdansmatête,ilvitdansmoncœuretjel’aidanslapeau.Lepire,c’estquejemensquandjeprétendsquejenel’aipasvudepuistroisjours.Pasplustardqu’hieraprès-midi,ilétaitàquelquesmètresdemoi.Jemetenaisàl’écart,àportéedebrasnéanmoins!Nousn’avonspasparlémaisilétaitvraimentlà,toutprès,magnifiquedanssoncostumenoirtaillésurmesure,présentparmilafouledensevenueassisteraux funéraillesdumalheureux laborantinassassinéquelques joursplus tôt.KurtEpstein setenait près de lui. Mon professeur semblait très affecté par cette cérémonie. Et Isaac a toutnaturellementpasséunbrasautourdesonépaulepourlesoutenir.Jemesouviensd’avoiréprouvéunstupideélandejalousie,d’avoirrêvéquecesoitautourdemesépaulesques’enroulelebrasd’Isaac.

Jem’ensuisaussitôtvoulu.Nousassistionsàunenterrement,jenepouvaispasdécemmentnourrirdetellespensées.Sijepouvaislevoir,iln’apassembléserendrecomptedemaprésence.J’aibienfaillimemettreàdécouvertpourmejeterdanssesbras,maisLukasm’aretenueainsiquejeleluiavaisdemandésid’aventurejedevaiscraquer.

Situn’existaispasLukas,jeseraisdevenuefolle…

Monpremieramim’avraimentaidéeàrésisteràlatentationderevenirversIsaac.Jen’aijamaisconsommédedroguesmais j’ai l’impressionderessentircettesensationdemanquequi torture lestoxicomanesenphasedesevrage.ÀproposdeLukas,j’aicrucomprendrequ’ilaidaitWilmaAstairàrévisersescours.Jel’aichambréunpeupouressayerd’ensavoirplussurlanaturedeleurrelationmaisilestrestéaussidiscretquemystérieux.J’avaisenviedeluiparlerdesvoixqu’entendWilmaàmonsujet,maisjemesuisretenue.J’aijurédegarderlesecret.

Depuis notre séparation, je n’ai pas eu de nouvelles d’Isaac. Je le revois sur le voilier, froid,indifférentàmaprésence.Jesaisbienqu’iladûsesentirterriblementblesséparmadécision.Jen’aipas le droit dedouter de lui, il n’a fait que respectermonbonvouloir.Et pourtant je nepeuxpasm’empêcher de penser que notre histoire ne recommencera peut-être jamais ! Il n’a pas vraimentréagiàl’idéequejelequitteetjemedemandesijecomptevraimentpourlui.C’esttotalementinjustedema part de penser une chose pareille,mais je suis perdue et je ne suis plus sûre de rien.À laréflexion,jepensequ’iladûsentirmaprésencedansl’assembléelejourdel’enterrement.Etl’idéequ’il ait fait semblant de ne pas me voir me déchire le cœur. Mais à quoi d’autre pouvais-jem’attendre?C’étaitsidurdelequitter,maiscesilenceentrenousestencoreplusdouloureux.Àtelpointquejemedemandesanscessesijenesuispasfolled’avoiragidelasorte!Surtoutquandsemet à clignoter dans ma mémoire le message de Savannah sur le miroir… Toi, Isaac, l’anneau,l’alchimie…

Maisjenepeuxpasresterlààmemorfondre!

J’arrêtedememettremartelentêteetj’accomplisuneffortdémesurépoursortirdemonlit.J’ail’impressiond’avoir110ans!Jemedemandemêmesijenecouvepasunegrippeouuntrucdanslegenre.Aufonddemoi,jesaiscequec’est:celan’astrictementrienàvoiravecunegrippe,ils’agitd’une déprime qui dépose une chape de plomb sur mes épaules. Reste à espérer que cela ne setransformepasendépression.

Parcequejecommenceàenavoirmarredestransformations…

Àcettepensée,jesourismalgrémoi,nemanquantpasdemerappelerquejesuiseffectivementenphasedemétamorphose.Un jourou l’autre, je seraiunecréaturesurnaturelle.Pour l’heure jen’airienoséannonceràmesparentsetSamantha.JelesimagineàSanFrancisco,sefaisantpourlemoinsunsangd’encreàimaginerquejemetransformeen…vampire!Etcetteperspectiven’estpasfaitepourmeplaire.Jecroisqu’aufonddemoi,jen’aipasvraimentacceptécettetransformation.J’agiscomme si je gardais l’espoir de pouvoir redevenir humaine… Comme si Isaac allait trouver leremède.

Isaac…

Pour lemoment, jepréfèreattendre,assumerdansmoncoin,neriendireàmesprochesdeSanFrancisco.ilseratoujourstempsdefairemon«comingout»!

Simonhumourrevient,c’estdéjàça...

Jepasseuneculotteetun tee-shirtavantdem’étireraucentrede lapièce.Sur leminibardemakitchenette, la machine à caféme fait de l’œil et je décide de céder à ses avances. Je sélectionned’abord une playlist sur mon ordi. Je choisis une dosette de mon expresso le plus intense et jedémarrelamachinequisemetàvibrercommeunpetitmarteau-piqueur.Jepasseunsweatàcapucheetjedécidedebraverlabruinepourboiremoncaféàl’extérieur.Parlabaievitréeouverte,j’entendsIziachanterLetMeAlone.C’estletitreidéalpourm’extirperdematorpeur,poureffacermesidéesnoiresetmedonnerenviedecroquer lemondeàbellesdents.Cettevoixqui s’échauffeetquimeréchauffe,unpeurauque,unpeucassée.Trèsrock.Et jecommenceàmebalanceraurythmedelamusique sur la terrasse, insensible à la bruine qui se dépose sur mes cheveux et mon visage.J’intercepte le regard d’une voisine en robe de chambre à fleurs qui secoue une nappe égalementfleurie et afficheunair inquiet.C’estunevieilledame sansâgeque jevoispour lapremière fois.J’ignore son attitude qui semble signifier qu’à ses yeux, je dois être une junkie sous l’emprise desubstances illicites. Je lui adresse un sourire mais sans demander son reste, nappe plaquée sur lapoitrinetelunbouclier,elleseréfugiechezelle.

Vousavezraison,onnesaitjamais,jesuispeut-êtredangereuse!

Lerefletlégèrementdéformédelajeunefemmequejecroisesurlasurfacedudoublevitragen’apourtantpasl’airbienmenaçant.Ondiraiteneffetunejeunefolletoutauplus,maisriend’alarmant.Jehausselesépaulesetjesoupire,puisjemeréfugieàmontourdanslestudiocarleclimatn’estpasfranchement adapté à la danse en extérieur avec petite culotte et sweat à capuche. Une fois assisedevantmonbureauoù jeme remetsdemachorégraphieeffrénée,mes idéesnoires refluent tandisquelesparolesdelachansonHonestyinterprétéeparBillyJoels’échappentdesenceintesportatives.TousmesinstantsvécusàYesterdaymereviennentaveclaforced’unevaguededeuxmètres.Et lasouffrancesefaitànouveaujoursouslaformed’uneimageineffaçable:IsaacShine…etlecortègede qualités qu’il représente à mes yeux. La vie, l’espoir, le plaisir, le bonheur. Quelque chosed’essentiel!Etjesensquejesombredansl’abîmeleplustotalàl’idéequenousneseronssansdouteplusjamaisensemble.Quequoiqu’ilarrive,quelquechoses’estpeut-êtredéfinitivementcasséentrenous.Et jesuisfatiguéed’évoluerentredeuxeaux.Jemesensseuleaumonde.Àmepersuaderuninstantquejen’auraisjamaisdûquitterIsaaccarc’estàdeuxquenousserionsforts.Etàmerassurerlaminutesuivanteenétantconvaincuequec’étaitlaseulechoseàfaire.

LemessagedeSavannah revienten forcepour investir chaquecellulegrisedemoncerveau. Jerepense à l’alchimie. Cette alchimie entre Isaac et moi. Et puis je me revois à la mairie, seule,désemparée, presque ridiculisée par ce salaud de Marshall. Et puis, je n’en peux plus du silenced’Isaac,BillyJoelmeflanquelecafard,je…

C’enesttrop!

