AXE 3 : ORGANISATION DES FILIERES ET
VALORISATION DES PRODUITS AGRICOLES
PROGRAMME 3.1. : DYNAMIQUE DES FILIERES COTONNIERES
D'AFRIQUE CENTRALE FACE AU CONTEXTE GLOBAL ET LOCAL
DIAGNOSTIC DU MECANISME DE FINANCEMENT DE
LA RECHERCHE-DEVELOPPEMENT AU SEIN DE LA
FILIERE COTONNIERE CENTRAFRICAINE
Rapport d’étude
David KADEKOY-TIGAGUE Correspondant National
Bernard HAMADOU BELLO Chercheur
Mars 2007
lalalaladededede
APPUI A LA RECHERCHE REGIONALE POUR LE DEVELOPPEMENT
DURABLE DES SAVANES D’AFRIQUE CENTRALE
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TABLE DES MATIERES
LISTE DES ABREVIATIONS ............................................................................................................................ 3
RESUME ............................................................................................................................................................... 4
ABSTRACT - DIAGNOSIS OF THE MECHANISM OF FINANCING THE RESEARCH AND DEVELOPMENT IN CENTRAL AFRICAN COTTON SECTOR ...... ........................................................... 4
I. INTRODUCTION ............................................................................................................................................. 6
II. OBJECTIFS DE L’ETUDE ............................................................................................................................ 7
2.1. OBJECTIF GENERAL DU PROGRAMME ............................................................................................................ 7
2.2. OBJECTIFS DU PROJET ................................................................................................................................... 7
2.3. OBJECTIFS SPECIFIQUES DE L’ETUDE ............................................................................................................ 8
III. METHODOLOGIE ........................................................................................................................................ 8
3.1. APPROCHE METHODOLOGIQUE ..................................................................................................................... 8
3.2. OUTILS D’ INVESTIGATION ............................................................................................................................ 8
3.3. ZONE D’ETUDE ............................................................................................................................................. 8
3.3.1. Milieu physique ................................................................................................................................... 9
3.3.2. Milieu humain ...................................................................................................................................... 9
3.3.3. Activités agro-économiques ............................................................................................................... 10
IV. RESULTATS ET DISCUSSION ................................................................................................................. 10
4.1. BREF HISTORIQUE SUR LA RECHERCHE COTONNIERE EN REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE ........................... 10
4.2. PRINCIPALES SOURCES DE FINANCEMENT DE LA RD AU SEIN DE LA FILIERE COTON ................................... 11
4.3. DOMAINES D’ INTERVENTION EN RECHERCHE COTONNIERE ........................................................................ 13
4.3.1. Sélection variétale ............................................................................................................................. 13
4.3.2. Protection phytosanitaire .................................................................................................................. 13
4.3.3. Agronomie ......................................................................................................................................... 14
4.3.4. Etude de la filière .............................................................................................................................. 14
4.5. LIMITES DE LA RECHERCHE COTONNIERE EN CENTRAFRIQUE ET PERSPECTIVES ......................................... 16
4.5.1. Insuffisance des ressources financières et humaines ......................................................................... 16
4.5.2. Difficultés d'adoption des technologies générées .............................................................................. 17
4.5.3. Vision limitée de la recherche et du développement .......................................................................... 18
4.5.4. Conjoncture internationale en perpétuel changement ....................................................................... 18
4.5.5. Faible coopération sous-régionale .................................................................................................... 18
V. CONCLUSION ............................................................................................................................................... 19
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES .......................................................................................................... 22
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LISTE DES ABREVIATIONS
ARDESAC : Appui à la Recherche Régionale pour le Développement Durable des Savanes d’Afrique Centrale
BM : Banque Mondiale
CIRAD : Centre de Coopération Internationale pour la Recherche Agricole et le Développement
CORAF : Conseil Ouest et Centre Africain pour la Recherche et le Développement Agricole
FCFA : Franc de la Communauté Financière Africaine
FIDA : Fonds International de Développement Agricole
FMI : Fonds Monétaire International
GIR : Groupement d’Intérêts Ruraux
ICRA : Institut Centrafricain de la Recherche Agronomique
IRCT : Institut des Recherches sur le Coton, les Textiles et fibres exotiques
OP : Organisations des Producteurs
PPI : Production et protection intégrée
PRASAC : Pôle régional de recherche appliquée au développement des savanes d’Afrique Centrale
PTI : Programme triennal d’investissement
RCA : République Centrafricaine
RD : Recherche-développement
SOCOCA : Société Cotonnière Centrafricaine
STI : Société de Transport International
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RESUME
Afin de mieux appréhender l’organisation et le fonctionnement des fonctions critiques au sein de la filière cotonnière centrafricaine, une étude diagnostic du mécanisme du financement de la recherche cotonnière en Centrafrique a été réalisée. L’approche méthodologique utilisée dans le cadre de cette étude est basée sur une recherche bibliographique couplée avec des entretiens semi-directifs avec les acteurs concernés. Le principal outil d’investigation est un guide d’entretien orienté essentiellement sur les questions relatives au mécanisme de financement de ce segment par les partenaires concernés.
L’analyse des informations collectées a montré que le financement des activités de recherche-développement au sein de la filière cotonnière en Centrafrique a bénéficié de la contribution de différents partenaires au développement. Le niveau de ces appuis financiers, qui s’inscrivent généralement dans le cadre de coopérations bilatérales, varie d’un partenaire à un autre. Ces appuis tiennent compte des objectifs de développement que s’est fixés le Gouvernement, des contraintes de production, et des domaines d’intervention. Globalement, les différentes activités mises en œuvre par la recherche, en étroite collaboration, avec l’encadrement et la société cotonnière ont été à la base du développement de la culture cotonnière. L’analyse des impacts des travaux de recherche montre que la contribution de la recherche cotonnière a été essentielle et reste indispensable pour faire face aux problèmes phytosanitaires, technologiques, agronomiques et économiques actuels et futurs de la filière.
