Magazine Art Animalier

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ΩCEANS JACQUES PERRIN LIGUE ROC HUBERT REEVES CHRISTIAN HUCHEDÉ LE REFUGE DE L’ARCHE PORTFOLIO : LES PANTHÈRES DU PARC DES FÉLINS PORTRAITS DARTISTES LAURENCE SAUNOIS - JEAN-BAPTISTE VENDAMME ART ANIMALIER Magazine Nature & Culture Le 1 er Magazine qui enracine l’écologie dans la création L 19164 - 2 - F: 5,50 - RD N° 2 - janvier - février 2010

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Article sur Laurence SAUNOIS, artiste animalier

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Portraitd’Artiste

Combien de fois, n’ai-je pas entendu « Mais à quoi cela sert-il de faire un tableau qui ressemble à une photographie. Autant agrandir une photographie. »

Laurence Saunois est une artiste engagée qui agit pour la nature et la sauvegarde des mammifères en voie de disparition mais elle est aussi une artiste aux multiples facettes : peintre animalier, sculpteur, auteur, photographe sans oublier une excellente main verte. Sa voix douce est en harmonie avec son jardin. Regard franc et direct, l’artiste vous reçoit en toute simplicité.

Comment vous est-elle venue cette passion dévo-rante pour la faune et la flore ?

Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été en contact avec les animaux. Mes principaux souvenirs d’enfance leurs sont associés. Petite, le monde animal me fascinait. Adolescente, les murs de ma chambre n’étaient pas couverts de posters de chanteurs mais

de posters de chevaux. Je leur vouais une véritable passion et voulais devenir jockey, rêve irréalisable à l’époque, mais longtemps espéré. Être cavalière me connectait, par l’intermédiaire de mon cheval, à la nature. J’aimais les grands espaces et les randon-nées, découvrir des lieux sauvages comme le Vercors, la Camargue, le Jura ou tout simplement ma région d’origine : le Lot et plus particulièrement la région de Figeac.

Il est évident que les grands espaces ont nourri vo-tre inspiration mais cela ne suffit pas pour prendre un crayon ou un pinceau.

Parallèlement à mon amour pour la nature, je dessi-nais. J’étudiais les grands maîtres comme Ingres, Gé-ricault et leurs techniques. Après avoir eu mon bac-

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calauréat, je décidais à 17 ans, de m’inscrire aux Beaux-arts de Paris. Alors que mon dossier artistique était accepté, mon dossier admi-nistratif fut refusé. J’étais tellement dépitée que je décidais de ne plus jamais toucher à un crayon. Je de-vins donc secrétaire de direction d’un très grand groupe en recher-che pharmacologique à Paris. Les années passèrent. À 27 ans, un de mes amis m’offrit un coffret de peinture à l’huile et un carton en-toilé. Ce fut le déclic ! Je découvrais la couleur, les pigments et les in-finies possibilités qui s’offraient à moi. Mon tout premier tableau fut dédié à mon cheval de randon-nées : Jason. Depuis ce temps, je n’ai jamais plus cessé de créer. J’ai testé, petit à petit, toutes les tech-niques artistiques possibles : pas-tels secs ou gras, acrylique, crayons de couleur, fusains… et bien sûr l’huile. Avec le recul, je ne regrette absolument pas de ne pas avoir fait les Beaux-arts. J’ai pu ainsi me for-mer comme je l’entendais, à mon rythme, sans influence extérieure, sans préjugé, sans a priori vis-à-vis de telle ou telle technique. Plus j’avançais dans mes découvertes et plus je me complaisais à faire de l’hyperréalisme. La trentaine passée, je quittais Paris pour m’ins-taller dans la région natale de ma mère : le Lot.Lors de mes débuts artistiques, j’ai eu de nombreux détracteurs. J’ai été refusé dans de nombreuses ex-positions d’art contemporain et as-sociations. J’étais un peintre géné-raliste comme beaucoup d’autres et je ne comprenais pas ces refus. Je faisais de l’art hyperréaliste, tout simplement. Combien de fois, n’ai-je pas entendu “Mais à quoi cela sert-il de faire un ta-bleau qui ressemble à une photo-graphie. Autant agrandir une pho-tographie.” Toutes ces personnes oubliaient une chose : l’énorme travail de recherche qui se cachait derrière chaque tableau. Recher-che du sujet, de la lumière, et sur-tout de l’exactitude des traits, des attitudes. Et puis, il y avait aussi la

