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635794 LA NEUROPATHIE AUDITIVE / DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE : 2ÈME PARTIE Paul Deltenre Jean-Louis Collette LA NEUROPATHIE AUDITIVE / DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE : 2ÈME PARTIE Paul Deltenre Jean-Louis Collette

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LA NEUROPATHIE

AUDITIVE /DÉSYNCHRONISATION

AUDITIVE : 2ÈME PARTIE

Paul Deltenre

Jean-Louis Collette

LA NEUROPATHIE

AUDITIVE /DÉSYNCHRONISATION

AUDITIVE : 2ÈME PARTIE

Paul Deltenre

Jean-Louis Collette

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Mars/Avril 2008 - Vol. 21 - N°2Imprimé par Néo-typo - Besançon

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Sommaire )

5 EDITORIALPaul Avan

6 LA NEUROPATHIE AUDITIVE / DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE

6 Chapitre X Conséquences centrales de la neuropathie auditive /désynchronisation auditive :aspects psychoacoustiques et perceptivo-cognitifsXavier Perrot

28 Chapitre XIDifférences entre les diagnostics de Neuropathie Auditive/Désynchronisation Auditive et de Troubles (Centraux) duTraitement de l’Audition - Thierry Morlet

31 Chapitre XIINeuropathie Auditive / Désynchronisation Auditive et appareillageEric Bizaguet

42 Chapitre XIIIApport de la modalité visuelle dans la perception de la paroleCécile Colin

51 Chapitre XIVImplantation cochléaire dans les neuropathies auditivesDidier Bouccara

57 Chapitre XV Neuropathie, synaptopathie, atteinte sensorielle, formes partiellesde neuropathie, nouvelles étiologies :variations sur un thème connu - Nathalie Loundon

65 Chapitre XVI Remédiation (réhabilitation) de la Neuropathie Auditive /Désynchronisation Auditive :expérience d’un centre de réadaptationVentura Mancilla

73 Chapitre XVIINeuropathie Auditive / Désynchronisation Auditive : Elaborationd’une Base de Données - Thierry Morlet

77 Chapitre XVIIIEn guise de conclusion - Jean-Louis Collette

80 CONGRÈS 2008

83 COMMUNICATIONS

92 INFORMATIONS - OFFRE D’EMPLOI

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Les Cahiers de l’Audition

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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LES MANUSCRITSSONT ÀADRESSER ÀProfesseur Paul AVANLes Cahiers de l’AuditionLaboratoire de BiophysiqueFaculté de médecine, BP3863001 Clermont-Ferrandcedex, France

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Instructions aux auteurs

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Éditorial )

D ans un domaine pointu comme celui de l’audition, il est rare de découvrir des concepts nouveaux, tout autant que de mettre au pointdes méthodologies d’exploration nouvelles. Quelques balises émergent

de temps en temps : la découverte des mécanismes de l’onde propagée par Békésy,celle des mécanismes actifs cochléaires, en plusieurs temps, Gold pour la théorie,Kemp pour la première manifestation spectaculaire. Dans le domaine de l’exploration, un peu moins d’une décennie avant les otoémissions de Kemp quiconstituaient une suite logique à sa découverte fondamentale, on avait rencontréJewett et les potentiels évoqués précoces (longtemps après le couple Davis pourles PEA tardifs). La reconnaissance de l’entité « neuropathies auditives » parArnold Starr marque également l'émergence d'un champ d'investigations, maisaussi d'une méthodologie clinique nouvelle. Celle-ci est de nature à stimuler l’imagination de ceux qui ont à appareiller les patients identifiés.La découverte initiale des neuropathies auditives est tombée à point pour stimuler les recherches, basées sur l’application plus systématique des outils objec-tifs modernes, complétée par des approches subjectives de plus en plus rigoureu-ses. En à peine plus de dix ans, le thème connaît des développements nombreux,et les troubles de nature neuropathique apparaissent avoir une fréquence plusgrande qu’on n’aurait pu le croire initialement car leur cadre physiopathologiques’est élargi.Accuser les voies nerveuses auditives de mal fonctionner aurait été unalibi si les méthodes d’investigation moléculaires et génétiques n’étaient venues àpoint nommé compléter les intuitions des cliniciens : il y a bien des molécules spécifiques des voies auditives, dont l’absence de fonctionnalité pénalise la circulation des messages auditifs au point de les rendre incompréhensibles. Lesrecherches dans cette direction ont mis l’accent sur l’importance de pratiquer destests objectifs assez complets pour révéler des patterns physiopathologiquesuniques. Les audiologistes sont désormais persuadés de la nécessité de mieuxévaluer les performances psychophysiques, et la technologie offre désormais desappareils capables de ne pas se contenter de délivrer du gain, de toute façon bieninutile quand la cochlée fait son travail. Un progrès régulier et considérable a étéaccompli en 10 ans, grâce à la convergence de multiples disciplines : le sujet desneuropathies auditives a fait partie de ceux qui leur ont fourni la motivation.L’aventure des neuropathies auditives est magistralement retracée pour lesCahiers de l’Audition par les responsables du dossier dont les Cahiers publient ledeuxième volet, Jean-Louis Collette et Paul Deltenre. Ils ont su rassembler lestravaux de plusieurs des principaux acteurs de l'actualité dans ce domaine. Il fautsouligner l’exploit que représente le fait de réaliser une synthèse aussi complète,en aussi peu de temps (mais il est vrai que si nos deux corédacteurs en chef spé-ciaux avaient été moins diligents, ce n’est pas 2 numéros en 2007-8 qu’il leur auraitfallu, mais 3 en 2009, 5 en 2010... Un cauchemar pour eux, leurs co-auteurs et lamaison d’édition !) Remercions-les, ainsi que les autres auteurs, d’avoir su joindreérudition, talents pédagogiques et pragmatisme, les Cahiers de l’Audition sont fiersde leur offrir cette tribune d’où ils peuvent nous enseigner un chapitre tout neufde l’audiologie en marche.

Paul Avan

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

( Dossier

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CHAPITRE X :CONSÉQUENCES CENTRALES DE LA NEUROPATHIEAUDITIVE/ DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE :ASPECTS PSYCHOACOUSTIQUESET PERCEPTIVO-COGNITIFS

RÉSUMÉ

ABSTRACT

Dr Xavier PERROT

Service d’Audiologie et

Explorations Orofaciales

(Pr Lionel COLLET)

Centre Hospitalier Lyon-Sud

Bâtiment Chirurgical 3A

165, chemin du Grand Revoyet

69495 PIERRE-BENITE

e-mail :

[email protected]

UMR 5020 CNRS

Université Lyon I

(Pr Rémi GERVAIS)

Laboratoire

« Neurosciences sensorielles,

comportement, cognition »

50 avenue Tony Garnier

69366 LYON Cedex 07

Les mécanismes physiopathologiques sous-tendant la neuropathie auditive / désynchronisation auditive (NA/DA) sontessentiellement représentés par une per-turbation de la synchronisation neuronaleet/ou une diminution des entrées neurona-les. Les conséquences psychoacoustiqueset perceptivo-cognitives qui en découlentsont caractéristiques de cette pathologie.

Contrairement à la perception de l’intensi-té sonore, qui est modérément dégradée,la perception de la fréquence est détério-rée, notamment pour la discrimination desbasses et moyennes fréquences, qui néces-site un codage temporel. Mais c’est surtoutla perception de la dimension temporellequi est la plus perturbée, notamment larésolution temporelle. En condition binaurale, les performances restent pathologiques, du fait d’une incapacité à utiliser les indices interauraux temporelset les différences interaurales de phase,conduisant entre autres à une détériora-tion de la localisation spatiale auditive.Cette dégradation perceptive pour lesindices acoustiques temporo-spectraux aégalement un retentissement importantsur les capacités de compréhension de laparole, avec une détérioration marquée del’intelligibilité en milieu bruité, sans amélio-ration par le démasquage binaural.

De manière intéressante, il existe des corrélations étroites entre les variablespsychoacoustiques, perceptivo-cognitiveset électrophysiologiques (potentielsévoqués auditifs exogènes), permettant derelier les perturbations auditives à un substratum anatomo-physiologique. Parcontre, la relative dissociation, d’une partentre les capacités perceptives et lespotentiels évoqués auditifs (PEA) endogè-nes, d’autre part entre les PEA précoces etles PEA corticaux, suggère l’existence demodifications centrales (plasticité cérébraleou effet attentionnel) survenant au coursde la NA/DA.

En conclusion, l’ensemble de ces donnéesincite à une évaluation psychoacoustiqueprécise des patients présentant uneNA/DA, afin d’adapter la prise en chargeaudioprothétique selon le type de profilperceptivo-cognitif déficitaire constaté.

Central consequences of auditory neuropathy /auditory dyssynchrony: psychoacoustic andcognitive perceptual perspectives

The pathophysiological mechanisms underlyingauditory neuropathy / auditory dyssynchrony(AN/AD) mainly consist in disruption of neuralsynchrony and/or reduction in neural input.Psychoacoustic and cognitive perceptual conse-

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quences which result from these phenomenaare characteristic of this condition.

Contrary to loudness perception, which is slightly disturbed, pitch perception is deteriorated, especially for low and mediumfrequencies as their discrimination requires temporal coding. Indeed, this is the temporal processing which is the most disrupted, notably temporal resolution.Binaural hearing is abnormal, due to an inabi-lity to use interaural time and phase differen-ces, leading among other deficits to impair-ment of sound localization. This perceptualdeterioration in the use of spectro-temporalcues has a great effect on speech perceptionabilities too, with marked reduction in speechintelligibility in noise and without improvementby binaural unmasking.

Interestingly, there are close relationshipsbetween psychoacoustic, cognitive perceptualand electrophysiological (exogenous auditoryevoked potentials) variables, which enable tolink auditory disruption to an anatomo-physio-logical substratum

On the other hand, the relative dissociationbetween perceptual abilities and endogenous auditory evoked potentials (AEPs)as well as between brainstem AEPs and corti-cal AEPs, suggests that potential centralchanges (cerebral plasticity or attentionaleffect) occur in AN/AD.

To conclude, this ensemble of data suggeststhat performing a specific psychoacousticassessment of AN/AD patients might help to adapt hearing management (conven-tional hearing aids vs. cochlear implants) tothe established pattern of cognitive perceptualimpairment.

préservation des otoémissions acoustiques(OEA) provoquées ou du potentiel micro-phonique cochléaire, témoignant de l’inté-grité fonctionnelle des cellules ciliéesexternes (CCE) et des mécanismescochléaires actifs (MCA) ; d’autre part, unedisparition des potentiels évoqués auditifs(PEA) précoces, témoignant d’un dysfonc-tionnement des voies auditives afférentes(Rance, 2005 ; Rapin & Gravel, 2003).

Ces deux critères objectifs sont complétéspar des données d’audiométrie comporte-mentale, avec une dégradation dispropor-tionnée de la compréhension de la paroleévaluée à l’audiométrie vocale, par rapportà la perte auditive modérée retrouvée àl’audiométrie tonale liminaire (Rance,2005 ; Rapin & Gravel, 2003).

Cette discordance est importante à connaître, dans la mesure où elle est lepoint d’appel sémiologique faisant suspec-ter le diagnostic chez des patients adultesqui « peuvent entendre, mais ne peuvent pascomprendre » (Zeng et al., 1999).

Les difficultés de compréhension de laparole, caractéristiques de la NA/DA, sontliées à des perturbations du traitement desindices acoustiques (notamment spectrauxet temporels), que nous allons détaillerdans cet article. Cependant, il est importantde garder à l’esprit que peu d’études ontcaractérisé de manière exhaustive lesconséquences psychoacoustiques et per-ceptivo-cognitives de la NA/DA.

De plus, l’hétérogénéité des étiologies ren-contrées et le faible nombre de patientsexpertisés, allant d’études de cas uniques(Kaga et al. 2002 ; Kraus et al., 2000 ; Starret al., 1991) à l’évaluation de vingt à trentepatients (Michalewski et al., 2005 ; Starr etal., 2004 ; Zeng et al., 2005), n’ont paspermis de définir un profil déficitaireunique. Ceci explique en partie la grandevariabilité des résultats obtenus, aussi bienentre individus d’une même étude qu’entredifférentes études. Enfin, si l’intitulé de cetarticle reprend le terme de désynchronisa-tion auditive, consacré par la littératureanglophone (Rance, 2005), il n’en demeurepas moins que les mécanismes physio-pathologiques sous-jacents ne se limitent

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pas à une perturbation de la synchronisa-tion neuronale (Starr et al., 2003 ; Zeng etal., 2005).

Nous débuterons donc cette revue parquelques rappels de neurophysiologieauditive et par les données essentiellesconcernant les mécanismes pathogéniquesde la NA/DA. Nous décrirons ensuite lesperturbations psychoacoustiques et per-ceptivo-cognitives qui en découlent, ainsique les corrélations retrouvées entre lesdifférentes variables mesurées. Enfin, nousterminerons par quelques remarques surla nécessité d’adapter la prise en chargeaudioprothétique des patients présentantune NA/DA.

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Dossier )

REMARQUESPRÉLIMINAIRES1

Le diagnostic de NA/DA repose sur laconjonction de deux critères électro-physiologiques principaux : d’une part, une

RAPPELS DENEURO-

PHYSIOLOGIEAUDITIVE

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2.1. Physiologie cochléaire

• Décor général

Pour être efficace, le système auditif péri-phérique doit pouvoir coder l’ensembledes paramètres physiques caractérisant lesstimuli acoustiques, afin de transformer lesvibrations sonores en un message nerveuxtransportable par les fibres afférentes dunerf auditif : c’est la transduction auditive(Aran et al., 1988). Ce phénomène est com-plété par les MCA, qui jouent un doublerôle : d’une part, une fonction d’amplifica-tion et d’accord, permettant un gain de sen-sibilité auditive d’environ 40 dB et une amé-lioration de la sélectivité fréquentielle(Moulin & Collet, 1996) ; d’autre part, unefonction de compression, permettant d’é-largir la dynamique de réponse des fibresauditives afférentes en évitant leur satura-tion (Bouccara et al., 2005).

• Principaux acteurs cochléaires

La transduction auditive est sous la dépen-dance d’un binôme fonctionnel constitué

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de la cellule ciliée interne (CCI) et desfibres auditives afférentes de type I aux-quelles elle est connectée (Aran et al.,1988). Chaque fibre auditive afférente estcaractérisée par son seuil de réponse(intensité minimale pour laquelle la fibre vadécharger), sa dynamique de réponse(allant du seuil de réponse au seuil de satu-ration) et sa courbe d’accord fréquentielle(centrée sur une fréquence caractéristique,pour laquelle le seuil de réponse estminimal) (Aran et al., 1988). Ce coupleneurosensoriel est complété par les CCE,dont les capacités d’électromotilité soma-tique sous-tendent les MCA (Moulin &Collet, 1996). Sur le plan fonctionnel, onpeut donc opposer les CCI, qui ont un rôle « sensoriel », et les CCE, qui ont un rôle « mécanique » (Bouccara et al., 2005). Enfin,ces éléments présentent une organisationspatiale le long de la cochlée, avec un gra-dient décroissant de la base à l’apex pour lecodage des fréquences, déterminant unerelation « fréquence-place » : c’est la tono-topie cochléaire (Aran et al., 1988).

• Influx nerveux afférent

En condition optimale de fonctionnement,le message nerveux issu de la cochléecontiendra donc une représentationexhaustive des stimuli acoustiques, aussibien en termes d’intensité et de fréquence,qu’en termes de composition spectrale etde variations temporelles (Deltenre, 2006).

2.2. Codage neuronal des

stimuli acoustiques

• Caractéristiques générales

Un stimulus acoustique est caractérisé parson intensité sonore, sa fréquence, sa com-

position spectrale et ses variations temporelles. Le codage neuronal de ces différents attributs acoustiques élémentaires repose sur deux types demécanismes complémentaires (Botte et al.,1989 ; Deltenre, 2006). D’une part, il existeun codage temporel, qui est basé soit sur letaux de décharge des fibres auditives affé-rentes (c’est-à-dire le nombre de potentielsd’action émis par unité de temps), soit surle taux de synchronisation des décharges(c’est-à-dire la précision avec laquelle lacadence de décharge des potentiels d’ac-tion est synchronisée sur la fréquence dustimulus, phénomène appelé « verrouillage de phase »)1. D’autre part, il existe uncodage spatial, qui est basé soit sur lescaractéristiques propres de chaque fibreauditive afférente (avec une activation spé-cifique en fonction de sa fréquence caracté-ristique et de son seuil de réponse), soit surune extension du pattern d’excitation auxfibres adjacentes (avec une augmentationdu nombre total de fibres répondant au sti-mulus). Pour les sons complexes2, la distinc-tion n’est pas aussi tranchée et leur codageneuronal relève le plus souvent d’un mécanisme mixte, à la fois spatial et temporel. Il est important d’avoir à l’espritque les indices temporels sont normale-ment plus « résistants » que les indices spa-tiaux, notamment en présence de bruit ouaux fortes intensités de stimulation.

• Codage de l’intensité sonore(sonie)

Le codage de l’intensité sonore reposeessentiellement sur les mécanismes temporels, avec une augmentation du taux et de la synchronisation desdécharges pour des intensités croissantesdu stimulus sonore. Les mécanismes spa-

tiaux interviennent quant à eux pour lessons d’intensité élevée (supérieure à 85 dBSPL), activant les fibres à seuil élevé, et pourles sons de fréquence élevée (supérieure à5000 Hz), entraînant une extension dupatron d’excitation (Botte et al., 1989).

• Codage de la fréquence ouhauteur tonale (tonie)

Le codage de la fréquence des sons purs (pour les fréquences inférieures à 5000 Hz) repose de manière concomitanteet indépendante sur les deux types demécanismes décrits précédemment : d’unepart, la synchronisation des décharges depotentiels d’action et leur verrouillage dephase sur la période du stimulus permet uncodage temporel ; d’autre part, l’organisa-tion tonotopique de la cochlée, avec uneactivation des fibres ayant une fréquencecaractéristique proche de la fréquence du stimulus, permet un codage spatial. Pour les sons de fréquence supérieure à 5000 Hz, le codage neuronal repose uniquement sur les mécanismes spatiaux,représentés par le codage tonotopique(Botte et al., 1989).

Le codage de la fréquence fondamentaledes sons complexes harmoniques est plusélaboré (cf. Figure 1). Il repose sur unmécanisme mixte spectro-temporel, com-portant successivement un codage spectralet une analyse temporelle (modèle deMoore et van Noorden).

Le codage spectral est basé sur l’existencede filtres passe-bande périphériques (aussiappelés bandes critiques), organisés tono-topiquement le long de la cochlée3. Il estréalisé en deux étapes : d’abord, une activa-tion des bandes critiques cochléaires, enfonction des fréquences composant le

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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( Dossier

1. L’information temporelle véhiculée par les fibres auditives afférentes est déterminée par la période du stimulus (c’est-à-dire l’inverse de sa fréquence). La synchronisationneuronale et le verrouillage de phase sont donc limités par la durée minimale de la transduction auditive et par la période réfractaire des fibres auditives afférentes. Cettelimitation temporelle aura un effet de filtre passe-bas, rendant la synchronisation inopérante pour les fréquences de stimulation supérieures à 5 000 Hz (Deltenre, 2006).

2. Nous n’évoquerons ici que les sons complexes harmoniques. Un son complexe périodique de fréquence fondamentale F0 et de période P = 1/F0, est dit harmoniquelorsque les sons purs qui composent son spectre ont des fréquences multiples entiers successifs de F0.

3. L’organisation cochléaire en filtres auditifs est à la base de la résolution fréquentielle (ou sélectivité spectrale), c’est-à-dire la capacité du système auditif à séparer (ou à « résoudre ») les différents harmoniques d’un son complexe. Cette résolution fréquentielle est sous la dépendance du système hydromécanique passif (membranebasilaire) et des MCA (cellules ciliées externes).

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stimulus ; ensuite, une transduction dusignal correspondant à chaque bande cri-tique, aboutissant au niveau des fibres audi-tives afférentes à des décharges neuronalessynchronisées ou périodiques4. L’analysetemporelle comporte également deuxétapes : d’abord, une analyse des intervallesinter-pics entre les potentiels d’action,réalisée indépendamment pour chaquecanal fréquentiel ; ensuite, une comparaisonglobale de ces intervalles temporels,recherchant les intervalles communs auxdifférents canaux fréquentiels. Au final,l’identification de l’intervalle commun leplus souvent rencontré permet au systèmeauditif central d’extraire la période cor-respondant à la fréquence fondamentale du stimulus (Deltenre, 2006, Moore, 2004).

2.3. Dimension temporelle

des stimuli acoustiques

• Caractéristiques

La dimension temporelle est le plus complexe des paramètres acoustiquescaractérisant un stimulus sonore. Elle estreprésentée par les variations au cours dutemps de l’intensité sonore (appeléesmodulation d’amplitude) et/ou de la fréquence (appelées modulation de fréquence). Ces variations temporelles desstimuli acoustiques ont un rôle informa-tionnel important, notamment pour le langage, dont une grande partie des para-mètres discriminants est portée par des fluctuations spectrales rapides(Deltenre, 2006).

• Enveloppe et microstructure

Les variations temporelles d’une ondesonore se répartissent en deux catégories(cf. Figure 2). D’une part, il existe desvariations rapides de la pression sonore, qui

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Dossier )

4. À la sortie des filtres auditifs, deux types de signaux résultants peuvent être définis, selon la résolvabilité des harmoniques composant le stimulus : d’une part, les harmo-niques de basses fréquences (résolus) produisent un signal sinusoïdal aboutissant à des décharges neuronales synchronisées sur la fréquence de chaque harmonique ;d’autre part, les harmoniques de hautes fréquences (non-résolus) produisent un signal complexe aboutissant à des décharges neuronales périodiques, se répétant à lafréquence fondamentale du stimulus.

Figure 1 : Codage d’un son complexe harmonique de fréquence fondamentale 100 Hz

(avec des harmoniques d’amplitude égale). Selon le modèle de Moore et van Noorden, le

codage de la fréquence fondamentale comporte deux étapes : un codage spectral, puis

une analyse temporelle. (D’après Plack & Oxenham, 2005)

Figure 2 : Variations temporelles d’un signal de parole : enveloppe et microstructure.

Les variations d’amplitude du signal sont représentées en fonction du temps. Elles com-

portent des fluctuations lentes (entre 4 et 16 Hz), correspondant à l’enveloppe (courbe en

trait pointillé), et des fluctuations rapides (entre 500 et 5000 Hz), correspondant à la

microstructure (indiquée par une flèche en trait plein). (D’après Zeynep, 2003)

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déterminent la fréquence d’un son pur : cesvariations représentent la microstructure(ou structure fine) du signal acoustique etne sont pas codées en tant que variabletemporelle par le système auditif. D’autrepart, il existe des variations lentes du signalsonore, correspondant aux modulationsd’amplitude ou de fréquence que l’onretrouve dans la plupart des sons écolo-giques et qui vont par exemple déterminerla cadence syllabique de la parole : cesvariations représentent l’enveloppe dusignal sonore, dont le rythme de variationest codé en tant que variable temporellepar le système auditif (Deltenre, 2006).

Une étude récente utilisant des stimuli acoustiques appelés « chimères auditives5 » a montré que l’enveloppe étaitindispensable à la compréhension de laparole, alors que la structure fine était plusimportante pour la perception de lahauteur tonale et pour la localisation spa-tiale des sons (Smith et al., 2002).

• Rôle des indices temporels dansla perception de la parole

La parole est véhiculée par des sons complexes, caractérisés par leur spectrefréquentiel et leur évolution dans le temps(Rance, 2005). Les phonèmes, unités linguistiques élémentaires, comportent à lajonction entre consonne et voyelle desvariations rapides de fréquence (appeléestransitions formantiques). Ces fluctuationsspectrales rapides doivent pouvoir êtreperçues pour permettre la distinctionentre les différents phonèmes (Starr et al.,1991). De manière analogue, la reconnais-sance des consonnes dépend d’indices tem-porels, alors que celle des voyelles estplutôt déterminée par des indices spec-traux (Nie et al., 2006). Dans une étudepsychoacoustique récente, Pichora-Fulleret collaborateurs (2007) ont montré que ladégradation de l’intelligibilité de la paroleen milieu bruité était plus marquée en cas

3.1. Modèles physiopatho-

logiques et simulation

expérimentale

• Modèles phénoménologique etcomputationnel

À partir des résultats expérimentauxobtenus chez des patients présentant uneNA/DA, Zeng et collaborateurs (1999) puisStarr et collaborateurs (2003) ont élaborédeux modèles physiopathologiques com-plémentaires. D’une part, le modèle phéno-ménologique vise à expliquer les consé-quences psychoacoustiques de la désyn-chronisation auditive (Zeng et al., 1999).D’autre part, le modèle computationnelprésente les effets neurophysiologiquesrésultant du dysfonctionnement neuronal(Starr et al., 2003). La figure 3 résume demanière synthétique ces deux modèlesphysiopathologiques, appliqués aux diffé-rents mécanismes pathogéniques sous-tendant la NA/DA.

• Expérience de simulation chezdes sujets normoentendants

Le modèle phénoménologique de Zengprésente l’intérêt d’avoir été validé expéri-mentalement, grâce à un protocole desimulation de la NA/DA chez des sujetsnormoentendants (Zeng et al., 1999). Enprésentant des stimuli acoustiques dont lescaractéristiques temporelles étaient artifi-ciellement dégradées, ces auteurs ontobtenu une altération des performances de

NOTIONSESSENTIELLES SURLES MÉCANISMESPATHOGÉNIQUES

SOUS-TENDANTLA NA/DA

3

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( Dossier

de distorsion temporelle (avec une désyn-chronisation des composantes de bassesfréquences) qu’en cas de distorsion spec-trale (avec un aplatissement du spectre for-mantique).

• Contraintes temporelles dusystème auditif

Comme nous l’avons vu précédemment, lesystème auditif périphérique présente untemps de réponse incompressible, quilimite ses performances en termes de réso-lution temporelle. Ainsi, la période réfrac-taire des fibres nerveuses auditives vadéterminer leur rythme maximal dedécharge, limitant par là même les possibi-lités de codage des variations temporellesrapides, par exemple pour les fluctuationsrapides d’enveloppe.

Au niveau du système auditif central, descontraintes analogues vont égalementlimiter la résolution temporelle (Deltenre,2006).

2.4. Rôle fonctionnel de la

synchronisation

neuronale

La synchronisation des décharges neurona-les transporte des informations importan-tes pour la perception auditive. D’abord,elle contribue au codage des attributs élé-mentaires des stimuli acoustiques, tels quel’intensité et la fréquence. Ensuite, elle estimpliquée dans l’extraction des caractéris-tiques spectrales des sons complexes. Parailleurs, elle participe au codage des fluctua-tions temporelles d’enveloppes, à la base dela reconnaissance de la parole. Enfin, elleaméliore la localisation spatiale auditive enaudition binaurale (Zeng et al., 1999).

5. Il s’agit de stimuli synthétisés ayant pour particularité d’avoir l’enveloppe d’un son donné et la structure fine d’un autre son.

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résolution temporelle et de reconnaissancede la parole semblables à celles retrouvéeschez les patients avec NA/DA. De plus,cette détérioration artificielle du traite-ment auditif était proportionnelle à l’im-portance de la dégradation temporelle desstimuli utilisés.

3.2. Mécanismes

pathogéniques

Deux mécanismes pathogéniques princi-paux, non exclusifs l’un de l’autre, sont sus-ceptibles d’expliquer les anomalies percep-

tivo-cognitives retrouvées dans la NA/DA(Rance, 2005 ; Zeng et al., 2005).(cf Tableau 1 - page 24)

• Désynchronisation auditive

Une perturbation de la synchronisationneuronale et du rythme des décharges vaentraîner une dispersion temporelle (ou jitter) des potentiels d’action au niveaudes fibres auditives afférentes6 (Kraus et al.,2000 ; Starr et al., 1996). La conséquenceneurophysiologique en sera un étalementet un nivellement (ou smearing) de lareprésentation temporelle des stimuli

acoustiques, proportionnels à l’importancede la désynchronisation (Rance, 2005 ; Zenget al., 1999). La réponse neuronale induitesera donc d’amplitude modérément dimi-nuée, mais de durée prolongée (cf. Figure 3B). Sur le plan perceptif, laréduction des capacités de codage temporel aura des conséquences différen-tes selon le type de tâche. Pour une tâchede discrimination, basée sur la comparaisonde deux profils d’onde sonore (commepour la détection d’un silence), la dégrada-tion des performances sera importante. Parcontre, pour une tâche de détection, baséesur une décision de type « tout-ou-rien »

Figure 3 : Modèle phénoménologique et computationnel de la neuropathie auditive. Chaque schéma illustre un des trois mécanismes

potentiels de dysfonctionnement du nerf auditif (B : désynchronisation auditive, C : diminution des entrées neurales, D : combinaison des

deux précédents), en comparaison avec le fonctionnement auditif normal (A). De haut en bas, sont représentés : les stimuli acoustiques

transitoires utilisés pour un paradigme de détection d’un son ou d’un silence ; les décharges neuronales induites par ces stimuli au niveau

de quatre fibres auditives afférentes connectées à une même cellule ciliée interne (l’activité spontanée des fibres n’est pas représentée) ;

la réponse neuronale moyenne résultant de l’activité de ces quatre fibres. Les conséquences perceptives auditives sont résumées à la

partie inférieure de chaque schéma. (D’après Starr et al., 2003 & Zeng et al., 2005)

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6. L’absence de PEA enregistrables nécessite une dispersion temporelle d’au moins 0,5 ms (Kraus et al., 2000). La détérioration de la perception de modulations d’amplitude à basses fréquences (de l’ordre de 10 Hz) suggère que pour certains patients, cette dispersion pourrait atteindre plusieurs dizaines de millisecondes (Ranceet al., 2004).

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(comme pour la détection d’un son), ladégradation sera minime (Zeng et al.,1999). Quant à l’intelligibilité de la parole,elle sera fortement dégradée (Starr et al.,1996 ; Zeng et al., 1999).

• Réduction des entrées neuronales

Une diminution des entrées neuronales vaentraîner une diminution du nombre depotentiels d’action cheminant dans lesfibres auditives afférentes (Starr et al.,2003 ; Zeng et al., 2005). La conséquenceneurophysiologique en sera une réductionquantitative de l’information, sans modifica-tion morphologique (Rance, 2005 ; Starr etal., 2003). La réponse neuronale induitesera donc d’amplitude diminuée, mais dedurée normale (cf. Figure 3C). Sur le planperceptif, la dégradation portera essentiel-lement sur la détection des stimuli acous-tiques en milieu bruité, objectivée par une évolution non-linéaire du rapportsignal/bruit7, mais également sur le traite-ment temporel à faible niveau d’intensitésonore (Starr et al., 2003).

• Autres mécanismes

* Mécanisme mixte :Un mécanisme combinant désynchronisa-tion auditive et réduction des entréesneuronales est également possible (Starr etal., 2003). Dans ce cas, on aura un profilneurophysiologique mixte : la réponseneuronale induite sera à la fois d’amplitudefortement diminuée et de durée prolongée(cf. Figure 3D). Sur le plan perceptif, l’en-semble des anomalies perceptivo-cogniti-ves décrites dans la NA/DA sont compati-bles avec ce mécanisme.

* Bloc de conduction :Un mécanisme de bloc de conduction péri-phérique a été évoqué dans les formestempérature-dépendantes de la NA/DA8

(Rance, 2005). Sur le plan neurophysiolo-gique, cela induit une limitation du tauxmaximal de décharge neuronale, avec pourconséquence perceptive une dégradationdes capacités discriminatives supraliminai-res (Starr et al., 2003).

3.3. Corrélats

neuropathologiques

Les mécanismes pathogéniques que nousvenons de présenter sont sous-tendus pardifférentes lésions neuropathologiques(Rance, 2005 ; Rapin & Gravel, 2003 ; Starret al., 2001).

• Lésion des CCI

La perte sélective des CCI va entraîner unediminution du nombre de fibres auditivesafférentes excitées, c’est-à-dire une réduc-tion des entrées neuronales.

• Synaptopathie

Un dysfonctionnement au niveau dessynapses entre CCI et fibres auditives affé-rentes va entraîner soit une désynchronisa-tion par allongement de la transductionauditive, soit une réduction des entréesneuronales par diminution du largage deneurotransmetteur9.

• Myélinopathie

La démyélinisation des fibres auditives afférentes a pour conséquence un ralentis-sement de la conduction nerveuse. La

Nous allons maintenant présenter, fonc-tion par fonction, les différentes perturba-tions de la perception auditive caractéris-tiques de la NA/DA.

CONSÉQUENCESPSYCHO-

ACCOUSTIQUESET PERCEPTIVO-COGNITIVES DE

LA NA/DA

4

7. Un des patients de l’étude de Starr et collaborateurs (2003) présentait un ratio 3:1 du rapport signal/bruit permettant le maintien de la détection d’un son pur de 1000 Hz en milieu bruité : à chaque augmentation de 1 dB du bruit, le signal devait être augmenté de 3 dB pour pouvoir être toujours perçu.

8. Ce mécanisme est à rapprocher du phénomène d’Uhthoff, décrit dans la sclérose en plaques et consistant en une symptomatologie déficitaire sensitivo-sensorielle induitepar une augmentation de la température corporelle (Cianfrone et al., 2006).

9. Ce mécanisme est suspecté dans certaines formes génétiques de NA/DA avec mutation du gène de l’otoferline (Varga et al., 2003).

démyélinisation étant variable d’une fibre àl’autre, les vitesses de conduction serontplus ou moins altérées, avec pour résultan-te une désynchronisation des déchargesneuronales. Par ailleurs, l’allongement de lapériode réfractaire et la dégradation descapacités de transmission des trains depotentiels d’action à haute fréquence sontsusceptibles d’aboutir à des blocs deconduction nerveuse.

• Axonopathie

L’atteinte des axones des fibres auditivesafférentes va entraîner une perte neurona-le, réduisant le nombre d’éléments nerveuxfonctionnels sans modifier leur vitesse deconduction. La conséquence sera uneréduction des entrées neuronales.

• Atteinte mixte axono-myélinique

L’atteinte mixte axono-myélinique est le substratum neuropathologique du mécanisme mixte, combinant désynchroni-sation auditive et réduction des entréesneuronales.

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4.1. Perception de l’intensité

sonore (sonie)

S’il existe une perturbation relativementvariable des seuils auditifs tonals, la discri-mination d’intensité est habituellementpréservée, ou modérément altérée (Zenget al., 2005).

• Audiométrie tonale liminaire

La dégradation modérée des seuils auditifstonals, classiquement décrite dans les pre-miers cas de NA/DA, fait évoquer le dia-gnostic lorsqu’elle s’accompagne de pertur-bations paradoxales représentées par ladétérioration marquée de l’audiométrievocale et l’absence de PEA précoces(Worthington & Peters, 1980). En fait, lesétudes ultérieures menées dans cettepopulation de patients ont montré que lesrésultats de l’audiométrie tonale liminairepouvaient aller d’une audition normale àune surdité totale (Rance, 2005).

Globalement, la répartition du seuil auditif moyen respecte la règle des « troistiers » : un premier tiers de patients a uneaudition normale ou une surdité modérée(perte tonale moyenne < 40 dB HL), unsecond tiers présente une surdité moyenneà moyenne-sévère (perte entre 40 et 70 dBHL) et un denier tiers souffre d’une surditésévère à profonde (perte > 70 dB HL)(Madden et al., 2002 ; Rance et al., 1999 ;Starr et al., 2000).

Le profil audiométrique le plus fréquent,retrouvé dans près de 30 % des cas,est une perte prédominant sur les basses fréquences (profil dit « en penteinversée ») (Rance et al., 1999 ; Starr et al.,2000 ; Zeng et al., 1999). Par contre, uneperte prédominant sur les hautes fréquen-ces, caractéristique de la surdité endoco-chléaire, ne se retrouve que dans environ10 % des cas (Rance, 2005).

Une particularité de l’audiométrie tonale,retrouvée chez plus d’un quart despatients, réside dans des fluctuations intra-individuelles des seuils auditifs, avec unevariance d’environ 20 dB (Rance et al., 1999 ; Starr et al., 2000). Fait impor-tant, ces fluctuations de seuil, qu’elles soienten amélioration ou en dégradation, sontconcomitantes de modifications des capaci-tés perceptives auditivo-verbales (Rance,2005).

