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    LUNIQUENECESSAIRE 37

    Connaissance de ce quipour lhomme, est ncessaire

    au cours de sa vie, de sa mort,et aprs sa mort,

    Quil nest donc pas utile de se soucierde la frivolit du monde, et quil est bonde se consacrer lunique ncessaire.

    par le vieillard

    Jan Amos Comeniusoffert au monde pour sa mditation, lge de 77 ans.

    Traduit du Latin partir dela version de1668 dAmsterdam (Apud Christophorum Cunradum

    M DC. LXVIII).

    Trence : Plus nous avanons en ge, mieux nous comprenons toutes choses.

    Platon:Toute connaissance, sans la connaissancedu bien le plus lev, est plus nocive quelle nest bnfique...

    Dmocrite:Le manque de la connaissance du meilleurest lorigine du mal.

    Dieu dit dans Ose 4:6 :Mon peuple est dtruit, parce quil lui manquela connaissance.

    Christ dit (Luc 10 : 42) :Une seule chose est ncessaire ! Marie a choisila bonne part, qui ne lui sera point te.

    Avant-Propos

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    Deux ans avant sa mort, en 1668, Jan Amos Comenius dlivra au monde ce testament spirituel. Il avait 77ans et terminerait bientt sa vie si agite Amsterdam, o Laurens De Geer, dont la famille lavait depuis longtemps

    protg, lui permettait de vivre sans trop de soucis financiers. Il avait peu de besoins et vivait lui-mme autant quepossible du strict ncessaire. Sa parole avait toujours t en harmonie avec ses actes.

    N dans une communaut spirituelle libratrice, il en devint assez rapidement le dirigeant, puis fut charg par

    J.V. Andreae de prendre la direction de la deuxime vague de la Rose Croix du XVIIe sicle. Il est donc de faonparfaite un envoy de la Fraternit Universelle dont les uvres doivent tre connues par tout chercheur de vrit.

    Dans la dernire partie de sa vie, son orientation fut encore plus spcifiquement spirituelle. Son uvremajeure, qu'il n'eut d'ailleurs pas le temps de terminer, est la Consultation Universelle pour le redressement deschoses humaines. Cette uvre est encore trs actuelle, puisque la vision intemporelle qu'il y dveloppe est encoreinaccomplie ou compltement dtourne, en particulier sur les plans spirituel, pdagogique, philosophique, et

    politique, dans le sens suprieur du terme - vie de la cit oriente sur le dveloppement de lme spirituelle.

    Mais ce petit ouvrage, un des plus concis de Comenius, rsume la sagesse laquelle il est parvenu... Il vamme jusqu sy excuser davoir trop particip aux affaires du monde, ce qui se conoit si, comme Rudolf Steiner,on pense quil est la rincarnation dun mage qui, en son temps, stait oppos Mani. Sa sphre de vie ternelle auraitalors t habite par une personnalit trop humanitariste en conflit avec lenseignement universel.

    Dautre part, quand on ralise que Jan Amos Comenius visait ici son activit surtout pdagogique (et par consquentpolitique), on se rend compte quel point un norme malentendu la accompagn sa vie durant et surtout dans lessicles qui suivirent. De nos jours le peu de gens qui connaissent Comenius lassocient justement cet aspect ducatif,et passent compltement ct de lessentiel : une clatante lumire spirituelle clairant encore ceux qui le veulentvraiment.

    Ce qui nous interpelle directement et personnellement dans ce petit livre, cest son intense simplicit, son bon sens, etsa force rvolutionnaire, partir du moment o nous en faisons quelque chose de vcu et non un nouveau sujet dethse.Rappelons ici ladage hermtique : Les dieux sont des hommes immortels, les hommes des dieux mortels.Comenius nous invite ici devenir des hommes et des femmes vritables, dignes de ce nom, et nous en montre lechemin, quil a lui-mme parcouru...

    Actualit de la vision de Comenius.-------

    La vision de Comenius sapplique particulirement notre poque, par de nombreux points indiqus dans ce livre etaussi dans la Consultation Universelle.... Nous aurons loccasion de nous en inspirer, surtout dextraits du derniervolume (le septime) de cet Opus Magnum, la Panorthosia, dont nous avons pu nous procurer la version en anglais.

    Ce mot, un nologisme grec quasiment intraduisible, voque la justesse, le redressement, la rectification, en un sensuniversel.Or Comnius, en particulier dans sa Consultation Universelle pour le Redressement des Choses Humaines , prsenteune vision trs actuelle dexigences parfaitement applicables notre temps. Cet ouvrage nest pas encore traduit enfranais. Il en existe des parties traduites en anglais, en allemand, en japonais, en italien, mais rien en franais, si cenest des passages insrs dans des tudes sur Comenius. Nous esprons bien entendu le jour proche o de courageuxtraducteurs, dsintresss et rellement motivs, combleront cette lacune.Son projet pdagogique spirituel, quil tenta de concrtiser aussi bien en Pologne, en Sude, en Angleterre, quenHongrie, fait partie de ce projet beaucoup plus vaste de Rforme gnrale des affaires humaines, sur une base,rptons-le, purement spirituelle. Des bribes de ce projet furent rcupres, videmment trs mal comprises, par desinstitutions telles que lONU ou lUNESCO. Son objectif est, et reste universel : Rtablissement de l'tre humain et detout ce qui le concerne, sappliquant tous et partout Dans ce sens, il devance largement les ides sociales les plushardies de notre temps. Viser un rtablissement rellement universel est pour lui essentiel, incontournable, mais ilfaut unir les efforts individuels de tous. Le systme spirituel expos dans lUnique Ncessaire ainsi dailleurs que dansla Pampaedie (nologisme traduisible peu prs par lide : systme universel dducation pour tous et partout), fait

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    dmontre chaque jour sa corruption, tout dveloppement suprieur semble impossible dans le cadre actuel. Bien peuvoient et reconnaissent la vracit des faits, et sont prts en tirer les consquences. Que va-t-il donc se passer ?De grands bouleversements auront lieu, cest inluctable. C'est malheureusement le chemin le plus court La coupeest pleine, Ceux qui travaillent d'arrache-pied au renouvellement intrieur et extrieur de l'humanit, en commenant

    par eux-mmes, ne le souhaitent videmment pas, mais l'tat de conscience actuel de l'humanit l'obligeraprobablement passer par les douleurs de l'enfantement. Ainsi sera rendu possible un nouvel tat d'tre latent en

    chacun de nous. Plus nombreux seront ces pionniers, moins dures seront les souffrances de l'humanit pour passer lecap. Il est donc du devoir de tous les individus conscients de consacrer leur vie ce travail. Tout est l, il fautseulement le mettre en uvre.Comenius tait le dirigeant de lEglise de lUnit des Frres, puis J.V. Andreae lui confra la direction de la deuximevague de la Rose-Croix du XVIIe sicle. Or, notre poque, le Lectorium Rosicrucianum, ou Ecole Internationale de laRose-Croix dOr, joue peu prs le mme rle, se rclamant dailleurs des mme racines. Son fondateur, M. Jan vanRijckenborgh, a aussi crit une littrature assez importante. Un de ses livres, Le Dei Gloria Intacta (Editions duSeptnaire, Tantonville 54116) paru peu aprs la deuxime guerre mondiale, reprend, par exemple dans son avant-

    propos, la terminologie de la Rose-Croix du XVIIe sicle.Quiconque a un tant soit peu tudi le XVIIe sicle reconnatra sans peine la reprise du style et de nombreuses formulesintroduites par Jean Valentin Andreae dans son Appel de la Fraternit ou Fama Fraternitatis . Celui-ci joua ungrand rle dans la vie de Comenius, comme nous le verrons plus loin.Cette exploration de la pdagogie thrapeutique spirituelle moderne, laquelle Comenius nous incite, implique que je

    reprenne mon compte cet avant-propos. Nous le voyons dj au dbut de ce livre, LUnique Ncessaire, aucunredressement profond et srieux de lhumanit ne peut ni ne pourra se faire tant que les trois aspects, corporel,psychique et spirituel de lhomme, aussi bien individuel que social ne sont pas srieusement pris en compte.Dans un autre ordre dides, jaimerais aussi faire allusion, puisque la dimension pdagogique est en quelque sorte trs

    prsente chez Comenius, un petit texte de Victor Hugo assez mconnu, mais pourtant rvlateur :La Libert de lEnseignement (tir de lAvenir du dimanche 9 octobre 1904)La cration s'offre l'tude de l'homme. Le prtre dteste cette tude et tient la cration pour suspecte. La vrit latentedont le prtre dispose contredit la vrit patente que l'univers propose. De l un conflit entre la foi et la raison. De l, sile clerg est le plus fort, une voie de fait du fanatisme sur l'intelligence.S'emparer de l'ducation, saisir l'enfant, lui remanier l'esprit, lui reptrir le cerveau, tel est le procd ; il est fortredoutable. Toutes les religions ont ce but : prendre de force l'me humaine. C'est cette tentative de viol que la Franceest livre aujourd'hui. Essai de fcondation qui est une souillure. Faire la France un faux avenir : quoi de plusterrible ? L'intelligence nationale en pril ; telle est la situation actuelle.

    L'enseignement des mosques, des synagogues, des presbytres est le mme ; il a l'identit de l'affirmation dans lachimre ; il substitue le dogme, cet empirique, la conscience, cet avertisseur. Il verse l'imposture dans la candeur de la

    jeunesse, et, si on le laisse faire, il en arrive ce rsultat de crer chez l'enfant une pouvantable bonne foi dans l'erreur.Abrutir est un art. Les prtres des divers cultes appellent cet art libert d'enseignement. Ayant t eux-mmes soumis la mutilation de l'intelligence, ils voudraient pratiquer cette mutilation aprs l'avoir subie. Un castrat faisant l'eunuque :cela s'appelle l'enseignement libre.Victor Hugo

    On pourrait dire de nos jours la mme chose de lenseignement dEtat, mon exprience personnelle le confirme. Celaest un peu svre et potique, dans le style de notre pote national, mais je crois que malgr son orientation purementspirituelle, notre Jan Amos Komensky naurait pas dsavou cet appel la conscience. Nous nous voyons ici placentre des visions et des points de vue apparemment divers et opposs dans leur complexit. Apprenons ici avoir

    plusieurs points de vue la fois, devenant ainsi riches comme la Nature elle-mme.Notre point de dpart est double ; comment approcher le monde en tant qucole dexprience et en mme tempscomment lapprocher en tant que apprendre le quitter, maison de transit.Le monde est une cole et finalement un laboratoire alchimique. Les puissances spirituelles, communment appelesDieu, ont donn cette possibilit lhomme. Trois livres en sont les livres sacrs : le livre de lhomme, le livre dumonde, et le livre de Dieu. Comenius se rfre absolument cette prsence inconnue et inconcevable, au cur de touttre humain. Cette voix divine que personne nentend vraiment, mais que certains pressentent et mme parfoisressentent sous forme dune indfinissable nostalgie. Cette vision pour lui est fondamentale, il btit tout sonenseignement sur elle.Ce livre de la Nature, doit mener lhomme vers le livre de lhomme, passant de ce que Comenius appelle la Physica, la Metaphysica, puis lHyperphysica (Via Lucis, en cours de traduction) Il pourra ainsi acqurir la sagesse,lamour et la force de Dieu. Dans ce contexte, quest-ce quune cole ? Elle se dfinit comme une communautdhommes ou de jeunes qui soccupent de comprendre et dapprendre les choses vraiment utiles.Voici ce quen dit Comenius, dans Le Labyrinthe du Monde et le Paradis du Cur, plus prcisment dans ladeuxime partie, Le Paradis du Cur, montrant lorientation de lhomme veill, donc de celui qui peut enseigner :

