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67 Rayonnement thermique cohérent Le rayonnement électromagnétique produit par un corps à température T est généralement considéré comme l’exemple type du rayonnement incohérent que l’on oppose au rayonnement laser. L’un est quasi isotrope tandis que l’autre est très directionnel, l’un a un large spectre tandis que l’autre est quasi- monochromatique. Aussi surprenant que cela puisse paraître, le rayonnement thermique de bon nombre de corps est cohérent à une distance de la surface émettrice inférieure à la longueur d’onde. Nous verrons que ces effets peuvent être prédits à l’aide d’une approche électromagnétique du rayonnement thermique. Plusieurs expériences récentes ont confirmé ces propriétés inattendues. e rayonnement thermique est le rayonnement émis par un corps à température T. Le soleil, des braises ardentes, le filament de tungstène d’une ampoule incandescente sont des exemples de sources de rayonnement thermique. Bien que la lumière soit une onde électromagnétique, le rayonne- ment thermique est très souvent présenté dans les cours de thermodynamique ou de physique statistique. Après être passé rapidement sur le fait qu’il s’agit bien d’ondes électromagnétiques, les exposés s’attardent générale- ment sur les propriétés thermodynamiques du rayonne- ment à l’intérieur d’une enceinte isotherme appelé rayonnement de corps noir. Ce lien fort entre le rayon- nement de corps noir et la thermodynamique n’est pas fortuit. La célèbre explication du spectre du rayonne- ment de corps noir due à Planck résulte d’un raisonne- ment thermodynamique. On montre ainsi que l’énergie du rayonnement de corps noir varie comme T 4 . On peut également calculer la pression radiative du rayon- nement par des arguments de thermodynamique. Une description phénoménologique en termes de flux d’énergie est suffisante pour traiter des applications d’éclairement ou de chauffage radiatif. Cette approche, appelée radiométrie, est ainsi toujours préférée aux notions de champ électromagnétique lorsqu’il s’agit de traiter du rayonnement thermique. Une telle descrip- tion phénoménologique, commode et efficace pour traiter de nombreuses applications, laisse néanmoins en suspens de nombreuses questions concernant la nature du rayonnement thermique. Nous allons présenter dans cet article des progrès récents dans la compréhension de la nature du rayonnement thermique et de ses proprié- tés. Ces progrès ont été stimulés par l’étude des champs électromagnétiques au voisinage des sources, étude ren- due possible grâce au développement de l’optique de champ proche ou nano-optique. En effet, lorsque l’on s’intéresse au rayonnement à des distances de la source inférieures à la longueur d’onde, de nouveaux phéno- mènes inattendus apparaissent : la densité d’énergie devient très supérieure à la densité d’énergie du rayon- nement de corps noir, le spectre du rayonnement ne suit plus la loi de Planck et le champ peut devenir cohé- rent spatialement. Toutes ces propriétés requièrent une description dans un cadre électromagnétique et nous conduisent à réexaminer notre façon de décrire le rayonnement thermique. Le rayonnement thermique Essayons de comprendre l’origine du rayonnement thermique dans un contexte électromagnétique. On sait que pour une antenne, les champs rayonnés sont pro- duits par des courants induits dans l’antenne. Ces cou- rants ne sont rien d’autre qu’un déplacement d’électrons dans un métal. Dans le cadre d’une description classique du rayonnement électromagnétique par une antenne, on montre que ce sont les mouvements accélérés des charges qui produisent le champ électromagnétique. Peut-on considérer qu’un filament de tungstène incan- descent dans une ampoule est équivalent à une antenne ? La théorie des antennes nous dit qu’un cou- rant à 50 Hz produit un rayonnement très faible à 50 Hz mais n’explique pas l’émission de lumière blanche. En fait, le mécanisme d’émission de lumière est relié à l’augmentation de la température du filament. Or la température est une mesure de l’agitation thermique des électrons. La densité de courant j peut donc se décom- poser en deux composantes : sa valeur moyenne et une partie fluctuante. La valeur moyenne est pilotée par la tension appliquée au filament tandis que la partie fluc- tuante dépend de la température. La lumière blanche est due au rayonnement des fluctuations de la densité de cou- rant. De façon plus générale, lorsqu’un corps est chauffé, ses porteurs de charge (électrons, ions, atomes d’un solide portant une charge partielle) sont l’objet de mou- vements d’agitation thermique. Chaque porteur se comporte alors comme une charge accélérée qui rayonne. L Article proposé par : Jean-Jacques Greffet, [email protected], Laboratoire d’énergétique moléculaire et macroscopique, combustion (EM2C), CNRS, Carsten Henkel, [email protected], Institut fuer Physik, Universitaet Potsdam

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Rayonnement thermique cohérent

