RejoignezlesEditionsAddictivessurlesréseauxsociauxettenez-vousaucourantdessortiesetdesdernièresnouveautés!Facebook:cliquez-iciTwitter:@ed_addictives

Egalementdisponible:

Sexfriends

AlistairMonroeabeauêtreunjeunemultimilliardaireabsolumentcharmantetbeauàtomber,ChloéHaughtonn’envisagepasuneseuleseconded’entamerunehistoiresérieuseaveclui.Lajeunefemmeestterroriséeàl'idéed'avoirunerelationdeplusd'unenuitavecunhomme.Etcelaimpliquederespecterlachartequ'elles'estfixée,dontlarèglenuméro2est:Passerunenuitavecunhomme:ok;deuxnuits:alerterouge,troisnuits:danger!oulaplusimportante,lanuméro4:Nepastomberamoureuse.Saufqu’Alistairn’apasl’habitudequ'onluiimposedesrèglesetentendbienséduirelabelleChloé.

Tapotezpourvoirunextraitgratuit.

Egalementdisponible:

RockYou

«Jechercheunefilleintelligente,débrouillarde,honnêteet,enoption,jolie.Cettefille,c’esttoi!»Lorsquel’excentriqueLindseyproposeàsaniècedevenirlarejoindreàLosAngelespourtravaillerdanssonlabeldemusique,lecœurd’Angelanefaitqu’untour!Maislajeunefilleestloindesedouterquesavievaêtretotalementbouleversée.Dansl’avionquil’emporteverslaCitédesAnges,ellerencontreunmystérieuxjeunehomme.C’estMarvinJames,lecélèbrechanteurderockpourquielledoittravailler.Peuàpeu,Angelatombesouslecharmedel’énigmatiquestarquiluiferadécouvrirunmondedeplaisiretdesensualité.Maisleurpassionnaissantevaseheurteràunsombrepasséquineleslaisserapasindemnes...Découvrezlesaventuresd'AngelaetMarvin,lerockeurtorturé.Uneidyllequiferabattrevotrecœuraurythmedelasagalaplusrockdel'année!

Tapotezpourvoirunextraitgratuit.

Egalementdisponible:

LoveU

QuandZoéScartarriveàLosAngelespourretrouversonamiePaulineetqu'elleseretrouvesansportable,sansargentetsansadresseoùallersuiteàlapertedesesbagages,ellen'enrevientpasd'êtresecourueparlebeauTerrenceGrant,lastardecinémaoscariséelaplusenvuedumoment!EtquandquelquesjoursplustardTerrencerappelleZoépourluiproposerdetravaillercommeconsultantefrançaisesursontournage,ellepensevivreunrêve.D'autantquel'acteurnesemblepasinsensibleauxcharmesdelajeunefille…Maisl'universdeHollywoodpeutsemontrercruel,etlesapparencestrompeuses.Àquipeut-onsefier?EtquiestréellementTerrenceGrant?

Tapotezpourvoirunextraitgratuit.

Egalementdisponible:

BeautifulParadise

Solveigs'apprêteàvivreunnouveaudépart,directionlesBahamas,l'îledeCatIsland,oùsonexcentriquetantepossèdedeschambresd'hôtes.Soleil,plagedesablefinetpalmiers,c’estdanscecadreparadisiaquequeSolveigrencontrelemultimilliardaireWilliamBurton,etlecoupdefoudreestimmédiat!Ununiversmerveilleuxs'offrealorsàlajeuneParisienne.Seuleombreautableau,lemystérieuxjeunehommecachequelquechose,sonpasséesttrouble.Entreunirrépressibledésiretunimpalpabledanger,lajeunefilleacceptera-t-elledesuivrelebeauWilliam?A-t-elleseulementlechoix?DécouvrezlanouvellesériedeHeatherL.Powell,unesagaquivousemporteraauboutdumonde!

Tapotezpourvoirunextraitgratuit.

Egalementdisponible:

Contratavecunmilliardaire

DécouvrezlesaventuresdeJulietteetDarius,lemilliardaireauxmultiplesfacettes.Uneintriguesentimentaleintenseetsensuellequivoustransporterajusqu'auboutdevosrêveslesplusfous.

Tapotezpourvoirunextraitgratuit.

MeganHarold

TOUTPOURLUIMILLIARDAIREETDOMINATEUR

Volume9

1.Inquiétudes

Jereprendsmesespritsdanslacuisine,essaiederassemblercequipeutl’êtredansmatêtepourretrouverunpeudecohérence.Jefixemonverred’eau.Dans lesalon,Adam,mesparentsetRyandiscutentdeleurjournée,deleurexpéditionentrehommesenpleinenature,d'Adametdesonenviedeprendredelahauteurpouradmirerlepaysage,cequiluiavaluquelquescontusions…C’étaitunepremièrepourlui,cettesortie.Iln’apasencorelepiedassurépourrandonnerauxcôtésdemonfrèreetdemonpère,plusaguerris.Maiscen’estpastantcetincidentquifaitbattremoncœur.L’entrevueaveclavoyanteplustôtdansl’après-miditourneenboucledansmonesprit.Elleapréditl’accidentd’Adam,elleavulesdifficultésqu’ilrencontreraitsurlessentiers.

Sielleaditvraipourça,qu’enest-ildureste?

Je la revois s’affoler devant ses cartes, je revois ses yeux pleins d’effroi, son trouble, sesparoles…Lavoyantem’aparlédemenaces,demenacesparticulières,sombresetfortes,elleaaussiparlédemort…

Celuiquinousmenaceestprêtàtoutpourarriveràsesfins,iladéjàtué,ilpeutrecommencer…

Voilà ce qu’elle a dit. Je suis encore glacée, incapable de me réchauffer. Je sais qui est cettemenace,commentendouterdésormais?LorraineHill,latanted’Adam,adéjàprouvécombienelleétaitdangereuse.Adamfaitdesrecherchessursafamilleetsursonpassé.Sesrécentesdécouvertesmontrent que Lorraine lui a toujoursmenti. Ses parents ne sont pas les viles personnes qu’elle adécritesàsonneveu.Non,aucontraire.Lamèred'Adamétaitunefemmebien,respectéeetaiméeparlacommunauté,sonpèrenel’apasabandonné.Ilasubvenuauxbesoinsdesafamillemaisàdistance.Pourquoilesparentsd’Adamont-ilsétéséparés?Pourquoisonpèrenes’est-ilpasoccupéd’Adamquandsamèreestmorte?Tantdequestionsencoren’ontpastrouvéleursréponses…Lesrecherchessontlonguesetcompliquées,commesiquelqu’uncherchait,ouavaitcherché,àenterrerlavéritéleplus profondément possible. Lorraine n’aime pas qu’Adam fouille son passé, c’est devenu uneévidence.

Quecache-t-elle?

Je ne crois pas aux voyantes en temps normal,mais celle-cim’a fait une forte impression. Cequ’elleavul’abouleversée.Etmamèreetmoiaussi,parlamêmeoccasion.Sielleditvrai,Lorrainen’apasfinidenousmalmener.Maisjusqu’àquelpoint?Serait-ellevraimentprêteàattenteràlaviedesonneveu?Àlamienne?Est-cequ’ellen’apaspousséPaulàsesuicider?Enluiavouantqu’ellen’étaitpassamère,maissabelle-mère,lemondedePauls’esteffondré.Enluireprochantseséchecspourarrêterlesrecherchesd’Adam,enlemanipulantavecmépris,n’a-t-ellepascherchéàl’écarter?Je secoue la tête et frissonne.La familleHill estmystérieuse.Adamdoit continuer ses recherchespourdécouvrirquiétaitsonpèreetcomprendresesdécisions.Ilnepeutenêtreautrementdésormais.Peut-êtrenousfaudra-t-ilnousmontrerunpeuplusprudentsàl’avenir?

«Éléa,toutvabien?»faitunevoixdansmondos.

Mamère.Commej’auraispréféréqu’ellenesoitpastémoindetoutça,qu’ellen’entendepasceshistoiresdemenace!Lagarderendehorsdeceshistoires.

–Oui,oui,çava.Notresortiem’adonnésoif!réponds-jeenessayantdeprendreuntonenjoué.–Éléa,qu’est-cequ’ilsepasseici?Lavoyante,dequellemenaceparlait-elle?

Bingo,mamèrenevarienlâcher!

–Maman,tusaisbienquelesvoyantesaimentlespectacle,çalesrendpluscrédibles.Oublie…–Écoute,elleavul’accidentd’Adam,ellenes’estpastrompéesurça.Alorsildoityavoirduvrai

danslereste!Jesaisbienquetunemedispastout,Éléa.Jesuisunemèreetjesensquandmonenfantmecachequelquechose.

–Jenetecacherienmaman,iln’yapasdemenace.Regarde,jejouepourlePhilharmoniquedeNewYork,Adamestunhommebien,dequoipourrais-jemeplaindre?

J’essaiedememontrerpersuasive.Jen’aipasenviedeluimentir,maisiln’estpasquestionquejeluiconfietouslesderniersincidentsdemavie:l’oiseaumortenvoyélorsdemonpremierconcertauPhilharmonique, le lien soupçonné entre l’incendiaire de notre maison et Paul Hill, les lettres demenace,lesappelsanonymes,lesarticlesmensongersdanslapresse,lepassageàtabacd’AdamparleshommesdemaindePaul,monenlèvement,latentativedenousrenverser,monfrèreetmoi…

Avouercegenredechosesàunemère,c’estcommeprovoquerundébutdetsunami!

«Tun’arriveraspasàmeconvaincre,Éléa,jesensquequelquechosesepasseicietquepersonneneveutnousendireplus.Ryannes’esttoujourspasexpliquésursondéménagementsoudaindeNewYorkàSanFrancisco!Vousnenousditespastout,lesenfants,etcen’estpasbien!Ons’inquiète!»

Ryanadécidédevivreiciparcequeluiaussis’inquiétaitpourmoi.Maisçanonplus,jenepeuxpasledireàmaman…

« Ryan et Claire voulaient sans doute se rapprocher. Rien de plus maman », cherché-je à laconvaincre.

Ryanetmameilleureamiesesontmisencoupleaumêmemoment,c’estuneexcusevalablepourdéménager.Vivreunerelationàdistancen’estpasévident.

«Jeconnaistonfrère,ilnes’estjamaislancésivitedansunerelation.Ilestvenuicijusteaprèsl’incendie,c’esttoutdemêmeétrangecommecoïncidence!»

Mamèrecommenceàs’agiter.Jemesenssoudainàcourtd’arguments.Jesuislassedetoutça…

Mavien’ariendenormal.

«TusaisÉléa, reprendmamère.Noushabitons loinpapaetmoi,c’estdurd’êtresi loindesesenfants.Maisquandenplusnosenfantsnouscachentdeschoses,c’estencoreplusangoissant.Alors

puisquetunemedirasrien,etjesuispersuadéequetuasdeschosesàdire,promets-moiaumoinsd’êtreprudente.Etn’hésitepasàappelersituasbesoindenous.»

Ma mère me serre contre elle. C’est un geste rare chez elle. Je suis tellement désolée de lesinquiétercommeça.Maiscelaseraitpires’ilssavaienttout.Peut-êtreunjoursauront-ils?Jeposematêteaucreuxdel’épauledemamère.

Qu’ilestloin,letempsdel’insouciance!

Mesparentsnousquittentcesoir.ToujourstenusparleurquincailleriedeKelowna,auCanada,ilsne s’autorisent que de courts séjours avec nous. Le voyage doit les fatiguer mais c’est le seulcompromisqu’ilss’accordentpourpasserdutempsavecnous,leursenfants.Peut-êtrequ’unefoisàlaretraiteilss’autoriserontàvenirplussouvent,etpluslongtemps.

L’excitationdeleurdépart,lesderniersmomentsensemble,leséclatsderiresurlesperformancesd’Adamenmatièredepêche, animent le début de soirée.Et puis soudain, le vide.Mesparents ontrepris avec joie l’hélicoptère pour lesmener à l’aéroport etRyan etClaire se sont aussi éclipsés.NousnousretrouvonsenfinseulsavecAdam,assisdans lecanapé,unpeuassomméspar le récenttourbillonquenousvenonsdevivre.Leweek-endaétébienrempli!

–Ehbien,quelweek-end!finitpardireAdam.–Jecroisqu’ilnousfaudraunesemainepournousenremettre,acquiescé-je.–Ton père a décidé qu’ilm’emmènerait pêcher lors de notre prochaine visite chez eux. Ilm’a

aussiparlédefaireunbivouac,ajouteAdamdansunlargesourire.–Unbivouac?!–Héoui!Aveccequim'estarrivé,ilpensequej’aibesoind’uneimmersioncomplèteenpleine

nature!–Une immersion« enmilieuhostile » tuveuxdire, complété-je en souriant.Remarque, tu sais

maintenantqu’ilfautteteniréloignerdesrochers…–Hé!Jenepensaispasquedespierrespouvaientsedécrocheretmetomberdessus.Toutavait

l’airtrèssolide!essaiedesedéfendreAdam.

Je lance àAdamun regard dubitatif, purementmoqueur. Il a justemanqué de chance,mais j’aienviedeletaquiner.Jepensequecetépisoderesteralongtempsentrenous,etqueRyannemanquerapasdelechambrersurlesujet.

–MademoiselleHaydensen, jelisdelamoqueriedansvosyeux!ditAdamfaussementfâché.Jevousmetsaudéfidem’accompagneràceprochainbivouacetjesuiscurieuxdevoircommentvousvousensortirez,citadinecommevousêtes!

–Vousoubliezquej’aigrandilà-bas,monsieurRitcher,minaudé-je.–J’aihâtedevousvoirlâchéeenpleinenature!

Adamserapprochedemoi.Aussiprès,jepeuxsentirl'odeurdesapeau,cetteodeurterriblementenivranteettroublante.Maisaulieudem'enlacer,d’ungeste,ilmedonneunlégercoupdecoussinquejen’aipasvuvenir.

Monsieurestjoueurcesoir…

J’enattrapeunmoiaussietentredanslabataille.J’évitedetouchersonvisageetseségratignures.Nousbataillonscommedeuxenfantsjusqu’àcequejebaisselesarmes.J’aibesoindereprendremonsouffle.Adamm’attireàlui.Jem’installecontresapoitrine,latêtesursontorse,lesjambessursescuisses.Ilmeserreetmecaressedoucementlescheveux.J’entendssoncœurbattre,jefermelesyeux.

«Monange,tuavaisl’airpaniquéeenrentrantettamèren’avaitpasl’airbiennonplus.Qu’est-cequivousamisesdansunétatpareil?»demandeAdam,brisantcetendremoment.

J’ouvrelesyeuxetmeredresse.

–Mamèrem’a entraînée voir une voyante.L’échange a été, disons… très étrange.Ellem’a ditqu’unemenace planait surmoi, qu’il fallait que jememéfie, que cettemenace avait tué et qu’ellen’avait pas peur de recommencer. La voyante était bouleversée et son attitude nous a un peuimpressionnées.

–Unevoyante?J’espèrequetunecroispastoutescesbalivernes.–Jen’ycroispasnon,maiselleavuqu’ilt’étaitarrivéquelquechose.–Coïncidence !Cettevoyantea fait sonspectacle,ça faitpartiedeson job.Ne te tourmentepas

pourça,monange.– Jem’en remettrai. En revanche, mamère est partie très inquiète. Elle se doute que je ne lui

racontepastout.–Jesuisàl’originedetoutecetteinquiétudeautourdetoi.Jeteprometsquequandonenaurafini

avectoutça,nousauronsunevieplustranquille.Enattendant,jeferaitoutpourteprotéger,souffleAdamenmeregardantdroitdanslesyeux.

Lespromessesd’Adamnesontjamaisfaitesenl’air.Àcetinstant,moninquiétudedel’après-midis’envole, j’éprouve une confiance totale en l’homme à mes côtés. Et je sens que j’ai une chanceincroyabledel’avoir,mêmesicelaimpliquequelques«difficultés»auquotidien.J’aihâtedevivrecet«après»,qu’onentermineaveccesquestions,avecLorraine…

Tiens,d’ailleurs,Lorraine…

«Qu’est-cequetupensesdesoninvitation?»demandé-jeàAdam,enattrapantlecartonlaissésurlatable.

