Business Model et Innovation de rupture

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Mots clés : Business Model, Innovation de rupture Professional Thesis Enseignant tuteur : Isabelle Decoopman Avril 2010 Edouard Thurotte Mémoire Business Model et Innovation de rupture

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"Business Model et Innovation de rupture" Mémoire Master 2 ESC Lille - Edouard Thurotte

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Edouard Thurotte

M o t s c l é s : B u s i n e s s M o d e l ,

I n n o v a t i o n d e r u p t u r e

P r o f e s s i o n a l T h e s i s

E n s e i g n a n t t u t e u r : I s a b e l l e D e c o o p m a n

A v r i l 2 0 1 0

Mémoire Business Model et Innovation de rupture

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RemerciementsEn préambule à ce mémoire, nous souhaitions adresser nos remerciements les plus sincères aux personnes qui nous ont apporté leur aide et qui ont contribué à l'élaboration de ce mémoire ainsi qu’à la réussite de cette formidable année à SKEMA.

Nous tenons à remercier sincèrement Madame Isabelle DECOOPMAN, qui, en tant que responsable de mémoire, s'est toujours montrée à l'écoute et très disponible tout au long de la réalisation de ce mémoire, ainsi pour l'inspiration, l'aide et le temps qu'elle a bien voulu nous consacrer.

Nous souhaitons également remercier Madame Corinne POROLI pour ses conseils qui ont été une aide précieuse ces derniers mois.

Nos remerciements s’adressent enfin à tous les entrepreneurs qui ont accepté de répondre à nos questions avec gentillesse. Nous tenons ainsi à remercier Frédéric MOMBOISSE de la FNAC et de la FEVAD, Damien ROUE de Citydeal, Michel KOTSLINKI de Systemes-E, Olivier DESURMONT de Sineo, Yann SOILLY de Gaïan, Florence TROS de Emova, Claude SURIN de ID-Act et Alexandre Woog et Benoît Wocjiechowski de e-loue.

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SynthèseLe Business Model, terme encore trop souvent associé à la Netéconomie, est en train de se faire une place dans le vocabulaire des entreprises. Suite à notre revue de littérature et à notre acceptation de la définition de Amit & Zott agrémentée des travaux de Demil & Lecoq nous avons enquêté auprès des entreprises pour savoir comment le concept de Business Model est perçu et quel est son lien avec l’innovation (de rupture).

En dehors des difficultés à déterminer avec précision ce qu’est le Business model d’une entreprise les interviewés considèrent les composantes de cette notion comme très importantes en particulier lorsqu’il s’agit de présenter et d’expliquer leurs entreprises. Très souvent, l’explicitation du Business Model est un outil de présentation à l'attention d'investisseurs potentiels. Il décrit les modalités stratégiques et tactiques envisagées pour que le projet/l’entreprise produise des revenus. En effet, le concept s’attache à des variables ou des leviers afin de pouvoir définir son « modèle pour faire des affaires ».

En revanche, les divergences et approximations entre théorie et pratique nous ont amené à nous poser des questions sur l’utilité même du Business Model, et en particulier sa relation avec l’innovation.

Tout d’abord nous avons cherché à savoir si la taille de l’entreprise avait un impact sur le Business Model, malheureusement il n’y que très peu de travaux sur cette donnée et nos entretiens principalement réalisés sur des petites structures ne nous laissent qu’entrevoir certaines caractéristiques.

Ensuite, le lien entre innovation et Business Model est assez particulier car celui-ci peut être cette innovation. Dans ce cas les deux sont fortement liés en revanche, un produit innovant n’est pas forcément suivi d’une évolution d’une Business Model et vice versa, aucun Business Model ne permet de créer l’innovation à lui seul.

Enfin, connaître son Business Model et le comprendre est-il réellement important pour une entreprise ? Même si l’argumentation selon laquelle le Business Model n’est qu’un concept et que les entreprises ne l’ont pas attendu pour être profitable est acceptable il faut néanmoins envisager le Business Model comme un bon outil d’analyse de l’entreprise et surtout de présentation dans le cadre d’un Business Plan. Il est de plus toujours intéressant et pratique de mettre des mots simples pour caractériser tout un système.

Pour arriver à ce degré d’utilité le concept de Business Model doit passer un palier et sortir de son registre académique pour devenir pratique et être applicable en situation réelle.

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SommaireRemerciements......................................................................................................................................3

Synthèse.................................................................................................................................................4

Sommaire...............................................................................................................................................5

Introduction...........................................................................................................................................6

1. Appropriation de la théorie............................................................................................................7

A. Introduction : Naissance et évolution du concept de Business Model.......................................7

B. Les idées fortes des trois différents courants de pensée............................................................9

C. Les points clés du concept de Business Model et de l’innovation de rupture..........................12

D. La définition de son Business Model........................................................................................15

2. Application à l’entreprise.............................................................................................................19

A. Introduction, nos premiers constats.........................................................................................19

B. La méthode employée lors des interviews...............................................................................19

C. Les entreprises et personnes interrogées.................................................................................20

D. Points de convergence.............................................................................................................23

E. Points de divergence................................................................................................................26

3. Analyse et critiques personnelles.................................................................................................28

A. Introduction sur la divergence/convergence globale observée entre théorie et pratique.......28

B. La confrontation entre terrain et théorie.................................................................................28

C. Les idées originales, apports et réflexions critiques sur le sujet...............................................38

D. Notre proposition de Petit Business Model d’innovation.........................................................40

Conclusion............................................................................................................................................44

Bibliographie........................................................................................................................................45

Annexes................................................................................................................................................47

A. Interview de Michel Kotlinski / Canne multifonction................................................................47

B. Interview de Damien Roué / CityDeal.......................................................................................49

C. Interview de A. Woog et B. Wocjiechowski / E-loue.................................................................51

D. Interview de François Momboisse / FEVAD..............................................................................54

E. Interview de Yann Soilly / Gaian...............................................................................................65

F. Interview de Claude Surin / Idact.............................................................................................68

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Introduction

Le terme de Business Model, en vogue depuis quelques années, est aujourd’hui encore sujet à controverse. Depuis que nous travaillons sur le sujet, nous n’avons cessé de remarquer une divergence grandissante entre théorie et pratique.

La première partie de notre travail consistait à faire une revue de l’état de l’art concernant les Business Model, et nous nous sommes plus particulièrement attachés au concept en cas d’innovation de rupture technologique. Durant la seconde phase de ce projet, nous avons voulu valider nos acquis théoriques par des interviews sur le terrain. Notre objectif principal était de mettre en avant les points saillants du Business Model en cas d’innovation, que ce soit dans la théorie ou dans la pratique, et de montrer le chemin qu’il restait à parcourir d’un coté comme de l’autre, afin d’arriver à une définition stable et universellement validée du concept.

Ce que nous avons remarqué dès le départ, c’est que le schisme entre données théoriques et pratiques était immense, et que les entreprises à l’origine d’innovation de rupture n’étaient pas légion.

Nous allons tout au long de ce papier, vous rendre compte de nos découvertes et des points de confrontation avec ce que nous avions pu lire, et vous faire part de nos apports sur le sujet. Nous allons donc ici nous intéresser à la problématique suivante:

Quelles est l’influence des Business Model sur la création d’innovation de rupture ?

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1. Appropriation de la théorie

A. Introduction : Naissance et évolution du concept de Business Model

Business  : « Activité de production de biens et services incluant les aspects financiers, commerciaux  et industriels. » (Genesereth et Nilsson 1987).

Model  :   « Description   simplifiée   et   représentation   d’une   entité   ou   d’un   processus   complexe. »  (Osterwalder, Pigneur et Tucci, 2005).

Quelque soit sa taille, son activité ou son but final, toute entreprise peut être caractérisée par un Business Model. Apparu durant la seconde moitié du XXème siècle, le Business Model est un concept maintenant très répandu depuis son émergence à la fin des années 1990. En effet, la démocratisation de cette notion ces dernières années n’est pas un hasard.

Cette période a été marquée par un certain nombre de mutations d’ordre à la fois économiques, réglementaires et technologiques, qui ont impliqué de profonds changements dans la manière de gérer les entreprises. A travers ces mutations de nouveaux métiers sont apparus, mais aussi la possibilité de faire appel à de nouvelles sources de revenus et enfin les relations interentreprises se sont complexifiées. Ces mutations ont entrainé l’apparition de nouveaux outils comme le Business Model.

Bien souvent associé à la Net-économie, le Business Model s’emploie désormais pour tout type de projet entrepreneurial, que ce soit de petite ou grande échelle. Très souvent, l’explicitation du Business Model est un outil de présentation à l'attention d'investisseurs potentiels. Il décrit les modalités stratégiques et tactiques envisagées pour que le projet/l’entreprise produise des revenus. L'expression "modèle économique" est employée pour expliquer très précisément comment les revenus seront générés. En effet, le concept s’attache à des variables internes et externes afin de pouvoir définir son « modèle pour faire des affaires ».

Afin de comprendre les contours de ce concept, il convient dans un premier temps de s’intéresser à la naissance de celui-ci. Comme nous l’avons évoqué précédemment, l’apparition du concept de Business Model s’explique par trois facteurs technologiques, réglementaires et économiques.

Facteurs technologiquesDeux facteurs technologiques ont eu une influence considérable sur la structuration des relations interentreprises : la numérisation et l’essor d’internet. Le développement de la numérisation et le développement d’internet a entraîné une convergence technologique entre les réseaux informatiques de télécommunication et de télédiffusion. Cette modification de l’environnement technologique a transformé les chaînes de valeur traditionnelles de pratiquement chaque secteur.

Point intéressant : la courbe de tendance de l’utilisation du terme « Business Model » suit celle du NASDAQ (fondamentalement l’indice de cotation américain des entreprises liées aux nouvelles technologies et l’Internet).

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Facteurs économiquesL’ouverture des marchés a accru la concurrence à travers le monde, complexifiant les modèles d’affaires. L’avantage concurrentiel étant à l’origine de la création de valeur, il a fallu penser un outil d’évaluation stratégique permettant d’évaluer les leviers de cette création.

Ainsi la gestion par la valeur est devenue un outil privilégié de pilotage, et est à l’origine des transformations des chaines de valeur.

Facteurs réglementairesLe grand mouvement international de dérégulation et de globalisation a occasionné de grands bouleversements dans les entreprises. Par exemple la libéralisation de certains secteurs (comme les Télécoms) a donné naissance à de nouvelles industries et à de nouveaux métiers.

Pour les dirigeants ou entrepreneurs, le concept de Business Model permet de répondre aux besoins d’analyse de la complexification de l’environnement d’affaires. Les entreprises sont confrontées à de profondes mutations dans leur activité comme la possibilité de générer de nouvelles formes de revenus ou la complexification des relations inter-firmes.

La possibilité de générer de nouvelles formes de revenus pour l’entrepriseL’apparition de nouveaux métiers grâce aux progrès technologiques et aux déréglementations a bien sûr entrainé l’émergence de nouvelles formes de revenus. Par exemple, la Netéconomie a permis d’envisager des Business Models où l’apporteur de revenus n’est pas forcément l’utilisateur du service (exemple : la publicité sur Internet).

