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Académie de Paris
Université Pierre et Marie Curie
Année 2011 - 2012
Mémoire pour l’obtention du Diplôme d’Etudes Spécialisées
d’Anesthésie-Réanimation
Coordonnateur : Monsieur le Professeur Didier Journois
Présenté et soutenu le 10 avril 2012 par
Monsieur David Lobo
Approche de la physiopathologie des infections liées aux dérivations
ventriculaires externes par une méthode d’écouvillonnage
Travail effectué sous la direction de Monsieur le Docteur Roman Mounier
Relu et validé par Monsieur le Professeur Benoît Plaud
Université Paris-Est Créteil & GHU Henri Mondor, Créteil
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Résumé
But de l’étude
La physiopathologie des complications infectieuses liées aux dérivations ventriculaires
externes (DVE) n’est pas connue. Certains facteurs de risque sont décrits. Il existe une
controverse quant à la surveillance biologique, notamment sur la périodicité de l’analyse du
liquide céphalo-rachidien. Les germes en cause sont principalement des germes saprophytes
de la peau. L’objectif principal de l’étude était d’évaluer la part des différentes voies
physiopathologiques à l’origine de ces infections, par une méthode d’écouvillonnage. Les
objectifs secondaires étaient de déterminer les valeurs diagnostiques de cet outil, et de
rechercher les facteurs de risque associés à ces complications.
Mathériel et méthodes
Etude prospective de cohorte, observationnelle. Tous les patients porteurs d’une DVE étaient
inclus. Les patients présentant une infection préexistante du liquide céphalo-rachidien (LCR)
ou une embarrure crânienne n’étaient pas inclus. Les patients dont le cathéter était retiré ou
qui décédaient avant le quatrième jour étaient exclus. L’analyse du LCR était quotidienne. Le
site d’insertion cutané de la DVE et le robinet distal étaient écouvillonnés tous les deux jours,
jusqu’à l’ablation du cathéter. Celui-ci était mis en culture après ablation. Les germes
identifiés comme responsables d’une complication infectieuse étaient confrontés à ceux des
écouvillonnages, afin d’établir, pour chaque cas, la voie physiopathologique en cause. Les
facteurs pouvant être associés à la survenue d’une complication infectieuse ont été recueillis.
Résultats
Au total, 51 patients, ayant reçu 63 poses de cathéter, ont été retenus pour l’analyse. Neuf cas
de complications infectieuses ont été observés, dont six infections et trois colonisations. Sept
d’entre eux étaient associés à des écouvillonnages cutanés retrouvant le germe en cause, sans
écouvillonnage de robinet concordant. Un cas était associé à un écouvillonnage de robinet
retrouvant le germe responsable, sans que la chronologie des prélèvements ne permette de
conclure sur le mécanisme. La sensibilité d’une série d’écouvillonnages cutanés
systématiques était de 77,8%, et sa valeur prédictive négative de 89,5%. En revanche, la
spécificité et la valeur prédictive positive étaient faibles (40,5% et 21,9%, respectivement).
Parmi les facteurs étudiés, seule la fuite de LCR autour du cathéter était significativement
associée à la survenue d’une complication infectieuse.
Discussion
Sept complications infectieuses parmi les neuf observées ont pu être expliquées par une
progression du germe responsable à partir de la peau du patient. L’existence d’une fuite
cutanée de LCR pourrait favoriser ce mécanisme. Le passage du germe par la voie
endoluminale du cathéter ne semble pas jouer un rôle physiopathologique fréquent. La valeur
prédictive négative de l’écouvillonnage cutané pourrait être intéressante en pratique clinique,
mais son évaluation reste à faire.
Conclusion
La voie physiopathologique principale à l’origine des complications infectieuses sur DVE
semble être la progression extraluminale du germe à partir de l’interface entre la peau du
patient et le cathéter. Ceci relativise l’importance du risque infectieux lié aux prélèvements de
LCR sur le robinet distal. Les soins locaux d’asepsie, et la surveillance de survenue d’une
fuite de LCR, doivent être pris en compte dans la prévention de ces infections.
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Table des matières
Introduction ............................................................................................ 5
I- Diagnostic des complications infectieuses liées aux cathéters de
DVE .................................................................................................... 5
II- Epidémiologie des complications infectieuses ........................... 7
III- Physiopathologie ........................................................................ 8
IV- Objectif de l’étude ...................................................................... 9
Matériel et Méthodes ........................................................................... 10
I- Population étudiée ....................................................................... 10
II- Pose du cathéter de DVE .......................................................... 10
III- Procédure de soins locaux de DVE .......................................... 11
IV- Réalisation des écouvillonnages ............................................... 11
V- Surveillance biologique du LCR .............................................. 12
VI- Données recueillies ................................................................... 13
VII- Analyses statistiques .............................................................. 14
Résultats ............................................................................................... 15
I- Caractéristiques de la population ................................................ 15
II- Résultats bactériologiques et complications infectieuses ........ 17
III- Chronologie de colonisation des sites écouvillonnés ............... 19
IV- Valeurs diagnostiques ............................................................... 20
V- Facteurs associés aux complications infectieuses .................... 20
Discussion ............................................................................................ 21
Conclusion ........................................................................................... 28
Références ............................................................................................ 29
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Abréviations
DVE Dérivation Ventriculaire Externe
HSA Hémorragie Sous-Arachnoïdienne
LCR Liquide Céphalo-Rachidien
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Introduction
La pose d’un cathéter de dérivation ventriculaire externe (DVE) est un geste fréquent
en neurochirurgie afin d’évacuer le liquide céphalo-rachidien (LCR), le plus souvent au cours
d’une hydrocéphalie aiguë, secondaire à une obstruction de la libre circulation du LCR,
comme dans l’hémorragie sous-arachnoïdienne (HSA). Cette technique est également
proposée dans le traitement de l’hypertension intracrânienne d’origine traumatique ou
secondaire à un processus expansif, en cas d’insuffisance du traitement médical seul. Les
patients bénéficiant de ce traitement sont pris en charge en réanimation ou en unité de
surveillance continue.