Nousn’avonspaseul’occasiondereparlerdecetteinvitationarrivéedansl’après-midi.Adaml’aouvertealorsqu’il soignait sesblessures, et je rentrais àpeinedecette séancechez lavoyante.Cecartonfaitéchoàlamenaceénoncéecetaprès-midi.MaisjenedisriendemapenséeàAdam.Iln’ycroitpasetmoinonplus,jen’yaijamaiscru.

–J’imaginequeceseral’occasionpourLorrainedejouerunenouvellefois lacomédie.Jesuistrès curieuxde savoir pourquoi elle nous convie tous les deux. Il y a quelque chosederrière cetteinvitation,nous ledécouvrironsbien assezvite, commenteAdamd’unevoix froide. Jepréféreraisquetuneviennespas,pourt'évitertoutça.Tun'aspasbesoindet'exposerauxétatsd'âmedeLorraine.

–JesaisquetuaimeraismeprotégerdeLorraine,maisl’invitationestànosdeuxnomsetceserait

trèsmalvuquejeneviennepasavectoi.Lorraineenconcluraitquejerefusesesefforts,insisté-je.Net’inquiètepas,jeveuxt'accompagner.Allons-yensembleetdécouvronscequ’elleveut.

J'arriveàmemontrerconvaincante.JeveuxprouveràAdamqu'ilpeutcomptersurmoiluiaussi.Etmêmesi jenepensepasêtrecomplètementsereinedemainsoir, jesaisqu'Adamne laisserapasLorraineallertroploin.

–Qu’est-cequetupensesdemonterunplateaudanslachambre?J’aifaim,maisj’aiaussienviederepos,decalmeetdetoi,meproposeAdam,lesourireaucoindeslèvres.

–Oh!oui.Jevalidetonprogramme,approuvé-jeenplaçantundouxbaisersurseslèvres.–Parsdevantetfais-nouscoulerunbain!JevaisvoirGloriapourleplateau!

Je gravis l’escalier rapidement et entre dans lamagnifique chambre d’Adam. J’aime ce lieu, cegrandlitaumilieudelapièce,lacheminéedansuncoin,latélévisionsavammentcamoufléederrièreunmiroir.C’estunprécieuxhavredepaixdanslequelaucundenossoucisn’estentré.Jemedirigevers la salle de bains et ouvre les robinets. L’eau coule en cascade. J’y glisse quelques boules desavon, qui parfument tout de suite la pièce. J’allume la chaîne hi-fi et trouve une doucemusiqued’ambiance.Jeveuxquetoutsoitparfait…

Jemedépêched’enfilerundéshabilléensoienoire,j’aienviedeséduireAdam,devoirbrillersesyeuxenmevoyant,delevoirmordresalèvre.Moncœurs’affolequandjel’entendspasserlaportede la chambre. Jem’appuie sur le chambranle de la porte coulissante de la salle de bains, invitantAdamàmerejoindre.Enmevoyant,sonregards’obscurcitdedésiretilmerejointsansattendre.Lasoirée s'annoncesensuelle, torridemême.Adamn'a rienperdude ses forcesmalgré sa journéeaugrandairetjebrûled'enviedelesentircontremoidepuisquej'airespirésonodeur…

Leréveilesttoutaussidélicieuxquelecoucher.Adammecaresseledos,paisiblement.J’ouvrelesyeuxendouceur.

«Allezpetitemarmotte,ilesttempsdeseréveiller.Unelonguejournéenousattend»,murmureAdamtoutprèsdemoi.

J’étiremoncorpsengourdi.

« Je crois au contraire qu’elle risque de passer très vite ! C’est la soirée chez Lorraine quis’annoncelongue»,ajouté-jeensoupirant.

Je rejoins Adam dans la cuisine. Rasé de près, avec son costume gris, sa cravate noire et sacheveluresavammentdomptée,ilest…magnifique.Jenepeuxpasm'empêcherdelâcherunsoupirdeplaisirenmerappelantlaforcedesesbras,m'entourant,cettenuit.

M'entourant,moi!

Ilmetendunetassedecaféfumante.

–Est-cequetuasletempsdem’accompagnercematinàmonbureau?J’airendez-vousdansunedemi-heureavecHayley,j’aimeraisquetusoislà,medemandeAdamvisiblemententhousiaste.

–TuvoisHayleycematin?

Notre amie journaliste est toujours très disponible mais je me demande bien pourquoi Adamsouhaitelavoir.

«Oui,j’aieuuneidée,jet’expliqueraienroute.»

Adamestdéjàprêtàpartiretmelaisseàpeineletempsdefinirmoncafé.

Quelleidée?

Hayleyestdéjàlàànousattendrequandnousarrivons.Adamaeuletempsdes’expliquerdanssavoitureetjetrouvesonidéetrèsbonne.Encorefaut-ilqueHayleyaccepte!

–Hayley,mercid’êtrevenueaussivite,ditAdamenluiserrantlamainchaleureusement.Allonsdansmonbureaupourdiscuter.

–Vousaviezl’airassezpresséautéléphone.Etjenecommencemajournéequedansuneheureaujournal.

JesalueHayleyàmontour.J’apprécielajeunefemme,elleestsincèreetnousatoujoursaidés.Ilya encore peu, ellem’a prévenue qu’une rumeur s’apprêtait à circuler surma prétendue grossesse.Grâceàelle,Adamapufaireintervenirsesavocatsetlesitepeoplequiamisenlignecettefausseinformationl’aretiréeaussitôtettoutaétéeffacéduWeb.

Nousnous installonsdans ce coin salonque je commenceàbienconnaître.Peude tempsaprèsnotreentrée,unhommevientnousapporterunplateaupourlepetitdéjeuner.

Jevaispeut-êtrepouvoirboireuncaféplustranquillement!

Adamestlepremieràprendrelaparole.

–Hayley, j’aibesoindevousetdevotre talentd’investigatrice. J’aidécidé ilyaquelque tempsd’enquêtersurmafamille,mesparentsplusexactement.J’aidécouvertpasmaldechosesmaisjemeretrouveunpeucoincéconcernantmonpère.Ilsembleraitquetouteslesinformationssurluisoientprotégées,etilm’estdifficiled’approfondirmesrecherchessanséveillerlessoupçons.J’aienviedememontrerdiscret,c’estpourquoij’aipenséàvous.

–Sijecomprendsbien,vousvoulezquej’enquêtesurvotrepère?demandeHayley,concentrée.–Exactement.Pourcommencer,j’aimeraissavoiroùilavécuàSanFranciscoavantdemourir.Si

voustrouvezautrechose,jesuispreneur.–Jevaisessayerdemerenseigneretdetrouverça.Jenesuispasdétectiveprivémaisjedevrais

pouvoirtrouverdespistes.Votrepères’appelaitHowardHill,c’estbiença?–Oui.Sionvous interrogeaucoursdevotreenquête,ousivousvoussentezmenacée,surtout,

prévenez-moi. Je ne tiens pas non plus à ce que vous vousmettiez en danger pourmoi, prévientAdam.

–Oh!voussavez,lessujetsquifâchent,c’estunpeumonmétierdejournaliste.Découvrirquiétaitvraiment Howard Hill peut faire un très bon sujet de reportage. D'ailleurs, est-ce que vous medonneriezl'autorisationdepubliercertainesinformations?demandeHayley.

–Discutons-enlemomentvenu,d'accord?–OK!Jevaism’ymettretoutdesuite,j’imaginequevousêtesassezpresséd’avoirdesréponses?–Jenepeuxrienvouscacher,Hayley,avoueAdamensouriant.–Trèsbien.Jevoustiensaucourant!

Hayley est fine. Elle connaît les grandes lignes de notre histoire, elle sait que nous avons dûtraverserpasmald’épreuvescesdernierstemps.Elleneposepasdequestionsinutilesetvadroitaubut.C’estcequ’Adamappréciechezelle.

–Bon,ehbien,iln’yaplusqu’àattendre,soufflé-jeau-dessusdemoncafé.–Oui,j’aiconfianceenHayley.Etsij’arrêtelesrecherchesdemoncôté,Lorrainepenserapeut-

êtrequej’ailaissétomber.Quejemecontentedecequejesais.–Tucroisqueçapeutmarcher?– Oui. Ambrose et Lorraine sont trop présents dans ma vie en ce moment. Je sens qu’ils me

surveillent.Jeleslaissecroirequejepasseàautrechose!

Adammesourit.Ilaffichesonéternelleassurance,ilsaitcequ’ilveutetoùilva.Jesuistoujoursadmirativede levoiraussicombatifetpersévérant. Ilnecille jamais, trouve toujoursdenouvellesressources.AutourdeLorrained’êtremanipulée!

2.Réuniondefamille

Monventreseserre,jen’aijamaiseuautantletracdetoutemavie,mêmeavantunconcert.

Enfin,c’estdifférent.

J’ail’impressiondem’apprêteràmejeterdanslagueuleduloup.Aumoins,pendantunconcert,jesaisquoifaire,jesaisdequoiilestquestion.Jesaiscommentçasepasse.Là,c’estl’inconnu.CedînerchezLorrainemedonnefroiddansledos.Cettefemmes’esttoujoursmontréedistanteàmonégardetn’ajamaisvud’untrèsbonœilmonarrivéedanslavied’Adam.Paulm’amêmeavouéavantdesesuiciderqu’elleluiavaitdemandédemalmenerAdamàRiverton,pourluifaireabandonnersesrecherches sur son passé.Adam a fini à l’hôpital…Si elle a été capable de faire ça à son propreneveu,quisaitsiellen’estpasderrièreautrechose?Leslettresdemenace,l’incendiedelamaison,est-elleaussiderrièretoutça?Commentsavoir?

Et ce dîner ? Se sent-elle seule comme l’a glissé Ambrose à Adam la dernière fois ? A-t-ellevraiment envie de resserrer les liens avec la seule famille qui lui reste ? A-t-elle des regrets ?Lorrainealedondebrouillerlespistes.Àl’enterrementdePaul,elleestapparuecommeunemèreravagéeetpourtant,ellevenaitderejetersonfilsenletraitantd’incapableetenluiavouantqu’ellen’était pas samère,mais sa belle-mère. Paul a été trompé toute sa vie,manipulé, il n’a été qu’unsimplepionpourLorraine,lapersonneidéalepourêtresonhommedemain.LemondedePauls’esteffondréetils’estsuicidé.Jen’oublieraijamaissesaveuxquandilm’aenlevée.D’ailleurs,Lorrainenesaitpasqu’Adametmoisommesaucourantdesonsecret,niqu’AdamafaitdesrecherchessurlavraiemèredePaul.Lorraineamentitoutescesannéessurcettefaussematernité.Dansquelbut?Pourl’héritage?Ceshistoiresmedépassent.Etenattendant,ilfautl’affronter,cesoir,chezelle,sursonterrain.

J’enfrissonne.

Nousseronssurnosgardes,Adametmoi.

Etcomme jem’yattendais, la journéepassevite. J’aibeauprendre le temps, ralentir lacadencemêmedecertainsmorceauxdeviolon,discuteravectoutlemondedetoutetderien,l’aiguilleavancetropvitesurlecadrandel’horloge.Etdèsquejepasselaporteduconservatoireetquej’entredansmavoiturepourallermechanger,chezmoi,unepetitevoixcommenceàmesoufflerdansl’oreille:«N’yvapas…»

Siçanetenaitqu’àmoi!MaisjeneveuxpaslaisserAdamyallertoutseul.

L’appartementestvidequand je rentre.Claireestsurunnouveauprojetetelle finit tard.Jedoisdoncchoisirseulematenuepourcettesoirée.Elledoitêtreirréprochable,etilfautquejem’ysentebien.

Cettesoiréememetsuffisammentmalàl’aisepournepasenrajouter!

J’optepourunejupenoire,untopfluideblancetunevestedelamêmecouleur.Jejouelacartedelasobriété, jenepensepasme tromperaveccetensemble.Quelquesbijouxpour rehausserunpeul’ensemble, un maquillage soigné et un chignon pour retenir mes cheveux. Je m’observe dans laglace,jescrutelemoindredétailquipourraitmefairedéfaut.J’accompagneAdam,jedoisêtreàlahauteur.L’angoissemevrilleleventre.

Jedevraispeut-êtremettreunerobe.Est-cequejesuisassezhabillée?C’estundîner,pasungala.Ah,jenesaispas…SiseulementClaireavaitétélà!

À 19 heures tapantes, le chauffeur d’Adam sonne à l’interphone. Je n’ai plus le temps de mechanger,jedoisyallercommeça.Jechaussemesescarpins,ceuxaveclesquelsjenemarcheraispasdeskilomètres,maisquiontleméritedemegrandiretd’allongerunpeumasilhouette.

EtsiAdamn’aimepas?

Et toujours cette petite voix…Ce dîner est-il vraiment une bonne idée ?Et la voyante, elle quiparlaitdemenaces?Moncœurbatàtoutrompre,mesjambesflageolent,magorgeseserre.Jemesensdéfaillir.

Sijefaisunmalaise,j’auraiunebonneexcusepournepasyaller…

MaisAdamm’attenddevantsavoiture.Sonsourirecrispénem’aidepasàmesentirmieux.

–Tuvasàunentretien?medemande-t-ilenm’embrassantdélicatement.–Çaneteplaîtpas?Cen’estpasassez?Jelesavais!Jeremontemechangeret…–Hé,doucementmonange,jetetaquine.Tuestrèsbien,c’estparfait.

JelanceàAdamunregardnoir.

Matenuen’estvraimentpaslemeilleursujetdeplaisanterie!

Adams’aperçoitdemanervositéetcomprendquel’humourn’estpasàmaportéepourlemoment.

–Monange,jetetrouveparfaite,ajoute-t-il.Tutesensprête?–Pasvraiment…,bougonné-jed’unevoixfaible.

Adamm’attirecontrelui.Jemeblottisdanssesbrasetrespiresonodeur,sonparfumquiatantdepouvoirsurmoi.J’inspireprofondément,j’arrivemêmeàmedétendre.Jesaisoùmeréfugiersilasoiréesepassemal…Adamm’apparaîtencoreunefoiscommeunroc,jesaisqu’ilestlàpourmeprotégersijamaisleschosesdevaientmaltourner.Qu’ilsuffirad’unregardpourquejetrouvesonsoutien.Jen’aipaspeuràsescôtés.Ilmerassure.

Hautlescœurs!Peut-êtrequecettesoiréepasseravite?

Dans la voiture, j’observeAdam. Il porte un costume sombre lui aussi, très sobre. Si je donne

l’impressiondepasserun entretien, lui semble se rendre àundînerd’affaires.Adamn’apas l’airtendu,cequejeluienvie.Maissaminesérieuseetsonvisagefermérévèlentqu’iln’envisagepascedînercommeunepartiedeplaisir.Ilmetientlamain,mecaressedoucementdupouce.Quandilposesesyeux surmoi,unedoucechaleurm’enveloppe.Pourmoi, etuniquementpourmoi, son regards’allumeetsonvisages’illumine.Ilsaitexactementcommentmerassurer.

–Tuappréhendes,monange?m’interroge-t-ildoucement.–Unpeu…–Net’inquiètepas.Lorrainen’oseraaucuneréflexionàtonégardenmaprésence.Etmêmesielle

ose,jesaiscommentluirépondre.Jenetequittepasdetoutelasoirée,ilnet’arriverarien.

Jepresse lamaind’Adamunpeuplus fort. J’aiconfianceen luiet sesparolesontunvraieffetbénéfiquesurmoi.Adamestàmescôtésetjen’airienàmereprocherdetoutefaçon.Jen’aimepasl’idéequeLorrainepuissem’effrayer.Jen’aipasenviedeluidonnercepouvoirsurmoi!

– Je suis curieux de savoir ce que nous veut Lorraine, continue Adam en se tournant vers lafenêtre.Qu’est-cequipeutbiensecacherderrièrecetteexcusedudînerfamilial?

–Ambroseaditqu’ellevoulaitteretrouver…–Peut-être,mêmesijen’ycroispasvraiment.Restonssurnosgardes.Aucunmotentoutcassur

Paul,nisurmesparents.Sic’estcequ’elleveutsavoir,laissons-lavenir.

