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1 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC L’Anatomie du sein Le sein est un organe sexuel secondaire caractéristique des mammifères. Mais c’est surtout l’organe qui assure la fonction biologique nécessaire à la survie du nouveau né et du jeune enfant. I- Situation Les seins sont placés sur la paroi antérieure du thorax entre le sternum et la limite antérieure de l’aisselle. Ils s’étendent entre la 3 ème et la 7 ème côte. Dans certains cas le tissu glandulaire peut s’étendre jusqu’au creux de l’aisselle en dehors, le sternum en dedans et l’épigastre en bas. II- Forme et dimensions Les seins sont de forme approximativement hémisphérique, mais leurs formes et leurs dimensions sont très variables ; ils sont plus ou moins symétriques et séparés de la paroi thoracique par le sillon sous mammaire de profondeur variable. Il faut distinguer le prolongement axillaire de la glande (appelé également queue de Spence) relié par des canaux lactifères à l’aréole et la glande mammaire accessoire le plus souvent axillaire généralement non drainée. Ces formations peuvent être la source d’engorgements localisés et temporaires. III- Configuration extérieure Le sein est recouvert d’un revêtement cutané dermoépidermique, comme le reste du corps. Sa partie centrale est occupée par une saillie de forme cylindrique ou conique : le mamelon ou papille mammaire. Le mamelon mesure environ 1 cm de hauteur et de largeur. Sa surface arrondie est parcourue de petits pertuis, les pores lactifères qui sont les orifices des canaux lactifères ou galactophores. Ils sont au nombre de 4 à 18. L’extrémité du mamelon est parfois plate, plus rarement rentrée, ce sont les mamelons ombiliqués. On ne doit considérer comme mamelons ombiliqués, que les mamelons qui ne s’extériorisent pas lors de la pression de l’aréole, ce qui est assez rare. Le mamelon est entouré d’une zone, d’avantage pigmentée, annulaire, d’un diamètre variable entre 2 et 6 cm appelé aréole ou auréole. De couleur rosée ou légèrement pigmentée en dehors de la grossesse, elle prend une couleur brune pendant la grossesse. Sa surface est rendue inégale par la présence de petites éminences appelées tubercules de Montgomery ou tubercules des glandes

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  • 1 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    L’Anatomie du sein

    Le sein est un organe sexuel secondaire caractéristique des mammifères. Mais c’est surtout l’organe qui assure la fonction biologique nécessaire à la survie du nouveau né et du jeune enfant.

    I- Situation

    Les seins sont placés sur la paroi antérieure du thorax entre le sternum et la limite antérieure de l’aisselle. Ils s’étendent entre la 3ème et la 7ème côte. Dans certains cas le tissu glandulaire peut s’étendre jusqu’au creux de l’aisselle en dehors, le sternum en dedans et l’épigastre en bas.

    II- Forme et dimensions

    Les seins sont de forme approximativement hémisphérique, mais leurs formes et leurs dimensions sont très variables ; ils sont plus ou moins symétriques et séparés de la paroi thoracique par le sillon sous mammaire de profondeur variable. Il faut distinguer

    • le prolongement axillaire de la glande (appelé également queue de Spence) relié par des canaux lactifères à l’aréole

    • et la glande mammaire accessoire le plus souvent axillaire généralement non drainée. Ces formations peuvent être la source d’engorgements localisés et temporaires.

    III- Configuration extérieure

    Le sein est recouvert d’un revêtement cutané dermoépidermique, comme le reste du corps. Sa partie centrale est occupée par une saillie de forme cylindrique ou conique : le mamelon ou papille mammaire. Le mamelon mesure environ 1 cm de hauteur et de largeur. Sa surface arrondie est parcourue de petits pertuis, les pores lactifères qui sont les orifices des canaux lactifères ou galactophores. Ils sont au nombre de 4 à 18. L’extrémité du mamelon est parfois plate, plus rarement rentrée, ce sont les mamelons ombiliqués. On ne doit considérer comme mamelons ombiliqués, que les mamelons qui ne s’extériorisent pas lors de la pression de l’aréole, ce qui est assez rare. Le mamelon est entouré d’une zone, d’avantage pigmentée, annulaire, d’un diamètre variable entre 2 et 6 cm appelé aréole ou auréole.

    • De couleur rosée ou légèrement pigmentée en dehors de la grossesse, elle prend une couleur brune pendant la grossesse.

    • Sa surface est rendue inégale par la présence de petites éminences appelées tubercules de Montgomery ou tubercules des glandes

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    aréolaires qui sont des glandes sébacées, parfois reliées à un canal lactifère ou galactophore en profondeur (ceci explique l’écoulement possible de lait au niveau des tubercules de Montgomery).

    IV- Structure du sein

    1- le revêtement cutané La peau présente une structure normale avec un épiderme superficiel et un derme profond et des annexes épidermiques : follicules pileux, glandes sébacées et sudoripares. L’aréole au contraire présente une structure particulière : la peau est fine, élastique, très peu kératinisée, pigmentée. A la peau est annexé le muscle aréolaire constitué de fibres musculaires circulaires adhérant à la peau, s’étendant jusqu’à la base du mamelon et de fibres radiées perpendiculaires aux précédentes, partant du derme de l’aréole jusqu’au derme du mamelon. Le mamelon est richement vascularisé et innervé. Il est porteur de récepteurs sensibles à l’étirement et à la douleur. Les récepteurs à la douleur sont plus distaux, proches de l’extrémité du mamelon, alors que les récepteurs à l’étirement sont périphériques. Ces particularités déterminent les fonctions particulières du mamelon et de l’aréole.

    • Signal pour l’enfant par sa couleur (pigmentation), sa chaleur (vascularisation), son odeur (glandes sébacées des tubercules de Montgomery, annexes cutanées, lait), sa douceur. Les 5 sens : vue (proéminence couleur), toucher (douceur chaleur), goût, odorat, audition sont stimulés si on ajoute la perception du cœur et de la voix maternelle.

    • Caractère érectile par l’élasticité et le muscle aréolaire, permettant l’étirement de l’aréole et du mamelon dans la bouche de l’enfant.