Le LCR est considéré comme un milieu propice à la croissance bactérienne, les
moyens de défenses immunitaires y étant pratiquement inexistants. Le taux de leucocytes
immunocompétents circulants n’y est que de 0,1%, les taux d’immunoglobulines et de
compléments y sont très bas, et la réduction de l’activité opsonisante limite le pouvoir de
phagocytose et de bactéricidie naturelle. La barrière hémato-encéphalique constitue une
barrière de protection naturelle. En faisant communiquer le LCR avec le milieu extérieur, la
DVE expose ainsi à des complications infectieuses.
I- Diagnostic des complications infectieuses liées aux cathéters de DVE
Les complications infectieuses en rapport avec les DVE regroupent plusieurs entités
cliniques difficiles à distinguer. Les termes de méningite, de ventriculite, ou d’infection liée
au cathéter de DVE, expression plus générale comprenant les deux atteintes infectieuses
précédentes sont fréquemment employés dans la littérature. La colonisation du cathéter est
également une complication infectieuse classique.
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La définition des complications infectieuses, et leurs critères diagnostiques varient et il
n’existe pas de consensus. En 1984, Mayhall et al.1 définissaient ces infections par une culture
de LCR positive indépendamment d’autres éléments diagnostiques. Bien que cette définition
ne distinguait pas les contaminations, les colonisations du cathéter et les infections, celle-ci a
été reprise dans la majorité des études suivantes. En 2002, une revue de la littérature2
proposait une définition permettant une distinction entre les différentes situations clinico-
biologiques, sans préciser les valeurs seuil de glycorachie, de protéinorachie ou de comptage
des éléments cellulaires. Ainsi, il est distingué :
- la contamination, lorsqu’un prélèvement isolé de LCR est positif, sans autre anomalie
biochimique, cellulaire ou clinique,
- la colonisation, lorsque plusieurs prélèvements de LCR sont positifs au(x) même(s)
germe(s), sans autre anomalie biochimique, céllulaire ou clinique,
- l’ infection liée à la DVE probable, lorsqu’il existe une décroissance progressive de la
glycorachie, un accroissement de la protéinorachie, l’installation d’une pléïocytose, en
l’absence de positivité bactériologique du LCR,
- l’infection liée à la DVE avérée, lorsqu’aux éléments précédents s’ajoute la positivité
bactériologique d’un ou plusieurs prélèvements de LCR,
- la ventriculite, lorsqu’aux éléments précédents s’ajoutent des signes cliniques en
faveur, tels qu’une raideur de nuque, une photophobie, une altération de l’état de
conscience et des convulsions notamment.
Certaines études intègrent aussi la culture du cathéter, lors de son ablation, dans la
démarche diagnostique3,4
. Ces infections restent difficiles à identifier. Il faut souligner la
rareté des signes cliniques par rapport aux méningites communautaires, et surtout leur manque
de spécificité. En effet, la fièvre, la raideur de nuque, les vomissements, l’altération de l’état
de conscience peuvent s’inscrire dans le tableau sémiologique d’une HSA en dehors de toute
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infection neuro-méningée. La fièvre isolée perd également de sa spécificité en contexte post-
opératoire. L’examen direct du LCR ne serait positif que dans 46% des cas d’infection5.
L’hypoglycorachie serait le signe biochimique le plus sensible, mais l’ischémie cérébrale
serait à l’origine de 35% de faux positifs, et les faux négatifs pourraient atteindre 40%6.
D’autres marqueurs comme le D-lactate, ou le rapport hématies/leucocytes dans le LCR, plus
ou moins rapporté au rapport plasmatique ont aussi été proposés, sans permettre un diagnostic
formel. Ainsi, en l’absence de marqueurs spécifiques, les auteurs s’accordent sur une
approche dynamique des différents éléments du LCR pour poser le diagnostic d’infection sur
DVE. Finallement, il existe actuellement une controverse sur la fréquence des prélèvements
de LCR, et sur l’intérêt de pratiquer des examens biologiques systématiques pour améliorer
leur sensibilité, ou guidés par l’examen clinique. Ces choix sont à mettre en balance avec le
risque lié à la manipulation de la DVE lors des prélèvements.
II- Epidémiologie des complications infectieuses
Les complications infectieuses liées à la pose d’une DVE sont rapportées chez 2 à
22% des patients, les plus grandes séries publiées retrouvant des résultats homogènes aux
alentours de 10%7,8,9
. Cette grande variabilité s’explique essentiellement par l’hétérogénicité
des définitions précédemment décrites. En regroupant les résultats de 23 études2, le taux de
cultures positives de LCR était de 8,8% par patient, mais ces cultures n’étaient pas toujours
associées à une infection.
III- Facteurs de risque
Quelques facteurs de risque ont été suggérés dans la littérature. L’existence d’un LCR
hémorragique, comme dans le cas de l’HSA ou d’une hémorragie intraventriculaire d’autre
cause, pourrait multiplier par quatre le risque infectieux4. L’existence d’une embarrure
crânienne est rapportée comme un facteur de risque associé aux complications infectieuses9,
bien que dans ce cas, le rôle de la DVE soit moins évident. L’association d’une DVE à une
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intervention neurochirurgicale par craniotomie pourrait également favoriser ces infections1,9
.
