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UNIVERSITE Michel Montaigne - BORDEAUX 3

UFR Sciences des Territoires et de la Communication

Institut des Sciences de l’Information et de la communication

MEMOIRE RECHERCHE Master 2 Ingénierie de la recherche en sciences de l’information et de la communication

spécialité Communication Réseaux et Société

Rôle socio culturel des communautés

virtuelles de patients dans le suivi des

maladies chroniques Vers un nouveau modèle d’éducation thérapeutique ?

Soutenu par Géraldine GOULINET – Juin 2013

Sous la direction de: Didier PAQUELIN, professeur des Universités

Membre du jury : Gino GRAMACCIA, professeur des Universités

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Remerciements

« Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles

que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons

pas qu’elles sont difficiles »

Cet hommage à Sénèque me permet d’ouvrir cette page de remerciements que

je dédie particulièrement à mon mari et mes enfants. Une reprise d’étude après

un parcours professionnel n’est jamais simple.

Se remettre dans un processus intellectuel où toute pensée doit être démontrée

alors que la vie professionnelle nous oblige à agir plus qu’à réfléchir, cet

exercice m’a amené à reconfigurer mon mode de pensée, à réinventer ma

conception de la communication, à redéfinir mon projet de vie.

Sans l’appui quotidien de mes proches qui m’ont soutenue dans toutes les

étapes de cet engagement, à « oser » cette reconversion personnelle et

professionnelle, la tâche aurait été plus difficile.

Un grand merci également à mon directeur de mémoire, Didier Paquelin et à

Gino Gramaccia qui m’ont accompagnée et guidée, chacun à leur manière,

dans ce parcours naissant.

Leurs encouragements à poursuivre mes recherches au-delà de ce mémoire

ont été des signes précieux pour continuer dans cette voie et gagner en

motivation comme en conviction.

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Avant-propos

Elaborer ce projet de recherche a nécessité maintes fois une adaptation de son

angle d’étude. Au carrefour de plusieurs sciences : biologie, sociales,

éducatives, information et communication, l’objet aurait nécessité un travail

clinique sur un corpus de patients afin de lui donner une dimension et un relief

en accord avec la réalité.

C’est pourquoi mon analyse devait porter initialement sur une plateforme web

d’éducation thérapeutique intitulée CEPIA utilisée par le Centre d’Education

Thérapeutique d’Aquitaine. Elle devait me permettre d’observer les usages et

les pratiques en recherche action.

L’annulation de la commande au cours de mon mémoire m’a contrainte à

reconsidérer l’angle d’analyse et définir une nouvelle problématique sur la

question des TIC dans le suivi des maladies chroniques.

En l’abordant par l’approche des sites de communautés virtuelles de patients,

en recherche descriptive, mon objectif aujourd’hui est de relier ces résultats à

un projet futur mettant en scène l’étude des perceptions de patients.

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Sommaire

INTRODUCTION GENERALE

I. Mutation du processus communicationnel de la relati on

médecin patient à l’ère du numérique

1. Les asymétries de la relation médecin patient

2. Le numérique et les mutations du processus communicationnel

II. Construction d’une médiation numérique au sein des

pratiques éducatives

1. Maladies chroniques et dispositifs numériques, enjeux croisés

2. Education et santé, les perspectives de l’éducation thérapeutique ............

III. Place et rôle socio culturel des communautés virtue lles des

patients dans le dispositif éducatif

1. De la communauté à la communauté virtuelle de patients

2. Objet d’étude : CARENITY, BE PATIENT, PATIENT WORLD

CONCLUSION GENERALE

Bibliographie

Table des matières

Annexes

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Liste des abréviations

HAS : Haute Autorité de Santé

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

ETP : Education Thérapeutique du Patient

CNOM : Conseil National de l’Ordre des Médecins

TIC : Technologies de l’Information et de la Communication

ASIP santé : Agence des Systèmes d’Information Partagés de Santé

CNOM : Conseil National de l’Ordre des Médecins

CNAM : Caisse Nationale d’Assurance Maladie

IGAS : Inspection Générale des Affaires Sociales

ALD : Affection longue durée

CM : Case Management

DM : Desease Management

CCM : Chronic Case Management

PM : Population Management

CGEIET : Conseil Général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des

technologies

INPES : Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé

CISS : Collectif Inter associatif Sur la Santé

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INTRODUCTION GENERALE

La santé c’est "pouvoir tomber malade et s’en

relever; c’est un luxe biologique".

Cette citation de Georges Canguilhem1 pour définir la santé comme « une

capacité à surmonter les crises » est un choix fondé pour introduire les

principaux questionnements soulevés par l’objet de ce mémoire de recherche.

Tout d’abord, parce ce que, pour le philosophe, la notion du rapport de l’être

humain à sa vie est le fruit d’une expérience vécue où la maladie, n’est pas un

phénomène anormal mais « la capacité à vivre une autre vie ». Ainsi ce n’est

pas une partie de la vie d’un individu mais l’ensemble de l’organisme qui se

trouve transformé par le pathologique, nécessitant pour le malade,

l’engagement d’une nouvelle réalité.

Mais au delà de la perception du patient face au pathologique, c’est toute la

posture relationnelle du médecin face au malade que se trouve revisitée par

son approche : « C’est donc bien toujours en droit, sinon actuellement en fait,

parce qu’il y a des hommes qui se sentent malades qu’il y a une médecine, et

non pas parce qu’il y a des médecins que les hommes apprennent d’eux leurs

maladies ».

Cela étant, cette transformation est-elle « intrinsèquement biologique » ou

l’environnement n’a-t-il pas une incidence directe ou indirecte sur ces

changements ? C’est là les questions posées dans les « nouvelles réflexions

concernant le Normal et le Pathologique ». En corrélation des travaux de Michel

Foucault, Canguilhem s’interroge en effet sur la dimension sociale des

changements survenus en raison du Pathologique.

Prenant comme parti pris que « l’homme se débat avec un milieu qui n’est pas

un pur donné mais qu’il construit », santé et maladie sont abordées de manière

1 Georges Canguilhem (1904-1995) philosophe et médecin français, spécialiste d’épistémologie et d’histoires des sciences. Essai sur quelques problèmes concernant le normal et le pathologique (1943), réédité sous le titre Le Normal et le Pathologique, augmenté de Nouvelles Réflexions concernant le normal et le pathologique (1966), 9e rééd. PUF/Quadrige, Paris, 2005.

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globale sur fond de société. Ainsi et au-delà de la médecine pure, le Normal et

le Pathologique s’inscrivent dans système social normé et organisé, capable

d’intégrer une approche globale centrée sur l’individu (Emile Durkheim, 1897)

avec une démarche holistique tenant compte des facteurs externes (Talcott

Parsons, 1951). Le « corps, l’esprit et le milieu » s’appréhendent de manière

multidimensionnelle au regard de facteurs curatifs, préventifs, éducatifs ou

sociaux.

L’introduction de ce projet de recherche en référence à cet auteur permet donc

d’aborder cette réflexion sous le prisme de la sociologie de la maladie, de la

médecine et de la santé où la question sociale sera plus particulièrement

examinée sous l’angle de la communication médecin malade, de l’éducation du

patient et de l’usage des technologies de l’information et de la communication

dans ce processus communicationnel.

Pour conduire celle-ci, l’axe d’étude portera sur le vécu et l’auto-suivi des

maladies chroniques à partir des communautés virtuelles de patients en vue de

répondre à la problématique suivante : quel(s) rôle(s) socio culturels jouent les

communautés virtuelles de patients atteints de maladies chroniques dans la

construction d’un nouveau modèle d’éducation thérapeutique ?

Par le caractère durable et évolutif, souvent associées à une invalidité et à la

menace de complications graves, les maladies chroniques engendrent des

incapacités et des difficultés personnelles, familiales et socioprofessionnelles

importantes. Ce retentissement de la maladie sur la vie quotidienne et sur la

participation à la vie sociale engage aussi, une dépendance vis-à-vis d’une

thérapeutique, d’une technologie médicale, de l’intervention de professionnels

par le besoin de soins médicaux ou paramédicaux, d’aide psychologique,

d’éducation ou d’adaptation. De plus, l’intérêt pour la prise en charge des

maladies chroniques répond à des enjeux politiques et socio-économiques

forts.

En effet, selon un rapport de Juin 2011, la Caisse Nationale d’ Assurance

Maladie (CNAM) annonce les faits suivants : « 1 Français sur 6, soit 9 millions

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de personnes, souffre d'une maladie chronique grave comme le diabète, le

cancer, l'hypertension ou la schizophrénie. Et ces chiffres sont en hausse : le

nombre de personnes atteintes de ces pathologies chroniques augmente

d’environ 4% chaque année depuis 2005. (…). Les patients touchés par une

affection de longue durée (ALD) représentent 15,5% de la population du régime

général, le diabète venant de prendre la première place des affections avec 1,9

million de malades, soit une augmentation de 6,5% l'an dernier et un coût

estimé à environ 10 milliards d'euros par an. Si la tendance se poursuit, les

ALD atteindront les 17 % en 2014 2 ».

Parallèlement, l’usage des TIC (technologies de l’information et de la

communication) dans le secteur de la santé est aujourd’hui un fait avéré. Il

constitue en effet une source d’information sur la santé de plus en plus utilisée

par les individus dans différents pays (McDaid et Pack, 2010) et se trouve

mobilisé à différentes étapes du processus de soins, avant et après la

consultation d’un professionnel de la santé, tout au long de la prise en charge

médicale, par les malades comme par les proches. (Christine Thoër, 2012).

A partir des cadres théoriques de référence portant sur la relation médecin-

patient et sur les usages et appropriations de l’internet-santé, la première partie

de ce mémoire cherchera à comprendre la mutation du processus

communicationnel à l’ère du numérique. Du modèle paternaliste au modèle

interactionniste (Anselm Strauss, 1992) qui institutionnalise d’une part le

malade chronique d’un statut de « consommateur » au concept

« d’empowerment » (Wallerstein & Bernstein, 1988, Lackey, Burke, Peterson,

1987) il sera cherché à démontrer d’une part, la participation de la personne, au

moyen d’une prise de conscience de son état et d’autre part la volonté à agir

pour l’améliorer.

2 COLLEN, Vincent. Diabète, cancer : un Français sur six est pris en charge au titre d’une maladie chronique. In : Les Echos.fr [en ligne]. 29 juin 2011. [Consulté le 4 février 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.lesechos.fr/29/06/2011/LesEchos/20963-15-ECH_diabete--cancer---un-francais-sur-six-est-pris-en-charge-au-titre-d-une-maladie-chronique.htm.

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L’autre point d’interrogation visera plus particulièrement l’interaction de ce

processus avec l’usage numérique afin de corréler avec la littérature les

phénomènes susceptibles d’impacter les comportements des médecins comme

des patients (Jacques Perriault, 2002, Antonio Casilli, 2009).

Ces transformations du système de santé (prévalence croissante des maladies

chroniques, nouvelles modalités de prise en charge et nouveaux usages de

l’internet-santé) posent aussi la question des nouvelles compétences du

médecin et du patient en matière de démarche éducative.

Dans cette logique, c’est la question de l’apprentissage pour assurer la

compréhension des évènements de la vie, pour faire des choix raisonnés et

volontaires (Gilles Hardley, 2009) et pour développer des compétences

spécifiques (Bruner, 1966, Ausubel, 1978, Vygotsky, 1920) qui sera étudié en

deuxième partie de ce mémoire afin d’analyser plus particulièrement la place et

le rôle des communautés virtuelles de patients au sein des pratiques

éducatives et notamment celle de l’éducation thérapeutique du malade

chronique.

Par définition, l’éducation thérapeutique du patient participe à l’acquisition et au

maintien de compétences pour lui permettre de préserver son capital santé. Il

s’agit d’un processus éducatif participatif visant l’appréhension de la maladie

tout en prenant en compte ses caractères psychosociologiques, son vécu et

son environnement. Grâce à l’auto surveillance globale de la maladie, l’auto

mesure de données para cliniques simples, l’adaptation éventuelle des

médicaments, la connaissance et l’action sur les facteurs de risques, la

réalisation de gestes techniques de soins, la prévention de complications

évitables, l’évolution progressive de son environnement, le patient acquière

connaissances et compétences lui permettant de devenir « acteur de sa

santé ».

Après le diagnostic médical de la pathologie, le schéma méthodologique retenu

pour la mise en place d’un processus d’éducation thérapeutique s’appuie

d’abord et prioritairement sur la participation des malades aux décisions

médicales ou/et médico sociales.

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Dans ce cadre, le prisme des technologies et notamment celles de l’information

et de la communication interfère directement sur l’objet de cette étude. Bien

que peu d’études soient menées sur l’usage d’internet auprès des patients

atteints de maladies chroniques, les tendances confirment, malgré tout, une

connexion aux sites communautaires et aux blogs en ligne comme dispositif

numérique principal d’accès à l’information et de partage de connaissances. Et

les motivations de connexion à ce média sont quasi identique que celle d’un

internaute en recherche classique : mieux comprendre ou en savoir plus sur le

diagnostic du médecin, rechercher des témoignages de personnes souffrant

des mêmes pathologies ou être capable de poser des questions précises au

médecin avant d’aller le voir, telles sont les raisons majeures d’un accès au

web selon la dernière étude menée en Mars 2010 par l’organisme « The Pew

Internet & American Life Project3».

Pour mesurer la construction des savoirs et des compétences d’auto-soins et

d’adaptation (HAS, 2007) des patients membres de ces communautés

virtuelles, l’étude portera plus spécifiquement sur l’analyse sémiotique de trois

sites internet français : BE PATIENT, CARENITY et PATIENTSWORLD qui

seront appréhendés comme dispositifs sociotechniques au travers desquels il

sera plus particulièrement étudié les usages et les pratiques sociales (Christine

Barats, 2013).

Pour ce faire, la méthodologie de l’observation ethnographique en ligne

(Josiane Jouet, 2013) permettra, par l’immersion, d’étudier les formes

d’interactions et de transactions (Peter Stockinger, 2004) au sein de ces

communautés en posant comme grille de lecture la recherche d’indicateurs

techniques et sociaux proposés par le dispositif web et ceux déployés dans les

programmes d’éducation thérapeutique.

Partant de l’hypothèse que l’acquisition de connaissances et de compétences

du patient ne s’intègrent plus dans une simple relation pédagogique entre

apprenant (patient) et enseignant (professionnel de santé) mais dans un 3 SUSANNAH, FOX et PURCELL, Kristell. Chronic Disease and the Internet | Pew Research Center’s Internet & American Life Project. In : [en ligne]. [Consulté le 4 février 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.pewinternet.org/Reports/2010/Chronic-Disease.aspx.

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système ouvert (web), la question d’un changement possible de paradigme lié

aux pratiques des communautés virtuelles de patients dans l’application des

programmes d’éducation thérapeutique reste entière.

En s’interrogeant sur les conduites d’acteurs en interaction avec le dispositif et

les logiques d’usage, il s’agira de saisir le sens des phénomènes de

communication complexes des trois sites web composant le corpus de cette

étude par la méthodologie de l’analyse sémiotique situationnelle théorisée par

Alex Mucchieli (2007) et modéliser par Marie-Caroline Heïd (2009) dans son

application aux dispositifs socio-techniques.

La troisième partie de ce mémoire tentera donc de répondre à cette

problématique en dégageant deux tendances : l’émergence de nouvelles

fonctions référentielles au sein de la relation thérapeutique et l’apparition de

nouvelles postures éducatives.

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I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique

Introduction du chapitre Afin de poser les principes fondamentaux de notre angle d’étude, il revient déjà

de se questionner sur les concepts de médecine, de maladie et de malade

dans sa perspective sociale et anthropologique. Cela pour nous permettre

d’analyser et de comprendre plus particulièrement le processus de

communication qui relie le médecin au malade et de caractériser le rôle

d’internet dans celle-ci.

La finalité de cette première partie de mémoire est de qualifier les mutations,

c’est-à-dire les changements, les transformations, les déplacements opérés

avec l’arrivée des dispositifs numériques, pour intégrer les hypothèses

dégagées, à leur application dans les pratiques éducatives du suivi des

maladies chroniques.

Par définition, la médecine est une science, un art, et une technique dont l'objet

est à la fois l'étude du corps humain et de son fonctionnement, ainsi que la

conservation et le rétablissement de la santé4 . Elle est personnifiée par le

médecin, considéré comme l’expert que l’on consulte lorsqu’on est malade5.

Avec l’usage, c’est la personne habilitée à exercer la médecine après avoir été

admise à différents examens sanctionnant plusieurs années d'études

médicales. Enfin, la maladie dans son sens commun, est un état affectant le

corps de l’individu et qui impose de consulter le médecin pour le guérir.

Ce rappel étymologique permet de mettre en relief la dimension sociale et

anthropologique dans laquelle s’exerce la pratique médicale, en fonction des

exigences et des attentes liées à l’environnement et au système de santé

défini. Il invite à s’interroger sur la pratique médicale elle-même et son rapport à

la maladie et au malade.

4 http://www.techno-science.net/?onglet=glossaire&definition=5955 5 du latin medicus –médecin- ou « apte à guérir » ; « qui soigne, guérit »

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Enfin, il caractérise la posture du médecin et du malade en fonction des

motivations, des perceptions individuelles et collectives.

Sans engager une énumération exhaustive des préceptes qui ont construit la

sociologie de la médecine et de la santé, nous retiendrons les pensées de

Talcott Parsons, Eliot Freidson et Anselm Strauss qui ont marqué son histoire

et son évolution, résumées notamment par le sociologue canadien Marc

Renaud (1985)6 . En abordant la maladie comme une conduite et le malade

comme un objet social, l’intérêt pour notre étude est de corréler les travaux de

ces auteurs qui ont contribué à modéliser la relation médecin-patient avec

l’apparition dans le système de santé de la diffusion massive d’Internet comme

source d’information. En effet, l’augmentation au cours des 20 dernières

années de services interactifs et des sites internet dédiés à la santé semblerait

coïncider avec le désir (réel ou supposé) des patients d’assumer plus de

responsabilités dans la gestion de leur propre santé, voire de leur maladie,

renforçant ainsi l’idée de consommateurs actifs de soins et d’information de

santé. Ainsi, il sera recherché comment interagit le média « Internet » en tant

que source d’information et comment ce dernier s’inscrit-il aujourd’hui dans le

processus communicationnel de la relation médecin-patient.

La question développée à partir de ces cadres de référence est de comprendre

comme s’opère cette mutation dans la gestion des perceptions et des

motivations entre le médecin et le patient pour construire des identités

susceptibles de modifier le rôle et les fonctions de chacun. Pour construire cette

hypothèse, la référence à Antonio Cassilli et ses travaux sur la corporiété

(2009) et à Anthony Giddens sur la réflexivité permettront, entre autre, d’y

répondre.

1. Les asymétries de la relation médecin patient

6 RENAUD, Marc et RENAUD, Marc. De la sociologie médicale à la sociologie de la santé [en ligne]. Chicoutimi : J.-M. Tremblay, 2006. [Consulté le 8 avril 2013]. ISBN 1554420075. Disponible à l’adresse http://classiques.uqac.ca/contemporains/renaud_marc/socio_med_socio_sante/socio_med_socio_sante.html.

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A. Contextualisation et approches théoriques Comment définir la relation entre le médecin et le patient ? Est-ce un processus

de communication visant uniquement la transmission d’information d’une

personne à une autre ? Pour la psychologie sociale, la communication est un

des modes d’expression de la relation. C’est un moyen à travers lequel des

relations se construisent et se développent. Aussi, avant d’analyser les

modalités de cette communication, attachons nous à formaliser le cadre

contextuel de la relation afin d’apporter un éclairage complémentaire sur la

relation elle-même. Si le contexte révèle le caractère spécifiquement social

d’une relation, nous retiendrons celui du « rôle « afin de comprendre le rapport

établi entre individualité et contexte.

Le rôle désigne un type de comportement adopté par un individu suivant un

ensemble de normes sociales en réponse à des attentes d’autrui dans un milieu

donné. Un aspect particulier de l’étude des rôles sociaux porte sur la façon dont

ils sont appris et intériorisés en fonction d’une culture donnée.

De ce point de vue, il n’existe pas de relation sans rôle. De ce fait, le terme de

relation « médecin/malade » révèle le fait que l’on est dans un cadre social

particulier qui est celui du contexte thérapeutique; et dans un tel contexte, les

caractéristiques individuelles sont structurées, voire transformées par leur

inscription et leur absorption dans un rôle : le rôle de malade, d’un côté, et celui

du médecin, de l’autre.

Si, l’héritage de l’hippocratisme7 a permis de signifier la relation thérapeutique,

les sociologues se sont davantage intéressés à la relation sociale, c’est à dire à

la rencontre entre deux acteurs (le malade et le médecin), tous deux membres

de groupes sociaux divers et engagés dans une action réciproque (le soin).

C’est en 1951 que Talcott Parsons donne le coup d’envoi à la réflexion

sociologique sur la maladie à travers son ouvrage « The social system ». Avant

lui, il n’y avait que très peu de corrélations entre les variables sociales et

7 Aphorismes d’Hippocrate. Il se distingue par sa volonté de théoriser la pratique médicale, en établissant des procédures et des règles fondées à partir de l’observation des maladies, de leurs contextes, de leurs évolutions Cette méthode d’apprentissage de la médecine, fondé sur des maximes et le par cœur perdurera tout au long de l’histoire du métier de médecin. L’ouvrage constitue une sorte de compilation des réflexions hippocratiques. Proposition sur la thérapeutique, sur le régime des malades: " Pour les maladies extrêmes, ce sont les traitements d'une rigueur extrême qui ont la meilleure efficacité." (Aphor. 1ere section, 6).

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biologiques, en se basant uniquement sur le discours du médecin. Ce que Marc

Renaud confirme comme la règle que « quelqu’un est perçu comme malade

uniquement quand il se dit malade ou se comporte à la façon d’un malade »

devient le fondement des recherches sociologiques visant à comprendre les

raisons du hiatus potentiel entre « l’être » et le « faire », entre l’expérience de

la maladie et la conduite du malade.

L’intuition de Parsons est que le rapport d’un individu à sa maladie est, d’une

certaine manière, la manifestation du rapport que cet individu entretient avec

les valeurs de la société. Dans ce contexte, la maladie, définie comme une

déviance par rapport aux normes sociales, les individus doivent remplir des

fonctions et des devoirs où la médecine permet le contrôle de l’ordre social.

Avec l’hypothèse que le médecin et le malade ont un même but - la guérison -

son approche fait émerger un concept totalement nouveau, celui du rôle du

malade. Assermenté de droits et de devoirs, le patient se voit reconnu dans sa

maladie (bien qu’exempté de ses responsabilités) avec l’obligation de

rechercher l’aide compétente et de coopérer avec le médecin. Cette vision

« paternaliste » de la relation décrit un modèle asymétrique (le médecin est

l’expert qui prend la décision), consensuel (chacun accepte le rôle de l’autre,

puisqu’ils sont complémentaires) et s’inscrit dans la droite ligne des principes

hippocratiques de bienséance8.

