Plaidoyer Santé sexuelle et reproductive de Médecins du Monde

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Les avortements à risque : du déni à l’action S’ENGAGER AU CAIRE+20 POUR UN MEILLEUR ACCÈS À LA CONTRACEPTION ET L’AVORTEMENT SÛR ET LÉGAL t

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Les avortements à risque : du déni à l’action S’engager au Caire+20 pour un meilleur accès à la contraception et l’avortement sûr et légal.

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Les avortements à risque : du déni à l’action

S’engager au Caire+20 pour un meilleur aCCèS à la ContraCeption et l’avortement Sûr et légal

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Les avortements à risque : du déni à l’action

Sommaire

Glossaire

Synthèse

Fiche n° 1 La santé sexuelle et reproductive, une approche de santé publique fondée sur les droits humains

Fiche n° 2 La Conférence du Caire, un tournant décisif dans la reconnaissance des droits sexuels et reproductifs

Fiche n° 3Le Caire, vingt ans après : entre avancées timides et promesses non tenues

Fiche n° 4La problématique des avortements à risque

Fiche n° 5Renforcer l’accès à la contraception

Fiche n° 6Prendre en charge les grossesses non désirées : l’accès à l’avortement médicalisé

Fiche n° 7La conférence du Caire +20 : remobiliser la communauté internationale autour des droits sexuels et reproductifs

Fiche n° 8 Recommandations

Fiche n° 9La mobilisation de la société civile internationale

Fiche n° 10Pour aller plus loin...

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Les avortements à risque : du déni à l’action

GlossaireAGNU Assemblée générale des Nations unies

CEDEF Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

CIDE Convention internationale relative aux droits de l’enfant

CIPD Conférence internationale sur la population et le développement

CPD Commission Population et Développement

CSW Commission on the Status of Women (Commission de la condition de la femme)

DIU Dispositif intra-utérin

EC European Commission (Commission européenne)

ICEC International consortium for emergency contraception

IVG Interruption volontaire de grossesse

FNUAP Fonds des Nations unies pour la population

MDM Médecins du Monde

OMD Objectifs du millénaire pour le développement

OMS Organisation mondiale de la santé

PED Pays en développement

PIDCP Pacte international relatif aux droits civils et politiques

PIDESC Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

ONU Organisation des Nations unies

UE Union européenne

VIH Virus d’immunodéficience humaine

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Les avortements à risque : du déni à l’action

SynthèseEn 1994, lors de la Conférence internationale du Caire sur la population et le développement (CIPD), 179 Etats ont adopté un programme d’action dans lequel ils se sont engagés à garantir l’accès universel à la santé reproductive d’ici 2015. Cette conférence a marqué un tournant décisif dans la reconnaissance des droits sexuels et reproduc-tifs, leviers incontournables de l’émancipation féminine et de l’amélioration de la santé des femmes.

Depuis quelques années, on assiste cependant, aussi bien sur la scène internationale qu’au sein même de l’Union européenne, à la montée en puissance de groupes conservateurs de mieux en mieux organisés qui remettent régulièrement en question ces droits fondamentaux. Dans ce contexte, la prochaine session spéciale des Nations Unies consacrée aux 20 ans de la confé-rence du Caire (22 septembre 2014) représente un moment particulièrement important pour faire le bilan de l’action internationale, enrayer la montée des conservatismes et réaffirmer l’importance des droits sexuels et reproductifs dans le nouveau cadre de développement post-2015.

LA PRObLéMAtIqUE : LES GROSSESSES NON DéSIRéES Et AVORtEMENtS à RISqUEA l’heure de dresser le bilan de la mise en œuvre du programme d’action du Caire, la communauté internationale accuse de sérieux retards en matière de santé sexuelle et reproductive. La probléma-tique des grossesses non désirées, un des princi-paux défis identifiés lors de la conférence, continue en effet de se heurter à de fortes oppositions au niveau international, rendant les avancées en la matière encore très fragiles et limitées. Pourtant, ces grossesses non désirées représentent un véritable enjeu de santé publique et figurent parmi les principaux facteurs de morbi-mortalité maternelle. Elles se traduisent dans la réalité par la multiplication des grossesses à plus haut risque (liées notamment aux grossesses précoces ou trop rapprochées), mais également par un nombre très important d’avortements pratiqués dans de mau-vaises conditions de sécurité.

222 millions de femmes qui préfèreraient dif-férer ou éviter une grossesse dans les pays en développement n’ont toujours pas accès à une contraception sûre et efficace. Selon les esti-mations, environ 80 millions de grossesses non désirées surviennent dans ces pays et plus d’un quart de ces grossesses (21,6 millions) aboutit à un avortement non médicalisé. Chaque année, ces avortements à risque entraînent le décès de près de 50 000 femmes, soit environ 13% de la mortalité maternelle, tandis que 8 millions d’autres souffrent d’invalidités temporaires ou définitives.

Aujourd’hui, il est essentiel que la communauté internationale se saisisse de cet agenda inachevé de la CIPD et renouvelle son engagement en faveur de la santé et des droits sexuels et reproductifs. Plus particulièrement, la conférence du Caire+20 doit être l’occasion pour les Etats de prendre des décisions concrètes en matière de prévention et prise en charge des grossesses non désirées. Dans cette perspective, Médecins du Monde recom-mande aux Etats de garantir un meilleur accès à la contraception et à l’avortement sûr et légal afin de donner aux femmes la capacité de déci-der de leur vie (voir recommandations fiche 8).

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Les avortements à risque : du déni à l’action

qU’ESt-CE qUE LA SANté SExUELLE et reproductive ?

La santé reproductive désigne un concept englobant : il s’agit d’un « état de bien-être général, tant physique que mental et social, de la personne humaine, pour tout ce qui concerne l’appareil génital (…) et non seulement l’absence de maladies ou d’infirmités. Cela suppose donc qu’une personne peut mener une vie sexuelle satisfaisante en toute sécurité, qu’elle est capable de procréer et libre de le faire aussi souvent ou aussi peu souvent qu’elle le désire. (Cela) implique qu’hommes et femmes ont le droit d’être informés et d’utiliser la méthode de planification familiale de leur choix (…), le droit d’accéder à des services de santé qui permettent aux femmes de mener à bien grossesse et accouchement et donnent aux couples toutes les chances d’avoir un enfant en bonne santé.1 »

Cette définition inclut la santé sexuelle2 et va au-delà en intégrant les notions de maternité, de paternité et de planification familiale ainsi que toutes les affections qui touchent à l’appareil génital. Sans se limiter à la période de la procréation, la santé reproductive inclut la santé maternelle tout en reconnaissant à toute personne le droit à une vie sexuelle librement choisie et sûre, qu’elle choisisse ou non d’avoir des enfants.

Afin de rappeler que la sexualité n’a pas toujours un but reproductif et de sou-ligner l’importance de prendre en charge la santé sexuelle, nous avons opté dans ce dossier pour la terminologie de « santé sexuelle et reproductive ».

• La santé sexuelle et reproductive est un concept englobant, qui comprend aussi bien la santé maternelle que la santé en matière de sexualité. C’est un état de bien-être général, physique, mental et social.

• La santé sexuelle et reproductive implique le respect des droits sexuels et reproductifs de chacune et chacun : le droit de mener une vie sexuelle agréable, sûre et librement choisie ; le droit d’avoir accès à une offre de méthodes et services de planification familiale complète ; ou encore le droit de vivre à l’abri des violences sexuelles et dans le respect de son intégrité corporelle.

• Les politiques en faveur de la santé sexuelle et reproductive ont des effets bénéfiques sur la santé des femmes et des enfants tout en favorisant l’émancipation féminine.

En bREf

La santé sexuelle et reproductive, une approche de santé publique fondée sur les droits humains

1 Conférence du Caire, paragraphe 7.2

2 Pour une définition de la santé sexuelle, voir : http://www.euro.who.int/fr/what-we-do/health-topics/Life-stages/sexual-and-reproductive-health/news/news/2011/06/sexual-health-throughout-life/definition

Fiche 1

UN CADRE DE RéFéRENCE : LES DROItS HUMAINS

La santé sexuelle et reproductive implique le respect d’un certain nombre de droits fondamentaux : disposer de son corps, prendre des décisions autonomes sur sa santé, avoir accès aux services de planification familiale, etc. Ce sont les droits sexuels et reproductifs, qui découlent de droits humains déjà reconnus dans des législations nationales, des instruments internationaux relatifs aux droits humains et des documents de référence de l’ONU.

Les droits sexuels et reproductifs incluent pour toute personne, sans crainte de discrimination, violence ni coercition, les droits suivants :

» Droit à l’autonomie physique et au respect de sa vie privée • Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 17.1, 1966• Conférence de Pékin, article 96, 1995 : « Les droits fondamentaux des femmes comprennent le droit d’être maîtresses de leur sexualité, y compris leur santé en matière de sexualité et de procréation, sans aucune contrainte, discrimination ou violence, et de prendre librement et de manière responsable des décisions dans ce domaine.»

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fiche n°1 / La santé sexuelle et reproductive, une approche de santé publique fondée sur les droits humains

Les avortements à risque : du déni à l’action

Conformément au droit international, ces services de santé doivent être de qualité (hygiène, qualité des équipements et de la formation du personnel), accessibles (accessibilité physique et économique, non-discrimination), disponibles (fonctionnels et en quantité suffisante) et acceptables (respectueux de l’éthique médicale et adaptés au contexte socio-culturel des usagers)3.

3 Comité des Droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale n°14, paragraphe 12, 2000 : http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G00/439/35/PDF/G0043935.pdf?OpenElement

Exemples de services de santé sexuelle et reproductive

• information et éducation sexuelle

• contraception

• Suivi de grossesse, de l’accouchement et du post-partum

• prévention et dépistage des maladies sexuellement transmissibles

• Services proposant un avortement médicalisé

• prise en charge de l’infertilité et des pathologies du système reproducteur

t » Droit à la sécurité et la protection contre toutes formes de violence

• Déclaration universelle des droits de l’Homme, article 3, 1948• Protocole de Maputo, article 4.1, 2003 : « Toute femme a droit au respect de sa vie, de son intégrité physique et à la sécurité de sa personne. Toutes formes d’exploitation, de punition et de traitement inhumain ou dégradant doivent être interdites. »

» Droit à la santé, y compris la santé sexuelle et reproductive

• Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, article 12, 1966 • Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, articles 14.2(b) & 12.2, 1979 : « Les Etats assurent aux femmes le droit : « d’avoir accès aux services adéquats dans le domaine de la santé, y compris aux informations, conseils et services en matière de planification de la famille. » Ils s’engagent également à « [fournir] aux femmes pendant la grossesse, pendant l’accouchement et après l’accouchement, des services appropriés et, au besoin, gratuits, ainsi qu’une nutrition adéquate pendant la grossesse et l’allaitement. »

» Droit de décider librement et avec discernement du nombre et de l’espacement des naissances

• Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, article 16.1(b) • Conférence du Caire, paragraphe 7.3, 1994 : « (…) Les droits en matière de procréation (…) reposent sur la reconnaissance du droit fondamental de tous les couples et des individus de décider librement et avec discernement du nombre de leurs enfants et de l’espacement de leurs naissances et de disposer des informations nécessaires pour ce faire, et du droit de tous d’accéder à la meilleure santé en matière de sexualité et de reproduction. (…) »

» Droit à l’information et l’éducation, y compris en matière de sexualité et de procréation

• Convention internationale relative aux droits de l’enfant, articles 24.2(f), 1989• Conférence du Caire, paragraphe 7.41, 1994 : « … Les adolescentes devraient notamment pouvoir accéder à une information et à des services qui les aident à comprendre leur sexualité et à se protéger contre les grossesses non désirées, les maladies sexuellement transmissibles et les risques de stérilité en résultant. Il faudrait également enseigner aux jeunes gens à respecter l’autodétermination des femmes et à partager les responsabilités avec elles dans les questions de sexualité et de procréation… »

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Les avortements à risque : du déni à l’action

DE LA SANté SExUELLE Et REPRODUCtIVE à L’éMANCIPAtION DES FEMMES

L’accès à la santé sexuelle et reproductive est une des conditions nécessaires pour mener une vie digne et en bonne santé. Il s’agit également d’un levier incontournable de l’émancipation féminine et l’égalité des genres. Les services de santé sexuelle et reproductive peuvent en effet avoir un impact positif sur le changement social, l’égalité des genres, l’éducation et l’autonomie financière des femmes.

» Santé

L’accès à la contraception permet aux femmes de décider d’être enceintes au moment qu’elles jugent le plus adapté, ce qui évite les complications liées aux grossesses précoces ou trop rapprochées et contribue du même coup à réduire la mortalité materno-infantile.