J’acquiesce. Ilnous fautpeude tempspourarriverà lamaisondeLorraine.Nousdépassonsunimmenseportaildeferforgé,remontonsunegrandeallée.Quelqueslampadaireséclairentdéjàcequisemble être un parc immense, malgré le soleil encore rougeoyant. La pelouse est impeccable,parfaitemententretenue.Quelquesbuissonsdebuisparsèmentlelitdeverdure.Adammetendlamainpour sortir de lavoiture.Àpeine ai-jeposé lepied au solquemes escarpins s’enfoncentdans lesgraviersdel’allée.Lamaisonestmagnifique,majestueuse.Lorrainevitdansunhôtelparticulier.Desalléespartentderrièrelamaison,jesuiscurieusedevoirlejardinderrière,maisl’heuren’estpasàlavisite.Jesuisdéjàbienassezimpressionnéeparlecôtécossudecettedemeure.C’estsansdoutel’unedesplusbellesmaisonsdeSanFrancisco.Jefaisquelquespasaubrasd’Adam,quim’entraîneversleperron où nous attend unmajordome. J’entends les pneus d’une voiture,me retourne et reconnaiscelledemesgardesducorps.J’interrogeAdamduregard.

«Simpleprécaution»,murmure-t-il.

Arrivéeauxmarchesduperron,jesuissoulagée.Jenerisqueplusdemetordrelachevilledanslesgraviers.Monpassefaitplusassuré.J’inspireungrandcoupavantdepasserlaported’entrée.Lehalldelamaisonestaussimajestueuxquel’extérieur.Unimposantlustredecristalestsuspenduauplafond,desgrandsmiroirsoccupentlamajoritédesmurs.Lemarbreestomniprésent,ausol,dansl’escalier qui s’ouvre vers l’étage et sur les colonnes.Malgré l’espace, je me sens oppressée. Ladécorationestchargée,Lorrainesembleaimerlesnaturesmortes,lesportraitsetlesmeublesanciens.

Adamm’entraîne,enhabituédeslieux,versunsalon.Lelieuestunpeuplusclair,maistoujoursaussichargé.J’ai l’impressiond’entrerdansunmusée. Ici,uneporcelaine, làun tableaudemaître,des fauteuils aux tissus fleuris de style LouisXV, des consoles aux dorures brillantes, encore desmiroirs,deschandeliers,dumarbre…J’aipeurdebougeretdecasserquelquechose!Assisedans

l’undesfauteuils, j’aperçoisLorraine.Jeravaleaussitôtmacuriositédes lieux.Toutmoncorpssetend.Lorrainen’estpasseule.AmbroseCarterestlàaussi,jel’aperçoisdedosetreconnaisaussitôtsasilhouetteetsacalvitie.

«Adam,jenet’aipasentenduarriver»,s’exclameLorraineentendantunemaindanssadirection.

Elle ne compte visiblement pas se lever de son fauteuil, c’est à nous de la rejoindre.Adammeserre une derrière fois la main avant de la lâcher et salue sa tante. Ambrose se lève et les deuxhommeséchangentunepoignéefranche.Lorrainemedétaillemaism’offreunsourireavenantquandjem’approchepourlasalueràmontour.

Cesouriredonnerait-illetondelasoirée?

Ambroseest,commeàsonhabitude,trèsdistant.Courtois,maisdistant.

Jen’avaispasenvisagélaprésenced’autrespersonnes,tropoccupéeàpenseràLorraine.Ambroseestunprochedelafamille,associédansl’industriepharmaceutiquedesHill.Nousnousinstallonsànotre tourdansun canapéet j’entendsAdaméchangerquelquesbanalités avec sa tante. J’essaiederemettredel’ordredansmespensées,d’oublierunpeuleslieuxetdemeconcentrersurcequ’ilsepasse.Maisunrirehautperchéattiremonattention.Ilprovientdelaterrassedonnantsurl’arrièredelamaison.Laporte-fenêtre,grandeouverte,mepermetd’observeràloisircejardinquiattiraittantmacuriositéilyaquelquesinstants.

Nemeditespasque…

Etlerirereprend.

Oh!non…

JemeretourneversAdametsurprendsonregardfixéluiaussisurl’extérieur.Lorraineaperçoitnotresurpriseetcroitbondepréciser,aucasoùnousnel’aurionspasreconnue:

«Emyest là.C’était une amie très prochedePaul,Adam.Elle vient régulièrementmevoir, onévoquenossouvenirset…»

LavoixdeLorrainesebrise.Je la regarde,étonnée,et lavoisse tamponner lesyeux.Jeprendsimmédiatement lamesure du tour que prend cette soirée : Lorraine nous sert son côté «mère endeuil ». La comédie est donc de mise, le sourire accueillant n’était qu’une mise en bouche. Jem’imaginemoiaussijouerlacomédie,luiprendrelamain,lapresseravecsollicitudeetluisortirun«Jecomprends»pleindecomplaisance.Maisjem’abstiens.

Résumons:AmbroseetEmysontdelapartie.Noussommesdeuxcontretrois.

J’attrape à la volée une coupe de champagne que vient nous proposer une discrète serveuse etattendsavantdelaporteràmeslèvres.

Mêmesiunefurieuseenviedelaboired’untraitmetitille.

«Vous êtes déjà là ! s’exclameune voix à la porte-fenêtre. J'ai cru que je n'arriverais jamais àraccrocher!Adam,Éléa,quelplaisirdevousvoirici!»

Àpeineai-jeletempsdemeleverqu’Emymeposedeuxbisesbruyantessurlesjoues.

«Toujoursaussisexy,Adam»,ajoute-elleens’agrippantàsacravate.

ElleattrapeàsontourunecoupedechampagneavantdeselaissertomberdansunfauteuilàdroitedeLorraine.Çayest,nousysommes,lasoiréecommence.Jeréprimeunsoupirdelassitude.

Maisqu’est-cequejefaislà?!

J’aimeraiséchangerneserait-cequ’unregardavecAdam,poursavoircequ’ilpensede toutça,mais jeme sens observée, détaillée, parEmy en face demoi.Elle affiche unemine épanouie. Seslongscheveuxblondstombentnonchalammentsursesépaules.Jedoisbienavouerqu’Emyestunebellefemme,etlarobenoirequ’elleportemetparticulièrementenvaleursasilhouettedemannequin.Physiquement,jenefaispaslepoids…

«Bon,maintenantquetoutlemondeestlà,levonsnosverresàlamémoiredePaul»,intervientLorraine,quelquestrémolosdanslavoix.

Sagement,nousémettonstousenchœurun«ÀPaul».Quidansl’assembléeestvraimentsincèreenpensantàPaul?Jerongemonfrein,cettecomédiem’exaspère…

–Je suis ravieque tu aies acceptémon invitationAdam,continueLorraine.Nousnous sommesperdusdevueces temps-ci.C’estdommage,noussommes l’unet l’autre la seule famillequinousreste.

–Tusaisquelesaffairesmeprennentbeaucoupdetemps,matante,répondAdamens’installantconfortablementdanslecanapé,visiblementàl’aise.

–Iln’yapasquelesaffairesquiteprennentdutemps,interromptEmydesavoixhautperchéeenmedésignantdudoigt.

Jesouris,derrièremacoupe.

Jenepeuxvraimentpaslasentir,celle-là!

«C’estvrai,continueAdam.Éléacomptebeaucoupdansmavie.»

JetournelatêteversAdam,nosregardssecroisent.Ilaprislepartidejouerlejeudelacomédieluiaussi,desemontreravenantetchaleureux.Ilfautquejemedétende.Pourluimontrerqueje lesuissurceterrain,jeluioffreunpetitrirecristallin.

Àmoilerôledelaparfaitepetitecompagne!

–Éléa,commentsepassevotrevieauPhilharmonique?Jen’entendsquedebonséchossurvotretravail,meféliciteLorrainesuruntonmielleux.

–Merci, madame Hill. Je suis consciente de la chance que j’ai de faire partie de cette grande

institution,réponds-jeenjouée,unsourireplaquésurlevisage.–Jeprévoisd’assisteràl’undevosprochainsconcerts,j’aihâtedevousentendrejouer.–Jesuisflattée,madameHill.

Jepousselevicederougirunpeu.

Jecroisquejem’ensorsplutôtpasmal…

Les banalités continuent, la discussion est doucement animée. Seul Ambrose se montre plussilencieux.Onnepeutpasluireprocherdenepasentrerdanscettevastehypocrisie.Jesensparfoissonregardfroidsurmoi.Maisilfuitmonregardquandjel’observeàmontour.Cethommememetmalàl’aise.

QuandLorraineselèveenfinpours’enquérirdudîner,jesouffleintérieurement.C’estcemomentque choisit Ambrose pour parler affaires avec Adam et l’entraîner un peu à l’écart. Je seraisparanoïaque, jemediraisqueLorraineetAmbroseont faitexprèsdemelaisseren têteà têteavecEmy.Adammelanceunregardoùjepeuxylireunsoupçond’inquiétude.Luiquinevoulaitpasmelaisserseule…Jelerassured’undiscrethochementdetête.QuantàEmy,elleterminesatroisièmecoupeenmefixant.Jechoisisdel’ignoreretmelèveàmontour.Jelaissemacuriositéreprendreledessusetmedirigeverslaterrasseextérieure.Espérerqu’Emynemesuivepasestunedouceutopie.Jel’entendsdéjàrespirerderrièremoi,unecoupepleineàlamain.

–C’estmagnifiquenon?medemande-t-elleenfixantlejardin.–Très,avoué-je.

Le parc est immense, fleuri avec soin. Les allées se rejoignent, permettant au promeneur dedécouvrirlemoindrerecoindecettevégétationcontrôléeavecsoinparlamaindel’homme.Lanuitesttombéemaistoutestéclairé.

« J’adore cet endroit ! Adam et moi avons beaucoup batifolé ici », dit-elle sur le ton de laconfidence.

Biensûr.Jen’ycroispasuneseconde.Bientôtellevamedirequ’ilsontcouchéensembledanslesparterresdefleurs…

Adamm’aavouéqu’ilsn’avaientjamaisfaitl’amouretjelecroissurparole.

«Enfin,jenedispasçapourterendrejalouse,c’estdel’histoireancienne.Maisj’aimebienmerappelercessouvenirs…çamefaitencoredeschoses,situvoiscequejeveuxdire»,ajouteEmyenmepoussantducoude.

Je hoche la tête en souriant. Emy prend ça comme un signe d’encouragement et à mon granddésespoir,ellecontinuedeparler.

–Paulaimaitmoinslanature.Adametluiétaientsidifférents…PauvrePaul,mourirsijeune,c’estaffreux.

–C’esttriste,eneffet.

–Sij’avaissuqu’ilavaitdestendancessuicidaires,jenel’auraispaslâchéd’unesemelle.Jen’airienvuvenir,ilavaitl’aird’allerbien,jenecomprendspascequiluiapris.

Àmescôtés,j’entendsEmyrenifler.S’ilsétaientvraimentamis,jepeuxcomprendresadétresse.SijeperdaisClairemoiaussi,ceseraitterrible.Jebaissemalgrémoimagarde.

–C’estdifficileparfoisdeserendrecompteàquelpointnosprochesvontmal.Ilsontledonpourcacherleurmal-être…Comments’envouloir?dis-je,sincèrementcompatissante.

–Paul était trèsmystérieux, souffleEmy.Tues ladernièrepersonneà l’avoirvuvivant, tu l’astrouvécomment?

Commentsait-elle?

–Ahbon?demandé-je,faussementétonnée.–Oui,ilestvenuauPhilharmoniquecejour-là.Vousvousêtesparlé?

Quelquechosem’alerte.LadiscussionvientdeprendreuneautretournureetEmyaeuvitefaitdesécherseslarmes.

Alorsc’estça?IlsveulentsavoircequePaulapumedire?C’estça,lebutdecedîner?

Jeresteévasive.Horsdequestiond’avouercequejesais.

–Jel’aicroisé,oui.Ilavaitl’airnormal,jecrois.Jenemesouviensplus,avancé-je.–Ilnet’arienditdeparticulier?Ilnet’apasemmenéeailleurs?insisteEmy.

Est-cequ’ellesaitquePaulm’aenlevée?

–Ilvoulaitm’emmenerquelquepart?demandé-jeàmontour.–Jenesaispas…ilauraitpuvouloirtedirequelquechoseàl’abridesoreillesindiscrètes,hésite

Emy.

Je fais mine de chercher dans mes souvenirs. Je sens Emy à l’affût. Lorraine doit l’avoirmissionnéepourchercheràsavoircequePaulapumedire.

Commesij’allaistoutavoueràEmy…C’estmeprendrepouruneidiote!

–Jen’étaispaslaconfidentedePaul, tudois lesavoir.Cen’estpasàmoiqu’ilauraitconfiéunsecret,dis-je,faussementsérieuse.

–C’estvrai,avoueEmy.Maisilavaitunpetitfaiblepourtoi,çaauraitpulepousseràteparler.

Unpetitfaible…J’entendsencorePaulmedirequ’ilmerendraitplusheureusequ’Adam.Paulnemevoulaitqueparjalousievis-à-visd’Adam.Çaaussi,ilmel’aavouémaisjenevaissûrementpasl’apprendreàEmy!

«Tucroisqu’il avait un secret ?C’estpour çaqu’il se serait tué ?TuasdemandéàAdam?»l’interrogé-jeinnocemment.

JesensEmyperdue,priseàsonproprepiègesouslefeudesquestions.Jeperçoissonhésitation:est-cequ’elledoitcontinueràmequestionneroulaissertomber?Jedécidedel’aiderunpeu.

«Enfaitsi,Paulm’aparlécejour-là…»

Leregardd’Emys’agrandit.Elleattendlasuite.

«Ilm’aavouéqu’iln’aimaitpaslamusiqueetquesaprésenceauPhilharmoniqueétaitjusteuneexcusepourmevoir»,dis-jed’unetraite,surletondusecret.

Emymeregarde,lesyeuxvides.Est-cequ’ellemecroit?

–C’esttoutcequ’ilt’adit?–Oui.Ilestpartitrèsviteaprèsça,conclus-je.

JenesaispassiEmyvientdegobermonmensonge.Elleneditplusrien.Jeprofitedesonsilencepourmettreun termeàce tête-à-tête,prétextantque ledînerdoitnousattendre.En rentrantdans lesalon,j’aperçoisLorraineenpleinediscussionavecAmbroseetAdam.Jelesrejoins.

« Votre propriété est magnifique, madame Hill », souligné-je, avenante, pour faire plaisir à lamaîtressedemaison.

Lorraineme remercie d’un signe de tête.Derrièremoi, Emy fait son entrée. Et alors qu’Adamm’entraînevers lasalledudîner, j’aperçoisdansunmiroir lerefletdeLorraineetEmyenpleinesmessesbasses.Jesupposetrèsfortementqu’Emyluifaituncompterendudenotrediscussionsurlaterrasse. J’aihâtedepouvoir enparler avecAdammais l’occasionne seprésentepasaucoursdurepas.Ambrosecontinuedem’ignorer,EmydelancerdescommentairespeupertinentsetLorrained’afficherunsourirefaussementbienveillant.Unétrangeràcettescènepourraitsetromperquantàl’ambiancedecettesoirée.Etquand,enfin,laportedelavoitureserefermederrièremoi,àl’abrisurlabanquettearrière,jepeuxenfinrespirerlibrement.

«C’estfini!»soufflé-jeenreposantmatêtecontreledossier.

Adamnemelaisserienajouter.Ilm’attiredoucementcontreluietposeseslèvreschaudessurlesmiennes.Derrièrelesvitresfumées,notrebaiserpasseinaperçu.J’aimecepetitréconfort.Lavoituresemetàrouler,nouséloignantpourdebondecettesoiréesiparticulière.

–Tuasétéparfaite,monange,déclareAdamenmecaressantlajoueduboutdesdoigts.Quellemascarade,cedîner!

–JesaismaintenantpourquoiLorrainevoulaitnousvoir:EmyacherchéàsavoirsiPaulm’avaitditquelquechoseavantdemourir.

–C’étaitdoncça,votrediscussionsurlaterrasse?Lorrainem’aretenualorsquejecherchaisàterejoindre.

