Post on 19-Jun-2022
UNIVERSITÉ D’ANTANANARIVO
FACULTE DES DROIT – GESTION - ECONOMIE ET SOCIOLOGIE
DEPARTEMENT DROIT
MEMOIRE DE D.E.A. EN DROIT DES AFFAIRES
THEME : LA PROTECTION DE LA BANQUE DANS LE CAUTIONNEMENT D’UN COMPTE COURANT.
Presenté par : Mr. RAZANAKOTO Ny Ony Arilaza.
Directeurs d’etude : Mr. RAMAROLANTO RATIARAY
(Professeur titulaire à l’Université d’Antananarivo).
Mlle ESOAVELOMANDROSO FARATIANA
(Maître de conférence à l’université d’Antananarivo)
Date de soutenance : 04 Août 2003
Mr. RAHARINARIVONIRINA Alisaona
Professeur agrégé en droit
Nous tenons à vous témoigner notre gratitude :
- d’abord, pour avoir partagé vos précieuses expériences et connaissances, à travers vos
conseils, instructions et cours, en l’occurrence en second et troisième cycles,
- ensuite, d’avoir présidé la présente soutenance.
Mr. RAMAROLANTO RATIARAY
Professeur titulaire à l’université d’Antananarivo
Et Mlle ESOAVELOMANDROSO FARATIANA
Maître de conférence à l’université d’Antananarivo
Nous tenons également à vous adresser nos vifs et sincères remerciements :
- d’une part, pour vos encadrements dans l’accomplissement de ce mémoire,
- et d’autre part, pour avoir partagé avec nous vos connaissances et savoirs.
Enfin, nous adressons nos remerciements à tous ceux qui, de près ou de loin, ont
contribué à l’accomplissement de cet ouvrage.
AVANT-PROPOS.
L’étude que nous allons présenter dans cet ouvrage constituant le résultat de nos
recherches tant sur le plan pratique que théorique porte sur « la protection de la banque dans le
cautionnement d’un compte courant ». Nous tenons à préciser dès maintenant que pour mieux
apprécier cette position, il y a lieu de considérer les différents principes régissant le droit du
cautionnement, notamment ceux dégagés dans les articles 2011 à 2040 du code civil français.
Le choix de ce sujet a été dicté par le fait que la technique n’est pas encore maîtrisée
malgré son importance actuellement. En effet, le cautionnement d’un compte courant occupe une
place prépondérante dans les activités bancaires nonobstant sa subtilité et sa complexité.
Seulement, nous ne traitons dans cette étude que de la protection de la banque par rapport à la
pratique et par rapport aux principes actuellement appliqués.
1
INTRODUCTION
De nos jours, le crédit occupe une place très importante dans le monde des affaires, qu’il
en est devenu le moteur et le pilier tant sur le plan national qu’international1. Cela s’explique par
la recherche permanente de sécurité, de rapidité, qui anime tous les acteurs de la vie économique
du pays. En effet, le recours à la technique de crédit, en raison des avantages que celle-ci procure,
a nettement influé sur le volume des opérations traitées.
Le crédit permet d’aller plus vite dans les négociations et dans les réalisations des
opérations. Cette technique permet de dissocier dans le temps l’échange des deux prestations que
sont la mise à disposition de la somme d’argent et le remboursement de celui-ci. Dans la pratique,
cela se traduit par un prêt monétaire accordé par un organisme financier ou une banque.
L’objectif est de permettre à un particulier ou à une entreprise d’ajuster ses moyens
financiers et ses besoins à un moment donné. En contre partie, une rémunération correspondant
aux fonds d’immobilisation engagés, est consentie au profit du prêteur selon la durée et le
montant du crédit
Le crédit peut revêtir plusieurs formes : l'octroi d'un délai de paiement par le vendeur d'un
bien; le prêt de fonds par une banque en vue de régler des achats au comptant; la promesse de la
réalisation d'un prêt sous la forme d'une ouverture de crédit, lorsque le demandeur en exprimera
le souhait. Plus exactement, on essaie de mettre en rapport l’offre et la demande des capitaux.
Il convient de rappeler que le mot « crédit » dérive du latin « credere », qui signifie
« croire » ou « se fier à », ce qui nous conduit à déduire que l’opération de crédit constitue un acte
basé sur la confiance. Cependant, cette confiance ne saurait être aveugle en ce sens qu’avant
l’octroi du crédit, un examen très approfondi des dossiers2 du demandeur est préalablement
effectué en vue d’amoindrir le risque de non-remboursement.
1 Le crédit documentaire est une pratique très prisée dans le commerce international. Sur le plan national, les établissements bancaires tentent actuellement de vulgariser le crédit en créant des crédits correspondants aux exigences des différents domaines d’activités : le crédit à la consommation, le crédit à long terme destiné aux opérateurs, le crédit agricole, le crédit immobilier…La création de « EQUIP BAIL MADAGASCAR », une société spécialisée dans le crédit bail mobilier, en est un exemple. 2 Principalement, les banques exigent que le demandeur de crédit lui remette tous les documents qui pourront refléter sa capacité financière tels les bilans de la société durant les trois dernières années, le tableau d’autofinancement …
2
Les données financières ainsi récoltées sont certes indispensables, mais elles ne sont
certainement pas d’une crédibilité absolue. Le remboursement s’étale généralement sur des
années, qu’entre temps, la situation du bénéficiaire du crédit peut changer, engendrant ainsi
d’énorme risque3 pour la banque.
Concrètement, il est plus sécurisant pour la banque de traiter avec des personnes4
entretenant déjà une relation d’affaires stable et continue avec elle. La technique du compte
courant répond au mieux à cette exigence. C’est pourquoi, les établissements de crédit y attachent
une importance particulière. Les banques accordent les crédits à leurs clients en considération du
fonctionnement du compte avant la demande et de la position dudit compte au moment du crédit.
Comment peut-on expliquer cette position ?
Pour ce faire, il nous sera opportun de retracer en quelques lignes le fonctionnement et les
caractéristiques du compte courant.
Généralement, le compte courant a comme titulaire des commerçants ou des gens de la
profession libérale, c’est-à-dire, des personnes justifiant d’un besoin permanent du concours de la
banque pour leurs activités.
Soulignant que le compte courant résulte nécessairement d’une convention conclue entre
la banque et sa relation. En vertu de ladite convention, les parties s’accordent sur la nature des
créances et opérations qui y seront affectées. En effet, seules les opérations prévues dans le
contrat pourront figurer dans le compte courant, et qui deviendront par la suite des articles de
compte5, sous l’effet de la novation. L’inscription en compte d’une créance change ainsi le solde
dudit compte.
Pendant le fonctionnement du compte, il n’est pas besoin de distinguer le débiteur du
créancier pour la, simple et bonne, raison que la banque et sa relation6se sont convenues de
différer les règlements des créances réciproques entrant en compte.
3 Vu le fait qu’entre la date de l’octroi du crédit et la date de l’échéance, le débiteur puisse, par exemple, tomber en faillite ou décéder. En d’autres termes, il ne sera plus en mesure de rembourser la banque. 4 Toutes personnes physiques ou morales titulaires d’au moins un compte au sein de l’établissement 5 Simple jeu d’écriture : inscription au débit ou au crédit du compte. 6 Se dit des clients de la banque ou des personnes entrant en relation d’affaires stable et continue avec elle.
3
La seconde caractéristique du compte courant qui va nous servir à fonder cette pratique,
est son indivisibilité. Il s’agit en quelque sorte d’une conséquence de la fusion des créances. Les
opérations entrées en compte perdent leur individualité et vont constituer, à la clôture du compte,
le solde définitif. Ce sera seulement à ce stade qu’il sera possible de déterminer d’une part, le
débiteur et le créancier d’autre part.
Le compte courant permet ainsi à la banque d’avoir plus de précision sur la consistance
du patrimoine de son client. Est-ce à dire que la banque se trouve à l’abri de tout risque de non-
paiement ?
On pourrait répondre par le positif dans la mesure où la banque avait été d’une extrême
diligence et prudence avant d’accorder le crédit. Seulement, force est de constater que cette
sécurité ne peut être qu’éphémère puisque la situation du débiteur peut se dégrader. Ce risque
résulte du fait que le crédit s’étend généralement sur une période plus ou moins longue et que la
banque ne peut pas s’immiscer dans la gestion du patrimoine de son client. Cette persistance du
risque de non-paiement a amené la banque à chercher d’autres techniques. C’est ainsi
qu’actuellement, outre le statut du client7, sa situation financière8, le banquier exige qu’une sûreté
soit constituée en sa faveur afin de prévenir tout risque de défaillance du débiteur.
En droit civil, on appelle sûreté la garantie que le créancier prévoyant demande à son
débiteur, pour se prémunir contre le danger de l'insolvabilité de celui-ci à l'échéance, soit que le
débiteur ne possède plus alors de ressources suffisantes, soit qu'il ait entre-temps contracté
d'autres dettes et que leur total dépasse l'actif de son patrimoine. Les sûretés peuvent être
personnelles ou réelles.
Les sûretés réelles se caractérisent par l’affectation d’un bien déterminé ou d’un lot de
biens en vue de garantir un prêt ou une créance. Dans ce cas, le créancier bénéficiaire pourra se
faire payer sur le prix du bien affecté, si le débiteur ne satisfait pas à son obligation. Parmi les
sûretés réelles, les hypothèques9 et les gages10 sont les plus pratiqués. Il ne faut pas oublier que,
par rapport aux autres créanciers du débiteur, la banque bénéficiaire d’une hypothèque ou d’un
gage se trouve dans une situation très confortable dans la mesure où la constitution d’une sûreté
réelle aurait pour principal effet de conférer au créancier gagiste ou hypothécaire d’une part, un 7 Etre titulaire d’un compte courant ou non 8 Eu égard aux renseignements fournis dans la demande de crédit. 9 Le débiteur affecte un immeuble immatriculé en guise d’hypothèque si elle n’arrive pas à rembourser ce que la banque lui a prêté et ce, conformément à l’article 23 de l’ordonnance du 03 octobre 1960. 10 Prenons l’exemple d’un gage sur véhicule. Cette sûreté est organisée par le code civil dans les articles 2071 et suivants.
4
droit de suite et d’autre part, un droit de préférence. Le droit de suite permet au créancier de
poursuivre le bien gagé en quelle que main qu’il se trouve et le droit de préférence lui autorise à
faire vendre le bien par voie de justice et par la suite, se faire payer par préférence sur le prix
dudit bien.
Les sûretés réelles sont reconnues pour leur efficacité cependant, il ne faut pas négliger le
fait qu’elles exigent des formalités assez lourdes quant à leur constitution. Mais encore, en
matière de procédure collective, cette situation du créancier gagiste ou hypothécaire se trouve de
nouveau en conflit avec celle des créanciers privilégiés11 tels le trésor, les salariés, le fisc…. Tout
cela pour démontrer que l’efficacité de la sûreté réelle n’est pas encore absolue.
En outre, les présentes sûretés répondent mal aux besoins prônés dans le monde des
affaires. En effet, pour le banquier, une sûreté idéale devrait être d’une constitution facile et sans
formalité lourde mais aussi et surtout d’une efficacité certaine, c’est-à-dire, une technique, qui
permettra le cas échéant d’obtenir satisfaction. Parmi les sûretés actuellement en vigueur, il n’y
en a pas une qui présente simultanément ces deux exigences12.
Quoi qu’il en soit, force est de constater que le cautionnement constitue la technique de
sûreté la plus prisée dans les établissements de crédit. Cela peut s’expliquer de deux manières.
D’abord, il convient de considérer le mot « FIHAVANANA » qui nous distingue de tout autre
pays en ce sens que, ce mot n’a d’équivalence nulle part ailleurs. L’adage malagasy, « Aleo very
tsikalankalam-bola ; toy izay very tsikalankalam-pihavanana » ne fait que réitérer le sens de cette
notion. Textuellement, cela traduit une volonté réciproque de s’entraider. Or, le cautionnement,
conçu à l’origine comme étant un service rendu, présente avec le « FIHAVANANA », une
certaine analogie. En principe et conformément à cette particularité de la société malagasy,
l’application et la pratique du cautionnement ne devraient pas susciter de grand problème
Deuxièmement, le cautionnement est un contrat par lequel une personne, appelée caution,
s'engage, envers le créancier d'une obligation, à accomplir cette obligation si le débiteur n'y
satisfait pas lui-même13. Ce contrat suppose donc une obligation principale valable14. Si la dette
principale n'est pas payée à l'échéance, le créancier est en droit de poursuivre directement la 11 Art.2127 et suiv. du code civil 12 Le cautionnement est d’une constitution facile puisqu’il est parfait dès la conclusion du contrat de cautionnement. Aucune formalité expresse n’est exigée pour sa validité. En effet, l’article 2015 du code a stipulé le caractère exprès de l’engagement quitte à ce que la caution ait conscience de ses actes. Par ailleurs, l’application de l’article 1326 du code civil a connu certaines adaptations pour le besoin du crédit. 13 Article 2011 c.civ. 14 L’article 2012 du code exige une obligation principale valable comme condition de validité de l’engagement de la caution
5
caution. Seulement, en vertu du bénéfice de discussion, la caution simple et non solidaire peut
obliger le créancier à poursuivre en premier lieu le débiteur principal15. La caution qui a acquitté
la dette possède un droit de recours contre le débiteur principal16. La simplicité de la constitution
n’est plus à discuter. Il suffit que la caution exprime sa volonté de s’engager sans qu’il ne soit
besoin de respecter un quelconque formalisme17.
Qu’en est-il de l’efficacité du cautionnement devant l’insolvabilité ou en cas de
procédure collective prononcée contre le débiteur principale ?
La banque ne sera pas obligée de subir le concours de la masse des créanciers afin
d’obtenir le paiement du solde puisqu’il lui est possible de le réclamer auprès de la caution en
vertu du contrat de cautionnement. Cela se justifie par la nette dualité des liens d’obligations
caractérisant le cautionnement18. Etant intervenue en vue de parer à de telle défaillance, la caution
devra ainsi supporter l’insolvabilité du débiteur principal.
Récapitulons que pour se prémunir contre le risque de non-remboursement, la banque
considère essentiellement d’une part, le fonctionnement du compte courant et d’autre part, la
fourniture d’une caution pour garantir le paiement du solde résultant dudit compte. Le
cautionnement d’un compte courant est une pratique courante aujourd’hui malgré sa complexité
et subtilité. En effet, la problématique qui se retrouve à chaque fois qu’on aborde la question
relative au cautionnement concerne la recherche de l’équilibre entre la nécessité du crédit et la
nécessité de protéger la caution. De plus, jusqu’à présent, ni les textes ni les jurisprudences ni les
doctrines n’ont pu établir d’une façon stable et explicite cet équilibre.
Par rapport à cela, force est de constater que la tendance qui se fait sentir, opte pour la
protection de la caution en alléguant que, la caution souscrit un engagement très rigoureux
puisqu’elle se propose de payer la dette d’autrui. En outre, la plupart des articles du code civil
disposent dans le sens d’une protection de la caution entre autres les articles 2012, 2036 et 2038.
Par contre, aucune disposition ne stipule expressément la protection du créancier que par
conséquent, celle-ci sera déduite à partir de la superposition de plusieurs interprétations
jurisprudentielles. 15 Article 2021 et suivant du code civil, traitant des effets du cautionnement 16 Article 2028 du code civil : « la caution qui a payé dispose d’un recours subrogatoire contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou à l’insu du débiteur » Cette faculté est en principe accordée à toute caution quelle que soit la modalité de son engagement sous la condition d’un paiement préalable. (Civ.1ère, 25 oct.1994, Bull.civ. I, n°305) 17 Le rédacteur du code s’est contenté d’exiger que l’engagement de la caution résulte d’un acte positif. L’arrêt de la cour de cassation : (Civ.1, 24 avr.1968, B. I, n°116) rejette la simple présomption. 18 En vertu de l’article 2011 du code, la caution est personnellement tenue de la dette du débiteur principal. Mais il faut retenir que la caution souscrit un engagement essentiellement accessoire.
6
Comment explique-t-on cette tendance ? Est-ce à dire que la banque n’a plus besoin
d’être protégée du seul fait de l’engagement de la caution ?
La première fonction de la caution est certes de parer à une éventuelle défaillance du
débiteur principal, mais rien ne prouve que le risque de non-remboursement se trouve totalement
écarté. En conséquence, il est indispensable d’établir un régime de protection adéquat et organisé
au profit de la banque. Une telle protection sera établie à partir de l’analyse de la complexité
même du cautionnement d’un compte courant. Le but est ici d’accorder à la banque un régime de
protection qui ne nuira pas à l’intérêt de la caution.
Pour ce faire, nous devons cerner ladite complexité, malgré le silence de la loi, et
interpréter les dispositions diverses du code civil ainsi que les différentes décisions
jurisprudentielles quitte à ce que nous puissions analyser successivement, les protections que le
droit de cautionnement accorde, même implicitement, à la banque ( Partie 1) d’une part, et les
protections que la banque a, elle-même inventées, en fonction de ses besoins, d’autre part. (Partie
2)
7
PARTIE I : LES PROTECTIONS ACCORDEES A LA
BANQUE PAR LE CAUTIONNEMENT D’UN COMPTE
COURANT
. L’objectif escompté dans le cautionnement d’un compte courant est la protection de la
banque contre une inexécution éventuelle de la part du débiteur principal19.
Cet engagement est toujours matérialisé dans un contrat et présente nécessairement les
caractéristiques suivantes : accessoire, consensuel et unilatéral. En effet, la caution s’engage en
vertu de cette convention à payer à la place du débiteur si ce dernier se trouve dans l’impossibilité
de le faire. Ce qui nous permet d’affirmer que de ce contrat, naissent d’une part, une sûreté
personnelle au profit de la banque et d’autre part, une obligation contractuelle de payer à la
charge de la caution.
Déjà au niveau de la distinction entre le contrat de cautionnement et le cautionnement en
tant que technique de sûreté résultant dudit contrat, le rédacteur du code civil n’a pas jugé utile
d’apporter une quelconque précision.
Par ailleurs, on pourrait être tenté d’affirmer que la banque est à l’abri de tout risque de
non-paiement puisque l’objet de l’engagement de la caution n’est autre que l’obligation du
débiteur. Seulement, il convient de préciser que dans ses rapports avec la caution, le banquier
n’est qu’un simple créancier chirographaire. L’engagement de la caution n’engendre pas une
protection absolue.
Quels sont les moyens juridiques mis à la disposition de la banque pour qu’il obtienne le
cas échéant le remboursement de ce qu’elle a prêté ?
Pour ce qui est de l’obligation de payer, il s’agit en principe, d’une simple application de
la théorie générale des obligations dans le cautionnement. Soulignons que ces règles font l’objet
d’une certaine adaptation lorsqu’elles sont appelées à régir le rapport entre la banque et la
caution, sous l’effet des caractéristiques du cautionnement. C’est la raison pour laquelle il nous
est opportun d’expliquer en quelques lignes lesdites caractéristiques
19 Art.2011C.Civ.
8
Pour expliquer le caractère accessoire du cautionnement, nous devons considérer le fait
que le cautionnement n’ait de sens que s’il existe une obligation principale à garantir. Appliquer
dans le compte courant, pour que le cautionnement puisse être valable, il faut que le solde
définitif dudit compte soit débiteur20. En cas de position créditrice du solde final, l’engagement de
la caution n’a plus d’objet et entraînera par la suite, la caducité du cautionnement.
Le contrat de cautionnement est consensuel puisque le code civil dans ses dispositions, ne
prévoit pas formalité précise pour sa constitution. L’article 2015 c.civ. s’est contenté d’exiger que
l’engagement résulte d’un acte positif et ne saurait être déduit du silence de la caution21. Dans le
concret, l’écrit traduit au mieux cette exigence.
Enfin, comme seule la caution souscrit une obligation, le cautionnement est ainsi à
caractère unilatéral. Mais il y a lieu de préciser que nous sommes en présence d’un contrat
puisque la formation du cautionnement nécessite l’acceptation de la banque. La question qui se
pose est ici de savoir si la mention manuscrite exigée pour la validité de tout contrat unilatéral22
est aussi de règle en matière de cautionnement d’un compte courant. Nous y répondrons dans le
développement ci-après.
Ces trois caractéristiques seront prises en considération pour l’analyse de la protection de
la banque dans le cadre de cette étude.
Afin de bien structurer l’étude des protections accordées à la banque, nous analyserons
l’impact de ces caractéristiques aussi bien dans le contrat de cautionnement que dans l’examen de
l’obligation de la caution. Ce qui nous amène à adopter le plan d’étude qui suit :
Chapitre1 : Les protections de la banque dans le contrat de cautionnement d’un compte
courant.
Chapitre 2 : Les protections de la banque par rapport à l’obligation de la caution.
20 En application de l’article 2012 du code civil. 21 Civ. 1re, 24 avr. 1968, B.I, n° 116 22 Art.1326 C.civ : « l’acte juridique par lequel une seule partie s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffre. En cas de différence, l’acte sous seing privé vaut pour la somme écrite en toutes lettres »
9
Chapitre 1 : les protections de la banque dans le contrat de cautionnement d’un compte
courant
Le cautionnement est matérialisé par le contrat conclu entre la banque et la
caution. En effet, l’article 2011 du code civil stipule que la caution est personnellement
tenue à exécuter ce qui est due par le débiteur principal en cas de défaillance de celui-ci.
La première mission de la caution est certes de parer à la défaillance du débiteur principal
au paiement du solde débiteur définitif du compte courant, mais il serait hâtif de dire que
la banque est entièrement à l’abri du risque de non-paiement. Le risque est certainement
réduit par rapport au fait que deux débiteurs s’engagent à honorer une seule dette.
L’aspect contractuel du cautionnement a pour principal effet de procurer à la banque un
certain confort, mais la question relative au risque de non-paiement n’est pas encore
totalement résolue. Il n’est pas prouvé que la caution honorera effectivement l’obligation
faillie lorsque la banque lui demandera de s’exécuter.
L’objectif est ici de permettre à la banque de mettre en œuvre le cautionnement
afin d’obtenir le paiement du solde définitif débiteur. Pour ce faire, il faut d’abord que le
contrat de cautionnement soit valable. Cette condition constitue la base et le point de
départ de la protection de la banque puisque la caution ne saurait être tenue que dans la
mesure où le contrat pourrait faire l’objet d’une exécution de bonne foi.
Soulignons qu’étant un contrat, le cautionnement, pour sa validité, doit respecter
les conditions exigées dans le droit commun des contrats. Le non-respect de ces
conditions pourra rendre le contrat nul et non avenu. Les caractéristiques du
cautionnement ont parfois pour conséquence d’assouplir23 les conditions de formation du
cautionnement de façon à ce que la banque puisse actionner la caution, le cas échéant,
sans trop de difficulté.
Pour l’exécution du contrat de cautionnement, nous devons nous référer aux
règles édictées par la loi sur la théorie générale des obligations24. En effet, l’article 123 de
cette loi prévoit que : « le contrat légalement conclu s’impose aux parties au même titre
23 Sur l’application de l’article 1326 du code civil dans le cautionnement d’un compte courant. 24 Loi 66-003 du 2juillet 1966 : J.O. 9/07/66
10
que la loi ». Dans le cadre d’un cautionnement d’un compte courant, comment cette
disposition s’applique-t-elle ? La banque profite-t-elle de cette règle ?
Il faut quand même rappeler que la nécessité du crédit dans le monde des affaires impose
qu’une protection soit organisée au profit de la banque et doive exister tout le long de la vie du
cautionnement. Comme il a été précisé, la validité du contrat constitue le point de départ de la
protection de la banque. Par conséquent, il nous faut dans un premier temps mettre en évidence
les protections accordées à la banque lors de la formation du contrat (section I) Ensuite, nous
allons démontrer que l’application de l’article 123 de la loi sur la théorie générale des obligations
renforce davantage cette idée de protection de la banque (section II)
Section 1 : lors de la formation du contrat de cautionnement
Le cautionnement constitue le résultat de la rencontre des volontés de la caution
et de la banque. Comme tous contrats, le cautionnement sera soumis à des conditions de
validité précises. Ceci étant, les règles de l’article 64 de la loi sur la théorie générale des
obligations sont appelées à régir le contrat de cautionnement.
Comment peut-on dégager un régime de protection de la banque par rapport à ces
règles ?
Nous devons tenir compte des impacts des caractéristiques du cautionnement dans
l’appréciation et l’application desdites règles. Etudier la formation du contrat de
cautionnement d’un compte courant, nous conduit à analyser l’application des règles de
droit commun des contrats, d’une part et à dégager les quelques spécificités du
cautionnement, d’autre part.
Ainsi, pour mettre en évidence les protections de la banque lors de la formation
du contrat de cautionnement, il nous faut aborder les conditions tenant à la personne des
parties (§ 1) ; ensuite, les conditions relatives au consentement des parties (§ 2) et enfin,
les conditions relatives à l’obligation principale. (§ 3)
11
§1- les conditions tenant à la personne de la caution
Avant d’entamer les règles régissant le consentement des parties, il est plus
logique d’apporter plus de précision sur la capacité et le pouvoir de chacune des
parties(A). Soulignons que les conditions tenant à la banque ne suscitent guère de
difficulté. Il suffit de partir du principe : « Le cautionnement ne peut exister que sur une
obligation valable »25. Ceci étant, pour que le cautionnement puisse exister, il faut que la
banque et son client aient rempli toutes les conditions de validité du contrat de base. La
validité du contrat de cautionnement dépend essentiellement de celle du rapport de base.
A contrario, si une irrégularité de la convention principale est constatée, cela va entraîner
la caducité du cautionnement et par la même occasion, aucune obligation ne sera due.
Par ailleurs, il convient de noter que la banque ne pourra exercer ses activités
qu’après avoir reçu l’agrément de la CSBF (ou Commission de Supervision Bancaire et
Financière). En effet, l’article 03 de la loi 95-030 stipule que « les opérations de banque
comprennent la réception de fonds public ; l’octroi du crédit ; la mise à disposition du
public ou la gestion des moyens de paiement », aussi, conformément à l’article 16 de la
même loi « l’exercice de l’activité d’établissement de crédit telle que définie à l’article
03 de la présente loi, est subordonnée à l’agrément de la Commission de supervision
bancaire et financière instituée au chapitre premier du titre III de la présente loi »26. Ce
qui signifie que la capacité de la banque n’est plus à discuter dans le cadre du
cautionnement d’un compte courant. Par conséquent, il ne nous reste plus qu’à analyser
les conditions tenant à la caution.
Outre les conditions de l’article 64 LTGO27, l’article 2018 du code civil prévoit
une condition supplémentaire en vue de renforcer la finalité du cautionnement. Cet article
stipule la solvabilité de la caution comme condition de son engagement (B)
25 Art.2012 C.Civ. 26 Loi 95-030 du 22 janv. 1995 relative à l’activité et contrôle des établissements de crédit : J.O. n° 2350 du 04/03/96, éd. Spéciale, p. 292 27 Sur les conditions de validité des contrats.
12
A- La capacité et le pouvoir de la caution.
1- La capacité de la caution
Pourquoi accorder de l’importance sur la capacité de la caution alors que l’on veut
mettre en évidence la protection de la banque ?
La réponse en est très simple et simplifiée, la banque ne pourra se prévaloir du
cautionnement que dans la mesure où la caution aurait rempli toutes les conditions
requises par l’article 64 LTGO. L’intérêt de la banque réside dans le paiement du solde
débiteur apparaissant à la clôture du compte courant. Il lui serait impossible de demander
à la caution d’exécuter l’obligation alors même qu’une des conditions de formation du
contrat de cautionnement fait défaut.
En outre, selon l’article 65 de la LTGO, la capacité constitue la règle en matière
de contrat. Dans le concret, en matière de cautionnement, du moment qu’une personne
s’engage à honorer l’obligation d’autrui, il est présumé être capable de contracter et aussi,
être capable de disposer de son patrimoine. Ainsi, nous pouvons dire que les règles sur la
capacité contribuent à protéger la banque puisque la caution n’aura plus la possibilité de
s’en prévaloir pour se rétracter28.
Pourtant, certains auteurs affirment que la capacité de contracter s’apparente en
une protection de la caution en s’appuyant sur la gravité de l’acte29. En effet, le but
immédiat de la règle de la capacité se caractérise par la volonté de vérifier l’aptitude de la
caution compte tenu de la gravité de son engagement. D’un autre côté, force est de
constater que la finalité lointaine de l’exigence de l’article 2018 du code civil sur la
capacité, consiste à protéger la banque parce que cette dernière n’aurait plus de garantie
s’il était possible pour la caution de ne pas s’exécuter en invoquant la nullité du contrat
de cautionnement, sur la base de son incapacité.
Par ailleurs, la caution pourrait être appelée à se substituer au débiteur défaillant.
Seulement, en raison du caractère accessoire de son engagement, ce paiement ne saurait
être définitif. C’est la raison pour laquelle, la capacité de la caution est assimilée à celle
28 Com. 7 fev.1984: Gaz. Pal. 1984. 2. Panor. 163, obs. A.P. 29 Philippe Simler et Philippe Delebecque : « Les sûretés » ;Dalloz 1989
13
d’un prêteur30. La caution qui a payé, pourra en effet se subroger au droit de la banque et
se retourner contre le débiteur sauf, dans le cas d’un cautionnement constitué en vue de
matérialiser une libéralité31 telle une donation. Dans ce cas, la jurisprudence32 opte pour
l’application des règles relatives à la donation33.
2- Le pouvoir de la caution
La banque a intérêt à ce que la caducité du contrat de cautionnement ne soit pas
prononcée pour absence de pouvoir de la caution. Ainsi, pour se prémunir contre cette
éventualité, la banque au moment de la conclusion du contrat se doit d’analyser le
pouvoir de la caution et vérifier si la caution peut effectivement disposer du patrimoine
engagé.
D’un autre côté, pour une protection optimale de la banque, l’assiette même du
cautionnement joue un rôle très important. Cela nous amène à analyser la protection de la
banque par rapport au pouvoir de la caution. Pour ce faire, il convient d’étudier
succinctement la notion du pouvoir de la caution selon qu’on se trouve confronter aux
règles des régimes matrimoniaux ou en face des droits des sociétés.
2-1- l’incidence du régime matrimonial dans le pouvoir de la caution
Concernant l’incidence des régimes matrimoniaux34 dans l’engagement de la
caution, il nous faut considérer successivement le pouvoir de la caution sous la séparation
des biens et celui de la caution commune en biens.
30 Philippe Théry : « Sûretés et publicité foncière » Ed. Puf, p. 33 31 La caution s’engage à payer la dette du débiteur pour matérialiser une donation stipulée en faveur de ce dernier. 32 Civ. 1, 12 mai 1982, Chassagne, B.I, n° 173, D., 83.320, n. J. Mestre. Dans cet arrêt, la débitrice a été la maîtresse de la caution. La caution a dû payer le créancier mais a perdu son recours contre la débitrice puisque l’engagement a été qualifié de donation indirecte. 33 Art. 95 et suiv. de la loi 68-012 du 04 juillet 1968 relatives aux successions, testaments et donations ; J.O. n°598 du 13/07/68, p. 1438 34 Loi 67-030 du 18 déc.1966 relatives aux régimes matrimoniaux et à la forme des testaments ; J.O. n°569 du 23/12/67, p. 2080 ; Errata : J.O. du 13/01/68 ; modifiée par loi 90-014 du 20 juillet 1990 ; J.O. n°2008 E.S. du 23/07/90, p.12958.
14
2-1-1- le pouvoir de la caution mariée sous la séparation des biens.
Lorsque la caution est mariée sous le régime de la séparation des biens, elle
engage tous ses biens en garantie de la dette du débiteur principal. Dans ce cas, la banque
pourra poursuivre la caution sur lesdits biens et le conjoint ne pourra s’y opposer puisque
dans ce régime, « chacun des époux conserve l’administration, la jouissance et la libre
disposition de ses biens. »35
La protection de la banque se traduit ici par la facilité dans la constitution du
cautionnement et au fait que, la garantie s’étend sur tous les biens de la caution. La
position du droit positif malgache et celle du droit français présentent dans cette
hypothèse une parfaite similitude36. La seule limite que doit respecter la banque pour le
recouvrement de sa créance, serait la contribution légale aux charges du ménage qui
pèsent sur la caution mariée sous la séparation des biens37.
2-1-2- le pouvoir de la caution commune en biens
2-1-2-1- Le principe
Dans le cadre d’une caution mariée sous le régime de la communauté, la
protection de la banque se présente autrement. Le pouvoir de la caution commune en
biens se heurte à différentes techniques entre autres : l’intérêt de famille, l’administration
de la communauté et la notion d’acte de disposition.
Au regard de la jurisprudence française, le cautionnement n’est ni un acte de
disposition à titre gratuit38, ni une aliénation à titre onéreux 39d’un bien, qu’il n’est pas
nécessaire de le soumettre au consentement des deux époux sous peine de nullité. Par
35 Art. 57 de la loi 67-030 du 18 déc.1966 36 Art. 1536 C.Civ. relatif à l’administration, à la jouissance et la libre disposition des biens dans le cadre d’un régime de la séparation des biens. 37 Art. 58 de la loi 67-030 du 18 déc.1966 relatives aux régimes matrimoniaux et à la forme des testaments ; J.O. n°569 du 23/12/67, p. 2080 ; Errata : J.O. du 13/01/68 ; modifiée par loi 90-014 du 20 juillet 1990 ; J.O. n°2008 E.S. du 23/07/90, p.12958. 38 Art. 1424 C.Civ : « Les époux ne peuvent l’un sans l’autre aliéner ou grever de droit réel les immeubles, fonds de commerce et exploitation dépendant de la communauté, non plus que les droits sociaux non négociables et les meubles corporels dont l’aliénation est soumise à publicité. Ils ne peuvent, sans leur conjoint, percevoir les capitaux provenant de telles opérations » 39 Même article.
15
contre, si l’acte de cautionnement dissimule frauduleusement un de ces actes, la nullité
pourra être prononcée.
Par ailleurs, l’article 1421 nouveau du code civil français stipule : « chacun des
époux a le pouvoir d’administrer seul les biens et d’en disposer, sauf à répondre des
fautes qu’il aurait commises dans sa gestion. Les actes accomplis sans fraude par le
conjoint sont opposables à l’autre ». Cette nouvelle disposition du code civil pourrait
s’analyser en un net renforcement de la protection de la banque puisque cette dernière
aurait la possibilité de poursuivre la caution, jusqu’à parfait paiement, sur les biens de la
communauté. Cependant, le rédacteur du code civil a préféré apporter une certaine
restriction au droit des créanciers puisqu’en vertu de l’article 1415 nouveau40, « chacun
des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou
un emprunt, à moins que ceux-ci n’aient été contractés avec le consentement exprès de
l’autre conjoint qui, dans ce cas, n’engage que ses biens propres. . Précisons toutefois que
le consentement du conjoint n’est pas soumis aux exigences de l’article 1326 du code
civil41puisqu’il ne s’agit pas d’un engagement personnel. Aussi, faut-il insister que « dans
l’hypothèse d’engagements séparés des deux époux, faute de consentement exprès de
chacun à l’engagement de l’autre, chacun n’engage que ses biens propres et ses
revenus »42 , ce qui signifie que la banque pourra toujours poursuivre la caution sur ses
propres et ses revenus en dépit de l’absence du pouvoir de la caution à engager la
communauté.
Comment le droit malgache entend-il résoudre ce problème ? Pourra-t-on
transposer cette position du droit positif français dans le contexte malgache ?
Soulignons que la règle relative au régime de la communauté des biens en droit
malgache se rapproche de celle du droit français. La différence notable se situe au niveau
de l’administration de la communauté et le pouvoir de chacun des époux. En droit
malgache, « le mari est l’administrateur de la communauté »43, ce qui rejoint le sens du
code civil d’avant la loi du 23 décembre 1985. Les conséquences profitent inévitablement
40 Loi française n° 85 – 1372 du 23 décembre 1985 41 Civ. 1re, 13 nov. 1996: Bull. civ. I, n° 392 42 Civ. 1re, 4 juin 1996 : Bull. civ. I, n° 325 43 Art. 22 de la loi 67-030 du 18 déc.1966 relatives aux régimes matrimoniaux et à la forme des testaments ; J.O. n°569 du 23/12/67, p. 2080 ; Errata : J.O. du 13/01/68 ; modifiée par loi 90-014 du 20 juillet 1990 ; J.O. n°2008 E.S. du 23/07/90, p.12958
16
à la banque en matière de cautionnement, puisque le seul engagement du mari à garantir
le solde d’un compte courant suffira à engager la communauté. En d’autres termes, la
banque pourra facilement poursuivre le paiement sur l’ensemble des biens communs en
ce sens que le pouvoir de la caution n’est plus dans ce cas à rechercher ou à prouver. Par
conséquent, ni la femme, ni les héritiers de la caution ne seront en mesure d’empêcher la
réalisation des poursuites dirigées contre eux.
