Post on 13-Sep-2018
L’approche du travail en aviculture : spécificités et tour d’horizon des travaux menées ces 10 dernières
années
Journée d’étude des production porcines et
cunicoles
Gembloux
Mercredi 28 novembre 2012
Le travail en élevage, une préoccupation croissante ces
dernières années
« la nouvelle campagne d’affichage dans les zones rurales est une
invitation à se lancer un challenge et à redonner un sens à la vie »
Une préoccupation qui résulte d’un passé pas si récent…
Volume de production agricole totale X 2 (X 3 en aviculture chair)
Population active agricole = 6,2 millions à environ 1 million de personnes
1960 2010
Segmentation de la production
Accroissement des attentes environnementales et BEA
Accroissement des fonctions administratives
Evolution des modes de vie (temps libre, travail conjoints à l’extérieur)
…
Mais aussi, sur la même période…
Evolutions inévitables des systèmes
d’élevage
Impact sur le travail…
Des transformations du travail sous influence d’un contexte socio-professionnel
Les années 1950-1980 : une « citadelle » auto-normée, fortement
soutenue et régulée, « monde monolithique »
Depuis les années 90 : un monde agricole devenu minoritaire, fortement
questionné par la société, dans un contexte économique incertain
Vers une diversification des modèles agricoles
« Méga-farm » « collectifs familiaux »
« exploitation unipersonnelle »
Agriculture « projet de vie »
« L’innovateur pionnier »
La rupture « 35 heures » (fin 90) : recul de la «valeur travail » en
agriculture, aspiration à tirer un revenu à partir d’un temps de travail
comparable au reste de la population
Etudier le travail en élevage, un travail d’équipe…
Généticien Vétérinaire
Des thématiques aux acteurs bien identifiées…
… dont le travail ne fait pas partie
Economiste Zootechnicien Médecin Ergonome
Sociologue Conseiller entreprise
Les spécificités du travail en aviculture
Un atelier (dans sa forme rationnelle) introduit plus tardivement sur les exploitations, comme une activité complémentaire, de diversification
valoriser un excédent de main d’œuvre disponible
L’atelier avicole s’est adapté à la MO disponible, et non l’inverse
Un modèle technique déjà très optimisé dès les origines de la production rationnelle
Un besoin de main d’œuvre très « binaire » au court du cycle : modéré ou insuffisant
Les spécificités du travail en aviculture
Une production à cycle court, réajustement de calendrier facilement possibles (pic de MO)
Atelier avicole = variable d’ajustement « travail » pour les autres ateliers ?
La question travail n’a pas pour autant été négligée en aviculture
Une approche des questions de travail marquée par ces caractéristiques
1. L’approche économique :
quantifier le temps de travail
Pourquoi s’intéresser au temps de travail sur les exploitations ?
