Le Queercore Et La Place de La Femme Dans Le Punk Hardcore

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1 er cycle, collège universitaire Cycle euro-latino-américain, campus de Poitiers Mini-mémoire Le queercore et la place de la femme dans le punk hardcore Gender studies Professeur : Alexandre JAUNAIT Décembre 2011 José GUERRA

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Mini-mémoire de Gender Studies sur le Queercore et la place de la Femme dans le punk hardcore.

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1er cycle, collège universitaire

Cycle euro-latino-américain, campus de Poitiers

Mini-mémoire

Le queercore et la place de la femme

dans le punk hardcore

Gender studies

Professeur : Alexandre JAUNAIT

Décembre 2011

José GUERRA

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« I love hardcore boys ! » chante Limp Wrist, groupe étasunien de hardcore punk inscrit dans le

mouvement queercore.

Tout d’abord, il faut rappeler que le punk hardcore est apparu aux Etats-Unis au début des années

1980, avec les trois groupes piliers de ce mouvement : Black Flag, Bad Brains et Minor Threat.

Musique originaire des périphéries de Washington D.C., le punk hardcore s’est démarqué du punk

ordinaire par ses rythmes plus rapides et violents. Mais le thème du racisme et des conflits avec la

police sont tout de même restés les thèmes principaux de l’agenda contestataire de ce mouvement,

à l’exception du groupe The Wire, et de leur morceau « 12XU » traitant de l’homosexualité au début

des années 1980. Personne n’avait osé parler du sexisme, ni s’était demandé pourquoi les concerts

de punk hardcore avaient un public masculin dans leur majorité, voire même pourquoi des groupes

de femmes n’étaient pas encore apparus. Etant un mouvement qui opère en marge de la société,

l’incorporation d’autres mouvements alternatifs tels que le queercore des années 1990 le rend de

plus en plus révolutionnaire dans le sens où le racisme et les problèmes d’autorité ne sont plus les

priorités de la scène hardcore. Par la suite, la scène a vu émerger des groupes tels que Bikini Kill,

membre du mouvement « Riot Grrrl », mouvement cité assez souvent dans l’émergence de la

troisième vague féministe étasunienne, utilisant la musique comme moyen d’expression de leur rage

envers la société.

Le thème queercore est un terme-parapluie qui englobe non seulement le punk hardcore

homosexuel, mais aussi un mouvement « underground » prenant en compte d’autres créations

artistiques comme l’impression de fanzines, l’incorporation d’autres genres de musique comme

l’indie rock ou le post-punk, la création littéraire et la production cinématographique. Le hardcore

n’est pas que de la simple musique, c’est aussi un style de vie. Ce mouvement a surtout fait son

« coming out » pendant les années 1990, période où la tolérance sexuelle à niveau mondial était de

plus en plus élargie, en même temps que la scène hardcore de chaque pays devenait de plus en plus

internationale grâce au développement des nouvelles technologies, notamment d’internet,

encourageant la production musicale.

La problématique traitée dans ce mini-mémoire sera de voir comment à travers de l’agenda

contestataire des queers et femmes du punk hardcore sont parvenus à se réapproprier de ce

mouvement et de mettre en avant la critique sociale sur l’oppression des identités de genre et de

sexe. Dans une première partie nous verrons quels sont les espaces de réappropriation du queercore

et hardcore féminin à travers la déconstruction des idéaux du punk hardcore. Dans un deuxième

temps, on verra les nouveaux moyens d’expression du mouvement, repoussant à l’extrême l’agenda

contestataire du punk hardcore.

I) La déconstruction du punk hardcore

Tout d’abord, le queercore et les courants féministes du punk hardcore modifient à leur manière les

idéaux de base du punk hardcore. Dans le punk hardcore il existe un courant encore plus extrémiste,

le « straight edge ». On se concentrera surtout dans cet aspect du punk hardcore, étant le lieu de

confrontation le plus net et le plus intéressant à étudier.

