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UNIVERSITE DE ROUEN
UFR Sciences de l’Homme et de la Société
Département de Sciences de l’Education
Année Universitaire 2010 – 2011
Les pratiques évaluatives :
Cas du lycée professionnel
dans l’Académie de la Guadeloupe
En vue de l’obtention du
Master Recherche Sciences Humaines et Sciences Sociales
Mention Sciences de l’Education
Sous la direction de :
Monsieur Pierre-Philippe BUGNARD –
Professeur à l’Université de Fribourg et Neuchâtel (Suisse)
Monsieur Loïc CHALMEL -
Professeur à l’Université de Rouen (France)
Marie Josée CILPA
N° étudiant : 20707463
2
TABLE DES MATIERES
Présentation de la recherche ...................................................................................... 4
Contexte et constats................................................................................................ 4
Intérêt et questionnement........................................................................................ 5
Problématique et paradigme ................................................................................... 6
Chapitre 1 : APPROCHE CONCEPTUELLE ................................................................ 8
1.1. De la notation à l’évaluation................................................................................. 9
1.1.1. Les débuts de docimologie................................................................................... 9
1.1.2. Les différents biais de l’évaluation ....................................................................... 11
1.1.3. Vers une évolution des pratiques d’évaluation..................................................... 15
1.2. Le concept d’évaluation ....................................................................................... 18
1.2.1. Essai de définition ................................................................................................ 19
1.2.2. Différents types d’évaluation ................................................................................ 21
1.2.3. Evaluation et apprentissage chez l’élève ............................................................ 23
1.3. La formation et l’enseignement professionnels en Europe et en France ........ 27
1.3.1. La formation et l’enseignement professionnels en Europe .................................. 28
1.3.2. De la formation professionnelle à l’enseignement professionnel en France ........ 31
1.4. Le contexte de la formation et de l’enseignement professionnels
en Guadeloupe ....................................................................................................... 35
1.4.1. Les facteurs géographiques et historiques........................................................... 35
1.4.2. Caractéristiques de l’enseignement professionnel............................................... 44
1.5 Le concept d’évaluation en Guadeloupe ............................................................. 47
1.5.1. L’approche de l’évaluation et la période esclavagiste .......................................... 48
1.5.2. L’influence de l’histoire sur les pratiques d’aujourd’hui ........................................ 49
1.6. Hypothèse .............................................................................................................. 50
Chapitre 2 : APPROCHE METHODOLOGIQUE .......................................................... 51
2.1. Champ de l’étude .................................................................................................. 52
2.1.1. Formations relevant des métiers du génie électrique........................................... 52
3
2.1.2. Echantillon............................................................................................................ 52
2.2. Le recueil des données ........................................................................................ 55
2.2.1 Les outils ............................................................................................................. 55
2.2.2 La démarche ........................................................................................................ 56
2.3. Traitement et bilan des investigations ................................................................ 57
2.3.1. Etat des pratiques enseignantes .......................................................................... 57
2.3.2. Regards sur les pratiques .................................................................................... 59
2.3.3. Relations entre les acteurs................................................................................... 61
Chapitre 3 : ANALYSE ET DISCUSSIONS .................................................................. 62
3.1. La culture de l’évaluation ..................................................................................... 63
3.1.1. La formation des acteurs...................................................................................... 63
3.1.2. L’implication des élèves dans l’évaluation............................................................ 64
3.2. Les représentations sociales dans le champ éducatif ...................................... 66
3.2.1. Le concept de représentations sociales ............................................................... 66
3.2.2. Les représentations sociales et évaluation .......................................................... 67
3.2.3. Les représentations sociales et évaluation dans le contexte de la Guadeloupe.. 68
3.3. Retour sur l’hypothèse ......................................................................................... 68
3.3.1. Discussions autour de l’hypothèse....................................................................... 68
3.3.2. Les limites de la recherche et les prolongements possibles ................................ 69
Bilan de l’étude et apports personnels ...................................................................... 70
Bibliographie et sitographie........................................................................................ 71
Annexes
Annexe 1 : Questionnaire de l’élève............................................................................... 73
Annexe 2 : Questionnaire professeur............................................................................. 75
Annexe 3 : Grille d’analyse des rapports d’inspection.................................................... 78
Annexe 4 : Grille d’analyse des documents d’évaluation ............................................... 79
Annexe 5 : Résultats des investigations......................................................................... 80
4
PRESENTATION DE LA RECHERCHE
o Contexte et constats
«Dans le monde scolaire, lorsqu’on dit ˝ évaluation˝ on pense d’abord à l’appréciation de
l’excellence scolaire des élèves dans les diverses disciplines enseignées, éventuellement à
l’évaluation de la conduite et du travail. N’oublions pas cependant qu’on évalue aussi les
enseignants, les établissements, les programmes, les réformes, le système scolaire dans
son ensemble. Certaines de ces évaluations se fondent sur une appréciation préalable des
acquis des élèves : sur cette base, on juge souvent de la qualité d’un enseignant, d’une
école ou d’un curriculum » Ph. Perrenoud1
Evaluer c’est, d’après J. Nimier « juger en fonction d’une valeur (ou d’attentes) ». C’est aussi
communiquer à l’évalué ce qu’on attend de lui, c’est bien souvent « un ˝ message˝ plus
qu’une ˝ mesure ».
Evaluer c’est « mesurer à l’aide de critères déterminés des acquis d’un élève, de la valeur
d’un enseignement» - Petit Larousse illustré 1999.
L’Académie de la Guadeloupe, académie monodépartementale et archipélagique s’est fixée
comme axes de son projet « la réussite de tous les élèves et la professionnalisation des
enseignants». Les pratiques évaluatives sont en autres un des indicateurs retenus2 pour
apprécier ce niveau de professionnalisation des enseignants. C’est dans ce contexte que
lors de nos visites de classes, en tant qu’inspecteur de l’Education Nationale en
enseignement professionnel, un certain nombre de constats relatifs à ces pratiques ont
attiré notre attention sans que la conscience professionnelle des enseignants ne soit remise
en cause :
o Difficultés pour les enseignants à expliciter l’objet des évaluations proposées aux
élèves, même en présence d’outils (ce qui est évalué, et comment il est évalué ?)
o Faible capacité des enseignants à exploiter les évaluations pour positionner l’élève
(information de l’élève sur les progrès réalisés),
o Difficultés à utiliser l’évaluation pour réguler et réajuster les apprentissages (pourquoi
évaluer ?).
1 PERRENOUD Ph., Novembre 1989. Vers une sociologie de l’évaluation. Bulletin de l’Association des enseignants et chercheurs en éducation Paris, (n° 6, pp. 19 -31) 2 Objectif : Optimiser les pratiques d’évaluation - Rendre les acteurs pédagogiques attentifs aux effets de leur pratique (Extraits du projet académique)
5
Les questions majeures, qui ont émergé de ces constats et qui ont fait l’objet de notre
réflexion de départ sans qu’elles ne préjugent d’un ordre hiérarchique, sont les suivantes :
o Qu’évalue l’enseignant ? Comment évalue-t-il ?
o Quelles fonctions, de l’évaluation mise en place dans le cadre de l’apprentissage ?
o Quelle maîtrise des types d’évaluation par les enseignants ?
o Que signifie la note attribuée pour une activité donnée, pour l’enseignant et pour
l’élève ? Quelle est la validité de la note ?
o Quelle place occupe l’auto-évaluation ?
Dans ce contexte, notre travail viserait ainsi à explorer les habitus évaluatifs dans
l’Académie de la Guadeloupe au regard des modèles (historiques, docimologiques), des
fonctions de l’évaluation, présentés dans la littérature.
Ce regard serait à croiser avec les facteurs suivants en vu d’apprécier leurs impacts sur les
pratiques :
o l’histoire de la formation et de l’enseignement professionnels,
o les spécificités de la formation et de l’enseignement professionnels en Guadeloupe,
o les représentations liées à l’acte d’évaluer en Guadeloupe
Notre question de recherche serait donc la suivante :
Quelles sont les caractéristiques des pratiques évaluatives dans les lycées
professionnels de l’Académie de la Guadeloupe, pour les filières en sciences et
techniques industrielles ?
Intérêt de l’étude
Notre recherche répondrait ainsi à plusieurs intérêts :
1- En tant qu’inspecteur
o procéder à une analyse compréhensive des habitus évaluatifs de
l’Académie mis en œuvre dans les établissements dispensant des
formations professionnelles, en vu de faire évoluer les pratiques des
enseignants
2- En tant qu’accompagnateur des enseignants
o amener les équipes de professeurs à des pratiques d’évaluation qui soient
au service de l’apprentissage des élèves (centrées sur les progrès et non
sur les résultats) tout en prenant conscience des biais liés à ces pratiques
6
Problématique et paradigme
Dans ce chapitre, nous aborderons la démarche scientifique que nous utiliserons pour traiter
du problème posé, la question de départ étant définie précédemment.
Notre problématique fait appel aux notions liées aux modèles et fonctions de l’évaluation, en
relation avec l’histoire de la formation et de l’enseignement professionnels (facteurs
institutionnels, culturels…….), les représentations des acteurs impliqués dans la formation
professionnelle, sur l’acte d’évaluer.
Dans le cadre de notre travail, nous souhaitons mettre en relation les pratiques des acteurs
avec les modèles de la littérature dans une «dimension de sens»3.
Pour ceci, nous avons donc choisi une approche par « le schème compréhensif» développé
par JM BERTHLOT4, et présentée dans l’ouvrage de R. QUIVY5 .
Cette approche est ainsi définie : «permettre de rechercher le sens des phénomènes et non
l’explication car celle-ci en cacherait le sens. ……. On en arrive ainsi à construire, une
compréhension, des modèles de comportements humains »6
Le choix de cette approche, implique que soit fait un point sur les faits historiques afin
d’éclairer la compréhension du problème posé, et ainsi proposer le modèle d’habitus
évaluatifs utilisés dans le cadre de l’apprentissage au sein de l’Académie de la Guadeloupe.
La partie relative aux concepts se fonde sur l’analyse d’ouvrages de référence et des
travaux scientifiques. Compte tenu de l’importance de la littérature sur l’évaluation, nous
avons particulièrement orienté notre recherche sur les aspects liés, aux pratiques
enseignantes dans les situations d’apprentissage, aux acquis de l’élève.
Nous ne nous sommes pas limités dans notre recherche au contexte français, puisque des
références notamment belges, anglo-saxonnes, canadiennes et suisses ont été citées.
Notre étude se situant dans le contexte de la formation et de l’enseignement professionnels
relevant du niveau V et IV, et qui représente plus de 9000 élèves, il a donc fallu s’arrêter à
un champ exploratoire précis.
3 La dimension de sens développée par R. QUIVY signifie que les acteurs interprètent les situations dans lesquelles ils se trouvent et la manière dont ils les expérimentent 4 L’intelligence du social, 1990, PUF 5 QUIVY R., VAN CAMPENHOUDT L., (1995). Manuel de recherche en sciences sociales. Editions Dunod 6 Les points-charnières de la recherche scientifique, Cours de Méthodologie, Master 2 de recherche à distance francophone en Sciences de l’Education (Mardif)
7
Le choix d’un secteur professionnel relevant du domaine du génie électrique présente les
avantages suivants :
o filière rattachée au champ de compétences des inspecteurs en sciences
et techniques industrielles,
o échantillon représentatif, par le nombre d’élèves, de professeurs et
d’établissements de formation.
Les résultats de nos investigations nous permettront de caractériser les pratiques dans ce
secteur professionnel, et d’envisager la transposition de cette analyse à l’ensemble des
formations professionnelles relevant du secteur des sciences et techniques industrielles
dans les lycées professionnels de l’Académie.
Nous avons ainsi choisi pour présenter notre travail un développement en trois parties :
Une première partie qui vise à circonscrire les notions d’évaluation, de formation et
d’enseignement professionnels par une description des aspects qui les caractérisent.
Les théories liées à l’évaluation seront abordées dans une perspective historique allant de
la notation à l’évaluation.
L’étude de la formation professionnelle sera traitée par un aperçu historique et sociologique,
du contexte européen, national et local.
A ce niveau, il a fallu faire face aux obstacles liés à la faible disponibilité dans l’Académie de
données globales, et à l’importance de la littérature sur l’évaluation.
Ce travail sur les aspects théoriques sera conclu par la définition de notre hypothèse de
travail. Elle sera analysée à l’aide d’une démarche expérimentale présentée dans les deux
autres parties suivantes.
Une deuxième partie constituant l’approche méthodologique, retracera la recherche
exploratoire menée. Une description de l’échantillon, des outils, de la démarche de recueil
des données sera proposée. Les résultats de nos investigations seront présentés et
analysés
Une troisième partie confrontera par une démarche interprétative, les typologies
rencontrées dans la littérature aux habitus évaluatifs observés dans l’Académie de la
Guadeloupe. Elle permettra ainsi de faire un retour sur notre hypothèse et dégager les
limites de notre étude.
.
8
9
1.1 De la notation à l’évaluation
« L’évaluation n’est pas la note
et la note n’est pas l’évaluation »
Olivier Maulini
L’observation des pratiques de classe nous conduit à affirmer que la distinction entre
notation et évaluation n’est pas claire pour les enseignants et les élèves. Les professeurs
attribuent préférentiellement une «notation chiffrée normative» quelque soit la situation et
le moment de l’apprentissage. Dans ce chapitre, c’est à la lumière d’une étude historique de
la notation et de l’évaluation que nous allons asseoir notre travail et ainsi illustrer notre
problématique.
1.1.1 Les débuts de la docimologie
A partir du 15ème siècle, la correction physique est utilisée en appareil disciplinaire « plus
l’élève est frappé, plus vite il apprendra ». Jusqu’à la moitié du 20ème siècle, elle était encore
infligée aux élèves dans les écoles de l’Europe Occidentale, alors que des arrêtés
interdisant les châtiments corporels des élèves en lycées (1804) et à l’école (1834), étaient
déjà en vigueur.
Cette suppression des châtiments corporels conduit à l’apparition de procédés de
remplacement : les mauvais points, la réprimande, la privation de récréation, les retenues, la
mise à genou, l’exclusion ou le port de l’écriteau.
La notation scolaire serait donc une invention de la pédagogie rationnelle née d’un contexte
de surveillance des consciences et des comportements. Elle a été mise en place pour
suppléer la pédagogie de la correction physique par les procédés d’émulation psychologique
d’humiliation et de gratification.7
Notation, examen et contrôle sont étroitement liés. Dans le système scolaire noter c’est
soumettre à l’examen, à une épreuve, un procédé permettant de juger de la valeur d’une
personne en comptant ses fautes. L’examen décerne publiquement une marque visible,
expression d’un verdict la bonne/mauvaise note.
La note du latin «nota» signifie marque, signe, appréciation que les maîtres donnent de leur
élèves8.
7 Extraits du cours d Histoire de l’Education, PP BUGNARD, Université de Fribourg 8 FOULQUIE.P, Dictionnaire de la langue pédagogique (1971), Paris PUF
10
«Le contrôle permet de vérifier la conformité d’un processus par rapport à des normes
édictées, un modèle de référence préexistant »9.
« L’examen : Action de constater le degré d’instruction ou les aptitudes d’une personne à
obtenir un titre, occuper une fonction (par des épreuves écrites ou orales) »10.
Au début du vingtième siècle, la généralisation de la notation a entraîné les premiers travaux
sur la docimologie en raison des interrogations sur la fiabilité des notes scolaires attribuées
aux élèves. Le terme «docimologie » vient du grec «qui fait ses preuves, acceptable»11.
La docimologie est donc la science qui étudie les différents moyens de contrôler des
connaissances et des compétences.
En France, c’est en 1922 avec Henri Piéron12 qu’apparaît le terme de docimologie qui se
généralise en 1963 dans son ouvrage « Examens et docimologie ».
Dans d’autres pays (USA, Angleterre, Belgique), des expériences démontrent également
le manque de fiabilité des notes scolaires (travaux d’Andréa Jadoulle, psychopédagogue du
Laboratoire de pédagogie d’Angleur)13.
Ces différents travaux ont pu ainsi montrer :
o «qu’une même copie est notée différemment par l’enseignant selon son ordre de
correction, selon qu’elle se trouve parmi les premières ou parmi les dernières feuilles de la
pile que l’enseignant doit corriger » (Bonniol, 1965)
o «qu’une même copie sera jugée différemment par l’enseignant selon qu’elle suit une copie
jugée « très bonne » ou « très faible» (Bonniol et Piolat, 1971).
Les travaux de Bourdieu et Passeron (1964), Baudelot et Establet (1971), Boudon (1973)
ont montré l’influence de l’origine sociale des élèves dans le jugement du professeur. Tantôt
ce sont les enfants issus des milieux favorisés qui sont avantagés (Pourtois 1978), tantôt ce
sont les élèves issus des milieux défavorisés (paternalisme bienveillant – Dardenne 1999,
Nicaise 2001).
9 BARBIER JM (1985), L’évaluation en formation, Paris PUF 10 Dictionnaire de l’Académie française 11 BAILLY MA, Abrégé du dictionnaire grec français (1901), Paris Hachette 12 Psychologue, agrégé de philosophie, maître des études de psychologie expérimentale en France entre 1910 et 1950 environ. Il donna à la psychologie expérimentale, jusqu'alors surtout clinique et psychiatrique, une orientation plus large, très proche de la physiologie, la situant à la jonction de la réflexologie pavlovienne et du béhaviorisme, dont il fut le précurseur en annonçant très nettement dès 1908 sa volonté d'éliminer les données de l'introspection et en assignant à la psychologie l'étude des comportements, indifféremment animaux et humains. 13 En Belgique René Jadot, fonda à Angleur un laboratoire de psychopédagogie où des expériences menées en 1931, par Mlle Jadoulle une des disciples d'Ovide Decroly sur la notation des copies
11
D’autres facteurs tels que les stéréotypies diverses jouent également un rôle important dans
ce jugement professoral :
o l’apparence physique ou le genre sexuel (Leyens et Yzerbit, 1997 ; Merle, 1998)
o le niveau scolaire de l’élève (les résultats de ses évaluations précédentes,
notamment ceux présentés dans son bulletin scolaire)
o le statut de la classe (la réputation, l’image véhiculée par la classe qu’il fréquente,
notamment celle présentée lors des conseils de classe).
o les représentations préalables sur les capacités supposées de l’élève (effet
Pygmalion)
La question de la note renvoie donc à la responsabilité de l’enseignant, de l’élève et plus
largement du système éducatif. Il en ressort ainsi ce que la docimologie désigne comme les
«biais de la notation scolaire», que nous nous proposons de présenter ci-dessous.
1.1.2 Les différents biais de l’évaluation
Dans l’acte d’évaluer, les enseignants ne sont pas toujours conscients des mécanismes
(représentations personnelles, environnement…) qui influent sur la notation attribuée aux
élèves. Ces mécanismes regroupés sous le vocable de « biais » peuvent être classés en
fonction des effets.
Effet système
L’objectivité, la neutralité, l’indépendance de celui qui évalue est fortement déterminée par le
système de valeurs de l’institution dans laquelle il se trouve. La connaissance ou non des
règles qui régissent cette institution aura donc une influence sur l’évaluation.
Dans le système éducatif en France comme dans toute institution, l’évaluation est
déterminée par le système de valeurs qui la fonde. A chaque élève est attribuée un étiquette,
une place, un rang qui préfigure celle qu’il occupera dans la société ; rang qu’il est souvent
très difficile de modifier au long de vie scolaire14. L’élève se voit «cataloguer » dans une
échelle de notes et de jugement de valeurs qui est transmise de manière inconsciente d’un
enseignant à l’autre et d’une classe à l’autre.
14 BATESON parle de système de codage lié, au système de valeurs " selon lequel les objets du monde sont choisis, négligés ou rejetés "
12
Effet établissement
Le type d’établissement et le lieu où il se trouve jouent un rôle non négligeable sur les
résultats des élèves et par extension sur les pratiques d’évaluation des enseignants.
Cet effet établissement dont l’importance a été mise en lumière dans les années 1980 par de
nombreuses expériences, démontre que l’identité, le type de management, l’organisation, le
climat, la cohésion des équipes enseignantes influent les résultats des élèves.
En France ce sont les travaux de DURU DELLAT, MINGAT (1993) et de MERLE (1998) qui
ont mis en évidence cet effet.