Toutefois, dans le contexte actuel de crise, l’on s’interroge sur le rôle et l'impact qu'aura la recherche au sein de cette filière, car les activités de recherches cotonnières entreprises par l’ICRA sont fréquemment réduites par l’insuffisance de moyens de fonctionnement et le désengagement de l’Etat au financement des activités de l’institut. De manière générale, la dynamique de la recherche cotonnière en Centrafrique se trouve être limitée, entre autres, par l’insuffisance des ressources financières et humaines, la conjoncture internationale en perpétuel changement avec ses conséquences négatives sur le développement de la filière cotonnière et sur le niveau de financement de la recherche au sein de cette filière, le faible niveau de coopération sous-régionale, le manque de cadre de concertation entre la société cotonnière et la recherche pour la prise en charge de certaines opérations, la non contractualisation du partenariat (producteurs/société cotonnière/recherche) pour une réelle prise en compte des besoins et des réalités socio-économiques des producteurs dans les programmes de recherche ; etc.
L’analyse de ces contraintes appelle à accorder une attention particulière aux questions relative à l’importance des opérations la recherche à entreprendre (amélioration; agronomie/systèmes de production; entomologie/techniques de PPI, etc.) en vue d’améliorer de manière durable la compétitivité de la filière cotonnière centrafricaine ainsi qu’à la place et le rôle de la recherche qui doivent être définis comme priorité dans réformes et nouvelles orientations politiques de développement de la filière cotonnière (libéralisation, privatisation, contractualisation de partenariat, etc.).
Enfin pour poursuivre son développement, la recherche cotonnière doit répondre aux nouvelles contraintes du monde paysan et du marché international en optant pour une recherche régionalisée et en réseaux afin de permettre une meilleure utilisation des moyens humains et matériels disponible et une réduction de son coût. Mots clés : Filière cotonnière, fonctions critiques, recherche-développement, partenaires au développement, domaines de recherche, financement, Centrafrique.
ABSTRACT - DIAGNOSIS OF the MECHANISM OF FINANCING THE RESEARCH AND DEVELOPMENT IN CENTRAL AFRICAN COTTON SECTOR
In order to seize the organization and the functioning of the critical functions within the Central African cotton sector, a diagnosis’ study of the mechanism of the financing of the cotton research in Central African Republic (CAR) was realized. The methodological approach used for this study is based on a bibliographical research coupled with semi-directive interview with the concerned actors. The main tool of the investigation is an interview guide directed essentially on the questions relative to the mechanism of financing of this segment by the concerned partners.
The analysis of the collected information showed that the financing of the activities of research and development within the cotton network in the CAR benefited from the contribution of various partners of development. The level of these financial supports, which join generally within the framework of bilateral cooperation, varies from a partner to another one. These supports take into account objectives of development that settled the Government, constraints of production, and fields of intervention. Globally, the various activities implemented by the research, in close collaboration, with the extension services and the cotton companies were on the base of the development of the cotton culture. The analysis of the impacts of the research works shows that the
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contribution of the cotton research was essential and indispensable to face the current and future phytosanitary, technological, agronomic and economic problems of the sector.
However, in the current context of crisis, we wonder about the role and the impact which will have the research within this sector, because the activities of cotton researches undertaken by ICRA are frequently reduced by the insufficiency of means of functioning and the disengagement of the State to the financing of the activities of the institute. In general, the dynamics of the cotton research in the CAR is limited, among others, by the insufficiency of the financial and human resources, the international situation in perpetual change with its negative consequences on the development of the cotton sector and on the level of financing of the research within this sector, the low level of sub-regional cooperation, the lack of frame of dialogue between the cotton society and the research for taking care of certain operations, the not contractualization of the partnership (producers / cotton society / research) for a real consideration of needs and socioeconomic realities of the producers in research programs; etc.
The analysis of these constraints need a particular attention on the questions relative to the importance of the research operations to be undertaken (improvement; agronomy / systems of production; entomology / techniques of PPI, etc.) to improve in a long run the competitiveness of the Central African cotton sector as well as on the place and the role of the research who must be defined as priority in reforms and new orientations development policies of the cotton sector (liberalization, privatization, contractualization of partnership, etc.).
Finally to continue its development, the cotton research has to answer the new constraints of the peasant and the international market by opting for a regionalized research and in networks to allow a better use of the average human beings and material available and a reduction of its cost.
Keywords: Cotton sector, critical function, research and development, development’s partner, domains of research, financing, Central African Republic.
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I. INTRODUCTION
Au cours de ces quinze dernières années, les filières agricoles en Afrique sub-saharienne ont
connu d’importantes transformations sous l’effet de la libéralisation des économies, de la
globalisation des échanges et de la notable diminution des interventions gouvernementales.
Les filières cotonnières d’Afrique Centrale n’ont pas échappé à ces mutations auxquelles
s’ajoute la baisse du cours mondial de coton. Ces filières, adoptant une stratégie de
développement agricole intégré, étaient considérées par les institutions de Bretton Woods
(Banque Mondiale et Fonds Monétaire International), inspirateurs des "Plans d'Ajustement
Structurels", comme ayant un caractère monopolistique qui est contraire aux principes du
libéralisme économique. Ces institutions ont fini par imposer aux pays producteurs de coton
diverses reformes de restructuration de ces filières comme conditionnalités à remplir avant de
pouvoir bénéficier de leurs aides financières.