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A. La rupture des tabous sexuels

Si on prend le cas des queers dans la scène straight edge, on voit une scène où l’on prône

l’abstinence sexuelle au même titre que l’abstinence de drogues. Des groupes tels que Limp Wrist

revendiquent leur appartenance au mouvement straight edge, mais ils rompent avec cette règle

dorée qui traite de la sexualité. Dans le queercore, cette abstinence sexuelle serait un résultat de la

répression sexuelle vécue par les sociétés modernes, une répression dite « bourgeoise », où

paradoxalement le punk hardcore ne serait qu’une reproduction à niveau microsocial de la

dichotomie issue du genre.

Il faut aussi comprendre que le straight edge a une double face : le côté anticapitaliste où l’on ne

consomme ni alcool, ni viande ni tabac dans une volonté de boycotter les grandes entreprises, et un

côté conservateur très moraliste, souvent associé aux églises protestantes (beaucoup de concerts de

hardcore ont lieu dans des temples évangéliques), voire même associé aux mormons, qui arrivent à

ne même pas consommer de la caféine pour des raisons religieuses. Si l’on revient aux queers

straight edge, ceux-ci attaquent un des principes importants de cette scène ambigüe, radicalisant

encore plus le straight edge, tout en le dépouillant de cet aspect moralisateur qui n’est qu’un dérivé

du système de genre où la sexualité doit rester quelque chose de silencieux, où le couple

Homme/Femme, qui serait dans le straight edge orthodoxe très évident, ne serait pas mis en

question, et donc tout ce qui serait en dehors de ce cadre normatif irait contre le straight edge.

Comme le dirait Patrick Flynn, chanteur de Have Heart, groupe straight edge de Boston, « there just

aren't enough men like you ». Peut-être même que le fait d’être végétarien, qui diminue encore plus

la virilité des hommes dans la société, la viande étant signe de masculinité, pourrait expliquer cette

tendance moralisatrice visant à renforcer leur masculinité, de même que l’attitude virile marquée par

l’absence de consommation de drogues et de viande.

Si on prend maintenant le cas des femmes dans le straight edge, encore plus minoritaires dans le

punk hardcore en général, on voit une double tendance s’esquisser : les filles qui reprennent les

mêmes thématiques que les hommes « standard » du straight edge, et d’un autre côté les filles qui

radicalisent leur discours féministe, tout en restant straight edge. Si on prend l’exemple du groupe

portugais Reaching Hand, leurs morceaux traitent souvent de la fierté d’être straight edge, de

continuer à l’être, ainsi que de quelques thèmes politiques, mais la sexualité, voire même le simple

rapport hiérarchique Homme/Femme ne sont jamais cités. Les seuls commentaires qu’on peut

écouter des hommes straight edge est « La fille de Reaching Hand, elle est mignonne ». D’autre part,

si on analyse le groupe californien de Punch, les idées sur le straight edge se cassent. « We don’t

need you, we just need that you need us » crie avec rage et intensité la chanteuse du groupe. En

radicalisant même les chansons, faisant un mélange bizarre entre vegétalianisme et féminisme avec

leur morceau « Feminists, don’t have a cow », comparant l’exploitation des vaches avec le fait

d’accoucher et avoir des enfants pour les femmes.

On trouve des groupes qui reprennent les noms des groupes les plus emblématiques du hardcore

(« Youth of Togay » au lieu de « Youth of Today », « Gayrilla Biscuits » au lieu de « Gorilla Biscuits »…)

Ils reprennent les morceaux de ces groupes en modifiant leurs titres : on pourrait prendre l’exemple

du morceau « Gay Edge Revenge » de Gayrilla Biscuits. Le morceau original, « Straight Edge

Revenge » de Project X, est un des hymnes les plus chantés par les straight edge du monde. Cette

reprise devient aussi l’hymne des straight edge queers. Mais des reprises comme celle là ont suscité

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de vives discussions dans la scène. Le groupe Gayrilla Biscuits devait sortir un album en 2008 avec

une reprise de la couverture de l’album « The Things We Carry » de Have Heart mais avec l’arc-en-

ciel en arrière plan. Le label bridge Nine Records leur a empêché de sortir l’album, qui contenait

également « the Gaychinist », une reprise de « The Machinist» de Have Heart, groupe emblème du

label.