Le travail : une ressource de l’exploitation, qui a un impact sur :
le coût de production
la pérennité de l’atelier (« vivabilité », un des volets de la viabilité d’une exploitation)
le revenu des éleveurs (€/UTH)
Une réelle complexité d’approche
une quantité difficile à mesurer
une corrélation très peu évidente entre quantité et qualité
un périmètre de la notion de travail aux contours parfois floues
une variabilité considérable, sans qu’on puisse toujours expliquer rationnellement
3 grandes familles d’outils utilisés pour l’observation des temps dans les productions animales
Analyse de bases de
données intégrant la
question du travail
Approche par tâches Approche globale du
temps : méthode
« bilan travail »
taille de l’échantillon
Approche des temps
très simpliste
Peu d’enquêtes
Volume de données
associées
Références souvent très
précises
mesure fine de la
variabilité
Méthode lourde (jusqu’au
chronométrage)
Approche centrée sur
l’atelier (au mieux)
Souvent chez des
éleveurs spécialisés
Temps global pas toujours
égal à la somme des temps
de chaque tâche
Approche courante
en aviculture
Approche des temps plus
grossière
Analyse temps par atelier
ET pour l’exploitation
méthode adaptée aux
exploitations mixtes,
comparaison entre productions
Enquête relativement légère
Difficile de caler des
temps avicoles avec
autres ateliers (temps
glissants)
Quelques résultats sur les temps de travaux
y = 1265,5x + 755,66
R2 = 0,3925
0
1000
2000
3000
4000
5000
6000
7000
8000
9000
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5
Production Productivité du travail
moyenne calculée
(m²/UTH)
Poulet standard 2 021
Dinde medium 2 094
Poulet Label Rouge 1 011
Dimension atelier (en m²)
POULET STANDARD
Forte variabilité des temps
Productivité observée sensiblement inférieure aux valeurs empiriques régulièrement évoquées
Analyse de l’Enquête Aviculture 2008 (Agreste)
Main d’œuvre avicole (en UTH)
Une productivité qui varie peu en fonction du degré de spécialisation
La variabilité de la productivité s’accroît par contre beaucoup avec la spécialisation
0
2 000
4 000
6 000
8 000
10 000
12 000
0 1 2 3 4 5 6Moins de
25%
Entre 25% et
49%
Entre 50% et
74%
Entre 75% et
99%
Egale
100%
Productivité (en m²/UTH)
Degré de
spécialisation
POULET STANDARD
Quelques résultats sur les temps de travaux
Quelques résultats sur les temps de travaux
ESTIMATION DU TEMPS DE TRAVAIL PAR LOT
N° du Bâtiment : Lot N° :
Surface : 1400 Espèce :
TEMPS / JOUR NOMBRE DE NOMBRE DE NBRE TOTAL
/ PERSONNE PERSONNES JOURS / LOT D'HEURES
Arrivée des poussins 90 3 1 270
Démarrage :
surveillance 60 1 1 60
abreuvement, alimentation 30 1 1 30
enlèvement, nettoyage du 240 2 1 480
matériel de démarrage 0
Surveillance quotidienne après
la phase de démarrage 0
abreuvement, alimentation 90 1 96 8640
Interventions diverses:
paillage, entretien de litière 120 2 21 5040
vaccinations, traitements 240 1 1 240
pesées 30 1 4 120
baguage 270 8 1 2160
Enlèvements: 240 9 1 2160
Préparation + pesée camion 270 1 1 270
0
Nettoyage:
démontage du matériel 90 4 1 360
lavage du bâtiment 1200 1 1 1200
balayage 120 1 1 120
enlèvement du fumier 360 2 1 720
lavage du matériel 300 2 1 600
désinfection, désinsectisation 90 1 1 90
Epandage du fumier, lisier 600 1 1 600
Préparation du bâtiment:
litière 480 2 1 960
remise en place du matériel 420 2 1 840
cloisons 60 2 1 120
Travaux divers :
petites réparations 360 1 1 360
commande aliment et divers 150 1 1 150
entretien des parcours 14 1 1 14
entretien des abords 240 1 1 240
NOMBRE TOTAL DE MINUTES DE TRAVAIL POUR LE LOT 25844
Quelle espèce?surface
en m²
effectif
moyen
animaux
durée
du lot
(j)
nbre
totale
heures
sur le lot
volume
horaire
par
semaine
poule repro 1 100 9 420 342 2 289 47
poulet standard 1 020 21 420 52 118 16
poulet label 390 4 290 91 138 11
dinde repro 1 413 3 116 235 2 021 60
dinde standard 1 070 8 025 130 339 18
cane de barbarie
repro1 180 2 615 512 2 615 36
canard standard 650 8 970 100 212 15
Approche par tâches
Méthode « bilan travail »
Exemple Système Lait + volailles + cultures
Travail « de saison » en aviculture : toutes les tâches ponctuelles de l’atelier (mise en place,
enlèvement, nettoyage,…)
Travail « d’astreinte » en aviculture : toutes
les tâches récurrentes de soins aux animaux
(surveillance, litière,…)
Temps de travail – Comparaisons multi-espèces des bilans travail
Filière UGB
Travail
d'astreinte
(h/an)
Bovin viande 134 2 110
Volaille chair 1 500
Pondeuses 3 300
Ovin viande 96 2 540
Bovin lait 96 2 990
Porc 3 510
Caprin lait 56 3 550
Ovin lait 72 3 590
Caprin
fromager 19 5 080
TOUS 100 2 800
Quantification du temps de travail
Des outils variés, pour des usages divers
Une méthodologie « bilan travail » bien adaptée au conseil et à l’observation des temps (globalité, comparaison entre filières)
Une approche quantitative qui amorce des questions plus qualitatives sur les conditions de travail (souplesse, marges de sécurité…)
L’approche temps de travail : approche indispensable mais insuffisante à elle seule
Quelle validité pour des références de productivité de travail lorsque la variabilité est si forte ?
