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1L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 0062 L’espoir

801 BP 1850Abidjan 01, Côte d’IvoireTel : (225) 22 40 04 00Fax : (225) 22 40 04 [email protected] du Bureau Régional de la Banque mondiale (Côte d’Ivoire, Burkina Faso, Togo, Bénin)

Directeur de la PublicationPublisherMadani M. Tall

Rédacteur en ChefEditor in chiefEmmanuel Noubissie Ngankam

Rédacteur en Chef adjointEditorTaleb Ould Sid’Ahmed

RelectureEditingMarie France Anet

Comité EditorialEditorial BoardMadani M. TallLorenzo BertoliniIssa DiawMariko PhanseTaleb Ould Sid’AhmedMarie France AnetSaidou DiopEmmanuel Noubissie Ngankam

CollaborationHerbert Yusimbom BohSylvie NÉNONENE

Graphisme et ImpressionDesign and PrintingSNPECI

SOMMAIREL’ÉVÈNEMENT

DOSSIER

4

30

20

28

La Zone Franc CFA face à la Crise Européenne

Les enjeux de la réconciliation nationale

en Côte d’Ivoire

Burkina FasoPlaidoyer pour plus

d’efficacité de l’Aide Publique au Développement

revue du Portefeuille de la Banque mondiale au Bénin

Mettre l’accent sur les résultats

ZOOM SURL’ENSEA d’Abidjan

Une étoile dans la nuit noire

INSIDE THE BANKamadou ibrahim,

Pourquoi je suis revenuà la Banque mondiale

BANK IN ACTION

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3L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

Crises et opportunités Crisis and opportunities

Par / By Madani M. TallÉ D I T O R I A L

Je voudrais tout d’abord m’acquitter de l’agréable devoir de vous présenter mes vœux les meilleurs pour l’année 2012 et souhaiter que cette année apporte à chacun d’entre vous, santé et paix profonde.2011 a été une année difficile certes, mais elle aurait pu être pire pour les populations des pays dont mon équipe et moi avons la charge au nom de la Banque mondiale. La Côte d’Ivoire aurait pu s’embraser, les hoquets sociaux et les mouvements d’humeurs dans les rangs de l’armée auraient pu faire vaciller le Burkina Faso, l’élection présidentielle au Bénin était annoncée comme étant celle de tous les dangers, les grands chantiers de la transformation économique, sociale et politique du Togo restent ouverts bien que ce pays soit redevenu attractif comme nous le montrons en pages 25-27 de votre magazine.

2012 sera, selon certains experts, bien plus difficile encore. La crise de la zone Euro qui n’a pas fini de révéler son ampleur, nous interpelle tous et singulièrement les dirigeants de nos pays. En pages 4 et 5, nous appelons à l’urgence de la pensée et de l’action en vue de prévenir certaines externalités de cette crise qualifiée de « la plus grave depuis la seconde guerre mondiale ». Au-delà de son caractère inouï, cette crise pourrait être une opportunité pour certains pays africains ayant des liens particuliers avec la zone Euro.Plus spécifiquement, la Côte d’Ivoire qui polarise encore les attentions du fait entre autres, de son rôle moteur en Afrique de l’Ouest, est engagée dans un ardu processus de normalisation dont l’une des dimensions, sans doute la plus prégnante et la plus complexe, est la réconciliation nationale. Nous y consacrons un volumineux dossier de 12 pages avec à la clé une interview de M. Charles Konan Banny, Président de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR). Ce dossier est une contribution à la réflexion et n’a aucune prétention à l’exhaustivité tant la réconciliation, loin d’être de la seule responsabilité d’un individu ou d’une institution, est une quête multidimensionnelle qui requière la somme de toutes les intelligences, de toutes les compétences et de toutes les bonnes volontés. L’aboutissement de cette quête témoignera de la capacité ou non des Ivoiriens à transformer une décennie de crise en une formidable opportunité de création d’une nation.

First, it is a pleasure for me to wish you the best for 2012. I hope this New Year brings to all of you health and inner peace. 2011 was certainly a difficult year, but it could have been worse for people in the countries my team and I are in

charge of on behalf of the World Bank. Côte d’Ivoire could have blazed up; social hiccups and bitter mood in the army could have shaken Burkina Faso; the presidential election in Benin was heralded as that of all the dangers; the major economic, social and political transformations in Togo still to be completed even though this country has become attractive again as described on pages 25-27 of your magazine 2012 will, according to some experts, be even more difficult. The Euro zone crisis, which has not yet revealed its magnitude, is a challenge for all of us, particularly for the leaders of our countries. On pages 4 and 5, we are calling for urgent thinking and action to prevent some externalities of that crisis called “the worst since the second World War”. Beyond its unprecedented character, this crisis could be an opportunity for some African countries with special ties to the Euro zone.More specifically, Cote d’Ivoire, which is still the focus because of, among other things, its leading role in West Africa, is engaged in an arduous normalization process, one of whose dimensions, perhaps the most vivid and and the most complex, is the national reconciliation. We have devoted to this theme a 12-page analysis and commentary, including an interview with Mr. Charles Konan Banny, President of the Dialogue, Truth and Reconciliation Committee (CDVR). This article is a contribution to the debate and does not claim to be a comprehensive one, as reconciliation, far from being the sole responsibility of an individual or an institution, is a multidimensional quest that calls for everyone’s intelligence, competences and goodwill. The outcome of this quest will demonstrate the Ivorians’ ability or inability to turn a decade of crisis into a tremendous opportunity for the creation of a nation.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 0064 L’espoir

le 21 Novembre 2011, un quotidien ivoirien jette un gros pavé dans la marre en annonçant la dévaluation

imminente du Franc CFA. Dans un style révélateur de ses motivations, le journaliste étaye son article d’arguments et de détails dont la date exacte à laquelle interviendra la déferlante. Grace à la magie du web, l’information fait le tour du monde créant un buzz sur la toile. Une panique à la dimension du traumatisme provoqué par la dévaluation de 1994, s’empare des citoyens et des opérateurs économiques des 14 pays de la zone F CFA, panique amplifiée par le silence des ministres des finances et autres banquiers centraux qui semblent minimiser la portée et les effets dévastateurs de l’information. Les déclarations à l’emporte-pièce de certains officiels dont quelques-uns (et pas des moindres) n’hésitent même pas à évoquer les aspects positifs d’un éventuel ajustement monétaire, en rajoutent à la confusion. Les scénarios les plus alarmistes sont échafaudés et on assiste, médusé, à une gestion hésitante de l’information tant par les autorités monétaires nationales que par les deux Banques Centrales de l’UEMOA1 et de la CEMAC2 que sont la BCEAO3 et la BEAC4.S’il est évident que le faux « scoop » du journal Notre Voie a d’autres motivations qu’économiques et monétaires, il faut cependant lui reconnaitre, à tout le moins, le mérite d’avoir sonné le tocsin tout en attirant l’attention, sans le savoir ni le vouloir, sur un problème essentiel et de fond qu’est la gestion de la monnaie dans les pays de la zone CFA et l’avenir de cette zone monétaire à l’orée de la crise de l’Euro.

1 - Union Economique et Monétaire de l’Afrique de l’Ouest qui comprend huit pays : La Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Togo, le Niger, le Burkina Faso, le Bénin, le Mali et la Guinée Bissau2 - Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale composée de six pays : Le Cameroun, le Tchad, le Congo Brazzaville, le Gabon, La République Centrafricaine et la Guinée Equatoriale

3 - Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest 4 - Banque des Etats de l’Afrique Centrale

La crise de l’endettement des pays européens qui s’avère être l’un des événements majeurs de l’année 2011, n’a hélas pas fini de révéler toutes ses dimensions et les mots commencent à manquer pour la décrire. Dans ses vœux aux Français le 31 décembre dernier, Nicolas Sarkozy ne s’est pas encombré d’euphémisme : « C’est une crise inouïe, sans doute la plus grave depuis la deuxième guerre mondiale », dit-il, emboitant le pas à la Chancelière allemande Angela Merkel qui, dans la même circonstance, prévient ses compatriotes de ce que « l’Allemagne va bien, mais l’année 2012 sera sans aucun doute plus difficile que celle qui s’achève ». Mais au-delà des mots, les maux persistent avec l’annonce officielle le 13 janvier 2012 de la dégradation de la note financière de neuf pays de la zone Euro dont… la France, par l’agence Standard and Poor’s. Si ce n’est pas (encore) le couperet, çà y ressemble. En fallait-il plus pour finir de rallier à la bérézina ambiante ceux qui doutent encore de la tragédie qui se joue sous nos yeux et qui a placé les pays de la zone Euro sous

Ajustement Structurel? Voire ! Les faits et le langage de vérité de la part des deux principaux leaders du moteur européen démontrent à suffisance que le pronostic de Jacques Attali qui a pétrifié le monde entier en novembre dernier en annonçant que « la zone Euro ne passera pas Noel 2011 », n’a peut être été que retardé et la probabilité de sa réalisation reste forte et même très forte. Madame Christine Lagarde, Directrice Générale du Fonds Monétaire International (FMI) en a rajouté une couche lors de son séjour en Afrique du Sud au début du mois de janvier 2012 en prédisant une année particulièrement difficile pour les pays africains et singulièrement pour ceux ayant une relation privilégiée avec les pays de la zone Euro. Chaud devant !Au-delà des conséquences planétaires systémiques et cataclysmiques de la crise de la zone Euro, quel sera le sort des pays africains et singulièrement celui des 14 pays dont la monnaie commune le F CFA, est liée à l’Euro par un mécanisme tutélaire qui tire son essence du pacte colonial avec la France et consacré par le traité

Par EMMANUEL NoUBISSIE NgANkAM

La Zone Franc cFa Face à La crise européenne

L’urgence de la penséeet de l’action

Et si l’Euro était en péril…

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5L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

de Maastricht de 1992 instituant l’Union Economique et Monétaire européenne dont l’Euro est le principal socle ?Il importe de rappeler ici les fondements de ce qu’était alors la zone Franc et qui a survécu à l’avènement de l’Euro. Véritable héritage du découpage colonial de l’Afrique, le F CFA créé par la France le 26 décembre 1945, est depuis la mort du Franc Français le 1er janvier 1999, rattaché à l’Euro par une simple transposition des accords monétaires liant la France à 12 de ses anciennes colonies auxquelles se sont jointes la Guinée Equatoriale et la Guinée Bissau. Alors même que l’avènement de l’Union Economique et Monétaire européenne aurait dû ou pu sonner le glas de ces accords qui fondaient l’existence du Franc de la Communauté Financière Africaine en Afrique de l’Ouest (F CFA) émis par la BCEAO et le Franc de Coopération Financière en Afrique Centrale (F CFA) émis par la BEAC, la France a pu obtenir de ses partenaires européens une dérogation au traité de Maastricht qui en son article 109 stipule que « le conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, peut conclure des accords de taux de change avec des monnaies non-communautaires ». Par ailleurs, le protocole en annexe du traité prévoit à la demande de la France, qu’elle conserve le privilège d’émission dans les Départements et Territoires d’Outre-mer et qu’elle est habilitée à déterminer la parité du F CFA.Les accords monétaires évoqués plus haut, sont assis sur trois principes majeurs à savoir : (i) la parité fixe entre le F CFA et l’Euro sans aucune variation au jour le jour en fonction des demandes et offres de monnaies (1 Euro = 655,957 F CFA) ; (ii) la libre circulation des capitaux dans l’espace économique constitué par les 14 pays et la France, un principe qui, depuis le 2 août 1993, a été drastiquement restreint; et (iii) la convertibilité illimitée du F CFA garantie par la France. Cette garantie a une contrepartie majeure qui fonde de fait un quatrième principe qui est celui de la centralisation des réserves de change. Par ce principe, chacun des 14 pays est tenu d’ouvrir un Compte d’Opérations dans les livres du Trésor français, compte domicilié à la Banque de France et sur lequel sont déposés 50%5 des avoirs

5 - Ce taux est passé de 100% à 65% puis à 50% depuis 2005

extérieurs du pays. Les différents comptes d’opérations des Etats membres d’un même Institut d’Emission (BCEAO ou BEAC), se garantissant mutuellement. Ces principes qui fondent des Accords en vigueur depuis 1945 malgré quelques aménagements, sont aujourd’hui plus qu’ils ne l’ont jamais été, à l’épreuve des faits et des contraintes économiques. A la faveur de la crise de la zone Euro, la question monétaire dans les pays de L’UEMOA et de la CEMAC, devrait revenir au-devant de l’actualité en interpellant au premier chef les dirigeants de ces pays, les Gouverneurs des deux Instituts d’Emissions (BCEAO et BEAC), mais également les élites intellectuelles dont la discrétion pour ne pas dire le silence assourdissant face au cataclysme planétaire annoncé, devient pesant. Le cordon ombilical monétaire entre

l’Europe (à travers la France) et les pays de la zone F CFA a créé un système de vases communicants qui consacre la vulnérabilité de ces pays aux maux dont souffrirait la zone Euro. Au milieu de ce silence, quelques voix quand même, dont celle de Kako Nubukpo6 qui dans une tribune publiée sur le site Ouestafnews, démontre l’inopportunité d’un ajustement monétaire (dévaluation du F CFA) dans le contexte actuel et pose « la question plus globale de la pertinence du régime de change et du coût d’une gestion monétaire extravertie pour les populations de l’UEMOA ». D’un point de vue strictement économique, le Pr Nubukpo suggère «un système de change flexible qui aurait alors l’avantage d’assurer aux autorités de la BCEAO un apprentissage progressif de la gestion monétaire et d’envoyer par le biais d’un taux de change moins rigide des signaux réguliers aux populations de la zone sur l’état de leurs économies…». Pour l’économiste Togolais, outre la question du régime de change

6 - Kako Nubukpo est agrégé d’Economie et chef du pole analyse économique et recherche de la Commission de l’UEMOA

entre le F CFA et l’Euro, le véritable enjeu pour les pays de l’UEMOA est « d’envisager les modalités concrètes de réalisation de la monnaie unique pour l’ensemble de la CEDEAO7 qui devrait être effective en 2020. Dans cette perspective, il convient de lever les symboles historiques permettant de dépasser un clivage entre francophones et anglophones qui n’a plus lieu d’être ». Le problème de la rigidité du taux de change est corroboré par d’autres acteurs de premier plan dont Jean-Michel Severino, ancien Directeur Général de l’Agence Française de Développement (AFD) qui dans l’édition 2659 de l’hebdomadaire Jeune Afrique rappelle que si le F CFA « a défavorisé les exportations des pays africains, ce n’est pas tant son niveau que son régime qui est en cause, car celui-ci induit une évolution monétaire déconnectée de la conjoncture

africaine ». Il faudra, prescrit-il, « que les responsables africains réfléchissent sereinement aux bons mécanismes à lui substituer, mais qui ne devront ni mettre fin à l’union monétaire régionale ni couper totalement le lien entre l’Euro et le F CFA ». Serge Michailof, un autre ancien de l’AFD et de la Banque mondiale enfonce le clou lorsqu’il relève que « le F CFA surévalué a joué un rôle très négatif, mais surtout son caractère déresponsabilisant qui a été nuisible

car il est piloté par l’ancienne puissance coloniale». Ce qui est dit est dit !En tout état de cause, les dirigeants des pays africains de la zone CFA ne peuvent plus se permettre d’être indifférents à ce qui se passe en Europe. Ils ne peuvent plus se permettre l’économie d’une réflexion courageuse et dépouillée de toute considération émotionnelle, sur la monnaie et son statut dans leurs économies. Au moment où la zone Euro tangue, ils auront le choix entre d’une part (i) agir en anticipant le Tsunami annoncé et en tirant au passage toutes les leçons de la crise européenne notamment en ce qui concerne les dures lois de la gestion des finances publiques, et d’autre part (ii) subir les externalités d’une catastrophe dont ils ne sont en rien responsables tout laissant passer une fois de plus l’opportunité historique de remise à plat d’un système qui a peut être fait son temps.