L’attribution d’un rôle dédié aux malades amène à s’intéresser plus

spécifiquement « à la gestion des rapports que l’homme entretient avec la

maladie » 9 et plus particulièrement aux comportements de ces derniers,

forgeant ce que David Mechanic identifie comme « Ilness behavior » (1995) et

Erving Goffmann nomme « illness career ».10

8 Dans ce schéma, le médecin entre dans une morale du « bien faire » avec l’obligation d’adapter ses gestes à la fragilité et l’extrême dépendance de celui qui souffre afin de favoriser la guérison du malade. Si ce dernier est exempt de responsabilité, c’est sur le médecin que repose cette dernière au point de décider du bien à la place du malade. 9 MASSÉ, Raymond. Les mirages de la rationalité des savoirs ethno médicaux. In : Anthropologie et Sociétés. 1997, Vol. 21, n° 1, p. 53. DOI 10.7202/015461ar. 10 Avec le concept de carrière, Goffman entendait mettre l'accent sur les aspects « moraux » du rapport à la maladie ou à l'institution, le cycle des modifications qui interviennent dans la personnalité de l'individu avec la prise en charge par le système de soins.

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Ainsi cette perspective reconnaît d’une part le pouvoir du médecin, en termes

d'expertise technique et de statut, et d’autre part le pouvoir du malade, en

terme de perception et de variations comportementales selon l’influence de

facteurs psycho sociologiques, culturels ou économiques. C’est en raison de

ces derniers que la théorie de Parsons trouve ses limites et ce, pour deux

raisons majeures selon Marc Renaud : « sans remettre fondamentalement en

cause l’existence d’un tel rôle de malade, les études montrent qu’en réalité les

gens ne réagissent pas tous de la même manière devant les mêmes

symptômes et que ce concept s’applique mieux au cas de maladie aigüe… Il ne

permet pas de comprendre les affligés de maladies chroniques. Ici en effet, la

maladie n’est pas temporaire et le malade doit donc s’ajuster à une condition

plus ou moins permanente ».

Ce cadre d’analyse ouvre le champs de la réflexion quelques années plus tard

à deux psychiatres, Thomas Szasz et Mark Hollander qui reprennent ce modèle

et proposent dès 1956 plutôt trois modèles de relations thérapeutique,

directement liés à l'état du malade :

- dans le cas de blessures graves, du coma ou d'un patient soumis à une

anesthésie, la relation prend la forme "activité-passivité" : le malade est un objet

passif, alors que le médecin est totalement actif ;

- dans des circonstances moins graves, le malade est capable de suivre en

partie les conseils du praticien et d'exercer une part de jugement, la relation

fonctionne alors sur le mode de la "coopération guidée" ;

- dans le cas des maladies chroniques qui s'étalent dans la durée (diabète par

exemple), le médecin et le malade ne se rencontrent qu'occasionnellement et le

rôle du médecin consiste à aider le malade à se prendre lui-même en charge. Il

s'agit d'une relation qui prend la forme de la "participation mutuelle".

En ouvrant la perspective que la maladie n’est le seul objet social mais que le

malade peut en être également un produit, amène au tournant des années

1970, une nouvelle façon d’aborder la relation médecin-patient.

Sous l’impulsion des mouvements sociaux et contestataires de l’époque

s’élevant contre le pouvoir médical11, les travaux d’Eliot Freidson s’appuient sur

11 PIERRET, Janine. Entre santé et expérience de la maladie. In : Psychotropes. 22 octobre 2008, Vol. Vol. 14, n° 2, p. 47-59. DOI 10.3917/psy t.142.0047.

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l’hypothèse que les différents groupes sociaux (les malades/les médecins) ont

des intérêts divergents. Considérant ces derniers comme des acteurs qui

développent des stratégies en fonction de leurs propres intérêts, le sociologue

dans son ouvrage « la profession médicale » 12 fait apparaitre un nouveau

concept, celui d’une communauté professionnelle détentrice d’un savoir acquis

lors de sa formation et considérée comme « experte » face à une communauté

de profane qui consulte le médecin qu’elle juge « que selon des critères extra-

professionnels ».

Sa logique d’opposition faisant de la relation médecin-patient un modèle

conflictuel met en exergue les systèmes d’interactions et/ou

d’interdépendances liées aux savoirs et aux compétences attribuées à chacun :

« Alors que le médecin partage des connaissances spécialisées, une identité et

un loyalisme avec ses collègues plutôt qu’avec les profanes, c’est de ces

mêmes profanes que dépend son existence. Alors qu’il n’a aucun pouvoir pour

les obliger à utiliser ses services, il dépend du libre choix de clients éventuels

(…) L’exercice de la médecine consiste, par essence, en l’action réciproque de

deux séries de normes différentes et parfois contradictoires »13

Aux antagonismes culturels (culture professionnelle et culture profane) qui

impactent les logiques des acteurs (logique de soin pour le médecin et respect

de la vie quotidienne pour le patient), le sociologue met particulièrement en

évidence la notion d’autonomie professionnelle du médecin.

Perçue comme la capacité acquise par la médecine au début du 20ème siècle

d’évaluer et de contrôler elle-même l’aspect technique de son travail à partir de

ses compétences scientifiques, cette autonomie considérée comme

« technique » favorise le contrôle dominant de la profession y compris sur 12 La profession médicale, Paris, Payot, 1984, 369 p. Traduction française de : Professiono f Medicine. A Study of the Sociology of Applied Knowledge (New York, Dodd, Mead and C°,1973) par A. Lyotard-May et С.Malamoud; préface de С. Herzlich 13 LUNATIC. Eliot Freidson – Influence du client sur l’exercice de la médecine | Bafouillages. In : Bafouillages [en ligne]. [Consulté le 8 avril 2013]. Disponible à l’adresse : http://blog.bafouillages.net/2007/06/12-eliot-freidson-influence-du-client-sur-l-exercice-de-la-medecine/. \line{}Blog consacré aux sciences humaines et sociale en général, à la sociologie en particulier\line

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18

l’environnement socio-économique. C’est en ce sens que son ouvrage analyse

le pouvoir dédié à la profession médicale au sens de communauté 14 (intérêts

partagés et d’identité commune) alors que l’autonomie du malade est

davantage perçue, non en qualité de compétences, mais en capacité de

décision et de négociation uniquement lors de la consultation. Ce constat repris

par Isabelle Baszanger (1986) spécifie l’asymétrie relationnelle en indiquant

que « toutes les interactions médecins-malades sont sous-tendues par un

conflit de perspectives qui vient renforcer la nature structurelle dissymétrique

des positions de chacun dans cette relation ».

Cette divergence d’intérêts, porteuse de conflits qui définissent les situations

d’actions est le cœur de la théorie de l’ordre négocié soutenue par Anselm

Strauss (1978). Si cet auteur a concentré une partie de sa réflexion aux

questions des mécanismes organisationnels, c’est sous l’angle de

« trajectoire » que nous focalisons l’attention.

Strauss remarque en observant le déroulement de l'activité médicale qu'elle

s'inscrit dans un processus complexe, orientée vers la réalisation d'un objectif,

qui engage le malade et les acteurs dans sa réalisation.

Partant de cette base, il définit une unité d'analyse qui lui semble fondamentale

pour étudier la production et la négociation de l'ordre social, la trajectoire.15.

La définition de Strauss indique donc que l'ensemble des acteurs est impliqué

dans le travail médical, aussi bien le médecin que le patient lui-même. En effet,

la coopération que peut apporter le patient dans le bon déroulement de l'activité

médicale est fondamentale – et de même, le médecin travaille à ce que le cours

de la maladie évolue favorablement. Complétant la théorie de Parsons, Strauss

montre donc que le patient doit jouer son rôle en suivant certaines normes, qui

sont propres à son statut de malade.

14 GOODE, William J. Community within a community: the professions. American Sociological Review, 1957, vol. 22, no 2, p. 194-200. 15 « Le terme de trajectoire, (...) fait référence non seulement au développement physiologique de la maladie de tel patient mais également à toute l'organisation du travail déployée à suivre ce cours, ainsi qu'au retentissement que ce travail et son organisation ne manquent pas d'avoir sur ceux qui s'y trouvent impliqués. », (Strauss, p. 143)

Page 19: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

19

Complexifiées par ces incessantes négociations entre les différents acteurs qui

entrent dans sa réalisation, les trajectoires sont affectées par de fortes

contingences telles que les évolutions technologiques, nécessitant une

adaptation permanente. Si le diagnostic médical permet d’établir un schéma de

trajectoire, les complications médicales, les erreurs, le possible refus de

coopération du patient, rendent la progression de la trajectoire plus ou moins

indéterminée. Strauss remarque alors que le médecin, pour appliquer le

schéma de trajectoire, doit tenter de visualiser certaines phases de la trajectoire

pour que l'assemblage des efforts collectifs soit relativement ordonné. C’est

dans ce processus d'articulation que réside pour une grande part la réussite

médicale et la mise en place d'un ordre social.

Face aux différentes sources d'aléas, les acteurs doivent adopter des

stratégies d'articulation et recourir fréquemment à la négociation pour

réarticuler le travail lorsque celui-ci est fragilisé. De ce point de vue, le rôle du

patient est très important puisqu'il permet souvent, par les négociations qu'il

tente pour améliorer son état, de réenclencher un processus d'articulation,

notamment lorsque la trajectoire prend une tournure critique.

Les modèles de Parsons et de Szasz et Hollander nous invitent à percevoir le

sens de la relation, organisée du médecin vers le malade. L’asymétrie nait d’un

phénomène de subordination qui d’ailleurs est largement décrit par Freidson.

La perception d’Anselm Strauss transforme l’orientation de cette asymétrie qui

sera d’ailleurs modélisée par Emmanuel et Emmanuel en 199216 en favorisant

la participation du patient aux décisions médicales, (C.Fournier et S.Kernazet,

2007).

Figure 1 : Comparaison des différents modèles de la relation m édecin-patient retenus

par Emanuel et Emanuel (1992) .

INFORMATIF INTERPRETATIF DELIBERATIF PATERNALISTE

Valeurs du Définies, fixées et En construction Ouvertes à un Objectives et

16 Emanuel EJ, Emanuel LL. Four models of the physician-patient relationship. JAMA 1992 ; 267(16) :2221-6

Page 20: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

20

patient communiquées par

le patient

et conflictuelles,

nécessitant une

élucidation

développement et

à une révision à

travers un débat

moral

partagées par le

médecin et le

patient

Devoirs du

médecin

Fournir une

information

factuelle pertinente

Mettre en œuvre

l’intervention

choisie par le

patient

Elucider et

interpréter les

valeurs du patient

utiles

Informer le

patient

Mettre en œuvre

l’intervention

choisie par le

patient

Articuler et

convaincre le

patient des

valeurs les plus

admirables

Informer le patient

Mettre en œuvre

l’intervention

choisie par le

patient

Promouvoir le

bien-être du

patient

indépendamme

nt des

préférences qu’il

exprime

Conception

de

l’autonomie

du patient

Choix et contrôle

du soin médical

Compréhension

de soi utile au

soin médical

Auto-

développement

moral utile au soin

médical

Assentiment à

des valeurs

objectives

Conception

du rôle du

médecin

Expert technique

compétent

Conseiller Ami ou

enseignant

Gardien, tuteur

Cette approche « centrée sur le patient », soulevée dans l’article de Cécile

Fournier et Sandra Kernazet17 « prend en compte l’expérience unique vécue

par le malade: le médecin n’est plus amené à établir un diagnostic mais à créer

un espace de travail non directif dans lequel le patient pourra cheminer vers un

changement souhaité ».

Maintenant que nous avons pu sérier le concept de relation et sa

contextualisation au regard des cadres théoriques de référence, comment peut-

on définir le processus communicationnel de cette relation pour comprendre

l’analyse des mutations possibles à l’ère du numérique ?

17 FOURNIER, Cécile et KERZANET, Sandra. Communication médecin-malade et éducation du patient, des notions à rapprocher : apports croisés de la littérature. In : Santé Publique. 15 décembre 2007, Vol. Vol. 19, n° 5, p. 413 �425. DOI 10.3917/spub.075.0413.

Page 21: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

21

A cela, il paraît nécessaire de clarifier que la notion de processus de

communication qui sera plus spécifiquement abordée, est celle qui propose une

approche centrée sur la transmission d’informations dans les interactions

homme-machine.

En introduction de son ouvrage, Constantino Landolo 18 affirme que

« L’instrument essentiel par lequel s’instaurent et se développent les relations

et les interactions humaines est la communication, c’est-à-dire la capacité de

transmettre aux autres des idées, des faits, des sentiments, des concepts ; et

de les recevoir de la part de ceux qui nous les transmettent. »

De fait, la communication ne peut se limiter au transfert d’une information entre

une source et une cible qui la reçoit. Loin d’être un système linéaire, de

conception télégraphique et sans ancrage social (Shannon et Warren, 1975),

elle s’inscrit dans un processus d’interactivité circulaire (Norbert Wiener, 1950)

constitué d’une boucle de rétroaction (feed back positif ou négatif) où le

langage constitue en lui-même un élément complexe (Roman Jakosbson,

1963) intégré dans un système d’information.

L’intérêt de poser le modèle de Jakobson, en vis à vis des théories de la

sociologie de la santé, est qu’il vise à saisir la communication humaine dans

toute sa complexité. Aux trois éléments de base (Emetteur/récepteur/message),

il dégage six facteurs auxquels il fait correspondre six fonctions communicatives

spécifiques.

- La fonction expressive :

Elle renvoie à l’émetteur et concerne la personnalisation du message. Le

message ne décrit plus seulement une réalité objective mais est imprégné par

les manifestations physiques et psychologiques de l’émetteur.

- La fonction conative :

Elle concerne l’effet du message sur le destinataire. Dans le message, il s’agit

des éléments destinés à susciter une réaction de la part du récepteur (émotion,

action, réponse verbale...)

18 LANDOLO, Costantino et VITALI, Martine. Guide pratique de la communication avec le patient : techniques, art et erreurs de la communication. Paris : Masson, 2007. ISBN 9782294701450 2294701453.

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22

- La fonction phatique :

Elle est assurée par tous les éléments du langage permettant de vérifier si le

message est bien transmis et compris. Cette fonction est essentielle pour

permettre de maintenir des échanges comportant le moins possible de

malentendus entre les interlocuteurs.

- La fonction métalinguistique :

Elle s'exerce lorsque l'échange porte sur le code lui-même et que les

partenaires vérifient qu'ils utilisent bien le même code. Cette fonction consiste

donc à utiliser un langage pour expliquer un autre langage.

- La fonction référentielle :

Elle indique le contexte par rapport auquel le message prend du sens.

- La fonction poétique :

Elle s’exerce sur le message en lui-même dont la forme a une valeur

expressive propre. Cette valeur varie selon les mots choisis, l’intonation, les

mimiques.

Appliquées à la communication verbale, les fonctions de Jakobson s’intègrent

dans le cadre de la relation interpersonnelle entre le médecin et le malade.

Intégrées au dispositif socio-technique19 que représente le web, elles sont une

grille d’analyse de contenu (texte, image et signe) permettant de décoder les

modalités de communication et de saisir les médiations techniques qui s’y

opèrent à travers les différentes fonctionnalités proposées, organisées et

structurées.

L’inscription de ce processus dans une interaction homme-machine renvoie de

fait à l’approche cybernétique de la communication née avec l’Ecole de Palo

Alto et théorisée par Norbert Wiever20.

19 Cette appellation fait référence aux réflexions de Laurence Monnoyer-Smith qui appréhende le web dans son approche dédiée aux sciences de l’information et de la communication « comme un complexe hétérogène de pratiques, d’organisations, de savoirs et de machines qui vise à saisir la dimension communicationnelle des médiations techniques à l’œuvre et en son sein. L’originalité des SIC réside dans son aptitude à tenir ensemble la dimension technique du web replacé dans son environnement sociotechnique ainsi que l’ensemble complexe des médiations sociotechniques qui le font exister ». 20 Norbert Wiener, mathématicien américain, théoricien et chercheur en mathématiques exposa ses théories sur la cybernétique dans son livre « Cybernetics or Control and Communication in the Animal and the Machine » en 1948.

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23

Hasard ou non, il s’avère que les premiers travaux sur la cybernétique ont été

déployés en psychiatrie et se sont traduit par le fait que le thérapeute ne

considérait plus son patient comme un individu isolé sur lequel il devait poser

un diagnostic psychiatrique mais s'intéressait aux interactions du patient avec

son environnement.

En passant d'une explication individuelle, linéaire et diachronique à une

explication systémique, circulaire et synchronique, l’émergence du web devient

un outil communicant 21 et l’individu un être social22, défini par ses relations

d’échanges et « branché » à un vaste réseau de communication : « L’homme

n’est donc plus individu face à la société, mais un élément qui vit par la société.

La personnalité, le caractère, les sensations, les sentiments ne sont plus

constitutifs de l’homme. Seul compte sa capacité à communiquer ». 23

B. Internet et santé : de la pratique aux usages Depuis plus de vingt ans, les technologies de l’information et de la

communication ont connu, dans le domaine de la santé, un développement

considérable, notamment en ce qui concerne internet.

Cet engouement rejoint les motivations liées à l’usage du web en général où les

conditions de vie (la santé en faisant partie) et l’éducation apparaissent comme

des préoccupations d’intérêt public majeures. C’est en tout cas ce que

démontre l’enquête mondiale sur son utilisation, proposée par l’organisme

21 Wiener ne fait pas de différence entre les êtres naturels (humains par exemple) et les êtres artificiels (machines); ils ne sont pas comparés par leur nature apparente, mais uniquement de par leur comportement effectif. Il pense que la société peut uniquement être comprise à travers l’étude des messages et des facilités de transmission qui lui sont propres. 22 Breton explique que selon Wiener « L’homme n’est plus en tant qu’être un centre d’où tout part et ou tout revient, comme dans les conceptions classiques, mais il représente un élément intermédiaire du vaste processus de communications croisées qui caractérisent une société. (1997) 23 BRETON, Philippe. L’utopie de la communication entre l’idéal de la fusion et la recherche de la transparence. In : Quaderni. 1996, Vol. 28, n° 1 , p. 125�133. DOI 10.3406/quad.1996.1147.

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24

Internet Society en 201224. Elle confirme que les personnes interrogées se

disent très enthousiastes sur son rôle potentiel à résoudre certains fléaux et

que les renseignements présents sur le web permettraient également

d’améliorer les conditions de vie, selon 63% des sondés.

Cette utilisation serait-est liée historiquement à la recherche et la transmission

d’information en matière de santé ? En effet, si le médecin constituait

(Boltanski, 1971) et constitue encore aujourd’hui la principale source

d’information des patients25 (Kivits, 2006), les connaissances en matière de

santé se transmettent parallèlement, grâce au processus de socialisation, au

sein de la famille, à l’école et à travers les médias traditionnels écrits ou

audiovisuels. L’apparition de dispositifs appuyés sur les TIC devient un vecteur

d’information au même titre que les autres médias, à la fois en tant que

producteur et récepteur de celle-ci (Kivits, 2012).

Par ailleurs, les travaux menés depuis les années 2000, notamment dans le

domaine des sciences sociales, cherchant à signifier l’utilisation massive de

l’internet santé, ont permis de corroborer cette problématique avec d’autres

thèmes tels que la nouvelle autonomie du patient ou l’acquisition de nouveaux

savoirs (Kivits, 2012).

Cette double intention amène à considérer internet-santé sur deux angles

particuliers : le regard des « Medias Studies » c’est-à-dire l’étude de cette

technologie comme une expérience de la vie quotidienne, intégrée aux

pratiques des utilisateurs qui, selon Silverstone et Hirsch26 se sont appropriés la

« culture technologique ». Dans le cadre de notre étude, cela rejoint les travaux

24 ANON. Étude : l’usage d’Internet dans le monde en 2012. In : Le blog du Modérateur [en ligne]. [Consulté le 9 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.blogdumoderateur.com/etude-usage-internet-dans-le-monde-en-2012/. 25 Guide HAS 2012 : RECOMMANDATION DE BONNE PRATIQUE MEDICALE : Délivrance de l’information à la personne sur son état de santé 26 SILVERSTONE, Roger. Consuming technologies: media and information in domestic spaces. New York [u.a. : Routledge, 1994. ISBN 0415117127 9780415117128.

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25

de Mallein et Toussaint27 qui ont particulièrement étudié le rôle de ce média par

l’analyse des différents modes d’appropriation et des conditions sociales de son

intégration.

L’autre regard est que l’internet-santé, en tant qu’objet technologique, ne peut

être ignoré tant il (re)questionne les thèmes classiques de la sociologie de la

santé, abordé dans le précédent chapitre, tels que les relations médecin-

patient, les savoirs profanes, le vécu des maladies. En ce sens, la

problématique n’est plus centrée sur l’outil mais sur l’individu.

Ce positionnement ancre fortement les usages d’internet dans un contexte

« santé », reliant toutes les actions individuelles ou interindividuelles à un cadre

social défini, l’action devant être également expliquée par des facteurs

structurels. Autrement dit, il s’agit de trouver dans l’usage conçu en tant

qu’action, sa signification sociétale.

Ainsi, au regard des études et enquêtes menées sur l’utilisation d’internet-

santé, il s’agit bien là d’une pratique non seulement avérée mais totalement

insérée dans un environnement socio-culturel grâce aux espoirs des progrès

sociaux, au développement de la technologie comme à la démocratisation de

l’accès à internet28.

Pour comprendre plus en détail les pratiques individuelles et collectives des

dispositifs numériques appliqués à la santé, Madeleine Akrich et Cécile Méadel

(2004) ont synthétisé les auteurs qui ont tenté de classifier les typologies

d’applications selon des logiques variées :

27 MALLEIN, Philippe et TOUSSAINT, Yves. «L’intégration sociale des technologies d’information et de communication: une sociologie des usages», Technologies de l’information et société, Québec, Vol. 6, n 4, pp. 315-335. TECHNOLOGIES D’INFORMATION ET DE COMMUNICATION, QUOTIDIEN ET MODES DE VIE (URBAINS): CONTOURS ET RESULTATS DE LA, 2005, p. 250. 28 Une étude conduite dans 7 pays européens indique que proportion des personnes utilisant internet santé (au sein de l’ensemble de la population) est passée en moyenne de 42,1% en 2005 à 53,3% en 2007. ANON. Internet et santé: acteurs, usages, et appropriations. Québec : Presses de l’Université du Québec, 2012. Collection Santé et société. ISBN 9782760535213. \line{}RA773.6 .I56 2012\line

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26

• La logique médicale de Vincent Hazebroucq (2003 )29

Il distingue ainsi 7 familles d’utilisation : échanger les avis entre professionnels,

assister à distance les patients, surveiller à domicile, pratiquer des actes

médicaux à distance, organiser la circulation des données dans un réseau de

santé, délivrer des enseignements et participer à la gestion des systèmes de

santé.

