MÉMOIRE - DUMAS
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MÉMOIRE
Pour l’obtention du Certificat de Capacité en Orthophonie
Préparé au sein du Département d’Orthophonie,
UFR Santé, Université de Rouen Normandie
Étude des corrélations entre les évaluations subjectives et
objectives de la voix chez des patients présentant une paralysie
laryngée bilatérale
Présenté et soutenu par
Clémentine MERTZ
Mémoire de recherche
Mémoire dirigé par Jean-Paul MARIE, laboratoire de Chirurgie Expérimentale UPRES – Équipe
d’Accueil 3830 – IRIB Groupe de Recherche sur le Handicap Ventilatoire (GRHV)
Mémoire soutenu publiquement le 28 juin 2018 devant le jury composé de
Mr Jean-Paul MARIE PU-PH, service ORL - Chirurgie cervico-faciale, CHU de Rouen
Directeur de mémoire
Mme Isabelle FAIVRE Orthophoniste, Bihorel Présidente du jury
Mr Adrien MARRONNIER Praticien hospitalier, ORL, CHU de Rouen Membre du jury
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Remerciements
L’intérêt porté au domaine de la voix et de la respiration m’a été transmis par des
professionnels passionnés qui ont facilité la réalisation de ce mémoire et à qui je souhaite
témoigner toute ma reconnaissance pour leur aide précieuse.
En premier lieu, j’adresse ma sincère gratitude au directeur de ce mémoire, le professeur
Jean-Paul MARIE, pour avoir permis et soutenu la réalisation de ce travail grâce à sa réflexion
toujours pertinente et sa bienveillance en toutes circonstances.
Je remercie également madame Isabelle FAIVRE et monsieur Adrien MARRONNIER, pour
l’honneur qu’ils m’ont fait en acceptant de prendre part à l’évaluation de mon mémoire et me
faire bénéficier de leur expérience.
J’adresse ma reconnaissance à madame Caroline THILL et monsieur Thomas VERMEULIN,
pour leur aide indispensable concernant la partie statistique de ce mémoire.
Je voudrais aussi exprimer mes remerciements à mes proches qui m’ont apporté le soutien
nécessaire tout au long de ces études.
Un grand merci à toute ma promotion pour ces cinq belles années et plus particulièrement
à Clémence, Arva et Marine, pour leur amitié exceptionnelle et sans qui tout aurait été plus
difficile. Je remercie ma famille et plus particulièrement ma sœur Lorène – ma première
supportrice depuis le début – pour sa relecture attentive. Et enfin, Kévin, pour tout, mais plus
particulièrement pour sa confiance et son calme olympien lorsque j’en ai manqué.
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TABLE DES MATIÈRES
Remerciements .......................................................................................................................... 3
Introduction ................................................................................................................................ 5
Problématique et hypothèse générale ...................................................................................... 6
Rappels théoriques ..................................................................................................................... 8
I- Définitions et anatomie de la phonation ........................................................................ 8
1.1 La phonation et la voix ............................................................................................. 8
1.2 La fonction vocale : éléments d’anatomie et physiologie ....................................... 9
1.3 Le contrôle de la voix : les synergies ...................................................................... 10
1.4 L’innervation laryngée ........................................................................................... 10
II- La voix pathologique ..................................................................................................... 11
2.1 Les dysphonies dysfonctionnelles et organiques .................................................. 11
2.2 La paralysie laryngée .............................................................................................. 12
III- L’évaluation de la voix ............................................................................................... 12
3.1 L’évaluation de la voix : subjectivité et objectivité ................................................ 12
3.2 L’évaluation subjective .......................................................................................... 13
3.3 L’évaluation objective : analyse instrumentale ..................................................... 15
Matériel et méthode ................................................................................................................ 18
I- Population et procédure d’évaluation .......................................................................... 18
1.1 Population de l’étude............................................................................................. 18
1.2 Les évaluations et les variables étudiées ............................................................... 19
II- Méthode et hypothèses opérationnelles ...................................................................... 20
Analyse statistique ................................................................................................................... 22
I- Corrélations préopératoires .......................................................................................... 22
II- Corrélations post-opératoires ....................................................................................... 25
Discussion des résultats ........................................................................................................... 29
Conclusion ................................................................................................................................ 35
Bibliographie ............................................................................................................................ 36
Annexes .................................................................................................................................... 39
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Introduction
La voix est une fonction humaine complexe qui se définit d’un point de vue anatomique et
fonctionnel et à travers laquelle se jouent les enjeux fondamentaux de la communication
orale. En effet, la phonation est une adaptation spécifique à l’espèce humaine qui lui permet
de transmettre des informations à travers le canal oral. Le locuteur adapte alors à la situation
de communication les paramètres acoustiques de sa voix (hauteur, intensité, timbre). Ces
paramètres, propres à chacun et déterminés par l’anatomie et la physiologie de l’appareil
vocal, sont modulés selon l’état émotionnel, l’intention, la culture, le sexe, l’âge…
L’impact de la dysphonie peut ainsi être entrevu à travers le modèle « déficience,
incapacité et handicap » proposé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 1980. La
déficience est définie comme « une perte ou une anomalie d’une structure anatomique ou
d’une fonction organique » là où l’incapacité désigne « les difficultés que rencontre une
personne dans l’exécution de certaines activités ». Le handicap qui en découle se définit selon
« les déficiences, les limitations d’activité et les restrictions de la participation [aux activités de
la vie quotidienne] », dépendant de facteurs environnementaux et personnels. Si on applique
ce modèle au domaine de la voix, une pathologie vocale – par exemple, une paralysie des
cordes vocales – peut entraîner une altération des caractéristiques acoustiques de la voix – ici,
des capacités pneumo-phoniques. Le handicap qui en découle dépend alors du contexte
psycho-social (profession, loisirs, participation à une chorale, structure familiale…) (Jacobson
et al., 1997).
Tous ces aspects doivent être pris en compte dans le bilan vocal, qui devient alors un acte
complexe et multidimensionnel. Après le diagnostic médical de la pathologie, l’évaluation des
fonctions laryngées porte donc tant sur les paramètres acoustiques et aérodynamiques –
mesurés objectivement grâce à l’analyse instrumentale – que sur l’évaluation subjective par
le thérapeute et le patient. Ces deux aspects de l’évaluation doivent permettre de dresser un
« état des lieux » qui caractérisera la voix et orientera les choix thérapeutiques (Giovanni et
al., 2013). Les liens entre les évaluations objectives et subjectives restent encore à préciser
mais différeraient notamment selon la pathologie. Ce mémoire propose de s’interroger sur
les liens entre ces deux aspects du bilan clinique vocal dans le cas de la paralysie bilatérale des
cordes vocales en fermeture.
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Problématique et hypothèse générale
Le recueil et l’analyse des données concernant des patients souffrant d’une paralysie
bilatérale des cordes vocales et ayant bénéficié d’une réinnervation laryngée ont fait émerger
la problématique de la corrélation entre les évaluations subjectives et objectives de la voix. En
effet, ces patients et les thérapeutes ont renseigné des évaluations subjectives et des analyses
informatiques de la voix ont été réalisées à différents temps (pré et post-opératoires). Lorsque
la dyspnée diminue, les patients expriment une baisse du handicap vocal ressenti, même
lorsqu’aucune amélioration objective des paramètres vocaux n’est attestée. La dyspnée paraît
donc interférer entre l’incapacité vocale et l’auto-évaluation du handicap vocal. Par ailleurs,
les relations entre les évaluations subjectives et objectives semblent complexes.
Existe-t-il une corrélation entre le handicap vocal ressenti, les paramètres objectifs
(acoustiques et aérodynamiques) et l’analyse perceptive chez des patients présentant une
paralysie laryngée bilatérale en fermeture ?
Hsiung, Pai et Wang (2002) se sont intéressés aux corrélations entre le Voice Handicap
Index (VHI) et certaines mesures acoustiques (jitter, shimmer, rapport signal/bruit, temps
maximal de phonation) chez des patients présentant des plaintes vocales diverses. D’autres
auteurs (Wheeler et al., 2006 ; Woisard et al., 2007 ; Cheng et al., 2010) ont poursuivi ce travail
en ajoutant d’autres paramètres acoustiques (les profils d’intensité et de fréquence) et
aérodynamiques (période d’aphonie et d’essoufflement, pression sous-glottique, débit d’air
phonatoire moyen) ainsi que l’indice de sévérité de dysphonie. Ces études, incluant des
patients avec des pathologies vocales variées, n’ont pas permis de dégager de corrélation
entre les mesures objectives et le VHI. Ces auteurs défendent alors l’idée que l’auto-évaluation
et les mesures informatisées apportent respectivement des informations sur le handicap et
l’incapacité consécutifs à la déficience vocale et que celles-ci ne sont pas corrélées. Ils
suggèrent néanmoins que certaines pathologies pourraient induire un lien entre le handicap
et l’altération des paramètres vocaux, notamment dans le cas de paralysie des cordes vocales.
D’autres équipes (Schindler et al., 2009 ; Gillespie et al., 2014 ; Dehqan et al., 2017) ont
poursuivi les recherches en étudiant les corrélations entre le VHI et les mesures acoustiques
et aérodynamiques de la voix en constituant des groupes établis selon les pathologies vocales.
Ces auteurs ont notamment inclus un groupe avec une paralysie unilatérale des cordes
vocales. Schindler et al. (2009) ont ainsi trouvé des corrélations entre le domaine fonctionnel
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du VHI et le jitter chez ces patients. Gillespie et al. (2014) ont quant à eux identifié une
corrélation entre le débit d’air phonatoire moyen et le VHI-10 chez des patients présentant la
même dysfonction. Le handicap vocal serait alors lié, dans cette population, à l’impossibilité
de contrôle du flux d’air durant la phonation. Dehqan et al. (2017) ont finalement mis en
évidence une corrélation entre le subtest physique du VHI, le temps maximal de phonation et
les mesures d’instabilité. Ces nouvelles données laissent à penser qu’il existe un lien entre le
handicap vocal et un paramètre vocal et/ou aérodynamique particulier, qui différerait selon
la déficience vocale.