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    On doit apprendre connatre Christ seul (en tant que force de l'Esprit manifeste - (N.D.T.)-(la Bible, esprit duNouveau Testament)Tu as observ comme les rudits essayaient de comprendre toutes choses. Que le sommet de ton tude soit de m'tudierdans mes actes, et d'admirer comme toutes choses sont gouvernes par moi, et toi aussi tu trouveras l bien plus matire rflexion que tous ces rudits, et cela dans un bonheur ineffable. A la place de toutes les bibliothques, dont la lecture

    procure un travail sans fin, de peu de profit, et bien souvent du mal, toujours de la lassitude et de la perplexit, je tedonne ce livre unique dans lequel sont dposs tous les arts libraux. L ta grammaire consistera en une contemplationde mes paroles ; ta dialectique sera ta foi en elles ; ta rhtorique, prires et soupirs ; tes sciences, l'examen de mesuvres ; ta mtaphysique, la dlectation en moi et en les choses ternelles ; ta mathmatique, le compte, la pese et lamesure de mes bndictions, et d'autre part, de l'ingratitude du monde ; ton thique, mon amour qui doit tre la rgle deton entire conduite envers moi et envers ton prochain. Mais cherche en tous ces arts, non tre vu des hommes, mais te rapprocher de moi. Car ma lumire n'illumine que les curs humbles.Christ, le meilleur mdecin,

    Tu as observ parmi les mdecins leur qute de remdes divers pour la prservation de la sant et la prolongation de lavie. Mais pourquoi devrais-tu t'inquiter de la dure de ta vie ? Demeure-t-elle en ton pouvoir ? Tu n'es pas entr dansle monde volont, et ce n'est pas toi qui dcideras de le quitter, car ma providence dtermine ces choses. Assure-toidonc que tu vis bien, et je m'occuperai de la dure de ta vie. Vis seul et sincrement selon ma volont, et je serai ton

    mdecin, en vrit je serai ta vie et la longueur de tes jours. Car sans moi, la gurison mme est un poison, et quand jele commande, le poison mme doit servir de remde. C'est pourquoi recommande-moi ta vie et ta sant et n'y consacreplus aucune pense.Voici quelle doivent tre les maximes de ta loi : n'envie la proprit de quiconque, mais laisse chacun la sienne et

    partage avec ceux qui en ont besoin ; satisfais toutes tes obligations matrielles, rends service autrui et considre ceservice comme une dette ; pour maintenir la paix abandonne tout, mme toi-mme ; si quelqu'un veut prendre tonmanteau, abandonne-lui aussi ta tunique, et s'il veut te frapper sur une joue, tend lui aussi l'autre. Voil mes textes deloi. Si tu les observes, tu es certain de prserver la paix.La religion du Christ

    Tu as observ dans le monde comme les hommes s'agrippent leurs crmonies religieuses et se querellent leur sujet.Que ta religion consiste me servir paisiblement, libre des crmonies, car je ne les exige pas de toi. Quand tu me sers

    comme je te l'enseigne, en esprit et en vrit, ne te dispute avec personne propos de religion, mme si on te traited'hypocrite, d'hrtique ou d'autre chose. Attache-toi tranquillement moi et persvre dans mon service.

    L'autorit du royaume de Christ

    Parmi les dirigeants et administrateurs des socits humaines tu as observ comme les hommes aiment se pousser enavant aux premires places et diriger les autres. Mais toi, mon fils, tant que tu vis, cherche la place la moins leve etdsire obir, non commander. Il est plus facile, plus tranquille et plus confortable de rester la dernire place qu' la

    premire. Si tu souhaites diriger et commander, dirige-toi toi-mme : A toi je confie ton corps et ton me, au lieu d'unroyaume. Tu as l autant de sujets qu'il y a de membres du corps et d'impulsions de l'me ; cherche les contrler afinque tout soit bien. Mais si par-dessus cela ma providence se plat te confier quelque chose de plus, soit obissant etfais fidlement ce que je te commande, non en vertu de ta propre inclination, mais de mon appel. Essaie maintenant de prouver ton hrosme dans ta lutte contre eux : c'est dire le dmon, le monde, et tes propres

    dsirs charnels. Garde-toi contre ceux-ci du mieux que tu le pourras ; carte les deux premiers et frappe et tue ledernier. Si tu t'acquittes vaillamment de cette guerre, je te promets en vrit que tu obtiendras une couronne plusglorieuse que le monde ne peut t'en offrir.

    Pourquoi chercherais-tu d'abondantes richesses ? Pourquoi les dsirerais-tu ? Les besoins de la vie sont peunombreux, et c'est moi qui m'occupe d'y subvenir pour tous ceux qui me servent. Par consquent cherche plutt rassembler les trsors intrieurs, l'illumination et la pit, et toutes ces autres choses, je te les donnerai par surcrot. Carles cieux et la terre seront tiens par droit d'hritage, je te l'assure. Et ces plaisirs ne pourriront pas et ne t'opprimeront

    pas, mais te procureront un bonheur ineffable.L'unit la plus chre

    En ce monde, les hommes cherchent de la compagnie ; mais toi, vite toute agitation, et cultive la solitude. Lacompagnie n'est qu'une incitation, soit au pch ou aux choses superflues, l'oisivet ou au gaspillage d'nergie. Car necrains point, tu n'es pas seul, mme si tu devais tre seul. Car je suis avec toi, et tu peux communier avec moi et la

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    dcouvrent, le discutent, le fassent, le rptent, sans se relcher, par leur effort propre, dosant les efforts, tudiant lesrsultats - ne laissant au pdagogue que le rle de contrler si ce qui doit se faire se fait, de la faon adquate.Soutenant llve, lencourageant, et laissant la libert de lchec. Car il est ncessaire que llve trouve par lui-mmele pourquoi de lchec sans que celui-ci soit systmatiquement considr comme une faute. Lchec est en effet,comme la russite, toujours une exprience dont on peut extraire la leon.LHomme-personnalit actuel, dot de la conscience de sa propre vie, avec la conscience de son ego, de son moi, o

    interviennent le corps et le pouvoir mental, ce que lon appelle son cur et son me est donc malgr tout linstrumentde sa propre rvolution, de son propre renouvellement. Il sagit l de la reconstruction de lHomme Parfait . A partirde l, lhomme a reconnu sa conscience, et se doit de la dfendre pied pied ! Et le jeune devra aussi devenir sensible la notion de limportance de son corps et de sa pense, en tant quinstrument de la conqute de la conscience du petitmonde quil reprsente. Le jeune comprend trs vite limportance de sa personne, (son vhicule), et alors il nest plusquestion pour lui de malmener celui-ci. Disparaissent alors tous les problmes actuels de drogue, dalcoolisme, deviolence, etc...Le pdagothrapeute est alors confront des problmes tels que : comment faciliter laccs la conscience de lalimite (prise de conscience de ses limites) ? Lenfant lui en donne souvent loccasion. Oui Monsieur cest vrai, mais

    je ny arrive pas, je suis toujours mauvais, etc... Oui Monsieur, mais comment peut-on tre plusieurs endroits la fois.Oui Monsieur, mais avec mon corps et ma pense, je dois manger, boire et dormir, que se passe-t-il quand je dors, je necontrle plus rien alors, etc... Ladolescent pose souvent une multiplicit de questions amenant lducateur guidervers la comprhension de la conscience de la limite, et... alors tout commence.

    Des lves disent : oui, cest vrai, je ramne tout moi, et pourtant dans lhistoire, jai bien vu que de grands hommesdmontraient un sens du sacrifice intense et jai mme cru quils taient plus que des hommes. La stupidit de lespritde vnration absurde et destructrice des idoles (chanteurs ou sportifs), peut se transformer en puissance de vision duhros, comme chez les Grecs, le demi-dieu, comme Hracls. Cest alors que le pdagothrapeute pourra faire appelaux mythes de tous les temps, montrant comment il est racont, dans les mythes, lgendes, contes et histoires le passagede ltat de conscience-moi(gocentrique) ltat psychique spirituel au service du Tout, et les prmisses de cet tat

    psycho-spirituel prsentes en chacun de nous. L encore, il faut laisser dcouvrir lintrieur de chacun par son propreintrieur.Les histoires et lintrospection montreront alors les problmes affrents la conscience de la limite et parfois lesmoyens de les rsoudre, moyens toujours situs dans la sphre de lme et de lesprit, intervenant jusque dans lamatire. Tout cela modifiera considrablement notre conception de lOrientation sociale et pdagogique, le travailintrieur primant sur tout, et toute forme de mtier ou dapprentissage ne pouvant tre alors quun lment de plus danslapprentissage de lternit.

    Il deviendra clair alors quil nest plus question de croire, mais de savoir par exprience vcue. On en arrive desnotions de possession intrieure, au mme titre que de devenir un homme ou une femme vritable dans et par la forcede lamour : il ne sagit plus de croire au sens habituel du terme !

    Nous avons dit que nous voulions partir de lhomme parfait. De tout temps, il a exist des hommes qualifis de parfaits,denvoys, dhommes-dieux ou dautres noms suivant les poques, les civilisations. Par exemple les parfaits Catharesou Moraves, les Pater chez les Mithriaques, etc...Ils nous semblent peu nombreux, mais nous ne connaissons pas tout. Leur caractre principal est en effet la discrtion.Ils ne se font connatre que lorsque cela est jug bon, indispensable. Et cela correspond un plan universel. Les librsselon lme, cela est certain, ceux qui ont accompli le processus de la gurison authentique, rgnration sur le plan

    psychospirituel, utilisent souvent des vhicules dont le plus bas niveau de densit sapparente ce que nous appelonsnergie ou vitalit.A moins quil soit, comme nous lavons vu plus haut, jug bon, dans le cadre dun plan cyclique universel pour lagurison de lhumanit quun ou plusieurs dentre eux sincarnent, adoptent un corps de chair et de sang, ce qui

    correspond un inexprimable rtrcissement de conscience, sacrifice incommensurable au service du tout. Ils naissentalors dun homme et dune femme, et aprs avoir rapidement effectu une perce de conscience, enseignent lhumanit le chemin de la Gurison absolue. Bien entendu, ils descendent en quipe, des domaines de lternit.Dans les domaines de lespace-temps, ils peuvent tre disperss ou concentrs. Et ils forment eux-mmes des hommes

    parfaits. Cest l le but ultime de toute pdagogie ...Car la premire tape pour chacun dentre nous cest de parvenir cet tat de conscience, afin nous-mmes de

    participer au grand plan. Et le jeune comprend cela trs vite !Donc lhomme parfait sorganise de faon tre le plus efficace pour collaborer au plan de devenir humain vritable,aussi bien selon les aspects naturels, psychiques, que spirituels, afin de toucher le maximum dindividus. Il tente ainside crer les meilleures conditions pour une libration finale de lhumanit entire. Lhomme parfait utilisera lesmoyens mis sa disposition dans le temps en question. Vous ne pouvez pas vous imaginer quel point les enfantscomprennent ces choses et cherchent, pleins denthousiasme, comment ils pourraient aider. Il faudra rapidement leurmontrer quen plus de tout ce quils peuvent imaginer, le meilleur moyen est encore pour eux de devenir eux-mmesParfaits !Comenius tait un de ces hommes parfaits

