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Université Lyon 2 Institut d’Etudes Politiques de Lyon Mémoire de fin de quatrième année : Vers une compétence européenne en matière de sport ? L’exemple de la lutte antidopage Compte-rendu de l’atelier-débats : Sport et citoyenneté européenne Camille KELBEL « La construction européenne à la croisée des chemins : quelles orientations entre approfondissement et élargissement » Directeur de recherche : M. Laurent GUIHERY Septembre 2008

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Université Lyon 2Institut d’Etudes Politiques de Lyon

Mémoire de fin de quatrième année :

Vers une compétence européenne enmatière de sport ?L’exemple de la lutte antidopage Compte-rendu del’atelier-débats : Sport et citoyenneté européenne

Camille KELBEL« La construction européenne à la croisée des chemins :

quelles orientations entre approfondissement et élargissement »Directeur de recherche : M. Laurent GUIHERY

Septembre 2008

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Table des matièresRemerciements . . 5Avant-propos . . 6Introduction . . 7Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport . . 10

Chapitre 1 : Le mille-feuille des compétences de la lutte anti-dopage . . 101.Des compétences déclinées à plusieurs échelles . . 102. Une imbrication des compétences et des responsabilités . . 19

Conclusion du chapitre . . 25Chapitre 2 : La lutte antidopage européenne, opportunité ou danger pour le monde dusport? . . 25

1. Les besoins nouveaux des organisations sportives . . 262.Le dopage, une problématique emblématique du droit du sport : vers uneautonomisation du domaine sportif ? . . 303.L’UE : relai de ces attentes ? . . 31

Conclusion du chapitre . . 33Chapitre 3 : Sport, dopage et droit communautaire : les limites d’une approcheéconomique du sport . . 33

1. L’incursion du droit communautaire dans le sport : l’approche économique . . 332.Les spécificités du sport ou l’éloignement du tout économique . . 393.Exemplification : la place du dopage en droit de la concurrence. . . 43

Conclusion du chapitre et de la partie . . 46Partie 2. Le ''modèle sportif européen'' à l'épreuve du dopage . . 47

Chapitre 1 : La lutte anti-dopage a bien négocié le virage des exceptions aux règlescommunautaires : vers une approche élargie du sport . . 47

1.Les fondements d’une politique sportive européenne dynamique . . 472.Les angles d’attaque privilégiés de la politique sportive européenne . . 51

Conclusion du chapitre . . 52Chapitre 2 : La lutte anti-dopage, pivot de la politique sportive européenne . . 53

1. Une lutte antidopage européenne basée sur la coopération . . 532.L’action communautaire, une injection de sang neuf pour la lutte contre le dopage . . 57

Conclusion du chapitre . . 61Chapitre 3: La politique sportive européenne, quel bilan? . . 61

1 .Bilan sportif de la politique européenne . . 612.Bilan politique de la l’intervention européenne dans le sport : . . 65

Conclusion du chapitre et de la partie . . 68Partie 3. Perspectives de l’action communautaire dans le sport . . 69

Chapitre 1 : Les limites intrinsèques de la lutte anti-dopage européenne : un sprint finalassez décevant… . . 69

1.…des textes qui appuient le sport uniquement sur la son rôle sociétal et la santépublique . . 692…de la jurisprudence, qui se révèle ambiguë . . 74

Conclusion du chapitre . . 78

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Chapitre 2 : Un potentiel offensif à travailler : l’extension de la politique anti-dopage . . 781.Des domaines d’action revisités . . 792.Les nouveaux enjeux . . 80

Conclusion du chapitre . . 81Chapitre 3 : Le sport et l’UE dans la dynamique d’approfondissement, des enrichissementsmutuels . . 81

1.Perspectives de la lutte contre le dopage : vers un problème public européen ?. . 822.L’Europe fait progresser le sport et le conforte dans ses spécificités . . 833.Le sport est un vecteur possible d’intégration européenne . . 84

Conclusion du chapitre et de la partie . . 88Conclusion générale . . 89Annexes . . 91

Annexe 1 : La place de l’Europe dans le sport mondial, travail de recherche . . 91Annexe 2 : Liste des interdictions 2008 . . 93Annexe 3 : Questionnaire et analyse des réponses . . 93Annexe 4 : Les contrôles anti-dopage de l’AFLD (1997-2006) . . 96Annexe 5 : Compte-rendu de l’atelier-débats ‘’Sport et citoyenneté européenne’’,EGE . . 97Annexe 6 : Exemple de redistribution (UEFA) . . 102Liste des abréviations . . 104

Références bibliographiques . . 106Ouvrages / monographies . . 106Articles de périodiques . . 110Documents en ligne . . 112Webographie . . 113

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Remerciements

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Remerciements

Je tiens à remercier plusieurs personnes, qui, d’une manière où d’une autre, ont contribué àla réalisation de ce travail.

Merci à mon directeur de mémoire, M. Laurent Guihéry, pour son suivi, sa disponibilité,et pour m’avoir aidé à approfondir mes réflexions sur le sujet. Merci également pour son aidetechnique.

Merci aux personnes que j’ai pu interroger : M. Michel Audran, spécialiste du dopagesanguin et professeur de biophysique à la Faculté de pharmacie de Montpellier, et M. ColinMiège, Administrateur Civil et auteur de plusieurs ouvrages sur l’Europe et le sport.Merci à M.Jean-Christophe Lapouble pour son orientation et ses conseils.

Les intervenants de l’atelier-débat « Sport et citoyenneté européenne » des Etats Généraux del’Europe pour leur vision originale et éclairante. Tous m’ont accueilli avec une grande gentillesseet m’ont accordé beaucoup plus de temps que je ne n’aurais osé l’espérer.

Merci à tous ceux qui ont pris le temps de répondre à mon questionnaire.

Enfin, merci à mon entourage. A mes parents et amis pour leur soutien.

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Avant-proposCe travail constitue l’aboutissement de la démarche que j’ai tenté de suivre durant ces quatre annéesà l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon, et qui consiste à mettre à profit les enseignements quenous avons reçu dans des domaines aussi variés que le droit, l’économie, la sociologie ou l’histoirepour appréhender un domaine particulier d’intérêt, en l’occurrence le sport.

Passionné par les compétitions sportives de haut-niveau, ayant moi-même pratiqué le basket-ball dans un centre de formation et encadré une équipe de jeunes, consacrer ma vie professionnelleau sport, notamment au sein des organisations sportives internationales ou des autorités publiquescompétentes, reste pour moi un objectif de tout premier plan. Je projette à cet égard d’effectuer unstage de fin d’études en rapport avec celui-ci.

Dès lors, le Diplôme Universitaire d’Etudes Européennes m’offrait la possibilité de combinercet attrait sportif avec les problématiques européennes pour lesquelles je ne saurais nier mon intérêt(originaire de Belgique, j’ai effectué mon année de mobilité en Lettonie, occupé des emploissaisonniers en Angleterre et en Allemagne et participerai l’an prochain à un master 2 en Pologne).

L’Europe n’a longtemps pris en compte le sport que de manière très indirecte, alors qued’autres acteurs s’étaient emparés de la question. C’est en m’interrogeant sur cet état de fait quej’ai eu envie de m’intéresser aux domaines particuliers d’intervention européenne dans le sport, etnotamment la lutte contre le dopage. Les recherches menées durant l’année m’ont fait réaliser à quelpoint les documents traitant de ces questions sont rares ou peu précis dans les termes, ce qui m’apermis par ailleurs de m’orienter vers d’autres canaux de diffusion de l’information, notammentles entretiens et conférences. L’élaboration d’un questionnaire m’a permis de tester les perceptionsdu grand public. Même si cette piste reste à approfondir, il se dégage un manque de visibilité del’UE dans sa supposée politique sportive pourtant en plein essor. Ce travail de recherche a ainsiété l’occasion de changer ma vision des choses sur certains points.

J’espère être parvenue à mener ce travail avec l’objectivité requise.

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Introduction

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Introduction

« Le dopage est le mal endémique du sport moderne. Il dénature l'esprit de lacompétition et menace la santé des athlètes. Il remet potentiellement en causel'existence et l'intérêt des épreuves majeures du sport mondial, discréditées unpeu plus d'année en année. […] Dans ce contexte particulier, les JO 2008, quise tiendront à Pékin, feront l'objet d'une attention particulière. La Chine est eneffet suspectée de passivité dans la lutte contre le dopage, en témoigne sonimplication dans de nombreux scandales pendant les années 1990. Elle souffreégalement d’une réputation de pays fournisseur de produits dopants1. »

Sport et Union européenne, une relation originale…La définition la plus répandue du concept de sport est européenne. Elle figure dans

la Charte européenne du sport du Conseil de l'Europe, le vocable "sport" y désignant« toutes formes d'activités physiques qui, à travers une participation organisée ou non,ont pour objectif l'expression ou l'amélioration de la condition physique et psychique, ledéveloppement des relations sociales ou l'obtention de résultats en compétition de tousniveaux »2, seule définition officielle du terme.

