La sécurité énergétique en Méditerranée

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GROUPEMENT D’ETUDES ET DE RECHERCHES SUR LA MEDITERRANEE L ’ANNUAIRE DE LA MEDITERRANNEE 2008 La sécurité énergétique en Méditerranée Edition du GERM Publié en partenariat avec la Fondation Friedrich EBERT

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GROUPEMENT D’ETUDES ET DERECHERCHES SUR LA MEDITERRANEE

L’ANNUAIRE DE LA MEDITERRANNEE

2008

La sécurité énergétique en Méditerranée

Edition du GERM

Publié en partenariat avec la Fondation Friedrich EBERT

Page 2: La sécurité énergétique en Méditerranée

L’Annuaire de la Méditerranée est élaboréen partenariat avec

la Fondation Friedrich EBERT

© Groupement d’Etudes et de Recherches sur la MéditerranéeDépôt légal :

ISBN :Imprimerie : Rabat

Page 3: La sécurité énergétique en Méditerranée

PUBLICATION DU GERMAssociation scientifique reconnue d’utilité publiqueB.Q. n° 5560 du 13 septembre 2007 (version arabe)

CORRESPONDANCE : B.P. 8163 – AGENCE DES NATIONS-UNIES

AGDAL-RABAT

Site Web : www.germ.ma

Page 4: La sécurité énergétique en Méditerranée

LES ORGANES DU GERM

COMITE EXECUTIF

Habib EL MALKI

Driss KHROUZ

Jamila HOUFAIDI SETTAR

Mohamed MOHATTANE

Mohamed BERRIANE

Hamid BEHAJ

Fouad AMMOR

Moha MARGHI

Mohamed KHARISS

El Houssine AFKIR

Driss AISSAOUILarbi EL HARRAS

CONSEIL SCIENTIFIQUE

Habib EL MALKI

Driss KHROUZ

Mohamed MOHATTANE

Jamila HOUFAIDI SETTAR

Miloud LOUKILI

Abdoulwahab MAALMI

Aziz HASBI

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REDACTEUR EN CHEF

Driss KHROUZ

COMITE DE REDACTION

Driss KHROUZ

Najat BENSERHIR

Hamid BEHAJ

Miloud LOUKILI

Mohamed KHARISS

Loubna BERAICH

Houda EL KHELOUFI

Jaber AFOUKANE

Page 6: La sécurité énergétique en Méditerranée

Sommaire

Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

Présentation de l’Annuaire de la Méditerranée 2008 . . . . . . . . . . 13

Axe I : Les questions énergétiques : un enjeugéostratégique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

L’espace euro-méditerranéen, hydrocarbures et stratégies :entre Washington et Moscou

Philippe Sébille-Lopez . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

La géopolitique des ressources énergétiques de la merCaspienne : rivalités et coopérations

Turab Gurbanov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

La problématique énergétique mondialeMounir Debbarh . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

Axe II : Le développement durable et laproblématique des énergies renouvelables . . . . . . . . . . . 85

Eau et énergie en MéditerranéeAlexandre Taithe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

Le rôle du nucléaire dans le mix énergétique : défiset perspectives : qu’en est-il au Maroc ?

Yahia Bouabdellaoui . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

L’efficacité énergétique : quelle contribution audéveloppement durable ?

Ahmed Morchid . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

Page 7: La sécurité énergétique en Méditerranée

8 La sécurité énergétique en Méditerranée

Premières assises nationales du Développement durableen Méditerranée

Tawfik Hasni . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149

La problématique de l’énergie dans ses différentesdimensions : une tentative d’évaluation

Abdelaziz Bennouna, Driss Zejli et Rachid Benchrifa . . . . . . . 163

Perspectives pour le Maroc : vers un Maroc exportateurd’énergie! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201

Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211

Pistes bibliographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249

Table des matières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253

Page 8: La sécurité énergétique en Méditerranée

Depuis le début du processus de Barcelone en 1995, la FondationFriedrich Ebert (FES) a accompagné le Partenariat euro-méditerranéen.Le lancement de l’Union pour la Méditerranée (UPM) en 2008 a remisla question Euromed au premier plan de l’agenda politique européen,donnant l’occasion à la FES de développer davantage sa coopérationrégionale autour de la Méditerranée. Ainsi, la FES a initié en 2009 unenouvelle ligne de travail de portée régionale, intitulée « FES DialogueMéditerranée », impliquant dix bureaux de la région MENA, de l’Unioneuropéenne – notamment en Espagne, en France et à Bruxelles – et desnouveaux pays membres de l’UPM, à titre d’exemple le bureau de Croatie.Cette ligne de travail, coordonnée au sein de notre siège à Berlin, chercheà intensifier la coopération et les synergies entre l’ensemble despartenaires de la FES des deux rives.

Au-delà des partenariats nationaux, la FES cherche à accompagnerégalement les structures régionales, notamment l’Assemblée parlementaireeuro-méditerranéenne, la Plateforme non-gouvernementale Euromed etle Forum syndical Euromed. L’objectif poursuivi par «FES DialogueMéditerranée » consiste à assurer un accompagnement politique des projetsEuromed qui soit partagé par tous les acteurs sociaux à travers le dialogueeuro-méditerranéen. Il s’agit de jeter des ponts entre les milieuxpolitiques, les académiciens et les différents acteurs de la société civile,entre les deux rives ainsi qu’au sein même de la région MENA.

Trois thèmes constituent les piliers de cet axe de travail : lespolitiques sociales et de l’emploi, la migration et la sécurité énergétique.

Avant-propos

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Ce dernier thème, objet de la 16e rencontre annuelle du Groupementd’Etudes et de Recherches sur la Méditerranée (GERM), qui s’est tenueles 11 et 12 décembre 2008 à Rabat, revêt une importance d’actualitéessentielle et constitue l’une des principales priorités de la politique dupartenariat euro-méditerranéen et du partenariat avec l’Afrique, par sadimension géostratégique, ses enjeux politiques et économiques qui sontles déterminants fondamentaux de la sécurité régionale, de la croissanceéconomique, de la richesse et des équilibres financiers.

La FES, fondation politique allemande œuvrant pour la démocratiesociale, la justice et la paix dans le monde, se voit interpellée par un sujetaussi important que la sécurité énergétique. Son objectif est de promouvoirun espace de débat et d’échange d’idées à faire valoir de manière crédibledans le discours et l’action politique, non seulement au niveau national,mais aussi au niveau régional.

C’est à ce titre qu’une série de spécialistes remarquables sontintervenus lors de la 16e rencontre annuelle du GERM, qu’il s’agit deremercier ici pour leurs contributions enrichissantes.

Les remerciments vont également au GERM, dirigé par son secrétairegénéral, M. Driss Khrouz, et son équipe de travail, pour la co-organisationen partenariat avec la Fondation de cette rencontre, pour le choix judicieuxdu thème qu’est la sécurité énergétique et pour la qualité et le niveau decompétence des intervenants.

La FES tient à ce partenariat avec le GERM, avec qui elle partageune histoire de coopération riche de plus d’une décennie de travailscientifique et académique sur des sujets d’actualité politique, économiqueet sociale, relatifs aux défis de la Méditerranée. La mission conjointe dela FES et du GERM est de contribuer à promouvoir l’avenir dupartenariat méditerranéen, assurer une meilleure interactivité et undialogue constructif dans l’intérêt des populations des deux rives.

La 17e rencontre annuelle du GERM, co-organisée par la FES et leGERM les 4 et 5 décembre 2009, portera sur le thème « Le statut avancédu Maroc à l’épreuve de l’Union pour la Méditerranée ». Par cettemanifestation, la Fondation cherche à faire le lien entre la science et lapolitique, c'est-à-dire entre les experts et les instituts de rechercheacadémique, d’une part, et les décideurs politiques et sociaux, de l’autre,

10 La sécurité énergétique en Méditerranée

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dans l’objectif d’élaborer des inputs concrets qui permettront d’ajusteren amont des décisions politiques importantes.

Les travaux de cette 17e rencontre du GERM feront l’objet de lapublication de l’Annuaire de la Méditerranée 2009, publication conjointeavec le GERM qui existe depuis plus d’une décennie. La FES espèrequ’elle servira de référence académique pour les chercheurs et les acteursconcernés par le partenariat euro-méditerranéen.

Ulrich Storck

Représentant Résident Fondation Friedrich Ebert, Maroc

11Avant-propos

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La sécurité énergétique acquiert de plus en plus une dimensiongéostratégique essentielle. Loin de se réduire à une question de prix etde marché, l’énergie revêt des dimensions multiples ; elles touchentles fondements de la croissance économique telle qu’elle s’est progres-sivement consolidée depuis la fin du XIXe siècle, les déterminants del’emploi, de la richesse, les équilibres financiers des entreprises et desEtats, et elles déterminent de plus en plus le devenir des changementsclimatiques, le respect de la biodiversité et des équilibres durables de laterre.

Le clignotant rouge qu’exprime la hausse brutale des prix du pétrolen’est que la partie visible de l’iceberg.

Les dernières hausses, quoique brutales et douloureuses pour lespopulations les plus pauvres et des pays non développés, sont en fait unedes manifestations des dérèglements que connaît le capitalisme, de plusen plus déterminé par la finance spéculative et les bulles financières desbourses de valeurs au détriment de l’économie productive de richesseset de bien-être global.

Comme les fonds d’investissements et autres produits financiers sanscontrepartie réelle, le pétrole est une valeur refuge de multiples formesde blanchiment d’argent et de spéculations mondiales.

Des paradis fiscaux aux dérégulations des groupes financiers, l’énergieest bel et bien un symbole des dérapages successifs qui depuis 1973disparaissent pour réapparaître et avec de plus en plus des dégâts.

La sécurité énergétique se pose aujourd’hui en termes de pouvoird’achat pour des centaines de millions de personnes, mais aussi en termesde sécurité tout court.

Présentation de l’Annuairede la Méditerranée 2008

Rabat, décembre 2008

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Entre la non-maîtrise du nucléaire et l’effet de serre provoqué par leCO2 issu des énergies fossiles, l’alternative se pose en de nouveaux termes.

Sans remonter jusqu’aux sources de l’énergie pétrolière et au carteldes «sept majors» qui ont dominé et qui dominent encore l’industrieénergétique, il n’est pas exagéré de dire que les crises, les dominations,les spoliations et la destruction de l’environnement sont inscrits dansl’histoire du pétrole.

Aujourd’hui que la conscience d’une fin probable du pétrole à la loidu marché est acquise, la problématique énergétique commence à êtreabordée dans des termes plus stratégiques.

A court terme, la pratique de réseaux électriques intégrés crée desinterconnexions importantes, c’est ainsi que depuis les pays des Balkansjusqu’en Afrique du Nord, un câble sous-marin alimente en électricitédifférents pays.

En 2020, l’Union européenne utilisera encore une énergie à 83 %d’origine fossile.

En Méditerranée, la sécurité énergétique pose de graves défis pourchacune des trois composantes en face :

Les pays de l’Union européenne, gros consommateurs d’énergie fossilen’en produisent pas. Ils absorbent les deux tiers de l’énergie consommée.

– La France, l’Espagne, l’Italie et la Grèce émettent 70 % du CO2 dela Méditerranée.

– 36 % des importations de gaz naturel et 20 % des importations depétrole consommés dans les pays de l’Union européenne proviennent despays producteurs méditerranéens, surtout l’Algérie et la Libye.

– 87 % de la consommation énergétique des pays de la Méditerranéesera encore d’origine fossile en 2025.

C’est dire qu’entre les prix et leurs répercussions sur les conditionsde vie des populations et l’impact sur la biodiversité et les dangers del’effet de serre, les choix sont clairs. Mais ce n’est pas parce que la visionexiste que les moyens et les conditions de sa réalisation sont évidentes.Entre la diversification des sources d’énergie par la promotion desressources reproductibles et le changement de culture des consommateurs,les démarches sont plus complexes qu’elles ne paraissent. Mais cela

14 La sécurité énergétique en Méditerranée

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suppose des mutations qui ne se feront, sans conteste, que sous la pressionde la nécessité. Cela devrait toucher des facilités de la société deconsommation ainsi que les modes de vie, de travail, de loisirs et lesorganisations des espaces urbains et d’habitat.

Les énergies renouvelables deviennent de plus en plus un choixd’avenir, ce n’est pas une option souhaitable. C’est la seule issue pourl’Homme et l’écosystème.

L’énergie éolienne et l’énergie solaire sont les seules voies alternatives.

Pour le Maroc, les potentialités dans ce domaine sont très importantes.La maîtrise des technologies se pose d’autant moins que le pays disposede compétences humaines qui peuvent adapter aisément le savoir-fairedont disposent d’autres pays.

Lors de sa réunion constitutive tenue le 13 juillet 2008 à Paris, l’Unionpour la Méditerranée a décidé de faire de l’énergie renouvelable un deses choix prioritaires. C’est là un des axes de la potentielle Communautéde l’Energie euro-méditerranéenne (CEEM) que l’Assembléeparlementaire euro-méditerranéenne a proposé lors de sa dernièrerencontre.

Quatre axes ont permis une articulation optimale des composantesde la thématique de la rencontre :

1. la question énergétique : enjeu géostratégique des relations inter-nationales ;

2. quel avenir pour le pétrole et le gaz naturel ?3. les énergies renouvelables ;4. le comportement du consommateur face à la question énergétique.

L’Annuaire de la Méditerranée 2008 aborde une thématique quidevient de plus en plus centrale dans les positionnements et l’évolutiondu monde.

Aux considérations largement connues, liées à la production desénergies, à leur financement, aux positions concurrentielles et demonopole, à la sécurité d’approvisionnement, aux asymétries de bien-être dans le monde du fait des richesses énergétiques, aux multiplesfacettes de la spéculation et aux paradis fiscaux, etc. se rajoutent lesnouvelles préoccupations et centres d’intérêt liés au réchauffementclimatique et aux graves détériorations des équilibres de l’écosystème.

15Présentation de l’annuaire de la Méditerranée

Page 14: La sécurité énergétique en Méditerranée

16 La sécurité énergétique en Méditerranée

Les expressions nouvelles des prises de conscience des menaces quipèsent sur la planète stimulent des cultures et des valeurs dont la substanceest de changer radicalement le mode de vie des humains sur la terre pourun développement durable, harmonieux et tourné vers un avenir meilleur,pour une reproduction saine des composantes fondamentales de la terre.

Les mesures, les lois, les politiques et les comportements quiréduisent pollution, gaspillage et qualité de la vie sont bel et bien concernéspar les questions énergétiques.

L’année 2008 avec l’éclatement de la crise multiforme qui s’installemontre bien l’intérêt du choix de ce thème par le GERM et la centralitédes énergies et des énergies renouvelables dans la géostratégie mondiale,régionale et nationale de chacun et de tous.

Il est heureux, enfin, qu’avec l’arrivée du président Barak Obama,les Etas-Unis d’Amérique adhèrent aux mesures et politiques qui semettent en place dans ce sens dans plusieurs pays depuis l’accord deKyoto.

Driss KHROUZ

Secrétaire général du GERM

Page 15: La sécurité énergétique en Méditerranée

Axe I

Les questions énergétiques :un enjeu géostratégique

Page 16: La sécurité énergétique en Méditerranée

L’espace euro-méditerranéen : un ensemble géographiquetrès morcelé au Nord

• 1957 : Europe des 6, Traité de Rome.

• 2007 : Europe des 27, Bulgarie et Roumanie, 23 langues officielles.

• L’Europe géographique, avec une superficie de 10 millions de km2

(UE 27 = 4,3 millions de km2), est le plus petit des 5 continents,mais aussi le plus fragmenté (avec l’Afrique).

• UE 27 : 494 millions d’habitants pour un PIB de 16 748 md$, enparité de taux de change nominal, soit 30,82 % du PIB mondialen 2007 ( PIB/h UE 27 : 33.900 $/h ; USA (41.000 $/h).

L’Europe géopolitique : un petit continent composé de58 Etats potentiels

Les 27 États membres de l’Union européenne : Allemagne, Autriche,Belgique, Bulgarie, Chypre, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande,France, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg,Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie,Royaume-Uni, Slovaquie, Slovénie, Suède, etc.

• Les 3 Etats candidats à l’Union européenne : Croatie, Macédoine,Turquie.

(*) Phillipe Sébille-Lopez, Consultant en relations internationales au sein du cabinetGéopolia.

L’espace euro-méditerranéen,hydrocarbures et stratégies : entre

Washington et Moscou

Philippe Sébille-Lopez*

Page 17: La sécurité énergétique en Méditerranée

• Les 4 États membres de l’Association européenne de libre-échange(AELE) : Islande, Liechtenstein, Norvège, Suisse.

• Les 7 Etats membres de l’Accord de libre-échange centre-européen :Albanie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Macédoine, Moldavie, Monténégro,Serbie.

• 11 autres États européens (dont au moins une partie est située sur lecontinent européen) : Andorre, Arménie, Azerbaïdjan, Biélorussie,Géorgie, Kazakhstan (le nord de la Caspienne, Monaco, Russie(Kaliningrad et l’ouest de l’Oural), Saint-Marin, Ukraine, le Vatican ; soitpotentiellement 52 Etats, voire plus…

• Plus 6 Etats non reconnus par la communauté internationale (ou àla souveraineté contestée) : Abkhazie, Chypre du Nord, Haut-Karabakh,Kosovo, Ossétie du Sud, République moldave de Transnistrie.

• L’UE et au-delà en Europe : les 27 + 14 + 11 + 6, soit 58 Etatspotentiels et/ou virtuels.

• Conseil de l’Europe (de 10 Etats en 1949 à 47 Etats-membres en2008, pour une population de quelque 800 millions d’habitants et 5 Etatsobservateurs dont les USA).

Pluralités de représentations au Nord

• Pluralités d’intérêts au Nord entre pays au sein de l’UE et hors del’UE.

• Pluralités dans l’approche de la relation transatlantique et des rapportsà établir avec la Russie.

• Pluralités de perception du sud de la Méditerranée (histoirecoloniale, effet 11/9, immigration, etc.).

Total 57 pays : 1 450 millions d’habitants ; PIB en 2007: 3 692 md$,soit un PIB/h de 2 546 US$/a/h (13 fois moins que dans l’UE 27) (1).

Pour les 10 pays membres de l’OCI et riverains de la Méditerranée(hors autorité palestinienne) : PIB 1 161 md$ dont la moitié en Turquie(663 md) pour 264 millions d’habitants, soit un PIB/h (PIB courant)d’environ 4 400 US$ en 2007 (7 fois moins que l’UE 27).

20 La sécurité énergétique en Méditerranée

(1) Source statistiques : Rapport économique annuel sur les pays de l’OCI en 2008, OCI/SESRIC,2008.

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• De fortes disparités aussi entre les Etats du sud et des caractéristiquesterritoriales et démographiques particulièrement explosives : des conflits,des zones grises, des séparatismes, des frontières poreuses et souventartificielles du fait des héritages coloniaux et des deux guerres mondiales,le tout sur fond de clivages politiques, culturels et socio-économiquesmultiples et polymorphes.

De la géographie à la géopolitique : USA, Russie, les deuxacteurs majeurs de la zone euro-méditerranéenne

La géopolitique des Etats-Unis : deux postulats et quelques axiomes

1. La raison d’être des Etats-Unis : transformer le monde à leur image,celle d’une société idéale basée sur la démocratie et l’économie de marché.

2. Mettre en place un système normatif mondialisé basé sur ce modèlequi perpétue leur hégémonie.

Corollaire : veiller à ce qu’aucune puissance rivale potentiellen’émerge, qui risquerait de produire un modèle concurrent.

• Réduire l’influence russe dans l’espace ex-soviétique.

• Contenir et limiter la montée en puissance de la Chine.

• Soutien à la géopolitique d’Israël sur un M-O toujours vital.

• Consolider un bloc relais partant de l’UE vers l’est jusqu’à l’Asieet incluant le plus de pays de la Méditerranée (le Grand Moyen-Orients’inscrivait dans cette doctrine).

• Un monde multipolaire est impossible, car il finirait par remettreen cause la mondialisation qui s’effectuait largement au bénéficedes USA, au moins jusqu’à la crise financière…

• OTAN : outil stratégique des Etats-Unis, mais le monde est moinseuratlantique et de plus en plus global, d’où de nouvelles missions...

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Page 19: La sécurité énergétique en Méditerranée

22 La sécurité énergétique en Méditerranée

Source : Philippe Sébille-Lopez, Géopolitiques du pétrole, Editions Armand Colin, 2006,470 pages.

Pour contrôler l’accès de la Russie aux mers chaudes et au Moyen-Orient : Elargissement de l’Otan vers l’est et renforcement vers lesud des bases stratégiques et points de contrôle US

Nouvelles menaces et repositionnement de la présence militaire US :contrôle des points de passage stratégiques et sécurisation des fluxcommerciaux et des approvisionnements pétroliers

Page 20: La sécurité énergétique en Méditerranée

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Redéploiement stratégique nord/sud des forces américaines/OTAN enEurope et élargissement de l’Otan vers l’est (26 pays membres + 23 « payspartenaires ») : la zone Caspienne/Caucase/Mer noire, plus que jamaisstratégique, notamment pour le transit des hydrocarbures.

L’OTAN vers le sud : dialogue méditerranéen (MD) et initiativede coopération d’Istanbul (ICI)

• Une volonté d’étendre et de formaliser davantage les partenariatsmilitaires au sud.

• M.D. (1994) : Egypte, Israël, Mauritanie, Maroc et Tunisie ; Jordanie(1995) puis Algérie (2000).

• I.C.I. (2004).

Parallèlement à cette progression des intérêts militaires de l’OTANvers le sud, renforcement de la présence des compagnies pétrolièresaméricaines et plus généralement occidentales dans l’espace euro-méditerranéen élargi, face à une concurrence elle aussi renforcée des paysémergents et de leurs compagnies, notamment asiatiques, et au retourdes compagnies et intérêts militaires russes. Algérie, Libye, Egypte,Afrique sahélienne et golfe de Guinée (AGOA), Asie centrale, etMoyen-Orient.

Les importations pétrolières des USA

Total 15 pays : environ 85 % des importations (brut + produits).

De l’Union soviétique à la Russie : poussée par les Etats-Unis et grâceà ses hydrocarbures et autres matières premières, la Russie cherche àredéployer ses ailes sur un monde en voie de multipolarisation.

Après la perte de ses bases navales liées à la Guerre froide, la Russie :un colosse au pied d’argile ? Forces de projection assez faibles et qualitédiscutable. Pour les USA, une seule menace réelle : ses missiles et sescapacités balistiques, d’où le bouclier anti-missiles US en Europe de l’Est.

UE 27 et pétrole : 69 % ou 82 % de dépendance extérieure (selon quel’on intègre ou pas la production de la Norvège qui est dans l’OTAN maispas dans l’UE).

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Page 21: La sécurité énergétique en Méditerranée

Country Sep-08 Aug 08 YTD 2008 Sep-07 YTD 2007

Canada 2,364 2,199 2,420 2,520 2,473

Saudi Arabia 1,431 1,537 1,546 1,560 1,456

Venezuela 1,051 1,305 1,193 1,315 1,353

Mexico 1,003 1,400 1,281 1,454 1,564

Algéria 657 530 539 702 732

Nigéria 591 1,166 1,015 1,181 1,087

Iraq 543 663 661 603 493

Russia 437 490 481 389 416

Angola 416 495 511 591 542

Virgin Islands 345 298 328 384 333

Brazil 271 208 247 232 216

United Kingdom 247 222 222 185 288

Ecuador 233 298 218 239 205

Netherlands 196 143 165 136 127

Colombia 149 257 203 186 148

24 La sécurité énergétique en Méditerranée

SourcePourcentage des importations

2004 2006

Russie 26 % 33 %

Norway 13 % 19 %

Arabie saoudite 9 % 11 %

Libye 8 % 9 %

Iran 5 % 6 %

Kazakhstan 3 % 5 %

Algérie 3 % 4 %

Niger 3 % 3 %

Iraq 2 % 2 %

Autres 10 % 8 %

EU own production total 18 %

Source : Commission européenne.

Europe des 27 : importations de pétrole (2004-2006)

Source : EIA, département américain de l’Energie.

Total imports of Petroleum (Top 15 Countries)(Thousand Barrels per Day)

Page 22: La sécurité énergétique en Méditerranée

25Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Les différences entre 2004 et 2006 résultent de l’intégration de laproduction de l’UE en 2004 et uniquement des importations en 2006.

L’UE 27 et le gaz : 46 % ou 63 % de dépendance extérieure

Europe des 27 : Provenance du gaz naturel (2004)

Norway17 %

RussianFederation

29 %

Algeria13 %

Nigeria1 %

Qatar1 % Others

2 %

EU ownproduction total37 %

Source : European Commission DG TREN, Eurostat.

Principaux bénéficiaires des exportationsde gaz naturel russe, 2005

Country Imports % of Domestic(bem/year) NG Consumption

1 Ukraine 60.4 79

2 Germany 36.5 43

3 Italy 23.3 65

4 Belarus 20.2 100

5 France 22.6 100

6 Hungary 8.3 62

7 Czech Republic 7.1 4

8 Austria 6.9 70

9 Poland 6.4 47

Page 23: La sécurité énergétique en Méditerranée

26 La sécurité énergétique en Méditerranée

La consommation gazière de l’UE devrait progresser de 150 à200 Gm3 d’ici 20 ans (AIE)

En 2006, consommation de gaz de l’UE 27 = environ 500 Gm3

La dépendance extérieure de l’UE va rapidement se renforcer dansun contexte où la demande mondiale va elle aussi globalement progresser,d’où des inquiétudes sur les capacités des pays exportateurs à pouvoiry répondre.

Source : IEA, BP (2006), CIS and E. Europe Energy Yearbook.* Percentage above 100 imply stocking of extra supplies.

Country Imports % of Domestic(bem/year) NG Consumption

10 Slovakia 6.4 108*

11 Baltic States 5.7 100

12 Filand 4.2 105*

13 Romania 4.1 23

14 Fmr Yugoslavia 4 57

15 Azerbaijan 3.4 36

16 Bulgaria 2.8 89

17 Greece 2.4 96

18 Georgia 1.3 100

19 Switzerland 0.36 12

Page 24: La sécurité énergétique en Méditerranée

27

L’Europe est entourée par plus de 60 % des réservesmondiales de gaz naturel conventionnel, à distance

économique par gazoduc

La prééminence de la Russie en Europe

La Russie fournit : 37 % des importations gazières de l’UE 27 et 25 %de sa consommation.

Les hydrocarbures de la Caspienne : une zone non délimitée soumiseà de fortes pressions.

Hydrocarbures, mais aussi défense et questions stratégiques : lesorganisations, les pipelines.

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Distance à vol d’oiseau à partir de Bruxelles.Dans les cercles: volume des réserves de gaz par pays en trillions de m3.

Page 25: La sécurité énergétique en Méditerranée

Constantes et ruptures stratégiques de la mer Caspienne àl’Europe de l’Est

• Au plan politique : quelques évidences.

• De la Caspienne à l’Europe de l’Est, des pays ex-communistes, avecdes approches très différenciées envers la Russie, mais tous proches desUSA.

• Derrière les hydrocarbures : l’affrontement USA/Russie.

• Des accords et/ou projets de défenses anciens et nouveaux (CaspianGuard/Caspian Force), des bases militaires, des contrats d’armement, etc.

• Des systèmes d’alliances politico-économiques antagonistes et/outrès composites : OTSC, GUAM, CEI, OCS, Forum des pays riverainsde la Mer noire, le tout sur fond d’élargissement de l’OTAN, de révolutionscolorées, de conflits gelés, de contentieux terrestres et maritimes, deséparatismes, etc.

• Des relations bilatérales variables entre les acteurs au gré despressions et soutiens extérieurs (Ouzbékistan), d’où des questions sur lafiabilité des engagements : on retrouve toutes les caractéristiques d’unezone de confrontation stratégique, avec les intérêts de presque toutes lesgrandes et moyennes puissances de la zone, plus quelques autres(Russie, Etats-Unis, Chine, UE, Turquie, Iran, etc.) d’où bien desincertitudes (la crise géorgienne d’août 2008 et ses enseignementspétroliers).

Constantes et ruptures stratégiques de la mer Caspienne àl’Europe de l’Est

• Au plan des hydrocarbures : intérêts divers selon les types d’acteurs.

• Pays exportateurs d’hydrocarbures de la Caspienne : la recherchede relations plus ou moins équilibrées avec les trois grands blocsconsommateurs (Europe, Chine/Asie, USA) et le voisin russe, plus lavolonté de reprendre le contrôle de leurs ressources.

• La Russie : garder le monopole sur ses voies d’exportation, court-circuiter les projets étrangers de contournement en absorbant lescapacités d’exportation de ses voisins et/ou en lançant des projetsconcurrents ; limiter les pays de transit pour ces nouvelles capacitésd’exportation afin de conserver une totale maîtrise de son principal levierde pouvoir.

28 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 26: La sécurité énergétique en Méditerranée

29

• Pays importateurs : diversifier les sources et voies d’approvision-nement en contournant certains obstacles politiques.

• Pays de transit : fournir toutes sortes de projets, y compris les plus« originaux » en appui aux stratégies des acteurs qui précèdent pour profiterau maximum des droits de transit via les rivalités existantes.

• Pour les compagnies pétrolières (privées plus que nationales), il fautintégrer tous ces éléments sur la durée pour sécuriser et rentabiliser lesprojets, par delà les ambitions stratégiques des Etats impliqués.

Logiques de blocs géopolitiques autour de la Caspienne : la rivalitéUSA/Russie profite pour le moment à la Chine (pétrole kazakh +gaz naturel turkmène)

Quelles nouvelles routes du gaz vers l’Europe

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Page 27: La sécurité énergétique en Méditerranée

Pour la Russie, contourner l’Ukraine par où transitent 80 % desexportations gazières russes vers l’Europe : projet Nord Stream, SouthStream contre Nabucco, Blue Stream II, etc.

Pour l’Europe, renforcer les capacités GNL et diversifier les voiesd’approvisionnement.

La Turquie, dont la consommation de gaz augmente fortement, renforcesa position de hub énergétique vers l’Europe, pour le gaz naturel maisaussi pour le pétrole.

Des opportunités aussi pour les pays du sud de la Méditerranée, del’Algérie à l’Egypte.

Quelle(s) route(s) pour le pétrole de la Caspienne ?

OPEP du gaz : la volonté de puissance de la Russie

• Le FPEG a été créé à l’initiative de la Russie et de l’Algérie en 2001à Téhéran. Il regroupe quinze pays producteurs de gaz : Algérie*, Brunei,Egypte, Indonésie*, Iran*, Libye*, Malaisie, Nigeria*, Oman, Qatar*,Russie, Trinidad & Tobago, Emirats arabes unis*, Venezuela*, mais aussila Norvège en tant qu’observateur. Ensemble, ces quinze pays représentent75 % des réserves mondiales de gaz (et 44 % de la production).

• OPEP : 49,5 % des réserves prouvées mondiales de gaz naturel, 18 %de la production mondiale.

• Avec l’OPEG : entraîner l’Iran, l’Algérie et les pays de la Caspienne(1re visite d’un président russe en Iran depuis 1943 en marge du sommetdes pays riverains de la Caspienne 10/2007, 1re visite du président éluMedvedev au Kazakhstan 5/2008).

• Mais les plus virulents, Iran et Venezuela, n’ont pratiquement aucunecapacité d’exportation gazière malgré leur potentiel respectif. L’Iranpourrait sous certaines conditions développer assez rapidement sescapacités d’exportation gazière. Les perspectives sont beaucoup pluslointaines et plus régionales pour le Venezuela.

• La réunion ministérielle du FPEG prévue le 4/6/2008 à Moscou aété reportée, et depuis la réunion de Doha d’avril 2007, l’OPEG peineà exister.

• L’attitude des pétromonarchies du Golfe (25 % des réserves) ?

30 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 28: La sécurité énergétique en Méditerranée

• Des marchés mondiaux du gaz régionalisés et pour le moment à l’abrid’un futur cartel, mais jusqu’à quand ?

• L’OPEG pose plus de questions qu’elle n’apporte de réponses pourle moment, et la Russie « navigue » prudemment entre l’OPEP et la futureOPEG (la Russie a désormais un statut d’observateur à l’OPEP).

Conclusion

• Aspects énergétiques dans l’espace euro méditerranéen :

– développer les coopérations énergétiques sur la durée vers le sudpuisque personne n’échappera aux interdépendances actuelles, qui vontmême se renforcer ;

– stimuler les partenariats politico-économiques euro-méditerranéens(UpM, processus de Barcelone et autres, en multilatéral et/ou enbilatéral, en tentant de réduire les frictions et les freins de part et d’autre,etc.

• Aspects stratégiques :

– réduire les tensions américano-russes :

• développer des synergies d’intermédiation notamment Otan/UE/Russie, autour de la Mer noire pour désamorcer des crisespotentielles entre les USA et la Russie, notamment sur l’Ukraine(impliquer les autres pays riverains de la Mer noire dans le cadrede l’OSCE) ;

• en termes d’élargissement de l’OTAN, faire comprendre à lanouvelle Administration Obama, qu’il conviendrait de renforcerle Conseil Otan/Russie et d’étudier soigneusement les nouvellesadhésions en renforçant l’implication européenne, en tant quepartie intégrante d’une identité européenne de sécurité et de défenseà l’intérieur de l’OTAN, ceci renvoie aux intérêts stratégiques desUSA par rapport à ceux de l’Europe, etc.

• Barack Obama veut bien coopérer avec la Russie dans le domainede la non-prolifération et du terrorisme, mais il s’inquiète du« militarisme » de Moscou (Zbigniew Brzezinski était conseiller ducandidat Obama) ;

31Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Page 29: La sécurité énergétique en Méditerranée

32 La sécurité énergétique en Méditerranée

– le règlement du conflit israélo-palestinien et le rôle des USA… ;

– élargir le cadre des partenariats : la lutte contre le terrorisme etl’immigration constituent surtout des axes importants pour les pays dunord de l’espace euro-méditerranéen (USA inclus), il reste à trouver desthèmes réellement porteurs pour les deux rives : l’énergie, l’environnementet le développement économique au sud sont manifestement des axescomplémentaires à renforcer prioritairement en collaboration avec lesEtats du sud ;

– réduire les tensions américano-russes, c’est à l’évidence contribuerà améliorer les perspectives de développement et de stabilité dans l’espaceeuro-méditerranéen, au nord comme au sud, mais nous sommes toustellement divisés et les intérêts respectifs de Washington et Moscou surla zone ne font que nous diviser davantage...

Page 30: La sécurité énergétique en Méditerranée

Introduction

La chute de l’URSS créa une nouvelle organisation internationale, etle premier changement auquel il donna lieu, c’est sans doute lamodification de l’ordre géographique international, avec l’apparition de15 nouveaux pays sur le territoire de l’ancien empire. Ces nouveaux Etats,à leur tour, tentèrent de profiter de cette occasion historique pours’exprimer sur la scène internationale et sentir et faire sentir les vertusde l’indépendance dans les domaines politique, économique, social,culturel et autres.

Dans ce contexte, l’Azerbaïdjan, comme d’autres Etats de cette nature,décida de jouer avec ces atouts. A cet égard, le meilleur atout pour cepays, ce sont ses ressources énergétiques, plus précisément le pétrole et,dans une certaine mesure, le gaz naturel. C’est ainsi qu’il décidad’exploiter ses ressources naturelles pour jeter les fondements d’uneéconomie solide nationale, créer son appareil politico-administratif,améliorer la vie socioculturelle de son peuple, etc. Pourtant, comme tousles nouveaux Etats indépendants, il dut faire face aux problèmesobjectifs : manque d’infrastructures, de financement, de technologie, desavoir-faire. Pour les obtenir, il n’avait qu’une seule possibilité : s’ouvrir

(1) Les opinions émises dans cette recherche ne représente en aucun cas la position officielled’un aucun organisme public ou privé et appartient à l’auteur lui-même. En tant que l’auteurd’une thèse de doctorat en Sciences politiques soutenue à la Sorbonne, sous la direction duProfesseur Charles Zorgbibe et publiée chez les éditions Harmattan, sous forme d’ouvrage de2 tomes, intitulé «Le pétrole de la Caspienne et la politique extérieure de l’Azerbaïdjan », ildéclare faire le résumé de son ouvrage complété avant même qu’il n’accède au poste de fonctionpublique.(2) Conseiller du Service diplomatique au cabinet du Président de la République de l’Azerbaïdjan.

La géopolitique des ressourcesénergétiques de la mer Caspienne :

rivalités et coopérations (1)

Turab GURBANOV (2)

Page 31: La sécurité énergétique en Méditerranée

sur l’extérieur, et surtout sur l’Occident. Ainsi l’Azerbaïdjan, en décidantde proposer pour la première fois les richesses énergétiques de la merCaspienne au monde, s’est placé au centre de la configuration de rapportsde forces et s’est transformé en cible des grandes puissances dans cetterégion.

La difficulté de réalisation de ses grands projets énergétiques résultaitd’une période de crise politique et économique en Azerbaïdjan, avecseulement quelques millions de dollars américain dans le trésor public,quelques milliers de points pourcentage d’inflation et 20 % du territoireoccupé, avec 15 % de la population réfugiés ou déplacés. En plus, on nesavait pas s’il y avait assez de pétrole pour compenser un investissementde quelques dizaines de milliards de dollars, et même s’il y en avait assez,personne ne savait si c’était exploitable, si on pouvait l’acheminer versles marchés occidentaux à partir d’un pays géographiquement enclavé.Le président Heydar Aliyev, ancien membre de Politburo de PC de l’URSSet ancien général du KGB, candidat potentiel pour remplacer Tchernenkoaprès sa mort (comme au Politburo on avait eu une mauvaise expérienceavec un dirigeant caucasien, Staline, on ne voulait qu’un dirigeant slaveà la tête du pays, et ainsi la candidature d’Aliyev fut exclue), un hommepolitique internationalement connu pour sa sagesse et son expérienceréussit à négocier avec les puissances mondiales et leurs géants pétroliersen vue de les convaincre d’investir dans le secteur énergétique del’Azerbaïdjan.

En signant, le 20 septembre 1994, le contrat pétrolier avec 11 sociétéspétrolières de 7 Etats pour l’exploitation de pétrole dans les gisementsazeri, «Chiraq » et «Gunashli » qui se trouvent dans le secteurazerbaïdjanais de la mer Caspienne, l’Azerbaïdjan déclencha unenouvelle étape de la politique énergétique : c’était le plus grand contratpétrolier du siècle. Pourtant, l’Azerbaïdjan ne s’est pas arrêté là : entre1994 et 2001, il a signé 21 grands contrats pétroliers avec 35 compagniespétrolières de 21 pays ; le montant total des investissements directsétrangers dans le secteur pétrolier azerbaïdjanais avait prévu environ60 milliards de dollars américains. Les pays participant à ces contratssont les Etats-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne, la Turquie, le Japon,l’Italie, la France, la Norvège, l’Arabie saoudite, l’Iran, le Canada,l’Espagne, la Belgique, l’Allemagne et d’autres.

34 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 32: La sécurité énergétique en Méditerranée

Les richesses économiques de la mer Caspienne, le pétroleen tant que matière première stratégique

Les analyses prouvent que la région de la mer Caspienne en généralet de l’Azerbaïdjan en particulier possède une histoire assez riche quantau pétrole : au début des années 1900, Bakou produisait 95 % du pétrolerusse et 51 % du pétrole mondial. Pendant la Seconde Guerre mondiale,l’Azerbaïdjan fournissait 71,5 % du pétrole total de l’URSS. Déjàpendant les Première et Seconde Guerres mondiales, le pétrole de Bakouétait l’objet de rivalité entre les grandes puissances. Après l’indépendance,l’histoire se répéta.

Actuellement, le pétrole occupe une place primordiale dans les sourcesénergétiques mondiales. Il est considéré comme une matière premièrestratégique par les caractéristiques dynamiques de la demande depétrole, à savoir la combinaison d’une forte élasticité-revenu et d’unefaible élasticité-prix ainsi que la substituabilité limitée (3). La demandemondiale de pétrole connut dans le courant du XXe siècle une croissanceexponentielle. Représentant 0,1 mb/j vers 1880, elle décuple à deuxreprises pour atteindre 1 mb/j vers 1910 et 10 mb/j vers 1950. Entre cettedate et 1973, elle est multipliée par 6 et atteint 57 mb/j. Depuis cettedate, la croissance de la demande se ralentit, avec une augmentation d’untiers pendant le dernier quart de siècle, la consommation s’établissant àenviron 75 mb/j en 1999. L’AIE prévoyant une croissance au rythmemoyen de 1,9 % par an sur la période 2000-2020, on atteindrait ainsi115 mb/j en 2020 (4). Au cours de 50 dernières années, la part du pétroledans la consommation mondiale énergétique a évolué : en 1938: 20,7 %,en 1950 : 27,7 %, en 1960 : 34,7 %, en 1970 : 44,1 %, en 1980 : 44,9 %,en 1990 : 40,5 %. En 2010, celle-ci atteindrait plus de 50 % (5). Selonles données de l’Agence internationale de l’énergie, en 2010, sur unapprovisionnement énergétique total primaire de 12 400 millions de tonnesd’énergie, 36,9 % viendront du pétrole, 21,9 % du gaz, 22,7 % du

35Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

(3) «Problèmes géopolitiques liés à la production et aux échanges de pétrole », séminaire Energieet société, Promotion Copernic (2000-2002), ENA, p. 9-10, version électronique disponiblesur le site www.ena.fr/tele/sem0104geopolitique.pdf(4) L’International Energy Outlook de l’Energy Information Administration du Départementde l’Energie des Etats-Unis, qui travaille aussi à l’horizon 2020, arrive aux mêmes conclusions,au moins dans le cadre du Référence Case; voir EIA (2001).(5) Aras, O. N., Economie et stratégie de la Caspienne de l’Azerbaïdjan, op.cit., p 10.

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charbon, 5,6 % du nucléaire, 2,3 % de l’eau et 10,6 % d’autres sourcesénergétiques (6).

Les réserves pétrolières potentielles de la mer Caspienne, selon leDépartement de l’Energie des Etats-Unis, sont de 184 milliards de barils,et les réserves pétrolières totales sont comprises entre 200 et 216 milliardsde barils. Le potentiel gazier de la région de la mer Caspienne est encoreplus significatif : les réserves prouvées de gaz naturel sont estimées à166 trillions de m3. Les réserves gazières potentielles, selon les mêmessources, sont de 282,8 trillions m3. Ceci étant, les réserves gazières totalessont de 458,8 trillions mm3 (7). La région posséderait entre 2 % et 6 %des réserves mondiales de pétrole et entre 6 % et 10 % des réserves degaz. Ces ressources en hydrocarbures la situeraient derrière la Russie etle Golfe persique et juste devant la Mer du Nord. Les estimations desréserves réelles du pétrole brut de l’Azerbaïdjan varient entre 7 et 13milliards de barils, et ses réserves pétrolières possibles sont estiméesen 2003 par le Département de l’Energie des Etats-Unis à 32 milliardsde barils. Ceci étant, selon les estimations du Département de l’Energiedes Etats-Unis, les réserves pétrolières totales de l’Azerbaïdjan sontestimées, en 2003, entre 39 et 44,5 milliards de barils.

La nouvelle situation politique exigea de l’Azerbaïdjan que celui-cimette en avant toutes ses richesses afin de développer son économie surdes bases solides. Pourtant, ce n’était pas si facile, car certaines puissancesne voulaient pas laisser l’Azerbaïdjan profiter seul de tous ces trésors. Lepremier dispositif géopolitique que l’on pût utiliser contre l’Azerbaïdjan,c’était sans doute la question du statut juridique de la mer Caspienne.

La question du statut juridique de la mer Caspienne, premierdispositif géopolitique

La question du statut juridique de la mer Caspienne est aussi crucialeque les ressources qu’elle détient : en effet, il ne suffit plus de connaîtrela présence de ces richesses, encore faut-il pouvoir déterminer s’il estpermis de les exploiter. Pour arriver à la situation actuelle, laréglementation de l’accès à la mer Caspienne a connu différentes étapes.

(6) Pour plus d’informations, voir International Energy Agency, «Key world energy statisticsfrom IEA», 2007 edition.(7) Voir EIA of Department of Energy of USA, site internet :www.eia.doe.gov/emeu/cabs/caspgrph.html#TAB1

Page 34: La sécurité énergétique en Méditerranée

Historiquement, la mer Caspienne fut l’objet de rivalités entre lesRusses, les Perses et les Ottomans. Avec sa politique de conquêteterritoriale, au 17e siècle, le tsar russe Pierre le Grand se tourna vers lesud et le sud-est. Remportant la victoire sur les Perses, il accéda aux partiesoccidentales et méridionales de la mer Caspienne dès 1723. C’est à partirde cette date qu’il faut considérer la mer Caspienne comme faisant partiedes deux pays : la Russie et l’Iran. Au début du 18e siècle, les quatre traitésqui furent conclus entre la Russie et la Perse (celui du 12 septembre 1723à Saint-Pétersbourg, celui du 13 février 1729 à Rasht, et en 1732 à Rasht,enfin celui de 1735 à Gandja) (8) se traduisirent par des cessions et desrétrocessions de territoires, sans même que soit déterminé le statutjuridique de la Caspienne. Les deux traités signés au 19e siècle (traitésdu Gulistan de 1813(9) et de Turkmentchaï de 1828 (10) respectivemententre la Russie et la Perse, n’ont pas établi non plus les frontières despays riverains sur la mer Caspienne, ni les limites d’exploitation de sesrichesses naturelles et biologiques. Après la révolution bolchevique, deuxtraités furent signés entre les deux puissances. Tandis que par le traitéde Moscou de 1921 avec la Perse, la République fédérative des Sovietsde Russie (11) déclarait nul et non avenu l’ensemble des traités etconventions conclus antérieurement avec la Perse par le gouvernementtsariste, les dispositions des articles 6 et 7 accordent au nouveaugouvernement soviétique un droit exclusif, mais conditionnel,d’intervention militaire contre l’Iran. Quant au traité de commerce et denavigation du 25 mars 1940, signé entre l’Iran et l’URSS (12), il déclaraitla Caspienne comme « mer soviéto-iranienne », et donc seul les bateaux

37Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

(8) Hasanov S., La question du statut de la mer Caspienne dans les relations interetatiques,Baki, Elm, 2002.(9) «Traité de paix et d’amitié perpétuelle conclu entre l’empire de Russie et celui de Perse,dit Traité de Gulistan, le 12 octobre 1813», in De Martens G.F., Nouveau recueil de traitésd’alliance, de paix, de trêve, de neutralité, de commerce, de limites, d’échange, et de plusieursactes servant à la connaissance des relations étrangères des puissances et des Etats de l’Europe,Gottingue, Librairie de Dietrich, 16 tomes, tome IV, 1808-1819, p. 89-95.(10) «Traité russo-persan de Turkmentchaï du 22 février 1828», in Strupp, K., Documents pourservir à l’histoire du droit des gens, Berlin, Hermann Sack, 1923, 5 tomes, tome I, p. 410-411.(11) «Traité d’amitié, signé à Moscou le 26 février 1921, entre la Perse et la République fédérativedes Soviets de Russie », Société des Nations, Recueil des Traités et Engagements Internationauxenregistrés par le Secrétaire de la S.d.N., vol. IX, p. 400-412.(12) «Treaty of commerce and navigation between Iran and Soviet Union with exchange ofnotes », March 25, 1940, signed at Tehran, in British and Foreign State papers, 1940-1942,volume 144, p. 419-434.

Page 35: La sécurité énergétique en Méditerranée

de la nationalité de l’un des pays riverains pouvaient s’y trouver. A cetteépoque encore, aucun d’entre eux ne reconnaît la division sur le statutde la mer Caspienne.

Le premier pas pour diviser la mer Caspienne fut l’initiativeunilatérale de l’URSS. Suivant l’ordre daté du 1934 du Commissaire dupeuple aux affaires intérieures de l’URSS, le service de garde-frontièrede ce pays était chargé de protéger le secteur soviétique de la merCaspienne se trouvant au nord de la ligne Astara- Hassankulu, et les naviresiraniens n’avaient pas le droit de traverser au nord de cette ligne sansautorisation préalable de l’URSS (13). Ainsi, l’URSS commença àexploiter les ressources pétrolières de la mer Caspienne se trouvant aunord de la ligne Astara- Hassankulu sans la participation de l’Iran, sansconsultation de l’Iran et sans aucune contestation de la part de l’Iran.En réponse, l’Iran, à son tour, commença à exploiter les gisementspétroliers du plateau continental de la mer Caspienne sans aucuneconsultation avec l’URSS. Plus tard, le 15 septembre 1962 à Téhéran,aurait été signé un mémorandum, considéré comme confidentiel, entrele ministre des Affaires étrangères de l’Iran, Abbas Aram, et l’ambassadeurde l’URSS en Iran, Nokolay Pégov(14). L’une des Notes formant cemémorandum aurait prévu une ligne partant d’Astara vers Hassan-Kiyadehen traversant la mer Caspienne, ce qu’on appelle la « ligne Astara-Hassankouli » ou la ligne «Aram-Pégov », considérée comme la frontièredans la mer Caspienne entre l’URSS et l’Iran (15). En 1970, le ministèrede l’Industrie pétrolière de l’URSS a partagé la partie soviétique de lamer Caspienne entre l’Azerbaïdjan, la Russie, le Turkménistan et leKazakhstan sur la base d’une ligne médiane. Ainsi, il y avait cette formede division tacite de la mer Caspienne entre les deux Etats riverains detelle manière que les ressources de la surface et du fond de la merappartenaient à deux Etats riverains dans leurs zones respectives de la

38 La sécurité énergétique en Méditerranée

(13) Aliyev, H., Azerbaijan oil in the world policy, Baku, Azerbaijan, 1997, p. 371.(14) Butler, W., The law of Soviet Territorial Waters, Praeger publishers, n.Y., Washington,London, 1967, p.68-69.(15) Le contenu de ce mémorandum a été révélé en entier le 26 octobre 1997, lors d’un entretienavec Ahmad Mirfenderski, l’ex-directeur du département politique du ministère des Affairesétrangères de l’Iran (1963-1964) et Ambassadeur de l’Iran en URSS (1965-1971), Mirfenderski,G., Limits of National Juridiction in the Caspian Sea, 1999, article reproduit avec modificationsous le titre de “Evolution of Iranian Sovereignty in the Caspian Sea”, in Amirahmadi, H., TheCaspian Region at a Crossroad. Challenges of a Nex Frontier of Energy and Development,Macmillan, London- USA, 2000, p. 240-245.

Page 36: La sécurité énergétique en Méditerranée

Caspienne (16). Cette situation continua jusqu’à l’effondrement del’URSS.

La question des limites des zones sous souveraineté ou sous juridictiondes Etats riverains ne commença à se poser vraiment qu’à compter dudémembrement de l’URSS en 1991, où la mer Caspienne comptait nonplus deux Etats riverains, l’Iran et l’U.R.S.S., mais cinq dont quatre issusde ce dernier Etat : la Fédération de Russie, le Kazakhstan, l’Azerbaïdjanet le Turkménistan. La signature du « contrat du siècle » fut, sans doute,le début du clivage entre les pays limitrophes de la mer Caspienne .

Depuis 1992, une série de rencontres aussi bien multilatérales quebilatérales eurent lieu pour déterminer le statut juridique internationalde la mer Caspienne. Ce qui a conduit à la signature de trois accordsbilatéraux entre les trois pays riverains.

• Le 6 juillet 1998, la Fédération de Russie et le Kazakhstan signèrentl’accord de délimitation du lit de la mer du secteur septentrional de lamer Caspienne suivant le principe de la ligne médiane, ce fut le premieraccord bilatéral concernant la division de la mer Caspienne après la chutedu régime soviétique. Le Turkménistan et l’Iran protestèrentimmédiatement contre cet accord.

• Le 9 janvier 2001, l’Azerbaïdjan et la Russie ont convenu que lefond maritime de la mer Caspienne peut être divisé en secteurs entre lesEtats voisins contigus et opposés sur le principe de ligne médiane tracéeà distance égale des côtes et modifiable par leur consentement mutuel (17).

• Le 29 novembre 2001, le Kazakhstan et l’Azerbaïdjan signèrentl’accord concernant la délimitation du fond de la mer Caspienne suivantle principe de la ligne médiane.

A l’heure actuelle, il n’existe pas de traité multilatéral valide quidéfinisse le statut juridique de la mer Caspienne et donc aucun texteservant de référence quant à l’exploitation des fonds marins. Pour l’Iran,la mer Caspienne devrait être régie par un statut juridique comme si elle

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(16) Gramola, M., «The legal status of the Caspian Sea after break-up of the Soviet Union »,Marco Polo Magazine, 2/99, version électronique disponible sur le site internet de TRACECA :www.traceca-org.org (17) Quotidien national «Xalq Qazeti» (publication de l’Appareil présidentiel de la Républiqued’Azerbaïdjan), 9 janvier 2001.

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était un lac. Cela signifierait soit un contrôle commun, soit une part de20 % de la Caspienne pour chacun des cinq Etats riverains. La Russie,l’Azerbaïdjan et le Kazakhstan, estiment que la Caspienne est une merfermée, ce qui entraîne que chaque Etat riverain a des droits d’exploitationdes fonds marins dans une zone correspondant aux eaux nationales dontla superficie peut être délimitée par des lignes médianes de démarcation.Une telle formule, sur laquelle se sont fondées les négociations pendantces dernières années, ne donnerait à l’Iran que 13 % au-delà de sa côte.Le Turkménistan est resté plus ou moins neutre, cherchant à équilibrerles deux parties. A l’heure actuelle, la Russie contrôle environ 19 % desfonds marins de la Caspienne, le Kazakhstan 29 % et l’Azerbaïdjan 21 %.

Concernant la doctrine et le droit international, les positions desauteurs concernant le statut juridique de la mer Caspienne ne sont pasunanimes : les propositions varient entre le lac (18), les lacs-frontières (19),la mer intérieure (20), les lacs intérieurs (21), les eaux intérieures, la merintérieure fermée (22), « land-locked waters » (23), un espace maritime

(18) Butler, W. E., The Soviet Union and the Continental shelf, The Johns Hopkins Press,Baltimore and Mondon, 1971, p. 119 ; Tavernier, p., «Le statut juridique de la mer Caspiennemer ou lac ? » (la pratique des Etats vue à travers les documents publiés par les Nations-Unies),Actualité et droit international, Revue d’analyse juridique d’actualité internationale, 20 octobre1999, version électronique disponible sur le site www.ridi.org/adi.(19) Pondaven, Ph., Les lacs-frontières, Pédone, Paris, 1972, p. 12, note 29; Barabolia, P., etles autres auteurs, Voenno-morskoi mezhdunarodno-provovoi spravotchnik, Voenizdat, Moscou,1966, cité par Butler, W. E., The Soviet Union and the Continental shelf, The Johns HopkinsPress, Baltimore and Mondon, 1971, p. 136.(20) Rivier, A., Principes du droit des gens, Rousseau, Paris, 1896, t. I, p. 144; Bundy, R., «TheCaspian –Sea or Lake ? Consequences in international Law », focus on the Caspian, CentralAsia Quarterly, Summer, 1995 (Research Forum School of Oriental and African Studies,University of London), p. 26-30.(21) Gidel, G., Le droit international public de la mer, t.1, Introduction : la haute mer, Sirey,Châteauroux, Mellotée, 1932, p. 60.(22) Fauchille, P., Traité de droit international public, Rousseau, Paris, 1925, 8e édition, refondueet complétée par H. Bonfils, t.1, p. 206-207; De Harting, F., Les conceptions soviétiques dudroit de la mer, Pédone, Paris, 1960, p. 29.(23) Lucchini, Laurent ; Voelckel, Michel, Droit de la mer, t.1: La mer et son droit, les espacesmaritimes, Pédone, Paris, 1990, p.141.

