La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

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Cette étude a été préparée dans le cadre du projet de l'IIPE sur «La gestion des enseignants » dirigé par Gabriele Göttelmann-Duret La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone Antoine Traoré Paris 1996 UNESCO : Institut international de planification de l'éducation

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Cette étude a été préparée dans le cadre du projet de l'IIPE sur «La gestion des enseignants »

dirigé par Gabriele Göttelmann-Duret

La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

Antoine Traoré

Paris 1996 U N E S C O : Institut international de planification de l'éducation

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

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Les idées et les opinions exprimées dans ce document sont celles de l'auteur et ne reflètent pas nécessairement les vues de l ' U N E S C O ou de Г П Р Е . Les appellations employées dans ce volume et la présentation des données qui y figurent n'impliquent de la part de l ' U N E S C O ou de Г И Р Е aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant à leurs frontières ou limites.

La publication de ce document a été financée grâce à la subvention de l ' U N E S C O et aux contributions de plusieurs Etats membres de l ' U N E S C O dont la liste figure à la fin de ce document.

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par l'atelier de reproduction de Г П Р Е .

Institut international de planification de l'éducation 7-9 rue Eugène-Delacroix, 75116 Paris

© U N E S C O janvier 1997 IIPE/ph

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L a gestion du personnel enseignant

Dans beaucoup de pays, en particulier dans ceux qui sont confrontés à des politiques d'ajustement structurel et à des restrictions du budget consacré à l'éducation, les responsables politiques et les gestionnaires cherchent de plus en plus à contenir les dépenses pour le personnel enseignant, en particulier en optimisant l'affectation et l'utilisation des enseignants.

Dans cette perspective, les décideurs, les planificateurs et les administrateurs doivent se poser des questions essentielles telles que :

Les enseignants sont-ils répartis de manière équitable entre les différentes régions et écoles du pays ?

e Quel type de mesures peuvent permettre de surmonter les déséquilibres géographiques existants ?

• C o m m e n t peut-on redéployer le personnel enseignant qualifié s'il est employé en surnombre dans des postes administratifs ?

• Par quelles voies pourrait-on atteindre un meilleur ajustement entre, d'une part, le profil et les motivations du personnel enseignant disponible ?

e E n particulier, c o m m e n t peut-on s'assurer que les enseignants capables sont affectés ou promus à des postes de responsabilité et mieux rémunérés ?

e Quels aménagements des structures de rémunération et de promotion et quelle mesures incitatives peuvent aider à améliorer la motivation et l'utilisation des enseignants ?

Lié à la question d'une meilleure affectation et d'une meilleure utilisation du corps enseignant, se pose le problème de savoir comment améliorer la présence effective des enseignants, c o m m e n t s'assurer que les enseignants affectés dans un poste disposent du niveau et du type de connaissances et de compétences nécessaires pour faire correctement leur travail ; et quels modes d'enseignement : double vacation ; classes multigrades, etc., mettre en oeuvre dans différents contextes.

L'objectif général du projet de Г П Р Е consiste à analyser les problèmes, les stratégies et les pratiques d'affectation des enseignants et finalement à

V

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La gestion du personnel enseignant

contribuer à Г identification et l'élaboration des politiques et des instruments de gestion efficaces dans ce domaine.

L e projet vise plus spécifiquement à :

e améliorer la connaissance actuelle des problèmes d'affectation et de gestion des enseignants ;

e identifier - à partir de monographies sur des aspects spécifiques de la gestion du personnel enseignant et d 'un certain nombre de monographies nationales - les politiques, les stratégies et les instruments de gestion permettant de résoudre les problèmes de l'affectation et de l'utilisation des enseignants ;

« élaborer les instruments et les indicateurs qui permettront un diagnostic et un suivi de l'affectation et de l'utilisation des enseignants ;

e contribuer au développement de capacités nationales dans le domaine de l'affectation des enseignants, en élaborant du matériel pédagogique lié au contexte.

Si les responsables politiques et administratifs portent un intérêt croissant à la question de savoir comment gérer l'affectation des enseignants de manière plus efficace, plus équitable et plus satisfaisante pour tous, les études et les informations sur ce thème sont encore éparses dans de nombreuses parties du m o n d e . Ceci est particulièrement vrai pour l'Afrique francophone, où les efforts déployés pour mieux connaître l'état réel du déploiement du personnel enseignant et développer des stratégies de gestion plus efficaces sont récents alors que les appels à la rationalisation de la gestion du secteur éducatif se sont faits de plus en plus pressants depuis la fin des années 1980.

L a présente monographie, préparée par Antoine Traoré, contribue à élargir et à systématiser l'information existante sur l'affectation et la gestion des enseignants dans les pays de cette région du m o n d e . Elle montre les défis majeurs auxquels ces pays se trouvent confrontés à présent dans le domaine en question, en particulier l'utilisation parfois peu rationnelle et la mauvaise répartition géographique des enseignants ainsi que le désajustement existant fréquemment entre les exigences de certains postes (postes d'enseignement dans des classes à effectifs pléthoriques ; postes de direction d'établissements scolaires, etc.) et le profil de ceux qui les occupent. Par ailleurs, l'auteur présente les principales stratégies employées dans la région pour répondre à ces problèmes majeurs.

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Table des matières

Introduction 1

Chapitre I L'affectation et la gestion des enseignants 4 1. Manque absolu ou mauvaise gestion ? 4 2 . Inégalités dans la répartition spatiale 13 3. Adéquation entre le profil et le poste de l'enseignant 25 4 . L'accès aux postes de responsabilité 26

Chapitre II Politiques nationales d'emploi et de déploiement de la force enseignante 28

1. Politiques de recrutement et de formation 28 2 . Politiques de redéploiement 33 3. Politiques d'utilisation du personnel enseignant 35 4 . Autres politiques 39

Chapitre П1 Systèmes de gestion 41 1. Systèmes de recrutement et de formation 41 2 . Gestion des affectations et des mutations 43 3. Gestion des carrières 46 4. Capacités institutionnelles et instruments de

gestion du personnel enseignant 51

Remarques finales 54

Bibliographie 60

Vil

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Introduction

L'éducation est un facteur déterminant du développement économique et social d'un pays. Elle constitue un impératif exigeant des efforts importants, tant sur le plan financier que sur le plan des ressources humaines. Si dans les années 80 le budget de l'éducation représentait dans les pays d'Afrique au Sud du Sahara plus de 5 % de leur Produit National Brut (P .N.B. ) , ces pays lui consacrent, à présent, et pour des besoins de plus en plus énormes, moins de 4 % d'un P . N . B . qui, dans certains cas, est en nette régression.

A u regard de l'ampleur des besoins et des difficultés financières dans cette partie du monde , une nouvelle stratégie dans la formulation et la mise en oeuvre des politiques éducatives s'est imposée : faire mieux et plus avec le peu que l'on a. O n ne pourra faire mieux et plus que s'il y a une meilleure utilisation et allocation des ressources disponibles. Etant donné qu'une grande partie du budget de l'éducation est consacrée aux dépenses du personnel, l'une des voies que l'on préconise afin d'atteindre une gestion rationnelle du secteur éducatif est le déploiement et l'utilisation plus efficaces des personnels enseignants.

Derrière cette approche de rationalisation, il y a le constat selon lequel des problèmes majeurs existent à présent au niveau de l'affectation du personnel enseignant. Ces problèmes demandent à être explorés plus avant et maîtrisés dans toute la mesure du possible car, vu la poussée démographique, d 'un côté, et les contraintes économiques actuelles, d 'un autre côté, il est à craindre que les pays d'Afrique au Sud du Sahara ne soient en mesure de satisfaire leurs besoins en enseignants dans les années à venir. E n effet, en Afrique francophone sub-saharienne1, le taux de

1. O n regroupe sous cette expression l'ensemble des anciennes colonies françaises et belges d'Afrique.

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croissance annuel (valeur médiane) des effectifs d'enseignants au primaire a été de 3 % sur la période 1985-1990 contre 5 % sur la période 1980-1985. A u secondaire, le taux est passé de 6 % à 5 % [Association pour le Développement de l'Education en Afrique ( A D E A ) 1995]. Parallèlement, le taux de croissance annuel des effectifs de l'enseignement primaire a diminué de 3 % (1980-1985) à 2 % (1985-1990). Si l'évolution des effectifs d'enseignants du secondaire garde à peu près la m ê m e ampleur que celle des effectifs d'élèves de ce cycle, la croissance des effectifs d'enseignants du primaire semble plus réduite que celle des effectifs d'élèves du cycle.

Peu nombreuses sont les études et informations relatives au déploiement et à la gestion du corps enseignant dans cette zone géographique.

L'objectif de cette monographie est de contribuer à combler la base existante en synthétisant les principaux éléments que la documentation disponible contient sur l'affectation et la gestion du personnel enseignant en Afrique francophone. Le travail vise à faire ressortir les défis majeurs auxquels les pays de la région se trouvent confrontés dans ce domaine et les principales stratégies qui ont été adoptées pour y répondre.

П sera articulé autour de trois axes principaux :

1er axe : L'affectation et la gestion des enseignants

Dans le Chapitre I nous présenterons quelques tendances majeures caractérisant le déploiement et la gestion du corps enseignant en Afrique francophone. Nous essaierons de traiter en particulier de la question de savoir dans quelle mesure il y a un manque absolu d'enseignants dans les pays d'Afrique francophone ou s'il y a surtout un problème de répartition géographique et de gestion du personnel enseignant disponible. Certains observateurs estiment qu'il existe, le plus souvent, dans ces pays, un manque d'enseignants dans les zones rurales alors que, parallèlement, les zones urbaines détiennent des effectifs pléthoriques dans les bureaux ou dans les classes.

U n autre aspect central de l'affectation optimale des enseignants réside dans la recherche d'une adéquation entre le poste et le profil de l'enseignant qui l'occupe. Quelques éléments d'information dont nous disposons sur cette question seront également présentés dans ce chapitre.

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Introduction

2ème axe : Les politiques nationales d'emploi et de déploiement de la force enseignante

L'objectif, dans ce second chapitre, est de présenter différentes politiques et stratégies qui ont été adoptées dans divers groupes de pays pour rendre l'affectation et la gestion du corps enseignant plus efficaces : politiques de redéploiement, mesures incitatives et autres pour une meilleure répartition géographique, etc.

3ème axe : Les systèmes de gestion.

E n partant du constat selon lequel l'efficacité du déploiement des enseignants dépend pour une part essentielle de la gestion des ressources humaines, cette partie essaiera d'explorer comment les pays d'Afrique francophone organisent et gèrent le recrutement, l'affectation, la mutation, et le développement professionnel du personnel enseignant.

Les informations utilisées au cours de ce travail proviennent de sources diverses, en particulier de statistiques nationales, d'études et de recherches.

П importe, dès à présent, de signaler que le travail n'est pas exhaustif. Il ne porte ni sur les enseignements du système non conventionnel (privé, religieux, communal,...), ni sur le cas des enseignants du troisième cycle ; il concerne principalement le premier cycle de l'enseignement public. Toutefois, sous certains aspects, il abordera le cas du second cycle public.

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Chapitre I

L'affectation et la gestion des enseignants

h Manque absolu ou mauvaise gestion ?

1.1 Regard sur les besoins actuels et futurs

Il existe un paradoxe dans les pays d'Afrique francophone que l'on peut résumer en termes de « sous-scolarisation » au regard des populations scolarisables et de « sur-scolarisation » au regard du poids du budget de l'éducation sur les finances publiques et des capacités d'absorption des sortants. E n dépit de ce poids financier de l'éducation sur le budget public, en particulier de celui des frais du personnel enseignant, des besoins énormes, notamment en personnel enseignant, existent. En effet, nombreux sont les pays qui se sont fixés un objectif de scolarisation à atteindre d'ici à l'an 2000. Selon le Rapport Mondial sur l'Education de l ' U N E S C O ( U N E S C O , 1991), il faudrait que les pays en développement - dans l'hypothèse d'une diminution du nombre d'élèves par maître - créent 5,2 millions de postes d'enseignants dans le premier degré au cours des années quatre vingt dix. E n gardant le m ê m e niveau d'encadrement et si l'on veut atteindre les taux de scolarisation prévus, on prévoit pour l'Afrique sub­saharienne une croissance des effectifs enseignants de 6 % par an au primaire et 9 % au secondaire.

П n 'y a pas de doute que c'est en Afrique au Sud du Sahara que les besoins sont les plus énormes. E n dehors de certains pays c o m m e l'Algérie, qui ont réussi à couvrir la totalité ou la quasi-totalité de leurs besoins en enseignants pour l'école fondamentale, aucun pays d'Afrique francophone ne fait exception à ce constat.

A u Tchad, pays sur lequel nous avons des projections, les besoins en enseignants du primaire d'ici à l'an 2002 varient entre 7.782 et 16.753, en fonction des hypothèses concernant les taux d'encadrement (F. Orivel ; J.

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L'affectation et la gestion des enseignants

Perrot, 1991), soit des besoins annuels compris entre 1.100 et 2.400 enseignants. Toujours selon ces deux auteurs, un rythme de formation de 264 instituteurs par an permet de faire face aux besoins actuels sans permettre pour autant, un éventuel remplacement des maîtres bénévoles. E n Guinée, la réalisation de l'objectif d 'un taux d'admission de 70 % en première année du primaire en l'an 2000, nécessite le recrutement de 500 enseignants par an pour ce cycle, au cours de la décennie précédant cette échéance.

A u secondaire, les besoins devraient également s'amplifier dans certains pays.

Tout ce tableau s'assombrit dès lors que l'on ajoute l'inventaire des besoins en enseignants qualifiés et les départs à la retraite. O n ne possède pas de données sur l'ensemble des pays d'Afrique francophone ; néanmoins, les données de quelques pays nous permettent de nous faire une idée de ces besoins.

O n estimait en 1989 les besoins en enseignants qualifiés du primaire au Burundi, au R w a n d a et en Tunisie respectivement à 2.066, 9.270 et à 2.043 (ВГГ, 1991). A u Mali, le remplacement des partants à la retraite dans la décennie à venir induit des besoins importants. Selon la pyramide des âges du corps enseignant de ce pays (enseignants de tous les degrés), 23 % des enseignants en 1992 avaient plus de 45 ans. E n supposant que la retraite dans ce pays se situe autour de 60 ans, il faudrait prévoir d'ici à l'an 2005 le remplacement de ces 23 %. D e manière générale, d'après les objectifs de scolarisation et les tendances démographiques, les besoins en enseignants vont aller en croissant dans les pays d'Afrique francophone.

U n e analyse plus fine des besoins réels exige cependant de savoir comment le personnel existant est effectivement déployé.

1.2 Gestion des enseignants

Si l'on s'en tient aux statistiques globales (sur le plan national), on est tenté de dire qu'il existe un excédent d'enseignants dans un certain nombre de pays. E n effet, dans certains pays le nombre des enseignants au primaire est nettement supérieur à celui des salles de classes de ce cycle. Logiquement, il ne devrait donc pas exister de classes sans enseignant. Cependant, il en est autrement car une partie des enseignants, en réalité, n'exerce pas son service en classe, les raisons étant diverses : affectation à un poste administratif au niveau central ou régional, au sein des établissements scolaires, congé de maladie, stage de formation, etc.

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

A u bout du compte, il existe un nombre relativement important de classes sans titulaires.

(i) Le taux d'encadrement

Le plus important quand on utilise le ratio élèves/maître dans la détermination des besoins ou la demande en enseignants c'est d'avoir un ratio de référence afin de le comparer au niveau du ratio réel sur le terrain. A défaut de cette référence, on peut se servir de l'évolution du ratio.

Cela étant, l'évolution des taux d'encadrement des élèves au primaire (voir Tableaux 1(a), 1(b) et 1(c)) fait ressortir trois groupes de pays : le premier groupe se compose des pays dont les taux d'encadrement sont en baisse (hausse du ratio élèves/maître) ; le second groupe comprend les pays dont les taux sont à la hausse (baisse du ratio élèves/maître) et enfin, le troisième groupe est composé de pays dont les taux d'encadrement sont plus ou moins stables.

Tableau 1(a). Ratio élèves/maître, Groupe 1

Pays

Burundi

Centrafrique

Congo

Guinée

Mali

Niger

Sénégal

Togo

1985

56

66

61

36

34

37

46

46

1990

67

90

66

40

42

42

58

59

Source : Association pour le Développement de l'Education en Afrique ( A D E A ) .