• La logique de relations de Gunther Eysenbach (2001)

Son choix, classer les applications en fonction de la nature des relations

qu’elles construisent et les répartir en trois catégories empruntées au

commerce électronique, le B2C : interactions entre professionnels (B de

Business) et patients (C de Consumer), le B2B : relations et échanges de

données entre professionnels et le C2C : échanges entre patients seuls. Ses

idées et son approche sont à l’origine du concept de « Medecine 2.0 »

Figure 2 : Modélisation du concept de Medecine 2.0 (e-santé) par Gunther Eysenbach

29 Rapport sur l’état des lieux, en 2003, de la télémédecine française

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27

Selon le modèle dépeint dans la Figure 1, cinq aspects majeurs apparaissent

dans la construction du Web 2.0 en santé selon Gunther Eysenbach. Autour

des services médicaux, de la prise en charge en soin, de la recherche

scientifique, on voit en effet se profiler des pratiques émergentes que sont :

1) le réseau social,

2) la participation,

3) l’apomediation30,

4) la collaboration

5) l’ouverture des données

• La logique par projets expliquée par Madeleine Akri ch et Cécile

Méadel

Face à la recherche d’une rationalisation de l’organisation sanitaire et de

l’amélioration des soins (permettant de renforcer la coordination des

professionnels et de mobiliser plus rapidement l’expertise des spécialistes), la

mise en place de dispositifs numériques sont, pour les patients, un moyen

d’accès à l’information médicale, d’acquisition de compétences susceptible de

remettre en cause le modèle asymétrique de la relation médecin-patient.

Pour ramener ces typologies de pratiques au sujet de notre étude, nous

retiendrons donc plus particulièrement les deux dernières approches afin

d’orienter l’angle de recherche, non dans le sens du rapport descendant

«médecin/patient », mais dans une dynamique ascendante du patient vers le

médecin, au travers l’usage des communautés virtuelles de patients atteints de

maladies chroniques.

C’est pourquoi cherchons à combiner les deux théories des usages, l’une

axées sur l’étude du média, l’autre sur les motivations des individus, pour

analyser dans un premier temps ce qui peut avoir été transformé, supprimé,

30 Terme forgé pour éviter l’usage de l’expression Web 2.0 dans les débats académiques, qui signifie l'état que tient ce média à relier les gens et les informations (faire de la médiation) sans pour autant être acteur volontaire de ce contact. Gunther Eysenbach (2008) “Medicine 2.0: Social Networking, Collaboration, Participation, Apomediation, and Openness”, Journal of Medical Internet Research. ANON. Débuguer nos cancers. In : [en ligne]. [Consulté le 11 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://owni.fr/2012/10/02/debuguer-nos-cancers/. \line

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28

maintenu ou créé dans le processus de communication de la relation médecin-

patient avec l’usage des TIC.

Autour des trois principaux usages liés à Internet-santé que sont : la recherche

d’information, l’échange d’expériences et la participation à la construction des

savoirs (Kivits, 2012), tentons de rapprocher le modèle de relation médecin

patient Emanuel et Emanuel (1992) avec la grille d’analyse sociologique de

l’usage des TIC réalisée par Mallein et Toussaint (1994) afin de mettre en

évidence l’importance des significations d’usages dans l’appropriation du

dispositif socio-technique et ce, pour nous permettre d’identifier les éléments de

la mutation.

2. Le numérique et les mutations du processus commu nicationnel

A. Du physique au virtuel : la fin de l’hégémonie paternaliste au transfert de postures relationnelle s

La conception d’un médecin « gardien, tuteur » face à un patient consentant tel

que modélisé par Emanuel et Emanuel (1992), nous l’avons vu, trouve ses

limites théoriques avec l’approche conflictuelle d’Eliot Freidson. Elle s’entend

également par son contexte historique qui a progressivement déconstruit le

pouvoir médical et la médicalisation de la société pour organiser un nouveau

contrat entre société et médecine (Janine Pieret, 2008).

En posant les questions d’autonomie, de responsabilité et de droit au cœur

d’une médecine du risque et non plus d’une médecine de la maladie, « la

question de l’information, de l’éducation et de responsabilisation devient une

préoccupation centrale et ce, d’autant que le développement d’association de

malades et d’usagers conduit à s’interroger sur son impact et son effet (….) On

assiste alors au développement de prises de paroles hétérogènes et à des

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29

configurations variables entre les acteurs selon les problèmes (médecins,

scientifiques, politiques, médias, industriels, malades…)31 .

Renforcé par les crises sanitaires et le développement de maladies de longue

durée (VIH, cancer, maladies chroniques), ce n’est donc pas dans un

processus linéaire mais dans un esprit de revendications d’autonomie et de

savoir profane du corps (mouvements revendicatifs des années 1980 de

résistance civile électronique) de la part des communautés de patients contre

les institutions médicales que s’est ainsi construite la culture numérique.

L’arrivée d’internet-santé contribue définitivement à supprimer cette vision

subordonnée du patient au médecin, pleinement garant de son bien-être,

indépendamment des préférences qu’il exprime.

Dès lors, les 1er hackers mettent leurs compétences informatiques au service

des malades, le médecin devient alors une ressource parmi d’autre,

concurrencée par les communautés en ligne, les forums de discussions, ou les

bases de données ouvertes32.

Si l’arrivée des dispositifs numériques entraîne la suppression du modèle

paternaliste, ils pérennisent la vision informative soutenue par Emanuel et

Emanuel (1992) et ce, en raison du maintien d’une posture d’expertise

médicale acquise avec l’appropriation des nouvelles technologies. Nous

entendrons d’ailleurs ici la notion « d'appropriation » la mise en évidence la

disparité des usages et des usagers en montrant la construction sociale de

l'usage, notamment à travers les significations qu'il revêt pour ce dernier

(Millerand, 2008).33

Adossée à la grille d’analyse sociologique des TIC, telle que définie par Mallein

et Toussaint (1994), la perception de cette technologie dans le processus

communicationnel s’insère dans une rationalité de la cohérence socio- 31 PIERRET, Janine. Entre santé et expérience de la maladie. In : Psychotropes. 22 octobre 2008, Vol. Vol. 14, n° 2, p. 47-59. DOI 10.3917/psy t.142.0047. 32 CASILLI, Antonio A. Usages numériques en santé : conflictualité épistémique et sociale dans les communautés de patients en ligne. In : Internet : des promesses pour la santé ? 2011, p. 181-191. 33 MILLERAND, Florence. Usages des NTIC : les approches de la diffusion, de l’innovation et de l’appropriation (2e partie). In : Commposite. 28 mai 2008, Vol. 3, n° 1, p. 54-73. \line

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technique dans le sens où « le nouveau dispositif trouve sa place dans un

ensemble social, culturel, technique, organisationnel, relationnel préexistant. »

Intégration sociale des technologies d’information et de communication : une sociologie des

usages – Mallein et Toussaint, 2004

Figure 3 : Concepts clés des deux rationalités

Usage et rationalité de la cohérence socio -

technique

Usage et rationalité de la performance

techno-sociale

Banalisation Idéalisation

Hybridation Substitution

Evolution sociale Révolution sociale

Identité active Identité passive

Le rapport sur l’état des lieux, en 2003, de la télémédecine française rédigé par

le Dr Vincent Hazenbroucq est l’exemple d’une appropriation de l’internet-santé

pour une pratique médicale. Au même titre que les progrès médicaux ont

permis aux médecins d’assurer compétence et expertise auprès des patients

pour leur assurer la meilleure intervention dans un cadre concerté et négocié

(Alsem Strauss), la e-santé devient l’instrument de contrôle du soin médical.

L’information, le partage d’information, quelle soit médicale ou de santé34 par le

praticien restent dans ce cadre précis, sous surveillance du professionnel de

santé : « La télémédecine n’est cependant pas une innovation de la Société de

l’information, puisque de nombreuses expérimentations exploitant notamment

la télévision analogique datent des années 1950, et que de nombreux projets

de recherche ont été développés, en vue de la conquête de l’espace, dès les

34 ROMEYER, Hélène. TIC et santé : entre information médicale et information de santé. In : tic&société [en ligne]. 13 octobre 2008, n° Vol. 2, n° 1. [Con sulté le 3 mai 2013]. DOI 10.4000/ticetsociete.365. Disponible à l’adresse : http://ticetsociete.revues.org/365. \line « Sous l’effet des technologies d’information et de communication (TIC), deux types distincts d’informations à propos des thématiques de santé émergent : information de santé (grand public, non spécialisée) et information médicale (professionnelle). Gagnant peu à peu les supports de presse, cette distinction est extrêmement prégnante sur l’Internet. Ces deux informations renvoient par ailleurs à de nouveaux usages en matière d’informations sur la santé et à une certaine forme d’industrialisation d’une information jusque-là publique et scientifique, tout du moins en France ».

Page 31: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

31

années 1970. La National Aeronautics and Space Administration (NASA)

cherchait alors à garantir la surveillance médicale et la santé des futurs

astronautes et a financé de nombreuses études de télémédecine. Cependant,

les possibilités ouvertes par deux avancées techniques plus récentes,

initialement distinctes mais désormais confluentes, ont déclenché une véritable

renaissance de la télémédecine clinique ».

En ce sens, la place du patient est strictement encadrée dans un modèle où les

compétences sont placées du côté des professionnels, ceux-ci ayant de plus le

monopole de la définition de l’information pertinente pour le patient.

La capacité d’action du patient est limitée à ce que le médecin veut bien lui

octroyer. Il peut être associé au suivi dans le cas d’une télésurveillance mais

son rôle est clairement défini comme celui d’un auxiliaire médical dont la

coopération permet le bon fonctionnement du dispositif, à l’exclusion de toute

participation, à l’interprétation et encore moins à la prise de décision (Akrich et

Méadler, 2004). L’asymétrie de relation médecin patient, identifiée dans le

cadre d’une communication interpersonnelle physique se trouve ainsi

transférée, dans les pratiques médicales, avec l’usage des dispositifs

numériques.

Pour autant, si les usages d’internet-santé semblent s’opérer dans un

continuum de pratiques, des résistances au changement persistent. Dans son

blog, Sia Partners35, pose plusieurs remarques à l’action menée par l’ASIP

Santé (Agence des Systèmes d’information Partagés), organisme public chargé

d’accompagner l’émergence de technologies numériques en France : « La e-

santé, bien que fortement encouragée par le gouvernement, peine à trouver sa

place dans le système de santé français. Or, contrairement aux idées reçues, le

frein n’est pas nécessairement financier. Certes, investir dans les technologies

de l’information a un coût, mais la vraie difficulté est en réalité culturelle.

35 ANON. Stratégie RH, le portail RH & Change de Sia Conseil. In : [en ligne]. [Consulté le 12 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://rh.sia-partners.com/20120918/la-e-sante-en-france-une-revolution-culturelle-a-operer/. Société de consulting experte dans l’organisation, les transformations, le management, les systèmes d’informations. http://www.sia-partners.com/

Page 32: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

32

Remettre en cause les pratiques et les habitudes des praticiens revient peu ou

prou à remettre en cause leur métier et de fait, leur rôle dans la société ».

Aussi, l’une des transformations majeures détectée avec l’émergence du

numérique dans le processus communicationnel de la relation médecin patient

ne serait pas fondamentalement d’ordre technologique mais d’ordre socio-

culturel, par une reconfiguration identitaire de l’un et de l’autre.

B. Des transformations identitaires à la création d e

« l’empowerment » du patient

La caractéristique essentielle du changement opéré par les TIC provient

incontestablement de la visibilité technologique offerte de passer d’une sphère

privée à une sphère publique. Dès lors que la médecine est devenue une

institution de contrôle médical dans les années 1950, dès lors que la logique

médicale se trouve remise en question dans les années 1970, dans son

autonomie et sa toute puissance à gérer la santé publique (Janine Pierret,

2008), internet santé remodèle incontestablement les frontières spatio-

temporelles de l’espace public et de l’espace domestique. A ce titre, il propose

une nouvelle vision de la modernité dans le sens où le progrès réalisé vient

s’opposer à la culture antérieure d’un système, circonscrit dans son

organisation informationnelle.

Formalisée par les travaux d’Antony Giddens (1990), il met en valeur trois

notions essentielles à la dynamique de la modernité36 :

36 La théorie de la modernité de Giddens tente d'expliquer les changements intervenus, avec la globalisation du monde, dans les relations sociales. Les conséquences de ces ruptures sont analysées à trois niveaux: • Celui des institutions de la modernité, • Celui des transformations de l'intimité, du soi, • Celui des relations sociales. Son objectif est de proposer un tableau d'ensemble des relations sociales, sans penser la "société" comme un tout unique, en réunissant dans une même analyse les faits sociaux dans leur diversité.

Page 33: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

33

• La séparation du temps et de l'espace,

• Les mécanismes de délocalisation des relations sociales,

• L'appropriation réflexive des connaissances

La référence à cet auteur justifie d’une part, les changements opérés avec

l’arrivée du web dans ses critères spatio-temporels, nous venons de le voir, et

permet d’autre part, d’appréhender la notion d’appropriation réflexive des

connaissances au travers les notions d’individualité et d’auto-identité.

Ainsi, en mettant l'accent sur le processus d'individualisation, c'est à dire la

construction de l'individu, de l'identité, et d'un style de vie, la modernité, telle

que conçue par l’auteur, n’est pas le déclin de liens sociaux, mais leur

transformation, via les mécanismes de modification de l'intimité.

L’autre notion clé que nous retiendrons est celle de l’auto identité. Par la

réciprocité des attentes et la confiance mutuelle dans ses proches, l'individu

assure le développement de l'identité du moi (l'acquisition d'une identité

sociale), et la diffusion du rôle.

Ce bouleversement des rapports constitue l’un des phénomènes de brouillage

expliquant d’une part les transformations identitaires des acteurs mais

également les motivations d’usage en fonction de ces derniers. Ce que Josiane

Jouët37 appelle « un mouvement spatial qui conduit à la fois à transporter son

univers privé dans l’espace public et à accéder à l’espace public à partir de

chez soi » devient le lieu de nouveaux comportements et modes opératoires

(Florence Millerand, 1999).

Pour compléter cette approche, la référence aux traces mémorielles faisant de

« l’usage une sorte de rétroaction qui influe sur celui qui s’en sert et crée une

empreinte qui modifie progressivement le milieu »38 (Jacques Perriault, 2008)

37 JOUËT, Josiane. Retour critique sur la sociologie des usages. In : Réseaux. 2000, Vol. 18, n° 100, p. 487-521. DOI 10.3406/reso.2000.2235. 38 BOENISCH, Gilles. Jacques Perriault, La logique de l’usage. Essai sur les machines à communiquer. In : Questions de communication. 1 août 2009, n° 15, p. 503 �504. \line{}

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34

nous ramène au schéma de Emanuel et Emanuel (1992) sur la relation

médecin-patient dans son modèle interprétatif.

Opportunité d’un nouvel ordre négocié pour les médecins, les TIC offrent donc

des perspectives nouvelles au sein des pratiques médicales dans le rôle de

conseiller, d’accompagnement et de soutien psychologique des malades,

notamment à travers leurs échanges avec d’autres patients concernés par la

même maladie.

Lors de la troisième édition des débats du CNOM (Conseil National de l’Ordre

des Médecins) organisée en mai 2010 , autour du Docteur Jacques LUCAS,

Vice - Président du CNOM et du Docteur François STEFANI, Vice - Président

de la section éthique et déontologie du CNOM sur la thématique : « Vers une

meilleure intégration d’internet à la relation médecin-patient », il est affirmé que

« l’outil leur offre des clés pour leur permettre de mieux dialoguer avec leurs

médecins et de bâtir ainsi une relation constructive ».

Afin que les professionnels de santé puissent appréhender l’usage d’Internet au

sein de leur relation avec leurs patients, le Docteur Lucas, émettra même le

souhait que « les facultés de médecine intègrent une formation sur les

Technologies de l’Information et de la Communication, dont Internet, dans le

cursus universitaire ».

Cette position affirmée de vouloir inscrire l’usage des TIC dans l’enseignement

médical démontre l’existence de « patterns d’usage » dans le rapport au

pouvoir entretenu au sein d’un groupe comme le reflet de phénomène de

reproduction « héréditaires », détaillé par Proulx et Laberge. (Millerand, 1999).

Ainsi, la valeur du médecin conseil, chargé du « pouvoir » et du « savoir » lui

permettant d’informer le patient et de mettre en œuvre l’intervention choisie par

lui, serait décuplée avec les capacités technologiques du web.

A cette appropriation médicale s’oppose celle des patients, fondée sur une

identité active face à la technologie, comme principe de revendication libertaire

et d’autonomie (Mallein et Toussaint, 1994).

Page 35: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

35

Facteur d’émancipation du patient, internet santé reconfigure donc également

pour eux le processus communicationnel : « Internet est plus qu’un moyen de

diffuser de l’information médicale. Il devient l’environnement dans lequel les

rôles traditionnels et les relations entre professionnels de la santé et les

usagers apprécient d’avoir un contrôle croissant sur la sélection, la diffusion et

même l’interprétation des informations médicales » 39(Wikgren, 2001).

La question du devoir d’information par le médecin et d’association à la prise de

décision, légitimée en France par la loi dite Kouchner du 4 mars 200240, pose

les principes fondamentaux de cette démarche active à l’accès aux

informations, qu’elles soient d’ordre médical ou de santé (Romeyer, 2008).

La capacité offerte par internet de rechercher de l’information, d’échanger sur

des expériences et de construire des savoirs devient « la mise en jeu d’une

identité personnelle et d’une identité sociale (…) l’appropriation procède alors

d’une double affirmation : de la singularité et de l’appartenance qui relie au

corps social » (Josiane Jouët, 2000).

De fait, à la compréhension du « moi », utile au soin médical tel que décrit dans

le modèle interprétatif de Emanuel et Emanuel, se juxtapose la capacité d’auto-

développement moral, utile au soin, comme nouvelle conception de l’autonomie

du patient, schématisée dans le modèle délibératif et défini également par

Antony Giddens sous l’idée « d’auto-identité ».

Par conséquent, l’épaisseur sociale laissée par l’histoire de la sociologie de la

santé et la reconnaissance du malade dans une expertise 41 se trouve

surdimensionnée avec le numérique dans la création d’une nouvelle identité du 39 WIKGREN, Marianne. Everyday health information exchange and citation behaviour in Internet discussion groups. In : The New Review of Information Behaviour Research. 2003, Vol. 4, n° 1, p. 225 �239. DOI 10.1080/14716310310001631543.

40Synthèse disponible sur le site : http://www.uvp5.univ-paris5.fr/staticmed/e-dosmed/cours/informationpatient/informationPatient.htm 41 Rapport de la mission « Nouvelles attentes du citoyen, acteur de santé » initiée par le Ministère de la Santé et des Sports. Document général mission 3 _ P2011 - Rapport_nouvelles_attentes_du_citoyen-2-2.pdf [en ligne]. S.l. : s.n. [Consulté le 12 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_nouvelles_attentes_du_citoyen-2-2.pdf

Page 36: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

36

patient, identité réelle et identité virtuelle, toutes deux investies d’un pouvoir

d’action et de décision.

Par ailleurs, la naissance de cette nouvelle corporiété du patient constituée du

malade et de son autre virtuel42 (Antonio Cassilli, 2009) doté « d’autonomie et

de capacitation » fait émerger une nouvelle forme de relation apomédiée, c’est-

à-dire « non pas la renonciation complète du médecin et de son rôle de

médiateur entre le patient et son corps, mais plutôt d’une médiation à distance

qui (…) ne voit pas la disparition de la figure de l’expert mais sa relégation en

toile de fond ».

Cette « capacitation » issue d’une situation (la maladie) ou d’un environnement

aliénant (relation asymétrique du patient « profane » face au médecin

« expert ») apparaît comme la réponse à un sentiment d’impuissance ou

d’incapacité (powerlessness) vécue aussi bien par un groupe que par l’individu.

Cette perception a donné naissance à la notion d’empowerment qui se met en

place à partir du moment où l’individu a pris conscience de sa situation et

souhaite la modifier pour mieux contrôler sa vie 43(Aujoulat, 2007).

Formalisée par Le Bossé et Lavallée 44 (1993), la notion d’empowerment doit

prendre en compte simultanément des conditions structurelles et individuelles

du changement social. Ainsi, « l’exercice effectif d’un pouvoir d’action dépend à

la fois des possibilités (les ressources, mais aussi le cadre législatif et le

contexte politique) offertes par l’environnement et des capacités des personnes

à exercer ce pouvoir (les compétences, mais aussi le désir d’agir, la perception

des possibilités d’action, la capacité de projection) ». 42 CASILLI, Antonio A. Usages numériques en santé : conflictualité épistémique et sociale dans les communautés de patients en ligne. In : Internet : des promesses pour la santé ? 2011, p. 181�191.

43 DIAL: L’empowerment des patients atteints de maladie chronique : des processus multiples : auto-détermination, auto-efficacité, sécurité et cohérence identitaire [en ligne]. S.l. : s.n., [sans date]. [Consulté le 17 avril 2013]. Disponible à l’adresse : http://dial.academielouvain.be/handle/boreal:5226?site_name=UCL. 44 LE BOSSÉ, Yann. De l’« habilitation » au « pouvoir d’agir » : vers une appréhension plus circonscrite de la notion d’empowerment. In : Nouvelles pratiques sociales. 2003, Vol. 16, n° 2, p. 30. DOI 10.7202/009841ar.

Page 37: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

37

De fait, la notion d’empowerment ne consiste pas simplement le fait d’être actif.

L’action est ici « un outil d’acquisition de pouvoir qui ne conserve sa pertinence

que dans la mesure où elle s’inscrit dans une logique d’influence personnelle

ou collective sur l’environnement ».

Défini autour de quatre composantes essentielles : la participation, la

compétence, l'estime de soi et la conscience critique (conscience individuelle,

collective, sociale et politique), l’empowerment est structuré de manière

individuelle, organisationnelle ou collective, on parle d’empowerment

communautaire (Aujoulat, 2002).

Appliquée à la santé communautaire45, attachons-nous à détailler les notions

d’empowerment individuel et communautaire afin de les appliquer à l’objet de

notre étude.

L’empowerment individuel ou psychologique désigne la capacité d’un individu à

prendre des décisions et à exercer un contrôle sur sa vie personnelle. Comme

le sentiment d’efficacité ou l’estime de soi, l’empowerment met l’accent sur le

développement d’une représentation positive de soi-même (self concept) ou de

ses compétences personnelles. En plus, l’empowerment individuel inclut

l’analyse et la critique du contexte social et politique, le développement des

ressources et des compétences individuelles et collectives nécessaires à

l’action sociale.