Effet classe
Il a été identifié pour la première fois par GRISAY (1984). Le contexte de la classe joue un
rôle important sur la manière dont les enseignants évaluent : les élèves sont situés les uns
par rapport aux autres, et non par rapport à des objectifs et compétences définis. Cet effet
classe s’illustre par les deux résultantes suivantes :
Effet posthumus15
On attribue assez généralement à Posthumus, enseignant hollandais en poste en Indonésie
durant la seconde guerre mondiale et interné dans un camp japonais durant celle-ci, la
paternité d’une loi formulée de la manière suivante par De Landsheere (1992) :
« Un enseignant tend à ajuster le niveau de son enseignement et ses appréciations des
performances des élèves de façon à conserver, d’année en année, approximativement la
même distribution (gaussienne) de notes16. »
Cette « loi de Posthumus » indique que la distribution des notes résulte d’une sorte de
prototype, communément admis : il existe peu d’élèves exceptionnels (très faibles ou très
brillants), mais beaucoup d’élèves relativement moyens. Lorsque l’on se place dans la
situation d’une épreuve interne, c’est assez souvent ce type de distribution Guassienne qui
est mise en évidence, alors même que des épreuves externes, appliquées aux mêmes
élèves, indiquent des niveaux moyens très variables et des dispersions différentes, d’une
classe à l’autre.
15 Extrait de DEMEUSE, M. (2004). Introduction aux théories et aux méthodes de la mesure en sciences psychologiques et en sciences de l’éducation. Editions de l’Université de Liège
16 Laugier et Weinberg (1927) souscrivent à cette idée: « les notes [de 166 candidats à un concours universitaire dont les copies ont été jugées par deux correcteurs indépendants, expérimentés et méticuleux] sont distribuées par chaque examinateur, à peu près suivant une courbe normale "en cloche" : les notes moyennes sont les plus fréquentes, les notes très bonnes ou très mauvaises sont les plus rares. C'est un signe qui atteste de la valeur de la notation, car on sait que si l'on mesure, dans un groupe homogène d'individus, un trait quelconque, - que ce soit la taille ou le poids, ou une fonction mentale au moyen d'un test, - on constate que les résultats se distribuent selon une courbe en cloche. Tout porte à croire qu'il en est de même pour les connaissances dans le groupe d'individus …..»
13
De Landsheere (1992), explique ce phénomène de la manière suivante :
« Un professeur qui enseigne de façon non individualisée dans une classe où les élèves ne
sont pas spécialement sélectionnés donne normalement à son cours un degré de difficulté
adapté à la majorité du groupe. Si l’ajustement est correct, il y aura donc beaucoup de
résultats moyens, peu de très bons et peu de très mauvais. La distribution de ces résultats
s’approchera de la courbe gaussienne. Cette distribution, dite normale, est à l’image de
beaucoup de qualités humaines, telles qu’elles se répartissent dans des groupes nombreux,
pris au hasard. »
Il dénonce le mythe de la courbe de Gauss
« Dans les sciences humaines, la courbe en cloche de Gauss joue un rôle considérable,
parce qu’elle est l’image même de la répartition de bien des aptitudes et des qualités : les
individus moyens abondent, mais les génies et les idiots, les géants et les nains sont rares.
Comme les tests mesurent souvent des aptitudes, des traits de personnalité ou des
performances de vastes populations, et servent à classer les individus en les comparant les
uns aux autres, il est naturel que ces épreuves soient étalonnées selon la répartition
gaussienne : en gros, 70 % de moyens, 13 % de bons, 13 % de médiocres, 2 % d’excellents,
2 % de très mauvais».
La constante macabre
Par constante macabre, André ANTIBI17 entend le pourcentage d’élèves qui sont mis en
situation d’échec pour que l’évaluation paraisse crédible.
Il définit la « constante macabre» comme étant un facteur qui influe la notation des élèves.
Il précise que : «Sous la pression de la société, les enseignants semblent obligés, pour être
crédibles, de mettre un certain pourcentage de mauvaises notes, même dans les classes de
bon niveau. En effet, les parents et les élèves eux-mêmes suspecteraient à priori un
professeur d’une matière importante dont la moyenne de classe serait de 14 ou 15 sur 20 ».
Pour ce chercheur «la raison essentielle de l’existence de cette constante est le fait que la
société fait jouer au système éducatif un rôle de sélection et de classement des élèves».
17 Professeur à l’université Paul-Sabatier de Toulouse, André ANTIBI dirige le laboratoire de didactique, Il est l’auteur de « La constante macabre » paru en 2003, Math’adore-Nathan
14
Effet élève
Les attitudes et comportements de l’élève face à la notation s’illustrent par l’effet suivant :
L’effet Pygmalion ou concept d’étiquetage ou effet Rosenthal
L’effet Pygmalion ou prophétie auto-réalisante a été mis en évidence par Robert Rosenthal
qui avait désigné, de manière tout à fait aléatoire un certain nombre d’élèves qui étaient, soi-
disant, pourvus d’une intelligence extraordinaire. Il s’avère que ces élèves ont brillamment
réussi parce que les enseignants en étaient convaincus à l’avance18
L’élève réussira mieux s’il est bien considéré par les enseignants. « Tout sujet tend à
répondre aux attentes que l’on place en lui – que celles-ci soient positives ou négatives.
Autrement dit, valorisez un individu, il voit ses performances augmenter objectivement. A
contrario, le rabaissez, le brimez dans ses initiatives, dans ses possibilités d’expression, son
estime de soi dégringole et le voilà qui fonctionne de moins en moins bien »19
Effet maître
De nombreuses recherches démontrent que l’évaluation est influencée par la personnalité de
l’évaluateur, et par des facteurs que l’évaluateur ne soupçonne pas. L’enseignant s’évalue
autant qu’il évalue ses élèves.
Il convient de citer pour cet effet deux types de biais correspondant l’un à l’influence de
caractéristiques socio –culturelles et l’autre à l’influence de caractéristiques professionnelles.
Effet Halo
Dans toute relation d’évaluation, il existe chez celui qui évalue ce que l’on appelle en
psychologie sociale, des attentes qui renvoient à des représentations sociales.
L’effet Halo est un biais qui tend à sur- ou sous-estimer l’élève à partir des éléments perçus
ou connus par l’enseignant. Il fait référence au fait que les enseignants notent à partir de la
perception qu’ils ont de l’élève : aspects liés aux caractéristiques comme l’origine sociale,
l’aspect physique, la présentation vestimentaire, la prononciation ou l’accent…
« L’effet de halo présente un caractère affectif accusé. Souvent, on surestime les réponses
d’un élève de belle allure, au regard franc, à la diction agréable… Soit pour des raisons de
lisibilité, soit pour des raisons nettement affectives. L’écriture peut aussi influencer le
correcteur. » (De Landsheere, 1992). Dans cet ordre d’idée, Chase (1968) a montré que la
mauvaise qualité de l’écriture fait baisser le score d’un élève.
18 ROSENTHAL R., JACOBSON L (1971) Pygmalion à l’école, Casterman, Tournai, 19 MRAX, Petite Psychologie sociale et racisme, Petite leçon de discrimination appliquée, décembre 2005.
15
Biais professionnels
Ils furent nommés pour la première fois dans les travaux précurseurs de FELOUZIS (1997) :
« l’évaluation conduite par l’enseignant sera dépendante de la conception qu’il a de son
métier ».
Ces travaux mettent en lumière deux types de pratiques, et de profils d’enseignants :
o des pratiques qui tendent à valoriser les savoirs disciplinaires et à évaluer
sévèrement dans un souci de contrôler la performance, de former une élite et de faire
progresser le plus possible l’élève,
o des pratiques centrées sur l’élève de manière à le valoriser. Ces pratiques visent à
encourager l’élève à progresser.
Ces différents constats sur les effets de «l’évaluation normative chiffrée» ont entraîné
l’apparition de d’autres modèles de pensées que nous nous proposons de retracer dans le
chapitre suivant.
1.1.3 Vers une évolution des pratiques d’évaluation
Dans ce chapitre, nous nous appuierons sur les expériences de la Suisse, du Danemark, et
sur les expérimentations menées en France et en Belgique pour montrer comment s’est
opéré le glissement d’une évaluation de l’élève basée sur la notation chiffrée, vers des
pratiques prenant en compte les compétences de l’élève.
La réforme de l’évaluation en Suisse
Comme dans beaucoup de systèmes scolaires européens, l’utilisation de moyennes de
notes autour des examens était le seul critère utilisé en Suisse pour l’évaluation des élèves.
La réforme scolaire débutée au milieu des années 1990 s’est donnée comme priorité
l’évolution de l’évaluation scolaire en vue de clarifier les objectifs et les mises en pratiques.
Ce changement progressif s’est accompagné d’une transformation culturelle et des usages
de l’évaluation.
Après vingt années de refonte, le système scolaire Suisse s’inscrit dans la recherche d’une
évaluation plus « formative et moins sélective »20 qui permette à chaque élève de développer
au mieux ses compétences. L’usage de l’auto-évaluation avec le portfolio a été aussi
encouragé dans cette réforme favorisant ainsi la communication avec l’élève et la famille.
L’apparition de tests de références ou épreuves comparées s’est généralisée pour remplacer
20 Rapport du CSRE, Septembre 2000
16
les tests ou examens d’admission. Ces tests sont basés sur des critères ne dépendant pas
de la classe mais des compétences et potentialités des élèves.
Ces mutations des pratiques évaluatives ont ainsi contribué :
o à l’objectivité des évaluations, des résultats et de la note par une meilleure cohérence
dans la pratique de l’évaluation, entre les cantons de Suisse, et entre les degrés
scolaires,
o au développement de l’évaluation formative et de l’auto-évaluation,
o à l’évolution de l’évaluation sommative en fonction des objectifs de l’apprentissage,
o à une meilleure communication des acteurs autour de l’évaluation.
On peut ainsi lire dans le rapport du Centre Suisse de Coordination et pour la Recherche en
Education : « l’évaluation ne doit pas être mise au service de la performance scolaire, ni
d’aucune compétition, ou sélection. Elle doit soutenir les processus d’apprentissage, la
confiance en soi, et le développement des élèves en évaluant de façon globale, exhaustive
et adéquate leurs compétences (….). L’évaluation formative prend tout son importance dans
la mesure où elle permet d’élargir le champ de l’évaluation tout en donnant des informations
plus riches et plus gratifiantes ».
L’organisation du système scolaire au Danemark
Le système scolaire danois s’étale sur 9 grades pour les élèves âgés de 7 ans à 16 ans. Le
niveau scolaire n’est pas le seul critère à être évalué. Les compétences sociales (empathie,
serviabilité, volonté, vie en groupe…..), les aptitudes personnelles sont prises en compte au
même titre que les résultats scolaires. La pratique de l’évaluation formative, de l’auto-
évaluation, l’usage du bilan consigné dans « un livret de l’élève » et du carnet de bord
personnel de l’élève complété par l’enseignant, sont les bases de cette organisation.
L’évaluation par notation chiffrée se fait à partir du 8ème grade en vue de disposer
d’informations supplémentaires sur l’évolution des apprentissages de l’élève. Des tests
nationaux donnant lieu à des bilans au 2ème et 9ème grade sont le support de l’état des lieux
des acquis et des difficultés.
Ce type d’organisation présente les avantages suivants :
o une évaluation plus qualitative que quantitative pour assurer le réajustement et la
différenciation des enseignements,
o des possibilités de remédiation immédiate individuelle et/ou collective des difficultés
repérées des élèves,
o un usage de l’évaluation sommative par notation pour certifier en fin de grade,
comme complément pédagogique visant à identifier le profil des apprenants.
17
Le contrat de confiance d’André ANTIBI
Ce contrat fait suite aux travaux sur la constante macabre. L’objectif est d’indiquer à l’avance
aux élèves les éléments déjà vus et corrigés sur lesquels porteront 80 % du contrôle. Ce qui
permet de ne pas « piéger l’élève » et de le mettre dans une attitude confiante. Deux, trois
jours avant le contrôle le professeur organise une séance de questions-réponses au cours
de laquelle les élèves peuvent disposer d’explications.
Pour André ANTIBI, ce système a déjà fait ses preuves dans d’autres types d’évaluation :
permis de conduire, examens de musique, et ne supprime pas l’échec mais le limite. Il parle
alors de suppression de l’échec artificiel.
Cette démarche favorise :
o la motivation de l’élève pour le travail (augmentation des potentialités de réussite).
L’élève est en compétition avec lui et non avec les autres formés.
o l’amélioration des résultats et la réduction de l’échec scolaire,
o le changement de représentation de l’évaluation par les élèves par une meilleure
articulation entre évaluation formative/évaluation sommative,
o un climat de confiance.
Les autres façons de penser l’évaluation
André LEVY présente deux modèles d’évaluation21 :
« L’évaluation comme accompagnatrice de la création de valeur que l’œuvre réalise » Le
principe est de favoriser la créativité des élèves lors des situations d’enseignement et de
formation. Cette posture oblige une modification du rapport au savoir et des processus
d’acquisition de ce savoir.
« L’évaluation comme marqueur de la relation pédagogique ». Le principe est de procéder à
l’évaluation qui sort du cadre de la relation maître-élève vers une réflexion collective sur le
travail des formés au cours d’une réflexion collective.
Vincent CARETTE22 propose un outil basé sur une évaluation en trois phases :
Phase 1 : évaluation des compétences mobilisées par l’élève sur une tâche inédite,
Phase 2 : la même tâche est découpée en tâche élémentaires avec des consignes explicites,
présentées dans l’ordre où elles doivent être accomplies,
21 LEVY.A, Les enjeux sociaux occultés de l’évaluation, Nouvelle revue de psychologie 22 CARETTE Vincent est professeur à l’Université libre de Bruxelles. Ses travaux de recherche se concentrent sur les questions d’apprentissage et d’évaluation des acquis des élèves dans des approches par compétences. Il est le co-auteur de l’ouvrage « les compétences à l’école : apprentissage et évaluation (2003), Bruxelles, De Boeck
18
Phase 3 : si nécessaire, on évalue la maîtrise des procédures de base à utiliser dans
différentes phases du problème à réalisé ».
Vincent CARETTE indique « Dans ce cas, les enseignants peuvent à la fois mieux
comprendre les référentiels, évaluer leurs propres pratiques, réaliser un diagnostic sur les
compétences des élèves, et travailler à comprendre « en situation » comment agir.
Mais il pose des limites qu’il a constatées lorsqu’il observait les enseignants construire et
utiliser ce genre d’épreuves : « cela nous prend beaucoup de temps », le fait que les
épreuves « papier-crayon » ne permettent pas de « faire » (et donc de mesurer ce que les
élèves savent faire effectivement). Mais la « phase 2 » (décomposition de la phase
complexe) se fait toujours selon une certaine logique, dont on constate qu’elle « bloque »
certains enfants qui ne parviennent plus à avancer lorsqu’on les contraint à passer par un
cheminement de pensée et d’action ».
Synthèse
Ce premier chapitre fait état de la complexité de l’évaluation qui ne se limite pas à la simple
apposition d’une note, jugée comme la plus juste par celui qui l’attribue. L’évaluation est la
résultante d’un certain nombre de facteurs relevant à la fois de l’élève, du professeur, des
autres acteurs du système éducatif, et du contexte.
Néanmoins, il ne s’agit pas non plus d’affirmer que l’évaluation des acquis des élèves est
totalement faussée. L’évaluation normée est une nécessité dans certains contextes,
cependant les évolutions des pratiques témoignent de la nécessité d’une approche
complémentaire de l’évaluation (appréciation par les enseignants de la maîtrise des
compétences des formés).
Il convient donc d’aborder le concept de l’évaluation en s’interrogeant sur le sens
étymologique du terme, ses modèles, ses fonctions, et les représentations qu’il véhicule.
1.2 Le concept d’évaluation
« Le rapport à la connaissance est
toujours régi par les idées de constat, de bilan,
de vérification donc de pouvoir ? »
Anne JORRO
Dans l’éducation, il est à noter que plusieurs types d’évaluations se déploient sous
différentes facettes. Le terme « évaluation » est utilisé dans tous les milieux de l’éducation :
au sein de la classe, au sein des équipes d’enseignants, au sein de l’encadrement, au sein
de l’administration rectorale. Il est associé au contrôle, à la mesure, au positionnement, à la
certification…
19
Au plan national, la question de l’évaluation des élèves semble également aujourd’hui
incontournable lorsque l’on aborde les problématiques liées à la pédagogique. C’est ainsi
que l’on peut lire dans une étude des dossiers de l’Enseignement Scolaire :
« L’évaluation fait donc partie intégrante du processus d’apprentissage et constitue, pour les
enseignants, un élément essentiel du contrat pédagogique qui les lie, le plus souvent
implicitement, à leurs élèves… Les enseignants y consacrent, de ce fait, beaucoup de temps
et d’attention.
L’évaluation des élèves par les enseignants est l’acte majeur par lequel ces derniers
mesurent tout à la fois les acquis de chaque élève et l’atteinte des objectifs qu’ils assignent
à leur enseignement ».23.
Au cours de ces dernières années, les définitions et démarches en matière d’évaluation ont
beaucoup évolué, jusqu’à parler aujourd’hui «des» évaluations. Dans ce chapitre nous
procéderons à un tour d’horizon des approches liées à cette notion.
1.2.1 Essai de définiton
Les différentes définitions de l’évaluation traduisent le fait que ce concept n’est pas encore
stabilisé et unifié.
1- « Processus d’appréciation par lequel on juge de l’adéquation des résultats de la
formation aux buts assignés à l’action, en vue de tirer les conclusions nécessaires sur
l’intérêt de la formation et son éventuelle reconduction »24.
2- « Opération qui consiste à estimer, à apprécier, à porter un jugement de valeur ou à
accorder une importance à une personne, à un processus, à un événement, à une
institution ou à tout objet à partir d’informations qualitatives et/ou quantitatives, et de
critères précis en vue d’une prise de décision. C’est comprendre, éclairer l’action de
façon à pouvoir décider avec justesse de la suite des événements »25.
3- Dispositif qui a pris naissance vers le milieu du 20ème siècle dans les pays anglo-saxons
et qui résulte de la transposition dans le domaine de l’enseignement, de concepts et de
modèles appliqués dès le 19ème siècle dans le monde de l’économie et en particulier dans
23 Pratiques d’évaluation des enseignants en collège, Les dossiers Enseignement Scolaire – Janvier 2005 24 LESNE. M, (1984), Lire les pratiques de formation d’adultes, Paris Edilig 25 LEGENDRE Renald, (1993), Dictionnaire actuel de l’éducation, - GUÉRIN / ESKA.
20
l’industrie. Dans l’éducation, ce dispositif se situe dans le cadre de la mise en œuvre de
la pédagogie par objectifs.26.
4- «Mesure à l’aide de critères déterminés, des acquis d’un élève, de la valeur d’un
enseignement, etc. »27.
5- « Acte par lequel on formule un jugement de valeur portant sur un objet déterminé
(individu, situation, action, projet …..) par le moyen d’une confrontation entre deux séries
données qui sont mises en rapport ».28.
6- « Démarche ou processus conduisant au jugement et à la prise de décision. Jugement
qualitatif ou quantitatif sur la valeur d’une personne, d’un objet, d’un processus, d’une
situation ou d’une organisation, en comparant les caractéristiques observables à des
normes établies, à partir de critères explicites, en vue de fournir des données utiles à la
prise de décision dans la poursuite d’un but ou d’un objectif »29.
Le terme d’évaluation peut dans certains cas s’apparenter au contrôle et à l’examen. La
qualité du référent en est la distinction : un référent «normalisé » pour le contrôle et l’examen
et un référent «adapté au contexte» pour l’évaluation.
7- Acte d’évaluation comme acte de jugement : J. M. BARBIER30. précise : « Un acte
d’évaluation qui parvient à son terme est un acte qui aboutit à la production d’un
jugement de valeur. La présence de celui – ci permet de dire s’il y a ou non évaluation.
Le jugement de valeur constitue la marque de l’évaluation ».
8- Acte d’évaluation comme acte de décision : G. SCALLON31 indique « Dans le cadre de
l’évolution de la notion d’évaluation en éducation, c’est – à – dire dans un cadre très
général, l’avènement du paradigme mesure – évaluation – décision a permis de
donner une certaine perspective dont il faut être conscient : Selon cette conception de
l’évaluation, la visée principale de toute démarche évaluative est une prise de décision et 26 Dictionnaire de la pédagogie (1996), Paris, Bordas 27 Le Petit Larousse illustré 1999. 28 HADJI.C (2000), L’évaluation règles du jeu – Des intentions à l’action, EFS Editeur 29 Pratiques d’évaluation des enseignants en collège, Les dossiers Enseignement Scolaire – Janvier 2005 30 BARBIER JM (1985), L’évaluation en formation, Paris PUF 31 SCALLON.G (2004), L’évaluation des apprentissages dans une approche par compétence, De Boeck, Pédagogies en développement
21
non plus un simple jugement. On pourrait alors parler d’évaluation qui, dans un certain
sens, s’oppose à la perspective de l’évaluation – jugement ou de l’évaluation –
contemplation ».
Ces différentes définitions se caractérisent par les constantes suivantes : l’évaluation
n’est pas une simple mesure puisqu’elle peut être qualitative. Elle fait référence à des
objectifs d’apprentissage explicites. Elle constitue une aide à la décision (remédiation,
orientation, sélection…….)