• Selon une étude du Lancet (Contraception and health, 2012), espacer les nais-sances de deux ans grâce à la contraception permettrait de diminuer les risques de prématurité et pourrait réduire de 10% les risques de décès chez les enfants de moins d’un an dans les pays en développement. L’accès à la contraception permettrait également de diminuer la mortalité maternelle des jeunes femmes de 15 à 19 ans, chez lesquelles le risque de décès liés à la maternité est 2 fois plus élevé que chez les femmes de plus de 20 ans. Chez les filles en-dessous de 15 ans, ce risque est multiplié par 54.

• En cas de grossesse non désirée, l’accès à l’avortement médicalisé permet d’éviter le recours aux avortements clandestins et à risque.

» education, autonomie financière et égalité des genres

Les femmes qui ont accès aux méthodes de contraception sont en mesure de poursuivre leurs études en évitant les risques de grossesses non désirées. Elles peuvent donc entrer sur le marché du travail sur un pied d’égalité avec les hommes, accéder aux postes de responsabilité et participer à la vie publique. Les femmes autonomes et éduquées sont ensuite plus susceptibles d’investir à leur tour dans l’éducation de leurs propres filles, ce qui contribue à diminuer les inégalités de genre dans la vie adulte (inégalités face à l’emploi et/ou face au partage des responsabilités parentales, par exemple).

» Développement économique et social

De par ses effets sur la santé materno-infantile et l’émancipation féminine, l’accès à la santé sexuelle et reproductive peut également favoriser le déve-loppement économique et social des pays, en améliorant les conditions de vie générales des individus et des familles (allongement de l’espérance de vie, accès à l’éducation, emploi féminin, augmentation des revenus…).

Au Kenya, 10 000 à 13 000 jeunes filles quittent l’école chaque année en raison d’une grossesse. Dans certains pays d’Afrique sub-saharienne, entre 8 et 25% des jeunes filles quittent l’école en raison d’une grossesse précoce. Countdown 2015 Europe, Planification familiale et autonomisa-tion des femmes, 2012

4 Organisation mondiale de la Santé, WHO Guidelines on Preventing Early Pregnancy and Poor Reproductive Outcomes among Adolescents in Developing Countries, Genève, 2011, pp. ix, 130. & http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs364/fr/

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Les avortements à risque : du déni à l’action

La Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) ou « conférence du Caire », qui se tient en 1994, marque un tournant décisif en matière de développement et de droits des femmes. Pour la première fois, 179 Etats signent un programme d’action ambitieux dans lequel ils s’engagent à améliorer tous les déterminants du développement : la santé, l’éducation, l’accès à l’alimentation, mais aussi l’autonomisation des femmes et l’égalité des genres.

Pour y parvenir, les participants adoptent une nouvelle démarche basée sur les droits humains. Les droits des femmes, et notamment leurs droits repro-ductifs, sont reconnus comme des éléments capitaux de tous les programmes relatifs à la population et au développement. Dans un langage progressiste, les Etats prennent position en faveur de la planification familiale, qui n’est plus seulement un moyen de maîtriser la fécondité des femmes : il s’agit avant tout d’un droit humain, qui doit s’exercer librement et en pleine connaissance de cause, et qui s’applique aussi bien aux couples qu’aux individus non mariés et aux adolescents.

Bien qu’il n’ait pas valeur de traité légalement contraignant, le programme d’action du Caire (http://www.un.org/popin/icpd/conference/offfre/conf13.fre.html) reflète un large consensus qui engage directement la communauté internationale et lui impose des objectifs chiffrés dans tous les domaines liés au développement, y compris la santé sexuelle et reproductive.

Dans le chapitre 7 intitulé « Droits et santé en matière de reproduction », les Etats s’engagent ainsi à réduire de trois quarts le taux de mortalité maternelle d’ici 2015. Surtout, ils abordent deux aspects de la santé sexuelle et reproduc-tive jusqu’alors largement négligés : la prévention et la prise en charge des grossesses non désirées.

• La conférence internationale sur la population et le développement de 1994 (CIPD) introduit un changement de paradigme décisif en matière de politiques de développement, qui se base sur le libre-choix et le bien-être des individus.

• Les droits reproductifs sont reconnus comme des droits humains.

• Les etats signataires s’engagent à garantir l’accès universel à la santé sexuelle et reproductive d’ici 2015.

• Les avortements à risque sont considérés comme un problème de santé publique et il est reconnu que toutes les femmes devraient bénéficier de soins post-avortement, quelle que soit la législation en vigueur.

La conférence du Caire, un tournant décisif dans la reconnaissance des droits sexuels et reproductifs

UNE AMbItION : L’ACCèS UNIVERSEL à LA SANté SExUELLE Et REPRODUCtIVE

Fiche 2

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fiche n°2 / Une prise de conscience internationale : la Conférence du Caire et ses suites

Les avortements à risque : du déni à l’action

D’une part, les signataires s’engagent à garantir, en droit comme en pratique, l’accès universel à des services et des soins de planification familiale de qualité d’ici 2015. Ces services et soins doivent comprendre toute une gamme de méthodes de contraception sûres et efficaces ainsi que l’information néces-saire à leur utilisation5.

D’autre part, les Etats s’engagent à considérer les avortements à risque comme un problème de santé publique et à réduire les décès et les com-plications qui en découlent. Le programme d’action demande explicitement aux Etats de veiller à ce que les femmes ayant avorté soient traitées avec compréhension et bénéficient de conseils. Il exige également des Etats qu’ils garantissent la prise en charge des complications liées à l’avortement, quelle que soit la législation en vigueur.6

“Plus précisément, les gouvernements devraient faciliter la prise en charge par les couples et les individus de leur santé en matière de reproduction, en abolissant toutes les restrictions injustifiées d’ordre juridique, médical, clinique et règlementaire à l’information sur les services et méthodes de planification familiale et à l’accès à ces services et méthodes. » Conférence du Caire, paragraphe 7.20

...Tous les gouvernements et les organisations intergouvernementales et non gouvernementales intéressées sont vivement invités à renforcer leur engagement en faveur de la santé des femmes, à traiter les conséquences des avortements pratiqués dans de mauvaises conditions de sécurité en tant que problème majeur de santé publique et à réduire le recours à l’avortement en étendant et en améliorant les services de planification familiale. La plus haute priorité doit toujours être accordée à la prévention des grossesses non désirées et tout devrait être fait pour éliminer la nécessité de recourir à l’avortement. Les femmes qui ont des grossesses non désirées devraient avoir facilement accès à une information fiable et à des conseils empreints de compréhension. (…) Dans les cas où il n’est pas interdit par la loi, l’avortement devrait être pratiqué dans de bonnes conditions de sécurité. Dans tous les cas, les femmes devraient avoir accès à des services de qualité pour remédier aux complications découlant d’un avortement. Après un avortement, des services de conseil, d’éducation et de planification familiale devraient être offerts rapidement, ce qui contribuera également à éviter des avortements répétés. » Conférence du Caire, paragraphe 8.25

5 Conférence du Caire, paragraphes 7 et 8.

6 Ibid

Le programme d’action du Caire pose donc les premières bases de l’action internationale en faveur de la santé sexuelle et reproductive. Il aborde pour la première fois les questions d’accès à la contraception et l’avortement, bien que les déclarations à ce sujet restent limitées. Dans les années suivant la conférence, plusieurs initiatives internationales pour les droits des femmes vont s’inspirer de cet évènement clef.

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Les avortements à risque : du déni à l’action

Un des mérites de la conférence du Caire est la mise à l’agenda de la santé sexuelle et reproductive. Depuis 1994, en effet, le sujet semble imprégner peu à peu les conclusions finales des sommets internationaux ainsi que les standards internationaux en matière de droits humains :

1995 : quatrième conférence mondiale sur les femmes de PékinLa conférence de Pékin réaffirme les principes forts du Caire et établit un pro-gramme d’action dans 12 domaines clefs (santé, violence à l’égard des femmes, développement, etc.) Le document final de la conférence reconnait le droit des femmes à être « maîtresses de leur sexualité ». C’est la première fois qu’un texte fait référence aux droits sexuels des femmes, sans les lier systématiquement à la reproduction. Surtout, le programme d’action de Pékin appelle les Etats à revoir les lois pénalisant l’avortement.

QueLLeS évoLutionS depuiS Le caire ? Les gouvernements devraient « envisager de réviser les lois qui prévoient des sanctions contre les femmes en cas d’avortement illégal. »Conférence de Pékin, Article 106k, 1995

2000 : Sommet du MillénaireLes Nations unies adoptent les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) avec l’ambition de réduire de moitié la pauvreté. Parmi ces huit objec-tifs, trois concernent directement la santé, dont deux reprennent explicitement les objectifs de la Conférence du Caire en termes de réduction de la mortalité maternelle et infantile (OMD 4 et 5). 2007 : Les Etats ajoutent un sous-objectif à l’OMD 5 concernant la santé maternelle : ils s’engagent à rendre l’accès à la santé reproductive universel d’ici 2015.

Que dit L’OMd 5 ?

Objectif 5 : Améliorer la santé maternelle

Cible 5.A - Réduire de trois quarts, entre 1990 et 2015, le taux de mortalité maternelle• indicateurs : 5.1. taux de mortalité maternelle 5.2. Proportion d’accouchements assistés par du personnel de santé qualifié

Cible 5.B - Rendre l’accès à la santé reproductive universel d’ici à 2015 • indicateurs 5.3. taux de prévalence de la contraception 5.4. taux de natalité parmi les adolescentes 5.5. Accès aux soins prénatals 5.6. Besoins de planification familiale non couverts

2006 : Plan d’action de MaputoAdopté par l’ensemble des ministres de la Santé de l’Union africaine, le plan d’action de Maputo définit les axes d’intervention prioritaires pour atteindre un accès universel aux services de santé sexuelle et reproductive d’ici 2015, avec notamment un focus sur la planification familiale et les avortements médicalisés (autorisés depuis le « Protocole de Maputo » en cas de viol, d’inceste, de danger pour la santé ou la vie de la femme ou en cas de danger pour la vie du fœtus7).

2010 : Initiative « Muskoka »Lors du Sommet de Muskoka, au Canada, les pays du G8, accompagnés d’autres bailleurs bilatéraux et fondations, s’engagent à mobiliser 7,3 milliards de dollars US d’ici 2015 afin d’atteindre les OMD 4 et 5 (santé maternelle et infantile).

2012 : Sommet de Londres sur la planification familialeLe Royaume-Uni et la Fondation Bill & Melinda Gates, en partenariat avec le Fonds des Nations unies pour la population, organisent un sommet à l’issue duquel les participants, dont la France, s’engagent à permettre à 120 millions de femmes supplémentaires dans les pays en développement d’accéder à la planification familiale d’ici 2020.

7 Protocole à la charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatifs aux droits des femmes, article 14.2, 11 juillet 2003 : http://www.achpr.org/files/instruments/women-protocol/achpr_instr_proto_women_fra.pdf

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Les avortements à risque : du déni à l’action

Le programme d’action du Caire prévoyait de réduire de 75% les décès liés à la grossesse et l’accouchement d’ici 2015 ; un engagement réitéré en 2000 lors du Sommet du Millénaire (voir fiche 2). En l’espace de deux décennies, le taux de mortalité maternelle dans le monde a diminué de 47%, passant de 400 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes en 1990 à 210 décès en 20108.

• vingt ans après la conférence du Caire, les progrès en matière de santé maternelle sont encourageants mais insuffisants pour atteindre l’objectif fixé par l’ONU.

• La prise en charge et la prévention des grossesses non désirées ont été délibérément écartées de l’agenda international, sous l’influence de groupes conservateurs et religieux.

• aujourd’hui encore, 222 millions de femmes qui souhaitent éviter ou différer une grossesse dans les pays en développement n’ont pas accès à une méthode de contraception moderne.

• environ 40% des grossesses dans le monde sont non désirées et une grossesse sur dix aboutit à un avortement à risque.

en bref

Le Caire, vingt ans après : entre avancées timides et promesses non tenues

MORtALIté MAtERNELLE : UN RECUL NOtAbLE DANS LE MONDE, MAIS à DES NIVEAUx tRèS éLOIGNéS DE CEUx FIxéS PAR L’ONU

Fiche 3

Les décès MAterneLs

un décès maternel est le décès d’une femme survenu au cours de la grossesse ou dans un délai de 42 jours après sa terminaison, quelle qu’en soit la durée ou la localisation, pour une cause quelconque déterminée ou aggravée par la grossesse ou les soins qu’elle a motivés, mais ni accidentelle, ni fortuite. OMS, Classification international des maladies et des pro-blèmes de santé connexes, dixième révision – CIM-10, 1993.