45 Cours - Santé Publique : Notions de base. In : [en ligne]. [Consulté le 13 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.infirmiers.com/etudiants-en-ifsi/cours/cours-sante-publique-notions-de-base.html. La santé communautaire nécessite la participation des membres de la communauté à la gestion de leur santé individuelle et collective. Il y a une notion d’engagement de chaque individu. La démarche participative est importante en santé communautaire. Les savoirs des destinataires de l’action sont primordiaux. L’action communautaire se construit dans l’échange et implique un transfert de compétences du professionnel vers le profane (le destinataire de l’action) mais aussi du profane vers le professionnel de santé. Les professionnels sont des personnes ressources et mettent leurs compétences au service de la communauté.

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38

Une communauté « empowered » est une communauté dans laquelle les

individus et les organisations utilisent collectivement leurs compétences et leurs

ressources pour satisfaire leurs besoins respectifs. Ils s’entraident, résolvent

leurs conflits et accroissent leur influence sur la qualité de vie de la

communauté. Une communauté empowered est en capacité d’exercer une

influence sur les décisions et les changements au sein du système social dont

elle fait partie.

Pour corréler à ces notions, Nina Wallerstein dans son article de revue

« Empowerment to reduce health disparities » 46(2002) réalise à la demande de

l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) en 2006, une étude intitulée

« Quelle est la preuve de l’efficacité de l’habilitation à améliorer la santé » dans

laquelle elle met en valeur la notion d’empowerment qui confirme : « un

partenariat proactif et une stratégie d'auto-soins permettant d’améliorer les

résultats de santé et la qualité de vie des malades chroniques ».

En considérant l’empowerment comme un processus d’acquisition du pouvoir

par l’émancipation et la compétence des individus au regard du système 47, la

vision de « vivre avec la maladie » devient le « pouvoir de mener le plus

possible une vie normale en participant activement à la prise en charge et au

suivi, en recevant ou recherchant des informations permettant d’être associés

au choix les concernant, en pouvant établir une communication directe avec les

personnes confrontées aux mêmes réalités pour capitaliser les savoirs profanes

et partager les expériences ». (Rapport de la mission « Nouvelles attentes du

citoyen acteur de santé », 2011).

46 WALLERSTEIN, N. Empowerment to reduce health disparities. In : Scandinavian Journal of Public Health. 1 septembre 2002, Vol. 30, n° 59 suppl, p. 72-77. DOI 10.1177/14034948020300031201. 47 L’EMPOWERMENT, DE LA THEORIE A LA PRATIQUE - La Vie des idées. In : [en ligne]. [Consulté le 12 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.laviedesidees.fr/L-empowerment-de-la-theorie-a-la. \line

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39

Synthèse du chapitre

En conclusion de cette partie, plusieurs éléments doivent retenir notre attention.

La mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient, à

l’ère du numérique, s’inscrit dans un contexte socio-culturel lié aux

transformations du rôle de chacun, sur fond de débat de société, dont

l’appropriation technologique devient le support d’émancipation identitaire et de

revendication de compétences.

Confortée par l’augmentation de la prise en charge des maladies chroniques,

elle ajoute, une valeur temporelle et relationnelle significative qui la différencie

d’autant plus de la prise en charge des maladies aiguës, de part l’implication

nécessaire à la compréhension de la maladie qui devient durable. En terme

d’usages, la recherche d’information, l’échanges d’expériences, la participation

à la construction des savoirs sont d’autant plus prégnants dans le cadre des

maladies chroniques que se greffe un facteur d’incertitude majeur48(Vaillant,

2006).

L’apprentissage de la maladie, dans le sens « apprendre à vivre sa maladie »

et « apprendre à vivre avec sa maladie », devient ici un enjeu majeur que nous

proposons de développer dans la deuxième partie de ce mémoire, à travers

l’étude des pratiques éducatives en santé, et plus spécifiquement celle de

l’éducation thérapeutique.

La question du rapport entretenu avec les dispositifs sociotechniques, dans ce

cadre, devient le sujet essentiel du chapitre suivant, qui l’envisage aussi bien

en terme de défi politique, social et sanitaire qu’en terme de valeur

communicationnelle et éducationnelle.

48 VAILLANT, Marie-France. La culture de santé par l’éducation thérapeutique à l’hôpital : des usages qui réinterrogent la relation médecin - soignant - patient. In : Les cultures de la santé. Nouveaux imaginaires et nouveaux usages [en ligne]. S.l. : s.n., 2 juin 2006. [Consulté le 12 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00372418.

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40

II. Construction d’une médiation numérique au sein des pratiques éducatives

Introduction du chapitre

Pour analyser et comprendre comment peut se construire une médiation

numérique au sein des pratiques éducatives, il est nécessaire de s’intéresser

aux notions fondamentales qui constituent la relation pédagogique entre le

médecin et son patient.

Pour en assurer l’étude, il semble nécessaire de revenir aux fondements

psychosociaux conduisant à l’empowerment du patient, c’est-à-dire au pouvoir

d’agir, afin de les confronter aux stratégies éducatives sensées influencées les

comportements de santé.

De fait, pour nous permettre de mieux appréhender le cadre conceptuel de

l’éducation thérapeutique, l’apport des théories de l’enseignement et de

l’apprentissage entre les différents modèles issus des approches behavioristes,

cognitivistes, constructivistes et socioconstructivistes de la littérature sont à

rapprocher des différentes notions entendues entre éducation et santé afin de

définir plus précisément le cadre de l’éducation thérapeutique.

La deuxième notion importante de ce chapitre porte sur la définition que nous

faisons du terme médiation numérique. Étymologiquement, le mot renvoie au

latin « mediare » (partager par le milieu, être placé au milieu, se trouver entre,

intervenir, s’interposer). Selon la professeure Ghislaine Azémard49, en sciences

de l'information et de la communication, la médiation peut se définir comme «un

procédé de communication et de transmission qui utilise un ou plusieurs

intermédiaires, qui peuvent être de nature différente. La médiation permet de

rendre accessibles des informations par différents processus de codage-

décodage50». Pour compléter cette définition, et ne pas la cantonner à un

49 UNIVERSITE PARIS 8. Elle dirige la Chaire Innovation Transmission et Edition Numériques à la Fondation Maison des sciences de l'homme. Ses recherches sont spécialisées dans le secteur des e-médiations interactives, scientifique, culturelle, pédagogique et territoriale, et menées dans le cadre du programme de recherche et de création numérique LEDEN. 50 MEDIATION [en ligne]. S.l. : s.n., 2013. [Consulté le 16 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=M%C3%A9diation&oldid=92337448. \line{}

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41

usage purement instrumental, ajoutons-lui celle de Philippe Cazeune51 qui la

caractérise comme « une démarche visant à accompagner des publics variés

vers l’autonomie, dans l’usage quotidien des technologies, services et médias

numériques ».

A ce titre, deux idées majeures guident la suite de ce mémoire, l’une au sens

« médiatisation » (média/vecteur intermédiaire au sein de la relation éducative

entre le patient et le médecin) et l’autre au sens « appropriation » de la

technologie dans le cadre d’une action pédagogique.

51 SAVOIR EN ACTES. In : [en ligne]. 8 mai 2013. [Consulté le 15 mai 2013]. Disponible à l’dresse : http://blog.savoirenactes.fr/. \line{}

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42

1. Maladies chroniques et dispositifs numériques, e njeux croisés

A. Etat des lieux et cadre de référence

Définir ce que l’on regroupe sous le terme de maladie chronique est un

prérequis essentiel pour comprendre comment s’articule sa prise en charge.

De manière générale, toute maladie chronique peut être caractérisée par un

ensemble de particularités incluant : ses causes, sa sévérité ou sa gravité, sa

durée d’évolution ou son ancienneté, notamment sa possibilité de guérison, de

rémission, de rechute ou d’évolution par poussées, et enfin ses conséquences,

en particulier sur le fonctionnement de l’individu.

Si plusieurs approches ont été utilisées pour caractériser les maladies

chroniques, nous retiendrons celle par les conséquences qui, basée sur un

modèle biopsychosocial 52 , répond le mieux aux problématiques de santé

publique (représentation centrée sur une vision globale de l’individu) et permet

d’envisager l’ensemble des maladies chroniques sur un socle commun en

termes de conséquences, de prises en charge médicale, psychologique,

sociale, économique et professionnelle.

À la lumière des réflexions précédentes, le Haut Conseil de la santé publique

propose dans son rapport de novembre 2009 « La prise en charge et la

protection sociale des personnes atteintes de maladie chronique » d’utiliser une

définition transversale, telle que proposée par les auteurs du Plan pour

l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies

chroniques 2007-2011, et caractérisée par :

● la présence d’un état pathologique de nature physique, psychologique ou

cognitive, appelé à durer ; 52 http://rms.medhyg.ch/numero-258-page-1511.htm Le modèle biopsychosocial est à la fois un modèle théorique, c’est-à-dire un ensemble cohérent et articulé d’hypothèses explicatives de la santé et de la maladie, et un outil clinique, (ensemble de moyens diagnostiques et thérapeutiques directement applicables). En pratique clinique, ce modèle intègre en permanence les perspectives biologique, psychologique et sociale et nécessite une participation active du patient, dont le corollaire est une importance accrue des aspects éducationnels.

Page 43: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

43

● une ancienneté minimale de trois mois, ou supposée telle ;

● un retentissement sur la vie quotidienne comportant au moins l’un des

trois éléments suivants :

● une limitation fonctionnelle des activités ou de la participation sociale,

● une dépendance vis-à-vis d’un médicament, d’un régime, d’une

technologie médicale, d’un appareillage ou d’une assistance personnelle,

● la nécessité de soins médicaux ou paramédicaux, d’une aide

psychologique, d’une adaptation, d’une surveillance ou d’une prévention

particulière pouvant s’inscrire dans un parcours de soins médico-social.

En terme de poids économique, la prise en charge représentait en 2006, 29%

de la population de l’Union Européenne âgée de 15 ans et plus. En France,

près d’1 Français sur 7 (soit 8,3 millions de personnes en 2008) bénéficie du

dispositif des affections de longue durée (ALD) qui représentaient, à elles

seules en 2007, 64% des dépenses totales de l’Assurance Maladie.

La prise en charge de ces pathologies, a montré des défaillances d’un point de

vue clinique et organisationnel, ce qui a conduit à mener en 200953, une vaste

enquête téléphonique pour examiner et comparer auprès des patients, les

conditions de prise en charge de quelques maladies chroniques (hypertension

artérielle, maladie coronarienne, diabète, arthrite, asthme, bronchite chronique,

cancer, dépression).

Réalisée auprès de 8 pays, dont la France, cette étude a vérifié qu’au delà de

la perte d’efficience organisationnelle et économique, il existe des manques

structurels certains pour assurer de manière coordonner la prise en charge de

ces pathologies. Dès lors, un grand nombre de pays occidentaux mettent en

œuvre des dispositifs de prise en charge structurée et coordonnée en vue

d’améliorer les parcours de soins.

53 C. SCHOEN, R. OSBORN, S. K. H. HOW, M. M. DOTY, AND J. PEUGH, "In Chronic Condition: Experiences of Patients with Complex Health Care Needs, in Eight Countries, 2008," Health Affairs Web Exclusive, Nov. 13, 2008, w1–w16.

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44

Cette démarche initialement développée aux Etats-Unis a donné naissance à 4

concepts organisationnels54 (case management - CM, desease management

DM, chronic care management - CCM, population management – PM), tous

inscrits dans un contexte de développement des soins intégrés.55

Dans le cadre de notre étude, intéressons-nous plus particulièrement au

modèle de desease management, qui, dans les années 1990, a cherché à

cibler plus spécifiquement les patients atteints de maladies chroniques.

Dans le rapport publié par Pierre Louis Bras, Gilles Duhamel et Etienne Grass

en 2006 au nom de l’IGAS (Inspection Générale des Affaires Sociales) sur le

thème « Améliorer la prise en charge des maladies chroniques : les

enseignements des expériences étrangères de desease management », les

auteurs font référence à l’association américaine de desease management

(DMAA) qui proposait de définir le concept comme « un système coordonné

d’intervention et de communication en matière de soins, dirigé vers les

populations pour lesquelles les efforts des patients eux-mêmes ont un impact

significatif ».

En ce sens, le DM :

• soutien la relation entre le médecin et le patient dans le cadre d’un

plan de soin

• se concentre sur la prévention des complications en utilisant des

recommandations scientifiquement fondées et des stratégies visant à

accroitre les capacités des patients à se prendre en charge

(empowerment)

• évalue ses résultats humains, cliniques et économiques de manière

continue dans le but d’améliorer globalement la santé des patients.

54 BRUNN, Mathias et CHEVREUL, Karine. Prise en charge des patients atteints de maladies chroniques. Concepts, évaluations et enseignements internationaux. In : Santé Publique. 1 mars 2013, Vol. Vol. 25, n° 1, p. 87-94 . 55 L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) définit les soins intégrés comme le contrôle par un même acteur du financement et de la production des soins (de l’organisation des services participant au diagnostic, la prise en charge et la promotion de la santé).

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45

En 2002, la revue « The American journal of managed care56 » complètera

cette définition en s’intéressant plus particulièrement aux composants d’un

programme de DM qui vise particulièrement :

• le processus de formation favorisant la prise en charge des patients

et de leur santé (patient self management) autour de la prévention

primaire, des programmes de modification des comportements et des

dispositifs de surveillance de l’observance

• le système de retour d’information, de contrôle et de surveillance

continue (routine/reporting/feedback)

• l’usage adéquat des TIC

Loin de cohabiter au contact d’un système sous tendu par le DM, les dispositifs

numériques s’y insèrent totalement comme en témoigne les résultats du rapport

mené en 2012 par Robert Picard au nom du Ministère de l’Economie et des

Finances et du Redressement Productif sur le thème « De l’information du

patient à la démocratie sanitaire : enjeux et conditions d’un usage efficient des

technologies ».

Conforté par le cadre réglementaire, notamment la loi du 4 mars 2002 qui

légifère la question de l’information comme un droit acquis au patient de tenir

un rôle plus actif dans sa prise en charge, attitude qui constitue un élément de

pronostic essentiel, le code de déontologie médicale se voit modifié avec

l’obligation faite aux médecins d’informer le patient pour aboutir à une «décision

partagée ».

En France comme dans d’autres pays de la communauté européenne, la Haute

Autorité de Santé (HAS), produit en 2010 un rapport sur sa stratégie en matière

d’information du public qui en exprime clairement l’importance : «

L’information du public est devenue un enjeu essentiel du système de santé et

de son évolution, car le patient devient un acteur à part entière dans le

processus de soin ; il est obligatoirement consulté avant toute intervention mais

surtout, il est de plus en plus actif lors de sa prise en charge par le système de

56 WP, WELCH, C, BERGSTEN, C, CUTLER, C, BOCCHINO et RI, SMITH. Disease management practices of health plans. In : The American journal of managed care. avril 2002, Vol. 8, n° 4, p. 353 �361.

Page 46: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

46

soins, donnant souvent son avis, discutant parfois les informations des

praticiens. En outre, et de façon très positive, la compréhension de son état de

santé et des prescriptions qui lui sont faites, est un facteur de plus en plus

important de la qualité et de l’efficacité des traitements. Ces observations,

valables dans une grande diversité de situations, revêtent une importance

particulière dans le cas des maladies chroniques ».

La question des technologies au service de l’information du public apparaît, dès

lors, dans ce cadre politique et réglementaire. Ainsi, dès 2004, le législateur

confie à la HAS, la mission d’établir une procédure de certification des sites

Internet santé à destination du grand public57 en lien avec la fondation suisse

Health On the Net (HON) (La Santé sur Internet) chargée d’assurer la

certification des sites.

Mais au-delà de la valeur d’enjeux politiques, économiques, sociaux et

sanitaires pour les autorités publiques, le défi technologique majeur soulevé

avec leur usage des dispositifs numériques est celui des nouvelles

connaissances profanes et des limites des connaissances professionnelles

pour les patients et le citoyen. A ce titre, le rapport confirme que : « l’utilisation

de l’Internet par une large majorité de nos concitoyens s’accompagne

d’interactions avec des personnes souffrant des mêmes pathologies. Les

échanges, confrontations, vérifications, retours d’expériences associées à ces

pratiques constituent, in fine, un nouveau champ de compétence en santé

qu’on qualifie parfois de «profane». Cette compétence s’articule, se confronte

parfois, voire s’oppose à la compétence des professionnels, et revendique une

légitimité acquise dans le vécu de la personne au quotidien ».

Ainsi, il est constaté dans le rapport que :

- Les réseaux sociaux technologiques concernant la santé, stimulés

par l’abondance d’informations de santé mise à disposition du public,

sont les lieux privilégiés d’émergence de ces nouvelles

connaissances.

57 Loi n° 2004-810 du 13 août 2004

Page 47: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

47

- Les professionnels qui modèrent ces réseaux, ou qui plus simplement

les visitent ou les observent, témoignent de la richesse qu'ils en

retirent au niveau de la compréhension des patients, des

observations qu'ils réalisent et éventuellement croisent entre eux. En

tant qu'acteurs de ces réseaux, ils peuvent assurer avec efficacité

leur mission d'information, mais aussi être interpelés sur leurs

propres croyances, lorsqu'émergent des pratiques partagées issues

du sens commun qui ne rejoignent pas les données techniques dont

ils disposent.

Une affirmation soutenue par l’approche sociologique de l’innovation que

Gérald Gaglio 58 observe également : « Les informations glanées, les

expériences recueillies et les relations nouées sur Internet semblent

complémentaires et non concurrentes au savoir, aux prescriptions, à la

fréquentation des médecins…/… Les médecins pourraient considérer l’activité

de prise d’informations sur Internet comme un complément utile de leurs

interventions auprès des malades et de leur entourage : le partenariat entre

patients et médecins promu par le droit se déplace hors les murs du cabinet

médical et se distribue ».

Pour conforter ces éclairages, le rapport de Robert Picard présente l’intérêt

d’entériner ces postulats en corroborant ces derniers avec l’étude conduite par

le CGEIET 59 (Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des

technologies) afin de recueillir le témoignage de patients sur les motifs qui les

conduisent à mobiliser les dispositifs numériques comme source d’information.

Les résultats de l’enquête menée auprès d’un représentant d’une association

58 GAGLIO, Gérald. Consommation d’informations sur Internet et modulation de la relation aux médecins. Le cas d’aidantes de malades atteints d’une pathologie lourde. In : Sociologies pratiques. 17 mai 2010, Vol. n° 20, n° 1, p. 63 �74. DOI 10.3917/sopr.020.0063.

59 « La diffusion des technologies de l’information et de la communication dans la société française », Rapport 2012, réalisé pour le CGEIET et l’ARCEP – www.credoc.fr et http://www.cgeiet.economie.gouv.fr/

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48

de patient atteint d’une maladie chronique, en l’occurrence le diabète, éclairent

sur certaines motivations dont :

• Conscience et responsabilité

« Les citoyens atteints de maladie chronique évoluent globalement dans le

sens d’une conscience et d’un sens de leur responsabilité accrus

(…).Nombreux sont les patients qui connaissent mal leur maladie, alors même

qu’un patient informé gère mieux son capital santé. »

• L’intérêt accordé aux technologiques

« Les technologies, celles de l’information et des communications notamment,

sont porteuses de nouvelles réponses. Ainsi, le coaching à distance est bien

perçu. Il permet un meilleur engagement du patient.

Les outils de la télémédecine sont rares, et sont vus comme devant encore faire

leur preuve. Ils doivent être accompagnés d’une formation. Concernant plus

spécifiquement les services d’information, les sites internet Santé, les blogs, ont

du succès ».

• Enjeux et risques de l’information

« Les services d’information à destination du public modifient la relation patient-

soignant (..). Le médecin traitant doit prendre en compte cette nouvelle donne.

L’information rendue accessible au patient peut favoriser l’automédication, ce

qui peut être risqué. Les connaissances profanes se développent au travers

des réseaux sociaux, ce qui est positif : mais il faut en même temps veiller à

leur exactitude lorsqu’elles évoquent le domaine médical ».

• La question de la confiance

« Les patients attendent des technologies simples, à leur portée. Ils ont besoin

de sentir qu’ils restent pris en charge. Les associations peuvent y contribuer. Il

faut veiller à la personnalisation des technologies et à la prise en compte du

Page 49: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

49

contexte du patient. Le patient doit aussi être conforté dans la confiance qu’il

donne aux technologies (..). »

La convergence des points de vue, tant au niveau des chercheurs que des

patients eux-mêmes pose maintenant la question du rapport entretenu avec

l’outil technologique. Comment caractériser ce lien qui unit les individus au

dispositif socio technique ? Est-ce uniquement la relation médecin patient qui

est aujourd’hui médiatisé par cet artefact technologique ou ce dernier devient-il

un objet transitionnel éducatif ?

B. De la relation à la médiation

La question de l’instrumentalisation de la communication ou communication

instrumentée est un phénomène qui trouve ses sources avec l’histoire de

l’homme : « il n’est aucune action, aucune conduite humaine qui n’échappe au

processus d’instrumentation à travers la médiation d’artefacts techniques »

commente à ce sujet Daniel Peraya dans son article « Regard critique sur les

concepts de médiatisation et de médiation, nouvelles pratiques, nouvelles

modélisations ».60

Il prend pour preuve les travaux de Leroi Gourhan sur l’étude anthropologique

des premiers hommes et de leurs rapports à l’outil technique qu’il définit comme

"exsudé de la main de l’homme et donc comme une extension qui la prolonge,

augmentant de ce fait ses capacités ».

Aussi, l’outil technologique que représente un dispositif numérique serait, dans

ce sens, une nouvelle forme de médiation, c’est-à-dire de mise en relation entre

l’objet, l’action et le sujet. Ce que Daniel Peraya confirme en indiquant que

« tout dispositif médiatique doit être considéré comme un outil cognitif dans sa

double dimension matérielle et symbolique ». En effet, s’intéresser au statut de

l’artefact technique revient à rechercher les interactions induites ou déduites sur

l’environnement et sur l’action elle-même, médiatisée par cet objet technique.

60 PERAYA, Daniel. Un regard critique sur les concepts de médiatisation et de médiation. Nouvelles pratiques, nouvelle modélisation. In : [en ligne]. [Consulté le 25 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://w3.u-grenoble3.fr/les_enjeux/2008-supplement/Peraya/

Page 50: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

50

Cette approche considérée comme processus instrumental de la médiation,

devient, selon Yves Lenoir61 « un moyen de négociation, faisant appel à des

techniques et poursuivant l’atteinte d’objectifs déterminés ».