Ainsi la question du partage de revenus, devenue centrale dans l’économie numérique, demandait de nouveaux outils d’analyse que lui apporte le Business Model.

La complexification des relations inter-firmesAlliances, partenariat, accords, franchises (etc.) ont contribué à faire émerger des méta-réseaux entre les entreprises et bouleverser les schémas traditionnels de relation d’affaires. De nouveaux concepts sont apparus, notamment l’écosystème d’affaires ou de constellation de valeur, auxquels la notion de Business Model est venue apporter une réponse.

Evolution du concept de Business Model

Dans la littérature, le concept de Business Model est pour la première fois évoqué au milieu du XXème siècle avec des auteurs comme Penrose (1959), Chandler (1962) Ansoff (1965) ou Andrews (1965). Toutefois, sa pleine acceptation prend place à la fin des années 1990.

Timmers (1998) et Rappa (2001) sont les premiers à énoncer sa définition et ses classifications. Par la suite Chesbrough et Rosenbloom (2000), Linder et Cantrell (2000) ou Magretta (2001) seront amenés à définir ses composantes sans pour autant approfondir la démarche. Ces dernières seront mises en avant par des auteurs comme Hamel (2000), Weill et Vitale (2001) ou Afuah et Tucci (2003).

Enfin Gordijn (2002) ou Osterwalder (2004) sont les premiers à mettre en évidence les composants conceptuels. Leurs travaux ont mené à la proposition de méta-modèles de Business Model comme modèles de référence et d’ontologies.

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Le concept de Business Model est aujourd’hui utilisé et apprécié des managers car il offre une vision transversale de l’entreprise, à l’inverse parfois de la stratégie. À l’heure de l’internet, de la montée en puissance des capitaux à risque par fond d’investissement et du LBO (Leveraged Buy Out) l’explicitation des mécanismes de création de valeur est devenue priorité pour les entreprises.

B. Les idées fortes des trois différents courants de pensée

Dans la littérature, trois grands paradigmes se dégagent. Ceux-ci sont complémentaires et nous avons souhaité les aborder pour mieux cerner la notion de Business Model.

Le Business Model comme « Revenue Model »« Un Business Model dépeint le contenu, la structure et le mode de gouvernance des transactions qui  sont mis en place pour créer de la valeur à travers l’exploitation d’opportunités d’affaire » Amit et  Zott (2001).

Le premier courant de pensée à avoir éclos sous l’impulsion d’auteurs comme Rappa (2000), Linder et Cantrell (2001) ou Amit et Zott (2001), s’attardait principalement sur la notion de « création de valeur ». Le Business Model est un outil d’analyse qui permet de comprendre ses propres mécanismes de création de valeur et ceux des concurrents.

Bien que n’étant pas consensuelle à l’époque, et ne l’étant toujours pas aujourd’hui, les auteurs semblaient tous s’accorder sur le fait que l’unique caractéristique mise en avant par les Business Model était « comment créer de la valeur ? ».

Ainsi la création de valeur se décline alors en 4 items :

L’efficience des transactions représente la réduction des coûts avec l’augmentation des transactions. Plus une transaction sera rapide efficace et répétée, plus elle créera de valeur.

La complémentarité de l’offre porte sur le mécanisme de vente par lot ainsi un lot de biens et/ou services fournis ensemble a plus de valeur que ces biens fournis séparément.

Le lock-in, forme de fidélisation, source de valeur potentielle dans la mesure où les clients sont motivés pour racheter des produits de la marque. En empêchant/prévenant le client d’aller voir chez la concurrence, de la valeur se crée.

L’innovation source de création de valeur. En innovant dans ses produits, services, méthodes de production, distribution, marketing etc. mais en innovant dans la manière de faire des affaires et d’organiser son entreprise.

Ce paradigme met en avant le concept de business Model comme exclusivement axé sur la manière dont une entreprise fait des profits. Il reste encore aujourd’hui largement répandu dans le monde managérial, mais aussi dans le monde de la recherche.

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Le Business Model comme le triptyque proposition de valeur, architecture de valeur et équation de profits

« Le Business Model est la description pour une entreprise des mécanismes lui permettant de créer de  la valeur à travers : la proposition de valeur faite à ses clients, son architecture de valeur, et de capter  cette valeur pour la transformer en profit (équation des profits) » Lehmann-Ortega (2008).

Comme nous avons pu le voir précédemment, le terme de Business Model s’est souvent limité au concept de création de valeur. Certains auteurs comme Laurence Lehmann-Ortega ont proposé une définition du concept plus précise et englobant de nouvelles dimensions.

Le concept de Business Model n’est plus ici limité à la création de valeur, et n’est donc plus fondamentalement opposé à la stratégie d’entreprise dite classique. Au contraire, il vient se juxtaposer à celle-ci pour définir un niveau intermédiaire de gestion (dit méso) afin de permettre à toute entreprise d’améliorer sa productivité en s’intéressant à celui-ci.

Voici les composantes du triptyque qui permettent d’approfondir le concept de Business Model:

La proposition de valeur qui comporte deux items : le type de client ou de marché à qui s’adresse l’entreprise, et le produit ou service proposé au client. Cette proposition décrit le Quoi de l’offre, son attractivité, et les services aux clients.

L’architecture de valeur comprenant : La chaine de valeur interne de l’entreprise (ensemble de tâches à réaliser afin de livrer la proposition de valeur au client) et la chaine de valeur externe (fournisseurs, réseaux d’entreprises…). Elle décrit le Comment de la production. Il faut noter que les clients peuvent avoir un rôle dans le processus d’innovation de l’entreprise, et ainsi ils peuvent se voir associés au réseau de valeur de celle-ci. L’architecture de valeur repose sur la mise en œuvre des ressources et aptitudes organisationnelles de la firme.

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Valeur

Efficience

Lock-in

Innovation

Complémentarité

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L’équation de profits comprend quant à elle la valeur captée par l’entreprise, et la structure des coûts et capitaux engagés, ce qui reflète l’architecture de valeur. C’est la traduction financière du Business Model, assimilable à son Return On Capital Employed (ROCE) à cela près qu’il est fait abstraction du mode de financement pour se concentrer uniquement sur le cycle d’exploitation et d’investissement.

Le Business Model de la captation de valeur

« Le   Business  Model   d’une   organisation   est   l’ensemble   de   choix   qu’elle   fait   pour   générer   des  revenus » Demil et Lecocq (2006).

Dans ce groupe d’auteurs le Business Model est un outil d’analyse des ressources (ainsi que leurs combinaisons) et des compétences utilisées afin de générer des revenus en proposant une offre au client. Cette approche vient compléter celles plus classiques qui décrivent comment l’entreprise crée et capte de la valeur mais non ce qu’elle fait de cette valeur.

Le modèle RCOA (Ressources, Compétences, Offre, Activité) développé par Warnier et al (2004) et Demil et Lecocq (2008) permet d’affiner cette analyse. Cette approche permet de mettre en valeur plus précisément les variables internes sur lesquelles le décideur peut réellement agir, à l’inverse de la stratégie qui s’attarde plus sur l’environnement. Ainsi le Business Model permet d’identifier des leviers concrets qui peuvent être actionnés de façon innovante.

Voici les 6 variables clés énoncées par le modèle qui sont de véritables leviers d’action :

Avec quelles ressources et compétences l’entreprise cherche-t-elle à générer des revenus ?Tout produit, service ou actifs de l’entreprise peut être une ressource, si tant est qu’il peut apporter un revenu à l’entreprise, contrairement à la définition d’une ressource en stratégie. Qui exploite les ressources et les compétences ?

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Proposition de valeurOffre qui résout un problème/ une attenteClient /segment de marché ciblé par l'entreprise

Equation de profitValeur captée par l'entreprise (CA, coût)Structure des coûts et des capitaux

Architecture de valeurChaine de valeur interne et externe de l'entreprise

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Il existe trois formes traditionnelles d’exploitation des ressources (modes de gouvernance) : les marchés, firmes et réseaux. Les ressources peuvent être exploitées simultanément dans plusieurs types de gouvernance, et de manières différentes les unes des autres. Qui paye pour l’acquisition ou l’utilisation des ressources ? Traditionnellement le client est celui qui paye directement la ressource, que ce soit pour son acquisition ou son utilisation. Toutefois nous l’avons vu précédemment, une source de revenu peut revêtir une multitude de formes, mais toujours dans le but de fournir des revenus. Quelle est la structure des revenus ? La répartition des revenus acquis par le biais des différentes sources est primordiale, car elle implique une définition de ceux qui créent de la valeur dans l’entreprise. Dans l’approche Business Model, les choix de répartition de revenus entre les types de clientèles définissent le pouvoir de négociation des clients. Comment est rémunérée la vente ou l’utilisation des ressources ? Les choix de facturation influencent la politique tarifaire et qualitativement l’image de l’entreprise. La fréquence des paiements, quant à elle, influence les flux financiers de la firme. Quels coûts et structure organisationnelle implique le Business Model ? Les coûts impliqués dans chaque choix que fait l’entreprise et l’exploitation des ressources vont définir son Business Model.

C. Les points clés du concept de Business Model et de l’innovation de rupture

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Business Model

Ressources et compétences généreratrices

de revenus

Acteurs qui utilisent ces

compétences

Acteurs payant

l’utilisation/acquisition des ressources

Structure des revenus

Rémunération de l’utilisation

de ces ressources

Coûts et structure

organisationnelle

impliquées

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Stratégie et Business Model, deux concepts complémentairesLe Business Model est un concept qui contribue au processus de réflexion stratégique. En stratégie l’objectif principal de la discipline est le gain d’un avantage concurrentiel. Dans un Business Model, cette distinction est moins pertinente car les décisions concernent les sources de revenus, et non l’avantage que peut générer la perte ou le gain d’une position de domination sur le marché. Le Business Model est un lieu de confrontation des forces macro et micro-structurelles, qu’on pourrait qualifier de « méso ».

Le Business Model est une approche fonctionnelle de plus facilement adaptable aux organisations mono-activité ou aux petites entreprises. En effet, les variables issues du Business Model sont plus facilement manipulables car elles sont des leviers concrets.

Les deux types de Business ModelOn distingue deux types de Business Model. Le premier est le Business Model générique, qui désigne les caractéristiques communes à plusieurs acteurs d'un secteur ou de plusieurs secteurs (les entreprises lowcost par exemple). Le second type est le Business Model spécifique, qui définit l'ensemble des choix effectués par une entreprise singulière dans son secteur.

Toutefois il est difficile d’établir un Business Model référent par secteur d’activité. En effet le Business Model est étroitement lié à l’environnement et au contexte dans lequel il est évolue et qui en fait son unicité.

Le Business Model, un outil d’aide à la décisionL’utilisation de l’outil Business Model permet de :

Comprendre ses propres mécanismes de création de valeur et ceux des concurrents. Appréhender ses ressources, ses aptitudes organisationnelles et son portefeuille de

compétences. Avoir une vision transversale de son modèle d’affaires en intégrant différentes dimensions et

entités opérationnelles.

Pour le porteur de projet, le Business Model sert de point d’appui pour la prise de décision. Il permet une meilleure compréhension de son réseau d’affaires et permet de mieux valoriser le projet.