Par contre, comme en droit français, « le mari commun en bien, ne pourra pas,
sans le consentement de la femme : disposer à titre gratuit des biens communs meubles
ou immeubles ; aliéner ou grever de droits réels un immeuble ou un fonds de commerce
ou une exploitation appartenant à la communauté ; aliéner les droits sociaux non
négociables et meubles corporels dont l’aliénation est soumise à publicité, lorsque ces
biens dépendent de la communauté »44.
Puisque aucune disposition du droit positif malgache ne traite expressément du
pouvoir de la caution, on pourra ainsi combiner l’article 22 avec l’article 23 de la loi 67-
030 du 18 déc.1966 relatives aux régimes matrimoniaux et à la forme des testaments et
affirmer que, le cautionnement ne doit pas être soumis au consentement du conjoint pour
être valable puisqu’on n’est pas en présence d’un acte de disposition au sens de la loi et
de la jurisprudence45. Ceci étant, la supériorité du mari dans la gestion de la communauté
ne fait qu’accroître la protection de la banque.
2-1-2-2- L’exception : le cautionnement réel
Le cautionnement réel consiste à engager non pas l’ensemble du patrimoine de la
caution, mais seulement un bien précis ou un lot de biens composant ce patrimoine en
vue de garantir la dette du débiteur principal. Ceci étant, la caution réelle doit justifier
d’un pouvoir de disposition. En effet, cet acte entre dans le domaine de l’article 23 de la
loi relative aux régimes matrimoniaux. Plus précisément, la banque se trouve dans
l’obligation de vérifier que l’engagement de la caution est effectivement accompagné du
consentement de la femme. Si par négligence, la banque omet de le faire, la femme qui
44 Art. 23 de la même loi 45 Paris, 26 nov. 1991 : JCPN 1992, II, 379, n°13, obs. SIMLER « la clause d’administration incluse par les époux dans leur contrat de mariage n’emportait pas nullité du cautionnement souscrit par un époux seul »
17
n’a pas donné son consentement au cautionnement, peut s’opposer à la réalisation de
l’acte en alléguant l’absence de pouvoir de la caution
Le cautionnement réel est alors assimilé à un acte de disposition quant à son
régime. La présente sûreté sera, par conséquent, efficace si et seulement si, la femme de
la caution a donné son accord. Cette solution pourrait être gênante pour la banque
créancière puisqu’elle est obligée de rechercher l’existence du consentement de la
femme. Il convient de rappeler que le consentement de la femme n’est soumis à aucun
quelconque formalisme, il suffit qu’il soit exprès46. Le droit positif actuel ne prévoit pas
expressément la forme que doit revêtir ledit consentement.
Par contre, si le cautionnement est donné en conformité avec cette exigence, la
banque se trouve de nouveau dans une situation confortable puisqu’elle est devenue
créancière privilégiée des époux.
2-2- l’impact du droit des sociétés dans le pouvoir de la caution
2-2-1- Les pouvoirs des dirigeants sociaux
Il est unanimement admis que le dirigeant social, dans ses actes d’administration,
représente la société personne morale. Ce pouvoir lui est conféré par les actionnaires en
vertu des statuts, qui ne sont autre que la traduction de la volonté de ces derniers.
Ceci étant, les actes accomplis par les dirigeants sociaux engagent normalement la
société47. Seulement, des remarques sur l’étendue réelle du pouvoir des dirigeants
sociaux s’imposent. En effet, les administrateurs et dirigeants sociaux sont responsables
envers la société et les tiers des violations des statuts ou des fautes commises par eux
dans leur gestion. Que pour se justifier, ils doivent prouver qu’ils ont fait bonne diligence
dans l’administration et la gestion de la société48. Les dirigeants sociaux doivent ainsi se
46 Civ. 1re, 13 nov. 1996 précité supra n°18 47 Art. 24 de la loi du 07 mars 1925 relative à l’institution des sociétés à responsabilité limitée ; complétée par la loi du 13 janvier 1927 : J.O. du 19/03/27, p. 290 Art. 04 de la loi du 16 novembre 1940 : J.O. 09/09/50, p. 1398 portant réglementation des sociétés anonymes 48 Art. 25 de la loi du 07 mars 1925 relative à l’institution des sociétés à responsabilité limitée. Art. 4 alinéa 6 de la loi du 16 novembre 1940 : J.O. 09/09/50, p. 1398 portant réglementation des sociétés anonymes
18
conformer aux dispositions statutaires pour pouvoir engager la société. Les modifications
des statuts devant s’opérer avec l’accord de tous les actionnaires puisqu’il y va de leurs
intérêts, sauf disposition contraire. La question qui se pose est de savoir si le
cautionnement souscrit par le dirigeant social engage la société.
2-2-2- Le cautionnement souscrit par un dirigeant social
Précisons que ni la loi ni la jurisprudence malgache n’a pu affirmer sa position sur
cette question. Par contre, nous pourrons essayer d’en dégager une solution, en analysant
l’esprit de la loi actuellement applicable en la matière et en s’inspirant des solutions
légales et jurisprudentielles françaises49.
Pour les sociétés anonymes, autres que les établissements de crédits50, deux cas
sont à analyser. Dans certains cas, le droit français exige que le cautionnement soit donné
sur autorisation du conseil d’administration ou du conseil de surveillance à peine de
nullité51. Il incombe ainsi à la banque créancière de vérifier l’existence de cette condition
posée par la loi. Dans d’autres hypothèses, le cautionnement est purement et simplement
interdit notamment, lorsque la dette garantie est celle des dirigeants sociaux.
Pour ce qui est des sociétés à responsabilité limitée, la réponse est plus favorable
à la banque puisque aucune disposition légale n’interdit à la société de se porter garant de
la dette d’un tiers52, la contrariété avec l’intérêt social constituera la seule limite à
respecter.
Enfin, pour les autres types de sociétés commerciales, l’unanimité est exigée pour
engager la société à se porter caution ou tout au moins, le cautionnement doit se rattacher
à l’objet social.
Quels sont les conséquences du cautionnement donné par une société dans ses
rapports avec ses créanciers sociaux ?
Pour limiter la portée du cautionnement donné par une société, une intervention
légale a été nécessaire. Depuis la loi du 24 juillet 1966, « les sociétés anonymes et les 49 Pour les sociétés anonymes, la solution retenue exige que le cautionnement soit donné sur autorisation du conseil d’administration 50 Puisqu’il s’agit d’une opération courante conclue à des conditions normales. 51 Art. 98 al. 4 et 128 al. 2 de la loi 24 juillet 1966 52 Com. 25 mai 1993 : Bull.civ. IV, n° 208
19
sociétés à responsabilité limitée ne pouvaient plus se porter caution des dettes des gérants
ou associés, des administrateurs ou assimilés, des membres de leur famille proche ou
personnes interposées. »53 A contrario, la société est habilitée à se porter caution d’une
obligation tierce du moment que l’acte n’est pas contraire à l’objet social. Il convient de
préciser qu’il appartient au tiers qui invoque la nullité de l’acte, d’apporter la preuve que
le cautionnement constitue un dépassement de l’objet social54.
Devant la quasi-similitude des régimes des sociétés entre le droit positif malgache
et le droit français, nous pourrons adapter les solutions sus-développées dans notre
système. Par conséquent, la banque, pour se protéger contre le risque relatif au pouvoir de
la caution personne morale, devra vérifier que le cautionnement constitué à son profit
n’est ni contraire à l’intérêt social ni être donné en violation des statuts de la société
caution. Généralement, le patrimoine d’une société est important que sa solvabilité soit
presque certaine.
B- La solvabilité de la caution.
L’article 2018 du code civil a prévu la solvabilité de la caution comme
complément des conditions de validité du droit commun des contrats : « Le débiteur
obligé à fournir une caution, doit en présenter une qui ait la capacité de contracter, qui ait
un bien suffisant pour répondre de l’objet de l’obligation, et dont le domicile soit dans le
ressort de la cour royale où elle doit être donné. »
Apparemment, cette disposition semble profiter à la banque, mais contribue-t-elle
effectivement à améliorer sa protection dans le cadre d’un cautionnement d’un compte
courant ?
Pour une meilleure approche, nous allons d’abord essayer de cerner le domaine
d’application de cet article, ensuite nous allons expliquer en quoi cette disposition
contribue–t-elle au renforcement de la protection de la banque ?
1- Le domaine d’application de l’article 2018 C.Civ
53 Philippe Malaurie et Laurent Aynes : « Les sûretés et la publicité foncière », Ed. Cujas, 2e édition, 4e trim.1988, p. 38, n° 134 et n°135 54 Art. 98 et 113 de la loi française du 24 juillet 1966 et Com. 18 juin 1980 : Bull. civ. IV, n° 264
20
On peut distinguer trois catégories de cautionnement : le cautionnement légal, le
cautionnement judiciaire et le cautionnement volontaire ou conventionnel.
Dans les deux premières catégories, le débiteur se trouve dans l’obligation de
fournir une caution. Cette obligation émane soit de la loi soit du juge. Seulement, nous
devons préciser que le cautionnement doit toujours résulter d’un contrat conclu entre la
caution et le créancier. L’article 2018 du code civil trouve sans difficulté, dans ces
catégories de cautionnement, application.
Comment cet article s’applique-t-il dans le cautionnement volontairement conclu
en vue de garantir le paiement du solde débiteur d’un compte courant ?
Aucune disposition n’exige que la caution, en matière de cautionnement
volontaire, doive justifier sa solvabilité au moment où elle s’engage. Cela ne signifie
cependant pas que la banque ne peut pas vérifier la situation de la caution avant
d’accepter l’engagement de cette dernière. Comme le cautionnement n’aura pas de sens si
la personne qui s’engage à garantir le paiement ne dispose pas suffisamment de biens
pouvant recouvrer la valeur éventuelle du solde débiteur final d’un compte courant, la
banque doit systématiquement s’assurer que la caution, du moins au moment de la
conclusion du contrat, a un patrimoine plus ou moins consistant eu égard au crédit
accordé55. Comme, l’objectif étant d’encourager la banque à octroyer le maximum de
crédit pour le besoin du commerce, il faudra ainsi instaurer un système qui lui inspire
beaucoup plus de confiance.
Aussi, dans la pratique, la banque fait de l’engagement d’une caution à garantir
une éventuelle inexécution de la part de son client, l’une des conditions de l’accord du
crédit. De ce fait, le client qui veut obtenir le financement émanant de la banque présente
une caution pouvant le cas échéant remplir l’obligation de payer. Puisque la banque se
trouve, vis-à-vis de la caution, dans la situation d’un simple chirographaire, sa meilleure
assurance serait alors la solvabilité de ladite caution56. Par conséquent, fournir une
caution solvable ne constitue pas une obligation légale pesant sur le débiteur mais plutôt
un atout indispensable pour persuader la banque, de conclure le crédit. 55 La banque limite le crédit accordé au client jusqu’à une certaine somme pour mieux prévoir le risque d’insolvabilité. Cette limite est calculée à partir du fonctionnement du compte et de la sûreté constituée. 56 La caution sera personnellement tenue de la dette en vertu du contrat de cautionnement. Par conséquent, si à son tour, elle n’y satisfait pas, la banque pourra en vertu de l’article 01et article 58 de la loi 66-003 du 2 juillet 1966 : J.O. 9/07/66, le poursuivre sur les actifs composant son patrimoine.
21
2- La protection engendrée par cette disposition
Comment peut-on dégager une protection de la banque en appliquant cette
disposition du code civil dans le cautionnement d’un compte courant ?
Nous devons toujours partir du fait que la caution s’engage pour parer à une
défaillance éventuelle du débiteur. Concrètement, la caution s’engage personnellement à
honorer l’obligation normalement due par le débiteur principal. Comme on l’a vu
précédemment, la pratique bancaire actuelle exige la fourniture d’une caution pour qu’un
crédit soit accordé. En effet, la banque en tant que « prêteur » n’octroie du crédit que si la
personne qui se porte caution dispose effectivement le moyen d’assurer le paiement du
solde du compte. Par ailleurs, aucune disposition légale n’interdit à ce que la banque
demande que la caution justifie d’une certaine solvabilité.
En outre, l’article 2020 du code civil dispose : « Lorsque la caution reçue
volontairement ou en justice est ensuite devenue insolvable, il doit en être donnée une
autre. »
Etant édictée en faveur de la banque, la caution ne pourra pas l’invoquer pour
refuser de payer la dette57. Cette disposition du code civil peut parfaitement régir le
cautionnement d’un compte courant. En effet, en matière d’un compte courant, la dette à
payer présente un caractère futur qu’entre temps, la situation de la caution comme celle
du débiteur principal peut changer. C’est sûrement pour prévoir de tel risque que la loi a
édicté une telle possibilité.
Par ailleurs, la loi autorise la banque à exiger l’engagement d’une personne
déterminée pour garantir l’exécution de l’obligation du débiteur principal58. Cette
affirmation résulte de l’alinéa 2 du même article : « cette règle reçoit exception dans le
cas seulement où la caution n’a été donnée qu’en vertu d’une convention par laquelle le
créancier a exigé une telle personne pour caution ». Ainsi, puisque la banque dispose de
telle prérogative, il est très compréhensible qu’elle demande la fourniture d’une caution
solvable pour s’assurer que le solde né du compte courant sera, d’une manière ou d’une
57 Civ. 1re, 7 juin 1988 : Bull. Civ, n°173 58 Civ. 3e, 4 janv 1983: Bull. Civ. III, n°1
22
autre59, payé malgré l’inexécution du débiteur principal. Cette solvabilité présente une
importance notable puisque le patrimoine de la caution constitue le gage général de la
banque.
De surcroît, étant un créancier chirographaire, la banque peut veiller à ce que la
consistance du patrimoine de la caution ne diminue pas. Concrètement, la banque est
autorisée à agir au nom et à la place de la caution par le biais de l’action oblique60 pour
qu’un bien ne sorte du patrimoine de cette dernière. Cette action est possible en cas de
négligence de la caution et lorsque l’acte visé présente un caractère patrimonial. Aussi,
faut-il que la négligence puisse entraîner l’insolvabilité de la caution et surtout que la
créance de la banque soit certaine, liquide et exigible. Soulignons que le résultat de cette
action profite à tous les créanciers de la caution61 puisque le patrimoine de cette dernière
constitue le gage général de tous ses créanciers. Dans le cadre du cautionnement d’un
compte courant, la banque ne pourra s’en prévaloir qu’au moment de la clôture du
présent compte puisque l’engagement de la caution porte sur une obligation future. En
effet, la dette ne sera exigible qu’au moment de la clôture du compte courant et lorsque le
débiteur principal n’a pas honoré le paiement du solde dudit compte62, en ce sens que le
cautionnement présente essentiellement un caractère accessoire63.
Outre sa négligence, il y a lieu de souligner que pour éviter de payer, la caution
peut aussi agir en fraude aux droits de la banque64. Pour s’en prémunir, la banque pourra
se prévaloir des dispositions de l’article 51 de la LTGO65 qui stipule que « le créancier
même sans titre exécutoire peut demander que tout acte fait par le débiteur en fraude de
son droit lui soit déclaré inopposable »66. Précisons que dans ce cas, l’acte en soi n’est
59 Puisque la banque et la caution sont liées par un contrat, deux cas peuvent se présenter : soit la caution paie en vertu du contrat, soit la banque se fait payer sur le patrimoine de la caution en se prévalant de l’article 01 et 58 de la loi 66-003 du 2 juillet 1966 : J.O.du 09/07/66 60 Art. 61 de la LTGO : J.O. 9 juillet 1966 : « le créancier peut exercer les droits et actions de son débiteur à l’exception de ceux qui sont rattachés à la personne. » 61 L’article 58 de la LTGO : « Le créancier muni d’un titre exécutoire peut exercer ses droits sur tous les biens de son débiteur lesquels constituent son gage général. » 62 En vertu de l’article 2013 C. civ. « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur principal, ni être conclu sous des conditions plus onéreuses. » 63 «….caution d’une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire cette obligation si le débiteur n’y satisfait pas lui-même. » 64 En consentant des libéralités en faveur d’un tiers par exemple. 65 J.O. du 09 juillet 1966 66 Inspiré de l’article 1167 du code civil.
23
pas nul mais seulement inopposable au créancier diligent67. Aussi, la jurisprudence s’est
prononcée pour le caractère relatif de l’action paulienne et a décidé que « l’action exercée
par le créancier (…), seul demandeur à l’action, avait pour effet de rendre inopposable à
lui seul l’opération effectuée en fraude de ses droits. »68
L’action paulienne est actuellement admise sans difficulté en matière de
cautionnement d’un compte courant. La question qui a engendré des discussions
doctrinales et jurisprudentielles portait sur la qualification de la fraude paulienne. Au sens
de l’article 1167 du code civil, « la fraude résulte de la seule connaissance qu’a eu le
débiteur du préjudice qu’il causait au créancier en se rendant insolvable ou en
augmentant son insolvabilité »69. En d’autres termes, l’intention de nuire de la caution
n’est pas à rechercher pour fonder l’action de la banque puisque la connaissance du
préjudice suffit à présumer la fraude. Notons que cette qualification de la fraude
paulienne est valable quelle que soit la nature de l’acte visé (acte à titre onéreux ou à titre
gratuit ; contrat synallagmatique ou unilatéral)70. Il est cependant à noter que la
solvabilité de la caution sera déterminée uniquement à partir des immeubles composant
son patrimoine. Encore, faut-il que les immeubles en question ne fassent pas l’objet d’un
quelconque litige, en vue de renforcer la protection de la banque. Cette solution constitue
une application de l’article 2019 du code civil français71.
§2- les conditions relatives au consentement
Pour qu’un contrat puisse être valable, il faut qu’il y ait consentement des parties,
c’est-à-dire, les volontés de chacune des parties doivent avoir été exprimées et exemptes
67 Cf. PLANIOL et RIPERT, t. VII, Obligations par Randouant, n° 965. 68 Cf. Req. 2 août 1871 et aussi Com. 22 mai 1978 : Bull. civ. IV, n° 139.En effet, à la différence de l’action oblique et de l’action directe, le produit de l’action paulienne profite uniquement à celui qui s’en prévaut. 69 Civ. 1re, 17 oct. 1979: JCP 1981. II. 19627, note Ghéstin. 70 Civ. 1re, 29 mai 1985 : Bull. civ. I, n° 163 : le caractère unilatéral ou synallagmatique, à titre gratuit ou onéreux importent peu pourvu que la connaissance par le débiteur du préjudice soit établie. 71 « La solvabilité d’une caution ne s’estime qu’eu égard à ses propriétés foncières, excepté en matière de commerce ou lorsque la dette est modique. On n’a point égard aux immeubles litigieux ou dont la discussion deviendrait trop difficile pour l’éloignement »
24
de tout vice. Appliquer dans le cautionnement d’un compte courant, comment ces
conditions se matérialisent-elles ?
Pour répondre à cette question nous allons traiter successivement : l’existence du
consentement des parties (A) et l’intégrité du consentement de chacune des parties (B)
A- Existence du consentement des parties
Le consentement constitue l’une des conditions de validité posées par l’article 64
de la loi sur la théorie générale des obligations72. « En l’absence d’un consentement, il
n’y aura pas de contrat », soutient Philippe Théry.
Comme le cautionnement est un contrat, il y a lieu d’appliquer cette disposition
pour que le rapport banque – caution puisse produire les effets escomptés.
Par ailleurs, l’article 67 de la même loi dispose que le contrat se forme dès la
rencontre des volontés. C’est le principe du « consensualisme » par opposition au
formalisme contractuel qui constitue l’exception. Le cautionnement présente un caractère
consensuel puisque aucun formalisme précis n’est exigé pour sa formation. En effet,
l’article 2015 du code civil a seulement exigé que l’engagement de la caution présente un
caractère exprès73 sans aller jusqu’à prescrire une quelconque formalité obligatoire.
Aussi, le cautionnement est un contrat unilatéral en ce sens que seule la caution
souscrit une obligation. L’article 2011 du code civil stipule que : « celui qui se rend
caution d’une obligation, se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si
le débiteur n’y satisfait pas lui-même ». La question qui se pose est de savoir si le droit
commun des contrats unilatéraux trouve ici application, notamment, l’article 1326 du
code civil relatif à l’exigence d’une mention manuscrite.
En ce qui concerne le consentement de la banque, aucune exigence particulière
n’a été stipulée, qu’une simple acceptation suffit à le traduire74. Cependant, il convient de
remarquer que cette acceptation de la banque s’avère indispensable puisqu’on est en
72 Loi 66-003 du 2 juillet 1966 relative à la théorie générale des obligations : J.O.du 09/07/66. 73 Art.2015 C.Civ : « Le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l’étendre au-delà des limites dans laquelle il a été contracté » 74 Com.26 janv. 1988: Bull. civ. IV, n°49
25
présence d’un contrat et non d’un engagement unilatéral de volonté75. Ce qui implique
que la caution n’est tenue tant qu’il n’y a pas acceptation de la part de la banque.
Par suite, nous n’allons plus traiter que les questions relatives au consentement de
la caution et analyser les impacts de chacune des caractéristiques du cautionnement dans
la protection de la banque.
Le principe de l’article 2015 du code civil et le caractère consensuel du contrat de
cautionnement
« Le cautionnement ne se présume point » ; la jurisprudence en a déduit que le
silence de la caution n’entraîne pas la formation du contrat de cautionnement76. La
plupart de la jurisprudence interprètent cet article comme une règle tendant à protéger la
caution compte tenu de la gravité de son engagement. De plus, la deuxième partie du
présent article stipule que «..….Et on ne peut pas l’étendre au-delà des limites dans
lesquelles il a été contracté ». Concrètement, il est très difficile de cerner la
notion « exprès », notamment sa portée puisqu’il faut le confronter avec le caractère
consensuel du contrat de cautionnement.
1-1- Le caractère exprès de l’engagement de la caution
Que signifie exactement le caractère exprès édicté par l’article 2015 du code
civil ?
Plusieurs thèses se sont confrontées jusqu’en 1989. Certains auteurs soutiennent
que le caractère « exprès » sous-entend une idée de formalisme et de solennité. D’autres
estiment que le caractère « exprès » exige une règle de preuve spéciale.
Il est évident que le mot exprès insinue un engagement non douteux, mais
comment se matérialise-t-il ?
La solution retenue par la jurisprudence actuelle consiste dans la certitude qu’a eu
la caution lors de son engagement. Plus exactement, aucune formule sacramentelle n’est
75 Com.14 déc. 1976: Bull. civ. IV, n°325 76 Civ. 1re, 24 avr.1968, B.I, n° 116 : sur le rejet du silence de la caution.
26
exigée pour la validité du contrat, il faut et il suffit que la volonté de la caution soit
établie avec certitude. Cette solution rejette ainsi toute idée de formalisme qui alourdirait
le mode de constitution du cautionnement. Seulement, force est de constater que l’écrit
est le moyen matériel le plus crédible pour traduire ce caractère.
Pour ce qui est de la règle de preuve spéciale, la jurisprudence rejette cette idée et
affirme que le cautionnement sera prouvé selon les règles de preuve du droit commun77.
On pourra très bien appliquer cette disposition dans le cautionnement d’un compte
courant. Il suffit que la caution ait exprimé clairement et d’une manière non équivoque,
sa volonté de se porter caution pour que la banque puisse, le cas échéant, s’en prévaloir.
Il faut que la caution montre dans l’acte qu’il se substituera au débiteur si ce dernier
n’exécute pas son obligation. De plus, elle aura à indiquer les modalités de son
engagement ainsi que la dette garantie. La jurisprudence française est même allée plus
loin en insistant que le cautionnement doive comporter l’indication du débiteur
principal78.
Par ailleurs, un engagement exprès et précis de la part de la caution profite à la
banque puisque cela va lui servir dans l’évaluation du montant maximal qu’il pourra
accorder à son client79.
1-2- L’impact du caractère consensuel du contrat de cautionnement.
Le cautionnement est classé parmi les contrats consensuels par sa forme. Cela
signifie que l’échange de consentements suffit à rendre parfait le contrat80.
L’interprétation du caractère exprès de l’engagement de la caution a failli bouleverser ce
caractère consensuel du cautionnement. Comme nous l’avons vu précédemment, il a fallu
attendre la jurisprudence de 1989 pour trancher sur la question et opter pour le maintien
du caractère consensuel du cautionnement.
77 Art. 1341 C.Civ 78 Com. 22 janv. 1985: Gaz. Pal. 1985. Panor. 117, obs. Piedelièvre. 79 Dans la pratique bancaire actuelle, la surface financière accordée au demandeur du crédit dépend d’une part du fonctionnement du compte et d’autre part, de la hauteur de l’engagement de la caution. 80 Art. 67 de la loi 66-003 du 2 juillet 1966 : J.O. 09/07/66
27
Ce caractère consensuel du cautionnement a pour principale conséquence de
faciliter sa constitution. En effet, l’écrit est utile pour exprimer la volonté de la caution
mais il n’est pas exigé comme une condition de validité du contrat de cautionnement.
L’écrit considéré en tant que condition de validité a pour finalité de protéger le
consentement. Par contre, il sera utile pour rendre efficace l’acte s’il n’est requis qu’à
titre de preuve81. En matière de cautionnement d’un compte courant, l’écrit constitue-t-il
une règle de forme ou bien une règle de preuve ?
Pour avoir beaucoup plus de précision, il nous faut analyser l’impact du caractère
unilatéral du cautionnement dans la formation du contrat.
2- La combinaison du caractère unilatéral et du caractère consensuel du
contrat de cautionnement
Le cautionnement est un contrat unilatéral puisque seule la caution s’engage, a-t-
on précisé précédemment. Qu’est-ce que cela implique ? Devra-t-on appliquer la règle de
l’article 1326 du code civil dans le cautionnement ?
2-1- Le droit commun des contrats unilatéraux
L’article 1326 du code civil stipule : «L’acte juridique par lequel une seule partie
s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent ou à lui livrer un bien
fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit
cet engagement ainsi que la mention écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité
en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l’acte sous seing privé vaut pour la
somme en toutes lettres »
L’article 277 de la LTGO a, semble-t-il, apporté plus de précision sur la question.
En effet, dans son alinéa 3, il est expressément stipulé que « la mention est exigée même
s’il s’agit d’un engagement accessoire à une dette principale. »
Dans le droit commun des contrats unilatéraux, l’écrit constitue une condition de
validité. En effet, le but est ici de protéger celui qui s’engage quitte à ce qu’il ait
81 Art. 97 de la loi 66-003 précitée
28
conscience de son acte. Plus exactement, la mention manuscrite exprime la connaissance
qu’avait celui qui souscrit l’engagement, au moment où il conclut, de la nature et de
l’étendue de son obligation. Aussi, cette exigence a-elle été établie pour se prémunir
contre une éventuelle fraude émanant du créancier, d’autant plus que la règle du double
original ne s’applique pas82.
Nous assistons ici à un formalisme très poussé. Selon ces articles, un contrat
unilatéral devra comporter cette mention manuscrite à peine de nullité. C’est dans cette
optique que la jurisprudence a décidé que les dactylographies et les imprimés ne
suffisaient pas à exprimer la volonté du souscripteur83. Le législateur ainsi que le juge ont
préféré maximiser la protection du souscripteur en disposant dans ce sens. Appliquer
dans le cautionnement d’un compte courant, aboutira-t-on à la même solution ?
2-2- La particularité du contrat de cautionnement d’un compte courant et la règle
de la mention manuscrite.
Le cautionnement d’un compte courant se caractérise par le fait que la caution
s’engage à payer une dette éventuelle. Cette particularité résulte de l’aspect même de la
dette à garantir. Dans le compte courant, le montant définitif du solde à payer ne sera
déterminé qu’à sa clôture. C’est la raison pour laquelle le présent cautionnement est
qualifié de « cautionnement de dette future. »84
Avant, l’existence de cette catégorie de cautionnement était très discutée, voire
refusée. Certains auteurs, tels Planiol et Pothier, sont allés jusqu’à le considérer comme
étant une simple promesse de contrat85. Cette thèse a été renversée par celle soutenue par
M.Mouly, qui démontre qu’en vertu de l’article 1130 du code civil « une obligation
actuelle peut valablement avoir un objet futur ». De cette démonstration, il a été déduit
que du cautionnement des dettes futures naissent deux obligations complémentaires à la
charge de la caution d’une part, l’obligation de couverture, servant à délimiter l’étendue
de l’obligation et d’autre part, l’obligation de règlement qui sera déterminé à partir de la
82 Seul le créancier détient l’acte original signé de la main du débiteur. 83 Civ.1re, 22 juin 1983 : Bull.civ. I, n° 182 84 Philippe Malaurie et Laurent Aynes : « les sûretés », précité, voir 7 85 Philippe Théry, précité, p. 68
29
couverture. Ainsi, il nous faut partir du caractère accessoire du cautionnement et rappeler
que la caution ne saurait être tenue que lorsque le débiteur principal lui-même l’est86.
Dans le cas d’un cautionnement d’une dette présente, cette distinction n’est pas
nécessaire puisque la caution sait à quoi elle s’engage et qu’en outre, son obligation est
d’une exécution immédiate. En effet, l’obligation de la caution se réduit au paiement de
la dette du débiteur au cas où ce dernier ne s’exécuterait pas.
Compte tenu de cette particularité du cautionnement d’un compte courant,
comment doit-on interpréter l’article 1326 du code civil ?
Actuellement, la mention manuscrite occupe une place très importante dans le
cautionnement d’un compte courant même si l’acte n’est pas entièrement rédigé de la
main de la caution. Dans la pratique, la banque pré imprime l’acte, et la caution n’aura
plus qu’à y apposer sa signature précédée de la mention « bon pour caution », suivi de la
somme en toutes lettres et en chiffres. Ceci présente un double intérêt. Du côté de la
caution, la mention servira à la protéger contre le risque de fraude émanant de la banque,
compte tenu de l’aspect futur de la dette et du caractère unilatéral du contrat (non-
application du principe du double original)87. Par contre, cette mention manuscrite sera
très utile pour la banque lors de la mise en œuvre du cautionnement en ce sens que la
caution doit honorer ce qu’elle a souscrit conformément à la mention, par elle écrite et
signée.
De plus, on pourra aussi faire jouer l’article 2015 du code civil, stipulant
que : « on ne peut pas l’étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ».
Interprété en faveur de la banque, ajouté de la règle de la mention manuscrite, nous
pouvons dire que la caution est tenue de respecter les termes de son engagement.
Enfin, soulignons qu’en matière de cautionnement, la règle est plus souple
puisque l’irrégularité de l’acte n’entraîne pas la disparition de celui-ci ; l’acte irrégulier
peut toujours valoir comme un commencement de preuve par écrit, pouvant être complété
par tous moyens88.
86 Art. 2011 du code civil. 87 Art. 275 de la loi 66-003 malagasy, J.O. du 09/07/66 relative à la théorie générale des obligations : « Les actes sous seings privés qui constate des conventions synallagmatiques doivent être rédigés en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant un intérêt distinct » 88 Com. 23 mai 2000 : Bull.civ. IV, n°107, p. 96
30
Le cautionnement n’étant pas expressément régi par le droit malgache, la position
actuellement consacrée sur la portée de la mention manuscrite n’a pas pris en
considération l’alinéa 3 de l’article 277 de la LTGO. De cette disposition, nous pouvons
déduire que le rédacteur de la présente loi témoigne une sollicitude excessive au débiteur
même en cas de contrat accessoire. Notons que jusqu’à présent, aucune doctrine encore
moins, des décisions judiciaires malagasy, ne s’y est référée. C’est pour cette raison que
la solution du droit français a été purement et simplement transposée dans notre droit
positif. Par conséquent, la mention manuscrite constitue « une règle de preuve ayant pour
finalité de protéger le consentement »89, peu important que la dette soit future.
B- Intégrité du consentement des parties.
Le consentement doit non seulement exister, mais aussi, faut-il qu’il soit exempt
de tout vice. Les vices de consentement sont traités par les articles 68 et suivants de la loi
66-003 du 02 juillet 196690 et les articles 1109 et suivants du code civil français.
Il en existe quatre : le dol, l’erreur, la violence et la lésion en droit malgache,
tandis qu’en droit français, la lésion ne constitue un vice que dans les cas prévus par la
loi.
Nous allons, uniquement traiter, dans le cadre de cette étude : primo,
l’appréciation de l’erreur dans le cautionnement d’un compte courant et secundo, le dol
en matière de cautionnement d’un compte courant.
1- l’erreur dans le cautionnement d’un compte courant
Normalement, c’est à la personne qui veut s’en prévaloir d’apporter la preuve sur
l’existence de l’erreur, conformément à l’adage célèbre : « actori incubit probatio »
Dans le cadre d’un cautionnement, la caution invoque dans la plupart des cas
l’erreur, pour refuser à la banque le paiement du solde débiteur du compte courant.
89 Civ. 1re, 30 juin 1987, Bull. civ. I, n° 210, p. 155 : « les exigences relatives à la mention manuscrite ne constituent pas de simples règles de preuve mais ont pour finalité la protection de la caution » 90 J.O. du 09/07/66
31
Pour mieux appréhender la notion de l’erreur dans le cautionnement d’un compte
courant, nous devons faire appel à l’article 1110 du code civil91. Le caractère unilatéral
du contrat n’enlève en rien à l’article 1110 du code civil son efficacité92. Se conformant
au sens de cette disposition, la cour de cassation a annulé un cautionnement donné par
des personnes illettrées puisque celles se sont engagées en croyant que leur patrimoine ne
serait pas engagé93. L’article 70 de la loi 66-003 malagasy sur l’erreur n’a pas traité le cas
des contrats unilatéraux. Par contre, cette disposition pose les mêmes critères que le droit
français pour que l’erreur puisse constituer un vice de consentement94.
En principe, le cautionnement ne peut pas être annulé parce que la caution s’est
trompée sur la solvabilité du débiteur principal. La finalité même du cautionnement
consiste à substituer la caution au débiteur, pour le paiement du solde du compte, si le
débiteur principal venait à être défaillant ou insolvable sauf si elle faisait de cette
circonstance la condition de son engagement95. En cas de pluralité de cautions, si une des
cautions disparaît et que la caution qui s’en prévaut arrive à démonter qu’elle s’était
engagée en considération de la totalité des cautions, la nullité sera alors prononcée96.
Ces exigences particulières tiennent au fait que le cautionnement est un contrat de
garantie, c’est-à-dire, ledit contrat a été conclu en vue d’assurer la sécurité de la banque.
L’insolvabilité du débiteur justifie l’action dirigée contre la caution mais cette situation
compromet le recours de cette dernière.
2- Le dol en matière de cautionnement d’un compte courant
Dans quelles conditions peut-on annuler le cautionnement d’un compte courant
pour dol ?
91 « L’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet. Elle n’est point une cause de nullité, lorsqu’elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a voulu contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention » 92 Civ. 1re, 24 mai 1948 : D.1948 : l’article 1110 du code civil régit tous les contrats y compris les contrats unilatéraux, 93 Civ. 1re, 25 mai 1964 : D. 1964. 626 94 Art. 70 de la LTGO : « L’erreur vicie la volonté lorsqu’elle est déterminante et porte sur un élément essentiel du contrat ou considéré comme tel par les deux parties. 95 Civ.1re, 19 mars 1985 : Bull. n°98 96 Civ. 1re, 2 mai 1989 : Bull. civ. I, n° 175
32
Comme pour l’erreur, nous devons partir du principe dégagé dans le droit
commun des contrats. Le dol est défini comme étant des « manœuvres frauduleuses ou
allégations mensongères dont le but est d’induire l’autre partie en erreur pour obtenir son
consentement »97
De cette définition, il y a lieu de mettre en évidence que pour entraîner la nullité
du cautionnement, la caution doit être en mesure de prouver que la banque l’a induite en
erreur98, que sans cela, la caution ne se serait pas portée garant du paiement du solde du
compte courant. La jurisprudence a actuellement décidé que le dol est constitué lorsque la
banque dissimule la situation obérée du débiteur au moment de l’engagement de la
caution99. Par contre, si la banque arrive à démontrer que la caution aurait eu
connaissance de la situation du débiteur puisqu’elle disposait des éléments permettant
cette connaissance100, c’est-à-dire, qu’elle aurait pu s’informer elle-même101, la nullité ne
sera pas prononcée. Le dol émanant du débiteur principal ne saurait être retenu comme
cause de nullité du contrat de cautionnement d’un compte courant puisque le débiteur
n’est pas parti au contrat. Cette solution est pourtant critiquée. En effet, les auteurs
favorables à la nullité du contrat de cautionnement pour dol du débiteur principal,
considèrent qu’il ne faut pas analyser le contrat de cautionnement isolément102.