• Seuil de discrimination d’intensité

La perception des modifications d’intensitésonore est habituellement dans les limitesde la normale.Ainsi, Zeng et collaborateurs(2005) ont-ils montré, chez vingt-et-unpatients âgés de 6 à 53 ans (âge moyen de

21 ans), que les seuils de discriminationd’intensité pour un son pur de 1 000 Hzn’étaient que légèrement augmentés,notamment à faible niveau de stimulation10.De plus, la différence par rapport à trente-quatre sujets contrôles, sélectionnés parmiles membres indemnes des familles despatients et appariés en âge, n’était pas sta-tistiquement significative (Zeng et al.,2005).

Une exception notable est le cas princepsdécrit par Starr et collaborateurs (1991).Cette jeune fille de 11 ans11 présentait unedégradation de ses capacités de discrimina-tion d’intensité, avec des seuils doublés parrapport à ceux de cinq sujets contrôlesd’âges voisins (10 dB contre 4 dB), pour dessons purs de 200, 1000 et 4 000 Hz présen-tés à 20 et 40 dB SL.

10. Comme nous l’avons vu dans le chapitre 2, le codage neuronal de l’intensité sonore à faible niveau de stimulation et pour des fréquences inférieures à 5 000 Hz estessentiellement d’ordre temporel.

11. Il s’agit du sujet AN3 des études de Zeng et collaborateurs (1999, 2005).

Figure 4 : Discrimination fréquentielle des sons purs. Le seuil de discrimination

fréquentielle (en Hz) est représenté en fonction de la fréquence testée (barres d’erreur =

erreur standard), chez quatre sujets normoentendants (triangles blancs) et douze

patients avec NA/DA (ronds noirs). Pour les patients avec NA/DA, la dégradation des

seuils est d’autant plus marquée que la fréquence testée est basse. (D’après Zeng et al.,

2005)

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( Dossier

4.2. Perception de la

fréquence ou hauteur

tonale (tonie)

Contrairement à la perception de l’intensité sonore, la perception de la fréquence s’avère perturbée, notammentpour la discrimination fréquentielle.Pour la résolution fréquentielle et les pro-cédures de masquage simultané, les résul-tats expérimentaux sont plus discordants.

• Seuil de discrimination de fréquence

La discrimination fréquentielle est forte-ment altérée, comme l’ont montré plusieurs recherches menées aussi bienchez des enfants que chez des adultes(Rance, 2005).

Zeng et collaborateurs (2005), dans leurétude sur les conséquences auditivo-perceptives de la NA/DA, ont mesuré lesseuils de discrimination fréquentielle pourdes sons purs allant de 125 à 8 000 Hz, parpas d’une octave, et présentés à l’intensitémaximale confortable. Par rapport augroupe contrôle, ils ont trouvé une dégra-dation des seuils d’autant plus marquée quela fréquence testée était basse (cf. Figure4). Pour les basses et moyennes fréquences(< 4 000 Hz), les seuils étaient augmentésde un à deux ordres de magnitude (c’est-à-dire d’un facteur 10 à 100) ; pour les hautesfréquences (≥ 4 000 Hz), ils se rappro-chaient des seuils des sujets contrôles, pourdevenir normaux à 8 000 Hz (Zeng et al.,2005). En d’autres termes, la discriminationdes fréquences codées temporellement,c’est-à-dire les basses et moyennes fré-quences, était perturbée alors que celle desfréquences codées spatialement, c’est-à-dire les hautes fréquences, était subnorma-le ou normale (Rance, 2005).

Des résultats analogues ont été obtenuschez quatorze enfants porteurs d’uneNA/DA à début précoce (Rance et al.,2004). Chez ces enfants âgés de 4 à 10 ans(âge moyen de 6 ans et demi), la détériora-tion des seuils de discrimination fréquen-tielle variait de quatre fois et demie lanormale à 4 000 Hz à onze fois la normaleà 500 Hz, pour des sons purs présentés à100 dB SPL. Par ailleurs, contrairement auxsujets contrôles normoentendants ou avecune surdité endocochléaire, l’utilisation desons modulés en fréquence, qui empêchentle codage temporel par verrouillage dephase, ne modifiait pas les seuils de discri-mination (sons purs contre modulations defréquence) (Rance et al., 2004). Cette parti-cularité suggère qu’il existe d’emblée unealtération du codage temporel chez lesenfants ayant une NA/DA.

Pour la discrimination fréquentielle, le casprinceps décrit par Starr et collaborateurs(1991) présentait une augmentation desseuils similaire à celle décrite par Rance etcollaborateurs (2004), entre 3 et 15 fois lanormale, pour des sons purs entre 200 et 4 000 Hz.

• Résolution fréquentielle et masquage simultané

La résolution fréquentielle (ou spectrale),liée à la largeur des filtres auditifs et à leursélectivité fréquentielle, peut être détermi-née au moyen de deux procédures de mas-quage simultané, réalisées lors de l’évalua-tion de la perception de sons purs enmilieu bruité.

* Masquage par bruit en bande ou bruit àencoche spectrale :

La première procédure consiste à compa-rer les seuils de détection en présence d’unbruit à bande moyenne ou large et ceux enprésence d’un bruit à encoche spectralecentrale (dit notched noise). L’amélioration

du seuil en présence du bruit à encochepermet d’estimer les capacités du sujet àbénéficier de ce « trou spectral » pourséparer les deux stimuli (son pur et bruit).

Les résultats publiés sont un peu diver-gents. D’un côté, Rance et collaborateurs(2004) ont trouvé des performances com-parables entre leur groupe d’enfants ayantune NA/DA et des sujets contrôles nor-moentendants, suggérant une résolutionfréquentielle équivalente. De l’autre, Krauset collaborateurs (2000) ont montré, chezune jeune femme de 24 ans (IT) présentantune NA/DA d’origine congénitale, desseuils masqués augmentés ainsi qu’uneamélioration minime entre les deux condi-tions (3.5 dB, contre 18 dB chez des sujetscontrôles normoentendants). Ce résultatévoquerait plutôt une détérioration de larésolution fréquentielle, même si lesauteurs ont suggéré un déficit central ducodage neuronal, du fait de la préservationdes OEA (Kraus et al., 2000). Un tel déficitpourrait expliquer les difficultés de percep-tion de la parole en milieu bruité12, consta-tées chez cette patiente.

* Masquage pour des sons purs de courteou de longue durée :

La deuxième procédure consiste à compa-rer les seuils de détection de sons purs dedurée différente, en présence d’un bruit àlarge bande (bruit blanc). En milieu bruité, laperception de sons purs de longue duréepermet d’évaluer la résolution spectrale etla présence de régions mortes cochléaires,alors que celle de sons purs de courtedurée permet d’évaluer l’intégrité desMCA et l’activité du système efférent olivo-cochléaire médian13 (Zeng et al., 2005).Chez dix patients (âgés de 6 à 53 ans), Zenget collaborateurs (2005) ont évalué la per-ception de sons purs d’une durée de 9 ou200 ms, ayant une fréquence de 250 à 4 000Hz et présentés 3 ou 300 ms après le débutdu bruit blanc. Pour les sons purs de courtedurée, dont la perception était déjà modé-

12. Par exemple, la discrimination des voyelles n’est possible que si les pics formantiques qui les composent sont séparés spectralement et codés de manière indépendan-te au niveau des voies auditives ascendantes, c’est-à-dire qu’ils sont « résolus » (Rance, 2005).

13. Chez les sujets normoentendants, le seuil de détection est meilleur en condition stable, où l’activité anti-masquage du système efférent olivocochléaire médian est présente, qu’à l’instauration du bruit masquant : c’est ce que l’on appelle un effet d’overshoot.

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rément pathologique dans le silence (cf.infra), il existait une augmentation du seuilde perception d’environ 23 dB. Dans lamesure où l’effet d’overshoot était prochede celui des sujets contrôles normoenten-dants, ce résultat suggére un fonctionne-ment olivocochléaire dans les limites de lanormale (Zeng et al., 2005). Pour les sonspurs de longue durée, il existait égalementun excès de masquage d’environ 20 dB,évoquant une altération de la résolutionfréquentielle (Zeng et al., 2005). Parailleurs, une étude récente a recherché deszones mortes cochléaires chez des patientsprésentant une NA/DA avec des seuilstonals normaux ou modérément dégradés(Vinay & Moore, 2007). Alors que le TEN-test14 était pathologique, avec une augmen-tation des seuils masqués pour une ou plu-sieurs fréquences, il n’existait pas de déca-lage du pic des courbes d’accord psycho-physiques, comme cela se produit en pré-sence de zones mortes cochléaires. Cettediscordance de résultats a donc été inter-prétée par les auteurs comme le refletd’une détérioration du codage auditif péri-phérique induite par la présence de bruit,mais en rapport avec une perte de la syn-chronisation neuronale plutôt qu’un élar-gissement des filtres auditifs (Vinay &Moore, 2007).

4.3. Perception de la

dimension temporelle

Comme nous allons le voir, la perceptionde la dimension temporelle s’avère êtrel’attribut acoustique le plus perturbé en casde NA/DA.

• Résolution temporelle

La résolution temporelle correspond à l’acuité avec laquelle le système auditif peutpercevoir des modifications des stimuli aucours du temps (Deltenre, 2006). Elle fait référence à la capacité à détecter

des variations globales du stimulus acous-tique, correspondant à l’enveloppe, plutôtque des variations rapides de pressionsonore, correspondant à la structure fine(Rance, 2005). Elle peut être évaluée pardifférentes procédures psychoacoustiquesd’intégration ou de discrimination tempo-relles (Zeng et al., 2005).

* Intégration temporelle :L’intégration temporelle évalue le seuil dedétection d’un son pur ou d’un bruit blancen fonction de sa durée (approximative-ment de 5 à 500 ms).Chez seize patients del’étude de Zeng et collaborateurs (2005), ladétérioration de ce paramètre n’était signi-ficative que pour des bruits blancs d’unedurée de 5 et 10 ms, pour lesquels les seuilsde détection étaient majorés de 5 à 10 dBpar rapport à ceux de quatre sujets contrô-les. Ces résultats suggèrent que les patientsavec NA/DA ont des difficultés à détecterles stimuli de courte durée (≤ 10 ms), maispas les stimuli de longue durée (≥ 20 ms)(Zeng et al., 2005).

* Détection d’interruption :La détection d’interruption (ou gap) consis-te à déterminer le plus court intervalle desilence perceptible au sein d’un son pur oud’un bruit blanc. Zeng et collaborateurs(2005) ont évalué les performances devingt patients pour un bruit à large bande(20 à 14 000 Hz), en fonction de son niveaude présentation (de 5 à 50 dB SL).Comparativement aux sept sujets contrô-les, les résultats étaient similaires pour lesfaibles niveaux de stimulation (50 ms à 5 dBSL), mais se dégradaient fortement pour lesniveaux plus élevés (15 ms à 50 dB SL,contre 3 ms pour les sujets contrôles). Demanière complémentaire, Michalewski etcollaborateurs (2005) ont testé, chez qua-torze patients âgés de 9 à 40 ans, la percep-tion d’intervalles de silence au sein d’unbruit à large bande présenté à l’intensité « la plus confortable ».

Ils ont non seulement montré que le profilde détection était décalé par rapport àcelui d’un groupe contrôle, mais également

14. Le TEN-test correspond à une audiométrie tonale liminaire réalisée en présence d’un masquage ipsilatéral par un bruit « égalisateur de seuil » (Threshold-Equalizing Noise).Chez les personnes normoentendantes, le seuil masqué (avec un bruit d’intensité constante) est globalement identique pour toutes les fréquences entre 250 Hz et 10 kHz.Il permet de dépister des régions mortes cochléaires (c’est-à-dire non fonctionnelles), lorsque le seuil masqué est anormalement élevé par rapport au seuil absolu.

Figure 5 : Fonction de transfert de modulation temporelle pour un bruit blanc modulé

en amplitude. Le seuil de détection de modulation (en dB, réf = 100 % de modulation)

est représenté en fonction de la fréquence de modulation (barres d’erreur = erreur

standard), chez quatre sujets normoentendants (triangles blancs) et seize patients

avec NA/DA (ronds noirs). Pour les patients avec NA/DA, le seuil de détection de

modulation (flèche en pointillée) et la fréquence de coupure (étoile) sont anormaux.

(D’après Zeng et al., 2005)

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que la précision était moindre, et ce malgréun allongement du temps de réaction.

Ces résultats montrent que les patientsNA/DA ont des difficultés à détecter lesintervalles de silence, même à des niveauxde sensation sonore confortables(Michalewski et al., 2005 ; Zeng et al., 2005).

* Détection de modulation temporelle :La détection de modulation temporelleconsiste à déterminer la plus petite modu-lation sinusoïdale d’amplitude perceptiblepour un signal porteur donné (son pur,bruit en bande ou bruit blanc), en compa-rant le stimulus test modulé et le stimulusstandard non modulé, présentés à desniveaux de stimulation RMS équivalents15.Zeng et collaborateurs (2005) ont mesuré,chez seize de leur vingt-et-un patients, leseuil de détection de modulation d’amplitu-de d’un bruit blanc en fonction de la fré-quence de modulation (de 2 à 2 000 Hz). Lafonction de transfert de modulation tem-porelle16 ainsi définie présentait un profilanormal, par comparaison à celui de quatresujets contrôles (cf. Figure 5). Le seuil dedétection de modulation (pic de sensibilité)était de 37 % (contre 10 % pour les sujetscontrôles), avec une fréquence de coupureà 17 Hz (contre 258 Hz pour les sujetscontrôles) et une nette dégradation desperformances pour les fréquences demodulation extrêmes (Zeng et al., 2005).

Pour les quatorze enfants de l’étude deRance et collaborateurs (2004), les résul-tats étaient globalement similaires, maisavec une répartition dichotomique entreun sous-groupe de sept enfants ne présen-tant qu’une dégradation modérée pour lesfréquences de modulation élevées (50 et150 Hz) et un sous-groupe de sept enfantsprésentant des perturbations importantespour l’ensemble des fréquences de modu-lation testées (10, 50 et 150 Hz).

Ces résultats montrent que les patientsavec NA/DA ont des difficultés à détecterles modulations temporelles, aussi bienlentes que rapides (Zeng et al., 2005). Pourcertains patients, la dégradation est tellequ’ils n’arrivent même pas à détecter laprésence d’une modulation d’amplitude de100 % (Kumar & Jayaram, 2005 ; Rance etal., 2004 ; Zeng et al., 1999).

• Masquage temporel non simultané

La procédure de masquage temporelconsiste à mesurer l’élévation du seuil deperception d’un signal sonore induite par laprésence d’un masque, soit juste avant lesignal à détecter (masquage proactif ouforward masking), soit juste après (masqua-ge rétroactif ou backward masking)(Deltenre, 2006). Elle permet de mesurerles capacités d’un auditeur à séparer dessons dans le temps (Kraus et al., 2000), lesperformances étant corrélées aux capacitésde résolution temporelle (Rance, 2005).Chez quatre patients (deux enfants et deuxadultes jeunes), Zeng et collaborateurs(2005) ont mesuré l’effet masquant d’unson pur de 1 000 Hz sur la perception d’unautre son pur de 1 000 Hz, en faisant varierl’intervalle inter-stimulus de 1 à 500 ms. Parrapport aux quatre sujets contrôles, il exis-tait un élargissement de la fenêtre tempo-relle de l’effet de masque : en rétroactif, lespatients montraient un masquage de 60 %même pour un intervalle inter-stimulus17 de100 ms (comparée à un masquage ≤ 15 %jusqu’à 20 ms, pour les sujets contrôles) ;en proactif, l’effet de masque était plusmarqué chez les patients, pour les interval-les entre 5 et 50 ms. Ces résultats mont-rent que les patients avec NA/DA nepeuvent pas séparer efficacement desstimuli successifs trop rapprochés (Zeng et

al., 2005). Les résultats obtenus avec unmasque par bruit en bande sont similaires,comme le montre l’augmentation à 51 dBSPL du seuil de perception d’un son pur de1000 Hz en condition de masquagerétroactif chez la patiente IT, comparée àun seuil de 32 dB SPL pour 10 sujetscontrôles normoentendants (Kraus et al.,2000).

• Profil déficitaire temporel du cas princeps

La jeune patiente décrite dans l’article prin-ceps de Starr et collaborateurs (1991) pré-sentait également de fortes perturbationsde la résolution temporelle (Zeng et al.,1999). Les indices évalués objectivaient lesaltérations suivantes : (i) pour l’intégrationtemporelle, une augmentation abrupte duseuil de perception (+ 20 dB) pour les sonspurs d’une durée inférieure à 30 ms ;(ii) pour le test de fusion de clics, une aug-mentation de l’intervalle minimal pour per-cevoir deux clics séparément (90 à 100 ms,contre 2 à 4 ms pour sa sœur normoenten-dante) et (iii) pour la détection d’interrup-tion, une augmentation du seuil de percep-tion d’intervalle silencieux au milieu d’unbruit proche de 80 ms (contre 2 ms poursa sœur normoentendante). Par contre, ladifférenciation de durée entre deux sonspurs était normale pour les stimuli decourte durée (20 à 30 ms, contre 20 mspour les sujets contrôles) et légèrementdégradée pour les stimuli de longue durée(200 à 300 ms, contre 140 ms pour lessujets contrôles).

4.4. Audition binaurale

Les données que nous avons présentéesjusque là concernent l’audition monaurale.Nous allons maintenant aborder les pertur-

15. Le niveau RMS (root-mean-square) d’un son complexe s’exprime en dB SPL. Il correspond à une intensité moyenne, calculée à partir de la pression acoustique efficace.La présentation à un niveau équivalent évite de fournir au sujet des indices non temporels, tels qu’une modification de l’intensité globale.

16.Temporal modulation transfer function (TMTF).

17. Pour le masquage rétroactif, il s’agit de l’intervalle entre la fin du signal et le début du masque. Pour le masquage proactif, il s’agit de l’intervalle entre la fin du masqueet le début du signal.

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bations de l’audition binaurale liées à laNA/DA. L’intégration des informationsbinaurales est en grande partie déterminéepar des indices temporels. Ceci expliquepourquoi les performances en auditionbinaurale sont le plus souvent patholo-giques, à l’image de la perception monaura-le de la dimension temporelle.

• Localisation spatiale et différences interaurales

La localisation spatiale s’appuie sur deuxindices distincts liés à la perception diffé-rentielle entre les deux oreilles, lorsque lestimulus acoustique n’est pas émis dans leplan sagittal médian. Il s’agit d’une part,d’une différence interaurale de temps (oude phase), liée au délai de propagationd’une oreille à l’autre ; d’autre part, d’unedifférence interaurale d’intensité, liée àl’effet de masque de la tête. Zeng et colla-

borateurs (2005) ont évalué les capacitésde localisation spatiale chez trois de leurspatients adultes jeunes (ayant des pertesauditives légères à modérées), en manipu-lant les différences interaurales de temps etd’intensité. La différence interaurale detemps était basée sur la présentation dedeux sons purs de 500 Hz (un dans chaqueoreille), avec une avance de phase de 0, 30,60 ou 90° pour le son présenté à droite18 ;la différence interaurale d’intensité étaitbasée sur la présentation de deux sonspurs de 500 ms (un dans chaque oreille),avec une différence d’intensité de 0 ou 10dB SPL entre les deux sons19. Les perfor-mances se sont avérées « remarquable-ment discordantes ». Pour les différencesinteraurales de temps, les patients n’ontrapporté aucun changement de position,alors que les trois sujets contrôle perce-vaient une latéralisation d’autant plusmarquée que le déphasage était important

(cf. Figure 6) ; pour les différences inter-aurales d’intensité, les performances despatients étaient quasiment superposables àcelles des sujets contrôles. Ces résultatsmontrent que les patients avec NA/DAsont incapables d’utiliser des indices inter-auraux temporels pour localiser les sons,mais peuvent utiliser efficacement desindices interauraux d’intensité (Zeng et al.,2005).

Comme pour la discrimination d’intensité,le cas princeps de Starr et collaborateurs(1991), ainsi que celui d’un patient adultedécrit dans un article ultérieur (Starr et al.,1996), ont fait exception. En effet, ces deuxpatients présentaient une dégradationconjointe des performances de localisationspatiale, à la fois pour les indices temporels(avec une absence de latéralisation percep-tible) et pour les indices d’intensité (avecune différence interaurale minimale de 36 dB pour percevoir un changement delatéralisation).

• Battements et fusion auditive

Lorsque deux sons de fréquences voisines(avec une différence d’au moins 3 Hz) sontprésentés à un auditeur, il se produit unphénomène de battement, c’est-à-dire unemodulation d’amplitude du signal résultant.En condition monaurale, on parle de batte-ment physique20, correspondant à unevariation d’intensité de taux égal à la diffé-rence de fréquence entre les deux sons.Dans ce cas, la perception du battementnécessite une synchronisation neuronale àla fréquence de modulation. En conditionbinaurale, on parle de battement binaural,qui nécessite une synchronisation neurona-le à la fréquence de la porteuse et une inté-gration centrale (au niveau du tronc céré-bral).

Chez les trois patients adultes jeunes testéspar Zeng et collaborateurs (2005), il a été

18. Ce déphasage correspond à un décalage temporel respectivement de 0, 167, 333 ou 500 microsecondes.

19. L’intensité nominale était de 90 dB SPL pour les deux oreilles ou de 85 dB SPL dans l’oreille droite et 95 dB SPL dans l’oreille gauche. Les fréquences testées allaientde 250 Hz à 8 000 Hz, par pas d’une octave.

20. Le battement monaural est généré au niveau de la cochlée, par une interaction « physique » entre les deux sons.

Figure 6 : Localisation spatiale à partir des différences interaurales de temps.

La latéralisation (de 0 pour la position centrale à 3 pour la position la plus à droite) est

représentée en fonction de la différence interaurale de phase entre deux sons purs de 500

Hz, avec une avance de phase pour le son présenté à droite (barres d’erreur = erreur

standard), chez trois sujets normoentendants (triangles blancs) et trois patients avec

NA/DA (ronds noirs). Les patients avec NA/DA ne perçoivent aucun changement de

position, quel que soit le déphasage. (D’après Zeng et al., 2005)

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montré une préservation du battementmonaural avec des sons purs ne différantque de 3 Hz, alors qu’il existait une altéra-tion de la perception du battement binauralpour deux sons purs de 500 et 503 Hz.Dans ce dernier cas, les patients perce-vaient un signal auditif fusionné sans batte-ment, alors que les sujets contrôles pou-vaient percevoir le battement. Ces résultatssuggèrent que les patients avec NA/DApeuvent suivre les fluctuations temporelleslentes à l’origine du battement monaural,mais sont incapables de suivre des fluctua-tions temporelles rapides, comme dans lecas du battement binaural (Zeng et al.,2005).

Ces résultats avaient déjà été rapportéspour les deux patients (une enfant et uneadulte) de Starr et collaborateurs (1991,1996).

• Différence de niveau de masquage binaural

La différence de niveau de masquage binau-ral évalue les capacités du système auditifcentral à utiliser des informations de phaseprovenant des deux oreilles. Elle repose surle fait qu’un signal binaural bruité est plusfacilement détectable, lorsque l’on changela phase du signal ou du bruit masquantdans une des deux oreilles. Cela se traduitpar une diminution du seuil de perceptiondu signal et par la nécessité d’augmenterl’intensité du bruit, pour avoir un mêmeniveau de masquage que celui obtenu enl’absence de déphasage. Chez les sujetsnormoentendants, cette différence est de10 à 15 dB (Licklider, 1948).

Chez les deux patients testés sur le plan psychoacoustique par Starr et collabo-rateurs (1991, 1996), la différence de niveau de masquage binaural était quasi-

ment nulle, malgré des stimuli acoustiquesen opposition de phase. Ces résultats sug-gèrent que les patients avec NA/DA ontdes perturbations du traitement temporelbinaural et ne peuvent donc pas utiliser effi-cacement les différences interaurales dephase (Rance, 2005).

4.5. Perception de la parole

Comme on pouvait s’y attendre, la dégra-dation du traitement des paramètresacoustiques, notamment des indicesspectro-temporaux , va avoir un retentisse-ment important sur les capacités de com-préhension de la parole (Rance, 2005).

• Audiométrie vocale classique

Si l’absence de corrélation entre percep-tion de la parole et audiométrie tonale estune caractéristique constante de laNA/DA, les résultats de l’audiométrievocale restent très variables selon lespatients (Starr et al., 2000). Cependant,deux profils sont plus couramment observés. Le premier profil correspond àune dégradation importante de l’audio-gramme vocal, disproportionnée parrapport à la perte auditive tonale (Rance,2005) ; il est retrouvé chez 70 à 75 % despatients adultes (Starr et al., 1996).

Le second correspond à une dégradationplus modérée, avec des scores d’intelligibi-lité vocale dans le silence conformes à ceuxattendus, compte tenu de la perte tonale21

(Rance, 2005) ; il est retrouvé chez 20 à 25 % des patients adultes (Starr et al.,1996).

Sur le plan physiopathologique, ces deuxprofils relèveraient d’atteintes distinctes,respectivement centrales (au niveau desvoies et relais du système auditif central)

pour le premier et périphériques neuro-sensorielles (au niveau des cellules ciliéesinternes et/ou des fibres auditives afférentes) pour le second (Rance et al.,2002). Exceptionnellement, quelques cas depatients ayant des performances normalesà l’audiométrie vocale dans le silence ontété décrits (Kraus et al., 2000).

Chez les enfants ayant présenté une attein-te prélinguale, la distribution est plus équi-librée, avec une répartition égale entre lesdeux profils, pour moitié-moitié (Rance etal., 2002). Cette discordance est probable-ment liée aux modalités de dépistage despatients, susceptibles d’induire un « biais derecrutement »22.

• Intelligibilité selon le matérielvocal testé et les conditions d’écoute

Les résultats de différentes études ont misen évidence des difficultés spécifiques deperception, inhérentes au caractère dyna-mique des signaux de parole et qui sontmajorées en condition d’écoute bruitée(Rance, 2005).

* Discrimination phonémique et identification de mots :

En utilisant des stimuli vocaliques synthé-tiques et en manipulant les formants (duréedes transitions ou fréquence initiale), Krauset collaborateurs (2000) ont pu évaluer laperception de la structure fine des sons deparole chez la patiente IT.Alors que le seuilde discrimination de contraste23 pour lecontinuum vocalique /ba-wa/ était parfaite-ment normal à environ 3 ms (contre 6 msen moyenne pour les sujets normoenten-dants), celui du continuum /da-ga/ étaitaltéré à environ 120 Hz (contre 80 Hz pourles témoins).

21. Ce premier profil, avec une détérioration de la perception de la parole malgré une audibilité adéquate, suggère que le facteur limitant est une dégradation de la perception des indices supraliminaires (Rance, 2005).

22. En effet, les patients adultes ont été plutôt recrutés sur des critères cliniques, notamment des difficultés de compréhension de la parole, alors que les enfants ont étéessentiellement recrutés sur des critères paracliniques, notamment une dégradation des PEA. Cette différence est susceptible d’avoir majoré la proportion de patientsadultes présentant une dégradation de la perception vocale plus importante que leur perte auditive tonale.

23. Just noticeable difference (JND).

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Dossier )

En milieu bruité, la discrimination du conti-nuum /da-ga/ était impossible, même pourun rapport signal/bruit à +10 dB (alors quele seuil était à 140 Hz pour les témoins).Ces performances différentielles suggèrentqu’IT était capable de percevoir des diffé-rences temporelles, mais présentait des dif-ficultés pour discriminer des différencesspectrales, avec une détérioration nette-ment majorée dans le bruit (Kraus et al.,2000).

Dans une étude plus récente menée chezquatorze patients avec une NA/DA (majo-ritairement des adultes jeunes), Kumar etJayaram (2005) ont montré qu’il existaitaussi une dégradation de la perception de ladurée de la transition formantique pour lasyllabe /da/, avec un seuil de discriminationde contraste entre 75 et 110 ms (contre 25à 50 ms pour 30 sujets normoentendants).Ce résultat suggère que la perception des indices temporels est également perturbée (Kumar & Jayaram, 2005).

Une donnée complémentaire intéressante,rapportée dans le cas princeps de NA/DA (Starr et al., 1991), est la percep-tion différentielle des mots monosylla-biques selon leur composition en conson-ne-voyelle-consonne. D’une part, la patien-te avait plus de difficultés à discriminer desmots différant par leur voyelle centrale quepar leur consonne initiale (57 % de répon-ses correctes pour la voyelle, contre 74 %pour la consonne). D’autre part, cet écarts’accentuait lorsque les consonnes utiliséescomportaient des composantes de hautesfréquences (en anglais : ch, s, t, wh et s),pour atteindre près de 100 % de réponsescorrectes. Dans le cadre de la NA/DA, cesrésultats illustrent la difficulté des patientsà discriminer des changements rapides defréquence, comme à la jonction entreconsonne et voyelle, mais également lesavantages perceptifs que peuvent leurfournir les composantes de hautes fréquen-ces (Starr et al., 1991).

* Compréhension de la parole en milieu bruité :

La majoration des difficultés de compré-hension de la parole en milieu bruité estune caractéristique retrouvée chez tous lespatients ayant une NA/DA, même chezceux présentant des scores d’intelligibilitévocale normaux dans le silence (Kraus etal., 2000 ; Zeng & Liu, 2006).Ainsi, pour IT,la compréhension de mots monosylla-biques présentés en binaural passait de 100 % dans le silence à 10 % en milieubruité, pour un rapport signal/ bruit à +3 dB (Kraus et al., 2000). Cette détériora-tion était beaucoup plus importante quepour les 14 témoins adultes normoenten-dants, qui conservaient un score moyend’intelligibilité de 40 % (pour le mêmerapport signal / bruit) (Kraus et al., 2000).Deux facteurs surajoutés de variabilité ontété mis en évidence dans cette étude : ladifficulté lexicale et le nombre de locu-teurs. Une dégradation supplémentaire del’intelligibilité en milieu bruité a donc étérapportée pour des listes de mots difficilesou présentés par des locuteurs multiples.

Ces résultats suggèrent que, malgré le bruitmasquant, la patiente était capable d’utiliserla suppléance mentale pour les motssimples et de tirer bénéfice des régularitésde signal acoustique procurées par un locu-teur unique (Kraus et al., 2000). L’effet dubruit sur la compréhension de phrases aégalement été rapporté par Zeng et Liu(2006), aussi bien en condition monaurale(quatre patients) qu’en condition binaurale(deux patients).

Dans cette étude, l’écart maximal pour lescore d’intelligibilité vocal était de quatre-vingt points entre la condition dans lesilence et celle dans le bruit, pour unrapport signal/bruit à 0 dB (Zeng & Liu,2006).

Cette détérioration de la compréhensionde la parole en milieu bruité est cohérenteavec l’effet accru des masquages simultanéset non simultanés constaté chez lespatients présentant une NA/DA (Kraus etal., 2000 ; Zeng et al., 2005).

* Langage « éclairci » contre langage « conversationnel » :

Chez treize patients présentant uneNA/DA, Zeng et Liu (2006) ont montréque l’utilisation d’un langage « éclairci »,c’est-à-dire avec des mots mieux articuléset une prononciation plus lente, amélioraitla compréhension de phrases parlées. Parrapport à un langage « conversationnel », legain moyen en termes de pourcentage d’in-telligibilité allait de seize à vingt-et-unpoints24, en fonction des conditions testées(monaural ou binaural, dans le silence oudans le bruit). Cette amélioration est pro-bablement liée aux différences acoustiqueset phonétiques entre le langage « éclairci »et le langage « conversationnel »25, facilitantle codage des indices temporels de laparole pour le langage « éclairci » (Zeng &Liu, 2006).

* Sommation et démasquage binauraux :

Dans la même étude, Zeng et Liu (2006)ont mis en évidence un effet de sommationbinaurale dans le silence, avec une amélio-ration du pourcentage d’intelligibilité deplus de vingt-cinq points, par rapport à uneprésentation monaurale. Fait intéressant,cet avantage de l’audition binaurale n’étaitpas retrouvé pour la condition d’écoutebruitée. Ces résultats sont parfaitementexpliqués par le profil psychoacoustiquedéficitaire des patients avec NA/DA,notamment les difficultés de codage desindices temporels interauraux et l’effet demasquage excessif en milieu bruité, suscep-tible de réduire l’efficience du démasquagebinaural (Zeng et al., 2005).

24. Ce gain d’intelligibilité, pour des conditions d’écoute identiques par ailleurs, correspond à ce que les auteurs appellent le clear speech advantage.

25. Il s’agit notamment d’une vitesse de parole moins élevée, d’une augmentation de l’énergie acoustique entre 1000 et 3000 Hz et d’une amplification des modulationstemporelles.

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Les quelques études ayant combiné les approches comportementales (perfor-mances psychoacoustiques et perceptivo-cognitives) et électrophysiologiques (enre-gistrements des PEA) ont révélé l’existencede corrélations entre ces différentes varia-bles, permettant de relier les troubles de laperception auditive décrits dans la NA/DAà un substratum anatomo-physiologique.

5.1. Variables

psychoacoustiques et

perception de la parole

Comme pour d’autres pathologies primai-res ou secondaires du système auditif(presbyacousie, sclérose en plaques, trou-bles de l’apprentissage), les difficultés decompréhension de la parole dans la NA/DAsont étroitement liées à la détérioration dutraitement des indices temporels acous-tiques (Zeng et al., 1999).

Dans leur étude chez quatorze enfants por-teurs d’une NA/DA à début précoce, Ranceet collaborateurs (2004) ont montré qu’ilexistait une forte corrélation entre les per-formances psychoacoustiques temporelleset les difficultés de compréhension de pho-nèmes : plus les seuils de discrimination fré-quentielle étaient faibles et/ou les perfor-mances de détection de modulation tem-porelle étaient élevées, meilleurs étaient les scores de discrimination vocale.Globalement, la répartition des patients ausein de l’échantillon était dichotomique :

d’un côté, un sous-groupe de sept enfantsprésentait une dégradation modérée desperformances psychoacoustiques tempo-relles et un score de discrimination vocalesupérieur à 60 % ; de l’autre, un sous-groupe de sept enfants présentait unedégradation importante des performancespsychoacoustiques et un score de discrimi-nation vocale inférieur à 30 % (Rance et al.,2004).

Des résultats similaires ont été rapportéschez les quatorze patients adultes jeunesde Kumar et Jayaram (2005), avec une corrélation entre les performances dedétection de modulation temporelle et lescapacités de compréhension de mots dis-syllabiques. Ces auteurs ont également misen évidence une relation entre les scoresd’intelligibilité vocale et les seuils auditifstonals, mais seulement pour les basses fréquences (250, 500 et 1000 Hz). Cesrésultats, qui illustrent parfaitement lesrépercussions délétères de la NA/DA sur lecodage temporel des basses fréquences,mais pas sur le codage spatial des hautesfréquences, ont conduit les auteurs à consi-dérer la sensibilité auditive aux basses fré-quences comme un indicateur sûr descapacités supraliminaires de traitementtemporel (Kumar & Jayaram, 2005).

5.2. Corrélations

avec les réponses

électrophysiologiques

Deux principaux types de PEA sont classiquement décrits : les PEA exogènes,reflétant le traitement sensoriel des stimuliauditifs, et les PEA endogènes, reflétant leurtraitement cognitivo-perceptif (Mauguière& Fischer, 2007). Les deux ont été étudiésdans le cadre de la NA/DA, mais les résul-tats concernant d’éventuelles corrélationss’avèrent discordants (Kumar & Jayaram,

2005 ; Michalewski et al., 2005 ; Rance et al.,2002).

• Pour les variables psychoacoustiques

* Corrélations avec les potentiels évoquésauditifs exogènes :

Dans leur article princeps, Starr et collabo-rateurs (1991) ont distingué deux profils deréponses de leur patiente pour les PEAexogènes. Alors que les réponses auxstimuli acoustiques transitoires (PEA pré-coces, de moyenne latence et tardifs)étaient absentes, les réponses aux stimuliacoustiques continus (déflexion négativesoutenue) étaient présentes. Les auteursont relié ces résultats à la dégradation de larésolution temporelle, constatée chez leurpatiente et de manière habituelle en cas deNA/DA (Zeng et al., 2005).

De même, Michalewski et collaborateurs(2005) ont pu corréler, chez sept de leursquatorze patients (âgés de 9 à 40 ans), lesperformances de détection d’intervalles desilence au sein d’un bruit blanc continu(gap) avec la génération des PEA tardifs(ondes N100-P200) par les mêmesstimuli26. Les seuils électrophysiologiques(c’est-à-dire la durée minimale de gap géné-rant des potentiels) suivaient l’évolutiondes seuils comportementaux (c’est-à-direla durée minimale de gap détectable), maisavec une majoration allant de 0 à 10 ms27

(Michalewski et al., 2005).

