L’écriture Gagner tient toute du temps la place

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L’écriture tient toute la place ! De mon perron en montagne, je regarde le chien qui s’épuce et n’écrit pas. J’écoute le cochon dans l’enclos qui grogne et n’écrit pas. J’écoute aussi les clarines incessantes des Salers dans le pré. Je regarde le Rhône dans le lointain, les Alpes et la grande plaine brumeuse qui n’écrivent pas. Je regarde les herbes, les arbres, les roches et les derniers moucherons avant la neige qui n’écrivent pas. Alors, comme il faut bien que quelqu’un le fasse pour eux, j’écris. C’est venu comme ça, l’air de rien, dans l’enfance. Et c’est l’écriture qui, au fur et à mesure, a pris toute la place dans ma vie, dans mes yeux, dans mes mains. Une place qui n’existe pas vraiment. Qui fait ce qu’elle peut pour se tenir en ce monde ! Jusqu’en 2000, j’ai peint des bâtiments, vendu des clefs à molette et des niveaux à bulle, conduit des camionnettes, livré des tondeuses à gazon,élevé des lapins… Tout en écrivant. J’étais ouvrier écrivain. L’écriture était pour ceux qui le savaient et qui me regardaient vivre, un loisir assumé financièrement. Aujourd’hui que je me consacre uniquement à cette activité, écrivain au caractère ouvrier et sans statut particulier,je cherche toujours un salaire chaque mois, mais c’est plus dif- ficile. Certains disent, il est écrivain puisqu’il ne fait que ça ! L’on m’a proposé plusieurs fois dans le passé de devenir fonctionnaire, de m’investir dans telle ou telle entreprise… J’ai décliné toutes ces propositions pour avoir le temps d’améliorer cette phrase qui tourne en moi depuis si longtemps. Pour avoir le temps de travailler l’écriture. Actuellement, dans mon entourage proche, certains espè- rent que je devienne romancier.Ce que je suis peut-être en train de devenir à mon âge ! Poète c’est bien,mais romancier,c’est mieux pour être un écrivain. Dans la plaine, il y a une toute petite rumeur sur ma personne : L’écrivain ? Il habite là-haut,exactement sous le Crêt de la neige. En cette place qui n’existe pas vraiment. Joël Bastard n°237 - décembre 2008 le mensuel du livre en Rhône-Alpes en +++++ Le livre de Jacques Chauviré, La Terre et la guerre, réédité en 2008 par Le Temps qu’il fait, est le lauréat du premier prix « Mémorable » des libraires Initiales. Ce prix récompense la réédition d’une œuvre française ou étrangère majeure. On se réjouit de cette reconnaissance supplé- mentaire pour l’un des plus beaux romans de cet écrivain-médecin, mer- veilleux observateur de l’âme humaine, décédé en 2005 (voir Livre & Lire n°234, septembre 2008). www.initiales.org > www.arald.org beaux-livres /p.10-11 Des livres et des images Pour cette fin d’année, quelques ouvragesdes maisons de Rhône-Alpes : Éditions Michel Guérin, Éditions Stéphane Bachès, Fage Éditions, La Fontaine de Siloé, La Taillanderie. Et toutes les autres nouveautés… Gagner du temps Parce que, pour écrire, certains auteurs sont contraints de pratiquer le contre-la-montre, et que la minute est aujourd’hui à prix d’or, les aides à l’écriture restent l’un des temps forts des politiques en faveur du livre menées notamment par les institutions régionales, DRAC et Région. Avec les nouvelles mesures pour les créateurs, mises en place par le Conseil régional, et la rééva- luation des bourses à laquelle a procédé la DRAC Rhône-Alpes, le dispositif d’aide à l’écriture dépasse les 90 K€. (lire p.3) L.B. !!!!!!!!!!! Elle bouge à une vitesse normale On connaît Géraldine Kosiak pour ses livres, où le texte et l’image dialoguent de manière si subtile, et son regard souvent mélancolique sur les fragi- lités des êtres et les évidences (pas toujours) trompeuses de la vie. Et voilà que, par chance, on retrouve cette artiste protéi- forme pour une exposition, « Je bouge à une vitesse normale », à l’Espace arts plastiques de la Maison du peuple de Vénissieux (69), jusqu’au 31 décembre. On peut y découvrir les travaux présentés dans J’ai Peur et Catalogués (1995 et 2005), des suites photographiques : Japon, 206 vues (2006) et Monterey Stereo (2004), ainsi qu’un ensemble de grands formats récents. « La notoriété, c’est comme de manger des cacahuètes : quand on commence, on ne peut plus s’arrêter. » Cette citation d’Andy Warhol ouvre le livre de Frédéric Lavignette, La Bande à Bonnot, paru chez Fage Éditions. Jules Bonnot, une icône warholienne ? Photographie colorisée du plus célèbre des malfaiteurs.(lire p.11) les écrivains à leur place zoom/p.6 Association de libraires Libraires en Rhône-Alpes se relance. Objectif : créer un réseau professionnel à l’échelon de la région. voyage/p.9 Diois ou Montana ? Elle vit dans la Drôme et ne quitte sa vallée que pour les paysages du continent américain. Son dernier livre est le portrait d’un trappeur. Rencontre avec Françoise Perriot. Rive-de-Gier privé de bibliothèque Roland Delpui est le directeur d’une médiathèque qui n’existe plus. Après les intempéries de début novembre et la montée des eaux du Gier, le rez-de-chaussée de la médiathèque de la ville, environ 600 m 2 , a été entièrement détruit. Seule la partie jeunesse de l’équi- pement, 400 m 2 à l’étage, a survécu. Sur les 40 000 références, il n’en reste plus que 10 000. Estimation des dégâts, hors informatique et bâtiment, 1 M€. « Le plus dur, confie le directeur, c’est que, une fois l’urgence passée, on ne sait pas par où commencer tant la tâche est immense… » Première préoccupa- tion, faire en sorte que la biblio- thèque continue à vivre en dehors de ses murs. Ensuite, reconstituer les fonds : « Mais il faut d’abord des locaux… », conclut Roland Delpui. Médiathèque Louis Aragon www.rivedegier.fr urgence © Fage Éditions

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L’écrituretient toutela place !De mon perron en montagne, je regardele chien qui s’épuce et n’écrit pas.J’écoute le cochon dans l’enclos quigrogne et n’écrit pas. J’écoute aussi lesclarines incessantes des Salers dans lepré. Je regarde le Rhône dans le lointain,

les Alpes et la grande plaine brumeuse quin’écrivent pas. Je regarde les herbes, lesarbres, les roches et les derniers moucheronsavant la neige qui n’écrivent pas. Alors,comme il faut bien que quelqu’un le fassepour eux, j’écris. C’est venu comme ça, l’airde rien,dans l’enfance.Et c’est l’écriture qui,au fur et à mesure, a pris toute la place dansma vie,dans mes yeux,dans mes mains.Uneplace qui n’existe pas vraiment. Qui fait cequ’elle peut pour se tenir en ce monde !Jusqu’en 2000, j’ai peint des bâtiments,vendudes clefs à molette et des niveaux à bulle,conduit des camionnettes, livré des tondeusesà gazon, élevé des lapins… Tout en écrivant.J’étais ouvrier écrivain. L’écriture était pourceux qui le savaient et qui me regardaientvivre, un loisir assumé financièrement.Aujourd’hui que je me consacre uniquementà cette activité, écrivain au caractère ouvrieret sans statut particulier, je cherche toujoursun salaire chaque mois, mais c’est plus dif-ficile.Certains disent, il est écrivain puisqu’ilne fait que ça ! L’on m’a proposé plusieursfois dans le passé de devenir fonctionnaire,de m’investir dans telle ou telle entreprise…J’ai décliné toutes ces propositions pour avoirle temps d’améliorer cette phrase qui tourneen moi depuis si longtemps. Pour avoir letemps de travailler l’écriture. Actuellement,dans mon entourage proche, certains espè-rent que je devienne romancier.Ce que je suispeut-être en train de devenir à mon âge !Poète c’est bien,mais romancier, c’est mieuxpour être un écrivain. Dans la plaine, il y aune toute petite rumeur sur ma personne :L’écrivain ? Il habite là-haut, exactement sousle Crêt de la neige. En cette place qui n’existepas vraiment. Joël Bastard

n°237 - décembre 2008le mensuel du livre en Rhône-Alpes

en +++++Le livre de Jacques Chauviré, La Terre etla guerre, réédité en 2008 par Le Tempsqu’il fait, est le lauréat du premier prix« Mémorable » des libraires Initiales. Ceprix récompense la réédition d’une œuvrefrançaise ou étrangère majeure. On seréjouit de cette reconnaissance supplé-mentaire pour l’un des plus beauxromans de cet écrivain-médecin, mer-veilleux observateur de l’âme humaine,décédé en 2005 (voir Livre & Lire n°234,septembre 2008). www.initiales.org

> www.arald.org

beaux-livres/p.10-11Des livres et des imagesPour cette fin d’année,quelques ouvragesdes maisons de Rhône-Alpes : Éditions MichelGuérin, Éditions Stéphane

Bachès,Fage Éditions,La Fontaine de Siloé,La Taillanderie.Et toutes les autresnouveautés…

Gagnerdu tempsParce que, pour écrire, certainsauteurs sont contraints de pratiquerle contre-la-montre, et que laminute est aujourd’hui à prix d’or,les aides à l’écriture restent l’un destemps forts des politiques en faveurdu livre menées notamment par lesinstitutions régionales, DRAC etRégion.Avec les nouvelles mesurespour les créateurs, mises en placepar le Conseil régional, et la rééva-luation des bourses à laquelle aprocédé la DRAC Rhône-Alpes, ledispositif d’aide à l’écriture dépasseles 90 K€. (lire p.3) L.B.

! ! ! ! ! ! ! ! ! ! !Elle bouge à une vitessenormaleOn connaît Géraldine

Kosiak pour ses livres,où le texte et l’imagedialoguent de manière si subtile, et sonregard souvent mélancolique sur les fragi-lités des êtres et les évidences (pas toujours)trompeuses de la vie. Et voilà que, parchance, on retrouve cette artiste protéi-forme pour une exposition, « Je bouge àune vitesse normale », à l’Espace artsplastiques de la Maison du peuple deVénissieux (69), jusqu’au 31 décembre. Onpeut y découvrir les travaux présentés dansJ’ai Peur et Catalogués (1995 et 2005), dessuites photographiques : Japon, 206 vues(2006) et Monterey Stereo (2004),ainsi qu’unensemble de grands formats récents.