Le cautionnement se caractérise par la dualité des liens d’obligations d’une part et
l’unité d’objet des obligations, d’autre part. Le critique précédemment invoqué ne tient
pas compte du fait que l’identité d’objet n’implique pas nécessairement une identité de
régime. Par conséquent, étant donné que le débiteur ne participe ni dans la formation ni
dans l’exécution du contrat de cautionnement, les manœuvres lui émanant ne sauraient
97 Art. 77 de la loi 66-003 du 2 juillet 1966 : J.O. 9/07/66 Voir aussi Art. 1116 du code civil : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté Il ne se présume point, et doit être prouvé » 98 Civ.1re, 27 juin 1973, D. 1973. 733, note Ph. Malaurie 99 Civ.1re, 21 janv. 1981, Bull. n° 25 100 Civ.1re, 1er Mars 1972, D.1973. 733, note Ph. Malaurie 101 Civ. 1re, 19 mars 1985, B.I, n°98 : les cautions étaient parentes avec débiteur principal, elles pouvaient ainsi s’informer sur l’étendue de l’obligation principale. Dans ce cas, seul le refus de renseignement constitue une faute imputable à la banque. Cf. aussi, Com. 29 mai 2001, Bull. n° 106 : en l’espèce, la caution ayant la qualité de gérant de la société, elle avait connaissance de la situation du débiteur. 102 M. Rémond-Gouilloud, « L’influence du rapport caution-débiteur sur le contrat de cautionnement », JCP, 1977. I. 2850, sp. n° 27
33
être admises pour annuler le contrat conclu entre la banque et la caution103.
Paradoxalement, dans les rapports entre les cofidéjusseurs, le dol émanant d’un
cofidéjusseur peut être évoqué par la caution qui se prévaut de la nullité du
cautionnement. Cette solution a été consacrée par la chambre commerciale de la cour de
cassation française dans un arrêt du 29 mai 2001104.
§3- les conditions relatives à l’obligation principale
L’article 2011 du code civil précise que la caution sera tenue de payer si le
débiteur principal ne le satisfait pas.
De cette disposition, deux remarques s’imposent. D’un côté, cet article exprime la
subsidiarité de l’engagement de la caution : la caution ne sera en principe tenu qu’après la
défaillance du débiteur principal et d’un autre côté, l’article 2011 du code civil met en
évidence l’affinité des liens qui existe entre les deux obligations malgré la dualité des
sources. En effet, la caution n’est tenue que lorsque le débiteur lui-même y est obligé. Ce
qui nous amène à analyser la teneur de l’article 2012 du code civil et étudier son
application dans le cadre d’un cautionnement d’un compte courant.
A- Application du principe de l’article 2012 dans le
cautionnement d’un compte courant
L’article 2012 du code civil stipule que le cautionnement ne peut exister que sur
une obligation valable. A contrario, toute obligation valable peut faire l’objet d’un
cautionnement. Plus précisément, du moment que la banque a une créance à faire valoir,
un cautionnement peut être constitué en sa faveur. Mais, en application du caractère
accessoire du cautionnement, lorsque l’obligation principale est sous condition
suspensive, la caution n’est pas tenue en cas de défaillance de la condition.
Dans le compte courant, la caution s’engage à payer à la place du débiteur
principal en cas de position débitrice du solde définitif dudit compte et lorsque le débiteur
103 En application de l’article 1116 du code civil et de l’article 77 de la LTGO 104 Com. 29 mai 2001, Bull. n° 100, suivant pourvoi n° 96-18-118.
34
ne le paie pas. Ici, l’existence du solde débiteur à la clôture du compte ajoutée de la
défaillance du débiteur principal constituent les conditions de l’obligation de la caution.
Ceci pourrait être considéré comme l’illustration de l’application du caractère
accessoire105.
Ceci étant, on peut toujours cautionner une obligation encore qu’elle est future.
D’autant plus que ce type de cautionnement est actuellement très prisé et que sa validité
n’est plus discutée puisqu’il suffit de se référer à l’obligation du débiteur lors de
l’exigibilité 106.
Le cautionnement d’un compte courant fera naître deux catégories d’obligation :
l’obligation de couverture et l’obligation de règlement que nous allons traiter lorsque
nous aborderons l’étendue de l’obligation de la caution.
B- La portée de l’article 2012 du code civil et la nullité de
l’obligation principale
En matière de nullité, nous devons distinguer deux hypothèses : la nullité d’un
contrat ayant déjà fait l’objet d’une exécution et la nullité d’un contrat qui n’a pas encore
été exécuté. Pour cette dernière hypothèse, l’annulation ne comporte pas de problème
puisque le contrat sera nul et non avenu, c’est-à-dire, il ne produira aucun effet. Dans ce
cas, le cautionnement souscrit en vue de garantir ce contrat sera caduc pour disparition
d’objet.
En ce qui concerne la seconde hypothèse, puisque la nullité du contrat signifie un
anéantissement rétroactif de celui-ci, les parties seront remises au statu quo ante. Ce
retour à l’état initial fait naître à chacune des parties une obligation de restitution. Si un
cautionnement a été constitué, à la jurisprudence de retenir que la caution sera tenue
jusqu’à parfaite restitution107. Nous pouvons déduire que la finalité du cautionnement ici,
prime sur l’aspect accessoire du cautionnement. Cette primauté de la finalité constitue un
105 Civ. 1re, 29 avr. 1997: Bull. civ. I, n° 133 106 Civ., 10 janv. 1870, Barthe et Delcasse, D.P., 70. I. 160 (2e espèce) : cette arrêt constitue une jurisprudence constante 107 Com. 17 nov. 1982: D. 1983. 527, note Contamine-Raynaud : la caution reste tenue puisqu’on est toujours en présence d’un même contrat, des mêmes parties et des mêmes obligations mais dans les sens inverse.
35
facteur essentiel dans le renforcement de la protection de la banque en ce sens que la
caution reste tenue tant qu’une obligation pesant sur le débiteur n’est pas totalement
liquidée.
Comme l’étendue de l’obligation de la caution dépend de la mention manuscrite
traduisant sa volonté, la banque n’aura qu’à s’y référer lors de l’exigibilité de la dette.
Cela ne devra pas engendrer des problèmes puisqu’elle pourra en principe se prévaloir de
la force obligatoire des contrats édictés par l’article 123 de la loi 66 – 003 Malagasy.
Ce principe de la force obligatoire du contrat cautionnement peut-il effectivement
s’analyser comme une protection reconnue à la banque ?
36
Section 2 : La protection de la banque par rapport aux effets du
contrat de cautionnement
« Le contrat légalement formé s’impose aux parties au même titre que la loi
Elles doivent l’exécuter de bonne foi dans le sens qu’elles ont entendu, lui donner
Elles ne peuvent le révoquer ou le modifier que de leur consentement mutuel ou pour les
causes que la loi autorise»108
De cette disposition, nous pouvons dégager trois remarques : que le contrat est
irrévocable, qu’on ne peut plus changer sa teneur à moins d’un accord commun et enfin,
que le contrat s’exécute de bonne foi entre les parties.
Dans le développement qui suit nous allons analyser, en considérant ces éléments,
les protections accordées à la banque. Pour ce faire, il y a lieu tout d’abord, d’étudier les
effets obligatoires du contrat entre les parties (§1). Ensuite, nous entamerons
l’opposabilité du contrat de cautionnement (§2)
§1- les effets du contrat entre les parties
Comme le stipule l’article 123 de la loi précédemment citée, les premières
conséquences de la force obligatoire du contrat sont son irrévocabilité et son
immutabilité.
A- Les principes directeurs de l’effet du contrat appliqués dans le cautionnement
d’un compte courant.
1- l’irrévocabilité du contrat de cautionnement
Le mot irrévocable signifie que les parties ne peuvent plus se rétracter du moment
que le contrat est reconnu valablement conclu. Dans ce cas, le contrat devra recevoir
exécution conformément aux termes prévus.
108 Art.123 de la loi 66-003 précitée
37
Ce qui mérite d’être souligné en matière de cautionnement sans limitation de
durée, c’est que, la caution peut résilier son engagement à tout moment109. Cette faculté
que le droit de cautionnement accorde à la caution ne constitue pas une révocation parce
qu’elle n’aura d’effet que pour l’avenir.
La révocation dont il est question ici concerne la caution qui s’engage et par la
suite, veut se rétracter et ne plus se porter caution. A la différence de cette rétractation, la
résiliation fait subsister l’obligation de règlement. La révocation anéantira l’acte lui-
même et engagera la responsabilité de celui qui le fait sans l’accord exprès de l’autre
partie. Cette disposition de l’article 123 de la LTGO confère à la banque une certaine
sécurité. La banque devra juste attendre la clôture du compte pour actionner la caution.
En cas de résiliation, la caution sera en principe tenue des dettes nées avant la survenance
de la résiliation mais ne sera plus tenue des dettes nées après ladite résiliation.110
Appliquer dans le compte courant, la résiliation a suscité beaucoup de discussion
et de controverse. Nous l’expliquerons davantage lorsque nous aborderons l’étendue de
l’obligation de la caution.
Mais quid de l’immuabilité du contrat de cautionnement d’un compte courant ?
2- l’immutabilité du contrat de cautionnement
Cette disposition réitère l’utilité de la mention manuscrite, mais cette fois-ci, elle
est invoquée au profit de la banque. L’article 2015 du code civil insiste sur le fait qu’on
ne peut étendre le cautionnement au-delà dans lesquelles il a été contracté. Pareillement,
mais dans l’autre sens, la caution doit honorer l’obligation telle qu’elle a été prévue dans
le contrat, conformément à la mention manuscrite exigée par l’article 1326 du code civil.
Ce qui signifie que la caution ne peut plus modifier les termes de son engagement
du moment que la banque a donné son acceptation. Le but en est d’instaurer une certaine
109 Art. 48 de la loi française du 01mars 1984 110 Com. 16 oct. 1992, D. 1993, somm. 314, obs. Aynès
38
stabilité dans les relations contractuelles. Par conséquent, aucune modification ne pourra
être opposable à la banque que dans la mesure d’un accord mutuel111.
Cette disposition renforce ainsi la protection de la banque dans la mesure où, pour
actionner la caution, elle n’aurait qu’à se référer à la mention manuscrite traduisant la
volonté de cette dernière. De plus, la preuve en sera facilitée puisque la banque détient le
seul original112.
B- L’effet relatif du contrat de cautionnement
L’article 2011 du code civil prévoit que la caution est tenue envers le créancier à
satisfaire l’obligation du débiteur principal. En appliquant cette disposition dans le
cautionnement d’un compte courant, nous pouvons affirmer que la caution sera, à la
clôture du compte courant, obligée de payer le solde débiteur si le client cautionné ne le
fait pas. Nous constatons que trois catégories de personnes interviennent dans le
mécanisme du cautionnement, mais qui sont les parties au contrat de cautionnement et
comment l’effet relatif des contrats s’applique-t-il ?
1- les parties au contrat de cautionnement
Le rapport débiteur – banque occupe certainement une place très importante dans
le mécanisme du cautionnement113, mais le débiteur est étranger au contrat de
cautionnement. Le cautionnement résulte en fait d’une convention conclue entre la
banque et la caution. De plus, il est stipulé à l’article 2014 du code civil que
l’engagement de la caution peut être souscrit à l’insu voire contre le gré114 du débiteur
principal. Ceci étant, le rapport caution – banque est accessoire au rapport banque –
débiteur, mais la caution préserve une autonomie certaine. Le problème qui pourrait se
poser concerne les recours après paiement de la caution contre le débiteur lorsque le
cautionnement a été contracté sans ordre de ce dernier. En tout cas, la banque, du moment
111 Art. 123 de la loi 66-003 : J.O. 09/07/66 112 En matière de contrat unilatéral, la règle du double original n’intervient pas. 113 Art. 2012 C.Civ : « Le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable. » 114 Hypothèse des cautionnements légal et judiciaire ; Art. 2040 du code civil français.
39
que la caution s’engage dispose de deux recours possibles : celui dirigé directement
contre le débiteur et celui dirigé contre la caution en vertu du contrat de cautionnement.
Le débiteur ne peut pas se prévaloir du contrat de cautionnement pour refuser de
payer ni en demander l’annulation. Par contre, la caution peut opposer à la banque toutes
les exceptions inhérentes à la dette115 en vertu du caractère accessoire de son engagement.
Les choses jugées dans le rapport principal peuvent être invoquées, par celui qui s’en
prévaut, dans le rapport banque – caution. Mais il convient de souligner que les décisions
rendues entre la banque et la caution n’interviennent qu’entre elles. En effet, la
jurisprudence a été précise sur la question et prévoit que «le juge du cautionnement est
juge de l'exception par application de l'article 49 du nouveau Code de procédure civile
et, par suite, tenu de statuer sur toutes les exceptions inhérentes à la dette invoquée par
la caution, sa décision ne s'imposant que dans les rapports entre le créancier et la
caution 116»
Si aucune irrégularité ne peut être soulevée, la caution se doit de payer la banque
par application de l’article 123 de la loi 66-003 et selon les termes du contrat.
2- l’exécution de bonne foi
L’effet relatif du contrat traduit l’article 123 de la loi sur la théorie générale des
obligations. Appliquer dans le cautionnement d’un compte courant, ce principe signifie
que la banque et la caution doivent respecter et honorer les engagements pris en vertu de
ce contrat. Le contrat de cautionnement s’impose ainsi au même titre que la loi et n’a
d’effet qu’entre les parties117.
L’obligation de loyauté est la seule obligation de la banque issue du caractère
contractuel du cautionnement. La jurisprudence de 1997 a en effet condamné la banque
créancière au paiement de dommages intérêts, au motif que l’engagement de la caution
était excessif eu égard le patrimoine et les revenus de cette dernière118.
115 L’engagement de la caution a pour objet l’obligation du débiteur principal en vertu de l’article 2011 du code civil et d’autre part, selon l’article 2013 du même code, le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur principal. (Com. 18 janv.2000 : Bull. civ. IV, n°11, p. 9 ) 116 Com. 18 janv. 2000 précité, aussi, Com. 18 janv. 2000, Bull. IV, n° 11, p. 79 117 Art. 129 de la loi 66-003 sur la théorie générale des obligations : J.O. du 9/07/66 118 Com. 17 juin 1997 : Bull. civ. IV, n° 188
40
Par contre, la caution a une obligation de payer une somme d’argent. Sauf, faute
émanant de la banque, la caution sera dans l’obligation d’honorer son engagement119. Ici,
la mention manuscrite joue de nouveau un rôle prépondérant dans la protection de la
banque en ce sens qu’elle n’aura qu’à se référer au contenu de ladite mention pour
actionner la caution. Ceci étant, lorsque le solde définitif du compte courant présente une
position débitrice et si le débiteur principal ne paie pas, la caution doit solder ledit compte
selon les termes et l’étendue de son engagement. Cependant, il faut aussi tenir compte de
l’aspect accessoire de l’engagement de la caution. En effet, la caution peut être déchargée
soit parce que la banque a commis une faute vis-à-vis du débiteur principal soit parce que
le débiteur a payé. Dans le cas d’un paiement effectué par le débiteur, la caution a
accompli sa mission de sûreté et donc, elle ne sera plus tenue. Par contre, en cas de faute
commise par la banque à l’encontre de son client, la caution est aussi déchargée non pas
parce que la banque a été désintéressée mais plutôt, en application de l’article 2036 du
code civil autorisant la caution à opposer à la banque les exceptions liées à la dette. La
jurisprudence a reconnu à la caution cette faculté sans difficulté dans un arrêt du 26 avril
2000 : « Attendu que, poursuivie en paiement par le créancier, la caution qui demande à
être déchargée de son obligation en raison de la faute commise par celui-ci à l'encontre
du débiteur principal, sans prétendre obtenir un avantage autre que le simple rejet, total
ou partiel, de la prétention de son adversaire, peut procéder par voie de défense au
fond ; qu'elle peut aussi, par voie de demande reconventionnelle, demander à être
déchargée indirectement en sollicitant des dommages-intérêts puis la compensation entre
le montant de sa dette et celui de ces dommages-intérêts » 120. Soulignons que, dans ce
cas, il incombe à la caution de prouver la faute commise par la banque sinon, la décharge
ne pourra pas s’opérer et le paiement sera de droit.
Nous venons de voir que la relation principale a une répercussion directe sur le
cautionnement en raison du caractère accessoire de celui-ci. La question qui se pose
maintenant est de savoir si le contrat de cautionnement d’un compte courant est
119 Civ. 1re, 9 mai 2001, Bull. n° 125, suivant pourvoi n° 98-23-144 : dans cet arrêt, il a été décidé que « la caution n’est déchargée que si, par le fait exclusif du créancier, elle ne peut plus être subrogée dans les droits de celui-ci. » 120 Com. 26 avr. 2000: Bull. IV, n° 80, p. 71
41
opposable au tiers. Ceci nous amène à analyser la portée de la force obligatoire du
cautionnement d’un compte courant.
§2- L’opposabilité du contrat de cautionnement d’un compte courant
Pour comprendre la protection de la banque par rapport à l’opposabilité du
cautionnement d’un compte courant, il nous est indispensable d’aborder d’une part, la
portée du principe dans les pouvoirs du juge (A) et d’autres part, l’opposabilité du contrat
à l’égard des tiers. (B)
A- La portée de la force obligatoire du contrat de cautionnement par
rapport aux pouvoirs du juge.
Nous reconnaissons que le juge dans le droit commun des contrats dispose deux
pouvoirs essentiels : le pouvoir d’interprétation et le pouvoir de révision. Dans l’exercice
de ces pouvoirs, le juge ne doit en aucun cas dénaturer le contrat.
1 - le pouvoir d’interprétation du juge
Interpréter le contrat, c’est rechercher les volontés réelles des parties. Cela
suppose qu’il y ait désaccord entre les parties sur ce point. Dans le cadre d’un
cautionnement, le contentieux exigeant l’intervention du juge en vue d’une interprétation,
est abondant. Ce pouvoir d’interprétation du juge doit nécessairement obéir à la volonté
réelle des parties exprimée dans le contrat de cautionnement.
De tel problème apparaît notamment au moment où la banque veut actionner la
caution en vue du paiement. En effet, pour se défendre, la caution invoque que son
intention n’était pas de se substituer au débiteur principal mais seulement d’aider ce
dernier à rembourser la banque. Par conséquent, la banque ne pourra pas lui réclamer le
paiement. Pour avoir sanctions de ses droits, la banque devra rapporter la preuve que la
caution a entendu payer à la place du débiteur en cas de défaillance de celui-ci. « Le
commencement de preuve par écrit que constitue la signature donnée sur le même acte à
42
la fois en qualité de représentant de la société et en qualité de caution, complété par
l'élément extrinsèque résultant de la qualité de gérant, rend parfaite la preuve du
cautionnement », soutient la jurisprudence121. Ceci étant, le juge saisi du contentieux
devra tenir compte des termes de l’acte et ne devra pas aller jusqu’à dénaturer le contrat.
Une telle dénaturation entraînera la disqualification du cautionnement122. En effet, le juge
ne devra interpréter que les termes ambigus et seuls les termes équivoques ferons l’objet
de son intervention.
Par ailleurs, l’article 126 de la LTGO prévoit une règle d’interprétation en
disposant qu’en cas de doute, le contrat s’interprète en faveur du débiteur, cette règle
étant inspirée de l’article 1162 du code civil. La plupart du temps, lorsque la caution
s’engage à garantir le solde débiteur d’un compte courant, elle utilise des termes trop
généraux.
En revanche, l’article 2016 du code civil énonce : «le cautionnement indéfini
d’une obligation principale s’étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais de
la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la
caution», l’application de cet article n’est pas aussi évidente que cela peut paraître. Ainsi,
nous revenons sur le terrain de la mention manuscrite de l’article 1326 du code civil.
Quant à la question du doute sur l’étendue de l’engagement, la jurisprudence a affirmé
qu’en cas de mention incomplète sur le sort des intérêts, l’acte pourra être complété par
des éléments extrinsèques123. Nous insisterons davantage sur la question lorsque nous
analyserons l’étendue de l’obligation de la caution en tant que garante du paiement du
solde de compte courant.
1- Le pouvoir de révision du juge
En cas d’une imprévision, le juge du cautionnement peut-il réviser le contrat
conclu entre la banque et la caution ?
121 Com. 23 mai 2000 : Bull. civ. n° 107, p. 96 122 Com. 21 déc. 1987 : D. 1989. 112, note Brill sur la distinction entre la lettre d’intention et le cautionnement. 123 Civ. 1re,21 fév. 1995, Bull. civ. I, n° 90
43
L’article 128 de la loi sur la théorie générale des obligations dispose pour la
primauté de la force obligatoire du contrat et affirme que malgré la rupture de l’équilibre
du contrat, les parties doivent honorer leur obligation. Dans cette hypothèse, nous
sommes amenés à jongler entre l’effet du contrat et une règle d’équité. Le cautionnement
étant intervenu en vue de prévenir tout risque d’impayé, le pouvoir de révision du juge ne
devrait pas aller à l’encontre de la finalité de la présente sûreté. Prenons l’exemple de la
faillite du débiteur, la caution ne pourra pas demander en justice la révision du contrat en
arguant sur cette base. Malgré le fait que le recours est réduit à néant, la caution devra
tenir son engagement et payer la banque.
Par contre, l’article 2020 du code civil semble prévoir une possibilité de révision
opérée en faveur de la banque. En effet, en vertu de cette disposition, la banque sera
autorisée à demander en justice la fourniture d’une autre caution si la première venait, à
son tour, à être insolvable. Saisi de cette demande, le juge devra trancher dans ce sens. Le
présent article peut parfaitement régir le cautionnement conventionnel124. Ceci étant, le
contrat de cautionnement est opposable au juge, mais quid de son opposabilité au tiers,
c’est-à-dire, au débiteur, aux autres cautions ainsi qu’aux héritiers de la caution.
B- La portée de la force obligatoire du contrat de cautionnement vis-à-vis des
tiers
Comme nous l’avons précisé, les seuls partis au contrat sont la banque et la
caution. Seulement, le cautionnement aura des répercussions sur le rapport caution –
débiteur et caution – cofidéjusseurs. Aussi, faut-il considérer l’opposabilité du
cautionnement aux ayants de la caution.
124 Civ. 3e, 4 janv. 1983: Bull. Civ. III, n° 1
44
1- La situation née du contrat de cautionnement est opposable au
débiteur principal
Cette éventualité se produit sans difficulté quand le cautionnement a été constitué
au su et avec l’accord du débiteur principal, puisque nous serions en présence d’un
mandat tacite. Mais quid du cautionnement donné à son insu ou même contre son gré ?
Il faut partir du principe selon lequel, la caution ne saurait être tenue d’une
manière définitive. Après avoir payé, la caution sera en droit de réclamer au débiteur le
remboursement de ce qu’elle a avancé. Le fait que le débiteur ait ou non consenti à
l’engagement de la caution ne peut pas priver la caution de ce recours. Le code civil a
prévu deux catégories de recours : le recours personnel et le recours subrogatoire. Ces
recours accordés à la caution peuvent s’opérer de deux manières soit après qu’elle a payé
la banque soit avant même d’effectuer un quelconque paiement. Le recours avant
paiement constitue un régime de protection accordé à la caution en raison de la gravité et
la rigueur de son engagement. Par contre, le recours après paiement suppose que la
banque soit désintéressée ou du moins, payée en partie.
Dans l’hypothèse d’un cautionnement donné à l’insu du débiteur, la caution peut
se retourner contre le débiteur en vertu du principe de la gestion d’affaire. La caution ne
peut s’en prévaloir qu’après avoir payé la banque. En effet, l’article 2028 du code civil
stipule que « la caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, soit que le
cautionnement ait été donné au su ou à l’insu du débiteur. » Le paiement même partiel
constitue la condition requise pour l’exercice d’un tel recours. La jurisprudence a tranché
dans ce sens en précisant que l’exercice d’un recours personnel repose sur un paiement
préalable125. Il y a lieu de préciser que l’effet du contrat est poussé très loin vis-à-vis du
débiteur principal puisque la caution est autorisée à demander au débiteur cautionné le
remboursement de la totalité de ce qu’elle a versé à la banque.
Dans le cadre d’un cautionnement limité dans son montant ou d’un paiement
partiel, la caution pourrait se trouver en concours avec la banque qui dispose toujours de
la relation principale pour recouvrer le solde non cautionné. C’est la raison pour laquelle,
125 Civ. 1re, 25 oct. 1994, Bull. Civ. I, n° 305
45
il est souvent stipulé dans le contrat de cautionnement que « la caution doit renoncer à
concourir avec la banque tant que cette dernière n’est pas intégralement payée126. »
Pour le cautionnement donné contre le gré du débiteur, la caution, pour obtenir le
remboursement de ce qu’elle a payé, peut se prévaloir de l’article 1251 du code civil,
repris par l’article 344 de la loi 66-003127 stipulant que « si le tiers était lui-même tenu au
paiement de la dette, il est subrogé au droit du créancier » ; de plus, l’article 2029 du
code civil réitère cette idée de recours fondée sur la subrogation et précise que la caution
qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu’avait le créancier contre le débiteur.
Cette disposition suppose un paiement total effectué au profit de la banque et ce, en vertu
de l’article 1252 du même code 128. Cette pratique est rare voire inexistante puisque la
banque demande expressément auprès de son débiteur la fourniture d’une caution avant
même l’octroi d’un quelconque crédit mais aussi, parce que le cautionnement, de nos
jours, a perdu son caractère désintéressé.
2- L’opposabilité aux autres cautions de la situation née du
cautionnement
En ce qui concerne l’opposabilité aux autres cautions de la situation née du
cautionnement, la caution est fondée à recourir contre les autres cautions en vertu de
l’article 2033 du code civil. Les conditions exigées pour l’exercice de ce recours sont les
suivantes : les cautions ont garanti la même dette ; et la caution qui s’en prévaut doit
justifier qu’elle a payé la banque.
Pour ce qui est du paiement, l’arrêt en date du 14 octobre 1981129 décide qu’il
suffit que le paiement dépasse la part et portion. Un paiement intégral n’est donc pas
nécessaire. La situation de la banque n’est pas affectée par cette disposition de l’article
2033 du code civil. Par ailleurs, il est stipulé qu’en cas d’insolvabilité de l’une des
126 Civ. 2e, 8 déc. 1988, Bull. Civ. II, n° 162 et aussi la pratique du cautionnement d’un compte courant à Madagascar (Cf. contrat de cautionnement en annexe) 127 J.O. 9/07/66 128 « La subrogation établie par les articles précédents a lieu tant contre les cautions que contre les débiteurs : elle me peut nuire au créancier lorsqu’il n’a été payé qu’en partie ; en ce cas, il peut exercer ses droits, pour ce qui lui reste dû, par préférence à celui dont il n’a reçu qu’un paiement partiel » 129 Civ. 1re, 14 oct. 1981, Bull. Civ. I, n° 290
46
cautions, cette insolvabilité sera répartie sur les autres cautions, même par celui qui a
payé.
A propos de la faculté de résiliation accordée à chacune des cautions en matière
de cautionnement illimité ou indéfini, la représentation mutuelle ne pourra pas intervenir
en faveur des cautions. En effet, la révocation unilatérale faite par une des cautions
n’entraîne pas la disparition des engagements des autres cautions à moins qu’elles aient
fait de la totalité de la garantie la condition de leurs engagements130. Précisons toutefois
que la caution qui résilie son engagement sans en informer les autres cofidéjusseurs,
commet une faute à leur égard131.
De même, la remise de dette accordée par la banque à une des cautions ne
décharge pas nécessairement les autres cautions. Cette affirmation reçoit exception
lorsque les cofidéjusseurs sont à même de justifier que ladite remise pourrait nuire
gravement à leur recours et que la totalité des garanties constitue la cause déterminante de
leurs engagements132.
3- Les effets du cautionnement aux héritiers de la caution.
En vertu de l’article 2017 du code civil « les engagements de la caution passent à
leurs héritiers, à l’exception des contraintes par corps, si l’engagement était tel que la
caution y fût obligée. »
Pour que la caution puisse transmettre des obligations à ses héritiers, il faut que
lesdites obligations aient existé avant la survenance du décès. La jurisprudence a affirmé
qu’ « en cas de garantie d’un compte, lorsque qu’aucune dette n’existait à la charge du
débiteur principal au décès de la caution, celle-ci qui n’était pas tenue ne pouvait
transmettre d’engagement à ses héritiers. »133
De l’article 2011 du code civil, nous déduisons que la caution est personnellement
tenue de payer la dette normalement due par le débiteur, en cas de défaillance de ce
dernier. C’est sur cette base que nous pouvons déduire l’application de l’article 01 de la
130 Civ. 1re, 2 mai 1989 : Bull. civ. I, n° 175 131 Civ. 1re, 7 déc. 1999 rapp. dans « Banque magazine, n° 613 Avril 2000 » 132 Civ. 1re, 2 mai 1989 précité supra 101 133 Civ.1re, 3 juin 1986 : Defrénois 1987. 281, note Piedelièvre ; aussi Com. 29 juin 1982, Bull. civ. n° 258
47
loi sur la théorie générale des obligations. Par conséquent, l’engagement souscrit par la
caution fait partie intégrante de son patrimoine, ce qui permet cette transmission
d’obligation. Les héritiers qui ont accepté la succession134 de leur auteur seront ainsi
tenus de la même façon que la caution. Par contre, ils ne seront point tenus des dettes
nées postérieurement au décès de leur auteur135.
134 Article 58 et suiv. de la loi 68-012 relative aux successions, testaments et donations : J.O. n° 598 du 13/07/68, p. 1438 sur l’acceptation d’une succession et ses conséquences juridiques. 135 Com. 29 juin 1982, précité 108
48
Chapitre 2 : les protections de la banque par rapport au régime de l’obligation de la
caution
Le cautionnement, rappelons-le, fait naître à la charge de la caution d’une part,
une obligation de payer résultant du contrat de cautionnement et d’autre part, l’obligation
de se substituer au débiteur principal en cas de défaillance de celui-ci. Cette situation
n’est autre que la traduction de l’article 2011 du code civil qui stipule que « celui qui se
rend caution d’une obligation se soumet personnellement envers le créancier à satisfaire
à cette obligation si le débiteur n’y satisfait pas lui-même ».
De ce fait, pour analyser la protection de la banque par rapport à l’obligation de la
caution, il nous est indispensable de procéder selon la situation considérée. Ainsi, nous
allons étudier dans un premier temps, la protection de la banque par rapport à l’obligation
de la caution en tant que débitrice de la banque et ensuite, nous analyserons cette
protection à travers l’obligation de la caution en tant que garante exclusive du paiement
du solde du compte courant.
Section 1 : la protection de la banque par rapport l’obligation de la
caution en tant que débitrice de la banque
En vertu du contrat de cautionnement, la caution est tenue d’une obligation de
payer au profit de la banque, puisque le cautionnement constitue un acte générateur
d’obligation.. Par application de l’effet relatif et de la force obligatoire du cautionnement
sus-développés, nous pouvons déduire que l’exécution de cette obligation traduit au
mieux la garantie de la banque.
Pour analyser cette affirmation nous allons aborder successivement les protections
de la banque par rapport à la structure de l’obligation de la caution (§1) et les protections
par rapport à la mise en œuvre de ladite obligation (§2)
49
§1- La structure de l’obligation de la caution
Sous cette rubrique, il nous faut étudier en premier lieu les éléments même de
l’obligation de la caution (A) et en second lieu, les modalités pouvant affecter
l’obligation de la caution. (B)
Les éléments de l’obligation de la caution
Nous pouvons distinguer l’élément essentiel de l’obligation de la caution d’une part,
et les éléments immuables de l’obligation d’autre part.
l’élément essentiel de l’obligation de la caution
L’article 88 prévoit que « les obligations résultant d’un contrat ont pour objet,
soit de fournir une prestation, soit de s’abstenir d’une faculté. » Et dans son second
alinéa « La prestation ou l’abstention doit être déterminée ou déterminable ». « Elle doit
être possible » et enfin, « elle peut être future aussi bien que présente »
C’est surtout ce dernier alinéa qui nous importe en matière de cautionnement d’un
compte courant. En effet, au moment où la caution souscrit l’engagement, le montant du
solde final du compte courant n’est pas encore connu. Comment la disposition de l’article
88 de la LTGO s’apprécie-t-elle ?
Pour y répondre, nous allons nous référer à la jurisprudence qui a consacré la
validité d’un cautionnement des dettes futures136. Ce type de cautionnement est
actuellement très prisé. En effet, « la chose qui fait l’objet du cautionnement contenu
dans l’acte s.s.p. est déterminé quant à son espèce, puisque ce cautionnement s’applique
aux obligations que le cautionné avait souscrits ou souscrirait au profit de la maison C. ;
si la chose qui fait l’objet de ce cautionnement est incertaine quant à sa quotité, cette
quotité peut être déterminée par celles des obligations principales auxquelles s’applique 136 Civ. 10 janv. 1870, Barthe-Delcasse, D.P. 70. I. 160 (2è esp.)
50
l’obligation accessoire de la caution. » Plus exactement, le caractère futur de l’obligation
de la caution ne rend guère inefficace le cautionnement puisqu’il suffira de se référer au
solde définitif du compte courant pour prouver que l’obligation en question est
déterminable, quant à son objet.
les éléments immuables de l’obligation de la caution
1-1- la notion de patrimoine
L’article 01 de la loi 66-003 du 2 juillet 1966 énonce : « L’obligation est un lien
de droit en vertu duquel le débiteur est juridiquement tenu envers le créancier de lui
fournir une prestation ou de s’abstenir d’une faculté, prestation ou abstention dont il est
responsable sur la valeur des éléments actifs qui composent son patrimoine. »
Le cautionnement étant un contrat, cette disposition devra ainsi régir le rapport
banque – caution. En effet, la prestation de la caution consiste à payer le solde du compte
courant si le débiteur n’y satisfait pas137. Si à l’échéance, la caution ne satisfait à cette
obligation, elle devra en vertu de l’article précité répondre sur son patrimoine. L’exigence
de l’article 2018 relative à la solvabilité de la caution s’est sûrement inspiré de cette
définition de l’obligation. C’est pourquoi, outre les facultés et droits accordés à la banque
pour préserver la consistance du patrimoine de la caution tel qu’il a été exposé dans la
section relative à la solvabilité de la caution138, la banque peut aussi pratiquer des saisies
conservatoires sur les biens appartenant à la caution en garantie du paiement du solde du
compte courant. Pour cela, la banque n’est pas obligée de se munir d’un titre exécutoire
puisqu’il s’agit ici d’une mesure d’urgence. Cette faculté est reconnue à tous créanciers
chirographaires en vertu de l’article 59 de la même loi. Toujours dans le souci d’assurer
le paiement du solde du compte courant, la banque peut, en se prévalant de la
particularité du présent cautionnement, demander que la caution ne se porte plus caution
d’un autre débiteur ou n’engage plus ses biens en garantie d’une autre dette
137 Art. 2011 du code civil français. 138 Cf. la solvabilité de la caution supra. p. 14 et 15, sur les actions de la banque contre les actes et faits de la caution.
51
Aussi, la notion de patrimoine est bien présente dans l’obligation de la caution
puisque cette obligation sera transmise à ses héritiers en vertu de l’article 2017 du code
civil139. Cela signifie que l’engagement souscrit par la caution fait partie intégrante de son
patrimoine.
Cette implication du patrimoine de la caution dans la garantie du paiement du
solde du compte courant, constitue l’élément essentiel de la protection de la banque en ce
sens que cette dernière dispose, dans une certaine mesure, d’un pouvoir de contrainte
contre la caution.
1-2- le pouvoir de contrainte de la banque
La relation qui s’établit entre la banque et la caution en vertu du contrat de
cautionnement traduit un droit de créance stipulé en faveur de la banque. Ceci étant,
comme tout créancier, la banque pourra contraindre la caution à payer par toute voie de
droit. En l’occurrence, lorsque la caution n’exécute pas la prestation convenue, la banque
munie d’un titre exécutoire, peut saisir les biens composant son patrimoine et les faire
vendre en vue de recouvrer sa créance140. Il est opportun d’apporter quelque précision sur
la notion de titre exécutoire puisqu’on peut le catégoriser en deux. Primo, le titre
exécutoire peut être contenu dans un acte notarié dans lequel cas, l’article 1326 du code
civil ne trouve plus application en ce sens que le cautionnement est dressé par un notaire
et l’acte fait foi jusqu’à inscription de faux. Secundo, le titre exécutoire peut résulter d’un
jugement de condamnation en paiement. Dans cette hypothèse la banque doit
préalablement traduire la caution en justice en vue d’un paiement et l’exécution de
l’obligation se fera en vertu dudit jugement. Par ailleurs, l’absence d’un titre exécutoire à
l’encontre du débiteur ne fait pas obstacle aux poursuites dirigées contre la caution.
Mais nous devons souligner que ces droits accordés à la banque se trouvent
conditionnés par les modalités de l’obligation de la caution.