    • Récepteurs à l’étirement, en périphérie de l’aréole, donnant le signal de la libération de l’ocytocine et de la prolactine.

    • Récepteurs de la douleur proches du mamelon signalant la mauvaise succion du bébé.

    • Lubrifiant par le sébum des glandes de Montgomery.

    2- La glande mammaire

    Elle est entourée d’une fine lame de tissu fibreux (fascia pré et rétromammaires). Ce n’est pas une capsule au sens propre car elle présente des prolongements vers la glande (ancien terme : crêtes de Duret) La glande mammaire repose sur le muscle grand pectoral en arrière et le muscle grand dentelé en arrière et latéralement. Ces muscles sont recouverts d’une aponévrose séparée de la graisse par du tissu fibreux (fascia rétromammaire). Le tissu fibreux pénètre dans la glande elle-même en séparant les lobes et formant un ligament suspenseur (anciennement ligament de Cooper) d’efficacité relative.

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    Elle est entourée d’un panicule adipeux qui forme une enveloppe à peu près complète, à l’exclusion de l’aréole. Le volume de graisse est variable et conditionne en grande partie le volume du sein lui-même. Le tissu adipeux forme des petites loges entourées de tissu fibreux en avant, latéralement en arrière et au sein de la glande mais fait défaut au niveau de l’aréole où la glande mammaire n’est séparée du derme que par une mince couche de tissu conjonctif. Dans la couche adipeuse se trouvent de nombreux vaisseaux artériels et veineux ; en particulier le réseau veineux superficiel (réseau veineux de Haller) qui est très développé pendant la grossesse et l’allaitement. La glande mammaire proprement dite est divisée en 4 à 18 lobes indépendants et présente un aspect en grappe avec des subdivisions successives en lobules, la division ultime étant l’alvéole ou acinus. L’essentiel de la glande se trouve à proximité du mamelon. On considère que 2/3 de celle-ci se trouve à moins de 30 mm de la base du mamelon, le quadrant supéro externe est par ailleurs prédominant. Chaque lobe possède un canal excréteur ou canal lactifère ou canal galactophore (canal de 1er ordre) dans lequel se jettent les canaux venant des lobules (canal de 2ème ordre). L’acinus ou alvéole est l’extrémité dilatée en ampoule des petits canaux (canal de 3ème ordre ou canal élémentaire). Un grappillon d’acini ou d’alvéoles forme le lobule. Les lobes et les lobules sont de volume et de nombre très variable suivant les personnes. Les canaux lactifères drainent les lobes et se dirigent par un trajet sinueux vers le mamelon et peuvent fusionner en cours de trajet. L’existence de dilatations appelées autrefois sinus lactifères est très largement contestée actuellement par les travaux échographiques qui révèlent un diamètre variable des canaux lactifères mais pas d’ampoule au sens strict. Les canaux lactifères se dirigent vers le sommet du mamelon et s’ouvrent en pore lactifère ou pore galactophore. Plusieurs canaux pouvant se réunir avant de parvenir au mamelon, le nombre de pores peut être inférieur au nombre de lobes. Ces structures : glande sécrétoire, graisse, tissus fibreux, vaisseaux sont largement entremêlées ce qui explique que la chirurgie du sein peut altérer le fonctionnement glandulaire, d’autant plus qu’elle est proche de l’aréole et du mamelon (modification du volume de la glande mais aussi perturbations vasculaires et nerveuses.

    3- Structure histologique de l’alvéole ou acinus

    L’ alvéole ou acinus est la structure élémentaire de la glande mammaire et l’unité de production du lait. Elle est issue d’une dilatation en ampoule des canaux élémentaires. Elle est constituée d’une couche de cellules sécrétrices, glandulaires ou cellules lactifères ou lactocytes en liaison étroite avec un réseau de capillaires qui va apporter les nutriments et les signaux nécessaires à la synthèse du lait. Ces cellules sont polarisées (c'est-à-dire ont un sens de fonctionnement) et possèdent l’équipement nécessaire à la synthèse des composants du lait et un appareil mitochondrial important, source d’énergie. La

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    membrane cellulaire possède des capacités d’absorption et de nombreux récepteurs hormonaux. Les cellules sont séparées par un espace de taille variable appelé jonction serrée dont l’ouverture et la fermeture jalonnera l’évolution glandulaire (ouvertes lors de la grossesse, des mastites et du sevrage, fermées lors de l’allaitement). Cette couche de cellules glandulaires est entourée d’un réseau dense de vaisseaux capillaires, de cellules musculaires contractiles appelées cellules myoépithéliales, de lymphocytes et de macrophages. Les cellules myoépithéliales sont aussi présentes en périphérie des canaux lactifères à proximité des alvéoles, permettant l’éjection du lait. En revanche, elles sont absentes des canaux lactifères principaux dans lesquels le lait progresse par la force du réflexe d’éjection initial et de l’aspiration du bébé. Cette structure est importante pour comprendre le fonctionnement de l’alvéole :

    • La couche unicellulaire de cellules glandulaires en relation étroite avec les capillaires permet de capter les nutriments de base nécessaires à la synthèse du lait et de les déverser dans la lumière de l’alvéole après un traitement plus ou moins important.

    • Les cellules myoépithéliales sont le «moteur» de l’éjection du lait après stimulation par l’ocytocine

    • Les lymphocytes apportent les anticorps de type IgA qui vont être transformés en IgA sécrétoires par la cellule glandulaire.

    • Les récepteurs hormonaux membranaires entourant la cellule lactifère participeront à la régulation hormonale de la synthèse du lait.

    V- vascularisation

    1- artérielle : La partie interne du sein est vascularisée par les branches de l’artère mammaire interne. La partie externe par les branches de l’artère axillaire. La plupart des artères abordent la glande par sa face superficielle

    2- Veineuse :

    Il existe un réseau veineux important appelé réseau veineux ou cercle veineux de HALLER . Les veines se déversent dans le réseau superficiel des régions voisines. Les veines profondes se rendent aux veines mammaires internes et les veines externes vers la veine axillaire.

