Belguendouz - Projet partenariat UE Maroc pour la mobilité

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R REFLEXIONS SUR LE P PROJET DE P PARTENARIAT E EURO - - M MAROCAIN POUR LA M MOBILITE mars 2013 Page - 1 - R R E E F F L L E E X X I I O O N N S S S S U U R R L L E E P P R R O O J J E E T T D D E E P P A A R R T T E E N N A A R R I I A A T T E E U U R R O O - - M M A A R R O O C C A A I I N N P P O O U U R R L L A A M M O O B B I I L L I I T T E E Abdelkrim BELGUENDOUZ Universitaire à Rabat Chercheur Spécialisé en Migrations

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Le Partenariat pour la Mobilité est à l’ordre du jour dans les relations entre l’Union Européenne et le Maroc, ayant constitué un des points essentiels de l’objet de la visite, le 1er mars 2013 à Rabat, de José Manuel Barroso, Président de la Commission européenne et de Cécilia Malstrom, Commissaire européenne aux Affaires Intérieures. L’étude suivante dresse les contours, la portée et les enjeux de ce partenariat pour le Maroc.

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Abdelkrim BELGUENDOUZ Universitaire à Rabat

Chercheur Spécialisé en Migrations

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Sommaire

I- Grandes lignes du partenariat pour la mobilité 1.1- Un « package » 1.2- Un mea-culpa du bout des lèvres 1.3- La conditionnalité 1.4- Lancement du PM avec le Maroc 1.5- Un fourre-tout à prédominance sécuritaire 1.6- Déjà, des limites pour les visas 1.7- Un partenariat intégral 1.8- Tout reste encore à discuter

II- Exigences attenues du Maroc par l’U.E. en matière de réadmission 2.1- La célérité d’abord 2.1- La célérité d’abord 2.3- Accords en chaine

III- Pourquoi le Maroc a refusé jusqu'ici de signer l'accord de réadmission 3.1- L’intérêt de l’UE d’abord 3.2- La question de la preuve 3.3- Double langage de l’UE 3.4- Absence de recours 3.5- Remise en cause de droits acquis 3.6- Prédominance du sécuritaire 3.7- La sous-traitance sécuritaire 3.8- Atteintes aux intérêts géostratégiques du Maroc 3.9- Usage abusif du droit international 3.10- Des accords bilatéraux existent déjà 3.11- Un niet catégorique… à confirmer

IV- Entre la carotte et le bâton 4.1- Loin de l’intérêt commun 4.2- Immigration sélective ou choisie 4.3- Des aveux cyniques 4.4- Au-delà des incitants 4.5- Regrets de l’ambassadeur de l’UE à Rabat

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Le Partenariat pour la Mobilité est à l’ordre du jour dans les relations entre l’Union Européenne et le Maroc, ayant constitué un des points essentiels de l’objet de la visite, le 1er mars 2013 à Rabat, de José Manuel Barroso, Président de la Commission européenne et de Cécilia Malstrom, Commissaire européenne aux Affaires Intérieures. L’étude suivante dresse les contours, la portée et les enjeux de ce partenariat pour le Maroc. Elle se décline en quatre parties:

1) Les grandes lignes de ce partenariat ;

2) Exigences attendues du Maroc par l’UE en matière de réadmission ;

3) Pourquoi le Maroc a refusé jusqu’ici de signer l’accord de réadmission ;

4) Entre la carotte et le bâton.

I- Grandes lignes du partenariat pour la mobilité

L’approche globale des migrations peut être définie comme la dimension extérieure de la politique de l’Union européenne en matière de migration. Elle se fonde sur un partenariat avec les pays tiers et couvre l’ensemble des questions liées aux migrations d’une manière exhaustive et se voulant équilibrée (migration légale, lutte contre l’immigration illégale, lien entre migration et développement et dimension extérieure de l’asile).

Adoptée en 2005, elle illustre l’ambition de l’UE d’établir une politique migratoire cohérente, fondée sur le dialogue politique et une étroite coopération pratique et opérationnelle avec les pays tiers. En juin 2011, les conclusions du Conseil européen ont invité la Commission européenne à présenter une évaluation de l’approche globale.

À la suite de la communication de la Commission le 18 novembre 2011, ayant pour titre « Approche globale de la question des migrations et de la mobilité » (COM (2011) 743 final), le Conseil a décidé de l’adapter aux nouveaux besoins migratoires avec le titre « la nouvelle approche globale de la question des migrations et de la mobilité ».

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1.1 Un « Package »

Pour l’Union européenne, le Partenariat pour la Mobilité (PM), tel qu’il est développé dans la communication précitée de la Commission, est fondé sur quatre piliers d’importance égale :

1) l’organisation et la facilitation de l’immigration légale et de la mobilité ;

2) la prévention et la réduction de l’immigration clandestine et de la traite des êtres humains ;

3) la promotion de la protection internationale et le renforcement de la dimension extérieure de la politique d’asile ;

4) la maximisation de l’impact des migrations et de la mobilité sur le développement des pays d’origine.

A priori, cette approche globale peut paraître comme novatrice, féconde et généreuse. En fait, elle répond à la nécessité pour l’UE de présenter sa politique migratoire à l’égard des pays tiers comme un « package », pour mieux faire accepter les dimensions sécuritaires, celles liées notamment à la nécessaire acceptation par ces pays partenaires d’accords de réadmission impulsés par l’UE, concernant non seulement les propres ressortissants de ces Etats-tiers, mais également les « illégaux » en Europe, arrivés sur le contient en passant par des pays de transit comme le Maroc.

En d’autres termes, ce partenariat pour la mobilité exige de la part du Maroc un engagement concret, réel et crédible sur la « gestion intégrée » des frontières et des flux migratoires, faisant des frontières des lieux de sécurité collective.. Tout comme il exige du Maroc la réadmission des migrants en situation irrégulière provenant et/ou supposés avoir transité par le Maroc, incluant ceux des pays tiers.

Pour l’instant, l’UE a déjà signé des accords de partenariat pour la mobilité avec la Moldavie et le Cap Vert (5 juin 2008), la Géorgie (30 novembre 2009) et l’Arménie (6 octobre 2011). Les projets annoncés depuis le mouvement de personnes induit par le « Printemps Arabe », le sont notamment avec l’Égypte et ceux en cours, depuis octobre 2011, le sont avec la Tunisie et le Maroc.