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L'affectation et la gestion des enseignants

Tableau 1(b). Ratio élèves/maître, Groupe 2

Pays

Burkina Faso

Gabon

Mauritanie

Seychelles

Tchad

Zaïre

1985

62

46

51

22

71

41

1990

57

42

45

19

67

37

Source : Association pour le Développement de l'Education en Afrique ( A D E A ) .

Tableau 1(c). Ratio élèves/maître, Groupe 3

Pays

Bénin

Cameroun

Comores

Dijbouti

Madagascar

Rwanda

1985

33

51

35

44

38

56

1990

35

51

36

43

40

57

Source : Association pour le Développement de l'Education en Afrique ( A D E A ) .

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

S'il était prouvé qu'un effectif élevé ne réduit pas la qualité de l'enseignement, alors un ratio élèves/maître qui augmente serait une façon d'accroître la productivité des enseignants et indiquerait, par conséquent, une bonne utilisation de ces enseignants. O n peut se demander, cependant, si ce ratio élevé n'est pas préjudiciable à la qualité de l'enseignement - du moins dans un contexte où les enseignants ne sont pas préparés à des pratiques efficaces dans les salles de classes pléthoriques. Avec une moyenne de 48 élèves par maître, le ratio élèves/maître est, pour l'Afrique francophone, bien supérieur à celui relevé pour l'Afrique anglophone (39/1) et pour l'Asie (37/1) ( A D A E , 1995, d).

(ii) Le corps enseignant

A u niveau de la composition du corps enseignant, on constate une variété de statuts et de profils de qualification : 11 % des enseignants en Tunisie sont des contractuels. Dans d'autres pays c o m m e c'est le cas au Burkina Faso, plus de 10 % des postes d'enseignants du primaire sont assurés par les appelés du service militaire (Service National pour le Développement). Le Bénin, lui aussi, a eu massivement recours à des jeunes volontaires - sans formation - pour occuper des postes d'instituteur. Dans le premier cas, il faudrait, à long terme, titulariser les contractuels (nous reviendrons sur cet aspect) ; dans les deux autres cas, les appelés ou volontaires ne sont pas des enseignants qualifiés. A u Burundi, on a recours aux étrangers, lesquels représentent, au début des années 90, 17 % du corps enseignant au primaire. Dans ce pays, les besoins annuels actuels s'élèvent au moins à 1.000 nouveaux enseignants à recruter ( M . W . Kaba ; M . Bwimana , 1993).

L'analyse est plus complexe au secondaire car elle doit être faite par discipline, en tenant compte des heures officielles de cours dans la discipline et de la charge horaire officielle des différentes catégories d'enseignants à ce niveau (agrégés, C A P E S , etc,).

C o m m e précédemment, la composition du corps enseignant du secondaire de certains pays peut être source d'enseignements en ce qui concerne les besoins actuels. E n 1993, plus de 45 % du corps enseignant au Burkina Faso étaient des appelés du service national. Certains, parmi eux, sont de futurs enseignants formés qui exerceront la profession d'enseignant après le service ; le nombre de ceux qui ne le sont pas ne nous est pas connu mais il est probable qu'il soit élevé. L'audit du ministère de l'éducation nationale du Bénin indiquait en 1991 que le déficit horaire des heures de cours au secondaire pourrait être estimé à 18 % de la masse horaire globale.

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L'affectation et la gestion des enseignants

C e déficit concernerait les matières de Français, d'Anglais, de Mathématiques et des Sciences Physiques. O n apprend dans une étude du B.I .T. (BIT, 1991) que c'est justement dans les disciplines de langues, de mathématiques et de sciences que les pays rencontrent le plus souvent les pénuries d'enseignants au second degré.

(iii) Les modalités de service

L e souci d'optimiser les services rendus par les enseignants renvoie à un certain nombre de questions concernant leur affectation réelle et leurs modalités de service.

Concernant la charge horaire, tout d'abord, on note que dans les pays en développement, l'enseignant consacre plus de temps à dispenser les cours en salle de classe que son collègue des pays développés : 28 heures par semaine contre 25 heures dans le second cas. Mais, à l'opposé, l'enseignant dans les pays développés consacre plus de temps payé aux activités para­scolaires (T. M . Longo, 1993). Le choix consistant à consacrer plus de temps de travail aux cours magistraux dans les pays en développement est sans doute rationnel si l'on se situe sous l'angle purement économique et si l'on tient compte de leurs pénuries d'enseignants mais sous l'angle pédagogique, cela pourrait ne pas l'être dans le cas où les conditions favorables à ce type d'enseignement et d'apprentissage ne sont pas réunies.

• Quant aux modalités de service, les informations disponibles concernent surtout les enseignants du premier degré. Dans ce cycle, on peut distinguer 4 systèmes différents, lesquels coexistent quelques fois dans un m ê m e pays.

Le premier système est le plus répandu : l'enseignant est affecté dans une « classe simple ». Son temps hebdomadaire de travail peut atteindre 40 heures selon le pays. Souvent, il existe à côté des enseignants ayant des classes « simples », des enseignants travaillant dans des « classes multigrades ». us assurent dans ce cas le m ê m e nombre d'heures que leurs collègues des « classes simples ». Mais ils doivent, contrairement aux autres, dispenser sur la m ê m e durée de temps deux cours différents pour deux classes. Lorsque les effectifs en classes ne sont pas très élevés, il semble que les classes multigrades soient un m o d e de service rationnel, à condition que l'enseignant soit préparé aux méthodes d'enseignement dans ces types de classes. Ces classes perdent cependant leur rationalité quand elles sont pléthoriques.

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

- Dans le second système, l'enseignant est affecté à une classe en « double vacation ». Dans ce cas, son volume horaire quotidien tend à être moindre étant donné qu'il cède alternativement la salle de classe les après-midi ou les matinées à un autre enseignant. C e système se rencontre dans des pays c o m m e le Sénégal, la Mauritanie, le Niger et le Burundi. O n exploite grandement les salles de classes par cette méthode mais, dans ce système, les enseignants sont, par rapport à leurs collègues du premier système, sous-utilises.

- L e troisième système est celui des enseignants concernés par le « double flux », c'est-à-dire ayant deux classes dans une m ê m e journée, l'une le matin, l'autre l'après-midi. C e système a entraîné dans des pays c o m m e la Mauritanie, une augmentation sensible du temps de travail de l'enseignant de plus de 6 heures par semaine. Il se rencontre dans un grand nombre de pays.

- Le quatrième cas défigure, que l'on rencontre quelques fois dans les zones urbaines, est le doublonnage des enseignants dans les classes. L'audit sur la gestion du secteur éducatif au Bénin, par exemple, indique que sur un échantillon de 217 classes du primaire, les sureffectifs étaient de 45 enseignants en 1990, 52 en 1991 et 44 en 1992, soit des sur-effectifs de plus de 20 %. Les enseignants qui se retrouvent dans ce système ont incontestablement moins de temps de travail que leurs homologues servant dans d'autres systèmes d'utilisation ; en effet, à deux pour une m ê m e classe, ils se relaient dans l'exercice de leur fonction. Les modalités d'exercice dans le cas du Bénin sont soit l'alternance d'une semaine à l'autre, soit toutes les 48 heures ou par demi-journée. O n reproche à ce dernier système d'être un exemple de mauvaise utilisation du corps enseignant et surtout d'être un exemple d'irrationalité car, le plus souvent, les enseignants qui sont dans ce système sont soit autant rémunérés que les autres, soit rémunérés avec un écart très faible.

La recherche d'une gestion optimale du personnel enseignant voudrait que les avantages et les inconvénients respectifs de ces différentes modalités d'utilisation soient soigneusement analysés et pondérés. E n particulier : quel est l'impact du système de « double flux » ? L'efficacité pédagogique de l'enseignant ne risque-t-elle pas d'être réduite par cette extension du temps de travail et comment cette dernière est-elle compatible avec les activités productives parallèles de l'enseignant (travaux agricoles ou de petit commerce, par exemple) qui constituent un phénomène répandu dans de

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L'affectation et la gestion des enseignants

nombreux pays en développement où le salaire d'enseignant est faible ? L à où elle constitue une réalité incontournable, l'activité (ou les activités) parallèle(s) de l'enseignant doit(doivent) être prise(s) en compte dans la réglementation et l'organisation des horaires de travail.

(iv) Les enseignants non chargés de cours

L a proportion d'enseignants non chargés de cours (enseignants dans les administrations centrales et régionales, conseillers pédagogiques, inspecteurs, enseignants déchargés de cours travaillant dans l'administration de leur établissement, remplaçants, enseignantes en congés de maternité et souvent les malades) est, dans certains pays, très élevée. Le tableau ci-dessous permet d'étayer cette affirmation.

Tableau 2 . Nombre d'enseignants en classes pour un enseignant déchargé de cours2

Pays

Burkina Faso

Burundi

Côte d'Ivoire

Mali

Années

1991

1992

1993

1991

Ratio

23

16

13

34

Sources : Annuaires statistiques nationales.

M ê m e s'il est difficile, dans l'absolu, de porter un jugement sur le nombre d'enseignants déchargés de cours, on est amené, cependant, à se poser, des questions du genre : Quelle est la tâche exacte des enseignants non chargés de cours ? A-t-on besoin d 'un si grand nombre d'enseignants pour assurer des tâches administratives ? U n fonctionnaire non enseignant ne serait-il pas, dans certains cas, mieux à m ê m e de les accomplir ?

2. Il s'agit du rapport du nombre des enseignants chargés de cours sur le nombre des enseignants non chargés de cours.

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

L'audit au Bénin précédemment évoqué, révèle que sur 1.228 enseignants non chargés de cours3 en 1991 (867 instituteurs, 173 professeurs du secondaire et 77 professeurs d'université), « 237 sont affectés à des fonctions d'administration éducative (statistiques, cartes scolaires, examens, gestion pédagogique, encadrement), 220 le sont à des fonctions de gestion administrative (gestion du personnel, budget, comptabilité, gestion du matériel, etc.) et 771 à des tâches de secrétariat, de logistique et de soutien ». A u Mali, une enquête semblable révèle que sur environ 3.000 enseignants (tous cycles confondus) non chargés de cours, plus de 500 ne déclarent aucune fonction précise, auxquels s'ajoutent environ 500 enseignants occupant des fonctions de secrétaire, d 'économe, de bibliothécaire, etc. ; les autres non-chargés de cours étant affectés à des fonctions d'encadrement ou de gestion du système scolaire (fonctions qui peuvent être compatibles ou non avec leur profil).

Il peut être approprié d'employer des enseignants dans des fonctions d'administration éducative (direction d'établissement, inspection et certaines fonctions de gestion éducative au niveau central et régional), ceci d'autant plus que ces postes de gestion et d'encadrement constituent souvent les seules perspectives d'avancement professionnel pour les enseignants. E n revanche, les autres fonctions de gestion pure peuvent être accomplies par des non enseignants. L'affectation des enseignants à ces fonctions se justifie d'autant moins qu'elle induit deux types de coûts importants que l'Etat ou le ministère de l'éducation devrait supporter :

- coûts liés au fait que de nouveaux enseignants doivent être recrutés et formés en remplacement de ceux qui sont dans les administrations ;

- coûts inhérents à la nécessité, à court ou à moyen terme, de former les enseignants affectés aux postes de gestion administrative aux rudiments de leur nouvelles fonctions. Ils peuvent, à long terme, acquérir certains rudiments par l'apprentissage sur le tas ; mais on ne pourra pas éviter les coûts de certains dysfonctionnements des administrations, en l'absence d'une formation appropriée. D e plus, dans certains pays, ce sont les enseignants qualifiés - ou qui ont le plus d'expérience - qui sont appelés à ces fonctions administratives, accentuant ainsi les pénuries d'enseignants de qualité.

3. Les enseignants dans l'administration des établissements non compris.

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L'affectation et la gestion des enseignants

• U n aspect non négligeable dans l'affectation des enseignants non chargés de cours concerne ceux qui travaillent dans l'administration des établissements scolaires. E n particulier, au second degré, la taille des établissements peut justifier que le personnel de direction soit - du moins partiellement - déchargé de cours. Cependant, les fonctions administratives dans les établissements scolaires regroupent non seulement les fonctions de direction (tâches pédagogiques, tenue des dossiers, organisation du fonctionnement de l'établissement, emploi du temps, etc.), mais aussi les fonctions de surveillance, d'intendance ou d'économat ainsi que diverses autres fonctions. U n e gestion plus rationnelle du personnel pourrait être atteinte en réservant les fonctions simples de gestion et de secrétariat à des non enseignants, à condition que ces fonctions soient moins rémunérées que celles d 'un enseignant. D e manière générale, cependant, la déperdition d'enseignants au profit de l'administration soulève la question de savoir quels systèmes de carrière et de récompense permettraient d'améliorer la rétention d'enseignants performants dans des fonctions d'enseignement.

2. Inégalités dans la répartition spatiale

2.1 Une évaluation complexe

L a répartition des enseignants sur le territoire d 'un pays constitue une autre dimension centrale de leur déploiement et de leur gestion.

П convient, sur ce point, de distinguer entre les situations de déséquilibre avec pénuries d'une part, et les situations de déséquilibre sans pénuries (pas de pénuries mais la répartition est inégale), d'autre part. E n effet, il existe dans certains pays un nombre suffisant d'enseignants permettant de doter chaque classe d 'un instituteur, alors que dans des zones rurales, des classes restent souvent sans titulaire. E n Tunisie, par exemple, il n ' y a pas de pénurie d'enseignants au niveau national et, pourtant, il y a un déséquilibre au profit des zones urbaines. Par contre, on observe au Mali, au Burkina Faso et à Madagascar, des pénuries graves d'enseignants dans certaines zones géographiques qui s'ajoutent à une pénurie apparemment générale d'enseignants du primaire.

E n l'absence d'informations quantitatives bien détaillées, on ne peut pas évaluer l'ampleur réelle de ces pénuries et ceci notamment pour les raisons suivantes :

e l'évaluation des pénuries, à partir des découpages administratifs existants, en inspections, en province, en Governorats ou en toute

13

Page 20: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

autre entité géographique, fournit une image peu précise de la réalité. Ainsi, d 'un découpage plus fin, il pourrait résulter des pénuries dans des sous-entités alors qu'au niveau global de l'entité administrative considérée, il n 'en existerait pas ;

e l'adoption du système de double flux ou des classes multigrades dans une zone augmente le nombre de classes pourvues d 'un enseignant sans, pour autant, faire croître celui des enseignants. Si les enseignants qui tiennent ces classes multigrades ou à double flux n'étaient pas comptés autant de fois que les classes auxquelles ils enseignent, le nombre des classes sans enseignant apparaîtrait en fait plus élevé ;

• la pénurie dans les zones rurales se traduit parfois par une fermeture des classes ou, le plus souvent, par une simple fusion des classes sans enseignant dans des écoles voisines. Statistiquement, les pénuries disparaissent avec de telles pratiques étant donné que seules les classes ayant un enseignant restent en fonctionnement. П semble qu'en 1990, les classes sans titulaire dans certaines zones reculées de la Côte d'Ivoire et du Cameroun aient été fermées (Rapport économique pour l'Afrique C E A , 1993) et qu'au Burundi, les responsables procèdent à la fusion des classes dans les écoles voisines ( M . W . Kaba ; M . Bwimana , 1993). Cette stratégie de rationalisation comporte le risque de décourager certains enfants habitant loin des classes maintenues, d'aller - ou de continuer à aller - à l'école ;

e enfin, il convient de noter que les données sur les enseignants en service, le nombre de salles de classes et les effectifs d'élèves ne sont pas toujours fiables. O n note, par exemple, parfois une tendance à la « surestimation » des besoins d'enseignants (en d'autres termes, à la « sous-estimation » du personnel enseignant effectivement disponible) - ceci surtout dans des contextes où les ressources financières et humaines allouées à un établissement dépendent du nombre d'élèves et d'enseignants en service que ce dernier déclare avoir.

C e qui semble c o m m u n à tous les pays d'Afrique francophone, est le fait que les classes dans les zones urbaines ont, d'une manière générale, toujours un enseignant titulaire. Cependant, leurs ratios Elèves/Maître sont souvent élevés par rapport à celui existant dans les zones rurales. Pour un groupe de cinq pays, le Tableau 3 donne une indication de la différence entre la capitale et l'ensemble du pays en ce qui concerne ce ratio. Toutefois,

14

Page 21: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

L'affectation et la gestion des enseignants

au Burundi, ce dernier est moins élevé dans la capitale que la moyenne nationale. E n Tunisie, cet indicateur ne fait pas apparaître de différences. Dans les autres pays inclus dans ce tableau (comme dans la majorité des cas en Afrique francophone), la tendance évoquée à trouver des classes pléthoriques à la capitale se confirme.