S’appuyant sur ces dernières études, l’hypothèse faite dans ce mémoire est qu’il existe un
lien entre le handicap vocal et un paramètre vocal et/ou aérodynamique chez les patients
présentant une paralysie laryngée bilatérale. La détermination de ce paramètre permettrait
de le cibler lors des traitements, notamment lors de la rééducation orthophonique, afin de
mieux satisfaire le patient en réduisant sa gêne vis-à-vis de sa voix. Cela améliorerait
également l’interprétation du VHI et le lien entre les différents aspects de l’évaluation clinique
pour guider le choix des outils d’évaluation.
Dans un premier temps, il conviendra de rappeler les données théoriques qui régissent le
geste phonatoire et le bilan vocal, en particulier dans le cas des paralysies laryngées. Ensuite,
une étude statistique permettra de mesurer le niveau de corrélation entre les évaluations
subjectives et objectives de la voix chez des patients qui souffrent d’une paralysie laryngée
bilatérale en fermeture et qui ont bénéficié d’une réinnervation laryngée. Finalement, les
résultats seront analysés au regard des données de la littérature afin de conclure sur les liens
entre tous ces aspects de l’évaluation vocale.
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Rappels théoriques
I- Définitions et anatomie de la phonation
1.1 La phonation et la voix
Selon le Dictionnaire d’orthophonie, la phonation réfère à l’ « ensemble des phénomènes
volontaires (mouvement respiratoire adapté à la parole, vibration des cordes vocales,
modulation de la voix dans les résonateurs du conduit vocal) entraînant la production des sons
du langage articulé » (Brin-Henry et al., 2011c) c’est-à-dire l’ensemble des phénomènes
concourant à la production de la voix.
La voix se définit dans ce cadre comme le « souffle sonorisé par le larynx, amplifié et
modulé par les cavités de résonance sus-laryngées, ayant toutes les caractéristiques du son »
(Brin-Henry et al., 2011d). Il est important de noter que la voix est un outil de communication
qui se décline en de multiples manifestations selon ses usages dans la vie quotidienne. La voix
sera ici étudiée en tant que comportement vocal et décrite selon ses paramètres acoustiques :
- la hauteur est le paramètre traduisant la fréquence vibratoire de la source sonore et
s’exprime en hertz (Hz) ou par la note correspondante. Concernant la voix, la hauteur
tonale décrit la fréquence du son fondamental laryngé (fréquence vibratoire des
cordes vocales) et on parle de voix grave ou aiguë. Elle est autour de 110/130 Hz pour
un homme et de 205/245 Hz chez la femme mais elle varie avec l’âge et s’abaisse chez
la femme après la ménopause (Brin-Henry et al., 2011b). La hauteur dépend
principalement de la taille du larynx et de la tension des cordes vocales, qui varie au
cours de la parole pour participer à l’intonation.
- l’intensité caractérise le volume sonore et se mesure en décibels (dB). On parle alors
de voix faible ou forte. L’intensité de la voix est notamment dépendante de la pression
d’air sous-glottique et de la coordination pneumo-phonique. Elle varie en permanence
durant la parole.
- le timbre correspond subjectivement à la couleur d’un son, à ses caractéristiques
propres qui nous permettent de reconnaître une voix. Objectivement, le timbre se
définit par sa composition en harmoniques (nombre et intensité relative) qui sont les
fréquences multiples du son fondamental. Le timbre dépend notamment de la
transformation du son par les cavités de résonance.
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1.2 La fonction vocale : éléments d’anatomie et physiologie
La fonction vocale est assurée par l’appareil vocal qui désigne l’ « ensemble des organes
qui permettent l’émission des sons » (Cornut, 2009). On distingue trois parties dans l’appareil
vocal : l’appareil respiratoire (soufflerie), le larynx (vibrateur) et les cavités sus-laryngées
(résonateurs).
L’appareil respiratoire constitué du « soufflet abdomino-thoracique » assure l’acte
respiratoire, résultant d’une compétition entre les forces musculaires actives lors de
l’inspiration et les résistances élastiques passives qui s’y opposent lors de l’expiration (retour
à la position de repos musculaire). Le diaphragme constitue la force musculaire inspiratoire
principale : lorsqu’il se contracte, il tire le plancher de la cage thoracique vers le bas et dilate
les dernières côtes, agrandissant le thorax dans tous les plans de l’espace. Lors de la
phonation, l’inspiration se raccourcit tandis que l’expiration s’allonge et devient active – Le
Huche et Allali (2010) utilisent les termes d’ « élan du geste phonatoire » et de « souffle
phonatoire » –, l’appareil respiratoire fournissant ainsi l’énergie nécessaire à la production du
son.
Le larynx est formé de cinq cartilages principaux et des membranes et ligaments qui y sont
associés. Le cartilage thyroïde (qui protège le larynx et dont la proéminence constitue la
pomme d’Adam), le cartilage cricoïde et l’épiglotte forment son armature fibrocartilagineuse.
À l’intérieur de cette armature, les deux cartilages aryténoïdes, mobiles, sont responsables
des mouvements d’ouverture et de fermeture de la glotte grâce à leur rotation au niveau de
leur articulation avec le cricoïde. Les mouvements d’abduction et d’adduction sont produits
respectivement par les muscles crico-aryténoïdiens postérieurs et latéraux. Les plis vocaux –
constitués d’un ligament vocal (ligament thyro-aryténoïdien inférieur), du muscle vocal
(muscle thyro-aryténoïdien) et d’une muqueuse qui recouvre toute la longueur de la corde
vocale – s’insèrent sur le cartilage thyroïde en avant et sur l’apophyse vocale des cartilages
aryténoïdes en arrière (McFarland, 2016). Le larynx, grâce à sa configuration anatomique et à
la mobilité des plis vocaux, assure quatre fonctions (Cornut, 2009) :
1) la respiration, avec l’ouverture glottique lors de l’inspiration ;
2) la protection des voies aériennes inférieures pendant la déglutition, par la fermeture
des plis vocaux et la remontée du larynx sous la base de langue conjointe à la bascule
arrière de l’épiglotte ;
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3) la phonation, grâce à l’adduction des plis vocaux ;
4) la fonction d’occlusion pour augmenter la pression sous-glottique lors de l’effort
physique intense, de la toux ou de la défécation.
Enfin, les cavités de résonance (cavités pharyngo-buccales et fosses nasales) et les
mouvements articulatoires sont nécessaires à la production différenciée des sons de la parole.
Les mouvements de la mandibule qui modulent le volume de la cavité buccale, le
rétrécissement ou l’élargissement du pharynx, l’élévation ou l’abaissement du voile du palais
ou encore le positionnement des lèvres et de la langue participent en effet à produire et
différencier les phonèmes de la parole (McFarland, 2016).
1.3 Le contrôle de la voix : les synergies
La fonction vocale résulte au total d’une coordination des trois parties de l’appareil vocal
qui doivent fonctionner en synergie, dans une dynamique globale du corps (Brin-Henry et al.,
2011a) :
- la synergie pneumo-phonique traduit la coordination entre le souffle et le son pour
obtenir un équilibre entre le souffle phonatoire et la force de résistance de la glotte ;
- la synergie phono-résonantielle permet de faire mieux résonner le son laryngé par
une adaptation des cavités de résonance aux sensations vibratoires ;
- la synergie phono-acoustique est parfois ajoutée aux processus de contrôle de la voix
et désigne l’ajustement et le contrôle par l’oreille.
1.4 L’innervation laryngée
La production du son par le larynx est permise par l’innervation laryngée qui est assurée
par deux branches du nerf vague (Xe paire crânienne) :
- le nerf laryngé supérieur assure l’innervation sensitive au-dessus des plis vocaux et
l’innervation motrice pour le muscle crico-thyroïdien qui participe à la modulation de
la tension des plis vocaux ;
- le nerf laryngé inférieur (ou nerf laryngé récurrent) assure l’innervation sensitive en
dessous des plis vocaux et l’innervation motrice pour tous les autres muscles
intrinsèques du larynx.
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L’anatomie du nerf récurrent le rend vulnérable aux pathologies et aux lésions,
notamment au cours d’une opération chirurgicale, du fait de son passage à proximité d’autres
structures. On notera que le nerf récurrent gauche a un trajet plus long et complexe qui le
rend plus vulnérable encore que son homologue à droite : il nait dans le thorax au niveau de
la crosse de l’aorte et remonte ensuite vers le larynx en suivant la trachée alors que le nerf
récurrent droit nait à la base du cou au niveau de l’artère sous-clavière. Des deux côtés, les
nerfs récurrents longent ensuite la glande thyroïde (McFarland, 2016).
II- La voix pathologique
2.1 Les dysphonies dysfonctionnelles et organiques
La dysphonie est un trouble de la phonation. Le Huche et Allali (2010) proposent cette
définition : « trouble momentané ou durable de la fonction vocale ressenti comme tel par le
sujet lui-même ou son entourage ». La dysphonie se caractérise généralement par l’altération
d’un ou de plusieurs paramètres acoustiques de la voix (le timbre, la hauteur et l’intensité)
mais elle peut également ne pas avoir de traduction acoustique : elle est alors ressentie par le
patient. Cette définition de la dysphonie laisse place à une grande part de subjectivité et on
parle de trouble lorsque le patient identifie sa voix comme anormale. Afin de déterminer le
caractère pathologique de la voix, il faudra donc tenir compte de la qualité de celle-ci mais
également de la gêne ressentie par le patient : en effet, un patient peut tout à fait se trouver
satisfait d’une voix altérée sur le plan acoustique et, à l’inverse, un autre se trouvera très gêné
sans qu’aucune perturbation du son ne soit trouvée.
On distingue généralement :
- les dysphonies dysfonctionnelles, qui sont une altération de la fonction vocale
générée et/ou entretenue par un geste vocal inadapté. On observe souvent une
perturbation de la synergie pneumo-phonique. La dysfonction peut alors entraîner une
lésion laryngée si elle n’est pas prise en charge.
