Post on 28-Oct-2015
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE
DE LA
XXIE DYNASTIE ÉGYPTIENNE
Parmi les nombreuses dynasties quise sontsuccédé en
Égypte,
la XXIe est une de celles dont l'histoire présente leplus
d'obscu-
rité. La chronologie de cette période est d'autant plus difficile à
établirque
lepouvoir paraît avoir été exercé concurremment par
les rois de Tanis et lesgrands prêtres d'Ammon à Thèbes cette
dualité est une cause de trouble pour l'historienqui
n'a àsa dispo-
sitionpour
cette étude ni grands monuments, ni grandstextes
historiqueset en est réduit à fonder ses calculs sur des syn-
chronismes n'offrantpas
les toutes garanties désirables de certi-
tude.
L'heureuse découverte des momiesroyales, faite en 1881, à
Deir-el-Bahari, permit à M.Maspero
dejeter quelque clarté dans
le chaos et de dresser un tableauchronologique à peu près com-
plet dans les grandes lignes, mais présentant des lacunes qui ne
pouvaient être combléesque grâce
à de nouveaux documents',
La trouvaille de la sépulture des Prêtres d'Ammon, faite en
4891'par M. Grébaut, vint enrichir le Musée de Gizeh de t53 mo-
mies depersonnages se rattachant
parun titre
quelconque au
sacerdoce du dieu suprême de Thèbes. Toutes ces momies da-
tent de la XXIedynastie et l'aspect en est uniforme. Les cercueils
de formeanthropoïde et
généralementdoubles sont entièrement
couverts de peintures polychromes représentantdes divinités, des
symboles sacrés, parfois avec ornements en relief, entremêlées
1. Maspero, Les momies royales çte Deir-el-Bahari, dans les Mémoires de la
Mission française du Caire, t. I, fasc. 4. Je désignerai cet ouvrage par hi, R.
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA XXI' DYNASTIE ÉGYPTIENNE 73
de courtesinscriptions;
le tout est recouvert d'une couche de
vernisjaunâtre.
Leurapparence est la même que
celle des cer-
cueils desPinedjem,
de Râ-mât-ka, de Nési-khonsou, etc. Quel-
ques-unesdes boîtes avaient été dorées
partiellement,au
visage et aux mains cet or sipeu épais avait néanmoins tenté
les voleurs, et de mêmeque pour les momies de la cachette
royale il avait été gratté dans l'antiquité.Cette
spoliation,due
aux individus qui avaient lagarde
de ces corps,était facilitée
par
le faitque
la caisse intérieure était seule fermée le couvercle
de la caisse extérieure était seulement posé sur la cuve et les
chevillesqui
devaient fixer les tenons n'étaientjamais
enfoncées.
Lesparties dorées des deux cercueils étaient donc livrées à la
cupiditédes
personnes,tant
que, le souterrain n'étant pas rempli,
le puits d'accès n'était pas comblé'.
Laplupart des momies de cette trouvaille ont été ouvertes en
1891et 1892, et le Dr Fouquet, quiprépare une étude sur l'embau-
mement, fera connaître les divers modes d'emmaillottementqu'il
apu observer dans cette riche série je signalerai
seulementque
tous lesprocédés employés
n'ont pas également réussi. Même.
pourles momies les
plus importantes,les opérations
n'ontpas
ététoujours conduites avec soin, et, au-dessous des épaisseurs
d'étoffe, du bitume, despoudres aromatiques
destinées à pré-
server à tout jamais le corps des causes d'altération, on n'a fré-
quemment retrouvéqu'un
cadavrerongé parles dermestes, ré-
duit à l'état de squelette.
Aucun bijou précieux n'a été découvert sur ces momies. Un éper-
vier en métal(argent
ou bronze doré) étendaitparfois
ses ailes
sur lapoitrine du mort; une
plaque rectangulaire, presque tou-
joursen cire rouge,
surlaquelle
était gravé un udja,couvrait
l'incisionpratiquée
dans le flancgauche
etpar laquelle
lecorps
avait été vidé. Les quatre génies funéraires modelés en cire
étaient enroulés dans les viscèresqu'ils
devaientprotéger
et
placés dans la cavité ducorps.
1. Cf. Notice des principaux monuments du Musée de Gizeh, 1892, p. 256
et suivantes.