Productivité de travail = un critère typologique incomplet…
2. Les autres angles d’approche de la question du travail
Les autres angles d’approche du travail
Au-delà de la thématique « temps de travail » : d’autres dimensions du travail
Santé / sécurité
Ergonomie
Organisation / gestion de la main d’œuvre
Identité des éleveurs
Conditions de travail
Améliorer les conditions de travail
Enjeux : faciliter le travail (vieillissement des éleveurs),
améliorer l’image des productions
Les thématiques explorées :
Caractérisation des tâches « pénibles » : nettoyage-désinfection, enlèvements (ITAVI)
Le ramassage mécanisé des volailles : évaluer la diversité des systèmes, l’impact sur la production, les modalités d’organisation, les coûts, la sécurité des chantiers (Chambres d’Agriculture, MSA, ITAVI)
Réduire les risques pour la santé
Enjeux : limiter les impacts et les risques sur la santé des
éleveurs d’un élevage en bâtiment, dans une ambiance
confinée
• Travail en bâtiments et pathologies respiratoires – Poussières, émissions gazeuses (ammoniac, monoxyde de carbone), germes (bactéries et moisissures), produits désinfectants : part importante d’éleveurs souffrent de troubles respiratoires (AFSSA, OSTA, 2003 ; MSA)
• Maladies infectieuses et zoonoses : chlamydioses,
mycoplasmes, influenza (H5N1 et H1N1)
• Pathologies d’hypersollicitation (TMS) –étude CRAB et ARACT, 2007, impact des changements de modes d’élevage en
gavage (ITAVI), très fréquent aussi en abattoirs
Perception du travail en aviculture
Quelques études qui aborde le sujet de manière périphérique (stratégie des éleveurs mixtes, multifonctionnalité des exploitations, CASDAR 3D…)
enquêtes sur la perception de l’atelier avicole par des éleveurs mixtes (60)
39 éleveurs avec
un atelier grande
culture
31 éleveurs avec
un atelier Bovin
viande 17 éleveurs avec
un atelier Bovin
lait
32 % en LR et 68 % en standard et certifié
Perception de l’atelier avicole par des éleveurs mixtes
Production sans passion
Atelier qui passionne le plus : 12 % pour l’aviculture, 43 % pour un autre atelier
Une production très (trop ?) rigoureuse, la plus risquée sur un plan technique (56 % des éleveurs)
Certains se sont « pris au jeu »
« il ne faut pas louper le départ »
« une production stressante », on est « jamais tranquille »
Même lorsque l’on est bon sur plusieurs bandes, tout est toujours remis en cause à chaque lot
Une production anxiogène
Sentiments accentués chez les éleveurs standard, moindre chez les éleveurs label
Perception de l’atelier avicole par des éleveurs mixtes
Pas assez d’autonomie et de marge de manœuvre
« on n’a pas de pouvoir de décision, on n’investit pas sur la génétique, on n’optimise pas la stratégie alimentaire, on ne choisit même pas l’aliment, tout est sous contrôle… mais pas le notre »
Un atelier moins « impliquant » que d’autre : fort niveau d’encadrement, intégration, cycle court, grand effectif, exclusivement sur engraissement
Peu d’enjeux de long terme, chaque lot est un nouveau départ
L’atelier qui présente le plus de risque financier (48 %), tous types d’élevage et degré de spécialisation
Des pistes de réflexion pour repenser les relations contractuelles ?