Conceptualisée selon différents types par cet auteur, revoyons ici les

caractéristiques essentielles du terme pour mieux assimiler ces fondements au

sujet de notre étude (Fig.6)

Figure 6 : Concepts associés à la médiation instrumentale (Yves Lenoir, 2003)

TYPE Caractéristiques

CONCILIATION Formelle ou informelle

N’exige pas de tierce personne

But : trouver des points communs et concilier

les intérêts entre les parties

NEGOCIATION Formelle ou informelle

N’exige pas de tierce personne

But : établir un accord (éventuellement une

coopération)

ARBITRAGE Formelle

Exige une tierce personne qui à le pouvoir de

décision

But : trouver une solution rapide au conflit

RESOLUTION de CONFLITS Formelle

Exige une tierce personne qui a le pouvoir de

décision

But : supprimer les conflits

Le complément de cette grille à notre lecture nous éclaire, au delà du rapport à

l’outil lui-même, sur les conditions de la relation. Au regard des éléments

61 Yves LENOIR, Docteur en sociologie et directeur du Centre de Recherche sur l’intervention éducative – Université de Sherbrooke. (Microsoft PowerPoint - M\351diation-Pr\351sentation.ppt) - Mediation.PDF [en ligne]. S.l. : s.n. [Consulté le 15 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.crie.ca/Communications/Documents_disponibles/Mediation.PDF

Page 51: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

51

produits dans la première partie de ce mémoire, nous y voyons notamment,

dans les concepts de négociation et de conciliation, les fondements

intrinsèques qui déterminent l’évolution de la relation médecin patient au cours

des dernières années, amplifiée par le caractère durable des maladies

chroniques.

Elle nous permet aussi de mesurer la particularité des liens entretenus entre, et

avec, le dispositif socio technique que représente le web. Car ce sont, en

l’occurrence, ces valeurs matérielles et symboliques qui distingue internet de

l’outil technique traditionnel. Entendu alors comme un « complexe hétérogène

de pratiques, d’organisations, de savoirs, de normes et de machines qui

instancie l’ensemble des formes sociosémiotiques qui s’expriment notamment

dans les écrits d’écran » 62 (Laurence Monnoyer-Smith, 2013), les

fonctionnalités de partage et de mise en réseau induites par le web, nous

renvoient, de fait, à la notion fondamentale de la relation, comme acte social.

Issu d’un processus communicationnel, dont le langage n’est plus ici, inscrit

dans un cadre interpersonnel physique mais un schéma discursif virtuel, la

médiation, en fonction des auteurs, est, pour certains, un intermédiaire, un objet

de relation, un objet transitionnel ou une fonction d’interface (Guy Gimenez,

2002). Entre ces différentes conceptions, le point commun résulte de

l’articulation entre le sujet (le patient/le médecin), l’objet (l’information, le savoir,

le médecin), et l’outil technologique, ce qui détermine la nuance entre

médiatisation et médiation.

Si la première renvoie, selon Daniel Peyara à l’idée de média, entendu au sens

de support de transmission (l’auteur illustre d’ailleurs cette idée par l’expression

« médiatiser un contenu »), la seconde se réfère à l’idée de médium que

l’auteur, en référence à Yves Lenoir, identifie comme démarche extrinsèque,

centrée sur la dynamique des individus dans leur rapports sociaux et ayant

pour objet la réalisation de l’être humain en société : « tout être humain se

62 BARATS, Christine. Manuel d’analyse du Web en sciences humaines et sociales. Paris : Armand Colin, 2013. ISBN 9782200286279 2200286279.

Page 52: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

52

construit en construisant la réalité dans le temps et dans l’espace et vise une

certaine forme d’émancipation sociale ».

Intégrés dans le champ d’une relation pédagogique, hypothèse retenue dans ce

chapitre, comment définir l’accès au savoir et la transmission des

connaissances au sein de cette triangulation ?

Dans l’article « Médiation, médiations… 63» les auteurs, en référence à Linell

(2009), et Vygotski, réaffirment que « la connaissance du monde nous vient de

manière nécessairement médiatisée, (…), et qu’on peut donc remplacer le

terme de construction de connaissances par médiation de connaissances ». De

fait, cette manière qui consisterait à mettre en média une connaissance serait à

la fois une médiatisation de contenus et un processus éducatif au sein de la

relation pédagogique, agissant sur les comportements cognitifs et relationnels

des individus.

Avec le postulat qu’ « apprendre est une production de soi par soi, mais cette

autoproduction exige le recours à la médiation de l’autre (et du monde) » selon

Yves Lenoir, il est maintenant nécessaire de définir ce que nous entendons par

éducation et pratiques éducatives afin de poursuivre notre raisonnement.

2. Education et santé, les perspectives de l’éducat ion thérapeutique

A. Education et santé, les apports conceptuels Le rapprochement des deux termes trouve donc une partie de sa justification

dans le premier chapitre de ce mémoire, à travers notamment les évolutions du

rôle du patient, devenu acteur, puis décideur de sa santé, et inscrit dans une

dynamique d’expérience de vie individuelle et collective, dont la maladie fait

partie.

En effet, de part la condition d’une relation asymétrique entre le savoir expert et

le savoir profane, de part l’existence sociale et culturelle de la communauté des 63 DESSUS, Philippe, PUIMATTO, Gérard et GRANDBASTIEN, Monique. Médiation, médiations…. In : Distances et médiations des savoirs. Distance and Mediation of Knowledge [en ligne]. 18 février 2013, Vol. Vol. 1, n° 2. [Co nsulté le 27 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://dms.revues.org/255.

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53

patients face à la communauté médicale, la relation entre eux n’est pas de

l’ordre de l’enseignement 64 mais bien de l’éducation au sens de guider,

conduire, faire produire et faire se développer65 les compétences du patient

(apprenant) nécessaires à la compréhension de ce qu’il vit, avec l’adaptation de

comportements de santé adéquats au maintien d’un état de complet bien-être

physique, mental et social tel que définit par l’OMS, dans un système qui, de

surcroit, doit prendre en compte aujourd’hui l’usage des TIC.

Si la notion d’éducation, dans le cadre de notre objet d’étude, s’envisage

comme « le moyen d’apporter les éléments nécessaires à la constitution de

l’individu dans ses pratiques et l’ensemble des processus de changement

auxquels l’individu et la société sont confrontés »66 (Chantal Aymard, 2004) ,

l’action éducative se construit en référence à différents modèles et différentes

conceptions de l’éducation qu’il convient de poser pour nous permettre de

mieux approcher cette notion avec celle de la santé et de la maladie.

En effet, deux conceptions de l’éducation sont à mettre en parallèle. La

première, orientée « science de la santé », trouve sa légitimité dans

l’apprentissage des compétences et des comportements favorables, relayée

par les professionnels du soin. La seconde, dirigée « science de l’éducation »,

aborde la santé comme un des volets et des thèmes de l’éducation et va plutôt

étudier le processus instruction-apprentissage entre l’enseignant et l’apprenant.

L’intérêt de croiser ces deux approches est double. Il s’agit d’une part de

comprendre la construction du savoir entre le médecin et le patient autour de la

maladie (qui devient le sujet d’enseignement et d’apprentissage) dans le 64 Enseigner, c'est transmettre à la génération future un corpus de connaissances (savoir et savoir-faire) et de valeurs considérées comme faisant partie d'une culture commune. Le terme enseignement, de son côté, se réfère plutôt à une éducation bien précise, soit celle « de la transmission de connaissances » à l'aide de signes (Signes et enseignement dérivent d'ailleurs de la même racine latine). 65 Le mot « éducation » est directement issu du latin educatio de même sens, lui-même dérivé de ex-ducere (ducere signifie conduire, guider, commander et ex, « hors de ») : faire produire (la terre), faire se développer (un être vivant). 66 EYMARD, Chantal. Essai de modélisation des liens entre éducation et santé. In : Questions vives, recherches en éducation. 2004, Vol. 3, n° 5, p. 13-34 .

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54

processus communicationnel, et d’autre part de s’intéresser aux

comportements issus de ces apprentissages.

Aux vues de cette mise en perspective, cela doit nous aider nous interroger sur

le rôle et la place occupée par les communautés virtuelles de patients dans ce

processus éducatif et ce, en fonction de l’angle d’étude.

Le tableau schématique des principaux courants théoriques conçu par

Anastissis Kozanitis67 (2005) est utile pour définir l’angle par lequel les sciences

de l’éducation ont un apport intéressant pour la santé (Fig.4).

Figure 4 : Représentation schématique des principaux courants théoriques de

l’enseignement et de l’apprentissage

Socio-

constructivisme

Constructivisme Cognitivisme Béhavioriste

Enseigner c’est…

Organiser des

situations

d’apprentissage

propices au dialogue

en vue de provoquer

et de résoudre des

conflits socio-

cognitifs

Offrir des situations

obstacles qui

permettent

l’élaboration de

représentation

adéquates du monde

Présenter

l’information de façon

structurée,

hiérarchique,

déductive

Stimuler, créer et

renforcer des

comportements

favorables appropriés

Apprendre c’est…

Co-construire ses

connaissances en

confrontant ses

représentations à

celle d’autrui

Construire et

organiser ses

connaissances par

son action propre

Traiter et

emmagasiner des

nouvelles

informations de façon

organisée

Associer par

conditionnement, une

récompense à une

réponse spécifique

Méthodes pédagogiques appropriées

Apprentissage par

projets, discussions,

exercices, travaux

Apprentissage par

problèmes ouverts,

étude de cas

Exposé magistral,

résolution de

problèmes fermés

Programme

d’autoformation

assistée par

67 Conseiller pédagogique au Bureau d’Appui Pédagogique de l’Ecole Polytechnique de Montréal. Consultable http://www.polymtl.ca/bap/ress_peda/docs_consult.php

Page 55: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

55

ordinateur

Adossée à notre étude, cette grille de lecture nous permet aisément de rendre

lisible la transformation du processus communicationnel de la relation médecin

patient, qui, au cours de l’histoire, est passée d’une vision behavioriste à une

approche socioconstructiviste, transfert légitimé par l’évolution des modèles

conceptuels de la santé (du biomédical à un modèle biopsychosocial).

Dans son essai de modélisation des liens entre éducation et santé, Chantal

Eymard (2004) traduit les approches cognitivistes, constructivistes et socio-

constructivistes qui ont influencé l’approche en santé de la manière suivante :

• L’approche cognitiviste ou le modèle de l’instruction

L’éducation est caractérisée par la volonté de transmettre la culture scientifique.

L’action éducative est ici intentionnellement exercée sur l’être humain pour

l’amener à être ce qu’il est, pour le construire à des bonnes pratiques. Dans

cette approche, l’éducabilité est étroitement liée au développement de

l’intelligence, par l’inculcation des savoirs savants cumulée aux savoirs de

l’apprenant, afin de l’amener à accroitre son potentiel de connaissance. Adapté

à la santé, il s’agit de favoriser la transmission des normes et des bonnes

pratiques au travers la sphère familiale, scolaire ou de soin, grâce à la

communication d’informations et au phénomène d’ancrages (David Ausubel,

1978).

• L’approche constructiviste ou le modèle du développement du sujet

Centrée sur le sujet qui apprend, ce dernier est rendu acteur des situations qu’il

vit. La démarche éducative vise ici, et selon l’auteur, à passer d’une relation

pédagogique une relation éducative au sens retenu par Marcel Postic 68 :

« Quand au lieu de se réduire à la transmission du savoir, elle engage des

êtres dans une rencontre où chacun découvre l’autre et se voit soi-même,

commence une aventure humaine ».

68 POSTIC, Marcel. La Relation éducative [en ligne]. S.l. : Presses Universitaires de France - PUF, 2001. ISBN 2130523358. Disponible à l’adresse : http://www.amazon.fr/La-Relation-%C3%A9ducative-Marcel-Postic/dp/2130523358/ref=wl_mb_hu_c_2_dp#reader_2130523358.

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56

En privilégiant la mise en avant des savoirs construits par l’expérience du sujet

au détriment des savoirs savants, la relation éducative développe la

connaissance de soi et favorise les apprentissages sociaux. Contextualisée à la

santé, cette approche s’oriente plus vers une action de promotion que de

prévention 69 , bénéfique à l’identification des potentialités individuelles et

collectives comme à la prise de décision.

• L’approche socio-constructiviste ou le modèle de l’interaction

sociale

Initiée par Lev Vygostsky 70 , l’approche socio-constructiviste est un modèle

d’enseignement-apprentissage pour lequel trois éléments didactiques sont

indissociables pour permettre le progrès :

- la dimension constructiviste qui fait référence au sujet qui apprend.

- la dimension socio qui fait référence aux partenaires en présence : la

communauté d’apprenants et l’enseignant.

- la dimension interactive qui fait référence au milieu dans lequel s’organisent

les situations et l’objet d’apprentissage.

Pour résumer cette lecture, Chantal Eymard indique que « l’éducation n’est pas

ici transmission de savoirs savants, ni seulement développement des

potentialités du sujet, elle développe la capacité du sujet à problématiser et à

inventer des réponses ».

Par le déploiement de la capacité d’agir de l’individu apprenant, la conception

de la connaissance est ici définit, tant par les savoirs construits, que par les

savoirs expérientiels de l’individu et des membres de la société.

69 Selon l’OMS, la promotion de la santé a pour but de donner aux individus davantage de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens de l'améliorer. La prévention quant à elle, est l'ensemble des mesures visant à éviter ou à réduire le nombre et la gravité des maladies ou des accidents. 70 Psychologue russe (1896-1934). Ses travaux sur l’apprentissage social ont été initialement publiés dans les années 1920, la contribution à la psychologie occidentale moderne n’a été reconnue qu’à la suite de la traduction en anglais de ses travaux vers la fin des années 1970.

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57

La santé est ici un projet de société, où l’apprenant est accompagné dans

l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de ce dernier.

A partir de cette présentation chronologique, prenons appui sur les travaux de

Alain Deccache et Philippe Meremans (2000)71 qui ont utilisé ces différentes

approches pour catégoriser les logiques d’instruction et d’apprentissage en

fonction des modèles d’éducation :

Modèle d’éducation Modèle de santé

Biomédical Biopsychosocial

Logique d’instruction

(fondée sur l’enseignant)

Type 1 : enseignement de

savoirs médicaux

Modèle Behavioriste

Enseignement à la prévention

(bénéfice-risque). L’éducation

vise la transmission des

savoirs et des comportements

de prévention recommandés.

Type 2 : enseignement des

savoirs de santé à la fois

physique, mentale, sociale

Modèle cognitiviste

Les savoirs à transmettre

restent prédéfinis mais par des

experts travaillant en

complémentarité. L’éducateur

est un enseignant, un expert.

Logique d’apprentissage

(fondée sur l’apprenant)

Type 3 : apprentissage de

savoirs médicaux

Modèle constructiviste

L’éducation s’élabore autour

d’un apprentissage participatif

dans lequel les apprenants

contribuent à leur propre

formation notamment en

définissant eux-mêmes leurs

objectifs et les moyens

d’apprendre. L’éducateur est

encore un expert mais aussi

un facilitateur, un animateur

Type 4 : apprentissage de

savoirs de santé à la fois

physique, mentale et sociale

Modèle socioconstructiviste

L’éducation se fonde sur une

logique globale de la santé et

de la maladie. La participation

occupe une place majeure qui

se définie à la fois comme une

possibilité de négocier les

sujets de santé, les contenus

et les méthodes. L’éducateur

tient le rôle d’une personne

ressource, facilitateur et d’aide

71 Alain Deccache et Philippe Meremans. L’éducation pour la santé des patients au carrefour de la médecine et des sciences humaines. In : Brigitte Sandrin Berthon. L’éducation pour la santé au secours de la médecine. Paris : Puf, 2000, p. 147.

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58

capable de s’adapter aux

attentes et choix de

l’apprenant.

à l’empowerment du public.

B. Formalisation de l’éducation thérapeutique

La formalisation de cette démarche permet de rejoindre les préoccupations

éducatives vues par la « science de la santé » qui elle, va davantage orienter

son étude sur les facteurs d’influences et de genèse des comportements de

santé, afin de chercher à comprendre les liens de causalités entre individu et

maladie, entre risque et maladie, entre comportement, risque et conséquence.

La démarche éducative se fixe prioritairement sur le besoin éducatif, dans

l’objectif de poser un diagnostic éducatif et/ou comportemental.

Dès lors, trois niveaux de lecture encadrent le périmètre de cette conception de

l’éducation : l’éducation pour la santé des patients, l’éducation du patient à sa

maladie et l’éducation thérapeutique du patient.

• L’éducation pour la santé des patients

Formalisée par le Dr Lawrence W.Green72, l’éducation pour la santé est « une

combinaison d’expériences d’apprentissages conçue pour faciliter les

adaptations volontaires du comportement conduisant à la santé ». Pour

démontrer son raisonnement, l’auteur donnera un complément d’explication à

chaque terme :

« Combinaison » : dénote l'importance de la complémentarité des méthodes

éducatives. Chaque méthode correspond à certains objectifs d'apprentissage.

Une combinaison de ces méthodes permet d'atteindre l'ensemble des objectifs

du projet d'éducation pour la santé.

« Expériences d'apprentissage » : insiste sur la nécessité d’une pédagogie

active permettant l’intégration, la réappropriation des éléments cognitifs

(connaissances), affectifs (attitudes et valeurs) et psychomoteurs (habilités)

favorisant la réalisation d’un comportement.

72 Green L.W., Kreuter M.W., Deeds S.G., Partridge K.B. (1980) Health Education Planning – adiagnostic approach, Mayfield Publ., USA, pp. 306. Visible également sur le site http://www.lgreen.net/precede.htm

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59

« Faciliter » : situe le rôle de l’éducateur dans sa fonction de guide qui doit

respecter la personnalité de l’éduqué, voire favoriser son accession à

l’autonomie, à l’auto-détermination.

« L'adaptation volontaire » : spécifie d'abord que tout individu possède un

mode de vie qui est façonné par son hérédité, son développement, sa culture,

et son environnement. Il ne s’agit pas pour l’éducateur, de poser des solutions

toutes faites, mais de donner des outils au sujet pour l’aider à trouver une

approche qui tienne compte de son histoire, de ses valeurs et de ses

connaissances.

« Comportement conduisant à la santé » : les comportements visés, dans un

projet d'éducation pour la santé, sont tous les comportements qui permettent

d'améliorer la santé.

• L’éducation des patients à la maladie

S’adressant plus particulièrement aux malades chroniques, il s’agit

d’accompagner le patient dans la prise de conscience de son état et la

reconnaissance de son positionnement actuel. En s’intéressant à la façon dont

ce dernier accepte son état et gère ses problèmes au quotidien (gestion du

traitement mais aussi prévention des complications et rechutes, impact de la

maladie sur la vie personnelle, familiale, professionnelle, sociale), l’action

éducative dans ce contexte, cherche à stimuler, intégrer et responsabiliser le

patient en évaluant notamment sa motivation, ses croyances, ses valeurs et ses

perceptions afin de positionner l’orientation des changements de

comportements de santé et leur stabilité dans le temps.

Définie par Alain Deccache et Eric Lavendhomme 73, cette conception renvoie

l’idée d’une « l'éducation du patient comme un processus par étapes, intégré

dans la démarche de soins, comprenant un ensemble d'activités organisées de

sensibilisation, d'information, d'apprentissage et d'aide psychologique et

sociale, concernant la maladie, les traitements, les soins, l'organisation et

procédures hospitalières, les comportements de santé et ceux liés à la maladie,

destinés à aider le patient (et sa famille), à comprendre la maladie et les

73 DECCACHE, Alain et LAVENDHOMME, Eric. Information et éducation du patient: Des fondements aux méthodes. S.l. : De Boeck Université, 1989. ISBN 9782804112677

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60

traitements, collaborer aux soins, prendre en charge son état de santé et

favoriser un retour aux activités normales ».

• L’éducation thérapeutique des patients, malades chr oniques

Son objectif est de former les patients à l’autogestion, à l’adaptation du

traitement à leur maladie chronique, et à leur permettre de faire face au suivi

quotidien dont l’intérêt est de produire un effet thérapeutique complémentaire à

ceux de toutes les autres interventions.

Décrite dans les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS)

comme une démarche pédagogique structurée afin d’aider les patients à

acquérir les compétences dont ils ont besoin (auto soins et adaptation74 ) pour

suivre les traitements qui leur sont prescrits, elle s’organise dans une

planification en quatre étapes, modélisées par J.F. d’Ivernois et R. Gagnayre

(1995) : le diagnostic éducatif, le contrat, la mise en œuvre de l’éducation et

son évaluation.

Le diagnostic éducatif : il permet la connaissance du patient, d’identifier ses

besoins, ses attentes, formuler avec lui des compétences à acquérir ou à

mobiliser et à maintenir en tenant compte des priorités du patient.

Le contrat ou programme ETP : il s’agit de négocier les compétences à

acquérir au regard du projet du patient et de la stratégie thérapeutique, afin de

planifier un programme individuel.

Mise en œuvre du programme : par la sélection des contenus à proposer lors

de séances d’ETP, des méthodes et des techniques participatives

d’apprentissages, il convient de planifier et réaliser les séances avec

l’alternance de séquences individuelles et collectives.

74 HAS : les compétences d’autosoins sont les décisions que le patient prend avec l’intention de modifier l’effet de la maladie sur sa santé (World Health Organization, 2004). Les compétences d’adaptation sont des compétences personnelles et interpersonnelles, cognitives et physiques qui permettent au personnes de maîtriser et de diriger leur existence, et d’acquérir la capacité à vivre dans leur environnement et à modifier celui-ci. Elles font partie d’un ensemble plus large de compétences psychosociales (World Health Organization, 2003)

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61

L’évaluation : réalisée individuellement, elle est l’occasion de mettre en valeur

les transformations intervenues chez le patient : acquisition de compétences,

vécu de la maladie au quotidien, autodétermination, capacité d’agir etc.

En synthèse, le schéma proposé ci-dessous permet de visualiser la démarche

éducative en fonction de l’orientation donnée à l’enseignement-apprentissage

en santé :

http://www.educationdupatient.be/cep/pages/educationpatient/ep12.htm

Page 62: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

62

Synthèse du chapitre

Que retenir de cette mise en perspective conceptuelle à travers la science de la

santé, celle de l’éducation et le rapport à la technologie ?

Tout d’abord, elle nous confirme bien que la relation médecin patient, de part

les conditions liées à l’aspect durable de la maladie chronique, s’inscrit dans un

principe éducationnel. Dans ce cadre, la construction des connaissances

permettant au patient d’acquérir les compétences nécessaires en autonomie et

en auto-efficacité, comme levier à l’incertitude dans lequel il se trouve plongé,

s’inscrit dans un processus qui prend en compte toutes ses composantes

physiques, psychiques et sociales ainsi que son environnement.

Favorisé par les conditions socio-culturelles qui ont marqué l’évolution de la

médecine, le « pouvoir d’agir » des patients, construit sur le principe de la

revendication et du désir de participation, pose aujourd’hui la question

essentielle de la place et du rôle de ce pouvoir « expérientiel », dans la

construction du savoir intégré aux dispositifs éducatifs.

L’éducation thérapeutique, dont l’objectif est de « former » le patient à prendre

en charge sa maladie, repose autant sur ces perceptions intuitu personae que

sur l’apprentissage des techniques et des comportements favorables à sa

santé.