* Corrélations avec les potentiels évoquésauditifs endogènes :

Outre les deux profils déjà décrits, Starr etcollaborateurs (1991) ont pu enregistrerchez leur patiente des PEA endogènes(MMN et onde P30028), mais avec des laten-ces allongées. Faits intéressants, cet allonge-ment de latence constaté en modalité auditive se retrouvait également pour une

26. Bien que présents, il faut cependant noter que les PEA tardifs avaient des latences allongées par rapport aux réponses obtenues dans un groupe de douze sujetscontrôles.

27. Ces valeurs sont à rapporter aux seuils comportementaux de détection, qui allaient de 5 à 30 ms.

28. La MMN (mismatch negativity ou négativité de discordance) correspond à une indexation automatique pré-attentionnelle. L’onde P300 (potentiel de détection et d’identification d’une cible) correspond à la fois à une réaction d’orientation attentionnelle et à un processus décisionnel.

CORRÉLATIONSENTRE LES

DIFFÉRENTESVARIABLESMESURÉES

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tâche de détection d’une cible visuelle,alors que l’omission d’un stimulus auditifgénérait une réponse de latence normale.Ces résultats suggèrent que les altérationsperceptivo-cognitives ne se limitent pas à lamodalité auditive et illustrent sur le planneurophysiologique la dichotomie entreune détérioration des capacités de discri-mination (ici, entre deux stimuli auditifs ouvisuels) et une relative préservation descapacités de détection (ici, de l’absence destimulus auditif) (Zeng et al., 1999).

• Pour les variables perceptivo-cognitives

* Corrélations avec les potentiels évoquésauditifs exogènes :

Plusieurs études ont montré que certains patients avaient une compréhen-sion de la parole subnormale, alors queleurs PEA précoces étaient fortement dés-tructurés, voire absents (Rance, 2005 ; Starret al., 1991, 1996). En d’autres termes, unfonctionnement optimal des voies nerveu-ses auditives ascendantes, ainsi qu’une par-faite synchronisation des fibres afférentesne sont pas indispensables à la compréhen-sion de la parole, au moins dans le silence(Kraus et al., 2000).

Cependant, cette « règle d’indépendance »ne semble pas s’appliquer aux PEA delatences moyennes et tardives.Ainsi, sur lesdix patients de l’étude de Starr et collabo-rateurs (1996), le seul à avoir obtenu unscore d’intelligibilité vocale subnormal(avec une moyenne de 84 %) présentait desPEA de latences moyennes et tardivesnormaux, alors qu’ils étaient absents oupathologiques pour les cinq autres patientsenregistrés.

De même, dans leur étude chez des enfantsappareillés présentant une NA/DA, Rance etcollaborateurs (2002) ont montré qu’il existait une relation étroite entre

l’amélioration des performances de compré-hension de mots dissyllabiques avec les pro-thèses auditives et la présence de PEAtardifs générés par des sons purs ou des syllabes synthétiques29. Ils ont ainsi pu définirdeux groupes aux résultats opposés : lepremier, sans PEA tardifs enregistrables, pré-sentait une intelligibilité vocale fortementdégradée malgré les prothèses auditives(score moyen à 6 %) ; le second, avec desPEA tardifs présents et subnormaux,présen-tait une très nette amélioration de l’intelligi-bilité vocale avec les prothèses auditives(score moyen à 60 %) (Rance et al., 2002).De plus, pour ce second groupe, il existait une corrélation négative entre lesscores d’intelligibilité vocale et les seuils auditifs tonals à basses et moyen-nes fréquences (500, 1000 et 2000 Hz)(Rance et al., 2002). Les auteurs reliaient cesdeux profils à des atteintes distinctes, prédo-minant sur le versant central neuronal pourle premier groupe et sur le versant périphé-rique neurosensoriel pour le secondgroupe30.

De manière discordante, deux autresétudes n’ont pas retrouvé de relation claireentre les PEA tardifs et les performancesd’intelligibilité vocale, ni pour leurs caracté-ristiques d’amplitude ou de latence (Kumaret Jayaram, 2005), ni pour leur présence ouabsence (Michalewski et al., 2005). Ces der-niers résultats suggèrent que la relationentre PEA tardifs et compréhension de laparole reste inconstante et que, lorsqu’elleexiste, elle s’exprime surtout sur un modebinaire « présence-absence ».

* Corrélations avec les potentiels évoquésauditifs endogènes :

Les quelques résultats expérimentauxdisponibles sont assez divergents. D’uncôté, Kraus et collaborateurs (2000) ontmontré qu’il existait chez la patiente IT unerelation étroite entre les performances de

discrimination phonémique et la générationd’une négativité de discordance pour lescontrastes formantiques. En effet, la discri-mination du continuum vocalique /ba-wa/était bonne et générait une négativité dediscordance normale, alors que la discrimi-nation du continuum /da-ga/ était altéré etne générait pas de négativité de discordan-ce. De l’autre, Kumar et Jayaram (2005) ontmontré, chez cinq des neuf patients quiprésentaient des réponses évoquées auditi-ves, qu’il pouvait exister une MMN généréepar des contrastes formantiques, alorsmême que ces contrastes n’étaient pas discriminés sur le plan comportemental(comme pour les cinq patients sans MMN).Ce résultat est en faveur d’une relative dis-sociation entre les PEA endogènes et lescapacités perceptives, chez les patients pré-sentant une NA/DA (Kumar & Jayaram,2005).

• « Doubles corrélations »

Quelques rares études ont mis en évidence des « doubles corrélations »entre les variables psychoacoustiques ouperceptivo-cognitives et les variablesélectrophysiologiques. Ainsi, l’enfant évalué par Kaga et collaborateurs (2002)montrait : d’une part, une audiométrietonale subnormale, « corrélée » à la présence d’une négativité de discordanceet d’une onde P300 générées par des bouf-fées tonales ; d’autre part, une audiométrievocale dégradée, « corrélée » à l’absencede négativité de discordance et d’ondeP300 générées par des sons verbaux. Cesrésultats sont intéressants, dans la mesureoù ils montrent que la relative conservationou la dégradation de la perception auditiveselon le type de stimulus concernent à lafois les processus automatiques (MMN) etles processus conscients ou volontaires(onde P300) (Kaga et al., 2002).

29. Par contre, il n’y avait aucune relation entre la présence des PEA tardifs et les résultats des OEA ou de l’électrocochléographie.

30. Cette classification est à rapprocher de celle de Starr et collaborateurs (2004), qui distinguent la neuropathie auditive proximale (ou de type I), correspondant à uneatteinte des fibres auditives afférentes, et la neuropathie auditive distale (ou de type II), correspondant à une atteinte périphérique au niveau des cellules ciliées internes oude leurs synapses avec les dendrites terminales des fibres auditives afférentes.

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5.3. Rôle des modifications

centrales

La persistance de réponses évoquées audi-tives corticales, alors même que les PEAprécoces sont absents, suggèrent l’existen-ce de modifications centrales survenant aucours de la NA/DA (Purdy et al., 2001).

• Plasticité cérébrale

La présence inconstante de PEA endogè-nes, ainsi que leur relation avec les capacités de perception auditive, sont enfaveur d’un phénomène de plasticité céré-brale qui pourrait survenir chez certainspatients.Ainsi, la relative normalité des PEAendogènes et de la discrimination percepti-ve pour certains stimuli acoustiques, alorsmême que le message afférent est dégradé,pourrait être liée à un mécanisme de réor-ganisation neuronale permettant de com-penser au niveau cortical l’informationmanquante en provenance de la périphérie(Kraus et al., 2000). Cela pourrait être lecas, par exemple, pour le continuum voca-lique /ba-wa/ étudié chez la patiente IT(Kraus et al., 2000). Dans un modèle animal de neuropathie auditive par atteinte neuro-sensorielle, Salvi et collaborateurs (1999)ont constaté une augmentation de l’excita-bilité du cortex auditif, malgré la diminutiondes entrées périphériques. Ce phénomènepourrait être le reflet d’une « amplificationcorticale » par augmentation du gain fonc-tionnel31 (Qiu et al., 2000).

• Effet attentionnel

Dans leur étude combinant mesurespsychoacoustiques et électrophysiolo-giques, Michalewski et collaborateurs(2005) ont identifié quatre patients pourlesquels les PEA tardifs générés par des intervalles de silence étaient absents en condition passive d’écoute, mais apparaissaient pendant une tâche de détec-

Les caractéristiques particulières dudéficit perceptivo-cognitif des patientsprésentant une NA/DA, ainsi que leurvariabilité interindividuelle, devraientinciter les audiologistes à la vigilanceavant de poser l’indication d’une prise encharge audioprothétique, que ce soit pardes aides auditives externes ou par desimplants cochléaires.

6.1. Aides auditives

externes

L’usage d’aides auditives externes reste

31. On peut rapprocher ce processus de l’effet d’acclimatation auditive décrit chez les sujets malentendants avec atteinte endocochléaire et appareillage auditif monaural(Arlinger et al., 1996).

32. Chez le sujet normal, cet effet correspond à une amplification de l’onde N100 induite par les processus attentionnels.

CONSÉQUENCESPOUR LA PRISE

EN CHARGEAUDIOPROTHÉ-

TIQUE DESPATIENTS AVEC

NA/DA

6

tion, avec des seuils électrophysiologiquesglobalement superposables aux seuils com-portementaux. Les potentiels corticauxenregistrés dans cette condition d’écouteactive pourraient s’apparenter au potentielvertex lié à l’attention (ou « effet N1 »32).Quant aux mécanismes sous-jacents, deuxinterprétations sont envisageables. D’unepart, l’implication de processus auditifs corticaux, susceptibles de compenser la désafférentation périphérique « fonction-nelle », pourrait permette l’émergenced’une réponse électrophysiologique(Michalewski et al., 2005). D’autre part, l’ac-tivation de voies auditives corticofuges des-cendantes, susceptibles de moduler le fonc-tionnement périphérique auditif via lesystème efférent olivocochléaire, pourraitaméliorer le « gain » de la transmissionneurale et/ou favoriser la resynchronisationdu message neural afférent (Giard et al.,1994).

• Hypothèse alternative

La dissociation entre PEA précoces et corticaux pourrait être liée aux modali-tés différentielles de production de cesdeux types de réponses, au niveau des sys-tèmes auditifs périphérique et central.D’une part, les PEA précoces reflètent l’ac-tivité axonale rapide et synchronisée ainsique la quantité d’influx nerveux cheminantle long des voies auditives afférentes ;d’autre part, les PEA corticaux reflètentl’activité post-synaptique lentes des neuro-nes du cortex auditif (Rance et al., 2002).Sur le plan fonctionnel, cela signifie queleurs constantes de temps respectives,donc leur « résolution temporelle », sontdifférentes : de l’ordre d’un dixième demilliseconde pour les PEA précoces etd’une dizaine de millisecondes pour les PEAcorticaux (Kraus et al., 2000). La principaleconséquence est que les PEA corticauxsont beaucoup moins sensibles à la désyn-chronisation du message afférent que les

PEA précoces (Rance, 2005), expliquant ladissociation entre ces deux types deréponses chez les patients avec NA/DA. La« pseudo-resynchronisation » des réponsesélectrophysiologiques corticales seraitdonc liée aux propriétés intrinsèques dusystème auditif central, et non à des phéno-mènes de réorganisation plastique induitspar la privation auditive ou la désynchroni-sation. De ce point de vue, l’absence dePEA corticaux, ainsi que la détériorationdes performances perceptives, pourraientêtre liées à une dégradation du messageafférent périphérique dépassant les capaci-tés de « pseudo-resynchronisation » et lesconditions minimales de fonctionnementdu système auditif central cortical. Celapourrait être le cas, par exemple, pour lecontinuum vocalique /da-ga/ évalué chez lapatiente IT (Kraus et al., 2000).

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controversé (Rance, 2005). Dans lemeilleur des cas, seulement la moitié despatients appareillés par des prothèsesauditives conventionnelles en tirentbénéfice (Rapin & Gravel, 2003). Rance et collaborateurs (2002) ont ainsimontré que huit des quinze enfantstestés bénéficiaient de leur appareillageauditif bilatéral, avec une augmentationde plus de cinquante points du scoremoyen d’intelligibilité vocale, qui passaitde 8 à 60 %. Cette amélioration relativepourrait être liée au recrutement de neurones auditifs résiduels par l’amplification, permettant d’augmenterla synchronisation neuronale (Rance etal., 2002). Mais ce « rendement » moyeninterpelle également et incite à laréflexion. Face à la dégradation des capacités de codage des stimuli, induitepar la désynchronisation auditive et/ou laréduction des entrées neuronales,il serait nécessaire non seulement d’améliorer le réglage des aides auditi-ves, mais surtout de concevoir des algo-rithmes de traitement du signal acous-tique qui augmentent leur efficacité.

En se basant sur le profil psychoacous-tique déficitaire des patients avecNA/DA, Zeng et collaborateurs ontproposé deux adaptations : l’utilisationd’un filtre passe-haut et le développe-ment d’un algorithme d’expansion d’en-veloppe (Zeng et al., 2005 ; Zeng & Liu,2006). D’une part, le filtre passe-hautpermettrait d’éliminer les basses fréquences, mal discriminées et poten-tiellement masquantes, en limitant l’am-plification aux composantes de hautefréquence, beaucoup mieux discriminées(Zeng et al., 2005). Une approche compa-rable consisterait à transposer les bassesfréquences vers les hautes fréquences(Rance, 2005). D’autre part, un algorith-me d’expansion d’enveloppe permettraitd’amplifier les modulations temporellesd’amplitude pour les sons verbaux, en se

rapprochant des caractéristiques acous-tiques de la parole « éclaircie »33 (Zeng &Liu, 2006). Une approche complémentai-re consisterait en un algorithme d’expan-sion temporelle allongeant la durée dessignaux de parole, pour faciliter la per-ception des indices temporels (Rance,2005).

6.2. Implants cochléaires

L’utilisation d’implants cochléaires estune alternative à l’appareillage auditifconventionnel, lorsque ce dernier s’avèreinefficace ou lorsque les patients présen-tent une perte auditive sévère (Maddenet al., 2002 ; Rance, 2005). Plusieursétudes ont déjà montré le bénéficepotentiel des implants cochléaires, tantsur le plan perceptif qu’électrophysiolo-gique.

Chez les sept patients qui avaient bénéfi-cié d’une implantation cochléaire (unila-térale pour six d’entre eux et bilatéralepour le dernier), Zeng et Liu (2006) ontmontré que le gain d’intelligibilitémonaurale avec le langage « éclairci »était plus important pour la stimulationélectrique que pour la stimulation acous-tique, dans le silence comme dans lebruit. En condition binaurale, un gaind’intelligibilité, par rapport à une stimula-tion acoustique diotique, était égalementobtenu avec une stimulation combinantstimulation acoustique d’un côté et stimulation électrique de l’autre, maisuniquement dans le silence (Zeng & Liu, 2006). Ce résultat montre que lesdifficultés d’intelligibilité binaurale enmilieu bruité persistent malgré l’implan-tation cochléaire unilatérale. Dans uneautre étude, Starr et collaborateurs(2004) ont testé soixante-douzemembres d’une même famille (répartissur sept générations), qui souffraientd’une forme héréditaire autosomique

dominante de NA/DA. Chez trois de ces patients, les auteurs ont montré une relation étroite entre l’« efficacitéélectrophysiologique » de l’implantcochléaire et l’amélioration des capacitésperceptives auditives. Ainsi, la restaura-tion des PEA précoces évoqués électri-quement et la normalisation de la latencedes réponses corticales étaient-ellescorrélées à l’amélioration des perfor-mances auditives, aussi bien pour ladétection d’intervalles de silence quepour la reconnaissance de phrases, avecune intelligibilité vocale passant de 0 % àenviron 60 %34 (Starr et al., 2004).

L’implantation cochléaire, grâce à une sti-mulation électrique supraphysiologiquedes fibres auditives afférentes, pourraitdonc restaurer la synchronisation neuro-nale. Par ce biais, elle pourrait compen-ser les troubles de la perception auditi-ve, notamment ceux liés à la dégradationdu codage temporel (Santarelli et al.,2006). Du fait de l’allongement des constantes de temps du système auditifcentral lié à la pathologie, il serait préférable d’utiliser des stimulationsélectriques lentes, plus facilement intégrables (Peterson et al., 2003). Parcontre, il faudrait proscrire les stimula-tions électriques rapides, susceptiblesd’avoir un effet paradoxal de fatigue nerveuse (ou de bloc de conduction) les rendant inefficaces (Stephanova &Daskalova, 2004). Sur le plan diagnos-tique, l’utilisation des implants cochléai-res pourrait permettre de différencierles deux principaux mécanismes de neuropathie auditive, à savoir la désynchronisation auditive et la réduc-tion des entrées neuronales.

33. Il faudrait par contre proscrire les algorithmes de compression non-linéaire d’amplitude (Rance, 2005 ; Zeng & Liu, 2006).

34. Ce bénéfice semblerait plus important pour les patients présentant une neuropathie auditive distale (ou de type II), pour laquelle il existe une relative préservation descellules ganglionnaires et de leurs axones (Starr et al., 2004).

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BIBLIOGRAPHIEGÉNÉRALE

Les tests psychoacoustiques utilisés chezles patients ayant une NA/DA sontindispensables à l’évaluation précise destroubles perceptivo-cognitifs induits parcette pathologie. Cette assertion est d’au-tant plus vraie qu’il existe une grande varia-bilité interindividuelle et que les résultatsobtenus sont en grande partie corrélés auxperformances d’intelligibilité de la parole,contrairement aux techniques électro-physiologiques.

Outre une avancée scientifique dans la compréhension des mécanismes neuro-physiologiques de la perception de laparole, et au-delà de son intérêt nosologique, la caractérisation du profildéficitaire perceptivo-cognitif de la NA/DApourrait avoir trois applications intéressan-tes (Oertel, 2005) :

- d’abord, pour orienter la prise en chargeet le traitement « fonctionnel » de cettepathologie ;

- ensuite, pour améliorer l’efficacité de l’adaptation audioprothétique, dans cecontexte particulier ;

- enfin, pour développer des paradigmes dedétection automatique de la parole.

Une question non encore résolue à ce jour,qui pourrait bénéficier d’une approche enimagerie cérébrale fonctionnelle, porte surla participation des phénomènes de plasti-cité dans l’expression du profil perceptivo-cognitif de la NA/DA.

CONCLUSION

7

L’auteur tient à remercier le DocteurJean-Louis Collette, pour son aide à l’actualisation de la bibliographie et poursa « patience éditoriale », ainsi que le Professeur Paul Deltenre pour sescommentaires constructifs.

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BIBLIOGRAPHIESÉLECTIONNÉE

Tests psychoacoustiques Résultats Mécanismes pathogéniques

Discrimination fréquentielle

À basses et moyennes

fréquences (< 4 kHz)Pathologique DA

À hautes fréquences (8 kHz) Normale (ou subnormale)

Résolution temporelleDétection d’un gap Pathologique (allongement) DA > RE

FTMT Pathologique (à taux élevés) DA > RE

Discrimination verbale Pathologique (diminuée) DA > RE

Détection d’un signal en milieu bruitéPathologique (rapport S/B

optimal non-linéaire)RE

Tableau 1 : Résultats des principaux tests psychoacoustiques réalisés dans la neuropathie auditive / désynchronisation auditive

et mécanismes pathogéniques sous-jacents.

DA : désynchronisation auditive, FTMT : fonction de transfert de modulation temporelle, gap : intervalle de silence entre deux sons, RE :

réduction des entrées neuronales, S/B : signal/bruit. (D’après Rance, 2005 & Starr et al., 2003)

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

( Dossier

28

CHAPITRE XI :DIFFÉRENCES ENTRE LES DIAGNOSTICS DENEUROPATHIE AUDITIVE/ DÉSYNCHRONISATIONAUDITIVE ET DE TROUBLES (CENTRAUX) DUTRAITEMENT DE L’AUDITION

RÉSUMÉ

INTRODUCTION

ABSTRACT

Thierry MORLET

Center for Pediatric Audiology

and Speech Sciences

A.I. DuPont Hospital for Children

Wilmington, DE USA

E-mail: [email protected]

Le tableau de la Neuropathie Auditive/Désynchronisation Auditive peut dans certains cas présenter des similitudes aveccelui des Troubles (Centraux) duTraitement de l’Audition, en particulierpour les cas présentant une discriminationeffondrée dans le bruit alors que la com-préhension reste à peu près correcte dansle silence.

Un bilan audiométrique objectif classiquecomprenant l’étude des RéflexesStapédiens, des Oto-Emissions Acous-tiques Provoquées (ou mieux encore duPotentiel Microphonique Cochléaire), desPotentiels Evoqués Auditifs Précoces, per-mettra assez facilement de différencier cesdeux entités, permettant ainsi d’envisagerune prise en charge adéquate.

The similarities between normal or close tonormal speech abilities in quiet but not in noisein some children with auditory neuropathy/dys-synchrony and children with (central) auditoryprocessing disorders can make differential dia-gnosis a challenge for these children.A compre-

hensive test battery, including tympanometry,acoustic reflexes, otoacoustic emissions, andauditory brainstem response will however allowto determine the appropriate diagnosis andmanagement.

En raison de l’existence de quelques simili-tudes frappantes entre certains sujetsatteints de Neuropathie Auditive/Désynchronisation Auditive (NA/DA) d’unepart et de Troubles Centraux du Traitementde l’Audition (TCTA) d’autre part, il nous asemblé judicieux de dresser un bref tableaucomparatif des deux entités afin de pouvoirmieux les différencier.

Caractéristiques Auditives

de patients atteints de

NA/DA

Certains patients atteints de NA/DA ontpeu, voire pas de perception consciente dessons alors que d’autres semblent présenterune audition normale à la notable excep-tion d’importantes difficultés de compré-hension dans un environnement bruyant.Zeng (1999) a montré que chez despatients atteints de NA/DA, la compréhen-sion médiocre de la parole est due à desperturbations sévères des capacités du

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traitement temporel. A la différence de laforme habituelle de surdité permanentecausée par une perte des cellules ciliéesexternes de la cochlée, les PEAP et l’audio-gramme ne fournissent pas au clinicien d’informations relatives à la sévérité de ladégradation de traitement du son (et doncdu langage) dans les NA/DA. Les niveauxauditifs sur l’audiogramme peuvent s’éche-lonner d’audition normale à surdité pro-fonde (Berlin, 2003a). Ces seuils indiquentle niveau de perception consciente dessons mais non la sévérité des problèmestemporels du patient.

Environ 7% des enfants atteints de NA/DAvont développer normalement leur langageet commencent à parler entre 1 an et 18 mois (Berlin,2003b), malgré leurs PEAPanormaux.Une majorité d’entre eux va pré-senter une audition normale dans un envi-ronnement silencieux mais présentera denombreuses perturbations dans la compré-hension de la parole en présence d’un bruitde fond. On peut souvent étiqueter à tortces enfants comme présentant des TCTA.

Troubles (Centraux) du

Traitement Auditif (TCTA)

Les TCTA peuvent être grossièrementdéfinis comme un déficit dans le traitementde l’information spécifique de la modalitéauditive malgré une sensibilité auditive auxsons purs normale (Jerger et Musiek,2000). Les TCTA peuvent se manifestercomme un déficit dans la localisationsonore, la discrimination, les reconnaissan-ces de configuration, le traitement tempo-

rel et de mauvaises performances en pré-sence d’un signal dégradé ou en compéti-tion avec un autre (ASHA, 1996).

Approximativement 5% des enfants d’âgescolaire présentent l’une ou l’autre de cesformes de TCTA (Musiek, 1990). Les TCTAsont souvent associés avec d’autres pertur-bations de l’écoute et de l’apprentissagecomme le retard de langage ou la dyslexie.Les TCTA peuvent aussi être associés dansquelques cas avec des pathologies neurolo-giques, comme des tumeurs, un retard dematuration des voies auditives centrales,ainsi que des anomalies du développement(Bamiou,2001).

Comparaison de la NA/DA et

des TCTA

Une caractéristique majeure d’un TCTA estl’impossibilité pour un enfant par ailleursnormo-entendant d’un point de vue strictement audiométrique de bienentendre en présence de différents interlo-cuteurs ou de bruit de fond (Bellis,1996 ;Chermak,1999 ; Bamiou, 2001 ; Chermak,2002 ; Muchnik, 2004). De façon intéressan-te, certains enfants atteints d’une NA/DAprésentent un comportement auditif simi-laire à celui des enfants atteints de TCTA,chez lesquels existe un développement àpeu près satisfaisant de la parole et dulangage, une compréhension correcte de laparole dans le calme alors qu’apparaissentdes difficultés à comprendre le langage dansun environnement bruyant. Ainsi, les deuxcatégories d’enfants vont partager le para-doxe de présenter, malgré un audiogramme

29

tonal, des Oto-Emissions AcoustiquesProvoquées (OEAP) et des scores de discrimination dans le silence normaux,une discrimination effondrée dans le bruit.

Bien que les deux pathologies partagent lescaractéristiques mentionnées ci-dessus, onne retrouvera pas dans la majorité des caschez les enfants atteints de NA/DA deréflexes stapédiens (RS) (dans de rares cas,les RS seront présents, mais les seuilsseront plus élevés) ; les réponses aux PEAPseront absentes ou anormales. En revanchechez les enfants atteints de TCTA, on observera des RS et des PEAP en réponseà des clics normaux. Il est donc importantd’inclure l’étude des RS pour tous lesenfants suspectés de présenter des TCTA.Si les RS sont absents ou de seuils élevés,une étude des PEAP utilisant les deux polarités de clics devra être pratiquée pouréliminer une NA/DA.

Les enfants présentant une NA/DA quisont capables de développer une parole etun langage sans intervention spécifique nereprésentent pas la majorité des cas et ledépistage précoce de l’entité est donc jus-tifié. Cependant de nombreux programmesde dépistage de la surdité sont toujoursbasés sur les OEAP (c’est encore le cas auxUSA dans de nombreuses maternités). Celasignifie que la majorité des enfants présen-tant une NA/DA ne seront pas identifiés etinclus dans le suivi du dépistage néo-natal.Et parmi ceux-ci se trouveront ceux quin’ont aucune conscience auditive et ceuxqui ne peuvent développer ni parole nilangage par eux même sans une interven-tion extérieure spécifique.

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

Dossier )

Tympanogramme

Réflexe Stapédien

OEA

PEAP

Seuil aux sons purs

Reconnaissance Vocale (dans le silence)

Reconnaissance Vocale (dans le bruit)

NA/DA

Normal

Anormal ou Absent

Présentes ou Absentes

Anormaux ou Absents

Normal à Sévère/profond

Excellente à Médiocre

Médiocre

TCTA

Normal

Présent

Présentes

Normaux

Normal

Excellente

Bonne à Médiocre

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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( Dossier

Ces enfants finiront par être adressés pourcontrôles ultérieurs une fois qu’il seradevenu apparent aux parents et/ou aupédiatre qu’il existe un problème auditif.Dans ce scénario, on risque d’ignorerpendant longtemps les enfants qui ne montrent pas de retard notable dans lespremières années de vie. Certains d’entreeux seront plus tard diagnostiqués à tortcomme atteints d’un TCTA (ou un autretype de difficulté d’apprentissage) si l’évaluation auditive n’inclut que les audio-métries tonale, vocale dans le silence etl’étude de la mesure des OEA. C’est pour-quoi un tri pré-audiométrie comprenanttympanométrie, étude des RS et des OEAest fortement recommandé pour tous lesenfants vus en consultation (Berlin, 2003a).

D’une manière générale, le tri pré-audio-métrie est d’ailleurs recommandé pourtous les nouveaux patients vus en consulta-tion, quelque soit leur âge. La connaissancede la NA/DA étant récente, elle reste nonidentifiée chez de nombreux enfants,adolescents et adultes.

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RÉFÉRENCES

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Dossier )

CHAPITRE XII :NEUROPATHIE AUDITIVE / DÉSYNCHRONISATIONAUDITIVE ET APPAREILLAGE

RÉSUMÉ

RÉSUMÉ

Eric BIZAGUET

Laboratoire de Correction

Auditive - Dyapason

20 rue Thérèse F-75001 Paris

E-mail : [email protected]

L’utilisation de plus en plus systématiquedes épreuves d’audiométrie objectivepermet de mieux comprendre les difficul-tés post-appareillage de certains patientset d’en adapter la prise en charge.Pathologie méconnue, la NeuropathieAuditive/ Désynchronisation Auditive(NA/DA) apparue récemment dans les dia-gnostics médicaux implique une démarched’appareillage différente. En effet, NA/DAest à la base de désordres psychoacous-tiques qui ne peuvent être traités de façonclassique où l’amplification n’améliore pasforcément les scores d’intelligibilité et peutmême être perturbante en milieu bruyant,d’où l’intérêt de privilégier certaines zonesde qualité ainsi que les techniques direc-tionnelles de captation. Dans cette patho-logie, les règles de choix prothétique etd’amplification sont à définir en fonctiondu contexte clinique, audiométrique ; l’ob-tention des premiers résultats de l’expéri-mentation en milieu social prend ici uneimportance toute particulière.

The increasingly systematic use of objectiveaudiometry techniques allows a better unders-tanding of the difficulties experienced byseveral patients after hearing aid fitting. Once

these difficulties are understood the fittingparameters and rehabilitation strategy can beindividually adapted and improved. Among thecauses of such difficulties,Auditory Neuropathy/ Auditory Dyssynchrony is a recently describedand relatively ill-known entity which implies adifferent management approach when pros-thetic aids are considered.Auditory Neuropathy/ Auditory Dyssynchrony causes specific psycho-acoustic defects which cannot be managed ina classical way: amplification does not necessa-rily improves intelligibility scores and can evenbe detrimental in noisy surroundings.This leadsto a strategy emphasizing certain frequencyregions in which distortion is less severe as wellas directional methods of sound capture. In thisentity, the rules for prosthetic aid choice andfitting must be defined according to the clinicaland audiometric context and must heavily relyon the first results of real life experience insocial and everyday environments.

La définition de la Neuropathie Auditive /Désynchronisation Auditive (NA/DA) estbasée sur des mesures physiologiquesobjectives explorant la fonction desCellules Ciliées Externes (CCE), du nerfcochléaire et des voies auditives centralesdu tronc cérébral. Il est à noter que parmiles 20 000 patients suivis par le laboratoire,seulement 4 sont officiellement étiquetésNA/DA.

INTRODUCTION

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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( Dossier

La connaissance dans le monde audiopro-thétique de cette cause de perte auditiveest récente et les articles concernant l’ap-pareillage auditif de ce type de surdité sontpratiquement inexistants. Seuls quelquesparagraphes citent la particularité de l’a-daptation prothétique de ce type de patho-logie, indiquant d’ailleurs une interrogationsur l’intérêt de l’appareillage dans ce cadre.

Pourtant, en regardant l’épidémiologie decette pathologie, certains patients atteintsde NA/DA ont forcément été pris encharge comme des patients atteints desurdité endo-cochléaire classique. Repartirvers le passé lors d’une étude rétrospecti-ve en ayant la connaissance du problèmeserait particulièrement intéressant etconfirmerait sans doute que l’appareillageauditif ne correspond évidemment pas àdes règles strictes de calculs mathéma-tiques méthodologiques, mais est un pro-cessus itératif intégrant les premiers résul-tats obtenus dans des modifications succes-sives. L’appareillage d’une NA/DA répondencore davantage à cette notion d’interac-tivité et d’évolutivité des gains prothétiquesen fonction du ressenti subjectif du patient,des résultats relevés en audiométrie tonaleet vocale, mais également de l’utilisationconstatée en milieu social.

Tout simplement parce que la base d’audio-métrie objective nécessaire à l’étiquetagediagnostique est rarement réalisée endehors de l’appareillage du jeune enfant oudu nourrisson.

La définition précise de la NA/DA cor-respond à une persistance des Oto-Emissions Provoquées (OEAP) et/ou duPotentiel Microphonique Cochléaire avec

une abolition ou altération majeure desPotentiels Evoqués Auditifs Précoces(PEAP) incluant l’onde I. Cette discordanceest en faveur d’une conservation initialedes CCE, le site lésionnel pouvant cor-respondre à l’atteinte sélective des CellulesCiliées Internes (CCI) (Amatuzzi et al2001), à’un dysfonctionnement synaptiquearticulant les CCI au nerf auditif (Yasanugaet al 1999) ou à’une atteinte du nerf auditifproprement dit.

Or, peu de nos patients arrivent avec cestests objectifs réalisés. Devrait-on passer àl’extrême inverse où tous les patientsauraient été complètement investigués ?Oui, en généralisant certaines valeurs deprévalence parmi les patients atteints desurdité chronique comme les 4 % deMadden et al en 2002 ou encore les 11 %de Rance et al en 1999. Non, en avalisantdes valeurs faibles comme celle de l’étudeépidémiologique rétrospective de Kumaren 2006 sur 21000 patients qui donne uneprévalence de NA/DA chez les patientsconsultants pour une atteinte auditive deperception permanente de 0,54 %.L’absence de tests systématiques devraitcependant conduire à moyen terme à véri-fier ces éléments dans le cadre d’uncortège de présomptions, au premier lieudesquelles l’existence d’une discordancetonale vocale importante.

La perte auditive, allant de légère à profon-de, est souvent plate ou ascendante sur lesfréquences aigues (Kumar et Jarayam2006). Cette forme de courbe, qui repré-sente un faible pourcentage des déficiencesauditives endocochléaires classiques (pres-byacousie, traumatisme sonore, oto-toxici-

té, anoxie, …) dans lesquelles la perte estplus marquée sur les fréquences aiguës, sedifférencie également du fait qu’existeconjointement une conservation des CCEqui sont dans les pathologies classiques lescellules en général les plus atteintes du faitde leur fragilité. Ces différences neuro-physiologiques de départ devraient doncconduire à une vision de la réhabilitationprothétique différente, et donc à une adap-tation particulière de la prise en chargedans le cadre d’une NA/DA.

La surdité est souvent évolutive sans qu’il yait de règle connue, et chez l’enfant desfluctuations seraient fréquentes. On noted’ailleurs une aggravation de la perte audi-tive sans appareillage et également chezcertains une disparition dans le temps desOEAP qui étaient présentes au moment dudépistage. Ce fait doit être pris en comptecar la sur-correction éventuelle par unappareillage peut évidemment créer untraumatisme sonore susceptible d’aggraverla perte auditive. Ce qui conduira l’audio-prothésiste à choisir des niveaux de com-pression et d’écrêtage en adéquation avecl’absence de traumatisme.

Il existe une gêne majeure en milieubruyant et pour certains une atteinte enmilieu silencieux plus ou moins importante.Pour Starr et al en 1998 et en 2000, la com-préhension en milieu silencieux resteraitcependant correcte. La différence parrapport à une surdité classique serait de +3à +15 dB d’après Kraus et al en 2000. Cettemajoration du déficit dans un rapportsignal/ bruit défavorable doit conduire àune interrogation sur les techniques capa-bles de magnifier la parole dans le bruit.

De même, l’une des caractéristiques de laNA / DA est une discordance entre latonale et la vocale. Dans le cas d’unesurdité légère à sévère, la règle est deretrouver pour une surdité de perceptionclassique le seuil d’intelligibilité en liste dis-syllabique à un niveau corrélé à l’importan-ce de la perte auditive tonale ( seuil d’intel-ligibilité = Moyenne des pertes auditivessur les 500-1000-2000 Hz + 10 dB ) . Dansla NA/DA, la fourchette de discordance estplus importante car on retrouve dans la lit-térature des pertes auditives tonales com-

POURQUOI CETTEMÉCONNAISSANCE

DE LA NA/DA DANS L’ACTE

PROTHÉTIQUE ?

1 ÉLÉMENTS ENFAVEUR D’UNE

NA/DA AUNIVEAU DE

L’AUDIOMÉTRIEPROTHÉTIQUE

2

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Dossier )

prises entre 30 et 40 dB HL et une absencetotale d’intelligibilité. Si le seuil d’intelligibi-lité est retrouvé à une intensité différentede plus de 10 dB par rapport au calculmathématique, et que la présence de bruitperturbant fait s’écrouler la compréhen-sion, on doit se poser la question de l’exis-tence d’une NA/DA.