8 ONU, Objectifs du Millénaire pour le Développement : Rapport de 2013 : http://www.un.org/fr/millenniumgoals/pdf/mdg_report2013_goal5.pdf

9 ibid.

taux de mortalité maternelle, 1990, 2000 et 2010 (décès maternels pour 100 000 naissances vivantes)

http://www.un.org/fr/millenniumgoals/pdf/mdg_report2013_goal5.pdf

Régions développées

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Régions en développement

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Ces résultats sont notamment liés aux programmes visant à améliorer le suivi et la prise en charge des femmes enceintes, à l’image des initiatives « Maternité sans risque » (1987), ou plus récemment l’initiative onusienne « Every Woman, Every Child » (2010). Grâce à ces efforts, la proportion d’accouchements en présence de personnel qualifié dans les pays en développement est passée de 55% en 1990 à 66% en 20119.

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fiche n°3 / Vingt ans après la Conférence du Caire : entre avancées timides et promesses non tenues

Les avortements à risque : du déni à l’action

On estime malgré tout qu’au rythme actuel, seulement 23 pays sur 181 concer-nés parviendront à remplir leur objectif d’ici 201510. La mortalité maternelle reste en effet largement au-dessus de l’objectif fixé par l’ONU, en particulier en Afrique sub-saharienne, où l’on dénombre encore en moyenne 500 décès maternels pour 100 000 naissances (contre 850 décès en 1990)11. Il faut par ailleurs garder à l’esprit que le calcul de la mortalité maternelle n’est pas une science exacte. L’enregistrement des décès est souvent incomplet, en parti-culier dans les régions où les femmes accouchent encore chez elles. Même lorsque les registres prennent en compte tous les décès, ils ne précisent pas systématiquement si la femme était enceinte12. La communauté internationale doit donc redoubler d’efforts pour atteindre l’objectif fixé lors du Sommet du millénaire.

Contrairement à la santé maternelle, qui a fait l’objet d’initiatives positives de la part de la communauté internationale, les questions relatives à la prévention et la prise en charge des grossesses non désirées ont été délibérément écartées de l’agenda international depuis le Caire. Pourtant, ces grossesses figurent parmi les principaux facteurs de morbi-mortalité maternelle. Elles se tra-duisent dans la réalité par la multiplication des grossesses à plus haut risque (notamment les grossesses précoces ou trop rapprochées) mais également par un nombre très important d’avortements à risque.

En 1994, le programme d’action du Caire avait énoncé plusieurs objectifs pour résoudre cette problématique : (a) l’accès universel aux méthodes de contra-ception (b) la prise en compte des avortements à risque comme un problème de santé publique et (c) la prise en charge des complications post-avortement. Pourtant, près de vingt ans plus tard, les Etats n’ont toujours pas tenu leurs promesses.

D’une part, les progrès actuels sont jugés encore insuffisants pour rendre l’accès à la contraception universel d’ici 2015. Plus d’une femme sur quatre qui souhaite éviter une grossesse dans les pays en développement n’a toujours pas accès à une méthode de contraception moderne et plus d’une naissance sur dix dans le monde survient chez une jeune fille de 15 à 19 ans13. D’autre part, la proportion des avortements à risque a atteint des niveaux très préoc-cupants : en 2008, près d’un avortement sur deux dans le monde était pratiqué dans de mauvaises conditions. Tandis que le taux de mortalité maternelle tend à diminuer, la part des décès maternels dus aux avortements à risque reste stable (environ 13%)14.

PRéVENtION Et PRISE EN CHARGE DES GROSSESSES NON DéSIRéES : DES PROGRèS tRèS LIMItéS

10 banque mondiale : http://www.worldbank.org/mdgs/maternal_health.html (consulté le 19/08/13)

11 Op.cit. ONU, 2013.

12 Pour plus d’informations : WHO, UNICEF, UNFPA & World bank, Trends in Maternal Mortality : 1990 to 2010, 2012 : http://www.unfpa.org/webdav/site/global/shared/documents/publications/2012/Trends_in_maternal_mortality_A4-1.pdf

13 ONU : http://www.un.org/fr/millenniumgoals/pdf/mdg_report2013_goal5.pdf

14 WHO, Unsafe abortion : global and regional estimates of the incidence of unsafe abortion and associated mortality in 2008, 6th edition, 2011

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Les avortements à risque : du déni à l’action

Progrès insuffisants pour atteindre la cible si la situation ne change pas

cible déjà atteinte ou en voie d’être atteinte d’ici 2015

Données insuffisantes ou inexistantes

EC : http://development.donoratlas.eu/infographics/MDGs%20-%20Infographic%20-%202012.pdf

Accès universel à la santé reproductive : état des lieux de l’OMD5 dans les PED

La situation actuelle s’explique en partie par la diminution de l’aide en faveur de l’accès à la contraception et l’avortement médicalisé des années 90 au début des années 2010, reléguant à l’arrière-plan le problème des grossesses non désirées. Cette réduction des ressources a été encouragée par certaines politiques étrangères conservatrices, à l’image du « Gag rule » américain, qui visait à bloquer toute contribution américaine aux programmes de développe-ment promouvant de près ou de loin l’accès à l’avortement médicalisé. Malgré plusieurs initiatives positives récentes comme le Sommet de Londres (2012), le montant de l’aide dédiée spécifiquement à la santé reproductive, et plus parti-culièrement aux programmes de planification familiale, reste encore trop faible (voir graphique ci-dessous) pour rattraper le retard accumulé.

L’aide à la santé reproductive reste faible

http://mdgs.un.org/unsd/mdg/Resources/Static/Products/Progress2012/French2012.pdf

Rappel t

En 2007, l’OMD 5 a été élargi pour inclure un des objectifs énoncés par le Caire : l’accès universel à la santé reproductive, mesuré selon quatre indicateurs (Taux de prévalence de la contraception, taux de natalité parmi les adolescentes, accès aux soins prénatals, besoins de planification familiale non couverts).

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fiche n°3 / Vingt ans après la Conférence du Caire : entre avancées timides et promesses non tenues

Les avortements à risque : du déni à l’action

Sur la scène internationale, la question des grossesses non désirées, de même que celle des droits des femmes en général, se heurte à l’opposition de groupes conservateurs et religieux de mieux en mieux organisés. Bien que le droit international affirme la primauté des droits humains sur toute consi-dération religieuse, coutumière ou socio-culturelle15, ces groupes remettent inlassablement en cause les droits des femmes et font peser une réelle menace sur leur santé.

Dès 1979, plusieurs Etats ont ainsi refusé d’adhérer aux principes fondateurs de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de dis-crimination à l’égard des femmes (CEDEF) : 30 pays ont émis des réserves relatives à l’égalité des droits dans le cadre du mariage ou de la famille, tandis que 22 ont émis des réserves relatives à la compatibilité de la CEDEF avec les lois religieuses ou les codes traditionnels.

En 1994, les réserves de 15 pays sur le chapitre du programme d’action dédié à la santé sexuelle et reproductive ont affaibli l’impact de la Conférence du Caire.

De même, en 1995, la Déclaration de Pékin a été censurée par des groupes conservateurs qui ont refusé d’inscrire les termes « droits sexuels des femmes » dans le document final, bien que le texte y fasse implicitement référence.

Cinq ans plus tard, lors du Sommet du Millénaire de l’ONU, ces mêmes Etats sont parvenus à exclure la santé sexuelle et reproductive des OMD. Ce n’est qu’en 2007 que la « santé reproductive » a été ajoutée, en tant que sous-objectif de l’OMD 5 (amélioration de la santé maternelle).

Lors de la 57e session de la Commission sur la condition de la femme (CSW), en mars 2013, un groupe de pays conservateurs dont le Vatican, la Russie, l’Iran, mais également Malte (un des rares pays dans le monde à interdire l’avortement en toutes circonstances), a paralysé les négociations en tentant de rouvrir certains chapitres sur les droits des femmes considérés comme acquis. En Lybie et en Egypte, les propositions de l’ONU ont été violemment attaquées par plusieurs dirigeants religieux16. Là encore, la remise en question du modèle patriarcal et l’accès des femmes à la contraception et l’avortement étaient au cœur des débats. Ces nouveaux blocages n’ont pas échappé à la société civile qui s’est fortement mobilisée jusqu’à l’adoption par la CSW d’un document final réaffirmant les obligations des Etats en matière de violences contre les femmes.

Aujourd’hui, à l’heure où les Etats devraient mettre en place des programmes ambitieux en faveur de la santé sexuelle et reproductive, la société civile est donc obligée de réaffirmer sans cesse des droits humains acquis il y a près de vingt ans. Dans le cadre de l’élaboration de l’agenda de développement post-2015, il est temps que la communauté internationale se remobilise autour des droits sexuels et reproductifs des femmes. Les grossesses non désirées et leurs conséquences doivent être considérées et traitées comme un problème de santé publique et un enjeu pour les droits des femmes et le développement international.

UN CLIMAt DE REMISE EN qUEStION DES DROItS DES FEMMES “La Commission exhorte les

Etats à condamner fermement toutes les formes de violences à l’égard des femmes et à s’abstenir d’invoquer quelque coutume, tradition ou considération religieuse que ce soit pour se soustraire à l’obligation qui leur incombe d’éliminer cette violence, comme le prévoit la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes. » Conclusions concertées de la 57e session de laCommission sur la condition de la femme des Nations unis (mars 2013) http://www.un.org/womenwatch/daw/csw/csw57/CSW57_Agreed_Conclusions_(CSW_report_excerpt)_F.pdf

15 Voir notamment la CEDEF (art.5) & la Déclaration de l’AGNU sur les violences faites aux femmes : « Les Etats devraient condamner la violence à l’égard des femmes et ne pas invoquer de considérations de coutume, de tradition ou de religion pour se soustraire à l’obligation de l’éliminer. » (art.4) : http://www2.ohchr.org/french/law/femmes_violence.htm & Conclusions concertées de la 57e session de la Commission sur la condition de la femme des Nations unis (mars 2013)http://www.un.org/womenwatch/daw/csw/csw57/CSW57_Agreed_Conclusions_(CSW_report_excerpt)_F.pdf

16 the Guardian : http://www.theguardian.com/global-development/poverty-matters/2013/mar/11/religious-right-wrong-women-right-choose, http://www.theguardian.com/world/2013/mar/15/muslim-brotherhood-backlash-un-womens-rights, Libya Herald : http://www.libyaherald.com/2013/03/11/grand-mufti-condemns-un-report-on-violence-against-women/ & AWID : http://www.awid.org/News-Analysis/CSW-Special-Focus3/News/Libyan-mufti-issues-edict-against-UN-document-on-women-s-rights-says-it-counters-Islamic-law

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Les avortements à risque : du déni à l’action

• L’avortement légal et médicalisé est une des interventions les plus sûres dans les pays développés (moins de 1 décès pour 100 000 interventions), tandis que les avortements non médicalisés représentent un risque de décès 220 fois plus élevé.

• environ la moitié des avortements dans le monde (soit 21,6 millions en 2008) correspond à des avortements à risque. La quasi-totalité de ces avortements a lieu dans les pays en développement.

• en 2008, les avortements à risque ont causé la mort de 47 000 femmes. On estime que plus de huit millions de femmes ayant subi un avortement à risque souffrent chaque année de complications nécessitant une prise en charge médicale, mais seulement 5 millions d’entre elles sont hospitalisées.

• L’interdiction ou toute autre restriction légale n’a pas d’effet dissuasif sur le recours à l’avortement. Cela ne fait que reléguer les avortements dans la clandestinité.

• L’accès à la contraception ne permet pas d’empêcher toutes les grossesses non désirées. Il doit dans tous les cas aller de pair avec l’accès à l’avortement sûr et légal.

• L’illégalité de l’avortement et les avortements à risque perpétuent les inégalités face à la santé et les inégalités entre pays riches et pays pauvres.

La problématique des avortements à risque

Fiche 4

AVORtEMENt « à RISqUE » : de Quoi parLonS-nouS ?

Il existe différents types d’avortements : spontané (sans intervention, aussi appelé « fausse couche »), provoqué (pratiqué dans le but d’interrompre une grossesse, aussi appelé « interruption volontaire de grossesse »). L’avortement est dit thérapeutique lorsqu’il est réalisé sur indication médicale.

Un avortement est considéré comme « sûr » ou « médicalisé » lorsqu’il est pratiqué dans de bonnes conditions médicales. Cela implique, au minimum, la présence d’un personnel de santé qualifié et formé, des conditions d’hygiène satisfaisantes, et des soins pré et post avortement de qualité.