Ces réformes consistent entre autres à appliquer les mesures relatives à la libéralisation des
filières cotonnières, à la privatisation (partielle ou totale) de certains segments desdites
filières, à la restructuration des sociétés cotonnières, au désengagement des Etats du secteur
productif, etc. D’une manière générale, les réformes, tant institutionnelles que structurelles,
entreprises, afin de rendre plus compétitive les filières cotonnières d’Afrique Centrale, n’ont
pas toujours donné les résultats escomptés. Parfois même, les résultats n’étaient eux-mêmes
pas clairement identifiés. Ces mesures ont tendance à modifier profondément le
fonctionnement des filières ainsi que les règles établies, à marginaliser progressivement les
groupes sociaux déjà démunis ou défavorisés, à modifier le comportement des agents exposés
à de nouveaux risques et à des situations d’incertitude, et de remettre en question les modes
de coordination existants dans le fonctionnement de ces filières (Farval, 2000).
En effet, la mise en œuvre de ces reformes couplée avec la dégradation de l’environnement
socio-économique, en Afrique Centrale en générale et en République Centrafricaine (RCA) en
particulier, a manifestement entraîné des changements dans l’organisation et le
fonctionnement des segments clés de la filière cotonnière. L’un des segments le plus touché
en Centrafrique est celui du financement de la recherche-développement (RD) au sein de la
filière cotonnière. Alors que le financement durable du secteur agricole, en général, et de la
recherche agronomique, en particulier, fait partie des actions prioritaires du Gouvernement
Centrafricain, la mise en œuvre de ces reformes et de la politique d’ajustement structurel a eu
des impacts négatifs sur le fonctionnement dudit segment. En outre, en dépit de l’importance
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du rôle et de la place de la recherche agronomique dans le processus de développement
agricole et de la croissance économique du pays, les investissements publics de l’Etat alloués
à ce sous-secteur ne dépassent guère 1% du total du budget annuel des investissements1. Par
ailleurs, on note une absence totale du secteur privé dans le financement des activités de RD.
Cet ensemble de constat amène à réfléchir sur les perspectives du mécanisme de financement
des activités de recherche-développement dans ce contexte où évoluent les filières agricoles
en général.
C’est dans cette optique que le programme 3.1 « Dynamiques des filières cotonnières
d’Afrique Centrale face au contexte global et local », du Pôle régional de recherche appliquée
au développement des savanes d’Afrique Centrale (PRASAC), a retenu, parmi ses opérations
de recherche, de faire une étude diagnostic du mécanisme de financement de la recherche-
développement au sein de la filière cotonnière centrafricaine.
II. OBJECTIFS DE L’ETUDE
2.1. Objectif général du programme
L’objectif général du programme est d’analyser l’organisation et la compétitivité des filières
cotonnières d’Afrique centrale dans un contexte de libéralisation des marchés, en vue de
fournir aux décideurs et opérateurs économiques des informations susceptibles d’améliorer
durablement la dynamique de ces filières.
2.2. Objectifs du projet
Les objectifs spécifiques visés par le projet « Analyse des impacts du processus de
libéralisation sur l’organisation et la compétitivité des filières cotonnières d’Afrique
centrale » du programme 3.1 consistent à :
- Tirer les leçons des expériences de privatisation des filières cotonnières en Afrique de l’Ouest (en vue d'un processus de privatisation efficace en Afrique centrale);
- Etudier le changement d'adhésion des paysans à la culture cotonnière : facteurs et conséquences.
1 Sur une prévision budgétaire de 312 milliards de FCFA pour la période 2002/2004, la part des investissements dans le secteur rural (4,5%) est de 14 milliards de FCFA, soit environ 4,7 milliards de FCFA/an. Ministère de l’économie, des finances, du plan et de la coopération internationale, 2004. Programme triennal d’investissement (PTI) 2002-2004.
8
2.3. Objectifs spécifiques de l’étude
Cette étude vise plus spécifiquement à faire un diagnostic des fonctions critiques de
l’organisation de la filière cotonnière en Centrafrique, notamment du segment financement de
la recherche-développement au sein de la filière cotonnière, afin de dégager les axes de
réflexion sur le mécanisme de financement durable de la recherche-développement.
III. METHODOLOGIE
3.1. Approche méthodologique
L’approche méthodologique utilisée pour réaliser cette étude est basée sur une recherche
bibliographique couplée avec des entretiens semi-directifs avec les principaux acteurs
concernés (responsables de la recherche et de la société cotonnière) par la problématique de
financement de la RD au sein de la filière cotonnière en Centrafrique. En outre, des entretiens
avec des personnes ressources et partenaires intéressés par la filière cotonnière (Représentant
des firmes phytosanitaires, vulgarisateurs, responsables des ministères techniques concernés,
etc.) et la consultation des sources de données disponibles ont permis de collecter les
informations complémentaires à l’analyse du problème.
3.2. Outils d’investigation
Le principal outil d’investigation utilisé pour la réalisation des entretiens avec les acteurs sur
le terrain est un guide d’entretien spécifique adressé à chaque type d’acteurs. Ce guide a
permis, de manière générale, de collecter entre autres les données concernant principalement :
- les sources de financement de la recherche développement sur le coton ;
- le niveau de financement et son évolution ;
- les domaines d’activités financés ;
- les objectifs visés par les programmes financés ;
- les principaux résultats obtenus ;
- le mécanisme de transfert des résultats de la recherche ;
- les principales contraintes ;
- les suggestions et les perspectives.
