Post on 12-Sep-2018
LES PERSONNAGES
La famille impériale :
Louis Ier le Pieux empereur d’Occident
Judith de Bavière impératrice d’Occident
Charles fils de Louis Ier et de Judith
Lothaire fils aîné de Louis Ier
Pépin et Louis autres fils de Louis Ier
Les sept élus de Charlemagne :
Roland héros légendaire, ami de
Charlemagne
Éginhard savant, secrétaire de Charlemagne
Efflam comte de Glay-Acquin, filleul de
Charlemagne
Amaury Bayard fils du comte Bayard, fidèle de
Charlemagne
Barthold le Frison commandant en chef des flottes de
Charlemagne
Hervé de la Tour fils du général en chef des armées
de Charlemagne
Guillaume conseiller de Charlemagne
du Plessis
Autres personnages importants :
Landrik écuyer du comte Efflam de Glay-Acquin
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Clothilde épouse d’Efflam
Nominoë duc de Bretagne
Morona druidesse bretonne et veuve du roi
Morvan
Ganelon beau-frère de Charlemagne, traître
Tailledru valets du comte de Glay-Acquin
et Coupesoif
Romarik cousin de Landrik
Janika servante et amie de Clothilde
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Première partie
Les sept épées du moine
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En ce mois de mai 833, Landrik et son chien couraient
dans la forêt depuis des heures. Pourtant, ni l’un ni
l’autre ne montrait le moindre signe de fatigue. Landrik,
un colosse en pleine force de l’âge, allait de son grand
pas élastique sur ses sandales de cuir. Tann, un superbe
dogue, le précédait. À une croisée de chemins, ils virent
déboucher sur leur droite un cheval au galop. Le cavalier
tira sur les rênes et arrêta sa monture.
–Je suis bien sur la route qui mène au château de
Glay-Acquin ? demanda-t-il.
C’était un moine, mais un moine qui se tenait en selle
avec l’aisance d’un chevalier. Son long manteau de
bure* était tout poussiéreux, preuve qu’il avait fait un
long voyage.
– Oui, répondit Landrik. Tournez à gauche au prochain
chemin. Vous verrez le château à votre droite en sortant
de la forêt.
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– Je vous remercie, mon fils, dit le moine. Savez-vous
si le comte Efflam est sur ses terres actuellement ?
– Oui, répondit Landrik, puisque je suis là.
Le moine l’examina avec attention. L’homme était
vêtu d’une simple tunique de chanvre beige, et de braies*
de même teinte. Ses souples sandales de cuir étaient lacées
sur les mollets. Il ne portait pas l’épée, signe distinctif
de la noblesse, mais un scramasaxe, le sabre court des
soldats francs.
– Seriez-vous son écuyer ?
Le visage de Landrik s’éclaira :
– Tout juste, mon père ! Je suis son écuyer depuis
dix ans.
Le moine sourit sous son capuchon et, regardant le
splendide molosse d’un œil connaisseur, ajouta :
– Vous avez là une bien belle bête.
– C’est Tann, répondit Landrik avec fierté. Mon
meilleur compagnon. Je l’ai dressé moi-même. Nous
revenons de la chasse.
Et Landrik frappa de la main sur la gibecière* bien
remplie qu’il portait en bandoulière.
– Nous rentrons justement au château de Glay.
Suivez-nous.
Sans attendre la réponse, Landrik siffla son chien
et reprit sa course.
– Peste, pensa le moine en pressant sa monture.
Ce diable d’homme court aussi vite que mon cheval
galope.
Il faut dire qu’en ce temps-là les routes n’étaient que
de mauvais chemins caillouteux, et les coursiers
ressemblaient plus à de lourds chevaux de labour qu’à
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des pur-sang. Néanmoins, Landrik était sans conteste
le meilleur coureur de Bretagne.