L’atteinte du nerf ou des CCI entraîne unesaturation des CCI, des synapses ou desfibres nerveuses, ce qui devrait créer unemodification de la dynamique subjective,mais aussi une abolition des réflexes stapé-diens. La mesure habituelle des seuils deconfort et d’inconfort est donc à prendreen compte avec prudence, et ce d’autantplus que l’existence d’un traumatismesonore lié à l’amplification est toujourspossible.

Il existe également une anomalie sur lefonctionnement des fibres efférentes auditi-ves. La preuve de cette anomalie est appor-tée entre autres par l’analyse de la boucleolivaire médiane en mesurant l’amplitudede l’effet suppresseur controlatéral desOEAP en fonction de l’intensité d’un signalde bruit blanc administré dans l’oreillecontrolatérale (Collet et al 1990). Cetteanomalie d’activation des voies efférentescontribuerait à expliquer les mauvaisesperformances des patients avec NA/DApour la détection d’un son pur dans le bruit(Kraus et al., 2000). Rappelons que le rôledes fibres efférentes olivocochléairesmédianes est d’améliorer le rapportsignal/bruit (Micheyl et al., 1995 ; Micheyl etCollet, 1996 ; Micheyl et al., 1997 ; Giraudet al., 1997 ; Kumar et Vanaja, 2004). Dupoint de vue de la recherche, ce dysfonc-tionnement peut être analysé en utilisantdes droites de régression sur l’amplitudedes OEAP, mais cette recherche semble dif-ficile actuellement dans un bilan général.On pourrait cependant tenter de l’analyseren effectuant un test vocal avec présenta-tion d’un signal de bruit blanc sur l’oreillecontrolatérale.

Tout simplement parce que le rôle del’audioprothésiste est de rechercher lemeilleur rapport confort – résultatspour améliorer de façon optimale lesbesoins et conditions de vie du patient.Donc, savoir qu’il s’agit d’une NA/ DApeut expliquer un résultat vocal insuffi-sant et permettre d’orienter la démarcheprothétique vers la recherche d’un com-promis différent.

Au départ, l’étiquetage NA/DA n’étantpas toujours réalisé par absence d’audio-métrie objective complète, (cetteabsence de diagnostic étant constantechez l’adulte), on ne peut que partir del’audiométrie tonale et vocale vers unappareillage classique, l’adaptation auxparticularités de la surdité à traiter nevenant qu’après les premières étapesd’appareillage. On doit donc partir desrègles d’appareillage classique qui sontles suivantes :

Placer le niveau de la voix moyenne aumilieu de la dynamique résiduelle dusourd ou au niveau de sa zone deconfort, ce qui devrait correspondred’un point de vue habituel au niveau demeilleure qualité d’analyse temporelle etfréquentielle de la fonction auditive.

Cela n’est malheureusement pas tou-jours aussi simple et le simple transfertpar le gain de l’appareil dans cette zonereste parfois insuffisant pour obtenir lasatisfaction du patient. On peut égale-ment poser le problème d’une autrefaçon en recherchant par correction suc-cessive le gain correspondant au meilleurrapport résultats/ confort en fonction

des besoins et demandes du patient.

Par ailleurs, le niveau de sortie maximumdoit être choisi de façon à ne pas dépas-ser le niveau d’inconfort de façon àéviter tout risque traumatique.

En cas de discordance importante entrela tonale et la vocale, l’audioprothésistepeut estimer être en présence d’uneNA/DA avec un doute plus accentué encas de présence de dégradation de l’é-preuve vocale en milieu bruyant.

2 solutions peuvent alors exister si lediagnostic n’a pas été fait initialement :

La plus rationnelle d’un point de vueintellectuel serait de renvoyer le patientchez l’ORL pour que des épreuves com-plémentaires soient réalisées.

La plus simple serait de se mettre dansune position où la NA/DA supposéeexiste et réaliser un appareillage entenant compte de cette difficulté.

Encore peut-on se poser la question desavoir si le fait que la surdité à appa-reiller soit une NA/DA modifie les règleshabituelles d’appareillage ?

Dans le cadre d’une adaptation prothétiqueclassique, la détermination du gain se faitdans une première étape en utilisant uneméthodologie d’appareillage comme le Pré-réglage de Xavier Renard ou la méthodeCTM mise au point par François Le Her.Ces méthodes utilisent les valeurs relevéesdu seuil d’audition, mais aussi les seuilssupraliminaires de confort et d’inconfort.

À partir du contrôle d’efficacité immédiateffectué dès la mise en place de ce gain, onpeut modifier les paramètres acoustiques

DIFFÉRENCESENTRE APPA-

REILLAGE D’UNESURDITÉ ENDO-COCHLÉAIRE ET

D’UNE NA/DA

4

POURQUOI DOIT-ONSE POSER LA

QUESTION DE SAVOIRSI LA PATHOLOGIE EST

UNE NA/DA DANS LE CADRE D’UNAPPAREILLAGE ET QUEDOIT-ON FAIRE DANS

CE CAS ?

3

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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( Dossier

de la prothèse auditive en fonction desbesoins et demandes du patient. L’essai enmilieu social présente ici un grand avantagecar l’appareillage nécessite une évolutivitédes réglages en fonction de nombreuxparamètres dépendant de l’ancienneté de lasurdité, des facultés d’adaptation dupatient, de ses besoins, de son comporte-ment psychologique,etc…

On voit dans cette énumération que latechnique de calcul mathématique est uneétape de l’appareillage et que celui-ci sebase ensuite sur l’interactivité entre lesdonnées fournies par le patient à partir deson sentiment subjectif et des résultats del’essai en vie sociale et les corrections réali-sées par l’audioprothésiste à partir de latraduction en technique des desiderataexprimés par le déficient auditif appareillé.

Cette démarche évolutive et adaptative estparticulièrement adaptée à la NA/DA. Eneffet, les difficultés liées à l’aspect neuro-physiologique de la surdité font apparaîtrequatre difficultés majeures :

4.1 Le résultat vocal

insuffisant avec et sans

appareils entraîne une

difficulté résiduelle de

vie sociale et ne peut

donc correspondre au

compromis confort/

résultats désiré par

l’appareillé

L’interactivité nécessaire à toute démarched’appareillage oblige alors l’audioprothésis-te à la recherche d’un compromis différentet donc à une modification des réglagesjusqu’à l’obtention d’un compromis accep-table; ce qui est par définition impossible auregard de la pathologie.

On voit ici que la démarche technique doitêtre complétée par un accompagnementpsychologique de la part de l’audioprothé-siste pour permettre l’acceptation de cemanque de résultats.

C’est le rôle de l’éducation prothétiqued’informer le patient des étapes de l’appa-reillage, de ses limites et des difficultés rési-duelles futures. On ne peut en effet promet-tre le même résultat à un déficient auditif de20 ans présentant une surdité légère isoléeet à une personne âgée de 90 ans présen-tant une surdité moyenne sévère avec trou-bles centraux associés. La recherche ducompromis acceptable est évidemment dif-férente et la connaissance par le patient deson futur ainsi que des difficultés pour yparvenir sont indispensables pour faire le «deuil » d’une audition parfaite et apprendreà utiliser au mieux les apports prothétiquessur le court moyen et long terme.

En partant d’une NA/ DA, on sait dès ledépart que l’amélioration en vocale serafaible car la prothèse auditive apporte unecorrection quantitative à un problème quiest surtout qualitatif. C’est pourtant le caset c’est efficace dans le cadre de la surditéendocochléaire classique où le fait demettre le niveau moyen de la voix au niveaude meilleure analyse de la fonction auditiveaméliore de manière incontestable et cons-tante la vie sociale du patient appareillé.

Le fait de savoir qu’il s’agit d’une NA/DA nepeut donc que conduire à une prudencerelative dans la prise en charge et les pro-messes faites au patient. Le prédictif sur lerésultat, facteur important pour obtenir laparticipation du patient, sera volontaire-ment choisi bas au niveau du résultat défi-nitif et le temps d’habituation long, en étantcependant adapté à la souffrance psycholo-gique et aux besoins du patient.

4.2. Les seuils mesurés ne

sont pas représentatifs

des valeurs habituelles

d’audibilité, de confort

et d’inconfort utilisés

classiquement

Il existe une discordance théorique éviden-te sur la dynamique observable dans le casde la NA/DA. Cependant, aucune étude surun grand nombre de NA/DA n’existe sur lapsychoacoustique de cette pathologie.

En analysant le fonctionnement classiqued’une cochlée normale, on peut rappelerque le rôle des CCE est un rôle d’amplifi-cateur pour les faibles intensités. Ce rôleexiste donc toujours, mais n’est pas relayésoit par les CCI, soit par les synapses , soitpar le nerf lui-même. On peut en déduireque la courbe de transfert entrée dans lacochlée et sortie en central ne suivra pasune courbe habituelle. La saturation éven-tuelle devrait créer une croissance centra-le moins importante que l’élévation péri-phérique ne le laissait prévoir.

Faut-il dans ce cadre mettre en place uneamplification ? Certainement si l’on consi-dère que le seul élément à retenir en tantqu’audioprothésiste n’est pas ce que l’o-reille « entend », mais ce que le cerveaureçoit. Or, même si le message transmis aucerveau n’est pas de grande qualité, le faitde permettre une perception est déjà uneétape suffisante à justifier l’appareillage, àcondition de ne pas atteindre le niveau desaturation qui pourrait conduire à ne plusobtenir une amélioration quantitative touten ayant une dégradation de la qualité de laperception.

On ne peut malheureusement se fier auseuil de confort et d’inconfort subjectifsans prendre le risque de voir l’amplifica-tion apportée créer une surdité supplé-mentaire liée à un traumatisme sonoreiatrogène. Or, il n’existe actuellement pasde test prédictif sur le niveau où la satura-tion commence et, si elle est progressive, sil’élévation se fait par paliers ou en plateau.

La seule possibilité pour rechercher le gaindésiré est de l’augmenter progressivementpour obtenir un résultat en prenant unrisque minimal lors de cette mise en place,puis d’analyser le résultat vocal et psycho-acoustique obtenu lors de l’augmentationprogressive de l’amplification. L’une destechniques pour relever la courbe de trans-fert de la fonction auditive est d’utiliser l’é-chelle sonore subjective (7 paliers allant denon perçu, faible,… à douloureux), lepatient indiquant l’intensité subjective res-sentie à chaque émission sonore. Le suiviimmédiat et permanent permet de consta-ter que le gain mis en place au niveau du

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conduit auditif n’est pas toujours retrouvéà un niveau subjectif central. Ce qui peutjustifier la mise en place d’une amplificationcomplémentaire en prenant cependant laprécaution de vérifier par un test vocal quele nerf ou les CCI ne rentrent pas en satu-ration (courbe vocale en listes dissylla-biques ou test cochléaire de Lafon auniveau de la voix moyenne avec appareils).

Si le fait d’augmenter le gain améliore lerésultat vocal, une nouvelle augmentationpeut être tentée. Si cela crée une dégrada-tion, l’accroissement du gain est effacé et lepalier précédent est conservé. Le risque estque l’amplification entraîne une dégrada-tion des CCE et la disparition des OEAP, cequi pourrait entraîner une dégradationcomplémentaire de la qualité de l’oreille.On verra ultérieurement que des solutionstechniques existent pour amplifier les sonsfaibles sans amplifier les sons forts, voire lesintensités moyennes.

4.3. La courbe est plate, ou

encore ascendante sur

les fréquences aiguës

La surdité prise en charge par l’audiopro-thésiste présente le plus souvent uneconservation relativement bonne des fré-quences graves et une perte plus importan-te sur les fréquences aiguës. D’où unemeilleure qualité d’analyse de la zone graveau point de vue fréquentiel et temporel, faitparticulièrement important puisque lesgraves vont véhiculer de façon privilégiée laprosodie de la parole et permettre unesynchronisation des éléments permettantla reconnaissance d’un pattern auditif oud’une séquence auditive.

Rappelons un paragraphe du chapitred’Evelyne Veuillet et Hung Thaï-Van (chapi-tre VII) concernant la meilleure conserva-tion des fréquences aiguës. La surditémoins importante sur les fréquences aiguësserait liée à une moindre atteinte des fibresnerveuses courtes qui sont originaires de ladeuxième moitié du premier tour de lacochlée et qui codent les fréquencesmoyennes. Les pertes plus importantes sur

les basses fréquences comparées aux fré-quences plus élevées s’expliquent aussi parle fait que les basses fréquences sontcodées par des neurones qui synchronisentleur activité sur la phase du stimulus. Dufait de la désynchronisation liée à laNA/DA, ces basses fréquences ne peuventplus être codées correctement. En revan-che, pour les hautes fréquences, le codagese fait en fonction du lieu d’excitation sur lamembrane basilaire, fonction probablementassez bien conservée chez les patientsatteints de NA/DA.

Le poids relatif des aigus et des graves seradonc différent entre une NA/DA et unesurdité de type presbyacousie, aussi bien auniveau qualité d’utilisation qu’au niveau dupotentiel réel de signification de l’informa-tion au niveau central. La traduction desinformations subjectives fournies par lepatient doit intégrer non seulement lapathologie elle-même, mais aussi les élé-ments susceptibles d’être les plus perfor-mants pour une utilisation optimale.

La zone aiguë étant théoriquement demeilleure qualité dans la neuropathie audi-tive, on peut penser que l’amplification doitêtre maximale dans cette plage fréquentiel-le, surtout qu’il existe un risque de mas-quage des graves sur les aigus augmenté parrapport à une surdité traditionnelle.

On peut noter que les patients ayant unedégradation importante de leur compré-hension par rapport à leur audition sontparticulièrement gênés par le son de leurpropre voix et par l’autophonie qui enrésultent. Le fait de diminuer de façonimportante la zone d’amplification desgraves a tendance à améliorer leur confortd’écoute sans toutefois diminuer de façonsignificative leur compréhension.

Une étude pourrait être lancée concernantces patients souffrant d’une gêne importan-te à l’écoute de leur propre voix, et lecritère ajouté à la liste des éléments entraî-nant un doute de NA/DA si la statistiquemontrait que les cas les plus graves présen-taient cette pathologie.

4.4 : L’atteinte sélective de

la cochlée et l’existen-

ce d’un dysfonctionne-

ment du système

efférent ont un impact

important sur la capa-

cité de compréhension

en milieu bruyant

Toutes les études montrent qu’un impactimportant sur la compréhension en milieubruyant existe dans cette pathologie, sanstoujours discerner la part revenant à laneuropathie proprement dite de celle dueau dysfonctionnement

Rappelons les éléments clés de la littérature :

- La perception de la parole est typique-ment difficile dans un milieu bruyant alorsque la compréhension dans un milieusilencieux reste correcte (Starr et al,1998. 2000).

- La chute importante des scores de com-préhension dans un milieu bruyant estune des caractéristiques des NA/DA, lerapport signal /bruit pouvant aller de + 3à + 15 dB (Kraus et al 2000).

- La NA/DA se traduit souvent à l’audiomé-trie vocale par un important déficit de lareconnaissance de la parole, en discordan-ce avec les seuils mesurés à l’audiométrietonale. Dans ces conditions, l’appareillagede tels patients avec des prothèses auditi-ves conventionnelles se révèle souventpeu efficace, surtout lorsque les poten-tiels évoqués auditifs corticaux sontdégradés (Rance et coll., 2002 et pour unerevue Rance et coll., 2005).

On voit donc que la NA/DA entraîne uneprise en charge difficile des milieuxbruyants, fait déjà constaté à un niveaumoindre sur toutes les surdités endoco-chléaires. Aucune solution n’est actuelle-ment décrite dans la littérature.

Pour rechercher une solution qui sera àconfirmer, on peut rappeler que les aigussemblent avoir une importance prépondé-rante pour la compréhension des surditésde type NA/DA, que la mauvaise qualité des

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graves et de l’analyse temporelle encourageà utiliser les fréquences aiguës, que lesgraves exercent un effet de masque sur lesaigus, que les graves sont en général plusatteints que les fréquences aiguës, que laparole est statistiquement plus aiguë queles bruits. On peut donc en conclure qu’unsystème privilégiant les aigus par rapportaux graves serait la solution théorique laplus adaptée au NA/DA.

DIFFÉRENCESENTRE APPA-

REILLAGE D’UNESURDITÉ ENDO-COCHLÉAIRE ET

D’UNE NA/DA

5

Figure 1 : L’audiogramme de gauche montre en avril 2002 l’existence d’une surdité profonde et l’inefficacité du gain prothétique bien quele gain mesuré à l’oreille artificielle soit proche de 60 dB . L’audiométrie de 2007 réalisée après implantation révèle à gauche un seuil hori-zontal de 30-35 dB avec implant, mais surtout constate l’amélioration du seuil de l’oreille droite obtenue avec la prothèse controlatéralesans que celle-ci ait été modifiée en puissance puisqu’elle était au maximum en 2002. Cette évolution droite importante au niveau quanti-tatif n’apporte hélas pas d’amélioration en terme de compréhension, ce qui pourrait remettre en question l’appareillage à moyen terme encas d’absence d’amélioration subjective.

5.1. Le gain prothétique

La recherche du gain se fait de façon pro-gressive et itérative au fur et à mesure desréglages et visites de contrôle.Alors que legain est augmenté de façon globale pour envérifier l’intérêt lors d’une épreuve vocale,on prendra le soin de faire une étude diffé-rentielle avec augmentation seulement de lazone des aigus, puis augmentation de toutela bande de fréquence à la recherche de lasolution donnant le meilleur résultat vocal.

Lors de toute modification de réglage, ondoit vérifier non seulement le gain vocalinduit, mais surtout que cette modificationn’entraîne pas une dégradation de l’intelligi-bilité en milieu bruyant.

Les systèmes de compression permettentaujourd’hui de mettre en action une amplifi-cation relativement importante pour les sonsfaibles et une amplification faible, voire nullepour les sons forts.On peut ainsi fournir uneamplification tout en étant protecteur.

Il arrive cependant que le gain fourni pouréviter une aggravation soit insuffisant pourconstater une amélioration non seulementde compréhension ou d’évolution, maistout simplement de réactions aux bruits.

C’est le cas de C.L, 9 mois au moment dutest de dépistage réalisé à l’étranger pré-sentant des PEA plats et des OEAP norma-les compatibles avec une audition compri-se en 0 et 35 dB. Lors de son retour enFrance, elle est de nouveau explorée par lesPEAP qui retrouvent une absence deréponses alors que les OEAP sont présen-tes. Une recherche génétique est réaliséeet le diagnostic de surdité impliquant unemutation touchant l’otoferline, protéineimpliquée dans la vidange des vésiculessynaptiques des CCI ( RodriguezBallesteros et al. 2003), est posée.

L’audioprothésiste qui avait commencé l’ap-pareillage à l’étranger avait mis en place un

gain pratiquement nul.A l’arrivée en France,un réappareillage est effectué, car les appa-reils étaient en essai, en utilisant une pro-thèse auditive à compression avec un gainde 20 dB pour les sons faibles et moyens etaucune amplification à partir de 90 dB. Lerésultat en cabine ne montre aucun résultatet confirme l’existence d’une surdité pro-fonde typique des synaptopathies à l’otofer-line, et ce d’autant plus que C. est une petitefille vive, curieuse qui réagit de façon cons-tante aux niveaux vibratoires.Le gain est progressivement augmenté pouratteindre au bout de 6 mois 65 dB de gainmoyen et un niveau sortie de 135 dB SPL.Des seuils apparaissent, sans toutefoisentraîner de réactions d’orientation-inves-tigation dans la vie courante. Ces seuilsseront d’ailleurs confirmés ultérieurementlors de test avec la participation de C.

3 éléments peuvent être extraits de cesdiagrammes :La mise en place du gain de 65 dB nepermet pas de mettre en place un gain pro-thétique suffisamment efficace pour que nese pose pas la question d’une implantation.Dans cette phase, C. réagit à toutes lesvoyelles prononcées à voix moyenne quandelle se situe dans une situation de test, cequi sous-entend une perception de l’infor-mation, alors qu’aucune réaction dans la viecourante n’existe. Cette discordance deréponses se retrouve très souvent dans lescas où la perception existe pour les sons

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Figure 2 : L’audiométrie prothétique montre une discordance entre intelligibilité et perte tonale. L’augmentation du gain crée une

dégradation de la courbe vocale. Le compromis doit être recherché de façon progressive pour améliorer la compréhension sans entraîner

de gêne subjective.

faibles, mais qu’il existe une saturation de lafonction auditive : c’est en général parceque l’appareil rentre en saturation. On peutpenser dans le cas de C. qu’il s’agit d’unesaturation du « nerf auditif ».

Dans la phase 2, C. est implantée après dia-gnostic génétique de surdité impliquantl’Otoferline. Le résultat est très bon et l’onconstate de plus que les seuils obtenus avecl’oreille controlatérale, qui continue à êtreappareillée s’améliorent, sans toutefois per-mettre une différenciation autre que bruit/non bruit, et du facteur durée. En audiomé-trie vocale de mots simples en liste ouverte,le 100 % d’intelligibilité est obtenu pour unniveau de 45 dB en stéréo et en mono. Lefait de porter l’appareil controlatéral n’en-traîne ni dégradation ni amélioration de lacompréhension. Par contre, le seuil s’étantamélioré avec appareil, et les zones non sti-mulées se réorganisant à un niveau central,il a été décidé de faire conserver le portrégulier de cet appareil controlatéral. Onpeut noter par ailleurs que la disparition desOEAP un an après le début de l’appareillagen’a pas entraîné de modification des seuilssur l’oreille appareillée de manière clas-sique. Ce fait ne peut être totalement fiabledu fait de l’amélioration du seuil par stimu-lation globale par l’implant.

En conclusion de ce premier cas, l’appa-reillage se justifiait dans la première étapepour confirmer la surdité et l’inefficacité de

la technique classique pour les acquisitionsde langage alors que le gain était presque aumaximum. Le port de l’appareil controlaté-ral n’entraîne dans ce cas aucune nuisancesur l’utilisation de l’implant et conserve unestimulation centrale au départ de cetteoreille, permettant dans le futur l’éventuellemise en place d’une nouvelle technologie.

Un deuxième cas peut nous permettre d’a-nalyser l’intérêt d’une adaptabilité du gain.Monsieur C., 59 ans, présente une gêne enaugmentation importante depuis 10 ansavec une discordance importante tonal /vocal, une perte totale de compréhensionen milieu bruyant, des PEA très désynchro-nisés, une mauvaise utilisation de la lecturelabiale, ainsi qu’une dégradation très impor-tante des seuils différentiels de fréquenceet de temps en psycho-acoustique.

Il est appareillé stéréophoniquement enopen fit. Le gain prothétique est de l’ordrede 20 dB sur les aigus ; Dans un premiertemps de nombreux essais d’augmentationspécifique du gain en fonction de la fré-quence ont été effectués sans résultats. Lemeilleur compromis a été obtenu en nemettant aucune amplification sur la zonegrave et en diminuant le niveau du gainpour les fortes intensités, ce que permet defaire l’open fit qui, en laissant le conduitauditif ouvert, devient transparent pour ceréglage dès 80 dB SPL.

Le gain prothétique vocal est faible, la com-préhension sans lecture labiale impossibleen présence de bruits environnants.Subjectivement, Monsieur C. se dit trèsaidé par l’appareillage et constate une netteamélioration des bruits perçus. Tout essaid’augmentation du gain se traduit parcontre par une dégradation de la compré-hension, surtout en cas d’essai d’amplifica-tion de la zone grave. Seul élément nonconfirmé par rapport à une NA/DA, le faitde ne pas présenter d’OEAP.

5. 2. Le choix du traitement

du signal et des modes

de captation

microphonique :

La particularité de la NA/DA est de présen-ter une dégradation très importante de lacompréhension en milieu bruyant. On saitde plus qu’en cas de compréhension rési-duelle en milieu silencieux, le fait de recher-cher une augmentation importante en gainn’apporte pas forcément d’amélioration dela qualité d’intelligibilité. L’amplification estcependant nécessaire pour permettre uneperception de l’information.

On peut en revanche totalement justifier l’ap-pareillage, même avec un gain faible en utili-sant surtout les possibilités de débruitage desappareils de dernière génération. Plusieurs

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types de traitement du signal coexistent dansles appareils de dernière génération.

5.2.1 : Une compression adaptative

La dynamique d’une NA/DA est obligatoi-rement différente de celle d’un entendantou d’un déficient auditif à surdité endoco-chléaire classique. Le but de l’amplificationdans une NA/DA est d’amplifier de façonsélective les informations faibles sans tou-tefois entraîner de saturation au niveau desstructures en cause. On voit ici l’importan-ce d’une compression adaptable dans plu-sieurs canaux avec facteur de compressionet niveau de déclenchement indépendantsfréquentiellement.

Les caractéristiques de cette compressiondépendent des mesures réalisées en audio-métrie dans un premier temps, puis de l’in-teractivité des réglages avec les essais enmilieu social et le ressenti subjectif dupatient concernant sa voix, le timbre desbruits perturbants ou gênants et la com-préhension en fonction des lieux d’écoute.

On a compris dans les paragraphes précé-dents que les graves jouaient un rôle négatifquand ils étaient présents. Grâce aux com-presseurs multi-bandes, on peut maintenantprendre en compte cette notion et compri-mer davantage la zone fréquentielle gravepar rapport aux aigus en cas d’augmenta-tion du niveau de bruit et donc de parole.

5.2.2 Un traitement améliorant lerapport signal /bruit parreconnaissance du bruit :

Le bruit peut être différencié de la parolepar des critères de durée, d’intensité, detemps et d’harmonicité sans toutefois qu’ilsoit possible actuellement de favoriser auniveau du traitement numérique du signalune voix par rapport à une autre.Cette différenciation permet de magnifierles canaux où les éléments de parole sontprépondérants et émergents et de dimi-nuer de façon presque instantanée ceux quicontiennent majoritairement du bruit.L’amélioration signal / bruit est importantepour tous les bruits ayant une durée de

présentation suffisante. Par ailleurs, les der-nières générations d’aides auditives sontcapables d’analyser les transitoires d’at-taque rapide, de favoriser ceux dont lapente de montée est compatible avec destraits de parole et de diminuer les incom-patibles. Le traitement actuel du signal estcependant déjà suffisamment efficace pourqu’il soit conseillé lors de l’appareillage dessurdités avec troubles du décodage.

5.2.3 Un traitement améliorant lacompréhension de la parolepar traitement des informa-tions de la voix :

Certaines aides auditives commencent àêtre équipées de systèmes de traitementqui modifient de façon très importante lastructure du signal capté. Par exemple, latransposition de signal transfère une partiede l’information contenue dans la zoneaiguë non perçue par absence de CCI versla zone médiane susceptible d’utiliser l’in-formation. Ce type de traitement estsurtout utilisé actuellement dans le cadredes traumatismes sonores à cochléeblanche dans la zone aiguë, mais on peutpenser qu’il pourrait avoir une certaineefficacité lors du transfert des graves versles aigus dans le cas des NA / DA. Demême, certains algorithmes commencent àrallonger certains phonèmes ou parties dephonèmes pour permettre une meilleureanalyse, ce qui pourrait présenter un avan-tage dans le cas où la durée insuffisante duphonème serait la cause de l’incompréhen-sion. Le futur est donc sur le traitement dutemps, de la fréquence et du timbre, ce quimalheureusement ne pourra être que par-tiellement utilisé dans le cadre de la NA/DA où la transmission de l’information parle système nerveux est l’élément limitantde la chaîne auditive.

5.2.4 Une captation adaptative del’information dans l’espace :

Il est évident que les microphones direction-nels apportent un très grand confort d’é-coute dans les milieux bruyants puisque lesignal frontal est privilégié. L’amélioration durapport signal / bruit est importante et la

qualité d’écoute dans le bruit beaucoup plusnette. Un point capital dans le cadre de l’é-ducation prothétique est d’apprendre ici aupatient à se placer de façon à optimaliser lacaptation du locuteur dans le bruit environ-nant. Malheureusement, pour pouvoir lefaire, il faut être capable de localiser les dif-férentes sources sonores, c’est-à-dire êtrecapable de les reconnaître,puis de les traiter,ce que ne peut généralement pas faire unpatient présentant une surdité compliquée.

Cette difficulté est aujourd’hui en passed’être résolue puisque les microphonesactuels intègrent une directionnalité adap-tative en fonction de la source de paroleprépondérante qui n’a pas besoin d’êtreobligatoirement frontale et le milieu danslequel le patient se trouve (réverbérant ounon, plus ou moins bruyant ). De plus, lepassage en mode directionnel a tendance àdiminuer légèrement l’amplification desgraves, ce qui ne peut qu’être positif dans lecas d’une NA/DA.

L’ensemble de ces traitements améliore defaçon incontestable la compréhension d’unmalentendant dans le bruit. L’améliorationsur le rapport signal/ bruit va de quelquesdB à plus 15-20 dB en fonction des condi-tions de captation et de bruits.On voit doncque ces appareils auditifs ne peuvent êtreéliminés d’emblée dans le cas d’une NA/DAcomme la littérature nous l’indique.

D’autant que l’impact sur la compréhen-sion d’une NA/DA est retrouvé majoritai-rement sur la capacité du patient à com-prendre en milieu bruyant. On ne peutdonc que pousser à l’appareillage avec cetype de prothèse de nouvelle générationcapable de reconnaître le bruit, la parole etd’exercer une adaptation en fonction dumilieu rencontré.

Lorsque la perte est très importante et qu’iln’existe pas de compréhension résiduellequelle que soit l’intensité fournie dans leconduit auditif, ce traitement montremaheureusement ses limites et le choix d’unappareil de coût moins important peut éven-tuellement s’exercer à ce niveau avec cepen-dant la notion que la protection des restesauditifs peut à elle seule justifier le choixd’un appareil numérique haut de gamme.

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Dossier )

Le matériel HF, liaison privilégiée entre unlocuteur et un auditeur, présente lesmêmes avantages que le traitement dusignal au niveau de l’amélioration durapport signal/ bruit avec la particularitéd’éliminer le facteur distance. Cette tech-nique, tout comme celle de la bouclemagnétique pour les patients utilisateurs decontours munis de bobine téléphonique, nepeut donc qu’être recommandée danstoutes les surdités à résultats insuffisants, etdonc dans le cas des NA/DA.

La lecture labiale doit être citée etconseillée de manière systématique dèsque le niveau d’intelligibilité dans le silencen’atteint pas le 100 %, ce qui est le cas dansla NA/DA, surtout quand la conversation alieu dans un milieu bruyant ou réverbérant.

La connaissance de l’existence d’uneNA/DA chez un patient change profondé-ment sa prise en charge et les choix pro-thétiques. Encore faudrait-il que cettepathologie soit connue dès le début de l’ap-pareillage, ce qui n’est pas le cas. Le coûtéconomique de la généralisation des Oto-émissions complétées par des PEA sembleimpossible. On doit donc se contenter defaire procéder à un examen à postérioriquand les résultats escomptés ne sont pasobtenus au regard de la perte auditive.

Le fait de connaître l’étiologie peut permet-tre une prédiction plus précise de l’efficaci-té prothétique future, une préparation à lamodestie des résultats, le choix d’une aideauditive plus adaptative et éventuellementle passage à l’implant dans les pathologiesatteignant les CCI ou les liaisons synap-tiques de façon majeure. Cette pathologiedoit également faire évoluer le regard des

patients sur les résultats obtenus engénéral car elle démontre que la responsa-bilité de l’audioprothésiste ne peut êtreengagée totalement dans certaines patho-logies en cas de insatisfaction résiduelle.Encore faut-il que celui-ci mette en placetoutes les solutions à sa disposition pourrechercher comme il le doit le meilleurcompromis confort résultat et qu’il partici-pe par tous les moyens à la prise en chargepluridisciplinaire (orthophoniste, psycholo-gue, médecin du travail, pouvoirs publics…)nécessaire à l’équilibre psychologique deces patients en grande difficulté.

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( Dossier

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CHAPITRE XIII :APPORT DE LA MODALITÉ VISUELLEDANS LA PERCEPTION DE LA PAROLE

RÉSUMÉ

ABSTRACT

Cécile COLIN1,

Jacqueline LEYBAERT2,

Brigitte CHARLIER3,

Anne-Laure MANSBACH4,

Chantal LIGNY3,

Ventura MANCILLA3,

Paul DELTENRE5.

1 Unité de Recherche en

Neurosciences Cognitives,

U.L.B. - CP 191

Université Libre de Bruxelles

50, av. Roosevelt

B-1050, Bruxelles

[email protected]

2 Laboratoire de Psychologie

Expérimentale, U.L.B.

3 Centre Comprendre et Parler,

Bruxelles

4 ORL pédiatrique, Hôpital

Universitaire des Enfants

Reine Fabiola, U.L.B.

5 Clinique de neurophysiologie,

département de neurologie,

U.L.B.

En raison du grand intérêt potentiel de l’u-tilisation de la voie visuelle dans la remé-diation de la NA/DA, nous passons enrevue les nombreuses études ayantdémontré l’apport de l’information visuel-le (lecture labiale et Language ParléComplété, LPC) dans la perception de laparole chez les personnes atteintes dedéficience auditive. Nous exposons, enparticulier, un paradigme permettant d’es-timer le poids accordé à chaque modalitésensorielle dans la perception de la parole :l’effet McGurk. Nous avons appliqué ceparadigme à une population de 51 enfantssourds profonds (non atteints de NA/DA)portant un implant cochléaire, ayant étéimplantés avant ou après 4 ans et utilisant,ou non, le LPC. Les résultats, encore préli-minaires, montrent qu’indépendammentdu moment de pose de l’implant, lesenfants sourds obtiennent de bien moinsbonnes performances que des enfants decontrôle à la fois dans une condition deparole auditive et dans une condition deparole visuelle, suggérant une sous-spécifi-cation de leurs représentations phonolo-giques, hypothèse renforcée par le fait queles enfants exposés au LPC obtiennent demeilleures performances que les autrespour l’identification de certains phonèmes.Dans une condition de parole audiovisuel-le congruente, tous les enfants sourds sesont fortement améliorés par rapport auxconditions unimodales. Enfin, dans unecondition de parole audiovisuelle dis-congruente, alors que les réponses des

enfants de contrôle sont dominées par lecanal auditif, celles des enfants implantésont largement été dominées par le canalvisuel. Ces deux dernières conditionsdémontrent de façon non équivoque laforte dépendance de la lecture labiale chezles enfants implantés, même précocementet même utilisant le LPC.

Since the use of visual information as a syner-gistic complement of auditory information is ofa potentially high interest in the remediation ofauditory deficits, this chapter reviews the manystudies having demonstrated the role of visualinput (lip reading and cued speech) in speechperception.

We shall particularly detail the McGurk effect,a paradigm allowing the evaluation of the rela-tive weight taken by each of the two modalitiesin speech perception.

We have applied this paradigm to a populationof 51 children with a profound hearing loss(not due to AN/AD) having received a cochlearimplant either before or after four years of ageand resorting -or not- to cued speech.The pre-liminary results show that irrespective of theirage at implantation, deaf children yieldedmuch lower speech identification scores thancontrol children both for auditory and visualinput.This suggests a poor specification of theirphonological representations, a hypothesis sup-ported by the fact that, at least for certain pho-nemes, the children exposed to cued speechexhibited better performances than those whowere not. In a condition of congruent audio-

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visual speech, all deaf children considerablyimproved with respect to both unimodal condi-tions. In an incongruous condition of audio-visual speech, whereas the responses of thecontrol children were dominated by the audi-tory channel, those of the implanted childrenwere largely dominated by the visual channel.These two latter conditions unambiguouslydemonstrate that the implanted children werestrongly dependent on lip reading, even if theywere implanted early and used cued speech.

visuelle dans la perception de la parole chezles personnes souffrant de déficience audi-tive portant une prothèse conventionnelle(Erber, 1972) ou un implant cochléaire(Tyler, Parkinson, Woodworth, Lowder, &Gantz, 1997) et chez les personnes normo-entendantes exposées à un signal auditifbruité. Sumby et Pollack (1954) sont parmiles premiers à avoir montré que l’intelligibi-lité d’un signal acoustique (des mots mono,bi- ou trisyllabiques), mêlé à du bruit, étaitfortement améliorée par la lecture labiale.Celle-ci contribuait d’autant plus à la perception de la parole que le bruit étaitimportant. Ces résultats ont été largementreproduits lors d’études ultérieuresmenées pour la plupart en anglais (Erber,1969 ; Dodd, 1977 ; Middleweerd et Plomp,1987 ; MacLeod et Summerfield, 1990 ; voirMohamadi et Benoît, 1992 pour desdonnées concernant le français). En outre,le fait de regarder les mouvements deslèvres et du visage améliore aussi la détection de la parole masquée par dubruit (Grant & Seitz, 2000), augmentantainsi la compréhension même lorsque lesignal visuel n’apporte en lui-même aucuneinformation phonétique (Schwartz,Berthommier & Savariaux, 2004). Le faitque le signal visuel précède le signal acous-tique permettrait aux participant-e-s defocaliser leur attention et de tirer davan-tage d’information du signal acoustiquedégradé.

