CE QUE LES TRIBUNAUX APPELLENT « FAUTE EN » CHIRURGIE
PR CHRISTINE GRAPIN-DAGORNO CHIRURGIEN PÉDIATRE
DOCTEUR EN DROIT
LA « FAUTE » ?
Définition juridique
« Manquement à une obligation préexistante »
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LA « FAUTE » EN CHIRURGIE ?
• C’est u e faute de DROIT COMMUN
– CODE CIVIL, CODE PÉNAL
• Mais il existe des textes spécifiques qui précisent les devoirs des médecins (Code de Déontologie, loi Kouchner, Code de la Santé Publique: CSP)
• Rôle important de la jurisprudence
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PRINCIPE FONDATEUR DE LA RESPONSABILITÉ MÉDICALE
ARRÊT MERCIER 1936
• La relation médecin-malade est un CONTRAT
• La responsabilité médicale est CONTRACTUELLE avec OBLIGATION DE MOYENS
• Le médecin doit fournir « des soins attentifs, consciencieux, et conformes aux données acquises de la science »
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Depuis 2002 (loi Kouchner)
1. Il existe un é a is e d’i de isatio e t a-judiciaire : Commissions de Conciliation et d’I de isatio CCI
– L’a e t est is su la CONCILIATION
– P ise e o pte de l’ALÉA THÉRAPEUTIQUE
– Re ou s au TRIBUNAUX e as d’é he
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Depuis 2002 (loi Kouchner)
2. La responsabilité du chirurgien ne peut être
engagée u’e as de faute
– Abandon de la notion de responsabilité sans faute
– Les professionnels de sa té « ne sont responsables
des conséquences do agea les d’a tes de prévention, de diagnostic ou de soins u’e as de faute »
• Exceptions: infection nosocomiale, produits de santé
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PRINCIPAUX TYPES DE FAUTES RELEVÉES DANS LA JURISPRUDENCE
MANQUEMENT AU DEVOIR D’HUMANISME MÉDICAL
L’i fo atio édi ale
La nécessité du consentement
• Il s’agit d’une obligation éthique, déontologique et légale
• PRINCIPE: l’inviolabilité du corps humain
• « Il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité thérapeutique pour la personne. Le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement » (art. 16-3 et 16-1 du Code Civil
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DÉFAUT D’INFORMATION
• Principe CONSTITUTIONNEL de sauvegarde de la dignite de la personne
• CODE DE DÉONTOLOGIE MÉDICALE
– « Le édecin doit la personne qu'il examine, qu'il soigne ou qu'il
conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les
investigations et les soins qu'il lui propose »
• LOI KOUCHNER
– « Toute personne a le droit d'tre i fo ée sur son état de sa té. Cette
information porte sur les diférentes investigations, traitements ou actions
de p évention qui sont p oposés, leur utilite , leur urgence éventuelle,
leurs o séquences, les risques f équents ou graves normalement
p évisibles qu'ils comportent »
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CONTENU DE L’INFORMATION
• Le chirurgien doit expliquer
• les différentes modalités thérapeutiques
• le risque de complications
• les conséquences normales, les complications possibles
• L’i fo atio doit porter sur TOUS LES RISQUES, même les
plus graves et les plus exceptionnels.
