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Moninconnu,monmariageetmoi

GraceestàLasVegaspourassisteràunmariage.Aprèsunesoiréebienarrosée,elleseretrouveaumatinmariéeàCaleb,unhommerencontrélaveille,sansavoiraucunsouvenirdelacérémonie.Ilestcharmant,ceCaleb,ilestmêmecarrémentcanon,etenplusilesttrèsriche,maissemarier,cen’étaitpasdutoutdanslesprojetsdeGrace.Saliberté,elleytient.Lehic,c’estquesoncherépoux,dontellenesaitrien,nesemblepasdécidéàaccepterl’annulationdeleurmariage…

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Luirésister…oupas

JosephButlerestunhommed’affairesredoutéquin’apasl’habitudequ’onluirésiste.OliviaScottestuneétudianteendroitquiadécidédeneplusselaisserfaire.Entreeux,larelationvavitetourneràlaconfrontation.EtsiJosephinsistepourêtrelepatrond’Olivia,ilnesedoutepasunseulinstantdecequeledestinleurréserve…

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Jeuxinterdits

À15ans,j’airencontrémonpireennemi.SaufqueTristanQuinnétaitaussilefilsdelanouvellefemmedemonpère.Etqueçafaisaitdeluimondemi-frère.Entrenous,laguerreétaitdéclarée.Etonn’apastenudeuxmoissouslemêmetoit.À18ans,leroidesemmerdeursrevientdupensionnatoùilaétéenvoyépourlelycée.Ilasondiplômeenpoche,lesyeuxlesplusperçantsquisoientetunsourireinsupportablequej’aienvied’effacerdesagueuled’ange.Oud’embrasserjustepourlefairetaire.

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Encore!

Miatientlecourrierducœurauseind’unecélèbreradiodeSeattle,écoutant,conseillant,rassurantsanscesselescœursmaladesquil’appellentsouventtarddanslanuit.Maisseulederrièresonmicro,lecœurbriséparunerelationquis’estmalterminée,lajeunefemmenecroitplusenl’amour,ellepourtantsiapteàenparlerauxautres…Parleplusgranddeshasards,soncheminvacroiserceluideHarryBannister,milliardairerécemmentéluHommedel’année.Pragmatique,controlfreak,solitaire,Harryesttoutsoncontraire.Etpourtant,ilsvontdécouvrirensemblequelaviepeutêtrebienplusdouceetdrôleàdeux!

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Noël,monmilliardaireetmoi

Noël,unmilliardaire…quedemanderdeplus?

Milliardaireaupassédouloureux,HarrisonCooperdétestelesfêtes.IlserendpourtantdansleMontanapourretrouversafamille.MaryElligsonestsonopposée,étudianteviveetenjouée,elleestuneamoureuseinconditionnelledeNoël.Entreeux,toutcommencemal:jetantleurdévolusurlemêmecadeau,MaryetHarrisonsedisputentaumomentoùilsfontconnaissance.Ilsaimeraienttouslesdeuxneplusjamaisserevoir!MaislamagiedeNoëlpeutfairedesmiracles,etvoilàqueleurscheminssecroisentànouveau!Invitésàlamêmesoirée,coincéssousunebranchedegui,ilsnepouvaientimaginerpiresituation…Etpourtant,dehasardsensurprises,ilsnevontcesserdeserapprocher…Maispourront-ilssesupporter?

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LolaDumas

LUI,MOIETLEBÉBÉ

Volume3

1.Chausséeglissante

Léonie

Réfléchissonspeumais réfléchissonsbienet surtoutvite.Simonestdenouveau surpiedetmesparentsvont rentrerchezeuxd’uneminuteà l’autreenattendantdemoidesexplications surnotrepetiterencontreàConeyIsland.Mamission,sijel’accepte(c’estbon,c’estbon,jel’accepte,jen’aipas le choix de toute façon) : empêcher Simonde redevenir le chauffeur de Jesse et préparer uneexplicationplausiblepourmonpèresurlefaitquejemepromèneunsamediavecunmilliardaireetsonbébéquesesamis imaginent,desurcroît, être lemien. Jenesaispaspourquoi,mais laviedeJennyavecsestroismecsmesembled’unseulcoupd’unesimplicitésansnom!

–Léonie,tuprépareslethéetoninstallelatable?Papaetmamannevontpastarderettusaisquepapaaimequetoutsoitprêtpourson«goûter».

Oui,jesaisSimon,maissijet’aidanslespattes,jenevaispaspouvoirréfléchirviteetbien.

–Jefaisunepausepipietjem’ymets.

Lestoilettes,monrefuge!J’aidûpasserplusdetempsiciquesurlesbancsdel’école,etjedoisdire que j’y ai aussi appris davantage. C’est là que mes parents entassent leurs classiques. Desautodidactesmes parents !Garagistes dans la vie,mais lettrés en cabinets ! Ils nem’ont jamais niconseillée, nimêmeobligéede lire lemoindre livre,maisdèsque j’ai sudéchiffrer trois phrasescorrectement,lestoilettesdel’appartementontcommencéàseremplirdebouquins,etpasn’importelesquels!Homère,Dante,Shakespeare,Dickens,Melville,MarkTwain,Flaubert,Dostoïevski…Sanscompter les mythes et légendes du monde entier et les textes fondateurs. J’ai lu l’Épopée deGilgameshavantmêmedesavoirquelaMésopotamieexistaitetj’aicomprisasseztardqueleslivresque je trouvais là n’y étaient pas mis par hasard. Ils apparaissaient ou disparaissaient selon unesélection pointue qui accompagnaitmes lectures, sur place ou à emporter.Mes parents se sont enquelquesorteservisdemavessiepouréclairermalanterne.Leplusdrôle,c’estquenousn’enavonsjamaisparlédirectement!Justeparallusions,desréférencessoudaincommunes.J’aimoi-mêmefinipar y laisser des livres, histoire de glisser un peu de mes découvertes contemporaines dans leurbibliothèque idéale. Étrangement, ça amoins bienmarché avec Simon. Peut-être parce qu’il pissedebout ?Du coup, il a souvent plus de livres dans le dos que devant lui, et comme il s’assied enmoyennemoinssouventqu’unefillepourfairesesbesoinsnaturels,çaadûréduiresespossibilitésderencontresaveclahauteculture.Enfinjesuppose.Quandonpensequec’estsonpetitasticotquil’aempêchédedevenirungrandlecteur…BonjourpapaFreud!

Enattendant,ils’impatientedel’autrecôtédelaporte.

–Bon,Léonie,tutebougesunpeu!–Oui,oui,j’arrive.

Ilvamechercherjusquedanslestoilettes!Onsecroiraitretournésvingtansenarrièrequandonétaitgosses!

Simonatoutdemêmebienfaitdeserappeleràmonsouvenir.Aprèstout,jesuisassiseicipourtrouver comment l’empêcher de reprendre le travail. Il y aurait bien la bonne vieille méthodeaméricano-napolitaine:jedemandeàdeuxoutroisgrosbrasdeluipéterlesjambesàcoupsdebattedebaseball.Avantage:c’estrapide,simple,hyperefficace.Problème:c’estquandmêmemonfrère,etlebutn’estpasqu’ilfinisseenchaiseroulante.Etpuis,jenesuispasNapolitaineetjen’aipasdegrosbrassouslamain,mêmepasdebatte.Lamisère,quoi!Conclusion:jevaissortirdecestoilettessansavoirtrouvédesolution…

Jessefrappedenouveauàlaporte.

–Léonie,maisc’estpasvrai!T’ascommencéunbouquinouquoi?

Hum…sortirdestoilettesouyrester…Maislavoilàlasolution!Pourquoichercherplusloin?

–J’arrive.JeterminejusteledeuxièmevolumedeGuerreetPaix.–Trèsdrôle!–C’estbon,t’espénible…Jesors.Jevaismelaverlesmainsetjetepréparelethé.Jesaisqueje

suislaseulecapableicidefairebouillirdel’eauàlabonnetempérature,maisjet’apprendraiunjoursituveux.

–C’estmalin!Magne-toiaulieudefairedusarcasme.

MonpauvreSimon,jevaismemagner,maisjepensequetuvasleregretterassezvite.Voyonscequ’il y a dans la pharmacie de cette salle de bains… Non, pas ça… ça non plus… Ah ! Voilà !Purjabid,c’estélégantcommenom…maisaumoinsonencomprendtoutdesuitel’usage.

«Nepasutiliserplusd’unsachetparjour.»

Parfait!Ehbien,onvaverserlessixquirestentdanstonthé,moncherfrère.Tuastoujoursrêvédevoyagerdans lespaysexotiques?Je t’offreune initiationà la turistasansfraisdedéplacement.C’estpasgentil,ça?Etenplus,tuvaspouvoirrattrapertonretarddelecture!Unespritpleindansuncorpsvide.

Allez,mamainnetremblerapas,foideLéonieBorgia!

***

Laportedel’appartements’ouvre,puisclaqueaprèsavoirlaisséentrermesparentsaumomentoùjepose le thésur la tableetque j’offreàSimon la tasse rempliedesonbreuvagepréféré,etde lasubstance magique qu’il l’amènera à découvrir, enfin je l’espère, les richesses de la littératuremondiale.Monpères’approchedemoi,levisagenobleetfermé,commeNapoléonqu’onviendraitdedébarqueràSainte-Hélène.

–Bonjourmafille.

Il m’a dit ça avec la voix la plus glaciale et caverneuse qu’il a pu trouver. Je pense que larésonanceadûfairetremblerlesfondationsdel’immeubleetj’aipresquevulesstalactitespendreaubout de chaquemot de sa phrase. Il poursuit en m’embrassant avec la chaleur d’un vague parentobligédetoucherlecadavred’unevieilletantedétestéesursonlitdemort.Ambiance!

Jejetteuncoupd’œilàmamèrepourconnaîtrel’étendueréelledesdégâts.Elleesquisseunlégermouvement des lèvres en avant, associé à un imperceptible hochement de tête, suivi d’un subtilglissementdespaupièresverslebas.Traduction:«Net’inquiètepas,j’aiarrangélecoup.Tonpèreva nous jouer leRoiLear avec l’option " vous êtes toutes des traîtresses à la couronne " pendantquelques jours,mais ça va vite lui passer. En attendant, laisse-toi appeler Cordélia et il finira paradmettretoutseulquetuesunebonnefille.»Jerépondsàmamanparunpetitsourirediscretquiveutdire:«Millemercismaman,tuasencoreassuré!»

En attendant, il va tout de même falloir participer à ce goûter avec, en plus, un Simon qui acommencéàengloutirsaboissonetunepartiedesgâteauxapportésparmesparents.Jenemesenstoutdemêmepastrèsàl’aise,vaguementinquiète.J’ail’impressiond’êtredansunfilmd’Hitchcock,quetoutlemondevasemettreàfixerlatassedeSimonsurfondd’unemusiqueàglacerlesangetdécouvrirquej’aiempoisonnémonproprefrère.J’espèrenepasavoireulamaintroplourdetoutdemême!Normalement,unsachetsuffit,maissix…Ilvavivrel’enfer,oudumoinslepurgatoire.C’estlecasdeledire!

Papas’estinstalléenboutdetable.Ilafficheunairdigneetcrispécommepournousdire:«Nefaitespasattentionauglaivequevousavezplantéentremesomoplatesetquifaitjaillirmonsangàgros bouillon. Je souffre, mais vous n’entendrez pas un seul gémissent de douleur sortir de mabouchejusqu’àcequejemeure,totalementexsangueettrahiparlesmiens.Ensuite,vousmejetterezàlafosseaveclesgueux.Jeneveuxaucundeshonneursdusàmonrang.»

Heureusement, pour l’instant, Simonne se rend compte de rien, absorbé par ses gâteaux et sonthé…quinesemblepasagir.Étrange,avecunedosepareilledelaxatif!

Papabriselesilence.JeguettelaréactiondeSimon.

–Ehbien,mafille,maisdois-jeencoret’appelermafille?Jecroisavoirenfincomprispourquoitonemploitedemandeautantdetemps,beaucoupdetemps,mêmelesamedi!

Lesgâteaux retiennent encore tropSimonpourqu’il réagisse.Et toujourspasd’effetPurjabid !Monpèrenes’arrêtepaslà:

–Visiblement,lachairdemachairtrouveplusimportantdes’occuperdelafilled’unmilliardairequededonnerdesesnouvellesàsonproprepère.

Là,mêmelesgâteauxgobésparSimonnepeuventplusfaireleurofficedebouche-oreilles.

–Lafilledequ…Oh…Oh!Excusez-moi.

Sauvée!

Simonpartverslestoilettesàlavitessed’Apollo13enpriantdenepasavoirlemêmeproblèmed’explosionderéservoirqu’euxavantd’arriversurlalune.Ledécollageatellementsurpristoutlemondequemonpèreenaoubliéqu’onétaitentraindelejeteràlafossecommuneavecsonglaivedansledosetregardemamèreensedemandantquellemoucheabienpupiquermonfrère.

–Maisqueluiarrive-t-ilencore?Cesonttesgâteaux?–Mes gâteaux sont aussi les tiens ! Je te rappelle que nous les avons achetés ensemble, ditma

mère,ets’ilsyétaientpourquelquechose,jenevoispaspourquoiseulSimonensouffrirait.Nousenavonstousmangés!