***
Le château de Glay-Acquin, comme la plupart des
châteaux de cette époque, était une sorte de grosse
ferme en bois. Autour du logis principal et de la vaste
cour se groupaient les écuries, les granges, les greniers
et les chaumières des serviteurs. L’ensemble était
entouré d’une double palissade d’épieux, que dominait
une tour de guet. La contrée était paisible en ce moment,
le portail était ouvert et Landrik entra dans la cour,
suivi du moine. En cette fin d’après-midi, il régnait
dans l’enceinte du château une grande activité : les
palefreniers rassemblaient les chevaux pour la nuit,
les vachers poussaient leur troupeau dans l’étable pour
la traite, et les porchers ramenaient vers la porcherie
les cochons qui s’étaient égaillés dans la forêt voisine.
Les poules caquetaient, les oies cacardaient, et les
canards cancanaient dans un vacarme assourdissant.
Landrik, habitué à ce tohu-bohu, donna ordre à
un valet de s’occuper du cheval du moine et lui
demanda où se trouvait le comte Efflam.
– Il est près de l’étang, avec madame Clothilde.
– Le comte Efflam est donc marié ? demanda le
moine tout en marchant.
– Oui, dit Landrik, il est marié d’hier. Il a épousé
une orpheline qu’il avait recueillie enfant. Quand
madame Clothilde est devenue une belle jeune fille, il
en est tombé amoureux, et je le comprends ! Elle est aussi
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bonne que belle, et nous sommes tous heureux de
l’avoir pour maîtresse.
Clothilde et Efflam étaient assis sur un banc auprès
d’un étang où évoluaient des cygnes et des grues domestiques.
Ils étaient tous deux vêtus à la mode franque : Clothilde
avait une longue robe de lin bleue recouverte d’un
manteau d’un fin lainage de la même couleur, mais
plus court et bordé d’un large galon de soie brodé de
fils d’or. Ses cheveux blonds étaient serrés sur la nuque
en une lourde tresse. Efflam portait une courte tunique
de lin de couleur rouille, serrée à la taille par une large
ceinture richement brodée, et des braies de laine noires.
Quand le moine aperçut Efflam, il ordonna à
Landrik d’une voix brève :
– Laisse-nous maintenant.
Landrik s’immobilisa, ne quittant pas des yeux le
visiteur. Le comte Efflam vint à sa rencontre. Les deux
hommes se dévisagèrent en silence : ils étaient tous
deux de haute taille, tous deux d’allure imposante.
Le visage du comte, encadré de cheveux noirs, respirait
la franchise. Le visage du moine était à moitié dissimulé
par le capuchon de son manteau.
– Qu’as-tu donc à me dire, moine ? demanda Efflam.
– Filleul de Charlemagne, répondit le moine avec
gravité, je t’assigne* rendez-vous dans un mois, au
coucher du soleil, sur la rive gauche du Rhin, en face
de l’île de Nonnenwerth, qui se trouve à mi-chemin
entre Cologne et Coblence.
– De quel droit m’assignes-tu ? répliqua le comte.
Pour toute réponse, le moine rejeta son manteau en
arrière, découvrant deux épées. Il en appuya une contre
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le banc et, sortant l’autre de son fourreau, il montra du
doigt trois mots qui y étaient gravés. Efflam avait été
élevé à la cour de Charlemagne, il savait donc lire et
écrire. Il se pencha sur l’épée :
– Charles et paix, dit-il en pâlissant.
Puis il se tourna vers sa jeune femme et lui entoura
les épaules de son bras.
– Moine, dit-il, sais-tu que je suis marié d’hier ?
– Je le sais.
– N’ai-je point assez guerroyé pour l’empereur
Charlemagne ? Ne puis-je enfin vivre en paix sur mon
domaine ?
– Souviens-toi de ton serment, dit le moine.
– Je m’en souviens, murmura Efflam avec accablement.
Il releva bientôt la tête et déclara :
– Je partirai dans huit jours.
– Dans huit jours il sera trop tard, répliqua le moine.
Il te faut partir demain et porter la seconde épée au
comte Bayard. Tu le trouveras au camp de Bayeux, en
Neustrie*. Je repars à l’instant. Donne-moi un cheval
frais.