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1.2 Un mea-culpa du bout des lèvres

Il faut dire qu’à la faveur du mouvement d’émancipation des peuples arabes et particulièrement au Maghreb, les premières réactions des gouvernements des pays européens, ainsi que celle des instances européennes, ont été cristallisées autour d’une inquiétude centrale.

Il s’agit de la « menace migratoire » (amenant le ministre italien de l’intérieur à demander le déploiement de forces de sécurité italiennes sur le territoire tunisien !!!), de « l’exode biblique » (Frattini, alors ministre italien des affaires étrangères) ou de l’alerte sur la situation en sud-Méditerranée, qui pourrait avoir des conséquences majeures sur les « flux migratoires incontrôlables et sur le terrorisme » ( !!!), selon l’intervention télévisée le 27 février 2011 de Nicolas Sarkozy, alors président de la République française. Et pour donner corps à ces menaces supposées et en souligner tout à la fois l’importance et l’actualité, il ajoutait : « C’est toute l’Europe qui serait en première ligne » !

Ce n’est qu’un peu plus tard, que l’UE a procédé à une sorte de « mea-culpa », reconnaissant que les pays de l’UE avaient apporté leur soutien aux régimes autoritaires sud-méditerranéens, moyennant le rôle de gendarme exercé par ces régimes pour protéger l’Europe contre l’immigration clandestine en provenance des Pays du Sud, Libye et Tunisie en particuliers.

Mais, ce faisant, l’UE exprimait un double langage, à travers le constat d’un décalage entre cette formulation autocritique et la persistance par l’UE de la même démarche purement sécuritaire, s’agissant de l’immigration et inscrite dans le Partenariat pour la Mobilité.

C’est ce qui ressort des communications conjointes de la Commission européenne et de la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité du 8 mars et du 25 mai 2011 sur « Un partenariat pour la démocratie et une prospérité partagée avec le Sud de la Méditerranée » et sur « Une stratégie nouvelle à l’égard d’un voisinage en mutation » et la communication de la Commission européenne du 24 mai 2011 sur « Un dialogue pour les migrations, la mobilité et la sécurité avec les pays du Sud de la Méditerranée ».

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1.3 La conditionnalité

La conditionnalité est un des principes de base du partenariat pour la mobilité. En effet, le dialogue est proposé et mené par l’UE sur la base de l’approche pays par pays, c'est-à-dire de la situation respective de chaque pays partenaire. Les résultats escomptés du dialogue sont tributaires des efforts déployés et des progrès enregistrés dans l’ensemble des domaines (migrations mobilité et sécurité).

Cette conditionnalité renvoie, pour le pays partenaire, à prendre notamment les mesures nécessaires, telles qu’elles sont énumérées dans la communication de la Commission en date du 24 mai 2011. Ces mesures sont les suivantes :

• Mise en place d’accords sur le retour volontaire ;

• Conclusion d’accords de réadmission avec l’UE, qui contiennent des dispositions portant sur la réadmission de ressortissants propres et de ressortissants de pays tiers, tout en assurant l’exécution intégrale des obligations existantes en matière de réadmission ;

• Conclusion d’accords opérationnels avec FRONTEX ;

• Renforcement des capacités en matière de gestion intégrée des frontières, de sécurité des documents et de lutte contre la criminalité organisée, y compris le trafic d’êtres humains et le passage clandestin de migrants ;

• Coopération dans la surveillance conjointe de la mer Méditerranée ;

• Démonstration d’une disposition à coopérer avec l’UE dans l’identification de ses ressortissants et de ses résidents, notamment dans le cadre de la coopération policière et judiciaire, et aux fins des réadmissions et des extraditions ;

• Élaboration et mise en œuvre dans le pays partenaire d’une législation sur l’asile conforme aux normes internationales, notamment au moyen d’une coopération avec le HCRNU.

Dans une communication de la Commission européenne (COM, 2011 : 17), la conditionnalité est mise en avant comme suit, en tant que composante essentielle des Partenariats pour la mobilité (PM) :

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« La mise en œuvre (des PM) est subordonnée à l’engagement des pays tiers concernés de réadmettre les migrants irréguliers qui ne sont pas autorisés à séjourner sur le territoire des États membres, de prendre des mesures efficaces visant à prévenir les migrations irrégulières en mettant en place une gestion des frontières intégrée et en améliorant la sécurisation des documents, et enfin de lutter contre le crime organisé, et notamment le trafic des migrants et la traite d’êtres humains ».

Dans la communication en date du 8 mars 2011, intitulée « Un partenariat pour la démocratie et une prospérité partagée ave le Sud de la Méditerranée », la Commission européenne précise ainsi sa conditionnalité :

« En échange d’une mobilité accrue, les partenaires doivent être prêts à accroître le développement des capacités et à fournir un soutien financier suffisant pour la gestion des frontières, la prévention et la lutte contre l’immigration illégale et la traite des êtres humains, notamment grâce à une surveillance maritime accrue, le retour des immigrés clandestins (procédures de retour et accords de réadmission), ainsi que par la lutte effective des services répressifs contre la criminalité organisée et la corruption transfrontière ». 1.4 Lancement du PM avec le Maroc

S’agissant du cas spécifique des rapports euro-marocains, il y a lieu de relever la visite officielle effectuée à Rabat le 1er mars 2013 par une délégation de haut niveau de l’exécutif européen, comprenant notamment José Manuel Barroso, président de la Commission européenne et Cécilia Malstrom, Commissaire européenne aux Affaires intérieures.

L’ordre du jour était consacré initialement au projet d’accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA). Sur insistance européenne, la question du PM s’est invitée à la dernière minute.

À cette occasion, en effet, le Maroc et l’UE et les 8 États membres concernés sont parvenus à un accord sur le projet de la « Déclaration conjointe établissant un Partenariat de Mobilité », qui a été paraphé en vue de la signature prochaine de ce type de partenariat.