L’envied’écrireàIsaacdevientsoudainplusfortequetout.Lediscoursquem’atenuEphremsurleborddelarouteafaitsonpetitbonhommedechemin.Cerenardasutrouverlesmotsjustes,ceux

contrelesquelsonnepeutpaslutter.Conscientequejenepourraipasrésister,jesaisismontéléphoneetm’apprêteàconfieràIsaaccequej’aisurlecœurlorsqu’unesilhouetteapparaîtderrièrelabaievitréeetmefaitsursauter.

3.Rewind

C’estcomplètementfou,c’estdelatélépathie!

Depuisledébutdel’histoire,noussommesreliésparquelquechosedetrèsfort.

Deplusfortquetout!

Mon cœur bat la chamade. Il est là, devantmoi, IsaacShineme sourit. Je fais coulisser la baievitrée.

–J’allaist’écrire,jepensaisàtoi,et…

Mavoixestfaible,lesmotsrestentbloquésdansmagorgemaiscen’estpasàcaused’unsortdesorcière cette fois. La présence charismatique d’Isaac est plus puissante que toutes les magies del’univers.Jen’arrivequ’àl’admirertandisquesonsourires’agrandit.Ilestbeaucommeundieuavecsachemiseblanchedontlespremiersboutonssontouvertssursonlargetorseetsonpantalondetoilekaki qui lui tombe parfaitement sur les hanches. J’ai l’impression de ne pas l’avoir vu depuis desannées,alorsquenousnoussommesséparésilyadeuxjoursàpeine!

–Pasquestiondevivresanstoi,tum’entends?souffle-t-ilsanspréambuledesavoixrauquequimeséduittellement.

–Maisje…–Iln’yapasdemais,Lily!m’interrompt-ilenposantl’indexsurmeslèvres.J’aieuleloisirde

réfléchircesderniers jours.Avectoutesceshistoiresetcesmystères,nousn’avonspaspuprofiterpleinementdenotreamouretçajesuisprêtàlesupportertoutletempsqu’ilfaudra,maistelaissermequitter…

Ils’interromptquelquessecondes,passeunemaindansmescheveuxcommes’ilvenaitdedéterreruntrésoraztèque.Lecobaltdesesyeuxsecouledanslevertdemesiris,puisilmurmure:

– Te laisser me quitter, Lily, ça, c’est au-dessus de mes forces. J’ai beau être solide, je saisd’avancequejenem’enremettraipas.

Je suis au comble de l’émotion, bouleversée par lesmots demon alchimistemagnifique.À cetinstant, j’ai l’impressionde tomber ànouveau follement amoureusede tout cequ’il représente.Lavéritéétantquejen’aijamaiscessédel’être,maislaportedecetteprisonoùjem’étaismoi-mêmeenferméevientdes’ouvrir. J’aime lessentimentsqu’ilm’inspire,cequ’il représenteà luiseul :cemélangedeforceetdefragilité,cettesincéritéetcettedouceuralliéesàunecertaineautorité,toutcelamefaitpenserqueceseraituncrimecontrel’humanitédevivreloinl’undel’autre.

Quelleidiotejesuisdem’êtrefaitcroireàmoi-mêmequejepouvaisquitterIsaac!

Nous sommes faits pour être ensemble, liés envers et contre tout, impossible de lutter. Jem’approche de lui et je me laisse envelopper par ses bras puissants et protecteurs. Notre étreintesilencieuseestundélice.J’ensavourechaqueseconde.

C’estlàquejeveuxvivreàjamais…

Blottiecontreletorsed’Isaac,jelaisseleslarmescoulersurmesjoues.

–J’aibesoindetoi,chuchoteIsaacaucreuxdemonoreille.–Moiaussi,j’aibesoindetoi.

Nos soupirs du plaisir d’être à nouveau ensemble remplacent tous les mots du vocabulaireamoureux.Noussommesdeuxetunseul,enfusiondansunocéandefélicité.C’estpeut-êtrebêteàdire,maisc’estavecluiquejesuismoi,maintenantjelesaisplusquejamais.Noscorpss’emboîtentparfaitement. Nous sommes simplement collés serrés, enlacés tendrement, et j’ai l’impressionmagique que nous sommes en train de faire l’amour. C’est unique comme sensation. Isaac prenddélicatementmonvisageentresesmains,sonregardm’investittotalementetsavoixsichaudeirradieenmoi.

–Jeveuxt’emmeneraularge,Lily.Nousallonsnaviguerenpleinemerpoureffacerlesouvenirdenotredernièrecroisière,d’accord?Nousseronsseulsaumonde,invisiblesauxyeuxdesautres.

–Oui,murmuré-jeenmenoyantdanslecobaltdesesyeux.

***

Installéeàlaproueduvoilierquisurfesurlesvagues,j’offremonvisageauxcaressesduventetdusoleil.J’ail’imageromantiquedeKateWinsletetLeonardoDiCaprioàbordduTitanic,lesbrasécartés,embrassantl’horizonetfrémissantd’unamourinfini.J’entendslesparolesdeMyHeartWillGoOn, jemesensmerveilleusement libre. Isaacadûbloquer labarreenpiloteautomatiquecar ilvientdesecollerdansmondos,sonvisageenfouidansmescheveuxqu’ilrespireenm’étreignant.

–Jet’aiemmenéesurlevoilierpourdeuxraisons,Lily.–Dis-moi,Isaac,fais-jeenpivotantpourluifaireface.

Sesyeuxm’hypnotisent,sesmainssurmesépaulessonttièdes,savoixestassurée.

–Toutd’abord,ilestplusquetempsdepasseràlaphased’attaque,Lily.Ilfautd’abordrécupérerlesplansducadastre,puislocaliserledolmenetenfinprévoirunaffrontementaveclessorcièresetlesNobodies.

–Oui,nousnepouvonsplus rester lààattendre, jesuisentièrementd’accord.J’aiessayéde lesrécupérermaisAllanMarshallm’amisdesbâtonsdanslesroues.

Jem’empressederaconteràIsaacmonentrevueaveclemaireetsonvisages’assombritaufildemesexplications.

– Je suis très inquiet,onvadevoiragir très rapidement.Comme tu lepensesà juste titre,Allan

Marshallestfortcapablededétruirecesplans.–Maiscommentva-t-ons’yprendre,Isaac?–Nousallonsentrersansfrapper,Lily,etnousservir!Nousferonsçademainmatinàlapremière

heure.

Jehochelatête.Etjenepeuxpasm’empêcherdepenseràlatêtedeMarshalls’ildécouvraitcequenousnousapprêtonsàfaire.Ceseramapetitevengeancepersonnelle.

–Ilyaautrechosequejen’aipaseul’occasiondetedire,Isaac.Nousétionsséparésetjenetenaispasàcequecenouvelélémenttepousseàmerejoindre.Jenepensaisqu’àuneseulechosealors,quetusoisloindemoi,ensécurité.Mêmesij’ensouffraisterriblement.

–J’ensouffraistoutautantquetoi,miñalinda.

Jehochelatête,émue,etjepoursuis:

–Lematinavantdepréparertonévasion,j’aireçuunnouveaumessagedeSavannah.

Le regard d’Isaac s’éclaire, comme à chaque fois que nous évoquons sa sœur. Je sors monportable de mon sac pour sélectionner dans mon album photo le cliché que j’ai pris du derniermessagedeSavannah.Jeluitendsl’iPhonedontilobservel’écranavecconcentration.

–Jesortaisdeladouche,murmuré-je.Ilyavaitdelabuéepartoutetcemessageestapparusurlemiroir.

–Celanefaitqueconfirmerl’urgencedelasituation,murmureIsaacsansquitterl’écrandesyeux.

Jehochelatêtetandisqu’ilsepasseunemaindanslescheveuxensemordantl’intérieurdelajoue.Sonémotionestpalpable.Jemesouviensparcœurdumessage,lesmotssedéroulentdansmatête,commeunrébus,uneénigme,uneformule.

Quatre choses essentielles… Toi, Isaac, l’anneau, l’alchimie… Et souviens-toi de mon premiermessage.Courage!Savannah.

–Savannahessaiedenousaideràvaincrelessorcières,avanceIsaacenmerendantmonportable.J’ensuisdeplusenpluspersuadé.Mêmesijemedemandepourquoiellefaitçaaprèstantd’années.Etpourquoiellereviendraitsebattrecontrelessorcières.

– Je ne sais pas au juste, Isaac, mais je crois comme toi que Savannah et vous avez le mêmedessein,lemêmebut,maintenant.Etmoiaussi,sil’ontientcomptedutatouageetdesmessages.