3.3. Zone d’étude
Etant donné la problématique de l’étude concerne la production cotonnière qui est développée
dans la zone des savanes, notre zone d’étude est constituée des terroirs de référence du
PRASAC et de certains villages situés dans la zone des savanes cotonnières. Globalement, la
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zone des savanes cotonnières centrafricaines couvre les préfectures de l’Ouham et de
l’Ouham-Pendé (dans le nord-ouest), la Ouaka, la Nana-Gribizi et la Kémo (dans le centre-
est). Cette zone représente 25% du territoire national et compte 41% de la population totale du
pays.
3.3.1. Milieu physique
La zone cotonnière est influencée par un climat du type soudano-guinéen, caractérisé par une
saison sèche allant de novembre à mars et une saison pluvieuse allant d’avril à octobre. La
pluviométrie annuelle moyenne est de l’ordre de 1.400 mm, dont 90% répartis sur la période
végétative allant de mai à septembre. La température moyenne est de 26°C avec une
amplitude thermique se situant entre 12°C et 38°C. Associée à la pluviométrie, elles offrent
des conditions favorables pour la production agricole.
La végétation est arbustive, parfois arborée et assez dégradée par des feux de brousse qui les
ravagent chaque année. La densité de cette végétation décroît du sud de la zone cotonnière au
nord et constitue l’une des contraintes au développement de la traction animale dans le sud.
La végétation est dominée par les espèces pyrophiles telles que : Daniella oliveri, Terminalia
laxiflora, Isobernia doca, Vitex simplicifolia, Ficus etrangulaire, Combretum sp, Khaya
senegalensis, Borassus aethiopium (rônier), etc. La strate inférieure est constituée des
graminées pérennes telles que : Citenia sp, Imperata cylindrica, Andropogon gayanus,
Zelezine indica, Hyparemea rufa, etc.
Les sols, de type ferrugineux, relativement riches en éléments chimiques, demeurent sensibles
à l’érosion hydrique. La profondeur de ces sols est faible et constitue avec les curasses
latéritiques un facteur limitant à leur exploitation.
3.3.2. Milieu humain
La population de la zone cotonnière centrafricaine est composée de divers groupes ethniques :
Banda, Gbaya, Mandja et Sara qui sont des autochtones agriculteurs, et mbororos d’origine
peulh, qui sont essentiellement des éleveurs. La densité moyenne de la population dans cette
zone est 6,5 hab./km². Cette densité reste très faible comparativement à celles des zones
cotonnières du Tchad (entre 50 et 80 hab./km²) et du Cameroun (plus de 100 hab./km²).
10
3.3.3. Activités agro-économiques
Diverses activités agro-économiques sont pratiquées par les producteurs de cette zone, à
savoir : l’agriculture, l’élevage et les activités para-agricoles. L’agriculture fait partie
intégrante de l’organisation sociale des terroirs et occupe la quasi-totalité de la population
active. Les systèmes de cultures sont caractérisés par les grands groupes de cultures telles
que : (i) le coton comme culture de rente ; et (ii) les plantes à racines et tubercules (manioc,
igname, patate douce) ; (iii) les légumineuses à graines (arachide, haricot) ; (iv) les céréales
(maïs, riz, sorgho) ; (v) les protéagineux (courges, sésame) ; et (vi) les cultures de contre-
saison (amarante, jute, solanum, etc.).
Le type d’élevage le plus répandu dans la zone et l’élevage du petit bétail (volailles, caprins,
ovins et porcins) pratiqué par la quasi-totalité des exploitations agricoles. L’élevage bovin est
pratiqué par les éleveurs peulhs et quelques agro-éleveurs sédentaires. En outre, les activités
para-agricoles fréquentes sont la transformation des produits, la cueillette, la chasse, la pêche
et l’apiculture. Les produits issus de ces différentes activités font l’objet d’autoconsommation
et de vente.
IV. RESULTATS ET DISCUSSION
4.1. Bref historique sur la recherche cotonnière en République Centrafricaine
L’histoire de la recherche agronomique en République Centrafricaine remonte vers les années
1945 où les premiers centres et stations de recherche ont été créés à Bambari, Boukoko,
Soumbé, Poumbaïdi, Grimari, Ngounouman, etc. Les activités de recherche cotonnière étaient
entreprises principalement par l’Institut des Recherches sur le Coton, les Textiles et fibres
exotiques (IRCT). Ceci traduisait la forte volonté des pouvoirs publics et des professionnels
du textile français de développer, de façon significative, la production cotonnière pour assurer
l'indépendance et la sécurité des approvisionnements de fibre, mais aussi le développement
économique et social des territoires africains gouvernés par la France. Les principes d'une
intégration verticale des activités de recherche, production, collecte, égrenage et
commercialisation furent arrêtés et les méthodes assez rapidement mises au point sur le
terrain. Dès lors, une dynamique remarquable entre la recherche cotonnière et les structures
chargées du développement s'est mise en place. Le principal partenaire financier des activités
de recherche de ces instituts était la France. Les programmes de recherche développés furent
variés et eurent la particularité d’avoir une vocation régionale.
11
Suite aux différents reformes institutionnelles et changements structurels intervenus dans le
secteur agricole centrafricain, vers les années 70 jusqu’au début des années 90, l’Institut
Centrafricain de la Recherche Agronomique (ICRA) a été créé et doit dorénavant coordonner
l’ensemble des programmes de recherche au niveau national. Pour accompagner ce processus,
plusieurs partenaires au développement se sont engagés à apporter leurs appuis financiers
pour la mise en œuvre des différents programmes de recherche qui ont été identifiés.