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Dans ce cadre, Barroso déclarait à Rabat le jour même dans une conférence de presse : « Les relations entre l’UE et le Maroc viennent aussi de prendre un nouveau tournant, grâce à l’accord politique sur le partenariat pour la mobilité, afin de garantir une bonne gestion de la circulation des personnes entre nos frontières. Aujourd’hui, nous lançons la négociation d’un accord pour faciliter les procédures d’octroi des visas pour certaines catégories de personnes, notamment les étudiants, les chercheurs, les hommes et les femmes d’affaires. À long terme, on ne peut que soutenir une évolution vers une pleine mobilité des citoyens marocains sans visa, en tenant compte des relations globales entre l’UE et le Maroc et pour autant que les conditions d’une mobilité sûre et bien gérée soient réunies ».

Cette conditionnalité est à peine suggérée en des termes très diplomatiques, pour ne pas brusquer l’opinion publique marocaine, en dévoilant au grand jour les objectifs fondamentalement sécuritaires de l’approche retenue.

En effet, la transparence n’a pas été la règle, concernant notamment le contenu précis de cette Déclaration politique, dans la mesure où, dans une approche de pure opacité, les deux parties n’ont pas rendu public ce document et ont refusé de le communiquer aux chercheurs. Cette rétention de l’information est le fait aussi bien de la Direction Europe du ministère marocain des affaires étrangères, que des services de la Délégation de la Commission de l’UE, accréditée à Rabat.

Pourtant, le document de travail conjoint des services de la Commission européenne en date du 20 mars 2013, intitulé « Mise en œuvre de la Politique Européenne de Voisinage au Maroc : progrès réalisés en 2012 et actions à lettre en œuvre », nous apprend à la page 14 que « le gouvernement marocain à clairement exprimé son intérêt pour un futur Partenariat pour la mobilité, notamment en soumettant un non paper riche en propositions au mois d’avril (2012) et une version révisée de la Déclaration politique le 3 janvier 2013, un premier round de négociations a eu lieu les 18 et 19 octobre (2012) et un second round s’est tenu les 14-15 février 2013 ».

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Par conséquent, beaucoup d’informations existent, mais on ne veut pas les divulguer. Or, on a besoin d’un débat franc et transparent qui ne trompe pas les gens, sur les dessous et les véritables objectifs du Partenariat pour la Mobilité. 1.5 Un fourre-tout à prédominance sécuritaire

Néanmoins, le recoupement d’informations très parcellaires livrées par certains médias, marocains et européens, qui ont communiqué plus sur les aspects « positifs », permet de relever les éléments suivants :

- Au cours de l’année 2013, l’UE et le Maroc s’engageront dans les négociations sur le contenu même des accords qui composeront ce Partenariat pour la mobilité.

- Ce Partenariat, qui touche tous les aspects liés à la migration et à la mobilité, vise à mieux informer les citoyens marocains possédant les qualifications requises sur les offres d’emploi, d’étude et de formations disponibles dans l’UE, ainsi qu’à faciliter la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles et universitaires.

- Le Partenariat se fixe comme objectif le renforcement de la mobilité entre le Maroc et l’UE. Il vise, notamment à lancer la négociation d’un accord pour améliorer les conditions de prestation dans les consulats européens et pour faciliter les procédures d’octroi des visas pour certaines catégories de personnes, notamment les étudiants, les chercheurs et les hommes et femmes d’affaires.

- L’UE s’est engagée dans la préservation des droits de la sécurité sociale des travailleurs marocains et de leurs familles et leur portabilité.

- Le Maroc et l’UE vont également travailler ensemble en vue de maximiser l’impact positif de la migration sur le développement du Maroc, en encourageant les investissements directs dans les régions à fort potentiel migratoire. Ainsi, l’UE donnera un soutien renforcé aux initiatives de développement portées par les ressortissants marocains

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dans l’UE. Elle appuiera le Maroc pour mobiliser les compétences des binationaux afin de contribuer au développement du Maroc.

- L’UE va aussi aider le Maroc à renforcer sa capacité sur les plans législatifs, institutionnels et opérationnels, en particulier pour prévenir et lutter contre la migration irrégulière, les réseaux de trafic de migrants et de traite d’êtres humains et à mettre en place un système national d’asile et de protection internationale, avec le renforcement des capacités des autorités marocaines en charge de l’asile.

- L’UE et ses agences (EUROPOL, FRONTEX, le Bureau européen d’appui en matière d’asile, la Fondation européenne pour la formation) ainsi que 8 États membres de l’UE (Allemagne, Belgique, Espagne, France, Italie, Pays-Bas, Portugal et Royaume-Uni), proposent des initiatives concrètes pour mettre en œuvre ce partenariat.

1.6 Déjà, des limites pour les visas

Au-delà de ce canevas de mesures et réagissant à cette déclaration politique, le porte-parole du Quai d’Orsay, Philippe Lalliot, a retenu deux éléments clés. Il a plaidé le 4 mars 2013, lors d’un point de presse à Paris, pour un accord sur la mobilité, en cours de discussion entre le Maroc et l’Union européenne, répondant aux intérêts des deux parties : « Notre objectif est de parvenir à un accord équilibré, intégrant à la fois des facilitations de visas pour certaines catégories de personnes et des procédures de réadmission efficaces ». Mais, à la veille de la visite d’État au Maroc du Président François Hollande les 3 et 4 avril 2013, est-ce « plaider en faveur du Maroc », que de lui demander de signer avec l’UE un accord de réadmission !? Par ailleurs, trois jours plus tard, dans une tribune publiée dans « L’économiste » et « Akhbar Al Youm » (5 mars 2013), Charles Fries, ambassadeur de France au Maroc, tenait à préciser, concernant son pays, que « nous restons liés par un cadre réglementaire européen, qui ne nous permet pas d’élargir de manière discrétionnaire le spectre des personnes éligibles à des visas d’entrée dans notre pays ».

En d’autres termes, la facilitation de l’attribution de visas se fera en accord et en conformité avec l’acquis déjà existant !

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1.7 Un partenariat intégral

Précisons ici que l’outil ou instrument retenu par la déclaration politique commune entre l’UE et le Maroc, est le Partenariat pour la mobilité (PM) et non pas une formule alternative, sous la forme du Programme commun pour les migrations et la mobilité (PCMM).