Le rayonnement électromagnétique produit par un corps à température T est généralement considérécomme l’exemple type du rayonnement incohérent que l’on oppose au rayonnement laser. L’un est quasiisotrope tandis que l’autre est très directionnel, l’un a un large spectre tandis que l’autre est quasi-monochromatique. Aussi surprenant que cela puisse paraître, le rayonnement thermique de bon nombre decorps est cohérent à une distance de la surface émettrice inférieure à la longueur d’onde. Nous verrons queces effets peuvent être prédits à l’aide d’une approche électromagnétique du rayonnement thermique.Plusieurs expériences récentes ont confirmé ces propriétés inattendues.

e rayonnement thermique est le rayonnementémis par un corps à température T. Le soleil,des braises ardentes, le filament de tungstène

d’une ampoule incandescente sont des exemples desources de rayonnement thermique. Bien que lalumière soit une onde électromagnétique, le rayonne-ment thermique est très souvent présenté dans les coursde thermodynamique ou de physique statistique. Aprèsêtre passé rapidement sur le fait qu’il s’agit bien d’ondesélectromagnétiques, les exposés s’attardent générale-ment sur les propriétés thermodynamiques du rayonne-ment à l’intérieur d’une enceinte isotherme appelérayonnement de corps noir. Ce lien fort entre le rayon-nement de corps noir et la thermodynamique n’est pasfortuit. La célèbre explication du spectre du rayonne-ment de corps noir due à Planck résulte d’un raisonne-ment thermodynamique. On montre ainsi que l’énergiedu rayonnement de corps noir varie comme T4. Onpeut également calculer la pression radiative du rayon-nement par des arguments de thermodynamique. Unedescription phénoménologique en termes de fluxd’énergie est suffisante pour traiter des applicationsd’éclairement ou de chauffage radiatif. Cette approche,appelée radiométrie, est ainsi toujours préférée auxnotions de champ électromagnétique lorsqu’il s’agit detraiter du rayonnement thermique. Une telle descrip-tion phénoménologique, commode et efficace pourtraiter de nombreuses applications, laisse néanmoins ensuspens de nombreuses questions concernant la naturedu rayonnement thermique. Nous allons présenter danscet article des progrès récents dans la compréhension dela nature du rayonnement thermique et de ses proprié-tés. Ces progrès ont été stimulés par l’étude des champsélectromagnétiques au voisinage des sources, étude ren-due possible grâce au développement de l’optique dechamp proche ou nano-optique. En effet, lorsque l’ons’intéresse au rayonnement à des distances de la sourceinférieures à la longueur d’onde, de nouveaux phéno-mènes inattendus apparaissent : la densité d’énergiedevient très supérieure à la densité d’énergie du rayon-

nement de corps noir, le spectre du rayonnement nesuit plus la loi de Planck et le champ peut devenir cohé-rent spatialement. Toutes ces propriétés requièrent unedescription dans un cadre électromagnétique et nousconduisent à réexaminer notre façon de décrire lerayonnement thermique.

Le rayonnement thermique

Essayons de comprendre l’origine du rayonnementthermique dans un contexte électromagnétique. On saitque pour une antenne, les champs rayonnés sont pro-duits par des courants induits dans l’antenne. Ces cou-rants ne sont rien d’autre qu’un déplacement d’électronsdans un métal. Dans le cadre d’une description classiquedu rayonnement électromagnétique par une antenne,on montre que ce sont les mouvements accélérés descharges qui produisent le champ électromagnétique.Peut-on considérer qu’un filament de tungstène incan-descent dans une ampoule est équivalent à uneantenne ? La théorie des antennes nous dit qu’un cou-rant à 50 Hz produit un rayonnement très faible à 50 Hzmais n’explique pas l’émission de lumière blanche. Enfait, le mécanisme d’émission de lumière est relié àl’augmentation de la température du filament. Or latempérature est une mesure de l’agitation thermique desélectrons. La densité de courant j peut donc se décom-poser en deux composantes : sa valeur moyenne et unepartie fluctuante. La valeur moyenne est pilotée par latension appliquée au filament tandis que la partie fluc-tuante dépend de la température. La lumière blanche estdue au rayonnement des fluctuations de la densité de cou-rant. De façon plus générale, lorsqu’un corps est chauffé,ses porteurs de charge (électrons, ions, atomes d’unsolide portant une charge partielle) sont l’objet de mou-vements d’agitation thermique. Chaque porteur secomporte alors comme une charge accélérée quirayonne.

L

Article proposé par : Jean-Jacques Greffet, [email protected], Laboratoire d’énergétique moléculaire et macroscopique,combustion (EM2C), CNRS, Carsten Henkel, [email protected], Institut fuer Physik, Universitaet Potsdam

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Il y a quand même une forte différence avec uneantenne ; à l’évidence, lorsqu’un fil est chauffé, on negénère pas de courant et l’intensité moyenne est doncnulle ! Cependant, la valeur moyenne quadratique del’intensité est non nulle. Il en va de même pour lechamp rayonné. Le champ moyen rayonné est nul maisla valeur moyenne du carré du champ est non nulle. Enrésumé, on peut utiliser la théorie des antennes pourmodéliser l’émission de la lumière : il suffit de considé-rer qu’il existe des courants fluctuants dont le spectre defréquences est étendu. Cette approche est analogue aumodèle de Langevin du mouvement brownien : onintroduit un terme source aléatoire qui permet demodéliser les fluctuations.