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    Au dbut du XVIIe sicle se constitua le Cercle de Tbingen, dont les chercheurs connaissent surtout Jean ValentinAndreae, auteur des trois textes fondamentaux de la Rose-Croix classique, alors que les deux autres fondateurs de ceCercle en furent en vrit les instigateurs et les inspirateurs vritables. Il s'agit bien entendu de Tobias Hesse et deChristophe Besold. Comme toute autre priode de l'histoire, il fut l aussi, comme de nos jours d'ailleurs, possible dese relier par l'abngation et la disparition du moi, ce qui est vritablement l'essence de l'homme et la fois letranscende. Ces textes bouleversrent le monde europen de l'poque (on dnombre plus de trois cents livres crits en

    rponse ces manifestes, ce qui est proprement inimaginable pour un temps o ldition ne connaissait pas ledveloppement actuel : mme aujourd'hui, ce serait dj le symptme d'un franc succs de librairie). La puissante forcespirituelle qui prit forme ce moment avait t depuis longtemps prpare, s'inscrivant dans la ligne du Gnosticisme,du Manichisme et du Catharisme.Le Manichisme toucha des millions de gens, de lAfrique la Chine.Le Catharisme permit une civilisation fantastique, o la femme, fait remarquable pour lpoque, tait lgale delhomme, de se dvelopper au sud de la France.Comenius eut trs tt connaissance des manifestes publis entre 1614 et 1616, probablement Heidelberg ou Herborn, au cours de ses tudes en Allemagne. Connu surtout comme pdagogue, il tait de la mme trempe que cesinstructeurs spirituels. Il reut de la plume mme de Jean Valentin Andreae le flambeau qui faisait de lui le continuateurde la Fraternit de la Rose-Croix pour cette poque. Et les projets de la Fama Fraternitatis, (l'Appel de la Fraternit,ditions du Septnaire, Tantonville, 54116), faillirent d'ailleurs se raliser sous la forme d'un Collge d'hommesillumins. Comenius, par le biais de la Royal Society, rvait d'en faire le point de dpart d'une vritable rvolution non-

    violente l'chelle mondiale. Essayons, en vue dune application moderne pratique, de montrer les aspects tant pdagogiques, psychiques que spirituels, et les pripties qui menrent l'accomplissement d'un grand nombred'individus de cette poque. Nous sommes tous appels collaborer la mise en place d'une vritable ducation del'tre Humain, dans un absolu renversement des valeurs, plus ou moins brve chance, parce que c'est l le sens dela vraie volution humaine, notre poque aussi.En effet, au XVIme - XVIIme sicle, la tche particulire du Cercle de Tbingen, et donc aussi de Comenius, tait,en oprant une refonte universelle de la Connaissance aussi bien analytique que synthtique, de revivifier cetessentiel en montrant comment chacun, par une pense autonome, serait appel comprendre et raliser l'tat deconscience de l'tre vrai, en particulier pour cette poque (et bien entendu il en est de mme pour la ntre).C'est pourquoi le travail fondamental de notre ami Bohmien, Comenius, fut-il pdagogique, dans le sens o l'ducationse doit de permettre l'auto-formation, l'auto-ralisation de l'tre vrai. Il fut aussi un Homme Vrai sur tous les plans, dansla mesure o la dcouverte du monde, de la Vie et de ses lois implique une prise de conscience et une ralisation del'absolu en soi, une comprhension de l'Homme en tant que Microcosme, petit monde rsum de l'Univers. Il manifesta

    aussi un aspect purement spirituel, puisque, comme il l'crit lui-mme dans Via Lucis, cette ducation n'a de sens, aufond que pour nous faire parvenir l'Acadmie Cleste.Qu'est-ce, en fait, que l'autonomie ?Avant d'aller plus loin, nous voudrions rappeler que seules sont disponibles les traductions en franais de quatre textesde J.A. Comenius, savoir, Le Labyrinthe du Monde et le Paradis du Cur, l'Unique ncessaire, De laPrdication et La Grande Didactique. Notre recherche se base donc surtout sur des extraits, (et laide de quelquesamis latinistes) reprables dans divers livres sur Comenius, et sur ces quatre textes, dont les trois premiers taient

    jusqu peu, indisponibles en librairie.Au fond, on pourrait se poser la question : Komensky (son vrai nom) prne une orientation surtout intrieure. Iln'attribue pas l'ducation une valeur exclusivement horizontale et terrestre, mais propose au travail ducatif comme la socit tout entire de consacrer tous leurs efforts la re-formation d'un tre vrai, humain-divin. N'est-il donc pas luiaussi un de ces doux rveurs mystiques, millnariste par surcrot, et par-dessus le march, utopiste ?Eh ! Bien, Non, mille fois non ! Il suffit de se pencher un peu sur la Pampaedie, (troisime livre de l'uvre majeure de

    Comenius, La Consultation Universelle pour l'amlioration des choses humaines ) pour dcouvrir qu'il allie uneconception absolument raliste et pratique dune parfaite autonomie de l'tre, avec une orientation purement spirituelle.Il dsire que lon enseigne dans les coles non seulement lautonomie de la pense, mais aussi l'autonomie desmotions et des actes. Mais en fait, quest-ce que lautonomie ?Il sagit ici denseigner la libert individuelle de devenir un homme parfait, victorieux, possesseur du trsor. Libert dela dcision, libert que donne la connaissance et la matrise de ses instincts, tendances naturelles et aspirations

    profondes, et libert de les valuer selon lorientation choisie. Et cela en dehors de tous les dogmes tablis et idesprconues de la socit dans laquelle on vit. Chacun, comme c'tait d'ailleurs le cas dans la communaut de L'Unitdes Frres de Bohme-Moravie, devra avoir un mtier, afin de subvenir ses propres besoins. Il faut ici souligner que,dans L'Unit, aucun pasteur n'tait nourri par la communaut ; il devait donc, fait trs nouveau pour l'poque, participer la vie socioprofessionnelle du groupe. Il est intressant de dgager ici les douze points que l'on retrouve dans laPampaedie :(prcisons ici quil s'agit dune synthse adapte notre temps et non pas dun simple recopiage)

    1) Les traits qui caractrisent l'essence humaine dcrivent les rapports que l'homme entretient avec son milieu.L'homme vit dans et doit s'adapter une ralit. Il interagit avec toute la Nature, dont l'homme et les quatre rgnes

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    font partie, ainsi que l'absolu, le parfait, le dieu qui est aussi en lui. Toute crature humaine pense, dsire, veut, etcherche savoir.

    2) L'tre vrai, l'humain en chemin, cherche vivre pleinement, en bonne sant, et reprsenter quelque chose.3) Il veut et cherche tre inform de tout ce qui existe dans le monde, car les richesses du monde sont destines notre apprentissage de l'abngation et du perfectionnement total de notre tre intrieur en vue de lpanouissementgnral du monde et de lhumanit. Ceci condition dtre utilises sans chercher de profit goste.

    4) Il lui faut arriver comprendre toutes choses, leurs mcanismes, leur fonctionnement, et surtout la relationde tout avec tout. En comprenant de toutes petites choses, par le biais des correspondances, nous pouvons arriver comprendre le tout.

    5) Vivre librement, cest--dire :Vouloir et choisir les choses que l'ont sait bonnes, grce ses dcouvertes et son intuition personnelle.

    Ne pas vouloir, refuser les choses mauvaises, et disposer de tout, autant que possible, selon sa propre volont(Pampaedia, III, 11).

    6) Lhomme devra dvelopper un discernement lui permettant de savoir ce qui va dans le sens du plan dedveloppement pour le Monde et lHumanit et ce qui le contrecarre. Donc, non seulement l'Homme devra apprendre

    penser et sentir juste, mais il devra tre mis en mesure de traduire en actes ce qu'il a conu, et produire des biens etdes services. Ceci uniquement dans la mesure o il n'exploitera pas ses frres pour un profit excessif. Chacun pourradonc s'inscrire dans ce plan de dveloppement, sans chercher tirer son pingle du jeu, mais en cherchant vraimentl'intrt commun.

    Comme le dit en substance Jan Van Rijckenborgh dans le Mystre de la Vie et de la Mort, ( Editions du Septnaire,Tantonville 54116) Le Royaume intrieur ne peut se manifester que si l'Homme-dieu sait, et agit en consquence, queson tre Microcosmique (divin, spirituel, petit monde rsum de lunivers) appartient un tout plus grand, la maniredont un cosmos n'existe pas par lui seul, mais appartient un macrocosme, un rassemblement de cosmos. Sonorientation doit donc se dvelopper, non plus vers soi, gocentrique, mais vers les autres, bien entendu sur la baseapprofondie dune connaissance de Soi, s'levant la manifestation Universelle, se vouant en parfaite abngation.Grce cette faon de servir dsintresse, il se manifestera lui aussi, quoique de toute autre faon.

    7) Il acceptera laisance matrielle (comme il accepterait la pauvret) si elle lui choit naturellement :Il ne sy efforce pas de faon goste ou en exploitant autrui.8) Il est pour lui parfaitement souhaitable et lgitime de dsirer vivre en paix et dans la scurit, ce qui ne manqueraabsolument pas de se produire, si l'ducation prconise par Comenius, hros de lesprit, (et par dautres luiapparents par lesprit)se rpand, grce la paix civile et sociale. Il peut esprer que ses biens ne seront ni convoits nivols. Cela sera aussi une consquence logique du nouvel tat de vie qui se dmontrera alors. (N'oublions pas que

    Comenius vise ici les soldats et les seigneurs qui dpouillaient les paysans de leurs maigres ressources).9) De l ne peut dcouler qu'une vie honnte et donc une bonne rputation, rpondant la vritable destine

    humaine.10) Puisque l'Ecole formera tous, pauvres comme riches, hommes comme femmes, sans aucune distinction,

    quelle qu'elle soit, la lecture, l'criture et l'loquence, c'est dire l'art de prendre la parole de faon efficace, touspourront communiquer de faon valable avec tous en matrisant le langage. Ainsi pourra schanger et se transmettre lasignification profonde du but de la vie.

    11) Et tous voudront ainsi et pourront entretenir des relations humaines dignes de ce nom, pacifiques etbienveillantes, chacun se soutenant en vue du but commun.

    12) Donc l'aspiration la plus leve, (le but suprme) ira de soit et tout sera orient dans ce sens.Pour Comenius, le monde entier est un labyrinthe, un asile de fous, une prison plus ou moins subtile, et il ne fait queconfirmer ici ce que nous pouvons clairement observer de nos jours par nous-mmes. Et nous reconnaissons quuneducation philosophique et spirituelle digne de ce nom doit permettre de mettre sur le chemin de lautonomie de la vie.