Par ailleurs, la virtualisation des échanges, notamment par l’intermédiaire de

sites internet dédiés, interroge doublement sur les rapports à la technologie et

ses incidences sur le modèle éducatif. Les spécificités du dispositif

sociotechnique que représente le web, comme support d’une communication

instrumentée, est également objet de relation dans la construction des

connaissances, de part ses fonctionnalités sémio cognitives et le rôle

d’interface social entendu au sein du réseau informel et virtuel qu’il entretient.

Les chapitres précédents ont relevé de manière générale ces changements

socio-culturels, cette évolution dans les pratiques relationnelles et éducatives

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63

ainsi qu’une prise en considération des usages liés à l’arrivée des dispositifs

sociotechniques.

Intéressons-nous plus spécifiquement maintenant à la place et au rôle joué par

les communautés de patients et comment la virtualité de ces dernières peut

aujourd’hui nous interroger sur un changement possible de paradigme.

Page 64: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

64

III. Place et rôle socio culturel des communautés

virtuelles des patients dans le dispositif éducatif

Introduction du chapitre

La notion déterminante est ici celle apportée à la définition de « communautés

et de communautés virtuelles ». En effet, l’expression renvoie à plusieurs

orientations qu’il est intéressant de détailler pour l’adapter aux réflexions de

notre étude. Si le terme signifie l’idée d’un groupement de personnes unies par

des liens d'intérêts, des habitudes communes, des opinions ou des caractères

communs (communauté d’intérêt), il renvoie également à la notion d’identité

dans la manière de penser de plusieurs personnes75.

Par ailleurs, notons qu’en psychiatrie, puis dans d’autres institutions de prise en

charge de patients tels que les alcooliques ou les toxicomanes, ce terme

s’inscrit dans les pratiques médicales visant, « l'effacement des rapports

traditionnels entre soignants et soignés, ainsi que la participation active des

soignés au fonctionnement de l'institution, en vue de favoriser leur

apprentissage social, considéré comme principal processus thérapeutique, ou

de changement imposé de façon quasi autoritaire, en faisant intervenir la

pression du groupe ».

Appliquée au cadre numérique, la communauté virtuelle est une notion récente

qui se définie, selon Howard Rheingold 76 , comme « des regroupements

socioculturels qui émergent du réseau, lorsqu'un nombre suffisant d'individus

participent à ces discussions publiques pendant assez de temps, en y mettant

suffisamment de cœur, pour que des réseaux de relations humaines se tissent

au sein du cyberespace." Si l’auteur valorise ici la valeur collective attribuée à la

congruence des rapports sociaux entretenus par l’intérêt des individus face au

groupe dans lequel ils se reconnaissent, le prisme de cet aspect est à mettre en

75 Dictionnaire Larousse 76 RHEINGOLD, Howard. Les communautés virtuelles. Paris; Reading, Mass.; New York : Addison-Wesley France, 1995. Mutations technologiques. ISBN 2879080894 9782879080895.

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65

parallèle avec celui de la communauté, afin de nous éclairer sur les motivations

et les intentions d’actions de ces dernières.

Face à un environnement ou les frontières spatio-temporelles sont

reconfigurées par « un rapprochement des personnes intéressées par le libre

partage des idées et des informations, dans les domaines les plus divers,

tissant entre ceux qui y participent, y échangent et s’y entraident des liens

affectifs ou professionnels », bâtissant des complicités actives, bien " réelles ",

à travers d'innombrables échanges virtuels, en quoi les intentions d’actions des

communautés virtuelles de patients dans le cadre du suivi des maladies

chroniques ont-elles un impact sur les pratiques éducatives, notamment celle

de l’éducation thérapeutique ?.

C’est précisément ce sur quoi portera notre terrain de recherche à partir de

l’étude de trois sites internet proposant une fonctionnalité communautaire où il

sera observé les interactions entre le dispositif technique et la construction des

savoirs nécessaires, notamment par les conditions expérientielles qu’il propose.

Pour conduire cette analyse, il sera confronté, par la méthode d’observation

ethnographique en ligne, les formes d’interaction et de transactions au sein de

ces communautés en posant comme grille de lecture la recherche d’indicateurs

techniques, sociaux et d’adoption de la technologie proposés par les dispositifs

web et ceux déployés dans les programmes d’éducation thérapeutique.

1. De la communauté à la communauté virtuelle de pa tients

A. Evolution socio culturelle de la reconnaissance du

savoir expérientiel

Page 66: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

66

Pour Emmanuelle Jouet77, dans sa synthèse formulée sur « Construction et

reconnaissance des savoirs expérientiels des patients », c’est en 1934, au sein

du mouvement des Alcooliques Anonymes, qu’ont été posées, les pierres

angulaires d’un nouveau type d’échanges fondé sur des pratiques informelles

et non formelles entre patients.

En reprenant les travaux de Pierre Lascoumes78, l’entrée en scène de la parole

du patient s’inscrit dans une volonté de faire face « à la faiblesse des réponses

médicales et à l’importance des problèmes psychosociaux auxquels ils étaient

confrontés, conduisant de petites minorités à s’auto-organiser ».

C’est ainsi que ce modèle d’organisation va s’étendre à d’autres groupes,

comme les usagers de drogues dans les années cinquante et les personnes

atteintes par le VIH dans les années quatre-vingt.

Ce type d’interaction, basé sur l’entraide, le partage d’informations entre

malades, la formation entre pairs, en développant l’approche globale de la

personne, a peu à peu remis en cause, puis bouleversé, la toute puissante

expertise médicale, comme source de guérison et de gestion de la maladie. Il a

aussi permis d’aller à la rencontre des malades sur les lieux mêmes de leurs

addictions. Loin de rester un phénomène isolé et indépendant, Emmanuelle

Jouet en rappelle d’ailleurs les principes structurels : « l’organisation de ce

mouvement s’est formalisée selon des modèles déjà opérationnels, comme

ceux des sociétés savantes ou des grandes sociétés caritatives79. »

Parallèlement aux mouvements issus des corporations associatives et

humanitaires, la communauté médicale, sur fond de remise en cause du

modèle organique (biomédical) s’inspire du concept de « relation d’aide » pour

revisiter, elle aussi, son approche du soin. L’apport psycho-humaniste de Carl

77 JOUET, Emmanuelle, FLORA, Luigi Gino et VERGNAS, Olivier Las. Construction et reconnaissance des savoirs expérientiels des patients. In : Pratiques de Formation - Analyses [en ligne]. juin 2010, Vol. 2010, n° 58-59. [Consul té le 28 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00645113. 78 LASCOUMES, Pierre. L’usager, acteur fictif ou vecteur de changement dans la politique de santé ? In : Les Tribunes de la santé. 1 décembre 2003, Vol. no 1, n° 1, p. 59-70. DOI 10.3917/seve.001.70. 79 Ces organisations (comme la Croix Rouge) sont nées vers le début du XIXe siècle, avec initialement un rôle uniquement caritatif pour aider les malades et déshérités sans pour autant intervenir sur le plan des soins délivrés dans les établissements publics de santé.

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Rogers comme une relation dans laquelle « l’un au moins des deux

protagonistes cherche à favoriser chez l’autre la croissance, le développement,

la maturité, un meilleur fonctionnement et une plus grande capacité d’affronter

la vie » 80est l’exemple de ce changement, favorisant le passage du modèle bio

médical au modèle biopsychosocial énoncé dans le chapitre précédent.

Mettre le patient au centre du dispositif de soins devient un objectif déterminé,

tant au niveau politique (en santé publique et communautaire), qu’au niveau

thérapeutique et préventif : tout ce qui concerne l’information et l’éducation du

malade devient au niveau sociétal, le pilier des nouvelles politiques de santé

publique, pendant que les revues de littérature tendent à montrer que

l’éducation du patient améliore la qualité des soins et devient un facteur

bénéfique crucial dans la prise en charge. Les approches de la santé et de

l’éducation exposées dans le chapitre précédent en sont l’exemple.

La nécessité non seulement d’informer mais d’éduquer le patient afin d’être au

plus près d’un consentement dit « éclairé », légiféré par la loi du 4 mars 2002,

devient la clé de voute de la reconnaissance individuelle et collective du pouvoir

donné aux patients, fruit de cette contingence entre les deux communautés

(médicale et profane).

Le renforcement des droits individuels (information, consentement, accès direct

aux informations médicales, non-discrimination, etc.), celui des droits collectifs

(agrément des associations, statut des représentants, création d’une instance

de conciliation régionale, participation aux conférences régionales, etc.), et

deux procédures, l’une de conciliation en cas de conflit, l’autre d’indemnisation

des victimes d’aléas thérapeutiques, illustrent la volonté de reconnaître la

communauté des patients comme acteur de santé.

La création du Collectif interassociatif sur la santé (Ciss) en juin 1996,

regroupant aujourd’hui vingt-six des principales associations nationales de

80 VAILLE, Hélène. Le Développement de la personne. In : Sciences Humaines [en ligne]. [Consulté le 28 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.scienceshumaines.com/le-developpement-de-la-personne_fr_12966.html. \line{}1951-1961 Carl rogers\line

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personnes malades et de personnes handicapées démontre, par sa forte

représentativité nationale, sa capacité à agir tant au niveau de maladies

spécifiques (diabète, cancer, myopathies, mucoviscidose, VIH) qu’en matière

de handicaps (physique ou mentaux).

Soutien psychologique, social et parfois médical apporté aux personnes

atteintes, et contrairement au lieu commun qui veut que chaque groupe soit

enfermé dans le particularisme de ses besoins et l’égoïsme de ses

revendications (Pierre Lascoumes, 2003), ces associations, conscientes que

seule, une action collective soutenue, était susceptible de mener à bien un vrai

travail transversal aux différentes pathologies qu’elles représentent,

s’organisent donc pour partager de nombreux problèmes de santé.

Christian Saout, président du Ciss, insiste d’ailleurs sur « l’expertise profane

dont nous nous revendiquons : tirer de l’expérience de la représentation de tous

les enseignements pour améliorer le fonctionnement de ce l’on appelle la

démocratie ».

Outre la reconnaissance statutaire d’un mouvement collectif, c’est donc aussi la

reconnaissance identitaire du patient expert 81 qui reconfigure les habitudes

éducatives des professionnels.

Cette reconnaissance d’un savoir développé par l’expérience du vécu de la

maladie pose les bases de nouvelles pratiques émergentes comme le constate

Emmanuelle Jouet : « et, dès lors que les soignants ne sont plus considérés

comme les seuls « experts », l’apprentissage de nouvelles modalités de relation

au sein du système de santé avec les soignés et leurs proches devient

doublement délicate. D’un côté, les médecins craignent des exigences

irréalistes et, de l’autre côté, les associations et leurs membres veulent à tout

prix faire entendre de nouvelles prérogatives ».

Par l’accession à toutes sortes de sources, y compris scientifiques, les

associations s’organisent pour analyser, intégrer puis diffuser des informations

81 L’expression « Patient expert » utilisée dans le rapport du Department of Health est en fait apparue à la fin des années quatre-vingt au sens de patient « éduqué ».

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cruciales pour leur communauté. En ce sens, elles développent et nourrissent

des réseaux pour constituer de réelles communautés de pratiques, apportant

une expertise de terrain afin d’officier, autant dans l’accompagnement des

usagers venant à leur rencontre, que dans la gouvernance des politiques de

santé et des établissements ou programmes de santé.

Pour preuve, en France, les recommandations de la Haute Autorité de la Santé

et les livrets d’information de l’INPES – Institut National de Prévention et

d’Education à la Santé - sont élaborés en tenant compte de leur expertise.

L’arrivée d’internet, dispositif socio technique de relation sociale, facteur

exponentiel d’accès à l’information et au partage d’expérience, nous invite

forcément à réfléchir sur les incidences directes et/ou indirectes liées à la

constitution de ces communautés de pratiques et nous interrogent sur le

changement possible de paradigme du modèle éducatif. Ce que Emmanuelle

Jouet dans sa synthèse évoque également : « Aujourd’hui, le e-patient a accès

à quantité d’informations et peut en produire sur des forums publics ou sur son

propre blog ou site. (…). Il prend ainsi une posture iconoclaste aux frontières

des concepts de communautés d’apprentissage et de communautés de

pratiques (Lave et Wenger, 1991) ».

B. Du réel au virtuel : modélisation des communautés de patients

Si nous sommes en mesure d’évaluer la formalisation du phénomène groupal

et collectif organisé entre patients et structures connexes, voyons maintenant

ce qui la distingue du simple regroupement d’individus.

Pour ce faire, prenons appui sur les travaux de Robert MacIver 82qui fonde sa

définition de la communauté sur la relation sociale. Pour l’auteur, la

communauté prend la forme de réseaux « car elle est créée par cette activité

de l’esprit des hommes par laquelle ils entrent incessamment en relation les

82 MACIVER, Robert Morrison. Community: a Sociological Study: Being an Attempt to Set Out the Nature and Fundamental Laws of Social Life. S.l. : Routledge, 1970. ISBN 0714615811.

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uns avec les autres ». Si la communauté repose sur la volonté des êtres

humains à réaliser leurs intérêts communs et de ce qui les lie ensemble, elle

s’organise par la mobilisation des acteurs en son sein.

L’article de Cherry Chrecker 83 , « qu’est-ce la communauté » aborde cette

notion au delà de l’importance accordée à l’interaction : « il est impossible de

comprendre la communauté, de savoir ce qu’elle est, sans tenir compte du

sens qui lui est attribué par les membres. Les gens construisent la communauté

de manière symbolique et en font une source et un réceptacle de sens, et un

repère de leur identité »

Communauté de pratique, d’apprentissage, d’intérêt : comment définir cette

communauté de patients qui s’est construite au fur et mesure des évolutions

socio culturelles ? Intéressons nous maintenant aux nuances que revêtent les

différentes approches pour chercher à l’appliquer à notre objet d’étude.

C’est en reprenant comme terrain d’étude ethnographique le fonctionnement

des alcooliques anonymes que Jean Lave et Etienne Wenger, en 1991,

théorisent l’idée de communauté de pratiques dans le paradigme de

l’apprentissage situé (situated learning). Ce que les auteurs souhaitent avant

tout démontrer, n’est pas tant sur la structure de la communauté et l’étude fine

de ce qui en constitue les pratiques, mais l’affirmation d’un apprentissage social

qui « n’est ni un transfert de connaissances d’une situation à l’autre, ni le

traitement d’informations, mais une façon de participer à des pratiques sociales,

un statut, un mode d’appartenance à une communauté, une façon d’en être ».

Pour comprendre le mécanisme de cet apprentissage situé, les auteurs

s’intéressent au caractère informel et aux automatismes structurels des

interactions entre experts (membres plus anciens Alcooliques Anonymes) et

nouveaux venus, dans la construction du savoir expérientiel (apprendre à

83 Qu’est-ce la communauté - Cherry_SCHRECKER_-_Qu_est_ce_que_la_communaute_-_reflexion_sur_le_concept_et_son_usage.pdf [en ligne]. S.l. : s.n. [Consulté le 29 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Cherry_SCHRECKER_-_Qu_est_ce_que_la_communaute_-_reflexion_sur_le_concept_et_son_usage.pdf.

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raconter son histoire autant qu’exprimer son vécu), les modalités de

participation et les formes d’engagement.

Les observations réalisées leurs permettent de dresser le constat suivant :

« l’apprentissage (learning) est un processus de participation à des groupes

sociaux, c’est à dire des communautés de pratiques, participation qui est, au

départ « périphérique et légitime » mais qui augmente peu à peu dans

l’engagement et la complexité »84. Ce point de vue permet donc de revisiter la

vision de l’apprentissage comme un mode de participation à des groupes

sociaux.

En définissant la pratique comme « les compétences, les tâches, les actions

mises en œuvre, les significations, les relations, les artéfacts, les conventions,

les valeurs, les représentations qui permettent de rendre l’expérience

possible » Etienne Wenger en 1998, permettra ensuite de mieux cerner les

éléments mobilisés au sein de la communauté.

En précisant la notion de pratique, cet auteur, en référence aux travaux

précédents, conceptualise la notion de participation à laquelle il ajoute celle de

la négociation du sens, vecteur d’identité. Ainsi, la pratique est considérée

comme la source de cohésion au sein de la communauté, forgée par, ce que

l’auteur défini, engagement mutuel, entreprise commune et répertoire partagé.

Avec le regard ethnographique, le chercheur, loin de vouloir seulement

observer les interactions quotidiennes qui contribuent à réifier la communauté

(engagement et relations mutuelles), rejoint indirectement les préceptes

d’emporwement entendus par Isabelle Aujoulat qui ont été détaillés dans le

chapitre précédent. A cela, relayons lui seulement l’idée de répertoire partagé.

En effet, pour Wenger, l’engagement au sein d’une pratique commune crée

avec le temps, les ressources collectives (répertoire partagé) de la

communauté de pratique. Les outils (documents), les gestes, les codes, les

84 BERRY, Vincent. Les communautés de pratiques : note de synthèse. In : [en ligne]. [Consulté le 10 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.academia.edu/1127961/Les_communautes_de_pratiques_note_de_synthese.

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routines, deviennent les éléments mêmes de la pratique, les fondements à la

structure communautaire qui entretiennent le sentiment d’appartenance.

En cernant mieux le concept de communauté, qu’en est-il de la communauté

virtuelle ? Son fonctionnement est-il similaire, ou l’artefact technologique que

représente le web, en modifie-t-il le sens ?

La notion de communautés, appelées virtuelles selon l’expression popularisée

par Howard Rheingold, est une notion phare d’Internet. Outil communautaire

par excellence, Internet est, selon Pierre Levy85 « le dispositif technique idéal

pour l’émergence et la consolidation des communautés les plus diverses,

permettant à un collectif d’entrer en communication avec lui-même ». Ce lien

entre le réseau technique et la notion de communauté parait étroit, ancien et

historique.

Pour mieux en saisir les contours, l’ouvrage de Serge Proulx86 « communautés

virtuelles : penser et agir en réseau » nous éclaire sur ce qui renforce et

distingue les deux termes.

La différenciation majeure entre la communauté et la communauté virtuelle est

avant tout formelle. C’est en fait sur le principe du corps, du lieu et de

temporalité des échanges que se particularise la communication en ligne de la

communication en face à face. L’espace spatio-temporel qui était une norme

sociale dans les pratiques des communautés réelles (temps de la rencontre,

lieu de la rencontre) se trouve effectivement reconsidérée dans un contexte

hyper connecté.

Il n’en demeure pas moins que la communauté virtuelle offre des potentiels

supplémentaires (en rappel l’étymologie du terme virtuel « ce qui a de la vertu,

de la puissance ») qu’il est intéressant de notifier en comparaison avec les

motifs et les fonctions occupées par la communauté, telle que définie plus haut.

85 Pour un modèle scientifique des communautés virtuelles. Chapitre 7 « communautés virtuelles : penser et agir en réseau ». 86 PROULX, Serge, POISSANT, Louise et SENECAL, Michel. Communautés virtuelles: penser et agir en réseau. Québec : Presses Université Laval, 2006. ISBN 2763783848

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Nous en retiendrons deux essentielles en référence à Serge Proulx et à Michel

Sénécal.

• De l’intérêt à la construction de l’appartenance

La communauté virtuelle est avant tout une communauté d’intérêt. C’est, en

effet, ce que Rheingold fait ressortir comme étant les composantes

indispensables à sa constitution : « plusieurs individus, des rapports sociaux,

un intérêt face au groupe, le tout s'inscrivant dans une dynamique temporelle ».

Cette caractéristique, reprise également par Proulx va jusqu’à concevoir le

partage d’un authentique projet collectif : « la communication de groupe

médiatisée par l’informatique constitue un environnement social et symbolique

dans lequel les participants peuvent développer un sentiment d’appartenance

au groupe et s’y construire une identité collective qu’elle soit communautaire ou

sociale ».

Ce processus de « conscientisation collective de collectifs d’usagers

connectés » trouve sa représentation dans la conception des logiciels sociaux

(social software) et de dispositifs collaboratique (computer supported

coopérative work) qui, selon l’auteur « tentent notamment d’inventer des

dispositifs orientés activement vers une facilitation au groupe ».

• De l’interactivité à l’interaction

Pour Michel Sénécal, dans la communauté virtuelle, l’interactivité associée

communément à des interventions techniques ne peut se distinguer de

l’interaction qui s’inscrit davantage dans une dimension sociale : « toutes deux

s’avèrent indissociables car elles sont conjointement évoquées quand le sens

et l’usage de l’une et de l’autre ne sont pas tout simplement interchangeables ».

Ainsi, l’interactivité technique proposée par le dispositif socio technique valorise

l’interaction de l’homme à l’interface, tout en stimulant l’interaction humaine des

hommes entre eux à travers la machine. Suivant cette perspective critique, la

quête de l’interactivité dans les usages des médias est envisagée comme un

élément du discours contestataire du « sens unique » des médias de masse.

Ce que l’auteur assure en affirmant que cette interactivité « n’est pas sans lien

avec le processus d’appropriation sociale de la technique et de la participation

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74

du citoyen (individus et groupes d’intérêts communs) à la fabrication et à la

diffusion des messages ».

Au delà de l’appartenance, la communauté virtuelle, par son processus

d’interactivité et d’interaction amplifie en cela, la dimension d’une

reconnaissance statutaire et identitaire telle que nous l’avons détaillé pour la

communauté.

S’il est justifié que les communautés virtuelles font émergées un nouveau type

de dispositif de médiation qui « suscitent non seulement la multiplication des

échanges d’information entre les personnes mais aussi une transformation

qualitative de la nature de ces interactions » (Serge Proulx) l’intérêt maintenant

est de nous interroger plus précisément sur les communautés virtuelles de

patients atteints de maladies chroniques.

Si nous avons pu démontrer le rôle socio culturel tenu par les communautés de

patients, qui au-delà d’une convergence d’intérêt à su structurer une

communauté de pratiques et d’apprentissage à travers la valorisation des

savoirs expérientiels, qu’en est-il des communautés virtuelles ? La médiation

des connaissances reconnue à travers le dispositif socio technique, tel que

nous l’avons démontré en deuxième partie de ce mémoire, est elle également

observable dans le cadre des communautés virtuelles de patients, au point

d’engager un processus d’apprentissage social revisitant le modèle actuel

d’éducation thérapeutique ?

Pour y répondre, appuyons nous sur l’analyse ethnographique en ligne de trois

sites web dédiés à des communautés d’intérêts (Serge Proulx, 2006) : Carenity,

Be Patient et Patientworld afin d’y chercher les réponses possibles.

2. Objet d’étude : CARENITY, BE PATIENT, PATIENT WO RLD

A. Méthodologie de recherche, limites, résultats

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L’ethnographie en ligne, fondée sur l’étude descriptive et analytique des écrits

numériques des internautes, est une méthode qui a été développée par Josiane

Joët et Carole le Caroff 87et qui semble totalement approprié à notre recherche.

