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EMMENEZ VOS ENFANTS VOIR… Campagne des Musées d’Orsay et de l’Orangerie, 2015 Étude réalisée par Lucille Vivier, Nicolas Valladon et Juliette Hage Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne — Master 1 Direction de projets ou établissements culturels VOIR NI FURIOUS VOS ENFANTS EMMENEZ NI FAST EMMENER SES ENFANTS À ORSAY ET À L’ORANGERIE C’EST L’ENFANCE DE L’ART Henri-Julien Félix ROUSSEAU, dit Le Douanier La Carriole du Père Junier (1908) Huile sur toile Paris, Musée de l’Orangerie © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) Franck Raux GRATUIT POUR LES ENFANTS* *pour les moins de 26 ans ressortissants de l’Union Européenne Impression Merico Source : Musée d’Orsay & l’Agence Madame Bovary

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EMMENEZ VOS ENFANTS VOIR…

Campagne des Musées d’Orsay et de l’Orangerie, 2015Étude réalisée par Lucille Vivier, Nicolas Valladon et Juliette Hage

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne — Master 1 Direction de projets ou établissements culturels

VOIRNI FURIOUS

VOS ENFANTSEMMENEZ

NI FAST

EMMENER SES ENFANTS À ORSAY ET À L’ORANGERIEC’EST L’ENFANCE DE L’ART

Henri-Julien Félix ROUSSEAU, dit Le DouanierLa Carriole du Père Junier (1908)Huile sur toileParis, Musée de l’Orangerie© RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay)Franck Raux

GRATUIT POUR LES ENFANTS*

*pour les moins de 26 ans ressortissants de l’Union Européenne

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Source : Musée d’Orsay & l’Agence Madame Bovary

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ENTRETIEN CONCEPTION

Thibault Vandershooten (TV) de l’agence Madame Bovary.

Qui était le commanditaire du projet ?

TV : L’établissement public des musées d’Orsay et de l’Orangerie.

À quelle occasion souhaitait-il communiquer ? Il me semble que c’était en 2015.

TV : Oui en octobre 2015. C’était la rentrée donc c’était le bon moment pour communiquer.

Quels étaient les destinataires du projet de communication ?

TV : Avant même de parler de cible, il y avait surtout un objectif qui était de faire en sorte que les musées d’Orsay et de l’Orangerie deviennent ou redeviennent un lieu emblématique de sorties familiales. Du coup, le musée d’Orsay nous a dit qu’il fallait une campagne attractive, accrocheuse, qui donnent envie aux parents franciliens de se dire « tiens ce weekend je vais emmener ma famille au musée d’Orsay ».

Quels étaient les attentes du commanditaire ?

TV : Une campagne efficace. Une campagne qui dépoussière l’image que les gens pouvaient avoir du musée d’Orsay et de l’Orangerie. Ce qui est souvent le gros problème des musées.

Oui c’est ce qu’on voyait sur votre document, c’est qu’en effet Orsay est un des musées parisiens qui a le moins de public familial.

TV : Oui c’est ça. Ils avaient un déficit de fréquentation familiale. En comparaison, le Centre Pompidou et le Quai Branly je crois ont justement beaucoup travaillé là-dessus et ont des ré-sultats bien meilleurs. Le musée d’Orsay était en retrait. C’était dommage et ils voulaient faire quelque chose. En plus, en termes de médiation culturelle pour les jeunes, ils font beaucoup de choses, il y a des ateliers, des sorties scolaires, mais avec la famille ça ne venait pas à l’idée d’un parent francilien de se dire « tiens ce weekend on va aller avec mes trois enfants au musée d’Orsay ».

Quels étaient les messages à faire passer dans cette campagne ?

TV : Venez en famille au musée d’Orsay. Ce n’est pas parce que c’est un musée d’art impres-sionniste qu’il n’est pas intéressant pour les enfants. Ils ne vont pas s’ennuyer, il y a plein de chose en rapport avec la culture populaire.

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Comment et pourquoi votre agence a-t-elle été choisie ?

TV : L’agence a été choisie parce que Pascal Couvry, le directeur de création de l’agence et son créateur, avait travaillé pour le musée d’Orsay. Il avait fait une campagne à l’occasion de la réouverture d’une aile du musée d’Orsay en 2013 ou 2014 et ils avaient fait une campagne très efficace et très relayée, avec un slogan assez simple : « on a revu Orsay, tout est à revoir ». C’était pour événementialiser la réouverture. Avec ça il jouait avec des regards d’œuvres em-blématiques. Cette campagne a reçu des prix et a été très efficace. Du coup, le musée d’Orsay a voulu retravailler avec Pascal Couvry.

Quel était votre rôle dans ce projet ?

TV : D’une part, il fallait comprendre ce que ça voulait dire de faire venir les familles ; de faire du planning stratégique qui vient en amont de la conception. C’est tout le travail de documentation, de benchmark, qu’on peut faire sur un sujet : se documenter, voir ce que les autres font, avoir une approche sociologique de la chose et d’arriver avec des insights, des concepts, qu’on pré-sente, qu’on soumet à un team créatif (un concepteur rédacteur et un directeur artistique). Eux, avec leur talent d’expression, ils arrivent à traduire l’idée que la stratégie a mis en place. Dans un monde idéal ça se passe comme ça mais bien souvent on se rend compte que quand on met les mots et les images ça ne marche pas. Moi je me suis occupé du planning stratégique là-dessus et de tout le suivi de projet.

Quels étaient les autres intervenants dans ce projet ?

TV : Pascal Couvry, directeur de la création, un concepteur-rédacteur très connu qui s’appelle Pascal Manry, et un directeur artistique qui s’appelle Paulo Villas.

Avez-vous accompagné le commanditaire dans la formulation ou la reformulation de ses intentions, de ses attentes et de sa demande ?

TV : Oui dans le sens où, quand Amélie est venue nous voir, elle nous a dit tout simplement « j’ai un problème, je n’ai pas de familles qui viennent ». Sauf que pour nous ça ne veut pas dire grand-chose. Avant de passer en création, tout le travail de stratégie, d’insight, on l’a présenté au musée d’Orsay qui a validé la direction qu’on voulait prendre.

Quels étaient les directives, le cahier des charges ou le pitch du projet ?

TV : C’était de faire une campagne d’affichage. C’était la seule contrainte. Et si, aussi, faire une campagne économe, ne pas organiser des shootings, qui auraient pu coûter très cher au musée. Ils n’avaient pas forcément le budget et ce n’était pas le sujet. Du coup, on a mis un point d’honneur à utiliser des photos des œuvres du musée d’Orsay donc il n’y avait aucune dépense dans la production.

Comment avez-vous « traduit » la demande, les objectifs et les attentes du commandi-taires en produit de communication ?

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TV : Quand on nous a dit « il n’y a pas de familles » il y avait une raison à cela. Pourquoi les familles se disent « je n’ai pas envie d’aller au musée d’Orsay » ? Il y a un déficit de notoriété sur ce public spécifique. La traduction c’était de se rendre compte que le musée d’Orsay n’ar-rivait pas à rendre attractif pour le grand public une grande partie de ses collections. Ce qui était quand même dingue parce que le musée d’Orsay c’est le musée de l’impressionnisme et l’impressionnisme c’est une catégorie artistique qui est très spontanée. Il n’y a pas besoin d’avoir fait de grandes études d’art, d’avoir lu Pastoureau, pour comprendre une œuvre. Ce qu’on a dit à Orsay c’est qu’ils avaient toute la matière pour dire à tout le monde « Nos œuvres sont très accessibles, très grands publics ». En plus, l’impressionnisme du XIXe siècle traite de sujets assez contemporains comme la famille, les produits culturels, les relations amoureuses. C’est là-dessus qu’on a réussi à faire de petites passerelles entre la consommation culturelle en 2015 et les thèmes traités par l’impressionnisme.

Avez-vous fait plusieurs propositions ?