Les cinq grandes fonctions du Business Model (Osterwalder, Pigneur, Tucci 2005)

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Protéger

Anticiper

ComprendreAnalyser

Manager

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L’évolution des Business ModelsLe Business Model est un outil évolutif qui doit être régulièrement modifié, repensé et implémenté. Les raisons sont simples, et tout porteur de projet doit être conscient de ces faits. Ainsi on peut identifier cinq facteurs qui peuvent amener à faire évoluer un Business Model :

Le besoin de barrer la concurrence Le besoin de répondre à une mutation sur son marché L’opportunité d’améliorer une offre L’opportunité de profiter d’une innovation technologique L’opportunité d’attirer de nouveaux consommateurs sur ses offres

Innovation et Business Model

« On   entend   par   innovation   technologique   de   produit   la  mise   au   point/commercialisation   d’un  produit   plus   performant   dans   le   but   de   fournir   au   consommateur   des   services   objectivement  nouveaux   ou   améliorés.   Par   innovation   technologique   de   procédé,   on   entend   la   mise   au  point/adoption de méthodes de production ou de distribution nouvelles ou notablement améliorées.  Elle peut faire intervenir des changements affectant – séparément ou simultanément – les matériels,  les   ressources   humaines   ou   les   méthodes   de   travail »   Organisation   de   coopération   et   de  développement économiques (1997).

L’innovation en entreprise peut prendre quatre différentes facettes, selon la typologie de l’OCDE :

L’innovation Produit, lancement sur le marché d’un produit ou service nouveau (ou amélioration d’un existant)

L’innovation Processus, nouvelles méthodes (ou amélioration notable) de production ou de distribution

L’innovation Marketing, innovation sur les fameux « 4P » L’innovation Organisationnelle, comme la nouvelle structuration de l’entreprise

Nous l’avons vu précédemment, le Business Model est un outil d’analyse évolutif qui part sa nature est totalement adapté à la modélisation d’une innovation. Dans le cadre d’une innovation, le Business Model permet de :

Articuler la proposition de valeur Identifier un segment du marché Définir la structure de la chaine de valeur Estimer les coûts de structure et le potentiel de profit Positionner l’entreprise dans le réseau de valeur (fournisseurs, consommateurs…) Formuler l’avantage comparatif qui permettra à l’entreprise de surpasser ses concurrents

Dans la littérature on peut discerner quatre modèles d’innovations, dont l’une, l’innovation de rupture est la thématique de notre mémoire (voir par ailleurs).

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L’innovation Incrémentale ne bouleverse pas ni les conditions techniques, ni le marché et est qualifiée de modeste. On l’assimile à une amélioration plus qu’un changement radical (ex : la souris optique).

L’innovation par Adjacence marché qui pousse une entreprise à s’étendre sur de nouveaux marchés en s’appuyant sur ses qualités intrinsèques (ex : Gilette et les rasoirs pour femmes).

L’innovation par Adjacence Produit / Technologie, qui se focalise sur le développement de nouveaux produits, services et compétences sur le marché propre à l’entreprise (ex : Intel et ses processeurs).

L’innovation de Rupture qui transforme totalement le domaine auquel elle s’applique et crée même de nouveaux besoins chez les clients. Elle change totalement la donne pour l’entreprise (ex : l’imprimerie ou le MP3)

D. La définition de son Business Model

Afin de proposer un mode de construction de Business Model, nous avons choisi de nous appuyer sur le triptyque de Lehmann-Ortega ainsi que les récents travaux de Demil, Lecocq et Stähler.

Patrick Stähler, consultant en innovation chez FluidMinds, a mis au point un canevas pour aider à la création de son Business Model (2009). Au triptyque Proposition de valeur/Architecture de valeur/Equation de profit, il y ajoute la dimension Culture et Valeurs de l’entreprise.

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Construire son Business Model – La proposition de valeur et les clients

La proposition de valeur"La valeur est le concept économique reflétant ce qu’un acheteur payera pour un produit ou un service” (Chesbrough et Rosenbloom, 2002).

Le rôle fondamental et économique d’une entreprise est de créer de la valeur, la répartir et capter cette répartition. La proposition de valeur, telle que nous la considérons ici, doit reposer sur des ressources et des compétences maîtrisées par l’entreprise et décrit le « quoi » de l’offre. C’est en quelque sorte la formalisation de l’idée de l’offre et met en valeur sa construction.

De nombreux éléments contribuent à la création de valeur et peuvent être intégrés à la proposition de valeur. Par exemple : la performance, le prix, l’image de marque, la nouveauté, etc.

L’entreprise devra répondre à ces deux questions :

Quelle est l’idée ? (D’où vient-elle ? Est-elle protégée ?) L’idée coïncide-t-elle avec une opportunité d’affaires ? (Quels sont les critères génériques ?

Opportunités et menaces du marché visé ?)

Les clientsL’objectif de cet item est de connaître et comprendre qui sont les clients du projet. Le Business Model doit expliciter les différents segments visés par l’entreprise et caractériser leurs besoins. Dans certains Business Models, les clients participent à la création de valeur, c’est pourquoi il est important des bien les cerner.

Le porteur de projet devra répondre à ces deux questions :

Qui sont vos clients et quelle segmentation souhaitez-vous établir ? (Profils, rentabilité, etc.) L’offre est-t-elle différenciée ? Quels sont les canaux de communication et distribution ?

Construire son Business Model – L’architecture de valeurL’architecture de valeur est l’ensemble des tâches mises en œuvre par l’entreprise pour délivrer la proposition de valeur. Elle s’articule autour de cinq items: l’offre, l’architecture de distribution, la chaîne de valeur, les compétences clés et le réseau de partenaires.

Par l’offre on entend déterminer ce que l’on veut réellement proposer au client afin d’identifier quelles sont les tâches à mettre en œuvre pour répondre à la proposition de valeur. De même l’architecture de distribution permet de comprendre comment l’entreprise doit atteindre ses clients.

La chaîne de valeur telle qu’elle est évoquée dans le modèle se réfère à la chaîne de valeur interne telle que Michael Porter l’a défini. Utilisée en stratégie, cette cartographie représente l’entreprise et ses services décomposés en activités créatrices de valeur. Elle se décompose en 2 types d’activités : les activités principales et les activités de support.

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Exemple d'activités principales dans la chaîne de valeur de Porter :

(Source Strategie4Innovation)

Il s’agit ici de répondre aux questions :

Quelles sont les ressources tangibles et intangibles nécessaires au projet ? Comment les agencer, les utiliser ?

Il convient également pour l’entreprise de déterminer les compétences clés à mettre en œuvre pour mener à bien cette proposition de valeur. Ainsi l’entreprise doit se demander quelles sont les compétences à développer pour créer des avantages concurrentiels.

Parallèlement il faudra envisager son réseau de partenaires qu’on peut également considérer comme la chaîne de valeur externe. Quelles ressources vont apporter les partenaires ? Bien souvent, les coopérations, partenariats ou alliances permettent d’améliorer la proposition de valeur. Quelles sont les compétences clés que l’entreprise va conserver, et quelles sont celles qu’elle va confier à des partenaires ?

Construire son Business Model – L’équation de profitPour établir l’équation de profit, il faut mettre en exergue la structure des coûts et les sources de revenus et répondre aux questions suivantes : Quels sont les différents postes de coûts et que représentent-ils ? Quelles sont les sources de revenus ? Quelles sont leurs répartitions ?

Construire son Business Model – Culture et valeursLa dimension Cultures et valeurs est la dernière envisagée dans la construction du Business Model. Elle s’articule autour de trois items : le style de leadership, le style de relations et les valeurs.

Le style de leadership répond aux questions: Comment mener les collaborateurs ? Quelle est la liberté donnée dans leur travail au quotidien ?

Le style de relations répond aux questions: Comment travailler avec ses clients ? Comment travailler avec ses collègues ?

Les Valeurs répondent aux questions: Quelles sont les valeurs qui globalement régissent ses comportements ? Quelles sont les valeurs poursuivies ?

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2. Application à l’entreprise

A. Introduction, nos premiers constats

Les dernières années de la décennie 2000 ont été marquées par une crise sans précédent. Tout d’abord une crise financière, qui prit naissance aux Etats-Unis, et dont les agences de cotations, les établissements de crédit et les fonds d’investissement ont été les principaux acteurs.

A l’heure de la globalisation et des transactions mondiales de capitaux, le mouvement s’est ensuite amplifié pour arriver jusqu’en Europe et notamment en France, pays qui nous concerne ici. Cette crise s’est suivie d’une crise économique : recul du PIB (-2,2% en France entre 2008 et 2009), augmentation du chômage (+2 points entre 2007 et 2009 pour atteindre 10 %)1. La situation est donc difficile, tant pour les entreprises que pour les particuliers.

Dans ce contexte, nous constatons une réelle crise de confiance de la part des consommateurs et l’apparition d’un sentiment (tout au moins) de baisse d’un certain pouvoir d’achat. Le client final est alors en recherche permanente d’un rapport qualité/prix optimal, obligeant les entreprises à posséder un Business Model parmi les plus performants du marché sous peine de ne pouvoir résister à la concurrence.

De plus, l’émergence du tout-Internet favorise la transparence de l’information : avis des consommateurs, comparateurs de prix, tout est fait pour que le client puisse choisir en toute liberté. Elément central de la création de valeur, le Business Model se doit donc d’être différenciant ou plus efficace que celui de ses concurrents.

A la lumière des interviews, le premier constat que nous pouvons faire est la méconnaissance du concept « scientifique » du Business Model. Même pour des entrepreneurs, qui connaissent les rouages des entreprises ainsi que les principaux leviers sur lesquels agir, il s’agit plus de « la façon de faire de l’argent », du «gagne-pain de l’entreprise » ou encore du « comment être plus compétitifs que nos concurrents ». Ce sont les définitions les plus fréquentes qui nous ont été faites lors de la recherche des personnes à interviewer. Il était donc important pour nous de vulgariser les principales notions étudiées dans l’état de l’art afin de pouvoir extraire les informations qualitatives de ces interviews.

B. La méthode employée lors des interviews

Nous avons réalisé ces interviews en rencontrant les personnes concernées. En effet, il nous a semblé que le face à face était la technique la plus efficace et adaptée à ce genre de questionnement. Une ou deux personnes de notre équipe sont donc allés rencontrer l’interviewé à l’occasion d’un entretien d’une durée plus ou moins une heure. Il était par ailleurs relativement difficile de disposer d’un créneau de disponibilité supérieur même si nous avons clairement senti la passion de nos interviewés, leur envie de communiquer et de nous transmettre ce qu’ils considèrent comme les principales clés de leur entreprise.

1 Source : OCDE

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Nous avons donc souhaité laisser parler notre interlocuteur au maximum afin de capter l’ensemble des informations « naturelles » en étant convaincus que cela permettait de ne pas influencer les réponses via nos questions. Nos questions ont été pour la plupart très courtes, simplement utilisées pour relancer ou aiguiller la discussion.

Dans cette optique, nous avons enregistré certains entretiens dans la mesure du possible, cette captation sonore s’accompagnant d’une prise de note écrite.

