Vive les REQUINS - ASPAS
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Vive lesREQUINS !
ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES
LONGITUDE 181
www.aspas-nature.org
l'Association pour la protection
des animaux sauvagesLâASPAS est une association pour la protection des animaux sauvages, reconnue dâutilitĂ© publique, 100% indĂ©pendante financiĂšrement et politiquement. Elle achĂšte des espaces naturels pour les prĂ©server de toute exploitation mercantile.
L'ASPAS sensibilise lâopinion publique sur lâaberration du classement des « nuisibles », mĂšne des actions pour une meilleure connaissance et une meilleure protection des loups, des amphibiens, des blaireaux, des renards, des requins...
En 2012, lâASPAS rejoint Shark Alliance, coalition dâONG internationales se consacrant Ă la restauration et Ă la conservation des populations de requins en essayant de faire Ă©voluer la politique commune de la pĂȘche de lâUnion EuropĂ©enne.
En partenariat avec Longitude 181 et Sea Shepherd France, lâASPAS sâest Ă©galement mobilisĂ©e pour agir juridiquement Ă plusieurs reprises contre des arrĂȘtĂ©s dĂ©posĂ©s par le prĂ©fet de La RĂ©union, puis par le dĂ©putĂ© maire de Saint Leu, autorisant des prĂ©lĂšvements « prĂ©ventifs » de requins, notamment des requins bouledogues au sein de la RĂ©serve Naturelle Marine de La RĂ©union. Le tribunal administratif a donnĂ© raison aux associations, soulignant dâune part lâincompĂ©tence du dĂ©putĂ© maire de Saint-Leu pour dĂ©roger au rĂ©gime de protection de la rĂ©serve et, dâautre part, le caractĂšre inappropriĂ© et disproportionnĂ© de la mesure.
Avec prĂšs de 3000 procĂ©dures engagĂ©es devant les tribunaux depuis plus de 30 ans, lâASPAS Ćuvre efficacement pour le respect et lâĂ©volution du droit de lâenvironnement, et a dĂ©jĂ sauvĂ© des centaines de milliers dâanimaux sauvages.
LâASPAS, une association libre pour des animaux libres !
Association pour la protection des animaux sauvages BP 505 - 26401 CREST Cedex - FranceTĂ©l. 04 75 25 10 00 - Fax. 04 75 76 77 58 - [email protected]
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Requin océanique(Carcharhinus longimanus)
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Rédaction en chef : Anne Fourier et Marc Giraud Contributions : Myriam Dupuis - Anne Fourier - Marc Giraud - Véronique Sarano - François SaranoTémoignages : Yves Paccalet - Yann Perras - Debbie Salamone - François Sarano - Bernard Seret
Relecture scientifique : François Sarano - Bernard Séret / Relectures : Ariane Ambrosini - Manon Chalindar Céline Hernandez - Brigitte Sanne - Véronique Sarano / Traduction de D. Salamone : AdÚle Marchal
Coordination : Madline Reynaud / Direction artistique, maquette : Marion Sarano / Iconographie : Rémi Collange Anne Fourier / Photographiques couvertures © : Pascal Kobeh. Galatée films - Jamieragen - François Sarano
Photographiques © : Alvesgaspar - Frédéric Bassemayousse - Beverly Cabellan - Candiche - Rémi Collange - Mark Conlin Zach Dischner - Kate Dixon - Eazy traveler - Grolltech - Hermés - Denise Meertens - Tendua. Myriam Dupuis - Thierry Peres
Tybo.wikimedia commons - François Sarano - Véronique Sarano - Shark Attack Survivors for Shark Conservation - Tomasz Sienicki Wikimedia commons - Xvic.wikimedia commons. Illustrations : Marc Giraud - Gilles Macagno - Pascal Robin - Marion Sarano
© ASPAS - juillet 2015 - Tous droits de reproduction réservés.Imprimé par Impressions Modernes
B ienvenue chez les squales ......................................p.04-08
TĂMOIGNAGE : BERNARD SĂRET .....................................p.09
Les requins de France ....................................................p.10-15
TĂMOIGNAGE : YVES PACCALET ......................................p.16-17
La pĂȘche dans le monde ..................................................p.18-23
TĂMOIGNAGE : FRANĂOIS SARANO ................................p.24-25
LâhystĂ©rie anti-requins ................................................p.26-28
TĂMOIGNAGE : DEBBIE SALAMONE ................................p.29
La « crise requin » à La Réunion .................................p.30-36
Qu'en est-il de la protection des requins ? ........p.37-38
TĂMOIGNAGE : YANN PERRAS ..........................................p.39
Et vous, que pouvez-vous faire ? ........................p.40-41
Ils agissent pour les requins et lâocĂ©an .......p.42-43
Les requins et le loup : la force fragile ...........p.44-45
BIBLIOGRAPHIE ......................................................................p.46
Association pour la protection des animaux sauvages BP 505 - 26401 CREST Cedex - FranceTĂ©l. 04 75 25 10 00 - Fax. 04 75 76 77 58 - [email protected]
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Des poissons particul iers
Ces animaux font partie d'un immense groupe ( les Ă©lasmobranches ) comprenant 530 espĂšces diffĂ©-rentes de requins et quelques 750 espĂšces de raies. Les poissons cartilagineux nâont aucun rapport avec ceux qui pos-sĂšdent un squelette osseux.
Les poissons osseux, comme la sardine ou le thon,
sont gĂ©nĂ©tiquement plusproches de lâĂȘtre humain quâils ne le sont des requins !
Le terme mĂȘme de « poisson » nâa dâailleurs plus beaucoup de signifi-cation au regard de la classification actuelle du vivant.Les requins se caractĂ©risent par un squelette entiĂšrement cartilagineux, mais aussi par 5 Ă 7 fentes bran-chiales latĂ©rales selon lâespĂšce, et par 2 nageoires dorsales, exceptĂ© chez certains requins « primitifs » ( câest-Ă -dire proches de lâancĂȘtre ). Les poissons osseux, quant Ă eux, sont dotĂ©s dâun squelette plus ou moins ossifiĂ© et nâont, de chaque cĂŽtĂ© de la tĂȘte, quâune seule ouver-ture branchiale appelĂ©e « ouĂŻe ».
Il existe des requins dâeau douce, des requins rikiki, de pacifiques gĂ©ants et des petits « parasites », des espĂšces tropicales ou arctiques, et dâautres qui sâĂ©battent prĂšs des plages de la France mĂ©tropolitaine. Que cela ne vous empĂȘche pas de vous baigner en toute tranquillitĂ© : ce qui est gĂ©nĂ©ralement colportĂ© sur ces animaux est entachĂ© d'erreurs et de prĂ©jugĂ©s.
B i envenue chez
Les requins sont des poissons au squelette cartilagineux, comme les raies et les chimĂšres.
Requin-marteau halicorne(Sphyrna lewini)
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Dauphin ( 1 nageoire dorsale )Requin ( 1 nageoire dorsale et 1 nageoire caudale )
Sur les 530 espĂšces de requins prĂ©-sentes dans le monde, prĂšs de la moitiĂ© ne dĂ©passe pas 1 mĂštre et prĂšs des trois quarts nâatteignent pas 1,60 m. La taille varie de 15 cm
RUSE DE PRO : REQUIN OU DAUPHIN ? En surface, la nageoire dorsale et la nageoire caudale des requins dĂ©passent de lâeau, ce qui permet de les diffĂ©rencier immĂ©diatement des dauphins dont lâunique nageoire dorsale Ă©merge. La nageoire caudale verticale propulse le requin grĂące Ă un mouvement latĂ©ral de droite Ă gauche, alors que la nageoire caudale horizontale du dauphin suit un mouvement ondulatoire de haut en bas.
les squales . . .
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pour le requin-lanterne nain ( Squalio-lus laticaudus ), qui tient dans la main, Ă plus de 14 m pour le requin-baleine ( Rhincodon typus ).
Ăcrite en collaboration avec des spĂ©cialistes renommĂ©s, cette brochure est destinĂ©e Ă mieux faire connaĂźtre les requins, et Ă sensibiliser sur lâurgence de leur protection. En effet, ces prĂ©dateurs nĂ©cessaires Ă la vie marine sont en train de se rarĂ©fier Ă une vitesse inquiĂ©tante. " Les requins protĂšgent nos ocĂ©ans, protĂ©geons-les. "
Ampoules de LorenziniPerception des champs Ă©lectriques(sous la tĂȘte)
Ligne latéralePerception des ondes de pression
Fossettes sensoriellesAnalyse de l'eau
Narines - Saveurs
Yeux - Vue
DES SENS INSENSĂSLes requins ont une perception remarquable de leur environnement et disposent de sens que nous humains ne possĂ©dons pas. Ainsi, les am-poules de Lorenzini, une multitude de cellules sensorielles qui sâouvrent par de minuscules orifices sur le museau, permettent aux requins de percevoir les micro-champs Ă©lectriques. GrĂące Ă elles, un requin est capable de repĂ©-rer une proie cachĂ©e dans le sable.
Le requin possÚde sur les flancs d'autres cellules sensorielles qui réa-gissent aux variations de pression : elles forment la ligne latérale. Ainsi il perçoit la moindre vibration émise par ce qui bouge alentour.
Les «fossettes» sensorielles dispersĂ©es sur lâensemble du corps, plus particu-liĂšrement le dos, analysent la compo-sition chimique de lâeau et sa salinitĂ©.
Ainsi certains requins
« goĂ»tent » lâeau avec leur dos !
Les narines du requin ne jouent aucun rĂŽle dans la respiration. IndĂ©pen-dantes lâune de lâautre, elles dĂ©tectent les moindres saveurs ( odeur sexuelle, sang, putrĂ©faction )âŠ
Comme le chien qui remonte la piste grĂące Ă son flair, le requin remonte le courant de « saveurs ». Il balance sa tĂȘte de droite Ă gauche pour mieux cerner ce courant et se diriger vers sa source, zone de concentration la plus forte.
Dernier sens : les papilles gusta-tives qui tapissent non seulement la bouche mais Ă©galement lâĆsophage !
© Marion Sarano
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DES AMOURS MORDANTESChez les requins, la fĂ©condation est interne et nĂ©cessite un accouple-ment, comme chez les mammifĂšres. Le mĂąle est pourvu de deux organes copulateurs, les ptĂ©rygopodes, mais un seul dâentre eux pĂ©nĂštre la femelle. Lâaccouplement est parfois brutal, car le mĂąle maintient sa partenaire en la mordant et peut la blesser.
Certains squales pondent des Ćufs comme les oiseaux, dâautres ont une gestation interne et donnent nais-sance Ă des petits semblables aux adultes. Bref, ces poissons ont « in-ventĂ© » la maternitĂ© ! Mais dans tous les cas, les requins nouveau-nĂ©s sont
immédiatement autonomes et ne re-çoivent aucun soin parental.