–Jelesaivuesdiscuterensuite,elleetEmy.–Lorraines’inquiètedecequenoussavonssurelle,ajouteAdampensif.–Oui,maiselleneserapasplusavancée.Emyn’estpastrèsdouéepourenquêter.

Le téléphoned’Adaminterromptnotrediscussion. Il fronce lessourcilsquand ilvoit lenuméroaffichéàl’écran.

«Allô?…Quoi?…Trèsbien,j’arrivetoutdesuite…Conradestlà?…OK,dansdixminutes.»

Puis,àsonchauffeur:

–Aubureau,vite!–Qu’est-cequ’ilsepasse?luidemandé-je,inquiète.

Adamseretourneversmoi,laminefurieuse.

«Monbureauaétésaccagé.»

3.Querelles

–Tun’aspasunservicedesécuritépouréviterlescambriolages?–Si,etjecomptebienleurdemandercommentilsontpulaisserpasserça!fulmineAdam.

LavoiturerouleàvivealluredanslesruesdeSanFrancisco,jusqu’auxbureauxd’Adam.Àcetteheureavancée, lacirculationestheureusement fluide.Adamest furieux.LedînerchezLorraineestdéjàloinderrièrenous.Devantlehalld’entrée,unagentdelasécuriténousfaitentrer.Adamneluiditrienetsedirigeàgrandesenjambéesjusqu’àl’ascenseur.Avecmesescarpins,jepeineàlesuivre,maisjen’osepasluidemanderdem’attendre.

Adamalesyeuxrivéssurlesétagesquidéfilent.Jeposeunemainsursonépaule,jenesaispasquoifaired’autredevantcettecolère.Ilseretourneversmoietesquisseunpetitsourire.

«Jesuisdésolé,monange.J’aidesdossiersimportantsdansmonbureau,ilfautquejesachecequiaétévolépourpouvoirréagirvite,tucomprends?»

J’acquiesce.Conradnousaccueilledevantlaportedel’ascenseur.

–Qu’est-cequ’ils’estpassé?luidemandetoutdesuiteAdam.–Lasécuritéaaperçusur lescamérasquelqu’unentrerdanslebureaupar labouched’aération.

Onalavidéo,expliqueConradtoutensedirigeantverslebureau.–Conrad,attends,l’arrêteAdam.Commentleservicedesécuritéa-t-ilpulaisserpasserça?Est-ce

qu’ilsn’ontvraimentrienpufaire?–IlsontréagiviteAdam,levoleuraquandmêmeeule tempsd'ouvrir les tiroirs,d’enlever les

tableauxetdesaccagerl'appartement.Maisapriori,iln’arienemportéaveclui.Ontelaissevérifier,onnesaitjamais.

Les deux hommes poursuivent leur chemin dans le couloir, je les suis.Conrad a un peu apaiséAdam. Devant la porte du bureau, cinq hommes discutent entre eux. En voyant arriver Adam, lesvisagesseferment.L’undeuxprendlaparole.

– Monsieur Ritcher, je suis désolé. Nous n’avons pas attrapé ce cambrioleur, nous ne nousattendionspasàcequ'ils'échappeparunebouched’aération.Nousavonslancél’alertedèsquenousavonsaperçusaprésence.

–Vousavezlavidéo?demandeAdamenpassantlaportedesonbureau.

Surleseuil,Adamaunmouvementd’arrêtpuisilentre,suivideConrad.Leservicedesécuritémelaisseentreretj’aperçoisàmontourl’étenduedesdégâts.Lebureaud’Adamestdévasté,lestiroirssont ouverts, despapiers éparpillés.Les tableauxont été déposés au sol, comme si le cambrioleurs’étaitassuréqu’iln’yavaitpasdecoffrederrière.L’hommedelasécurité,lechefdel’équipesansdoute,posesurlefatrasdubureauunPCportablequ’ilouvre.

«Voilàlavidéo,monsieurRitcher»,dit-ilencliquantsurunonglet.

Lacaméradubureaud’Adamestinstalléedanslefauxplafond,cequilarendtrèsdiscrète.Jenesavaispasqu’ilyavaitdescamérasicietjemesouviensdenosébatsdanslecanapé.

Çaétéfilmé?!

Jemefais lapromessede ledemanderàAdam.Jem’approchede lui,curieusedevoiraussicequ’ils’estpassé.Lavidéomontreunepersonne.Hommeoufemme,difficileàdire,lasilhouetteestsombreetporteunecagoule.Onvoitlecambrioleurfouillerdanslebureau,puistrèsvite,lesignald’alarme se met en action. Les gestes du voleur deviennent plus confus, il s’attarde juste sur lestableauxavantderepartirparunebouched’aération,encoregrandeouverte.Lavidéonerévèlepasgrand-chosemaismontrequeleservicedesécuritéestintervenurapidementaprèsl’effraction.

–Levoleurrepartlesmainsvides,visiblementilcherchaitquelquechoseenparticulier.Est-cequetureconnaiscettesilhouetteAdam?intervientConrad.

–Non,répondAdam.

Puiss’adressantàl’équipedesécurité:

–Voussavezsil’hommeestsortidel’immeuble?–Onaessayédelesuivredanslesescaliers,ungarsdel’équipeestpasséparlabouched’aération,

onl’aguettéàtouteslesissuespossibles,répondlechefdelasécurité.–Et?– Iln’estpasdu toutpasséparces issues.Ona retrouvéunebrèchedansunevitre,à l’étagedu

dessousetdumatérield’escalade.Lecambrioleurestdescenduenrappeletafilédèsqu’ilatouchélesol,terminelechefdelasécurité.

AdametConradéchangentunregardsurpris.

–Unprofessionnel,commenceConrad.–Quisavaitexactementcomments’enfuir.Uncoupbienpréparé,ajouteAdam.Bon,jevaismettre

del’ordreicietvérifierquerienn’aétévolé.–MonsieurRitcher,nousavonsvraimentfait lenécessaire,sesentobligéd’ajouterlechefdela

sécurité.– Je veux bien vous croire.Ne vous inquiétez pas, ce cambrioleur devait connaître lamoindre

failledanslasécurité,lerassureAdam.Nousferonslepointavecvousdemain,nousnoussommespeut-êtremontrésnaïfsquantàcegenred’attaque.

–Trèsbien,monsieurRitcher.

L’hommes’enva,suividesonéquipe,visiblementrassuréequantàlaréactiond’Adam.

–Bonehbien,autravail,lanceAdamàConradenmontrantlestasdepapiersquijonchentlesol.Tucroisquec’estunespiondelaconcurrence?

–AucuneidéeAdam,répondConraddansungested’impuissance.S’ilavaitvoléquelquechose,onensauraitplusmaislà…

Adamseredressed’uncoupetmeregarde:

–Àmoinsquecenesoit…Lorrainenousaconviéschezellepourundîner,cesoir,explique-t-ilàConrad.Chosequ’elle n’a jamais fait.Ellem’a éloignédubureaude cette façon.Peut-être qu’ellechercheàdécouvriroùj’ensuisdansmesrecherchessurmesparents…

–C’estunedrôledecoïncidenceeneffet,accordeConrad.–Jefaisbiendetoutconserverenlieusûr.Ilfaudrarefairepasseruneéquipepourvérifiers’iln’y

apasdemicroicietsinosbrouilleurssonttoujoursperformants.

Conradse lancedans le rangementet jem’apprêteàm’attelerà la tâchemoiaussiquandAdamsuspendmongeste.

–Mon ange, ce n’est pas à toi de faire ça. On va en avoir pour la nuit à tout ranger, classer,vérifier…Rentrecheztoi,lesgardesducorpsteramèneront,medit-ild’unevoixdouceenm’attirantàlui.

–Tuessûrquetun’aspasbesoindemoi?–Tuasbienméritédetereposeraprèscettesoirée.

Nousaurionsmérité tous lesdeuxdenousretrouveraucalme,en têteà tête,après la tensiondecette soirée. Je soupire, la têteposéecontre sapoitrine.Adamm’enlace,meserreunpeuplus fortcontrelui.Jepourraispassermasoiréeicimaisjecomprendsquejenesuisd'aucuneutilité.

Cespapiersdoiventêtreducharabiapourmoi!

Jem’éloigneàcontrecœur.Aprèsundernierbaiser, jemedirigevers lasortie, laissantAdamàsonactiviténocturne.Jel’observesurlepasdelaporte.Ilvientd’ôtersaveste,dedéfairesacravateetdelalancersurledossierdesonfauteuil.Adamsurprendmonregard,mesouritendéfaisantlespremiers boutonsde sa chemise. Je l’admire nonpas uniquement parcequ’il estmagnifique,maispourtoutcequ’ilest.Ilgèrecettenouvellecriseavecbeaucoupdeforce.Jeluisouffleunbaiserdeloinetrentrechezmoi.

Jerefermelaportedel’appartement,discrètement.JenesaispassiClaireestrentrée,etpeut-êtredort-elle.Jetiensàlamainmesescarpinsquej’aienlevésdèslehalldel’immeuble.Mespiedsmeremercientencoredecettedélivrance.Danslesalon,ilyadelalumière.Claireestpenchéesursonordinateur,concentrée.

«Éléa,tevoilà»,dit-elleavantdefondreenlarmes.

Ellemetombedanslesbras.

Jecroisquej’aidroitmoiaussiàmacriseàgérercesoir!

«Qu’est-cequ’ilsepasse,Claire?Pourquoipleures-tu?Laisse-moiposermesaffaires,etvienst’asseoir.»

J’entraîneClairedanslecanapé.Elles’essuielesyeux.J’airarementvumacolocataireenlarmes,lavoirdanscetétatmeremueaussiunpeu.

–C’estRyan,souffle-t-elleavantderepartirdansunnouveausanglot.Ons’estdisputés.–Ausujetdequoi?– Ryan trouve que je travaille beaucoup trop ces derniers jours. C’est vrai, je ne suis pas très

présente,mais j’aiunnouveauprojet, tusaiscommentçasepasse…Jemesuis toujoursdonnéeàfondpourmonboulot,tumeconnais.Iltrouvequejeledélaisse!

–Oh!c’estpourça?!

Riendebiendramatique!

Je sais queClaire s’investit toujours à fond, au point de perdre de vue l’essentiel,mais elle estcommeça.

–Ryanvas’habituer.Ilnet’ajamaisvuebosser,c’estunepremièrepourlui,laisse-luiletempsdes’adapteretdeserendrecomptequecen’estpassigrave,rassuré-jeClaire.Tuveuxquejel’appelledemain?

–Jesuisdésoléedetemêleràça.Tuasraison,c’estunepremièrepournousdeux,ilfautqu’ontrouvenosmarques,renifleClaire.

–Bon,jeluipasseuncoupdefildemain.Tutravaillessurquoi?–Untrucvraimentintéressant,s’enthousiasmesoudainClaire,seslarmestoutjustesèchessurses

joues.LemairedeSanFrancisconousachargésde lancerunmuséepourenfants, il trouveque lavilleestunpeupauvrepourlajeunesse.Monchefm’adonnéledossier,c’estuntravaildefou,maishyperstimulant.

Çayest,lamachineestlancée…

« J’ai trouvé un super lieu pour le musée, une ancienne caserne de pompiers désaffectée.Réhabilitée,ellevaêtresuper.Demain,jerencontreunarchitecte,unmecspécialisédansl’universdelapetiteenfance,ilprévoitderéaliseruntrucpoétique.Çaseprésentehyperbien,j’ailefeuvertsurtout, je me sens pousser des ailes ! Tiens, tu fais quoi demain matin ? J’ai rendez-vous avecl’architecteà10heuresàlacaserne,viens,tumeconseilleras!Tuconnaisbienlesenfantstoi!»

Moi?Connaîtrelesenfants?Jen’aiaucunenfantdansmonentourage…

Clairesembleliredansmespensées.

– Enfin, tu es une artiste, tu as la sensibilité pour ça, ajoute-t-elle. Allez viens, ça me feraitvraimentplaisirdetemontrer!

–OK,jeviens,maisjenem’attardepas,jedoisêtreauconservatoirepour13heuresauplustard,accepté-je.

Impossiblede lutterde toute façondevantClaire.Ellem’auraitharcelédemainmatin jusqu’àcequej’accepte.Clairelanceuncridejoie,leslarmessontloin.

Ryansortavecunepassionnée,ildevraits’enréjouir.

JelaisseClaireàsonordinateuretrejoinsmachambre.Cen’estqu’unefoisallongéedansmonlitquejelaisselesmusclesdemoncorpssedétendrelesunsaprèslesautres.

Je dors comme un bébé etme réveille reposée. Le sommeil a été réparateur. Après la journéed’hier, j’ai envie que celle-ci soit joyeuse. Avant de poser le pied au sol, j’appelle Adam, pourprendredesnouvelles.S’ildortencore,jeluilaisseraiunmessage.Maisilrépond,dèsladeuxièmesonnerie.Savoixchaudem’emplitdebien-être,jesensqu’ilsouritàl’autreboutdufil.

–Monange,tuasbiendormi?s’enquiert-il.–Commeunbébé.Ettoi?Vousavezputoutranger?Rienn’aétévolé?–Riendutout.Lecambrioleurn’apaseuletempsouiln’apastrouvécequ’ilcherchait.–Tuaspudormirunpeu?–Trèspeu,tuasoccupétoutesmespensées…Toidanstajupe,hier,surtesescarpins…–Adam!–Onsevoitcesoir?Notresoiréed’hieraungoûtd’inachevé.–Oui,jetrouveaussi,dis-jeensentantmonterunevaguedechaleuraucreuxdemesreins.–Alorsàcesoir,monange.

Jeraccroche,lesjouesenfeu.Majournéecommenceplutôtbien.

Commepromislaveille, jesuisClaireàsonrendez-vousmatinaldanscettefameusecasernedepompiers. En l’état, difficile d’imaginer que le lieu puisse accueillir un musée. Ouvert au vent,l’endroitasouffertdutempsetestàl’abandon.MaisClairearaison,lesiteestintéressant,ilestbiensituéetasûrement«dupotentiel»,commeondit.

L’architecte est déjà là, un jeune hommeblond, sportif, et visiblement à la pointe des dernièrestechnologies.IldessinetoutcequiluipasseparlatêteetnotelesremarquesdeClairesurunetablette.Jemecontentedesuivreetdehocher la têtede tempsen temps.Claireet luisontà fonddans leurprojet,l’échangeentrelesdeuxestvivant,complice.Jen’aimepaslafaçondontl’architecteposesamaindansledosdemonamie,nicommentillaregarde.Claireestentraindesefaireouvertementdraguersousmesyeux.Sontéléphonen’arrêtepasdesonner.Quandelleaperçoitlenumérodesonsupérieur,elles’excuseets’isolepourprendreladiscussion.

–C’estvotreamie?medemandeaussitôtl’architectequinelalâchepasdesyeux.–Oui.

Etd’ailleurssitupouvaisarrêterdelamaterdevantmoi…

–J’adorevotreamie,elleestpétillante, j’aimeçachezunefemme,commente-t-il.Voussavezsiellecélibataire?

–Non,ellesortavecmonfrère.Etc’estsérieux,ajouté-je.

L’architecte me regarde, surpris. J’ai croisé les bras, il ne me manque plus qu’un rouleau àpâtisseriepourfinirdel’impressionner.

Lemessageestclair?

L’architecteplongedanssatablette,l’airconcentré.Jenelequittepasd’unesemellelerestantdelavisite.Samainsefaitnettementmoinsbaladeuse.

–Jen’aimepascemec,lancé-jeàClaireunefoislavoituredel’architectepartie.–Pourquoi?medemande-t-elle,surprise.–Iln’apasarrêtédetecoller,detetoucher,detedraguerdetoutelamatinée.Tusaisqu’ilm’a

demandésituétaiscélibataire?–Oui,ilestunpeulourd,j’avoue,maistrèspro.Cequ’ilprévoitdefaireestjusteexceptionnel.Et

cen’estpasdésagréabledesefairedraguer…–Héoh!tusorsavecmonfrère!–Oh!Éléa,alorsjenepeuxplusteparlerd’autresmecs?Tumefaisunecrisedejalousie?–C’estpasça,mais…jen’aimepascemec,c’esttout.–T’inquiète,jenetomberaipasdanssesbras.Maisjenevaispaslevexernonplus,ilm’esttrop

précieux.Alors,tuenpensesquoi,detoutça?finit-elleparmedemanderenmedésignantlacaserne.–C’estpasmal,ettuasl’airbienpartie,approuvé-je.– J’espère aussi.Bon, il faut que je file aubureau.Dis, tu as euRyan ? Il ne répondpas àmes

messagescematin,s’attristeClaire.–Jel’appelleauconservatoire,avantlesrépétitions,promis.Net’inquiètepas,ilvat’appeler.