Il est remarquable de constater que H.A. Lorentzavait proposé cette approche dans une série de confé-rences faites à l’Université de Columbia dès 1905. Pour-tant, cette approche a été oubliée dans l’enseignementdu rayonnement thermique. Il est probable que l’unedes raisons soit la méconnaissance des fluctuations de ladensité de courant. En effet, en 1905, la mécaniquequantique n’existait pas. Les électrons étaient décrits parune approche classique. Le modèle de gaz d’électronslibres dans un solide conduisait ainsi nécessairement àune vitesse quadratique moyenne de l’électron telle quemv2 = 3kT. Il en résulte que les valeurs quadratiquesmoyennes de la densité de courant et des champs sontproportionnelles à la température. Avec cette approche,il est donc impossible de retrouver le spectre du corpsnoir donné par la loi de Planck. La description électro-magnétique conduisait donc à une impasse. Ce n’estque près de 50 ans plus tard que Callen et Welton ontmontré comment calculer les fluctuations de la densitéde courant en établissant la version quantique du théo-rème de fluctuation-dissipation. Dès lors, il devenaitpossible de calculer les champs rayonnés par les courantsdus aux fluctuations thermiques. Ce résultat a très rapi-dement été utilisé par de nombreux auteurs pour étu-dier les forces de Van der Waals. Rytov a appliqué cerésultat au problème du rayonnement thermique et a étécapable de donner un fondement théorique aux loisphénoménologiques d’émission. Mais l’intérêt majeurde cette théorie n’est pas de reproduire des comporte-ments connus. Elle permet de prédire et d’expliquer deseffets hors d’atteinte des lois phénoménologiques. Nousallons commencer par réexaminer l’émission de rayon-nement en champ proche, c’est-à-dire à une distance dela source inférieure à la longueur d’onde.

Cohérence temporelle du rayonnement thermique en champ proche

Etudions tout d’abord le spectre de la densité d’éner-gie électromagnétique à l’approche d’une interface. Lafigure 1 présente le calcul de cette densité d’énergie au-

dessus d’une surface de carbure de silicium (SiC) à 300Kà différentes distances. Sur la figure du haut, on reconnaîtdans l’enveloppe de la courbe l’allure de la fonction dePlanck qui décrit le rayonnement de corps noir. La posi-tion λm du maximum de cette courbe dépend de la tem-pérature T suivant la loi λmT = 2896 µm K ; elle est del’ordre de 10 µm à 300 K. On observe sur la figure unebande spectrale pour laquelle la densité d’énergie est fai-ble. Elle correspond à la présence des phonons optiquesce qui se traduit par un indice très élevé de sorte que leSiC est fortement réfléchissant et donc peu émissif. Rap-prochons-nous maintenant de la source. Pour une dis-tance de l’ordre d’une fraction de λm, le spectre changeprofondément d’amplitude et d’allure : la densitéd’énergie augmente de plusieurs ordres de grandeur etdes structures apparaissent dans les plages spectrales où lematériau est fortement réfléchissant. A une distance de100 nm, un seul pic finit par dominer tout le spectre.

Pour comprendre ce comportement, on peut rai-sonner de deux façons différentes. Le SiC est un maté-riau constitué d’atomes différents qui portent une

Figure 1 – Evolution du spectre d’énergie électromagnétique avec la dis-tance de détection au-dessus d’une surface de carbure de silicium (SiC).Température T = 300 K, distances à l’interface z = 100 µm (haut), 1 µm(milieu) et 100 nm (bas).

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charge partielle. L’agitation thermique des atomes àl’intérieur d’un élément de volume conduit ainsi àl’apparition d’une densité de courant aléatoire. Ainsi,chaque élément de volume se comporte comme unpetit dipôle rayonnant aléatoire. Dès lors, on comprendque le rayonnement augmente à courte distance car lestermes en 1/r3 du champ dipolaire deviennent domi-nants à courte distance par rapport aux termes dechamp lointain qui varient comme 1/r. Par ailleurs, oncomprend également que le rayonnement deviennequasi-monochromatique. En effet, on s’attend à ce queles amplitudes de vibration des dipôles aléatoires soientimportantes pour les fréquences propres de vibrationdes liaisons chimiques dans le matériau. On observed’ailleurs des pics beaucoup plus étroits pour les maté-riaux cristallins que pour les matériaux amorphes telsque le verre. Ainsi, les phonons optiques qui rendentun matériau très réfléchissant et donc peu absorbant etpeu émissif en champ lointain (bande spectrale appeléereststrahlen) ont l’effet inverse en champ proche car ils