1.2.2 Différents types d’évaluation
L’évaluation, très présente dans le système éducatif, prend plusieurs formes. Le présent
chapitre s’attachera à dresser un panorama des évaluations traditionnelles, et de celles plus
récentes, dans l’objectif d’en apprécier leur usage.
Le code de l’éducation et de la terminologie du ministère de l’éducation32 distingue trois
types d’évaluation par rapport à leur objectif au moment du déroulement de l’action de
formation (avant, pendant, après l’action de formation).
Avant l’action
Evaluation diagnostique,
pronostique
Pendant l’action
Evaluation formative,
formatrice
Après l’action
Evaluation sommative,
certificative
Évaluation intervenant au
début, voire au cours d’un
apprentissage ou d’une
formation, qui permet de
repérer et d’identifier les
difficultés rencontrées par
l’élève ou l’étudiant afin d’y
apporter des réponses
pédagogiques adaptées
Évaluation intervenant au
cours d’un apprentissage
ou d’une formation, qui
permet à l’élève ou à
l’étudiant de prendre
conscience de ses acquis
et des difficultés
rencontrées, et de découvrir
par lui-même les moyens de
progresser
Évaluation intervenant au
terme d’un processus
d’apprentissage ou de
formation afin de mesurer
les acquis de l’élève ou de
l’étudiant par rapport à une
norme
32Commission générale de terminologie et de néologie, Vocabulaire de l’éducation – BO n° 33 du 20/09/07
22
Charles HADJI33 classe les types d’évaluation au regard des fonctions qui leur sont
attribuées dans une activité pédagogique dans la classe.
Il introduit deux critères pour qualifier les pratiques d’évaluation : la fonction et l’observable.
La fonction correspond à l’objectif central de l’évaluation et l’observable est l’élément sur
lequel portera l’évaluation.
Place par rapport à la séquence de
formation
Type d’évaluation
Fonction
Observable
Avant l’action de
formation
Evaluation diagnostique, pronostique,
prédictive
Orienter, adapter
Le producteur
est ses caractéristiques (identification)
Pendant l’action de
formation
Evaluation formative,
progressive
Réguler, faciliter
Les processus, l’activité
de production
Après l’action de formation
Evaluation
sommative, terminale
Vérifier Certifier
Les produits
Linda ALLAL34 propose une classification qui met en lien type d’évaluation et sa fonction.
Elle introduit les notions d’axes de référence qui renvoient à l’aspect normatif de l’évaluation
en comparaison avec les autres élèves, et l’aspect critérié de l’évaluation en lien avec les
résultats attendus et les objectifs de formation.
Types d’évaluation
Fonction
Evaluation pronostique, diagnostique
orientation, adaptation en début de formation
Evaluation formative
information et adaptation durant la formation
Evaluation formatrice
régulation, remédiation durant la formation
Evaluation sommative
certificative
certification, bilan, mesure, sélection en fin de formation
33 HADJI.C (2000), L’évaluation règles du jeu – Des intentions à l’action, p 59, EFS Editeur 34 Allal, L., Cardinet J. et Perrenoud, Ph. (dir.) L’évaluation formative dans un enseignement différencié, Berne, Lang, pp. 153-183 (1ère éd. 1979).
23
Jean Marie De KETELE35 propose une classification basée sur le principe des référentiels.
Il en découle une catégorisation des évaluations qui privilégient :
o le bilan et la correction des produits (« référentiel de contrôle » selon Figari,
1993),
o la facilitation des apprentissages («référentiel de compétences cognitives»),
o l’aide à la construction de l’identité individuelle et collective («référentiel de
représentations sociales»),
o la régulation du fonctionnement individuel et collectif («référentiel d’interactions»).
M. C. DAUVISIS introduit la notion «d’évaluation d’entrée» pour estimer le décalage entre
pré-requis du candidat et le pré-requis de la formation. Il s’agira de mesurer le niveau de
compétences de l’élève en début de formation en le croisant avec le référent de la formation.
L’évaluation prend ainsi la forme d’un positionnement à l’entrée.
1.2.3 Evaluation et apprentissage chez l’élève
Les chapitres précédents nous permettent ainsi d’affirmer que l’évaluation dans
l’apprentissage, n’est pas exclusivement le contrôle, et ne se restreint pas à des moments
spécifiques. L’évaluation remplit d’autres fonctions que celles qui consistent à mesurer les
compétences et les connaissances des élèves.
Les questions au cœur de ce chapitre sont : « A quoi peut et doit servir l’évaluation ? »,
« Comment mettre l’évaluation au service de l’action pédagogique ? »
Pour traiter de ce chapitre nous nous tiendrons aux grandes fonctions de l’évaluation qui
déterminent le type d’évaluation et le contexte d’apprentissage.
De nombreux travaux de chercheurs ont ainsi défini trois grandes fonctions les plus
courantes de l’évaluation :
o fonction d’orientation : permettre un choix de formation, orienter, adapter son
enseignement,
o fonction de régulation : comprendre les démarches de l’élève et l’aider dans son
processus d’apprentissage,
o fonction de certification : permettre de vérifier que les objectifs sont atteints.
35 Extrait de DE KETELE JM (juin 1993), L'évaluation conjuguée en paradigmes, in Revue française de pédagogie, n°103, avril
24
De l’évaluation sommative à l’évaluation formative
L’’évaluation sommative relève du contrôle des apprentissages, alors que l’évaluation
formative relève de la régulation des conditions de l’apprentissage.
D’après Bloom l’évaluation sommative est liée au classement, à la certification, ou à
l’attestation du progrès de chaque élève.
Des enquêtes ministérielles québécoises sur l’évolution de la fonction de l’évaluation
formative sur les apprentissages36 affirme que :
o « L’évaluation sommative intervient à la fin d’une série de tâches d’apprentissage et
sert à informer l’enseignant et l’élève sur la maîtrise d’un ensemble d’objectifs »,
o « L’évaluation formative est une démarche amenant l’enseignant à situer l’élève
dans ses apprentissages et à diagnostiquer ses forces et ses faiblesses afin de lui
offrir un enseignement correctif pertinent et différencié ».
L’évaluation sommative se distingue donc de l’évaluation formative par le fait qu’elle évalue
le degré d’atteinte des objectifs d’un apprentissage alors que l’évaluation formative sert à
aider l’élève et l’enseignant à progresser vers la maîtrise de compétences.
L’évaluation formative se caractérise par trois fonctions :
o une fonction d’aide qui rend possible l’identification par l’élève de ses propres
processus d’apprentissage et ainsi les conserver ou les modifier
o fonction informative : facilitatrice d’une meilleure connaissance chez l’élève des
attentes du professeur et du but à atteindre. Rôle d’homogénéisation des apprentissages
chez tous les élèves,
o fonction de régulation : adaptation des processus d’apprentissage.
La régulation peut-être réalisée soit par l’enseignant soit par l’élève. Linda ALLAL (1979 et
1984) et J. CARDINET (1986) définissent trois types de régulation :
les régulations proactives qui interviennent avant la séquence d’apprentissage
pour adapter la planification des apprentissages aux besoins des élèves,
les régulations interactives qui concernent les ajustements au cours des
apprentissages pour traiter de manière immédiate une difficulté repérée,
36 MORRISSETTE J, MAHEUX G, Evolution de la fonction de l’évaluation formative des apprentissages à travers le discours ministériel québécois entre 1981 et 2002, Revue de Sciences de l’Education
25
les régulations rétroactives qui ont lieu après l’apprentissage lors d’un
réinvestissement d’une compétence et qui visent à remédier à partir des
problèmes identifiés.
D’autres chercheurs tels Philippe PERRENOUD (1991) et Gérard SCALLON (2000) ont
démontré que ce sont les régulations interactives qui jouent un rôle important dans
l’apprentissage du fait des réajustements continus, qui placent l’élève dans des conditions
optimales de réussite.
Cependant, il est à relever ce que certains chercheurs (G. SCALLON et D. BAIN) appellent
la « contamination » de la fonction formative de l’évaluation du fait :
o de la prédominance de la fonction sommative de l’évaluation durant de longues
années,
o de l’absence de cadre de référence en évaluation des apprentissages,
o du statut des enseignants (dispensent leur enseignement au regard de référentiel
édicté au plan national).
Cette « contamination » réduit donc l’évaluation formative à des actions correctives pour
faire face aux difficultés des élèves. Trois éléments ont été identifiés comme renforçant cette
« contamination », ce sont la formation des enseignements, l’organisation scolaire en lien
avec le contexte d’exercice et la spécificité de l’établissement de formation (programme
d’étude et mode d’enseignement), et la motivation de l’élève liée à ses conditions de vie.
De l’évaluation formative à l’évaluation formatrice
L’évaluation formative est présentée comme celle qui est centrée sur la gestion des
apprentissages. Comme précisé dans le chapitre précédent, elle est dite « facilitatrice » de
par ces trois aspects qui la caractérisent au regard de l’apprentissage chez l’élève : fonction
d’aide, fonction informative et fonction de régulation.
Quand la régulation se fait par l’élève par anticipation des attentes du professeur,
G. SCALLON37 définit ce phénomène comme « l’évaluation formatrice » dont le principe a
été repris par NUNZIATI38 : «l’évaluation formatrice est l’appropriation par les élèves des
outils d’évaluation des enseignants, et la maîtrise des opérations d’anticipation et de
37 SCALLON.G (2004), L’évaluation des apprentissages dans une approche par compétences, De Boeck 342 p 38 NUNZIATI. G (1990) Pour construire un dispositif d'évaluation formatrice. Cahiers pédagogiques n° 280
26
planification de cette évaluation ». L’évaluation formatrice fait donc référence aux théories
socioconstructivistes notamment la métacognition.39.
Charles HADJI précise que l’évaluation formatrice c’est : « évaluation qui, en fonction de
l’idée que seul peut vraiment réguler son activité d’apprentissage, et de la prise en compte
de l’importance de la représentation des buts à atteindre, vise l’appropriation par l’apprenant
des critères de réalisation du produit et d’appréciation de la production, l’activité didactique
se centrant pour cela sur des tâches concrètes et non sur des objectifs formels »40.
Michèle GENTHON41 a différencié, dans le dispositif d’apprentissage les régulations
externes effectuées par l’enseignant, des régulations internes effectuées par l’apprenant par
l’autorégulation. L’élève devient acteur de son apprentissage et de son évaluation (auto-
évaluation) qui prend alors une dimension formatrice puisque l’élève devra s’approprier la
démarche évaluative.
L’évaluation formatrice peut être alors définie comme l’identification d’objectifs et de critères,
pour aider l’élève à distinguer les attendus au terme de l’action pédagogique et ainsi l’aider à
s’approprier les critères d’évaluation.
En conclusion
Nous pouvons dire que les pratiques et habitus évaluatifs ont évolué avec les courants
pédagogiques pour devenir progressivement partie intégrante et aide à l’apprentissage.
Ces changements se sont opérés de manière simultanée avec l’évolution des pratiques
d’enseignement. En France, la mise en œuvre de l’évaluation à partir de socles de
compétences (socle de compétences et connaissances pour les élèves en collège ; les dix
compétences pour l’enseignant) en est un exemple significatif.
Cependant, parler de pratiques évaluatives nous oblige à parler des acteurs impliqués et du
contexte d’application.
Dans les chapitres suivants, nous parcourrons l’historique de la formation et de
l’enseignement professionnels de l’Europe à la France en s’arrêtant sur le contexte de
l’Académie de la Guadeloupe afin d’analyser les caractéristiques des pratiques évaluatives
en lien avec le contexte de l’enseignement professionnel dans ce département français
d’Outre-mer. 39 La métacognition désigne l'analyse que l'apprenant fait de son propre fonctionnement intellectuel. La métacognition renvoie aux activités mises en œuvre pour exécuter une tâche et à l'ajustement de ces activités (gestion de l'activité mentale). La métacognition c'est une compétence à se poser des questions pour se planifier, s'évaluer constamment avant, pendant et après une tâche pour se réajuster au besoin. Il s'agit de prendre conscience de ses méthodes de pensée et de réguler ses propres processus de pensée 40 HADJI C. (1990), L’évaluation règles du jeu, ESF p.187 41 M. GENTHON a fait sa thèse sur les transferts dans le champ de psychologie cognitive avec des références piagétiennes
27
1.3. La formation et l’enseignement professionnels en Europe et en France
En passant d’un mode d’enseignement
à un mode de formation,
nous touchons très directement
les pratiques évaluatives
F. MULLER
Etudier le lien entre des pratiques et un système, nécessite de comprendre les fondements
historiques de ce système. Ainsi, l’analyse des pratiques évaluatives dans le système de la
formation et de l’enseignement professionnels se fera à travers l’étude historique de ce
système de formation.
La formation professionnelle peut être définie comme :
«L’acquisition des connaissances théoriques et pratiques pour l’exercice d’une profession»
Glossaire du Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario (SEFPO)
«L’ensemble des mesures adoptées en vue de l’acquisition ou du perfectionnement d’une
qualification professionnelle pour les travailleurs, prises en charge en France par l’État et les
employeurs » Dictionnaire
«La possibilité pour chaque salarié, tout au long de sa carrière, de développer, améliorer sa
qualification professionnelle, ou d’en acquérir une nouvelle» Guide du travail
«Le processus d’apprentissage qui permet à un individu d’acquérir le savoir et les savoir-
faire (habiletés et compétences) nécessaires à l’exercice d’un métier ou d’une activité
professionnelle»42.
Ce panorama de définitions nous permet de conclure que le regard porté sur la formation
professionnelle varie en fonction des axes d’entrée.
En France, la formation professionnelle par voie scolaire est assurée par les établissements
professionnels, technologiques, les Centres de Formation pour Apprentis (CFA) et les écoles
(d’ingénieurs et de commerce). Cependant nous ne devons pas négliger la place qu’occupe
la formation continue dans la formation professionnelle.
42 Article Formation professionnelle de Wikipédia en français http://fr.wikipedia.org/wiki/Formation_professionnelle
28
Nos propos porteront en particulier sur la formation professionnelle par voie scolaire en
lycées professionnels pour tenir compte de notre problématique de départ.
1.3.1 La formation et l’enseignement professionnels en Europe43
Dans ce chapitre nous dresserons un parcours historique, en lien avec les évolutions
technologiques et économiques (moyens et méthodes de production) en raison de l’impact
non sans conséquence de ces mutations sur les métiers donc sur la formation et par
conséquent sur les méthodes d’évaluation des formations.
Des origines communes
La formation et l’enseignement professionnels, à ses origines, en Europe à l’exception de la
Russie, étaient basés sur un modèle similaire, celui des guildes c’est-à-dire «des
associations qui regroupent à partir du XIIème siècle les artisans d’une même ville et
appartenant au même corps de métier ».
Ces guildes étaient régies par une hiérarchie stricte : apprenti, compagnon, maître. Elles
édictaient leurs propres règles et règlements qui définissaient les méthodes d’exécution des
ouvrages, les prix, les contrôles qualité des productions, et les exigences en matière de
formation d’apprentis et de compagnons.
Le titre de maître délivré par la guilde est la seule preuve écrite de la compétence.
Les «certificats d’apprentissage» marquaient la fin de la première étape de formation de la
période d’apprentissage.
Cette période d’apprentissage s’achevait par un examen spécialisé «donnant décharge» à
l’apprenti. Chaque corps de métier définissait les règles d’acceptation de l’ex-apprenti dans
la guilde.
La révolution industrielle
L’essor de l’industrialisation en Europe a entrainé la disparition des guildes et de
l’apprentissage traditionnel. Des bouleversements profonds sont provoqués sous la pression
des mouvements politiques.
Sous l’influence des organisations politiques, philosophiques, culturelles et religieuses, et
d’une industrialisation se produisant à des rythmes différents dans les pays, trois modèles
de base de formation prennent naissance en Europe pour répondre aux besoins
économiques :
43 Extraits de la conférence sur L’histoire de la formation et de l’enseignement professionnels en Europe dans une perspective comparative organisée par le Centre Européen pour le développement de la formation professionnelle (CEDEFOP) à Florence en octobre 2002 in Formation Professionnelle (août 2004). Revue Européenne (N° 32 mai)
29
o le modèle de l’économie de marché libérale en Grande-Bretagne,
o le modèle bureaucratique d’État en France,
o le modèle dual-corporatif en Allemagne
Ces modèles de formation constituent la base de tous les modèles de formation en Europe
au cours des siècles suivants.
Les modèles «classiques» de formation et d’enseignement professionnels
Différents modèles
Fonctionnement
Modèle libéral en
Grande Bretagne
Modèle réglementé par l’Etat
en France Modèle dual en Allemagne
Qui détermine
l’organisation de la
formation et de
l’enseignement
professionnels ?
Négociée « sur le
marché » entre les
représentants syndicaux et
patronaux et les
prestataires de la formation
et de l’enseignement
professionnel
L’Etat
Des chambres publiques
d’artisanat, organisées par
profession
Où se déroulent la
formation et
l’enseignement
professionnels ?
Plusieurs options : dans
les établissements
scolaires, et/ou les
entreprises, par
apprentissage électronique
Dans les établissements
spécialisés appelés « écoles de
production »
Dans le cadre d’une formation
en alternance prédéfinie entre
les entreprises et les écoles
professionnelles (modèle dual)
Qui détermine le
contenu de la formation
et l’enseignement
professionnels ?
Soit le marché, soit les
entreprises en fonction des
besoins du moment. Le
contenu n’est par prédéfini
L’Etat (en association avec les
partenaires sociaux). Il ne vise
pas essentiellement à refléter la
pratique par les entreprises mais
s’appuie sur une formation plus
générale et théorique
Les chefs d’entreprise, les
syndicats et l’Etat décident
d’un commun accord
Qui finance la formation
et l’enseignement
professionnels ?
Généralement les individus
qui en bénéficient.
Certaines entreprises
financent certaines
formations qu’elles
dispensent elles-mêmes
L’Etat impose une taxe aux
entreprises et finance la
formation et l’enseignement
professionnels mais uniquement
pour un nombre limité de
demandeurs par an
Les entreprises financent la
formation en entreprise et
peuvent déduire leurs
dépenses des impôts. Les
apprenants perçoivent un
montant prédéfini par contrat.
Les écoles professionnelles
sont financées par l’Etat
Quelles sont les
qualifications acquises
à l’issue de la
formation et de
l’enseignement
professionnels et
quelles possibilités ?
Il n’existe ni contrôle de la
formation, ni examens
finals reconnus
universellement
Il existe des diplômes d’Etat qui
permettent également aux
meilleurs diplômés de suivre les
études supérieures
Généralement reconnues, les
qualifications permettent à
ceux qui les détiennent
d’exercer le métier
correspondant et de suivre
des études supérieures
Source : CEDEFOP
Dans les établissements de formation professionnelle, des procédures visant à tester les
aptitudes de candidats à entrer en formation et exercer un métier se généralisent.
30
L’Allemagne fut le premier pays à mettre en place des tests psychotechniques réalisés par
des psychologues durant la première guerre mondiale pour tester les aptitudes des jeunes à
conduire un véhicule motorisé. Ces tests vont être maintenus après la guerre, et transférés à
d’autres domaines de formation.
En France sur le modèle allemand, des tests psychotechniques sont également utilisés pour
identifier les points forts des formés.
A partir des années 1950
Les nations européennes signent à Rome un traité instituant la Communauté économique,
européenne (1957). Cet accord va permettre de poser les bases communes en matière de
formation et enseignement professionnels.
La formation et l’enseignement professionnels en Europe vont être centrés sur la sécurité au
travail pour faire face au nombre croissant d’accidents notamment dans les mines.
La création de la commission permanente pour la formation professionnelle va
institutionnaliser les échanges entre les responsables de la formation et l’enseignement
professionnels.
Les échanges au sein de cette commission vont permettre de faire face aux différentes
problématiques liées à la formation professionnelle (pénurie de travailleurs qualifiés, montée
du chômage dans certaines régions, amélioration des conditions de vie des travailleurs…).
L’idée d’une politique commune en matière de formation professionnelle fait face à des
oppositions de certains pays par peur de voir leur modèle d’origine s’effondrer.
En 1975, la création du centre européen pour le développement de la formation
professionnelle (CEDEFOP) va ainsi assurer une réflexion sur l’enseignement :
connaissances, compétences et performances.
Les itinéraires communs à partir des années 1980
Cette réflexion aboutit dans les années 1980 à des programmes d’actions européens qui se
concrétisent en 1986 avec le programme « Léonardo Da Vinci », dont l’objectif est de
permettre aux formés des états membres grâce à la mobilité et à l’innovation, de développer
leurs compétences professionnelles tout au long de la vie. Ce processus se poursuit vers
une politique européenne ayant pour base les axes suivants :
o un cadre unique pour la transparence des compétences et des qualifications,
o un système de transfert d’unités capitalisables pour l’enseignement et la
formation professionnels,
o des principes et critères de qualité communs en matière d’enseignement et de
formation professionnels,
31
o des principes communs concernant la validation des apprentissages non formel
et informel,
o orientation tout au long de la vie.