- les dysphonies organiques, correspondant à un trouble de la phonation en présence
d’une lésion anatomique ou physiologique du larynx, essentiellement au niveau de la
glotte (cancer laryngé, nodules, kystes, polypes sur les cordes vocales…). Les lésions
peuvent alors entraîner un dysfonctionnement réactionnel de la fonction vocale.
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2.2 La paralysie laryngée
Une des causes possibles de dysphonie organique est l’immobilité des cordes vocales (ou
une restriction de leur mouvement) qui peut être due à (Le Huche et Allali, 2010) :
- un blocage articulaire au niveau de l’articulation crico-aryténoïdienne ou entre les
apophyses vocales causé par un traumatisme (par exemple au cours de l’intubation),
une tumeur, un mécanisme cicatriciel ou rhumatismal ;
- une myopathie avec une impossibilité de contraction ;
- une paralysie laryngée qui peut être une atteinte des voies nerveuses centrales (avec
une atteinte du tronc cérébral ou de la base du crâne) ou périphériques sur le trajet
du nerf vague ou de ses branches (atteinte au niveau du larynx, de la carotide interne,
de la crosse de l’aorte, de la zone broncho-pulmonaire, de l’œsophage, ou encore de
la thyroïde). La thyroïdectomie est en effet la cause la plus fréquente de paralysie
bilatérale des cordes vocales (Swibel Rosenthal et al., 2007).
La paralysie laryngée peut être asymptomatique ou se manifester par une dysphonie, une
dyspnée laryngée et parfois par un trouble de la déglutition. Les symptômes varient selon que
la paralysie est uni- ou bilatérale, en fermeture ou en ouverture.
Lorsque la paralysie des cordes vocales est en ouverture, le patient présente une
dysphonie ou une aphonie, un trouble de déglutition avec de nombreuses fausses routes et la
perte de la fonction d’occlusion du larynx. La respiration est alors généralement préservée
mais on retrouve parfois une mauvaise gestion du souffle.
Lorsque la paralysie récurrentielle est en fermeture, le tableau clinique est souvent
dominé par une dyspnée laryngée qui perturbe la coordination pneumo-phonique.
III- L’évaluation de la voix
3.1 L’évaluation de la voix : subjectivité et objectivité
Devant toute plainte vocale, l’évaluation de la voix doit permettre d’établir un état des
lieux qui facilitera le diagnostic, la comparaison dans le temps (notamment avant et après
traitement) et les choix thérapeutiques. Un protocole d’évaluation fonctionnelle a été
proposé par la Société européenne de laryngologie (Dejonckere et al., 2001). Il est repris et
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détaillé dans un article de Giovanni et de Saint-Victor (2013) selon qui le bilan clinique vocal
comporte au minimum :
1) un enregistrement de la voix, nécessaire pour les comparaisons ultérieures ;
2) une évaluation perceptive qui consiste à évaluer subjectivement à l’oreille la qualité
de la voix (notamment du timbre). Elle peut s’effectuer à l’aide de différentes échelles
dans l’objectif d’uniformiser la terminologie et les critères d’évaluation ;
3) une auto-évaluation par le patient de sa voix et de son handicap vocal. En fonction de
sa profession, de ses interactions sociales et de l’importance accordée à la
communication orale, le patient peut ressentir un handicap plus ou moins important,
qui ne paraît pas toujours en lien avec les altérations acoustiques. L’auto-évaluation
par le patient aide ainsi à la construction du projet thérapeutique car le thérapeute
visera à réduire la gêne réelle du patient ;
4) une évaluation instrumentale des paramètres acoustiques en fonction du matériel
disponible. L’évaluation quantitative confère un ancrage objectif au bilan vocal. Ainsi,
pour chaque paramètre, il est préférable de multiplier les mesures et d’effectuer une
moyenne afin de rendre compte de la variabilité des performances (dans la voix
normale et pathologique). L’évaluation instrumentale permet en outre de comparer
les paramètres acoustiques à des normes mais également de les comparer avant et
après un traitement, et ainsi objectiver les progrès.
Le bilan intègre toujours une analyse de la demande du patient afin de déterminer la
plainte, la chronologie des troubles vocaux, les antécédents et le contexte médical. Un
examen clinique médical donnera une idée précise du fonctionnement des cordes vocales.
Une évaluation des tensions musculaires et respiratoires du patient sera également
indispensable à l’élaboration du projet thérapeutique de la rééducation vocale.
L’évaluation de la voix est donc un bilan complexe : tous ces angles d’observation sont
nécessaires pour rendre compte des aspects multidimensionnels de ce support de la
communication orale.
3.2 L’évaluation subjective
On distingue deux formes d’évaluation subjective de la voix :
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- celle du praticien : c’est l’analyse perceptive (ou perceptuelle)
- celle du patient : c’est l’auto-évaluation par questionnaire.
Pour l’analyse perceptive, le praticien doit juger de la qualité de la voix et de ses
caractéristiques perceptives. Il peut pour cela utiliser différentes échelles dont la plus utilisée
est l’échelle GRBASI développée par Hirano (1981) et complétée par la suite par Dejonckere
(1996) qui évalue six paramètres :
- « G » pour l’impression générale de sévérité de la dysphonie ;
- « R » pour la raucité qui réfère à l’impression d’irrégularité de vibration ;
- « B » pour le souffle qui évalue la présence de fuite d’air altérant la voix, par manque
d’accolement glottique phonatoire ;
- « A » pour l’asthénie qui traduit le manque de puissance, la faiblesse de la voix ;
- « S » pour le serrage, l’impression d’effort et de tension, notamment lorsqu’il y a un
forçage vocal ;
- « I » (ajouté par Dejonckere) pour mesurer l’instabilité qui correspond aux variations
de la qualité de la voix d’un instant à l’autre ;
Pour chaque paramètre, le praticien cote selon quatre degrés de sévérité, allant de 0
(normal / absence) à 3 (présence maximale). Ainsi, plus le score GRBASI est élevé, plus
l’altération vocale est jugée importante par le professionnel.
L’évaluation perceptive est indispensable puisque l’oreille est l’outil le plus performant et
le plus accessible pour juger de la qualité de la voix et c’est généralement cette analyse qui
permettra d’apprécier l’évolution après une thérapie. Elle est cependant insuffisante du fait
des biais qu’elle présente. La variabilité importante de cotation inter-évaluateur (jugement de
deux évaluateurs sur une même voix) et même intra-évaluateur (jugement d’un même
évaluateur à des temps différents) est réduite par l’emploi de jurys d’écoute mais ces derniers
sont difficiles à mettre en œuvre en pratique clinique courante. La complémentarité des
évaluations instrumentales est alors indispensable, les évaluations dites « objectives »
compensant cette importante subjectivité (Ghio et al., 2007).
Le patient évalue parallèlement la qualité de sa voix. Ce questionnement est l’occasion de
l’amener à s’interroger sur l’importance respective de l’altération acoustique et des
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conséquences de celle-ci. Différentes échelles peuvent être utilisées : le placement d’un
curseur sur une échelle analogique bipolaire allant de 0 (voix normale) à 100 (voix très
pathologique), par exemple.
Le Voice Handicap Index (VHI) (Jacobson et al., 1997) est l’auto-questionnaire évaluant
quantitativement le handicap vocal le plus répandu. Il distingue l’impact de la dysphonie sur
les sphères fonctionnelle (impact dans les activités de la vie quotidienne), émotionnelle
(réponse affective) et physique (perception que le patient a des caractéristiques physiques de
sa voix). Les trente questions du VHI sont réparties équitablement entre ces trois aspects. Pour
chaque item, le patient répond selon la fréquence de survenue de situations négatives vis-à-
vis de sa voix : « jamais » (0), « presque jamais » (1), « parfois » (2), « presque toujours » (3),
ou « toujours » (4). Plus le score est élevé, plus le handicap vocal est important.
Il existe une version abrégée du Voice Handicap Index, le VHI-10 qui, sans perdre de
validité, évalue quantitativement la perception du patient de son handicap vocal mais qui ne
distingue pas les impacts dans les domaines fonctionnel, émotionnel et physique. Le VHI-10
serait un outil plus robuste que le VHI pour évaluer le handicap vocal et nécessite moins de
temps de passation, ce qui en fait un outil très utilisé en clinique (Rosen et al., 2004).
3.3 L’évaluation objective : analyse instrumentale
L’évaluation objective de la voix qualifie mais surtout quantifie la fonction vocale et ses
dysfonctions éventuelles à partir de mesures acoustiques et aérodynamiques. Des mesures
électrophysiologiques peuvent également être réalisées.
Différents logiciels de traitement du signal sont disponibles : par exemple les logiciels
Vocalab (Anne Menin et Etienne Sicard) et Praat (Paul Boersma et David Weenink) disposent
des principales fonctionnalités de mesure des paramètres acoustiques. Le système
d’Évaluation Vocale Assistée (EVA®) est un autre dispositif qui intègre une évaluation des
paramètres acoustiques et des mesures aérodynamiques (débits d’air et pressions). Ces
logiciels effectuent généralement les mesures à partir de la tenue d’un /a/. Ce contexte étant
très éloigné de la parole naturelle continue, l’analyse instrumentale doit être interprétée au
regard de l’ensemble des évaluations cliniques réalisées.
Le choix des paramètres à mesurer reste sujet à débat entre les chercheurs, mais les plus
courants sont (Giovanni et al., 2013) :
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- La hauteur tonale avec la détermination de la fréquence fondamentale F0 (en hertz
ou en note de musique). La mesure objective de la fréquence correspond le plus
fréquemment à une analyse spectrale, représentant la structure fréquentielle au cours
du temps. On peut ainsi également mesurer l’étendue vocale (entre la note la plus
grave et la note la plus aiguë) qui donnera des indices sur les possibilités de
modulation.
- L’intensité (en décibels) : on la mesure à l’aide d’un sonomètre. Il est possible de
mesurer l’intensité de la voix conversationnelle (correspondant à une intensité
moyenne usuelle), l’intensité minimale et maximale (intensité de la voix projetée) afin
de déterminer les possibilités de modulation de la puissance.
- L’instabilité : les mesures instrumentales rendent compte des irrégularités à court
terme du son, présentes dans de nombreuses pathologies vocales. Ainsi, on mesure
fréquemment le jitter (écart-type de la période de la fréquence fondamentale, c’est-
à-dire la variation de hauteur) et le shimmer (écart-type de l’amplitude, c’est-à-dire la
variation d’intensité).