L’injection rétrograde dans le circuit de DVE a été rapportée comme facteur de risque dans
une seule étude prospective1. La fuite de LCR autour du cathéter favoriserait ces infections
10,
mais l’association semble disparaître en cas de tunnelisation du cathéter1,11
. Les autres
facteurs de risque cités dans la littérature sont l’existence d’une infection systémique9, d’une
durée de cathétérisme prolongée1,11
et d’une corticothérapie11
.
Le recours à une antibioprophylaxie maintenue jusqu’à l’ablation de la DVE n’a pas
d’intérêt démontré, et pourrait même décaler l’épidémiologie bactérienne de ces infections
vers des bactéries multirésistantes et des germes fongiques12,13
.
IV- Physiopathologie
La physiopathologie des infections sur DVE n’est pas bien documentée. Par analogie avec
les cathéters veineux centraux, il existe classiquement quatre mécanismes possibles :
- La voie hématogène.
- La voie de colonisation extraluminale, avec progression des germes sur la face externe
du cathéter à partir du point d’insertion cutanée.
- La voie endoluminale.
- L’inoculation directe au moment de la pose du cathéter.
La part respective et la réalité de chacun de ces mécanismes ne sont pas connues. Des
données sont disponibles concernant les infections liées aux cathéters veineux centraux, dont
la porte d’entrée infectieuse semble être essentiellement la progression extra-luminale des
germes à partir du patient. La méthode d’écouvillonnage a permis d’étudier la
physiopathologie infectieuse dans ce contexte14,15
. Son intérêt diagnostique repose
essentiellement sur une valeur prédictive négative élevée dans ces études, permettant ainsi
pour certains experts d’écarter une infection après un écouvillonnage cutané négatif. Cette
méthode n’a pas été proposée dans le contexte du diagnostic des infections sur DVE.
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V- Objectif de l’étude
L’objectif principal de l’étude était d’évaluer la part des voies physiopathologiques endo
et extraluminales des complications infectieuses liées aux DVE (colonisations et infections),
par une méthode d’écouvillonnage. Les objectifs secondaires étaient de tester les valeurs
diagnostiques de cette méthode et de rechercher des facteurs de risque associés aux
complications infectieuses liées aux DVE.
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Matériel et Méthodes
Il s’agit d’une étude de cohorte observationnelle réalisée au sein du service d’anesthésie-
réanimation du GHU Henri Mondor à Créteil sur des patients admis entre juin 2010 et février
2011, et qui ont bénéficié de la pose d’une DVE. Pour chaque patient éligible à l’étude, une
feuille de recueil nominative a été créée, les données ont été collectées de façon prospective et
analysées de façon rétrospective. Cette étude a reçu un avis favorable du Comité de Protection
des Personnes - Ile-de-France IX. Dans la notification d’avis favorable, le Comité a qualifié la
présente étude comme non interventionnelle et ne relevant pas de la loi Huriet modifiée.
I- Population étudiée
Tous les patients porteurs d’un cathéter de DVE et admis en réanimation chirurgicale et
traumatologique, ou en unité de surveillance continue rattachée au service d’anesthésie-
réanimation, dans le cadre ou non de la grande garde de neurochirurgie de l’Ile-de-France,
étaient inclus. Les patients présentant une infection du système nerveux central connue à la
pose de la DVE, et ceux présentant une embarrure chirurgicale du crâne, n’étaient pas inclus.
Les patients dont le cathéter était retiré ou qui décédaient avant le quatrième jour étaient
exclus.
II- Pose du cathéter de DVE
Toutes les poses de DVE étaient effectuées au bloc opératoire, par un neurochirurgien
interne ou sénior, en conditions d’aseptie chirurgicales, et sous anesthésie générale. La tête du
patient était tondue, lavée, puis préparée avec une solution de chlorexidine alcoolisée. Un
cathéter siliconé était introduit par un orifice précoronal et parasagittal (3 cm), jusque dans le
ventricule cérébral homolatéral. Le cathéter était ensuite tunnélisé en sous-cutané pour obtenir
un orifice de sortie cutané postérieur de 6 à 8 cm. La DVE était fixée par des fils de rappel.
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L’extrémité libre était raccordée au système de la DVE.
Le cathéter ventriculaire utilisé (Bactiseal® Codman®, Johnson&johnson™, Raynham,
Massachusetts, USA), dans sa portion intraparenchymateuse, est un cathéter imprégné d’une
combinaison de clindamycine à 1,5% et de rifampicine à 0,054%, avec diffusion endo et
extraluminale.
L’antibioprophylaxie peropératoire dans cette indication était laissée à l’appréciation
de l’équipe médicale en charge du patient.
III- Procédure de soins locaux de DVE
En accord avec les pratiques d’hygiène du centre, validées par le Comité de Lutte contre
les Infections Nosocomiales, les soins locaux étaient effectués tous les deux jours à partir
d’une procédure écrite, ou plus fréquemment en cas de nécessité (examen clinique, pansement
mobilisé ou fuite de LCR). Les soins étaient effectués sous respect d’une asepsie stricte, après
décontamination des mains par solution hydro-alcoolique, et en utilisant des gants stériles. Le
patient bénéficiait d’un shampooing contenant de la chlorexidine, puis de la chlorexidine
acqueuse était appliquait en deux temps, et en laissant agir au moins deux minutes. Une
compresse stérile et grasse était appliquée en cravate autour du point d’insertion du cathéter,
recouverte de compresses stériles et de bandes. Enfin, le robinet proximal du système de
recueil était fixé au pansement.