    Cette ducation commence ds le foyer familial, avant mme lcole, par lexemple et latmosphre rayonne par lesadultes. Ceci est actuellement loin dtre vident pour notre sicle orient sur la course la consommation et aux

    plaisirs sans freins. Des instituts de formation de haut niveau apprennent de futurs cadres et entrepreneurs commentconditionner leurs futurs clients, et ceci est jug bon, moral ! Et tous les media participent cette mascarade. Tout lemonde doit faire comme tout le monde, et mme parmi les enfants, la libert de ne pas faire comme les autres est malvue et parfois sanctionne svrement... Il faut penser, dire, faire et shabiller comme les autres. Lautonomie atoujours, et surtout de nos jours, suppos un certain courage. Pour Comenius, la libert revient la connaissance deslois du monde et de lunivers, lois suprieures pour le dveloppement de lhumanit, et lobissance ces lois, sansrapport aucun avec celles bases sur la lutte pour lexistence et linstinct de conservation des socits et des individus.(Son ide, par exemple, quil ne faudrait plus se servir ni construire darmes nest malheureusement pas prte dtreentendue...) Lindispensable aspect d'veil la vie vritable correspondant lveil dune conscience suprieure, libre,originale, en accord avec les valeurs dcouvrir au plus profond du cur et de lme, doit faire partie de touteducation digne de ce nom. A lpoque de Comenius, ces ides taient si rvolutionnaires que les grands ministresdEurope, de Richelieu Oxenstiern en Sude, sarrachrent ses services pour rformer le systme ducatif de leur

    pays respectif. Dans le De rerum humanarum emendatione consultatio catholica (traduction provisoire :

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    Consultation universelle pour le redressement des choses humaines) ainsi que dans la Via Lucis il sadresse auxrudits, aux hommes de spiritualit et aux hommes de pouvoir, Lumires de lEurope, hommes clairs, pieux etillumins, un peu comme Valentin Andreae le fait dans son Appel (Fama Fraternitatis). Le sicle des Lumires

    pouvait commencer. Mais lhomme qui avait consacr sa vie lavnement de cette priode, en fut quasiment cart titre posthume. Ses contemporains, qui ne comprirent pas la puissance et la valeur inoues de ce travail portent, SamuelDesmarets en particulier, l'crasante responsabilit d'avoir orient l'opinion de Bayle dans une direction compltement

    ngative. En lisant son dictionnaire historique et critique, les philosophes du XVIIIe sicle sont passs ct d'un bondphilosophique, pdagogique et spirituel non ngligeable. Et pourtant, si ce projet tait rvolutionnaire, au moins autantque ceux des Ferrer, des Fresnay et des La Garanderie, il se situait dans la grande tradition hermtique, berceau de lacivilisation europenne. Le dix-neuvime sicle reconnut en lauteur de ce livre un grand pdagogue. Lhumanitclaire semble maintenant mre pour une comprhension plus juste, plus approfondie, de Jan Amos Komensky.Voyons encore les points cls non encore vraiment accomplis dans l'ducation europenne contemporaine :

    L'acquisition de la vritable autonomie et en particulier de l'autonomie de la pense renouvele. Platon l'avaitdj parfaitement expliqu en long et en large, en particulier dans la Rpublique : un homme vritable possde une

    pense spirituelle qui commande ses motions et ses instincts. Donc les actes (pitumia) et les mouvements ducur, (thumos) sont au service du Nos (penser spirituel). Or, au dpart, l'homme ordinaire, marche sur la tte .Ses penses sont domines par ses motions, et tous deux sont au service de ses instincts et de son tre animal.

    La propension dvelopper, par des moyens agrables et positifs, le got de la recherche et de l'effort pourraittre facilite par l'exploration du champ de vie humain et la comprhension des lois harmoniques l'arrire plan de

    notre Univers de secours, ainsi que la tendance au travail sur soi et la connaissance de soi. En effet l'homme est unmicrocosme, un rsum de l'Univers. Ici aussi Comenius n'a rien invent et le fronton de Delphes, dit-on, stipulaitclairement la mme chose, en tout cas cette sentence a profondment imprgn le monde grec : Connais-toi toi-mmeet tu connatras la Nature et les Dieux, c'est--dire les forces l'arrire plan de l'Univers. Au niveau du templeintrieur, les Grecs, soi dit en passant, de mme que les Egyptiens, n'ont jamais t polythistes. Par une pensesynthtique et image, ils amenaient progressivement tous les aspirants mrs pour cela la comprhension des

    principes spirituels et mtaphysiques. La conception solaire prsente dans leurs mythes prparait consciemment lavision christocentrique, dont ils savaient qu'elle suivrait.

    Puis, tous les aspects de la maturit psychique, spirituelle et matrielle, que nous ne dtaillerons pas iciTous ces points constituent aussi pour Comenius des fondements indispensables une socit qui voudrait dpasser lestade de la horde animale, ce qu'elle n'a pas encore fait, hors les cas d'un nombre proportionnellement trs restreint denos congnres.Deux objectifs sont vidents et fondent la recherche pansophique et sa reprise pour notre temps : la matrise de soi et la

    victoire sur soi, chapitres incontournables pour employer la langue de bois audiovisuelle, de toute pdagogielibratrice, aussi bien pour l'aspirant que pour l'instructeur.Commentons ici quelque peu la Prire au Pre des Lumires. Nous pourrons y observer les implicationsinimaginables d'une vritable Haute Raison par laquelle ce lutteur, hros de l'exprience intrieure et extrieure vcue

    jusque dans ses plus extrmes consquences, put en quelques dizaines d'annes, abattre pour longtemps des pans entiersd'une poussireuse mentalit scolastique se perptuant alors encore de faon virulente.L'orientation de Comenius est bien entendu purement spirituelle, et non religieuse ou mystique. Il s'agit d'emble du

    problme de l'illumination des hommes. Tout homme doit devenir clair. Cela implique bien videmment ledveloppement d'une haute raison par l'instauration d'coles chez tous les peuples, des maisons d'enseignement pourtous. Pour l'poque cela tait plus que nouveau, l'enseignement restant l'apanage d'un petit nombre de privilgis.Pourquoi parlons-nous d'une haute raison ? Laissons tout dabord la parole Comenius lui-mme, dans laDedicatio de la Via Lucis Que les objets de nos investigations soient triples ! Ils ne sont pas diffrents du monde qui nous entoure, plein de

    cratures diverses elles-mmes pourvues des formes les plus varies. Ce monde est proprement parler le grand livrede Dieu, un livre surcharg des caractres les plus divers. Pour les dchiffrer, nous sommes pourvus dorganes, les cinqsens que comporte notre nature. Ainsi donc notre monde est la premire cole o pntrent ceux qui, en vertu de leur naissance, font partie de lespcehumaine. On peut lappeler lEcole de la Nature, soit lcole physique. Pour livres et pour matres nous avons lespectacle, interprt selon les donnes de la raison, de lensemble des cratures conformment ces paroles :Demande aux quadrupdes et ils te lapprendront, aux oiseaux du ciel et ils te renseigneront. (Livre de la Naturen.d.t..)Parle la terre et elle te rpondra, les poissons des mers te le conteront. Comment ne pas reconnatre la faon dela main du Seigneur tous ces tmoignages ? (Job 12, 7/8). A cette cole fait suite une autre cole, lcolemtaphysique, diffrente en tout de la prcdente. Ici, livres et matres ne sont plus les objets de nos tudes. Non pashors de nous, mais lintrieur de nous. De toute vidence, ici seule notre Raison nous guide ou plutt limagedivine imprime dans notre esprit, dessine en caractres aussi nombreux que nos ides innes, que nos impulsions, quenos facults. Ces dernires ne cessent de nous parler. Elles nous dictent, nous enseignent, nous remuent, nous stimulent,et agissent en nous ; elles sadressent aussi bien au savant qu lignorant, au sage comme au simple, lveill commeau dormeur. Elles le font avec rectitude quand elles sinspirent dune norme droite, de travers quand on les laisse dvier

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    par rapport la norme. Pour nous faire connatre et juger ces ralits mtaphysiques, nos sens, les intrieurs comme lesextrieurs, ne peuvent rien pour nous. Nintervient que notre Raison, cette lumire ou cet il intrieur des mes.

    Nous pouvons lexprimer en termes plus contemporains : l'homme doit apprendre et comprendre progressivement tousles aspects de la ralit et donc de la Raison. Ainsi seulement une vritable autonomie, sur les plans spirituel, psychiqueou matriel, base sur la conscience de la raison pure et une pense vraiment libre, pourrait se dvelopper.Reconnaissons-le humblement : nous en sommes loin ! Et pourtant cest possible, suivant le postulat de Comenius et de

    ses amis. Nous-mmes posons ici comme principe de base : ces aspects, le spirituel, le psychique, et le matriel, dontl'humanit ordinaire n'a explor, compris et vcu, qu'une toute petite partie, peuvent tous tre expriments, et ils lesont ou le seront.Personne ne niera ici l'tat gnral du monde ! Il est, en un certain sens, encore bien pire que celui qui existait du tempsde Comenius. A part quelques progrs scientifiques, mais sagit-il vraiment de progrs, vu lusage qui en est fait ? Detoutes faons, ils correspondent une vue parcellaire de la raison et de la connaissance. Ces progrs ne sont d'ailleurs

    jamais des lments de premire main. C'est pourquoi l'introduction de cette Prire au Pre des Lumires nesurprendra personne :Voici, les tnbres recouvrent la terre et l'obscurit les peuples.Insistons ici sur un point fondamental nos yeux :

    L'erreur, d'aprs l'tude que nous avons pu en faire, aussi bien sur le terrain que dans les livres de Komensky, se situesur le plan pdagogique fondamental. A notre poque, le moment n'est pas loin, si ce n'est dj fait, o on fixera des

    objectifs socio-conomiques mondiaux, sans changer en quoi que ce soit la nature humaine, alors quelle devrait ltrede fond en comble. Et l'on parlera de paix et d'harmonie. Or toute autolibration, qui implique une auto-rvolution, ncessite un travail ducatif en profondeur qui balaye, plus ou moins brve chance, sans violence, lesracines du mal : l'gosme, la lutte animale pour la vie, et autres flaux relevant plus de la bte que de l'homme.Malheureusement, nous trouvons l encore, de faon plus ou moins implicite, les piliers de notre socit.Mais on veut crer une unit artificielle extrieure, sans s'attaquer vraiment la racine du problme, racine qui pourraittre arrache par l'individu lui-mme, et par lui seul. C'est la difficult laquelle furent confronts tous ceux quivoulaient enseigner quelque chose d'essentiel depuis l'Egypte et mme bien avant. L'Egypte avait rsolu le problmegrce son systme ducatif reli au temple, cur de la socit entire. L'organisation du temple et de l'accs lasagesse permettait l'individu en dmontrant ses aptitudes d'tre plus ou moins attir, guid vers le temple, grce latriple configuration suivante : A partir de la "vie", le candidat tait guid vers le pristyle, puis vers le temple intrieur,lui -mme comprenant deux aspects.A notre poque, de mme qu' celle de Comenius quoique un moindre degr, l'homme a en principe tous les lments

    lui permettant de prendre son destin en main. C'est pourquoi les anciennes mthodes nont plus cours.L'objectif de Comenius, comme celui de tout ducateur contemporain au sens o nous lentendons, se doit d'treuniversel. L'illumination, telle que la prsente Comenius dans sa prire au Pre des Lumires, peut trs bien s'expliquerraisonnablement. Mais ceci condition d'accepter que notre connaissance de l'homme soit encore parcellaire. Il existeune raison qui englobe la raison ordinaire. Celle-ci est bien souvent oriente sur des principes qui commencentheureusement s'effondrer, les principes de rentabilit et d'exploitation entre autres. Non seulement exploitation les unsdes autres, mais encore et surtout, et cela est une consquence logique de l'inconscience et de la courte vue purile denos pseudo scientifiques, conomistes, religieux et autres hommes de pouvoir, exploitation destructrice de notre