74 REVUE ARCHÉOLOGIQUE
Cesobjets
n'intéressentque l'archéologue;
il en est d'autres,
plus importants parsuite des
inscriptions qu'ils portent, quele
dépouillement a mis entre nos mains. Ce sont
1° Le grand suaire en toile grossière qu'on trouve immédia-
tement sousl'enveloppe extérieure. Souvent un Osiris y
est des-
siné, adorépar le
défunt dont les noms et titres sont énumérés
2° Le gros scarabée caché au milieu des linges, sur lapoi-
trine, et dont le plat, couvert de textes empruntésaux
chapitres
xxx ou Lgm du Livre des Morts, donne le nom du personnage;
3° Lepapyrus,
roulé etplacé entre les
jambes.En général
c'est le livre de l'Am-duautqui occupait cette place;
le Livre
des Morts était renfermé dans une statuette creuse représentant
Osiris, placéeà côté du cercueil;
4° Les bretelles etpendeloques. Les bretelles consistent en
deux longuesbandes de cuir
rouge se croisant dans le dos, pen-
dant sur lapoitrine,
ornées àchaque extrémité d'un rectangle
enpeau
blanchequi porte gaufrée en relief la représentation
d'une divinité (Ammon, Min ouMaut)
et d'un roi ou d'ungrand
prêtre;
Les objets que je désigne sous le nom dependeloques
étaient
d'unemploi plus rare, et se trouvent concurremment avec les
bretelles. Ce sont deux morceaux depeau
blanche ayant'les
formeset
suspendusà un cordon de cuir rouge passé
au-
tour du cou. Au milieu d'ornements divers ils donnent le nom
d'un grand prêtre d'Ammon;
5° Les linges écrits.Beaucoup
de momies avaient sur elles une
ou plusieurs pièces de toile assez fine, de 1 mètre de côté envi-
ron, portantdans
l'angle, imprimé aumoyen d'un cachet, les ca-
ractères ou Maisplus intéressantes sont les lon-
gues pièces d'étoffe dédiées à desdivinitéspar de
hautspersonnages
etqui mentionnent la date de leur fabrication. Malheureusement
cespièces sontpresque toujours déchirées en étroites bandelettes
mélangées aulinge ordinaire de la momie et l'inscription, lors-
qu'elle n'apas été détruite
parle bitume, est rarement entière.
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA XXIe DYNASTIE ÉGYPTIENNE 75
Lesobjets appartenant
aux trois premières séries que nous
avons établies ne nous ont fourni que des renseignements généa-
logiquesassez
maigres, parfoisen désaccord avec les textes des
cercueils. Les résultatspresque complets ont été
exposésdans le
Dictionnaire des nomshiéroglyphiques
de M. Lieblein, sous le
n° 2544.
Les bretelles et les linges écrits ont seuls donné des éclaircis-
sements sur la situation politique de l'Égypte; toutefois ces ren-
seignements, se réduisant à des noms de roi ou de grand prêtreet
à des dates, étaient moins faciles à coordonner que ceux fournis
parles stèles d'Apis pour
le classement des dernièresdynasties.
Les bretelles etpendeloques
ont été extrêmement utiles à
notre travail, puisqu'ellesnous donnent le nom du roi et du
grand prêtresous
lequelvivait le
personnage.Les différents
textesque j'ai pu y lire sont les suivants
1. Les numéros donnés aux momies sont ceux de l'ordre dans lequel elles ont
été extraites du souterrain. Pour les noms des personnages, se référer au Dic-
tionnaire de M. Lieblein.
76 REVUE ARCHÉOLOGIQUE
PENDELOQUES
D'autrepart voici les inscriptions
tracées sur des bandelettes.
Momie 2
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78 REVUE ARCHÉOLOGIQUE
1. M. R. p. 729.
Avant d'utiliser ces documents nouveaux, je mettrai sous les
yeuxdu lecteur le tableau dressé par M.
Maspero qui repré-
sente l'état actuel de la science
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA XXI" DYNASTIE ÉGYPTIENNE 79
Un fait qui se dégageà première vue de l'examen des
inscrip-
tions des Prêtres d'Ammon estque
la cachette ne renfermait pas
de momiesplus
anciennes quele
pontificatde Râ-men-kheper.