- Le temps maximal de phonation (TMP) est un indice de qualité de la coordination
pneumo-phonique et donne un indice sur la fonctionnalité de la respiration lorsqu’elle
est au service de la phonation. Il se mesure sur la tenue du /a/ à intensité et hauteur
confortables.
D’autres mesures aérodynamiques peuvent être prises : ces paramètres permettent
notamment d’appréhender la coordination pneumo-phonique, la fuite glottique dans le cas
d’un mauvais accolement des cordes vocales ou encore la présence d’un forçage vocal. On
explore généralement les pressions d’air sous-glottique et intra-orale ainsi que les débits d’air
nasal et oral (Teston, 2004). Ces mesures sont importantes dans de nombreux cas, notamment
lorsque la dysfonction vocale n’a pas de traduction acoustique (par exemple, dans le cas du
forçage vocal, la pression sous-glottique sera majorée, sans nécessairement retentir sur les
paramètres acoustiques) ou lorsqu’une dysfonction respiratoire est associée.
Le bilan vocal est donc un acte multidimensionnel et aucune mesure ne suffit pour
caractériser une voix. Au total, l’évaluation perceptive évalue plus volontiers l’aspect
fonctionnel et l’utilisation de la fonction vocale, tandis que l’évaluation instrumentale
traduit les caractéristiques « mécaniques » de la phonation. Par ailleurs, l’évaluation du
17
handicap vocal permet de mesurer le retentissement de l’altération vocale sur la qualité de
vie du patient dans les activités de la vie quotidienne.
L’objectif de cette étude sera de déterminer s’il existe une corrélation entre le handicap
vocal ressenti et les évaluations instrumentale et perceptive, dans le cas d’une paralysie
laryngée bilatérale en fermeture.
18
Matériel et méthode
I- Population et procédure d’évaluation
1.1 Population de l’étude
Les données nécessaires à l’étude des corrélations entre les évaluations subjectives et
objectives de la voix sont issues des dossiers médicaux des patients inclus dans le protocole
de réinnervation des paralysies laryngées bilatérales en fermeture. Ce protocole est mené à
l’hôpital Charles Nicolle du CHU de Rouen (76) par le professeur Jean-Paul MARIE. L’objectif
est d’améliorer la fonction respiratoire des patients en préservant le plus possible ou en
améliorant la fonction vocale.
Tous les patients répondent aux critères suivants :
CRITÈRES D’INCLUSION CRITÈRES D’EXCLUSION
Paralysie laryngée bilatérale en fermeture
Sans amélioration depuis 6 mois ou plus (ou
depuis moins de 6 mois s’il y a une destruction
bilatérale des nerfs laryngés inférieurs)
Mobilité arycricoïdienne normale
Être âgé de plus de 16 ans et de moins de 75 ans
Information éclairée réalisée
Consentement écrit recueilli
Examens cardio-vasculaire, neurologique et
clinique normaux
Sans antécédent respiratoire notable
Pour les femmes en âge de procréer : test de
grossesse négatif
Paralysie laryngée datant de plus de 3 ans sans
signe de réinnervation syncinésique sur le bilan
électromyographique laryngé
Traitement de la paralysie laryngée autre que la
trachéotomie, l’injection de toxine botulique dans
les muscles laryngés, ou la cordectomie
postérieure sans geste sur l’aryténoïde et avec
préservation vocale (GRBASI ≤ 3)
Ankylose arycricoïdienne
Être âgé de moins de 16 ans ou de plus de 75 ans
Antécédents respiratoires pathologiques ou
fonction respiratoire anormale
Antécédent d’irradiation cervicale
Contre-indication anesthésique, diabète, atteinte
neurologique autre que la diplégie laryngée,
pathologie cardiovasculaire ischémique
[…]
19
Les patients présentent donc tous une dyspnée et/ou une dysphonie avec une cause
commune : une paralysie laryngée bilatérale en fermeture. L’étude comporte n = 36 patients,
l’âge moyen est de 47 ans et 2 mois au moment de l’opération ; le minimum est de 16 ans et
le maximum est de 75 ans. Le sex-ratio est de 31 femmes pour 5 hommes, sans doute du fait
de la plus grande fréquence des dysfonctionnements thyroïdiens chez la femme. En effet, la
chirurgie de la thyroïde est en cause dans un tiers des cas des paralysies laryngées bilatérales
(Swibel Rosenthal et al., 2007).
1.2 Les évaluations et les variables étudiées
Les évaluations effectuées lors du protocole de réinnervation laryngée suivent les
recommandations pour la bonne pratique clinique dans le cas des paralysies récurrentielles
de l’adulte (Société française d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie de la face et du cou,
2002). Concernant la fonction vocale, nous disposons de :
- L’auto-évaluation subjective de la voix et du handicap vocal avec les scores obtenus au
VHI et/ou VHI-10 et à l’échelle analogique de la qualité de la voix (cf. annexes 1, 2 et 3)
du questionnaire de handicap vocal élaboré et utilisé dans le service ORL-chirurgie
cervico-faciale du CHU de Rouen. Le questionnaire VHI a été modifié par l’ajout d’une
catégorie « C » (caractéristiques acoustiques) définie par l’unité de la voix et de la
déglutition du service ORL du CHU de Toulouse pour évaluer les paramètres
acoustiques. Le choix s’est donc porté sur le score obtenu au VHI-10 pour l’auto-
évaluation du handicap vocal afin de comparer les résultats avec la littérature mais
également pour sa forte validité.
- L’évaluation perceptive de la voix par un professionnel grâce à l’échelle GRBASI.
- L’analyse instrumentale de la voix comprend des analyses acoustiques (jitter,
shimmer, intensité de la voix conversationnelle et de la voix projetée, hauteur tonale)
et des analyses aérodynamiques (notamment du TMP). Les mesures instrumentales
ont été réalisées à l’aide du logiciel EVA© sur la tenue du /a/ aussi long et régulier que
possible. Les valeurs sont ensuite comparées à des normes établies dans le laboratoire
du service, dans les mêmes conditions de passation, à partir d’une population de
référence.
20
- L’analyse vidéostroboscopique du larynx et l’électromyographie laryngée. Ces
examens ne seront pas analysés pour cette étude mais confirment que tous les
patients présentent le même diagnostic médical de paralysie laryngée bilatérale.
Le planning des évaluations a été défini afin de suivre l’évolution des fonctions
respiratoires et vocales, à distance de l’opération. Ainsi, des tests ont été pratiqués en
préopératoire, en post-opératoire entre 1 et 3 mois, entre 6 et 9 mois, à 12 mois et enfin entre
18 et 24 mois post-opératoires. Si nécessaire, des évaluations plus tardives ont été proposées
(plus de deux ans et demi après l’opération).
II- Méthode et hypothèses opérationnelles
L’hypothèse faite dans ce mémoire est qu’il existe un lien entre l’auto-évaluation du
handicap vocal et un paramètre de l’analyse perceptive et/ou objective de la voix chez les
patients présentant une paralysie laryngée bilatérale en fermeture.
Nous étudierons dans un premier temps les corrélations entre le VHI-10 et les évaluations
perceptives et instrumentales en préopératoire. Cette date nous permettra d’analyser le lien
entre les évaluations lorsque les patients présentent une dyspnée qui interfère
nécessairement avec les évaluations instrumentales et avec le handicap ressenti. Parmi les
patients opérés dans le cadre du protocole, nous avons donc sélectionné tous les patients qui
ont rempli un questionnaire abrégé de handicap vocal en préopératoire (n = 36). Nous nous
intéresserons ensuite aux évaluations post-opératoires tardives (entre 12 et 18 mois après
l’opération) afin d’étudier ces mêmes corrélations chez les patients dont la dyspnée est
supposée s’être améliorée. Pour sélectionner ces patients, nous avons choisi ceux dont le
volume inspiratoire maximum au cours de la première seconde (VIMS) a augmenté.
Nous avons choisi d’effectuer les tests de corrélations entre le VHI-10 et la mesure de la
hauteur tonale (F0), de l’intensité de la voix conversationnelle et de la voix projetée (intensité
maximale), de l’instabilité (jitter et shimmer), du temps maximal de phonation (TMP) et enfin
avec le score perceptif du GRBASI. Ces évaluations sont en effet les plus couramment utilisées
dans la littérature. La corrélation entre les deux auto-évaluations de la voix et du handicap
(échelle analogique et VHI-10) sera également calculée afin de déterminer le lien entre
l’altération vocale telle qu’elle est perçue par le sujet et le handicap ressenti.
21
Au regard des données de la littérature exposées précédemment sur les patients
présentant une paralysie laryngée bilatérale en fermeture et dont le tableau clinique est
dominé par la dyspnée laryngée, nous pouvons alors formuler les hypothèses opérationnelles
suivantes :
- L’évaluation perceptive et l’auto-évaluation du handicap vocal seront corrélées, les
évaluations subjectives du patient et du thérapeute prenant en compte toutes les deux
de l’altération d’un point de vue fonctionnel. Le VHI-10 sera donc corrélé à l’échelle
GRBASI et à l’échelle analogique d’auto-évaluation de la qualité de la voix.
- La dyspnée inspiratoire oblige le patient à reprendre son souffle très fréquemment et
lentement. L’altération pneumo-phonique impacte la possibilité de parler longtemps
et/ou fort. Le handicap vocal ressenti sera donc fortement lié aux possibilités
respiratoires du patient. Le VHI-10 sera donc corrélé au TMP et à l’intensité maximale
en préopératoire.
- Le handicap vocal pourra être lié à d’autres paramètres acoustiques en préopératoire,
notamment l’intensité de la voix parlée qui est également dépendante de la synergie
pneumo-phonique, mais dans une moindre mesure.
- Les paramètres acoustiques mesurant l’instabilité (jitter et shimmer) seront également
liés au VHI-10 puisqu’ils sont de bons indicateurs du niveau de dysphonie.