Jem’interromps,nourrisunepenséepourlesvoixqu’entendWilma,maisçajenepeuxtoujourspasàenparleràIsaac,mêmesij’enmeursd’envie.J’effacecedésirdemonesprit.

–Etjemesuistrompéeentequittantpouréviterunenouvelleattaquedeleurpart,continué-je.Enfait,c’estànousd’allerleschercher,surleurterrain,ainsiquesemblevouloirledireSavannahdanssonpremiermessage.Etc’estensemblequenouspouvonsyarriver.

–Toi,moi,l’anneau,l’alchimie,scandeIsaacenplongeantsonregarddanslemien.

Jefrissonneetmerapprochedelui.Ilsepenchepourposerseslèvressurmonfront.Sesmains

glissentdemesépaulesàmespoignets,puisilprendmesmainsdanslessiennes.J’aimequandilfaitça,quandilmetientetmeretient.

– Je suis touché par les allusions de Savannah, poursuit-il. C’est comme si elle savait depuistoujoursquenousallionsnousrencontrer,toietmoi.

Ils’interromptpourdéposerunautrebaisersurmonfront.Lecontactdeseslèvressidoucesmeréchauffeetm’apaise.Iltrembleunpeu,c’estimperceptible,maisjesaisqu’ilestbouleversé.J’enailaconfirmationquandsavoixlégèrementétrangléeajoute:

–Nous sommes plus que reliés, Lily, nous sommes indissociables. Par sonmessage, Savannahnous annonce qu’en fin de compte, seul l’amour pourrait triompher de la fatalité. Elle nous ditsimplementqu’iln’yapasdefatalitéquandonsaitcommentetavecquiilfautavancerdanslavie.

Jeboissesparoles,savoureletimbredesavoixgrave.

–Àdeux,continue-t-il,nousallonspousserlessorcièresdansleursderniersretranchements.C’estleseulmoyendecomprendrecequ’ellesattendent,dedécouvrircequ’ellespréparent.

–EtlesNobodiesaussi!–Oui,concèdeIsaac,avantd’ajouter:sansoublierlafortprobablecomplicitéd’AllanMarshall.

Cela nous ramène à ces fameux plans cadastraux qu’il semble décidé à nous empêcher deconsulter.J’aienviequ’onyailledecepas,qu’onmettelamainauplusvitesurlemeilleurmoyendelocaliserledolmen.

–Pasmaintenant,merépondIsaac.J’avaisbesoindet’enparleravanttoutechose,pourquenoussoyonslibérés.Maisilfaudraagirenpleinenuitpourêtresûrdenefaireaucunemauvaiserencontre.Depuis ta visite,Marshall est probablement sur le qui-vive. Et puis j’en viens à la raison la plusimportante,cellequim’aincitéàt’emmenerenpleinemeravecmoi.

Jerestesuspendueàseslèvrestandisqu’illaissepasserquelquessecondespourcréerlesuspens.Un large sourire à faire fondre un glacier dessine des fossettes sur ses joues que j’ai envie decroquer. Des effluves de son parfum me caressent les narines. Ce bois de santal est un puraphrodisiaque.Mêléàl’odeurd’Isaac,c’estunecombinaisonmiraculeusequifaitperdreleurnordàmessens.

–Çavafaire trois joursquenousn’avonspasfait l’amour,Lily,etçamemanquecommetunepeux pas imaginer. Alors j’ai pensé que nous serions bien au milieu de l’océan pour fêter nosretrouvaillessansêtredérangésparquiquecesoit.Qu’endis-tu,toi?

Lavoixd’Isaacm’électrise.Jememordslalèvreinférieureencoulantmonregarddanslesien.Fairel’amouravecluiestdevenuunevéritablevocation.Jem’étonneaussiquenousayonsputenirdeuxjourssansnoustoucheralorsquec’estessentielpournous.D’autantplusquematransformationaiguise mon appétit en la matière, rendant d’une certaine façon cette métamorphose tout à faitintéressante.

–Jedisquejesuisassez…convaincue!

–Justeassez?réplique-t-ilenesquissantunemimiquefaussementvexée.

Jerisetjemedressesurlapointedespiedspourluisusurreràl’oreille:

–Enfait,c’estlameilleureidéedepuislacréationdumonde.

Ilritetmesoulèveenmetenantparlesfesses.Jesuisdéjàdanstousmesétats.

– Jevaisd’abordouvrirunebouteilledechampagne,déclare-t-il enme reposant au sol.Tumedonnessoif,Lily.

Jeleregardesedirigerverslacabine.Aumomentd’enouvrirlaporte,ilm’adresseuneœilladepar-dessussonépaule.C’estunepure invitation, irrésistible.Je lesuisàpas lents,moncœurbat lachamadeetledésirmonteenmoi.Undésirdeplaisiretdetendresse.

Quandjelerejoinsdanslapièceprincipaledelacabine,jeréprimeuneexclamationdesurpriseetd’émerveillement.Toujoursaussirapidedanscertainessituations,Isaacestdéjànu!

– Prems, chuchote-t-il, faisant allusion à notre dernier effeuillage mutuel où, pour la toutepremièrefois,jem’étaisretrouvéeavantluidansleplussimpleappareil.

–Tun’esqu’untricheur,fais-je,l’airfaussementoffusqué.

Ilritenmetendantunecoupedechampagne.J’enboisunegorgéesanslequitterdesyeux,mesurel’effet impressionnant que mes paroles produisent sur Isaac, savoure la fraîcheur des bulles quienvahissentma langue et mon palais. Je reposema coupe sur un guéridon et je commence àmedéshabiller tout en me dirigeant vers la chambre où sont allumés des dizaines de photophores,commelorsdenotrepremièrefois,aprèsnotreindécentbaiserpublicauBlood&Food.Jesèmemesvêtementssurmonchemin, tel lePetitPoucet.Mêmesi jen’aipasdu toutpeurdemeperdreavecIsaac.Monstringdéjàmouilléatterritsurleparquetquandjepasseleseuilduboudoiroùj’imaginepar avance le son de nos peaux et lamusique incomparable de nos gémissements. Dans quelquessecondes, nous presserons la touche rewind de nos amours, nous remonterons jusqu’à l’instant sitristedenotre séparationetnous reprendrons l’enregistrementpour recouvrirdenotrebonheur lebrouillardd’unmomentd’égarement.

Quandjepénètredanslachambreetquejelèvelesyeuxpouradmirerl’ambianceféeriquemadeinShine,jesursautecarIsaacestenfacedemoi.Jenel’aimêmepasentendusedéplacer,c’estfou.J’ensuisàmedirequej’aiencoredesprogrèsàfairepourespérermemesurerauvampireleplusrapide dumonde, quand ses larges et doucesmains se posent surmes hanches. Jeme transformed’emblée enun interminable frisson.Troismots simples s’échappentd’entremes lèvres.Cesmotsque l’onditparfoisaprès l’amouretque jenepeuxpasm’empêcherdedireavant,parceque je lesais…

–Jesuisheureuse.

Dans la luxueuse cabine du voilier, parmi les photophores et des vases garnis de tournesolsmulticolores qui clignotent au rythme des battements de mon cœur, je me tiens debout, nue etfrémissante, face au vampire le plus glamour de la galaxie. Il est lui-même dans le plus simple

appareiletc’estunetenuequiluivadiablementbien!Sonérectionestfascinante.Jedoisfaireappelàtoutemavolontépournepascéderàl’enviefolledem’agenouillersansplusattendreavantdefaireglissersonmembregonfléetpalpitantdansmabouche.Jusqu’aufonddemagorge.Jen’ai jamaiséprouvédetelsdésirs…avantlui.Jedécidedefairecommesiderienn’étaitpourl’exciterunpeu.C’estunexercicetrèsdifficile,maisc’estsibondeleprovoquer.

–Magnifiquescesnouvellesfleursmulticolores,murmuré-jeenadoptantuntonaussidétachéquepossible.Commentdiabletrouves-tuletempsdecréercegenredemerveilles?

– D’abord, elles sont pour toi, Lily, répond-il tout en passant une main dans ses cheveux, têtepenchéesurlecôté,danscetteposequilerendfurieusementséduisant.Ensuite,murmure-t-iluntonplusbas,quandils’agitdetoi,letempsnecompteplus.