La principale tâche et peut-être la difficulté majeure rencontrée lors de ces interviews était la vulgarisation du vocabulaire théorique. En effet, nous avons banni l’utilisation de certains mots trop théoriques de type « chaine de valeur » ou « captation de valeur » pour ne donner que deux exemples. Il aurait été par ailleurs inadapté et inutile de se servir de ce vocabulaire trop technique et inintelligible pour notre interlocuteur.

Dans notre revue de littérature, nous avons souhaité nous intéresser principalement au Business Model de la captation de valeur décrit par Demil et Lecocq détaillé dans la partie précédente (1B).

Nous nous sommes par ailleurs plus particulièrement attardés sur «les ressources et compétences génératrices de revenus » et sur le thème abordant la structure des revenus.

C. Les entreprises et personnes interrogées

Concernant les personnes interviewées, notre choix s’est initialement porté sur les dirigeants ou créateurs d’entreprises innovantes. En effet, ce sont les interlocuteurs les plus aptes à parler de Business Model puisqu’ils en ont à leur origine. De ce fait, nous avons axé nos recherches dans ce sens.

Toutefois, après plusieurs essais infructueux, nous nous sommes trouvés face à la difficulté de trouver un public concerné par ce sujet est relativement précis. C’est pourquoi nous avons choisi de faire passer nos entretiens à des personnes qui n’étaient pas obligatoirement au courant de tous les aspects du Business Model mais leur variété a permis d’obtenir une vision d’ensemble grâce à leur complémentarité.

Les personnes interviewées sont donc décrites dans les fiches ci-dessous :

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D. Points de convergence

Dans le cadre de nos interviews nous avons donc rencontré des personnes issues de formation différentes, ayant des parcours différents, et travaillant dans des domaines différents. Cependant, un certains nombres d’aspects autour de notre recherche ressortaient toujours de la même manière lors de la discussion. Nous allons ici tenter de faire le point à ce sujet.

La vision du Business Model :Globalement, sans pour autant savoir précisément ce qu’est le Business Model, les interviewés ont su orienter leur réponses dans les bonnes directions. En effet ils nous ont presque tous parlé de création de valeur et pour certain de rentabilisation de cette valeur (captation). Cependant ils ont tous liés le Business Model à la stratégie et aux concurrents. De plus, même s’il nous parle de la création de valeur par exemple, ils utilisent parfois ces termes parce qu’ils les ont entendu sans trop savoir ce que c’est :

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« La création de valeur se fait tout simplement par appel d’offre et par rapport à la qualité de la  proposition qui est offerte à nos clients. » 

Claude Surin, IDAct

L’idée du Business Model : Même si tous (ou presque), admettent l’importance de leur Business Model au sein de leur entreprise, aucun d’entre eux n’a réfléchis à celui-ci avant de créer son entreprise. En effet, pour les jeunes entreprises interviewés (E-loue, CityDeal, IDAct, Gaïan) c’est l’idée, le concept de leur entreprise qui est venu avant. Ces 4 entreprises se sont lancées sur des marchés relativement nouveaux (location sur internet, couponing ou achats groupés, …) avec avant tout un concept que leurs fondateurs considéraient comme innovant. Leur Business Model leur est venu par la suite, en réfléchissant autour de leur concept contrairement aux entreprises low-cost qui par exemple ne sont fondées « que » sur leur Business Model.

« Nous avons travaillé des mois afin de réfléchir au meilleur moyen de rentabiliser notre idée tout en  permettant aux utilisateurs de profiter de celle-ci. »

Alexandre Woog, E-loue

Cette phrase indique clairement, ainsi que la chronologie qu’il nous a fait de son entreprise, que le Business Model a était mûrement réfléchi après même le lancement du site.

L’importance du Business Model : Comme nous venons de le dire, toutes les entreprises reconnaissent que pour réussir il faut un bon Business Model (sans savoir pour autant ce que c’est réellement). Mais effectivement ceci est d’autant plus vrai que les entreprises interrogées sont principalement des e-business et donc soumis à une concurrence rude et ayant plus ou moins les mêmes avantages / inconvénients. Comme le dit le président de la FEVAD :

« Le   problème   le   plus   gros   pour   les   sites   de   e-commerce   reste   la   profitabilité.   C’est   là   que  l’importance d’un Business Model de qualité entre en jeu. »

François Momboisse, FEVAD

Evolution du Business ModelLe problème de l’évolution du Business Model se pose ou se posera à toute les entreprises, grosses ou petites, récentes ou plus anciennes. En effet, il arrive toujours un moment où si l’on ne veut pas être dépassé par les autres il faut innover. Que ce soit via les produits ou via la manière de faire du commerce (vulgairement le Business Model). Pour ne pas rater ce virage (rappelons nous de l’exemple de Kodak), il faut être réactif. Hors, aucune entreprise interrogée ne pensent à cela. Tous pensent que leur Business Model doit d’abord faire ces preuves et perdurer avant d’être remis en question.

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« Je n’envisage pas de changer mon modèle actuel pour le moment, car il est tout récent et à encore  besoin de temps pour faire ses preuves. »

Yann Soilly, Gaïan

En association à cette idée, ils sont très peu à réaliser une réelle veille. La veille concerne surtout les grosses entreprises qui doivent réagir vite pour conserver leur place de leader. De plus, dans le domaine des nouvelles technologies et de l’e-business, et grâce à Internet les choses vont très vite. Il est donc devenu inutile de faire une pseudo veille. Elle ne devient intéressante que lorsqu’elle est poussée et donc coûteuse. Les jeunes entreprises se contentent donc de suivre les actualités via la toile.

« Enfin, au niveau de la veille, je n’en fais pas, et je n’en ai pas pour l’instant besoin. Bien sur je me  tiens au courant de ce qui se passe dans le domaine, par Twitter et internet en général, mais on ne  peut pas réellement dire que je fasse du Bench marketing. »

Yann Soilly, Gaïan

Business Model et innovationComme nous l’avons évoqué précédemment nous nous sommes rapidement rendu compte que les innovations de rupture étaient très rares et ne concernaient pas uniquement les produits/services. En effet, même si l’on pense téléphone, TV et Internet quand on pense innovations de rupture, il faut aussi compter avec low-cost, VAD, le jetable, le rechargeable… Au contact de nos dirigeants nous avons pu vérifier cette idée. En effet toutes les innovations mise en œuvre sont incrémentales (canne, lavage bio) ou au niveau de l’organisation, du Business Model (achats groupés, location entre particulier…).

« L’innovation principale  du  Business  Model  de   l’entreprise  se  situe  dans  sa  manière  de  diffuser  l’information. »Claude Surin, IDAct

« L’innovation principale du concept Gaian, c’est l’utilisation de produits sans tensioactif, la ‘’chimie  verte’’. »Yann Soilly, Gaïan

« Révolutionnaire je ne sais pas mais plus pratique que ce qui existe aujourd’hui c’est sûr. »Michel Kotlinski à propos de la canne multifonction

Peu importe le type d’entreprises et de dirigeants nous trouvons donc certains points de convergences dans les réponses aux questions touchant au Business Model. En effet, les dirigeants se regroupent souvent sur le concept, l’idée globale du Business Model. Cependant, comme nous l’avons dit, il y a autant de Business Model que d’entreprises et donc il y a forcément des points de divergences que nous allons voire maintenant.

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E. Points de divergence

Pour cette partie, nous n’allons pas nous focaliser sur les différences « d’application » du Business Model mais plutôt sur la conception de celui-ci, ce qu’il est en lui-même pour les entreprises. Et par ailleurs sont rapport avec l’innovation.

La diversité de la notion d’innovation Comme nous l’avons dit dans le dernier point commun entre les interviewés, les innovations sont pour la plupart incrémentales cependant, nous avons également dit qu’elles ne s’appliquaient pas qu’au produit. En effet, le premier point de divergence entre les entreprises concerne la base de leur innovation qui est également responsable de leur envie d’entreprendre.

Michel Kotlinski et Gaïan misent sur leurs produits : M.Kotlinski en offrant un produit n’existant pas encore et répondant à un besoin déjà couvert mais de manières plus évoluées et Gaïan proposant le même produit/service que les entreprises de nettoyage traditionnelles mais en jouant la carte du Bio.

E-loue et IDAct misent sur leur services : E-loue s’inspire d’une idée ayant échouée par le passée (mauvais timing ?) et la représente en la repensant, IDAct propose le même service que beaucoup d’agence de conseils ou de consultants mais avec une manière de travailler différente, plus humaine.

CityDeal mise sur son architecture de valeur : nous connaissons tous les « prix de groupes » et la force du nombre lorsqu’il s’agit de négocier les prix. CityDeal propose en quelque sorte de mettre en relation des gens ne se connaissant pas et leur propose divers produits/services à des prix négociés pour un groupe (même mieux négocié).

La mise en route du Business ModelNous avons vu que les jeunes entreprises cherchaient le meilleur Business Model en rapport avec leurs idées et que celui-ci pouvait mettre plusieurs mois à se dessiner et à se décider. Cependant les entreprises n’agissent pas toutes la même manière pendant ce laps de temps et même après avoir trouvé.

En effet, CityDeal avait trouvé son Business Model au moment du lancement du site. Cependant ce modèle est partiellement mis en place puisqu’il arrive à CityDeal de faire des opérations « à perte » qui sont en réalité des opérations marketing destinées à attirer des inscrits comme dernièrement les places de cinéma UGC à 1€.

Dans un autre style, E-loue a lancé sa plateforme de location avant même d’avoir trouvé son Business Model (plus particulièrement son équation de profit). Et encore aujourd’hui alors que tout est décidé, le site reste totalement gratuit à l’utilisation et aucun CA n’est dégagé. Le Business Model n’entrera en vigueur que lorsque la masse critique définie par les fondateurs sera atteinte (objectif : Mars 2011).

Le groupe IDAct quant à lui n’a pas trainé puisque lors de la création de l’entreprise tout était prêt et l’entreprise tournait déjà à sa « vitesse de croisière » au niveau de l’organisation, de la stratégie et du

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Business Model. Cela est peut-être grâce à l’expérience de son fondateur. Enfin, Michel Kotlinski qui est à l’origine de l’innovation ne souhaite pas développer son idée personnellement mais s’associer et n’a donc que vaguement réfléchi sur la manière de commercialiser l’objet.

L’importance du Business ModelSi tous les interviewés s’accordent à dire que les éléments qui composent le Business Model sont important et conditionne la réussite de l’entreprise. Tous ne sont pas convaincus par cette notion. En effet elle reste d’une part assez vague mais d’autres part, et cela est peut-être plus vrai pour des personnes plus expérimentées, ils font la judicieuse remarque que les entreprises n’ont pas attendu de maîtriser le concept de Business Model pour faire des bénéfices et être profitables.