- Le handicap vocal ressenti sera plus fortement influencé par les qualités vocales de la
voix lorsque la dyspnée sera améliorée (en post-opératoire) et donc le VHI-10 sera
corrélé avec les évaluations de la hauteur, de l’intensité et du timbre (indices du
GRBASI notamment).
22
Analyse statistique
La corrélation entre le score au VHI-10 et la mesure de chaque paramètre a été calculée
avec un test r de Spearman. Nous retiendrons un niveau de significativité inférieur à 5%
(p < 0,05). Les coefficients de corrélation r varient entre –1 et 1 : un coefficient positif indique
une corrélation positive (lorsqu’une variable évolue dans un sens, l’autre évolue dans la même
direction) et un coefficient négatif indique une corrélation négative (les variables évoluent en
sens opposé). Nous retiendrons les niveaux de corrélation suivants :
- r compris entre -0,3 et 0,3 = corrélation faible ;
- r compris entre 0,3 et 0,5 (ou entre -0,5 et -0,3) = corrélation passable ;
- r compris entre 0,5 et 0,7 (ou entre -0,7 et -0,5) = corrélation moyenne ;
- r supérieur à 0,7 (ou inférieur à -0,7) = corrélation forte.
I- Corrélations préopératoires
On constate une corrélation forte entre le score au VHI-10 et le score à l’échelle GRBASI,
avec une très bonne significativité. Ainsi, le handicap vocal semble corrélé à l’altération
générale de la voix évaluée subjectivement par le thérapeute. Ce résultat suggère que le
handicap vocal est influencé par une combinaison de paramètres perceptifs. Afin d’affiner ce
premier résultat, le niveau de corrélation entre chaque indice de l’échelle GRBASI et le VHI-10
a été déterminé (présenté par ordre de niveau de corrélation) :
- Corrélation VHI-10 et somme des indices G-R-B (paramètres qui ont démontré une
robustesse suffisante selon Giovanni et de Saint-Victor, 2013) : r = 0,6593 ; p = 0,0001
- Corrélation VHI-10 et indice G (sévérité de la dysphonie) : r = 0,6399 ; p = 0,0001
0
5
10
15
0 10 20 30 40
TOTA
L G
RB
ASI
(su
r 1
2)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction du GRBASI en préopératoire
r = 0,7102 ; p = 1,592E-5 ; n = 29
0
50
100
150
0 10 20 30 40
Ech
elle
an
alo
giq
ue
de
la
qu
alit
é d
e la
vo
ix
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction de l'échelle analogique d'auto-évaluation en préopératoire
r = 0,5712 ; p = 0,000638 ; n = 32
23
- Corrélation VHI-10 et indice I (instabilité) : r = 0,5446 ; p = 0,0023
- Corrélation VHI-10 et indice B (souffle) : r = 0,5104 ; p = 0,0047
- Corrélation VHI-10 et indice A (asthénie) : r = 0,5003 ; p = 0,0057
- Corrélation VHI-10 et indice R (raucité) : r = 0,3236 ; p = 0,0867 (non significatif : on ne
peut pas interpréter les résultats et donc dire s’il y a ou non une corrélation)
- Corrélation VHI-10 et indice S (serrage) : r = 0,0667 ; p = 0,731 (non significatif)
On constate qu’il existe une corrélation moyenne entre le VHI-10 et la combinaison des
paramètres G-R-B ainsi qu’avec les indices G, I, B et A de l’échelle GRBASI. Ces résultats vont
dans le sens d’un lien complexe et multiple entre le handicap vocal ressenti et les altérations
vocales, qui serait bien « capté » par l’évaluation perceptive du professionnel.
Un niveau de corrélation moyen existe entre les deux auto-évaluations proposées au
patient (VHI-10 et échelle analogique). La qualité de la voix telle que le patient la perçoit et le
handicap vocal ressenti sont donc liés.
Un niveau de corrélation passable est retrouvé entre le VHI-10, l’intensité de la voix
projetée (intensité maximale) et le temps maximal phonatoire qui sont deux évaluations
objectives liées à la capacité respiratoire du patient. En effet, afin de produire un son d’une
puissance importante et/ou sur une longue durée, le patient doit avoir une capacité
respiratoire suffisante et une bonne coordination pneumo-phonique.
60
70
80
90
100
110
0 10 20 30 40
Inte
nsi
té v
oix
pro
jeté
e (d
B)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction de l'intensité de la voix projetée en préopératoire
r = -0,4266 ; p = 0,0160 ; n = 35
0
10
20
30
40
50
0 10 20 30 40
TMP
(se
con
des
)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction du TMP en préopératoire
r = -0,4156 ; p = 0,0145 ; n = 34
24
Aucun lien ne peut être conclu avec certitude entre le VHI-10, l’intensité de la voix
conversationnelle et la hauteur face à une significativité insuffisante pour ces deux tests.
Concernant la hauteur, on peut s’interroger sur l’effet de la différence entre la hauteur
tonale chez l’homme et la femme. De plus, on constate que peu de patientes ont une voix
pathologiquement aggravée (normes entre 163,18 et 204,39 Hz, établies au sein du
laboratoire auprès de 12 femmes d’âge moyen de 59 ans et 6 mois) : une seule patiente a une
hauteur tonale inférieure à 150 Hz, les autres voix sous les 150 Hz étant celles des hommes.
C’est également le cas pour l’intensité de la voix conversationnelle qui est dans la norme chez
la majorité des patients (la norme se situe entre 59,92 et 77,20 dB pour la population de
référence). Or, on constate que seul un patient se situe au niveau de la borne inférieure.
Ainsi, la paralysie laryngée bilatérale en fermeture semble peu affecter la hauteur et
l’intensité conversationnelle.
Les corrélations entre le handicap vocal et les mesures d’instabilité ne sont pas
interprétables (p > 0,05). Ces résultats pourraient être dus aux valeurs extrêmes du shimmer
et du jitter.
0
50
100
150
200
250
300
0 10 20 30 40
Hau
teu
r (H
z)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction de la hauteur tonale en préopératoire
r = 0,2301 ; p = 0,183 ; n = 35
50
60
70
80
90
100
110
0 10 20 30 40
Inte
nsi
té
voix
co
nve
rsat
ion
nel
le (
dB
)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction de l'intensité de la voix conversationnelle en préopératoire
r = -0,1957 ; p = 0,267 ; n = 34
0
1
2
3
4
5
0 10 20 30 40
Shim
mer
(d
B)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction du shimmer en préopératoire
r = 0,306 ; p = 0,0736 ; n = 35
0
20
40
60
80
100
0 10 20 30 40
Jitt
er (
Hz)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction du jitter en préopératoire
r = 0,265 ; p = 0,124 ; n = 35
25
II- Corrélations post-opératoires
Après sélection des patients ayant amélioré leur fonction respiratoire (VIMS qui a
augmenté, sans être systématiquement normalisé) et ayant renseigné un questionnaire de
handicap vocal (VHI-10) entre 12 et 18 mois post-opératoires, nous obtenons une population
n = 22 patients.
On note une diminution significative de la moyenne au VHI-10 entre les périodes
d’évaluation préopératoire ( = 19,3) et post-opératoire ( = 10,7). Le score à l’échelle GRBASI
est stable (différence non significative entre les moyennes) entre les deux temps de
l’évaluation. Il en est de même pour les mesures du TMP, du jitter et du shimmer. On
considère donc que les patients ont a minima une préservation de leur fonction vocale. Les
patients expriment donc une diminution du handicap vocal en l’absence d’amélioration
significative des résultats aux évaluations perceptives et objectives.
Nous effectuons les mêmes corrélations entre les différentes évaluations et le handicap
vocal pour ces patients chez qui nous considérons que la dyspnée a diminué.
Une corrélation forte est de nouveau retrouvée entre le VHI-10 et le score total de l’échelle
perceptive GRBASI en post-opératoire, avec une très bonne significativité. Il en est de même
pour la corrélation entre le VHI-10 et l’échelle analogique. Afin de voir si les liens entre les
qualités acoustiques perceptives et le handicap vocal évoluent une fois que la dyspnée a
diminué, nous calculons le niveau de corrélation entre chaque indice de l’échelle GRBASI et le
VHI-10 :
- Corrélation VHI-10 et indice G (sévérité de la dysphonie) : r = 0,8626 ; p = 4,107E-6
0
2
4
6
8
10
0 10 20 30 40
TOTA
L G
RB
ASI
(su
r 1
2)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction du GRBASI en post-opératoire
r = 0,874 ; p = 2,175E-6 ; n = 18
0
20
40
60
80
100
0 10 20 30 40
Ech
elle
an
alo
giq
ue
de
laq
ual
ité
de
la v
oix
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction de l'échelle analogique d'auto-évaluation en post-opératoire
r = 0,6706 ; p = 0,00121 ; n = 20
26
- Corrélation VHI-10 et somme des indices G-R-B : r = 0,7406 ; p = 0,000440
- Corrélation VHI-10 et indice I (instabilité) : r = 0,629 ; p = 0,00518
- Corrélation VHI-10 et indice S (serrage) : r = 0,6026 ; p = 0,00812
- Corrélation VHI-10 et indice A (asthénie) : r = 0,5574 ; p = 0,0162
- Corrélation VHI-10 et indice R (raucité) : r = 0,474 ; p = 0,0468
- Corrélation VHI-10 et indice B (souffle) : r = 0,32 ; p = 0,195 (non significatif)
On constate quelques changements entre les moments préopératoire et post-opératoire.
Les meilleures corrélations sont encore entre le handicap vocal et l’indice de sévérité de la
dysphonie et la somme des indices G-R-B. En revanche, contrairement à l’évaluation
préopératoire, le handicap vocal est mieux corrélé aux indices I, S, A et R en post-opératoire.
Une corrélation (moyenne) négative est de nouveau retrouvée entre le VHI-10 et
l’intensité de la voix projetée. Ainsi, la coordination pneumo-phonique reste une donnée
importante, liée au handicap vocal chez les patients présentant une paralysie laryngée
bilatérale, même lorsque la dyspnée s’est améliorée (mais pas toujours normalisée).