7 - Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest qui comprend 15 pays (dont les 8 de l’UEMOA) et est peuplée de près de 300 millions d’habitants

Au moment où la zone Euro tangue, les dirigeants de la zone franc Cfa auront le choix entre agir en anticipant le Tsunami annoncé ou subir les externalités d’une catastrophe dont ilsne sont en rien responsables.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 0066 L’espoir

By EMMANUEL NoUBISSIE NgANkAM

On November 21, 2011, an Ivorian daily threw a big cat among the pigeons by announcing the

imminent devaluation of the CFA franc. In a style that reveals his motivations, the journalist supported his thesis with arguments and details including the specific date on which the tidal wave would occur. Thanks to the magic of the web, the information has gone around the world creating a buzz on the web. Panic commensurate with the scope of the trauma caused by the 1994 devaluation has struck citizens and economic operators in the 14 CFA zone countries. That panic has been exacerbated by the guilty silence of finance ministers and other central bankers who seem to minimize the scope and the devastating effects of the information. Some officials make hasty statements; some of whom (not the least) do not even hesitate to underscore the positive aspects of a possible currency adjustment, thus adding to the confusion. The most alarmist scenarios are constructed and here we are, dumbfounded at this ineffective information management by both national monetary authorities and the two WAEMU1 and CEMAC2 central banks that are BCEAO3 and BEAC4 respectively. While it is clear that the false scoop of the newspaper “Notre Voie” has motives other than economic and monetary ones, it is necessary to, at least, recognize its merit of ringing the alarm while, unintentionally or unknowingly, drawing attention to an important and critical issue, i.e. the management of the currency in the CFA

1 - West African Economic and Monetary Union, which includes eight countries: Cote d’Ivoire, Senegal, Togo, Niger, Burkina Faso, Benin, Mali and Guinea Bissau2 - Central African Economic and Monetary Community comprising six countries: Cameroon, Chad, Congo Brazzaville, Gabon, Central African Republic and Equatorial Guinea3 - Central Bank of West African States4 - Bank of Central African States

zone countries and the future of the currency on the brink of the Euro crisis.The debt crisis in European countries, which happens to be one of the major events of 2011, has unfortunately not finished revealing all its dimensions and no words could be equal to the task of describing it. In his Happy New Year wishes to the French on December 31, Nicolas Sarkozy was straightforward: “This is an unprecedented crisis, probably the worst since World War II,” he said, striking step with German Chancellor Angela Merkel who, in the same circumstance, warned her countrymen: “Germany is fine, but the year 2012 will undoubtedly be more difficult than the one that is ending.” But beyond the words, the problems persist with the official announcement, on January 13, 2012, of Standard & Poor’s downgrading of the financial ratings of nine euro zone countries including France. Even if this is not the chopping block (yet), it looks like it. Were more words needed to convince those who still did not want to believe in the tragedy unfolding under their very eyes, a tragedy that has put the euro zone countries

under structural adjustment? I doubt it. In any case, facts and the language of truth of the leaders of the EU’s top two countries amply demonstrate that the forecast of Jacques Attali, who petrified the whole world last November when he announced that “the Euro zone will not survive beyond Christmas 2011,” was just delayed and that the likelihood of its occurrence remains strong and even very strong. Mrs. Christine Lagarde, Managing Director of the International Monetary Fund (IMF), has added a layer during her stay in South Africa at the beginning of January 2012 by predicting a particularly difficult year for African countries, and especially for those with a privileged relationship with countries of the Euro zone. Watch out ahead!Beyond the global systemic and cataclysmic consequences of the crisis in the Euro zone, what is the fate of African countries and particularly that of the 14 countries whose currency, the CFA, is pegged to the Euro by a guardian mechanism which draws its essence from the colonial pact with France and is enshrined in the 1992 Maastricht Treaty establishing the European Economic

The cFa Franc Zone coping wiTh The european crisis

Urgency of thoughtand action

What future for cfa franc ?

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7L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

and Monetary Union of which the Euro is the main base ? It is important to recall here the foundations of what the Franc zone was then and which has survived the introduction of the Euro. A true legacy of the colonial division of Africa, the CFA, created by France on December 26, 1945, has, since the death of the French Franc on January 1, 1999, been pegged to the Euro by a simple transposition of the monetary agreements between France and 12 of its former colonies joined by Equatorial Guinea and Guinea Bissau. The advent of the European Economic and Monetary Union should or could have heralded the death of these agreements on which the existence of the West African Financial Community Franc (CFA) issued by BCEAO and the Central African Financial Cooperation Franc (CFA) issued by BEAC, but France was able to get a derogation from its European partners for the Maastricht Treaty, which in Article 109 stipulates: “the Council may, acting unanimously on a recommendation from the Commission, conclude formal agreements on an exchange rate system with non-Community currencies.” Moreover, the protocol annexed to the Treaty provides, at the request of France, that it retains the privilege of issue in its Overseas Departments and Territories and is entitled to determine the parity of the CFA.The monetary agreements mentioned above are based on three main principles: (i) a fixed parity between the CFA and the Euro without any day to day variation that would depend on currency supply and demand (1 Euro = 655.957 CFA), (ii) the free movement of capital in the economic area consisting of the 14 countries and France, a principle which, since August 2, 1993, has been drastically restricted, and (iii) the unlimited convertibility of the CFA guaranteed by France. This warranty is a major consideration which establishes a de facto fourth principle, which is the centralization of the foreign exchange reserves. Per this principle, each of the 14 countries is required to open an Operations Account in the books of the French Treasury. That account is held at the Banque de France and 50%5 of the country’s foreign

5 - That rate decreased from 100% to 65%, then to 50% in 2005.

assets are deposited into it. The various operations accounts of the member states of the same Issuing Institution (BCEAO or BEAC) guarantee each other. Despite some adjustments, these principles, on which the agreements in force since 1945 have been based, are, today more than they have ever been, tested by facts and economic constraints. In the light of the crisis in the Euro zone, the monetary issue in WAEMU and CEMAC countries should become topical again by calling, first and foremost, on the leaders of these countries, the Governors of the two Issuing Institutions (BCEAO and BEAC), but also on the intellectual elites whose discretion, if not deafening silence, in the face of the global cataclysm announced, is becoming heavy. The monetary umbilical cord between Europe (through France) and

CFA zone countries has created a system of communicating vessels that aggravates their dependence and vulnerability. In the midst of this silence, still a few voices, including that of Kako Nubukpo, who, in an article published on the Ouestafnews website, demonstrates the inappropriateness of a currency adjustment (devaluation of the CFA) in the current context and raises “the broader question of the relevance of the exchange rate regime and the cost of an externally-based currency management for the WAEMU people.” From a strictly economic point of view, Professor Nubukpo6 suggests “a flexible exchange rate system which would then have the advantage of gradually teaching monetary management to BCEAO authorities and sending, through a less rigid exchange rate, regular signals to the people of the area on the state of their economies ...” For that

6 - Kako Nubukpo is an Associate Professor of Economics and Head of the Economic and Re-search Analysis Node of the WAEMU Commission.

Togolese economist, in addition to the issue of the exchange rate regime between the CFA and the Euro, the real challenge for WAEMU countries is to “consider the practical arrangements for implementing the single currency for all ECOWAS7 countries, which should be effective in 2020. In this prospect, it is appropriate to remove the historical symbols so as to overcome the historical split between Francophones and Anglophones which has no reason to exist anymore”. Jean-Michel Severino, former Director General of the French Development Agency (AFD), and other leading key players corroborated the issue of exchange rate rigidity. Mr. Severino, in the 2659 issue of the weekly Jeune Afrique recalls that while the F CFA “has penalized African countries’ exports, it is not due so much to its level but to its regime, as it

leads to a monetary development disconnected from the African situation”. He proposes “that African leaders must think calmly of the right mechanisms to replace it, but these mechanisms should neither put an end to the regional monetary union nor totally cut off the link between the Euro and the F CFA”. Serge Michailof, another former employee of the AFD and the World Bank drives home the point, stating that “the overvalued F CFA has played a negative role, but most importantly its

disempowering character has been harmful, for it is controlled by the former colonial power”. What is said is said! In any case, African leaders of the CFA zone can no longer afford to be indifferent to what is happening in Europe; they can no longer shy away from courageous brainstorming, devoid of all emotional considerations, on the currency and its status in their individual economies. While the euro zone is pitching, they will have to choose between; (i) acting in anticipation of the predicted Tsunami by drawing all the lessons from the European crisis, particularly with respect to the harsh laws of public finance management, and (ii) undergo the externalities of a disaster they in no way bear responsibility for while missing, once again, a historic opportunity to overhaul a system which has seen its days.

7 - Economic Community of West African States, which comprises 15 countries (including the 8 WAEMU countries) and has a population of nearly 300 million.

While the euro zone is pitching, cfa zone leaders will have to choose between acting in anticipation of the predicted Tsunami or undergo the externalitiesof a disaster they in no waybear responsibility.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 0068 L’espoir

DOSSIER Par TALEB oULD SID’AhMEDDOSSIER

Après près de 15 ans de crises multiformes qui ont déstructuré la société ivoirienne, laissant des plaies béantes et des traumatismes profonds, l’heure est à la réconciliation. La Réconciliation Nationale, tout le monde la veut, tout le monde en parle, parfois avec des mots qui hélas ne traduisent pas toujours le langage de l’apaisement et de la vérité ; Ce qui peut être compris comme des réminiscences de nombreuses années de haine enfouie. Quelle que soit la charge émotive que véhiculent ces mots, l’expression du besoin, du désir et de la quête de la réconciliation semble partagée par l’immense majorité des ivoiriens. C’est en tout cas notre vœu dont l’une des manifestations est un dossier que nous consacrons au thème de la réconciliation en Côte d’ Ivoire. Il s’agit en fait d’un débat que nous ouvrons sur des questions diverses tels la Gouvernance, l’Houphouétisme, la relance économique etc. Nous donnons également la parole à M. Charles Konan Banny, Président de la Commission Dialogue Vérité et Réconciliation (CDVR), et à quelques jeunes ivoiriens qui espèrent d’un avenir meilleur pour leur pays.Ont contribué à ce Dossier : Madani M. TallEmmanuel Noubissié NgankamTaleb Ould Sid’ahmedRobert YunguJean-Noël Gogoua

Gouvernanceet Réconciliationen Côte d’Ivoire

les enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

la Côte d’Ivoire semble à la croisée des chemins et voudrait définitivement tourner le dos au passé à travers entre autres, un processus de réconciliation dont le Président

Ouattara en a fait sa seconde priorité après la sécurité. Ce processus qui se veut inclusif nécessitera certes un engagement individuel de chaque citoyen, mais plus que jamais, exigera de l’Etat incarné par les pouvoirs publics et les institutions de la République, une gestion irréprochable des ressources, de toutes les ressources nationales. C’est ici qu’apparait l’enjeu de la Gouvernance dans le processus de réconciliation.Le concept de Gouvernance dont la définition revêt une certaine complexité, est fondu dans un cadre normatif unanimement accepté par tous les spécialistes. Ce cadre est assis sur le triptyque Participation, Transparence et Redevabilité ou obligation de rendre compte. Avant de revisiter ce triptyque à l’aune de la réconciliation, quelques repères nous donnent la perception qu’ont un certain nombre d’institutions de renom, de l’état de la Gouvernance en Côte d’Ivoire. Selon l’indice de la qualité de gouvernance de la fondation Mo Ibrahim, la Côte d’Ivoire se situe à la 46ième place sur 53 en Afrique, très loin derrière le Ghana voisin qui occupe la 7ième place. L’Indice de perception de la corruption de l’ONG Transparency International, classe la Cote d’Ivoire au 154ième rang au monde sur 183 avec une note de 2,2 sur 10. Loin derrière le Ghana qui occupe le 69ième rang. Ces perceptions d’institutions internationales ne sont que le reflet d’une situation interne dont l’amélioration pourrait favoriser le « vivre ensemble » que les ivoiriens ont perdu et qui était pourtant leur marque de fabrique.Pour ce qui est de la participation, elle renvoie entre autres, à la notion de décentrement qui permet au citoyen à travers son représentant, de participer effectivement à la prise de décision ainsi qu’à la mise en œuvre de celle-ci. Cette participation se fait à la fois par le biais des institutions (parlement, collectivités locales) et de la société civile dont le rôle de sentinelle est de plus en affirmé. Dans le contexte ivoirien, la mise

en place de nouvelles institutions longtemps différée du fait de la crise, est fondamentale. Ces institutions se doivent d’être maquées non seulement du sceau de la légalité, mais également et surtout de celui de la légitimité populaire. Après l’élection présidentielle d’octobre et novembre 2010 dont l’épilogue est survenu après, hélas, une douloureuse et longue parenthèse, les législatives du 11 décembre 2011, il faut l’espérer, doteront la Côte d’Ivoire d’un parlement dont le rôle de législateur et de contrôleur de l’action gouvernementale sera légitimé par la pluralité des opinions qui s’y exprimeront. C’est à cette condition qu’il pourra porter fièrement le label de « Représentation Nationale » car, le parlement est le lieu par excellence de l’expression de la démocratie et de la diversité. Dans le même ordre d’idée, les prochaines élections municipales sont essentielles car elles permettront de désigner et de légitimer l’exécutif local qui, selon le degré de décentralisation admis par les lois de la République, constitue le creuset de la participation du citoyen à la gestion de son environnement immédiat. La commune est le lieu où se forgent la conscience démocratique et la participation à la gestion de la cité. Le Maire, le Conseiller Municipal sont les voisins ou les parents à qui mandat est donné de gérer les ressources de la petite communauté. En Côte d’Ivoire et ce pour des raisons diverses, la participation du citoyen à la base reste relativement faible si on s’en tient à une étude diagnostique sur la Gouvernance menée il y a un an par la Banque mondiale, étude qui montre que seulement un citoyen sur 18 participe à des initiatives publiques d’élaboration des budgets communaux. Dans une interview accordée au quotidien Fraternité Matin le 28 décembre 2011, le Président de l’Union des Villes et Communes de Côte d’Ivoire (UVICOCI), Monsieur Francois Amichia, formulait les attentes du citoyen par rapport aux prochaines consultations municipales. Le degré de décentralisation (transfert de pouvoirs et de ressources) et la légitimité populaire des prochains exécutifs communaux, fonderont la volonté de réconciliation des populations dès lors

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9L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

DOSSIERDOSSIERles enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnale

en côTe d’ivOire

qu’à la base elles auront elles-mêmes légitimé le leadership local et auront la latitude de leur retirer leur confiance le cas échéant. L’enjeu est d’autant important pour le processus de réconciliation que la diversité socioculturelle a été malmenée voire instrumentalisée donnant naissance à un lexique où l’on retrouve des termes tels que autochtones, allochtones, allogènes. Le leadership local qui sortira des prochaines consultations municipale sera t-il dépouillé de ces considérations ?Pour ce qui est de la Transparence et de la Redevabilité qui complètent le trépied de la Gouvernance, elles sont des catalyseurs de la réconciliation dans un pays qui sort péniblement de dix années de crise militaro-politique marquée entre autres par une partition de fait du pays et une gestion hors budget d’une partie des ressources nationales et particulièrement dans l’ancienne zone CNO (Centre Nord-Ouest). Disons le sans ambages ; cette période a été marquée par un déni de transparence et de redevabilité que personne ne souhaiterait voir rééditer. Des velléités de survivance de cette période que l’on observe encore ici et là sont des actes qui confinent à de la défiance à l’autorité de l’Etat. Certes, on ne sort pas de dix ans de conflit armé comme si l’on descendait d’un ring de boxe c’est-à-dire en s’embrassant ; mais l’Etat qui a le monopole de la violence légitime se doit de faire valoir son autorité afin de rassurer à la fois les citoyens, les investisseurs

et les partenaires économiques et financiers. Les survivances de la chienlit, même si elles sont à la marge, ne constituent pas moins des pesanteurs sur la voie de la réconciliation, tant elles font peser des soupçons sur l’impartialité de l’Etat. Sur un plan normatif, de nombreux chantiers restent ouverts

notamment, le parachèvement de la réforme des marchés publics, source des plus grandes concussions, la poursuite de la réforme de la justice avec entre autres, la mise en place effective d’une cour des comptes, d’un tribunal du commerce, la participation plus active de la société civile à la gestion des affaires publiques notamment par l’accès aux comptes publics, la mise en place d’un cadre législatif et réglementaire contre la corruption etc. A cet effet, après l’adhésion à la Convention

des Nations Unies contre la Corruption et l’élaboration de la Charte Ethique et d’un Code de Déontologie pour les membres du gouvernement, une loi sur la déclaration de la fortune des membres du Gouvernement, des élus et autres gestionnaires de la fortune publique, serait de nature à rassurer l’opinion publique sur les orientations nouvelles des autorités. De tels engagements, s’ils étaient effectivement appliqués sans faiblesse de quelle que nature que ce soit, emporteraient l’adhésion à une cause commune.