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    3- Lymphatique :

    Le sein est drainé par trois réseaux de collecteurs lymphatiques tributaires des ganglions axillaires, mammaires internes et sus claviculaires. Le réseau principal est sous aréolaire et se rend vers l’aisselle et les ganglions axillaires. Ce réseau draine toute la partie supérieure, inférieure et externe de la glande. La face profonde est drainée par des collecteurs traversant le grand pectoral vers le réseau sus claviculaire. La partie interne de la glande est drainée par des vaisseaux lymphatiques se drainant dans les ganglions de la chaîne mammaire interne

    VI- Innervation

    Les nerfs sont issus de la branche sus claviculaire du plexus cervical superficiel (d’autres branches forment le plexus brachial) et de rameaux perforants des nerfs intercostaux (2ème au 6ème nerf intercostal). Ils innervent la peau et la glande mammaire. Les récepteurs nerveux sont essentiellement des récepteurs sensitifs

    • Sensibilité profonde, proprioceptive à l’étirement • Sensibilité superficielle à la température, à la douleur

    Les récepteurs transmettent leur influx aux nerfs du plexus cervical superficiel et aux nerfs intercostaux. Cet influx gagnera le cortex où il pourra être modulé

  • 6 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    Schéma d’anatomie selon la nomenclature actuelle d’après le précis d’anatomie clinique de P Kamina

    (noter la présence fautive persistante de la notion de sinus lactifères très contestés actuellement)

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    VII- Embryologie et évolution de la glande au cours de la vie

    1- Durant la vie in utero Les premières ébauches de la glande mammaire apparaissent au cours de la vie utérine chez le fœtus mâle comme le fœtus femelle, mais alors qu’elles restent dans un état rudimentaire chez le mâle, elles se développeront ultérieurement considérablement chez la femelle. La glande mammaire est issue de 2 épaississements de l’ectoderme (couche qui formera la peau et le système nerveux). Ils apparaissent latéralement sur le corps de l’embryon. Ces crêtes se fragmentent en ébauches indépendantes régulièrement disposées par paires qui formeront les mamelons. La plupart de ces ébauches disparaissent mais peuvent persister et former rarement des glandes mammaires accessoires et assez souvent uniquement des mamelons accessoires sur tout le trajet de cette ligne primitive; ces mamelons accessoires peuvent ressembler à des grains de beauté et n’être identifiés que par leur position dite sur la « ligne du lait ». Les ébauches thoraciques bourgeonnent et forment 4 à 18 bourgeonnements épithéliaux qui formeront ultérieurement les lobes puis des arborescences dans le tissu sous jacent qui se creusent d’un canal. Chez le garçon ce bourgeonnement est bloqué par la testostérone. 2- A la naissance La glande mammaire est une ébauche constituée d’un bouquet de canaux reliés au mamelon et inclus dans le tissu adipeux. Jusqu’à la puberté sa croissance est faible et suit le développement du reste du corps. 3- A la puberté La croissance s’accélère considérablement sous l’influence hormonale. On constate une extension et une ramification des canaux avec apparition de bourgeons à leurs extrémités, un développement de tous les tissus associés : tissu adipeux et conjonctif et la modification de l’aréole qui grandit et se pigmente. 4- A chaque cycle menstruel Lors de la 1ère partie de cycle, les œstrogènes favorisent la croissance des canaux et durant la 2ème partie de cycle la progestérone prend le relai comme si une éventuelle grossesse se préparait. 5- Durant la grossesse Les canaux s’allongent sous l’influence des estrogènes et les extrémités borgnes des canaux s’élargissent en ampoule creuse pour former les alvéoles sous l’influence de la progestérone. Chaque alvéole est formée de cellules sécrétrices et s’entoure de vaisseaux sanguins et de cellules musculaires qui participeront à la formation du lait (cellules sécrétrices) et à son éjection (cellules myoépithéliales). 6- Pendant la lactation Le volume des seins augmente en raison du doublement du flux sanguin, de l’accroissement des sécrétions et du développement du tissu glandulaire. Les alvéoles continuent à se développer et les récepteurs à se multiplier ceci expliquant l’augmentation de capacité de synthèse possible au cours de la lactation outre les mécanismes de stimulation au niveau local, et la régulation hormonale.

  • 10 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    7- A l’arrêt de la lactation Les alvéoles subissent une involution. Le sevrage entraîne une atrophie du tissu glandulaire qui est progressivement remplacé par du tissu conjonctif. Le tissu glandulaire ne retourne pas complètement à l’état pré-gravide ; il persiste généralement quelques alvéoles. 8- A la ménopause On observe une atrophie du tissu glandulaire, des canaux lactifères, et partiellement du tissu adipeux.

    La différenciation de la glande mammaire au cours des étapes de la vie

    Vie fœtale Avant la puberté efœtale

    Après la puberté

    Gestation Lactation

    tarissement

  • 11 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    Physiologie de la lactation

    La lactation est une fonction d’apparition tardive dans l’échelle de l’évolution. Elle

    permet aux mammifères de maintenir leurs petits en vie en couvrant leurs besoins nutritionnels et en les protégeant sur le plan immunitaire.

    Cette fonction reste privilégiée dans des circonstances extrêmes : dénutrition, maladie, déshydratation maternelle. Elle peut prendre le pas sur d’autres fonctions de l’organisme en particulier, le cycle menstruel et la reproduction qu’elle bloque de façon intense et prolongée. A l’échelle des populations, l’allaitement maternel exclusif et prolongé est une excellente méthode de réduction des naissances.

    En préliminaire on peut dire que la mise au sein du nouveau né entraîne un certain nombre de réflexes :

    • Chez la mère o Emission de Prolactine permettant la production du lait o Emission d’Ocytocine permettant l’éjection du lait

    • Chez l’enfant o Réflexe de fouissement (l’enfant se dirige spontanément vers le sein) o Réflexe des points cardinaux (l’enfant tourne sa tête pour rechercher le

    mamelon) o Réflexe de succion o Réflexe de déglutition

    Mais c’est la quantité de lait exprimé à chaque tétée qui conditionne la production ultérieure de lait par chaque sein.

    Le sein est donc un réservoir, mais un réservoir très particulier : il est composé de milliers de micro réservoirs, les alvéoles et il ne se remplit que si on le vide.

    D’où l’importance de ne pas limiter les tétées et de contrôler leur efficacité.