« La notoriété, c’est comme de manger des cacahuètes : quand on commence, onne peut plus s’arrêter.» Cette citation d’Andy Warhol ouvre le livre de Frédéric Lavignette,La Bande à Bonnot, paru chez Fage Éditions. Jules Bonnot, une icône warholienne ?Photographie colorisée du plus célèbre des malfaiteurs. (lire p.11)

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zoom/p.6Association de librairesLibraires en Rhône-Alpes serelance. Objectif : créer un réseauprofessionnel à l’échelon de la région.

voyage/p.9Diois ou Montana ?Elle vit dans la Drôme et nequitte sa vallée que pour lespaysages du continent américain.Son dernier livre est le portraitd’un trappeur. Rencontre avecFrançoise Perriot.

Rive-de-Gier privé de bibliothèqueRoland Delpui est le directeurd’une médiathèque qui n’existeplus. Après les intempéries de

début novembre et la montée deseaux du Gier, le rez-de-chaussée dela médiathèque de la ville, environ600 m2, a été entièrement détruit.Seule la partie jeunesse de l’équi-pement,400 m2 à l’étage,a survécu.Sur les 40 000 références, il n’enreste plus que 10 000. Estimation

des dégâts, hors informatique etbâtiment,1 M€.« Le plus dur, confiele directeur, c’est que, une foisl’urgence passée,on ne sait pas paroù commencer tant la tâche estimmense… » Première préoccupa-tion, faire en sorte que la biblio-thèque continue à vivre en dehorsde ses murs.Ensuite,reconstituer lesfonds : « Mais il faut d’abord deslocaux… », conclut Roland Delpui.

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premier planDans la rentrée littérairedes éditions Champ Vallon

Nunez et lesfragments duNarcisseLa rentrée littéraire des éditionsChamp Vallon a été marquée parla parution de deux romans inclas-sables. Après Une vraie boucherie,de Bernard Jannin,dont nous vousavons déjà parlé dans ces colonnes,place à l’objet littéraire nonidentifié d’un jeune auteur bourréde talent, Laurent Nunez, quidonne, avec Les Récidivistes, unlivre ambitieux, entre autobio-graphie et pastiche.

On avait découvert Laurent Nunezgrâce à la parution d’un essai, inti-tulé Les Écrivains contre l’écriture,dans lequel il convoquait desmonuments comme Cioran,Artaud ou Valery, pour s’interrogersur les liens entre la vie et la litté-rature. Son premier roman, LesRécidivistes, confirme qu’il est déci-dément un auteur à part,puisque cetexte autobiographique (autofiction-nel ?) sur ses amours de jeunesse etson passage à l’écriture est composésur le mode du pastiche.Nunez s’est en effet glissé dans lespas de quatre immenses écrivainspour raconter sa propre histoire :Pascal Quignard, Marguerite Duras,Marcel Proust et Jean Genet.Très loin d’une simple imitation(même si les pastiches sont saisis-sants de justesse), Nunez s’empareà la fois du style, mais aussi desthèmes (l’oubli, la perte, le tempsretrouvé), des atmosphères et desmodes opératoires de chacun deses maîtres pour rendre compte deses expériences personnelles avecsa propre voix.Le plus remarquable est sans douteque cette démarche,d’une profondeérudition, ne verse jamais dans ladémonstration ou la pédanterie.Elleconfère à l’autoportrait de LaurentNunez une dimension singulière,qui fait de cette éducation senti-mentale et littéraire un livre intimeà la fois intelligent et émouvant.Yann Nicol

Rencontre avec Laurent Nunez

Écrire avec…Avant de publier Les Récidivistes,vous aviez écrit un essai intituléLes Écrivains contre l’écriture.Quels sont les liens qui unissentces deux livres ?L’idée du livre m’est venue lorsqueje travaillais sur cet essai. C’étaiten fait mon mémoire de maîtrise,et j’avais 21 ans… J’essayais derépondre à ceux qui s’estimaientuniques,originaux,qui craignaientl’influence de la lecture commeune sorte de contamination deleur « moi intérieur ». En fait, j’aitenté dans Les Récidivistes de navi-guer entre les reproches deCioran : « Presque toutes les œuvressont faites avec des éclairs d’imi-tations, avec des frissons appris etdes extases pillées »,et le conseil dePaulhan : « un écrivain qui a donnéune année de sa vie à un seulauteur, mettons Jules Renard, ouValéry, ou Proust (entre nous, c’estlà une excellente méthode) – mais,qui a lu cet auteur à fond, qui l’aépuisé –, pourra encore écrire demauvais essais, ou des romansmédiocres. Ça nous arrive à tous.Il peut du moins être sûr d’unechose : c’est qu’il ne fera jamais duRenard, ou du Valéry, ou duProust. » J’ai voulu m’imprégnerdes grands écrivains dès ce premierroman, pour peut-être me débar-rasser d’eux.

Dans Les Récidivistes, vous livrezune autobiographie à travers lavoix de quatre écrivains : Proust,Genet,Duras et Quignard.Pourquoi ceux-là ? Pourquoi choisird’assumer cet héritage plutôt quede le masquer ?Pour ce qui est des auteurs, deuxcritères ont joué dans le choix. Ilfallait évidemment qu’ils me plai-sent, que j’envie leurs autobiogra-phies et leur vision du monde (plusrarement leur vie), mais il fallaitsurtout que les quatre styles soientreconnaissables, quitte à êtredécriés par certains.Or,on a repro-ché à tous ces écrivains (à Duras etProust surtout, et pour des raisonscontraires) leurs manières d’écrire.Ce fut un plaisir immense de pré-paration : il m’a fallu les relire, tous,et entièrement. J’ai vécu quatre ansavec eux. Notre époque est pleinedu désir d’individualité, d’origina-lité, de spontanéité. Je ne mereconnais pas là-dedans. Alors jen’ai pas voulu masquer les auteurschez qui j’avais puisé.Au contraire :j’ai voulu montrer clairementqu’on n’écrit jamais à partir derien. L’originalité, ça n’existe pas.

Vous faites là plus qu’une vaineimitation,puisque vous empruntezle style de ces écrivains, maisaussi leur atmosphère, leur« mode opératoire », leurs thèmes(la perte, l’oubli, la mémoire…),pour faire un livre finalement trèspersonnel…Il ne s’agissait pas de faire unsimple pastiche, de copier desstructures stylistiques. Je voulaismontrer que lire un auteur,c’était faire changer la vie, latourner définitivement du côté de

cet auteur. Une fois que vous avezlu Proust, vous n’êtes plus du toutvous-même. Je voulais montrerque l’être humain se construit àpartir d’une combinaison d’autresêtres humains, et qu’il lui importede bien choisir cette combinaison.On sera ceux qu’on aura lus : c’estma définition, assez personnelle,de la liberté.

Il est particulièrement frappantde voir que vous combinez deuxgenres a priori opposés : l’auto-biographie et le pastiche…J’ai essayé de remplir une case videde la théorie littéraire : réunir l’au-tobiographie (réputée pour êtretransparente,une sorte de commu-nication totale et confiante avecautrui) et le pastiche (le genre leplus faux, c’est-à-dire le plus artifi-ciel). J’espère que le résultat adonné un livre instable, des récitsindécidables.

Le narrateur est écartelé entre lafiction et la vie réelle, si bien qu’ilvit certains événements en échoà des scènes issues de l’œuvredes auteurs cités. Sur le bandeauqui orne votre livre, se trouve unetoile de Hopper qui symbolisecette relation ambiguë entre lavie et la littérature…Cette peinture s’intitule L’Excursiondans la philosophie. Dès que je l’aivue, je l’ai voulue pour ce roman.On y voit un homme assis sur unlit,habillé, et derrière lui,une fille,allongée, nue, de dos. Ils viennentvisiblement de faire l’amour. Mais– c’est Hopper qui l’explique –l’homme n’a pas vraiment aimé :alors il relit un passage de Platon, lephilosophe du grand amour. Il essaiede comprendre la différence entrece qu’il a lu de l’amour et ce qu’ilvient de vivre en faisant l’amour.Cetécart le désespère.Je suis,peut-être,c’est vrai, ce désespéré-là.Propos recueillis par Y.N.

Laurent NunezLes RécidivistesChamp Vallon478 p., 24 €ISBN 978-2-87673-490-6

entretien

Laurent Nunez est né en 1978 à Orléans.Il publie son premier essai, Les Écrivains

contre l’écriture, chez José Corti,en 2006.En 2008 sort son premier roman, Les

Récidivistes, chez Champ Vallon.

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lecteurs des nombreux romans de Sergio Atzeni etde Francesco Abate,aux éditions La Fosse aux ours.Du côté de la jeunesse, les bénéficiaires sont :Catherine Cuenca, qui poursuit son impression-nant travail sur les enfants dans la guerre, aprèsFrères de guerre (Flammarion), récompensé parde nombreux prix littéraires ; Élisabeth Combres,auteur de plusieurs documentaires pour lesjeunes et d’un roman très remarqué sur le géno-cide du Rwanda, La Mémoire trouée (GallimardJeunesse) ; Lionel Le Néouanic, inventeur icono-claste et tous azimuts avec ses images à base demodelage peint et auteur du magnifique albumL’Homme sans tête (Seuil Jeunesse) ; JérômeRuillier, qui délaisse les terres de l’album pour unroman graphique et continue, ici comme ailleurs,à mettre à mal les clichés et à transgresser lesfrontières ; Fabrice Turrier, enfin, qui poursuitainsi son parcours d’auteur-illustrateur riched’une bonne trentaine de livres.

Et la littérature ?

Pour le reste, on est frappé par la diversité desentreprises littéraires et poétiques,qui s’exprimeà travers les autres aides attribuées. Des tita-nesques chantiers entrepris par Onuma Nemon,qui poursuit son incroyable cosmologie (à paraîtrechez Verticales), ou par Patrick Beurard-Valdoye,

Douze écrivains et deux tra-ducteurs ont bénéficié cetteannée d’une bourse d’aide àl’écriture ou à la traductionattribuée par la Région et parla DRAC Rhône-Alpes, avec leconcours de l’ARALD. Nettementrenforcé à la suite des Rencontresrégionales pour le livre, en 2007,le nouveau dispositif d’aide auxcréateurs voit grand.