Cette seconde solution est envisagée par certains pays partenaires, l’UE et les États membres, lorsque les deux parties souhaitent instaurer une coopération approfondie, mais que l’une ou l’autre n’est pas disposée à assumer l’ensemble des obligations et des engagements. La différence fondamentale avec le partenariat pour la mobilité, réside dans le fait que ce cadre n’implique pas nécessairement la négociation d’accords en matière d’assouplissement des formalités de visas et de réadmission.

Par conséquent, le Maroc s’est bien engagé avec l’UE dans la première voie, celle du Partenariat pour la mobilité, impliquant à terme la signature simultanée de deux accords : le premier sur l’assouplissement des formalités de visas, le second sur la réadmission.

Cependant, comme le précise la communication de la Commission européenne, s’agissant de l’approche globale de la question des migrations et de la mobilité, le Partenariat pour la mobilité et le programme commun pour les migrations et la mobilité « s’appuient l’un comme l’autre sur des engagements mutuels, mais restent non contraignants sur le plan formel ».

1.8 Tout reste encore à discuter

Par ailleurs, en matière de Partenariat pour la mobilité, entre le Maroc et l’UE, on est bien loin de ce que Barroso qualifiait à Rabat le 1er mars 2013 de « nouveau tournant ».

De même, il faut établir une grande distance avec les affirmations du document de travail sur le Maroc du 20 mars 2013 de la Commission européenne et de la Haute Représentante de l’UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, selon lesquels « le dialogue sur la migration, la mobilité et la sécurité a

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progressé en 2012 et la négociation du Partenariat pour la mobilité est quasiment finalisée, l’objectif étant d’aboutir à sa signature au premier semestre 2013.

Lors de la visite du Président Baroso et de la Commissaire Malmström au Maroc le 1er mars 2013, l’UE et le Maroc ont constaté leur accord politique sur le texte de la Déclaration politique ».

Or ceci est une lecture tronquée et précipitée, continuant à mettre le Maroc sous pression médiatique. L’UE a déjà fixé dans le passé, plusieurs échéances précises à la signature de l’accord de réadmission…

En réalité, on n’en est qu’aux balbutiements. Il n’y a aucune certitude à ce que ce partenariat pour la mobilité, qui est au stade de projet, devienne effectif. Si les objectifs ont été définis, il n’est pas dit, comme nous le montrerons plus loin, que l’accord se fasse sur les actions identifiées qui restent à négocier, et autour desquelles de profondes divergences subsistent, s’agissant de certaines mesures d’ordre sécuritaire.

En d’autres termes, on est encore au stade non pas de la finalisation, mais de la discussion, sachant qu’en matière de réadmission, le dialogue euro-marocain dure depuis douze ans, sans aboutissement concret. En d’autres termes, comme lecture des résultats réels de la visite marocaine de Barroso, il faudrait, à notre sens, comprendre que le Maroc accepte de continuer avec l’UE le dialogue sur la réadmission dans un autre cadre, celui du Partenariat pour la Mobilité, mais sans que les réserves et objections formulées jusqu’ici par le Maroc et que nous verrons plus loin, ne soient levées.

Avant d’analyser dans une troisième partie les raisons qui ont amené jusqu’ici le Maroc à ne pas signer cet accord de réadmission, présentons dans un second temps, ce qui est exigé de Rabat par l’UE.

II- Exigences attenues du Maroc par l’UE en matière de réadmission

Relevons tout d'abord que dans la perspective d'établir un système européen de réadmission, la Commission européenne a adopté une approche standard

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en matière de négociation de la réadmission avec les pays tiers, utilisant en quelque sorte un modèle type, proposé à tous les processus de négociation avec les pays concernés.

Précisons ici que les négociations menées par l'Union européenne ont pour l'instant débouché sur l'entrée en vigueur (date indiquée) de onze accords de réadmission: Albanie (1er mai 2006), Bosnie Herzegovine (1er janvier 2008), Arym (1er janvier 2008), Hong Kong (1er mai 2006), Macaco (1er janvier 2006), Moldavie (1er janvier 2008), Monténégro (1er janvier 2008), Russie (1er juin 2007), Serbie (1er janvier 2008), Sri Lanka (1er mai 2006), Ukraine (1er janvier 2008). À cela, il faut ajouter la signature, le 26 octobre 2009, d’un accord avec le Pakistan, ratifié le 1er décembre 2010 et la signature avec la Géorgie d’un accord le 22 novembre 2010. L’accord avec le Turquie a été paraphé le 21 juin 2012.

2.1 La célérité d’abord

Présentée comme une procédure administrative et opérationnelle, la réadmission concerne l'éloignement rapide d'étrangers considérés comme non autorisés. Sont concernés non seulement les ressortissants des parties contractantes à un accord, mais aussi les ressortissants de pays-tiers ainsi que les apatrides ayant transité sur le territoire des parties contractantes.

Ce qui est recherché dans le projet d'accord euro-marocain, c'est la célérité et l'efficacité de la réadmission d'abord des nationaux marocains, qui ne doit souffrir aucune entrave de procédure par les consulats marocains, aussi bien pour ceux entrés illégalement, que pour les personnes qui ne répondent plus aux critères fixés par la législation en cours concernant le séjour dans les pays européens d’immigration.

2.2 Marocains et étrangers en transit par le Maroc

Dans la « Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen relative à une politique communautaire en matière de retour des personnes en séjour irrégulier » en date de 2002, la Commission européenne précise que les accords de réadmission visent à faciliter l'éloignement: « des personnes qui ne remplissent pas, ou ne remplissent plus, les conditions d'entrée, de présence ou de séjour dans l'État requérant ».

Cependant, le projet d'accord de réadmission que l'Union européenne s'est fixée de faire entériner par le Maroc, concerne également la réadmission de ressortissants de pays tiers ou même d'apatrides: « qui ne remplissent pas ou ne remplissent plus les conditions d'entrée, de présence ou de séjour en

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vigueur sur l'État membre requérant, lorsqu'il est établi ou valablement présumé, sur la base du commencement de preuve fournie que ces personnes:

a) Sont en possession d'un visa ou d'un permis de séjour en cours de validité par le Maroc, ou

b) Sont entrés sur le territoire des États membres de manière illégale en provenance du territoire du Maroc ». (alinéa 1 de l'article 3 du projet d'accord de réadmission UE-Maroc).