Ainsi, la sexualité tend à devenir un thème principal dans la scène hardcore, on pourrait donc en

déduire une plus grande tolérance, par conséquent, dans les scènes de punk hardcore.

B. Une tolérance élargie ?

En effet, dans le hardcore punk on trouve déjà une plus grande tolérance sur les questions de

sexualité et de genre, avec une présence féminine et queer de plus en plus importante sur la scène.

On voit des hommes tous tatoués et pleins de piercings porter des pulls de The Smiths (même si ce

groupe n’est pas hardcore, leur chanteur Morrissey est quand même homosexuel) ou de Punch. Cela

peut paraître un exemple un peu bancal, mais rien que la confection de vêtements de groupes

hardcore parle beaucoup. Si on va dans des sites de ventes de produits de hardcore, tels que la

Bridge Nine Store ou la boutique de Deathwish Records, on ne voit que des produits faits pour des

hommes : des t-shirts avec des designs sanglants, des shorts, des casquettes, des vêtements sportifs.

Les femmes ont de plus en plus de produits, mais qui restent très différenciés, avec des boucles

d’oreilles faites de vinyles, des sacs à main avec les logos des groupes (et qui parfois sont de couleur

rose), des t-shirts avec les tailles féminines, des robes, des jupes… La différenciation des sexes dans

les produits hardcore pourrait être la traduction concrète de l’élargissement du public de la scène,

mais ceci pourrait aussi signifier la conservation du système de genre hérité jusqu’à maintenant. On

pourrait même voir que la quasi-totalité des groupes de hardcore qui sont dans les grands labels

sont… hétérosexuels. Mais les labels queer surgissent de plus en plus. Même pour rentrer dans le

mythe du punk hardcore, Ian MacKaye, grand idole et chanteur du mythique groupe (inventeur du

straight edge aussi) Minor Threat, avec son label Dischord Records a été le premier à enregistrer et

produire le premier album du groupe féministe Bikini Kill.

On aurait même, dans le cadre du queercore, une certaine commercialisation du mouvement.

Prenons par exemple le cas du groupe étasunien The Gossip. A la base, ce groupe jouait un mélange

de punk et de musique électronique dans des petits locaux d’Arkansas. Tous dans ce groupe sont

queers, sans aucune exception. Au fil des années, le groupe a commencé à gagner un prestige non

seulement dans la scène de queercore, mais aussi sur la scène « commerciale », en captant

l’attention des gros labels étasuniens, dont Columbia Records qui les a signés. Maintenant on voit

leurs vidéos passer sur MTV, leurs CDs en vente à la Fnac, entre autres. Même si maintenant leur

reconnaissance en tant que queers est nette, ils ont cependant dû laisser de côté leurs idéaux punks

pour pouvoir se commercialiser. D’autre part, le groupe queer Pansy Division a aussi pu transmettre

un message de tolérance auprès des jeunes grâce à sa commercialisation partielle. Après une

tournée en alternance avec le groupe de rock Green Day, ils ont affirmé dans une interview: « So

probably before we did the Green Day tour, our audience was probably, I don't know, 80% gay,

70%, and after we did the Green Day tour our audience was probably 80% straight ». Cela a même

fait que des jeunes lycéens hétérosexuels s’enrôlent dans les alliances straight-gay suite à cette

tournée.

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Une autre question importante serait : comment les filles, s’impliquent-elles dans cette scène de

punk hardcore, marquée par le machisme et la virilité? D’après une interview faite à Emmy

Hutsebaut (jeune fille de 23 ans impliquée dans la scène hardcore belge), c’est toujours par le moyen

d’un ami qu’elles parviennent à rentrer dans cette antre de la masculinité. Emmy écoutait déjà du

hardcore, et la scène de Ghent, la ville de Belgique dont elle est originaire est réputée être une des

scènes de hardcore les plus violentes d’Europe. Dans cette ville, les filles, même si elles sont

minoritaires, participent activement dans l’organisation de concerts, de festivals (comme l’Ieperfest),

et participent aussi musicalement si on prend l’exemple de la nouvelle vedette européenne de

hardcore Oathbreaker. Emmy raconte que parfois il est dur de supporter toutes les techniques de

drague employées par les membres des groupes de hardcore. Pour la petite anecdote, le chanteur du

célébrissime groupe canadien Comeback Kid a passé toute une journée à courir après Emmy, sans

succès, jusqu’à ce qu’il rencontre une autre fille qui ne faisait même pas partie de la scène hardcore,

une simple « groupie ». Même si on voit que les filles sont de plus en plus acceptées dans ces cercles,

elles restent quand même une minorité qui subit toujours les affres du complexe de supériorité

masculine du hardcore.