Synthèse
La formation et l’enseignement professionnels en Europe ainsi présentés dans ce rapide
panorama, fait ressortir une construction marquée par une volonté de l’Europe de disposer
d’un cadre commun d’évaluation des compétences en matière de formations et
d’enseignement professionnels.
Il convient maintenant de croiser ce regard européen, avec l’approche de la formation
professionnelle en France.
1.3.2 De la formation professionnelle à l’enseignement professionnel en
France 44
L’enseignement professionnel en France est marqué par un ensemble d’interactions entre
les différents partenaires (entreprises, Etat, partenaires sociaux ...) en relation avec les
évolutions politiques, économiques, culturelles et pédagogiques.
La présentation que nous adopterons, permettra de comprendre l’influence des évolutions de
l’enseignement et de la formation professionnels sur l’évaluation.
De la Révolution au 19ème siècle
Comme en Europe, la révolution industrielle a entraîné en France la transformation des
moyens de production, une déstructuration de l’apprentissage et des moyens de régulation
de la formation professionnelle qui étaient assurés par les guildes (compagnonnage).
Néanmoins durant tout le 19ème siècle les débats sur la formation professionnelle ont été
intenses pour permettre de régler les problèmes de scolarisation et de formation des jeunes.
44 Les éléments dans ce chapitre sont issus des réflexions menées dans le cadre : - des travaux de Christian ENAULT – professeur de lycée et d’IUFFM de Reims présentés dans une synthèse réalisée à partir de fascicules édités par le CNED et de deux ouvrages : PELPEL et TROGER (2001). Histoire de l'enseignement technique. Editions Hachette éducation, Y. DEFORGE (1999). De l'éducation technologique à la culture technique. Editions ESF dans le cadre de l'IUFM et du DRESTI (Dispositif Ressource pour l'Enseignement des Sciences et Techniques Industrielles) - des travaux du CEREQ sur « Le partenariat social dans la formation professionnelle initiale en France (juin 2005), E. BENTABET, JL KIRSCH, S. STEFANI
32
La formation professionnelle au 19ème siècle
La formation professionnelle s’organise autour d’initiatives de l’Etat et de structures privées
car l’Etat et le ministère de l’instruction publique font appel aux organisations religieuses,
confessionnelles et aux communes pour l’aider à définir des politiques de formation.
Les initiatives de l’Etat : les premières écoles techniques sont crées en 1805 par Napoléon
(Ecole des Arts et Métiers à Compiègne) pour la formation d’ouvriers. Ces écoles forment les
fondements des actuelles écoles d’ingénieurs éclairés (en 1907 création du brevet
d’ingénieur).
Vers 1829 les Écoles Primaires Supérieures (EPS) sont créées et inscrites dans la loi
Guizot en 183345, elles s’intéressent à l’étude des sciences et de leurs applications dans
l’industrie. Deux branches se développent : la plus importante est dite générale, l’autre est
professionnelle et sera intégrée aux Écoles Manuelles d’Apprentissage.
En 1865, l’Enseignement Secondaire Spécial est créé avec un objet similaire d’assurer la
formation professionnelle, mais il évolue très vite vers un enseignement « moderne » plus
que technique. Le baccalauréat moderne en est créé en 1886.
Les premières Écoles Nationales d’Apprentissage (ENP) sont créées par l’État en 1886 et
1887 à Vierzon, Armentières et Voiron, dans le cadre des Écoles Manuelles
d’Apprentissage.
Le mouvement de scolarisation est bien engagé quand est créée une commission de
l’enseignement professionnel entre 1863 et 1865. Celle-ci doit proposer un projet de loi
après enquête pour nommer l’enseignement professionnel.
Des initiatives privées contribuent également à la construction du schéma de la formation
professionnelle en France :
o Initiatives religieuses : mise en place d’écoles professionnelles en 1827 pour
les enfants des usines pour les moraliser et leur donner une formation
professionnelle
o Initiatives associatives : création de cours professionnels pour les adultes
pour promouvoir la qualification des ouvriers
o Initiatives municipales : création de cours professionnels post scolaires dans
certaines grandes villes (1860 à Paris)
o Initiatives d’entreprises privées : création d’école pour ouvriers qualifiés par
des entreprises renommées (1837 Schneider, Claix, Christofle)
45 Du nom du ministre de l’Instruction publique, la loi GUIZOT de 1833, pose les bases d’un enseignement primaire plus large et plus accessible, notamment par l’obligation faite aux communes d’ouvrir une école et aux départements d’entretenir une école normale. Elle fixe également des contenus durables à l’enseignement primaire
33
Ce mouvement de scolarisation se fixe comme objectif de former les élites et ouvriers
qualifiés pour faire face à la concurrence industrielle.
Le mouvement de scolarisation à partir du 20ème siècle46
Cette période se caractérise par un manque de main d’œuvre qualifiée, ce qui a entraîné
une volonté des acteurs de parvenir à une validation de la formation professionnelle par les
diplômes professionnels.
En 1911 : création du certificat de capacité professionnelle qui deviendra CAP en
1919. La loi de 194347 confirme l’existence du CAP comme diplôme national. Le rôle de
l’État est clairement défini comme seul autorisé à animer la réflexion et fixer les
contenus des diplômes. De nombreux centres de formation professionnelle voient le
jour sous l’égide de l’enseignement technique et délivrant une véritable formation
professionnelle. Il s’agit là des ancêtres des lycées professionnels. La validation se fait
par des examens ponctuels en fin de formation.
En 1926 : création des brevets professionnels
Sous le régime de Vichy : standardisation des diplômes de CAP par le ministère de
l’instruction publique
A partir de 1944, période d’après-guerre : l’Etat prend l’initiative de lier formation et
qualification et conserve le monopole de délivrance des diplômes. La création des
commissions nationales professionnelles consultatives en 1946 va conduire à des
débats importants sur la formation professionnelle et aboutir jusqu’en 1955 à la
standardisation des diplômes et la normalisation des formations (contenus, horaires,
examens, diplômes).
En 1960 : l’organisation des formations professionnelles scolarisées se met en place.
Les centres d’apprentissage deviennent des Collèges d’Enseignement Technique (CET)
46 TROGER. V et BURCY. G (Juin 2000). Un siècle de formation professionnelle en France : la parenthèse scolaire ? Revue Française de pédagogie (N° 131, avril – mai) CEREQ « Le partenariat social dans la formation professionnelle initiale en France (juin 2005), E. BENTABET, JL KIRSCH, S. STEFANI 47 Il s’agit d’un texte promulguant un règlement général de tous les CAP industriels masculins
34
puis Lycée d’Enseignement Professionnel (LEP) et enfin lycées professionnels (LP) en
1986. Ils assurent la formation des ouvriers et employés qualifiés.
En 1985, les formations de baccalauréats professionnels voient le jour à la suite de la
crise de la formation professionnelle avec la mise en place par les entreprises de
nouvelles modalités d’organisation du travail. Un nouveau paysage de la formation
professionnelle se dessine : une formation qui s’appuie sur l’école pour la formation et
l’entreprise pour l’insertion. Les entreprises s’appuient sur le système éducatif pour leur
fournir un nouveau type d’ouvriers qualifiés.
Avec la création des baccalauréats professionnels apparaissent une nouvelle modalité
de délivrance des diplômes par contrôle en cours de formation où l’évaluation
certificative des compétences se fait par sondage par les formateurs au fur et à mesure
que les formés atteignent le niveau.
En 1992, la généralisation des stages en entreprise dans les formations
professionnelles et du contrôle en cours de formation sont effectives, sans pour autant
permettre une prise en compte plus concrète des compétences professionnelles au profit
des savoirs théoriques.
Les pratiques de formation et de validation des formations confirment cette prédominance
des connaissances théoriques. Une enquête réalisée par Patrick LECHAUX48, sur les
baccalauréats professionnels (Equipements et installations électriques et vente
représentation) a montré que l’importance des savoirs théoriques est une variable
fondamentale qui déterminent les pratiques et les formes de l’alternance.
Le la loi quinquennale du 20 décembre 1993 fait obligation de la possibilité d’offrir
à tous une formation adaptée répondant aux besoins du marché, pour faire face aux
bouleversements de l’enseignement professionnel liés à la montée du chômage.
Synthèse :
La formation professionnelle scolaire est une spécificité de la France. Malgré un
positionnement difficile par rapport à l’enseignement traditionnel, elle a pu être reconnue
dans le champ de l’enseignement secondaire par une prédominance tantôt de
l’apprentissage, tantôt de la formation scolaire, au gré des évolutions économiques.
48 LECHAUX P. (1995). Alternances et jeux des acteurs. L’exemple du baccalauréat professionnel. Formation Emploi, (n°49, janvier-mars, p. 47-68)
35
Les différents modèles de formation qui se sont succédés n’ont pas permis l’évolution des
pratiques en matière de formation, et d’évaluation vers la prédominance des compétences
professionnelles. Les pratiques d’évaluation basées sur le contrôle des connaissances sont
encore très présentes même de nos jours.
1.4 Le contexte de la formation et de l’enseignement professionnels en
Guadeloupe
La Guadeloupe, département français dispose d’un système éducatif édicté par les lois de la
République.
Néanmoins la situation géographique et le contexte historique de la Guadeloupe par rapport
à la France, doivent être visités de manière à mieux comprendre l’implantation et
l’organisation de la formation et de l’enseignement professionnels de ce département.
Vincent de GAUJELAC précise49 : «Tout individu est le maillon d’une l’histoire qui a
commencé avant lui, qui se transmet à travers lui et les siens [...]. C’est l’impératif
généalogique […]. L’histoire est agissante dans la mesure où elle conditionne les
comportements, les façons d’être, les attitudes, les personnalités ». L’accès au savoir, la
réussite scolaire, les performances des élèves sont donc dépendantes de facteurs
géographiques et historiques qui feront l’objet du chapitre suivant.
1.4.1 Les facteurs géographiques et historiques
Ces facteurs géographiques et historiques qui ont marqué l’Education en Guadeloupe se
caractérisent par un contexte archipélagique, une démographie spécifique, un multilinguisme
et un passé esclavagiste et colonialiste.
Les données géographiques
La Guadeloupe est à la fois une région monodépartementale de l’Outre-mer français et une
région ultrapériphérique européenne, située dans les Amériques. Elle forme un archipel
comprenant huit îles dont la Grande-Terre (à l’est) et la Basse-Terre (à l’ouest), sont les
deux principales îles. Quatre îles, considérées comme les dépendances de la Guadeloupe
continentale, sont situées tout autour de la Basse-Terre et de la Grande-Terre :
o les îles des Saintes à quelques 10 km au sud-est de Basse-Terre, composées de
deux îles principales (Terre-de-Haut et Terre-de-Bas) et de six îlots inhabités,
49 GAUGELAC .V (1987), La névrose de classe Trajectoires sociales et conflits d’identités. Hommes et Groupes
36
o l’île de Marie-Galante à 40 km au sud-est,
o les îles de la Petite-Terre au sud-est de la pointe de Grande-Terre, qui constituent
une réserve naturelle et restent inhabitées
o l’île de La Désirade à l’est de Grande-Terre.
Jusqu’en 1997, ce département français était découpé en trois arrondissements (Basse-
Terre, Pointe-à-Pitre et Saint-Martin/Saint-Barthélemy). Depuis le 15 juillet 2007, les îles de
Saint-Martin et de Saint-Barthélemy ont acquis le statut de collectivités d’Outre-mer et ne
font plus partie de la Guadeloupe.
Cette dimension archipélagique prend un caractère particulier sur le système éducatif. La
gestion de l’enseignement se fait sous l’autorité hiérarchique du Recteur d’Académie pour
les deux îles principales, les dépendances et les deux collectivités d’outre-mer qui sont
restées sous la compétence de l’Académie.
Il en résulte une double insularité en raison de l’éloignement à la fois de l’autorité nationale
et de l’autorité locale des dépendances et des collectivités. Ce qui engendre de fortes
contraintes qui pèsent sur l’organisation de l’enseignement dans sa globalité : gestion
administrative des élèves et des personnels, formation des personnels, organisation de
l’évaluation certificative, déplacements de personnels.
Les données démographiques
Au 1er janvier 2011, la population française dépasse pour la première fois les 65 millions
d’habitants : 63,1 millions de personnes vivent en France hexagonale50 et 1,9 million dans
les départements d’outre-mer (DOM) et 795 000 habitants dans les collectivités d’outre-mer
(Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et
Futuna, Saint-Martin et Saint-Barthélemy).
Au 1er janvier 2010, la population de la Guadeloupe est estimée à 404 400 personnes.
Depuis 1999, la population augmente en moyenne de 0,4 % par an. La particularité est le
pourcentage important de jeunes (28,1 % de la population ont moins de 18 ans en 2008). 51.
La Guadeloupe est la troisième région la plus jeune en France après la Guyane et la
Réunion. Ce pourcentage de jeunes détermine le nombre élevé d’établissements de
50 On parle de France métropolitaine ou de France hexagonale pour la différencier de ses autres territoires 51 Source INSEE : estimation de la population et statistiques de l’état civil
37
formations générale, professionnelle et technologique dans l’Académie (32 lycées publics et
privés généraux, technologiques et professionnels).
La population en Guadeloupe se caractérise également par :
o des origines ethniques diverses52
72 % des guadeloupéens sont afro-caribéens, 14 % sont indo-caribéens, 9 % sont de type
européen, 2 % de la population est originaire du Moyen-Orient, enfin les autres ethnies
représentent près de 3 % des habitants.
o une diversité de langues maternelles
Étant donné l’absence de statistiques officielles, les estimations d’ethnologues53, sur une
population de 444 515 habitants
Langue Locuteurs Pourcentage
Créole guadeloupéen 430 000 96,3 %
Créole haïtien 12 000 2,3 %
Français 7 300 1,36 %
Anglais 200 0,04 %
Les données linguistiques
Le multilinguisme dans l’Académie prend plusieurs formes : les langues le plus couramment
utilisées sont le français, le créole guadeloupéen54 comme langue maternelle, et les autres
créoles des populations immigrées. Un bilinguisme français/créole est le plus fréquemment
constaté.
Les européens, majoritairement originaires de la France hexagonale utilisent pour une très
grande part que le français. Cependant certains comprennent la langue créole sans pouvoir
la parler.
Il convient donc, pour analyser l’effet de ce multilinguisme, de distinguer la situation des
dépendances et de la Guadeloupe proprement dite :
52 Les statistiques basées sur l'origine ethnique étant interdites en France, les données sur la composition de la population sont de simples estimations 53 Source internet : http://. www.ethnologue.com 54 Dans une proportion variant entre 93 % et 96 % de la population
38
o L’île de Saint-Martin a été réquisitionnée lors de la Seconde Guerre
mondiale par les États-Unis (construction d’un aéroport militaire), ce qui
contribua à angliciser la population de l’île. De ce fait, on note un
multilinguisme français/créole/anglais dans cette collectivité conforté par
l’appartenance à la Hollande d’une partie de l’île.
La majorité des insulaires de Saint-Martin parle « l’anglais des îles » c’est-à-
dire une variété d’anglais caraïbéen comme langue maternelle. Le français
demeure la langue de l’école, mais c’est l’anglais standard qui demeure la
langue véhiculaire dans toute l’île, qui sert d’instrument de communication
efficace entre les quelques 80 ethnies.55
La forte migration de populations hispanophones sur cette île, durant ces
dernières années, a renforcé ce multilinguisme.
o L’île Terre-de-Haut (aux Saintes) est composée majoritairement (à 90 %)
de « Blancs-Pays », ceux-ci étant les descendants des colons bretons,
normands et poitevins arrivés vers les années 1648. Dans cette île où très
peu d’esclaves ont été importés du fait de l’économie basée principalement
sur la pêche, la population saintoise est restée « blanche» et parle le créole
comme langue maternelle.
o En Guadeloupe continentale (Grande-Terre et Basse-Terre) la répartition
des groupes ethniques conduit au schéma suivant : le créole comme langue
maternelle, le français plus qu’une langue seconde. On peut conclure que ce
sont bien en fait deux langues maternelles qui se côtoient.
Dans un objectif de prise en compte de la particularité des départements et collectivités
d’Outre-mer dans le système éducatif en France, du plurilinguisme en tant que méthode
d’enseignement, des dispositifs tels l’adaptation des programmes56, la langue et culture
55 Source EDUSCOL 56 Adaptation des programmes d'histoire et de géographie pour les enseignements donnés dans les DOM : note de service n° 2000-024 du 16/02/2000
39
régionale (LCR) et l’introduction du créole langue étrangère dans l’enseignement57 ont été
préconisés ces dernières années par le ministère de l’éducation nationale.
Ces expériences ont été relayées au sein de l’Académie par la mise en œuvre non
systématique de ces dispositifs (5 % des élèves bénéficient d’un enseignement du créole
selon les modalités suivantes : un dispositif d’information et de sensibilisation dans le cadre
du dispositif LCR, un dispositif d’apprentissage du créole langue vivante étrangère58).
Des pratiques (en particulier chez les enseignants autochtones, les enseignants d’origine
européenne étant limités par l’insuffisance de maîtrise de la langue créole) qui consistent en
une alternance du français et du créole ou du français et de l’anglais, sont également
utilisées non systématiquement dans les méthodes d’apprentissage et dans les pratiques
d’évaluation. Cette stratégie est définie par Frédéric ANCIAUX dans ses travaux de
recherche comme «l’alternance codique» ou «code-switching»59. Il précise également
«Dans la Caraïbe, l’alternance codique français/créole pourrait constituer une stratégie
d’enseignement efficace en vue d’améliorer, d’une part, les apprentissages moteurs et
linguistiques, et d’autre part la relation pédagogique»60.
D’autres travaux viennent renforcer ce constat :
«Le recours au créole semble offrir une aide à la clarification des consignes, à la
participation des élèves, et à la mise en pratique des connaissances acquises»61.
«Le recours au créole engendre des apprentissages de type cognitif plus rapides et plus
performants»62.
« Des enquêtes ministérielles sur les dispositifs mis en place montrent que l’enseignement
multilingue a un impact positif sur l’acquisition des connaissances et des compétences :
épanouissement affectif et intellectuel des élèves,
développement des capacités de communication orale,
facilitation de l’entrée dans l’écrit,
maîtrise de la langue de scolarisation,
amélioration des acquisitions scolaires à long terme » 63.
57 L’article 21 de la loi no 84-747 du 2 août 1984 relative aux compétences des régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de la Réunion permet, un enseignement en langue régionale 58 Source EDUSCOL 59ANCIAUX F. (2007), Alternance codique en éducation dans la Caraïbe, Atelier de recherche sur l’enseignement du créole et du français, Institut de Recherche pour le Développement Université des Antilles et de la Guyane - Université d'Etat d'Haïti 60 Il fait référence ici de travaux réalisés sur l’enseignement de l’éducation physique et sportive 61GAUVIN A. (1977), Du créole opprimé au créole libéré, Paris L’Harmattan 62 DURIZOT JNO BAPTISTE P. (2001), Cultures et stratégies identitaires dans la Caraïbe, Paris l’Harmattan
40
Si l’on tient compte des 96,3 % (cf. tableau diversité de langues maternelles) de la population ayant
comme langue maternelle le créole, il en ressort l’importance de tenir compte de cette
alternance codique dans les stratégies d’apprentissage dans un contexte plurilingue qui
caractérise l’Académie de la Guadeloupe. Ainsi, l’occultation des difficultés pédagogiques
qu’entraîne l’enseignement presqu’exclusivement en langue française dans les
communautés Outre-mer, n’est pas un élément favorisant l’évolution de l’apprentissage
donc de l’évaluation.
L’apparition depuis une dizaine d’années de la «Créolité»64 qui lie la question de l’identité
culturelle à celle de l’identité linguistique serait également une piste à explorer pour diminuer
ces effets liés au multilinguisme et à un enseignement exclusif en langue française.
L’influence de l’histoire
L’histoire de la Guadeloupe est en relation avec celle des Antilles : la colonisation
européenne et la période esclavagiste, pratiquées durant trois siècles par les Espagnols, les
Anglais, les Français et les Hollandais.
o Des amérindiens à la colonisation française
Vers 300 ans avant notre ère, les Arawaks qui peuplèrent la Guadeloupe furent décimés par
un autre peuple amérindien, les Caraïbes.
Les Caraïbes ou Kalinas seront eux-mêmes décimés dans les vingt premières années de la
colonisation française de la Guadeloupe, qui débuta en 1635 lorsque le cardinal de Richelieu
autorisa la Compagnie des Iles d’Amérique à coloniser les Antilles.