139 Sur la transmission de l’obligation de la caution à ses héritiers ; (supra n° 104) 140 Art. 58 de la LTGO malgache
52
Les modalités de l’obligation de la caution.
On distingue d’une manière générale, selon l’élément affecté d’une modalité : les
modalités relatives à l’existence et à l’objet de l’obligation d’une part et celles relatives
au sujet de l’obligation d’autre part.
les modalités relatives à l’existence et à l’objet de l’obligation de la caution
Dans cette étude, nous allons faire appel aux modalités prévues classiquement
dans la théorie générale des obligations : les conditions et les termes.
1-1- Les conditions en matière de cautionnement d’un compte
courant.
Comme tout contrat, il est laissé à la libre arbitre des parties de décider sur les
modalités de leur engagement. En matière de cautionnement d’un compte courant, si on
analyse la théorie de Planiol ou de Pothier, l’existence d’un solde débiteur final constitue
une condition suspensive. En d’autres termes, le cautionnement sera caduc si ledit solde,
objet de son engagement, devient à la clôture du compte créditeur. En effet, puisque
aucune dette ne se trouve à la charge du débiteur principal, par application du caractère
accessoire du cautionnement, la caution ne saurait être tenue. La position débitrice du
compte courant à la clôture constitue dans cette hypothèse une condition suspensive. Le
cautionnement des dettes futures était considéré comme une promesse de contrat ou un
cautionnement conditionnel.
Mais l’hypothèse qui nous intéresse concerne le cas où la caution, lors de la
conclusion du contrat, subordonne son engagement à la réalisation d’une condition.
L’engagement d’un dirigeant social, à garantir les dettes nées ou qui vont naître à la
charge de la société, est souvent subordonné à l’octroi de crédit consenti au profit de cette
dernière par la banque. La condition de l’engagement est alors matérialisée par le crédit
octroyé. Dans le cas contraire, le contrat de cautionnement n’existera pas.
53
Enfin, la condition relative à la solvabilité du débiteur principal devrait être
rejetée. La caution étant intervenue pour palier justement cette défaillance du débiteur, il
serait contre le principe même du cautionnement d’admettre de telle condition. Mais
paradoxalement, la caution est fondée demander la nullité du cautionnement en alléguant
l’insolvabilité du débiteur si elle arrive à démontrer que cette situation constituait la
condition de son engagement141. Cette jurisprudence demeure jusqu’à présent, constante
et on est même aller jusqu’à l’étendre dans les rapports entre cofidéjusseurs142. En effet,
une caution est autorisée à demander la nullité de son engagement au motif
d’insolvabilité d’une des cautions si elle prouve que le maintien de la totalité des
garanties constituait la cause de son engagement.
1-2- Les termes dans le cadre du cautionnement d’un compte
courant.
Dans le cadre d’un compte courant, deux situations sont à étudier : celle d’un
cautionnement indéfini et celle du cautionnement consenti pour une durée déterminée.
Dans le cas d’un cautionnement à durée déterminée, l’obligation de couverture de
la caution prend fin à la date indiquée dans le contrat. La caution sera alors tenue des
dettes nées avant le terme indiqué. En effet, en vertu de l’article 2013 du code civil qui
prévoit que « Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être
contracté sous des conditions plus onéreuses », le terme stipulé dans le contrat de
cautionnement ne peut pas dépasser celui contracté dans le contrat de base. L’arrivée du
terme ne rend pas exigible l’obligation de règlement tant que l’obligation principale ne
l’est pas.
Dans le second cas de figure, la caution s’engage dans les mêmes termes que le
débiteur. Par conséquent, le terme stipulé dans le contrat de base s’applique dans le
rapport banque – caution. La caution sera tenue d’honorer le paiement du solde dès la
date de son exigibilité. Théoriquement, la caution est dans ce cas, autorisée à résilier son
contrat à tout moment, en vertu de la prohibition des engagements perpétuels. Le
141 Civ.1re, 19mars 1985 ; précité supra (71) 142 Civ. 1re, 2 mai 19889 ; précité supra (72)
54
problème qui se pose est alors de déterminer l’étendue réelle de l’engagement de la
caution. Ceci constitue une illustration parfaite du cautionnement des dettes futures ou
cautionnement indéfini143.
L’intérêt de la distinction réside dans la détermination de l’étendue de l’obligation de
la caution que nous aborderons ultérieurement144.
les modalités relatives au sujet de l’obligation
2-1- La solidarité entre la caution et le débiteur
« La solidarité ne change pas la nature du cautionnement, mais modifie
seulement certains de ses effets. »145. En principe, il appartient à la caution de stipuler la
solidarité dans le contrat de cautionnement. La première conséquence d’une telle
stipulation consiste à la renonciation au bénéfice de discussion qui constitue une suite
logique du caractère subsidiaire de l’engagement. Cette pratique profite à la banque
puisqu’elle n’aura plus à respecter un rang quelconque dans le recouvrement de sa
créance. En effet, cela résulte de l’article 2021 du code civil qui stipule que « …ou à
moins qu’elle ne soit obligée solidairement avec le débiteur ; auquel cas l’effet de son
engagement se règle par les principes qui ont été établis pour les dettes solidaires », la
caution et le débiteur se trouvent ainsi, par rapport à la créance, sur le même rang146.
Sur la question relative à la solidarité, l’article 36 de la loi 66-003 stipule que « la
loi ou la volonté des parties peut imposer à chaque débiteur une obligation solidaire, ou
faire bénéficier chaque créancier d’une créance solidaire. » Notre droit positif distingue
deux situations : la solidarité passive147 et la solidarité active. En matière de
cautionnement, il y a lieu de faire jouer la solidarité passive et appliquer l’article 37 de la
loi 66-003 sur la théorie générale des obligations qui prévoit que « les codébiteurs
143 Cf. Ph. Malaurie et L. Aynès : « Les sûretés » ; Ed. Cujas, 2e éd.4e trim. 1988 144 Cf. section relative à l’étendue de l’obligation de la caution. 145 Req. 19 fév. 1908, S. 1911. 1. 529, note Wahl ; rapporté par Stéphane Piedelièvre « les sûretés », 3e éd. 2001 146 Elles sont toutes tenues de la totalité de la dette en application de l’article 1200 et suivants du code civil. 147 cela concerne l’obligation solidaire par opposition à la créance solidaire.
55
solidaires sont tenus pour la totalité de la dette envers le créancier, sans préjudice de son
recours contre ses coobligés. »
2-2- La solidarité entre les cofidéjusseurs
2-2-1- la solidarité entre les cofidéjusseurs seuls
La solidarité entre les cofidéjusseurs entraîne la disparition du bénéfice de
division reconnu par l’article de l’article 2025 du code civil disposant que « lorsque
plusieurs personnes se sont rendu cautions d’un même débiteur pour une même dette,
elles sont obligées chacune à toute la dette. »
La règle sur le caractère accessoire de l’obligation de la caution doit primer sur la
solidarité. C’est dans ce sens que la jurisprudence a décidé que « le montant total des
cautions ne peut être supérieur à celui des dettes du débiteur principal »148. Cette
décision résulte de la combinaison de l’article 2013149 et de l’article 2025 du code civil
Comme nous l’avons précisé, la règle sur la solidarité se trouve de nouveau
applicable dans la situation des cofidéjusseurs solidaires puisque l’article 2025 précité
présente une parfaite similitude avec la disposition de l’article 37 de la loi du 2 juillet
1966 sur la théorie générale des obligations malagasy et de l’article 1200 du code civil
français.
Il faut néanmoins préciser que certaines règles de la solidarité ne trouvent pas
application, notamment sur la représentation mutuelle des coobligés. En effet, la
jurisprudence rejète l’application de cette représentation mutuelle dans l’exercice de la
faculté individuelle de la révocation150 ou encore la remise individuelle accordée à une
seule caution. Cela signifie que la décharge accordée à l’une des cautions n’entraîne pas
nécessairement la décharge des autres cofidéjusseurs, ils peuvent seulement s’en
prévaloir et exiger que la dette due soit déduite de la part et portion de la caution.
148 Civ. 1re, 18 fév. 1997 : Bull. civ. n° 62, sur l’étendue de l’obligation de la caution en cas de solidarité. 149 «Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses » 150 Com. 13 juin 1995, Bull. Joly. 1995. 844, note Delebecque.
56
2-2-2- la solidarité entre le débiteur et tous les cofidéjusseurs
Cette troisième figure du cautionnement apparaît le plus avantageux pour la
banque dans ce cas, la stipulation de solidarité fait disparaître aussi bien le bénéfice de
discussion que le bénéfice de division. Ici, la solution pour la solidarité entre les seules
cautions s’applique sans difficultés sur la limite de la représentation mutuelle151.
Dans tous les cas de solidarité, le caractère exprès de celle-ci n’exige pas
l’application de l’article 1326 du code civil. Cette solution constitue une jurisprudence
stable et constante152.
§2- la mise en œuvre de l’obligation contractuelle de la caution
Nous allons maintenant démontrer en quoi l’application des règles du droit
commun des contrats profite-t-elle à la banque ? Pour y répondre, il convient d’évoquer
dans un premier temps les avantages procurés à la banque du fait de l’application de la
théorie générale des obligations dans la mise en œuvre de l’obligation (A) et en second
lieu, nous aborderons la responsabilité de la caution en matière de cautionnement d’un
compte courant (B)
Les avantages procurés à la banque
Pour ce qui est des avantages procurés par la loi à la banque, il est à signaler que ceux-ci se manifestent surtout au niveau de la preuve de l’obligation et au niveau de la mise en demeure de la caution.
151 Civ. 1re, 13 juin 1995 : Bull. civ. I, n° 258, 152 Civ. 1re. 31 janv. 1989: Bull. civ. I, n° 45
57
Un mode de preuve facilité
Pour actionner la caution, la banque doit justifier d’un intérêt à agir en vertu de
l’article 02 de la loi relative au code de procédure civile malagasy153. La banque devra
alors démontrer l’existence d’une créance à faire valoir contre la caution. Pour cela, nous
devons nous baser sur les termes du contrat de cautionnement.
1-1- L’importance de la mention manuscrite dans la preuve de l’engagement.
Dans un premier temps, la banque doit prouver que le solde du compte courant est
débiteur à sa clôture. Ensuite, elle aura à démontrer l’inertie du débiteur ou encore se
prévaloir de la mention manuscrite154.
L’article 1326 du code civil impose la rédaction d’un écrit pour tout contrat unilatéral.
Dans le cautionnement d’un compte courant, l’écrit constitue une règle de « preuve à
finalité de protection »155ou encore, selon les termes de la cour de cassation « une
règle de protection du consentement »156. Tant que l’écrit est valablement établi, la
banque n’aura qu’à le produire comme preuve de l’existence de la créance. Par contre,
lorsque l’écrit est entaché d’irrégularité la banque pourra s’en servir comme
commencement de preuve par écrit, pouvant être complété par tous moyens157.
1-2- Les conséquences du caractère unilatéral du cautionnement dans la
réalisation de la preuve
153 « L’action n’est recevable que si le demandeur justifie d’un intérêt juridique, né et actuel, direct et personnel » 154 Sur les modalité de l’obligation de la caution. 155 Com. 19 juin 1990, JCP 1990. II. 21578, note Legeais ou encore, Civ. 1re, 30 juin 1987, Bull. civ. I, n° 210, p. 155 : sur la combinaison de l’article 2015 et 1326 du code civil. 156 Com. 6 déc. 1994, Bull. civ. IV, n° 363 157 Civ. 1re, 21 fév. 1995, précité (74)
58
Puisque le cautionnement est un contrat unilatéral, l’article 1325 du code civil
exigeant le double original ne s’applique pas. Par conséquent, le seul original sera
détenu par la banque créancière, ce qui facilitera le cas échéant, la preuve. La mention
manuscrite constitue la pièce maîtresse de la preuve en ce sens que l’engagement est
retracé dans cet acte, du moins dans ses grandes lignes. Cette pratique actuelle relative
au rejet du principe du double original est critiquée par S. Piedelièvre en soutenant qu’
« en l’absence de trace on oublie ». Par la même occasion, il avance qu’il serait mieux
de remettre un exemplaire du contrat à la caution plutôt que d’imposer certaines
obligations d’informations. Dans ce cas, on tend non seulement, vers
l’assouplissement de la signification du caractère unilatéral du cautionnement qui veut
instaurer une protection accrue de la caution et de ses ayants causes mais aussi et
surtout, vers l’anéantissement de l’obligation d’information qui pèse sur la banque158.
1-3- Le caractère civil ou commercial du cautionnement.
Pour la qualification civile ou commerciale du cautionnement, nous sommes amenés à
considérer les éléments de distinction dégagés par la jurisprudence. Cette distinction
nous sera d’une très grande utilité puisque le cautionnement sera prouvé selon les
règles du droit commun des contrats, avons-nous dit159.
D’une part, le cautionnement présente un caractère commercial dans le cadre d’un
compte courant si la caution a un intérêt patrimonial dans l’opération garantie160. Dans
la pratique, c’est souvent les dirigeants sociaux qui s’engagent à garantir le solde qui
pourra résulter du compte courant. Dans cette hypothèse, il est aisé de démontrer le
caractère intéressé, de la caution. Une telle solution peut être parfois qualifiée de trop
simpliste. La preuve est libre à l’égard des commerçants. Par contre si le
cautionnement est souscrit par un non commerçant, devra-t-on encore appliquer cette
règle, et qualifier commercial ledit cautionnement ? La réponse qui est favorable à la
banque a été retenue c’est-à-dire la liberté des preuves. 158 Art. 2016 al. 2 du code civil français 159 En se référant à l’article 1341 du code civil 160 Paris, 20 janv. 1998, Bull. Joly 1999. 539
59
D’autre part, on a aussi admis que lorsqu’un commerçant se porte caution pour le
besoin de son commerce, le cautionnement est commercial par accessoire. Pour
illustrer ce type de cautionnement, reprenons l’application considérée par Ph. Malaurie
et L. Aynès « un cautionnement donné par un fournisseur (brasseur, compagnie
pétrolière) pour permettre au fournisseur d’obtenir du crédit. Le cautionnement est un
des éléments complexe du contrat de fourniture. » Etant souscrit par un commerçant,
l’application de la liberté des preuves ne suscite guère de difficulté, étant donné que
deux conditions sont réunies pour permettre la qualification d’acte de commerce :
l’intérêt du fournisseur dans l’opération garantie et le statut de commerçant de la
caution.
Dans le cas d’un cautionnement civil, la preuve doit être rapportée par écrit parce que
le montant engagé est toujours très élevé161. Ici, la banque devra se référer sur la
mention manuscrite pour prouver que la caution s’est engagée à garantir le solde du
compte. L’étendue de l’engagement sera déduit de la teneur de la mention manuscrite.
La particularité de la mise en demeure
En vertu de l’article 51 de la loi du 2 juillet 1966 sur la théorie générale des
obligations, la banque doit mettre en demeure la caution avant d’engager une
quelconque procédure. Il s’agit alors d’un point indispensable du processus de
recouvrement de la créance. Par extension, et en se basant sur le caractère accessoire
du cautionnement, on a pu établir que la mise en demeure faite à l’endroit du débiteur
principal vaut par la même occasion, pour la caution. Par suite, si après la constatation
de la créance, le débiteur ne se manifeste pas, la banque n’aura plus à mettre en
demeure. C’est en quelque sorte une extrapolation de la chose jugée dans le rapport de
base puisqu’on pourra reprendre le dispositif de l’arrêt de la chambre commerciale du
18 mai 2000 qui prévoit que «En raison du caractère accessoire du cautionnement, le 161 Article 1341 du code civil : « Il doit être passé devant notaire ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, il n’est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis l’acte, encore qu’il s’agisse d’une somme ou d’une valeur moindre »
60
juge du cautionnement, saisi d'une action en paiement par le créancier contre la
caution, est tenu de respecter la décision passée en force de chose jugée rendue par le
juge compétent de la procédure dans les rapports entre le créancier et le débiteur
principal, et concernant l'existence ainsi que le montant de la créance ; en revanche,
tant qu'une telle décision n'est pas intervenue, et sauf la faculté discrétionnaire qu'il
conserve de surseoir à statuer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice
le juge du cautionnement est juge de l'exception par application de l'article 49 du
nouveau Code de procédure civile et, par suite, tenu de statuer sur toutes les
exceptions inhérentes à la dette invoquée par la caution, sa décision ne s'imposant que
dans les rapports entre le créancier et la caution »162. Cet arrêt signifie d’une part, que
la caution peut se prévaloir des décisions rendues entre la banque et son client en vertu
du caractère accessoire du cautionnement et d’autre part, la banque peut opposer à la
caution ce qui a été décidé dans ses rapports avec le débiteur principal.
La responsabilité de la caution
Quelles sont en réalité les sanctions de l’inexécution de la caution ?
Pour plus de précision, il nous faut démontrer que la caution est débitrice d’une
obligation de résultat faisant ainsi apparaître une responsabilité contractuelle régie par les
articles 177 et suivants de la LTGO malagasy163
La nature de l’obligation de la caution
La différence fondamentale entre le cautionnement et la lettre d’intention réside dans
la nature de l’obligation qui en résulte. En effet, lorsqu’on est présence d’une lettre
d’intention, la personne qui s’engage n’est tenue que d’une obligation de faire ou tout
162 Bull. IV, n° 11 163 J.O. du 9 juil. 1966.
61
au plus, de moyen. Par contre, la caution s’engage à honorer personnellement la dette
du débiteur en cas de défaillance de celui-ci. Cette rigueur dans le cautionnement est
tirée de l’article 2011 du code civil. De ce fait, la banque n’aura qu’à prouver que le
résultat escompté n’est pas atteint pour pouvoir actionner la caution en justice puisque
la caution est, en vertu du cautionnement, débitrice d’une obligation de résultat dont
l’inexécution ou le retard dans l’exécution suffit à engager une responsabilité
contractuelle.
La responsabilité de la caution
2-1- le principe de l’article 177 de la LTGO
« En cas d’inexécution totale ou partielle d’une obligation contractuelle ou exécution tardive, le débiteur doit réparer le préjudice causé de ce fait au créancier »
Ceci étant, comme le rapport banque – caution est un rapport contractuel en vertu
de l’article 2011 du code civil, en cas d’inexécution ou d’une exécution tardive, la banque
sera fondée sur la base de l’article 177 précité à demander réparation. Pour y échapper, la
caution doit prouver que l’inexécution émane du fait de la banque. Dans le cadre d’un
cautionnement d’un compte courant, la caution pourra se prévaloir de toutes les
exceptions inhérentes à la dette164. La loi et la jurisprudence sont même allées jusqu’à
sanctionner le créancier lorsque celui a rendu impossible la subrogation. L’article 2037
dispose dans ce sens : « la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits,
hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier s’opérer
en faveur de la caution » et « toute clause contraire est réputée non écrite. » Cette faculté
est reconnue à toute caution quelle que soit la modalité de son engagement165.
164 Article 2036 du code civil 165 Civ. 14 juin 1841. 1. 282 : cette position constitue une jurisprudence constante en la matière.
62
2-2- la mise en œuvre de la responsabilité de la caution
Avant d’entrer dans le cœur du sujet, il nous faut rappeler que la caution est
personnellement tenue à payer le solde du compte courant en cas d’inexécution de la
part du débiteur principal. Ainsi, pour mettre en œuvre la responsabilité de la caution,
la banque devra être à même de prouver dans un premier temps que la caution étant
tenue n’ait pas honoré son engagement, puis justifier que la banque a subi des
préjudices et enfin, démonter le lien de causalité existant entre le préjudice subi et
l’inexécution de l’obligation de payer.
2-2-1- La preuve de l’inexécution ou de l’exécution tardive.
Pour commencer, la banque doit apporter la preuve que le solde à la clôture du compte
courant est débiteur. Par conséquent, la dette est devenue par la même occasion
exigible, en se référant aux termes du contrat. Ensuite, la banque sera amenée à
prouver l’inexécution ou le retard dans l’exécution du paiement du solde.
Pour ce faire, la banque doit nécessairement se référer aux termes du contrat et
respecter les modalités de l’engagement souscrit par la caution166. Comme nous
sommes en présence d’un contrat unilatéral et dont l’écrit est utile pour son efficacité,
la preuve du cautionnement sera, par conséquent, facilitée. En effet, la banque devra
juste prouver l’existence de l’exécution tardive ou de l’inexécution sans rechercher si
la caution a ou non, commis une faute. De-là nous pouvons déduire que le seul fait de 166 En cas de cautionnement à termes, la banque doit tenir compte de cette modalité
63
ne pas honorer l’engagement souscrit, selon les termes du contrat, nous fait entrer dans
le terrain de la responsabilité.
2-2-2- Le préjudice subi par la banque
Il n’est plus besoin de rappeler l’importance d’une liquidité permanente dans l’activité
bancaire. Partant de cette affirmation, l’inexécution ou le retard dans l’exécution suffit
à présumer le préjudice, par la banque subi. Aussi, la banque a octroyé le crédit sous la
condition de l’engagement de la caution, l’inexécution émanant de cette dernière
constitue ainsi un préjudice en soi puisque cela peut traduire une perte éprouvée dans
la mesure où le remboursement du prêt se trouve en péril. D’un autre côté, toujours
pour la même raison, on pourrait analyser ce préjudice de la banque en un manque à
gagner. En effet, comme l’engagement de la caution constitue la condition de l’octroi
du crédit, la banque n’aurait certainement pas conclu avec le débiteur si ce dernier ne
fournissait pas la caution pour répondre de l’obligation de payer le solde débiteur
pouvant résulter de clôture du compte en cas de défaillance. Ceci dit, la banque aurait
pu contracter avec d’autre débiteur et mettre à la disposition de celui-ci les sommes,
objet de la créance en litige. La banque pourra ainsi évoquer à son profit l’article 191
de la LTGO167
167 « le créancier peut invoquer comme éléments de son préjudice la perte qu’il a subie et le gain dont il a été privé »
64
2-2-3- Le lien de causalité entre le préjudice et l’inexécution de l’obligation ou
l’exécution tardive.
De ce qui précède, nous avons pu dégager que la faute de la caution en matière de
cautionnement n’est pas à démontrer puisqu’il suffit de prouver que le résultat promis
par la caution n’a pas été atteint. De même, le préjudice subi par la banque résulte du
fait que la caution n’a pas respecté l’engagement souscrit, que par conséquent, le lien
de causalité entre le préjudice et l’inexécution s’établit de lui-même. Ceci étant, la
responsabilité de la caution est valablement engagée du moment qu’elle ne respecte
pas les termes de son engagement. Cette circonstance n’est autre que la conséquence
de la force obligatoire du contrat168.
Aussi, l’article 179 de la LTGO169 stipule expressément que le seul fait de
l’inexécution d’une obligation de résultat suffit à engager la responsabilité de celui sur
qui pèse ladite obligation.
Rappelons que la caution aura la possibilité de justifier son inexécution soit en
prouvant une faute de la banque dans ses rapports avec le débiteur principal, en se
prévalant du caractère accessoire de son engagement170 ou en démontrant que la
168 Art. 123 LTGO qui prévoit que le contrat doit recevoir une exécution de bonne foi 169 « Le débiteur d’une obligation de résultat est responsable du préjudice découlant de l’inexécution de celle-ci par le seul fait que le résultat prévu au contrat n’a pas été atteint. »
170 « La caution qui demande à être déchargée de son obligation en raison de la faute commise par le créancier à l'encontre du débiteur principal peut ou bien, sans prétendre obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire, procéder par voie de défense au fond ou bien, par voie de demande reconventionnelle, demander à être déchargée indirectement en sollicitant des dommages-intérêts puis la compensation entre le montant de sa dette et celui de ces dommages-intérêts », Com. 26 oct. 1999, Bull. 1999, IV, n° 182, p. 156
65
subrogation est devenue impossible par suite des actes et faits accomplis par la
banque171.
Comme nous l’avons précisé, du contrat de cautionnement, naissent à la fois une
obligation contractuelle de payer et une technique de sûreté. Aussi, nous venons de
démontrer qu’à travers le régime et la structure de l’obligation de la caution, la
protection de la banque se trouve renforcée. La protection née de l’obligation de la
caution en tant que garante du solde du compte courant n’est pas aussi évidente que
cela peut paraître, qu’il convient d’apporter quelques précisions.
Section 2 : les protections de la banque par rapport à l’obligation de la caution en tant que
garante du paiement du solde du compte courant
Sous cette rubrique, nous allons analyser cette protection primo, par rapport à
l’étendue de l’obligation de la caution et secundo, par rapport à la mise en œuvre de la
garantie.
§1- la protection de la banque par rapport à l’étendue de l’obligation de la caution
Théoriquement, il ne devrait pas y avoir de problème sur l‘étendue de l’obligation de
la caution compte tenu de la place de la mention manuscrite dans le cautionnement
d’une part et du caractère accessoire de l’engagement, d’autre part. Seulement, dans la
pratique, cette affirmation se trouve compromise soit en raison des imprécisions des
termes du cautionnement soit à cause de la non-maîtrise des techniques qui en
découlent, que la protection de la banque se trouve paralysée.
171 Civ. 1re, 9 mai 2001, Bull. n° 125
66
Afin de mieux cerner le sujet, il nous faut tout d’abord rappeler les principes directeurs
le régissant avant de donner plus de précision sur l’incidence des différentes modalités
affectant l’engagement de la caution dans la détermination de l’étendue de
l’obligation. Aussi, devons nous insister que le cautionnement d’un compte courant
fait naître à la charge de la caution deux obligations complémentaires à savoir
l’obligation de couverture et l’obligation de règlement.
Les principes directeurs de l’étendue de l’obligation de la caution.
Ces principes obéissent nécessairement aux caractéristiques du cautionnement
compte tenu des dispositions légales régissant la présente sûreté.
1- Le cautionnement est accessoire à l’obligation principale en vertu de l’article
2013 du code civil.
Soutient-on, « toutes les sûretés doivent être accessoires »172 puisqu’elles servent
à garantir le paiement d’une créance. Dans le cautionnement d’un compte courant, ce
caractère accessoire occupe une place très importante notamment, lorsqu’il s’agit de
déterminer l’obligation due par la caution. Le code civil a, semble-t-il, tracé les grandes
lignes permettant de respecter le caractère accessoire du cautionnement.
« Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté
sous des conditions plus onéreuses », que signifie cette disposition ?
La première remarque qui s’impose se rapporte au fait que l’engagement de la
caution n’est pas ici contesté quant à son existence. En effet, le rédacteur du code civil a
simplement voulu apporter quelques précisions sur l’étendue de l’obligation souscrite par
la caution. De prime abord, l’article 2013 semble disposer dans le sens d’une protection
de la caution en ce sens qu’étant accessoire, cette dernière ne sera, en aucun cas,
assujettie à des obligations plus onéreuses et plus sévères que le débiteur principal. 172 Dans ce sens, Philippe Théry, « Les sûretés et publicité foncière », précité n° 31
67
Ensuite, l’article 2013 dans son alinéa 2 dispose que « le cautionnement peut être
contracté à des conditions moins onéreuses ». Ceci constitue la suite logique de l’alinéa
premier sus-indiqué. Dans cette optique, la loi a voulu accorder à la caution la possibilité
de limiter son engagement soit dans le temps soit par rapport au montant de l’obligation.
Le caractère accessoire du cautionnement ne traduit pas une parfaite identité des régimes
des obligations compte tenu de la dualité des liens d’obligation qui caractérise le
cautionnement173. Aussi, en vertu de l’article 2015 qui prévoit que « le cautionnement ne
peut pas être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté », la banque
devra respecter cette limitation stipulée par la caution. La caution pourra par exemple,
affecter un terme à son engagement ou encore, limiter son engagement à un montant
déterminé. Ainsi, lors de la mise en œuvre de la garantie, la banque se trouve dans
l’obligation de s’y référer174.
Enfin, l’alinéa 3 de l’article 2013 prévoit que « le cautionnement excédant la
dette ou contractée à des conditions plus onéreuses, n’est point nul, il est seulement
réductible à la mesure de l’obligation principale ». De cette disposition, deux remarques
s’imposent. D’une part, le fait que l’obligation de la caution soit toujours inférieure ou
égale à celle du débiteur principal et d’autre part, dans le souci de primer la finalité du
cautionnement, le rédacteur du code s’est prononcé pour le maintien de la sûreté175. En
effet, le dépassement de l’obligation principale ne constitue pas une cause de nullité du
cautionnement puisque l’intention de la caution était de se porter garante de l’exécution
de l’obligation et la question relative à l’étendue ne concerne que la mise en œuvre de la
sûreté.
2- L’engagement de la caution doit être positivement exprimé.
173 Tiré de l’article 2011 du code, la caution est personnellement tenue envers le créancier en vertu du contrat de cautionnement auquel le débiteur n’est pas parti. Par conséquent, la caution peut décider librement des modalités de son obligation. 174 Importance de la mention manuscrite dans la mise en œuvre du cautionnement (Civ 19 juin 2001, Bull. n° 179, pourvoi n° 98-16-183 sur la stipulation d’un terme et Civ. I. 10 juil. 2001, Bull. n° 208, pourvoi n° 98-21-575 sur la limitation de l’engagement à un montant déterminé). 175 Com. 1 juil. 1997, Bull. Civ. n° 208 : la caution ne peut pas s’obliger à payer des intérêts si l’obligation n’en génère pas.
68
En vertu de l’article 2015 du code civil, « le cautionnement ne se présume point, il
doit être exprès et ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été
contracté. »
Comme nous l’avons développé, la banque devra se référer et respecter les termes de
l’engagement de la caution. Ceci constitue l’une des conditions de validité du
cautionnement. En effet, la jurisprudence a décidé, sur la base de cet article, que
l’engagement de la caution ne pourra, en aucun cas, résulter de son inertie ou de son
silence176.
Nous avons fait remarquer que l’écrit constitue le meilleur moyen de traduire cette
exigence de l’article 2015 tout en insistant que la règle dictée par l’article 1326 du
même code connaît une certaine souplesse, quant à son application. La jurisprudence
et la doctrine ont unanimement admis que la mention manuscrite, en matière de
cautionnement, constitue « une règle de preuve ayant pour finalité de protéger la
caution »177.
Aussi, a-t-on précisé que la mention manuscrite insuffisante n’entraîne pas la nullité
du cautionnement puisqu’elle pourra être complétée par des éléments extrinsèques.
Cette position a été maintes fois confirmée notamment, en cas d’imprécision sur
l’étendue de l’obligation de la caution. Lorsque la caution s’est engagée d’une manière
indéfinie à garantir le solde du compte courant, la jurisprudence a appliqué le principe
qui dit que « l’accessoire suit le principal » ou « accessorium sequitur principal », en
se conformant à la règle édictée par l’article 2016 du code civil178 Elle a condamné la
caution à honorer en plus du principal les intérêts et accessoires.
B- l’importance du terme dans la détermination de l’étendue de
l’obligation de la caution
176 Cf. les conditions relatives à l’existence du consentement de la caution. (Civ. 1re, 24 avr.1968, B.I, n° 116, le cautionnement doit résulter d’un acte positif de la part de la caution) 177 Civ. 1re, 30 juin 1987, Bull. civ. I, n° 210, p. 155 : « les exigences relatives à la mention manuscrite ne constituent pas de simples règles de preuve mais ont pour finalité la protection de la caution » (cf. supra p.22, n° 67) 178 Civ. 29 fév. 2000, Bull. I, n° 68, p. 46 ; cf. aussi, Civ. 10 juil. 2001, Bull. n° 208 (précité supra n° 153)
69
Nous avons vu lors de l’étude des différentes modalités pouvant affecter l’obligation
de la caution que cette dernière peut valablement stipuler des limitations à son
engagement. De cela, nous déduisons deux types de cautionnement : le cautionnement
affecté d’un terme exprès et le cautionnement sans limitation de durée. Dans le cadre
de cette étude, nous allons analyser les conséquences du terme dans l’étendue de
l’obligation afin de pouvoir dégager les protections accordées à la banque.
70
1- La protection de la banque dans le cautionnement à durée déterminée
Un terme exprès signifie que la caution a entendu limiter son engagement dans le
temps. Comme nous l’avons dit précédemment, le terme stipulé doit être inférieur au
terme de l’obligation principale par application de la disposition de l’article 2013179.
Dans le cautionnement d’un compte courant, l’obligation de couverture est à
exécution successive tandis que l’obligation de règlement sera à exécution instantanée.
En conséquence, l’arrivée du terme ne met pas fin à toutes les obligations de la caution en
ce sens qu’elle va juste servir dans la délimitation des éléments couverts par le
cautionnement. Comme le compte continue de fonctionner, le solde du compte lui-même
pourrait connaître des changements quant à sa position. Aussi, est-il besoin de rappeler
que la première conséquence de la stipulation du terme consiste à priver la caution de la
faculté de résilier son engagement à tout moment.
1-1- L’arrivée du terme.
L’obligation principale couverte sera l’obligation née entre la date de la conclusion du
contrat et le jour de la survenance du terme. Le compte courant étant en perpétuel
mouvement, il sera tenu compte du fait que le montant du solde provisoire au jour du
terme puisque ce solde va constituer le plafond de l’obligation de la caution.
Soulignons que l’arrivée du terme n’équivaut pas à l’exigibilité de la dette ni au délai
imparti au créancier d’exercer ses poursuites. L’arrêt de la cour de cassation en date du
19 juin 2001 a consacré cette solution en décidant que « L’engagement de la caution
en garantie d’un prêt d’une durée de 8 ans consenti était ‘limité à quatre années à
partir du décaissement des fonds’. Cette clause a pour seul effet de limiter la garantie
de la caution au temps convenu parles parties et non d’imposer au créancier
d’engager contre elle ses poursuites dans ce même délai »180. Cela signifie que le
179 « Le cautionnement ne peut être conclu à des conditions plus onéreuses » 180 Civ. 1re, 19 juin 2001, Bull. n° 179
71
terme met fin à l’obligation de couverture mais laisse subsister l’obligation de
règlement qui ne sera exigible qu’à la clôture du compte en raison du caractère
accessoire de l’obligation de la caution.
1-2- La prorogation du terme de l’obligation principale
La finalité du cautionnement consiste à parer à la défaillance du débiteur principal
au paiement du solde débiteur apparaissant à la clôture du compte courant. Le terme,
lorsqu’il est stipulé expressément, doit nécessairement être inférieur à celui de
l’obligation principale en application conformément à l’article 2013 du code civil. La
stipulation d’un terme traduit la volonté de la caution de vouloir mettre fin à son
obligation à un moment précis. De ce fait, la prorogation accordée par la banque à son
débiteur n’aura pas de répercussion sur l’obligation de la caution. En effet, la banque
accorde de tel délai au débiteur principal en espérant que la situation de ce dernier évolue
et par la suite, il sera en mesure d’honorer le paiement du solde du compte, il s’agit en
fait d’une mesure de clémence accordée au débiteur principal. Notons que si après la
prorogation, le débiteur arrive à payer, la caution sera par la même occasion libérée. Si
dans le cas contraire, la prorogation est infructueuse, l’obligation due par la caution sera
limitée à hauteur du solde provisoire du compte constaté au jour du terme.
Compte tenu de la volonté de la caution, la même solution sera adoptée pour le
cas de prorogation judiciaire ou légale. Cela se justifie par l’opposabilité du contrat de
cautionnement au juge. En effet, avons-nous dit, le juge ne pourra, en aucun cas,
dénaturer ou interpréter la convention du moment que la volonté de chacune des parties y
est exprimée sans équivoque181. La stipulation du terme doit donc être faite de la manière
la plus explicite et la plus claire possible, pour ne pas créer des confusions ou des
incertitudes. En cas d’insuffisance de la mention manuscrite, on pourra faire jouer le
principe dégagé par l’arrêt du 15 Octobre 1991, qui considère que « l’écrit irrégulier
n’est nul, il sera réduit à un commencement de preuve par écrit pouvant être complété
181 cf. effets du contrat de cautionnement et le pouvoir d’interprétation du juge, p. 33.
72
par tous moyens 182».Dans cette hypothèse, il appartient à la caution de prouver qu’elle a
entendu limiter dans le temps son engagement.
182 Civ. 15 oct. 1991, J.C.P. 1992. II. 21923, note SIMLER
73
1-3- La déchéance du terme principal.
La déchéance du terme de l’obligation principale a pour principal effet de rendre
immédiatement exigible la dite obligation. Appliquer dans le cautionnement à durée
déterminé d’un compte courant, il y a lieu de considérer deux hypothèses.
Premièrement, lorsque la déchéance survient après le terme exprimé par la
caution, il convient de reprendre la solution retenue dans le cas d’une prorogation. Plus
exactement, l’obligation sera celle comprise entre la date de la conclusion et le jour du
terme. Seulement, la caution sera tenue d’honorer l’obligation ainsi déterminée, le jour où
la dette principale est exigible du fait de la déchéance.