–Cecidit,pasàcettevitesseetencettequantité…J’envenaisàmedemanders’ilavaitplusieursbouches,moi,ajouté-je.

Je me permets cette fourberie pour continuer à détourner l’attention de mon thé fatal et desquestionssurmonemploidutemps.

–Oui,maisilatoujoursmangécommeça…Ah!Lerevoilà.Quet’arrive-t-il?demandemamèreensetournantversSimon.

–Aucuneidée,maisc’étaitmoinsune!Peut-êtreunrestedegrippe?Aufait,vousparliezde…Oh…NomdeDieu!Excusez-moi.

DeuxièmepassageenorbitepourApollo.

«Houston,onaunproblème.»

Enattendant,lemienestentraindeserégler.

–Maisc’estpaspossible.Ilestmalade,là!

Mon père a un flair incroyable ; il aurait dû être médecin ! Après quelques échanges entretechniciensdelaNASA,Apolloréapparaîtsurlesécrans.

–Lavache!J’ailebidecomplètementretourné.J’aipeut-êtrebutropvite?Iln’étaitpourtantpasfort ce thé. Et donc, c’est quoi cette histoire de béb… Oh nooon… c’est pas vrai ! Faut que j’yretourne…

«Houston,Houston,onaperduApollo.»

Bon,désolée,j’adorelesvoyagesdansl’espace,maisjenepeuxpasresterpourleretoursurterrefinal.

– C’est pas tout ça, mais je vais vous laisser. Normalement, la conversation de Simon estpassionnante, mais là, on dirait les dialogues d’une mauvaise série qui seraient coupés toutes lestrentesecondesparunepubsurlesproblèmesintestinaux.Çadevientunpeudécousu.Jevaisluidireaurevoiretj’yvais.

Jeplantelàmonpèrevoyantque,lapremièresurprisepassée,ilessaiedesesouvenirdurôlequ’iljouaitavantquelevoyageintersidéraldemonfrèrenecommence,etjecogneenpassantsurlaportedestoilettesoùmonfrèrerisquedepasserunebonnepartiedelajournée,voiredelanuit.

–BonSimon,ilfautquej’yaille!Tuferaismieuxderesteràl’intérieur.Enplus,j’yailaissétoutTolstoï.

–Situcroisquej’ailatêteàça…

Dommage…Frère et sœur, deux destins (ou deux intestins ?) parallèles.Moi, je n’ai jamais puavoueràmesprofsétonnésdemesconnaissancesquej’avaislulesœuvrescomplètesdeVictorHugosurunecuvettedeWC.Monfrère,lui,n’oserapassevanterd’êtrerestéenfermédansl’annexedelabibliothèqued’Alexandriesansjamaisyouvrirunlivre.Fatalitas!

Jeparsdechezmesparentset,àpeinearrivéedanslarue,jereçoisunSMSdeSimon.

[Jenepourraipasbosserdemainjecrois.TupeuxcontinueràconduireJesseFranklin?][Pasdeproblème.Préviens-moiquandçairamieux.]

Affaire classée. Sans batte, sans drame familial, sans explications à donner. Certaines fois, jem’admire!

J’envoiedans la fouléeunSMSà Jessepour luidireque toutest régléavecSimon.Sa réponsearriveenunefractiondeseconde.

[Viensvite.Grosproblème.Jenepeuxpasendireplus.]

Monsangseglaceaussitôt.Finil’autosatisfaction.

Zoé?Mary?Lestypesdangereux?

Jeprendslavoitureetfonceàl’hôtel.

***

J’airouléavecunebouleàl’estomacetdansunetensionindescriptible.ToutelascèneavecMarym’estrevenued’uncoup…toutcommel’impressionétrangedanslavoiturecemidi…

Jemontedanslasuite.Personne,nullepart.J’arriveàl’étage.Laporteestentrouverte.Jelapousseavec angoisse.À l’intérieur, le bazar est indescriptible. Il y a des habits tachés unpeupartout, descouches,desbiberonsrenversés.Cambriolage?OùestJesse?Zoé?Jeprendsmoncourageàdeuxmains,jerentredavantagedanslapièceetappelle.

–Jesse?Jesse?

J’entendssavoix,essouffléeetinquiète.

–Ah!C’esttoi!Ouf!Entrevite.

Jesse arrive avec Zoé dans les bras. Enfin, si ma vue ne me trahit pas car le tableau qu’ilscomposentneressembleàriendeconnu.LevisagedeZoéestradieuxettotalementrecouvertd’unecompotecomposéed’unmélangedechocolatetdebanane.Elleenaétaléjusquedanssescheveux.

Ellen’estvêtuequed’unecouche-culotteenfiléedetraversetd’unechaussettebleue.Lerestedesoncorps est parseméde diverses taches provenant de lamême compote, enfin ilme semble.Quant àJesse, s’il est plus habillé, il n’est pas enmeilleur état. Sa chemise sort de son pantalon et a l’airboutonnée d’une manière totalement improbable. Elle est également maculée de compote, lesmorceaux plus ou moins séchés formant un sentier sinueux qui arrive jusqu’à sa tête, ébourifféecommejamais.Ondiraitqu’ilaconfondulepotdecompoteavecceluidesongel.Ilestpiedsnusetsonpantalonal’aird’avoirpasséunsalequartd’heure,unpeucommes’ilavaitfaitunentraînementdeMarinesenmilieuhostileetboueux.Jessesetientenfacedemoi,etjenepeuxconstaterqu’unechose:ils’estfaitunpeudépasserparlesévénements,maislesquels?Mystère…

–MaisJesse,commentest-ce…possible?

Jessemeregarde,arrêtédansunmouvementquiatoutdeceluidupoissonrougedécouvrantpourla première fois la tête de son propriétaire à travers le verre du bocal ; ce qui fait que le tableaucomplet, le poisson et la chute subite demon stress, jeme prends un fou rire inextinguible, àmeroulerparterre.C’estd’ailleurscequ’ilseproduitsur-le-champ.Jemelaissetombersurlamoquettedesoulagementenmetenantlescôtestellementj’aimalauxabdos.Jedistinguevaguement,àtraversleslarmesderirequimecoulentdesyeux,queJesseappréciemoyennement.

–Bon,Léonie…çavalà!Onacompris.Respire.–Ex…peuxpas…cuse…parler…moi…tellement…Jesse…jeris.–OK,OK!Tiens,prendsZoé.Moi,jevaismedoucheretmechanger.

Ilmetendlapetiteetdisparaîtpendantque,touteslesdeux,onserouleparterrederigolade.

***

UnefoisunpeucalméeetJesseenfinpropre,j’aipulaverégalementZoé,etnousvoilàtouslestroisdanslesalon.Jesseestsortidesontableaudemaîtreencoreplusbeauetsexyqued’habitude.Toujourspiedsnus,maisavecunpantalonpropre,unT-shirtquiluivacommeunedeuxièmepeauetlescheveuxencoreunpeuhumides,iln’ajamaisétéaussidécontractéet…naturel.Onencroqueraitpresque!EndonnantsonbiberonàZoé,j’essaied’ensavoirplussurl’ouraganquiadévastélasuiteàcoupsdepotpourbébé.

–Maistuasfaitquoiaujuste?Tuessayaisdel’habilleroudelanourrir?–Non,maisenfait,elleétaithabillée.Jel’avaischangéeetpuisjevoulaisluidonneràmanger.À

sonâge,onpeutcommenceràdiversifier. J’aipréparédeuxcompoteset après…jene saispascequ’ils’estpassé,maistoutadégénéré!C’estcommeungrandtrounoir,unpeucommesileschosesavaientprisunevieautonome.

–Tusaisquequandondit«diversifier»,onparledelanourriture,pasdel’endroitoùonlamet.Normalement,ellecontinueàpasserexclusivementparlabouchedel’enfant.

Jeretiensdifficilementunnouveaufourire.

–C’estça,faislamaligne!

Jesse prend ça à la rigolade, mais on sent tout de même que la perte totale de contrôle de lasituationl’aperturbé.Pasl’habitudedesefairedéborder,montycoon!Lepauvre,ilestservidepuisquelquetemps!

–Etoùas-tutrouvéqu’ilfallaitdiversifiersonalimentationenplus?Surl’appli?–Non,c’estAkiraquim’aconseillélescompotes.–Akiraestaussispécialisteencompotes?

Jesseretrouveuninstantsonairsérieuxdegrandmanitoudelafinance.

–Akiraestspécialisteentout.–Bah, tu aurais peut-êtremieux fait de lui demander de temontrer comment nourrir un enfant

avecdelacompotesansrepeindrelesmursalors!–Jenem’attendaispasàcequeZoéneréagissepasdutoutdelamêmemanièrefaceàunecuillère

quefaceàunetétine.

Sanscommentaire.

–Enattendant,c’estdommagequetutesoisprécipitéaussivitesousladouche.J’auraisbienléchédelacompotesurunmilliardaire,moi!

Jesseprendunairoutré.

–Enfin,Léonie,toutdemême!Ettudisçadevantlapetiteenplus.Allez,donne-lamoi,jevaislacoucher.

IlprendZoédanssesbrasetsedirigeverslelitapportéparAkiraenajoutant:

–Jevaisquandmêmeallervérifiers’ilrestequelquespots.–Super!Surtoutnebloquepassurlacompote,j’aimeaussilacrèmeauchocolat.–Tufinirasobèse.

Sic’estenléchantuncorpspareil,jesuisprêteàacceptermonsort!

2.Descentedangereuse

Jesse

–Bon,désolé,iln’yaplusdecompote.

Je viensde coucherZoépour unepetite sieste etLéonie accueillema remarque enhaussant lesépaulesetenmimantunfauxairdépité.Lejeusepoursuit.

–Mêmepasunvieuxyaourt?Delachantilly?N’importequoi?–Non.Ilyavaitbienunrestedetaramadontlaprovenancem’échappe,maislà,franchement,jene

lesentaispas…ouplutôtunpeutrop.Etpuis,jepenseàtaligne,moi.–Tunepréfèrespaspenseràmabouche?

Sijepréfèrepenseràtabouche?Jenepensequ’àelle.

–Penser,c’estbien…Agir,c’estmieux!

JemerapprochetendrementdeLéoniequinesemblaitattendrequeçadepuisquejesuissortideladouche.Moiaussi,jedoisbienl’avouer.Jenemereconnaisplus.J’aitoujourstoutcontrôlé,mêmemeshistoiresd’amour.C’estmoiquimenaislejeu.Unemanièredetenirl’autreàdistance,degarderlepouvoirenquelquesorte,denepasmelaisserenvahiretdefairecommesileschosesnepouvaientpasm’atteindre,maisavecLéonie,c’estdifférent.Elleesttellement…imprévisible.J’ail’impressionquejenepeuxpastricher,qu’ellevapointertoutdesuitelanotequisonnefaux.Çam’effraie…Enmême temps, avec elle, j’ai aussi l’impression d’entrevoir la possibilité d’un bien-être inconnujusqu’alors… comme un lien qui, étrangement,me libérerait.Mais surtout, ce qu’elle estm’attireirrésistiblement!

Jem’assiedsàsescôtéssurlecanapé.Ellearamenésesjambescontresoncorpsenlesenserrantetme regarde, la tête posée avec grâce sur ses genoux.Elleme sourit. Je ne sais pas s’il y a desposturesexclusivementféminines,maisjen’aijamaisvuaucunhommes’asseoircommeça.Jeposema main sur les siennes et l’attire à moi avec l’autre. Elle bascule légèrement pendant que jem’avance,etnosbouchesserencontrent.

C’estàchaquefoislemêmeplaisiretlamêmeredécouverte.Lafraîcheurdeseslèvres,ladouceurde sa peau m’emportent vers un état suspendu où plus rien n’a d’importance, à part ce contactdésormaisconnuetdontjenemelassepas.Jelerecherchemême.J’aimesavoirquelafuriesaitsefaire tendre, qu’elle peut aussi faire tomber ses barrières, jusqu’à sa voix qui change de tonalité,moins tendue, plus limpide, plus souple.Une arabesque.Nos lèvres sedétachentun instant.Léoniesusurre:

–Ditesdonc,M.Franklin,vosbaiserss’intensifientàchaquefois.Vousvousentraînezquandjenesuispaslàouquoi?

–Oui,j’aiuneréservedebouchesaubureau!–Jem’endoutais.

Nousnoussourionsetreprenonsnosbaisers,deplusenplusintenses.Léonieselaisseglissersousmoietnousnousretrouvonsallongéssurlecanapé.Mesmainscommencentàredécouvrirsoncorps.

–Hum…votreentraînementdonnedesrésultatsétonnants.–Enfait,jecroisquec’estvousquim’inspirez.

J’aideplusenplusenvied’elleetjecommenceàlacaresser.Noslanguesnesequittentplus.Mondésiraugmenteetmonsexesemetàvibrer.Àvibrer?Deplusenplusfortmême!

–Monportable!–Jemedisaisaussiquejetefaisaisundrôled’effet,unpeu…inhabituel.

JemelèveetsorsletéléphonedemapochependantqueLéonieserassied,unsourirerésignéaucoindeslèvres.C’estEvaquim’appelle.

