6 la Maison du cil 1875 - 1959 7
De la révolution industrielle au CIL : les fondationsDes premières cités ouvrières à la création du Comité Interprofessionnel
du Logement, face à l’urgence de bâtir ou de reconstruire,
une politique nationale du logement social prend corps.
Le Nord de la France, et le département de l’Aisne en particulier,
sont en première ligne.
DANS L’AISNE ET DANS LE MONDE
1900 La première ligne de métro est ouverte à Paris
1901 Naissance à Aubenton de l’aviateur Jean Mermoz, qui effectuera la première traversée France-Amérique du Sud en 1930
1912 Le Titanic sombre dans l’Atlantique
1916 Guillaume Apollinaire est gravement blessé lors des batailles du Chemin des Dames
1926 Création de la société Le Bourget
1929 Jeudi noir : effondrement de Wall Street
1936 Jean-Paul Sartre enseigne la philosophie au lycée de Laon
1940 Le Général de Gaulle lance l’appel du 18 juin
1949 Lancement de la célèbre Mobylette
1957 La France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, l’Italie et les pays du Benelux signent le traité de Rome
1875 - 1959
6 la Maison du cil 1875 - 1959 7
De la révolution industrielle au CIL : les fondationsDes premières cités ouvrières à la création du Comité Interprofessionnel
du Logement, face à l’urgence de bâtir ou de reconstruire,
une politique nationale du logement social prend corps.
Le Nord de la France, et le département de l’Aisne en particulier,
sont en première ligne.
DANS L’AISNE ET DANS LE MONDE
1900 La première ligne de métro est ouverte à Paris
1901 Naissance à Aubenton de l’aviateur Jean Mermoz, qui effectuera la première traversée France-Amérique du Sud en 1930
1912 Le Titanic sombre dans l’Atlantique
1916 Guillaume Apollinaire est gravement blessé lors des batailles du Chemin des Dames
1926 Création de la société Le Bourget
1929 Jeudi noir : effondrement de Wall Street
1936 Jean-Paul Sartre enseigne la philosophie au lycée de Laon
1940 Le Général de Gaulle lance l’appel du 18 juin
1949 Lancement de la célèbre Mobylette
1957 La France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, l’Italie et les pays du Benelux signent le traité de Rome
1875 - 1959
Département de l’Aisne, gravure extraite de l’Atlas National Illustré
de Victor Levasseur, Paris 1876.
Berceau de l’histoire de France, entre Île-de-France et Champagne, le département de l’Aisne est un assemblage de territoires aux identités régionales multiples. Traversée de nombreux cours d’eau, entre collines
et plateaux, l’Aisne fut longtemps une terre profondément rurale et les cultures de céréales et de betteraves y ont façonné le paysage. Mais elle fut aussi une terre de villes prospères. Ainsi, au XIXe siècle,
autour de Laon, Saint-Quentin, Vervins, Soissons ou Château-Thierry s’implantèrent des manufactures prestigieuses : textile, travail du verre
ou des métaux ont assuré la pénétration du travail industriel dans les campagnes. Enfin, comme l’illustre la carte de Victor Levasseur,
ingénieur géographe du milieu du XIXe siècle, l’Aisne a vu naître bon nombre de personnages célèbres…
Le familistère de Guise. Fermé sur lui-même, le “Palais social” est déjà critiqué lors de l’Exposition Universelle de 1889. En effet, on développe
déjà différents modèles visant à enraciner la famille dans un foyer individuel.
R emonter aux origines de La Maison du CIL, c’est retrouver les
racines de l’histoire industrielle de notre pays. Celle qui conduit à la
seconde moitié du XIXe siècle, période pendant laquelle le mouve-
ment de l’habitat social a creusé son lit et trouvé de nombreux parti-
sans. C’est le temps des précurseurs marqué par la force innovatrice
de quelques personnalités influentes, qui vont poser les bases de ce
qui constitue, encore aujourd’hui, l’armature du logement social et
du système d’aide à la construction. Il est habituel de faire remonter
la politique du logement en France à la loi du 13 avril 1850 sur
l’assainissement des logements insalubres. De fait, il s’agit de la pre-
mière intervention de l’État pour tenter de remédier à des conditions
d’habitation dramatiques. Certes, les effets de cette loi restèrent limi-
tés, mais avec elle l’idée que les autorités devaient s’impliquer dans
la question sociale avait fait son chemin. Louis Napoléon Bonaparte
en était l’un des principaux défenseurs, allant jusqu’à consacrer une
partie de sa fortune personnelle à l’édification des premiers loge-
ments ouvriers à Paris.