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• « la seule circonstance que les risques ne se réalisent
u’e eptio elle e t e dispe se pas les p ati ie s de leur obligation » (Cass. Civ. 1e, 8 avril 2010)
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L’information doit être
• Claire : compréhensible
• Loyale : ne pas tenter de convaincre à tout prix, ne pas mentir
• Appropriée : il faut s’adapter au degré de compréhension du malade
• Une information qui n’est pas claire, loyale et appropriée peut être assimilée à un défaut d’information
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LA PREUVE DE L’INFORMATION
Arrêt HÉDREUL 1997
• « le médecin est tenu d’une obligation d’information
vis-à-vis de son patient et il lui incombe de prouver qu’il a exécuté cette obligation »
article 1315 Code Civil :
• « Celui qui est légalement ou contractuellement tenu
d’une obligation particulière d’information doit
apporter la preuve de l’exécution de cette obligation »
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MOYENS DE PREUVE
• « TOUT MOYEN » (a t Guyomar 1997), loi Kouchner
• ORALE ou ÉCRITE
• FAISCEAU DE PREUVES:
– Courriers, nombre d’e t etie s, délai de éflexion…
• DOSSIER MÉDICAL e tio a t l’i fo atio et so o te u
• BROCHURES mais : ATTENTION: Le chirurgien doit s’assu e ue l’i fo atio a éte comprise
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Exemples
• Sd de la ueue de heval da s les suites d’u e arthrodèse vertébrale. Information prouvée par nombreuses consultations, courriers au MT
– (Cass.12/06/2012)
• Nécrose cutanée plastie abdominale, consentement signé. Information jugée insuffisante car on ne mentionnait pas le contenu de l’i fo atio – (Cass 6/02/2013)
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Le chirurgien doit lui-même fournir l’i fo atio
• « l’i fo atio incombe tout professionnel de
sa té dans le cadre de ses o pétences et dans le
respect des gles qui lui sont applicables
• Il ne peut se décharger de l’o ligatio su u o f re
(Civ. re 31 mai 2007)
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LA RÉPARATION d’u défaut d’i fo atio
• 1. Notio de PERTE DE CHANCES d’évite l’i te ve tio pa u e i fo atio app op iée
– Le patient doit établir la p euve u’il au ait e o é l’i te ve tio s’il avait été ieu i fo é
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LA RÉPARATION d’u défaut d’i fo atio
• 2. Déso ais: il s’agit d’u préjudice autonome p éjudi e d’i p épa atio
– «Toute pe so e a le d oit d’ tre i fo ée. Le non-respect du devoi d’i fo atio ui e découle, cause celui au uel l’i fo atio était légalement due un p éjudice que le juge ne peut laisser sans éparation »
– Cass. Civ. 1ère, 03 juin 2010
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LE DÉFAUT D’INFORMATION : FAUTE CIVILE, MAIS NON PÉNALE
• « Attendu que l’avertissement préalable constituant
une obligation professionnelle d’ordre général,
antérieur à l’intervention médicale ou chirurgicale et
distincte de celle-ci ne saurait justifier une poursuite
devant la juridiction répressive .. »
– Cass. Civ. 1 17 novembre 1969
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FAUTES TECHNIQUES
LA FAUTE TECHNIQUE 1. « Obligation de MOYENS », CSP
• Les soins doivent être attentifs, de qualité,
appropriés, conformes aux connaissances médicales
actuelles, garantissant la meilleure sécurité possible,
sans risque disproportionné (rapport
risque/bénéfice)
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LA FAUTE TECHNIQUE 2. L’e eu de diagnostic
• Le hi u gie est te u d’u e o ligatio de o e s et non de ésultat
• Erreur non fautive quand le diagnostic est
édicalement difficile et que tous les moyens ont
été is e œuv e
– Civ. re mai , Cass. re, 4 mai 2012
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• En revanche: Fautive
– Lorsque le diagnostic pouvait tre établi, sans retard, en faisant les examens écessaires
• Cass.civ.1, 25.06.2009
– En cas de égligence, défaut d’atte tio , d’i adaptatio des o e s te h i ues e plo és ou toute autre manquement l’o ligatio s d’agi o fo ément aux do ées de la science ».
• TGI Bobigny 28 mars 2014
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LA FAUTE TECHNIQUE 3. L’i di atio opé atoi e
• CSP: Article L. 1110-5 : le patient est en droit de recevoir les soins les plus app op iés son état, rapport risque/ bénéfice, qualité, sécurité
– Intervention de chirurgie bariatrique, indication jugée inadéquate pour une intervention grave et non dépourvue de risques
• CA Rennes 14 mai 2014
– Utilisatio d’u e te h i ue jugée « trop risquée »
• Civ re 20/01/2011
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LA FAUTE TECHNIQUE 4. Liée au matériel
• Oubli de o ps ét a ge ha p, i st u e t…
– TGI Paris 5/12/2011, TGI Verdun 12/04/2012
• P é autio s d’e ploi d’u dési fe ta t i fla a le: Embrasement du patient
– TGI Lyon 14/11/2011
• Obligation de o t ler son atériel avant le début de l’i te ve tio
– CA Metz 9/04/2013
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LA FAUTE TECHNIQUE 5. Maladresse
• « u e alad esse o stitue u e faute, sa s u’il ait lieu de s’i te oge su sa g avité ou su so aléa »
– Cass. civ. 1, 7 janvier 1997
• « la responsabilité du praticien était engagée dès lors que
la réalisation de l'opération n'impliquait pas l'atteinte de
l'organe »
– Cass. civ. 1, 23.05.2000
• « obligation de p écision du geste chirurgical »
– Civ. re 9/04/2001
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LA FAUTE TECHNIQUE . Lésio d’u o ga e de voisi age
• « l’attei te, par un chirurgien, un organe ou une partie du corps du patient que son intervention
’i pli uait pas, est fautive en l’a se e de p euve qui lui incombe d’u e a o alie e da t l’attei te i évitable ou la su ve a e d’u is ue i hérent cette intervention qui ne pouvant tre at ise, elverait de l’aléa thérapeutique ».