IV- Réalisation des écouvillonnages
Une paire d’écouvillonnage était réalisée à chaque soin local de DVE, soit tous les deux
jours après la pose. Chaque paire comportait un écouvillonnage cutané sur une surface
d’environ 4 cm2 autour du point d’insertion du cathéter, réalisé avant les soins d’asepsie, ainsi
qu’ un écouvillonnage de la face interne du robinet distal du système de drainage. Le choix de
ce robinet par rapport au robinet proximal résulte de la plus grande fréquence de sa
manipulation du fait des prélèvements de LCR, le robinet proximal ne devant être
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qu’exceptionnellement manipulé, en général par l’équipe médicale, et sur justification
(confirmation biologique d’un résultat anormal, injection intra-ventriculaire d’antibiotique ou
de fibrinolytique). Les écouvillons étaient au préalable humidifiés par une solution de sérum
salé isotonique stérile. Ils étaient acheminés directement au laboratoire de microbiologie, pour
mise en culture.
Les écouvillons étaient ensemencés directement sur différents milieux de culture : gélose
tryptone-soja (non spécifique), gélose Columbia ANC (spécifique des cocci à Gram positif) et
gélose Drigalski (spécifique des bacilles à Gram négatif). Tous les milieux étaient incubés à
37°C pendant deux jours. Durant ces deux premiers jours, les cultures étaient examinées
quotidiennement. En cas de culture positive à un germe pathogène, une identification et un
antibiogramme étaient réalisés. Si la culture était positive à un germe commensal de la peau
(Staphylocoque à coagulase négative, Corynébactérie), la souche était conservée pour
comparaison ultérieure en cas de positivité du LCR ou du cathéter.
V- Surveillance biologique du LCR
La pratique habituelle reposait sur un prélèvement quotidien du LCR drainé par le système
de collecte de la DVE, et sur une analyse biochimique pour mesure de la glycorachie et de la
protéinorachie, et en bactériologie pour examen cytologique et bactériologique.
La méthode d’analyse bactériologique reposait sur :
- l’aspect macroscopique du LCR,
- la numération des éléments nucléés et des hématies dans une cellule de comptage, en
microscopie optique,
- la réalisation d’une formule en cas de présence de plus de dix éléments nucléés,
- l’examen direct après coloration de Gram, et l’observation au microscope sur lame
cerclée par cytocentrifugation,
- l’ensemencement sur plusieurs milieux de culture à 37°C, dont :
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o une gélose tryptone-soja pendant deux jours,
o une gélose au sang pendant deux jours,
o un bouillon Schaedler pendant cinq jours,
o une gélose chocolat Polyvitex pendant cinq jours.
VI- Données recueillies
Pour chaque patient inclu, les données suivantes étaient collectées sur une feuille de
recueil nominative:
Caractéristiques démographiques :
Age, genre, existence d’une immunodépression, antécédent d’intervention
neurochirurgicale récente et de mise en place de matériel étranger intracrânien.
Caractéristiques en rapport avec l’admission :
Score IGS2, motif et date d’hospitalisation, score initial de Glasgow, score de Fischer
et WFNS en cas d’HSA, existence d’une hémorragie intra-ventriculaire.
Caractéristiques en rapport avec la pose du cathéter :
Date de la pose, indication, acte neurochirurgical ou radio-interventionnel associé (et
le cas échéant, durée du geste), pose de DVE bilatérale, expérience du chirurgien, contexte
d’urgence ou non, antibioprophylaxie.
Caractéristiques en rapport avec l’évolution du patient :
Changement de DVE et motif, durée de séjour en réanimation, décès.
Variables en rapport avec la surveillance infectieuse :
Survenue d’une complication infectieuse liée à la DVE (colonisation ou infection),
survenue d’une infection systémique, résultats bactériologiques des examens directs et des
cultures de LCR, des cathéters, des écouvillonnages du site d’insertion cutanée et du robinet
distal.
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Evènements liés à la DVE :
Nombre de jours d’arrêt du drainage, déconnexion accidentelle du système de recueil,
manipulation du robinet proximal, injection dans le cathéter, fuite de LCR au point
d’insertion.
VII- Analyses statistiques
Les données recueillies ont été codées en variables avec le logiciel SPSS™ statistics
version 17.0® (SPSS Inc., Chicago, Illinois, USA) sous forme de fichier informatique
anonymisé. Le test de Shapiro Wilk a été utilisé avant de permettre l’expression des variables
continues en moyenne ± écart-type, ou, à défaut, en médiane et distances interquartiles (25ème
et 75ème
percentiles). Les variables nominales sont exprimées en effectifs et pourcentages. Les
comparaisons entre variables qualitatives ont été effectuées avec le test du Khi-2, ou le test
exact de Fisher lorsque les effectifs théoriques n’étaient pas appropriés. Les comparaisons
entre variables quantitatives ont été réalisées par le test de Mann-Whitney. L’analyse
actuarielle a été réalisée par la méthode de Kaplan-Meier, et les courbes ont été comparées par
le test du Log Rank. Une valeur de p < 0,05 était considérée comme statistiquement
significative. S’agissant d’une étude descriptive et en l’absence de données publiées sur cette
méthode, aucun calcul de nombre de patients à inclure a priori n’a été effectué.
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Résultats
I- Caractéristiques de la population
Soixante-deux patients ont été inclus. Onze patients ont été exclus a posteriori: trois pour
absence de réalisation d’écouvillonnage et huit pour retrait du cathéter avant le quatrième
jour. L’analyse finale portait sur 51 patients. Leurs caractéristiques démographiques sont
représentées dans le tableau 1.