–OuiEva,quesepasse-t-il?–VousêtesdesacrésenfoirésHenryettoi!Ilm’aexpliquéla«véritable»histoiredeZoéetde

Léonie!Merci!Vousm’avezprispourunecruche!–Maisnon,c’est…

Evanedécolèrepas.

–Mais si !Etmoiquidis auxparentsdeLéoniequ’ilsontunebellepetite-fille ! Ils ontdûmeprendrepourunedingue!EtçaamisLéoniedansunbelembarras,non?!

–Ne t’inquiète pas, c’est arrangé. Je suis une victime comme toi dans cette affaire.Henry s’estpayénostêtesetjemesuisfaitsurprendre.Unefoisquelemouvementétaitlancé…

–Pff…Oui,unpeufacileetlâche.Excusedemec.–Bah,désolé,jesuisunmec.Jen’aidoncpasd’excusesdefemmeàtedonner.Cecidit,tuferais

biendet’enprendreàHenryplutôt.

Evasecalmeunpeu.

–Rassure-toi,ilaeusoncompte.–Siçapeutterassurer,ilentendraaussiparlerdemoi.

Elleéclatederire.Ellen’estjamaisbienlongtempsencolère.C’estunecrème.

–J’ycomptebien!Enattendant,présentemesexcusesàLéonie.J’espèrequemasortieneluiapascausé tropd’ennuisauprèsde sesparents.Qu’ellen’hésitepasàm’appeler si elleveutuncoupdemainpourlapetite.Solidaritéféminine.

–Oui,jevois.Jeteremerciedemeproposertonaide.Jenesuisdécidémentpasunefemmeàtesyeux…

–Non,çameferaitmal.Au-delàdeça,elleal’aird’êtreunechouettefille.Tuferaisbiendenepaslaperdre,cherJesseFranklin,tun’entrouveraspasdeuxcommeelle.

–Heureusement!–Allez!T’esvraimentunmec.Tun’avouerasjamaisquetuenesdingue.Àpluscrétin!–Merci!Àbientôt,chèreamie.

JeraccrocheetvaismerasseoirauprèsdeLéoniequim’interrogeduregard.

–C’étaitEva.Ellevientd’êtremiseaucourantpourZoéet…notrerelation.–Quiest?–Ehbien…tuesmonchauffeuretmababy-sitter.C’estça,non?–Saletype.

Léoniemefrappegentimentavecuncoussin.J’arrêtesongesteetl’embrasse.C’esttoujoursaussibon,mais lesvibrationsdemontéléphoneontstoppénet l’élande toutà l’heureennousramenantbrusquementàlaréalité.Ilnenousresteplusqu’àrevenirauxquestionslaisséesensuspens.

–Trêvedeplaisanteries,elletesalue,s’excusepoursaphrasemalheureuseetteproposesonaidepour s’occuper de Zoé. Dans la foulée, ellem’a passé un savon pour ne lui avoir rien dit sur lemoment.

–Jel’aimebiencettefemme!Jel’aitoutdesuitetrouvéesympathique.Onpourraitêtreamies,jepense.

–Ehbien!Voussemblezêtretombéesd’accordsurlaquestionsansvousconsulter.

Léoniesourit,pensive,ets’enfoncedavantagedanslecanapé,soudainsérieuse.

–EtMary?–QuoiMary?–Tum’aspromis,Jesse…

J’aipromis.Qu’ai-jepromis?Dem’occuperd’unesœurquim’aabandonnéilyadesannéesetquim’afilésamômeàgardersansmêmevenirmevoirdirectement?

–Oui,jesais,maisqueveux-tuquejefassedeplus?–Cequejet’aidit:trouvercequiluiarrivevraiment.Onn’abandonnepassonenfantpourrien.

Personnenefaitça.Etjetejurequelorsquejel’aivuel’autrefois…–Oui,oui,jetecrois.Jesaisquetuessincère,maisMary…j’ensuismoinssûr.Siçasetrouve,

ellevadébarquercommeunefleurdansdeuxoutroisjoursennousdisantquetoutvabien.Elles’esttoujourscomportéeenégoïsteaprèstout!

Je vois bien que Léonie n’adhère pas à ma vision des choses. Il faut dire que moi-même, jecommence à avoir des doutes. J’ai confiance enLéonie,mais pas enMary. Je n’ai plus confiancedepuisdesannées,depuisunecertainenuitdanslacuisinedetanteMartha.

–Écoute,déjà,jevaisappelerJenny.Ellesortavecunflicassezhautplacésijemesouviensbien.Ellepourraitpeut-êtretrouverquelquechose.Tuveuxbien?

QuandLéonieaune idéeen tête…Maiselleacertainement raison, il fautenavoir lecœurnet.Aprèstout,qu’est-cequeçacoûte?

–OK,OK,appelletacopine.–Super!C’estparti.

Léonieprendsonportableetc’estàmontourdelaregardertéléphoner.

–Oui,salutJenny,peux-tumerendreunservice?Non,cen’estpasdegarderlapoussettedeZoé,laissetomber.

Léoniesecouelatête,mi-amusée,mi-excédée.

–Non… il y a eu quelques petits problèmes. Je ne peux pas te racontermaintenant…Oui… tupourrasrevoirlapoussette,maiscen’estpaslaquestion,là!

Léoniemeregardeettournesonindexsurlatempeenlevantlesyeuxauciel.Jeluisouris.CetteJennyestvraimentunphénomène!

–J’auraisbesoin…hum…hum…Oui, Jenny,mais jen’aipas le temps, je te l’aidit…J’auraisbesoinquetonpotedelapolicefassequelquesrecherchessurMary,qu’onensacheplus.Tupensesquetupeuxluifairetrouverdesinfossanstroptefairegriller?

ElleécoutelaréponsedeJennyetmefaitunsignepositif.

–Oui,c’estça,tuserasunesortedeMataHari,situveux,maiséviteladanseduventredevantlui,hein!Jeterappellequequandtutetrémousses,turessemblesmoinsàGretaGarboqu’àlacréaturedeFrankensteinquivientdeseprendreuncoupdejus.Çarisqued’êtrecontre-productif!Àmoinsquetuneveuillesfairediversion…

Visiblement, Jenny défend samanière de danser auprès de Jenny et trouve certainement qu’elleauraitplutôtlecharmedeSalomé.

–Maisoui…jeplaisante…tun’asriendeBorisKarloff…«Saufquandelledanse»,memurmureLéonieencachantlecombiné.–OK!MerciJenny,tuesgéniale.Jet’envoielescoordonnéesdeMary.Appelle-moidèsquetuas

quelquechose.Bises.

Elleraccrocheetsoupire.

–Voilà,j’aienvoyémaversiontrèspersonnelledePhilipMarlowesurlapistedetasœur.Tuasuneautreidée?

–Pasvraiment.JepeuxrelancerHenryetlesgarsdel’équipe…–Ettatante?–…–Tatante,Jesse,tuvoisquic’esttatante?Non?Onpourraitallerlavoir?L’interroger?

InterrogertanteMartha?Çavaêtreunetorture…pournous!

–Tusais,TanteMartha…estvraimentétrange.Jenel’aipasvuedepuislongtemps…Etpuis,siça

se trouve,elleest sur leshautsplateauxduTibeten trainde tresserdes tapismagiquesenpoilsdeyack…

–Mais,tul’aseueautéléphonel’autrejour…–Çaneveutriendire!–Jesse…Tuesentraindechercherdesexcusesàlanoix.Appelle-las’ilteplaît.

Ellearaison,maisilyauneéternitéquejen’aipasvutanteMartha,niquejesuisretournéchezelle.Tropdemauvaissouvenirs…MaisjesaisqueLéonienemelâcherapas.

–Bon,d’accord,jel’appelle.Onverrabien.

Je reprends mon téléphone sous le regard bienveillant de Léonie. Bienveillant mais un peu «surveillant»aussi.

–BonjourtanteMartha,c’estencoreJesse.–Ehbien!Tunedonnespasdenouvellespendantdesannéesetpuistum’appellespresquetousles

joursmaintenant.Mais çanem’étonnepas, l’écorcedupommierne réagit pas commed’habitude,signequedegrandsbouleversementssontàl’œuvre.

JeregardeLéonie,l’œilinquiet,maiselleestinflexibleetmefaitsignedecontinuer.

–Ils’agitdeMary,n’est-cepas?Tudemandaisdesesnouvellesl’autrejour.–Oui,tanteMartha,elleapeut-êtredegrosproblèmes.Vouspourriezm’aider?–Passemevoir.Ceseramieuxd’endiscuterdevivevoix.Oninterrogeralegrandbol.

Jelesavais!Pourlecoup,c’estmoiquin’enaipasdebol!

– Ce ne sera peut-être pas nécessaire, tanteMartha, et puis… je ne suis pas seul… Ça va êtredifficiledemedéplacer…

Léoniemefusilleduregard.

–Viensavectonamie!Ceseraparfait.–M…monamie?Maiscomment…?

Léonieaentendumaréponsegênéeetsemarreenlevantlepouceverslehaut.

–AllezJesse!Jenesuispasnéedeladernièrepluie.Jevousattends.

Commed’habitude,tanteMarthaaraccrochéavantquejenetrouvequoiluirépondre.Ilvafalloiryaller…

–Ellenousattend.–Allez,nefaispascettetête.Onvacheztatante,pasàunenterrement!

Oui, je saisLéonie, cen’estpasunenterrement,mais toutdemême,beaucoupdechosesenmoisontmorteslà-bas.Etpuis…tanteMarthaetson«grandbol»!?Jenesaisvraimentpassijesuis

prêtàsupporterça…Siellem’obligeàparleraupommier,jemetire.

***

LéoniegarelavoituredevantcheztanteMartha.C’estétrange,ellecontinueàconduiredèsqu’onsedéplace,mêmesionnepeutplusvraimentdirequ’elleestmonchauffeur…

LamaisondetanteMarthan’apaschangé.Lessouvenirsmepercutentdèsquejesorsdelavoitureet encore plus violemment quand je vois tante Martha sortir devant la porte pour nous regarderarriver. Samaison ressemble à celle demes parents.Çam’a toujours troublé,même si dansmonsouvenir,l’intérieurcorresponddavantageàlacaravanedeMmeIrmaqu’àunpavillondebanlieue.Jeporte Zoé dans son cosy et Léonie marche à mes côtés. J’ai l’impression que chaque pas merapproched’unpasséquej’aitoutfaitpoureffacer.

–SourisunpeuJesse!TuaslatêtedeScooby-DooquandilannonceàSammyqu’ilvientdevoirunfantôme.

–Tun’espasloindelavérité.

Léonieposesamainsurmonbrasetm’aideainsiàfranchirpluscalmementlesdernierspasquinousséparentdetanteMartha.

–BonjourtanteMartha,jevousprésenteLéonieetZoé,lafilledeMary.–BonjourLéonie,bonjourZoéetbonjouràtoiJesse.Ilyabienlongtemps!Entrez,entrez.

J’embrasse tante Martha en passant, et un éclair vient soudain me traverser le cerveau et merenvoie sur un autre perron plusieurs années auparavant,mais l’image disparaît et j’entre dans lamaisonàlasuitedeLéonie,Marthaderrièrenous.Nousarrivonsdanslesalon.TanteMarthaabienfaitleschoses.Ilyaquelquesboissons,desmetsconnusd’elleseuleoudequelquestribusancestralesaujourd’huidisparues.MêmeLéoniesemblesedemandercequepeuventbiencontenircesassiettes!IlyaaussiunparcpourZoé.Nousl’installonsdedansetnousnousmettonsautourdelatable,unpeumaladroits.

–Servez-vous!IlyaquelquessauterellesdeMadagascaretdesfruitsconfitsd’Afghanistan.

JenesaispascommentMarthas’yestprisepourprésentertoutça,maislefaitestqu’ilnousestimpossiblededistinguerlessauterellesdesfruits.Nousdéclinonsdoncpolimentsonoffre.

–OnvaattendreunpeutanteMartha.–Oui,mercimadame,c’est trop!Onadéjàunpeugoûté…Onnesavaitpasqu’onviendrait…

Sinon,vouspensezbien…Cen’estpastouslesjoursqu’ilyadessauterellesàtable…

Martha sourit.Onne saura jamais si ellen’estpasdupedumensongedeLéonieetde sa légèreironieousiçaluipassetotalementau-dessusdelatête.Jeparieraispourlasecondeoption.Léoniesemble toutdemêmeunpeudécontenancée.Ellemeregarde.En tempsnormal,ceseraitàmoiderelancer la conversation, mais je m’en sens totalement incapable. Léonie le comprend à mon aircertainementunpeudésemparé.Tropdechosescirculentdansmatêtepourquejetienneunéchange

untantsoitpeucohérentavectanteMartha.Ellechoisitdereprendrelefil.

Merci

–C’estgentildenousrecevoir.Jesses’inquiètepourMary.Vousl’avezrevue?Voussaviezqu’elleavaitunbébé?

TanteMarthasetourneversmoipourrépondre:

–Oui.Jesuisvosviesàtouslesdeux,tusais!Deloin,maisjemetiensaucourant.Maryestvenueme voir à la naissance de la petite, quand le père, un gentil garçonmais pas très sérieux, n’a pasassumé.Etpuiselleestrepasséedetempsentempspourdonnerdesnouvelles,maisjenel’aipasvuedepuisquelquetemps.