La longĂ©vitĂ© des requins peut aller de 4 Ă 70 ans ( pour le grand requin blanc ). Ă cette durĂ©e de vie importante, sâas-socient une maturitĂ© sexuelle tardive ( entre 2 et 20 ans selon les espĂšces ), une gestation lente ( le requin-lĂ©zard Chlamydoselachus anguineus a la pĂ©riode de gestation la plus longue des vertĂ©brĂ©s : elle pourrait atteindre 3 ans et demi ! ) et une faible fĂ©conditĂ© ( peu de petits par portĂ©e ). Ce renou-vellement lent des individus rend les populations de requins particuliĂšre-ment vulnĂ©rables.
DANS TOUTES LES MERS DU MONDELes requins sont présents dans toutes les mers et océans, y compris dans les régions glacées avec pour exemple les laimargues du Groenland (Somniosus microcephalus).
Certaines espĂšces apprĂ©cient lâeau douce. Elles peuvent remonter les fleuves sur plusieurs
centaines de kilomĂštres et vont jusque dans les lacs, tels les requins bouledogues
(Carcharhinus leucas).
Les squales sont capables de par-courir des distances trĂšs importantes lors de leurs migrations Ă la recherche de nourriture ou pour se reproduire.
Les requins occupent Ă©galement toute la colonne dâeau, certaines espĂšces sont plus actives en surface, tandis que dâautres se cantonnent dans les plus grands fonds marins. Habitant des profondeurs, le requin grande gueule ( Megachasma pelagios ) nâa Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© Ă la science quâen 1976. Depuis l'an 2000, plus dâune centaine dâespĂšces nouvelles ont Ă©tĂ© dĂ©cou-vertes. Le monde des requins reste cependant largement mĂ©connu.
Grand requin blanc (Carcharodon carcharias)
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UN RĂGIME ALIMENTAIRE VARIĂ
ESSENTIELS AUX ĂCOSYSTĂMES MARINS
Certaines espĂšces ont des prĂ©fĂ©-rences, comme le requin-pĂšlerin (Cetorhinus maximus) et le requin- baleine (Rhincodon typus), qui se nourrissent de petits poissons et de plancton. Dâautres sont capables dâattraper des oiseaux, des dauphins ou des phoques.
Les requins sont trĂšs Ă©clectiques.Ce sont principalement
des mangeurs de poissons, qui diversifient leurs menus
avec des invertébrés (mollusques, crustacés).
Le squalelet fĂ©roce (Isistius brasiliensis) a le rĂ©gime alimentaire le plus original. C'est un petit prĂ©dateur dâenviron 50 centimĂštres. Avec ses lĂšvres qui
font ventouse, le squalelet fixe ses mùchoires sur ses victimes, puis il leur arrache un morceau de chair ! Ses cibles sont les requins, les thons, les es-padons, mais aussi les phoques, dau-phins, baleines⊠et parfois le caout-chouc des sonars des sous-marins. Ce petit « parasite » se rencontre dans les mers tropicales et tempérées, y compris en Méditerranée.
Les requins sont des « superpré-dateurs » qui ont des relations avec de trÚs nombreuses espÚces. à ce titre, ils ont une place trÚs importante
dans les milieux quâils occupent.
Acteurs dominants de la chaßne alimentaire, les superprédateurs sont pourtant trÚs fragiles, à cause de leur faible fécondité et de leur maturité sexuelle tardive.
PrĂ©sents depuis400 millions dâannĂ©es,les requins ont survĂ©cu
Ă 5 extinctions massives !
Or, leur Ă©limination par la pĂȘche entraĂźne des change-ments radicaux pour toutes les espĂšces qui Ă©taient en relation avec eux, et en cascade des bouleversements profonds des Ă©cosystĂšmes marins.
© Marc Giraud
Le squalelet est petit,et il se nourrit d'une drĂŽle de maniĂšre...
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Requin gris de récif (Carcharhinus amblyrhynchos)
Les hommes prĂ©fĂšrent les gros poissons ! En un siĂšcle, leurs stocks (thons, mĂ©rous et requins) ont chutĂ© de 2/3. La pĂȘche tend Ă cibler ces « gros poissons » car ils sont relative-ment plus faciles Ă capturer, et surtout parce quâils ont une meilleure valeur marchande. Selon les statistiques « officielles » de la FAO (Organisation des Nations Unies pour lâalimentation et lâagriculture), la production mon-diale de requins a triplĂ© en 50 ans, passant de 250 000 tonnes en 1960 Ă presque 900 000 tonnes en 2002 ; mais
depuis 2003 cette production baisse ! La production rĂ©elle, incluant les captures non dĂ©clarĂ©es et les rejets, serait dâenviron 1,6 millions de tonnes, dont 400 000 pĂȘchĂ©s uniquement pour les ailerons ! En quelques dĂ©cennies, de nombreuses populations de ces re-quins « commerciaux » ont fortement diminuĂ©, certaines jusquâĂ 90 % de leur biomasse initiale. Dans un Ă©co-systĂšme Ă©quilibrĂ©, les prĂ©dateurs sont diversifiĂ©s et abondants, ils contrĂŽlent naturellement les populations de petits poissons et dâinvertĂ©brĂ©s. En
Peut-on imaginer une mer sans requin ?Ne laissons pas disparaĂźtre le Grand Blanc du Grand Bleu !
Océanographe biologiste, spécialiste des poissons cartilagineux, Bernard Séret est consultant en Ichtyologie marine aprÚs
40 années passées dans la recherche scientifique publique.
TĂ©mo ignageB E R N A R D S Ă R E T
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exploitant prioritairement ces prĂ©da-teurs, la pĂȘche modifie les « rapports de force » entre les diffĂ©rents Ă©che-lons des chaĂźnes alimentaires : la diminution des prĂ©dateurs « supĂ©rieurs » favorise les populations des poissons intermĂ©diaires : lâĂ©cosystĂšme se trans-forme. Pour maintenir sa rentabilitĂ©, la pĂȘche exploite alors ces Ă©chelons intermĂ©diaires, puis les Ă©chelons de plus en plus bas dans les chaĂźnes alimentaires. Ă terme, il ne subsiste que des petits poissons et des invertĂ©brĂ©s⊠dont les mĂ©duses ! LâĂ©cosystĂšme est appauvri.
Certains requins, comme les roussettes, rĂ©sistent plutĂŽt bien Ă lâexploitation, mais dâautres doivent ĂȘtre prĂ©servĂ©s ( avec des mesures de gestion durable ) ou mĂȘme protĂ©gĂ©s ( interdits Ă la pĂȘche ).
Une mer sans requin est Ă craindre si nous ne freinons pas leur exploitation sans discernement. De « nuisibles », les requins sont dĂ©sormais reconnus comme utiles, non seulement pour la bonne santĂ© des Ă©cosystĂšmes marins, mais aussi Ă lâhomme, car des Ă©cosys-tĂšmes sains sont producteurs de res-sources pour lâĂȘtre humain.
PETITS ET GRANDS REQUINS DE MĂTROPOLEEn plongĂ©e, on peut croiser de petits requins qui vivent prĂšs du fond : la petite roussette ( Scyliorhinus canicula ), la grande roussette ( Scyliorhinus stellaris ) ou lâĂ©missole ( Mustulus mustulus ). HĂ©las pour elles, les roussettes sont trop exploitĂ©es, notamment en MĂ©diterranĂ©e, et commercialisĂ©es sous le nom de saumonette.
La roussette pond une vingtaine dâĆufs tout en nageant. L'embryon est protĂ©gĂ© par une capsule cornĂ©e rectangulaire dont les coins sont pro-longĂ©s de filaments torsadĂ©s. Ces filaments qui s'accrochent aux aspĂ©-ritĂ©s fixent la capsule sur le fond. Ainsi fixĂ©s au substrat, le petit et son ber-ceau ne dĂ©rivent pas.
Les requ ins de France
Savez-vous que lâon mange encore quotidiennement des requins en France mĂ©tropolitaine, et quâune espĂšce gĂ©ante vient rĂ©guliĂšrement se nourrir dans les eaux de Bretagne ?
© Marc Giraud
RUSE DE PRO :CAPSULES DâĆUFS
On trouve rĂ©guliĂšrement sur nos plages des capsules dâĆufs de raies et de petits requins : les roussettes. Ces prĂ©cieux indices tĂ©moignent de la prĂ©sence de ces poissons cartilagi-neux prĂšs de nos cĂŽtes.
Capsule dâĆuf de roussette
Capsule dâĆuf de raie
© Mark ConlinRequin peau bleue (Prionace glauca)
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Requin-pĂšlerin de belle taille comparĂ© Ă une plongeuse. Celle-ci ne risque rienâŠ
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Lâembryon, visible par transparence, se dĂ©veloppe jusqu'Ă ce que, totale-ment autonome, il sorte de sa cap-sule. On trouve parfois des capsules vides Ă©chouĂ©es sur les plages. Beiges ou brunes, les capsules de la petite roussette mesurent de 4 Ă 6 cm. Celles de la grande roussette sont deux fois plus grandes.
Plus impressionnant, le requin-pĂšlerin
adulte peut mesurer plus de 12 m
pour un poids de 6 tonnes.
Câest le deuxiĂšme plus gros "poisson" aprĂšs le requin-baleine. Bien quâil soit protĂ©gĂ©, ce gĂ©ant est en voie de disparition, notamment Ă cause du commerce des ailerons. Les passionnĂ©s de lâApecs ( Association pour lâĂ©tude et la conservation des sĂ©laciens ) Ă©tudient ses dĂ©placements et tentent d'estimer leur nombre dans les eaux de Bretagne. Au printemps et en Ă©tĂ©, le requin-pĂšlerin (Cetorhinus maximus) vient se nourrir de planc-ton au large du sud du FinistĂšre et en mer dâIroise. La grosse bĂȘte est inoffensive. En mer dâIrlande, oĂč un rassemblement exceptionnel de 500
requins-pÚlerins a été observé, des sorties en mer sont organisées pour que le public les rencontre dans leur milieu naturel.
Le requin-taupe commun ( Lamna nasus) ainsi que le requin-renard (Alopias vulpinus) se rencontrent plus au large au niveau de la pente continentale. Avec le requin peau bleue ( Prionace glauca ), ce sont
des espĂšces pĂ©lagiques (qui vivent en plein eau). En Ă©tĂ©, les plus jeunes individus peuvent sâapprocher des cĂŽtes et ĂȘtre aperçus en surface par les plaisanciers.
TrĂšs rare aujourdâhui, le « grand blanc » est de temps en temps pĂȘchĂ© en MĂ©diterranĂ©e. Il nây a pas de quoi en faire un film dâangoisse, mais cer-tainement un excellent documentaireâŠ
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On estime quâune cinquantaine dâespĂšces nagent dans les eaux mĂ©tropolitaines. Voici quelques-unes de celles que l'on observe le plus couramment.