Le sport est souvent vu comme une prérogative jalousement conservée par des Etats-Nations pour lesquels les équipes nationales comptent parmi les représentants de premierplan de leur supposé rayonnement international. Dans ce contexte, parler d’Europe revientà introduire une dimension originale à l’étude du sport, un espace géographique dont lapertinence en termes sportifs ne va pas de soi. Deux approches peuvent néanmoins êtredégagées : la place de l’Europe dans le sport d’une part, et, d’autre part, la place dusport dans l’Europe. La première, qui consiste à analyser les performances sportives del’Europe au niveau mondial est dominée par l’idée de perte de « parts de marché » sportif,pour reprendre l’allusion aux secteurs économiques en déclin. En fait, les chiffres desmédailles olympiques révèlent plutôt un tassement3 et cette voie d’étude n’offre que peu deperspectives d’interprétation. La seconde approche consiste à comprendre la place du sportdans l’Union européenne et ce qui est fait dans ce domaine, i.e. quelle politique en matièrede sport est entreprise au niveau européen. L’intérêt est ici double : pallier aux difficultés dusport européen révélées entre autres par la première approche et envisager le sport commeun domaine d’approfondissement de la construction européenne.

L'action communautaire en matière de sport est de fait éminemment politique ence sens que les traités n'ont pas reconnu jusqu’ici de compétence directe à l'UE en lamatière. Sans mention explicite de leur relation, sport et UE ont néanmoins su et dut seconfronter à de maintes reprises par des chemins détournés ; le sport est alors envisagé

1 JEANNET, Guillaume. Le dopage, enjeu majeur des JO de Pékin 2008. MAG, 23 juin 2008 http://www.jopekin2008.fr/

jeux-olympliques-le-dopage-enjeu-majeur-des-jo-de-pekin---3420.asp?1=12 Recommandation n°R(92) 13 REV du Comité des ministres aux Etats membres sur la Charte européenne du sport révisée,

article 2. La Charte a adoptée par le Comité des Ministres le 24 septembre 1992 lors de la 480e réunion des Délégués des Ministreset révisée lors de la 752e réunion le 16 mai 2001.

3 Cf. : Annexe 1.

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non point en tant que tel mais rattaché à d'autres domaines pour lesquels "Bruxelles" àd'avantage de compétence, a fortiori le marché commun, la santé publique, l’éducation,la formation et la jeunesse, ou encore la politique audiovisuelle. Ces politiques recoupentclairement les questions sensibles et d'actualité du sport (règles de transferts, formationdes joueurs, droits de retransmission, etc.). Cette lacune en termes de bases juridiques nes'est pas traduite par un effacement des institutions européennes, qui se sont penchéessur les principaux questionnements émanant du monde du sport dès le début des années1970. Et si initialement l'UE s'est intéressée au sport dans sa dimension économique, unequestion qui reste largement en suspens compte-tenu de l'annexion grandissante du sportpar des intérêts économiques notamment privés, de nouveaux champs se sont ouvertspour lesquels la dimension européenne semble une alternative très crédible. Le premierconcerne la violence et son corollaire du racisme qui inquiètent évidemment une Europebrandissant l'étendard de l'intégration, du droit des minorités et de la tolérance. Le second,que je me propose de développer dans ce travail, fait, à l'heure où j'écris ces mots, tremblerles organisateurs du Tour de France dont il a littéralement empoisonné les dernièreséditions...Après les « scandales », dominés par l’intervention des instances sportives, etles « affaires », marquées par la judiciarisation du problème4, l'Union européenne constituepeut-être une opportunité sans précédent de redonner un souffle nouveau à la lutte contrele dopage. Dans cette hypothèse, un "copier-coller" de cette action prise comme exemple-type, pourrait permettre d'envisager à termes des politiques sportives européennes plusambitieuses et formalisées...et pousser in fine à leur reconnaissance par les textes.

Le dopage, leader de l’action européenne dans le sport…Vainqueur du Tour des Flandres (1961), de Bordeaux-Paris (1963), de Milan-San Remo

(1964), du Tour de Lombardie (1965), et champion du monde sur route (1965), le coureurcycliste britannique Tom Simpson restera surtout dans les mémoires pour sa chute mortellesur les pentes du Mont Ventoux dans le Tour de France 1967. Les amphétamines révéléespar les analyses marqueront le point de départ d'une prise de conscience collective duproblème du dopage dont on tarde à apercevoir la ligne d'arrivée. La disqualification de BenJohnson, médaillé d’or sur 100m aux Jeux Olympiques de Séoul en 1988 et recordman de ladistance reine, puis l’affaire Festina sur le Tour 1998 sont autant de péripéties qui jalonnentl’histoire d’un phénomène vieux comme le sport.

Le concept de dopage est étymologiquement d’origine néerlandaise : doop signifie« liquide épais » et le Dope était une boisson énergisante en Afrique du Sud. C’est d’abordsous la forme de l’anglicisme doping que le terme fut utilisé dans l’hexagone, avant que nesoit imposé le terme de dopage.

Avant même d'envisager la place de l'UE dans la lutte anti-dopage, des référencesnationales peuvent permettre de mieux appréhender les enjeux techniques du problème.Au titre de la loi du 5 avril 2006, le dopage concerne l'interdictiond’utiliser des substanceset procédés de nature à modifier artificiellement les capacités, ou à masquer l’emploide substances et procédés ayant cette propriété, voire encore de recourir à ceux deces substances ou procédés dont l’utilisation est soumise à des conditions restrictives(autorisations d'usage à des fins thérapeutiques) lorsque ces conditions ne sont pasremplies. Cette interdiction s'adresse alors à toute personne, non seulement au coursdes compétitions et manifestations sportives organisées ou agréées par des fédérationssportives, mais aussi en vue d’y participer, cette dernière hypothèse justifiant les contrôles

4 DURET, Pascal. L’éthique sportive à l’épreuve, compétitions et dopage. Cahiers français, n°320, mai - juin 2004, p.77-81.

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Introduction

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organisés hors compétitions5. La liste des interdictions est élaborée annuellement parl'Agence mondiale antidopage6 dont nous reviendrons largement sur les prérogatives aucours de ce mémoire ; elle est ensuite publiée au Journal Officiel. Pour figurer sur cette« liste noire », les produits et méthodes doivent remplir deux des conditions suivantes :avoir le potentiel d’améliorer la performance sportive, présenter un risque réel ou potentielpour la santé de l’athlète, être contraire à l’esprit sportif, ou simplement avoir la faculté demasquer l’usage d’autres substances ou méthodes interdites. Ces définitions posent d'oreset déjà problème en incluant la prise en compte des conséquences de l'acte de dopagemal cernées par les scientifiques, et en laissant planer un certain flou juridique autour dela notion d' « esprit sportif ». Outre l'usage de substances ou procédés prohibés, le refusdu contrôle, le non-respect des règles du contrôle par l'athlète et même l'opposition au bondéroulement de ce contrôle par les organisateurs constituent d'autres infractions entrantdans le champ de la lutte contre le dopage dans le sport.

Les enjeux économiques et sociaux du dopage recoupent une dimension nationale etsupranationale, et sont à mettre en relation avec l'importance du sport dans nos sociétésmais aussi dans nos économies. L'Europe compta à ce titre pas moins de 700 000 clubsde sport et 60% des européen déclarent pratiquer régulièrement un sport (Eurobaromètre,2004).

Les enjeux politiques, enfin, ne sauraient être appréhendés uniquement àtravers le prisme des théories de l'intégration européenne (néo-fonctionnalistes versusintergouvernementalistes), la mosaïque des prérogatives ne pouvant se réduire à uneopposition frontale Etats-Nations/Union européenne. Se pose aussi à cet égard la questionde la perception du dopage et de son éventuelle dimension européenne par le public, auregard d’autres problèmes affectant le sport, une perception que j’ai tenté de canaliser sousforme d’un questionnaire7. Car pour doper sa politique sportive, encore faut-il que l’UEapparaisse comme un acteur pertinent dans un domaine clé du sport.

En quoi l'action menée par l'Union européenne au titre de la lutte contre le dopage est-elle moteur d'une possible politique sportive européenne?

Basé sur l’hypothèse selon laquelle la lutte antidopage, en s’articulant à la fois autourdes particularités du sport et de compétences européennes fortes, constitue un modèle àl’action de l’UE dans le sport, ce mémoire n'a pas vocation à décrire dans le détail les actionsentreprises par l'UE dans le sport, mais davantage de donner une impression d'ensembledes atouts et faiblesses de cette intervention, et de montrer, à l'aune de l'exemple du dopage,les opportunités à saisir en la matière. La première mi-temps de ce mémoire consistera enun état de l’art relativement statique des relations entre l’Union européenne et le mouvementsportif, la seconde en un bilan de l’intervention européenne dans le sport suite aux évolutionsrécentes et dynamiques qui ont bouleversé leur prise en compte mutuelle. En prolongations,nous verrons quelles perspectives s’offrent à l’UE dans le sillage de sa politique antidopage.

5 LOI n° 2006-405 du 5 avril 2006 relative à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs, inJORF n°82, 6 avril 2006, p.5193.

6 Cf. : Annexe 2.7 Cf. : Annexe 3.

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Partie 1. Le dopage, aux fondements del'intervention européenne dans le sport

Chapitre 1 : Le mille-feuille des compétences de lalutte anti-dopage

L’internationalisation du sport, phénomène ancien, jusqu’alors régulé par les autoritéssportives, au premier rang desquelles le mouvement olympique international et les grandesfédérations, doit désormais s’accommoder de l’implication croissante des organisationsinternationales gouvernementales, dont les initiatives les plus significatives proviennent duniveau européen. La lutte antidopage, en tant qu’élément clé de politique sportive, cristallisecette configuration. La multitude des intervenants (1.) se traduit par une imbrication descompétences et des responsabilités, laissant une marge de manœuvre réduite à uneéventuelle intervention européenne (2.).