    I- Rappel sur les différentes hormones de l’organisme Une hormone est une substance produite par un organe, appelé glande endocrine, et transportée par la circulation sanguine dans un autre organe dont elle excite ou inhibe le développement et le fonctionnement. Ce type de régulation est appelé régulation endocrine, c’est une régulation à distance Il existe un autre type de régulation appelée autocrine, régulation au sein de l’organe lui-même. On verra plus tard l’importance de cette régulation locale dans la lactation.

    a. Hormones stéroïdes Les hormones stéroïdes sont des hormones de structure tétra cyclique dérivée du cholestérol et de la progestérone. Elles sont liposolubles et doivent être transportées dans le sang par des protéines de transport (les graisses ne sont pas solubles dans l’eau) en revanche elles n’ont pas besoin de récepteurs pour pénétrer dans la cellule dont la membrane est de composition lipido protidique. Elles se couplent ensuite à un récepteur cytoplasmique pour agir.

  • 12 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    Ce sont les hormones sexuelles : progestérone, œstrogènes, testostérone, mais aussi le cortisol et l’aldostérone fabriqués par la glande surrénale.

    b. Hormones peptidiques ou protéiques

    Les hormones peptidiques sont constituées d’acides aminés ; elles sont stockées dans les glandes et sécrétées sur demande, elles sont hydrosolubles, elles voyagent donc librement dans la circulation sanguine mais nécessitent un récepteur pour pouvoir pénétrer dans la cellule. Toutes les hormones hypothalamiques font partie de ce groupe.

    • Certaines ont une action directe : ce sont l’ocytocine et l’hormone antidiurétique (ADH) qui sont sécrétées par l’hypothalamus, stockées dans la post hypophyse et relargués dans la circulation selon les besoins. Il est intéressant de constater que l’origine hypothalamique de l’ocytocine, la rend tributaire des afférences corticales. Le réflexe d’éjection qu’elle commande est lui-même tributaire de l’environnement cortical (les influences psychologiques et générales pouvant être positives ou négatives).

    • D’autres ont une action indirecte de stimulation ou d’inhibition d’autres hormones : o Rôle stimulant des RF ou RH : Realising Factors ou Realising

    Hormones : TRH (pour la TSH) GRH pour les hormones de stimulation gonadique (FSH LH)

    o Rôle inhibiteur : prolactin inhibiting factor (PIF) : hormone frénatrice de la sécrétion de prolactine. On sait maintenent qu’il s’agit de la dopamine.

    Les hormones ante hypophysaires font partie également de ce groupe.

    o Certaines ont une action générale dans la physiologie de la lactation : ACTH (hormone de stimulation de la glande corticosurrénale), TSH (hormone de stimulation de la thyroïde), FSH, LH (hormones de stimulation ovarienne), MSH (hormone de la mélanogénèse-pigmentation), GH (hormone de croissance).

    o La prolactine a une action plus spécifique qui sera détaillée ultérieurement. Globalement on peut dire qu’elle agit en stimulant la synthèse du lait.

    Les hormones thyroïdiennes sécrétées par la thyroïde, l’insuline sécrétée par le pancréas participeront à la croissance et à la différenciation tissulaire. L’ hormone lactogène placentaire (HPL) a une structure très voisine de la prolactine. Elle est fabriquée par le placenta et disparaîtra donc avec la délivrance. Elle va pouvoir servir de stimulant en synergie avec la prolactine mais aussi bloquer certaines de ses fonctions en prenant sa place sur les récepteurs.

  • 13 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    II- Conditions hormonales du développement du sein

    a. Durant la vie in utero Le développement in utero est un phénomène neutre sur le plan hormonal : c’est le blocage par la testostérone qui entraîne une différenciation masculine ; en absence de celle-ci, le développement est identique et féminin. Cependant l’ensemble des hormones qui participent à la croissance de l’organisme est incriminé : hormones hypophysaires : FSH, LH, ACTH, TSH, PROLACTINE, MSH, GH ; hormones thyroïdiennes, insuline, glucocorticoïdes, et bien entendu tous les facteurs de croissance et les hormones d’origine placentaire : progestérone, estrogènes, hormone lactogène placentaire (HPL).

    b. A la naissance Les modifications hormonales liées à la naissance peuvent entraîner une petite poussée glandulaire avec augmentation de volume de la glande et même une sécrétion transitoire de lait appelée « lait de sorcière » qui peut se produire chez la fille comme chez le garçon.

    c. A la puberté

    La croissance s’accélère considérablement sous l’influence hormonale. Interviennent principalement les gonadotrophines hypophysaires : FSH et LH qui assurent la maturation ovarienne. Les oestrogènes assurent le développement des canaux, du tissu conjonctif, de la graisse et des vaisseaux mais le développement complet de la glande nécessite l’action combinée des oestrogènes et de la progestérone.

    d. A chaque cycle menstruel Lors de la 1ère partie de cycle, les oestrogènes favorisent la croissance des canaux et durant la 2ème partie de cycle la progestérone prend le relai comme si une éventuelle grossesse se préparait.

    e. Durant la grossesse

    On constate une augmentation de volume progressive de la glande mammaire qui est cependant inconstante (cette augmentation de volume a une certaine valeur pronostique sur les capacités de fabrication du lait mais le développement peut se poursuivre en début de lactation).

    • Croissance de la glande La croissance et la multiplication des canaux se poursuivent. Les extrémités borgnes des canaux s’élargissent en ampoule formant les alvéoles ou acini. Les cellules subissent une différenciation glandulaire. Pour ce qui concerne la croissance les hormones agissent en synergie. La progestérone et les oestrogènes favorisent la croissance du tissu glandulaire associés aux autres hormones de croissance : insuline, prolactine, glucocorticoïdes, facteurs de croissance épidermiques (EGF), formant ce qu’on appelle le complexe hormonal. Les oestrogènes agissant préférentiellement au niveau des canaux, la progestérone sur l’alvéole. L’hormone lactogène placentaire HPL, de structure voisine de la prolactine jouit d’une place particulière : action agoniste synchrone avec la prolactine. Il est intéressant de constater qu’en cas de grossesse multiple son taux est majoré.