TV : Oui bien sûr. Quand un client vient nous voir avec un brief ça ne se fait pas d’arriver avec un seul brief créatif. On en avait fait trois mais je ne me souviens plus à quoi ils ressemblaient honnêtement.

Y a-t-il plusieurs projets en concurrence pour cette campagne ?

TV : Non du coup.

Y a-t-il eu des désaccords ?

TV : Non. Aucun. Ça s’est très bien passé.

Comment cette proposition finale a-t-elle été reçue par les personnes du musée ?

TV : Ils ont adoré. Ils ont trouvé que c’était très efficace de simplicité. Que c’était moderne.

Qui a eu l’idée de ces visuels ?

TV : C’est un travail d’équipe. Ce n’est pas le fait d’une seule personne.

Comment se sont fait les choix des visuels ?

TV : Quand on a fait la stratégie, moi je me suis posé la question de savoir à l’heure actuelle quelle était la consommation des enfants de produits culturels. Les enfants aiment bien aller au cinéma, voir des super héros, voir des dessins animés, les sports de combats, etc. On avait fait une liste de pleins de thèmes et après on s’est posé la question de quelle œuvre pourrait coller avec quel thème. C’est comme ça que c’est fait le choix des visuels.

Comment avez-vous eu les visuels ? Vous avez fait un tour du musée ?

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TV : Il y a une photothèque au musée d’Orsay, ils ont des photographes à disposition qui ont pour mission de photographier toutes les œuvres et en fonction des thèmes on a choisi. Il y avait des thèmes qu’on avait pas encore et quand on a regardé les photos on a eu des idées. Par exemple le visuel du Douanier Rousseau et « Ni Fast Ni Furious », typiquement, l’idée est venue du visuel et non l’inverse.

Pouvez-vous nous parler de la composition de l’image en la mettant en relation avec sa signification ?

TV : La composition de l’image est encore une fois très simple. Le carré en surimpression permet d’avoir un exergue sur les mots et laisser toute la place au dialogue entre le visuel et l’accroche. La couleur choisie est en rapport avec les teintes de l’œuvre choisie. Il y a un côté transparent fluo qui fait assez moderne. Au niveau de la typographie elle est non sérifé. Du coup, elle est moderne et dynamique. Il y a des différences de corps, de graisse qui rendent l’ensemble un peu dynamique. C’est une typographie système. Nous ne l’avons pas créé.

Comment les textes ont-ils été conçu ?

TV : À partir des thèmes qu’on avait identifiés. C’est le travail du concepteur-rédacteur de trouver. L’injonction « Emmenez vos enfants » rajoute de l’attractivité et du poids au message. C’est tout le talent de Pascal Manry.

Qu’est-ce que l’image raconte ?

TV : L’impressionnisme est une forme d’art foncièrement contemporaine, moderne, qui traite de thèmes d’actualité.

Souhaitiez-vous créer un choc visuel ? Surprendre ?

TV : Choc visuel ? Comment ça ?

Amélie Hardivillier nous a beaucoup parlé d’audace, de campagne « audacieuse ». C’est peut-être ça qu’il faut comprendre ici dans « choc visuel ».

TV : Oui. Si elle dit que c’est audacieux c’est par rapport à celle sur les gens nus. Quand on va au musée on se dit rarement « Tiens je vais emmener mes enfants voir des gens nus ». Ce qui est rigolo là-dedans c’est qu’il y a une série, un effet de masse. Il y a neuf visuels et avec un média très traditionnel, les affiches, on a parlé de cette campagne à la télé, à la radio, sur les réseaux sociaux, sans aucun achat d’espaces. C’est ce qui a fait que la campagne était ef-ficace. Le ton humoristique participe à ce qu’Amélie appelle de l’audace. On n’a pas l’habitude de voir des œuvres anciennes avec des mots pêchus, rigolos. Des gens du musée d’Orsay ont dit que c’était scandaleux, qu’on dénaturait les œuvres, etc. Il y en a toujours…

Selon vous, quelles sont les qualités de cette campagne ?

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TV : C’est son ton humoristique et sa simplicité.

Et quels sont ses défauts ?

TV : On n’en a fait que neuf.

Quel est l’impact des conditions de diffusion sur la création du document ?

TV : On savait qu’on allait avoir de l’affichage dans le métro et des insertions presse dans les magazines, et de l’affichage insert 60 x 80 cm. Les contraintes se sont des contraintes tech-niques. Quand on conçoit une campagne on fait ce qu’on appelle un master, soit en portrait, soit en paysage. Une fois que le master est validé, il y a toute une partie exécution : mise au format en fonction des contraintes techniques. Il n’y avait pas d’autres contraintes.

Le diffuseur peut-il demander des aménagements sur la campagne ?

TV : Ils nous donnent un format et on doit s’adapter c’est tout. On présente des choses, et ils donnent leurs envies, leurs choix.

Selon vous, quelle a été l’interprétation de ce document par le public ?

TV : Elle a été bonne. Comme c’était une campagne traditionnelle d’affichage, les gens ont commencé à en parler sur les réseaux sociaux alors qu’on n’avait rien fait sur les réseaux. On a commencé à en parler à la télé. Je pense que c’est une bonne campagne. On a reçu pas mal de prix de communication pour elle. Les gens connaissent, les franciliens en tout cas l’ont déjà vue. L’interprétation a été plutôt bonne oui je pense. Je pense que les gens se sont dit « Ah c’est plutôt rigolo en fait le musée d’Orsay ».

Selon vous, quelles sont les connaissances, les conventions, les codes, qui sont néces-saires au public pour comprendre la campagne ?

TV : Justement on a fait en sorte qu’il n’y en ait pas. Les deux seules c’est « Ni Fast Ni Furious »car il faut connaître le film, et celle qui est la plus élitiste c’est « Emmenez vos enfants voir des pompiers ». Les gens n’ont pas tous compris.

Avez-vous imaginé que le public puisse construire d’autres significations que celles que vous vouliez ?

TV : Je peux l’imaginer mais je ne sais pas lesquelles.

C’est un peu ce qu’on va définir avec le focus group. Voilà ce qui était donné, le message voulu et l’avez-vous compris comme ça ?

TV : D’accord. Je peux difficilement vous répondre pour le coup. Ce serait marrant de savoir ce que les gens peuvent comprendre.

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Selon vous, quels ont été les bénéfices de cette campagne pour le commanditaire ?

TV : Les musées d’Orsay et de l’Orangerie ont une image moins vieillotte. Et en termes de fréquentation… La campagne est arrivée juste avant les attentats et du coup tous les lieux culturels, les six mois suivants, ont été en baisse drastique de fréquentation. Néanmoins, le musée d’Orsay en a moins pâti. On fait des liens comme on veut mais la campagne a peut-être participé à cela.

Au niveau de la réception, le public ado était-il également visé par cette campagne ?

TV : Oui.

Selon vous, un collégien de 11 - 15 ans pouvait-il comprendre facilement ce document ?

TV : Oui je l’espère. Pas celle des pompiers mais les autres je pense oui.

Que pensez-vous que les adolescents ont pensé de cette campagne ?

TV : Je pense que ça les a fait rigoler, ou sourire du moins.

La campagne était-elle plus adressée aux parents, aux enfants, ou aux deux ?

TV : Il y a une règle simple, si on veut toucher les enfants, quand on a 10 - 12 ans, ce n’est pas l’enfant qui décide mais les parents. Donc il faut toucher les parents.

Quand on communique pour des adultes, doit-on prendre en considération le fait que des enfants ou de jeunes adolescents peuvent voir le message ?

TV : Bien sûr oui.

Quels ont été les retours sur ce document ?

TV : On a eu des prix de communication. On a eu beaucoup de retombées presse. France Info nous a élu « Coup de Com de l’année ». Les retombées ont été très positives. Même quatre ans après on la présente dans nos références. Même pour l’agence ça a été très bénéfique. C’est la campagne vitrine.