Mais, en ces temps de révolution industrielle, c’est à l’initiative privée que revient l’essentiel
de la production de logements destinés aux ouvriers. Dans l’Aisne, en particulier, l’industrie
textile amorce le mouvement. Le secteur se concentre dans le nord-ouest du départe-
ment où sont regroupés 70 % de ses effectifs : à Saint-Quentin, Bohain-en-Vermandois,
Fresnoy-le-Grand et Beaurevoir notamment. En 1896, le textile, alors à son apogée,
rassemble plus de 28 000 emplois. Au niveau national, la dynamique de construction
s’orga nise entre 1885 et 1894. Banquiers et patrons de plusieurs villes de France fran çai ses
créent les premières grandes sociétés immobilières à vocation sociale. Ils se réunissent
à Paris en 1889 dans le cadre de l’Exposition universelle sous l’appellation d’habitations
à bon marché (HBM) avant la création l’année suivante de la Société Française des
HBM. Sa vocation : être un centre d’information, un groupe de pression, une agence
de renseignement et une pourvoyeuse de plans, de baux, de modèles et de statuts pour
les sociétés d’habitation. De 1894 à 1912, le système français du logement social pose
Le système français du logement social pose ses fondements institutionnels
8 la Maison du cil 1875 - 1959 9
GoDIn, LE GénIAL VISIonnAIrE
DAnS L’AISnE AGrICoLE, SAInT-QUEnTIn, UnE CAPITALE InDUSTrIELLE
En 1840, l’industriel Jean-Baptiste Godin a l’idée de substituer
un poêle en fonte émaillée au traditionnel poêle en tôle.
“L’histoire enregistrera nos succès”, prédisait le génial inven-
teur en 1860. Il avait raison : Godin est devenu une marque
de référence. Mais plus encore que cette innovation, son
nom est associé à une œuvre majeure : le familistère de
Guise. Cet ensemble de trois immeubles fixera le cadre des
différentes campagnes de construction menées entre 1860 et
1880. Près de 350 appartements sont proposés en location
aux familles des employés de l’usine Godin. Plus de 1 200
habitants vivent alors au “Palais social”, véritable préfigura-
tion du logement collectif en France.
Avec le XIX e siècle et l’arrivée du coton, l’économie
textile entre dans le monde moderne : grandes usines
de brique, main-d’œuvre arrachée aux campagnes,
cités ouvrières des faubourgs. Saint-Quentin prend
son visage de cité industrielle avec ses usines aux
noms bientôt prestigieux : Touron et Vandendriessche,
tissages Daltroff, Sidoux... Alors que l’expansion de la
filature est contenue dans les grands centres lillois et
vosgiens, le tissage essaime à Saint-Quentin. La ville se
hisse au niveau de la capitale industrielle d’une Aisne
agricole où émergent également des sites comme
Bohain, Étreux, Guise. Tous ces établissements tra-
vaillent pour Paris et la mode, toujours prêts à explorer
les nouveaux genres, à marier toutes les fibres. Matisse
y trouve son inspiration, Coco Chanel et Paul Poiret s’y
approvisionnent, notamment chez les tissus Rodier et
ses pièces tissées en exclusivité. Les guerres, l’évolution
de la mode, l’émergence de la concurrence étrangère
auront raison des splendeurs de la Belle Époque.
Département de l’Aisne, gravure extraite de l’Atlas National Illustré
de Victor Levasseur, Paris 1876.
Berceau de l’histoire de France, entre Île-de-France et Champagne, le département de l’Aisne est un assemblage de territoires aux identités régionales multiples. Traversée de nombreux cours d’eau, entre collines
et plateaux, l’Aisne fut longtemps une terre profondément rurale et les cultures de céréales et de betteraves y ont façonné le paysage. Mais elle fut aussi une terre de villes prospères. Ainsi, au XIXe siècle,
autour de Laon, Saint-Quentin, Vervins, Soissons ou Château-Thierry s’implantèrent des manufactures prestigieuses : textile, travail du verre
ou des métaux ont assuré la pénétration du travail industriel dans les campagnes. Enfin, comme l’illustre la carte de Victor Levasseur,
ingénieur géographe du milieu du XIXe siècle, l’Aisne a vu naître bon nombre de personnages célèbres…
Le familistère de Guise. Fermé sur lui-même, le “Palais social” est déjà critiqué lors de l’Exposition Universelle de 1889. En effet, on développe
déjà différents modèles visant à enraciner la famille dans un foyer individuel.