Mary a gardé le contact avec tante Martha !? Je ne sais plus quoi penser. Elle voulait déjàrenouer ? Pourquoi tante Martha ne m’a-t-elle rien dit ? C’est Mary qui lui a demandé ? Je necomprendsplusrien…

–Maisquelleraisona-t-ellepuavoirdeconfierZoéàJesse?

MarthasetournedenouveauversLéonie.

–Jenesaispas.Maryatoujoursétéétrange.

VenantdetanteMartha,çapourraitpasserpouruncompliment!

–Jesseadûvousdirequ’ellea fuguéun jouretqu’elles’estdébrouilléeseule. Jene l’ai revuequ’àlanaissancedesafille.J’aibienessayédel’emmeneràuneséancepourfairedansersesorganesà l’époque,maisellen’apasvoulu.C’estdommage.Onyvoitplusclairaprès.TudevraisessayerJesse.

–Nonmerci,tanteMartha.Mesorganespréfèrentbougerlemoinspossible,pourtouttedire.

Maryadoncréapparuilyaquelquesmoisseulement.Çan’expliquepaslasuite.

Léonieétouffeunrire.

–Oui,c’estvrai,çan’ajamaisététatassedethé.Maistusais,jesuisquandmêmeinquiète.Maryadoresafille,pourcequej’aivuquandelleestvenue.Elledoitavoirdesérieuxproblèmespourtelaconfier.D’autantquedepuisque…Enfin,tun’asjamaisvraimenteulafibrefamiliale.

Léoniem’a jeté un regard de victoire.Visiblement, à partmoi, tout lemonde est persuadé queMarycourtunvéritabledanger.

–Ilvafalloirqu’onrentre,tanteMartha.Tenez-moiaucourantsivousapprenezquelquechose.–Maisvousn’avezrienmangéetjen’aipasencoreinterrogélegrandbol!–Merci,maisondoitpartir.Vraiment.Onreviendra.–Commetuveux.

Nous disons au revoir à tante Martha et reprenons Zoé pour l’installer dans la voiture. Nousrestonssilencieuxpendantunepartiedutrajet,chacunruminantsespensées.C’estLéoniequibriselesilence:

–Jesse?–Hum?–Depuistoutàl’heure,jemedemande…–Oui?–C’estquoilegrandbol?

Lefourirequinousemporteenmêmetempsnenouslâcheplusjusqu’àl’hôtel,commeunventbienfaisantbalayanttoutelatensionaccumulée.

***

– Je peux comprendre que ta sœur n’ait pas confié Zoé à ta tante. La crainte du biberon desauterelle,jesuppose!Maisilyatoutdemêmeuntrucétrangedanstoutça.

LéoniecontinuelaconversationendonnantsondernierbiberonàZoéavantqu’onnelacouche.

–SitutrouvesquelquechosedenormaldanscettehistoireetenparticuliercheztanteMartha,jesuispreneur…

–Jeneparlepasdesesamuse-gueules.Sanscompterqu’onn’amêmepasouvertlesboissons!Çadevaitêtreauminimumdujusdecrotaleouunsmoothieauxtesticulesdesanglier!Pourl’énergie,j’imagine.

J’éclatederire.

– Je vois que tu viens de comprendre ce qu’on a vécu à chaque repas quand tanteMartha s’estoccupéedenous.Àsadécharge,elleavaitaussidelanourriture«normale»,dontMaryaemportéunebonnepartieens’enallantd’ailleurs.Uneraisondepluspourquejeluienveuille,tiens!

–Non,cequejevoulaisdire…Lachoseétrangeetsurlaquellejen’aipastiltétoutdesuite,c’estqu’elleavaitunparcavecdesjouetspourZoé,etjenemesouvienspasquetuluiaiesditqu’onvenaitavec elle. Et puis, elle était aussi plus oumoins au courant pourmoi, souviens-toi, quand tu l’asappelée…JepensequelaPythiequitetientlieudetantenenousapastoutdit.

LaremarquedeLéoniemetrouble.

–Tuasraison.Tupensesqu’ilfaudraitretournerlavoirpourensavoirplus?Pasauxheuresdesrepasentoutcas,tropdangereux!

–C’estdommageparcequelaPythievientenmangeant,commechacunsait,maisonéviteratoutdemême,jesuisd’accord.

–Oh,mais c’est drôle, ça ! Elle vient de loin, celle-ci.Allez, donne-moi cette enfant que je lacoucheavantquetunelacontaminesavectesjeuxdemotsantiques.

JeprendsZoédansmesbrasetlaportejusqu’àsonpetit lit.Manièce.Ellemeregardefixement

danslesyeux.Jerevoisceuxdesamère,etl’émotionmegagnedenouveau.Tantd’annéesàmettretoutçadecôtépourqueçaviennem’exploserdenouveauàlafigureparlebiaisdecepetitcorpssiléger,sifragileetdéjàpourtantsisolide.JelapapouilleunpeuenfaisanttoutdemêmeattentionàcequeLéonien’entendepastropetjeretournedanslesalonoùLéoniem’attenddanslamêmepositionqu’ilyaquelquesheures.Prêteà recommencer làoùnousnousétionsarrêtésavant lecoupde fild’Eva?

–EtsiM.Franklinvenaitretestermeslèvres?Aprèsavoirjetésonportableàl’autreboutdelasuitesipossible…

Prête,donc.

–Aucunportablenevibrerapluscesoir.Promis.–Ehbien,faisonsdoncvibrertoutlereste.

JereplongeenfindanslesbrasdeLéonie.Plusbesoinderéfléchir,jesuissimplementlàoùjedoisêtre,pourêtrecequejesuis.Jesuistraversépardesémotionsdeplusenplusfortes.J’aienviedemeperdredanssonodeur,danssachaleur,toutoublier.Noussommesassezvitepresqueentièrementnus.Mescaressessefontdeplusenplusprécises,appuyées.Léoniesoupire,m’embrasse,metouche.

–J’aienviedetoi.–Moiaussi.–Vachercherunpréservatif.–Oh!Non…j’avaisoublié.J’aiutiliséledernierhier…

Nousrestonsunmomentcommestupides,encoredans l’auradecequenousattendions tous lesdeuxetquinepourrapasaboutir.Noscorpsetnosespritsprennent le tempsde revenirunpeuenarrièredecequ’ilsavaientdéjàprojeté.Latendresseetl’enviesontpourtanttoujourslà.

–Onpourrait…s’enpasser…laprochainefois…situveux.

Léonie me regarde, un peu étonnée que la proposition vienne de moi, mais l’étonnement faitimmédiatementplaceàunregardamoureux.

–Oui…j’enaienvieaussi.Onpourrait tentermaintenant?Jeprends lapiluleet j’aiconfiance,mais…

–…ilvautmieux…–…êtresûrs…–…oui…

Léoniemecaressedoucementlevisage,medonnedepetitsbaisers.Jesuisbien.Ellemelâcheunedecesrépliquesdontellealesecret:

–Bon,pasdecompote,pasdecapotes,çalimiteunpeulespossiblespourcesoir.–Aucontraire,lescontraintesattisentl’imaginationetilnousresteencorebeaucoupdechosesà

découvrir!– Eh bien, Livingstone, je pense qu’il est alors temps de commencer l’exploration de mon

continentaveclesmoyensdubord…

Jel’embrasse,recommençantnospréliminaires.

–Vousallezêtresurpriseparlesressourcesqu’unexplorateurinventifpeutreceler.–Foindevantardise,maisdesactes!Explorez,moncher,explorez.Lemondes’offreàvous.

3.Airederepos

Léonie

–Passe-moidonccettemerveilleuseconfiturecertifiéesanssauterelles,s’ilteplaît,Jesse.J’aiunefaimdeloup!

–TusaisLéonie,onn’estpasobligésdefinirleplateauàchaquefois!Sanscompterqu’ensuitetuteplainsqu’ilnerestepasdecompote,ou jenesaisquoid’autre,pourassouvir tesdésirs lesplussalaces…

–Mesdésirssalacesdanslesquelstuesprêtàteroulersansaucuneretenue,jetelerappelle!

Nous sommes à la table du petit déjeuner depuis presque une heure, les yeux pétillants,engloutissantdestonnesdenourritureetnousamusantavecZoéquialternesonbiberonavecdestestsgustatifsissusdesmerveillesposéessurlatable.Jessel’agardéesursesgenouxetsemblenepasselasser de lui faire découvrir de nouvelles saveurs. Il s’est drôlement amélioré depuis son premiercrash-testàlacompote!Quantàmoi…jeplane,jenage,jevole.

Quandtupasseslanuitplusieursfoisavecquelqu’un,quetuesencoreheureusedeledécouvrirauréveil,quetuletrouvesaussiattirantquelaveilleetqu’enplustuesattendriedelevoirsimplementbeurrer des tartines, je pense que tu as vraiment basculé dans ce qui pourrait devenir une histoiresérieuse. Il faut se rendre à l’évidence, c’est ce quim’arrive avec Jesse ! Évidemment, si le petitdéjeunersefaitsystématiquementdansunpalace,onpeutsedirequeçaaideàvoirlavieenroseetàparer le bonhomme de toutes les qualités, mais, honnêtement, je ne crois pas que ça suffise. Parexemple, j’aime bienAkira,mais je ne suis pas sûre qu’ilm’émoustillerait avec une biscotte à lamain,alorsqueJesse…

–Jepensequetuasunemauvaiseinfluencesurmoi,Léonie.Jen’avaisjamaisvulacompotesouscetangleavantdeteconnaître.

–Maismoinonplus…C’esttoncorpsdebêtedesexequimefaitvenirdesidéescommeça.

Jessemanquedes’étoufferavecsonboutdecroissant.Onseregarde,complices,cherchantlejeu,l’étonnement et savourant le bonheur d’être ensemble. Amoureux quoi ! Si ce n’est pas ça, ça yressemble drôlement en tout cas.Ça pourrait durer encore des heures,mais quelqu’un frappe à laportedelasuite,brisantletableauidylliqueetquasifamilialdecepetitdéjeuner.

–Tuattendsquelqu’un?– Oui, je ne t’ai pas dit… À propos d’hier… notre discussion… J’ai pensé que ce serait plus

pratiquedefaireveniruneinfirmière…plutôtquedesedéplacer.Pourletest,quoi!Commeça…– Comme ça, on aura uniquement à se préoccuper de la saveur de la compote. Eh bien, tu es

rapide!Jevaisfaireattentionàcequejedisducoup.Jenevoudraispasmeréveillerunmatinsurunetabled’opérationparcequej’auraisannoncélaveillequejetrouvemonnezpastrèsdroit!

–Non,t’inquiète!Tonnez,çava.Jeneferaivenirquelqu’unquepourlesgroschantiers.

Jessese lèveenriant,mepasseZoéetvaouvrirà l’infirmièrevenuenousfaire le testHIV.J’aiprisl’annoncedutestenplaisantant,maisj’aitoutdemêmeeuunpetitcoupaucœur.Jessesemblevouloirqu’onavanceensemble.Ilchange.Ila l’aird’avoirvraimentenviequ’oncontinue,commemoi.Jeparlaisd’unehistoiresérieuse?Ondirait,non?

***

L’infirmièreestpartieavecunpeudenotresang.Elleauraitpufaireundiagnosticrapideavecunesimplegoutte,maisJessea tenuà faire leschosesdans les formes.À laJesse!Notresangvaêtreanalyséàfond!Jen’aiaucundoutesurlerésultat,maisjenesaispaspourquoi,c’estcertainementidiot,jepensequeçanous«libérera»dequelquechose.C’estunpeucommeunpassage,uneétapeinitiatique.Ensuite,onpeutentameruneautrepartieduvoyage.

Jesuisentraindepenserà toutçaenjouantà«Attrapetondoudou»avecZoéquandJessemedonne des informations sur l’organisation de sa soirée. Certainement celle dont Henry a parlé àConeyIsland.

–Jevaisêtrepriscesoiretjenesaispasàquelleheureçavaterminer.Ilyauneénormesoirée,hyperimportanteavecdesentrepreneursindiens.Sijefaisdesaffairesaveceux,c’estlejackpot!

–Ilssontdanslescasinos?–Toujoursaussivive!Non,ilsontdesentreprisesdetextileetdematérielinformatiquedanstout

lesous-continent,etleursboîtessous-traitentpourdesconsortiumdanslesquelsj’aidéjàdesactions.Si je peux leur faire encore baisser les coûts de la main-d’œuvre là-bas, je gagne sur les deuxtableaux.

Jedevraismetaire,maislepetitgoûtamerquicommenceàmeveniràl’idéederesterseulecesoiretladésinvolturedeJesseparrapportàdesouvrierscertainementpauvresqu’ilnerencontrerajamaisetdontilnevapasarrangerlesortm’incitentàluirépondre.

–TuveuxdiresurletableaudesIndiensquicrèventladalleetsurceluidesouvriersd’iciquivontsefairevirer?

Jesseaccuselecoup,unpeusurpris.