L’influence de la parole visuelle ne se limitepas aux situations dans lesquelles le signalauditif est dégradé. Elle améliore la compré-hension d’un signal de parole clair, maiscomprenant un contenu sémantiquementcomplexe (Reisberg, McLean et Goldfield,1987), ou prononcé dans une langue étran-gère (Davis et Kim, 1998), ou encore pro-noncé dans la langue maternelle mais parun locuteur parlant avec un accent étranger(Burnham, 1998). Dans des conditions nor-males d’écoute, elle améliore également lacompréhension de la parole conversation-nelle (Cerrato, Leoni et Falcone, 1998) oucelle de logatomes VCVCV* (Benoît,Mohamadi et Kandel, 1994). Enfin, Mills(1987) a montré que des enfants aveugles,d’une moyenne d’âge de deux ans, acqué- * C = consonne ;V = voyelle

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raient plus lentement que les voyants dessons caractérisés par une articulation clai-rement visible (des bilabiales comme /b/,/m/, …) et qu’ils commettaient des erreursspécifiques à leur déficit (substitution d’unphonème par un autre appartenant à unecatégorie visuelle différente).

L’augmentation de l’intelligibilité de laparole par l’information visuelle dépendraitdu fait que cette dernière est complémen-taire de l’information auditive.Alors que lamodalité visuelle fournit essentiellement del’information relative au lieu d’articulation,l’information véhiculée par la modalitéauditive est plus saillante en ce qui concer-ne le mode d’articulation et le voisement.Le lieu d’articulation (spécifié par des chan-gements acoustiques rapides, de faibleintensité) est en effet difficile à isoler dusignal auditif présenté seul (Miller & Nicely,1955). Une étude de Rosen, Fourcin etMoore (1981) a bien illustré cette complé-mentarité entre audition et vision. La fré-quence fondamentale (F0), qui présentéeseule n’est pas intelligible, constitue pour-tant un indice important dans la compré-hension du langage. La F0 n’est quasimentpas détectable via la modalité visuelle maisla complète bien. Les auteurs ont montréque les performances en lecture labialeaugmentaient considérablement lorsquel’information acoustique de la F0 étaitdisponible. Breeuwer et Plomp (1985) ontobtenu le même type de résultats en utili-sant les fréquences des premier et secondformants (F1 et F2) à la place de la F0.

L’effet McGurk : un paradig-

me expérimental pour

l’étude de la lecture labiale

Le rôle crucial de la lecture labiale, ainsi quele caractère spontané et irrépressible deson utilisation, s’illustrent particulièrementbien lorsque la vision et l’audition fournis-sent des signaux discongruents. Pourpreuve, la présentation d’un message acous-

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INTRODUCTION

Comme souligné si à propos dans le remar-quable texte rédigé par Arnold Starr enintroduction à la présente monographie, lalecture labiale constitue un moyen simpleet efficace d’atténuer les difficultés rencon-trées par les sujets atteints de NA/DA dansla perception de la parole. Si l’apport de lalecture labiale et du Langage ParléComplété (LPC) dans la compensation dela surdité endocochléaire classique est biendocumenté (voir Alegria, Hage, Charlier &Leybaert, 2007 pour une revue), il est inté-ressant de constater que même dans lescas relativement rares de NA/DA présen-tant des seuils audiométriques normaux, onpeut observer une forte dépendance à lalecture labiale (Kraus, Bradlow, Cheathamet al., 2000). Compte tenu de l’intérêt durecours à l’information visuelle dans lacompensation du déficit de la NA/DA, ilnous a paru approprié d’inclure une synthè-se des connaissances actuelles sur les inter-actions audio-visuelles dans la perceptionde la parole dans cette monographie sur laNA/DA.

Données de la littérature sur

l’intégration audiovisuelle

Durant la seconde moitié du vingtièmesiècle, de nombreuses études ont mis enévidence l’apport essentiel de l’information

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tique parfaitement audible en même tempsque des mouvements articulatoires cor-respondant à un message différent donnesouvent lieu à un percept qui ne cor-respond pas à l’information auditive maisintègre des traits du signal visuel. Cette illu-sion, mise en évidence par McGurk etMacDonald en 1976, démontre que lesystème perceptif utilise l’informationvisuelle même lorsque le signal auditif estclair et non ambigu (voirhttp://www.media.uio.no/personer/arntm/McGurk_english.html pour une démonstra-tion). McGurk et MacDonald (1976) ontobservé deux types d’illusions : des fusionset des combinaisons. Lorsqu’une syllabecomprenant une consonne vélaire (e.g. /ga/)est présentée visuellement en même tempsqu’une syllabe comportant une consonnebilabiale présentée auditivement (e.g. /ba/),la perception qui en résulte est souventune fusion entre les deux informations(/da/). Par contre, la présentation d’une bila-biale /ba/ visuelle doublé d’un /ga/ auditifsuscite généralement une réponse de typecombinaison, telle que /bga/. Outre lesréponses de type fusion ou combinaison,on observe parfois des captures visuelles.La modalité visuelle domine alors complè-tement le percept. En présentant tous lesdoublages possibles des syllabes auditiveset visuelles /va/, /da/, /δa/ et /ba/, Repp,Manuel, Liberman et Studdert-Kennedy(1983) ont obtenu de très hauts pourcen-tages de captures visuelles. Rosenblum etSaldaña (1996) ont également montré quela présentation d’un /ba/ auditif avec un /va/visuel donnait lieu à la perception de /va/.De nombreux exemples de captures ontégalement été rapportés entre des syllabesvisuelles et auditives ayant des lieux d’arti-culation plus éloignés.Ainsi, bien que dans lecas d’un /ga/ auditif doublé d’un /ba/ visuel laréponse attendue soit une combinaison(/bga/), il arrive fréquemment que la réponsefournie soit /ba/ ; de même, avec un /ga/visuel doublé d’un /ba/ auditif, des réponses/ga/ sont parfois observées (McGurk etMacDonald, 1976 ; Colin, Radeau, Deltenre,Demolin et Soquet, 2002).

Depuis les premières études de McGurk etMacDonald, l’effet McGurk a été reproduit

et réexaminé par de nombreuses équipesde recherche (pour une revue, voir Colin &Radeau, 2003) et a été utilisé comme para-digme expérimental afin d’examiner lesmécanismes de perception de la paroleaudiovisuelle (pour une revue, voir Green,1998), et notamment d’étudier leur déve-loppement. Si les illusions McGurk sont, eneffet, déjà observables chez les enfantsd’âge scolaire et pré-scolaire (Desjardins,Rogers & Werker, 1997 ; Massaro, 1984 ;McGurk & MacDonald, 1976), voire mêmechez des bébés de quelques mois (Burnham& Dodd, 1996 ; Rosenblum, Schmuckler &Johnson, 1997), les prédispositions à perce-voir la parole de façon multimodale sontinfluencées par l’expérience. En français,comme en anglais, la proportion d’illusionsest faible à l’âge de cinq ans, et se dévelop-pe à partir de huit ans jusqu’à l’âge adulte(Leybaert & Colin, sous presse).

Le LPC

Si la lecture labiale constitue un complé-ment utile au signal auditif pour la percep-tion de la parole, en particulier évidemmentchez les personnes souffrant de déficienceauditive, elle n’est toutefois pas suffisantepour atteindre un niveau de compréhen-sion de la parole adéquat ni pour permett-re le développement du langage chez lesenfants sourds. La limite principale de lalecture labiale vient du fait que certainsphonèmes, différant en termes acoustiques,sont indistinguables visuellement. Ainsi, lesphonèmes différant par la nasalité (e.g. /m/vs /b/) ou le voisement (e.g. /b/ vs /p/) secaractérisent par des images labiales iden-tiques. Vu le degré élevé d’ambiguïté queprésente la lecture labiale, une méthode decommunication visant à renforcer la préci-sion des informations issues de la lecture

labiale a été mise au point par Cornett(1967). Il s’agit du Cued Speech (en fran-çais, Langage Parlé Complété ou LPC). Cesystème comporte une série de configura-tions manuelles qui, combinées aux mouve-ments des lèvres, permettent l’identifica-tion des phonèmes (Leybaert, Charlier,Hage & Alegria, 1998). Pour la langue fran-çaise (voir Figure 1), la main peut adopterhuit configurations (codant pour lesconsonnes) et cinq positions (qui codentpour les voyelles).

Grâce à la précision des indices phoné-miques fournis, le LPC permet aux enfantssourds d’élaborer des représentationsphonologiques précises et d’obtenir ainside meilleures performances que les enfantssourds non exposés au LPC dans destâches de compréhension du message oral(Charlier, Hage, Alegria et Périer, 1990), demorpho-syntaxe (e.g. maîtrise du genregrammatical ; Hage,Alegria et Périer, 1990),de métaphonologie (e.g. jugement de rimes ; Charlier & Leybaert, 2000) ainsi quede lecture (e.g. Alegria, Dejean, Capouillez& Leybaert, 1990) et d’orthographe (e.g.Leybaert & Charlier, 1996).

Les données issues des études portant surla lecture labiale et sur le LPC indiquentdonc que le développement du langage oralne repose pas nécessairement sur l’auditionmais dépend plutôt de l’accès à une infor-mation phonologique précise, quelle quesoit la modalité sensorielle dans laquellecette information est véhiculée.

Apport visuel et

implantation cochléaire

En restaurant l’input auditif, l’implantcochléaire permet évidemment aussi aux

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Figure 1. Exemple de code pour certaines consonnes et voyelles du français.

Pour une description complète du code, voir http://www.alpc.asso.fr/code01-c.htm

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enfants sourds profonds de développerdes représentations phonologiques mieuxstructurées et plus complètes que chez lesenfants ne pouvant bénéficier d’un implant.

Si le bénéfice des implants cochléaires surles capacités de perception (e.g.Wu & Yang,2003) et de production (e.g.Vieu, Mondain,Blanchard et al., 1998) de la parole a été largement démontré, peu d’études ont étéconsacrées aux capacités d’intégrationaudiovisuelle dans la perception de laparole. Or, il semblerait que l’accès à desreprésentations audiovisuelles bien structu-rées favorise la perception et la productionde la parole, ainsi que les habiletés cogniti-ves qui dépendent des représentationsphonologiques (Lachs, Pisoni & Kirk, 2001).

En utilisant l’effet McGurk comme paradig-me expérimental, nous évaluons actuelle-ment les capacités d’intégration dessignaux de parole auditifs et visuels d’en-fants sourds profonds congénitaux ayantété implantés précocement (avant 4 ans)ou tardivement (après 4 ans) et utilisant,ou non, le LPC de façon intensive.

Comme suggéré par Clark (2003), on peutémettre l’hypothèse que les enfantsimplantés soumis à de la parole audiovi-suelle accorderont un poids plus impor-tant à la modalité visuelle que des enfantsnormo-entendants. Vu leur expérienceauditive limitée, leur cortex ne pourraitpas intégrer les signaux auditifs et visuelsde façon appropriée.Toutefois, les compé-tences de perception de la parole audiovi-suelle pourraient être modulées par la pré-cocité de la mise en place de l’implant, ainsique par l’exposition au LPC.

De nombreuses études indiquent que lesscores en perception de la parole auditiveaprès implantation deviennent d’autantmeilleurs que l’implant a été posé tôt, depréférence avant trois ou quatre ans

(Baumgartner, Pok, Egelierler et al., 2002 ;Tyler et al., 1997 ; Snik, Makhdoum,Vermeulen et al., 1997 ; Svirsky, M.A.,Teoh,S.-W., Neuburger, H., 2004). En effet, uneprivation sensorielle précoce dans unemodalité entraîne une réorganisation fonc-tionnelle des aires corticales spécifiques decette modalité (e.g. Neville, Schmidt etKutas, 1983). L’implantation précoce, avantla fin de la période critique, permettraitainsi aux aires cérébrales auditives de main-tenir leur fonctionnalité initiale. Des enfantssourds congénitaux implantés précoce-ment pourraient plus rapidement exploiterles relations phonétiques entre signauxauditifs et visuels et développer ainsi desmécanismes d’apprentissage audiovisuelsplus précoces. Par conséquent, ils devraienttémoigner de meilleures capacités d’inté-gration de la parole audiovisuelle, seraientplus sensibles à l’effet McGurk et moinsdépendants de la lecture labiale que desenfants implantés plus tardivement (Schorr,Fox, van Wassenhove & Knudsen, 2005).

L’utilisation du LPC avant la pose de l’im-plant semble avoir un effet bénéfique surles capacités de perception de la paroleauditive après la pose de l’implant. SelonDescourtieux, Groh, Rusterholtz et al.(1999), la grille phonologique acquise via lecanal visuel serait transférable au canalauditif. Ainsi, on peut émettre l’hypothèseque les enfants sourds éduqués à l’aide duLPC témoigneront de meilleures capacitésd’intégration de la parole audiovisuelle queles enfants communiquant par une autreméthode. Soumis à l’effet McGurk, legroupe LPC devrait fournir davantage deréponses de fusion et de combinaison etmoins de réponses purement visuelles quel’autre groupe.

Cinquante et un enfants sourds profondscongénitaux (non atteints de NA/DA)munis d’un IC ont à l’heure actuelle été

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soumis à une situation de type McGurk.Parmi ceux-ci, 19 ont été implantés avantl’âge de quatre ans (dont 12 utilisent le LPCde façon intensive) et 32 ont été implantésaprès quatre ans (dont 17 utilisent le LPCde façon intensive ; voir tableau 1 pour unedescription plus complète des enfants).

Les enfants devaient identifier des syllabesprésentées soit auditivement (A), soit visuelle-ment, en lecture labiale (V), soit audiovisuelle-ment de façon congruente (AVc), soit audiovi-suellement de façon discongruente (AVd).

Les stimuli auditifs (diffusés à une intensitémoyenne de 70 dB SPL) et visuels cor-respondaient aux syllabes, /bi/, /gi/, /pi/, et/ki/, prononcées par un locuteur franco-phone. Pour la modalité audiovisuelle, nousavons construit quatre stimuli congruents(A/bi/ V/bi/,A/gi/ V/gi/,A/pi/ V/pi/,A/ki/ V/ki/)et quatre stimuli discongruents (A/bi/ V/gi/,A/gi/ V/bi/,A/pi/V /ki/,A/ki/ V/pi/).

Pour chacune des quatre conditions (A, V,AVc et AVd), les syllabes voisées (/bi/, /gi/)et non-voisées (/pi, /ki/) étaient présentéesdans des blocs différents pour ne pas alour-dir la tâche des enfants d’un point de vuecognitif. L’expérimentatrice disait auxenfants qu’ils allaient entendre (et/ou voir)des syllabes sans signification et que danschaque situation, ils devraient choisir (en lapointant du doigt), parmi quatre possibilitésécrites (/bi/, /gi/, /di/ ou /bgi/ pour les sylla-bes voisées et /pi/, /ki/, /ti/ ou /pki/ pour lessyllabes non-voisées), celle qui correspon-dait à ce qu’ils avaient entendu (ou lu surles lèvres). Ces réponses correspondaientaux signaux auditifs et visuels réels et aux illusions McGurk attendues (fusion ou combinaison). Le niveau du hasard correspondait donc à 25%.

L’intervalle entre les stimuli était fixé à 4 secondes et la session entière durait 20 à 25 minutes.

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Précoces - LPC + Précoces - LPC - Tardifs - LPC + Tardifs - LPC -

Nombre de particip. 12 (10 filles) 7 (3 filles) 17 (10 filles) 15 (10 filles)

Age 9,3 (5 - 14) 9,1 (6,66 - 10,9) 15,5 (10 - 25) 11,23 (8,6 - 15,75)

Age à l’implantation 2,7 (2,1 - 3,25) 2,91 (2,33 - 3,66) 7,91 (4 - 16) 5,13 (4 - 8,6)

Durée port de l’IC 6,6 (3,85 - 11) 6,17 (4,33 - 7,9) 7,64 (3,25 - 11) 6,1 (3,23 - 8)Tableau 1

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Les pourcentages de réponses correctes enfonction de la précocité de la pose de l’im-plant, de l’utilisation du LPC et du type destimulus, sont illustrés, pour les conditionsA,V et AVc, dans les figures 2 à 4. La figure5 illustre les pourcentages de réponsesdonnées dans la condition AVd, en fonctionde la précocité de la pose de l’implant, del’utilisation du LPC, du type de stimulus (lestimulus indiqué sur la figure correspond àla partie auditive du signal) et du type deréponse donné. Pour chaque stimulus AVdiscongruent (ex : A/bi/ V/gi/), les enfantsétaient susceptibles de donner une réponseauditive (/bi/), une réponse visuelle (/gi/), laréponse audiovisuelle d’intégration atten-due (/di/) ou une réponse autre (typique-ment, l’autre réponse d’intégration : /bgi/).

Les résultats rapportés ci-dessous sontencore préliminaires (étude en cours) maisont toutefois fait l’objet d’analyses statis-tiques (analyses de variance portant sur lesnombres de réponses correctes aveccomme facteurs inter-sujets le moment depose de l’implant et l’utilisation, ou non, duLPC et comme facteur intra-sujet le stimu-lus : /b/, /g/, /p/, /k/). Les détails concernant lesdonnées acquises sur les enfants et adultesnormo-entendants peuvent être consultéschez Leybaert et Colin (sous presse).

Alors qu’ils témoignent de bonnes capaci-tés de compréhension (et même de pro-duction) de la parole, les enfants implantésont obtenu des performances très nota-blement plus faibles que des enfants decontrôle dans la condition auditive seule,quelle que soit la syllabe envisagée (et enparticulier pour /gi/). Notons que l’absencede contexte est certainement beaucoupplus défavorable aux enfants sourds qu’auxenfants normo-entendants. Contrairementà nos hypothèses, les enfants implantésprécocement n’ont pas obtenu demeilleurs résultats (59.5% de réponsescorrectes en moyenne) que les enfantsimplantés tardivement (56.5% de réponsescorrectes en moyenne). De la même façon,nous n’avons pas non plus observé de dif-férence entre le groupe LPC+ (60% deréponses correctes en moyenne) et LPC-(56% de réponses correctes en moyenne),sauf en ce qui concerne la syllabe /gi/ pour

laquelle le groupe LPC+ était un peu plusperformant.

Dans la condition visuelle, la différence deperformance entre les enfants de contrôleet les enfants sourds était un peu moins fla-grante que dans la condition auditive. Lesdeux groupes d’enfants implantés se sontnéanmoins révélés moins performants enlecture labiale de syllabes décontextuali-sées que les enfants normo-entendants,pour les quatre syllabes envisagées. Onaurait pu émettre l’hypothèse que, vu leurexpérience auditive limitée, les enfantssourds auraient développé des capacitéscompensatrices de lecture labiale plusimportantes que les enfants normo-enten-dants. Les résultats obtenus dans la présen-te étude laissent plutôt penser que lemanque d’expérience auditive a pu entraî-ner une moins bonne spécification desreprésentations phonologiques chez lesenfants sourds que chez les enfants normo-entendants, celle-ci ayant des conséquencesà la fois en modalité auditive et en modali-té visuelle. Les enfants implantés tardive-ment ont, en moyenne, obtenu 13.5% deréponses correctes de plus que les enfantsimplantés précocement et ceci portait par-ticulièrement sur la syllabe /bi/. Cette diffé-rence pourrait soit s’expliquer par le faitque leur expérience auditive a été encoreplus limitée que celle des enfants implantésprécocement et qu’ils ont, par conséquent,eu davantage l’occasion et le besoin d’utili-ser la lecture labiale pour percevoir laparole de la façon la plus performante possible. On ne peut toutefois exclure que

les meilleures performances en lecturelabiale des enfants implantés tardivementsoient dues à un simple effet d’âge ; ceux-ci,plus âgés en moyenne que les enfantsimplantés précocement, ont, par consé-quent, également plus d’expérience avec laparole visuelle. Notons aussi que lesenfants exposés au LPC ont obtenu plus deréponses correctes que les autres pour lessyllabes voisées (/bi/ et /gi/). Enfin, dans tousles groupes, y compris chez les normo-entendants, les syllabes avec un lieu d’arti-culation visible (/pi/ et /bi/) ont été globale-ment mieux perçues que celles avec un lieud’articulation postérieur (/gi/ et /ki/).

Dans la condition audiovisuelle congruente,nous n’avons pas observé de différence deperformance en fonction du moment depose de l’implant (80% de réponses correc-tes en moyenne pour chaque groupe), ni enfonction de l’utilisation du LPC (83% deréponses correctes en moyenne pour legroupe LPC+ et 77% pour le groupe LPC),si ce n’est, à l’instar de la condition auditi-ve, un avantage du groupe LPC+ limité à lasyllabe /gi/. Notons, par rapport aux condi-tions unimodales, une forte amélioration(de l’ordre de 20%) des scores d’identifica-tion, ce qui suggère que les enfants implan-tés sont parfaitement capables d’intégrerles informations des deux modalités senso-rielles pour améliorer leurs performancesde perception de la parole.

La condition audiovisuelle discongruentes’est marquée, chez les trois groupes decontrôle, par une faible proportion deréponses illusoires, particulièrement de

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Figure 2 : Pourcentages de réponses correctes en condition auditive en fonction de la pré-

cocité de la pose de l’implant, de l’utilisation du LPC et du type de stimulus

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fusions. Les réponses étaient très majoritai-rement auditives, comme si les participant-e-s ignoraient le canal visuel. Notons toute-fois que chez les adultes, le pourcentage deréponses auditives pour les items compre-nant une consonne vélaire en modalitéauditive (/gi/ et /ki/) était inférieur à 50%, lamajorité des réponses correspondant àl’illusion attendue (une combinaison). Cecisouligne l’évolution de l’effet McGurk avecl’âge. En ce qui concerne les enfants implan-tés, on note le même patron de réponsespour les quatre groupes, à savoir une trèsfaible proportion de réponses auditives,assez peu de réponses d’intégration et unemajorité des réponses de réponses visuel-les. Ce patron de résultat était le mêmepour tous les stimuli, à l’exception de A/pi/V/ki/ pour lequel les réponses d’intégration(/pki/) étaient aussi nombreuses que lesréponses visuelles. En cas de signal audiovi-suel discongruent, il semble donc que lesenfants implantés ne se fient que très peuau canal auditif, même pour l’intégrer avecle canal visuel.

Les causes de la faible utilisation, par lesenfants implantés, du canal auditif dans lecas de la parole audiovisuelle discongruen-te peuvent être multiples. On peut bien-sûrmettre en cause le caractère non optimalde la stimulation auditive via l’implant.Toutefois, il semble plus plausible de mettreen cause la durée de privation auditive pré-cédant l’implantation. En effet, Schorr et al.(2005) ont montré que seuls les enfantsimplantés avant 30 mois fournissaient unnombre significatif de réponses d’intégra-tion face à des stimuli audiovisuels dis-congruents. Or, dans notre échantillon de51 enfants, seuls trois d’entre eux ont étéimplantés avant cet âge. Une extension évi-dente de la présente étude serait donc detester des enfants ayant été implantés à unplus jeune âge ; l’absence d’effet du momentd’implantation dans la condition auditive etdans les deux conditions audiovisuellespouvant sans doute également s’interpré-ter en termes d’âge d’implantation enmoyenne assez tardif, même dans notregroupe « précoce ».

En ce qui concerne le LPC, nos hypothèsesn’ont pas été entièrement rencontrées

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Figure 4 : Pourcentages de réponses correctes dans la condition audiovisuelle congruente en

fonction de la précocité de la pose de l’implant, de l’utilisation du LPC et du type de stimulus.

Figure 5 : Pourcentages de réponses données dans la condition audiovisuelle dis-

congruente, en fonction de la précocité de la pose de l’implant, de l’utilisation du LPC, du

type de stimulus (le stimulus indiqué sur la figure correspond à la partie auditive du

signal) et du type de réponse donné (réponses auditives, réponses visuelle, réponses

d’intégration ou réponses autres).

dans la mesure où dans les 4 conditionsexpérimentales, le groupe LPC+ avait, defaçon générale, des performances similairesau groupe LPC-. Notons toutefois, quepour chaque modalité (A, V et AVc), le

facteur LPC interagissait avec le type de sti-mulus, indiquant de meilleures performan-ces pour le groupe LPC+ pour la syllabe /gi/dans les modalités auditive et audiovisuellecongruente et pour les syllabes /bi/ et /gi/

Figure 3 : Pourcentages de réponses correctes dans la condition visuelle en fonction de

la précocité de la pose de l’implant, de l’utilisation du LPC et du type de stimulus.

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dans la modalité visuelle. Cette observationet le fait que les stimuli étaient décontex-tualisés renforce l’idée selon laquelle l’utili-sation intensive du LPC permet d’acquérirdes représentations phonologiques mieuxstructurées. Ce bénéfice semble par ailleursse marquer particulièrement pour les sylla-bes les plus difficiles à identifier (e.g./gi/).

Enfin, il est intéressant de constater que sien cas de conflit audiovisuel, la modalitévisuelle est fortement privilégiée par l’en-semble des enfants implantés, en cas decongruence audiovisuelle (situation la plusproche de la vie quotidienne), les deuxmodalités semblent exploitées avec lemême poids, leur combinaison permettantd’atteindre en moyenne 80 % d’identifica-tions correctes, ce qui démontre la capaci-té des enfants implantés à intégrer lessignaux auditifs et visuels dans la percep-tion de la parole, même dans une situationde parole décontextualisée où les indicessémantiques, syntaxiques ou encore émo-tionnels ne peuvent être utilisés. Ce résul-tat témoigne une fois de plus de l’importan-ce du canal visuel dans la perception de laparole et encourage fortement son utilisa-tion dans les situations de communicationdes enfants implantés.

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L’ensemble des données et résultats quiprécèdent démontrent clairement l’intérêtdu recours à l’information visuelle tantdans le développement de la phonologiechez les sourds précoces que dans l’aide àla discrimination de la parole dans les situa-tions de pauvre rapport signal/bruit au seindu canal auditif, donc y compris (voir chapi-tre Xavier Perrot) dans la NA/DA.

Une évaluation systématique de ce typed’approche dans la remédiation de laNA/DA nous paraît dès lors justifiée quelque soit par ailleurs le mode thérapeutiqueappliqué au canal auditif (voir chapitre EricBizaguet).

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RÉFÉRENCES

CONCLUSION

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CHAPITRE XIV :IMPLANTATION COCHLÉAIREDANS LES NEUROPATHIES AUDITIVES

RÉSUMÉ

ABSTRACT

INTRODUCTION

Didier BOUCCARA1,

Jean Louis COLLETTE2,

Paul DELTENRE3

1 Service ORL,

Hôpital Beaujon, AP-HP 100

Boulevard du Général Leclerc

F-92110 Clichy France

E-mail :

[email protected]

2 92 rue de la Victoire 75009

Paris et Service ORL,

C.H.I.Créteil 40 avenue de

Verdun F-94000 Créteil

3 Clinique de Neurophysiologie,

Département de Neurologie,

CHU Brugmann,

place van Gehuchten, 4

B-1020 Bruxelles Belgique.

La place de l’implantation cochléaire (IC)en cas de Neuropathie Auditive/Désynchronisation Auditive (NA/DA) est àpriori limitée compte tenu, schématique-ment, des modalités de fonctionnement del’IC : stimulation des fibres du nerfcochléaire. Cependant les constatationscliniques montrent que lors de cette affec-tion les résultats fonctionnels obtenuspeuvent être proches, ou même équiva-lents, à ceux obtenus au cours des autresindications : surdités par atteinte « cochléaire ». Parmi les hypothèses évo-quées pour expliquer ce paradoxe l’uned’entre elle est basée sur la capacité rési-duelle des fibres nerveuses à répondre àdes stimulations synchronisées, telles quecelles réalisées par l’IC. Ces données sonten cours de précision grâce aux mesuresélectrophysiologiques réalisées lors desstimulations électriques par l’IC. En pra-tique clinique, la diversité des causes ettableaux cliniques de NA/DA implique deconsidérer cas par cas l’indication de réha-bilitation par IC.

by desynchronisation on Auditory BrainstemResponse (ABR). Clinical facts demonstratedthat in that condition CI could restore speechperception as in other cause of profound sen-sorineural hearing loss. By now CI devices givesthe opportunity to measure neural responsesand electrically evoked ABR, in order to determine correlation between clinical respon-ses and electrophysiologic data. Given thevariability of causes of AN/AD, each caseshould be individually evaluated beforecochlear implantation.

Hearing rehabilitation with cochlear implant(CI) during Auditory Neuropathy/ Dyssynchrony(AN/AD) appears to be a challenge: one of theclinical characteristics of the disease is the lossof effective neural conduction as demonstrated

Le diagnostic de Neuropathie Auditive/Désynchronisation Auditive (NA/DA) serévèle régulièrement difficile, d’où une sousévaluation de son incidence réelle. Cetteaffection est caractérisée par une surditéde perception plus ou moins rapidementévolutive, avec altération importante del’intelligibilité. Les éléments qui contribuentà l’établir sont essentiellement basés surdes tests audiologiques : audiométrie tonaleet vocale, Potentiels Évoqués AuditifsPrécoces (PEAP), enregistrement despotentiels microphoniques cochléaireset/ou des otoémissions acoustiques provo-quées (OEAP) comme précédemmentdécrit dans le chapitre IIIb du premiernuméro de cette monographie. Le traite-ment dépend de la sévérité de l’atteinteauditive et de l’éventuelle présence detroubles associés, en particulier visuels(voir chapitre par Colin et al. Dans cenuméro). Le bénéfice de l’appareillageconventionnel dans la NA/DA est limité en

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terme de compréhension de la parole,voire nul dans certains cas. Il reste cepen-dant proposé en première intention dansles formes les moins sévères avec conser-vation d’une intelligibilité suffisante enaudiométrie vocale (Truy et al., 2005). Sesmodalités font l’objet d’une revue danscette monographie (Bizaguet, ChapitreXII).A l’appareillage est associée unerééducation orthophonique permettantd’optimiser le niveau de communication enparticulier par l’apprentissage précoce dela lecture labiale.

L’indication d’un implant cochléaire dansles cas de NA/DA est basée sur l’absencede résultat fonctionnel satisfaisant avec lesautres méthodes de réhabilitation. L’idéede traiter la NA/DA par implantationcochléaire comporte a priori une contra-diction évidente : si c’est le nerf cochléairequi est atteint, quelle garantie possède-t-on que sa stimulation va se révéler effica-ce ? Par ailleurs, les formes dues à desatteintes localisées aux Cellules CiliéesInternes ou à la synapse pourraient théori-quement s’accompagner d’un certaindegré de dégénérescence transsynaptiquedu nerf.

En pratique les données cliniques montrent chez des patients souffrant deNA/DA, pour lesquels en l’absence de toutbénéfice avec les aides conventionnellesune indication d’implantation a étéretenue, un bénéfice important avec cetteprocédure (Miyamoto et al., 1999;Postelmans et Storkroos, 2006; Mason etal., 2003; Katada et al., 2005). Ces résultatssuggèrent que la stimulation électrique parl’Implant Cochléaire (IC), en particulieravec l’apport des stratégies de codage lesplus récentes, offre la possibilité de restau-rer une synchronisation de la réponse parles fibres du nerf cochléaire. Le développe-ment de mesures électrophysiologiques dela réponse neurale au moyen de l’IC estactuellement utilisé, tant en per-opératoireque lors des réglages. L’objectif de ce cha-pitre est de réaliser une revue desdonnées actuelles consacrées à cette indi-cation particulière d’IC.

En France les indications actuelles d’ICchez l’adulte sont les surdités profondes ousévères, pour lesquelles le niveau de discri-mination des mots ne dépasse pas 50 % à65 dB en champ libre, alors que le patientutilise les aides auditives adaptées de façonoptimale à son atteinte. Compte tenu desbénéfices obtenus avec l’IC, les extensionsactuelles des indications se font vers lessurdités sévères pour lesquelles ce niveaud’intelligibilité se situe entre 50 et 70 %. Iln’y a pas de limite d’âge supérieure à l’ICchez l’adulte, sauf en cas de troubles cogni-tifs, ce qui justifie une évaluation spécifiqueau-delà de 65 ans. Chez l’enfant il est admisque l’âge de l’implantation doit être le plusprécoce possible, sans limite supérieure,sauf dans les situations où l’enfant n’a déve-loppé aucune ébauche de la communicationorale au-delà de 4 ans. Le choix du côté àimplanter dépend de l’historique de lasurdité : dernière oreille entendante etbénéfice résiduel d’une aide auditive de l’undes deux côtés. Le choix du modèle d’ ICdépend de l’expérience de l’équipe ducentre d’implantation et des besoins spéci-fiques en terme d’interaction entre lesélectrodes de stimulation et le nerfcochléaire : niveau d’audition résiduelle,anomalie morphologique congénitale ouacquise de la cochlée.

Actuellement tous les modèles d’ICrécents disposent de la technologie compa-tible avec la réalisation de tests électro-physiologiques lors de l’intervention chi-rurgicale, puis secondairement lors desréglages. Ces tests explorent la réponseneurale directement liée à la stimulationélectrique ou les potentiels évoquésgénérés par celle-ci.

Un certain nombre de situations représen-tent des indications d’ IC bilatéral :patient présentant un risque d’ossificationcochléaire bilatéral en raison d’une ménin-

gite bactérienne récente ou d’une fracturedu rocher bilatérale ; mais aussi porteurd’un IC unilatéral avec un résultat suscepti-ble d’amélioration par une implantationbinaurale dans le cadre de la réinsertionsocio-professionnelle.

L’indication d’implantation fait l’objet d’uneévaluation pluridisciplinaire (audioprothé-siste, médecin ORL, orthophoniste, ensei-gnant, médecin traitant, radiologue…) etd’une information détaillée fournie aupatient et à son entourage, comportant enparticulier une rencontre avec un ou plu-sieurs implantés.

La question de l’implantation auditive dutronc cérébral lors de la NA/DA apparaîtlogique : elle consiste en effet à stimuler lesvoies auditives au-delà du nerf cochléaire, auniveau des noyaux cochléaires du tronc céré-bral. Cependant le caractère plus aléatoiredes résultats obtenus par l’implant du tronccérébral explique que cette dernière procé-dure n’est actuellement qu’exceptionnelle-ment retenue dans le cas de la NA/DA(Colletti et al.,2004) contrairement à d’autressituations pathologiques n’offrant aucuneautre possibilité : agénésie des nerfs cochléai-res,ossification cochléaire,Neurofibromatosede type 2 (Bouccara et al., 2007).

La NA/DA correspond du point de vuephysiopathologique à une anomalie locali-sée au niveau des cellules ciliées internes,de la synapse entre ces cellules et les fibresdu nerf cochléaire, des neurones du gan-glion spiral ou des fibres nerveuses ellesmêmes, voire d’une atteinte multifocale.Ces différents types d’atteintes correspon-dent probablement à des expressions cli-niques différentes (Rapin et Gravel, 2006;Loundon, 2007; Marlin et Van Maldergem,2007). La stimulation électrique des fibresdu nerf cochléaire telle que réalisée par l’IC

INDICATIONSACTUELLES DE

L’IMPLANTATIONCOCHLÉAIRE

ASPECTS PHYSIO-PATHOLOGIQUESDE LA NA/DA

ET IMPLICATIONSTHÉRAPEUTIQUES

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ne devrait donc, a priori, pas permettre uneactivation efficace des voies auditives dansles cas où ce sont les fibres nerveuses quisont atteintes. Comme nous le verrons, lesconstatations cliniques démontrent l’effica-cité de l’implant dans la grande majoritédes cas. Les propositions pour expliquerl’efficacité de l’IC sont les suivantes : d’unepart en cas d’atteinte de la synapse celluleciliée interne/neurone il est possible que laréponse de la fibre nerveuse à la stimula-tion électrique soit satisfaisante, d’autrepart il est envisagé que le caractère hyper-synchrone de la stimulation électriqueapportée par l’implant réussisse à restaurerun décours temporel satisfaisant à l’activiténeuronale (Truy et al., 2005). En pratique laréalisation d’un test de stimulation élec-trique au promontoire est un élément inté-ressant pour décider d’une implantationcochléaire (Mason et al., 2003), même s’ilne peut préjuger du résultat obtenu.