Tableau 3. Ratio élèves/maître au niveau national et dans la capitale

Pays

Burkina Faso

Burundi

Côte d'Ivoire

Togo

Tunisie

Années

1991

1992

1993

1990

1992

National

56

66

36

58

26

Capitale

74

59

41

66

26

Sources : Annuaires statistiques nationales.

Si l'on ne retenait que les enseignants en classe, les ratios dans les zones urbaines augmenteraient encore plus car la variable « nombre de maîtres » communément utilisée dans les statistiques nationales pour le calcul du ratio Elèves/Maître est la s o m m e des maîtres en classes et des maîtres non chargés de cours. Or, la part des enseignants travaillant dans les administrations est logiquement plus élevée dans les zones urbaines (où ces administrations sont généralement localisées) que dans les zones rurales.

Cependant, le ratio simple du nombre d'élèves par maître fournit une vision imparfaite de la distribution réelle de l'offre d'enseignants : une zone peut avoir le ratio le plus faible non pas parce qu'il y a un excédent d'enseignants mais parce que les effectifs scolarisés y sont faibles. E n fait, pour évaluer la rationalité de la répartition du personnel enseignant sur un territoire, il faut tenir compte des établissements et des classes et, dans le cas du secondaire, du nombre de filières et de matières enseignées dans ces établissements.

15

Page 22: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

Dans cette optique, considérons un indice qui fait apparaître les inégalités de la distribution entre les zones : l'indice de représentation (IR). П est défini dans le cas du premier degré, c o m m e le rapport de la proportion d'enseignants (y compris les enseignants dans les administrations) d'une zone géographique à la proportion du nombre de classes de cette zone. A u niveau national, IR au primaire vaut toujours 1. U n e région sera sur­représentée en enseignants si son IR est supérieur à 1 et inversement, la région sera sous-représentée pour un IR inférieur à 1. Le cas parfait est celui où IR vaut 1 pour toutes les zones géographiques, c'est-à-dire une situation d'absence d'inégalité dans la distribution. Les Tableaux 4, 5 et 6 donnent l'état de la répartition en Côte d'Ivoire, en Tunisie et au Mali.

Tableau 4. Disparités géographiques dans la répartition des enseignants du primaire en Côte d'Ivoire

Directions régionales

Abengourou

Abidjan

Bondougou

Bouakè

Daloa

Korhogo

Man

Odiennè

San Pedro

Yamousoukro

Ratio Elèves/Maître

35

41

31

33

39

29

34

27

37

33

Total (pays) 1 36

Proportion des enseignantes (%)

16

27

7

21

12

15

8

8

11

16

18

IR

1,03

1,02

0,99

1,01

0,98

1,02

0,97

0,99

0,99

1,00

1,00

Source : Annuaire statistiques du ministère de l'éducation nationale (1993) Côte d'Ivoire.

16

Page 23: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

L'affectation et la gestion des enseignants

Tableau 5. Disparités géographiques dans la répartition des enseignants du primaire en Tunisie

Govemorats

Tunis

Ariana

Ben Arous

Zaghouan

Bizerte

Bèja

Jendouba

Siliana

LeKef

Kasserine

Sidi Bouzid

Gafsa

Tozeur

Kebili

Tataouine

Medenine

Gabès

Sfax

Mahdia

Kairouan

Monastir

Sousse

Nabeul

Total (pays)

Ratio Elèves/Maître

26

30

26

25

27

26

30

26

25

30

27

28

26

29

28

27

25

24

25

27

23

25

24

26

Proportion des enseignantes (%)

60

57

64

48

53

50

47

42

47

33

23

44

38

26

30

30

48

36

36

43

52

51

50

45

IR

1,08

0,98

1,01

0,95

0,99

0,98

0,95

0,94

0,99

0,90

0,92

0,95

0,99

0,93

0,92

0,98

1,00

1,06

1,00

0,95

1,16

1,08

1,05

1,00

Source : Annuaire statistiques du ministère de l'éducation et des sciences 1992) Tunisie.

17

Page 24: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

Tableau 6. Disparités géographiques dans la répartition des enseignants du fondamental au Mali

Inspections

Kayes

Bafoulabé

Kita

Nioro

Koulikoro

Baguineda

Dioila

Kati

Kolokani

Sikasso 1

Sijasso2

Bougouni1

Bougouni 2

Koutiala

Segou l

Segou 2

Niono

San

Mopti seva

Proportion des enseignantes (%)

19

11

9

9

15

14

6

23

8

37

7

8

6

25

35

17

19

13

19

IR (tous les enseignants)

0,91

0,82

1,46

0,82

0,90

0,63

0,62

0,97

0,65

1,64

1,14

1,03

1,21

1,08

1,07

0,92

1,10

0,98

0,95

IR

Enseignants 1er cycle

1,12

1,16

1,07

1,45

1,27

1,13

1,05

1,06

1,47

0,79

0,77

0,81

1,00

0,87

0,83

0,87

0,90

0,89

0,96

Enseignantes 2nd cycle

0,84

0,79

0,91

0,43

0,66

0,83

0,94

0,92

0,40

1,27

1,30

1,24

0,99

1,16

1,22

1,17

1,13

1,15

1,05

18

Page 25: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

L'affectation et la gestion des enseignants

Tableau 6. (suite)

Inspections

Bandiagara

Tenenkou

Tombouctou

Dire

Gao

Bouren

Bamako 1

Bamako 2

Bamako 3

Bamako 4

Bamako 5

Bamako 6

Bamako 7

Total

Proportion des enseignantes (%)

6

0

12

10

17

4

47

70

41

47

50

48

54

22

IR (tous les enseignants)

0,81

0,80

1,24

0,97

1,00

0,75

1,33

0,64

1,39

1,34

1,37

1,46

1,76

1,00

m

Enseignants 1er cycle

1,05

0,55

0,98

1,20

1,12

1,25

0,94

1,59

0,74

0,76

0,72

0,95

1,01

1,00

Enseignants 2nd cycle

0,93

1,57

1,03

0,74

0,85

0,68

1,08

0,24

1,33

1,31

1,36

1,07

0,98

1,00

Source : Annuaire statistiques du Ministère de l'Education Nationale Mali (1992). 2 = 2ème cycle du Fondamental

Ces tableaux montrent, notamment, dans les cas considérés, que les capitales sont sur-représentées, c'est-à-dire sur-dotées d'enseignants.

19

Page 26: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

A u Mali, TIR de l'inspection de B a m a k o 7 atteint 1,76 tandis que ceux de Baguineda et de Dioila valent respectivement 0,63 et 0,62. Dans ce pays, il est important de distinguer entre le 1er et le 2ème cycle de l'enseignement fondamental. Certaines inspections sont sous-représentées à l'un ou l'autre de ces cycles seulement. E n Tunisie, également, certains governorats sont « sous-représentés » ; c'est le cas, entre autres, des governorats de Tataouine et de Kasserine. Rappelons cependant que la sous-représentativité des governorats peut signifier qu'il n 'y a pas - ou relativement peu -d'enseignants dans des fonctions administratives. E n tout cas, un indice de représentation en-dessous de 1 ne signifie pas toujours qu'il existe des classes sans enseignant et un indice au-dessus de 1 n'indique pas le contraire. L a Côte d'Ivoire en est une illustration. O n y enregistre des classes sans enseignant dans les régions de San Pedro et de Korhogo ; ces dernières sont pourtant « bien représentées ».

2.2 Répartition géographique des enseignantes

U n phénomène c o m m u n à tous les pays considérés ici, est la distribution spatiale inégale des enseignantes m ê m e si leur pourcentage au niveau national et les disparités dans leur distribution spatiale varient fortement d 'un pays à l'autre (voir Tableaux 4,5 et 6) . Dans les pays retenus dans le Tableau 7 ci-dessous, elles représentent plus de la moitié des personnels enseignants des zones urbaines.

Tableau 7 . Proportion des enseignantes au niveau national et dans la capitale

Pays

Burkina Faso

Burundi

Mali

Togo

Tunisie

Années

1991

1992

1991

1990

1992

National (%)

27

47

22

20

45

Capitale (%)

76

90

50

51

60

Sources : Annuaires de statistiques nationales.

20

Page 27: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

L'affectation et la gestion des enseignants

Dans certains cas c o m m e celui du Burundi, on observait que les enseignantes étaient non seulement concentrées dans les salles de classe en ville mais qu'elles représentaient 83 % des enseignants en surnombre dans les grandes villes ayant pour fonction de remplacer les absents ( M . W . Kaba et M . B w i m a n a , 1993). S'il est de plus en plus reconnu que la présence d'une enseignante peut contribuer à augmenter la scolarisation des jeunes filles en zone rurale, des difficultés importantes subsistent apparemment dans la plupart des pays d'Afrique francophone pour y attirer et stabiliser les enseignantes, surtout dans les zones les plus reculées.

Dans quelques pays d'Afrique francophone, le taux de féminité des enseignants au niveau national est faible, m ê m e dans les zones urbaines. Selon une étude sur la qualité de l'enseignement en Guinée, par exemple, les femmes représentent 30 % des enseignants dans la capitale (Conakry) ; il est vrai qu'elles ne sont que 16 % au niveau national. (J. Y . Martin ; T . N . Châu , 1993). U n e situation semblable se retrouve en Côte d'Ivoire (voir Tableau 4 page 16). Ces pays font face à un problème général de sous-représentativité des femmes dans le corps enseignant.

2.3 Répartition des enseignants qualifiés et expérimentés

Globalement, les déséquilibres entre les régions semblent particulièrement marqués en ce qui concerne la distribution des enseignants qualifiés et expérimentés.

A u Mali, par exemple, certaines inspections (c'est-à-dire certaines zones administratives), sont sous-représentées si l'on considère la part que représente leur personnel enseignant vu dans sa globalité dans le corps enseignant du pays ; mais quand il s'agit des enseignants qualifiés, elles sont sur-représentées. Inversement, d'autres inspections sont sous-représentées au niveau des enseignants qualifiés alors qu'elles ne le sont pas dans la représentativité du total des enseignants (voir Tableau 6page 18). C'est le cas notamment des inspections couvrant des zones à faible densité de population où le rapport élèves/maître est bas mais qui attirent peu d'enseignants qualifiés. Pour évaluer plus précisément la rationalité de la répartition spatiale des enseignants, il est donc important de tenir compte de différentes variables telles que les caractéristiques des enseignants d'une part, le niveau, l'organisation de la scolarisation et l'utilisation réelle du personnel enseignant, par zone géographique, d'autre part.

U n exemple des disparités interrégionales dans la distribution des enseignants qualifiés est le Togo. E n 1989/90, les instituteurs représentaient 26 % et les instituteurs-adjoints, 51 % du corps enseignant du primaire.

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Page 28: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

Leurs répartitions respectives dans les 21 grandes régions restaient très inégales. Alors que les instituteurs-adjoints constituaient plus de 62 %, voire 7 1 % , du corps enseignant dans les régions de Binah, Doufelgou, Assoli et Bassar, ils ne sont que 43 % dans les régions du Golfe et de Zio. Quant aux instituteurs (plus qualifiés), ils sont relativement plus nombreux dans les régions du Golfe (30 %) et de Tchaoudio (29 %) et moins présents dans celles de Binah (17 %) et de Wawa (15 %) (A. Kudjoh, 1995).

E n outre, les enseignants expérimentés (ayant cinq ans d'ancienneté et plus) tendent à être concentrés dans les zones urbaines. U n e étude sur le personnel du ministère de l'éducation au Mali, révèle que 51 % des maîtres du premier cycle, chargés de cours au niveau national, avaient moins de cinq années de service en 1992 et ne représentaient que 38 % au niveau de la région de B a m a k o . Par contre, ils constituaient plus de 60 % des maîtres dans la région de Koulikoro (République du Mali, 1992).

Cette situation est similaire dans de nombreux pays d'Afrique francophone. H importe donc de recenser les facteurs qui sont à l'origine de cette mauvaise répartition géographique des enseignants.

2.4 Causes de la mauvaise répartition géographique des enseignants

Quels sont les causes ou les facteurs qui peuvent expliquer les inégalités entre les zones urbaines et les zones rurales, ou entre différentes régions, en ce qui concerne la distribution du personnel enseignant ?

Plusieurs raisons sont généralement évoquées pour expliquer la préférence des enseignants pour les zones urbaines. Elles peuvent être classées en trois groupes :

e Raisons économiques : Dans son étude sur les politiques d'ajustement et la professionnalisation des enseignants portant sur un échantillon de 22 pays d'Afrique Sub-saharienne, T . M . Longo (1993) note que la rémunération des enseignants a diminué de 13 % (chiffre médian) sur la période 1980-1987. Beaucoup d'enseignants, sans quitter la profession, ont cherché une activité parallèle. Dans presque tous les pays d'Afrique, la recherche de plusieurs activités rémunérées parallèles constitue une pratique courante. C e comportement n'est d'ailleurs pas propre aux seuls enseignants. Les opportunités de trouver des activités parallèles permettant « d'arrondir les fins de mois » sont de loin plus abondantes dans les villes que dans les campagnes. Ainsi, un enseignant du secondaire en zone urbaine, parallèlement à ses activités d'enseignant dans le public, a-t-il souvent la possibilité d'enseigner en

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Page 29: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

L'affectation et la gestion des enseignants

tant que vacataire dans un établissement privé (les établissements privés étant le plus souvent présents dans les zones urbaines). D e plus, les villes offrent plus de possibilités d'activités commerciales et plus d'opportunités de cours particuliers auprès des enfants de familles aisées que les campagnes ne peuvent en offrir. Il n'est donc pas rare que certains enseignants usent de leurs affinités politiques ou parentales, et parfois des complicités d 'un médecin (certificats médicaux), pour obtenir une affectation ou une mutation dans une zone urbaine sans que l'on soit en mesure de le remplacer dans son « lieu d'affectation normale ».

Par ailleurs, l'existence du système de suppléance dans certains pays - surtout dans les grandes villes - crée, chez beaucoup d'enseignants, une forte tentation de se faire affecter dans une zone urbaine. S'il est leur est possible d'être dans une zone urbaine offrant plus de confort, un temps de travail réduit et la m ê m e rémunération qu'en zone rurale, pourquoi s'en priveraient-ils ? Ils disposeront alors d 'un temps supplémentaire qu'ils pourront consacrer à d'autres activités.

Raisons sociales : Elles sont, pour une large part, à l'origine de la concentration urbaine des enseignants et surtout de celle des enseignantes. Peut-on refuser l'affectation à une enseignante dont l'époux exerce son travail dans une zone urbaine ou qui est n o m m é à un poste dans une administration centrale en ville ? Selon une étude sur le personnel du Ministère de l'Education nationale du Mali, en 1992, 40 % des enseignants de tous les degrés, au niveau national, avaient un conjoint ou une conjointe ayant une profession rémunérée, contre 65 % dans la capitale. Il est évident que ceci entraîne des difficultés non négligeables dans la gestion du personnel. E n effet, étant donné que seulement 10 % des enseignants ont un(e) conjoint(e) travaillant au ministère de l'éducation nationale, les possibilités de procéder, au niveau du ministère, à une affectation coordonnée des époux à des postes en dehors de la capitale, sont limitées.

e Raisons culturelles : Certains affirment que le décalage culturel entre la ville et les campagnes est un élément fondamental qui doit être pris en compte dans l'explication de refus d'être affecté à un poste à la campagne. Dans presque tous les pays, la plupart des enseignants ont un niveau d'éducation post-primaire (cas des

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

enseignants du primaire) ou post-secondaire (cas des enseignants du secondaire). D e par le fait qu'ils ont généralement reçu leur formation dans une zone urbaine, beaucoup d'entre eux ne veulent plus habiter la campagne étant donné que l'on n 'y trouve pas les éléments de confort et de distraction que possèdent les zones urbaines. Rejoindre les zones rurales peut passer pour un exil. C e comportement est particulièrement marqué chez les jeunes et chez les célibataires. E n Côte d'Ivoire, par exemple, la durée moyenne de séjour à un poste d'enseignant du primaire à l'intérieur du pays (zones rurales) est assez brève chez les jeunes, tandis que leur durée de séjour dans un poste, en centres urbains, est plus longue (ADEA, 1995, a).

e Autres raisons : Il convient de signaler, particulièrement, le cas des enseignants dont la santé requiert qu'ils soient dans des zones urbaines afin de suivre des soins, ou le cas des enseignants ayant des enfants en âge d'aller dans les lycées et collèges qui sont dans beaucoup de pays d'Afrique le plus souvent situés dans les zones urbaines. Certains enseignants proches de la retraite sollicitent les villes dans l'espoir de se reconvertir à d'autres activités. Cependant, dans la plupart des pays d'Afrique, ce dernier cas est à présent encore moins fréquent que celui de leurs homologues cherchant à revenir dans leur région d'origine.