Selon l’OMS, l’avortement « à risque » ou « non médicalisé » se définit au contraire comme « une intervention visant à interrompre une grossesse non désirée effectuée soit par des personnes qui ne possèdent pas les compétences nécessaires, soit dans un contexte où les conditions sanitaires minimales n’existent pas, ou les deux ». C’est le cas des avorte-ments « clandestins », pratiqués dans les pays où l’interruption volontaire de grossesses est interdite ou son accès trop restreint.

En bREf

UN PRObLèME DE SANté PUbLIqUE

Les méthodes d’avortements médicalisést

- L’avortement médicamenteux est une association d’une ou plusieurs molécules. On utilise de préférence une combinaison de mifépristone (ou RU486) et de prostaglandine (misoprostol ou gémoprost). Le cas échéant, le Misoprostol peut être utilisé seul.

- L’aspiration est la méthode d’avortement chirurgical. Elle consiste à utiliser l’aspiration provenant de pompes électriques ou de seringues manuelles pour l’évacuation utérine. C’est une méthode clef dans le cadre de l’avortement incomplet.

17 WHO, Unsafe abortion : global and regional estimates of the incidence of unsafe abortion and associated mortality in 2008, 6th edition, 2011

Lorsque l’avortement est pratiqué dans de bonnes conditions, les complica-tions sont extrêmement rares. A titre d’exemple, le risque de décès dus aux avortements médicalisés dans les pays développés est inférieur à 1 décès pour 100 000 interventions, ce qui fait de l’avortement médicalisé une intervention aussi sûre qu’une injection de pénicilline17.

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fiche n°4 / La problématique des avortements à risque

Les avortements à risque : du déni à l’action

En cas d’avortement à risque, en revanche, le risque de complications et de décès est beaucoup plus élevé. En 2008, on estime que plus de 21 millions d’avortements ont été pratiqués dans de mauvaises conditions, conduisant à 47 000 décès maternels, soit 13% de la mortalité maternelle dans le monde. Environ huit millions de femmes subissant ce type d’avortements présentent des complications nécessitant une intervention médicale chaque année. Plus d’un tiers d’entre elles n’ont cependant jamais accès à des soins adéquats18.

Ces complications peuvent être, à court terme, un avortement incomplet, une hémorragie, une infection, un traumatisme génital, une perforation utérine et/ou une rupture utérine. Des complications à plus long terme peuvent advenir telles que l’infertilité, des douleurs chroniques, des maladies inflammatoires pelviennes.

18 Singh S, Hospital admissions resulting from unsafe abortion: estimates from 13 developing countries, Lancet, 2006, 368(955):1887–1892.

Les avortements à risque sont une des cinq grandes causes directes de mortalité maternelle dans le monde

Causes indirectes 20 %

Hémorragies 24 %

Infections 15 %

Avortements à risque 13 %

Eclampsies 12 %

Dystocies (accouchements difficiles) 8 %

Autres causes directes 8 %

OMS, The World Health report. Make every woman and child count. 2005

Une grossesse sur dix dans le monde aboutit à un avortement à risque.OMS, Unsafe abortion incidence and mortality. Global and regional levels in 2008 and trends during 1990-2008. Information sheet. 2012

21 millions d’avortements à risque par an

40 % des avortements à risque concernent une jeune femme de 15 à 24 ans.

8 millions de femmes par an souffrent de complications liées à un avortement à risque

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LES AVORtEMENtS CLANDEStINS : UN PHéNOMèNE OCCULté MAIS bIEN RéEL

Depuis toujours, la question de l’avortement fait l’objet de vives controverses. Dans toutes les régions du monde, des pays ont tenté ou tentent encore d’éra-diquer la pratique des avortements, en ayant recours à des législations restric-tives et répressives. Pourtant, quelle que soit la nature des arguments avancés, l’interdiction légale de l’avortement n’a aucun effet dissuasif démontré sur la pratique des interruptions volontaires de grossesse19.

Au contraire, le nombre relatif d’avortements provoqués est inférieur dans les pays présentant une loi libérale par rapport aux pays présentant une loi restric-tive. A titre d’exemple, les taux d’avortement s’élèvent à 29 pour 1 000 femmes en âge de procréer en Afrique et 32 pour 1 000 en Amérique latine, où la pratique est interdite dans la plupart des pays. A l’inverse, en Europe de l’Ouest, où les législations relatives à l’avortement sont généralement plus libérales, ce taux est de 12 pour 1 00020.

En général, les pays qui ont des législations plus libérales en matière d’accès à l’avortement garantissent en parallèle l’accès à la contraception, ce qui permet de diminuer l’incidence des grossesses non désirées et des avortements. Il s’agit là de deux piliers indissociables, l’accès universel à la planification fami-liale ne pouvant empêcher l’ensemble des grossesses non désirées. On estime en effet qu’environ 33 millions de grossesses non désirées par an surviennent chez des femmes utilisant un contraceptif21.

Loin de faire disparaître les avortements, les lois restrictives les retranchent dans la clandestinité. Elles obligent les femmes à avorter dans le secret, en ayant recours à des techniques traditionnelles peu sûres et un personnel non qualifié ; ce qui augmente le risque de complications.

En Amérique latine, par exemple, certaines femmes essayent de provoquer un avortement en se mutilant à l’aide de baleines de parapluie ou en utilisant des produits pharmaceutiques sans bénéficier des informations nécessaires à leur usage (ex : misoprostol), ce qui pose des problèmes de dosage parfois graves. D’autres, en Afrique, ont recours à des breuvages à base de plantes censés provoquer des contractions de l’utérus ou des médicaments en surdosage comme les anti-paludéens. Dans les pays anglo-saxons, avant la libéralisation de l’avortement, les femmes utilisaient parfois des cintres qu’elles introduisaient dans leur vagin, tandis qu’en France, on tentait d’avorter au moyen d’aiguilles à tricoter, ou avec l’aide des « faiseuses d’anges » (avorteuses clandestines)22.

19 WHO, Unsafe abortion (2011), supra note 1, at 6.

20 Institut Guttmacher, Les faits sur l’avortement provoqué dans le monde, 2012

21 OMS, Safe abortion: technical and policy guidance for health systems. 2nd ed., 2012

22 David A Grimes, Janie benson, Susheela Singh, Mariana Romero, bela Granatra, Friday E Okonofua, Idbal H Shah. Unsafe abortion: the preventable pandemic. The Lancet Sexual and Reproductive Health Series, 2006 & CEPED : http://www.ceped.org/avortement/fr/chap4/800/chap4-800.html

47 000 décès maternels, soit 13 % de la mortalité maternelle en 2008

5 millions de femmes hospitalisées par an suite à un avortemant à risque

des avortements à risque ont lieu dans les pays en développement

98 %

44% 49%

1995

2008

Proportion d’avortements à risque

Proportion d’avortements médicalisés

Institut Guttmacher, FNUAP, OMS, Susheela Singh et al., 2008-2012

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fiche n°4 / La problématique des avortements à risque

Les avortements à risque : du déni à l’action

UN ENJEU D’éqUIté SOCIALE DANS LE MONDE

La pratique de l’avortement à risque reflète de façon flagrante les inégalités sociales contemporaines face à la santé et l’accès aux soins entre pays déve-loppés et pays en développement, femmes riches et femmes pauvres.

En effet, près de 98% des avortements à risque sont aujourd’hui pratiqués dans les pays en développement, où l’accès à l’avortement est le plus sévèrement limité. Certaines femmes parviennent à se procurer un avortement médicalisé même lorsque l’intervention est interdite, à condition d’en avoir les moyens. Les autres sont contraintes de se tourner vers des avorteurs clandes-tins et parfois malhonnêtes. Sans ressources et mal informées dans le pays où la sexualité des jeunes est taboue, les adolescentes sont particulièrement tou-chées par ce problème : en 2008, on estime en effet que 40% des avortements à risque concernent des jeunes femmes de 15 à 24 ans23.

Les contextes de crises ou de conflits sont également des situations à risque car ils favorisent les violences sexuelles contre les femmes. En temps de guerre, l’usage systématique du viol comme une arme à part entière donne en effet lieu à de nombreuses grossesses forcées. L’accès à la contraception, et notam-ment la contraception d’urgence, étant souvent restreint dans ces situations, de nombreuses femmes sont contraintes de recourir à un avortement à risque.

Exemples de méthodes d’avortements à risque, par voie d’administration

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Voie orale• Solutions toxiquesEau de javel / Solutions Détergentes / Acide

• Thés et remèdes à base d’herbesThé fort / Thé à base de fumier animal / Assortiments de médicaments à base d’herbes

• MédicamentsStimulants utérins, comme le misoprostol ou l’ocytocine (utilisé en soins obstétricaux) /Quinine et chloroquinine (utilisés pour le traitement de la malaria)

traitements introduits dans le vagin ou le col de l’utérusTablettes de permanganate de potassium / Préparations à base d’herbes / Misoprostol

Injections intramusculairesDeux vaccins contre le choléra

Objets introduits dans l’utérus (via le col de l’utérus)bâtons, parfois trempés dans l’huile / Morceau de sucre / Haricot vert cru / Racine ou feuille de plante / Câble / Aiguille à tricoter / Dispositif intra utérinCintre / Stylo à bille / Os de poulet / Rayons de roue de vélo / Curette aiguisée (méthode du « curetage »)

Lavements intestinauxSavon / Thé shih (absinthe)

traumatismes physiques, coupsMassages du dos ou abdominaux / Levée de poids lourds / Sauts du haut des escaliers ou du toit

David A Grimes, Janie benson, Susheela Singh, Mariana Romero, bela Granatra, Friday E Okonofua, Idbal H Shah. Unsafe abortion: the preventable pande-mic. The Lancet Sexual and Reproductive Health Series, October 2006

Malgré le déni d’un grand nombre de gouvernements, l’avortement clandestin est donc une réalité qui impacte la santé des femmes et bafoue leurs droits les plus essentiels. En plus de provoquer des drames individuels, les décès et les complications liés à cette pratique aggravent la mortalité maternelle et désta-bilisent les services de santé déjà très précaires des pays en développement. Pourtant, des solutions simples et moins coûteuses existent : l’accès à la contraception et l’avortement médicalisé.

23 FNUAP, Etat de la population mondiale 2012, Oui au choix, non au hasard, 2012

Estimations du nombre d’avortements à risque, dans le monde et par régions, en 2003 et 2008

WHO, Unsafe abortion : global and regional estimates of the incidence of unsafe abortion and associated mortality in 2008

Un avortement à risque en Afrique sub-saharienne représente un risque de décès plus de 800 fois plus élevé (520 décès pour 100 000 interventions) qu’un avortement légal et médicalisé aux Etats-Unis (0,6 décès pour 100 000 interventions). OMS, 2008

Monde Pays développés Pays en développement0

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Nombre d’avortements à risque en 2003 (millions)

Nombre d’avortements à risque en 2008 (millions)

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• en vertu du droit international, tous les Etats doivent assurer l’accès des femmes et des hommes aux services et aux méthodes de planification familiale, sans coercition ni discrimination.

• aujourd’hui encore, 222 millions de femmes qui souhaitent éviter ou différer une grossesse dans les pays en développement n’ont toujours pas accès à une méthode de contraception moderne.

• on estime qu’environ 40% des grossesses dans le monde sont non désirées.

• Les femmes et les filles qui cherchent à obtenir une contraception moderne se heurtent à des barrières légales, socio-culturelles et pratiques qui les empêchent d’exercer pleinement leurs droits.

• L’élargissement de l’accès aux services de planification familiale ces dernières années a eu un effet bénéfique sur quasiment tous les indicateurs de développement des pays concernés.

Renforcer l’accès à la contraception Fiche 5

CONtRACEPtION Et PLANIFICAtION FAMILIALE

La contraception fait partie de l’offre des services de planification familiale, en complément de l’éducation sexuelle ou encore du dépistage des maladies sexuellement transmissibles. Par contraception, il faut entendre les méthodes contraceptives « modernes » telles qu’identifiées par l’OMS. Elles incluent les contraceptifs hormonaux (type pilule), les DIU, les implants, les préservatifs (féminins et masculins), la stérilisation volontaire (vasectomie ou ligature des trompes), et la contraception d’urgence (lévonorgestrel 1,5 mg ou DIU)24.