Deux Français65 accompagnés de quatre religieux de l’ordre de Saint Dominique choisis par
les soins de Richelieu et de 400 colons engagés par contrat, débarquèrent à la Guadeloupe
(continentale) et en prirent possession. Ils livrèrent aussitôt une guerre sans merci aux
Caraïbes, qui dura de 1635 à 1639 et se conclut par un traité de paix avec les derniers
63 Source EDUSCOL 64 Ce mouvement littéraire est apparu à la fin des années 80. Son fondement conceptuel repose sur un manifeste : "l'éloge de la Créolité" écrit par J. BARNABE, Patrick CHAMOISEAU et Raphaël CONFIANT. Il s'agit de poursuivre par le biais de l'écriture et du langage, la recherche identitaire entamée par la Négritude et l'Antillanité. La démarche intègre l'histoire des Antilles et l'imbrication des différents peuples qui sont arrivés, volontairement ou pas. La Créolité rejette l'unicité, l'universel, la pureté et la transparence. Elle prône la diversité, la pluralité des appartenances pas seulement africaines ou européennes, pluralité dans un vivre ensemble.
65 Charles Liénart de L’Olive et Jean Duplessis d’Ossonville, gentilshommes normands et fidèles lieutenants de d'Esnambuc, L'Olive souhaitait posséder une île bien à lui. Il s'associa avec du Plessis pour la réalisation de cet ambitieux projet.
41
indiens caraïbes qui acceptent alors de quitter l’île pour s’installer sur l’île voisine de la
Dominique. Ce traité de paix favorisa l’augmentation de la population.
Les années qui suivirent, la Guadeloupe fut occupée tantôt par les français, tantôt par les
anglais, tantôt par les espagnols, et tantôt par les hollandais. Des nobles s’installèrent en
Guadeloupe, aux côtés des artisans et de paysans. L’enseignement sur l’île pour les petits
habitants était assuré par les religieux alors que les nobles envoyèrent leurs enfants en
France pour être scolarisés.
o L’esclavage et son abolition
Les colons français tentèrent alors diverses cultures comme le tabac, l’indigo, et le café puis
la culture intensive de la canne à sucre faisant ainsi appel à une main d’œuvre d’esclaves.
Dès 1642, ils acheminent des esclaves noirs venant d’Afrique de l’Ouest jusqu’aux Antilles
pour développer la production de sucre de canne.
En 1685, le Code noir fut proclamé de manière à réglementer le régime de l’esclavage et
préciser les devoirs des maîtres et des esclaves. Bien que ce code ne traitât pas des
questions de langue, il dépouillait l’esclave de toute son identité.
Ce Code noir, resta en vigueur dans toutes les Antilles et en Guyane française jusqu’en
1848 (date de l’abolition définitive de l’esclavage par la France)66.
Durant cette période esclavagiste, il est à noter le rôle des missionnaires religieux dans
l’instruction des esclaves. En 1837, dans la perspective d’une émancipation générale qui
paraît désormais de plus en plus inévitable, les frères de l’Instruction chrétienne de Ploërmel
se voient confier par l’État l’instruction publique à la Guadeloupe : il s’agit d’éduquer les
futurs libérés.
Les maîtres s’opposaient à cette instruction mais aussi à l’instruction religieuse approfondie
pour les esclaves, par peur de la diffusion d’une éducation. Ils refusaient ainsi d’accorder le
temps libre aux esclaves. Néanmoins, seules les communications verbales étaient
autorisées par les maîtres entre les missionnaires et les esclaves : cantiques et autres
chants religieux. Par peur des colons, les missionnaires restent peu actifs, certaines actions
sont tout de même menées (distribution de billets contenant les rudiments de la religion,
usage de répétiteurs noirs dans chaque habitation pour faire la prière).
Nous pouvons ainsi nommer le rôle joué par le Père LABAT dans l’instruction des
esclavages en utilisant les plus anciens comme instructeur des nouveaux.
66 Le décret du 27 avril 1848 abolit l’esclavage. On estime qu’entre 1650 et 1850, la France aurait importé 290 000 esclaves en Guadeloupe.
42
A l’abolition de 1848, l’esclavage continua sous une autre forme lorsque fut imposé le code
de l’Indigénat67. Grâce aux pratiques discriminatoires imposées par ce Code, les Blancs
continuèrent de jouir de privilèges considérables.
La suppression de l’esclavage entraîna l’importation entre 1854 et 1885, des immigrants
indiens «libres» provenant des comptoirs de l’Inde pour permettre le fonctionnement de
l’économie sucrière68 .
L’abolition s’accompagna également d’une large diffusion de l’instruction pour les
« nouveaux libres ». Sous l’impulsion des révolutionnaires, un décret du 27 avril 1848 ouvre
droit à un enseignement élémentaire gratuit et laïc pour les filles et les garçons. Les
ecclésiastiques, qui peuvent enfin approcher de manière régulière la majorité de la
population dont les noirs libres, continuent leur évangélisation selon leur idéologie
« l’éducation ne peut être que chrétienne». Malgré ce vent de liberté et encore longtemps
après l’abolition, l’écriture continue à être transmise clandestinement par les Noirs lettrés, et
toujours dans le cadre de l’exercice des chants religieux. En effet, le système scolaire confié
aux frères Ploërmel reste peu développé en raison de la reproduction des inégalités entre la
bourgeoisie désireuse de conserver ses avantages et les nouveaux libres constituant la
bourgeoisie noire souhaitant accéder à l’éducation. En août 1902, un nouveau décret étend
l’obligation, la gratuité et la laïcité de l’enseignement scolaire.
La formation d’une intelligentsia de couleur se développe également : les nouveaux libres,
cherchent à se marier, à faire leur première communion, à s’instruire. Les places importantes
dans la société post-esclavagiste occupés par les premiers noirs libres étaient dans la
politique, l’enseignement, la médecine, le domaine de la justice. Dès 1848, un noir
« nouveau libre » fut nommé député de la Guadeloupe.
L’intelligentsia noire s’attache à la « réhabilitation de la race noire » pour qu’elle retrouve sa
dignité. Le concept de « négritude » voit le jour par des groupes d’intellectuels
presqu’entièrement masculins. La négritude, aux Antilles, a servi à ouvrir le passage pour
67 Le Code de l'indigénat fut adopté le 28 Juin 1881. Puis c'est en 1887 que le gouvernement français l'imposa à l'ensemble de ses colonies. En général, ce code assujettissait les autochtones et les travailleurs immigrés aux travaux forcés, à l’interdiction de circuler la nuit, aux réquisitions, aux impôts de capitation (taxes) sur les réserves et à un ensemble d’autres mesures tout aussi dégradantes. Il s'agissait d'un recueil de mesures discrétionnaires destiné à faire régner le «bon ordre colonial», celui-ci étant basé sur l'institutionnalisation de l'inégalité et de la justice. Ce code fut sans cesse «amélioré» de façon à adapter les intérêts des colons aux «réalités du pays». Le Code de l'indigénat distinguait deux catégories de citoyens: les citoyens français (de souche métropolitaine) et les sujets français, dont les Antillais. Les sujets français soumis au Code de l'indigénat étaient privés de la majeure partie de leur liberté et de leurs droits politiques; ils ne conservaient au plan civil que leur statut personnel, d'origine religieuse ou coutumière. 68 Réputés dociles, ils furent 45 000 à venir travailler en Guadeloupe pour une durée, en principe, de cinq ans. Beaucoup d’entre eux restèrent sur place à la fin de leur contrat, fondèrent une famille et devinrent bientôt des Guadeloupéens à part entière, tout en conservant leur religion et leurs habitudes culinaires, mais perdirent leur langue pour adopter le créole guadeloupéen
43
ceux qui voulaient s’éloigner de toute dépendance culturelle, politique et économique qui
n’ait pas été « purement »antillaise.
Cette quête de l’authenticité a produit l’Antillanité, gardant en éveil une claire conscience des
apports des cultures européennes et africaines.
o .Vers la départementalisation
La Troisième République de 1870 marqua un réel progrès, car non seulement le suffrage
universel masculin fut institué, mais l’enseignement public obligatoire, laïc et gratuit, fut
étendu à tous les Guadeloupéens en 1881.
Toutefois, la situation des classes ouvrières resta précaire, car la scolarisation des enfants
impliquait des dépenses supplémentaires auxquelles les parents ne pouvaient pas toujours
faire face. En réalité, le niveau de vie des Noirs et immigrés indiens ne connut une
amélioration significative que vers le milieu du XXème siècle.
Le 19 mars 1946, l’Assemblée nationale française adopta à l’unanimité la loi dite de
«l’assimilation», qui transformait les « quatre vieilles » colonies (la Réunion, la Guadeloupe,
la Martinique et la Guyane française) en départements français, ce qui représente la
reconnaissance de l’égalité entre les « vieilles colonies » et la métropole.69
Les îles sont administrées par des préfets chargés de l’application des lois de la République
et non plus par des administrateurs coloniaux.
Cette situation est le début de progrès non négligeables au niveau de l’éducation. La Loi de
programme de 1960 pour les départements d’outre-mer prévoit un plan triennal
d’équipements et d’expansion économique de plus de 400 millions de francs (61 millions
d’euros) dont près de 70 millions de francs (10,7 millions d’euros) pour l’éducation nationale.
Les années qui suivent sont celles de la mise à niveau en matière d’infrastructures et de
scolarisation, des départements d’outre-mer par rapport à la France hexagonale. Les lois de
décentralisation donnèrent les pleins pouvoirs aux communes, départements et régions
concernant la construction et la dotation des établissements (équipements, budget de
fonctionnement).
69 Depuis la loi du 19 mars 1946, la Guadeloupe est dotée d’un Conseil régional et d’un Conseil général.
44
Synthèse
Ce panorama nous permet ainsi de dégager la complexité du système éducatif en
Guadeloupe qui se caractérise par les aspects suivants :
o un contexte sociolinguistique,
o une insularité, renforcée par le caractère archipélagique,
o « une francisation »70 de l’éducation,
o un brouillage des représentations.
Le contexte géographique et historique de la Guadeloupe a fortement influé sur la mise en
place de l’enseignement malgré son appartenance à la France hexagonale. Il convient donc
d’analyser le développement de la formation et de l’enseignement professionnels par rapport
aux modèles de l’Europe et de la France.
1.4.2 Caractéristiques de la formation et l’enseignement professionnel en
Guadeloupe
Ce chapitre s’attachera à présenter quelques principes généraux et des spécificités
académiques de la formation et de l’enseignement professionnels.
S’agissant des spécificités de l’Académie, nous avons fait le choix de travailler à partir des
données de l’année scolaire 2009/2010 en ne tenant compte que des établissements publics
par manque de données académiques suffisantes relatives aux établissements privés sous
contrat, et en raison de la non stabilité des chiffres de l’année scolaire de 2010/2011.
Contexte
L’histoire de la formation et de l’enseignement professionnel en Guadeloupe coïncide avec la
mise en place d’actions en faveur de l’enseignement secondaire et d’initiatives locales que
nous nous proposons de relater.
L’enseignement secondaire débuta le 10 janvier 1882 par décision d’une commission
spéciale qui détermina les conditions d’établissement du lycée. En mars 1882, le lycée de la
Guadeloupe prit le nom du Lycée Carnot. Des initiatives privés comme le « cours Michelet »
qui fut fondé par quelques professeurs du lycée Carnot, regroupés autour de N. DE
KERMADEC, ont permis la scolarisation dans le secondaire.
Dans ce contexte, une école professionnelle est annexée au Lycée Carnot. Les difficultés
d’organisation qu’elle rencontre amène les autorités de l’époque à voter un arrêté local du
70 Le terme « francisation » désigne une transformation visant à adopter l'apparence française. Le terme est ainsi employé en linguistique (francisation de mots), en sociologie et éducation (francisation des non-francophones)
45
1er octobre 1934 qui crée des centres d’apprentissages fonctionnant avec des artisans
spécialisés qui assurent la formation pratique et des instituteurs qui dispensent les cours
théoriques.
Le «cours Michelet» subventionné par la colonie, continue à fonctionner et accueille des
élèves de niveau certificat d’étude. Il propose des cours autour du travail du bois et du fer.
D’autres centres se développent dans la Guadeloupe en 1935 (Capesterre, Le Moule…), il
se fait alors une sélection des meilleurs élèves orientés vers les centres d’apprentissage.
Parallèlement des formations pour les filles sont créées et délivre le brevet d’artisanat
féminin.
Le « cours Michelet » va devenir propriété de la colonie en 1941. En décembre de la même
année, la société civile des « cours Michelet » est dissoute. L’établissement devient alors
public et devient lycée par décision des autorités en septembre 194471
Il convient aussi de citer d’autres initiatives privés tel l’institution Saint Jean BOSCO crée en
1935 par l’église catholique. Les jeunes adolescents accueillis sont placés dans des
entreprises et rentrent le soir où ils sont hébergés et reçoivent les premiers cours du soir :
lecture, écriture, calculs et autres activités ludiques. Des années plus tard (1943), l’institution
s’installe sur un autre domaine et y crée un complexe éducatif. La formation professionnelle
est dispensée par l’école technique qui prépare au Certificat d’Aptitude Professionnel et au
Brevet Elémentaire Industriel. En 1966, la formation professionnelle est de nouveau
transférée vers un autre centre appartenant à l’église72 et qui continue à ce jour à assurer de
la formation professionnelle.
La formation professionnelle dans l’Académie de la Guadeloupe est presqu’exclusivement
contrôler par l’’état. Des lycées professionnels voient progressivement le jour pour assurer la
qualification des jeunes.
Spécificités de l’Académie
L’Académie compte aujourd’hui 15 Etablissements Publics Locaux d’Enseignement : EPLE
(lycées professionnels ou sections d’enseignement professionnel au sein de lycées
polyvalents) qui préparent aux formations professionnelles de niveau V et niveau IV. Un
élève sur trois de l’enseignement public choisit la voie professionnelle comme voie de
71 Source : site du Collège Michelet – Académie de la Guadeloupe 72 Source : Site du diocèse de la Guadeloupe
46
formation73. A la rentrée 2009, 9000 élèves, toutes filières confondues, sont accueillis au
sein de ces établissements, soit 18 filières représentées dans l’Académie74. Une coloration
plutôt tertiaire des formations est à relever puisque qu’on note que le secteur des services75
regroupe plus de la moitié des effectifs. Ce qui correspond aux caractéristiques du tissu
économique de l’île.
Cette prédominance des formations relevant du commerce et des services
s’expliquerait par :
le peu de contraintes au niveau des surfaces d’enseignement et des équipements
nécessaires à l’ouverture des formations de ce type,
les spécificités du tissu économique industriel (non représentativité dans le
département de certains secteurs, nombre limité d’entreprises dans les secteurs
existants, typologie des entreprises : entreprises unipersonnelles ou très petites
entreprises de type familial, fragilité économique liée au faible potentiel, à l’insuffisance
de fonds propres et aux difficultés d’accès au crédit) qui ne favorise pas la formation
en entreprises des formés,
le coût élevé de certains plateaux techniques de formations dans le secteur
industriel,
Pour l’ensemble des filières, la répartition des élèves par niveau de formation se décline de
la manière suivante76 :
1 170 élèves en certificat d’aptitude professionnelle (CAP)77,
2025 élèves en brevet d’études professionnelles (BEP)78,
5 805 élèves en baccalauréat professionnel (BCP) dont 58 % d’entre eux sont
inscrits dans une spécialité des services.
73 JIOUNANDAN. E. (Juin 2010), DPET, Département Evaluation et Prospective, Rectorat de la Guadeloupe – INSEE : (Antiane N° 73) 74 Une filière se caractérise par un regroupement au sein d’une famille de métiers connexes de formations de niveaux différents 75Le secteur des services est généralement dénommé « secteur tertiaire ». Il recouvre un vaste champ d'activités qui va du commerce à l'administration, en passant par les transports, les activités financières et immobilières, les services aux entreprises et services aux particuliers, l’éducation, la santé et l'action sociale, la restauration et l'hôtellerie, définition de l’INSEE 76 JIOUNANDAN. E. (Juin 2010), DPET, Département Evaluation et Prospective, Rectorat de la Guadeloupe – INSEE : (Antiane N° 73) 77 Cinq spécialités concentrent à eux seuls 56 % des élèves : «agroalimentaire-alimentation- cuisine», «coiffure, esthétique » «accueil, hôtellerie, tourisme», «bâtiment : finitions», «métiers du bois». 78 Spécialités présentes «électricité, électronique», «secrétariat, «comptabilité, gestion», « spécialités sanitaires et sociales» «bureautique», restauration
47
Cette répartition tend vers les préconisations nationales qui sont de proposer pour la voie
professionnelle deux parcours de formation initiale sous statut scolaire (le niveau V avec le
CAP, le niveau IV avec le baccalauréat professionnel). Les chiffres de 2010 et les prévisions
pour la rentrée 2011 viennent confirmer cette situation puisqu’aucune formation de BEP ne
sera proposée à l’exception des fins de cycle, et une augmentation progressive des BCP se
poursuivra.
L’apprentissage, comme autre voie de formation professionnelle, représente 46 formations
professionnelles pour un effectif de 1325 élèves soit 14,7 % des formés. Il concerne
particulièrement les formations du bâtiment (57 % des formations) 79.
Cette opposition des types de formations dispensées sous statut scolaire (métiers de
service) et par apprentissage (formations du secteur des sciences et techniques industrielles
en particulier les métiers du bâtiment), se justifierait par une caractéristique régionale de
l’apprentissage. Toutefois, l’apprentissage s’est très peu développé par rapport aux autres
régions de la Métropole.
La formation professionnelle au sein de l’académie relève également d’établissements privés
soit sous contrat avec l’état, soit hors contrat.
Synthèse
La formation professionnelle en Guadeloupe malgré ses fondements différents par rapport
au modèle français, correspond aux mêmes critères que ceux de la France hexagonale :
une formation principalement scolaire sur un modèle étatique.
1.5 Le concept d’évaluation en Guadeloupe
Dans ce chapitre il est important de débuter notre réflexion en citant de nouveau les
invariants qui définissent les types d’évaluation «processus d’appréciation», « action de
porter un jugement », « processus de communication », « objectifs fixés », « prise de
décisions ».
Durant les années de traite, nous avons dit que les esclaves ont été privés de cette
possibilité de porter un jugement, et la seule représentation qu’ils avaient de l’évaluation
était liée à la valeur marchande.
Analysons, comment ces paramètres ont interféré sur les pratiques d’évaluation des
autochtones aujourd’hui ?
79 Source : Service Académique de l’Inspection de l’apprentissage, février 2010
48
1.5.1 L’approche de l’évaluation et la période esclavagiste
Dans ce chapitre, nous nous proposons d’analyser les pratiques d’évaluation dans le
contexte de la Guadeloupe, à travers une entrée historique de la période esclavagiste en vue
de déterminer l’influence de l’histoire sur les pratiques d’aujourd’hui.
La période esclavagiste fait référence à la traite qui se définit en bonne partie par l’existence
d’un échange, ou d’un commerce, qui fait référence à des marchands, des acheteurs, et de
la marchandise. Dans le cadre de la traite négrière aux Amériques, ce commerce qui se
déroulait en trois étapes prit le nom de commerce triangulaire ou traite Atlantique.
Les commerce entre les colonies et l’Afrique Noire via l’Europe, ont permis ainsi de ramener
des esclaves qui étaient soit vendus aux enchères soit échangés :
o dans un premier temps sur les côtes africaines contre des textiles bruts, des textiles
finis, des armes blanches, des armes à feu, des vins et spiritueux, des matières
premières brutes, des produits semi-finis ou finis, des articles de fantaisie et parures,
o dans un deuxième temps dans les colonies contre des produits tels le sucre, le café,
le coton, le cacao ramenés en Europe.
Dans une approche sociologique, A. LEVY80 précise que l’évaluation aurait pour but :
de classer «les objets» (biens matériels ou immatériels, prestations ou services,
personnes) en leur attribuant une note permettant de les comparer à d’autres
semblables sur une échelle hiérarchique établie
de déterminer ainsi leur valeur d’échange, c’est-à-dire leur prix, dans le cadre d’un
marché où tout s’échange et tout se vend ».
Si l’on croise cette définition avec deux éléments de la traite négrière et de l’esclavage que
sont le commerce triangulaire et le code noir, les aspects suivants en lien avec le rapport à
l’évaluation se dégagent :
Durant le commerce triangulaire, les esclaves considérés comme un bien se trouvent
relégués à l’état d’objet faisant ainsi office de marchandise.
L’évaluation de l’esclave à sa capture en Afrique reposait sur l’appréciation de sa seule
valeur marchande (en lien avec son état général de santé, sa robustesse...) en concurrence
avec la marchandise européenne ramenée par les négriers européens.