D’une part, l’émergence du queercore et l’introduction des femmes dans le punk hardcore permet

de changer le paradigme actuel du hardcore hérité des années 1980, mais ceci n’est pas tout. Ces

deux nouvelles tendances sont aussi un vecteur de modernisation des scènes, d’innovation.

II) Les nouvelles formes d’expression dans le punk hardcore

De plus, le punk hardcore ne se résume pas qu’à de la musique et à de la mode vestimentaire. Dans

les cas du queercore et des mouvements féministes punks, on remarque une introduction de

nouvelles formes de création artistique associées au label « hardcore », et on voit même comment

ces mouvements innovent les mises en scènes des artistes.

A. Les fanzines et le cinéma : deux nouvelles tendances

Le fanzine est peut-être l’élément clé du hardcore. Une scène sans fanzine c’est comme un roi sans

sa couronne. Les fanzines servent à transmettre des connaissances aux aficionados, tels que les

nouveautés à niveau musical, des interviews avec des artistes pour approfondir le message qu’ils

transmettent. Le queercore doit sa naissance à un fanzine intitulé « J.D.s», dirigé par Bruce la Bruce

et G.B. Jones, qui par la suite seront encore plus reconnus par leurs films cultes dans la culture

underground mondial. Quand on dit « nouvelle tendance », cela veut dire que grâce à la

réappropriation des mouvements féministes et queers des fanzines, ils ont pu innover dans la

création des fanzines, en conjuguant parfaitement l’éthique punk avec leurs revendications. Les

numéros de J.D.s parlaient surtout de leur mécontentement envers la société consumériste, se

rattachant à l’éthique punk du « do it yourself ». Ils sont contre l’autoségregation conduite par la

communauté gay « orthodoxe », en luttant pour une diversité sexuelle et de genre unie contre le

capitalisme et la répression politique. Cela peut paraître paradoxal puisque ce groupe se referme

dans le monde du punk. On voit maintenant des fanzines avec des unes provocatrices, pleines

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d’images sexuelles très graphiques. On y lit des articles à propos de thèmes gender studies et des

manifestes anarchistes et/ou anticapitalistes, comme on peut lire aussi des interviews faites à des

groupes hardcore du mouvement. La vente se fait surtout dans les concerts et les boutiques de punk,

à des prix très modiques, voire à des prix libres.

Le mouvement féministe et queer, surtout féminin, le Riot Grrrl, a aussi pu donner une vision du

punk du point de vue des femmes. Originaire d’Olympia, Washington, le mouvement Riot Grrrl a

émergé un peu avant que le queercore fasse sa sortie après la parution du premier numéro de J.D.s.

S’inspirant des artistes féminines des années 1980 comme Patti Smith, et surtout de la Third-Wave

Feminism au plein cœur de ce mouvement, les Etats-Unis, les filles punks veulent créer un nouvel

espace d’expression qui soit en opposition à toute la musique sexiste crée par les hommes, surtout

dans le punk. Erika Reinstein dit dans le Riot Grrrl Manifesto: « BECAUSE we girls want to create

mediums that speak to US. We are tired of boy band after boy band, boy zine after boy zine, boy

punk after boy punk after boy...BECAUSE we need to talk to each other. Communication/inclusion

is the key. We will never know if we don’t break the code of silence... BECAUSE in every form of

media I see us/myself slapped, decapitated, laughed at, objectified, raped, trivialized, pushed,

ignored, stereotyped, kicked, scorned, molested, silenced, invalidated, knifed, shot, choked and