Dans ses yeux éclatants, je lis qu’Isaac a deviné que je suis sur le point dem’embraser. Il saitpertinemment qu’enmoi le volcan n’attend qu’un souffle de vent pour entrer en éruption.Et il enjoue,luiaussi!Onseprovoquemutuellement.Ils’approchedoucement,ilestterriblement…sexy.Ilsecolleàmoiengardant lesbras le longdesoncorps.Jesenssonsexetellementdurcontremonventre,çadevientunsupplicederestercalme.Levisagerelevévers lui, jepassemachinalement lalanguesurmeslèvres.Làencore,jemeretiensdesaisirsesfessesàpleinesmains.

Situsavaiscommej’aienviedelespétrir,delesgriffer…Ellessontbellestesfesses…

Jegémisdemespensées,jenesaispass’illesdevinemaisilsourit.Sonsouffletièdecaressemonfront,sonparfumoùsemêlent le santalet la sueuraffolemonodorat,moncorpsestparcourudefrémissements incessants. « Je suis heureuse…»Ces troismots qui se sont échappés d’entremeslèvresaumomentoùnousnoussommesretrouvésfaceàface,cestroismotssesontimposésd’eux-mêmes. J’aurais pu les prononcer mille fois sans reprendre ma respiration tant je ressensphysiquement ce sentiment. Ces mots que l’on dit parfois dans sa vie et qu’avec lui je pourraisprononcer chaque seconde. Je soutiens son regard bleu cobalt, mains sur les hanches et œilladeslangoureuses,jeleprovoqueencorepouressayerdegarderl’avantage…Mêmesijesaisdéjàqueleloupvamemangertoutecrueetquejenecrieraipasausecours.Jemérited’êtrecroquée,dévorée,jen’aipasledroitd’appeleràl’aide.JeNEVEUXPASqu’onvienneàmonsecours.

Garde-moitoujours,monamour,retiens-moietnemelaissejamaism’enfuir…

Cette pensée sur laquelle je suis si concentrée, je veux qu’Isaac l’entende. Car je sais qu’il estcapabledelirecertaineschosesintimesdansmonesprit.Sijenetienspasàcequesoitrégulier,sijedésireprotégermonjardinsecretafindeluiréserverdessurprises,là,justelà,jedésireintensémentqu’ilreçoiveenpleincœurcettepenséequiestpournousdeux.J’aitroppeurquelesmotsprononcésperdentde leur saveuraucontactde l’air. Il fautquecela resteennous telun secret. Jeveuxqu’ilfassedemoisaprisonnièreàperpétuité.Jeveuxêtreàluicorpsetâme.

Tum’entends,monamour?Faisdemoitacaptiveàjamais…

Sonsourires’élargit,d’adorablesfossettessedessinentauxcoinsdeseslèvresetjesaisquenoussommessurlamêmelongueurd’onde.

–Tourne-toi,s’ilteplaît.

J’obéis,j’adorel’idéed’obéir,c’estinexplicable.Jen’aijamaisétésoumiseàunhommeavantlui.AvecIsaac,c’estdifférent,c’estévident.S’offriretcomprendredanslemêmetempsl’effetquecelaproduitchezlui.C’estplusunpouvoirqu’autrechose.Êtredominéem’apparaîteneffetcommeunmoyendélicieuxdeposséder.

–Laisse-toifaire…

Sontonestdouxmaisc’estunordre.Jesavourecemomentdécisifoùs’ouvred’unseulcouplechampdespossibles.Dansmonchampdevision,labellemaind’Isaacsesaisitd’unfoularddesoiepourpreposésurl’accoudoird’unrocking-chair.Sansdireunmot,illepasseavecdélicatesseautourdemesyeux. Je sens son souffle surmanuque. Jeme laisse faire lorsqu’ilnoue lesextrémitésdubandeauderrièrematête.Jenevoisplusrien,tousmessenssontenéveiletd’autressensinconnusnaissentenmoi,jesuisàfleurdepeau,j’aidéjàenviedejouir.

C’estcomplètementdingueça…

Son sexe se plaque contre mes reins, ses mains passent sur mes épaules, les frôlent puis lesmassent avecdouceur,bifurquent enfinversmes seinsdont lespointes sontdressées, esquissent lecontour de mes aréoles. Il me fait soudain pivoter face à lui et je gémis. Je ne le vois pas, jel’imagine,çam’excite…Sesdoigts,salangue,sesdentsjouentavecmestétonsunlongmoment,illespince, lesagace, lessuce, lesmordille,cequiapoureffetdemefaire jouirunepremière fois.C’est une vague inattendue qui me surprend et me fait perdre mes repères. Je me laisse aller. Ilcommenceàfairechauddanslacabine.Jesuisensueur.Cettemoiteurdansl’atmosphèreesttrès…torride.Etjen’arrêtepasdefrissonner.

–Tuasfroid,monamour?plaisante-t-il.–Tellementquej’ensuisbrûlante,susurré-jeensouriant.

Ilritetjemedélecteunenouvellefoisdecetteharmoniedanssatessiture.C’estpeut-êtrestupidemaisjepourraisvraimentjouirdel’entendrerire.Isaacestcapabledetoutavecsavoix.Jecroisqu’illesaitmaisjenesuispaspersuadéequ’ilsoitconscientquec’estàcepoint-là.J’aienviedeluidire«Risencoreettoujours,fais-moijouirjusteenmeparlant»,maisjegardecetteidéepouruneautrefois.Là,j’aitropenviedesentirsoncorps,sapeaunuecontremapeaunue.Jeveuxqu’ilmetouche,mepalpe,meforce,megriffeetmeclaquelesfesses.Qu’ilmedévaste,meravage,mefassevibreretm’emporte dans des rouleaux rugissants avant de redevenir cette écumedouce qui vous caresse etvousconsolesurlerivage.

Jesuisdeplusenplusmouillée.C’estcommeun ruissellementdélicieuxdans l’intimité demescuissestremblantes.Yeuxbandés,impatiente,j’attendsqu’Isaacm’emmènedanscespaysagesdontluiseulconnaîtlagéographie.

–Tuesmagnifique,Lily.

Savoixrauquemechavire,jefeule,jegrogne,despulsionsanimalesprennentlecontrôledemaraison.Jesuisentièrementàlui,jesuisdéjà…prête.J’aienviedehurlerquandsesdoigtsécartentma

fenteetseglissentdanslefourreauhumidedemonsexe,quandsavoixhallucinantemeconfiequejesuislajeunefemmelaplusdélicieusedel’univers.

–Tuesàmoi,Lily,gémit-iltoutprèsdemonoreille.

Son autre main caresse mes cheveux… Oui, je suis à lui, je suis d’accord. Je me sensmerveilleusement bien. Je ne voudrais être ailleurs pour rien au monde. Les doigts d’Isaac mefouillent, prennent possession demoi, alternant les rythmes avec unemaestria indescriptible. Unechaleur intense envahit mes reins qui tressautent. Je suis une poupée, son jouet qui dit encore,encore…

–Tusaispourquoijet’aibandélesyeux,Lily?–Dis…dis-moi…balbutié-jeentredeuxdéchargesdeplaisir.

Mesreinssontanimésdeconvulsionstandisquesesdoigtscoulissentinlassablementenmoi.Monsexe se contracte quand la paume de son autre main commence à voyager sur mes fesses, leuroctroyantparintermittenceunepetiteclaquebiensentie.Etlesonproduitparcecontactmemethorsdemoi.Jesuislivrée,lesyeuxbandés…Jesuisheureuse…

–Tuveuxvraimentsavoir?–S’ilteplaît…tu…je…

Jesuisincapabledeparlernormalement.Moncerveauestentotaleconnexionavecleplaisirquicirculeenmoiteluncourantélectriquecontinudeforteintensité.Avecsavoix,sesdoigtsmagiques,Isaacacommeeffacéledictionnairedemondisquedurinterne.Bientôtjeneseraisplusenmesuredeproduireautrechosequedessonsinintelligibles…Devaguesonomatopées…

–Jetebandelesyeuxpourquetun’aiespaspeurdemevoirdisparaître,grogne-t-ilensaisissantdélicatementmaisfermementmescheveuxpourm’obligeràluioffrirmoncouqu’ilsemetàlécheretsuceravecvoracité.