1. Des compétences déclinées à plusieurs échelles La lutte contre le dopage, au même titre que le sport en général, voit son organisationpartagée entre instances sportives et autorités publiques. Cela suppose une véritablecoordination, tant entre les différents acteurs au sein de chaque espace géographiquepertinent, qu’entre ces espaces eux-mêmes, nommément les Etats (1.1.), l’Europe (1.2.) etle niveau international (1.3).

1.1 Niveaux national et infranational Chaque Etat membre a ses propres structures sportives, et nous verrons que la disparitéentre pays européens en la matière est un challenge de taille pour le supposé « modèlesportif européen ». En France, l’intervention nationale en matière de dopage est le faitprincipalement du Ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports, du Comité nationalolympique et sportif français et plus récemment de l’Agence française de lutte contre ledopage.

Le projet de loi de finances pour 2008 contient un volet « Sport, jeunesse et vieassociative » qui détaille de manière relativement exhaustive les actions menées dans notrepays8.

1.1.1 Le ministère de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la Vieassociative (MSJSVA)

8 Cf. : Annexe 6.

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

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Afin d’appréhender au mieux l’enchevêtrement des compétences, nous nous appuieronsici sur le cas français en matière de lutte anti-dopage. En guise d’introduction à l’actionentreprise par l’Etat via le ministère et a fortiori le secrétariat d’Etat aux Sports, il convienttout d’abord d’illustrer son importance par quelques chiffres. Alors qu’en 1997, le budgetconsacré par l’ancien ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Vie Associative à laprotection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage s’élevait à l’équivalent de

5,64 million d’euros, il est passé à 22,24 millions en 2006 9 . Cette évolution chiffrée sedouble d’un apport normatif conséquent, de nombreuses mesures et initiatives ayant étéimpulsées par le ministère. Le point d’orgue de cette politique fut sans conteste l’adoptionde la loi du 5 avril 2006, par ailleurs codifiée au Titre III du Livre II du Code du sport.

Premier élément de réforme, le dispositif national se voit réaménagé selon troismodalités principales, concernant respectivement, la prévention, lé répression et le contrôle.En premier lieu, les Antennes Médicales de Prévention du Dopage (AMPD) remplacent lesAntennes Médicales de Lutte contre le Dopage. Il s’agit de structures d’accueil pour lessportifs déjà touchés par le dopage, mais aussi de structures de prévention du dopage.En second lieu, l’aspect répressif est revu : trafiquants et pourvoyeurs risquent nonseulement jusqu’à sept ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende, mais désormaissont instaurées des peines complémentaires, telles l’interdiction d’exercer ou encore lafermeture des établissements sportifs ayant accueilli un tel trafic. Troisièmement, est crééeune Agence Française de Lutte contre le Dopage (AFLD), une autorité administrativeindépendante, avec pour mission de vérifier si la lutte nationales est non seulement effectivemais aussi efficace.

En prolongement de cette réorganisation, la coordination des différentes instancesnationales est facilitée afin d’élaborer une véritable stratégie de la prévention du dopage quiregrouperait l’ensemble des acteurs concernés La loi examine ainsi le rôle des fédérationssportives. Il leur est réaffirmé un pouvoir de sanction à l’encontre des sportifs ayant recoursà des méthodes et produits dopants. Ce pouvoir disciplinaire est encadré dans le temps :la fédération compétente a dix semaines pour statuer en première instance, et la procéduredans son ensemble en cas d’appel ne doit pas dépasser quatre mois. En marge de lasanction, il y a ici aussi un rôle de surveillance dans le domaine médical, d’où le fameuxcertificat médical pour les amateurs mais au-delà la surveillance est évidemment pluspoussée pour les sportifs professionnels. Or, lors de cet encadrement médical des sportifset plus largement des compétitions mais aussi lorsqu’elle mène des actions de prévention,les fédérations sont soutenues par le ministère de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et dela Vie associative. Plus pragmatiquement, il est clair que les financements du ministère versces différentes instances jouent un rôle crucial dans cette coordination. Le budget évoquéen introduction sert à financer l’AFLD au titre de la mise en place d’un programme nationaldes contrôles, de l’analyse des échantillons et de la recherche, et enfin au titre des missionsdisciplinaires. Concrètement, cela à par exemple permis d’effectuer plus d’analyses de

prélèvements urinaires (8791 en 2005) 10 . Plus directement, des projets d’études ou de

recherche peuvent faire appel à des subventions pour leur travail sur un domaine précisde la lutte antidopage tel la nandrolone ou les bêta2-agonistes. D’autres moyens queles moyens financiers à proprement parler sont aussi promus, à l’image du Numéro VertEcoute Dopage, un dispositif national d’écoute téléphonique qui accompagne les antennes

9 Ministère de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la vie associative. La lutte anti-dopage : objectifs et moyens : http://www.santesport.gouv.fr/contenu/Lutte_Anti_Dopage/objectifs.asp

10 Ministère de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la vie associative, Ibid.

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médicales régionales, ou encore le recrutement de vingt-quatre médecins conseillers.Par ailleurs, au sein de l’INSEP a été créé un Institut de la recherche biomédicales etd’épidémiologie du sport, l’IRMES. Celui-ci comprend un comité scientifique censé garantirà la fois la qualité des travaux et leur cohérence.

Ces actions de soutien aux fédérations et d’engagement de moyens financiers ethumains par le Ministère témoignent de l’impulsion forte donnée au niveau gouvernementalà la lutte antidopage. Cette action au plus haut niveau national sert indéniablement debase pour répondre ensuite aux impératifs d’harmonisation entre les volets nationaux etinternationaux de la lutte anti-dopage.

1.1.2. Le Comité National Olympique et sportif français (CNOSF) La France ne compte pas moins de 105 fédérations qui sont regroupées sous la houlette duComité National. Il a surtout une mission de mise en place de structures médicales dans uneoptique de préparation des sportifs de nationalité française aux compétitions internationalesomnisports, notamment les Jeux Olympiques. L’objectif clairement affichés du CNOSF est ladéfense des valeurs de l’olympisme, et cela semble passer par la prévention et la répressiondu dopage avec comme base de travail le Code Mondial Antidopage mais aussi la législationdétaillée plus haut. En effet parmi les domaines d’action du Comité détaillés sur son site

Internet 11 , le volet « santé » est marqué par l’omniprésence des questions relatives au

dopage de la prévention à l’analyse des substances, en passant par la perception du dopagepar le public.

Ainsi, le Comité National Olympique et sportif français a été à l’origine de la FondationSport Santé qui a avant tout une mission de prévention des sportifs et de leur entourage. Saparticularité est donc qu’elle est vouée non seulement à la sensibilisation, dans l’esprit duCNOSF, des pratiquants du haut niveau, mais également aux familles, et de manière pluslarge au public des événements sportifs, ainsi qu’aux médecins et dirigeants.

Le Comité National Olympique et la Fondation Sport Santé sont engagés dans desactions communes avec le Ministère de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et dela Vie associative comme l’illustre la mallette intitulée « le Sport pour la santé », unexemple significatif de la coordination au niveau national. Il s’agit d’un outil d’information etpédagogique qui s’appuie sur les textes en vigueur, d’où une mise à jour récurrente et avecvocation de sensibiliser aux enjeux du sport, en faisant une large place à la problématiquedu dopage.

1.1.3. L’Agence française de lutte contre le dopageL’AFLD, en tant qu’autorité administrative indépendante, et du fait qu’elle soit dotée de lapersonnalité morale, constitue une troisième voie pour appréhender la lutte antidopage auniveau national. Alors que le Ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports et leComité National Olympique envisagent le dopage comme une problématique du sport engénéral, l’Agence française de lutte contre le dopage est spécialisée, ce qui permet desouligner l’importance de la lutte qu’elle mène au regard des autres volets de la politiquesportive de la France. Créée par la loi du 5 avril 2006 et le décret du 29 septembre de lamême année, elle a été envisagée dans son architecture comme une fusion du Conseil deprévention et de lutte contre le dopage (CPLD) avec le Laboratoire national de dépistagedu dopage (LNDD), tout en s’accaparant les attributions du Ministère lui-même sur des

11 Cf.: Site du CNOSF : http://www.franceolympique.com/cat/3-actions.html

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

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points précis : définition de la stratégie des contrôles antidopage et organisation de cescontrôles. Au niveau organisationnel interne, l’AFLD est composée de neuf membres donttrois juristes, trois scientifiques, « trois personnalités qualifiées dans le domaine du sport »12 dont un sportif de haut niveau (à l’heure actuelle, Sébastien Flute, médaillé d’or detir à l’arc à Barcelone en 1992), un représentant du CNOSF et un membre désigné parle Comité Consultatif National d’Ethique. L’agence est donc envisagée comme un nœudde coopération tout en garantissant son indépendance de jure. Son autre originalité estde considérer des aspects du dopage souvent ignorés, tels le dopage animal qui touche

notamment les courses hippiques ou les compétitions d’équitation 13 .Le rôle de l’AFLD est à souligner car il répond à une préoccupation récente de mise en

avant du problème du dopage au sein des institutions compétentes en matière de sport ;on passe du dopage comme sous-domaine du sport à la prise en compte du dopage entant que tel dans une dimension sportive et de santé publique toute à la fois. Surtout, cetteagence s’inscrit dans un objectif de cohérence et de simplification vis-à-vis des instancesmondiales, au premier rang desquelles l’Agence mondiale anti-dopage (AMA). Ses missions

sont multiples 14 :- Prévention et recherche dans le domaine des substances dopantes ;- Prévention et recherche dans le domaine des méthodes de détection ;- Organisation des contrôles antidopage de compétitions et entraînements sur le

territoire français, sauf compétitions internationales) ;- Organisation des contrôles antidopage de compétitions internationales (uniquement

sur demande des fédérations internationales compétentes ou de l’AMA) –département descontrôles ;

