Traumatisme abdominal
(adulte et enfant)
K Chaumoitre
Sce Imagerie Médicale
Hôpital Nord
CHU Marseille
Plan
• Généralités
• FAST echo
• Protocole d’exploration TDM
• Lésions à ne pas rater
▫ Fuites actives
▫ Indications d’embolisation
• Lésions subtiles
▫ Mésentère + digestif (Seat-belt)
▫ Diaphragme
▫ Pancréas
• Traumatismes pénétrants
Traumatisme abdominal adulte
• Traumatismes fermés dans 80% des cas• 45 à 75% des cas dans le cadre d’un traumatisme sévère à risque
vital engagé (polytraumatisé)• 5-10% de mortalité• Traitement conservateur +++
• Mécanismes▫ Compression directe ▫ Hyperpression abdominale (ceinture de sécurité)▫ Décélération
• Imagerie ▫ FAST echo▫ Scanner injecté (souvent scanner corps entier)
* Hughes Injury 2002;33: 295-302
Traumatisme abdominal enfant
• 1ère cause de mortalité et morbidité chez l’enfant
• Traumatismes fermés dans plus de 90% des cas (chutes, AVP)
• Traitement conservateur quasi exclusif +++
• Spécificités pédiatriques▫ Faible protection des côtes et des muscles abdominaux
▫ Plasticité osseuse donc peu de fractures de côtes ou du bassin
▫ Organes atteints : rate, foie, reins, pancréas
▫ Volume sanguin faible donc décompensation rapide surveillance et VVP
• Imagerie▫ Échographie première + doppler
▫ Scanner injecté si échographie patho
▫ Suivi écho +++
Critères de gravité enfant
• Chute > 3m ou 3 fois la taille de
l’enfant
• AVP:
▫ Ejection du véhicule
▫ Mort d’un des passagers
▫ Haute cinétique
▫ Déformation de l’habitacle
▫ Piéton, vélo avec impact à
plus de 30 km/h
▫ AVP moto > 30 km/h
Critères rassurants
• Pas de signe clinique en faveur
d’un traumatisme de la paroi abdo
notamment traces de ceinture
• Glasgow > 13
• Pas de douleur abdo ni de
ballonnement
• Pas de signe en faveur d’un trauma
thoracique
• Pas de diminution du murmure
vésiculaire
• Pas de vomissement post trauma
FAST echo
Focused Assessment with Sonography for Traumas
FAST echo
• Installation rapide mais non précipitée
• Accès abdomen et pelvis +++
• De plus en plus souvent faite par les réanimateurs ou les
urgentistes
Les conditions de réalisation
Le rêve La réalité
Matériel
• Échographe portable ou de faible
encombrement
• Sur batterie (allumage rapide)
• Sonde convexe 3-5 MHz
• Sonde linéaire si possible 5-12
MHz
• Adaptation possible avec une
sonde cardio
FAST echo – la base
• Épanchement peritonéal liquidien
▫ Espace de Morrison
▫ Périhépatique
▫ Périsplénique
▫ Gouttières pariétocoliques
▫ Douglas
• Quantification
• Épanchements pleuraux et péricardiques
Règles de base
• Appareil disponible et prêt
• Réglages optimisés
• Patient en décubitus, non mobilisé (-able)
• Dégager au mieux les vêtements surtout en regard du pelvis
et des bases pulmonaires +++
1er quadrant hypochondre droit
Espace hépatorénal de Morisson
Cul de sac pleural droit
Epanchement pleural D
2eme quadrant hypochondre gauche
Espace splénorénal
Cul de sac pleural gauche
Pensez aux gouttières pariétocoliques
Epigastre
AOVCI
péricarde
Épanchement péricardique
Pelvis – cul de sac de Douglas
Cul de sac de Douglas
Quantification de l’épanchement
• Peu précise
• Un seul compartiment chez l’adulte moins de 800 cc
• Tous les compartiments au moins 1,5 l
• S’aider de la taille subjective d’une vessie pleine (350 cc)
• FAST utile uniquement pour la recherche d’épanchement
• Sensibilité et pertinence remise en cause notamment en cas de patient instable à FAST négative*
Score possible
Combiné avec constantes vitales
(Manka M, 2009)
Score <3 hémopéritoine <1 l
Score >3 hémopéritoine >1 l
* Carter JW et al. Injury 2015
Aspect de l’épanchement
• Sang frais anéchogène ou fin piqueté
échogène
• Au bout de qq h sédiment
possible
FAST echo – le plus
• Rétropéritoine
• Pneumopéritoine
• Pneumothorax
• Analyse parenchymes pleins (enfant)
Rétropéritoine
• Difficile +++
• Penser à un hémorétropéritoine si
▫ Aorte et VCI refoulées en avant en
coupes sag
▫ Vessie en forme de poire
(coloquinte)
• Niveau vésical en faveur d’une
hématurie mais peu corrélé avec une
lésion rénale sévère
Pneumopéritoine
• À rechercher à la sonde linéaire en avant du foie gauche à
l’apex de l’abdomen
Atteinte parenchymes pleins
• Difficile en phase aigue
• Atteinte traumatique généralement hyperéchogène peu marquée, aspect hétérogène
• Sous estimée +++ en écho par rapport au scanner donc ne pas s’arrêter à l’écho et compléter par scanner IV
• Aspect globuleux de la rate avec perte de visibilité du hile
• Développement futur de l’écho de contraste?