C’était l’une des priorités affichéespar le Conseil régional dans sa nouvellepolitique en faveur du livre lancée cetteannée : replacer les créateurs au cœurdes politiques culturelles, en diversifiant et enaugmentant sensiblement le soutien qui leurest apporté. Côté création littéraire, cela s’estnotamment traduit dès 2008 par un engage-ment significatif de la part de la Région dansun dispositif d’aide aux écrivains,que la DRACRhône-Alpes pratiquait en collaboration avecl’ARALD depuis de nombreuses années.Destinées à des auteurs de littérature (roman,récit, nouvelles, poésie, théâtre, jeunesse), d’essais(hors travaux universitaires), ainsi qu’à destraducteurs, ce soutien est à la fois une aidematérielle non négligeable apportée aux écrivains– et la possibilité de « s’offrir du temps » –, maisaussi le signe d’une reconnaissance et d’unencouragement pour des auteurs soumis auxaléas de la vie éditoriale et à la faiblesse desdroits d’auteur.Examinés par une commission réunissant desexperts et des professionnels du livre, les dossiers,qu’ils proviennent de débutants ou d’écrivainsconfirmés, doivent concerner des projets d’écri-ture sur lesquels les membres de la commissionont à se prononcer.

12 + 2 = 92 000…

En 2008,douze écrivains et illustrateurs ainsi quedeux traducteurs auront donc été aidés dans lecadre de ce dispositif, qui reste sans conteste l’undes plus ambitieux en France (hors CNL).Pour ce qui est de la traduction, deux aides spé-ciales sont apportées cette année par la DRACRhône-Alpes à Françoise Marel, qui poursuit unprécieux travail autour de B.S.Johnson chezQuidam Éditeur, et à Marc Porcu, dont l’engage-ment en faveur de la littérature italienne et desauteurs sardes a pu notamment profiter aux

dont le cheminement poétique à travers le Cycledes exils emprunte les voies/voix mythologiquesde la vieille Europe, aux œuvres minusculeset précieuses d’Alexandre Bergamini (autresmythologies,autre exil,dans Retourner l’infâmeet Cargo mélancolie, chez Zulma) ou d’HubertVoignier (dont les textes poétiques – Cheyne

Éditeur – cultivent la lenteur et lesilence autant que le réel et la fiction) ; des voyages narratifs deVirginie Ollagnier, qui sait si bien semouvoir dans l’espace et dans letemps (L’Incertain, Liana Levi), àceux, accomplis au cœur de lamémoire par Christophe Petchanatzou à travers les rencontres que Jean-Pierre Spilmont provoque dans lemonde entier ; les champs littérairess’affichent ainsi dans toute leurrichesse et leur singularité.Or,en un temps où la circulation deslivres fabriqués devient de plus enplus prégnante dans l’économiegénérale du livre, c’est précisémentcette singularité littéraire et créative– même si elle ne fait pas l’unanimité,surtout si elle ne fait pas l’unanimité –que l’institution, tant bien que mal,se doit de soutenir. L.B.

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premier plan

Les aides à l’écriture

7 bourses de découverte à 4 000 € (Région Rhône-Alpes)3 bourses d’encouragement à 7 000 € (DRAC Rhône-Alpes)

3 bourses de création à 13 000 € (2 : DRACRhône-Alpes ; 1 : Région Rhône-Alpes)51 dossiers de demande de bourse en 2008

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ères

Les bourses d’écriture et de traduction

Le choix de la diversité

Références exigéesAprès une délibération du conseil d’administration duCentre national du livre qui l’instituait, en septembredernier, les seize membres de la commission « Librairiede référence », présidée par Antoine Gallimard, ont éténommés pour trois ans par le ministre chargé de laCulture sur proposition du président du CNL.Cette commission est chargée d’examiner les dossiersde demandes de subventions pour la mise en valeurdes fonds en librairie et aura « vocation à siéger dansla commission compétente pour l’attribution du labelfiscal de librairie indépendante de référence (LIR) quidevrait prochainement être créé ».La commission comprend deux représentants del’État, deux personnalités qualifiées, trois libraires,trois directeurs commerciaux, trois éditeurs (AntoineGallimard, Marion Mazauric, Anne-Marie Métailié) ettrois écrivains (Daniel Pennac, Michel Lesbre, LaurentGaudé). Du côté de Rhône-Alpes, on remarque, parmiles libraires, Françoise Charriau, responsable de lalibrairie Passages, à Lyon, et parmi les personnalitésqualifiées, Geneviève Dalbin, directrice de l’ARALD.

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On connaît bien la machine Internet,et même si on aime le livre, celui-cidoit évoluer. »D’où l’intérêt de Samedi midi Édi-tions pour le livre numérique, déjà

Après leur Histoire illustrée ducostume, véritable référence dugenre, Samedi midi Éditionspublient une Encyclopédie duchapeau et se positionnent clairement sur le marché éditorialde la mode et de son histoire.Une image qui complète celle dontbénéficie cette maison lyonnaisedans le domaine du tourisme.

Patrice Lejeune est formel – et unbrin provocateur –, la réussite deSamedi midi Éditions est inverse-ment proportionnelle à sa présenceen librairie… Et malgré le succès despremiers guides à thèmes dans lesecteur des chambres d’hôtes decharme (trois à quatre titres par an),lancés par sa maison dès 2001,60 %du chiffre d’affaires se fait désormaissur Internet. « C’est une douce alchi-mie », explique le directeur de lamaison d’édition, un ingénieur deformation qui n’a pas peur du marke-ting. « Notre fort développement surla Toile s’explique d’ailleurs en partiepar l’existence des guides, qui nouslégitiment, analyse Patrice Lejeune.

expérimenté avec Cyberlibris en2006. Car le domaine du tou-

risme se prête parfaitementà ces développe-ments, qui créent

de l’interactivité.Certains titresen prépara-tion ne seront

ainsi publiés que sous formenumérique, vendus sur

Numilog (12 à 15 € au lieu de20 € pour les guides). « Nous

sommes à fond dans le Web 2 »,assure Patrice Lejeune, dont la

maison suit le mouvement lancépar Gallica 2. On comprend aussipourquoi les derniers développe-ments en matière de Reader,notam-ment du côté de chez Sony, réjouis-sent cet éditeur atypique, quiconsidère que « les libraires gèrenttrop souvent leur rayon tourismecomme il y a cinquante ans. » Pourlui, au contraire, le marché éditorialdu tourisme,c’est déjà demain. L.B.

www.samedimidi.com

Éditions du Lampion

Des contes, des histoires, deslégendes… Et des illustrations !Les Éditions du Lampion,nouvellement créées parJean-François Durand,misentsur des textes courts,confrontés à des illustra-tions originales.Les adultescomme les enfants serontséduits par le merveilleux,

l’insolite ou l’imaginaire dans ceslivres dont le format met en valeurtextes autant qu’images. De fablesen contes, d’héritage classique en

mythes revisités,du Canadaà l’Italie, quatre volumessont déjà au catalogue.Installé en Ardèche, l’édi-teur n’a pas fini d’emmenerses lecteurs vers d’autresunivers.www.editions-lampion.fr

Une histoirede chefsQu’est-ce qu’une cervelière, un recou-leto ou une volante ? Non pas des nomsd’oiseaux, mais de couvre-chefs… Se plonger dans ce dictionnaire ency-clopédique, fruit d’un monumentaltravail mené durant près de quinzeans par les auteurs, Éliane Bolomier,Jean Dumonthier, Jean-Pierre Gaudin,Pierre Morel, l’Atelier-Musée du cha-peau, situé à Chazelles-sur-Lyon (Loire)et le Club chapeau-passion, c’estcomprendre la richesse et la longuehistoire des rapports entre l’hommeet sa tête.Cet ouvrage synthétique,quitraite de tous les aspects du chapeau,est d’ailleurs une première. Histoire,technique, symbolique, le chapeau estlié à l’évolution du costume et resteun « objet ethnographique privilégié ».Y compris celui d’Amélie Nothomb,qui signe la préface… L.B.

Encyclopédie du couvre-chefSamedi midi Éditions400 p., 95 €ISBN 978-2-915928-07-5

Cinq ans d’artet de livresCinq années d’existence pour FageÉditions, cinq années au coursdesquelles Gilles Fage et PhilippeGrand, rejoints par LaurenceBarbier, ont construit un cataloguesolide centré sur l’art, principale-ment contemporain, à quelquesfantaisies près… Cet anniversaire

sera marqué par l’exposition« Temps de pause », qui réunira lesœuvres de plusieurs artistespubliés chez l’éditeur lyonnais.Frédéric Delangle, Jean-Luc Parant,John Berger, Marie Borel et biend’autres exposeront leurs photo-graphies, sculptures, peintures,dessins… à la galerie Annie Lagier,à l’Isle-sur-la-Sorgue (84), à partirdu 6 décembre et jusqu’au 4 janvier.www.fage-editions.c.la

parution

19e Journées deLyon des auteursde théâtre618 manuscrits reçus cette année etsix textes sélectionnés et présentésà la médiathèque de Vaise, à Lyon,du 4 au 6 décembre, les Journées deLyon des auteurs de théâtre pour-suivent leur travail au long cours surl’écriture dramatique francophone.Seront présentés cette année : Moded’emploi, d’Alexandre Badea, Crash

Test,de Marie Dilasser,Les Éoliennes,d’Anne Frédérique Rochat, Été, deCarole Thibaut, Sainte dans l’incen-die, de Laurent Fréchuret, Verticalede fureur, de Stéphanie Marchais.Durant les trois journées, qui récom-pensent ces œuvres non jouées et nonpubliées, les textes sont mis en espacepar les auteurs ou par des compagniesprofessionnelles. Un débat intitulé« Théâtre : masculin/féminin, la parti-tion singulière » est par ailleurs orga-nisé le 6 décembre à 10h.Il sera animépar Reine Prat (DTMS, ministère de laCulture), auteur du rapport intitulé« Pour l’égal accès des femmes etdes hommes aux postes de respon-sabilité, aux lieux de décision, à lamaîtrise de la représentation ».www.auteursdetheatre.org

Samedi midi Éditions : l’avenir du tourisme

Une maison d’actualité

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En août dernier, la librairie Classique,dans le 6e arr. de Lyon, changeaitde capitaine : c’est désormais OdileFrondas qui mène la barque. Lapassion du livre en guise de gouvernailet l’aide de la Région Rhône-Alpespour gonfler les voiles, cetteancienne contrôleuse de gestion atenté l’aventure.Après un mois de travaux, la librai-rie a rouvert ses 45 m2. Avec 1 000références jeunesse (sur un totalde 4 000) et des animations autourdu conte, Odile Frondas fait claire-ment cap sur un public familial,qui se retrouve nombreux à bordde la librairie, heureux de trouverlà livres et vie de quartier. Malgréquelques embûches, notammentdes négociations délicates avec lesfournisseurs, l’esprit initial est là :« Faire de cette librairie un lieud’échanges et de découvertes. »

au Sénégal,puis retour en France pourrejoindre les Compagnons d’Emmaüs.C’est lassés de la vie parisienne qu’ilsdécident de partir pour reprendre lalibrairie. Un blog, des liens avecles associations locales, de futuresanimations en tête…, ces deuxnouveaux libraires ont le goût ducontact humain et valent le détour.Marion Blangenois

* Dans le cadre du tutorat organisé parl’association Libraires en Rhône-Alpes.