Tableau 1 : Caractéristiques démographiques
Caractéristique Valeur
Age 59 [43-63]
Sexe
Homme 22 (43,1)
Femme 29 (56,9)
Motif d’admission
HSA 34 (66,7)
Traumatisme crânien 3 (5,9)
Tumeur intra-crânienne 5 (9,8)
Autre 9 (17,6)
IGS II 28 [15-45]
Glasgow à l’admission 10 [6-14]
WFNSa
1 10 (29,4)
2 8 (23,5)
3 2 (5,9)
4 6 (17,6)
5 8 (23,5)
Fishera
2 2 (5,9)
3 4 (11,8)
4 28 (82,4)
Immunodépression 2 (3,9)
Neurochirurgie récente 4 (7,8)
Hémorragie intra-ventriculaire 39 (76,5)
Durée de séjour en réanimation 20 [15-26]
Décès en réanimation 10 (19,6)
Résultats exprimés en médiane [quartiles] ou n (%) a Sous-groupe des HSA.
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Soixante-trois cathéters de DVE ont été posés, dont 2 patients porteurs de DVE bilatérale, et
10 changements de cathéter. Les caractéristiques liées à la pose sont présentées dans le
tableau 2.
Tableau 2 : Caractéristiques liées à la pose du cathéter
Caractéristique Valeur
Antibioprophylaxie
Oui 13 (20,6)
Non 47 (74,6)
Donnée manquante 3 (4,8)
Expérience du chirurgien
Senior 32 (50,8)
Interne 27 (42,9)
Donnée manquante 4 (6,3)
Contexte d’urgence
Oui 56 (88,9)
Non 5 (7,9)
Donnée manquante 2 (3,2)
Durée de la pose 40 [40-40]
Intervention associée à la pose
Aucune 57 (90,4)
Embolisation 3 (4,8)
Résection tumorale 3 (4,8)
Cathéter bilatéral 2 (3,9)
Indication de pose de DVE
Hydrocéphalie 63 (100)
Résultats exprimés en médiane [quartiles] ou n (%)
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II- Résultats bactériologiques et complications infectieuses
Quatre-cent quatre-vingt quinze écouvillonnages ont été réalisés, dont 249 au niveau du
site d’insertion cutané, et 246 au niveau du robinet distal. 660 échantillons de LCR ont été
analysés en bactériologie. Soixante-treize écouvillonnages de peau (29,3%) étaient positifs,
dont 14 (5,6%) en rapport avec une complication infectieuse. Trente-deux écouvillonnages de
robinet (13%) étaient positifs, dont 2 (0,8%) en rapport avec une complication infectieuse.
Dix-sept échantillons de LCR (2,6%) étaient postifs, dont 15 (2,3%) en rapport avec une
complication infectieuse, et 2 (0,3%) en rapport avec une contamination (prélèvement positif
isolé, sans autre anomalie clinico-biologique). Cinquante-trois cathéters ont été mis en culture
à l’ablation. Leur culture était positive dans 6 cas, dont 3 en rapport avec une infection et 3 en
rapport avec une colonisation. Ces résultats sont résumés dans la figure 1. Au total, 6 cas
d’infection et 3 cas de colonisation du cathéter ont été observés. Ces cas sont rapportés dans le
tableau 3.
L’incidence des infections liées aux DVE était de 11,8% par patient , et de 17,6% par
patient en prenant en compte les colonisations. La cohorte a été exposée à une DVE durant un
total de 770 jours, la densité d’incidence était de 7,8 cas pour 1000 jours de DVE pour les
infections, et de 11,7 cas pour 1000 jours de DVE pour l’ensemble des complications
infectieuses.
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Figure 1 : Prélèvements bactériologiques réalisés
Tableau 3 : Descriptif des cas de complication infectieuse
Patient
n°
Nature de la
complication
infectieuse
Délai
(J)
Culture du
LCR
Culture du
cathéter
Ecouvillonnage
concordant Délai entre
écouvillonnage
et diagnostic
(J)
Autre infection
au(x) même(s)
germe(s) Cutané Robinet
1 Infection 25 K. pneumoniae E. gergoviae,
K. pneumoniae, E.coli
Oui Non 8 Oui
2 Infection 13 E.faecalis Négative Oui Non 2 Oui
3 Infection 24 S. aureus Négative Oui Non 9 Non
4 Infection 19 S.epidermidis
méti-R
S.epidermidis
méti-S
Non Oui 5 Non
5 Infection 7 E.faecalis Non faite Non Non - Non
6 Infection 8 E.faecalis E.faecalis Oui Non 0 Non
7 Colonisation - Négative S.epidermidis Oui Non 2 Non
8 Colonisation - Négative Staphylocoque à coagulase -
Oui Non 5 Non
9 Colonisation - Négative E. cloacae Oui Non 10 Non
176
214
643 47
59
30 2 14
2 15
6
Ecouvillonnage de peau Ecouvillonnage de robinet
Culture de LCR Culture de cathéter
N négatifs
N positifs sans rapport avec une complication infectieuse
N positifs en rapport avec une complication infectieuse
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Sept complications infectieuses sur les neuf observées étaient associées à un
écouvillonnage cutané au point d’insertion du cathéter positif et concordant au même germe,
sans écouvillonnage du robinet positif concordant. Deux d’entre eux survenaient dans un
contexte de sepsis extra-neurologique documenté au germe responsable. Sur les deux cas de
complications infectieuses restants, un était associé à un écouvillonnage du robinet
concordant, et le dernier n’était associé à aucun écouvillonnage concordant.