80 LEVY.A, Penser l'événement Pour une psychosociologie critique, Cahiers de Psychologie politique
49
Le commerce triangulaire contribua ainsi à la dévalorisation du noir qui n’avait que comme
seul référence par rapport à un jugement de valeur que l’on pouvait avoir de lui, sa valeur
marchande. Sur les plantations ce critère était encore le seul utilisé quand le maître voulait
vendre un esclave.
Porter un jugement ou une appréciation se réduisait alors pour l’esclave à donner une valeur
dans un contexte organisé et marchand. La notion de jugement ne pouvait se concevoir
sans qu’il ait un intérêt : quand un maître sur une plantation parlait de son esclavage en
vantant ses qualités c’était toujours dans un contexte commercial, c’est-à-dire de vente pour
tirer meilleur profit.
Le code noir édicté en mars 1685 pour régir les droits et devoirs des maîtres et des esclaves
fournissait une base légale pour le fonctionnement dans les colonies. Ce code composé de
60 articles contribua à la déshumanisation du noir.
Deux articles ont retenu notre attention, en lien avec le concept d’évaluation. Ces articles
dépossédaient le noir esclavage de la possibilité de porter tout jugement de valeur dans tous
les aspects de la vie quotidienne.
Art. 30 : «Ne pourront les esclaves être pourvus d’office ni de commission ayant quelque
fonction publique (…) pour gérer et administrer aucun négoce, ni être arbitres, experts ou
témoins, tant en matière civile que criminelle, et en cas qu’ils soient ouïs en témoignage, leur
déposition ne servira que de mémoire pour aider les juges à s’éclairer d’ailleurs, sans qu’on
en puisse tirer aucune présomption, ni conjoncture, ni adminicule de preuve ».
Article 31 : «Ne pourront aussi les esclaves être parties ni être (sic) en jugement en matière
civile, tant en demandant qu’en défendant, ni être parties civiles en matière criminelle (….) ».
Cette situation, aurait ainsi crée une relation d’interdépendance avec le maître, qui aurait
abouti à ce que la parole de l’esclave ne prenne de sens qu’à travers l’appréciation du
maître. Sur les plantations, quand il lui était fait un compliment, l’esclave devait avoir l’accord
son maître avant d’acquiescer ou d’ignorer.
1.5.2 L’influence de l’histoire sur les pratiques évaluatives d’aujourd’hui
Nos propos s’appuieront sur notre vécu à la fois d’originaire des Antilles, et d’acteur social
dans la société antillaise dans le domaine de l’éducation faute de référents précis sur cet
aspect.
Ainsi, il n’est pas rare d’entendre des expressions à forte connotation historique quand il
s’agit, soit de porter une appréciation, soit de parler de la relation dans l’acte d’évaluation.
50
Nous nous orientons aux expressions entendus dans le cadre de l’enseignement en nous
limitant à quelques unes bien significatives de cette influence de l’histoire :
o « le professeur a mis une mauvaise note car il ne m’aime pas »,
o « je ne veux pas décevoir mon professeur par mon travail… »,
o « Le professeur croit m’acheter en me donnant des points supplémentaires, ou en ne
me donnant pas de sanctions pour telle ou telle faute »,
o « Cet élève ne vaut rien… »,
o « Parler le petit nègre ».
Ces phrases sont l’expression :
o de la subsistance d’une relation affective dans les relations entre évalué/ évaluateur
qui renvoie à la relation maître/ esclave qui conduit soit à la volonté de plaire soit au
refus et/ou la remise en cause de toute autorité
o de la persistance de la représentation marchande de l’évaluation qui consiste encore
à dévaloriser un individu et à le comparer à un bien matériel.
o de cette méfiance dans la relation entre évalué/évaluateur, en raison d’une
suspicion par l’évalué, d’une recherche d’un quelconque intérêt par l’évaluateur
adoptant une attitude prévenante
1.6 Hypothèses de travail
Cette approche conceptuelle que nous venons de développer nous a permis une lecture des
éléments essentiels en lien avec la définition et l’historique de l’évaluation, de la formation
et de l’enseignement professionnels.
A partir de la question principale qui débute notre recherche « Quelles sont les
caractéristiques des pratiques évaluatives dans les lycées professionnels de l’Académie de
la Guadeloupe, pour les filières en sciences et techniques industrielles ? », l’hypothèse que
nous faisons émerger au croisement de ces concepts est la suivante :
«Les pratiques évaluatives dans les filières professionnelles en Sciences et
Technique Industrielles se caractériseraient comme un rituel qui viserait plutôt à
mesurer les connaissances et les compétences, qu’à permettre aux formés de
progresser dans les apprentissages»
51
52
2.1 Champ de l’étude
Dans ce chapitre, nous exposerons les caractéristiques académiques des formations
relevant du domaine du génie électrique pour le niveau V et IV dans les lycées
professionnels ou les Sections d’Enseignements professionnels et de l’échantillon retenu
pour notre étude.
2.1.1 Formations relevant des métiers du génie électrique
o Nature des formations
Les métiers du génie électrique regroupent les formations en électronique et en
électrotechnique. L’effectif d’élèves est d’environ 700, soit 7,8 % de la population scolaire de
l’Académie, réparti comme suit :
34,5 % en électronique
65,5 % en électrotechnique
o Répartition par niveau de formation
Les niveaux de qualification représentés :
20 % de niveau V (BEP et CAP)
80 % de niveau IV (baccalauréat professionnel)
o Etablissements de formations
L’implantation des ces formations dans les 10 établissements de l’Académie permet une
bonne couverture du territoire :
8 établissements en Guadeloupe continentale soit 4 lycées professionnels et 4 sections
d’enseignement professionnel intégrés dans des lycées polyvalents,
1 section d’enseignement professionnel sur la dépendance de Marie Galante,
1 section d’enseignement professionnel sur la Collectivités d’Outre Mer de Saint Martin.
2.1.2 L’échantillon d’étude
Le choix de cet échantillon s’est fait en relation avec les corps d’inspection.
o La population scolaire
La typologie des élèves a été dressée à partir des données fournies par les services de vie
scolaire des établissements et les services académiques.
53
Les caractéristiques générales qui se dégagent de cette population scolaire, ont été retenues
d’un point de vue global :
Un âge moyen d’entrée en 2nde de 15,2 ans
Une répartition par sexe qui dénote d’une filière à majorité masculine : 15 % de filles et
85 % de garçons
Une catégorie socio professionnelle des parents qui correspond au profil des élèves
accédant en lycée professionnel (chiffres académiques : CSP moyenne : 36% d’élèves –
CSP défavorisée : 48,3 % d’élèves)
Un parcours scolaire classique de collège : + de 50 % des élèves sont issus d’une 3ème
générale (principalement des collèges limitrophes de l’établissement de formation
professionnelle)
3ème générale 65,53 %
3ème d’insertion 10,34 %
2nde technologique 24,13 %
Une affectation majoritaire sur le vœu 1 : 70 % des élèves ce qui caractérise le bon taux
d’attractivité de cette filière au niveau académique81.
Une poursuite d’études en brevet de technicien supérieur après leur formation de
baccalauréat professionnel envisagée à 75 % ce qui correspond à un choix d’orientation
réfléchi pour un grand nombre des élèves.
Un pourcentage de réussite aux évaluations d’entrée en 2nde compris en 60 à 98 % pour
79,3 % des élèves soit un niveau d’entrée en 2nde supérieur à la moyenne académique82.
Il en résulte donc un profil d’élèves qui possèderaient des prédispositions suffisantes pour
poursuivre un cycle de formation dans ce domaine professionnel.
Néanmoins, d’autres indicateurs non scolaires ont été signifiés par les équipes de
professeurs et qu’il est intéressant de relever :
faible motivation par rapport au travail malgré le choix d’orientation voulu et les capacités
intellectuelles réelles : 20%
attitude peu scolaire : dissipé et insolent : 36,6 %
81 Taux académique d’affectation sur le vœu 1 tout niveau confondu : 90 % : Données Service Académique de l’Information et de l’orientation 82 Données JADE : Taux académique des évaluations d’entrée en 2nd professionnel : 43,6 % (ramené à un taux global pour les disciplines français, mathématiques, anglais) des élèves ont un pourcentage de réussite compris en 60 à 98 %
54
o Le personnel enseignant
46 professeurs dispensent les enseignements auprès des élèves soit 93,5 % de
professeurs de lycées professionnels (PLP) et 6,5 % professeurs de lycées technologiques
(Certifiés). Les données concernant ces enseignants ont été recueillies auprès de
l’inspecteur chargé de la filière.
Typologie
Répartition/ tranche d’âge Répartition/ niveau de formation Répartition par statut
30 – 40 ans 41- 50 ans 51- 60 ans BTS Bac + 3 et plus % titulaires % contractuel
19,5 %
58 %
22,5 %
71 %
29 %
95,7 %
4,3 %
Soit un fort taux de titulaires, une population enseignante relativement jeune (77,5 % ayant
moins de 50 ans).
22 % des enseignants sont non créolophones et sont arrivés d’académies de la France
Hexagonale
100 % ont fait l’objet d’une évaluation pédagogique dans les cinq dernières années.
Relative stabilité des enseignants : 62 % n’ont pas changé d’établissement d’exercice
durant ces dix dernières années
Mode d’accès dans le corps d’enseignants majoritairement par voie de concours externe :
59,5 % contre 31% par concours interne et 9,5 % sur liste d’aptitude
Très bonne participation aux actions de formation continue : 92 %
A partir de ces données concernant notre échantillon, nous pouvons donc relever quelques
indicateurs correspondant aux formés et aux enseignants :
Elèves
Une population relativement jeune
Un niveau de formation satisfaisant à l’entrée en 2nde
Des capacités intellectuelles qui trouvent ses limites par rapport au manque de motivation et
une attitude peu scolaire
Enseignants
Une population enseignante relativement jeune avec un niveau de formation de base
acceptable.
Une part représentative d’enseignants non créolophone qui présente une propension à
discuter de leur spécialité.
Un suivi pédagogique régulier
55
2.2 Le recueil des données
Deux modes d’investigation ont été retenus pour le recueil des données pour notre
recherche : le questionnaire et la grille d’analyse.
Les enquêtes par questionnaire ont été limitées aux élèves et aux enseignants en
considérant que le cadre de la classe constituait le lieu privilégié d’appréciation de l’activité
d’évaluation. Nos investigations porteront sur des classes de CAP et de baccalauréat qui
constituent actuellement les deux seules voies de formation professionnelle même si au
lancement de notre enquête, il subsistait encore quelques rares classes de BEP.
L’utilisation d’une méthode d’analyse, d’observations de situations d’apprentissage et
d’évaluation, permet de procéder à un croisement d’informations. Nous avons fait le choix de
grilles d’analyse des rapports d’inspection et des documents d’évaluation d’épreuves de
certification par contrôle en cours de formation (CCF).
2.2.1 Les outils d’analyse
Les questionnaires
Les questionnaires ont été élaborés pour interroger les acteurs sur leurs pratiques et leur
représentation sur l’acte d’évaluer. Ce choix d’outil a été retenu car il offrait la possibilité
d’interroger le plus grand nombre d’acteurs. Deux questionnaires ont été réalisés :
un questionnaire élèves (annexe 1), qui repose sur des questions permettant de
relever le constat et les représentations de l’élève sur les pratiques d’évaluation de
l’enseignant,
un questionnaire professeurs (annexe 2) qui comprend deux parties : une partie portant
sur le contexte d’exercice, et une partie relative aux pratiques mise en œuvre par
rapport aux différents moments d’évaluation dans une situation d’apprentissage.
La grille d’analyse
Deux grilles ont été élaborées pour relever les pratiques d’évaluation mises en œuvre dans
le cadre :
des situations d’apprentissage décrites dans les rapports de visite élaborés par les
corps d’inspection, (annexe 3)
des épreuves de certification par CCF à travers les documents d’évaluation
renseignées par les professeurs (annexe 4)
56
2.2.2 La démarche
Nous avons travaillé sur un échantillon d’élèves et de professeurs en enseignement
professionnel et général sur l’ensemble des établissements dispensant des formations
relevant du domaine du génie-électrique.
Les questionnaires des enseignants ont été transmis et récupérés par le biais des
professeurs formateurs académiques en sciences et techniques industrielles.
136 questionnaires ont été distribués comme suit :
Retours
Disciplines d’enseignement
Distribués Nombre Pourcentage
Mathématiques sciences 30 4 13 %
Lettre histoire 30 8 26,6 %
Anglais 30 16 53,3 %
Electrotechnique / Electronique 46 15 32,6 %
Total
136
42
Le choix d’étendre l’enquête à l’enseignement général est dans un objectif de disposer
d’éléments de comparaison sur les pratiques en enseignement général et en enseignement
professionnel, nous permettant ainsi d’affiner notre analyse.
La passation du questionnaire aux élèves s’est faite par l’intermédiaire des professeurs
principaux et d’enseignement professionnel. Ils ont été complétés au libre choix des élèves
dans le cadre des activités de classe.
Notre bilan sera effectué qu’à partir des retours en raison du manque de fiabilité sur le
nombre réel de questionnaires distribués sur les 700 élèves scolarisés dans cette filière.
Electrotechnique Electronique
CAP Baccalauréat professionnel Baccalauréat professionnel
1ère année 2ème année 2nde 1ère Tle 2nde 1ère Tle
2 0 23 48 8 47 25 11
Soit un total de 164 sur 700 soit 23,4 % de réponses
Un dépouillement manuel des questionnaires suivi d’un traitement statistique en vue de
l’analyse et de l’interprétation est la stratégie retenue.
57
Compte-tenu du peu de réponses en classes de CAP, l’exploitation ne pourra être conduite
sur ce niveau de formation.
L’analyse des rapports d’inspection et des documents d’évaluation des épreuves par CCF,
ne concerne que les professeurs de l’enseignement professionnel.
La grille pour l’analyse des rapports d’inspection est établie avec les entrées suivantes :
contexte d’exercice du professeur, modalités d’évaluation, cohérence avec les objectifs
d’apprentissage, contenus de l’évaluation, type d’exploitation, modalités de correction.
Celle relative aux documents d’évaluation par CCF comporte les critères suivants :
identification des compétences évaluées, adéquation des indicateurs avec le barème,
cohérence de l’activité support avec les compétences
2.3 Traitement et bilan des investigations
La restitution de nos investigations sera organisée autour des trois items suivants en
s’appuyant sur les résultats présentés en annexe (annexe 4) :
L’état des pratiques enseignantes,
Les représentations sur l’acte d’évaluer,
Les relations entre les acteurs.
2.3.1 Etat des pratiques enseignantes
Le regard porté sur l’état des pratiques se fera à travers le bilan de la maîtrise des concepts,
des types et modalités d’évaluation et de correction, des fonctions de l’évaluation dans
l’apprentissage.
Maitrise des concepts
Les résultats des 42 retours de questionnaires émanant des professeurs nous indiquent que
l’approche conceptuelle de la notion d’apprentissage est non maîtrisée par les enseignants :
80 % des enseignants en enseignement professionnel (EP) n’ont pu proposer un classement
dans une situation d’apprentissage des types d’évaluation. Parmi ces 80 %, 33 % n’ont pas
intégré l’évaluation formatrice contre 36,8 % en enseignement général (EG).
Ce constat pourrait trouver ses origines dans le défaut de formation des enseignants autour
des notions liées à l’évaluation.
Place de l’évaluation dans l’acte d’enseigner
L’évaluation n’est pas systématisée dans les pratiques des enseignants : 46 % en EP et
68,5 % en EG déclarent ne procéder à aucune évaluation dans certaines séances. Ce
58
constat est confirmé lors des visites d’inspection qui relèvent que 30 % ne pratiquent aucune
évaluation et 60 % évaluent en partie les acquis des élèves.
L’évaluation normative chiffrée a encore une place non négligeable : 30 % attribuent
systématiquement une note quelque soit le moment de l’évaluation. La note étant globale,
elle donne à l’élève une vision de ses erreurs sans qu’il puisse identifier les difficultés.
Quand il s’agit d’une évaluation sommative, nous pouvons comprendre cette pratique, mais
dans le cas d’évaluation en cours d’apprentissage, comment l’élève repère t’il les efforts à
produire pour atteindre les objectifs fixés ?
Ces constats confirmeraient encore la non maîtrise des fonctions de l’évaluation : le
professeur évaluerait sans qu’il y ait une véritable prise de conscience des enjeux pour
l’élève.
Types et modalités d’évaluation et de correction
Le type d’évaluation utilisé est le contrôle de connaissances : 52,8 % des enseignants lors
d’évaluations diagnostiques et 70 % lors d’évaluations formatives.
Les deux modalités majoritairement rencontrées sont :
o l’écrit : 80 % des enseignants déclarent l’utiliser en évaluation
formative.
o l’oral : les inspections relèvent une utilisation à 100% sous forme de
questions/réponses.
Des évaluations à partir d’activités pratiques ont été citées par les 73 % des professeurs EP,
ce qui se justifierait par la caractéristique de leur enseignement.
Les professeurs évaluent principalement pendant l’apprentissage (40 %) et en fin
d’apprentissage (60%). Ce constat est confirmé par le fait que 100% des élèves de 2nde
disent être évalué pendant le cours.
Les corrections des évaluations se font à l’oral au tableau soit par les enseignants (75 %),
soit par les élèves (73 %), immédiatement ou de manière différée.
Il en ressort une évaluation de type traditionnel, avec un usage généralisé de l’écrit, centrée
sur les connaissances théoriques.
Cet usage majoritaire de l’écrit révèle bien une pratique d’évaluation de connaissances et le
manque de corrélation entre l’évaluation et l’apprentissage relevées lors des observations
(75 % des évaluations étaient partiellement en cohérence avec les objectifs de
59
l’apprentissage). La question qui résulte de ce constat : l’évaluation proposée constitue t’elle
toujours le meilleur moyen d’apprécier l’apprentissage ?
Les modalités de correction utilisées, caractérisent une part importante de la régulation
externe par l’enseignant. Il y a donc lieu de s’interroger sur la place de l’auto-évaluation et de
l’évaluation formatrice dans les pratiques.
Evaluation et fonction dans l’apprentissage
Les fonctions de l’évaluation majoritairement déclarés par les enseignants, sont en lien avec
la mesure et le contrôle de l’acquisition des compétences chez l’élève (de 73% à 84,2 %).
On relève également la fonction de régulation lors de l’évaluation diagnostique (46% parlent
de réajuster leur enseignement – 60% d’ajuster leur progression – 73 % reformuler leur
cours). Cependant, seuls 20 % (EP) à 36,8 % (EG) citent le fait de motiver les élèves – 40 %
de procéder à de la remédiation – 33% de repérer les difficultés des élèves. 75% des
évaluations ne sont pas exploitées dans l’apprentissage.
On constate donc que les pratiques se caractérisent par une prédominance d’une régulation
proactive de l’apprentissage qui pourrait s’apparenter à une centration de l’évaluation sur
l’enseignant, malgré une volonté affichée d’adapter son enseignement. En fait, l’enseignant
ferait-il sa propre évaluation plutôt que celle de ses élèves (remarque souvent entendue lors
des visites d’observation : vous ne m’avez pas dit si mon cours était correct ou pas ?).
Qu’en est-il des modalités d’encouragement des élèves à travers l’évaluation, pour les aider
à améliorer leurs prestations ?
La régulation interactive, (référence à l’évaluation formatrice), visant à comprendre les
démarches de l’élève pour l’aider dans son processus d’apprentissage, est peu mise en
œuvre dans les pratiques analysées. Les procédures de questionnement régulier qui ont été
relevées par les observations des corps d’inspection, en cours d’apprentissage ne
permettent pas une appropriation par les élèves des critères d’évaluation.
2.3. 2 Regards sur l’évaluation
Dans ce chapitre, nous aborderons le regard des enseignants sur les résultats des élèves,
et celui des élèves sur les pratiques des enseignants.
o Les résultats des élèves vus par les enseignants
Les enseignants attribuent les résultats des élèves de 53% à 86 % au manque de travail,
d’attention et d’écoute. Seuls 10,5 % (EG) à 20 % (EP) mettent en lien les résultats avec
leurs démarches pédagogiques. Il s’agit bien là de l’image que l’enseignant se fait du retour
de l’élève sur un apprentissage donné.
60
Ces jugements signifieraient que le professeur dans sa posture d’expert et de représentant
de l’autorité, considère ses pratiques comme bonnes, et l’évaluation viendrait en sanction du
travail des élèves.
Nous pouvons donc relever la contradiction entre le déclaratif des enseignants sur le
caractère régulateur de l’évaluation sur leurs pratiques d’apprentissage, et la perception
qu’ils ont des résultats.