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La vice-présidente de la Banque mondiale magnifie la réconciliation.

La participation, la transparence et la redevabilité sont des catalyseurs de la réconciliation dans un pays qui sort péniblement d’une longue crise marquée entre autrespar la partition du pays.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00610 L’espoir

en créant la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR), le Président Alassane Ouattara a non seulement réalisé une

promesse faite lors de sa campagne électorale, mais il a pris le risque d’ouvrir la boite de pandore qui pourrait livrer des vérités dont certaines ont été longtemps enfouies, dissimulées ou falsifiées. Au-delà des missions confiées à la CDVR dont le mandat est circonscrit dans le temps (deux ans), la réconciliation qui s’abreuve aux sources du dialogue et surtout de la vérité, interpelle TOUS les ivoiriens et singulièrement les élites intellectuelles qui se voient ainsi offrir une opportunité historique de mettre leur intelligence au service de la communauté, de jouer le rôle qui est le leur à savoir celui de phare, d’éveilleur de conscience et de gardien des valeurs. Exemple de réussite économique et d’intégration sociale, la Côte d’Ivoire qui sort péniblement d’une quinzaine d’années de crises multiformes, était pourtant bien partie si l’on s’en tient à l’apparente prospérité de ce pays dont le charismatique leader historique, Félix Houphouët-Boigny, avait fait des choix que d’aucuns croyaient bâtis sur du rock et qui ont d’ailleurs inspiré un cadre normatif dénommé Houphouétisme. La question de fond qui se pose à la CDVR et aux élites ivoiriennes aujourd’hui est celle de savoir si l’on peut raisonnablement comprendre les fondements des crises ivoiriennes en vue de les exorciser sans questionner, voire revisiter la philosophie politique qui a servi de socle à plus de trente

années de règne sans partage du «Père de la Nation» ? Si cette ingénierie politique était si pertinente, d’où vient-il que l’héritage du « Vieux » ait été si lourd à porter au point où la Paix, valeur cardinale qu’il plaçait au-dessus de toutes les autres, ait été dévoyée et piétinée ?Véritable idéologie au sens marxiste du terme, c’est-à-dire un système de représentation sociale au service d’un dominant ou d’une classe dominante, l’Houphouétisme, dont se réclame aujourd’hui l’essentiel de la classe politique ivoirienne, avait une capacité mobilisatrice et fédérative assise certes, sur des valeurs telle la culture de la paix

et du dialogue, mais l’Houphouétisme était selon l’un des éminents intellectuels africains, l’anthropologue et historien ivoirien Harris Memel-Fotê de regrettée mémoire, bâti sur un trépied constitué de : (i) l’ouverture sur l’extérieure dont l’une des retombées a été l’afflux de la main d’œuvre étrangère ayant contribué au « miracle » ivoirien ; (ii) la gestion patrimoniale des ressources publiques, conceptualisée par Jean-François Bayart. Cette forme de patrimonialisme assimilée par certains anthropologues à la philosophie du «Grilleur d’arachides» qui se gave à force de goutter pour apprécier la cuisson. Mais, n’est pas grilleur d’arachides qui veut. Il doit

réconciliation en côte d’ivoire :

Le président Félix Houphouet Boigny : il était la paix incarnée mais…

Faut-il revisiter l’Houphouétisme ?«Pardonner ne signifie pas ignorer l’offense, ni camoufler d’une étiquette trompeuse un acte répréhensible. Pardonner signifie plutôt que la faute n’est pas un obstacle à la relation. Le pardon est le catalyseur qui créé les conditions nécessaires à un nouveau départ».Martin Luther King

DOSSIER Par TALEB oULD SID’AhMEDDOSSIER les enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

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11L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

surtout appartenir à la clientèle politique, un réseau qui a fonctionné comme un rhizome ; (iii) le mythe de l’idéologie ethnocentrique de l’Etat et de l’idéologie aristocratique de l’ethnie.Ce troisième pilier a été questionné par Memel-Fotê qui part du constat que la Côte d’Ivoire est un patchwork d’une soixantaine d’ethnies regroupées en quatre grandes familles linguistiques que sont les Akan (Baoulé, Agni, Abron, Alladian, Avikam, Attié, Abbey et les lagunaires), les Kru (Bété, Wé, Dida, Bakwé, Guéré, Néyo), les Mandé (Malinké, Dan, Kwéni), les Voltaïques ou Gur (Sénoufo, Koulango, Lobi). Ces deux derniers groupes situés essentiellement dans la partie septentrionale du pays sont faussement assimilés aux Dioula (commerçants et musulmans selon l’imagerie populaire).Selon Memel-Fotê, Houphouët-Boigny qui était Akan (Baoulé) a assis son pouvoir sur le mythe de la prédisposition de ce groupe à exercer le pouvoir avec une prééminence pour les Baoulé et les Agni. Cette hiérarchisation extrêmement dangereuse car porteuse des germes de la frustration et de la division, a été vécue et acceptée pour ne pas dire tolérée pendant plus de trente ans, aidée en cela par la relative prospérité du pays et un système accommodant de redistribution de la rente.La vérité historique nous rappelle que dès le milieu des années 80, la première secousse tellurique que connait la Côte d’Ivoire, c’est la crise économique qui ébranle les bases du système rentier qui avait jusque là fonctionné sans heurt. Cette fissure dans la méthode Houphouët fait le lit d’une opposition politique qui donne de plus en plus de la voix face à un pouvoir usé et au « Vieux » fatigué et malade. La première salve est donnée en Octobre 1990 quand un Kru du nom de Laurent Gbagbo, ose l’inimaginable et obtient près de 20% de suffrage à la première élection présidentielle pluraliste. Certes La Baule est passée par là, mais c’est un véritable « Tsunami » que seule l’anthropologie politique de la Côte d’Ivoire permet de comprendre. La brèche est ainsi ouverte et ne se refermera plus jamais car la vulnérabilité du système est mise en évidence.

L’Houphouétisme se délite et la société ivoirienne que l’on croyait parfaitement intégrée, révèle ses limites structurelles. Les événements s’enchainent : La mort du Vieux en 1993, précédée un an plus tôt par la publication de la « Charte du Grand Nord » qui ne fait aucun mystère des revendications de l’élite Mandé et Gur à ne plus jouer les seconds rôles au sein du PDCI et à prendre toute sa place sur la scène politique nationale. La création du RDR et les élections de 1995 pour lesquelles Alassane Ouattara est disqualifié, le coup d’Etat de Décembre 1999, le chiffon rouge de l’ivoirité, barbarie ethnonationaliste, construction intellectuelle revêche qui a causé tant de dégâts malgré la confession de certains de ses concepteurs et contemplatifs, les élections présidentielles de 2000 qui voient la consécration de …Laurent Gbagbo, un Kru (Bété), la rébellion de Septembre 2002, forme d’expression (?) des élites du Grand Nord, et l’épilogue d’Avril 2011 qui signe la fin d’une violente et meurtrière crise post-électorale et consacre l’accession à la magistrature suprême d’Alassane Dramane Ouattara, un « Dioula ». Qui l’eut cru ? Certes la Côte d’Ivoire a vacillé (pour ne pas dire plus), certes, la quête d’une nation et la cohésion sociale ont été éprouvées, mais sauf à être de mauvaise foi ou de lire l’histoire à l’envers, ce pays est resté debout grâce à certains piliers sur lesquels Houphouët-Boigny l’avait bâti. Mais ces piliers, pour solides qu’ils soient, pourraient ne pas résister au discours manichéen de certains pamphlétaires qui veulent qu’il y ait d’un côté de bons et de l’autre de mauvais Ivoiriens suivant que ceux-ci appartiennent à tel parti politique ou à telle ethnie. Tout en

évitant l’Houphouétisme à rebours, ceux qui ont pris leur revanche sur l’histoire, ont l’impérieux devoir d’inviter les ivoiriens à se parler à eux-mêmes, sans faux-fuyant et sans pudeur. Il ne devrait pas avoir dans ce pays à qui la nature a tant donné, une caste de gouvernants et une de gouvernés. Il ne devrait pas avoir d’Ivoiriens à part et des Ivoiriens à part entière. Il ne devrait pas avoir ceux qui labourent et ceux qui moissonnent. L’aire de la rente, il faut l’espérer, est définitivement révolue et ce sera à chacun selon son travail et ses mérites. Il faut également l’espérer, l’heure de l’égalité des chances a sonné et que cette nouvelle donne sera portée non seulement dans le discours, mais dans les faits, l’exemple venant d’en haut.La réconciliation nationale appelle à un devoir de mémoire et même d’inventaire notamment de la part de tous ceux qui ont été formés au moule du PDCI-RDA et qui peu ou prou se sont réclamés ou se réclament encore de l’Houphouétisme dont les indéniables acquis ne sauraient justifier que soient tues ses carences voire ses perversions. L’ethnicisation outrancièrement dangereuse du pouvoir en a été et pour ceux qui contesteraient les thèses de Harris Memel-Fotê, ils devraient à tout le moins, avoir la grandeur de vue de reconnaitre que pour n’avoir pas été un Saint, le « Père de la Nation » a peut être commis la faute coupable de n’avoir pas pu, su, ou voulu mettre de l’ordre dans la maison Côte d’Ivoire avant de s’en aller. Que cette faute serve de leçon à ceux qui souhaitent, veulent et œuvrent pour que la Côte d’Ivoire se réconcilie avec elle-même. CQFD (Ce Qu’il Fallait Démontrer)

DOSSIERDOSSIERles enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnale

en côTe d’ivOire

Le mythe de l’idéologie ethnocentrique de l’Etat et de l’idéologie aristocratiquede l’ethnie portait lesgermes de la crise.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00612 L’espoir

L’INvITé : ChArLES koNAN BANNyPrésident de la Commission Dialogue, vérité et réconciliation (CDvr)

Monsieur le Président, la CDVR créée par ordonnance du Président de la République le 13 juillet 2011 a été officiellement portée sur les fonts baptismaux le 28 septembre 2011. Trois mois après, où en êtes vous avec la phase opérationnelle de votre mission ? La CDVR a-t-elle été dotée des moyens à la dimension des enjeux de son mandat ?La Commission ayant été instituée au milieu de l’année budgétaire 2011, la dotation de l’État en sa faveur n’a pas atteint pour l’instant la hauteur qu’on pouvait légitimement attendre. Mais les démarches en cours permettront, j’en suis persuadé, de corriger cette faiblesse. Ajoutons à cela que la Commission a sollicité le concours de quelques partenaires bilatéraux, multilatéraux et internationaux pour l’aider à mener à bonne fin la mission qui lui a été assignée. Ces requêtes donneront sûrement des résultats.

L’ordonnance qui crée la CDVR stipule qu’elle a pour mission « d’œuvrer en toute indépendance à la réconciliation et au renforcement de la cohésion sociale entre toutes les communautés vivants en Cote d’Ivoire ». Cette ordonnance charge la CDVR d’élaborer une typologie des violations des droits humains susceptibles d’être l’objet de ses délibérations. Cette typologie a-t-elle été élaborée? Si oui, quelle est-elle ?La typologie des violations ne varie guère d’une crise à l’autre. On connaît les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, les assassinats ciblés, les viols, les destructions de biens publics ou privés, les atteintes graves à la liberté, les enlèvements, la spoliation des biens, etc. Mais la commission n’est pas encore parvenue au stade de l’élaboration d’une typologie attestée par les faits. Il appartiendra aux commissions spécialisées qui seront mises en place, notamment celle chargée des investigations, de dire quels types de violations se retrouvent dans le cas ivoirien.

Nommé à la tête de la Commission Dialogue et Réconciliation (CDVR) en mai 2011, Charles Konan Banny a le profil de l’emploi. Haut commis de l’Etat, il a un sens élevé de la chose publique. Ancien Gouverneur de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), il connait mieux que quiconque, l’interpénétration entre la Côte d’Ivoire et la sous-région. Ancien Premier Ministre dans un contexte de crise de 2005 à 2007, qui mieux que lui connait les faces visibles et invisibles de la déstructuration de la société Ivoirienne ? Il a la réputation d’être élitiste et cassant ; peut être parce qu’il a horreur de la médiocrité. A l’abord, on découvre un homme certes extrêmement rigoureux, mais dont l’humanisme, les grandes qualités intellectuelles et le rêve qu’il entretien pour son pays, rappellent qu’il sort du moule de Houphouët-Boigny à qui il se réfère très souvent.

DOSSIER DOSSIER Par TALEB oULD SID’AhMEDDOSSIER DOSSIERles enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

les enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

Charles Konan Banny avec foi et détermination

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13L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

Les origines des crises ivoiriennes sont multiples. J’évoquerais ici le foncier notamment rural, l’exclusion sous toutes ses formes, la question identitaire, le déni de nationalité, la lute pour la conquête et l’exercice du pouvoir. Si la CDVR veut exorciser tous ces maux, elle ne pourra faire l’économie de scruter leurs racines. En a-t-elle les moyens ? Et puis, deux ans qu’est la durée de votre mandat, n’est ce pas un peu court pour ne pas dire impossible ?La Côte d’Ivoire n’en est pas à sa première tentative de recherche des origines de la crise qui la frappe depuis plus de 15 ans. On se souvient du Forum organisé en 2001 par l’ancien Président de la République, tout comme du projet de Forum de dialogue national conçu du temps où j’exerçais les fonctions de Premier ministre ! Toutes ces expériences ont permis de rassembler une importante documentation qui fera l’objet d’une revue critique de la part de la Commission avant que la Commission spécialisée chargée des questions heuristiques n’effectue ses propres recherches. Aurons-nous tout achevé en deux ans ? Le travail de la Commission ne sera jamais achevé ! La Côte d’Ivoire devra de toute façon se doter d’un observatoire qui donne l’alerte pour prévenir la survenue des crises dans notre pays.

Dans une note intitulée « De l’Etat N’zassa1 à l’horizon national », vous placez le Pardon au cœur de la mystique de la réconciliation et vous déclarez « le succès de la mission de réconciliation passe par une exigence de réparation des préjudices subis ». N’y a-t-il pas là une sorte d’ambivalence entre l’impérieuse nécessité du pardon et l’exigence de réparation des préjudices ?Au contraire ! La réparation des préjudices subis ouvrira la voie

1 - Appellation donnée en Côte d’Ivoire aux pagnes bigarrés confectionnés

par le recollement de plusieurs morceaux d’autres

au pardon accordé par les victimes des exactions. Les victimes seront elles-mêmes convaincues de la nécessité de pardonner à leurs bourreaux si ces derniers reconnaissent leurs fautes et rendent ainsi possible la réhabilitation de ceux qu’ont affectés leurs actes répréhensibles.

Monsieur le Président, vous n’avez de cesse de rappeler que la mission de la CDVR n’interfère pas avec celle de la justice. Pourriez-vous clarifier cette démarcation ? Dans le contexte ivoirien et au regard du profil de tous ceux qui ont été peu ou prou impliqués dans des actes d’atteinte aux droits humains, peut-on envisager la réconciliation sans amnistie ?Chacun doit accepter de répondre des fautes ou des crimes qu’il a commis. En outre, le rétablissement de la cohésion sociale et le maintien de la paix passent nécessairement par la sanction des fautes. L’impunité, à l’inverse, menace la cohésion sociale et conduit à l’enracinement de la violence et des violations des droits humains.