  • 14 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    • Inhibition de la lactation

    En ce qui concerne le blocage de la lactation il existe des antagonismes hormonaux. La progestérone agit comme inhibiteur en maintenant ouvertes les jonctions intercellulaires de l’alvéole (ouverture des jonctions serrées). L’hormone lactogène placentaire (HPL ) en bloquant les sites de la prolactine. Les structures voisines de l’HPL et de la prolactine permettent à l’HPL d’occuper les sites mammaires de la prolactine mais l’action beaucoup moins puissante (agoniste) de l’HPL joue un rôle de quasi blocage de la lactation (action antagoniste de l’HPL en bloquant l’action de la prolactine)

    f. Au démarrage et en cours de la lactation Globalement le démarrage de la lactation est lié aux modifications hormonales de l’accouchement et au décollement placentaire avec

    � Chute de la progestérone qui ferme les jonctions � Chute de l’HPL qui renforce l’action de la prolactine

    Il persiste des capacités de développement de la glande mammaire sur le plan quantitatif et qualitatif par poursuite du développement du réseau glandulaire mais aussi par la multiplication des récepteurs hormonaux.

    g. A l’arrêt de la lactation

    L’arrêt des stimulations hormonales et surtout l’arrêt de la vidange du sein sont responsables de l’involution des cellules glandulaires des alvéoles qui pourront être de nouveau stimulées par une nouvelle grossesse et un nouvel allaitement.

    III- La régulation hormonale endocrine et locale autocrine de la lactation

    a. A l’accouchement

    Les fortes concentrations d’oestrogènes, de progestérone et d’hormone lactogène placentaire chutent rapidement.

    � L’accouchement déclenche la chute de la progestérone qui permet la fermeture des jonctions serrées et celle de l’HPL qui libère les récepteurs à prolactine et lève l’inhibition de la lactation.

    � La succion déclenche la libération de prolactine et d’ocytocine

    b. La prolactine

    • C’est une hormone peptidique hydrosoluble • Sa sécrétion

    o Elle se situe au niveau du lobe antérieur de l’hypophyse o Son taux augmente de façon progressive tout au long de la

    grossesse et est très élevé juste après l’accouchement (×4 à 24 Semaines d’Aménorrhée, ×8 à 38 SA)

    o La sécrétion est permanente mais modulée o Après l’accouchement sa sécrétion est renforcée par la

    succion du nouveau né. Le taux de base reste élevé et se

  • 15 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    modifiera ultérieurement en fonction du degré de succion de l’enfant.

    � stimule les récepteurs aréolaires, � envoie l’information à l’hypothalamus � où est inhibé le PIF ou Dopamine (facteur inhibant

    la sécrétion) � ce qui permet la libération d’un pic surajouté de

    prolactine par l’ante hypophyse. � La prolactine est transportée dans la circulation

    sanguine � vers les cellules glandulaires du sein où elle active

    la synthèse du lait � Il n’y a pas de conditionnement de la réponse

    contrairement à l’ocytocine ; la réponse est automatique et ne dépend pas de l’environnement psychologique, elle s’ajoute à la sécrétion de base.

    o La libération de la prolactine se fait sous forme de pics de sécrétion provoqués à chaque tétée (7 à 20 par jour) ; le pic obtenu se superpose au taux de base qu’il renforce ; le dosage est maximal 45 minutes après la tétée.

    o L’intensité du pic est proportionnelle à l’intensité et à la durée de la stimulation (majorée si stimulation bilatérale)

    o Il existe une variation circadienne du taux de prolactine : la sécrétion est plus élevée pendant le sommeil. Le taux maximum est généralement en fin de nuit Le taux minima en fin de journée

    o Elle agit en synergie avec un complexe hormonal

    lactogène � Glucocorticoïdes � Insuline (la montée de lait est classiquement retardée

    de 24 heures chez la diabétique) � GH, hormone de croissance � Hormones thyroïdiennes

    o Elle agit par l’intermédiaire de récepteurs, il est probable que les tétées fréquentes lors du démarrage favorisent la multiplication des récepteurs.

    o Il existe une grande variabilité des taux de base et de l’intensité des pics sans corrélation parfaite avec la quantité de lait produite.

    o Le niveau de base diminue progressivement au cours de l’allaitement, les pics sont moins intenses mais ils persistent durant toute la durée de l’allaitement. La prolactine n’est pas suffisante à l’entretien de la lactation mais elle est nécessaire.

    o Le PIF (prolactin inhibiting factor) ou dopamine sécrétée au niveau hypothalamique est un neurotransmetteur. Les substances agissant sur la dopamine vont modifier le taux de prolactine

  • 16 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    � Ce qui renforce la dopamine bloque la prolactine : bromocryptine (parlodel®), cabergoline (Dostinex®). Ils seront actifs précocément dans la période où la prolactine est élevée mais beaucoup moins à distance de l’accouchement.

    � Ce qui inhibe la dopamine stimule la prolactine : les neuroleptiques, l’ά méthyldopa (aldomet®) mais aussi la dompéridone (motilium®, péridys®) pouvant être utilisée pour augmenter la quantité de lait. A l’inverse ces substances renforceront une prolactine abaissée à distance de l’accouchement

    Dopamine (PIF)

    prolactine

    Agonistes dopaminebromocriptine

    (-)

    (+)InhibiteursDopaminedomperidone

    (-)

    D’après Endocrinologie G Hennen

    • Les actions de la prolactine

    o Elle participe au développement de la glande mammaire � Puberté : elle est indispensable à la croissance des

    canaux alvéolaires � Grossesse : elle est nécessaire au développement

    lobulo-alvéolaire et à la différenciation cellulaire des lactocytes : in utero l’excrétion de lactose est corrélée au taux de prolactine

    o Elle agit sur la fabrication du lait : la prolactine intervient en stimulant la synthèse de tous les composants du lait, en particulier les protéines dont la caséine qui n’est synthétisée que par les cellules glandulaires des alvéoles.

    o La prolactine est une hormone préexistant à l’évolution des mammifères, elle a donc de nombreuses fonctions en dehors de la lactation. On l’a appelée omnipotine (fait tout) ou versaline (a des effets contradictoires selon les organes)