Traumatisme hépatique
Messages
• FAST echo moins de 5 min : épanchement oui/non,
abondant oui/non
• Si FAST + scanner avec IV
• Chez l’enfant stable, écho plus détaillée pour avoir un examen
de référence pour le suivi par échographie ensuite mais si
écho + scanner avec IV
Protocole TDM
Etage abdominal souvent exploré dans le scanner corps
entier ou scanner TAP
• Équipes entrainées = maitrise technique• Exploration rapide, de qualité optimale, reproductible
• Etage abdomino-pelvien▫ Exploré avec IV , temps artériel et portal▫ Possibilité de protocoles à injection multiphasiques pour avoir un
temps artériel et veineux combiné (« split bolus »)▫ Ne pas hésitez à rajouter un temps semi-tardif 120-160s si
patient en choc circulant mal▫ Temps tardif basse dose si lésion rein et/ou bassin
• Installation du patient primordiale▫ Acquisition bras levés si possible ou bras sur le tronc avec cale
d’interposition
Place du passage sans IV et du tardif
• Pas de bénéfice du passage sans IV dans le cadre du
polytraumatisme
• Intérêt dans un traumatisme abdo isolé?
• Augmentation de la dose et du temps d’examen
• Passage tardif basse dose plus utile (lésion rénale ou bassin)
Cas clinique
• 3h28, nuit du dimanche au lundi
• 64ème examen en coupe de la garde
(dont 10 body-scanners normaux)
• Homme, 40 ans
• AVP « haute cinétique » 2 roues
• Pas de défaillance neurologique,
hémodynamique et ventilatoire
• Asymptomatique
• Accompagné par un externe
(« c’est ma première garde »)
Vous êtes présent à la console. Vous voyez le scout. Que dites
vous au manip?
L’analyse des fenêtres osseuse est normale.
Quelle est votre interprétation?
• CR de la garde (lecture junior + senior): Epanchement
péritonéal isolé
• Avis d’un chirurgien digestif : Surveillance en hospitalisation
• Apparition progressive de douleurs abdominales
• Patient « péritonéal » à H24
Morale de l’histoire
Installation primordiale +++
Patient déshabillé
Sonde urinaire clampée si patient
sondé
Épanchement péritonéal sans lésion
foie/rate
Chercher une atteinte digestive
ou voies urinaires
Hémopéritoine
▫ Spontanément hyperdense (45 UH) à
l’endroit du saignement
▫ Valeur localisatrice (clot sign)
▫ Cette mesure de densité peut se faire
également sur acquisition IV d’emblée
▫ Si hypodense, pensez à un uro-péritoine
temps tardif
Foie - Rate
• Organes souvent touchés (foie 25%, rate 35%)
• Connaitre les lésions élémentaires▫ Contusion▫ Hématome (intraparenchymateux ou sous
capsulaire)▫ Lacération (<3 cm)▫ Fracture (>3 cm)▫ Lésions vasculaires (hémorragique ou
ischémique)
• Critères de gravité▫ Fuite active▫ Fracture hépatique traversant l’arbre
porte/voies biliaires
28 ans, AVP moto faible cinétique
J8 douleurs abdo + fièvre
Qu’évoquez vous?
Biliopéritoine drainage
J 19 : ça s’infecte …J 30: ça saigne …
M2 : il va bien
Reins - vessie
• Temps tardif +++ (en low dose)
• Clamper la sonde urinaire
Classification trauma rein
• Simplifiée en lésions mineures (types
1 et 2) et lésions majeures (types 3
et 4)
• Lésions mineures 25% à 75% des
cas
• Lésions pédiculaires (gravité++)
10% des lésions traumatiques de
l’appareil urinaire
• Lésions urétérales très rares
Majeures
Mineures
Sévérité non corrélée à la présence et l’intensité de l’hématurie
Lésions pédiculaires
• Rares et graves
• FDR: décélération brutale
• Souvent chez traumatisme grave (polytraumatisé)
• Hémorragies embolisation
• Ischémie pas de prise en charge consensuelle*
(revascularisation décevante**)
• Plus fréquemment : lésions d’une branche artérielle ou d’une
artère polaire avec infarctus d’une partie du rein***
* Chabrot P et al. Revascularization of traumatic renal artery dissection by endoluminal