Les
mentions du grand nepourront
donc être attribuées
qu'à Pinedjem Il. et cette constatation nous force dès l'abord à
assignerau roi Amen-si une
place autre quecelle
qu'onlui don-
nait.
M. Maspero, d'accord avec MM. Naville et Wiedeman, regardait
comme le cartoucheadopté par Her-hor pour
la Basse-
Égypte1.Or la bande 133 a été faite en l'an VIII du roi Amen-si
par Pinedjem II, fils deRâ-men-kheper.
Il devient impossiblede
maintenir l'assimilation de ce souverain avec Herhor et l'on doit
lui chercher une place parmi les rois tanites.
Pinedjem II avait commencé son pontificatsous Amen-m-ap'
Amen-si nepeut donc avoir régné qu'après Amenophtis;
il s'in-
tercale dans la dynastie à la place, vide jusqu'ici,réservée aux
cartouches d'Osokhor et de Psinakhes.
On peut objecter qu'en l'an XVI, le roi Amen-si faisait transfé-
rer les momiesroyales dans la tombe de la reine An-hapu', tan-
dis que les listes de Manéthon n'assignent qu'un règnede 6 ans
à Osokhor, de 9 ans à Psinakhès; même en totalisant la durée
de ces deux règnes on n'arrivepas
à 16 ans. Je dois dé-
clarer que je n'attache qu'une importancetrès secondaire aux
chiffres fournispar
ces listes. Nous avons dans le détail tant de
preuves fourniespar des témoins irrécusables
queles nombres
de l'historiengrec
ont été sciemment faussés que jeme méfie
de l'ensemble. Commerenseignement général,
des tables nous
donnent de précieuses indications sur le classement des pha-
raons les suivre plus loin serait s'exposerà tomber dans l'er-
reur.
i. M. R., p. 673.
2. Bande 134.
3. M. R., p. 551, 553, 557.
80 REVUE ARCHÉOLOGIQUE
Voici les chiffresque donnent
pourcette
époqueles
compila-
teurs de Manéthon et leSyncelle:
Le total énoncépar Manéthon est de 130 ans la Vieille Chroni-
que dit 121 annéespour
7 générations.
Si l'onessaye
de mettre enregard
les dates fournies par les
monuments anciens, ily a
impossibilitéabsolue. Nous venons de
voir l'an 17 d'Amen-sipour Osokhor qui
n'en aque 6; une autre
bandeparle
de l'an 49 d'Amenophtis auquelon n'en a concédé
que 9, etpas
un seul règnede la
dynastie,suivant les Grecs,
n'aurait atteint cette durée. Il faut, je crois, renoncer à établir la
concordance. Le nom même Amen-si necorrespond
ni à Oso-
khor, ni à Psinakhès, ni à Saïtespar lequel
leSyncelle remplace
ces deux noms.
La trouvaille des Prêtres d'Ammon nous révèle deux nou-
veauxpontifes l'un est e, fils de
Pinedjem,l'autre
Lepremier de ces
personnages prendforcément place
à la fin
de ladynastie
fils dePinedjem II, il a dû lui succéder et précé-
derAuput, grand prêtre sous Chechanq.
Laposition
de Nes-bi-neb-dad (Smendès)dans la série des
Premiers Prophètes d'Ammon se détermine assez facilement. Sur
la momie 130, lespendeloques
à son nom accompagnentdes
bretelles au cartouche d'Amen-m-ap Smendès est donc anté-
rieur àPinedjem II
quia terminé ce règne
et il a dû exercer
l'autoritéreligieuse après Râ-men-kheper qui
était grand prêtre
au commencement du même règne.Il
ya tout lieu de croire que
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA XXIe DYNASTIE ÉGYPTIENNE 81
mûSÉRIE, T. XXVIII. G
cet individu est celui dont il est question dansl'inscription du
pylônede Karnak1 et
qui est dit fils de Râ-men-kheper.
L'introduction de ces troispersonnages
dans l'histoire modifie
tout le tableau de cette époque. Dans lespages suivantes je
tirerai parti de tous les documents connus pour essayerd'établir
la situation relative des souverains et desgrands prêtres.