maîtrise de la technique artistique et le challenge que cela représentait et que cela représente toujours. Parmi les nombreux paysages et portraits de personnes que j’avais réalisés, il y avait quelques tableaux animaliers. Un jour, à quelques kilomètres de chez moi, une association organisa une exposition d’art animalier. J’y rencontrais une aquarelliste belge, Odette Godfroid, qui m’encouragea et qui surtout devint mon amie. Elle me don-na quelques noms de salons et d’expositions animalières.Internet, et son ouverture sur le monde, vint révolutionner ma vie d’ar-tiste. Je suis devenue membre de la Society of Animal Artists de New York. Cette organisation internationale qui regroupe quelques centai-nes d’artistes à travers le monde dont Robert Bateman, Guy Coheleach ou encore Kent Ullberg, n’a qu’un objectif : promouvoir l’excellence de la peinture animalière. En 2008 et 2009, mes œuvres ont été sélection-nées pour le National Tour de la SAA. Je suis également devenue mem-bre de la Marwell International Wildlife Art Society en Angleterre. Cette

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organisation réalise chaque année la plus grande exposition d’art animalier en Europe.En 2009, deux de mes tableaux ont été sé-lectionnés pour le concours international de la BBC “Wildlife Artist of the year” et un de ces tableaux y a reçu un “commended” Award. Deux années de suite, j’ai participé à l’exposition de la David Shepherd Wildlife Foundation à la Mall Gallery de Londres pour l’élection de l’artiste de l’année. Un de mes tableaux a été finaliste. Cette exposition a pour but de récolter des fonds pour la sau-vegarde des mammifères en voie de dispari-tion. Sur les ventes, 50 % sont reversées à la fondation.

Si vous excellez en peinture, vous excellez aussi en sculpture, pourtant ce n’est pas du tout la même discipline.

Après avoir dessiner et peint les animaux, il m’est venu tout naturellement l’envie de les sculpter. J’ai commencé par réaliser la tête de mon chien en terre. Cette matière douce m’a permis de me familiariser avec le mode-lage. J’ai ensuite fait quelques sculptures en pierre pour enfin me tourner vers le bronze. Je réalise pour mes clients des sculptures “sur mesure” de leur animal de compagnie. Je travaille alors sur la base de dizaines de photographies. J’étudie les moindres détails. Mes clients sont impliqués dans le processus de création. Ils me servent de guide car, qui mieux qu’eux, pourrait me fournir tous ces renseignements qui feront la différence : un port de tête, des caractéristiques physiques et toutes les petites choses qui font de leur animal un être unique. J’aime ce travail de collaboration.Sculpter les animaux sauvages me passion-ne également. Je me documente, regarde autant de films, documentaires que possible pour étudier l’anatomie de l’animal. Je vais aussi sur le terrain pour photographier les animaux dans leurs milieux naturels. Pour les animaux plus exotiques ou peu communs à l’état sauvage, je me rends dans des parcs ou des zoos pour me rendre compte de visu de leurs proportions. Il en résulte des milliers de photographies.

Et cela vous a amenée naturellement à la photographie.

Être naturaliste permet d’étudier l’animal dans sa globalité. Ce qui est primordial pour le représenter. La photographie est un outil très utile. Lorsque je pars en vadrouille dans la nature, je ne me déplace jamais sans mon appareil photo. Il me permet bien souvent

de saisir des moments de vie, des instanta-nés de la vie sauvage. J’ai une grande admi-ration pour les papillons. Depuis quelques années, je les photographie en vol – exercice difficile mais tellement enrichissant. Cela m’a permis d’appréhender la lumière d’une cer-taine manière, d’apprendre à me déplacer sans déranger la nature qui m’entoure. Ainsi, j’ai pu approcher des chevreuils, des oiseaux ou des écureuils à quelques mètres sans les faire fuir. Ces moments-là sont des grands moments de bonheur, uniques et précieux à mes yeux. L’Agence Naturimages diffuse mes photographies, plus particulièrement celles liées à mon jardin qui est pour moi un havre de paix et qui est aussi une grande source d’inspiration.

Il semblerait qu’une bonne fée se soit pen-chée sur votre berceau car vous cumulez les dons en ayant aussi une main verte.