–Ehbien !Jeconstatequ’ilasuffique tuapprochesMaryune foispourêtrecontaminée.Jenepensaispasqu’unsimplecontactpuissetransmettrelevirus.Cecidit,toutcelaestpluscompliquéquetuneledis,etpuismesjeuxsurlestableauxnetegênentpasquandilstepermettentdeprendretonpetitdéjeunerdansleplusgrandpalacedeNewYork!

Touchée!

–OK!Unpointpartout,laballeaucentre.Cen’estcertainementpaslemoment,maisj’aimeraisbienqu’onenparleà l’occasion. Je te signalequemêmesimespetitsdéjeunerssesont largementaméliorés,et je t’en remercie, je resteencorechauffeurdemétier,etdoncplusprochede touscesgensqu’onballotteaugrédedécisionssurlesquellesilsn’ontaucuneprise.SituréfléchisetquetulesvoiscommedesmilliersdeLéonieoudeSimon,çachangeunpeuladonne,non?

Touché!

–Hum…jenesaispas.Jefaisdesaffaires,desgrostrucsetj’aitravaillépourobtenirtoutça.J’aisacrifiédeschoses,beaucoup,etjetravailletoujours.Jenepeuxpaspenseràtouslesindividusquipeuplentlaplanète,non?J’avance.

–Tuavancesetpuisunjourtutombessurtanièce,unefemmechauffeurquiteplaîtettuestoutdemêmeobligédet’arrêterunpeupourregarderdanslerétroviseur,voirs’iln’yapasquelquechosequiclocheàl’arrière.

Jesses’approchedemoi,unpeuremuétoutdemême.

–Léonie,unechoseestsûredanscequetudis,c’estquetumeplais.Pourlereste…

Ilm’embrasse,etjesuisassailliepardessentimentscontradictoires.Jesensqu’ilestsincère,maiscequel’onvientd’évoquerestunevraiequestion.Jenevoudraispasqueçadétruisetout.Etjesaisaussique je l’aiattaqué là-dessusparceque jevaismeretrouversans luicesoir,avecZoé,queçaremueenmoidesimagesdefemmeaufoyeretquej’aitoujoursvouluêtrelibre…Voilàquejememetsàêtredéçuedenepaspasserlasoiréeavec«monhomme»etque,enplus,jegardelapetite.

Léonie,pilotedecourseindépendante,laisse-moirire!

Nosbouchesseséparent.

– Pour le reste… on verra, mais ne crois pas que tu vas t’en sortir comme ça, parce que tuembrassescommeundieu!

–Jen’enattendspasmoinsdetoi!Tucomptesfairequoicesoir?

C’estça,remuelatronçonneusedanslaplaie!

– Je devais passer voir Simon de toute façon. Je verrai. Je laisserai peut-être Zoé à Jenny unmoment…

EtjeprendrailetempsderacheterquelquesboîtesdePurjabid!

–Parfait!Onfaitcommeça.

Zoés’estendormie,gavéedenourriture,quandmonportablesonneenaffichantlenomdeJenny.Çameparaîtencorebientôtpourelle!Çadoitêtreimportant.Elleapeut-êtredesinfossurMary.

–Oui,Jenny,déjàdebout?–MataHarin’apasd’heure!

Jemedoutaisquec’étaitlié…

–Tuasl’airravie!Tuastrouvéquelquechose?

Jesses’assiedàcôtédemoienattendantlesnouvelles.

–Oui,avecJohn!J’aifaitminedem’intéresseràlamanièredontlapolicefaitsesrecherchesetpuisj’aiglissélenomdeMaryl’airderienpourfaireuntestdansleursmachines…

–John,c’esttonflic?–Oui.–Etalors?– Bah… c’est du lourd taMary. Elle est fichée à la CIA et au FBI comme hacker, et c’est une

candidatesacrémentbalèzevisiblement.Ilsn’ontjamaispulacoincer,maisilssaventqu’elleatrouvédesaccèsàdesfichiersclasséstopsecretetqu’elleseraitcapabled’ymettreunbeaumerdier.

–Nooon…lavache!

Jessemeregarde,vaguementinquietetimpatient.

–Attends,cen’estpas fini !Ellea traînéavecun typequi s’appelleHanderson…Bougepas, jeretrouve,ilaunnomàcoucherdehors…Thaddeus…C’estça,ThaddeusHanderson.Parcontre,lui,ils’estfaitserreretn’apasl’airtrèsfréquentable.Ilétaitplutôtsurdesmagouillesautourdefichiersdebanque.

–Maisdisdonc,tut’esmiseàparlercommedanslesséries!OndiraitMikeHammer!–Ouais,c’estcool,hein?Jetrouvequeçamedonneunairplusprotoutdesuite.Peut-êtrequeje

devraisouvriruneagencededétectives.Qu’enpenses-tu?–Jepensequet’esdingue,maistuasfaitdusuper-boulot!–C’estmonjob,baby.Àvot’service!–Bon,jevois,jetelaisseredescendre;tum’asl’airunpeugrimpée,là!JevaisinformerJesse.Je

terappelleplustard.J’auraispeut-êtreencorebesoindetoi.–AgenceJenny,lerenseignementsansennuis!C’estpasmalcommeslogan,non?–EtpourquoipasJenny’sAngelspendantquetuyes!Tuasassezdetypessouslamainpourcréer

les«drôlesdemecs».–Maisc’estgénial!–OK!Jetelaisse.Bises.–Bises.Gé-nial!

Je raccroche en me disant que Jenny n’est décidemment pas banale et peut-être tout de mêmevéritablementfrappée.JefaisunrapidecompterenduàJesse,quiappelleHenrysurlechamp.

–SalutHenry,pourrais-tupisteruntypequis’appelleThaddeusHanderson?Ilal’airliéàMaryetafaitdelaprisoncommehacker…OK!Super!

Jessehochelatête,puisprendunairgênéetmejetteunœilenbiais.

–Non,non,laissetomber,jevaismedébrouiller…Non,jetedis!Àcecompte-là,jepréfèrevenirseul…Bah,siçanesefaitpas,çaseferapourcettefois…

Jesses’estassisetsetortilleenrépondantàHenry:

–Oui…bon…n’insistepas !Jevais trouverunesolution…C’estça, fais lemalin !Allez,àcesoir!

Ilraccrocheetmeregardeintensément,visiblementenpleineréflexion.

–Qu’y a-t-il ? Tu penses à l’opération demon nez ou tu as trouvé un chantier plus gros pourdemain?

Ilrevientàlui.

–Non,non!Est-ceque…tuvoudraisveniràlasoiréeavecmoi?–Bah…c’est…que…–Bon,cen’estpasgrave!Tudevaisvoirtonfrère,jecomprends…–Mais non, non, je peux venir… C’est juste que… je ne m’y attendais pas… mais oui, avec

plaisir!Jetesuivraispartout,tulesaisbien,mêmeàuneréuniond’affreuxexploiteurscapitalistes.–Mais…Léonie,tusaisqueJEsuisundecesaffreuxexploiteurscapitalistes.

Jessemelanceunsourireironique.

–Jesaisetjecomptebienpouvoircommencermontravaildesapedel’intérieur.–Hum…jenesuisplussûrquecesoitunesibonneidéequeçadet’emmener…–Ilfautsavoirvivredangereusement,M.JesseFranklin!

Ilm’enlacetendrement.

–Jetetiendraiàl’œilalors.Maisquefait-ondeZoé?–Jenny?Peut-êtretatante?ElleestaussiflinguéequeJennydansunautregenre,maiselleal’air

mieuxéquipéeenmatérielpourbébé.–VapourtanteMartha.Jevaisl’appeler,maisSimon…tunedevaispaslevoir?–Mmm…jeleverraiuneautrefois.

Jecroisquej’aipiquéunfardenbottantentouche.J’espèrequeçanes’estpasvu.

–Oh!Oh!Réponseenmodeécarlate!Tumecachesquelquechose?

Vue!

–Non,non…–Pascrédible!–Maisnon,rien,jet’assure…–Pascrédiblenonplus!–…–Allez,lâcheletruc.TudevaisvoirSimonpourquoi?ÀmoinsquecenesoitpasSimonquetu

devaisvoirmaisunautrehomme?Jevaisfinirparêtrejaloux.–OK,maisjeteledissitumedisavecquitudevaisalleràlasoirée.J’aicrucomprendrequeje

n’étaispaslepremierchoix.–Mais…non…quevas-tuimaginer?–Pascrédible!–Maisjet’assure…–Pascrédiblenonplus!

Onéclatederireenmêmetemps.

–OK!OK!Henryavaitfaitappelàuneescortpourm’accompagner.Onnepeutpasarriverseuldanscegenredesoirées.

–Uneescort!?Tucouchesavecdesescorts?!–Bahvoyons!GénéralementHenrym’enenvoiedeuxoutrois,jelesculbutedanslecouloirpour

voir celle qui tient lemieux et après, je garde la plus solidequi finira la soirée épuisée sousmesassautssexuels.

Ilestsérieux?

–Tuplaisantes?–Évidemment, jeplaisante!Ellessontpayéespoursourireetteniruneconversationintelligente

aveclesinvités.C’estàpeinesijelesvois.–Mmm…jenesaispassic’estbeaucoupplusvalorisant…–Çam’auraitétonnéd’obtenirunbonpointdanstouslescas!Maispassons…Ettonpetitsecret?–Àpeineplusreluisant!JevoulaisvoirSimonpourm’assurerqu’ilnepourraitpasreprendrele

travailet,sibesoin,l’aiderdenouveauàresterscotchéchezlui.–L’aider?Tun’espaspourrienàsonempêchement?–Disonsquejen’avaispasdevirusdelagrippeàluiinoculer,alors…–Alors?–Alorsj’aimisuneboîtedelaxatifsdanssonthé…

J’aiunpeuhontedel’avouer,maisJesseéclatederireaprèsavoireuunesecondedesurprise.

–C’estpasvrai,maistuesundangerpublicenfait!PauvreSimon!Jeteproposequ’ontrouveunemeilleuresolutionpourlasuite.

–Oui,oui.Detoutefaçon,ilavaitprisunpeudepoids.– C’est ça…Allez, l’empoisonneuse, réfléchis à la robe que tu veuxmettre et prépare-toi. On

passerachezunbijoutieravantd’alleràlasoirée…–Ahbon…je…OK!J’yvais.

Unbijoutier?

Jesuisprisedansuntourbillon.Jenesaisplustropquoipenser,maisj’aitoutdemêmehâte.

–Ahnon,Léonie,attends!–Quoi?

Ilachangéd’avis?Uneescortferal’affaire?

–Jevaisquandmêmeallerviderlapharmaciedelasalledebainsavantquetun’yailles.Onnesait jamais ! Je ne voudrais pas que mes futurs associés passent la soirée dans les toilettes ous’endormenttousenmêmetemps,voirepire…

–Mais…jevoisquelaconfiancerègne…Cecidit,tufaisbien,maisçaneteserviraàrien.J’aidescapsulesdepoisoncachéesunpeupartoutsurlecorps.

–Danscecas…Jen’aipasd’autresolutionquedelesdécouvrir.Maintenant!

Jemesauveet ilmepoursuitdans lasuite.Jepenseque jevais le laissermerattraper.J’aibienenviequ’ilmecherchequelquescapsules.Etcommeellesn’existentpas,çarisquedeluiprendreunbonmoment!Onaencorepasmaldetempsavantlasoiréedesexploiteurs,autantenprofiter!

4.Ventlatéral

Jesse a effectivement fini par me rattraper. Il n’a trouvé aucun poison sur moi. Il a pourtantcherchélescapsulesavecsoin,c’estlemoinsqu’onpuissedire!Jenepensaispascelapossible,maiscecourt lapsde tempsoùnousn’avonsplusdepréservatifsetoù lesrésultatsdes testsnesontpasencorearrivésnouspermetdesdécouvertes…fascinantes.Jemedemandepresquesijenevaispasleregretter quand l’attente sera terminée. Pour l’instant, le problème est tout autre. Je fais face à lapenderiedans laquellemedéfient lesplusbelles robesdumondeet,évidemment, jen’arrivepasàchoisir.UntasdeChanelparsèmedéjàlelit,quelquesDiorlerejoignent.J’ai l’airmalinavecmescritiques sur lescapitalistes. J’ensuis làdemes réflexionsquandJessedébouledans lapièce,déjàprêt.

–Léonie?Nooon…J’aiappelétanteMartha,ondoitdéposerZoéchezelle,passerteprendredesbijouxettuesencoreàmoitiénue!Qu’est-cequetufais?

– Bah, justement, j’essaie de m’habiller, mais comme c’est la première fois que je vais à unesoiréedemilliardaires,laseulechosequejesaisc’estquejenepeuxpasyallerenculotteaveclesseinsà l’air,niencostumedechauffeur.Pour le reste…laroberouge,çavafairecommuniste, lablanche,communiante,lajaune,Titichezlesgrosminets…

–OK!OK!N’enjetteplus!Metslanoire,laSaintLaurent,là.C’estclassiqueetelletombebien.–Tucrois?–J’ensuissûr!Move!Tuvasêtresuperbe.Allez,jevaispréparerZoé.Dépêche-toi!Onpartdans

dixminutes.–Dixminutes!?–Douze,maisc’estmadernièreoffre.