Efflam fit signe à Landrik d’approcher.
– Tu donneras une bonne monture au moine. Toi
et moi, nous partirons demain matin pour un long
voyage. Nous emmènerons deux valets ; choisis-les
toi-même. Occupe-toi de tout. Les quelques heures qu’il
me reste, je les dois à ma femme.
Puis, ayant salué le moine, il prit la comtesse par
la taille et ils s’éloignèrent.
– De quel serment s’agit-il ? demanda Clothilde.
– Il y a un mystère dans ma vie, répondit Efflam.
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Si je ne t’en ai pas parlé, c’est que j’ai promis le secret
à l’empereur Charlemagne sur son lit de mort. J’espérais
pouvoir vivre ici heureux près de toi, mais il me faut
obéir à quiconque me présente cette épée. Il y va de
mon honneur.
– Dans ce cas, dit Clothilde, tu dois partir, et moi,
je dois t’attendre.
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Le lendemain, quatre cavaliers traversaient l’immense
forêt bretonne. Efflam chevauchait en tête, Landrik le
suivait, portant fièrement au côté l’épée d’Efflam.
– J’ai maintenant l’épée du moine, avait déclaré Efflam,
et nul n’est plus digne que toi de se servir de mon épée.
Venaient enfin les deux valets. C’étaient deux frères
jumeaux : mêmes larges épaules, mêmes cheveux en
broussaille. Mais l’un ne manquait jamais une occasion
de se bagarrer, et l’autre aimait le vin plus que de raison.
On les nommait Tailledru et Coupesoif. Landrik les avait
choisis pour leur force et leur courage.
Au soir, ils atteignirent la plaine au milieu de laquelle
s’élève le mont Dol. En son sommet, un gigantesque
brasier éclairait une scène étrange : sur la pierre plate d’un
dolmen* se tenait une femme, vêtue d’une robe blanche
et brandissant une faucille d’or qui resplendissait à la
lumière des flammes. Autour d’elle, une foule innombrable
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chantait. Par moments, les chants s’arrêtaient et la
prêtresse parlait à la foule.
– C’est nuit de pleine lune, murmura Landrik. Les Bretons
qui ne sont pas convertis au christianisme se réunissent
chaque année sur le mont Dol pour y célébrer leur culte.
N’y allons pas, messire. Faisons un détour.
– Pourquoi ? demanda Efflam. Les druides* ne sont pas
dangereux, que je sache.
– Vous avez raison, mais cette druidesse est Morona,
la veuve du roi Morvan mort en combattant contre l’empereur
Louis. Elle a juré de venger son époux en soulevant son
peuple.
– Comment sais-tu cela ? s’étonna Efflam.
– Messire Efflam, vous êtes devenu breton parce que
l’empereur Charlemagne vous a donné le château de
Glay-Acquin pour vous remercier de vos services ; mais
moi, je suis breton depuis toujours. Et vous ne parlez pas
notre langue. Nos druidesses ont des pouvoirs magiques,
et Morona est la plus puissante d’entre elles. Passons notre
chemin, croyez-moi.
– Je suivrai ton conseil, dit Efflam.
Ils contournèrent le mont Dol à l’abri de la forêt et firent
halte quand le mont eut disparu dans la nuit.
Tandis que Tailledru et Coupesoif construisaient une
hutte de branchages et allumaient un feu pour réchauffer
quelques galettes et surtout éloigner les bêtes sauvages,
Efflam demanda à Landrik :
– Que disait Morona ?
– Elle disait ce qu’elle répète sans cesse depuis dix
ans : le peuple breton doit se soulever contre l’envahisseur
franc, et Morona prendra la tête de leur armée.
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– Mais les Francs ne sont pas des envahisseurs !
s’exclama Efflam. Jamais l’empereur n’a voulu détruire la
nation celte. Il veut seulement unifier l’Empire.
Landrik haussa les épaules :
– Allez donc faire entendre cela à une femme, une
reine dont le roi est mort au combat !