En effet, alors que des jeunes entrepreneurs comme E-loue ou alors des jeunes employés comme Damien Roué de CityDeal semblent très concernés par leur Business Model (E-loue a travaillé plusieurs mois dessus et l’a incorporé à son Business Plan pour la levée de fond), Claude Surin le fondateur d’IDAct et François Momboisse le président de la FEVAD ne semblait pas obnubilé par cette notion. Ce dernier commente d’ailleurs que même dans l’e-business beaucoup de sites se créent sans réellement de Business Model :

«  Ils ont vu qu’il y avait un business à faire sur Internet, ils se sont créés vite et je ne sais pas s’ils ont  pu faire un Business Model vraiment à 5 ou 10 ans ce n’est pas évident. »François Momboisse, Président de la FEVAD

Ce constat a été fait après le succès d’Amazon qui a suscité des vocations.

Nous constatons donc à travers ces interviews que s’il y a des points de convergence chez les acteurs du monde économique d’aujourd’hui à propos du Business Model et de sa relation à l’innovation il y a également des points de divergences non négligeables. Nous reviendrons d’ailleurs par la suite sur la raison de ces divergences et sur une en particulier qui est l’utilité du Business Model et par extension les perspectives d’avenir de cette notion.

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3. Analyse et critiques personnelles

A. Introduction sur la divergence/convergence globale observée entre théorie et pratique

De manière générale, nous avons remarqué qu’il n’était pas facile pour les entreprises, qu’elles soient récentes ou déjà bien implantées, de déterminer quel était leur Business Model. Plus complexe encore était de savoir si les innovations technologiques récentes dans leur branche, avaient donné lieu à des changements structurels ou fonctionnels au sein de leur entreprise.

Ayant axé notre réflexion sur les Business Model en cas d’innovation technologique de rupture, notre premier constat fût qu’il existe à l’heure actuelle très peu d’entreprises à l’origine de telles innovations, si l’on prend la définition stricto sensu. Force nous a également été de constater que ces innovations majeures étaient souvent réservées aux grands groupes à forte influence et gros budget R&D, plutôt qu’aux petits inventeurs, qui, même si ils ont les bonnes idées, n’ont pas le budget ni les moyens nécessaires pour mettre en place et commercialiser un nouveau produit.

Qui plus est, on remarque qu’innovation de rupture ne signifie pas toujours position dominante sur le marché, du moins pas éternellement. Nombreux sont les exemples où les pionniers dans un domaine ont acquis suffisamment de poids et de puissance pour s’assurer les « jours heureux » de leur innovation, mais nombreux sont aussi ceux qui ont été à l’origine d’un nouveau concept/produit très prometteur et donc leader sur le marché un temps, mais qui ont vite perdu cette position, n’ayant pas su correctement adapter leur Business Model et leur entreprise à l’arrivée de cette innovation.

Enfin, notre réflexion nous a conduits à penser que c’était généralement la structure, l’architecture et l’objectif général poursuivi par l’entreprise qui était à l’origine de l’innovation plutôt que l’inverse. Notre étude terrain semble confirmer qu’il existe des Business Model propices aux innovations, plus particulièrement aujourd’hui dans les e-business, mais que l’innovation de rupture dans l’entreprise ou celle du concurrent, n’est pas toujours suivie d’une refonte totale de la structure des entreprises concernées.

Trop peu conscientes de leur Business Model, les grands groupes sont plutôt longs et réticents à réagir, alors que les plus petites structures, plus souples mais moins solides financièrement, hésitent à changer de modèle, le leur n’ayant pas encore eu le temps de faire ses preuves.

Nous allons ainsi approfondir toutes ces hypothèses dans la partie suivante en confrontant notre réflexion théorique sur les Business Model et la génération de valeur, et nos observations terrains sur ce qu’il en est réellement des entreprises à innovation de rupture.

B. La confrontation entre terrain et théorie

Comme nous l’avons précisé précédemment, notre étude terrain a été un peu plus complexe à mener que nous ne l’imaginions au départ. Cela étant dû principalement à deux choses :

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Tout d’abord, il n’y a que très peu d’innovations de rupture, même au niveau des hautes technologies, où les innovations sont le plus souvent incrémentales (innovations d’amélioration).

Ensuite, les entreprises, même créées récemment, ne sont pas toujours conscientes de leur Business Model (nous ne nions pas ici l’existence de celui-ci, mais le fait que l’entrepreneur n’en soit pas complètement conscient). On remarque que cette connaissance du Business Model est plus étendue chez les jeunes entrepreneurs, et plus particulièrement dans le domaine de l’e-business, que chez les autres dirigeants d’entreprises.

Le concept de Business Model émergeant depuis seulement une quinzaine d’années, il ne fait pas encore parti du vocabulaire courant de tous les dirigeants d’entreprises. D’où notre difficulté à poser les bonnes questions aux dirigeants ayant mis sur le marché des innovations ces dernières années, mais sans créer de nouvelles entreprises/structures.

Notre étude du terrain se déroulera en 3 parties :

Grandes et petites structures, à qui sert le Business Model ? Qui connait le sien ? Qui le modifie et l’adapte ?

L’innovation de rupture apporte-t-elle un avantage concurrentiel durable ? Doit-on modifier le Business Model ou la stratégie d’une entreprise en cas d’innovation de rupture dans le secteur ? Aucun ou les deux ? Y-a-t-il un Business Model adapté aux innovations de rupture ?

Le Business Model et la création de valeur, est-ce aussi efficace que la littérature le prétend ? Est-il primordial pour une entreprise de connaitre son Business Model ? Sous ces termes ou quelque soit l’appellation utilisée ?

Durant ces 3 parties nous vous exposerons nos constats sur les divergences et convergences entre ce que nous avions pu lire et trouver dans les différentes théories, et ce que nous avons eu l’occasion d’observer sur le terrain.

Grandes et petites structures, à qui sert le Business Model ? Qui connait le sien ? Qui le modifie et l’adapte ?Nous allons commencer par un bref rappel de ce que nous avions pu observer dans la littérature au sujet des Business Model en fonction de la structure de l’entreprise.

Nous l’avons vu précédemment, en 1965, Ansoff raisonnait déjà sur la stratégie d’une entreprise et laissait entrevoir des débuts de Business Model. Mais c’est Andrews (1965) qui sera le premier théoricien à distinguer stratégie et Business Model (Business Strategy Vs Corporate Strategy).

Depuis lors, la question de l’application d’un Business Model selon la taille est un facteur qui n’a été pris en compte que selon le triptyque de Laurence Lehmann-Ortega. En décrivant l’architecture de valeur, qu’elle soit interne à l’entreprise (l’ensemble de tâches à réaliser afin de livrer la proposition de valeur au client), ou externe (les liens fournisseurs, les réseaux d’entreprises…). En effet, la taille de la structure impacte la mise en œuvre des ressources et aptitudes organisationnelles, qui peuvent grandement varier selon le nombre de collaborateurs, de clients ou même de la puissance financière de la firme.

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En considérant la quasi-inexistence de travaux sur ce point particulier, nous pouvons donc prétendre que la taille n’est pas un facteur discriminant dans l’application d’un business model efficace. Grande ou petite, l’entreprise doit simplement gérer des niveaux différents de business model, et ce, même si elles n’en sont pas pleinement conscients.

Concernant les entreprises plus au fait sur ce concept, c’est à dite qui on complètement fondé leur entreprise et leur avantage concurrentiel sur leur capacité d’innovation ou d’adaptation de leur business model, nous constatons qu’elles sont parmi les plus performantes (par exemple Ryanair ou Apple pour ne citer qu’elles) et qu’elles sont souvent présentées dans les médias telles des success-stories ou des modèles de réussite.

Il convient toutefois de préciser qu’il est plus facile de modifier le produit, la façon de le produire, de le distribuer ou de le vendre selon la petitesse de la structure et surtout en fonction de sa jeunesse. Dans les premiers mois de vie de la création d’une entreprise, il est important d’être particulièrement à l’écoute de ses clients ou utilisateurs afin de confronter son offre aux besoins du marché. Les premiers temps sont déterminants car c’est la période ou jamais pour apporter des modifications importantes à l’offre.

Cette flexibilité est également fonction de la personnalité du décideur. Si celui-ci sait se remettre en question, et accepte les challenges en mettant son entreprise au défi d’être la plus compétitive sur un aspect particulier, il sera alors plus aisé pour celle-ci de modifier ses attributs afin de choisir le levier adapté.

Le Business Model est l’affaire de peu de personnes dans une entreprise. Etant une donnée stratégique, il revient au comité stratégique (quand il existe) de donner les lignes directrices de l’entreprise dans les 5 à 10 prochaines années. L’innovation du business model – mais aussi des modifications qui peuvent lui être apportées - fait donc partie des priorités des dirigeants d’entreprises.

Selon une étude, près de 70 % des dirigeants sont impliqués dans l’innovation du business model de leur entreprise2. Ils peuvent souhaiter modifier ce modèle suite à des difficultés éprouvées à assurer leur avantage concurrentiel sur la seule base de leurs produits et services. C'est-à-dire que la façon dont l’entreprise produit peut prendre autant d’importance que ce qu’elle produit.

Les changements de modèle apparaissent aussi grâce à la technologie qui leur permet d’atteindre des marchés de niche. Les processus sont de plus en plus liés à Internet et de nouveaux canaux de distribution voient le jour. Pour rester compétitives dans cet environnement dynamique, les entreprises doivent adopter une approche plus prédictive, et donc disposer immédiatement des informations dont elles ont besoin. Les entreprises qui réussiront le mieux sont celles qui observent d’autres secteurs et segments de marché à la recherche de concepts et de business model qui pourraient transformer leur propre secteur d’activité.

Pour adapter leur business model, les entreprises peuvent avoir recours à des intervenants extérieurs : cabinet de conseil, consultant en stratégie, etc…

Ces professionnels apportent un œil neuf et une vision critique de la situation actuelle en toute objectivité. La remise en cause est alors plus facilement justifiée. Une équipe de management de 2 Source : IBM Global CFO Study 2008

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projet peut-être spécialement créée pour l’occasion. Le rôle de support dans le cercle de décideurs (par exemple le Conseil d’Administration) revêt alors un rôle crucial afin de motiver l’ensemble des collaborateurs à accompagner le changement décidé. Ces modifications dans l’organisation peuvent se traduire par certains freins tels que la mobilité du personnel, le changement de perception par le client, etc. Il est donc une fois encore plus aisé de mettre en place ces changements dans une petite structure.

Enfin, une dernière résistance au changement peut se présenter suite à la complexification des relations interentreprises : les alliances, accords ou partenariats ont contribué à faire émerger des méta-réseaux entre des entreprises (comme étudiés par Ben Haj Youssef et Ouziel, 2002).Les modifications de Business Model n’impacte plus que l’entreprise mais tout l’écosystème d’affaires

L’innovation de rupture apporte-t-elle un avantage concurrentiel durable ?

Doit-on modifier le Business Model ou la stratégie d’une entreprise en cas d’innovation de rupture dans le secteur ? Aucun ou les deux ?

Y-a-t-il un Business Model adapté aux innovations de rupture ?