Clairemeserredanssesbrasavantderejoindresavoiture.

Jen’aimepascerôledetamponentrelesdeux.

Arrivéeauconservatoire,jem’isolepourappelermonfrère.

–Jem’attendaisàcequetum’appelles,ditmonfrèred’unevoixmorneendécrochant.–Quelaccueil!Commenttuvas?–Clairet’aparlé?

OK,allonsdroitaubut…

–Oui,jel’airetrouvéeenlarmeshiersoir.–Ons’estunpeudisputés,avoue-t-il.–TusaisRyan,Claireestunebosseuse,cen’estpaspourautantqu’ellet’oublie.–Elleaannulétousnosderniersrendez-vousetquandonsevoit,elleestpendueautéléphone.–Ellebossesurungrosprojet,çaval’accapareruntemps,etpuistoutredeviendracalme.C’est

commeçaqueçasepasse.–J’aidumalàlasuivrequandelleestcommeça.Onafaitunesoiréerécemment,elleparlaità

toutlemonde,toutlemondelaconnaissait.J’étaislààtraînerderrièreelle.Jenesavaispasquoifairenioùmemettre.

–Écoute, appelle-la, elle n’attendque ça.Elle a besoin que tu la soutiennes,même si elle ne lemontrepas.Pasquetubougonnesdanstoncoin,OK?

–Ouais,OK…–Tul’appelles?–Oui,OK,onvadiscuter.–Bien.EtRyan!Commencepardiscuteraulieudebouder!Jenevaispasfaireletamponentre

vousàchaquedispute,OK?C’estdinguecommeturessemblesàpapadanscesmoments-là…–Oh!çava,bougonnegentimentRyan.–Allez,jefile!Àplus!

Missionaccomplie.

Monfrèreesttêtu,maisilsaitquandildoitarrêterdel’être.C’estàeuxderéglerçamaintenant!

J’entre dans le hall du conservatoire où visiblement M. Glen m’attend. Il se précipite à marencontreetnemelaissemêmepasletempsdeluidirebonjour.

«MademoiselleHaydensen!Jevousattendais!VousêtesattendueàLasVegascesoir!»

LasVegas?Attendue?Pardon?

Devantmonairsurpris,lesecrétaireduPhilharmoniqueajoute.

«OslavKievskyaimerait quevous jouiez avec lui ce soir sur scène àLasVegas.Onvient toutjusted’avoir laconfirmation, c’estpourçaque jevouspréviensaussi tard.VouspartezavecMax,votreaviondécolledansdeuxheures.»

Oslav…Lecélèbreviolonistesemontretoujoursaussispontanédanssesdésirs.

Maiscommentrefuserunnouveauduoaveclui?Lesderniersontétémagiques…

–D’accord,monsieurGlen.Jefilepréparerunsacetjeparspourl’aéroport.–Trèsbien,trèsbien.Tenez-moiaucourantdèsvotrearrivée.Maxalesbilletsd’avion.Allez,ne

soyezpasenretard.

Àpeinelaporteduconservatoirefranchiequejelarepassedenouveau,poursortircettefois.JeparspourLasVegasetçaal’airtoutàfaitnormal.Jecroisquejeneréalisepastoutàfait…Surlaroutemeramenantchezmoi,j’appelleAdam.Ilnedécrochepas.Jemesouviensqu’ilavaitprévudediscuteravecsonservicedesécurité,çadoitluiprendredutemps.Jeluilaisseunrapidemessage,luiexpliquantquejemerendsàLasVegas,àlademanded’Oslav.

Jeprépareunevalise rapidement,prévoisune tenuede soirée. Jene saismêmepascombiendetempsjerestesurplace!Dansledoute,j’optepouruneseconderobehabillée.Jen’aipasletempsd’optimisermavaliseetjeprendsunpeudetout.

Heureusementqu’elleroule!

Je retrouve Max à l’enregistrement des bagages. Mon répétiteur et désormais très bon amim’avoueavoirétéprisdecourtluiaussi.Cevoyageimprovisénel’arrangepas,maisilsaitluiaussiqu’on ne refuse pas une invitation d’Oslav Kievsky. Il me rassure quant à la durée du voyage, ilpossèdenosbilletsderetour,prévupourdemain.

Levolestrapide,ilnousfautmoinsdedeuxheurespourarriverdanslacapitaledesmachinesàsous,descasinosetdesnéonsmulticolores.Unevoiturevientnouschercheretl’angoissemegagne.

Est-ce que je vais avoir assez de temps pour répéter ? Parce que je neme sens pas du tout demontersurscènesansm’êtreéchaufféeavant!

JeconfiemoninquiétudeàMax.Ilregardesamontreetgrimace.

Voilàquin’estpaspourmerassurer!

Oslavnousaccueillelui-mêmedanslehallduCaesarsPalace,aupiedd’unegigantesquefontainesurmontéede statuesgrecques.Le lieu estprestigieux,mais jen’aipas le tempsd’être éblouie.Leconcertd’Oslavestprévuà21heures.Nousregardonsnosmontres:ilest18heures.

Toutvabien.

Oslavme rassure avec son éternel calme.Nos valises, àMax etmoi, sont emportées dans noschambres.Leviolonistenousentraîneverslasalledespectacle,unlieumythique.

Je joueàLasVegas,dans lamagnifiquesalledespectacleduCaesarsPalace, dans troisheures,sansavoirencorerépété.Non,vraiment,toutvabien!

«ToutvabienÉléa,me rassureOslav. Jene t’ai pas fait venir pour temettre endifficulté. J’aienviedejoueravectoilesmorceauxenregistréssurl’album.Tulesconnaisbien,tunedevraispasavoirdemalàt’ensouvenir.»

Max acquiesce, je ne suis pas aussi confiante. Je manque d’expérience pour appréhender cemanquederépétitionavecsérénité.

–Çafaitunpeucapricedestardevousavoirfaitvenircommeça,non?ajouteOslavenriant.–Unpeu,avoué-je.

Lacomplicitéquej’entretiensavecOslavmepermetcettefamiliarité.

–Jem’enrendscompte.Mais jenerevienspasàSanFranciscoavantquelquetemps.LasVegasétait la seuleoccasiondenous revoiravant…jene saispasquandd’ailleurs, ajouteOslavcommepours’excuserdece«caprice».

–JesuistoujoursaussiraviedejoueravecvousOslav,jenepeuxrienvousrefuser.

Le temps est trop court pour le passer à discuter.Sur scène, nousnousmettons tout de suite autravail, parmi les techniciens, occupés à parfaire leurs réglages. Oslav a raison, j’ai tellementtravaillé lesmorceaux de l’album quemes doigts s’en souviennent bien.Mon stradivarius sembleretrouverlesbonnesvibrations.

Jepeuxdoncmefaireconfiancealors…

Uneheureavantlespectacle,Oslavetmoiallonsnousrafraîchiretnousmettreentenue.Maxenprofitepourmesuivredansmasuiteetmedonnerseséternelsconseils.Jenepouvaispasavoirdemeilleuraccompagnateurpourcevoyage!

Lasalleestpleine.Àdeuxminutesdel’entréeenscène,letracmevrilleleventre.Oslavneperdpassonéternelsourire.Ilentrelepremier,jenelerejoinsqueplustard.Letempsdem’imprégnerdesamusiqueencoulisse,dem’immergerdanssonunivers,demelaisserbercerparsesnotesquedéjà

j’entendsprononcermonnom.

C’estmontour.

Faceàface,dans lehalodedeuxprojecteurs,nouséchangeonsunregard.Pasbesoinderépéterdesheurespourretrouvercettefluiditéquicouleentrenous.Notreduoestavanttoutunplaisirpournous,mêmesinouslepartageonsaveclepublic.

Monhalodelumières’éteintàladernièrenote,commeconvenuaveclemetteurenscène.Oslavmemurmureun«merci»avantque jequitte l’espacequi luiestdenouveauentièrementdédié. Jerejoinslescoulissessurunnuage,lamagieaencoreopéré.JenetrouvepasMax,enrevanche.

Peut-êtrem’attend-ildansmaloge?

Jepousseuncrienentrant.Cen’estpasMaxquim’attendmais…Adam!

–Qu’est-cequetufaislà?demandé-jeaussitôt.–Tunetesouvienspas?Onavaitprévudepasserlasoiréeensemblemonange,merépondAdam,

sourireauxlèvres.–MaisMax…etOslav?–Maxsaitqu’ilnedoitpast’attendre.D’ailleurs,Alanestlàluiaussi.–Alanestici?– Oui, j’ai pensé qu’il aimerait passer la soirée avecMax, lui aussi, ajoute Adam, faussement

désinvolte.–Tues…–…parfait?

J’embrasseAdam.Notrebaiserestélectrique,unfrissonmeparcourtledos.Levoiricicesoirnepouvaitpasmefaireplusplaisir.Etmedirequ’ilafaitprofiterAlan,lemarideMax,desavenue,lerendencoreplusattirant.

–MaisOslav?m’inquiété-je.–Oslav ades invitationspour ce soir, ne t’en fais paspour lui.Tudevrais le recroiser demain

avantdepartir.–Alors,nousavonsnotresoirée,soufflé-jetoutprèsdeseslèvres.–Ànous, dans un palace deLasVegas,mon ange, ajouteAdam, le regard alluméd’un nouvel

éclat.

Jerassemblemesquelquesaffairesetrangemonstradivariusdanssonécrin.J’entraîneAdamversmasuiteduCaesarsPalaceetmonamantn’émetaucuneobjection.

Aumomentd’appuyersurleboutondansl’ascenseur,Adamretientmamain.

«J’ailouéuneautresuite…»

NousnousenvolonsverslessommetsduCaesarsPalace.Noussommesseulsdanscetascenseur,certainement surveillé par une ou deux caméras. Mon cœur s’accélère, imaginant ce que nous

pourrionsfaire,ici,entrecesquatreparois.Adams’approchedemoi,jesaisqu’ilaassezderetenuepournepasmemettredansunesituationembarrassante.Maisils’approcheassezdemoipourquejepuissesentirsonparfumetlachaleurdesoncorps.Nousnenoustouchonspas,maislatensionentrenousestpalpable.Jecroiselesdoigtspourquepersonnen’arrêtecemoment,commesuspendu.Nosregards sont rivés l’un à l’autre. Celui d’Adam est intense, profond, pénétrant. Et puis, ses yeuxdescendent,s’attardentsurmesseins.Jeretiensmonsouffle,c’estcommesiAdammecaressaitduboutdesdoigts.Jerespiredeplusenplusvite.

C’est étrange, comme sensation. Nous n’avons aucun contact physique et pourtant, j’ail’impressionquemapeaufrémit.

Adam fait encore un pas versmoi.Nos corps sont à quelques centimètres l’un de l’autre.Monamantm’envoûteparcetteproximité,parsonregardélectrisantqu’ilplongeànouveaudanslemien.Sarespirationestsaccadée,saboucheestentrouverte,légèrementhumide.Ilenfaudraitpeupourquecetteenviedeviennetropforteetquenoscorpsfassentfidulieu.Lapassionnousdévore,s’amusedenous,maisnousparvenonsencoreà lacontrôler,à fairedurercet instant,àexacerbercedésirquinaîtaucreuxdemonventre.

Ilfaitchauddanscetascenseur!

La porte s’ouvre, le courant d’air nous réveille et, sans me lâcher des yeux, Adam recule dequelquespas.Avantdesortir,ilm’attrapeparlamain.L’ascenseursefermederrièremoi.Monamantposeseslèvressurlesmiennes.Ilm’offreunbaiserrapide,maisdélicat.

Commeuneinvitation…

Lecouloirquimèneàcettenouvellesuiteestcalme,feutré.Nousn’ycroisonspersonne.Àcetteheure,lescasinosetrestaurantsdoiventêtrepleins.Adams’arrêtedevantuneporteetsortdesapocheunecartemagnétique.

«J’espèrequecettechambreteplairaplusquelatienne.Situn’aimespas,nouspouvonstoujourschanger»,medit-ilensouriant.

J’entre. Je suis immédiatement attirée par une pièce où quelques bougies ont été allumées pouroffrir une ambiancedouce.Mais cen’est pas leplus remarquable.Avantmêmed’entrerdans cettepièce, je lâcheuncrid’admiration.Jenesaispasoùposermesyeuxtellement toutestmagnifique.Cette pièce dispose d’une immense baie vitrée avec vue sur Las Vegas. La ville et ses lumièresscintillentdemillefeux.Lespalacesvoisinssontilluminés,lespectacledecettecitédémesuréesousnospiedsestàcouperlesouffle.Monregardquittelafenêtrepourseposersur…

«Non!»m’exclamé-jeenmetournantversAdam.

Ilm’offreundélicieuxsourireenretour.Entouréedebougies,unelargebaignoireouunepetitepiscine, encastrée dans le sol, habite le cœur de la pièce. Des banquettes blanches, capitonnées,gardentcetespaced’eau.Jen’aijamaisvuçadetoutemavie.Desserviettesmoelleusesetdesmulesenépongeattendentgentimentqu’onaitbesoind’elles.

–C’estmagnifique!arrivé-jeàdireàAdam,quivientdemerejoindresurlepasdeporte.– Tu ne regrettes pas ta suite ? On garde celle-là ?me taquine-t-il, comme s’il avait vraiment

besoindemeledemander.–Biensûr!

Adam m’entraîne dans le reste de la suite. Tout est somptueux, bien sûr. Dans la chambre àcoucher,lelitestinstalléaumilieudelapièce,dansunsavantaménagement.Jedéposesurunfauteuilmon violon et l’étole qui couvre mes épaules. J’aperçois mes affaires à côté du lit. Adam s’estvraimentoccupédetout.Ilmelaisseletempsdemeposer.Soudain,unepenséetraversemonesprit.

Jen’aiaucunmaillotdebain!

Jeneveuxpasromprelecharmedecedébutdesoiréeaveccedétailbasique.Maisce«détail»merendnerveuse.Bizarrement,sanscettepetitebarrièredetissu,jenesaispascommentmerendredanscettepiscinesansenvoyerunmessageclairàAdam.Jemeursd’enviedecebain,d’admirerlavueenme prélassant dans l’eau, collée à mon amant, mais ma pudeur m’empêche de me montrer aussilibérée.

Commentmesortirdelà?

Uneidéecoquinemevient:j’ôtemessous-vêtements.Quitteàsebaignernue,autantassumerdèsledébut.Letissudemarobeestunecaressesurmesseinsetsurmesfesses.Latensionérotiquedelasoiréevientdegrimperencoreunpeu…

Pourlapremièrefoisdepuislongtemps,jechercheAdam,nerveuseettendue.

Pourquoi?Est-cel’ambianceélectriquedeLasVegas?Lavilledetouslesextrêmes?

JeretrouveAdamdanslesalon,occupéàregarderparlabaievitrée,unverreàlamain, l’autredans sa poche de pantalon. Il nem’a pas entendue arriver. Je l’observe, ses épaules, sa taille, sesfesses,sesjambessolidementancréesdanslesol.Mêmededos,sonpouvoird’attractionsurmoiestimpérieux. Je suis attirée, commeaimantée.Sous le tissude sa chemise, je connais la lignede sesmuscles,lapuissancedesesbras,l’habiletédesesdoigts.Ilsuffitquejeleregarde,dedos,pourquemonsangsemetteàbouillonner.Unevaguededésirm’envahit,intacte,identiqueàcelleressentieilyapeudansl’ascenseur.