O n note, également, des raisons d'ordre professionnel, pouvant expliquer des disparités dans la répartition des enseignants qualifiés. E n effet, enseigner dans une zone urbaine est le plus souvent l'un des moyens les plus sûrs pour avancer en grade ou obtenir une nomination. E n effet, dans de nombreux pays d'Afrique, un enseignant à la campagne est moins souvent inspecté que son collègue en ville. Ceci est dû, d'une part, à des taux d'encadrement par l'inspection variant sensiblement entre zones rurales et zones urbaines et d'autre part, à des difficultés financières et de communication pouvant réduire les déplacements des inspecteurs en zone rurale.

U n exemple-type de cette inégalité entre zones urbaines et zones rurales est celui du Sénégal ou le ratio Inspecteurs/Maîtres est de 1/50 en ville contre 1/150 dans la campagne (B. Thiam, 1995).

Enfin, dans certains pays, la pénurie d'enseignants en zone rurale pourrait s'expliquer par les politiques actives de construction d'écoles sans que les moyens pour les doter d'instituteurs aient été trouvés. A u Burkina

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L'affectation et la gestion des enseignants

Faso, par exemple, une politique volontariste d'incitation à la construction d'écoles par les populations locales combinée au licenciement d 'un nombre considérable d'instituteurs, s'était traduite au milieu des années 1980 par une pénurie très importante de personnel enseignant dans les campagnes et des déséquilibres croissants entre les villes et les campagnes. Dans d'autres pays (Algérie, Zaïre) le départ massif, depuis 1990, des coopérants pourrait aussi contribuer à l'aggravation des pénuries d'enseignants. U n e autre cause des déséquilibres géographiques existants pourrait, selon certains, être la centralisation des systèmes de gestion dans les pays d'Afrique francophone car, en effet, la quasi-totalité des postes administratifs sont concentrés dans les zones urbaines et notamment dans les capitales.

3. Adéquation entre le poste et le profil de V enseignant

Les données disponibles donnent, en règle générale, seulement des renseignements sur la distribution géographique des enseignants par catégorie. Les informations plus fines sur les caractéristiques des postes occupés et celles de leurs occupants sont rares. C e sont ces caractéristiques pourtant qui permettent de juger de la rationalité de l'affectation du personnel qualifié car, en effet, les besoins en enseignants qualifiés varient en fonction des zones géographiques et des établissements.

Les résultats de diverses études convergent pour dire qu 'un certain nombre de postes méritent d'être occupés par des enseignants possédant des compétences et des qualités particulières. C'est le cas des postes d'enseignement dans les classes spécifiques (classes multigrades, classes en double vacation, système de double flux, classes d 'examen, classes pléthoriques), des postes d'inspecteurs et de conseillers, des postes de chef d'établissement et des postes administratifs qui reviennent aux enseignants.

O r sur ce point, on ne peut faire une opposition entre les zones urbaines et les zones rurales. Ni les zones urbaines, ni les zones reculées ou rurales ont le monopole des postes nécessitant un personnel qualifié. Plusieurs facteurs font que les zones urbaines ont un grand besoin en enseignants ayant des compétences spécifiques. Par exemple, on a enregistré dans les zones urbaines de la plupart des pays d'Afrique francophone un développement rapide de la double vacation, des doubles flux et, surtout, un accroissement du ratio Elèves/Classes (classes pléthoriques). Par contre, dans les zones rurales, ce sont les classes multigrades qui rendent la tâche de l'enseignant plus difficile du fait que les enfants ont généralement plus de difficultés pour travailler en langue française que leurs homologues en ville où le français est davantage utilisé c o m m e langue véhiculaire. U n e étude

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

présentant uniquement la distribution des enseignants selon leur qualification et leur expérience (laquelle fait, en général, ressortir une inégalité au détriment des zones rurales), peut conduire à des conclusions erronées. Les informations sur les postes occupés sont également nécessaires. Sur ce point, l'exemple du Mali est bien significatif.

Dans ce pays, 51 % des enseignants chargés de cours au premier cycle ont moins de cinq ans de service ; ils occupaient 49 % des classes de plus de 40 élèves. Pourtant moins de 56 % des enseignants de plus de 10 ans de service sont affectés dans les classes de plus de 40 élèves. Dans le district de B a m a k o , les classes de plus de 40 élèves forment 9 4 % de l'ensemble des classes de ce district ; elles sont à 62 % occupées par les enseignants de plus de 5 ans de service. П s'avère donc que les enseignants ayant une plus grande expérience (plus de 5 ans de service) dans ce district, sont affectés dans les classes pléthoriques ; tel n'est pas le cas dans les autres régions où les classes de plus de 40 élèves sont tenues à plus de 50 % par des enseignants de moins de 5 ans de service.

O n le voit, des critères autres que le niveau de qualification et l'expérience des enseignants semblent déterminants au m o m e n t de leur affectation dans les classes c o m m e cela a été évoqué plus haut. Nous y reviendrons par ailleurs dans le Chapitre III.

4. L'accès aux postes de responsabilité

Le poste de chef d'établissement dans les pays d'Afrique francophone s'obtient, de façon générale, sur nomination en tenant compte de l'ancienneté et d'autres critères de mérite. A u Niger, par exemple, les chefs d'établissements du primaire ou les proviseurs des établissements du secondaire sont n o m m é s sur la base des notations administratives ; toutefois, le critère d'ancienneté intervient fortement dans la décision finale de nomination. Cette pratique de nomination aux postes de chefs d'établissements - soumise à des pressions politiques ou les interventions diverses - peut favoriser la nomination d'un certain nombre d'enseignants qui ne possèdent pas le profil adéquat pour ces postes. D e plus, dans la majorité des pays, le chef d'établissement ne reçoit pas de formation avant ou après sa nomination.

Il y a cependant des exceptions à cette pratique qui se voit d'autant plus critiquée qu'elle se place dans un contexte où l'on s'efforce de développer l'autonomie ou, du moins, une responsabilité accrue des établissements scolaires. E n effet, ce n'est pas parce qu 'un enseignant a des aptitudes pédagogiques qu'il sera apte à accomplir des tâches de direction et de

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L'affectation et la gestion des enseignants

gestion d'un établissement. Dans un pays c o m m e la France, les autorités ont abandonné cette pratique de sélection au poste de chef d'établissement en instituant un concours de recrutement. A Madagascar, il est envisagé, à terme, d'emprunter cette voie en professionnalisant la fonction de chef d'établissement. E n Algérie, les directeurs des écoles fondamentales ou des lycées sont recrutés parmi le personnel enseignant âgé de plus de trente ans et ayant suivi une formation spécialisée (gestion des établissements scolaires). Le Sénégal, par exemple, a récemment entrepris la formation continue des directeurs d'école et chefs d'établissements ( A D E A , 1995, c). Dans la plupart des cas, le personnel de direction des établissements en Côte d'Ivoire, est recruté par concours mais seuls quelques uns reçoivent une formation après leur admission ou en cours d'emploi.

• Contrairement aux chefs d'établissements, les inspecteurs et conseillers pédagogiques du primaire, reçoivent, dans un grand nombre de pays, une formation à leur fonction future, us sont généralement recrutés à l'issue d'un concours mais l'accès au concours est le plus souvent soumis à une condition d'ancienneté. A u Maroc, par exemple, le concours des inspecteurs du premier degré est ouvert aux instituteurs titulaires et ayant une ancienneté de 7 ans m i n i m u m , celui des inspecteurs du second degré est ouvert aux enseignants titulaires ayant une ancienneté m i n i m u m de quatre ans. Ici encore, certains pays c o m m e la Côte d'Ivoire ou le Mali font exception, ces postes étant attribués par simple nomination.

» Ni la pratique de nomination sur la base des notations professionnelles régulières et d'ancienneté, ni m ê m e la pratique des concours ne peuvent individuellement suffire à sélectionner les enseignants les plus méritants et les plus capables pour assumer des postes de responsabilité. Il reste à trouver des modalités de promotion plus appropriées tenant compte du rendement du candidat dans les fonctions de responsabilité lui étant confiées.

Peut-être qu'une solution médiane combinant plusieurs critères (notations et ancienneté couplées aux notes obtenues à l'issue d'un concours et d'une période probatoire dans la nouvelle fonction) serait plus adaptée.

L a prise en compte de la notion d'adéquation entre le poste et la personne qui l'occupe requiert d'abord l'existence d 'un système d'information fiable et fonctionnel. O r dans beaucoup de pays d'Afrique, le développement et l'utilisation de bases d'information appropriées pour l'administration des enseignants et la gestion prévisionnelle du personnel laisse encore à désirer.

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Chapitre II

Politiques nationales d'emploi et de déploiement de la force enseignante

Dans le but de suppléer au manque d'enseignants locaux et de promouvoir l'éducation, les pays francophones au lendemain de leurs indépendances ont créé des écoles de formation d'enseignants. Ces écoles se sont, dans la plupart des cas, avérées incapables de satisfaire la demande d'enseignants, notamment parce que la demande d'éducation augmentait d'année en année et parce que, en m ê m e temps, les ressources consacrées à la formation des enseignants se réduisaient ou ne suivaient pas l'évolution de la demande.

L a nécessité de combler le manque d'enseignants (à laquelle s'ajoutait parfois l'ambition de réduire le ratio m o y e n élèves/maître) a donc conduit à diverses politiques de recrutement, de formation, et d'utilisation des enseignants. U n certain nombre de mesures ont, par ailleurs, été prises pour tenter de combattre les déséquilibres caractérisant leur distribution géographique.

Bien que leurs objectifs soient, pour une large part, les m ê m e s , ces politiques et stratégies diffèrent, sous divers aspects, d 'un pays à un autre.

1. Politiques de recrutement et deformation

1.1 Formation accélérée d'enseignants

Etant donné la durée de formation d 'un enseignant dans le système classique des écoles de formation (2 ans en général) et l'urgence des besoins, l'une des solutions de court terme préconisée par les responsables de l'éducation dans certains pays, a été d'assurer aux futurs enseignants une formation minimale permettant de les utiliser dans l'immédiat.

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C'est ainsi qu'au Rwanda , des écoles normales techniques de transition avaient été créées en 1979 dans le seul but de former près de 1.000 instituteurs, en l'espace de trois ans. Plus récemment, un projet de formation accélérée d'enseignants a été financé en République Centrafricaine par la Banque Mondiale ; le projet devait permettre de former 250 instituteurs par an (9 mois de formation) pendant trois ans (J. Barka, 1993).

U n e politique semblable a été appliquée ces dernières années au Sénégal ; un certain nombre d'enseignants du primaire ont été formés en trois mois puis sont allés directement enseigner (B. Thiam, 1995).

L'avantage des politiques de formation accélérée est qu'elles permettent de suppléer au manque d'enseignants à des coûts réduits et dans l'immédiat. Mais les vues concernant les conséquences de cette politique sur la qualité de l'enseignement divergent. Certains considèrent qu'une formation de courte durée risque d'avoir des conséquences néfastes sur la qualité de l'enseignement, surtout si le niveau de recrutement pour cette formation (premier cycle du secondaire, pour les maîtres du primaire) équivaut, en réalité, à un niveau d'acquis très modeste - pour ne pas dire médiocre. D'après une autre position - qui gagne du terrain dans les projets d'éducation actuellement menés en Afrique francophone - il n 'y a pas de différence significative entre l'efficacité pédagogique d'un « instituteur-adjoint » (premier cycle secondaire et une année de formation professionnelle) et celle d 'un « instituteur »(premier cycle secondaire et 4 années de formation ou bien Bac + 1), alors que la différence de salaire est, selon les pays, de l'ordre de 20 à 30 % ( A D E A , 1995, d).

Le Graphique 1 représente cette dernière position selon laquelle à partir d'un certain niveau min imum de formation (N1), le recrutement de maîtres plus diplômés n'est pas forcément le gage d'une plus grande efficacité.

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Graphique 1. Rapport entre la formation initiale des maîtres et le niveau d'acquisitions des élèves

Niveau moyen d'acquisitions des élèves

* * * *

* *

N a N1 N b N 2 Niveau de formation initiale du maître

Source : L'Association pour le Développement de l'Education en Afrique (ADEA).

1.2 Politique de recours aux contractuels et aux vacataires4

L e choix des responsables de certains pays a été d'avoir recours au volontariat, aux vacataires et aux contrats temporaires accordés aux diplômés non formés à l'enseignement mais disposés à enseigner.

4. Les vacataires sont généralement recrutés pour l'enseignement dans le secondaire et sont rémunérés à l'heure.

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C'était notamment le cas en Tunisie, en 1992, où plus de 11 % des enseignants du primaire et plus de 10 % des enseignants du secondaire étaient des contractuels. C'est également le cas au Mali où un nombre relativement important d'enseignants du primaire et du secondaire sont des contractuels. Sous la pression de la réduction du budget de l'éducation, ce dernier pays, tout c o m m e la Côte d'Ivoire, a recruté récemment un nombre croissant de maîtres en-dessous du niveau de qualification formellement requis. Dès les années 1980, le Bénin recrutait massivement des « enseignants volontaires » parmi les jeunes en milieu rural et parmi les sortants du premier cycle du secondaire (en 1992, ils étaient 50.000 sur les 175.000 enseignants du primaire). Les vacations sont, quant à elles, très répandues au Sénégal où l'on comptait en Octobre 1994, plus de 132 vacataires dans l'enseignement public moyen. Dans d'autres pays c o m m e le Burkina Faso, le Maroc ou le Sénégal, les responsables ont eu recours aux appelés du service militaire pour occuper les postes vacants dans les classes. Les appelés ayant un niveau supérieur à celui du premier cycle du secondaire sont affectés dans les classes du primaire et ceux ayant un diplôme universitaire sont affectés, selon leur spécialité, dans le secondaire.

Dans la majorité des cas, les contractuels ou vacataires sont moins rémunérés que les permanents. Б pourrait s'agir là d'une méthode peu onéreuse de lutte contre les pénuries. Mais, il conviendrait d'admettre que cette politique n'est pas sans conséquences. E n effet, à court ou à moyen terme, la qualité de l'enseignement tend à être affectée par le manque de formation professionnelle et de motivation de cette catégorie de personnel. Dans la pratique, on constate, en effet, que l'idée de substituer une formation courte, en cours de service, à une formation initiale longue, si elle paraît convaincante, n'est toutefois pas si facile à mettre en oeuvre. C o m m e le montre l'exemple de divers pays (le Bénin des années 80, par exemple), on a du mal à fournir aux maîtres non-qualifiés une formation en cours de service, les principales raisons en étant les insuffisances quantitatives et qualitatives des formateurs d'enseignants et des ressources nécessaires à la fois pour fournir ces formations et pour remplacer les enseignants en congé de formation. D e plus, il semble difficile de maintenir un certain nombre d'enseignants sous le statut de contractuel. Sous leur pression et celle des organisations d'enseignants, il est fort probable que l'Etat soit obligé, à terme, de les intégrer dans la fonction publique.

1.3 Participation des populations locales

Dans certaines zones où les pénuries d'enseignants sont courantes, ce

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sont les populations ou collectivités locales qui recrutent et qui prennent en charge les rémunérations des enseignants de leurs écoles. A u Tchad, par exemple, un nombre important d'enseignants de ce type assure l'enseignement dans les écoles reculées. Leur nombre était de 2529 au cours de l'année scolaire 1987-1988 (Mbaiosso A , 1990). Il arrive également que des enseignants, recrutés par les communautés, assurent les cours dans les classes des écoles primaires de certaines régions reculées de Côte d'Ivoire ou de Madagascar. Q u e ce soit au Tchad, en Côte d'Ivoire, à Madagascar ou dans d'autres pays de la région (Mali, par exemple), on observe, de plus en plus, que les salaires d'une partie des enseignants sont assurés par les associations des parents d'élèves et/ou des collectivités locales.