killed. BECAUSE I am tired of these things happening to me; I’m not a fuck toy, I’m not a punching

bag, I’m not a joke...BECAUSE a safe space needs to be created for girls where we can open our

eyes and reach out to each other without being threatened by this sexist society and our day to day

bullshit». Le punk étant déjà une culture postmoderniste, nihiliste à sa base, le mouvement Riot Grrrl

a su mélanger parfaitement les éléments du féminisme, du Do It Yourself punk et de

l’anticapitalisme, les filles étant le vecteur de création d’idées, de subculture et d’art. Les fanzines de

ce mouvement parlaient des expériences personnelles des écrivaines, comme la violence

domestique, le viol, l’homophobie, voire même de vegétalianisme. Tristement, ce mouvement a

connu sa chute en plein milieu des années 1990, avec la mauvaise interprétation du « girl power »

mené par les Spice Girls, et aussi à cause de la rapide commercialisation des groupes de ce

mouvement, comme on a pu l’observer avec Courtney Love. Actuellement, l’héritage des groupes

tels que Bikini Kill sont des groupes comme Le Tigre, fondé par Kathleen Hanna (qui a aussi fondé

Bikini Kill), mélangeant du pop avec du post-punk.

En ce qui concerne le cinéma s’inscrivant dans le queercore, on y voit des films ou des courts

métrages qui parlent de la vie quotidienne des punks queers. S’inspirant d’artistes queers comme

Andy Warhol ou Vivienne Dick, les réalisateurs de queercore « punkulturalisent » les thématiques

queers. Si on prend l’exemple des films de Bruce LaBruce, les histoires concernent des skinheads

homosexuels qui se battent avec des skinheads fascistes, comme on le voit dans Skin Gang, qui

même s’ils se disent être homophobes, lorsqu’ils attaquent les punks, les violent. Il y a même une

scène où un skin se masturbe et éjacule sur une page du Mein Kampf d’Hitler. On aurait un autre

exemple d’un autre film dirigé par G.B. Jones, The Yo-Yo Gang, où des filles skateuses sont les

« reines » du quartier, cassant les visages des punks machos et se faisant tatouer. Le slogan du film

est: "Gang girls frequently out-curse, out-fight and out-sex every boys' gang around”. C’est aussi

important de voir aussi comment les réalisateurs mélangent les scènes des films avec de la musique

de la scène queercore, comme le mélange des scènes de The Yo-Yo Gang avec la musique du groupe

The Fifth Column. Les films queer ont depuis été des films cultes pour toutes les communautés

queers du monde, soit punk ou soit orthodoxe.

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B. Une mise en scène innovante

Les concerts de queercore ou de punk hardcore féministe ne sont pas la même chose qu’un concert

conventionnel de hardcore. On y voit émerger des nouvelles techniques, modes d’organisation, voire

même les concerts deviennent un endroit d’expression cassant symboliquement et physiquement les

tabous tenus envers le sexe. « Cruising at the show », un morceau du groupe Limp Wrist, met en

avant la pratique du « cruising », où les homosexuels cherchent des partenaires pour l’occasion, et ici

donc les concerts de queercore deviendraient les endroits parfaits pour draguer. Le concept même

de « cruising » est un terme propre à la culture homosexuelle, étant ici transposée dans le monde du

punk hardcore. La plupart des hétérosexuels qui ont écouté ce morceau ont appris quelque chose de

nouveau. On voit dans les vidéos de leurs concerts et les photos en Internet comment se déroulent

leurs concerts. On y voit des hommes tous nus ou avec des vêtements en cuir, des éléments de

sadomasochisme, des jouets sexuels entre autres. On y voit, physiquement et symboliquement une

volonté claire de casser avec la sexualité taboue, et en même temps une réaffirmation de l’identité

queer.

En imitant les « X » que mettent les straight edge sur leurs poings ou les straight edge vegans qui

mettent un « V », les aficionados du queercore (incluant les queers qui ne sont pas straight edge)

mettent un triangle, en rappelant le symbole des queers issue des homosexuels exterminés dans les

camps de concentration de la Deuxième Guerre mondiale.