4.2. Principales sources de financement de la RD au sein de la filière coton
Depuis le début des années 90, le financement des activités de recherche-développement au
sein de la filière cotonnière en Centrafrique a bénéficié de la contribution de différents
partenaires au développement. Le niveau de ces appuis financiers, qui s’inscrivent
généralement dans le cadre de coopérations bilatérales, varie d’un partenaire à un autre. Ces
appuis tiennent compte des objectifs de développement que s’est fixés le Gouvernement, des
contraintes de production, et des domaines d’intervention.
Au cours de ces deux dernières décennies, les partenaires au développement intervenant dans
le financement des activités de recherche-développement au sein de la filière cotonnière se
présentent comme le montre le tableau 1, ci-après :
Tableau 1 : Sources de financement des programmes de recherche cotonnière
Partenaires financiers Niveau de financement (FCFA)
Domaines d’activités financés
Société Cotonnière 5-20 millions - Amélioration variétale - Production de semences - Technologie de la fibre - agronomie/systèmes de culture - Entomologie/technologies et de techniques de
protection phytosanitaire
Firmes phytosanitaires (Calliope) 2-3 millions - Test d’efficacité des nouvelles molécules (insecticides ; herbicides, engrais)
Etat 12-52 millions - Amélioration variétale - Production de semences - Défense des cultures
Coopération Française (Fonds de solidarité prioritaire à travers le PRASAC)
Environ 200 millions - Entomologie et adaptation de technologie et de
techniques de protection phytosanitaire (PICUR) - Agronomie/Systèmes de culture - Traction animale - Lutte contre les adventistes du cotonnier - Etude de la filière coton
Banque Mondiale Environ 1.000 millions
- Amélioration variétale - Agronomie/systèmes de culture - Entomologie - Etude du milieu producteur - Transfert de technologies
12
Il est à noter que les niveaux de financement apporté par la Banque Mondiale (BM) et la
Coopération Française restent les plus importants. Toutefois, il est remarqué que ces
financements ne sont pas destinés uniquement aux activités de recherches cotonnières. Ils
couvrent également les autres activités de recherche (productions vivrières et animales ;
gestion des terroirs ; migrations ; accompagnement des acteurs ; etc.). Par ailleurs, le
financement de la BM, octroyé à partir de 1993, a été suspendu en 1998 suite au non respect
des engagements de l’Etat vis-à-vis de cette institution. Suite à cette suspension et aux
différentes crises socio-politiques qu’avait connues le pays, de 1996-1997 et de 2002-2003, le
niveau de financements alloués aux activités de recherche-développement s’amenuise surtout
que les financements alloués par l’Etat restent difficilement mobilisables, malgré leur
inscription sur le budget national.
Figure 1: Evolution du financement de la RD en RCA
0
150
300
450
600
750
900
1050
1200
1350
1500
1650
1800
1950
1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007
Année
Bu
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FA
)
Budget National Budget Extérieur TOTAL
Source : Enquête de terrain, 2006.
13
4.3. Domaines d’intervention en recherche cotonnière
Les principaux domaines d’intervention financement sont les suivantes :
4.3.1. Sélection variétale
Elle vise à apporter des solutions aux contraintes agro-climatiques (résistance ou tolérance
aux ravageurs et maladies, caractère storm-proof, nepposité réduite), aux besoins des
producteurs (productivité, poids capsulaire, pouvoir germinatif) et aux exigences
technologiques de la filature (longueur de fibre, résistance, ténacité, allongement), de
l'égrenage (rendement en fibre) et de l'huilerie (rendement huile, caractère glandless).
Les résultats obtenus dans ce domaine depuis 50 ans semblent globalement très satisfaisants
pour toutes les parties. Des variétés avec des qualités très intéressantes ont été identifiées et
continuent à faire l’objet des travaux d’amélioration. La variété F135, actuellement en
production dans l’ensemble de la zone cotonnière, a été mise au point en tenant compte des
principales exigences qui sont la productivité au champ (au moins 1.500 kg/ha), un bon
niveau de rendement de fibre à l'égrenage (42%) et de bonnes caractéristiques technologiques
de la fibre qui répondent au mieux à la demande des filateurs.
4.3.2. Protection phytosanitaire
Ce domaine de recherche, qui vient historiquement après l'agronomie dans les programmes de
recherche cotonnière, vise à développer des innovations et techniques appropriées de
protection intégrées des cultures et de résistances. Mais, à cause de l'impact des ravageurs qui
entraîner de 40 à 80% de perte de la production, réduisant ainsi considérablement les gains
attendus de la sélection variétale, la protection phytosanitaire a pris largement le pas sur
l’agronomie. L'entomologie est devenue et est restée une discipline scientifique de premier
plan en recherche cotonnière. Cependant, très peu d’actions en phytopathologie ont été
développées.
Les essais multilocaux (parcelles filtres, essais à trois niveaux, lutte étagée ciblée) menés
conjointement avec les services de l’encadrement et de la société cotonnière se sont révélés
des outils adaptés à la mise au point des techniques et à l'évaluation des résultats auprès des
producteurs. Ils ont permis de prendre en compte les exigences de la société cotonnière, qui
assure l'approvisionnement des produits et le conseil technique auprès des producteurs,
notamment la simplicité d'application, l'efficacité et la sécurité au moindre coût. Depuis une
vingtaine d'années, la recherche, les sociétés cotonnières et les firmes phytosanitaires
14
collaborent pour mettre au point et promouvoir une protection intégrée de la culture
cotonnière, en considérant de nouvelles contraintes, telles que le développement des piqueurs-
suceurs plus difficiles à contrôler, la prévention des résistances et la protection de
l'environnement, la contrainte financière, particulièrement forte en ces temps difficiles de
crise cotonnière.