Le problème crucial inhérent à la prise en charge des salaires par les populations locales est que, bien souvent, ces dernières manquent de moyens permettant d'assurer cette charge au-delà de deux ou trois ans (N'Dri M . T . , 1993). E n outre, lorsque l'Etat ne fournit pas l'enseignant et que les populations locales doivent elles-mêmes le recruter, le choix est souvent fait uniquement en fonction du salaire que l'enseignant propose et de son appartenance à la région aux dépens de la qualification.

L a politique de la prise en charge des frais de personnels par les populations locales dans certaines localités ou certaines écoles permet de développer l'enseignement dans les zones où elle est pratiquée. Pour ce faire, elle devrait être mieux organisée. Cependant, on peut lui reprocher de n'être pas très équitable et de comporter le risque de servir d'échappatoire permettant à l'Etat de se désengager de l'un de ses rôles (à savoir l'éducation nationale) que nul autre agent ne peut généralement accomplir. Aussi, elle peut aboutir à une concentration d'enseignants contractuels de faible niveau de formation (et souvent aussi d'éducation formelle) dans certaines écoles ou certaines régions géographiques c o m m e l'indique, par exemple, le cas du Togo . Dans ce pays, le pourcentage des moniteurs de village et de contractuels varie assez fortement, entre 20 % dans la région Maritime (ou se trouve la capitale) et 48 % dans la région des Savanes, de m ê m e qu'à l'intérieur des régions entre les différentes préfectures (allant, toujours dans la région des Savanes, par exemple, d e 3 4 % à 5 3 % des enseignants, selon la préfecture considérée) (A.Kudjoh, 1995).

Toutes ces mesures de lutte contre les pénuries d'enseignants ont un m ê m e dénominateur c o m m u n : elles sont souvent à court terme et ont, fréquemment, pour résultat le recrutement d'enseignants non qualifiés. Etant donné le fonctionnement des systèmes de formation d'enseignants en vigueur dans certains pays, les responsables ne peuvent y trouver, sur le marché du travail, qu'un nombre très limité d'enseignants qualifiés et sont,

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par conséquent, contraints de recruter des non qualifiés. E n effet, dans ces pays, les écoles ou centres de formation d'enseignants ne forment que ceux qui seront recrutés ou embauchés par l'Etat et qui ont été admis à un concours de recrutement d'enseignants. Cette politique réduit, sur le marché du travail, le nombre d'enseignants formés ou qualifiés qui pourraient trouver un emploi dans une école publique ou privée.

Dans ce contexte, le problème de la qualification des enseignants du privé se pose. C o m m e n t ce secteur doit-il obtenir ses enseignants formés ? Certains pays ont différencié les réglementations régissant le secteur éducatif public, d'une part, celles régissant le secteur privé, d'autre part. E n Côte d'Ivoire, par exemple, le niveau B . E . P . C et deux années de stage pratique est le m i n i m u m (exigible par la réglementation) que tout candidat à la profession d'enseignant au premier cycle du primaire privé doit avoir. E n revanche, le niveau B . A . C plus trois années de formation initiale (dont une année de stage) est le m i n i m u m exigible dans le primaire public.

Dans ce pays, c o m m e dans d'autres, cependant, les établissements privés prestigieux attirent un certain nombre d'enseignants qualifiés du secteur public augmentant ainsi, ne serait-ce que temporairement, le déficit d'enseignants qualifiés dans le public.

2. Politiques de redéploiement

2.1 Politique de redéploiement des personnels administratifs

A la différence des politiques de recrutement et de formation m ê m e à « coût réduit », cette stratégie a l'avantage de rationaliser l'utilisation des ressources humaines. Elle consiste, soit à redéployer dans les classes les enseignants qui sont en surnombre dans l'administration ou sans classe, soit à reconvertir à l'enseignement un certain nombre d'agents administratifs en surnombre.

L a République Centrafricaine, avec le soutien de la Banque Mondiale, a mis en oeuvre un projet de recyclage de 1.500 agents c o m m u n a u x vers la profession enseignante. Leur recyclage est assuré par les conseillers pédagogiques et les anciens instituteurs des différentes localités. Dans plusieurs autres pays d'Afrique francophone, on a m e n é des actions de redéploiement d'enseignants non chargés de cours occupant des postes dans l'administration.

L'avantage du redéploiement des personnels administratifs est principalement économique. L'Etat ne crée aucun poste budgétaire de personnel, seuls les frais de formation ou de recyclage représentent le coût

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financier de la mesure. Cependant, cette politique est d'une application délicate. Dans le cas du Mali, une étude montre que plus de 55 % des enseignants qui pourraient être redéployés occupent leur fonction administrative depuis plus de 10 ans et ont plus de 45 ans. D e ce fait, selon la m ê m e étude, il semble que l'action de redéploiement rencontre d'énormes obstacles de mobilité ou d'adaptation du personnel concerné.

D ' u n e manière générale, cette stratégie rencontre l'opposition farouche d'une partie des personnes qui sont touchées par la mesure. Quand on sait que le plus souvent les personnes concernées occupent leur poste grâce à leur capacité d'intervention (interventions politiques, liens familiaux, réseau d'amis, etc.), on est en droit de conclure qu'il faut beaucoup de volonté et d'habileté politique pour mener à bien une opération de redéploiement à grande échelle. A cet égard, le cas de la Guinée est significatif. U n e analyse de l'exercice de redéploiement d'enseignants (du secondaire et de postes administratifs vers le primaire) dans ce pays indique, en effet, que le soutien déclaré du Chef de l'Etat au plan de redéploiement et l'implication personnel du ministre de l'éducation à toutes les étapes du déroulement du processus ont, pour une part essentielle, contribué au succès de cette opération. L e cas guiñeen montre qu'une telle action ne peut atteindre les effets escomptés que si des mesures d'accompagnement appropriées sont prises, telles que des campagnes d'information multi-média, des actions de formation, la transparence des normes et procédures de redéploiement appliquées et une structure assurant la gestion du redéploiement à travers les différents niveaux, secteurs et unités administratifs.

2.2 Politiques de redistribution par des mesures d'incitation et d'affectation

L a plupart des pays d'Afrique francophone sont caractérisés par la coexistence de zones fortement urbanisées - où le tissu scolaire et les infrastructures sont développés - et de zones rurales et isolées. A chaque fin d'année scolaire, les affectations provoquent des réticences importantes chez ceux qui sont affectés dans les zone reculées ; elles peuvent aller jusqu'à l'abandon, notamment chez les jeunes femmes. L a forte fluctuation du personnel enseignant est un problème fréquent en zone rurale. Dans beaucoup de pays, les mouvements sont très importants : par exemple, 60 % des enseignants en Mauritanie et environ 30 % à Madagascar, demandent leur mutation ( A D E A , 1995, d). Dans certains pays, (Mali, Maroc, Tchad, Côte d'Ivoire), les responsables de l'éducation ont soumis l'admission à la fonction d'enseignant à l'obligation de souscrire un engagement à servir

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dans le poste qui sera indiqué. E n Algérie, par contre, on a intégré la notion de personnalisation des postes dans les conditions de recrutement. Elle consiste à former les candidats admis au concours et ayant été sélectionnés pour des postes déterminés. Les enseignants recrutés ainsi semblent présenter les plus grandes chances de rejoindre effectivement le poste pour lequel ils ont été recrutés.

Dans d'autres pays c o m m e la Côte d'Ivoire et le Mali, des primes d'incitation et de motivation sont allouées aux enseignants des zones reculées. Toutefois, pour être efficace, la politique d'incitation par les primes doit contribuer à augmenter de manière conséquente le salaire versé à l'enseignant. Or les budgets alloués aux primes sont souvent limités de telle sorte qu'elles n'ont aucun effet incitatif. A u Mali, par exemple, un enseignant affecté dans les régions désertiques de Gao ou de Tombouctou (zones désertiques et reculées) ne perçoit que 5.000F CFA5 de plus que son collègue de B a m a k o . Les limites de cette politique en Afrique Sub­saharienne sont évidentes ; l'écart entre les villes et les campagnes est tel qu 'un pays supporterait difficilement la charge financière des primes qu'il faudrait pour motiver les enseignants à exercer dans les campagnes.

L'affectation quasi obligatoire des enseignants en début de carrière à des postes en zone rurale est une mesure adoptée par certains pays pour répondre à ce problème. Toutefois, elle demande à être appliquée avec beaucoup de précaution afin d'éviter que ne soient affectés dans un m ê m e établissement ou une m ê m e zone géographique que des enseignants débutants.

5. Politiques d! utilisation du personnel enseignant

Dans des contextes où les responsables de l'éducation ne peuvent ou ne veulent pas redéployer le personnel ou changer de politique de recrutement, d'autres stratégies peuvent être envisagées pour optimiser l'utilisation du corps enseignant en service.

3.1 Augmentation du temps de travail

L a charge de travail d 'un enseignant a deux composantes : la charge officielle d'heures d'enseignement et la charge de travail consacré à la préparation des cours, à la correction des devoirs et aux activités culturelles et sociales de l'établissement. Dans presque tous les pays, la première

5. 1FF=100FCFA.

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composante est fixée par les autorités et souvent en accord avec les organisations d'enseignants. Elle varie d'un pays à un autre et à l'intérieur d'un m ê m e pays, elle varie d'une catégorie d'enseignants à une autre. Avec les difficultés financières des dernières années, le BIT (1991) note que la charge de travail des enseignants s'est accrue dans toutes les parties du monde ; la particularité des Etats d'Afrique étant le fait que, contrairement aux pays développés, c'est la première composante qui s'est accrue et demeure nettement supérieure à celle des pays développés. E n France, par exemple, la charge horaire hebdomadaire est de 21 heures pour les enseignants du général, 15 heures pour les enseignants agrégés et 18 heures pour les enseignants certifiés soit une moyenne de 18 heures ; dans certains pays d'Afrique francophone, la charge moyenne est de 26 heures.

E n réalité, cependant, la charge horaire effectivement assurée est, dans certains cas, assez loin de la norme officielle. A titre d'exemple, une enquête réalisée en Guinée à ce propos a révélé que bon nombre de professeurs du secondaire ne dispensaient que 5 heures de cours par semaine au lieu des 18 heures constituant la norme officielle maximale. E n faisant obligation aux professeurs de réaliser désormais les 18 heures hebdomadaires, l'Etat guiñeen a pu récupérer l'équivalent de 400 emplois d'enseignants. Cependant, l'instauration du système du double flux a fait croître la charge horaire de travail des enseignants. A u Mali, en Mauritanie et au Sénégal par exemple, la charge horaire hebdomadaire (moyenne) d 'un enseignant est passée de 30 à 36 heures. Pour compenser cet accroissement, les enseignants titulaires des classes à double flux bénéficient de primes ou d'indemnités mensuelles.

E n Côte d'Ivoire, les obligations réglementaires de service d'un enseignant licencié ou certifié sont de 18 heures de cours par semaine mais, dans certaines conditions, ils peuvent fournir trois à huit heures de cours supplémentaires soit une moyenne de 23 heures par semaine. D ' u n e manière générale, un décret (nécessité de service) oblige les enseignants des zones déficitaires de ce pays à donner deux heures de cours supplémentaires par semaine. E n 1993, au Burundi, il était préconisé d'augmenter le nombre moyen d'heures d'enseignement par semaine de 18 à 24. Quant aux indemnités perçues sur les heures supplémentaires de cours, elles étaient au milieu des années quatre vingt dix de 1.750 F CFA de l'heure au Mali et de 2.566 FCFA en Côte d'Ivoire. Avec l'acuité de la crise, les pays sont enclins à supprimer ou à réduire ces mesures incitatives coûteuses.

Des stratégies de rationalisation ont également été adoptées dans le deuxième cycle du primaire ou dans le premier cycle du secondaire. Elles ont consisté dans certains pays, au-delà du déploiement d'enseignants des

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disciplines en excèdent vers celles qui en ont un déficit (BIT, 1991), à former les enseignants afin qu'ils soient aptes à enseigner plus d'une matière. E n contrepartie, les enseignants du niveau deux (premier cycle du secondaire) qui sont appelés à enseigner plusieurs matières ont désormais une charge horaire hebdomadaire moindre.

3.2 Réduction des taux de déperdition

C o m m e nous l'avons déjà évoqué plus haut, le départ de certains enseignants vers des postes administratifs ou vers le secteur privé (démission, mise en disponibilité, etc.) est un facteur qui accentue les pénuries d'enseignants. A présent, il n 'y a que peu de données statistiques sur le taux de déperdition des enseignants. Il semble que face à l'ampleur des déperditions vers les administrations centrales, certains pays ont été amenés à conditionner la mobilité des enseignants vers ces administrations par l'admission à un concours professionnel. Sans imposer un concours professionnel, les autres pays ont toutefois restreint le nombre d'enseignants qui devront chaque année aller dans les administrations.

L'exemple de la Côte d'Ivoire est, à cet égard, très significatif. La mobilité des personnels enseignants par le changement de corps, notamment le transfert des enseignants vers d'autres administrations, est strictement limitée. Le nombre de transferts en 1994 n'était que de 23 personnes (ADEA, 1995, a).

Quant au taux de déperdition vers le privé, il dépend de la qualification de l'enseignant et du niveau de chômage dans le pays. Dans un pays c o m m e le Burundi où le taux de chômage est faible, on estime à 5 % le taux annuel d'abandon des enseignants du primaire, 8 % celui des enseignants du secondaire et à 20 % celui des enseignants de l'enseignement technique ( M . W . Kaba ; M . B w i m a n a , 1993). Par contre, dans un contexte de chômage élevé de diplômés, très peu d'enseignants quittent la profession et les candidats se bousculent au concours d'entrée des écoles de formation des enseignants. Cependant, dans ces pays, les enseignants n'hésitent pas à démissionner dès que l'occasion leur est offerte. A u Sénégal, par exemple, la politique de départ volontaire de la fonction publique (moyennant une prime) du programme d'ajustement structurel ne concernait pas obligatoirement les enseignants et pourtant, ils furent nombreux à partir. O n estime à 500 le nombre de ceux qui sont partis avant que l'Etat ne restreigne les conditions de départ (B. Thiam, 1995).

Tant que les fonctions administratives présenteront plus d'avantages (salaires, indemnités, promotions faciles, prestige, etc.) que la fonction

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enseignante, les enseignants y seront toujours attirés. Il en est d'ailleurs de m ê m e de la déperdition vers le secteur privé à la seule différence que celle-ci n'est pas propre aux seuls enseignants ; elle concerne tous les agents de la fonction publique. Si le taux de déperdition des enseignants est plus élevé que celui des autres agents c'est parce que dans le cas spécifique des pays d'Afrique, les enseignants sont parmi les agents les plus qualifiés et, comparés à d'autres fonctionnaires de certains ministères, ils ont moins d'activités lucratives parallèles. Par conséquent, pour prévenir les taux de déperdition élevés, il est important d'accroître les perspectives de carrière à l'intérieur de la profession enseignante en les rendant au moins aussi attirantes que celles caractérisant les carrières dans d'autres administrations publiques. Les politiques concrètes engagées dans cette voie sont actuellement encore à leurs débuts en Afrique francophone.

3.3 Amélioration de Г efficacité des enseignants par la formation continue

L a formation continue peut jouer un rôle essentiel pour le développement des capacités professionnelles du personnel enseignant existant. Elle peut, en particulier, contribuer à améliorer les compétences et, en fin de compte, l'efficacité des enseignants non-qualifiés ou sous-qualifiés qui en bénéficient. Elle permet, de manière générale, d'actualiser et d'élever le niveau des connaissances des enseignants et de combler des déficits d'enseignants dans certaines matières en dispensant des formations complémentaires dans ces matières à des enseignants en service.

Cependant, dans la plupart de pays considérés ici, les dispositifs en place sont loin de pouvoir assurer ces fonctions. U n e analyse de l'action de recyclage d'enseignants entreprise au R w a n d a , entre le milieu des années 1970 et la fin des années 1980, afin de subvenir aux besoins de personnes pouvant dispenser des cours de travaux pratiques (notamment en agriculture) au niveau primaire et secondaire, révèle un certain nombre de problèmes et d'obstacles pouvant apparaître. C e sont entre autres : des formateurs mal formés à leur tâche ; un recrutement « capricieux » des candidats aux stages de recyclage ; l'affectation seulement d 'un peu plus du tiers des sortants dans les classes auxquelles ces stages les préparaient ( m ê m e si un autre tiers se trouvait dans les centres de formation ou des postes d'inspection) ; le fait qu'au bout de quelques années un tiers de ceux qui enseignaient effectivement l'agriculture à la sortie du stage de recyclage n'enseignaient plus cette matière ; etc (I. Nayigizente 1,1993).