produisent alors un pic d’émission. Le second point devue est un raisonnement dans l’espace de Fourier. Lanotion d’onde de surface (voir l’encadré 1) joue alors unrôle essentiel. Leur relation de dispersion ω(k) s’aplatitlorsque le vecteur d’onde k augmente ce qui conduit àune singularité dans la densité de modes. Le pic dans lespectre d’énergie apparaît à la fréquence correspon-dante. Il est invisible dans le champ lointain parce quele champ électrique associé à la résonance de surface estlocalisé à une distance de l’ordre de 1/k et ne peut sepropager. Dans les cristaux ioniques évoqués ci-dessus,les résonances se trouvent plutôt dans l’infrarouge, etl’on parle de « phonon-polariton » parce que la réponserésonnante à un champ électrique provient des dépla-cements des ions (donc des phonons). Les mêmes effetssont également observables pour les métaux, mais dansl’ultraviolet. Dans la modélisation d’un métal par unplasma simple, un « plasmon-polariton » apparaît

à où la longueur d’onde de plasma vaut

Les ondes de surfaceEncadré 1

Une onde de surface est une onde qui se propage paral-lèlement à une interface et qui décroît exponentiellement(on dit également qu’elle est évanescente) de part et d’autrede l’interface. Elle transporte de l’énergie parallèlement àl’interface mais le flux d’énergie perpendiculairement àl’interface est nul. C’est une onde de densité de charges desurface couplée à un champ électrique (et magnétique).C’est donc à la fois une onde mécanique et une ondeélectromagnétique : on parle de polaritons. Comme pourtout état lié, sa fréquence est fixée par une relation de dis-

persion ω = ω(k) avec .

où ε désigne la permittivité du milieu. Dans le cas desmétaux, les propriétés optiques sont dues aux électronslibres et sont assez bien décrites par un modèle de gazd’électrons libres. On trouve alors en négligeant les pertes :

où Ωp est la fréquence plasma, propor-tionnelle à la racine carrée de la densitéd’électrons. On parle alors d’un « plas-mon de surface ». Une formule similaires’applique aux cristaux polaires tels quele SiC où le NaCl où les déplacementsdes ions (de charge opposée) créent uneexaltation résonnante du champ depolarisation à la fréquence des phonons

optiques. A la surface d’un tel cristal apparaissent des« phonons-polaritons de surface ».

La figure de gauche montre que deux régimes différentsapparaissent dans la relation de dispersion d’un plasmon desurface : aux grandes longueurs d’onde, k Ωp/c, la rela-tion de dispersion est proche de celle d’un photon, ω ≈ ck,et le champ du plasmon pénètre sur plusieurs longueursd’onde du côté du vide. Dans le cas contraire, k Ωp/c, lafréquence tend vers une asymptote constante,

, alors que l’épaisseur du champ dans le videest de l’ordre de 1/k. Cette asymptote est la trace de la réso-nance plasmon (ou phonon-polariton) dans le volume dumatériau. C’est à cause des conditions aux limites à la sur-face qu’elle apparaît à une fréquence différente que Ωp.

Notons finalement que dans un matériau à pertes, laconstante diélectrique ε(ω) est complexe. On peut alorsparler d’un k complexe, l’inverse de sa partie imaginairecorrespond alors à la longueur d’atténuation de l’onde desurface le long de l’interface (voir la figure de droite).

k (kx2

ky2)1 2⁄

+=

k ω( ) ωc---- ε ω( )–

ε ω( )– 1–-------------------------=

k ω( ) ωc----

Ωp2 ω2

Ωp2

2ω2–

-----------------------=

ω Ωp→ 2⁄

Figure 1 – A gauche : relation de dispersion du plasmon de surface pour une interface vide/métal(Ωp est la fréquence de plasma du métal). Le point sur la courbe marque les paramètres pourl’image de droite : carte instantanée de l’amplitude du champ magnétique. En rouge (respective-ment magenta, bleu clair) : valeurs positives (respectivement négatives, nulles). En noir : lignes duchamp électrique instantané. L’onde de surface se propage vers la droite.

λpps λp 2=

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λp ≈ 210 nm pour le sodium, par exemple. C’est doncl’excitation thermique de ces ondes qui donne lieu aurétrécissement spectaculaire du spectre du rayonne-ment thermique observé en champ proche. On abou-tit ainsi à cette conclusion surprenante : le champrayonné thermiquement vu par un atome placé surl’interface est quasi-monochromatique. Il en résulteque ce champ est temporellement cohérent (voirencadré 2). L’origine physique de la cohérence tempo-relle est aisée à comprendre. Alors même qu’unesource thermique produit des champs électromagnéti-ques décorrélés dans le temps car ils sont produits pardes mouvements d’agitation thermique décorrélés, dèslors que des modes de surface existent, ils contribuentau champ. Le temps pendant lequel cette contributiondominante au champ est corrélée est tout simplementla durée de vie du mode de surface.