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non assimilable aux mers fermées ou enclavées (24), la mer fermée (25),la mer « privée » (26) ou même mixte (27).

La doctrine internationale n’est pas unanime sur le statut juridiquedes lacs. La doctrine majoritaire propose le partage des lacs entre lesEtats riverains. Les auteurs tels que Kliber, Hall, Lindley et Hersheyexcluent le condominium et proposent implicitement le ligne médianeet la limite à la rive pour délimiter les lacs entre les pays riverains (28).D’autres auteurs tels que Fiore, Chrétien, Hackworth, Wilson, Strupp,Jones, Redslob et Sibert approuvent explicitement le partage territorialdes lacs entre les Etats riverains (29). Pour Blunstchli, « les lacs font partiedu territoire de l’Etat qui les entoure. Quand ils sont situés entre plusieursEtats, ils sont considérés par analogie comme des rivières. A défaut deconventions spéciales, chaque Etat étend sa souveraineté jusqu’aumilieu du lac » (30). Les auteurs tels que Calvo, Rivier, Fauchil, Von Liszt,Oppenheim, Laurence et Winiarski proposent généralement la lignemédiane comme limite lacustre des eaux nationales (31). Certainsauteurs, tels que Adami, Diena, Accioly, Sawey et Seydel sont favorables

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

(24) Rousseau, Ch., Droit international public, Paris, Sirey, t. IV, Les relations internationales,1980, p. 279-280.(25) Bonfils, H., Manuel du droit international public (droits des gens), 2e édition, Paris, A.Rousseau, 1911, par Fauchille, p.495 ; Uliyanitskii, V., Mezhdunarodnoe pravo, Sibir, Tomsk,1911, p. 84; Dranov, B., Tchernomorskie prolivy : mezhdunarodno-provovoie rezhim, Yourizdat,Moscou, 1948, p. 52-53; Molodtsova, S., Mezhdunarodno-provovoie rezhim baltiskikhprolivov, Dissertatsiia, SGIP, n° 5 (1950), p. 62-63; Bakhov, A., Voenno-morskoi mezhdunarodno-provovoi spravotchnik, Voengiz, Moscou, 1956, p. 53-54; Malinine, S., « K voprosou o pravovoiklassifikatsii vodnykh prostranstv », Morskoe pravo i praktika, XLVI (1960), p.13-19.(26) Nguyen, D. D., Dallier P., Pellet, A., Droit international public, L.G.D.J., Paris, 8e édition,1999, p. 1045.(27) Vinogradov, S., Wouters, P., « The Caspian Sea: Current Legal Problems », Zeitschriftfür ansländishes öffentliches recht und Völkerecht (Zaörv), 1995, 55/2, p. 604-623, voir p. 618-619; Oxman, B., «Caspian Sea or Lake: What difference does in make ? (The legal debate)»,Caspian Crossroads, winter 1995-1996, p. 1-12, voir p. 12.(28) Cités par Pondaven, op. cité, p. 128-129, notes 295-298, voir Nazemi, M., la Mer Caspienneet le droit international: contribution à l’étude de sa situation juridique au carrefour desfrontières, Thèse de doctorat de Sciences juridiques soutenu en octobre 2001 à l’Université deParis 1, Panthéon- Sorbonne, p. 387.(29) Cités par Pondaven, op. cité, p.129, notes 299-309, voir Nazemi, M., la Mer Caspienneet le Droit international : contribution à l’étude de sa situation juridique au carrefour desfrontières, op. cit., p. 387.(30) Bluntchli, M., Le droit international codifié, Paris, Guillaumin, 1874, p. 198.(31) Cité par Pondaven, p. 131, notes 320 à 329.

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à l’application d’une méthode intermédiaire entre le condominium et lepartage (32).

En droit international, il n’existe aucune règle uniforme et codifiéepour la délimitation des lacs. Presque tous les lacs-frontières sont diviséspar des conventions entre les pays riverains (33). Pourtant, parallèlementau condominium (34) qui possède un seul exemple, la pratiqueinternationale, favorable au partage lacustre, présente différentes méthodesen la matière : la limite à la rive (35), les limites géométriques (36), leslimites astronomiques (37), les lignes droites (38) et la ligne médiane (39).

En cas de mer, le partage de la Caspienne doit se réaliser conformémentaux dispositions du droit international maritime telles que les mersterritoriales, les zones économiques exclusives et le plateau continental,conformément aux dispositions de la C.M.B. (40).

Pourtant, certains problèmes réels, de nature purement géopolitique,empêchent d’arriver à une solution acceptable pour tous.

Questions trop géopolitiques, configuration des rapports deforces

La région Caspienne, grâce à sa richesse économique, occupe une placegéopolitiquement essentielle. C’est pourquoi elle fait l’objet d’un jeu

42 La sécurité énergétique en Méditerranée

(32) Nazemi, M., la mer Caspienne et le Droit international : contribution à l’étude de sa situationjuridique au carrefour des frontières, op. cit., p. 387-388.(33) Gramola, M., «The legal status of the Caspian Sea after break-up of the Soviet Union»,op. cit.(34) Pour le Golfe de Forséca par l’arrêt du 11 Septembre 1992 de la CIJ concernant le différendfrontalier, terrestre, insulaire et maritime : El Salvador/Honduras ; Nicaragua, Rec. 1992, §369-432.(35) Tels que les lacs de Caceres, Mondioré, Gahiba, et Uberaba, le lac Mirim, le lac de Malawiet le lac de Tibériade.(36) Tels que le lac Prespa, le lac d’Orchid, le lac Scutari et le lac Tchad.(37) Tels que le lac Victoria, le lac Tanganyika, le lac Tchad et le lac Prespa.(38) Tels que le lac Ladoga, le lac Doiran, le lac d’Edouard, le lac Turkana ou Rodolphe, lelac Güija et le lac Khanka.(39) Tels que le lac de Lugano, la partie inférieure du lac de Constance, le lac Malawi, les lacsTanganyika et Moëro, la mer Morte, le lac Péipus, le lac Léman ou de Genève, le lac Albert,le lac Titicaca, le lac Moëro et les Grands Lacs nord-américains (les lacs Supérieur, Huron,Erié, Saint-Clair, Ontario et le lac des Bois).(40) C.M.B., les article 122 et 123, version électronique disponible sur le site d’internet del’ONU : http ://www.un.org/french/law/los/unclos/closindx.htm

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géopolitique tant au niveau mondial que régional des grandes puissancestelles que les Etats-Unis d’Amérique, la Russie, l’Union européenne,l’Iran, la Turquie, Israël, la Chine, ou encore le Japon qui veulent jouerleurs atouts. D’ailleurs, il serait erroné d’essayer de dissocier le facteurpétrolier d’autres enjeux géopolitiques pour l’analyser tout seul, car tousces enjeux sont interdépendants et se complètent. Ainsi, le facteur pétrolier,qui est d’abord un enjeu en soi à obtenir, représente également un moyenou un prétexte pour atteindre l’objectif principal.

La perspicacité de l’ancien président Azéri Haydar Aliyev a permisau pays de tirer profit de cette nouvelle occasion offerte par le « NewGreat Game », en jouant précisément sur la rivalité entre de nombreuxpays. En effet, il a voulu sauvegarder la paix dans la région entransformant les conflits d’intérêts exprimés par différents acteursétrangers en une relation de coopération pas seulement entre les pays dela région, mais aussi entre tous les autres pays impliqués dans ce jeu.C’est pour répondre aux exigences de la politique dite de « l’équilibre »que l’Azerbaïdjan a été conduit à inclure des Etats concurrents dansplusieurs contrats pétroliers comme nous avons pu en donner des exemplesplus haut.

Tant et si bien que même ce pétrole souvent pensé comme à l’originede belligérances est désormais perçu comme moyen indéniable pour réglerles différends avec l’Arménie – qu’elle considère comme pays agresseurresponsable de l’occupation d’une bonne partie de son territoire.

L’Arménie

L’Arménie n’est sans doute pas une puissance régionale. Pourtant,étant en guerre directe avec l’Azerbaïdjan, ce pays constitue pour lesAzéris le moyen direct et efficace pour faire pression sur l’Azerbaïdjan.Pour l’Azerbaïdjan, le conflit arméno-azerbaïdjanais est l’exempletypique du résultat des jeux géopolitiques joués autour du pétroleazerbaïdjanais. C’est la raison pour laquelle deux questions principalesde la politique extérieure de l’Azerbaïdjan, à savoir la diplomatie pétrolièreet le conflit arméno-azerbaïdjanais, sont étroitement liées. Ainsi, pourl’Azerbaïdjan, la stratégie pétrolière n’aurait aucune signification sansle règlement du conflit arméno-azerbaïdjanais, car les objectifs tels quela souveraineté de l’Etat, la prospérité du peuple, la sécurité régionalene pourront pas être réalisés.

43Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

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L’Arménie est le seul pays « non grata », notamment et catégori-quement exclu de toute coopération, pétrolière ou non. Et c’est pour cetteraison que, même dans ses relations avec d’autres puissancesinternationales et régionales concernant la question pétrolière,l’Azerbaïdjan voit et analyse toutes les démarches sur les bases du conflitarméno- azerbaïdjanais.

Les arguments historiques occupent une place importante dans lapolitique extérieure de l’Azerbaïdjan pour expliquer les raisons de ceconflit, car il est vu comme le résultat d’un processus historique. Selonles thèses azerbaïdjanaises, la réclamation territoriale des Arméniens viseà rétablir “la grande Arménie”, qui avait existé dans l’Antiquité et quioccupait l’espace situé entre la mer Caspienne et la mer Méditerranée,alors que les Azerbaïdjanais refusent l’existence de cet “empire”.Cependant, selon eux, les Arméniens n’ont jamais vécu au Caucase, maisen Asie mineure et ont été déportés par les Russes sur le territoireazerbaïdjanais en vue d’accomplir leurs politiques. Pour eux, tout ceprocessus commence à partir du début du 19e siècle et a continué jusqu’àprésent, selon le processus suivant : dans un premier temps, la déportationdes Arméniens sur le territoire azerbaïdjanais, puis la création de l’Etatarménien, ensuite le transfert du territoire azerbaïdjanais en Arménie etenfin la création de la région autonome du Haut-Karabakh. Ainsi, fondésur les bases historiques et alimenté par les jeux géopolitiques, le conflitarméno- azerbaïdjanais doit être résolu conformément aux principes dudroit international public.

Pour les Arméniens, le conflit ne concerne que le statut de la Régionautonome du Haut-Karabakh de la République de l’Azerbaïdjan ; il s’agitdonc d’un conflit armé non international, mais internationalisé par lareconnaissance de belligérance et l’intervention extérieure, alors que pourles Azerbaïdjanais, il s’agit au contraire d’un conflit armé inter-étatiqueau sens juridique du terme, puisque le Haut-Karabakh et d’autres régionsde l’Azerbaïdjan (au total 20 %) sont occupées par la Républiqued’Arménie et que les troupes militaires arméniennes se trouvent sur leterritoire de l’Azerbaïdjan. A leurs yeux, il s’agit donc d’un acted’agression dans le cadre du chapitre VII de la Charte de l’ONU. Puis,suivant les thèses arméniennes, dans ce conflit, l’accent doit être mis surle principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes pour lesArméniens du Haut-Karabakh, alors que selon les thèses azerbaïdjanaises,

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les Arméniens du Haut-Karabakh ne peuvent pas bénéficier de l’article 1du Pacte international des droits civils et politiques concernant uneautodétermination externe, mais de l’article 27, qui signifie uneautodétermination interne. Et en deuxième lieu, les dispositions de laCharte de l’ONU et les conventions en vigueur n’acceptent pas ce principeautorisant un mouvement sécessionniste contre l’intégrité territoriale etla souveraineté d’un Etat. Dans la thèse arménienne, le droit à la légitimedéfense individuelle et collective, en tant que droit naturel, est un pointde référence primordial, alors que, d’après les Azerbaïdjanais, le droit àla légitime défense des Arméniens du Haut-Karabakh ne peut pas autoriserla République d’Arménie à annexer cette région et à occuper sept autresrégions administratives de l’Azerbaïdjan.

La Russie

Il ne faut pas oublier que c’est le poids de la Russie qui pèse lourd :considérant cette région comme sa propre « zone d’influence », elle neveut pas la laisser aux autres (c’est-à-dire aux Américains et auxOccidentaux). C’est ainsi que le 24 septembre 1994, le ministère desAffaires etrangère de la Fédération de Russie a officiellement déclaré quela Fédération de Russie ne reconnaissait pas le contrat du siècle (41), tandisque M. Volter Chonia, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire del’époque de la Russie en Azerbaïdjan et d’autres représentants officielsde la Russie avaient participé à la signature du contrat.

La pénétration de la Russie dans la région de la mer Caspienne débuteau milieu du 16e siècle (42) : les empires ottoman et perse partageaientalors la sphère d’influence. A la fin du «Grand Jeu » se développant entrela Grande-Bretagne et l’Empire russe, la Russie a pris le contrôle duCaucase et de l’Asie centrale (43). Actuellement État-pivot au sein ducontinent eurasiatique, joueur de premier plan (44), se présentant comme

45Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

(41) «Position de la Fédération de Russie concernant le statut juridique de la mer Caspienne »,Nations Unies, Assemblée générale, Doc. A/49/475, 5 octobre 1994. Version électronique dudocument disponible sur le site d’internet officiel des Nations Unies : www.un.org(42) Henze, P. B., « Russia And The Caucasus », Perceptions Journal Of International Affairs,June-August 1996, volume I , number 2 , vers ion électroniquehttp ://www.mfa.gov.tr/grupa/percept/default.htm(43) Amineh, M. P., Towards the control of oil resources in the Caspian region, Münster : LIT;New York : St Martin’s Press, 1999, p. 86.(44) Brzezinski, Z., Le grand échiquier: l’Amérique et le reste du monde, Hachette Littératures,2000, p. 72.

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le successeur naturel de l’URSS, leader naturel et puissance (45), laFédération de Russie occupe un espace important de transition entre lemonde occidental et l’Asie.

La politique étrangère de la Russie, en général, et vis-à-vis du Caucasedu sud, en particulier, fut très ambiguë (46). En 1992, la Russie, formulaune recommandation stipulant que la Fédération de Russie,internationalement reconnue comme successeur de l’URSS, devait basersa politique étrangère sur la doctrine déclarant l’espace géopolitique entierde l’ex-Union comme la sphère de ses intérêts vitaux (comme la doctrineMornoë des Etats-Unis en Amérique latine) et devait s’efforcer de fairecomprendre et reconnaître à la communauté internationale ses intérêtsspéciaux dans cet espace. «La Russie doit s’efforcer de réussir à fairereconnaître à la communauté internationale son rôle de garant politiqueet militaire dans l’espace entier de l’URSS» (47). La Russie demandamême ouvertement à l’Occident et à la communauté internationale delui reconnaître le rôle de principale force de maintien de la paix sur leterritoire de l’ex-URSS (48).

La politique russe concernant cette région peut être divisée en troispériodes : la période de succès relatif entre 1991 et 1994, le roll backentre 1994 et 1999 et la rationalisation (relative) après 1999, avec l’arrivéeau pouvoir de Poutine (49).

En ce qui concerne le conflit du Haut-Karabakh, question crucialepour l’Azerbaïdjan, la Russie préféra une médiation exclusivement russeau processus du Groupe de Minsk au sein de l’OSCE. L’Arménie a favorisécette solution, tandis que l’Azerbaïdjan a refusé de recevoir une missionde maintien de la paix, comprenant seulement des forces russes,craignant que la gestion internationale du maintien de la paix soit rendueimpossible. Les Arméniens ont été vus par les militaires russes comme

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(45) Barylski R., « The Caspian Oil Regime: Military Dimensions », Caspian CrossroadsMagazine, Volume 1, Issue N° 2, Spring 1995, version électronique www.usazerbaijancouncil.org (46) Shoumikhin, A., “Russia: Developing Cooperation on the Caspian”, in Croissant, M.; Aras,P. B., Oil and geopolitics in the Caspian Sea Region, Westport, Conn.: Praeger, 1999, p. 145.(47) Eggert, K., « La Russie dans le rôle de “gendarme eurasien” ? », Izvestia, 7 août 1992,p. 4-5.(48) Graindorge, M., La politique de la Russie post-soviétique en Transcaucasie, Mémoire deDEA Relations internationales, l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, septembre 1997, p. 24.(49) Pour l’analyse détaillée, voir Habilov, M., Pacte de stabilité au Caucase et sesperspectives pour la paix et la sécurité au Caucase du Sud, op.cit.

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des alliés fidèles (50) du fait de leur animosité historique envers la Turquieet leur conflit séculaire avec les Azéris (51). La Russie est souvent citéedans la politique extérieure de l’Azerbaïdjan comme un État apportantson soutien aussi bien logistique que moral à l’Arménie. En juin 1994,la Russie et l’Arménie ont signé un accord de coopération militaire pour25 ans, prévoyant l’installation de bases militaires russes et despatrouilles mixtes sur les frontières avec l’Iran et la Turquie (52). Legouvernement russe a toujours refusé les accusations d’immixtion dansle conflit du Haut-Karabakh tout en participant au processus de sonrèglement pacifique. Pourtant, sa politique n’a pas été neutre dans ceconflit. La Russie a bel et bien pris part au conflit du Haut-Karabakh :soit indirectement par le transfert d’armement de 1 milliard de dollars(53) à l’Arménie, dont le soutien aux séparatistes du Haut-Karabakh étaitindiscutable (le fait fut officiellement reconnu par la Russie bien aprèsle conflit : la révélation par le ministre russe des relations avec la CEI,Aman Tuleyev – le fait a été confirmé par Rodionov, ministre de laDéfense de la Russie – que 85 tanks T-72, un équipement de transportde blindés et de personnel pour 50 millions de dollars et d’autre matérielmilitaire avaient été donnés à l’Arménie entre 1994 et 1996 a détérioréles relations avec l’Azerbaïdjan) ; soit directement par la participationdu côté arménien, en février et mars 1992, du 366e régiment motoriséd’infanterie russe à la prise des villes azerbaïdjanaises du Haut-Karabakhtelles que Khodjali (54) (où un massacre de civils fit des centaines demorts) et Choucha (position stratégique pour l’ouverture du « corridor »de Latchine reliant le Haut-Karabakh à l’Arménie) et aussi la participationunilarérale de la VIIe Armée russe présente en Arménie à la prise de laprovince de Kelbadjar, située en dehors du Haut-Karabakh (55). Ce qui

47Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

(50) Baev, P. K., Russia Refocuses its Policies in the Southern Caucasus, Caspian StudiesProgram, 2001, version électronique disponible sur le site d’internet http ://bcsia.ksg.harvard.edu(51) Mirsky G., On the Ruins of the Empire: Ethnopolitical Conflicts in the Former Soviet Union,New York, Greenwood Press, 1997, p. 62.(52) Felgengauer P., La Russie renforce son influence en Transcaucasie, Segodnya, 15 juin1994.(53) Pour plus d’informations, voir le site d’internet officiel du Président de l’Azerbaïdjan :www.president.az (54) Goltz Th., “The Hidden Russian Hand”, Foreign Policy, Fall, 1993, p. 100-101.(55) Une instruction écrite de la VIIe armée russe basée à Erevan avait été découverte, Interviewwith Elshan Aliyev, BBC Central Asia Service, 30 July 1996, citation dans Hadjian A. B,“Azerbaijan’s Energy Policy and its implications for Russian Security”, in Bulent, G. (ed), ThePolitics of Caspian Oil, op.cit., p. 146, note 199.

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a été interprété comme un soutien à l’agresseur et aussi comme uneviolation par la Fédération de Russie du droit international sur ledésarmement, ce qui a conduit l’Azerbaïdjan à chercher des solutionsalternatives à la médiation exclusivement russe dans ce conflit. Sous laprésidence de V. Poutine, la politique de la Russie dans le Caucase s’est« civilisée »; elle est devenue plus cohérente et intégrée.

La politique pétrolière d’Heyder Aliyev avait été préparée d’unemanière équilibrée de sorte que la cible ne soit plus l’Azerbaïdjan, maisque les grandes puissances luttent entre elles dans le cadre du contrat,ce qui garantirait au moins son application, chacun y trouvant ses intérêts.Même si la Russie était un partenaire irremplaçable et à part entière, lerapprochement entre l’Azerbaïdjan et l’Occident restait toujours visible,incontestablement, et la condition sine qua non pour l’exploitation despétroles, étant donné qu’aucun autre Etat n’avait assez de moyens aussibien financiers que technologiques pour répondre aux exigences del’époque. De plus, l’Occident était le seul marché de consommation pources pétroles.

Aux yeux de l’Azerbaïdjan, le pétrole était un excellent prétexte pourattirer les Etats-Unis, l’Europe et Israël en Azerbaïdjan en vue d’équilibrerle poids de la Russie et de l’Iran. Et pour attirer les Etats-Unis, l’Europeet Israël, la Turquie était le partenaire idéal. D’ailleurs, pour une stratégieà long terme, la Turquie se présentait non seulement comme un partenaireéconomique et politique, mais aussi et surtout comme un « frère aîné »,toujours présent pour apporter son « soutien fraternel ». Bien sûr, la Russieest toujours mécontente de la présence des Occidentaux dans sa « zoned’influence », et elle cherche à rétablir à tout prix sa « domination » perdue.

Les Etats-Unis

Sans aucun doute, les Etats-Unis sont l’Etat le plus favorisé dans cecontrat, ce qui transforme la région en une « zone d’intérêt vital » pourles Américains. Les Etats-Unis, seule superpuissance mondiale actuelleet se percevant, à ce titre, comme le gardien principal de la sécuritémondiale, ont toujours intérêt à intervenir dans toutes les parties du mondeet à essayer de régler n’importe quel conflit, à condition qu’ils y trouventun « intérêt vital » pour eux-mêmes.

Suite à l’effondrement soviétique, les Américains ont eu tendance àtraiter la région de la Caspienne et du Caucase du sud comme le « pré

48 La sécurité énergétique en Méditerranée

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carré » de la Russie et à ne pas manifester un grand intérêt pour cetterégion. Tout en ayant essayé de promouvoir l’indépendance des nouveauxEtats de la région, ils ne les ont pas jugés très importants pour leurs intérêtsnationaux. Tout en considérant les richesses énergétiques de l’Azerbaïdjancomme un outil précieux pour soutenir les économies des Etats de larégion, Washington ne les intégrait pas dans le contexte énergétiquemondial. Des considérations nationales, inspirées par l’importante et ledynamisme de la communauté arménienne des Etats-Unis, eurent un fortimpact sur la politique américaine de l’après- indépendance de ces Etatset sur la politique actuelle à l’égard de la région. Sous la pression de celobby, le Congrès adopta des sanctions contre l’Azerbaïdjan en 1992,dans le cadre de la sanction 907 du «Freedom Support Act ». Jusqu’aulever de ces sanctions par le Président en 2002, cette loi a empêché uneaide directe du gouvernement américain au gouvernement azerbaïdjanaiset a constitué un obstacle aux options politiques des Etats-Unis pour larégion. Les sanctions du Congrès ont ainsi contraint les différentsministères américains à repousser à plusieurs reprises les offres de Bakoude renforcer la coopération.

En vertu de leurs positions globales, comme unique superpuissance,et en déclarant la région zone d’intérêt vital, les Etats-Unis sont un élémentcrucial des calculs de sécurité caspienno-asiatique (56). A cet égard,l’Azerbaïdjan étant un pays stratégique de la région de la mer Caspienneet du Caucase du sud, il a toujours attiré l’attention de cette superpuissance,qui est aussi l’un des trois co-présidents du Groupe de Minsk de l’OSCE,pour le règlement pacifique du conflit arméno-azerbaïdjanais.

L’administration américaine renforça sa stratégie, en poussant la Russieen dehors de la région Caspienne et surtout en soutenant son alliée del’OTAN, la Turquie, qu’elle voyait comme le futur bastion de la stabilitédans cette zone de crise. Après la faillite des efforts d’Ankara du débutdes années de 90 pour intégrer les Etats turcophones de la CEI dans sapropre sphère culturelle et économique, les Américains soutinrent laTurquie pendant la deuxième moitié de cette décade comme « un pontde politique énergétique » entre l’Europe et la région Caspienne (57).

49Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

(56) Cornell, S. E., “U.S. Policy In ‘Caspian-Asian’: The Imperatives Of Strategic Vision” CentralAsia - Caucasus Analyst 2 août 2000, www.cacianalyst.org (57) Rahr, A., “Caspian Oil”, Internationale Politik, (Berlin, Germany) Summer 2001, p. 81.

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Pendant la deuxième moitié des années 90, Washington s’efforça,suivant l’exemple des grandes compagnies américaines, d’étendre soninfluence politique et économique dans le Caucase du sud, souvent audétriment de l’Iran et aussi progressivement, de la Russie (58). Les Etats-Unis s’intéressèrent d’avantage aux ressources énergétiques de la région.Washington encouragea activement la construction des corridorsénergétiques est-ouest, dont l’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC) etle gazoduc Bakou-Tbilisi-Erzourum (BTE).

Pendant la guerre contre le régime des talibans menée en Afghanistanen 2001-2002, l’Azerbaïdjan accorda le droit de survol à l’armée de l’airaméricaine. L’administration des Etats-Unis récompensa l’Azerbaïdjanpour son soutien en suspendant l’application de la section 907 de la loisur le soutien à la liberté, ce qui permit alors aux Etats-Unis de fournirun appui technique et militaire à l’Azerbaïdjan. Lors des préparatifs dela guerre en Irak, l’Azerbaïdjan fut pratiquement le seul pays musulmanà soutenir la coalition conduite par les Américains et les Britanniques.Lorsque la guerre prit fin officiellement le 1er mai 2003, le pays soutintla politique de reconstruction d’après conflit en Irak, prônée par les Etats-Unis, et en août 2003, il fut le premier Etat musulman à envoyer destroupes de maintien de la paix en Irak (59).

Parmi les 21 grands contrats signés entre 1994 et 2001, les Etats-Unisont obtenu leur part qui varie entre 25 et 80 % dans 15 contrats, avec laparticipation de leurs 11 compagnies pétrolières. Le pétrole de la merCaspienne représentant la deuxième source d’énergie hors Moyen-Orientpour les Américains, son exploitation diminue la dépendance des Etats-Unis envers les pays arabes. Face à une forte diaspora arménienne,l’Azerbaïdjan a été obligé de chercher un soutien auprès de la communautéjuive aux Etats-Unis, suivant ainsi le chemin de la Turquie, son frère aîné,ce qui a conduit au rejet de ce pays (d’ailleurs comme la Turquie) par lacommunauté arabo-musulmane, ses « frères » de religion.

50 La sécurité énergétique en Méditerranée

(58) Intervention de M. Gerard Libaridian, Conseiller de l’ex-president arménien M. Ter-Petrossian, “US-Russian relations : Implications for the Caspian Region”, a report from theCaspian Studies Program’s Conference of Harvard University, held on October 22-23, 2000,Cambridge, Massachusetts, June 2001, p. 11.(59) http ://www.assembly-weu.org/fr/documents/sessions_ordinaires/rpt/2004/1879.pdf

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L’Union européenne

La région de la Caspienne et du Caucase du sud est restée pendantlongtemps loin du centre d’intérêt de l’UE, car elle paraissait relativementmarginale dans la sphère des intérêts de sécurité de l’Union. Les troispays du Caucase du sud – Arménie, Azerbaïdjan et Géorgie – ne setrouvent pas en effet à sa frontière immédiate, et ce n’est pas non plusle cas pour les pays de l’Asie centrale. Ils ne sont pas non plus membresdu « nouveau voisinage », considéré par l’Union comme conséquencemajeure du nouvel élargissement, et aucun des trois pays de la régionn’est d’ailleurs candidat officiel à l’entrée dans l’UE. Durant lesannées 90, notamment pendant sa première moitié, l’Union s’est montréedistante et ne s’est pas engagée directement sur les questions crucialesdu Caucase du sud, préférant laisser le terrain à la rivalité russo-américaine, se contentant de suivre ce dernier dans le processusd’intégration de ces trois pays dans les structures euro-atlantiques(Partenariat pour la paix), même si elle-même et les autres institutionseuropéennes (OSCE, Conseil de l’Europe) étaient déjà présentes dansla région depuis leur indépendance.

L’action unilatérale des « grands » (Allemagne, France et Royaume-Uni) prédomine, ce qui rend difficile de parler de l’UE comme d’un« acteur unanime », comme cela fut déjà le cas pour sa politique desBalkans. Ainsi, ces trois pays ont développé des relations privilégiéespropres – pour des raisons économique, culturelle ou historique – avecchacun des pays de la région : l’Allemagne avec la Géorgie, la Franceavec l’Arménie et Royaume-Uni avec l’Azerbaïdjan (60).

Durant la deuxième moitié des années 90, l’UE s’est montrée plusactive. Les relations avec chacun des pays du Caucase du sud se sontaccrues. L’identité européenne des trois pays de la région s’est affirméepar leur adhésion au Conseil de l’Europe : Géorgie en 1999, Arménie etAzerbaïdjan en 2001. Déjà dans sa première Communication, intitulé “Versune stratégie de l’Union européenne pour les relations avec lesrépubliques transcaucasiennes”, la Commission proposait une stratégiecohérente, en reconnaissant que l’Union avait des intérêts géopolitiques

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

(60) Habilov, M., Pacte de stabilité au Caucase et ses perspectives pour la paix et la sécuritéau Caucase du Sud, op. cit, p. 53.

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et économiques dans la région (61).. Le Parlement européen reconnaissait,en 1997 (62), comme but de toute action dans la région la consolidationde l’indépendance de la Géorgie, de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan, larecherche d’une solution négociée aux crises politiques, en tenantcompte des interactions entre ces pays, la promotion de la démocratie,de l’Etat de droit et de la société civile et le développement économique.La Commission avait même rédigé une position commune sur la base del’ancien Article J.2 du traité instituant l’UE.

Les projets d’ordre énergétique et géostratégique, qui ont déjà étéinaugurés au début de la décennie (TRACECA (63) : Transport CorridorEurope-Caucasus-Central Asia, INOGATE (64) : Interstate Oil and GasTransport to Europe) sont activement soutenus dans le cadre duprogramme de TACIS (Tecnical Assistance to the Community ofIndependent States), même si le montant de l’aide européenne restetoujours minime en comparaison de l’aide directe américaine à traversle « Freedom Support Act » et les investissements des entreprisesmultinationales (65).

D’autres facteurs ont contribué à l’évolution des relations de l’UEavec le Caucase du sud. D’abord, l’impact des événementsdu 11 Septembre sur la nature de la politique mondiale et des relationsentre Etats est un élément non négligeable qui démontre à quel point lesdéfis de la sécurité traditionnelle n’étaient plus valables et que les Etatsétaient devenus vulnérables face à de nouveaux défis. Le combat contrele terrorisme international, le bioterrorisme, la prolifération clandestinedes armes nucléaires et contre les « sources » de leur développement (traficde drogue, blanchiment d’argent , immigration clandestine,appauvrissement, etc.) est devenu un défi ne connaissant plus aucunelimite géographique. Deuxième élément important qui a attiré l’attentionde l’Union envers le Caucase du sud-est, sans doute, son élargissementvers l’Europe de l’Est. Avec l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie,

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(61) COM (1995) 205, point 1.4.79.(62) Dans les discussions en vue de l’adoption du Rapport A4-0279/1996, présenté parMme Carrère d’Encausse.(63) Pour l’information détaillée, voir le site officiel de TRACECA, www.traceca-org.org(64) Pour l’information détaillée, voir le site officiel d’INOGATE, www.inogate.org (65) Pour la Géorgie seule, le montant total de l’aide européenne entre 1992-2000 est301,28 millions d’euros contre 986 millions de dollars d’aide américaine. Dov Lynch, “Unedynamique de l’insécurité régionale”, Cahiers de Chaillot, n° 65, décembre 2003, p. 180.

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la région du Caucase devient frontalière avec l’UE et avec ses conflitsgelés, ses institutions politiques faibles, son marasme socio-économique,etc., la région risque de constituer une source d’instabilité pour la frontièredu sud-est de l’UE (66).

Deux évolutions positives laissent espérer cette perspective, sinon unrenforcement des relations UE/Caucase du sud. La première est d’ordresubjectif, qui est que la question de l’« identité européenne » de ces paysne souffre plus de discussion. Si l’on accepte que l’Europe est un idéal,qui se définit plus par le partage des « mêmes valeurs communes » quepar sa définition géographique, l’identité européenne de ces pays n’estpas à discuter, ce qui est d’ailleurs majoritairement partagé (67).D’ailleurs, en 1996, la France promettait de construire une Europe allantde Brest à Bakou » (68). Institutionnellement, ces Etats ont pris la directionde l’Occident et les dirigeants ont exprimé à plusieurs reprises qu’ilsvoyaient « l’avenir heureux de leurs pays dans l’intégration aux structureseuropéennes » (69). Les trois pays se trouvent d’ailleurs dans lesstructures des différentes institutions européennes. Ils sont aussi membresdu Conseil d’Europe (Géorgie depuis 1999 et Arménie et Azerbaïdjandepuis 2001). La deuxième est plus concrète et concerne directement lesrelations UE/Caucase du sud : les relations bilatérales sont désormaisinstitutionnalisées et gérées dans le cadre de PCA (Partnership andCooperation Agreement), la région est considérée comme la « régionvoisine » – qui est définie dans le Projet de stratégie de sécurité de l’Unionet approuvée au sommet de Thessalonique en juin 2003, et depuis le7 juillet 2003, un « Représentant spécial de l’UE pour le Caucase du sud »gère ces relations bilatérales. Ces deux évolutions constituent untournant décisif et montrent l’intérêt que porte l’UE à cette région et àla coopération avec elle.

Les gouvernements européens seraient bien inspirés de réévaluer lasécurité de leurs futurs approvisionnements en gaz, pour tenir compte

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(66) Habilov, M., Pacte de stabilité au Caucase et ses perspectives pour la paix et la sécuritéau Caucase du sud, op. cit., p. 54.(67) Idem, p. 115.(68) Shihab S., «La France promet de construire une Europe allant “de Brest à Bakou”», leMonde, 15 octobre 1996.(69) La nouvelle direction géorgienne est allée plus loin : le Président géorgien, M. Saakachvilia déclaré, pendant sa visite à Bruxelles que l’intention de son pays était d’entrer à l’UE “avant2010”.

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l’augmentation rapide de leurs importations et de la libéralisation en coursdes marchés intérieurs et européens, dans l’optique d’une diminution deleur dépendance à l’égard des Etats du Golfe.

L’Europe importe environ 3 millions de barils par jour du Golfepersique, soit 45 % de ses importations pétrolières. L’Union européenneest le premier acheteur de pétrole et le premier fournisseur de l’Arabiesaoudite (38 % des importations saoudiennes) et de l’Iran.

Réduire la dépendance à l’égard du Moyen-Orient est donc essentiel,car le développement de la production pétrolière et gazière de la Mer duNord, consécutif aux chocs pétroliers de 1973 et 1979, a atteint ses limites,même s’il a permis de réduire substantiellement la dépendance pétrolièreextérieure des pays de l’Union européenne, passée de 97 % en 1973 à55 % en 2000 (pour les 15). Le taux de dépendance vis-à-vis du pétroleproduit à l’extérieur de l’Union pourrait faire un bond à 85 % dès 2010et à 90 % en 2020, selon la Commission européenne.

La Turquie

Immédiatement après l’indépendance, la Turquie, acteur régionalfortement impliqué au Caucase et en Asie centrale depuis la chute del’URSS (70), deuxième acteur dans la région après la Russie (71), a tentéde profiter de l’occasion pour renouveler son association historique avecles groupes ethniques du Caucase et de l’Asie centrale en vue d’accroîtreencore son influence dans la région (72) et d’y mener une politique plutôtambitieuse. Encouragée par les Etats-Unis pour contenir la menaceislamique potentielle représentée par l’Iran (73) et pour contrebalanceret affaiblir le poids de la Russie dans la région, la Turquie jouerait unrôle-pivot non seulement dans cette région mais aussi dans les paysturcophones de l’Asie centrale, en représentant une sorte de maillonprincipal entre les Etats-Unis et ces pays (74). D’autre part, étant devenue

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(70) Robins, P., «Between sentiment and self-interest : Turkey’s policy toward Azerbaijan andthe Central Asia states », Middle East Journal, vol. 47, n° 4, 1993, p. 493-510.(71) Gungor A., Aydinly E., «The Dual Pipeline : Cooperation Versus Competition », CaspianCrossroads Magazine, volume 2, Issue N° 1, Spring-Summer 1996, version électroniquewww.usazerbaijancouncil.org.(72) Forsythe, R., The politics of oil in the Caucasus and Central Asia, Oxford University Press,New York, 1996, p. 21.(73) Djalili, M. R.; Kellner, Th., Géopolitique de la nouvelle Asie centrale, de la fin de l’URSSà l’après- 11 Septembre, 3e édition, PUF, 2003, p. 133.(74) Jafalian, A., «Le pétrole, un facteur de stabilisation du Caucase », Stratégique, p. 80-81.

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le coordinateur régional de l’OTAN, elle essaie de jouer au mieux sonrôle de représentant de l’Alliance dans la région Caspienne (75). Ainsi,Ankara espérait assumer le rôle de leader d’une sorte de Commonwealthturc (76). D’ailleurs, la Turquie, avec son modèle de république laïqueet démocratique, occidentalisé et économiquement développé,correspondait aux aspirations des républiques turcophones dans leurconstruction nationale (77). A l’image du modèle développé en Turquiepar Mustafa Kemal Atatürk et qui perdure aujourd’hui malgré la récenteremontée de l’influence islamiste, l’Azerbaïdjan pourrait constituer ledeuxième exemple d’un pays de population musulmane qui adopte unsystème politique de type laïc et pro-occidental et qui réalise undéveloppement économique basé sur l’économie de marché, l’ouverturevers l’extérieur et l’accueil des investissements étrangers. Ce quiconstituerait un axe turco-azéri qui, opposé au modèle iranien et auxislamismes radicaux, détiendrait une réelle force d’attraction en Asiecentrale, au Moyen-Orient voire dans l’ensemble du monde musulman.Le Caucase, plus particulièrement l’Azerbaïdjan, serait un « pont » pourcette stratégie, car les Azéris étant un peuple turcophone, il ne serait pasdifficile pour la Turquie, en tant que « frère aîné », d’y établir son influencepolitique, économique et culturelle. Le Président turc de l’époque, TurgutÖzal, n’hésitait même pas à dire que le 21e siècle serait le siècle desTurcs (78). Suleyman Demirel, à son tour, se félicitait d’un monde turcde l’Adriatique à la muraille de Chine (79). Bref, Ankara paraissait assezapte à jouer ses atouts.

Ainsi, comme les autres pays, la Turquie aussi s’intéresse au pétrolede la mer Caspienne . La Turquie a fait un énorme effort pour obtenir lesoutien de Washington dans la réalisation de l’oléoduc BTC. La Turquie

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(75) Nassibli, N., «Azerbaijan’s Geopolitics And Oil Pipeline Issue », in Croissant, M.; Aras,P. B., (eds), Oil and geopolitics in the Caspian Sea Region , Westport, Conn.: Praeger, 1999.(76) Winrow, G. M., «Turkish National Interests », in Kalyuzhnova, Y., (ed), Energy in theCaspian Region, Palgrave, 2002, p. 234.(77) Bal, I., «The Turkish Model and Turkic Republics », Perceptions Journal of InternationalAffairs, septembre-november 1998, volume III, number 3, version électroniquehttp ://www.mfa.gov.tr/grupa/percept/default.htm(78) Kramer, H., “Will Central Asia become Turkey’s sphere of influence”, Perceptions JournalOf International Affairs, March- Mai 1996, volume III, Number 4, version électroniquehttp ://www.mfa.gov.tr/grupa/percept/default.htm(79) Pope, N., «Turquie : en Asie centrale ex-soviétique M. Suleyman Demirel évoque “un mondeturc de l’Adriatique à la Muraille de Chine” », le Monde, 6 mai 1992.

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voyait le projet BTC comme un moyen stratégique et politique précieuxpour renforcer sa position de pont énergétique entre les centresd’approvisionnement émergents de la région Caspienne et les marchésoccidentaux (80).

D’ailleurs, l’importance de la Turquie dans les stratégies d’évacuationsa, selon J.M. Bourdaire, trois aspects : son poids géopolitique dans larégion, son contrôle du Bosphore, débouché de la Mer noire sur laMéditerranée et sa capacité à fournir un transit de « deuxième rang »,derrière la Géorgie (pétrole) et l’Iran (gaz) (81). Pour réduire leschances de l’alternative russe et donner plus de poids à ses propresarguments, la Turquie a cherché, à partir d’août 1993, à opposer desrestrictions au passage des tankers par ses détroits qui contrôlent la sortiede la Mer noire. Se basant sur des raisons écologiques et des risquesénormes menaçant Istanbul, Ankara demanda la révision du traité deMontreux du 20 juillet 1936, régissant le statut du Bosphore et desDardanelles, ce qui provoqua l’opposition catégorique de Moscou. Mais,à l’occasion d’une nouvelle catastrophe tragique le 13 mars 1994 (la 444e

en 40 ans), la Turquie déclara l’entrée en vigueur, à partir du 1er juillet,d’une réglementation censée mettre un peu d’ordre dans ce trafic fou etau besoin le ralentir (82). Cet oléoduc, fortement soutenu par les Etas-Unis, a un seul inconvénient à part son coût : il traverse le sud-est de laTurquie, instable à cause de l’insurrection des habitants kurdes (83) etsoumis aux attaques de PKK.

Dans le conflit arméno-azerbaïdjanais, l’attitude du gouvernement turca uniformément été plus pro-azerbaïdjanais. L’ex-président Özal, enparticulier, en 1992 (après le massacre de février sur les civils azéris àKhojaly) s’est prononcé pour «donner une leçon aux Arméniens» (84),

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(80) Sayari, S., “Turkey’s Caspian Interests : Economic and Security Opportunities”, in Ebel,R. E., Menon, R., (ed), Energy and conflict in Central Asia and the Caucasus, Lanham, Md.:Rowman & Littlefield Publishers, 2000, p. 229.(81) Bourdaire, J.M., «Les enjeux énergétiques du monde turc », Revue française degéoéconomie (1999, printemps) n° 9, p. 62.(82) Dolay, N.; Fish, R., «Pétrole et politique : l’imbroglio du pétrole », Cahiers de l’Orient,(9/4/1996) n° 42, p. 80.(83) Aras, B.; Foster, G., “Turkey : Looking for Light at the End of The Caspian Pipeline”, inCroissant, M.; Aras, P. B. (ed), Oil and geopolitics in the Caspian Sea Region, op.cit, p. 236.(84) Foreign Broadcast Information Service, Western Europe series (Hereafter FBIS-WE),5 March 1992, p. 4.

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et lorsque les attaques arméniennes prirent une grande ampleur, l’arméeturque se mobilisa à la frontière de l’Arménie (85). En réagissantsévèrement lorsque le Nakhitchevan s’est trouvé sous la menaced’attaque, la Turquie déclara que cela serait considéré comme un casusbelli (86), car le Traité de Kars, signé entre les Turcs et les Russes, toujoursvalide, accorde le droit de garant à la Turquie sur ce territoireazerbaïdjanais. En outre, l’opposition turque, y compris l’oppositionprincipale, le parti d’Ana Vatan (Mère Patrie) et, tout à fait normalement,le parti de MHP (Parti du Mouvement Nationaliste) d’Alparslan Türkes,ont fortement accusé le gouvernement de laisser faire « le génocideorganisé par les Arméniens sur les Azéris et de laisser l’Azerbaïdjanseul » (87). D’ailleurs, au cours du conflit, la Turquie avait proposé unplan de paix qui fut refusé par l’Arménie, dénonçant la partialitéd’Ankara (88) ; et plus tard, la Turquie proposa sa participation à uneforce de paix au Haut-Karabakh (89). Le ministre des Affaires étrangères,Hikmet Çetin, effectua une tournée prolongée en Europe et aux Etats-Unis pour essayer de gagner un soutien pour organiser des opérationsde maintien de la paix, mais en vain (90).

Pourtant, la Turquie n’a pas pu aller plus loin, parce que d’autres paysaussi avaient des intérêts dans cette région. Nombreux sont les facteursqui ont contraint le comportement de la Turquie, l’empêchant depoursuivre une politique indépendante et surtout d’apporter un réel soutienà l’Azerbaïdjan au sujet du règlement du conflit arméno-azerbaïdjanaisqui revêt une importance vitale pour ce pays.

La plupart des contraintes importantes pesant sur la Turquie venaientde son alliance occidentale. Comme les pays occidentaux ont voulu resteren dehors du conflit, ou dans certains cas, soutenir tacitement ou

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(85) «Azerbaïdjan L’armée turque est placée en état d’alerte », le Monde, 5 septembre 1993.(86) Spatharou, A., «Geopolitics of Caspian oil : the Role of the Integration of the CaspianRegion into World Economy in Maintaining Stability in the Caucasus », In, Gökay, B. (ed.),The politics of Caspian oil, Palgrave, Great Bretain, 2001, p. 43.(87) FBIS-WE, 13 March 1992, p. 14.(88) «Dénonçant la “partialité” d’Ankara, l’Arménie a refusé d’examiner le plan de paix turcpour le Haut-Karabakh », le Monde, 13 mars 1992.(89) Azerbaïdjan: la Turquie prête à participer à une force de paix au Karabakh», le Monde,9 juillet 1994.(90) FBIS-WE, 16 March p. 2, quoting Ankara TRT television network, cité dans CORNELL,Svante, “Turkey and the conflict in Nagorno Karabakh, A Delicate Balance”, Middle EasternStudies, vol. 34, n° 1. 1998 électronique www.zerbaijan.com.

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implicitement l’Arménie, ils ont exercé une pression sur la Turquie pourqu’elle ne s’implique pas du côté de l’Azerbaïdjan.

En outre, les relations de la Turquie avec la Russie ont été un importantfacteur de retour au calme, car des relations politiques et particulièrementéconomiques avec la Russie se sont développées depuis 1991 (91). LaTurquie n’était pas prête à compromettre ses énormes intérêts économiquesen Russie, car ces deux pays sont « partenaires commerciauxmajeurs » (92). En outre, à chaque fois que la Turquie a signalé sonintention de s’impliquer dans le conflit du Haut-Karabakh, Moscou arépondu sévèrement et sans essayer de cacher son mécontentement àl’égard des politiques d’Ankara. Albert Chernyshev, ancien ambassadeurde Russie à Ankara et plus tard vice-ministre des Affaires etrangères deRussie, a déclaré : « Nous devons nous comprendre l’un l’autre. Celuiqui habite dans une maison en verre ne doit pas jeter des pierres (93). »

En tout cas, quoi qu’il en soit, la Turquie est considérée parl’Azerbaïdjan et les Azerbaïdjanais comme le meilleur partenaire et alliédans la région (94). Pour Zbigniew Brzezinski, la Turquie reste encore« un pivot géopolitique », non seulement en ce qui concerne cette régionmais également dans la politique du Moyen-Orient et des Balkans. Selonlui, l’Azerbaïdjan et la Turquie sont « deux des cinq pivots géopolitiquesde l’Eurasie (avec l’Iran, l’Ukraine et la Corée du Sud) avec desconséquences évidentes pour la politique des Etats-Unis (95).»

Israël

Israël est un pays qui joue un très grand rôle dans la région de laCaspienne, même si ce rôle n’est pas senti à priori. Les efforts d’Israëlen vue de développer ses relations avec les pays de la région Caspienneissus de l’ex-URSS signifient l’importance accordée à cette région. L’un

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(91) Bolukbasi, S., «Ankara’s Baku-Centered Transcaucasia Policy : has it failed ?», Middleeast journal, Jan. 1997.(92) Winrow, G. M., “Turkish National Interests”, in Kalyuzhnova, Y., (ed), Energy in the CaspianRegion, op.cit, p. 235.(93) Grudinina, I., «Ex Officio : Moscow Won’t Let Kurdish Organizations Build Nests inRussia », Current Digest of the Post Soviet press, 30 august 1995, vol. 47, p. 23-31.(94) Alieva, L., « The Foreign Policy of Azerbaijan », Central Asia and Caucasian Prospects,Briefing Paper N° 9, october 1996, www.riia.org/Research/rep/bp9.html.(95) Brzezinski, Z., Le grand échiquier: l’Amérique et le reste du monde, Hachette Littératures,2000.

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de ses buts était de créer une barrière contre l’expansion de l’influencearabe et iranienne (96) et donc prévenir les menaces du fondamentalismeislamiste que les pays en question envisageaient d’exporter dans cesnouvelles républiques qui étaient en quête d’une identité suite à un« vacuum identitaire » créé avec la chute de l’idéologie communiste. Israël,après reconnu l’Azerbaïdjan à la fin de l’année 1992, y a ouvert sonambassade en février 1993 et a commencé à jouer un rôle actif dans lesaffaires politiques et économiques de l’Azerbaïdjan, aboutissant mêmeà prendre une position pro-azerbaïdjanaise dans le conflit arméno-azerbaïdjanais (97)…

Parallèlement, les officiels azerbaïdjanais accordent une importancespéciale à Israël, qui est toujours perçu en Azerbaïdjan comme unpartenaire stratégique potentiel. En effet, Israël est un bon modèle pourles Etats de la Caspienne : un pays petit mais politiquement etéconomiquement puissant, démocratique et laïque (98). Ces Etats sontpersuadés qu’Israël, avec sa compétence technologique et sa traditiondémocratique, peut faciliter leur intégration dans le système mondialmoderne. De plus, Israël est perçu dans certains pays, comme enAzerbaïdjan, comme une route à la Communauté occidentale, en général,et aux Etats-Unis, en particulier.

D’autre part, la diaspora juive et le lobby juif aux Etats-Unis sontconsidérés comme partenaires privilégiés de l’Azerbaïdjan (99). Israël,qui se trouve dans une situation de dépendance énergétique totale, peutêtre un grand importateur de pétrole azéri (100). La coopération entrela Turquie et Israël dans cette région n’est pas un hasard. Israël est trèsintéressé et soutient la Turquie dans ses efforts de propagation de son

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(96) Ehteshami, A., Murphy, E., «The Non-Arab Middle East States and the Caucasian/CentralAsian Republics : Iran and Israel », International Relations, vol. 12, N° 1, April 1994, p. 96.(97) Aras, B., «Post-cold War Realities : Israel’s Strategy in Azerbaijan and Central Asia », MiddleEast Policy, vol. V, N° 4, January 1998, p. 73.(98) Ehteshami, Anoushiravan, Murphy Emma, «The Non-Arab Middle East States and theCaucasian/Central Asian Republics : Iran and Israel », International Relations, vol. 12, N° 1,(April 1994), p. 96.(99) Bremmer, I., “The US, Turkey, and the Future of the Caspian”, In Succession and Long-term Stability in the Caspian Region, Cambridge, MA : BCSIA, 2000, version électroniquedisponible sur le site d’internet http ://bcsia.ksg.harvard.edu(100) Greene, R. A., “Greater ties for Israel, Azerbaijan?”, Cleveland Jewish News, 30 April2002, vers ion électronique disponible sur le s i te d’ internethttp ://www.azembassy.com/archive/2002/media/cjn29apr02.htm

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modèle de démocratie parlementaire, de libre économie du marché et delaïcité dans une société musulmane (donc compatible avec le style degouvernement occidental) (101).

L’Iran

Historiquement, jusqu’à l’invasion de l’Azerbaïdjan par les forcesrusses en 1828, les Azéris et les Perses avaient vécu ensemble. Pourtant,la perception historique des Iraniens et des Azéris n’est pas la même.Pour les premiers, l’Azerbaïdjan fait partie de la grande civilisationiranienne (102). C’est la raison pour laquelle, en 1992, lors de la guerreentre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, les nationalistes iraniens ont fait pressionsur le régime pour soutenir l’Azerbaïdjan, car pour eux, les Azérisd’Azerbaïdjan étaient des citoyens actuels de l’Iran, puisque l’Azerbaïdjantout entier appartenait autrefois à l’Iran (103). Tandis que, pour les Azéris,ils n’appartiennent pas à la civilisation iranienne, mais plutôt au mondeturc, et la Perse fut plutôt gouvernée par les Persans que par les Turcs(du clan des Seldjoukides au clan des Gadjars). Et selon eux, c’est parles traités de Gulistan et de Turkmenchaï que l’Azerbaïdjan fut partagéentre les Perses et les Russes, la partie sud restant sous la dominationperse et la partie nord passant sous l’hégémonie russe.

La chute de l’URSS ouvrit à l’Iran des perspectives pour étendre soninfluence politique, et si possible son régime, aux nouveaux paysmusulmans voisins, en les considérant comme des débouchés pour sesproduits commerciaux, afin de compenser l’effet de l’embargo américain.Néanmoins, ce nouvel ordre régional apporta pour l’Iran des problèmesde type nouveau : de nouvelles frontières, surtout dans la Caspienne, etla perception iranienne du danger de l’irrédentisme azéri, etc.

La politique iranienne, au début des années 90, présente dessimilitudes avec la politique turque, à savoir : agir selon le réflexe de

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(101) De Vidas, J., Analyse d’un axe pacificateur: pertinence de l’alliance entre la Turquie etIsraël, Mémoire de DESS Etudes Stratégiques soutenu à l’Université Paris XIII-Nord, 2002,p. 44-45.(102) Entessar, N., «Iran : Geopolitical Challenges and the Caspian Region », in Croissant, M.;Aras, P. B. (ed), Oil and geopolitics in the Caspian Sea Region, op.cit., p. 161.(103) Homayun, T., « Negahi be Gharabagh Dar Masire Tarikhe Iran », Motaleeat Asiaye Markaziwa Ghafghaz, vol. 2, N° 1 (Summer 1993), Quoted in Ramazanzadeh, “Iran’s Role as Mediatorin the Nagorno-Karabakh Crisis”, cité dans Cornell, S., “Iran and The Caucasus”, Middle EastPolicy, vol. V, N° 4, January 1998, p. 57.

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l’héritage de l’empire, avec une différence toutefois : agir au nom de la“fraternité religieuse”, à la différence de la “fraternité ethnique” turque.Pourtant, l’action de l’Iran en Asie centrale s’est manifestée dans leschamps politiques et économiques beaucoup plus que religieux, car danscette région, qui vécut pendant longtemps sous l’athéisme, l’Islam n’estpas le critère de « l’identité collective primaire » (104).