E n dehors de la mauvaise articulation entre formation et affectation du

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personnel formé, les critiques des praticiens de la gestion éducative en Afrique francophone concernent surtout le fait que la formation continue (i) ne répond pas systématiquement aux besoins quantitatifs et qualitatifs de formation (elle ne repose d'ailleurs généralement pas sur une analyse systématique des besoins) ; (ii) pose le problème d'indemnisation des stagiaires et (iii) ne prévoit généralement pas le remplacement des maîtres en formation ( A D E A , 1995, c).

4. Autres politiques

Afin de répondre aux différents problèmes évoqués, les politiques de décentralisation et de déconcentration ont été adoptées dans un certain nombre de pays. Etant donné l'importance croissante attribuée à la décentralisation ou à la déconcentration de la gestion de l'éducation, il devient crucial de considérer soigneusement les arguments qui, dans la situation économique, géographique et culturelle des pays d'Afrique d'expression française, militent en faveur ou contre la décentralisation de certaines décisions de gestion des enseignants.

П у a, bien entendu, les arguments classiques contre la centralisation (lourdeur, inefficacité, non transparence, etc.). A côté de ces arguments, on peut retenir la nécessité de faire participer les populations sur le plan local au financement et à la gestion de l'enseignement dans leur localité. L a participation des populations à la gestion de leur système éducatif serait, semble-t-il, un garant d'une plus grande stabilité et d'une bonne utilisation des ressources. U n gain de stabilité est attendu parce que les aléas du système politique auraient moins d'impacts sur ce système de gestion locale. Il y aurait une transparence accrue, car le contrôle pourrait être à deux niveaux : au niveau local puis au niveau national. L'utilisation des ressources pourrait être meilleure étant donné que la décentralisation réduit les coûts liés aux procédures administratives. D e plus, les communautés locales identifieraient mieux que les autorités centrales leurs besoins. Dans le cas spécifique des pays d'Afrique, on peut ajouter que la dispersion des écoles sur l'ensemble du territoire national et les infrastructures de communication embryonnaires compliquent, en principe, la gestion centralisée. E n Algérie, par exemple, les raisons évoquées pour entreprendre la décentralisation de la gestion des enseignants étaient les suivantes :

* une plus grande maîtrise de la situation du corps enseignant par une utilisation plus rigoureuse des ressources au niveau régional (Wilaya).

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une plus grande efficacité dans le suivi et l'évolution des carrières des fonctionnaires concernés.

Bien que les arguments en faveur d'une décentralisation soient nombreux, il est important d'avoir à l'esprit qu'elle a ses limites. D'abord, le système tend à être plus coûteux, surtout lorsqu'il est mal appliqué : il crée alors un double emploi et donc demande plus de ressources financières et humaines. Ensuite, la décentralisation dépend de la taille du pays, de son système politique et des possibilités financières des régions. Elle devrait aussi, éviter deux écueils : ne pas entamer l'uniformité de l'enseignement à l'intérieur du pays et ne pas fragiliser la cohésion sociale. П s'agit d'éviter que le régionalisme ou le tribalisme naissent ou s'accentuent c o m m e cela a été recensé au Burundi, au début des années 90. Par ailleurs, il a été constaté dans certains pays que les politiques de décentralisation ou de déconcentration ont eu l'effet inattendu d'abandon (total ou partiel) des écoles gérées au niveau local.

П est bien connu que le niveau de motivation professionnelle des enseignants affectés ou mutés dans une zone reculée est souvent d'autant plus bas qu'ils considèrent la manière dont ce mouvement a été effectué c o m m e non objective ou du moins, non transparente. U n e voie possible d'atténuer ces critiques, plus ou moins justifiées, est de décentraliser les commissions d'affectation et de mutation et de faire participer les enseignants (leurs représentants) à ces commissions régionales6. L'informatisation et la décentralisation de la gestion d'un fichier distinguant entre le personnel et les postes sont d'autres mesures préconisées par certains pays (Mali, Mauritanie, etc.). Par ailleurs, la décentralisation du recrutement des maîtres est une mesure de plus en plus évoquée, envisagée ou m ê m e expérimentée dans certain pays c o m m e une stratégie complémentaire dans ce but. Des analyses approfondies évaluant les conséquences de cette politique dans différents contextes font cependant défaut à présent.

Dans tous les cas, un problème central, qui ne peut être résolu que partiellement en l'absence d 'un effort général d'aménagement du territoire, reste le maintien des enseignants en zone rurale.

U n e autre réalité à avoir présente à l'esprit est que les résultats escomptés suite à une décentralisation ne sont pas immédiats et peuvent être mitigés (J. Prawda, 1993). E n d'autres termes, la décentralisation est une politique à long terme qu'il s'agit d'évaluer dans cette perspective.

6. Le Burkina Faso déclarait en 1995 vouloir s'engager dans cette voie.

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Chapitre III Systèmes de gestion

L e déploiement et l'utilisation efficaces du personnel enseignant dépendent, pour une large part, des règles, de l'organisation et du fonctionnement du système de gestion en place, en particulier de la qualité du personnel de gestion, du système d'information utilisé pour la gestion. Toutes ces variables méritent d'être considérées de près lorsqu'il s'agit d'évaluer les forces, les faiblesses et les voies d'amélioration possibles du système de déploiement et d'utilisation des enseignants.

1. Systèmes de recrutement et de formation

L'hétérogénéité est l'une des caractéristiques du corps enseignant en Afrique. Avec la crise de ces dernières années, les modalités et les conditions de recrutement d'enseignants se sont multipliées c o m m e nous l'avons évoqué plus haut (cf. I. 2) . Ainsi, dans de nombreux pays, il est courant de rencontrer plusieurs corps d'enseignants. E n Guinée, on dénombre, de nos jours, plus de 12 corps différents d'enseignants exerçant dans tous les degrés de l'enseignement. E n Côte d'Ivoire, par exemple, une division particulièrement problématique s'est créée entre les enseignants « nouvellement recrutés » depuis 1991 et alignés sur la grille des salaires de la fonction publique d 'un côté, et ceux recrutés avant 1991 dont la rémunération est « décrochée » de cette grille de la fonction publique, d 'un autre côté. L e fait que les « anciens » gagnent 50 % de plus que leurs nouveaux collègues ne peut que susciter des réactions de mécontentement et de démotivation parmi les derniers.

M ê m e si les clivages entre les différentes catégories d'enseignants sont, dans la plupart des pays, moins profonds que dans le cas évoqué, la juxtaposition de corps caractérisés par des niveaux de qualification (formelle) et de rémunération différents mais ayant le m ê m e travail et les

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m ê m e s obligations, tend à créer des tensions susceptibles d'affecter le travail des enseignants.

Les règles et procédures utilisées dans le recrutement des enseignants ont toujours fait l'objet d'une réglementation stricte de la part des Etats (ВГГ, 1991). Dans la plupart des pays, l'accès à la profession d'enseignant se fait, soit par un concours (Maroc, Sénégal, Bénin, etc.), soit à la suite d'une sélection et d 'un examen approfondi des dossiers (avant 1993 au Niger).

Ces procédures de recrutement soulèvent cependant quelques interrogations. La première interrogation porte sur les critères de sélection utilisés. Il paraîtrait logique de plaider en faveur d 'un système de recrutement excluant les candidats qui vont dans l'enseignement par nécessité plutôt que par vocation. Il y a lieu de supposer que l'enseignant qui s'engage dans la fonction enseignante par nécessité reste non motivé et très souvent, abandonne la profession dès qu'il a une autre issue si des mesures spécifiques d'incitation et de soutien ne sont pas prises. C e comportement induit un coût social (manque de motivation pouvant affecter la qualité de l'enseignement) et, dans certains cas, une moindre rentabilité de l'investissement consenti à sa formation. Il s'avère que dans de nombreux pays on ne peut utiliser la motivation professionnelle c o m m e critère de sélection car les candidats réellement intéressés par la profession enseignante sont, le plus souvent, moins nombreux que les postes à pourvoir. D e plus, il est pratiquement difficile d'identifier les candidats qui sont réellement motivés et qui ont des chances de le rester.

L a seconde interrogation concerne l'âge du recrutement, notamment celui des enseignants du primaire. Avec les politiques d'ajustement structurel certains pays, dans le but de réduire le nombre de fonctionnaires, ont été amenés à baisser l'âge de la retraite des agents de la fonction publique pour pouvoir supprimer les postes ainsi libérés. Dans de nombreux pays, il est ramené à 50 ou 55 ans. Or, un enseignant peut être recruté à 30 ou 35 ans ; il ne lui reste donc que 25 ou 20 ans de service, ce qui diminue là aussi, son temps d'activité. Les enseignants du primaire recrutés au-delà de 30 ans sont d 'un niveau post-secondaire et souvent l'enseignement est pour eux la dernière solution de recours. U n e question qui s'impose ici est de savoir s'il ne faudrait pas imposer une limite d'âge dans le recrutement des enseignants et augmenter à nouveau l'âge de départ à la retraite.

L a troisième interrogation qui nous paraît cruciale a trait au niveau géographique où se situe le recrutement. A l'exception des enseignants qui sont recrutés par les écoles non publiques (privées, communales (appartenant aux communes) , religieuses, etc.), les recrutements ont lieu au niveau

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national, dans la quasi totalité des pays d'Afrique francophone. Selon des rapports sur la gestion des personnels de l'éducation en Côte d'Ivoire et au Sénégal ( A D E A , 1995, a et c), on estime que le recrutement au niveau régional d'une partie des enseignants permettrait de mieux ajuster et gérer les affectations en fonction des postes vacants. E n plus d'une meilleure gestion, ces mesures permettraient aux responsables régionaux de mieux satisfaire les besoins locaux étant donné que les candidats postuleraient, dans ce cas, pour un poste de leur choix ou se situant dans une localité qu'ils connaissent déjà. Toutefois, l'option de recruter au niveau régional ou local relève d'une politique de délégation de pouvoir. Sa réussite dépend donc du système politique et administratif en place.

2„ Gestion des affectations et des mutations

Pour régler, de manière efficace, les mouvements réels du personnel, les critères et procédures d'affectation et de mutation doivent à la fois prendre en considération les nécessités du bon fonctionnement du service éducatif, et être acceptés par le personnel concerné.

Les critères appliqués - qu'ils soient codifiés ou non - prennent en compte dans tous les pays considérés ici, certains facteurs sociaux et individuels des enseignants. L'ancienneté des agents, leur état de santé, leur situation familiale et d'autres raisons sociales sont généralement les facteurs prioritaires entrant en ligne de compte. E n d'autres termes, la probabilité pour qu 'un agent se retrouve muté en ville est d'autant plus grande qu'il a acquis de l'ancienneté, que son conjoint est employé en ville, qu'il souffre d'une maladie exigeant des soins ne pouvant être dispensés que dans certains centres urbains, etc. A u Mali, un barème (ou une réglementation) pondérant ces différents facteurs est, en général, établi ou révisé chaque année afin de classer les demandes d'affectation et de mutation. Sur cette base, des commissions opérant au niveau national et/ou régional prennent la décision finale d'affectation ou de mutation. Ainsi, au Mali, les mouvements se décident-ils au niveau central. Toute affectation, transfert ou mutation se fait par la direction administrative et financière, sur proposition d'une conférence nationale pour les mutations qui réunit les directeurs nationaux de l'enseignement fondamental, les directeurs régionaux de l'éducation et les inspecteurs de l'enseignement fondamental.

A u Niger, la décision d'affectation ou de mutation se décide à trois niveaux : au niveau de la commission sous-régionale, au niveau de la commission régionale et au niveau central.

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Chaque commission est composée de responsables académiques, des représentants syndicaux et des représentants des enseignants.

Malgré ces différences d'organisation, les critères communément appliqués pour les mouvements de personnel favorisent plutôt qu'ils ne combattent la concentration des enseignants expérimentés, performants et des enseignantes dans les zones urbaines. U n certain nombre de réglementations ont cependant été adoptées ou sont envisagées dans différents pays pour contrebalancer ces tendances centrifuges caractérisant les systèmes de déploiement du personnel enseignant.

Selon la réglementation en vigueur en Côte d'Ivoire, par exemple, la durée minimale de service d 'un enseignant du primaire voulant se faire muter est de trois ans à l'intérieur d'une direction régionale et de cinq ans pour changer de région. Pour maintenir les enseignants en zone rurale, le Bénin a pris une disposition permettant d'affecter les enseignants, dans toute la mesure du possible, dans leur région d'origine. Selon une étude sur le secteur de l'éducation de base au Burundi ( M . W . Kaba, M . Bwimana , 1993), cette disposition faciliterait l'installation des enseignants. C o m m e le nombre d'enseignants d'une région peut être inférieur aux postes d'enseignants de la région, le déficit est alors comblé par les surplus des autres régions et par l'affectation des enseignants étrangers. Les enseignants ayant bénéficié de cette disposition, estiment que la proximité de la famille représentait pour eux un grand avantage, tant au niveau de l'appui social et affectif qu'au niveau matériel (logement et nourriture). Cependant, nous savons très peu de chose sur les retombées de qualité de l'enseignement due à cette politique. A priori, elles devraient être positives. La mesure a, d'une part, la faveur des enseignants. D'autre part, affecté dans sa région d'origine, l'enseignant se retrouve dans son milieu social qu'il connaît mieux ce qui constitue une « plus value » dans sa connaissance sociale et psychologique des élèves. Néanmoins, certains craignent que, dans ce cas, l'enseignant puisse se trouver trop soumis à des pressions familiales et locales.

Selon un rapport du В Г Г , cependant, la mobilité des enseignants permet, malgré les coûts administratifs qu'elle entraîne, davantage d'échanges de connaissances et d'expériences. Elle favoriserait ainsi le développement professionnel des enseignants. D'autres, en revanche, affirment que la grande mobilité des enseignants porte un préjudice au bon fonctionnement des écoles et alourdit les charges financières de l'éducation ( A D E A , 1995, d). Des études détaillées au niveau de chaque pays devraient permettre d'avoir une vision plus fine et plus approfondie sur les conséquences de la mobilité du corps enseignant.

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Systèmes de gestion

Dans tous les cas, les normes et les procédures réelles régissant les mouvements doivent rester transparentes et acceptables pour tous les intéressés. Ainsi, l'affectation à un poste en zone rurale ne doit-elle signifier ni une sanction, ni la quasi-condamnation à l'oubli dans les décisions futures de promotions, c o m m e cela semble être le cas dans certains pays.

Certains pays cherchent des mesures appropriées pour faire face à la concentration de certains enseignants dans les villes - surtout celle des enseignantes facilitée par l'application du critère de « rapprochement des époux ». Ainsi le Sénégal envisage-t-il d'atténuer le poids attribué au « rapprochement des conjoints » dans les décisions d'affectation. Des changements de procédure peuvent, eux aussi, aider à réduire les effets négatifs de ce critère d'affectation. Ainsi en Côte d'Ivoire, par exemple, les mouvements des personnels enseignants précèdent ceux des autres administrations. Cela fait que l'on est obligé soit de ne pas prendre en compte la séparation des couples soit, de ramener l'enseignant(e) le plus près de son (sa) conjoint(e) après qu'il (elle) ait pris le poste qui lui a été attribué. U n système d'affectation conjointement élaboré avec les autres administrations pourrait permettre de réduire les mouvements inutiles et, dans certains cas, réduire la concentration des enseignantes dans les zones urbaines.

Les procédures de gestion des enseignants sont défaillantes à bien d'autres égards. U n rapport sur la gestion des mouvements des personnels en Côte d'Ivoire ( A D E A , 1995, a) où l'administration du secteur éducatif est restée fortement centralisée, relève quelques problèmes majeurs. Б s'agit principalement : des ajustements en dehors des procédures normales sous la pression de certaines personnalités ; du manque de rigueur des responsables locaux dans la détermination des besoins et des postes vacants au niveau local (établissements, inspections, etc.) ; du retard dans le redéploiement ou les affectations (de vacataires et de suppléants, par exemple) intervenant trop tardivement, après les mutations ordinaires. Le rapport cité plaide en faveur d'une réorganisation des procédures en réaménageant surtout le mouvement annuel de mutation par zone géographique et en trois temps : un premier mouvement (en mars), au niveau de la circonscription de l'Inspection primaire, destiné à équilibrer et redéployer les postes entre les écoles primaires ; le second (en mai), au niveau de la Direction régionale, procédant à un rééquilibrage entre les inspections et, enfin, le troisième (en Juillet), organisant un mouvement interrégional afin de pourvoir les postes vacants à l'issue du précédent mouvement . C e type de réaménagement de procédure devrait contribuer à assurer que tout le personnel requis soit en place à la rentrée.