OEAP restaient présentes. Le diagnosticd’ataxie de Friedreich est posé et le patientest implanté. Les résultats fonctionnels,à distance d’un an de l’intervention,retrouvaient des seuils en audiométrietonale comparables à ceux obtenus chezdes enfants du même âge implantés pourdes surdités d’autre cause qu’une NA/DA.En revanche les niveaux de reconnaissancede mots étaient inférieurs. Cette observa-tion soulignait donc l’intérêt de l’IC en casde NA/DA, même si le bénéfice attendun’atteignait pas celui obtenu dans les autrescauses de surdité. Par la suite les publica-tions de différentes équipes ont montré lesbénéfices de l’IC chez des adultes et desenfants (Mason et al., 2003; Katada etal.,2005; Postelmans et Storkroos, 2006;Rouillon et al., 2006; Jeong et al., 2007;Raveh et al., 2007; Rance et Barker, 2008).

Récemment les travaux de Zeng ont confir-mé l’apport de l’implantation cochléairechez les patients présentant une NA/DA(Zeng et Liu, 2006). Cette étude présentel’intérêt d’évaluer les bénéfices de la réha-bilitation auditive par l’IC, à la fois dans lecalme et dans le bruit, mais aussi en compa-rant les perceptions monaurales et binaura-les ainsi que bimodales : acoustiques etélectriques. L’apport de la stimulationbinaurale est démontré dans le calme maispas dans le bruit. Enfin les auteurs discutentl’intérêt potentiel de nouvelles modalitésd’amplification prothétique en terme detransposition fréquentielle, particulière-ment adaptées aux anomalies perceptiveslors de la NA/DA.

Les données publiées, en particulier parShallop (Shallop et al., 2005) illustrent lesrenseignements fournis par les mesuresélectrophysiologiques quand une IC est

réalisée chez un patient souffrant deNA/DA :

- En pré-opératoire : la caractérisation dudiagnostic de NA/DA : surdité confirméeen audiométrie avec les tests adaptés àl’âge du patient, absence de réponse àl’étude des PEAP (clicks et/ou tone-bursts), réponses conservées à l’étudedes OEAP et potentiels microphoniquescochléaires.Dans une étude portant sur 39 enfantsprésentant une NA/DA, Gibson et Sanli(2007) ont analysé les réponses obtenueslors de la stimulation de la fenêtre rondeà l’aide d’une électrode conçue spéciale-ment, avec une forme en « club de golf ».L’identification par cette procédure d’uneonde positive anormale précoce lors desstimulations électriques, et sa corrélationavec les potentiels évoqués par stimula-tion électrique, présente pour lui unintérêt pronostique quant au résultatfonctionnel obtenu avec l’IC.

- En per-opératoire les enregistrements desréponses neurales, correspondant auxpotentiels d’action composites évoquésélectriquement, sont effectués une foisréalisée l’insertion des électrodes dans lacochlée. Ils permettent de valider le fonc-tionnement de l’IC et la présence deréponses auditives. La procédure est diffé-rente selon le modèle d’implant, avec desalgorithmes de stimulation spécifiques :

• Avec les implants de la firme Cochlear®,modèle FreedomTM, il s’agit de la NRT(Neural Response Telemetry). La stimula-tion électrode par électrode permet devalider la présence du potentiel d’actioncomposite, et de ce fait d’une part le bonfonctionnement de l’implant et d’autrepart la présence d’une réponse auditive.L’artefact lié à la stimulation est masqué.Grâce à des protocoles de recherche deseuils ces mesures sont particulièrementutiles pour optimiser les seuils de détec-tion et de confort lors de l’activation etdes réglages des électrodes chez l’enfant(Cafarelli Dees et al., 2005). Il existe uneprocédure totalement automatisée :AutoNRT.

Les données de la littérature se résument àla description de cas isolés ou limités ennombre, du fait même de l’incidence de laNA/DA. Cependant les publications les plusrécentes confirment l’efficacité de l’IC lorsde la NA/DA.

En 1999 Miyamoto rapporte ce qui sembleêtre le premier cas documenté d’uneimplantation chez un enfant de 4 ans pré-sentant une surdité de perception rapide-ment évolutive, avec des fluctuations, asso-ciée à des troubles visuels et de l’équilibre(Miyamoto et al., 1999). Le diagnostic deNA/DA est établi à l’âge de 4 ans et à 6 anset demi, l’altération auditive est majeure :intelligibilité nulle d’un côté et très faible del’autre (8% de reconnaissance des mots). Ils’y associe une aggravation des troublesvisuels et de l’équilibre. A noter que les

RÉSULTATS DEL’IMPLANTATION

COCHLÉAIRELORS DE LA

NEUROPATHIEAUDITIVE

APPROCHEÉLECTROPHYSIO-

LOGIQUE DE LASTIMULATION

ÉLECTRIQUE LORSDE LA NA/ DA

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( Dossier

• Pour les implants de la firme AdvancedBionics® il s’agit de la NRI (NeuralResponse Imaging). Elle est basée sur l’en-registrement de la réponse neuraleobtenue lors de la stimulation de pairesd’électrodes réparties sur le faisceau del’implant HiRes90KTM (Akin et al., 2006).Des corrélations avec les seuils de réglageont été là aussi établies.

• Avec les modèles d’implant Med El® laprocédure de recueil est dénommée ART(Auditory Nerve Response Telemetry).Elle permet de déterminer les seuilsobjectifs de stimulation électrique s’ac-compagnant de l’apparition d’un potentield’action, mais aussi d’évaluer le temps derécupération des fibres du nerf auditifaprès une stimulation électrique (Abbaset al., 2004).

• Les implants Neurelec® permettent unrecueil des potentiels évoqués auditifs àpartir d’une stimulation électrique, d’oùune évaluation des seuils « objectifs »telle que réalisée avec les stimulationsacoustiques (PEAP) ou électriques lorsdes tests au promontoire.

Enfin Akunda et al. (2006) ont démontré lapossibilité de réaliser un monitoring de lafonction cochléaire par recueil des poten-tiels microphoniques durant l’implantationcochléaire.

- En post-opératoire les mesures réaliséesvont être essentiellement utiles aux régla-ges chez l’enfant implanté pour unesurdité pré-linguale. Les donnéesrecueillies par Shallop et al. (2005) illustrent, à partir de cas détaillés,comment la stimulation par l’IC évoqueune réponse électrophysiologique parfai-tement synchronisée tant au niveau despotentiels d’action du nerf évalué parNRT qu’aux réponses du tronc cérébralévaluées par PEAP. Dans une publicationrécente, Runge-Samuelson et al. (2007)ont comparé les réponses de 5 enfantssouffrant de NA/DA et implantés, à cellesd’un groupe « témoin » de 27 enfants présentant une surdité congénitale et euxaussi implantés.

Les résultats vont dans la même directionque ceux de Shallop mais avec des variations interindividuelles que les auteursrattachent à l’hétérogénéité des causes deNA/DA.

Au total les procédures de réglage, et enparticulier de détermination des seuils dedétection et de confort, tirent bénéfice desmesures électrophysiologiques (réponsesneurales, potentiels évoqués)

Le diagnostic de NA/DA est réalisé à partirde données cliniques et audiologiques. Dupoint de vue thérapeutique si la réalisationd’une implantation cochléaire semble àpriori non appropriée dans la NA/DA, lesrésultats cliniques obtenus prouvent sonefficacité en terme de réhabilitation desformes les plus sévères.

Le choix de l’implantation cochléaire bilaté-rale mérite d’être discuté car cette procé-dure a montré son efficacité dans les surdi-tés acquises de l’adulte et devrait en cas deNA/DA concourir à optimiser les résultatsfonctionnels (Müller et al., 2002; Ramsdenet al., 2005).

Par ailleurs les techniques d’imagerie fonctionnelle auditive par IRM ouTomographie à Emission de Positons,devraient permettre de mieux évaluer lesréponses corticales lors de stimulationsélectriques chez les patients souffrant deNA/DA (Coez et al., 2007).

Enfin le développement de thérapeutiquesdélivrées in situ par l’intermédiaire de l’im-plant cochléaire, en particulier des facteursneurotrophiques, représente une perspec-tive potentiellement intéressante au coursde la NA/DA (Nouchi et al,2005).

CONCLUSIONS :INTERROGATIONSET PERSPECTIVES

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RÉFÉRENCES

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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57

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

Dossier )

CHAPITRE XV :NEUROPATHIE, SYNAPTOPATHIE,ATTEINTE SENSORIELLE, FORMES PARTIELLESDE NEUROPATHIE, NOUVELLES ÉTIOLOGIES :VARIATIONS SUR UN THÈME CONNU

RÉSUMÉ

ABSTRACT

N. LOUNDON1, S. MARLIN2,

D. BOUCCARA3, Th. MORLET4,

T. BECKER5, P. DELTENRE6 et

J.L. COLLETTE7

1Service d’ORL et de chirurgie de la

face et du cou. Hôpital d’Enfants

Armand Trousseau, 26 avenue du

Docteur Netter, F-75571, Paris,

France. E-mail :

[email protected]

2Centre de Référence des Surdités

Génétiques Service de Génétique

Hôpital d’Enfants Armand

Trousseau, 26 avenue du Docteur

Netter, F-75571, Paris, France.

E-mail : [email protected]

3Service ORL, Hôpital Beaujon, AP-

HP 100 Boulevard du Général

Leclerc F-92110 Clichy France

E-mail : [email protected]

paris.fr

4Auditory Physiology and

Psychoacoustics Laboratory. Center

for Pediatric Audiology and Speech

Sciences. A.I. DuPont Hospital for

Children. Wilmington, DE USA.

E-mail : [email protected]

5 AuD Hearing, Lake Geneva, WI, USA

E-mail : [email protected]

6 Clinique de Neurophysiologie,

Département de Neurologie, CHU

Brugmann, place Van Gehuchten, 4

B-1020 Bruxelles Belgique.

E-mail : [email protected]

7 Sce ORL CHI Créteil, 40 avenue de

Verdun F-94010 Créteil et 92 rue de

la Victoire F-75009 Paris France

Ce chapitre, au contenu quelque peupanaché, comporte trois parties. La premiè-re revient sur la discussion de l’adéquationde la dénomination Neuropathie Auditive/Désynchronisation Auditive dans les cas oùl’anomalie lésionnelle siège clairement enamont des fibres nerveuses. Au-delà desaspects purement sémantiques et de la divi-sion des structures sur base anatomique, ildécrit la position défendue par A. Starrselon laquelle les cellules ciliées internespourraient être considérées comme uncomposant nerveux spécialisé produisantdes neurotransmetteurs, plutôt qu’unélément purement sensoriel. Le contenu dece chapitre attire également l’attention surla possibilité de dégénérescence transsy-naptique de la partie distale des prolonge-ments dendritiques des neurones de Cortisecondairement à une atteinte primaire descellules ciliées internes.

La deuxième partie du chapitre décrit untableau particulier interprété comme uneNeuropathie Auditive/DésynchronisationAuditive partielle, où les potentielsévoqués auditifs précoces sont conservésà forte intensité uniquement.

La troisième partie enrichit la liste, pour-tant déjà longue, mais vraisemblablementencore incomplète, des circonstancespathologiques pouvant déclencher une

Neuropathie Auditive/Désynchronisation

Auditive en rapportant deux cas secondai-

res à un traumatisme crânien.

This chapter has a patchwork structure organi-zed in three parts.

The first one revisits the question of the ade-quacy of the Auditory Neuropathy/AuditoryDyssynchrony label for cases in which thecausal anomaly is definitely located distally tothe nerve fibres. Going beyond the purelysemantic dimension, it contrasts an anatomical-ly-based division of the structural componentsinvolved with A. Starr’s opinion according towhich Inner Hair Cells can be considered asspecialized neural elements producing neuro-transmitters rather than as purely sensorystructures.The chapter also draws attention tothe possible role of trans-synaptic degenerationof the distal parts of the dendritic processes ofthe spiral ganglion cells consecutive to aprimary lesion of the Inner Hair Cells.

The second part of the chapter describes anunusual pattern of results in which AuditoryBrainstem Responses are preserved at high sti-mulus levels only and which is interpreted asindicating a partial Auditory Neuropathy/Auditory Dyssynchrony.

The third and last part adds one item to analready long, but most probably yet incomplete

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Arrivé à ce stade de la description de laNeuropathie Auditive / DésynchronisationAuditive (NA/DA), le lecteur de cettemonographie aura perçu l’existence d’unmalaise lié au degré d’imprécision de laterminologie actuellement en vigueur. Eneffet, même si l’utilisation relativementrécente de la dénomination NA/DA consa-cre la reconnaissance de mécanismes alter-natifs, indépendants d’une authentiqueneuropathie (Berlin et al., 2001; Rapin etGravel, 2003), mais se manifestant néan-moins par un tableau répondant à la défini-tion opérationnelle rappelée à plusieursreprises dans les chapitres précédents, lelabel NA/DA reste insuffisant pour couvrirtous les cas de figures qui se présententsous cette forme. En outre, l’imprécisionsémantique qui affecte l’étiquette diagnos-tique peut contribuer au développementde concepts erronés et donc de choix thé-rapeutiques incorrects, tant chez lespatients que chez différentes catégoriesde professionnels de la santé (Berlin et al.,2001).

Le contenu de ce chapitre résulte d’unetriple source d’inspiration. La premièredécoule d’une agréable discussion quiréunit, autour d’une table parisienne auxsenteurs gasconnes, les auteurs francopho-nes de ce chapitre et qui eut pour thèmele problème de l’adéquation de l’étiquettediagnostique pour les cas où la lésion peutêtre localisée dans la cochlée (CellulesCiliées Internes : CCI et synaptopathie).

La deuxième fut suscitée par une petitesérie d’observations partageant un profilde résultats physiologiques conduisant àl’hypothèse d’une forme particulière de ceque nous continuerons à appeler, faute demieux, NA/DA.

La troisième intégralement due à ThierryMorlet, provient de l’observation, à notreconnaissance, entièrement inédite à cejour, d’un tableau de NA/DA acquis aprèsun traumatisme crânien.

Est-il légitime de qualifier de neuropathietoutes les formes de déficience auditiverépondant aux critères de la définition opé-rationnelle alors que dans bien des cas, rienne permet de démontrer l’atteinte des affé-rents primaires ? D’un point de vue séman-tique, la réponse est clairement négativecomme le rappellent avec une certainevigueur Rapin et Gravel dans leur article de2003. Et a fortiori lorsque, comme dans lasynaptopathie à l’otoferline pour laquelleun marqueur génétique est disponible (voirchapitre VI dans le numéro précédent descahiers), on dispose de la certitude que l’anomalie siège en dehors du nerf cochléaire, le terme paraît inadapté. Unpoint de vue plus nuancé - et à notreconnaissance, exprimé pour la premièrefois par écrit dans les colonnes des cahiersde l’audition - se trouve sous la plumed’Arnold Starr, dans l’introduction de laprésente monographie. Force est, avanttout, de constater que le père du conceptde la NA ne semble pas pressé de rallier lecamp de ceux qui modernisent l’étiquettede l’entité en NA/DA. Et, quoiqu’il n’abordepas explicitement la question, A. Starrexprime clairement, dans la dernièrecolonne de son introduction, une opinionqui permet de deviner les origines de sarésistance. Starr écrit qu’il considère lesCCI comme un élément nerveux spéciali-sé produisant des neurotransmetteurs maispas de potentiels d’action. Il rassemble ainsiles éléments pré- et post- synaptiquescochléaires en une unité fonctionnelle cor-respondant à ce que H. Davis avait baptiséune unité sensorielle : un neurone primaire(c.à.d. appartenant au ganglion de Corti)afférent et la cellule ciliée à laquelle il se

connecte (Davis, 1962). Cette façon de voirles choses, guidée par la physiologie plutôtque l’anatomie, est évidemment en contra-diction flagrante avec l’idée qu’une atteintesélective des CCI comme celle que l’onpeut obtenir expérimentalement (Harrison,2000) ou dans certaines cas d’hypoxie péri-natale (Amatuzzi et al., 2001) constitue,parce que confinée à l’épithélium sensoriel,une atteinte sensorielle pure. En outre, plu-sieurs études expérimentales suggèrent(Takeno et al., 1998 ; Harrison, 2000) queles atteintes primaires des CCI sontimmanquablement suivies d’une dégénéres-cence des neurones du ganglion de Corti etmême d’un certain degré d’atrophie desneurones de second ordre. Pourtant,l’étude d’Amatuzzi et al. (2001) démontrantl’atteinte sélective des CCI chez desenfants prématurés décédés en unité desoins néonataux, n’a pas mis de perteneuronale en évidence, ce qui tendrait àfaire considérer ce tableau comme uneatteinte sensorielle. Toutefois, A. Starr(communication personnelle) estime qu’onne peut exclure une association lésionnellesystématique entre CCI et afférent primai-re tant que l’on n’a pas examiné les termi-naisons nerveuses distales. Il existe en effetune série de données suggérant que lepatron de dégénérescence secondaire desafférents primaires puisse varier en fonc-tion de l’espèce considérée et du mécanis-me de l’atteinte primaire (White et al.,2000). En ce qui concerne l’espècehumaine, plusieurs travaux rapportent unpatron d’atteinte antérograde, portantprincipalement sur l’extrémité distale, pré-ganglionnaire du neurone de Corti (VoirWhite et al., 2000 pour un résumé). Cetensemble de données et considérationsont amené A. Starr à proposer l’utilisationde la dénomination NA de type I ou NAproximale pour les atteintes primaires desneurones de Corti touchant le corps cellu-laire et les prolongements périphériques etcentraux des afférents primaires (Starr etal.,2004), comme on le voit dans la maladiede Charcot-Marie-Tooth. Par contre, lestableaux de NA/DA correspondant à unedégénérescence secondaire, antérogradede la partie distale, préganglionnaire desafférents primaires, avec une atteinte

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

( Dossier

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INTRODUCTION

1

enumeration of medical circumstances known tobe able to cause an Auditory Neuropathy/Auditory Dyssynchrony by reporting two casesacquired after closed head trauma.

QUAND LASÉMANTIQUES’EN MÊLE...2

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

Dossier )

relativement faible voire absente des corps cellulaires et des axones, seraient appelées NAde type II ou NA distale (Starr et al., 2004).

Dans un tout autre ordre d’idées, néan-moins d’une portée pratique essentielle,l’expérience croissante construite à partirde la population d’enfants atteints desynaptopathie à l’otoferline indique quequoique répondant à la définition opéra-tionnelle de la NA/DA, ces sujets ne distin-guent guère, en terme de sémiologie auditi-ve et de réponse au traitement, des autrescas de surdité profonde. Dès lors, il neparaît pas justifié, du point de vue de laprise en charge, de les considérer commeune entité tellement différente des attein-tes cochléaires classiques. Il reste bienentendu indispensable d’effectuer unerecherche active et systématique de lasynaptopathie à l’otoferline chaque fois quele cas présente un profil compatible (voirchapitre VI du cahier précédent), afin d’enconnaître l’incidence réelle, d’être à mêmede rendre un éventuel conseil génétique etde pouvoir proposer, le jour où il seradisponible, le traitement spécifique adapté.

A notre connaissance, il n’existe pas d’in-formation sur l’état des prolongementspériphériques du ganglion de Corti dans lasynaptopathie à l’otoferline, mais il est sansdoute judicieux de garder à l’esprit qu’a-près avoir rapidement disparu des neuro-nes, cette protéine s’exprime à nouveau(du moins chez le rat), à partir du huitièmejour post natal, dans les prolongementspériphériques du ganglion spiral (Schug etal., 2006). En fonction du raisonnementdéveloppé plus haut, il nous paraît utile detenter de vérifier, lorsque l’occasion s’enprésentera, la présence – ou non – dedégénérescence neurale dans la synaptopa-thie à l’otoferline.

A la lumière de l’ensemble des considéra-tions qui précèdent, il apparaît que l’éti-quette de l’entité n’a pas fini d’évoluer.Avecles progrès des techniques génétiques etmoléculaires d’identification des déficits,nous disposerons progressivement d’unnombre croissant de termes précis pourdésigner les différentes formes de surditérépondant à la définition opérationnelle de

Lorsqu’en 1996, l’un d’entre nous était enstage à Madison (WI) dans le laboratoire duProf. Kurt Hecox où Bob Lasky développaitles applications des Produits de DistorsionAcoustiques (PDA), on nous y montra unpatron de résultats très inhabituel, obtenuen collaboration avec Tim Becker, l’audiolo-giste qui suivait l’enfant concerné (voirfigure 1).

Les données de la figure 1 proviennent d’unjeune garçon atteint d’une surdité familialeprogressive atteignant sa mère et sa grand-mère. En 1994, il possédait encore desPotentiels Evoqués Auditifs Précoces

EXISTE-T’IL DESFORMES « PAR-

TIELLES » DENA/DA ?

3

Figure 1 : Données issues de l’oreille droite de l’enfant du Wisconsin atteint d’une surdité

familiale progressive : TEOAE (Transient Evoked Oto-Acoustic Emissions) : les OEAP au

clic sont bien présentes malgré (ABR) l’absence d’onde V sous 80 dB à l’enregistrement

des PEAP au clic. Les PDA (DPOAE : Distortion Product Oto-Acoustic Emissions) sont éga-

lement bien présents de 2 à 8 kHz.

ce qui est actuellement appelé NA/DA,comme par exemple la synaptopathie à l’otoferline. C’est donc en toute connais-sance de cause que nous avons choisi, pourrédiger la présente monographie, d’utiliserle vocable NA/DA qui nous semble possé-der la vertu de faire le lien avec toute la lit-térature antérieure à 2001 dans laquelle onne trouve pratiquement que le terme NAet celle plus récente qui élargit la descrip-tion en mentionnant un élément physiopa-thologique supposé jouer un rôle majeurdans la symptomatologie : la désynchronisa-tion des influx afférents. Ici aussi cependant,il convient de rester ouvert à d’autres typesde trouble de l’encodage neural dans lesafférents primaires. Comme discuté dans lechapitre X de ce cahier, la détérioration durapport signal/bruit du code neural repré-sentant le décours temporel des stimuliauditifs peut tout aussi bien résulter d’uneréduction des entrées neuronales qued’une authentique désynchronisation desinflux afférents.

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(PEAP) dont le seuil de l’onde V (70-80 dB)était en accord avec celui de l’audiogrammetonal. Pourtant ses Oto-EmissionsAcoustiques Provoquées (OEAP) au clic etses PDA étaient préservés. En quelquesannées, il perdit les deux types d’oto-émis-sions tandis que les seuils des PEAP s’éle-vaient avec persistance du PotentielMicrophonique Cochléaire (PMC). Letableau illustré par la figure 1 nous fit sou-lever l’hypothèse d’une NA (on ne parlaitpas encore NA/DA à l’époque !) partielle.Qu’entendons-nous par là ? Il est bienconnu que chaque CCI qui constitue en soiune unité de réception mécanique assurantla transduction suivie de la mise en place ducode neural primaire dans le nerf cochléai-re, est innervée par 20 à 30 prolongementspériphériques du ganglion spiral.Autrementdit, chaque détecteur mécanique distribueson information à une escouade d’afférents

primaires qui individuellement, représen-tent autant de fibres du nerf cochléaire.Parmi les 20 à 30 fibres innervant chaqueCCI, on peut en distinguer trois types surbase de critères physiologiques : celles quipossèdent un rythme spontané élevé et desseuils bas épousant ceux de l’audiogrammecomportemental, celles à rythmes sponta-nés moyens et seuils moyens, et celles àrythmes spontanés faibles et seuils élevés(Liberman et Kiang, 1978). Une hypothèseplausible pour expliquer le tableau derésultats représenté à la figure 1 consistedonc en une atteinte des fibres à seuils baset moyens produisant des influx désynchro-nisés ou réduits en nombre avec pourconséquence l’absence de PEAP aux inten-sités où elles seules sont activées. Parcontre, une fois atteint le seuil des fibres(supposées normales) à seuils élevés, unPEAP bien synchronisé peut être évoqué.

Ce tableau semble être exceptionnel, parceque malgré une vigilance sans cesse enalerte, nous ne l’avons jamais retrouvé, dumoins dans sa forme complète avec préser-vation des oto-émissions. Ce qui par contren’est pas exceptionnel, c’est le tableau illus-tré par la figure 2.

Le paradoxe le plus frappant dans l’ensem-ble de résultats illustré à la figure 2 résultede la combinaison d’un tableau d’atteintecochléaire avec une relation intensité-latence pour l’onde V qui est du type « segment H isolé » avec persistance d’unPMC dont le seuil d’évocation est égal àcelui de l’onde V. Les relations intensité-latence du type « segment H isolé » cons-tituent un type de résultat électrophysiolo-gique assez fréquent dans les atteintescochléaires (Deltenre et Mansbach, 1995;Markessis et al. 2007). Il a également été

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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( Dossier

Figure 2 : Données issues de l’oreille gauche d’un enfant de 21 mois examiné pour suspicion de déficience auditive dans le contexte d’une

surdité familiale.

(a) PEAP : comparaison entre les réponses à des clics de raréfaction et de condensation pour chaque intensité. On observe un net PMC pré-

cédant l’onde I. Il est probable que le PMC se prolonge durant plusieurs ms, mais les contraintes de l’examen n’ont pas permis de réali-

ser une épreuve d’adaptation qui aurait permis de vérifier la nature présynaptique de cette activité tardive en opposition de phase entre

les deux polarités acoustiques. Le seuil d’évocation, tant de l’onde V que du PMC est situé entre 50 et 55 dB nHL.

(b) La relation intensité-latence de l’onde V (cercles noirs rapportés à l’axe des ordonnées de gauche) mesurée sur les traces évoquées par

le clic de raréfaction est du type segment H isolé. Les croix noires indiquent les latences des ondes I, rapportées à l’axe des ordonnées

de droite.

(c) Audiogramme estimé à partir des seuils des potentiels stationnaires. Il confirme la prédiction associée au segment H isolé, à savoir un

profil audiométrique plutôt horizontal, dont le seuil à 4 kHz est en parfait accord avec celui mesuré par le clic.

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Dossier )

décrit sous le vocable de « sudden respon-ders » (Hecox et al, 1989) décrivant le faitque dès que l’on atteint le seuil du PEAP, salatence est brève (normale pour l’intensitéutilisée, mais trop brève pour une latenceau seuil). Les électrocochléographistesavaient déjà bien décrit ce tableau de rela-tion intensité-latence (mais appliquée aupotentiel d’action cochléaire) du type Hisolé en démontrant qu’il était associé à desprofils audiométriques horizontaux (Yoshie1976) et au recrutement de la sonie (Aran

et al., 1969). Sur base d’expérimentationsanimales utilisant les aminoglycosides, letableau du segment H isolé a pu être attri-bué à une destruction sélective des CCE(Wang et Dallos, 1972) ce qui devrait dèslors éliminer quasi complètement le PMCqui, lorsqu’il est enregistré en surface, estdominé à plus de 90% par l’activité desCCE (Dallos et Cheatham, 1976). Letableau illustré par la figure 2 suggère donc,comme celui de la figure 1, la préservationde la réponse des CCE en présence d’une

élévation des seuils avec absence de PEAPdans la moitié inférieure de la dynamique.Lors de l’enregistrement des données de lafigure 2, réalisé sous sédation, la présenced’oto-émissions n’a pu être déterminée enraison de l’importance du bruit respiratoi-re émis par l’enfant.

La figure 2 est à contraster avec la figure 3qui illustre, pour comparaison, le tableauclassiquement associé avec une relationintensité-latence réduite à un segment H

Figure 3 : données issues de l’oreille gauche d’une enfant de cinq ans et demi examinée sous sédation pour bilan d’hypoacousie difficile à

cerner par les épreuves psychoacoustiques.

(a) La relation intensité-latence de l’onde V relevée à partir des tracés évoqués par le clic de raréfaction est du type segment H isolé.

(b) PEAP : le seuil d’évocation de l’onde V est situé entre 50 et 55 dB. La comparaison systématique entre les polarités acoustiques de raré-

faction et de condensation à chacune des intensités supraliminaires ne révèle aucun PMC, ce qui est conforme aux attentes si le segment

H isolé reflète bien une destruction sélective des CCE.

(c) Le profil audiométrique estimé à partir des seuils des potentiels stationnaires est également conforme à la prédiction établie sur base

de la relation intensité-latence : profil globalement horizontal, centré vers 2-4 kHz sur le seuil de l’onde V au clic.

(d) PDA : ils sont totalement absents, à aucune fréquence, le signal ne se détache du bruit de fond.

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

62

( Dossier

isolé : comme escompté en présence d’uneatteinte sélective des CCE, on n’identifieaucune activité microphonique résiduelleet les PDA sont totalement absents.

Aussi intéressante qu’elle soit, cette hypo-thèse de neuropathie partielle ne touchantqu’une partie des fibres du nerf cochléairereste entièrement à démontrer, ce qui nepourra se réaliser qu’en accumulant unnombre suffisant de données de ce type eten suivant les enfants atteints jusqu’à ceque leur atteinte auditive puisse êtreévaluée en détail par des méthodes psycho-acoustiques ( Zeng et al., 2005).

CONCLUSIONS

3

LA LISTE DESAVATARS DE SANTÉ

SUSCEPTIBLES DEDÉCLENCHER UNE

NA/DA NE CESSE DE

S’ALLONGER…

4

Le premier tome des cahiers de l’audi-tion consacré à cette monographie comporte plusieurs chapitres se complé-tant avec l’ambition d’établir une listeexhaustive des conditions médicalespouvant être à l’origine de la NA/DA. Ilétait à peine sous presse qu’un desauteurs (TM) de ce chapitre a observédeux cas pédiatriques de NA/DA acquiseaprès trauma crânien, une conditioncausale qui à notre connaissance n’ajamais été rapportée.

Le premier cas est celui d’une fillette detrois ans qui a développé une surdité etune détérioration de la parole après untrauma crânien. Le bilan physiologique amontré, pour chaque oreille, l’absence detout PEAP en présence d’un PMC, l’ab-sence de réflexes stapédiens et la pré-sence de PDA.

Le second cas concerne un garçon dehuit ans qui également après un traumacrânien a développé un tableau cette foisunilatéral de NA/DA avec PEAP très

anormaux, PMC et PDA préservés ducôté atteint où l’audiogramme montraitune perte légère. A noter que lesréflexes stapédiens étaient tous abolis àl’exception du réflexe ipsilatéral à la sti-mulation de l’oreille restée normale, cequi suggère une lésion débordant la voieafférente de l’oreille atteinte.

La figure 4 illustre les résultats obtenuschez le premier de ces enfants.

Figure 4 : PEAP de l’oreille droite (a) et de l’oreille gauche (b) chez une fillette après un

trauma crânien. Le PMC est très visible dans les 2 oreilles. La diminution d’intensité de

stimulation montre clairement que la latence des différents pics composant le PMC ne

varient pas, contrairement au comportement des réponses neuronales lorsqu’elles sont

présentes. Les PDAs sont présents dans les 2 oreilles (c).

Il est vital de conserver à l’esprit que leconcept de NA/DA ne recouvre qu’unedéfinition opérationnelle décrivant unensemble d’atteintes auditives aux mécanis-mes finalement extrêmement variés. Un

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Dossier )

des intérêts du concept réside dans le faitqu’il oriente la recherche du mécanismephysiopathologique dans une série dedirections dont l’élagage progressif se réali-sera en fonction des informations fourniespar le contexte dans lequel il s’exprime. Unautre intérêt est que le tableau de NA/DAindique que l’on se trouve en présenced’une distorsion plus ou moins sévère de lareprésentation temporelle des stimuli, etque plus cette distorsion est sévère, moinsla correction des seuils par les algorithmesd’amplification utilisés dans les atteintescochléaires classiques seront efficaces. Parcontre, sous réserve toutefois d’avoir puéliminer certaines étiologies associées àune atteinte sévère des fibres nerveuses(agénésie du nerf cochléaire pour prendreun exemple extrême), la remédiation parimplant cochléaire se révélera efficace dansune majorité de cas.

Le concept NA/DA est probablement loind’avoir fini d’évoluer. La liste des circons-tances potentiellement liées à son appari-tion continue à s’allonger et l’on suspectel’existence de formes partielles, aux PEAPpréservés à forte intensité, ce qui ne facili-te pas leur détection.

Il y a peu de doutes que la NA/DA va sefaire progressivement démembrer enentités étiologiques et physiopathologiquesprécises. Chacun d’entre nous, appelés àdiagnostiquer, traiter, conseiller ces patientsavons l’opportunité, si nous restons vigi-lants, de participer à cette passionnanteaventure.

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RÉFÉRENCES

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65

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

Dossier )

CHAPITRE XVI :REMÉDIATION (RÉHABILITATION) DE LANEUROPATHIE AUDITIVE /DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE :EXPÉRIENCE D’UN CENTRE DE RÉADAPTATION

RÉSUMÉ

ABSTRACT

Malgré l’existence de recommandationspubliées pour la prise en charge de laNeuropathie Auditive/DésynchronisationAuditive, de nombreuses inconnues et opinions divergentes persistent sur lesujet. En outre, l’affection se caractérisepar une importante variabilité inter- voireintra- individuelle. Le pronostic en est ainsiparticulièrement difficile à établir.

L’expérience de notre centre, portant suronze enfants atteints à un stade pré-lingual,porteurs de déficience auditive moyenne àprofonde et suivis depuis au moins six anssuggère l’importance du rôle de la présencede handicaps associés, en particulier neuro-logique, mais aussi de nature psycho-socialeou de l’exposition simultanée à plusieurslangues. Seuls quatre enfants sur les onzeont atteint un niveau de développement dulangage conforme à leur âge (quotient lin-guistique voisin de 100%).Aucun ne souffraitde handicap associé alors que les septautres, tous affligés d’au moins un handicap associé, obtenaient des quotientslinguistiques oscillant entre 36 et 67%.Aucune corrélation entre les résultats et leniveau de déficience auditive ou le typed’aide prothétique (amplification ou implantcochléaire) n’a été mise en évidence. Nousavons encore beaucoup à apprendre surles multiples déterminants de l’évolution lin-

guistique des enfants porteurs deNeuropathie Auditive/DésynchronisationAuditive.Le projet de constitution d’une basede données internationale extensive devraitconstituer une aide considérable à cet égard.

Despite the availability of published recommen-dations for the management of AuditoryNeuropathy/Auditory Dyssynchrony, numerousquestions remain unanswered and different opi-nions can still be found on the subject.Moreover, the entity is characterized by animportant inter- and even intra- individual varia-bility.This makes prognosis particularly difficult.

The experience accumulated in our rehabilita-tion center comes from eleven children diagno-sed at an early, pre-lingual stage and havingauditory deficits ranging from moderate-severeto profound hearing loss. They have been followed-up for at least six years. The resultsindicate that a major determinant of the levelof language development is the presence orabsence of associated handicap(s), particularlyneurological deficits, but also psycho-social problems and simultaneous exposure to two ormore languages. Only four out of the elevenchildren reached a level of language develop-ment appropriate for their ages (LinguisticQuotient around 100%). None of them had anassociated handicap whereas the seven others,each of them being afflicted with at least one

Ventura MANCILLA1,

Chantal LIGNY1,

Laurence MATAGNE1,

Isabelle COURTMANS1,

Brigitte CHARLIER1-2,

Anne-Laure MANSBACH3,

Thierry RENGLET1, Pierre DEVOS1,

Bernard DACHY4, Paul DELTENRE5.

1 Centre Comprendre et Parler,

101 rue de la rive, B-1200 Bruxelles.

E-mails : [email protected] ;

[email protected];

[email protected] ;

[email protected];

[email protected];

[email protected];

[email protected];

2 Université Libre de Bruxelles

(U.L.B.)

Avenue F.D. Roosevelt, 50

1050 Bruxelles

3 Service d’ORL pédiatrique, Hôpital

Universitaire des Enfants Reine

Fabiola, U.L.B.

E-mail :

[email protected]

4Clinique de Neurologie,

Département de Neurologie,

CHU Brugmann,

place Van Gehuchten, 4 B-1020

Bruxelles Belgique. E-mail :

[email protected]

5 Clinique de Neurophysiologie,

Département de Neurologie, CHU

Brugmann, place Van Gehuchten, 4

B-1020 Bruxelles Belgique.

E-mail : [email protected]

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Une fois qu’à l’issue des investigations fonctionnelles appropriées, l’étiquette deNeuropathie Auditive / DésynchronisationAuditive (NA/DA) a été attribuée à unpatient, se pose le problème de la program-mation d’une prise en charge adéquate.