Par suite du dédoublement de Her-hor et d'Amen-si, ily a
lieu
de faire un travailpréparatoire
sur les dates de transport et de
réparationdes momies
royales.Les
procès-verbauxtracés tant
sur les momies quesur les
paroisde la cachette de Deir-el-Bahari
se classent en dixgroupes que je désignerai par
les lettres de
l'alphabet
A. An VI. Le grand prêtre Ller-hor vérifie les momies de Séti Ier
et de Ramsès Il et renouvelle leur maillot 2.
B. An VI, Legrand prêtre Pinedjem
fils de Pianl;h envoie
l'intendant du trésor restaurer les momies d'Amen-
hotep 1er et Thotmès II3.
C. An XIII.Pinedjem
fils de Piankhrépare
la momie de Ram-
sès III4.
D. An XVII. Lepremier prophète Pinedjem renouvelle le mail-
lot de Ramsès II dont ilapporte le corps dans la tombe de Séti 5.
E. Ans VII et VIII du roiPinedjem. On transfère dans une
même tombe les momies d'Aahmès et de ses enfants Si-amen et
Sitkames6.
F. Au XVI. Masahirta, fils du roiPinedjem,
envoie l'intendant
du trésor Pen-amen réparer le maillotd'Amen-hotep7.
G. An XVI du roi Amen-si Ramsès Ier, Séti Ier et Ramsès II sont
transférés du tombeau de Séti dans celui de la reine An-hapu 8.
1. M. R., p. 704.
2. M. R., p. 553, 557.
3. M. R., p. 536, 545.
4. M. R., p. 563.
5. M. R., p. 560.
6. M. R., p: 534, 538, 541.
7. M. R., p. 536.
8. M. R., p. 551, 553, 557.
82 REVUE ARCHÉOLOGIQUE
H. An V. Ensevelissement de Nesi-khonsou. Onremarquera
que leprophète
d'AmmonY
qui assistait à
cette cérémonie était-déjà
mentionné dans lesinscriptions du
groupe G'.
I. An X.'Séti 1er et RamsèsIl sont enfin transférés dans latombe
d'Amen-hotep Ier qui seraitainsicelle de la cachette'. Lepréposé
au trésor nommé dans l'ins-
cription Hest encore cité dans lesprocès-verbaux de la translation.
J. An XVI. Ensevelissement, dePinedjem
II. Yprennent part
lepréposé au trésor et le divin
père d'Ammon citésdéjà dans les textes I, ainsi
que le divin père étaitdéjà
éhargé des sceaux lors de l'enterrement de Nesi-khonsou3.
Nous avons maintenant en vue lapresque
totalité des docu-
ments surlesquels on peut étayer
l'histoire de cetteépoque.
Lepremier roi de la
dynastie est Smendès suivant les Grecs, le
de Dababieh'. Aucun autre texte n'est venu nousapprendre quels
étaient ses droits à la couronne etl'on
nepeut
encoreque formu-
ler deshypothèses sur les conditions du, changement
de la famille
régnante. Ce Smendès était-il un héritier légitime des Ramsès ou
unusurpateur? M.
Maspero pense quele
grand prêtre Her-hor
succéda immédiatement aux Ramessides etque Smendès ne
régna que plus tard, pendantle
pontificatde
Pinedjem5. J'avais
au contraire, proposéde ne
placerla
prisede royauté de Iler-hor
qu'après l'intronisation de Smendès. Il y a une autre solution pos-
1. M. R., p. 520.
2. M. R., p. 554, 559.
3. M. R., p. 522,4.
Daressy, Le roi Smendès, dans le Recueil, t. X, p. 133, et M. R., p. 675.5. M. R., p. 677.
CONTRIBUTION A L'ETUDE DE LA XXIe DYNASTIE ÉGYPTIENNE 83
sible de laquestion.