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3. Gestion des carrières

L a gestion de la carrière enseignante est l'un des éléments clés de l'efficacité de la gestion du corps enseignant. A u m ê m e titre que le niveau de rémunération, les perspectives de carrières sont généralement considérées c o m m e ayant un impact important sur la motivation ou le rendement professionnel des enseignants. Cependant, on sait à présent encore très peu des effets et des implications précis des différentes structures de rémunération et d'aménagement de la carrière des enseignants.

3.1 Rémunération

Etant donné les contraintes budgétaires, une question centrale qui se pose est de savoir quel devrait être le niveau de salaire nécessaire pour assurer une offre quantitative et un rendement professionnel suffisants des personnels enseignants dans un pays ? U n e autre interrogation centrale concerne le degré de differentiation qu'il faudrait établir entre la rémunération des personnels enseignants à différents niveaux (primaire, secondaire) ou dont l'ancienneté et la qualification ne sont pas les m ê m e s .

U n e caractéristique des pays d'Afrique francophone est que la rémunération des enseignants du primaire diffère de celle des enseignants du secondaire. A chaque niveau d'enseignement, la rémunération d 'un enseignant dépend essentiellement de la qualification (diplôme), de l'ancienneté et des responsabilités qu'il assume (ВГГ, 1991). Les facteurs de mérite ou de valeur professionnelle et la formation continue interviennent très peu dans la détermination des traitements. C'est peut être là une des explications des faibles salaires des enseignants du primaire dans les pays où ils sont alignés sur ceux de la fonction publique. O n pourrait résumer la politique de rémunération par l'expression selon laquelle on rémunère un profil type et non le travail accompli.

Certains reprochent à cette politique de rémunération d'être, du moins partiellement, à l'origine de la démotivation des enseignants car en effet, les systèmes de rémunération actuels ne permettent pas de stimuler ou de récompenser les enseignants les plus compétents et/ou les plus méritants. U n ensemble de rapports sur la gestion des enseignants en Afrique francophone sub-saharienne identifie d'ailleurs la rémunération c o m m e un des principaux objets de mécontentement des enseignants de la région concernée. Quelques pays tels que la Mauritanie et le Sénégal, par exemple, proposent de mettre en place un système de distinctions honorifiques (couplées avec des primes) : un nombre très limité d'enseignants seraient choisis tous les ans et

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Systèmes de gestion

recevraient récompenses et décorations des plus hautes autorités de l'Etat en ce qui concerne les distinctions les plus élevées, et des autorités régionales et départementales pour les distinctions de niveau moindre ( A D E A , 1995, d) .

Dans la plupart des pays, les seules promotions qui existent ne peuvent être obtenues que par voie de concours. Rien, dans ce cas, ne peut amener un enseignant qui a le diplôme requis à faire plus d'efforts. Il lui suffirait d'attendre que sa rémunération progresse avec son ancienneté. L 'une des solutions que l'on préconise - et que certains pays essaient d'adopter - est la rémunération au mérite. E n Tunisie, par exemple, le B I T signale que les primes de mérite peuvent atteindre 290 % de la rémunération mensuelle de base.

Toutefois, la mise en application de cette politique reste complexe. Jusqu'à présent, le débat reste largement ouvert sur les procédés d'évaluation des enseignants et les normes de compétence à appliquer : C o m m e n t mesurer le mérite d 'un enseignant ? Peut-on isoler sa « plus-value » de celle des autres enseignants, de l'apport de l'environnement ou de celui de la population d'élèves etc. ? E n dehors m ê m e des difficultés de mesure, la rémunération au mérite a l'inconvénient d'instaurer entre les enseignants une compétition que certains considèrent dommageable à l'enseignement (J. Oliveira ; J. P . Farell, 1993). U n e autre réserve que l'on soulève à l'égard de cette stratégie provient de l'expérience acquise sur sa pratique dans certains pays industrialisés. Il semble qu'elle se soit avérée coûteuse, difficile à gérer et parfois contre-productive (J. Oliveira ; J„ P . Farell, 1993).

S'il est vrai que la politique de rémunération ne résout pas seule le problème de motivation, elle joue indéniablement un rôle d'attraction et de rétention dans la profession enseignante. Pour résorber les pénuries d'enseignants souvent très accentuées dans certaines disciplines (Mathématiques, Art, etc.), on a suggéré une differentiation des salaires par discipline (J. Oliveira ; J. P . Farell, 1993). L e caractère problématique de cette politique, cependant, vient du fait qu'elle est, a priori, inacceptable pour les organisations d'enseignants et quand les pénuries vont disparaître dans les disciplines considérées, on ne pourra pas facilement supprimer les suppléments de salaire ou transférer cette politique au profit des nouvelles matières ayant des pénuries d'enseignants.

Parmi les structures/grilles de rémunération possibles, certains préconisent une structure dont les salaires seraient « tassés » avec un salaire débutant élevé ; pour d'autres, il faudrait une politique de salaires avec des écarts importants et un salaire débutant pas très élevé. L a mise en place de

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l'une ou l'autre des deux options dépend de la situation économique et du marché de l'emploi du pays car, la politique de rémunération des enseignants doit être fonction des réalités dans les autres secteurs. L à où il y a de bonnes perspectives alternatives d'emplois, une structure de salaires avec des écarts importants entre les échelons et un salaire débutant faible peut avoir pour effet de ne pas attirer un nombre suffisant de candidats. Inversement, une structure de salaires « tassés » commençant avec un niveau de salaire élevé tend à attirer plus de diplômés vers la profession enseignante ; mais, avec le temps, elle pourrait décourager les plus motivés et les plus performants à rester dans la profession.

Les pratiques en cours dans différents pays font ressortir des rapports entre les traitements maximaux et minimaux qui varient de un à quatre.

A u Burundi par exemple, le rapport est de 1 à 4 pour les instituteurs et de 1 à 2 pour les professeurs de l'enseignement secondaire (BIT, 1991). Il n 'empêche que le taux d'abandon est plus élevé chez les enseignants du secondaire général : 8 % contre 5 % chez les enseignants du primaire. E n dehors de facteurs contextuels, il reste aussi à connaître le rythme de progression du salaire et l'âge ou le nombre d'années de service auxquels le salaire maximal est atteint avant de pouvoir tirer des conclusions sur les effets des différentes structures de rémunération, sur la rétention et d'autres indicateurs d'efficacité.

Par ailleurs, la démotivation des enseignants ne provient pas seulement de la faiblesse des salaires mais aussi de Г irrégularité de leur versement.

Certains pays ont eu, en effet, d'énormes difficultés pour acheminer, à temps et sans irrégularité, les salaires des fonctionnaires. Ces phénomènes sont de nature à décourager les fonctionnaires et particulièrement les enseignants du primaire qui sont souvent les plus touchés parce qu'ils sont éloignés des villes et parce que beaucoup d'entre eux perçoivent leurs salaires au guichet. Toutefois, un système de paiement bancaire permet de résoudre les irrégularités. A u Mali, ce système existe mais ne concerne que les enseignants dont les salaires dépassent 50.000 FCFA. C e système de paie par le biais des banques réduit les retards et offre des facilités bancaires mais il suppose l'existence d'agences bancaires, tout au moins dans toutes les régions.

3.2 Systèmes de promotion et de développement professionnels

Dans les pays considérés ici, la gestion de la carrière des enseignants est soumise à la réglementation de la fonction publique. Les administrations de tutelle gérant la carrière enseignante varient, cependant, d 'un pays à l'autre.

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Systèmes de gestion

E n Côte d'Ivoire, la gestion des carrières est dévolue au seul Ministère de la fonction publique. A u Niger, elle est du ressort de trois ministères : le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, le ministère de la fonction publique, du travail et de l'emploi et le ministère des finances et du plan. Les implications et les effets respectifs des différentes structures de gestion de la carrière enseignante n'ont pas été étudiés de manière détaillée jusqu'ici. Certaines analyses ( A D E A , 1995, d) attirent l'attention sur la lourdeur d 'un système centralisant le pouvoir de la gestion du personnel au ministère de la fonction publique, d'autres soulignent la lenteur des systèmes de gestion faisant intervenir deux ministères ou plus dans la gestion des enseignants.

D ' u n e manière générale, l'avancement d 'un échelon ou d'un grade à un autre dépend des critères d'ancienneté et de la notation du supérieur hiérarchique. Quant à la promotion à un poste ou une catégorie de qualification supérieurs, elle est, dans certains pays, liée à la réussite d 'un concours professionnel. Dans d'autres, elle dépend seulement de l'ancienneté et de la notation. Dans d'autres encore, c o m m e le Burundi par exemple, l'avancement ou la promotion à une catégorie supérieure n'existe pas ; tout enseignant est condamné à demeurer dans sa catégorie de départ.

Si les effets démotivants possibles de ce dernier système sont évidents, les deux autres manières de réguler le passage d'une catégorie hiérarchique à l'autre, ont aussi leurs inconvénients : des phénomènes de subjectivité et de favoritisme ont, dans la pratique, souvent accompagné la promotion basée sur la seule notation par le (ou les) supérieur(s) hiérarchique(s) immédiat(s). L a promotion exigeant la préparation et la réussite d'un concours ou d 'un diplôme universitaire va, quant à elle, souvent de pair avec des congés de formation de longue durée et aussi, parfois, au bout du compte, avec une déperdition accrue.

Dans tous les cas, un effet démotivant peut provenir d'une application peu rigoureuse des règles d'avancement, dans la pratique. Il y a lieu d'instaurer des mécanismes de contrôle pour assurer la transparence et l'objectivité de l'évaluation et des décisions de promotion des enseignants.

U n autre problème majeur réside dans le fait que les perspectives d'accéder à des postes de plus haute responsabilité sont, très souvent, réduites. Surtout pour les enseignants du primaire les postes de supervision et d'encadrement sont généralement peu nombreux en raison de la petite taille des écoles primaires. Cette limitation des possibilités ou m ê m e le fait que le processus d'avancement d 'un grade à un autre ou d'une catégorie à une autre soit long, peuvent démotiver l'enseignant. E n outre, les conséquences des programmes d'ajustement structurel ont parfois limité

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encore davantage les possibilités d'encouragement des enseignants par des mesures de promotion avec une incidence financière. E n raison de la réduction des dépenses publiques, un certain nombre de pays, en effet, ne couplent plus, désormais, les avancements en échelon ou en grade avec une augmentation des traitements. L e Sénégal et la Côte d'Ivoire constituent, à cet égard, deux exemples tangibles.

Enfin, il est utile de rappeler que les effets de différentes mesures de motivation à l'égard des enseignants restent forcément réduits tant que certaines conditions minimales de travail ne sont pas remplies. E n effet, dans certains pays, il existe des écoles dont les maîtres manquent du m i n i m u m leur permettant de dispenser les cours tel que le simple livre du maître, support quasi-indispensable à tout enseignant. A u Burundi, par exemple, la pénurie des supports didactiques oblige les enseignants à écrire la leçon sur le tableau. E n Côte d'Ivoire, 30 % seulement des écoles primaires des zones rurales estiment détenir un « matériel pédagogique suffisant » contre 45 % dans les zones urbaines.

A côté de cette déficience en matériels didactiques, les enseignants rencontrent souvent, en milieu rural, des problèmes d'encadrement, d'isolement et de logement, en milieu rural. A titre d'exemple, on a constaté au R w a n d a et au Burundi, que certains enseignants du post-primaire et du secondaire étaient obligés de vivre loin des établissements où ils enseignaient tout simplement par manque de logements (I. Nayigizente, 1993). Souvent, ces enseignants sont obligés, par défaut de moyens de locomotion, de parcourir les trajets à pied ( W . Kaba ; M . Bwimana , 1993). Cela entraîne tout naturellement de la fatigue, une réduction du temps disponible pour la préparation du cours, la correction des devoirs, etc., et, très souvent, des absences7.

Dans ces conditions, il n'est pas étonnant de constater que m ê m e avec des niveaux de rémunération supérieurs à ceux des autres fonctionnaires, les enseignants soient peu motivés ou peu efficients. Afin d'être plus efficaces, les politiques de gestion des enseignants ont besoin d'être appuyées par la provision des conditions matérielles qui sont essentielles pour permettre à l'enseignant de remplir ses tâches correctement.

7. Selon une étude sur le secteur de l'éducation de base au Burundi, les diverses causes des abscences (recherche de paie, congés maladies, encadrement politique ou sportif, etc.) permettent d'expliquer le fait que 19 % du personnel enseignant d 'un canton (de 303 enseignants) étaient abscents pendant 1 à 3 mois au cours de l'année scolaire 1992-1993.

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4. Capacités institutionnelles et instruments de gestion du personnel enseignant

L a documentation sur laquelle le présent travail est basé ne fournit que peu d'informations précises sur l'état réel des dispositifs de gestion en place. Les éléments disponibles font ressortir en particulier des déficiences au niveau des systèmes d'information (notamment du fichier du personnel) et de la planification nécessaire pour une bonne gestion des enseignants, us soulignent aussi l'incapacité des structures centralisées à prendre les décisions de gestion appropriées en temps utile. Dans plusieurs pays d'Afrique francophone sub-saharienne (Mali, Côte d'Ivoire, Gabon , etc.) l'informatisation de la gestion du personnel de l'éducation est désormais engagée et promet d'améliorer son efficacité et son objectivité. Il est à espérer qu 'un système d'information fiable et opérationnel permettra, à terme, de développer une véritable gestion prévisionnelle des emplois, dans le secteur éducatif.

Enfin, c o m m e nous avons eu l'occasion de le mentionner précédemment, nombreuses sont les voix, dans la plupart des pays d'Afrique francophone, qui plaident en faveur de la déconcentration ou m ê m e de la décentralisation de la majorité des tâches de gestion du personnel enseignant, en vue de rationaliser celle-ci.

A ce stade, nous ne pouvons émettre que quelques réflexions fragmentaires sur ces pistes d'amélioration du dispositif de gestion. Elles sont, pour l'essentiel, basées sur l'expérience de la France, pays de tradition centraliste certes, mais qui a décentralisé la plupart des tâches de gestion des personnels enseignants du premier degré et une partie de celles concernant les enseignants du second degré (ce sont, en effet, les Académies/Rectorats et pour certaines tâches de gestion, les établissements qui se voient confier une partie de la gestion des personnels enseignants), et où un effort important de modernisation des outils de gestion de l'éducation a été fait depuis de nombreuses années.

U n rapport de l'Inspection générale de l'administration de l'Education Nationale (Rapport de l'Inspection générale de l'administration de l'Education Nationale, 1993) conclut que les services du personnel au niveau des académies ont enregistré d'incontestables gains de productivité, surtout grâce à l'utilisation de l'informatique. L'essentiel des documents utilisés pour les premières affectations, les mutations et les promotions sont, en effet, les produits d 'un traitement informatique.

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E n outre, de vastes opérations ont été menées pour former les agents administratifs concernés par l'utilisation des outils informatiques et pour informer les agents des nouvelles tâches de gestion accompagnant les mesures de décentralisation et de déconcentration.

U n certain nombre de faiblesses et de points critiques ont cependant été relevés dans le rapport sus-mentionné. П s'agit notamment du caractère trop peu opératoire des bases de données des services du personnel des académies pour assurer une bonne gestion prévisionnelle du personnel enseignant ou m ê m e le contrôle et pilotage précis des effectifs. L a base d'information existant à ce niveau permettrait, par ailleurs, seulement une évaluation insuffisante et non systématique d'aspects qualitatifs de la performance des enseignants (les bilans d'inspection étant partiels et peu réguliers). E n outre, on note que les marges de manoeuvre attribuées aux autorités académiques en matière d'affectation et de redistribution des personnels enseignants (titulaires et auxiliaires), n'ont pas été pleinement utilisées. D e m ê m e , les chefs d'établissements ont-ils peu tiré parti des possibilités d'action qui leur sont désormais offertes en matière de recrutement de vacataires, d 'embauché, de contractuels et de maintien en fonction de personnels arrivant au m o m e n t du départ en retraite. Si les libertés d'action n'ont pas été toujours bien exploitées, c'est, du moins partiellement, dû à certaines faiblesses du cadre réglementaire et organisationnel : les réglementations concernant le statut des enseignants sont multiples et manquent de clarté et de cohérence ; les moyens (surtout en personnel) correspondant à la mise en oeuvre des actes de gestion délégués ont parfois été insuffisants ou insuffisamment redistribués ; les informations en provenance des établissements (concernant les besoins en personnel) sont insuffisamment contrôlées au niveau des académies, ce qui conduit à des irrégularités, etc..