C’estviolent,presquebestial.Isaacestunanimalsauvage.Etdanslesexe,ilestcapabled’atteindreune liberté sans limites. Pourtant c’est beau, pourtant c’est doux. C’est l’amour qui le guide et latendresseirradiedanslemoindredesesgestes.Etilyasavoixquimerassureetmerendfolle.Cequ’ilvientdemedirerésonnedansmatête.Oui,j’aisipeurqu’ildisparaissedemavie.Maislà,jelesenscomplètement.Jenelevoispasmaisjesaisqu’ilestlà.C’estsamanièredemedirequ’ilseratoujoursprèsdemoi,mêmequandjeneleverraipas.C’estpoétiqueettrès…excitant!

–Jeveuxquetuapprennesàmevoir,mêmelesyeuxfermés…

Oui,jetevois…Jetevoismieuxquejamaismonamour…

C’est une expérience incroyable, c’est complètement dingue,mais c’est comme si je distinguaisparfaitementchaquedétaildesonvisage,desoncorps.Etdesonâmemagnifique.Jegémisencoreetencore, longtemps, tout le temps, jenecompteplus lesorgasmesqui se succèdentdans le staccatodésordonnédesbattementsdemoncœur.Jesuisexténuée,maisIsaaccontinueetilmechuchotedesmotsd’amouràprésent,despetitssecretsàl’oreille,rienquepourmoi.Ilmeditquejesuisbelle,

que je suis tellementmouillée, que je le rends fou, qu’il est heureux, qu’il n’a jamais été heureuxcommeça.Quandsesdoigtsm’abandonnentsansprévenir,jepousseuncridesurprise.

–Non…Encore…

Jelesuppliedecontinuer,ilrittendrementetpuisjesenssespaumesquiseposentsurmesfessesetmesoulèvent,etpuisjesenssonglandquis’immisceentremeslèvres…Etpuisjecrieplusfortlorsquesonsexesidurmepénètreetmeremplit.Jem’efforced’avalerdel’air,remontelescuisseslelongdeseshanches,enceinssesreinspourm’ouvriraumieuxetlerecevoirauplusprofonddemoi.Lespaumesd’Isaacenglobentmesfessesetjemedisqu’ellessontparfaitementàleurplace.Ilme porte, s’applique àme fairemonter et descendre sur sa verge. Lentement, puis vite, très fort,tendrementànouveau,puisviteencore…Toutsemélangealorsdansmatête,àenperdrelaraison.Jesuis aspirée dans un autre monde, sur les territoires infinis du plaisir. Mon corps est secoué deconvulsions, dévasté par les va-et-vient démentiels d’Isaac. Songland cogne au fond demoi,monplaisirestintense.Mescrisetmesgémissementssontétouffésparsalanguequifouilleprofondémentmabouche.Sonmembregrossitdémesurémentenmoi.C’est…hallucinant. Il abandonneenfinmabouche,sarespirationestsaccadée.Derrièrelefoulardquimeprivedelavue,j’imaginesonregardde prédateur, la sueur sur son front, son visage de toute beauté.Une nouvelle onde de plaisirmetraverse,j’ail’impressionqueçanes’arrêterajamais.Jepleuresousmonbandeaudesoiepourpre.Etjesuisheureuse,heureuse…Isaacgémitqu’iln’enpeutplus,quec’esttropbon.

–Jevaisjouir,Lily,je…

J’aimequandilmeprévient.Etsafaçondeledire,deprononcermonprénom,mebouleverseauplushautpoint.Jel’encourage,jeluidisquej’aienviequ’iljouissefort.

–Viensmonamour…Viens…

Sesmainspétrissentmesfessesavecfougue,medonnantl’impressiond’êtrel’esclaved’ungéantindestructible. Un orgasme incommensurable me prend alors au dépourvu quand Isaac explosesoudaindansunrâlequimerendfolle.Ilsedéverseenmoiparsaccades,jeressenslapuissanceetlachaleur de sa semence.Mon plaisir est démultiplié par les mots doux qu’il me dédie d’une voixessoufflée.C’estvraimentçaquej’aimeaveclui.Toutecetteviolence,cedésirbrut,etcettetendresseinfiniequimedonneinfinimentconfianceenluiaupointd’êtreprêteàtout.Mêmeàl’impossible…puisque c’est un mot qui n’existe pas avec Isaac. Une larme d’épuisement et de joie demeureprisonnièredemonbandeaude soie. Isaacme le retire avecdouceur.Mesyeuxclignent.La larmeglisselelongdemajoue,Isaacl’arrêteduboutdel’indexqu’ilporteàseslèvresenm’enveloppantde son regard cobalt. Et moi, je l’admire comme si je le découvrais pour la première fois, et ilressembletraitpourtraitàceluiquejem’étaisimaginéderrièremonbandeaudesoie.Noscorpssontsoudés,noustremblonsl’uncontrel’autre.

Merciinfinimentpourcetteexpérience…

Avecsacoutumièredélicatesse,Isaacmeprenddanssesbrasetmeportejusqu’aulargelitdelacabineoùilmedépose,avantdes’allongerprèsdemoi.

Enappuisuruncoude,ilmeregardeetm’admire.J’aitellementdechance,j’enaiconscience.Etc’estcommelesoleiletlesétoilesquidansentdanssesiris.Ildécolledemonfrontunemèchecolléeparlasueur.Nousn’avonspasbesoindenousdirequenousnousaimons.C’estunfait.Etlà,justelà,jemesenstotalementsacaptiveàjamais.

–MonsieurShine…–MademoiselleCooper?–J’aiencoreenviedevous,c’estgrave?

De l’index, il caresse le contour de mes lèvres qui frémissent. Son sourire est indécent. Sonérectionl’esttoutautant.Toutvabiendanslemeilleurdesmondes.

–Trèsgrave,souffle-t-ilenmepénétrantavectoutelatendressedumonde.

4.Prisdecourt

Ilestminuit.NoussommesàquaidansleportdeYesterday.Nousvenonstoutjusted’accosteretd’attacher le voilier d’Isaac à son anneau réservé. Quelques noctambules, des touristes pour laplupart,prennentunverreenterrasse,profitantdel’exceptionnelledouceurdel’air.JeregardeIsaac,admirechacundesesmouvements.Chaqueparcelledemapeaugardeenmémoiresescaresses,sesbaisers,sessuçonsetsesgriffures.Unefoisdeplus,monvampiremagnifiquem’aconduiteau-delàdesfrontièresdel’extase.AvecIsaac,j’ail’impressionquenousnecessonsdegravirunemontagnedontlesommetculmineàunealtitudeencoreinconnuedesspécialistes.Nousdécouvronstousdeuxlesmystèresinexplicablesdelanature.Etmatransformationm’autorisedésormaisàl’accompagnertrèsloindansleplaisir.J’étaisplusquejamaislivrée,offerte.Maistoujoursenveloppéed’uneinfinietendresse.Jesaisquejesuisprêteàêtresaprisonnièreàperpétuité.

Trèsloinettrèslongtemps…

Isaacsebaissesoudainpourramassercequiressembleàunefeuilledecarton.Ilse tourneversmoietjeconstatequ’ils’agitd’unecartepostalequiauraitétélaisséeparSavannah.Maislemessageest un peu grossier.D'autant plus que jusque-là, Savannah n’a laissé que desmessages éphémères.Isaacfroncelessourcilsetcommenceàlireàhautevoixlemessage.

«Jenesuispasprisonnière.Jel’aime.Toutvabien…S.»

Lesyeuxd’Isaacsontrivéssurlacartepostalecommes’ildésiraitplusquetoutqu’ellesedétruiseparlaseuleforcedesonregard.Savoixtremble.

– Elle l’aime ? Elle aime son créateur ? Elle n’est pas prisonnière… Tout ce que j’ai cru cesdernièresannées!

–C’estunebonnenouvelle,hasardé-je.

Illèvelesyeuxversmoi,m’observesansriendire.Seslèvresfrémissent,ilal’airfurieuxetperduàlafois.

–J’aidumalàlesupporter,dit-ild’unevoixgrinçanteàlaquellejenesuispashabituée.–Commentça,Isaac?demandé-jetimidement,consciented’avoirintérêtàmarchersurdesœufs.–Quemasœursoitrestéeavecsoncréateurdesonpropregré!–Maispourquoi?Siellel’aime…–Putain,m’interromptIsaac,cesalaudl’avampirisée,il…

Ils’interrompt,écartelesbrasetlèvelesyeuxaucielcommes’ils’apprêtaitàprier.