En revanche, la corrélation avec le TMP ne peut plus être établie (p > 0,05) après la
réinnervation. Cela peut être dû à une évolution hétérogène de ce paramètre chez les patients
qui ne va pas dans le sens d’une amélioration systématique.
60
70
80
90
100
110
0 10 20 30 40
Inte
nsi
té v
oix
pro
jeté
e (d
B)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction de l'intensité de la voix projetée en post-opératoire
r = -0,5223 ; p = 0,0181 ; n = 20
0
5
10
15
20
25
0 10 20 30 40
TMP
(se
con
des
)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction du TMP en post-opératoire
r = -0,1247 ; p = 0,6003 ; n = 20
27
Comme en préopératoire, les corrélations entre le VHI-10 et la hauteur, l’intensité
moyenne de la voix conversationnelle, le jitter et le shimmer ne peuvent être établies par
manque de significativité des tests (p > 0,05).
Tableau 1. Synthèse des niveaux de corrélations entre le VHI-10, les paramètres acoustiques,
l’échelle GRBASI et l’échelle analogique d’auto-évaluation de la voix en préopératoire.
PARAMETRES
GRBASI Échelle
analogique
Intensité
voix
projetée
TMP Hauteur Jitter Shimmer Intensité voix
conversationnelle VHI-10
n 29 32 35 34 35 35 35 34
r 0,7102 0,5712 -0,4266 -0.4156 0,2301 0,265 0,306 -0.1957
p-value 1,592E-5 0,000638 0,0160 0,0145 0,183 0,124 0,0736 0,267
NIVEAU DE CORRÉLATION
FORTE MOYENNE PASSABLE PASSABLE p > 0,05 p >
0,05 p > 0,05 p > 0,05
80
130
180
230
280
330
0 10 20 30 40
Hau
teu
r (H
z)
VHI-10
VHI-10 en fonction de la hauteur en post-opératoire
r -0,0212 = ; p = 0,929 ; n = 20
60
65
70
75
80
85
90
0 10 20 30 40
Inte
nsi
té v
oix
co
nve
rsat
ion
nel
le
(dB
)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction de l'intensité de la voix conversationnelle en post-opératoire
r = -0,2245 ; p = 0,341 ; n = 20
0
5
10
15
0 10 20 30 40
Jitt
er (
Hz)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction du jitter en post-opératoire
r = 0,2978 ; p = 0,2485 ; n = 20
0
1
2
3
4
5
0 10 20 30 40
Shim
mer
(d
B)
VHI-10 (sur 40)
VHI-10 en fonction du shimmer en post-opératoire
r = 0,2706 ; p = 0,2485 ; n = 20
28
Tableau 2. Synthèse des niveaux de corrélations entre le VHI-10, les paramètres acoustiques,
l’échelle GRBASI et l’échelle analogique d’auto-évaluation de la voix en post-opératoire
PARAMETRES
GRBASI Échelle
analogique
Intensité
voix
projetée
TMP Hauteur Jitter Shimmer Intensité voix
conversationnelle VHI-10
n 18 20 20 20 20 20 20 20
r 0,874 0,6706 -0,5223 -0,1247 -0,0212 0,2978 0,2706 -0,2245
p-value 2,175E-6 0,00121 0,0181 0,6003 0,929 0,202 0,2485 0,341
NIVEAU DE CORRÉLATION
FORTE MOYENNE PASSABLE p > 0,05 p > 0,05 p > 0,05 p > 0,05 p > 0,05
Tableau 3. Synthèse des niveaux de corrélations entre le VHI-10 et les indices de l’échelle
GRBASI en préopératoire
PARAMETRES GRBASI (total)
G+R+B G R B A S I VHI-10
n 29 29 29 29 29 29 29 29
r 0,7102 0,6593 0,6399 0,3236 0,5104 0,5003 0,0667 0,5446
p-value 1,592E-5 0,0001 0,0001 0,0867 0,0047 0,0057 0,731 0,0023
NIVEAU DE CORRÉLATION
FORTE MOYENNE MOYENNE p >
0,05 MOYENNE MOYENNE p > 0,05 MOYENNE
Tableau 4. Synthèse des niveaux de corrélations entre le VHI-10 et les indices de l’échelle
GRBASI en post-opératoire
PARAMETRES GRBASI (total)
G+R+B G R B A S I VHI-10
n 18 18 18 18 18 18 18 18
r 0,874 0,7406 0,8626 0,4741 0,32 0,5574 0,6026 0,629
p-value 2,175E-6 0,0004 4,107E-6 0,0468 0,1954 0,0162 0,0812 0,0052
NIVEAU DE CORRÉLATION
FORTE FORTE FORTE PASSABLE p >
0,05 MOYENNE MOYENNE MOYENNE
29
Discussion des résultats
L’objectif de l’étude était de déterminer s’il existe un lien entre le VHI-10 et les évaluations
perceptives et objectives de la voix chez des patients présentant une paralysie laryngée
bilatérale. Les niveaux de corrélation ont été déterminés avant et après la réinnervation
laryngée.
Les résultats confirment l’idée que le handicap vocal présente une origine multifactorielle,
incluant l’altération acoustique globale (mais pas seulement) évaluée par le thérapeute et
perçue par le patient.
La corrélation entre la qualité de la voix évaluée par le patient (échelle analogique) et le
handicap ressenti (VHI-10) montre que le lien entre la déficience et le handicap selon le
modèle de l’OMS s’applique bien à la paralysie laryngée bilatérale des cordes vocales. La
qualité acoustique de la voix telle qu’elle est perçue par le patient est donc bien liée au
handicap vocal ressenti dans le cadre des paralysies laryngées bilatérales en fermeture.
La corrélation entre le handicap vocal et l’échelle GRBASI, la somme G-R-B et l’indice G en
pré- et post-opératoire montre des liens complexes entre l’altération vocale et le handicap
qu’elle engendre chez le patient. En effet, cette échelle tient compte du niveau global de la
dysphonie (score total, somme G-R-B et indice G) mais également d’altérations perceptives
spécifiques, liées à la fois au vibrateur laryngé (indices R, S et I notamment) et à la synergie
pneumo-phonique (indices B et A).
En préopératoire, la corrélation entre le VHI-10 et les indices B et A de l’échelle GRBASI,
ainsi qu’avec l’intensité en voix projetée et le TMP, traduit le lien entre l’altération pneumo-
phonique causée par la paralysie laryngée en fermeture et le handicap ressenti. En effet,
l’indice B est lié au défaut d’accolement des cordes vocales lors de la phonation et l’indice A
est lié à la puissance vocale qui dépend notamment de la qualité de la coordination pneumo-
phonique, deux fonctions altérées dans les paralysies laryngées bilatérales en fermeture. La
perturbation du souffle phonatoire (perturbation de l’adduction des plis vocaux pour la
phonation qui empêche d’avoir une pression sous-glottique suffisante pour obtenir un son
clair, long et/ou puissant) est donc un élément important dans le ressenti du patient.
La corrélation moyenne entre l’indice I et le VHI-10 montre le lien entre la stabilité de la
voix et le handicap ressenti. Si un patient ressent une instabilité dans la qualité de sa voix, il
30
peut se trouver handicapé dès lors qu’il doit s’appuyer sur sa fonction vocale, puisque celle-ci
peut lui faire défaut de façon plus ou moins imprévisible.
L’absence de significativité pour les corrélations entre le VHI-10 et la hauteur et l’intensité
de la voix conversationnelle empêche de conclure à la présence ou à l’absence de lien entre
le handicap et ces paramètres vocaux. Néanmoins, ces deux paramètres étant peu perturbés,
on peut supposer que la hauteur et l’intensité conversationnelle ne sont pas des paramètres
acoustiques liés au handicap vocal ressenti dans cette population. On peut en effet penser
que si les patients n’ont pas de difficulté à produire une voix d’intensité suffisante pour la
conversation dans un milieu calme et/ou d’une tonalité satisfaisante, ces paramètres
interviendront peu dans le handicap ressenti.
Enfin, aucune corrélation ne peut non plus être conclue entre le VHI-10 et les mesures
d’instabilité. Ces dernières supposent qu’il existe une moyenne stable autour de laquelle la
variation est mesurée. Or, dans les pathologies vocales, il peut être difficile de déterminer une
valeur moyenne fiable, ce qui rend l’interprétation et l’utilisation des mesures du shimmer et
du jitter particulièrement délicates (Giovanni et al., 2013). On peut alors supposer que les
nombreuses valeurs extrêmes des mesures du jitter et du shimmer perturbent le calcul
statistique. De plus, la corrélation entre l’indice I du GRBASI et le VHI-10 montre que
l’instabilité de la voix et le handicap vocal sont liés. La différence ici se situe notamment au
niveau de la temporalité : l’indice I estime l’instabilité sur une échelle de temps plus large que
celle du jitter et du shimmer, qui évaluent l’instabilité du cycle vibratoire.
Lorsque la dyspnée diminue (en post-opératoire), on observe un changement dans les
liens entre les altérations acoustiques et le handicap. Au niveau de l’analyse perceptive, les
indices I, S, A et R sont corrélés au VHI-10. La corrélation avec l’indice A, tout comme en
préopératoire, met en lien le handicap vocal et l’altération de la coordination pneumo-
phonique. On peut supposer que, bien qu’améliorée, la compétence respiratoire n’est pas
normalisée pour tous les patients et que cela contraint donc toujours la puissance vocale, et
par extension participe au handicap vocal ressenti.
Un changement intéressant par rapport aux résultats préopératoires concerne la
corrélation avec les indices R (qui traduit l’impression d’irrégularité de la vibration) et S (relatif
à l’impression de serrage laryngé). Ces changements laissent supposer que le comportement
phonatoire a été modifié par l’opération et que ce changement est bien évalué par le patient
31
(via le handicap vocal) et le thérapeute (via l’évaluation perceptive). Ainsi, lorsque la dyspnée
diminue, le score au VHI-10 diminue également et le handicap semble plus lié aux indices
traduisant le geste vocal dans l’évaluation perceptive. On peut alors conclure que les
altérations concernant le vibrateur laryngé prennent davantage leur part dans le handicap
vocal ressenti lorsque la coordination pneumo-phonique est améliorée.