En bREf

UN LEVIER FONDAMENtAL POUR LA RéALISAtION DES ObJECtIFS DU MILLéNAIRE POUR LE DéVELOPPEMENt

24 OMS, Planification familiale, Aide-mémoire n°351, mai 2013 : http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs351/fr/

L’accès à la contraception est un droit humain fondamental qui contribue non seulement à l’amélioration de la santé des femmes, mais aussi à tous les OMD. Cela permet en effet d’améliorer la santé maternelle (OMD 5) en réduisant l’incidence des grossesses non désirées et leurs conséquences (grossesses précoces, trop rapprochées, avortements à risque, etc.) Les mères sont alors plus susceptibles de donner naissance à des enfants en bonne santé (OMD 4). L’accès à la contraception donne également aux jeunes filles les moyens d’être autonomes, de poursuivre leur scolarisation (OMD 2) et d’entrer sur le marché du travail sur un pied d’égalité avec les hommes, réduisant du même coup les inégalités de genre (OMD 3) ainsi que l’extrême pauvreté (OMD 1). Enfin, les méthodes de contraception mécaniques (préservatifs masculins et féminins) permettent d’éviter les risques de maladies sexuellement transmissibles comme le VIH (OMD 6).

Les contraceptifs inscrits sur la liste des médicaments essentiels de l’OMS

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La « Liste des médicaments essentiels de l’OMS » recense les produits pharmaceutiques et les dispositifs médicaux considérés comme essentiels pour satisfaire les besoins fondamentaux des populations. Réactualisée tous les deux ans, cette liste inclut plusieurs méthodes de contraception modernes : pilule, injections, DIU, préservatifs et implants ainsi qu’une méthode pour la contraception d’urgence (Lévonorgestrel). Selon le Comité pour les droits économiques, sociaux et culturels, tous les Etats devraient assurer l’accès aux médicaments de cette liste, au nom du droit à la santé.

CESCR, General comment No. 14 : The right to the highest attainable standard of health (22nd Sess., 2000), paras. 12(a)-(c), U.N. Doc. E/C.12/2000/4 (2000)

PLAnificAtiOn fAMiLiALe

La planification familiale correspond à l’ensemble des méthodes et des services qui permettent aux couples et aux individus de décider librement et avec discernement du nombre de leurs enfants, du moment et de l’espacement des naissances. Les services de planification familiale comprennent l’information et l’éducation relatives à la santé sexuelle et reproductive ainsi que la mise à disponibilité de méthodes contraceptives modernes (méthodes hormonales, diu, préservatifs…), la prise en charge des problèmes de stérilité, mais aussi la prévention et la prise en charge des infections sexuellement transmissibles.

Page 24: Plaidoyer Santé sexuelle et reproductive de Médecins du Monde

fiche n°5 / Renforcer l’accès à la contraception

Les avortements à risque : du déni à l’action

?que se passerait-il si on comblait tous les besoins des femmes en matière de contraception moderne dans les pays en développement ?

éVALUER LE « bESOIN NON SAtISFAIt EN CONtRACEPtION » DANS LE MONDE

L’accès universel à la contraception promis depuis le Caire et lors du Sommet du Millénaire est loin d’être une réalité. Aujourd’hui, on estime en effet que 222 millions de femmes qui souhaitent éviter ou retarder une grossesse dans les pays en développement n’ont toujours pas accès à une méthode de contraception moderne25.

Entre 2003 et 2012, la part des besoins non satisfaits en contraception moderne est restée quasiment la même sur l’ensemble des pays en développement : en 2012, 26% des femmes souhaitant éviter une grossesse n’avaient pas accès à des contraceptifs modernes; contre 29% en 2003. Dans les pays les plus pauvres, ce taux atteint des niveaux encore très élevés : 74% en Afrique de l’Ouest et 81% en Afrique Centrale23.

25 Guttmacher Institute, Susheela Singh & Jacqueline E. Darroch, Adding it up : costs and benefits of contraceptive services, Estimates for 2012, June 2012

26 Susheela Singh & Jacqueline e. darroch, Trends in contraceptive need and use in developing countries in 2003, 2008 and 2012 : an analysis of national surveys, The Lancet 2013

Qu’est-ce Que Le « besOin nOn sAtisfAit en contracePtion » ?

Sont considérées comme ayant un « besoin non satisfait en contraception », les femmes qui :• Sont en âge de procréer (15-49 ans) et sont fécondes• Sont sexuellement actives• Sont mariées ou en union libre• Souhaitent éviter ou différer une grossesse• n’utilisent pas de contraception moderne (c’est-à-dire celles qui n’utilisent pas de méthode de contraception du tout, mais aussi celles qui utilisent une méthode de contraception traditionnelle) NB : La plupart des estimations officielles ne tiennent pas compte des besoins des femmes célibataires. C’est pourquoi les chiffres donnés ici sont des estimations minimales, les besoins réels étant très probablement plus élevés.

Guttmacher Institute, Susheela Singh & Jacqueline e. darroch, Adding it up : costs and benefits of contra-ceptive services, Estimates for 2012, June 2012

• 16 millions d’avortements à risque en moins

• 1,1 million de décès infantiles en moins

• 7 millions de fausses couches en moins

• 5,7 milliards de dollars économisés en santé materno-infantile

• 54 millions de grossesses non désirées en moins

Dans les pays en développement, 867 millions de femmes souhaitent éviter une grossesse…

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645 millions utilisent une méthode de contraception moderne

222 millions n’utilisent pas de méthode de contraception moderne, soit 1 femme sur 4

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besoin non satisfait en contraception

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En 2012, 73% des femmes confrontées à un manque de contraceptifs modernes vivaient dans les pays les plus pauvres du globe. Susheela Singh, Gilda Sedgh and Rubina Hussain, Unintended pregnancy : worldwide levels, trends and ouc-tomes, 2010

DES bARRIèRES SOCIO-CULtURELLES, LéGALES Et PRAtIqUES qUI PERSIStENt

Bien que la connaissance des femmes en matière de contraception s’améliore dans les pays en développement, il leur est encore très difficile d’en faire usage. Au Kenya, par exemple, si 93% des femmes déclarent connaître au moins une méthode de contraception moderne, seulement 24% d’entre elles en utilisent une27. Lorsqu’elles tentent de se procurer des contraceptifs puis de négocier leur utilisation au sein de leur couple, de trop nombreuses femmes se heurtent en effet à des barrières socio-culturelles, législatives et pratiques qui per-sistent dans la plus grande indifférence.

» barrières socio-culturelles ou religieuses

Les inégalités de genre sont un obstacle majeur à l’accès à la planification fami-liale. Elles sont sous-tendues par des schémas de pensée et de comportements socio-culturels ou religieux qui considèrent les femmes dans la limite de leur rôle reproductif et ne reconnaissent donc pas leur droit à la contraception, et, plus généralement, à l’autonomie physique.

Les femmes célibataires et les adolescentes peuvent ainsi être exclues des services de santé sexuelle et reproductive car leur sexualité est niée ou consi-dérée comme anormale ; tandis que certaines femmes mariées doivent obtenir l’accord de leur mari pour utiliser un contraceptif.

A Madagascar, par exemple, l’accès à la contraception est particu-lièrement difficile pour les mineurs car les relations hors-mariage sont encore largement réprouvées. Médecins du Monde, Coordination Madagascar

En Argentine, bien que la stérilisation volontaire féminine (ligature des trompes) soit légale, il arrive souvent que le personnel de santé refuse encore cette intervention à une femme sous prétexte qu’elle n’est pas mariée ou doit obtenir l’accord préalable de son mari.Human Rights Watch, Illusions of care : Lack of accountability for reproductive rights in Argentina, 2010

» barrières législatives

De nombreuses législations nationales restreignent encore l’accès aux méthodes contraceptives en y imposant certains critères concernant l’âge, le sexe ou encore le statut marital des usagers/ères.

En République Démocratique du Congo, une loi de 1920 interdit le « contrôle des grossesses » ainsi que la « propagande anticonception-nelle », rendant illégale la diffusion d’informations relatives aux contra-ceptifs. Par ailleurs, bien que l’âge du premier rapport sexuel se situe autour de 14,5 ans, la contraception n’est toujours pas autorisée pour les mineurs. Face aux problèmes de santé préoccupants du pays, le Ministère du Genre, de la Famille et de l’Enfant a rédigé en août 2012 un projet de proposition de loi sur la santé de la reproduction. Les acteurs sur le terrain se mobilisent actuellement pour préciser le contenu de celui-ci et s’assurer qu’il aboutisse à l’abrogation de la loi de 1920 et l’accès à la contraception pour les adolescents. CEDEF, http://www2.ohchr.org/english/bodies/cedaw/docs/co/CONGOCO28_fr.pdf & Loi n°09/001 du 10/01/2009 portant protection de l’enfant, article 176

Au Pérou, depuis un arrêt de la Cour Constitutionnelle en 2010 déclarant que la contraception d’urgence violait le « droit à la vie » de l’embryon, la loi interdit de distribuer gratuitement la contraception d’urgence dans le système de santé public. ICEC : http://www.cecinfo.org/custom-content/uploads/2013/05/ICEC-Peru-Factsheet-2013.pdf

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27 Countdown 2015 Europe, Planification familiale et autonomisation des femmes, 2012 : http://www.countdown2015europe.org/wp-content/upLoads/2012/07/IPPF_Factsheet-1_Empowerment-fr2.pdf

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La contraception d’urgence victime d’idées reçues

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La contraception d’urgence (« pilule du lendemain ») offre aux femmes ayant eu un rapport non protégé un moyen sûr et efficace de minimiser les risques de grossesse non désirée (réduction du risque de grossesse de 60-90% jusqu’à 5 jours après un rapport). Elle fait partie des soins de base qui doivent être offerts aux femmes, notamment pour prendre en charge les grossesses non désirées en cas de viol. Son accès reste malheureusement très limité dans de nombreuses régions où elle est encore considérée à tort comme une pilule abortive. Selon les plus hautes autorités sanitaires, dont l’OMS, le mécanisme d’action de cette contraception n’est pourtant pas comparable à celui des pilules abortives : la contraception d’urgence perturbe l’ovulation, mais elle ne peut pas empêcher l’implantation d’un oeuf fertilisé. Elle n’est d’ailleurs pas contre-indiquée en cas de grossesse, preuve de son innocuité sur l’embryon.

ICEC, Résumé Clinique : Pilules contraceptives d’urgence http://www.cecinfo.org/custom-content/uploads/2013/06/Medical-and-Service-Delivery-Guidelines-French-June-2013.pdf

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fiche n°5 / Renforcer l’accès à la contraception

Les avortements à risque : du déni à l’action

» barrières économiques et géographiques

Même lorsque la contraception est un droit reconnu par les législations natio-nales, son accès dans la pratique reste difficile à cause de son coût ou de l’éloignement géographique des centres de santé.

En Côte d’Ivoire, une politique de gratuité des soins a été mise en œuvre auprès des femmes enceintes et des enfants de moins de cinq ans, mais elle ne concerne pas les contraceptifs. Malgré des subven-tions accordées par le FNUAP, les méthodes de contraception ne sont toujours pas à portée de toutes les femmes. Médecins du Monde, Coordination Côte d’Ivoire

En Angola, dans la province du Kwanza-Norte, la contraception d’ur-gence n’est disponible que dans les hôpitaux en zone urbaine, ce qui rend son accès difficile pour les femmes vivant dans les zones rurales plus reculées.Médecins du Monde, Coordination Angola

En France, l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive dans les camps de Rroms est très limité. En 2008, une enquête de Médecins du Monde dans un camp de Seine-Saint-Denis a révélé que 10% des femmes seulement utilisaient une méthode de contraception. Médecins du Monde, Médecins du Monde auprès des femmes rroms, mars 2008

LES SUCCèS DES POLItIqUES EN FAVEUR DE LA PLANIFICAtION FAMILIALE

Le cas de la Malaisie, qui a accueilli la 3e conférence « Women Deliver » en mai 2013, illustre l’efficacité d’une politique de santé globale qui inclut tous les aspects de la santé sexuelle et reproductive, y compris l’accès à la contraception. Entre 1957 et 2010, le pays a vu son taux de mortalité mater-nelle chuter, passant de 540 décès pour 100 000 naissances à 28 décès en 201028. Dans les années 50, pourtant, rien ne laissait présager cette diminution : les infrastructures étaient rares et dispersées et les accouchements avaient lieu à domicile, sans l’aide d’un personnel qualifié.

La situation a commencé à s’améliorer à partir de 1966, avec l’introduction du Family Planning Act, qui a permis d’élargir l’accès à la planification familiale. Plusieurs mesures parallèles ont ensuite été mises en œuvre : formation du per-sonnel de santé et des accoucheuses traditionnelles, équipement des hôpitaux, gratuité des soins pour les plus pauvres, parcours de soins intégré… Tous ces efforts coordonnés ont permis de réduire la mortalité maternelle de 65% entre 1960 et 1970. Aujourd’hui, le pays poursuit sa politique en faveur de la santé maternelle par le biais de ses 4000 centres de planning familial29.