Quiconque a déjà été confronté à ce pro-blème attestera sans nul doute de sa com-plexité. Il ne pourrait en être autrement,puisque comme abondamment discutédans les chapitres précédents, l’étiquetteNA/DA correspond à l’obtention d’unprofil particulier de résultats aux diverstests fonctionnels de l’audition et non à unmécanisme physiopathologique unique etencore moins à une entité morbide parti-culière. En outre, il existe de nettes diffé-rences entre les sujets atteints précoce-ment, à un stade pré-lingual, et les adultesou adolescents développant l’affection à unstade post-lingual, après l’acquisition d’unlangage normal et l’histoire naturelle del’affection peut lui conférer, au niveau indi-viduel, un caractère hautement évolutif(défavorable ou favorable) ou fluctuant.Enfin, comme décrit dans nombre des chapitres précédents, un des principauxmécanismes altérant la perception est ladistorsion de la représentation neurale dudécours temporel des stimuli, phénomèneauquel nous ont peu habitués les atteintescochléaires classiques.

additional handicap, achieved LinguisticQuotient values between 36 and 67 %. No correlation between the results andthe level of auditory deficit or the type of prosthetic aid (amplification or cochlearimplantation) was found.We still have a lot tolearn about the numerous factors affecting thelinguistic development of children affectedwith Auditory Neuropathy/AuditoryDyssynchrony. A comprehensive, internationaldata bank as projected in chapter XVII shouldbe of a great help in this regard.

Sous la double influence de la répartitionparticulière de l’habitat en Australie et del’organisation du système de santé publiqueau Royaume-Uni, nos collègues Australienset Britanniques bénéficient d’une centrali-sation des cas de NA/DA leur conférant un niveau d’expérience et d’expertise particulièrement élevé. La tradition duCommonwealth favorisant la collaborationtrans-océanique, un groupe d’auteurs bri-tanniques (Sutton et al., 2004) a élaboré,sur base du projet de protocole australienpublié dans le journal d’audiologied’Australie et Nouvelle Zélande (King etal., 2005), un guide de diagnostic et prise encharge de la NA/DA pédiatrique, disponiblesur la toile internet.On y trouve les recommandations de priseen charge suivantes :

IIa. Prise en charge initiale :

La première démarche, dans la foulée du dia-gnostic, consiste en l’information et l’éventuel encadrement des parents à l’annonce, non seulement de la déficienceauditive de leur enfant, mais en outre, du faitqu’il s’agit d’une forme particulière, au méca-nisme le plus souvent incertain, au pronosticimpossible à établir d’emblée et à l’approchethérapeutique encore peu codifiée.L’approche thérapeutique optimale dépendplus que vraisemblablement de multiples fac-teurs parmi lesquels le mécanisme intime del’atteinte doit jouer un rôle majeur.

Ce chapitre est essentiellement consacré àla réhabilitation de la NA/DA chez l’enfant.En effet, la population atteinte de cetteentité et fréquentant notre centre est trèsmajoritairement pédiatrique reflétant ainsile fait que cette affection, si elle peutfrapper à tout âge, est le plus souventcongénitale ou acquise dans la petiteenfance (Sininger et Oba, 2000).

La recherche d’une étiologie précise seradonc entreprise, sachant que, dans l’étatactuel des connaissances, elle restera idiopathique - savant euphémisme valantinconnue - dans la majorité des cas.Différentes disciplines pourront être appe-lées à contribuer à l’identification du méca-nisme causal en fonction de l’histoire familia-le et personnelle, des signes et symptômes :néonatologues, (neuro-)pédiatres, généti-ciens, ORL, radiologues ophtalmologues…

La responsabilité de la prise en charge et desa coordination sera habituellement confiéeà un spécialiste compétent en matière deréadaptation pédiatrique. Compte tenu desmultiples défis que pose la remédiation de laNA/DA, il est souhaitable de disposer d’unréseau de spécialistes accoutumés à l’entitéqui, en raison de sa relativement faible inci-dence justifie une référence vers un centretertiaire expérimenté pour garantir uneprise en charge optimale et un encadrementefficace des parents.

IIb. Suivi

Il conviendra ensuite de rechercher régu-lièrement les signes d’une possible évolu-tion et de documenter les éventuelles fluc-tuations de seuils.

Pour les enfants diagnostiqués dans lapériode néonatale, un contrôle de l’évolution des Potentiels Evoqués AuditifsPrécoces (PEAP), du PotentielMicrophonique Cochléaire (PMC) et desOto-Emissions Acoustiques (OEA) estrecommandé vers 8-10 semaines puis entre9 et 15 mois (Sutton et al., 2004), sansoublier le monitorage régulier de la fonc-tion de l’oreille moyenne, les enfantsatteints de NA/DA étant, autant que tousles autres enfants de leur âge, prompts àdévelopper une perte transmissionnelle quiaggravera leurs difficultés.

Aucune des méthodes d’audiométrieobjective actuellement disponibles ne per-mettant d’évaluer correctement les seuilsperceptifs (Rance et al., 1999), les méthodescomportementales appropriées à l’âge etau répertoire comportemental du sujetdevront être mises en œuvre, les seuils

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

( Dossier

66

INTRODUCTION

1

RECOM-MANDATIONSDISPONIBLES

2

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67

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

Dossier )

comportementaux constituant, dans l’étatactuel de l’art, le seul élément permettantde poser l’indication d’un essai d’amplifica-tion prothétique voire, s’il s’agit d’unesurdité profonde, d’un implant cochléaire.

Les enfants atteints de NA/DA étant particulièrement à risque de troubles dudéveloppement de la communication orale,l’apparition de ces derniers doit être cons-tamment surveillée : il s’agit de l’élémentdéterminant dans le choix des options deremédiation. Cette surveillance exige l’utilisation de tests standardisés réaliséspar des orthophonistes.

IIc. Aides à la communication

1. Prothèses amplificatrices :L’amplification conventionnelle ne doits’envisager que si les seuils comportemen-taux sont significativement élevés. Commerappelé au chapitre II du premier tome decette monographie, les résultats des sériesaustraliennes suggèrent qu’environ lamoitié des enfants atteints de NA/DAtirent un bénéfice significatif de l’amplifica-tion prothétique (Rance et al., 2002; Ranceet Barker, 2008). Dans les cas où des seuilscomportementaux fiables ne peuvent êtreobtenus et qu’un déficit de communicationorale ou de réaction aux sons de l’environ-nement incite à l’amplification, celle-ci doitêtre mise en œuvre avec précaution, encommençant par un gain faible qui sera, sinécessaire, accru progressivement jusqu’àce que l’enfant témoigne d’une réactivitéaux stimuli acoustiques.

Tant le texte australien que britanniquerecommandent des formules d’amplifica-tion classiques implémentant, à l’aide deprothèses numériques, une amplificationnon-linéaire compressive et un contrôleautomatique du gain. Notons au passage, enmanière d’illustrer les incertitudes quipèsent encore sur les stratégies d’amplifica-tion adéquates en NA/DA, que cette approche recommandant une amplificationcompressive dont une des conséquencesest de réduire l’amplitude des fluctuationstemporelles du signal (Zeng et Liu, 2006)s’oppose au raisonnement de Zeng (2000)

qui suggère au contraire un traitement dusignal accentuant l’enveloppe temporelle dela parole. Il faut également noter que legroupe Nord Américain, tant de l’école dela Nouvelle Orléans que celle de LosAngeles demeure plus sceptique quant à laréalité du bénéfice à long terme, dans lesconditions écologiques naturelles, de l’approche amplificatrice (Berlin et al., 2003 ;Zeng et Liu, 2006). Les résultats de l’ampli-fication prothétique doivent certes com-prendre une mesure des seuils amplifiés,mais ne seront valablement évalués qu’enfonction de la qualité du développement dela perception de la parole et de sa résistan-ce à la détérioration du rapport signal/bruit.

2. Systèmes FMEn préservant le rapport signal/bruit de laparole dans les situations d’écoute où il estnaturellement dégradé (typiquement laclasse de cours) les systèmes FM peuventassez logiquement contribuer à préserverl’intelligibilité du signal chez les sujetsatteints de NA/DA (Hood et al., 2003).

3. Implant cochléaire Ce sujet est traité en détail par DidierBouccara dans le chapitre XIV de cenuméro. Il semble clair que l’on assiste àune tendance croissante au recours à l’im-plant dans la NA/DA, le nombre de casdécrits comme des succès thérapeutiquescroissant régulièrement (Zeng et Liu,2006 ; Rance et Barker, 2008). La descrip-tion sporadique d’échec ou de résultats décevants après implantation dans laNA/DA (Miyamoto et al., 1999; Rance et al.,1999; Colletti et al., 2004; Gibson et Sanli,2007) doit toutefois inciter à la vigilance età l’exclusion formelle d’anomalies majeuresdes voies auditives, en particulier d’agénésiedu nerf cochléaire (Coletti et al.,2004;Buchman et al., 2006)

4. Modes de communicationComme souligné dans le chapitre XIII de cenuméro, une approche exclusivement oraliste est à déconseiller compte tenu del’importance de l’apport complémentairede la modalité visuelle.

L’expérience de notre équipe étant essen-tiellement basée sur une casuistique pédia-trique diagnostiquée à un stage prélingual,nous limiterons la description à cette popu-lation en y ajoutant, à des fins d’illustration,la relation de l’apport d’un appareillagedirectionnel chez un sujet adulte aux seuilspeu altérés.

IIIa. Méthode et patients

Une cohorte de 22 enfants atteints deNA/DA bilatérale et actuellement âgés dedeux à 18 ans est en ce moment suivie par notre centre. Des données fiables etcomplètes couvrant l’ensemble de leurévolution depuis le diagnostic jusqu’à unâge minimum de six ans sont à ce jourdisponibles pour onze d’entre eux ; ce sont ces derniers qui feront l’objet de ladescription qui suit.

La perte auditive des sujets a été quantifiéepar le Degré de Déficience Auditive (DDA)qui représente la moyenne binaurale desseuils audiométriques comportementauxobtenus aux sons purs et par voie aériennepour les fréquences de 500, 1000, 2000 et4000 Hz et permet également de les positionner dans l’une des catégories de laclassification du Bureau Internationald’AudioPhonologie (BIAP, 1997). La compa-raison entre leur valeur au moment du dia-gnostic de NA/DA et lors d’une mesureréalisée fin 2007 permet d’évaluer, sur unepériode de temps plus ou moins longue enfonction de la durée du suivi individuel,l’évolution des seuils.

Les Quotients Linguistiques (QL) ont étécalculés en divisant le niveau de développe-ment du langage observé par celui attendupour l’âge de l’enfant, sur base d’une évaluation réalisée, en fonction de l’âgeet/ou de ses compétences du sujet, avec

L’EXPÉRIENCE DUCENTRE

COMPRENDRE &PARLER

3

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

68

( Dossier

Tableau 1 : Fact Risq : Facteurs de risque : ? = inconnue, P = Prématurité, NN = séjour en unité de néonatologie, ET = Exsanguino-

Transfusion, Malf Coch = Malformation Cochléaire. Age : âge actuel en années. Age @ D : âge au moment du diagnostic de NA/DA (en année

ou mois). Age @ 1ère Int : âge au moment de la première intervention de remédiation (en année ou mois). Type Int : type d’intervention soit

Amplification Conventionnelle (AC) soit Implant Cochléaire (IC) soit AC suivi de IC. DDA initiale: Degré de déficience auditive initiale au

moment du diagnostic. DDA actuelle : Degré de déficience auditive actuelle. HA : Handicap(s) associé(s) : B= bi- ou multi- linguisme ;

N= Handicap Neurologique, S= Handicap (Psycho-) Social. Test Lang : type de test du langage (Ecosse ou Khomsi) utilisé pour calculer le

quotient de développement du langage. QL : quotient de développement du langage calculé comme le score observé au test utilisé sur le

score attendu pour l’âge chronologique. . Scol : type de scolarité : 1 = intégré en enseignement ordinaire sans difficulté ; 2 = intégré en

enseignement ordinaire avec difficultés ; 3 = enseignement spécial.

#

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

Fact

Risq

?

P NN

P NN

ET NN

P NN

ET P NN

ET NN

Malf Coch

?

Malf Coch

?

Age

12

12

13

10,5

14

8

10,5

7

18,5

9

13

Sexe

f

f

f

f

m

f

f

m

m

f

f

Age @ D

3

2

2

6 m

3,5

1 m

1,5

4,5

4,5

3 m

1,5

Age @

1ère Int

3,5

2,5

2,5 > 9

6 > 9

3,5

6 m

1,5 > 4

4,5

4,5

1,5

2 > 3

Type Int

AC

AC

AC - IC

AC - IC

AC

AC

AC - IC

AC

AC

AC

AC - IC

DDA

initiale

90

60

90

97

72

90

90

68

70

60

100

DDA

actuelle

100

69

108

99

77

57

90

58

99

90

100

HA

B

NS

BNS

BNS

NS

BS

B

Test

Lang

Ecosse

Ecosse

Khomsi

Khomsi

Ecosse

Khomsi

Ecosse

Khomsi

Ecosse

Khomsi

Ecosse

QL

0,36

1,12

0,52

0,5

0,5

0,96

0,99

0,65

1,09

0,67

0,60

Scol

3

1

3

3

3

2

1

3

1

3

2

le test de Khomsi (Khomsi, 1987; Charlieret Clerebaut, 1989) ou l’Epreuve deCompréhension Syntaxico-Sémantique(ECOSSE : Lecocq, 1996). La présence d’unou plusieurs éventuel(s) handicap(s) supplé-mentaire(s) ou circonstance défavorisante aété codée par une lettre mnémonique dutype de handicap : N pour handicap neuro-logique, S pour handicap Psycho-Social, et Bpour évolution en milieu Bi- voire multi-lingue.

Stratégie d’amplificationTous les enfants ont été traités en premiè-re intention par prothèse amplificatricebilatérale avec des appareils entièrementnumériques réalisant une amplificationnon-linéaire compressive avec contrôleautomatique du gain. La formule d’amplifi-cation suivait la recommandation du « Desired Sensation Level » (DSL : Seewald,1995; Seewald et al.,2005). Un micro omni-directionnel a toujours été utilisé. Lesparents et orthophonistes impliqués ontété systématiquement alertés sur le risquede détérioration de la compréhension de laparole en environnement bruyant. Unsystème FM a été systématiquement

proposé pour les classes de cours et lessituations similaires que pouvait rencontrerl’enfant dans sa vie quotidienne. Les quatreenfants implantés l’ont été sur base d’unesérie de critères incluant la valeur de DDA,l’absence d’efficacité du traitement par pro-thèse amplificatrice après un délai minimumd’un an et le niveau d’implication desparents dans le processus de réadaptation.Compte tenu des critères actuels de lalégislation belge pour la prise en charge ducoût de la procédure par la sécurité sociale,aucun enfant n’a été implanté si la moyennedes seuils à 500, 1000 et 2000 Hz de lameilleure oreille était meilleure que 85 dBHL ou si, lorsqu’ils étaient mesurables, lesscores de reconnaissance de phonèmes detype Consonne-Voyelle-Consonne présen-tés en champ libre à 70 dB SPL étaientmeilleurs que 30%.

Les quatre implants étaient du type Nucleus(deux processeurs Esprit 3G,deux Freedom)utilisant une stratégie de stimulation « ACE »(Advanced Combination Encoders). Aumoins 20 des 22 électrodes potentiellementdisponibles pour la stimulation intracochléai-re étaient en service. Un des enfants implan-

tés l’a été avant que la fonction d’enregistre-ment des potentiels d’action du nerfcochléaire (Neural Response Telemetry : voirle chapitre XIV par D. Bouccara dans cenuméro) ne soit disponible; des potentielsd’action normaux ont été obtenus par la sti-mulation électrique via l’implant chez lestrois autres enfants (cas 3,4 et 7).

Les onze enfants ont été pris en charge surun mode de communication globale, alliantla voie orale au Langage Parlé Complété(LPC) voire au langage signé en fonction del’âge de l’enfant et de l’implication desparents.

IIIb : Résultats

Le tableau I résume les principales donnéespermettant de décrire le type de prise encharge, les résultats en termes de quotientlinguistique et de type de scolarité et lesprincipaux déterminants de ceux-ci.

Trois cas sont d’origine totalementinconnue, deux ont une NA/DA associée àune malformation cochléaire et tous lesautres ont connu une période néonatale

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

69

Dossier )

sant régulièrement « déconnecté » desconversations tenues en sa présence.Alerté par ces plaintes, le neurologue qui lesuit suspecte qu’il pourrait s’agir d’une NAdéveloppée dans le contexte de sa poly-neuropathie héréditaire et demande un bilanaudiologique incluant l’électrophysiologie.Celui-ci révèle une légère élévation bilatéra-le des seuils (30 dB en moyenne) et unIndice de Capacité Auditive (ICA : moyennedes mots compris aux intensités de 40, 55 et70 dB) qui n’atteint que 83,3% dans le calme,ce qui est nettement trop faible comptetenu des seuils audiométriques. Les PEAPmontrent une forte détérioration de toutesles ondes y compris la première, avec persis-tance du PMC et des OEA.

Le diagnostic de NA/DA étant posé, lepatient est pris en charge en appareillageprothétique avec pour but principal detenter d’améliorer le rapport signal / bruitde la parole, le problème d’audibilité étantrelativement secondaire eu égard aux seuilsaudiométriques du patient. Après plusieursessais en situation de vie réelle, le choixs’est porté sur un appareillage binaural avecdes prothèses numériques basculant à lademande, entre un programme omnidirec-tionnel ou directionnel. L’amplification étaitlimitée à +15 dB à 3 et 4 kHz et à +5 dBaux fréquences inférieures, avec un faibletaux de compression (1,1:1).

La figure 2 illustre les seuils audiométriquesdu patient relevés avec et sans l’apport desprothèses.

La figure 3 compare les résultats en audio-métrie vocale dans les conditions avec etsans prothèses, ce qui permet le calcul del’amélioration de l’ICA due au port desprothèses.

Quant à la figure 4, elle illustre le bénéficeque le port des prothèses engagées en pro-gramme directionnel confère aux scores dediscrimination vocale pour différentsniveaux de rapport Signal / Bruit. (Figure 4)

Après plusieurs mois d’expérience dans lesdiverses situations de la vie quotidienne,tant le patient que son entourage décriventune amélioration significative de sa partici-pation aux échanges oraux.

Figure 1 : Distribution des onze valeurs de quotient linguistique en fonction du niveau de

DDA (en dB HL) et de la catégorie de déficience auditive selon la classification du BIAP

(M = Moyenne, S = Sévère, P = Profonde). Les symboles utilisés permettent de définir la

présence (symboles pleins) ou l’absence (symboles vides) de handicap(s) associé(s) et le

type d’aide auditive : cercle = amplification conventionnelle, carré = implant cochléaire.

critique avec séjour en unité de néonatolo-gie intensive. Quatre étaient prématurés ettrois ont développé une hyperbilirubinémienécessitant un traitement par exsanguino-transfusion. Trois enfants (cas 1, 9 et 10)appartenaient à une famille atteinte desurdité, dont deux (cas 1 et 10) dans uncontexte de consanguinité. A l’exceptiondes cas 6 et 8 qui ont favorablementévolué, les seuils se sont détériorés plus oumoins fortement au cours du temps ousont restés stables (cas 7 et 11).

Trois enfants (cas 2, 7 et 9) se détachent dugroupe par le fait qu’ils combinent un quo-tient linguistique proche de l’unité et unescolarité qui se déroule sans difficultés par-ticulières dans l’enseignement ordinaire. Unquatrième enfant (cas 6) les rejoint en cequi concerne le bon niveau de quotient linguistique, mais il accuse cependantquelques difficultés dans l’enseignementordinaire.

La figure 1 illustre la distribution des quo-tients linguistiques en fonction du niveau deDDA. Il n’y avait aucune corrélation signifi-cative (Coëfficient de Spearman = -0.46, p=0.15) entre les valeurs de quotient linguis-tique et celles de DDA. Les quatre enfantsdépourvus de handicap associé (symbolesvides) se détachent clairement du reste dugroupe.

Parmi les quatre enfants, indemnes de handi-cap associé, qui se détachent du reste dugroupe sur base d’un niveau de quotient lin-guistique conforme à celui attendu à leurâge, trois sont traités par amplificationconventionnelle et un par implant cochléai-re. Les sept autres enfants, dont trois sontimplantés, présentent tous au moins un han-dicap associé, accusent un retard significatifde développement du langage et fréquentent(sauf le cas 11) un enseignement spécialisé.

IIIc. Exemple de prise en

charge d’une authentique

NA post-linguale, apparue

dans le contexte d’une

polyneuropathie héréditaire

de Charcot-Marie-Tooth.

L’histoire est celle d’un patient de 45 anssuivi depuis plusieurs années à la consulta-tion de neurologie pour une maladie deCharcot-Marie-Tooth de forme démyélini-sante, démontrée à la biopsie de nerf.

Depuis quelques temps, il se plaint de diffi-cultés à comprendre la parole, surtout enmilieu bruyant. Son entourage rapporteque ces difficultés commencent à consti-tuer un handicap social, le patient apparais-

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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( Dossier

Figure 4 : patient adulte atteint de

NA/DA dans le contexte d’une poly-

neuropathie héréditaire de Charcot-

Marie-Tooth. Scores de Discrimination

Vocale en fonction du rapport signal /

bruit relevés en stéréophonie et champ

libre avec (•)et sans (o) prothèses.

Figure 2 : patient adulte atteint de NA/DA dans le contexte d’une polyneuropathie héréditaire de Charcot-Marie-Tooth. Audiogrammes

tonaux relevés sans prothèse (o et x) et seuils amplifiés mesurés en stéréophonie en champ libre (■).

Figure 3 : patient adulte atteint de NA/DA dans le contexte d’une polyneuropathie héréditaire de Charcot-Marie-Tooth. Audiométries vocales

réalisées en stéréophonie et champ libre avec (carrés vides) et sans (carré rempli d’une astérisque) prothèse.

CONCLUSION

4Il convient avant tout de rappeler que lerecrutement de notre centre étant biaiséen faveur des surdités sévères et profon-des, la série rapportée ici ne comporte quedes cas pour lesquels la correction de l’au-dibilité s’imposait. Ceci ne reflète dès lorsqu’une partie du très large spectre de situa-tions que l’on peut rencontrer chez lessujets atteints de NA/DA dont certains(une minorité), à l’extrémité favorable ducontinuum n’ont guère d’autre déficit quel’absence de PEAP (Berlin et al., 2003).Entre d’une part, l’attitude anglo-australien-

ne préconisant une approche tout comptefait assez classique et reposant avant tout, àcondition que les niveaux de seuils le justi-fient, sur la restauration prudente de l’audi-bilité à des niveaux confortables et d’autrepart, le scepticisme Nord-Américain suggé-rant la nécessité d’algorithmes particuliersde traitement du signal voire le recoursplus prompt à l’implant cochléaire, quenous apprend l’expérience glanée sur notregroupe d’enfants ?

Les résultats, exprimés en termes de QLsont globalement peu favorables et noncorrélés au degré de DDA. Rien n’indiquenon plus que le recours à l’implant induisedes résultats systématiquement meilleurs.Par contre, la suggestion qui se dégageimmanquablement de l’examen de la figure

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Dossier )

manière anecdotique, l’impact d’uneméthode d’amélioration du rapport signal /bruit sur la gêne fonctionnelle d’un patientaux seuils peu altérés.

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RÉFÉRENCES

5

1 est qu’un facteur majeur déterminant lerésultat fonctionnel à terme est la présen-ce ou non de handicap(s) associé(s) et ceciquel que soit le type d’aide auditive mise enoeuvre. Une telle constatation n’a évidem-ment rien d’étonnant dans l’absolu. La forteproportion d’enfants de cette série ayantconnu une période néonatale gravementperturbée contribue à nous rappelerqu’outre les handicaps de nature psycho-sociale ou liés au bi- ou multi-linguismepouvant toucher la population générale, lesenfants atteints de NA/DA présentent plusde risque d’y ajouter un handicap neurolo-gique que ceux qui sont atteints d’unesurdité endocochléaire classique. En effet,parmi les sept enfants accusant un retardde développement linguistique, quatre ontun handicap neurologique.

Le déterminisme du résultat fonctionnel dela prise en charge d’une NA/DA au stadeprélingual est hautement multifactoriel, et ilest fort probable que le mécanisme intimeà l’origine du tableau de NA/DA joue luiaussi un rôle capital. Dans l’état actuel denos connaissances, il ne faut donc ni réduirele problème à une simple assimilation auxsurdités endochléaires classiques, ni êtreoutrageusement pessimiste quant aux pos-sibilités d’obtenir des résultats satisfaisants,du moins en l’absence de handicaps asso-ciés dont certains, comme l’exposition àplusieurs langues, pourraient être au moinspartiellement contrôlés.

A l’issue de cette revue des résultats denotre population, nous ne pouvons queplaider vigoureusement en faveur de laconstitution d’une banque de donnéesinternationale (voir chapitre XVII de cenuméro), bien structurée, intégrant l’en-semble des paramètres susceptibles d’in-fluencer les résultats des patients et leurévolution. Ce projet devrait permettre àchaque centre participant de bénéficier del’expérience de l’ensemble des autreséquipes tout en contribuant à l’enrichisse-ment des connaissances communes et àune meilleure compréhension de tous lesaspects de l’entité NA/DA.

Enfin, l’expérience de prise en charge dupatient neuropathique adulte illustre, de

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Dossier )

CHAPITRE XVII :NEUROPATHIE AUDITIVE /DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE :ELABORATION D’UNE BASE DE DONNÉES

RÉSUMÉ ABSTRACT

INTRODUCTION

1Thierry MORLET

Center for Pediatric Audiology

and Speech Sciences

A.I. DuPont Hospital for

Children

Wilmington, DE - USA

En raison des nombreuses interrogationssubsistant à propos de la NeuropathieAuditive/Désynchronisation Auditive(NA/DA), telles que son étiologie, ses fac-teurs de risques et son pronostic, la cons-truction d’une base de données regrou-pant toutes les caractéristiques physiolo-giques et comportementales des patientss’avère nécessaire. Une base de données,conjointement aux autres approchesméthodologiques actuellement utilisées enrecherche tel que la création de modèlesanimaux, les expériences de psycho-acoustique ou encore les études anato-miques et génétiques, reste un outilindispensable qui permet l’étude de nombreux aspects de la NA/DA. Cettebase de données doit inclure de manièreexhaustive les informations recueilliesnotamment par le pédiatre, l’ORL, le géné-ticien, l’ophtalmologiste, le neurologue, letravailleur social, en sus de l’audiologiste etde l’orthophoniste. Elle renseigne sur lesmoyens et circonstances ayant conduit audiagnostic de la NA/DA, la recherche defacteurs responsables de la NA/DA (imagerie cérébrale, tests génétiques,tests neurologiques, etc.), les périodes pré-natales et postnatales, les caractéristiquesfamiliales, la santé générale du patient, saprise en charge, ses compétences auditiveset leurs évolutions, son développement dela parole et du langage.

The etiology of Auditory Neuropathy/Dys-Synchrony (AN/AD), specific risk factorsassociated with AN/AD and its prognosis arenot established for a large number of patients.To help answering some of these questions,the establishment of a database containingphysiological and behavioral characteristics foreach patient diagnosed with AN/AD is a neces-sity. Concomitantly with other methodologicalapproaches, such as animal models, psycho-acoustic experiments and anatomic andgenetic studies, a database remains a crucialtool in the field of AN/AD research. An AN/ADdatabase will include information obtained bythe pediatrician, ENT, geneticist, ophthalmolo-gist, neurologist, social worker and the audiolo-gist and speech language pathologist. TheAN/AD database will incorporate specific information regarding the diagnosis of AN/AD,a list of factors associated with AN/AD(imaging studies, genetic and neurologicaltesting), pre- and post-natal periods, familyhistory, general health, management, auditoryabilities, and speech and language develop-ment.

Depuis la mise en évidence du nouveautype de perte auditive que représente laNA/DA (NA/DA ; Starr et al., 1996) et quiaffecte environ 10 à 15% des patients

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atteints d’une perte auditive neurosenso-rielle, de nombreuses questions restent ensuspens. L’étiologie de la NA/DA resteencore inconnue dans la majorité des cas.Si certains facteurs de risque sont suspec-tés (Starr et al., 1996; Merchant et al.,2001 ;Varga et al., 2003), il apparaît claire-ment que nombre d’entre eux ne sont pasencore identifiés. Il reste aussi très difficiled’émettre un pronostic regardant l’évolu-tion de la NA/DA. Les capacités auditivesde certains patients vont rester stablesavec le temps, alors que pour d’autres, cescapacités régressent voire peuvent fluctuerconstamment (Starr et al. 1998). La priseen charge du patient reste aussi probléma-tique. Certains patients vont être capablesde développer parole et langage sans aideparticulière; d’autres nécessitent des aidesspécifiques allant d’un système FM à unimplant cochléaire. Malheureusement, iln’est pas encore possible de prédire chezle nourrisson quelles seront ses capacitésde développement du langage sur la seulebase des tests auditifs ayant conduit au dia-gnostic de NA/DA (réflexe de l’oreillemoyenne, otoémissions acoustiques etpotentiels évoqués auditifs précoces(PEAP); Berlin et al. 1993; Starr et al 1996,Rance et al., 1999; Deltenre et al. 1999). Iln’existe en effet pour ainsi dire que peu deparamètres disponibles permettant deprédire quelle option est la plus appro-priée pour un patient donné à un instantprécis de son développement.

Pour ces raisons, scientifiques et médica-les, la construction d’une base de donnéesregroupant toutes les caractéristiquesphysiologiques et comportementales despatients s’avère nécessaire. Une telle basede données représente un outil indispen-sable à la recherche des diverses causesengendrant la NA/DA, de ses facteurs derisque ainsi que des solutions adaptées àchaque patient en fonction de ses spécifici-tés propres. Dans la mesure où lesconnaissances concernant la NA/DA sonttrès limitées à l’heure actuelle, les informa-tions contenues dans la base de donnéesse doivent d’être exhaustives.

Pour ce faire, il est important de recueillirle maximum d’informations de la part desdifférents acteurs impliqués dans la prise encharge du patient.

Le diagnostic de NA/DA chez le nourrissonou l’enfant en bas âge doit en principeconduire à prescrire un ensemble d’investi-gations et consultations spécialisées. D’unemanière non exhaustive, citons : pédiatre,ORL, généticien, ophtalmologiste, neurolo-gue, travailleur social, en sus de l’audiologis-te et de l’orthophoniste. Les informationsrecueillies par cette équipe seront alors uti-lisées pour définir la prise en charge dupatient puis ensuite saisies dans la base dedonnées.

La base de données est organisée en différentes sections. Celles-ci renseignentnotamment sur les moyens et circonstan-ces ayant conduit au diagnostic de laNA/DA, la recherche de facteurs responsa-bles de la NA/DA (imagerie cérébrale, testsgénétiques, tests neurologiques, etc.), lespériodes prénatales et postnatales, lescaractéristiques familiales, la santé généraledu patient, sa prise en charge, ses compé-tences auditives et leurs évolutions, ledéveloppement de sa parole et de sonlangage. La base de données se doit d’êtreréactualisée à chaque fois qu’un nouveautest auditif ou de nouvelles informationspertinentes sont recueillies.

La construction et la maintenance d’unebase de données requièrent l’agrément del’institution en charge du patient et la signature d’un consentement éclairé de lapart des parents (et des enfants à partird’un certain âge si l’institution le spécifie).Les informations personnelles telles quenuméro de sécurité sociale, adresse,numéros de téléphone, etc., ne doivent pasapparaître et le nom du patient se doitd’être codé. Huit catégories principalespeuvent être définies :

1. Diagnostic de la NA/DA

Seront saisies toutes les informations rela-tives au diagnostic de la NA/DA:

- Sur quels tests le diagnostic de la NA/DAest-il basé ?

Le diagnostic de la NA/DA est courammentétabli par la mise en évidence de l’absenceou l’anormalité du réflexe stapédien, la pré-sence des Oto-Emissions Acoustiques(OEA) ou du Potentiel MicrophoniqueCochléaire (PMC) et l’absence ou l’anorma-lité des PEAP. D’autres tests peuvent êtrepris en compte (tels que la suppression desOEA provoquées ; Berlin et al., 1993 ; Starret al., 2001 ;Abdala et al., 2000 ; Hood et al.,2003), mais ils ne peuvent se substituer aux3 tests précédemment cités. En cas d’absen-ce des OEAs, la présence et les caractéris-tiques du PMC doivent être clairement mentionnées. Hormis chez le nourrisson oul’enfant en bas âge, l’absence des OEAs n’estpas rare chez le patient atteint de NA/DA(Rance et al., 1999 ; Starr et al., 2000 ;2001 ; Madden et al., 2002).Tout facteur sus-ceptible d’avoir joué un rôle dans l’absencedes OEAs doit alors être recherché etmentionné : port de prothèses auditives(type, gain, durée quotidienne et totale d’utilisation), antibiotiques ototoxiques, etc.- Qui a réalisé le diagnostic ?- Confirmation du diagnostic (par qui/quali-

fication) ?- Age du patient lors du diagnostic- Est-ce que le diagnostic de NA/DA est le

premier diagnostic établi ? Si non, quel a(ou ont) été le(s) diagnostic(s) précé-dent(s) (quelle a alors été la prise encharge et quels en ont été les résultats?).

- Présence d’un autre type de problèmeauditif en sus de la NA/DA ?

- Circonstances ayant mené au diagnosticde NA/DA : dépistage de la surdité à lanaissance, plainte des parents, etc.

2. Grossesse

Seront inclus tous les renseignements per-tinents relatifs à la grossesse et notammentla liste des complications s’il y en a eu ainsique les éventuels traitements médicaux(nom des médicaments, date et durée d’administration).

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

( Dossier

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Dossier )

3. Naissance et période

postnatale

Les caractéristiques générales à la naissan-ce seront documentées : date de naissance,ethnicité (si la loi en vigueur le permet),sexe, poids de naissance, âge gestationnel,âge conceptionnel, type d’accouchement.

Afin d’essayer de distinguer les cas deNA/DA congénitaux des cas acquis, toutecomplication lors de l’accouchement oulors des premiers instants de la vie seradûment mentionnée. L’on notera le type decomplication(s), le taux de bilirubine (et leséventuels traitements, photothérapie,transfusion sanguine), présence d’ictèrenucléaire, le score d’Apgar, la présenced’anoxie (caractéristiques et conséquen-ces), détresse respiratoire, oxygène et ven-tilation artificielle (durée), médicamentsreçus à la naissance (type, dose, durée), etc.

Résultats (et technique utilisée) du dépistage auditif de la surdité chez lenouveau-né si effectué.

4. Caractéristiques

familiales

Gémellité, nombre de frères et sœurs, âges.

L’existence et les caractéristiques de pertesauditives chez d’autres membres de lafamille seront renseignées le plus précisé-ment possible. Toute suspicion de NA/DAchez d’autres membres de la famille (avecun diagnostic réalisé antérieurement à laconnaissance de la NA/DA) devra êtredocumenté. L’existence d’autres conditionsmédicales au sein de la famille sera aussinotifiée.

5. Santé générale du patient

Les renseignements suivants seront inclus :- Médication courante- Présence de syndromes- Autres problèmes de santé : prise en

charge et résultats- Résultat des tests de potentiels évoqués

somesthésiques et de la consultation deneurologie afin de rechercher l’existence

de neuropathies autres que dans lesystème auditif

- Examen visuel- Imagerie cérébrale (malformations de

l’oreille interne, présence/absence du nerfauditif)

- Examen de la fonction vestibulaire (telsque les potentiels évoqués vestibulaires),de l’équilibre et de la posture.Développement de la marche. Mobilitégénérale.

- Conclusion du rapport du généticien.Tests génétiques réalisés ? Si oui, par quellaboratoire et quelles mutations ont-ellesété recherchées ? D’autres tests géné-tiques ont-ils été réalisés en raison de laprésence ou suspicion de syndromes ?Préciser si le patient ou sa famille autori-sent l’équipe de recherche à les contacteren vue d’un nouveau test génétique dansle futur en cas de découverte de nouvel-les mutations.

6. Prise en charge de la

NA/DA

- Types de communication utilisés par lepassé. Dates et résultats

- Type de communication utilisé actuelle-ment. Depuis combien de temps ?Evolution.

- Thérapie passée.Type et fréquence.- Thérapie actuelle.Type et fréquence- Aides : prothèses auditives, système FM,

implant cochléaire. Type, gain, bénéfice,durée d’utilisation, âge.