    plante. Il est vident qu'il ne s'agit pas de retourner l'ge des cavernes. Comme le dit Comenius, en particulier dans laPampaedie, il est urgent de faire en sorte que tous aient les moyens d'agir, de penser et de raliser dans le sens d'unevritable rvolution intrieure, d'un absolu retournement des valeurs o presque tout sera utilis, mais avec unminimum d'intelligence et de prvoyance ( l'exclusion toutefois de l'nergie atomique). Mme utilise pacifiquementet sans accident, le tripatouillage des atomes grande chelle dsquilibre dj lui seul, de faon trs subtile,

    l'quilibre de la planteComenius en matire de "science", ou autres, se place sur le terrain d'un vivant universel, d'une chelle de la vie allantde la pierre aux anges et au-del, en passant par l'homme. C'est pour cela qu'il ne pouvait accepter les conceptions

    purement mathmatiques de Descartes ou de Copernic. Pour lui, le sens des tres et des choses prime. La mthode qu'ilintroduit pour "rassembler la "vrit partout disperse" rvle une unit universelle qui se manifeste grce trois

    principes fondamentaux (la lumire, l'esprit et la matire) et par sept degrs (ou espces) de substances. On retrouve cesaspects dans l'enseignement universel. Il s'agit bien l d'une conception dynamique, vivante et en devenir. Elles'apparente la philosophie spirituelle de la nature que l'on peut retrouver chez Paracelse. Cela vit, est, progresse, semanifeste et vise l'accomplissement et au perfectionnement harmonieux du tout. Ainsi tout ne s'explique pas par lesoppositions, tout ne se rduit pas un ternel recommencement, l'univers a un sens, et "le monde est une pureharmonie" o, du plus inerte Dieu, il y a possibilit de l'veil de la conscience et de sa manifestation au service dutout.Dans ce contexte, l'ducation est un des piliers fondamentaux du travail de Jan Amos Komensky, mais cette ducation,nous l'avons vu, englobe largement ce que nous avons l'habitude d'entendre par-l. Dans lUnique Ncessaire, une

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    vision globale et synthtique de toute la vie humaine, par son objectif universel, retrouve le sens premier de laphilosophie, qute de la sagesse, et la transcende mme par ses aspects mtaphysiques.Cette faon de vivre et d'duquer aussi bien la jeunesse que l'ge adulte, comme Jan Amos l'avait trs bien compris, nemanquera pas de manifester ses rsultats, de faon universelle, car elle induira une vraie comprhension du monde, dela vie, et c'est l un des points originaux et remarquables de l'activit spirituelle, ducative et politico-philosophique ence XVIIe sicle. Il s'agit donc de favoriser l'closion de ceux qui guideront les autres, mais aussi de susciter l'autonomie

    de la comprhension et de la pense. C'est l un des points originaux et remarquables de l'activit spirituelle, ducativeet politico-philosophique en ce XVIIe sicle si perturb, o les armes catholiques soutenues par le pape dvastrenttoute l'Europe Centrale pour des raisons au fond assez videntes, mais qui se rduisent toutes une volont de pouvoir,temporel ou pseudo-spirituel.Cette universalit dmontre par Comenius, le fut aussi par dautres travailleurs spirituels, tels J.V. Andreae, voqu

    plus haut. Comenius fut non seulement un grand pdagogue, comme tous les chercheurs avertis dans le domaine del'ducation se plaisent le reconnatre aujourd'hui, mais aussi et surtout un immense philosophe et un puissant spirituel.Dans cette prire au Pre des Lumires, les points sur lesquels il insiste, par images et mtaphores, sont les suivants : 1.il s'agit d'illuminer, cest dire d'ouvrir les yeux et les oreilles de tout le genre humain, 2. de faire en sorte que le gotet l'aspiration la recherche de l'essentiel se gnralise de faon universelle, 3. de dvelopper la comprhension dumonde et de la vie et de ce qui se situe l'arrire plan des choses.

    Il faut que la multiplication d'coles permette d'effacer l'erreur et le ttonnement et de favoriser l'arrive une relle

    maturit, une relle autonomie de tous et de toutes :" Dieu, emplis la terre de ta connaissance, comme la mer est recouverte d'eau ! Fais se lever des hommes qui criventta volont dans des livres que tu puisses cependant imprimer toi-mme dans le cur des hommes. Veille ce que descoles s'ouvrent chez tous les peuples, des maisons d'enseignement pour tes enfants ! "Il s'agit donc de favoriser l'closion de ceux qui guideront les autres, mais aussi de susciter l'autonomie de lacomprhension et de la pense. Nous insistons car c'est l un point capital sur lequel nous reviendrons.Edifie toi-mme ta propre cole dans le cur des hommes ! Inspire les esprits des sages dans le monde entier, ce quisignifie une fois de plus la conjonction de l'autonomie de l'individu et de la formation de sages et de guides. Pour luil'ducation, ou lamendement, lautorvolution de tous se doit d'tre permanente et doit nous permettre de retrouver

    plus ou moins long terme l'tat d'homme vrai, l'image du crateur. Par ailleurs, il montre bien qu'elle n'est plus qu'unpieux rve idal. (Cf. Le Labyrinthe du monde et le Paradis du cur)

    Viser un rtablissement rellement universel est pour lui une chose essentielle, incontournable :Si nous n'y arrivons pas, nos efforts individuels resteront vains

    Par-l mme nous comprenons immdiatement que Comenius a une vision long terme du plan qu'il propose. Il estavant tout raliste et n'a rien, contrairement ce que certains chercheurs ont l'air de croire, d'un doux illumin utopiste,Il est donc parfaitement conscient que cette illumination du genre humain prendra du temps. Combien, il l'ignore :Mais tout ce qu'il sait c'est que ce travail doit, par del les sicles, tre entrepris et men bien. C'est pourquoi il lecommence et accomplit ce qu'il est en mesure d'accomplir.Et une puissante force spirituelle prend alors forme, depuis longtemps prpare et sinscrivant dans la lignehermtique du gnosticisme, du manichisme et du catharisme. Le manichisme, au IIIe sicle, toucha des millions degens, de lAfrique du nord la Chine. En moins de 80 ans, il civilisa la population ougoure, quasi tribale lpoque.Le catharisme, au XIIIe sicle, permit une civilisation tonnante de voir le jour dans tout le sud de la France,civilisation o la place de la femme tait lgale de celle de lhomme. Le catharisme essaima dans l'Europe entire.Cest vers 1616 que parurent les trois textes fondamentaux, manifestes de la Rose-Croix du XVIIe sicle, par JeanValentin Andreae (en fait on sait maintenant que les deux grands inspirateurs en furent Christophe Besold et TobiasHesse). Ces textes crypts, plein dallgories, bouleversrent le monde europen de lpoque : on compte plus de 300

    livres crits en rponse ces manifestes, ce qui est proprement inimaginable pour un temps o ldition ne connaissaitpas le dveloppement actuel. Comenius eut trs tt connaissance de ces manifestes de la Rose-Croix, au cours de sestudes en Allemagne, Herborn et Heidelberg. Connu surtout comme pdagogue, il tait de la mme trempe que lesauteurs de ces crits. De la main de J.V. Andreae lui-mme, il reut le flambeau faisant de lui le dirigeant de ladeuxime vague de la Rose-Croix.Et lon retrouve, notre poque, tous les points indiqus au cours de cette brve tude, dans le LectoriumRosicrucianum ou Ecole Internationale de la Rose-Croix dOr. Ses trois fondateurs, les frres Leene, et Mme Stok-Huyser, implantrent cette nouvelle pdagogie de lme et de lesprit dans un occident qui court sa perte. M. J. Leeneet Mme Stok-huyser, sous le nom de M. Jan van Rijckenborgh et Mme Catharose de Petri, crivirent une abondantelittrature disponible en franais, en librairie ou directement aux Editions du Septnaire (Tantonville 54116), site :www. septenaire.comTrois principes de base, noncs, en particulier dans le livre Via Lucis, existent ltat latent, et/ou trs malemploys, l'intrieur de chaque homme :Savoir, Vouloir et Pouvoir. (que nous pourrions actualiser en Savoir, Oser, Vouloir, Agir)

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    Ces trois facults sont prsentes en chacun, plus ou moins actives, conscientes ou efficaces. On peut les voiraussi comme les normes gnrales sur lesquelles le savoir peut s'articuler, l'aspiration la ralisation intrieure etextrieure, et les capacits gnrales qui permettront cette ralisation.

    Pour Johan Amos Komensky, il est question de ramener la source ces canaux lmentaires de la sagesse etde leur donner l'unique orientation positive ncessaire, que chacun de nous pressent intrieurement. Il est impossible,selon lui, qu'il n'y ait rien dans les hommes qui corresponde ces racines de la sagesse universelle humaine. Il

    dveloppe cette vision de faon concise et magistrale dans Unum Necessarium (LUnique Ncessaire).Le systme pdagogique psychospirituel expos en particulier dans la Pampaedie et dans lUnique Ncessaire faitdonc partie dun plan visionnaire englobant non seulement ltre entier, mais lhumanit entire. Il est conu comme undes piliers de la rforme du genre humain. Il lentreprend vigoureusement, tout en sachant quelle prendra bienlongtemps avant de pouvoir tre mene bien lchelle de toute lhumanit.Et nous aimerions terminer cet avant-propos par ces quelques lignes, les dernires de ce livre :Heureux vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est vous. Heureux vous qui avez faim maintenant, car vous serezrassasis. Heureux vous qui pleurez maintenant, car vous rirez, mais par contre, Malheur vous, les riches ! Car vousavez votre consolation. Malheur vous, qui tes repus maintenant ! Car vous aurez faim. Malheur vous qui riezmaintenant ! Car vous connatrez le deuil et les larmes (Luc 6, 20-21 et 24-25). Les aptres enseignaient la mmechose aux jeunes chrtiens et leur conseillaient de chercher un autre bonheur, une autre richesse, une autre satit,inaccessible au monde. L'Aptre dit : Par les armes offensives et dfensives de la justice, dans l'honneur etl'ignominie, dans la mauvaise et la bonne rputation ; tenus pour imposteurs et pourtant vridiques ; pour gens obscurs,

    nous pourtant si connus ; pour gens qui vont mourir, et nous voil vivants, pour pauvres, nous qui faisons tant deriches ; pour gens qui n'ont rien, nous qui possdons tout (2 Cor. 6, 7 10).Que doit faire celui qui a compris ces paroles apparemment pleines de contradictions ? Il doit choisir la bonne part enlui. Personne ne peut la lui drober. La somme de ce trsor spirituel peut tre rsum en quatre rgles :1. Ne t'encombre pas de choses dont tu n'as pas ncessairement besoin pour ta vie ; contente-toi du minimum qui suffit ton aisance et loue Dieu.

    2. Si tu ne peux pas avoir d'aisance, contente-toi du ncessaire.

    3. Si de cela mme tu es priv, tourne-toi vers toi-mme.

    4. Si cela ne t'est pas non plus possible, abandonne ton corps ; il nest que Dieu qui tu doives tattacher.

    Celui qui possde Dieu, peut se passer de tout. Avec Dieu, il possde le Bien le plus lev et la Vie ternelle pourl'ternit.

    Voici pour la fin, mes souhaits pour tout le monde.