4.3.3. Agronomie
L'agronomie a constitué un programme prioritaire pour la recherche cotonnière. Elle
concernait prioritairement le calendrier cultural, la place du coton dans l'assolement, les
densités. Les itinéraires de base ayant été assez rapidement définis et affinés, la recherche
d'une fumure adaptée s'est rapidement imposée. La fumure organique s'étant révélée trop
contraignante et coûteuse pour de petits agriculteurs, en terme d’effectif de bœufs et de la
main d’œuvre à mobiliser, la fumure minérale a fait l'objet d'études systématiques,
principalement sous la forme d'essais soustractifs. L'application à grande échelle des
recommandations des essais menés en milieu contrôlé débuta au milieu des années 60 fut
quasiment généralisée dans les années 80.
Quant à la recherche en matière de lutte contre les adventices, contrainte forte en matière de
production, elle a été plutôt timide. Toutefois, avec l’influence des pratiques d’utilisations des
herbicides par les cotonculteurs du Nord Cameroun, on note une certaine tentative
d’utilisation de ces herbicides par les producteurs de coton de la région frontalière du nord-
ouest (Ndim, Ngaoundaye, Bocaranga).
4.3.4. Etude de la filière
Les thématiques d’analyse économique des filières agricoles ont été abordées par des études
récentes. Dans le cas particulier de la filière cotonnière centrafricaine, les problématiques sont
abordées en analysant le développement et l’intensification de la production cotonnière par
rapport au contexte de privatisation du secteur. Les études réalisées ont porté essentiellement
sur l’analyse technico-économique des systèmes de production à dominance coton, des
exploitations agricoles dans les zones cotonnières et la mise au point des paquets
technologiques et référentiels techniques en vue de l’amélioration de la production cotonnière
(E. Mbétid-Bessane, 2002 ; D. Kadékoy-Tigagué et al., 1999 ; A. Leroy, 1993 ; etc.).
Dans le cadre des programmes régionaux de recherche, une attention particulière est accordée
à l’analyse de la dynamique de la filière cotonnière par rapport à l’environnement économique
15
global et local (consolidation de l’intégration régionale, baisse des cours mondiaux, fortes
subventions des pays occidentaux à leurs cotonculteurs, etc.). Les activités envisagées sont
axées sur l’analyse de l’impact de la crise et des changements institutionnels et structurels au
sein de la filière sur la dynamique des systèmes de production à dominante coton, les
stratégies adoptées par les acteurs pour s’adapter à cette crise et les perspectives d’évolution
de la filière. En effet, les perspectives d’évolution alimentent cependant bien des incertitudes,
car devant la chute des cours mondiaux et les pressions à la privatisation des institutions de
Bretton Woods, l’avenir du secteur cotonnier est incertain (Duteurtre et al, 2002). Pour ce
faire, les travaux de recherche entrepris dans ce domaine permettront, à terme, de disposer des
informations qui aideront les décideurs, les partenaires au développement et les opérateurs
concernés de définir les stratégies et des innovations organisationnelles, technico-
économiques et politiques indispensables à la relance et au développement durable de la
production cotonnière en RCA, ainsi qu’à l’amélioration de la compétitivité de cette filière.
4.4. Impacts des innovations développées sur le développement de la culture
Globalement, les différentes activités menées, en collaboration, avec les agents
d’encadrements et de la société cotonnière ont permis à l’ICRA de sortir des stations et
d’adopter une méthodologie d’intervention plus participative, tout en tenant compte des
demandes de ces partenaires de terrain : points d'appui en milieu contrôlé, essais multilocaux,
pré-vulgarisation, comité recherche-développement. En outre, l'organisation du plan de
multiplication et production des semences en stations et en milieu producteur constitue
l'occasion d'une étroite et fructueuse collaboration entre la recherche et la société cotonnière.
L’ensemble de ces stratégies constitue pour l’ICRA le mécanisme de transfert et de
valorisation de ses résultats de recherche dans les domaines de l’amélioration variétale, de
l’agronomie et de la défense de culture.
La mise au point et la diffusion de la variété F135 a permis d’améliorer égrenage de 3 à 4 % et
la longueur de soie de 1 mm au moins et de garantir la bonne qualité de la fibre. Concernant la
fertilisation et les techniques culturales, les apports de fumure minérale aux doses et aux
époques recommandées, couplés au respect des pratiques culturales appropriées, ont permis
d'améliorer et le rendement de coton-graine, passant de moins de 300 kg/ha à plus de 700k/ha,
et celui des cultures vivrières bénéficiant de l'arrière-effet des engrais appliqués sur le coton.
En outre, les messages techniques relatifs à l'utilisation des engrais minéraux et de la fumure
organique sont bien perçus par les producteurs, malgré la pratique courante du sous-dosage
16
des engrais. Les techniques de rotations et d’association coton-vivriers sont bien adoptées et
les différentes techniques culturales généralement bien suivies. Dans le domaine de la
protection phytosanitaire, les recommandations issues des nouveaux programmes en matière
de protection des cotonniers ont permis d'augmenter les niveaux de rendements et la qualité
du coton-graine. Par ailleurs, les nouveaux produits recommandés sont moins toxiques pour
l'homme et la nature.
4.5. Limites de la recherche cotonnière en Centrafrique et perspectives
L’analyse des impacts des travaux de recherche montre que la contribution de la recherche
cotonnière a été essentielle et reste indispensable pour faire face aux problèmes
phytosanitaires, technologiques, agronomiques et économiques actuels et futurs. Toutefois,
dans le contexte actuel de crise, l’on pourra s’interroger sur le rôle et l'impact qu'aura la
recherche au sein de cette filière, car les activités de recherche cotonnière entreprises par
l’ICRA sont fréquemment réduites par insuffisance des moyens de fonctionnement. Aussi, le
peu d'intérêt que porte l’Etat au financement des activités de l’Institut ne devrait pas être de
nature à rassurer les chercheurs.