R emonter aux origines de La Maison du CIL, c’est retrouver les
racines de l’histoire industrielle de notre pays. Celle qui conduit à la
seconde moitié du XIXe siècle, période pendant laquelle le mouve-
ment de l’habitat social a creusé son lit et trouvé de nombreux parti-
sans. C’est le temps des précurseurs marqué par la force innovatrice
de quelques personnalités influentes, qui vont poser les bases de ce
qui constitue, encore aujourd’hui, l’armature du logement social et
du système d’aide à la construction. Il est habituel de faire remonter
la politique du logement en France à la loi du 13 avril 1850 sur
l’assainissement des logements insalubres. De fait, il s’agit de la pre-
mière intervention de l’État pour tenter de remédier à des conditions
d’habitation dramatiques. Certes, les effets de cette loi restèrent limi-
tés, mais avec elle l’idée que les autorités devaient s’impliquer dans
la question sociale avait fait son chemin. Louis Napoléon Bonaparte
en était l’un des principaux défenseurs, allant jusqu’à consacrer une
partie de sa fortune personnelle à l’édification des premiers loge-
ments ouvriers à Paris.
Mais, en ces temps de révolution industrielle, c’est à l’initiative privée que revient l’essentiel
de la production de logements destinés aux ouvriers. Dans l’Aisne, en particulier, l’industrie
textile amorce le mouvement. Le secteur se concentre dans le nord-ouest du départe-
ment où sont regroupés 70 % de ses effectifs : à Saint-Quentin, Bohain-en-Vermandois,
Fresnoy-le-Grand et Beaurevoir notamment. En 1896, le textile, alors à son apogée,
rassemble plus de 28 000 emplois. Au niveau national, la dynamique de construction
s’orga nise entre 1885 et 1894. Banquiers et patrons de plusieurs villes de France fran çai ses
créent les premières grandes sociétés immobilières à vocation sociale. Ils se réunissent
à Paris en 1889 dans le cadre de l’Exposition universelle sous l’appellation d’habitations
à bon marché (HBM) avant la création l’année suivante de la Société Française des
HBM. Sa vocation : être un centre d’information, un groupe de pression, une agence
de renseignement et une pourvoyeuse de plans, de baux, de modèles et de statuts pour
les sociétés d’habitation. De 1894 à 1912, le système français du logement social pose
Le système français du logement social pose ses fondements institutionnels
8 la Maison du cil 1875 - 1959 9
GoDIn, LE GénIAL VISIonnAIrE
DAnS L’AISnE AGrICoLE, SAInT-QUEnTIn, UnE CAPITALE InDUSTrIELLE
En 1840, l’industriel Jean-Baptiste Godin a l’idée de substituer
un poêle en fonte émaillée au traditionnel poêle en tôle.
“L’histoire enregistrera nos succès”, prédisait le génial inven-
teur en 1860. Il avait raison : Godin est devenu une marque
de référence. Mais plus encore que cette innovation, son
nom est associé à une œuvre majeure : le familistère de
Guise. Cet ensemble de trois immeubles fixera le cadre des
différentes campagnes de construction menées entre 1860 et
1880. Près de 350 appartements sont proposés en location
aux familles des employés de l’usine Godin. Plus de 1 200
habitants vivent alors au “Palais social”, véritable préfigura-
tion du logement collectif en France.
Avec le XIX e siècle et l’arrivée du coton, l’économie
textile entre dans le monde moderne : grandes usines
de brique, main-d’œuvre arrachée aux campagnes,
cités ouvrières des faubourgs. Saint-Quentin prend
son visage de cité industrielle avec ses usines aux
noms bientôt prestigieux : Touron et Vandendriessche,
tissages Daltroff, Sidoux... Alors que l’expansion de la
filature est contenue dans les grands centres lillois et
vosgiens, le tissage essaime à Saint-Quentin. La ville se
hisse au niveau de la capitale industrielle d’une Aisne
agricole où émergent également des sites comme
Bohain, Étreux, Guise. Tous ces établissements tra-
vaillent pour Paris et la mode, toujours prêts à explorer
les nouveaux genres, à marier toutes les fibres. Matisse
y trouve son inspiration, Coco Chanel et Paul Poiret s’y
approvisionnent, notamment chez les tissus Rodier et
ses pièces tissées en exclusivité. Les guerres, l’évolution
de la mode, l’émergence de la concurrence étrangère
auront raison des splendeurs de la Belle Époque.
30 la Maison du cil 1959 - 1980 31
Le programme Chalandon à Gauchy, au Moulin de Tous Vents, une des réalisations du Toit Familial.
Avec le V e plan (1966-1970), l’engagement public s’intensifie. La fusion, en 1966, du
ministère des Travaux publics et des Transports et du ministère de la Construction donne
naissance à un grand ministère de l’Équipement et du Logement sous l’égide d’Edgar
Pisani. Il dispose désormais de directions départementales afin de superviser, voire d’ins-
truire les dossiers d’urbanisme. La loi d’orientation foncière crée de nouveaux instruments
d’aménagement adaptés aux nouvelles réalités : les SDAU (Schémas directeurs d’amé-
nagement urbain), les POS (Plans d’occupation des sols) et les ZAC (Zones d’aménage-
ment concerté). Enfin, la création, la même année, de la CP HLM, la Caisse de prêts aux
organismes d’HLM, réforme en profondeur le financement de la construction sociale. La
SA d’HLM poursuit d’ambitieux programmes de construction d’immeubles collectifs.