En effet, l’objectif étant la compréhension des communautés virtuelles de

patients atteints de maladies chroniques à travers leur modes de participation,

grâce à l’affichage des participants et aux fonctionnalités proposées par les

concepteurs du site web, nous positionnons notre angle de recherche sur une

représentation globale du collectif, et à l’instar de l’ethnographie classique, sur

l’invisibilité des interactions et des relations sociales.

Par l’accession « in situ » des échanges et des dynamiques sociales qui se

nouent en temps réel grâce à la connexion aux plateformes observées, nous

allons donc rechercher, à travers la construction d’une grille d’analyse

composée d’indicateurs qui attestent de l’imbrication étroite de la technique et

du social, de mettre en parallèle les compétences du professionnel de santé (le

médecin) et celles de l’éduqué (le patient) dans le cadre d’un processus

d’éducation thérapeutique et, ce à partir de la revue de littérature suivante :

- le guide des recommandations de la Haute Autorité de Santé de Juin 2007

« Education thérapeutique du patient, comment la proposer et la réaliser »

- « Education thérapeutique : mise en pratique des modèles en 5

dimensions » par Grégoire Langer, André Giordan, Monique

Chambouleyron et Aline Lassere-Moulet 88

- Le tableau synthétique présentant la logique d’instruction et d’apprentissage

en fonction des modèles d’éducation modélisé par Alain Deccache et

Philippe Meremans en 200089

87 BARATS, Christine. Manuel d’analyse du Web en sciences humaines et sociales. Paris : Armand Colin, 2013. ISBN 9782200286279 2200286279. 88 LAGGER, Grégoire, GIORDAN, André, CHAMBOULEYRON, Monique, LASSERRE-MOUTET, Aline et GOLAY, Alain. Éducation thérapeutique 2e partie : Mise en pratique des modèles en 5 dimensions. In : Médecine. 1 juin 2008, Vol. 4, n° 6, p. 269 �273. DOI 10.1684/med.2008.0299.

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- La grille d’observation du dispositif socio technique proposée par Josiane

Jouët en 2013

- L’analyse sémiotique des sites web, description, évaluation et conception de

Peter Stockinger, réalisé par l’Equipe Sémiotique Cognitive et Nouveaux

Médias (ESCoM) en 2004

Pour baliser notre recherche, nous nous contenterons d’observer à partir de la

page d’accueil de chacun de ces sites, le processus de navigation et les

interactions de la page dédiée à la communauté de patients diabétiques. Le

choix de cette pathologie est justifié pour plusieurs raisons majeures :

- La forte prévalence de cette pathologie au regard du chiffre total du nombre

de personnes atteintes de maladies chroniques en France en 2011 (15

millions de personnes) dont 2,9 millions atteints de diabète 90 (source

Laboratoire Roche)

- Le caractère endémique de cette pathologie qui a connu une

progression fulgurante en l’espace de quelques années. Ainsi et d'après les

données publiées dans le dernier Bulletin épidémiologique hebdomadaire

(BEH) de l'Institut de veille sanitaire, "le nombre de diabétiques traités en

France est supérieur à l'hypothèse la plus haute prévue par certains experts

pour 2016. En effet, entre 2000 et 2009 le nombre de diabétiques est passé

de 1,6 million (2,6% de la population) à 2,9 millions (4,4%) ».

- Un diagnostic qui tend à se généraliser à toutes les tranches

d’âges. Avec une proportion estimée à 14,2% pour les 65-74 ans et à 14,8%

pour les plus de 75 ans contre seulement 0,4% des moins de 44 ans

89 DECCACHE, Alain, MEREMANS, Philippe. L’éducation pour la santé des patients au carrefour de la médecine et des sciences humaines. In : Brigitte SANDRIN BERTHON. L’éducation pour la santé au secours de la médecine. Paris : Puf, 2000, p. 147. 90 Source Laboratoire Roche. http://www.fondationroche.org/fr/medias/actu_chiffres_cles_maladies_chroniques.html

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touchés par le diabète, on note néanmoins une forte augmentation du

diabète de type 1 chez l'enfant de moins de 4 ans et l'apparition de plus en

plus fréquente de diabète de type 2 ou diabète gras chez l'adolescent. Ces

deux phénomènes pourraient être directement attribués à la hausse de

l'obésité infantile. La France suit ainsi ce qui se passe aux Etats-Unis,

tendance que l'on retrouve aussi dans tous les autres pays occidentaux.91

Le choix des sites web dédiés Carenity, Be Patient et Patient World repose sur

les principes entendus par Serge Proulx dans son ouvrage « Communautés

virtuelles : penser et agir en réseau » et qui a permis de définir l’environnement

sociotechnique des communications en ligne.

En effet l’auteur met en lumière 6 principaux types d’environnements socio

techniques propre aux communautés en ligne : les réseaux locaux

communautaires, les babillards électroniques, le MUD (multi user domain), le

clavardage, les forums de discussion et les sites web dédiés à des

communautés d’intérêts tels que ceux que nous nous proposons d’étudier.

A partir de sa cartographie, voyons en quoi ces trois sites répondent aux

critères définis par Serge Proulx en fonction de leur carte d’identité.

CARENITY : http://www.carenity.com/

91 Source e-santé.fr http://www.e-sante.fr/attention-forte-augmentation-diabete-type-1-chez-enfant-diabete-type-2-chez-adolescent/actualite/1248

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Mise en ligne en avril 2011, Carenity est édité par Else Care, société

entièrement indépendante de l'industrie de la santé et contrôlée par son

fondateur, Michael Chekroun.

La volonté du site est de favoriser la mise en relation de patients et proches de

malades concernés par une même maladie, partant du constat de l'inégale

qualité de l'information de santé disponible sur le web. Pour ce faire Carenity

propose à ses membres trois services principaux :

• La mise en relation d'hommes et de femmes atteints d'une

même maladie grâce à des fonctionnalités communautaires : création de

groupes d'amis, fil d'actualité, forums, messagerie privée, base de

connaissance partagée, etc.

• Des outils simples de suivi de sa santé : indicateurs de suivi

de ses traitements et de ses symptômes développés sous la supervision

de médecins référents. Un tableau de bord facilite le suivi de sa santé

dans le temps et, une fois présenté à son médecin, peut enrichir le

dialogue patient-praticien.

• La mise en ligne d'enquêtes anonymes dont les résultats

agrégés sont fournis aux chercheurs et aux industriels pour favoriser la

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mise au point d'une meilleure offre de soins et de services médicaux qui

bénéficiera in fine aux malades.

La finalité réclamée du site est de permettre l’amélioration des connaissances

des besoins et des usages des patients pour, en retour, proposer une meilleure

offre de soins et de services. Le partenariat affiché avec des associations de

patients et le soutien de médecins via un comité scientifique et éthique sont les

garants du sérieux et de l’expertise engagés par le site internet.

BE PATIENT : http://www.bepatient.fr/

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La société BePATIENT est née de la volonté de son fondateur Frédéric

Durand-Salmon et de son équipe, de valoriser plus de 20 années

d´expériences concernant la gestion des données cliniques dans le cadre du

dossier patient hospitalier et de la recherche clinique. La plateforme est mise en

ligne depuis 2011. La mission que s’est donné le site est de permettre à chacun

de disposer des compétences et des outils pour promouvoir sa santé et sa

qualité de vie.

Pour ce faire, BePATIENT se considère comme une plateforme « eSanté »

proposant aux patients un bouquet de services, prioritairement dans le cadre

des maladies chroniques, de leur prévention et de leur surveillance en vue de

rendre celui-ci plus autonome et acteur de sa santé. Elle est proposée en direct

aux patients et à leurs proches, via des programmes spécifiques conçus par

BePATIENT et ses partenaires, sur le thème d'une pathologie précise. Elle peut

être adaptée aux besoins spécifiques d'une association de patient, d'une

fondation, d'un réseau de soins, d'une communauté de professionnels de santé

(médecins, pharmaciens), de la médecine du travail, d'un réseau hospitalier,

d'une organisation alternative spécifique (EHPAD, HAD, santé carcérale...).

Trois grands modules composent le site en terme d’offre de service :

• Une offre en télésanté

A partir des dernières technologies internet et de communication, les usagers

peuvent bénéficier d’un accompagnement en télé-monitoring et coaching santé,

renseigner leur carnet de santé mobile et le partager avec les professionnels de

santé. Deux rubriques proposent de manière gratuite ou payante des

prestations en télésanté : Pocket Santé (outils pratiques pour bien suivre sa

santé) et Webstore Santé (produits et services en ligne : consultation médicale,

dispositifs médicaux connectés). L’apport de ces applications doit favoriser

l’acquisition des compétences du patient en auto soins et en adaptation.

• Une offre de réseau social communautaire

Les mises en relations proposées concernent autant les professionnels de

santé, les patients experts que les patients entre eux. La recherche et la mise

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en réseau s’effectuent à travers l’annuaire des membres, la messagerie

sécurisée et la participation à des forums, modérés par les experts du site.

L’interactivité de la relation médecin patient est constamment recherchée ainsi

que la valorisation du partage d’expériences entre patients eux-mêmes.

• Une offre en prévention et en éducation

De la formation à l’accompagnement, de la sensibilisation à l’éducation

thérapeutique du patient, le site propose et offre des solutions d’aide, de

soutien et de formations adaptées aux besoins du patient. L’une des

spécificités du site est la revendication du concept de patients experts. S’il n'est

pas nécessairement atteint de la même pathologie, le patient expert

BePATIENT a reçu une formation qui lui permet de répondre aux questions

concernant tous les aspects transversaux de la maladie chronique. La mise en

relation s’effectue à partir d’un formulaire à disposition sur le site, qui reste

l’intermédiaire de la demande.

PATIENTSWORLD : http://www.entrepatients.net/fr

Mise en ligne en 2012, ce site intitulé à l’origine Entrepatients change de nom

en 2013 pour devenir Patientsworld. Cette plateforme, éditée par la société

Patientsworld dont le fondateur est Denis Granger, se veut un service conçu

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pour les patients et leur entourage mais aussi pour toutes les structures qui leur

apportent une aide, des services et un appui au quotidien.

Indépendante, entièrement dédiée à l’information, à l’échange et à

l’accompagnement des patients dans leur prise en charge et leur suivi

thérapeutique, elle met à leur disposition, ainsi qu’à celle de leur entourage

(famille, amis, aidants), un espace qui leur offre l’opportunité :

• De rejoindre et de participer à l’animation , par leurs

expériences, leurs vécus et leurs témoignages, d’une ou de plusieurs «

communautés » structurées par pathologie.

Outre les accès classiques aux communautés, à la messagerie ou aux

forums de discussions, le site propose le service Healthbox, qui permet, en

plus d’une auto mesure de s’évaluer par rapport à sa communauté de

référence.

• De consulter des articles, des témoignages , des

informations en lien avec la ou les pathologies qui les concernent,

directement ou indirectement.

• D’accéder à des services interactifs d’e-santé en lien avec

leur pathologie.

Regroupés dans la rubrique intitulée le Store, les applications concernent le

coaching, les serious game, les matériels para médical, les applications

pour stmarphones et tablettes numériques.

• De rechercher des partenaires de santé par le biais d’un

annuaire.

Outil de compréhension des patients, de leurs attentes et leur quotidien, la

plateforme web met également à la disposition d’industriels (laboratoires, agro-

alimentaire, bien-être et beauté) un outil d’observatoires et d’études afin de leur

permettre d’accompagner le patient dans une meilleure compréhension de sa

maladie, et d’un mieux-vivre avec celle-ci, d’apporter des astuces, de réels

services et des outils spécifiques, à l’utilisation quotidienne lors de maladies

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chroniques et construire des liens privilégiés avec les autres partenaires de la

spécialité concernée (sociétés savantes, associations de patients).

Pour pouvoir bénéficier d’un certain nombre de services : coaching

personnalisé via téléphone ou chat vidéo, conférences spécifiques, vidéos,

documentations complètes ou applications pour mobiles (exemples donnés à

titre indicatif), l’internaute sera amené, selon les accords et partenaires choisis

échéants, à s’abonner ou acheter les produits concernés.

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Cartographie de l’environnement socio technique de CARENITY, BE PATIENT et PATIENTSWORLD selon S. Proulx

Type d’environnement socio technique Serge PROULX

Fonctionnalité CARENITY, BE PATIENT et PATIENTSWORL D

Sites dédiés à des

communautés d’intérêts

Babillards Electroniques Communication effectuée en temps différée. Les usagers déposent les messages selon leur disponibilité. Ils sont regroupés autour d’un thème

MUD (multi user domain) L’inscription au site permet de cibler la communauté dans laquelle nous souhaitons nous

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Sites dédiés à des

communautés d’intérêts

Espace virtuel qui se déroule dans un environnement peuplé d’avatars où plusieurs participants peuvent échanger. Les avatars sont des représentations textuelles ou visuelles d’usagers. Ces environnements sont structurés par un ensemble de règles et de codes.

engager. En fonction de ce dernier, la plateforme nous indique le nombre d’usagers connectés à cette communauté afin d’organiser sa liste d’amis à partir de profil configuré à l’aide d’un avatar visuel et textuel.

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Sites dédiés à des

communautés d’intérêts

Forum de discussions Sont des lieux d’expression collectives situées sur le site. Ces environnements permettent l’échange de messages en temps différés (interaction asynchrone) entre usagers, chaque abonné recevant l’ensemble des messages de la liste.

C’est la fonctionnalité centrale du site qui requiert notamment l’inscription par un mot de passe pour se connecter aux espaces de discussion portant sur une thématique particulière.

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Sites dédiés à des

communautés d’intérêts

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Autres services interactifs

CARENITY : - Propose des fonctionnalités de gestion documentaire et de curation afin de

constituer sa « banque d’information » (ma bibliothèque). - Facilite les échanges d’expériences autour de la maladie entre membres de

la communauté (ma pathologie et moi, conseils pratiques, les traitements diabète type 2) - Anime un blog et des enquêtes régulières - Organise des rencontres « réelles » entre membres des communautés pour

mieux cerner les attentes et besoins des membres de la communauté en ligne - Propose une ouverture sur la vie quotidienne (espace détente : recettes de

cuisine, voyages, petites annonces) - Invite les membres des communautés à participer à des études de

recherche clinique ou audit. BE PATIENT : - Propose des fonctionnalités de suivi de santé (Pocket santé : planning,

gestion des mesures, rappel des rdv, suivi des graphiques) - Favorise les échanges avec les professionnels de santé et les patients

experts - Permet l’auto évaluation des connaissances (quizz santé, fiches pratiques) - Facile l’accès à l’information en fonction des centres d’intérêt (Live santé :

resté informé sur ma maladie) - Offre un service Store de solutions connectées en santé (télésurveillance,

coaching, téléconsultation médicale) dans un espace dédié et payant (Web store santé) - Anime une web TV avec des conférences débat et une émission dédiée aux

patients PATIENTSWORLD : - Organise en complément des fonctionnalités communautaires une

plateforme santé générique (dossiers, sondages, vidéo, fil d’actualité) - Met gratuitement à disposition un suivi quotidien de santé avec le

programme PEPS (HealthBox). A l'aide de modules dédiés, l’usager peut renseigner quotidiennement les informations relatives à un élément clef de sa santé et s’auto évaluer par étalonnage avec les membres de sa communauté.

- Offre un service Store de solutions connectées en santé (télésurveillance, chat, coaching, téléconsultation) dans un espace dédié et payant (Store)

- Dispose d’un moteur de recherche annuaire pour organiser la relation avec

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les professionnels de santé (Annuaire)

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Avec cette lecture des éléments contextuels nous permettant de présenter les

sites dans leur environnement sociotechnique, nous pouvons d’ores et déjà

établir des liens de concordance avec les fonctions éducatives, mises en

évidence par les différentes théories des sciences de l’éducation, énoncées au

chapitre précédent.

Aussi, proposons nous maintenant de justifier l’hypothèse d’une fonction

éducative au sein des communautés virtuelles de patients à partir du tableau

synthétique présentant la logique d’instruction et d’apprentissage en fonction

des modèles d’éducation et modélisé par Alain Deccache et Philippe

Meremans.

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Analyse des fonctions éducatives des sites BE PATIE NT, CARENITY et PATIENTSWORLD à partir sur tableau de Deccache et Meremans

Modèle d’éducation Modèle de santé

Biomédical Fonctions mobilisées

dans les sites

Biopsychosocial Fonctions mobilisées

dans les sites

Logique d’instruction (fondée sur l’enseignant)

Type 1 : enseignement de savoirs médicaux Modèle Behavioriste Enseignement à la prévention (bénéfice-risque). L’éducation vise la transmission des savoirs et des comportements de prévention recommandés.

Carenity : La rubrique info Santé propose : - un lexique médical en

partenariat avec Vidal - Des fiches maladies - Des indications sur les

symptômes, traitement et prévention

Be Patient : La rubrique Fiche pratique propose - des fiches de

recommandations de l’HAS

PATIENTSWORLD : Les fiches santé de la rubrique santé organisée sous la forme d’un glossaire par pathologie et organisé selon la même structure : - épidémiologie, chiffres clés prévention, causes, symptômes et recommandations HAS

Type 2 : enseignement des savoirs de santé à la fois physique, mentale, sociale Modèle cognitiviste Les savoirs à transmettre restent prédéfinis mais par des experts travaillant en complémentarité. L’éducateur est un enseignant, un expert.

Carenity : Le blog de la communauté réalisé en lien avec les associations de patients Be Patient : l’espace LIVE SANTE regroupant : - Les derniers infos

rassemblées par les experts

- L’agenda évènementiel des congrès, réunions et débats publics

- L’accès aux vidéos PATIENTSWORLD : les dossiers santé réalisés avec les partenaires et l’espace vidéo.

Logique d’apprentissage (fondée sur l’apprenant)

Type 3 : apprentissage de savoirs médicaux

Carenity : Rubrique « ma pathologie et moi » et « ma bibliothèque » fondée sur le

Type 4 : apprentissage de savoirs de santé à la fois physique, mentale et sociale

Carenity : Les 3 badges indiquent votre niveau d'implication dans votre

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Modèle constructiviste L’éducation s’élabore autour d’un apprentissage participatif dans lequel les apprenants contribuent à leur propre formation notamment en définissant eux-mêmes leurs objectifs et les moyens d’apprendre. L’éducateur est encore un expert mais aussi un facilitateur, un animateur capable de s’adapter aux attentes et choix de l’apprenant.

principe du forum de discussion et sur la curation des sources d’information en fonction des besoins des internautes. BePatient : L’espace Coaching Santé et Pocket Santé permettant : - la mise en relation avec les

experts et les professionnels en fonction des besoins et favorise la participation aux forums de discussion

- la sélection des outils de suivi de santé

- Les outils payant du Webstore

- Tests de connaissances quizz

PATIENTSWORLD : La Healthbox qui permet à l’internaute de s’auto évaluer tout en se comparant avec sa communauté - les outils payants du store

Modèle socioconstructiviste L’éducation se fonde sur une logique globale de la santé et de la maladie. La participation occupe une place majeure qui se définie à la fois comme une possibilité de négocier les sujets de santé, les contenus et les méthodes. L’éducateur tient le rôle d’une personne ressource, facilitateur et d’aide à l’empowerment du public

communauté. - Partagez son expérience, - Aidez la communauté à

mieux comprendre sa maladie

- Multipliez les échanges avec les membres.

- Participation à des sondages, enquêtes

BePatient : L’organisation d’un module de formation de 6 jours pour devenir Patient Expert. 2 sessions organisées en 2012. Exclusivité Bepatient. PATIENTSWORLD : L’inter-contribution de tous les membres de la communauté aux questions posées au sein du groupe de discussion sans modération par l’administrateur du site.

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L’apport de ce tableau synthétique nous indique bien que les communautés

virtuelles de patients mobilisent des fonctions éducatives au regard des

applications développées par chaque site observé. L’intérêt maintenant est de

s’intéresser de plus près à ces dernières afin d’étudier les actions de médiation

au sein des pratiques éducatives, à partir de ces dispositifs socio techniques.

Pour chercher à déterminer quels types de compétences ont été

particulièrement mobilisés, comment ces dispositifs socio techniques

s’inscrivent dans une pratique d’apprentissage social et quels usages sont

développés par l’adoption technologique, il a été nécessaire de construire une

grille d’analyse à partir du modèle développé par Josiane Jouët.

Les indicateurs retenus pour réaliser notre observation portent sur les fonctions

majeures des sites dédiés aux communautés d’intérêts, tels que nous avons pu

les identifier à la lecture de Serge Proulx dans sa présentation des différents

types d’environnements sociotechniques de communication en ligne que nous

formalisons sous les entités suivantes :

- Contributions : en rapport avec la fonction de babillage

électronique

- Personnalisation et Partage : en rapport avec la fonction MUD

qui formalise l’avatar et la capacité pour plusieurs usagers d’échanger en

ligne

- Discussion : en rapport avec les forums de discussions

La grille de lecture permet à la fois d’observer les fonctionnalités techniques

des sites et les actions de lien social opérés pour chacun des critères retenus.

Afin de répondre à la problématique d’un changement possible de paradigme

dans le modèle d’éducation thérapeutique, cette grille est complétée par

l’attribution des référentiels de compétences « éducateur » tels que définis par

Grégoire Langer, André Giordan, Monique Chambouleyron et Aline Lassere-

Moulet en proposant une modélisation à partir des 5 dimensions psycho-

sociales (cognitive, affective, perceptive, infra et méta-cognitive). Pour

rechercher les compétences « éduqué », la grille s’appuie sur le référentiel de

l’HAS et les différentes approches liées à l’étude des comportements de santé.

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Chaque grille présentée en annexe a porté sur l’analyse de la page réservée à

la communauté de diabétique pour les 3 sites.

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B. Discussion En synthèse des éléments observés, il est à noter que la grille a pu être

renseignée à 90% à partir des indicateurs et référentiels retenus avec la

répartition suivante : 100% pour Carenity et Patientsworld et 70% pour

BePATIENT.

L’absence d’évaluation pour ce site résulte d’un même facteur : la fonctionnalité

web dédiée au forum de discussion est d’une part à ce jour très faible

(seulement 8 ouverture de thèmes) et d’autre part modérée par les

professionnels ou experts reconnus BePATIENT avec qui il est nécessaire

d’effectuer une demande d’amitié pour accéder au contenu. Dans la mesure où

les échanges au sein de ce site semblent se constituer autour des émissions

webTV et dès lors que cette application n’a pas été retenue comme un élément

d’observation de l’environnement socio technique, nous n’avons donc pu

effectuer une analyse de ces critères.

Cette absence d’étude fait, par ailleurs, émerger les spécificités propres à

chaque site qui se revendique « plateforme de communautés virtuelles de

patients ». Pour Carenity et Patientsworld, la vocation d’être un espace

d’échanges, de partage d’information, de connaissances et d’expériences, est

totalement remplie.