Aviez-vous déjà entendu parler de ce type de projet d’éducation à l’image destiné aux professeurs de collèges ?

TV : Jamais non … Mais c’est super en tout cas. C’est très bien. Notre idée c’est de se dire qu’à l’heure actuelle tout le monde sait décoder une image, une publicité et qu’il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles. Il faut être sérieux et la meilleure manière c’est d’avoir de la considération pour les gens à qui on s’adresse.

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8Emmenez vous enfants voir… — 2015 — Diffusion

Amélie Hardivillier (AH), Chargé de la communication au Musées d’Orsay et de l’Orangerie, interviewée par téléphone.

Quel est le rôle du diffuseur dans le circuit de la communication ?

AH : Alors, le diffuseur c’est le musée c’est ça ?

Oui c’est ça.

AH : Alors ce n’est pas le musée, c’est un établissement public qui gère deux musées et c’est tout l’objectif de la campagne. C’est qu’à la fois cette campagne elle porte sur le musée d’Orsay et sur le musée de l’Orangerie. C’est très abscons ce que vous me posez comme question. C’est un peu technique. Si la question est de se dire le rôle de l’établissement public dans la dif-fusion c’est avant tout un rôle de diffusion vers le grand public d’une offre famille, et pour capter le public des parents et des enfants qui était un peu déficitaires à Orsay ces dernières années.

En particulier, quel a été votre rôle dans cette campagne précisément ? La question d’avant été assez générale sur le rôle d’un diffuseur dans le circuit de communication. Là c’est plutôt votre rôle précisément par rapport à ces visuels que vous diffusé lors de la campagne.

AH : Alors ce qui est important de dire c’est qu’on n’est pas n’importe quel diffuseur parce que le terme de diffuseur il est très général. Là on est quand même un établissement culturel avec une collection nationale donc il faut bien s’en rendre compte. Moi j’aime plus « émetteur du message » que « diffuseur ». C’est vraiment une institution culturelle, avec tout ce que ça sous-entend comme « poids de l’institution ». Le musée d’Orsay ne parle pas comme une société privée, c’est important aussi de le dire. Cette campagne est né d’un constat qui était de se dire « on a pas assez de public famille à Orsay ». On en a beaucoup moins qu’au Louvre et on essaye de travailler pour trouver une idée de campagne pour faire venir ou revenir ce public-là. Êtes-vous bien le commanditaire de la campagne ?

AH : On est uniquement le commanditaire de la campagne. C’est-à-dire que c’était un constat à ce moment-là du musée, des administrateurs, de se dire : on a un déficit. Vous savez, on signe des contrats de performance tous les 5 ans. Les établissements culturels et les établissements publics signent des contrats, ce qu’on appelle des contrats de performance et d’objectifs. C’est le cas par exemple à Radio France, à France Télévision, mais c’est le cas aussi au Louvre, à Orsay, à Versailles. Et dans ces contrats d’objectifs, on a des choses très précises, je dirais des cases à remplir, et on a, vous le savez bien, des objectifs de démocratisation culturelle et on a

ENTRETIEN DIFFUSION

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aussi des objectifs par cible de public. Et il était important de montrer qu’on avait fait des efforts sur ce type de public là. Effectivement, les objectifs qu’on souhaitait atteindre n’étaient pas tout à fait atteint et à travers cette campagne on espérait bien qu’ils le soient.

D’accord.

AH : Il faut juste que vous mettiez bien les choses en termes de date. C’est-à-dire que cette campagne elle a commencé en octobre 2015, à peine un mois avant les attentats. Ce qui a été excessivement compliqué pour en mesurer la portée. Vous imaginez bien qu’on retrouve seulement aujourd’hui, la fréquentation de 2014. L’impact de la campagne a été très difficile à mesurer puisqu’après les écoles ne sont plus venues. Vous imaginez le traumatisme des familles d’emmener les enfants dans les musées, lieu hautement sensible. C’est arrivé à un moment difficile. Elle est sortie trois semaines avant les attentats.

Donc le contexte a beaucoup joué.

AH : Oui. C’est pour ça qu’on a très peu de résultat. Le résultat n’était pas mesurable pour ces raisons.

Par rapport à l’agence de création, l’agence Madame Bovary, quel était votre lien avec cette agence-là ?

AH : J’avais eu la chance de travailler avec Pascal Couvry, le directeur de l’agence Madame Bovary, quand il était directeur artistique chez Publicis et Publicis nous avez accompagné sur la campagne de réouverture du nouvel Orsay. À ce moment-là, ça a été des travaux de rénova-tion et le musée est resté ouvert pendant quasiment deux ans. On a complètement repris le 5e étage donc la galerie impressionniste et on a créé plus de 1 500 m² qui n’existait pas dans ce qu’on appel le pavillon Hamon. C’était l’ancienne salle des machines de la gare. On a créé des étages, etc. C’était en 2011. C’est des travaux qui avaient coûté plus de 20 millions d’euros et évidemment il va falloir qu’on parle du nouvel Orsay, ce qui est en train de se faire c’est magni-fique et personne ne penserait qu’on serait capable de le faire en laissant le musée ouvert, on y est arrivé. Il va falloir faire une campagne qui tape. J’ai eu l’idée, et je peux dire qu’on a été le premier à oser se frotter au monde de la publicité. Je m’étais dit « faire une affiche on y arrivera sans soucis ». Ce qu’on ne sera pas faire, c’est d’aller chercher un slogan pour expliquer ce qui se passe. Publicis a accepté de relever le challenge, plutôt amusé de travailler avec une institu-tion culturelle, un musée, ce qui ne s’était jamais fait. Et Pascal a été le directeur artistique qui m’a été associé pour ce travail-là et c’est lui qui a créé le slogan « Nous avons revu Orsay, tout est à revoir ». Et alors ça, ça a fait un buzz démentiel. La campagne est sortie en septembre 2011, en octobre 2011 la galerie impressionniste a réouvert et c’était une campagne dont on a parlé partout. On a eu dix minutes de Jérôme Commandeur dans sa chronique sur Europe 1, parlant de l’audace de la campagne. Le truc nous a totalement échappé, ça a été un formidable succès. On a fait plein d’émule parce qu’à partir de cette campagne, il y a plein de musée qui ont essayé de travailler avec des agences de pub, comprenant l’importance du slogan, ce que nous on ne sait pas forcément faire. On a des expériences de communication, mais moins de publicitaire, ces génies de slogan parfois.

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Pascal a quitté Publicis peu de temps après qu’on ait travaillé ensemble pour créer Madame Bovary et quand on a demandé de réaliser cette campagne pour essayer de faire revenir les familles, je l’ai rappelé et je lui ai dit « j’ai envie de retravailler avec toi ». Et Madame Bovary, le musée d’Orsay c’est comme si c’était normal qu’on bosse ensemble. Et j’ai confié à Madame Bovary les enfants du musée d’Orsay. Y avait-il une attente de leur part par rapport à cette campagne ?

AH : L’attente était commune. C’était que ce soit une campagne qui soit audacieuse. Une cam-pagne qui marche aussi bien avec les collections du musée d’Orsay et les collections du musée de l’Orangerie. Les collections du musée de l’Orangerie sont beaucoup plus petites puisqu’elles ne représentent que 154 œuvres exactement donc il fallait aller vers un choix beaucoup plus restreint d’œuvres. Notre attente à tous les deux, c’était évidemment que le public s’empare de cette campagne, et qu’on parle de nous. À la fois c’était une campagne pour le jeune public, pour les familles, mais c’est vrai que l’idée était d’associer des mots de l’univers enfantin à une campagne qui allait d’abord être une campagne dans le métro. Qui prend le métro ? Ce ne sont pas les enfants seuls, ce sont évidemment les parents. Donc on joue à la fois sur les parents et les enfants. C’est ça qui est marrant dans la campagne. Effectivement, notre but à tous c’était qu’on s’amuse, qu’on fasse un truc qui allait être repéré, ce qui a été vraiment le cas, et qu’on essaye de dire aux parents « tiens c’est vrai ce weekend on avait rien, on va aller au musée ».