À Saint-Quentin, les 160 premiers loge-
ments du futur quartier Europe sont occu-
pés le 1er avril 1969. Parallèlement, de
nombreuses communes rurales lui con-
fient la réali sation de petits immeubles
collec tifs qui permettent à ces dernières de
maintenir leurs équipements publics. C’est
justement l’objet du premier grand débat
national, organisé par Olivier Guichard,
alors ministre du Logement, qui évoque
pour la première fois, non plus la quantité
de logements, mais la qualité et le cadre
de vie. Car les premières critiques pleuvent.
Si l’on a bâti des murs et des toits, on a
omis de construire les infrastructures et les
équipements qui vont de pair. Une lacune
que les politiques successives peineront
à combler. Dans la presse, à la télévision,
on dénonce le gigantisme, on commence
à parler de “sarcellite” pour évoquer le
mal des grands ensembles et la montée
de l’insécurité dans les “villes nouvelles”.
Cet écueil, le département de l’Aisne avait
su l’éviter, privilégiant les constructions à
taille humaine et traitant les affaires par
petites unités.
Devant l’importance de ce vent nouveau,
les pouvoirs publics, l’État et les collectivi-
tés locales réagissent très vite. Poussées
par une politique du logement qui entre-
temps a changé et incite les Français à
accéder à la propriété, aspiration d’ailleurs
largement partagée, les classes moyennes
se tournent vers la maison individuelle.
Face à l’évolution des besoins, la SA d’HLM
avait anticipé et participé dès 1966 à la
création d’une société coopérative, le Toit
Familial. Une initiative qui permet à ces
sociétés de répondre aux attentes de pro-
priété de la population. En 1969, “après de
longues réflexions”, le Toit Familial participe
au Concours international de la maison
individuelle, lancé par Albin Chalandon,
alors ministre de l’Équipement. “Un risque
considérable qui nécessitait d’importants
efforts de trésorerie”, dira plus tard Henri
Morrier, directeur général. Un tournant
pour le groupe qui, après quinze années
de réalisation pour l’essentiel d’immeubles
en location, se lance dans la construction
de maisons individuelles. Le concours
Chalandon et ses 400 logements com-
mercialisés chaque année pendant trois
ans ont fortement marqué cette période.
Les premières “Chalandonnettes”, réali-
sées à Courmelles, Saint-Quentin (Cépy),
Gauchy ou Villers-Cotterêts (quartier de
Pisseleux), permettront ainsi à bon nombre
de foyers d’acquérir une maison individuelle
à très bon marché sous le régime de la
Des mécanismes de plus en plus complexes
Nouveau produit, clientèle nouvelle
Activité de la construction en France en 1969, dans 35 ans d’urbanisme, Confédération Française pour l’Habitation et l’Urbanisme, 1981.
Les Blanchards, un programme de constructions réalisé par
la SA d’HLM à Château-Thierry.
Dès la fin des années 1960, l’échec des politiques de préfabrication
lourde et le rejet des grands ensembles conduisent à un regain
d’intérêt en faveur de l’habitat individuel. Albin Chalandon,
ministre de la Construction, se fait en particulier le défenseur
de cette tendance et lance, le 31 mars 1969, un grand concours
de la maison individuelle. Un concours qui donne lieu à
des recherches architecturales parfois originales et ingénieuses,
et à la mise au point de formules intermédiaires entre habitat
pavillonnaire classique et logement collectif : pavillons jumelés,
constructions en bandes de maisons sur plusieurs niveaux…
Le modèle qui porte le nom du ministre en exercice devient
l’illustration d’un changement de politique.
LeS “CHALAndonneTTeS” en VedeTTe
30 la Maison du cil 1959 - 1980 31
Le programme Chalandon à Gauchy, au Moulin de Tous Vents, une des réalisations du Toit Familial.
Avec le V e plan (1966-1970), l’engagement public s’intensifie. La fusion, en 1966, du
ministère des Travaux publics et des Transports et du ministère de la Construction donne
naissance à un grand ministère de l’Équipement et du Logement sous l’égide d’Edgar
Pisani. Il dispose désormais de directions départementales afin de superviser, voire d’ins-
truire les dossiers d’urbanisme. La loi d’orientation foncière crée de nouveaux instruments
d’aménagement adaptés aux nouvelles réalités : les SDAU (Schémas directeurs d’amé-
nagement urbain), les POS (Plans d’occupation des sols) et les ZAC (Zones d’aménage-
ment concerté). Enfin, la création, la même année, de la CP HLM, la Caisse de prêts aux
organismes d’HLM, réforme en profondeur le financement de la construction sociale. La
SA d’HLM poursuit d’ambitieux programmes de construction d’immeubles collectifs.