BD’Art : 10e éditionDu 5 au 7 décembre, Rive-de-Gierfêtera les dix ans de son Festival

de la bande dessinée et du dessin depresse. Un événement initié par l’asso-ciation BD’Art, née en 1999 à l’initia-tive de quatre passionnés qui souhai-taient promouvoir le neuvième art« par tous les moyens existants ».Depuis lors, la ville et la cinquantainede bénévoles de l’association accueillentun salon de la BD et une trentained’auteurs chaque premier week-end dedécembre, ainsi qu’un ensemble d’ani-mations, notamment à destination desjeunes, durant quasiment toute lasemaine.On notera,par exemple, la soi-rée de présentation en avant-première(le 2/11) du film Mia et le Migou, réa-lisé par Jacques Remy Girerd aux stu-dios Folimage de Valence, ainsi que lajournée consacrée aux publics scolaires(le 5/11), avec des ateliers, des projec-tions et des expositions. Par ailleurs,BD’Art intervient également dans lesmédiathèques de huit communes duGier. Cette année, en plus de la rétros-pective des 10 ans, on pourra rencon-trer à Rive-de-Gier, entre autres, PierreTranchand, Poupard, ChristopheCazenove, Ciro Tota, André Amouriq,Robert Ayats… L.B.

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Raconte-moi (enfin)la terre !Le voyage ne réserve pas que debonnes surprises… François Chazelleet son équipe de libraires l’ontappris à leurs dépens, eux qui ontété contraints de quitter leur empla-cement d’origine (voir Livre & Lirede mai 2008) pour un nouveau portd’attache, rue du Plat, à quelquespas de la place Bellecour, à Lyon.La nouvelle librairie de voyage etcultures du monde a finalementouvert début novembre, avec à peuprès deux mois de retard sur lesdates prévues.Ouvert,mais à moitiéseulement… Et même moins,puisque c’est un tiers de la librairie(environ 120 m2) qui est accessible,en attendant l’ouverture de l’en-semble, qui devrait se faire à lami-décembre (inauguration prévuele 11 au soir).À l’origine de ces ennuisà rebondissements, un différendavec le propriétaire des murs sur lestravaux de rénovation concernantune immense verrière au-dessous

de laquelle se trouvera l’espace derestauration.Lorsque l’ensemble de la librairiesera ouvert au public, Raconte-moila terre « nouvelle formule » pro-posera une offre de livres en netteaugmentation (+ 30 à 40 %), unvéritable café-restaurant, avec cui-sine bio et produits issus du com-merce équitable, ainsi qu’une sallede conférence de 60 m2 en sous-solpour accueillir les nombreusesanimations que les clients de lalibrairie ont appris à apprécier. Uneclientèle qui, elle, ne devrait pashésiter à voyager. L.B.

Le bal des enfantsdu limonUne nouvelle association d’organi-sation et de promotion d’événe-ments liés aux livres est née autourde la librairie lyonnaise Le Bal desardents. Il s’agit des Enfants dulimon, un hommage à RaymondQueneau et aux fous littéraires,maisaussi et surtout la volonté d’organiserdes rencontres avec des écrivains, deséditeurs, des penseurs. L’associationdispose des locaux de la librairie –qui reste désormais ouverte chaquemercredi jusqu’à 21h – et notammentd’une salle de 60 m2 dédiée aux ani-mations. À signaler, deux expositionsintéressantes : l’une est consacréeà « Albert Camus et les libertaires »,jusqu’au 15 décembre, l’autre per-met de découvrir deux ouvragesi l l u s t r é spar ThierryGuitard etparus auxé d i t i o n sLibertalia,jusqu’au 13décembre.

Profils atypiques

Autre défi, relevé récemment àAix-les-Bains, la reprise de la librairiedes Danaïdes. En juin, Romain etBénédicte Cabane arrivent dans leslieux avec une envie claire : animerune librairie généraliste de qualité.Le maître mot est « le conseil ».Mais, malgré l’accompagnement del’Association pour le développementde la librairie de création (ADELC) etl’aide de Maya Flandin, de la librai-rie Vivement Dimanche* (Lyon), lesdébuts sont difficiles. « L’ancienresponsable était une personnalité,ici, et une partie de la clientèle venaitautant pour les livres que pour lui »,avance le nouveau libraire.Pourtant,avec leur parcours atypique,Romainet Bénédicte Cabane suscitentl’envie de la rencontre. Études decommerce,deux ans de coopération

Raconte-moi la terre14, rue du Plat69002 Lyonwww.raconte-moi.com

Reprises de librairies à Aix-les-Bains et à Lyon

Changements d’équipages

actualités / librairie

Librairie Classique42, av. de Saxe - 69006 Lyonwww.librairie-classique.com

Librairie des Danaïdes3, place Carnot - 73100 Aix-les-Bainswww.librairie-danaides.com©

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Budget : 60 000 €Principaux financeurs : Villede Rive-de-Gier, Conseil généralde la Loire, Région Rhône-Alpes, Syndicat intercommunaldes Pays du Gier

Public : 3 000 visiteurs en 2007Près de 150 auteurs-illustrateursaccueillis depuis 1999

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Le Bal des ardents17, rue Neuve69001 Lyonwww.lebaldesardents.com

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Organiser un festival littéraire en milieu rural :retrouvez chaque mois un nouvel épisode

(4) Des écrivainsen Grésivaudan

Pari doublement réussi pour lesorganisatrices du festival Écrivainsen Grésivaudan,qui s’est tenu du13 au 15 novembre : un publictrès actif était au rendez-vouset la programmation diversifiée aenrichi les échanges. Reste unbilan à tirer avant de « partir »vers une 9e édition.

Même si le bilan chiffré reste àfaire avec chacune des quatorzecommunes participantes, avec leslycées de Pontcharra et Villard-Bonnot, avec la MAPAD de Frogeset le CHU de Grenoble, le bilan« sensible » rend d’ores et déjà

justice à l’engagement de touteune équipe.La 8e édition du festivalÉcrivains en Grésivaudan a plusque tenu ses promesses.Les biblio-thèques, lilliputiennes comprises,ont fait le plein de lecteurs. « Unpublic plus actif, note Béatrice

Berger-Marroux,membredu comité de pilotage,parce que les livres ontvraiment circulé enamont et que la qualitéainsi que la diversité desécritures ont suscité lacuriosité ».Pour la première fois eneffet, Écrivains enGrésivaudan avait choiside sortir du pur roma-nesque, en invitantl’ethnologue et écrivainJean-Yves Loude, ainsique l’essayiste-voyageurOlivier Germain-Thomas.Mais ce possible écueilde la programmation

s’est retourné en son contraire : unappel à lire, à dépasser les catégo-ries et les cloisonnements. PourSonia Chevalier, présidente de l’association, le pari était pourtantrisqué : « Deux hommes écrivains-voyageurs à la forte présence et

à la bibliographie conséquente, ettrois femmes, dont certaines trèsneuves sur la scène littéraire, plusengagées dans des voyages inté-rieurs.» Mais les liens se sont faits,et les deux rendez-vous qui croi-saient les expériences et lesapproches ont additionné les réus-sites au lieu de confronter des cli-vages. Et, comme le note avecmalice Yann Nicol, animateur de latable-ronde qui clôt rituellement lamanifestation,« la réunion de deuxUlysses et de trois Pénélopes a heu-reusement tissé du lien. » Les écri-tures intimistes de Claudie Gallay,Fabienne Juhel et Sylvie Aymardont ainsi eu leur part dans cevoyage collectif.Forte de ce coup d’essai, l’équiped’organisation partira bien vite àl’assaut de sa 9e édition,en réunissanttous ses partenaires pour phospho-rer avec elle. Parce que ça se passecomme ça, dans le Grésivaudan…Danielle Maurel (Fin)

de

A à

Z…

zoom

Marion Baudoin, ancienne librairede Raconte-moi la terre (Lyon) dotéed’une forte expérience dans ledomaine de la formation.Depuis mai 2008, la permanente del’association est allée à la rencontrede la cinquantaine d’adhérents – dulibraire de premier niveau,dans unegrande ville,au tout nouveau librairede deuxième niveau, dans unepetite ville – afin de mener desentretiens et d’identifier lesbesoins : « L’ensemble des librairesont envie de se regrouper, témoigneMarion Baudoin.Les grands librairesont montré qu’ils avaient envie d’êtrecollectifs et de défendre la profession

Nouveau départ pour l’associationLibraires en Rhône-Alpes

Librairesentre euxCréer un réseau professionnelà l’échelle de la région, c’estl’objectif de l’association Librairesen Rhône-Alpes, née en 2005.Aujourd’hui, dans un contexteéconomique difficile, ce regrou-pement de cinquante-septlibraires connaît un nouvelessor et s’invente de nouvellesmissions. Portrait de groupe.