Avant de répondre à toutes ces questions, il serait judicieux de refaire un point rapide sur l’innovation de rupture telle que nous l’avons définie. Replongeons-nous une fois encore dans la littérature pour voir ce qui est dit sur les innovations de ruptures et leur impact sur le business d’une entreprise et de ses concurrents. Pour rappel, nous utilisons la définition de l’innovation technologique de rupture selon l’OCDE:

« Une innovation technologique qui porte sur un produit ou un service et qui finit par remplacer une technologie dominante sur un marché. […] »

Si l’on suit cette définition, on peut comprendre pourquoi il existe si peu d’innovation de rupture, et pourquoi les entreprises cherchent toujours à en être à l’origine, mais est-ce que cela les sert réellement ?

L’innovation de rupture apporte-t-elle un avantage concurrentiel durable ?

Le concept d’innovation de rupture est la mise sur le marché de produits ou services radicalement nouveaux ; Ce qui était jusqu’à récemment réservé à quelques grandes entreprises innovantes ou à des PME start-up. Le propre de l’innovation de rupture est de remettre en cause le modèle mental accepté par l’ensemble des acteurs d’un marché. Ce renversement est uniquement possible sur des marchés en perpétuel changement. Par exemple, les nouvelles technologies ouvrent la porte à de nouvelles applications, comme pour l’Ipod et l’Iphone. Les changements de société impactent également les priorités et besoins des clients. Les préoccupations politico-économiques et environnementales modifient les comportements. L’innovation de rupture se décline donc ainsi :

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• Les besoins des clients : l’innovation de rupture satisfait des besoins latents qui n’étaient pas clairement exprimés jusqu’alors. • Le modèle économique : l’innovation repose sur un nouveau modèle économique apportant un meilleur rapport valeur / coût. • La structure du secteur : l’innovation propose une relation nouvelle entre les acteurs du marché : fournisseurs, partenaires et canaux de distribution.

Selon Benoît Sarazin- consultant en Innovation- dans son livre Misez sur les ruptures du marché  : 20  histoires   d’innovation   réussies, l’innovation technologique de rupture amènerait avec elle un changement de Business Model. La proposition de valeur et l’architecture de valeur serait complètement modifiées pour répondre aux nouveaux besoins clients, ce qui entrainerait une rupture complète dans l’équation de profit.

Ce cadre théorique étant établi, il faut également noter que l’on dénombre seulement quelques innovations technologiques de rupture par an pour ne pas dire par décennie. La télévision en fut une à son époque, l’appareil photo numérique également il y a quelques années, et aujourd’hui plus particulièrement, le Smart phone. Si l’on étend notre champ de recherche aux innovations de rupture dans tous les domaines, alors on peut remarquer que certaines entreprises ont été instigatrices de nouveaux modes de gestions et de nouveaux modèles d’affaires ces dernières années : telles que les Low-Cost, ou les entreprises de vente d’High Tech dématérialisées (pas de magasin physique). Ces modèles ont complètement bouleversés la donne et ces entreprises sont encore bien souvent aujourd’hui les leaders dans leur domaine. La proposition de valeur change, mais également l’équation de profit. En effet certaines entreprises génèrent la plus grande partie de leur revenu par la publicité, ou la vente et la location de leur infrastructure à des cibles complètements différentes de leur cible de base. Le meilleur exemple à l’heure actuelle serait Google, qui a bâtit son empire grâce aux revenus publicitaires.

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Lors de nos entretiens avec des dirigeants d’entreprises, nous avons pu constater que selon les domaines et selon les expériences personnelles de chacun, il était plus ou moins difficile de mettre en place des innovations de rupture. Une fois mise en place, celles-ci pouvaient s’avéraient être un gros avantage ou au contraire se retournait très vite contre son promoteur.

Michel Kotlinski, l’inventeur de la canne Multifonction, nous a avoué qu’après son premier échec dans une autre entreprise de construction de dôme, il avait peur qu’une fois encore la malchance ne l’empêche d’aller jusqu’au bout de son projet. Il rencontre encore aujourd’hui beaucoup de difficulté à faire adhérer les gens à son produit, car ces derniers ont peur de la nouveauté et que le produit ne soient pas bien accepté par les clients. Pour lui, son produit présente tous les avantages possibles pour ce type de produits et le succès est garanti, mais pour les investisseurs, engager des fonds auprès d’une personne de son âge, ayant déjà dû mettre une fois la clé sous la porte, n’est pas une chose aisée.

D’autres encore comme Yann Soilly de Gaian, l’entreprise de nettoyage Bio, se situant sur un marché prometteur mais nouveau, ont des difficultés à trouver de nouveaux clients et à mettre en place ces nouveaux reflexes pour « le consommateur ».

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"Le fait  de travailler  dans  le  Bio,  un domaine de plus  en plus  à  la  mode,  est  certainement  mon  avantage principal." Y.Soilly

"Le fait de me situer sur le marché du bio a vraiment fait la différence pour trouver mes premiers  clients. Et même si ils sont très peu nombreux pour le moment, j’espère que le bouche à oreille va me  permettre d’accroitre rapidement mon activité." Y.Soilly

Son entreprise est en avance complète sur tous ses concurrents et bientôt une loi devrait être édictée en sa faveur, mais en attendant, tant que le changement n’est pas « forcé », il n’est pas appliqué, que cela représente un surcoût ou non. Simplement car cela implique un changement d’habitude et induit une réappropriation du nouveau modèle, les gens sont plutôt réticents à faire des choix particulièrement en France.

On remarque ainsi que sur le terrain les choses sont un peu plus corsées que dans les réflexions stratégiques. Certes, certaines grosses entreprises peuvent mettre en place des innovations majeures et garder leur position de monopole pendant un certain temps, mais pour les plus petites structures, se lancer dans un business portant sur les innovations est souvent un risque majeur pour elles. Cela peut être un tremplin énorme comme l’entrée d’un gouffre. Il est impossible de nier que l’innovation apporte un avantage concurrentiel majeur pour une entreprise (selon les critères de Porter), mais cet avantage concurrentiel n’est que temporaire.

La seule chose qui se vérifie dans tous les cas, c’est que cette innovation, si elle est correctement exploitée, peut permettre d’acquérir suffisamment de puissance pour se lancer dans de nouvelles recherches et ainsi commercialiser en continu de nouvelles innovations, c’est le cas aujourd’hui d’Apple.

Un avantage concurrentiel ne peut être conservé indéfiniment, ou seulement au prix de lourds investissements financiers en communication et distribution. Selon les critères de consommation actuels, il est bien plus profitable d’innover sans cesse et de ne pas s’accrocher trop longtemps à un produit, qui ne sera plus utilisé dans quelques années. Un exemple pertinent que l’on peut citer est celui de Kodak, qui malgré son avantage concurrentiel évident dans les années 1980’, a vu son empire balayé d’un seul coup avec l’apparition de la photographie numérique.

Ce terme d’avantage concurrentiel nous renvoi plus précisément à l’idée de stratégie d’entreprise, mais qu’en est-il des changements au niveau du Business Model, lorsque l’on travaille sur des produits/services innovants. Une innovation de rupture est-elle nécessairement à l’origine de changement du Business Model ?

Doit-on modifier le Business Model ou la stratégie d’une entreprise en cas d’innovation de rupture dans le secteur ? Aucun ou les deux ? Y-a-t-il un Business Model adapté aux innovations de rupture ?

On vient de le voir, mettre en place une innovation de rupture n’est pas une chose facile. Acquérir un avantage concurrentiel n’est également pas simple. Faire les bons choix stratégiques et au niveau du

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Business Model d’une entreprise est quelque chose qui demande du temps et de la réflexion, et qui ne peut-être modifié facilement. On pourrait donc se dire que changer son Business Model est impossible une fois l’entreprise mise en place. Cette partie pose deux questions primordiales et complémentaires pour une entreprise :

- Une innovation de rupture induit-elle un bouleversement du Business Model ou de la stratégie d’une entreprise ?

- Mettre en place un business Model particulier est-il en soit une forme d’innovation ?

Lors de nos recherches sur les Business Model, nous avons souvent pu observer les termes « d’adaptation du Business Model » ou de « changement de Business Model », ce qui nous amènerait à penser que bien que difficile, un changement serait réalisable. Selon les différentes théories, on retrouve le Business Model comme « dépeignant le contenu, la structure et le mode de gouvernance des transactions qui sont mises en place pour créer de la valeur à travers l’exploitation d’opportunités d’affaire » (Amit et Zott 2001). On comprend que l’on puisse changer la proposition de valeur (offre au client), mais comment et pourquoi changer l’architecture de valeur (la manière dont la valeur est crée dans l’entreprise) et comment cela impacte l’équation des profits (d’où arrive et où va l’argent) ?

Selon les différentes théories, un même Business Model est souvent reproduit X fois par les entreprises du même secteur. Mais cela devient intéressant en cas de création d’un nouveau secteur, secteur créé en fonction d’un nouveau besoin. Selon les différents auteurs sur les Business Model, si une entreprise est à l’origine d’une innovation majeure, alors elle créera son propre modèle et générera des profits d’une manière qui lui sera propre. Les 3 composantes du Business Model devraient alors être différentes de celles des modèles précédents, et proposer un nouveau modèle qui sera repris seulement par les futurs concurrents directs du secteur.

Au niveau stratégique, les grandes lignes de conduite d’une entreprise sont définies dès le départ et ne changent que si la situation présente des risques. C’est du moins ce que l’on peut voir dans la littérature. Notre recherche primaire nous a amené à conclure à un changement de modèle d’affaires en cas d’innovation majeure, chez le concurrent aussi bien que l’entreprise innovante, mais qu’en est-il sur le terrain ? Les entreprises peuvent-elles toutes changer du jour au lendemain suite à l’apparition d’un nouveau modèle ?

****

Lors de notre étude sur le terrain, le démenti a presque été immédiat. Sur la demi douzaine d’interviews que nous avons réalisé, sur des entreprises présélectionnées, le premier constat fût que les dirigeants ne savaient pas précisément ce qu’est un Business Model. Et même plus, la récente majorité de ces entreprises n’avaient pas conscience qu’elles avaient un Business Model. Beaucoup d’entrepreneurs s’étaient contentés de suivre les modèles déjà mis en place. En creusant un peu plus notre réflexion, nous avons cependant vu que si les termes manquaient, le modèle était bien en place, réfléchi et souvent particulier. Chaque entreprise avait son infrastructure et semblait être en adéquation avec son secteur d’activité.

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Malgré le premier constat, venant un peu à contrepied de la théorie, nous avons pu voir que certaines entreprises créaient des Business Models complètement nouveaux si elles voulaient promulguer une architecture ou un produit nouveau.

L’entreprise Citydeal de Damien Roué propose ainsi un concept complètement novateur et se place comme une entreprise vraiment à part spécialisée dans le couponing (achat groupé revente). Partant d’une idée simple : « le consommateur est en perpétuelle recherche de bons plans, et les vendeurs d’un plus important remplissage de leur carnet de commande » les mettre en relation –avec une commission au passage- pourrait être une bonne relation win-win pour tous. Avec cette idée de base, l’entreprise a été mise en place et commence aujourd’hui à susciter le buzz autour d’elle.

E-loue a également été créée suite à une innovation majeure des modes de consommation, qui se veulent mieux utilisés et plus rentables. En ce sens, il lui était nécessaire de proposer sur son site non seulement un moyen de consommation responsable, mais également un moyen de rentabiliser les investissements de chacun.