Maintenant nous allons poser des questions par rapport au plan média.

AH : Alors il faut que je m’en souvienne, ce n’est pas évident. Je ne sais même plus quand on a lancé la campagne. Vous allez être plus informés. Ça fait trois ans environ, il me semble.

Oui c’est ça, trois ans. AH : Vous voyez je ne m’en souviens même plus, c’est horrible, ça passe tellement vite. Y avait-il un plan média et qui décide de ce plan média ?

AH : Ce plan média c’est moi qui le décide. On a un budget annuel de communication pour l’établissement public et ce budget est divisé par enveloppe qui sont allouées par projets. J’avais cette année-là une enveloppe dédiée à cette communication famille. En fonction de l’enveloppe, j’ai imaginé un plan d’affichage qui a commencé la première semaine des va-cances de la Toussaint. C’est la première fois qu’on a vu ces campagnes. Il y a trois ans, en 2015. Vers le 20 octobre 2015. C’était d’abord un plan métro, 200 x 150 cm, donc les métro couloir. On a décidé de la sortir évidemment au moment des vacances de la Toussaint. On a recommencé l’opération métro plus Decaux aux vacances de Noël. Et ensuite on l’a décliné jusqu’en juin 2016 de manière systématique, à chaque vacances scolaires sauf les grandes vacances. Depuis, vous pouvez remarquer qu’on l’a réutilisé de nombreuses fois puisqu’on a plusieurs visuels et on joue entre ces différents supports. Ce n’est pas la première année mais la deuxième année, on a fait de l’insert aussi. Vous savez ces affichages sur les devantures de cafés parisiens. C’était essentiellement métro, bus, Decaux et un petit peu d’insert.

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Avez-vous adapté votre stratégie de communication pour cette campagne ? Vous parlez des vacances scolaires donc vous semblez effectivement l’avoir adaptée.

AH : Oui bien sûr. Vous savez nous on a quand même beaucoup d’événements qui sont des événements d’exposition dans l’année donc l’idée de mon plan média annuel c’est que les choses ne se chevauchent pas forcément, qu’on communique au début d’une exposition puis une fois par mois sur les expositions. Ensuite je peux aussi avoir des campagnes sur la promo-tion de la carte blanche du musée d’Orsay, qui vient s’intercaler. Il y a aussi des communica-tions institutionnelles comme celle dont on parle là. Mon plan média, je le gère aussi en fonction de la globalité des événements à promouvoir. Pour cette campagne, les vacances scolaires semblaient le meilleur moment pour le faire. Avez-vous une influence sur les documents que vous devez diffuser ? leurs formats, leurs durées, leurs formes, leurs contenus, leurs qualités…

AH : C’est moi qui décide de tout. Je ne décide pas de tout dans mon coin, tout cela se fait en totale harmonie avec le président de l’établissement. Je ne décide pas d’une campagne toute seule. C’est une campagne qui porte sur l’établissement, donc évidemment je travaille et en-suite je soumets à la présidence de l’établissement. Pour accepter une campagne comme ça il faut avoir un peu d’audace, que ce soit celle sur le nouvel Orsay, ou celle-ci. Si bien à l’époque, le président du musée d’Orsay, Guy Cocheval, et la directrice de l’Orangerie, Laurence des Cars, qui est maintenant devenue notre présidente du musée d’Orsay et de l’Orangerie, ont trouvé ça génial et m’ont laissé partir en ne mettant rien en cause. Les slogans étaient sympas, drôle. Ce qui était intéressant c’est que n’y apparaissait pas forcément les chefs d’œuvre les plus connus de notre collection. C’était aussi ça l’intérêt. C’était de chercher des œuvres que les gens ne connaissent pas. Il y avait différente lecture. Celle avec les pompiers, tout le monde ne la comprenait pas. Les gens qui connaissaient la peinture pompier la comprenaient, d’autres n’ont pas compris. Pour la petite anecdote, on a été retweeté par les pompiers de Paris qui l’ont trouvé géniale. Celle qui parle de Fast & Furious, Pascal Couvry a eu l’accord du distributeur du film pour utiliser le titre. Ils ont trouvé ça super drôle et ont donné leur accord sans soucis. Pour les « sales gosses », c’est un vrai clin d’œil au Petit Nicolas, à La guerre des boutons, on est tout à fait dans cet esprit-là. Les rois et les princesses c’est un clin d’œil à Disney pour dire grosso modo « n’allez pas à Disney, chez nous on en a des plus jolis ». C’est super drôle. On en est très fiers (rires).

On a retravaillé aussi avec Pascal sur les 30 ans du musée. Je n’ai pas eu énormément de bud-get d’affichage donc on l’a moins vue mais il a refait des slogans sympas qui étaient « Venez à Orsay sans crier gare » mais on l’a beaucoup moins vue donc elle a moins marqué les esprits. Selon vous, qu’est-ce-que la campagne raconte ?

AH : Elle revisite à la fois les collections du musée d’Orsay et de l’Orangerie mais avec des œuvres qui ne sont pas forcément les plus connues. C’est ça qui nous a amusés aussi, de faire découvrir d’autres œuvres et de montrer que l’art c’était pour les petits comme pour les grands. Chacun y trouvait des choses à dire. Il y aussi cette idée d’initiation, de plaisir, et à travers une

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œuvre d’art on peut voir plein de choses. Les yeux qui regardent les œuvres d’art définissent quelles significations elles sont. On a la chance d’avoir des œuvres moins difficiles que certains musées. Le Louvre c’est plus compliqué. Pour décrypter une œuvre du Louvre, des œuvres très religieuses, il faut avoir un bagage culturel beaucoup plus important. C’est plus difficile de rentrer dans ces œuvres-là. Nous, Le Déjeuner sur l’herbe, tous les impressionnistes, l’école de Barbizon, même la peinture académique ça a quelque chose de très cinématographique. C’est plus facile d’accès. Que pensez-vous du rapport entre le texte et les visuels ?

AH : Les visuels c’est très facile pour nous. Ce sont des œuvres tellement magiques qu’elles parlent d’elles-mêmes. Ce qui m’intéressait, c’était d’avoir ce fameux slogan. C’est lui qui fait la force de la campagne. Les œuvres existent, elles sont fortes, mais avec ce slogan tout fonc-tionne ensemble et c’est cela qui est intéressant. Quels sont les défauts, s’ils existent, de cette campagne selon vous ?

AH : Oh elle n’en a pas (rires). Ce n’est pas possible. Si elle a un défaut majeur c’est d’avoir mis la barre trop haute. Que va-t-on pouvoir faire pour faire mieux la prochaine fois ? Sincèrement, j’ai un challenge de communication jeune public, famille, pour la rentrée prochaine. Orsay va lancer son site jeunesse, enfant, pour les 6 - 10 ans. Orsay va lancer une mesure tarifaire dont je ne peux pas encore vous parler car c’est encore assez confidentiel, mais très accès famille, enfant prescripteur de visite. Il va falloir refaire une grosse campagne de communication et faire mieux que celle déjà faite ça va être difficile. Les destinataires visés étaient-ils les familles et le jeune public ?

AH : Oui en fait la campagne a eu un tel retentissement que tout le monde s’en est emparé. Elle a frappé les esprits, dans un contexte qui n’était pas facile. On a eu toute cette triste période d’attentat. Les réseaux sociaux s’en sont emparés dès qu’elle est sortie. Après il y a eu toutes ces terribles nouvelles qui ont fait qu’il y eu un calme plat. Puis on l’a ressorti 8 mois plus tard et de nouveau les gens tweetaient. On a eu un prix. Le « Top Com » d’or je crois. Sur la première campagne on en a eu 3 ou 4. Sur celle-ci on en a eu 2. Je suis attentive sur les réseaux sociaux et on voit quand une campagne a un impact. Quelque part on a vu que c’était gagné. Si vous faites votre travail dessus c’est qu’elle a marché et qu’elle vous a interpellés. Quelle a été, selon vous, l’interprétation de ce document par le public ?