– Cassation (visa 1315 c.civ. + L.1142-1 I)
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LA FAUTE TECHNIQUE 7. Erreur fautive
• « Constitue de la part d’un chirurgien une
imprudence fautive dont il doit réparation la décision
de pratiquer au cours de l’excision d’un fibrome
l’ablation d’une masse rétropéritonéale non
décelée jusqu’alors, et qui s’est révélée être le rein
gauche de la patiente »
– Paris 17 juin 1988
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DÉFAUT DE SURVEILLANCE POST-OPÉRATOIRE
• Arrêt Farçat
– « En tant que chirurgien, il reste tenu d’une obligation générale de prudence et de diligence, et il convient de chercher si le chirurgien n’aurait pas dû s’assurer que le malade restait sous la surveillance d’une personne qualifiée, alors que l’arrêt cardio-respiratoire du patient s’était produit quand l’infirmière l’avait laissé seul dans la chambre »
• Cass. 30 mai 1986
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DEVOIR D’ÉQUIPE
• « Lo s ue des éde i s i te vie e t au sei d’u e é uipe édi ale su u pied d’égalité, il e t e do dans la responsabilité personnelle de chacun, en
ve tu du p i ipe de l’i dépe da e p ofessio elle, de veiller à ce que leur confrère assume
effectivement son rôle »
– article R.4127-64 du CSP
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LA FAUTE PENALE
Faute pénale
• Elle est recherchée en cas de plainte au pénal
(exceptionnel)
• Il s’agit le plus souve t le do age est t s g ave (décès)
• La faute est alors définie par le Code Pénal et le CSP
(règlementations avec sanctions pénales)
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Faute pénale médicale
• Le plus souve t il s’agit de fautes inconscientes , non intentionnelles
• « Attei te i volo tai e la vie ou l’i tég ité de la personne »
– « maladresse, imprudence, inattention, négligence, ou manquement à une obligation de sécurité imposée par la loi ou le règlement »
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Attention !
• Manque de surveillance post-opératoire
• Connaissance insuffisante du dossier
• No p ise e o pte des ésultats d’e a e s p é- ou post-opératoires (bactério, adio…
• Cela peut conduire à
• Erreur de côté
• Choc septique
• Décès post-opératoire
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Exemple: Négligence
• « est responsable de négligence le chirurgien qui n’a
pas, avant l’opération, pris les précautions
nécessaires pour que l’opéré soit à jeun »
– Trib.corr. Paris 4 mars 1970
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Exemple: Refus de se déplacer
• refus d’un chirurgien de garde de se déplacer pour examiner une blessée par balle qui décédera des suites du retard de soins
– Cass crim 25 mai 1982
• refus d’un obstétricien de se rendre au chevet d’une parturiente
– Cass crim , 2 avril 1992
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Faute pénale à l’hôpital
• Fautes « d’organisation »
– Reta ds, a se es…
– Mauvaise organisation du service, de l’activité, des ga des…
– Mauvaise gestion du personnel
– Hospitalisatio d’u alade da s u se vi e inadéquat faut de place
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Faute et erreur en matière pénale
• « l’erreur de diagnostic ne constitue pas en elle-même
une faute pénalement punissable, dès lors u’elle s’explique par la complexité de l’équivoque des
symptômes, la difficulté de leur constatation et de leur
interprétation »
– Amiens, 30 janvier 1990, confirmé par Crim. 17 janvier
1991
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Faute individuelle ou collective ?
• Actuellement: la faute est le plus souvent définie de
façon INDIVIDUELLE
• Or
– a plupart des fautes sont SYSTÉMIQUES: font
intervenir des process et non des comportements
individuels
– Possibilité de PRÉVENTION : GESTION DES RISQUES
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ACCIDENT
FAUTE
ERREUR
ERREURS SUCCESSIVES → ACCIDENT
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ERREUR
ERREUR
ERREUR
ERREUR
ERREUR FAUTE
DECES
CONCLUSION
• La plupart des FAUTES sont évitables
• La plupart des ACCIDENTS sont évitables par la
ise e pla e d’u e GESTION DES RISQUES
• LA « FAUTE » EST L’INSUFFISANCE DE GESTION DES RISQUES
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