- Options considérées ou refusées par lepatient et/ou la famille.

7. Résultats des tests auditifs

Les résultats de tous les tests auditifsdisponibles réalisés sur le patient serontsaisis.

Seront précisés quels sont les tests qui ontservi au diagnostic de la NA/DA et les testsréalisés après le diagnostic dans le cadre dusuivi du patient (afin de pouvoir analysertoute évolution, ou absence d’évolution desdifférentes réponses en provenance dusystème auditif).

- OEAs : Caractéristiques des OEAP, pro-duits de distorsion acoustiques et OEAspontanées (amplitude et niveau de bruiten fonction de la fréquence). Suppressiondes OEAP.

- Réflexe stapédien.- Tympanométrie.- Potentiels évoqués auditifs du tronc céré-

bral : Préciser le type de stimulus (clic,tone bursts, polarité), les conditions destimulation (air, conduction osseuse) et letype d’équipement utilisé.

- Audiométrie : tonale, champ libre, parole,etc.

- Autres tests : écocochléographie,potentiels évoqués de latence moyenne et tardive, tests psychoacoustiques(détection de différence de durée, etc.).

8. Développement de la

parole et du langage

Chez le sujet ne présentant pas, ou trèspeu, de perception auditive au début de laprise en charge, cette catégorie sera rapi-dement renseignée. Mais elle devra êtrerégulièrement revisitée notamment si lechoix de traitement se porte sur unimplant cochléaire.

Seront d’abord documentées dans cettecatégorie les capacités de réception dulangage (seuils de réception - capacité àrépéter les mots, même sans les compren-dre), puis les capacités de compréhension.

Il est très important de tester et documen-ter les capacités de réception et de compréhension du langage dans le silenceET dans le bruit. De nombreux enfantsatteints de NA/DA capables d’une certainecompréhension du langage dans le silenceperdent cette capacité dès qu’un bruit defond est introduit. Néanmoins, certainsenfants sont tout de même capables depercevoir/comprendre le langage en pré-sence de bruit et ce jusqu’à un certainniveau sonore. Le(s) niveau(x) de bruit uti-lisés durant le test seront notés avecgrande précision. Le choix du traitementpeut dépendre en partie de cette capacité à percevoir/comprendre dans le bruit.

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Viendront ensuite les informations relativesà l’expression du langage. Elles compren-nent l’analyse des vocalisations de l’enfanten bas âge, le nombre de mots de vocabu-laire connus de l’enfant plus âgé, ainsi que laclarté de la parole. Il conviendra d’indiquerla qualité professionnelle de l’individu ayantrecueilli les informations (audiologiste,orthophoniste, phonologiste, autre).

Suivant les capacités de l’enfant, serontdocumentés les résultats d’autres testsspécifiques du langage ainsi que ses capaci-tés à suivre une conversation en fonctionde différentes conditions environnementa-les (rapport signal/bruit, conditions audiovi-suelles).

Toutes les informations relatives au dévelop-pement du langage seront soigneusementindiquées : l’enfant a-t-il besoin/utilise t-il desaides visuelles, son niveau de parole etlangage est-il approprié pour son âge, quelleest son évolution de parole et de langage enfonction de la prise en charge choisie, l’en-fant est-il bilingue (inclure les combinaisonslangage oral/langage des signes -comme leLangage Parlé Complété), etc.

Conjointement aux autres approchesméthodologiques actuellement utilisées enrecherche telles que la création de modèlesanimaux, les expériences de psycho-acous-tique ou encore les études anatomiques etgénétiques, la création et maintenanced’une base de données reste un outil

indispensable qui permet l’étude de nombreux aspects de la NA/DA. Une tellebase de données présente aussi l’indéniableavantage de pouvoir être utilisée instanta-nément à des fins cliniques afin de trouverla meilleure prise en charge possible sur labase de l’expérience accumulée chez despatients présentant des caractéristiquessimilaires. Notre objectif en ce débutd’année 2008 est de réunir un consortiumd’équipes internationales permettant lacréation d’une base de données unique surla NA/DA à des fins de recherche maisdont une partie aussi sera accessible surInternet aux praticiens et parents à larecherche de données cliniques.

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CONCLUSION

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RÉFÉRENCES

Page 79: LA NEUROPATHIE AUDITIVE DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE 2 …

77

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

Dossier )

CHAPITRE XVIII :EN GUISE DE CONCLUSION

Jean-Louis COLLETTE

92 rue de la Victoire

75009 F-Paris

CHI Créteil, Service ORL,

40 avenue de Verdun

94000 F-Créteil

Paul DELTENRE

Clinique de Neurophysiologie,

Département de Neurologie,

CHU Brugmann,

place Van Gehuchten,

4 B-1020 Bruxelles Belgique.

E-mail : [email protected]

Au terme de cette revue de l’entitéNeuropathie Auditive / DésynchronisationAuditive (NA/DA), on peut retenir que l’évocation du diagnostic n’est pas éviden-te au premier abord.

Selon la localisation et les causes de l’atteinte il existe différents tableaux ouprofils cliniques de la NA/DA et il fautsavoir y penser devant un certain nombrede signes d’appel témoins à des titresdivers de la distorsion du message neural :

• quand la courbe vocale dans lesilence est nettement meilleureque celle obtenue dans le bruit (enparticulier chez un adulte jeune),

• quand la courbe tonale dans le silence estnettement meilleure que dans le bruit(en particulier également chez un adultejeune),

• quand la courbe tonale est nettementmeilleure que la courbe vocale,

• en cas de surdité même modérée, maisavec une courbe plate ou ascendante,

• en cas de surdité fluctuante,• ou encore si les seuils stapédiens sont

absents alors que le tympanogramme estnormal.

C’est de principe qu’il faudra évoquer chezle jeune enfant présentant les antécédentssuivants :

• ictère néo-natal dont il est toujours diffi-cile d’évaluer le niveau de risque parrapport à la NA/DA (il n’existe pas decorrélation évidente entre le niveauatteint par le taux de bilirubine et ledéclenchement de la NA/DA),

• prématurité,• faible poids de naissance,

• hypoxie néo-natale,• surdité familiale,• existence de cas familiaux de neuropa-

thies auditives ou polyneuropathies,• ou de maladies neurologiques (maladie de

Charcot-Marie-Tooth, ou maladie deFriedreich par exemple).

La détermination du seuil subjectif chez lejeune enfant est un point particuliérementdélicat du diagnostic. En effet si habituelle-ment chez le normoentendant il existe unedifférence entre les seuils réels et les seuilsobservés variable selon l’âge (de 10 dB vers3 ans à 35 dB avant 1 an), cette différenceest réduite à 10 dB sur les fréquences1000, 2000 et 4000 Hz et 15 dB sur la fréquence 500 Hz chez le jeune enfant présentant une surdité neurosensoriellepure, donc non NA/DA (MoniqueDelaroche). Cette précision améliorée estgénéralement interprétée comme uneconséquence du recrutement.

Mais dans la NA/DA le recrutement n’exis-te pas, ce qui rend l’extrapolation difficile.En effet dans ce cas la détermination desseuils subjectifs, particulièrement chez lejeune enfant, est plus délicate du fait mêmede la problématique de la pathologie. Oraucune méthode électrophysiologiqueactuellement disponible ne permettant l’évaluation correcte des seuils, seules lesmesures comportementales pourrontguider la prise en charge...

La fréquence de cette pathologie est indé-niablement sous-estimée, du fait de laméconnaissance usuelle des signes cliniqueset également par défaut de systématisationdes signes objectifs. Les éléments quidevront être retenus a priori pour évoquer

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le diagnostic seront, dans un contexte denormalité otologique, avec des tympansnormaux, la présence d’OEAP de bonnequalité (mais nous avons vu que leur dégra-dation est possible, l’étude du PMC étantplus fiable), associée à des PEAP dégradésou absents, le tout dans un contexteexcluant un processus expansif neurolo-gique à l’aide d’une IRM ou d’un examentomodensitométrique selon les anomaliesenvisagées.

On pourra enfin y penser devant l’ineffica-cité du traitement prothétique d’unesurdité, le gain fonctionnel en terme d’amélioration de la parole étant tropfaible, voire nul.

Ainsi si ces recommandations sont appli-quées, on peut espérer ne pas passer àcôté d’un diagnostic beaucoup moins rarequ’on a tendance à le croire (la preuve enest que les équipes qui recherchent laNA/DA en trouvent de plus en plus -jusqu’à près de 10 % des surdités pédia-triques définitives pour certains) et ainsipouvoir mettre en œuvre les prises encharge adaptées afin d’en réduire lesimportantes conséquences fonctionnelles.

Sur un plan thérapeutique, les choses nesont pas toujours claires mais on peutconstater que lorsque, du fait de seuilsauditifs bas, il a été décidé d’envisager uneimplantation cochléaire, le résultat est dansune majorité de cas satisfaisant, malgréquelques échecs ; la prothèse auditive,quant à elle, donne des résultats variables,mais peut-être l’amplification exclusive des fréquences aiguës proposée par FangGang Zeng (cf. Xavier Perrot, Chapitre X),rendue possible par les progrès constantsdes prothèses numériques, est-elle unevoie d’avenir intéressante.

En écho à ce sur quoi insiste Arnold Starrdans son introduction, il paraît pour lemoins utile lorsque le dépistage par lesPEAP (Automatiques ou non) a montrédes courbes perturbées ou absentes, depratiquer de principe une étude des OEAPet mieux encore des PMC (NatalieLoundon).

Ce n’est certainement pas l’expérienceactuelle en France sans que l’on puisse direexactement s’il s’agit d’un effet de la non-recherche systématique du PMC, ou d’uneéventuelle différence de profil génétique.Cela reste pour le moment une questionposée mais qui doit pousser chacun d’entrenous à traquer la NA/DA.

Une collaboration de chacun à la base dedonnées qui est en train d’être mise enplace peut permettre, en multipliant lesparamètres d’étude et les angles d’attaquede cette pathologie encore mystérieuse,d’éclairer un tableau qui présente encoredes zones d’ombre, tant sur le plan diagnos-tique que physiopathologique, et ainsi denous permettre d’en améliorer la prise encharge.

Les auteurs remercient Paul Avan pour ses toujours précieux avis et Martine Ohresserpour ses judicieux commentaires ainsi quepour ce qu’elle sait...

Daubech Q, Delaroche M: Explorations audio-

métriques chez l’enfant: d’un dépistage fiable à

tout âge à une audiométrie précise. Les Cahiers

de l’Audition.2005,(18) 5: 17-26

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du très jeune enfant. DeBoeck Université

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RAPPELSBIBLIOGRAPHIQUES

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79

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

Dossier )

Starr A, Sininger Y, Nguyen T, Michalewski HJ,Oba S, Abdala C - Cochlear receptor (micro-

phonic and summating potentials, otoacoustic

emissions) and auditory pathway (auditory brain

stem potentials) activity in auditory neuropathy.

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Zeng FG, Liu S. Speech perception in individuals

with auditory neuropathy. J Speech Lang Hear

Res. 2006; 49 :367-80

Association « S’entendre » et INSERM(Chapitre VI)

Nemours Partnership for Children’s Health(Chapitres VIII, XI, XVII)

Fondation Fyssen (Chapitre XIII)

Fondation Loicq (Chapitres I, II,V, XV)

Et un grand merci également à StéphanieBertet pour sa disponibilité dans l’élabora-tion matérielle de cette monographie.

Plusieurs des chapitres composant cettemonographie en deux tomes ont bénéficiédu support financier d’organismes ou fon-dations de recherche que nous tenons àremercier ici :

Grant # R01 DC002618 from the NationalInstitute of Health (Arnold Starr)

Fondation Brugmann (Chapitres I, II,V, XV)

Fonds Emile Defays (Chapitres I, II, V, XIII,XV)

Fonds d’Encouragement à la Recherche dela Faculté de Médecine de l’Université Librede Bruxelles (Chapitres I, II,V, XIII, XV)

REMERCIEMENTS

Page 82: LA NEUROPATHIE AUDITIVE DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE 2 …

Oticon E. Biza

Bernafon

Collège National d’Audioprothèse

Newson

Entendre

Unitron

80

( Congrès 2008

Phonak

C omme on peut le remarquerdepuis quelques

années, le congrès nationalprend de plus en plusd’importance. Peut-êtreest-ce parce que lemarché se développe unpeu plus difficilement queles professionnels semettent eux-mêmessemble-t-il en question deplus en plus fréquemment.Il se pourrait aussi qu’onsoit à un tournant et queles comportementsparfois un peu aventureuxde certains inquiètent.De toute évidence larumeur et la désinforma-tion, relayée par certainsmédias en attente depublicité, jouent un rôleanxiogène qui explique enpartie certains comporte-ment dont celui de cher-cher un abri et de venirrencontrer le sauveur.Bien évidemment, dans cecas pourquoi ne pasconcocter des contrats desubordinations puisque laproie est là, disponible, etpense-telle sans défense !Il y a derrière ces mon-tages, le plus souvent,une soif de gain qui necorrespond certainementpas à la réalité décrite etfeinte de mettre leconsommateur au centredes préoccupations. Celane doit tromper person-ne. Si le consommateurregarde et s’amuse decette situation c’est parcequ il sait parfaitementinstrumentaliser une situa-tion dont il convient, lors-qu’il est digne de ce nom,que ce n’est évidemmentpas cela qu’il attend.Le miracle du développe-ment n’existe pas et cen’est certainement pas enbradant le travail que lespatients-consommateurstrouveront leur compte

dans la pratique prothétique. Ils le saventfort bien.Ce que l’optique a vécudevrait servir de guide.Car contrairement à ceque beaucoup pensentseuls subsistent correcte-ment aujourd’hui ceux quiont investi le meilleurd’eux-mêmes et de ce quece métier pouvait offrir demieux et pas de pire. Lesopticiens ont su se battrehabilement sur des critè-res qui contrairement à ceque l’on pense souventn’ont jamais remis encause l’essentiel de l’activité économique del’entreprise. Ce n’est pascompliqué d’acheter unemonture de qualité en Asie ! Comment peut-on envisa-ger d’équiper les patientsavec le meilleur de latechnologie et ne pasdisposer des matériels etconditions optimales deformation et de travailpour réaliser les adapta-tions ! Où irons-nousacheter des produits desubstitution équivalentsaux technologies les plussophistiquées ? Qui lesfabriquera ?Il est grand temps d’yréfléchir le sourire de lavendeuse ne suffira paslongtemps à tromper lechaland... Le but est-il devendre moins cher enfaisant moins bien ? Il estévident que cela nedevrait pas convaincre lesplus ardents défenseurs dela consommation qui sou-haitent peut-être un peuplus pour un peu moins.L’équation moins pourmoins ne s’apparente-t-elle pas au fameuxperdant-perdant ; équationinégalable de la bêtise ? Ilconvient d’y réfléchir àdeux fois. F.D.

Page 83: LA NEUROPATHIE AUDITIVE DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE 2 …

Beltone Audiologie Starkey

guet Audiomedi Widex - Acourex

Audiomedi - Hansaton Biotone

Interson

Siemens Audiologie Iso-Sonic

81

Rayovac

Page 84: LA NEUROPATHIE AUDITIVE DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE 2 …
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83

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

LA NOUVELLE LÉGISLATION DU BRUIT AU TRAVAILET LES PROTECTEURS INDIVIDUELS

Communications )

RENARD C.*,

HUMEZ N.*,

DIEBOLT R.**,

DI VINCENZO D.***

*Audioprothésiste D.E.,

**Ingénieur Acousticien,

***D.U. Techniques

Audioprothétiques

Laboratoire d’Audiologie

RENARD 50 rue Nationale -

59000 LILLE

Cette année, et pour la première fois au congrès national des audioprothésistesfrançais, un appel a été lancé à la communication affichée.Le premier prix a été attribué à l’équipe des Laboratoires RENARD,composée de Christian RENARD, Nicolas HUMEZ, Romain DIEBOLT etDomenica DI VINCENZO.Le poster présenté par cette équipe aborde la problématique du bruit au travail et reprend la nouvelle réglementation, les critères de choix et les valeursd’affaiblissement des équipements de protection individuelle contre le bruit.Nous faisons paraître dans ce numéro des Cahiers de l’Audition l’intégralité de cette communication affichée.

Madame Alice DEBONNET-LAMBERT

(directrice du CIDB) et Madame Christine DAGAIN

(orgnisatrice du congrès) devant les travaux

de l’équipe des laboratoires RENARD.

NOUVELLERÉGLEMENTATION

CONCERNANT LEBRUIT AU TRAVAIL

La nouvelle directive européenne2003/10/CE du 6 février 2003 et sa trans-cription en France (décret n° 2006-892 du19 juillet 2006 relatif aux prescriptions desécurité et de santé applicables en cas d’ex-position des travailleurs aux risques dus aubruit et modifiant le code du travail), redéfi-nissent les seuils d’exposition et les actionsde prévention à mener par rapport à l’an-cienne réglementation européenne sur lebruit (86/188/CEE) datant du 12 mai 1986.

Un nouveau seuil n’existant pas dans l’ancienne réglementation est défini :la valeur limite d’exposition à ne pas dépasser (VLE), le travailleur étant équipé deProtecteurs Individuels Contre le Bruit (PICB).

DOSE DE BRUIT

Il existe 2 paramètres importants à prendre en compte pour évaluer l’exposi-tion sonore : le niveau de pression auquel

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

84

( Communications

Si tel est le cas, l’employeur :

• prend immédiatement des mesures pour

réduire l’exposition à un niveau inférieur

à ces valeurs limites

• détermine les causes de l’exposition

excessive et adapte les mesures de

protection et de prévention en vue

d’éviter toute récurrence (voir figure 1).

LE NIVEAUD’EXPOSITION NE

DOIT EN AUCUN CASDÉPASSER LES VLE

Il existe deux méthodes de mesurage duLAeq et du Lpc

- mesurage long : avec un dosimètreporté pendant toute la journée de travail,

- mesurage court : qui peut être effectuéavec un sonomètre sur un nombre d’échantillons et une durée de mesurenormalisés.

Tableau 1 : Rapport niveau de pression / durée

RÉFÉRENCES DE LARÉGLEMENTATIONSELON LA NORME

NF S31-084

■ LEX,8h : niveau d’exposition quotidienne aubruit sur 8 h

LEX,8h = L*Aeq,TE + 10 log TE

T0

Avec : TE = durée totale effective de lajournée de travail

T0 = durée de référence fixée à 8 h

L*Aeq,TE = niveau de pression acoustiquecontinu équivalent pendant TE, incertitudede mesure incluse

LAeq : niveau de pression global d’un bruitcontinu qui aurait la même énergie que lebruit de la machine (qui varie en fonction dutemps) pendant la durée de la mesure.Unité normalisée : dB (A)

■ Lpc : niveau de pression crête (niveau debruit maximal) maximum parmi lesniveaux crête mesurés pendant la duréede mesure. Unité normalisée : dB (C)

( )

A RETENIR

Une personne exposée pendant 7secondes à un niveau de 116 dBreçoit la même dose de bruitqu’une personne exposée pendant8 h à 80 dB.

A RETENIR

LEX,8h : niveau de pression correspondant à une exposition de 8 h

Lpc : niveau de pression maximumreçu pendant la journée detravail

• L’évaluation du risque résultant de

l’exposition au bruit.

• La suppression ou réduction au minimum

du risque (en particulier à la source).

• La consultation des travailleurs pour

l’évaluation du risque, les mesures de

réduction, le choix des PICB.

• L’aménagement des locaux de repos

de telle sorte que le bruit dans ceux-ci

soit à un niveau compatible avec leur

destination.

Quel que soit le niveau d’exposition :

L’employeur prend des mesures de préven-tion dont :

ACTIONS DEPRÉVENTION

un salarié est soumis et son temps d’expo-sition. On parle alors de dose de bruit.Le tableau 1 illustre l’équivalence en dosede bruit d’un niveau de pression de 80 dBauquel un salarié est exposé pendant 8 h.

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

85

Communications )

A RETENIR

La nouvelle réglementation diminueles valeurs d’exposition inférieureset supérieures et met en place unenouvelle valeur : la valeur limited’exposition à ne pas dépasser avecle protecteur auditif.

Les valeurs d’affaiblissementdes PICB doivent donc êtreparfaitement adaptées

La figure 2 donne le comparatif des seuils

d’exposition de l’ancienne et de la nouvelle

réglementation.

Figure 1 : Actions à entreprendre en fonction des niveaux d’exposition

Figure 2 : Différence entre ancienne et nouvelle réglementation

Page 88: LA NEUROPATHIE AUDITIVE DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE 2 …

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

86

( Communications

Les PICB passifs ne contiennent aucunsystème électronique permettant un traite-ment actif du bruit. Leur atténuation n’est induite que par la forme, la structure,les matériaux et le positionnement dansl’oreille. Ces protecteurs peuvent êtremunis de filtres acoustiques, permettantd’adapter les niveaux d’atténuation auxbesoins spécifiques d’écoute.Les PICB actifs sont, quant à eux, munis d’undispositif électronique permettant uneréduction automatique active des bruits au-delà d’un certain niveau (par exemple 80 dB). Les sons utiles (parole, indicateurssonores de fonctionnement des machines)ne sont pas « bloqués » et peuvent mêmeêtre légèrement amplifiés pour des person-nes présentant un déficit auditif, même léger.

Certains protecteurs actifs utilisent égale-ment un système dit « en opposition dephase ». Les casques munis de ces dispositifsélectroniques enregistrent, moyennant desmicros, les bruits extérieurs. Ces bruits sontalors analysés et certaines ondes sonoressont renvoyées en opposition de phase(l’amplitude maximale de l’une coïncide avecl’amplitude minimale de l’autre et s’y super-pose). L’intensité du bruit reçu au niveau del’oreille est par conséquent réduite.

■ Atténuation suffisante et adaptéeIl faut que le bruit auquel est soumis le travailleur soit suffisamment atténué pourque le niveau d’exposition avec la protec-tion soit inférieur aux valeurs définies par laréglementation du 6 février 2003 (directiveeuropéenne 2003/10/CE).La durée d’exposition, les caractéristiquesdu bruit (intensité, fréquence) et les atté-nuations réelles des protecteurs pourchaque bande d’octave doivent être pris encompte lors du choix du PICB.

■ Maintien des besoins d’écouteLe PICB doit maintenir (voire accroîtredans le cas de personnes déficientes auditives) une perception auditive suffisan-te pour assurer une bonne fonction d’aler-te (identification et localisation d’élémentssonores pertinents de l’environnement telsque la parole ou certains sons utiles).

Pour ce qui est des malentendants appa-reillés, deux solutions se présentent :• soit retirer les appareils de correction

auditive et porter une protection antibruitadaptée (idéalement un système actif),

• soit maintenir le port des appareils decorrection auditive, à condition que leréglage réalisé par l’audioprothésiste soitadapté à la déficience auditive, mais aussiaux conditions d’exposition.

■ Conditions d’hygiène du lieu de travail

L’hygiène sur le lieu de travail doit fairepartie intégrante des critères de choix d’un PICB. Les bouchons standards à usageunique seront préférés à des bouchonsréutilisables dans certains milieux profes-sionnels (par exemple en cas d’exposition àdes solvants ou à des projections de peinture...). Dans le cas de protectionsstandards réutilisables, un simple nettoyage

PROTECTEURSANTIBRUIT PASSIFS

ET ACTIFS

• Les embouts surmesureLeur atténuation dépendde leur forme, de leurmatière et du filtreéventuel. La qualité del’empreinte auriculairejoue un rôle essentiel.

ELÉMENTS ÀPRENDRE EN

COMPTE LORS DUCHOIX D’UN PICB

ELÉMENTS ÀPRENDRE EN COMPTE

POUR LE CHOIXD’UN ÉQUIPEMENT

DE PROTECTIONINDIVIDUELLE

CONTRE LE BRUIT

Le choix d’un équipement de ProtectionIndividuelle Contre le Bruit (PICB) estsoumis à certaines contraintes liées notam-ment aux caractéristiques acoustiques dubruit, aux besoins d’écoute, aux conditionsd’exposition et au niveau d’audition de lapersonne concernée.

D’autres paramètres sont à considérer :le confort physique et auditif de la protection (résonance, effet d’occlusion) et les conditions d’hygiène liées au milieu professionnel.

Une parfaite maîtrise de ces exigencesgarantira le respect des nouvelles normesde sécurité et le port effectif des PICB.

LES DIFFÉRENTSÉQUIPEMENTS DE

PROTECTIONINDIVIDUELLE

CONTRE LE BRUIT(PICB)

• Les casques (ou serre-têtes)Leur atténuationdépend essentiellementdes matériaux dontsont constituées lescoques.

• Les bouchons standards (jetablesou réutilisables)Leur atténuationdépend du matériau,de la forme et du positionnement dans le conduit auditif.

Il existe principalement 3 types de protecteurs individuels contre le bruit :

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Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

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Communications )

sionnel est elle aussi une étape essentielle.Cette sensibilisation est d’ailleurs rendueobligatoire par la directive européenne du 6 février 2003 lorsque le niveau d’exposition quotidienne (LEX,8h) ou leniveau crête (Lpc) égalent ou dépassent lesVAI (valeurs d’expositions inférieures).

Lors de cette information, il faut expliquerde façon précise les risques encourus lorsd’une exposition à des bruits nocifs. Lesalarié doit être informé de la nécessitéd’une adaptation au port du PICB qui, audébut, risque d’être contraignant mais quiest indispensable au maintien de l’intégritéde ses facultés auditives. Les conseils d’hygiène doivent aussi être donnés.

L’information des salariés concernés sur lesrisques liés au bruit dans le milieu profes-

Figure 3 : Effet d’occlusion - Représentation de la propagation des vibrations dans le conduit auditif

Relation entre volume et effet d’occlusion - Berger E.H., 1983

Insertion courteBeaucoup de vibrations

Insertion profondePeu de vibrations

Oreille ouverteLes vibrations sortent du conduit auditif

Oreille occluseLes vibration sont «enfermées»

dans le conduit auditif

INFORMATION ETSENSIBILISATION

DES PERSONNELSCONCERNÉS

A RETENIR

Le port permanent du protecteurindividuel contre le bruit pendanttoute la durée d’exposition au bruit est indispensable pour sonefficacité. Retirer une protectionune heure par jour suffit à fairebaisser son efficacité de 70 % !

à l’eau tiède est conseillé par les fabricants.Lors de la délivrance d’embouts antibruitsur mesure, un kit de nettoyage doit être fourni conjointement à une notice d’utilisation.

■ Confort physiqueQuel que soit le type de PICB, le confortphysique est nécessairement à prendre encompte pour l’obtention d’un port effectifpendant toute la durée de l’exposition.

Dans le cas des casques antibruit, « la pres-sion exercée par la majorité d’entre eux estsuffisante pour interrompre l’arrivée dusang dans la zone de l’oreille. Après uncertain temps, la plupart des individus commencent à sentir une gêne et ils ont tendance à retirer leurs casques pour decourtes périodes, voire pour le reste dutemps d’exposition » (selon une étude deW. WILLIAMS du laboratoire Nationald’Acoustique Australien). Les travailleurs utili-sant les casques antibruit se plaignent aussitrès souvent de la chaleur et de la transpi-ration provoquées par le port de ces équi-pements. Il faut donc conseiller au porteurde retirer le casque pendant quelquesminutes de temps à autre dans le calme.

Pour ce qui est des bouchons standards, ilfaut que la forme s’adapte bien à lamorphologie du conduit auditif externe. Lechoix du bouchon est donc fondamental,une mauvaise mise en place pouvant compromettre grandement l’atténuationannoncée. Des problèmes d’otophonie oude sensation d’occlusion rendent égale-ment le port de la protection antibruit aléatoire. Ces phénomènes résultent de lafermeture du conduit auditif externe et seproduisent principalement lors d’une insertion inadaptée du PICB dans leconduit. Une insertion profonde est néces-saire pour réduire cet effet d’occlusion(voir figure 3). L’intérêt d’un embout surmesure est de respecter parfaitement lamorphologie de chaque individu et d’éviterces inconvénients.

Page 90: LA NEUROPATHIE AUDITIVE DÉSYNCHRONISATION AUDITIVE 2 …

Les Cahiers de l’Audition - Vol. 21 - n°2 - Mars/Avril 2008

88

( Communications

Elle est déterminée à partir de la relationsuivante : APVfx = mf - αsf

Avec : f : fréquence centrale de la banded’octave

x : efficacité de protection souhaitée du protecteur

mf : affaiblissement acoustique moyendéterminé selon l’ISO 4869-1

sf : écart type déterminé selon l’ISO4869-1

α : constante dépendant de l’efficacité de protection choisie(voir figure 6)

La valeur APV correspond à lavaleur de protection estiméepour chaque bande d’octave

La valeur SNR correspond à lavaleur d’affaiblissement globale.

Son calcul dépend :• du niveau de pression acoustique

pondéré A par bande d’octave d’un bruitrose normalisé LAf(k) [f(k) représentantles fréquences centrales par bande d’octave du bruit entre 63 Hz et 8000 Hz]qui a un niveau de pression acoustiquepondéré C de 100 dB.

• des valeurs de l’ APVf(k)x du protecteurpour chaque bande d’octave. (voir figure 6)

VALEURSD’AFFAIBLISSEMENTDES PROTECTEURS

INDIVIDUELS CONTRELE BRUIT (PICB)

DESCRIPTIF D’UN TABLEAU OFFICIEL DEPERFORMANCES FOURNI AVEC LE PICB

LES MÉTHODES DEDÉTERMINATION

DES PERFORMAN-CES D’UN PICB

SELON LA NORMENE EN ISO 4869-2

Pour protéger les travailleurs contre lebruit, les protections dites collectives sontchoisies en priorité (cf. Techniques deréduction du bruit en entreprise de P.CANETTO). Si celles-ci ne permettent pasune protection suffisante, les travailleursdoivent être équipés, en complément, deProtecteurs Individuels Contre le Bruit.

Les valeurs d’affaiblissement de ces protec-teurs sont déterminées par un organismecertifié à l’issue d’une série de mesures enlaboratoire et de calculs normalisés.(cf. normes NF EN 13819-2, NF EN ISO 11904-1, NF EN 24869-1, NF EN ISO 4869-2, NF EN 24869-3)

Celles-ci comportent :• une valeur APVf par bande d’octave• une valeur SNR• une valeur H,M,L (voir figures 4 et 5)

Figure 4 : Exemple de tableau de performance d’un protecteur

Figure 5 : Exemple de courbe d’atténuation d’un protecteur

Figure 6 : Descriptifs des paramètres intervenant dans la performance d’un protecteur

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Les valeurs H,M,L correspondent auxvaleurs d’affaiblissement pour les fré-quences aiguës,moyennes et graves.

Le calcul de ces valeurs Hx, Mx, et Lx ( xétant l ‘efficacité de protection choisie) estdéterminé par des équations dépendant :

• du niveau de pression acoustiquepondéré A par bande d’octave de huitspectres de bruit de référence normaliséspar rapport à un niveau de pressionacoustique pondéré A de 100 dB possé-dant des valeurs (LC-LA) différentes. LCet LA étant les niveaux de pressionacoustique pondérés C et A des bruits deréférence.

• des valeurs de protection estiméeAPVf(k)x du protecteur pour chaquebande d’octave. (voir figure 6)

La NF EN ISO 4869-2 fournit également untableau exprimant les valeur de α en fonc-tion de l’efficacité de protection choisiepour le protecteur (Voir tableau 2).

Dans l’exemple donné dans la figure 4, onobserve que l’APVfx est directementdéduit de la différence mf - sf, α vaut donc1. La valeur d’efficacité de protection garan-tie est donc de 84 % ( Voir tableau 2).

Cet indice de α=1 est utilisé dans la majo-rité des tableaux d’atténuation des protec-teurs. Ceci implique donc que les valeursd’atténuation indiquées ne sont garantiesque pour 84 % des personnes équipées.

Or, ainsi que nous l’indique le tableau 2, lemaximum d’efficacité qu’il est possible dechoisir selon la norme est de 95 %, cor-respondant à un α de 1,64.

De plus, des études ont démontré que l’efficacité des PICB dans les conditionsréelles d’utilisation est inférieure aux caracté-ristiques établies par les mesures en labora-toire.

Ces différences de performances peuventprovenir entre autre :

• d’un mauvais positionnement du protecteur

• des différences anatomiques entre lesconduits auditifs des sujets humains

• de problèmes d’hygiène entraînant unemoins bonne étanchéité

• de l’usure du protecteur

• d’une empreinte insuffisamment profondeou mal réalisée (dans le cas d’emboutsmoulés sur mesure).

Tous ces paramètres démontrent les diffi-

Nous rappelons que la valeur de protectionestimée selon la norme NF EN ISO 4869-2est donnée par la relation :

APVfx = mf - αsf

La présence de l’écart type sf rend comptedes différences interindividuelles entre lessujets relevées lors des mesures en laboratoi-re des valeurs d’affaiblissement du protecteur.

cultés qu’il existe à garantir les atténuationsannoncées. Or, la nouvelle réglementationimpose des valeurs limites d’exposition àne pas dépasser avec le protecteur auditif.Ceci implique de garantir, dans les condi-tions réelles de travail, les valeurs d’affaiblis-sement mesurées en laboratoire.

Cette contrainte tend à inciter à unemesure individuelle et systématique de l’at-ténuation réellement apportée, ce quin’existe malheureusement pas à ce jour.

Des travaux sont actuellement en courspour pallier ce manque.

A RETENIR

- les valeurs APV correspondent à l’atténuation par octave

- la valeur SNR correspond à l’atténuation globale

- les valeurs H, M , L correspondentaux atténuations sur les fréquen-ces aiguës, moyennes et graves

LIMITESD’INTERPRÉTATION

DES VALEURS DEPROTECTION

ESTIMÉE (APV)

Tableau 2 : Valeur de α pour différentes efficacités de protection

Communications )

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DIRECTIVE EUROPEENNE 2003/10/CE relative

aux prescriptions de sécurité et de santé

applicables en cas d’exposition des travailleurs

aux risques dus au bruit et modifiant le code

du travail.

Norme NF EN ISO 11904-1 : Détermination de

l’exposition sonore due à des sources placées à

proximité de l’oreille : partie 1 : technique du

microphone placé dans une oreille réelle ( tech-

nique MIRE ).

Norme NF EN 13819-2 : Protecteurs individuels

contre le bruit : Essai : partie 2 : méthodes d’essai

acoustique.

Norme NF EN 24869-1 : Protecteurs individuels

contre le bruit : partie 1 : méthode subjective de

mesurage de l’affaiblissement acoustique.

Norme NF EN ISO 4869-2 : Protecteurs indivi-

duels contre le bruit : partie 2 : estimation des

niveaux de pression acoustique pondérés A en

cas d’utilisation de protecteurs individuels

contre le bruit.

Norme NF EN 24869-3 : Protecteurs individuels

contre le bruit : partie 3 : méthode simplifiée de

mesurage de l’affaiblissement acoustique des

protecteurs du type serre-tête, destinée aux

contrôle de qualité.

MUELLER H. G., HAWKINS D. B., NORTHERN J. L.(1992) Probe microphone measurements.Earing aid selection and assessment - SingularPublishing Group, INC.

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Mémoire de soutenance en vue de l’obtention

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( Communications

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NOM ........................................................................................ PRÉNOM ..................................................................................

SOCIÉTÉ ................................................................................................................................................................................................

ADRESSE ...............................................................................................................................................................................................

......................................................................................................................................................................................................................

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L’EPU 2008 aura lieu lesVendredi 5 et Samedi 6Décembre 2008 à la Citédes Sciences et de l’IndustrieCentre des Congrès de LA VILLETTE - 30, avenueCorentin Cariou à PARIS(19ème)

et sera rehaussée par uneexposition des industrielsfabricants et importateurs dematériels d’audioprothèse etd’audiophonologie.

Le pré-programme de cet EPU, intitulé « Psychoacoustique etsurdité. Bases fondamentalesImplications prothétiques »est le suivant :

PhonétiqueLiens avec la psychoacoustique,la surdité et l’audiométrie.

Comment le cerveauperçoit-il les sons ?Physiologie et biomécaniquecochléaires.

Codage de l’intensité,de la fréquence et du temps.

Voies auditives afférentes etefférentes.

Stéréophonie.

Incidences de l’environne-ment sur la perceptionacoustique.

Paramètres psycho-acoustiques mesurableschez le normo-entendantet le déficient auditif :Fréquence, intensité ettemps.Etudes comparatives.

Différenciation entre troublespériphériques et centraux.

Aspects centraux du décodage psycho-acoustique.

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