Adamseretourneetm’aperçoit.Ilposesonverresurunetablebasseetvientàmarencontre.Ilaceregarddeprédateur,celuiquimefaitsentirincroyablementdésirable.Marobe,portéeàl’occasionduconcert,possèdeundécolletéquinelaisserienvoir,maistoutimaginer.Monamants’approcheets’arrêteàquelquescentimètresdemoi.Illèvesamainsurmonépauleet,dudoigt,suitlaligned’unedes bretelles dema robe.Quand il atteint le fin tissu, à la naissance demon sein, je suspendsmarespiration.Sondoigtnes’arrêtepaslà.Ildescendencoreplusbas,jusqu’àunepetiteproéminencequivientdesedresser.Jelaisseéchapperunsoupirdeplaisiràcecontact,faisantécloresurlevisaged’Adamunsourireterriblementérotique.

«J’allaisteproposerdedescendrenousamuseraveclesmachinesàsous,maisjecroisquenouspouvonsnousamuserautrement»,murmureAdamenapprochantsabouchedemoncou.

Latensionvientdemonterd’uncran.Adamsetientàquelquescentimètresdemoi,seulsondoigtcaresseàm’enfairegémirleboutdemonsein.Saboucheeffleuremapeau,sonsoufflem’électrise,marespirations’accélère.Jemordsmalèvre,fermelesyeux.Jetournedélicatementmatêtepourquemabouches’approchedelasienne,pourl’inviteràvenirseposersurlamienne.Maiscen’estpascedontaenvieAdampourlemoment.

Monamantmeplaquecontrelemuretcollesoncorpsaumien.Sabouchemedévoredésormaislecou. Il attrape mes mains et les colle à leur tour au-dessus de ma tête. Adam m’emprisonne,m’empêched’esquiverlemoindregesteverslui.D’unemain,ilagrippemespoignets,del’autre,ilm’explore,par-dessuslesatindemarobe.

«Cetterobe,ellemerendfou»,l’entends-jesouffler.

Unepetitevoixsefélicitedansmatêtedemonchoix.

Je la trouvais appropriée pour un concert, je nem’attendais pas à ce qu’elle procure une tellepassion…

Adam attrape ma bouche, sans aucune retenue. Sa langue avertie vient rapidement trouver lamienne.Frustréedenepaspouvoirletoucher,jeplacetoutmondésirdanslamienne.Notrebaiserestfougueux,d’unevertigineuseintensité.Jesenslecorpsdemonamantsepresserunpeupluscontrelemien.Ma robeest longue,me tombe sur les chevilles.Adamsebat avec le tissupour le remonterjusqu’àmataille.D’ungestesûr,ilsoulèvemajambeetlaplaceautourdesataille.Jelaisseéchapperunautresoupirdedésir.Jeviensdesentirsonsexedurcontremonventre.

Si seulement je pouvais le toucher ! L’agripper à mon tour, serrer ses fesses dans mes mains,pressersonbassinunpeuplusfortcontremoi…

Adamcontinuedem’embrasser,jesenssondésirs’accroître.Samains’estglisséesurmesfesses.J'entendssongrognementdesurprisequandils’aperçoitquejeneporteaucundessous.Surpris,maisséduit!Malaxantmesfesses,m’embrassantpassionnément,Adammerendfolle.Jesensledésirmesubmerger.Jemeursd’enviedeletoucher,desentirsonsexecontrelemien,j’aipeurdebrûlervivetellementlapassionmedévoredel’intérieur.MaisAdamnesemblepaschangerdeposition,nimerendrema liberté.Aucontraire, ilvientdecollerunpeuseshanchescontre lesmiennes,nosdeuxsexessetouchentàtraverslestissusdesesvêtements.Moncorpssetend,majambesecrispeautourdesa taillepournerienperdredececontact. Ils'écarteunpeudemoipour laisserpassersamainentre mes jambes. Experte, elle s'immisce dans mon intimité, ses doigts se fraient un chemin, seglissent délicatement au cœur de mon être. Et puis ils commencent à bouger, avec assurance, àamplifiermondésir,monexcitation.Àchaquefrottement,àchaquemouvement,jeperdsunpeupluspied.Jegémis, larespirationd’Adamsefaitplusrauque,plussaccadéeaussi.Jefermelesyeux, jesenslavaguedel’orgasmemonterenmoi.Jepoussedescrisdeplaisir,Adamsepresseencoreplusfortcontremoi.Jesensquejevaisdéfaillirtellementleplaisirm’assaille,mesurprendparsaforce.Je…Underniercoupdereinsdelapartdemonamantfinitdemetransporter.Jetombelittéralementdanssesbrasquandilconsentenfinàdélivrermesbras.

Adam,lui,n’arienperdudesesforces.Ilmesoulève,plaçantmonautrejambeautourdesataille.Ilmedéposedélicatement sur le canapédu salon, aumilieudes coussins. Je ferme les yeux, pourreprendreunpeumonsouffleetlecontrôledemoncorps.Quandjelesouvreànouveau,Adammefixe,ouplutôt,mecouveduregard.

–Jet’adoreaveclesjouesrosesmonange,dit-ilenlaissantéchapperunsoupirdebien-être.–Je…Tu…Enfin…

Lesmotsnemeviennentpas.Jen’enrevienspasd’avoireucetorgasmeaussipuissantetsurtout,sansqu’Adamn’aieuàjouerdesesdoigts,niàmepénétrer.Monamantpartd’ungrandéclatderire,amusédemabéatitude.

–Jeregrettedenepast’avoirvuejouerdanscetterobe,surscène.Jemeseraisjetésurtoidanstaloge,souffleAdamenmecaressantlevisage.

–Jenepensaispasqu’elleseraitsi…

Ciel,jenevaispasfinirmesphrasescesoir.

«Elletevaparfaitement.Garde-laprécieusement,monange…»

Il faudra que je pense àmieuxme regarder dans la glace avec cette robe, je neme suis renducomptederienenlaportanttoutàl’heure.

Adamse relève, l’œil toujourséclairéd’unebrûlante intensité. Je le regardes’éloigner.Suruneconsole attend une bouteille de champagne dans son seau. Mon rythme cardiaque s’accélère ànouveau.Latensionentrenousn’apasfaiblietjemesensprêtepourunsecondround.SiAdammetrouvesexydanscetterobe,pourquoinepasjouerdecepouvoirdeséduction?Moncorpss’anime,monsangbouillonnedansmesveines. J’ai l’impressiondeme transformeren femme fatale.Cettenouvelleassurancemedonnedesailes.Jedéconnectemoncerveau,jeneveuxpasd’entravesàmondésirquimevrillelesreins,leventre.Jemelèveducanapé,medirigeversAdam.Jesuisuneautre.Madémarcheestlascive.Monamantm’observe,intéresséparlespectaclequejeluioffre.Jepassemalanguesurmeslèvres.Arrivéeàsahauteur,jeplaquemesdeuxmainssursontorse,lecaresse.Nousnenouslâchonspasduregard.Jedéboutonnesachemise,mesgestessontassurés.Jelalaissetomber à terre.Le corpsmusclé d’Adamvibre devantmoi.Comment résister ?Àmoitié nu,monamantafficheunebeautéindécente,uneperfectionàcouperlesouffle.Jenerésistepas.

J’entraîne Adam dans la pièce voisine, où se consument encore les bougies autour du bassinrectangulaire. Je l’attire vers les coussins, le pousse pour qu’il tombedoucement. Jem’agenouilledevant lui.Monamant se laisse faire,visiblement ravidemevoiraussidirective. J’ai terriblementenviedelui,deposermeslèvressursoncorps,desentirsachaleursousmesdoigts…J’aibesoindeletoucher,delesentir,dem’imprégnerdelui.Monenvieestanimale,presquevitale.

–C’estmoiquivaism’occuperdetoi,annoncé-je,lavoixgrave.–Laisse-moit’aider,murmureAdam.

Son clin d’œil charmeur finit de m’embraser. D’un geste rapide et d’un léger mouvement dubassin,monamantselibèredesonpantalon.Jeterminedeleluienleveravecsensualité.Mesmains

remontent sur ses cuisses, explorent l’intérieur de ses jambes jusqu’à frôler du bout des doigts lerenflementdesonboxer.LecontactestélectriqueetarracheàAdamungrognementsourd.Mamainrecouvremaintenant cette bosse, lamasse doucement.Mon cœur bat à toute allure, j’entendsmonamant respirerplus fort.Enune fractiondeseconde,monamant se retrouvenu.Sonsexepuissantrespire.Devantcettevision trèsérotique,monexcitationestà sonparoxysme. Je l’attrapedansmabouche, jelelèche, lecaresse.Monamantserejetteenarrière,émetdesgémissementsrauquesquim’encouragent.Mesmainss’agrippentàsonventre,malangues’attardesur lebouthumidedesonsexe,jelereprendsenmoi,plusexcitéequejamais.Adamglissesesmainsdansmescheveux,jelesensauborddel’orgasme,sonbassinbascule…Etj’arrête,jemerecule.

Monregardcoquinrencontreceluidemonamant.Brûlantdedésir,laboucheentrouverte,Adamestauborddugouffre.Monarrêtsoudaindoitlefrustrer…Jeneveuxpaslefaireattendre.Soussesyeuxintenses,jemerelève.Jeledomineet,sanslequitterdesyeux,jelaissetombermarobesurmeschevilles.Jeneporteaucunsous-vêtement,jesuisnuefaceàlui.Lespectaclequej’offreàmonamantal’airdeluiplaire.D’unmouvementdécidé,jelechevauche,m’assoissursescuissesetentouresataille demes jambes.Nosdeux sexes se touchent enfin. Je rejettema tête en arrière tant ce simplecontactestjouissif.Adamn’enpeutplusd’attendrelasuite,ilm’agrippelesfessesetmeguidepourentrer en moi. Je ne me fais pas désirer, c’est exactement ce que je veux.Mon bassin s’ouvre ets’empalesursonmembredur.Jecrieaupremiermouvementdeva-et-vient.Adaml’accentue,jemecambreunpeupluspourlelaissers’enfoncerplusloin.Cettechevauchées’emballe,monamantestun étalon fougueux. Adam choisit ce moment pour laper mon téton. Cette soudaine et inattenduedéchargedeplaisir délivremonorgasme. Jegémis longtemps, chaquenouvel à-coup fait durer lemoment.Monamantexploseàsontourdansunlongcrisourddedélivranceetdevolupté.

Nousnousserrons l’uncontre l’autrepour reprendrenotresouffle.Celuid’Adamestchaudsurmapeau.Soncorpsesthumide,jehumeavecdélectationcetteodeurmasculinemêléeàsonparfum.Leregardquenouséchangeonsànouveauesttendre,heureux.

«J’aimecetterobeetj’aimeencoreplusquandtuneportesriendessous,monange.Iln’yariendeplusexcitant…»

Jesouris,raviedemonaudace.

«Que dis-tu de prendre un bain, et de profiter de cettemagnifique vue ? »murmureAdam aucreuxdemonoreille.

J’acquiesce. Mon amant m’aide à me défaire de lui. Il attrape mon visage entre ses mains etm’embrasse.Jenesaispascommentdécryptercebaiser,mais j’ai l’impressionqu’Adamn’estpastoutàfaitrassasié…

Vraiment?

L’eau est chaude, c’est un délice d’y entrer nue. Je suis surprise par la profondeur de ce quiressemble plus finalement à une petite piscine d’intérieur. Je posemes bras au bord du bassin, leregard perdu sur les lumières deLasVegas.Mon corps se détend, je ferme les yeux et prend unegrandeinspiration.J’entendsderrièremoiletintementdesverressurlesoletlebruissementdel’eau

àl’entréedemonamant.

Adamvientsecollerderrièremoi.Jesenssonsexecontremesfesses.

Non,monamantn’estpasrassasié…

Il écartemes cheveuxetmord lanaissancedemanuque. Je sensque jevais avoirbeaucoupdeplaisirfaceàcettemagnifiquevue…

4.PacificHeights

JeretrouveMaxetOslavpourlepetitdéjeuner.Àcetteheure-là, lepalaceestcalme.Adamadûrepartir à la premièreheure, avecAlan, lemari deMax.En apercevant le regardpétillant demonrépétiteur,j’aicommel’impressionquesanuitaaussiététrès…courte.

«TuremercierasAdam»,meglisseMaxdansl’oreilleens’installantàtable.

Oslavestvolubilecematin,ilmonopoliselaconversation.IlaimecesconcertsàLasVegas,cessoirées qui se terminent au petitmatin. Il retrouve une seconde jeunesse. Il a fait l’effort de nousrejoindrecematin,nousavoue-t-il,maisilnousassurequ’ilestprêtàretournersecoucher.Nousnel’accaparonspaslongtemps,notreavionnousattend.NousseronsàSanFranciscoauxalentoursde12heures etM.Glennous ad’ores et déjàprévenusquenouspouvionsprendrenotre après-midi,Maxetmoi.

Jenesuispascontreunpeuderepos!

Nousavonsunconcertcesoir,maiscommejenetienspaslaplacedepremierviolon,j’aimoinsdepressionsurlesépaules.

Je retrouve l’appartement avec plaisir. Moi qui pensais le trouver vide, je retrouve Claire enpyjamaetrobedechambre.Cequi,vul’heuredelajournée,estassezinhabituel.

«Tunebossespas?»luidemandé-je.

Clairerelèvelatêtedoucement.J’aperçoissesyeuxbouffis.Jemeprécipiteàsescôtés.

–Qu’est-cequ’ilsepasse?–C’estRyan…–Quoi!Çanes’estpasarrangéentrevous?Jel’aieuhier,ilm’aditqu’ilt’appellerait…–Ilm’aappelé,onafaitlapaix…Maisons’estdenouveaudisputéshiersoir…–Pourquoi?– J’avais une soirée, pour le projet du musée. Je lui ai proposé de venir. L’architecte était là

aussi…et tu te rappellescomment ilest…Ryanet luin’ontpasarrêtédes’envoyerdespiques.Enrentrant,Ryanm’afaitunescènedejalousie.Ilm’aditque…quejedevaisresteraveccespersonnes-là,que luin’étaitqu’unsimpleétudiant,qu’ilnese trouvaitpasassez intéressant…Ilestpartiet…et…jecroisquec’estfini.

LavoixdeClaireestchevrotante.Elleesttrèsaffectée.

Bon,mevoilàànouveauentrelesdeux…

–Écoute,jevaisallerlevoiretluiparler,tenté-jedelaconsoler.–Ilavaitl’airsi…siconvaincu!

–Ryanestbuté.Maisiln’estpasidiot.Jevaisallerlevoirsurlecampus.Enattendant,secoue-toi.Habille-toi.Nelaissepastombertonprojet,OK?C’estaussiimportantpourtoi,encouragé-jeClaire.

Macolocse lèveàcontrecœur.Maisellesaitque j’ai raison.S’ilyabienunechosequipeut larebooster,c’estsontravail.

Moiquivoulaismereposer…

JegaremavoituresurlecampusdeRyan.JeconnaisvaguementsonemploidutempsmaisilvientdemeconfirmerparSMSque ses cours sont terminés. Je le cherche aumilieudes étudiants et netardepasàl’apercevoir.Jem’arrêtenet.

C’estpasvrai!Pasencoreelle!

Emy discute avecmon frère, ils ont l’air de se connaître, leur discussion semble lesmettre debonnehumeur.Jelesobservedeloin,jefulmine.

Qu’est-cequecettefillefabriqueavecmonfrère?Qu’est-cequ’ellechercheencore?Etbiensûr,mon frère tombe dans le panneau de la jolie blonde sympa ! Il va m’entendre ! Il va vraimentm’entendre!

Leur échange se termine, j’attends un peu qu’Emy soit hors de vue pourm’approcher demonfrère.

–Salut,petitesœur,dit-ilenmevoyantarriver.–Salut,marmonné-je.Tuconnaiscettefille?–Emy?Onsecroisedetempsentemps,elleesttrèssympa.

Jemeretiensdenepasfranchementmemettreencolère.

–Est-cequetusaisquiestcettefille?insisté-je,deplusenplusagacée.–Non…Tulaconnais,toi?demandeRyan,apercevantmonénervement.– Tu te souviens des fausses rumeurs dans les journaux, des diffamations, de la conférence de

pressequ’Adamadûorganiserpourdémentirceramassisdemensonges?

Ryanacquiesce.