Outre ses effets sur la santé, l’accès à la contraception peut contribuer dans certains pays à l’autonomisation physique et financière des femmes. Ainsi, au bengladesh, l’accès à la contraception a provoqué une diminution de la fertilité (moins de trois enfants dans les années 90 contre 6 dans les années 70) qui s’est traduite par une amélioration de la santé des femmes et un meilleur accès à l’éducation. Les femmes ayant recours à une méthode de contraception étant plus à même d’accéder au marché du travail, on estime qu’elles gagnent en moyenne un salaire supérieur d’un tiers à celui des autres femmes n’y ayant pas recours. L’amélioration de la santé des femmes, leur insertion professionnelle et leur autonomie financière ont eu pour effet de valoriser leur statut et d’accroître leur pouvoir décisionnel au sein de leur ménage et leur communauté30.

28 the Lancet, Maternal health in Malaysia : progress and potential, Vol 381, mai 2013

29 Ibid.

30 FNUAP, Etat de la population mondiale 2012, 2012

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Les avortements à risque : du déni à l’action

• dans les pays en développement, une grossesse non désirée sur quatre environ aboutit à un avortement à risque.

• plusieurs hauts-représentants et comités de l’ONU appellent les Etats à dépénaliser l’avortement.

• Malgré une tendance vers une plus grande libéralisation des lois sur l’avortement, des reculs sont observables dans toutes les régions du monde, y compris en Europe.

• a ce jour, quatre pays interdisent totalement l’avortement sans aucune exception : le Chili, Malte, le Nicaragua et le Salvador. C’est également le cas du Vatican.

• 40% des femmes en âge de procréer (15-49 ans) dans le monde vivent encore sous des législations très restrictives en matière d’avortement.

• Même lorsqu’il est légal, l’accès à l’avortement reste difficile du fait des nombreuses barrières administratives et financières imposées par les Etats et de la réprobation sociale dont cette intervention médicale fait encore l’objet.

• La libéralisation de l’accès à l’avor-tement sûr et légal est un élément incontournable des politiques de réduction de la mortalité maternelle.

Prendre en charge les grossesses non désirées : l’accès à l’avortement médicalisé

Fiche 6

RAPPEL DES ENGAGEMENtS DES étAtS EN FAVEUR DE L’ACCèS à L’AVORtEMENt En bREf

L’absence de traité international autorisant explicitement l’avortement (à l’exception du Protocole de Maputo, qui autorise l’avortement dans certains cas31) ne signifie pas que les Etats n’ont aucune obligation en la matière. Bien au contraire, l’accès à l’avortement est sous-tendu par plusieurs droits humains des femmes inscrits dans des conventions et des accords internationaux (voir Fiche 1). Cette question fait d’ailleurs l’objet d’un nombre grandissant de déclarations, d’engagements internationaux et de recommandations de l’ONU.

Depuis le Caire en effet, plusieurs comités de suivi des traités et hauts repré-sentants de l’ONU se sont saisis de la problématique de l’accès à l’avortement, sous l’angle de la santé publique comme des droits humains. En 2011, le rapporteur spécial des Nations unies à la santé Anand Grover a exhorté les Etats à dépénaliser l’avortement, en conclusion d’un rapport novateur sur les effets des sanctions pénales et autres restrictions sur le droit à la santé32.

Le comité contre toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le comité pour les droits de l’enfant, ou encore le comité des droits de l’Homme ont eux aussi recommandé aux Etats de libéraliser leurs lois sur l’avorte-ment. Ces comités composés d’experts indépendants ont clairement établi les liens entre les législations restrictives, les avortements à risque et la mortalité maternelle33.

“L’interdiction pénale de l’IVG est l’expression très claire d’une ingérence de l’État dans la santé sexuelle et génésique d’une femme. »

Anand Grover, Rapporteur spécial des Nations unies à la Santé

31 Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatifs aux droits des femmes, article 14.2, 11 juillet 2003 : http://www.achpr.org/files/instruments/women-protocol/achpr_instr_proto_women_fra.pdf

32 Nations-Unies, Rapport intermédiaire du rapporteur spécial du Conseil des droits de l’homme sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, 2011 : http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/66/254&referer=http://europeanprochoicenetwork.wordpress.com/2011/09/25/un-special-rapporteur-anand-grovers-report-on-abortion/&Lang=F

33 CRR, Bringing Rights to Bear: Abortion and Human Rights, 2008: http://reproductiverights.org/en/document/bringing-rights-to-bear-abortion-and-human-rights

Page 28: Plaidoyer Santé sexuelle et reproductive de Médecins du Monde

fiche n°6 / L’accès à l’avortement médicalisé

Les avortements à risque : du déni à l’action

Standards internationaux* Références

Prévention des avortements à risque

Les Etats devraient mettre tout en œuvre pour limiter les besoins de recours à l’avortement (éducation, planification familiale…)

Programme d’action du Caire

Les Etats doivent considérer les avortements à risque comme un problème de santé publique

Programme d’action du Caire

Prise en charge des avortements à risque et des complications post-avortement

Dans tous les cas, quelle que soit la législation en vigueur, les femmes doivent avoir accès aux soins liés aux complications découlant d’un avortement

Programme d’action du Caire

Législations relatives à l’avortement

Les Etats doivent revoir les lois pénalisant les femmes ayant eu recours à un avortement

Programme d’action de Pékin

Les Etats doivent libéraliser les lois sur l’avortement ; au moins dans les cas où la grossesse fait suite à un viol, un inceste ou lorsqu’elle met la vie de la mère en danger

Comités de suivi des traités de l’ONU, Protocole de Maputo

Prestation des avortements et accès aux services

Lorsqu’il est légal, l’avortement devrait être sûr et accessible et les professionnels de la santé devraient être formés à cette prestation

CIPD+5

L’avortement doit se faire avec le consentement libre et éclairé des patientes

Comités de suivi des traités de l’ONU, Déclaration d’Amsterdam sur les droits des patients de l’OMS

* Désignent les traités régionaux et internationaux légalement contraignants, les recommandations rendues par les comités de suivi des traités de l’ONU et les documents issus des conférences de l’ONU qui sont le fruit d’un consensus international. NB : la liste ci-dessus n’est pas exhaustive.

Irlande : une loi a minimat

L’Irlande est un des pays européens les plus restrictifs en matière d’accès à l’avortement. En 1992, la Cour Suprême irlandaise avait rendu une décision favorable à l’autorisation de l’avortement en cas de danger pour la vie de la mère (« Affaire X »), mais celle-ci n’a été suivie d’aucun effet ; contraignant chaque année des milliers de femmes irlandaises à voyager en Grande-Bretagne pour avoir accès à des services d’avortements sûrs et légaux. Suite au décès d’une jeune femme fin 2012 dans un hôpital qui lui avait refusé un avortement thérapeutique, le gouvernement a adopté une loi a minima qui ne fait qu’expliciter la législation antérieure en n’autorisant l’avortement qu’en cas de danger de mort ou de suicide pour la femme.

35 Guttmacher Institute, Abortion worldwide, 17 years of reform, October 2011

36 Guttmacher Institute, Facts on abortion in Africa, 2012, & Susan A. Cohen, Facts and consequences : Legality, Incidence and Safety of abortion worldwide, 2009

37 Center for reproductive rights, UN body slams abortions laws : http://reproductiverights.org/en/feature/un-cedaw-slams-hungary-abortion-restrictions & Le Monde : http://www.lemonde.fr/europe/article/2013/05/07/le-gouvernement-espagnol-envisage-de-penaliser-de-nouveau-l-avortement_3172377_3214.html

38 Ipas, When abortion is a crime : the threat to vulnerable women in Latin America, 2013

39 Comité contre la torture, 2004 : http://www.unhchr.ch/tbs/doc.nsf/c12563e7005d936d4125611e00445ea9/d384885e2f67b496c1256eda005252fc/$FILE/G0441604.pdf

40 Amnesty International, Nicaragua. Interdiction totale de l’avortement au Nicaragua. La santé et la vie des femmes en danger, les professionnels de la santé passibles de sanctions pénales, 2009 : http://www.amnesty.org/fr/library/asset/AMR43/001/2009/fr/bd9b55c8-dcef-4eee-b467-d76216a29c6a/amr430012009fr.pdf

Protection of life during pregnancy Act, 2013 : http://www.irishstatutebook.ie/pdf/2013/en.act.2013.0035.pdf

34 Nations unies, Rapport du rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, février 2013 : http://www.ohchr.org/Documents/HRBodies/HRCouncil/RegularSession/Session22/A-HRC-22-53_FR.pdf

Enfin, la dépénalisation de l’avortement fait également partie des recomman-dations de Juan E. Méndez, Rapporteur Spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Dans un rapport publié en 2013, celui-ci a confirmé que les restrictions en matière d’accès à l’avortement, et notamment l’interdiction absolue de l’avorte-ment, pouvaient s’apparenter à des actes de torture et/ou mauvais traitements34.

Accès à l’avortement : les standards internationaux

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Les avortements à risque : du déni à l’action

Depuis la conférence du Caire, plus de 25 pays ont libéralisé leur législation sur l’avortement35. Il s’agit d’une tendance qui concerne toutes les régions du monde. Certains pays ont élargi l’accès à l’avortement légal en assouplissant les conditions autorisant l’interruption volontaire de grossesse (Thaïlande), en remboursant totalement les avortements (France) ou en ouvrant l’accès aux femmes sans-papiers (Danemark, Suède).

Malgré cette tendance générale vers une plus grande libéralisation de l’avor-tement, près de 40% des femmes en âge de procréer (15-49 ans) dans le monde vivent encore sous des législations très restrictives en matière d’avortement. En Afrique et en Amérique latine, ce taux s’élève à plus de 90%36.

La situation pourrait s’aggraver sous l’effet d’une lame de fond qui tente de remettre en question les avancées acquises par le passé. Plusieurs tentatives de retours en arrière menaçant les droits sexuels et reproductifs des femmes commencent en effet à voir le jour, y compris en Europe : la Hongrie a introduit dans sa Constitution un article reconnaissant que la vie du fœtus devait être pro-tégée « dès la conception » tandis qu’en Espagne, le gouvernement a annoncé son intention de réviser la loi de 2010 autorisant l’avortement37.

Certains pays d’Amérique latine comme la Bolivie, l’Argentine ou le Brésil, continuent par ailleurs d’emprisonner les femmes reconnues coupables d’avoir avorté en dehors du cadre légal très strict (seulement en cas de viol ou de danger pour la vie de la mère) ainsi que les professionnels de santé qui les y ont aidées. En Argentine, entre 1999 et 2008, 417 professionnels de la santé ont ainsi été reconnus coupables de crime pour avoir pratiqué des avortements illégaux38.

Enfin, à ce jour, quatre pays interdisent totalement l’avortement sans aucune exception : le Chili, Malte, le Nicaragua et le Salvador. C’est égale-ment le cas du Vatican. Au Chili, selon les témoignages recueillis par les ONG locales39, les femmes qui se rendent dans un hôpital à la suite de complications liées à un avortement illégal sont parfois contraintes de donner le nom de la personne à qui elles se sont adressées avant de pouvoir obtenir des soins. Les professionnels de la santé nicaraguayens sont quant à eux tenus de signaler les cas « suspectés » d’IVG illégale, y compris les fausses couches40.

Salvador : beatriz en danger de mort et interdite d’avortement

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L’histoire de Beatriz est emblématique du non-sens et de la dangerosité des interdictions absolues sur l’avortement. A 22 ans, cette jeune femme atteinte de plusieurs affections graves risquait de mourir si elle poursuivait sa grossesse. Elle était déjà mère d’un enfant en bas-âge et le fœtus qu’elle portait n’était pas viable. Au nom de la loi stricte du Salvador qui interdit l’interruption de grossesse en toute circonstance, la Cour Suprême lui a malgré tout refusé un avortement thérapeutique pendant des semaines. Ce n’est qu’avec l’aide d’une mobilisation internationale et après une condamnation de l’Etat par la Cour interaméricaine des droits de l’Homme que Beatriz a finalement obtenu les soins nécessaires. Elle a été opérée par césarienne afin que l’intervention médicale ne soit pas considérée comme un avortement. Comme annoncé, l’enfant est mort dans les heures suivantes. Depuis, la législation du Salvador n’a pas changé.