Des expériences de physique atomique ont fournirécemment une confirmation de l’augmentation de ladensité d’énergie du rayonnement thermique au voisi-nage d’une source. L’un des auteurs avait prédit dès1999 que des atomes dans un piège magnétique auraientune durée de vie plus courte en approchant le pièged’une surface métallique (à une distance inférieure d’unedizaine de microns environ). Le groupe d’E. Cornell àBoulder (Colorado, USA) (prix Nobel 2001 pour ledéveloppement des condensats de Bose-Einstein de gazatomiques dilués) a utilisé un champ magnétique inho-mogène pour piéger des atomes refroidis par laser à destempératures de l’ordre de 1µK et moins. Par l’effetZeeman, les atomes « voient » un potentielVm(r) ∝ m|B(r)| où m est le nombre quantique magné-tique et |B(r)| le module du champ magnétique. Lechamp magnétique dû à l’agitation thermique des élec-trons dans la surface métallique peut faire passer l’atomedans un autre état (de nombre quantique magnétiquem′ = m ± 1) s’il présente une composante à la fréquencede Larmor, νL ∝ |B(r)|, avec une direction perpendi-culaire au champ statique du piège. Ces conditions sontfacilement réunies pour les champs thermiques dans labande radio νL = 1...100 MHz qu’on rencontre typi-quement. Dans son nouvel état m′, l’atome se trouvedans un potentiel moins profond, par exemple. Aprèsquelques transitions de ce type, le potentiel magnétiquechange de signe, et l’atome est éjecté du piège par le gra-dient du champ magnétique. On peut montrer que letaux de ces transitions entre états Zeeman est propor-tionnel à la densité spectrale du champ magnétique(règle d’or de Fermi). Dans l’expérience d’E. Cornell,on observe ainsi que la durée de vie du piège magnéti-que diminue lorsqu’on approche le centre du pièged’une surface métallique. On trouve un accord quantita-tif avec les prédictions théoriques. Remarquons quedans ces mesures, on se trouve très fortement dans lerégime du champ proche, puisque λ est de l’ordre dequelques mètres au moins. La densité spectrale duchamp magnétique est alors augmentée d’une dizained’ordres de grandeurs par rapport à la loi de Planck !

Cohérence spatiale du rayonnement thermique en champ proche

Nous venons de voir que le spectre d’émissiond’énergie est profondément modifié en champ proche.Le spectre devient quasi-monochromatique, ce quicorrespond à une source temporellement cohérente.Nous allons maintenant montrer que les sources ther-miques peuvent être également cohérentes spatiale-ment, ce qui signifie que les champ émis en deux pointsdistincts de la source sont corrélés. On considère trèsgénéralement que les sources thermiques sont incohé-rentes spatialement. La raison en est que les mouve-ments d’agitation thermiques des électrons sontdécorrélés en deux points distincts. Les champs émissont donc a fortiori décorrélés et par conséquent ne peu-vent pas interférer (voir encadré 2). Comme au paragra-phe précédent, l’existence de modes de surface peutmodifier considérablement la situation. Nous montronssur la figure 2a une mesure du rayonnement thermiqued’un ruban d’or de 20 µm de large et 80 nm de hautplacé sur un substrat de SiC. Cette mesure a été effec-tuée par l’équipe de Yannick de Wilde à l’aide dumicroscope de champ proche (Thermal RadiationScanning Tunneling Microscope) construit à l’ESPCI.Dans ce montage, l’échantillon est chauffé afin d’aug-menter son émission thermique. Pour détecter lechamp au voisinage de la surface (champ proche), onapproche une pointe qui diffuse le champ vers un sys-tème de collection. En déplaçant l’échantillon sous lapointe on peut ainsi réaliser une cartographie du champémis thermiquement.

Le résultat marquant observé sur la figure est la pré-sence de franges. Ces franges sont une signature directede la cohérence du champ proche émis thermique-ment. Cette structure peut s’interpréter de la façon sui-vante. Tout d’abord, rappelons que chaque élément devolume du système est une source aléatoire de rayon-nement décorrélée des autres éléments de volume.Chaque élément de volume peut exciter des ondes desurface (des plasmons de surface) qui se propagent surde grandes distances le long du ruban d’or. Ainsi, lacorrélation du champ en divers points est simplementdue à la propagation d’une onde le long de la surface.

Examinons maintenant d’où proviennent les fran-ges. Les ondes de surface se propagent le long du rubanet se réfléchissent sur les bords du ruban. Ainsi, leruban, se comporte comme un guide d’ondes planairedes modes de surface. On peut vérifier cette interpré-tation en modifiant la largeur du ruban. Comme on s’yattend, on observe une variation du nombre de frangescomme on le voit sur la figure 2a. Au-delà de cettemise en évidence directe de la cohérence du champthermique en champ proche, la mesure illustre la pos-sibilité de réaliser une image des modes électromagné-tiques de la surface.