« Eh bien, cette fille que tu trouves si sympa a fait croire qu’elle était enceinte d’Adam et quej’avaisbrisé leur famille.Et encore, jene te racontequeça !Cette fille est lagentilleprotégéedeLorraine,uneamiedePaul.Est-cequetuasbesoindeplusdedétailsoutucommencesàcernerunpeulepersonnage?!»

Jeneparleplus,jecrie.

–Non!souffleRyan,surpris.–Jesuisprêteàparierqu’ellesaitquetuesmonfrèreetqu’elleneparlepasjustepourleplaisir

desefaireunnouvelami!

– Calme-toi Éléa, si j’avais su… Elle m’a dit qu’elle débarquait elle aussi à San Francisco etqu’elleneconnaissaitpersonne,essaiedesedéfendremonfrère.

–Benvoyons…

Ryanal’airsincère.Jenepeuxpasluienvouloirdes’êtrefaitmanipuler.J’enveuxsurtoutàEmydes’approcherdemonfrère.Jetentedemecalmer.

–Dis,j’aivuClairecematin.Elleapleurétoutelanuit,ellecroitquec’estfinientrevous,c’estvraiRyan?

–Jemedoutaisquetuvoulaismevoirpourça…Écoute,jenesaispas.Sasoiréed’hier,jemesuissenti si transparent parmi toutes ses relations. Et ce mec qui n’arrêtait pas de la draguer… Il estarchitecte,jesuisétudiant.

–Jel’aidéjàcroisé,etc’estvraiqu’ilestunpeucollant.MaisClairen’estpasdutoutintéresséeparlui!

–Aujourd’huinon,maisdemain?J’ail’impressionquenosdeuxuniversnes’accordentpas,ellecroisedumonde,jem’enfermepourmesétudes.Ellevaselasser…

Monfrèreraclelesolduboutdupied.Ilal’airtouchéluiaussi.

–Ryan,jeconnaisClaire.Elleadoresonmétier,ellepartsouventàdroite,àgauche,çanedoitpasêtresimpleàsuivre,jetel’accorde.MaisClaireestsérieuseetsielleafranchilepasavectoi,c’estaussiparcequ’elleaspireàseposer.Elleneveutpasd’unmeccommeelle,elleveutquelqu’unquiluiapportelecalme,quilaposeetquiluifassevivreautrechosequesonquotidien.Alors,fais-luiconfiance.Jenel’aijamaisvueaussiheureuse,nisitristequecesdeuxderniersjours.

–Écoute,c’esttrèsgentilcequetuessaiesdefaireÉléa,maislaisse-moigérerçaàmafaçon.Jenesais pas ce que je ressens, OK ? Et je n’ai pas envie de la suivre partout comme un petit chien !s’énerveRyan.

–MaisRyan…–Laisse-tomber,Éléa!Netemêleplusdeça!Jedoistelaisser,j’aimagardequicommencedans

uneheureàl’hôpital.–MaisRyan!

Monfrèremelaisselà,sansunautremot.Jesoupire.

Qu’ilm’énerve,quandilestfermécommeça!

Clairenevapasdutoutêtrecontentedurésultat.J’espèreaumoinsque,simonfrèremetuntermeàcetterelation,illeferaproprement!

J’espèrequandmêmequecen’estpasfinientreeux…

Montéléphonevibre.C’estunmessaged’Adam.

[Peux-tumerejoindreàmonbureau?Hayleyadesinformations.]

Ah,Hayleyatrouvé…

[J’arrive,jesuislàdansunequinzainedeminutes.]

Jeregardedansladirectionoùmonfrèreestparti.Jesoupireencoreunefois.

Jesuisdésormaisunehabituéedesbureauxd’Adam.Lasécuritém’ouvremêmelaportebattantepouraccéderauxascenseurs,jen’aiplusbesoindesortirmacartepersonnelle,hormispourutiliserl’accèsprivéàl’étaged’Adam.Hayleyestdéjàlà.Adamprendletempsdem’accueillir,m’embrasse,pasaussilangoureusementquecettenuit,maisunbaisertoutdemêmeprononcé.Jem’installedanslecanapé. Je ne peuxm’empêcher de regarder le plafond, là où la caméra de surveillance est située.Depuisquej’aivulavidéodelatentativedecambriolage,jesaisqu’ilyadescamérasici.

Il faut que je demande à Adam si nos ébats ont été filmés. Si c’est le cas, je ne pourrai plusregarderlasécuritécommeavant…

–Maintenant qu’Éléa est là, dites-nous toutHayley, vous avez trouvé quelque chose ? demandeAdam,avecuneimpatiencecontenue.

–Oui,j’aipuretrouverl’adressedevotrepère.J’aidelachanced’avoirunbonaminotairequimedevaitunservice.IlaregardécequelafamilleHillavaitachetécommemaisonàSanFrancisco.Iln’yenaqu’uneaunomdeHowardHill,ainsiquecelledeRiverton,maisvousdevezdéjàlesavoirpourcelle-ci,expliqueHayleyensortantunbloc-notesdesonsac.

–Etellesesitueoù,cettemaison?interrogeAdam,tendu.–DanslequartierdePacificHeights,répondHayley.–Quoi?!

Adamseretourneversmoi.Devantl’airsurprisdeHayley,jepensequ’uneprécisions’impose:

–Adampossèdeunemaison,danscemêmequartier.–Ilsepourraitquejesoisvoisindelamaisondemonpère?!s’exclameAdam.–Voicil’adresse,ditHayleyenluitendantunboutdepapier.

Adam en prend connaissance. Il reste un temps silencieux, à lire et relire les quelques lignesannotées.

«Effectivement,cen’estpastrèsloin»,souffle-t-il.

JeneconnaispastrèsbienlequartierdePacificHeights.Jen’ymetslespiedsquedepuisquejesuisavecAdam.Trèshuppé,disposantdesplusbellesvillasdeSanFrancisco,c’estl’undesquartierslesplusrecherchés.

–Jeveuxlavoir,ditsoudainAdam.–Tuveuxallervoircettemaison,maintenant?demandé-je,surprise.–Oui.Jeveuxvoircettemaison.Jeveuxsavoirsijelaconnais,siellemerappelledessouvenirs.

Hayley,vousavezquelquechosedeprévumaintenant?–Euh…non,pasdansl’heure,répondlajournaliste.–Vouspourrieznousyemmener?Votrevoitureestsansdouteplusdiscrètequelamienne,ajoute

Adam.

Hayleyacquiescedansunsourire.Eneffet,devantsavoiture,nousnousarrêtonstouslestroisensouriant.Unevieilleguimbardenousattend,unepetiteaméricainecommeilenexistetant.

«Maiselleestfiable»,sesentobligéed’ajouterHayley,commepourdéfendresavoiture.

Monamieprend levolant,Adams’installesur lesiègeavantet jemeglisseà l’arrière.Avec lacirculationdecemilieude journée,nousmettonsunpeude tempsàparvenirdans leshauteursdePacificHeights.JereconnaislaroutepourallerchezAdam,maisnoustournonsjusteavant.Commedestouristes,nouségrenonssurlachausséelesnumérosdesénormesvillas,jusqu’àtombersurcelledupèred’Adam.Hayleysegarediscrètementsurletrottoird’enface.Larueestcalme.Adamalesyeux rivés surcettedemeure imposante, trèscarréeà la façade foncée, tranchantavec leblancdesfenêtres.De làoùnoussommes,nouspouvonsapercevoirungrandescaliermenantauperron.Enspirale,cedernierestentourédecolonnesblanches.Au-dessus,unepetiteterrasse.Lejardinsembleentretenu.D’ici,jenesaispassilamaisonestoccupée.

Adamneditrien.Ilobserve.Samâchoireestcrispée.Jesuislapremièreàromprelesilence.

–Cettemaisonteditquelquechose?–Riendutout,répond-ild’unevoixsourde.

Soudain, Adam sort de la voiture, traverse la rue pour s’approcher du portail. Je le suis,instinctivement.Hayleyestsortiedesavoiture,maisresteàdistance.JecontinuederegarderAdam.Derrière ses lunettes de soleil, je ne peuxpas voir son regard.Mais ses lèvres sont pincées.C’estcommeunerencontrepourlui.Ildécouvreunepartiedelaviedesonpère…

Puissoudain,illèvelebras,faitsigneàquelqu’und’approcher.

Maisàquifait-ilsigne?

J’entendsuneportedevoituresefermer,puisuneseconde.Mesgardesducorps…Ilssontlà,euxaussi…

«Faitesletourdecettemaison,essayezdevoirsivouspouvezentrer,sansvousfairevoir.Sivousavezlemoindredoute,nefaitesrien,necourezaucundanger,etnevousmettezpasdansunesituationquipourraitêtreembarrassante.Rapportez-moicequevousaurezvu.Jevousdonnequinzeminutes,pasunedeplus»,ordonneAdamauxdeuxhommes.

Lesgardesducorpsseséparent.Jen’ai jamaisentenduAdamparlerdecette façon.S’ilpouvaitlui-même entrer, je suis sûre qu’il le ferait. Mais ce serait trop risqué pour lui…Hayley nous arejoints.Adamseretourneverselle.

–Àquiappartientcettemaisonmaintenant?luidemande-t-il.–CettemaisonarejointlepatrimoinedeLorraineHillàlamortdevotrepère,murmureHayley,

tantelledoitsentirquelemomentestgrave.–Mais…Pourquoiest-cequecettemaisonnet’estpasrevenue?interviens-je,surprise.Tuesson

descendantdirect.–Encoreunmystèreàéclaircir,souffleAdam,entresesdents.

Lesminutess’écoulent.Jetrouveletempslong.Jecrainsqu’unevoituredepoliceneviennenousdemanderdepartir,ounenousembarque,ounenousprennepourdesrôdeurs.Pire,jecrainsqu’unecaméradesurveillancenenousfilmeetqu’àl’autrebout,Lorrainenenousobserve…J’enailachairdepoule.L’undeshommesd’Adamrevient,ensecouantlatête.Iln’apaspupasserdesoncôté.Lesminutess’écoulent,Adamconsultesamontre.Hayleyseglissedanssavoiturepournousyattendre.Noussommesprêtsàpartirquandlesecondgardeducorpsapparaît,essoufflé.

Ilapuentrerdanslejardin.Iln’avuaucunsignedevie.Danslamaison,lemobilierestrecouvertdegrandsdrapsblancs,signequepersonnen’habiteiciencemoment.QuefaitLorraineaveccettemaison?Pourquoilagarde-t-elle?

Ellen’apasbesoindelalouerpourarrondirsesfinsdemois…

Adamremercielesdeuxhommesetleurdemandederejoindreleurvoiture.Nousrestonstouslesdeuxdevantcettemaisoninaccessible.

Siseulementellepouvaitparleretnousracontersonhistoire!

«Est-cequetucroisqueLorrainel’agardéeintactedepuislamortdetonpère?Quecesontsesmeublesquisontencorelà?Sesaffaires?»

Mesquestionsnetrouventpasderéponses.Adamfixelamaison.Jeposemamainsursonbras,pourlesortirdesespensées.

«Jenesaispas,fait-ilensedétournantdelamaison.Jenesaisriendecettemaison.Ilvafalloirquejeledécouvre.Cettemaisondétientpeut-êtreunedesclésdumystère.»

Nousquittons les lieux.Avantdem’engouffrerdans lavoituredeHayley, je lui jetteunderniercoupd’œil.Cettemaisonmedonnelefrisson.

MaispourquoiLorrainea-t-ellehéritédelamaisonetpassonfils?

5.Faceàface

Surletrajetquinousramèneàsonbureau,Adamsemontretrèssilencieux.Ladécouvertedecettemaison l’affecte. Pour lui, ce doit être comme une rencontre avec son père, par procuration.Découvrirl’universdesonpère,unlieuquidevaitluiêtrefamilier,c’estunpeucommel’approcherdeplusprès.Adam,quin’a rienconnudesonprocheparent,peutdésormais l’imaginerpassant leportailmatin et soir, gravir lesmarches du perron, faire les cent pas sur la terrasse…Mais cettemaisonappartientaujourd’huiàLorraine.

EllerevenaitdedroitàAdam,pourquoinejamaisluienavoirparlé?

«Adam,sivouslevoulezbien,j’aimeraiscontinuerdecreusersurvotrepère.J’aiquelquespistesàexploiteràsonsujet,çapourraitêtreintéressantdesavoiroùellesmènent,pourvous»,demandeHayleyennousdéposantaupieddel’immeuble.

Adamréfléchituninstant,puisrépond:

–OK,allez-y.Maisn’oubliezpas,nevousmettezpasendanger.Jeneveuxpasquetoutcecipuissevousnuire.

–Pasdeproblème!Enquêtersurdessujetsdifficiles,c’estmonmétier,nel’oubliezpas!souligneHayleyensouriant.

Nous quittons notre amie journaliste. Son implication n’est pas intéressée, elle souhaitesincèrementapportersonaide,avecsesmoyens,àcettesituationpesantepournous.

Sinouspouvionsenêtrelibéréspourdebon…

–Jedoisretournertravaillermonange.Mercid’êtrevenue,meditAdam,droitdanslesyeux.–C’estimportantpourtoi.Etjetiensmoiaussiàdécouvrirlavéritésurtonpassé.Etj’aiaussihâte

quetoutceciseterminevite,avoué-je.–Oui,souffleAdam.Unefoisqu’onenaurafiniavectoutça,jem’occuperaidetoi,quedetoi.

Adam m’attire contre lui et m’embrasse. Devant l'intensité de ce baiser, mes jambes setransformentencoton.

Oh!oui,j’aihâte!

Jereprendslechemindemavoiture.Jepeuxenfinm’octroyerunpeudereposavantdefilerauconservatoirepourleconcertdecesoir.

Ilmefauttoutdemêmerépéter…

Quandjerentrechezmoipourladeuxièmefoisdelajournée,jenetrouvepasClaire.Elleadûsuivremesconseilsetserendreàsontravail.

Unetrèsbonnechose!

J’ai quelques heures devant moi. Sans me poser de question, je file dans ma chambre pourm’accorderunepetitesieste.Jecoupemontéléphone.

Jeveuxdormir!

Lesommeilestcapricieux.Ilfautdirequejenel’aidepasbeaucoup.EntreRyanetClaire,lepèred’Adam,Emy et le Philharmonique,mon cerveau ne trouve pas le repos.Dépitée, je n’insiste pas.J’attrapemonordinateur,jen’aipasencoreconsultémese-mailsdelajournée.

Tiens,unmessagedeClaire…

De:ClaireSwansonÀ:ÉléaHaydensenObjet:RyanRe,Tonfrèreestuncon!Désolée,maisc’estvrai!Ilm’aappeléetoutàl’heurepourmedirequ’ilvoulaitqu’onfasseunbreak.Jesuisencolère,ilnem’amêmepaslaisséeparler!Bref, je vais me concentrer sur mon projet, donc, ne t’inquiète pas si tu ne me croises pasbeaucoupcesprochainsjours.J’airendez-vousavecl’architectecesoir…Jenesaispassijedoisnoyermonchagrindanssesbrasoul’envoyersurlesroses!Entoutcas,mercid’avoiressayéd’arrangerleschoses.Etheureusementquetun’aspaslemêmecaractèrequetonfrère!++Claire

Jesuisscotchée.Jenecomprendspasmonfrère…

De:ÉléaHaydensenÀ:ClaireSwansonObjet:RE:RyanJesuisdésolée,jenesaispasquoitedire…Pourl’architecte,nefaisrienquetuneregrettesaprès!JesuispersuadéequeRyanretrouveralaraison.Boncouragepourtonboulot!Éléa

Jenepeuxrienfairepourlesaider.J’aidéjàparlédeuxfoisàRyan,sanssuccès.Detoutefaçon,cesontleurshistoiresdecouple,jenepeuxrienyfaire.

Hormissurveillerçadeprès.

J’occupelerestedemonaprès-miditrèsstudieusement,metsdel’ordredansmespapiers,range,classe…Jesuisheureusequandvientl’heuredemelibérerdecettetâcheetderetrouverlamusique.Au conservatoire, je rejoins rapidement mes collègues. Le premier violon de ce soir est un peuangoissé.