REQUINS DE MĂTROPOLE
DANS
LES EAUX
TEMPĂRĂES
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1 Requin-pĂšlerin ( Cetorhinus maximus )
âą Ămissole lisse ( Mustelus mustulus )
2 Grande roussette ( Scyliorhinus stellaris )
âą Requin-taupe bleu ( Isurus oxyrinchus )
âą Requin-taupe commun ( Lamna nasus )
3 Grand requin blanc ( Carcharodon carcharias )
MER MĂDITERRANĂE & OCĂAN ATLANTIQUE NORD-EST :
Ces requins emblématiques fréquentent autant les eaux atlantiques que méditerranéennes.
âą Requin gris ( Carcharhinus plumbeus )
4 Ămissole tachetĂ©e ( Mustelus asterias )
âą Aiguillat commun ( Squalus acanthias )
5 Grand requin-marteau ( Sphyrna mokarran )
âą Requin-taureau ( Carcharias taurus )
6 Sagre commun ( Etmopterus spinax )
7 Requin peau bleue ( Prionace glauca )
âą Requin-hĂą ( Galeorhinus galeus )
8 Petite roussette ( Scyliorhinus canicula
âą Requin-renard de mer commun ( Alopias vulpinus )
9 Requin soyeux ( Carcharhinus falciformis )
âą Squale-chagrin commun ( Centrophorus granulosus )
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⹠Requin gris de récif ( Carcharhinus amblyrynchos )
âą Requin gris ( Carcharhinus plumbeus )
1 Requin-bouledogue ( Carcharhinus leucas )
âą Requin-tigre ( Galeocerdo cuvier )
2 Requin pointe blanche du récif ( Carcharhinus albimarginatus )
3 Requin pointe noire ( Carcharhinus melanopterus )
4 Requin-corail ( Triaenodon obesus )
âą Requin-nourrice fauve ( Nebrius ferrugineus )
âą Requin citron ( Negaprion brevirostris )
⹠Requin de récif ( Carcharhinus perezii )
âą Requin-tigre ( Galeocerdo cuvier )
âą Requin-nourrice ( Ginglymostoma cirratum )
âą Requin-taupe bleu ( Isurus oxyrinchus )
1 Requin-bouledogue ( Carcharhinus leucas )
MER DES CARAĂBES ( Guadeloupe, Martinique⊠)
OCĂAN PACIFIQUE ( PolynĂ©sie, Nouvelle CalĂ©donie⊠)
⹠Requin océanique ( Carcharhinus longimanus )
âą Grand requin-marteau ( Sphyrna mokarran )
5 Requin soyeux ( Carcharhinus falciformis )
âą Requin-marteau halicorne ( Sphyma lewini )
6 Grand requin blanc ( Carcharodon carcharias )
REQUINS DES OUTRE-MER
Les espÚces des territoires d'Outre-Mer sont plus abondantes que celles des cÎtes métropolitaines. Ces requins des mers tropicales sont plus souvent en contact avec les riverains.
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⹠Requin gris de récif ( Carcharhinus amblyrynchos )
âą Requin gris ( Carcharhinus plumbeus )
1 Requin-bouledogue ( Carcharhinus leucas )
âą Requin-tigre ( Galeocerdo cuvier )
2 Requin pointe blanche du récif ( Carcharhinus albimarginatus )
3 Requin pointe noire ( Carcharhinus melanopterus )
OCĂAN INDIEN ( La RĂ©union, Mayotte )
4 Requin-corail ( Triaenodon obesus )
âą Requin nourrice fauve ( Nebrius ferrugineus )
⹠Requin océanique ( Carcharhinus longimanus )
âą Grand requin-marteau ( Sphyrna mokarran )
5 Requin soyeux ( Carcharhinus falciformis )
âą Requin-marteau halicorne (Sphyma lewini )
DANS LES EAUXTROPICALES...
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Mission en PolynĂ©sie, aux Ăźles Tuamotu⊠Au cĆur du lagon de Rangiroa, surprise ! Des enfants se baignent ; mais pas tout seuls. Ils sâamusent avec des requins ! Ils barbotent au milieu des « Dents de la mer » ⊠Une douzaine de squales vont et viennent dans un
enclos de corail. Les enfants jouent avec eux. Ils poursuivent les gros poissons dans lâeau peu profonde. Ils les attrapent par la queue ou les nageoires, ils les chevauchent et se laissent traĂźner par eux dans lâonde. Nulle crainte. Juste le plaisir de se divertirâŠ
Les peuples du Pacifique affirment quâils ont lâ« esprit requin ».Nous autres, Occidentaux, nous avons lâ« esprit anti-requin ».
Philosophe, écrivain, journaliste, naturaliste, scénariste, Yves Paccalet a accompagné Jacques-Yves Cousteau pendant
prĂšs de 20 ans et a signĂ© avec lui de nombreux livres. En 2014, ce passionnĂ© de nature publie « Ăloge des mangeurs
dâhommes », vouĂ© Ă la dĂ©fense des animaux prĂ©dateurs, rĂ©putĂ©s « dangereux » et mal-aimĂ©s.
TĂ©mo ignageY V E S P A C C A L E T
Or, il ne sâagit nullement de petits animaux dans le style des requins-chats ou des roussettes. Ce sont de « vrais » squales, des gros, des sauvages, de 1,50 Ă 2 mĂštres de longueur. Corps puissant, grande bouche et dents acĂ©rĂ©es⊠Ces animaux appartiennent Ă deux espĂšces : celle que les PolynĂ©siens nomment mauri, câest-Ă -dire le requin Ă pointes noires ( Carcharhinus melanopterus ) ; et celle quâils baptisent mamaru ou
torire selon son Ăąge : le requin de corail ( Triaenodon obesus ).
Les enfants sâĂ©battent sans crainte avec ceux dont la rĂ©putation, ailleurs sur la planĂšte, sâĂ©crit en lettres de sang Ă la « une ». Leurs pĂšres et leurs grands-pĂšres leur ont appris Ă cĂŽtoyer les « monstres ». Ils leur ont montrĂ© comment les approcher, les amadouer, les toucher, prĂ©voir leurs rĂ©actions, bref comment vivre avec eux. Les anciens leur ont
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surtout enseigné le sens du mot « respect ».
Dans la tradition polynĂ©sienne, jamais un pĂȘcheur ne doit revenir Ă terre sans avoir jetĂ© plusieurs poissons Ă la mer en offrande aux squales qui suivent sa pirogue. On dit, aux Tuamotu, que le corps des requins sert de refuge Ă lâĂąme des humains morts.
Pour les PolynĂ©siens, sous la peau rugueuse du squale, se dissimule lâesprit dâun ancĂȘtre. Les peuples du Pacifique affirment quâils ont lâ« esprit requin ». Nous autres, Occidentaux, nous avons lâ« esprit anti-requin ». Plus gĂ©nĂ©ralement, antinature. Nous refusons de nous couler au creuset de la mer, de la terre, du ciel et de la vie. Nous ne voulons pas entendre ce que les autres crĂ©atures ont Ă nous dire. Nous y perdons le meilleur de nous-mĂȘmes. Nous y Ă©garons notre aptitude Ă comprendre et Ă ressentir lâharmonie de la nature, avant de nous y fondreâŠ
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Depuis 30 ans, lâexplosion de la pĂȘche des requins a mis en danger la survie de la plupart des espĂšces, car leur faible fĂ©conditĂ© et leur maturitĂ© sexuelle tardive les rendent particuliĂšrement vulnĂ©rables Ă une exploitation intensive.
LA PĂȘCHE DANS LE MONDE
UN MASSACRE GĂNĂRAL
Selon la FAO (Organisation des Nations Unies pour lâalimentation et lâagriculture), environ 800 000 tonnes de requins sont pĂȘchĂ©es chaque annĂ©e dans le monde. Tou-tefois, entre les pĂȘches non dĂ©cla-rĂ©es et les requins capturĂ©s puis re-jetĂ©s Ă lâeau, aprĂšs que les ailerons ont Ă©tĂ© prĂ©levĂ©s, la quantitĂ© rĂ©elle de requins tuĂ©s chaque annĂ©e serait de 1,6 million de tonnes, soit en rap-portant ce nombre au poids moyen
LâHOMME RESPONSABLE DE LA DISPARITION DES REQUINS
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dâun requin, environ 100 millions de requins. Selon lâUICN (Union Inter-nationale pour la Conservation de la Nature),
1/3 des espĂšces de requins sont
menacĂ©es de disparition ! LâIndonĂ©sie, lâEspagne, lâInde, les USA et TaĂŻwan sont les pays qui pĂȘchent le plus de requins. Viennent ensuite, en Europe, la France et le Portugal.
La pĂȘche aux requins sâest considĂ©rablement accrue au dĂ©but des annĂ©es 1990, lorsque la demande et le coĂ»t des ailerons ont brutalement augmentĂ©.
LA SENNE TOURNANTE encercle les bancs de thons et capture les requins qui les suivent : peau bleue, mako, requin soyeux.
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Requin gris (carcharhinus plumbeus)
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PĂCHE CIBLĂE ET PĂCHE ACCESSOIRE
Les requins sont recherchĂ©s spĂ©cifiquement pour leur chair et pour leurs ailerons, mais ils sont aussi capturĂ©s accidentellement par des engins de pĂȘche qui ne leur sont pas destinĂ©s. AppelĂ©es "cap-tures accessoires",
ces captures accidentelles, représentent un nombre considérable de requins.
Les captures accessoires sont sur-tout faites par les engins de pĂȘche dirigĂ©s vers les grands poissons
pĂ©lagiques (thons et espadons) : les sennes tournantes et les longlines. Mais elles sont aussi rĂ©alisĂ©es par dâautres engins trĂšs peu sĂ©lectifs comme le chalut de fond et la pa-langre de fond.
Enfin, bien quâils soient interdits au niveau mondial, les grands filets maillants dĂ©rivants sont malheu-reusement toujours utilisĂ©s dans les nombreux pays oĂč la rĂ©glementa-tion n'est pas appliquĂ©e. Ils causent alors des dĂ©gĂąts considĂ©rables chez toutes les espĂšces qui vivent prĂšs de la surface, requins compris.
1.LE PALANGRE DE FOND Les hameçons appùtés destinés aux prédateurs qui vivent sur le fond prennent aussi les requins profonds comme le griset et le chien de mer.
2.LE CHALUT DE FOND Racle le fond des océans et emporte tout : les jeunes de nombreuses espÚces de requins, sur le plateau continental ; les requins profonds à croissance trÚs lente dans les grandes profondeurs.
3.LE FILET MAILLANT DĂRIVANT Les nappes de filet font des barriĂšres de plusieurs km de long qui capturent tout ce qui vit prĂšs de la surface : tortues, oiseaux et requins.
4.LA LONG LINE Les lignes appĂątĂ©es destinĂ©es aux thons et espadons capturent aussi requins marteaux, soyeux, longimane, peau bleue, makoâŠ
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La pĂȘche pour se nourrir est une chose,
le massacre pour le plaisir de tuer ou pour satisfaire un
caprice de gourmets est insupportable !
LE FINNING, UNE PRATIQUE BARBARE
La plupart des requins ne sont pas capturĂ©s pour leur chair, mais uni-quement pour leurs nageoires. On parle alors de finning ou dĂ©coupe des nageoires. On mutile le requin de ses nageoires et on le rejette Ă la mer, parfois encore vivant, oĂč il va longuement agoniser.