Qu’est-ce que l’amnistie, sinon la rémission des fautes ? Pardonner, c’est en quelque sorte remettre la faute commise en dehors des sanctions pénales. Il n’est pas exclu, du reste, que le pardon soit associé à des remises de peine comme cela arrive dans toutes les justices du monde.

On peut relever pour le déplorer, une certaine déconnexion entre la quête de la réconciliation et les attitudes de certains ivoiriens. Je pense ici à certains organes de presse ou à une catégorie de citoyens qui semblent ramer à contre-courant. Je pense également au manque de synergie entre les actions parfois bienveillantes de certaines élites et les activités de la CDVR. Ceci ne laisse t-il pas augurer de ce que la quête de réconciliation n’est pas (encore) en Cote d’Ivoire la chose la mieux partagée.Si tout le monde était tendu comme un seul homme vers l’objectif de

DOSSIER DOSSIER Par TALEB oULD SID’AhMEDDOSSIER DOSSIERles enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

les enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

La citoyenneté ivoirienne se construira par l’intégration et non par l’ostracismeet l’exclusion.

Les membres de la Cdvr : ils incarnent l’espoir de tout un peuple.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00614 L’espoir

la réconciliation, la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation n’aurait pas de raison d’être. C’est parce que la Côte d’Ivoire a subi une grave crise de confiance qu’il a paru indispensable de désigner un arbitre pour raccorder les Ivoiriens divisés. Quand, par surcroît, le pays sort d’une guerre civile, les rancœurs ne peuvent pas disparaître par enchantement. Nous savons que notre tâche n’est pas aisée, que nous devrons nous armer de patience et d’opiniâtreté pour amener les personnes réticentes à s’engager dans le processus de réconciliation. Si nous parvenons à susciter la confiance de tous les protagonistes, nous atteindrons l’objectif de la réconciliation.

A l’observation de la société ivoirienne, on a la nette impression que la déstructuration sociale se nourrit des inégalités, de la précarité et de l’exclusion, qui semblent s’accroître chaque jour davantage. Les jeunes n’ont plus de repère. Ils sont plus de 4 millions au chômage. Le système éducatif est en déliquescence. Les principales universités d’Etat sont fermées. Deux promotions de bacheliers ont perdu tout espoir de franchir le seul d’un amphithéâtre sauf à être de famille aisée pour s’expatrier. Qu’est-ce que cela vous inspire dans la perspective de la réconciliation nationale ? La CDVR se sent-elle interpellée par ce type de préoccupation ?Le problème que vous évoquez est ancien. Il résulte de la croissance rapide du pays, de l’explosion démographique, des progrès de la scolarisation, de la survenue de la crise économique des années 1980 et de l’inadéquation des solutions envisagées pour résoudre les problèmes posés. Personne ne le nie ! La Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation sait, comme chacun, que sans une large composante économique, la réconciliation ne sera qu’un vœu pieux. Les problèmes sérieux évoqués par votre question, ont alimenté dans le passé la politique d’instrumentalisation de la jeunesse, cette jeunesse devenue aujourd’hui un véritable « Lumpenprolétariat », pour parler comme les marxistes ! La CDVR place pour cette raison la jeunesse au cœur de ses préoccupations.

Le peuple ivoirien est incontestablement profondément croyant si on en juge par la fréquentation des maisons de prêche (églises, temples, mosquées). Vous-même avez récemment placé votre mission sous la bienveillante protection de la Sainte Vierge Marie. Et si la tragédie ivoirienne qui dure depuis près de 15 ans était un châtiment de Dieu.Je suis assurément un croyant et la philosophie religieuse à laquelle j’adhère me persuade que rien d’humain ne s’accomplit sans la volonté divine. Je suis convaincu que la main de Dieu intervient dans le cours de la vie des hommes. Je sais également que Dieu est bon et qu’il ne jette pas la malédiction sur ses créatures, mais au contraire les guide avec amour sur le chemin de la vérité et de la repentance.

Monsieur le Président, qu’est-ce qu’être Ivoirien aujourd’hui ?La question « qu’est-ce qu’être ivoirien ? » est la plus sérieuse qui se

posera dans les plus brefs délais aux citoyens ivoiriens. Ils devront y répondre avec intelligence en ayant à l’esprit les préceptes du Président Houphouët-Boigny. La citoyenneté ivoirienne se construira par l’intégration et non par l’ostracisme et l’exclusion. Le Président Houphouët-Boigny a rêvé ce pays comme une oasis cosmopolite accueillante à tous les hommes. Là est la source des progrès

considérables réalisés en trois décennies par la Côte d’Ivoire. Le Président Houphouët-Boigny voulait construire une Société de Confiance en Côte d’Ivoire. Sa confiance en l’homme a entraîné le progrès. Notre défiance a freiné le développement. La Côte d’Ivoire n’a pas d’autre choix que de revenir à ces fondamentaux. Nous devons jeter aux orties la culture de la citadelle assiégée et concevoir une nouvelle citoyenneté ivoirienne généreuse et humaine. Si nous ne le faisons pas par notre propre volonté, les faits nous y contraindront.

Y a-t-il une question qui vous tient particulièrement à cœur et que nous n’avons pas abordée ?Je voudrais simplement m’adresser aux Ivoiriens

par le truchement de votre publication pour les appeler au dialogue et à la réconciliation. Je profite également de votre tribune pour rappeler aux bailleurs de fonds que la Côte d’Ivoire est un pays-région et qu’en l’aidant à retrouver son équilibre par la réconciliation, elle aura aidé toute l’Afrique de l’Ouest. La pauvreté nourrit le repli sur soi et l’hostilité aux autres. La prospérité, quant à elle, se partage plus aisément. Alors aidez la Côte d’Ivoire à retrouver la prospérité et toute l’Afrique de l’Ouest y gagnera.

La pauvreté nourrit le repli sur soi et l’hostilité aux autres. La prospérité, quant à elle, se partage plus aisément.

Le président de la Cdvr : « Nous savons que notre tâche n’est pas aisée »

DOSSIER DOSSIER Par TALEB oULD SID’AhMEDDOSSIER DOSSIERles enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

les enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

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15L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

M. anzouMana, 44 ans, chômeur, père de quatre enfants, Abidjan.« Nous souhaitons passer à autre chose »La Côte d’Ivoire de demain sera meilleure que celle d’où nous venons de sortir. C’est à l’avenir de nos enfants que nous pensons. Si ça va pour eux, ça ira pour nous. Que l’Etat fasse l’effort d’occuper tout le monde à faire autre chose que la guerre . Chacun vivrait en total respect par rapport à l’autre si tout le monde avait du travail. La réconciliation doit passer par le pardon ; le refus de se venger. Je lance un appel à tout le monde pour qu’on puisse s’entendre, comme au temps du Président Félix Houphouët Boigny. C’est le moment de regarder vers le futur, oublier le passé, malgré les blessures qu’il a pu engendrer. Ce qui s’est passé est dur, mais il faut s’entendre quelque soit notre ethnie. Je suis avec les Bété, les Dida, les Gouro et on s’entend bien. Nous voulons passer à autre chose.

Mlle Yéo djelika, 29 ans, jeune femme d’affaires« Une nouvelle vision pour la Côte d’Ivoire »A mon âge, je ne me fais pas trop d’illusion : Un pays instable n’a aucun avenir. Mon profond désir est de voir mon pays retrouver pleinement paix et quiétude. J’en appelle donc aux autorités pour mettre fin définitivement au climat

d’insécurité qui nous rend la vie très difficile Il faudrait aussi penser à l’emploi des jeunes et à la construction d’hôpitaux. Je pense à la réouverture des universités pour que les étudiants retrouvent rapidement le temple du savoir. Je voudrais que mon pays ait une nouvelle vision. Et que nous vivions dans la paix pour qu’il y ait une forte réconciliation. Nous avons plusieurs ethnies en Côte d’Ivoire qui prouvent que nous ne sommes pas divisés ; au contraire, nous sommes ensemble ! Nous devrons constituer une équipe forte et dynamique pour avancer afin que la nouvelle vision soit vraiment dans la fraternité. Ensuite, que l’Etat aide les PME victimes de la crise post –électorale à se relancer pour participer à la renaissance économique de la Côte d’Ivoire, car les PME en constituent le fer de lance.

HerMann Hokou, 25 ans, Secrétaire exécutif du Réseau Jeunesse Paix et Développement« J’ai foi en la jeunesse ! »Ma vision de l’avenir est optimiste. La Côte d’Ivoire fait face à des problèmes structurels tels que l’éducation, l’emploi des jeunes, etc. Il faudrait du temps pour régler tous ces problèmes . Une autre Côte d’Ivoire doit naître, décomplexée et unie pour relever tous ces défis. Je constate qu’aujourd’hui, les clivages idéologiques et certaines croyances tendent à disparaître. De nouvelles dynamiques se

créent entre tous les jeunes du monde, grâce aux réseaux sociaux. On se rend compte qu’il y a un héritage commun à préserver. Des aspirations communes naissent et de grandes actions sont mises en œuvre. Le rôle important joué par les jeunes dans les révolutions arabes en dit long sur ces mutations sociopolitiques. Les jeunes sont tous unanimes sur ce qu’ils ne veulent plus. L’avenir sera différent, l’espoir est permis.

Maïga aBdoulaYe, 12 ans, élève en classe de 5ème, Attécoubé, Abidjan.« On est dans le présent »Je veux que la Côte d’Ivoire soit bien. Que les gens se réconcilient. On doit oublier ce qui s’est

passé ; maintenant on est dans le présent. Je veux que

le président construise beaucoup d’écoles. Quand je grandirai, qu’il me donne un travail pour que je puisse nourrir papa et maman.

Ce qu’ils pensentde la Côte d’Ivoire de demain Des années de furie politico-militaire ne réussiront pas à leur faire oublier que par-dessus tout, les plus grandes tragédies ont toujours une fin. Leur cote d’ivoire à eux, ils la veulent débarrassée des scories de la haine et l’intolérance, résolument tournée vers la paix, la justice et le pardon. Ils ont tous le regard tourné vers l’avenir et ne souhaitent pas interroger le passé. Anzoumana, Djélika, Hermann et le jeune Maïga font partie de ces nombreux Ivoiriens qui aspirent à une seule chose : vivre, tout simplement.

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les enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00616 L’espoir

Les sources de croissance ou les déterminants économiques de la réconciliationLa débâcle économique du milieu des années 80 à la quelle s’est greffée la crise militaro-politique qui a duré de 2002 à 2011, ont contribué à la déstructuration de la société ivoirienne et à la régression économique. La fin de la crise postélectorale en avril 2011 à sonné le glas du cauchemar et tous les espoirs sont désormais permis. L’une des priorités majeures annoncées par les autorités est la réconciliation nationale, préoccupation multidimensionnelle dont l’une des facettes est d’ordre économique. Il va de soi que les ivoiriens, notamment les jeunes qui ont le plus souffert des crises, seront plus enclins à se réconcilier qu’ils verront s’éloigner le spectre de la misère, de la précarité et de l’exclusion. Redonner au jeune ivoirien sa dignité humaine passe entre autres, par la reprise économique et une croissance forte dont les fruits seraient équitablement redistribués. Le nouveau Gouvernement doit adopter de toute urgence une stratégie de croissance qui permettra de créer des emplois et de faire reculer la pauvreté, envoyant ainsi un message clair que le pire est passé et que l’avenir est prometteur.Dans ce contexte, la Banque mondiale a commis à l’attention du Gouvernement, un rapport sur les sources de croissance, rapport qui pourrait servir de guide dans les choix stratégiques permettant de capitaliser sur les nombreux atouts dont regorge la Côte d’Ivoire. Ce rapport dont le résumé est repris ci-dessous, se focalise essentiellement sur les exportations basées sur des ressources naturelles d’origine agricole qui ont toujours été le socle de l’économie ivoirienne et le demeurent.

La Côte d’Ivoire a été un exemple de succès économique au cours des 20 premières années de son indépendance, mais un brusque revirement s’est amorcé en 1980 et dès 1993, le revenu par habitant du pays est retombé à son niveau de 1960. La dévaluation du franc CFA a déclenché une reprise de l’économie, mais celle-ci a été rapidement fragilisée par une crise politique à partir de 1999. La détérioration de la situation politique à la fin des années 90 a conduit à un bref conflit armé et à la division du pays en deux parties distinctes en 2002. Cette crise sociopolitique, ajoutée à l’incurie économique, à la corruption et au retrait de l’appui des donateurs, a eu d’importantes conséquences néfastes sur l’économie, les infrastructures et les institutions. Depuis 2000, la croissance de la Côte d’Ivoire a été parmi les plus faibles d’Afrique subsaharienne: le taux moyen annuel de croissance du PIB s’élevait à -1,0% entre 1999 et 2003, se redressant légèrement pour s’établir à 1,6% seulement au cours de la période 2004-2008. En 2009, la croissance économique a

enfin dépassé le taux de croissance démographique (3,8% contre 3,0%) pour la première fois depuis de nombreuses années. Malheureusement, une recrudescence de la crise postélectorale en fin 2010-début 2011 a encore une fois porté un coup dur à l’économie. Le déclin de la Côte d’Ivoire aura donc été presque aussi spectaculaire que son essor. Le revenu moyen par habitant est retombé au niveau atteint à l’indépendance en 1960. Le taux de pauvreté, qui ne s’élevait qu’à 10% en 1985, a augmenté pour s’établir à environ 43% en 2008, et il est probablement encore pire en 2011.1Le pays a besoin, de toute urgence, d’une croissance rapide et inclusive pour faire reculer la pauvreté, créer des emplois, donner l’espoir d’un meilleur avenir et contribuer à panser les plaies du tissu social

L’amélioration du climat de l’investissement est une nécessité impérieuse si le secteur privé va être en mesure de créer l’emploi si attendu. Au classement Doing Business, la Côte d’Ivoire occupe le 167e rang sur 183

1 - Banque mondiale, Évaluation de la pauvreté, 2011. Le seuil national de pauvreté utilisé s’élève à environ 1,50 dollar par jour, selon le taux de change.

DOSSIER Par TALEB oULD SID’AhMEDDOSSIER les enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

Comment mieux attirer les investisseurs ?

PIB par habitant: 1960 - 2009

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pays, loin derrière le Ghana voisin qui occupe la 67e place. Si l’instabilité politique est le plus important obstacle, la plupart des principales variables connaissent des problèmes. Des réformes transversales de l’environnement des affaires seront importantes pour stimuler l’investissement et la croissance dans les industries manufacturière et tertiaire, et elles sont moins sujettes aux abus que les interventions ciblées. Elles sont toutefois moins susceptibles d’assouplir les contraintes des sous-secteurs reposant sur l’exploitation des ressources naturelles, lesquels tendent à être plus singuliers. D’autres rapports couvrent adéquatement le programme plus général d’amélioration du climat de l’investissement, notamment les enquêtes Doing Business, le Rapport de l’enquête sur le climat de l’investissement, l’Étude diagnostique par pays des infrastructures en Afrique et le Programme d’évaluation du système financier. Aussi le présent rapport s’intéresse-t-il principalement aux sous-secteurs reposant sur l’exploitation des ressources naturelles.

Les exportations de ressources naturelles ont été le moteur de la croissance du pays et elles le resteront à moyen terme. Les exportations sont susceptibles de croître rapidement, car elles ne sont pas sujettes aux contraintes des limites du modeste marché national. L’impact de la production des ressources naturelles se fait sentir dans beaucoup d’autres secteurs, grâce aux interactions en amont et en aval — intrants, transformation, transport, services financiers, taxes et consommation finale. En général, seule une poignée de sous-secteurs clés constituent la locomotive des économies se trouvant au premier stade de développement. En Côte d’Ivoire, ces filières ont été celles du cacao et du café pendant des années, bien que diverses autres activités se soient également développées. Dans les années 2000, le rôle de locomotive a échu aux hydrocarbures. Quelques-uns des sous-secteurs traditionnels sont actuellement en proie à des difficultés, tandis que d’autres se renforcent. Chaque sous-secteur ayant ses particularités, il importe de les examiner séparément en vue de déterminer leur potentiel, leurs contraintes et le degré requis d’intervention étatique.