***
Ils se remirent en route au petit matin et parvinrent
vers le milieu du jour dans un paysage dévasté : villages
incendiés, cultures ravagées.
– Les Normands ! murmura Efflam. Ils sont donc venus
jusqu’ici !
Ils atteignirent le camp de Bayeux au coucher du
soleil.
– Qui va là ? demanda la sentinelle.
– Le comte de Glay-Acquin. Je désire parler au comte
Bayard.
– Le comte Bayard ne reçoit personne. Il a été grièvement
blessé durant la bataille contre les Normands.
– J’ai un message urgent pour lui. Laissez-nous entrer,
moi et mes gens. Nous attendrons dans la cour.
Le capitaine de la garde revint bientôt en courant :
– Le comte Bayard va vous recevoir, messire.
– Attends-moi ici, ordonna Efflam à Landrik.
Landrik s’assit sur une meule de foin et surveilla les
jumeaux : Tailledru cherchait déjà querelle à un soldat et
Coupesoif avait découvert un tonneau qui l’attirait irré-
sistiblement. Landrik les ramena à ses côtés.
– Le comte a dit d’attendre. Attendons.
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– Attendre quoi ? demanda Tailledru qui n’aimait pas
l’inaction.
– Rien, répondit Landrik laconiquement. Attendre,
c’est tout.
– Tout, ce n’est pas rien, grommela Coupesoif.
Landrik leur jeta un regard si noir que, résignés, ils
s’assirent.
Dans la salle principale du château, un lit avait été
dressé sur une estrade ; le comte Bayard y reposait, soutenu
par de nombreux coussins qui le maintenaient assis. À la
droite du lit, un moine récitait les prières des mourants.
Au pied du lit se trouvaient, comme le voulait la coutume
du temps, le destrier du comte et ses trois lévriers favoris
qui gémissaient plaintivement. Dans un angle de la salle,
la comtesse était assise, entourée de ses enfants.
Lorsqu’il vit entrer Efflam, Bayard eut un mouvement
de joie :
– Je suis heureux de te revoir. Qu’as-tu à me dire ?
Efflam prit la main du mourant et la serra. Puis il
sortit la seconde épée de son fourreau, la lui montra et
prononça les deux mots sacramentels :
– Charles et paix !
– Charles et paix, répéta Bayard en écho.
Il se redressa, comme galvanisé, puis retomba sur ses
oreillers.
– Amaury, appela-t-il.
Un adolescent s’avança et mit un genou en terre au
chevet de son père.
– Amaury, dit Bayard. J’ai prêté un serment autre-
fois : tu respecteras ce serment. Le comte de Glay-Acquin
t’en dira plus. Tu partiras avec lui. Tu prendras mon
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cheval ; il m’a conduit à la victoire, il t’y conduira aussi.
Il eut un dernier sourire. Le cheval hennit, les chiens
hurlèrent lugubrement. Le comte Bayard venait de rendre
son âme à Dieu.
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Le rendez-vous
sur le Rhin
Par une belle soirée de juin, Efflam et sa suite atteignirent
la rive gauche du Rhin à l’endroit indiqué par le moine.
Landrik scruta l’horizon à la recherche d’un signal
quelconque.
– Croyez-vous, messire Efflam, que nous soyons à temps ?
– Cela fait exactement un mois que nous sommes
partis ; nous sommes exactement en face de l’île de
Nonnenwerth, et le soleil ne va pas tarder à se coucher.
Nous sommes en temps et en heure. Attendons.
Cette fois, Tailledru se garda bien de demander ce
qu’il fallait attendre. Il obéit.
Le soleil disparut, happé par la forêt.
Soudain Tailledru s’écria :
– Il y a une barque là-bas, devant l’île.
Efflam regarda dans la direction indiquée.
– Je ne vois rien, dit-il.
– Tailledru a des yeux de lynx, expliqua Landrik.
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Il y voit de nuit comme de jour. S’il voit une barque, c’est
qu’il y a une barque.