    Christian Fleischl

    Unum Necessarium

    Au noble prince et seigneur Ruprecht (Robert)

    Comte de Palatinat sur le Rhin

    Trs honor Prince,

    Le monde entier ne peut rien face au conseil donn par Varron un pre de famille avis ou cet homme qui faisait sonmarch : Nachte pas ce qui pourrait ttre utile, mais seulement ce dont tu as vraiment besoin. Le monde entier estun march. On y trouve toutes sortes de denres. On y voit aussi toutes sortes de vendeurs, dacheteurs ou de badauds ;mais peu dentre eux savent faire la diffrence entre le ncessaire et linutile. Sur ltalage, mlanges et couleurs

    bigarres, du bon et du mauvais, du ncessaire et du superflu, de lutile et du pernicieux, du prcieux et du sans valeur :tout est offert, vendu et achet. Le plus tonnant - et cest bien dommage ! - cest quon y trouve plus souvent linutileque le ncessaire, le nuisible que lutile, le mauvais que le bon ; on offre, on vend, on achte. De l vient ce dicton :Mundus vult decipi, le monde veut tre tromp. Et en fait partout dans le monde ne sont querreurs et illusions.Mme le sage Salomon na pas su se prserver des mensonges et des duperies du monde, na pas pu chapper aumirage de ses illusions : il est devenu la victime de lorgueil et de la vanit, de la folie et de lamertume.

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    Je suis un homme dun grand ge, et jai eu rcemment loccasion de rflchir tout cela. Jai dcid de mettre par critquelques-unes de mes penses. Jespre que mon travail ne sera pas inutile, dabord pour moi, vieillard au bord de latombe : jessaie ainsi dallger mes dernires heures en mettant en relief linanit des choses de ce monde ; mais je faiscela aussi pour dautres, enferrs dans la superficialit mondaine, mais prts couter une parole ferme.Mme toi, grand Prince, ceci pourrait tre de quelque utilit. Ton sort nest pas meilleur que celui dun Samson, dunDavid, dun Salomon ou dautres hommes distingus : entrans dans les courants du monde et les abysses de linutile,

    ils ne purent sen extraire et sen dfaire qu grand-peine. Ta maison paternelle, ton origine, ton nom, les multipleschemins de ta vie, cole dexprience, ont fait de toi un homme pouss vers les vertus hroques. Mais un coureur peuttrbucher sur un obstacle quelques mtres de larrive, plus vite quil ne le croit.Toi, Ruprecht, rejeton dune ligne ancienne de rois, non, plutt dempereurs ! Rien de commun ou de frivole ne tesied, toi qui as dj atteint un certain ge et qui a beaucoup dexprience ; seules les choses suprieures sont dignes detes anctres.Cest celui dont tu portes le nom, Ruprecht, prince lecteur de Palatinat, qui fut choisi pour tre empereur romain en1400 et qui gouverna lAllemagne pendant 10 ans avec beaucoup de sagesse. Lorsquil prit le pouvoir, le pays taitdchir de tout ct par les combats et les guerres, mais il parvint rtablir la paix et se fit, chez les historiens, le renomdun prince sage au grand cur.Tel Salomon celui qui apporte la paix, son nom lui revenait de droit. Ruprecht, ou plutt Ruheprecht, est celui quiapporte le calme (Ruhe : calme, tranquillit). Ce nom sied aussi ton pre et ton grand-pre Frdric. Friedrich estquivalent Frieden reich (royaume de la paix) et rappelle les temps de paix sous Salomon. Mais lpoque de ton

    pre, la paix ne rgnait pas ; ctait lpoque o la guerre lanait son flau sur la Bohme, sur lAllemagne, surlEurope. Les vnements le poussrent diffrer ses projets en attendant une poque plus propice.Que les temps de paix, enfin, soient instaurs ! Pensons enfin les rtablir, aprs une si longue priode dhiver, aprstant douragans et de mauvais temps ! Ceci serait possible si les chrtiens de tout bord opraient un revirementfondamental. Ils pourraient ainsi calmer la colre de Dieu attise par leurs pchs ; si les princes dsarmaient et

    pensaient rtablir la paix, si le peuple tait prt servir Dieu et ses rois temporels, si tout le monde voulait considrerla vie non comme une comdie mais comme une pice srieuse et ne passait pas son temps soccuper de chosesvaines et phmres, mais de ce qui permet llvation de lme !Trs honor Prince, les prophties que les astrologues ont faites sur le moment de ta naissance et le nom que tu portes,sont tout fait favorables. Elles sont encore valables, les chants que les potes ont crits en ton nom existent encore. Ilstont tous prdit un avenir heureux. Mais lart des astrologues et le destin des puissances sont dans la main de Dieu. Il afait les cieux et la terre. Il rgit tout avec puissance et sagesse dans les limites par lui prescrites.Jai pris la libert de faire paratre, dans cet crit, ce qui est pour lhomme lunique ncessaire. Guid par un solide bon

    sens et par la parole divine, il pourra ainsi conduire sa vie phmre avec sagesse. Lis les crits dun vieil homme, cherPrince, ta jeunesse fougueuse et ses ncessits appartiennent au pass. Dpche-toi ! Toi aussi, laisse les labyrinthes dela vie derrire toi, arrte le mouvement continuel du rocher de Sisyphe, change les joies trompeuses de Tantale en des

    joies authentiques qui donnent un vrai plaisir.Moi, je prierai Dieu, en cette anne naissante, alors quun destin favorable a plac les rnes du pouvoir en tes mains,

    pour que lunique ncessaire soit universellement pris en compte. Alors, en vrit, tu ouvriras le chemin et tuapporteras la paix au monde chrtien, grce ton ardeur pieuse, sense et hroque. AMEN !Avec dvouement et de tout cur, je souhaite votre Honneur un vrai bonheur.J. A. COMENIUS de MoravieAmsterdam, anno 1668 le 1er mars, dans mon tude.

    AvertissementauLecteur

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    Il nous a sembl prfrable, pour lagrment de la lecture, de placer les cinq premiers chapitres la fin dutexte.

    Les derniers chapitres, VI X, sont en effet plus dynamiques, de porte plus gnrale, et dune actualit

    proprement stupfiante. Les cinq premiers, bien que trs moralisateurs, font preuve dun grand ralisme.

    Prcisons dautre part que les notes sont en fin de texte. Pour la majeure partie, elles concernent les citationsbibliques. Nous y avons mis le texte de la version de Raymond Segond, directement en note de fin de livre, quand lacitation de Comenius sloignait trop du texte biblique.

    CHAPITRE VI

    Grce aux rgles chrtiennes, lhomme cultiv et vers dans les sciences peut rendre droit ses propres chemins tortueuxet ceux des coles. Il apporte ainsi une possibilit de ralisation plus sre et vite les dceptions.1. De quoi l'homme a-t-il besoin ? Il doit sadapter de faon correcte aux choses impersonnelles de ce monde desapparences, face Dieu et aux hommes. La premire, on l'appelle la philosophie, la deuxime la politique, la troisimela religion. Sans ces trois, l'homme ne serait pas homme, mais seulement une crature dpourvue de raison, quil soitsatur de richesse, d'honneur et de tous les biens matriels. Un malade n'a que faire d'un lit en or. Une vie brillante n'estd'aucune utilit un insens. Le sage a ses yeux dans la tte, mais l'insens marche dans les tnbres (Eccl.2, 14). Carle but de la sagesse et de la culture n'est pas de faire suivre l'homme, tel un animal, les mouvements de la masse sedirigeant l o il ne doit pas aller. Il doit voir clairement devant lui sa vie et son destin et s'y conformer de faonintelligente, tirer les consquences du pass, et percevoir le prsent avec discernement, les yeux tourns vers l'avenir.2. A-t-on besoin de beaucoup de choses pour allumer cette lumire de la sagesse ? Si les hommes se laissent conduire

    par Dieu, seuls la crainte de Dieu, la prire et trois livres seront ncessaires. La crainte de Dieu pour viter de devenir

    tmraire ou ngligent, pouss uniquement par la dsinvolture ou la simple curiosit. Devenir semblable Dieu est unechose sacre. Chacun doit l'approcher avec respect et humilit. La crainte de Dieu est le dbut de la sagesse (Prov. 1,7)1. La fervente prire doit nous le montrer. Nous ny avons aucun mrite, mais grce l'espoir mis dans la misricordede Dieu, nous pourrons accder aux sources de la Lumire et du Salut. Daniel et Salomon ont agi bien plus sagementque tous les autres hommes. Ils ont eu accs la Sagesse grce leurs prires, et pas aux autres biens. Elle est promise chacun, sil invoque Dieu pour l'obtenir (Jacques 1, 5)2. La source de toute sagesse, la parole de Dieu venant denhaut, s'exprime de triple faon : premirement, elle est introduite en chaque crature raisonnable, anges et hommes,comme une lumire de la raison ; deuximement, il a appos son sceau sur toutes les cratures corporelles qui peuplentle monde ; troisimement, elle a t proclame par les envoys de Dieu et mise en langage prophtique sur son ordre.Ainsi, il y a aussi trois chemins vers la sagesse. Le premier est le bon sens, dot d'un pouvoir de discernement naturel clairer par la raison ; le deuxime est le monde avec ses cratures soumettre l'aide des sens ; le troisime est le livrede la Bible rempli de mystres dvoils. Ils peuvent tre sonds par la foi. Ces trois livres divins contiennent tout lesavoir ncessaire. Ils sont l'Unique ncessaire pour accder la sagesse.

    3. L'apprentissage de la sagesse est-il facile ou difficile ? Les deux. Ce serait une vraie joie paradisiaque et une grandevolupt pour notre me, faonne l'image de Dieu, que de tout faire selon les conseils de Dieu. Mais du fait de sadgnrescence, tout n'est que labyrinthe, preuves de Sisyphe et grosses dceptions.4. Qu'on nous explique cela ! D'aprs la volont de Dieu, la philosophie devrait permettre la domination licite del'homme sur toute chose du monde des apparences, sur toutes les cratures lui soumises. Cette domination est possiblegrce un intrt bienveillant envers elles, un gouvernement raisonnable et une utilisation intelligente. Selon leslois de la nature, la politique consiste en une cohabitation pacifique des hommes, dans le but d'un soutien mutuel dansla vie et d'une aide mutuelle par le conseil et l'action. Son fondement est le suivant : faites aux autres ce que vousvoulez que les autres vous fassent. L'essence de la religion est le fait de croire en Dieu lorsqu'il nous rvle sa volont,dobir ses commandements, de croire en ses promesses toujours et partout, dans toutes les situations de la vie, sanshsitation.5. Cela est-il facile ? Oui, c'tait le cas. Mais les hommes ont nglig le jardin de Dieu, ils ont laiss crotre les ronces etles mauvaises herbes. Ils l'ont laiss se transformer en jungle. Le nombre des apparences est tellement grand, le nombredes opinions, des points de discorde compliqus et des divergences d'opinion consquentes, est infini ; d'innombrableslivres, apparemment savants, ont t crits l-dessus et dans plusieurs langues diffrentes. Mais la confusion augmente

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    sans cesse ; et combien de diffrentes mthodes, ajoutant la difficult, n'a-t-on pas labores pour les transmettre auxgnrations futures ! De nombreuses langues, dont les auteurs, voulant paratre savants, se sont vertus compliquerles choses linfini par rivalit mutuelle. Tous les crivains ne cessent donc d'errer dans un labyrinthe sans fin,soulvent dnormes rocs et ne peuvent qutre victimes de cruelles dceptions et opprobres.6. Mais comment ? Tu prtends : ces choses cres par la main d'artiste de Dieu, c'est--dire notre raison, le monde etsa parole, sont un labyrinthe ? Je dis : oui. Car leur diversit et leur nombre sont immenses : tu peux chercher ici ou l

    ou ailleurs un dbut ou une fin sans jamais les trouver. Les livres sacrs ont un sens si profond et si divers : la raisonhumaine ne l'a pas encore sond et compris jusqu' aujourd'hui. Peux-tu compter les penses surgies leur propos dansl'esprit des physiciens et des philosophes, des mathmaticiens et des historiens, des politiciens et des thologiens ; les

    points de discorde quotidiennement lordre du jour et les opinions divergentes issues de ces points de discorde ?Pourquoi Dieu, dans son infinie sagesse, a-t-il livr ces trsors l'investigation de la pense ? Uniquement dans le butd'garer l'esprit de l'homme et de le faire chercher vainement ? Non, mais afin de percevoir plus clairement ladiffrence entre lui, crature, et le crateur.7. Si tel est le but, les rflexions sur ce sujet peuvent-elles tre prjudiciables ? Il n'en serait pas ainsi si les hommestaient humbles et s'ils apprenaient tre de simples lves de l'ternelle sagesse. Mais la majorit d'entre eux agit defaon cervele ; ils n'aiment que trop leur orgueil. Ils sont en adoration devant leurs petites tincelles d'esprit commedevant un soleil. Ils attendent des autres le mme comportement. Cest l l'origine de toutes les oppositions et disputesnommes avec orgueil divergences d'opinions entre gens lettrs. Ils en ont tellement satur le monde ! Interminablessont les hostilits et les labyrinthes !