En effet, ils déclarent utiliser l’évaluation pour réajuster leurs modalités d’enseignement,
alors que dans la pratique, les résultats occupent une place importante dans la perception
qu’ils ont du travail des élèves. L’appréciation des démarches utilisées par les élèves pour
mobiliser les compétences acquises en apprentissage dans une activité donnée, des
progrès faits ou à effectuer sembleraient peu pris en compte.
Ce qui pourrait justifier les 30 % de cohérence partielle entre l’activité et les compétences à
évaluer.
o Les pratiques des enseignants vues par les élèves
Les élèves considèrent les pratiques d’évaluation des enseignants comme étant un moyen
de mesurer leurs compétences (33 % à 100 %), leurs progrès (17 % à 84 %), juger leur
travail (17 % à 50 %).
Ces représentations correspondent bien à aux fonctions que les professeurs définissent eux-
mêmes de leurs pratiques.
Nous devons relever que 17 % à 34 % des élèves déclarent ne pas repérer dans une
situation d’apprentissage le moment d’évaluation.
Néanmoins, moins de 50 % des élèves attribuent à l’évaluation un moyen de repérer leurs
difficultés (30 % à 50 %), et de les aider à progresser (30 % à 50 %), ce qui pourrait
expliquer l’indifférence vis-à-vis de l’évaluation (34 à 90 %).
On note là encore entre l’écart entre les représentations et les pratiques réelles. Malgré des
situations avérées d’évaluation en cours d’apprentissage, la fonction d’aide ne prendrait pas
tout son sens à travers les procédures mises en œuvre.
61
2.3.3 Les relations entre les acteurs
L’évaluation s’inscrit dans un processus de communication entre l’évalué et l’évaluateur.
Toute relation de communication fait référence à un schéma qui met en lien des acteurs.
Les éléments qui caractérisent la relation dans le cadre des pratiques observées sont les
suivantes :
o 69 % des enseignants déclarent accepter les contestations de leurs élèves, 66% à
100% des élèves disent repérer à travers l’évaluation ce que les enseignants attendent
d’eux.
Dans ce schéma de communication l’évaluation devrait apparaître comme une information
visant à faire progresser l’élève, et non une sanction. Le développement de bonnes relations
au sein de la classe est essentielle pour instaurer la confiance et donc la motivation des
élèves par rapport à l’apprentissage et à l’évaluation.
Synthèse
Le bilan de nos investigations fait apparaître la typologie suivante des pratiques évaluatives :
o une évaluation plutôt de type traditionnel, centrée sur la mesure des
connaissances théoriques et plus rarement des compétences, ne constituant
pas toujours une aide à l’apprentissage chez l’élève.
Nous proposons donc d’analyser ce constat, en le mettant en parallèle avec deux concepts
émergeant de nos investigations : la culture de l’évaluation et le concept de
représentations sociales.
62
63
3.1 La culture de l’évaluation
Les pratiques évaluatives au sein d’un système renvoient à plusieurs acteurs qui doivent
évoluer ensemble pour rendre efficientes les démarches mises en œuvre.
Dans le cadre des pratiques observées dans le contexte de l’Académie de Guadeloupe, une
meilleure formation des acteurs, et une implication plus significative des élèves dans le
processus d’évaluation constitueraient deux leviers en notre sens qui tendraient à faire
évoluer les pratiques. Les effets liés à ces acteurs que nous avons identifiés dans notre
approche conceptuelle comme les biais à l’évaluation seraient ainsi minimisés.
3.1.1 La formation des acteurs
L’idée de culture commune fait référence à une vision partagée du vocabulaire, des objectifs,
des fonctions, des pratiques et des finalités de l’évaluation. A l’échelle de l’établissement,
cette culture de l’évaluation concernera les acteurs internes (encadrement, personnel
enseignants), mais également les acteurs externes (corps d’inspection, décideurs).
Michel VIAL83 précise qu’évaluer dans une situation de formation exige « d’élaborer une
problématique à partir de laquelle l’évaluateur puisse se donner des conceptualisations de la
régulation, du critère, de l’auto-évaluation, du projet et de la qualité ». La formation des
acteurs renvoie donc à ce choix stratégique répondant à des modèles à définir
correspondant en fonction contexte de notre recherche. Michel CRAHAY84 parle de modèles
d’intelligibilité utilisés dans les recherches en éducation et qu’il désigne par comme étant
« des constructions intellectuelles qui organisent les observations de manière cohérente… ».
Nous pensons que cette formation pourrait répondre aux spécificités :
o Formation commune
Elle impliquerait tous les acteurs dans une construction partagée d’un projet de
formation alliant la définition de démarches et l’élaboration outils. Ce type de formation
répondrait à une exigence d’harmonisation des pratiques et de mutualisation des
expertises. Nous pouvons citer en exemple l’élaboration de grilles académiques
d’évaluation par filière en collaboration avec les corps d’inspection, les enseignants,
83 Vial. M, (2001), Se former pour évaluer - Se donner une problématique et élaborer des concepts, Collection : Pédagogies en développement, De Boeck 84 CRAHAY. M, la recherche en éducation : une entreprise d’intelligibilité de faits et de représentations ancrés dans l’histoire sociale
64
les formateurs.
D’autres actions plus globales pilotées par la Direction de la pédagogie pourraient
s’inscrire dans un contexte académique et aboutir à créer le lien entre l’entité qu’est
l’établissement et l’Académie.
o Formation alternant pratique et théorie
Elle renvoie à un modèle de formation-action. André DE PERRETI précise dans son
ouvrage l’évaluation a-t-elle un sens ? « [ …] C’est parce qu’ils auront la possibilité
de s’exercer sur des outils et des méthodes suffisamment divers que les enseignants
pourront choisir ce qui convient à leur discipline, à leur âge et à leur originalité même,
comme à ceux de leurs élèves, ainsi qu’aux moments du travail [……]»85.
Cette démarche de formation s’inscrit dans une logique d’analyse de pratiques pour
donner la possibilité aux acteurs de faire les choix les plus adaptés.
o Formation initiale et continuée
Elle contribuerait à conduire les acteurs à cette prise de conscience de l’importance
de l’évaluation comme un processus cognitif pour l’élève.
La formation initiale poserait les bases conceptuelles et instrumentées, la formation
continuée permettrait ainsi d’accompagner particulièrement les enseignants dans
leurs pratiques.
3.1.2 L’implication des élèves dans le processus d’évaluation
Dans le chapitre constituant notre approche conceptuelle, nous avons repéré les évaluations
formatives et formatrices comme étant celles qui placent l’élève dans une situation de
comprendre les processus d’apprentissage mis en œuvre par l’enseignant et ainsi
progresser. La problématique qui se pose est de définir « Comment l’amener à cette posture
intellectuelle ? »
Les stratégies métacognitives sont des démarches qui répondraient à cet objectif.
Jacques Tardif définit la métacognition comme une démarche qui « réfère à la connaissance
ainsi qu’au contrôle que le sujet a sur lui-même et sur ses stratégies cognitives »86 .
« La métacognition est la représentation que l’élève a des connaissances qu’il possède, et
de la façon dont il peut les construire et les utiliser »87.
85 DE PERETTI. A, L’évaluation a-t-elle un sens ? – Chapitre 5 : pourquoi apprendre ? 86 In Pour un enseignement stratégique : l'apport de la psychologie cognitive, 1992
65
Il conviendrait ainsi d’amener l’élève à poser un regard rétroactif sur son apprentissage de
manière à l’évaluer, en vue de ses propres progrès. Pour cela, l’élève doit être en mesure
d’identifier ses points forts et ses points faibles et mettre en place des stratégies de
remédiation, appelés de régulation.
La métacognition exige de l’élève une connaissance de soi et une confiance en soi.
Dans la pratique, cette démarche consiste à amener l’élève à être dans l’action tout en se
regardant faire « être sur son vélo et se regarder passer », pour prendre conscience des
procédures, du processus, des difficultés, des erreurs et des solutions possibles dans le
cadre d’un apprentissage.
Le développement des stratégies métacognitives doit se faire dès l’école maternelle en
utilisant des méthodes telle la verbalisation. D’autres méthodes pourront également être
utilisées plus tardivement dans la scolarisation de l’élève : carnet de bord, portfolio.
Toutes ces méthodes contribuent à donner les moyens à l’élève d’apprendre à apprendre
donc à se mettre dans une position de réussite.
L’utilisation de la métacognition dans l’apprentissage chez l’élève fait appel à des
paramètres autres que la confiance en soi qui justifierait son échec dans l’apprentissage,
quand l’élève n’est pas en mesure de les mobiliser (savoir observer, savoir utiliser sa
mémoire, savoir raisonner, savoir gérer ses émotions) 88.
En matière d’évaluation, l’utilisation des stratégies métacognitives permettraient l’élève à
s’approprier les démarches mises en place par l’enseignant (identification des critères
d’évaluation….)
Synthèse
Le développement de ce chapitre nous permet de conclure sur l’importance de la formation
allant de l’élève jusqu’aux décideurs institutionnels. La formation se détermine comme un
levier important sur les représentations qui peuvent être véhiculées par l’évaluation. La
maîtrise par tous les acteurs, des règles qui entrent en jeu dans l’évaluation favorise cette
confiance mutuelle entre les acteurs qui bien souvent font défaut dans les pratiques
observées. Il n’est pas rare de constater l’organisation particulière de la classe au moment
des évaluations pour éviter la « tricherie ».
87 In Cahiers pédagogiques - décembre 2006 - DELVOLVE N. Professeur Chercheur en ergonomie, IUFM Midi Pyrénées 88 In Cahiers pédagogiques - décembre 2006 - DELVOLVE N. Professeur Chercheur en ergonomie, IUFM Midi Pyrénées
66
3.2 Les représentations sociales dans le champ éducatif Le deuxième aspect émergeant de notre analyse et pour lequel il nous semble important
d’en discourir c’est le concept de représentations qui s’est caractérisé par le regard
réciproque que les acteurs ont porté sur les pratiques mises en jeu dans le cadre des
investigations de notre étude.
3.2.1 Le concept de représentations sociales
Le concept de représentation a été utilisé pour la première fois par le sociologue français
E. DURKHEIM en 1898. Il a été repris en 1961 par Serge MOSCOVICI qui définit les
représentations sociales comme « des modalités de pensée pratique orientées vers la
communication, la compréhension et la maîtrise de l’environnement social, matériel et
idéel»89.
Il précise que « par représentations, la personne se donne des modèles explicatifs, des
codes qui autorisent chacun à trouver un sens et à donner une signification au monde qui
l’entoure »90.
Les représentations sociales font donc référence aux interactions individuelles et collectives
générées par la massification des moyens de communication entre les individus. Ces
interactions se construisent dans une relation entre l’individu et lui-même, individus à
individus et individus et l’environnement physique.
Ces représentations prennent leur origine dans l’histoire, le vécu, les expériences
personnelles, les acquis de l’individu. Denise JODELET explique que « les représentations
sociales doivent être étudiées en articulant éléments affectifs, mentaux et sociaux et en
intégrant à coté de la cognition, du langage et de la communication, la prise en compte des
rapports sociaux qui affectent les représentations »91.
Ce concept connait depuis environ 40 ans une généralisation à tous les domaines, en raison
des changements de fonctionnement de la société. Les sciences de l’Education analysent
l’influence des représentations sociales sur l’apprentissage.
89 In S. MISCOVICI (1995), Manuel de psychologie sociale 90 In S. MISCOVICI (1995), Manuel de psychologie sociale 91 JODELET.D , (7ème édition 2003), Les représentations sociales, PUF
67
3.2.2 Les représentations sociales et évaluation
o Principe général
Si l’on tient compte des apports conceptuels sur la définition des représentations sociales et
présentés dans le chapitre précédent, nous pouvons dire que le champ éducatif représente
un champ privilégié où les représentations jouent un rôle important.
Philippe MERIEU dans son ouvrage « Apprendre, oui mais comment ? » définit une
représentation comme une « conception que le sujet a, à un moment donné d’un objet ou
d’un phénomène».
Michel GILLY précise que ce concept concerne aussi « la communication pédagogique au
sein de la classe et la construction des savoirs [...]. La classe devient alors un « système
social interactif » 92.
o Représentations sociales et pratiques d’évaluation
Elles renvoient au regard que posent les élèves et les enseignants sur le but même de
l’évaluation. Les fonctions attribuées majoritairement par les enseignants et les élèves de
l’évaluation comme un moyen de « mesure » pourraient donc correspondre à la fonction
véhiculée par le système lui même : fonction normative qui consisterait à classer les élèves
au sein d’une classe, les établissements au sein d’une académie et les académies au plan
national.
Les stratégies visant donc à développer d’autres modes d’évaluation seraient donc brouillées
par cette fonction de l’évaluation porté par le système, et reproduite de manière consciente
ou non, par les acteurs et qui justifierait de nos jours encore l’importance de la notation
comme indicateur fiable pour les parents.
La clarification des représentations, comme de la non maîtrise conceptuelle par les acteurs,
contribuerait à réduire les biais. De nombreux auteurs ont démontré comment les différences
de représentations entre les acteurs étaient à l’origine des échecs.
92 JODELET.D, (1989) Les représentations sociales, PUF
68
3.2.3 Les représentations sociales et l’évaluation dans le contexte de la
Guadeloupe
Nous nous proposons dans ce chapitre croiser le concept de représentation au contexte
historique en s’arrêtant sur certains aspects qui à notre sens pourraient avoir une relation de
causalité.
o La contestation presque systématisée de la note
50 % à 100 1% des élèves contestent la note pour des raisons qu’ils citent liées à l’injustice,
l’incompréhension de la façon de noter, la justesse de la note.
Ce constat pourrait donc s’expliquer par une contestation ou opposition au jugement porté
par les enseignants. Ce qui renverrait non pas au contexte de la classe mais à un contexte
social et familial plus général du « refus de tout jugement » d’une autorité hiérarchique, dont
les origines auraient été réveillées lors des 40 jours de grève qu’ont connu les départements
français d’Outre-mer en 2009 et qui renvoient au passé esclavagiste et colonialiste.
o La relation de communication
Le refus de la contestation des notes par 31 % des enseignants confirme le modèle du
schéma de communication hérité des relations sociales du passé, et perpétué par certains
professeurs.
Modèle selon lequel, l’enfant n’avait pas le droit à la parole après une décision prise par un
adulte où il devait incliner la tête dans une discussion avec l’adulte.
Cette attitude renvoie également à la relation maître/esclave qui devait s’humilier devant son
maître en inclinant la tête.
3.3 Retour sur l’hypothèse
Au terme de notre travail, les interprétations et l’analyse de nos investigations ont permis de
mettre en évidence deux éléments qui prédominent dans la typologie des pratiques
analysées.
3.3.1 Discussions sur l’hypothèse
Ces deux éléments sont les suivants :
o la prédominance de l’évaluation de connaissances au détriment des
compétences, signe de la persistance d’une évaluation à forte connotation
sommative. Cette continuité pourrait s’expliquer par la faible mise en œuvre dans les
69
apprentissages d’une entrée par les compétences et de fait dans les stratégies
évaluatives,
o des pratiques plus centrées sur le contrôle et la mesure au détriment de l’aide
et de la régulation de l’apprentissage : un changement des représentations,
accompagné d’une formation conceptuelle et instrumentalisée conduiraient à une
évolution plus significative des pratiques.
Notre hypothèse ainsi partiellement validée, nous permet de poser le problème de la
«formation en évaluation».
3.3.2 Les limites de notre étude et les prolongements possibles
La non prise en compte dans notre corpus de l’impact des pratiques des enseignants non
créolophones ne nous a pas permis d’affiner notre analyse en y incluant l’influence de
« l’alternance codique » présentée dans notre approche conceptuelle .
Ce choix est du à la volonté d’éviter la stigmatisation des pratiques des autochtones déjà
empreintes de représentations liées au passé historique.
De plus, en se référant à notre objectif à travers cette recherche, qui vise à conduire au
changement93, le traitement égalitaire des acteurs, conditionne un début d’acceptation dans
le processus de changement.
Les prolongements de cette étude pourraient nous conduire à une analyse comparative des
pratiques avec l’Académie voisine de la Martinique ayant un contexte historique,
sociologique, démographique et éducatif à peu près similaires en vue d’analyser les vrais
raisons des limites au changement.
93 Référence à la logique du changement développé
70
BILAN DE L’ETUDE ET APPORTS PERSONNELS
Les conclusions de notre recherche font ressortir la persistance de pratiques évaluatives que
l’on pourrait qualifier de « traditionnelles ».
Malgré une écriture des référentiels de certification, des formations professionnelles depuis
plus de trente ans en termes de compétences, l’entrée par les compétences dans les
apprentissages et dans l’évaluation n’est que partiellement mise en œuvre dans les
stratégies de classe.
De plus, les spécificités de l’enseignement professionnel industriel dans le contexte local ont
conduit à des pratiques fortement influencées par les représentations des acteurs.
Les résultats que nous avons obtenus à travers les investigations menées auprès de notre
échantillon nous donnent un éclairage des pratiques. Il semble pertinent de ne pas
généraliser ces pratiques à l’ensemble de la formation professionnelle en lycée professionnel
pour laquelle les formations tertiaires représentent une part importante.
Il nous semble donc que des observations de formations relevant du tertiaire dont les
enseignants mettent en œuvre des stratégies globales autres que ceux du secteur industriel,
et dont les élèves se caractérisent par une typologie différente auraient permis d’affiner
notre analyse. Les pratiques dégagées sont-elles générales au sein de l’Académie ou
spécifiques au secteur des sciences et techniques industrielles ?
Les quelques contradictions relevées dans les réponses des acteurs interrogés et les
observations en inspections pourraient trouver leur origine dans les limites du questionnaire
à choix multiples qui peut enfermer l’interrogé dans un type de réponse.
Nous tenons à rappeler que les résultats de nos investigations qui permettent de dresser les
habitus évaluatifs, ne doivent pas laisser supposer un manque de conscience
professionnelle de certains enseignants qui mettent en œuvre les stratégies visant la
réussite des élèves dont ils ont la charge.
Cette recherche m’a amené à me pencher sur la question des pratiques évaluatives tout en
croisant des éléments conceptuels divers. La mise en lien de l’histoire de la formation et de
l’enseignement professionnels avec l’histoire de la Guadeloupe a permis de faire ressortir
des pistes vers une démarche de changement des pratiques des acteurs concernés.
71
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages et revues
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ANCIAUX F. (2007), Alternance codique en éducation dans la Caraïbe, Atelier de recherche
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Université des Antilles et de la Guyane - Université d'Etat d'Haïti
Conférence sur « L’histoire de la formation et de l’enseignement professionnels en Europe dans une perspective comparative » in Formation Professionnelle (août 2004). Revue Européenne (N° 32 mai) DE LANDSHEERE. G. (1971), Evaluation continue et examens: précis de docimologie, publié à Bruxelles, chez Labor, à Paris, chez Nathan DE KETELE JM (juin 1993), L'évaluation conjuguée en paradigmes, in Revue française de
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LEVY.A, Les enjeux sociaux occultés de l’évaluation, Nouvelle revue de psychologie LEVY. A, Penser l'événement Pour une psychosociologie critique, Cahiers de Psychologie politique NUNZIANTI. G (1990) Pour construire un dispositif d'évaluation formatrice. Cahiers pédagogiques n° 280.
72
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SITOGRAPHIE
http://. www.ethnologue.com
http://perso.wanadoo.fr/jacques.nimier/dossier_evaluation.htm
73
ANNEXE 1
Etude des pratiques évaluatives en lycée professionnel en Guadeloupe
Etudiant en Master II de recherche à distance – Université de Rouen
QUESTIONNAIRE ELEVE : Questionnaire anonyme
Commune de votre établissement
……………………………………………………………………
Sexe
F M
Tranche d’âge
- 15 ans 16 à 19 ans 20 à 22 ans + 22 ans
Classe
CAP : 1ère année BEP Bac pro : 2nde pro
2ème année 1ère pro
Tle pro
Section
Métiers de l’électronique Métiers de l’électrotechnique
Indiquer selon vous les moments où le professeur
vous évalue (si vous le souhaitez vous pouvez
cocher plusieurs cases)
en début de cours
pendant tout le cours
à la fin du cours
à la fin de plusieurs cours
pour vous délivrer votre examen
vous n’avez pas repéré de moment particulier
Indiquer deux raisons pour lesquelles selon vous
vous êtes évalué?
pour vous donner une note
pour mesurer vos compétences acquises
pour vous classer par rapport aux autres élèves de la classe
pour mesurer vos progrès individuels
pour juger votre travail
Autres - Préciser
Quelle est la forme de l’évaluation qui vous est proposé ?
fiche guide
activité pratique
activité orale
Autres - Préciser
74
A l’issue d’une évaluation quel sentiment avez-vous le plus souvent ? (3 réponses attendues)
Déception
Motivation
Blocage
Joie
Pas de sentiment particulier
Autres – Préciser……………………………………………………….