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Emission thermique cohérente en champ lointain

Les images de champ proche révèlentl’existence de la cohérence spatiale durayonnement émis thermiquement lorsquedes ondes de surface sont excitées. Comme,par définition, les ondes de surface sontconfinées au voisinage de l’interface, oncomprend que la cohérence spatiale durayonnement thermique n’ait pas été obser-vée plus tôt. La question qui se pose main-tenant est de savoir s’il est possibled’exporter la cohérence spatiale du champproche vers le champ lointain. En d’autrestermes, peut-on coupler l’onde de surface àune onde se propageant dans le vide ?

Le problème posé est analogue au pro-blème des coupleurs qui permettent de fairerayonner les guides d’onde. En pratique, ilsuffit de graver sur l’interface un réseaupériodique de traits de largeur inférieure

La cohérenceEncadré 2

La notion de cohérence est fondamentalement liée aufait que les sources de lumière ont toujours un caractèrealéatoire. Une source de rayonnement thermique est aléa-toire car les courants qui créent le champ sont les mouve-ments d’agitation thermique aléatoires des charges. Un laserest également une source aléatoire car il y a toujours desprocessus d’émission spontanée qui créent une fluctuationde la phase du rayonnement émis. La cohérence des champsclassiques n’est autre que la notion de corrélation du champen deux points et à deux instants qui peut se décrire par lavaleur moyenne ⟨E(r1, t1) E(r2, t2)⟩.

La façon la plus simple de mettre en évidence la cohé-rence d’un champ électromagnétique est de produire desinterférences. Derrière un écran opaque percé de deuxtrous en r1 et en r2, les champs qui se propagent jusqu’à unpoint M situé à une même distance r = cτ des deux troussont de la forme K1 E(r1, t − τ) et K2 E(r2, t − τ). Les détec-teurs optiques sont sensibles à l’intensité, de sorte que lesignal observé est proportionnel au carré du champ. Onobtient ainsi la somme des intensités produites par les deuxtrous séparément plus un terme d’interférence qui est préci-sément la fonction de corrélation ⟨E(r1, t−τ) E(r2, t−τ)⟩. Onvoit ainsi que le terme croisé ou terme d’interférence carac-térise la corrélation du champ en deux points séparés (lesdeux trous) au même instant. On parle de cohérence spa-tiale. C’est ce que permet de mesurer un dispositif de trousd’Young par observation à égale distance des deux trous.On peut au contraire s’intéresser à la fonction decorrélation du champ au même point mais à deux instants

distincts. On parle alors de cohérence temporelle. Il s’agiten quelque sorte de caractériser la mémoire du phénomènealéatoire. L’échelle de temps caractéristique de décroissancede la fonction de corrélation est appelée durée de cohé-rence temporelle et notée τcoh. Le type même d’interféro-mètre permettant de faire cette mesure est l’interféromètrede Michelson éclairé par une source ponctuelle (un troudans un écran). Un détecteur placé en sortie de l’interféro-mètre reçoit deux champs issus du même point r1 mais quiont suivi deux chemins de longueur différente. Le termed’interférence est donc de la forme :

Indiquons pour finir une propriété essentielle ; la duréede cohérence temporelle τcoh et la largeur en fréquence duchamp ∆ν sont telles que ∆ν · τcoh ≈ 1. On peut augmenterla durée de cohérence en diminuant la largeur spectrale d’unchamp par filtrage. De même, la longueur de cohérencetransverse suivant l’axe Ox ∆x d’un faisceau lumineux estinversement proportionnelle à sa largeur en vecteur d’onde∆kx ou en d’autres termes à son ouverture angulaire. Onpeut augmenter la longueur de cohérence en réduisantl’ouverture angulaire d’un faisceau par filtrage. Ainsi, unfaisceau laser d’un pointeur est à la fois monochromatique(cohérent temporellement) et quasi parallèle (cohérent spa-tialement). A contrario, un charbon ardent émet dans toutesles directions (faible cohérence spatiale) un rayonnement despectre très large (faible cohérence temporelle).

E r1 t τ1–,( )E r1 t τ2–,( )⟨ ⟩ .

Figure 2 – Intensité du rayonnement thermique de champ proche au-dessus d’un ruban d’or(hauteur 100 nm, largeur variable de 10 à 30 µm, longueur de 1 mm) détecté avec un filtre centréà 10,9 µm de largeur 1 µm. On observe des franges d’interférence qui mettent en évidence lacohérence spatiale du champ émis thermiquement. (a) Image de l’émission de champ proche(Thermal Radiation Scanning Tunneling Microscopy) pour trois largeurs du ruban, (b) Calcul numé-rique de la densité d’états électromagnétiques locale pour les mêmes largeurs à deux hauteurs dif-férentes. (D’après Nature, De Wilde et al. 444, p. 740 (2006).