Fabriquer du lien, mutualiser lesactions, valoriser l’expérience…, lesambitions de l’association Librairesen Rhône-Alpes prennent tout leursens au regard de la période de fra-gilité et de remise en cause quetraverse actuellement la librairieindépendante.Sur ce plan, la volonté des librairesa rencontré le soutien de la DRACRhône-Alpes et de la Région, ce quia permis à l’association de se relan-cer en recrutant une coordinatrice,

en région,oùle Syndicatde la librairief r a n ç a i s e(SLF) n’estpas implanté.Et puis, dansles petitesvilles, beau-coup de pro-fess ionnelsont un senti-ment d’isole-ment et sou-

haitent échanger, avoir des projetscommuns ».

Profession, interprofession…

Pour répondre à la diversité de lademande, l’association,présidée parKurt Nagel (Librairie des Bauges,Albertville), a d’ores et déjà lancéune série d’initiatives : un siteInternet, à la fois vitrine collectivedes libraires, vecteur de diffusiond’informations professionnelles etlieu de partage d’expériences et deconseils à travers un forum de ques-tions-réponses ; un dispositif detutorat pour les librairies ouvertes

récemment : il s’agit de leur propo-ser le tutorat d’un libraire expéri-menté, interlocuteur privilégié pourune période d’un an – notammentsous la forme de trois journées pas-sées au sein de la librairie. « Unpartenariat que nous avons sou-haité formaliser, ajoute MarionBaudoin, et qui est destiné à fairegagner du temps au libraire ainsiqu’à le contraindre à prendre durecul par rapport à ses activités. »Autres projets,qui devraient prendrecorps dans les mois à venir, la forma-tion des libraires dans les « fonda-mentaux » du métier, mais aussidans la gestion du temps et les stra-tégies d’organisation ; les anima-tions collectives, avec des tournéesd’auteurs ou des rencontres avec deséditeurs de la région.Bref,à travers ces actions qui se veu-lent à la fois concrètes et construc-tives, il s’agit pour l’associationLibraires en Rhône-Alpes de dyna-miser la profession tout en s’inscri-vant dans l’interprofession. L.B.

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livres & lectures/poésieD’un pays imaginaire et réel où il estencore possible de regarder les êtres et leschoses avec l’œil d’un « géomaître ».Appelons ce pays, ou ce paysage, la sur-face du monde. Et le photographe YanTomaszewski de la saisir au plus près deson essence, son commencement peut-être : un désert de traits et de tracesmêlés.Des verticales légères qui luttentavec des horizontales graves, avecquelques petits signes tout autour : unpanneau à l’abandon, une toile en l’air,

un arbre de tra-vers.Ne reste plusqu’à planter descorps : couple etdallage, enfantssur échiquier,maisaussi femme dedos et hommes àdeux. Ils poussentdans le paysagecomme d’autreslévitent, se pen-chent comme onpense. Le dessinse fait alors des-

Erhebung : une élévation vers le texte et l’image

Ici-basErhebung, littéralement : élé-vation.Un mot qui traduit bienla teneur et la tenue d’étrangesphotographies qui semblent àla fois sorties de nulle part etvenues de partout.

sein, les visions improbables devien-nent des vues quasi parfaites.Erhebung, littérairement : poésie. Etl’écrivain Aymen Hacen de décocherses mots comme autant de flèchesqui atteignent très vite le cœur dechacune des photographies deTomaszewski : le silence dans laparole, le hasard dans le jeu, l’amourdans l’attente. Des petits poèmes enprose pour ne jamais prendre la pose.Élévation, de ce côté-ci du livre,pourrait d’ailleurs se dire : évalua-tion. Ou plus juste : mesure.Comme pour mieux fermer les yeuxet entendre, l’espace d’un instant, lebruit de la photographie, son rêveintérieur. Et le poète d’ajouter aussi-tôt dans le liminaire du livre :« Erhebung, élévation, rêve, chimère,utopie. » Roger-Yves Roche

ErhebungPhotographies Yan Tomaszewski,textes Aymen Hacen (avec un CD textes et voix)Jean-Pierre Huguet Éditeur50 p., 15 € ISBN 978-2-35575-033-5

Bacchanaleset festival Alors que le Festival internatio-nal de poésie se déroule dans larégion jusqu’au 20 décembre, la

Maison de la poésie Rhône-Alpes, àSaint-Martin-d’Hères, propose deuxparutions importantes de la revueBacchanales : la première est une sur-prenante et magnifique anthologieconsacrée à la poésie amérindienne,avec pas moins de 127 auteurscontemporains des États-Unis et duCanada traduits et présentés parManuel Van Thienen. Un panoramaen français à peu près unique, quirend justice à la créativité de ces écri-tures amérindiennes qui constituentun prolongement de la tradition oralechère aux peuples autochtonesd’Amérique. Avec de très belles illus-trations de Nora Hermann.La seconde publication se confond avecle thème du festival de cette année :« Poésie Gratte-monde ».Un rendez-vousdonné à 64 poètes qui croisent leurregard sur la société et le mondecontemporain, pour ne pas désarmer :« La poésie c’est la fièvre, l’insatisfaction,l’objection radicale à la paresse de nosconsciences, trop tôt, trop facilementsatisfaites de viandes creuses, de pré-textes à fuir », écrit Jean-Pierre Siméon.Avec des contributions de Claude Ber,Jean-Pierre Bobillot, Denise Desautels,Jacqueline Held, Caroline Sagot-Duvauroux, Serge Pey, Salah Stétié…Et un cahier couleur dédié au plasti-cien sud-africain Bruce Clarke.Parmi les rendez-vous du Festival,on neratera pas le Marché de la poésie, de lapetite édition et du livre d’artiste, les6 et 7 décembre,à l’Heure bleue (Saint-Martin-d’Hères), ni la présence dePhilippe Jaccottet autour de Pétrarque.L.B.

Anthologie de la poésieamérindienneBacchanales n° 42264 p., 20 €

Poésie Gratte-mondeBacchanales n° 43180 p., 20 €

Une doubleallianceLes éditions Voix d’Encre ont tou-jours privilégié la rencontre entreune voix poétique et une œuvre gra-phique.Elles ne dérogent pas à cetteligne avec leurs deux derniers titres :Une fleur sous la neige, tout d’abord,qui voit Michel Thion oser lepoème-récit – cette audace n’est-ellepas celle d’un retour à la source dela poésie ? Mais si L’Iliade racontaitune guerre, Thion, lui, raconte unerencontre entre « Elle / cheminant lemonde / implacable et douce » et« Il / l’errant ».Le tout dans « La ville/ miroir lent / de l’indifférence ».

Les peintures d’Anne Weulersserenforcent l’atemporalité de cettehistoire, la collaboration des deuxartistes nous conduisant au plusimportant, à « La solitude / main-tenant / habitée ».Dans Le Petit Livre amer, Jean-PierreChambon interpelle son ombre, sesouvient en plein hôpital psychia-trique d’un vieux refrain où il étaitquestion de « Zombies in the houseof madness », voyage – sans goûtpour l’exotisme – du Grand Nord àla Chine intérieure, pour mieuxs’effrayer d’un détail entrevu dansune église de Bohème. Les mots deChambon sont accompagnés parles gouaches (de bleu et de gris) deNadia Dib. F. H.

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Michel ThionAnne WeulersseUne fleur sous la neigeÉditions Voix d’encre100 p., 20 € - ISBN 978-2-35128-042-3

Jean-Pierre ChambonNadia DibLe Petit Livre amerÉditions Voix d’Encre68 p., 16 € - ISBN 978-2-35128-041-6

7 44d’Élisabeth Chabuel

Le poème-trace,dans un livre au for-mat élégant, d’une performanced’écriture au jour le jour réalisée enjuillet 2004 sur la vitrine de lalibrairie Mosaïque à Die,à l’occasiondu soixantième anniversaire des évé-nements de l’été 44 dans le Vercors.Élisabeth Chabuel parle à travers lesmots et les silences de sa mère pourraconter (ou plutôt : faire entendre)ce qui est arrivé cet été-là.Un souve-nir, un seul (« la famille a dû quittersa maison pour se cacher dans lesbois »), qu’elle s’efforce de restituer– resituer – dans une langue terri-blement précise et coupante, avecdes phrases abruptes souvent, à picparfois : « Les parents les amis /Comme gibier / Traqués ».Le lecteurretient son souffle, comme l’enfantplein de peur qu’était alors la mère :« Oiseau / Un craquement / Ou bêtedans fourré ».On dirait que l’Histoirepourrait à chaque instant la prendreà la gorge. R.-Y. R.

K Éditions 65 p., 14,50 €ISBN 978-2-9517940-8-5

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venir sous la férule des grandsmédias, cherchant à faire alliance età mettre en place un système unique.Mais gare aux chevaux de Troie et aux« vieilles connaissances » !Au-delà de la charge contre « cettetélé qui rend fou ceux qui la font,parce qu’elle cherche à asservir ceuxqui la regardent », Le ComplotGutenberg met habilement enlumière les tentatives de monopoleet de manipulation de l’information.Un exercice salutaire à l’heure oùsauvegarder une pluralité d’expres-sions devient une question cruciale.Marc-Henri Jéru

Philippe MoucheLe ComplotGutenbergGaïa248 p., 19 €ISBN 978-2-84720-118-5

Sans vouloir « faire Libé » – journaldont il est amplement questiondans le marigot médiatique ici misen scène –, Le Complot Gutenbergest un premier roman qui faitMouche…, à la fois par son ambi-tion et son suspens. Un voyage aucœur de la fabrique des images etdes rumeurs,où tous les coups – lesplus tordus possibles – sont permis.Si contrôler les consciences passepar la manipulation des images et desdésirs, il s’agit,pour réussir,d’échafau-der une machination médiatiquecomplexe. Images subliminales,notesdes clavistes,snuff movies,presse gra-tuite, plateaux truqués, publicités,petites annonces, coups montés…,tout est bon pour rendre le spectateur« accro » et le lecteur cérébralementdisponible. L’opération est baptiséeÉcran Total par ses concepteurs.Ainsi que les médias le font de l’opi-nion, l’auteur retourne le lecteur àtour de page et l’entraîne dans uncomplot vertigineux, où l’écrit etl’image se disputent la civilisation à

Tébessa, 1956 : vie et mortd’un soldat

Regarder les hommestomberDes pentes croix-roussiennesde Lyon aux sables du désertnord-africain, Laurent Cachardsigne un premier roman sombreautour de la Guerre d’Algérie.