Les grands prêtres d'Ammon étaient tout-
puissantsvers la fin de la XX- dynastie et sans doute des alliances
avec la familleroyale
leur donnaient des titres àl'héritage
du
trône. La branche des Ramessides étant éteinte, la couronne re-
venait à IIer-hor. Celui-ci, déjà âgé, occupé de l'administration
religieusede l'Égypte, recula devant les nouvelles charges que
lui auraitimposées
son élévation au trône; ilpréféra
choisir un
homme à sa dévotion, peut-être apparenté égalementà l'ancienne
race. Les auteurs grecs appliquent à la dynastie la mention de
Tanite le nom du roi Smendès indiquetout au moins une
origine
du Delta; de Mondès à Tanis la distance n'estpas considérable;
les monuments laisséspar
les souverains de la XXIedynastie sont
presquetous à Tanis, nous
pouvonsdonc admettre comme exacte
la mention de Manéthon. Or on sait que Tanis, rebâtie etagrandie
parRamsès II, avait adopté le culte de la capitale de
l'Égypte
Ammon-râ, roi des dieux, ylaût, Khonsou étaient les divinités
principalesà Tanis aussi bien
qu'à Thèbes il n'y aurait aucune
impossibilitéà ce
qu'à cette époqueles
grands prêtresde Thèbes
aient été égalementles chefsdusacerdocetanite. L'acte deHer-hor
était trèspolitique gouvernant
directement laHaute-Egypte,
ilplaçait pour surveiller le Delta (dont
les différentes villesja-
louses de leur autonomie n'auraientpeut-être pas
subi volontai-
rement l'ascendant direct deThèbes),
un homme du pays, mais
dévoué à sapolitique.
Par le même fait il évitait les reproches
qu'onavait déjà dù faire aux
prêtresd'Ammon de vouloir con-
fisquertoute l'autorité;
Par suite de cet accord, le pouvoir était donc partagéentre
Sinendès, roiapparent
detoute l'Egypte, et Her-hor, premier pro-
phète d'Ammon, chef religieux, vice-roi dé la Haute-Égypte, ayant
droit au cartouche, et n'occupant volontairement quele second
rang. La situation n'était pas sans analogie avec celle despapes
et des empereurs aumoyen âge, des Chaïgouns et des Mikados
auJapon.
Les seules dates connues se rapportantà Her-hor sont ins-
crites sur les cercueils de Séti Ier et Ramsès 1"' (groupe A).
84 REVUE ARCHÉOLOGIQUE
Comme elles ne citent cepersonnage qu'avec les titres de
pre-
mierprophète et nomarque,
l'année VI dont elles parlent appar-
tient aurègne
du dernier des Ramessides, Ramsès Râ-men-mât.
M. Maspero placePiankh comme grand prêtre pendant
le rè-
gnede Her-hor; l'arrangement que je propose
force à modifier
cette situation. Bien loind'abdiquer
ses fonctions sacerdotales
en montant sur le trône, Her-hor rehausse leprestige
de son titre
depremier prophète
d'Ammon en l'inscrivant dans un cartouche-
prénomet
lui donnant ainsi une valeur
égaleà l'assimilation au soleil
que prenaient lespharaons
en cei-
gnantla couronne. Je crois
que Smendès mourut lepremier;
il
eut pour successeurque
Manéthon ap-
pelle Psusennès. Presqueimmédiatement
après Her-hor décéda
et son fils aîné1-
devintpontife.
L'entente était
déjà peut-être rompue nullepart
on ne voit Piankhporter
des
titres royaux de son père; mais les monuments de ce grand prêtre
sont rares, vu le peu de durée de son pontificat.:dès l'an VI de
l'susennès il étaitremplacé par
son fils comme en
témoignent lesinscriptions de Deir-el-Bahari (groupe B).
L'inspection des tombes royalesse
poursuivait régulièrement.
En l'an XIII onréparait la momie de RamsèsIII; puis
on s'avisa
de faciliter la surveillance des momies royalesen réunissant les
corps en un seul endroit et en l'an XVII Ramsès II futtransporté
dans la tombe de Séti(inscr. D).
Pinedjem contracta plusieurs mariages,dont un avec
fille du roi tanite. Celte union lui valut l'expectativedu trône
2 et la reconnaissance de sa vice-royauté avec droit
auprotocolc
1. Pour le prénom de ce roi, voir plus loin page 88.
2. Daressy, Notes et Remarques, dans le Recueil.
CONTRIBUTION A.- L'ÉTUDE DE LA XXIe DYNASTIE ÉGYPTIENNE 85
A la mort de sonbeau-père, Pinedjem
resta seul maître dé
l'Égypte, prit un nom deka et le
double cartouche
Dans la liste despha-
raons, il prendla
place indiquéeau nom de
Nepherchèrès.