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à la longueur d’onde. Chaque trait est éclairé par l’ondede surface et la diffuse dans toutes les directions. En gra-vant un réseau de traits disposés périodiquement, leschamps diffusés par les différents traits interfèrent. De cefait, seules les directions correspondant à des directionsd’interférences constructives apparaissent dans le dia-gramme de rayonnement. Ainsi, la directivité de lasource apparaît bien comme une conséquence directe dela cohérence du champ dans le plan de la source. Souli-gnons qu’en l’absence d’ondes de surfaces, les champsémis thermiquement au niveau des différents traitsseraient décorrélés de sorte qu’il n’y aurait pas d’interfé-rences. Le réseau ne crée pas la cohérence, il révèle lacohérence existante. Afin d’observer le phénomène, ilest nécessaire d’optimiser le couplage. Des traits troppetits ne diffusent pas assez le rayonnement tandis quedes traits trop importants empêchent l’onde de surfacede se propager. Un calcul numérique permet d’optimi-ser le profil et d’obtenir le maximum d’émission thermi-que, c’est-à-dire autant qu’un corps noir.

La figure 3 représente le diagramme d’émission d’unréseau de SiC à 11,36 µm dans le plan perpendiculaireaux traits du réseau. On observe que le rayonnement estconfiné dans deux lobes angulairement étroits. Ce dia-gramme d’émission ressemble tout à fait aux diagram-mes d’émission des antennes. C’est une signature de lacohérence du champ dans la source. On peut montrerque la largeur angulaire des lobes est proportionnelle aurapport λ/lcoh où λ est la longueur d’onde dans le vide etlcoh est la longueur de cohérence. Nous avons récem-ment reproduit ce type d’expérience sur des réseaux detungstène dont les plasmons de surface apparaissent dansl’infrarouge. Nous avons ainsi pu mesurer des ouvertu-res angulaires de 14 mrad. A titre de comparaison, unfaisceau typique d’un laser CO2 est large d’environ5 mrad. Si le rayonnement thermique ainsi produit esttrès directionnel, ce qui est la signature de la cohérencespatiale dans un plan transverse à la direction de propa-gation, il ne faut pas en conclure pour autant que l’on a

affaire à un laser thermique. Le nombre moyen de pho-tons dans un mode est toujours donné par la loi deBose-Einstein. Ce chiffre est faible devant 1 tandis quepour un laser, le mode est très fortement peuplé. Parailleurs, le rayonnement thermique n’est pas monochro-matique dans ce régime. Le spectre d’émission dépendde l’existence d’ondes de surface donc de leur relationde dispersion.

Une façon simple de comprendre l’origine de lacohérence du rayonnement thermique est de raisonneren termes de filtrage. On sait en effet que la réduction dela largeur spectrale d’un signal augmente sa cohérencetemporelle. De même, la cohérence spatiale transversed’un faisceau est reliée à son ouverture angulaire. Onpeut se représenter l’interface entre le matériau à tempé-rature T et le vide comme un filtre placé entre un corpsnoir (le rayonnement à l’intérieur du matériau à tempé-rature T ) et le vide. L’interface est caractérisée par unfacteur de transmission qui est faible pour un métal pourtoutes les directions : le métal est un mauvais émetteur.On voit avec ce point de vue que la notion d’émissivitéd’un corps est identique à la notion de transmittivité d’uneinterface. Ceci permet de comprendre la loi de Kirchhoffqui exprime l’égalité entre l’émissivité d’un matériau etson absorptivité. En effet, les deux apparaissent commela transmittivité air-métal ou métal-air. Or, ces deuxgrandeurs sont égales par la propriété de réciprocité :égalité du signal détecté après permutation de la sourceet du détecteur, toutes choses égales par ailleurs. Cetteimage permet également de comprendre l’émissionthermique cohérente en champ lointain. Le couplagerésonant entre l’onde de surface et une onde plane crééepar le réseau produit un facteur de transmission voisin de1 pour une fréquence et une direction bien définies.L’émission par la surface apparaît ainsi comme le résultatdu filtrage de l’émission d’un corps noir par une interfacequi bloque la majorité des directions d’émission.

Transferts thermiques en champ proche

Pour finir, discutons la contribution du rayonnementau transfert de chaleur entre deux matériaux à des tem-pératures différentes. Dans la géométrie la plus simple,deux corps planaires se font face l’un à l’autre. On igno-rera ici la transmission de chaleur par l’échange de molé-cules de gaz à travers l’interstice. Dans la limite « grandedistance » (distance d grande par rapport à la longueurd’onde thermique dominante λT = hc/kBT ), c’est le fluxdu rayonnement thermique qui donne un flux net de

chaleur proportionnel à . Ce flux est indépen-

dant de la distance si la taille des deux surfaces est plusgrande que la distance. Le spectre du flux ressemblebeaucoup à celui du corps noir (la loi de Planck), à part lamodulation par l’émissivité des matériaux.