Un carnage. C’est à la faveurd’un carnage que se déploie lemonologue intérieur de GérardPoncet, jeune croix-roussien venumourir en terre algérienne, le 5 avril1956. Il n’était pourtant question qued’une « opération de maintien del’ordre dans un coin qu’on n’auraitcertainement jamais visité si on nenous y avait pas tous envoyés, et enmême temps s’il vous plaît, par lemême train, le même bateau, lemême autre train, etc. ».Loin de son Gros-Caillou et de sescours d’horticulture, Poncet sedemande à quoi rime son combat.« Le fell, s’il meurt ici, il aura eu l’im-pression d’avoir défendu sa terre,son pays, c’est un peu comme s’ilse sacrifiait : son sang irait droit àla terre, il serait chez lui, vraiment,il ferait corps avec son sol ; moi, àvrai dire, je préfèrerais le visiter quele défendre, le bled ! ».

La manipulation médiatique à l’épreuve du roman noir

Le Complot Gutenberg fait Mouche

Enchâssés dans un épilogue algérienqui n’en finit pas, les souvenirs lyon-nais de Poncet tombent avec justesse.« À la Croix-Rousse, moi, les fells, çafait longtemps que je les auraissemés, ça nous aurait évité de jouerau chat et à la souris. »Laurent Cachard, auteur de ce pre-mier roman, sait passer de la Vogueaux marrons aux scènes de bordelmilitaire avec fluidité. Il recrée sanspathos l’existence et les derniers ins-tants d’un soldat dont on trouverales effets inventoriés à la fin du livre« (valise en fer blanc : 1, jeu de tarot ;2, trousse de toilette nylon…) ».Frédérick Houdaer

Laurent CachardTébessa, 1956Éditions Raison et Passions130 p., 13 € ISBN 978-2-917645-00-0

Laice, Maurice…Qui a dit que Montmartre était unquartier parisien confit dans le sucrede la mièvrerie touristique ? PasChantal Pelletier, qui en connaîtbien la géographie et en fait undécor à la fois sombre et pitto-resque. En compagnie de sonhéros, le flic Maurice Laice, qu’ona déjà vu dans plusieurs aventures(Éros et Thalasso, More is less…),l’écrivain fait un retour saignant auxannées quatre-vingts qui,en France,entretiennent de bonnes relationsavec le roman noir. Normal. C’estle début des grandes désillusionspolitiques,une période de profondecrise sociale et économique, l’arri-vée du Sida en prime.Nous sommesen 1984 et si la société imaginée par

Orwell n’a pas triomphé, on com-prend tout de même que le monden’appartient ni aux rêveurs ni à ceuxqui sont nés du mauvais côté de labarrière. Le tout jeune flic en fera ladure expérience. Un polar à la fran-çaise qui démarre par un triplemeurtre, au soir du 10 mai 1981,alors que la France fête le change-ment et son nouveau présidentsocialiste. L’enquête aboutira troisans plus tard.Pour Maurice Laice etbeaucoup d’autres, l’avènement des

lendemains quidéchantent. L. B.

Chantal PelletierMontmartre – Mont des martyrsGallimard « Série Noire »256 p., 16,50 €ISBN 978-2070120635

Les relations de la science et del’Église ont rarement été un longfleuve tranquille.Mais,depuis Galilée,elles ont créé des moments houleuxqui ont marqué l’histoire humaine :lorsque les découvertes scientifiquesviennent battre en brèche les théo-ries de la Bible.À cet égard, la parution du livre deCharles Darwin,L’Origine des espèces,fut un événement majeur.Elle donnalieu à de féroces affrontements entreles partisans de l’Église anglicane,hos-tiles à cette pensée qui ramenait lesépisodes d’Adam et Ève ou de l’Archede Noé à de gentilles fables, etquelques savants sans préjugés (en cequi la concerne, l’officielle Académiedes sciences anglaise se confondaitavec le clan des religieux…), recon-naissant sinon la validité,du moins lesérieux du travail de Darwin. Cesdébats violents se matérialisèrent lorsd’un important colloque organisé par

l’Associationbritanniquepour le déve-loppementdes sciences.Il réunissaitnombre depersonnali-tés scientifiques,politiques et ecclé-siastiques de Grande-Bretagne ainsique d’éminents invités étrangers.Cet événement est le sujet de Darwinviendra-t-il ?,mi-roman mi-essai toutà fait stimulant de l’écrivain etmédecin tropicaliste, Luc Perino.Avec une érudition remarquable, ilrestitue ici le climat de l’époque etmet en scène les personnalitésessentielles de cette fameusecontroverse. À découvrir. N.B.

Luc PerinoDarwin viendra-t-il ?Éditions Le Pommier346 p., 23 € - ISBN 978-2-7465-0386-1

Présence de Darwin

livres & lectures/roman

+ + + + + + + + + + + + + + + + http://auteurs.arald.orgconsultez le site des écrivains, des auteurs et illustrateurs jeunesse de Rhône-Alpes

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livres & lectures/voyage

ÉDITIONS ANNACHANEL

La Spirale bleuede Virginie RapiatMélie est une rêveuse.Lorsqu’elle découvre dansun vieil album de photosune spirale bleue d’oùs’échappe un merveilleuxpapillon, elle décide de le suivre…

collection Féerie32 p., 15 €ISBN 978-2-917204-11-5

CHRONIQUE SOCIALE

Accompagner levieillissement : seformer et formerde Danielle Thiebaud

le secteur Austerlitz-La Pitié-Salpêtrière dansle 13e et les alentours de

l’ancienne usine Renault-Billancourt dans l’actueldépartement des Hauts-de-Seine. L’approche ethno-historique de ces troismilieux urbains différentsévoque les années detravail et les parcoursprofessionnels, les tracesque le travail a laissées tant chez les individus que dans les paysages.

316 p., 28 €

ISBN 978-2-35428-014-7

ÉDITIONS DU CROQUANT

Loger les immigrés : la Sonacotra 1956-2006de Marc Bernardot

Qui ne connaît pas lesfoyers SONACOTRA ? Ils sont en effet devenusemblématiques de l’immigration du travailen France. Mais que sait-onvraiment de ces foyersprésentés comme lieux de toutes les différences ?Cet ouvrage propose,à partir d’entretiens,d’enquêtes de terrain etd’archives, une sociologiehistorique de la Sociéténationale de constructionpour les travailleurs qui nous conduit jusqu’àaujourd’hui, où laSONACOTRA est devenue ADOMA.

Collection Terra352 p., 22 €ISBN 978-2-9149-6844-7

Sur les tracesd’un trappeurSpécialiste des Indiens d’Amérique,Françoise Perriot revient à son sujetpar la bande, à travers l’itinéraired’un homme hors du commun,sorte d’« Indien blanc » de la pro-vince canadienne d’Abitibi. Né en1941,élevé entre lacs et forêts,oiseauxet orignaux, Michel Pageau, aprèsavoir très tôt quitté l’école, refusé lacarrière de mineur et abandonné cellede bûcheron,se débat entre la néces-sité de vivre de la chasse et son amourdes animaux. Trappeur à l’ancienne,sachant chasser l’ours à l’arc et parleraux loups, il est naturellement lié auxIndiens et, plus largement, à « l’âmedu monde ». En 1976, en réaction àune chasse qui perd l’écoute et le res-pect de sa proie,il décide de fonder unrefuge pour y soigner les animaux bles-sés,avant de les rendre à leur environ-nement naturel.Cette mission,qui luivaut aujourd’hui reconnaissance etcélébrité, donne à l’auteur l’occasionde nous interroger sur la préservationde la nature, ainsi que sur notre inéli-minable « humanimalité ». M.-H. J.

Françoise PerriotMichel Pageau,trappeur - J’ai entendupleurer la forêtLe Seuil - 304 p., 19 €ISBN 978-2-02-090720-0

Fille de là-basVous voyagez beaucoup. Depuisquand habitez-vous la région ?Je me suis installée dans le Dioisen 1976. J’étais exploitante agri-cole et vivais dans une vallée per-due entourée d’un cirque majes-tueux de montagnes. En 1984, jesuis partie vivre au Montana, auxpieds des Rocheuses. J’ai décou-vert les grands espaces qui n’enfinissent pas d’inspirer les écrivains.Durant quatre ans, j’ai appris àcôtoyer la nature sauvage, tellequ’elle n’existe plus guère enFrance, et je me suis fait de nom-breux amis indiens. De retour enFrance, j’ai publié mon premier livre,

La Dernière Frontière (Albin Michel),basé sur une collection de photogra-phies anciennes que j’avais consti-tuée et sur ce que j’avais appris del’histoire des nations indiennes. J’aicontinué à écrire sur ce thème.Ayanttoujours été très proche de la nature,vivant dans une superbe région où lanature n’est pas qu’une image, j’aiécrit un ouvrage sur le monde asso-ciatif pour la défense de l’environne-ment. Parallèlement à mes activitésd’auteur,j’écrivais régulièrement pourle magazine Terre Sauvage.

Comment est survenue la rencontreavec Michel Pageau ?En 2001, le magazine Le Pèlerin m’aconfié un reportage sur une région peu connue du Québec, l’Abitibi.C’est alors que j’ai fait la connais-sance de Michel Pageau. Ce per-sonnage haut en couleurs, donts’est inspiré Bernard Clavel pourcamper le personnage du hérosd’Harricana, m’a intriguée. Nousnous sommes compris rapide-ment, sans doute parce que j’avaisune certaine habitude – et unamour certain – des animaux et dela nature, sans doute aussi parceque, comme Michel Pageau, jecrois que la générosité est une qua-lité rare.N’en déplaise à sa modes-tie, cet homme est un des person-nages les plus célèbres du Québec.