La politique nationaliste du gouvernement d’Eltchibey (1992-1993)a envenimé cette relation et a poussé Téhéran à prendre des « mesurespréventives », car le président Elçibey, pro-turc, anti-russe et anti-iranien (105), accusant Téhéran de « négliger les intérêts des Azérisd’Iran » (106), déclara à plusieurs occasions que l’Etat iranien estcondamné à mort, et il n’hésitait pas à déclarer ouvertement que « danscinq ans les deux Azerbaïdjans seraient réunifiés » (107). En Iran, il sembleque la crainte du régime de voir se développer l’irrédentisme parmi laforte minorité azérie de l’Iran ait incité Téhéran à préférer une Républiqueazerbaïdjanaise affaiblie sur son flanc nord, plutôt qu’un Etat riche etsurtout pétrolier, tandis que la minorité azérie en Iran (environ 30 millions)est vue comme un facteur positif pouvant mener Téhéran à soutenir Bakouplutôt qu’à travailler contre, afin de garder sa minorité azérie calme. C’esten s’inquiétant des appels à la réunification (108) de certains nationalistesazéris que l’Iran a développé des liens étroits avec l’Arménie (109), quiest actuellement son principal partenaire économique dans la région (110).En fin de compte, une situation paradoxale en a résulté : le régimefondamentaliste islamique d’Iran s’est mis à soutenir l’Arménie chrétiennecontre des musulmans azéris.

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(104) Shaffer, B., “Islam, Iran, and the Prospects for Stability in the Caspian Region”, InSuccession and Long-term Stability in the Caspian Region, Cambridge, MA : BCSIA, 2000,version électronique disponible sur le site d’internet http ://bcsia.ksg.harvard.edu.(105) Ochs, M., «Azerbaijan : Oil, Domestic Stability and Geopolitics in the Caucasus », InCaucasus and the Caspian Seminar Transcripts, SDI, 1996 version électronique disponiblesur le site d’internet http ://bcsia.ksg.harvard.edu.(106) Iran Times, 10 july 1992, p. 1.(107) Hiro, D., «The Azerbaijan Question », The Nation, 14 september 1992.(108) Rutland, P., «Paradigms for Russian Policy in the Caspian Region », in Ebel, R. E.; Menon,R., (ed), Energy and conflict in Central Asia and the Caucasus, op.cit., p. 181.(109) Kemp, G, «U.S. –Iranian Relations : Competition or Cooperation in the Caspian Sea Basin »,in Ebel, R. E.; Menon, R., (ed), Energy and conflict in Central Asia and the Caucasus, op.cit,p.152; Peimani, H., The Caspian pipeline dilemma: political games and economic losses,Westport, Conn.: Praeger, 2001, p. 84.(110) Amineh, M. P., Towards the control of oil resources in the Caspian region, Münster :LIT; New York : St Martin’s Press, 1999, p. 116.

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Durant le conflit, l’Iran, comme la Russie, a continué d’offrirdifférentes formes de soutien à l’Arménie : approvisionnement enélectricité et en marchandises etc. « pour faire payer à l’Azerbaïdjan sontropisme occidental » (111). Toutefois, le soutien de l’Iran a dépassé lesrelations simplement commerciales. Certains dirigeants azéris ontindiqué que l’Iran a servi au moins d’itinéraire de passage pour des armesen route vers l’Arménie (112), et il semble que des combattantsarméniens aient été formés en Iran (113). Les Azéris arguaient du faitque l’ASALA (armée secrète arménienne pour la libération de l’Arménie)existait encore et se formait en Iran et que cette organisation avait uneforte influence sur le gouvernement arménien concernant le problèmedu Haut-Karabakh (114).

Après l’arrivée au pouvoir d’Heydar Aliyev, l’Azerbaïdjan a révisésa politique extérieure et conduit une « politique d’équilibre » entre laRussie, l’Iran et la Turquie, tandis que celle de Mutalibov était plutôt« pro-russe » et celle d’Elçibey plutôt « pro-turque » ou « pro-occidentale » (115). Lors de la rédaction du projet de constitution enAzerbaïdjan, Téhéran était mécontent de la politique « anti-religieuse »de l’Azerbaïdjan, qui choisissait une voie laïque et démocratique,comme en Turquie, car Téhéran considérait cette politique comme nuisibleaux intérêts des peuples de deux nations chi‘ites (116). D’ailleurs, lerapprochement de l’Azerbaïdjan avec les Etats-Unis et Israël a commencéà poser des problèmes à l’Iran. Le ministre iranien des Affairesétrangères, Velayeti, lors de sa visite à Bakou en mars 1996, a accusél’Azerbaïdjan de mettre en danger la sécurité de l’Iran en entrant dansune alliance de facto stratégique avec Israël, tandis que son homologue

62 La sécurité énergétique en Méditerranée

(111) Roy, O., «Le noeud caspien », Politique internationale, 1997, été, n° 76, p. 229. (112) Cornell, S., “Iran and The Caucasus”, Middle East Policy, vol. V, n° 4, January 1998,p. 61.(113) Halliday, F., «Condemned to React, unable to Influence : Iran and Transcaucasia »,Wright, J.; Goldenberg, S.; Shoefield R. (ed), Transcaucasian Boundaries, UCL Press,London, 1996, p. 84.(114) Cornell, S., «Iran and The Caucasus », Middle East Policy, vol. V, n° 4, January 1998,p. 61.(115) Molla-Zade, J., «Azerbaijan and the Caspian Basin : Pipelines and Geopolitics », InCaucasus and the Caspian Seminar Transcripts, Cambridge, MA : Strengthening DemocraticInstitutions Project, 1996. version électronique disponible sur le site d’internethttp ://bcsia.ksg.harvard.edu.(116) Entessar, N., «Iran : Geopolitical Challenges and the Caspian Region », in Croissant, M.;Aras, P. B. (ed), Oil and geopolitics in the Caspian Sea Region, op.cit., p.165.

Page 60: La sécurité énergétique en Méditerranée

azerbaïdjanais l’accusait d’intervenir dans les affaires intérieures del’Azerbaïdjan (117). Le souhait de l’Azerbaïdjan d’accueillir les basesmilitaires de l’Otan (118) était critiqué aussi bien par la Russie que parl’Iran. Bakou à son tour accusait l’Iran de financer les mouvements etles partis politiques islamistes en Azerbaïdjan (119).

Au début, l’Iran a tenté d’offrir ses bons offices pour rechercher unesolution pacifique au conflit. Le premier cessez-le-feu a été négocié àTéhéran en mars 1993. Pourtant, les attaques militaires arméniennessuccessives sur le territoire d’Azerbaïdjan et l’occupation de Chouchapendant les négociations elles-mêmes ont rendu impossibles les effortsde l’Iran. Et cela fut même perçu en Azerbaïdjan comme un complotpréparé par l’Iran pour faire sortir les dirigeants azerbaïdjanais de la ville,sous prétexte de négociation de cessez-le-feu et ainsi faciliter les attaquesarméniennes. La politique de l’Iran vis-à-vis du conflit du Haut-Karabakh a ainsi déçu Bakou.

Téhéran tenta également de prendre part au partage des ressourcesénergétiques de la mer Caspienne, malgré son point de vue divergent surle statut de cette mer avec son voisin du nord et avec les autres paysriverains. Il avait obtenu le consentement de l’Azerbaïdjan pour participerau consortium AIOC avec une part de 5 % (120) ; et pourtant, suite audésaccord avec les Etats-Unis, il fut écarté au profit de la compagniepétrolière américaine Exxon (121). Il détient actuellement une part dansles contrats pétroliers azerbaïdjanais tels que Shah Deniz (10 %) etLenkoran-Deniz, Talish-Deniz (10 %). Sa volonté de faire traverser lesoléoducs et gazoducs de la Caspienne et de l’Asie centrale par son territoirese heurta à l’opposition américaine – même si la route d’Iran était la pluscourte et commercialement la plus rentable (122) – ce qui le poussa àdévelopper une route alternative d’énergie nord-sud avec l’Arménie etla Russie.

63Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

(117) Iran Times, 8 March 1996, p. 1.(118) Quotiden azerbaïdjanais Azerbaycan, 16 décembre 1998.(119) Samii, W., « Iran Accused of involvement in Azerbaijan Unrest », RFE/RL, Iran Report 1,n° 2, 24 november 1998.(120) Yerasimos, S., «Des histoires de tuyaux et de pétrole », Hérodote, 6/4/1996, n° 81, p. 118.(121) Jego, M., «L’Iran est écarté de l’exploitation pétrolière en Azerbaïdjan au profit de lasociété turque TPAO et de la firme américaine Exxon », Le Monde, 14 avril 1995.(122) Peimani, H., The Caspian pipeline dilemma: political games and economic losses, op.cit.,p. 59.

Page 61: La sécurité énergétique en Méditerranée

Après les événements de 11 Septembre, l’Iran continua à rester dansl’« axe du mal », et Donald Rumsfeld déclarait à propos de l’Iran, de l’Iraket de la Corée du Nord : « Chacun de ces trois pays sont activementengagés dans le programme d’armes de destruction massive. Et noussavons que ces pays ont des relations avec le réseau terroriste (123). »

Actuellement, la question du statut juridique international de la merCaspienne est l’un des problèmes majeurs à régler entre l’Azerbaïdjanet l’Iran. Si l’Azerbaïdjan est pour la division de la Mer en secteursnationaux suivant la ligne médiane, l’Iran à son tour insiste sur la validitédes traités de 1921 et de 1940, propose comme solution soit l’usagecommun, soit la division égale (20 % pour chaque Etat riverain) et refusede reconnaître la légitimité des accords pétroliers signé entre l’Azerbaïdjanet les compagnies pétrolières étrangères et aussi des accords bilatéraux.Le 23 juillet 2001, pour la première fois en mer Caspienne, uneconfrontation à caractère militaire se déroula à 150 km au sud de Bakou,dans la concession d’Alov-Araz-Sharg, détenue par BP (124). Un navirede guerre iranien contraignit deux bâtiments effectuant des travaux deprospection pour le compte de la société britannique, elle-mêmemandatée par le gouvernement azerbaïdjanais, à interrompre leursactivités et à quitter les lieux. L’intervention iranienne avait été précédéed’une mise en garde par Téhéran et du survol du bateau de BP par unavion militaire de l’Iran (125). Bakou, à son tour, dénonça vigoureusementune violation de son espace aérien et de ses eaux territoriales et cherchaun soutien auprès de la Turquie et des Etats-Unis.

Ces arguments nous montrent très bien la configuration des puissancesautour de la richesse de la mer Caspienne. A côté des petits Etats telsque l’Azerbaïdjan, le Turkménistan et le Kazakhstan, les grandespuissances internationales et régionales telles que les Etats-Unis, l’Unioneuropéenne, la Russie, la Turquie et l’Iran jouent leurs atouts. Cette région,qui était l’« ancienne zone d’influence » de la Russie et de l’Iran setransforme en une « nouvelle zone d’influence » des Etats-Unis, d’Israëlet de la Turquie. Parallèlement, cette configuration conduit aussi à un

64 La sécurité énergétique en Méditerranée

(123) Knowlton, B., « U.S. Stepping up criticism of Iran ; Aide sees “Axix’ as ‘Clear Threat”»,International Herald Tribune, 3 February 2002.(124) Djalili, M. R.; Kellner, Th., Géopolitique de la nouvelle Asie Centrale, de la fin de l’URSSà l’après 11 Septembre, 3e édition, PUF, 2003, p. 191.(125) Idem, p. 192.

Page 62: La sécurité énergétique en Méditerranée

regroupement et une bipolarisation : pendant que « l’ancienne zoned’influence » jette le fondement d’une « nouvelle alliance » entre la Russieet l’Iran (qui étaient toujours mutuellement hostiles) contre la présencedes «étrangers » dans leurs sphères, la « nouvelle zone d’influence » estgérée par « l’ancienne alliance » telle que les Etats-Unis, Israël et laTurquie.

De même que le problème du partage des richesses, leuracheminement vers le marché mondial pose aussi un problème délicat,car l’Azerbaïdjan et les autres nouveaux Etats riverains de la merCaspienne sont géographiquement enclavés. Ici, théoriquement, plusieursitinéraires étaient envisageables : vers le nord, vers l’est, vers le sud etvers l’ouest. Tandis que pour les hydrocarbures de l’Asie centrale la routede l’est restait toujours valable, pour le pétrole et le gaz naturelazerbaïdjanais, elle était exclue. La route la plus courte et la pluséconomique était l’Iran, pourtant les Etats-Unis avaient déjà mis leur« veto » et cette route aussi était exclue. Alors la deuxième routeéconomiquement avantageuse était l’Arménie et la Turquie. L’Azerbaïdjanétant en guerre contre cet Etat, la réalisation de ce projet restaitproblématique : « il fallait d’abord rétablir la paix et discuter après ». Letroisième projet, c’était la Géorgie et la Russie débouchant sur Soupsaet Novorossisk. Pourtant, après, il faudrait traverser le Bosphore par lesbateaux, ce qui augmentait le risque d’accidents. De surcroît, en Géorgieet au Sud de la Russie les conflits existaient toujours, ce qui mettait enquestion la sécurité de l’oléoduc. La quatrième possibilité c’était laGéorgie et la Turquie, débouchant à Ceyhan. Ici encore les conflits : enGéorgie et au sud-est de la Turquie.

Pourtant, les deux oléoducs, à savoir Bakou-Novorossisk (depuisnovembre 1997) et Bakou-Soupsa (depuis janvier 1999) avaient déjàcommencé à transporter les pétroles primaires. Quant à Bakou-Tbilissi-Ceyhan (connu sous le sigle BTC), la déclaration d’Ankara du 29 octobre1998 et celle d’Istanbul de 18 novembre 1999 et la décision du présidentazerbaïdjanais du 22 mai 2000 reconnaissent officiellement cettedirection comme « route d’exportation principale »; et actuellement leprojet est pratiquement réussi, la construction terminée et le pétrole encours d’acheminement. Même si cet oléoduc n’est pas économiquementle plus avantageux, politiquement et stratégiquement son importance pourl’Azerbaïdjan et pour l’Occident est indiscutable.

65Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Page 63: La sécurité énergétique en Méditerranée

66 La sécurité énergétique en Méditerranée

Ainsi, avec le soutien des Etats-Unis et d’Israël, ce projet évolue, àl’heure actuelle, de manière positive. Les tankers remplis du pétroleazerbaïdjanais quittent le port turc de Ceyhan ; et l’Azerbaïdjan commencealors à engranger ses revenus pétroliers. Mais les territoires del’Azerbaïdjan se trouvent toujours sous occupation, tandis qu’il y a déjàplus de 14 ans que le premier contrat pétrolier a été signé. La stratégiepétrolière azerbaïdjanaise arrivera-t-elle à son but ultime qui consiste àrétablir véritablement la paix, la stabilité et la confiance dans la régiondu Caucase et de la Caspienne ? Si oui, quand, si non, pourquoi ? C’estle futur qui nous le montrera...

Page 64: La sécurité énergétique en Méditerranée

Introduction

La problématique énergétique mondiale s’articule autour de deux défismajeurs qu’il faut relever pour assurer le développement durable : sécuriserdes approvisionnements énergétiques permanents, fiables, à des prixraisonnables et transformer le système énergétique pour le rendre sobreen carbone, efficient et respectueux de l’environnement.

L’évolution des marchés et des prix énergétiques pendant les dixdernières années montre que nos modes actuels de production et deconsommation ne sont pas soutenables à long terme, notamment pourles énergies fossiles qui resteront dominantes dans le bouquet énergétiquemondial. La bonne gouvernance constitue l’outil principal pour assurerune croissance responsable qui allie développement économique,protection de l’environnement et réduction des inégalités.

Le risque n’est pas de manquer de ressources énergétiques, mais plutôtde ne pas investir à temps dans les infrastructures nécessaires pourdévelopper les capacités de production et assurer la disponibilité etl’accessibilité à tous de l’énergie à des prix abordables pour les consom-mateurs et équitables pour les producteurs.

Pour éviter des dommages catastrophiques irréversibles sur le climat,il est primordial de développer les énergies renouvelables, l’efficacitéénergétique et les technologies de décarbonisation des sources d’énergiefossiles pour réduire les émissions de CO2 et d’autres gaz à effet de serreafin d’infléchir les tendances actuelles de détérioration rapide del’environnement.

La problématique énergétique mondiale

Mounir DEBBARH*

(*) Mounir DEBBAR, Conseiller de la Ministre de l’Energie, des Mines, de l’Eau et del’Environnement.

Page 65: La sécurité énergétique en Méditerranée

68 La sécurité énergétique en Méditerranée

I. Les fondamentaux de la scène énergétique mondiale

• La demande en énergie primaire va continuer à augmenter,conséquence de la croissance démographique et économique. Elle passede 10 000 Mtep en 2000 à 17 000 Mtep en 2030, tirée par les besoinscroissants des pays en développement, soit 70 % d’augmentation en 40ans. Les pays non OCDE seront responsables de 87 %de cet accroissement,la Chine, l’Inde et le Moyen-Orient en représentant plus de 60 %.

La part des énergies fossiles, bien qu’en baisse, restera dominantedans la consommation d’énergie avec 81 % en 2030 contre 86 % en 2000.Pendant la période considérée, le pétrole continuera à occuper lapremière place malgré la réduction de sa part de 37 % à 30 %. Alors quele charbon renforcera sa position de 26 % à 29 %, le gaz stagnera en passantde 23 % à 22 %

Année 2000 : 10 GtepPart énergie fossile : 86%

Gaz23 %

Energiesrenouvelables

6 %

Nucléaire8 %

Pétrole37 %

Charbon26 %

Page 66: La sécurité énergétique en Méditerranée

69

• Les réserves prouvées en énergies conventionnelles sont suffisantesau rythme de production actuel pour répondre à la demande au-delàde 2030. La durée de leur exploitation avec les techniques et lesconditions économiques actuelles est estimée à 40, 60 et 100 ansrespectivement pour le pétrole, le gaz naturel et le charbon.

• Si l’on ajoute tout le potentiel en pétrole, en gaz naturel et en charbonqui reste à découvrir et l’exploitation par des technologies plus avancées,l’épuisement de ces ressources n’interviendrait pas avant 190, 150 et100 ans respectivement.

• Ces ressources sont inégalement réparties et se trouvent concentréesdans un nombre limité de pays dans des régions géostratégiquessensibles, notamment pour le pétrole et le gaz naturel.

Les réserves de pétrole sont localisées à plus de 67 % au Moyen-Orient(61 %) et en Russie (6,4 %), cette proportion monte à 86 % en réunissantcelles des pays de l’OPEP (75,5 %) et de l’ex-URSS (10,4 %) (fin 2007).

• Les gisements de gaz naturel sont localisés à 55 % dans trois pays :la Russie (25,5 %), l’Iran (15,7 %) et le Qatar (14,4 %) et en leur ajoutantles autres pays du Moyen-Orient et l’Afrique, on arrive à près de 74 %.

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Année 2030: 17 GtepPart énergie fossile : 81%

Charbon29 %

Gaz22 %

Energiesrenouvelables

14 %

Nucléaire5 %

Pétrole30 %

Page 67: La sécurité énergétique en Méditerranée

70 La sécurité énergétique en Méditerranée

• Le charbon est mieux réparti, mais néanmoins huit pays, les USA(28,6 %), la Russie (18,5 %), la Chine (13,5 %), l’Australie (9 %) etl’Afrique du Sud (5,7 %) regroupent 82 % de ses réserves.

• La dissymétrie entre centres de production et de consommation depétrole et de gaz est un facteur déterminant pour l’équilibre des marchésénergétiques. Les pays producteurs, la plupart en développement, quiconcentrent souvent les plus grandes réserves d’hydrocarburesconventionnels n’en sont pas les plus gros consommateurs. Par contre,la majorité des pays industrialisés et les pays émergents – Chine et Indenotamment – produisent beaucoup moins que ce qu’ils consomment enraison de leurs réserves limitées. L’excédent des premiers est exportépour combler les besoins des seconds dont la conjoncture économiqueet financière, parmi d’autres facteurs, influe sur les cours des marchéspétroliers qui constituent les prix de référence pour les autres énergies.

Parts en % de production et de consommationde pétrole en 2007

0,0

5,0

10,0

15,0

20,0

25,0

30,0

35,0

USA +

Canada UE

Russie

M. O

rient

Afrique

Chine

Inde +

Indonésie Reste

du monde

ProductionConsommation

Page 68: La sécurité énergétique en Méditerranée

71

Part en % de production et de consommationde gaz en 2007

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

0,0

5,0

10,0

15,0

20,0

25,0

30,0

USA +

Canada UE

Russie

M. O

rient

Afrique

Chine

Inde +

Indonésie Reste

du monde

ProductionConsommation

Le charbon : Production et consomation équillibrées

World coal consumption grow by 4.5 %, well above the 10-year average. Coal was the world’s fastest-growing tuel for the fifth consecutiveyear. Growth was above average in all regions except the Middle East. Chinese consumption growth acounted for more than two-thirdsof global growth.

1997

2007

NorthAmerica

S & Cent.America

Europe& Eurasia

Middle East& Africa

AsiaPacific

0

100

200

300

400

500

600

700

800

900

1 000

1 100

1 200

1 300

1 400

1 500

1 600

1 700

1 800

1 900

0

100

200

300

400

500

600

700

800

900

1 000

1 100

1 200

1 300

1 400

1 500

1 600

1 700

1 800

1 900

ProductionMillion tonnes oil equivalent

ConsumptionMillion tonnes oil equivalent

NorthAmerica

S & Cent.America

Europe& Eurasia

Middle East& Africa

AsiaPacific

Page 69: La sécurité énergétique en Méditerranée

72 La sécurité énergétique en Méditerranée

• Ces disparités sont exacerbées par la volatilité des cours, notammentdu pétrole, qui, avec un marché spot très développé et des instrumentscommerciaux variés, est propice à la spéculation et à la manipulationboursière, causes de déséquilibres à court terme des marchés.L’année 2008 a été édifiante à cet égard : après la flambée de juillet oùles cours du brut ont frôlé les 150 $/baril, ceux-ci ont chuté brusquementpour coter moins de 50 $/baril à la fin de l’année avec l’approfondissementde la crise financière et le ralentissement de l’activité économiquemondiale.

II. Les défis énergétiques majeurs à l’horizon 2030

• La sécurité de l’approvisionnement constitue la premièrepréoccupation.

• La demande énergétique va croître de 11 730 Mtep à 17 100 Mtepentre 2006 et 2030. Les pays en développement, qui représenteront plusde 85 % de la population mondiale qui comptera près de 8,3 milliardsd’individus en 2030, verront leur part dans la consommation d’énergieprimaire passer de 52 % à 62 % pendant cette période.

Conjoncture du marché pétrolier

Evolution des prix du brut WTI entre novembre 2007 et novembre 2008

Page 70: La sécurité énergétique en Méditerranée

73

• Comme indiqué plus haut, si le monde ne manque pas de ressourcespour satisfaire ces besoins croissants, il faudra assurer la disponibilitérégulière et durable de toutes les formes d’énergie, c’est-à-dire les produireen quantité suffisante et continue au meilleur coût et les livrer par desvoies sûres sur les lieux de consommation à des prix abordables, dansle respect de l’environnement.

• La réalisation de ces objectifs nécessite une coopération renforcéeentre les pays producteurs et consommateurs, la mobilisation descapitaux pour édifier les infrastructures nécessaires et la sécurisation dutransport de l’énergie dont l’acheminement implique souvent la traverséede plusieurs Etats et de voies maritimes pas toujours paisibles.

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

World primary energy demand by region in the referenceScenario (Mtoe)

Page 71: La sécurité énergétique en Méditerranée

• Les évènements récents, comme le conflit russo-géorgien, ledésaccord sur le gaz entre la Russie et l’Ukraine, les actes de pirateriemaritime au large de la Somalie, l’instabilité endémique du Moyen-Orient,le retour du nationalisme dans nombre de pays à grandes réservesd’hydrocarbures, montrent combien la question de la sécurité d’approvi-sionnement est cruciale pour l’énergie.

• Pour assurer la disponibilité de l’énergie, il est impératif de mobiliserd’ici 2030 des investissements colossaux estimés à 26 000 milliards US$(2007), dont 52 % pour la production de l’électricité.

• Tout retard dans la réalisation de ces projets énergétiques créera unénorme déficit de l’offre par rapport à la demande qui entraînera un telrenchérissement des produits énergétiques que peu de pays importateurs,surtout dans les régions en développement, pourront supporter. Pourmaintenir la paix sociale et soutenir leur économie, ils devrontsubventionner les prix de l’énergie au détriment des investissements dansles projets de développement.

• Le recul actuel des prix énergétiques, très corrélés à ceux du pétrole,est lié à la crise financière et à la récession économique. Le retardementdans la construction de nouvelles capacités de production et dans leremplacement de celles existantes va pousser les prix à la hausse dès lareprise économique qui est attendue dans les deux prochaines années.

• Dans tous les cas, nous entrons dans une ère d’énergie chère en raisonde l’augmentation constante des coûts unitaires d’investissement dansles projets énergétiques, notamment pétroliers. Les dépenses deconsommation en produits pétroliers ont représenté 1 % et 4 % du PIBmondial respectivement en 1998 et 2007 et atteindront en moyenne 6 %à 7 % dans les pays en développement d’ici 2030, constituant un réelprélèvement sur leur richesse créée. Leur croissance économique seraainsi hypothéquée si des progrès de productivité jumelés à une baissede l’intensité énergétique ne compensent pas le surcoût de l’énergie utiliséepour produire une unité de PIB.

• La préservation de l’environnement et la lutte contre les changementsclimatiques est une priorité mondiale.

• Dans le scénario de référence de l’AIE, si de nouvelles mesures nesont pas prises, les émissions de CO2 dues à l’augmentation des énergiesfossiles passeront de 28 Gt en 2006 à 41 Gt en 2030, soit une

74 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 72: La sécurité énergétique en Méditerranée

75

augmentation de 45 % sur la période considérée, dont 97 % imputablesaux pays en développement, la Chine, l’Inde et le Moyen-Orient étantresponsables des 3/4 de cet accroissement.

• En intégrant tous les gaz à effet de serre émis, la concentration deGES s’élèvera de 44 Gt à 60 Gt CO2-équivalent entre 2005 et 2030, lapart de CO2 lié à l’énergie passant de 61 % à 68 %.

• La production électrique et les transports où prédomine l’utilisationdes énergies fossiles contribueront à 70 % dans cette croissance.

• La part des villes dans les émissions de CO2 dues à l’énergie vapasser de 71 % (19,8 Gt sur 28 Gt) en 2006 à plus de 75 % (30,8 Gt sur41 Gt) en 2030 en raison de l’urbanisation rapide, notamment du tiers-

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Energy-related CO2 emissions by region in the referenceScenario (Gigatonnes)

Page 73: La sécurité énergétique en Méditerranée

76 La sécurité énergétique en Méditerranée

monde. Les zones urbaines, concentrant la majorité des activitésindustrielles et de transport, utilisent plus intensément les énergies fossilesque le milieu rural qui sans doute réduira sa consommation en biomassepour utiliser des énergies plus modernes comme le butane et l’électricité.

• La poursuite de l’utilisation des énergies fossiles au rythme actuelet sans amélioration de leur qualité pour les rendre propres va augmenterla concentration de CO2 dans l’atmosphère de 380 ppm (parts par million)en 2005 à 700 ppm au prochain siècle ou 1000 ppm en tenant compte del’ensemble des GES, aboutissant à une élévation de la température duglobe de 6° C. Cette situation aura des conséquences incalculables surle changement climatique et des effets néfastes pour la planète, commela montée des eaux des mers submergeant une partie des continents, lesinondations entraînées par des pluies diluviennes, de longues périodesde sécheresse, la détérioration de la santé des hommes, les déséquilibresdes écosystèmes, la rareté ou la pollution des eaux potables, ladésertification galopante dans plusieurs régions, le manque de produitsalimentaires causés par tous ces phénomènes aboutissant à des famineset des troubles sociaux graves.

Energy-related CO2 emissions in cities by region in thereference Scenario

35

30

25

20

15

10

5

02006 2020 2030

70 %

72 %

74 %

76 %

80 %

78 %

Non-OECD citiesOECD citiesShare of citiesin world (right axis)

Page 74: La sécurité énergétique en Méditerranée

77

• Cette perspective qui menace notre existence n’est pas viable. Pouréviter sa réalisation, elle appelle un changement radical dans le systèmeénergétique par la mise en œuvre de mesures réglementaires, ledéploiement de nouvelles technologies et une profonde modification dansnos comportements.

• L’AIE, en préparation de la réunion de Copenhague prévue à la finde 2009 pour établir un accord post-2012 sur le changement climatique,a développé deux scénarios pour contenir les émissions de GES à 550ppm dans le premier et 450 ppm dans le second.

• Un objectif ambitieux implique des mesures politiques rigoureusesainsi que des investissements très élevés pour l’atteindre. Dans les deuxcas, il est préconisé une efficacité énergétique généralisée, le recoursmassif aux énergies renouvelables, un retour plus marqué du nucléaire,la séquestration et le stockage du CO2 pour utiliser du charbon et deshydrocarbures propres. Le succès d’un tel programme permettra à la foisde satisfaire les besoins énergétiques et de stabiliser l’augmentation dela température à 3°C ou 2°C selon le cas.

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Potential effects of stabilisation of atmospheric concentrationsof greenhouse gases at different levels

700

600

500

400

300

280

0 °C 1 °C 2 °C 3 °C 4 °C 5 °C

pre-industrial levels

450

500

550

600

Page 75: La sécurité énergétique en Méditerranée

78 La sécurité énergétique en Méditerranée

• En mettant en œuvre ces politiques alternatives (PAS), plus de 2 Gtepd’énergie primaire seront économisées par rapport au scénario deréférence (SR), en ramenant la consommation de 17 721 Mtep à15 823 Mtep en 2030.

• Ce résultat sera atteint par la baisse de la part des énergies fossilesde 82 % dans le SR à 76 % dans le PAS, notamment celle du charbonpassant de 28,2 % à 23,4 %. Le nucléaire et les énergies renouvelablesoccuperont une meilleure place avec 23,7 % dans le PAS au lieu de 18 %dans le SR.

2005 2005 2005 2005 2005 2005

20

25

30

35

40

45

Reference Scenario 550 Policy Scenario 450 Policy Scenario

CCS

Nuclear

Renewables & biofuels

Energy efficiency

Gig

ato

nn

es

Oil*31.5 %

Coal/peat28.2 %

Other**10.8 %

Hydro2.4 %

Nuclear4.8 %

Gas22.3 %

Oil*31.1 %

Coal/peat23.4 %

Other**14.0 %

Hydro2.9 %

Nuclear6.8 %

Gas21.8 %

17 721 MToe 15 783 MToe

Réduction des émissions de CO2 en liaison avec les énergiesdans les scénarios de politiques climatiques

Fuel shares of TPES in 2030 for the Referencescenarion and Alternative Policy Scenario

Page 76: La sécurité énergétique en Méditerranée

• Il faut reconnaître qu’aux coûts et au rythme de progression actuelsdes technologies et dispositifs à mettre en place, peu de pays endéveloppement auront la capacité financière pour les acquérir, alors qu’ilsseront responsables de 97 % de l’accroissement des émissions de GESavec près de 60 % de la consommation d’énergie primaire. Laconcrétisation des politiques proposées dans les deux scénarios impliqueune coopération internationale étroite, un réel transfert de technologiespropres des pays du Nord vers ceux du Sud, des modalités de financementinnovantes et des coûts unitaires d’investissement réalistes.

III. Efficacité énergétique et énergies renouvelables,la nouvelle révolution énergétique

• Pour empêcher l’occurrence d’une catastrophe écologique, il esturgent de changer de trajectoire en adoptant une croissance responsablequi, tout en permettant la sécurité d’approvisionnement énergétique, assurele développement durable et l’augmentation du bien-être de l’ensemblede la population mondiale. C’est d’une véritable révolution dont nousavons besoin pour réaliser cet objectif.

• L’efficacité énergétique, le premier pilier de cette transformation,doit devenir une priorité majeure pour tous.

• En exploitant tout le potentiel d’efficacité énergétique dans tous lessecteurs économiques et sociaux, il est possible d’économiser 20 à 50 %de notre consommation énergétique. Il faudra à cet effet combiner :

• les technologies peu énergétivores comme les moteurs et les appareilsà haut rendement, la cogénération vapeur-électricité dans l’industrie, leslampes à basse consommation pour l’éclairage, la réduction des pertesdans les réseaux électriques, l’orientation des bâtiments et l’utilisationde matériaux de construction isolants…

• à des gestes quotidiens simples comme éteindre les lumières et leséquipements après usage, emprunter les transports publics au lieu de lavoiture individuelle à n’utiliser que sur les longues distances enpratiquant une conduite économe, améliorer les plans de déplacementurbain, régler les feux de signalisation pour fluidifier la circulationautomobile…

79Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Page 77: La sécurité énergétique en Méditerranée

• Les gouvernements doivent s’engager résolument dans cette voieen promouvant des mesures législatives plus contraignantes, desincitations fiscales, des campagnes de sensibilisation auprès des usagers.Il coûte beaucoup moins cher d’économiser de l’énergie que d’en produire.

• Les énergies renouvelables restent la solution à long terme la plusappropriée pour réduire la consommation des énergies fossiles polluanteset épuisables.

• Bien qu’elles progressent très rapidement au taux 7,5 % par an, lesénergies renouvelables ne contribueront que modestement au bouqueténergétique mondial, avec quelque 15 % de la consommation énergétiqueprimaire en 2030. Ceci s’explique par le fait que bien que la source denombre de ces énergies soit gratuite, comme le vent, le soleil, lagéothermie, les marées, les coûts d’investissement en installations pourles exploiter sont aujourd’hui élevés, et le kWh produit à partir de cesénergies est plus cher que celui généré par les centrales à combustiblesfossiles ou électronucléaires.

• Seuls les pays industrialisés se sont engagés massivement et à desdegrés variables dans les énergies renouvelables en imposant à leursindustries énergétiques des proportions déterminées de productionénergétique à partir des sources renouvelables, moyennant desencouragements à l’investissement et des tarifs subventionnés.

L’Allemagne est exemplaire à cet égard en Europe, avec 16 000 GWéoliens installés, 800 MW photovoltaïques, 4 300 MW thermiques contrerespectivement pour la France 400 MW, 26 MW et 550 MW. Cependant,le charbon étant la base de sa production électrique, elle demeure la pluspolluante avec 10,46 tonnes de CO2 émis par habitant contre une moyenneeuropéenne de 8.

• Mis à part leur coût, les énergies renouvelables sont confrontées àdes handicaps sérieux qu’il est nécessaire de surmonter pour assurer leurdéveloppement. En effet, l’éolien et le solaire, par exemple, sontactuellement limités techniquement par la faiblesse de leur densitéénergétique et l’intermittence de leur production, et les biocarburants parleur utilisation de denrées alimentaires pour les produire. Leur avenirdépend de la levée de tels obstacles qui implique des percéestechnologiques importantes et de l’innovation pour augmenter leurefficacité et réduire leur coût :

80 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 78: La sécurité énergétique en Méditerranée

81

1. Réduire leur densité énergétique, c’est-à-dire la surface couvertepar les installations pour produire la même quantité d’énergie que parles moyens classiques. Par exemple, pour produire les 3,65 GW demandéspar Paris, le nucléaire occupera 0,2 km2, les panneaux solaires couvriront91 km2, une retenue d’eau pour l’hydroélectricité 365 km2, un champd’éoliennes 454 km2 et une surface pour cultiver la biomasse 3 000 km2.La solution passe, par exemple pour le solaire comme énergie la plusabondante et la plus durable, par la “miniaturisation” des installations,

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

2006

2015

2030

2006

2015

2030

2006

2015

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2006

2015

2030

2006

2015

2030

2006

2015

2030

2006

2015

2030

Hydro Geothermal Wind onshore Wind offshore Biomass Concentratingsolar

Solar PV

0

100

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300

400

500

600

700

Do

llars

(yea

r-20

07) p

er M

Wh

Projected generating costs of renewable energytechnologies in the reference Scenario

2015 2030 2015 2030 2015 2030 2015 20300

40

80

Do

llars

(yea

r-20

07) p

er M

Wh

120

160

200

United States European Union China India

Coal

Gas

Nuclear

Wind

Electricity generating costs in selected regions

Page 79: La sécurité énergétique en Méditerranée

à l’instar de ce qui s’est produit dans l’informatique, et la neutralisationde la baisse d’intensité des rayons du soleil la nuit ou par des nuages.On peut imaginer, à cet effet, le placement de satellites sur des orbitesprès du soleil envoyant directement sa chaleur par des canaux laser versles centrales électriques à concentration solaire (CSP).

2. Rendre régulière la production des énergies renouvelablesnotamment pour l’électricité. Les réseaux électriques, tels qu’ils sontconçus aujourd’hui, ne peuvent supporter plus de 30 % à 40 % de puissanceintermittente installée. Ne sachant pas encore stocker d’importantesquantités d’électricité, il suffit d’un caprice météorologique pour arrêterdes milliers d’éoliennes ou les faire produire en même temps pourdéstabiliser tout un réseau électrique voire entraîner son effondrement.La panne géante du réseau électrique européen du 6 novembre 2006s’explique en partie par l’instabilité créée par la multiplication deséoliennes en Allemagne.

• Pour un apport régulier des sources renouvelables au réseau et sansà-coup intempestif, il est nécessaire de résoudre le problème du stockagede l’électricité produite à partir de ces énergies. Dans l’hydroélectricité,les stations de transfert énergétique par pompage (STEP) permettent deréguler le turbinage en remontant pendant les heures creuses l’eau libéréepar le barrage principal quand il est en production vers un bassinsecondaire qui viendra renforcer la puissance à produire aux heures depointe. Les dispositifs de stockage d’électricité d’origine éolienne etsolaire ne sont pas encore au point. Il faudra concevoir des batteries trèsdenses et légères pouvant stocker de grandes quantités d’énergie. Pourle moment, le photovoltaïque pour l’électricité, le solaire et le petit éolienpour pomper l’eau potable restent une solution idéale pour fournirl’électricité décentralisée et l’eau aux deux milliards d’habitants les pluspauvres de la planète qui n’y ont pas accès.

3. Pour les biocarburants, sensés se substituer au pétrole dans lestransports, ils sont aujourd’hui produits à partir de matières agricoles,mettant en danger la sécurité alimentaire des populations. Les émeutesde la faim qui ont éclaté dernièrement ont sonné l’alarme pour que lanourriture ne passe pas avant les carburants. Leur développementdépendra des résultats des recherches effectuées sur des plantes et desalgues qui ne rentrent pas en concurrence avec l’alimentation humaine,n’occupent pas des terres fertiles et consomment peu d’eau.

82 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 80: La sécurité énergétique en Méditerranée

83

Conclusion

Les enjeux énergétiques des prochaines décennies sont cruciaux pourle monde entier. Pour assurer le développement durable, il faut en mêmetemps relever les deux défis majeurs que sont la sécurité desapprovisionnements et la préservation de l’environnement. Dans cetobjectif, il est impératif de :

– mettre en œuvre les technologies et les options disponibles pourdévelopper toutes les ressources énergétiques ;

– faire de l’exploitation de tout le potentiel d’efficacité énergétiquedisponible une priorité majeure ;

– mobiliser, dans les trente prochaines années, les 26 000 milliardsde dollars US nécessaires aux investissements en infrastructuresénergétiques, dont 50 % dans l’électricité ;

– promouvoir une intégration plus profonde des marchés régionauxet internationaux et accélérer le transfert réel des technologies les mieuxadaptées des pays industrialisés vers les pays en développement.

– préserver l’environnement par l’utilisation d’énergies propres et lerecours aux technologies économes en énergie et sobres en carbone.

La crise globale actuelle révèle les déséquilibres qui existent entreles différents systèmes financier, économique, social et énergétique quiont prévalu jusqu’à maintenant et montre qu’ils sont arrivés à leur limite.Elle constitue un point de basculement du modèle de gaspillage desressources vers une ère de leur meilleure gestion par une nouvellegouvernance, dans l’intérêt des générations actuelles et futures.

Les questions énergétiques : un enjeu géostratégique

Page 81: La sécurité énergétique en Méditerranée

Axe II

Le développement durableet la problématique des énergies

renouvelables

Page 82: La sécurité énergétique en Méditerranée

S’il est difficile d’échapper à la double relation « de l’énergie pourl’eau » et « de l’eau pour l’énergie » pour structurer un article explorantcette dialectique, ces liens seront développés sous l’angle de la contrainteà la décision politique. En effet, l’eau, l’énergie et l’agricultureconstituent trois domaines où la marge du choix pour le décideur politiquese restreint. L’état de la ressource en eau notamment, quantitativementet qualitativement, surdétermine de manière croissante des décisionsd’ordre stratégique à l’échelle interne et régionale (comme en témoignepar exemple la prise en compte des enjeux en termes de sécurité : sécuritésalimentaire, énergétique et eau).

1. De l’énergie pour l’eau douce

1.1. La mobilisation de l’eau : une consommation énergétiquecroissante

Si les demandes eau devraient augmenter d’un tiers entre 2000 et 2025dans les pays du sud et de l’est de la Méditerranée, celles en électricitédevraient tripler dans le même laps de temps. La seule demande enélectricité pour la mobilisation et la production d’eau douce en 2025pourrait représenter la moitié de la consommation en électricité en 2000.

(126) Le Plan bleu, dont l’aire de travail est la Méditerranée, a exploré de manière exhaustiveles enjeux liés à l’eau, à l’énergie et au changement climatique dans cette zone. Sur ces troisthèmes, ses publications se révèlent précieuses :http ://www.planbleu.org/publications/eau.html ;http ://www.planbleu.org/publications/energie.html ;http ://www.planbleu.org/publications/changementsClimatiques.html (*) Chargé de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique, www.frstrategie.org

Eau et énergie en Méditerranée (126)

Alexandre Taithe*

Page 83: La sécurité énergétique en Méditerranée

88 La sécurité énergétique en Méditerranée

Un cercle vicieux se crée en prenant en compte le « hot spot » duréchauffement climatique qu’est la Méditerranée. Les précipitations etdébits de surface diminuent, tandis que la température atmosphériqueaugmente sur tout le pourtour méditerranéen (127). Le changementclimatique s’accélère ainsi que croissent les demandes en eau et les coûtsde sa mobilisation (eau souterraine, transfert, eau plus polluée, recoursà des ressources non conventionnelles), tout en diminuant la ressourcedisponible pour la production d’hydroélectricité (cf. 2.). A cela s’ajoutel’accroissement démographique dans le sud et l’est de la Méditerranée(Egypte en premier lieu).

Or, l’eau pèse déjà dans les consommations en énergie primaire et enélectricité, comme en témoigne le tableau ci-dessous :

Encadré n° 1

Part de l’eau douce dans la consommationen énergie primaire et en électricité (128)

La mobilisation de l’eau (129) est ainsi estimée à 0,4 kWh/m3 en Franceet à 1,5 kWh/m3 en Israël (qui a recours au dessalement, à la réutilisation,à des transferts longue distance). Le m3 d’eau produit dans les Pays du

(127) Avec un haut degré de convergence des modèles pour le signe de changement (90 %)pour la diminution des débits moyens annuels, cf. IPCC, «Climate change and water », Technicalpaper n° IV, 2008, disponible sur le site internet du GIECC : www.ipcc.ch (128) ROUYER Jean-Loup, MOREL Julien, De l’énergie pour l’eau dans le bassinméditerranéen, Conférence Hydrotop, juin 2007, p. 7.(129) THIVET Gaëlle, «Eau/énergie, Energie/eau et changement climatique en Méditerranée »,chapitre 10, in Plan bleu, Changement climatique et énergie en Méditerranée, juillet 2008,p.10-14, http ://www.planbleu.org/

Energie primaire Electricité

France 1,6 % 3,3 %

Etats-Unis 1,6 % 4,3 %

Arabie saoudite 3,7 % –

Israël 11,5 %

Chine 1,7 % 5,5 %

Inde 8,9 % 30,5

Page 84: La sécurité énergétique en Méditerranée

89

sud et de l’est de la Méditerranée (PSEM) devrait passer de 0,2-0,4 kWhen 2000 à 1 en 2025, contre respectivement 0,4 à 0,7 kWh dans les Paysdu nord de la Méditerranée (PNM) (130).

Encadré n° 2

Les demandes en eau et en électricité en 2000 et 2025 dansles pays du sud et de l’est de la méditerranée (131)

1.2. Energie et prélèvements agricoles

L’Agriculture est de loin le secteur qui prélève et qui consomme leplus d’eau en Méditerranée, à l’exception de la France (où le secteurénergétique prélève beaucoup d’eau mais en consomme peu) et Gaza (oùles prélèvements agricoles, restreints, ont été rejoints par les usagesdomestiques).

Or l’eau nécessaire à l’irrigation a également un coût énergétique nonnégligeable. Les prélèvements, les transferts et l’irrigation elle-mêmenécessitent par exemple en moyenne 1 kWh/m3. Mais cette consommation

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

(130) Plan bleu, «Des stratégies de gestion intégrée des ressources en eau et en énergie pourfaire face au changement climatique », coll. Les Notes du Plan bleu, n° 9, novembre 2008, 4 p.,http ://www.planbleu.org/ (131) Plan bleu, op.cit., Les Notes du Plan bleu, n° 9, novembre 2008, 4 p.

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

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2000 20250

100

200

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1 000

2000 2025

Demande en eau Demande totale en électricité

Demande en électricité pour l’eau

Page 85: La sécurité énergétique en Méditerranée

en énergie augmente si le pompage a lieu dans des eaux souterraines, sil’eau a besoin d’être surélevée pour son transport et si l’irrigation a lieupar canaux pressurisés, trois contraintes que l’on retrouve dans la récenteextension des surfaces irriguées en Egypte via le canal de Touchka.

Car l’énergie est devenue une contrainte pour l’agriculture, qui doitêtre pris en compte au moment de développer des surfaces irriguées. Laperception stratégique de l’approvisionnement en eau potable, en termesde sécurisation quantitative des approvisionnements, conduit plusieurspays de la rive sud à privilégier le recours au dessalement pour les usagesdomestiques, ce qui libère autant de volumes pour l’agriculture. C’estdonc bien à l’évaluation de l’ensemble des arbitrages de la ressourcequ’invite, entre autres, le coût énergétique de l’irrigation. Le coût derevient des denrées ainsi produites en dépend également.

La réutilisation des eaux usées, plutôt destinée à l’agriculture,entraîne de la même manière un surcoût énergétique de l’ordre de 1kWh/m3 (à comparer aux coûts énergétiques du dessalement d’eausaumâtre – 1,5 kWh/m3 – et d’eau de mer – au mieux 4 kWh/m3 pourl’osmose inverse. La réutilisation présente ainsi un bilan énergétique pluscompétitif que les transferts d’eau sur une distance supérieure (132) à60 km (hors dénivelé très favorable).

De plus, la valorisation des boues d’épuration peut permettre jusqu’à60 % du fonctionnement d’une station d’épuration, l’autonomieénergétique de celles-ci étant atteignable à terme.

1.3. Le dessalement de l’eau de mer ou de l’eau saumâtre

La multiplication des capacités de production d’eau dessalée (d’unfacteur 3 entre 1990 et 2000 et d’un facteur 2 entre 2000 et 2008) confirmela croissance supérieure ou égale à 10 % de ce secteur. Les différentsprocédés de dessalement ont d’ores et déjà atteint la maturitétechnologique. Cela implique tout d’abord que les progrès que l’on peutespérer en matière de rendement énergétique ou hydrique (proportion del’eau dessalée et rejetée, la saumure) ne seront plus spectaculaires. Ensuite,la compétitivité des différents procédés est désormais démontrée pour

90 La sécurité énergétique en Méditerranée

(132) THIVET Gaëlle, «Eau/énergie, Energie/eau et changement climatique en Méditerranée »,chapitre 10, in Plan bleu, Changement climatique et énergie en Méditerranée, juillet 2008, p.10-19, http ://www.planbleu.org/

Page 86: La sécurité énergétique en Méditerranée

91

les usages domestiques, industriels, et même agricoles à forte plus-valuehydrique comme la culture de légumes, même si le dessalement demeured’un coût supérieur à celui des traitements de l’eau douce.

Encadré n° 3

Capacité de production installée

Les technologies de dessalement

L’émergence du marché du dessalement date du milieu des années 60.Une technologie, la distillation, supplante alors les autres pour représenter90 % des installations à cette période. La distillation, qui consiste àchauffer l’eau salée pour la transformer en vapeur, exige un investissementénergétique massif. La vapeur est ensuite condensée pour obtenir de l’eaudouce. L’énergie doit donc être abondante et bon marché, ce quiexplique que 50 % de l’eau dessalée dans le monde est encore produitedans les États pétrolifères du Moyen-Orient. A la distillation à détentesétagées (Multi-Stage Flash distillation ou MSF) a succédé le procédéde distillation à multiples effets (Multi-Effect distillation MED), pluséconome, mais à l’origine réservé à des volumes de production plusrestreints.

La technologie de l’osmose inverse (OI), qui constitue 20 % des unitésau début des années 80, s’impose aujourd’hui devant les procédés dedistillation. 50 à 55 % de la capacité installée de désalinisation s’opèrepar osmose inverse. 70 % des contrats signés optent désormais pour cettetechnologie, contre 30 % pour la distillation et l’électrodialyse (ED –part anodine). L’osmose inverse consiste à filtrer de l’eau salée, parl’exercice d’une pression de 40 à 80 bars, à travers des membranes micro-

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

1997 2008 2016 2020

Capacité installée (enmillions de m3/j) 18 51 109

Part de l’Osmose inverse 55 % 70 %

Part de la distillationthermique 45 % 30 %

Page 87: La sécurité énergétique en Méditerranée

92 La sécurité énergétique en Méditerranée

perméables qui retiennent le sel, les micro-algues ou les bactéries maislaissent passer les molécules d’eau. 80 % des usines de dessalement auxÉtats-Unis fonctionnent selon ce principe. Depuis l’apparition d’unenouvelle génération de membranes en 1995, le coût de l’osmose inverseest devenu inférieur à celui de la distillation. Pour l’instant, les plus grossesunités (1 million de m3/j) proviennent de la distillation. Les volumesimportants, en osmose inverse (supérieurs à 200 000 m3/j), sont obtenuspas l’addition d’unités de dessalement.

Encadré n° 4

Technologies de dessalement par capacitésinstallées dans le monde (133)

(133) Sources : Veolia Water Solutions & Technologies.

MED9 %

MSF30 %

ED4 %

OI52 %

Autre5 %

Page 88: La sécurité énergétique en Méditerranée

93

Prix et coûts énergétiques du dessalement

Encadré n° 5

Capacité de dessalement installée en 2008(en millions de m3/jour) (134)

En fonction des degrés de salinité et des procédés appliqués, le prixd’un m3 d’eau dessalée oscille entre 0,4 et 1 dollar par m3 pour l’osmoseinverse, et entre 0,65 et 1,8 dollar pour la distillation. Ces prix,couramment relayés, ne différencient cependant pas le dessalement d’eaude mer (entre 35 et 70 g de sel par litre d’eau), de celui d’eau saumâtre(2 à 10 g/l de sel). L’osmose inverse, extrêmement performante avec deseaux faiblement salées, peut se révéler, si le taux de sel est trop important,soit inadaptée, soit d’un coût similaire à la distillation. Le prix dudessalement d’eau saumâtre en osmose inverse varie ainsi entre 0,2 et0,4 dollar par m3. La désalinisation est devenue un complément deressource en eau plus compétitif que les transferts massifs d’eau.L’Espagne, pourtant friande d’infrastructures hydrauliques, a par exemplerenoncé à des dérivations de l’Ebre pour construire 20 stations dedésalinisation. Le projet de transfert Rhône-Catalogne, quel que soit sondimensionnement, était également plus cher que le dessalement.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

(134) Sources : Degrémont, Aquasat (FAO), Veolia, Glabal Water Intelligence et infographiele Monde (15 mai 2008).

0 1 2 3 4 5 6 7 8

Arabie saoudite

Emirats arabes unis

Etats-Unis

Espagne

Algérie

Japon

Corée du Sud

Qatar

Chine

Koweit

Page 89: La sécurité énergétique en Méditerranée

L’intérêt de la distillation est en effet de pouvoir traiter toutes lesqualités d’eau, là où les membranes utilisées en osmose inverse montrentleurs limites. De plus, et contrairement à l’osmose inverse, la distillationne nécessite pas forcement d’électricité pour fonctionner. Une unité MSFou MED peut ainsi être alimentée en chaleur par cogénération (productioncombinée d’électricité et de chaleur). Le dessalement mixte, par osmoseet distillation, s’adapte parfaitement au fonctionnement d’une centralethermique. Cette technologie hybride peut même faire descendre, danscertaines conditions, le dessalement d’eau marine à un prix inférieur à0,5 dollar/m3.

Les coûts énergétiques sont nettement en faveur de l’osmose inverse.Ainsi, la distillation par MSF nécessite 12 kWh par m3, celle par MED7 kWh/m3, et l’osmose inverse, 4 kWh/m3 (voire un peu moins, surtoutlorsque la pression qui permet le rejet des saumures est récupérée pourproduire de l’électricité).

Des expériences de dessalement grâce à l’énergie nucléaire sont enfinmenées en Chine, au Japon ou en Inde. Mais il semble que l’énergiepotentielle utilisable, sous la forme de chaleur récupérée par les circuitsprimaires et secondaires de refroidissement, soit en dessous du seuil utile(exergie) pour la distillation. L’énergie nucléaire ne sera alors utiliséequ’indirectement sous forme d’électricité. Cela ne devient alors qu’unesolution parmi d’autres formes de production électrique.

Si sur le papier, le choix de l’osmose inverse paraît s’imposer (coûtinférieur, technologie moins énergivore), elle demeure tributaire duprétraitement, crucial pour la pérennité des membranes, et donc de laqualité de l’eau à transformer. En effet, les membranes, fabriquées à basede pétrole, représentent jusqu’à 30 % du prix d’une installation. Leurremplacement s’opère tous les 5 à 10 ans. Mais un prétraitement amélioré(acidification, filtration, floculation, chloration) prolonge l’efficienceopérationnelle des membranes jusqu’à 10 ans.

Les marges de progression (prix final, consommation d’énergie)semblent finalement réduites, surtout pour la distillation, déjà mature.L’osmose inverse peut espérer gagner (20 % à terme) sur le stade duprétraitement et la production/pérennité des membranes. Les différentestechnologies, notamment la MED et l’osmose inverse, gardent ainsi touteleur pertinence à l’horizon stratégique, contrairement à la MSF.

94 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 90: La sécurité énergétique en Méditerranée

95

Le prix final de l’eau dessalée la réserve aux usages domestiques etindustriels. L’agriculture, pour des usages à forte valeur ajoutée, commela culture de légumes, est accessoirement un client potentiel. EnEspagne, 22,4 % de l’eau dessalée sert à la production de légumesprimeurs (135), ce qui pose à nouveau la question de la bonne gestiondes demandes en eau, et non plus seulement de la sécurisation de l’offre.

Energie nucléaire et dessalement

Des expériences de dessalement grâce à l’énergie nucléaire sont enfinmenées en Chine, au Japon ou en Inde. Mais il semble que l’énergiepotentielle utilisable, sous la forme de chaleur récupérée par les circuitsprimaires et secondaires de refroidissement, soit en dessous du seuil utile(exergie) pour la distillation. L’énergie nucléaire ne sera alors utiliséequ’indirectement sous forme d’électricité. Cela ne devient alors qu’unesolution parmi d’autres formes de production électrique.