    8. Mais nous avons des livres dans lesquels sont rassembls les trsors des penses justes ? N'apportent-ils pas une aidepour connatre la sagesse ? Oui, ils devraient prserver de toute dviance et montrer l'homme, si facilement imbu desa propre sagesse, le vrai chemin. Mais ces livres dans leur tat actuel ne sont en fait qu'un labyrinthe de plus pour quis'y plonge sans guide. Leur nombre est bien trop grand et une vie ne suffirait pas pour n'en lire qu'un millime. Lamatire en est bien trop dense pour qu'il soit possible un cerveau humain den venir bout sans tre pris de vertige.Bien des livres nont quune fonction dcorative. Sans grande utilit ils sment la confusion, n'apportent pas vraimentla clart. Ils sont en fait trs dangereux. Ceci explique le nombre impressionnant de soi-disant savants et d'ruditscingls, mais aussi la raret des vrais savants et des sages. Car Dieu anantit la sagesse des sages et il rejette la raisondes insenss (1 Cor. 1, 19)3. Si tu vois un gros livre ou mieux encore, une vaste bibliothque, prouve de lacompassion pour les humains plongs dans la dtresse. Ils se torturent l'esprit avec maints labyrinthes et n'enprouveront finalement que de la honte. Les friandises attirent le gourmand pour finalement le dcevoir avec la nause,la maladie et une mort prmature ; les tentations de la connaissance dans les nombreux et divers livres n'apportent l'esprit qu'une satit dangereuse, reclent la frustration, la maladie et le dprissement. Les plus senss commencent

    dj s'inquiter : si personne ne peut arrter ce dluge immense et toujours grandissant de livres, il est craindre queles hommes ne lisent plus rien. Ils ne croiront plus en rien et l'athisme et le manque de foi recouvriront tout. On en voitdj les prmisses ici ou l, surtout chez les peuples qui se croient trs volus.9. Alors, quel est le conseil que tu peux donner pour que la lecture des livres ne devienne pas un labyrinthe ? Tiens-toi un livre unique et indispensable et ne te laisse pas persuader de perdre ton temps avec des livres inutiles. Ne lis pas

    beaucoup de livres, mais de bons livres. Choisis un livre classique sur un sujet donn, celui qui tapportera une vritobjective. Et tiens-ten celui-ci. Lis-le avec attention, prends des notes sur les choses essentielles et ne te laisse pasfrustrer par l'crivain. Ne lui accorde pas trop dimportance. Ensuite, relis les extraits encore et encore, que ta mmoires'en imprgne et tente de faire une application pratique de ta lecture. Ainsi la plupart des bons crivains peuvent entrerdans ta chair et ton sang. Ainsi tu te nourriras de la moelle de la sagesse. Tu ne l'auras plus seulement dans tes notesmais surtout dans ton cur et dans ta tte. Si les coles voulaient bien utiliser cette mthode, elles n'pargneraient passeulement la jeunesse, mais aussi l'glise, l'Etat et au monde de faire de nombreuses erreurs et d'emprunter lesvoies dtournes de lillusion.

    10. Tu oses demander si peu pour une affaire aussi importante ? Oui, j'ose en me rfrant Christ qui disait : qui mesuit ne marchera pas dans les tnbres mais aura la Lumire de la Vie (Jean 8, 12), au cas o il dciderait de suivre ceguide et cette lumire (c'est--dire lorsqu'il accepte de mettre de ct les livres crits par les hommes et qu'il cherchel'illumination dans les seuls livres de Dieu). C'est le bon choix qu'a fait Marie, lorsquelle s'est assise aux pieds de Jsus

    pour couter sa parole en oubliant tout le reste autour delle.11. La Bible elle-mme n'est-elle pas un labyrinthe pour l'esprit humain, avec ses passages mystrieux et inexplicables,avec son sens profond ? Voil ce qu'prouve le dbutant. Mais en ralit les difficults sont moins grandes qu'elles n'y

    paraissent. Un si parfait matre d'uvre ne pouvait vouloir comme terrain dvolution pour sa sagesse (le monde,l'esprit humain, sa parole) qu'un endroit o rgne la parfaite symtrie. Comme toute erreur est exclue dans la perfection,les humbles et attentifs lves de Dieu n'en trouveront pas non plus. Mme si dans notre humaine imperfection nousnous garons de temps en temps, cela se produira moins souvent que pour ceux qui suivent d'autres matres si nousnous laissons guider par Dieu. Il conduit sur les chemins de la sagesse et guide les sages (Sagesse 7, 15)4. Et nous nemanquons pas de conseils aviss de Dieu en ce qui concerne notre comprhension de sa sagesse, du livre de la cration,de l'esprit et de la Bible.

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    12. Quels sont ces conseils aviss ? En tout premier les trois suivants : 1. Cherche ce que tu cherches la bonne place,ce qui te concerne en toi, ce qui concerne le monde dans le monde, et ce qui concerne Dieu en Dieu. 2. Fais tesrecherches avec les outils appropris : utilise pour le monde la lumire de la raison, pour l'esprit la lumire dudiscernement, pour Dieu la lumire de la foi. Car le monde matriel est sous la domination de la raison, des sens ; lediscernement rgit le monde de l'esprit et la foi est l'essence de la rvlation. 3. Apporte toute chose en gale harmonieafin dviter les dissonances entre les penses, les paroles et les actes divins d'une part et nos sens, notre raison et notre

    foi d'autre part. Alors seulement la lumire et la vrit peuvent devenir permanentes pour l'honneur de Dieu et pournotre salut.13. Maintenant, explique-toi plus clairement pour que notre traverse de la cration ne se transforme pas en labyrinthemais devienne un jardin des joies et des dlices. Tiens compte de la richesse de la cration et de chaque dtail en

    particulier. Considre d'abord ceux dont les caractristiques sont l'tre mme, comme par exemple les quatre lmentset les choses qui en sont issues, les mtores, les mtaux, les pierres. Considre ensuite ceux qui ont une vie propre, quinaissent, vgtent et meurent comme les arbres et les plantes ; puis les cratures qui ont du mouvement et des motions,comme les diverses espces animales et finalement les cratures faites l'image de Dieu pouvant accder laconnaissance, tels les hommes et les anges. On pourrait aussi ranger les cratures corporelles d'aprs le nombre de leurssens, d'aprs leur vue, leur oue, leur odorat, leur got et leur toucher, les mettre dans cinq catgories et les tudier selonleur constitution.14. Mais l'esprit humain n'est-il pas aussi un chaos et un labyrinthe ? Ce n'est pas le cas s'il se contient dans ses limites.Que veut-on dire par limites ? Ce sont les connaissances des nombres, mesures et poids qui lui sont donns par Dieu.

    Car Dieu ayant fait toute chose avec mesure, pese et calcul (Sagesse 11, 12)5, il en a fait de mme avec l'esprit humainpour qu'il mesure, pse et calcule toute chose qui l'entoure. Pour cela, il l'a dot de trois dons diffrents : 1. Il a donncertaines connaissances innes qui tayent son pouvoir de connaissance, 2. Certains instincts cachs qui lui permettentde choisir entre le bien et le mal, 3. Certains organes et comptences pour rechercher le bien et pour viter et rejeter lemal. Ces trois qui englobent tout le pouvoir de discernement, de la volont et du pouvoir d'action de l'homme - touthomme les possde en lui - sont aussi appels plus gnralement les connaissances, les instincts et les comptenceshumaines. Si on pouvait les classer d'une certaine faon, chose non encore faite jusqu' prsent, on n'obtiendrait pas unlabyrinthe inextricable mais un champ bien ordonn ou un jardin des dlices, donnant plus de joie que ne peut le faire levaste monde.15. Mais ne peut-on accder d'une certaine faon une comprhension agrable et dynamisante de la parole de Dieu, dela Bible ? Oui, cela est possible si tu as cette ferme conviction : ce livre est la lettre adresse par Dieu l'humanit, danslaquelle il tente de la soustraire l'inanit des choses temporelles et la convie entrer dans sa flicit ternelle. Tu doisde plus en tre convaincu : Dieu y a mis sa rvlation pour l'homme, il lui demande obissance et lui promet plus que

    ce monde ; enfin, l'tude de ce livre est totalement diffrente de celle de tous les autres livres des hommes.16. Celui qui lit la Bible doit tre convaincu que ce livre, donn nous, les chasss du paradis, est une grandiose miseen garde de Dieu sur notre folie de lavoir abandonn, lui notre source de Vie, et le malheur dans lequel nous noussommes nous-mmes prcipits. Et une dmonstration de la misricorde par lui accorde aux repentants. Ainsi, la Bibleest un livre de grande ncessit comme il n'en existe aucun autre au monde, il nous vite la descente aux enfers et nous

    permet d'accder la Vie ternelle et au salut.17. Pour comprendre l'essence mme de ce livre, distinguons les rvlations, les commandements et les promesses.Lquivalent humain en serait la foi, l'obissance et lesprance. Il nous est rvl ce quaucun il na vu, ce quaucuneoreille na entendu, ce qui n'est point mont au cur de l'homme (2 Cor. 2, 9-10), et ce que ni discernement ni raisonhumaine n'ont dcouvert si Dieu lui-mme ne l'a pas rvl (comme par exemple ce qui prcda la cration, ce quisuivra ce monde, ce qui se passe hors de ce monde, ce qu'il y a dans le cur de Dieu et la pense divine notre propos).Ce que Dieu rvle aux croyants, par son esprit, nous l'apprhendons avec la foi, plus solide que toute exprience car denature divine (Hbr. 11, 1)6. Les commandements des Saintes Ecritures sont si grandioses que l'homme n'a pas la force

    ncessaire pour les accomplir sans l'aide du Saint-Esprit. La renaissance est indispensable. Nous devons devenir deshommes nouveaux, avec un pouvoir mental tourn vers le divin, des tres vraiment l'image de Dieu. Mais ceci n'est

    possible que si nous soumettons humblement notre tre entier la volont misricordieuse de Dieu. Et surtout ! Cequ'aucun homme, aucun ange, aucun monde ne peut nous promettre, l'Ecriture Sainte nous le promet : la Vie ternelleavec tout son cortge de joies, la source mme de toute flicit, Dieu qui est le prix de la course pour ceux qui ont

    purifi leur cur et se sont tourns vers lui (Gen. 15, 1)7. Ce qui reste inaccessible tout espoir humain, les croyants yparviennent avec l'espoir divin. C'est qu'ils sont cent fois prts renoncer tous les sens, tous les schmas mentaux dela raison, oui, toute la vie terrestre avec tout ce qu'elle offre, pour ne plus tendre que vers l'ternel et l'intemporel.L'Aptre en tmoigne lorsqu'il loue les actes de foi des Saints d'autrefois (Hbr. 1)8.18. Si quelqu'un veut puiser la lumire et la vrit divines de ce saint livre, et surtout la force surnaturelle de la foi, del'amour et de l'esprance, il doit dabord l'tudier plus que tout autre livre des hommes. Deuximement, il doit entamerson tude avec grande prudence et en troisime lieu ne pas se contenter de la thorie mais agir.19. La Bible requiert une tude approfondie parce qu'elle recle les trsors les plus grands, des trsors d'illumination, devrit et de salut. Mais seul celui qui demande, cherche et frappe les obtiendra (Mt. 7, 7)9. Que le livre de cette Loisoit toujours sur tes lvres : mdite-le jour et nuit afin de veiller agir selon tout ce qui y est crit. C'est alors que tu