Un film, Il parle aux loups, l’a renduencore plus populaire.Aussi,quandje lui ai proposé d’écrire sa bio-graphie, il m’a répondu dans sabarbe quelque chose d’assez peuconvaincant. Les années sontpassées, puis un jour, sa femme,Louise, m’a envoyé un courriel.« La Française, des journalistes dechez toi, du magazine Ulysse, sontvenus ici et la dame,elle a demandéà Michel pourquoi il écrirait pas sabiographie. Michel, il a répondu, sij’écris ma biographie, ce sera avecFrançoise.Alors voilà, si tu veux… »Bien sûr,que je le voulais ! Côtoyerde telles personnes, les inviter àse raconter, faire partager leurexpérience unique, divulguer cetamour immense dont ils sont faits,est un honneur doublé d’un plai-sir intense. Les Éditions du Seuilm’ont fait confiance. Cette belleaventure a duré plus de deux ans.Puis un jour, j’ai cru même être unpeu moi-même fille de là-bas.Parce que je comprenais la langue,que le froid ne me surprenait plus,que je reconnaissais quelquesarbres, le cri des oiseaux, certainestraces d’animaux dans la neige et,surtout,parce que Louise et Michelm’avaient adoptée.Propos recueillis

par M.-H. J.

www.refugepageau.cahttp://francoise-perriot.info

entretien

L’ATELIER DU HANNETON

Si tu veux vivre, avancede Monique Domergue,traduction de KarineGrange GoussianPoésie et typographie,alphabets latin et arméniense mêlent dans ce recueilqui trouve son origine dansle témoignage des membresde la communautéarménienne de Romans.

50 p., 18 €

ISBN 978-2-914543-16-3

Accompagner lespersonnes âgées,en particulier celles qui sont désorientées,nécessite de se former afind’assurer pleinementune réelle présence et uneproximité dans les actes de la vie quotidienne.On trouvera ici les repèresnécessaires à ce travailprofondément humain.

collection Comprendre les personnes96 p., 11,20 €ISBN 978-2-85008-723-3

nouveautés des éditeurs

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ÉDITIONS CRÉAPHIS

Mémoires du travail à Parissous la direction de Michel PigenetCet ouvrage analyse lesrésultats d’une enquêtemenée auprès de dizainesd’habitants et d’actifs de trois sites parisiens : le faubourg des métallosdans le 11e arrondissement,

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ÉDIMONTAGNE

L’Ivresse du papillonde Lionel MangaUne plongée dans leCameroun d’aujourd’hui à travers les œuvres et le regard de ses artistes.

216 p., 22 €ISBN 978-2-913031-37-4

ELLUG (ÉDITIONS LITTÉRAIRESET LINGUISTIQUES DE L’UNIVERSITÉDE GRENOBLE)

Le Sphinx et l’Abîme :Sphinx maritimes et énigmesromanesques dans « MobyDick » et « Les Travailleurs de la mer »

de Lise Revol-MarzoukL’auteur explore larencontre inédite et

incongrue entre le sphinxégyptien et la sphinxgrecque dans l’imaginairemaritime de HermanMelville et Victor Hugo.Il invite le lecteur à unvoyage mêlant histoires et formes mythiques dansune figuration vivante de l’énigme universelle.

collection Atelier de l’imaginaire334 p., 27 €ISBN 978-2-84310-120-5

philosophique, une penséede sagesse quotidienne…Parmi eux, on trouvera GuyFaur de Pibrac, AntoineFavre, Claude Guichard,Pierre Mathieu etGuillaume Colletet.

collection Atopia230 p., 24 €ISBN 978-2-84137-229-4

LA PASSE DU VENT

Usages du poèmede Jean-Pierre Siméon,entretiens avec Yann NicolÀ travers une séried’entretiens, le journalisteYann Nicol met à jour Jean-Pierre Siméon,l’homme et le poète.

134 p., 13 €ISBN 978-2-84562-138-1

PUL (PRESSES UNIVERSITAIRESDE LYON)

Penseurs conservateursau Royaume-Uni : deBurke au Thatchérismesous la direction de MauriceChrétienCet ouvrage regroupe onzeétudes sur les auteurs les plus

ENS ÉDITIONS

Survivre à l’inondation :pour une ethnologie de la catastrophede Julien Langumier,préface de FrançoiseZonabend13 novembre 1999 : levillage de Cuxac-d’Aude esttouché par les inondations.Dans l’ombre des discours

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livres & lectures/beaux-livresdes envies de chasse,de pêche ou deséduction, sachez que l’éditeur, dansla même collection gourmande,publie des carnets de cuisinièresconsacrés notamment à la Cuisine dela chasse, Cuisine de la mer et à laCuisine érotique.Ce dernier,avec ses Asperges mous-selines au citron (rappelons que« l’asperge fut interdite par les reli-gieuses à partir du XIXe siècle dansles pensionnats de jeunes filles… »),ses Petits maquereaux en coquede moutarde, sa Banane au four ousa Crème renversée renversante,

permettra àchaque séduc-trice ou àchaque séduc-teur d’« envoû-ter sa proie ». Ilpourrait consti-tuer un cadeauprécieux pourun Noël moinsfamilial. L.B.

Les MeilleuresRecettes de nosterroirsÉditions StéphaneBachès188 p., 29 €ISBN 978-2-916266-88-7

Collectiongourmande : 92 p., 20 €

Éditions Stéphane Bachès :gourmandise n’est pas péché

Chasse, pêcheet séductionMême si les Éditions StéphaneBachès préparent la sortie d’unenouvelle collection et celle du trèsattendu Dictionnaire historique deLyon pour le printemps 2009,où l’onfêtera les dix ans de la maison lyon-naise, les parutions gourmandescontinuent de faire recette.La preuveavec Les Meilleures Recettes de nosterroirs, une idée née desrencontres faites avec deséditeurs étrangers à laFoire du livre de Francfort,aujourd’hui concrétiséesous la forme d’un recueilmanuscrit, qui reste dansla lignée éditoriale soi-gnée créée il y a quelquesannées par StéphaneBachès.Toujours sous la conduitede Sonia Ezgulian, cuisi-nière et directrice de col-lection inventive, maisavec le renfort inspiré dusommelier Damien Gateau,l’ouvrage est une sélec-tion de belles recettes(plus de 150) issues desterroirs régionaux, de laBourgogne aux Antilles,de Nice à la Vendée, de laCorse à la Savoie…Si,par ailleurs, il vous vient

Mieux qu’un tombeau pourun alpiniste d’exception,le livre de Michel Bricola etDominique Potard,consacréà Patrick Berhault,dresse leportait d’un héros que l’onaurait aimé tutoyer…

Le moins que l’on puisse direde son parcours, c’est qu’ilfut accidenté.De sa jeunessedans le sud,où son goût pourla plongée le dispute à la ten-tation de la délinquance, deses premières ascensionsréussies, bien qu’il soitchaussé de grosses chaus-sures de montagne au lieude chaussons d’escalade, à safaçon d’entrer dans l’histoire del’alpinisme… par une chute de 800mètres dans l’Oisans, il est indis-cutable que Berhault a traversé denombreuses lignes jaunes.Aussi exceptionnel physiquementque fragile à sa manière (une ascen-sion trop rapide en Himalaya lui acoûté cher),Berhault tient autant del’artiste que du sportif, mais avancesans trop d’atermoiements. Avecrage parfois. L’une des voies qu’il aouverte, et qui sera longtemps consi-dérée comme la plus difficile del’Hexagone, a été baptisée par sessoins : « La haine ». « Le couloir est

comment ? / Super. / Et les séracs ? /Les séracs ? Ils sont, comment dire,ils sont séracs, quoi… Si tu y pensestrop, tu ne montes pas. »Quand Berhault oublie un marteaupour enfoncer ses pitons, il le rem-place aussi sec par une grosse pierre(pas question de renoncer à l’ascen-sion).Les enchaînements qu’il oseraen un temps record, sans sombrerdans le star-system, le rendrontlégendaire. À juste titre. F. H.

Michel Bricola et Dominique PotardBerhaultÉditions Guérin296 p., 55 €ISBN 978-2-352210-21-2

experts et des récitsmédiatiques, l’enquêteethnographique menée iciéclaire, deux ans aprèsl’inondation, ce qui faitévénement localement.

collection Sociétés,Espaces, Temps354 p., 28 €ISBN 978-2-84788-133-2

ÉDITIONS JÉRÔMEMILLON

Quatrains morauxcollectifPlusieurs dizaines de poètesont rivalisé d’ingéniositépour enclore dans l’étroitespace de quatre versautonomes une loi morale,une méditation

Éditions Guérin : les aventures de Patrick Berhault

Est-ce ainsi que les hommes grimpent ?

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Patrick Berhault (second plan), à l'âgede 15 ans, avec Patrick Edlinger.

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fantasme est né de son désir de vendre. Elle a misl’accent sur d’infimes événements, elle a donnéde fausses informations, elle a commis nombred’erreurs sans jamais publier de démentis… Maistoute cette histoire, que les journaux ont racontéeavec talent et en cherchant à faire peur, a été pourelle une formidable aubaine. »

Sensation forte

Être au plus près de l’événement, voilà ce que lapresse a promis à ses lecteurs et voilà la promesseque tient Frédéric Lavignette, en exploitant parfai-tement les ressources des archives et du photo-reportage alors naissant. Le Petit Parisien, Le Matin,Excelsior, L’Action française…, trente journaux ontété passés au crible par l’auteur.Son travail a consistéà reconstituer une chronologie exacte des faits et àmettre au point un montage de citations,qui retracent– éventuellement de manière contradictoire –l’aventure sensationnelle de cette entreprise crimi-nelle et de cette traque collective. L’approche est riche et obligele lecteur à se demander où est la vérité…Selon l’auteur, « le phénomène Bonnot appartient finalementmoins à l’individu qu’à la société de l’époque ». Insécurité,peuret fascination pour ce personnage cruel et révolté, grandilo-quence de la délinquance,attrait pour la violence et les imagescrues – il faut voir les photos de cadavres exhibées dans la presse

La Bande à Bonnot, comme si vous y étiez

Il était unefois 1912…La Bande à Bonnot est un mythe. FrédéricLavignette l’a revisité à travers la presse del’époque. Quatre ans de travail aux archivesde la Préfecture de police de Paris, à la BNFet à la BPI, pour un livre documentaire quirefait l’histoire en images. Sensationnel !

Entre banditisme et anarchisme, entre médiatisa-tion et manipulation des médias,entre actions vio-lentes et utilisation des techniques modernes,JulesBonnot est en quelque sorte une figure de la moder-nité… Ce malfrat lyonnais lancera sa brillante – maiscourte – carrière en montant à Paris et en dévali-sant, le 21 décembre 1911,un garçon de recettes dela Société générale.Les médias s’emballent, le publicest fasciné : c’est le premier épisode du feuilleton,qui s’achèvera par la mort de Bonnot,dans un bainde sang, le 28 avril 1912 à Choisy-le-Roi.« La presse a fantasmé toute cette histoire,expliqueFrédéric Lavignette, lui-même journaliste, et ce

d’information de ce temps-là… –,cette société trouve un miroir éton-nant dans la presse de l’époque. Etdans cet ouvrage foisonnant,magnifiquement édité, qui retracel’irrésistible ascension du casBonnot. L.B.