Deuxièmement, lorsque l’obligation principale se trouve déchue183 avant le terme
stipulé, la caution resterait tenue dans les conditions initialement prévues184. Seulement,
cette solution peut être renversée par une clause contraire stipulée dans le contrat de
cautionnement, prévoyant que la déchéance du terme de l’obligation principale rend
exigible l’obligation de la caution185. Aussi, devons nous partir du principe selon lequel la
caution ne saurait être tenue à des conditions plus onéreuses et noter que l’article 2032 du
code civil a été créé justement pour résoudre le présent problème. La solution n’est pas
très explicite, mais en interprétant la disposition de cet article, nous pourrons déduire que
l’obligation de la caution n’est pas déchue puisqu’elle doit payer la banque lorsque celle-
ci le demande186. En effet, en vertu de cet article 2032 alinéa 2 du code civil, « la caution
est autorisée à exercer des recours contre le débiteur avant même d’avoir payé la banque
lorsque le débiteur a fait faillite ou est en déconfiture pour être par lui indemniser ». Ce
recours exercé avant paiement constitue, en réalité, une action en indemnité. Elle sera
dirigée contre le débiteur principal puisque le terme stipulé n’est pas respecté par suite de
la déchéance de l’obligation principale.
183 En règlement judiciaire ou en faillite. 184 Marty et Raynaud, par Jestaz, n° 591 et la jurisprudence de Civ. 1re, 20 déc. 1976, JCP 1977. II. 18611, concl. Gulphe 185 Com. 11juil. 1988, Bull. Civ. IV, n° 236 : autorisant cette clause contraire. 186 La faillite et l’insolvabilité du débiteur principal fait partie de la raison de l’engagement de la caution.
74
75
2- Terme implicite
A la différence du terme exprès, la caution sera tenue dans les mêmes conditions que
le débiteur principal. Puisque l’engagement perpétuel est prohibé, la caution est
autorisée à résilier unilatéralement son engagement à tout moment. Il nous faut ainsi
analyser l’impact de la résiliation dans l’étendue de l’obligation de la caution. Pour
mieux appréhender et mettre en évidence la protection de la banque en résultant, nous
allons considérer successivement les cas suivants : la prorogation du terme de
l’obligation principale, la déchéance du terme frappant le débiteur principal et enfin,
en cas de décès du débiteur.
2-1- la prorogation du terme de l’obligation principale
Rappelons que la prorogation permet au débiteur de ne pas exécuter l’obligation à
l’échéance initialement prévue. Aussi, l’article 2039 du code civil stipule que « la simple
prorogation du terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge point
la caution, qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement »
De cette disposition, il incombe ainsi à la caution qui s’en prévaut pour se
décharger de son obligation, de rapporter la preuve que la prorogation volontaire a
entraîné la perte du bénéfice de subrogation. Dans cette hypothèse, la prorogation est
considérée comme une faute de la part de la banque qui, par la suite, va engendrer la
décharge de la caution187. Pour atténuer cette faculté accordée à la caution, l’arrêt de la
première chambre civile du 05 juin 1984, a précisé que « si le créancier a agi avec une
intention bienveillante lorsqu ‘il s’abstenait de poursuivre la défaillance dès sa première
défaillance, il ne violait pas la clause selon laquelle aucune prorogation ne pourrait être
187 Civ. 1re, 16 fév. 1970 : D. 1970. 428, aussi, Civ. 9 mai 2001, Bull. n° 125, pourvoi 98-23-144
76
accorder sans le consentement de la caution puisque ceci ne constituait pas une
prorogation volontaire et donc, le créancier ne sera pas en faute. »188
Puisque la caution n’a pas stipulé de terme dans le contrat, elle a ainsi entendu
s’engager dans les mêmes termes que le débiteur principal. De prime abord, cette
position semble être d’une application évidente. Pourtant, la réalité en est différente
puisqu’il convient d’étudier séparément le cas d’une prorogation légale et judiciaire et
celui d’une prorogation volontaire.
En cas de prorogation judiciaire ou légale : la doctrine ainsi que la jurisprudence
ont préféré se prononcer pour la primauté de la finalité du cautionnement. Ils
ont décidé que la caution sera actionnée au jour même de l’échéance en
avançant que le cautionnement est justement constitué en vue de remédier à
une éventuelle défaillance du débiteur principal189. L’étendue de l’obligation
de la caution sera ainsi, celle constatée à la date de clôture du compte courant.
En cas de prorogation volontaire : la prorogation avons-nous dit ne décharge pas
la caution, mais influe-t-elle sur l’étendue de l’obligation de la caution ? Pour
y répondre, il nous faut revenir sur le terrain de la mention manuscrite et
déterminer l’intention réelle de la caution. Si la prorogation est donnée avec
son accord, le montant de son obligation sera celui constaté à la date de
l’échéance prorogée. Par contre, si le consentement n’a pas été donné, alors
que le contrat le prévoit, la caution est déchargée en se prévalant de l’article
2039 du code civil.
2-2- la déchéance du terme principal
En cas de déchéance du terme principal, puisque la caution ne saurait être tenue
plus que ne le serait le débiteur principal, l’obligation de la caution sera alors par la
même occasion exigible. En effet, la banque a contracté avec la caution pour se prémunir
188 Civ.1re, 5 juin 1984 : Bull. civ. I. n° 185 189 Req. 28 fév. 1939, S. 1939. 1. 161, rapporté dans Dumas, note Roubier.
77
contre de tel risque190. En matière de compte courant, le solde apparaissant au jour de la
déchéance sera considéré comme le solde final. En conséquence, la caution sera tenue de
payer ledit solde à moins qu’elle ait limité son engagement par un montant déterminé.
190 Les procédures collectives ouvertes contre le débiter principal font partie des risques couverts par le cautionnement.
78
2-3- la résiliation unilatérale
La résiliation unilatérale n’opère que pour l’avenir. Ainsi, la caution sera tenue
des dettes nées avant la révocation de son engagement. Appliquée dans le compte
courant, avant 1972, la solution était que la position débitrice du compte au jour de la
révocation constituait le plafond de ce qu’elle aura à payer. De nombreux critiques ont
attaqué cette solution en arguant que l’usage par la caution de la faculté de résiliation se
résoudrait en un simple cautionnement à terme. Sous cette pression, la cour de cassation a
décidé que « si le compte courant ayant continué de fonctionner, le débit du solde
provisoire existant au jour de la révocation du cautionnement n’a pas été effacé par les
remises subséquentes et le solde débiteur réclamé après clôture définitive du compte, ne
résulte point d’avances effectuées par la banque postérieurement à la révocation de
l’engagement »191. Par ailleurs, la banque est autorisée à insérer une clause stipulant que
la caution est tenue de payer le solde débiteur existant au jour de la résiliation. Ce serait
allé à l’encontre du principe de l’indivisibilité du compte courant.
2-4- Le décès de la caution.
Il convient de rappeler ici la teneur de l’article 2017 du code civil qui prévoit
expressément que « les engagements des cautions passent à leurs héritiers, à
l’exception de la contrainte par corps, si l’engagement était tel que la caution y fût
obligée ».
En matière de compte courant, le décès du débiteur entraîne la déchéance de
l’obligation principale et rendra par la suite, exigible le solde du compte. Ainsi,
l’obligation de la caution sera en principe, égal au montant constaté au jour du décès
du débiteur principal. En effet, la jurisprudence a été explicite sur la question, et a
191 Com. 22 nov. 1972, Gaz. Pal. 1973. 1. 213, note D. Martin et Com. 23 mai 1989, Bull. civ. IV, n° 158
79
décidé que seules les dettes existantes à la charge de la caution au jour de son décès
seront transmises aux héritiers192.
C- La limitation du montant dans le cautionnement d’un compte
courant.
Parmi les facultés accordées à la caution, la limitation de son engagement à un
montant est la plus usitée. Avant d’étudier cette hypothèse, nous allons d’abord analyser
le cas d’un cautionnement non chiffré.
1- La protection de la banque dans le cautionnement non chiffré.
Lorsque la caution a entendu s’engager purement et simplement dans les mêmes
termes et conditions que le débiteur principal, l’étendue de son obligation sera la même
que celle de l’obligation garantie. Dans cette hypothèse, la banque pourra demander
auprès de la caution le paiement du solde final résultat du compte courant tant en
principal que pour les intérêts et accessoires sauf dans le cas où, la caution aurait
expressément stipulé qu’elle ne garantissait que la dette en principal. Cette stipulation
doit avoir été faite expressément sinon, la caution ne pourra pas s’en prévaloir. Cette
exigence vaut également dans le sens inverse.
Cette solution résultant de l’application de l’article 2016 du code civil est
consacrée comme étant une jurisprudence constante actuellement193. En effet, il est admis
qu’en cas d’insuffisance de la mention manuscrite, l’acte complété par des éléments
192 Com. 29 juin 1982, Bull. civ. n° 258 : les dettes nées postérieurement ne seront pas transmises aux héritiers de la caution. 193 Com. 29 fév. 2000, précité.
80
extrinsèques permet de déterminer que la caution est tenue au paiement du solde du
compte courant aussi bien pour le capital que pour les intérêts194.
Par ailleurs, l’alinéa 2 du même article impose à la banque une obligation
d’information. Cette disposition n’est pas allée jusqu’à prescrire une sanction en cas de
non-respect de ladite obligation. Devant ce silence de la loi, la doctrine ainsi que la
jurisprudence ont unanimement établi que lorsque la banque omet d’informer la caution
sur la situation de la dette principale, en guise de sanction, l’engagement sera maintenu
mais les intérêts seront frappés déchéance195.
2- La protection de la banque dans le cautionnement chiffré
Pour ce qui est du cautionnement chiffré, la jurisprudence a adopté la même solution
que pour le cautionnement non chiffré. La question qui a suscité le plus de contentieux
concerne la signification du montant porté dans l’acte du cautionnement. Le second
problème engendré par cette limitation se rapporte au paiement effectué par le débiteur
principal.
2-1- L’interprétation du montant porté dans l’acte et ses conséquences dans
l’étendue de l’obligation de la caution.
Le problème est délicat en ce sens que la caution lorsqu’elle souscrit son engagement
n’a pas prévu la nature du montant inscrit dans l’acte de cautionnement. En effet, deux
cas peuvent se présenter, soit le montant est considéré comme le plafond de
l’engagement incluant le principal et les intérêts soit, il est admis comme étant le
montant du principal cautionné. Dans les deux cas, l’article1326 trouve application
194 Com. 6 fév. 2001, Bull. N° 29 : la cour condamne la caution qui s’était engagé non seulement pour le principal mais aussi pour les accessoires doit s’acquitter de la pénalité de 10% due par le débiteur principal qui constituait un accessoire. 195 Com. 25 avr. 2001, Bull. n° 75
81
puisqu’en cas de différence entre la somme en toutes lettres et celle en chiffre, l’acte
vaut pour la somme en toutes lettres. Par ailleurs, l’article 2016 du code civil stipule
que « le cautionnement indéfini d’une obligation principale s’étend à tous les
accessoires de la dette… »
La solution depuis 1983 considère que la mention manuscrite doit nécessairement
indiquer que la caution couvre en même temps que le principal les intérêts. Ceci étant,
le montant inscrit dans l’acte constitue le plafond de l’engagement et par conséquent,
la somme indiquée est composée du principal, des intérêts et des accessoires. Par
contre, si outre la somme exprimée, la caution a ajouté et entendu garantir les intérêts,
la jurisprudence a décidé que l’obligation de la caution s’étendra à tous les accessoires.
En effet, l’arrêt de la chambre commerciale du 29 octobre 1991 « la somme indiquée
dans l’acte constitue le plafond de l’engagement, principal et accessoires
confondus »196.
De ce qui précède, les intérêts seront ainsi soumis à la règle de la mention manuscrite
issue de la combinaison de l’article 1326 et 2015 du code civil. En cas d’insuffisance
de l’acte, il est possible de le compléter par d’autres éléments extrinsèques à l’acte.
C’est dans ce sens que la cour de cassation a décidé que « Lorsque le cautionnement
n'est pas commercial, la caution ne peut être tenue des intérêts au taux conventionnel,
en cas d'insuffisance des mentions manuscrites quant à ce taux, que sur le fondement
d'éléments extrinsèques propres à compléter ces mentions »197.
L’arrêt du 16 mars 1999 de la chambre commerciale a semble-t-il apporté une
précision importante en la matière, en réitérant l’utilité de l’article 2016, et décide
que : « Il résulte des articles 2016 et 1326 du Code civil que la caution d'une somme
déterminée ou indéterminée qui s'est engagée à garantir la dette "en principal, intérêts
et accessoires" est tenue au paiement desdits intérêts, peu important que la mention
manuscrite n'en fasse pas état ». De cet arrêt, il a été décidé que même si la mention
manuscrite ne relate pas les intérêts, l’apposition de la mention « bon pour caution et
de la signature » suffit à étendre l’engagement aux intérêts et accessoires du moment
196 Com. 29 oct. 1991, Bul. Civ. IV. n° 315 197 Civ. 29 fév. 2000, Bull. I. n° 68, p. 46
82
que la caution a entendu garantir la somme que le débiteur devra à la banque « en
principal, intérêts et accessoires »198.
2-3- L’imputation des paiements effectués par le débiteur principal.
La solution retenue actuellement est plus favorable à la banque puisqu’en cas
de silence des parties, les paiements effectués seront imputés à la part non garantie.
Cette solution s’est inspirée du fait que le cautionnement constitue avant tout, une
sûreté.
Cela signifie que la caution et la banque peuvent convenir que les paiements
effectués par le débiteur, en cas de cautionnement chiffré, seront imputés sur la part
couverte par le cautionnement199. Ce sera dépourvu d’intérêt pour la banque qui veut
se trouver à l’abri du risque de non-paiement.
§2- la mise en œuvre de la garantie
Afin de mettre en évidence la protection de la banque par rapport à la mise en
œuvre de la garantie, nous allons étudier l’exigibilité de l’obligation de la caution pour
terminer avec l’extinction de l’obligation de la caution.
Tout d’abord, il y a lieu de préciser que la charge de la preuve est supportée par la
banque. Comme nous l’avons démontré lors de l’étude de la mise en œuvre de
l’obligation contractuelle de la caution, la preuve est facilitée en raison du caractère
unilatéral du cautionnement et aussi, à cause de la place qu’occupe la mention
manuscrite dans le cautionnement d’un compte courant200. Aussi, faut-il préciser que
seul l’objet de la preuve change. En effet, la banque aura à prouver successivement
l’existence du cautionnement, l’étendue de l’engagement et enfin, la solidarité. Dans
198 Com. 16 mars 1999, Bull. IV. n° 59, p. 48. 199 Civ. 1re, 19 mai 1987, B. I. n° 154 : D. 1987, som. 446, note Aynès 200 Cf. section relative à la mise en œuvre de l’obligation de la caution (supra. p. 46-49)
83
tous ces cas, on adopte les mêmes principes que ce qu’on a vu lors de l’étude de
l’obligation de la caution en tant que débitrice de la banque.
A- Sur la question relative à l’exigibilité de l’obligation de la caution
et la protection de la banque
Pour analyser la protection de la banque sous cette rubrique, nous allons
considérer successivement : le cas d’un cautionnement simple et le cas d’un
cautionnement solidaire.
1- En cas de cautionnement simple
1-1- Le bénéfice de discussion
L’article 2011 du code civil précise que la caution n’est tenue de payer que
lorsque le débiteur ne satisfait à son obligation. La première interprétation que nous
pouvons tirer de cette disposition concerne le caractère subsidiaire de l’engagement de la
caution. En effet, c’est à juste titre que certains auteurs tels Ph. Théry et S. Piedelièvre,
considèrent que la caution est une débitrice du second rang. Ceci dit, pour réaliser ses
poursuites, la banque devra, dans un premier temps, s’adresser au débiteur principal sauf
lorsque l’insolvabilité du débiteur principal est avérée.
Il convient de souligner que cette règle n’est pas d’une application d’office en ce
sens qu’il appartient à la caution qui veut « bénéficier de la discussion de le requérir lors
des premières poursuites dirigées contre elles », de le requérir. Cette règle qui est d’une
application stricte découle directement de la l’article 2022 du présent code. Cette position
84
de la loi relative au moment de l’exercice de cette faculté a été suivie sans difficulté par
la jurisprudence201.
Ce bénéfice de discussion constitue la règle en matière de cautionnement simple
puisque l’article 2021 stipule expressément que « la caution n’est obligée de payer qu’à
défaut du débiteur, qui doit être préalablement discuter dans ses biens, à moins que la
caution n’ait renoncé au bénéfice de discussion, ou à moins qu’elle ne soit obligée
solidairement avec le débiteur ; auquel cas l’effet de son engagement se règle par les
principes qui ont été établis pour les dettes solidaires. » De cette disposition, le législateur
a prévu deux exceptions légales. Premièrement, la caution qui a expressément renoncé au
bénéfice de discussion ne pourra plus s’en prévaloir lorsque la banque lui demandera le
paiement. En d’autres termes, si au moment où la caution s’engage, elle a stipulé dans le
contrat qu’elle y renonce, la banque pourra dans ce cas poursuivre directement celle-ci.
Deuxièmement, la même solution est retenue lorsque la caution s’est engagée
solidairement avec le débiteur puisque dans cette hypothèse, son obligation est régie par
la règle de la solidarité202.
Enfin, la jurisprudence a décidé dans un arrêt de la première chambre civile en
date du 21 juin 1978203, que « la caution pour pouvoir bénéficier de la discussion doit le
stipuler expressément dans le contrat ». Cette solution profite à la banque dans la mesure
où, elle n’a pas à respecter un quelconque rang dans ses poursuites.
Nous en déduisons que la caution, pour pouvoir bénéficier de la discussion doit
contribuer activement dans la réalisation de celle-ci malgré le fait que, la présente faculté
constitue la manifestation la plus naturelle du caractère accessoire et subsidiaire du
cautionnement.
201 Civ. 1re, 15 juil. 1999 : Bull. civ. I. n° 236 : consacrant le moment d’exercice de la demande. 202 Art. 1197 et suiv. du code civil. 203 Civ. 1re, 20 juin 1978, Bull. civ. I, n° 236.
85
1-2- Le bénéfice de division
Le bénéfice de division suppose l’existence de plusieurs cautions garantissant la
même dette et le même débiteur. Comme pour la discussion, la division doit être
demandée. La remarque qui s’impose se rapporte sur le fait qu’en cas de pluralité de
cautions, la renonciation au bénéfice de division est la règle. Cela découle de la
disposition de l’article 2025 qui stipule que « lorsque plusieurs personnes se sont rendues
cautions d’un même débiteur pour une même dette, elles sont toutes tenues pour la
totalité de la dette ». Ceci étant, en l’absence d’une stipulation expresse dans le contrat de
cautionnement, la banque n’aura pas à diviser ses poursuites et peut par conséquent,
exiger la totalité de la dette à l’une quelconque d’entre elles.
2- En cas de cautionnement solidaire.
Actuellement, la pratique du cautionnement solidaire est devenue très abondante
en raison des avantages que la banque peut en tirer. Comme nous l’avons précisé, la
solidarité a pour principal effet d’anéantir les bénéfices de discussion et de division, des
facultés normalement reconnus aux cautions. Par conséquent, lorsque la caution a
entendu souscrire son engagement avec la stipulation de solidarité, la banque n’aura pas à
respecter des rangs dans l’exercice de ses poursuites. Ceci étant, la stipulation de
solidarité contribue efficacement à la protection de la banque en sens qu’outre la facilité
dans la poursuite, chacune des cautions sera tenue pour la totalité de la dette204. Par
ailleurs, la jurisprudence a admis qu’en l’absence d’une stipulation expresse, lorsque
deux personnes s’engagent à garantir une seule et même dette, toutes deux seront tenues
solidairement envers la banque et ne pourront lui opposer le bénéfice de division205.
Cependant, il convient de préciser que lorsque deux cautions se sont portées cautions
d’un même débiteur pour une même dette, l’une s’est engagée en limitant son
204 Art. 2025 du code civil. 205 Com. 11 déc. 2001, Bull. n° 195 sur la solidarité et le bénéfice de division
86
engagement à un montant déterminé et l’autre, souscrivant un engagement illimité quant
à son montant, la banque pourra réclamer à l’une comme à l’autre la somme indiquant la
limitation. Dans ce cas, le reste sera dû par celle qui n’a pas limité son engagement206.
B- L’extinction du cautionnement d’un compte courant.
Nous devons considérer deux hypothèses distinctes : l’extinction du cautionnement
avec pour résultat la satisfaction de la banque et l’extinction qui n’aboutit pas à la
satisfaction de cette dernière.
1- L’extinction engendrant la satisfaction de la banque.
1-1- Extinction par voie principale
Sous cette rubrique, nous allons nous limiter à analyser la protection de la banque par
rapport à l’extinction de l’obligation de règlement puisque l’obligation de couverture
avons-nous vu, s’éteint selon les termes et la stipulation contractuelle. En effet,
l’obligation de couverture nous a plutôt servi lors de l’étude de l’étendue de
l’obligation. Aussi, avons nous précisé que l’extinction de l’obligation de couverture
n’engendre pas l’extinction de l’obligation de règlement. Nous pouvons justifier cette
affirmation par la théorie soutenue par M. Mouly, en matière de cautionnement des
dettes futures, qui dit que : « l’obligation de couverture fixe un cadre général et lors
de la naissance de l’obligation garantie, l’obligation de règlement apparaîtra. » Ce
qui nous amène à limiter notre étude au seul cas de l’obligation de règlement.
Ce mode d’extinction du cautionnement confirme la dualité des liens d’obligations qui
caractérise le cautionnement. En effet, le cautionnement naît avec le contrat conclu
entre la banque et la caution, avons-nous précisé. Aussi, ce contrat met-il à la charge
de la caution une obligation de payer le solde du compte courant à la clôture de celui-
206 Com. 18 oct. 1983, Bull. civ. IV, n° 266.
87
ci. Nous avons vu que la théorie générale des obligations peut normalement régir le
cautionnement en l’absence de dispositions spéciales ou bien lorsque celle-ci ne va pas
à l’encontre de la règle spéciale. Par conséquent, nous pouvons reprendre les causes
d’extinction de l’obligation prévues dans le droit commun des contrats et étudier
successivement le paiement, la dation en paiement et la compensation.
a- Le paiement.
Le paiement effectué par la caution éteint sa propre dette. En vertu de l’article 328 de
la loi du 2juillet 1966, « le paiement est l’accomplissement par le débiteur de
l’obligation qui est à sa charge » ; « le débiteur doit payer la chose même qui fait
l’objet de la dette. » Nous pouvons appliquer cette disposition de la théorie générale
des obligations dans l’extinction de l’obligation de règlement. En effet, la caution aux
termes de son contrat, s’est engagée à payer le solde du compte en cas de défaillance
du débiteur principal. Le fait pour la caution de payer ledit solde répond ainsi à
l’exigence de l’article 328 de la présente loi.
Le problème qui pourrait se produire concerne le paiement partiel effectué par la
caution et accepté par la banque. Lorsqu’elle a entendu garantir le solde débiteur final
en principal, intérêts et accessoires, le paiement ainsi effectué devra être imputé sur les
intérêts sauf stipulation contraire. Ceci constitue une application de l’article 340 de la
loi sur la théorie générale des obligations.
b- La dation en paiement en vertu de l’article 2038 du code civil.
La dation en paiement consiste pour la banque, d’accepter que la caution, au lieu
de payer une somme d’argent lui remette soit un immeuble soit un effet quelconque en
guise de paiement. L’article 2038 stipule que « l’acceptation volontaire que le créancier
a faite d’un immeuble ou d’un effet quelconque en paiement de la dette principale,
décharge la caution encore que le créancier vienne à en être évincé. » De cette
88
disposition, notamment, dans la dernière partie, il semble que la loi a voulu
responsabiliser la banque quitte à ce que cette dernière vérifie au préalable la chose objet
de la dation en paiement. Contrairement au paiement en espèces, la dation comporte, dans
une certaine mesure, un risque pour la banque.
c- La compensation.
De nouveau, nous pourrons faire appel à la règle édictée par le droit commun des
contrats qui prévoit que « lorsque deux obligations réciproques existent entre les mêmes
parties, les dites obligations s’éteignent de plein droit à concurrence de la plus
faible. »207
L’application de la compensation est très marquée, notamment, lorsque la banque
a commis à l’égard du débiteur principal une faute. En effet, « La caution qui demande à
être déchargée de son obligation en raison de la faute commise par le créancier à
l'encontre du débiteur principal peut, ou bien, sans prétendre obtenir un avantage autre
que le simple rejet de la prétention de son adversaire, procéder par voie de défense au
fond, ou bien, par voie de demande reconventionnelle, demander à être déchargée
indirectement en sollicitant des dommages-intérêts puis la compensation entre le montant
de sa dette et celui de ces dommages-intérêts. »208
207 Article 364 de la loi du 2 juillet 1966 sur la théorie générale des obligations. 208 Com. 26 oct. 1999: Bull. 1999. IV. n° 182, p. 156.
89
1-2- Extinction par voie accessoire
La question qui mérite d’être soulevée concerne surtout les conditions de l’extinction
de l’obligation de la caution par voie accessoire. Il est admis que le cautionnement ne
peut exister que sur une obligation principale valable209. Dans quelles conditions,
l’extinction de l’obligation principale entraîne-t-elle, l’extinction de l’obligation de la
caution ?
Pour ce faire, nous allons analyser successivement, le paiement l’obligation principale,
la dation en paiement la compensation.
a- Le paiement de l’obligation principale.
Comme nous l’avons défini précédemment, le paiement constitue le mode normal
d’extinction d’une obligation. Pour que la caution puisse se prévaloir du paiement fait
par le débiteur principal, il faut que ledit paiement ait été libératoire, effectif et prouvé.
Pour analyser ces trois critères justifiant l’extinction de l’obligation principale, il y a
lieu de considérer des hypothèses précises.
• Le paiement fait par un tiers
En vertu de l’article 343 de la loi 66-003, le paiement effectué par un tiers éteint les
droits de la banque garantie. Par contre, en raison de la subrogation qui s’opère entre
la banque et le tiers qui a payé, la caution reste tenue au paiement.
• Le paiement partiel
En cas de paiement partiel, la jurisprudence a affirmé que le paiement effectué par le
débiteur sera imputé sur la somme non garantie210. Cette solution ne suscite guère de
difficulté quant à son application puisqu’elle est unanimement admise.
b- La dation en paiement
Pour cette hypothèse, il suffit de se référer à la solution retenue pour l’extinction par
voie principale de l’obligation de la caution. En effet, lorsque la banque a accepté la
209 Art. 2012 du code civil. 210 Civ. 1re, 19 mai 1987, B. I. n° 154, précité n° 200
90
dation au paiement faite par le débiteur, la caution sera par la même occasion libérée
puisque la dation en paiement produit dans ce cas les mêmes effets que le paiement au
regard de l’extinction de l’obligation.
c- La compensation
Pour ce qui est de la compensation opérée entre la banque et le débiteur, la caution
peut normalement s’en prévaloir. L’arrêt de la cour de la cassation du 12 juin1979, est
même allé jusqu’à étendre la portée de l’article 1294 du code civil. Dans cet arrêt, il a
été décidé que même si le débiteur renonce ou ne fait pas la compensation, la caution
pourra toujours s’en prévaloir pour se décharger211.
2- l’extinction du cautionnement sans la satisfaction de la banque
Dans cette étude, nous allons considérer : la remise de dette, la prescription et la
novation.
2-1- par voie principale
a- la remise de dette
Dans cette hypothèse, lorsque la banque a consenti une remise de dette à la caution,
cela entraîne l’extinction de l’obligation de celle-ci. Ceci ne signifie pourtant pas que
la banque a renoncé à sa créance. En effet, elle n’a plus de sûreté en garantie de sa
créance principale, mais le débiteur principal reste tenu.
b- la prescription
Lorsque l’action est éteinte par la prescription, la caution n’est plus tenue.
Remarquons que lorsque la prescription du cautionnement est plus courte que celle de 211 Com. 12 juin 1979, Bull. civ. IV, n° 197
91
l’obligation principale, la banque conserve ses droits contre le débiteur principal. Par
contre, lorsque la prescription de l’obligation de la caution est plus longue, tel le cas
d’un cautionnement civil garantissant une obligation commerciale, l’extinction de
l’obligation par la voie de la prescription se réfère à celle qui est la plus courte.
c- la novation
En ce qui concerne la novation, elle peut valablement intervenir en matière de
cautionnement. En effet, il suffit que la condition relative à son accomplissement, soit
respectée. Par conséquent, si la banque et la caution ont prévu que la caution pourra
être remplacée par une autre personne ou encore, dans l’hypothèse où la caution
conserve son engagement mais l’objet du cautionnement est remplacé. Nombreux sont
les cas, mais ce que nous voulons souligner consiste à affirmer que la novation ne
produit effet qu’entre la caution et la banque.
2-2- par voie accessoire.
la remise consentie au débiteur principal
L’article 1287 du code civil, dispose que la remise consentie au débiteur
principal décharge la caution. Cette règle constitue une application pure et simple du
caractère accessoire du cautionnement. En fait, cela se manifeste par une transaction
conventionnelle qui s’opère entre la banque et le débiteur mais dont le résultat profite
à la caution.
les autres modes d’extinction
En ce qui concerne les autres modes d’extinction prévue par le droit commun des
contrats, la solution reste la même, qu’il n’y a pas lieu de s’y attarder. En effet, la
caution est déchargée lorsqu’une novation ou une résolution se produit dans la relation
banque –client.
92
Devant le silence de la loi, allant dans le sens d’une protection de la banque, nous
avons été amenés à exploiter la complexité et la subtilité même du cautionnement,
pour préconiser un régime de protection adéquat et organisé, du moins sur certains
points. En effet, nous avons pu démontrer que la banque, compte tenu de l’aspect
contractuel du cautionnement peut se prévaloir des garanties et droits, que la loi sur la
théorie générale des obligations accorde à tous les créanciers, pour recouvrer le solde
du compte courant. Aussi, avons-nous précisé que les caractéristiques du
cautionnement peuvent également être interprétées en faveur de la banque.
Mais devant le caractère trop général de ces lois et l’imprécision de ces
caractéristiques, force est de constater que la protection ainsi dégagée, ne couvre pas
tous les difficultés et risques que le cautionnement lui-même engendre au détriment de
la banque. Que pour s’en prémunir, cette dernière a, dans la pratique, créé d’autres
nouvelles règles protectrices. Ces règles sont-elles équitables ? Contribuent-elles à la
réalisation de l’équilibre entre la protection de la caution et celle de la banque ?
Pour y répondre nous allons, dans le développement qui suit, analyser ces protections
issues du seul arbitraire de la banque.
93
PARTIE II : LES PROTECTIONS ISSUES DU SEUL
ARBITRAIRE DE LA BANQUE DANS LE
CAUTIONNEMENT D’UN COMPTE COURANT
Longtemps conçu comme un service rendu, le cautionnement a complètement changé
quant à son utilité et ses effets. De nos jours, la pratique a totalement délaissé cet esprit et a
essayé d’apporter de nouvelle optique dans le droit du cautionnement. La caution s’engage
non plus pour des raisons personnelles et familiales mais plutôt parce que la banque exige son
intervention pour se substituer au débiteur en cas de défaillance de ce dernier. Cette exigence
de la banque s’opère au moment de la demande de crédit. La caution souscrit ainsi
l’engagement afin de permettre la réalisation du crédit.
Nombreux sont les cas qui ont conduit la banque à innover dans ce sens, mais nous
pouvons les catégoriser en deux. D’abord, sur le plan légal, l’insuffisance des textes
organisant la pratique du cautionnement, notamment, en matière de compte courant, pousse
les établissements de crédit à instaurer des règles particulières et spéciales selon leur
convenance. Aussi, le droit commun du cautionnement tranche-t-il trop en faveur de la
caution et tend-il actuellement vers l’éviction de la protection de la banque dans le
cautionnement. Ensuite, sur le plan pratique, les banques veulent se trouver dans une situation
sans risque.
Par ailleurs, nous devons résoudre la question relative à l’équilibre entre la nécessité
du crédit et la protection de la caution.
Tout cela nous conduit à démontrer que ces protections issues du seul arbitraire de la
banque sont, la plupart du temps, trop importantes (chapitre 1) qu’un rééquilibrage s’impose
aussi bien par rapport à l’intérêt de la banque qu’à celui de la caution (chapitre 2)
94
Chapitre 1 : Une protection excessive de la banque
D’une manière générale, les banques ne dispensent plus de crédit que lorsque le client
arrive à fournir une garantie personnelle. La constitution d’un cautionnement est désormais de
règle en matière de crédit accordé sur la base du compte courant. Seulement, force est de
constater que la pratique de cette technique de sûreté n’est fondée que sur le besoin de la
banque. Par ailleurs, le cautionnement, notamment le droit le régissant, n’est pas encore
maîtrisé à Madagascar C’est pourquoi, les banques essaient d’adapter les règles issues du
droit français à leur besoin, uniquement, pour se procurer le maximum de sécurité.
Pour mieux cerner le problème, il est opportun de démontrer dans un premier temps
que l’excès résulte de la position du droit positif actuel (section 1) avant de mettre en
évidence les pratiques excessives (section 2).
Section 1 : Une conséquence de la position du droit positif actuel
Pour une meilleure approche des causes de la pratique excessive actuellement répandue, nous
allons considérer trois éléments. Les réponses que nous donnerons par la suite ne constituent pas une
liste exhaustive, mais elles nous seront utiles pour la recherche d’un rééquilibrage nécessaire. Ceci
étant, nous allons analyser successivement la tendance du droit de cautionnement vers l’éviction de la
protection de la banque (§1), l’absence de texte organisant expressément la mise en œuvre de la
présente sûreté (§2) et enfin, la recherche d’une protection maximale qui anime la banque (§3).
.
§1- La tendance vers l’éviction expresse de la protection de la banque.
La question qui se pose et qui mérite d’être traitée, au préalable, est celle de savoir
comment cette attitude s’analyse-t-elle ?
Pour y répondre, il nous faut nous référer aux principes régissant le cautionnement
d’un compte courant et démontrer que cette tendance du droit positif résulte du mécanisme
même du cautionnement d’un compte courant (A), avant de mettre en évidence l’éviction de
la protection de la banque (B)
95
A- Du fait du mécanisme même du cautionnement d’un compte courant
Pour justifier en quoi le mécanisme du droit de cautionnement participe-t-il à
l’éviction de la protection de la banque, il faut se référer aux diverses dispositions du code
civil traitant du cautionnement212.
Afin de parfaire cette étude, nous allons structurer le devoir de la manière suivante : 1/
la contribution de la banque dans le cautionnement et 2/- la considération des intérêts de la
caution.
1- La contribution de la banque dans le cautionnement
En principe, le cautionnement est unilatéral en ce sens que seule la caution souscrit
un engagement. Cette affirmation a été déduite de la disposition de l’article 2011 qui prévoit
que « celui qui se rend caution d’une obligation se soumet personnellement envers le
créancier à satisfaire à cette obligation si le débiteur n’y satisfait pas lui-même. » De cette
disposition, on pourrait avancer qu’aucune obligation ne pèse sur la banque.
Mais la solution actuellement en vigueur a, semble-t-il, voulu aller dans le sens
opposé et affirmer que la banque, outre le fait d’accepter l’engagement, se doit d’honorer une
obligation de prudence ou devoir de vigilance et une obligation d’information213.
1-1- l’obligation de prudence de la banque ou devoir de vigilance
Sur quel principe doit –t-on se fonder pour caractériser la présente obligation ?
Pour expliquer cette obligation de la banque, nous devons faire appel à la notion de
la non-ingérence, en vertu de laquelle la banque ne pourra pas s’immiscer dans les affaires de
son client. En effet, la banque ne peut pas refuser les ordres émanant de son client en
212 Art. 2011 à 2043 du code civil. 213 L’obligation d’information est expressément stipulée à l’article 2016 du code civil, l’obligation de prudence découle des pratiques bancaires et du professionnalisme de la banque, enfin, l’obligation de loyauté est surtout créée en vue de préserver l’intérêt de la caution.
96
invoquant que l’acte envisagé par ledit client est inopportun. Seulement, il faut remarquer
que, vis-à-vis des tiers ou du client, lorsque la banque n’a pas fait bonne diligence dans
l’accomplissement de ses missions, sa responsabilité pourra être engagée214. Dans le cas
contraire, le client ou le tiers ne pourront agir en responsabilité contre lui. Cette règle de la
non-ingérence connaît toutefois des limites notamment, lorsque les anomalies sont flagrantes
et évidentes. Cela signifie que le devoir de prudence combiné avec celui de la non-ingérence
dispense la banque d’une quelconque recherche sur la régularité ou non des opérations
effectuées par les clients215. Dans ce cas, pour prouver la faute de la banque, il faut que la
preuve soit dotée d’une certaine évidence quitte à ce que la banque réponde de ses actes
fautifs.