Les évaluations vous permettent-elles (3 réponses au maximum)
de connaître votre niveau par rapport aux autres élèves
de repérer vos difficultés
de mieux comprendre le métier que vous apprenez
de vous aider à progresser
de mieux comprendre le cours
Autres
Préciser ……………………………………………………….
A l’issue d’une évaluation, est-ce qu’il vous est
arrivé de contester votre note ?
OUI
NON
Citer deux raisons qui vous ont amené à contester
cette note ?
note ne correspond à votre niveau
note trop basse
note vous paraît injuste
vous ne comprenez la façon de noter le professeur
Autres
Préciser…………………………………………………………
Par rapport au professeur, l’évaluation
vous rapproche du professeur
vous permet de juger le professeur
vous permet de comprendre ce qu’il attend de vous
Autres
Préciser…………………………………………………………
75
ANNEXE 2 Etude des pratiques évaluatives en lycée professionnel en Guadeloupe
Etudiant en Master II de recherche à distance – Université de Rouen
QUESTIONNAIRE ENSEIGNANT : Questionnaire anonyme
1- CONTEXTE D’ACTIVITE
Commune de votre
établissement
………………………………………………………………………………..
Disciplines d’enseignement
……………………………………………………………………………….
Statut
titulaire non titulaire
Sexe
F M
Tranche d’âge
20 à 30 ans 31 à 40 ans 41 à 50 ans 50 ans et +
Ancienneté dans la fonction
0 à 2 ans 3 à 5 ans 6 à 10 ans
+ 10 ans + 15 ans + 20 ans
Classes en charge
CAP : 1ère année BEP Bac pro : 2nde pro
2ème année 1ère pro
Tle pro
Nombre d’élèves par classe
en groupe 12 en classe entière 24
15 30
Autre préciser :
2- EVALUATION DES APPRENTISSAGES
Classer de 1 à 4 les différents types d’évaluation selon l’ordre chronologique dans lequel ils apparaissent au cours d’un apprentissage
Sommative
Formatrice
Formative
Diagnostique
Y a-t-il des séances pendant lesquelles vous ne faites aucun type d’évaluation
OUI
NON
Si oui pourquoi ?.
Mettez vous systématiquement une note dès que vous évaluez
OUI
NON
76
2.1 – les pratiques d’évaluation diagnostique
Sur quoi faites –vous porter l’évaluation diagnostique ?
sur les compétences et connaissances antérieures de l’élève
uniquement sur qu’il faut pour la séance
sur ce que le contenu de la séance à venir évoque chez l’élève
Autre - Préciser Comment mettez vous en place cette évaluation ?
de manière informelle : discussions, échanges à l’oral
de manière imprévue
de manière organisé : par questionnaire
Autre – Préciser
A l’issue de l’évaluation diagnostique vous procédez le plus souvent aux actions suivantes
(2 réponses attendues)
Ajuster votre progression
Reformuler le cours
Constituer les groupes pour un enseignement différencié
Dresser un profil des élèves
Etablir un état des compétences de chaque élève afin de faire un suivi
Autres, Préciser ?
2.2 – les pratiques d’évaluation formative A quel moment du cours faites vous cette évaluation ?
En début de séance
En cours de séance à chaque nouvelle notion
En fin de séance
vous ne faites pas ce type d’évaluation (si c’est votre cas passez au 2.3)
Quand corrigez-vous cette évaluation ?
Tout de suite
Pour la prochaine séance
Quand c’est possible
Indiquer trois raisons pour lesquelles vous évaluez les élèves ?
Donner une note à chaque élève
Mesurer les compétences acquises
Classer les élèves
Mesurer les progrès réalisés individuellement par les élèves
Ajuster votre enseignement
Faire de la remédiation
Comment évaluez- vous majoritairement les élèves ?
à l’écrit
à l’oral
Autres – Préciser
77
2.3 –Les pratiques d’évaluation sommative
Quels sont vos outils d’évaluation ?
fiche réponse élèves
activité pratique
activité orale
Autres - Préciser
Quelles sont vos utilisations les plus fréquentes des évaluations sommatives ?
Motiver les élèves
Permettre aux élèves de se situer dans leur apprentissage
Gérer l’hétérogénéité
Répondre à une demande sociale (remplir le bulletin)
Percevoir chez les élèves les erreurs
Donner une note à chaque élève
Comment organisez-vous vos évaluations ?
par une série d’exercices
par un questionnaire
par une situation professionnelle ou étude de cas
Autre. Préciser
A l’issue de l’évaluation, comment mettez-vous en place les corrections ?
les évaluations sont généralement corrigées au tableau par un élève
les évaluations sont généralement corrigées au tableau par vous-même
les évaluations font l’objet d’une correction individuelle ?
Autre ? Préciser
Y a t-il certains élèves à qui vous ne donnez pas de note après avoir corrigé leur production
OUI
NON
Si oui, pourquoi ?
2. - Les relations dans l’acte d’évaluation L’évalué a-t-il la possibilité de contester les conclusions de son évaluation ?
OUI
NON
Quelles informations vous prélevez le plus souvent des résultats des élèves ? (3 réponses attendues)
un manque d’attention de l’élève
Une absence d’apprentissage
Une absence de travail de l’élève
Une mauvaise écoute de l’élève
Une mauvaise compréhension de la consigne
Une inadaptation de la démarche pédagogique utilisée aux besoins des élèves
Autre. Préciser
78
ANNEXE 3
GRILLE D’ANALYSE DES RAPPORTS D’INSPECTION
CONTEXTE
Niveau de formation BTS licence master ingénieur
Age
20 à 30 ans 31 à 40 ans 41 à 50 ans
50 ans et +
Lieu de naissance DOM COM France hexagonale Autre
Statut titulaire non titulaire
Grade PLP certifié
Mode de recrutement concours interne concours externe liste aptitude
Académie d’origine académies métropolitaine DOM TOM COM
Ancienneté dans la fonction
0 à 2 ans 3 à 5 ans 6 à 10 ans
+ 10 ans + 15 ans + 20 ans
Ancienneté dans le poste
0 à 2 ans 3 à 5 ans 6 à 10 ans
+ 10 ans + 15 ans + 20 ans
PRATIQUES D’EVALUATION
Vérification des acquis de l’élève oui non en partie
Moment de
l’évaluation/apprentissage
avant pendant en fin
Modalités d’évaluation
écrit oral pratique
individuel groupe
autre
Type d’évaluation
questions faisant appel uniquement à restitution de savoirs
théoriques
activités faisant appel uniquement à mise en œuvre
compétence
mixage de questions de connaissances et mise en œuvre
compétences
autre
Cohérence évaluation/
objectifs apprentissage
oui non en partie
Modalités de correction
immédiate différée
individuellement (auto correction) par groupe classe
par le professeur
Type d’exploitation
immédiate pas d’exploitation
79
ANNEXE 4
GRILLE D’ANALYSE DES DOCUMENTS D’EVALUATION
CONTEXTE
Statut
titulaire non titulaire
Type de documents
grille d’évaluation documents élèves
autre :
PRATIQUES D’EVALUATION
Indication des compétences
évaluées
oui non en partie
Cohérence compétences / activité
oui non en partie
Adéquation barème/indicateurs
oui non en partie
Adéquation barème/niveau
taxonomique
oui non en partie
Adéquation note/niveau
d’acquisition compétences
oui non en partie
Adéquation note/appréciation
oui non en partie
80
Annexe 5
RESULTATS DES INVESTIGATIONS
1- EXPLOITATION QUESTIONNAIRES ENSEIGNANTS
En enseignement général (EG) : 28 réponses sur 90 questionnaires distribués En enseignement professionnel (EP) : 15 réponses sur 46 enseignants 1.1 Profil des enseignants
Titulaires Non titulaires
EP EG EP EG
Statut 67 % 96,5 % 33 % 3,5 %
Féminin Masculin EP EG EP EG
Sexe
0 % 85 % 100 % 15 %
20 à 30 ans 31 à 40 ans 41 à 50 ans 50 ans et + EP EG EP EG EP EG EP EG
Répartition
par âge
6,7% 7,3% 26,7 % 14,2% 46,6% 53,5 %
20% 25 %
0 à 2 ans 3 à 5 ans 6 à 10 ans + 10 ans + 15 ans + 20 ans EP EG EP EG EP EG EP EG EP EG EP EG
Ancienneté
dans la fonction
14%
7 %
6%
3 %
26%
14 %
14%
8 %
14 %
25 %
26 %
43 %
1.2 Etat des pratiques des enseignants
Maîtrise des types d’évaluation
Items EP EG Classement correct des types d’évaluation
20 %
42,1
Absence de classement de l’évaluation formatrice
33,3 %
36,8 %
81
Evaluation et notation
Items EP EG Absence d’évaluation à certaines séances
46 % TP, de travail de recherche, cours magistral, travaux de découverte
68,5 % classe non réceptive, corrections d’exercice, manque de temps, cours en classe entière, cours mal perçu par les élèves, temps d’assimilation insuffisante
oui 30% 25% Attribution systématique de note quelque soit le moment de l’évaluation
non 70 %
75 %
Absence de notes aux évaluations sommatives
20 % travail insuffisant, élève absent pendant l’apprentissage,
52,6 % absence pendant apprentissage mauvaise note, mauvaise production, lacunes
Evaluation diagnostique
Items EP EG Types
Evaluation connaissances et compétences antérieures Evaluation uniquement contenus pour séance Evaluation expériences élèves en lien avec contenus séance du jour
52,8 %
26,4%
20,8 %
61,3 %
23,3 %
15,4%
Modalités de l’évaluation Evaluation informelle : discussion, échanges à l’oral Evaluation organisé avec utilisation outil : questionnaire Evaluation improvisée Evaluation par autre méthode
40,7 %
59,3%
NR
NR
34,5 %
54,8%
7,2 %
3,5 % (expériences précédentes)
Fonction (2 réponses attendues)
Ajuster progression professeur Reformuler le cours Faire de la différenciation pédagogique Dresser profil des élèves Etablir état compétences de chaque élève en vue suivi
60% 73 % 20% 20 % 33%
68,4 % 42,1 % 31,5 % 42,5 % 47,3 %
82
Evaluation formative
Items EP EG Moment
En début de séance En ours de séance, à chaque nouvelle notion En fin de séance
5,6 %
56,7 %
37,7%
47,3 %
15,7 %
57,8 % Double réponse
Modalités de correction Correction immédiate Correction à la séance suivante Correction quand c’est possible
40 % 60 % NR
22,6 % 54,8 % 22,6 %
Modalités d’évaluation
Ecrit Oral
80 % 20 %
94,7 % 52,6 %
Double réponse
Fonctions (3 réponses attendues) Donner une note à chaque élève Mesurer compétences élèves Mesurer les progrès des élèves Réajuster leur enseignement Faire de la remédiation
13% 73 % 80 % 46 % 40 %
26,3 % 84,2 % 63 %
42,1 % 42,1 %
Evaluation sommative
Items EP EG Modalités (Plusieurs réponses au choix)
Fiche réponses Activité pratique Activité orale
80% 73 % 13 %
42,1 % 78,9 % 68,4 %
Modalités de correction (Plusieurs réponses au choix) Correction au tableau par des élèves Correction au tableau par l’enseignant Correction individuelle Autre type de correction
73 % : 40% NR
15,7 % collective, échanges, reformulation)
63,1 % 52,6 % 26,3 %
Types (Plusieurs réponses au choix)
Exercices Questions Situation professionnelle, étude de cas Autre forme
33 % : 48% : 66 % NR
63,3 % 31,5 % 57,8 % 15,7 %
(sujet examen)
Fonctions (Plusieurs réponses au choix) Motiver l’élève Situer l’élève dans l’apprentissage Réponse à demande sociale : remplir bulletin Repérer erreurs des élèves Donner une note
20 % 66 % 26 %
33 % 13 %
36,8 % 84,2 % 31,5 %
36,8 % 42,1 %
83
1.3 Regards sur le travail des élèves
Items EP EG Attribuent résultats au manque d’attention Attribuent résultats à absence travail Attribuent résultats à qualité écoute ’élève Attribuent résultats à mauvaise compréhension consignes Attribuent résultats aux démarches pédagogiques inadaptées besoins élèves Autres
60 %
86 %
60 %
53 %
20 %
NR
36,8 %
89,4 %
31,5 %
73,6 %
10,5 %
5,26 % Problèmes personnels
1.4 Relations avec les élèves dans l’acte d’évaluation
Items EP EG oui
69 %
73,6%
Acceptation contestations élèves sur leur notation
non
31 %
26,4 %
2- EXPLOITATION QUESTIONNAIRES ELEVES
81 élèves interrogés issus de la filière électrotechnique (ELT)
83 élèves interrogés issus de la filière électronique (ELN)
2.1 Typologies des élèves
ELT ELN Baccalauréat Professionnel Baccalauréat Professionnel
Items 2nde 1ère Tle 2nde 1ère Tle
M
100 %
100 %
100 %
83,3 %
100%
100 %
Sexe
F
0 %
0%
0%
16,7%
0 %
0 %
16-19
100 %
83,3%
83,3%
100%
100%
34%
Age
20-22
0 %
16,7 %
16,7 %
0%
0%
66%
84
2.2 Regards sur les pratiques du professeur
ELT ELN Baccalauréat Professionnel Baccalauréat Professionnel
Items 2nde 1ère Tle 2nde 1ère Tle Moment (plusieurs réponses au choix)
Début cours Pendant cours Fin cours Fin plusieurs cours Pas de moment particulier
66,7% 100 % 34 % NR
NR
66,7% 83,3% 34% 17%
NR
16,7% 50%
16,7% 16,7%
16,7%
17% 50% NR NR
17%
50% 17% NR 34%
34%
66% 50% 50% 50%
NR
Fonction de l’évaluation (2 réponses) Donner note Mesurer compétences Mesurer progrès individuels Juger travail Classer /élèves Délivrer examen Autres
34 %
100 %
83,3 %
NR
NR
NR
NR
50 %
67 %
50 %
50 %
NR
NR
NR
17 %
66,7 %
84 %
34 %
NR
NR
NR
NR
50 %
50 %
34 %
NR
34 %
NR
34 %
33,3 %
34 %
NR
34 %
17 %
NR
66 %
66 %
17 %
34 %
17 %
17 %
NR Rôle de l’évaluation (3 réponses)
Connaitre niveau/élève Repérer difficultés Comprendre métier Aider à progresser Comprendre cours
Autres
66 %
50 %
34 %
34 %
100 %
NR
50 %
30 %
NR
30%
34%
NR
17 %
50 %
17 %
43 %
50 %
NR
34 %
38 %
83 %
34 %
NR
NR
17 %
33 %
17 %
34 %
17 %
17 % Avoir note
60 %
42 %
34 %
50 %
NR
NR
85
ELT ELN Baccalauréat Professionnel Baccalauréat Professionnel
Items
2nde 1ère Tle 2nde 1ère Tle Modalités (plusieurs réponses)
Fiche guide Activité pratique Activité orale Autres
84,3 % 100 % 34 % NR
50 % 100 %
NR NR
17 % 90 % 50 % NR
50 % 66 % 17 % NR
34 % 66 % 17 % 34 %
34 % 66 % NR NR
Sentiment face à l’évaluation Déception Motivation Blocage Joie Aucun sentiment Autres
34 % 66 % 17 % 66 % 90 % NR
34 % 50 % 83 % NR
66 % 17 %
fatigue
66,7 % 34 % 17 % 34 % 34 % 17 %
attente
50 % 34 % NR NR
66 % 17 % peur
17 % 34 % 17 % 34 % 66 % NR
50 % 34 % 34 % 17 % 34 % NR
oui 83,3 % 83,3 % 66 % 50 % 80 % 100 % Contestation notes non 16,7 % 16,7 % 34 % 50 % 20 % 0 %
Raison de la contestation Note correspond pas à niveau Note trop basse Note injuste Incompréhension sur façon noter professeur Autres
NR
34 % 50 %
50 %
NR
17 %
34 % NR
50 %
NR
17 %
17 % 17 %
50 %
NR
34 %
17 % 17 %
34 %
NR
17 %
17 % 34 %
66 %
17% Note fausse
17 %
50 % 34 %
34 %
NR
2.3 Relations avec le professeur dans l’acte d’évaluation
ELT ELN Baccalauréat Professionnel Baccalauréat Professionnel
Items 2nde 1ère Tle 2nde 1ère Tle Evaluation rapproche Evaluation permet de juger Evaluation permet de comprendre ce que le professeur attend
NR
16,7%
83,3%
NR
34%
83%
NR
34%
66%
NR
NR
100%
17%
17%
66%
17%
17%
66%
NR : non réponse
86
3- EXPLOITATION DES RAPPORTS D’INSPECTION
10 rapports d’inspection ont été analysés
CONTEXTE
Niveau de formation BTS : 75% licence : 25%
Age 31 à 40 ans : 20% 41 à 50 ans : 30% 50 ans et + : 50 %
Lieu de naissance DOM : 90 % France hexagonale : 10 %
Statut titulaire : 25 % non titulaire : 75 %
Grade PLP : 90% certifié : 10 %
Mode de recrutement concours interne : 50% concours externe : 50 %
Académie d’origine académie métropolitaine : 10%
Ancienneté dans la fonction
3 à 5 ans : 10 % 6 à 10 ans : 30 % + 10 ans : 20 %
+ 15 ans : 30 % + 20 ans : 10 %
Ancienneté dans le poste 3 à 5 ans : 10 % 6 à 10 ans : 30% + 10 ans : 60 %
PRATIQUES D’EVALUATION
Vérification des acquis de l’élève oui : 10 % non : 30 % en partie : 60 %
Moment de
l’évaluation/apprentissage
avant : 0 % pendant : 40 % en fin : 60 %
Modalités d’évaluation
oral : 100 %
individuel : 25 % groupe : 75 %
Type d’évaluation
questions faisant appel uniquement à restitution de savoirs
théoriques : 70 %
activités faisant appel uniquement à mise en œuvre de
compétences : 10 %
mixage de questions de connaissances et mise en œuvre de
compétences : 20 %
Cohérence évaluation/
objectifs apprentissage
oui : 25 % non : 0 % en partie : 75 %
Modalités de correction
Immédiate : 100% différée : 0 %
individuellement (auto correction) : 0 %
par groupe classe : 25 %
par le professeur : 75 %
Type d’exploitation
Immédiate : 25 % pas d’exploitation : 75 %
87
4- EXPLOITATION DES DOCUMENTS D’EVALUATION
L’observation porte sur des documents d’évaluation présents lors des visites d’inspection
CONTEXTE
Statut
titulaire : 100 % non titulaire : 0%
Type de documents
grille d’évaluation : 50 %
documents élèves : 20 %
autre (situation évaluation) : 30 %
PRATIQUES D’EVALUATION
Indication des compétences
évaluées
oui : 100 % non : 0 % en partie : 0 %
Cohérence compétences / activité
oui : 70 % non : 0 % en partie : 30 %
Adéquation barème/indicateurs
oui : 80 % non : 0 % en partie : 20 %
Adéquation barème/ exigences
oui : 70 % non : 10 % en partie : 20 %
Adéquation note/niveau
d’acquisition compétences
oui : 60 % non : 10 % en partie : 30 %
Adéquation note/appréciation
oui : 60 % non : 10 % en partie : 30 %
88
Université de Rouen
Département des Sciences de l’Éducation
Master Recherche Sciences Humaines et Sciences Sociales
Mention Sciences de l’Education
Nom : CILPA Marie Josée
Titre du mémoire : « Les pratiques évaluatives : cas du lycée professionnel dans
l’Académie de la Guadeloupe »
Directeurs de mémoire : Monsieur Pierre-Philippe BUGNARD
Monsieur Loïc CHALMEL
Résumé :
L’évaluation s’inscrit dans la continuité des pratiques de classe. Elle fait référence à des
modèles traditionnels et théoriques.
Ce mémoire porte sur les habitus évaluatifs dans le contexte de la formation et de
l’enseignement professionnels dans l’Académie de la Guadeloupe.
A partir d’un panorama historique de la notation à l’évaluation, et de la formation et de
l’enseignement professionnels, s’est dessiné les caractéristiques propres à cette Académie.
L’étude d’un échantillon représenté par les métiers du génie-électrique relevant du secteur
des sciences et techniques industrielles, s’est effectuée autour d’une hypothèse selon
laquelle les pratiques de ce secteur constitueraient plus un rituel visant à mesurer les
connaissances et les compétences plutôt qu’à permettre aux formés de progresser dans les
apprentissages.
Les méthodes d’investigations ont ainsi permis de confronter les résultats aux modèles
théoriques rencontrés dans la littérature. L’analyse aboutit à dresser les caractéristiques des
pratiques dans le secteur considéré, à valider mon hypothèse tout en définissant des
propositions d’évolutions des représentations.
Mots clés : notation, docimologie, évaluation, formation et enseignement professionnels,
représentations