POTAGE Ă LA SOUFFRANCE
Les nageoires sĂ©chĂ©es servent pour faire de la « soupe dâailerons » que certains sont prĂȘts Ă payer fort cher.
Cette mode gastronomique est Ă lâorigine
dâun Ă©norme trafic dans lequel les nageoires sont ven-dues Ă prix dâor sur les marchĂ©s asiatiques : Taiwan, Chine, CorĂ©e. Mais aussi sur le marchĂ© amĂ©ricain qui reste lâun des plus demandeurs, tant la communautĂ© asiatique y est prĂ©sente. Ce fructueux trafic a fait exploser la pĂȘche des requins dans le monde entier : navires industriels ou embarcations artisanales, tous sont attirĂ©s par lâappĂąt du gain.
Dans les ailerons, câest le cartilage qui donne la texture spĂ©cifique de la soupe. Le parfum vient des autres ingrĂ©dients. Les ailerons peuvent donc ĂȘtre remplacĂ©s par⊠du cartilage de porc !
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L'orgueilleuse ignominie des concours de pĂȘche au requin.
Le finning désigne la découpe des nageoires figurées en rose.
Ils emploient des flĂšches Ă tĂȘte ex-plosive pour massacrer les squales les plus curieux qui sâapprochent innocemment de leur fusil !
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DES MASSACRES INDIGNES
Bien quâelle soit anecdotique en tonnage, la pĂȘche sportive pour amuser les plus riches doit ĂȘtre dĂ©noncĂ©e.
La « pĂȘche rĂ©crĂ©ative au requin »
est un hobby dâun autre Ăąge.
Elle nâa plus sa place au XXIeme siĂšcle, alors que les populations de tous les grands prĂ©dateurs sont en chute libre. Elle a fait des dĂ©gĂąts considĂ©rables dans toutes les populations de re-quins qui vivent Ă proximitĂ© de la surface des ocĂ©ans, en particulier le requin peau bleue (photo), le requin mako et le requin renard. Pire encore, certains clubs de pĂȘche organisent de scandaleux concours de pĂȘche aux requins !
ĂGOĂSTES ET NUISIBLES :
Certains chasseurs sous-marins, qui ont probable-ment trop vu le film « Les Dents de la mer », consi-dĂšrent encore quâil est de salut public de tuer les requins.
LES CHASSEURS SOUS-MARINS
Requin peau bleue(Prionace glauca)
UN CONCENTRĂ DE TOXIQUES
Le requin fait partie des grands prĂ©-dateurs, il est en bout de chaĂźne ali-mentaire. Ă ce titre, il accumule tous les polluants persistants qui ont Ă©tĂ© ingĂ©rĂ©s par les poissons dont il se nourrit, notamment les pesticides et les mĂ©taux lourds (plomb, cad-mium, mercure). Il concentre ainsi le mercure sous sa forme la plus toxique, le mĂ©thylmercure, Ă raison de 0,5 g Ă 1 g par kilo dâailerons.
Dans certaines rĂ©gions tropicales, le requin concentre de la mĂȘme ma-niĂšre des toxines, les carchatoxines et ciguatoxines. Ces derniĂšres sont contenues dans une micro algue, la Gambierdiscus toxicus, qui est ingĂ©rĂ©e par les poissons herbivores.
Par bioaccumulation le long de
la chaĂźne alimentaire, ces toxines se concentrent.
Elles atteignent chez les requins, prĂ©dateurs supĂ©rieurs, des taux qui provoquent la ciguatera, maladie qui peut ĂȘtre mortelle, chez ceux qui les consomment. LâInstitut Pasteur de Madagascar a ainsi recensĂ© une quinzaine de morts depuis 2013.
Les requins tigres et les bouledo-gues pĂȘchĂ©s Ă La RĂ©union peuvent ainsi contenir des ciguatoxines quâils ont accumulĂ©es lors de leurs migrations en se nourrissant dans des rĂ©gions infestĂ©es de lâocĂ©an Indien.
VENDUS POUR LEUR CHAIR.. .Plusieurs espĂšces de requins sont exploitĂ©es pour leur chair. En Europe, ce sont surtout la petite et la grande roussette (vendues sous le nom de saumonette), lâĂ©missole tachetĂ©e, lâaiguillat commun et le requin-hĂą. MalgrĂ© les quotas de pĂȘche censĂ©s les protĂ©ger, ces espĂšces sont gĂ©nĂ©ralement surexploitĂ©es, voire en danger comme lâaiguillat.
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Requin peau bleue (Prionace glauca)
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LâHUILE DU FOIE POUR DES CRĂMES DE BEAUTĂ
Le squalane, extrait de lâhuile de foie de requin, est un composĂ© hydratant non gras et trĂšs soluble. Ses propriĂ©tĂ©s en font un produit recherchĂ©
pour la fabrication
de crĂšmes hydratantes et autres produits
cosmĂ©tiques. En 2012, entre 3 et 6 millions de re-quins des profondeurs ont Ă©tĂ© tuĂ©s pour rĂ©pondre Ă la demande inter-nationale en squalane. De fait, sur 72 crĂšmes Ă©chantillonnĂ©es, lâasso-ciation Bloom a dĂ©couvert quâune crĂšme sur 5 contient du squalane de requin. LâEspagne occupe une place centrale dans le nĂ©goce dâhuile de foie de requin.
LE CARTILAGE DES CHARLATANS
Parmi les molĂ©cules extraites du cartilage de requin, certaines sti-muleraient le systĂšme immunitaire, dâautres inhiberaient la croissance de nouveaux vaisseaux sanguins alimentant les cellules cancĂ©reuses, ou seraient antiasthmatiques. Mais les effets secondaires sont parfois problĂ©matiques et les Ă©tudes cli-niques contradictoires : certaines ont montrĂ© quâil nây avait aucune diffĂ©rence entre les patients ayant reçu le « mĂ©dicament » et ceux ayant reçu le placebo.
MAIS AUSSI POUR DES SOUS-PRODUITS FUTILESDans la plupart des cas, les requins ne sont pas pĂȘchĂ©s pour leur chair mais pour des utilisations futiles : dents pour les bijoux, huile de foie pour les crĂšmes de beautĂ©, cartilage supposĂ© Ă tort soigner diffĂ©rentes maladies, ou peau pour la maroquinerie de luxe.
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Huile de foie de requins
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Pourquoi prĂ©server les requins, et plus gĂ©nĂ©ralement la vie sauvage ? Il y a des raisons biologiques⊠Chaque animal, chaque espĂšce a une place dans lâĂ©cosystĂšme. Cette place est dĂ©finie par les relations que lâespĂšce tisse avec les autres ĂȘtres vivants et le milieu physique. Plus l'ĂȘtre est complexe, plus ses relations sont nombreuses et com-
plexes. Par consĂ©quent, plus la disparition de cette espĂšce a des consĂ©quences sur les autres es-pĂšces et sur lâĂ©cosystĂšme. Les requins sont des animaux trĂšs complexes, leurs relations sont im-portantes et nombreuses ; leur dis-parition affectera lâĂ©cosystĂšme en profondeur et, ne nous y trompons pas, nous ne serons pas Ă©pargnĂ©s
François Sarano est docteur en océanographie, plongeur professionnel, chef d'expédition et ancien conseiller scientifique du Commandant Cousteau. Plongeur, conseiller
scientifique et co-scénariste du film Ωcéans réalisé par Jacques Perrin et Jacques Cluzaud, il est également cofondateur
de l'association Longitude 181 Nature.
TĂ©mo ignageF R A N Ă O I S S A R A N O
car nous faisons intimement partie de lâĂ©cosystĂšme global.
Nous devons prĂ©server les requins aussi pour des raisons philoso-phiques. LâĂ©limination des espĂšces par cupiditĂ©, ou simplement parce quâelles entravent la rĂ©alisation de nos caprices, renforce la prise de contrĂŽle de lâhomme sur le monde. Ce contrĂŽle nous emprisonne en nous sĂ©curisant dans un univers de plus en plus artificiel, aseptisĂ©,
uniforme et virtuel. Cette domina-tion sans partage rĂ©trĂ©cit irrĂ©mĂ©dia-blement notre univers qui devient Ă©touffant, carcĂ©ral. Au contraire, les requins indomptĂ©s, libres, sym-boles de la vie sauvage, Ă©largissent notre horizon en nous offrant leur imprĂ©visibilitĂ©. Ils nous ouvrent une fenĂȘtre sur le merveilleux. Que se-rait un monde sans requins ? Sans Ă©lĂ©phants ? Sans gorilles ? Sans vie sauvage ? Câest un peu comme si vous demandiez que serait un
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Trouver comment vivre harmonieusement avec les requins donne sens Ă notre HumanitĂ© ! Respecter les requins, câest
nous respecter nous, les Ătres humains !
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monde sans Mozart, sans Rem-brandt ?
Câest la diversitĂ© du vivant ainsi que la diversitĂ© culturelle qui font la richesse de notre Terre. Lâunifor-mitĂ©, câest la fin du monde ! Perdre une espĂšce, câest comme perdre un chef-dâĆuvre. Au fond direz-vous, ce nâest pas si grave, nous conti-nuerons Ă survivre ! Et pourtant confusĂ©ment, nous ressentons Ă quel point câest fondamentalement grave, car câest une part de notre HumanitĂ© que nous perdons.
Si nous jugeons le vivant Ă lâaune de lâutile et du rentable pour juger de ce qui doit ĂȘtre conservĂ© ou pas, oĂč placer le curseur ? Qui garder ? Le requin ? Les dauphins ? Pas plus utiles ! Moi-mĂȘme, suis-je utile ? Serais-je conservĂ© ? Et puis, les normes changent avec le temps, lâespace et les traditions culturelles, les philosophies⊠En revanche, si je sais faire de la place aux requins qui nous dĂ©rangent, Ă la baleine bleue et Ă tous les encombrants, si je sais faire de la place Ă tous les insignifiants, aux espĂšces que je ne connaĂźtrai peut-ĂȘtre jamais, alors je saurai faire de la place Ă chacun dâentre nous avec ses diffĂ©rences, ses richesses.
LâĂ©limination des requins par caprice, par cupiditĂ©, pose une autre question : quel HUMAIN voulons-nous ĂȘtre ? En effet, nâest-ce pas au Respect que nous marquons envers les autres, envers nos « coloca -Terres » que nous mesurons notre « HumanitĂ© », notre diffĂ©rence dâavec les autres espĂšces ? Câest ce respect qui nous construit, qui nous dĂ©finit, qui dĂ©finit notre Huma-nitĂ©. En revanche, lâĂ©limination des requins, comme celle d'une autre espĂšce, est une indignitĂ© qui nie ce que nous aspirons Ă ĂȘtre : humain.