4.5.1. Insuffisance des ressources financières et humaines
Suite à l’arrêt du financement alloué par les principaux partenaires financiers à l’ICRA, tels
que la Banque Mondiale, le Fonds International de Développement Agricole (FIDA), et les
séries de crises socio-politiques itératives, l’ICRA connaît de sérieuses difficultés financières
pour la mise en œuvre de ses programmes de recherche. Au cours de ces dernières années,
certains partenaires au développement (Société cotonnière, firmes phytosanitaires,
Coopération française, etc.) ont apporté leur appui pour soutenir certaines activités de
recherche. Cependant, le niveau de cet appui reste en deçà des besoins réels de l’institut. Cette
situation rend aléatoire, voire impossible, la mise en œuvre des actions prioritaires de
recherche et amène donc à s’interroger sur le mécanisme de financement durable de la
recherche agricole.
Les axes de réflexions par rapport à ce problème doivent prioritairement porter sur les points
suivants :
- la définition, dans le cadre du Fonds de développement agricole en cours de
discussion, d’un mécanisme pratique d’allocation de ressources à la recherche sur les
fonds qui seront versés par les sociétés cotonnières, les industries agroalimentaires, les
17
partenaires au développement ainsi que les opérateurs utilisateurs des résultats de la
recherche ;
- la création d’un cadre de concertation et de partenariat entre les producteurs, la société
cotonnière et la recherche pour une réelle prise en compte des besoins et des réalités
socio-économiques des producteurs et sociétés cotonnières dans les programmes de
recherche et pour la prise en charge du financement des opérations de recherche
inhérentes aux besoins exprimés par ces partenaires ;
- la promotion des stratégies devant encourager les opérateurs privés à s’impliquer dans
le financement des activités de la recherche ;
- l’allocation, par l’Etat, sur le budget national des ressources nécessaires et facilement
accessibles pour le financement des activités de recherche, conformément aux
engagements pris par les Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union Africaine (UA)
à Maputo d’adopter des politiques déterminées en faveur de l’agriculture et du
développement rural et à y consacrer, dans les cinq années à venir, au moins 10% de
leur budget.
L’insuffisance des ressources humaines reste un facteur limitant. La masse critique actuelle
des chercheurs reste en deçà des besoins et ne permet pas d’entreprendre les travaux de
recherche couvrant les différents domaines. En outre, il se pose également un problème de la
qualité du personnel disponible. En effet, la qualité du personnel est particulièrement
déterminante dans la formulation, l’exécution et le suivi des activités de recherche. Pour être
efficace, le personnel doit évoluer dans une ambiance scientifique qui lui permettra de
s'épanouir. Le contact avec les communautés scientifiques, un accès à l'information, une
participation régulière à des rencontres internationales et un accès plus facile aux réseaux de
publications sont essentiels. Beaucoup des chercheurs de l’ICRA souffrent encore de leur
isolement scientifique, ce qui ne leur permet pas d’échanger leurs expériences et de valoriser
leur effort.
4.5.2. Difficultés d'adoption des technologies générées
Quoique la recherche a pu diffuser et faire adopter la variété F135 dans l’ensemble de la zone
cotonnière et que les semences sont fournies par la société cotonnière, il n'en est pas le cas
pour certaines innovations mises au point et recommandées par la recherche (systèmes de
cultures sédentaires, sarclage mécanique, fumure organique, densité de semis, etc.). Les
18
raisons de la non-adoption de ces technologies sont diverses : les technologies qui ne sont pas
à la portée des producteurs, non ciblées, qui demandent des mesures collectives dont la
rentabilité n'est pas immédiate, un coût d'opportunité élevé, non-prise en compte des points de
vue des producteurs, une faible implication des producteurs à leur élaboration.
4.5.3. Vision limitée de la recherche et du développement
La recherche aussi bien que le développement manquent dans certains cas d'une vision à long
terme des problèmes de la filière. C'est de la capacité d'anticipation que dépendra l'efficacité
commune. Or les difficultés économiques conjoncturelles ou les préoccupations actuelles
empêchent ou entravent des investissements pour demain. L'histoire récente de la filière
montre que la recherche elle-même n'a pas été toujours prévoyante dans la hiérarchisation de
ses activités. Par ailleurs, les chercheurs se doivent d'être plus prospectifs pour sortir de leurs
activités routinières et embrasser des thématiques nouvelles.
4.5.4. Conjoncture internationale en perpétuel changement
La filière cotonnière doit s'adapter aux conjonctures et évolutions du marché international qui
est en perpétuel changement. La recherche cotonnière doit tenir compte de cette dynamique et
de certains facteurs défavorables dans l’orientation de ses programmes de recherche. Il s’agit
entre autres des facteurs tels que :
- le faible niveau de la production nationale ;
- les fortes subventions accordées par les occidentaux à leurs cotonculteurs ;
- l'évolution technologique dans l'expertise du coton, le système de classement de fibre adopté pour catégoriser le coton sur le marché international ;
- le système de fixation du prix de la fibre sur le marché mondial indexé au cours du dollar.
Ainsi, les travaux entrepris par l’ICRA sur la sélection de nouvelles variétés doivent tenir
considérer cette dynamique pour améliorer la productivité et la compétitivité de la production
cotonnière centrafricaine.