- Analyse d’échantillons –département des analyses ;- Pouvoir disciplinaire concernant les sanctions administratives de suspension ;- Délivrance des autorisations d’usage à des fins thérapeutiques (AUT) ;- Expertise auprès des fédérations nationales, de l’Etat.On le voit, le dopage est un enjeu fédérateur au niveau national. Non seulement aucune

des grandes instances nationales n’ignore le problème, mais de plus des outils spécifiquesont été créés à son égard. Cela nous permet d’affirmer que toute politique du sport passenécessairement par une politique de lutte contre le dopage.

1.2. Le niveau européenDans cette partie, nous développerons l’action des acteurs institutionnels européens quiont été amené à intervenir dans la lutte contre le dopage. La question des fédérationseuropéennes est intimement liée au cadre normatif produit au niveau international plusqu’européen, comme l’illustre le règlement antidopage de l’UEFA qui a été modifié pour se

12 Ordonnance n°2006-596 du 23 mai 2006 relative à la partie législative du code du sport, Titre III : Santé des sportifs et lutte contrele dopage, article L.232-613 Ibid., Titre IV : Lutte contre le dopage animal, articles L.241-1 à L.241-9

14 Cf. : site Internet de l’AFLD : http://www.afld.fr/interieur.php?page=1

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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conformer aux règlements de l’AMA et de la FIFA 15 . C’est pourquoi les autorités sportiveseuropéennes ne seront pas abordées ici. Les comités olympiques européens (COE) ferontl’objet d’un développement ultérieur16.

1.2.1. Le Conseil de l’Europe a- Un rôle précurseur dans la lutte antidopage européenne :

La lutte contre le dopage au niveau européen fut historiquement d’abord l’œuvre duConseil de l’Europe. Si cela peut sembler paradoxal à la vue du sujet de ce mémoire quis’intéressera davantage à l’action entreprise par l’Union européenne dans ce domaine, ilsemble cependant que ce soit bien Bruxelles qui ait repris la main et offert des perspectivesélargies à la lutte antidopage européenne, le caractère intergouvernemental du Conseil deStrasbourg limitant de droit et de fait des actions plus poussées. Néanmoins, les textesdu Conseil de l’Europe ont fait date, la première résolution ayant été adoptée dès 1967par le Comité des ministres. C’est ce même Comité qui adoptera en septembre 1984 unerecommandation relative à une Charte européenne contre le dopage dans le sport, quiconstituera la base au CIO lors de l’adoption de la Charte internationale olympique contrele dopage en 1988.

b- La Convention européenne contre le dopage, point d’orgue de l’action du Conseilde l’Europe :

Le 16 novembre 1989 a été adoptée la Convention européenne contre le dopage,véritable aboutissement de l’ensemble des démarches entreprises par le Conseil deStrasbourg (LAPOUBLE, 2001). Il est en ce sens révélateur des contradictions de l’état dela lutte supranationale contre le dopage, ce qui ne l’a pas empêche de devenir la véritablepierre angulaire d’une telle action.

Ce texte constitue tout d’abord une bonne illustration des compétences imbriquées dela lutte antidopage dans la mesure où il se contente de fixer des objectifs qu’il appartient auxEtats signataires de mette en œuvre par les mesures qu’ils jugent appropriées : ainsi, lesEtats sont invités à « [encourager] leurs organisations sportives à clarifier et à harmoniser

leurs droits, obligations et devoirs respectifs. » 17 . De fait, on relève plus des allusions àl’ « esprit » du texte que des mises en œuvre concrètes :

- Promotion de l’harmonisation des règlements nationaux et internationaux de luttecontre le dopage ;

- Fixation de règles communes. Les Etats sont ensuite chargés de les traduire enmesures techniques, financières, législatives ou d’éducation ;

- Rôle d’interface avec les acteurs internationaux qui permet la tenue d’un listing dessubstances et pratiques prohibées avec mise à jour annuelle ;

- Encouragement et soutient au développement des programmes de prévention et derépression.

Or, dans le droit comme dans les pratiques, la prévention et la répression de l’usage etdu trafic de produits dopants reste très variable d’un pays à l’autre.

15 Voir à ce propos l’article 16 de la Charte de l’UEFA concernant les procédures de contrôles sanguin.16 Cf. : infra, partie 1 – chapitre 2 : 1.3.1

17 Conseil de l’Europe, Convention contre le dopage, 16 novembre 1989, article 7

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

Kelbel Camille - 2008 15

Mais dans le même temps, certaines dispositions de la Convention sont assez explicitesquant à la concrétisation de ces objectifs généraux : aides aux organisations sportivesdans le financement des contrôles et des analyses, création de laboratoires de contrôle,instauration de programmes d’éducation et d’information sur les dangers du dopage. Ausein du Conseil de l’Europe a par ailleurs été créé un groupe de suivi intergouvernementalpour vérifier la mise en œuvre de la Convention par les Etats signataires et mettre à jourannuellement la liste des produits et pratiques proscrits. Autre atout de la Convention,le nombre de ses signataires : 49 pays dont certains non-européens (Canada, AustralieTurquie), ce qui fonde largement sa légitimité comme interlocuteur de l’AMA et desfédérations sportives internationales.

c- Les autres actions du Conseil de l’Europe : les prolongements de la Convention :A partir du début des années 1990, le Conseil de l’Europe va être amené à interagir

avec d’autres acteurs de la lutte contre le dopage. En 1992 sera lancé avec la Commissioneuropéenne et le soutien de certains gouvernements et ONG, l’ « Europack, guided’éducation et d’information du sport sans dopage » à destination des jeunes sportifs.

Entre 1994 et 1998 ont suivi des recommandations à caractère technique et un nouveauguide, destiné cette fois-ci aux athlètes, leurs entraîneurs, et plus largement les dirigeantssportifs, le « Guide du sport propre ».

En 1999, le Conseil à ré exprimé ses objectifs de renforcement de la lutte antidopageet d’harmonisation entre autorités du sport et autorités publiques à l’occasion de la créationde l’Agence mondiale antidopage et alors qu’il dispose de deux représentants au sein duConseil de fondation de cette agence.

Par la suite, un protocole additionnel, œuvre là encore du Comité de ministres de laConvention contre le dopage, est venu en juillet 2002 compléter le dispositif du Conseilde l’Europe. Les signataires de ce protocole reconnaissent les compétences de l’Agencemondiale antidopage pour les contrôles exercés hors-compétition. Surtout, l’article premierdu protocole instaure une reconnaissance mutuelle des contrôles antidopage réaliséssur le territoire d’une des parties prenantes. Cela permet notamment aux organisationsantidopage nationales de réaliser sur leur territoire des contrôles sur les athlètes venantdes autres Etats signataires. Mais en même temps, cela peut constituer un obstacle à unepolitique plus ambitieuse menée à d’autres niveaux.

1.2.2. L’Union européenne (UE)Le rôle de l’Union européenne dans la lutte antidopage, point d’orgue de ce travail, peutêtre appréhendé succinctement dans un premier temps par l’action menée récemment parses institutions dans le concert quelque peu cacophonique des instances engagées dansce domaine.

Chronologiquement, les premières actions entreprises par l’UE en matière de luttecontre le dopage le furent par le biais des institutions intergouvernementales que sont leConseil européen et le Conseil des ministres. Ce dernier a adopté dès décembre 1990 une

Résolution relative à une action communautaire de lutte contre le dopage dans le sport 18

qui prône une articulation avec la Convention contre le dopage du Conseil de l’Europe. Ont

18 Résolution du Conseil du 3 décembre 1990 relative à une action communautaire de lutte contre le dopage dans le sportin JOCE n° C329/4, 31 décembre 1990

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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suivi plusieurs textes dont une déclaration sur le dopage en juin 1991 19 et une résolution

en date du 8 février 1992 qui a abouti à l’adoption du code de conduite antidopage 20 . Lecode avait un objectif double : sensibilisation du grand public mais aussi coopération entreorganisations sportives. Il s’agit d’un premier geste politique, l’UE n’ayant pas compétenceen la matière mais se permettant d’ouvrir la brèche pour une intervention plus pousséeau fil des scandales liés au dopage. Le Conseil européen, à savoir les Chefs d’Etat etde Gouvernement, ont pris le relai médiatique de cette percée après le Tour de France1998 marqué par l’affaire Festina en défendant à Vienne en décembre 1998 le conceptd’ « éthique sportive » face au dopage et en demandant une mobilisation au niveau del’UE, c’est-à-dire en fait uniquement une meilleure coordination des politiques nationalessur le sujet, mais sous couvert d’une coopération entre les Etats membres, la Commissionet les autorités sportives internationales. Une institution intergouvernemental entrevoit icila possibilité d’une coordination à la fois inter et supranationale sans encore parler depolitique communautaire propre en la matière. A Nice, en décembre 2000, est réaffirméepar le Conseil européen l’importance de cette lutte et est par ailleurs avancée l’idée d’une

participation de l’UE à l’Agence mondiale antidopage 21 . Pour en revenir au Conseil desministres, a fortiori celui au regroupant les ministres chargés des sports, le dopage y figureconstamment à l’agenda et dans ce cadre ont été débattues au niveau européen les statutset le fonctionnement de l’AMA ainsi que la participation financière et la représentation del’UE à l’agence.