Notre relation avec les requins pose la question du monde dans lequel nous voulons vivre. Un monde contrĂŽlĂ©, aseptisĂ© et uniformisĂ©, un monde sans rien qui nous Ă©chappe, sans vie sauvage ? Un monde oĂč les derniers survivants de chaque espĂšce seraient prĂ©servĂ©s dans des aquariums gĂ©ants, des zoos, tristes arches de NoĂ©, ersatz dâune richesse Ă©vanouie. Jâaurais honte de dire Ă mes enfants : « Jâai ren-contrĂ© les requins ; ils mâont Ă©bloui, ils mâont donnĂ© des joies immenses, ils mâont offert des moments de paix bouleversants. Par insouciance, par caprice⊠je nâai pas su vous les transmettre ! »
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LâhystĂ©r ie anti-requins
Dans la culture occidentale, les requins sont synonymes de danger
et de mort...
... et le film « Les Dents de la mer » (Steven Spielberg, 1975), qui a déformé la réalité avec beaucoup
dâefficacitĂ©, nâa pas amĂ©liorĂ© leur rĂ©putation. Plus tard, lâauteur du roman dont est tirĂ© le film, Peter Benchley, a regrettĂ© lâimpact nĂ©gatif de
son Ćuvre. Fervent dĂ©fenseur des Ă©cosystĂšmes marins, il sâest amĂšrement repenti dans son livre « Shark Trouble » (2003) et au cours de nombreuses confĂ©rences. Mais cela nâa pas suffi Ă changer les mentalitĂ©s.
La peur des prĂ©dateurs est due Ă la mĂ©connaissance de leurs mĆurs. Entretenue par certains mĂ©dias, cette terreur pousse Ă des rĂ©actions irrationnelles, des massacres insensĂ©s, des destructions sans mesure.
Alors quâaucun accident mortel nâa Ă©tĂ© enregistrĂ© en MĂ©diterranĂ©e depuis plus de 100 ans, l'observation d'un aileron de requin, ou de poisson lune, suscite toujours la panique et des rĂ©actions disproportionnĂ©es.
Trop de journalistes font des « unes » racoleuses et anxiogĂšnes. Durant lâĂ©tĂ© 2014, un petit requin peau bleue qui sâaventure rarement prĂšs des cĂŽtes de Corse, est observĂ© prĂšs d'une plage. Les drapeaux rouges sont aussitĂŽt hissĂ©s pour interdire la baignade... alors que l'animal est inoffensif.
© Rémi Collange
PLUS UN ĂVĂNEMENT SORT DE LâORDINAIRE ET PLUS IL FRAPPE LâIMAGINATION
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Source : International Shark Attack File at the Florida Museum of Natural History
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Source : International Shark Attack File at the Florida Museum of Natural History
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LâANIMAL LE PLUS DANGEREUX
EST MINUSCULE Alors que, selon l'International Shark Attack File, les requins sont responsables d'une dizaine d'accidents mortels par an ( graphique ci-contre ),
les moustiques, vecteurs du chikungunya, de la dengue,
du paludisme et de tant dâautres maladies,
font chaque année 1,5 million de morts.
Les abeilles et les frelons tuent 400 humains par an, les mĂ©duses, une cinquantaine. Et le « meilleur ami de lâhomme » ? Le chien est responsable de 25 000 dĂ©cĂšs chaque annĂ©e ( essentiellement en transmettant le virus de la rage, dans les pays nâayant pas de
traitement vaccinal ).
LE REQUIN NâEST PAS UN MANGEUR DâHOMMESIl ne sâagit pas de nier les accidents liĂ©s aux requins - nous publions ici deux tĂ©moignages de victimes - mais de les replacer dans leur contexte, pour en prendre lâexacte mesure. Quotidiennement, des millions de personnes se baignent sur les territoires des requins. Si nous Ă©tions Ă leur menu, il y aurait des centaines d'accidents chaque jour et nous ne pourrions pas mettre un orteil dans lâeau. On a plus de chance de gagner le gros lot au Loto Âź ( une sur 14 millions ) que de se faire mordre par un requin !
DĂCĂS DâHUMAINS PAR AN
DANS LE MONDE
Moustiques : 1 500 000Serpents : 100 000
Chiens : 25 000Abeilles / frelons : 400
MĂ©duses : 50Requins : 10
Céphée ( Cephea cephea )
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DES DANGERS RĂELS ?La pollution de lâair tue chaque annĂ©e 7 millions dâhumains ; le tabac, 6 millions ; les accidents de la route, 1,3 millions ; les guerres⊠plus de 500 000 ; les crimes de sang font 200 000 morts.
Il y a 1,3 milliard de fumeurs dans le monde.
PrÚs de 10 millions mourront chaque année de leur funeste habitude,
soit 1 milliardau XXIe siĂšcle...
Soit un million de fois plus que par morsure de requin, Ă supposer quâil reste des squales Ă la fin du XXIe siĂšcle ! C'est ce que nous rappelle Yves Paccalet dans son ouvrage « Ăloge des mangeurs dâhommes ».
SE SOUCIE-T-ON VRAIMENT
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« Il mâa attrapĂ©e ! » ai-je criĂ© pendant que je me dĂ©battais Ă coups de pieds pour me libĂ©rer des mĂąchoires dâun requin. Cela se passe en 2004 au large de la cĂŽte Est de la Floride, Ă moins de 16 mĂštres du rivage. Se rendant compte que je nâĂ©tais pas le poisson quâil espĂ©rait chasser, le requin lĂącha soudainement prise, mais aprĂšs mâavoir dĂ©chiquetĂ© le pied et sectionnĂ© le tendon dâAchille.
Je me suis rendue compte que jâĂ©tais particuliĂšrement lĂ©gitime pour
dĂ©fendre les crĂ©atures marines - y compris les requins. Jâai laissĂ© tomber mon job de journaliste et jâai commencĂ© Ă travailler pour « The Pew Charitable Trust » ( page 42 ), organisation non gouvernementale de protection des requins, oĂč jâai fondĂ© « Shark Attack Survivors for Shark Conservation ». Le groupe est composĂ© de survivants dâattaques du monde entier - certains ayant perdu des bras ou des jambes - qui savent pertinemment que les
Mordue par un squale, la journaliste amĂ©ricaine Debbie Salamone a fondĂ© une association de dĂ©fense des requins avec dâautres victimes dâattaques. Porte-parole de son association,
elle tĂ©moigne pour lâASPAS.
TĂ©mo ignageD E B B I E S A L A M O N E
Bien que cela mâait pris des mois pour pouvoir Ă nouveau marcher, jâai fini par rĂ©aliser que mon amour
des ocĂ©ans nâavait, lui, pas Ă©tĂ© atteint.©
Alv
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sparrequins ont plus Ă craindre de lâhumain que lâhumain des requins.
Ensemble, nous avons contribuĂ© Ă Ă©tablir et renforcer lâinterdiction de la pĂȘche aux ailerons de requins ( shark finning ) adoptĂ© par lâONU ( page 23 ). Nos militants ont interpellĂ© l'ONU afin de promouvoir une plus grande protection des Ă©changes commerciaux, d'interdire la pĂȘche d'espĂšces vulnĂ©rables et de limiter la pĂȘche aux requins en fonction des
ressources disponibles. Ils ont aussi soutenu les efforts de lâONG « Pew » pour la crĂ©ation de 10 sanctuaires, Ă©parpillĂ©s dans le monde entier, oĂč la pĂȘche commerciale de requins est interdite ; ces sanctuaires reprĂ©sentent au total prĂšs de 13 millions de kmÂČ.
Ă terme, les survivants dâattaques espĂšrent parvenir Ă renforcer la population de requins pour assurer le bien-ĂȘtre des Ă©cosystĂšmes marins.
Panneau de la Réserve Naturelle Marine, criblée de plombs par les opposants à la Réserve
la «cr ise requ in» à la réun ion
DES ACCIDENTS
à La Réunion, les accidents mortels par morsure de requin ne sont pas nouveaux : 10 entre 1990 et 2000, 3 pour la décennie suivante et 7 depuis 2011, ce qui est dans la moyenne mondiale : 10 accidents mortels par an, avec de fortes variations : 1 seul en 2007, mais 13 en 2011.
La majorité des accidents touchent des surfeurs,
le soir dans lâeau trouble aprĂšs les pluies.
Les plongeurs et apnĂ©istes, qui sont tous les jours dans lâeau, ne sont en revanche pas importunĂ©s et voient trĂšs rarement des requins.
Ces accidents impliquent des requins bouledogues ( Carcharhinus leucas ), trĂšs rarement des requins tigres ( Galeocerdo cuvier ).
DES PROGRAMMES SCIENTIFIQUES
L'Institut de Recherche et de DĂ©veloppement ( IRD ) a donc menĂ© le programme CHARC : Connaissances de lâĂ©cologie et de lâHAbitat de deux espĂšces de requins CĂŽtiers sur la cĂŽte ouest de La RĂ©union.
CHARC et dâautres Ă©tudes montrent que le requin tigre nâest pas sĂ©dentaire. Il se dĂ©place dans tout lâocĂ©an Indien, au moins jusquâau nord de Madagascar et jusquâaux cĂŽtes du Mozambique. Le requin bouledogue est lui aussi un migrateur qui viendrait prĂšs des cĂŽtes rĂ©unionnaises, plutĂŽt entre mars et juin, pour se reproduire dans les eaux dessalĂ©es des ravines. La population nâest pas en augmentation.
LA SITUATION ET LES FAITS
© Thierry Peres
Depuis fĂ©vrier 2011, 17 accidents impliquant des requins, dont 7 mortels, ont dramatiquement endeuillĂ© lâĂźle de La RĂ©union.
Ces accidents ont provoqué une psychose et des réactions hors de proportions que les médias ont appelé « La crise requin ».
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Blanchiment et mort des coraux aprÚs que les violentes pluies tropicales ont emporté les eaux
usées dans le lagon.
© Rémi Collange
EAUX USĂES ET DĂCHETS
Depuis les annĂ©es 1990, lâurbanisa-tion a explosĂ© sur la cĂŽte ouest de La RĂ©union. Mais la capacitĂ© de traitement des dĂ©chets et des eaux usĂ©es nâa pas augmentĂ© en consĂ©-quence.
Des déchets organiques se déversent massivement
en mer Ă chaque grosse pluie,
contribuant Ă attirer les requins dans les zones de baignade et de surf.
Cette pollution, associĂ©e Ă la surpĂȘche et au braconnage, a provoquĂ© la destruction de lâĂ©cosystĂšme corallien.
UNE RĂSERVE MARINE
Pour tenter de rĂ©tablir lâĂ©quilibre de lâĂ©cosystĂšme cĂŽtier ravagĂ© par lâhomme, une rĂ©serve marine de 35 km 2 a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e en 2007.RĂ©ellement efficace Ă partir de 2011, la rĂ©serve peine Ă amĂ©liorer la situation, car la pĂȘche y est autorisĂ©e partout, sauf dans les 5 % de la rĂ©serve strictement protĂ©gĂ©s.