4.5.5. Faible coopération sous-régionale
A l’époque où la recherche cotonnière était entreprise avec l’appui de l’Institut de la
Recherche Cotonnière et Textile (IRCT), la collaboration était dynamique entre la RCA et les
autres pays de la sous-région, notamment le Cameroun et le Tchad. Cette collaboration portait
sur les méthodes d’expérimentations communes dans les domaines de la sélection variétale,
19
de l’agronomie et de la protection intégrée des cultures, les échanges de variétés et
d’information sur les résultats essais expérimentaux, l’analyse des échantillons de fibre au
laboratoire de technologie de la fibre de Bébédja au Tchad. Malheureusement, au cours de
cette dernière décennie, cette collaboration est pratiquement inexistante entre la recherche
centrafricaine et les autres centres partenaires. Cette situation a pour conséquence la faiblesse
des échanges d'expériences, de matériel et de programme collaboratifs, en dépit des
conditions de production semblables.
Actuellement, les initiatives du PRASAC pour la mise en œuvre des programmes de
recherche régionaux constituent une opportunité pour relancer et redynamiser cette
coopération. En effet, le PRASAC représente un cadre approprié pour les pays concernés
(Cameroun, Tchad, RCA) d’entreprendre des opérations de recherche directement utilisables
par les acteurs de développement, par la mise en commun des ressources humaines,
matérielles et des équipements, et l’échange des méthodes, des références et des résultats pour
résoudre avec plus d’efficacité les problèmes de développement communs aux trois pays
membres.
La relance de la collaboration entre l’ICRA et le réseau coton du Conseil Ouest et Centre
Africain pour la Recherche et le Développement Agricole (CORAF/WECARD) et du Centre
de Coopération Internationale pour la Recherche Agricole et le Développement (CIRAD) est
à encourager. Elle permettra à l’ICRA d’élargir et renforcer sa coopération avec les centres
avancés de recherche cotonnière et de partager l’expérience des grands pays producteurs de
coton d’Afrique de l’Ouest. Cette coopération devrait permettre à l’ICRA d'orienter ses
activités vers des secteurs d'avenir comme la biotechnologie.
V. CONCLUSION
Dans le cadre de la mise en œuvre des opérations de recherche retenues par le programme 3.1
« Dynamique des filières cotonnières dans un contexte global et local en Afrique Centrale »,
du PRASAC/ARDESAC, une étude diagnostic du segment financement de la recherche-
développement au sein de la filière cotonnière de Centrafrique a été entreprise. Cette étude a
pour objectif d’apprécier le mécanisme de financement de la recherche cotonnière dans un
contexte de crise où la culture cotonnière en Centrafrique est pratiquement en « agonie » afin
de dégager les axes de réflexion sur le mécanisme de financement durable de la recherche-
développement. La collecte des données nécessaires à l’analyse de la dynamique de ce
segment de la filière a été réalisée auprès des différents partenaires de la recherche, tels que
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les responsables des sociétés cotonnières, de la recherche, de la vulgarisation des
organisations des producteurs, des partenaires au développement.
L’analyse des données collectées a permis de préciser les principaux domaines d’activités
activités de recherche mises en œuvre en vue du développement de la filière cotonnière. Il
s’agit des programmes de recherche en amélioration variétale, en agronomie, en protection
intégrée des cultures et en économie. Les sources et le niveau de financement de ces activités
ont également été mis en exergue. Les partenaires intervenant dans le financement de la
recherche cotonnière en Centrafrique sont les Sociétés Cotonnières, les Firmes phytosanitaires
(Calliope), l’Etat, la Coopération Française (Fonds de solidarité prioritaire à travers le
PRASAC) et la Banque Mondiale. Le niveau de financement de ces activités varie d’un
partenaire à un autre.
Globalement, le niveau des fonds alloués par ces partenaires reste très faible par rapport aux
besoins réels de l’ICRA. Les difficultés éprouvées par l’Etat à respecter ses engagements vis-
à-vis de ses partenaires, couplées aux crises politico-militaires, ont amené certains partenaires
à réduire, voire suspendre leur appui financier pour la mise en œuvre de ces activités. Ces
financements ont permis à l’ICRA de mettre au point des innovations techniques qui ont
permis d’améliorer progressivement la productivité, le rendement à l’égrenage et les
caractéristiques technologiques du coton. Toutefois, l’étude a mis en évidence un certain
nombre de contraintes qui ont entravé la bonne exécution de ces programmes de recherche
cotonnière. Il s’agit entre autres de :
- insuffisance des ressources financières (Etat, partenaires au développement) ;
- inexistence d’un mécanisme approprié pour le financement durable de la
recherche ;
- manque de cadre de concertation entre la société cotonnière et la recherche pour la
prise en charge de certaines opérations ;
- non contractualisation du partenariat (producteurs/société cotonnière/recherche)
pour une réelle prise en compte des besoins et des réalités socio-économiques des
producteurs dans les programmes de recherche ; etc.
En dépit des changements et des réformes en cours dans la filière cotonnière, une attention
particulière doit être accordée aux questions suivantes :
21
- La recherche cotonnière (amélioration; agronomie/systèmes de production;
entomologie/techniques de PPI, etc.) reste importante pour l’amélioration durable
de la compétitivité de la filière
- La place et le rôle de la recherche dépendront du degré de réformes et des
nouvelles orientations politiques de développement de la filière (libéralisation,
privatisation, contractualisation de partenariat, etc.)
Enfin pour poursuivre son développement, la recherche cotonnière doit répondre aux
nouvelles contraintes du monde paysan et du marché international en optant pour une
recherche régionalisée et en réseaux qui permet une meilleure utilisation des moyens humains
et matériels disponible et une réduction de son coût.
22
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