SItUAtION SUR L’étAt LéGISLAtIF DANS LE MONDE

Center for Reproductive Rights, The World’s Abortion Laws 2013 : http://worldabortionlaws.com/map/ (consulté le 23/08/13)

Avortement autorisé pour sauver la vie de la femme uniquement ou totalement interdit

Avortement autorisé pour préserver la santé de la femme (physique et mentale)

Avortement autorisé pour des motifs socio-économiques

Avortement autorisé sur demande

données non disponibles

Pour plus d’informations : http://www.safeabortionwomensright.org/tag/beatriz/

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fiche n°6 / L’accès à l’avortement médicalisé

Les avortements à risque : du déni à l’action

SANS ACCèS EFFECtIF, PAS DE DROItS

Même lorsqu’il est légal, l’accès à l’avortement reste souvent difficile dans la pratique. En Ethiopie, par exemple, on estime qu’à peine plus d’un quart des avortements a été pratiqué dans des conditions sûres et légales en 2008, malgré la libéralisation de la loi trois ans auparavant. Le manque de professionnels de santé qualifiés, le coût des traitements, l’absence de centres de santé de proxi-mité, la crainte d’avoir affaire à un personnel masculin ou encore l’incapacité de se rendre à l’hôpital sans la permission d’un tiers, sont les principales raisons pour lesquelles les femmes ne bénéficient toujours pas des soins auxquels elles ont en théorie droit41.

Dans d’autres cas, ce sont les barrières administratives qui empêchent les femmes d’exercer leurs droits : autorisation d’un tiers (parents ou époux), délais d’attente obligatoires, validation par un panel d’experts… En Europe, le recours abusif à l’objection de conscience dans le corps médical peut rendre l’accès aux services d’avortements particulièrement difficile. C’est le cas en Italie, où 70% des gynécologues et 50% des anesthésistes refusent désormais de pratiquer des avortements pour des motifs moraux ; une tendance à la hausse depuis 200342.

Tous ces encadrements restrictifs, qui ne s’appliquent pas dans les autres domaines de la santé sexuelle et reproductive, contribuent à renforcer l’idée selon laquelle l’avortement est un acte répréhensible pour lequel les femmes doivent payer d’une manière ou d’une autre.

LES EFFEtS POSItIFS DE L’ACCèS à L’AVORtEMENt MéDICALISé : L’ExEMPLE DU NéPAL

Depuis quelques années, le Népal est devenu un cas d’école en matière de réduction des décès maternels. Grâce à une politique de santé reproductive ambitieuse intégrant l’accès à l’avortement médicalisé, le pays est en effet en voie d’atteindre les cibles fixées par l’OMD 5 en matière de santé maternelle.

Les progrès du Népal en la matière ont été rendus possibles par l’adoption d’une série de mesures entre 1991 et 2010 visant à améliorer la santé et la condition des femmes, notamment en remédiant aux avortements à risque, qui représentaient encore la première cause de mortalité maternelle dans certaines régions népalaises au début des années 2000 (ex : la vallée de Kathmandu). La libéralisation de l’accès à l’avortement (2003) et l’amélioration de la prise en charge des grossesses et des accouchements ont eu pour effet conjugué de diminuer le taux de mortalité maternelle de 850 décès pour 100 000 naissances dans les années 90 à 229 décès en 201143. Le défi pour le Népal aujourd’hui consiste à poursuivre ces efforts afin de garantir l’accès à la santé reproductive, y compris l’avortement sans risque, pour toutes les femmes dans les zones rurales et éloignées.

D’autres pays ayant réformé leur législation en matière d’avortement ont eux aussi constaté une diminution de la morbi-mortalité maternelle sur leur territoire, à l’image de l’Afrique du Sud. Après la libéralisation de la loi, le nombre annuel de décès dus à l’avortement a diminué de 91% entre 1994 et 1998-2001. La loi a permis la promotion des méthodes de contraception, l’usage de méthodes d’avortement chirurgicales et médicamenteuses plus sûres et une meilleure formation du personnel de santé44.

41 Guttmacher Institute, Making abortion services accessible in the wake of legal reforms: a framework and six case studies, 2012: http://www.guttmacher.org/pubs/abortion-services-laws.pdf

42 Conseil de l’Europe, Accès des femmes à des soins médicaux légaux : problème du recours non réglementé à l’objection de conscience, juillet 2010

43 bhandari tR, Dangal G, Maternal Mortality: Paradigm Shift in Nepal, Nepal Journal of Obstetrics and Gynaecology 12/2012; 7(2)

44 the Lancet : David A Grimes, Janie benson, Susheela Singh, Mariana Romero, bela Ganatra, Friday E Okonofua, Iqbal H Shah. Unsafe abortion : the preventable pandemic. Sexual and Reproductive Health Series, Otober 2006.

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La conférence du Caire +20 : remobiliser la communauté internationale autour des droits sexuels et reproductifs

Fiche 7

FAIRE LE bILAN DU PROGRAMME D’ACtION DU CAIRE

Comme stipulé dans la résolution 65/234 adoptée par l’AGNU en décembre 201045, l’organisation de la session spéciale a d’abord vocation à faire l’éva-luation de l’état d’avancée du programme d’action du Caire et à renouveler le soutien politique nécessaire à la pleine réalisation de ses buts et objectifs. La résolution précise qu’il n’y aura pas de renégociation du contenu et des enga-gements pris lors de la conférence du Caire dont le programme est prorogé en l’état au-delà de 2014.

Un processus de « revue opérationnelle » du programme d’action du Caire est actuellement en cours et se déroulera jusqu’à la session spéciale du 22 sep-tembre 2014. Coordonné par le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), ce processus d’évaluation et de consultation46 comprend plusieurs éléments dont le principal est la réalisation d’une enquête globale auprès des Etats membres des Nations unies47. Courant 2012, les gouvernements ont ainsi été invités à remplir un questionnaire afin de rassembler l’information la plus complète possible sur les éléments clefs du programmes d’action en se focalisant sur les avancées obtenues, les limites et contraintes rencontrées ainsi que sur l’identification des nouveaux enjeux ayant pu émerger.

Ce processus d’évaluation prévoit aussi la tenue de cinq conférences régionales organisées de juin à septembre 2013. D’autres consultations, notamment avec les organisations de la société civile, viennent aussi compléter le dispositif.

A l’issue du processus, le Secrétaire Général des Nations unies devra soumettre aux Etats membres deux rapports. Un rapport global qui sera débattu dans le cadre de la 47ème session de la Commission Population et Développement (CPD) des Nations unies en avril 2014, puis un second en juin 2014 (Index report), qui fera la synthèse des débats de la CPD et proposera les recommandations clefs en vue de la session spéciale de l’AGNU. POSER LES bASES D’UN AGENDA AMbItIEUx POUR L’APRèS 2015

Bien que le programme d’action de la CIPD ne fasse pas l’objet de nouvelles négociations lors de la session spéciale du Caire+20, ce rendez-vous interna-tional n’en demeure pas moins un moment clef pour réaffirmer l’importance de la santé et des droits sexuels et reproductifs. A l’instar de la conférence du Caire dont le contenu a largement inspiré la définition des OMD, les conclusions et recommandations de la CIPD+20 auront très certainement une influence décisive sur le prochain cadre de développement qui viendra se substituer aux OMD après 2015.

Dans son rapport « Réaliser l’avenir que nous voulons pour tous » (juin 2012), le Secrétaire Général des Nations unies identifie clairement la revue opération-nelle de la CIPD parmi les processus à suivre dans le cadre de l’élaboration du

45 AGNU, Résolution 65/234. Follow-up to the International Conference on Population and Development beyond 2014 ; http://icpdbeyond2014.org/uploads/browser/files/ungass_res_65_243.pdf

46 http://icpdbeyond2014.org/about

47 Premiers résultats consultables ici : http://icpdbeyond2014.org/uploads/browser/files/initial_findings_of_icpd_beyond_global_survey.pdf

Le 22 septembre 2014, dans le cadre de la 69ème Assemblée Générale des Nations unies (AGNU), se tiendra à New York une session spéciale consacrée aux vingt ans de la conférence du Caire. Cet événement sera l’occasion de dresser un bilan de la mise en œuvre du programme d’action du Caire en soulignant autant les progrès réalisés que les retards accumulés et les nombreux défis qui restent à relever dans un certain nombre de domaines clefs comme la planification familiale ou l’accès à l’avortement sûr et légal.

Un an avant l’expiration des Objectifs du Millénaire pour le Développement, cette session spéciale représente surtout une opportunité unique d’obtenir une remobilisation politique et le renouvellement des engagements de la communauté internationale en faveur des droits sexuels et reproductifs. Ce rendez-vous onusien constitue un moment symbolique fort dont les Etats progressistes devront impérativement se saisir pour tenter d’enrayer la montée des conservatismes et poser les bases d’un agenda ambitieux et volontariste pour l’après 2015.

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fiche n°7 / La conférence du Caire +20 : une opportunité à saisir pour remobiliser la communauté internationaleautour des droits sexuels et reproductifs

Les avortements à risque : du déni à l’action

programme de développement pour l’après 2015. Il est donc primordial que la session spéciale du Caire+20 aboutisse à l’adoption d’une déclaration finale forte et ambitieuse, appelant à faire de la santé et des droits sexuels et repro-ductifs un des enjeux prioritaires de l’agenda post-OMD.

Pour parvenir à ce résultat, la France, qui entend jouer un rôle de chef de file dans la promotion des droits sexuels et reproductifs, devra veiller à ce que les problématiques de contraception et d’avortement soient pleinement intégrées aux débats et figurent dans le document final de la CIPD+20. Elle devra notam-ment faire en sorte que l’Union européenne, première donatrice mondiale d’aide publique au développement48, adopte une position commune en faveur de la santé sexuelle et reproductive, y compris l’accès à l’avortement médicalisé.

Une attention particulière devra être accordée à un certain nombre de pays ouvertement critiques vis-à-vis des politiques en faveur de la santé sexuelle et reproductive, notamment celles destinées à faciliter l’accès à l’avortement médicalisé ; dont la Pologne, la Slovaquie ou encore Malte. Cela est d’autant plus important que la nomination en novembre 2012 du député maltais Tonio Borg – fervent opposant au droit à l’avortement – au poste de commissaire euro-péen chargé de la santé et des consommateurs pourrait conforter l’influence très préoccupante des groupes conservateurs sur la politique de santé et d’aide au développement de l’Union européenne49.

Face à la gravité des avortements à risque dans le monde, il est temps pour la France et les Etats membres de l’UE de dépasser leurs désaccords internes pour garantir aux femmes et aux filles un meilleur état de santé et le plein exercice de leurs droits humains, au-delà de toute considération morale ou religieuse.

L’agenda du Caire+20t

Juillet-Octobre 2012Enquête globale auprès des Etats membres

Décembre 2012Forum mondial de la jeunesse, Bali, Indonésie

Mars 2013Analyse des données issues de l’enquête globale et finalisation des rapports régionaux par les commissions régionales des Nations unies

Juin-Septembre 2013Conférences régionales et thématiques :• UNESCWA, Le Caire, 24-26 juin• UNECE, Genève, 1-2 juillet• Conférence internationale ICPD sur les Droits humains, La Haye, 7-10 juillet• UNECLAC, Montevideo, 12-15 août• UNESCAP, Bangkok, 16-20 sept • UNECA/AU, Addis Ababa, 30 sept-4 octobre• Réunion d’experts sur la santé des femmes, Mexico city, 30 sept-2 octobre

Décembre 2013Premier draft du rapport du Secrétaire Général des Nations Unies (SGNU)

21 – 24 janvier 2014Conférence de l’Asie Pacifique sur la santé sexuelle et reproductive, Manille

14 – 18 avril 2014 47ème session de la Commission Population et Développement de l’ONU, New York

23-25 avril 2014 6ème Conférence internationale des parlementaires sur la mise en œuvre de la CIPD (IPCI), Stockholm

Juin-juillet 2014 Publication du rapport du SGNU (Index report) portant les recommandations de la 47ème CPD

22 septembre 2014 Session spéciale de l’Assemblée Générale des Nations Unies sur la CIPD+20

48 Commission Européenne : http://development.donoratlas.eu/infographics/Accountability%20-%20Infographic%20-%202012.pdf (consulté le 12 août 2013)

49 Planning familial http://www.planning-familial.org/sites/internet/files/2012-11-14_cp_election_tonio_borg_-commision_sante_ue.pdf

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Recommandations Fiche 8

Vingt ans après la conférence du Caire et un an avant l’expiration des OMD, la CIPD+20 sera un moment décisif pour l’élaboration du futur agenda de développement de l’après-2015. Dans un contexte de remise en question générale des droits sexuels et reproductifs des femmes, les Etats devront faire preuve de vigilance et d’ambition, afin de s’assurer que l’accès à la contraception et l’avortement soient pleinement intégrés aux conclusions finales des négociations. Il s’agira de réaffirmer l’importance de ces droits, défendre les avancées obtenues et revendiquer l’extension des droits existants.