L e rapport mentionné insiste, en particulier, sur deux observations concernant la gestion déconcentrée et décentralisée du personnel enseignant :

(i) E n raison de l'importance des effectifs à gérer ou de l'étendue territoriale d'une unité régionale (académie, par exemple), la relation directe « rectorat-établissement » peut s'avérer inadaptée ; certaines académies en France ont ainsi associé l'Inspection ou/et les établissements à la gestion du personnel enseignant. H semble utile de renforcer, dans ces cas, les outils de pilotage et de contrôle du rectorat.

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(ii) U n e organisation de la gestion du personnel à partir de l'établissement paraît séduisante mais elle a montré certaines limites dans les académies en France où on a essayé de la réaliser. O n y a signalé surtout une parcellisation excessive et une technicité insuffisante de bon nombre des établissements regroupés.

Il ne semble pas inutile de garder à l'esprit ces observations et remarques sur l'expérience de gestion déconcentrée du personnel enseignant en France lorsqu'il s'agira de développer des politiques et projets d'aménagement de la gestion des enseignants dans les pays d'Afrique francophone.

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Remarques finales

L e présent travail fait un premier état de la question du déploiement et de l'utilisation des enseignants et, tout particulièrement, des enseignants du premier cycle dans les pays francophones d'Afrique. Il a permis de mettre en évidence un certain nombre de problèmes spécifiques auxquels doivent faire face les politiques de déploiement et d'utilisation rationnelle des personnels enseignants dans cette région du m o n d e , en particulier :

(i) La pénurie absolue a" enseignants au niveau national. Trois facteurs sont essentiellement à l'origine de cette situation. П s'agit d'abord des contraintes financières. E n effet, dans un grand nombre de pays, le budget alloué à l'éducation ne permet plus d'accroître suffisamment le volume annuel de recrutement d'enseignants nécessaires pour faire face aux besoins. Ensuite, le manque d'enseignants peut être aussi, partiellement, la conséquence du fait que leur statut, leurs niveaux de rémunération et conditions de travail attirent très peu de diplômés vers cette profession. Enfin, la législation nationale de plusieurs pays ne permet pas de recruter des candidats ne possédant pas un certain niveau de formation, alors qu'en l'absence de cette contrainte, la pénurie n'existerait pas. (ii) Le manque d'enseignants qualifiés. Celui-ci peut être la conséquence d 'une pénurie générale d'enseignants. Mais, très souvent, il est généré ou aggravé par la déperdition des enseignants qualifiés au profit des administrations publiques (particulièrement de l'administration du Ministère de l'Education) et, quelques fois, du secteur privé. Il est aussi, dans une certaine mesure, le résultat des départs précoces à la retraite des enseignants expérimentés.

Enfin, dans certains cas, il est lié à la limitation de l'accès à la formation initiale et continue ;

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Remarques finales

(iii) La répartition déséquilibrée des enseignants sur le territoire national. Celle-ci entraîne un manque d'enseignants dans certaines écoles ou régions géographiques des pays et des sureffectifs dans d'autres. Cette situation tient, le plus souvent, à la préférence des enseignants pour certaines zones et certains établissements au détriment d'autres, et surtout aux critères d'affectation des enseignants(es) favorisant leur concentration dans les zones urbaines. (iv) U n e mauvaise adéquation entre les profils des enseignants et ceux des postes auxquels ils sont affectés. C e problème est essentiellement dû à l'absence d'une véritable politique de développement professionnel des enseignants et à une organisation peu efficace de la gestion des carrières des enseignants. (v) Le surnombre des enseignants dans certaines administrations publiques. L'usage des postes administratifs c o m m e éléments de promotion ou de récompense des enseignants s'expliquant par les avantages comparatifs que procurent les fonctions administratives et, quelques fois, le recours aux postes administratifs pour pouvoir affecter des enseignants(es) auprès de leurs conjoints(es), sont quelques unes des causes de ce surnombre, (vi) L a déperdition du personnel enseignant au profit d'autres secteurs que l'administration. Le manque de perspectives de promotion ou d'avancement, le statut dévalorisant de l'enseignant, les mauvaises conditions de travail et les écarts de rémunération avec le privé sont autant d'éléments d'explication de ces déperditions. (vii) L'absentéisme élevé de certains enseignants. C o m m e facteurs explicatifs de ce phénomène, on peut citer - en plus de ceux qui sont à l'origine des déperditions du personnel enseignant - la faiblesse ou l'absence de supervision à l'intérieur de l'école et par les institutions externes (communautés, administrations, etc.) et certaines faiblesses dans le fonctionnement de l'administration (quérir la paie, répondre à des convocations diverses, etc.). (viii) L a mauvaise utilisation des enseignants en poste. Elle se manifeste en particulier par un temps effectif d'enseignement qui est, pour certains enseignants (suppléants, remplaçants, etc.), en dessous des normes officielles, et pour d'autres, nettement au-dessus de la charge horaire officielle.

Bien qu 'un certain nombre de solutions aux problèmes sus-mentionnés relèvent du domaine de la gestion, d'autres demandent des choix politiques. Les Tableaux 8.1-8.5 présentent quelques options politiques et quelques instruments de gestion envisageables afin de faire face à ces problèmes. Il

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophoit

est important de savoir que chacune des options et stratégies a un coût monétaire et un coût non monétaire. Si certaines des options se situent dans une perspective à court terme, d'autres sont à inscrire dans le long terme. E n dépit du fait que les problèmes sus-répertoriés soient c o m m u n s à bon nombre de pays, leurs causes - et donc les mesures pour y remédier - ne sont pas nécessairement les m ê m e s

Tableau 8.1. Problème № . 1 : Manque absolu d'enseignants au niveau national

Options politiques

Double flux (dans les zones à forte densité démographique).

Classes multigrades (recrutement biennal dans les zones à faible croissance démographique).

Redéploiement de certains enseignants occupant des postes administratifs.

Déconcentration ou décentralisation des pouvoirs de recrutement : promouvoir le recrutement des enseignants par les communautés locales.

Flexibilisation et diversification des critères et conditions de recrutement : contractuels, vacataires, volontaires, etc.

Augmenter l'âge de départ à la retraite.

Accroître la charge horaire des enseignants.

Stratégies/Instruments de gestion requis

Bonne préparation des enseignants aux méthodes d'enseignement en double flux et dans les classes multigrades.

Dotation en équipements scolaire et didactique des classes concernées par le double flux et les classes multigrades.

Hausse de p % (avec p<100) des rémunérations des enseignants dans les classes spécifiques (double flux, classes multigrades).

Mesures d'incitation au redéploiement : primes, soutien pédagogique, etc.

Subventions publiques aux communautés locales, réglementation des recrutements à différents niveaux.

Faire appel aux enseignants retraités aptent à enseigner, aux vacataires, aux contractuels, etc.

Abaisser le niveau de formation générale exigible au concours de recrutement.

Réduire la durée de la formation initiale (dans les cas où elle est au-dessus du seuil d'efficacité optimale) et mettre en place un système efficace de formation en cours d'emploi.

Reculer l'âge de la retraite.

Mesures d'accompagnement et contrôle de la charge horaire modifiée.

Mise en place d'un système d'information et de gestion fiable et fonctionnel.

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Remarques finales

Tableau 8.2. Problème № . 2: Manque d'enseignants qualifiés

Options politiques

Limiter l'accès des enseignants aux postes administratifs.

Augmenter l'âge de départ à la retraite.

Faire appel aux retraités qualifiés et aptes à enseigner

Faciliter l'accès à la formation initiale et continue.

Améliorer les conditions de vie et de travail des enseignants.

Stratégies/Instruments de gestion requis

Définir les postes administratifs réservés aux enseignants

Diversifier le statut des enseignants

Mettre en place un système efficace de formation continue.

Baisser le niveau de formation générale exigible au concours de recrutement.

Tableau 8.3. Problème N o . 3 : Mauvaise répartition des enseignants

Options politiques

Déconcentration ou décentralisation des pouvoirs de gestion des affectations.

Politique d'affectation concertée entre les administrations de l'Education Nationale et les autres administrations.

Valorisation des postes dans les zones non attrayantes

Stratégies/Instruments de gestion requis

Mise en place d'un système d'information et de gestion fiable et fonctionnel à tous les niveaux de gestion.

Incitation à exercer dans les zones non attractives : primes, habitations pour maîtres, soutien actif des inspections, faciliter l'accès à la paie en fin de mois, etc.

N e plus utiliser l'affectation dans ces zones c o m m e une mesure disciplinaire mais c o m m e mesure d'incitation (promotion accélérée, etc.).

T e m p s m i n i m u m de service dans les zones non attrayantes pour les nouveaux sortants et les candidats à des postes de promotion.

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La gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

Tableau 8.4. Problème № . 4: Déperdition des enseignants au profit des administrations publiques et du secteur privé

Options politiques

Développer les mesures d'incitation

Professionnalisation du corps enseignants.

Meilleur contrôle /pilotage des déperditions.

Stratégies/Instruments de gestion requis

Elargir l'échelle de promotion et d'avancement dans la fonction enseignante.

Modification de la structure des rémunérations.

Logements pour les enseignants.

Améliorer les conditions de travail dans les écoles.

Définir les postes administratifs (publics) réservés aux enseignants.

Limitation à un seuil donné du nombre annuel des enseignants pouvant avoir accès à une fonction administrative.

Politique d'affectation concertée entre les administrations de l'Education Nationale et les autres administrations.

Mise en place d'un système d'information et de gestion fiable et fonctionnel.

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Remarques finales

Tableau 8.5. Problème № . 5: Absentéisme des enseignants qualifiés

Options politiques

Améliorer la condition enseignante.

Accroître la supervision.

Améliorer la gestion de routine.

Stratégies/Instruments de gestion requis

Accroître l'échelle de promotion et d'avancement dans la fonction enseignante.

Logements pour les enseignants.

Améliorer les conditions de travail dans les écoles.

Compensations salariales.

Accorder une certaine autonomie et responsabilité aux directions d'écoles et aux inspections

Faciliter la recherche de la paie et les formalités administratives.

Les contraintes budgétaires auxquelles sont soumis la plupart des pays peuvent conduire à donner une priorité aux politiques dont les coûts financiers sont moindres quand bien m ê m e elles peuvent ne pas être les mieux indiquées. La recherche de solutions aux différents problèmes devrait aller au-delà de l'exploration des différentes voies et mesures spécifiques énumérées dans les Tableaux 8.1 - 8.5 et se situer dans un cadre global. E n effet, les problèmes mis à nu tout au long de cette étude sont, pour une large part, interdépendants. Seule, une étude approfondie du système de gestion en place dans son contexte concret spécifique permet, d'une part, de mieux cerner ces problèmes et, d'autre part, d'adopter une politique efficace, tant au niveau des solutions qu'au niveau des coûts.

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Page 66: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

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Remarques finales

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Page 69: La Gestion du personnel enseignant en Afrique francophone

Publications et documents de Г П Р Е

Plus de 750 ouvrages sur la planification de l'éducation ont été publiés par l'Institut international de planification de l'éducation. Ils figurent dans un catalogue détaillé qui comprend rapports de recherches, études de cas, documents de séminaires, matériels didactiques, cahiers de Г П Р Е et ouvrages de référence traitant des sujets suivants :

L'économie de l'éducation, coûts et financement

Main-d'oeuvre et emploi.

Etudes démographiques.

La carte scolaire, planification sous-nationale.

Administration et gestion.

Elaboration et évaluation des programmes scolaires.

Technologies éducatives.

Enseignement primaire, secondaire et supérieur.

Formation professionnelle et enseignement technique.

Enseignement non formel et extrascolaire : enseignement des adultes et enseignement rural.

Pour obtenir le catalogue, s'adresser à l'Unité des publications de Г П Р Е .

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L'Institut international de planification de l'éducation

L'Institut international de planification de l'éducation (ПРЕ) est un centre international, créé par l ' U N E S C O en 1963, pour la formation et la recherche dans le domaine de la planification de l'éducation. Le financement de l'Institut est assuré par l ' U N E S C O et les contributions volontaires des Etats membres. A u cours des dernières années, l'Institut a reçu des contributions volontaires des Etats membres suivants : Allemagne, Danemark, Inde, Irlande, Islande, Norvège, Suède, Suisse et Venezuela.

L'Institut a pour but de contribuer au développement de l'éducation à travers le monde par l'accroissement aussi bien des connaissances que du nombre d'experts compétents en matière de planification de l'éducation. Pour atteindre ce but, l'Institut apporte sa collaboration aux organisations dans les Etats membres qui s'intéressent à cet aspect de la formation et de la recherche. Le Conseil d'administration de Г П Р Е , qui donne son accord au programme et au budget de l'Institut, se compose d'un m a x i m u m de huit membres élus et de quatre membres désignés par l'Organisation des Nations Unies et par certains de ses institutions et instituts spécialisés.

Président : Lennart Wohlgemuth (Suède), Directeur, Institut nordique d'Afrique, Uppsala.

Membres désignés : David de Ferranti, Directeur, Département de développement humain ( D D H ) , la

Banque mondiale. Harka Gurung, Directeur, Centre de développement de l'Asie et du Pacifique, Kuala

Lumpur. Tito Egor go Contado, Chef du service de la vulgarisation et de l'éducation agricoles,

Division de la recherche, de la vulgarisation et de la formation, Département du développement durable, Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture ( F А О ) .

Membres élus : Dato'Asiah bt. Abu Samah (Malaisie), Conseiller de société, Lang Education, Land and

General Berhad, Kuala Lumpur. Faï'za Kefi (Tunisie), Présidente, Union Nationale de la F e m m e Tunisienne, Tunis. Kabiru Kinyanjui (Kenya), Spécialiste principal du programme, Division de la

recherche, Centre de recherche pour le développement international, Nairobi. Klaus Hufner (Allemagne), Professeur, Université Libre de Berlin, Berlin. Tamas Kozma (Hongrie), Directeur général, Institut hongrois pour la recherche en

éducation, Budapest. Teboho Moja (Afrique du Sud), Directrice, Education, Société Sud-Africaine de

Diffusion, Johannesburg. Yolanda M . Rojas (Costa Rica),Vice-Recteur d'Académie, Université de Costa Rica,

San José. Michel Vernières (France), Professeur de sciences économiques, Université de Paris I,

Panthéon-Sorbonne, Paris.

Pour obtenir des renseignements sur l'Institut s'adresser à : Secrétariat du Directeur, Institut international de planification de l'éducation, 7-9 rue Eugène-Delacroix, 75116 Paris, France.

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L ' o u v r a g e

Dans les pays d'Afrique francophone, l'affectation et la gestion plus rationnelles du personnel enseignant constituent désormais une des préoccupations prioritaires des responsables du secteur éducatif. Confrontés d'une part, à un ralentissement, parfois m ê m e à une suspension des recrutements dans la fonction publique, et, d'autre part, à des exigences croissantes concernant le développement quantitatif et la qualité de l'éducation, ils sont, en effet, appelés à rendre la gestion des ressources humaines disponibles plus efficace, en veillant notamment à une utilisation appropriée des enseignants qualifiés et à leur répartition équitable entre les différentes zones géographiques et les différents établissements du pays. Il est également important d'améliorer les processus de mutation et d'autres actes de gestion du personnel en les rendant plus rapides, plus transparents et plus acceptables pour les agents concernés. L a présente monographie se propose de faire état des principaux problèmes d'affectation et de gestion des enseignants auxquels les pays de cette région doivent actuellement faire face. Elle aborde, par ailleurs, les stratégies qui y ont été adoptées dans le passé récent afin d'accroître l'efficacité de la gestion du personnel enseignant.

L ' a u t e u r

Antoine Traoré est diplômé de l'Ecole Nationale Supérieure de Statistique et d 'Economie Appliquée ( E N S E A ) d'Abidjan, Côte d'Ivoire et titulaire d'une maîtrise en Modélisation économique et statistique de Г E N S E A de Paris. Б a effectué plusieurs travaux d'expert pour YInstitut international de planification de l'éducation (IIPE) et d'autres organismes internationaux. Depuis 1996, il travaille à la Banque Centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest à Ouagadougou, Burkina Faso.