L'EXPLOSION DES LOISIRS NAUTIQUES
Les activitĂ©s nautiques ont, elles aussi, explosĂ© multipliant les risques de rencontres avec les re-quins. Plus grave, certains pratiquants ne connaissent pas la mer ou, pire, refusent dâen apprendre les rĂšgles. Ils sâapproprient certaines « va-gues » en niant lâexistence de lâĂ©cosystĂšme global. PlutĂŽt que de prendre la responsabilitĂ© de leur ac-tivitĂ©, ils demandent Ă lâĂtat de sĂ©cu-
riser le terrain de jeux quâils se sont attribuĂ©s pour satisfaire leur caprice.
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DES PĂCHES PUNITIVES
Pour rĂ©pondre Ă la demande de vengeance, des pĂȘches punitives sont organisĂ©es aprĂšs chaque acci-dent afin de « chĂątier le coupable ». Ces pĂȘches absurdes mas-sacrent, au hasard, les requins qui passent et nâont jamais permis de cap-turer le requin cause de lâaccident, ni Ă La RĂ©union, ni dans les autres rĂ©gions du monde oĂč ces reprĂ©sailles moyenĂągeuses ont Ă©tĂ© abandon-nĂ©esâŠ
LA RĂSERVE MARINE ATTAQUĂE
Certains surfeurs remettent violem-ment en cause (menaces physiques, cocktail MolotovâŠ) lâexistence de la RĂ©serve Naturelle Marine, lâaccu-sant de provoquer « des dĂ©sordres Ă©cologiques en Ă©tant le garde-man-ger des requins ». Or la RĂ©serve,
LA PROBLĂMATIQUE
LâĂtat finance Ă coup de millions dâeuros lâĂ©limination des requins et la destruction de lâĂ©cosystĂšme marin afin que quelques dizaines de surfeurs puissent satisfaire leur caprice sportif.
soumise Ă une forte pression de pĂȘche, est toujours trĂšs pauvre en poissons. Elle ne constitue pas un attrait pour les requins.
ĂLIMINATION DES REQUINS, ABSURDE, DANGEREUSE
Des surfeurs exigent de lâĂtat quâil sĂ©cu-
rise leur terrain de jeu en éli-minant les requins. Pour justifier cette destruction, le CRPM a pro-posé une pseu-
d o - re c h e rc h e scientifique, Cap
Requin, dont il refuse de donner le
protocole et que les scien-tifiques de lâIRD ont refusĂ© de cau-
tionner. Cette volontĂ© dâĂ©radiquer les requins, plutĂŽt que dâapprendre les risques, est absurde car il est impossible et inadmissible de sup-primer les requins de lâocĂ©an Indien pour « sĂ©curiser » les plages rĂ©unionnaises.
Les autres usagers de la mer qui respectent les rĂšgles Ă©lĂ©mentaires de sĂ©curitĂ© ne sont pas importunĂ©s par les requins. Lâutilisation opaque des subventions par le ComitĂ© RĂ©gional des PĂȘches Maritimes de La RĂ©union ( CRPM ) finance une usine de transformation des requins⊠en engrais !
Requin corail( Trianodon obesus )
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Pire, le CRPM a proclamĂ© avoir in-ventĂ© un engin de pĂȘche capable « dâeffaroucher les requins » : le « smart drumline », qui nâest autre quâune ligne appĂątĂ©e ordinaire... Cette affirmation est pathĂ©tique, et on en rirait si elle nâĂ©tait aussi cri-minelle ! Car, en faisant croire quâil allait « sĂ©curiser la mer », le ComitĂ© des pĂȘches suggĂšre que les rĂšgles les plus Ă©lĂ©mentaires de prudence peuvent ĂȘtre oubliĂ©es, encoura-geant ainsi les usagers Ă diminuer leur vigilance.
Les pĂȘches menĂ©es par le CRPM ont peut-ĂȘtre
favorisé les derniers accidents mortels.
En effet, en plaçant des appĂąts dans les lieux de baignade et dâactivitĂ©s nautiques, le CRPM attire, au milieu des baigneurs, les requins du large qui ne seraient jamais venus si prĂšs des rivages, renforçant considĂ©ra-blement les risques dâaccidents. Sa responsabilitĂ© est engagĂ©e.
SUBVENTIONS Ă LA DESTRUCTION DE LâĂCOSYSTĂME MARIN
La responsabilitĂ© de lâĂtat français est, elle aussi, engagĂ©e. Car il finance sciemment, Ă coup de millions dâeuros, un systĂšme aveu-glĂ©ment destructeur qui condamne la RĂ©serve marine nationale. Il sub-ventionne un massacre totalement inefficace car, aprĂšs plus dâun an, les accidents nâont malheureusement pas cessĂ©.
Le CRPM et quelques pĂȘcheurs se gavent de cet argent public. DĂ©jĂ 675 000 ⏠allouĂ©s en 2011- 2015, 4 millions ⏠prĂ©vus pour 2015 - 2020.
Pour justifier massacre et dépenses,
l'Ătat pourrait subventionner une usine de transformation
des requins en engrais ! Scandale encore plus insupportable car cette usine ( capacitĂ© minimum 3000 t /an ) ne pourrait fonctionner quâen important massivement du poisson puisque toute la pĂȘche rĂ©unionnaise, requins et autres poissons, nâexcĂšde pas 1000 t.
DĂMOCRATIE BAFOUĂE
Les tenants de lâĂ©limination des requins nâautorisent aucune autre expression : scientifiques, reprĂ©-sentants de la RĂ©serve marine et reprĂ©sentants des associations sont rĂ©guliĂšrement calomniĂ©s, molestĂ©s et mĂȘme menacĂ©s de mort ! La mafia dicte les rĂšgles par la violence physique.
© Tybo wikimedia commons
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Depuis 2012, lâASPAS, Longitude 181 et les 6 associations du Collectif * tentent de restaurer un « vivre ensemble » entre activitĂ©s aquatiques, Ă©cosystĂšme rĂ©cifal et requins. Cette harmonie passe nĂ©cessairement par lâapprentissage de la mer, dans les Ă©coles comme sur les plages, et par le respect de rĂšgles simples de sĂ©curitĂ©.
ACTIONS ET SOLUTIONS
Appelée par les clubs de plongée, par la Réserve marine et les Réu-nionnais qui n'osaient pas s'expri-mer, Longitude 181 s'est rendue à La Réunion dÚs 2012. Avec l'ASPAS, elle a invité sans succÚs le grand public et les élus à plonger pour
voir la réalité de terrain et se faire une opinion afin que la raison
prenne le pas sur la rumeur
Face au colportage de rumeurs irra-tionnelles, aux menaces physiques et aux insultes les plus graves, associations métropolitaines et réunionnaises se sont constituées en Collectif * ( page 43 ).
Aux cĂŽtĂ©s de l'ASPAS, elles ont menĂ© avec succĂšs des recours juridiques contre les pĂȘches abusives de requins. Depuis 2013, elles tentent dâobtenir des Ă©claircissements sur les programmes Cap Requins et Valo Requins, notamment les protocoles scientifiques suivis et la rĂ©partition des subventions de lâĂtat.
Le Collectif tente, dâautre part, de faire entendre la voix de la « majoritĂ© silencieuse » des RĂ©unionnais qui commence Ă oser sâexprimer : sites internet, pĂ©titions contre les mas-sacres et pour la RĂ©serve, ou lettre ouverte de la mĂšre de la jeune Talon Bishop, tuĂ©e en fĂ©vrier 2015 (voir biblio).
* Le Collectif dâassociations : ASPAS, Longitude 181, Sea Shepherd, Fondation Brigitte Bardot, Tendua, Requin IntĂ©gration, Vagues, Sauvegarde des Requins.
DES ASSOCIATIONS QUI AGISSENT
© Thierry Peres
Manifestation pour la préservation de la Réserve Naturelle Marine de La Réunion le 25 avril 2015
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COMMENT RĂDUIRE LES RISQUES ?
Nous rĂ©affirmons avec force que, dans les circonstances ordinaires, les requins ne sont pas dangereux et que lâon peut pratiquer toutes les activitĂ©s nautiques en leur prĂ©sence.
Il y a des situations dangereuses
qui multiplient les risques dâaccidents.
Il faut donc renoncer à son activité le soir et lorsque les pluies diluviennes ont troublé l'eau de mer.
On apprend Ă respecter le code de la route et de la circulation en ville, milieu autrement plus dangereux que la mer. Pourquoi, Ă La RĂ©union, refuse-t-on lâapprentissage de la mer ? Pourquoi refuse-t-on de respecter les quelques rĂšgles simples de sĂ©curitĂ© ?
PRATIQUER SON ACTIVITĂ EN SPORTIF RESPONSABLE
Chaque accident mortel est intolĂ©rable, et chacun veut tout mettre en Ćuvre pour les Ă©viter⊠Pourtant, il nây a que lors des accidents de requins que lâon exige de lâĂtat de supprimer le « facteur naturel ». Dans le cadre des autres activitĂ©s de nature (ski, plongĂ©e, spĂ©lĂ©o, parapenteâŠ), demande-t-on aprĂšs chaque accident la suppression des courants et des mĂ©duses, des grottes et montagnes, de la neige et des tourbillons de vent ? Non, on demande aux sportifs de respecter les rĂšgles du milieu naturel. Il en va de mĂȘme des surfeurs.
Celui qui pratique une activité nautique devrait
« apprendre la mer »,prendre la mesure des risques
naturels et renoncer à son activité lorsque les conditions
sont défavorables.
Dans le cas contraire, il devrait assumer les conséquences en ADULTE RESPONSABLE.
Car, quelles que soient les mesures prises, il y aura toujours des risques à pratiquer une activité en milieu naturel peuplé de prédateurs sauvages.
Requin pointe blanche du récif (Carcharhinus albimarginatus)
Sâil Ă©tait rĂ©servĂ© Ă :
âą Renforcer la protection de la RĂ©serve marine pour rĂ©tablir lâĂ©quilibre Ă©cologique dĂ©truit,
âą Augmenter et moderniser le systĂšme dâassainissement des eaux usĂ©es,
⹠Enseigner « la mer » dans les écoles comme dans les lieux publics, en expliquant les risques et les rÚgles à respecter, comme dans toute activité de nature,
âą Renforcer la signalisation sur les plages et les lieux dâactivitĂ©s aquatiques.
LâARGENT PUBLIC ALLOUĂ SERAIT BIEN MIEUX DĂPENSĂ
Apprendre et respecter, seul moyen de retrouverune harmonie entre activité balnéaire
et vie sauvage marine.
LES RĂGLES DE SĂCURITĂ Ă SUIVRESi ces consignes Ă©lĂ©mentaires avaient Ă©tĂ© respectĂ©es, au moins 6 des 7 accidents mortels advenus depuis fĂ©vrier 2011 nâauraient pas eu lieu ! Il ne faut pas aller Ă lâeau :
Tard le soir ou tĂŽt le matin,
AprÚs les pluies, lorsque les ravines se sont déversées en mer, apportant des odeurs fortes qui attirent les requins,
En cas de forte houle qui trouble lâeau de mer,
En dehors des zones autorisées à la baignade,
Chaque fois que le drapeau rouge est hissé,
PrĂšs des zones portuaires oĂč sont jetĂ©s des appĂąts et des dĂ©chets de pĂȘche.