Mon jardin de près de 4 000 m2 est complè-tement naturel et a une particularité. Je ne l’arrose jamais. À l’heure actuelle, il est pri-mordial d’avoir une vision différente du jar-din et de la manière de l’appréhender si l’on veut y recevoir le maximum de biodiversité. Aujourd’hui, il accueille près de 800 plantes plus ou moins résistantes à la sécheresse ou sauvages. La faune y est bien présente. En 2007, il est devenu refuge LPO (Ligue de pro-tection des Oiseaux) car j’ai pu y recenser plus de 60 espèces différentes qui vivent à demeu-re, y font une halte pendant leur migration ou qui, tout simplement, viennent y trouver de la nourriture. J’ai adhéré au programme “Jardin de Noé”, mis en place par le Muséum national d’Histoire naturelle de Paris. Le fait que mon jardin ait été primé au niveau départemental lors des concours des maisons fleuries m’a incitée à l’inscrire à l’association des Parcs et Jardins de Midi Pyrénées. Cette année, pour la première fois, je l’ai ouvert au public lors des manifestations nationales “Rendez-vous au Jardin” et “Les jardiniers de France”. De nombreuses personnes ont été surprises de voir ce que l’on pouvait obtenir en cultivant un jardin de façon naturelle et surtout sans eau. En 2010, un livre “Le Jardin de Jammary” viendra soutenir ma vision du jardinage. Un jardin doit être un lieu vivant et évolutif. Je pense qu’il est du devoir de chacun d’œuvrer à son échelle pour la sauvegarde des espèces ou la préservation de la nature. Il n’est pas besoin d’aller loin pour cela. Commencer par son petit lopin de terre, si l’on en a un, est im-portant. Les mentalités doivent évoluer dans le bon sens.

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L’écriture et l’Art sont deux disciplines complémen-taires et cela se confirme avec vos projets.

Je travaille actuellement à l’illustration d’un livre qui s’intitule “Sur les pas des ours : comprendre et proté-ger” qui est écrit par une passionnée, Geneviève Ha-melin, aux Éditions Cheminements. Il sera le premier d’une collection destinée aux jeunes, consacrée aux espèces menacées de disparition. Ce livre est parrainé

par l’IFAW, Fond International pour la protection des animaux et préfacé par le professeur Valentin Pazetnov qui œuvre en Russie à la protection des ours bruns et à la réintroduction des oursons orphelins. J’aide éga-lement certaines associations de protections animales à récolter des fonds en mettant en vente certaines de mes œuvres à leur profit. Je soutiens actuellement l’as-sociation Kalaweit en réalisant une cinquantaine de portraits de singes. Ces portraits feront l’objet d’une

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exposition fin 2010 puis seront mis en vente. Kalaweit vient en aide aux gibbons captifs d’Indonésie (mais pas seulement) et lutte contre la dé-forestation à Bornéo et Sumatra. Son but est, bien sûr, de créer des réserves dans la forêt primaire où les animaux seront réintroduits mais également, de travailler avec les populations loca-les pour pérenniser les actions entre-prises. La forêt indonésienne est me-nacée par les grandes exploitations de palmiers qui ravagent tout, dans le seul but de produire l’huile de palme. Celle-là même que nous retrouvons dans la composition d’innombrables produits de consommation de no-tre vie quotidienne (savon, gâteaux secs…).En tant qu’artiste animalier, il me paraît normal de s’impliquer dans la sauvegarde de la nature. La nature est notre Muse…

Pour terminer cette interview nous vous proposons un portrait chinois. Si vous étiez une saison :

Sans hésiter, l’automne. C’est ma sai-son de naissance. J’aime l’automne parce que la nature se prépare à af-fronter l’hiver. C’est un combat pour la survie. J’aime les couleurs, les lumiè-res et les atmosphères spécifiques à cette saison.

Un animal ?

Difficile de répondre : un cheval sau-vage probablement. Le cheval sau-vage symbolise pour moi l’endurance, la liberté, les grands espaces. Mon plus beau souvenir de cavalière, c’est d’être sur mon cheval de randonnée au grand galop dans les champs de lavande, entourée de milliers de pa-pillons.

Une légende ?

La légende du Dreamcatcher, légende indienne. Cette légende nous fait en-trer dans la symbolique des rêves, des actions bonnes ou mauvaises envers les forces de la nature et envers les hommes.

Un végétal ?

Un églantier. Ce rosier sauvage pousse partout et est beau toute l’année. Il se couvre de milliers de fleurs au printemps qui servent de réservoir de nourriture aux insectes butineurs puis, ensuite, chaque fleurs donnent un fruit qui a son tour apporte de la nourriture aux oiseaux pendant l’hiver. Comme chaque plante, il a son rôle à jouer dans le cycle parfait de la nature.

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Don’t let me die Huile sur toile - 50 cm x 70 cm

Retrouvez Laurence Saunois sur www.laurencesaunois.com