Les six cas d’infection liée à la DVE étaient toujours documentés sur un prélèvement
de LCR, tandis qu’aucun des trois cas de colonisation ne l’était. Ces derniers ont tous été
documentés à partir de la mise en culture du cathéter à son ablation.
III- Chronologie de colonisation des sites écouvillonnés
Le délai du premier écouvillonnage positif pour chaque cathéter a été analysé par la
méthode de Kaplan-Meier (Figure2). Le délai médian d’écouvillonnage cutané positif était de
8 jours, alors que moins de la moitié des cathéters étaient associés à un écouvillonnage de
robinet positif. Les courbes étaient significativement différentes (p=0,001).
Figure 2 : Analyse de Kaplan-Meier pour délai d’écouvillonnage positif
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IV- Valeurs diagnostiques
En prenant en compte l’ensemble des complications infectieuses (infections sur DVE et
colonisations), la sensibilité d’une série d’écouvillonnage cutané au point d’insertion du
cathéter systématiques était de 7/9 (77,8%) et sa spécificité de 17/42 (40,5%).
Dans cette cohorte, où l’incidence des complications infectieuses était de 17,6% par
patient, la valeur prédictive positive était de 21,9% et la valeur prédictive négative de 89,5%.
V- Facteurs associés aux complications infectieuses
Parmi les facteurs étudiés, seule la fuite de LCR était associée aux complications
infectieuses (p=0,04). Les résultats des analyses univariées sont présentés dans le tableau 4.
Tableau 4 : Analyses univariées pour le risque de présenter une complication infectieuse
Facteur étudié
n (%) ou médiane [quartiles]
Rapport de
cotes
[IC 95%]
Valeur de P Complication
infectieuse
n=9
Absence de
complication
infectieuse
n=42
Neurochirurgie < 3mois 0 (0) 4 (9,5) - 1
Chirurgie associée à la pose de DVE 0 (0) 3 (7,1) - 1
Hémorragie intra-ventriculaire 8 (88,9) 31 (73,8) 2,84 [0,32-25,36] 0,666
HSA 7 (77,8) 27 (64,3) 1,94 [0,36-10,57] 0,699
Antibioprophylaxie peropératoire 1 (11,1) 9 (22) 0,44 [0,05-4,04] 0,665
Pose de DVE par interne 5 (55,6) 17 (42,5) 0,59 [0,14-2,54] 0,713
Changement de cathéter 2 (22,2) 7 (16,7) 1,43 [0,24-8,37] 0,651
Fermeture du drainage 6 (66,7) 35 (83,3) 0,4 [0,08-1,99] 0,353
Déconnection accidentelle 1 (11,1) 5 (11,9) 0,92 [0,09-9,03] 1
Prélèvement proximal 3 (33,3) 5 (11,9) 3,7 [0,7-19,68] 0,137
Fuite cutanée de LCR 4 (44,4) 5 (11,9) 5,92 [1,18-29,7] 0,04
Injection dans la DVE 1 (11,1) 4 (9,5) 1,19 [0,12-12,09] 1
Durée de cathétérisme (J) 17 [12,5 – 20] 14 [9,7 – 19] - 0,207
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Discussion
Six cas d’infection sur DVE et trois cas de colonisation ont été observés. Sur ces neuf cas
de complications infectieuses, sept (77,8%) retrouvaient un écouvillonnage cutané au point
d’insertion du cathéter positif au même germe que celui responsable de la complication
infectieuse, sans qu’aucun écouvillonnage du robinet ne mette en évidence ce germe. Le
choix du robinet distal par rapport au robinet proximal dans la réalisation des écouvillonnages
résulte de la plus grande fréquence de sa manipulation du fait des prélèvements de LCR, le
robinet proximal ne devant être qu’exceptionnellement manipulé, en général par l’équipe
médicale, et sur justification (confirmation biologique d’un résultat anormal, injection intra-
ventriculaire d’antibiotique ou de fibrinolytique). Il était alors logique qu’une colonisation
endoluminale éventuelle par un germe extérieur provienne de ce robinet.
Dans six cas de complication infectieuse, les écouvillonnages cutanés au point d’insertion
du cathéter étaient obtenus avant le diagnostic de complication infectieuse et dans un cas, le
jour du diagnostic. Ainsi, ces données orienteraient vers une voie de progression extra-
luminale du germe.
Dans deux cas sur les sept ayant un écouvillonnage cutané au point d’insertion du cathéter
concordant avec le germe responsable, le patient présentait un sepsis extra-neurologique
documenté au même germe. Ceci pose la question de la possibilité d’une diffusion
hématogène du germe. Cette hypothèse reste peu probable, compte-tenu de la présence du
germe sur l’interface entre la peau et la DVE avant le développement de l’infection. Une
contamination indirecte de la peau du patient par son environnement est possible. En effet,
une étude suggère que la décontamination de l’environnement du patient pourrait influencer
sa flore bactérienne, et notamment diminuer le portage de bactéries multirésistantes16
. Par
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22
ailleurs, la faible proportion de patients développant une méningite secondaire à partir d’un
foyer non contigu aux méninges, lorsqu’ils ne sont pas porteurs d’une DVE, rend également
cette hypothèse peu probable. Les germes mis en cause dans la méningite, hors contexte de
DVE , sont en majorité des germes encapsulés (Streptococcus pneumoniae, Neisseria
meningitidis) qui n’étaient pas retrouvés dans cette étude, et les facteurs de risque rapportés de
ces méningites font souvent référence à un foyer de contiguïté (otite moyenne, sinusite),
minimisant ainsi le rôle de la diffusion hématogène17
.