La transformation à valeur ajoutée a longtemps été un élément central de la politique gouvernementale en Côte d’Ivoire, mais il convient d’examiner sa pertinence en se fondant

sur l’analyse de cas particuliers. Un degré de transformation est inévitable dans certains cas (coton, sucre, huile de palme, caoutchouc), tandis que dans d’autres, un produit peut valoir moins après sa transformation (ananas, thon). En règle générale, le produit de base fait partie d’une chaîne de valeur mondiale et le pays producteur n’est compétitif que dans certains segments. Le développement national requiert une transformation structurelle, mais avant d’encourager de nouvelles activités, un gouvernement doit s’assurer que les avantages procurés

à l’économie nationale justifient toute mesure incitative. Le coût de la création d’un emploi dans la production du beurre de cacao est de 400 fois supérieur à celui d’un emploi dans la transformation du cajou, et la perte de recettes fiscales est importante. Alors, si la création de l’emploi et la réduction de la pauvreté sont des priorités, la transformation du cajou semblera mériter plus d’attention. Par contre, si les autorités croient que le pays devrait entrer dans la fabrication du chocolat, il devra éventuellement aborder les étapes plutôt intensives en capital de la transformation du cacao. La politique ivoirienne officielle consistant à ajouter de la valeur de façon indistincte mérite d’être étudiée en profondeur et nuancée avec l’aide d’une analyse coût-bénéfice de chaque sous-secteur.

La filière du cacao ne figure pas parmi les principaux thèmes du rapport, bien que le cacao demeure la plus importante denrée d’exportation. La raison en est que le cacao n’est pas considéré comme une importante source de croissance et qu’un débat est en cours sur la définition d’une nouvelle stratégie reposant sur une analyse et un examen approfondis. Le défi consistera à éviter un recul de ce sous-secteur et à forger un consensus autour du nouveau cadre institutionnel. Le rapport se borne à traiter de la question de la valeur ajoutée et à situer le cacao dans le contexte plus général de la diversification sous forme d’exploitation de cultures plus rentables.

Les sous-secteurs jadis importants du café et de l’ananas semblent en situation de déclin. Les petits exploitants abandonnent ces deux cultures en faveur de solutions de rechange plus prometteuses. Des marchés spécialisés peuvent exister, en particulier dans la sous-région, et les autorités doivent faire leur possible pour faciliter les activités des grands exportateurs d’ananas, mais sans recourir aux subventions. Toutefois, ces filières ne sont plus des sources de croissance.

La banane et le sucre éprouvent eux aussi des difficultés, mais ils sont plus prometteurs. Les niveaux d’exportation de la banane ont été maintenus, grâce au rôle dominant des grands exploitants qui ont probablement besoin de peu d’appui en dehors d’une amélioration du climat de l’investissement. Les prix du sucre se sont récemment améliorés et l’industrie sucrière devrait rester compétitive sur le marché national en expansion. Les deux denrées ont par ailleurs d’importantes

17L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

DOSSIERDOSSIERles enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnale

en côTe d’ivOire

L’amélioration des revenus des planteurs du cacao reste une priorité.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00618 L’espoir

possibilités de débouchés dans la sous-région. Parmi les cultures de première nécessité, le maïs présente le meilleur potentiel de croissance, basé sur le marché régional. Le marché de l’UEMOA accuse un important déficit de maïs et la demande est susceptible de croître plus rapidement que la population, car l’augmentation de la consommation de viande suscite une demande d’aliments pour animaux. Il existe de bonnes possibilités d’accroître les faibles rendements actuels. La rotation du maïs et du coton signifie qu’une résurgence de la filière coton favoriserait également la production du maïs.

Les filières agricoles les plus prometteuses sont celles du caoutchouc, de l’anarcade, du coton, du riz et de l’huile de palme. Elles sont susceptibles de croître de 10% par an ou plus. Le caoutchouc et l’anarcade (ou cajou) croissent rapidement depuis un certain temps, et les récentes plantations d’hévéas garantissent une expansion supplémentaire. Le coton se redresse sous l’effet notamment de l’augmentation des prix mondiaux et il peut enregistrer une croissance considérable tout simplement en retrouvant les niveaux antérieurs de production. La production d’huile de palme avait stagné, mais on assiste à un regain d’intérêt de la part du secteur privé, maintenant que les cours mondiaux se sont raffermis. De ces cinq filières, celle du riz est peut-être la moins prévisible. Le marché intérieur offre un grand potentiel de croissance et l’augmentation des prix mondiaux a rendu à nouveau compétitives quelques formes de production nationales. Cette filière est toutefois lourdement tributaire d’un concours efficace et coordonné de l’État, condition indispensable à son décollage.

Il est temps de passer de l’exportation de la noix de cajou brute à sa transformation sur place. La Côte d’Ivoire est maintenant le plus grand exportateur mondial de noix de cajou brutes. Le climat de l’investissement n’a guère été favorable au renforcement de la capacité de transformation, mais la situation devrait s’améliorer. Plus de 100 000 emplois pourraient être créés, surtout dans le nord pauvre, si toute la récolte était décortiquée, avec en outre des possibilités de produire de l’électricité en utilisant les coques comme biocombustibles. Pour ce faire, il faudrait toutefois certaines incitations bien gérées pour éviter de pénaliser les agriculteurs ou de protéger les entreprises inefficaces. En cas de recours à une taxe à l’exportation, ses fonds doivent être orientés vers

un programme visant à accroître les rendements de la culture, lesquels sont nettement inférieurs à ceux des pays concurrents. Les travaux de recherche publics et les services de vulgarisation font cruellement défaut, l’organe interprofessionnel est faible et un plus solide cadre de réglementation est nécessaire pour améliorer la coordination sans entraver le dynamisme du secteur privé.

La filière caoutchouc est en plein essor et requiert peu d’intervention publique. Les cours mondiaux devraient rester élevés, car ils sont liés au prix du pétrole (principale composante du caoutchouc synthétique). L’organe interprofessionnel fonctionne déjà convenablement et doit être davantage habilité à réglementer les activités, en ce qui concerne notamment l’entrée de nouveaux acheteurs et le respect des engagements contractuels. Le principal défi consiste à donner aux agriculteurs pauvres la possibilité de participer à cette expansion, compte tenu des coûts de l’investissement initial et de la longue période qui s’écoule avant la mise en saignée des nouveaux hévéas. Le caoutchouc offre une grande possibilité de diversification, au niveau tant du planteur que du pays. Une certaine imposition de niveau modeste peut se justifier, surtout si elle sert à réduire la pression subie par les cacaoculteurs surtaxés et à appuyer le développement rural par le biais de mécanismes comme le Fonds d’investissement en milieu rural.

L’huile de palme connaît une renaissance et elle appuie un éventail d’opérations à valeur ajoutée. La Côte d’Ivoire n’a pas besoin d’aller au-delà de la sous-région pour trouver un marché important et en croissance, même s’il y aura lieu de déployer des efforts pour s’assurer que les autres pays de l’UEMOA et de la CEDEAO respectent leurs accords de libre-échange. Une action concertée sera nécessaire pour réduire les coûts en vue de soutenir la concurrence des fournisseurs asiatiques, mais le secteur privé (notamment des investisseurs asiatiques) est bien placé pour prendre l’initiative à cet égard. Dans cette filière aussi, l’organe interprofessionnel jouera un rôle central, à condition que son pouvoir soit renforcé par la nouvelle loi proposée. Il convient d’adopter un code destiné à s’attaquer aux problèmes environnementaux et sociaux, conformément aux principes définis par la Table ronde internationale sur la production durable d’huile de palme.

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les enjeux de la récOnciliaTiOn naTiOnaleen côTe d’ivOire

Pépinière de cacao au Centre R&D Nestlé à Abidjan.

Repenser le système éducatif pour répondre aux besoins du marché.

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19L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

Le coton peut contribuer à augmenter les revenus dans quelques-unes des régions les plus pauvres du pays. Cette filière a toutefois gravement pâti de 10 années de crise, et elle requiert un programme prospectif pour rétablir la confiance et créer un consensus parmi les parties prenantes. Les producteurs tiennent absolument à dépendre moins des égreneurs pour les intrants et les conseils, mais pour que cet objectif soit atteint, il sera nécessaire de rationaliser leurs organisations et de renforcer considérablement les capacités de celles-ci. Le financement, la recherche, la production de semences, la vulgarisation et le contrôle de la qualité méritent tous l’attention, et les problèmes ne peuvent être résolus à court terme sans un certain appui public. Les perspectives d’amélioration du prix mondial sont de bon augure pour la production rizicole nationale. L’autosuffisance est peu probable, mais il existe un bon potentiel de substitution efficace des importations. On dénombre 11 systèmes différents de production de riz, qui ne sont pas tous compétitifs face aux importations. La riziculture pluviale intensive avec utilisation de variétés améliorées et d’engrais présente le plus grand potentiel. La mise en valeur des bas-fonds, au moyen notamment des techniques à faible coût de diversion continue de cours d’eau, offre des possibilités supplémentaires de développement. Le pays demeurera cependant tributaire des importations pour la moitié de la consommation totale dans un avenir prévisible, aussi importera-t-il d’éviter des droits de douane élevés, des coûts d’importation superflus ou un pouvoir de monopole, qui contribuent tous à accroître les prix payés par les consommateurs pauvres.

La filière pêche se trouve dans une situation très inquiétante et mérite peut-être d’être repensée de fond en comble. La Côte d’Ivoire court le risque de perdre sa position de grand exportateur africain de thon dans la région Atlantique, en raison de l’arrivée d’acteurs mondiaux sur le marché ghanéen. Il peut se révéler nécessaire de s’associer à des partenaires similaires pour renforcer l’industrie ivoirienne du thon. Des améliorations au port d’Abidjan, afin de préserver son rôle en tant que hub pour la pêche au thon dans la sous-région, pourraient être essentielles pour la viabilité de l’industrie. Par ailleurs, il convient de prêter davantage attention à la pêche artisanale vu la dépendance aux importations. La filière souffre de grands problèmes de gouvernance, notamment liés à la gestion et à la surveillance des ressources halieutiques, ainsi qu’au contrôle des flottes industrielles qui mettent à mal la pêche artisanale.

Enfin, le secteur extrêmement important de l’énergie est confronté à d’énormes problèmes à court terme, mais il est fort prometteur si ces difficultés peuvent être surmontées. Le secteur énergétique est une source d’exportations — pétrole brut, produits pétroliers et électricité — ainsi qu’un fournisseur d’intrants essentiels pour le reste de l’économie. Après avoir insufflé une nouvelle vie à l’économie ces 10 dernières années, ce secteur souffre aujourd’hui d’un manque d’investissement. Il convient de procéder de toute urgence à l’exploration en mer en vue de confirmer la probabilité des nouvelles réserves requises pour compenser la baisse de la production des puits existants et d’assurer la disponibilité du gaz naturel qui est très important pour les producteurs d’électricité et le secteur industriel. Entre-temps, la connexion

au gazoduc ouest-africain doit être réalisée, pour assurer l’accès au gaz ghanéen ou nigérian. Le secteur de l’électricité se trouve dans une situation critique. Les solutions sont bien connues: importants investissements dans l’entretien, nouvelle participation du secteur privé, renégociation des contrats gaziers, ajustements réguliers des prix et réduction des pertes commerciales, entre autres. Le manque de volonté politique d’entreprendre des réformes a été le principal obstacle.

Le taux de change n’est pas analysé ici, mais l’on ne saurait en faire abstraction. Il s’agit du plus important facteur qui influe sur la compétitivité d’un pays. Il revêt une importance accrue dans le cas de la Côte d’Ivoire, compte tenu de la parité fixe entre sa monnaie et l’euro, devise qui s’avère relativement forte. Ce n’est pas par hasard que la seule période de croissance importante qu’a connue le pays au cours des 30 dernières années est celle qui a suivi immédiatement la dévaluation de 1994. Les autorités ivoiriennes devront éviter les pressions inflationnistes qui accroissent le coût des intrants et des facteurs de production nationaux, et poursuivre l’amélioration des sources microéconomiques de compétitivité pour compenser l’absence de l’instrument macroéconomique d’ajustement du taux de change. Une analyse approfondie s’impose.

Une stratégie de croissance exige le consensus, la coopération et l’esprit d’initiative au sein du gouvernement, et la collaboration avec le secteur privé. Des mécanismes institutionnels appropriés sont nécessaires pour hiérarchiser, coordonner et promouvoir les réformes de la politique, et y affecter des ressources. Quelques éventuels éléments de base sont en place, comme la plateforme public-privé, les organismes de promotion des exportations et des investissements, et la stratégie de réduction de la pauvreté. Cela étant, il existe de nombreux programmes et initiatives concurrents. Dans d’autres pays, le succès a souvent été assuré par un petit groupe de techniciens de classe mondiale bénéficiant d’un appui politique au plus haut niveau, qui définissent une stratégie et sont capables de faire adopter des décisions et de veiller à leur mise en œuvre. Les Ivoiriens devront réfléchir non seulement sur le contenu d’une stratégie de croissance, mais aussi sur le cadre institutionnel indispensable pour la soutenir.

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Atelier de fabrication de pagne wax à Abidjan.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00620 L’espoir

de manière globale, la moyenne de durée de vie des projets et programmes de développement sous financement de la Banque mondiale et la plupart des autres partenaires se situe

entre 4 et 5 ans. Pour mieux atteindre les objectifs assignés au départ, il est important d’en mesurer régulièrement la performance tant au niveau des décaissements, de la gestion financière que l’atteinte effective des objectifs de développement. Or si les Etats bénéficiaires de ces financements ne sont pas directement impliqués, les risques d’un dysfonctionnement de la chaine d’exécution sont majeurs. C’est justement pour prévenir ces distorsions que la revue conjointe BM-BAD et FIDA a choisi pour thème « Comment améliorer l’utilisation des systèmes nationaux ?». L’exercice a permis de réunir près de 200 participants venus de l’Administration centrale et déconcentrée, des collectivités territoriales, du secteur privé, des unités de gestion des projets des trois bailleurs et des autres Partenaires Techniques et Financiers présents au Burkina Faso. Pour le gouvernement burkinabé pour qui l’année 2011 n’a pas été de tout repos, la rencontre était utile à plus d’un titre, surtout qu’elle intervient dans un contexte de reprise du dialogue national après les troubles sociaux survenus au milieu de l’année dernière.

De la déclaration de Paris à l’utilisation effective des systèmes nationaux Qu’il s’agisse des autorités burkinabées que des ses partenaires, la revue conjointe de Ouagadougou a remis au goût du jour l’impérieuse nécessité de donner un sens à une application pleine et entière de la déclaration de Paris, notamment au sujet du recours aux mécanismes locaux de gestion des projets de développement. M. Léné Sebgo, Directeur général de la coopération internationale au ministère burkinabé des finances l’a clairement fait savoir : « Si les partenaires acceptent de s’arrimer aux systèmes nationaux pour la mise en œuvre des projets, le gouvernement va prendre le leadership de son développement ». Réponse des partenaires par la voix de la Représentante résidente de la Banque mondiale au Burkina, Mme Galina Sotirova: « Si tel est le souhait, alors cela ne fera qu’aider les Partenaires à assurer un meilleur suivi de l’efficacité de l’Aide ».

En matière d’harmonisation et d’alignement, le mécanisme de coordination des donateurs existe au niveau global au Burkina Faso notamment autour de la SCADD. En effet, selon la définition de l’OCDE, la BM, la BAD, et le FIDA n’ont pas de cellules parallèles au Burkina Faso. Ceci est confirmé par les résultats de l’enquête 2011 pour le suivi de la Déclaration de Paris.