La Russie entreprend la construction de centrales nucléaires flottantes,dont la première phase de conception remonte à 1991, pouvant êtrecouplées à des unités de dessalement. Destinées initialement àl’approvisionnement électrique de territoires russes éloignés au nord età l’est du pays, ces centrales embarquées ont suscité l’intérêt du Chiliet de la Chine dès 2004, leur ouvrant des perspectives de commer-cialisation internationale. L’achèvement de la première unité aurait lieuen 2010. Six autres seront produites d’ici à 2015 ou 2018. Ellesdévelopperont chacune une puissance de 70 mégawatts. Une barge estéquipée de deux réacteurs KLT40S, que l’on retrouve déjà sur lesbrise-glace nucléaires russes Arktika et Taymyr. Si leur technologie est éprouvéedepuis presque quarante ans, ils n’ont pas été conçus pour fonctionnerà proximité de populations civiles et ont été modifiés. Le coût unitaired’une centrale embarquée oscille autour de 300 millions de dollars, enfonction du cours du rouble (9 milliards de roubles). Si l’implantationd’une centrale sur une barge est moins onéreuse que sur terre,l’exploitation de la centrale sur la mer entraîne un surcoût d’un facteurde 2 à 2,5 par kilowatt produit (136) comparé à une unité terrestre. Laproduction journalière d’eau dessalée s’élèverait à 240 000 m3, ce qui

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

(135) Rencontre hispano-marocaine, Dessalement d’eau. Dossier informatif, 25, 26 et27 septembre 2006, 16 p. et Global Water Intelligence, 2009.(136) http ://www.kommersant.com/p771523/nuclear_energy/

Page 91: La sécurité énergétique en Méditerranée

96 La sécurité énergétique en Méditerranée

Encadré n° 5

Production d’hydroélectricité (en % de la productiontotale d’électricité, WB, 2004)

classe les centrales flottantes dans la moyenne haute des unités deproduction, toutes technologies confondues. Les clients qui ont manifestéleur intérêt seraient une vingtaine, principalement en Asie du Sud-Est(dont la Chine, l’Indonésie et les Philippines).

Si la centrale est conçue, selon le constructeur (association de l’agencenucléaire russe Rosatom et du constructeur naval militaire Sevmash), pourrésister à des attaques d’avions kamikazes, la principale réticence au projetprovient du combustible utilisé par les KLT-40S, de l’Uranium 235 enrichià près de 20 %. Dans le cadre du Traité de non-prolifération, la Russiene pourrait louer (ou vendre) de telles centrales qu’à des pays eux-mêmessignataires du TNP et qui acceptent un plein contrôle de l’Agenceinternationale pour l’énergie atomique (AIEA). De plus, même dans deseaux territoriales étrangères, une centrale flottante devrait rester russeet donc avec un service de sécurité russe (même si ce principe initialdevrait varier au gré des accords commerciaux futurs).

2. De l’eau pour l’énergie

2.1. L’énergie hydraulique dans le bassin méditerranéen

La part de l’énergie hydraulique dans la production énergétiquemondiale est secondaire (19 %), loin derrière les énergies fossiles nonrenouvelables (charbon, pétrole, gaz : 64 %), mais devant l’énergienucléaire (17 %). Pour 66 pays cependant, l’énergie hydraulique produitplus de 50 % de leur énergie électrique, et pour 24 pays, au moins 90 %(99 % en Norvège).

Albanie 98.33 Italie 13.52

Algérie 0.8 Liban 10.99

Bosnie 46.83 Libye 0

Chypre 0 Macédoine 22.24

Croatie 52.72 Maroc 8.36

Page 92: La sécurité énergétique en Méditerranée

97

L’hydroélectricité représente 12 % de la production électrique pourles PNM, et 13 % pour les PSEM. Mais hormis le barrage d’Assouan enEgypte, peu de réservoirs ont une capacité supérieure à 1 km3. Leur usageconsiste ainsi à une régulation intra-annuelle.

Malgré une production en deçà de celle espérée (cf. 2.3), l’énergiehydroélectrique dispose d’une grande marge de développement. Les paysémergents n’utilisent que 15 % de leur potentiel hydroélectrique, et lespays industrialisés 70 % en moyenne. Par des aménagements sur leurs2 500 barrages, les Etats-Unis seraient par exemple en mesure de doublerl’hydroélectricité qu’ils produisent.

L’intérêt des barrages, hormis le problème des rejets de CO2 des lacsde retenue, réside également dans la lutte contre le changementclimatique et les émissions de gaz à effet de serre. En Méditerranée, 13 %des émissions pourrait être économisées si un tiers du potentielhydroélectrique était exploitable économiquement (Plan bleu).

2.2. L’eau, source froide des centrales thermiques et nucléaires

L’eau des océans joue le rôle primordial de régulateur thermiqueplanétaire, grâce à l’une des propriétés de l’eau : sa chaleur spécifiqueélevée (18 calorie-mole par degré). Plus que tout autre élément naturel(avec l’ammoniaque), l’eau nécessite une grande quantité d’énergie pourêtre chauffée ou refroidie (10 fois plus que le fer!). Cette qualité sert parexemple au refroidissement des centrales nucléaires et thermiques (ouaux radiateurs d’un chauffage central…). Pour bien prendre consciencede l’importance de cette propriété pour la production d’énergie, on peutprendre comme illustration la différence entre prélèvement etconsommation d’eau. En Allemagne et en France, les centrales nucléaires

Egypte 12.48 Portugal 22.02

Espagne 11.39 Slovénie 26.81

France 10.52 Syrie 13.24

Grèce 7.94 Tunisie 1.18

Israël 0.06 Turquie 30.58

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 93: La sécurité énergétique en Méditerranée

et thermiques représentent 66 % et 59 % des prélèvements en eau. Enrevanche, elles ne contribuent qu’à environ 3 % à l’eau consommée dansces deux Etats. La différence entre l’eau prélevée et réellementconsommée est en général rejetée dans les fleuves et rivières d’où ellea été puisée.

2.3. Le changement climatique : un défi aux énergéticiens

Or, qu’il s’agisse de l’hydroélectricité ou de l’intérêt de la ressourcepour le refroidissement des centrales thermiques et nucléaires, les usagesde l’eau à des fins énergétiques sont menacés par le changementclimatique. Deux conséquences en découlent directement : l’altérationdu débit des cours d’eau et leur température.

En premier lieu, la diminution du débit annuel des cours d’eau toucheraavec un haut niveau de convergence des modèles (> à 90 %) (137) toutle pourtour méditerranéen dans une proportion d’au moins 25 %, etsupérieure à 40 % pour le Maghreb et l’est du bassin méditerranéen(comparativement entre 1980-1999 et 2090 et 2099). Cela affectedirectement les volumes recueillis par les lacs de retenue, et donc lepotentiel d’hydroélectricité (baisse des apports en eau de surface au Marocde l’ordre de 20 % au cours des trente dernières années).

Dans le même temps, la capacité de stockage est également altérée,notamment par l’envasement (moins 36 % entre 1980 et 2003 au Maroc,et une diminution prévue de 15 % entre 2000 et 2025 en Algérie).

La combinaison de ces éléments a par exemple conduit à uneproduction hydroélectrique au Maroc au mieux deux fois inférieure à cellequi était escomptée (entre 450 et 1 500 Gwh en moyenne par an depuisune vingtaine d’années, contre une capacité production théorique en 2007de 3 200 Gwh). L’Office national de l’électricité marocain a alors dûcompenser ce déficit par le recours à l’électricité d’origine thermiqueou à l’énergie renouvelable.

En second lieu, la hausse de température des cours d’eau en périodeestivale peut conduire à rendre la ressource impropre à sa fonction derefroidissement des centrales thermiques et nucléaires. La France a ainsi

98 La sécurité énergétique en Méditerranée

(137) IPCC, «Climate change and water », Technical paper n° IV, 2008, disponible sur le siteinternet du GIECC : www.ipcc.ch

Page 94: La sécurité énergétique en Méditerranée

99

été confrontée en juillet 2006 à d’importants effacements depuissance (138) de ses centrales nucléaires le long du Rhône, jusqu’à5 000 MW pour une puissance théorique totale de 7 700 MW, entrainantdes risques pour la sécurité et la stabilité du réseau. Des températuressupérieures à 27° C étaient alors mesurées dans les eaux de surface dèsla sortie du lac Léman.

Conclusion

Sans doute faut-il distinguer les deux relations «Energie pour l’eau »et « Eau pour l’énergie » dans la gravité de leurs perspectives.

Dans le premier cas, la pression et donc la concurrence pour lesdemandes en énergie pourraient aider à dépasser les approches tropcentrées sur la gestion de l’offre. Malgré ses progrès et son intérêt réel,le dessalement semble devenir un recours systématique pour la« sécurisation de l’eau potable », au détriment de la gestion de la demandeet notamment des arbitrages entre les différents usages. Les surcoûts liésà l’énergie en matière d’irrigation et des services aux collectivitéspourraient par exemple aider à mettre en perspective de nouveaux projetsd’infrastructures avec des mesures locales d’économie d’eau, et pluslargement aider à prendre conscience d’usages inadaptés à la ressource(et à l’énergie) disponibles.

La seconde relation, « de l’Eau pour l’énergie », s’avère pluspréoccupante à l’avenir. La manière dont la ressource est affectée par lechangement climatique, en quantité et en qualité (température) révèleune vulnérabilité, alors même qu’un contexte marqué par des tensionspour l’énergie et la lutte contre les émissions de GES soulignent aucontraire les qualités de l’énergie hydraulique sur ces deux points.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

(138) THIVET Gaëlle, «Eau/énergie, Energie/eau et changement climatique en Méditerranée »,chapitre 10, in Plan bleu, Changement climatique et énergie en Méditerranée, juillet 2008, p. 10-10, http ://www.planbleu.org

Page 95: La sécurité énergétique en Méditerranée

Les politiques énergétiques sont nées de la volonté des Etats d’adopterdes stratégies pour faire face aux différents chocs pétroliers et à la volatilitédes prix des produits énergétiques et d’intégrer des solutions decompromis pour la conduite d’une politique tenant compte dudéveloppement durable. Cette dimension devrait se traduire par la miseen place d’un cadre juridique solide et par un engagement à moyen etlong terme de toutes les parties prenantes pour la mise en œuvre de cettepolitique.

Les objectifs de la politique énergétique, différents d’un pays à l’autre,visent notamment à la diminution de la dépendance énergétique parl’utilisation (ou préservation) des ressources locales – approvisionnerd’une manière sûre, suffisante et compétitive les produits énergétiques –et à garantir la cohésion sociale et territoriale.

La sécurité énergétique telle que définie par l’Agence internationalede l’énergie (AIE) consiste à « assurer au pays une énergie sûre,compétitive et durable, dans le contexte du changement climatique, dela hausse de la demande mondiale d’énergie et des incertitudes qui pèsentsur l’approvisionnement futur ». Pour ce faire, les pays ont été amenésà explorer l’utilisation de toutes les filières énergétiques en vue decomposer un choix de bouquet électrique qu’impose leur situation socio-économique. Depuis le choc pétrolier, le secteur de l’électricité a subides mutations profondes. Sa privatisation et son ouverture à lacompétitivité n’ont pas abouti à baisser le prix du kWh ni protéger lasanté et préserver l’environnement. L’introduction de l’électronucléaire

(*) Professeur au département des Ressources Naturelles et de l’Environnement à l’IAV, Hassan II,Rabat.

Le rôle du nucléaire dans le mixénergétique : défis et perspectives

qu’en est-il au Maroc ?

Yahia Bouabdellaoui*

Page 96: La sécurité énergétique en Méditerranée

(EN) est un acte politique qui nécessite l’engagement du pays dans unprogramme industriel à long terme. Celui-ci connaît, ces derniers temps,une relance notable après la période d’étiage survenue suite à l’accidentde Tchernobyl en 1986. Toutefois, l’EN semble être plus compétitif grâceaux derniers progrès technologiques, à une plus grande maîtrise de lasûreté, à une large répartition géographique, au faible coût et à la stabilitédu prix de l’uranium. Il présente en sus l’avantage de réduire les gaz àeffet de serre (GES). Il convient de souligner par ailleurs l’égalité despays quant à l’accès à cette technologie : les pays de l’OCDE disposentde la technologie, des moyens financiers et de l’expertise ; les pays endéveloppement peinent à y accéder, ne parviennent pas à attirer lesinvestissements nécessaires et ce, en dépit de leurs besoins vitaux enélectricité et en eau.

Il sera question dans cet article de présenter les défis et lesperspectives de la filière de l’électronucléaire en soulignant les conditionsde son introduction au Maroc.

Le rôle du nucleaire civil dans le mix énergétique

1. Le contexte

Les techniques du nucléaire civil sont largement utilisées dans tousles secteurs socioéconomiques, notamment la santé, l’eau, l’agricultureet l’industrie. En 1957, les Nations Unies ont mis en place l’Agenceinternationale de l’énergie atomique. Celle-ci a la charge de la sûreté dunucléaire civil, le transfert de la technologie et le contrôle de la non-prolifération et du détournement de cette technologie à des fins nonpacifiques.

Les pays de l’OCDE ont chargé l’Agence de l’énergie nucléaire (AEN)de la promotion et du suivi de l’électronucléaire. Il existait jusqu’endécembre 2007, 439 réacteurs, inégalement repartis dans 30 pays etproduisant 14 % de l’électricité et 6 % de l’énergie mondiales.

Les projections réalisées par plusieurs agences dont l’AIEA confirmentl’augmentation de la demande énergétique et montrent la tendancedominante de celle issue des sources fossiles, notamment le charbon,laquelle couvre encore et à plus long terme plus de 60 % des besoinsmondiaux. Ces projections estiment à 8 % la part de l’EN en 2030.

102 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 97: La sécurité énergétique en Méditerranée

Les applications non électriques du nucléaire vont se développer pourle dessalement de l’eau de mer, le chauffage, le transport et lesapplications industrielles.

La plupart des réacteurs actuellement en service sont de la 2e génération1970-1980. Ils ne sont plus commercialisés Ceux de la 3e génération ontété développés pendant les années 90. Ils sont conçus pour être plus sûrset économiquement compétitifs. Ceux de la 4e génération, en cours dedéveloppement, seraient plus sûrs, plus performants et généreraient moinsde déchets.

Parmi les facteurs qui entravent le développement de la filièreélectronucléaire (FEN) il y a :

• la sûreté ;

• les craintes de prolifération ;

• l’encombrement des déchets de haute activité ;

• la perception (et l’acceptation) du public ;

• la nécessité d’un investissement significatif (financier, ressourceshumaines qualifiées ;

• la mise en place d’infrastructures légales et réglementaires adéquateset conformes aux normes fondamentales internationales (NFI).

Néanmoins, La FEN connaît une forte attractivité qui s’explique, entreautres, par une demande croissante, par la volatilité des prix desproduits énergétiques fossiles et par l’incertitude qui pèse sur lespossibilités d’approvisionnement. Les énergies fossiles sont concentréesessentiellement au Proche-Orient et en Russie et tendent à s’épuiser. Cetteattractivité serait également due à la volonté affichée des pays plus oumoins forcés à se conformer aux exigences du développement durable.La relative compétitivité économique, les performances technologiqueset l’amélioration des conditions de sûreté du nucléaire ont conduit lespays depuis 2003 à réévaluer leur stratégie énergétique pour y introduireou renforcer cette source relativement disponible peu chère et stable dansla production de l’électricité.

La composition des bouquets électriques dépend des facteurséconomiques et sociopolitiques de chaque pays. L’efficacité énergétiqueest devenue une source d’économie incontournable. Les différentessources en jeu sont :

103Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 98: La sécurité énergétique en Méditerranée

– les thermiques fossiles : le charbon, le gaz, le fuel et la biomasse ;

– l’électronucléaire ;

– les renouvelables : l’hydro électrique, l’éolien on shore et off shore,le solaire thermique et photovoltaïque, le géothermique et l’énergie desmarées.

En 2006, la contribution moyenne de chaque type de source dans laproduction électrique mondiale a été, selon l’AIEA, 66,5 % pour lethermique fossile, 17,5 % pour l’hydro-électrique ; 14 % pour le nucléaireet 2 % pour les renouvelables.

Nous examinerons ci-après quelques facteurs clés de la FEN,notamment les aspects afférents à la sûreté et à la sécurité, aux problèmesde gestion des déchets, à la compétitivité économique et socio-environnementale.

2. Les défis de l’électronucléaire

2.1. Sûreté et sécurité nucléaire

La sûreté a été mise à rude épreuve lors des deux accidents survenusle siècle dernier. Le premier, de degré 5 sur l’échelle internationale desévénements nucléaires INES qui est graduée de 0 à 7, a eu lieu en 1979à Three Mile Island aux Etats-Unis. Le second, connu sous le nom deTchernobyl, de degré 7, a eu lieu en 1986 en Ukraine. Le manqued’informations et de communication au public a accentué sa défiance àl’égard du nucléaire.

Ces accidents et d’autre moins graves ont contribué au renforcementde l’arsenal juridique international obligeant les Etats à s’y conformeren vue de mieux protéger les travailleurs, le public et l’environnementcontre d’éventuels accidents ; par ailleurs, ils ont conduit l’industrienucléaire à améliorer la sûreté des réacteurs. Il convient de soulignerégalement que les réacteurs actuellement en service cumulent plus de13 000 ans de fonctionnement. Ce qui démontre la maîtrise de latechnologie et l’amélioration des performances de ces réacteurs. Dansce sens, les autorités de réglementation en France et aux USA ontrécemment prolongé de 20 ans supplémentaires les licences de plusieursanciennes centrales nucléaires.

104 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 99: La sécurité énergétique en Méditerranée

Comme le risque zéro n’existe pas, pour minimiser les risques d’unéventuel accident, l’AIEA, en coordination avec les organisationsrégionales et nationales concernées, a mis au point des programmes etprocédures de préparation aux situations d’urgence nucléaire et de gestionde crise.

Les événements du 11 septembre 2001 ont mis au devant de la scènele renforcement des dispositifs de sécurité des installations et des matièresnucléaires et radioactives. Les bombes sales et la menace d’actesmalveillants ont été et sont encore au centre des préoccupations desservices de sécurité.

2.2. Les problèmes de gestion des déchets et le démantèlement descentrales

Les centrales nucléaires dans le monde produisent chaque année200 000 m3 de déchets de faible et moyenne activité et 10 000 m3 dedéchets de haute activité. Ce sont ces derniers types qui doivent êtrecomplètement isolés de l’environnement. Leur enfouissement profond,dit géologique, est proposé comme solution par la communautéscientifique. Les Américains procèdent déjà à l’enfouissement profonddans le site de Yucca Mountain au Nevada. L’idée de disposer d’un seulsite international fait l’objet de débat. La réglementation en vigueur confieaux pouvoirs publics la gestion des déchets nucléaires et la conduite dudémantèlement des installations nucléaires.

2.3. Compétitivité économique et socio-environnementale del’électronucléaire

Le coût de production de l’électricité est parmi les avantagescompétitifs de l’EN.

Plusieurs études ont été réalisées dans ce but. Celle conjointe deAIE/AEN et AIEA en 2005, a fourni des données fiables concernantl’économie de la production de l’électricité générée par les différentestechnologies dans 100 centrales.

L’estimation des coûts prévisionnels a été calculée par « la méthodedu coût moyen actualisé » et en utilisant « les hypothèses génériques pourles principaux paramètres économiques et techniques » pour une « duréede vie économique de 40 ans pour la plupart des centrales, un facteur de

105Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 100: La sécurité énergétique en Méditerranée

charge moyen pour les unités en base de 85 % et des taux d’actualisationde 5 et de 10 % ».

Les résultats obtenus montrent ce qui suit :

– pour un taux d’actualisation de 5 %:

• Le nucléaire : 21-31 $ /MWh (50 % pour l’investissement, 30 % pourO&M et 20 % pour le combustible), le kWe installé est de US$ 1000-2000, durée de construction 5 à 7 ans,

• le charbon : 25-50 US$ /MWh (30 % pour l’investissement, 20 %pour O&M et 45 % combustible, 1 000-1 500 US$ le kWe installé,durée de construction 4 ans,

• le gaz : 37-60 US$ /MWh (15 % investissement, 10 % O&M et 80 %pour le combustible, 400-800 US$ pour le kWe installé, durée deconstruction 2 à 3 ans,

• l’éolien : 1 000-2 000 US$/ kWe, 35-95 US$/ MWh,

• la micro-hyraulique : 40-80 US$/MWh,

• le solaire : 150 US$/MWh,

– pour un taux d’actualisation de 10 %:

• le nucléaire : 30-50 $ /MWh (70 % investissement, 20 % O&M 10 %combustible), le kW installé est de US$ 1000-2000, durée deconstruction 5 à 7 ans,

• le charbon : 35-60 US$ /MWh (50 % investissement 15 % pour O&Met 35 pour le combustible, 1 000-1 500 US$ pour le kWe installé,durée de construction 4 ans,

• le gaz : 40-63 US$ /MWh, 400-800 US$ pour le MW installé, duréede construction 2 à 3 ans,

• l’éolien : 45-140 US$/ MWh,

• la micro-hydro : 65-100 US$/MWh,

• le solaire : 200 US$/MWh (selon la capacité disponible le coût peutapprocher les 300 US$.

Il se dégage de ce qui précède que :

– le nucléaire est sensible aux taux d’intérêt du fait de la durée de laconstruction (5 à 7 ans) et aux taux d’actualisation 5 % ou 10 % qui lemettent au même niveau de compétitivité que le charbon, sachant que

106 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 101: La sécurité énergétique en Méditerranée

le prix du KWh d’origine nucléaire englobe déjà le coût des déchets etdu démantèlement ce qui se traduit dans le jargon du secteur énergétiquepar : externalités internalisées ;

– le prix du combustible est le moins cher et le plus stable : ledoublement du prix du combustible (charbon, gaz, uraniumrespectivement) augmenterait le coût de production de l’électricité de35-40 % pour la filière charbon, de 70-80 % pour celle du gaz, de 5-10 %pour l’électronucléaire ;

– en outre, le coût de production de l’électricité issue des sourcesfossiles sus-mentionné augmenterait une fois comptabilisées les pénalitésinhérentes à l’émission du gaz carbonique dans l’atmosphère ;

– par ailleurs, la large répartition géographique de l’uranium est unfacteur qui garantit l’approvisionnement, contrairement au pétrole et augaz dont les gisements et les réserves sont concentrés au Proche-Orientet en Russie ; toutefois, l’inquiétude des opérateurs les conduit aujourd’huià rechercher des contrats de longue durée pour sécuriser leurapprovisionnement, en dépit du fait que le fonctionnement des réacteursnécessite un faible volume d’uranium ; le problème de stockage ne sepose donc pas et ne présente pas d’enjeu pour la spéculation.

3. Gouvernance de l’électronucléaire [3]

Comme il a été signalé plus haut, l’introduction du nucléaire devraitsatisfaire à des conditions politiques et socio-économiques etenvironnementales. Elle nécessite un engagement politique fort de l’Etatpar l’adoption d’une politique énergétique claire et attractive à long terme,par l’implication de toutes les parties prenantes, par l’adhésion du public,par la confiance des investisseurs et les garanties fournies auxorganisations internationales et aux pays voisins.

Le rôle des pouvoirs publics reste déterminant pour la bonne conduitede ce projet dans :

• la mise à niveau du cadre juridique relatif à la réglementation et aucontrôle de la sûreté et sécurité nucléaires, à la radioprotection de la santédes travailleurs, du public et de l’environnement ;

• la démonstration d’une démarche de transparence au niveau de lacommunication et de l’information du public ;

107Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 102: La sécurité énergétique en Méditerranée

• la responsabilité civile nucléaire hors site ;

• la mise en place d’une politique de formation et de formation continueet de R & D, des mesures incitatives pour attirer et maintenir les cadreset le personnel qualifiés ;

• le respect des conventions internationales régissant le nucléaire civil.

Conclusion

La FEN offre aux pays qui en ont les moyens technologiques, lesressources humaines qualifiées et financières suffisantes, l’opportunitéde diversifier et de stabiliser leur approvisionnement en électricité et deréduire les émissions de gaz carbonique. Son introduction exige la miseen place d’infrastructures conformes aux Normes fondamentalesinternationales, nécessite des investissements importants en capital humainet demande une mobilisation à long terme de l’effort national. Sa miseen place se caractérise par les éléments suivants : un délai de constructionimportant donc sensible aux taux d’intérêt, 5 à 7 ans ; un coûtd’investissement très sensible également aux taux d’actualisation 5 %,10 % ou même 15 % sur 30 à 40 ans ; des risques financiers, une fois lesecteur libéralisé, pour les capitaux privés inhérents aux aléas politiques.En revanche, le prix du combustible est moins cher et plus stable. Lesexternalités (les frais de gestion des déchets nucléaires et ceux dudémantèlement de la centrale nucléaire) sont déjà internalisées etinclues dans le prix du kWh facturé.

Quelles opportunités pour le Maroc ?

Le Maroc peut tirer profit des avantages du nucléaire civil pour atténuersa dépendance énergétique extérieure et disposer d’une technologierobuste sûre et non polluante afin de faire face aux prochains défis deson développement socio-économique. Il devrait pour ce faire satisfaireà des conditions préalables pour être éligible à l’introduction del’électronucléaire et présenter une offre attractive et fiable.

Les défis de demain dans un contexte de rareté des ressources naturelleset de déficit hydrique sont notamment : comment assurer un m3 d’eaupotable et un kWh abordables, équitables et durables pour la population ?

108 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 103: La sécurité énergétique en Méditerranée

Introduction

La question énergétique est au cœur des préoccupations dudéveloppement durable comme l’illustre l’exemple méditerranéen oùs’expriment avec acuité les interdépendances entre énergie et ressourcesnaturelles, énergie et changements globaux et notamment changementclimatique, systèmes énergétiques et investissements à long terme, sécuritéénergétique et volatilité des prix.

Face aux enjeux du changement climatique, le développementénergétique de la région doit donc évoluer en s’attachant, d’une part, àpromouvoir un système énergétique moins émetteur du gaz à effet de serreet, d’autre part, à s’adapter à la réalité du changement climatiquenotamment en termes d’augmentation moyenne de la température. LesENR (139) et l’URE (140) sont parties des réponses à apporter, d’autantqu’au-delà des effets directs sur le changement climatique elles devraientégalement contribuer à réduire les impacts sur l’environnement. Cesimpacts, qui pour la plupart sont liés à l’utilisation des énergies fossiles,doivent être limités en contribuant à modérer l’augmentation, actuellementobservée, par exemple, des transports maritimes d’hydrocarbures enMéditerranée (transports qui représentent aujourd’hui le quart du traficmondial) et en contenant l’extension des infrastructures qui leurs sont liées.

Dans ce contexte, la recherche d’une réduction des coûtsd’approvisionnement, de la teneur en carbone et en polluants due à la

(*) Directeur de projets, Paris, France, Docteur de l’Institut national polytechnique, Nancy-France, Membre du G.E.R.M, Maroc, Membre de l’International Association of Hydrogeologists,UK.(139) Energies renouvelables.(140) Utilisation rationnelle de l’énergie.

L’efficacité énergétique : quellecontribution au développement durable ?

Ahmed MORCHID*

Page 104: La sécurité énergétique en Méditerranée

croissance économique, via une efficacité énergétique accrue et un recourséquilibré aux ENR, apparaît comme un enjeu majeur de développementdurable pour tous les pays de la région et tout particulièrement ceux dela rive sud. Ces nouvelles orientations énergétiques soulèvent cependantdes interrogations sur le rôle respectif que devront jouer les Etats, lescollectivités locales, le secteur privé et le citoyen pour développer à grandepour l’échelle des actions efficacité énergétique et pour des énergiesrenouvelables dans des marchés énergétiques de plus en plus dérégulés,ouverts à la concurrence mais toujours différenciés entre les rives nordet sud de la Méditerranée.

Le passage à un système énergétique plus sûr, sobre en énergie et enémissions de gaz à effets de serre et de polluants devrait avoir des effetsd’entraînement positifs sur l’ensemble de l’économie, notamment enpermettant une meilleure compétitivité, en développant de nouvellesfilières industrielles, en créant des marchés d’exportation et des emploisdans des secteurs d’avenir… Sur le long terme, la recherche etdéveloppement dans les nouvelles technologies d’énergie renouvelableet d’efficacité énergétique devrait représenter un secteur porteur.

Une stratégie d’efficacité énergétique consiste à élaborer des politiqueset à mettre en œuvre des mesures et des moyens permettant de modifierles conditions de la consommation d’énergie dans toutes les activitéséconomiques et sociales par l’amélioration de l’efficacité des méthodes etdes équipements de consommation. L’objectif est d’obtenir une meilleureréponse aux besoins du développement avec une consommation de produitsénergétiques bien inférieure à celle résultant des pratiques actuelles.

Le succès de l’efficacité énergétique sera déterminé par le niveau decapacité d’intervention de nouveaux acteurs, issus de l’ensemble de lasociété. Beaucoup reste à faire, mais certains pays, certaines villes,certaines communautés rurales ont déjà réalisé des programmes audacieuxet des projets ambitieux et ont mis en place des politiques remarquables.

1. Contexte méditerranéen : dimensions et disparités

La Méditerranée est une des régions du monde où la question dudéveloppement durable se pose avec le plus d’acuité puisqu’elle est à lafois :

110 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 105: La sécurité énergétique en Méditerranée

• une “écorégion” précieuse et fragile dont le développement est déjàfortement pénalisé par la dégradation de l’environnement ;

• une des pr incipales zones de contact , de f racture e td’interdépendances Nord/Sud de la planète ;

• un ensemble de pays et un espace dont la stabilité et la prospéritédépendront largement de la capacité à mettre en œuvre de façonconcertée des politiques et des modes de développement intégrant lesdimensions environnementale, sociale et économique.

La Méditerranée a été recensée par le 4e rapport du GIEC (141) commel’une des régions du monde pour lesquelles le réchauffement climatiquedevrait marquer le plus l’environnement et les activités humaines. Lesanalyses des spécialistes du climat convergent vers un certain nombrede pronostics : hausse moyenne des températures de 3 à 4 °C, baisse quasigénérale des précipitations et plus grande occurrence d’évènementsextrêmes d’ici 2100. Les impacts du changement climatique surl’environnement en Méditerranée sont d’ores et déjà sensibles. LesPSEM (142), surtout ceux du Maghreb, échangent principalement avecles pays de l’UE. Les fortes interdépendances euro-méditerranéennesdevraient continuer à s’accroître, l’énergie en est l’une des plusconcernées.

Il reste qu’à moyen terme – dans un contexte de ressources plus rares –c’est l’évolution du contenu de la croissance qui déterminera sacompatibilité avec des objectifs de développement durable pour la région.Tout dépendra de la capacité des pays à éviter la surexploitation et ladégradation de leurs ressources naturelles (agriculture/eau,tourisme/littoral, énergie/hydrocarbures, etc.) pour fonder leurdéveloppement économique. Sur le long terme, les impacts économiquesdu changement climatique sur les pays des rive sud et est constituentune préoccupation grandissante, notamment en ce qui concernel’adaptation de leurs économies. A l’horizon 2025, la demande d’énergieprimaire pourrait se trouver multipliée par 1,5 en Méditerranée, les PSEMconnaissant des taux de croissance de leur demande énergétique quatrefois plus élevés que les PNM (143). Ils représenteraient alors 42 % de

111Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

(141) Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat.(142) Pays du sud et de l’est de la Méditerranée.(143) Pays du nord de la Méditerranée.

Page 106: La sécurité énergétique en Méditerranée

112 La sécurité énergétique en Méditerranée

Source : Eni, 7th World Oil and Gas Review, Rome, 2007; UN Comtrade, Commodity TradeStatistics Database, United Nations Statistics Division, New York.

Tableau 1Part des pays méditerranéens dans les importations

d’hydrocarbures de l’EUR4 (%)

Energie 2002 2003 2004 2005 2006

France Gaz 24,18 21,94 12,09 17,44 –

Pétrole 7,99 12,51 13,55 12,57 10,24

Italie Gaz 40,74 39,11 38,51 43,50 45,41

Pétrole 29,59 31,10 32,30 31,20 33,27

Portugal Gaz 85,32 74,55 60,65 62,38 –

Pétrole 6,04 19,79 24,83 30,77 46,77

Espagne Gaz 58,26 58,49 51,63 43,90 –

Pétrole 17,67 18,72 20,01 17,53 16,83

la demande d’énergie totale du bassin méditerranéen, contre 29 % en 2006.La Turquie pourrait devenir le second consommateur du bassin.

Les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) totalisent 80 % del’approvisionnement énergétique des pays (94 % pour les PSEM, 75 %pour les PNM). Quatre pays, Algérie, Libye, Egypte et Syrie, sontexportateurs d’hydrocarbures et fournissent 22 % des importations depétrole et 35 % des importations de gaz de l’ensemble du bassinméditerranéen. Tous les autres pays sont importateurs nets d’énergie. Sanscorrection de tendance, d’ici à 2025, le gaz naturel pourrait atteindre 37 %de la demande en énergie primaire dans les PSEM. La part du charbonse maintiendrait, en particulier pour la production d’électricité. La partdes énergies renouvelables, hors hydraulique et biomasse, resterait limitée,passant de 2,8 % de l’énergie primaire à 3 % dans les PSEM et de 3 à4,2 % dans les PNM.

Les échanges énergétiques en Méditerranée occidentale reflètent cetteinterdépendances entre des pays classés parmi les « premiers exportateursd’hydrocarbures », dits pays producteurs, et certains pays qui sont des« importateurs réguliers », dits pays consommateurs.

La présence simultanée de ces deux types d’acteur, exportateurs etimportateurs, dans une même région donne lieu à des relationscommerciales spécifiques, comme le montre le tableau suivant.

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113

Ce tableau montre la part du pétrole et du gaz du nord del’Afrique (144) dans les importations énergétiques des pays del’EUR4 (145). A première vue, on observe que les importations de gazsont plus importantes en pourcentage que celles de pétrole et qu’àl’exception de l’Italie, la part relative du gaz a légèrement diminué cesdernières années. En Espagne et au Portugal, cette diminution s’expliquepar la volonté de corriger l’excessive concentration des approvision-nements en gaz provenant d’Algérie, qui s’est traduite par la mise œuvrede pol i t iques de divers i f icat ion géographique des sourcesd’approvisionnement et de recomposition du bouquet énergétique, avecune part croissante des énergies renouvelables. Cependant, et bien quele débat reste ouvert, tous les analystes s’accordent à dire que l’importancedu gaz dans la consommation européenne d’énergie est appelée à croître.Pour preuve, les prévisions de la DG TREN (146) qui, dans son scénariode référence, prévoit que la demande européenne de gaz augmentera de24 % entre 2005 et 2030.

Au niveau méditerranéen, l’approche dite « marché »de la politiquede sécurité énergétique est apparue avec le processus de Barcelone. En1995, la déclaration de Barcelone attribue au secteur énergétique un « rôlestructurant […] dans le partenariat économique euro-méditerranéen », cequi revient à en faire un élément - clé du développement du Maghreb.Par ailleurs, la déclaration de Barcelone se propose de « renforcer lacoopération et d’approfondir le dialogue dans le domaine des politiquesénergétiques […] et de créer les conditions cadres adéquates pour lesinvestissements et les activités des compagnies d’énergie, en permettantà ces compagnies d’étendre les réseaux énergétiques et de promouvoirles interconnexions (147)».

2. Consommation, réserves et demande énergétiques enMéditerranée

Un scénario tendanciel annonce une croissance des risques et desimpacts. La dépendance énergétique pourrait s’accroître sensiblement,

Le Développement durable et la problématique des énergies renouvelables

(144) Ces données correspondent à la somme des exportations en provenance d’Algérie, deLibye et d’Égypte.(145) Italie, France, Espagne et Portugal.(146) Direction générale transport et énergie.(147) Cité dans l’OME, en 2006.

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114 La sécurité énergétique en Méditerranée

tant pour les PSEM importateurs (passant de 77 % en 2006 à 88 % en2025) que pour les PNM (passant de 68 % à 73 % sur la même période).

D’ici 2025, les PSEM devraient connaître des taux de croissance deleur demande énergétique quatre fois plus élevés que les PNM. La Turquiedeviendrait le deuxième plus gros consommateur d’énergie enMéditerranée en 2025. La part des PSEM dans la consommation totaled’énergie en Méditerranée passerait de 27 % en 2000 à 40 % en 2025,en raison de leur développement économique et des besoins d’unepopulation croissante. Seize millions de Méditerranéens n’ont pasencore accès à l’électricité, tandis que la population des PSEM pourraitaugmenter de 92 millions entre 2000 et 2025. Le secteur résidentiel /tertiaire représente déjà le premier poste de consommation énergétique(près de 40 %) et connaît des progressions de consommation spectaculaires(hausse de plus de 5 % par an entre 1974 et 1999).

Dans les PNM, la croissance de la consommation d’énergie provientd’abord du secteur des transports, qui représente environ un tiers du totalen 2000 contre un cinquième au début des années 1970. L’accroissementdes trafics et de la mobilité ont été bien supérieurs à la croissanceéconomique et aux améliorations technologiques. Ainsi, même si lesconstructeurs ont fait d’importants progrès en termes de consommationet d’émissions polluantes par voiture, le parc a augmenté plus vite encore,accroissant la consommation totale du secteur.

Le déséquilibre géographique de la consommation énergétique enMéditerranée se traduit par le fait que les 2/3 de la consommation totaleen énergie dans cette région reviennent au PNM ; la consommation parhabitant, dans ces mêmes pays, s’élève à 3,2 tep contre 1 tep dans lesPSM.

La structure de la consommation énergétique en 2006 pour les deuxrives de la Méditerranée est transcrite dans la figure suivante, dans desproportions différentes selon la nature de l’énergie utilisée, maisdemeure dans des ordres de grandeur similaires. A la différence des PSEM,le nucléaire est une énergie développée et consommée dans les pays dela rive nord-méditerranéenne.

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115

Figure 1

Consommation d’énergie primaire dans les deuxrives de la Méditerranée

Fig. 1a - Consommation des PSEM

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Charbon15 %

Gaz34 %

ER4 %

Hydrocarbures2 %

Pétrole45 %

Charbon11 %

Gaz22 %

ER5 %

Hydrocarbures2 %

Nucléaire18 %

Pétrole42 %

Fig. 1b- Consommation des PNM

Page 110: La sécurité énergétique en Méditerranée

116 La sécurité énergétique en Méditerranée

Espace tout à la fois de production et d’échanges de ressourcesénergétiques, la Méditerranée supporte environ 30 % du commercemondial des hydrocarbures. Une grande partie de ce commerce résultedes flux de transit exogènes à la région. Les échanges endogèness’expliquent par deux différences essentielles :

• la dotation en ressources énergétiques est très fortement concentréesur trois pays du sud : l’Algérie la Libye et l’Égypte, qui détiennent environ5 % des réserves mondiales de gaz naturel et 3 % des réserves de pétrole ;

• les pays du Nord sont plus riches et consomment beaucoup plusd’énergie par habitant que ceux du Sud.

L’infrastructure de l’énergie en Afrique du Nord est déjàraisonnablement bien intégrée, particulièrement en ce qui concerne lessecteurs de l’électricité et du gaz. Géographiquement, l’intégration del’énergie dans cette région a été facilitée par le fait que la plus grandepartie de la population vit dans une bande relativement étroite le longde la côte méditerranéenne et des bords du Nil. Ceci facilite grandementla fourniture d’énergie aux populations. L’infrastructure énergétique estconcentrée dans cette bande avec un nombre limité de ramifications quimènent principalement aux grands champs de pétrole et de gaz.

L’Afrique du Nord, en particulier l’Algérie et la Libye, est unfournisseur essentiel de l’Europe. Le pétrole nord-africain n’a que laMéditerranée à franchir pour atteindre la France, l’Italie, la Grèce ou laTurquie. Les liens entre la France et l’Algérie, d’une part, l’Italie et laLibye, d’autre part, ont joué un rôle important dans le développementde l’industrie pétrolière de ces deux pays. Ce sont des sociétés françaisesqui, avant l’indépendance de l’Algérie, ont mis en évidence les gisementsdu Sahara. C’est pour traiter le pétrole libyen, découvert et exploitéd’abord par des sociétés américaines indépendantes dépourvues decapacités de raffinage en Europe, que d’importantes installations ont étéconstruites en Sardaigne, en Sicile et dans le Mezzogiorno ; ce quirépondait par ailleurs aux vœux du gouvernement italien de développeréconomiquement cette région.

La Libye et l’Algérie sont d’importants exportateurs de pétrole ;l’Égypte consomme une grande partie de sa production. La Libye exporteégalement un peu de gaz naturel, mais c’est bien entendu l’Algérie quiest un acteur majeur de la scène gazière. Le gaz du Sahara est exportévers l’Europe soit par le gazoduc Algérie-Tunisie Sicile qui franchit la

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117

Méditerranée, soit par le gazoduc Algérie-Maroc-Espagne qui passe parle détroit de Gibraltar, soit sous forme GNL (gaz naturel liquéfié). Cespays d’Afrique du Nord offrent, en termes de trajectoire historique, descaractéristiques pétrolières plus proches de celles des producteurs duMoyen-Orient que de l’Afrique de l’Ouest : membres de l’OPEP pour(Algérie et Libye) nationalisation dans les années 70, rôle encore trèsimportant et actif de la compagnie nationale, forte sensibilité aux tensionspolitiques dans le monde arabo-musulman, etc.

Les producteurs principaux de gaz et de pétrole d’Afrique du Nord– l’Algérie et la Libye – et l’Egypte, autre producteur majeur, sont reliéspar des pipelines qui traversent les pays voisins, la Tunisie et du Maroc,aux marchés situés de l’autre côté de la Méditerranée et de la Mer rouge.Les interconnexions avec ces pays permettent d’accéder à des marchéslucratifs. L’Algérie, avec ses gigantesques réserves, envoie du gaz en Europepar le Maroc et Gibraltar et par la Tunisie et la Sicile. Le graphique ci-dessous représente les réserves en gaz (Gm3) et en pétrole (Mtep) enMéditerranée, ainsi que la production de l’électricité. Ces réserves biencontrastées montrent encore une fois ce déséquilibre tant remarqué enréserves qu’en production même au sein des PSEM. Le projet de pipelineNIVAL entre le Nigeria et l’Algérie ferait de cette dernière une véritableplaque tournante de la distribution du gaz. Les trois pays : Italie, Franceet Espagne marquent bien une forte production d’électricité, ce qui reflètedes besoins forts essentiellement liés à l’industrie, le transport et le bâtiment.

Figure 2Réserves en pétrole et en gaz en Méditerranée

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Source: OME, 2006

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118 La sécurité énergétique en Méditerranée

Dans les PNM, c’est le secteur des transports qui a enregistré la plusforte croissance de consommation depuis 30 ans, pour représenter, avec32 % de la consommation d’énergie en 2005, le premier poste. Dans lesPNM, tous les secteurs ont fortement augmenté leur consommation, ceuxde l’industrie et du résidentiel étant les plus gros consommateurs en 2005,avec respectivement 36 et 27 % de la consommation d’énergie en 2005.Un tel scénario tendanciel annonce une croissance des risques et desimpacts, tels que :

• les émissions de CO2 issues de la consommation d’énergie pourraientaugmenter, entre 2006 et 2025, de 55 % dans les PNM et de 119 % dansles PSEM ; en 2025, les émissions des PSEM, bien que 1,8 fois moinsimportantes par tête d’habitant que dans les PNM, pourraient représenter47 % des émissions du bassin, contre 33 % en 2006;

• les risques sociaux et économiques liés à la hausse des coûts del’approvisionnement et à ses répercutions sur la facture énergétique despays, des ménages et des entreprises seraient accrus.

Le graphique ci-dessous montre la demande énergétique primaire desdeux rives de la Méditerranée les trente dernières années et les douzeannées à venir. Il ne semble pas que cette demande énergétique primaireait une tendance linéaire continue. Les experts pensent que, trèsvraisemblablement, à l’horizon 2020-2030 cette demande connaîtra unecertaine stabilité, due à l’utilisation simultanée ou pas des énergiesrenouvelables.

Figure 3

Production d’électricité en Méditerranée

Page 113: La sécurité énergétique en Méditerranée

119

3. Nécessité de promouvoir un développement énergétiqueplus durable

La mise en œuvre d’une alternative incontournable pour ralentir lacroissance de la consommation d’énergie est fondée principalement surune utilisation plus rationnelle de l’énergie et sur un développement rapidedes énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermie, hydroélectricité).Ce scénario alternatif suppose un changement important d’approche dansle raisonnement, la planification et la gestion énergétiques pour diversifierles politiques et mobiliser le plus grand nombre possible d’acteurs. Defortes impulsions publiques affichées dans des stratégies nationales,accompagnées de systèmes de financement durables et d’un effort derecherche-développement, de communication et de formation sontnécessaires.

Il est donc grand temps de faire de la promotion d’un développementénergétique plus durable une nécessité et un débat de grande importance.Nous ne pouvons pas établir une stratégie durable d’énergie sanstrouver les réponses à des questions de base et sans mener des réflexionssimples, mais qui demeurent incontournables :

• Comment satisfaire les besoins énergétique actuels et futurs de façonoptimale ?

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Figure 4Demande énergétique primaire en Méditerranée

Page 114: La sécurité énergétique en Méditerranée

• Quels sont les moyens à mettre en œuvre pour y répondre ?

• Dispose-t-on des alternatives opérationnelles, associées à lacroissance de la demande énergétique ?

• Disposons-nous des outils performants nous permettant d’identifierdes événements imprévus probables (économiques, politiques,climatiques, etc.) pouvant affecter directement ou indirectement lesecteur de l’énergie ?

Il est très important de mettre au centre de l’ensemble de ces réflexionset de ces questions la composante humaine. L’Homme, avec un grandH, doit se sentir responsable de ses actes envers l’environnement, doitvoir l’avenir des générations futures dont sa propre progéniture, doitchanger de comportement, doit simplement réfléchir avant d’agir. Nouspouvons entrer dans des débats philosophiques quant au comportementhumains, mais le sujet reste tout de même simple et la feuille de routefacilement applicable : une bonne conduite envers la nature, qui n’estpas un gisement inépuisable.

Il est grand temps de dire que la priorité des priorités doit être, commetant d’autres scientifiques et intellectuels l’on suggéré, l’exploitation desgisements d’efficacité énergétique dans des secteurs clefs tels que letransport, le bâtiment et l’industrie. Si l’on arrive à allier l’efficacitéénergétique au déploiement, à grande échelle, des énergies renouvelables,on aura gagné la bataille, mais plus encore la guerre.

4. L’efficacité énergétique : enjeu majeur du développementdurable 4.1. Le développement durable : une prise de conscience

Tout d’abord, il convient de rappeler ce qu’est le développementdurable. Il est certain que la définition de ce terme demeure large etcomplexe, pour la simple raison que le développement durable n’existepas matériellement. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’uneprojection d’une intention permettant d’orienter l’adaptation des sociétéshumaines à des situations prévisibles ou pas du contexte environnementaldans lequel vivent. C’est donc des formulations différentes d’hypothèsesqui supposent la durabilité et la pérennité du développement. Enrevanche, on ne peut parler du développement durable que lorsque ceshypothèses « prédictives » ont résisté aux épreuves du temps.

120 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 115: La sécurité énergétique en Méditerranée

Le développement durable peut donc être défini, de la façon la plusbrève et la plus optimale, comme étant une manière de satisfaire les besoinsdes populations actuelles dans un souci d’équité, sans remettre en causeles moyens de satisfaire les besoins des générations futures.

En termes d’énergie, cela signifie la garantie d’un service optimal aumeilleur coût dans le respect des conditions écologiquement saines avecle moins d’impact sur les populations et les cultures, sur une échelle detemps plus longue.

Il est donc primordial, dans une approche d’équité à l’échellerégionale, de favoriser l’accès à l’énergie aux populations les plusdéfavorisées leur permettant de satisfaire leur besoins de base. Au mêmetemps, la réduction des pertes encourues dans les transformations, letransport et l’utilisation de l’énergie pour les populations plus développéesest une nécessité.

Mais si l’on veut vraiment s’inscrire dans cette perspective d’équitéentre populations, les décideurs et les différents acteurs doivent s’assurerdes retombées économiques permettant de satisfaire les besoins despopulations locales dans les lieux de production d’énergie, quelle qu’ensoit sa nature, dans le respect de leur territoire, de leur culture et de leurvie sociale.

Tout cela nous amène à la réflexion sur l’efficacité énergétique, cettecomposante qui a pris une place primordiale dans une dimension deresponsabilité universelle quant à la bonne gestion de l’énergie, devenueaujourd’hui une nécessité et le problème de tous.

L’efficacité énergétique est d’abord une prise de conscience, unestratégie et une mise en œuvre de moyens et de mesures permettant demodifier les conditions de la consommation d’énergie. Cela se traduitpar un comportement humain « responsable » qui se résume, dans unepremière approche, en :

• une meilleure réponse aux besoins par l’utilisation d’une quantitéminimale d’énergie pour assurer un service optimal ;

• le choix du type d’énergie en fonction du besoin, ce qui peut setraduire également par l’utilisation de la bonne énergie au bonendroit ;

• le recours et la promotion des énergies renouvelables.

121Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 116: La sécurité énergétique en Méditerranée

Il est grand temps de faire de l’efficacité énergétique un pilierimportant du développement durable. Nous devons donc être tous lalocomotive, chacun dans son environnement et son entourage, d’une forteconscience afin d’acquérir des automatismes pour :

• l’assurance d’une sécurité énergétique à faible impact surl’environnement ;

• un meilleur choix énergétique, sans s’en priver ;

• une réduction des impacts environnementaux liés à uneconsommation irrationnelle de l’énergie ;

• une réduction des besoins de nouveaux équipements qui requièrentde fortes consommations énergétiques ;

• un ralentissement de l’épuisement des ressources non renouvelables ;

• un transfert de savoir et l’exportation de champs d’expertise versles pays qui en ont besoin.

4.2. L’utilisation rationnelle de l’énergie : une alternativeincontournable

L’utilisation plus rationnelle de l’énergie et le développement rapidedes énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermie, hydroélectricité)est aujourd’hui une alternative inévitable et vitale pour toutes lespopulations.

Les hypothèses retenues sont une économie de 20 à 25 % de la demandetotale en énergie d’ici 2025 et 14 % d’énergies renouvelables dans le bilande cette perspective au lieu de 4 % dans le scénario de base. L’habitatreprésente le gisement d’économie d’énergie le plus important, notammentsur la rive sud et est de la Méditerranée, en pleine croissancedémographique.

La comparaison des performances entre les pays et de nombreuxexemples concrets montrent qu’un tel scénario à double dividende,environnemental et économique, est possible. C’est le cas de l’Italie, enmatière de baisse d’intensité énergétique, et des territoires palestiniens,en matière de chauffe-eau solaires. Les retours sur investissementsobservés sont en général courts : quelques années, parfois même quelquesmois.

122 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 117: La sécurité énergétique en Méditerranée

123

Les avantages du scénario alternatif sont considérables : • une croissance de la demande réduite de moitié, représentant une

économie totale d’énergie de 208 Mtep/an en 2025;• 2 000 milliards d’euros de dépenses évitées sur 25 ans, sur la base

d’un baril à 120 $ ;• une dépendance énergétique réduite à 18 % (contre 38 % avec le

scénario tendanciel) ;• 154 centrales de 500 MW de moins à construire sur le littoral

méditerranéen ;• 860 millions de tonnes de CO2 de moins dans les émissions de GES

en 2025;• de nombreux emplois dans les secteurs innovants de « l’après-

pétrole »;• une adaptation de la région aux changements nécessaires pour limiter

le réchauffement climatique.

La figure ci-dessous montre l’économie possible d’énergie et laréduction des émissions de CO2 pour les deux scénarios, de base ettendanciel.

Figure 5

Economies d’énergie et d’émissions de CO2 réalisablesavec le scénario alternatif, 2025 pour l’ensemble

des pays de la méditerranée

Fig 5a : Demande d’énergie primaire commerciale

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Source : Plan bleu, Observatoire méditerranéen de l’énergie, 2008

821 Mtep

2000 Scénario debase 2025

Scénario dealternatif 2025

100

300

500

700

900

1 100

1 500

ENRHydroNucl.

Gaz NPétroleCharbon

Mte

p

1 300

– 55

– 154

– 92

– 10

+ 103

1 365 Mtep

1 158 Mtep

Page 118: La sécurité énergétique en Méditerranée

124 La sécurité énergétique en Méditerranée

La mise en œuvre du scénario alternatif suppose un changementimportant d’approches dans le raisonnement, la planification et la gestionénergétiques pour diversifier les politiques et mobiliser le plus grandnombre possible d’acteurs. De fortes impulsions publiques affichées dansdes stratégies nationales, accompagnées de systèmes de financementdurables et d’un effort de recherche-développement, de communicationet de formation sont nécessaires. Pour faire évoluer les comportements,les incitations et un signal « prix » clair sont indispensables.

La Stratégie méditerranéenne pour le développement durable (SMDD)a d’ailleurs suggéré en priorité l’exploitation des gisements d’efficacitéénergétique dans les secteurs clefs (bâtiment, transport, industrie) et ledéploiement à grande échelle des énergies renouvelables.

Aussi l’utilisation rationnelle de l’énergie et le développement desénergies renouvelables figurent-ils parmi les six priorités du Partenariateuro-méditerranéen initié depuis 1995, mais les efforts semblent encoremajoritairement concentrés sur l’offre énergétique. Le dialogue euro-méditerranéen sur l’énergie constitue une opportunité pour impulser plusnettement des objectifs de maîtrise de l’énergie et des énergiesrenouvelables en rééquilibrant les budgets MEDA (148) national et

Source : Plan bleu, Observatoire méditerranéen de l’énergie, 2008

Fig 5b : Emission totale de CO2 selon les 2 scénarios(de base et alternatif)

1971 1980 1990 2000 2010 2020 20300

500

1 000

1 500

2 000

2 500

3 000

3 500

Scénario de baseScénario alternatif

MtC

O2

(148) Instrument financier de l’Union européenne (UE) assurant la mise en œuvre du Partenariateuro-méditerranéen (PEM).

Page 119: La sécurité énergétique en Méditerranée

régional en leur faveur. Une condition de réussite est certainement queles projets soient portés par les pays eux-mêmes et inscrits dans desstratégies nationales.

La coopération euro-méditerranéenne s’inscrit désormais dans lanouvelle politique de voisinage de l’Union européenne. Dans ce cadre,l’énergie fait partie des domaines-clés des plans d’action nationauxélaborés conjointement par les pays méditerranéens et l’Union européenne.Ces plans incluent, d’ailleurs, de façon forte des actions en faveur desénergies renouvelables et de la maîtrise des consommations. C’est déjàle cas pour plusieurs PSEM. Le montant des ressources budgétairesaffectées à la région méditerranéenne pour la période 2007-2013 a déjàété fixé courant 2006; si les fonds destinés au secteur de l’énergies’orientent, dans l’action, davantage vers des actions en faveur del’utilisation rationnelle de l’énergie et des énergies renouvelables et queces dernières deviennent prioritaires, la coopération régionale auraitréellement joué un rôle catalyseur pour aider la région à changer descénario.