Pour cela, Médecins du Monde appelle les Etats à :

1• veiller à ce que la santé sexuelle et reproductive soit intégrée dans les objectifs prioritaires de l’agenda de développement de l’après-2015 ;

2• accroître de manière significative les moyens alloués au financement des soins et services de santé sexuelle et reproductive ;

3• augmenter la part d’aide publique au développement consacrée au financement des soins et services de santé sexuelle et reproductive ;

4• Mettre en place un mécanisme de contrôle et de suivi annuel des progrès réalisés dans le domaine de la santé et des droits sexuels et reproductifs.

5• Garantir l’accès universel des jeunes, qu’ils soient scolarisés ou non, à une éducation complète à la sexualité afin de leur permettre de prendre des décisions informées en la matière, dans le respect de l’égalité des genres et le partage des responsabilités ;

6• Garantir l’accès des femmes et des filles à une large gamme de méthodes de contraception modernes, y compris la contraception d’urgence ;

7• Lever les obstacles législatifs et réglementaires à l’accès à la contraception et l’information en matière de santé sexuelle et reproductive, tels que le consentement obligatoire des parents, les restrictions liées à l’âge et au statut matrimonial ;

8• assurer l’accès gratuit aux méthodes de contraception modernes, y compris les méthodes de longue durée (type DIU, implants et stérilisation volontaire).

9• Garantir l’accès à une offre complète de services de qualité, dispensés de manière humaine et bienveillante, permettant à toutes les femmes et adolescentes de bénéficier d’une prise en charge médicalisée en cas d’interruption volontaire de grossesse ou de complications liées à un avortement à risque ;

10• abroger spécifiquement les lois et règlementations qui limitent le plein exercice du droit à l’avortement, telles que l’autorisation d’un tiers (parents, conjoint…) ou les périodes d’attente obligatoires ;

11• abolir les lois prévoyant des mesures punitives contre les femmes et les jeunes filles qui ont subi une interruption de grossesse illégale et libérer celles qui sont en détention, conformément au programme d’action de Pékin (art. 106 k) ;

12• réviser les lois et les politiques afin de rendre l’interruption volontaire de grossesse accessible et légale ;

13• assurer l’accès gratuit aux services d’avortement sûrs et légaux.

Promotion de la santé sexuelle et reproductive

Avortement

tContraception

Ces recommandations sont tirées pour la plupart d’un texte de positionnement réalisé avec le Planning Familial et Equilibres & Populations. Pour découvrir ce document de positionnement conjoint, voir http://www.medecinsdumonde.org.

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Une mobilisation de la société civile internationale

Fiche 9

LES CAMPAGNES à SUIVRE…

• international campaign for women’s right to safe abortionhttp://www.safeabortionwomensright.org Réseau d’ONG internationales qui font campagne pour défendre le droit des femmes à avorter dans de bonnes conditions. La campagne vise à créer un mouvement international en faveur des droits sexuels et reproductifs des femmes, en veillant à ce que l’accès à l’avortement soit mis à l’agenda de la communauté internationale.

• September 28 http://www.september28.org/Journée de mobilisation en faveur de la dépénalisation de l’avortement instituée à l’origine par des organisations féministes d’Amérique latine et des Caraïbes. Depuis 2012, cette initiative a pris une dimension internationale. Elle est coordonnée par le « Women’s global network for reproductive rights » (WGNRR) : http://www.wgnrr.org/

• post 2015 Women’s coalition http://www.post2015women.comUne coalition d’associations de défense des droits des femmes et de développement international mobilisées autour de l’agenda post-2015.

• Beyond 2015http://www.beyond2015.orgUne campagne mondiale rassemblant plus de 650 associations dans plus de 100 pays qui vise à influencer l’élaboration de l’agenda post-2015.

LES RéSEAUx RéGIONAUx

Amérique latine• consorcio Latinoamericano contra el aborto inesguro – CLACAI http://www.clacai.org/ Consortium latino-américain contre les avortements à risque. CLACAI défend l’accès aux techniques modernes d’avortement et notamment l’avortement médicamenteux pour réduire les avortements à risque.

• consorcio Latinoamericano de anticoncepción de Emergencia – CLAE http://www.clae-la.org/ Réseau qui s’occupe principalement du plaidoyer en faveur de la contraception d’urgence au niveau latinoaméricain.

• red de Salud de las Mujeres Latinoamericanas y el Caribe – RSMLAC http://www.reddesalud.org/Réseau membre du WGNRR qui mène des campagnes en faveur du respect des droits sexuel et reproductifs et la dépénalisation de l’avortement en Amérique latine. Le RSMLAC a notamment suivi l’implémentation du programme d’action de la CIDP dans la région.

Asie• asia Safe abortion partnership – aSap http://asap-asia.org/index.htmlRéseau d’ONG en Asie qui mène une campagne régionale pour l’accès à l’avortement sûr et légal.

Afrique• african network for Medical abortion – anMa http://anmanetwork.org Le réseau africain pour l’avortement médicamenteux a pour objectif de réduire la mortalité maternelle due aux avortements à risque en promouvant l’accès à l’avortement médicamenteux.

• african Youth and adolescents network – aFriYan http://www.afriyan.com/ Réseau d’ONG lancé en 2005 pour promouvoir la santé sexuelle et reproductive des jeunes et des adolescents et accroître leur implication dans les politiques de santé et développement en Afrique.

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fiche n°9 / La mobilisation de la société civile internationale

Les avortements à risque : du déni à l’action

Countdown 2015 Europe http://www.countdown2015europe.org/ Consortium de 17 ONG européennes qui travaille auprès de la société civile et des décideurs politiques afin de garantir l’accès à la santé et l’exercice des droits sexuels et reproductifs dans les pays en développement. Depuis 2004, Countdown 2015 Europe attire notamment l’attention sur l’importance des besoins non satisfaits en contraception dans le monde.

European NGOs for Sexual and Reproductive Health and Rights, Population and Development – EuroNGOs http://www.eurongos.orgRéseau d’ONG européennes qui promeut l’intégration de la santé sexuelle et reproductive dans les politiques internatio-nales de coopération et de développement.

qUELqUES ADRESSES UtILES

• Fédération internationale des associations de planning familial – IPPF www.ippf.org L’IPPF est une ONG pionnière dans la défense des droits sexuels et reproductifs. La fédération est présente dans 172 pays, où elle défend le droit des femmes à disposer librement de leur corps, via l’accès à l’éducation sexuelle, la contraception et l’avortement.

• Marie Stopes international – MSi http://www.mariestopes.org/ Une ONG militante qui fournit des soins et services d’avortements sûrs aux femmes dans les pays où l’avortement est illégal ainsi qu’un accès à la contraception.

• ipashttp://www.ipas.org Une ONG qui défend les droits sexuels et reproductifs des femmes dans les pays les plus pauvres. Ipas intervient auprès des femmes, du personnel de santé et des responsables politiques afin de garantir aux femmes l’accès à des soins et services d’avortements sûr et légaux.

• Guttmacher institutehttp://www.guttmacher.org/Institut de recherches de référence qui publie régulièrement des enquêtes, articles, vidéos et rapports très documentés sur l’accès à la santé sexuelle et reproductive dans le monde.

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Pour aller plus loin… Fiche 10

LES DROItS SExUELS Et REPRODUCtIFS DES FEMMES DANS L’AGENDA INtERNAtIONAL

» ONU

• World We Want 2015 – Le Monde que nous voulonshttp://www.worldwewant2015.org/ Plateforme interactive créée par les Nations unies et la société civile pour donner aux citoyens la possibilité de participer au débat mondial autour de l’agenda post-2015.

• post 2015 http://post2015.org/Site internet et compte twitter qui présentent tous les développements relatifs à l’agenda post-2015, avec des mises à jour régulières.

• programme d’action du cairehttp://www.un.org/popin/icpd/conference/offfre/conf13.fre.html

• plateforme d’action de pékinhttp://www.un.org/womenwatch/daw/beijing/pdf/BDPfA%20F.pdf

• Site des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD)http://www.un.org/fr/millenniumgoals/

• onu Femmeshttp://www.unwomen.org/

• Site du Fond des nations-unies pour la population – FNUAP http://www.unfpa.org/public/home

Site de l’Organisation Mondiale de la Santé – OMShttp://www.who.int/reproductivehealth/fr/index.html

» Union Européenne

L’UE et les OMD http://ec.europa.eu/europeaid/what/millenium-development-goals/index_fr.htm

• plan d’action du conseil de l’ue en appui des oMdhttp://ec.europa.eu/development/icenter/repository/COMM_COM_2010_0159_MDG_FR.PDF

bIbLIOGRAPHIE SUR LA SANté SExUELLE Et REPRODUCtIVE

» définitions et concepts clefs

• Médecins du Monde - Santé sexuelle et reproductive. Cadre de référence. 2013http://www.medecinsdumonde.org/content/download/14331/170010/file/Guide+Sant%C3%A9+Sexuelle+et+Reproductive+MdM.pdf

- Santé sexuelle et reproductive : une approche médicale et politique fondée sur la santé publique et les droits humains. 2013http://www.medecinsdumonde.org/Publications/Plaquettes-d-information/Sante-sexuelle-reproductive

» Les droits sexuels et reproductifs en droit international

• amnesty internationalFaire des droits sexuels et reproductifs une réalité. Un cadre fondé sur les droits humains. 2012http://www.amnesty.org/fr/library/info/ACT35/006/2012

• center for reproductive rights - Reproductive rights are human rights. Twelve human rights key to reproductive rights. 2008http://reproductiverights.org/sites/crr.civicactions.net/files/documents/V4Repro%20Rights%20Are%20Human%20Rights%20-%20FINAL.pdf

- Bringing rights to bear. Abortion and human rights. Government duties to ease restrictions and ensure access to safe services. 2008http://reproductiverights.org/sites/crr.civicactions.net/files/documents/BRB_abortion_hr_revised_3.09_WEB.PDF

- Bringing rights to bear. Family planning is a human right. Government duties to ensure access to contraceptive services and information. 2008http://reproductiverights.org/sites/crr.civicactions.net/files/documents/BRB_Contra.pdf

• Les ressources de la bibliothèque du parlement européen sur l’agenda de développement post-2015 et les OMD http://libraryeuroparl.wordpress.com/2013/01/22/post-2015-development-agenda/http://libraryeuroparl.wordpress.com/2013/06/10/millennium-development-goals-beyond-2015/

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fiche n°10 / Pour aller plus loin…

Les avortements à risque : du déni à l’action

» Avortement : faits et chiffres

• center for reproductive rights - Carte interactive sur les législations relatives à l’avortement dans le monde :http://worldabortionlaws.com/map/

• Guttmacher institute- En Bref. Les faits sur l’avortement provoqué dans le monde. Janvier 2012http://www.guttmacher.org/pubs/fb_IAW_fr.pdf

- L’avortement dans le monde, vidéohttp://www.youtube.com/watch?v=mnffN3XCpEA

• L’organisation Mondiale de la Santé – oMS- Unsafe abortion. Global and regional estimates of the incidence of unsafe abortion and associated mortality in 2008, 6th edition, 2011http://whqlibdoc.who.int/publications/2011/9789241501118_eng.pdf

- Safe abortion : technical and policy guidance for health systems, 2nd edition, 2012http://apps.who.int/iris/bitstream/10665/78413/1/9789242548433_fre.pdf

» planification familiale : faits et chiffres

• Guttmacher institute- Une vue d’ensemble : coûts et avantages des services de contraception – Evaluations pour 2012. Juin 2012http://www.guttmacher.org/pubs/AIU-2012-estimates-FR.pdf

Page 39: Plaidoyer Santé sexuelle et reproductive de Médecins du Monde

Médecins du Monde est une association humanitaire qui soigne les populations les plus vulnérables, les victimes de conflits armés, de catastrophes naturelles, ceux et celles que le monde oublie peu à peu. Présente dans 60 pays, elle dénonce les atteintes à la dignité et aux droits de l’homme et se bat pour améliorer la situation des populations à travers de nombreux projets de terrain et des campagnes de sensibilisation. Depuis 2010, MdM a fait de la santé sexuelle et reproductive une de ses priorités d’action dans une vingtaine de pays. Ses interventions s’inscrivent dans une double démarche auprès des populations les plus vulnérables sur le terrain, souvent en appui des systèmes de santé existants ; mais aussi auprès des décideurs politiques, notamment sur des thématiques telles que la levée des bar-rières financières pour l’accès aux soins, l’accès à la contraception ou encore l’accès à l’avortement médicalisé et l’accès à des soins pré et post-avortement de qualité.

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Médecins du Monde / 62 rue Marcadet / 75018 Paris01 44 92 15 15 / www.medecinsdumonde.org