La capacité de mise en œuvre des projets sur le terrain est renforcée par les représentations de la BM, la BAD, et le FIDA au Burkina Faso. Ces bureaux jouent un rôle central dans le suivi et l’appui technique aux projets, ce qui a contribué à améliorer la performance globale des portefeuilles des trois partenaires. Le traitement des dossiers sur les acquisitions et décaissements est accéléré grâce à la présence sur le terrain des représentations. Ainsi, les interactions avec le gouvernement et la coordination de l’aide sont davantage facilitées par les bureaux, de même que la supervision des projets sur le terrain.

Persistance de quelques goulots d’étranglement Si le problème de l’harmonisation entre bailleurs semble donc être en bonne voie au Burkina Faso, avec une tendance vers plus d’alignement sur les priorités du Gouvernement1, des problèmes génériques communs aux projets financés par les 3 bailleurs cités plus haut subsistent, ce qui n’est pas sans incident sur la performance globale. Outre la faiblesse des compétences requises pour la bonne exécution des projets dés leur conception, le fait majeur relevé par la revue concerne le suivi des plans de passation des marchés publics et une faible qualité des rapports d’audit pour ce qui concerne la gestion financière. Quand aux niveaux des décaissements, aucun des 3 partenaires n’atteint 50%, comme indiqué ci-dessous dans le tableau de performance générale.

1 - Le portefeuille actif national des trois partenaires (BAD, BM, FIDA) comprend 31 projets dominés par le secteur public. Leur répartition sectorielle traduit la prédominance des infrastructures (transports et énergie) pour 29% suivi de l’agriculture et le développement rural (21%) et la gouvernance économique (15%). Une répartition qui reflète l’alignement stratégique des partenaires sur les priorités actuelles du gouvernement, contenues dans la stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD).

Par BEgNADEhI CLAUDE BATIoNo

La notion d’efficacité des ressources allouées aux pays en voie de développement occupe de plus en plus une place centrale dans le dialogue entre Partenaires Techniques et Financiers et Gouvernements. Avec un portefeuille de 36 projets et programmes pour un volume global estimé à environ 651 milliards de francs CFA, la Banque mondiale (BM), la Banque Africaine de Développement (BAD) et le Fonds international pour le développement de l’agriculture (FIDA) sont des partenaires de poids pour le développement du Burkina Faso. Pour la seconde édition de la revue conjointe de leur portefeuille tenue en Novembre 2011 à Ouagadougou, les 3 partenaires ont plaidé en faveur d’un renforcement de l’utilisation des systèmes nationaux.

Burkina FasoPlaidoyer pour plus d’efficacité de l’Aide Publique au Développement

in acTion

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21L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

INDICATEURS BAD BM FIDA

Progrès de mise en œuvre Satisfaisant SatisfaisantModérément satisfaisant

Objectifs de Développement Satisfaisant SatisfaisantModérément satisfaisant

Engagement Global milliards FCFA) 196,2 422,5 32,23

Total décaissé(milliards FCFA) 56,8 184,8 15,42

Taux de décaissement 29% 44% 47,83%

Nombre de Projets à risque 2 1 0

Projets à problèmes 1 1 1

Projets âgés (>8 ans) 3 2 0

Taille moyenne des projets (million $) 49 62 13.9

Nombre de supervision annuel par projet 2 2 1

S’y ajoute une série de contraintes, telles que l’absence de systèmes informatisés de suivi des résultats au niveau des ministères sectoriels et le faible lien avec les systèmes de suivi-évaluation des projets. L’absence d’harmonisation des systèmes de motivation des personnels des projets soutenus par les catégorisations A, B, C du Gouvernement, respectivement pour les projets à unité intégré, cellule parallèle et agence autonome. Il faut noter aussi une faiblesse des moyens techniques, humains et financiers pour préparer, mettre en œuvre et suivre efficacement les projets, d’où la contrainte de recourir aux fonds de préparation qui affectent ainsi l’enveloppe des projets lors de leur mise en œuvre.L’ensemble des faiblesses structurelles et des problèmes spécifiques identifiés, ont permis de formuler des recommandations et un plan d’actions 2011-2012.1. Sur le plan organisationnel, le format revue multi bailleurs initié

en 2010 sera renforcé, voire étendu à d’autres partenaires, ce qui sort de la classique revue Banque mondiale-Gouvernement. Cette démarche participe de la rationalisation des espaces de concertation et de la coordination et harmonisation des approches des partenaires concernés. Sur ce format, le Burkina est le premier pays d’Afrique francophone et le deuxième en Afrique au Sud du Sahara après la Tanzanie à opter pour une revue conjointe de cette nature avec la BAD.2. La mise en place d’un groupe conjoint de préparation contribue au renforcement de la coordination entre les bailleurs. Pour preuve, la BM et la BAD ont initié une mission conjointe au Burkina Faso du 5 au 16 décembre 2011 pour l’élaboration d’une stratégie conjointe d’appui au Burkina, du moins au niveau du diagnostic des priorités et des défis auxquelles les Document de Stratégie Pays respectifs devraient tenter de répondre à travers les axes d’intervention qui seront retenus.3. Convier plus de partenaires, ne serait-ce que multilatéraux, pour une revue conjointe et unique par an. Le Ministre de l’Economie et des Finances du Burkina ne cache pas son ambition de convier d’autres partenaires à prendre part à la prochaine revue conjointe, à partir du moment où le plan d’action de la revue adresse finalement des problèmes que rencontrent les autres Partenaires présents au Burkina Faso.

L’autre difficulté à résoudre concerne la performance des projets régionaux où interviennent principalement la BAD (9 opérations) et la BM (7 opérations) pour un montant globale de 227 milliards de F CFA, respectivement de 115 milliards F CFA pour la première et 112 milliards F CFA pour la seconde. En tout point de vue, la revue conjointe des portefeuilles de la Banque mondiale, de la BAD et du FIDA qui s’est déroulée en novembre dernier, marque un tournant majeure dans la coopération entre le Burkina Faso et ses principaux partenaires pour une plus grande efficacité de l’Aide Publique au Développement de ce pays. Rendez-vous est pris pour novembre 2012.

in acTion

Au centre : Lucien Marie Noël Bembamba, ministre burkinabé des Finances et de l’Économie.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00622 L’espoir

Mettre l’accent sur les résultats

revue du portefeuillede la Banque mondiale au Bénin

le 11 novembre 2011, la représentation de la Banque mondiale et le Gouvernement du Bénin ont organisé une revue conjointe du portefeuille des projets financés par la Banque mondiale. Y

ont été également conviés, les autres partenaires au développement, les organisations de la Société civile et les médias. Le portefeuille de la Banque mondiale au Bénin a pris de l’importance et s’est considérablement agrandi au cours des récentes années. Au total 25 projets et programmes s’élevant à un engagement global de près de 725 millions US$, soit plus de 350 milliards FCFA. La répartition sectorielle se présente selon le graphique ci-après :

Au-delà des projets dont la mise en œuvre est étalée sur plusieurs années, le Bénin reçoit également chaque année un appui budgétaire (autour de 20 à 30 millions US$) décaissé en une tranche pour

soutenir le gouvernement dans la mise en œuvre de la Stratégie pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté. Trois opérations sont actuellement en cours de préparation : (i) le 7ème appui budgétaire (sous forme de don de 30 millions US$ soit environ 15 milliard de F CFA) ; (ii) du Projet d’appui à la décentralisation des services communautaires (37 millions US$, près de 18,5 milliard de F CFA), et (iii) du financement additionnel de 10 millions US $ (5 milliards de F CFA) au Projet d’appui à la lutte contre le paludisme. La Revue du portefeuille avait pour but principal d’examiner les opérations en cours, afin d’évaluer leurs performances et d’identifier les problèmes urgents à résoudre afin de réaliser pleinement les objectifs attendus et atteindre les résultats escomptés.

Une performance assez satisfaisante, mais quelques problèmes nécessitant des actions rapidesD’une façon globale, la revue a révélé que 64% des opérations en cours ont une performance satisfaisante, et que certaines font face à des problèmes qui entravent leur mise en œuvre. Il s’agit, entre autres : (i) des longs délais de mise en vigueur des projets ; (ii) de la faiblesse des décaissements [au 31 octobre 2011, le taux des décaissements cumulés était de 45%] ; et (iii) des contraintes liées à la passation des marchés, à la gestion financière, au suivi-évaluation et à la sauvegarde environnementale et sociale.

Par SyLvIE NENoNENE,NDEyE MAgATTE FATIM SECket NADIATh ALLAkE DENDE

in acTion

L’assainissement urbain est une nécessité.

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23L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

Des recommandations spécifiques consignées dans un plan d’action ont été formulées pour apporter des solutions aux problèmes identifiés. Un comité de suivi desdites recommandations a été mis en place, présidé par le Ministre du Développement, de l’Action Economique et de la Prospective, pour veiller à : (i) l’amélioration de la performance du portefeuille ; (ii) la réduction des délais de traitement des dossiers de passation des marchés par le Direction Nationale de Contrôle des marchés publics à 7 jours ouvrables comme indiqué dans le code des marchés publics et les textes en vigueur ; la réduction du délai d’approbation et de signature des marchés par le Ministère de l’Economie et des Finances à 15 jours, et la délégation de signature des marchés aux Ministères sectoriels à hauteur de leur seuil de signature ; ( iii) la mise en place d’un système de gestion axée sur les résultats ; (iv) l’utilisation des procédures électroniques de décaissement sur l’ensemble du portefeuille ; (v) la réduction et la levée des autres contraintes transversales et spécifiques ; (vi) le respect des délais de mise en vigueur des projets ; et (v) l’amélioration du taux de consommation des crédits alloués au Bénin. Le gouvernement du Bénin et la Banque mondiale se sont engagés, chacun en ce qui le concerne, à prendre les dispositions nécessaires pour la mise en œuvre effective des recommandations de la revue, l’accent devant être mis sur des résultats concrets et mesurables, seuls gages de la pertinence des projets.

un exemple de projet performant :Le Second Projet de Gestion Urbaine Décentralisé (PGUD-2)

A titre d’illustration, une vidéo a été présentée aux participants sur un des projets du portefeuille (le deuxième Projet de Gestion Urbaine Décentralisé --PGUD-2) dont la performance est jugée satisfaisante sur plusieurs plans.

Le PGUG-2 a démarré en 2006 dans les villes bénéficiaires (Cotonou, Porto-Novo, Parakou, Abomey-Calavi, Kandi, et Lokossa) avec un financement initial de 35 millions US$, suivi d’un financement additionnel en 2008 d’un montant de 40 millions US$, avec pour objectif d’accroître l’accès des populations bénéficiaires aux infrastructures et services urbains.A quelques mois de sa clôture (Mars 2012), le PGUD-2 a déjà décaissé 93% du crédit initial et 98% du financement additionnel, atteignant des résultats considérables : réhabilitation, pavage et drainage de 32,9 km de voies urbaines denses (126% de la cible initiale), donnant à 384 000 résidents un meilleur accès aux centres d’activités économiques (121% de la cible initiale) ; construction de 17,5 km de réseaux d’assainissement qui ont permis de protéger plus de 100 000 habitants des inondations périodiques ; construction (en cours) d’un Centre d’enfouissement technique pour la gestion des déchets solides ; construction d’infrastructures sociocommunautaires (modules de classe, centres de santés, centres communautaires, hangars et boutiques de marchés, modules de latrines, kiosques à eau, etc.). Dans sa mise en œuvre, le PGUD-2 a respecté les mesures de sauvegarde sociale préconisées par la Banque mondiale : toutes les personnes qui ont été négativement affectées par le Projet ont été indemnisées de façon adéquate et ont ainsi pu s’offrir des conditions de vie convenables. Le gouvernement a également pris des mesures d’accompagnement pour fournir aux communautés affectées, comme c’est le cas à Takon, des infrastructures sociales en compensation du terrain qui abrite le Centre pour l’enfouissement des déchets solides (écoles, systèmes d’adduction d’eau potable, route pour relier la communauté au principal axe routier ; électricité ; compensation financière pour le terrain acquis). Il est important de noter que les retombées du PGUD-2 pour les communes bénéficiaires sont remarquables, comme en témoignent les propos de Monsieur Ahlonsou Richard, Chef-Service « Appui aux initiatives communautaires » à la Mairie de Cotonou : « Le PGUD-2 a permis à la Mairie de Cotonou de réaliser des ouvrages qui ont eu des impacts considérables. Sur le plan économique par exemple, certaines zones de la ville qui étaient soumises à des périodes d’inactivité de près de 6 mois par an pour cause d’inondation, sont aujourd’hui assainies et économiquement actives 12 mois sur 12. Les boutiques dans ces zones avant les ouvrages coûtaient 5 000 francs ; actuellement, elles coûtent 20 000 à 25 000 francs par mois. On note également une hausse de la valeur des parcelles dans les zones assainies. Autrefois, ces zones étaient difficiles d’accès, mais avec les ouvrages réalisés, la valeur des parcelles a doublé et même triplé dans certains cas, et on voit aujourd’hui de très belles maisons qui y sont construites. La mobilité urbaine s’est également améliorée avec la construction des nouvelles voies pavées qui ont permis de désengorger certains axes de la ville sur lesquels la circulation était auparavant très dense, rendant la situation pénible pour les usagers ».A noter également que les municipalités bénéficiaires ont reçu des formations en gestion financière, en passation des marchés et sur les mesures de sauvegarde qui les ont aidés à améliorer la gestion de leurs revenus et à les accroître, de façon à pouvoir s’en servir pour l’entretien des ouvrages. De même, les capacités ont été renforcées pour les comités de développement des quartiers qui aujourd’hui sont bien outillés pour défendre les intérêts des communautés auprès des municipalités. Ces actions de développement institutionnel sont très utiles pour les municipalités dans le cadre de la préservation des ouvrages réalisés à travers le PGUD-2.Le PGUD-2 tire vers la fin. Un nouveau projet, le Projet d’Urgence de Gestion Environnementale en Milieu Urbain (50 millions US$), vient d’être initié pour poursuivre certaines des actions d’assainissement dans la ville de Cotonou et dans les municipalités voisines.

in acTion

Le ministre Béninois du Développement, de l’Analyse Économique et de la Prospec-tive, Marcel De Souza (2e à partir de la gauche) ouvrant les travaux de la revue

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00624 L’espoir

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Le Togo de retour…Le changement le plus notable, que le Togo ait connu récemment, est l’érection à Lomé d’un imposant complexe ultramoderne sur le boulevard du bord de mer, le Centre Panafricain Ecobank. Il s’agit du nouveau siège d’Ecobank, qui a été inauguré le 28 juin 2011. Cette construction témoigne de la confiance de cette banque panafricaine dans l’économie et la stabilité du Togo à long terme, et indique clairement qu’après une longue période d’instabilité socio-politique et économique, le Togo est enfin de retour. Oui, le pays a l’ambition de redevenir le centre financier panafricain et le carrefour du transport régional et du tourisme qu’il fut jadis. En effet, jusqu’à la fin des années 80, Lomé était un centre d’affaires dynamique et bien coté. Aujourd’hui encore, cette ville est un centre qui facilite les échanges commerciaux entre les pays de la sous-région. Des exemples récents confirment l’influence et la vocation régionales de Lomé, notamment : (i) le lancement de la première compagnie aérienne panafricaine à capitaux privés (ASKY) ; et (ii) l’investissement de 500 million de dollars US pour la construction du terminal à containers au Port de Lomé, qui sera bientôt réalisée par

la Mediterranean Shipping Company sur un financement consenti par un consortium des plus grandes institutions financières menées par la Société Financière Internationale (IFC), filiale du Groupe de la Banque mondiale. Plus encore, Lomé abrite non seulement les sièges d’Ecobank, d’ASKY, de West Africa Cargo, mais également ceux de la BIDC, la BOAD, la CICA-Ré, la Financial Bank, etc.. Nous savons aussi que les femmes ont historiquement joué un rôle très important dans l’économie du Togo. A une certaine époque, les plus grands et plus riches commerçants de tissus-pagnes étaient des femmes togolaises, surnommées “Nanas Benz”, parce qu’elles ne conduisaient que des Mercedes-Benz. Cependant quelques décennies plus tard, seulement un petit nombre d’entre elles a pu s’adapter au nouvel environnement économique qui leur imposait la diversification de leurs activités. En un mot, il faudrait redynamiser les activités dans lesquelles le pays excellait, tout en les adaptant aux nouvelles tendances économiques et technologiques. Tout ceci devrait être possible dans un Togo, de nouveau ouvert sur le monde, ainsi qu’au business !