Dans ce cas, la même procédure de délivrance des documents de voyage que pour les ressortissants marocains doit être suivie par le Maroc, sinon l'UE lui imposera un document type de voyage aux fins d'expulsion vers le Maroc. 2.3 Accords en chaine

Précisons ici que selon l'article 13 du projet d'accord décrivant la procédure de transit, celui-ci peut ne pas se limiter au Maroc, mais aller jusqu'à la frontière de l'État de destination finale. Ceci sous-entend que l'UE (ou bien le Maroc avec d'aide » de l'UE) va, dans le cadre d'un « réseau », établir des accords de « libre-échange » particuliers, à l'intérieur de la zone migratoire potentielle pour pouvoir organiser le transit. Deux situations pour le Maroc peuvent se présenter:

- « si le transit est effectué par voie aérienne, la personne à remettre et les escortes éventuelles sont exemptées du devoir d'obtention d'un visa de transit d'aéroport »;

- « si le transit est effectué par d'autres voies, les autorités compétentes de l'État requis, (le Maroc), sous réserve des consultations mutuelles, soutiennent le transit, notamment par la surveillance des personnes en question et la mise à disposition d'équipements appropriés à cet effet ».

Ceci signifie que cet accord va demander la mise en place de centres de rétention pour abriter ces irréguliers. Il s’agit aussi de sécuriser ces camps, de permettre l'identification des refoulés et d'assurer les prestations requises en matière de santé, d'accompagnement psychologique, d'aide juridique et de traduction. Comme le précise l’hebdomadaire marocain « La Nouvelle Tribune » daté du 21 octobre 2010 et à titre d’exemple :

« La ville d’Oujda pourrait devenir un “hub régional”, une sorte de plateforme... logistique, dotée d'infrastructures tels que des lieux d'hébergement, centres hospitaliers ou encore d'espaces dédiés aux enfants.

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Histoire d'humaniser l'accueil et le transfert de milliers d'hommes et de femmes ».

Après avoir vu à quelles obligations le projet d’accord communautaire de réadmission de l’UE soumet le Maroc, on se concentrera dans l’article de demain, concentrons nous sur le fait de savoir ce qui a retardé sa conclusion, sachant que depuis 2008, il fait désormais partie du package relatif au « statut avancé ».

En effet, lors du septième Conseil d’association UE-Maroc tenu à Luxembourg le 13 octobre 2008, une formulation attire l’attention dans la Déclaration de l’UE sur le statut avancé accordé au Maroc. Dans le point 26 de ce document, il est mentionné que l’approfondissement du dialogue bilatéral pour la concrétisation de ce statut avancé est conditionné par la nécessaire signature par le Maroc de l’accord de réadmission avec l’UE. En clair, tant que l’accord de réadmission n’est pas signé, il ne peut y avoir de possibilité de développement de la coopération …

III- Pourquoi le Maroc a refusé jusqu'ici de signer l'accord de réadmission

Le projet d’accord euro-marocain soumis officiellement en septembre 2000 n’a toujours pas abouti en mars 2013, après trois rounds de négociations informelles (jusqu’en 2003), quinze rounds de négociations formelles (dont 3 en 2007 et le dernier en date le 10 mai 2010 à Bruxelles) et quatre réunions techniques sur le flagrant délit, et ce, en dépit d'innombrables pressions, allant de « l’encouragement » à la signature de cet accord, à un conditionnement et chantage de plus en plus nets.

3.1 L’intérêt de l’UE d’abord

Précisons d’ores et déjà que du côté de l’UE, il suffit de lire les conclusions du Conseil de l’Union européenne dans son « plan global de lutte contre

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l'immigration clandestine et la traite des êtres humains dans l’Union européenne » du 27 février 2002, pour comprendre qu'en matière de négociation des accords de réadmission, on est loin de la présence de véritables partenaires à égalité de forces et de moyens : « (…) avant de négocier tout accord de réadmission, il convient de prendre en considération l’intérêt de l’Union européenne et de ses États membres ».

De même, c’est la Commission des Communautés européennes qui reconnaissait deux mois plus tard, le 10 avril 2002 dans le « livre vert relatif à une politique communautaire en matière de retour des personnes en séjour irrégulier », que : « les accords de réadmission sont dans le seul intérêt de la communauté ».

Du côté marocain maintenant, le mutisme est de rigueur. Des bribes d'information qui ont circulé ces dernières années sur l’évolution de cette thématique très confidentielle des négociations euro-marocaines sur la réadmission et des éléments de débat qui s'est instauré occasionnellement ici ou là, on peut avancer les principales observations et critiques suivantes. 3.2 La question de la preuve

Le projet d’accord de réadmission UE-Maroc souffre de nombreuses lacunes en matière de droits humains. Ce qui pose problème, c’est d’abord la question du flagrant délit et la charge de la preuve, en dépit du fait qu'ils aient donné lieu à quatre réunions techniques.

Pour ce qui est de la « présomption de preuves » de ressortissants de pays tiers censés avoir transité par le Maroc vers l’Europe, cette présomption ou début de preuve est suffisante pour les Etas membres pour exiger l’extradition. Par contre, elle pose un problème au Maroc, puisqu’il doit, à chaque fois, produire sans tarder les documents nécessaires.

Par ailleurs, pourquoi faire assumer au Maroc la responsabilité de rapatrier un ressortissant d’un pays tiers qui a passé 5 à 6 frontières africaines ou asiatiques avant d’arriver au Maroc ? S’agissant des pays africains, l’article 13 de l’Accord de Cotonou, signé par les pays ACP et l’UE, n’impose-t-il pas aux pays ACP la responsabilité de rapatrier leurs ressortissants en situation irrégulière en Europe ?

Par conséquent, cette politique européenne en matière de migrants en situation irrégulière, n’est-elle pas à mener en direction des principaux pays d’origine, plutôt que de transit !?

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3.3 Double langage de l’UE

Sur le même plan, on notera le double langage ou l’absence de cohérence de l’UE. D’une part, celle-ci exige du Maroc de jouer le rôle de gendarme, d’autre part comme l’a fait son ambassadeur à Rabat en octobre 2012, elle qualifie le traitement des Subsahariens par le Maroc de « problématique ».