Parfois, la contrainte oblige. J’enfile la robe qui me va comme un gant et me glisse dans desescarpins aux talons pas trop « escarpés » qui feront l’affaire. Je me regarde dans le miroir del’armoire.

Est-cebienmoi?LéonieCaravaggio,passionnéedecoursesdevoitures,pilote,prêteàarracherlesyeuxaumoindremachoquimecantonneraitdansunrôlede«femme»?

Je me retrouve dans une robe de soirée digne de la remise des Oscars avec l’impression deregarderuneautrequemoidanslemiroir.L’habitferaitlanonne?Non,jesuistoujourslamême.

Je retrouve Jesse dans le salon, onze minutes et trente secondes après son passage éclair.Heureusementquejem’étaisdéjàmaquillée!IlestaccroupidevantZoé,installéedanssoncosy.Toutlemondeestprêt.Ilsetourneversmoi.

–Décidément…tum’étonnerastoujours!–Quoi ? Tu ne pensais pas que j’arriverais à enfiler une robe en dixminutes, en lamettant à

l’endroit,enplus?Tusais,unefoisqu’onarepéréoùpasserlatêteetlesbras,lerestesuit.

Ilselèveetmerejoint.Ilalesyeuxquibrillent.Sesyeuxsansfondquim’onttantfrappéelorsdenotrepremièrerencontreetquejenemelassepasderedécouvriràchacundesesregards.Ilposesesmainssurmeshanches,admiratif.

–Tuestoutsimplementmerveilleuse.Ondiraitquechaquerobequetumetsaétécousuesurtoi.–Ilfautcroirequejesuisnéeavecuncorpspourrobesdeluxesanslesavoir!Moiquipensais

passermavieensalopettedansungarage…–Jeregarderaitoutdemêmes’iln’yapasdesalopetteschezChanel.–S’ilteplaît,jerêveraisdedémonterunmoteurensalopetteChanel!

Nousnousembrassonstendrement.C’estàchaquefoisaussidouxetaussifort.

–Allez,enroute!OnpassecheztanteMartha,puischezVanCleefandArpelsetensuiteonfileauWaldorf.

–Entoutesimplicité,quôaaa!C’estparti.

Jesses’arrêtenet,commefoudroyé.

–Mince!–Quoi?Tupréfèresfinalementquej’enfileunesalopette?–Non,jen’aipaspenséàdemanderunchauffeur…Tantpis…jevaisconduirejusquecheztante

Marthaetjevaisendemanderunpouraprès.–Jepeuxconduire.–Non,maistunevaspas…–Quoi ?La longueurdemes jambesne changepas suivant lesvêtementsque jeporte, et jene

pensepasqu’unerobeSaintLaurentm’empêched’atteindrelespédales!

J’ai l’impressionqu’unegrande lassitude tombe soudain sur les épaulesde Jesse. Ilme regardecomme s’il venait de découvrir que je pense que la terre est plate et qu’il va devoirm’expliquerrapidementqu’elleestronde.

–Mais…onvaàunesoirée…–Jesais.–Léonie…çanesepassepascommeça…–Avecmoi,si.Pasquestionquejemefasseconduireparunchauffeur!

JevoislemondedeJessequis’écrouledevantsesyeux,maisilnevapaslelaisserpartircommeça.

–Onnevientpasàcegenredesoiréesenconduisantsavoiture,c’esttout!–Unchauffeurnesefaitpasconduireparunautrechauffeur,mêmeenrobedesoirée,c’esttout!–Cesoirtun’espaschauffeur,compris?–Chauffeurunjour,chauffeurtoujours,compris?

Jesseestàboutd’arguments.

–Etmonimagedemarque?Qu’est-cequejevaisdireàmesinvitéss’ilsnousvoientarriveravec

toiauvolant?–Tuesmilliardaire, tu es forcément excentrique !Et c’est la dernièremode àNewYork !Qui

oseratecontredire?

Jesseprenduntempsd’arrêt.

– Mais, dis-moi… personne n’a jamais pensé à t’étrangler ou un truc comme ça, pour êtretranquille,unefoispourtoutes?

–Si,toutletemps,maiscommeàchaquefoisqueçadevraitseconcrétiser,c’estàunmomentoùonestsuperenretard,jem’entire.

–Jusque-là!J’essaieraidoncdemesouvenirdecesmerveilleuxinstantsquetumefaisvivreàun«moment»oùj’aurailetempsdetetuer.

JesseattrapelecosydeZoéàtoutevitesseetseprécipiteverslaporte.J’enconclusqu’onestenroutepourallerchezMartha.

***

L’arrivéechezsatanteaétéunpeumoinsdifficilequelapremièrefois.Jesseestplusdétendu,misàpartladigestionunpeudifficileconcernantmaplaceauvolant,maisMarthaesttellementcontentedenousrevoiretdegarderZoé!

–C’estmerveilleux!Jesuisraviedelagarder.Onvabiens’amuser,heinZoé?

Zoé gazouille. Elle a l’air de bien apprécierMartha. Elle est vraiment facile cette enfant ! Elledonneraitenvied’enavoircinqousixd’uncoup,pourvuqu’ilssoientcommeelle!

–Mercidenousrendreservice,tanteMartha.Parcontre,vousneluifaitesdanseraucunorganeetvousévitezlessauterelles!Elleestencorepetite.

– Ne t’inquiète pas Jesse, je ne suis pas folle ! À cet âge-là, elle n’a droit qu’à la mousse defourmis.

–Quoi?!

Marthaéclatederire.Jemedisquelepersonnageestpeut-êtremoinsbarréetpluscomplexequ’ilenal’air.

–Jetefaismarcher,Jesse.Partezsanscrainte!Zoéestentredebonnesmains.

Jesseretrouvequelquescouleursmaissembletoutdemêmeunpeudubitatif.J’accélèreledépart.

–MerciMartha.Jereviendrailachercherdemain.Allez!Onestpartis,Jesse.–Aurevoirlesenfants.Amusez-vousbien.TuesmagnifiqueLéonie!–Merci!

Onretournedanslavoiture,directionVanCleef.

–Ellecommenceàmeplaire,tatante.

–Jemedoute.Dèsquequelqu’unestsusceptibledemerendredingue,j’ail’impressionquetuvasletrouverforcémentsympathique.

–Rooo…c’estbon,Calimero!–Démarre,situneveuxpasquejet’écrasesurlecrânecequ’ilmerestedecoquille.

Jetournelecontactaumomentoùmontéléphonevibre.UnSMS.

[Soyezprudents.Vousêtessurveillés.]

Mon sang se glace. Je relève la tête pour voir si quelqu’un est dehors, mais la rue est vide.Forcément.Réflexeidiot.Jemedoutebienquel’auteurduSMSn’allaitpasseretrouversurletrottoird’à-côté,niuntypeavecdesjumellesenfacedupare-brise,maisjen’aipaspum’enempêcher.C’estlavoixdeJessequifaitretombermapeurd’uncran.Untoutpetitcran.

–Qu’est-cequec’est?Çava?Tuestouteblanche.Unemauvaisenouvelle?–Regarde.

JeluitendsmontéléphoneavecleSMSanonyme,enessayantdenepastroptrembler.

–Mmm…c’estunepub,unteasing.Tuvasrecevoirlasuitedemainoumêmeavant.Toutlemondefaitçamaintenant…

–Jesse…jenesuispastranquille.Cen’estpasdelapub.Ilsepassetropdechosesétrangesautourdetasœur…Jenet’aipasdit,l’autrejour,àConeyIsland…jesuiscertainequequelqu’unafouillélavoitureet…

–Léonie…

Ilmeposelamainsurlajoue,rassurant.

– Tu te fais des idées. Qui pourrait t’envoyer ça ? Sérieusement ? Et pourquoi ? Arrête et net’inquiètepas.Aupire,c’estunemauvaiseblague…

–Uneblague?TunepensespasqueMaryessaiedenousprévenird’undangerplutôt?–Maisnon!Queldanger?Etpourquoinepasledécriredanscecas?C’estuntrucbidon,jete

dis.Allez,démarre.

Jesses’est fait tout tendre.Croit-ilvraimentcequ’ilditouraconte-t-ilçapourmerassurer?Sic’estlecas,çan’apasvraimentmarché!Jen’arrivepasàprendrecemessageàlalégère,maisj’yaitout demême gagné quelque chose : il a complètement oublié que je conduisais et que ça ne luiparaissaitpasnormalilyaàpeineuneheure.C’estdéjàça!

Enroute!Projetsàcourtterme:bijoux,soiréeettentativedefind’angoisse.

***

–Dépêchez-vousdeprendrelavoiture.J’aiconnuleserviceduWaldorfplusrapide!–Bienmonsieur.Toutdesuitemonsieur.

Letypes’exécutesansdemandersonreste.J’aifaitlafièrejusque-là,maisquandlevoiturieravu

sortirlechauffeurdelaRollsenlapersonnedemapomme,enrobeSaintLaurentavecdesbouclesd’oreilleendiamant,jel’aivutiquertoutdemêmeetjemesuissentiestupide.J’aisoudainressenticombien tout cela n’était pas mon monde, mais celui de Jesse, qui retrouve immédiatement sesrepèresquandilyestprojeté.Ilétaitcontrelefaitquejeconduise,mais,àl’arrivée,c’estluiquiaassuré.Sapetitephraselancéeenpublicavecsonautoritéindiscutablearendubienréellemaréponsetêtuedetoutàl’heure.Enquelquesmotsetuneintonation,Jessearappeléquiétaitlepatron.Sous-texte:«Çavousétonnequ’elleconduise?Maisvousêtesdébilemonvieux,toutlemondefaitça!Vousêtesenretarddeplusieurssiècles.Allezmerangerlabagnolevitefait,vousavezdéjàperdudutemps.»Impressionnant!Etilm’apriseparlatailleleplusnaturellementdumondepourrentrerauWaldorfAstoria.

–Détends-toietprofitedelasoirée!Tuessuperbe.–Merci.

Jesuissuperbe?Jenesaispas.Toutestgi-gan-tesque.Ilyaunefouledegens,tousplusélégantslesunsquelesautres.Jenesaisplussimarobemeva.J’ail’impressionquetoutlemonderegardeles boucles d’oreille que Jesse m’a offertes en se demandant pourquoi de telles beautés sontaccrochées à quelqu’un commemoi. Il y a des petits démons quime tournent autour de la tête enhurlant:«Imposteur!Imposteur!»J’espèrequepersonnenelesvoit.

Noussommesàpeinerentrésquequelqu’unseprécipitesurJesse.

–Ah!BonsoirM.Franklin,jevousattendais.Ilfautabsolumentquejevousprésenteledirecteurd’ITDIncorporation!

–BonsoirM.Jameson.JevousprésenteLéonieCaravaggio,monamie.–Enchantémademoiselle,vousêtesmagnifique.–Merci.–Jetelaisse,Léonie.Onseretrouveplustard.

Jesses’éloigneaprèsm’avoirembrasséedanslecou.

«Monamie»,unbaiserenpublic…Jecroisquejevaisallermesaoulerauchampagne!

Je me suis collée à une table remplie de coupes en essayant de prendre l’air le plus naturelpossible,etc’estuneparfaiteréussite!J’ail’impressiond’avoirlagrâceetlaprestanced’unpoulpequiseraitvenus’échoueraumilieudelagaleriedesGlacesdeVersailles.Encoreheureuxquejen’endégagepasaussil’odeur!Maisjesuisstupide,Jessem’aditd’enprofiter.Touticiestfantastique.Jereprendsunverreetmoncourageàdeuxmainsetjemelancedanslatraverséedelasalle.Etj’aibienfait!J’aperçoisenfinquelqu’undeconnu.Henrysedirigeversmoi,toujoursclasse,mêmedansunsmokingidentiqueàtouslesautres,enfinàmesyeux.Ilnem’apasencorevue.J’avanceversluienpréparantmonplusbeausourireavecunsoulagementcertainquandunhommes’approched’Henryetlefaitdévierdesoncheminenleprenantparlatailleaprès…l’avoirembrasséfurtivementsurlabouche!

Avec seulement deux verres ingurgités,même un poulpe n’est pas assez bourré pour avoir deshallucinations ! J’ai VUHenry smacker le clone de JohnnyDepp, et quelqu’un en a profité pour

soudermesescarpinsausol.Jesuisscotchée!Ilfaitcequ’ilveut…maisEva,ellesait?Commentluidire?EtJesse?C’estsonmeilleuramiaprèstout…

–Oh!Léonie!Jesuistrèsheureusedeterevoir!

Lepoulpetournesagrossetêtetroplourdeverslavoixquivientderésonner.C’estEva,souriante.Jetenteundécollagepartieldemestentaculespourmeplacerenfaced’elleetjetteundernierregardàHenryetJohnny,maisilsontdéjàdisparu.Evan’arienvu.

–Ah!Eva!Çamefaittrèsplaisiraussi.

Lepoulpearéussiàparler.Çadevraitpouvoirencores’améliorerpourlasuitedelaconversation.

–Jesset’adit?Jesuisvraimentdésoléepourl’autrejour.Henrynem’avaitinforméederien.

Ilestpossiblequ’ilyaitd’autreschosesdontilnet’informepas.

–IlavaitpromisàJessederesterdiscret,maislà, jepensequ’ilavoulus’amuserànosdépens.Enfin…c’estHenry!