Le Togo esT de reTour

nouvelle destination privilégiée pour les investissements

La situation géographique exceptionnelle du Togo impose au pays d’axer son développement sur une plus grande intégration régionale. Ceci, en transformant son port en eau profonde en hub maritime par exemple, en le reliant au développement des réseaux routier, ferroviaire et de fibre optique pour l’internet. En plus de son potentiel agricole, le Togo capitalisera davantage sur son expérience et ses atouts pour développer une industrie de services (financiers, transmission de données électroniques, tourisme). Cependant, pour réaliser ce potentiel et le transformer en réelle opportunité économique, le pays devra s’atteler davantage à lever un certain nombre de défis et contraintes qui entravent sa croissance durable.

Par hErvé ASSAh

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25L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

in acTion

ainsi que les chances de succès des réformes économiques en cours, de l’autre côté, la longue période d’instabilité qui a entraîné des faiblesses dans la gestion des secteurs clé de l’économie a eu un impact négatif considérable sur la performance économique du pays et sur la population.

Appui de la Banque mondiale pour la relance de l’économie togolaiseDans ce contexte, il nous a paru important de rappeler ce que fait la Banque mondiale pour aider le Gouvernement togolais à relever les divers défis sur les plans économique et social. En 2008, lors du ré-engagement de la Banque mondiale au Togo, notre portefeuille des projets se résumait à quelques dons d’un montant total de 5 millions de dollars américains. Aujourd’hui, ce dernier s’élève à près de 250 millions de dollars américains (US$). Le montant des financements consentis par la Banque a largement dépassé ce qui était initialement prévu. La première Note de Stratégie Intérimaire (NSI-1) a été élaborée en 2008 par la Banque pour soutenir la mise en œuvre des principaux piliers du Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DRSP) du gouvernement togolais. L’objectif visé était d’aider le Togo à se remettre de la longue période d’instabilité et de suspension de l’aide internationale, et à jeter les bases d’une croissance économique soutenue et partagée à moyen terme. Il a d’abord été question d’appuyer le Togo dans le règlement des arriérés dus à la Banque pour ouvrir la voie aux nouvelles opérations : un montant de 157 millions US$ a été décaissé par la Banque mondiale dans ce sens. Les interventions qui ont suivi sont axées sur trois principaux piliers et ont, jusqu’ici, été entièrement financées par des dons.

Amélioration de la gouvernance économiqueEntre 2008 et 2011, quatre dons ont été octroyés au Togo par la Banque sous forme d’appuis budgétaires, totalisant un montant total de 82,3 millions US$. Ces appuis budgétaires ont contribué à soutenir des réformes couvrant trois grands domaines stratégiques, à savoir (i) la gestion des dépenses publiques et la gestion financière de l’Etat, (ii) la promotion de la gouvernance et de la transparence dans les entreprises publiques, et (iii) le renforcement du secteur financier. Le Togo a ainsi pu réaliser d’importantes réformes économiques et matière de politiques de développement qui ont permis de renforcer la préparation, l’exécution et le contrôle du budget, la passation des marchés publics, et d’améliorer la performance et la transparence dans les secteurs clé de l’économie, notamment ceux du phosphate, du coton, de l’énergie et des finances publiques. Les rapports d’achèvement des trois premiers appuis budgétaires ont été globalement satisfaisants.

Après la réduction de la dette, se concentrer sur les réformes économiquesAvec une dette extérieure considérablement réduite grâce à l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) en Décembre 2010, le Togo peut enfin se concentrer sur les réformes ayant un impact à long terme et susceptibles d’attirer des capitaux nationaux, régionaux et internationaux vers les sources de croissance potentielles. Le développement de ces dernières permettra d’accélérer et de soutenir la croissance économique, tout en consolidant le consensus sociopolitique atteint depuis 2007. Avec le point d’achèvement du PPTE et grâce à un environnement international favorable, le Togo se trouve aujourd’hui à un tournant historique, caractérisé par l’opportunité unique de se positionner fermement sur la voie d’une croissance économique forte et durable. Cependant, malgré ce potentiel prometteur, le Togo doit faire face à plusieurs défis et contraintes dans son effort de développement. Si d’un côté le déroulement pacifique de l’élection présidentiel de 2010 a nettement amélioré le climat sociopolitique dans le pays

Siège d’Ecobank à Lomé sur le boulevard du Mono

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00626 L’espoir

in acTion

Appui à la relance économiqueet au développement durableDans le cadre de ce pilier, il a été question d’accompagner le Togo dans le développement des infrastructures pour soutenir la croissance économique, la relance de l’économie rurale et agricole, le renforcement du secteur privé, et l’identification des sources potentielles de croissance.Des financements importants ont été engagés par la Banque dans le cadre de ce pilier. Il s’agit des opérations de réhabilitation des infrastructures urbaines (28,3 millions US$), et des projets porteurs de croissance tels que le Projet d’Appui au Secteur Agricole (37 millions US$), le Programme de Productivité Agricole en Afrique de l’Ouest (12 millions US$), le Projet d’Appui au Développement du Secteur Privé (13 millions US$), et du Projet de Facilitation du Commerce et du Transport le long du Corridor Abidjan-Lagos (33 millions US$).Des études économiques et sectorielles ont également été effectuées. Les plus importantes sont : (i) le Mémorandum Economique du Togo ; et (ii) la Note de Politique sur le Climat des Investissements au Togo. Ces études ont permis au gouvernement de développer une stratégie pour une croissance tirée par un secteur privé renforcé, qui identifie clairement les opportunités économiques ainsi que les actions permettant de les saisir. Pour sa part, la Société Financière Internationale (IFC)—une filiale du Groupe de la Banque mondiale— a engagé un certain nombre d’activités pour soutenir les efforts de relance économique et de développement durable. Plus encore, l’IFC a coordonné le financement du Terminal à Container (500 millions US$) qui sera construit au Port de Lomé par Mediterranean Shipping Company. Ce nouveau hub de pointe pour le transbordement et la manutention des services portuaires va desservir l’Afrique de l’Ouest et Centrale, et devrait réduire les coûts du transport pour les usagers du Terminal. Pour soutenir les réformes dans le secteur de l’énergie, l’IFC a également effectué en 2010, un investissement de 14 millions US$ dans la construction d’une centrale thermique indépendante de 100MW à Lomé, en partenariat avec la société américaine Contour Global. En outre, l’IFC va soutenir la participation privée dans les infrastructures (ports, aéroports, etc.) et les secteurs de croissance (mines, etc.) et financer un certain nombre de projets dans le secteur privé.

Répondre aux besoins sociaux urgentsUn des objectifs du programme de la Banque est d’aider le Togo à faire face aux besoins sociaux urgents. Dans ce cadre, le Projet de Développement Communautaire (PDC), financé par un don de 32,6 millions US$ et qui a été lancé en 2009, répond aux besoins sociaux urgents à l’échelle communautaire. Avec le PDC, le Togo a pu réaliser des infrastructures sociocommunautaires de base dans les domaines de l’éducation, de la santé, des pistes rurales, des latrines, des points d’eau et des marchés. Le projet a également soutenu la conduite des activités génératrices de revenus, un important programme de nutrition en milieu scolaire, et un programme de sécurité alimentaire. Le Projet Education et Renforcement Institutionnel (PERI), financé à hauteur de 45 millions US$ par un don du Partenariat Mondial pour l’Education (ex Initiative Fast-Track), et qui a démarré en 2010, vise à faciliter l’accès à l’école primaire de tous les enfants, à améliorer la qualité des enseignements, et à renforcer les institutions en charge de l’éducation. Le Projet de Gestion Intégrée des Catastrophes et des Terres (16,8 millions US$) qui a été récemment approuvé par le Conseil d’Administration de la Banque, va aider le gouvernement à mieux gérer les risques liés aux inondations périodiques et à la dégradation des sols. Ainsi, le portefeuille de la Banque mondiale au Togo est en pleine expansion et sa mise en œuvre se déroule de manière satisfaisante. De nouvelles opérations sont actuellement en cours de préparation. Pendant que le gouvernement entame la préparation d’un nouveau DSRP, la Banque mondiale vient d’élaborer une seconde Note de stratégie intérimaire (NSI-2) pour couvrir la période 2012-2013, et qui sera présentée au Conseil d’Administration de l’institution au début de l’année 2012. La NSI-2 va soutenir les mêmes piliers que la NSI-1 et va renforcer les actions déjà engagées pour (i) améliorer la compétitivité et la croissance en vue de la création d’emplois, (ii) améliorer la gestion des finances publiques et la gouvernance, et (iii) renforcer la résilience du pays pour l’aider à réduire sa vulnérabilité. Il est clair que le Togo dispose d’un potentiel très important et qu’avec une forte détermination à relever les différents défis auxquels le pays fait face, et avec un appui soutenu de tous les partenaires au développement pendant cette phase cruciale, le Gouvernement du Togo devrait être en mesure de mettre le pays sur la voie de la croissance soutenu et durable. De sorte, le Togo pourra enfin réaliser son potentiel et le transformer en réelles opportunités économiques et engranger certains dividendes rapides qui sont déjà à sa portée.

Le développement agricole reste vital pour l’économie togolaise

Marché aux ceréales

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27L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

in acTion

Des membres Du Conseil D’ADministrAtion De lA bAnque monDiAleAu borD De lA lAgune D’ébrié

Du 8 au 11 février 2012, la Côte d’Ivoire accueillera une importante délégation d’Administrateurs du Groupe de la Banque mondiale dans le cadre d’une visite en Afrique qui les conduira dans 2 autres pays, le Ghana et la Guinée. L’objet principal de cette visite est de leur permettre d’évaluer la contribution de la Banque au programme de sortie de crise en cours d’exécution et les moyens de la renforcer. Ils ne se déplacent que rarement hors de Washington, siège de la Banque mondiale. Quand ils le font, c’est généralement pour des motivations d’un indéniable intérêt tant pour le pays visité que pour l’institution qu’ils représentent. Toucher du doigt les réalités d’un pays caractérisées soit par une situation de crise majeur du fait de l’Homme ou de catastrophe naturelle, soit par ses performances en matière de développement et pouvant être cité en exemple, soit par la qualité de son partenariat avec la Banque mondiale, soit par sa situation stratégique dans un contexte régional, etc. Ces motivations qui fondent la visite des membres du Conseil d’Administration sont certes multiples, mais elles sont à chaque fois porteuses d’un ou de plusieurs messages adressés à la fois aux autorités du pays et au management de la Banque mondiale. Pour le cas de la Côte d’Ivoire, cette visite constitue à maints égards une opportunité dans le contexte actuel de ce pays. Elle est d’autant plus importante que c’est près de la moitié du Conseil d’Administration de la Banque mondiale (10 membres sur 25) qui fera le déplacement d’Abidjan.

Comprendre le rôle d’un Administrateur de la Banque mondialeLe Conseil d’Administration du Groupe de la Banque mondiale jouit des pouvoirs des plus étendus. Placé au haut de l’échelle de la hiérarchie de l’institution, c’est lui qui approuve les grandes décisions managériales, les allocations de ressources aux pays, les accords de financement (prêts, crédits et dons), les politiques opérationnelles et autres. Ces pouvoirs lui sont délégués par les pays actionnaires de la Banque mondiale. A la différence du Conseil d’Administration d’une entreprise, celui de la Banque mondiale est une instance permanente au même titre que la direction de l’institution. 5 Administrateurs sont nommés par les plus grands actionnaires (États-Unis, Japon, Allemagne, France et Royaume-Uni). Les 20 autres sont élus par des groupes de pays qu’ils représentent. Pour tout dire, ce sont donc les vrais « patrons » de la Banque mondiale qui ont jeté leur dévolu sur la Côte d’ivoire où leur programme de visite prévoit, outre le dialogue de haut niveau avec les plus hautes autorités de la République, des rencontres avec le Président de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR), des représentants du secteur privé, de la société civile et des visites de terrain pour mieux appréhender les réalités de la Côte d’Ivoire profonde.

Who’s Who de la délégationles adMinisTraTeurs aTTendus a aBidjan

Ambroise FAYOLLE – Administrateur pour

la France à la Banque mondiale et au Fonds

Monétaire International.

John WHITEHEAD – Administrateur pour l’Australie, Cambodge, République de Kiribati, Corée, îles

Marshall, États fédérés de Micronésie, Mongolie, Nouvelle Zélande, République de Palau, Papouasie

Nouvelle Guinée, République de Samoa, îles Salamon, République de Tuvalu et le Vanuatu.

Kevin DALRYMPLE – Administrateur Suppléant pour les îles Antigua-et-Barbuda, Bahamas, îles Barbados, Belize, Canada, île

dominicaine, Grenade, Guyane, Ireland, Jamaique, St. Kitts et Nevis (ou Saint-

Christophe-et-Niévès), Sainte Lucie, Saint Vincent et les Grenadines.

Varinia Cecilia DAZA FORONDA –

Administrateur Suppléant pour l’Argentine, Bolivie, Chili, Paraguay, Peru, et

Uruguay.

Administrateur hôteAgapito MENDES DIAS – Administrateur pour le Benin, Burkina Faso, Cameroun, Cape Vert, Centre Afrique, Tchad, Comores, Cote d’Ivoire, RDC, Djibouti, Guinée Equatoriale, Gabon, Guinée, Guinée-Bissau, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, Congo, Sao Tome & Principe, Sénégal et Togo.

Pierre ROMAND-HEUYER – Chargé Principal des

Opérations au Secrétariat du Conseil d’Administration.

Jörg FRIEDEN – Administrateur pour la Suisse, représente aussi

les intérêts de l’Azerbaïdjan, Kazakhstan, Kirghizstan,

Tadjikistan, Turkménistan, Ouzbékistan, Pologne et Serbie.

Merza H. HASAN – Administrateur pour le Koweït.

Représente aussi Bahrein, Egypt, Irak, Jordanie, Liban, Libye,

Maldives, Oman, Qatar, Syrie, Emirats Arabes Unis et Yemen.

Ingrid-Gabriela HOVEN est Administrateur pour

l’Allemagne.

Rogerio STUDART – Administrateur pour le Brésil, Colombie, République

Dominicaine, Equateur, Haïti, Panama, Philippines, Surinam,

Trinidad &Tobago.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00628 L’espoir

Une étoile dans la nuit noire

ceux qui empruntent le Boulevard Mitterrand à Abidjan ont pu le constater : de toutes les constructions qui bordent le parcours, celle de l’ENSEA est sans doute la plus aboutie en

termes de vue panoramique et d’esthétique environnementale. La vaste pelouse verte et les longues allées fleuries, méticuleusement entretenues tout au long de l’année, ne laissent personne indifférent. L’image est d’autant frappante qu’à l’entour, règne une atmosphère de misère. Bâtie sur une superficie de trois (3) hectares dont les deux tiers (2/3) sont de l’espace vert, l’Ecole est formée de sept (7) bâtiments reliés entre eux par des passerelles. Une prouesse reconnue par un cabinet indépendant, Planistat, qui écrivait dans un rapport commandité en 2003 par le Ministère français des Affaires étrangères que « Les locaux de l’ENSEA tranchent tant en ce qui concerne leur taille que leur entretien de ceux des deux autres écoles (ndlr : l’Institut Sous-régional de Statistique et d’Économie Appliquée (ISSEA) de Yaoundé et le Département Statistique de l’École Nationale d’Économie Appliquée (ENEA) de Dakar » Le rapport1 note que « les conditions de travail sont certainement parmi les meilleures, si elles ne sont pas les meilleures de l’enseignement supérieur ivoirien ». Un brevet de satisfecit rarement délivré à une institution de formation africaine. La moisson de la rigueur, de la constance et un leadership porté par 3 équipes dirigeantes qui se sont succédées à la tête de l’institution depuis sa création en 1961. En 50 ans d’existence, l’ENSEA n’a connu que 3 Directeurs généraux, tous enseignants, passionnés de recherches et de formation. Le dernier, Koffi N’Guessan, est en poste depuis 1995.