La différence mineure entre les deux sites réside dans les formes d’interactions

entre les utilisateurs qui selon la logique de relations de Gunther Eysenbach

(2001) est de l’ordre du C2C (échanges entre patients seuls) pour Carenity et

B2C (échanges entre patients et professionnels) pour Patientsworld. Nous

retrouvons également cette logique pour BePATIENT qui a totalement organisé

son site sur le principe d’un lien constant avec les modérateurs professionnels

de santé de la plateforme ou encore avec les patients experts.

Ces spécificités de logique ne sont pas sans conséquences sur l’ergonomie et

les fonctions du langage appliqué au site telles que définies par Jakobson. La

relation C2C des patients entre eux fait émerger des fonctions expressives et

conatives très développées dans Carenity, quelles soient textuelles ou

visuelles. Dans notre grille, elle se traduit par une forte prise en compte de la

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dimension émotionnelle et affective qui favorise l’empathie. Les accroches

« vous n’êtes plus seuls face à la maladie », « Je suis là pour vous aider » en

message de l’administrateur de la communauté ainsi que toutes les

fonctionnalités permettant de liker un contenu, de souhaiter la bienvenue en

sont les exemples.

En revanche, les sites BePATIENT et patientsworld favorisent davantage les

fonctions référentielles et phatique qui se traduisent par « Que voulez-vous

faire aujourd’hui » ou « c’est plus simple en se connectant ».

La question de la médiation est également mise en exergue à travers cette

grille de lecture. En fonction de la logique de relation retenue par les trois sites,

la forme de la médiation au sein des pratiques éducatives évolue. Si les trois

sites ont chacun développé une application à leur plateforme permettant de

valoriser les compétences en auto soins du patient afin d’acquérir autonomie et

de s’autoréguler, BePATIENT semble se rapprocher du concept de

médiatisation des connaissances c’est-à-dire de mise en ligne d’outils

permettant cette autogestion alors que Carenity et Patientworld s’inscrivent plus

dans le concept de médiation des connaissances, les outils pouvant être

discuter et partager avec la communauté pour enrichir le savoir expérientiel

qu’offre cette dernière.

Enfin la question de la communauté comme vecteur d’apprentissage social est

au centre du fonctionnement des sites Carenity et Patientsworld. La valorisation

pour chacun d’eux des contenus par thèmes, par membres, par fil de

discussion organisée pour Carenity autour de l’idée « moi et ma communauté »

(ma bibliothèque, ma pathologie et moi, mon forum) et pour Patientsworld dans

le sens « la communauté pour moi » reprend l’idée de l’individu, qui s’intègre et

est intégré par l’approbation des membres. C’est par l’inscription des règles,

des codes et procédures de lien social que se construit l’apprentissage à

travers la perception de ces comportements.

Enfin, la mise en adéquation des compétences éducateur avec celles de

l’éduqué nous permet de positionner maintenant le curseur général en fonction

du modèle d’apprentissage tel que défini par Deccache et Meremans.

Page 97: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

97

Ainsi et en complément de la grille précédemment réalisée sur la modélisation

des logiques d’instruction et d’apprentissage, BePATIENT semble davantage

répondre à des critères constructivistes et behavoristes. Sa position sur la

formation de patients experts (module de 6 jours) en est une preuve : il n’est

pas rechercher en priorité l’apprentissage social par la construction de savoirs

expérientiels provenant des communautés de patients, mais l’accompagnement

de ces derniers, par des pairs devenus experts, dans la gestion de la maladie.

Assez proche du modèle actuel d’éducation thérapeutique, le site ne permet

pas, en l’état des éléments disponibles, la construction d’un réseau social de

patients lui permettant l’engagement à la communauté d’intérêt. Par ailleurs,

l’accessibilité aux échanges rendue payante pose la question de la place de ce

dispositif numérique en transversal avec le suivi et la prise en charge médicale.

En revanche les sites Carenity et Patientsworld proposent une nouvelle

approche de l’éducation qui étaye d’ailleurs son succès. La dynamique des

échanges entre membres, la création de nouveaux forums de discussions,

engage ces dispositifs dans un modèle socioconstructiviste.

La prise en compte des dimensions sociales, affectives et physiques de

l’environnement et de l’individu, la valorisation au sein des groupes de

discussion d’une relation d’aide, de partage d’expériences mais également de

partage de savoir à travers l’expression des symptômes, des traitements et des

complications avec l’ouverture de son suivi santé aux membres de la

communauté, dimensionne une nouvelle approche de l’éducation thérapeutique

par l’empowerment individuel et collectif.

Page 98: Rôle socio culturel des communautés virtuelles de patients ... · I. Mutation du processus communicationnel de la relation médecin patient à l’ère du numérique 1. Les asymétries

98

CONCLUSION GENERALE

La grille d’observation en ligne constituée permet de mettre en exergue

plusieurs éléments clés de notre problématique :

- le facteur socio culturel voit, avec l’arrivée du numérique, une mutation du

processus communicationnel de la relation médecin patient.

- le facteur technologique modifie les pratiques éducatives et la forme des

communautés d’intérêts.

Dès lors, il apparaîtrait l’émergence de nouvelles fonctions référentielles au sein

de la relation thérapeutique et l’apparition de nouvelles postures éducatives

inhérentes à l’usage de dispositifs socio-techniques.

Pour saisir les significations attachées aux conduites d’acteurs en interaction

avec le dispositif et mettre en relief les logiques d’usage (tout en tenant compte

du poids de la technique), nous conclurons notre étude sur la projection de

l’analyse sémiotique situationnelle développée par Alex Mucchielli (2007) du

site PATIENTSWORLD qui répond en tout point à notre problématique et ce

pour 3 raisons :

- il répond à la logique d’une relation entre patients et professionnels et

permet donc de justifier les changements communicationnels avec l’arrivée

de dispositifs socio techniques.

- il intègre toutes les fonctionnalités d’un environnement socio technique de

communication en ligne (forum, clavardage, mud…).

- Il propose des applications permettant à l’usager de s’étalonner par rapport

au groupe (self efficacity) avec l’application Heathbox et de mesurer ces

croyances relatives à la santé par sondage individuel et par comparaison

avec ceux de la communauté. En cela, il répond donc aux exigences de

l’apprentissage social formalisé par les communautés de patients.

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Cette théorie propose en effet une méthode pour appréhender les phénomènes

humains comme une construction de sens en situation pour l’acteur. La

situation ici, qui conclurait notre étude, serait d’envisager la conception d’un

nouveau modèle d’éducation thérapeutique.

A partir du tableau systémique réalisée par Marie-Caroline Heïd et Valérie

Méliani 92 , ce dernier permet au chercheur de dégager les usages normés

portés par le dispositif dans un contexte en immersion, de renseigner la grille

sémiotique situationnelle selon les cadres et les niveaux identifiés par Alex

Mucchielli pour permettre de modéliser le phénomène de communication.

En conséquence de cette projection, la grille appliquée au site

PATIENTSWORLD se structure de la manière suivante :

Niveaux

Cadres

Micro -situationnel Interaction de l’usager avec le site

Méso-situationnel Interaction de l’usager avec les autres usagers à travers le site web

Macro -situationnel Interaction de l’usager avec l’extérieur du site web

Identitaire

Enjeux, intentions, projets, finalités

incitation à l’activité de se s’informer : rubrique santé qui reprend les fiches santé, les médicaments, les vidéos, les actualités. Incitation à participer : inscrivez vous, renseignements du profil sur son mur Contact, accès Abonnement à la newsletter, envoi de post sur sa messagerie personnelle

Possibilité de devenir prescripteur d’info pour d’autres usagers : relations professionnelles vers patients et patients entre patients Possibilité d’échanger des discussions avec d’autres usagers : commentaires, le chat (à partir de Facebook et tweeter) le partage de lien, photos, le suivi santé (traitements, symptômes, complications) Heathbox : se comparer avec la communauté dans le suivi de sa santé (nutrition, sommei)

Annuaire des professionnels Information sur l’agenda évènementiel : journées de prévention Lien sur les vidéos : autour d’un sujet et par thématique Sondage : lien sur des sujets de sociétés. Prise de position. Evaluation des résultats avec ceux de la communauté

Qualités des relations

Ambiance, climat,

Incitation à rentrer en relation : entre les patients et avec les professionnels

Incitation à entrer en communication avec d’autres membres : les communautés les plus

Relations avec autres partenaires : Espace Store, lien avec associations de patients,

92 B2.5-T_Heid - Heid.pdf [en ligne]. [Consulté le 5 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.trigone.univ-lille1.fr/complexite2010/actes/Heid.pdf

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100

degré de proximité/distance

(rechercher) Possibilité d’accéder à PATIENTSWORLD sans aller sur le site : boite mail, Facebook, Tweeter,

actives, les derniers posts de commentaires

établissements référencés

Normes

Règles partagées

Reconnaissance et importance de chaque individualité : accès personnalisé aux informations, adaptation des contenus en fonction des difficultés d’apprentissage Loging obligatoire de connextion

Normes d’échanges , de partages d’information, co-construction du contenu informationnel dans les forums de discussion et « normalisme » des fiches santé sous la même charte : comprendre, soigner, vivre avec, Actus et dossiers Avatars des membres de la communauté Charte de confidentialité dans la diffusion des informations

Ouvrir le débat sur le bien être et la santé de manière général. Proposer un espace éducation et prévention en santé Favoriser l’interaction avec les professionnels tout en maintenant la dynamique relationnelle entre membres patients Favoriser l’implication des proches par l’accessibilité et la possibilité de recommandations sur les réseaux sociaux thèmes actu et dossiers, vidéos

Positionnement

Places, statuts, rôles

L’usager acteur de sa santé, pouvoir d’agir et de faire

Un statut de relation d’aide, de soutien et de conseil des autres membres de la communauté Un statut d’appui et de consulting des professionnels.

Le 1er réseau social santé en France Vocation d’éducation et de prévention en santé

Temporel

Contexte historique Passé/présent/futur

Accès aux informations en interactions asynchrone.

Possibilité de chater avec patients et professionnels (version payante)

Partage sur les réseaux sociaux

Les potentiels d’apprentissage social à travers d’une part l’accès, le partage

d’information et d’autre part les échanges de savoirs expérientiels, la capacité

d’empowerment individuel et collectif et la reconfiguration des rôles et des

statuts apparaissent plus précisément avec ce tableau systémique.

L’ensemble de ces éléments semblerait donc préfigurer un changement de

paradigme offrant, à travers les fonctionnalités d’un site de communautés

virtuelles de patients tel que PATIENTSWORLD un nouveau modèle

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d’éducation thérapeutique qui pourrait, à chaque séquence de la prise en

charge, intervenir dans le dispositif.

- Au niveau du diagnostic éducatif (patient/médecins/objectifs négociés) pour

mieux intégrer les connaissances du patient, l’identification de ses besoins

et de ses attentes et formuler avec lui les compétences à acquérir à travers

une interface dédiée à la relation médecin/patient

- Au niveau du programme personnalisé d’ETP et des priorités

d’apprentissage par l’évaluation des compétences d’auto soins et

d’adaptation nécessaires au travers l’accès et le partage de son suivi de

santé (médicaments, symptômes, complications)

- Au niveau de la mise en œuvre des séances d’ETP collectives et/ou

individuelles qui permettrait de résoudre les difficultés organisationnelles de

possibilités locales (accessibilité géographique, disponibilité des

professionnels de santé) et d’optimiser les outils pédagogiques sous une

forme interactive (éducation par le jeu, MUD, Moodle93..)

- Au niveau de l’évaluation individuelle de l’ETP par un retour personnalisé,

valorisé dans le fil de discussion et étalonné dans le cadre de

l’apprentissage social avec les autres membres de la communauté.

Ces éléments restent encore à l’état de recherche qu’il serait maintenant

intéressant de mettre en application dans le cadre d’une étude sur une cohorte

de patients avec la participation d’une structure organisatrice d’éducation

thérapeutique.

93 Moodle. Wikipédia [en ligne]. 2013. [Consulté le 4 juin 2013]. Disponible à l’adresse : http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Moodle&oldid=93515820 Moodle est une plateforme d'apprentissage en ligne (en anglais : e-learning) sous licence libre servant à créer des communautés s'instruisant autour de contenus et d'activités pédagogiques. Le mot « Moodle » est l'abréviation de Modular Object-Oriented Dynamic Learning Environment : « Environnement orienté objet d'apprentissage dynamique modulaire ».

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L’intérêt serait maintenant de valider la problématique d’un rôle éducatif au delà

de son implication socio culturelle, ce que nous avons tenté de démontrer dans

ce mémoire.

Car c’est fondamentalement à partir du contexte socio culturel que se

construisent les pratiques éducatives en santé à partir de la sociologie de la

médecine, de l’éducation, et maintenant des usages technologiques.

En cela et en conclusion de ce mémoire, la théorie de l’intelligence collective

développée par Pierre Levy94, par son vision holistique fondée sur le principe

que chacun sait quelque chose, propose une nouvelle approche des

technologies au service du savoir et de la connaissance : « L’intelligence

collective n’est donc pas la fusion des intelligences individuelles dans une sorte

de magma communautaire mais, au contraire, la mise en valeur et la relance

mutuelle des singularités. »

Or et pour l’auteur « l’interconnexion des ordinateurs peut être un instrument

au service de l’intelligence collective. (…).Dans le « cyberespace », chacun est

potentiellement émetteur et récepteur dans un espace qualitativement

différencié, non figé, aménagé par les participants, explorable. Ici, on ne

rencontre pas les gens principalement par leur nom, leur position géographique

ou sociale, mais selon des centres d’intérêt, sur un paysage commun du sens

ou du savoir. (…).

Le « cyberespace » manifeste des propriétés neuves, qui en font un instrument

de coordination non hiérarchique, de mise en synergie rapide des intelligences,

d’échange de connaissances et de navigation dans les savoirs. Son extension

s’accompagne d’une rupture de civilisation rapide, profonde et irréversible. (…).

Pourquoi ne pas saisir ce moment rare où s’annonce une culture nouvelle pour

94 http://www.monde-diplomatique.fr/1995/10/LEVY/1857 Pierre Lévy est titulaire d'une chaire de recherche du Canada en Intelligence Collective à l'université d'Ottawa. Un des principaux objectifs est de constituer une nouvelle couche sémantique du Web permettant de visualiser les processus d'intelligence collective à partir des données circulant dans le cyberespace. LÉVY, Pierre. L’Intelligence collective: pour une anthropologie du cyberspace. Paris : La Découverte/Poche, 1997. ISBN 2707126934 9782707126931.

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orienter délibérément l’évolution en cours ? A raisonner en termes d’impact, on

se condamne à subir. La technique propose, mais le citoyen dispose. Cessons

de diaboliser le virtuel (comme si c’était le contraire du réel !).

Le choix n’est pas entre la nostalgie d’un réel daté et un virtuel menaçant ou

excitant, mais entre différentes conceptions du virtuel. L’alternative est simple.

Ou bien le « cyberespace » reproduira le médiatique, le spectaculaire, la

consommation d’informations marchandes et l’exclusion à une échelle encore

plus gigantesque. C’est, en gros, la pente naturelle des « autoroutes de

l’information ». Ou bien nous nous mobilisons en faveur d’un projet de

civilisation centré sur l’intelligence collective : recréation du lien social par les

échanges de savoir, reconnaissance, écoute et valorisation des singularités,

démocratie plus ouverte, plus directe, plus participative.

Les Arbres de connaissances sont une illustration pratique de ce projet95 .

Poussant à partir des auto-descriptions des personnes, l’arbre des

connaissances rend visible la multiplicité organisée des compétences

disponibles dans une communauté. Lisible sur écran, cette carte dynamique

des savoir-faire d’un groupe ne résulte pas d’une quelconque classification a

priori des savoirs : elle est l’expression, évoluant en temps réel, des parcours

d’apprentissage et d’expérience des membres de la collectivité. (…).

Dans tous les cas, les individus gagnent une meilleure appréhension de leur

situation dans l’espace du savoir des communautés auxquelles ils participent et

peuvent élaborer en connaissance de cause leurs propres stratégies

d’apprentissage. Tant il est vrai que l’intelligence collective, projet humaniste,

ne peut être qu’au service ultime des citoyens.».

95 Les arbres de connaissances, ou arbres de compétences, sont une marque déposée de la société TriVium), qui a mis au point, dans ce but, le logiciel Gingo. Il s’agit d’une méthode informatisée pour la gestion globale des compétences dans les établissements d’enseignement, les entreprises, les bassins d’emploi, les collectivités locales et les associations. Elle est expérimentée sur plusieurs terrains en Europe et particulièrement en France (grandes entreprises, PME, universités, organismes de logements sociaux, etc.). Grâce à cette approche, chaque membre d’une communauté peut faire reconnaître la diversité de ses compétences, même celles qui ne sont pas validées par les systèmes scolaire et universitaire classiques.

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128. Médiation. Wikipédia [en ligne]. 2013. [Consulté le 16 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=M%C3%A9diation&oldid=92337448

129. Modèles et démarches d’éducation thérapeutique : place des TIC dans les dispositifs - Modeles_et_demarches_d’education_therapeutique-place_des_TIC.pdf [en ligne]. [Consulté le 20 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.infiressources.ca/fer/depotdocuments/Modeles_et_demarches_d%E2%80%99education_therapeutique-place_des_TIC.pdf

130. Moodle. Wikipédia [en ligne]. 2013. [Consulté le 4 juin 2013]. Disponible à l’adresse : http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Moodle&oldid=93515820

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131. Qu’est-ce la communauté - Cherry_SCHRECKER_-_Qu_est_ce_que_la_communaute_-_reflexion_sur_le_concept_et_son_usage.pdf [en ligne]. [Consulté le 29 mai 2013]. Disponible à l’adresse : http://www.social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Cherry_SCHRECKER_-_Qu_est_ce_que_la_communaute_-_reflexion_sur_le_concept_et_son_usage.pdf

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE .......................................... ............... 6

I. Mutation du processus communicationnel de la relati on

médecin patient à l’ère du numérique .............. .......................... 12

Introduction du chapitre .......................... ...................................................... 12

1. Les asymétries de la relation médecin patient ..... ............................. 13 A. Contextualisation et approches théoriques ............................................ 14 B. Internet et santé : de la pratique aux usages ......................................... 23 2. Le numérique et les mutations du processus communic ationnel ... 28 A. Du physique au virtuel : la fin de l’hégémonie paternaliste au transfert de postures relationnelles .................................................................................. 28 B. Des transformations identitaires à la création de « l’empowerment » du patient ........................................................................................................... 32

Synthèse du chapitre .............................. ....................................................... 39

II. Construction d’une médiation numérique au sein des

pratiques éducatives .............................. ..................................... 40

Introduction du chapitre .......................... ...................................................... 40 1. Maladies chroniques et dispositifs numériques, enje ux croisés ..... 42 A. Etat des lieux et cadre de référence ...................................................... 42 B. De la relation à la médiation .................................................................. 49 2. Education et santé, les perspectives de l’éducation thérapeutique 52 A. Education et santé, les apports conceptuels .......................................... 52 B. Formalisation de l’éducation thérapeutique ........................................... 58

Synthèse du chapitre .............................. ....................................................... 62

III. Place et rôle socio culturel des communautés virtue lles des

patients dans le dispositif éducatif .............. .............................. 64

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Introduction du chapitre .......................... ...................................................... 64 1. De la communauté à la communauté virtuelle de patie nts ............... 65 A. Evolution socio culturelle de la reconnaissance du savoir expérientiel .. 65 B. Du réel au virtuel : modélisation des communautés de patients ............. 69 2. Objet d’étude : CARENITY, BE PATIENT, PATIENT WORLD ............ 74 A. Méthodologie de recherche, limites, résultats ........................................ 74 B. Discussion ............................................................................................. 95

CONCLUSION GENERALE .......................................... ................ 98

Bibliographie ..................................... ......................................... 105

Table des matières ................................ ..................................... 118

Annexes ........................................... ........................................... 120

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Annexes - Infographie Laboratoire ROCHE sur les chiffres clés des maladies

chroniques en 2010

- Grille d’analyse CARENITY

- Grille d’analyse BE PATIENT

- Grille d’analyse PATIENTSWOLRD

- Analyse sémiotique des sites web : description, évaluation et conception

- Guide de recommandations de l’HAS « Education thérapeutique du patient,

comment la proposer et la réaliser ? »

- Education thérapeutique, mise en pratique des modèles en 5 dimensions

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UNIVERSITE Michel Montaigne - BORDEAUX 3 UFR Sciences des Territoires et de la Communication Institut des Sciences de l’Information et de la communication

Géraldine GOULINET – 2012/2013

MEMOIRE RECHERCHE Master 2 Ingénierie de la recherche en sciences de l’information et de la communication spécialité Communication Réseaux et Société

Rôle socio culturel des communautés virtuelles de p atients dans le suivi des maladies chroniques : Vers un nouveau modèle d’éducation thérapeutique ?

Résumé : En même temps que ce sont modifiées les relations médecin-patient avec les évolutions socio-culturelles, passant d’un modèle biomédical à un modèle biopsychosocial, la reconnaissance du patient, dans sa globalité, lui a permis d’acquérir un « pouvoir d’agir ». Par ailleurs, l’émergence d’internet, a formalisé la mutation de ce processus communicationnel en lui permettant un accès direct à l’information, au savoir médical et à l’apprentissage de sa santé. La forte proportion des maladies chroniques a surenchéri ce phénomène en engageant les pouvoirs publics a développé une éducation thérapeutique afin que ce dernier puisse développer des compétences en auto-soins et en adaptation, sous couvert de l’enseignement des professionnels. Or, le pouvoir donné aux patients d’expression, d’échanges, de partage d’expériences et de connaissances a forgé une culture communautaire basé sur l’entraide et l’apprentissage social autour d’intérêt et d’engagement commun. Avec le numérique, l’arrivée de sites web dédiés aux communautés virtuelles de patients interrogent sur la place qu’occupent maintenant ces dispositifs dans la relation éducative, qui semblent favoriser l’émergence d’usages et des pratiques en devenir. Mots clés : maladies chroniques, éducation thérapeutique, communauté virtuelles, relation médecin patient, emporwement, apprentissage social. Summary : while these are changed relations doctor-patient with the socio cultural changes, from a bio model medical model biopsychosocial, recognition of the patient, in its entirety, it allowed to acquire an "authority to act". Moreover, the emergence of the internet, has formalised the mutation of this communicative process allowing him direct access to information, medical knowledge and learning of his health. The high proportion of chronic disease have been outbid this phenomenon by engaging the public authorities has developed a therapeutic education so that it can develop skills in self-care and adaptation, under the guise of teaching professionals. However, the power given to patients of expression, Exchange, sharing of experiences and knowledge has forged a community culture based on mutual help and social learning around interest and common commitment. With digital, the arrival of web sites dedicated to virtual communities of patients questioned the role now these devices in the educational relationship, which seem to promote the emergence of usages and practices become. Key words : chronic diseases, therapeutic education, virtual community, patient physician relationship, emporwement, social learning.