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Ă lâaube des annĂ©es 2000, des associations luttent contre la surexploitation des requins et lancent une large sensibilisation auprĂšs du grand public.
En 2003, Longitude 181 demande Ă la PolynĂ©sie française de prĂ©server les requins du finning qui se dĂ©ve-loppe. Son action aboutit en 2007 : une loi de pays interdit la pĂȘche dans toute la Zone Economique Exclusive (ZEE) polynĂ©sienne qui va jusquâĂ 200 milles des cĂŽtes, lâune des plus vastes du monde.
Longitude 181 puis lâASPAS re-joignent ensuite la coalition Shark Alliance (page 42) pour
Quâen est- il de la protect iondes requ ins ?
Depuis quelques annĂ©es, des mesures conservatoires viennent sâopposer Ă lâanarchie dĂ©vastatrice de la pĂȘche aux requins.
DES AVANCĂES GRĂCE AUX ASSOCIATIONS
demander lâinterdiction du finning
sur les bateaux de pĂȘche europĂ©ens
(qui fournissaient 1/3 des ailerons sur le marchĂ© de Hong-Kong). AprĂšs un long combat, le Parlement europĂ©en vote en 2012 lâobligation, pour tous les navires europĂ©ens, de dĂ©barquer les requins avec leurs ailerons attachĂ©s. Les carcasses encombrantes ne valant rien, les pĂȘcheurs hĂ©sitent Ă pĂȘcher les re-quins. Toutefois, la faiblesse des moyens de surveillance rend difficile lâapplication de cette lĂ©gislation.
© Tendua - Myriam DupuisRequin à pointes noires (Carcharhinus melanopterus)
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LA PROTECTION PROMULGUĂE PAR CERTAINS ĂTATS
Certains pays sensibilisĂ©s par ces actions dĂ©cident de protĂ©ger les requins dans leur ZEE. Ainsi, dans lâocĂ©an Pacifique, toute pĂȘche est dĂ©sormais strictement interdite dans les Ăźles Palau, Cook, Marshall, Tokelau, en Nouvelle CalĂ©donie et dans le sanctuaire de Malpelo (Colombie).
Dâautre pays prennent des mesures de protection spĂ©cifique. Le grand requin blanc est protĂ©gĂ© depuis 1991 en Afrique du Sud, 1993 en Namibie, 1997 aux Etats-Unis, 1998 en Australie, 2000 Ă Malte et 2007 en Nouvelle ZĂ©lande.
Enfin, de plus en plus de pays instaurent des quotas (quantitĂ©s maximales) sur la pĂȘche aux requins (roussette, Ă©missoleâŠ), voire des interdictions totales. Ainsi la pĂȘche au requin-taupe a Ă©tĂ© interdite en Europe en 2010 par lâUnion EuropĂ©enne.
CONVENTIONS INTERNATIONALES FAUSSEMENT RASSURANTES
Aucun rĂšglement ne protĂšge les requins Ă lâĂ©chelle internationale ! Contrairement Ă une idĂ©e reçue, les conventions ne font quâinscrire certains requins particuliĂšrement menacĂ©s dans la « Liste des
espĂšces protĂ©gĂ©es ». Mais elles nâinterdisent pas leur pĂȘche. Ainsi, la CITES (Convention sur le commerce international des espĂšces de faune et de flore sauvages menacĂ©es d'extinction) a bien inscrit 8 des 530 espĂšces Ă son Annexe II : requin baleine (Rhincodon typus), requin pĂšlerin (Cetorhinus maximus), grand requin blanc (Carcharodon carcharias), requin ocĂ©anique Ă pointes blanches ou longimane (Carcharhinus longimanus), requin marteau halicorne (Sphyma lewini), grand requin marteau (Sphyrna mokarran), requin marteau commun (Sphyrna zygaena) et requin taupe bleu (Isurus oxyrynchus). Mais cette inscription correspond seulement Ă lâinterdiction du commerce international de ces espĂšces.
La CITES nâinterdit ni la pĂȘche, ni la vente Ă lâintĂ©rieur du pays oĂč les requins
ont Ă©tĂ© pĂȘchĂ©s.
Une transition vers la durabilitĂ© est en marche, mais elle sera longue, car il existe encore beaucoup de pĂȘcheurs / pilleurs en activitĂ© dans le monde.
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2003 : El Yaque au Venezuela, paradis pour vĂ©liplanchiste. Jâaccomplis mon rĂȘve. Alors que je suis dans lâeau, je descends de ma planche pour effectuer des rĂ©glages, je sens que mon pied est pris dans un Ă©tau. Gravement mordu par un requin, je me dĂ©fends. Je serai secouru grĂące Ă un concours de circonstances incroyable.
AmputĂ© dâune jambe, je refuse de laisser ma tragĂ©die personnelle alimenter la peur infondĂ©e de ces
animaux. Au contraire, je veux mettre en lumiĂšre des pratiques de pĂȘche Ă la fois cruelles et destructrices. Mon tĂ©moignage a pour objectif dâalerter les consciences, en plaidant en faveur de l'arrĂȘt du finning, et de l'Ă©tablissement de quotas de pĂȘche.
La surpĂȘche est lâune des menaces les plus graves sur les Ă©cosystĂšmes, parce quâelle modifie les Ă©quilibres naturels, et notamment le haut de la chaĂźne des grands prĂ©dateurs. Un des moyens les plus efficaces
AmputĂ© dâune jambe, je refuse de laisser ma tragĂ©die personnelle alimenter la peur infondĂ©e des requins.
VĂ©liplanchiste, Yann Perras a Ă©tĂ© victime dâun accident de requin. Conscient des enjeux de lâĂ©cologie, cet amoureux des mers garde un admirable esprit sportif et part en guerre, non pas
contre les requins, mais contre ceux qui les détruisent.
TĂ©mo ignageY A N N P E R R A S
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pour lutter contre cette pression est de créer un réseau de grands sanctuaires qui seront interdits aux activités extractives industrielles et commerciales. PEW, avec son programme Global Ocean Legacy (page 42), a pour but de créer de 15 à 20 grandes réserves hautement protégées dans les 3 océans majeurs de la planÚte. Ainsi, il participe activement au programme Global Shark.
La rĂ©action Ă La RĂ©union dâautoriser la pĂȘche de 90 requins nâest, Ă
mon sens, non seulement pas une dĂ©cision rationnelle et utile, mais elle va Ă lâencontre mĂȘme du message que je souhaite vĂ©hiculer : le requin nâest Ă la base pas un animal dangereux. Seules, certaines circonstances peuvent ĂȘtre dangereuses. Il appartient donc Ă lâhumain de respecter les consignes pour assurer des baignades en sĂ©curitĂ©. Faut-il rappeler que le nombre dâaccidents par noyade est sans aucune commune mesure avec les accidents impliquant des requins ?
En tant que consom-mateur, refusez dâacheter du requin, ne serait-ce que pour votre propre
santé et celle de vos enfants (page 22). Sachez que « la saumonette » ou « le chien de mer » sont les noms commerciaux utilisés pour désigner plusieurs espÚces de petits requins (roussettes, aiguillats communs, émissoles) souvent proposées en
restauration collective. Et « le veau de mer » désigne en réalité le requin-taupe bleu.
Ainsi, boycottez le steak de requin et la soupe dâailerons, ainsi que les res-taurants qui en proposent.
La pĂȘche pour les ailerons dĂ©cime les requins par millions et ne res-pecte aucune Ă©thique en perpĂ©tuant des pratiques brutales et illĂ©gales, le Shark Finning (page 20).
Ne consommez pas de plat Ă base de requin
Une crĂšme de beautĂ© sur 5 contient du squalane de requin extrait de lâhuile de son foie. Les gĂ©lules Ă base de cartilage de requin, utilisĂ©es pour les problĂšmes articulaires et contre le cancer, perpĂ©tuent une pratique sans Ă©thique, sans respect et sans validation scientifique.
En France, comme partout dans le monde, boycottez les produits dĂ©rivĂ©s issus des requins (page 23). De mĂȘme, nâachetez ni dent, ni mĂąchoire de requin en guise de souvenirs pour ne pas encourager ce marchĂ©.
CHAIR DE REQUIN
PRODUITS DĂRIVĂSNâachetez pas de produits dĂ©rivĂ©s issus des requins
Chacun de nous peut Ćuvrer Ă son Ă©chelle pour la protection des requins. Dâabord, en nâencourageant pas leur destruction, en privilĂ©giant des achats responsables. Les plus motivĂ©s peuvent agir plus concrĂštement encore.
Et vous , que pouvez-vous fa ire ?
© CandicheRequin-pÚlerin (Cetorhinus maximus)
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Le Shark Feeding est une activité touristique qui consiste à attirer les requins en les nourrissant pour les voir de plus prÚs. Cette pratique modifierait le comportement des squales et rapprocherait des
espĂšces vivant au large, prĂšs des cĂŽtes. Elle est Ă©galement risquĂ©e car elle peut gĂ©nĂ©rer des accidents pour les plongeurs (les requins affamĂ©s peuvent ĂȘtre agressifs).
Ne participez pas aux activités de Shark Feeding
Longitude 181 nature a lancé la Charte internationale du plongeur responsable pour mieux préserver les richesses de la mer et pour les partager plus équitablement (page 47).
La protection des requins passe aussi
par lâinformation au grand public, aux employĂ©s de magasins, aux responsables dâenseignes, aux restaurations collectives scolaires, Ă vos proches... Le dĂ©pliant « Les requins protĂšgent les ocĂ©ans,
protĂ©geons les requins » est disponible gratuitement, sur simple demande auprĂšs de lâASPAS et de Longitude 181. Un tract Ă destination des restaurants qui servent de la viande de requin et des magasins qui vendent des produits dĂ©rivĂ©s issus du requin est inclus dans le dĂ©pliant.
Vous pouvez Ă©galement soutenir financiĂšrement les associations qui
agissent en faveur des requins en y adhérant ou en participant aux frais engagés pour cette campagne : les lobbies favorables à la destruction
des requins sont bien plus riches et puissants que nous !
Enfin, vous pouvez rejoindre une association, en devenir un membre actif, et participer Ă des manifestations.
SHARK FEEDING
Devenez un plongeur responsable
Distribuez les dépliants et les tracts
PLONGEUR RESPONSABLE
DIFFUSEZ LâINFORMATION
SOUTENEZSoutenez les défenseurs des requins
NâhĂ©sitez pas Ă le photocopier et Ă le distribuer autour de vous.