stenting : three cases. Acta Radiol 2010
** MerrotT et al. Trauma of the renal pedicule in children: 2 cases. Prog Urol 2000
*** Chaumoitre K et al. Vascular ischemic lesions of the kidney. J Radiol 2010.
Traumatismes urétéraux
• Rares (à la jonction pyélo-urétérale)
• Plus souvent dans les traumatismes pénétrants
Traumatisme rénal de haut grade
• Bien analyser les vaisseaux (artères et veines)
• Traquer les fuites actives et estimer s’il s’agit de simple blush non modifié au temps veineux ou d’une fuite nécessitant une prise en charge RI
• Chercher la rupture des cavités urinaires au temps tardif
▫ Attention, en cas d’hématome important, la rupture est souvent absente sur le premier scanner et visible au contrôle
▫ Traitement par drainage interne le plus souvent (JJ)
Urgentiste de 42 ans, VTT en solitaire, chute dans la forêt au dessus de Gap
Contrôle du scanner à J7
Contrôle à 2 mois
Bassin - pelvis
• Bilan osseux précis (VR 3D pour les cliniciens)
• Recherche fuite active artérielle ou veineuse +++
• Place de la radiologie interventionnelle +++
Fuites actives
• À traquer partout
▫ Tissus mous
▫ Intercostal
▫ Parenchyme
Différencier la fuite au sein d’un parenchyme et la fuite allant en
péritoine libre
▫ Piliers du diaphragme
▫ Bassin +++
• Peuvent mettre en jeu le pronostic vital
▫ Embolisation à discuter selon la localisation
Place de l’embolisation?
• Rate▫ Pour les patients avec blush mais stables▫ Pour les traumas sévères (AAST III ou IV) stables▫ Embolisation tronculaire en général
• Foie▫ Si lésion artérielle et patient stable ou faux anévrysme
(complication à 10-15j)▫ En complément après un packing chirurgical si instable▫ Embolisation sélective
• Rein▫ AAST IV stable▫ Embolisation si fuite active▫ Recanalisation : résultats décevants à distance
Place de l’embolisation?
• Pelvis – bassin
▫ Patient stable ou stabilisé
▫ Si blush au scan ou choc à FAST négative
▫ En général particules résorbables
▫ Parfois sélectif
• 85-95% efficacité arrêt du saignement
• Ballon intra-aortique utilisée par certaines équipes (Grenoble)
sur le lieu du trauma
Fracture complexe du cotyle et du sacrum droits avec fuite active hypogastrique
Embolisation par coils
Traumatisme mésentère + digestif
• Rares (5%)
• Diagnostic difficile et souvent retardé
• Augmentation de la morbi-mortalité (17-32%) si retard
diagnostic
• Bonne VPN du scanner
• Ne pas hésiter à recontrôler l’imagerie précocement
• Analyse fine des images +++
Vaisseaux mésentériques
Fuite active
Irrégularités
Thrombose
Paroi digestive
Épaississement défaut de rehaussement Rupture pariétale
Rupture paroi colique avec pneumopéritoine localisé Épaississement jéjunal
Attention au fenêtrage
Mésentère
Infiltration
Hématome
Péritoine
Épanchement liquidienPneumopéritoine
Lésion de la paroi abdominale
Cas clinique AVP
moto
Que voyez vous?
Surveillance armée – défense
contrôle scanner à H4
Messages
• Diagnostic des lésions intestino-
mésentériques difficile +++
• Analyse minutieuse
• Contrôle précoce selon clinique
• Score Faget/Millet*
▫ Si > 5 chirurgie
Signes TDM Points
Hémopéritoine faible 1
Hémopéritoine abondant 3
Pneumopéritoine 5
Épaississement paroi dig 2
Fuite active mésentérique 3
Infiltration mésentère 2
Défaut de rehaussement dig 1
Rupture paroi dig 5
Lésion rate -1
Lésion de la paroi abdo 2
*Faget C, Taourel P, Charnit J, Ruyer A, Alili C, Molinari N, Millet I.Value of CT to predict
surgically important bowel and/or mesenteric injury in blunt trauma : performance of a
preliminary scoring system. Eur Radiol 2015
Seat belt syndrome
• Association de lésions traumatiques
dues à la ceinture de sécurité
▫ Choc frontaux +++
▫ Stigmates cutanés à rechercher
▫ biomécanique
▫ Lésions les + fréquentes
Luxation ou fracture du rachis
dorsolombaire (F Chance)
Perforation digestive
Fractures côtes et sternum
Paroi abdominale
▫ Plus rares
Aorte
Aile iliaque
Dissection vx du cou
AJR 2006
Fracture de Chance • Hyperflexion
▫ Luxation - fracture
▫ Rupture du ligament inter-
épineux
▫
• Lésions entre T11 et L2 chez
l’adulte
• Traitement chirurgical
(instable)
Traumatismes du bloc duodéno-pancréatique
• Diagnostic initial difficile, souvent retardé (association lésionnelle, lipase)
• Plus fréquent chez l’enfant
• Complications
▫ Pancréatite post traumatique
▫ Perforation duodénale
▫ Fracture pancréas kyste
• Intérêt de l’IRM* ** (wirsungo +/- pancréas) rupture du wirsung?