À Saint-Quentin, les 160 premiers loge-
ments du futur quartier Europe sont occu-
pés le 1er avril 1969. Parallèlement, de
nombreuses communes rurales lui con-
fient la réali sation de petits immeubles
collec tifs qui permettent à ces dernières de
maintenir leurs équipements publics. C’est
justement l’objet du premier grand débat
national, organisé par Olivier Guichard,
alors ministre du Logement, qui évoque
pour la première fois, non plus la quantité
de logements, mais la qualité et le cadre
de vie. Car les premières critiques pleuvent.
Si l’on a bâti des murs et des toits, on a
omis de construire les infrastructures et les
équipements qui vont de pair. Une lacune
que les politiques successives peineront
à combler. Dans la presse, à la télévision,
on dénonce le gigantisme, on commence
à parler de “sarcellite” pour évoquer le
mal des grands ensembles et la montée
de l’insécurité dans les “villes nouvelles”.
Cet écueil, le département de l’Aisne avait
su l’éviter, privilégiant les constructions à
taille humaine et traitant les affaires par
petites unités.
Devant l’importance de ce vent nouveau,
les pouvoirs publics, l’État et les collectivi-
tés locales réagissent très vite. Poussées
par une politique du logement qui entre-
temps a changé et incite les Français à
accéder à la propriété, aspiration d’ailleurs
largement partagée, les classes moyennes
se tournent vers la maison individuelle.
Face à l’évolution des besoins, la SA d’HLM
avait anticipé et participé dès 1966 à la
création d’une société coopérative, le Toit
Familial. Une initiative qui permet à ces
sociétés de répondre aux attentes de pro-
priété de la population. En 1969, “après de
longues réflexions”, le Toit Familial participe
au Concours international de la maison
individuelle, lancé par Albin Chalandon,
alors ministre de l’Équipement. “Un risque
considérable qui nécessitait d’importants
efforts de trésorerie”, dira plus tard Henri
Morrier, directeur général. Un tournant
pour le groupe qui, après quinze années
de réalisation pour l’essentiel d’immeubles
en location, se lance dans la construction
de maisons individuelles. Le concours
Chalandon et ses 400 logements com-
mercialisés chaque année pendant trois
ans ont fortement marqué cette période.
Les premières “Chalandonnettes”, réali-
sées à Courmelles, Saint-Quentin (Cépy),
Gauchy ou Villers-Cotterêts (quartier de
Pisseleux), permettront ainsi à bon nombre
de foyers d’acquérir une maison individuelle
à très bon marché sous le régime de la
Des mécanismes de plus en plus complexes
Nouveau produit, clientèle nouvelle
Activité de la construction en France en 1969, dans 35 ans d’urbanisme, Confédération Française pour l’Habitation et l’Urbanisme, 1981.
Les Blanchards, un programme de constructions réalisé par
la SA d’HLM à Château-Thierry.
Dès la fin des années 1960, l’échec des politiques de préfabrication
lourde et le rejet des grands ensembles conduisent à un regain
d’intérêt en faveur de l’habitat individuel. Albin Chalandon,
ministre de la Construction, se fait en particulier le défenseur
de cette tendance et lance, le 31 mars 1969, un grand concours
de la maison individuelle. Un concours qui donne lieu à
des recherches architecturales parfois originales et ingénieuses,
et à la mise au point de formules intermédiaires entre habitat
pavillonnaire classique et logement collectif : pavillons jumelés,
constructions en bandes de maisons sur plusieurs niveaux…
Le modèle qui porte le nom du ministre en exercice devient
l’illustration d’un changement de politique.
LeS “CHALAndonneTTeS” en VedeTTe
50 la Maison du cil 1980 - 2000 51
De plus en plus, la SA d’HLM investit le cœur des villes et s’engage sur des opéra-
tions dans les centres urbains. Elle réalise des ensembles immobiliers comprenant à la
fois des locaux à usage d’habitation, des commerces ou des bureaux en location ou en
accession. À Laon, près de 20 000 m2 sont aménagés place de la Gare pour soutenir
le développement de la ville. Cette opération, réalisée en millièmes de copropriété en
volume, abrite la gare du Poma 2000 qui assure la liaison entre la ville basse et la ville
haute.