La Commission a dans un premier temps fait profil bas devant le principe de subsidiaritéappliqué au dopage, comme en témoignent les réponses aux questions écrites publiéesau Journal Officiel des Communautés européennes entre 1996 et 1999 : «l'adoptionde mesures contraignantes visant à interdire l'utilisation, par les sportifs, de substancesillégales destinées à accroître les performances n'entrait pas dans les compétences de

l'Union européenne. » 22 . Pourtant, suite à la déclaration sur le sport incluse dans le traité

d’Amsterdam, au Forum européen du sport de novembre 1998 et au Conseil européende Vienne, au cours duquel les Chefs d’Etat et de Gouvernement vont demander laCommission de préparer un rapport sur la dimension sociale et la structuration du sport enEurope qu’elle lui soumettra à Helsinki en décembre 1999, la Commission va convoquerles premières Assises européennes du sport à Olympie en mai 1999. Ces assises vont êtrel’occasion pour la Commission de préparer un document de travail ayant trait à la lutte contrele dopage. En décembre 1999, ces réflexions vont aboutir à un Plan d’appui communautaireà la lutte contre le dopage dans le sport, le premier véritable programme d’action en lamatière, qui prévoit notamment :

- une collaboration avec le CIO en vue de mettre en place et de faire fonctionner l’AMA.La Commission européenne a financé dans une large part un ensemble de projets novateursde plusieurs programmes de l’AMA, et ce à hauteur de deux millions d’euros au titre de sa

19 Déclaration du Conseil et des ministres de la santé des Etats membre du 4 juin 1991 relative à la lutte contre le dopage, ycompris l'abus de médicament, dans les activités sportives in JOCE n° C 170/1, 29 juin 1991

20 Résolution du Conseil du 8 février 1992, annexée d'un code de conduite antidopage dans les activités sportives in JOCEN° 44/2, 19 février 1992

21 Voir à ce sujet les conclusions du Conseil du 4 décembre 2000 sur la lutte contre le dopage in JOCE n° C 356, 12 décembre2000, p. 1

22 Cf. : JOCE n° C 56/28 du 26/02/96, p. 28, et JOCE n° C 182 du 28/06/1999, p. 49

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

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première participation en 2001. L’institution du Berlaymont s’est également associée au CIOdans le cadre d’une action visant à promouvoir les valeurs de l’olympisme dans les écoles ;

- une mobilisation des instruments communautaires comme complément de l’actiondes Etats membres ;

- une expertise sur le phénomène du dopage.Le plan d’appui a par la suite été remplacé par un Programme pluriannuel de lutte

contre le dopage qui comprend surtout des actions d’information/communication et desensibilisation.

Le troisième acteur majeur de la lutte anti-dopage dans l’Union européenne, leParlement européen (PE), a adopté en 1994 une Résolution sur le sport et le dopage avecune approche de précurseur puisqu’ il « engage la Commission et le Conseil à reconnaîtreexpressément la responsabilité de l'Union européenne dans la lutte contre le dopage dans

le sport » 23 , puis une Résolution sur les mesures urgentes à prendre contre le dopage dans

le sport24en décembre 1998 adressée à la Commission. En 2000,le Parlement européena mandaté la Commission pour des actions dites pilotes de recherche sur le dopagedécomposées en quinze projets touchant des activités sportives variées, à la fois dans lesport amateur et professionnel, le tout pour un budget de 5 millions d’euros. Dans la mêmelignée, le PE va soutenir la création de l’AMA et le rôle de la Commission européenne dansl’agence.

1.3. Le niveau internationalLes acteurs du niveau international dans le sport ont, du fait de l’internationalisation du sportet des problématiques qui lui sont associées, un rôle de plus en plus incontournable à jouer.Ceci est particulièrement vrai pour la lutte antidopage, phénomène transfrontalier s’il en est.

1.3.1. L’Agence Mondiale Antidopage (AMA)L’initiative de la création de l’Agence mondiale antidopage revient au Comité InternationalOlympique et aux Etats en ordre dispersé. On peut d’ores et déjà souligner le rôle prégnantde la France et la participation active d’organisations intergouvernementales, sans pourautant entrer dans le détail de l’action de l’Union européenne à proprement parler. Lafondation de l’AMA à Lausanne le 10 novembre 1999 souhaitait répondre à un tripleobjectif de promotion de la lutte contre le dopage, de surveillance, et de coordination auplan international. Au niveau organisationnel, son financement est réalisé autant par lesinstances sportives que par les gouvernements. L’agence s’articule autour de son conseilde fondation composé de 36 membres, d’un comité exécutif de 12 membres, et de comitésde travail au nombre de quatre. Des observateurs indépendants sont aussi présents ausiège de Montréal.

Au niveau des stratégies mises en place, l’AMA s’appuie largement sur le Code mondialantidopage, dont elle coordonne la mise en place et les développements éventuels dansle sens d’une harmonisation toujours plus accrue entre pays des règles se rapportant au

23 Résolution A3-0313/94, JOCE n° C 205, 27 juillet 199424 « Considérant que le phénomène du dopage dans le sport, comme les événements récents l’ont révélé, est devenu hautement

inquiétant dans tous les domaines sportifs et à tous les niveaux compétitifs ou amateurs, qu’il met en danger la santé des sportifs,fausse les compétitions, nuit a` l’image du sport notamment auprès des jeunes et porte atteinte à la dimension éthique du sport » inJOCE n° C 98 du 9 avril 1999, p. 291

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dopage, et ce dans tous les sports. Le plan stratégique d’activités et de ressources en courss’étend jusqu’en 2009. Ses missions s’articulent autour de plusieurs points :

- Information auprès des sportifs, de l’encadrement et des gouvernements sur lesconséquences du recours au dopage ;

- Coordination des programmes de recherche à l’échelle mondiale ;- Soutient aux programmes de recherche antidopage ;- Mise en place de règlements dans le prolongement du Code mondial antidopage ;- Contrôles en et hors compétitions.Au cours de la Conférence mondiale sur le dopage dans le sport qui s’est tenu du 15 au

17 novembre 2007 à Madrid, les délégués ont adopté la Résolution de Madrid introduisantdes modifications au Code allant dans le sens d’un renforcement de ses dispositions et d’uneharmonisation plus poussée. Les gouvernements et le Mouvement sportif sont désormais

chargés de mettre en œuvre ces amendements avant le 1er janvier 2009.

1.3.2. Le Comité International Olympique (CIO) Le Comité international olympique est une organisation non-gouvernementale qui a encharge, et c’est sans doute là son rôle le plus médiatisé, l’organisation des Jeux Olympiques.Fondé en 1894 par Pierre de Coubertin, le Comité, dont on peut préciser qu’il est à but non-lucratif, reçoit comme financements des fonds privés (publicité, droits de retransmissiondes JO). En marge de ces aspects organisationnels, le C.I.O. assure la promotion devaleurs comme l’éthique et par le sport, éthique que l’on peut décliner dans les principes denon-discrimination et de solidarité. Ces concepts sont étroitement liés à la problématiquedu dopage.

En 1967 a été créée une commission médicale au sein du Comité internationalolympique en charge de la lutte contre le dopage, aux missions variées :

- Information préventive des sportifs, entraîneurs et administrateurs ;- Publications et organisation de séminaires sur les dangers du dopage ;- Etude et financement de procédés scientifiques d’aide aux sportifs (médecine,

nutrition).Le CIO est un organe de collaboration entre les différents intervenants du mouvement

sportif, i.e. les comités nationaux olympiques, les comités d’organisation des JeuxOlympiques, les fédérations internationales, les clubs et athlètes. Les fédérationsinternationales ont-elles aussi été amenées à développer la lutte antidopage au sein descompétitions qu’elles organisent, tant par leurs liens avec le CIO qu’avec l’AMA.

1.3.3. L’organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et laculture (UNESCO) L’UNESCO est le troisième acteur d’envergure internationale impliqué dans la lutteantidopage. A fortiori, la Convention internationale contre le dopage dans le sport, adoptéepar l’unanimité des Etats membres de l’organisation le 19 octobre 2005 vise à :

- Harmoniser au niveau international les efforts de la lutte contre le dopage ;- Fournir un cadre légal comme base de travail pour les gouvernements nationaux afin

qu’ils développent ensuite la lutte antidopage à leur niveau national ;

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

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- Mettre en conformité les pratiques des Etats membres avec les principes du CodeMondial Antidopage de l’AMA (continuité entre la convention de l’UNESCO et le code del’AMA).