4.3. Union pour la Méditerranée : un projet, un défi !

Le potentiel des énergies renouvelables (hydroélectricité, géothermie,solaire, éolien) est considérable en Méditerranée mais largement sous-exploité (3 % du bilan énergétique de la région en 2000), que ce soit pourla production d’électricité ou pour les usages domestiques. Pourtant, laMéditerranée dispose d’un potentiel considérable d’énergie solairegrâce à un ensoleillement (environ 5 kWh/m2/jour) parmi les plus élevésau monde, de multiples sites favorables aux éoliennes, des ressourcesgéothermiques notables (comme par exemple en Turquie) et despossibilités significatives de développement de la petite hydroélectricité.

Au total, d’ici 2025, une économie de l’ordre de 20 à 25 % (jusqu’à50 % dans les PSEM) de la demande totale en énergie serait tout à faitréalisable dans l’ensemble des pays riverains, en utilisant les technologiesdéjà disponibles. Quant à la part des énergies renouvelables, ellepourrait atteindre 14 % du bilan primaire en énergie en 2025 (horsbiomasse) au lieu de 4 % pour le scénario de base.

Jean-Louis Borloo, ministre français de l’Ecologie et du Développementdurable, en charge des questions du développement durable dans le cadre

125Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 120: La sécurité énergétique en Méditerranée

de l’Union pour la Méditerranée, a réuni en 2008 plus de 300 acteursintéressés par une implication directe dans le Plan solaire méditerranéen.Ce projet-phare de l’Union pour la Méditerranée (UPM) vise à accroîtrel’utilisation des énergies renouvelables et à renforcer l’efficacitéénergétique de chaque pays et de la région dans son ensemble.

Pour Jean-Louis Borloo, « le Plan solaire méditerranéen est lameilleure réponse commune que nous, pays du sud, de l’est, du nord dela Méditerranée pouvons apporter aux grands défis de notre planète :demande d’énergie croissante, prix de l’énergie fossile très fluctuant etrareté de cette ressource et surtout nécessité absolue de lutter ensemblecontre le changement climatique. C’est ensemble que nous pourrons faireface aux grands défis énergétiques, climatiques et économiques ».

Représentants des gouvernements égyptien, marocain, espagnol,syrien, italien et grec, commission européenne, administrations nationales,investisseurs, entreprises et associations professionnelles, institutionsfinancières, agences spécialisées... tous sont réunis pour discuter desgrands enjeux qui vont permettre d’atteindre les objectifs fixés par lePlan solaire méditerranéen, après la conférence de Paris et la réuniondes ministres des Affaires étrangères à Marseille les 3 et 4 novembre 2008:mise en place d’un cadre réglementaire et de mécanismes incitatifs adaptéspour le développement des énergies renouvelables et des réseauxélectriques dans tous les pays de la Méditerranée ; définition et mise enœuvre du financement des projets afin d’assurer leur rentabilité ;définition d’un cadre pour l’exportation d’électricité verte d’une rive àl’autre de la Méditerranée ; première analyse des projets déjà proposés.

Cette conférence a permis notamment d’engager les étapes nécessairesau lancement des premiers projets-pilotes en 2009-2010. Les conclusionsde cette rencontre alimenteront également un projet de déclaration pourun Plan solaire méditerranéen, qui sera partagée avec tous les Etatsmembre de l’Union pour la Méditerranée.

Les énergies renouvelables sont encore peu exploitées dans la régionMéditerranée, comptant pour seulement 4 % du bilan énergétique des paysméditerranéens (hydroélectricité incluse). Les pays méditerranéensbénéficient pourtant de conditions d’ensoleillement extrêmementfavorables et possèdent de vastes espaces libres pouvant accueillir descapacités de production d’électricité de taille importante.

126 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 121: La sécurité énergétique en Méditerranée

La construction de centrales solaires permettra l’accroissement descapacités de production des pays du Sud et la satisfaction d’une partiede la consommation domestique. Une partie de ces capacitéssupplémentaires pourrait être destinée à l’exportation vers les pays del’Union européenne. Le développement de l’énergie solaire etl’augmentation de l’efficacité énergétique entraîneront une diversificationdu mix énergétique et une réduction de la dépendance et des risques liésau recours massif aux énergies fossiles.

Enfin, dans les pays producteurs, le développement des centralessolaires permettra de préserver les ressources fossiles rares. Celaparticipera de la pérennisation des revenus d’exportation, important pourle développement national. Enfin, les coûts de production de l’électricitéà l’aide du solaire se rapprochent le plus de ceux des centrales thermiquesclassiques et pourraient rapidement permettre une production commercialeà grande échelle.

5. Le Maroc, un cas d’école

5.1. Indicateurs, spécificités et bilan énergétiques marocains

La sécurité énergétique est aujourd’hui un grand sujet de débats auMaroc. Responsables et experts multiplient les rencontres pour discuterde cette question épineuse. Il est important de noter que le Maroc est unpays importateur net d’énergie sous forme de produits pétroliers, decharbon et d’électricité, même s’il dispose d’un potentiel en énergiesrenouvelables et en efficacité énergétique explorable et considérable.

Dans un contexte de forte croissance économique, plus de 8 % en 2006,entretenue par le déploiement de programmes de développementstratégiques, la croissance de la demande énergétique s’est établie en 2005à près de 5 %, avec plus de 8 % pour l’électricité, 5 à 6 % pour les GPLet 3 % pour les autres produits pétroliers.

L’énergie électrique nette appelée, au Maroc, de janvier à septembre2008 était d’environ 18 300 Gwh avec une évolution presque constantede 8 % depuis 2005. La production des centrales électriques en concessions’est élevée en 2008 à 13 000 Gwh (77 % charbon, 21,5 % gaz naturelet 1,5 % éolien) (149).

127

(149) Statistiques du Ministère de l’Energie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 122: La sécurité énergétique en Méditerranée

Aujourd’hui le Maroc, pays non producteur d’énergies fossiles, faitface à défis énergétiques lourds. Ces défis sont nombreux et différentstels que la garantie d’approvisionnement et la maîtrise des coûts.

La situation énergétique du pays se caractérise par une forte dépendanceet une lourde facture énergétique. Cette situation se traduit par :

• une forte dépendance vis-à-vis des énergies fossiles avecl’importation de 96 % des besoins. En 2006, la consommation d’énergiescommerciales s’est élevée à environ 13 Mtep (charbon 30,2 %, produitspétroliers 62 %, GN 3,1 %, eolien 0,4 %, electricité importée 1,7 %, ethydro-électricité 3 %) ;

• une importation d’électricité en forte croissance avec 6 % en 2006et des prévisions à la hausse (près de 20 % en 2009) ;

• une base de consommation en énergie commerciale, ramenée àl’habitant, « faible », avec 0,41TEP/hab./an et 480 kWh/hab./an, induisantune intensité énergétique à parité de pouvoir d’achat raisonnable de 0,1,bien que de fortes disparités existent entre catégories de consommateurs.Cette base de consommation présente un potentiel de croissance élevé.Une consommation supérieure à 1 Tep/hab./an est prévue à l’horizon 2030;

• des besoins en investissement supérieurs à un million d’euros paran ;

• des coûts d’accès contraignants en raison du poids de la compensationdes produits pétroliers assurée par l’Etat (700 millions d’euros environen 2005) et du poids de la facture énergétique, près de 3,5 milliards d’euros(20 % du montant global des importations) ;

• des coûts d’accès contraignants également en raison d’un systèmede péréquation des tarifs urbain/rural tirant les coûts de l’électricité versle haut tout comme la charge électrique qui présente un pic de demandeélevé le soir (3 700 Mw par rapport à un appel de 2 200 Mw en heurescreuses en 2006) ;

• un impact sur l’environnement, notamment en termes d’émission,de gaz à effet de serre (60 % des émissions sont liées à l’énergie) et entermes de pression sur la ressource forestière avec une consommationde biomasse pour le chauffage et la cuisson en milieu rural estimée à 3,3Mtep, générant la perte de quelque 30 000 hectares de forêt annuellementet reflétant un accès encore limité aux services énergétiques modernesdans ces zones.

128 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 123: La sécurité énergétique en Méditerranée

129

• Le bilan énergétique marocain en termes de consommation (2005-2008) des énergies fossiles essentielles (pétrole, gaz) et d’électricité peutse résumer de manière très simple dans le tableau ci-dessous :

Tout cela fait que la facture énergétique ne cesse de s’alourdir, en 2008elle s’est tout de même élevée à 60 milliards de dirhams, soit une évolutionde plus de 20 % par rapport à 2007.

Le Maroc a subi également une lourde augmentation des subventionsdes produits pétroliers l’an dernier, effet direct de la hausse exponentielledu prix du baril de pétrole. Ces subventions ont été multipliées par 3,rien que sur une année, elles sont passées de 7,5 milliards de dirhams en2007 à 26 milliards de dirhams en 2008.

Les énergies renouvelables sont et doivent être l’alternativeincontournable à l’utilisation des énergies dites fossiles. La contributiondes énergies renouvelables au bilan énergétique national (hors biomasse)est d’environ 4 %. Elles sont à l’origine de la production de près de 10 %de l’énergie électrique, grâce à l’effort important de mobilisation de laressource hydraulique ainsi qu’à l’effort d’implantation de premiers parcséoliens (124 MW installés, 140 MW en construction au nord du paysauxquels s’ajoutent 200 à 300 autres MW en cours).

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Energie Période

2005 2008

Produits pétroliers (MT) 6 713 455 9 073 300

*Gaz (Mm3) 500 @ 871**

Electricité (Gwh) 19 518 > 22 600 ***

Tableau 2

Bilan de la consommation marocaine de l’énergiefossile essentielle (2005-2008)

*: Extension de la capacité du gazoduc Maghreb-Europe (GME) **: Introduction de nouvelles centrales ***: Chiffres 2007

Page 124: La sécurité énergétique en Méditerranée

130 La sécurité énergétique en Méditerranée

Il y a lieu de noter que de manière générale les énergies renouvelablesfont l’objet de projets diversifié (centrales thermo-solaires, stations depompage, turbinage hydraulique, valorisation énergétique des déchets,pompage d’eau, dessalement de l’eau de mer, climatisation et chauffagesolaire de l’eau sanitaire…) s’impliquant ainsi dans divers programmeséconomiques et sociaux comme c’est le cas du programme d’électrificationrurale dont les objectifs sont pris en charge à hauteur de 7 % par lessystèmes solaires photovoltaïques individuels.

Les ressources sont importantes avec en particulier une estimationpour l’éolien de plusieurs GW, un marché potentiel du solaire thermiquede plus d’un million de m2, et des possibilités importantes de valorisationde la biomasse (9 millions d’hectares de forêt et vocation agricole dupays). En terme de tendance, les attentes vis-à-vis de ces filières sontimportantes de la part des institutionnels, des opérateurs économiquesou tout simplement des consommateurs.

L’approche de l’efficacité énergétique devient donc hautementstratégique.

5.2. Le Maroc : des atouts et du potentiel

Le Maroc, par sa position géographique, bénéficie des ingrédients quifont le bonheur de la Vision 2020 pour un développement énergétiqueplus durable. Au Maroc, il y a le soleil, le vent, la mer et la forêt, autantd’éléments essentiels pour la production d’énergies renouvelables. Dece fait, la diversification des sources d’énergie et la réduction de ladépendance deviennent hautement stratégiques.

Notons que les réformes gouvernementales entreprises dans lesecteur de l’énergie sont fortement soutenues par de grandes instancescomme la Banque mondiale (BM), l’Agence allemande de coopérationtechnique (GTZ), le Programme des Nations Unies pour le développement(PNUD), etc. L’ouverture du secteur énergétique au secteur privé sousforme de partenariat était une réforme devant faciliter l’accès à l’énergiedes populations rurales éloignées pour des coûts raisonnables.

La part des énergies renouvelables devrait être portée à 1 000 MWen 2012, soit 10 % du bouquet énergétique et 20 % de la productiond’électricité.

Page 125: La sécurité énergétique en Méditerranée

Avec 3 500 km de côtes, un relief (chaînes montagneuses du Rif etde l’Atlas) et un régime des vents favorables, le Maroc dispose d’unpotentiel réalisable d’énergie éolienne considérable évalué à 1 065 MWà l’horizon 2012 (3,4 TWH) et à 3 260 MW en 2020 (9,9 TWH) avecune hypothèse de croissance annuelle de cette filière de 15 %.

Si un système incitatif adéquat est mis en place, ce potentiel pourraitatteindre en 2020 8 700 MW (26,2 TWH, soit près de la moitié de lademande en énergie électrique en 2020), ce qui correspond à unecroissance annuelle moyenne de 30 %, équivalente à celle enregistrée enRFA. Ce potentiel n’est cependant réalisable que dans le cadre d’unestratégie d’exportation d’énergie verte avec les renforcements de réseaunécessaires. A noter que dans cette situation la rentabilité desinvestissements dépendra des conditions de valorisation des excédentsà l’étranger en heures creuses. Ce potentiel de plusieurs milliers de MW(offshore non inclus) est localisé essentiellement dans la zones Nordavoisinant le détroit de Gibraltar, les vallées intérieures d’orientationouest- est, les zones côtières d’El Jadida à Cap Ghir et de Tarfaya à Dakhla.

Pour ce qui est du solaire, un rayonnement solaire annuel moyen deprès 2 000 kWh/m2 représente un potentiel de mobilisation de laressource très important en particulier pour les applications bassetempérature (de 315 GWH en 2010 à 1 360 GWH en 2020) et lesapplications photovoltaïques (80 MW en 2010 jusqu’à 2 000 MW en2020). La concrétisation de ces potentiels reste conditionnée par bonnombre de mesures techniques, financières et réglementaire.

Par ailleurs, il ressort de l’étude « cadre règlementaire des énergiesrenouvelables au Maroc », réalisée par le Centre de développement desénergies renouvelables (CDER) et la GTZ, un potentiel de biomasse trèsélevé et d’importance équivalente à celle de l’éolien grâce à la maturitédes technologies de biogaz, au développement des cultures énergétiqueset à la demande croissante des biocarburants. La biomasse regroupe, bienentendu, le biogaz sous différentes formes, les déchets biogènes, lesdéchets agricoles, le biodiesel (plantes énergétiques), etc.

Il est à noter que d’autres formes d’énergie renouvelable existent maiselle constituent encore des pistes non explorées au Maroc, telle que lagéothermie. Grâce à une géologie exceptionnelle, le Maroc dispose depotentialités en géothermie basse température encore inexplorées, enparticulier dans le Nord (du Moyen-Atlas à l’est du Rif oriental) et des

131Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 126: La sécurité énergétique en Méditerranée

132 La sécurité énergétique en Méditerranée

bassins sédimentaires du Sahara (flux de chaleur élevé des îles Canariesau bassin de Tindouf).

Aucune exploitation de cette forme d’énergie n’est encore pratiquéeau Maroc, bien que de nombreuses applications puissent être envisagéestel que le chauffage des serres dans le secteur de l’agriculture ou laclimatisation des bâtiments collectifs.

Tous ces atouts et toutes ces réflexions font que de nouvellesorientations stratégiques s’imposent, en dehors même de l’utilisation desénergies renouvelables. L’efficacité énergétique en est une.

5.3. L’efficacité énergétique un véritable accompagnement dudéveloppement économique et social marocain

Le potentiel d’efficacité énergétique est aussi considérable. La figureci-dessous présente les estimations rapportées par l’étude de la Banquemondiale et du ministère de l’Energie et des Mines (politique, programmeet instruments pour un plan national d’efficacité énergétique, 2006) etrévèle des possibilités d’économie d’énergie de 23 % à l’horizon 2020par rapport à un scénario dit « au fil de l’eau ».

Figure 7Evolution tendancielle de l’économie d’énergie

au Maroc à l’horizon 2020

Source : Plan bleu. Centre d’activités régionales, octobre 2007.

Industrie0

1

3

4

5

2

Transport Résidentiel Agriculture

200020102020

Secteurs

Eco

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mill

ion

s TE

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Page 127: La sécurité énergétique en Méditerranée

133Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

L’efficacité énergétique est l’une des voies appropriée, voire la pluspertinente pour découpler croissance économique et croissance de lademande énergétique.

En matière d’efficacité énergétique, le ministère marocain del’Energie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement (anciennementministère de l’Energie et des Mines), en association avec les partenairesconcernés, a entrepris une série d’actions dans le cadre du Plan nationald’efficacité énergétique. Ce plan est actuellement en cours de finalisationen concertation avec les différents opérateurs et intervenants dans lesecteur énergétique. Les actions prévues permettraient d’atteindre deséconomies d’énergie allant jusqu’à 20 % de la consommation énergétiqueà l’horizon 2020.

Les différentes actions prévues sont axées sur les filières les plusdéveloppées à savoir l’eau chaude solaire, le bois énergie et l’efficacitéénergétique dans les secteurs de l’industrie, de la santé, de l’habitat, dutourisme, de l’enseignement et dans les établissements à caractère social,ainsi que pour le développement des collectivités locales. Il faut dire quele développement des énergies renouvelables est un axe primordial, voirele premier qui doit s’inscrire dans cette perspective de développementdurable qu’est l’efficacité énergétique.

Le Maroc a dores et déjà lancé des projets importants dans l’éolienet le solaire.

Pour l’éolien, citons quelques exemples de projet dont certains ontdébuté, il y’a déjà sept ou huit ans :

1. Parc d’Abdelkhalak Torres

– Situation géographique : 40 km à vol d’oiseau à l’est de la ville deTanger.

– Puissance installée : 50,4 MW.

– Productible annuel moyen : 226 GWh/an.

– Mise en service : 29 août 2000.

2. Parc expérimental

– Situation géographique : 40 km à vol d’oiseau à l’est de la ville deTanger.

Page 128: La sécurité énergétique en Méditerranée

– Puissance installée : 3,5 MW.

– Productible annuel moyen : 14,5 GWh/an.

– Mise en service : 24 octobre 2000.

3. Parc d’Essaouira

– Situation géographique : Cap Sim (15 km au sud d’Essaouira).

– Puissance installée : 60 MW en exploitation.

– Productible annuel moyen : 200 Gwh/an.

– Mise en service : en 2007.

Pour le solaire, nous pouvons citer les actions suivantes :

1. Solaire photovoltaïque non connecté au réseau

Electrification de 3 163 douars comptant 44 719 foyers avec des kitssolaires individuels dans le cadre du PERG (150) à fin 2007.

2. Solaire photovoltaïque connecté au réseau

– Installation en 2007 de la centrale à Tit Mellil constituée de 1 024panneaux solaires d’une puissance totale de l’ordre de 50 KW a étéinaugurée en 2007. Cette centrale débite l’énergie produite sur le réseaunational.

– Installation d’une centrale de 150 KWc à l’aéroport Mohammed V.

3. Solaire thermique: chauffe-eau solaires (PROMASOL)

– Installation de 240 000 m2 de capteurs solaires.

– Mise en place du fonds de garantie de l’efficacité énergétique etdes énergies renouvelables (FOGEER), destiné à garantir les créditsd’investissement consentis par les établissements de crédit.

Il faut dire que les énergies renouvelables et l’efficacité énergétiqueont pris place aux côtés des produits pétroliers et de l’électricité commesecteur à part entière. La concrétisation de ce positionnement s’est traduitepar des projets en cours de réalisation plus audacieux et plus ambitieux.Parmi ces projets, on citera l’essentiel, à savoir :

134 La sécurité énergétique en Méditerranée

(150) Programme d’électrification rurale globale.

Page 129: La sécurité énergétique en Méditerranée

Parc de Tanger

– Situation géographique : entre Tanger et Tétouan

– Puissance installée : 140 MW

– Productible moyen annuel : 526,5 GWh/an

– Mise en service prévisionnelle : 2009

Centrale thermo-solaire à cycle combiné d’Ain Beni Mathar

– Représente un nouveau moyen de production combinant l’énergieprimaire d’origine fossile et les énergies renouvelables

– Puissance installée de 472 MW dont 20 MW d’origine solaire

– Mise en service en 2009.

Programme EnergiPro

– Offre la possibilité aux auto-producteurs de produire leur électricitéà partir des énergies renouvelables, en acheminant sur le réseau detransport l’électricité à partir des sites de production vers les sites deconsommation.

– L’excédent de production est racheté par l’ONE à un tarifpréférentiel de + 20 % par rapport à l’autoproduction par des moyensd’autoproduction non renouvelables

– Plusieurs industriels se sont regroupés en consortium pour totaliserdes puissances en adéquation avec les gisements éoliens.

Les perspectives pour l’éolien et le solaire sont plus ambitieuses avecle Programme 1 000 MW à l’horizon 2012, l’installation de 240 000 m2

de chauffe-eau solaires (CES) pour ce qui concerne le solaire thermiqueet l’intégration du photovoltaïque au niveau des applications énergétiquesdécentralisées ainsi que la mise en place de projets-pilotes demicrocentrales photovoltaïques chez les particuliers pour ce qui concernele solaire photovoltaïque. L’objectif est très réaliste, pour autant que lespromesses fiscales soient inscrites de façon définitive dans la loi definances 2008 et/ou 2009, à savoir l’exonération des droits à l’importationou leur réduction (de 10 à 2,5 %) ainsi que la baisse de la TVA sur leséquipements à 7 %.

Il ne faut pas perdre de vue que la promotion de l’efficacitéénergétique est un véritable accompagnement du développementéconomique et social.

135Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 130: La sécurité énergétique en Méditerranée

– le choix des filières énergétiques qui préservent l’environnement,d’où la nécessité du recours aux énergies renouvelables ;

– la mise en place d’un système et d’un cadre réglementaire plus intégréavec une mise au point sur la situation institutionnelle et la mobilisationde l’ensemble des organismes concernés en termes de planification etde prospectives ;

– la mise en place d’une stratégie de mobilisation des opérateurs privésafin d’avoir une disponibilité d’offres d’équipements de qualité à traversune base partenariale public-privé ;

– la mise en place de dispositions fiscales plus favorables à l’atteintedes objectifs fixés et à la réduction de contraintes administratives ;

– le développement des moyens d’accompagnement afin d’assurer undéveloppement durable de la fourniture d’énergie, de réduire le coût del’approvisionnement énergétique pour l’économie nationale, de luttercontre le changement climatique et de développer la technologie devalorisation des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. Cetaccompagnement peut se faire par le biais d’un projet de loi qui définitde façon claire le cadre réglementaire, la sensibilisation de la populationet une meilleure communication.

6. Programme d’actions pour une efficacité énergétique plusrentable

6.1. Orientations : cadre général

Les orientations stratégiques ne valent que si elles se traduisent enactions. Les perspectives dessinées tout au long de ce qui précède montrentque l’efficacité énergétique peut devenir une vraie action de coopérationen matière de développement durable.

Au niveau régional, le Maroc et les pays méditerranéens, notammentsous l’égide du Plan d’Action pour la Méditerranée, ont déjà montré leurvolonté et leur capacité à mettre en œuvre des projets communs, enparticulier en matière de renforcement des capacités et de développementd’expertise. Toutefois, il faut aller plus loin dans le transfert desconnaissances. Dans le secteur particulier de l’énergie, mais aussi dansd’autres, une mutualisation des efforts et une mise en commun des

136 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 131: La sécurité énergétique en Méditerranée

compétences sont alors indispensables, mais surtout possibles si l’on veutvéritablement s’inscrire dans un espace de coopération pour undéveloppement durable régional.

C’est à l’élaboration de telles actions concrètes et selon une approchevéritablement partenariale que doivent donc aussi se consacrer les paysméditerranéens. Il en va de même au niveau national où les stratégiesde développement durable, les programmes de développement deterritoires n’auront de sens et d’intérêt que s’ils se traduisent en actions.

L’une des principales actions serait de renforcer l’observation et laveille stratégique du secteur de l’énergie. Cette veille pourra se faire laréalisation d’enquêtes sur les consommations, en recoupant des donnéesprécises recueillies sur la consommation énergétique finale ventilée parsecteur d’activité (bâtiment, industrie, transport, etc.) et par région.

Afin de procéder, par ailleurs, à un travail d’optimisation plusrigoureux, il est opportun de mettre en conformité énergétique etenvironnementale l’ensemble, ou dans un premier temps, les principalesunités industrielles et tertiaires par le biais d’audits permettant de donnerla priorité à l’approche d’un programme global et pérenne.

Il est donc important de fixer des objectifs quantitatifs précispermettant à l’efficacité énergétique d’être un point de convergence etun axe de coopération et de partenariats plus ambitieux.

Le développement des pays les moins économiquement avancés de larégion Méditerranée devra notamment, et en cohérence avec les Objectifsdu Millénaire, satisfaire leurs besoins en infrastructures, en logements eten services. Il sera inévitablement consommateur d’énergie, d’eau, deressources naturelles. L’enjeu consistera donc à inventer de nouveauxmodes de production et de consommation afin de gérer au mieux un espaceet des territoires finis, des ressources naturelles limitées, une populationcroissante, des contraintes nouvelles et des inégalités persistantes.

Le scénario alternatif met en évidence l’intérêt économique depromouvoir des modes de consommation plus économes en ressourcesrares. Une efficacité énergétique accrue, notamment dans les secteursdu transport et du bâtiment, permettrait d’économiser près du quart dela demande totale en énergie primaire attendue en 2025 et pour un coûtvraisemblablement inférieur à 10 % des investissements d’ores et déjàprogrammés.

137Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 132: La sécurité énergétique en Méditerranée

6.2. Orientations : élaboration pratique

Des programmes ou plans d’action ont été mis en place ces dernièresannées à l’issue des débats nationaux au sein de certains pays de la régionméditerranéenne ou des débats inter-pays qui ont eu lieu dans la régionet qui ont regroupé plusieurs Etats des deux rives.

Il a été signalé précédemment que pour les pays de la rive sud et sud-est de la Méditerranée (PSEM), la demande énergétique actuelle et à venirse caractériserait par une croissance spectaculaire de la demanded’électricité, beaucoup plus rapide que celle du PIB, de la consommationd’énergie primaire liée directement à la croissance de leur population.Pour ces pays, la demande énergétique pourrait être multipliée par 2,6entre 2006 et 2025, sous l’effet d’un triplement des consommations enTurquie, Tunisie et Algérie et d’un doublement en Egypte et au Maroc.Le développement attendu du secteur industriel, l’amélioration del’accès à l’électricité et la hausse des niveaux de vie, directement liée àla consommation du résidentiel, seraient à l’origine de ces augmentationsfulgurantes de consommation.

Dans les pays de la rive nord de la Méditerranée (PNM), c’est plutôtle secteur des transports qui a enregistré la plus forte croissance deconsommation depuis 30 ans, pour représenter, avec 32 % de laconsommation d’énergie en 2005, le premier poste. Dans ces pays, tousles secteurs ont fortement augmenté leur consommation, ceux del’industrie et du résidentiel étant les plus gros consommateurs cettedernière décennie, avec respectivement 36 et 27 % de la consommationd’énergie.

C’est donc bien trois secteurs principaux dans la région de laMéditerranée, et même dans d’autres régions du monde, qui doivent fairel’objet de programmes d’actions pour une utilisation rationnelle del’énergie si l’on ne veut pas alourdir le scénario tendanciel de laconsommation énergétique et s’inscrire dans une efficacité énergétiqueplus rentable et plutôt durable. Il s’agit des secteurs du transport, dubâtiment et de l’industrie.

Pour ce qui concerne le secteur du transport, il faut souligner quel’accroissement des trafics a été essentiellement celui des déplacementsroutiers, qui, il y’ a déjà dix ans à fin 1999, représentaient 88 % desdéplacements terrestres de voyageurs et 82 % des transports de

138 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 133: La sécurité énergétique en Méditerranée

139

marchandises. Le rail qui affichait 9 % du trafic interne des voyageurs,joue un rôle notable en Égypte (47 % du total) et dans les pays de l’Estadriatique (23 %). La forte croissance du transport aérien (7,3 % par an)est à relier au développement du tourisme. Sans oublier le trafic du fretmaritime qui a aussi connu une forte croissance (4 % par an), bien quel’on note une sous-compétitivité des chaînes de transports euro-méditerranéennes nord-sud.

Les nuisances générées sont importantes puisque les transports sont,entre autres, à l’origine d’environ un tiers des émissions de CO2 et desémissions de particules et de 70 % des émissions d’oxyde d’azote dansles grandes agglomérations de la rive nord méditerranéenne. Dans lespays de la rive sud, la motorisation de masse (automobiles) se généralisebien avant 2025. Cette évolution exponentielle aura de lourds impactsen termes de congestion, de nuisances sonores, d’émissions de gaz à effetde serre, de pollutions locales. La figure ci-dessous représente l’évolutionet le scénario tendanciel à l’hrizon 2025 du trafic fret routier, aérien etferroviaire dans la région.

Figure 8Evolution et scénario tendanciel du trafic

en Méditerranée à l’horizon 2025

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Source : CEMT, Ministères des transports, instituts statistiques nationaux, prospectives Planbleu.

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Page 134: La sécurité énergétique en Méditerranée

140 La sécurité énergétique en Méditerranée

Les actions à mettre en œuvre pour une efficacité énergétique dansle secteur du transport pourraient donc être, parmi beaucoup d’autresactions :

• la promotion de l’intégration de l’approche « efficacité énergétique »en’amont de l’élaboration des plans de déplacement urbains à l’échellelocale ;

• l’application des règles plus strictes pour la lutte contre la pollutionpar une alliance entre un cadre réglementaire et une forte sensibilisationde la population ;

• l’amélioration de l’intégration des politiques de transport dans laplanification économique pour obtenir un progrès continu en termes dedécouplage entre croissance des transports motorisés et croissance duPIB;

• une répartition modale plus favorable aux moyens de transports moinspolluants ;

• l’incitation financière représentée par un crédit d’impôt sur lesvéhicules propres et par un soutien financier au transport combiné (rail-route).

Pour ce qui concerne le secteur du bâtiment, la consommationd’énergie totale des secteurs résidentiel et tertiaire confondus a augmentédans le bassin méditerranéen ces trente dernières années de 30 % du faitde l’accroissement du parc, de l’élévation du niveau de confort (appareilsélectroménagers), de l’apparition de nouveaux besoins (climatisation).En France, par exemple, parmi les 31,3 millions de logements, 19,1millions, soit 61 % du parc, ont été construits avant la réglementationthermique de 1975. Avec un taux annuel de renouvellement du parc de1 %, il restera en 2050 entre 30 et 40 % de logements antérieurs à 1975.Il est donc indispensable d’améliorer la performance des bâtimentsexistants.

Vers 2025, la population citadine du bassin méditerranéen pourraitatteindre 220 millions d’ahbitants dans les pays des rives est et sud(151 millions en 2005, à titre de référence) et 156 millions dans les paysde la rive nord (140 millions en 2005, à titre de référence). Un gros tiersde cette croissance aura lieu dans les régions côtières méditerranéennes.Le secteur du bâtiment est responsable de 21 % des émissions de CO2 et

Page 135: La sécurité énergétique en Méditerranée

de 43 % de la consommation d’énergie finale en France, par exemple.Le chauffage représente près des deux tiers de ces consommationsd’énergie et la majeure partie des émissions de CO2 de ce secteur.

Il est donc important de mettre en place un programme de mesuresde plus en plus performant qui doit nécessairement permettre à ce secteurde revoir sa façon d’évoluer et de se développer, programme qui doitmobiliser tous les acteurs du bâtiment, accompagné d’un soutien despouvoirs publics par des mesures réglementaires, une informationrenforcée des particuliers, des incitations financières, mais aussi desactions de recherche et de développement.

Les actions à proposer peuvent être, par exemple :

• la mise en place d’un diagnostic de performance énergétique deslogements et des locaux de type tertiaire se traduisant notamment parune étiquette énergie semblable à l’étiquette énergie des équipementsélectroménagers ou d’éclairage, ou des voitures neuves ;

• la mise en place de labels énergétique et de certificationsenvironnementales tels que le label «Haute Performance Energétique,HQE», correspondant à une consommation conventionnelle d’énergie àhauteur d’un pourcentage arrêté d’économie d’énergie par rapport à uneconsommation d’énergie de référence et qui seraient (labels etcertifications) un déclencheur pour promouvoir l’importance de lacontribution des énergies renouvelables ;

• la mise en place et le renforcement de la réglementation thermiquepour les bâtiments aussi bien neufs qu’existants. Ce cadre réglementairepermettra sans doute de faire disparaître du marché, à terme, les produitsde construction ou équipements techniques obsolètes en termes deperformances énergétiques, afin de privilégier la diffusion la plus largepossible dans le parc existant à l’échelle régionale des meilleurs produitsdisponibles.

Il faut dire qu’actuellement un grand nombre de gouvernements desEtats de la Méditerranée appellent à de vastes chantiers concernant lebâtiment pour s’inscrire dans une dimension d’efficacité énergétique dansce secteur et afin de réduire les émissions de CO2, jusqu’à un facteur 4à l’horizon 2050 pour certains pays. La généralisation d’un nouveauconfort moderne, avec un bâti fortement isolé, une ventilation performante,un niveau d’éclairage naturel élevé, des équipements peu consommateurs

141Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 136: La sécurité énergétique en Méditerranée

d’énergie et intégrant au mieux les énergies renouvelables, est nécessairepour atteindre ces objectifs.

Dans ce domaine du bâtiment qu’elle a identifié comme prioritaire,la Stratégie méditerranéenne pour le développement durable a fixé quatreorientations principales :

– anticiper et planifier la croissance urbaine ;

– valoriser le patrimoine urbain méditerranéen ;

– améliorer la qualité de vie et réduire les inégalités ;

– améliorer la gouvernance urbaine et renforcer la solidarité entre villesméditerranéennes.

Pour ce qui concerne le secteur de l’industrie, les actions de maîtrisede l’énergie portent principalement sur la « gestion des utilités » dansl’industrie. Elle peut être définie comme l’ensemble des moyens deproduction, transformation, distribution, suivi, contrôle et optimisationdes utilités, y compris le traitement des rejets.

Outre les importants gisements d’économie d’énergie indispensablesmentionnés dans les deux points précédents, le transport et le bâtiment,il existe des potentiels conséquents dans d’autres secteurs tels quel’industrie.

Le potentiel d’efficacité énergétique et de réduction des émissionsde CO2 dans l’industrie passe, d’une part, par la mise en œuvre d’unegestion fine de l’énergie et, d’autre part, par l’optimisation des fluxd’énergie au sein des usines. Les systèmes de gestion de l’énergiepermettent de surveiller et d’interagir avec la conduite des procédésindustriels ou la production d’utilités. Ils contribuent à éviter des dérivesde réglages et à conserver une utilisation rationnelle de l’énergie au coursdu temps.

Au-delà, les innovations sur les procédés industriels sont nécessaires :de nouveaux usages très performants de l’énergie et tout spécialementde l’électricité, des re-conceptions de procédés avec une meilleureintégration énergétique, des systèmes de récupération et de valorisationde chaleur, ou de l’énergie contenue dans les rejets et coproduits. Au final,dans un contexte d’énergie rare et chère, il est important que toute unitéd’énergie « injectée » dans une activité donnée soit utilisée au maximum.

142 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 137: La sécurité énergétique en Méditerranée

L’emploi de techniques performantes conduit bien souvent à un coûtd’investissement supérieur, mais contribue dans la majorité des cas, nonseulement à une efficacité énergétique améliorée, mais aussi à plus depropreté, de compacité, de précision, de fiabilité et de rapidité desprocédés. Il s’ensuit une meilleure maîtrise de la qualité du produit etun accroissement de la productivité.

Dans ce secteur, l’efficacité énergétique peut être traduite par lesactions suivantes :

l’utilisation des équipements à haute performance énergétique quiseront le fruit d’un développement de systèmes d’optimisation énergétiqueglobaux, fiables et faiblement consommateurs avec utilisation desNTIC, et développement des réseaux de communication industriels ;

la sensibilisation à la gestion rationnelle de l’énergie, pouvant setraduire par la mise en place de diagnostics et la promotion des bonnespratiques dans les plate formes des PME/PMI, en utilisant les techniquesles plus efficaces en énergie ;

la réflexion sur un couplage entre la mobilisation des experts relaispermettant de faire le lien entre un savoir-faire et un besoin réel et unsoutien aux investissements.

6.3. Exemple : le Maroc

En matière d’efficacité énergétique, le ministère de l’Energie et desMines, en association avec les partenaires concernés, a entrepris une séried’actions dans le cadre du Plan national d’efficacité énergétique. Ainsi,les différentes actions seront axées sur les filières les plus développéesà savoir l’eau chaude solaire, le bois énergie et l’efficacité énergétiquedans les secteurs de l’industrie, de la santé, de l’habitat, du tourisme, del’enseignement et dans les établissements à caractère social, ainsi quepour le développement des collectivités locales.

A ce titre, il a été mis en place un Plan national d’actions prioritaires(PNAP), coordonné 2008-2012. Une mobilisation pour l’adoption demesures urgentes d’efficacité énergétique et de réduction de laconsommation a été initiée, en vue de traiter les problématiques relativesà l’offre et à la demande d’électricité, à travers (i) la généralisation deslampes à basse consommation (LBC) et des chauffe-eau solairesparticulièrement dans les bâtiments publics, (ii) la rationalisation de

143Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 138: La sécurité énergétique en Méditerranée

l’éclairage public et (iii) l’intensification des audits énergétiques chezl’industriels, les agriculteurs et les collectivités locales.

Ce plan national d’actions prioritaires a vu son applicabilité s’étendreaux trois secteurs précédemment traités : le transport, le bâtiment etl’industrie.

Pour ce qui est de l’efficacité énergétique dans le secteur du transportau Maroc, nous soulignons que celui-ci joue un rôle essentiel dans ledéveloppement économique et social et représente environ 24 % de laconsommation énergétique totale du pays. Il est responsable de près de15 % des émissions totales de gaz à effet de serre. Les actions proposéesdans ce secteur sont les suivantes :

• l’évaluation de la consommation d’énergie dans ce secteur par laréalisation d’une étude fine afin d’identifier les gisements d’économied’énergie ;

• la mise en place d’un cadre légal et réglementaire relatif auxprocédures pratiques pour l’élaboration des plans de déplacements urbainsvisant la promotion de l’intégration de l’efficacité énergétique ;

• la promotion du transport collectif ;

• la sensibilisation de la population aux économies d’énergie et àl’utilisation rationnelle de cette dernière par le biais d’une fortecommunication et de la formation.

Dans le secteur du bâtiment, les actions suivantes ont été proposées :

• la mise en place d’un cadre réglementaire traduit par un Coded’efficacité énergétique dans le bâtiment ;

• la mise en œuvre d’un système d’étiquetage énergétique et delabellisation des équipements pour un gain sur la consommationd’énergie de référence et la promotion d’un recours aux énergiesrenouvelables pour la production d’eau chaude sanitaire, le chauffageou la production d’électricité ;

la réalisation de 50 projets de démonstration de l’utilisation rationnellede l’énergie et celle des énergies renouvelables dans différentes régionsdu Maroc ;

le développement des programmes sectoriels par l’installation deschauffe-eau solaires.

144 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 139: La sécurité énergétique en Méditerranée

Il est à souligner ici que le ministère de l’Energie et des Mines et leCentre de développement des énergies renouvelables ont lancé un projetdu Code d’efficacité énergétique dans le secteur du bâtiment encollaboration avec le PNUD et le Fonds pour l’environnement mondial(FEM). Ce projet vise l’intégration des considérations énergétiques enparticulier dans trois secteurs : la santé, l’hôtellerie et les logementscollectifs.

L’effort d’amélioration de l’efficacité énergétique sera concentré surtrois grands axes : la conception des bâtiments, le fonctionnement deséquipements (chauffage, climatisation, etc.) et la gestion énergétique dansle bâtiment. La phase d’assistance du projet de Code d’efficacitéénergétique dans le bâtiment a été lancée en juin 2005, au cours de laquelledes concertations élargies entre les partenaires institutionnels et lesprofessionnels du bâtiment ont eu lieu dans le but d’élaborer le montageet le cadre juridique et institutionnel du projet.

Le secteur de l’industrie, consomme plus de 30 % de l’énergie totaledu pays. Le gisement du potentiel global d’économie d’énergie a été estiméà 48 %. Face à ce potentiel, un programme d’actions a été mis en œuvrepour promouvoir l’approche de l’efficacité énergétique dans ce secteur.Les actions de ce programme s’inscrivent dans :

• l’amélioration des niveaux de qualification industriels sur lespratiques d’efficacité énergétique par l’utilisation des équipementsappropriés à l’utilisation rationnelle de l’énergie et à haute performanceénergétique ;

• l’optimisation des ratios de consommations d’énergie électrique etthermique ;

• le renforcement des compétences managériales sur la gestionrationnelle de l’énergie, la veille quant à l’application de la réglementationen vigueur et la sécurité des personnes et des biens.

La sensibilisation du Maroc à l’approche de l’économie d’énergie danstous les secteurs était un déclencheur de la mise en place de plusieursprogrammes et de projets intégrés de développement du marché dessystèmes des énergies renouvelables et d’efficacité énergétique. Parmices projets ambitieux et audacieux, on peut citer :

145Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 140: La sécurité énergétique en Méditerranée

• le programme d’électrification rurale globale (PERG) ; l’objectifd’un accès à l’électricité dans le milieu rural arrêté initialement pour 2010a été ramené à 2007, avec 93 % à travers l’extension du réseau et 7 % àtravers l’électrification décentralisée ;

• le programme PROMASOL, programme national de promotion etde transformation du marché des chauffe-eau solaires ; les activités menéespar le CDER se sont articulées autour de 4 axes principaux : (1) la qualitédes équipements et des services, (2) l’accès aux équipements et auxservices, (3) la mobilisation des institutionnels et (4) le sensibilisationde l’opinion publique ;

• le programme national d’utilisation rationnelle du bois de feu ;l’objectif de ce programme mis en place en 2003 par le CDER et leministère de l’Energie et des Mines est de préserver les massifs forestiersen intervenant sur la demande de bois de feu en vue de son optimisation,par la promotion et la diffusion de technologies améliorées économesde bois de feu.

Beaucoup d’enseignements importants ont été tirés de ces programmes,et des orientations stratégiques ont été, par conséquent, mises en place.Il est, par ailleurs, certain que la réussite de tels projets passe avant toutpar une évaluation réelle des consommations énergétiques et un bon pré-diagnostic en termes d’économie d’énergie des systèmes à mettre en place.

Conclusion

Face à un système énergétique régional, voire mondiale, vulnérable,l’efficacité énergétique est devenue une stratégie de développementdurable incontournable. D’où la nécessité de traduire les orientations enactions avec la mutualisation des efforts, chose qui, aujourd’hui, dépassela volonté des pays de la région vers une réalité absolue. D’ailleurs, cesactions ne peuvent voir le jour sans la mise en place inévitable d’uneprofonde rénovation de partenariats pour un développement plus durable.En effet, ces partenariats ne peuvent être fonctionnels que par la miseen commun des compétences et le partage d’expérience qui demeurentla seule solution pour ulever un défi loin d’être simple.

L’avenir dépendra des politiques menées sur le terrain, à l’échellemondiale, régionale et nationale au sein de chaque pays. Il sera lié à une

146 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 141: La sécurité énergétique en Méditerranée

vision à long terme plus sage, à une planification d’économie d’énergieplus stratégique, à des leaderships courageux responsables et à desdémarches participatives pour impliquer la composante humaine, lecomportement individuel et la responsabilité de chacun dans ce que l’onoffre comme avenir à des générations futures. Mais, face aux immensesdéfis d’un développement durable, des efforts locaux pour les pays endéveloppement et émergents nécessitent d’être épaulés par la promotiondes mécanismes d’un développement propre.

Bibliographie

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«Quelle union méditerranéenne ?», Géo-économie n° 42, publié parl’Institut Choiseul, 2008.

«Observatoire d’études géopolitiques », Études géopolitiques 9, éditionsKarthala, 144 p., 2008.

«Quelle union pour quelle Méditerranée ? Observatoire méditerranéende l’énergie (OME)». Energie en Méditerranée, rapport pour le PlanBleu, 2002, 2005, 2006 et 2008 .

Energie et environnement en Méditerranée. Enjeux et prospectives,Economica, 1993, (Les Fascicules du plan Bleu, n° 7).

L’électrification rurale décentralisée au Maroc. Lutte contre l’effet deserre et les changements climatiques, Fonds Français pourl’Environnement Mondial, 2000.

Evolution de la consommation d’énergie dans le Monde, Edition 1995de l’AASA.

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147Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 142: La sécurité énergétique en Méditerranée

148 La sécurité énergétique en Méditerranée

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Géopolis et United Nations Population Division, World UrbanizationProspects. Révision 2005 .

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L. Urdy pour le Plan Bleu d’après World Bank Decentralization databaseet sources nationales pour les pays de la méditerranée, 2002.

Résultats du Modèle CMIP-3 sur les variations climatiques mondiales,Giorgi, 2007.

Les perspectives du Plan Bleu sur le développement durable enMéditerranée, édition 2008.

Plan Bleu, 2007, Stratégies méditerranéennes et nationales dedéveloppement durable. «Efficacité énergétique et énergierenouvelable au Maroc », etude nationale,Mohamed Berdai, CDER.

Etude du cadre réglementaire de l’Eolien au Maroc (Banque Mondiale– Ministère de l’Energie et des Mines, 2007).

Développement énergétique au Maroc depuis 1955 ; perspectives 2025,Mounir Debbagh, 2005 ;

Etude du marché de l’environnement au Maroc. Analyse et perspective,(Ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Eau et del’Environnement, 2007).

«Pétrole et pays importateurs en Développement : cas du Maroc » (IEPF,liaison énergie, 1er trimestre 2006, A. Benchekroun, A. Haddouche),2006.

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Page 143: La sécurité énergétique en Méditerranée

Le New deal Europe

• L’objectif de cette communication est de répondre à plusieursattentes :

1. Un projet répondant aux exigences de développement national pour :– ramener le pays au niveau de développement de la région Euro-MED;– Faire sortir l’économie du pays de la dépendance vis-à-vis des

hydrocarbures ;

2. Un projet précis qui peut s’inscrire dans le cadre de l’UpM.

3. Un projet s’inscrivant dans la dimension maghrébine et africainedu pays.

En fait, un projet qui puisse dans cette période de morosité globaliséefaire rêver la jeune génération actuelle.

En résumé, un projet qui puisse s’inscrire dans les perspectives dedéveloppement national, régional et même continental.

Un projet réaliste et suffisamment ambitieux pour être mobilisateur.Pour cela, il faudra exploiter au mieux les opportunités existantes commecelle de l’UpM dans la mesure ou les intérêts des 2 rives soient partagéeset qu’elles s’inscrivent dans un véritable changement.

Défis à releverInverser le cycle du changement climatique pour transformer la région

en New Numedia.

Nouvelles oasis dans le désert et inverser ainsi le cycle d’immigrationceci en :

Premières assises nationalesdu développement durable en Méditerranée

Tawfik HASNI*

(*) Président du Conseil d’Administration de Hamoud BOUALEM.

Page 144: La sécurité énergétique en Méditerranée

• Inversant le cycle de la désertification ;

• Inversant le cycle de la déforestation.

Ce Programme car cela en est un, peut être considéré comme leprogramme de développement durable du millénaire.

Nous le saisirons dans sa globalité pour bien en cerner les dimensions,puis pour être pragmatique nous définirons le premier projet qui peutêtre arrêté dans le cadre du «Plan solaire » de l’UpM.

Le Wale Saharian project est un programme en plusieurs phases, Ilambitionne de transformer la région du Souff en premier par le projetNew Numedia et ensuite sur près de 1 800 km une bande désertique enune vaste oasis avec un développement intégrant :

– l’énergie ;

– l’eau ;

– l’agriculture ;

– le tourisme ;

– l’industrie solaire ;

– la recherche et le développement solaire (technopole solaire).

Il abordera aussi le problème du financement.

Etat des deux rives

Nous nous proposons de présenter l’état des 2 rives en focalisant surles 5 pays européens et les 5 pays de la rive sud (Maroc-Algérie-Tunisie-Libye-Egypte) ceci au plan économique global, nous aborderons d’unefaçon plus détaillée ensuite :

– l’énergie ;

– l’eau ;

Nous proposerons par la suite un programme de développementsoucieux de préserver la durabilité.

Bilan économique global

Le bilan provient du Rapport du développement économique sud-méditerranéen élaboré par Eco-Med.

150 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 145: La sécurité énergétique en Méditerranée

151

Nous présenterons les aspects :– économiques : PIB-IDE;– évolution démographique ;– exportations/importations agricoles.

PIB par habitant en dollars (Source FMI)

Les PSM ont un PIB/h PPA 6 fois inférieur à celui de la zone euro,en 13 ans cet écart s’est creusé de 60 %.

Les taux de croissance moyens de la population dans les PSM entrel’année 2000 et 2007

1,5 % 1,5 % 1,3 % 1,1 % 0,9 % 1,3 %

Egypte Libye Algérie Maroc Tunisie PSM

Sans s’attarder sur les chiffres, synthétisons l’évaluation économiqueque fait l’UE de la rive sud.

Nous constatons la dichotomie au plan économique du Maghreb etdu Machrek.

En ce qui concerne le Maghreb hors Mauritanie (non médit.), il fautconstater qu’il y a un autre clivage entre les pays qui ont atteint les objectifséconomiques retenus par l’UE pour les pays du Maghreb, à savoir doublerleur PIB actuel comme la Libye ou en voie de le faire comme l’Egypteet le reste qui, avec le Maroc, l’Algérie et la Tunisie, partage une histoirecommune : « l’ancienne Numidie ».

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Libye Tunisie Algérie Egypte Maroc PSM

12 277 7 473 6 533 5 491 4 076 5 840

Page 146: La sécurité énergétique en Méditerranée

Le New Deal

En effet les 3 pays souffrent :

– d’une économie mal engagée ;

– de ressources humaines inadéquates par rapport aux besoins.

L’Algérie semble être des trois le seul pays bénéficiant d’une aisancefinancière.

Il s’agit, au moment où le système mondial actuel atteint ses limiteset où le «We can » devient le slogan partagé par tous les grands décideurs,de proposer d’amorcer le changement salutaire qui puisse augurer d’unvéritable développement durable dans la région. L’UpM pourrait être lesbases d’un New Deal.

Cependant, pour être pragmatique et se donner les chances du succès,nous proposons que ce New Deal commence par un projet-pilote : le projetNew Numedia.

Les grandes lignes du New Deal

Pour un développement durable partagé, il faut :

• partager le travail : des études récentes montrent qu’il faudra dédierà la rive sud certaines filières industrielles comme les industries solaires,les filières textiles, certains services, etc.;

• partager le savoir : le développement de ces filières industriellesnécessitera un partage du savoir technologique ceci par un développementde technopoles, véritable partenariat du savoir et de l’industrie ;

• partager une vision de l’avenir énergétique : le potentiel d’énergieen général est important, celui des énergies vertes au Maghreb estcertainement l’un des plus importants au monde.

Ressources nécessaires

Le résultat des études d’Eco-Med montrent que les pays du Maghrebdevraient doubler leur PIB pour rattraper la rive nord. Les ressourcesnécessaires pour cela sont fondamentalement :

• les hommes : le développement c’est d’abord le savoir, un Erasmusspécifique peut être la solution ;

152 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 147: La sécurité énergétique en Méditerranée

153

• les finances : il devient évident si avant la crise financière lamobilisation des crédits était difficile, même en Algérie, aujourd’hui c’estplus complexe.

Le Financement

Le financement reste la contrainte majeure, il faut faire preuved’imagination. Les besoins peuvent êtres sériés comme suit :

• Les PME : le développement sera porté par les PME en partenariatrive nord-rive sud, un fonds capital-risque fera effet de levier pourcautionner le financement des besoins complémentaires, mais pour réduireles frais financiers, le fonds devra être partagé entre la BEI et le Trésordu pays maghrébin concerné (délocalisation-relocalisation) ;

• les Infrastructures : le financement des infrastructures devra se faireen grande partie par la BEI et les Etats concernés, à taux bonifié ou àtaux zéro ;

• les projets structurants : un projet réellement innovant répondant auxattentes est la base de ce New deal, un projet de partenariat public-privéqui peut mobiliser des financements encore disponible compte tenu del’importante crise actuelle.

Besoins en énergie électrique de la Rive sud

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

EgyptLibyaTunisiaAlgeriaMarocNorth Africa

Co

nsu

mp

tio

n (k

Wh

/cap

/y)

2000 2005 2010

0

1 000

2 000

3 000

4 000

5 000

6 000

2015 2020 2025 2030 2035 2040 2045 2050

Page 148: La sécurité énergétique en Méditerranée

154 La sécurité énergétique en Méditerranée

Situation hydrique de la région

Nous aborderons l’évaluation de la situation sous les aspects :

– des besoins hydriques ;

– de l’impact du changement climatique ;

– de la désertification qui s’étend.

2000 2005 2010 2015 2020 2025 2030 2035 2040 2045 2050

Co

nsu

mp

tio

n (k

Wh

/cap

/y)

0

1 000

2 000

3 000

4 000

5 000

6 000

7 000

8 000

CyprusGreeceMaltaItalySpainPortugalMediterranean EU

Besoins en énergie électrique de la Rive nord

2000 2005 2010 2015 2020 2025 2030 2035 2040 2045 2050

Wat

er C

on

sum

pti

on

(Bm

3 /y)

0

100

200

300

400

500

600

Natural Water UsedWastewater reusedFossil Fuel Desalination

Groundwater Over-UseCSP DesalinationEfficiency Gains

Middle East et North Africa

Page 149: La sécurité énergétique en Méditerranée

155

Les glaciers auront disparu d’ici 2100

Un rapport du Programme des Nations Unies pour l’environnementmontre qu’au rythme actuel du réchauffement climatique, les glaciersdu monde entier auront fondu d’ici à la fin du siècle, ce qui devrait mettreen danger l’approvisionnement en eau de centaines de millions depersonnes et provoquer de graves répercussions sur l’environnement.

Situation énergétique de la région

– Nous donnerons une brève présentation des besoins énergétiquesde la région à moyen et long terme, sachant qu’un atelier sera consacréà l’Energie.

– Nous ferons aussi rapidement le point sur les différentes sourcesd’énergie : fossiles, renouvelables et nucléaire.

Potentiel des énergies fossiles et nucléaire

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 150: La sécurité énergétique en Méditerranée

156 La sécurité énergétique en Méditerranée

Evolution du prix de l’électricité

Coûts à l’investissement des centrales électriques

(Source : DLR ACTUALISED)

Page 151: La sécurité énergétique en Méditerranée

157Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Criteria for sustainability and portfolio of technoloqies endresources for poxer generation

Les énergies renouvelables

Page 152: La sécurité énergétique en Méditerranée

Potentiel solaire de l’Algérie

• Le potentiel solaire en chiffres :

– Solaire thermique = 10 fois la consommation globale mondiale.

– L’équivalent de 10 champs comme Hassi R’Mel par an.

– Potentiel d’export d’ici 2025: 12 000 MW.

– Le potentiel technique de 169 800 TWH/an

– C’est l’exploitation des seules surfaces indiquées en couleur sur lacarte.

– Il recouvre l’emplacement de nos gisements pétroliers et gaziersau sud.

Approvisionnement de l’Europe en énergie

• Le réseau HVDC représenté sur la diapo précédente offre :

– La sécurité d’approvisionnement avec un potentiel de 24 000 MWd’ici 2025, soit l’équivalent de 50 milliards M3/an Gaz Nat.