*Rekhi S et al. Emerg Radiol 2010
** Lin Y et al. Eur J Radiol 2010
LBA
Garçon 14 ans, chute de vélo, impact épigastrique
TDM initiale
Aggravation clinique dans les 24h avec défense et contracture
Contrôle TDM précoce à J2
Rupture du bloc pancréatico-duodénal chirurgie : suture + drain
Diaphragme
• Ruptures diaphragmatiques rares (<5% des polytraumatisés)
• Diagnostic initial parfois difficile
▫ 85% gauche – 15% droite
▫ Analyse multiplanaire minutieuse +++
• Rupture diaphragmatique
Place de l’imagerie
• Le dogme « trauma pénétrant = exploration chirurgicale
d’emblée sans imagerie » est terminé…
• Si le patient est stable ou stabilisé, le scanner peut avoir une
place
▫ Balistique précise pour les lésions armes à feu
▫ Topographie des fragments de balles
▫ Analyse utile :
Lésions en région thoracique basse et/ou abdominale haute avant
prise en charge chirurgicale (chirurgien viscéral ou thoracique)
Atteinte cervicale
Suspicion de lésion rétropéritonéale +/- rachis
Arme blanche
Pas de lésion intraabdo Atteinte péritonéale No comment…
Intérêt dans le traitement conservateur* **
Scanner initial (arme blanche) Contrôle H10 Contrôle M4
* Navsaria P et al. Eur J Trauma Emerg Surg 2018
** Berg RJ et al. Injury 2014
Scanner et traumatisme pénétrant abdomen
• Examen de référence sur patient stable:
▫ Sensibilité 80% pour le bilan des lésions contre 46% pour la FAST*
▫ Sensibilité de 97% pour détecter une violation péritonéale (contre 100% pour l’exploration chirurgicale de la plaie)
▫ Recherche de fuite active, pneumopéritoine
▫ Balistique balles
• Bonne visualisation point d’entrée et de sortie
• Intérêt ++ en cas de point d’entrée postérieur (rétropéritoine, voies urinaires, rachis)**
• Permet de limiter les laparotomies blanches
• Possibilités de traitement conservateur (surveillance armée)
• À répéter précocement si apparition d’une défense car le diagnostic de lésion digestive n’est pas toujours facile
• Possibilité de diagnostiquer les lésions diaphragmatiques *** grâce aux reconstructions multiplanaires
* Hoffmann et al. SFAR 2011
**Zeidenberg J et al. Seminars in roentgenology 2016
*** Dreizin et al. Emerg Radiol 2015
Plaie par arme blanche, patient stable reçu en SAU, venu sur ses pieds
Point d’entrée sous ombilical médian avec hernie d’épiploon
Votre diagnostic?
Pointe du
couteau
Difficultés et pièges
• Arme blanche:
▫ trajet peu visible, profondeur souvent sous estimée en scanner
▫ Lésions digestives difficiles à diagnostiquer
▫ Exploration chirurgicale de la plaie +++
• Arme à feu:
▫ Analyse multiplanaire oblique +++ selon point d’entrée et sortie
• Pensez aux organes mobiles avec la position du patient
(debout/couché) et le degré d’inspiration
22 ans arme blanche hypocondre droit – épanchement péritonéal à l’échographie
Trauma par balle, tir unique d’un immeuble,
Patient dans la rue en contrebas
Acquisition sans IV
Intérêt ?
Take home message
• Maitriser la technique +++
▫ Installation du patient
▫ Protocole
• Demander les circonstances du trauma
• Suivre l’examen en « live » à la console pour décider s’il faut
un temps tardif basse dose à 3-5 min (reins/bassin) voire
intermédiaire vers 120 sec si le patient circule mal et que le
temps portal est trop précoce
• Analyser toutes les images en MPR et multifenêtrage
• Regarder les tissus mous pour retracer les zones d’impact
• Être systématique dans l’analyse et le CR
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