À Saint-Quentin, le transfert de l’hôpital du centre-ville à la périphérie débouche sur
l’opération des “Jardins de l’Hôtel-Dieu” : 23 000 m2 de plancher, 290 places de station-
nement en souterrain, 2 600 m2 de bureaux et commer ces et 105 logements équipés
en domotique. Le cabinet d’architecte Richard, en charge
du programme, associe urbanisme et environnement sur
un site historique où, depuis l’année 1295, hôpitaux et
hôtels-Dieu se sont succédé. Toujours à Saint-Quentin,
la résidence Voltaire est l’objet d’une opération de réno-
vation et de reconstruction intégrée. Dans les bourgs et
les villages également, la construction se marie avec la
réhabilitation et la sauvegarde du patrimoine local.
Une vocation d’aménageur urbain
“Le Voltaire”, ou un bel exemple de réhabilitation du bâti ancien au centre-ville de Saint-Quentin.
Résidence “Les Jardins de l’Hôtel-Dieu” à Saint-Quentin, 1992-1993.
Dessin et maquette du cabinet Richard pour la résidence
“Les Jardins de l’Hôtel-Dieu” à Saint-Quentin.
© Photos Richard.
Chantier des “Jardins de l’Hôtel-Dieu”, Saint-Quentin, 1990.
Une vaste opération qui nécessita pas moins de 45 000 m3 de terrassement
pour la réalisation de 105 logements, 400 places de parking (souterrain)
et 3 600 m2 de bureaux et commerces.
50 la Maison du cil 1980 - 2000 51
De plus en plus, la SA d’HLM investit le cœur des villes et s’engage sur des opéra-
tions dans les centres urbains. Elle réalise des ensembles immobiliers comprenant à la
fois des locaux à usage d’habitation, des commerces ou des bureaux en location ou en
accession. À Laon, près de 20 000 m2 sont aménagés place de la Gare pour soutenir
le développement de la ville. Cette opération, réalisée en millièmes de copropriété en
volume, abrite la gare du Poma 2000 qui assure la liaison entre la ville basse et la ville
haute.
À Saint-Quentin, le transfert de l’hôpital du centre-ville à la périphérie débouche sur
l’opération des “Jardins de l’Hôtel-Dieu” : 23 000 m2 de plancher, 290 places de station-
nement en souterrain, 2 600 m2 de bureaux et commer ces et 105 logements équipés
en domotique. Le cabinet d’architecte Richard, en charge
du programme, associe urbanisme et environnement sur
un site historique où, depuis l’année 1295, hôpitaux et
hôtels-Dieu se sont succédé. Toujours à Saint-Quentin,
la résidence Voltaire est l’objet d’une opération de réno-
vation et de reconstruction intégrée. Dans les bourgs et
les villages également, la construction se marie avec la
réhabilitation et la sauvegarde du patrimoine local.
Une vocation d’aménageur urbain
“Le Voltaire”, ou un bel exemple de réhabilitation du bâti ancien au centre-ville de Saint-Quentin.
Résidence “Les Jardins de l’Hôtel-Dieu” à Saint-Quentin, 1992-1993.
Dessin et maquette du cabinet Richard pour la résidence
“Les Jardins de l’Hôtel-Dieu” à Saint-Quentin.
© Photos Richard.
Chantier des “Jardins de l’Hôtel-Dieu”, Saint-Quentin, 1990.
Une vaste opération qui nécessita pas moins de 45 000 m3 de terrassement
pour la réalisation de 105 logements, 400 places de parking (souterrain)
et 3 600 m2 de bureaux et commerces.
66 la Maison du cil 2000 - 2010 67
À Villers-Cotterêts comme dans de nombreuses communes, La Maison du CIL produit des programmes d’aménagement
en étroite concertation avec les partenaires locaux.
L’aménagement de la ZAD du Parc à Villers-Cotterêts.
À Saint-Quentin, le fief historique de la société, ce discours prend une réso-
nance particulière. Pierre André, le sénateur-maire de la commune, se félicite
d’une telle colla boration. “Un programme de rénovation urbaine d’enver-
gure ne peut se réaliser sans partenaires. L’intérêt est de pouvoir compter
sur des interlocuteurs solides, réactifs et compétents. Les réalisations que
nous menons avec La Maison du CIL apportent beaucoup à la ville car
elles contribuent à la valorisation urbaine, notam ment par la résorption de
friches et d’îlots urbains délabrés. Bien sûr, et c’est là l’essentiel, elles appor-
tent beaucoup aux Saint-Quentinois car elles contribuent à l’amélioration de
leur cadre de vie. Je pense, par exemple, à la résidence “Debrez”, inaugurée
en juin 2009. Il s’agit là d’un ensemble de 133 logements à taille humaine,
privilégiant une qualité d’environnement et proche d’équipements scolaires
et sportifs. En effaçant les friches industrielles des anciens établissements
Debrez et Comoditex, le programme a métamorphosé l’environnement
urbain tout en s’intégrant parfaitement dans le quartier de Remicourt,
quartier agréable et verdoyant. Je pense également à la démolition des tours
de la rue Laplace,dans le quartier Europe. Ces tours, construites en 1975 et devenues
vétustes, seront remplacées par des logements individuels en locatif. Cette opération prend
place dans le projet d’aménagement global du quartier Europe, qui vise à rééquilibrer sa
composition sociale et à améliorer la qualité de vie de ses habitants.” Tout en conduisant
une politique de la ville, La Maison du CIL contribue à la vitalité de l’habitat en périphérie
des villes et dans des communes à forte demande comme Villers-Cotterêts, stimulée par
la proximité de la zone d’activité de Roissy-en-France.