Parmis les deux autres cas où aucun écouvillonnage cutané au point d’insertion du
cathéter n’a pu mettre en évidence le germe responsable de la complication infectieuse, un
d’entre eux était associé à un écouvillonnage de robinet concordant au germe responsable et il
s’agissait d’une infection survenant à 19 jours de la pose du cathéter. Malgé cela, il n’est pas
formel que la voie de contamination initiale était endo-luminale car l’écouvillonnage du
robinet mettant en évidence le Staphylocoque epidermidis responsable de l’infection était
obtenu le jour même du premier échantillon de LCR positif à ce germe, bien que le tableau
infectieux se soit déclaré cinq jours plus tard. Or, la paroi endo-luminale du système de
drainage et le robinet écouvillonné étaient déjà contaminés par le LCR, sans savoir si la
progression du germe avait été initialement antérograde ou rétrograde. Pour le dernier cas
d’infection sur DVE, aucun écouvillonnage n’a pu identifier le germe avant l’infection, et
aucune hypothèse n’a alors pu être privilégiée.
Sur l’ensemble des complications infectieuses observées, ces données suggèrent donc
qu’au moins sept cas sur neuf pouvaient être dus à une progression du germe à partir de
l’interface entre la peau du patient et le cathéter, excluant ainsi le passage initial du germe par
l’intérieur du circuit. Ces données pourraient expliquer en partie les résultats d’une étude
rétrospective qui ne retrouvait pas de diminution des infections liées à la DVE chez les
patients dont le cathéter avait été changé systématiquement dans les cinq premiers jours9. En
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effet, si le germe colonise le cathéter préférentiellement à partir de la peau du patient, le
changement de l’intégralité du circuit pourrait avoir moins d’impact sur la prévention de ces
infections, puisque le réservoir de germes se trouve déjà sur la peau du patient.
En 1994, une étude utilisait une méthode d’écouvillonnage dans le diagnotic des
infections sur cathéter veineux central, en écouvillonnant la peau du patient et le pavillon du
cathéter15
. Tous les écouvillonnages de peau étaient positifs en cas de colonisation du
cathéter. Les auteurs ont conclu que dans ce type d’infection, la principale voie conduisant à
la colonisation et à l’infection était la progression du germe à partir de la peau du patient.
L’analyse actuarielle représentant la probabilité d’écouvillonnage positif en fonction du
temps a été réalisée en considérant le délai d’obtention du premier écouvillonnage positif pour
chaque cathéter de DVE, s’il avait lieu. La pertinence de cette analyse est contestable. En
effet, après un écouvillonnage positif, il était assez fréquent d’obtenir des écouvillonnages
négatifs sur le même site. La mise en évidence de germes sur ces sites, et donc leur
colonisation, ne constituait pas un phénomène irréversible. Cependant, non seulement il y
avait plus de cathéters ayant au moins un écouvillonnage cutané au point d’insertion du
cathéter positif qu’ un écouvillonnage du robient positif (55,6 contre 28,6%, respectivement),
mais au sein de chaque série, les écouvillonnage cutané au point d’insertion du cathéter
devenaient plus rapidement positifs. Ceci suggère que l’interface entre la peau et la DVE était
colonisée avec plus de facilité que le robinet du système de recueil. Les deux courbes étaient
significativement différentes (p=0,001).
Trois complications infectieuses étaient documentées à Staphylocoque à coagulase
négative et un cas à Staphylococcus aureus. Ces résultats sont concordant avec la fréquence
connue des germes saprophytes de la peau dans ce type d’infection. La littérature révèle une
prédominance des germes saprophytes de la peau, comme Staphylococcus epidermidis,
Staphylococcus aureus, et des streptocoques, pouvant atteindre jusqu’à 85% des cas8.
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D’autres bactéries sont également incriminées, et quelques études retrouvent un éventail très
large de germes impliqués, les germes cutanés étant parfois minoritaires18
. Les bacilles à gram
négatif ne sont pas rares, et souvent responsables d’une mortalité accrue pouvant atteindre 20
à 30%6,19
. Notre cohorte retrouvait trois cas de complications infectieuses documentées à
Enteroccocus faecalis et deux cas à enterobactéries (Klebsiella pneumoniae et Enterobacter
cloacae). Ainsi les germes saprophytes de la peau ne représentaient que 44,4% des cas de
complications infectieuses. Ceci pourrait s’expliquer en grande partie par le modèle du
cathéter utilisé dans le centre, qui est imprégné de rifampicine et de clindamycine. Ces
antibiotiques ont une efficacité moins constante sur les entérocoques et les entérobactéries, et
l’ activité antibactérienne in vivo de ces cathéters a essentiellement été étudiée sur les germes
saprophytes de la peau20
. Ainsi, bien que l’incidence des complications infectieuses soit
équivalente à celle des données publiées, l’épidémiologie bactérienne était constituée de
germes moins fréquents. L’antibiothérapie reçue par le patient, sa durée de séjour, l’écologie
bactérienne du service sont autant d’éléments pouvant expliquer une flore cutanée inhabituelle
à l’origine des résultats observés.