Perception de l’atelier avicole par des éleveurs mixtes
L’aviculture : « je t’aime, moi non plus ! »
Une production d’une très haute technicité, un facteur de progrès pour les autres ateliers aussi (par transposition)
Une évaluation objective de sa « performance professionnelle »
« Sans la volaille, on n’en serait pas là aujourd’hui »
Pour deux tiers des éleveurs, l’atelier avicole était perçu (en 2004) comme l’atelier le plus rémunérateur…sur une longue période, l’atelier qui a permis d’autres investissements sur l’exploitation »
(58 % des éleveurs enquêtés dans le tiers supérieur, 86 % dans la première moitié )
Perspectives
Observer le travail dans les grands collectifs, dans la perspective d’une poursuite de la concentration des élevages
L’objet d’un projet en cours : AAP CASDAR « travail 3D »
Regards croisés sur le travail : organisation, économie, sociologie
Comparaison du fonctionnement de différents « collectifs » de main
d’œuvre en France
Un volet sur le travail dans les élevages d’Europe du Nord
(Danemark, Pays-Bas, Royaume-Uni et Allemagne)
Des premières conclusions riches sur grands collectifs Europe du Nord :
Automatisation/rationalisation des tâches, fidélisation des salariés,
changements du métier et des compétences du chef d’exploitant,
externalisation, pénibilité, réseaux d’information, formation…
Perspectives
Approfondir (et anticiper…) les impacts des mesures réglementaires sur le travail
impact de la Directive BEA pondeuses sur le travail : Pas d’étude sensu stricto pour mener cette évaluation, mais des informations collectées au travers d’études connexes
Peu d’impacts exprimés entre la cage conventionnelle et la cage aménagée sur le travail :
Mises en place plus faciles dans grandes cages (17 /23 éleveurs),
mais enlèvements plus longs stabilité au final
Adéquation entre taille container de livraison et taille de la cage
facilite la tâche
Dans l’idéal : étude d’impact « travail » préalable à toute évolution réglementaire majeure sur modes d’élevage
Nettoyage et désinfection plus longs en cages aménagées
Perspectives
Le travail dans les exploitations mixtes
Rendre le métier toujours plus attractif
Accepter (encourager) le pluralisme des modèles de production ?
Arbitrage entre compétitivité et attractivité
Arbitrage de l’allocation du travail entre ateliers, complémentarités, concurrences, compatibilité…
A rapprocher d’autres interactions entre ateliers dans les cas de mixité
Approche multidimensionnelle du travail – Conclusions
Ne pas réduire le travail à sa seule dimension de moyen de production
L’approche multidimensionnelle : participe à la compréhension de l’attractivité de l’activité avicole et du métier d’aviculteur
La population d’éleveurs est diverses, les attentes aussi
Entreprise
Agricole
Innovation,
créativité
Tradition,
continuité
4- Des entrepreneurs
agricoles qui souhaitent s’adapter aux
évolutions du marché
6- Des agriculteurs
porteurs de projets de vie
et de production
5- Des créateurs
entrepreneurs
développant une
activité dynamique
2- Des agriculteurs
en retrait, traditionnels
3- Des
agriculteurs
dépendants
1- Des agriculteurs
modernistes qui souhaitent
optimiser leurs systèmes
Les évolutions attendues du métier d’agriculteur - Typologie
Merci de votre attention... J. FAIZANT
gallot@itavi.asso.fr
http://idele.fr/metiers/partenariat-r-d/rmt-travail-en-elevage.html