Au cœur des villes et en périphérie
En 2009, La Maison du CIL fête son cinquantième anniversai-
re. L’événement est célébré au palais de Fervaques où plus de
200 personnalités sont réunies. Le président Bruno Bacro saisit
l’occasion pour affirmer le positionnement généraliste de
la société dans un environnement réglementaire en pleine
évolution. Parmi les autres temps forts de ce rendez-vous :
la projection d’un film retraçant le demi-siècle de la société,
ainsi qu’une série de tables rondes sur des thèmes essentiels
comme le développement durable dans le logement social.
CInquAnte Ans, L’âge De rAIson
Le 50e anniversaire de La Maison du CIL est célébré le 29 octobre 2009 au palais de Fervaques.
Discours de Bruno Bacro lors de la manifestation du 50e anniversaire de La Maison du CIL.
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À Villers-Cotterêts comme dans de nombreuses communes, La Maison du CIL produit des programmes d’aménagement
en étroite concertation avec les partenaires locaux.
L’aménagement de la ZAD du Parc à Villers-Cotterêts.
À Saint-Quentin, le fief historique de la société, ce discours prend une réso-
nance particulière. Pierre André, le sénateur-maire de la commune, se félicite
d’une telle colla boration. “Un programme de rénovation urbaine d’enver-
gure ne peut se réaliser sans partenaires. L’intérêt est de pouvoir compter
sur des interlocuteurs solides, réactifs et compétents. Les réalisations que
nous menons avec La Maison du CIL apportent beaucoup à la ville car
elles contribuent à la valorisation urbaine, notam ment par la résorption de
friches et d’îlots urbains délabrés. Bien sûr, et c’est là l’essentiel, elles appor-
tent beaucoup aux Saint-Quentinois car elles contribuent à l’amélioration de
leur cadre de vie. Je pense, par exemple, à la résidence “Debrez”, inaugurée
en juin 2009. Il s’agit là d’un ensemble de 133 logements à taille humaine,
privilégiant une qualité d’environnement et proche d’équipements scolaires
et sportifs. En effaçant les friches industrielles des anciens établissements
Debrez et Comoditex, le programme a métamorphosé l’environnement
urbain tout en s’intégrant parfaitement dans le quartier de Remicourt,
quartier agréable et verdoyant. Je pense également à la démolition des tours
de la rue Laplace,dans le quartier Europe. Ces tours, construites en 1975 et devenues
vétustes, seront remplacées par des logements individuels en locatif. Cette opération prend
place dans le projet d’aménagement global du quartier Europe, qui vise à rééquilibrer sa
composition sociale et à améliorer la qualité de vie de ses habitants.” Tout en conduisant
une politique de la ville, La Maison du CIL contribue à la vitalité de l’habitat en périphérie
des villes et dans des communes à forte demande comme Villers-Cotterêts, stimulée par
la proximité de la zone d’activité de Roissy-en-France.
Au cœur des villes et en périphérie
En 2009, La Maison du CIL fête son cinquantième anniversai-
re. L’événement est célébré au palais de Fervaques où plus de
200 personnalités sont réunies. Le président Bruno Bacro saisit
l’occasion pour affirmer le positionnement généraliste de
la société dans un environnement réglementaire en pleine
évolution. Parmi les autres temps forts de ce rendez-vous :
la projection d’un film retraçant le demi-siècle de la société,
ainsi qu’une série de tables rondes sur des thèmes essentiels
comme le développement durable dans le logement social.
CInquAnte Ans, L’âge De rAIson
Le 50e anniversaire de La Maison du CIL est célébré le 29 octobre 2009 au palais de Fervaques.
Discours de Bruno Bacro lors de la manifestation du 50e anniversaire de La Maison du CIL.
80 la Maison du cil 81
Depuis la création de la SA d’HLM du département de l’Aisne en 1959, notre société
n’a cessé de progresser. Son image a considérablement évolué mais son engage
ment demeure identique : offrir un habitat et un cadre de vie de qualité. Cet ouvrage
est le témoin de notre histoire et des idées âprement défendues par tous nos colla
borateurs. En dégageant les lignes de force de ces cinq décennies, l’épopée ainsi
retracée nous aide à mieux comprendre le passé, à décrypter le présent et à anticiper
le futur.