–Toutvabien?crie-t-ilauxétoilessousl’œilcurieuxdesnoctambulesquidoiventsedemandercequiarriveàcethommecampésurlepontdesonvoilier.Tutrouvesquetoutvabien,Savannah?

Tunepouvaispasmeledireavant?

Il baisse les bras, fait quelques pas et s’accroche aubastingage comme s’il était sur le point des’évanouir.Jemeprécipiteverslui,mecolledanssondos.

–Calme-toi,Isaac,calme-toi,jet’enprie.

Son corps tremble, ses muscles sont tendus, il est au bord d’exploser. Il se tourne vers moi,s’attacheàretrouversoncalme.

–Maispourquoi,Lily?PourquoiSavannahn’ajamaischerchéànouscontacter,moiouEphrem,d’unemanièredirecte?Pourquoin’est-ellejamaisrevenuesiellen’estpasprisonnière?Pourquoinepasm’avoirditavantqu’elleallaitbien?

Çafaitbeaucoupdequestionsenmêmetemps.Jenesuissûrederienmais jesaisqueSavannahavaitforcémentuneraisonvalablepouragirdelasorte.

–JepensequeSavannahnepouvaitpasvouscontacter.Ellesecache,sesmessagessontfaitspourdisparaître,elleutiliseWilma.Elleessayederevenirversnousmaisondiraitqu’elleapeur.

–Commentpeux-tuenêtreaussisûre,Lily?gémitIsaacenbaissantlesyeux.–Jen’ensuispassûre,répliqué-je,jelesens,voilàtout.Jesuisunpeudanslamêmesituationque

Savannah.Quandjet’aiquittéilyatroisjours,jel’aifaitpourteteniràl’écartdudanger.Jevoulaisteprotéger,etsiçasetrouve,j’auraispeut-êtrefinipardisparaître,commetasœur!

Isaac neme regarde toujours pas. Je sais qu’il puise des forces en lui pour se reprendre enfin.Provenantdelapasserelled’embarquement,unevoixderrièremondosmefaitsursauter.

–Lily a raison, Isaac.Nous pensions qu’elle avait subi cette transformation, or elle l’a fait paramour!C’estl’essentiel,non?

Horsdelui,Isaacbonditverssonfrèrequivientdeposerunpiedsurlepontduvoilier,seplaceàquelques centimètres de lui et le toise du regard. Ses poings sont serrés, prêts à frapper. Ephremgardesoncalme,soutientsonregardsanspourautantleprovoquer.

–Écoute,Ephrem,lâcheIsaac,jen’aipasenviedeparlerdeçaavectoi.–Maisouvrelesyeux,Isaac,regardelaréalitéenface.Cequicomptec’est…–N’endispasplus,s’ilteplaît!

Je décide de m’interposer pour calmer les esprits, je me sens assez minuscule entre ces deuxgrandshommesquisefontface.Maisjem’impose.Ilssesontréconciliésilyaquelquesjoursdeçaetjenetienspasàcequ’ilsrecommencentavecleursstupidesdisputes.

–Parpitié,arrêtez-vous!Vousêtesfrères,vousvousaimezetvousaimezSavannah.Arrêtezdeperdredutempsàessayerdedéfinircequidevraitêtreetnepasêtre.Unebagarrenechangerarienàl’affaire!

MontondoitêtrepourlemoinsautoritairecarIsaacetEphremdemeurentsansvoix.Jerestesur

malancée,utilisantmesdernièrescartouchespourenfoncerleclou.

–Oualorsbattez-vousunebonnefoispourtoutessic’estleseulmoyendevousexpliquer!

Jem’écarte brusquement pour les laisser décider. Je croise les doigts pour que tout s’arrange.Quelques secondes s’écoulent durant lesquelles on pourrait presque entendre l’électricité grésillerdansl’air.Enfin,Isaacsoupire,avantdeposerunemainsurl’épauledesonfrère.

–Désolé,c’estjustequeSavannahestunsujetdélicat.Çamefaitmal,c’esttout.–Ça,jelesais,répondEphremavecdouceur,etjelecomprends.

Isaacposesonautremainsurl’épauledesonfrère.Ilémanedececontactfraternelunepuissanceextrême.Etcommeparmagie,levampiredemavieretrouvesasuperbe.

–Arrêtonsdenousbattre,Ephrem.Lilyaentièrementraison.–Jenedemandequeça,Isaac.Battons-nousensembleplutôt!

Lesdeuxfrèreséchangentunsourirecompliceetjerecommenceàrespirer.JesaisqueSavannahleurmanqueautantàtouslesdeux.Ilsn’ontsimplementpaslamêmefaçondel’exprimer.Etenfindecompte,cettecartepostalenouspermetdenourrirungrandespoir:celuideretrouverSavannahunjourou l’autre.C’estégalementrassurantdesavoirqu’ellen’estpasprisonnièrequelquepartmaisjustecachéeaveclevampirequ’elleaime.Pourdesraisonsforcémenttrèssérieuses,puisqu’ellen’apasréapparudepuisbientôtvingt-cinqans.Jem’éclaircislavoix:

– Cette carte doit renforcer notre envie de retrouver le dolmen et d’espérer pouvoir rappelerSavannahànous.C’estprécisémentàcôtédudolmenqu’aétépriseladernièrephotodevotresœur.Cefameuxclichésurlequell’étoiledegranitn’apparaîtpas.

–Onfilechercherlesplansàlamairie,commandeIsaacsanshésiter.– Je ne suis pas certain queMarshall organise des nocturnes, répliqueEphrem sur le ton de la

plaisanterie tout en montrant l’heure à son poignet. Ça signifie qu’il va nous falloir entrer sansfrapper.

Isaacémetunrirebref,avantd’ajouter:

–C’estexactementcequenousallonsfaire.Ilnousregardeàtourderôleetarticule:quim’aimemesuive!

Jeluiprendsaussitôtlamain,àunevitessequimesubjuguemoi-mêmecarjenesuispasencorehabituéeàmatransformation.Ephremnousobserve,l’airattendri,avantd’annoncer:

–VapourunesoiréeportesouvertesàlamairiedeYesterday.

Sansplusattendre,nousdébarquonssurlequaiduportdeYesterdayetnousnousinstallonsàborddelaMustangnoired’Ephrem.JemedemandeuninstantcommentEphremapuarriveraumomentoùnousdécouvrionslemessagedeSavannah.Etlaseuleexplicationpossiblem’apparaîtdanstoutesonévidence:nonseulementilssontreliésàSavannah,maisilssontsurtoutliésl’unàl’autre.

***

Assise sur la banquette arrière, jeme place aumilieu pour regarder la route. Tandis que nousroulons vers lamairie, j’observe à la dérobée les profils respectifs des frères Shine. Résultat descourses,jesuisaveclesdeuxplusbeauxgossesdelaplanètedansunevoituredecollection.

SiSamanthamevoyait,elleferaitdespiedsetdesmainspourmonteravecnous…

Jesourisàcettepenséeparcequejesuiscertainequ’Ephremetmameilleureamiepourraienttrèsbien…s’entendre.JemesensensécuritéaveclesfrèresShine,àlafoisapaiséeetprêteàaffrontertous les dangers. Les phares jaunes de la Mustang crèvent l’obscurité, des bouffées d’air tièdes’introduisentparlesvitresouvertesetfontvoleternoscheveux.Duradiocassetted’époqueincrustédanslaconsolecentrale,nousparviennentlesparolessyncopéesdeJailhouseRockparElvisPresley.EphremetIsaacm’expliquentqu’ilsontassistéàbonnombredesesconcertsetjemefaislaréflexionquejen’étaismêmepasnée,qu’ilsontenfaitconnutoutuntasdechosesquimesemblentpourtantappartenir au passé le plus reculé. Malgré leur apparence humaine, les frères Shine ont traversétellement de décennies, voyagé dans tant de pays. Quand ils entonnent en chœur le refrain deJailhouseRock,leursdeuxvoixsemêlantàlaperfection,j’ail’impressiondevivreunpetitmomentàpart.Jesuisauxanges.

IlsferaientuntabacàBroadway!