    � Elle agit sur l’équilibre hydro-électrolytique � Sur la croissance et le développement � Elle freine les fonctions de reproduction (plus elle

    est élevée, plus le blocage ovulatoire est intense) � Elle a des effets sur le comportement

  • 17 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    � Hormone du stress et du maternage � Elle a un rôle immuno-modulateur

    o La prolactine à une influence sur le sommeil, elle permet un passage plus rapide au sommeil profond, plus réparateur.

    c. Régulation autocrine de la production du lait

    • L’action de la prolactine seule ne peut pas expliquer la

    régulation de la production du lait. o Il n’y a pas de corrélation entre le taux de prolactine et la

    quantité de lait produite o Un sein opéré dont un ou plusieurs canaux ont été coupés

    permet un allaitement malgré un ou plusieurs lobes non fonctionnels (pas ou peu d’engorgement dans ces zones malgré une absence de drainage).

    o Certaines femmes ne donnent qu’un sein alors que l’autre est théoriquement normal et est drainé par la même quantité de prolactine plasmatique.

    o Il doit y avoir une explication locale à l’absence de production d’un sein et la bonne production de l’autre, alors que le taux de prolactine sanguin est bien entendu le même des deux cotés et dans tous les territoires d’un même sein.

    • L’action de la prolactine est modifiée par des mécanismes de régulation locale.

    • Le mécanisme local est un rétrocontrôle négatif ; c'est-à-dire que quand les alvéoles sont pleines, la sécrétion de lait est freinée, mais à l’inverse : plus on enlève de lait, plus l’alvéole en produit.

    • La vidange du sein est plus importante que la fréquence des tétées.

    • Les travaux de Peter Hartmann confirment parfaitement ces constatations cliniques : Les mesures des volumes des seins en fonction du temps le démontrent dans différentes situations. Il existe en effet des variations indéniables de volume des seins qui ont pu être mesurées par des techniques échographiques et informatiques. Ont pu être établis un certain nombre de paramètres

    o La capacité de stockage : c’est la différence entre le plus grand volume mesuré et le plus petit au cours d’une période de 24 heures.

    o Le degré de remplissage : c’est la quantité de lait disponible à un moment donné. Il est compris entre 1 ou 100% (« sein plein ») et 0 ou 0% (« sein vide»).

    o La vitesse de remplissage du sein : c’est la variation de volume entre 2 mesures rapportée au temps : on peut l’exprimer en cc/ heure

    o La vitesse de remplissage est inversement proportionnelle au degré de remplissage : quand les seins sont « pleins », avant la tétée, peu de lait est produit et le volume des seins reste stable ; quand les seins sont « vides » après la tétée, la production de lait est intense et le volume des seins

  • 18 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    augmente rapidement. Du lait pourra donc être de nouveau tiré peu de temps après la tétée

    o Les débits de lait horaires produits chez une même femme peuvent varier de 6 à 90cc heure entre les 2 seins stimulés différemment, mais aussi sur un même sein plus ou moins stimulé : la synthèse du lait est régulée indépendamment et localement dans chaque sein.

    o Des études ont été faites sur les volumes de lait produits : � Au départ < à 100 ml/j � L’augmentation commence à la 36ème heure, se

    stabilise après 4 jours à 500 à 600 ml de lait par jour. � Il existe de grandes différences individuelles.

    • Le contrôle autocrine est donc essentiel o Il régule à court et moyen terme le volume de lait

    produit : il répond à la demande de l’enfant et sera déterminé par l’efficacité et la fréquence des tétées.

    o Le volume de lait produit est donc plus le reflet des besoins de l’enfant que des capacités de la mère ; à condition le bébé soit bien portant et puisse téter sans réserve.

    o Une baisse de lait est la conséquence d’un mauvais transfert de lait à l’enfant (l’enfant ayant pris peu, il a peu vidé et donc le sein a peu produit) ; ce n’est pas une insuffisance de lait primaire.

    o Tout ce qui limite l’extraction du lait : succion inefficace, tétées insuffisantes et /ou trop courtes, anomalies du réflexe d’éjection, diminue la quantité de lait produite.

    o On peut augmenter la production en augmentant la fréquence la durée et surtout l’efficacité des tétées.

    Début de tétée « seins pleins »

    Fin de tétée « sein vide »

    Volume du sein

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    o Pour les femmes présentant une capacité de stockage faible, le nombre de tétées doit être supérieur car il existe une quantité maximum pouvant être produite après chaque tétée.

    o Pour les femmes qui ont une grande capacité, les tétées pourront être très espacées ; si le bébé prend des tétées trop fréquentes, il risque de ne pas être rassasié malgré les grandes capacités maternelles, car il ne consomme que du lait de début de tétée peu riche en graisse.

    • Le mécanisme du contrôle autocrine : o Il est réalisé par l’intermédiaire du FIL : Feed back

    Inhibitor of Lactation ou Facteur d’Inhibition de l a Lactation.

    o C’est une petite protéine du lactosérum, il pourrait s’agir de la sérotonine. Elle s’accumule dans les alvéoles en même temps que les autres composants du lait

    o Son mode d’action serait le blocage de la liaison prolactine / récepteurs

    o C’est un mécanisme local lié au remplissage et à la vidange de l’alvéole : quand l’alvéole est pleine il y a beaucoup de FIL qui bloque la prolactine et l’alvéole s’arrête de produire ; quand l’alvéole se vide, le FIL s’évacue avec le lait et la production peut reprendre.

    o Les mesures faites par Hartmann ont été faites sur le sein entier mais cette régulation se fait probablement à tous les niveaux, ce qui explique les constatations faites aux différents niveaux :

    � Sein � Lobe, � Lobule � Alvéole…certaines pouvant ne pas être

    fonctionnelles.

    d. Ejection du lait : elle est sous la dépendance de l’ocytocine

    • L’ocytocine est une hormone peptidique hydrosoluble • Sa sécrétion

    o Elle se situe au niveau de l’hypothalamus o Puis elle est transférée dans la post hypophyse où elle est

    stockée. o Après l’accouchement sa sécrétion est provoquée par la

    succion du nouveau né � qui stimule les récepteurs aréolaires, � envoie l’information à l’hypothalamus � qui déclenche la libération de l’ocytocine post

    hypophysaire � l’ocytocine est transportée dans la circulation � stimule les récepteurs des cellules myoépithéliales

    qui réalisent une véritable contraction de l’alvéole et des canaux lactifères. Ces cellules sont musculaires

  • 20 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    lisses (c'est-à-dire de fonctionnement partiellement automatique, non régulé par un influx nerveux, mais par l’ocytocine.