1 - Les appuis de la France et de la Commission Européenne aux Écoles Africaines de Statistique : Évaluation rétrospective aux écoles africaines de statistiques. Document réalisé par Planistat pour le compte du Ministère des Affaires étrangères, 2003.

Modeste, il rend hommage aux pionniers qui ont eu l’idée, à un moment où le jeune Etat de Côte d’Ivoire avait besoin d’indicateur pour suivre et piloter le développement de son économie, de créer un centre devenu au fil des ans un pole d’excellence. « Sans chiffres, c’était très difficile de prendre des décisions efficaces pour un développement harmonieux. Il fallait donc trouver des techniciens pour produire des chiffres, les analyser, calculer les indicateurs de croissance et mieux suivre le développement de l’économie du pays » admet-il. Ces pionniers, ce sont les premiers statisticiens économistes ivoiriens et d’une bonne partie de l’Afrique francophone formés par des experts français sous la houlette du Centre Européen des Statisticiens Economistes des pays en voie de développement (CESD) de Paris, créé avec l’appui de l’INSEE et de la Communauté européenne en 1962. Deux ans plus tard, en 1964, le CESD se voit attribuer la responsabilité de superviser l’organisation d’un concours commun ouvert à tous les candidats des pays africains susceptibles de se présenter, à l’occasion de la création d’une première formation de statisticiens à Abidjan. Prémices d’une intégration régionale par l’excellenceDurant les premières années des indépendances, dans tous les rouages de l’administration africaine, on notait une présence significative d’assistants techniques français commis à cette tache et à bien d’autres. Première étape : la création de l’Ecole d’Application de la Direction de la Statistique et des Etudes Economiques (1961), devenue Ecole de Statistique (1963). C’est ici que seront formés de nombreux fonctionnaires du corps des Agents Techniques de la Statistique recrutés sur concours professionnel, parmi les commis du service ou par concours direct ouvert aux candidats titulaires du BEPC. En plus de la Côte d’ivoire, les premiers étudiants viennent du Mali, de la Haute Volta (actuel Burkina Faso), et la Guinée qui

L’ensea d’aBidjan

Panafricaine dès ses débuts aux lendemains des indépendances, l’Ecole Nationale Supérieure de Statistique et d’Economie Appliquée (ENSEA) d’Abidjan est un fleuron de l’enseignement supérieur en Afrique francophone. Alors que sur le continent, enseignants et élèves sont réduits à un état de clochardisation du fait des choix des politiques publiques inappropriées, l’ENSEA donne l’exemple d’une institution dont les produits et la gouvernance ont su s’adapter aux époques. Plus que l’enseignement des statistiques indispensables à la prise de décision pour un meilleur développement, c’est une passion pour la qualité et la constance du bon leadership qui ont permis à cet établissement d’être une référence tant pour le système de formation ivoirien que régional.

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29L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

Une étoile dans la nuit noirefinissent par affirmer la vocation régionale d’une école qu’une loi est venue ériger en 1969 en établissement public d’enseignement supérieur, doté de la personnalité civile et de l’autonomie financière. Succédant à une pionnière, COULIBALY Claude qui avait dirigé les 9 premières années de l’école, le professeur YATTIEN-AMIGUET François obtient en 1982 la dénomination « École Nationale Supérieure de Statistique et d’Économie Appliquée», ENSEA et étend les objectifs de l’École à la formation de cadres statisticiens au plus haut niveau. Résultat : la filière Ingénieur Statisticien Economiste ou ISE, jadis délivrée par le CESD à Paris, est ouverte dès 1987 à Abidjan.

Quand il arrive aux commandes en 1995, en pleine crise économique, Koffi N’Guessan est animé par la même volonté d’innovation et de succès, même s’il doit faire face aux effets de la crise qui frappe son pays. Sept ans plus tard, c’est-à-dire en 2002, c’est une autre crise, politico-militaire celle là, qui s’abat sur la Côte d’Ivoire. Les effets conjugués de ces crises contraignent l’Etat à imposer une diète budgétaire à ses démembrements dont l’ENSAE. Mais c’est aussi dans ce contexte délétère que M. N’Guessan et ses collaborateurs trouvent la force de leurs convictions. L’ENSEA, c’est toute une histoire, il faut la réhabiliter. « Peut-être que je me trompe. Pour moi, ce qui manque en Afrique, souvent, c’est qu’il n’existe pas un idéal dans l’administration que l’on recherche ; il n’y a pas une passion dans le travail que l’on fait. A l’ENSEA, je pense qu’une des clés de nos succès, c’est que chacun a su s’intégrer dans un idéal commun. On a moins senti les effets de la crise car durant cette période, tout le monde a été solidaire » lance-t-il, les yeux pétris d’espoir pour une Afrique qui gagne. Au bout de cette logique de persévérance et de passion pour le métier d’enseignant, l’ENSEA obtient en 2006 le label «Centre d’Excellence Régional de l’UEMOA». Une distinction méritée, basée sur un indéniable sens de la pédagogie, de la rigueur dans la sélection des meilleurs profils et une vocation à entretenir la réputation d’une expertise au service des Etats africains. Attirés par la qualité de son enseignement, quelques 20 pays africains, y compris le Sénégal et le Cameroun où il existe pourtant des centres de formation statistique, envoie régulièrement leurs cadres s’y former. Pour la rentrée 2010-2011, ce sont prés de 330 étudiants de 15 nationalités (40 étudiants viennent de pays anglophones, conséquence de l’ouverture depuis 2008 vers ces pays) qui sont enregistrés dans les 5 filières proposées : Ingénieurs Statisticiens Economistes (ISE) ; Ingénieurs des Travaux Statistiques (ITS) ; Adjoints Techniques de la Statistique (AD) ; Agents Techniques de la Statistique (AT) ; Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées-Analyse Statistique Appliquée au Développement (DESS - ASAD). Une aubaine pour les organismes internationaux, les ministères, organismes publics et/ou privés et les grandes entreprises dont une bonne partie n’hésitent pas à « pister » dés leur entrée à l’école, des futurs cadres. En 5 décennies de formation, ce sont plus de 3000 Ingénieurs Statisticiens Economistes que l’ENSEA a injectés dans le circuit de l’emploi, sans difficulté. Les produits ressemblant étrangement au contenant, l’image de pureté que projette l’ENSAE irradie sur les étudiants de cette institution universitaire qui est la démonstration par l’absurde que la déliquescence avancée de l’Enseignement Supérieur en Côte d’Ivoire n’est pas une fatalité, mais le fait d’Hommes, le fait d’une élite qui a failli.

Koffi N’Guessan, Directeur Général de l’Ensea : une force de conviction

qui irradie sur ses étudiants.

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azedine Ouerghi, Coordonnateur des secteurs Développement HumainOriginaire de Tunisie, Azedine Ouerghi est diplômé de l’Institut Français des Sciences et Techniques Nucléaires et Paris Dauphine. Très pointu sur les questions relatives aux systèmes de protection sociale et l’emploi des jeunes, il en fera une priorité dans sa nouvelle fonction de coordonnateur des secteurs Développement Humain pour la Côte d’Ivoire, le Benin, le Togo et le Burkina Faso. Azedine, Abidjan te dit «Akwaba ! ».

Mark roland Thomas, Economiste principal Lui aussi va couvrir la Côte d’Ivoire, le Benin, le Togo et le Burkina Faso comme Economiste principal (depuis le 1er novembre 2011). Doté d’une solide formation aux universités Georgetown et Princeton et une expérience d’Economiste dans d’autres pays couverts par la banque, Mark Roland Thomas était

récemment basé en Turquie. En bon Anglais, il aime le foot et les plats épicés, ce qu’il ne manquera pas de trouver à Abidjan, même si pour l’instant il est basé à Washington. Welcome board Mark !

nabil M. chaherli, Coordonnateur des Secteurs Développement DurableA peine fut-il désigné pour son nouveau poste que Nabil Chaherli, Agro-Economiste de formation, était déjà « sur le terrain » fin Novembre 2011, à l’occasion d’une visite de son Directeur Sectoriel. Ses premiers contacts avec les planteurs de l’hévéa et du cacao ivoiriens ont démontré les capacités d’un homme qui n’a rien perdu de sa chaleur méditerranéenne. Nabil, qui avoue avoir mordu dans le fameux Atiéké local, y voit une similitude avec le bon couscous de Tunisie d’oú il est originaire. Marahba Bik Si Nabil !

Pélagie agonvinon, Team Assistant, IFC Après une carrière débutée aux USA, notamment au sein d’un grand organisme spécialisé dans le développement communautaire, Pélagie a rejoint sa Côte d’Ivoire natale en 2007 pour travailler avec une firme étrangère opérant dans l’exploration des hydrocarbures. Depuis 2 mois, elle a étoffé le bureau de la SFI à Abidjan. Bienvenida !

La ParoLe est à…

Amadou Ibrahim,Pourquoi je suis revenuà la Banque mondiale ?

je suis entré à la Banque mondiale en 1997, suite à un stage de 3 mois au Bureau de Niamey, suivi d’un contrat pendant 2 ans comme Analyste de

Recherche. En décembre 1998, un poste d’économiste a été ouvert au Niger et je fus sélectionné. Etudiant, je ne comprenais pas bien pourquoi l’aide massive fournie à l’Afrique ne produisait pas de résultats tangibles. Une meilleure compréhension de l’infrastructure administrative dans mon propre pays, m’a permis de mieux cerner le problème. Les premiers défis commencent lorsque vous avez la responsabilité d’une activité majeure (projet, étude, etc.) et que vous avez à diriger une équipe, respecter des délais, trouver un consensus avec le client, etc. Je garde un très bon souvenir de ma présentation au Conseil d’Administration de la Banque en avril 2008, de la Note d’Evaluation Conjointe (FMI-BM) du DSRP (Document de Stratégie de Lutte contre la Pauvreté) du Niger. C’était pour moi une expérience inoubliable. C’est aussi une illustration de la grandeur d’âme de nos managers. Il y a aussi des difficultés et des défis, mais il faut garder confiance en soi et rester motivé. Je fus sélectionné en 2009 par Afreximbank (institution financière panafricaine) en tant qu’économiste principal. La situation politique s’était dégradée au Niger et un certain nombre de bailleurs ont gelé leur appui financier au pays, de même après une dizaine d’années passées à la Banque et dans cette période d’incertitude, j’avais le sentiment que c’était le bon moment d’essayer une autre expérience. J’ai ainsi pu acquérir de nouvelles connaissances. La difficulté intrinsèque qui est très vite perceptible dans une institution continentale, est que la gouvernance reflète souvent en miniature un condensé de la gouvernance des États membres. La force de la Banque mondiale, c’est d’avoir su éviter cet écueil. J’ai décidé d’y revenir suite à une opportunité de travailler au Bénin. La perception de l’Afrique dans le monde a très positivement changé au cours des dernières années.

INSIDETHE BANK

The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00630 L’espoir

Nouveau staff

la FaMille s’élargiT

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31L’espoir The World Bank Magazine - Abidjan / N° 006

2011: regards réTrOsPecTiFs Entre des processus électoraux plus ou moins chaotiques par endroit, et ce qu’il est admis aujourd’hui d’appeler « le printemps arabe », l’année 2011 aura également été marquée par la crise financière en Europe. Nous avons donné la parole à quelques collègues pour leurs regards rétrospectifs.

DJOuDALBAYE DANIEL YGNALBAYE, Resource Management Analyst. (Cotonou, Benin)

« L’Afrique, entre espoir et doute… »Commençons par le meilleur de l’année 2011 : Le dénouement de la crise ivoirienne et son impact sur la sous-région ; Les élections au Benin dont on avait peur et qui se sont finalement bien déroulées; La désignation et l’installation d’un nouveau Représentant Résident de la Banque mondiale au Benin ; La visite du Pape et surtout son message de paix et de réconciliation. 2011 a été aussi une année difficile : La restriction budgétaire à la Banque mondiale et son impact sur les opérations ; La crise financière internationale, et particulièrement dans la zone Euro dont certains pays comme la Grèce sont sous Ajustement Structurel ; Les conflits armés; le printemps arabe a surpris tout le monde et bouleverse la géopolitique internationale ; les attentats qui ont ciblé le personnel des Nations-Unies au Nigeria ; certains de nos collègues y ont laissé la vie. Mais l’espoir demeure toujours et les économistes nous prédisent de bonnes nouvelles en termes de croissance pour la sous –région.

Ndeye MAgAtte FAtIM SeCk, Program Assistant (en stage de développement de carrière, Cotonou, Benin)

« Jeunes, emploi et révolution »2011 aura été particulièrement riche en évènement : la crise ivoirienne vécue avec les collègues évacués à Dakar pour qui j’avais de la compassion. En dépit de ce qui leur est arrivé, j’ai eu l’occasion de découvrir des personnes sympathiques et professionnelles. Je pense aussi aux

révolutions arabes et au mouvement des indignés qui ont révélé d’une part: La détermination des jeunes à changer les choses dans leur vie et pour leurs Nations. D’autre part : le poids décisif et indiscutable qu’ont joué les réseaux sociaux comme facebook et twitter dans ces évènements. Je me réjouis aussi que la Banque mondiale accorde davantage d’intérêt aux questions de l’emploi des jeunes. Enfin, je finirai par remercier le dynamique bureau du Benin où je suis depuis septembre 2011. Pour 2012, je souhaite pour le Sénégal des élections libres et transparentes, et que la paix et la justice règnent partout.

gALINA SotIrovA, Country Manager (ouagadougou, Burkina Faso)

«2012 : Ensemble, transformons les défis en opportunités»Le Burkina Faso a connu en 2011, l’une des plus grandes crises sociopolitiques de son histoire. La Banque mondiale a salué l’esprit de dialogue qui a prévalu, ainsi que les initiatives et engagements du gouvernement à promouvoir plus de gouvernance, de transparence et une approche participative pour ramener la sérénité dans le pays. Notre souhait pour 2012 est de consolider le partenariat avec les différentes parties prenantes au développement afin de soutenir la diversification – le Pôle de Croissance de Bagré en est l’illustration-, de renforcer la bonne gouvernance, tout en menant de profondes réflexions pour dynamiser la création d’emplois - des jeunes notamment – et transformer ce formidable défi en une opportunité d’impliquer une importante frange de la population dans le développement du pays.

MArIAMe BAMBA, Team Assistant (Abidjan, Côte d’Ivoire)

« Iman… le plus beau jour de ma vie! »2011! Une année très spéciale pour moi, riche en émotions. De la tristesse due à la séparation, en décembre 2010, d’avec mes collègues de la Banque évacués à Dakar suite à l’éclatement de la crise postélectorale. Dominique, Betche et moi-même, avions décidé de rester à Abidjan pour des raisons personnelles. Tous les 3, nous nous étions dit que la crise ne durerait que quelques semaines. Hélas !Mais 2011, ce fut aussi une année de joie immense pour mon époux et moi-même. Le 7 septembre a vu la naissance de notre princesse, Iman. C’était le plus beau jour de ma vie. Iman signifie la « foi » en arabe. À tous ceux qui semblent avoir perdu la foi, je n’ai qu’un message : Reconvertissez-vous et ayez foi en Dieu. Puisse t-il faire en sorte que la Côte d’Ivoire ne connaisse plus jamais les douloureux évènements de 2011.

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The World Bank Magazine - Abidjan / N° 00632 L’espoir