Il ne s’agit pas, bien entendu, de fermer les yeux sur la répression qui s’abat sur les Subsahariens, les rafles policières, les expulsions et les violences commises contre eux par les forces marocaines de sécurité en particulier dénoncés par de multiples témoignages et rapports, dont le dernier en date, est celui de Médecins Sans Frontières.

Mais l’UE a également une lourde responsabilité. Elle fait le plus souvent au Maroc la leçon en termes humanitaires en disant que le Maroc doit garder les Subsahariens alors que le souhait, la volonté de ces derniers est de rejoindre l’Europe, qui se ferme au contraire sur les ressortissants de la Rive-Sud et n’adhère pas à leur libre choix. 3.4 Absence de recours

Par ailleurs, la place du juge est totalement absente, le projet n’ayant prévu aucune garantie juridictionnelle, en permettant notamment les recours.

Dans ce cadre, on relèvera l’avis émis le 13 octobre 2010 par le Centre Européen de Coopération Juridique (CDCJ) relevant du Conseil de l’Europe qui réaffirme, à propos des accords de réadmission, « la nécessité de garantir aux migrants en situation irrégulière un accès à la justice et notamment dans le cadre de leur processus de retour vers leur pays d’origine.

En effet, le respect de la protection des droits de l’Homme doit être assuré dans ce cadre, que cela concerne une réadmission ou un retour volontaire. Par ailleurs, ces solutions de retour ne doivent pas remettre en cause le droit de demander asile ou protection ». (CDCJ) (2010) 26 final).

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3.5 Remise en cause de droits acquis Sur un autre plan, une personne qui avait auparavant un statut légal, peut se retrouver dans l’illégalité, si entre-temps la politique du pays concerné en matière d’immigration change dans un sens restrictif, ce qui est le cas actuellement de nombreux pays européens, en particulier en Italie, en France…

C’est d’ailleurs dans cet esprit qu’à la 96ème session plénière des 18 et 19 juillet 2012, le Comité des Régions relevant de l’UE, réagissant par rapport à la communication de la Commission européenne sur la migration et la mobilité : une approche globale. Le Comité « est d’avis qu’il convient d’éviter que des étrangers en séjour régulier, puissent devenir illégaux en raison du manque de souplesse de la réglementation nationale et qu’ils aillent aussi grossir les rangs des personnes dépassant la durée de séjour autorisée ».

Précisons en effet que les accords communautaires de réadmission, qui posent des obligations réciproques pour les États membres et le pays partenaire, ne définissent pas les conditions de la régularité de la présence d’une personne dans l’UE ou dans un pays partenaire, cette question relevant des autorités nationales, en référence à la loi nationale ou européenne.

De plus, même si la Commission européenne est responsable de la négociation des accords de réadmission, elle n’est pas impliquée dans les opérations au jour le jour. Le retour/renvoi physique d'une personne repose entièrement sur les autorités compétentes des États membres de l’UE et du pays partenaire, en l’occurrence ici le Maroc. 3.6 Prédominance du sécuritaire

Par ailleurs, les soubassements du projet d'accord de réadmission sont dominés par des enjeux sécuritaires, au détriment des questions de développement, des aspects humanitaires et de la dimension des droits humains. Cela veut dire qu'il y a des pré-requis à assurer en terme de protection des voies de recours, des mesures d’accompagnement en termes de réinsertion et de développement, l’absence de « chartérisation », bref l’accord devant être humainement acceptable, ce qui n’est pas du tout le cas actuellement.

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3.7 La sous-traitance sécuritaire

Plus important encore, en voulant astreindre un pays-tiers comme le Maroc à réadmettre également ceux qui auraient transité sur son territoire, l'accord de réadmission a nécessairement comme impact de reporter la pression migratoire à l'extérieur des frontières de l'UE et de la transférer en particulier vers lui. En effet, la signature de l'accord obligerait le Maroc à reprendre les Subsahariens qui auraient transité par son territoire vers l'Europe, à les installer (même provisoirement) dans des camps de rétention et à les rapatrier chez eux à travers des accords de réadmission qu'il doit signer avec les pays d'origine subsahariens.

3.8 Atteintes aux intérêts géostratégiques du Maroc

En plus de la dimension droits de l'homme à respecter, les enjeux humains,

politiques et géostratégiques pour le Maroc en Afrique sont énormes, en

particulier la défense de la question de son intégrité territoriale, celle-ci

ayant fait l'objet auprès des Nations Unies, de l'initiative marocaine

d'autonomie, comme solution durable, juste et définitive de la question du

Sahara.

Cette attitude comporte des dangers pour l'État de droit, les droits humains des personnes concernées, l'image et les intérêts vitaux du Maroc en termes de profondeur géographique, historique, culturelle, géostratégique et économique africaine. Hassan II disait à propos de ce statut par rapport à l’Afrique : « Le Maroc est un arbre dont les racines plongent vers l’Afrique et qui respire par ses feuilles en Europe »

La toute récente et sixième tournée africaine du Roi Mohammed VI, comprenant le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Gabon montre l’acquitté de ces enjeux.

Au Sénégal, le Roi a parlé le 15 mars 2013 de « ce pays lié au Maroc par tant de liens de proximité : des liens de sang et de famille, des liens de solidarité sans faille et des liens de coopération et d’échanges constamment renouvelés et approfondis ».

À Abidjan, le Roi relevait avec force le 19 mars 2013, qu’ « il nous appartient aujourd’hui de préserver et d’entretenir des liens indissociables qui nous unissent afin de signifier, dans sa plus belle expression, la fraternité maroco-ivoirienne ».

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Par ailleurs, pour l’exemple des États de la Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dans leur ensemble, ces liens avec les pays subsahariens ont un caractère des plus particuliers, dont le Maroc n’a de cesse de rappeler la nature stratégique.

D’ailleurs, pas plus tard que le 27 février 2013, et à l’occasion de la tenue du 42e Sommet ordinaire de cette Communauté, le Roi du Maroc, dans un message adressé aux chefs d’État et de gouvernement, a souligné « l’importance stratégique que le Royaume du Maroc accorde à ses relations prioritaires avec la CEDEAO et tous ses États membres.