    � et entraîne l’éjection du lait o la sécrétion de l’ocytocine est pulsatile et on détecte de 4 à

    10 pulses pour 10 minutes responsables d’un réflexe d’éjection.

    o il peut exister un délai de quelques minutes entre la stimulation de l’aréole et l’éjection de lait. Ce délai est conditionné par les afférences hypothalamiques venant réguler la synthèse de l’ocytocine. La tétée n’est réellement efficace qu’à partir de l’éjection du lait qui peut donc être retardée.

    o Chaque tétée comporte plusieurs éjections qui ne sont pas toutes perçues par les mamans.

    o C’est le nombre d’éjections qui conditionne le volume de lait transféré et non le temps passé au sein.

    o Avec le temps, le réflexe d’éjection devient conditionné et le réflexe se déclenche dès le début de la tétée mais aussi en voyant, entendant ou pensant au bébé. D’où l’intérêt de favoriser ce réflexe chez les mamans qui doivent tirer leur lait (proximité du bébé, photo, musique…)

    o La libération de l’ocytocine est modulée par les afférences corticales : en particulier elle peut être inhibée par des stimulations négatives type stress et facilitée par une stimulation positive (environnement chaleureux). Contrairement à la prolactine, le stress diminue les décharges d’ocytocine.

    o La noradrénaline inhibe et retarde l’éjection du lait � Par effet direct sur les cellules myoépithéliales � En diminuant le flux sanguin au niveau du sein � En diminuant la libération d’ocytocine

    o L’alcool et les opiacés diminuent le réflexe d’éjection o L’ocytocine facilite la libération hypophysaire de la

    prolactine o La concentration des récepteurs à l’ocytocine augmente

    progressivement au cours de la grossesse. • Les autres actions

    o Elle augmente le flux sanguin et la température cutanée des seins.

    o Elle a une action antistress, anxiolytique et sédative o Elle élève le seuil de perception de la douleur o Elle favorise l’attachement o L’ocytocine agit aussi sur la musculature de l’utérus dont

    elle favorise l’involution. Cependant libération d’ocytocine peut être source de douleurs provoquées par des contractions utérines (tranchées) qui sont transitoires mais dont il faudra prévenir les mamans.

    o L’ocytocine a également un rôle de rétention hydroélectrolytique

  • 21 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    IV- La physiologie à l’échelon de l’alvéole ou acinus

    L’alvéole est une véritable usine à fabriquer le lait. Elle possède l’infrastructure cellulaire, l’équipement enzymatique, les relations vasculaires une membrane spécifique et un système de régulation lui permettant de répondre aux besoins du bébé.

    a. Rappel des bases histologiques et cytologiques

    • La cellule glandulaire est une cellule polarisée : le noyau est proche de la basale, elle-même proche des capillaires sanguins. Les vésicules golgiennes chargées de concentrer et d’excréter certains composants du lait sont du coté de la lumière (centre de l’alvéole). La cellule est riche en mitochondries (énergie), en ribosomes (synthèse des protéines) et en réseau de réticulum endoplasmique. Les globules lipidiques migrent vers la zone apicale et s’entourent d’une enveloppe membranaire qui va permette un processus d’exocytose (sortie de la cellule).

    • La membrane présente une structure classique mais la jonction intercellulaire est douée d’une perméabilité variable : quand la glande est en période de faible activité (avant la naissance et pendant le sevrage) les jonctions ne sont pas étanches et la composition du lait est plus proche du sang donc plus salée. Ce relâchement permet d’évacuer les produits accumulés dans la lumière des alvéoles après le sevrage. Pendant la lactation les jonctions entre les cellules sont imperméables.

    b. La synthèse des composants du lait

    • Les protéines sont synthétisées à partir des acides aminés issus du sang. Comme toutes les protéines l’ARN messager copie de l’ADN permet la synthèse au niveau des ribososmes du réticulum endoplasmique granuleux. La caséine est une protéine spécifique du lait dont la synthèse est activée par la prolactine.

    • Le lactose (glucose + galactose) est synthétisé à partir du glucose sanguin.

    • La caséine et le lactose s’associent pour former des micelles expulsées dans la lumière de l’alvéole par un mécanisme d’exocytose

    • Les lipides sont synthétisés dans le réticulum endoplasmique lisse à partir des graisses maternelles mises en réserve pendant la grossesse. La lipoprotéine lipase, enzyme nécessaire à la synthèse, diminue dans les graisses maternelles et augmente dans le tissu glandulaire. Les globules lipidiques migrent vers la zone apicale et s’entourent d’une enveloppe membranaire qui va permettre l’excrétion. Une partie des lipides du lait est donc d’origine membranaire (phospholipides). Le taux de lipides est la variable la plus importante dans la composition du lait. Il augmente au fur et à mesure de l’extraction du lait (de l’ordre de

  • 22 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    1% en début de tétée, 12% en fin de tétée, 4% en moyenne. Les variations semblent plus liées au degré de vidange qu’aux variations de synthèse. Le modèle proposé pour expliquer ce fait serait celui de l’ « éponge » qui serait pressée jusqu’à exprimer les globules lipidiques. Ces lipides sont également variables dans leur composition : ce sont le cholestérol, les triglycérides et les phospholipides. Les triglycérides issus du sang sont une des composantes liées à l’alimentation. Il faudra donc éviter les « mauvaises graisses » dans l’alimentation.

    • L’eau, les ions les vitamines sont transférés dans le lait sans modification par perméabilité simple de la membrane.

    • Les immunoglobulines IgA sécrétées par les B lymphocytes sont transférées du sang et se lient à une protéine (la pièce sécrétoire) située sur la membrane basale des lactocytes pour se transformer en IgA sécrétoires adaptées à la flore maternelle. Ces IgA sécrétoires migrent dans la cellule vers le la lumière alvéolaire où elles sont excrétées séparément. D’autres protéines subissent la même migration cellulaire : l’albumine, la transferrine, la prolactine et l’insuline.