–Oui,c’estHenry.Àcepropos…–…Quandonparleduloup!

HenrydébarqueaumomentoùjemedemandaissijedevaisparleràEva.Ill’embrassetendrementsurlajoueetsetourneversmoi.

–TuesvraimentresplendissanteLéonie.Lasoiréeteplaît?–Merci.Oui,elleesttrès…gaie,non?–Heu…oui,onpeutdireça.–Toutes les femmesont des robesmagnifiques, et les hommes sont très élégants aussi, un peu

commeJOHNNYDEPPensmoking.

HenryfaitsemblantdenepassaisiretEva,elle,nesaisitpas,évidemment.

–Oh!Tusais,toutlemondeparaîtélégantensmoking,JohnnyDeppcompris,jesuppose.–C’estsûr!Ildoitmêmeplaireauxhommes,JohnnyDeppensmoking,non?

Henrycontinueàfairelemalinetmeregardeavecunairparfaitementinnocent…Balèze!

–Oui…certainement…jenemesuisjamaisposélaquestionàdirevrai…

Tiensdonc!Tum’endirastant…

–Jevoisquevousvousêtesretrouvés!

Jessenousarejoints,empêchantmonenquêteetlarévélationdupotauxroses,maisjen’aipasditmonderniermot.Laconversations’envoleversd’autrescieux,etlasoiréecontinue.

JecroisquejevaisVRAIMENTmesaoulerauchampagne!

***

Finalement, jen’aipasbutantqueça.Ilfallaitquejeconduise,etpuis jevoulaisavoir les idéesclairespoursuivrelesfrasquesd’Henry.J’aipassélasoiréeàl’apercevoir,iciavecJean,làavecEva,toujoursdécontracté,àl’aise,hypertranquillequandonseretrouvaittousensemble(JeanMaraisenmoins,évidemment!).Gonflélegars!Etenpublic,enplus!

Deretourdanslavoiture,j’essaied’enparleràJesse.

–IlssontensembledepuislongtempsHenryetEva?–Troisouquatreans,jecrois.–TuasconnuHenryavec…quelqu’und’autre?–Mmm…quandonétaitplusjeunes…

MaisletéléphonequeJessevientderallumervibre,l’empêchantdepoursuivresaréponse.IllitleSMSensouriant.

–Onestnégatifs.–Jenetrouvepas.Jemesuistrouvéetrèspositivecesoir,aucontraire!Parcequefranchement…–Maisnon,tuesbête…onestnégatifs,HIVnégatif!Jeviensderecevoirlesrésultats.

Onseregarde.Pasbesoindeparlerpourcomprendrelemélanged’émotionsetdedésirquinousenvahitenmêmetemps.J’oublieHenry,lepoulpe…

–J’accélère?–J’allaisteledemander.

Nosespritsnesontplus tournésquevers le retourà l’hôtel.Noussavons tous lesdeuxquenoscorpsnousyattendentdéjà.Ilsn’ontplusbesoindeprotection.Désormais,noussommesvraimentànu.

Laroutequinousresteàfairepourarriveràl’hôtelsedéroulesouslatensiondetousnossens.J’ai l’impressionque chaqueporedenotre peau est relié par un réseau électrique, desmilliers designauxinvisiblesquiexcitentnotredésirsansmêmeavoirbesoindenoustoucher,simplementparlaprésence de l’autre à quelques centimètres. Savoir que, dans quelques minutes, nous allons nousenlaceretqueplusrienn’empêcheralecontactdirectentrenossexesprovoqueenmoidessensationsdécuplées.Jesuisunanimalenchasse.J’entendstouslesbruitscommesionavaitmontélevolume.Jereconnaislamoindrefragranceetjesuiscapabled’endonnerl’origine;jepourraispresqueluiattribuerungoût.Jepeuxvisualiserl’auradeJessequivientsefrotteràlamienne.

Je pousse la Rolls à la dernière limite de la vitesse autorisée. Si je m’écoutais, j’écraserais lapédale de l’accélérateur et j’arriverais en mode rallye à l’hôtel, arrêt au frein à main, mais j’ail’impressionqueJessetrouvequejevaisdéjàtropvite.

–Tupeuxaccélérer,maisj’aimeraisbienpouvoirtefairel’amourencoreenvie…–T’inquiète,jenevaispasterejouerCrash.D’ailleurs,onestarrivés!

Au parking, nous apercevons la créature de Frankenstein qui a pris l’habitude de nous laisserpassersansnousarrêter.Pourunpeu,jeletrouveraispresquebeau,c’estdiresilesphéromonesmemettententranse!Nousentronsdanslessous-solset lasemi-obscuritéentraîneJessevers ledébutdescaresses.Ilposesamainsurmonbrasetcommenceàl’enserrerparpetitestouches.

–Jesse…Attendsunpeuque jesoisà l’arrêt.Sinon, je risquedemegarerdans lecoffred’uneautrevoiture…

Il laisse samain surmoi,mais arrête sonmouvement et rit doucement. J’arrive à retrouver laplacedelaRollsetmegaredansunebrumededésir.Noussommesàpeineàl’arrêt,contactcoupé,quenousnousprécipitonsl’unsurl’autre.Nousnousdévoronsplusquenousnousembrassons.Nosdents s’entrechoquent, nos lèvres sontmordues, nos bouches se frottent comme si elles voulaients’aspirermutuellement.Nosmainsviennentchercherlecorpsdel’autreavecfrénésie,maisdansundésordrequinenousestpashabituel.Jessem’avale.Ilplongesonvisagedansmoncou,melèche,glissesa languedansmonoreille,memordille,provoquantàchaquefoisunfrissonincontrôlable.Mesmainslecherchent.Jeveuxtouttoucherenmêmetemps.Jepassedesacuisseàsontorse,glissesursonsexedéjàdur,entouresonvisage…Jessem’asaisiunseinetlepalpeavecuneforceetunedouceur incroyables. Il le lâchepresque aussitôt pour se glisser immédiatement entremes cuisses,écartantletissudelarobequej’aimistantdetempsàchoisir.J’essaiedereprendremonsouffleentredeuxbaisers.

–Jesse…Jesse…Onestdanslegarage…

Jessesemblesoudains’enrendrecompte.Nousrestonsquelquessecondes,haletants,nousfixantcomme deux bêtes qui n’attendent que l’instant où elles pourront se lancer de nouveau l’une surl’autre.Iln’yapasunbruitdansleparking.Àpartnossoufflesrauques,pasâmequivive!Jessesetendencoredavantage,auxaguets.

–Oui…je…Iln’yapersonne…

Jesuismoiaussiàl’écoutedumoindrefrémissementextérieurquisignaleraitunintrus.Jerespireparsaccades.LamaindeJesseestrestéeposéeàl’oréedemonsexe.

–Quelqu’unpourraitarriver…

Samainsefaitpluspressante;ilsemblevouloirreprendrelecombat.J’accuselapressiondesesdoigtsparungémissement.

–Jenesaispas…peut-être…Jen’arrivepasàpenser…J’aienviedetoi…maintenant!Onn’yvoit rien là-dedans. Si quelqu’un vient, on aura le temps de s’en rendre compte. Je ne peux pasattendre.

Jesse semble à peine se rendre compte de ce que nous faisons. Il est guidé par notre enviecommune,quiaprisune intensité incroyable.Unpeucommesi l’étroitessede lavoitureresserraitnotredésir,nousécrasaitsoussapressionenl’empêchantdesedisperser.Jesseécartesoudainletissudemaculottepours’introduiredansmonintimitédéjàouverte,trempéeparl’attente.C’estlesignalpour la partie encore raisonnable demon cerveaude rentrer dans sa niche et deneplus en sortir.

J’attrape le sexe de Jesse à travers son pantalon et memets à le caresser pendant que ses doigtss’enfoncentenmoi.Nosbouchessesontretrouvées.

–Viens…Onvasemettreàl’arrière.

Avantquejen’aieletempsdecomprendrelemouvement,Jesses’estglissédebiaisentrelesdeuxfauteuilsetm’attendsurlabanquettearrière.Jeprendslemêmechemin,deface,pendantqu’ilsortsonsexe.L’arrièredelaRollsnouslaisselargementlapossibilitédenousinstallerpourlevoyageimmobilequenousavonsentrepris.Si laRollsnebougepas,Jesse, lui,a l’airen transe,et jesuisdanslemêmeétat.Leparkingestéclairéparquelqueslampesdesecours,etl’arrièredelavoitureestsombre.LemembredeJessesedressedans l’obscurité,sortantdumilieudesoncorpsdemanièrepresque incongrue, blanc, tendu. Je l’ai pris dansma bouche, et il apparaît et disparaît comme sic’étaitmoi qui décidais de son existence à la lumière.Donner du plaisir à Jesse de cettemanièrem’excite. J’aime sentir cemélange de dureté et de douceur dont je fais varier la taille au gré descaressesprodiguéesparma langue.Son sexe répondà chacunedemes sollicitations. Je ressens lamoindredesespulsionsdanslaboucheetjel’imaginedéjàentrerenmoi.

–Embrasse-moi.

Jesseachuchotésademande,moitiéphrase,moitiésoupirdeplaisir.Jemeredresseetprendssabouche toutengardantsonsexedansmamain. Ilasortientièrementhorsdemarobe leseinqu’iltenaittoutàl’heureetsemblevouloirencaresserleboutavecsonmembre.C’estmoiquiexécutelemouvement.Jeposesonglandencorehumidesurmontétonetletitillejusqu’àcequ’ilsoitaussidurque lapartie laplussensibledeJesse. Jemepenchede tempsen tempspour le reprendredansmabouche.J’aienviequ’ilmepénètretoutdesuite,delesentirenfinenmoitotalement,sansl’enveloppedelatexquinousavaitencoreséparésjusque-là.Jessesembleavoirludansmespensées,etsansquejeluidisequoiquecesoit,ilseredresseetnousbasculonsensemble.Jemeretrouveassisefaceàluipendantqu’il soulèveetécartemes jambes. Jem’enfonceaumaximumdans le siègeetvaiscollermesescarpinssurleplafonddelaRolls.J’ailesjambesentièrementdécouvertes,deuxlonguestachesblanchesdanslalueurblafardeduparking.Lesecondéclairn’estautrequelesexedeJesse,dressélui aussi aumilieu du noir de son costume.Un dernier point de clarté est apparu entre nous :maculotte, glissée sur le côté pour laisser apparaître le triangle plus sombre qui attend de recevoirl’hommequej’aime.

–Viens.Doucement.

Jesse s’appuie d’une main sur le pilier formé par ma jambe, puis, de l’autre, écarte encoredavantagemaculottesans l’enlever.Jesens le tissuquienserreunepartiedemesfessesetdemonbassinpendantquel’essentieldecequ’ildevraitcouvrirestmaintenanttotalementoffert.Ilm’explorequelques secondes avec ses doigts, puis attrape son sexe et le pose délicatement sur mes lèvresentrouvertes.Nosregardssecroisent.Soncontactproduitencoredavantagede liquideenmoi.J’aipresque la sensation quemon désir s’écoule et que seul le sexe de Jesse pourra le contenir et lesatisfaire.Ilnemepénètrepastoutdesuiteetsemblevouloirmeredécouvrirentièrement,morceauparmorceau,avantdeseglisserenmoi,commesinousrecommencionstoutdepuisledébut,commes’il fallait réajusternos sensationspourenprofiter encoredavantage. Il caresseavec leboutde savergemon clitoris qui se dresse de plus en plus au fil dumouvement de va-et-vient imprimé par

Jesse, parfois excité différemment par unmouvement latéral, appuyé et rapide. Puis il reprend lerythmerégulier,descendauborddemonvagin,sansypénétrer,passantsurlesparoisdemeslèvresqui devinent la taille dumembre qui les écartera bientôt. Jesse se penche pourm’embrasser, sanslâchersonsexeniarrêtersescaresses.Ilal’odeurducuirdelavoiture,denosparfumsmélangés,dutissudenosvêtementsetlalégèreamertumedelatranspiration.Ilal’odeurdudésiretduplaisir.Dusexe.Cemélangevientagircommeunstimulusirrésistible,etmamainseprécipitesursonmembrepourcommenceràl’introduireenmoi.Jesseselaissefaire,mepasselerelais.Cesdeuxmainssontvenues s’arc-bouter de chaque côté de ma tête et c’est moi qui le guide désormais. Je passe unedernière fois son sexe sur les parois extérieures dumien et introduis son extrémité enmoi.Nousprenons le temps, au milieu de la frénésie qui nous emporte. Comme si le risque de nous faireprendredanscettesituationn’avaitaucuneimportance.Maisl’idéem’apparaîtdenouveau,soudain.

–Jesse…cen’estpeut-êtrepas…–Chut!Laisse,laissefaire.

Ilm’emportedans sa folie, et nouspoussons lemême râle aumomentoù ilmepénètreunpeuplus.Mêmesilamembranedespréservatifsestfine,lasensationdusexeànun’apasd’équivalent.C’estlaviequivientderentrerenmoi,lachaircontrelachair,l’intimitépousséejusqu’àl’abandon.Plusriennenoussépare.J’aientourélatêtedeJessedemesbras.Noussommesfrontcontrefront,alternantrégulièrementbaiserssurlaboucheetsurlevisage,pourl’instantreliésparlesexedeJesseàpeineentré.Letempsestsuspendu.Puis,monenvienepeutplussecontenir.Jedonneunlégercoupde bassin pour supplier Jesse de s’introduire davantage, entièrement, et de nous emmener vers lajouissance.Ilmeregardeetm’embrasse.