Je les imagine sur scène, je peux visualiser leur chorégraphie, leurs déhanchés, imitant lescélèbresetfurieusesondulationsduKing.Etlesfillesquileurcrienttoutleuramour,horsd’elles,auborddel’évanouissement…

Non,pasça!Isaacestpourmoi,rienquepourmoi…

Je souris d’être si légère en cemoment si grave. C’est grâce à lamusique, à lamagie qu’elledistille. Et c’est aussi grâce à Isaac et Ephrem. Je suis tellement heureuse de les voir ainsi unis,profitant d’un moment de détente avant le vol que nous nous apprêtons à commettre. Quand lespremièresnotesdeBlueSuedeshoessefontentendre,EphremimmobiliselaMustangàunecentainedemètresdelamairie,dansunezonenonéclairéepardesréverbères.L’avenue,àl’écartducentretouristique,esttotalementdéserteàcetteheure.

–Onyva?proposeEphrem.–C’estparti,répliqueIsaac.Lily,tunousattendsdanslavoiture?–Comptelà-dessus,monamour.Ilfaudraquetumepassessurlecorpssituespèresyallersans

moi.

Isaacmejetteunregardbrûlantsignifiantqu’ilneseraitpascontrelefaitdepassersurmoncorps.C’esttoutdumoinsainsiquejel’interprèteetjesuisassezconvaincuedenepasmetromper.Çaselitdansl’éclatdesesyeuxbleus.

–Onyva?demandé-je,affichantainsimadétermination.

Nous nous extirpons du véhicule le plus discrètement possible, prenant garde de refermer les

portièresavecdouceurpournepaséveillerl’attention.Etnousmettonslecapsurnotreobjectif.Isaacestentêteetjelesuiscommeuneombre,Ephremquantàluifermelamarche.Aprèsl’atmosphèrerock distillée par l’énergie de Presley et de ses deux choristes improvisés, le silence qui règnealentourestpresqueassourdissant.Jem’attendsàtoutinstantàvoirsurgirlevigileouMarshalllui-même,maisiln’yapasâmequivivedanslesecteur.

Nous évitons l’entrée principale dont la porte est blindée et Isaac nous entraîne à l’arrière del’hôteldevilleoùsetrouveuneportedeservice.Enmoinsdetempsqu’iln’enfautpourledire,Isaacfracture la serrure, puis nous traversons un couloir très étroit qui débouche sur une autre portedonnantsurlehallsombredelamairie.Ephremallumeunelampetorchequ’ilarécupéréedanslaboîteàgantsdelaMustangetnousprogressonsdésormaisenfileindienneversleserviceabritantlesdocuments cadastraux. Seul le froissement de nos vêtements trouble la quiétude qui règne en ceslieux.Jenepeuxpasm’empêcherd’imaginerunescènedefilm.

Jen’aijamaisfaitça,c’esttrès…excitant!

Jebloqueaussitôtcettepenséedansmonesprit.Cen’estvraimentpaslemomentdeselaisseralleràcegenredeconsidérations.L’adrénalineprocuréeparlasensationdudangernedoitpasmefaireperdredevuequenousrisquonsdenousretrouveraupostesiquelqu’unsepointaitousilamoindrealarmesedéclenchait.Jesursautequanduncraquementsefaitentendreetmesenslégèrementstupideencomprenantqu’Isaacvientdeforcerlaserruredubureaudesarchives.

–Jevaisallumerpourqu’ons’yretrouve,proposeEphrem.–Surtoutpasleplafonnier,leprévientIsaac.Unelampedebureauàlarigueurmaispasplus.

Je me raidis quand la lueur d’un petit éclairage halogène nous permet alors de distinguer lescontoursdelapièce.Jeconstateaussitôtqu’AllanMarshallm’amenti.Leslieuxsontimpeccablementrangés,iln’yapaslamoindretraced’unequelconquerestructuration.S’ilexistaitencoreundoute,j’aidésormaislapreuvequelemairedeYesterdaynetenaitpasdutoutàcequejerécupèreunecopiedesplanscadastraux.Enfin,jeblêmisfaceàl’ampleurdelatâchequinousattend.Dusolauplafond,surdelargesétagèresmétalliques,s’empilentdesmilliersdeclasseurs.

–Mince,ilvanousfalloirdesheuresavantdetrouvercequinousintéresse,melamenté-je.–Onvayarriver,chuchoteIsaac.–Jem’occupedelafacenord,plaisanteEphremàvoixbasse.Occupez-vousdel’autre.

Nous commençons à parcourir les rayonnages, déplaçons les classeurs avec précaution. Nousconsultonsdesdossiers,l’heuretourneetnousnousaffaironssansfaiblir.

Ilfautqu’ontrouve!

Maisletempspasseettoujourspaslamoindretracededocumentsrelatifsàl’urbanismedepuislacréation de Yesterday. Pour l’instant, il n’y a que cette maudite poussière qui me donne envied’éternuer. Àmes côtés, Isaac vérifie le contenu des classeurs à une vitesse hallucinante. Quant àEphrem,ilsembleenaccordparfaitavecsonfrère.Jesuismoinsadroitequ’euxaupointquejelaissesoudainéchapperunénormecoffretcartonnéquis’écrasesurlesolavecunbruitmat.Nouscessons

aussitôttoutmouvement,persuadésquecevacarmedanslesilences’estfaitentendreàdescentainesdemètresàlaronde.Noussommessurlesnerfs.Surtoutmoiàvraidire!Malgrémamétamorphoseencours,jesuisencoreloindeposséderleself-controld’unvampiredeplusde100ans.

–Jesuisdésolée,murmuré-jeauboutdequelquessecondesinterminables.–Toutvabien,merassureIsaac.Net’inquiètepas.

Sontonmerassure.

Commentfait-ilpourmeparlercommesinousétionsdansunsalondethé?

Jemepenchepourramasserl’objetquej’aimalencontreusementlaissétomberquandmonregardaccrocheleschemisessouplesàfermetureélastiquequisesontéparpilléessur le linodusol.Ellesproviennentducoffretquis’estouvertàcauseduchoc!Jemefrottelesyeux,jesaisisl’uned’entreelleetj’endéchiffrel’intituléinscritencapitalesaufeutrenoir:

Cadastre/UrbanismeYesterday/Fichier4

Lesbattementsdemoncœurs’accélèrent.Jebalaielesoldesyeux,ilyenadesdizainesdumêmeacabit!Toutel’histoiredeYesterday!

–Bingo,m’exclamé-je,avantdeplaqueraussitôtunemainsurmabouchecommesicelapouvaitétoufferl’échodemonglapissementvictorieux.

L’airpenaudmaisfolledejoie,jetendslachemisecontenantlefichiern°4àIsaacquis’ensaisitavecempressement.Ill’ouvreetsonsourires’effaced’unseulcoup.

–Dommage,lâche-t-ilavectristesse,iln’yaplusriendanscettechemise.

Jem’accroupissansréfléchiretj’ouvreuneàunechaquechemise.Quelquechoses’éteintunpeuplusenmoiàchaquefoisquej’eninspectelecontenu,jusqu’aunoirtotal.Jeretiensàgrand-peineuncriderage.Vides,ceschemisessonttoutesvides!

–Marshall,c’estMarshall,ilatoutfaitdisparaîtreaprèsmavisite.Merde,merde,c’estcequejecraignais!C’estfichu,onnesaurajamais!

Isaac hoche la tête tandis qu’Ephrem nous rejoint d’un pas rapide. Il nousmontre sa pierre deprotection,celledontKurtavaitdistribuéunspécimenàchacundenousdanslelabo,avantquenousnousséparions.Etelleclignote!Jefouilledansmapochepourvérifierlamienne:elleestchaude…etelles’allumedeplusenplusvite…C’estmauvaissigne!Isaacattrapelasiennequiestégalementéclairée.

–Ilsarrivent,dit-ilenmeprenantpar lamain,nousdevonsmettre lesvoiles !J’appelleraiKurttoutàl’heurepourlepréveniretluidemanderdenousrejoindresurlevoilier.Maislà,ilfautfiler!

LeconstatestcruelmaisIsaacaraison.Lemairenousadoublés.Cequisignifiequ’ilconnaissaitsansdoutelaréelleimportancedecesplansànosyeux.Etqu’ilpressentaitquenoustenterionsdeles

récupérerparlamanièreforte.Etmaintenant,nousrisquonsd’êtreprislamaindanslesac!

–Oui,confirmé-je,nousn’avonsplusrienàfaireici,nenouséternisonspas.