AH : Le musée a une image très sacralisée pour beaucoup. Nous on est vraiment dans ces questions de démocratisation culturelle. Le but était de se dire « prenons un peu de hauteur, on rigole, venez, n’ayez pas peur ». À travers ce genre de campagne je vais chercher les gens qui ne viennent pas au musée. Ceux qui viennent déjà, ce ne sont pas les campagnes qui vont les faire fuir mais ceux qui ne viennent pas, ils sont venus au musée grâce à cette campagne. Mon rêve c’est qu’ils viennent au musée grâce à cette campagne. On travaille beaucoup sur la question de la démocratisation. Je travaille beaucoup avec des médias comme Le Parisien.

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C’est important pour moi. Les gens qui lisent Le Monde, ils vont au musée. Les gens qui lisent Le Parisien, il y a ceux qui vont au musée et ceux qui n’y vont pas. Donc quand j’ai un article d’une page sur les expos je suis super contente. C’est un peu cette démarche d’une campagne qui parle à tout le monde. Selon vous, quelles sont les connaissances nécessaires au public pour comprendre cette campagne et son message ?

AH : Il y a plusieurs niveaux de message. On parlait de la peinture pompier, c’est clair qu’elle n’a pas été comprise par tout le monde. C’est ce qui nous amusait aussi, c’était d’intriguer, pas forcément que ce soit évident à chaque fois. Avec le Renoir et ses grosses dames, c’était as-sez rigolo. Les sales gosses c’est pareil, on est dans un univers particulier. Les dessins animés c’est dire qu’il n’y a pas que de la peinture à Orsay, mais aussi de la photo. Les héros en 3D avec le Bourdelle c’est vraiment intéressant. Quand on emmène les enfants au musée souvent les premiers émois c’est souvent devant la sculpture. La tri dimension de la sculpture les émeut beaucoup. Beaucoup plus que la peinture elle-même. Donc on a joué avec tous ces codes. On se dit souvent qu’on en a ras-le-bol de nos gamins sur les tablettes, etc. alors allons au musée où il y aura aussi des héros en 3D. Globalement tout le monde l’a comprise. La seule qui était en décalage c’était la peinture pompier. Le public adolescent était-il également visé par cette campagne ?

AH : Oui d’une certaine façon. En fait c’est son audace qui a payé. Les ados se sont amusés avec ça. Le Fast & Furious parle aux parents et aux ados, le 3D aussi. Les gens nus se sont les blagues des jeunes collégiens. La campagne a rajeuni l’image du musée. Elle a dépoussiéré l’image du musée impressionniste, d’Orsay, des vieilles dames au musée. Il n’y a pas que les impressionnistes à Orsay et à l’Orangerie. Quand on communique pour des adultes, doit-on prendre en considération que de jeunes adultes ou des enfants doivent comprendre le message ?

AH : L’intérêt d’un message c’est qu’il soit visible par tous. Je ne travaille pas une campagne comme ça. Surtout pour une campagne institutionnelle. Plus elle touche un public large plus j’ai gagné mon pari. On crée plusieurs niveaux de communication à chaque fois. Quelle a été le parcours de vie de cette campagne ?

AH : Elle vit toujours. On s’en sert toujours. De mémoire, je ne la réaffiche pas dans les mois qui viennent. L’idée c’est qu’on en fasse une autre pour la rentrée prochaine. Je pense que c’est la nouvelle qui prendra le pas sur celle-ci mais je ne dis pas que je ne ressortirai jamais celle-là de mes tiroirs. Sur les retours de la campagne vous nous avez déjà un peu répondu…

AH : Beaucoup sur les réseaux sociaux mais difficile à définir précisément en raison de l’actualité.

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Avez-vous constitué une revue de presse de cette campagne ?

AH : Demandez à Thibaut (agence Madame Bovary) qui a dû garder les articles. On en a parlé il n’y a encore pas très longtemps. J’ai été interrogé par les médias brésiliens, il y a une histoire avec un artiste qui se montrait nu dans un musée et il y a eu une histoire avec une petite fille. J’ai été beaucoup interrogée sur la campagne des gens tout nus : « Quelle audace ! Avez-vous eu des problèmes ? » On trouve ça génial mais nous dès qu’on fait quelque chose c’est tout de suite censuré. On en a pas mal parlé car Deborah de Robertis s’en est servie pour faire une nouvelle exhibition au musée d’Orsay. On en a parlé très récemment au moment où la cam-pagne sur Egon Schiele avec été censurée en Allemagne et aux USA. En même temps il y avait la campagne pour l’exposition Picasso érotique, avec cette femme rêvant et un grand pénis au-dessus, cette campagne est passée, sans censure, à l’heure où on parlait de harcèlement. Elle a fait peu de bruit malgré tout. Aviez-vous déjà entendu parler de ce projet d’éducation à l’image ?

AH : Non, j’ai énormément de travail, je suis éloignée de tout ça. J’ai une toute petite équipe avec moi. On gère la communication de deux musées et on est 8. On a énormément d’actua-lité et je n’ai pas le temps de tout regarder en termes d’étude. Vous allez faire une étude des publics après, c’est bien ça ?

Oui.

AH : Ça m’intéresse.

On vous enverra ça alors. C’est la fin du questionnaire. Merci pour le temps que vous nous avez accordé.

AH : Je vous en prie. Tenez-moi au courant car c’est quelque chose que nous n’avons pas le temps de faire mais qui est toujours intéressant. Soyez attentifs au teaser de la nouvelle expo-sition sur le Symbolisme balte. Ça fait partie de cette communication qu’on essaye de valoriser et soyez attentifs à la prochaine pour qu’elle soit encore plus chouette que la précédente.

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A — PREMIÈRE PRÉSENTATION DU DOCUMENT

L’image a été montrée quelques secondes aux collégiennes.

Céline : — Je n’avais jamais vu cette image. — Intéressant, j’aimerais bien voir l’exposition.— Indifférence.— Pourquoi avoir choisi différent thème pour la même exposition ?— Sur l’image il y a un jardin en arrière plan, un chariot avec des personnes dedans (famille), il fait beau. Je pense que cette image représente une exposition sur l’histoire de la voiture.

Lucie :— Je n’ai jamais vu cette image.— Je n’ai pas compris directement que c’était une pub pour un musée.— Je n’ai pas trouvé cela très drôle — indifférent.— J’ai trouvé qu’il prenait les enfants pour des « idiots », comme s’il fallait les forcer.— C’est un tableau, une famille dans une prairie. Le message « Ni fast ni furious » est contraire au tableau puisque cet endroit est reposant.

Elsa :— Non, je n’ai jamais vu cette image.— Destinée aux enfants : pour faire la promotion du musée d’Orsay.— Je n’ai pas ressenti d’émotions spéciales en la voyant.— J’ai essayé de comprendre l’image.— Sur cette image, il y a un texte. Ce qui m’a le plus marqué est « Ni fast ni furious ». Il y a également un homme. Sa signification principale est sûrement de ne pas faire regarder tout et n’importe quoi aux enfants.

B — SECONDE PRÉSENTATION DU DOCUMENT

1 — LES ÉCARTS DE COMPRÉHENSION

Maintenant que vous pouvez regarder cette image sans limite de temps, la compre-nez-vous de la même manière que la première fois ? Sa signification a-t-elle changé ? Si c’est le cas, quelles sont les différences entre la première et la seconde vision ? Selon vous, quelle est la signification de cette image ?

ENTRETIEN RÉCEPTION

Elsa (E), Céline (C) et Lucie (L), trois élèves de 3e entre 13 et 14 ans du Collège Saint-Michel de Picpus à Paris, interviewées le dimanche 15 avril 2018.