Jelecomprends!

Il sera au centre de l’attention. Je n’éprouve à son égard aucune jalousie. J’ai eumonheure degloirehiersoiravecOslavetçanemedérangepasdutoutd’êtreenretrait.

Etvumonétat,cen’estpasplusmal!

Quelquechosemegêne. Jemesensmalà l’aise.Auxcôtésdesautresviolonistes, leconcert sepasse plutôt bien.Mais l’angoisseme serre le ventre.Ce n’est pas comme d’habitude. Je lance unregardrapideautourdemoi,toutlemondeestconcentré.Monregardseporteverslepremierrangdes spectateurs.Mon sang se glace. Lorraine est là, etme fixe. Elle ne détache pas son regard dumien,ellenesedétournepaspourregarderl’ensembleduPhilharmonique.Lahainequejelisdanssesyeuxmefaitfrissonner.J’essaiedel’oublier,demeconcentrersurlamusique.Jerateunenote,heureusementsansincidence.

Reprends-toi!

J’essaie d’oublier ses yeux, son attitude, d’éviter de regarder dans sa direction.Mais mamaintremble.Jedoisêtrelivide.Impossibledereprendrelecontrôle.Àlafinduconcert,monsourireestfeint,jen’aiqu’unehâte,rejoindrelescoulisses,oubliercefâcheuxépisode.

Jem’enveuxdem’êtrelaisséeimpressionnercommeça!

Faireunefaussenote,enplus!

Maisceregard!Onestloindel’attitudegentillettedesondîner.Quelchangementradical.Jecroisquej’aivulevraivisagedeLorrainecesoir.Ellenecachaitpassahaineenversmoi…Perduedansmespensées,jerejoinslaloge,délaissantmescollèguesentraindesavourerletraditionnelpotdefindeconcert.J’aibesoindemeremettre.Maisquandjepousselaportedelaloge,jepousseuncridesurprise.Lorraineestlà!

«Lorraine,quefaites-vouslà?»demandé-jed’unevoixsourde.

Jejetteunœilderrièremoi,espérantqu’unmusicien,n’importequi,soitderrièremoi.Personne…

«NevousinquiétezpasÉléa,jenevaispasvousaccaparertrèslongtemps»,répond-elleavecunevoixaussidurequesonregard.

Instinctivement, jeplacemonviolonentre elle etmoi, surmonventre.Commeun rempart, uneprotection…

«Jesuisaucourantdevosmanigances, jeunefille.Adamfaitdesrecherchessursonpasséet jesuispersuadéequec’estvousquil’avezpousséàlefaire!Nefaitespasl'innocente,Paulm'atoutdit!Il amisAdamsurécoute, il a tout su !Mais jevousconseillede fairemachinearrière.PersuadezAdamdetoutarrêter,sinon, jepeuxvousassurerqu’ilnerésulterariendebondetoutça.NipourvousnipourAdam.»

Le ton est menaçant. Je suis glacée, je ne peux pas bouger, aucun son n’arrive à sortir demabouche.Lorrainepourraitmetuersurplaceavecceregard.

«PrenezcesmenacestrèsausérieuxÉléa.Ryan,Claireetvosparentspourraientensouffrir.»

Jeme pousse sur le côté pour laisser passer Lorraine. Sans ajouter un autremot, elle quitte lapièce. J’attends quelques minutes pour m’assurer qu’elle n’est plus dans les parages, pourm’effondrer surunechaise. J’ai froid, je frissonne.Lorrainevientdedévoiler sonvraivisage.Lamenaceannoncéeparlavoyante…D’uncoup,desimagessesuperposentdansmatête:mesparentsen pleine discussion avec Lorraine le soir d’un concert, Emy avec Ryan sur le campus… Elle aapprochétousmesproches,elleadéjàcommencéàs’introduiredansmoncercle.Jeserrelespoings.Ilesthorsdequestionquejemelaisseimpressionnerparcettefemmeabjecte!JedoisjusteprévenirAdam,ilfautprotégermesparents,Ryan,Claire!Toutlemonde!

«Toutvabien,Éléa?»faitunevoixàcôtédemoi.

C’estMax,jenel’aipasentenduentrer.

«Tuespâle!Tuasdelafièvre?Tuestouteglacée!»remarque-t-il.

Jetremble,c’estnerveux.

EtMax,ilestendangerluiaussi?

«Nebougepas,j’appelleAdam!»

Jesuisincapabledebouger,c’estcommesiLorrainem’avaitfigéesurplace.J’entendsMaxparlerau téléphone, il me regarde, inquiet. Il part ensuite me chercher à boire, essaie de couvrir mesépaules.Jen’arrivepasàmereprendre,maisilfautquejelerassure…

–Çava,Max,c’estcertainementuncoupdefroid,soufflé-jeenesquissantunsourire.– Repose-toi demain, reste au chaud. Je préviens M. Glen. Cet aller-retour à Las Vegas t’a

fatiguée!–Éléa!

Adamestdéjàlà!Jesuisaussientraindeperdrelanotiondutemps.

Lorrainem’ajetéunsortenm’effleurantaupassage?

Samineestinquiète.Jenepeuxrienluidireencore,entoutcaspasdevantMax.

–Jeteramène,dit-ilenm’aidantàmerelever.MerciMaxdem’avoirprévenu!–Derien,dit-ilentendantàAdammonviolon,rangédanssonétui.Repose-toi,Éléa!

Laforced’Adammefaitdubien.Maisjenelâchepassonbraspoursortir.Ilm’aideàmeglisserdans la voiture. J’ai peur que Lorraine ne soit là, elle ou ses hommes demain.QuandAdammerejointsurlabanquette,jeluidemandetoutdesuitederouler.Ilfaitsigneàsonchauffeur.

–Monange, tum’inquiètes, tuas laminedéfaite.Maxm’aditque tuétaismalade. Je suisvenuaussivitequepossible,s’inquièteAdamenmetenantlamain.

–Non,jenesuispasmalade.C’estLorraine…–Lorraine?TuasvuLorrainecesoir?!

JeracontetoutàAdam,leregardtoutaulongduconcert,saprésencedanslesloges,sesparoles,laduretédanssavoix,sesmenacessurmesproches.PlusjeparleetplusjesensquelacolèremontechezAdam.

«Ellet’amenacéedirectement!s’enflamme-t-il.Elleestalléetroploin!Jenelepermettraipas!Jevais aller lavoir, jevais lui parler,moi aussi jepeux lamenacer. Jen’aipaspeurd’elle !Elles’attaqueàtoi,sanssecacher,ettemenace?Non,c’estterminé,jenepeuxpaslaisserpasserça!»

Arrivéschezlui,Adammesoutienttoujourspourm’aideràsortirdelavoiture.Ilserrelesdents,ilestprofondémentencolère.Jepensequ’ils’enveutaussidenepasavoirétélàpourmeprotéger.Jem’installe dans le canapé.Adam s’éclipse et revient peu de temps après avec un plateau chargéd’une tasse de thé fumante et de quelques friandises à grignoter, sans doute jetées à l’aveugle. Leliquide chaudme fait du bien, je le sens se distiller dansmon corps. Je perds cette impression defroid.Adamm’observe,s’inquiète,faitlescentspas.Jem’apaiseenfin,retrouvemesesprits.

–Adam,appelé-jedoucementenluifaisantsignedes’asseoir.Écoute-moi.Jeneveuxpasquetuarrêtes tes recherches. Jeveuxque l’ondécouvrecequi rendLorrainesimenaçante. J’ai justeunefaveuràtedemander…

–Toutcequetuveux,monange,dit-ilenpressantmesmainsdanslessiennes.–Protègemesparents,Claire,Ryan,Max,touslesgensquej’aime.Jeveuxcontinuerlabataille,

maisjeveuxêtresûrequejenelefaispascontreeux.–Jevais fairecequ’il fautmonange, ils seront tousensécurité. Jevaispasserquelquesappels

pourmettreleurprotectionenplacedèscesoir.

Adamm’attire contre lui,mecaresse les cheveux. J’ai soudainenviedepleurer,mesnerfs sansdoute.Carjen’éprouveaucunetristesse.Seulementdelacolère.

QueLorraineosetoucheràuncheveudemesproches!

Puis ils'éloigne,attrapesontéléphone.Deloin, je l'entendsdiscuter.Adams'occupede tout, ilaentendumespeurs.Ilagitpourmonbien-être,sesactesmerassurent.Jepeuxtoujourscomptersurlui.

Toujours.

JemeréveillecematinlittéralementaccrochéeàAdam.Ilaprissoindemoitoutelasoirée,m’acommuniquésaforce.Unebonnenuitdesommeilafait lereste, jemesensmieux.J’ouvreunpeupluslesyeuxetm’aperçoisqueceuxd’Adamsontgrandsouverts.Ilm’observedoucement.

«Bonjour,monange»,murmure-t-il.

Oups,enserrantAdamcontremoi,jel’empêchedeselever!

Jelelibèreaussitôt,confuse.

–Jen’aipasoséteréveillerenbougeant,sourit-il.–Tuauraisdû,jesuisdésolée,tuesenretard?–Non,çava.Etcen’étaitpasdésagréable,souffle-t-ilenm’embrassantd’undouxbaiser.

Jeregardemamontre. Ilest toutdemême9heures!Adamfilesepréparer, jedescendsdans lacuisinepourattaquerlepetitdéjeuner.Jemeursdefaim!

Adammerejoint,letéléphonecolléàl’oreille.Ilraccroche,sesertuncaféetsetourneversmoi:

–Commenttutesenscematin?–Mieux,beaucoupmieux!–Bien.JevoisConraddansdixminutesaubureau.Onvas’organiserpourlaprotectiondetoutle

monde.–Discrètement?Jenevoudraispasquemesparentss’inquiètent.–Oui, personne ne s’apercevra de rien, je te rassure.Hayleym’a laissé unmessage. Je la vois

avantledéjeuner.Tupeuxnousrejoindre?–Biensûr.Jenetravaillepasaujourd'hui,MaxaprévenuM.Glendemonétatdefatigued'hier.–Jedoisfilermonange,tun’asbesoinderien?Jepeuxtelaisserseule?–Oui,çaira.Jemeprépareetjeterejoinsdirectementàtonbureau.

Adam estma protection rapprochée attitrée. Je terminemon petit déjeuner, discute un peu avecGloria.Lachaleurdelavieillefemmeestbienvenuecematin.

Quand j’arrive au bureau d’Adam, emmenée par les gardes du corps, c’est Conrad quim’accueille,pleindesollicitudeluiaussi.Ilm’entraînedanssonbureau,Adamétantenrendez-vous.Ilm’informedetoutcequiaétémisenplacepourmesproches.Jelesensluiaussitrèsencolèreetilprend à cœur deme rassurer. Adam et Conrad se donnent dumal. Ils prennent lamenace etmescraintesausérieux.J’aiconfianceeneux,maismoncœurseserre.

Jeneveuxpasquemafamilleoumesamissoientimpliqués!

Adampasselatêtedansl’entrebâillementdelaporte.Hayleyestarrivéeelleaussi.Adamenchaînelesrendez-vous,passed’uneentrevueprofessionnelleàuneautreconcernantsavieprivée.J’admiresacapacitéd’adaptation!

Commelaveille,nousnousinstallonsdevantHayley,etcommelaveille,j’aiunepenséepourlescamérasdesurveillance.

Jen’aipaseul’occasiondeposermaquestionàAdam.

En revanche,Hayley affiche unemine nettement plus grave que la veille. Sans attendre, elle vadroitaubut.

«Jecroisavoirmisledoigtsurquelquechosequipourraitêtreénorme!Jemesuisplongéedanstouteslescoupuresdepressequiontsuivilamortdevotrepèreetdevotreoncle.Uneenparticulierm’aintriguée.Lejournalistedel’époques’interrogeaitsurLorraine.Tenez,j’enaifaitunecopie.»

Adamattrapel’articleenquestionetcommencesalecture.Jemerapprochedeluipourlireàmontour.

–J’aibeaucouplusurlesujetetilestl’undesseulsjournalistesàparlerd’elledanscestermes,continueHayley.Il trouvaitquelamortdesassociésHillarrangeaitparticulièrementlesaffairesdeLorraineetduseulassociéencorevivant,AmbroseCarter.Enhéritantdelafortunedeleurmarietbeau-frèreenattendantquevousetPaulsoyezgrands,Lorraineprenaitlatêted’uneimmensefortuneetAmbrosele totalcommandementde l’industriepharmaceutiquecrééeà trois,avecvotreoncleetvotrepère.Pourlejournaliste,LorraineetAmbrosepouvaientfairecequ’ilsvoulaienttantquevousn’étiezpasmajeurs.

–Ambrosen’avaitplusbesoindel’accorddesautresassociéspourprendrelesdécisions,réfléchitAdam.IldevaitjusteseréféreràLorrainemaisàmonavis,tantquel’industrierapportaitbeaucoupd’argent,ellenedevaitpastrops’enoccuper…

– Le journaliste trouve la mort de vos proches trop intéressante pour eux deux, il trouve çaétrange.EtencoreplusparcequeHowardetHenrisontmortsenmêmetemps,ajouteHayley.

–Ilacreusésesinterrogations?demandeAdam.–Non, je ne trouve plus de traces de ce journaliste après cet article. Peut-être qu’il n’a pas su

prouverqu’AmbroseetLorrainevoulaientlecontrôletotaldel’empireHill.Jen’aipastrouvéqueça. J’aicontinuédecreuser laviedeHowardHill, saviemondaine, saprésencedansdesgalasdecharité, ce genre de choses. J’ai trouvéunnomqui revient beaucoup, accolé au sien.C’est SimonCollins.Çavousditquelquechose?

Adamsecouelatête.

«CeSimonCollinsestencoreenvie.C’estunancienavocatàlaretraite,quiexerçaitàl’époquedevotrepère, ici àSanFrancisco.Cequi est étrange, c’estqu’il a cessé sonactivitépeude tempsaprèslamortdeHoward.Ilestpartis’installeràBakersfield.Etilyvittoujours»,conclutHayley.

Qued’informationsd’uncoup!

LorraineetAmbroseàlatêtedel’empireHillenattendantquelesdeuxhéritiersdirects,AdametPaul,aientleurmotàdire?Est-cequ'unlienparticulierunitAmbroseetLorraine?Ilsvoulaientlespleins pouvoirs ?Mais pour faire quoi ? Pour amasser encore plus d’argent ? Howard et Henrygênaient tellement Ambrose ? Deux voix contre une pour prendre des décisions, ça devaiteffectivement apporterde la frustrationchezAmbrose.Maisde là à imaginerque lamortdedeuxhommespeutêtreliéeàcetteenviedetoutcontrôler?

EtceSimonCollins?DisparaîtreaprèslamortdeHoward?C’estlouche…Est-cequ’ilajouéunrôledanstoutça?

Je regarde Adam. Je n’aime pas ça. Est-ce que lui aussi en arrive à penser qu’on aurait pu sedébarrasserdesonpèreetdesononclepourunehistoired’argent,depouvoir?

Jem’égare,çanepeutpasalleraussiloin…

Maisquisait…

Àsuivre,nemanquezpasleprochainépisode.

Egalementdisponible:

Toi+Moi:l’uncontrel’autre

Toutlesoppose,toutlesrapproche.QuandAlmaLancasterdécrochelepostedesesrêvesàKingProductions,elleestdéterminéeàallerdel’avantsansseraccrocheraupassé.Bosseuseetambitieuse,elleévoluedanslecercletrèsferméducinéma,maisn’estpasdugenreàsefairedesfilms.Sonboulotl’accapare;l’amour,ceserapourplustard!Pourtant,lorsqu’ellerencontresonPDGpourlapremièrefois–lesublimeetcharismatiqueVadimKing–,ellereconnaîtimmédiatementVadimArcadi,leseulhommequ’elleaitvraimentaimé.Douzeansaprèsleurdouloureuseséparation,lesamantsseretrouvent.Pourquoia-t-ilchangédenom?Commentest-ilarrivéàlatêtedecetempire?Etsurtout,vont-ilsparveniràseretrouvermalgrélessouvenirs,malgrélapassionquileshanteetlepasséquiveutlesrattraper?

Tapotezpourvoirunextraitgratuit.