En effet, la convention, entrée en vigueur le 1er février 2007 a vocation in fine à laconvergence des politiques nationales, l’harmonisation concernant les législations maisaussi les règles sportives, afin que les mêmes règles de lutte antidopage s’appliquent quelque soit le lieu du contrôle, la nationalité du sportif ou même le sport pratiqué. Elle pallie dejure, en tant qu’instrument de droit public international, à l’absence d’effets contraignantsdu code mondial antidopage, car les Etats, en la ratifiant, reconnaissent à la fois l’ AMA etles principes du code mondial.

2. Une imbrication des compétences et des responsabilités La lutte antidopage constitue l’exemple-type d’une politique menée simultanément àplusieurs échelles. Avec le risque d’une dispersion des objectifs et des actions menées(2.1.). C’est dans ce contexte que l’UE tente de se faire une place au soleil en tant queproducteur de normes sportives, avec un bilan mitigé (2.2).

2.1. La diversité des acteurs, atout ou faiblesse de la lutte contre le dopage ?

2.1.1. Aperçu de la « soupe aux choux » des acteurs Lors d’un entretien réalisé auprès de Mr Colin Miège, Administrateur civil et auteur denombreux articles et ouvrages ayant traits en particulier aux relations entre le monde dusport et l’Union européenne, celui-ci se refusait à parler de conflit de compétence enmatière de dopage, en invoquant plutôt une « multitude d’acteurs, situation qui caractérisele domaine du sport d’une manière générale ». Il distingue les autorités publiques àdifférents niveaux (international, européen, national voire infranational) et les organisationssportives (CIO, fédérations sportives internationales, fédérations nationales). Dans certainspays, la présence de ce que l’on appelle en droit français des autorités administrativesindépendantes (l’AFLD dans notre pays) vient compléter le diaporama. Ce découpage estsomme toute assez proche de la littérature et de ce qui a été retenu dans la première partiede ce chapitre. Pourtant aux dires de l’interviewé : « tous ces niveaux d’intervention nese coordonnent pas spontanément, car ils peuvent avoir des visions divergentes », cettedivergence s’exprimant notamment entre le niveau national et supranational ou encore entreacteurs publics et privés.

Du fait de son incidence et de sa répercussion sur d’autres domaines, en l’occurrencela santé publique, la lutte contre le dopage semble constituer un parfait exemple d’unecompétence devant être partagée entre autorités sportives et autorités publiques. Ainsien Europe, le mouvement sportif s'est structuré selon des règles communes, puis d’unsystème autorégulé, il est devenu progressivement une préoccupation des gouvernementsen touchant des domaines de plus en plus variés pour lesquels les autorités publiques ontcompétence (Miège, 2000b). Mais cette préoccupation revêt elle-même des modalités trèsdifférentes d’un pays européen à l’autre. En effet, la prévention et la lutte contre le dopagesont tantôt prises en charge essentiellement par les gouvernements (comme nous l’avonsvu, c’est le cas en France), tantôt assumées largement par les autorités sportives nationales(Miège, 2000a).

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Tableau récapitulatif des institutions compétentes en matière de lutte antidopage :

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

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Financement (MSJSVA)(MSJSVA)(MSJSVA)- lesménages(14,2milliardsd’euros) :achat debiens, deserviceset despectaclessportifs. - lescollectivitéslocales (7,9milliardsd’euros) -l’Etat (3,2milliardsd’euros) :équipements,aides - lesentreprises(2,2milliardsd’euros) :parrainage,mécénat,droits TV

- l’Etat :7,3 millionsd’euros en2008 soit94% de sesressources -lesentreprises :mécénat -l’AMA et laCommissioneuropéennepar projet

(OrganisationdesNationsUnies)

- lesEtatsmembres

- lesEtatsmembres

½ CIO ½gouvernementsdont Europe :47,5%

Compétences - soinauxsportifs -conseil -recherche -recueildedonnéeset veillesanitaire

-expertisesur lesbénéficeset lesrisquesdesactivitésphysiquesetsportivespourlasanté

-programmesderechercheetd’informationsur leseffetsdudopage -coopérationnationalescientifique

- miseenplaced’unestructuremédicalesur lesgrandescompétitionsinternationalesomnisports -développeretprotégerl’espritolympique -participerà lapréventiondudopageet agircontrel’usagedessubstancesouprocédésinterditspar leCodeMondialAntidopageet lalégislationenvigueur

information,prévention,responsabilisation

- organisationdes contrôlesantidopagepour lescompétitionsfrançaises -analyse deséchantillons -sanctionsadministrativesé - délivranced’AUT -prévention etla recherche - coopérationavec l’AMA

encouragementaudéveloppementdesprogrammesdepréventionet derépressiondudopageet àl’harmonisation

-collaborationavecl’AMA -expertise -utilisationdecompétencesconnexes

-harmonisationpar uncadrelégal -actionsdecoopérationet decomplémentdesautresacteurs

- acceptation,mise en placeet respect duCode - scienceet médecine :promouvoir larecherche -coordinationantidopage -développementde la lutteantidopage -éducation etsensibilisationdes sportifs -contrôles horscompétition

-contrôleantidopageen ethorscompétition

Acteurssecondairesetbaseslégales

AntennesMédicalesdePréventionduDopage(AMPD)

INSERMInstitutderecherchebiomédicaleetd'épidémiologiedusport(IRMES)auseindel’INSEP

105fédérationssportives

FondationSportSanté

- services dusecrétariatgénéral -départementdesanalyses -départementdescontrôles -comitéd’orientationscientifique

Comitédesministres →Conventioncontreledopage

-Conseils -Parlement -Commissionetgroupesd’intérêts

→Conventioninternationalecontreledopagedanslesport

Conseil defondation,Mouvementsportif etgouvernements → Codemondialantidopage

Parsport →Codemondialantidopage

Acteursprincipaux

Ministère de la Santé,de la Jeunesse, desSports et de la Vieassociative (MSJSVA)

Comitéolympiqueet sportiffrançais

Agencefrançaise delutte contrele dopage(AFLD)

Conseildel’Europe

Unioneuropéenne

UNESCOAgencemondialeantidopage(AMA)

Fédérationsinternationales

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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Niveau national (France)Niveau européenNiveau international

2.1.2. Les atouts de la compétence partagéeLe dopage a réussi à se faire une place comme enjeu de tout premier plan des politiquessportives. Cela se manifeste par l’intérêt que lui portent d’une part les autorités publiques àtous les niveaux (Ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports, Conseil de l’Europe,UE, ONU via l’UNESCO), et d’autre part les instances du sport (CNO, COE, CIO, fédérationsinternationales).

La création d’agences spécialisées, à l’image de l’Agence française de lutte contrele dopage, vient encore renforcer cette impression de priorité : quel autre domaine dusport bénéficie d’une telle attention et d’une autorité administrative indépendante qui lui estdédiée ?

La coordination et le consensus sont aussi marquants compte tenu des divergencespréexistantes à l’organisation du sport dans les différents pays. La dimension internationalede la lutte antidopage est en effet un corollaire indispensable à l’internationalisation du sportet l’AMA jouit d’une reconnaissance certaine ce qui facilite l’action internationale. Cettecoordination est reflétée au niveau national par le dialogue entre les instances du ministèreet celles du Comité national olympique. Des outils transversaux comme la mallette « le sportpour la santé » ont d’ailleurs été mis en place.

2.1.3. Les faiblesses : de la diversité à la conflictualitéLa lutte antidopage souffre encore d’un manque de visibilité. Les réponses au questionnairemontrent que les intervenants sont très mal connus. La question de leur relai par les médiasse pose donc. Au cours du dernier Tour de France, le président de l’AFLD, M. PierreBordry a été interviewé au cours du journal télévisé de 13h, mais les intervenants les plusemblématiques en la matière semblent davantage être des personnalités du monde sportifcomme Christian Prud’homme, directeur du Tour, Joseph Blatter, Président de la FIFA ouencore Michel Platini. Les dopés ‘’repentis’’ occupent le devant de la scène médiatique(Richard Virenque, David Millar) aux dépens des spécialistes du dopage. La conséquenceest largement que les messages contre le dopage tels que diffusés par les médias jouentsur l’émotion et que les aspects scientifiques et sanitaires sont peu évoqués.

L’imbrication des compétences de la lutte antidopage pourrait aboutir potentiellementsur des conflits de compétence. Par exemple, s’agissant de l’organisation des contrôles,celle-ci dépend non seulement du lieu de la compétition mais aussi de son niveau. L’AFLDest ainsi compétente pour les contrôles sur le territoire français au cours des compétitionsnationales. Par contre, en cas de compétition internationale se déroulant en France, elleaura besoin d’un mandat de l’AMA. Or, pour certains sports, comme la natation, desétrangers sont présents aux championnats de France (un classement séparé est établi) etrisquent donc de passer entre les mailles du filet. Par ailleurs, certaines fédérations sonttoujours très réticentes aux contrôles.

2.2. L’UE sur le banc de touche des politiques sportives ?Si l’organisation du monde sportif européen a du mal à faire face à la mosaïquedes structures étatiques, elle souffre aussi de son insuffisance de développement. Desproblèmes internes que l’UE se propose de résoudre.