Des relations portées, avant tout, par une histoire séculaire riche d’échanges multiples, des liens de sang et de valeurs culturelles et cultuelles partagées. Des relations institutionnalisées et consolidées depuis nos indépendances recouvrées. Des relations approfondies, élargies et enrichies, tout au long de ces dernières années par une solidarité exemplaire et une coopération Sud-Sud singulière, au bénéfice de nos peuples ».

Or, la signature d’accords de réadmission entre le Maroc et ces pays subsahariens comme le pendant d’un accord de réadmission UE-Maroc, ne sert nullement les intérêts stratégiques du Maroc. 3.9 Usage abusif du droit international

Au-delà des raisons politiques précitées, invoquons un autre argument plus lié au droit international. Si la réadmission des nationaux ne pose pas de problème en dehors du genre de ceux relevés précédemment, étant admise conformément au droit international coutumier, par contre, la réadmission de ressortissants de pays-tiers, c'est-à-dire de ressortissants autres que ceux des parties contractantes, ne constitue nullement une obligation en vertu du droit international coutumier. L’Union européenne cherche ainsi à imposer de toute pièce une doctrine nullement fondée en droit international.

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3.10 Des accords bilatéraux existent déjà

Enfin, pourquoi établir un accord communautaire et demander comme le fait l’UE, l’abrogation d’accords bilatéraux de réadmission qui fonctionnent, à l’instar de ceux liant déjà le Maroc à l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne et des accords d’identification signés notamment avec la France, la Belgique, les Pays-Bas ? 3.11 Un niet catégorique… à confirmer

Toujours est-il que le 23 juillet 2012, lors d’une séance des questions orales à la Chambre des Conseillers, Saâd Eddine El Othmani, ministre marocain des affaires étrangères, avait clairement annoncé que « sur la question migratoire, le Maroc refuse de jouer le rôle de gendarme de l’Europe et c’est la raison pour laquelle nous avons décidé de ne pas signer l’accord relatif à la circulation des personnes ». Le ministre voulait certainement dire « accord relatif à la réadmission », lequel comporte selon lui, des dispositions « inappropriées ».

Quelques mois plus tard, il nous semble que les mêmes objections et griefs peuvent être opposés au projet d’accord sur la réadmission, qui est enrobé maintenant dans un emballage plus vaste et se voulant plus attrayant, celui du Partenariat pour la Mobilité. C’est l’objet de la dernière partie de cette contribution au débat public.

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IV- Entre la carotte et le bâton

Le projet d’accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA) entre le Maroc et l’UE, qui a été le prétexte de la visite au Maroc du président de la Commission Européenne est tout, sauf la libre circulation des travailleurs. Dès lors, ou ne peut valablement dire, comme l’ont affirmé certains commentateurs, que le Maroc et l’UE ont franchi une étape importante vers un « espace économique et humain commun ».

4.1 Loin de l’intérêt commun

Par ailleurs, le Partenariat pour la Mobilité, en maintenant et en renforçant la conditionnalité de la réadmission, n’est nullement dans « l’intérêt commun » des deux parties, contrairement aux affirmations de Barroso. Il ne constitue qu’une nouvelle tentative d’habillage des objectifs profondément sécuritaires de la politique migratoire européenne. La « mobilité » est poussée à l’extrême, par l’organisation des retours forcés et la réadmission impérative.

En décidant d’imposer son agenda, l’UE tente d’instituer un partenariat qui n’est qu’un nouvel avatar d’une stratégie purement conditionnelle, visant en fait à renforcer la maitrise de la mobilité et à restreindre les migrations.

En d’autres termes, le partenariat proposé pour la mobilité, nécessite impérativement du Maroc un engagement concret, « constructif et réel » sur la gestion intégrée des frontières, la maitrise absolue des flux migratoires et la réadmission ordonnée et efficace des migrants en situation irrégulière dans l’UE.

Sinon, il ne pourra pas bénéficier d’un éventuel assouplissement des formalités d’octroi des visas de court séjour et de l’accès à de nouveaux canaux de migration de travail, répondant d’abord aux besoins identifiés par les États membres eux-mêmes, compte tenu des déficits existants.

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4.2 Immigration sélective ou choisie

Comme le précise « l’approche globale de la question des migrations et de la mobilité », « la stratégie Europe 2020 insiste sur la nécessité de consentir des efforts particuliers, pour attirer les migrants hautement qualifiés dans le contexte de course mondiale aux talents », « dans le contexte de la stratégie Europe 2020, le but des migrations et de la mobilité est de contribuer à la vitalité et à la compétitivité de l’Union. Garantir l’existence d’une main-d’œuvre adaptable possédant les qualifications requises et capable de faire face avec succès à l’évolution constante de la démographie et de l’économie est une priorité stratégique pour l’Europe ». Par ailleurs, dans la communication conjointe « Une stratégie nouvelle à l’égard d’un voisinage en mutation » en date du 25 mai 2011, la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et la Commission européenne, insistent sur le fait que : « la mobilité de la main-d’œuvre est un domaine dans lequel l’UE et ses voisins peuvent être complémentaires.

Avec le vieillissement de la population de l’UE, la main-d’œuvre viendra à manquer dans certains domaines. Nos pays voisins disposent de travailleurs instruits, jeunes et talentueux qui peuvent combler ce déficit ».

La même préoccupation se retrouve dans la « Communication sur la migration » présentée le 4 mai 2011 par la Commission européenne, « L’accueil des migrants possédant les compétences qui correspondent aux besoins de l’Union, peut constituer une réponse aux pénuries de main-d’œuvre et de qualifications dans certains secteurs ».

S’agissant des autres dimensions, « le nouveau partenariat pour la mobilité offre un assouplissement des formalités d’octroi des visas lié à un accord de réadmission négocié simultanément. La mise en œuvre de l’approche “donner plus pour recevoir plus”, caractérisée par une certaine forme de conditionnalité, doit être poursuivie (…) afin d’accélérer la procédure de négociation de ces accords ».