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SEA SHEPHERD CONSERVATION SOCIETY :
Créée en 1977 par le capitaine Paul Watson, Sea Shepherd est une organisation internationale sans but lucratif qui a pour mission de mettre fin au massacre de la faune sauvage marine et à la destruction de ses habitats dans tous les océans de la planÚte.
www.seashepherd.fr
TENDUA :
Créée en 2008 par Myriam Dupuis, TENDUA est une association de sauvegarde de la biodiversité qui soutient des initiatives de conservation de la faune et de la flore. Elle défend la cause des requins depuis 2010 en organisant des conférences et en animant un blog à destination de tous dans le but de changer la perception du public.
www.tendua.org / www.protection-requins.org
SHARK ALLIANCE :
Coalition dâONG dĂ©diĂ©e Ă la restauration et Ă la conservation des populations de requins en amĂ©liorant les politiques de conservation (active
de 2006 Ă 2012). En 2012, elle obtient une lĂ©gislation europĂ©enne interdisant le finning en Europe. Shark Alliance a Ă©tĂ© menĂ©e par la Pew Charitable Trusts, ONG internationale ayant pour but dâamĂ©liorer la politique publique et lâinformation au grand public.
www.pewtrusts.org/en
De nombreuses associations locales, nationales et internationales se mobilisent pour la protection de la vie marine, et notamment des requins. Voici les principales.
Ils ag issent pour les requ ins et l âocĂ©an
© Thierry Peres
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SHARK ATTACK SURVIVORS FOR SHARK CONSERVATION :
L'association protĂšge les populations dĂ©croissantes et menacĂ©es de requins. Ses membres sont des surfeurs, nageurs et autres personnes venant du monde entier, qui, bien quâayant Ă©tĂ© victimes dâattaques terrifiantes et de blessures graves, reconnaissent que ces prĂ©dateurs sont en danger dâextinction, et que cette situation met en pĂ©ril les ocĂ©ans et lâensemble des Ă©cosystĂšmes marins.
www.facebook.com/SharkAttackSurvivors
BLOOM : FondĂ©e par Claire Nouvian en 2004, BLOOM a pour mission de changer de paradigme Ă©conomique afin dâoptimiser lâexploitation du bien commun universel quâest
la biodiversitĂ© marine. Elle met en place des pratiques limitant les impacts sur les espĂšces non-ciblĂ©es et les habitats, la crĂ©ation dâemplois grĂące au dĂ©veloppement du secteur de la pĂȘche artisanale et une meilleure rĂ©partition des subventions publiques françaises et europĂ©ennes, aujourdâhui captĂ©es par le lobby de la pĂȘche industrielle.
www.bloomassociation.org
COLLECTIF DâASSOCIATIONS POUR UNE COHABITATION HARMONIEUSE AVEC LES REQUINS Ă LA RĂUNION
© Shark Attack Survivors for Shark Conservation
Survivants d'un accident liĂ© Ă un requin en visite Ă l'ONU en 2010 pour demander de mettre fin Ă la pĂȘche des espĂšces de requins vulnĂ©rables.
Depuis 2013, un collectif de 8 asso-ciations sâest rassemblĂ© pour pro-tĂ©ger les requins Ă La RĂ©union. Il regroupe 2 associations locales, Vagues et Requin IntĂ©gration, et 6 associations nationales et inter-nationales : lâASPAS, Longitude 181 Nature, Sea Shepherd France, Fondation Brigitte Bardot, Ten-
dua et Sauvegarde des requins. Le collectif sâoppose fermement Ă tous les prĂ©lĂšvements de requins, punitifs ou prĂ©ventifs, pratiquĂ©s « au hasard », sans arguments scien-tifiques dĂ©montrant que lâĂ©limination des requins rĂ©duirait le risque dâacci-dents, lors de la pratique dâactivitĂ©s balnĂ©aires.
Un cocktail Molotov a Ă©tĂ© dĂ©couvert devant les locaux de la RĂ©serve marine de La RĂ©union ! StĂ©phane Girard, responsable local de Sea Shepherd, a dĂ» quitter lâĂźle Ă cause de cette violence.
En mĂ©tropole, mĂȘme bru-talitĂ© de la part des anti-loups. Deux gardes du Parc du Mercantour se font atta-quer Ă coups de pioche par un Ă©leveur, les locaux dâune a s s o c i a t i o n naturaliste sont saccagĂ©s par des reprĂ©sentants de syndicats de lâĂ©levage ovin, un administrateur de lâASPAS se fait molester Ă la sortie dâune rĂ©union.
Partout fusent des menaces de mort
de plus en plus virulentes : sâoccuper de biodiversitĂ©
est devenu risqué.
Comme les requins, le loup est un
superprédateur dans la nature, mais menacé et fragilisé par les activités humaines. Les requins et le loup occupent une place étrangement comparable dans nos imaginaires, nos fantasmes et nos terreurs pro-
fondes. Or, la peur et lâigno-rance sont les sĆurs de la
haine. Elles provoquent des réflexes, mais
pas de réflexion.
Le plus prĂ©occu-pant, câest que les ministres et leurs administra-tions soutiennent
généralement les casseurs. Ainsi
confortés dans leurs actions, les anti-nature
instaurent une situation à haut risque de dérapage. Les
décideurs choisissent donc une im-probable « paix sociale », contre la sécurité des habitants, ignorant les spécialistes qui proposent des solu-tions à long terme.
Merci donc dâavoir acquis cette bro-chure, de soutenir ceux qui Ćuvrent pour lâavenir. Les requins et le loup ont besoin de vous.
Les requins et le loup : la force fragile
Les anti-requins et les anti-loups se montrent de plus en plus violents contre les animaux, mais aussi contre ceux qui les protÚgent. Les autorités laissent faire.
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Les requins protÚgent nos océans, protégeons-les !
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Requin pointe blanche du récif (Carcharhinus albimarginatus)
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Ătudes sc ient if iquesSUR LâĂTAT DES POPULATIONS ET LEUR SUREXPLOITATION
Dulvy et al. « Extinction risk and conservation of the worldâs sharks and rays, eLife », 2014
Ferretti F. et al., « Loss of larger predatory sharks from the Mediterranean Sea », 2008
Rapport de Traffic « Into the deep : implementing cites measures for commercialy-valuable sharks and manta rays », 2013
Rapport de l'UICN « Liste rouge des espÚces menacées en France », 2013
Rapport de la FAO « la situation des pĂȘches et de lâaquaculture », 2014
Rapport de la CITES « EntrĂ©e en vigueur des amendements Ă lâAnnexe II pour 5 espĂšces de requins », 2014
Worms B. et al., « Global catches, exploitation rates, and rebuilding options for sharks marine policy », 2013
SUR LE SQUALANE
EnquĂȘte de Bloom « Le prix hideux de la beautĂ©. Une enquĂȘte sur le marchĂ© de lâhuile de foie de requin profond », 2012
Ătude de Bloom « La belle et la bĂȘte, du requin dans nos crĂšmes de beautĂ© », 2015
Ouvrages CALCAGNO Robert, «Requins au-delà du malentendu»,
Ăd. du Rocher, 2013, (144 p.)
GIRAUD Marc, « Calme plat chez les soles », Ăd. Robert Laffont, 2007,
(352 p.)
MOJETTA Angelo, « Les Requins », Ăd. GrĂŒnd, 1998, (167 p.)
PACCALET Yves, « La vie secrĂšte des requins », Ăd. lâArchipel, 2003, (298 p.)
PACCALET Yves, « Ăloge des Mangeurs dâhommes, loups, ours, requins⊠sauvons-les ! », Ed. Arthaud, 2014, (213 p.)
SARANO François, « Rencontres Sauvages », RĂ©flexions sur 40 annĂ©es dâobservations sous-marines, Ăd. gap, 2011, (256 p.)
SUR LA RĂUNION
Rapport scientifique final du programme CHARC « Ătude du comportement des requins bouledogue (Carcharhinus leucas) et tigre (Galeocerdo cuvier) Ă La RĂ©union », avril 2015.
SUR LA TOXICITĂ
Les intoxications par Consommation dâAnimaux Marins (ICAM) dans lâOcĂ©an Indien, ARVAM, 2000
Recommandation dâun comitĂ© des Nations Unies sur la dose maximale de mercure admissible dans lâalimentation, OMS, 2003
Contamination des requins, notamment tigre et bouledogue, par des ciguatoxines : occurrence, mĂ©thodes analytiques, cas humains rapportĂ©s et Ă©lĂ©ments dâĂ©thologie, Avis de lâANSES - rapport dâexpertise collective, AoĂ»t 2014
S ites internet http://www.traffic.org/home/2013/7/30/new-study-gets-its-teeth-into-shark-trade-regulations.html
http://www.fao.org/3/a-i3720f.pdf
http://www.iucn.org/?3362/2/Un-tiers-des-
http://www.liberation.fr/terre/2013/08/02/protection-des-requins-certains-pecheurs-se-contenteront-de-debarquer-leurs-prises-ailleurs_922402
http://www.liberation.fr/terre/2013/07/30/indonesie-inde-et-espagne-en-tete-des-pays-pecheurs-de-requins_921655
http://www.liberation.fr/terre/2012/08/27/aux-surfeurs-et-a-ceux-qui-veulent-eliminer-les-requins_842169
http://rue89.nouvelobs.com/2015/06/12/a-reunion-les-pro-anti-requins-dechirent-259722
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http://www.flmnh.ufl.edu/fish/sharks/statistics/statsw.htm
http://reunion.la1ere.fr/2015/04/29/la-lettre-emouvante-de-la-mere-de-talon-bishop-victime-d-une-attaque-de-requin-l-etang-sale-251901.html
requins-de-haute-mer-sont-menaces-dextinction
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www.longitude181.org
Longitude 181 agit pour la protection du milieu marin et le partage Ă©quitable de ses ressources. Elle a pour objectif dâaller Ă la dĂ©couverte de la nature, Ă la rencontre des hommes et de leurs traditions.
Elle a mis en place, en 2002, La Charte Internationale du Plongeur Responsable, aujourdâhui traduite en 22 langues. Actuellement, les structures ambassadrices de cette Charte sont rĂ©parties sur 20 pays en plus de la France MĂ©tropolitaine et de ses Outremers. Depuis 2003, Longitude 181 mĂšne des campagnes pour la prĂ©servation des requins et a participĂ© trĂšs activement Ă la fondation de Shark Alliance. Elle a notamment obtenu leur protection dans lâimmense ZEE de la PolynĂ©sie française (en 2007) et Ă bord de tous les navires de lâU.E. (en 2012, dans le cadre de Shark Alliance). Elle poursuit cette action avec un programme scientifique international dâĂ©tude des requins de MĂ©diterranĂ©e, dont le mythique grand requin blanc.
En 2012, Longitude 181 rejoint lâASPAS et Sea Shepherd France dans les dĂ©pĂŽts de plainte contre les dĂ©cisions abusives des Ă©lus locaux pour la destruction infondĂ©e des requins sur lâĂźle de La RĂ©union. Depuis, elle mĂšne une action assidue Ă la RĂ©union pour parvenir Ă une cohabitation harmonieuse avec les requins.
Longitude 181 nature
Longitude 181 Nature12, rue La Fontaine 26000 Valence - France
Mail. [email protected]
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Requin pointe blanche du récif (Carcharhinus albimarginatus)