Au niveau des analyses objectives, seule l’intensité de la voix projetée reste corrélée de
façon significative au VHI-10. Ainsi, la possibilité de projeter sa voix reste une donnée
importante et liée au handicap ressenti, même lorsque la dyspnée s’améliore. On soulignera
de nouveau le fait que, bien qu’améliorée, la dyspnée n’est pas normalisée pour tous les
patients sélectionnés, ce qui constitue un des biais de l’étude.
Au total, le niveau de corrélation entre le handicap vocal et l’analyse perceptive,
comparativement au niveau de corrélation avec l’analyse instrumentale, met en évidence le
fait que l’évaluation instrumentale ne reflète que partiellement l’usage de la voix. Ainsi, le
patient peut avoir des altérations qui sont bien captées par l’évaluation perceptive mais qui
ne transparaissent pas toujours dans les mesures acoustiques et aérodynamiques (comme
c’est le cas par exemple avec l’instabilité). Le patient peut en effet avoir une voix peu
perturbée sur un /a/ tenu mais ne pas pouvoir l’utiliser dans les activités de la vie quotidienne.
Les usages et implications en situation de communication de la voix en font alors un outil qui
ne peut s’évaluer qu’avec un bilan multidimensionnel.
La comparaison avec les données de la littérature n’est pas évidente. En effet, les études
les plus proches de la nôtre sont celles étudiant des groupes de patients présentant une
paralysie unilatérale des cordes vocales (Schindler et al., 2009 ; Gillespie et al., 2014 ; Dehqan
et al., 2017). Les auteurs ont trouvé des corrélations entre le VHI et les paramètres
aérodynamiques (débit d’air phonatoire, TMP) et certaines données acoustiques (jitter,
shimmer, rapport signal-bruit) chez ces patients. Il nous manque néanmoins des données sur
le niveau de sévérité de la dysphonie et/ou de la dyspnée de ces patients pour conclure à une
similarité entre nos études. En effet, le tableau clinique des paralysies laryngées unilatérales
est très variable selon la position adoptée par la corde vocale immobile. Généralement, la
dysphonie est associée à une paralysie unilatérale en ouverture (avec des troubles de la
déglutition) et les troubles dyspnéiques sont moins importants que dans les paralysies
32
bilatérales. Les différences entre nos résultats et la littérature peuvent être interprétées au
regard des pathologies étudiées. Ces résultats vont bien dans le sens d’un lien pathologie-
dépendant entre les évaluations subjectives et objectives de la voix. Dans le cadre des
paralysies laryngées bilatérales en fermeture, le handicap vocal ressenti est lié à l’analyse
perceptive et aux évaluations objectives du TMP et de l’intensité maximale.
Différents biais ont été identifiés dans ce mémoire. Tout d’abord, il convient de
s’interroger sur la population sélectionnée. De par la rareté de l’atteinte bilatérale des cordes
vocales, le petit nombre de sujets limite la portée statistique des résultats. De plus,
l’hétérogénéité clinique de la population conduit à une certaine prudence dans
l’interprétation. En effet, bien que tous les patients présentent une paralysie laryngée
bilatérale des cordes vocales en fermeture, les tableaux cliniques sont disparates. Certains
patients présentent des altérations acoustiques importantes qui sont sur le devant du tableau
clinique là où d’autres présentent une dyspnée majeure nécessitant une trachéotomie. Il en
est de même après l’opération qui n’a pas normalisé la respiration pour tous les patients,
même si la majorité a amélioré leur statut ventilatoire avec une décanulation dans la majorité
des cas (Marie et al., 2014). Ainsi, bien que la dyspnée soit moins importante en post-
opératoire, la fonction respiratoire et la coordination pneumo-phonique ne sont pas
systématiquement normalisées.
Le choix des évaluations a également été le sujet de réflexions. Les outils ont été
sélectionnés notamment en fonction des recommandations de la Société française d’oto-
rhino-laryngologie et de chirurgie de la face et du cou (2002) concernant l’examen clinique
dans le cadre des paralysies laryngées bilatérales.
Concernant l’échelle GRBASI, le jury d’écoute n’a pas pu être mis en place de façon
systématique ce qui laisse place à une plus grande subjectivité dans les cotations. De plus, on
pourrait s’interroger sur la pertinence des items A, S et I qui sont parfois critiqués dans la
littérature pour leur manque de robustesse (Dejonckere et al., 2001). Néanmoins l’évaluation
perceptive n’a pas été effectuée sur la base d’enregistrements audio de la voix mais bien lors
d’une consultation avec le patient. Ainsi, les biais méthodologiques liés aux enregistrements
(distance du microphone qui perturbe l’intensité, prise en compte des manifestations
comportementales du forçage vocal…) qui amoindrissent la robustesse de ces indices ne sont
pas applicables ici, ce qui nous permet d’utiliser avec fiabilité les indices A, S et I pour
l’évaluation perceptive de la voix.
33
L’échelle analogique du questionnaire rouennais est conforme aux recommandations de
Dejonckere et al. (2001) puisqu’elle propose au patient d’évaluer sa voix sur une échelle de
dix centimètres allant de 0 (voix tout à fait normale) à 100 (voix très anormale). Une analyse
qualitative et quantitative plus détaillée pourrait également être proposée avec une échelle
d’auto-évaluation de la qualité de la voix utilisant divers qualificatifs afin d’amener le patient
à se questionner sur les altérations acoustiques de sa voix (Giovanni et al., 2013). Cela
permettrait d’étudier les liens entre l’analyse perceptive du patient en différenciant plusieurs
critères (comme cela est fait avec l’échelle GRBASI) et son handicap vocal.
Finalement, la méthode statistique diffère aussi selon la littérature. Bien que la majorité
des auteurs appliquent la même méthodologie que celle utilisée dans ce mémoire, une autre
approche aurait pu être utilisée. Gillespie et al. (2014) ont par exemple choisi un autre procédé
qui aurait pu s’appliquer ici : ils ont corrélé les évolutions moyennes du VHI avec celles des
mesures acoustiques. Ils ont donc cherché à savoir si le changement de score du VHI-10 (après
un laps de temps non défini) était corrélé au changement des mesures informatiques dans le
cas de cinq pathologies différentes. Nous aurions pu utiliser cette méthodologie ici mais cela
aurait amoindri la puissance des résultats car tous les patients n’ont pas encore renseigné les
évaluations post-opératoires et nous aurions donc eu une population moins importante.
Au total, les hypothèses de départ ne sont que partiellement vérifiées. Le handicap vocal
est bien corrélé aux évaluations perceptives du patient et du thérapeute. L’altération
perceptive est donc bien un élément majeur à évaluer dans le bilan vocal afin de le mettre en
lien avec le handicap dans les activités de la vie quotidienne.
Le handicap vocal ressenti est également lié aux possibilités respiratoires du
patient lorsqu’une paralysie laryngée bilatérale en fermeture perturbe la fonction
respiratoire : les évaluations aérodynamiques et acoustiques en lien avec les capacités
pneumo-phoniques (TMP, intensité de la voix projetée) sont bien corrélées au handicap vocal.
Ce lien perdure après le traitement, bien que la dyspnée se soit améliorée.
Le lien entre le handicap vocal et les évaluations acoustiques de la hauteur, de l’intensité
de la voix parlée et de l’instabilité n’a pas pu être établi ici, ni en préopératoire ni en post-
opératoire. De nouvelles investigations seront nécessaires lorsque la cohorte de patients sera
plus importante. Une meilleure sélection des patients sera sans doute nécessaire afin
d’écarter les valeurs extrêmes du jitter et du shimmer, considérées comme peu fiables au-
34
delà d’un certain seuil de déviance (Giovanni et al., 2013). Les corrélations entre les indices R,
S et I en post-opératoire nous encouragent dans ce sens.
On peut finalement s’interroger sur la temporalité des différentes évaluations. En effet, le
handicap vocal et les paramètres vocaux pourraient évoluer chacun selon une temporalité
différente et il faudrait alors un certain temps après l’amélioration vocale et/ou respiratoire
pour que le patient ressente une diminution du handicap.
Une poursuite intéressante de l’étude pourrait concerner l’étude des liens entre le
handicap vocal et d’autres paramètres acoustiques et/ou aérodynamiques. En effet, si l’on se
réfère au protocole consensuel proposé par Dejonckere et al. (2001), il pourrait être
intéressant de corréler le VHI-10 avec le rapport signal-bruit et le quotient phonatoire
(capacité vitale / temps maximal de phonation). Ce dernier paramètre aérodynamique est un
bon indicateur de la fermeture laryngée lors de la phonation qui tient compte de la capacité
pulmonaire (variations interindividuelles qui pourraient perturber le score du TMP). Le
rapport signal-bruit évalue quant à lui l’énergie des harmoniques par rapport au « bruit » et
serait un indicateur plus pertinent de la dysphonie que le jitter et le shimmer utilisés ici.
De même, l’étude des corrélations entre le VHI-10 et les paramètres évaluant la fonction
respiratoire serait tout à fait pertinente chez ces patients présentant une paralysie laryngée
bilatérale en fermeture. En effet, le tableau clinique étant dominé par la dyspnée laryngée,
approfondir le lien entre le handicap vocal ressenti et la dyspnée nous donnerait des
renseignements précieux sur la part de l’altération vocale et de l’altération respiratoire dans
le handicap. Il faudrait alors corréler le VHI-10 avec le débit d’air moyen (Dejonckere et al.,
2001), les volumes inspiratoires et expiratoires maximums en une seconde (VIMS et VEMS) et
les pressions sous-glottique et intra-orale (Teston, 2004).
Afin de comparer les résultats à la littérature, il faudrait disposer d’études similaires chez
des patients présentant un tableau clinique comparable, c’est-à-dire ayant une pathologie qui
entraîne une dyspnée laryngée plus ou moins associée à une dysphonie (par exemple, des
patients présentant une tumeur atteignant la filière laryngée).
Enfin, l’étude avec des résultats post-opératoires plus tardifs (après 18 mois) permettrait
de voir les corrélations entre le handicap vocal et l’altération acoustique sur une plus grande
temporalité, dans la perspective d’une évolution différente entre l’amélioration objective et
celle ressentie par le patient.