Pinedjem, devenu roi, essayade
garderl'autorité
temporelle
etspirituelle.
En l'an VII et VIII de sonrègne
il réunit à .RamsPS et Séti
plusieursmembres de la famille d'Aahmes
(groupe E), agissant
encore engrand prêtre;
maisquelques annéesplus tardil se décida
à confier lepouvoir religieux à son fils Masahirta, que nous
voyons exercer le sacerdoce en l'an .XVI. C'est vers cette date
quemourut Isi-m-kheb, fille de Masahirta; aussi sa tente trouvée
dans la cachette de Deir-el-Bahariporte
à la fois les cartouches
de son grand père et les titres de son père'. Masahirta, queson
pèredestinait à lui succéder, ne survécut
pasà sa
fille etPinedjem essaya à nouveau de se passer du grand prêtre.
Cette tentative ne futpas heureuse; elle amena un soulèvement
à Thèbes, et l'ordre ne fut rétablique grâce
à là déportation
dans les oasis desplus
mutiris.Pinedjem
crutprudent
de satis-
faire aux désirs des habitants de laHaute-Egypte,
et il leur en-
voya comme grand prêtreson fils
Râ-men-kheperen l'an XXI2.
Lorsque Pinedjem mourut, lesceptre
sortit de la maison des
Premiers Prophètes d'Ammon et
gmonta sur le trône. Tanis et
Memphisfurent tour
à tour sa résidence, tandis que Râ-men-kheper gouvernaitla
Thébaïde.
Lepontificat
deRâ-men-kheper
dura au moinsquarante-huit
ans 3, sousPinedjem
etAmenophtis. Dans
toute la Haute-Égypte
1. Émile Brugsch, La tente funéraire cle laprincesse Isi-m-kheb, et M. R., p. 584.
2. Inscription Maunier.
3. Bande 105.
REVUE ARCHÉOLOGIQUE
il fit élever des constructions à Hibeh, àKarnak, à
Louqsor, à
Gebelein on trouve son nomestampé
sur desbriques, accolé à
celui de sa femme Isi-m-l;heb. Cette dernière n'estpas
la fille de
Masahirtaqui, ainsi
que ,nol.ls l'avons vu plus haut, était morte
avantque Râ-men-kheper
futgrand prêtre il faut bien observer
aussi que l'Isi-m-kheb pour laquelle on a fait la tenten'était pas
grande prêtresse d'Ammon, mais
simple prêtresse des dieux dePanopolis
lesparents de la femme de
Râ-men-kheper
nous sont donc inconnus. Enfin une troisième Isi-m-kheb vient
encore se placerdans le tableau
généalogique de cette famille.
C'est celle pour laquelle avait été faitprimitivement le cercueil
usurpé par Nési-hhonsou,. et qui est fille deRâ-men-kheper,
comme leprouve la mention
O 1, et à laquelle appartiennent les sellettes -en
bronzemarquées Il est
probable
que Râ-men-kheperavait une autre femme non encore connue,
car ce n'étaitpas l'usage que
la mère et la fil.leportassent le
même nom, peut-êtreest-ce une des
dontla
place ,est si difficile trouver'.
1. Mention deux fois répétée sur le second couvercle du cercueil (Guide
Maspero, n° Notice, 1892, n° 1196).
2. Il y en a au moins deux. L'une est celle qui a usurpé le cercueil d'Isi-m-
kheb, fille de Râ-men-kheper, et qui se qualifie C'est à
elle qu'appartiennent les autres décrets d'Ammon qui la disent fille de
Aest
probable,mais pas certain, qu'elle eut pour père
le Smendès de l'inscription du pylône de Karnak. L'autreNesi-khonsou, est
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA SSIe DYNASTIE ÉGYPTIENNE 87
Les datesse rapportant
autemps
de cegrand prêtre
sont rares.
Nous n'avons queles années XXI et XXV de
Pinedjem. les an-
nées VI et VII d'Amen-m-aptsur des bandes'
employées pour
une des réparationsdu maillot de Séti.
Après Râ-men-kheper, la chargede
premier prophèie d'Am-
mon passa à (Smendès) qui ne paraît pas avoir
exercé longtemps l'autorité, et dont le nom 'n'a été trouvéque
sur des pendeloques.