"La crise économique a rendu sa valeur à l’objet en tant qu’objet utile pour ce à quoi il sert et non  pour sa possession. De plus ce système permet de faire des économies aussi bien en tant que loueur  qu’en tant que propriétaire."A. Woog

La théorie qui édicte que le premier sur le marché ne soit pas forcément le meilleur indéfiniment, s’applique pour E-Loue. Le E-commerce présente de nombreux avantages, mais le modèle peut très rapidement être copié ou dupliqué.

Ces innovations de modèle d’affaires sont nombreuses sur la toile, mais restent marginales en dehors, comme si pour les entreprises traditionnelles, mettre en place de telles structures était impossible. Seuls certains modèles pourraient persister et être suivi, les autres étant voués à l’échec ou étant simplement des déclinaisons du modèle de base.

Les grands succès comme ceux des modèles Low Cost de Easy Jet, d’achat et de revente de masse sur internet comme Amazon, les sites de rencontres par affinité sur internet ne sont pas en reste avec Meetic Affinity, Dell, la 3G et l’internet 2.0 sont autant d’exemples de Business Model particuliers développés spécialement pour soutenir une stratégie d’entreprise différente et une autre vision de la manière de générer du profit. (voir bibliographie).

Bien souvent, on voit que c’est l’innovation qui est à l’origine d’un nouveau modèle et non l’inverse. Cependant, grâce à nos études sur le terrain et aux différents articles que l’on a pu trouver sur le sujet, sur internet notamment, on voit que les nouveaux modèles sont parfois l’innovation en elle-même.

On parle d’innovation stratégique comme d’une stratégie radicalement différente, qui consiste à changer les règles du jeu et ainsi à concevoir un nouveau business model. Un business model se composant de trois parties selon Lehmann-Ortega (la proposition de valeur au client, l’architecture de valeur, ainsi que le revenue model), nous avons identifié deux sources majeures permettant de mettre à jour des innovations stratégiques aboutissant à un revenue model profitable : la modification radicale de la valeur pour le client et celle de la chaîne de valeur. La stratégie perturbatrice est la modification complète de l’un des deux axes (quel qu’il soit), réservant le terme

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de rupture, impliquant une intensité plus forte, à la modification radicale des deux axes. (Source: les  deux formes de l’innovation stratégique, Laurence Lehmann-Ortega).

Une innovation n’induit pas forcément un changement, comme on peut le voir, l’avènement des achats en ligne n’a pas encore fait fermer les grandes surfaces telles Auchan Carrefour et autres, ils ont créé des sites en ligne, mais la plupart des ventes s’effectuent toujours en magasin, et le modèle de vente ne change pas de celui d’il y a dix ans. Toute entreprise sur un secteur en mutation se doit d’observer ses concurrents et de proposer des solutions adaptées en cas de mouvement de ceux-ci, mais il n’est pas nécessairement utile de revoir son Business Model si le risque de disparaitre n’est pas inexistant. Par exemple, la structure des entreprises peut permettre plus facilement de créer des innovations ou du moins d'y réagir vite, la FNAC a ainsi lancé une application TickNlive sur Iphone pour acheter les places de concert...Cela influe fortement sur l’avantage concurrentiel, mais pas forcément sur notre proposition de valeur, ce qui signifie que la principale variante concernée est la stratégie et non le Business Model. L’apparition d’un nouveau modèle ne fait pas toujours disparaitre le précédent : les restaurants subsistent encore et toujours face aux fastfoods.

Enfin, la mise en place de nouveaux Business Model sera dans certains cas l’innovation de rupture dont nous parlions précédemment et c’est elle qui sera sujet à copie. Tout comme un produit, un modèle d’entreprise qui réussit peut-être copié et adapté par la concurrence. Un Business Model peut être mis en place suite à l’apparition d’innovation, mais il n’existe pas de Business Model type qui puisse réellement s’adapter à toute innovation de rupture.

Au moins sur ce point théorie et pratique s’accordent, il n’existe pas de Business Model universel.

Il faut réunir beaucoup de paramètres pour qu’un nouveau business Model soit efficace: timing, mentalité des potentiels clients, situation économique favorable au produit, distribution et communication, investisseurs, mais aussi une part de chance…

Le Business Model et la création de valeur, est-ce aussi efficace que la littérature le prétend ?

Est-il primordial pour une entreprise de connaitre son Business Model ? Sous ces termes ou quelque soit l’appellation utilisée ?

Depuis quelques années, de plus en plus d’auteurs débattent autour du terme de Business Model, terme qui semble être de plus en plus apprécié en particulier par les entrepreneurs. Cependant, le concept ne fait pas encore l’unanimité et de grands auteurs comme Porter sont encore en désaccord avec cette idée. Bien que dénigré par les chercheurs, le nombre d’occurrences du terme sur internet dépasse les 100 000 en 2010 sur le moteur de recherche Google. Alors est-il vraiment primordial pour les entrepreneurs d’aujourd’hui de savoir ce qu’est un Business Model ?

La réponse est oui et non. Nous allons expliquer ici en quoi il est important de savoir ce que c’est, mais pourquoi il n’est pas nécessaire à tous de connaitre les termes techniques.

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Nous partons du constat révélé par les interviews que les dirigeants rencontrés ne savaient pas clairement répondre à la question du Business Model. En effet, en leur posant la question brutalement ils ne savent pas trop quoi répondre mais savent tout de même que la notion porte sur la création de valeur. En revanche en posant les questions soulevées par le Business Model une par une, on se rencontre qu’ils sont très au fait de ces aspects de leurs entreprises. Il est donc légitime de se poser la question de l’utilité réelle du Business Model que les entreprises n’ont pas attendu pour réaliser des profits.

Que ce soit le petit commerçant du coin ou bien la General Motors (plus vielle entreprise côté en bourse), ils savent très bien comment dégager des bénéfices et comment s’organisent leurs entreprises autour de cette recherche de profitabilité. Qu’elles soient formalisées ou non, leurs chaînes de valeur leur sont connues.

En prenant ce point de vue nous pouvons facilement penser que le Business Model n’est qu’une facétie de plus apportée par le e-business et la mondialisation. Un de ces termes à la mode qui disparaîtra aussi vite qu’il est apparu une fois qu’un nouveau sera lancé et relayé par des médias. De plus les entreprises disposent déjà de suffisamment d’outils pour les caractériser.

Cependant en y regardant d’un peu plus près on se rend compte que bien souvent il est très utile d’expliciter les choses. Preuve en est l’adoption par tous (ou presque) du Business Plan lors de la création d’entreprise par exemple. C’est aujourd’hui la référence pour un banquier d’affaires en charge d’une demande de financement. Cette notion de Business Model pourrait être très utile dans un cadre similaire à celui du Business Plan : pour présenter rapidement et simplement une entreprise et son fonctionnement à des personnes extérieures.

C’est ce que prétend d’ailleurs FluidMinds et Patrick Stähler qui a été un des premiers à publié un modèle applicable à la réalité au concept de Business Model. Car en effet, pour être utile, le Business Model se doit de changer de dimension et venir se frotter à la réalité plutôt que de se cantonner à une notion académique. Les quelques études trouvées sur Internet cherchant à décrire les Business Models de certaines entreprises phares sont de bons premiers pas vers cet empirisme nécessaire.

Pour vulgariser l’idée, il est plus simple de demander une chemise dans un magasin qu’un produit textile pour le haut du corps, qui se boutonne et qui est en coton. On se rend alors bien compte de l’intérêt de mettre des mots que tout le monde comprend sur des choses et des concepts. Après cinquante ans de recherche théorique il est donc temps de poser des barrières à cette notion afin qu’elle puisse être comprise par tous avec le même sens. Une fois qu’une définition sera acceptée (ce qui n’empêchera pas d’avoir des auteurs allant dans un autre sens et heureusement) l’utilité du Business Model pourra alors se développer et servir les intérêts de toutes les entreprises dans leur recherche de rentabilité. Nous proposerons par la suite une idée applicable de ce qui pourrait se cacher derrière le terme Business Model.

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C. Les idées originales, apports et réflexions critiques sur le sujet

La première partie de ce mémoire nous a permis d’observer les nombreuses théories existantes sur le concept de Business Model, ainsi que sur les différentes formes que peuvent revêtir l’innovation. Grâce à la partie précédente nous avons également pu voir les multiples impacts que l’innovation peut avoir sur un Business Model.

Cependant, il reste des zones d’ombres concernant le concept Business Model en lui-même, ce qui expliquerait son manque de légitimité au niveau scientifique. Par exemple comment le mettre en place ? Quels outils utiliser ? Qui doit penser ou repenser son Business Model ?

Dans cette partie nous allons essayer de vous apporter notre éclairage sur ce que nous avons pu découvrir lors de nos recherches sur les Business Model dans un contexte d’innovation.

Un outil de gestion indispensable pour les entrepreneurs des NTIC

On le sait aujourd’hui, toute personne souhaitant présenter son projet de création d’entreprise à une banque pour y lever des fonds, doit échafauder un Business Plan et structurer ses futures dépenses pour les 3 prochaines années en moyenne. La banque cherche par ce moyen à savoir ce qu’elle devra débourser et si le projet sera à même de la rembourser.

Nous pensons qu’en plus du Business Plan, les entrepreneurs devraient présenter, en particulier pour les e-business, un Business Model, qui permettrait à la banque de mieux cerner les mécanismes de production de valeur de la future entreprise, et ainsi leur donnerait un peu plus de confiance pour soutenir le projet.

Les différents chercheurs travaillant sur le Business Model, essaient de le décrire comme un outil, mais n’en donnent jamais une utilité fonctionnelle. Ainsi nous pensons que, utilisé pour justifier des dépenses dans les phases de créations d’entreprises ou de second tour de table de levé de fonds, le Business Model pourrait devenir très vite un outil indispensable pour justifier un financement.

Aussi, en réfléchissant et reformulant sous un format simple (schémas) les 3 variables du Business Model (proposition de valeur, architecture de valeur et équation de profit), toute entreprise, peu importe le domaine d’activité, pourrait avoir une vision intermédiaire (méso) de son entreprise, et non plus seulement une vision globale (niveau macro/stratégie) et une vision micro (opérationnel).

Les entreprises ne sont pas selon nous assez conscientes du potentiel du Business Model comme outil de gestion, et se fit trop à la stratégie. En complément de celle-ci, le Business Model pourrait aider une entreprise à générer plus de rentabilité et avoir des objectifs mieux définis.

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Un manque de consensus chez les chercheurs mais pas dans les entreprises ?

Nous l’avons déjà vu, le concept de Business Model étant encore tout jeune, il est soumis à de nombreuses controverses et n’est pas encore doté d’une définition « officielle » dans les revues scientifiques ou dans les magazines spécialisés.

Malgré cela, nos observations sur le terrain et la lecture de plusieurs articles sur Internet nous ont permis de dégager une conclusion un peu différente et pour le moins étonnante. Avec, nous l’avons vu, plus de 100 000 occurrences sur Internet en 2010, le terme de Business Model est devenu un réel phénomène dans le monde des affaires, et chacun propose sa propre définition du concept. C’est la notre point clé de réflexion :

Il existe autant de définitions du Business Model qu’il existe de Business Model en eux-mêmes.