–Viens.Entièrement.

J’aiàpeineprononcélaphrasedansunspasmequ’ilseglisseintégralementenmoi.C’est luietc’est un autre ; je le redécouvre. Au moment où il entame son mouvement régulier, mon corpss’abandonne et m’abandonne. Je ne suis plus qu’une suite d’images, de sons, d’odeurs et desensations.Chaquemorceauquimecomposeauneviepropreetm’envoiedesflashsdontl’originesetientdanscelledumonde.J’aileboutdesseinsàvif,lesjambestremblantes,lebassinélectriséparlesdéchargesdeplaisiràchaqueimpactdeJesse.Ilvadeplusenplusvite,deplusenplusloin.Jesaisqu’ilvajouirenmoi,quejevaislelaisserjouirenmoietquesajouissanceseraaussilamienne.

Lerythmes’accélère.Jesseaunenouvellefoistrouvélacadencejuste,lanôtre,celleaussidecetinstantquenousn’avonspasréfléchietquinousaemportésàtoutevitesse.Ledésirétaittropfort;iltraînaitdansnostêtesdepuisleSMS.Ilvaexploserdansquelquessecondes.Jeserresonsexeenmoi,jesenstoutessesaspéritéset j’enjouecommeavecunesecondebouchequiserait reliéeà touslespointsnerveuxdemonplaisir.

–J’aienviedejouirentoi.–Oui!Viens.–Tuesencoreloin?–Non,c’estlà,toutprès.

LaquestiondeJesseaencore rapprochémonorgasme. Il sait, je saisqu’il s’approcheetque le

gouffrenousengloutiradansquelquespasàpeine. Je le sensvenirdistinctement.Soudain, c’est lepointdebascule.Nous sommesaubord.Le sexede Jesse segonfleenmoicommedansuneffortultime;monvaginl’enserreencorecommesi jevoulaisarrêterl’inéluctabletoutenleprécipitant.Nous ne sommes plus qu’un. Nous sommes collés, indétachables. Jesse semble avoir arrêté derespirer et je n’entends plus mon souffle non plus. Nos bassins se frottent avec un minimum demouvements,maisdansuneintensitéinégalée.Etsoudain,c’estlà,levide.Noussautonstouslesdeuxdans un cri libérateur. Je me sens tomber. La chute me broie l’intérieur du corps et j’éclate. Ladéflagration redouble quand je sens Jesse exploser aussi en moi. Nous atterrissons au pied de lafalaise,brisés,touslesmembresfracassés,maisenvie,commenousnel’avonsjamaisété.

Petit à petit, nous reprenons conscience de l’extérieur, retrouvons nosmembres, vérifions qu’iln’y a personne alentour. Nous sommes restés habillés, comme si pour cette première fois sanspréservatif,ilsnousavaientfalluconcentrertoutesnossensationsenunseulendroit.Ilfaittoujourssombre, mais j’ai l’impression que nous sommes radioactifs et phosphorescents et que le mondeentierpourraitnousvoiràtraverslesmursduparking.Nousnousréajustonsunpeuetsortonsdelavoiture.Jessem’enlace.

–Finalement,ilavaitraisontonfrère.C’estvraimentidéallaRolls!–Pourêtresûrs,ilfaudraitcomparer.Tunem’aspasditquetuavaisseptouhuitvoituresici?–Sanscompterquejepeuxenracheter…–…etquemonpèreaungarage…–L’avenirmesemble radieux.Enattendant, ilya l’ascenseur, lecouloir, toutes lespiècesde la

suite…–Tun’esqu’unebête!

Nousnousdirigeonsverslasuiteavecuneidéeentête:recommencercequenousvenonsdevivreetenprofiterencorepluslongtemps.Prendreletempsjusqu’àdemain.Toujours.

5.Stop!

Léonie

Je suis confortablement installée sur un nuage moelleux réservé aux hôtes du Seigneur. DesangelotsjouentdelalyreetchantentdesGloriaeenmeversantlesmeilleursnectars.Moncorpsestlibéré de toute pesanteur et je suis éternelle, condamnée volontaire à la félicité. L’Amourm’enveloppedesonaurabénéfique,lebonheurn’aaucunelimiteet…

–Léonie,tuplanesouquoi?Tuasmangétropdepainaupavot?

LaremarquedeJessenemedétrônepas,bienaucontraire,mêmesijeretrouvesoudainlatableréelledupetitdéjeuner.Ilestlààmescôtés.Lemondeestparfait,idéal.Rienàdemanderdeplus.

–Jesuisheureuse,Jesse.Jesuisbien.C’esttout.

Ilmeregarde,amoureuxetattendri.Ilestdéjàprêtàpartiràsesrendez-vousd’affaire,maisnousrestonsencoretouslesdeuxentourésdeseffluvesdelanuit.

–Moiaussijesuisheureux.

Lebaiserquenouséchangeonsestpassionnéettendre,chargédetoutcequenoussommesdéjàetdecequenousallonsdevenirensemble.

–J’yvais.Àtoutàl’heure.–Àtoutàl’heure.

Jesses’enva,melaissantpensive,envahiepardesimagesdetoutcequ’ils’estpassédepuisnotrerencontre pour arriver à cettematinée. Je plane, c’est vrai,mais il va tout demême falloir que jem’activeunpeu.

Bon,allez,ilfautquej’aillechercherZoé!Lesangelots,vousrangezleslyresetlestrompettesetpuisvousmenettoyez toutça,hein?Moi, il fautque jeredescendedunuagepourallerprendre labagnole.Allez,zou!

***

JefrappechezMarthaquim’ouvredansunerobequiadûêtretricotéeparledalaï-lamalui-même.Levêtemententierestunmandalasusceptibledet’exploser leschakrasdirectsi tu leregardestropfixementplusdedeuxminutesetquetun’aspasdeuxcentsansdeméditationderrièretoi.Jenem’yrisquedoncpas,détournelesyeuxetembrasseMarthaquim’accueilleàbrasouverts.

–BonjourLéonie.Entre,entre,Zoéestdanssonparc.–BonjourMartha.

Lesalonesttoujoursremplid’objetsaussiimprobablesqu’inconnus,maisZoésembles’ysentirbien,etilcorrespondtellementàMartha!Nousnousinstallonssurlecanapé(maisest-cevraimentuncanapéoularépliqued’untemplehindouavecdescoussinsdessus?),quandjeremarque,àcôtéduparcoùsetrouveZoé,lamoufettedanssacage.Lamoufettequ’onavaitlaisséechezAkiraetquise trouve désormais ici. Par quel prodige ? Mon regard soudain devenu fixe oblige Martha àdécouvrircequimefascineautant.Elleseretourneensuiteversmoi,unsourirelégeretmalicieuxsurleslèvres.UneJocondeàlamodetibétaineenquelquesorte!

–Lamoufette…étaitchezAkira.VousconnaissezM.Ozu,Martha?

Lesourireresteenplace.S’yajouteunpetitpétillementdel’œil.

–Akiraestungrandamiàmoidepuislongtemps,trèslongtemps!

Elledit«longtemps»suruntonquimedonnel’impressionqu’ilsétaienttouslesdeuxprésentsàl’originedelacréation.Cecidit,aucund’euxnefaitsonâge.Leditâgequejeseraistoujoursbienenpeinedeleurdonnerd’ailleurs…

– Je comprends mieux… C’est grâce à lui que vous êtes au courant de la vie de Jesse et desquelquesnouveautésdesderniersjours.

–Exactement!Akiraétaitauservicedemonfrère.QuandlesparentsdeJesseetMarysontmortsdansunaccidentdevoiture,Akiraestrestéets’estnaturellementmisauservicedeJessequandilestdevenu…cequ’ilestaujourd’hui.

L’intonationdeMartha,bienquepresqueimperceptible,nelaisseaucundoutesursapensée.

–Vousappréciezmoyennement«cequ’ilestaujourd’hui»,non?–Jesseestduràlatâche,opiniâtreetbrillant,maisdisonsquelessouffrancesdelavienefontpas

réagirtoutlemondedelamêmefaçon.Etpuisc’estungarçon.Lamortdesesparentsetlafuitedesasœurl’ontforcéàtrouverunesolutionpourseprotégeretcontinuer,parfoisenoubliantunpeuderegarderautourdelui,maisj’ail’impressionquevousêtesentraindel’obligeràsouleverleheaumedesonarmuredetempsentemps.Jemetrompe?

Jenepeuxpasm’empêcherderougir;cequin’échappeévidemmentpasàMartha.

–Jenesaispas…C’est…Onest…Ilya…–C’estbiencequejepense.

Martha se lève et va chercher Zoé. Décidément, cette femme est pleine de surprises, et d’unegrandefinessederrièresesexcentricitésparseméesdesauterellesetdegrandbol.

Zoéal’aircontentedemeretrouver.LaconversationsepoursuitaveclapetitesurmesgenouxetMarthaquilapapouilledetempsentemps.

–Est-cequeJessesait…qu’Akiravousinforme?–Mmm…DisonsqueJessesaitévidemmentquejeconnaisAkira,mais…ilesttropoccupépour

se poser la question d’éventuelles informations que je pourrais avoir par ce biais. Je te l’ai dit,

Léonie,Jessenevoitquecequilepréoccupe:lecombatqu’ilmène,aumomentoùillemène.Autantilaun instinct infailliblepour lesaffaires,autantcequiappartientà l’intimeest…occulté,enfoui,effacédesonchampdevision.Maistuesarrivée…etZoé…

Jerougisdenouveau.Marthacontinue:

–Lesarbresm’ontparlé,tusais!Jesuissûrequedeschosessontentraindebouger.Tuneveuxpasquel’onconsultelegrandbolpourtoi?

Çayest!ElleestredescendueaupaysdesLutins!Jevaispartiravantqu’ellenemefassesucerdesracineshallucinogènesetquejevoieapparaîtreleGolumaumilieudusalon.

–C’estgentilMartha,maisjevaisdevoiryaller.JedoisretrouverJessedanspaslongtempset…–Jevois,jevois.C’estdommage.Jesuiscertaineque…maisjecomprends.J’interrogerailebol

sanstoi,maisc’estpluscompliquéd’yvoirquelquechosequandlapersonneconcernéen’estpaslà.

Jenesuispascertainedevouloirvoirquoiquecesoitdansunbol,Martha,aussigrandsoit-il!Etpuis…jen’aipasenvienonplusdevérifiersitoutemavieestdéjàécritedansunrécipientàcafé!Jepréfèrelasurpriseetleschoixquejedoisfaire.

JemelèveetquitteMartha.J’aimedécidémentbiencettefemme.

Ellem’aideà installerZoédans lavoiture. Je luiai laissé lamoufette ;pas lapeinede troublerJesseenrevenantavec!J’aurailetempsdeluiexpliquertoutçaàtêtereposée.Jememetsauvolantetdémarre.Marthacontinued’agiterlamainpournousdireaurevoiretdisparaîtdemonrétroviseurquandjetourneaucoindelarue…pourtombersurunecamionnetteenpannequibloquelepassage.Jevaisperdredutemps!J’ouvrelafenêtrepourdemandercequiluiarriveautypequis’approche.

–Bonjour,vousavezunproblème?–Non,c’esttoiquiaunproblème.–Comm…?

Jen’aipasletempsderéagirqu’ilouvrelaporteetmetientparlescheveuxavecunepoignedefer.Deuxautrestypessurgissentdelacamionnette.Lepremiervients’asseoiràcôtédemoietl’autreàl’arrière,àcôtédeZoé.J’essaiedemedébattreparréflexe,maisceluiquimetientresserresapriseetlesdeuxautressortentdescouteauxàcrand’arrêtqu’ilsouvrentenjouantavecd’unairpervers.

–Vousmefaitesmal!–Tulafermes,tutecalmesettoutirabien.Onn’apasenvied’êtreobligésdeseservirdeça.–Quemevoulez-vous?–Laferme,ont’adit!Détachetaceintureetsors.Ont’expliqueraenlieusûr.Pablovaconduire.

Donnetonportable.

Jefaiscequ’ilmedit.Iljetteleportablesurletrottoir.Personnenepourraplusmelocaliser.Leballetrecommence.Celuiquis’étaitglisséàcôtédemoiprendlevolantetl’autresortpourmemettreunbandeausurlesyeuxetmejeteràsaplace,àcôtédeZoéquicommenceàpleurnicher.

–Prendslamômesurtesgenouxetqu’ellelafermeaussi.–Elleestpetite…Commentvoulez-vous…etjenevoisplusrienenplus…–Débrouille-toietferme-la,ont’adit!

Cettefois,ilahurlé,effrayantZoé.Desportesclaquent,etondémarreàtoutevitesse.Toutçan’apas duré une minute. Je détache la petite tant bien que mal, dans le noir, et la serre contre moi.L’adrénaline, qui étaitmontée au début, redescend d’un coup. Il