Cantiques, paillardiseset belle Savoie« Je te prioz, Tomassa, / Vin me reconfortar ! / Comeunaz toma grassa, / Je te trovo ou tatar.» Ce qui,en fran-çais moderne,donnerait : « Je t’en prie,Thomasse, / Viensme réconforter ! / Comme une tomme grasse, / Je tetrouve au toucher.» Voilà un compliment joliment tournéque les filles de Savoie ont dû entendre plus d’une fois,en un temps où, du côté de Saint-Jean-de-Maurienne,on parlait encore le patois francoprovençal… Tirée de laseptième chanson en patois, qui conte avec beaucoupde naturel une « requête amoureuse repoussée », cetteœuvre fait partie des trente-trois chants, en français eten patois, qui composent les Noëls et Chansons deNicolas Martin, musicien et chansonnier savoyard duXVIe siècle. Imprimé à Lyon en 1555*, l’ouvrage,premierlivre imprimé en langue savoisienne, est un formidabletémoignage, qui mêle cantiques pour l’église et chan-sons paillardes.Un recueil présenté et traduit par GastonTuaillon, et de belles surprises de lecture. L.B.

*une seconde édition, dont l’exemplaireunique est conservé à la Bibliothèquemunicipale de Lyon, a paru en 1556.

Nicolas MartinNoëls & Chansons de SavoiePrésenté et traduit par Gaston TuaillonLa Fontaine de Siloé288 p., 30 €ISBN 978-2-84206-348-1

Ex-voto susceptu…« En raison d’un vœu formulé », c’est laforme complète de l’expression quiconvient à ces objets votifs, dont l’histoireremonte à l’antiquité païenne.Témoignagesde la puissance divine tout autant que dessituations de souffrance humaine, les ex-votoconstituent un patrimoine complexe et fragile,exposé à de longs épisodes historiquesd’interdiction et de destruction.Mais ce quel’on apprend dans le livre de BernardBerthod et d’Élisabeth Hardouin-Fugier,LesEx-Voto de Fourvière, c’est que la basiliqueelle-même n’est rien d’autre qu’un immenseex-voto, résultant de l’engagement pris parun groupe de catholiques lyonnais aumoment où,à l’été 1870, la ville est menacéepar les Prussiens. C’est cette « démarchevotive » que les auteurs retracent dans ce livretrès intéressant, qui présente nombre dereproductions surprenantes de ces objetsartistiques naïfs, dont certains ont été repla-

cés dans la chapelle dela Vierge en 2007. L. B.

Bernard BerthodÉlisabeth Hardouin-FugierLes Ex-Voto deFourvièreLa Taillanderie128 p., 25 €ISBN 978-2-87629-393-9

représentatifs de la penséeconservatrice britannique,de la fin du XVIIIe à la fin du XXe siècle. Il présente les caractéristiques et les constantes d’unmouvement de penséecohérent, malgré saméfiance envers la théorieet l’esprit de système,ainsi que son évolution face à des phénomèneshistoriques majeurscomme la Révolutionfrançaise, l’essor ducapitalisme libéral,l’avènement de ladémocratie, la question de l’Irlande, l’impérialismeet la décolonisation,le socialisme et le néo-libéralisme.

308 p., 25 €

ISBN 978-2-7297-0801-6

TERRE VIVANTE

Chauffage au boisd’Emmanuel CarcanoPoêle à bois, insert,cheminée, chaudière à bûches…, les systèmesde chauffage au bois ontprogressé depuis quelquesannées. Il est possibleaujourd’hui de penser uneinstallation performanteet écologique. Pour bien la choisir et l’utiliser, celivre passe en revue lesappareils, combustibles,normes et labels.

156 p., 21 €

ISBN 978-2-914717-48-9

/beaux-livres

Frédéric LavignetteLa Bande à Bonnotà travers la pressede l’époqueFage Éditions632 p., 38 €ISBN 978-2-84975-141-1

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Guillaume Martinez, dessinateur de la série Le Mondede Lucie. Mais sont à leur poste : les membres de lafamille Jouvray : Olivier, Jérôme et Anne-Claire, qui ontréalisé ensemble la série des Lincoln ; Virginie Ollagnierque l’on connaît comme écrivain,mais qui est aussi scé-nariste (Kia Ora) ; Fred Mansot, illustrateur,Ben Lebègue,auteur du Grand Gentil Loup,et Fred Salsedo,qui a donnénaissance à Ratafia.

De cinq à dix dans le septième…

Après une cigarette fumée sur le pas-de-porte, VirginieOllagnier sonne le rassemblement des troupes. Onpropose alors un petit jeu de questions-réponses pourconstituer un portrait croisé de leur aventure com-mune. La parole circule. Et l’on obtient ces différentscoups de crayons :Sur l’histoire (scénarisée par Olivier Jouvray) : « Nousétions tout d’abord cinq, rassemblés dans un atelier nonloin d’ici, à l’initiative de Jérôme et de moi, qui avionsenvie de travailler ensemble sur nos albums. C’était plusdrôle à plusieurs.À l’envie de changer de lieu – l’immeubledevenait insalubre… – s’est greffé le désir d’élargir l’équipeà d’autres personnes rencontrées dans le monde de labande dessinée. Finalement, on s’est retrouvé à dix ! Etl’on a fêté hier notre première année d’existence… Etpour info, KCS, ça ne veut strictement rien dire ! »Sur les raisons du rassemblement (dessinées parJérôme Jouvray…« Personnellement, je trouvais que,chez moi,mon bureauétait trop proche de mon lit… Il me fallait plus de place.Mais, plus sérieusement, je crois que l’on a tous la moti-vation de travailler avec des copains… Il y a une émula-tion, et c’est intéressant d’avoir le regard et les critiquesdes uns et des autres. Et puis, en cas d’urgence, on peutavoir de l’aide. Par exemple, j’ai eu une importante com-mande pour un dessin animé et tout l’atelier m’a donnéun coup de main. »

Leur petiteentreprise…KCS, c’est un collectif qui rassemble dix personnes.Leur point commun est d’exercer une activitéen lien avec la bande dessinée. Dix jeunes gens(ils n’ont pas, ou à peine, dépassé la quarantaine),huit hommes pour deux femmes (« c’est de la poly-andrie », nous soufflera Virginie Ollagnier, l’écri-vain de l’équipe), regroupés dans un atelier situéau centre de Lyon. Visite guidée.

Un « collectif d’auteurs de bande dessinée »… La déno-mination fleure bon le cliché soixante-huitard. Et l’ons’attendait presque à rencontrer une bande d’artistesdébraillés crayonnant quelques toiles multicolores dansun joyeux foutoir. Mais rien de tout cela. Ils ont éludomicile dans une rue tranquille du septième arron-dissement de Lyon. « Entrez, frappez, sortez et ne reve-nez jamais ! », c’est ce que l’on peut lire au 209 de larue Sébastien Gryphe. Une injonction surprenante etpeu amène, dont les deux dernières propositions sontà prendre comme une antiphrase humoristique.L’accueil est en effet chaleureux, une généreuse bon-bonne de café brûlant prête en l’honneur du visiteur.Dans la grande pièce lumineuse qu’ils occupent, on aaffaire à un ordre relatif, ou plutôt à un désordre orga-nisé. L’ambiance est studieuse, même si l’on entenddes enfants jouer dans une pièce attenante : la progé-niture de deux des dessinateurs. On est en période devacances scolaires…Les présentations sont faites. Manquent à l’appel,aujourd’hui, Efix, dessinateur et scénariste prolixe,auteur de nombreux recueils (la série des Mon ami laPoof), B-Gnet, à qui l’on doit la série des Wafwaf, et

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… et coloriées par Ben Lebègue) :« Pour moi, qui manque encored’expérience, c’est enrichissantd’avoir le retour de ceux qui en ontdavantage. »Sur le fonctionnement du collectif(écrit par Virginie Ollagnier) :« C’est extrêmement simple : chacunvient quand il veut, reste autant qu’ilveut. La seule obligation consiste àpayer chaque mois sa quote-part àl’association que l’on a montée pourlouer les locaux. À part ça, les gar-çons essayent d’obliger les filles àfaire le ménage, mais ça ne marchepas ! »Sur l’avenir (croqué collectivement) :« Des collaborations sont nées dansl’atelier. Même si chacun reste auto-nome, une identité s’est créée et ilnous arrive de partir ensemble dansdes festivals. C’est même parfois lavolonté des organisateurs. Pourl’avenir, c’est un peu embêtant, caron est tellement bien ici que l’onn’a plus envie de changer… Ducoup, on risque de s’encroûter ! »Tout en buvant une dernière tassede café et en rangeant notre enregis-treur,on se dit que,vue la pléthore deprojets que tous s’efforcent dedétailler, ce risque paraît largementinfondé… KCS paraît, en effet, avoirtrouvé un savant équilibre entre ledésir d’indépendance de chacun etson besoin d’émulation collective.Si l’acronyme continue à ne rienvouloir dire, la petite entreprise qu’ildésigne semble,elle,destinée à mar-quer durablement sa présence dansle paysage de la bande dessinéecontemporaine. Nicolas Blondeau

www.kcs-production.com/blog

Directeur de la publication : Geneviève Dalbin

Rédacteur en chef : Laurent Bonzon

Assistante de rédaction :Marion Blangenois

Ont participé à ce numéro : Joêl Bastard, Nicolas Blondeau, Frédérick Houdaer,Marc-Henri Jéru, DanielleMaurel, Yann Nicol,Roger-Yves Rocheet Caroline Schindler.

Livre & Lire / Arald 25, rue Chazière - 69004 Lyon tél. 04 78 39 58 87 fax 04 78 39 57 46 mél. [email protected] www.arald.org

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Livre & Lire : journal mensuel, supplément régional à LivresHebdo et Livres de France, publié par l'Agence Rhône-Alpespour le livre et la documentation.

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