    • Le passage intercellulaire au niveau des jonctions serrées correspond aux périodes de démarrage et de fin de la lactation avec le passage du lactose pendant la grossesse, de dérivés sanguins et de médicaments accru dans ces périodes charnières.

    • On peut donc distinguer 5 voies métaboliques de fabrication du lait

    o Voie I : exocytose de vacuoles de caséine, lactose et calcium.

    o Voie II excrétion de gouttelettes graisseuses +/- entourées de membrane.

    o Voie III transfert de l’eau et des électrolytes à travers la membrane.

    o Voie IV transfert d’éléments d’origine intersticielle : IgA, transferrine, albumine, prolactine, insuline.

    o Voie V transfert par la jonction intercellulaire au niveau des jonctions serrées dans leur période d’ouverture.

    c. La régulation est sous influence hormonale et modulée

    localement. • Le lait est sécrété en continu (mais à vitesse variable) dans les

    alvéoles où il est stocké jusqu’à l’éjection • La prolactine intervient en activant la synthèse des différents

    composants du lait en particulier, la caséine spécifique du lait. Elle est nécessaire à la synthèse mais ne régule pas le volume de lait produit.

    • La progestérone agit sur les jonctions intercellulaires qu’elle tient ouvertes pendant la grossesse. L’expulsion du placenta et la chute de progestérone entraîne donc la fermeture progressive de ces jonctions.

    • Le complexe hormonal lacté facilite l’ensemble des synthèses

  • 23 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    • La régulation autocrine par le FIL (feed-back inhibitor of lactation), polypeptide présent dans le lait, agirait par inhibition de la liaison prolactine / récepteurs. Son rôle est d’inhiber les synthèses quand la pression monte au niveau de la zone concernée. La régulation locale est responsable de la quantité de lait produite, par l’intermédiaire de la vidange du sein.

    • L’ocytocine permet l’éjection du lait par contraction des cellules myoépithéliales alvéolaires et des canaux lactifères : le réflexe d’éjection inhibé par le stress est nécessaire à l’extraction du lait

    V- Résumé des étapes de la lactation

    a. Lactogenèse de stade I : préparation • du milieu de la grossesse jusqu’à la naissance • correspond la différenciation cellulaire • début de la synthèse du lactose retrouvé dans la circulation

    maternelle à partir de 20 semaines d’aménorrhée. • contrôlée par la prolactine, les œstrogènes et l’ensemble des

    hormones de l’organisme. • inhibée par la progestérone qui agit au niveau des seins en

    inhibant l’action de la prolactine en harmonie avec l’Hormone Lactogène placentaire (HPL) et en agissant sur la perméabilité des jonctions intercellulaires des cellules lactifères qui sont ouvertes pendant la grossesse.

    b. Lactogenèse de stade II : induction de la lactation

    • De la montée de lait jusqu’au lait mature • Sous influence hormonale provoquée par la chute de la

    progestérone donc par l’accouchement et la délivrance et l’élévation de la prolactine

    • Bloquée par la cabergoline • Correspond à une augmentation du volume de lait produit • Et à une modification de sa composition qui devient

    progressivement plus riche en lactose et moins riche en sel.

    c. Lactogenèse de stade III : maintien de la production • Correspond à la production du lait mature • Elle reste sous influence hormonale avec un rôle nécessaire de la

    prolactine pour la synthèse du lait et de l’ocytocine pour l’éjection • Mais la régulation locale, autocrine est primordiale pour le

    maintien de la lactation. Un arrêt de vidange du sein entraîne un arrêt de la production.

    d. Le sevrage

    • Provoqué par l’arrêt de vidange du sein • Il entraîne la production d’un lait moins abondant et plus salé, dit

    lait de sevrage, ressemblant au lait collostral.

  • 24 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    VI- Conclusion : la physiologie de la lactation reste encore partiellement méconnue et des recherches sont en cours notamment pour mieux connaître la régulation au niveau cellulaire.

    Cependant la bonne compréhension des mécanismes hormonaux et autocrines permet de mieux aider les mères en étant conscients que

    • Presque toutes les femmes peuvent allaiter • Mais qu’il y a des variations individuelles de capacité à prendre

    en compte (au sens propre comme au figuré). • Que les capacités et l’état de santé de l’enfant sont également

    très importants à considérer. • L’essentiel étant de ne pas limiter les tétées et d’en contrôler

    l’efficacité. Bibiographie

    • La lactation de la grossesse au sevrage (nombreuses références) Les dossiers de l’allaitement 2003 n°54 p10-16 • L’alimentation infantile bases physiologiques Supplément au volume 67,1989 du bulletion de l’OMS (disponible LLLFrance) • Régulation de la synthèse du lait chez les femmes Hartmann PE 4ème journée internationale de l’allaitement hors série des dossiers de l’allaitement 2000 12-18 • Ultrasound imaging of milk ejection in the breast of lactationg women. Ramsay DT, Kent JC, Owens RA, Hartmann PE. Pediatrics 2004 Feb;113(2):361-7. • Intramammary pressure in the lactating sow in response to oxytocin and during natural

    milk ejections thoughout lactation. Kent JC, Kennaugh LM, Hartmann PE. J Dairy Res. 2003 May;70(2):131-8. • Mammary physiology and milk secretion McManamann JL, Neville MC. Adv Drug deliv Rev. 200. Apr29;55(5): • Lactation humaine : nouvelles données anatomophysiologiques et implications

    cliniques G Gremmo Feuger médecine et enfance novembre 2006 p 503-509

    • Autocrine-paracrine regulation of the mammary gland. J Dairy Sci. 2016 Jan;99(1):842-53. doi: 10.3168/jds.2015-9828. Epub 2015 Aug 20. Weaver SR1, Hernandez LL2.

  • 25 Formation Consultantes en lactation IBCLC 2019 Dr Brigitte Fontaine IBCLC

    L’acinus ou alvéole vue en coupe

    la cellule glandulaire de l’acinus ou alvéole

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