Des premiers projets locatifs jusqu’aux programmes de rénovation urbaine et aux
bâti ments à haute qualité environnementale, notre société s’est toujours affirmée
comme une force de proposition auprès des entreprises et des collectivités, privi
légiant l’écoute, le dialogue et la proximité. En cela, elle a constamment porté les
valeurs de nos précurseurs, perpétuant ainsi l’héritage de 1953 resté intact.
Nous pouvons être fiers des engagements passés de nos dirigeants, dont les noms
résonnent encore dans nos mémoires.
Mais nous sommes surtout attachés à l’avenir que nous voulons pour La Maison du
CIL, acteur engagé dans le développement économique régional et porté vers de
nouveaux pôles de croissance.
Dans cette perspective, notre ambition est multiple. Il s’agit d’abord de consolider
notre partenariat avec les entreprises et les collectivités. Nous voulons également
développer les programmes de construction en nous appuyant sur les synergies créées
entre les différentes entités de notre groupe. Les exigences actuelles nous conduisent
aussi à renforcer la qualité de service qui fonde la notoriété de notre société et à
étendre le périmètre de notre action vers les zones tendues, là où les besoins s’expri
ment avec acuité. Enfin, La Maison du CIL doit amplifier sa démarche dans une optique
de développement durable, amorcée depuis plusieurs années.
Face aux vastes chantiers qui s’ouvrent, nos équipes vont continuer à agir pleinement
et être source d’idées nouvelles pour prolonger l’œuvre humaine et sociale entreprise
il y a cinquante ans.
Des jalons pour l’avenir
Jean-André Charpentier,
directeur général de La Maison du CIL
Entre constructions, acquisitions et rapprochements,
l’histoire de La Maison du CIL nous aide à décrypter le présent
et à anticiper le futur.
Perspectives
80 la Maison du cil 81
Depuis la création de la SA d’HLM du département de l’Aisne en 1959, notre société
n’a cessé de progresser. Son image a considérablement évolué mais son engage
ment demeure identique : offrir un habitat et un cadre de vie de qualité. Cet ouvrage
est le témoin de notre histoire et des idées âprement défendues par tous nos colla
borateurs. En dégageant les lignes de force de ces cinq décennies, l’épopée ainsi
retracée nous aide à mieux comprendre le passé, à décrypter le présent et à anticiper
le futur.
Des premiers projets locatifs jusqu’aux programmes de rénovation urbaine et aux
bâti ments à haute qualité environnementale, notre société s’est toujours affirmée
comme une force de proposition auprès des entreprises et des collectivités, privi
légiant l’écoute, le dialogue et la proximité. En cela, elle a constamment porté les
valeurs de nos précurseurs, perpétuant ainsi l’héritage de 1953 resté intact.
Nous pouvons être fiers des engagements passés de nos dirigeants, dont les noms
résonnent encore dans nos mémoires.
Mais nous sommes surtout attachés à l’avenir que nous voulons pour La Maison du
CIL, acteur engagé dans le développement économique régional et porté vers de
nouveaux pôles de croissance.
Dans cette perspective, notre ambition est multiple. Il s’agit d’abord de consolider
notre partenariat avec les entreprises et les collectivités. Nous voulons également
développer les programmes de construction en nous appuyant sur les synergies créées
entre les différentes entités de notre groupe. Les exigences actuelles nous conduisent
aussi à renforcer la qualité de service qui fonde la notoriété de notre société et à
étendre le périmètre de notre action vers les zones tendues, là où les besoins s’expri
ment avec acuité. Enfin, La Maison du CIL doit amplifier sa démarche dans une optique
de développement durable, amorcée depuis plusieurs années.
Face aux vastes chantiers qui s’ouvrent, nos équipes vont continuer à agir pleinement
et être source d’idées nouvelles pour prolonger l’œuvre humaine et sociale entreprise
il y a cinquante ans.
Des jalons pour l’avenir
Jean-André Charpentier,
directeur général de La Maison du CIL
Entre constructions, acquisitions et rapprochements,
l’histoire de La Maison du CIL nous aide à décrypter le présent
et à anticiper le futur.
Perspectives
Voilà plus de cinquante ans que La Maison du
CIL œuvre en faveur du logement social. Ce livre
restitue la vision des hommes qui ont fait et font
encore La Maison du CIL, la force et la moder-
nité de leurs propositions. Il rappelle les grandes
étapes du développement de cet organisme,
de l’acte fondateur du 16 janvier 1959 signé
par une poignée de décideurs avant-gardistes
jusqu’aux initiatives décisives engagées à l’aube
de ce troisième millénaire.
Bâtisseur d’AvenirDe la SA d’HLM à LA MAiSon Du CiL
50 ans d’habitat social
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