Notons que dans le rapport banque - caution, la banque est toujours tenue de
respecter et d’honorer ce devoir de vigilance. En effet, la précision a été apportée par l’article
2037 qui prévoit que « la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits,
hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus par le fait de ce créancier, s’opérer en
faveur de la caution. Toute clause contraire est réputée non écrite ».
Ainsi, la caution doit prouver que la banque a été négligente puisqu’elle n’a pas
cessé ses relations commerciales avec le débiteur en temps utile, que dans le cas contraire, le
passif n’aurait pas existé216. Par contre, en cas de faillite prononcée contre le débiteur
principal, la banque ne commet point de faute lorsqu’elle n’a pas déclaré sa créance
préalablement à la poursuite dirigée contre la caution. En l’espèce la cour a décidé que « Un
créancier ne peut être débouté de son action contre la caution d'un débiteur en redressement
judiciaire au motif qu'il n'a pas produit aux débats un état des créances vérifiées et admises,
alors que, s'il est vrai que la décision du juge de la procédure collective rendue dans les
rapports entre le créancier et le débiteur principal s'impose à la caution, il n'en demeure pas
moins que le créancier peut poursuivre et obtenir la condamnation de la caution devant le
juge du cautionnement avant toute déclaration de créance ou, si la déclaration a été faite,
avant toute admission, en établissant l'existence et le montant de sa créance. »217
En somme, dans cette hypothèse, la preuve porte, non pas sur la faute de la banque
mais plutôt, sur la conséquence de l’acte ou du fait de celle-ci.
214 cf. Com.30 oct. 1984 : Rev. Banque. 1985, 644, obs. RIVES-LANGE, 215 Le fait de demander à un client les renseignements tel l’adresse, la profession ne constitue pas une ingérence mais plutôt, un devoir de prudence légitime. 216 Com. 26 juin 2001, Bull. n° 125, pourvoi n° 97-11-914, cf. aussi, Civ. I. 9 mai 2001, précité n° 97 p. 32 217 Com. 18 janv. 2000, Bull. IV. n° 12, p. 10
97
1-2- Le devoir d’information de la banque.
Le devoir d’information, consacré à l’article 2016 du code, dans le rapport banque –
caution, se heurte parfois au devoir de secret auquel la banque se trouve assujettie. Ainsi, pour
analyser la portée de l’obligation d’information, il nous faut étudier en parallèle le devoir de
secret de celle-ci.
Le devoir de secret signifie que la banque est tenue de ne pas révéler à un tiers la
situation et le type de relation qu’elle entretient avec son client. L’obligation d’information
exigée par l’article 2016 du code va-t-elle à l’encontre du devoir de secret de la banque ?
La jurisprudence a précisé que les informations à communiquer à la caution doivent
comporter le montant en principal, des intérêts et accessoires ainsi que le terme même de
l’engagement de la caution. En outre, elle doit se faire au moins une fois par an218. L’objectif
est ici de mettre la caution au courant de l’évolution de l’obligation garantie compte tenu du
fait qu’elle est concernée, même subsidiairement et qu’en plus, il s’agit d’un corollaire du
caractère unilatéral du cautionnement219.
2- La considération des intérêts et droits de la caution
La finalité du cautionnement consiste à payer à la place du débiteur, le solde
débiteur final résultant du compte courant, si ce dernier venait à être insolvable. Si on s’en
tient à cette affirmation, on pourra déduire que la cause de l’insolvabilité importe peu, du
moment que cela n’affecte pas la réalisation de ladite finalité. Pourtant ce n’est pas aussi
simple que cela peut paraître en ce sens qu’il faut par la même occasion préserver l’intérêt de
la caution. D’autant plus que les doctrines, les jurisprudences ainsi que la loi ont tranché dans
le sens d’une protection accrue au profit de la caution.
Pour justifier de telle position, il a été avancé que l’engagement souscrit par la caution
peut la conduire à la ruine si la loi ou les tribunaux n’interviennent pas dans ce sens. Par
ailleurs, l’analyse de la protection de la caution s’effectue à deux niveaux, d’une part, lors de
la formation du contrat de cautionnement et d’autre part, lors de la mise en œuvre de la
garantie. 218 Civ. 6 nov. 2001, Bull. n° 265, imposant le régime de l’obligation de la caution. 219 Seule la banque détient l’original.
98
Dans le premier cas, le droit positif a avancé comme justification qu’il y a lieu de
conscientiser la caution quant à la nature ainsi qu’à l’étendue de son engagement. C’est l’une
des raisons qui a engendré l’application de la règle de l’article 1326 dans la formation du
cautionnement. Aussi, faut-il rappeler que l’article 2015 du code civil dispose que la caution
doit exprimer son engagement d’une manière simple et sans équivoque220.
Lors de la mise en œuvre de la garantie, on a insisté sur le fait que la caution s’est
engagée à payer la dette du débiteur principal. De ce fait, elle ne saurait être tenue d’une
manière définitive puisqu’elle dispose, en principe, des moyens de recours contre le
débiteur221. Soulignons au passage que la jurisprudence222, en s’inspirant de la loi223, décide
que le fait pour la banque d’engendrer la perte du recours subrogatoire entraîne la décharge de
la caution. Dans le même ordre d’idée, cette fois-ci complétée par le caractère accessoire de
l’engagement de la caution, la cour de cassation décide que la caution pourra se prévaloir de
la faute commise par la banque à l’endroit du débiteur principal pour se décharger de son
obligation. Aux termes de cet arrêt, « La caution qui demande à être déchargée de son
obligation en raison de la faute commise par le créancier à l'encontre du débiteur principal
peut ou bien, sans prétendre obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de
son adversaire, procéder par voie de défense au fond ou bien, par voie de demande
reconventionnelle, demander à être déchargée indirectement en sollicitant des dommages-
intérêts puis la compensation entre le montant de sa dette et celui de ces dommages-
intérêts. »224
La question à laquelle nous allons maintenant répondre concerne les manifestations de
cette tendance vers l’éviction de la protection de la banque, constatée dans le droit positif
actuel.
B- Les manifestations de l’éviction de la protection de la banque
220 La jurisprudence a maintes fois insisté sur le fait que le silence ne traduit nullement la volonté de la caution. (Cf. Civ. 1re, 24 avr. 1968, B.I, n° 116, précité n° 22, p. 10) 221 Certains auteurs sont allés jusqu’à considérer que la caution doit avoir la capacité d’ « un prêteur » (Cf. Philippe Théry : « Sûretés et publicité foncière », précité n° 31 p. 15) 222 Civ. 9 mai 2001, Bull. n°125 223 Art. 2037 du code civil. 224 Com.26 oct. 1999: Bull.1999, IV, n° 182 p. 156
99
Pour ce faire, nous allons démontrer cette éviction de la protection de la banque
primo, lors de la formation du contrat de cautionnement et secundo, dans la mise en œuvre de
la garantie.
1 - Lors de la formation du contrat
1-1- La tendance vers le formalisme
En vertu de l’article 2015 du code civil, il est stipulé que « le cautionnement ne se
présume point ; il doit être exprès et on ne peut l’étendre au-delà des limites dans lesquelles il
a été contracté. » De cette disposition, la jurisprudence a créé des règles tendant
principalement à protéger la caution.
Comme nous pouvons remarquer, le rédacteur du code civil s’est limité d’exiger que
l’engagement soit « exprès », sans aller jusqu’à prescrire une quelconque formalité. Pourtant,
on ne sait pour quelle raison ni sur quelle base, la jurisprudence a-t-elle inventé la notion de
« preuve ayant pour finalité la protection de la caution. » En effet, depuis l’arrêt du 30 juin
1987, la mention manuscrite est rédigée en vue de permettre d’une part, la preuve de
l’engagement de la caution et d’autre part, la protection de la caution.
Eu égard cette position, nous pouvons avancer que les adeptes d’une telle qualification
ont tendance à primer l’intérêt de la caution sur la finalité du cautionnement. En effet, comme
nous l’avons précité ci-haut, le juge du fond se soucie trop de l’intérêt de la caution et
considère qu’étant bénéficiaire du cautionnement, il n’est plus besoin d’édicter une règle
spéciale allant dans le sens d’une véritable protection en faveur de la banque. Ce que l’on peut
reprocher à cette position de la jurisprudence, c’est le fait d’oublier que la banque, dans ses
100
rapports avec la caution n’est qu’un simple chirographaire225. La protection de la banque en
résultant ne sera donc pas absolue. Or, la banque, compte tenu du risque que l’opération de
crédit peut engendrer, éprouve le besoin d’être protégée. Nous avons pu démontrer qu’étant
un contrat, la banque pourra se prévaloir des règles destinées à protéger les créanciers
chirographaires traités par les articles 58 à 62 de la loi relative à la théorie générale des
obligations226.
Soulignons que l’article 62 de la loi portant théorie générale des obligations malagasy,
autorise le créancier chirographaire à augmenter ses garanties en vue de s’assurer sur le
remboursement de sa créance, en stipulant que « Indépendamment des droits qui lui sont
reconnus par les articles qui précèdent, le créancier peut toujours se faire constituer
certaines sûretés en garantie de l’exécution de sa créance dans les conditions prévues au titre
de sûretés et privilèges. » En analysant la teneur de cet article, nous pouvons déduire que la
protection accordée à la banque en vertu du droit commun des contrats est insuffisante,
notamment à cause du caractère général de la garantie227.
1-2- L’interprétation des caractéristiques du cautionnement.
Concernant l’existence de ces caractéristiques, nous constatons une parfaite
convergence d’opinions. Le cautionnement présente principalement trois caractères : il est de
par son essence accessoire, de par sa forme, consensuel et unilatéral.
L’éviction de la protection de la banque se manifeste surtout au niveau de
l’interprétation de ces caractères. Précisons que la tendance vers le formalisme est issue du
caractère unilatéral combiné avec l’exigence de l’article 2015 du code civil.
Pour mieux comprendre la position du droit positif par rapport à la question, nous
allons analyser un à un le sens donné par le droit du cautionnement à chacun de ces
caractères.
1- 2 – 1 - Pour le caractère accessoire
225 Sauf dans le cas d’un cautionnement réel. 226 Loi 66-003 du 02 juillet 1966 : J.O.n° 486 du 9/07/66, p. 1429. 227 En vertu de l’article 01 de LTGO, « le patrimoine du débiteur constitue le gage général de tous ses créanciers. »
101
La question relative au caractère accessoire du cautionnement ne suscite pas de
problème majeur quant à son interprétation sauf lorsqu’on est sur le terrain de l’étendue de
l’obligation228. En effet, il est actuellement admis que la caution s’engageant pour un montant
déterminé ne sera tenue que du paiement du solde en principal sauf stipulation expresse229.
Nous pouvons constater que la protection de la caution prime de nouveau en ce sens que le
principe, actuellement admis pour le sort des intérêts, réitère la valeur de la mention
manuscrite, qualifiée de « règle protectrice » par certains auteurs tels Ph. Malaurie et L.
Aynès ou Ph. Delebecque et Ph. Simler.
La jurisprudence a réagi et a décidé que l’irrégularité de l’écrit n’affecte pas la validité
de l’engagement puisque l’acte pourra toujours constituer un commencement de preuve par
écrit, pouvant être complété par des éléments extrinsèques230. Le juge du fond a voulu
rechercher la finalité du cautionnement.
1- 2 –2 - Pour le caractère unilatéral et le caractère consensuel du cautionnement.
En principe et selon les règles du droit commun des contrats, la validité d’un contrat
unilatéral est conditionnée par la confection d’un écrit231. Par ailleurs, l’article 2015 exige un
engagement exprès de la caution.
Dans le concret, le meilleur moyen permettant de matérialiser ce caractère exprès de
l’engagement consiste dans l’établissement d’un écrit. Il ne faut cependant pas oublier que le
caractère consensuel du cautionnement signifie que le cautionnement est parfait dès la
rencontre de la volonté des parties sans qu’il ne soit besoin d’accomplir une quelconque
formalité. Pourtant la jurisprudence a institué que l’écrit constitue « une règle de preuve ayant
pour finalité la protection du consentement de la caution ». Rappelons que lorsque l’écrit est
exigé pour la validité d’un acte, dans ce cas, le but est de protéger le consentement de celui
qui s’engage. Par contre, lorsqu’il n’est requis qu’à titre de preuve, son irrégularité n’affecte
que l’efficacité de l’acte. 228 (cf. section traitant l’étendue de l’obligation de la caution, p. 72 à 82) 229 Importance de l’écrit dans la détermination de l’étendue de l’obligation de la caution, notamment en matière de cautionnement chiffré : Com. 16 mars 1999, Bull. IV. n° 59, p. 48 (cf. p. 80 et 81 sur la signification du montant exprimé dans l’acte de cautionnement.) 230 Civ. 29 fév. 2000, Bull. I. n° 68, p. 46 231 Article 1326 du code civil français et article 277 de la loi 60-003 malagasy.
102
De ce que nous venons de voir, nous pouvons confirmer que la jurisprudence a
accordé une importance particulière à l’intérêt de la caution en s’appuyant sur la rigueur de
l’engagement de celle-ci. Cette tendance accentuée vers le formalisme, risque de nuire
gravement à l’épanouissement de la présente sûreté en ce sens que cela ne ferait qu’alourdir la
constitution du cautionnement232.
2 - Dans la mise en œuvre du cautionnement
2-1- Sur l’étendue de l’obligation de la caution.
Comme nous l’avons exposé lors de l’étude de l’étendue de l’obligation de la caution,
la mention manuscrite occupe une place indispensable dans la détermination de la couverture
en matière de cautionnement d’un compte courant233. L’éviction de la protection de la banque
se fait surtout sentir au niveau de la détermination de l’étendue de l’obligation en matière de
cautionnement chiffré. La solution retenue par le droit positif est motivée par la volonté de
témoigner une sollicitude excessive à la caution. La jurisprudence a décidé en s’appuyant sur
l’article 2015 qui stipule que « la caution ne saurait être tenue au-delà des limites dans
lesquelles, le cautionnement a été contracté. » Dans ce cas, le montant désigne le plafond de
l’engagement de la caution. Par contre, lorsque la caution a entendu garantir le solde du
compte en principal plus les intérêts, on appliquera la règle édictée par l’article 2016 du code
civil234. Mais, toujours est –il, l’étendue de l’engagement de la caution dépend largement de la
manière dont a été établi l’acte.
2-2- Par rapport aux droits de la caution et l’obligation de la banque
232 La facilité dans sa constitution figure parmi les avantages majeurs procurés par le cautionnement. 233 Civ. 29 fév. 2000, précité. 234 Com.16 mars 1999. Bull. IV. n° 59, p. 48
103
L’article 2016 alinéa 2 du code civil impose à la banque un « devoir d’information »
au profit de la caution et précise que lorsque la caution est une personne physique,
l’information devra être faite au moins une fois par an235. Cette position a été entérinée par
l’arrêt de la chambre civile du 6 novembre 2001 qui a décidé que « L'obligation, à laquelle
sont tenus les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise
sous la condition d'un cautionnement, de faire connaître chaque année à la caution le
montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires, ainsi que le terme de
son engagement, doit s'exécuter annuellement jusqu'à extinction de la dette. »La sanction
classiquement prévue lorsque la banque ne satisfait pas à cette obligation n’est pas la nullité
de l’acte de cautionnement, mais uniquement la déchéance des intérêts. Selon les termes de
l’arrêt de la chambre commerciale du 25 avril 2001, « Il résulte de l'article 48 de la loi du 1er
mars 1984 que, sauf dol ou faute lourde du dispensateur de crédit, l'omission des
informations prévues par ce texte est sanctionnée par la seule déchéance des intérêts. Dès
lors, est cassé l’arrêt de la Cour d’appel qui a énoncé qu’il n’y avait pas lieu de prononcer la
déchéance des intérêts, mais qui a débouté le dispensateur de crédit de sa demande en
paiement236»
La conséquence majeure de toutes ces décisions consiste dans le fait que la banque
doit apporter la preuve qu’elle a exécuté son obligation. Notons que l’information doit d’une
part, porter sur le principal, les intérêts et les accessoires et d’autre part, conformément à
l’article 48 de la loi 1er mars 1984, comporter l’indication que la caution pourra résilier à tout
moment son engagement lorsqu’elle n’a pas pris le soin de limiter dans le temps son
obligation. Aussi, a-t-on admis que la banque est dispensée de l’obligation d’information
lorsque la situation de la caution était telle qu’elle aurait eu connaissance desdites
informations sans l’intervention de la banque. Il en a été décidé ainsi lorsque la caution était le
gérant de la société cautionnée237.
En outre, la plus flagrante de toutes les manifestations de la primauté de la protection
de la caution sur celle de la banque a été la décision rendue par la cour de cassation en date du
20 octobre 1992, visé par l’article 1147 du code civil et l’article 48 de la loi du 01 mars 1984.
En effet, la cour de cassation a entendu aggraver la portée du non-respect de l’obligation
235 Civ. 6 nov. 2001, Bull. n° 265 : entérinant le principe de l’article 2016 alinéa 2 du code civil. 236 Com. 25 avr. 2001, Bull. n° 75 : les intérêts sont frappés de déchéance si la banque ne satisfait pas à l’obligation d’information. 237 Com. 29 mai, Bull. n° 106 : sur l’obligation d’information et la situation de la caution.
104
d’information en décidant qu’ « outre la déchéance des intérêts échus, la solution du droit
commun de la responsabilité sera applicable238 ». Cette décision peut être interprétée comme
excessive en ce sens que l’on a réduit à néant l’existence de l’obligation de se renseigner qui
pèse normalement sur la caution. En effet, dans cette décision, il a été décidé, sans aucune
autre réserve, que la négligence de la caution n’est pas à considérer lorsqu’on se trouve sur le
terrain de l’obligation de la banque.
C - La loi française sur la consommation
Actuellement, le droit de la consommation se veut d’être omniprésente quant au
domaine qu’il régit. Il faut remarquer que dans cette branche du droit, il y a lieu de distinguer
le professionnel du consommateur. Est qualifié de consommateur, le cocontractant qui se
trouve en position faible, et professionnel, celui qui dispose de suffisamment de savoir et de
maîtrise sur le domaine concerné.
En droit français, on distingue maintenant le cautionnement régi par le droit de la
consommation de celui régi par le droit commun des contrats dont la différence notable, quant
aux règles applicables, se situe au niveau de la condition de validité du contrat. En effet,
lorsque le cautionnement est conclu en vue de garanti un crédit à la consommation, on
appliquera, par conséquent, la règle relative à la consommation. Doit-on systématiquement
considérer la caution comme le consommateur et bénéficiera –t-elle par conséquent des
régimes protecteurs ?
La question qu’il convient de résoudre se rapporte plutôt sur la qualification du
cautionnement. En effet, le fait que le crédit cautionné soit-il un crédit à la consommation,
suffit-il à soumettre le cautionnement sous l’empire de la loi de la consommation 239?
La réponse donnée par le droit français a tranché en faveur de l’application de la règle
sur la consommation du seul fait que l’opération principale garantie constitue une opération 238 « Attendu qu’en statuant ainsi, alors que la sanction de l’article 48 de la loi du 1er mars 1984 en ce qui concerne l’obligation d’information de la banque s’ajoute à la sanction de droit commun et alors qu’en l’espèce, la négligence de la caution à révoquer son engagement ne supprimait pas la négligence de la banque dans son obligation d’information, la cour d’appel a violé les textes sus- visés. »
239 Code de la consommation du 31 décembre 1989.
105
régie par le droit de la consommation. En d’autres termes, on n’a pas suivi le même
raisonnement que celui qu’on avait adopté pour classer « commercial » un cautionnement240
§2- L’absence des textes organisant la mise en œuvre du cautionnement
La deuxième raison qui a engendré l’excès du régime de la protection de la banque
consiste dans l’absence d’un texte déterminant la procédure à suivre pour la mise en jeu du
cautionnement d’un compte courant. Pour justifier cette affirmation, nous devons partir de la
complexité même du cautionnement, avant de démontrer que les dispositions de la théorie
générale des obligations aussi bien malagasy que français ne suffisent pas à instaurer une
procédure de recouvrement propre au cautionnement.
A- Le cautionnement : une opération complexe
Comment expliquer cette complexité du cautionnement d’un compte courant ?
La première explication que nous pouvons fournir résulte de l’imprécision des textes.
Le rédacteur du code lui-même n’a pas voulu traiter séparément le contrat de cautionnement
et la technique de sûreté qui en découle. Tantôt, le mot cautionnement désigne le contrat passé
entre la banque et la caution, tantôt, celui-ci désigne la technique de sûreté en soi.
Par ailleurs, les portées réelles des caractéristiques du cautionnement ne sont pas
légalement, bien définies. Prenons, le caractère accessoire du cautionnement qui est souvent
confondu avec le caractère subsidiaire de l’engagement de la caution. Ces deux notions sont
certes, voisines mais elles n’ont pas les mêmes portées. La subsidiarité suppose que la caution
ne doit pas être poursuivie qu’après épuisement de tous recours. Par contre, le caractère
accessoire signifie que le cautionnement est nécessaire en vue de compléter le principal. Par
conséquent, nous pouvons déduire que la stipulation de solidarité entraînant la perte du
bénéfice de discussion, ne fait disparaître que l’aspect subsidiaire de l’engagement et laisse
240 Le cautionnement est commercial lorsque la caution a un intérêt patrimonial dans l’opération garantie (cf. . Paris, 20 janv. 1998, Bull. Joly 1999. 539, sur le caractère civil ou commercial du cautionnement, n° 161. p. 62)
106
ainsi, subsister le caractère accessoire. Cette théorie peut être vérifiée et justifiée par le fait
que la somme des engagements de toutes les cautions solidaires ne doit en aucun cas, excéder
l’obligation principale. Cela résulte de la combinaison de l’article 2013 et 2025 du code
civil241.
B- L’insuffisance des dispositions de la LTGO et du code civil
1- La loi 66-003 malagasy du 02 juillet 1966 sur la théorie générale des
obligations242
Le rédacteur de la présente loi n’a pas traité les sûretés dans ses dispositions. Comme nous
l’avons démontré, il est possible, dans certains cas, de faire jouer les règles émanant de la
théorie générale des obligations notamment, lorsque nous avons étudié la protection
banque dans le contrat de cautionnement. Seulement, il ne faut pas oublier que le
cautionnement est aussi une opération triangulaire qui se caractérise par l’existence de
deux liens d’obligations distincts que sont, le contrat de base sur lequel viendra se greffer
le contrat de cautionnement conclu entre la banque est la caution.
Aussi, convient-il de rappeler que le cautionnement est essentiellement accessoire.
L’article 277 de la LTGO dans son alinéa 3 stipule expressément que « la mention
manuscrite est exigée même s’il s’agit d’un engagement accessoire à une convention
principale ». Si on appliquait purement et simplement cette disposition dans le
cautionnement d’un compte courant, la mention manuscrite serait exigée en tant que
condition de validité de l’acte dont l’irrégularité entraînerait son annulation. 241 Civ.1re, 18 fév. 1997 : Bull. civ. n° 62. 242 J.O. n° 486, du 9/07/66. p. 1429
107
Seulement, le cautionnement n’est pas réduit au seul contrat de cautionnement conclu entre
la banque et la caution, mais aussi, une opération triangulaire dans laquelle le débiteur
occupe une place très importante. En effet, le code civil traite du rapport entre le débiteur
principal et la caution dans les articles 2028 à 2032. Ceci étant, ce rapport n’est plus dans
le domaine de la Loi sur la Théorie Générale des Obligations Malagasy.
2- Le code civil français
A la différence de la loi 66-003 malagasy, le cautionnement figure parmi les
nombreuses opérations juridiques régies par le code civil. Le code civil constitue le texte de
base du cautionnement puisque le présent code traite de toutes les étapes de la vie du
cautionnement. Il faut préciser que les dispositions du code civil n’ont pu dégager que les
règles de base pouvant être appelées à régir la présente sûreté tels les principes directeurs dans
la mise en œuvre du cautionnement. Ainsi, force est de constater qu’aucune procédure précise
n’a été établie, c’est la raison pour laquelle il est souvent fait appel aux règles du droit
commun en avançant qu’à défaut d’un texte spécial, le droit commun s’applique.
Une loi de procédure allant dans ce sens pourrait être envisageable à condition que
cela ne rende pas trop difficile, la mise en œuvre du cautionnement. Nous tenons à remarquer
que pour les sûretés réelles tel le gage243 ou hypothèque, le code civil a établi les principes
directeurs, mais en même temps, le nouveau code de procédure français a fixé les étapes
nécessaires à la réalisation desdites sûretés.
§3- La recherche d’une protection optimale
C’est surtout dans le cadre d’un compte courant que la banque octroie du crédit
actuellement en raison de la relation d’affaire qui s’est déjà nouée entre elle et son client.
Cette stabilité constatée au niveau de la relation « banque – client » ne satisfait point la
banque quand il s’agit d’accorder une facilité de caisse ou un découvert en compte courant.
En effet, même après analyse approfondie des données financières du client, la banque opte
243 Art. 92 et 93 du code de commerce français
108
toujours pour la constitution d’une sûreté, en l’occurrence d’un cautionnement, en vue de
garantir, le cas échéant, le paiement du solde qui pourrait en résulter. Dans le concret, pour
pouvoir bénéficier d’un crédit, le client doit d’une part, justifier d’une surface financière
importante et d’un rendement élevé et d’autre part, présenter une caution dont la solvabilité
est certaine du moins au moment de l’octroi du crédit. Quels sont les critères pris en
considération ? Ces critères sont-ils objectifs ?
Cela nous conduit à aborder la manifestation de l’excès dans la pratique du
cautionnement d’un compte courant.
Section 2 : La pratique excessive
Soulignons que les remarques et informations que nous allons fournir dans cette étude
sont tirées de la pratique du cautionnement constatée dans les banques primaires malagasy.
Pour avoir plus de précision, nous avons pris le soin de reproduire en annexe l’acte de
cautionnement habituellement utilisé par les établissements de crédit.
Dans le cadre de cette étude nous allons exposer dans un premier temps que, l’excès se
manifeste dans l’interprétation des caractéristiques du cautionnement pour ensuite, démontrer
que les intérêts ainsi que les droits de la caution sont totalement négligés.
§1- Dans l’interprétation des caractéristiques du cautionnement
A- Le caractère unilatéral du cautionnement
1- Le principe
Le caractère unilatéral signifie que seule une partie souscrit un engagement. A la
différence d’un engagement unilatéral de volonté, avons-nous dit, l’acceptation du
cocontractant est requise. La même règle régit le cautionnement, puisque la caution n’est
109
tenue que lorsque la banque a donné son acceptation244. Dans la pratique, il n’est plus besoin
de rechercher l’acceptation de la banque puisque, c’est elle-même qui impose la fourniture de
la caution. Il faut insister sur le fait que la caution s’engage uniquement en vue de permettre
l’octroi du crédit, les autres raisons de son engagement ne sont pas prises en considération245.
Par ailleurs, le caractère unilatéral exige l’application de l’article 1326 du code civil
sur la mention manuscrite afin de constater l’engagement. La pratique bancaire n’exige plus
que l’acte soit écrit de la main de la caution. Aussi, aucun contentieux relatif à ce problème
n’a-t-il pu être détecté. C’est la raison pour laquelle l’utilisation des actes pré imprimés est
très répandue.
2- Utilisation des actes pré imprimés
L’acte pré imprimé en soi ne suscite guère de difficulté quant à sa validité, c’est le
fond même de l’acte qui mérite d’être analysé. La banque étant dans une situation de force
aussi bien par rapport au demandeur de crédit que par rapport à la caution. Les clauses dans
l’acte de cautionnement sont élaborées à partir de la recherche de sécurité animant la banque.
Nous pourrions même assimiler le contrat de cautionnement à un contrat d’adhésion puisque
la caution n’exprime pas véritablement sa volonté. En effet, lorsque la banque demande la
fourniture d’une caution pour garantir le solde du compte, le crédit accordé sur la base dudit
compte ne sera pas octroyé tant que la caution fournie n’a pas accepté les clauses établies
dans le contrat de cautionnement. Dans cette hypothèse deux cas peuvent se présenter, soit la
caution accepte les conditions dans le contrat de cautionnement et le crédit est accordé soit,
elle refuse de s’y adhérer et par conséquent, le crédit n’est pas octroyé.
B- Le caractère consensuel du cautionnement
244 Com. 14 déc.1976 : Bull. Civ. IV, n° 325 245 En effet, la banque conditionne l’octroi du crédit à l’engagement d’une caution.
110
1- La signification de la règle
Nous avons précisé que le cautionnement est un acte consensuel de par sa forme, en ce
sens qu’aucune formalité ne devrait être exigée pour sa validité. Cette solution a été tirée
de l’article 2015 du code civil. Pourtant, lorsque nous analysons la pratique du
cautionnement à Madagascar, nous constatons que les banques exigent à ce que la
signature de la caution soit légalisée selon la forme foncière246 outre la mention « lu et
approuvé. Bon pour caution jusqu’à ……. » En effet, la banque ne tient compte de
l’engagement de la caution qu’après l’accomplissement de telles exigences. Cette pratique
ne va-t-il pas directement à l’encontre de la règle sus indiquée ? La raison que la banque
avance pour justifier cette pratique se base sur la fraude qui pourrait éventuellement
émaner de la caution ou du débiteur. La caution a, dans la plupart des cas, un intérêt
patrimonial marqué dans l’opération garantie. De ce fait, la crainte de la banque peut être
partiellement, justifiée.
2- L’écrit occupe une place prépondérante mais il est établi au profit
de la banque
Néanmoins, force est de constater que l’écrit est actuellement de règle en matière de
cautionnement. Non seulement, les clauses sont établies en faveur de la banque mais aussi, la
caution devra seulement y adhérer. La banque considère surtout la valeur probatoire de l’acte
et ne se soucie guère de la protection du consentement de la caution. Nous assistons ainsi à
une flagrante violation de la solution retenue en la matière. En effet, il a été décidé que l’écrit
constitue « une preuve ayant pour finalité la protection de la caution247. »
C- Le caractère subsidiaire de l’engagement de la caution.
246 « Vu pour la légalisation de M. nommé au présent acte, lequel s’étant présenté devant nous, justifié de son identité et affirmé la liberté de son consentement » 247 Civ. 1er, 30 juin 1987, Bull. civ. I, n° 210 et civ. 1re, 15 nov. 1989, D. 1990. 177, note C. Mouly
111
1- le principe relatif aux bénéfices de discussion et de division
La caution peut normalement, lorsqu’elle n’y a pas expressément renoncé, demander à
la banque de respecter un certain rang dans la réalisation de ses poursuites. Saisie d’une telle
demande, la banque doit nécessairement respecter cette exigence. La loi ne stipule aucune
sanction en cas de non-respect du bénéfice de discussion. Il faut seulement que la demande
soit faite au jour des premières poursuites dirigées contre la caution248.
La même solution s’applique en ce qui concerne le bénéfice de division. L’article
2026 du code prévoit expressément cette possibilité et stipule que « Néanmoins, chacune
d’elles peut, à moins qu’elle n’ait renoncé au bénéfice de division, exiger que le créancier
divise préalablement son action, et la réduise à la part et portion de chaque caution. » En
effet, la règle en la matière, permet à la banque d’exiger la totalité de la dette à l’une
quelconque des débiteurs.
2- la pratique du cautionnement d’un compte courant
Une fois de plus la banque affirme sa supériorité et impose que, dans son engagement,
la caution renonce expressément au bénéfice de discussion et au bénéfice de division. Dans le
contrat de cautionnement, la banque a inséré une clause selon laquelle, il est stipulé que
« chacune des cautions renonce expressément au bénéfice de division tant avec le débiteur
principal qu’avec tous les coobligés249. »
Soulignons que cette clause s’applique aussi bien pour le cautionnement simple que pour
un cautionnement solidaire. La banque n’a donc pas considéré les exigences des articles
précités et continue à insérer systématiquement la présente clause dans le cautionnement
surtout qu’aucune disposition ne sanctionne de telle pratique. Par contre, la loi a prévu une
sanction, qui n’est pas suffisamment coercitive, puisqu’elle prévoit une action en
responsabilité dirigée contre la banque lorsque celle-ci n’a pas discuté le débiteur dans ses
biens, que par le défaut de poursuites, le débiteur est devenu insolvable. Dans ce cas, la
caution pourra être déchargée en se basant sur la règle de l’article 2037 du code civil.
248 Art. 2022 du code civil. 249 Cf. article 04 du contrat de cautionnement en annexe.
112
§2- Par rapport à l’intérêt et aux droits de la caution
A- Lors de la formation du contrat
1- L’absence d’une liberté contractuelle véritable
Cette remarque est indispensable puisque nous sommes en présence d’un contrat. La
rencontre des volontés valablement exprimées constitue le point de départ de tous contrats. La
liberté contractuelle constitue la règle, avons-nous insisté lors de l’étude de la formation du
contrat de cautionnement. Par ailleurs, l’article 2015 prévoit que « le cautionnement doit être
exprès et ne doit pas être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. » Cette
disposition suppose une négociation préalable entre la banque et la caution.
La pratique actuellement en vigueur ne suit pas cette logique de l’article 2015 en ce
sens que la caution n’a pas à émettre une quelconque remarque ni sur les clauses relatives à la
forme du contrat ni sur celles relatives aux modalités de son engagement. En effet, comme
nous venons de le remarquer, la pratique assimile le cautionnement à un contrat d’adhésion.
La caution aura donc le choix entre, adhérer au contrat en acceptant toutes les clauses qui y
sont insérées ou ne pas y adhérer. La banque ne prévoit pas expressément que les clauses
forment un tout indivisible mais dans la pratique, le contrat de cautionnement ainsi établi,
constitue un tout. Dans ce cas, on devrait appliquer les règles régissant le contrat et se référer
à l’article 127 de la loi 66-003 du 2 juillet 1966 qui stipule que « lorsqu’une personne adhère
à un contrat dont les clauses ont été établies d’une manière unilatérale par l’autre partie, elle
n’est liée par les dispositions contenues dans ces clauses que si elle a pu avoir une exacte
connaissance. » De cette disposition, avant de s’engager, la caution devrait ainsi demander à
la banque la signification exacte des différentes clauses incluses dans le contrat de
cautionnement. Sur l’existence ou non d’une telle pratique, nous ne sommes pas en mesure de
fournir une précision.
2- Un engagement en quelque sorte sous pression
113
Notons que la banque, lors de l’examen du dossier du demandeur du crédit, analyse en
même temps la situation de la caution fournie. Dans la plupart des cas, la caution s’engage
parce qu’elle a un intérêt patrimonial dans la réalisation de l’opération objet du prêt. Aussi,
a-t-on précisé que la caution n’a pas à discuter des clauses contenues dans le contrat de
cautionnement.
En combinant ces deux hypothèses, nous pouvons dire que la caution au moment où elle
s’engage, se trouve dans une situation très délicate en ce sens qu’elle a à jongler entre sa
liberté contractuelle et la réalisation du crédit. En effet, la banque impose ses conditions
dans le contrat de cautionnement et lesdites conditions sont d’une portée absolue puisque
la caution ne peut, en aucun cas, y déroger.
Il convient de noter que les conditions relatives à la mise en œuvre du cautionnement sont
aussi soumises aux mêmes règles.
B- Pour la mise en œuvre du cautionnement
Pour démontrer l’excès du cautionnement dans la mise en œuvre du cautionnement,
nous devons considérer deux éléments : la primauté de la finalité du cautionnement et les
droits et intérêts de la caution.
1- La primauté de la finalité du cautionnement
Sous cette rubrique, nous allons surtout insister sur le fait que la caution s’est engagée
en vue de parer à une éventuelle défaillance du débiteur principal. La banque, dans le contrat
pré établi, n’a pas manqué de soulever la question. En effet, l’article 9 du contrat prévoit que
« toutes les dispositions du présent contrat conserveront leur plein effet en cas
d’atermoiement, règlement judiciaire, faillite du débiteur ou de toute situation analogue. » De
même, la banque a été animée d’une volonté ardente d’anéantir le risque de non-paiement en
ce sens qu’elle a insisté d’énumérer les causes pouvant entraîner l’exigibilité de l’obligation
114
de la caution et en précisant qu’elle n’aura pas à mettre en demeure la caution, pour les
poursuites250.
Par ailleurs, la banque a expressément stipulé les conditions qui vont permettre de
déterminer la couverture de la caution, notamment aux articles 5 et 6 du contrat. En vertu de
l’article 5, la banque affirme qu’en cas de révocation de l’engagement, celle-ci ne prend effet
qu’à la notification de l’accusé de réception. Elle continue de préciser que la couverture
s’étend de la conclusion du contrat au jour de la notification de la révocation. Par ailleurs, le
contrat précise que seul un paiement effectif peut décharger les obligés.