On pourrait aussi citer le groupe étasunien « Black Fag », reprise du groupe « Black Flag », qui se

travestit ou utilise des éléments de « folles » lors de leurs concerts. Mais c’est assez intéressant de

voir la mise en scène. Avec des vêtements à la Village people, on voit au fond un grand drapeau avec

le logotype du groupe (voire annexe), d’autres personnes en utilisant des jupes et des foulards avec

des plumes en train de crier. Le public est plutôt queer, étant leur type de punk hardcore un peu plus

simple et lent privilégiant les paroles et la mise en scène. Si on compare avec Limp Wrist, la musique

est en effet moins violente mais avec le même type de paroles, la mise en scène est beaucoup mieux

chez Blag Fag. Mais un point en commun que pourraient avoir ces deux groupes est l’originalité des

couvertures de leurs albums.

Les albums, tout comme on avait déjà parlé des fanzines auparavant, mettent en avant des

couvertures provocatrices, avec des reprises des couvertures des albums les plus emblématiques du

hardcore (voir annexe), où l’on voit des hommes dans la plupart en faisant du sexe oral, ou des

formes phalliques à profusion. Les couvertures des albums des groupes lesbiennes et/ou féministes

mettent surtout des images avec des femmes nues, se masturbant, ou tout simplement avec des

attitudes provocatrices et des titres assez ironiques (« All women are bitches » de The Fifth Column

par exemple).

Dans cette même ligne on trouve des transgenres punks, souvent oubliés par le queercore. Des

artistes tels que Vaginal Davis, nom du à l’activiste du black feminism Angela Davis, qui est présente

non seulement dans le monde de la musique, mais participe aussi activement dans les collectifs

artistiques mondiaux, comme à Berlin, et participe aussi dans des films du mouvement queercore.

Ces groupes de musique présentent une mise en scène très conceptuelle, allant de Black Fag (groupe

qui a fondé avec Bibbe Hansen) jusqu’aux Afro-Sisters, où elle prend des différentes personnalités

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une fois en scène. On aurait le groupe punk de transgenres juifs, Schmekel, qui serait aussi innovant.

Mélangeant de la polka et du punk, Schmekel chante de manière ludique leur transition de genre.

Avec l’appui de synagogues LGBT, le groupe a pu se donner à connaître dans le monde. En quelques

mots, Schmekel c’est «Their music sounds a bit like The Kinks crashed a Bar Mitzvah, while their

lyrics combine bawdy humor and critical awareness, encouraging audiences to laugh at butt jokes

while deconstructing systems of oppression ».

The Afro-sisters

Conclusion:

Nous avons pu voir dans un premier temps comment le queercore et l’élargissement de la place de la

femme dans la scène hardcore ont contribué à changer le paradigme du punk hardcore, en

changeant l’agenda et les thématiques des paroles, voire même en changeant le comportement des

aficionados et des labels. Dans un deuxième temps, nous avons vu comment avec la réinterprétation

de la définition de « punk », les mouvements queers et féministes ont pu donner une nouvelle lueur

au punk en général. A travers des films et à travers des fanzines on a pu voir que tels mouvements

sont réellement devenus punk dans leur essence, arrivant à être encore plus extrémistes que les

punks ordinaires. Aussi par la mise en scène et l’innovation dans les scènes punks, le queercore et

les filles ont finalement crée de nouvelles formes d’expression dans le cadre de la subculture punk.

Une des critiques majeures pourrait être que le punk hardcore reste une subculture surtout propre

aux classes moyennes blanches, même si une velléité d’inclusion est prônée. Cela pourrait expliquer

dans une certaine mesure le déclin du Riot Grrrl, ou expliquer la commercialisation de groupes de

Queercore comme The Gossip, ayant comme public les couches moyennes des sociétés du Premier

Monde. Une autre critique que l’on pourrait faire au queercore serait cet « universalisme »

encouragé par les aficionados de ce courant. Sans être pessimiste, il faut reconnaître que la plupart

de l’audience mondiale aura toujours tendance à vouloir écouter la musique qui leur sera servie sur

une assiette en argent, étant la télévision et la radio les principaux vecteurs de diffusion. La

subversion 2.0 et les alternatives à la musique commerciale seront toujours des modes et/ou des

styles de vie menés que par certains dans le monde, même si la formule magique pour réussir dans le

showbiz est facile à créer. Même si le queercore et la musique féministe ont un certain succès dans le

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monde, il faudrait éviter toujours que ces musiques ne deviennent que des modes exotiques et que

ça soit « cool » d’écouter des LGBT à la radio.