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L : Pour « ni fast ni furious », je croyais que c’était pour montrer une ambiance calme, on voit un tableau reposant, alors que Fast and Furious renvoie à la vitesse, c’est un blockbuster… Mais en fait l’image elle parle plutôt de la voiture, non ?C : Je me suis dit que c’était pour une exposition sur l’histoire de la voiture.E : Quand j’ai lu « ni fast ni furious », j’ai pensé que c’était pour expliquer aux enfants qu’ils doivent faire attention à ce qu’ils regardent. Mais j’avais pas vu vraiment ce qu’il y avait dans le tableau, avec le cheval devant. Mais après je n’arrive toujours pas à savoir ce que ça veut dire.

Que veut dire cette image pour vous ?

L : Elle parle d’une exposition sur les voitures.C : Moi aussi, je pense ça.E : Moi j’ai pas compris ça. Je pensais que c’était pour les enfants.L : En même temps, je comprends pas le lien avec les autres affiches du coup.C : À part que ça parle des centres d’intérêt des enfants… Pour ramener le plus de personne, je pense.

2 — SIGNIFICATION ET COMPREHENSION

Aviez-vous tout compris de cette image ?

Toutes : Non.

Juliette fait défiler toutes les images pour voir si certaines sont plus évocatrices que d’autres.

Celle sur les dessins animés :

C : Ça doit être sur l’histoire des dessins animés.E : Aucun rapport avec la première.

Celle sur l’art pompier :

E : Je la comprends pas, les gens ont l’air heureux autour de quelqu’un qui serait un pompier. Mais il n’a pas l’air du tout d’un pompier. Mais en même temps le texte parle d’un pompier, c'est bizarre…L : Celle-ci est beaucoup moins claire que les autres.

Vous avez du mal à comprendre la cohérence entre toutes les images.

Toutes : Oui !

Y a-t-il des détails que vous n’aviez pas remarqués et que vous voyez maintenant ?

C : Pour celle des dessins animés, j’avais pas vu qu’on voyait la décomposition du mouvement.

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E : Moi non plus, je me suis surtout concentrée sur les textes. C : Ah oui ? Moi l’inverse, d’abord l’image.L : Moi, surtout le texte, l’image ça vient après. Mais celle sur les dessins animés je ne com-prends pas vraiment ce qu’elle dit.

Pensez-vous qu’on peut comprendre le message de l’image au premier coup d’oeil ? Nous reprenons la première image (« ni fast ni furious »).

L : Non, je n'ai toujours pas compris l’image d’ailleurs. Donc au premier coup d’oeil non…

Qui sont les personnages dans cette image ?

L : La famille qu’on voit sur le tableau ?C : Oui je pense ça aussi. E : Oui, c’est une sortie en famille.

Est-ce que l’un des personnages vous touche, vous parle, plus qu’un autre ?

E : Ceux qui sont au premier plan je pense. C’est ceux qui attirent en premier le regard.

Le texte et l’image vont-ils bien ensemble ?

Pour « ni fast ni furious » :

E : Oui, on comprend qu’il y a un rapport entre Fast and Furious et les voitures.

Pour « les dessins animés » :

E : Oui, même chose.

Pour « les nus » :

L : Oui.C : En gros, les textes vont à chaque fois avec les images mais regroupés tous ensemble on ne comprend pas de quoi ils parlent.

Pour « l’art pompier » :

C : C’est vraiment la seule bizarre. Pour les autres on comprend bien le lien, pour les sales gosses, c’est clair. Mais le pompier ? Pas compris. On voit un homme en armure quoi…E : C’est un soldat ?L : Je pense juste qu’on ne connaît pas cette référence.

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3 — INTENTIONS ET OBJECTIFS DE COMMUNICATION

Qui communique au travers de cette image ?

E : C’est pour le Musée d’Orsay, je l’ai lu à la première lecture.

Les deux autres, aviez-vous compris ?

L : Oui en lisant le texte.C : Oui et comme on voit que c’est un tableau, ça nous semble logique.

Quel public vise le musée à travers cette campagne ?

C : Les enfants. E : Peut-être toute la famille parce que les enfants ne vont pas y aller tout seuls. Du coup, c’est sûrement pour les adultes aussi.

Et quel message veut-il diffuser ?

L : Ils veulent inciter les enfants à aller au Musée d’Orsay.E : Qu’ils ne soient pas trop sur leur téléphone mais qu’ils aillent au musée. L : Oui d’ailleurs on a l’impression qu’ils se sentent obligés de parler de dessin animé pour pouvoir parler aux enfants…

Tu veux dire cette campagne utilise des sujets alléchants pour s’adresser aux enfants.

L : Oui, voilà. E : Oui, la 3D par exemple.

Quelles réactions le musée peut-il attendre ?

E : Peut-être qu’on s’arrête et qu’on essaie de comprendre.C : Moi personnellement quand je suis dans le métro, je ne m’arrête presque jamais devant une affiche…E : Si elle m’intrigue, en général je m’arrête. Mais pour celle-ci je ne me serais pas arrêtée. L : Moi je me serais arrêtée devant celle qui parle des nus, peut-être…C : Ah oui ? À la limite moi ça serait plutôt celle sur les « sales gosses ».E : Moi je comprends pas ce qu’elle transmet comme message celle sur les « sales gosses ».

À votre avis, cette campagne est-elle réussie et efficace ? Et pourquoi marche-t-elle ou au contraire ne marche-t-elle pas ?

E : Ils ont écrit en lettres capitales donc ça donne envie de lire. Après est-ce que c’est ça qui fait que ça marche ? Je ne sais pas.

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L : Je crois que ça ne marche pas. Leur but c’est d’inciter les enfants mais si nous-mêmes nous n’arrivons pas à comprendre la publicité… c’est râté !E : Et il y a trop de choses, on ne sait pas où regarder.L : Oui et surtout on comprend pas l’objet de la publicité.

Donc elle n’est pas réussie ?

Toutes : Non…

4 — IMPACT ET CHANGEMENT

C : J’ai l’impression que ça vise un public vraiment très jeune. Des enfants de 10 ans quoi… Mais si nous on n’arrive pas à comprendre ces images alors un enfant de 10 ans…L : Oui, les pompiers j’ai toujours pas compris.C : Bon après, celle sur les « rois et princesses », les petits peuvent comprendre. En fait, le public dépend de chaque affiche.E : Pour « ni fast ni furious » par exemple, je comprends qu’il y a un jeu de mots mais je ne le comprends pas vraiment ce jeu de mots.

À votre avis, qu’est-ce qui pourrait être amélioré ?

L : Les textes.C : Oui les images ça va encore.

Pensez-vous que c’est utile de montrer ça ?

L : Oui parce que l’idée d’inciter les enfants au musée est bonne. Mais en même temps, c’est vrai que ça parle surtout aux parents.

Cette image peut-elle changer des habitudes, des comportements, des idées… ? Par exemple, si je reprends ce que vous dites, cette campagne va-t-elle inciter les familles à venir au musée ?

E : Peut-être que ça peut intriguer les familles et que du coup elles auront envie d’y aller.

Et les jeunes de votre âge ?

E : À part si on aime vraiment le musée, c’est pas un endroit où on irait de nous-mêmes… Du coup je ne pense pas.L : Oui et moi je trouve que c’est quand même trop enfantin donc je me sens pas concernée.

Les jeunes de votre âge peuvent-ils changer après avoir vu cette image ?

Toutes : Non ! C : En plus je trouve que c’est un peu moralisateur, pour revenir à ce qu’on disait quand on

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expliquait que ça parlait aux parents. Finalement, c’est un peu « forcez vos enfants à aller au musée ». Je le comprends un peu comme ça. « Emmenez » c’est un impératif donc c’est vrai que ça fait penser à un ordre.

À votre avis, qu’est-ce que le « communiquant » pense que vous allez comprendre et penser de son image ?

C : Déjà c’est bizarre parce que nous l’image on ne l’a pas comprise, du coup on ne sait pas ce qu’il a voulu faire passer comme message.E : Oui je suis d’accord, vu que nous on comprend pas, c’est un échec.