Effectivement, un bateau apparut bientôt avec trois
hommes à bord : deux rameurs et un chevalier casqué
et masqué. Le bateau accosta et le chevalier se leva de
son banc :
– Paix et Charles ! dit-il.
– Charles et paix ! répondit Efflam en dégainant à
demi son épée.
– Embarquez.
Amaury l’imita, répétant lui aussi le mot d’ordre.
Le chevalier le regarda avec attention.
– Ce n’est point le comte Bayard.
– Le comte Bayard est mort, répondit Efflam. Voici
Amaury, son fils aîné.
– Bayard mort ! dit le chevalier avec une vive émotion
dans la voix. Venez, Amaury.
Quant à Landrik et aux valets, ils reçurent l’ordre
de mener les chevaux dans un enclos, caché derrière
les sapins, et d’attendre avec d’autres écuyers et valets.
– Encore attendre ! grommela Tailledru.
– Encore et toujours ! renchérit Coupesoif.
Mais lorsqu’ils atteignirent l’enclos, leurs visages
s’épanouirent : il y avait là une nombreuse et bruyante
compagnie formée d’écuyers, de valets, de mules et de
chevaux. Un feu était allumé sous un immense chaudron
qui laissait échapper un fumet tentateur de lard
mijotant avec des fèves et des lentilles. Et on venait de
mettre une barrique en perce ! Tailledru joua des coudes
pour s’approcher de la marmite ; Coupesoif fonça
directement vers la barrique.
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– Holà ! leur cria Landrik. Prenez garde, toi Coupesoif,
à ne pas te soûler, et toi Tailledru, à ne pas te faire
abîmer le portrait.
Puis, la conscience tranquille, il s’assit sur l’herbe.
Son maître ne reviendrait pas avant l’aube. Ils avaient
tout leur temps.
***
La barque laissait derrière elle un sillage que la
lune argentait. On entendait seulement le clapotis de
l’eau le long de la coque et, parfois, le hululement d’une
chouette. La barque aborda l’île et les chevaliers
suivirent leur guide sur un sentier qui serpentait à tra-
vers bois. Après un quart d’heure de marche, ils
débouchèrent dans une clairière. Deux ombres se
détachèrent des chênes :
– Paix et Charles ! dirent d’une même voix les
sentinelles.
– Charles et Paix ! répondit le guide.
Une torche s’alluma, tenue par un moine dont le
capuchon dissimulait le visage. Efflam reconnut aussitôt
sa silhouette: c’était le visiteur du château de Glay-Acquin.
– Bienvenue parmi nous, dit le moine. Nous voici
au complet. Nous sommes tous d’anciens compagnons
de l’empereur Charlemagne. Que chacun vienne se
présenter.
L’un des hommes s’avança. C’était un homme âgé,
mais qui semblait avoir conservé toute sa vigueur.
Il retira son casque et dégaina son épée dont la lame
étincela à la lueur de la torche.
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– Je suis Guillaume du Plessis. J’étais conseiller de
Charlemagne.
Les autres chevaliers répétèrent après lui le même
cérémonial.
– Je suis Barthold le Frison. Je commandais les
flottes de Charlemagne.
– Je suis Efflam de Glay-Acquin, filleul de
Charlemagne.
– Je suis Hervé de la Tour, fils du général en chef
des armées de Charlemagne.
Amaury se présenta le dernier :
– Je suis Amaury, fils du comte Bayard.
Le moine laissa alors tomber à terre son manteau
de bure. Il n’eut pas besoin de se nommer, car tous le
reconnurent:
– Éginhard !
C’était en effet le secrétaire de Charlemagne, son
homme de confiance.
– Tu seras notre chef, déclarèrent les chevaliers
d’une même voix.
Éginhard leva la main :
– Il en est un autre plus digne que moi de cet honneur.
S’il consent à se joindre à nous, nous serons invincibles.
Si vous m’entendez sonner l’oliphant*, venez à notre
rencontre.
Cela dit, il gravit la colline.
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