Dans son article 6, le contrat stipule qu’ « en cas de révocation avant la clôture du
compte courant, les obligations dont elle émane au titre dudit compte seront déterminées par
le solde que dégagera ce dernier au moment de sa clôture sans pouvoir excéder, toutefois, le
montant de sa balance débitrice lors de la révocation, mais en tenant compte des
rectifications provenant d’opération en cours dénouées ultérieurement. » Ce qui signifie que
la banque s’est conformée à la solution actuellement consacrée sur la question de la
résiliation. La jurisprudence a, en effet décidé que « si le compte courant ayant continué de
fonctionner, le débit du solde provisoire existant au jour de la révocation du cautionnement
n’a pas été effacé par les remises subséquentes et le solde débiteur réclamé après clôture
définitive du compte, ne résulte point d’avances effectuées par la banque postérieurement à la
révocation de l’engagement »251
2- La négligence des droits et intérêts de la caution.
En vertu de l’article 2016 du code civil, le créancier doit nécessairement informer la
caution de la situation de la créance telle la somme due « en principal, intérêts et
accessoires », qu’en cas de non-respect de cette exigence, les intérêts échus seront frappés de
déchéance252. La banque a stipulé expressément dans le sens inverse et a imposé à la caution
une obligation de se renseigner. En effet, l’article 10 du contrat prévoit que « les cautions
entendent suivre personnellement la situation du débiteur cautionné et dispensent la banque
250 Cf. aussi, Art. 3 : « le présent engagement deviendra exigible de plein droit et sans mise en demeure dès que la ou les créance de la banque seront elles-mêmes exigibles. » 251 Com. 22 nov. 1972, Gaz. Pal. 1973. 1. 213, précité n° 193 252 Civ.I, 6 nov. 2001, Bull. n° 265, suiv. Pourvoi n° 99-15-506
115
de tout avis de prorogation ou de non-paiement. La banque ne sera pas tenue de les informer
des évènements qui pourraient affecter la situation juridique du débiteur, de l’un quelconque
des soussignés ou d’une autre caution, tels le décès d’une personne physique ou la dissolution
d’une personne morale. Elle ne sera pas davantage tenue de les informer de la dénonciation
qui serait faite par l’un quelconque des soussignés ou par une caution de son engagement. »
Soulignons qu’en ce qui concerne l’information relative à la résiliation faite par une
caution, la doctrine est très partagée. En effet, pour certains auteurs tel P. Ancel, il appartient
à la banque d’informer les autres cautions253, pour d’autres, tel Simler, en avançant que les
relations entre cautions étaient personnelles à la caution, il appartient à celle qui révoque son
engagement d’en informer les autres cautions254. La jurisprudence n’a pas pu préciser sa
position même si l’arrêt en date du 7 décembre 1999 a décidé que l’obligation d’information
pèse sur la caution. En effet, la cour, pour motiver sa décision a avancé que d’une part, la
caution avait des liens très étroits aussi bien avec les autres cautions qu’avec le débiteur et
d’autre part, les cautionnements avaient été consentis avec solidarité. En l’espèce, la caution a
été condamnée au paiement de dommages intérêts compte tenu de la faute par elle commise,
de ne pas avoir informé ses coobligées255.
En tout cas, les banques primaires malagasy ont purement et simplement écarté
l’obligation d’information et essaient d’instaurer une obligation de se renseigner à la charge
de la caution.
Les risques et conséquences d’une telle pratique.
Nous avons précisé que la problématique constante en matière de cautionnement
concerne l’équilibre entre la nécessité du crédit et la nécessité de protéger la caution. De ce
qui précède, nous avons vu que cet équilibre est loin d’être atteint.
Si on accorde trop d’importance à la protection de la caution, les banques chercheront
d’autres techniques pour la garantie de leurs créances. De même, si la règle régissant le
cautionnement se trouve trop rigoureuse à l’égard de la caution, personne ne voudra plus
253 P. Ancel « Le cautionnement des dettes de l’entreprises », D. 1989 254 Simler « Cautionnement et garanties autonomes », n° 760 255 Civ. 1re, 7 déc. 1999, rapp. « BANQUEmagazine, n° 613, avril 2000, p. 66
116
s’engager pour garantir la dette d’autrui. Dans tous les cas, force est de constater que le
cautionnement est voué à disparaître si on n’arrive pas à restaurer cet équilibre.
Rappelons que le cautionnement figure parmi les sûretés les plus prisées actuellement
et surtout, celle qui se rapproche le plus de l’état d’esprit des malagasy. Il est ainsi louable
d’essayer d’améliorer son régime quitte à ce que les déséquilibres sus développés ne soient
plus un obstacle. Par conséquent, des efforts, dans le sens d’un rééquilibrage, s’imposent.
Chapitre 2 : les rééquilibrages nécessaires
Soulignons que des solutions rigoureuses et précises ne sauraient être données vue la
subtilité et la complexité du cautionnement. Ainsi, nous allons nous référer aux difficultés
soulevées ci-haut pour donner quelques éléments nécessaires aux rééquilibrages.
Dans cette étude, nous allons proposer deux catégories de solutions, d’une part, celles
dictées par la nécessité du crédit et d’autre part, celles qui sont exigées par la nécessité de
protéger la caution.
Section 1 : Les rééquilibrages dictés par la nécessité du crédit
Avant d’entamer avec les rééquilibrages qui s’imposent, nous allons d’abord dans un
premier temps démontrer que le crédit est devenu indispensable dans la vie d’aujourd’hui
avant d’expliquer l’intérêt de la banque dans le mécanisme du cautionnement d’un compte
courant.
§1- La nécessité de crédit dans les affaires
Pour le besoin de notre étude, nous allons essayer de récapituler les différents
domaines et les différents types du crédit actuellement mis au service des clients de la banque.
117
A- Les formes du crédit
Le terme du crédit peut être court, moyen ou long. Le crédit à court terme est octroyé
généralement dans le but d'effectuer une opération précise. Il peut prendre la forme d'une
simple facilité de caisse ou d'un découvert autorisé sur le compte courant du bénéficiaire ou
encore d'un prêt ou d'une cession de créance par le biais d'opérations d'escompte. Le crédit à
moyen terme est né des insuffisances de l'autofinancement ainsi que de l'accès au marché
financier pour des périodes intermédiaires. Le crédit à long terme est destiné à satisfaire des
besoins permanents ou à financer des immobilisations qui s'amortissent sur une longue
période. Il n'est octroyé que sur des ressources stables et contre des garanties hypothécaires,
des cautions et des nantissements.
B- les crédits selon leurs utilités
On distingue traditionnellement les crédits commerciaux, qui correspondent
essentiellement à des achats de biens par les particuliers, et les crédits d'équipement, qui
satisfont les besoins des entreprises. Aujourd'hui, les principaux crédits sont les crédits à la
consommation et les crédits immobiliers. Les premiers sont accordés aux ménages pour leur
consommation courante ainsi que pour l'acquisition de biens plus durables et plus coûteux tels
que l'automobile ou l'électroménager (le produit SOAFENO et LE TAHIRY des banques
primaires) ; le crédit immobilier concerne la construction, l'achat et la modernisation
d'immeubles. Cette dernière catégorie s'adresse aux promoteurs comme aux acquéreurs.
C- les crédits et les garanties nécessaires à leur octroi
Les crédits personnels ne sont pas garantis et reposent exclusivement sur la confiance
du prêteur envers l'emprunteur. Ils s'opposent aux crédits accompagnés de sûretés ou gagés.
Ces sûretés peuvent être réelles lorsque c'est l'objet même du prêt qui est affecté auprès du
118
banquier ou c’est un immeuble qui est hypothéqué256. Les garanties du crédit peuvent aussi
être personnelles tel le cas d’un cautionnement constitué en vue d’assurer le remboursement
du prêt.
De ces différentes illustrations, nous pouvons déduire que le crédit ne cesse de justifier
son importance dans la vie. Par ailleurs, la loi 95-030 organisant l’activité bancaire a précisé,
dans son article 03 complété par son article 16 que, l’octroi du crédit figure parmi les
opérations dont l’exercice est réservé aux établissements de crédit.
Aussi, la banque exige-t-elle qu’une caution soit fournie pour que le crédit soit
autorisé. Ceci étant, considérant la place qu’occupe la banque dans la nécessité du crédit et la
position du droit positif relatif au cautionnement, il nous faut suggérer des solutions allant
dans le sens d’une reconsidération de l’intérêt de la banque dans la technique du
cautionnement.
§2- Reconsidérer l’intérêt de la banque dans le mécanisme du cautionnement
Pour pouvoir proposer des solutions dans ce sens, nous devons nous référer à la
position du droit de cautionnement actuellement en vigueur. Pour ce faire, nous allons
considérer successivement la finalité du cautionnement, l’équilibre entre l’obligation
d’information et de l’obligation de se renseigner et enfin, le respect des caractéristiques du
cautionnement.
A- La finalité du cautionnement d’un compte courant.
1- La mission de la caution.
Nous admettons que la caution s’engage en vue de payer le solde du compte courant si
le débiteur n’y satisfait pas. Ceci étant, la mission première de la caution consiste à veiller à
ce que la banque se trouve désintéressée malgré la défaillance du débiteur principal. En effet,
256 Article 2124 et suivant du code civil français A Madagascar, elle est organisée par l’ordonnance du 03 octobre 1960,
119
l’article 2011 du code a expressément stipulé dans ce sens. Seulement, la mise en oeuvre du
cautionnement n’est pas aussi évidente que ne laisse entendre cette disposition.
Rappelons que la caution se trouve au centre de l’opération du cautionnement. Elle est
en relation contractuelle avec la banque en vertu de l’article 2011 du code civil257. La caution
avons-nous dit, devra respecter les termes de son engagement et honorer ainsi son obligation.
Ce qui mérite d’être mis en relief c’est que, le paiement effectué par la caution en vertu du
cautionnement ne constitue pas une libéralité sauf stipulation contraire. La caution qui a payé,
avons-nous précisé, se subroge ainsi aux droits et actions qu’avait la banque contre le débiteur
principal. La condition pour permettre cette subrogation consiste au paiement libératoire
effectué auprès de la banque.
Nous avons souligné que la tendance actuelle du droit positif témoigne une grande
sollicitude à la caution. En effet, les solutions doctrinales tentent d’imposer de nouvelles
règles qui consistent à traiter différemment les cautions profanes de cautions averties258. Mais
aucune solution n’a pu être donnée sur la question relative aux droits accordés à la banque
pour le recouvrement de sa créance.
2- les moyens dont dispose la banque
En ce qui concerne les moyens mis à la disposition de la banque pour exiger le
paiement auprès de la caution, nous avons démontré qu’aucune règle allant dans ce sens n’a
pu être trouvé. De ce fait, pour agir contre la caution, la banque devra systématiquement se
référer à la loi sur la théorie générale259. Juridiquement, la banque est démunie de moyen de
pression véritable à faire valoir à l’encontre de la caution qui ne veut pas payer. En principe,
la banque se trouve dans une situation chirographaire vis-à-vis de la caution. Nous avons
soulevé que la protection issue de l’application du droit commun des contrats ne suffit pas à
instaurer une protection adéquate et organisée pour la banque. C’est la raison pour laquelle la
banque a inséré arbitrairement des clauses la mettant dans une situation à risques réduits.
257 Com. 21 déc. 1987 : D. 1989. 112, note Brill ; sur la distinction entre la lettre d’intention et le cautionnement. 258 Légéais, « Sûretés et garanties du crédit », LGDJ, 2è éd., 1999, n° 45 et suivants. 259 Art. 123 de la loi 66-003 qui traite des effets du contrat et des articles 58 et suivants sur les droits et garanties accordés aux créanciers chirograpaires.
120
Légiférer dans ce sens constitue ainsi un facteur concret et indispensable pour
l’épanouissement du cautionnement puisque l’objectif est de donner à la banque des moyens
juridiques efficaces.
Il est à noter que pour concrétiser de telle initiative, il nous faut considérer les
différents problèmes soulevés lors de l’exposé sur la tendance du droit positif vers l’éviction
de la protection de la banque. Ce qui nous conduit à apporter des précisions sur l’obligation
d’information de la banque, sur l’obligation de se renseigner de la caution et sur les
caractéristiques du cautionnement d’un compte courant.
B- L’équilibre entre « l’obligation d’information »
Avant de procéder à l’étude de l’obligation d’information de la banque, nous allons
d’abord rappeler le rôle de la banque dans l’opération de cautionnement.
1- le rôle de la banque
Le cautionnement est un contrat unilatéral puisque seule la caution souscrit un
engagement. La banque n’est pas, par conséquent, tenue d’honorer une obligation dans le sens
d’une contrepartie de l’engagement de la caution. C’est pourquoi, la doctrine, la jurisprudence
ont unanimement admis que l’acceptation par la banque de l’engagement souscrit par la
caution suffit à rendre parfait le cautionnement. Par contre, les obligations tenant à la situation
et à l’exigence des circonstances doivent être respectées par la banque entre autres le devoir
de vigilance, le devoir d’information. La précision qui nous intéresse porte ici sur le devoir
d’information de la banque. En matière de cautionnement, on ne peut pas concevoir un devoir
d’information générale puisque cela risquerait de porter atteinte au devoir de secret de la
banque260. Il convient ainsi d’interpréter le sens de l’obligation d’information de l’article 2016
du code civil de façon à ce que le droit du débiteur principal ne soit pas bafoué.
2- l’obligation d’information au sens de l’article 2016 et sa portée réelle
260 Cf. section traitant la contribution de la banque dans le cautionnement.
121
L’article 2016 stipule que « lorsque le cautionnement est contracté par une personne
physique, celle-ci est informée par le créancier de l’évolution du montant de la créance
garantie et de ces accessoires au moins annuellement à la date convenue entre les parties ou,
à défaut, à la date anniversaire du contrat, sous peines de déchéance de tous les accessoires
de la dette, frais et pénalités ». L’obligation d’information étant consacrée par une disposition
légale, la banque devra ainsi s’y conformer. Les problèmes qui se posent, se rapportent à
l’objet de l’obligation et aux champs d’application de l’article 2016.
D’abord, en ce qui concerne l’objet de l’information, l’article stipule expressément
qu’information sur l’évolution de la créance en principal, intérêts et accessoires, doit être
faite annuellement. De cette disposition, l’information ne devra porter que la créance elle-
même. Cet article devra recevoir une application stricte puisque les termes employés ne
suscitent guère de confusion. Il convient ainsi de consacrer la solution retenue par l’arrêt du 7
décembre 1999, qui prive la banque de l’obligation d’information sur la révocation unilatérale
d’une caution261. Par ailleurs, la sanction prévue en cas de non-respect de l’obligation consiste
dans la déchéance des intérêts, il faut ainsi rejeter la solution apportée par l’arrêt du 20
octobre 1992, visé par l’article 1147 du code civil et l’article 48 de la loi du 01 mars 1984 qui
tend à aggraver la sanction par la banque encourue, par suite d’une omission de l’obligation
d’information.
Ensuite, l’article stipule expressément que cette règle vaut uniquement lorsque la
caution est une personne physique. Ceci étant, lorsqu’une société s’engage à garantir une dette
ou le solde d’un compte courant, la banque ne sera plus tenue de se conformer à l’article
2016.
C- Le respect des caractéristiques du cautionnement.
Les problèmes relatifs aux caractéristiques du cautionnement concernent surtout le
caractère unilatéral et le caractère consensuel du contrat. puisque, l’interprétation du caractère
accessoire n’engendre guère de problème du côté de la banque.
1- Le caractère consensuel et la disposition de l’article 2015.
261 Cf . Civ. 1re, 7 déc. 1999, précité
122
Le caractère consensuel, rappelons-le, signifie que la rencontre des volontés suffit à
rendre parfait le contrat. Appliquer dans le cautionnement d’un compte courant, on est
confronté à l’exigence de l’article 2015 du code civil, stipulant le caractère exprès de
l’engagement de la caution. Concrètement, la pratique et la jurisprudence ont imposé la
confection de l’écrit pour matérialiser l’exigence de l’article 2015 du code civil.
Notons que l’établissement d’un écrit profite aussi bien à la banque qu’à la caution. La
banque pourra s’en servir pour réclamer à la caution le solde du compte en se référant aux
termes contenus dans le contrat. Du côté de la caution, l’écrit lui servira surtout à avoir une
idée plus précise sur l’étendue et la nature de l’engagement qu’elle souscrit.
La question qui suscite le plus de discussion se rapporte à la valeur de l’écrit ainsi
établi.
2- Le caractère unilatéral et le caractère consensuel du cautionnement.
Dans le cadre d’un cautionnement, la caution seule souscrit un engagement tandis que
la banque, se contente d’accepter262 ledit engagement. Ceci étant, le cautionnement présente
un caractère unilatéral. L’article 1326 du code civil et l’article 277 de la loi malagasy du 2
juillet 1966 stipulent l’établissement d’un écrit pour la validité d’un contrat unilatéral. La
jurisprudence a timidement rejeté cette idée de formalisme appliqué dans le cautionnement et
a créé une toute nouvelle règle qui est celle de considérer que l’écrit ne constitue pas une règle
de forme dont l’irrégularité entraînerait la nullité de l’acte, mais, plutôt une règle de preuve
ayant pour finalité la protection du consentement. En effet, il a été retenu que l’irrégularité de
l’acte n’engendre pas la nullité de l’acte, ceci pouvant être complété par des éléments
extrinsèques, pour prouver l’existence et l’étendue du cautionnement263.
Cette solution paraît être la plus mitoyenne en ce sens que cela ne nuit ni à la
constitution de l’acte ni à son efficacité. Par conséquent, serait excessive la solution que la loi
française en date du 31 décembre 1989 sur la consommation consacre en prévoyant que l’écrit
262 La loi n’exige pas une formalité particulière pour matérialiser l’acceptation de la banque. Mais la jurisprudence a exigé que l’acceptation doive exister puisqu’on est en présence d’un contrat et non d’un engagement unilatéral de volonté (Com. 26 janv. 1988, Bull. civ. N° 49) 263 Civ. 1re, 30 juin 1987, Bull.civ.I, n° 210, p. 155, Civ. 1re, 15 octobre 1991, JCP 1992. II. 21923, note SIMLER
123
constitue une condition de validité du cautionnement car ce serait allé à l’encontre du
caractère consensuel de celui-ci264.
Si tels ont été les quelques suggestions que nous ayons pu donner quant aux
rééquilibrages nécessaires dictés par la nécessité du crédit. Quels seront alors les
rééquilibrages qui s’imposent en considération de la protection de la caution ?
264 article L. 313-7 et 8 portant code de la consommation en france
124
Section 2 : les rééquilibrages dictés par la nécessité de protéger la
caution.
L’étude des rééquilibrages dictés par la nécessité de protéger la caution découle de la
problématique qui anime l’évolution du droit de cautionnement. En effet, cette problématique
se compose d’une part de la nécessité du crédit et d’autre part, de la nécessité de protéger la
caution. Nous venons de démontrer que compte tenu de la place du crédit dans la société
actuelle, la banque dispensatrice de crédit doit être protégée. Aussi, avons nous précisé que
l’engagement d’une caution en vue de garantir un crédit accordé sur la base d’un compte
courant constitue la condition essentielle de l’octroi du crédit. Il nous faut ainsi considérer
successivement les rééquilibrages imposés par la rigueur de l’engagement de la caution.
Pour traiter les rééquilibrages dictés par la nécessité de protéger la caution, nous
devons d’abord justifier en quoi, l’engagement de la caution est-il rigoureux ?
§1-La rigueur de l’engagement de la caution.
Comme nous l’avons vu tout au long de cette étude, la caution s’engage à payer le
solde du compte courant en vertu d’un contrat unilatéral, en cas de défaillance du débiteur.
Cette gravité de l’engagement de la caution se trouve renforcée en matière de cautionnement
d’un compte courant puisque la dette principale elle-même, présente un caractère futur. Le
solde final d’un compte courant ne saurait être déterminé qu’au jour de sa clôture. Ceci résulte
du fonctionnement et des caractéristiques du compte courant lui-même. En effet, nous avons
précisé que la banque et sa relation, entretenant une relation d’affaires stable et continue,
affectent en compte leurs créances réciproques et par la même occasion, conviennent de
différer le paiement du solde qui peut en résulter à la date de la clôture dudit compte. Au
moment de la conclusion et au cours du fonctionnement du compte, il n’est donc pas
nécessaire de distinguer le débiteur du créancier.
Le cautionnement en matière de compte courant fait ainsi naître à la charge de la
caution une obligation de payer dont le montant et l’étendue dépendent du mouvement et des
termes de l’engagement. De cette particularité, de la dette garantie, il est actuellement admis
125
que l’obligation de la caution se décompose en une obligation de couverture et une obligation
de règlement.
L’obligation de couverture de la caution naît avec la conclusion du contrat de
cautionnement. En effet, la dette couverte dépend essentiellement des termes et de la volonté
de la caution. Précisons que lors de la conclusion du contrat de cautionnement, la caution ne
peut que fixer les principes qui vont permettre de déterminer l’obligation réellement due. Par
ailleurs, la caution ne participe pas dans l’opération garantie, mais il en subit nécessairement
les conséquences compte tenu du caractère accessoire de son engagement. L’engagement de
la caution est donc certain dès la conclusion de l’acte, seule son étendue reste à déterminer.
Pour rendre moins incertains l’engagement de la caution, il lui est permis de délimiter
son engagement soit dans le temps, en stipulant expressément un terme soit, dans son
montant.
Notons que les solutions retenues concernant l’existence et l’étendue de l’engagement
de la caution ne lui sont pas toujours favorables. Tantôt, la loi et la jurisprudence priment la
finalité du cautionnement, tantôt, il est décidé que la protection de la caution soit renforcée au
détriment de la finalité du cautionnement.
Nous allons essayer de préciser quand faut-il primer la finalité du cautionnement et
quand la protection de la caution s’impose-t-elle ?
§2-Les rééquilibrages qui s’imposent.
A- Lors de la formation du cautionnement.
Nous avons démontré que la pratique actuelle du cautionnement à Madagascar
présente un caractère excessif. Par rapport à cela, quelles sont les mesures et les dispositions à
prendre ?
126
Pour commencer, nous devons essayer de reconsidérer les principes fondamentaux
régissant le cautionnement. Ainsi, nous allons successivement étudier les caractéristiques du
cautionnement avant de cerner la liberté de la caution.
1- le caractère subsidiaire de l’engagement et la liberté contractuelle de la caution
Partant de l’article 2011 du code civil, nous pouvons dire que la caution souscrit un
engagement subsidiaire en ce sens qu’elle n’est tenue qu’en cas de défaillance du débiteur
principal. En outre, l’article 2021 précise et renforce ledit caractère puisqu’il est stipulé que la
caution ne devrait pas être actionnée avant le débiteur principal.
De la deuxième partie de cet article, nous pouvons déduire qu’il appartient à la caution
de déterminer les modalités de son obligation. Pourtant, de ce que nous avons vu, la pratique
actuelle du cautionnement tend à obliger la caution à souscrire selon la convenance de la
banque. En effet, l’article 4 du contrat de cautionnement stipule que « chacune des cautions
renonce expressément au bénéfice de discussion et au bénéfice de division tant avec le
débiteur principal qu’avec tous coobligés. » Nous assistons à un abus qu’il convient de
restaurer en respectant la volonté réelle de la caution. Ceci dit, la banque devra respecter la
volonté de la caution et lui laisser la faculté de discuter et de négocier les termes de son
engagement. Ainsi, la caution qui ne renonce pas de son plein gré au bénéfice de discussion et
de division ne pourra exiger de la banque le respect d’un certain rang dans l’exercice des
poursuites.
2- le caractère unilatéral
La règle qui profite le plus à la caution consiste à considérer la mention manuscrite
comme une règle de preuve. En effet, comme le contrat est à caractère unilatéral, seule la
banque détient l’original. La mention manuscrite remplit ainsi une fonction purement
protectrice puisqu’elle relate en chiffre et en lettres l’engagement de la caution, et qui par la
même occasion, réduit le risque de fraude émanant de la banque.
La solution retenue en la matière n’est pas dangereuse pour la caution en ce sens que
la fonction protectrice est conservée et surtout que la jurisprudence a expressément décidé que
la mention manuscrite constitue « une règle de preuve ayant pour finalité la protection du
consentement. »
127
B- Dans la mise en oeuvre du cautionnement.
1- par rapport à l’obligation d’information
La solution retenue en matière d’obligation d’information de la banque consiste à la
seule déchéance des intérêts échus265. Par contre, est jugée trop sévère la solution retenue par
l’arrêt du 20 octobre 1992, qui tend à aggraver la sanction en avançant qu’outre la déchéance
des intérêts, la banque risque d’engager sa responsabilité contractuelle, du seul fait du non-
respect de l’exigence de l’article 2016 du code civil. Nous devons ainsi retenir la solution ci-
dessus mentionnée.
Sur la faculté de résilier à tout moment l’engagement, la banque, dans le contrat, n’en
fait référence que très sommairement266 malgré l’exigence de l’article 2016.
2- par rapport à l’obligation de se renseigner
La jurisprudence a souligné que lorsque la situation de la caution lui permet de
connaître la situation du débiteur267. La solution que la banque essaie d’instaurer présente un
caractère excessif. En effet, la banque impose unilatéralement à la caution de se renseigner sur
la situation du débiteur et sur l’état de la créance. Par conte, en ce qui concerne l’obligation de
se renseigner sur la dénonciation et la résiliation des autres cautions, la solution prévue dans
le contrat mérite d’être retenue d’autant plus que la banque est étrangère à la relation entre
cofidéjusseurs268.
3- Compte tenu des faits de la banque
265 Civ. 1re, 6 nov. 2001, Bull. n° 265, précité 266 Art. 5 et Art. 6 du contrat de cautionnement (cf. annexe) 267 Com. 29 mai 2001, Bull. n° 106 268 Civ. 1re, 7 déc. 1999, précité.
128
L’article 2037 du code civil prévoit que la caution pourra être déchargée de son
engagement lorsque par son fait, la banque a rendu impossible la subrogation. Cette solution
unanimement admise aussi bien par la jurisprudence269 que par la loi mérite d’être insérée
dans le contrat pour renforcer la protection de la caution. La décision de l’arrêt du 14
novembre 2001 qui décide que, « N’établissent pas que la dépréciation du gage était en
relation directe avec le fait exclusif du créancier, les motifs de la Cour d’appel qui pour
décharger la caution sur le fondement de l’article 2037 du Code civil a retenu que la créance
a été nantie, en avril 1985, pour un montant de 1 472 000 francs sur un fonds comprenant
outre le matériel, l'enseigne, le nom commercial, la clientèle, l'échafaudage qui y étaient
attachés et qu'au moment de la liquidation seul a pu être vendu le matériel pour une valeur de
444 605,22 francs ; qu'il en résulte, selon la Cour d’appel, que le gage du créancier
bénéficiant d'un nantissement s'est trouvé du fait de la déconfiture du débiteur principal privé
d'une grande partie de sa valeur entre la date du premier incident de paiement en novembre
1986 et celle de l'ouverture de la procédure collective le 24 août 1988 et les cautions privées
du droit préférentiel que leur conférait la subrogation sur les éléments du fonds de commerce
ainsi disparus ou dévalués. »
De cette deuxième partie, il convient de constater que deux opinions divergentes
s’affrontent concernant la conception d’une protection de la banque dans le cautionnement
d’un compte courant. D’un côté, il y a celle qui prône la protection de la caution et qui a,
semble-t-il, gagné le penchant de la majorité des doctrines, des lois et des jurisprudences.
Dans cette thèse, il est soutenu que la caution souscrivant un engagement rigoureux mérite
une protection accrue et à qui on doit une indulgence importante. D’un autre côté, il y a
l’opinion qui opte pour la primauté de la protection de la banque dans le cautionnement d’un
compte courant et par la même occasion, essaie de créer de nouvelles règles allant dans ce
sens.
Dans ces deux cas extrêmes, le cautionnement sera voué à disparaître. En
conséquence, il y a lieu d’insister sur le fait que seule une protection adéquate, eu égard la
nécessité du crédit d’une part et la protection de la caution d’autre part, et organisée,
notamment dans la mise en œuvre de la présente sûreté, pourrait engendrer un certain
équilibre entre l’intérêt de la banque et celui de la caution en la matière.
269 Civ. 9 mai 2001, Bull. n° 125, précité
129
130
CONCLUSION FINALE
A l’issu de cette étude, dont l’objet consiste à dégager l’importance d’un régime de
protection adéquat et organisé en faveur de la banque dans le cautionnement d’un compte
courant, nous constatons qu’il est très difficile de trouver un parfait équilibre entre l’intérêt
de la banque et la protection de la caution. Cette difficulté résulte du fait que d’une part, le
caractère trop générale des dispositions légales ne permet pas de gérer la subtilité et la
complexité du cautionnement d’un compte courant et que d’autre part, les jurisprudences,
les doctrines ainsi que les lois tendent à accorder à la caution trop de mansuétude et trop
d’indulgence en s’appuyant sur la rigueur et le danger de son engagement. Cette tendance
est certes favorable à la caution mais elle ne tient pas compte de l’équilibre qui doit exister
en permanence entre la nécessité du crédit et la protection de la caution. A l’extrême, cette
position risque de nuire gravement à l’existence et à l’épanouissement du cautionnement
en ce sens que, c’est la crédibilité même de la technique qui se trouve en péril.
En outre, contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’engagement de la caution en
vue de garantir le solde du compte courant n’engendre pas une protection absolue pour la
banque. Cette incertitude peut s’expliquer de deux manières. Premièrement, la banque,
avons-nous dit, dans ses rapports avec la caution ne dispose comme garantie de sa créance
que le patrimoine de cette dernière. Deuxièmement, aucune disposition légale ne stipule
expressément la protection de la banque en matière de cautionnement de compte courant.
Devant cette lacune et insuffisance de la loi, la tentative que la banque essaie de mettre en
œuvre semble être vouée à l’échec puisque, les droits et les faveurs accordés à la caution, à
tort ou à raison, se trouvent négligés. En effet, trop de rigueur à l’égard de la caution,
pourrait aussi entraîner le déclin de la présente sûreté.
Devant de telle difficulté, on pourrait être tenté de recourir à d’autres nouvelles
techniques, telle la garantie à première demande ou la technique de crédit-bail.
Théoriquement, ces nouvelles techniques paraissent être d’une efficacité redoutable mais
sur le plan pratique, il n’est pas encore prouvé qu’elles répondent mieux aux exigences de
la banque. Par ailleurs, l’essentiel n’est pas de pouvoir disposer d’un nombre élevé de
garanties mais plutôt, d’en maîtriser une de façon à ce que chacune des parties y trouve son
intérêt.
131
Pour terminer cette étude, nous espérons que cet ouvrage pourra servir, aussi bien
sur le plan pratique que théorique, à la recherche et à l’établissement de l’équilibre entre
les intérêts divergents.
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES
- A. RAHARINARIVONIRINA, A. BERTONE, Droit civil: les biens et les sûretés, CMPL
- C. GAVALDA, J. STOUFFLET, Droit bancaire: institutions – comptes - opérations - services, Litec, 3e éd., 1997
- J. FLOUR, J.L. AUBERT, Les obligations : l’acte juridique, Armand Colin, 7e éd., 1996
- J. FLOUR, J.L. AUBERT, Les obligations : l’acte juridique, Armand Colin, 4e éd. par J.L. AUBERT, 1996
- M. CABRILLAC, C. MOULY, Droit des sûretés, Litec, 3e éd., 1995
- N. HEUDEBERT, BOUVIER, Droit civil et commercial, PUF, 3e éd., 1984
- P. SIMLER, P. DELEBECQUE, Droit civil : les sûretés, la publicité foncière, Précis Dalloz, 1e éd., 1989
- P. SIMLER, P. DELEBECQUE, Droit civil : les sûretés, la publicité foncière, Précis Dalloz, 2e éd., 1989
- P. THERY, Sûretés et publicité foncière, PUF, 1e éd., 1988
- Ph. MALAURIE, L. AYNES, Droit civil : les obligations, CUJAS, 7e éd., 1997
- Ph. MALAURIE, L. AYNES, Les sûretés, CUJAS, 2e éd., 1988
- Ph. MALAURIE, L. AYNES, Les sûretés-la publicité foncière, CUJAS, 1994
- S. PIEDELIEVRE, Les sûretés, Dalloz - Armand Colin, 3e éd., 2001
- S. RANDRIANAHINORO, Droit des obligations, CMPL, 1e éd., 1984
JURISPRUDENCES
Civ. 10 janv. 1870, Barthe et Delcasse, D.P., 70. I. 160 ( 2e espèce)
Civ. 14 juin 1841. 1. 282
Civ. 1re, 24 mai 1948 : D.1948
Civ. 1re, 25 mai 1964 : D. 1964. 626
Civ. 1re, 24 avr.1968, B.I, n° 116
Civ. 1re, 16 fév. 1970 : D. 1970. 428
Civ.1re, 27 juin 1973, D. 1973. 733, note Ph. Malaurie
Civ. 1re, 20 déc. 1976, JCP 1977. II. 18611, concl. Gulphe
Civ. 1re, 17 oct. 1979 : JCP 1981. II. 19627, note Ghéstin.
Civ. 1re, 21 janv. 1981, Bull. n° 25
Civ. 1re, 14 oct. 1981, Bull. Civ. I, n° 290
Civ. 1, 12 mai 1982, Chassagne, B.I, n° 173, D.,83.320, n. J. Mestre
Civ. 3e, 4 janv 1983 : Bull. Civ. III, n°1
Civ.1re, 22 juin 1983 : Bull.civ. I, n° 182
Civ.1re, 5 juin 1984 : Bull. civ. I. n° 185
Civ. 1re, 19 mars 1985 : Bull. n°98
Civ. 1re, 29 mai 1985 : Bull. civ. I, n°163
Civ. 1re, 3 juin 1986 : Defrénois 1987. 281, note Piedelièvre
Civ. 1re, 19 mai 1987, B. I. n° 154 : D. 1987, som. 446, note Aynès
Civ. 1re, 30 juin 1987, Bull. civ. I, n° 210, p. 155
Civ. 1re, 7 juin 1988 : Bull. Civ, n°173
Civ. 2e, 8 déc. 1988, Bull. Civ. II, n° 162
Civ. 1re. 31 janv. 1989: Bull. civ. I, n° 45
Civ. 1re, 2 mai 1989 : Bull. civ. I, n° 175
Civ. 15 oct. 1991, J.C.P. 1992. II. 21923, note SIMLER
Civ. 1re,25 oct. 1994, Bull. Civ. I, n° 305
Civ. 1re,21 fév. 1995, Bull. civ. I, n° 90
Civ. 1re, 13 juin 1995: Bull. civ. I, n° 258
Civ. 1re, 4 juin 1996 : Bull. civ. I, n° 325
Civ. 1re, 13 nov. 1996 : Bull. civ. I, n° 392
Civ. 1re, 18 fév. 1997 : Bull. civ. n° 62
Civ. 1re, 29 avr. 1997 : Bull. civ. I, n° 133
Civ. 1re, 15 juil. 1999 : Bull. civ. . I. n° 236
Civ. 1re, 7 déc. 1999 rapp. dans « Banque magazine, n° 613 Avril 2000 »
Civ. 29 fév. 2000, Bull. I, n° 68, p. 46
Civ. 1re, 9 mai 2001, Bull. n° 125, pourvoi 98-23-144
Civ 19 juin 2001, Bull. n° 179, pourvoi n° 98-16-183
Civ. I. 10 juil. 2001, Bull. n° 208, pourvoi n° 98-21-575
Req. 19 fév. 1908, S. 1911. 1. 529, note Wahl
Req. 28 fév. 1939, S. 1939. 1. 161, rapporté dans Dumas, note Roubier.
Com. 22 nov. 1972, Gaz. Pal. 1973. 1. 213, note D. Martin
Com. 14 déc. 1976 : Bull. civ. IV, n°325
Com. 18 juin 1980 : Bull. civ. IV, n° 264
Com. 29 juin 1982, Bull. civ. n° 258
Com. 17 nov. 1982 : D. 1983. 527, note Contamine-Raynaud
Com. 22 janv. 1985 : Gaz. Pal. 1985. Panor. 117, obs. Piedelièvre.
Com. 21 déc. 1987 : D. 1989. 112, note Brill
Com. 26 janv. 1988 : Bull. civ. IV, n°49
Com. 11juil. 1988, Bull. civ. IV, n° 236
Com. 23 mai 1989, Bull. civ. IV, n° 158
Com. 19 juin 1990, JCP 1990. II. 21578, note Legeais
Com. 29 oct. 1991, Bul. Civ. IV. n° 315
Com. 16 oct. 1992, D. 1993, somm. 314, obs. Aynès
Com. 25 mai 1993 : Bull.civ. IV, n° 208
Com. 6 déc. 1994, Bull. civ. IV, n° 363
Com. 13 juin 1995, Bull. Joly. 1995. 844, note Delebecque.