Bibliographie :

-Photo couverture : http://www.flickr.com/photos/theroadiegirl/2056929751/

-Vidéo « Queer Youth TV Presents: Queercore »: http://www.youtube.com/watch?v=UHrLEHLK1lQ

-Article Wikipedia sur le Queercore : http://en.wikipedia.org/wiki/Queercore

-Article Wikipedia sur Riot Grrrl: http://en.wikipedia.org/wiki/Riot_grrrl

-Article Wikipedia sur The Gossip: http://en.wikipedia.org/wiki/Gossip_(band)

-Riot Grrrl Manifesto: http://onewarart.org/riot_grrrl_manifesto.htm

-KRISHTALKA, Sholem, Art essay: we are queercore:

http://www.xtra.ca/public/viewstory.aspx?AFF_TYPE=3&STORY_ID=2528&PUB_TEMPLATE_ID=2

-BELZER Hillary, Words + Guitar: the Riot Grrrl Movement and Third-Wave Feminism:

http://www8.georgetown.edu/cct/thesis/HillaryBelzer.pdf

-MILLER Earl, File under anarchy: a brief history of punk rock's 30-year relationship with Toronto's Art

Press:

http://www.thefreelibrary.com/File+under+anarchy%3a+a+brief+history+of+punk+rock's+30-year...-

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-Interview à Pansy Division : http://www.queermusicheritage.us/jul2009s.html

-Interview à Emmy Hutsebaut (de Ghent, Belgique), à Poitiers, le 12 décembre 2011.

-Biographie de Bruce LaBruce : http://en.wikipedia.org/wiki/Bruce_LaBruce

-Queer Zine Archive Project: http://www.qzap.org/

-Homocore Rules, Holy Tit Clamps Zine: http://www.holytitclamps.com/dcvv1990.pdf

-Article sur le queercore paru dans The Orange County News: http://www.ocweekly.com/2002-06-

27/features/queer-as-punk/

-Review sur le groupe punk de transgenres juifs Schmekel : http://www.jewcy.com/arts-and-

culture/%20schmekel_your_friendly_neighborhood_alljewish_all_transgender_punk_band

-Drague et cruising :

http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=cruising&source=web&cd=3&ved=0CGIQFjAC&url=http%3A

%2F%2Fechogeo.revues.org%2F3663&ei=BS36TuGdLOqIsQK02vm1CQ&usg=AFQjCNF2hPhkU1DVYcU

p9SRFNBsFVRxryw

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-BLOCK Adam, In search of the Homo-core underground, 1988:

http://www.monkeychicken.com/AdamBlock/1988_10_10zines.pdf

-Photo des Afro Sisters: http://www.flickr.com/photos/alicebag/526695754/

-Limp Wrist – Cruising at the Show: http://www.youtube.com/watch?v=4F70gltFEfs

-Punch – Feminists, Don’t Have a Cow: http://www.youtube.com/watch?v=X32vbcCjUV8

-Gayrilla Biscuits – Gay Edge Revenge: http://www.youtube.com/watch?v=UWbKOZ2Yjg8

-Have Heart – Bostons: http://www.youtube.com/watch?v=kv8Zth1AvGM

-Fifth Column – All Women are Bitches: http://www.youtube.com/watch?v=9TMDZfFtXlw

-The Yo Yo Gang Trailer: http://www.youtube.com/watch?v=ikWLaAP2YVk

-Skin Flick trailer: http://www.youtube.com/watch?v=U_vrgdnwe80

Annexes :

Couverture de l’album de 5th Column Affiche de concert de queercore Couverture de l’album de G.B.

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Couverture du fanzine Homocore #4 Couverture du fanzine Riot Grrrl Girl Germs