– La fiabilisation du réseau européen avec une ligne HVDC enparallèle.

Par ailleurs notre approche assure la prédictibilité des capacitésénergétiques qui seront réalisées à partir du solaire thermique, ce qui n’estpas le cas des autre filières d’énergie renouvelable. Comme elle assureune stabilité des prix à long terme et une sécurisation aisée du réseauproposé à la réalisation.

Ce projet c’est aussi 50 millions de tonnes de CO2 d’évités.

Les attentes

• Pour l’Algérie, un projet de développement ambitieux relançantl’économie sur de nouvelles bases et réduisant sa fragilité actuelle comptetenu de sa forte dépendance vis-à-vis des hydrocarbures tout encontribuant aux mutations culturelles et à la formation de la ressourcehumaine qui reste la fondamentale de tout développement.

• Pour l’Europe, un espace économique élargi indispensable face àla crise financière actuelle. Une réponse à sa vulnérabilité résultant deses besoins croissants en énergie.

158 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 153: La sécurité énergétique en Méditerranée

New Numedia Project

• Le projet prévoit la réalisation des infrastructures nécessaires pourtransformer la région du Souff à l’image de la Californie.

L’Energie sera fournie par une centrale solaire 800MW (80 % solaire20 % gaz)

• L’Eau proviendra de 2 sources : l’Albien et le projet de dessalementde 500 000M3/J à partir d’une ligne de 350 km tirée de la baie de Gabès.

Objectif : Développement hors hydrocarbures

• Le développement sur la base de Zero-Emission touchera :

– l’agriculture avec la reforestation du désert ;

– l’énergie certes avec le solaire mais aussi la plantation de gétrophasur la périphérie de la bande verte avant la ligne forestière protégeantles serres et les autres plantes adaptées aux conditions sahariennes ;

– le tourisme avec la construction d’un lac artificiel pour stocker l’eaude mer, le tourisme balnéaire et la thalassothérapie pour aider à financerle projet, l’optimisation du tourisme balnéaire et du tourisme saharienrentabiliseront l’ensemble ;

– la pisciculture dans le lac ;

– etc.

• L’eau devrait provenir de la récupération des eaux de l’Albien. Il y adéjà le rejet de 400 000M3/j à dessaler.

• Les limites de soutirage de l’Albien doivent être compensées parle dessalement d’eau de mer à pomper en Méditerranée. C’estpratiquement le coût d’un barrage qui doit être financé dans le cadre del’UpM. Ceci offrira des quantités sans limites pour le dessalement.

• Ce projet n’a rien à voir avec le projet français de la période colonialequi, lui, prévoyait de creuser un canal du chott jusqu’à la baie de Gabèsen occultant la catastrophe écologique qui en aurait découlé.

• La ligne d’eau de mer devra être dimensionnée en conséquence. Lasuite du WALE programme amènera à prolonger la ligne vers le sud (enAlgérie et pays sahariens) en aménageant d’autres lacs de stockage d’eautout le long sur les 1 800 km.

159Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 154: La sécurité énergétique en Méditerranée

Objectif : Ressources humaines

• L’Industrie et la recherche seront localisés dans un technopole dédiéau solaire et partie prenante du projet avec son université, ses centres derecherche et une plateforme industrielle de l’industrie solaire.

• Un technopole sur l’agriculture saharienne.

• Un technopole sur le traitement des eaux.

Le financement

• Le financement de ce programme devra être approché différemmentselon les investissements d’infrastructure et les projets industriels et detourisme.

• Pour l’infrastructure : ligne eaux de mer, aéroport, voies ferrées, lacde stockage, ce seront des financements garantis par l’Etat mais à tauxbonifiés ou 0, par la BEI sur une période de 25 ans.

• Le financement des projets serait en project financing (BOOT). Lesprojets de tourisme devraient supporter les autres projets pour respecterle principe de l’éco-tourisme.

• Le projet UpM devrait apporter une réponse à ces attentes.

• Les fonds arabes pourront aider au financement.

• Nous utiliserons aussi le marché des droits d’émission qui pour unefois sera réellement adapté à une réduction effective des émissions degaz à effet de serre.

• Les partenariats publique-privé algériens seront de mise pour lesjoint-ventures industrielles du solaire. La part des biens et servicesalgériens devra être négociée avec un plancher de 33 %.

• Le consortium à l’investissement capitalistique dans le domaine del’énergie export de l’électricité solaire devra voir la participation duministère de l’Energie et des Mines pour le tiers bloquant, depuis lescentrales solaires jusqu’à la commercialisation sur le marché européen.Il faudra pour cela lever les contraintes existantes pour le ministère del’Energie et des Mines afin d’accéder au marché européen.

• Ceci doit trouver sa réponse dans l’étude de faisabilité qui devraitêtre financée par le programme de l’UpM.

160 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 155: La sécurité énergétique en Méditerranée

L’Energie

• Nous avons relevé les besoins énergétiques requis pour coller aurythme minimum de développement pour doubler notre PIB.

• Les centrales solaires devront contribuer pour une plus grande partiede nos besoins pour arriver à satisfaire la majeure partie de besoinsélectriques à terme.

• Nous devrons utiliser des hybrides avec le gaz et aller sur les champsmarginaux de gaz pour une meilleure valorisation. De toute façon,l’épuisement des gisements de gaz rendra cette option techniquementobligatoire.

• Plus tôt nous mettrons en œuvre cette option et plus importante serala quantité de gaz préservée pour le futur.

• Nous intégrerons par là même cette option dans la stratégied’exportation d’énergies, en offrant de l’électricité solaire à la place dugaz.

• Le projet solaire de l’UpM servirait à mettre en œuvre cette option.

• Il représenterait une source de diversification et surtout unesatisfaction de besoins énergétiques importants pour l’Europe, tout encontribuant à assurer les objectifs du millénaire.

• Il représenterait aussi la meilleure option d’un développement durablepartagé entre les 2 rives.

• Il sera ainsi la meilleure contribution pour répondre aux problèmesdu changement climatique pour un coût des plus bas.

• Le potentiel de 24 000MW pour l’export sera accolé au programmeavec une première tranche de 6 000 MW intégrée dans le projet NewNumedia.

Conclusion

• WALE vient du nom du robot du film WALE.

L’idée est de montrer qu’il serait plus facile de réaliser le Wale Saharianprogramme que d’aller sur MARS. Il y a tant de choses encore à fairesur terre qu’il est nécessaire de la préserver. Ce sera certainement moinscoûteux.

161Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 156: La sécurité énergétique en Méditerranée

162 La sécurité énergétique en Méditerranée

Le programme pourrait être développé sur l’ensemble du Saharaafricain et répondre aux attentes du millénaire en matière dedéveloppement durable.

L’eau de mer devrait être disponible, surtout avec la fonte de la calotteglaciaire.

Les effets climatiques seront tels qu’il sera possible d’inverser le cycleet ramener les moussons de pluie. Le Sahara redeviendra vert, n’est-cepas un rêve de paix et d’espoir pour nos enfants ?

Le projet New Numedia constitue la réponse inéluctable aux attentesde l’UpM : un projet maghrébin et plus tard africain. Un projet réalisteet réalisable.

Ce projet permettra de traduire dans les faits les volontés politiquesde partenariat équitable entre les 2 rives.

Page 157: La sécurité énergétique en Méditerranée

Le développement récent des technologies des énergies renouvelablesa permis une grande amélioration dans les rendements techniques etéconomiques des équipements et des investissements et un saut importantdans la fiabilité des installations. Ces technologies présentent, tout aumoins pour une grande partie des composantes, une bonne aptitude autransfert, une aptitude qui constitue, dans certains cas, une exigencetechnologique et économique.

Les énergies renouvelables présentent une chance pour l’humanitéen général et pour les peuples des régions bien ensoleillées et bien ventées,telles que la nôtre, en particulier, pour démarrer un développement durableet global.

Une coopération Nord-Sud volontariste et bien programmée dans ledomaine des énergies renouvelables sera certainement fructueuse et mettraen exergue les synergies et les complémentarités naturelles entre lesrégions et réduirait sensiblement le fossé qui sépare les pays industrialisésdes pays en développement, renforçant ainsi les chances de l’humanitéd’atteindre un avenir meilleur pour tous.

La consommation d’énergie primaire mondiale est dominée par lesénergies fossi les , avec des conséquences économiques etenvironnementales de plus en plus signalées : coûts croissants, niveaulimité de sécurité énergétique, concentration des réserves dans des régionslimitées et contribution à la pollution locale et aux changementsclimatiques, dont les impacts pourraient être dramatiques.

(*) Professeur, chercheur en énergie.

La problématique de l’énergie dansses différentes dimensions :Une tentative d’évaluation

Abdelaziz Bennouna*Driss Zejli et Rachid Benchrifa

Page 158: La sécurité énergétique en Méditerranée

L’évolution du prix de pétrole ces dernières années, et en particulierces derniers mois, montre la grande tension qui règne sur le marché dupétrole et qui tire avec force les prix des autres vecteurs énergétiques.Cette tension qui résulte, d’un côté, d’une demande toujours enaugmentation et, de l’autre côté, d’une production qui la suit avecdifficulté, signale très probablement que nous approchons du maximumde la production pétrolière [1].

A la base des données récentes [2], la consommation du pétrole en2007 était supérieure à la production. Le prélèvement sur les stocks depétrole et des produits pétroliers chez des industriels, des intermédiaires,des commerçants et des Etats pour couvrir la différence entre laproduction (3 905,9 Mtep) et la consommation (3 952,8 Mtep), soitl’équivalent de plus de 4 jours de consommation, a réduitconsidérablement l’élasticité du marché, ce qui a donné l’envolé des prixdu pétrole durant la première moitié 2008.

La récession économique a fait chuter la demande en pétrole et aabsorbé la tension. Ainsi le prix du baril a perdu avant la fin 2008 75 %de son prix maximal (147$) réalisé au mois de juillet et stagne ces4 derniers mois autour de 40$ (décembre 2008-mars 2009).

Certains responsables trouvent que c’est l’occasion pour abolir ou auminimum réduire les efforts pour le développement des énergiesrenouvelables, d’autres trouvent que c’est plutôt l’occasion d’accélérerleur introduction.

A. Le système énergétique actuel : caractéristiquesquantitatives

Quelques définitions d’abord

– Les sources d’énergie primaires sont les sources énergétiques tellesqu’elles se présentent dans la nature. Les interventions de l’homme sontlimitées à leur extraction et leur transport lorsque c’est possibles. Cesressources sont :

• les ressources fossiles :

– les ressources fossiles conventionnelles : pétrole, charbon, gaznaturel ;

164 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 159: La sécurité énergétique en Méditerranée

– les ressources fossiles non conventionnelles : schistes bitumineux,sables asphaltiques, huiles lourdes, etc.;

– les ressources nucléaires fissiles : uranium, thorium...;

– les sources d’énergie renouvelables : rayonnement solaire,biomasse (bois de feu, bouse de vache, etc.), vent, chutes d’eau (énergiehydraulique), énergie géothermique, énergie des vagues, énergie desmarées, etc.;

• les ressources non conventionnelles d’énergie : déchets organiqueset non organiques, soufre, etc.

– La consommation totale en énergie primaire : c’est la somme desconsommations de l’ensemble des sources et ressources mentionnéesd’une façon commerciale et non commerciale. La part non commerciale(importante dans les pays en voie développement) représente en généralce qui est appelé communément : la consommation traditionnelle de labiomasse. Pour cette consommation, il n’y a que des estimations. Dansle cas du Maroc, elle est de l’ordre de 9 millions de tonnes de bois, cequi représente environ 3 millions de tonnes équivalent pétrole, soit environ25 % de la consommation nationale totale en 2006 (environ 15 millionsde tep).

– Les vecteurs d’énergie secondaire : sont les produits destransformations des ressources d’énergie primaire ou d’autres vecteursd’énergie secondaire. Ces vecteurs sont : les produits pétroliers, le charbonde bois, l’électricité, etc.

– L’électricité : est le vecteur d’énergie secondaire le plus important.Il y a des procédés pour transformer pratiquement n’importe quelle sourced’énergie primaire ou secondaire, directement ou indirectement, enélectricité. Certains auteurs utilisent l’expression électricité primaire pourindiquer que l’origine de cette électricité est soit nucléaire soithydraulique, vu que ces deux sources d’énergie primaire ne sonttransformées pratiquement qu’en électricité.

L’état actuel du secteur de l’énergie primaire

L’état de la consommation de l’énergie primaire (EP) aux deux niveauxmondial et national est présenté dans le tableau 1.

165Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 160: La sécurité énergétique en Méditerranée

166 La sécurité énergétique en Méditerranée

Le secteur de l’énergie primaire peut être caractérisé par :

1. Une dominance des ressources fossiles d’énergie dans la couverturede la demande mondiale totale en énergie primaire. La consommationdes ressources fossiles d’énergie était de 9,555 milliards de tonneséquivalent pétrole (Gtep) sur une consommation totale d’énergie primaireestimée à la base des données de l’Agence internationale de l’energie(AIE) et BP pour l’année 2006 à 12 Gtep [3, 4]. Ainsi, les ressourcesfossiles représentent environ 80 % de ladite consommation.

2. Une tension structurelle sur le marché du pétrole, ce qui se traduitpar une hausse importante suivie d’une récession économique, une chutede la demande, une chute des prix, une chute des investissements dansla prospection et la R&D pour reprendre avec une hausse, plus importante

Tableau 1

La consommation d’énergie primaire totale 2006 [3-5]

Maroc Monde

Sources Mtep %énergie % EP Mtep %énergie % EPcommer. totale commer. totale

Pétrole 7729 59 48 3890 35,5 32,3

Charbon 3891 29,7 24,2 3090 28,3 25,8

Gaz 485 3,7 3,0 2575 23,6 21,4

Somme Ress. fossiles 12105 92,4 75,2 9555 87,4 79,5

Nucléaire – – – 63 5,5 5,8 5,3

Import. électricité 524 4 3,3

Somme non renouvelable 12639 96,4 78,5 10190 93,2 84,8

Hydraulique 419 3,2 2,6 688,1 6,3 5,7

Vent 52,4 0,4 0,33 55 0,5 0,46

Somme ener. comme. 13110 100 81,4 10933 100 90,9

Est biom.+déchets + etc. 3000 – 18,6 1100 9,1

Somme EP 16100 0,13* 100 12033,6 100

EP com./hab. (tep) 0,430 25,7* 1,674

EP tot./hab. (tep) 0,528 29,1* 1,815

* Par rapport à la consommation mondiale correspondante.

Page 161: La sécurité énergétique en Méditerranée

167

des prix que la précédente (151). Parmi les raisons de cette instabilité,deux causes principales doivent être soulignées :

Le volume annuel des découvertes pétrolières est en déclin continu,il est devenu inférieur à la consommation annuelle depuis plus de vingtans (figure 1) [1]:

Figure 1Volume de la production et des découvertes annuelles

du pétrole conventionnel

Des experts pensent que la production pétrolière maximale au niveaumondial ne tardera pas à être constatée, après qu’elle ait déjà été dépasséeau niveau national par plusieurs pays [1].

Les découvertes les plus importantes, qui ont eu lieu aux USA, enArabie saoudite et dans d’autres pays grands producteurs de pétrole datentde la première moitié du 20e siècle. Pour les pays qui sont aussi des grandsconsommateurs, le maximum de la production annuelle n’a pas tardé àse manifester. Aux USA il a été observé (tel qu’il avait été prévu en 1956par Hubbert) en 1970.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

(151) Le prix à la fin de la hausse des années 70 était 38 $US pour la moyenne de l’année1980, en 2008 le prix moyen était d’environ 82 $US.

Past Discovery

Futur Discovery

Production

Revisions backdated.Rounded with 3yr movingaverage.

1930 1950 1970 1990 2010 20502030

0

10

20

30

40

50

60

Gb

/a

Page 162: La sécurité énergétique en Méditerranée

La production pétrolière maximale au Royaume Uni était de 1,06milliard de barils en 1999, depuis, elle est en diminution continue.En 2006, le Royaume Uni, avec une consommation de 0,652 milliard debarils, est redevenu importateur de pétrole.

Dans le cas de l’Arabie saoudite et pour des raisons techniques etpolitiques, la grande production (plus de 10 millions de barils par jour)du début des années 80 et depuis 2003 ne représentait que 3 % du volumedu gisement géant découvert avant 1950. Ceci permet à ce pays une duréede production relativement longue et probablement une valeur maximalede production encore plus élevée que celle du début des années 80(3,748 milliards de barils en 1980) pour les années à venir.

L’arrivée de nouveaux grands consommateurs à la fin du 20e siècle acreusé davantage le fossé entre les découvertes et la production et misen exergue l’impossibilité de couvrir les besoins en énergie de toutel’humanité d’une façon durable. La Chine, le 1/5 de la populationmondiale, a démarré cette dernière décennie un développementéconomique explosif, qui se reflète dans un développement comparableau niveau de la consommation de l’énergie primaire et des vecteursénergétiques principaux : pétrole charbon et électricité. Cetteconsommation a enregistré pour la période 2001-2006 une augmentationd’environ 70 % pour l’énergie primaire, environ 53 % pour le pétrole etenviron 100 % pour l’électricité [3].

L’impact de ce développement sur le commerce international du pétroleest très grand, vu que les importations pétrolières de la Chine ontpratiquement triplé durant la même période, et elles représentaient 7,4 %des importations mondiales en 2006 (3,2 % en 2001). Alors qu’au débutdes années 90, la Chine était encore un pays exportateur de pétrole !

En 2006, la consommation chinoise de pétrole était de 349,8 millionsde tep (Mtep) et les importations de 19 1,7 Mtep [3]. L’augmentationpar rapport 2005 était de 6,7 % pour la consommation et de 31,1 % pourl’importation.

Cette situation mondiale ne peut être changée rapidement pour deuxraisons :

168 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 163: La sécurité énergétique en Méditerranée

169

1. La probabilité de découvrir de nouveaux gisements pétroliers géantsou de nombreux petits gisements avec un volume total considérable esttrès faible. La figure 1 montre que le volume total des nouvellesdécouvertes annuelles depuis la fin des années soixante a une tendancedécroissante. Ainsi l’épuisement des réserves en pétrole ne peut ques’accélérer.

2. On ne peut pas s’attendre à un arrêt proche de l’augmentationdémographique ou à une saturation de la demande en pétrole des paysémergents et, par la suite, à une stagnation et encore moins à unediminution de celle-ci. La saturation de la demande en pétrole n’est mêmepas atteinte pour la majorité des pays industrialisés, qui ont déjà un niveaude consommation par habitant très élevé. La Chine et les pays qui sontsur la liste d’attente du développement, lorsqu’ils se lancent dans leprocessus de développement (et par conséquent de la consommationd’énergie) ce n’est pas pour s’arrêter demain. La figure 2 [6] donne uneprésentation (symbolisée !) de la répartition de la consommationd’énergie primaire dans le monde.

Figure 2

Présentation géographie de la consommationd’énergie primaire par pays [6]

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 164: La sécurité énergétique en Méditerranée

170 La sécurité énergétique en Méditerranée

Le graphique expose d’une façon flagrante la pauvreté africaine.L’Afrique est moins que maigre sur cette carte, et même lorsque laconsommation par habitant n’est pas prise en considération!

Si les réserves prouvées en pétrole et en gaz naturel sont limitées etne présentent que 40 à 60 fois la consommation annuelle actuelle, il n’enest pas de même pour les réserves en charbon et encore moins pour lesréserves fossiles non conventionnelles. Les réserves en huiles lourdes,sables asphaltiques et schistes bitumineux sont plusieurs fois supérieuresaux réserves en pétrole.

Les réserves en hydrates de méthane (estimées à 4 000 Gtep) sont à ellesseules plusieurs fois supérieures aux réserves prouvées de l’ensemble desressources fossiles conventionnelles. Les hydrates de méthane se trouventsous forme de glace, qui dégage le contenu en méthane pendant la fusion.

Pour les réserves prouvées et économiquement exploitables enressources fissiles (coût d’exploitation inférieur ou égal à 130 $US par kg),le rapport entre le volume de ces réserves 4,6 Mt (Tableau 2) [7] et laconsommation annuelle, en se basant sur la demande en 2006 qui étaitd’environ 70 000 tonnes, est de 75. Ce rapport est du même ordre quecelui relatif aux réserves prouvées des ressources fossiles conventionnellespétrole et gaz naturel. Mais il faut prendre en considération que la partdu nucléaire dans la couverture de la demande mondiale en énergieprimaire est seulement d’environ 5 % et que la part nucléaire dans laproduction d’électricité est d’environ 15 %. Cette dernière est inférieureà celle de l’hydraulique, qui est de 17 %.

Kt %

Australie 1 058,0 23,1

Kazakhstan 847,6 18,5

Canada 435,5 9,6

Afrique du Sud 395,7 8,6

Etats-Unis 345,0 7,5

Autres 1 503,2 32,7

Total 4 588,0 100

Tableau 2

Les réserves en uranium récupérables à un coût < 130$US/kg

Page 165: La sécurité énergétique en Méditerranée

171

A la base de la technologie de la quatrième génération des réacteursnucléaires de fission (une technologie qui valorise beaucoup mieux lecombustible et qui pourrait être disponible au niveau industriel vers l’an2050!), le rapport réserve/production annuelle serait multiplié par 60.Mais d’ici 2050, une bonne partie des 4,6 Mt de réserve sera épuisée.

Sous ces conditions, la question se pose : pourquoi on propose à despays en voie de développement des centrales nucléaires « classiques »?Sachant qu’une augmentation considérable de la puissance nucléaireinstallée dans le monde réduirait sensiblement la durée de vie des réservesfissiles économiquement exploitables, augmenterait considérablement lecoût du combustible et créerait des tensions sur le marché de l’uranium,une tension qui est déjà là, le prix de la livre (453 grammes) d’uraniuma augmenté de 74 % durant le premier tiers de l’année 2007, il se situaità 113 $US le mois d’avril 2007, ce qui représente déjà plus de 190 % duprix le plus élevé du tableau 2. Depuis le prix a chuté, mais certainementpas pour longtemps, vu que la production est inférieure à la demandedepuis 1990 (figure 4).

Figure 4

Ratio de la production par rapport à la demandeen uranium [7]

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

1980 1985 1990 19950,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5

2000

Pro

du

ctio

n d

’ura

niu

m/b

eso

ins

des

cen

tral

es

Page 166: La sécurité énergétique en Méditerranée

Pour la technologie très prometteuse et qui devrait libérer l’hommedes angoisses d’un manque en ressources énergétiques, le Mondepubliait le 4/4/2008 une enquête d’où on peut tirer : le chemin qui conduirapeut-être, un jour, à disposer d’une énergie issue de la fusionthermonucléaire reste encore long. Si tout va bien, ITER (InternationalThermonuclear Experimental Reactor) entrera en fonctionnementen 2018, pour vingt ans. Cet outil expérimental, destiné à établir “lafaisabilité scientifique et technique de la fusion thermonucléaire”, neproduira pas d’électricité. Ce sera la tâche de son successeur, ledémonstrateur Démo, vers 2040. Un prototype industriel n’est pasenvisagé avant 2060, et un éventuel déploiement de réacteursopérationnels, que les scientifiques faisaient naguère miroiter pour lemilieu du siècle, n’est plus à espérer avant 2070 ou 2080.

Est-ce que l’humanité peut attendre la fin du 21e siècle pour résoudreles problèmes de l’approvisionnement en ressources énergétiques ?

B. Le système énergétique actuel : caractéristiquesqualitatives. Les impacts des ressources fossiles

Les impacts de la valorisation énergétique des ressources fossiles surl’environnement peuvent êtres divisés en deux catégories : une avec desimpacts plus ou moins techniquement «évitables » et une autre où lesimpacts sont à l’état actuel et prévisible techniquement « inévitable ».

L’impact à l’exploitation : « évitable »

L’impact lié à l’exploitation et au transport des ressources fossilescommence sur les sites des gisements. Les espaces dépourvus de touteforme de vie sur de nombreux champs de pétrole et l’aspect lunaire dessites miniers de charbon et de lignite à ciel ouvert en témoignentclairement. Il est certain que ce type d’impact a diminué considérablementdans la dernière décennie.

Pollution liée à la valorisation énergétique : « évitable »

Pour réduire cette pollution, les efforts commencent déjà dans lapréparation des combustibles. Par exemple, pour les émissions de dioxydede soufre (SO2), le plus important des gaz engendrant l’acidité des pluies,la photo dans la figure 5 montre l’effet des pluies acides sur la forêt. La

172 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 167: La sécurité énergétique en Méditerranée

mise sur le marché des combustibles pauvres en soufre diminuesensiblement ces émissions. L’application des procédés d’absorption oud’adsorption de SO2 à partir des gaz de combustion dans les centralesélectriques à charbon a le même effet.

La pollution « inévitable » liée à la valorisation énergétiquedes ressources fossiles

Le CO2 : effet de serre et changement climatique

Le CO2 est une composante atmosphérique en trace et sa présenceest vitale à deux niveaux.

Il est une composante incontournable du cycle de carbone, qui encomplémentarité avec d’autres cycles (d’eau, d’azote, etc.) a permisl’évolution de la vie sur terre et par la suite le développement de la sociétéhumaine.

Il est une composante déterminante des gaz à effet de serre.L’utilisation énergétique des combustibles fossiles (charbon, pétrole etgaz) et le changement dans la couverture végétale engendrent desémissions de CO2 qui s’accumule dans les océans et dans l’atmosphère.

La moyenne annuelle de la concentration atmosphérique du CO2 estpassée de 282,9 ppm (part par million) au démarrage de la révolutionindustrielle au début du dix-neuvième siècle, à 383,72 ppm pour lamoyenne de l’année 2007 [10], soit une augmentation d’environ 36 %.

De plus, l’augmentation de ladite concentration s’accélère d’une façoncontinue. La moyenne de l’augmentation annuelle est passée de 0,76 ppmpour la moyenne des années 1959-1963, à 2,28 ppm pour la moyennedes années 2002-2007.

L’effet de serre est vital. Sans cet effet, la température moyenne surTerre aurait été inférieure à son niveau actuel de plus de 13 °C et la vie,telle que nous la connaissons, n’existerait pas. Mais l’augmentation dela concentration du CO2, et des autres gaz à effet de serre provoque uneaugmentation continue de la température moyenne, ce qui présente degrands dangers pour la vie.

Les mesures ont montré que l’augmentation de la moyenne detempérature durant les trois dernières décennies est d’environ 0,6 °C, ce

173Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 168: La sécurité énergétique en Méditerranée

174 La sécurité énergétique en Méditerranée

qui représente un supplément de 4,6 % par rapport à l’augmentationoriginale naturelle (13 °C).

Cette augmentation, pour le moment encore en deçà de l’augmentationattendue si l’humanité ne change pas de comportement, a déjà provoquédes effets alarmants. Les images dans la figure 7 présentant l’exemplede la fonte d’un glacier dans les Alpes mettent en exergue l’enverguredes effets au niveau de la fonte des glaciers à travers le monde.

Un autre aspect des changements climatiques provoqués parl’augmentation de la concentration des gaz à effet de serre, est lechangement des volumes et des répartitions temporaires et spatiales desprécipitations. Il paraît que l’Afrique et les pays riverains de laMéditerranée forment une région qui est touchée plutôt par unediminution des précipitations (figures 8 et 9).

Le bassin versant du fleuve Ourgha, au nord-ouest du Maroc, est l’undes bassins les plus arrosés du pays. Sur ce fleuve, le plus grand barragedu Maroc a été mis en service en 1997, (barrage Al Wahda). Les mesuresde l’écoulement annuel au niveau du site du barrage sont représentéesdans la figure 8.

Figure 8

Evolution de l’écoulement au niveaudu site Al Wahda [11]

1940 1950 1960 20001970 1980 19900

3

6

9

A p p o r t m o y e n : 2 6 7 7 M m 3

Eco

ule

men

t an

nu

el e

n m

illia

rds

de

m3

Page 169: La sécurité énergétique en Méditerranée

175

Selon les données de la Direction générale de l’hydraulique, la valeurmoyenne représentée dans la figure 8 est d’environ 2,68 milliards de m3.Si nous calculons la moyenne de trente ans, nous trouvons que cettemoyenne diminue d’une façon pratiquement continue durant la périodede mesures, et que la moyenne de la période 1971-2000 ne représentequ’environ 60 % de la moyenne de la période 1939-1968 (figure 9,).

Figure 9

Evolution de l’écoulement moyen de 30 ans

Dans la figure 9, nous avons intégré aussi l’évolution au niveau national(la courbe continue). Pour les périodes à partir de 1960, il apparaît quela diminution au niveau national est un peu moins importante qu’au niveaudu site du barrage Al Wahda, ce qui signifie que la diminution desprécipitations ne touche pas tout le territoire avec la même sévérité.

Des bateaux-citernes ont acheminé à partir du mois de mai 2008 del’eau depuis Marseille et Tarragone (nord-est de l’Espagne) versBarcelone et ses environs. La région est frappée par une sécheresse sévère,« la pire depuis 1912». Une usine de dessalement est prévue à Barceloneet devrait résoudre la crise en 2009.

Si d’un côté l’impact de ces données n’est pas encore bien visible surla consommation des ressources fossiles (charbon, pétrole et gaz), il l’estdéjà au niveau du choix des nouvelles installations énergétiques en UE

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

1939-1968

Volu

me

d’é

cou

lem

ent :

moy

enn

e d

e 30

an

sp

ar ra

pp

ort

à la

moy

enn

e 19

45-1

974

en %

1941-1970

1943-1972

1947-1976

1961-1990

1957-1986

1955-1984

1945-1974

1953-1982

1951-1980

1949-1978

1959-1988

1971-2000

1969-1998

1967-1996

1965-1994

1963-1992

60

70

80

90

100

110

Site AlwahdaMoyenne nationale

Page 170: La sécurité énergétique en Méditerranée

176 La sécurité énergétique en Méditerranée

et aux USA, deux locomotives du développement technologique mondial.Ainsi, l’émission spécifique moyenne de l’ensemble des nouvellesinstallations (2007) en CO2 représente moins de 50 % de l’émissionmoyenne des installations existantes fin 2000 dans l’UE. Cette tendanceest claire dans la variation de la composition du mix de la puissanceinstallée en fonction de l’âge des installations telle quelle se présentedans les figures 10 et 11.

Figure 10

Variation du mix pour la production d’électricité en UEen fonction de l’âge des unités [12]

0-5 years 6-10 years 11-15 years 16-20 years 21-25 years 26-30 years 31-35 years 36-40 years > 40 years

Coal Gas Nuclear Oil Other Steam WindWater

0 GW

20 GW

40 GW

60 GW

80 GW

100 GW

120 GW

140 GW

160 GW

2002 2003 2004 2005 2006 2007

0 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

Wind Dual fired Natural Gas Petroleum OtherCoal

Figure 11Variation du mix des nouvelles installations de

production d’électricité au USA [13]

Page 171: La sécurité énergétique en Méditerranée

177

Les deux figures montrent qu’au niveau de la production d’électricité,la part de la composante fossile la moins polluante, le gaz naturel,augmente beaucoup plus vite que l’ensemble des ressources fossiles. Cecibien que la consommation de gaz naturel soit freinée par le développementde l’infrastructure pour son transport.

De l’autre côté, l’impact est encore plus clair lorsqu’il s’agit de laconsommation des schistes bitumineux, la ressource fossile la pluspolluante. Les schistes représentaient de grands espoirs après la SecondeGuerre mondiale. Leur consommation a évolué sur 35 ans (1945-1980)avec une augmentation moyenne de 5,6 % par an. Elle a été multipliéepar 6,7 durant cette phase, elle est passée de 7 millions de tonnes en 1945à 47 millions de tonnes en 1980 (fig. 12) [14].

Figure 12

Evolution de la consommation mondialedes schistes bitumineux

Les problèmes environnementaux liés à l’extraction et au traitementdu minerai, qui dépassent ceux des autres ressources fossiles, ont prisle dessus. Ainsi la consommation après 1980 a-t-elle diminué avecpratiquement la même vitesse avec laquelle elle avait augmenté entre1945 et 1980.

Les déchets nucléaires

Les déchets nucléaires présentent de grands risques pour la vie.L’exposition à la radiation présente des dangers mortels pour les êtres

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

1880 1890 1900 1910 1920 198019701960195019401930 1990

25

20

15

10

5

0

50

45

40

35

30

2000

Germany

Maorning

Fush

Brazil

Scotland

Kashpir

Leningrad

Estonia

Met

ric to

ns. m

illio

ns

Page 172: La sécurité énergétique en Méditerranée

178 La sécurité énergétique en Méditerranée

vivants. La capacité de supporter cette radiation diminue considérablementavec le niveau de l’évolution de l’espèce vivante. Et si la dose absorbéen’est pas mortelle, les séquelles qui en résultent sont dans beaucoup decas insupportables.

Le problème des déchets nucléaires est aggravé par leur durée de vie.Pour le plutonium, très toxique et matière première dans la fabricationdes armes nucléaires, il faut attendre plus de cent mille ans pour que sontaux de radiation baisse au niveau de sa radiation naturelle. Laconséquence est l’abandon progressif du nucléaire observé au niveaumondial. Depuis 1978, il n’y a plus de commande pour la constructionde centrale nucléaire aux USA. Mieux encore : plus de 95 % descommandes de construction aux USA sont antérieures au choc pétrolierde 1973 (figure 15). Ainsi, la puissance nucléaire installée aux USA esten diminution depuis 1990. Mais les dépêches indiquent depuis 2008 unerelance du nucléaire au USA (et dans d’autres pays). Cependant,l’expérience dans ce pays (figure 15) montre que la probabilité pour qu’unecentrale commandée passe à la production industrielle d’électricité n’estque de l’ordre de 50 % (la différence entre Units Ordered et Full-PowerOperating Licenses.

Figure 15

Historique du nucléaire aux USA [15]

Page 173: La sécurité énergétique en Méditerranée

179

L’Allemagne, autre leader industriel et de la technologie nucléaire,a déjà décrété un moratoire du nucléaire. Sur la base de ce moratoire, ladernière centrale nucléaire allemande sera arrêtée en 2022.

Ainsi, chaque nouvelle prévision depuis 1975, dix ans après ledémarrage pratique du nucléaire « civil », présente une réduction parrapport à la précédente, et même les prévisions minimales n’ont pas étéréalisées.

La capacité nucléaire dans la production mondiale d’électricité,n’augmente plus comme dans les années 80, et on s’attend à unediminution de la puissance nucléaire installée au début de la deuxièmedécennie du 21e siècle (figure 16) [16].

Figure 16

Evolution de la puissance nucléaire installéeau niveau mondial

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Par ailleurs, dans le deuxième secteur de l’application énergétiquedes technologies nucléaires, la propulsion nucléaire dans le transportmaritime (marine de guerre et brise-glace), le nombre d’unités est endiminution continue depuis 1987 (figure 17).

Page 174: La sécurité énergétique en Méditerranée

180 La sécurité énergétique en Méditerranée

C. Quelles perspectives au niveau mondial ?

D’un point de vue quantitatif, la logique nous indique que si noussommes connectés à un réseau de distribution qui nous lie à une sourcedonnée, dans un point où le débit n’est plus suffisant, il faut voir dansun premier temps si le débit à la source est suffisant. Si la réponse estpositive, il faut essayer d’avoir un point de connexion plus proche de lasource avec moins d’étapes de transformation ou points de transferts,surtout lorsque ces points présentent des faibles rendements ou une grandedéperdition.

Dans le cas de l’énergie, l’origine des ressources qui couvrent plusde 95 % de la demande mondiale totale en énergie primaire est lerayonnement solaire. Le débit de cette source à l’entrée de la terre estenviron 7 000 fois supérieur à la demande mondiale actuelle. Lesressources fossiles représentent le dernier maillon dans la longue chaînedes transformations et des transferts naturels de l’énergie solaire. Lerendement énergétique le long de cette chaîne est dérisoire, ainsi le contenuénergétique des ressources fossiles formées ne représente même pas unepart par milliard (ppb) du contenu énergétique du rayonnement solairearrivant sur terre et qui a permis leur formation. Se connecter à la source

Figure 17

Evolution du nombre de navires à propulsion nucléaire

Page 175: La sécurité énergétique en Méditerranée

principale ou à ses dérivés primaires (vent, hydraulique et biomasse) nerésoudrait pas seulement la question quantitative de l’offre énergétique,mais aussi la question qualitative, vu que la demande sera limitée à dessupports énergétiques naturellement recyclables.

Le retour de l’humanité à la valorisation énergétique directe durayonnement solaire et des résultats primaires de sa transformationnaturelle – l’énergie éolienne, hydraulique et biomasse – ouvrirait à sondéveloppement tous les horizons qui ont été et qui sont « encore » ouvertspar ces ressources à l’évolution de la vie, avec toute sa diversité etcomplexité, connue ou encore inconnue.

Potentiel et technologies des énergies renouvelables

Les énergies renouvelables ne sont ni trop diluées, ni trop faibles, etelles peuvent répondre à la demande concentrée et élevée des mégapoleset des grandes industries.

Le rôle de base du rayonnement solaire et du vent est d’assurerl’évolution de la vie sur la planète et n’est pas de répondre auxexigences de telle ou telle technologie. Est-ce que la vie, telle que nousla vivons, aurait été possible avec un flux de rayonnement solaire deuxou trois fois plus intense et une vitesse moyenne du vent deux ou troisfois plus grande ? Ce sont les technologies qui doivent être développéespour s’adapter aux caractéristiques des sources naturelles d’énergie. Etmême la vie, elle n’a pas eu d’autre choix pour pouvoir évoluer.

On oublie que les aliments ne sont, pour leur contenu énergétique,que de l’énergie solaire transformée par les procédés naturels dephotosynthèse (appuyés par l’homme dans le cadre de l’agriculture) avecun rendement souvent inférieur à 0,1 %. Et que malgré le très faiblerendement énergétique, l’alimentation pas seulement des mégapoles maisde toute l’humanité (environ 6,7 milliards d’habitants fin 2008) est assurée.

On oublie aussi que la majorité des technologies existantes pour lamobilisation des énergies renouvelables permet des rendementsénergétiques 100 fois plus élevés que ceux du système de production desdenrées alimentaires. De plus, dans beaucoup de cas, ces technologiesn’exigent pas la disponibilité de l’eau sur le site de transformation, l’eauqui est indispensable dans le cas de la photosynthèse.

181Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 176: La sécurité énergétique en Méditerranée

Le Sandia National Laboratories annonçait le 12 février 2008 unnouveau record de rendement énergétique (31,25 %) à partir d’unmoteur Stirling alimenté à l’énergie solaire.

Le potentiel global annuel de l’ensemble des sources renouvelablesest énorme, il dépasse de milliers de fois l’ensemble des besoins actuelset futurs de l’humanité en énergie primaire. Rappelons, encore une fois,que les produits alimentaires d’origine végétale et animale ne représententqu’une partie des produits directs et indirects de la photosynthèse – laphotosynthèse qui produit aussi le bois de feu, le bois pour la menuiserieet pour l’industrie du papier, le coton – et que cette opération dephotosynthèse ne valorise que 1 % du flux de l’énergie solaire arrivantsur terre.

Ajoutons, en ce qui concerne l’énergie solaire, que les surfaces bienensoleillées du globe – ou plutôt trop ensoleillées et manquant d’eau pourune utilisation agricole, urbanistique ou autres – où des centrales solairespeuvent être installées (et que ces surfaces peuvent acquérir, avec certainestechnologies, par la suite une capacité de production agricole), sont deloin plus grandes que les surfaces utilisées pour l’agriculture alimentaireintensive. Sans compter le facteur rendement, déjà souligné plus haut.

En effet, le rendement de transformation de l’énergie solaire enélectricité ou en hydrogène (152) est 100 fois (pour l’électricité) et plusde 20 fois (pour l’hydrogène) plus élevé que le rendement énergétiquedans la production de denrées alimentaires. Ajoutons que les technologiespour la valorisation des énergies renouvelables sont en pleindéveloppement ; leurs rendements ne cessent d’augmenter et leurs coûtsbaissent d’une façon continue. L’exemple du système concentrateurparabolique avec un moteur Stirling pour la production d’électricité vientd’être souligné, et d’autres vont suivre.

Si l’inertie du système énergétique marque le développement dusystème dans sa globalité, elle est heureusement beaucoup mois efficaceau niveau sectoriel, et surtout au niveau des nouvelles technologies. Ainsinous vivons ces dernières années un engouement sans précédent pourles nouvelles technologies dans le cadre de la mobilisation des énergiesrenouvelables.

182 La sécurité énergétique en Méditerranée

(152) L’hydrogène est un des vecteurs proposés au niveau international pour le stockage massifdes ressources renouvelables et pour une multitude d’applications non énergétiques.

Page 177: La sécurité énergétique en Méditerranée

183

L’éolien

L’évolution rapide – qui dépasse toutes les prévisions – de lapuissance éolienne installée à travers le monde trouve son explicationdans un certain nombre de faits :

– un gisement de grande importance ;

– une bonne répartition sur l’ensemble du globe ;

– un bon niveau de maturité et de fiabilité technologique ;

– un bon niveau du rendement économique.

La bonne répartition de ce gisement sur le globe représente une bonneréponse à la répartition restrictive des ressources fossiles fluides,souvent soulignée, et celle de ressources fissiles, souvent oubliée (plusde 66 % des réserves récupérables en uranium se concentrent dans cinqpays (tableau 2)).

La figure 19 présente l’évolution dans le monde et dans un certainnombre de pays du cumul de la puissance éolienne installée entre 1992et 2008.

Figure 19

Evolution de la puissance éolienne installéedans quelques pays

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 178: La sécurité énergétique en Méditerranée

184 La sécurité énergétique en Méditerranée

La majorité des experts ne s’attendaient pas à une telle évolution.L’Agence internationale de l’énergie publiait dans son rapport (WorldEnergy Outlook, 2000) que la puissance éolienne installée en Europe en2010 devrait atteindre 34 000 MW. Cette valeur a été déjà dépassée en2004.

Même les prévisions « optimistes » du « pro énergie éolienne » sontdépassées. L’Association européenne de l’énergie éolienne estimait dansses prévisions pour l’an 2010, publiées en 2000, une puissance totale de60 000 MW (un niveau qui dépasse de 75 % celui annoncé par l’AIE).Cette valeur a été dépassée de 10 % fin 2008.

L’évolution de la puissance éolienne installée en France, le pays dunucléaire par excellence, est très importante. La France réalise desaugmentations annuelles qui sont de l’ordre de ceux réalisés parl’Allemagne et l’Espagne durant les années 90. L’augmentation annellemoyenne entre 2001 et 2008 de la puissance éolienne installée est de 71 %(figure 18 et tableau 2). La France a dépassé le Danemark en 2008.

La Chine, nouvel arivant dans le domaine de l’éolien, casse tous lesrecords (figure 18 et tableau 3). Une augmentation annuelle absolue quiexplose : elle a été multipliée par 92 entre 2002 (augmentation de 67 MW)et 2008 (augmentation de 6 160 MW) !

Tableau 3

Evolution récente de la puissance éolienneinstallée en France et en Chine

Année 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008

La France puissanceinstallée (MW) 80 148 239 372 757 1500 2454 3404

Augmentationannuelle (%) – 85 61,5 55,6 103,5 98,2 63,6 38,7

La Chine puissanceinstallée (MW) 402 469 567 764 1260 2604 6050 12 210

Augmentationannuelle (%) – 16,7 21,3 34,5 65,2 106 132 102

Page 179: La sécurité énergétique en Méditerranée

185

Tenant compte de ce développement, le Global Wind Energy Council(GWEC) révise chaque année ses prévisions vers le haut. Il prévoyaitdans son rapport annuel Global Wind Energy Report 2007 une haussede la puissance mondiale installée de l’énergie éolienne de plus de 155 %pour 2012 par rapport à 2007, pour atteindre 240 GW. Dans son rapportde 2008 (publié le 9/3/2009), la puissance prévue pour 2012 est corrigéevers le haut : elle devrait désormais atteindre 275,8 GW. Ces correctionsde prévision vers des valeurs plus élevées sont devenues une traditiond’une bonne partie des technologies des énergies renouvelables, à l’inversede ce qui se passe pour le nucléaire depuis les années 70 du siècle dernier.

Le photovoltaïque (PV)

Malgré le niveau, encore élevé, du coût de cette technologie, lesconvictions écologiques chez une bonne partie de la population dans lespays industrialisés et chez un certain nombre de leurs gouvernementsont permis la réalisation des cadres politiques, juridiques et économiquespour le développement de cette technologie.

La figure 20, publiée en avril 2000 [20], montre premièrement la chutedes prix du photovoltaïque entre 1975 et 1999, deuxièmement

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Figure 20

Evolution et prévision de la puissance photovoltaïquecommercialisée dans le monde

Page 180: La sécurité énergétique en Méditerranée

186 La sécurité énergétique en Méditerranée

l’augmentation des ventes de l’industrie pour la même période etfinalement les prévisions des deux grandeurs pour la période de 2000 à2005. Des experts pensaient que les valeurs de la production prévisionnellene seraient pas atteintes.

La puissance PV installée en Allemagne en 2005 était de 700 MW,soit 100 % de la puissance prévue au niveau mondial dans la figure 18et 43 % de la puissance PV installée en 2005 à travers le monde(1 786 MW). Cette dernière valeur représente 254 % de la valeur prévuepar les auteurs de la figure 18. Cette évolution continue : la puissancePV installée en 2007 au niveau mondial était de 3 800 MW (figure 21),elle représente une augmentation de 113 % sur deux ans [19].

Figure 21

Evolution de la production annuelle mondialedes systèmes PV

Les centrales solaires à concentration (CSP)

Une idée ancienne est celle de la concentration du rayonnement solairepour produire de la chaleur à haut niveau de température. Les Grecsutilisaient un ancêtre du miroir parabolique pour concentrer les rayonssolaires et allumer la flamme olympique. Cette idée est à la base de latechnologie très prometteuse des centrales solaires à concentration.

Trois concepts ont été développés et plus ou moins déjàcommercialisés : les centrales à miroirs cylindro-paraboliques, lescentrales à tour solaire et les centrales à miroirs paraboliques (figure 22).

Page 181: La sécurité énergétique en Méditerranée

En fonction du niveau de température de la chaleur produite, l’énergiesolaire à concentration peut être utilisée pour faire fonctionner descentrales à vapeur, des turbines à gaz ou des engins Stirling.

1. Miroirs cylindro-paraboliques

Les miroirs cylindro-paraboliques (en forme d’auge) concentrent lesrayons solaires sur l’axe focal, sur lequel se trouve le tube absorbeur.Les températures atteintes sont de l’ordre de 400 °C. Pour réduire lespertes de chaleur par conductivité et par convection, le tube absorbeurest protégé par un tube en verre avec un vide poussé entre les deux.

2. Tour solaire

Un champ ovale de miroirs concentre les rayons solaires sur un capteurlocalisé au sommet d’une tour. Le fluide caloporteur (air, eau, sels fondus,sodium...) transporte la chaleur vers le système de production d’électricité.Des températures très élevées dépassant 1 000 °C peuvent être atteintes,ce qui permet la réalisation d’un cycle combiné avec une grandeperformance.

3. Miroir parabolique

Un miroir parabolique concentre les rayons solaires sur un capteurqui se trouve approximativement au point focal de la parabole. Destempératures de 750 °C à 1 000 °C sont atteignables. Ce niveau detempérature a permis, avec des engins Stirling, un rendement deproduction d’électricité dépassant les 30 %.

Les premières centrales commerciales furent installées en Californieentre 1984 et 1990. Après une période de stagnation (de 1991 à 2005),plusieurs projets sont actuellement en cours d’implantation ou dedéveloppement (Espagne, Grèce, Etats-Unis, Égypte, Maroc, Algérie, etc.)cumulant une capacité mondiale totale de plus de 3 000 MW une foisces projets achevés, dont plus de 2 000 MW en Espagne.

En général, pour les ressources intermittentes – le rayonnement solaireet le vent – le volume de la production annuelle est défini par la puissanceinstallée et par les caractéristiques du gisement sur le site. La productionannuelle peut varier d’une année à l’autre, mais la grandeur moyenneest pratiquement constante. Ainsi, pour augmenter le volume de laproduction, il faut augmenter la puissance installée.

187Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 182: La sécurité énergétique en Méditerranée

Les centrales solaires à concentration présentent néanmoins uneexception : il est possible d’augmenter le volume de production annuellesans augmenter la puissance de la turbine, grâce au stockage de la chaleurexcédentaire produite dans un champ solaire élargi.

L’élargissement du champ solaire et l’introduction d’un système destockage de chaleur présentent plusieurs avantages :

a. améliorer la stabilité (la qualité) de la production en réduisantconsidérablement les pertes de qualité de production résultant desvariations d’irradiation, par exemple dues aux passages de nuages ;

b. permettre une production à base d’énergie solaire après le coucherdu soleil ;

c. permettre un démarrage de production avant le lever du soleil ;

d. permettre plus de liberté dans la gestion de la puissance injectéedans le réseau ;

e. augmenter le facteur de capacité de la centrale qui peut atteindre,selon la capacité de stockage, le niveau des centrales répondant auxbesoins en heures pleines et même celui des centrales de base ; ainsi, unecentrale CSP avec une capacité de stockage permettant 15 heures defonctionnement à puissance nominale est comparable à une centrale debase, car le rapport de la production annuelle à la puissance nominaledépasse alors 6 500 heures par an ;

f. permettre une réduction du coût de production du kWh, vu quel’augmentation de la production annuelle est supérieure à la somme desaugmentations des investissements, des dépenses de la gestion et ceuxde la maintenance, tant que la capacité de stockage est inférieure à lapossibilité de production journalière (la figure 25 donne le coût relatifde production du kWh en fonction de la capacité de stockage pour uninvestissement spécifique du stockage de 10 €/kWh par rapport au coûtde production d’une centrale sans stockage) ;

g. vu que la réduction attendue des investissements se feraessentiellement au niveau des composantes où le potentiel dedéveloppement est le plus important, le champ solaire et le système destockage, l’impact économique de l’introduction de cette option ne peutque s’améliorer dans l’avenir.

188 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 183: La sécurité énergétique en Méditerranée

189

Dans le cas d’un système photovoltaïque (PV) ou éolien,l’augmentation de la production ne peut se faire qu’à partir d’uneaugmentation de la puissance installée. En effet, l’offre d’électricité enabsence de la source primaire (rayonnement solaire ou vent) ne peut sefaire qu’à la base d’un stockage d’électricité produite durant le tempsde disponibilité de la source primaire. On notera aussi que le stockaged’électricité est généralement plus coûteux que le stockage de chaleur.Cette différence des caractéristiques de la composante de stockage entreles systèmes CSP thermique et PV et très importante. Une telle différenceentre les systèmes de production d’électricité, éolien et l’hydraulique(certainement plus accentuée : le stockage de l’eau à une hauteur donnéeest plus facile que le stockage de la chaleur à une température voulue)est pour une bonne partie à l’origine de la différence du développemententre les deux technologies, donnant avantage à l’hydroélectricité.

Le coût de production (figure 26) diminue fortement selon lapuissance totale installée, sous l’effet du cumul de l’expériencetechnologique et de l’échelle (nombre de centrales réalisées et capacitéunitaire de plus en plus grande). Les coûts futurs pourraient être réduitsjusqu’à 0,05-0,07 €/kWh, grâce à plusieurs facteurs :

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Figure 25

Impact de la capacité de stockage sur le prixde revient du kwh

(Source: http ://www.kineev.de/download/vortraege/20080130Dr.M.Eck SolarthermischeKraftwerke.pdf)

Page 184: La sécurité énergétique en Méditerranée

190 La sécurité énergétique en Méditerranée

(Source : http ://www.solarpaces.org/ Libary/GMI 10.pdf)

– amélioration du support métallique : réduction de la demande enmatériaux, réduction du poids et donc réduction de l’investissement ;

– possibilité de production automatisée en grande série ;

– construction d’unités avec une puissance optimale > 100 MW;

– développement des composants (matériaux et structure) pouraugmenter la durée de vie et réduire les besoins de maintenance ;

– intégration d’une composante de stockage et développement dessystèmes de stockage thermique plus performante et moins coûteuse.

Figure 26

Evolution probable du prix du kWh CSP en fonction de lapuissance cumulée installée

Enfin, il faut retenir que les coûts de production du kWh d’originefossile ou nucléaire sont instables (essentiellement dans le cas desressources fossiles), avec une tendance vers des coûts de plus en plusélevés. Il faut bien sûr y ajouter les coûts de l’impact environnemental.

Le tableau 4 présente une comparaison indicative des coûts deproduction du kWh des centrales au charbon avec et sans captation etstockage du CO2 et des centrales de type CSP avec stockage de chaleur.

Page 185: La sécurité énergétique en Méditerranée

191

Tableau 4

Comparaison entre les centrales au charbon et les CSPavec stockage de chaleur

Légende : ST: stockage de chaleur. FC : Facteur de capacité. CSC : Captation et stockage deCO2. IGCC : Gazéification du charbon et cycle combiné intégré. HVAC : Courant alternatifhaute tension. HVDC : Courant continu haute tension. CDM : Mécanisme de Développement

Propre.

Les chiffres dans le tableau 3 montrent que dans le cadre d’uneapplication au niveau des exigences des problèmes de l’environnementet des risques liés aux changements climatiques, le déploiement de latechnologie CSP dans le cadre de la complémentarité entre les paysriverains de la Méditerranée est déjà économiquement rentable.

L’investissement

L’importance du volume et l’augmentation galopante desinvestissements dans le domaine des technologies et des applications desénergies renouvelables au niveau mondial (figure 27) [20] soulignent laconviction grandissante au niveau international dans les secteurs de

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Charbon Solaire CSP avecST FC > 0,57

Ressource/Réserve Importante mais Abondante etépuisable illimitée dans

le temps

Intensité la plusélevé entre les

CO2 ressources fossiles Faibleutilisées, mais CSCpossible

Sans CSC 50 à 80Coût actuel Avec CSC 120 à 160 160 à 250$/MWh IGCC 60 à 90

IGCC + CSC 130 à 170

Perspective du coût En augmentation En diminution

Impact CDM Augmentation Diminution du coût du coût

Transport entre site Charbon : Électricité :du gisement et consommateur bateau et train HVAC

électricité

Page 186: La sécurité énergétique en Méditerranée

192 La sécurité énergétique en Méditerranée

Les données de la figure 26 reflètent et confirment encore une foisl’évolution déjà soulignée au niveau de l’application des technologieséolienne, photovoltaïque et récemment du thermosolaire depuissance (CSP). La prévision, annoncée par Clean Edge en 2001, pourles investissements en 2010 a été largement dépassée en 2008. L’alluredes deux courbes dans le diagramme 21 montre que ce dépassement desréalisations par rapport aux prévisions augmentera considérablement lesprochaines années.

Les investissements annuels dans la RD, même s’il ne reflètent pasl’importance du secteur des énergies renouvelables (très faibles par rapportaux investissements RD dans le nucléaire), ont permis une augmentationcontinue des rendements énergétiques des cellules photovoltaïques(PV) (figure 28), une réduction continue du prix de revient du kW installé(figure 20) et, par la suite, une réduction plus importante du prix de revientdu kWh. Une dépêche du mois de février 2009 de la firme américaineFirst Solar annonce que le prix de revient moyen du watt pour sa

l’industrie, de la finance, de la politique (ce sont des décrets et des loisqui ont permis et cadré cette évolution) et chez les consommateurs del’importance du rôle que peuvent jouer les énergies renouvelables dansla couverture de la demande énergétique mondiale.