5 — ÉDUCATION À L’IMAGE ET AUX MEDIAS

Votre manière de percevoir l’image a-t-elle changé maintenant que vous l’avez étudiée de plus près ? Avez-vous aimé en discuter ?

L : Oui ça change, forcément. En plus on découvre l’avis des autres. C : Oui c’est intéressant d’écouter les points de vue des autres, on se fait un avis en fonction de ce que les autres nous disent.

Cette discussion va-t-elle influencer votre relation aux images en général et comment ?

E : Peut-être. Ça me donne envie de faire plus attention aux images autour de moi, celles que je pense comprendre mais en fait je suis peut-être à côté de la plaque. Les affiches dans le métro par exemple.

Trouvez-vous important de développer l’éducation aux images et l’éducation aux médias à l’école ?

C : Oui nous on le fait déjà au collège. On étudie des tableaux surtout. E : Oui c’est important.L : Je pense aussi. On voit pas une image de la même manière quand on a pris le temps de la comprendre. D’autant plus qu’en général les jeunes sont très influencés par la pub donc c’est vrai que c’est important de bien les comprendre pour éviter les faux-sens. E : Oui, ça serait bien d’y consacrer quelques heures de cours mais pas non plus beaucoup !

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21Emmenez vous enfants voir… — 2015 — Médiation

En 2014, les musées d’Orsay et de l’Orangerie constatent que le jeune public et le public fami-lial est trop faible. En quelques chiffres, le nombre de visiteurs du Musée d’Orsay en 2014 est de 3 480 609, pour seulement 348 060 visiteurs ayant moins de 18 ans. Face à lui, des musées comme le Louvre ou le Quai Branly affichent des résultats bien supérieurs : 22 % de visiteurs de moins de 18 ans au Quai Branly, 18 % au Louvre, contre 5 % au Musée d’Orsay et 6 % à l’Orangerie. Certes les sorties scolaires brassent de nombreux enfants et adolescents mais les sorties en famille restent très faibles. Les deux institutions ont encore cette image poussiéreuse qui éloigne les jeunes et n’encourage pas les familles à venir. En 2014, seul 1 % des familles se déplacent pour les activités dédiées aux enfants. Près de 40 % des familles interrogées ne connaissent pas ces programmes « jeunes publics ». Seulement 31 % des familles qui visitent le Musée sont des familles françaises et franciliennes. En somme, la fréquentation du musée d’Orsay en particulier est composée à 70 % de touristes et les 30 % restants sont des adultes. On observe donc que les familles franciliennes n’amènent pas leurs enfants avec eux aux Musées d’Orsay et de l’Orangerie car ce n’est pas une destination familiale dans leur esprit. Ils ne semblent pas être conçus pour les enfants, à l’inverse des autres grands musées parisiens.

Dès lors, comment faire pour que les familles franciliennes amènent leurs enfants avec elles lorsqu’ils viennent visiter les deux musées ? Une campagne publicitaire semblait être le meil-leur outil pour débloquer la situation et faire qu’enfin les familles viennent en nombre dans les deux musées. Dans l’esprit d’Amélie Hardivillier — chef du service de la communication de l’Établissement public des musées d'Orsay et de l'Orangerie — la campagne en question de-vait répondre à des objectifs clairs et précis : que les parents amènent leurs enfants, donner envie aux enfants d’accompagner leurs parents, et concilier divertissement et enrichissement culturel. Les objectifs finaux étaient d’augmenter la fréquentation globale du musée, augmen-ter la fréquentation jeune public d’Orsay et de l’Orangerie, et enfin se mettre au niveau de ses concurrents sur le segment jeune public.

Afin de réaliser cette campagne, Amélie Hardivillier a souhaité travailler, ou plutôt re-travailler, avec Pascal Couvry, fondateur de l’agence Madame Bovary, une agence de création corporate. En effet, en 2011 la directrice de communication avait déjà fait appel à ses talents, à l’époque directeur artistique de l’agence Publicis, lors de la campagne « Nous avons revu Orsay, tout est à revoir ». Comme c’est un duo qui avait très bien fonctionné et dont la campagne avait fait un formidable buzz, elle a naturellement décidé de renouveler l’expérience en confiant les en-fants du musée d’Orsay à cette toute nouvelle agence innovante. Cette dernière est par ailleurs très intéressée sur le fait de travailler pour des institutions culturelles telles que le Centre des monuments nationaux, Le Mémorial de la Shoah, le Musée de l’Armée aux Invalides, etc.

ANALYSE ET SYNTHÈSE DES MÉDIATEURS

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Les concepteurs de la campagne — soit l’agence de création corporate — avaient pour seule directive de faire une campagne d’affichage économe (130 000 € pour cinq vagues d’affichages Metrobus). À leur disposition, se trouvaient toutes les images numériques des oeuvres de la collection des deux musées, qui leur a permis de ne faire aucune dépense en production, puisqu’il n’y a eu aucun shooting à faire. Aussi, l’idée était d’utiliser les oeuvres du musée afin de valoriser la collection. Parce que le musée se plaignait d’un manque de famille et donc d’un déficit de notoriété dans ce public, l’enjeu pour l’agence a été de rendre attractive leur collec-tion. L’avantage était que les images sont déjà très simples à comprendre et qu’il n’y avait pas besoin d’avoir fait de grandes études d’art pour les appréhender.

La campagne est composée de neuf images en format paysage présentant à chaque fois une oeuvre différente : il s’agit de scènes de genre, de sculptures, de peintures d’hommes nus… Comme l’impressionnisme traite de sujets assez contemporains, comme la famille, les relations amoureuses, les produits culturels, des passerelles ont été imaginé entre la consommation culturelle des enfants d’aujourd’hui et les thèmes traités dans les oeuvres. Associée à ces images, il y a une accroche sous la forme injonctive qui est mise en valeur sur un fond coloré et transparent, permettant la pleine lecture des tableaux. Pour chaque visuel, le texte varie tout en gardant la base « Emmenez vos enfants voir… » Cela crée un effet de répétition qui marque les esprits. Le texte fait le lien entre l’époque contemporaine et le XIXe siècle. Toute la force de la campagne se trouve en effet dans cette association anachronique. Par exemple, l’oeuvre du Douanier Rousseau est pour la première fois mis en dialogue avec le célèbre blockbuster Fast & Furious : « Emmenez vos enfants voir ni Fast ni Furious ». Le message qu’ils ont souhaité faire passer est que l’impressionnisme est une forme d’art très moderne finalement, qui traite de sujets d’actualité. Cela dépoussière un peu l’image dépassée des musées.

Ainsi, la campagne s’est voulue très simple et colorée, avec une typographie sans sérif mo-derne et dynamique. Ce qui marche très bien selon l’agence c’est l’injonction « Emmenez vos enfants » pensé par Pascal Manry, qui ajoute de l’attractivité à la campagne, et l’effet de masse produit par la série des neufs visuels qui renforce le poids du message. C’est imaginé sur un ton humoristique et audacieux. Par exemple pour le visuel « Emmenez vos enfants voir des gens tout nus », on n’a pas l’habitude de mettre en avant la nudité auprès du jeune public. Il souhaite surprendre et casser la rigidité du musée. En définitive, cette campagne a été qualifiée respectivement par la communauté des concepteurs et des diffuseurs de simple et audacieuse. Elle a été plutôt bien reçue à en juger par les retombés médiatiques sur les réseaux sociaux et les prix de communication remportés l’année de sa sortie. Ils espèrent en tout cas avoir fait évoluer l’image qu’on se fait d’un musée impressionniste.