Pinedjem II, autre fils deRâ-mea-kheper, lui succéda avant
l'an XXIId'Amenophtis
et vit la fin de cerègne d'un demi-
siècle de durée. Pinedjem avait épousé sa demi-sœur Isi-m-kheb,
fille de Râ-men-kheper1. La descendance de ce dernier était si
nombreuseque
le partagede ses biens avait amené de grandes
difficultés. Il fallut une ordonnancedePinedjem, soi-disant dictée,
par Ammonpour régler
leslitiges c'est le grand texte gravé
sur lepylône
de Thotmès III à Karnak. Les années V et VI men-
tionnées dans cette inscription se rapportent aurègne d'Amen-
siqui
était monté sur le trône après Amenophtis. En l'an VIII, il
consacrait des bandes delinge employées plus tard lors de
l'ensevelissement de Her-ub, fille de Râ-men-kher et d'Isi-m-
kheb en l'an XVI les momies royales subissaient un nouvel
exode (inscr. G.) et étaient transférées dans da tombe de An-
hapu.
Amen-si, qui avait rebâti le sanctuaire de Tanis, eutpeut-être
un successeur encore inconnu, queles Grecs appelent Psinachès,
puisPsusennès II monta sur le trône. C'est le cartouche de ce
dont le papyrus est conservé à Paris au Musée Guimet.
1. Briques de Hibeh et Gebelein.
88 REVUE ARCHÉOLOGIQUE
souverain quiest écrit
c
sur la statue du Nil
conservée au British Museum1.
Nési-khonsou, femme de Pinedjen, mourut en l'an V de ce
règne (inscr. H)et fut enterrée dans le
puitsde Deir-el-Bahari
en l'an X tous les personnages royauxretrouvés par
M. Mas-
perovenaient
partagersa
sépulture (groupe I). Ce dut être un
des derniers actes de Pinedjemen l'an XII nous trouvons à
saplace
son fils, qui se nommait comme le sôuve-
rain, bande 95).La momie de
Pinedjem déposée probablement
d'abord dans un tombeau particulierfut transportée
dans la ca-
chetteroyale
en l'an XVI(inscr. J).
Le roi Psusennès mourut le premier et avec lui disparutla
XXIe dynastie;une autre famille, que Manéthon appelle
Bubas-
tite, et dont ChechanqIe° fut le chef, monta sur le trône.
Peut-être à ce moment le grand prêtrePasebkhannut obtint-
il lapermission
de prendrele cartouche; ce serait à lui
qu'aurait appartenule pommeau
de canne en ivoire marqué
Il ne survécut pas longtemps au
changementde
dynastie entre l'an V et l'an X deChechanq
il
mourait et était remplacé par Auput,fils du nouveau souverain
..Ces modifications dans la transmission du pouvoirne
paraissent
1. Je soupçonne fort que lesigne est
fautif et mis pour. Le nom d'Ho-
rus n'a rien à faire dans ce cartouche, tandis que et l'article
s'écrit rarement avec seul. Un nom analogue à celui de Pa-seb-khâ-n-nut,
est celui de que porte une momie du Musée de Gizeh.
Si les cartouches des deux Psusennès sont identiques, ce serait au second.
qu'on devrait la 'construction du mur d'enceinte de Tanis. Le cartouche
appartiendrait à ce second Psusennès, et non au premier
dont, à son tour, le prénom serait inconnu.
2. Wiedemann, dans la Zeitsehrift, 1882, p. 88; M. R., p. 679 et 728.
3. Bandelettes de Djot-ptah-au-f-ankh. M. R., p. 573.
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA, XXIE DYNASTIE ÉGYPTIENNE 89
pasavoir amené de troubles dans l'État; je crois qu'il
faudrait
des preuves palpables pour admettre, comme on le fait généra-
lement, unedéportation
de la famille de Piuedjemen Nubie1.
L'hypothèsene
reposeabsolument que
surl'analogie
du nom
du fils de Her-hor avec celui des q quifon-
dèrent un royaumeà
Napata,et
s'emparèrentun
peu plustard
del'Egypte.
On voit parce résumé
que je m'écarte sensiblement de la
liste de correspondancedes
règneset des pontificats
dressée par
M. Maspero;un tableau
analogue à celui quece savant avait
établi faciliterala comparaison:
1. M. R., p. 740