Figure 27

Evolution des investissements dans les technologiesPV et éolienne

Page 187: La sécurité énergétique en Méditerranée

193

production de cellules PV couche mince (Cadmium tellurid) pour lequatrième trimestre 2008 était de 0,98$US/W.

Le schéma du diagramme 29 donne une présentation comparativegénérale de l’évolution, vécue et attendue, des coûts économiques et totauxde la production du kWh par les différentes sources d’énergie. Le coûttotal prend en considération, en plus du coût de production à l’usine, lesestimations des coûts externes suivants :

– le coût social : déplacement des populations pour permettre lamobilisation d’une source d’énergie fossile (mine de charbon ou de ligniteà ciel ouvert) ou renouvelable (construction d’un barrage) et augmentationdes risques de la bilharziose dans les zones inondées par les eaux desbarrages ;

– le coût environnemental (par exemple l’augmentation de l’effet deserre dans le cas des ressources fossiles, de déforestation et d’utilisationnon rationnelle du bois de feu) ;

– le coût culturel (déplacement des monuments du site historique AbouSimbel, ou l’inondation d’un site historique).

Les estimations des coûts, autres qu’économiques varient beaucoupselon les auteurs : certains les négligent totalement, d’autres les estimentsupérieurs au coût économique. Dans le schéma nous utilisons un rapportmoyen entre le coût économique et le coût total.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Figure 29

Evolution comparative du coût de production du kWh

Coût environnementalsociale et culturelle

RessourcesRenouvelable

Ressourcesfossiles et fissiles

Coû

t de

pro

duct

ion

par

kWh

Temps

A B CD E

Coût économique

Page 188: La sécurité énergétique en Méditerranée

194 La sécurité énergétique en Méditerranée

La partie avec le vert clair, en bas de la bande verte, représente leseffets socioéconomiques qui permettent ou encouragent l’Etat à réduireles taxes ou à augmenter l’appui aux ressources renouvelables. Ces effetsrésultent de la création d’emplois supplémentaires par rapport auxressources fossiles et fissiles et concerne essentiellement l’augmentationdes recettes de l’Etat résultant de l’augmentation du pouvoir d’achat dela population et de la réduction des dépenses sociales (allocations socialeset/ou de chômages pour les pays qui payent ces allocations).

Le coût d’utilisation des énergies renouvelables pour la productionde chaleur, d’électricité ou de biocarburants, pour certaines technologiesde transformation et sous des conditions locales appropriées, permet déjàune utilisation compétitive de ces ressources (surface bleue). L’évolutionà moyen et long terme des prix des ressources fossiles et fissiles ne peutqu’améliorer la compétitivité des énergies renouvelables et accélérer leurdéploiement massif et global.

Transférabilité des technologies des ER

Les technologies pour la mobilisation des énergies renouvelables sonttrès diverses. Certaines sont essentiellement des technologies nouvelles(PV par exemple), d’autres se présentent plutôt comme un nouvelassemblage de composantes bénéficiant des avancés technologiques dansd’autres domaines (l’éolien qui a bénéficié des avancées dansl’aéronautique, l’électrotechnique, l’électronique, les sciences desmatériaux ...) où une bonne partie des composantes existaient depuis desdécennies sur le marché, et une dernière partie qui représente unerenaissance d’une technologie plus ou moins oubliée, le moteur Stirling.Il est certain que les efforts de développement qui ont permis le bonfonctionnement des systèmes résultant de l’assemblage, ou pour remettrela technologie Stirling à jour, sont très importants, mais ces technologiesrestent, au minimum pour une bonne partie de leurs composantes,transférables vers les pays en développement par excellence.

La répartition du coût d’une éolienne sur les différentes composantesde l’installation [21]: nous estimons que des composantes, représentantenviron 50 % du coût total, peuvent être réalisées par l’industriemarocaine (sans ou avec une courte préparation ou faible effort pour lamise à niveau). Dans le cadre d’un programme de développement et detransfert de technologie, la part réalisable peut atteindre à moyen terme66 à 75 %.

Page 189: La sécurité énergétique en Méditerranée

195

L’évolution récente de la part de l’industrie chinoise dans la réalisationdes éoliennes installées en Chine est plus qu’étonnante. Elle est passéede 25 % en 2004 à environ 56 % en 2007 [22]. Tenant compte del’augmentation de la puissance installée annuellement, qui est passée de200 MW en 2004 à 3400 MW en 2007, on peut estimer l’augmentationde cette activité industrielle entre 2004 et 2007 à environ 3 750 %. Selonle dernier rapport de GWEC (mars 2009), 2009 verra l’entrée en forcede l’industrie éolienne chinoise dans les exportations de pale pour passerplus tard à d’autres composantes des unités éoliennes.

La dynamique de l’industrie chinoise se traduit aussi parl’appropriation de la haute technologie, nouvelle et complexe, duphotovoltaïque. La production des panneaux photovoltaïque en Chineest passée de 9 MW en 2003 à 369,5 MW en 2006, une augmentation de4 000 %. La Chine est devenue en 2007 le premier producteur mondialde panneaux PV.

Le tableau 5 donne la répartition du coût d’une centrale thermosolairede 80MW sur les composantes et selon la capacité de stockage thermiqueintroduite (l’unité de stockage est présentée par le nombre d’heures defonctionnement à puissance nominale en l’absence de rayonnementsolaire). Les résultats font partie d’une étude réalisée au début desannées 90 concernant le site d’Ouarzazate. L’introduction du stockagethermique améliore la performance et l’économie de la centrale ainsi quela part des composantes réalisables dans le pays. L’augmentation desinvestissements pour la centrale avec 9 heures de stockage est de 78 %,tandis que l’augmentation de la production est d’environ 120 %. Lesestimations actuelles pour l’investissement se situent entre 4 000 et 5 000$US/kW contre 5 662 dans le tableau 5.

A la base des informations disponibles sur l’état des entreprisesmarocaines à la fin des années 80, l’estimation de leur participation auxéquipements et aux travaux de réalisation d’une centrale sans stockagethermique était de 41 %. Nous estimons que la situation aconsidérablement évolué en faveur des entreprises marocaines et que leurparticipation pourrait atteindre environ 66 % pour une centrale avec9 heures de stockage qui pourrait être réalisée entre 2010 et 2012.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 190: La sécurité énergétique en Méditerranée

196 La sécurité énergétique en Méditerranée

Tableau 5

Répartition du coût d’une centrale CSP en fonctionde la capacité de stockage (106 $US)

Un des points du développement récent de cette technologie proposeun champ de capteurs avec des miroirs plans formant un système Fresnel(figure 33) et un capteur simple par rapport à celui du systèmecylindroparabolique (un tube métallique qui joue le rôle du capteur solaireà l’intérieur d’un autre tube en verre avec du vide entre les deux pourréduire les pertes de chaleur). D’autres avantages possibles de cetteproposition sont la possibilité de produire directement de la vapeur d’eauà haute pression dans le champ des capteurs solaires et la possibilitéd’autres utilisations de l’espace sous les miroirs. Cette simplificationpermettrait l’augmentation de la part transférable de cette technologieet la participation de l’entreprise locale.

En préparation d’un projet plus important (centrale hybride charbon-solaire), une petite unité de démonstration de 5 MW a été réalisée enAustralie, elle participe à l’alimentation en vapeur de la turbine de lacentrale à charbon.

La transformation des sources renouvelables d’énergie en vecteursconvenables à la demande est une activité extensive, la quantitéd’énergie récupérée par unité de temps est proportionnelle à la surfacemobilisée. Cette activité est donc comparable à l’agriculture, aussi nousvoudrions la nommer « agriculture énergétique ». La différence parrapport à l’agriculture, c’est que cette dernière utilise la surface, le sol,tandis que les différents types de l’agriculture énergétique (autres quela production de biomasse) équipent et occupent l’espace d’une façon

0 h % 3 h 9 h %

Travaux de génie civil 7,3 2,9 9 12 2,6

Champ solaire 99 38,9 130 185 40,8

Système de stockage 0 0 22 60 13,2

La centrale 40 15,7 40 40 8,8

Autres 108 42,5 124 156 34,6

Somme 254,3 100 325 453 100

$US/kW 3 179 4 062 5 662

Page 191: La sécurité énergétique en Méditerranée

197

plus ou moins dense (éoliennes environ 10 MW par km2 ou solaires entre30 et 100 MW par km2) à l’aide d’instruments de transformation.

Emploi

Les études concernant l’emploi relatif aux énergies renouvelables(production d’équipement, construction des installations, gestion etmaintenance de l’équipement) et les expériences des pays qui se sontengagés dans la mobilisation des énergies renouvelables depuis les annéesquatre-vingts sont nombreuses et ont montré que l’emploi généré par lamobilisation des énergies renouvelables pour une quantité donnéed’énergie est plus important que pour la mobilisation des ressourcesclassiques produisant la même quantité d’énergie. C’est la conclusiondu rapport «Putting Renewables to Work : How Many Jobs Can the CleanEnergy Industry Generate ?» [23], après l’évaluation de plus d’une dizainede rapports traitant la question selon différentes approches et utilisantdes bases de données américaines et européennes.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Tableau 6L’impact de la composition du parc de production

d’électricité sur l’emploi

Production et Gestion + installation maintenance Total

d’équipements + préparationdes combustibles

1. 85 % biomasse + 14 %éolien + 1 % PV 52°533 111°136 163°669

2. 60 %biomasse + 37 %éolien + 3 % PV 85°008 91°436 176°444

3. 40 %biomasse + 55 %éolien + 5 % PV 111°879 76°139 188°018

4. 50 % charbon + 50 %gaz naturel 22°71 1 63°657 86°369

5. 100 % gaz naturel 22°023 61°964 83°987

Scénario pour 2020:La composition duparc de productiondes 20 %

Nombre moyen d’emplois associé à chaque scénario

Page 192: La sécurité énergétique en Méditerranée

198 La sécurité énergétique en Méditerranée

L’économie verte englobe d’autres secteurs en plus des énergiesrenouvelables (ER) et de l’efficacité énergétique (EE), mais les deuxsecteurs ER et EE représentent une composante centrale de l’économieverte. L’étude donne aussi pour l’économie verte la répartition suivantede l’emploi total sur les composantes directe, indirecte et induite(tableau 8).

Tableau 8Répartition de l’emploi de l’économie verte

Composante Emploi créé

Emploi direct 935°200

Emploi indirect 586°000

Emploi induit 496°000

Total 1°999°200

Dans le tableau 6, nous reprenons de façon résumée la comparaisondes estimations du nombre d’emplois en fonction de la composition duparc pour la production d’une quantité de 20 % d’électricité appelée auxUSA.

Le tableau 6 montre que l’emploi dans les scénarios 1, 2 et 3, quiutilisent les énergies renouvelables, est environ deux fois plus importantque dans les scénarios 4 et 5, qui n’utilisent que des ressources fossiles.

Une étude publiée par l’université de Massachusetts-Amherst et leCenter for American Progress en septembre 2008 donne la comparaisonprésentée dans le tableau 7 entre l’effet sur l’emploi de l’investissementde 100 milliards de dollars dans l’un des trois secteurs : l’industriepétrolière, l’appui à la consommation domestique ou le secteur del’économie verte [24].

Tableau 7L’emploi créé par l’injection de 100 milliards de dollars

Secteur d’investissement Emploi créé

Industrie pétrolière 542°000

Appui à la consommation domestique 1 °700°000

Economie verte 2°000°000

Page 193: La sécurité énergétique en Méditerranée

199

Ajoutons que le Maroc mobilisera ses ressources renouvelables nonseulement pour couvrir ses propres besoins, mais aussi pour participerà la couverture d’une partie des besoins européens, et que cetteparticipation représentera très probablement un multiple de laconsommation nationale. Ajoutons à l’emploi direct et indirect (l’emploidans les industries annexes) l’emploi induit qui résulte de l’augmentationdu pouvoir d’achat et de l’augmentation de la consommation de lapopulation intégrée dans ce système de production.

Cette dernière partie d’emploi peut atteindre dans les pays industrielsenviron 40 % de l’ensemble des emplois directs et indirects. Dans cespays, un nouvel emploi induit en général une amélioration du revenu plusou moins importante par rapport à une situation de chômage où la personnerecevait une indemnité ou une aide sociale. Dans les pays en voie dedéveloppement, le pouvoir d’achat des chômeurs est le résultat d’uneréduction du pouvoir d’achat des parents ou d’autres donateurs. Ainsi,l’emploi induit chez nous peut dépasser même 60 % de l’ensemble desemplois directs et indirects.

Pour installer des puissances de l’ordre de quelques centaines de MWpar an dans une région quelconque, l’économie exige que la productiond’une bonne partie des équipements (surtout les équipements volumineuxet avec une faible valeur ajoutée) se fasse dans la région concernée pourréduire les coûts du transport. Ce qui plaide encore une fois pour letransfert de la production de ces équipements vers les pays où lestechnologies seront appliquées.

Un programme national pour la mobiisation rationnelle des énergiesrenouvelables qui s’intègre et mobilise efficacement les potentialités decomplémentarité Nord-Sud sera le plus grand programme d’emploi quin’ait jamais été réalisé dans le pays et dans la région. L’exemple chinoistrès récent, montre qu’une volonté politique claire avec un programmeadéquat peuvent changer la donne d’un jour à l’autre.

La figure 30 (page 22) montre que la part de l’industrie chinoise dansla production d’équipement éolien installé dans le pays a plus que doubléeen seulement trois ans, entre 2004 et 2007. Cette augmentation relativetrès importante cache une augmentation absolue plus importante encore,vu que la puissance annuellement installée est passée pour la même périodede 764 MW à 6 050 MW. Ainsi la part absolue de la production chinoiseest passée de l’équivalent de 191 MW en 2004 à 3 380 MW en 2007,soit une augmentation de plus de 1 670 % en 3 ans.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 194: La sécurité énergétique en Méditerranée

Le Maroc est prédestiné à jouer un rôle de premier plan dans lavalorisation des ressources renouvelables solaires et éoliennes, que cesoit au niveau du Maghreb ou au niveau des relations de complémentaritéentre l’Europe et l’Afrique du Nord, un point de vue que nous avonsdéfendu depuis plus de 20 ans et que nous avons présenté en 1994 dansun livre sous le titre : Vers un Maroc exportateur d’énergie. Une visionqui devient de plus en plus partagée, malheureusement essentiellementau niveau international.

Un témoignage dans se sens : le Maroc dispose des ressources qui leprédestinent à devenir un grand producteur des nouvelles énergies,notamment éolienne, thermosolaire et hydraulique ... Le Maroc pourraitproduire les énergies renouvelables et devenir, une fois libéré du fardeaude la facture pétrolière, un acteur important dans le secteur, a déclaréM. Karsner, secrétaire adjoint américain à l'efficacité énergétique et auxénergies renouvelables, lors d'une rencontre sur les stratégies du Marocpour promouvoir les énergies renouvelables, organisée mardi 4 mars 2008par l'ambassade du Maroc à Washington, en marge de la conférenceinternationale sur les énergies renouvelables, WIREC (153) 2008 (MAP6/3/2008).

Le Plan solaire méditerranéen (PSM) adopté par l’Union pour laMéditerranée et qui propose un programme de 20 GW solaire dans lespays du sud de la Méditerranée pour renforcer l’offre énergétique au sudet pour participer à la couverture de la demande au nord avec desressources inépuisables et environnementalement acceptable, représenteune fois de plus les atouts du sud au niveau des énergies renouvelables.

(153)WIREC : Washington International Renewable Energy Conference (March 3-6, 2008).

Perspectives pour le Maroc : vers un Marocexportateur d’énergie !

« Il y a une chose plus forte que toutes les armées du monde,c’est une idée dont le temps est venu »

Victor Hugo

Page 195: La sécurité énergétique en Méditerranée

Mme Benita Ferrero-Waldner à souligné le 19 février 2009 que le PSMest une nécessité et non pas une option.

Dernièrement, le docteur Hermann Scheer (fondateur et présidentd’Eurosolar et président du Conseil mondial des énergies renouvelables)a souligné, lors des conférences aux premières Assises de l’Energie (6mars 2009 à Rabat) et à la Bibliothèque nationale le 7 mars 2009, lesperspectives de la complémentarité Europe-Afrique du Nord au niveaude la valorisation des ressources en énergie renouvelable. Eléments debase amenant à la vision «Maroc Exportateur d’énergie »:

– Il a été démontré dans les paragraphes précédents que le retour àune utilisation des ressources renouvelables d’énergie en tant queressources de base est incontournable.

– Le Maroc est doté par la nature de gisements solaire et éolien trèsimportants.

– Il y a certainement d’autres régions dans le monde qui possèdentun potentiel solaire ou un gisement éolien comparables, mais le Marocse trouve à la porte d’une région, l’Europe, avec une demande trèsimportante en énergie primaire et où le coût de mobilisation de l’énergiesolaire en Andalousie (une des régions les plus ensoleillées de l’Europe)et en Allemagne serait respectivement 30 % et 200 % plus élevé que celuiMaroc.

Une étude récente, «Renewable Energy Potentials », publiée par«REN21 août 2008» présente un bilan des ressources renouvelables dansle monde, leur répartition selon les régions, leur nature et le potentiel deproduction en fonction des technologies et du coût pour 2050. Les deuxdiagrammes sélectionnés de l’étude et rassemblés dans la figure 36donnent une comparaison des potentiels entre une région avec uneconsommation importante et concentrée dans l’espace (OCDE Europe)et une région avec un potentiel très important de production dépassantde loin les besoins locaux (Afrique et Moyen-Orient).

Si la première région ne peut couvrir ses besoins en électricité enn’utilisant que les ressources renouvelables, et avec un coût de productiondépassant 5 US$cents/kWh, le potentiel de production dans la deuxièmerégion à un coût de production inférieur à 5 US$cents/kWh dépasse deloin l’ensemble des besoins des deux régions, indépendamment de leurévolution.

202 La sécurité énergétique en Méditerranée

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Prenons par exemple la région Sud-Est du Maroc (Ouarzazate,Zagoura, Smara). En se basant sur la technologie des centrales solaires(CSP présentée plus haut) avec des miroirs cylindroparaboliques,technologie existant depuis plus d’une vingtaine d’années (CentralesSEGS réalisées entre 1984 et 1990 en Californie ; figure 23), dernièrementréalisée au USA à NEVADA (64 MW) et actuellement en constructionen Andalousie (AndaSol 1 et 2, 2 x 50 MW), une centrale solaire de50 MW, occuperait 1 km2, au lieu de 1,2 km2 en Andalousie, et produirait115 à 125 millions de kWh d’électricité solaire par an au lieu d’uneproductibilité de 95 à 105 millions de kWh en Andalousie.

La centrale solaire à tour (PS 10), technologie en démonstration depuisdes années et récemment commercialisée au sud de l’Espagne près deSéville (au fond de l’image dans la figure 37), produirait selon lesprévisions des constructeurs environ 90 millions de kWh par km2 et paran.

Dans l’avant-plan de la photo il y a le champ de construction de lacentrale solaire PS 20 avec une puissance de 20 MW. Les deux unitésPS 10 et PS 20 fonctionnent en mode hybride (solaire et gaz naturel),mais la part de la ressource fossile est limitée à 15 %. Par contre, la centrale« solaire » de Ain Beni Mathar dans la région nord-est du Maroc, elleaussi hybride, fonctionnera à hauteur de 98 % à base de gaz naturel.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Page 197: La sécurité énergétique en Méditerranée

204 La sécurité énergétique en Méditerranée

La différence entre la productibilité de la centrale PS10 ou Andasol 1,ou une autre se trouvant en Andalousie, et celle d’une centrale de mêmeconcept et d’une puissance équivalente se trouvant au sud-est du Maroc,est négligeable en été et elle n’est pas très grande au niveau de laproduction annuelle. Cependant, au niveau de la production en hiver, ladifférence est importante. En effet, la production hivernale au sud-estdu Maroc est deux à trois fois plus grande que celle au sud de l’Espagne.

La comparaison avec la productibilité d’une centrale thermosolaireen Allemagne ne se pose pas vu qu’il n’y a pas d’installation ni de projetde ce type dans ce pays. Ce qui n’empêche pas les Allemands de construireune unité pour les besoins de la recherche-développement (centrale à tour)à Jülich. Ce qui souligne la conviction de la société allemande (Etat,recherche, industrie et finance) du rôle que peuvent jouer les centralessolaires à concentration dans l’avenir dans des pays appropriés et de lavolonté de continuer à jouer un rôle d’industriel leader dans ce domaine.

Comme la technologie PV n’exige pas le suivi du soleil pourfonctionner, le choix du lieu d’installation est moins important que pourles CSP. Pour la technologie PV, une grande expérience et beaucoup dedonnées sont disponibles en Allemagne et dans d’autres pays européens.Une centrale photovoltaïque en Allemagne produirait annuellement enmoyenne environ 900 kWh par kW de puissance installée. Au sud-estdu Maroc, un kW photovoltaïque installé produirait plus de 2 000 kWhannuellement. En hiver la productibilité au Maroc serait de 400 à 600 %plus grande qu’en Allemagne.

Ajoutons à cela que la disponibilité des surfaces adéquates au sud etau sud-est du Maroc est très grande et en général ces surfaces ne sontpas utilisables autrement. La figure 37 montre que l’environnement descentrales PS10 et PS20 est utilisable pour la production agricole, ce quiaugmente la valeur du terrain et donc le coût de la production.

La figure 38 présente l’évolution des prix du kWh pour les deuxtechnologies, CSP et PV en fonction de la latitude du site de l’installationet du développement technologique.

Page 198: La sécurité énergétique en Méditerranée

205

L’intégration des données de l’étude «Renewable Energy Potentials »déjà citée et des estimations du prix de revient du kWh pour la régionMENA et pour des sites au sud-est du Maroc dans le cadre des étudesCSP (base du concept DESRTEC) ont permis d’extrapoler (en rouge) latendance présentée pour les régions au nord de la latitude 34° nord dansle diagramme de base extrait de l’étude (Solar Power – Photovoltaïcs orSolar Thermal Power Plants ?) aux latitudes entre 34° et 20° nord. Dansla figure 39, l’ellipse en noir présente l’espace ibérique et en rouge l’espacemaghrébin, et ils permettent une comparaison des coûts de productionpour la technologie CSP entre la région sud-est du Maroc et l’Andalousieen Espagne.

L’équipement d’une surface de 200 km2 (soit moins de 0,03 % de lasurface nationale) dans la région sud-est du Maroc (Zagora, Smara) pardes centrales solaires (type cylindroparabolique, Fresnel, à tour ou Dish-Stirling) permettrait une production annuelle entre 14 et 25 milliards dekWh d’électricité. L’énergie appelée nette au Maroc était de 24 milliardsde kWh en 2008.

Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

Figure 38Comparaison du coût de production des technologies PV et CSP

en fonction de la latitude

Page 199: La sécurité énergétique en Méditerranée

Le Maroc ne jouit pas seulement d’un gisement solaire très importantet de bonne qualité mais aussi d’un gisement éolien, pas aussi importantmais de très bonne qualité. La qualité du gisement éolien au nord du Marocpermet aux éoliennes du parc Abdelkhalek Torres (50 MW) d’avoir unfacteur de capacité supérieur à 40 %, lorsqu’en Europe, rares sont les sitesoù des éoliennes, aussi petites et avec des tours aussi basses que cellesinstallées au Maroc, peuvent atteindre un facteur de capacité de 30 %.

Cette bonne qualité du gisement éolien n’est pas limitée à la régiondu Détroit. Au sud du Maroc, nous trouvons des espaces bien plus étenduset bien plus adaptés à une valorisation extensive de l’énergie éolienne,qui sont aussi très bien ventés. Le potentiel de production d’électricitééolienne dans cette région dépasse de très loin en volume les besoinsactuels et futurs du Maroc, et la qualité du gisement dans cette régionprésente une grande concurrence pour le site du parc Adelkhalek Torres.

Un autre atout du Maroc, et non le dernier : le site Sebkhat Tah.

Il est certain que le système CSP avec stockage amélioreconsidérablement les conditions d’intégration d’énergie solaire dans leparc de production d’électricité, mais ne peut pour autant éliminertotalement le caractère intermittent de la source. L’unité de recherchesur les technologies et l’économie des énergies renouvelables (TEER)au CNRST a repris au début des années 90 le projet hydro-solaire SebkhatTah pour la production d’électricité de l’ONE et a intégré une composantede stockage par pompage. Le concept développé à cette date permettraitune capacité de stockage de 500 GWh. L’étude a été reprise cesdernières années, et le nouveau concept permet de doubler la capacitéde stockage et d’atteindre environ 1 000 GWh. Avec cette capacité destockage, la part des ressources renouvelables intermittentes peut êtreaugmentée considérablement.

Une composition optimisée (éolien, CSP avec stockage de chaleur(en moyenne l’équivalent de 6 heures de fonctionnement), STEPAffourar, STEPAbdelmoumen, STEP Sebkhat Tah et les autres ressourcesrenouvelables et non renouvelables) du parc permettrait pour uneénergie appelée de l’ordre de 40 000 GWh une participation desressources renouvelables intermittentes de plus de 66 %.

Le Maroc dispose pratiquement de l’ensemble des atouts nécessairespour une valorisation rationnelle et bénéfique des énergies renouvelables,

206 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 200: La sécurité énergétique en Méditerranée

il ne manque principalement qu’une volonté politique précise, biendéveloppée et clairement exprimée dans le cadre d’un programme bienétudié.

Des changements cruciaux ont été entamés ces dernières années auMaroc au niveau des droits politiques, sociaux et économiques. De grandschantiers ont démarré. Nous espérons que ce champ de changements etl’engouement actuel des efforts de développement atteignent trèsprochainement le secteur de l’énergie. Nous avons besoin d’une nouvellevision publique nationale dans le domaine de l’énergie, qui se base surles principes fondamentaux de l’évolution qui sont le garant de ladurabilité, qui mobiliserait les ressources humaines du pays dans le cadred’une valorisation rationnelle des ressources naturelles nationales les plusabondantes.

Une nouvelle vision dans ce domaine se cristallise depuis quelquesannées au niveau international, gouvernemental (International Partnershipfor Hydrogen Economy (www.iphe.net) et non gouvernemental (Trans-Mediterranean Renewable Energy Cooperat ion «TREC»www.TRECers.net/de) et autres initiatives à travers le monde) et autresprogrammes régionaux (154). Les composantes de base de cette nouvellevision sont :

1. la mobilisation des différentes sources d’énergie renouvelable ;

2. la complémentarité entre les pays et les régions ;

3. l’électricité : produit et interface de base dans la plupart destransformations des ressources renouvelables ;

4. l’hydrogène : interface de stockage, carburant et matière premièredans l’industrie chimique.

Tenant compte essentiellement des trois premières composantes etprenant en considération la problématique de l’eau dans la région MENA,le concept DESERTEC a été développé par TREC. Il a été conçu dansle but de mettre valeur les espaces désertiques de la région MENA et la

207Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

(154) Des efforts et des propositions dans ce sens au niveau de plusieurs pays existent depuisenviron une vingtaine d’années. Au Maroc par exemple :1. Présentation du projet « LE MAROC SOLAIRE» à feu Sa Majesté Hassan II et au Présidentallemand R. Von Weizsäcker à l’occasion de la visite de ce dernier au Maroc en 1990.2. Publication du livre «Vers un Maroc exportateur d’énergie (le Maroc et l’hydrogène solaire)»en 1994.

Page 201: La sécurité énergétique en Méditerranée

technologie au service d’une sécurité renforcée dans le domaine del’énergie, de l’eau et d’une protection plus forte du climat. Dans ce but,il est proposé que l’Europe, le Moyen-Orient (Middle East) et l’Afriquedu Nord (ensemble de régions noté EU-MENA) coopèrent pour laproduction d’électricité et d’eau dessalée en utilisant l’énergie solairethermique à concentration et des éoliennes dans les espaces appropriésdu MENA. Ces technologies peuvent répondre de plus en plus à lademande d’électricité et de dessalement d’eau de mer et produire del’électricité propre qui peut être exportée par des lignes de transmissionen Courant Continu Haute Tension (HVDC) avec de faibles pertes versl’Europe (10 à 15 %).

Trois études, financées par le Ministère fédéral allemand del’environnement, de la protection de la nature et de la sûreté nucléaire(BMU) et dirigées par le Centre de recherche spatiale de Stuttgart (DLR),ont permis d’évaluer le potentiel des énergies renouvelables dans leMENA, les besoins attendus pour 2050 en énergie et en eau, et la faisabilitéd’une construction d’un réseau de transport électrique entre l’EU et leMENA. Les études MED-CSP et TRANS-CSP concernent le potentield’énergie solaire, le déploiement de la technologie des centrales àconcentration (CSP) et le transport d’électricité vers l’Europe. L’étudeAQUA-CSP couvre les aspects relatifs au dessalement solaire de l’eaude mer. Un résumé de l’ensemble des études enrichi par des interventionsde personnalités politiques et scientifiques est présenté dans le Livre blancdisponible sur le site de DESERTEC (www.DESERTEC.org).

• Une coopération entre les deux rives de la méditerranée présented’énormes avantages, nous en soulignons quelques-uns : elle permettraiten parallèle l’ouverture du marché subméditerranéen aux industriels etaux entrepreneurs européens, un transfert de technologie et la créationd’un nouveau tissu industriel dans la rive sud avec un grand potentielde création d’emplois.

• La création d’emplois au Sud, et surtout dans des régions actuellementpeu développées économiquement (parce qu’elles sont trop ensoleilléesou trop ventées), réduirait le volume des’émigrations clandestines versl’Europe en substituant le flux humain par un flux d’énergie. Le coût deproduction, bénéficiant de la bonne qualité du gisement subméditerranéenet de l’économie de l’échelle, faciliterait l’ouverture du marché de l’Europeà l’importation de l’électricité verte du Sud.

208 La sécurité énergétique en Méditerranée

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• Cette importation d’électricité verte ne rendra pas seulement plusfacile et plus économique la réalisation de l’engagement de l’Europe dansla réduction des émissions des gaz à effet de serre, mais elle permettraaussi un engagement plus fort et plus efficace de l’ensemble des paysde la région contre les dangers du changement climatique.

• Le revenu du Maroc (et des autres pays subméditerranéen) résultantde l’exportation d’électricité verte permettrait de mieux couvrirl’augmentation nécessaire des importations indispensables audéveloppement du pays et renforcerait les exportations européennes.

• Tenant compte de l’évolution du marché de l’énergie et de l’état del’environnement (Rapport 2007 du GIEC), même des industriels du secteurde l’électricité européen annoncent leur disposition à participer à desprojets allant dans ce sens (le président de «Energie-Baden-Wurtemberg »est prêt à participer à des projets de production d’électricité verte pourl’Europe en Afrique du Nord (Home page FINANCE 12/03/07).

• Tenant compte des bonnes relations historiques, un engagement duMaroc avec des partenaires européens dans cette coopération ouvrira labonne voie à la participation d’autres pays de la région et engendrera unengouement bénéfique pour toute la région.

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209Le développement durable et la problématique des énergies renouvelables

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210 La sécurité énergétique en Méditerranée

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ANNEXES

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Conclusions de la présidenceConseil européen de Bruxelles

11 et 12 décembre 2008

Le Conseil européen s’est réuni les 11 et 12 décembre 2008 et aapprouvé un plan de relance de l’économie européenne équivalent aenviron 1,5 % du PIB de l’Union européenne (chiffre équivalent a environ200 milliards d’euros). Ce plan constitue le cadre commun des effortsentrepris par les Etats membres et par l’Union européenne, afin d’assurerleur cohérence et ainsi maximiser leurs effets. Le Conseil européen estégalement parvenu a un accord sur le paquet énergie/changementclimatique, qui doit permettre de finaliser ce paquet avec le Parlementeuropéen d’ici la fin de l’année. Cette percée décisive permettra a l’Unioneuropéenne d’honorer les engagements ambitieux pris dans ce domaineen 2007 et de conserver son rôle moteur dans la recherche d’un accordmondial ambitieux et global a Copenhague l’année prochaine. LeConseil européen a marqué sa volonté, par des décisions concrètes, dedonner un nouvel élan a la politique européenne de sécurité et de défenseafin de répondre aux nouveaux enjeux de sa sécurité. Enfin, le Conseileuropéen a débattu des éléments destinés a répondre aux préoccupationsexprimées lors du référendum irlandais et a défini une démarche afin depermettre au traité de Lisbonne d’entrer en vigueur avant la fin de 2009.

La réunion du Conseil européen a été précédée d’un exposé deM. Hans-Gert Pottering, président du Parlement européen, a l’issue duquelun échange de vues a eu lieu.

I. Traité de Lisbonne

1. Le Conseil européen réaffirme qu’il considère que le traité deLisbonne est nécessaire pour aider l’Union élargie a fonctionner demanière plus efficace, plus démocratique et plus effective, y compris surla scène internationale. Afin que le traité puisse entrer en vigueur avantla fin de 2009, le Conseil européen, tout en respectant les buts et objectifsdes traités, a défini la démarche suivante.

Page 206: La sécurité énergétique en Méditerranée

2. En ce qui concerne la composition de la Commission, le Conseileuropéen rappelle que les traités en vigueur exigent la réduction du nombredes membres de la Commission en 2009. Le Conseil européen convientque, a condition que le traité de Lisbonne entre en vigueur, une décisionsera prise, conformément aux procédures juridiques nécessaires, pour quela Commission puisse continuer de comprendre un national de chaqueEtat membre.

3. Le Conseil européen a pris note avec attention des autrespréoccupations du peuple irlandais présentées par le premier ministreirlandais, telles qu’énoncées a l’annexe 1, sur la politique fiscale, la familleet les questions sociales et éthiques, ainsi que la politique commune desécurité et de défense pour ce qui est de la politique traditionnelle deneutralité de l’Irlande. Le Conseil européen convient que, a conditionque l’Irlande prenne l’engagement visé au point 4, l’ensemble despréoccupations mentionnées dans ladite déclaration seront traitées demanière a satisfaire a la fois l’Irlande et les autres Etats membres.

Les garanties juridiques nécessaires seront apportées sur les trois pointssuivants :

• aucune des dispositions du traité de Lisbonne ne modifie en quoique ce soit, pour aucun Etat membre, l’étendue ou la mise en œuvre descompétences de l’Union dans le domaine fiscal ;

• le traité de Lisbonne n’affecte pas la politique de sécurité et de défensedes Etats membres, y compris la politique traditionnelle de neutralité del’Irlande, ni les obligations de la plupart des autres Etats membres ;

• une garantie que les dispositions de la Constitution irlandaiseconcernant le droit a la vie, l’éducation et la famille ne sont pas du toutaffectées par l’attribution par le traité de Lisbonne d’un statut juridiquea la Charte des droits fondamentaux de l’UE et par les dispositions dudittraité relatives a la justice et aux affaires intérieures.

• En outre, la grande importance que l’Union attache aux questionsmentionnées a l’annexe 1, point d), y compris les droits des travailleurs,sera confirmée.

4. A la lumière des engagements du Conseil européen ci-dessus, etsous réserve que les travaux de suivi détaillés soient achevés de manièresatisfaisante d’ici la mi-2009 et avec la présomption qu’ils seront mis

214 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 207: La sécurité énergétique en Méditerranée

en œuvre de manière satisfaisante, le gouvernement irlandais s’engagea rechercher la ratification du traité de Lisbonne d’ici la fin du mandatde l’actuelle Commission.

II. Questions économiques et financières

5. La crise économique et financière est une crise mondiale. C’estpourquoi l’Union européenne travaille de concert avec ses partenairesinternationaux. Le sommet tenu a Washington le 15 novembre 2008 ason initiative a défini un programme de travail ambitieux en vue d’unerelance concertée de l’économie mondiale, d’une régulation plus efficacedes marchés financiers, d’une gouvernance mondiale améliorée et du refusdu protectionnisme. Il doit être mis en œuvre conformément au calendrierétabli. Le Conseil est invité a organiser la préparation de ces travaux avecla Commission et a faire rapport au Conseil européen de printemps 2009sur leur avancée, dans la perspective du prochain sommet qui aura lieule 2 avril prochain a Londres.

6. L’Europe a défini, de manière coordonnée, les mesures d’urgencenécessaires pour rétablir le bon fonctionnement du système financier etla confiance des acteurs économiques. Le Conseil européen souligne lanécessité pour les Etats membres de pouvoir finaliser sans délai cesmesures. Il appelle a leur pleine et rapide mise en œuvre, avec le concoursde tous les acteurs concernés, conformément au cadre établi par le Conseille 2 décembre 2008. Le Conseil européen exhorte les banques et lesinstitutions financières a utiliser pleinement les facilités qui leur sontaccordées pour maintenir et soutenir les crédits a l’économie ainsi qu’arépercuter sur les emprunteurs les réductions des taux d’intérêt centraux.A cet égard, il convient d’assurer que les mesures du cadre commun, enparticulier les mécanismes de garantie, soient effectivement appliquéesde manière a contribuer a abaisser le coût du financement des institutionsfinancières au bénéfice des entreprises et des ménages.

7. Les marchés financiers demeurent fragiles. Nous devons restervigilants et continuer a mettre en œuvre de manière prioritaire les mesuresdestinées a renforcer la stabilité, la supervision et la transparence dusecteur financier, en particulier celles prévues par la feuille de route duConseil ECOFIN. Dans ce contexte, le Conseil européen souhaite queles négociations avec le Parlement européen aboutissent a l’adoption

215Annexes

Page 208: La sécurité énergétique en Méditerranée

rapide des décisions législatives qui ont fait l’objet d’une orientationgénérale du Conseil (1). Il appelle également a des décisions rapides surles autres sujets prioritaires identifiés, en particulier les agences denotation, la supervision financière et les normes comptables.

8. La crise financière frappe maintenant l’économie. La zone euro,voire l’Union toute entière, sont menacées de récession. Dans cescirconstances exceptionnelles, l’Europe agira de manière unie, forte,rapide et décisive pour éviter une spirale récessive et soutenir l’activitééconomique et l’emploi. Elle mobilisera tous les instruments dont elledispose et agira de manière concertée afin de maximiser l’effet des mesuresprises par l’Union et par chacun des Etats membres. Dans ce contexte,les politiques de protection et d’inclusion sociales des Etats membresont également un rôle vital a jouer.

Le Conseil européen marque son accord sur un plan européen derelance économique, explicité ci-dessous. Ce plan constituera un cadrecohérent pour l’action a mener au niveau de l’Union ainsi que pour lesmesures décidées par chaque Etat membre en tenant compte de la situationde chacun. Dans l’esprit de la communication de la Commission du 26novembre 2008, il repose sur un effort équivalent au total a environ 1,5 %du PIB de l’Union européenne. Il prévoit également le lancement d’actionsprioritaires destinées a accélérer l’ajustement de nos économies face auxdéfis actuels.

Dans ce contexte, la Banque centrale européenne et les autres banquescentrales ont considérablement réduit leurs taux d’intérêt ; ellessoutiennent ainsi une croissance non-inflationniste et contribuent à lastabilité financière

11. En ce qui concerne l’action relevant de l’Union européenne, leConseil européen soutient en particulier :

– l’augmentation par la Banque européenne d’investissement de sesinterventions, a hauteur de 30 milliards d’euros en 20/10/2009, enparticulier au bénéfice des petites et moyennes entreprises, pour l’énergierenouvelable et pour le transport propre notamment au bénéfice du secteurautomobile, de même que la création du Fonds européen 2020 pour

216 La sécurité énergétique en Méditerranée

(1) Projets de directives sur les exigences de fonds propres des banques, sur la solvabilité descompagnies d’assurance, sur les organismes de placement collectif en valeurs mobilières etsur la protection des dépôts des épargnants.

Page 209: La sécurité énergétique en Méditerranée

l’énergie, le changement climatique et les infrastructures (« fondsMarguerite ») en partenariat avec des investisseurs institutionnelsnationaux ;

– la simplification des procédures et l’accélération de la mise en œuvredes programmes financés par le Fonds de cohésion, les Fonds structurelsou le Fonds européen agricole et de développement rural en vue durenforcement des investissements d’infrastructures et en matièred’efficacité énergétique ;

– sur la base d’une liste de projets concrets que présentera laCommission en tenant compte d’un équilibre géographique adéquat, lamobilisation des possibilités permettant, dans le cadre du budgetcommunautaire, de renforcer les investissements dans ces secteurs et dedévelopper, par le biais d’incitations réglementaires, L'internet a hautdébit, y compris dans les zones mal desservies ;

– le lancement rapide par le Fonds social européen d’actionssupplémentaires en soutien a l’emploi, notamment au bénéfice despopulations les plus vulnérables, en accordant une attention particulièreaux entreprises les plus petites en réduisant le coût non salarial du travail ;

– la mobilisation en faveur de l’emploi dans des secteurs clé del’économie européenne en particulier par le Fonds européen d’ajustementa la mondialisation, y compris grâce a l’amélioration et l’accélérationde ses procédures ;

– la possibilité, pour les Etats membres qui le désirent, d’appliquerdes taux de TVA réduits dans certains secteurs : le Conseil européendemande au Conseil ECOFIN de régler cette question avant le mois demars 2009;

– une franchise temporaire de deux ans au-delà du seuil “de minimis”en matière d’aides d’Etat pour un montant jusqu’à 500 000 euros etl’adaptation du cadre nécessaire pour accroître le soutien aux entreprises,en particulier les PME, ainsi que la pleine mise en œuvre du plan d’actionpour un “Small Business Act” adopté par le Conseil le 1er décembre 2008 ;

– Le recours, pour 2009 et 2010, aux procédures accélérées prévuesdans les directives relatives aux marchés publics, qui se justifie comptetenu de la nature exceptionnelle de la situation économique actuelle, afinde ramener de 87 a 30 jours la durée des procédures d’appel d’offres lesplus couramment utilisées dans le cadre de grands projets publics ;

217Annexes

Page 210: La sécurité énergétique en Méditerranée

– La poursuite d’une réduction générale et significative des chargesadministratives pesant sur les entreprises.

– Le Conseil européen invite le Parlement européen, le Conseil et laCommission a adopter les décisions nécessaires, y compris, le cas échéant,en ce qui concerne le cadre réglementaire, dans le plein respect desperspectives financières actuelles et des procédures de l’accord inter-institutionnel selon un calendrier aussi accéléré que possible.

12. A leur niveau, les Etats membres ont déjà pris un certain nombrede mesures importantes, répondant a leur situation propre et reflétant desmarges de man œuvre différentes. Un effort accru et coordonné estnécessaire eu égard a l’ampleur de la crise, dans le cadre d’une approchecommune reposant sur les lignes directrices suivantes :

– les mesures de soutien a la demande doivent viser un effetimmédiat, être limitées dans le temps et ciblées sur les secteurs le plustouchés et les plus importants au regard de la structure de l’économie(par exemple le secteur automobile et la construction) ;

– ces mesures peuvent prendre la forme, en fonction des situationsnationales, d’une augmentation de la dépense publique, de réductionsjudicieuses de la pression fiscale, d’une diminution des charges sociales,de soutiens a certaines catégories d’entreprises ou d’aides directes auxménages en particulier les plus vulnérables ;

– elles seront accompagnées d’un effort accru de mise en œuvre desréformes structurelles dans le cadre de la stratégie de Lisbonne. Cesréformes seront axées sur un financement accru de l’investissement etdes infrastructures, une amélioration de la compétitivité des entreprises,un soutien plus important accordé aux PME et une promotion de l’emploi,de l’innovation, de la recherche & développement ainsi que de l’éducationet de la formation.

13. Le Conseil européen souligne que le Pacte de stabilité et decroissance révisé demeure la pierre angulaire du cadre budgétaire de l’UE.Il offre la flexibilité permet an la mise en œuvre de l’ensemble des mesuresdu plan de relance. Conscient que ces dernières creuseront temporairementles déficits, le Conseil européen réaffirme son plein engagement en faveurde finances publiques soutenables et appelle les Etats membres a revenirdès que possible, conformément au Pacte, et au rythme du redressementéconomique, vers leurs objectifs budgétaires de moyen terme.

218 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 211: La sécurité énergétique en Méditerranée

14. Dans les circonstances actuelles, l’application par la Commissiondes règles de concurrence doit également répondre a l’exigence d’uneaction rapide et flexible. Dans ce contexte, le Conseil européen saluenotamment l’adoption par la Commission de nouvelles lignes directricespour les institutions financières et appelle a leur prompte mise en œuvre.

15. Le Conseil européen est convaincu que cet ambitieux plan derelance, qui converge avec les initiatives similaires mises en œuvre parles autres principales économies de la planète, apportera une contributiondécisive au retour rapide de l’économie européenne vers le chemin dela croissance et de la création d’emplois. Il appréciera, a partir de sa sessionde mars 2009, la bonne mise en œuvre du plan de relance et pourra lecompléter ou l’adapter en tant que de besoin.

16. Le Conseil européen invite le Conseil et la Commission a engagerun dialogue avec les pays producteurs d’hydrocarbures pour rechercherles moyens d’une stabilisation durable des prix de l’énergie.

17. Le Conseil européen souscrit a l’objectif de parvenir cette annéeau sein de l’Organisation mondiale du commerce a un accord sur desmodalités conduisant a la conclusion du programme de Doha pour ledéveloppement avec un résultat ambitieux, global et équilibré.

18. L’Europe doit continuer a investir dans son avenir. Sa prospéritéfuture est a ce prix. Le Conseil européen appelle au lancement d’un planeuropéen pour l’innovation, en liaison avec le développement del’Espace européen de la recherche ainsi qu’avec la réflexion sur l’avenirde la stratégie de Lisbonne au-delà de 2010, embrassant toutes lesconditions du développement durable et les principales technologies dufutur (notamment l’énergie, les technologies de l’information, lesnanotechnologies, les technologies spatiales et les services qui endécoulent, les sciences du vivant).

III. Energie et changement climatique

19. Le Conseil européen salue le résultat des travaux conduits avecle Parlement européen, dans le cadre de la codécision, qui ont permis dedégager un large accord de principe sur la plus grande partie des quatrepropositions du paquet législatif énergie/climat. Il salue égalementl’accord complet sur les propositions législatives “CO2 véhicules légers”,“Qualité des carburants” et la directive “Sources d’énergie renouvelables”.

219Annexes

Page 212: La sécurité énergétique en Méditerranée

20. Le Conseil européen a débattu des enjeux de la mise en œuvredu paquet et des questions encore ouvertes. Il est parvenu a un accordsur les éléments repris dans le document 17215/08.

21. Le Conseil européen invite le Conseil a rechercher un accord avecle Parlement européen sur la base de ce qui précède afin de permettreun accord en première lecture sur l’ensemble du paquet avant la fin del’année.

22. Ce paquet assurera la mise en œuvre des engagements ambitieuxen matière énergétique et climatique pris par l’Union européenne en mars2007 et mars 2008, en particulier l’objectif de réduction de 20 % desémissions de gaz a effet de serre en 2020. Le Conseil européen confirmel’engagement de l’Union européenne de porter cette réduction a 30 %dans le cadre d’un accord mondial ambitieux et global a Copenhaguesur le changement climatique pour l’après-2012 a condition que les autrespays développés s’engagent a atteindre des réductions d’émissionscomparables et que les pays en développement plus avancés sur le planéconomique apportent une contribution adaptée a leurs responsabilitéset a leurs capacités respectives.

23. La Commission présentera au Conseil européen en mars 2010 uneanalyse détaillée du résultat de la Conférence de Copenhague, notammenten ce qui concerne le passage d’une réduction de 20 % a 30 %. Le Conseileuropéen procédera, sur cette base, a une évaluation de la situation, ycompris les effets sur la compétitivité de l’industrie européenne et desautres secteurs économiques.

24. Dans le contexte de cet accord et du plan de relance économique,il est impératif d’intensifier les actions en vue d’améliorer l’efficacitéénergétique des bâtiments et les infrastructures énergétiques, depromouvoir les “produits verts” et de soutenir les efforts de l’industrieautomobile visant a produire des véhicules plus respectueux del’environnement.

L’effort de l’Union contre le changement climatique va de pair avecune action résolue afin de

25. Renforcer sa sécurité énergétique, y compris les interconnexionset la connexion des pays les plus isolés de l’ensemble européen. A cetégard, le Conseil européen demande au Conseil, sur la base desorientations définies dans ses conclusions d’octobre 2008, de procéder

220 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 213: La sécurité énergétique en Méditerranée

a l’examen rapide du Plan d’action sur la sécurité et la solidaritéénergétiques présenté par la Commission, en vue de sa réunion demars 2009.

IV. Relations extérieures et politique européenne de sécuritéet de défensePolitique européenne de voisinage

28. Le Conseil européen fait siennes les orientations dégagées lorsde la réunion ministérielle tenue a Marseille les 3 et 4 novembre 2008,qui ont permis de préciser les modalités de fonctionnement de l’Unionpour la Méditerranée. Il appelle, dans le cadre des structures ainsi misesen place, a la poursuite de la mise en œuvre ambitieuse de cette initiativedans toutes ses dimensions.

29. De même, le Partenariat oriental permettra de renforcer de manièresignificative la politique de l’UE a l’égard des partenaires orientaux dela politique européenne de voisinage (2) dans un cadre bilatéral etmultilatéral, de manière complémentaire avec les autres coopérationsexistant déjà dans le voisinage de l’Union, telles que la “Synergie de lamer Noire”, dont il conviendra de tenir compte.

Le Partenariat oriental devrait aider les pays partenaires a progresserdans leurs processus de réforme en contribuant ainsi a leur stabilité et aleur rapprochement de l’UE. Le Conseil européen salue les propositionsprésentées par la Commission dans sa communication du 3 décembre 2008et charge le Conseil de les examiner et de lui faire rapport en vue del’approbation de cette initiative ambitieuse lors de sa session de mars2009 et du lancement du Partenariat oriental lors d’un sommet avec lespays partenaires organisé par la future présidence tchèque.

Politique européenne de sécurité et de défense

30. Le Conseil européen marque sa volonté de conférer, a travers ladéclaration ci-jointe (3), un nouvel élan a la politique européenne desécurité et de défense. Respectueuse des principes de la Charte des Nationsunies et des décisions du Conseil de sécurité des Nations unies, cette

221Annexes

(2) Arménie, AzerbaIdjan, Biélorussie, Géorgie, République de Moldavie, Ukraine.(3) cf. annexe 2.

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222 La sécurité énergétique en Méditerranée

politique continuera a se développer en pleine complémentarité avecl’OTAN dans le cadre agréé du partenariat stratégique entre l’UE etl’OTAN et dans le respect de leur autonomie de décision et de leursprocédures respectives. A cette fin, le Conseil européen souscrit a l’analysedu rapport sur la mise en œuvre de la stratégie européenne de sécuritéde 2003 et fait siennes les déclarations adoptées par le Conseil (4), quiconviennent d’objectifs nouveaux pour renforcer et optimiser lescapacités européennes dans les années a venir et soulignent la volontéde l’UE d’agir au service de la paix et de la sécurité internationales touten contribuant concrètement à la sécurité des citoyens.

(4) cf. références figurant a l’annexe 6.

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Conclusions de la présidenceConseil européen de Bruxelles

Le 13 et 14 mars 2008

Extraits

Changement climatique et énergie

17. L’an dernier, l’UE a pris des engagements fermes et ambitieuxen matière de politique climatique et énergétique ; aujourd’hui, en 2008,il s’agit de les tenir. En décembre dernier, la conférence de Bali sur lechangement climatique avait permis de réaliser une percée décisive etde lancer un processus de négociation international ouvert à tous, quiest exposé intégralement dans la Feuille de route de Bali. L’UE tient àconserver un rôle moteur au niveau international en matière dechangement climatique et d’énergie et elle est fermement décidée àentretenir la dynamique imprimée aux négociations sur la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et son protocolede Kyoto, en particulier lors de la prochaine Conférence des Parties quiaura lieu à Pozna ? L'objectif est d’aboutir en 2009, à Copenhague, à unaccord mondial ambitieux et global sur le changement climatique pourl’après-2012, qui soit conforme à l’objectif des 2°C que s’est fixé l’UE.L’Europe y contribuera fortement en tenant ses engagements par rapportà tous les objectifs fixés par le Conseil européen du printemps 2007. L’undes défis majeurs à relever sera de faire en sorte que cette transition versune économie sûre et viable à long terme, et produisant peu de composéscarbonés, soit compatible avec le développement durable de l’UE, sacompétitivité, sa sécurité d’approvisionnement, la sécurité alimentaire,une gestion saine et viable des finances publiques et la cohésionéconomique et sociale. L’UE propose de contribuer à un effort accéléréet concerté, à haut niveau, visant à soutenir la Convention-cadre desNations unies sur les changements climatiques et le plan d’action de Balien vue d’élaborer une architecture cohérente et homogène pour un accordsur l’après-2012 qui garantisse le renforcement des investissements etdes apports financiers destinés aux mesures d’atténuation aussi bien qued’adaptation. Étant donné que la question du climat et de l’énergie faitpartie intégrante de la stratégie de Lisbonne, elle contribuera également

223Annexes

Page 216: La sécurité énergétique en Méditerranée

de manière constructive à des objectifs de croissance et d’emploi pluslarges.

18. L’ambitieuse série de propositions présentée par la Commissionpour mettre en œuvre les conclusions du Conseil européen duprintemps 2007 constitue un bon point de départ et une base appropriéepour parvenir à un accord. Le Conseil européen invite la Commission àcontinuer de soutenir les efforts déployés par les États membres pourréduire leurs émissions de gaz à effet de serre par des politiques et desmesures communautaires globales et ambitieuses. Les délibérationsapprofondies du Conseil, travaillant en association étroite avec leParlement européen, devraient aboutir à un accord sur ces propositions,qui constituent un tout cohérent, avant la fin de 2008, ce qui permettraleur adoption sous la législature actuelle, au plus tard début 2009. Cefaisant, le Conseil devrait garder à l’esprit qu’il est important de maintenirl’équilibre global du dispositif législatif dans son ensemble, et il devraitbaser ses travaux sur les principes de transparence, d’efficacitééconomique, d’efficacité au regard des coûts, d’équité et de solidaritédans la répartition des efforts entre les États membres. Le Conseil devraitégalement tenir compte du fait que le point de départ, les particularités,les possibilités et les résultats obtenus diffèrent selon les États membreset respecter la nécessité d’une croissance économique durable dansl’ensemble de la Communauté à laquelle contribuent tous les secteurs.Il convient également de suivre une approche axée sur la souplesse etsur l’efficacité au regard des coûts pour mettre au point des instrumentsfondés sur le marché en vue d’atteindre les objectifs de la politiqueénergétique et climatique, de façon à éviter des coûts excessifs pour lesÉtats membres. Il faudra intégrer l’objectif plus ambitieux d’uneréduction de 30 %, dans le cadre d’un accord mondial global, de manièreclaire, équilibrée, transparente et équitable, en tenant compte destravaux entrepris au cours de la première période d’engagement duprotocole de Kyoto.