35
Conclusion
L’étude met en évidence une corrélation forte entre les évaluations perceptives de la voix
et l’auto-évaluation du handicap chez les patients présentant une paralysie laryngée bilatérale
en fermeture. De plus, seules les évaluations objectives de la voix contraintes par la dyspnée
(intensité maximale et temps maximal de phonation) sont corrélées au handicap vocal ressenti
par ces patients. L’analyse laisse donc entrevoir une combinaison de paramètres qui
influencent l’auto-perception de sa voix et du handicap généré. Le handicap vocal ressenti
semble donc davantage lié à l’altération des paramètres pneumo-phoniques lorsqu’une
dyspnée est sur le devant du tableau, le lien avec les paramètres vocaux augmentant lorsque
la dyspnée diminue.
Par ailleurs, cette étude a mis en évidence la complexité de l’évaluation du handicap vocal
ressenti par le biais du Voice Handicap Index. Il semble bien que le VHI évalue le handicap
vocal mais pas uniquement : des éléments de handicap respiratoire et d’incapacité vocale
semblent également pris en compte.
En conclusion, les liens entre déficience et handicap doivent être approfondis dans le
domaine des altérations vocales. Il semblerait bien que ce lien soit pathologie-dépendant et
que, selon le tableau clinique et les troubles associés, les paramètres acoustiques soient plus
ou moins prégnants dans le handicap ressenti. C’est le cas lorsqu’une dyspnée laryngée est
associée à la dysphonie : les évaluations objectives de la voix les plus liées au handicap vocal
sont alors celles qui mesurent l’impact de l’altération pneumo-phonique. D’autres facteurs
psycho-sociaux interviennent très certainement dans le handicap vocal du patient, tels que
l’utilisation antérieure de la voix au quotidien, la représentation psychologique et sociale…
C’est tout l’objet du bilan vocal qui doit rendre compte de ces liens complexes et des impacts
sur la vie quotidienne d’une altération acoustique en mettant en perspective tous ces
éléments. Les évaluations perceptives et instrumentales ainsi que l’auto-évaluation du
handicap semblent bien complémentaires et irremplaçables dans l’évaluation fonctionnelle.
Les traitements des paralysies laryngées bilatérales en fermeture qui visent la restauration
de la fonction respiratoire en préservant la fonction vocale vont donc bien dans le sens de la
réduction du handicap ressenti. La rééducation orthophonique dans ce cadre se fixera alors
comme objectif une amélioration de la coordination pneumo-phonique, paramètre qui est le
plus lié au handicap ressenti.
36
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39
Annexes
Annexe 1. Questionnaire Voice Handicap Index (VHI) modifié par l’ajout de la
catégorie « C »
Veuillez mettre une croix dans la case qui correspond à votre situation, en sachant que :
J = jamais ; PJ = presque jamais ; P = parfois ; PT = presque toujours ; T = toujours.
J PJ P PT T
F1 On m’entend difficilement à cause de ma voix
C Ma voix n’est pas normale
P2 Je suis à court de souffle quand je parle
F3 On me comprend difficilement dans un milieu bruyant
C Ma voix est voilée, soufflée
C Ma voix est éraillée
P4 Le son de ma voix varie au cours de la journée
F5 Les membres de la famille ont du mal à m’entendre quand je les appelle dans la maison
F6 Je téléphone moins souvent que je le voudrais
C Au téléphone, on confond mon sexe
C Ma voix est trop faible ou trop forte
E7 Je suis tendu(e) quand je parle avec d’autres à cause de ma voix
F8 J’ai tendance à éviter les groupes à cause de ma voix
C Ma voix s’altère quand je suis stressé(e) ou lors de chocs affectifs
E9 Les gens semblent irrités par ma voix
P10 On me demande : « Qu’est-ce qui ne va pas avec ta voix ? »
C J’ai mal au niveau de la gorge quand je parle
C Je ne peux plus parler
C Je ne peux plus chanter
C Je ne peux plus appeler
F11 Je parle moins souvent avec mes voisins, mes amis, ma famille à cause de ma voix
F12 On me comprend difficilement quand je parle dans un endroit calme
P13 Ma voix semble grinçante et sèche
P14 J’ai l’impression que je dois forcer pour produire la voix
E15 Je trouve que les autres ne comprennent pas mon problème de voix
F16 Mes difficultés de voix limitent ma vie personnelle et sociale
P17 La clarté est imprévisible
P18 J’essaie de changer ma voix pour qu’elle sonne différemment
F19 Je me sens écarté(e) des conversations à cause de ma voix
P20 Je fais beaucoup d’effort pour parler
P21 Ma voix est plus mauvaise le soir
F22 Mes problèmes de voix entraînent des pertes de revenus
40
E23 Mes problèmes de voix me contrarient
E25 Je suis moins sociable à cause de mon problème de voix
P26 Ma voix m’abandonne en cours de conversation
E27 Je suis agacé(e) quand les gens me demandent de répéter
E28 Je suis embarrassé(e) quand les gens me demandent de me répéter
E29 À cause de ma voix, je me sens incompétent(e)
E30 Je suis honteux(se) de mon problème de voix
Annexe 2. Questionnaire Voice Handicap Index 10 (VHI 10)
Ci-dessous figurent des affirmations que les gens utilisent couramment pour décrire leur voix
ainsi que l’influence de leur voix dans leur vie quotidienne. Veuillez entourer la réponse qui
indique la fréquence de votre propre expérience.
0 = Jamais ; 1 = Presque jamais ; 2 = Quelquefois ; 3 = Presque toujours ; 4 = Toujours
1 Il est difficile pour les gens de m’entendre à cause de ma voix 0 1 2 3 4
2 Les gens éprouvent des difficultés à me comprendre dans une pièce bruyante 0 1 2 3 4
3 Mes problèmes de voix limitent ma vie privée et mes échanges sociaux quotidiens 0 1 2 3 4
4 Je me sens mis(e) à l’écart des conversations à cause de ma voix 0 1 2 3 4
5 Mon problème de voix me fait perdre des revenus 0 1 2 3 4
6 J’ai l’impression que je dois forcer pour produire de la voix 0 1 2 3 4
7 La clarté de ma voix est imprévisible 0 1 2 3 4
8 Mon problème de voix me contrarie 0 1 2 3 4
9 Je me sens handicapé(e) à cause de ma voix 0 1 2 3 4
10 Les gens me demandent : « Qu’est-ce qui ne va pas avec votre voix ? » 0 1 2 3 4
Annexe 3. Échelle analogique du questionnaire rouennais de handicap vocal
Comment trouvez-vous votre voix ? Faites un trait sur l’échelle ci-dessous.
Tout à fait normale Très anormale
(La distance entre le trait placé par le patient et les bords de l’échelle est mesurée afin d’obtenir
un score sur 100.)
41
Étude des corrélations entre les évaluations subjectives et objectives de la voix chez
des patients présentant une paralysie laryngée bilatérale
Présenté et soutenu par Clémentine MERTZ
Résumé
OBJECTIF : L’objectif de ce mémoire est d’étudier le lien entre le handicap vocal ressenti et les évaluations perceptives et instrumentales chez des patients présentant une paralysie bilatérale en fermeture des cordes vocales.
MÉTHODE : Les bilans vocaux de 36 patients sont analysés avant et 12 mois après la réinnervation laryngée. Les niveaux de corrélation sont mesurés entre le VHI-10, une échelle analogique d’auto-évaluation vocale, l’échelle GRBASI et les mesures acoustiques et aérodynamiques.
RÉSULTATS : En pré- et post-opératoire, le VHI-10 est corrélé à l’auto-évaluation de la voix, à l’échelle GRBASI et à l’intensité maximale. Le VHI-10 et le TMP sont également liés en préopératoire. Les niveaux de corrélation entre le VHI-10 et les indices de l’échelle GRBASI varient entre les évaluations pré- (G, B, A et I) et post-opératoire (G, I, S, A et R).
CONCLUSION : Le handicap vocal ressenti et l’altération pneumo-phonique sont liés dans les paralysies laryngées bilatérales en fermeture. Lorsque la respiration s’améliore, le VHI-10 diminue et traduit davantage le geste vocal. La restauration de la fonction respiratoire doit donc être au centre des traitements des paralysies laryngées en fermeture. Le VHI-10 doit par ailleurs être interprété avec prudence car il est en partie lié au handicap respiratoire lorsqu’une dyspnée est présente.
MOTS-CLÉS voix – paralysie laryngée bilatérale – mesures objectives – handicap vocal – VHI
Study of correlations between subjective and objective voice evaluations in patients with bilateral laryngeal paralysis
Summary
OBJECTIVE: The aim of this thesis is to study the link between perceived vocal handicap and perceptual and instrumental evaluations in patients with bilateral paralysis in vocal cord closure.
METHOD: The speech evaluations of 36 patients are analyzed before and 12 months after laryngeal reinnervation. Correlation levels are measured between the VHI-10, a voice self-assessment analogue scale, the GRBASI scale and acoustic and aerodynamic measurements.
RESULTS: In pre- and post-operative, the VHI-10 is correlated to voice self-assessment, GRBASI scale and maximum intensity. VHI-10 and TMP are also preoperatively linked. Correlation levels between the VHI-10 and GRBASI indices vary between pre- (G, B, A and I) and post-operative (G, I, S, A and R) assessments.
CONCLUSION: The vocal handicap felt and the pneumophonic alteration are linked in bilateral laryngeal paralysis in closure. As breathing improves, the VHI-10 decreases and further translates the vocal gesture. The restoration of respiratory function must therefore be at the centre of treatment for laryngeal paralysis during closure. VHI-10 should also be interpreted with caution as it is partly related to respiratory disability when dyspnea is present.
KEY WORDS voice - bilateral laryngeal paralysis - objective measures - vocal disability - VHI
Mémoire dirigé par Jean-Paul MARIE, laboratoire de Chirurgie Expérimentale UPRES – Équipe
d’Accueil 3830 – IRIB Groupe de Recherche sur le Handicap Ventilatoire (GRHV)