Si les descriptions diffèrent d’un site à l’autre, c’est que le modèle n’est jamais le même, mais il recoupe toujours les mêmes choses :

Ce qui est offert par l’entreprise Ce que celle-ci reçoit en contrepartie Comment tout cela est-il fait

Ce modèle sous-entend bien plus de transparence que pour les entreprises traditionnelles, mais cela est simple à réaliser pour les entreprises du net. Il reprend l’idée du Business Model de manière générale comme dans le modèle de Demil et Lecocq (voir partie 1) « Le Business Model d’une organisation est l’ensemble de choix qu’elle fait pour générer des revenus. »

Nous avons également pensé et discuté avec nos interviewés sur la possibilité de mettre en place un site internet du type www.Business-Model.com ou chacun pourrait donner son avis et sa propre définition du terme, ce qui pourrait donner une bonne base de données pour les recherches à venir.

Peut-on créer son Business Model si l’on n’est pas expert en la matière ?

Notre première remarque lorsque nous avons commencé à travailler sur le sujet en Octobre, fût de se dire que le concept de Business Model devait certainement être cantonné à une élite de chercheurs en management et stratégie d’entreprise. Suite à nos lectures et recherches, nous avons vu que ce n’était pas du tout le cas et que le terme était de plus en plus populaire et le concept vulgarisé. Mais ce que nous avons noté dans un troisième temps, c’est que les gens qui souhaitaient réaliser le Business Model de leur entreprise ne savaient absolument pas comment faire. Et pour cause, aucune indication précise n’est fournie dans les articles scientifiques quant à la mise en place de ce Business Model.

Tous les scientifiques donnent une définition du terme mais pas une mise en application. A l’opposé, ce que nous avons pu constater sur le terrain, c’est que les dirigeants d’entreprises peuvent nous

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donner une description précise et concise de leur Business Model, mais pas de définition précise de ce que c’est. Ils savent répondre aux questions que soulève le Business Model: comment créez vous de la valeur, comment la rentabilisez vous etc., mais ne répondent pas forcément de la même manière si on leur demande brutalement leur Business Model. C’est d’ailleurs pour cette raison que lors de nos entretiens nous avons porté une attention particulière à la formulation des questions, pour que tous puissent y répondre et en même temps se rendre compte qu’ils n’étaient pas si loin d’avoir mis en place leur propre Business Model.

Le fait qu'il n'y est pas encore de protocole académique pour mettre en œuvre son Business Model n'empêche pas les entrepreneurs de le faire. C'est ainsi que l'on peut constater qu'il n'est pas nécessaire de connaître la notion pour en connaître les tenants et les aboutissants.

Un concept qu’il ne faut pas généraliser

Dans un premier temps cantonné au e-business, les chercheurs ont vite eu le désir d’étendre le concept à tous les domaines d’activité.

Certes le modèle est extensible jusqu'à un certain point, mais d’après nos observations et questionnements sur les différents aspect du concept, nous en sommes arrivés à la conclusion que toute entreprise ne devait pas obligatoirement définir sur le papier et de manière précise son Business Model, car il est déjà clairement implanté de manière tacite dans les fondements de l’entreprise.

Ainsi, selon la taille et le secteur d’activité, la segmentation et répartition des revenus, une entreprise trouvera ou non la nécessité de se questionner sur son Business Model.

D. Notre proposition de Petit Business Model d’innovation

Nos travaux ce sont orientés dès le départ vers les Business Model et les innovations de rupture. Il est donc logique que le modèle que nous allons vous proposer maintenant soit en adéquation avec ces 2 concepts. Nous l’avons vu, souligné et répété, ce qui manque le plus au Business Model aujourd’hui, c’est une application pratique réalisable et simple pour les entreprises.

Notre modèle sera de ce fait une présentation décrivant les étapes pour mettre en place un Business Model, dans le cas d’une innovation majeure par l’entreprise. Ce modèle s’adressera aux entreprises en général et ne concernera pas un domaine d’activité particulier. Durant cet exercice, nous allons utiliser nos connaissances théoriques et nos découvertes sur le terrain pour présenter un modèle le plus concret et le plus précis possible.

Pour appuyer notre démonstration, nous allons nous baser sur les travaux de Lehmann-Ortega et Stähler (évoqué précédemment en 1D) ; et enrichir celui-ci avec nos propres données et une dimension un peu plus terrain. Voici le modèle que nous souhaitons mettre en valeur :

La proposition de valeur présentant le marché et le produit/service

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L’architecture de valeur qui regroupe les ressources et aptitudes organisationnelles de la firme.

L’équation de profits qui montre comment la valeur est captée et comment elle est réinsufflée dans l’entreprise

Culture et Valeurs de l’entreprise

Nous considérerons que ces notions sont comprises, même si pas totalement assimilées, par le lecteur. Cette définition nous semble complète et cohérente, mais n’est en aucun cas, du moins sous cette forme, réalisable. Notre modèle consistera en deux séries de questions que l’entrepreneur ou le dirigeant d’entreprise devra se poser lorsqu’il voudra travailler ou réinventer son Business Model. Il n’y aura de ce fait pas de bonnes ou de mauvaises réponses à ces questions, mais des réponses types.

Questions sur la proposition de valeur :

1- Quel est le produit/service que je propose à mes clients ? 2- Sur quel marché suis-je positionné ? Est-ce un nouveau marché ?3- Combien les clients sont-ils prêts à mettre pour obtenir mon produit (valeur perçue par le

client) ?4- En quoi mon produit / offre est-il différent de la concurrence ? En quoi innove-t-il ?5- Pourrais-je améliorer ma proposition de valeur en changeant le prix, la distribution ou la

communication autour du produit?

En résolvant ces 5 questions et en les reformulant à l’aide de 5 phrases simples, toute entreprise peut décrire rapidement et efficacement sa proposition de valeur.

Questions sur l’architecture de valeur :

1- Comment mon entreprise est-elle aujourd’hui organisée ? Comment le sera-t-elle demain avec l’apparition de cette nouvelle innovation ?

2- Quelles sont mes ressources et compétences clés ? 3- Mon avantage est-il copiable ou non ?4- Ai-je besoin de nouvelles structures/ressources avec l’apparition de cette innovation ?5- Dois-je modifier ma chaine de valeur avec l’arrivée de cette nouvelle technologie ?

Ces interrogations remettent en questions la chaine de valeur interne de l’entreprise et ne sont absolument pas à prendre à la légère. Si l’on parvient à y répondre assez rapidement, c’est que le modèle est bien défini et ne nécessite pas de changements majeurs autres que ceux soulevés par les questions.

Questions sur l’équation de profit :

1- Comment l’entreprise produit-elle de la valeur ? (tous les moyens possibles : locations d’espaces etc.) Ne peut-on pas améliorer ces revenus ?

2- Combien me coûte approximativement chaque service/branche ?3- Peut-on définir de manière précise qui créé de la valeur ? (valeur sous toutes ses formes)

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4- Les moyens mis en œuvre pour mettre en place l’innovation vont-ils être rentabilisés ?5- Comment vais-je passer d’une innovation à une invention profitable ?

Ces questions sur le comment et sur le combien vont permettre avant tout de savoir les services qui créent ou non de la valeur, si il faut les booster ou tout simplement les supprimer.

Questions sur les cultures et valeurs :

1- Comment mener les collaborateurs ? Quelle est la liberté donnée dans leur travail au quotidien ?

2- Comment travailler avec mes clients dans ce contexte d’innovation ?3- Mes fournisseurs sont-ils prêts à suivre mon innovation ? Comment vont-ils répondre à mes

attentes ?4- Est-ce que l’entreprise est entièrement mobilisée vers l’innovation ? Quelles sont les valeurs

de notre entreprise ?

Toutes ces questions simples, qui peuvent être renseignées rapidement, permettent d’avoir une vision globale du Business Model actuel d’une entreprise et des modifications à faire pour obtenir le Business Model que l’on souhaiterait avoir. Cela permet également de dégager un schéma global de génération de valeur à partir d’une innovation.

Toutes ces questions ne viennent se poser qu’en supplément de celles que posent déjà la stratégie. Une entreprise qui réfléchie sur son Business Model, devra donc également se questionner sur certains points clés de sa stratégie. Notre modèle propose ainsi en complément des interrogations de

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INNOVATION

Stratégies de développemen

t

Proposition de valeur

Segmentation du marché

Le modèle de Revenus

Stratégie sur le marché

(concurrence)

Structure de s chaines de

valeur (interne et externe)

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bases, qui rendent abordable le concept de Business Model, des conseils et questions pour la partie stratégique de l’entreprise.

Notamment, il est important de déterminer quel sera l’avantage stratégique et concurrentiel fourni par l’innovation, comment cela se déclinera au niveau du pilotage de l’entreprise, et si cela aura une influence sur le métier de base de l’entreprise.

Notre modèle n’a en aucun cas la prétention de se substituer aux autres modèles existants, mais veut simplement fournir une vision plus pratique et plus facile à mettre en place que celle proposée dans les différentes théories existantes.

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Conclusion

Ces confrontations entre théorie et terrain nous auront permis d’avoir une vision globale de l’état d’avancement du concept de Business Model. Ayant déjà était décliné en de multiples théories malgré sa courte existence, passant d’un modèle réservé aux e-business, à un modèle universellement déclinable, étant entre temps réfuté par Porter, le Business Model ne fait pas encore aujourd’hui l’unanimité et n’est pas encore très bien connu des dirigeants d’entreprises. La nébuleuse autour du concept est encore bien présente, en particulier dans le monde des affaires. Comme nous avons pu le constater durant nos interviews, les décideurs connaissaient leur Business Model, sans savoir que c’était ainsi que cela s’appelait.

Ce que nous pouvons affirmer à un niveau plus personnel, celui de notre groupe, c’est que cette expérience nous a permis d’ouvrir encore plus notre vision stratégique d’une entreprise, et nous a offert une meilleure visibilité quant à nos potentielles envies de créer notre propre entreprise et donc notre propre modèle. De même, il n’est pas inconcevable que nous développions un jour notre idée d’ajouter le Business Model au nombre des documents à fournir à la banque en cas de demande de prêt. Celui-ci garantissant plus d’assurances aux banquiers, et une meilleure connaissance du projet et des activités / ressources génératrices de revenu pour l’entrepreneur.

Notre plus grosse difficulté fût de trouver des personnes à interviewer qui étaient à l’origine d’innovation de rupture, car celles-ci ne se font pas nombreuses. A l’avenir si nous devions retravailler sur le sujet, nous aborderions le thème avec plus de confiance, mais nous essaierions également de nous orienter vers une problématique plus accessible du type :

Peut-on réellement parler de Révolution du Business Model d’une entreprise, en cas d’innovation de rupture dans son secteur d’activité ?

Nous espérons que ce mémoire vous aura éclairé sur le sujet, et qu’il nous permettra dans un futur proche, d’élargir la diffusion du concept chez les entrepreneurs, et de développer par la suite des articles sur la mise en œuvre du Business Models.

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http://www.neodia.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=68&Itemid=1

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