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2.2.1. La disparité des structures nationales met à mal le supposé « modèlesportif européen »Au fondement de l’idée d’une certaine unité dans l’organisation et les valeurs sportives auniveau européen, on trouve le rapport de la Commission au Conseil européen d’Helsinkien 1999, qui indiquait comment mieux prendre en compte les spécificités du sport dansles politiques européennes. C’est bien le droit de la concurrence qui est le plus révélateurà cet égard (PONS, 2001), dans la mesure où tout un pan de l’activité sportive, mêmeprofessionnelle, échappe à l’application stricte du droit de la concurrence. Le modèle sportifau sens large se base donc sur ses spécificités, au premier rang desquelles les règles dujeu, mais aussi le fait qu’il s’agisse semble-t-il du seul secteur économique marqué parla solidarité entre les concurrents. La compétition sportive est en cela fort différente de lacompétition sur les marchés traditionnels : la disparition d’un concurrent dans le sport met enpéril tout le système ; un championnat ne saurait être monopolistique. Au niveau européen,on retrouve d’autres éléments corroborant à cette spécificité : la structure hiérarchiquepyramidale des fédérations, le système de promotion-relégation, la place du bénévolatassociatif ou encore la redistribution d’une partie des revenus du sport professionnel versle sport amateur.

Pourtant ces similitudes entre pays du vieux continent, par opposition au modèleaméricain des ligues professionnelles fermées, n’est que l’arbre qui cache la forêt desdisparités d’organisation au niveau européen. La « mosaïque des institutions sportivesnationales » se manifeste surtout par le clivage dominant Nord/Sud (MIEGE, 2001b). Dansles pays du Nord de l’Europe, l’intervention des autorités publiques dans l’organisationdu sport est généralement limitée, à l’image de la Sport and recreation division duRoyaume-Uni, simple branche comptant quelques dizaines d’agents du Secrétariat d’Etatchargé de la culture, des médias et du sport. Le mouvement sportif national s’y est bâtiautour d’organisations sportives multiples et foisonnantes. A l’inverse, les pays du Sudse sont révélés beaucoup plus interventionnistes en matière de sport. L’administrationpublique nationale de pays comme la France, l’Espagne ou le Portugal est largement plusinterventionniste. En France, le ministère de la jeunesse et des sports, quels que soient lesautres portes-feuilles qui lui soient associés est une structure de taille, présente aussi dansles entités déconcentrées de l’Etat (région, département). En conséquence, le mouvementsportif y est essentiellement plus structuré, voire encadré par des statuts.

2.2.2. Le ‘‘sous-développement’’ des structures européennesa- Face à une impulsion nationale dynamique :

Schéma de l’organisation du sport français

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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Source : CNOSFLes interdépendances entre les différents niveaux sont réelles en ce qui concerne

les autorités sportives. Ce schéma reste cependant simpliste puisqu’il ignore le rôle desautorités publiques dans l’administration du sport en le présentant en vase clos autorégulé.Ce schéma, qui illustre la place du Comité national olympique et sportif français, est aussirévélateur de la non-prise en compte d’une dimension européenne dans l’organisationdu sport. Entre le niveau international (CIO, fédérations internationales) et le niveaunational (CNOSF, fédérations nationales et ligues), il n’est nullement fait mention d’instanceseuropéennes. L’explication la plus vraisemblable voudrait que les fédérations ou ligueseuropéennes (UEFA, ULEB, etc.) soient considérées comme internationales.

b- Le credo international a le vent en poupe :L’organisation du sport et la prééminence des compétitions internationales d’un côté

et nationales de l’autre a conduit de fait à un développement moindre des structureseuropéennes. L’essor de la Ligue des Champions et de l’Euro de football agit comme uncontrepoids à cette affirmation, de même que certains sports présents essentiellement en

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Europe. Les championnats d’Europe de Handball présentent ainsi un niveau similaire auxchampionnats du monde de la même discipline. Il n’en reste pas moins que l’organisationdu sport européen repose sur des structures continentales et non pas à l’échelle des 27uniquement.

Sans conclure à une marginalisation des autorités sportives et publiques européennes,il apparaît clairement que d’une part, les autorités sportives ont conclu à la nécessité d’uneaction globale contre le dopage et au succès de l’AMA, et d’autre part, ce sont les autoritéspubliques nationales voire infranationales qui se sont imposées pour gérer les actions deterrain (recherche, analyse, prévention, sanction). L’entente cordiale entre AMA et instancesnationales laisse peu de marge de manœuvre à une intervention européenne. A MichelAudran, spécialiste du dopage sanguin et professeur de biophysique à la Faculté depharmacie de Montpellier de préciser : « au niveau européen il n’y a à ma connaissanceaucune commission ou organisme chargé de la lutte anti dopage. » Cette affirmation mérited’être nuancée.

La lutte européenne hors UE s’organise autour du Conseil de l’Europe, premièreinstance à produire des textes normatifs sur le sujet, les Comités olympiques européens, etimpliquent les fédérations européennes (UEFA, ULEB, etc.).

Conclusion du chapitre Le sport mondial est caractérisé par une multitude de structures, à la fois diverses etcomplexes. Cela se retrouve au niveau européen où les statuts juridiques et l’autonomiedes intervenants sportifs varient fortement d’un Etat à l’autre. Ainsi, l'organisation sportiveprésente à l’heure actuelle au sein de chaque État membre de l’UE des caractéristiquesqui lui sont propres.

Ces compétences enchevêtrées peuvent être envisagées comme un obstacle ou unatout à l’action de l’Union européenne. La lutte contre le dopage est à ce titre emblématiquedes opportunités offertes aux institutions bruxelloises de s’impliquer davantage dans lesport. Il s’agira d’appréhender dans quelle mesure ces opportunités ont su être saisies.

Chapitre 2 : La lutte antidopage européenne,opportunité ou danger pour le monde du sport?

La question de la vision de l’Europe par le monde sportif est cruciale. Le mouvementsportif européen ne saurait ignorer l’Union européenne, qui constitue une réalité pour lesorganisations sportives des 27 Etats membres, mais aussi pour les fédérations sportivesinternationales (De Kepper, 2001). La lutte contre le dopage développée au niveaueuropéen notamment par la Commission constitue un exemple intéressant d’opportunitépour le développement du sport. En quoi l’Union européenne, a-t-elle été à même de prendreen compte les évolutions du sport et de relayer ses attentes dans la construction de sespolitiques publiques ? Les organisations sportives ont un besoin d’Europe (1.), que la lutte

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contre le dopage permet dans une certaine mesure de prendre en compte (2.), ce besoinétant par ailleurs relayé par des politiques européennes spécifiques (3.).

1. Les besoins nouveaux des organisations sportives Lors des seconds Etats généraux de l’Europe25, Jonathan Hill, directeur des bureauxBruxellois de l’UEFA est largement revenu sur les fondements d’une prise en comptedu sport par l’UE. Dès lors que le sport ne fonctionne plus en vase clos et commesystème autorégulé mais fait une place aux autorités publiques (MIEGE, 2000b), et queprécisément l’UE est une telle autorité, se pose inévitablement la question de l’opportunitéd’une action européenne. Les grandes fédérations qui se croyaient auparavant « hors-la-loi » sont progressivement entrées dans un dialogue. Jonathan Hill souligne que cechangement d’attitude s’est concrétisé pour l’UEFA par la recherche d’un partenariat avecle les institutions européennes.

1.1. Un besoin des autorités publiques dans de nombreux domaines Le développement de l’intervention des institutions publiques dans le sport est lié à deuxcorollaires : la croissance du sport comme fait de société et l’extension du sport à d’autressecteurs que les fédérations et autres CIO n’ont pas vocation à réguler par eux-mêmes.Les mutations du sport, mal maîtrisées par les organisation sportives peuvent être ainsiordonnées :

1.1.1. Une extension quantitative : le sport comme phénomène de société Concernant le sport comme « question d’intérêt public » (DE WAELE, HUSTING, 2001), ilest clair que les chiffres sont éloquents tant au niveau de la pratique que des répercussionséconomiques du sport dans l’UE26:

∙ 120 millions de licenciés, 700 000 clubs et associations ;∙ 1 million d’emplois directs, 2 millions d’emplois indirects, 2% du PIB ;∙ 7,5 milliards d’euros de droits de retransmission audiovisuelle [prospective pour

2008].

L’Eurobaromètre chiffrait déjà à 70 millions le nombre de ressortissants des 25pratiquantdu sport dans un club en 2004, ce qui représenterait 15% de la population de l’UE.Plusieurs problématiques sous-tendent la place grandissante du sport dans nos sociétésqui dépassent les simples ‘’règles du jeu’’ établies par les instances sportives : la questiondu temps-libre et de l’essor d’une société des loisirs, la multiplication des sports et ladémocratisation de leur accès (qui faisait du kite-surf il y a vingt ans ?), enfin et surtout lesquestions de la médiatisation et de la marchandisation du sport. D’une part, le sport estpartout, et éventuellement hors des structures traditionnelles, des clubs, ce qui impliqueune perte de contrôle des autorités sportives. D’autre part on notera que ces évolutionsrejoignent des questions de politique européenne d’actualité : la question des heures detravail, la question de la diversité, celle de l’environnement, etc.