***

Nous sommes assis sur le pont du voilier. Il est près de trois heures du matin, les cafés etrestaurantsduportsontfermés.SeulsleséclatsdevoixdesderniersfêtardsdeYesterdayetlerythmesourddebassesnousparviennentduBlood&Food.Noussommesdépités.C’estunéchectotal!J’enviens à supplier intérieurement Savannah de se manifester. Pour un peu, je serais capable dem’agenouiller et de joindre les paumes pour prier. Tout semélange dansma tête. Jeme demandepourquoiWilmanem’apas rappelée. Jem’interroge sur le silencedes sorcières et desNobodies.C’estassezfoumaisj’ensuispresqueàregretterqu’ilsn’aientpastentédesevengeraprèsl’évasiond’Isaacdumanoir.Cestatuquo ressembleàune trêvequinemeplaîtguère.Deschosesgravessepréparent,j’enéprouvelepressentiment.Deschosesbienplusgravesqu’unevengeanceimmédiate.Ensecret,JudithBastberg,ErnstWaldorffetAllanMarshalldoivents’organiserpournousnuire.Ilsnesontpasvraimentdugenreàabandonner.

Etilsontbesoindemonanneau…

–Isaac,Ephrem,je…Enfin,jemedemandes’ilsn’auraientpascomprisoùsetrouveledolmen!Àcausedemavisite,demesquestions,je…

Meslèvrestremblent,Isaacyposesonindexavecdouceurpourmefairetaire.

–Chut,Lily,gardetoncalme.Etdis-toiqu’ilslesaventpeut-êtretousdepuisledébut.Auquelcas,ilsontcachéoudétruitlesplanspournousretarder…

Ils’interromptetdésignemonauriculaire:

–Maisilsontencorebesoindeça!Donctoutn’estpasperdu.

Jeme lève et je tourne en rond sur le pont central du voilier. Je ne tiens pas en place.Ephremm’accordeun regardqui se voudrait encourageant, commepour appuyer les proposde son frère,maisj’ylisledésarroid’unjoueurdefootvenantdeperdreunmatchdécisif.

Visiblementrésoluànepasselaisserabattre,Isaacclaquedanssesmainsetseredresseàsontour.

–Jevaismefaireuncafé!dit-il.Desamateurs?

Ephrem lève le doigt en soupirant. Quant à moi, je décline l’offre, je suis déjà assez excitéecomme ça. Dans mon cortex, c’est une véritable usine. Des rouages cliquettent, des mécanismess’emboîtent,provoquantdesimpulsionssemuantentoutessortesderaisonnements.J’ail’impressionque mes neurones constituent les pièces maîtresses d’un ordinateur surpuissant étudiant desalgorithmesàunevitessehallucinante.Jeréfléchiscommetoujours…maisbeaucoupplusvitequ’àl’ordinaire.Cettetransformationsurnaturellequejesubisnecessedemesurprendre.IsaacetEphrems’installent sur la proue pour boire leur café et se remettre de notre déconvenue en perdant leur

regard à l’horizon. Et je continue à réfléchir. J’étudie et classifie les étapes de mon séjour àYesterday, me remémore les indices, j’en fais la thèse, l’antithèse et la synthèse. J’élimine desrésultatsaufuretàmesure,affinemarecherche.Enfindecompte,demeurentenlicelesmessagesdeSavannah. Rien n’est gratuit dans ces derniers. Le deuxième, je l’ai compris, c’est une histoired’amour et d’alchimie. Il est plus clair que le fameux premier message, celui que Savannah medemandepourtantdenepasoublier.Jerevoisalorslecarrédeneige,lesmotsinscritssurleblancimmaculé,àmêmelesol.

Lessorcièresoccupentleterrain…

Soudainmoncerveaus’arrêtedecalculer,j’aipresquel’impressiond’entendresescomplicationsinterrompre toute activité, comme si les deux aiguilles d’une horloge universelle venaient de seréglersur l’heureexacte.Lerésultatvientdetomber!Sur l’écrandemaconscience, ils’afficheetclignotepresquedevantmesyeuxéberlués.

–Jen’ycroispas!!!

J’aicriétellementfortqu’IsaacetEphremseprécipitentàmescôtés.Isaacmeprenddanssesbras,l’air inquiet. Tout mon corps tremble et il doit s’imaginer que c’est une nouvelle étape de matransformation. À quelques mètres, Ephrem se tient prêt à venir en aide à son frère s’il devaitm’arriverquelquechose.Maisjetremblesimplementdejoie,souslechocdelarévélationquivientdesefairejourenmoi.

–Lily,quesepasse-t-il?medemandeIsaacd’unevoixétranglée.

Jemedétachedeluietjecommenceàdanserautourd’eux.Ilsdoiventmeprendrepourunefollemaisj’aibesoind’évacuermontrop-pleind’énergie.Ilssuiventsanscomprendremesarabesquesetmesévolutions.Quandenfin,jem’arrête,jesuisàboutdesouffle.Ephremm’observe,lesmainssurleshanches,arborantunpetitsourirecirconspect.Isaacquantàluipenchelatêtesurlecôté.Ilestsicraquant,tellementattendrissantquej’aienviedehurleràquelpointj’aimelavie.

–S’ilteplaît,Lily,insisteIsaac.–Jesais,Isaac!J’aitrouvé!m’exclamé-je.–Quoi?demandentenchœurlesdeuxfrères.–C’estcomplètementdingue,ons’enfichedesplans!

IsaacetEphremm’interrogentsilencieusementduregard.

–Savannahfaitvraimenttoutpournousaider,votresœurestgéniale!

LevisagedesfrèresShines’éclaire,c’estunrégal,c’estunleverdesoleil.C’esttellementbeauàvoirquejefaisdurerleplaisir.

–Lily,dis-nousmaintenant!–Lessorcièresoccupentleterrain,articulé-jesuruntonvictorieux.–C’estlepremiermessagedeSavannah?demande-t-il.Celuiquetuastrouvéinscritsuruncarré

deneige!

J’acquiesce enmemordant la lèvre inférieure.Lesyeuxd’Ephrem font la navette entre Isaac etmoi,commes’ilassistaitàunepartiedeping-pong.Isaacpoursuitleraisonnement…

–Cequisignifieraitque…

Ils’interrompt,seprendlatêteentrelesmains,exécuteuntoursurlui-mêmecommes’ilcherchaitàseremettrelesidéesenplace.

–Lily!Tucroisvraimentquec’estça?Tupensesque…– Oui, coupé-je, le dolmen est chez les sorcières ! C’est fort probablement ce que Savannah

cherchaitànousdireenindiquantqu’ellesoccupaientleterrain.–Brillant,siffleEphrem.Ledolmenseraitcachésouslesfondationsdumanoir?–Onn’enapaslacertitude,concédé-je,maisfranchementjenevoisqueça.Etçaparaîttellement

logique.SurtoutsionréfléchitàcequeJudithm’aditlejourdetonévasion.–Là, j’ai dûmanquer un épisode de la sagaBastberg, déclare Ephrem sur un ton assez excité.

Qu’a-t-elledit,notresorcièretopmodel?

Isaac sourit de toutes ses dents en attendant que je réponde à son frère. Je suis si heureuse departager ce moment de gloire avec les frères Shine. Et le regard émerveillé d’Isaac me faitcomprendrequ’ilestheureuxaussi.Etfierdemoijecrois.

–«Tureviendrasbientôtaumanoir,Lily.J’aibesoindetoisurplace…»Voilà,motpourmot,cequem’aditJudithBastberg.

SouslecielétoilédeYesterday,lesregardsdeconnivencedutrioquenousformonssepassentdecommentaires.Noussavonsdésormaisquelleseralaprochaineétapedenotreaventure.

Àsuivre,nemanquezpasleprochainépisode.

Egalementdisponible:

Moninconnu,monmariageetmoi

GraceestàLasVegaspourassisteràunmariage.Aprèsunesoiréebienarrosée,elleseretrouveaumatinmariéeàCaleb,unhommerencontrélaveille,sansavoiraucunsouvenirdelacérémonie.Ilestcharmant,ceCaleb,ilestmêmecarrémentcanon,etenplusilesttrèsriche,maissemarier,cen’étaitpasdutoutdanslesprojetsdeGrace.Saliberté,elleytient.Lehic,c’estquesoncherépoux,dontellenesaitrien,nesemblepasdécidéàaccepterl’annulationdeleurmariage…

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