Com. 17 juin 1997 : Bull. civ. IV, n° 188
Com. 1 juil. 1997, Bull. n° 208
Com. 16 mars 1999, Bull. IV. n° 59, p. 48.
Com. 18 janv. 2000, Bull. IV, n° 11, p. 79
Com. 23 mai 2000 : Bull.civ. IV, n°107,p. 96
Com. 26 avr. 2000 : Bull. IV, n° 80, p. 71
Com. 6 fév. 2001, Bull. N° 29
Com. 25 avr. 2001, Bull. n° 75
Com. 29 mai 2001, Bull. n° 100, suivant pourvoi n° 96-18-118.
Com. 11 déc. 2001, Bull. n° 195 sur la solidarité et le bénéfice de division
PUBLICATIONS DIVERSES
- D. BOCCARA, Le compte courant cautionné, sa continuation et la procédure collective, Petites Affiches 18 juillet 1997, n°88, page 8
- Frédéric LEPLAT, Droit des sûretés, GLOSE 2001
- Me Réjean BOUCHARD, Le cautionnement, www.droit.com/avocat, 1999
- SSP NORIA, Cautionnement et régime matrimonial, 2000-2003
ANNEXES
LES JURISPRUDENCES
Civ III, 21 février 2001, Bull. n° 19, Pourvoi 99-17-732
Ayant retenu, sans dénaturation, qu'il résultait des clauses contractuelles de l'acte du 24 juillet 1989 que l'engagement avait été donné par la caution en garantie du prêt, en principal, frais et accessoires, c'est-à-dire jusqu'à son remboursement intégral et que l'engagement de caution, dans l'acte du 6 août 1992, avait été consenti sans limitation dans le temps, jusqu'au complet remboursement de la dette principale, la cour d'appel a pu relever, sans dénaturation, que les dates de péremption des inscriptions hypothécaires avaient été fixées conformément ou en exécution de l'article 2154 du Code civil et a constaté que les inscriptions avaient été régulièrement renouvelées.
Com, 6 février 2001, Bull. n° 29, Pourvoi 97-10-646
La caution qui s'était engagé non seulement pour le principal mais aussi pour les accessoires doit s’acquitter de pénalité de 10 % due par le débiteur principal qui constituait un accessoire de la dette.
Com, 25 avril 2001, Bull. n° 73, Pourvoi 96-22-035
L'article 48 de la loi du 1er mars 1984 n'impose aux établissements de crédit aucune forme particulière pour porter à la connaissance de la caution les informations mentionnées à cet article. Cette information peut résulter d’une assignation en justice.
Com, 25 avril 2001, Bull. n° 75, Pourvoi 97-14-486
Il résulte de l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 que, sauf dol ou faute lourde du dispensateur de crédit, l'omission des informations prévues par ce texte est sanctionnée par la seule déchéance des intérêts. Dès lors, est cassé l’arrêt de la Cour d’appel qui a énoncé qu’il n’y avait pas lieu de prononcer la déchéance des intérêts, mais qui a débouté le dispensateur de crédit de sa demande en paiement.
Cautionnement - Obligation d'information de la caution - Article 48 de la loi du 1er mars 1984 Chambre commerciale, 25 avril 2001 (Bull. n° 75) Le non-respect de l'obligation annuelle d'information de la caution, imposée par l'article 48 de la loi du 1er mars 1984, devenu l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier, a-t-il seulement pour effet la sanction prévue par ce texte, à savoir "la déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information", ou bien laisse-t-il place à la responsabilité civile de droit commun ? L'arrêt de la Chambre commerciale du 25 avril 2001, adopté en formation plénière de chambre, est venu mettre fin à une divergence de jurisprudence entre les deux sections de cette chambre en décidant qu' "il résulte de l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 que, sauf dol ou faute lourde du dispensateur de crédit, l'omission des informations prévues par ce texte est sanctionnée par la seule déchéance des intérêts". En effet, dans un arrêt du 7 avril 1992 (Bull. n° 148) la Chambre commerciale avait approuvé une cour d'appel d'avoir fait application pour l'omission d'information alléguée, de la seule sanction prévue par l'article 48, après avoir relevé que la banque n'était contractuellement pas tenue de renseigner les cautions sur l'évolution de la solvabilité de sa cliente, et retenu l'absence de mauvaise foi de la banque. Au contraire, quelques mois à peine après cette décision, un autre arrêt de la même chambre, du 20 octobre 1992 (Bull. n° 311), a décidé que la sanction de l'article 48 en ce qui concerne l'obligation d'information de la banque s'ajoute à la sanction de droit commun. Certains commentateurs avaient cru pouvoir trouver une articulation possible entre ces deux arrêts, en constatant que le premier portait sur une information relative à la "solvabilité" du débiteur, non exigée par l'article 48. Mais en dépit de la terminologie utilisée par l'arrêt du 7 avril 1992, la divergence n'en était pas mois réelle. Par l'arrêt du 25 avril 2001, la Chambre commerciale, plutôt que de prendre position sur la nature de la déchéance prévue par l'article 48, sanction ou réparation forfaitaire, a entendu s'en tenir à la règle lex specialia
generalibus derogant et à la volonté du législateur. Com, 25 avril 2001, Bull. n° 76, Pourvoi 97-12-861
Les établissements de crédit ayant accordé à une entreprise un concours financier au sens de l'article 48 de la loi du 1°, mars 1984, sous la condition d'un cautionnement, doivent se conformer aux prescriptions de ce texte jusqu'à l'extinction de la dette garantie par le cautionnement.
Civ I, 9 mai 2001, Bull. n° 124, Pourvoi 98-14-760
Le caractère explicite et non équivoque de la connaissance par la caution de la nature et de l'étendue de son engagement doit s'apprécier au jour de l'acte.
Le cautionnement qui porte sur tous les engagements souscrits sans limitation de sommes et de durée par un débiteur déterminé à l'égard d'un créancier également déterminé et qui peut être résilié à tout moment, garantit des dettes déterminables.
Civ I, 9 mai 2001, Bull. n° 125, Pourvoi 98-23-144
La caution n'est déchargée que si, par le fait exclusif du créancier, elle ne peut plus erre subrogée dans les droits de celui-ci.
Com, 29 mai 2001, Bull. n° 100, Pourvoi 96-18-118
Cautionnement - Dol commis par un cofidéjusseur Chambre commerciale, 29 mai 2001 (Bull. n° 100)
Dans les rapports entre cofidéjusseurs, le dol peut être invoqué par la caution qui se prévaut de la nullité du cautionnement lorsqu'il émane de son cofidéjusseur.
Il est de jurisprudence constante que le dol n'est une cause de nullité du contrat que s'il émane de la partie envers laquelle l'obligation est contractée, à moins que l'erreur provoquée ne porte sur la substance même de ce contrat (Civ. 1ère, 13 juillet 1996, Bull. n° 288). Le cocontractant de la caution est le créancier au profit duquel celle-ci s'engage. Pourtant, par cet arrêt du 29 mai 2001, la Chambre commerciale a admis que, dans les rapports entre cofidéjusseurs, le dol peut être invoqué par la caution qui se prévaut de la nullité du cautionnement lorsqu'il émane de son cofidéjusseur. Des cautions avaient exécuté leurs engagements en payant la banque créancière puis s'étaient retournées contre leurs cofidéjusseurs. Ces derniers ont résisté en soutenant avoir été victimes d'un dol et ont demandé l'annulation du contrat de cautionnement. En première instance, le tribunal a accueilli cette demande en considérant que les conditions dans lesquelles ces cautions avaient été amenées à prendre des responsabilités dans la société débitrice principale et à consentir leur garantie, en bénéficiant d'une cession de parts sociales à titre gratuit, et d'une nomination à des fonctions de gérance en dehors de toute compétence comptable, étaient inhabituelles compte tenu de la situation précaire de la société. La cour d'appel avait infirmé cette décision sur le fondement de la jurisprudence précitée. La Chambre commerciale, tout en confirmant l'arrêt dès lors que la preuve n'était pas rapportée que les manoeuvres dolosives avaient été déterminantes du cautionnement, a entendu signifier qu'en matière de cautionnement, le cofidéjusseur n'est pas véritablement un tiers au contrat. Selon l'analyse très pertinente de certains auteurs, "si l'accord créancier-caution constitue certes en soi un contrat, il n'a de sens et ne peut exister que greffé sur une opération de base, avec laquelle il forme un rapport triangulaire où le débiteur tient le rôle central". Dans ce rapport triangulaire, il faut laisser une place au cofidéjusseur puisque lui aussi est contractuellement lié au créancier. Le Code civil traite d'ailleurs les rapports entre la caution et le débiteur et ceux entre les cofidéjusseurs comme des 'effets du cautionnement" (articles 2028 et 2033 et suivants). Il restera à la Cour de cassation à dire si le dol commis par le cofidéjusseur ou le débiteur peut être invoqué par
la caution lorsqu'elle est poursuivie par le créancier. Com, 29 mai 2001, Bull. n° 106, Pourvoi 98-11-151
La caution ayant la qualité de gérant de la société cautionnée, elle avait connaissance de la situation du débiteur principal.
Civ I, 19 juin 2001, Bull. n° 179, Pourvoi 98-16-183
L'engagement de caution en garantie d'un prêt d'une durée de 8 ans consenti était « limité à quatre années à partir du décaissement des fonds ». Cette clause a pour seul effet de limiter la garantie de la caution au temps convenu par les parties et non d'imposer au créancier d'engager contre elle ses poursuites dans ce même délai.
Com, 26 juin 2001, Bull. n° 125, Pourvoi 97-11-914
La banque, qui n'avait pas agi avec prudence, avait commis une faute en aggravant le passif de la société d'une créance qui n'aurait pas existé si la banque avait cessé ses relations commerciales en temps utile. Les juges du fond ont pu dès lors pu retenir l'existence d'un lien de causalité entre cette faute et le préjudice de la caution tenue de garantir cette créance.
Civ I, 10 juillet 2001, Bull. n° 208, Pourvoi 98-21-575
La Cour d’appel condamne la caution au paiement d’une somme de 577.448,50 F après avoir énoncé que l'engagement de la caution était solidaire et s'appliquait au paiement ou remboursement de toutes sommes que le locataire peut à ce jour, ou pourra devoir au crédit-bailleur, en principal, augmentées de toutes taxes et de tous intérêts, commissions, frais et accessoires au titre du contrat de crédit-bail et que cet engagement était repris dans la mention manuscrite jusqu'à concurrence de 298 000 francs, plus intérêts et accessoires.
L’arrêt est cassé pour ne pas avoir relevé que la mention manuscrite du cautionnement, lequel n'avait pas un caractère commercial, portait référence, d'abord, au montant ou aux modalités de calcul de l'indemnité de résiliation et, ensuite, au taux de l'intérêt conventionnel, ni faire état d'éléments extrinsèques propres à suppléer aux insuffisances de cette mention.
Com. 17 juillet 2001, Bull. 138, Pourvoi n° 98-15-736
La caution même solidaire peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette, au nombre desquelles figure la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal.
Civ I, 6 novembre 2001, Bull. n° 265, Pourvoi 99-15-506
L'obligation, à laquelle sont tenus les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise sous la condition d'un cautionnement, de faire connaître chaque année à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires, ainsi que le terme de son engagement, doit s'exécuter annuellement jusqu'à extinction de la dette.
Civ I, 14 novembre 2001, Bull. n° 275, Pourvoi 99-12-740
N’établissent pas que la dépréciation du gage était en relation directe avec le fait exclusif du créancier, les motifs de la Cour d’appel qui pour décharger la caution sur le fondement de l’article 2037 du Code civil a retenu que la créance a été nantie, en avril 1985, pour un montant de 1 472 000 francs sur un fonds comprenant outre le matériel, l'enseigne, le nom commercial, la clientèle, l'échafaudage qui y étaient attachés et qu'au moment de la liquidation seul a pu être vendu le matériel pour une valeur de 444 605,22 francs ; qu'il en résulte, selon la Cour d’appel, que le gage du créancier bénéficiant d'un nantissement s'est trouvé du fait de la déconfiture du débiteur principal privé d'une grande partie de sa valeur entre la date du premier incident de paiement en novembre 1986 et celle de l'ouverture de la procédure collective le 24 août 1988 et les cautions privées du droit préférentiel que leur conférait la subrogation sur les éléments du fonds de commerce ainsi disparus ou dévalués.
Com, 11 décembre 2001, Bull. n° 195, Pourvoi 98-12-291
Deux personnes se sont portées se sont portés cautions solidaires envers une banque.
En l'absence de convention contraire les deux cautions solidaires ne pouvaient opposer au créancier le bénéfice de division
Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 14 Mars 1996 Textes cités : nouveau Code de procédure civile, articles 64 et 71 ; Code civil, article 2037 A rapprocher : 1re Civ., 24 juin 1997, Bull.1997, I, n° 211 p. 141 (rejet), et l'arrêt cité Notes sous arrêt : Semaine juridique, édition Entreprise, 17 février 2000, n° 7 p.271, note D.Legeais.
96-16.837 Arrêt n° 1733 Cour de cassation - Chambre commerciale du 26 octobre 1999: Bull.1999, IV, n° 182 p. 156 Demandeur à la cassation : M. Bertrand Echaudemaison Défenderesse à la cassation : Banque parisienne de crédit
CAUTIONNEMENT. - Caution. - Action des créanciers contre elle. - Responsabilité du créancier envers le débiteur principal. - Moyen de défense. Recevabilité.
La caution qui demande à être déchargée de son obligation en raison de la faute commise par le créancier à l'encontre du débiteur principal peut, ou bien, sans prétendre obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire, procéder par voie de défense au fond, ou bien, par voie de demande reconventionnelle, demander à être déchargée indirectement en sollicitant des dommages-intérêts puis la compensation entre le montant de sa dette et celui de ces dommages-intérêts.
Sur le second moyen ;
Vu les articles 64 et 71 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, poursuivie en paiement par le créancier, la caution qui demande à être déchargée de son obligation en raison de la faute commise par celui-ci à l'encontre du débiteur principal, sans prétendre obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire, peut procéder par voie de défense au fond ; qu'elle peut aussi, par voie de demande reconventionnelle, demander à être déchargée indirectement en sollicitant des dommages-intérêts puis la compensation entre le montant de sa dette et celui de ces dommages-intérêts ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société Sariam production (la société) a ouvert un compte courant à la Banque parisienne de crédit (la banque) ; que, par acte du 13 janvier 1992, M. Echaudemaison s'est porté caution solidaire envers la banque, à concurrence de 400 000 francs, pour toutes sommes dues par la société à la banque ; qu'il a également avalisé un billet à ordre de 400 000 francs souscrit le 11 mars 1992 par la société au profit de la banque ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a demandé à la caution paiement de la somme de 800 000 francs en exécution de ses engagements ; que celle-ci a résisté en invoquant l'octroi abusif de concours au débiteur principal puis leur dénonciation brutale ;
Attendu que, pour condamner la caution, l'arrêt énonce que M. Echaudemaison, ne revendiquant pas le bénéfice des dispositions de l'article 2037 du Code civil, ses prétentions quant à la responsabilité imputée par lui à la banque ne peuvent être accueillies, dès lors qu'il les allègue en tant que moyen de défense et non par voie de demande reconventionnelle en réparation du préjudice prétendument subi de nature à entraîner, le cas échéant, une compensation éventuelle entre les deux créances ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que M. Echaudemaison concluait à la confirmation du jugement qui avait relevé des fautes à l'encontre de la banque, alloué à la caution une indemnité de 400 000 francs et prononcé la compensation avec les sommes dues par celle-ci, tout en demandant à la cour d'appel de fixer son préjudice à la somme en principal de 800 000 francs, ce dont il résulte que la caution prétendait obtenir le simple rejet de la prétention de son adversaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 mars 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 20 Octobre 1995 Texte(s) cité(s) : Code civil, articles 1134, 1326, 1347, 2013, 2015, 2016 et 2036 Loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, article 56 Note(s) sous arrêt : JCP, éd. E., 17 juin 1999, n° 24, p.1055 note D.Legeais Banque et droit, août 1999, n° 66, p.35 note F.Jacob JCP, éd. G., 20 octobre 1999, n° 42, p.1893 note J.Casey
96-12.653 Arrêt n° 650 du 16 mars 1999: Bull., IV, n° 59, p. 48 Cour de cassation - Chambre commerciale Demandeur(s) à la cassation : Monsieur Yves Baudry Défendeur(s) à la cassation : Caisse de crédit mutuel de Senlis et autres
CAUTIONNEMENT. - Etendue. - Intérêts du capital cautionné. - Absence de mention manuscrite. - Caution s'engageant dans l'acte à garantir les intérêts. - Portée.
Il résulte des articles 2016 et 1326 du Code civil que la caution d'une somme déterminée ou indéterminée qui s'est engagée à garantir la dette "en principal, intérêts et accessoires" est tenue au paiement desdits intérêts, peu important que la mention manuscrite n'en fasse pas état.
Dit n'y avoir lieu de donner acte à M. Talavera de ce qu'il a déclaré s'associer au pourvoi formé par M. Baudry ; Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif déféré (Amiens, 20 octobre 1995) et les productions, que la Caisse de Crédit mutuel de Senlis (la banque) a consenti à la société Ready air services (la société) un prêt de 200 000 francs et une ouverture de crédit en compte courant d'un montant de 150 000 francs, garantis par le cautionnement solidaire de M. Yves Baudry, suivant actes sous seing privé des 17 juillet et 20 décembre 1986 ; qu'après la mise en liquidation judiciaire de la société, la banque a poursuivi la caution en exécution de ses engagements ; Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : Attendu que M. Baudry reproche à l'arrêt, s'agissant de l'ouverture de crédit en compte courant, de l'avoir condamné à payer à la banque, solidairement avec les autres cautions, la somme de 150 000 francs, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, dans ses conclusions d'appel, il faisait valoir que la banque avait commis une première faute en n'exigeant pas de la société le remboursement du découvert en compte au terme prévu par le contrat rédigé par l'établissement bancaire lui-même, soit le 31 août 1987, et avait commis une seconde faute en n'informant pas les cautions de cette situation anormale au regard du contrat d'ouverture de crédit ; qu'il concluait que "dans ses conditions, le Crédit mutuel ne peut qu'être débouté de toutes demandes fondées sur cet engagement de caution du 20 décembre 1986" ; qu'en estimant que M. Baudry ne tirait aucune conséquence précise de ses observations, tandis qu'il établissait clairement les fautes de la banque et alléguait que ces fautes privaient l'établissement bancaire du droit d'actionner les cautions, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis des conclusions dont elle était saisie, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ; et, alors, d'autre part, que la caution qui garantit les dettes d'un débiteur ayant conclu une convention de compte courant avec son créancier ne peut être condamnée envers celui-ci à payer le solde débiteur existant à l'ouverture du redressement judiciaire du débiteur principal, en l'absence de clôture du compte courant ; qu'en considérant que le redressement judiciaire de la société avait "cristallisé" la situation, le compte courant "étant dès lors clôturé", tandis que la mesure de redressement judiciaire n'a pas pour effet automatique de provoquer la clôture du compte, la cour d'appel, qui n'a pas recherché dans quelles conditions et à quelle date le compte courant avait été clôturé, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 2013 et 2036 du Code civil et 56 de la loi du 25 janvier 1985 ; Mais attendu, d'une part, que le grief de la première branche est inopérant dès lors que les fautes alléguées contre la banque n'étaient pas de nature à priver celle-ci de son droit de poursuivre la caution en exécution de son engagement ; Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que l'ouverture de crédit en compte courant prenait fin le 31 août 1987, ce dont il résulte que la caution avait garanti un crédit dont le terme avait été stipulé, l'arrêt en déduit
exactement que la caution était tenue au solde débiteur du compte à cette date, son engagement ne pouvant plus s'aggraver au-delà ; que, par ces seuls motifs, et dès lors que M. Baudry ne soutenait pas que ce solde aurait été réduit par des remises subséquentes, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la seconde branche, a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; Et sur le second moyen : Attendu que M. Baudry fait encore grief à l'arrêt, s'agissant de cautionnement du prêt, d'avoir dit qu'il était tenu de la dette en principal et intérêts et que la somme de 128 849,17 francs porterait intérêts au taux contractuel de 15 % à compter du 20 mars 1991, à l'égard des trois cautions, alors, selon le pourvoi, que viole les articles 1326, 1347 et 2015 du Code civil, l'arrêt qui, pour condamner la caution à payer les intérêts conventionnels en sus du principal de la dette, énonce que l'ensemble est inférieur au montant de la garantie figurant dans l'acte de cautionnement, alors que ni le corps de l'acte ni la mention manuscrite ne contenait d'indication relative au taux des intérêts conventionnels à la charge de la caution, et que la mention manuscrite ne précisait pas que la caution prenait en charge les intérêts ; Mais attendu qu'aux termes de l'article 2016 du Code civil, le cautionnement indéfini d'une obligation principale s'étend à tous les accessoires de la dette ; que cette règle, qui n'est pas d'ordre public, s'applique à plus forte raison au cautionnement d'un montant défini, moins incertain pour la caution ; que l'article 1326 du Code civil limite l'exigence de la mention manuscrite à la somme ou à la quantité due, sans l'étendre à la nature de la dette, à ses accessoires ou à ses composantes ; Attendu qu'après avoir relevé que, dans l'acte de cautionnement, M. Baudry s'engageait à garantir les sommes que la société doit ou devra à la banque "en principal, intérêts et accessoires à quelque titre que ce soit", au pied duquel la caution a porté les mots écrits de sa main : "Lu et approuvé. Bon pour cautionnement solidaire à concurrence de 200 000 f. (deux cent mille francs)", l'arrêt retient qu'il importe peu que la mention manuscrite ne fasse pas état des intérêts ; qu'ainsi, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen est sans fondement ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 21 novembre 1995
97-12.493 Arrêt n° 1141 Cour de cassation - Chambre commerciale du 23 mai 2000 (et arrêt rectificatif d'erreur matérielle n° 482 du 6 mars 2001) : Bull., IV, n° 107, p. 96 Demandeur(s) à la cassation : M. Beddouk Défendeur(s) à la cassation : M. Rey et autre
CAUTIONNEMENT. - Preuve. - Acte de cautionnement. - Commencement de preuve par écrit. - Elément extrinsèque le complétant. - Gérant de société.
Le commencement de preuve par écrit que constitue la signature donnée sur le même acte à la fois en qualité de représentant de la société et en qualité de caution, complété par l'élément extrinsèque résultant de la qualité de gérant, rend parfaite la preuve du cautionnement.
Attendu, selon l'arrêt déféré (Toulouse, 21 novembre 1995), que, le 14 décembre 1984, Mme Bruchon a donné à bail à M. Rey un local à usage commercial, le bail stipulant qu'en cas de cession, le preneur serait garant solidaire du cessionnaire pour le paiement des loyers ; que, le 27 octobre 1988, M. Rey a cédé le bail à la Société d'exploitation et de diffusion de tous vêtements (la Sodivet) dont le gérant, M. Beddouk, s'est porté caution solidaire du paiement des loyers et charges ; que la Sodivet a été mise en redressement judiciaire le 1er juin 1993, puis en liquidation le 1er juillet 1993 ; que, les loyers demeurant impayés depuis le 1er mai 1993, Mme Bruchon a fait délivrer, le 10 septembre 1993, à M. Rey une ordonnance portant une injonction de payer une certaine somme au titre des loyers impayés de mai à juillet 1993, ordonnance à laquelle M. Rey a fait opposition ; qu'en outre, Mme Bruchon a assigné M. Rey aux fins d'obtenir sa condamnation à payer les loyers d'août à octobre 1993 ; que M. Rey ayant appelé dans la cause M. Beddouk pour qu'il soit condamné à le garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui, le tribunal, après avoir joint les instances, a condamné MM. Rey et Beddouk à régler à Mme Bruchon les loyers impayés ; que, sur le recours formé par M. Rey, la cour d'appel a réformé le jugement et condamné M. Beddouk à garantir M. Rey des condamnations prononcées contre ce dernier ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Beddouk reproche à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le pourvoi, que cette décision mentionnant que le conseiller Lamant a entendu seul les plaidoiries et énonçant, par ailleurs, que le président était assisté par le greffier lors du prononcé de la décision, l'adjectif "assisté", au pluriel, ne peut concerner que les magistrats ayant délibéré, de sorte qu'il résulte de ces énonciations que le greffier assistait au délibéré des magistrats ; qu'ainsi, l'arrêt a violé les articles 447, 448 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il ne résulte pas des mentions critiquées par le pourvoi que le greffier, qui fait partie de la juridiction à laquelle il est affecté, ait participé au délibéré ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. Beddouk reproche encore à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions dans lesquelles M. Beddouk faisait valoir qu'il avait signé le contrat de cession de droit au bail pour le compte de la Sodivet en sa qualité de gérant de cette société, que la mention "lu et approuvé" qui figurait au dessus de sa signature n'exprimait donc que l'accord de la Sodivet sur les clauses du contrat de cession de droit au bail, et qu'il ne pouvait ainsi être déduit de ce contrat un engagement personnel de M. Beddouk de se porter caution de la Sodivet ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que le gérant d'une société à responsabilité limitée ne peut être engagé personnellement par un acte qu'il n'a signé qu'en qualité de représentant de la personne morale ; d'où il résulte qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1165 du Code civil ;
Mais attendu qu’après avoir constaté que M. Beddouk avait paraphé chacune des pages de l’acte de cession de bail, notamment la page 2 qui comporte le paragraphe suivant : "M. Beddouk se porte caution à titre personnel des conditions générales et particulières du bail, en particulier du paiement des loyers et charges", la cour d’appel a fait ressortir que le commencement de preuve par écrit que constituait la signature, donnée à la fois en
qualité de représentant de la société et en qualité de caution, était complété par l’élément extrinsèque résultant de la qualité de gérant, ce qui rendait parfaite la preuve de l’acte de cautionnement ; que, répondant ainsi, en les écartant, aux conclusions dont fait état la première branche, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 3 juin 1996 Texte(s) cité(s) : Loi n° 85-98 du 25 janvier1985 articles 101 et suivants Nouveau Code de procédure civile articles 5 et 49 Précédent(s) jurisprudentiel(s) : Com., 28 mai 1991, Bull., IV, n° 178, p. 127 (rejet) Note(s) sous arrêt Dalloz, cahier droit des affaires, 17 février 2000 n° 7 p. 97 note A. Lienhard 96-20.798
Arrêt n° 197 Cour de cassation - Chambre commerciale du 18 janvier 2000 : Bull., IV, n° 11, p. 9 Demandeur(s) à la cassation : Banque française commerciale Défendeur(s) à la cassation : Epoux Thorinius
CAUTIONNEMENT. - Caution. - Action des créanciers contre elle. - Opposabilité des exceptions inhérentes à la dette. - Redressement ou liquidation judiciaire du débiteur principal. - Juge du cautionnement. - Pouvoirs.
En raison du caractère accessoire du cautionnement, le juge du cautionnement, saisi d'une action en paiement par le créancier contre la caution, est tenu de respecter la décision passée en force de chose jugée rendue par le juge compétent de la procédure dans les rapports entre le créancier et le débiteur principal, et concernant l'existence ainsi que le montant de la créance ; en revanche, tant qu'une telle décision n'est pas intervenue, et sauf la faculté discrétionnaire qu'il conserve de surseoir à statuer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge du cautionnement est juge de l'exception par application de l'article 49 du nouveau Code de procédure civile et, par suite, tenu de statuer sur toutes les exceptions inhérentes à la dette invoquée par la caution, sa décision ne s'imposant que dans les rapports entre le créancier et la caution.
Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches :
Vu les articles 101 et suivants de la loi du 25 janvier 1985, et 5 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu'en raison du caractère accessoire du cautionnement, le juge du cautionnement, saisi d'une action en paiement par le créancier contre la caution, est tenu de respecter la décision passée en force de chose jugée rendue par le juge compétent de la procédure collective dans les rapports entre le créancier et le débiteur principal, et concernant l'existence ainsi que le montant de la créance ; qu'en revanche, tant qu'une telle décision n'est pas intervenue, et sauf la faculté discrétionnaire qu'il conserve de surseoir à statuer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge du cautionnement est juge de l'exception par application de l'article 49 du nouveau Code de procédure civile et, par suite, tenu de statuer sur toutes les exceptions inhérentes à la dette invoquées par la caution, sa décision ne s'imposant que dans les rapports entre le créancier et la caution ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Sofamalu (la société), la Banque française commerciale (la banque) a demandé que M. et Mme Thorinius soient condamnés à exécuter l'engagement de caution par lequel ils avaient garanti le remboursement d'un prêt consenti à la société avant sa mise en redressement judiciaire ;
Attendu que pour rejeter la demande, l'arrêt, qui constate que la banque avait déclaré sa créance à la procédure collective de la société, retient que le juge-commissaire s'est déclaré incompétent au motif qu'une instance était en cours devant la cour d'appel, constate que l'instance à laquelle s'est référé le juge-commissaire est celle dont elle est saisie, et en déduit que, celle-ci ne portant pas sur le bien fondé de la créance et son montant mais sur la mise en oeuvre des obligations des deux cautions, il appartenait à la banque d'exercer un recours contre la décision du juge-commissaire et qu'en l'absence d'un tel recours, elle est déchue de ses droits à l'égard de la société, cette déchéance bénéficiant aux cautions en application de l'article 2036 du Code civil ;
Attendu qu'en statuant ainsi, en l'absence de décision du juge compétent de la procédure collective sur l'existence et le montant de la créance ayant force de chose jugée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juin 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;
Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 23 avril 1996 Textes cités : Loi 85-98 du 25 janvier1985 Code civil article 2011 Nouveau Code de procédure article 455 Précédents jurisprudentiels : Com., 16 février 1993, Bull., IV, n° 58 (2) p. 39 (cassation) et l'arrêt cité 1re Civ., 7 octobre 1998, Bull., I, n° 283 p. 197 (rejet) et l'arrêt cité Notes sous arrêt : Dalloz, Cahier droit des affaires, 17 février 2000 n° 7 p. 97 note A. Lienhard.
96-16.833 Arrêt n° 187 Cour de cassation - Chambre commerciale du 18 janvier 2000: Bull., IV, n° 12, p. 10 Demandeur(s) à la cassation : Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Deux-Sèvres Défendeur(s) à la cassation : M. Barret
CAUTIONNEMENT. - Caution. - Action des créanciers contre elle. - Redressement ou liquidation judiciaires du débiteur principal. - Conditions. - Déclaration ou admission de la créance (non).
Un créancier ne peut être débouté de son action contre la caution d'un débiteur en redressement judiciaire au motif qu'il n'a pas produit aux débats un état des créances vérifiées et admises, alors que, s'il est vrai que la décision du juge de la procédure collective rendue dans les rapports entre le créancier et le débiteur principal s'impose à la caution, il n'en demeure pas moins que le créancier peut poursuivre et obtenir la condamnation de la caution devant le juge du cautionnement avant toute déclaration de créance ou, si la déclaration a été faite, avant toute admission, en établissant l'existence et le montant de sa créance.
Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société Etablissements Brechoire, mise en redressement judiciaire, a fait l'objet d'un plan de cession au profit de la société Savima ; que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Deux-Sèvres (la Caisse) s'est portée caution des engagements de la société Savima envers le commissaire à l'exécution du plan de la société Brechoire à concurrence d'un million de francs, avec le sous-cautionnement solidaire de M. Barret, donné par acte du 29 août 1988 ; que la société Savima ayant elle-même été mise en redressement judiciaire, la Caisse a exécuté ses engagements de caution puis s'est retournée contre M. Barret en lui demandant la somme de 625 000 francs qu'elle avait payée aux lieu et place de la débitrice principale ;
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ;
Attendu que, pour débouter la Caisse, en sa qualité de caution de la société Savima, de l'action qu'elle avait formée contre M. Barret, sous-caution, l'arrêt retient que la Caisse n'a pas produit dans le cadre du redressement judiciaire et s'en remet sur ce point à la production de M. Ségard, administrateur judiciaire de la société Etablissements Brechoire, ladite production étant faite par simple lettre datée du 23 avril 1990, aucun avis de réception n'étant joint à cette déclaration ; que cette seule pièce, faute de date certaine, ne peut établir qu'il a été satisfait aux obligations de l'article 66, alinéa 1er, du décret du 27 décembre 1985 ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans examiner l'attestation, non contestée, par laquelle le représentant des créanciers certifiait avoir reçu cette déclaration, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article 2011 du Code civil ;
Attendu que, pour débouter la Caisse de son action dirigée contre la sous-caution, l'arrêt retient encore que "rien n'établit que M. Ségard, ès qualités, ait été admis au passif du redressement judiciaire" et "qu'il appartenait à la
Caisse de produire aux débats un état des créances vérifiées et admises, ce en quoi elle est totalement défaillante" ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, s'il est vrai que la décision du juge de la procédure collective rendue dans les rapports entre le créancier et le débiteur principal s'impose à la caution, il n'en demeure pas moins que le créancier peut poursuivre et obtenir la condamnation de la caution devant le juge du cautionnement avant toute déclaration de créance ou, si la déclaration a été faite, avant toute admission, en établissant l'existence et le montant de sa créance selon les règles du droit commun ; que la cour d'appel a donc violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 avril 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 7 octobre 1997 Texte(s) cité(s) : Code civil, articles 1326, 1347 et 2015 Précédent(s) jurisprudentiel(s) : Com., 31 mai 1994, Bull., IV, n° 191 (1), p. 152 (cassation partielle) et l'arrêt cité 1re Civ., 27 juin 1995, Bull., I, n° 283 (2), p. 196 (cassation partielle) et l'arrêt cité 1re Civ., 5 décembre 1995, Bull., I, n° 445 (2), p. 310 (cassation partielle sans renvoi) et l'arrêt cité 1re Civ., 2 avril 1997, Bull., I, n° 114 (1), p. 76 (cassation partielle) et l'arrêt cité Com., 16 mars 1999, Bull., IV, n° 59, p. 48 (rejet) Note(s) sous arrêt : Semaine juridique, Edition entreprise, 18 mai 2000 n° 20 p. 801 note D. Legeais Semaine juridique, 13 septembre 2000 n° 37 p.1667 J. Casey Le Dalloz, cahier droit des affaires, 28 septembre 2000 n° 33 p. 342 note V. Brémond
97-21.873 Arrêt n° 458 Cour de cassation - Première chambre civile du 29 février 2000 : Bull., I, n° 68, p. 46 Cassation partielle
Demandeur(s) à la cassation : Epoux Bibes Défendeur(s) à la cassation : Banque Populaire Centre Atlantique
CAUTIONNEMENT. - Caution. - Obligations. - Etendue. - Intérêts du capital cautionné. - Intérêts dus par le débiteur principal. - Taux. - Mention manuscrite incomplète. - Eléments extrinsèques la complétant. - Constatations nécessaires.
Lorsque le cautionnement n'est pas commercial, la caution ne peut être tenue des intérêts au taux conventionnel, en cas d'insuffisance des mentions manuscrites quant à ce taux, que sur le fondement d'éléments extrinsèques propres à compléter ces mentions.
Attendu que les époux Bibes ont garanti, par leur cautionnement solidaire, le remboursement d’un prêt consenti par la Banque populaire Centre-Atlantique ; que la débitrice principale a été défaillante ; que la banque a demandé aux cautions d’exécuter leur engagement ;
Sur le second moyen, qui est préalable :
Attendu que la cour d’appel a constaté, motivant ainsi sa décision du chef critiqué, que les époux Bibes avaient fait précéder leur signature de la mention "bon pour cautionnement solidaire de la somme en principal de cinq cent mille francs (500 000 francs) plus tous intérêts, commissions, frais et accessoires" et relevé qu’ils ne contestaient pas le montant de la créance invoquée ; que le moyen manque en fait ;
Mais, sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 1326, 1347 et 2015 du Code civil ;
Attendu que pour décider que les époux Bibes étaient tenus des intérêts au taux conventionnel, l’arrêt énonce que dès lors qu’elle a écrit de sa main qu’elle les garantissait et que le taux de ces intérêts avait été fixé par écrit, la caution est tenue au paiement desdits intérêts, peu important que leur taux ne figure pas dans la mention manuscrite ;
Attendu, cependant, que lorsque le cautionnement n'a pas un caractère commercial, la caution ne peut être tenue des intérêts au taux conventionnel, en cas d'insuffisance des mentions manuscrites quant à ce taux, que sur le fondement d'éléments extrinsèques propres à compléter ces mentions ; qu'en se déterminant comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné les époux Bibes au paiement d'intérêts au taux contractuel de 13,25 %, l'arrêt rendu le 7 octobre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet,
en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;