19. Le Conseil européen est conscient que, dans un contexte mondialde marchés concurrentiels, le risque de fuite de carbone constitue, danscertains secteurs, tels que les industries à haute intensité énergétique,qui sont particulièrement exposés à la concurrence internationale, unproblème qu’il faudra analyser et s’employer à résoudre d’urgence dansle cadre de la nouvelle directive SCEQE, de sorte que, si les négociations

224 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 217: La sécurité énergétique en Méditerranée

internationales échouent, les mesures adéquates puissent être prises. Laconclusion d’un accord international reste la meilleure façon de traitercette question.

20. Le Conseil européen souligne que le système d’échange de quotasd’émission de gaz à effet de serre de l’UE est un élément essentiel d’unepolitique intégrée en matière de climat et d’énergie, et il est conscientde l’importance que revêtent l’instauration dans ce système d’un plafondunique applicable à l’ensemble de l’UE et la fixation d’une trajectoirepour la réduction des émissions. La directive révisée devrait améliorerle rapport coût-efficacité des réductions d’émissions nécessaires,permettre de lier le système d’échange de quotas d’émissions de l’UE àd’autres systèmes d’échange obligatoires limitant les émissions en valeurabsolue et renforcer le recours aux mécanismes de flexibilité résultantde projets mis en œuvre dans les pays tiers. Le Conseil européen insisteen outre sur la nécessité de faire preuve de souplesse pour atteindre lesobjectifs fixés au niveau national pour ce qui est des énergiesrenouvelables et des secteurs non couverts par le système d’échange,conformément au plan d’action adopté par le Conseil européen enmars 2007, et il souligne qu’il est important de mettre en place desmécanismes de soutien nationaux efficaces pour les énergiesrenouvelables, ainsi qu’un véritable mécanisme de flexibilité fondé surdes garanties d’origine, comme l’a proposé la Commission. Il souligneque la politique de la Communauté et des États membres en matièred’énergie doit accroître l’efficacité énergétique et améliorer la sécuritéde l’approvisionnement, ces deux éléments jouant un rôle essentiel sil’on veut mener à bien la politique intégrée de l’UE en matière de climatet d’énergie et parvenir à un développement économique durable.

21. Le Conseil européen rappelle que l'objectif poursuivi en proposantl’établissement d’un cadre réglementaire concernant le captage et lestockage du CO2 consiste à garantir que cette nouvelle technologie soitmise en œuvre d’une manière qui ne nuise pas à l’environnement, ce quisera démontré dans le cadre de projets, conformément à ce qui a étéconvenu au printemps 2007.

22. En vue d’atteindre l’objectif ambitieux qui a été fixé pourl’utilisation des biocarburants, il est essentiel de mettre au point et derespecter des critères de viabilité effective à long terme, que l’on pourrait,à l’avenir, également envisager d’appliquer à l’utilisation d’autres

225Annexes

Page 218: La sécurité énergétique en Méditerranée

formes de biomasse à des fins énergétiques, conformément auxconclusions du Conseil européen du printemps 2007, ainsi que d’assurerla disponibilité, sur le marché, de biocarburants de deuxième génération.

Il est nécessaire de renforcer les synergies entre les politiques menéesdans les domaines du changement climatique et de la biodiversité afind’en tirer des bénéfices sur les deux plans, notamment en renforçant lesactivités et les mesures mutuellement bénéfiques en ce qui concernel’atténuation des changements climatiques et l’adaptation à ceux-ci ainsique la production, la consommation et le commerce de biocarburants.Le Conseil européen encourage les États membres et la Commission àintensifier leurs efforts pour mettre un terme à l’appauvrissement de labiodiversité à l’horizon 2010 et au-delà. La neuvième réunion de laConférence des parties à la CDB, qui se tiendra à Bonne en mai 2008,et la réalisation intégrale du réseau Natura 2000 constituent des étapesessentielles pour atteindre cet objectif.

Un marché intérieur de l’énergie efficace, pleinement opérationnelet interconnecté est une condition essentielle d’un approvisionnementénergétique sûr, durable et compétitif en Europe. Le Conseil européendemande donc instamment au Conseil de mettre à profit les progrès réalisésrécemment sur le troisième ensemble de mesures pour un marché intérieurdans le domaine du gaz et de l’électricité afin de parvenir à un accordpolitique d’ici juin 2008, en prenant pleinement en considération lesconclusions du Conseil européen du printemps 2007. Il invite laCommission à tenir compte, lorsqu’elle poursuivra le développement deces politiques, de la situation et des besoins des marchés de l’énergielorsque ceux-ci sont isolés ou de petite taille.

Le Conseil européen rappelle l’importance qu’il attache aurenforcement de la sécurité énergétique de l’UE et de ses États membres.Si les mesures liées au changement climatique et à l’énergie, le marchéintérieur de l’énergie et les nouvelles technologies contribuent tous à laréalisation de cet objectif, il convient également d’œuvrer avecdétermination au renforcement de la dimension extérieure de la politiqueénergétique pour l’Europe pour la période 2007-2009. Le Conseil européennote avec satisfaction les progrès accomplis à cet égard, qui sont présentésdans le rapport sur l’état d’avancement des travaux soumis au Conseil(doc. 6778/08) ; il entreprendra une évaluation plus complète desprogrès réalisés dans la mise en œuvre et des nouvelles mesures

226 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 219: La sécurité énergétique en Méditerranée

nécessaires à la lumière de la prochaine analyse stratégique de la politiqueénergétique, qui sera présentée en novembre 2008 et devra être approuvéepar le Conseil européen du printemps 2009, et qui servira de base aunouveau plan d’action dans le domaine de l’énergie pour l’après-2010,lequel devra être adopté par le Conseil européen du printemps 2010. Cetteanalyse stratégique de la politique énergétique sera axée notamment surla sécurité de l’approvisionnement, y compris en ce qui concerne lesinterconnexions, et sur la politique énergétique extérieure. Le Conseileuropéen attache une importance particulière au fait que l’UE et ses Étatsmembres s’expriment d’une même voix, vis-à-vis des tierces parties, surles questions d’énergie.

26. Le Conseil européen salue le rapport commun du HautReprésentant et de la Commission sur les conséquences du changementclimatique pour la sécurité internationale. Il souligne l’importance decette question et invite le Conseil à examiner ce document et à formuler,au plus tard en décembre 2008, des recommandations sur les mesuresde suivi appropriées, notamment sur les moyens d’intensifier lacoopération avec les régions et pays tiers concernant l’impact duchangement climatique sur la sécurité internationale.

27. L’évolution vers une économie sûre et durable, à faibles émissionsde composés carbonés, aura un impact sur de nombreuses politiques ainsique sur la vie quotidienne et la situation économique de la population.Il y a lieu de mener des politiques cohérentes exploitant les synergiesen rapport avec l’énergie et le changement climatique également dansles trois autres domaines prioritaires de la stratégie de Lisbonne, ainsique dans d’autres domaines d’action de l’UE, y compris :

– en élaborant des politiques cohérentes en matière de R&D etd’innovation au niveau européen et national ;

– en libérant le potentiel économique des éco-industries, en élaborantune politique industrielle viable à long terme et en développant desmarchés pilotes durables et compétitifs sur le plan mondial, tout en tenantcompte de l’impact des mesures liées à l’énergie et au changementclimatique sur la compétitivité ;

– en favorisant la mise en place d’un système de transport viable àlong terme, qui permette aux États membres, dans le cadre des politiquesmenées par l’UE, de prendre les mesures nécessaires pour efficacementcontre le changement climatique ;

227Annexes

Page 220: La sécurité énergétique en Méditerranée

228 La sécurité énergétique en Méditerranée

– en envisageant un réexamen de la directive sur la taxation de l’énergieen vue de la rendre plus conforme aux objectifs de l’UE en matièred’énergie et de changement climatique ;

– en améliorant l’efficacité énergétique et l’utilisation efficace desressources dans tous les secteurs ;

– en informant le consommateur sur l’utilisation efficace de l’énergieafin de faire face aux répercussions sociales des questions d’énergie etde changement climatique et de saisir les possibilités qui y sont liées.

Le Conseil européen invite aussi la Commission, lors de l’élaborationde ses propositions législatives relatives aux taux de TVA, qui sontattendues pour l’été 2008, et en coopération avec les États membres, àexaminer les domaines dans lesquels les instruments économiques, ycompris les taux de TVA, peuvent contribuer à accroître l’utilisation desbiens efficaces d’un point de vue énergétique et des matériaux permettantd’économiser l’énergie.

28. Le Conseil européen souligne la nécessité d’un investissementsoutenu en matière de recherche et développement et de l’adoptioneffective des nouvelles technologies énergétiques, comme l’a récemmentindiqué la Commission dans le plan stratégique européen pour lestechnologies énergétiques qu’elle a présenté.

29. Le Conseil européen est conscient que le règlement des questionsénergétiques et la lutte contre le changement climatique passent par uneredéfinition des valeurs et un changement des comportements de la partdes citoyens. C’est pourquoi il demande instamment aux gouvernementsnationaux et aux institutions européennes de montrer l’exemple enaccomplissant des progrès notables vers l'objectif consistant à réduire laconsommation d’énergie de leurs bâtiments et de leurs parcs automobiles.

« Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée »

Le Conseil européen a approuvé le principe d’une Union pour laMéditerranée qui englobera les États membres de l’UE et les Étatsriverains de la Méditerranée qui ne sont pas membres de l’UE. Il a invitéla Commission à présenter au Conseil les propositions nécessaires pourdéfinir les modalités de ce que l’on appellera “Processus de Barcelone :Union pour la Méditerranée”, en vue du sommet qui se tiendra à Parisle 13 juillet 2008.

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229

Conclusions de la présidenceConseil européen de Bruxelles

Bruxelles, le 20 juin 2008

Extraits

Prix élevé des denrées alimentaires et du pétrole : conséquencespour l’action de l’Union

25. La récente flambée des prix des produits de base est sourced’inquiétude, tant au niveau intérieur, notamment pour ce qui est desménages a faibles revenus, qu’au niveau international, en particulier ence qui concerne les pays en développement importateurs nets de denréesalimentaires et/ou de pétrole. Il s’agit d’un phénomène complexe, dontles raisons profondes et les conséquences sont nombreuses et qui a desincidences sur l’ensemble des domaines d’action de l’UE. Le Conseileuropéen salue les deux communications de la Commission consacréesa ces questions.

26. Dans le secteur de l’agriculture, l’Union a déjà pris des mesuresvisant a limiter la pression exercée sur les prix des denrées alimentairesen vendant des stocks d’intervention, en réduisant les restitutions al’exportation, en supprimant l’exigence de mise en jachère pour 2008,en augmentant les quotas laitiers et en suspendant les droits d’importationpour les céréales, ce qui a permis d’améliorer l’approvisionnement et acontribué a la stabilisation des marchés agricoles.

27. Les réformes successives de la PAC l’ont davantage axée sur lemarché, ont réduit le nombre de mesures de régulation de l’offre et ontrendu les agriculteurs de l’UE plus réactifs face a l’évolution des prix.Il importe de continuer a orienter davantage l’agriculture vers les besoinsdu marché et de permettre ainsi aux agriculteurs de l’UE de mieux réagiraux signaux du marché, tout en garantissant une concurrence loyale eten favorisant une agriculture durable dans toute l’UE et en garantissantune offre adéquate de denrées alimentaires. Dans le cadre du bilan desanté de la PAC, le Conseil examinera d’autres mesures permettant des’attaquer a ces questions.

Annexes

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28. Il est indispensable de poursuivre les travaux en matièred’innovation, de recherche et de développement de la productionagricole, en particulier pour améliorer son efficacité énergétique, lacroissance de sa productivité et sa capacité a s’adapter au changementclimatique.

29. Un certain nombre d’Etats membres prennent actuellement desmesures a court terme pour atténuer les effets de l’évolution récente duprix des denrées alimentaires sur les ménages a faibles revenus. Afin qu’iln’y ait pas de distorsions dans les signaux donnés au niveau des prix, nid’effets de grande ampleur au niveau des salaires et des prix dans undeuxième temps, ces mesures devraient être ciblées et de courte durée.

30. Le Conseil européen salue l’initiative de la Commission visant aexaminer la question de la réglementation restrictive dans le secteur ducommerce de détail dans le cadre du réexamen du marché unique. Il sefélicite également de l’intention qu’a la Commission de suivreattentivement les activités sur les marchés financiers liés aux produitsde base, y compris les opérations spéculatives, ainsi que leursrépercussions sur les mouvements de prix et les éventuelles conséquencespour l’action de l’Union. Le Conseil européen invite la Commission afaire rapport sur ce problème avant le Conseil européen de décembre 2008et a envisager de proposer des mesures adéquates pour y faire face,notamment des mesures visant a améliorer la transparence du marché.

31. Il importe de faire en sorte que les politiques relatives auxbiocarburants s’inscrivent dans la durée, en fixant des critères de durabilitépour la production des biocarburants de première génération et enencourageant le développement de biocarburants de deuxième générationfabriqués a partir de sous-produits. Il est également nécessaire d’évaluer,dans les meilleurs délais, les incidences éventuelles de ces politiques surles produits agricoles destinés a l’alimentation et de prendre desmesures, le cas échéant, pour faire face a d’éventuels problèmes. Ilconvient en outre de poursuivre l’évaluation des incidencesenvironnementales et sociales de la production et de la consommationde biocarburants, tant a l’intérieur qu’en dehors de l’UE. Le Conseileuropéen souligne qu’il est important de favoriser la coordination avecles partenaires internationaux de l’UE a cet égard.

230 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 223: La sécurité énergétique en Méditerranée

32. Les prix élevés des denrées alimentaires mettent particulièrementa rude épreuve les pays en développement. Ils ont de graves répercussionssur la situation des populations les plus pauvres du monde etcompromettent la réalisation de tous les objectifs du Millénaire pour ledéveloppement (OMD). L’Union européenne doit donc prendre desmesures s’inspirant de préoccupations de développement et d’aidehumanitaire. Le Conseil européen se félicite de la volonté de laCommission de présenter une proposition visant a instaurer un nouveaufonds de soutien a l’agriculture dans les pays en développement, dansle respect des perspectives financières actuelles. L’Union ouvrera enliaison étroite avec les Nations unies et d’autres organisationsinternationales, ainsi que dans le cadre des politiques et stratégies despays partenaires.

33. L’UE apporte déjà une aide alimentaire et humanitaire importantea un grand nombre des régions les plus touchées, et elle mobilisera lesressources nécessaires pour financer, au-delà de l’aide alimentaire, unsystème de protection sociale pour les catégories de populations.

34. L’UE encouragera une réponse internationale mieux coordonnéeet a plus long terme a la crise alimentaire actuelle, en particulier dans lecadre des Nations unies, des institutions financières internationales etdu G8. Elle se félicite donc de la création par le Secrétaire général desNations unies de l’Equipe spéciale de haut niveau sur la crise mondialede la sécurité alimentaire. L’UE est déterminée à jouer pleinement sonrôle dans la mise en œuvre de la déclaration approuvée a Rome le 5juin 2008 lors de la conférence de haut niveau de la FAO sur la sécuritéalimentaire mondiale.

35. L’UE utilisera de manière transparente le dialogue politique qu’ellemène avec les pays tiers pour les dissuader de limiter ou d’interdire lesexportations de denrées alimentaires. Elle soulèvera également cettequestion au sein de l’OMC et d’autres enceintes internationalescompétentes. En outre, l’UE continuera a rechercher, pour le cycle deDoha, un résultat final global, ambitieux et équilibré.

36. L’UE encouragera l’adoption de mesures résolues au niveau del’offre de produits agricoles dans les pays en développement, enfournissant notamment le financement nécessaire pour les intrantsagricoles et une assistance pour l’utilisation d’instruments de gestion des

231Annexes

Page 224: La sécurité énergétique en Méditerranée

risques fondés sur le marché. Elle renforcera sensiblement son soutienaux investissements publics et privés dans l’agriculture et, plusgénéralement, encouragera les pays en développement a élaborer demeilleures politiques agricoles, en particulier pour contribuer a la sécuritéalimentaire et renforcer l’intégration régionale. Une attention particulièresera accordée aux petits producteurs et au renforcement de l’efficacitéénergétique.

37. Le Conseil européen se déclare préoccupé par la hausse continuedu prix du pétrole et du gaz et par ses incidences sociales et économiques.Des mesures peuvent être envisagées pour atténuer les effets de cettehausse sur les tranches les plus pauvres de la population, mais elles doiventrester de courte durée et ciblées. Le Conseil européen se félicite que laCommission ait l’intention de proposer des mesures a court terme visanta étayer le processus a long terme de restructuration du secteur de la péché.Il convient d’éviter des mesures fiscales ou d’autres interventionspubliques qui auraient des effets de distorsion, étant donné qu’ellesempêchent les agents économiques de procéder aux ajustementsnécessaires. Le Conseil européen invite la future présidence, encoopération avec la Commission, a examiner la faisabilité et l’incidencede mesures visant a limiter les effets de la flambée du prix du pétrole etdu gaz a lui faire rapport avant sa réunion d’octobre.

38. Cette évolution fait ressortir la nécessité d’adopter rapidement lepaquet sur le changement climatique et l’énergie, dont de nombreuxéléments peuvent contribuer a améliorer la situation. Il est indispensablede poursuivre les efforts afin d’accroItre l’efficacité énergétique et leséconomies d’énergie et de diversifier l’approvisionnement énergétique del’UE. Les nouvelles technologies ont en particulier un rôle essentiel a joueren la matière. Le Conseil européen invite les Etats membres, la Commissionet la Banque européenne d’investissement a soutenir les mesures visant afavoriser les investissements des ménages et de l’industrie en faveur del’efficacité énergétique, de l’utilisation de sources d’énergie renouvelableset d’une utilisation des carburants fossiles plus respectueuse del’environnement. Il demande instamment aux Etats membres et a laCommission d’accélérer la mise en œuvre du plan d’action de 2006 pourl’efficacité énergétique et d’envisager son réexamen. Il prend acteégalement de ce que la Commission présentera bientôt des propositionsvisant a réviser les directives sur la taxation de l’énergie et l’eurovignette.

232 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 225: La sécurité énergétique en Méditerranée

39. D’autres mesures devraient être rapidement examinées, notammentpour encourager la concurrence sur les marchés de l’énergie, favoriserla modernisation des systèmes de transport, y compris la mise au pointd’autres technologies, notamment les voitures électriques, et améliorerla transparence des marchés du pétrole, y compris en ce qui concerneles stocks pétroliers. Il conviendrait de renforcer le dialogue avec lescompagnies pétrolières et gazières, les pays producteurs de pétrole et degaz et les pays en développement importateurs de pétrole et de gaz, tantau niveau européen qu’au niveau international, afin de s’assurer que l’offreréponde mieux aux besoins du marché et afin d’améliorer les conditionscadres pour les investissements dans l’exploration, la production, lacapacité de raffinage et les sources d’énergie alternatives. A cet égard,le Conseil européen se félicite de la décision prise par l’Arabie saouditede convoquer, le 22 juin a Djeddah, une réunion entre pays producteurset pays consommateurs de pétrole.

40. Le Conseil européen prend tout particulièrement acte de l’intentionqu’a la Commission de suivre l’évolution du prix des denrées alimentaireset du pétrole en Europe et a l’échelle internationale, et attend avec intérêtle rapport sur l’évolution de la situation qu’elle présentera avant le Conseileuropéen de décembre 2008. Le Conseil européen encourage aussi laCommission a suivre l’évolution de la situation sur d’autres marchés liésaux produits de base. Etant donné le grand nombre de domaines d’actiontouchés par le prix élevé des denrées alimentaires et de l’énergie, le Conseileuropéen invite le Conseil “Affaires générales et relations extérieures”(CAGRE) a suivre de près les travaux menés sur cette question au seindes formations compétentes du Conseil et a lui faire rapport d’icioctobre 2008.

233Annexes

Page 226: La sécurité énergétique en Méditerranée

234 La sécurité énergétique en Méditerranée

(*) La Croatie et l’ancienne République yougoslave de Macédoine continuent à participer auprocessus de stabilisation et d’association.

Conseil de l’Union européenne

Bruxelles, le 18 septembre 2008

Iran: Déclaration de la Présidence au nom de l’Union européennesuite à la remise du rapport du Directeur général de l’AIEA

concernant les activités nucléaires de l’Iran

L’Union européenne remercie le Directeur général de l’AIEA et sonéquipe pour le rapport du 15 septembre, qui témoigne des efforts del’Agence pour faire la lumière sur les activités nucléaires de l’Iran.

L’Union européenne déplore que l’Iran, en violation des résolutionsdu Conseil de sécurité et des résolutions du Conseil des Gouverneurs del’AIEA, refuse de suspendre ses activités nucléaires sensibles et ne donnepas a l’AIEA la coopération que celle-ci demande pour apporter desréponses aux questions en suspens mentionnées dans ses rapports.

L’Union européenne partage la « grave préoccupation » du directeurgénéral de l’AIEA alors que l’Iran ne répond pas a des questions relativesa de possibles activités liées a la conception et a la fabrication des armesnucléaires.

L’UE appelle l’Iran a se conformer aux résolutions 1696, 1737, 1747et 1803 du CSNU et, en particulier, a suspendre ses activités sensiblespour permettre l’ouverture de négociations. Elle réaffirme son soutienaux propositions présentées a l’Iran en juin 2006 par le Secrétaire Généralet Haut Représentant de l’UE, et développées dans l’offre révisée remisea l’Iran, le 14 juin 2008. Elle reste engagée a trouver rapidement unesolution négociée au dossier nucléaire iranien et réaffirme son fermeengagement en faveur de la double approche.

La Turquie, la Croatie(*) et l’ancienne République yougoslave deMacédoine*, pays candidats, l’Albanie et le Monténégro, pays duprocessus de stabilisation et d’association et candidats potentiels,l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège, pays de l’AELE membres del’Espace économique européen, ainsi que l’Ukraine et la République deMoldavie, se rallient a la présente déclaration.

Page 227: La sécurité énergétique en Méditerranée

Directive sur les énergies renouvelables

Déclaration de la Commission concernant l’article 10,paragraphe 3

Entre 2013 et 2016, les Etats membres peuvent également utiliser leproduit de la mise aux enchères des quotas afin de contribuer a laconstruction de centrales a haut rendement, y compris des centralesélectriques utilisant des énergies nouvelles, qui sont aptes au CSC. Pourles nouvelles installations dont le rendement est supérieur au rendementfixé a l’annexe 1 de la décision de la Commission du 21 décembre 2006(2007/74/CE) (1), les Etats membres peuvent contribuer a hauteur de 15 %maximum aux coûts globaux de l’investissement requis pour unenouvelle installation qui est apte au CSC.

Déclaration de la Commission à l’ occasion de l’adoption de ladirective sur les énergies renouvelables

«La Commission est consciente que certains Etats membres ont atteintdes 2005 une part élevée d’énergies renouvelables au niveau national.Lorsqu’elle élaborera les rapports visés a l’article 20, paragraphe 6,point d), et paragraphes 7 et 8, la Commission tiendra dûment compte,dans le cadre de son évaluation du meilleur rapport coûts-avantages, descoûts marginaux engendrés par l’augmentation de la part des énergiesrenouvelables et prévoira le cas échéant, dans toute proposition présentéeconformément a l’article susmentionné de la directive, des solutionsappropriées également pour ces Etats membres.»

235Annexes

(1) Décision de la Commission du 21 décembre 2006 définissant des valeurs harmonisées derendement de référence pour la production séparée d’électricité et de chaleur en applicationde la directive 2004/8/CE du Parlement européen et du Conseil (not~f~ée sous le Numéro C(2006)6817).

Page 228: La sécurité énergétique en Méditerranée

236 La sécurité énergétique en Méditerranée

Conseil de l’Union européenne

Bruxelles, le 31 octobre 2008

Déclaration de la présidence au nom de l’UEsur la multiplication des violences des colons

à l’encontre des civils palestiniens

L’Union européenne condamne une nouvelle fois avec la plus grandefermeté les violences et exactions commises par les colons israéliens deCisjordanie a l’encontre des civils palestiniens.

Il n’est pas acceptable que la récolte des olives, essentielle pourl’économie des Territoires palestiniens et les autres activités desPalestiniens, soit ainsi entravée par cette multiplication d’actes violentset illégaux.

L’Union européenne rappelle qu’il est de la responsabilité dugouvernement israélien, qui a lui-même condamné ces actes, de prendreles mesures nécessaires pour y mettre un terme immédiatement,conformément a ses obligations internationales.

La Turquie, la Croatie* et l’ancienne République yougoslave deMacédoine*, pays candidats, l’Albanie, la Bosnie = Herzégovine, leMonténégro et la Serbie, pays du processus de stabilisation et d’associationet candidats potentiels, l’Islande, le Liechtenstein et la Norvege, paysde l’AELE membres de l’Espace économique européen, ainsi quel’Ukraine et l’Arménie se rallient a la présente déclaration.

(*) La Croatie et l’ancienne République yougoslave de Macédoine continuent a participer auprocessus de stabilisation et d’association.

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237

Extrait du Rapport général surl’activité de l’UE, Année 2008

Energie et Environnement

I. Energie

Aspects généraux

Le 13 juin, la Commission a adopté une communication intitulée«Relever le défi de la hausse des prix du pétrole ». avec la communicationsur les prix des denrées alimentaires, cette communication offre un cadreaux états membres pour faire face aux conséquences immédiates deshausses de prix et rechercher des solutions à moyen et à long terme auxnouvelles contraintes liées aux ressources. Les solutions proposéesconsisteront à modifier la demande d’énergie et à encourager l’efficacitéénergétique dans tous les secteurs de l’économie.

Le Parlement européen a de même adopté une résolution sur la maîtrisedes prix de l’énergie, le 25 septembre, dans laquelle il demande unengagement politique fort visant à : adopter des mesures concrètes deréduction de la demande d’énergie ; promouvoir les sources d’énergierenouvelables et l’efficacité énergétique ; poursuivre la diversificationde l’approvisionnement d’énergie ; réduire la dépendance à l’égard desimportations de carburants fossiles.

Dans le domaine des statistiques, un dispositif institutionnel stablepour la collecte de données sur l’énergie a été mis en place par le Parlementeuropéen et le Conseil le 22 octobre, afin que l’Union puisse disposerde statistiques européennes exhaustives et comparables sur toute une séried’aspects liés à l’énergie.

Energie et développement durable

La Commission a adopté, le 23 janvier, une proposition de directiverelative à la promotion de l’utilisation des sources d’énergie renouvelables.Celle-ci vise à fixer un objectif contraignant de 20 % d’énergierenouvelable dans la consommation finale en 2020, ainsi qu’un objectifde 10 % d’énergie renouvelable dans le secteur du transport d’ici à 2020.Elle propose un cadre législatif pour atteindre ces objectifs, ainsi queles critères et les dispositions pour assurer la durabilité des biocarburants

Annexes

Page 230: La sécurité énergétique en Méditerranée

238 La sécurité énergétique en Méditerranée

et bioliquides. Cette proposition fait partie d’un paquet de mesures surl’énergie et le climat.

Le même jour, elle a adopté une communication sur la premièreévaluation des plans nationaux d’action en matière d’efficacitéénergétique. L’évaluation fournit un aperçu de la série de stratégies etmesures présentées par les États membres et un premier recensement desexemples de bonnes pratiques qui méritent un examen plus approfondi.La Commission s’est concentrée sur l’examen de la partie des stratégiesconsacrée au rôle d’exemple du secteur public et à l’information.

Le Conseil européen des 15 et 16 octobre a confirmé que la sécuritéd’approvisionnement énergétique est une priorité de l’Union européenne.Il a donc notamment appelé à : finaliser le paquet législatif relatif au marchéintérieur de l’électricité et du gaz ; accélérer la mise en œuvre du pland’action européen sur l’efficacité énergétique et du plan stratégique pourles technologies énergétiques ; poursuivre avec détermination ladiversification des sources d’énergie, en lien avec le paquet sur l’énergieet le climat ; développer des mécanismes de crise permettant de faire faceà des ruptures temporaires d’approvisionnement ; renforcer et compléterles infrastructures critiques ; stabiliser l’approvisionnement en développantles relations avec les pays producteurs.

Le 13 novembre, la Commission a adopté sa deuxième analysestratégique de la politique énergétique de l’Union européenne. Dans laligne des mesures visant à atteindre les objectifs de l’Union en matièred’énergie et de changement climatique, cet ensemble de mesures dansle domaine de l’énergie donne un nouvel élan à la sécurité énergétiqueen Europe. Ce paquet de mesures comprend :

• une nouvelle stratégie pour créer une solidarité entre états membresdans le domaine énergétique, ainsi qu’une nouvelle politique relative auxréseaux d’énergie pour stimuler l’investissement dans des réseaux d’énergieplus efficaces favorisant une faible intensité carbonique;

• un plan d’action européen en matière de sécurité et de solidaritéénergétiques qui établit cinq domaines dans lesquels il est nécessaire d’agirplus pour garantir un approvisionnement énergétique durable ;

• un paquet de mesures relatives à l’efficacité énergétique, qui viseà réaliser des économies d’énergie dans des domaines essentiels,notamment en étoffant la législation relative à l’efficacité énergétique

Page 231: La sécurité énergétique en Méditerranée

applicable aux bâtiments et aux produits consommateurs d’énergie et enrenforçant le rôle des certificats de performance énergétique ainsi quedes rapports d’inspection sur les systèmes de chauffage et de climatisation.

Marché intérieur de l’énergie

L’état d’avancement de la création du marché intérieur du gaz et del’électricité a fait l’objet d’un rapport de la Commission du 15 avril.Malgré quelques améliorations encourageantes, particulièrement en cequi concerne la mise en œuvre de bonnes pratiques au niveau régional,l’analyse globale des progrès réalisés montre que des entravesconsidérables au bon fonctionnement du marché subsistent. Le troisièmepaquet législatif sur le marché intérieur du gaz et de l’électricité devraitcontribuer à remédier à cette situation.

Technologies et innovations énergétiques

Dans ses conclusions du 28 février, le Conseil a énoncé des principesfondamentaux, des objectifs et des actions pour une politique européenneen matière de technologies énergétiques. Il considère notamment que cettepolitique devrait accroître les synergies au niveau communautaire etprendre en compte les structures qui existent pour la coopération enmatière de recherche, de développement, de démonstration et dedéploiement dans le domaine des technologies énergétiques. Selon leConseil, le secteur privé devrait participer pleinement à ce processus dedéveloppement des technologies énergétiques.

Dans une résolution sur le plan stratégique européen pour lestechnologies énergétiques (plan SET) adoptée le 9 juillet, le Parlementeuropéen s’est exprimé en faveur d’une politique européenne dans cedomaine disposant d’une assise financière suffisante, qu’il considèrecapitale pour réaliser, d’ici à 2020, les objectifs de l’Union dans lesdomaines de l’énergie et du changement climatique.

Energie nucléaire

Dans ses conclusions du 8 décembre, le Conseil a décidé d’apporterson soutien à la création d’une banque de combustible nucléaire placéesous le contrôle de l’agence internationale de l’énergie atomique (aIEa).L’Union européenne prévoit de contribuer à ce projet à hauteur de 25millions d’euros. La banque de combustible nucléaire s’inscrira dans le

239Annexes

Page 232: La sécurité énergétique en Méditerranée

cadre d’un effort plus large visant à instaurer des mécanismesmultilatéraux d’approvisionnement en combustible.

Traité Euratom et Agence d’approvisionnement d’Euratom

Le Conseil a adopté, le 12 février, une décision qui abroge et remplaceles statuts de l’agence d’approvisionnement d’Euratom, afin de tenircompte de l’augmentation du nombre des états membres ainsi que de lanécessité d’appliquer des dispositions financières modernes à l’agence,et fixe son siège à Luxembourg.

Une synthèse des activités menées en 2007 aux fins de la mise enœuvre du titre II, chapitres 3 à 10, du traité Euratom a été présentée parla Commission le 3 juillet. Elle comprend également une synthèse desactivités de l’agence d’approvisionnement d’Euratom.

Coopération internationale

Au niveau régional, la coopération s’est poursuivie dans le cadre del’initiative de Bakou avec les pays de l’Europe de l’Est, du Caucase etde l’Asie centrale. La coopération avec les pays du Golfe et l’Organisationdes pays exportateurs de pétrole (OPEP) a été renforcée, et elle a continuéavec les pays d’Asie – dans le cadre des réunions Asie-Europe (ASEM) –et d’Afrique.

Par ailleurs, des responsables de l’Union européenne, de l’Iraq, de laTurquie et des pays du Machrek se sont réunis, le 5 mai, à Bruxelles etont affirmé, dans une déclaration conjointe, l’importance de renforcerla coopération énergétique entre eux en vue de créer un marché du gazqui sera intégré à celui du marché intérieur de l’Union, à travers ledéveloppement d’infrastructures de raccordement dans la région.

Deux réunions du Conseil ministériel de la Communauté de l’énergiese sont tenues le 27 juin à Bruxelles et le 11 décembre à Tirana. Lors deces réunions, les participants sont convenus de l’adoption d’uneprocédure régionale commune pour allouer les capacités électriques etgérer les congestions aux frontières. La Communauté de l’énergie s’estaussi dotée d’un mécanisme de règlement des différends, fondé sur desrègles permettant aux entreprises des pays membres de déposer desplaintes lorsqu’elles constatent des irrégularités. Des progrès significatifsont été enregistrés dans la plupart des pays de l’ouest des Balkans dansle cadre de la mise en œuvre de la législation européenne relative aumarché du gaz et de l’électricité.

240 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 233: La sécurité énergétique en Méditerranée

Au niveau bilatéral, le dialogue énergétique entre l’Union européenneet la Russie a continué en vue de nouveaux accords. Des partenariatsavec l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan et l’Ukraine se sont poursuivis. LaCommission a en outre initié un dialogue en vue de nouvelles coopérationsavec le Belarus et la Moldavie. Par ailleurs, de nouveaux partenariatsstratégiques ont été mis en route cette année avec l’Algérie, l’égypte,l’Iraq et le Turkménistan. Les dialogues bilatéraux ont égalementcontinué avec la Jordanie, la Lybie et le Maroc, ainsi qu’avec l’Argentine,l’Australie, le Brésil, le Canada, le Chili, la Chine, les états-Unis et l’Inde.Des négociations ont aussi été en cours avec la Suisse concernant lemarché de l’électricité.

II. Environnement

Changement climatique

A la suite des engagements pris par le Conseil européen de mars 2007,la Commission a adopté, le 23 janvier, un paquet de mesures sur l’énergieet le climat qui a pour but de faire de l’Union européenne une économieà faible intensité d’émissions avec une plus grande sécurité énergétique.Ce nouveau paquet de mesures vise à donner à l’Union les moyens deréduire d’au moins 20 % les émissions de gaz à effet de serre, de porterà 20 % la part d’énergie renouvelable dans la consommation d’énergieet d’améliorer d’autant l’efficacité énergétique, le tout d’ici à 2020. Laréduction des émissions sera portée à 30 % à l’horizon 2020 lorsqu’unnouvel accord mondial aura été conclu sur le changement climatique.

Les instruments permettant d’atteindre les objectifs fixés en 2007 sontles suivants :

• une proposition de directive visant à actualiser le systèmecommunautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE) ; uneproposition de décision instaurant un cadre communautaire pour que lesengagements nationaux couvrent la partie non couverte par le SCEQEen englobant des secteurs d’activité tels que la construction, les trans-ports, l’agriculture et les installations industrielles et de traitement desdéchets ;

• une proposition de directive concernant la promotion de l’utilisationde l’énergie renouvelable dans l’Union ;

241Annexes

Page 234: La sécurité énergétique en Méditerranée

• une proposition de directive relative au développement destechnologies énergétiques à faible teneur en carbone, y compris le captageet le stockage du dioxyde de carbone.

Le paquet comporte également une communication explicativeintitulée «Deux fois 20 pour 2020 – Saisir la chance qu’offre lechangement climatique » et une communication relative à la promotionde la démonstration à brève échéance de la production durable d’énergieà partir de combustibles fossiles.

Lors de sa session de printemps, le Conseil européen a rappelé quel’Union tient à conserver un rôle de chef de file au niveau internationalen matière de changement climatique et d’énergie. Il a souhaité qu’unpaquet législatif cohérent sur la base des conclusions du printemps 2007soit adopté au plus tard au début de 2009. En vue d’atteindre ces objectifs,en particulier en matière d’efficacité énergétique, la Commission a adopté,le 13 novembre, la deuxième analyse stratégique de la politiqueénergétique .

Le Conseil européen a, d’autre part, exprimé l’avis que l’un des défismajeurs sera de faire en sorte que la transition vers une économie sûreet viable à long terme, et produisant peu de composés carbonés, soitcompatible avec le développement durable de l’Union, sa compétitivité,sa sécurité d’approvisionnement, la sécurité alimentaire, une gestion saineet viable des finances publiques et la cohésion économique et sociale.

Le Conseil européen des 15 et 16 octobre a réitéré son engagementà tenir ses objectifs ambitieux en la matière.

Le Conseil européen des 11 et 12 décembre a dégagé un accord deprincipe sur le paquet législatif sur l’énergie et le climat et a invité leConseil à rechercher un accord avec le Parlement européen afin depermettre un accord en première lecture sur l’ensemble du paquet avantla fin de l’année. Le 17 décembre, le Parlement européen a donné sonfeu vert à ce paquet qui vise à assurer que l’Union réalisera ses objectifsclimatiques d’ici à 2020.

Par ailleurs, le 19 novembre, le Parlement européen et le Conseil ontadopté une directive qui intègre les activités aériennes dans le systèmecommunautaire d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre.Cette nouvelle directive a pour objectif de réduire l’incidence des activitésaériennes sur le changement climatique, étant donné l’essor rapide que

242 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 235: La sécurité énergétique en Méditerranée

connaît ce secteur. Elle plafonne les émissions des exploitants des aé-ronefs à 97 % des émissions précédentes (calculées sur la base de lamoyenne annuelle d’émissions entre 2004 et 2006) entre 2012 et 2013,et à 95 % à partir de 2013.

Le Comité économique et social européen a en outre publié, le 10 juillet,un avis exploratoire sur le rapport entre le changement climatique etl’agriculture au niveau européen ; à cette occasion il a souligné la possiblecontribution de cette dernière à préserver le climat.

Protection de la couche d’ozone

La Commission a adopté, le 1er août, une communication intitulée «Versl’élimination totale des substances appauvrissant la couche d’ozone –Mieux légiférer en mettant à profit vingt années d’expérience ». Elle estaccompagnée d’une proposition de révision de la réglementation envigueur dans ce domaine.

Protection de la biodiversité et de la nature

En février, la Commission a adopté les six listes de sites Nature 2000des zones protégées, qui ont ajouté au territoire protégé par le réseauune superficie de 90 000 km2 et plus de 4 000 sites. Le 12 décembre, ellea adopté huit décisions étendant la surface du réseau Nature 2000 d’unesuperficie de plus de 95 000 km2 et ajoutant 769 nouveaux sites. Nature2000 inclut désormais environ 700 000 km2 et 25 000 sites, et constitueainsi le plus grand réseau interconnecté de sites protégés dans le monde.

Dans ses conclusions du 3 mars, adoptées en vue de préparer laneuvième conférence des parties à la convention sur la diversitébiologique, le Conseil a rappelé que l’Union européenne est déterminéeà arrêter la perte de biodiversité au niveau global d’ici à 2010. Il a soulignél’importance que revêt une mise en œuvre renforcée des programmes detravail de la convention et du réseau Nature 2000 sur les zones protégées.

Lors de la neuvième conférence des parties à la convention sur ladiversité biologique qui s’est réunie du 19 au 30 mai à Bonne(Allemagne), 191 pays ont accepté de prendre des mesures de grandeenvergure afin de gérer la perte sans précédent de la biodiversité sur terre.Un rapport d’étape sur l’économie des écosystèmes et de la biodiversitéa été présenté durant cette session.

243Annexes

Page 236: La sécurité énergétique en Méditerranée

Dans le domaine de la protection des eaux et des zones côtières, leParlement européen et le Conseil ont adopté, le 17 juin, la directive«Stratégie pour le milieu marin » établissant un cadre d’actioncommunautaire destiné à assurer la protection et la conservation du milieumarin. Chaque état membre doit élaborer et mettre en œuvre une stratégiepour ses eaux marines pour parvenir à un « bon état écologique » du milieumarin ou le préserver au plus tard en 2020.

Afin de lutter contre la pollution des eaux de surface par les substancesdangereuses, le Parlement européen et le Conseil ont adopté, le 16 décembre,une directive sur des normes de qualité environnements pour les eaux desurface de l’Union européenne, découlant de la directive-cadre sur l’eau.La directive fixe les valeurs limites pour plus de trente substancespolluantes, y compris des pesticides, des métaux lourds et des biocides.

En matière de lutte contre l’exploitation illégale des forêts, laCommission a signé, le 3 septembre, le premier accord de partenariatvolontaire avec le Ghana, concernant l’application de la loi, lagouvernance et le commerce dans le domaine forestier (FLEGT – ForestLaw Enforcement Governance and Trade). Les négociations en vue dela conclusion de ces accords sont en cours avec le Cameroun, le Congo,l’Indonésie et la Malaisie. Ces accords garantissent le contrôle de lalégalité des importations dans l’Union européenne de produits forestiers.De même, la Commission et la Chine ont mis en place un mécanismebilatéral de coordination, afin d’intensifier les efforts pour lutter contrel’exploitation illégale des forêts et le commerce qui y est associé.

Le 17 octobre, la Commission a adopté une communication intitulée«Combattre la déforestation et la dégradation des forêts pour lutter contrele changement climatique et la diminution de la biodiversité », qui exposeses propositions pour combattre la déforestation tropicale. En vue desnégociations internationales concernant l’accord sur le climat pourl’après-2012, la Commission propose de se fixer pour objectifs de stopperla diminution de la couverture forestière de la planète en 2030 au plustard et de réduire la déforestation tropicale brute d’au moins 50 % d’icià 2020. Le même jour, la Commission a également adopté une propositionlégislative visant à réduire le risque d’entrée de bois et de produits dérivésissus d’une récolte illégale sur le marché communautaire. Le règlementproposé impose aux commerçants de bois de présenter des garantiessuffisantes quant à la légalité du bois mis sur le marché.

244 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 237: La sécurité énergétique en Méditerranée

La Commission a également adopté une communication concernantla stratégie de l’Union européenne relative aux espèces envahissantes(le 3 décembre) ainsi qu’une communication sur l’évaluation à mi-parcours de la mise en œuvre du plan d’action communautaire en faveurde la diversité biologique (le 16 décembre).

Utilisation durable des ressources

La directive-cadre sur les déchets a été approuvée par le Parlementeuropéen et le Conseil le 19 novembre, introduisant ainsi une nouvelleapproche dans la gestion des déchets qui établit en priorité la prévention,la réutilisation et le recyclage des déchets. Cette directive clarifie en outred’importantes définitions (elle distingue par exemple les déchets des sous-produits) et donne des buts ambitieux aux états membres en ce quiconcerne le recyclage. Elle met en place des programmes nationaux deprévention et un suivi de la part de la Commission sur ces objectifs dedissociation.

Le même jour, la Commission a adopté une communication présentantune stratégie de l’Union européenne pour l’amélioration des pratiques dedémantèlement des navires. Celle-ci inclut des actions visant à contribuerà la mise en œuvre d’une convention internationale sur le recyclage desnavires dont l’adoption est prévue en mai 2009. Elle prévoit égalementdes mesures destinées à encourager des actions volontaires du secteur destransports maritimes ainsi qu’une meilleure application de la législationcommunautaire actuelle en matière de transferts de déchets.

Le 3 décembre, la Commission a adopté un livre vert qui décrit lasituation actuelle en ce qui concerne la gestion des déchets biodégradablesdans l’Union européenne et propose des options pour de futursdéveloppements en la matière. Ses objectifs sont de susciter un débat envue de l’élaboration possible d’une proposition législative ainsi que d’aiderla Commission à évaluer si l’Union doit proposer des actionscomplémentaires.

Le même jour, la Commission a également présenté une propositionde modification de la directive visant à diminuer l’incidence des déchetsd’équipements électriques et électroniques sur l’environnement (directive«DEEE»), ainsi qu’une proposition de modification de la directive relativeà la limitation de l’utilisation de certaines substances dangereuses dansles équipements électriques et électroniques (directive LdSD).

245Annexes

Page 238: La sécurité énergétique en Méditerranée

Environnement et santé

La directive sur la qualité de l’air a été adoptée par le Parlementeuropéen et le Conseil, le 21 mai. Elle fixe des normes et des dates butoirpour la réduction des concentrations de particules fines, qui, au mêmetitre que les particules plus grosses connues sous le code Pm10 et déjàréglementées, comptent parmi les polluants les plus dangereux pour lasanté humaine. Dans le même domaine de la qualité de l’air, laCommission a adopté, le 4 décembre, une proposition de directiveimposant aux stations-service l’installation d’équipements de la phase IIde la récupération des vapeurs d’essence.

En ce qui concerne les substances chimiques, le Parlement européenet le Conseil ont adopté, le 17 juin, un règlement qui fixe les conditionsd’exportation et d’importation de certains produits chimiques dangereuxdans l’Union européenne en vue de mieux protéger la santé despersonnes et l’environnement au niveau international.

Par ailleurs, ils ont adopté, le 22 octobre, un règlement relatif àl’interdiction des exportations et au stockage en toute sécurité de mercuremétallique.

Instruments environnementaux

Pour préserver et améliorer la qualité et la disponibilité desinformations requises par la politique environnements, la Commissiona adopté, le 1er février, une communication intitulée «Vers un systèmede partage d’informations sur l’environnement (SEIS)» . Elle proposede moderniser et de simplifier le système européen de collecte, d’analyseet de communication des informations environnementales et prévoit leremplacement progressif des systèmes actuels de notification, en grandepartie centralisés, par des systèmes reposant sur l’accès, le partage etl’interopérabilité.

Le 2 juillet, la Commission a adopté le cinquième examen de lapolitique environnements qui porte sur les principales évolutions de lapolitique environnements de l’Union en 2007 dans les quatre principauxdomaines prioritaires du sixième programme d’action pourl’environnement 2002-2012 .

246 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 239: La sécurité énergétique en Méditerranée

Dans le cadre du plan d’action sur la consommation et la productiondurables et la politique industrielle durable, la Commission a présenté,le 16 juillet, un éventail d’instruments visant à améliorer les performancesénergétiques et environnementales des produits et des entreprises et àfavoriser une consommation et une production durables. Outre laproposition d’extension de la directive sur l’écoconception, le pland’action contient :

• une proposition visant à réviser le règlement concernant le systèmede label écologique communautaire «écolabel » qui signale les produitsles plus respectueux de l’environnement sur le marché de l’Union (enl’élargissant à un plus grand nombre de produits et de services et ensimplifiant les formalités du système pour le rendre plus attrayant pourles fabricants) ;

• une proposition visant à réviser le règlement concernant le systèmevolontaire de management environnemental et d’audit de l’Unioneuropéenne (EMAS), en vue d’encourager les entreprises, et plusparticulièrement les PME, à l’adopter (en réduisant la chargeadministrative, en créant des incitations et en l’ouvrant à des organisationsen dehors de l’Union) ; et

• une communication sur les marchés publics écologiques qui prévoitle soutien politique et opérationnel permettant aux pouvoirs publics dansl’Union européenne de mettre en place des marchés publics écologiquespour stimuler l’innovation dans les technologies, les produits et les servicesenvironnementaux.

Le 19 novembre, le Parlement européen et le Conseil ont adopté unedirective relative à la protection de l’environnement par le droit pénal.Elle oblige les états membres à prévoir dans leur législation nationaledes sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives, pour lesviolations graves du droit communautaire relatives à la protection del’environnement.

Le 27 octobre, la Commission a approuvé le financement de186 millions d’euros pour 143 nouveaux projets dans le cadre del’Instrument financier pour l’environnement (LIFE+) pour la période2007-2013. Les projets incluent des actions dans les domaines de laconservation de la nature, de la politique environnements ainsi que del’information et de la communication.

247Annexes

Page 240: La sécurité énergétique en Méditerranée

Conventions et accords internationaux

A la suite de la conférence de Bali sur le changement climatique quis’est tenue du 3 au 14 décembre 2007, le Parlement européen s’estprononcé sur son bilan, le 31 janvier. Il salue la décision prise de lancer,dans le cadre de la convention-cadre des Nations unies sur les changementsclimatiques, un processus officiel de négociations pour dégager un accordinternational sur le climat pour la période postérieure à 2012, et ilencourage l’Union à continuer à jouer un rôle aussi actif dans lesnégociations à venir.

Un rapport sur les progrès accomplis dans la réalisation des objectifsassignés au titre du protocole de Kyoto a été adopté par la Commission,le 16 octobre. Le rapport conclut que la Communauté atteindra son objectifau titre de Kyoto en mettant en œuvre les politiques et les mesuressupplémentaires prévues.

Du 1er au 12 décembre s’est tenue la conférence internationale dePozna ? sur le changement climatique, organisée sous l’égide desNations unies, réunissant plus de 190 pays signataires de la convention-cadre des Nations unies et du protocole de Kyoto. Cette conférence apermis de jeter les bases nécessaires pour la dernière année de négocia-tion devant aboutir en décembre 2009 à un nouvel accord internationalsur le climat, à savoir : un programme de travail qui guidera lesnégociations vers cet accord, un examen exhaustif du protocole de Kyotoavec un accord sur l’opérationnalisation du fonds d’adaptation et desnouvelles décisions en faveur de la lutte contre la déforestation.

248 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 241: La sécurité énergétique en Méditerranée

Ouvrages

Introduction à l’Environnement et au Développement Durable,février 2008, ouvrage numérique collectif auquel ont participé le pôleTICE et de nombreux ingénieurs et enseignants- chercheurs del’UVSQ.

La gestion concertée des ressources naturelles : l’épreuve du temps,mai 2008, sous la direction de Philippe Méral, Christian Castellanet,Renaud lapeyre Ed. Gret et Karthala, coll. Economie et développement,Réf. KAR 8.

Planète Blanche : les glaces, le climat et l’environnement ,mai 2008, par Jean Jouzel, Claude Lorius et Dominique Raynaud,Editions Odile Jacob, collection Sciences.

Ramses 2008, est l’encyclopédie annuelle de de l’actualité internationale,sous la direction de Thierry de Montbrial et Philippe MoreauDefarges.

Géographie des espaces naturels protégés, Genèse, principes et enjeuxterritoriaux, Samuel Depraz, Paris, Éditions Armand Colin, 2008.

Revues et Rapports

Français-allemand de l’énergie Relations dans le contexte européen :les énergies toujours l’Europe ?, Hinrich Thölken, ChristopheSchramm, Jan Horst Keppler.

«L’Editorial de l’énergie : Un mot de l’OPEP à Oran : Do No HarmilliamRamsay », atn Edito Energie, décembre 2008.

Pistes bibliographiques

Page 242: La sécurité énergétique en Méditerranée

250 La sécurité énergétique en Méditerranée

«La rédaction de l’énergie : les fantômes de DjakartaWilliam,C. Ramsay », Edito Energie, novembre 2008, Publications de la Banquemondiale.

Rapport de Croissance 2008, mai 2008. Les pays en développementpeuvent atteindre une croissance rapide, durable et équitable s’ilsparticipent à l’économie mondiale et ont des dirigeants engagés.

Rapport de suivi mondial, avril 2008, Progrès insuffisants vers laréalisation des objectifs en matière de nutrition, de santé, d’éducationet autres. Le changement climatique, les prix élevés des produitsalimentaires et du pétrole assombrissent les perspectives.

Efficacité énergétique, février 2008, Une nouvelle publication de laBanque qualifie de potentiellement « bénéfique à tous » l’améliorationdu rendement énergétique du Brésil, de la Chine et de l’Inde.

Références générales et autres liens utiles

Direction générale de la recherche :http ://ec.europa.eu/research/index.cfm ?lg=fr

Centre commun de recherche : http ://ec.europa.eu/dgs/jrc/index.cfm

Direction générale de l’énergie et des transports :http ://ec.europa.eu/dgs/energy_transport/index_en.htm

Politique européenne de voisinage :http ://ec.europa.eu/world/enp/index_fr.htm

Direction générale de l’environnement :http ://ec.europa.eu/environment/index_fr.htm

Développement durable : http ://ec.europa.eu/environment/eu ssd/

Changement climatique :http ://europa.eu/press_room/press_packs/climate/index_fr.ht m

http ://ec.europa.eu/environment/climat/home_en.htm

Page 243: La sécurité énergétique en Méditerranée

Avant-proposUlrich Storck . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

Présentation de l’Annuaire de la Méditerranée 2008Driss Khrouz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Axe I: Les questions énergétiques : un enjeugéostratégique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

L’espace euro-méditerranéen, hydrocarbures et stratégies :entre Washington et Moscou

Philippe Sébille-Lopez . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

La géopolitique des ressources énergétiques de la merCaspienne : rivalités et coopérations

Turab Gurbanov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

La problématique énergétique mondialeMounir Debbarh . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

Axe II: Le développement durable et laproblématique des énergies renouvelables . . . . . . . . . . . . 85

Eau et énergie en MéditerranéeAlexandre Taithe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

Le rôle du nucléaire dans le mix énergétique : défiset perspectives : qu’en est-il au Maroc ?

Yahia Bouabdellaoui . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

Table des matières

Page 244: La sécurité énergétique en Méditerranée

L’efficacité énergétique : quelle contribution audéveloppement durable ?

Ahmed Morchid . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

Premières assises nationales du développement durableen Méditerranée

Tawfik Hasni . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149

La problématique de l’énergie dans ses différentesdimensions : une tentative d’évaluation

Abdelaziz Bennouna, Driss Zejli et Rachid Benchrifa . . . . . . . 163

Perspectives pour le Maroc : vers un Maroc exportateurd’énergie! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201

Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211

Conclusions de la présidence, 11 et 12 décembre 2008 . . . . . . . 213

– Traité de Lisbonne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213

– Questions économiques et financières . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215

– Energie et changement climatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219

– Relations extérieures et politique européennede sécurité et de défense . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221

Conclusions de la présidence, 13 et 14 mars 2008 . . . . . . . . . . . 223

– Changement climatique et énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223

– «Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » . . . 228

Conclusions de la présidence, 20 juin 2008 . . . . . . . . . . . . . . . . 229

– Prix élevé des denrées alimentaires et du pétrole :conséquences pour l’action de l’Union . . . . . . . . . . . . . . . . . 229

Conseil de l’Union européenne, 18 septembre 2008 . . . . . . . . . 234

– Iran . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234

Directive sur les énergies renouvelables . . . . . . . . . . . . . . . . . . 235

– Déclaration de la Commission concernant l’article 10,paragraphe 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 235

– Déclaration de la Commission à l’ occasion de l’adoptionde la directive sur les énergies renouvelables . . . . . . . . . . . . . 235

252 La sécurité énergétique en Méditerranée

Page 245: La sécurité énergétique en Méditerranée

Conseil de l’Union européenne, 31 octobre 2008 . . . . . . . . . . . 236

– Déclaration de la présidence au nom de l’UE sur lamultiplication des violences des colons à l’encontredes civils palestiniens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 236

Extrait du Rapport général sur l’activité de l’UE,année 2008 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237

– Energie et environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237

Pistes bibliographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249

Table des matières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251

253Table des matières