Les valeurs diagnostiques déterminées pour l’outil d’écouvillonnage dans le diagnostic
des complications infectieuses, constituant de véritables infections ou des colonisations,
pourraient être intéressantes en pratique. En effet, la valeur prédictive négative d’une série
d’écouvillonnage cutané au point d’insertion du cathéter systématiques atteignait 89,5%. Ce
résultat était proche de celui retrouvé dans des études concernant le diagnostic des infections
précoces sur cathéter veineux central par méthode d’écouvillonnage, dont la voie
physiopathologique prédominante est la progression extra-luminale du germe17,18
. Ces études
rapportent des valeurs prédictives négatives supérieures à 90%. Dans le cas d’une DVE, cette
méthode pourrait permettre d’écarter une complication infectieuse devant un écouvillonnage
cutané au point d’insertion du cathéter négatif avec un risque d’erreur acceptable. Néanmoins,
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il faut préciser que cette valeur correspond ici à une série d’écouvillonnages sans prise en
compte du contexte clinique et biologique, et les valeurs diagnostiques d’un seul
écouvillonnage devant une suspicion de complication infectieuse n’ont pas été étudiées. Dans
ce cas, il serait attendu que cette valeur prédictive négative puisse décroitre par la perte de
sensibilité liée à la réalisation d’un écouvillonnage unique, et également par augmentation de
la prévalence dans une sous-population de patients suspects de présenter une complication
infectieuse. Dans la mesure où cette étude n’était méthodologiquement pas prévue pour
déterminer des valeurs diagnostiques utilisables en pratique clinique, d’autres études seront
nécessaires pour déterminer l’intérêt de cet outil dans ce contexte. En revanche, la faible
spécificité de l’écouvillonnage cutané au point d’insertion du cathéter rend inutilisable cet
outil dans le diagnostic positif d’une complication infectieuse. Enfin, aucune donnée n’est
disponible concernant la modification des valeurs diagnostiques de l’outil d’écouvillonnage
en cas de cathéter imprégné d’antibiotique.
Seule la fuite de LCR était associée à la survenue d’une complication infectieuse
(p=0,04). Ce résultat corrobore l’hypothèse de la porte d’entrée extra-luminale. En effet, dans
le cas d’une fuite cutanée de LCR, la communication entre le point d’insertion cutanée et le
ventricule du patient est plus large, et la progression des germes pourrait devenir plus facile.
La présence de LCR jusqu’à la surface cutanée pourrait apporter l’humidité et les nutriments
nécessaires à la croissance bactérienne.
Aucun autre facteur de risque étudié, notamment ceux habituellement retrouvés dans la
littérature (HSA, hémorragie intraventriculaire, intervention neurochirurgicale associée à la
pose du cathéter, injection dans le circuit, durée de cathétérisme), n’a été confirmé sur notre
cohorte, probablement à cause du faible effectif de patients. En effet, certains facteurs étudiés
ont été peu obervés et seule une très forte association à la survenue d’une complication
infectieuse aurait pu être détectée. D’autres facteurs de risques précédemment mis en
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évidence ne pouvaient être étudiés dans la cohorte, soit parce qu’ils faisaient partie des
critères de non inclusion (embarrure crânienne, fracture de la base du crâne), soit parce qu’ils
étaient trop peu observés ou inexistants dans le centre (pose de la DVE en dehors du bloc
opératoire, immunosuppression, contexte non urgent, DVE bilatérale).
Le faible nombre de patients inclus n’a permis d’observer que neuf cas d’évènements
infectieux. Les résultats observés sont à confirmer sur une plus grande cohorte de patients.
Par ailleurs, le respect du protocole n’était pas parfait. Le schéma de l’étude prévoyait la
réalisation d’une paire d’écouvillonnage tous les deux jours. Cette fréquence était soumise à
la régularité des soins locaux de DVE, qui souvent, n’ont pas été exécutés tous les deux jours
conformément à la procédure. Par ailleurs, chaque patient avait en réalité fait l’objet d’un
écouvillonnage cutané au point d’insertion du cathéter en médiane 3 [2,53 - 4] J et d’un
écouvillonnage de robinet pour 3,17 [2,67-4] J, ce qui est au-dessus de ce qui était prévu. Cet
écart au protocole a pu introduire une tendance à sous-détecter les colonisations des sites
écouvillonnés. Enfin, dix cathéters (15,9%) n’ont pas été mis en culture, ce qui a pu induire
une sous-détection des colonisations de DVE.
Les implications cliniques de ces résultats sont multiples. En effet, les soins locaux du
site d’insertion cutané du cathéter joueraient un rôle primordial dans la prévention de ces
infections. Cet aspect de la prise en charge ne doit pas être sous-estimé. Par ailleurs, il est
admis que les manipulations du cathéter ou de son système de recueil sont à éviter, tant le
risque infectieux lié à l’ouverture du circuit pourrait être à l’origine de complications
infectieuses. Pourtant, les données obtenues dans cette cohorte ne rapportent pas d’argument
de fréquence en faveur d’une telle porte d’entrée. Si ces résultats étaient confirmés, ils
pourraient relativiser le risque du recueil quotidien pour l’analyse biologique du LCR, bien
que cette attitude n’ait pas démontré d’intérêt par rapport aux analyses biologiques
ponctuelles, et que toute manipulation du circuit doit rester une procédure médicalement
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justifiée et réalisée dans le strict respect des règles habituelles d’asepsie. Enfin, cette
connaissance physiopathologique pourrait contribuer à l’amélioration de la fabrication des
cathéters imprégnés d’antibiotiques, adaptés à l’écologie bactérienne locale.
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Conclusion
Parmi les différentes voies physiopathologiques conduisant à la colonisation et à
l’infection liées aux cathéters de DVE, la progression extra-luminale des germes à partir du
point d’insertion cutanée du cathéter semblerait être la voie principale. Cette donnée suggère
l’importance, dans la prévention de ces infections, des soins locaux d’asepsie au site
d’insertion cutanée du cathéter, et attire l’attention du médecin sur l’importance de la fuite
cutanée dans la survenue des complications infectieuses. Elle relativise l’importance des
manipulations du système de recueil. L’outil d’écouvillonnage cutané pourrait présenter un
intérêt dans le diagnostic de ces infections, et son évaluation en routine reste à effectuer.
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