Néanmoins, lorsque nous avons confronté ces images de communication à un groupe de collé-giennes de 14 ans, nous avons fait face à une certaine incompréhension vis-à-vis du message souhaité par le musée et l’agence de communication. Si elles ont compris facilement qui étaient le destinataire et l’émetteur, du moins la chose s’est compliquée quant au message principal et à la visée des images. Le musée d’Orsay a été parfaitement identifié mais les collégiennes ont compris que chacune des images « vendait » une exposition différente alors qu’elle vantait col-lectivement la richesse de la collection du musée. Elles ont donc cherché pour chaque image ce que l’exposition en question pouvait présenter sans faire de lien entre toutes les images

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montrées lors de l’entretien. De plus, elles n’ont pas forcément apprécié le ton drôle, ce qui a confirmé un sentiment étrange chez elles, celui de prendre la phrase « Emmenez vos enfants voir... » comme un ordre, comme une obligation forcée d’aller au musée accompagnées de leurs parents. Car elles ont également trouvé que ladite phrase s’adressait davantage aux parents qu’à leurs enfants, ce qu’elles ont souligné à juste titre par l’utilisation du pronom pos-sessif « vos » qui marque la possession sur le mot « enfants » et donc qui revendique bien l’idée que le message s’adresse à des adultes ayant des enfants. Néanmoins cela n’apparaît pas comme une surprise, en effet ce point avait été évidemment conscientisé par l’agence de communication, Thibault Vandershooten nous avait confié : « Il y a une règle simple, si on veut toucher les enfants, quand on a 10 - 12 ans, ce n’est pas l’enfant qui décide mais les parents. Donc il faut toucher les parents. »

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24Emmenez vous enfants voir… — 2015 — Synthèse et tableau comparatif

01L’item et son contexte

Le musée d’Orsay est un musée national du ministère de la Culture, de même que le musée de l’Orangerie. Ces deux musées sont gérés par l’Établissement public du musée d’Orsay et du musée de l’Orangerie. Depuis le 1er janvier 2004, le musée d'Orsay est un Établissement Public Administratif. Il regroupe le musée d'Orsay, le musée de l'Orangerie et le musée Hébert. Le musée d'Orsay était avant 2004 un service à compétence nationale. Il est devenu établisse-ment public à caractère administratif par décret du 26 décembre 2003 (modifié par le décret du 27 mai 2010), placé sous la tutelle du ministre chargé de la culture. La campagne « Emmenez vos enfants » a été lancée en octobre 2015 afin de faire venir ou revenir les familles au musée d’Orsay et de l’Orangerie. Un contrat d’objectif et de performance et signé tous les 5 ans, com-prenant des objectifs très précis, et parmi eux celui de faire venir le public familial. Jusqu’à 2015, le pourcentage de public, contrairement au musée du Louvre, était très faible dans ces deux musées. En 2014, sur les 3 480 609 visiteurs du Musée d’Orsay, seulement 348 060 avaient moins de 18 ans. C’est alors le musée le moins fréquenté en relatif par les jeunes publics après comparaison avec ses concurrents. Par exemple, le Musée du Quai Branly accueille 22 % de visiteurs de moins de 18 ans sur l’année 2014, le Louvre 18 %, tandis que le Musée d’Orsay n’en accueille que 5 % et l’Orangerie 6 %. Le constat qui est fait est que les familles franciliennes n’amènent pas leurs enfants avec eux aux Musées d’Orsay et de l’Orangerie car ce n’est pas une destination familiale dans leur esprit.

Face à cette problématique, Amélie Hardivillier, chef du service de la communication de l’Éta-blissement public des musées d’Orsay et de l’Orangerie, a imaginé une campagne pour attirer ce public. La campagne comprend neuf visuels. Chacun reprend une œuvre peu connue du grand public du musée d’Orsay ou du musée de l’Orangerie, sur lequel est associé le slogan « Emmenez vos enfants voir… » avec un exemple choisi en fonction de l’œuvre.

02Communauté de production

L’agence Madame Bovary, fondée par Pascal Couvry. L’agence se définit elle-même comme une jeune agence de communication. Il s’agit d’une agence de création corporate qui veut ré-concilier la création et le corporate, car pour être efficace, la communication corporate a besoin d’audace, d’innovation, d’impertinence et surtout de légèreté. Madame Bovary fait appel à

SYNTHÈSE ET TABLEAU COMPARATIF

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25Emmenez vous enfants voir… — 2015 — Synthèse et tableau comparatif

tous les outils du XXIe siècle pour inventer de nouveaux territoires de communication frais et durables. Les objectifs de la communication étaient que les parents amènent leurs enfants aux Musées d’Orsay et de l’Orangerie, de donner envie aux enfants d’accompagner leurs parents au musée, et de concilier divertissement et enrichissement culturel. Les objectifs de la cam-pagne étaient d’augmenter la fréquentation globale du musée, d’augmenter la fréquentation jeune public des Musées d’Orsay et de l’Orangerie, et de se mettre au niveau des concurrent sur le segment jeune public. La campagne s’adressait aux parents habitants la région Île-de-France, ayant des enfants de moins de 12 ans. Les intervenants dans ce projet était Pascal Couvry, directeur de la création, Pascal Manry, concepteur-rédacteur, Paulo Villas, directeur artistique et Thibaut Vandershooten, responsable du planning stratégique et du suivi projet.

03Communauté de diffusion

Amélie Hardivillier, chef du service de la communication de l’établissement public des musées d’Orsay et de l’Orangerie. En 2015, Amélie Hardivillier décide de contacter Pascal Couvry, fondateur de la jeune agence de communication indépendante, Madame Bovary. En 2012, elle avait choisi l’agence Publicis Consultants pour la campagne « Nous avons revu Orsay, tout est à revoir » sur l’ouverture de 1500 m² de nouveaux espaces dans le musée. À l’époque, Pascal Couvry était le directeur de la création de l’agence, qu’il quitte en 2014 pour fonder sa propre agence. Lorsque la chef du service de la communication, Amélie Hardivil-lier doit trouver une agence pour leur nouvelle campagne, c’est tout naturellement qu’elle se tourne vers cette jeune agence. Intitulée « Emmenez vos enfants voir », cette campagne avait pour rôle de capter les parents et les enfants, déficitaires ces dernières années dans les deux musées mentionnés. Cette campagne est née du constat que les deux musées n’avaient pas assez de public famille, contrairement au Louvre notamment. Il fallait donc imaginer une cam-pagne pour faire venir ou revenir ce public. L’idée était de créer une campagne audacieuse en associant des mots de l’univers enfantin, adolescent, et des œuvres des deux musées, afin de toucher le jeune public, mais aussi les parents. Le but commun était de s’amuser et d’amuser en créant une campagne unique qui allait être repéré et reprise. La campagne revisite les deux collections en essayant de faire découvrir des œuvres peu connues. Le but est aussi de mon-trer que l’art est à la fois pour les petits et les grands. Chaque tranche d’âge y trouve quelque chose. Selon Amélie Hardivillier, les visuels utilisés parlent d’eux-mêmes, mais le slogan ima-giné par Pascal Couvry, donne la véritable force à l’ensemble. C’est l’association des deux qui assure l’efficacité de la campagne.

04Communauté de réception

Elsa, Céline et Lucie, collégiennes en classe de 3e à Paris. Les trois collégiennes interro-gées font partie d’un établissement de bon niveau et où elles sont déjà sensibilisées à la lecture d’image. Au sein du focus group, la réception de toutes les images a été pour le moins mitigée car il en résulte que peu d’images ont été réellement comprises par les collégiennes. Dès le

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26Emmenez vous enfants voir… — 2015 — Synthèse et tableau comparatif

début elles n’ont pas compris que les images vantaient la richesse des collections du Musée d’Orsay et elles ont cherché à comprendre ce que chaque image « vendait » comme exposition sans faire de lien entre toutes les affiches. L’une d’entre elles n’a même pas du tout été com-prise à cause d’un problème de vocabulaire (l’art pompier). Néanmoins, les trois jeunes filles ont bien ressenti que l’on cherchait à les attirer avec des éléments qui plaisent aux enfants : dessins animés, 3D, rois et princesses… Cependant elles ont conclu à l’unanimité que la cam-pagne s’adressait davantage aux parents qu’aux enfants.

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