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4.3 Des aveux cyniques

En définitive, l’application de la nouvelle formule européenne basée sur le principe « donner plus pour recevoir plus », n’est-elle pas la traduction concrète de la recette imaginée en mars 2005 devant le Senat français par Franco Frattini, alors Commissaire européen chargé de la Justice et des Affaires intérieures :

« La négociation d’accords de réadmission n’a pas été chose aisée (…) La principale raison de leur lenteur est que, bien que ces accords soient en théorie réciproques, il est clair qu’en pratique, ils servent essentiellement les intérêts de la communauté. Tel est notamment le cas des dispositions relatives à la réadmission des ressortissants de pays-tiers.

La bonne fin des négociations dépend donc beaucoup des “leviers” ou devrais-je dire des “carottes” dont la Commission dispose, c'est-à-dire d’incitations suffisamment puissantes pour obtenir la coopération du pays tiers concerné ».

Six années plus tard, la Commission européenne lui emboite le pas, en concrétisant cette stratégie de calcul. Dans sa « Communication sur la migration », en date du 4 mai 2011, la Commission constate qu’ « il est clair que les négociations relatives à la réadmission sont difficiles avec plusieurs pays, dont les plus importants pays d’origine et de transit de la migration irrégulière. Qui plus est, l’application de l’article 13 de l’accord de Cotonou entre l’UE et les pays ACP laisse toujours à désirer.

En particulier, l’absence d’incitants donnés par l’Union à ses homologues des pays-tiers tels que, par exemple, des mesures en matière de visas ou une assistance financière afin de renforcer la capacité de ces pays à appliquer l’accord correctement, entrave la capacité de l’Union à conclure et mettre en œuvre ces accords efficacement.

Par conséquent, il apparait clairement que chercher à obtenir des mandats séparés pour les négociations de réadmission n’a plus de sens. Il faut donc envisager les accords de réadmission dans la perspective plus large des relations globales de l’Union avec les pays partenaires concernés. À cet effet, il y a lieu de privilégier l’intégration des obligations en matière de réadmission, dans le cadre des accords conclus avec les pays-tiers ».

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4.4 Au-delà des incitants

À notre sens, en matière de projet d’accord de réadmission, les enjeux pour le Maroc, y compris dans le cadre du (nouveau) Partenariat pour la Mobilité, dépassent les simples incitants, leviers ou carottes. Notre refus de l’accord de réadmission avec l’UE, n’est pas dû à l’absence pour le Maroc de moyens financiers ou des capacités techniques et matériels pour organiser et entretenir des centres de rétention qui sont liés à cet accord.

De notre point de vue, il s’agit d’abord d’une question de droits humains et d’intérêts hautement stratégiques du Maroc dans le continent africain, liés notamment à la défense de l’intégrité territoriale du Maroc.

On ne peut accepter, sans réagir, les tentatives répétées de l’UE d’embrigader le Maroc dans le rôle de vigile, de gardes-frontières de l’Europe, de supplétif de la répression et de sentinelle avancée de l’UE, chargé d’assumer le rôle de barrage de rétention des migrations subsahariennes en particulier. On ne peut accepter que le Maroc joue le rôle de réceptacle des ressortissants subsahariens indésirables au sein de l’UE, de leur refoulement et renvoi vers leurs pays d’origine.

Certains responsables européens ne l’entendent pas de cette oreille.

4.5 Regrets de l’ambassadeur de l’UE à Rabat

Interrogé par le site Lakome à la vielle de l’achèvement de sa mission en tant qu’ambassadeur de l’UE à Rabat, sur le fait savoir que « des voix s’élèvent au Maroc comme en Europe pour dénoncer ce rôle de “gendarmes” que l’UE souhaite sous-traiter à ses voisins du Sud ». Eneko Landaburu, a donné « à cœur ouvert » cette réponse méprisante pour la société civile :

« Écoutez, on peut tout dire surtout quand on n’a pas de responsabilité. Sur le plan humain, je peux dire la même chose. Mais quand on est dans une situation de responsabilité, que l’on doit résoudre des problèmes, il faut prendre des mesures. Ce n’est pas de gaieté de cœur que l’UE demande à ses partenaires d’accepter la réadmission ».

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En conclusion à son interview, l’Ambassadeur a exprimé deux grands regrets au plan professionnel, au moment de quitter ses fonctions au Maroc. Le premier est celui « de ne pas avoir vu d’avancées plus significatives et sérieuses dans la réforme de la justice »;

L’autre regret, c’est l’absence d’« un plan national de convergence pour que les Marocains puissent dire en toute liberté et en toute souveraineté quel est leur niveau d’ambition pour la convergence réglementaire avec l’UE, traduit dans les domaines qui doivent faire l’objet de cette convergence et dans un calendrier ».

Puisqu’il est question d’une mise à niveau juridique au sens large et d’un rapprochement de la législation dans tous les domaines et pas simplement au niveau de la règlementation technique, liée notamment aux échanges commerciaux, répondons favorablement à la demande de l’ambassadeur de l’UE, en disant par exemple que la législation marocaine en matière migratoire, ne doit pas être calquée sur cette prônée l’UE, d’essence fondamentalement sécuritaire.

De même, la nécessaire loi marocaine sur l’asile doit s’inspirer directement de la Convention de Genève, et non pas être la traduction de la volonté d’externalisation de l’asile prônée par l’UE, pour ne pas assumer pleinement ses obligations conventionnelles, en empêchant les demandeurs d’asile d’accéder à l’Europe.

Allons plus loin. Tout en souhaitant que des progrès tangibles aient lieu notamment dans le domaine de la justice et de l’harmonisation réglementaire avec les acquis communautaires, espérons que le même ambassadeur, qui déclarait notamment à « Akhbar Al Youm » du 22 mars 2010 « pas de

partenariat avancé avec le Maroc sans la reprise des immigrés clandestins

ayant transité par le Maroc », qu’il continuera à avoir et dans un très long avenir, un autre regret.

Celui de voir le Maroc, malgré les diverses pressions et le chantage multiforme exercé sur lui, ne jamais signer d’accord de réadmission avec l’UE, y compris dans le cadre du Partenariat pour la mobilité, qui n’est qu’un euphémisme, qui essaye de cacher le rôle assigné au Sud de gardien frontalier de l’UE, et de camoufler en particulier la question de la réadmission vers le Maroc des migrants « clandestins » en Europe.

Abdelkrim BELGUENDOUZ Universitaire à Rabat

Chercheur Spécialisé en Migrations [email protected]