Figure 3 – Diagramme angulaire d’émission par un réseau gravé sur unesurface de SiC. Rouge : mesure, vert : calcul théorique. La présence de lobesd’émission (qui ressemblent à ceux d’une antenne radio) est une signaturede la cohérence spatiale de la source. (d’après Greffet et al., Nature 416,2002, p. 61.)

T24 T1

4–

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Rayonnement thermique cohérent

Un comportement complètement différent émergelorsque la distance d diminue (voir la figure 4). Le fluxaugmente sensiblement si d est inférieure à la longueurd’onde thermique λT ≈ 50µm (à température ambiante).On trouve alors une loi de puissance en 1/d2. Dans cerégime, l’échange de chaleur s’effectue par le champproche : les ondes évanescentes associées au mouve-ment thermique des charges dans le matériau 1 passent,comme dans l’effet tunnel, à travers la zone vide et secouplent aux charges dans le matériau 2. Le bilan de tra-vail effectué par les ondes évanescentes sur les charges« de l’autre côté » donne alors le flux net de chaleur.Techniquement, l’énergie échangée par unité de tempset de surface peut être calculée à l’aide de la composantenormale aux surfaces du vecteur de Poynting, moyennésur le spectre thermique des charges (et courants) dansles matériaux. Une analyse spectrale est possible et mon-tre qu’aux courtes distances, c’est le pic de l’onde desurface qui domine le spectre.

Ce comportement peut aussi se comprendre par unargument d’électrostatique. La distance d est bien infé-rieure aux longueurs d’ondes pertinentes (leur valeur

minimale n’est pas beaucoup plus petite que λT). Onpeut donc négliger le retard dans la propagation duchamp entre les charges en mouvement thermique depart et d’autre de l’interstice. Les matériaux étant globa-lement neutres, ce sont les composantes en 1/r3 durayonnement dipolaire qui assurent le transfert d’énergie.Le mécanisme responsable du transfert d’énergie est doncun couplage dipôle-dipôle de part et d’autre de l’inters-tice. La densité d’énergie échangée entre deux élémentsde volume est donc proportionnelle à 1/r6, et les intégra-les sur les deux demi-espaces remplis de matériau don-nent une loi de puissance en 1/d2 pour le flux d’énergiepar unité de surface. On obtient ainsi une conductivitéthermique qui augmente de plus de deux ordres de gran-deur lorsque la distance devient inférieure de 100 nm.

En conclusion, un sujet qui semblait clos depuisPlanck recèle bien des surprises dès lors qu’on s’appro-che à quelques nanomètres de la source. L’explorationdes conséquences de ces propriétés en est juste à sesdébuts.

Figure 4 – Coefficient d’échange thermique entre deux surfaces planes deSiC en fonction de la distance d. Le flux surfacique s’écrit sous la formeh (T1 – T2) lorsque l’écart de température est faible. La température

moyenne est de . Les courbes donnent les contribu-

tions des différentes polarisations (s ou p) des ondes propagatives (k ≤ ω /c)et évanescentes (k ≥ ω /c). On voit que l’accroissement du flux est dû à lacontribution des ondes évanescentes de polarisation p.

12--- T1( T2)+ 300= K

POUR EN SAVOIR PLUS

Lorentz (H.A.), « The theory of electrons and its applicationsto the phenomena of light and radiant heat », Ed. J.Gabay, Paris, 1916. http://gallica.bnf.fr

Rytov (S.), Kravtsov (Y.), Tatarskii (V.), « Principles of Statisti-cal Radiophysics », Springer-Verlag, Berlin, 1989.

Yannick De Wilde, Florian Formanek, Rémi Carminati, BorisGralak, Paul-Arthur Lemoine, Karl Joulain, Jean-PhilippeMulet, Yong Chen and Jean-Jacques Greffet, « Nature »,444, 2006, p. 740.

A. Shchegrov, K. Joulain, R. Carminati, J.-J. Greffet, « Phys.Rev. Lett. », 85, 2000, 1548.

J.-J. Greffet, R. Carminati, K. Joulain, J.-P. Mulet, S. Mainguy,Y. Chen, « Nature », 416, 2002, 61.

C. Henkel, S. Pötting et M. Wilkens, « Appl. Phys. », B69,1999, 277.

K. Joulain, J.-P. Mulet, F. Marquier, R. Carminati, J.-J. Greffet,« Surf. Sci. Rep. », 57, 2005, 59.

Ont également participé à ce travail R. Carminati, Y. Chen,S. Collin, F. Formanek, B. Gralak, K. Joulain, P.A. Lemoine,S. Mainguy, F. Marquier, J.-P. Mulet, F. Pardo, J.L. Pelouard,A. Shchegrov, Y. De Wilde.