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    seras heureux dans tes entreprises et russiras (Jos. 1, 8)10. .mais se plat dans la loi de Yahv, mais murmure sa loijour et nuit (Ps. 1, 2)11, et plus loin : Que j'aime ta loi ! Tout le jour je la mdite et plus que tous mes matres j'ai lafinesse, ton tmoignage je le mdite. Plus que les anciens j'ai l'intelligence, tous tes prceptes, je les garde (Ps. 11912,9713, 9814, 10015).20. Il faut redoubler de prudence lorsqu'on tudie la Bible. Lumire et tnbres y sont prsentes toutes deux, on ytrouve des exemples de sagesse et de folie, de vrit et de mensonge, de fidlit et d'infidlit, d'amour et de haine,

    d'espoir et de dtresse. Il en est ainsi de ce paradis spirituel : il n'y a pas seulement un arbre de la Vie, mais aussi unarbre de la connaissance du bien et du mal aux fruits mortels. L'arbre de Vie est reprsent par les rvlations, lescommandements et les promesses avec l'exemple des saintes personnes ayant vcu d'aprs ces prceptes ; l'arbre de laconnaissance du bien et du mal est reprsent par les mystres, les interdits et les menaces avec pour exemple les

    personnes qui ont men une vie impie et draisonnable et ne connaissent ni peur ni prudence. Celui donc qui se dcide entrer dans le paradis biblique, prend la ferme rsolution de rester sous l'arbre de Vie et d'viter l'arbre de laconnaissance du bien et du mal, c'est--dire qu'il entreprend l'tude de la Bible non pas pour tre plus savant, mais pourtre plus saint. Qui ne se tient pas cette rsolution, tombera rapidement et facilement dans les ornires. Mais quiaspire devenir meilleur, trouvera le chemin de la Vie. Il lui sera accord par surcrot la Vie mme et ce qui luisemblait impossible, plus tt mme qu' ceux qui ne cherchent que par curiosit comprendre les mystres de Dieu.Chaque lecteur de la Bible doit connatre cette mthode pratique. Je voudrais l'expliquer encore un peu plus.21. La Bible est un livre tout fait pratique, dans lequel Dieu utilise sa justice contre ses cratures rebelles. Il y dcrit la

    justice de son tribunal dans beaucoup d'exemples et de toutes les faons. Il montre aux hommes ce qu'ils doivent savoir

    et leur ordonne de faire ce qu'ils ont faire. Il promet aux obissants ce qu'ils sont en droit d'attendre, il bnit les pieuxmais il fait sentir sa juste duret aux incroyants. Si tu veux bien connatre tout ce processus divin concernant leshommes et leur tentateur, Satan, et si tu veux viter ton malheur, prte attention ce qui suit : une chose doit tre claire,la situation de l'homme d'aujourd'hui n'est pas diffrente de celle d'autrefois, chacun, suivant le conseil insondable deDieu, a le choix entre les hauteurs et les profondeurs, entre la justice et le pch, entre la vie et la mort. Celui quivaincra recevra la couronne de la vie ternelle, mais celui qui succombe n'aura que maldiction et perdition, comme ledit Esdras. En deuxime lieu, sache que Satan est le mme aujourd'hui qu'hier, il est notre ennemi et nous envie pournotre salut, il tente continuellement de ruser avec nous de mille faons et personne n'est sr de lui. Pense au fait queDieu se proccupe sans arrt de nous et de Satan et du combat que nous lui livrons, qu'il ne nous abandonne pas si leshommes ne l'abandonnent pas. Les Saintes Ecritures montrent maints exemples. Elles mettent nu les nombreusesruses de Satan avec lesquelles il essaie de dtourner les hommes, mais elles montrent aussi les nombreux aides etconseils que Dieu nous donne pour nous venir en aide. Il utilise tantt les mots doux et les enseignements salvateurs,tantt les rprimandes et les menaces, tantt les signes et les miracles, tantt les corrections et les coups ; et tout ce que

    Dieu a donn aux hommes au fil des temps - tout ceci est contenu dans les Saintes Ecritures.Tu ne ttonneras donc pas, si tu as en toi deux germes, comme d'ailleurs tout le monde, un germe de la bont

    provenant de Dieu, dispensateur de toutes les bonnes vertus, et un germe du mal venant du mchant semeur, le diable.Comme chaque homme est un monde en soi, avec son ciel et sa terre, son eau et son feu, sa matire et son esprit, salumire et ses tnbres, son mouvement et son absence de mouvement, ainsi dans chaque individu se reflte l'histoirede l'humanit crite par Dieu. Chacun a son Dieu et son diable, son paradis et son enfer, son arbre de Vie et son arbrede mort, ses tentatives et ses combats, ses victoires et ses checs, son Can et son Abel, en bref, le germe de la femme etle germe du serpent dans le sens o l'un doit russir dominer l'autre.22. Si un Chrtien lit souvent la Sainte Bible, il lui sera utile de ne pas la considrer comme un livre ordinaire qui ne leconcerne pas. Il y retrouvera, comme dans un miroir, les situations de sa vie. Il doit toujours essayer dimaginer tredans la situation dcrite, qu'il ait ou non t pieux ; qu'il s'applique toujours lui-mme les paroles et les actes dont ilest question. Car Dieu a une vue d'ensemble de tous les sicles pour l'ternit et il connat tout ce qui se passe ; il esttoujours le mme Dieu intemporel. Il dit la mme chose lun qu lautre dans la mme situation et il lui applique les

    mmes prceptes, d'aprs les critres de son ternelle justice. Il rend le bien pour le bien et le mal pour le mal. Tu peuxen faire l'exprience, cher Chrtien, si tu ne l'as pas encore fait. Commence par lire ta Bible, tente tout ce qui est en ton

    pouvoir pour faire ce qui plat Dieu et dtourne-toi avec horreur de ce qui lui dplat. Alors tu seras conduit delumire en lumire, de vertu en vertu, vers le Dieu juste de Sion (Ps. 84, 8)16.23. Mais tu ne dois pas dsesprer si d'emble tu ne rcoltes pas les bons fruits en employant cette mthode. Tout doitse faire par tapes, aucun matre n'est jamais tomb du ciel. Comme nos coles sont raisonnablement divises enclasses, nous pouvons dire que cette haute cole de la sagesse de Dieu est aussi divise en classes. Son but n'est autreque celui des aptres, c'est--dire d'enseigner chaque homme toute sagesse et de le rendre parfait dans le Christ (Col.1, 28)17. Son livre d'enseignement est le livre de Dieu, la Bible. Mais il faut trois choses pour arriver ce but : 1. Laconnaissance de toute l'histoire sainte ; 2. La vritable comprhension de tout ce qui touche la foi, l'amour et l'esprance; 3. Le revirement pour devenir un homme nouveau l'image de Dieu en parfaite justice et saintet (Eph. 4, 24 18 ; Col.3, 20 19 ; Cor. 2, 7- 8 20 ). La premire tape peut tre compare au recrutement des Chrtiens, la deuxime au champde bataille et la troisime la victoire et au triomphe. Ou, pour prendre une image de l'Ancien Testament : sur la

    premire marche les Chrtiens sont comme les Lvites qui servent dans le parvis du temple, sur la deuxime ils sont les

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    prtres qui exercent leur ministre dans le Saint, sur la troisime, ils sont Christ mme, ils ont pris la forme de Christ enperfection et, tel un grand-prtre drap dans sa dignit, ils sont prts entrer dans le Saint des Saints, au ciel.24. La Bible est donc pour les Chrtiens le seul et unique ncessaire ? Oui, certainement, si nous cherchons, commeDieu le veut, la sagesse, assis aux pieds de Christ comme Marie. Il est vrai que les Saintes Ecritures sont le trne de lasagesse. Mais les deux autres livres qui l'accompagnent ne sont pas inutiles, savoir le livre du monde et celui del'esprit humain. Ils ont pour fonction de lui prparer le chemin et de nous enseigner les besoins extrieurs de la vie pour

    que nous n'agissions pas de faon insense dans ce monde si nous voulons atteindre l'ternit. Raymond de Sebond amontr dans sa Thologie naturelle comment ces deux autres livres peuvent nous conduire sur la marche la plus hauteet la plus mystrieuse de la sagesse. Il nous en a laiss une preuve clatante. Il divise toute la cration en quatre parties,une partie selon son essence, une autre selon sa vie vgtative, une troisime selon son pouvoir de sensation et ladernire selon son pouvoir de connaissance et il explique ainsi tout ce qui concerne la connaissance de Dieu et le salutdes hommes, d'une faon si convaincante qu'on ne saurait le contredire. Son uvre complte comporte 330 chapitres eta t dite Venise, Lyon et Francfort. Cependant, cause de sa densit, de ses nombreuses rptitions et du style un

    peu rude et barbare de l'auteur, cette uvre est peu lue, ce qui est dommage. C'est pour cette raison que je l'ai fait diterrcemment en forme abrge et allge Amsterdam. Mais mme sous cette forme, c'est une marchandise sansacqureur. Car le monde ne fait pas la diffrence entre les perles et les dchets et prfre se perdre dans ses labyrinthesau lieu de chercher le fi1 d'Ariane qui pourrait l'en sortir.25. Un dsir languissant et gonfl d'espoir de toujours plus de lumire m'amne parler d'un autre court extrait des

    livres de Dieu. Jai dj commenc travailler sur cette uvre qui a pour titre Pansophia Christiana (La sagesse

    chrtienne universelle) dans laquelle j'ai rpertori tout ce qui est ncessaire l'homme. Si le cur est anim d'un dsirsincre pour les choses de cette vie ou de la vie future, elle devra montrer les moyens et les applications possibles pourtrouver le vrai chemin et atteindre srement le but. Cette uvre, si je peux la terminer, ne sera pas seulement utile auxsavants dans les coles, mais tous les hommes, car elle donne le fil d'Ariane pour q