1.1.2. Une extension qualitative : le sport en proie à d’autres domaines 25 Cf. : annexe 5 : Compte-rendu de l’atelier-débats ‘’Sport et citoyenneté européenne’’, EGE, 21 juin 200826 Commission européenne, COM (1999)644, Rapport d’Helsinki, 1er décembre 1999

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Concernant l’extension du sport qui devient un phénomène de plus en plus multidisciplinaire,touchant tant au droit qu’à l’économie ou la sociologie, les juridictions internes desfédérations se sont révélées insuffisantes. Les institutions européennes sont largemententrées dans la brèche en jugeant de plaintes concernant les fédérations. Surtout, ellesl’ont fait de manière extrêmement variée et les différentes affaires semblent recadrer lesrôles respectifs des organisations sportives et de l'UE. L’action règlementaire initiée parla Commission et relayée par la CJCE a ainsi permis de clarifier l’approche européennetouche-à-tout. En matière de libre concurrence, les décisions et directives de la Commissionet les arrêts de la CJCE (article 81, 82 et 87 du TCE), ont concerné :

- les règles relatives à la multipropriété des clubs;- les droits télévisés et la relation entre les médias et le sport (publicité pour l'alcool et

le tabac, directive « télévision sans frontières27 »);- les contrats de parrainage exclusifs;- la vente de tickets pour les rencontres internationales;- les agents de joueurs et la reconnaissance des diplômes et des qualifications;

professionnelles d'un Etat à l'autre;- la règle de la territorialité des compétitions ;- les aides d'Etat à des clubs sportifs professionnels;- l'utilisation des bases de données sportives;- les règles comptables européennes;- la circulation des personnes, services et capitaux, avec une dimension de relations

extérieures (extension aux accords d'association) et les règles concernant la lutte contrele dopage.

Ces facteurs d’évolution quantitative et qualitative du sport sont particulièrement bienillustrés par les problèmes phares du sport aujourd’hui.

1.1.3. Les maux du sport moderne, symptomatiques des limites del’intervention des organisations sportives Le racisme est un phase de devenir une préoccupation majeure du monde du sport, car dela même manière que les administrations publiques en charge du sport sont extrêmementdiversifiées tant au niveau de leur structure que de leur compétence, le problème du racismese pose en des termes très différents selon les Etats ; les hooligans anglais ne sauraientêtre confondus avec le racisme d’essence éventuellement régionaliste de la banderoledéployée par quelques supporters parisiens lors de la dernière finale de la Coupe de laLigue (« Pédophiles, chômeurs, consanguins : bienvenue chez les ch'tis »).

Le dopage ensuite, alors que les règlementations nationales sont à l’origine peuhomogènes d’un Etat à l’autre. La Commission européenne avait, à l’occasion despremières assises européennes du sport qui s’étaient tenues à Olympie en 1999, préparé undocument de travail spécifique sur la lutte contre le dopage dans le sport. Il y est fait allusionà« la commercialisation grandissante du sport, l’arrivée massive d’argent et le besoin derentabiliser les investissements des sponsors » à l’origine de la progression du dopage.

27 La directive ‘’Télévision sans frontières’’ établit des garanties en ce qui concerne la diffusion de certains grands événementssportifs ‘’en clair’’. Elle permet aux autorités nationales de déterminer un nombre limité d'événements devant être retransmis sur deschaînes gratuites. Or, la télévision est la source première de financement du sport professionnel en Europe.

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Cela va dans le sens d’une justification de l’intervention des pouvoirs publics qui ont lapossibilité de peser sur les organisations sportives, par exemple en posant comme conditionaux subventions publiques la mise en œuvre par ces organisations sportives d’actionsantidopage.

Cette nécessaire remise à plat des responsabilités et compétences de chacun dontl’entrée en lice de l’UE a été un vecteur essentiel a donc amené le monde sportif areconnaître l’intérêt de l’intervention des pouvoirs publics pour peu que leur cadre d’actionsoit bien défini et circonscrit.

1.2. Besoin d’un équilibre entre de nombreux acteurs et intérêts Dès lors que les autorités sont amenées à intervenir dans le domaine du sport, celui-cipeut-être analysé comme une politique publique. En l’état actuel des compétences, celaest surtout vrai pour le niveau national mais la théorie des politiques publiques est riched’enseignements pour envisager le sport à tous les niveaux d’intervention, notammenteuropéen.

1.2.1. Des enseignements tirés de la théorie des politiques publiques…Le modèle des « trois i » (Heclo, 1994 ; Hall, 1997), intérêts, institutions, idées, peut êtreappliqué aux politiques publiques (Surel, 2000) et donc constitue un apport de choix à l’étudedes politiques sportives (Delmas, 2001). Il stipule que pour comprendre la formation despolitiques publiques, il faut articuler les idées avec l’étude des intérêts en jeu et l’analysedu rôle des différentes institutions concernées.

Le premier « i », celui des intérêts, appliqué au sport, tendrait à montrer que plusieurscauses différenciées sont susceptibles de se télescoper. Le nombre élevé d’acteurs auximpératifs divergents rend en effet d’autant plus difficile l’établissement d’une positioncommune. Dès lors la résolution d’un problème en apparence simple, comme celui ladéfinition du dopage28, peut prendre un temps considérable et demander des concessions.

En ce qui concerne les institutions, l’élaboration des politiques publiques du sportsemble de plus en plus prendre la forme d’une gouvernance multi-niveaux ou polycentrique,la « multi-level governance » (Hoogue, 1996), c’est-à-dire impliquer différents acteurs demanière informelle à des niveaux eux-mêmes variés : les institutions communautaires(notamment la Commission et la CJCE), le mouvement sportif (les Comités olympiqueseuropéens, et par sport, l’UEFA, l’ULEB, fédérations nationales), et les gouvernementsnationaux.

Le troisième « i » comme idées, s’attache dans cette théorie aux représentations dumonde qui découlent du sport. D’un côté, le sport est vu comme ferment d’identité, desolidarité, facteur d’intégration sociale, utile à la santé publique, etc. De l’autre, le discourscritique retient les problèmes financiers, la violence, le dopage.

1.2.2. …à la réalité du terrain sportif : un équilibre qui reste à définirPour reprendre le découpage précédent, la divergence des intérêts peut être illustrée parl’obligation faite aux clubs de mettre leurs joueurs à disposition des sélections nationalessans contrepartie financière. Un principe ancien remis en cause récemment lorsque leclub belge de Charleroi a demandé des dommages et intérêts après la blessure de Majid

28 Cf. : infra, partie 2 - chapitre 2 : 1.3.

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Oulmers en sélection nationale marocaine ou encore par le dédommagement des clubs lorsdu dernier Euro de football. Autre exemple d’actualité, le chevauchement des calendrierscomme celui du Top 14 avec le Tournoi des Six Nations.

La multiplication des institutions est un phénomène relativement récent dans le sport.Il résulte à la fois de l’implication croissante d’autorités qui étaient restées en retraitauparavant (c’est le cas de l’UE) et de l’apparition de nouvelles organisations (AMA, AFLDpour la lutte contre le dopage). Alors que le CIO a longtemps été l’instance phare dusport mondial, on assiste désormais à un rééquilibrage entre le monde du sport qui gardel’apanage des règlements sportifs et les institutions publiques qui s’intéressent aux aspectsconnexes et aux répercussions de l’activité sportive (environnement, santé, financement).

Enfin, l’image du sport semble de plus en plus clivée entre le sport amateur de masseet le sport-spectacle professionnalisé, comme le soulignait Thierry Philip à l’occasion desEtats Généraux de l’Europe29.

1.3. Besoin d’une reconnaissance des spécificités du sport par les autorités

1.3.1. Une spécificité européenne

Les Comités olympiques européens (COE)30ont dès leur origine suivie de très prêt laquestion de l’évolution de la prise en compte du sport par les institutions européennes. Celas’est traduit très concrètement par l’installation d’un bureau de liaison à Bruxelles, alors quele siège des COE est à Lausanne, auprès du CIO. Ce bureau outre son rôle de suivi desactivités de l’UE a parfois joué comme un groupe d’intérêt (De Kepper, 2001). Dans le détail,le bureau de liaison des COE auprès de l’Union européenne a pour missions :

- une mission d’information des CNO européens sur les activités de l’UE touchant ausport ;

- une mission de représentation du mouvement sportif auprès des institutionseuropéennes ;

- une mission de lobbying sur des points particuliers dont se s’est saisi l’UE ;- une mission de promotion du sport dans les politiques communautaires.Dès lors, plusieurs remarques viennent à l’esprit. En représentant le mouvement sportif

dans sa dimension européenne (les CNO européens), les COE imposent un traitementeuropéen à part entière des questions sportives. Le sport européen s’érige avec ses proprespréoccupations aux dépens des autres ensembles. Il est significatif à cet égard que l’autoritépublique choisie ait été l’UE et non pas, par exemple, le Conseil de l’Europe.

1.3.2. Une spécificité sportiveLa mission de promotion du sport au sein de la politique européenne que s’est assigné lebureau de liaison répond à une logique sensiblement différente, celle qu’il faut aller plus loinque les compétences actuelles. Une idée qui ne va pas de soi tant le mouvement sportifa souvent gardé jalousement ses prérogatives. Une ambiguïté semble encore ressortir dela littérature et de la presse spécialisée à ce propos : alors que certains représentants dumonde du sport prônent un retrait de l’UE, d’autres, notamment les COE voudraient quele sport soit considéré comme un ensemble, et donc que l’UE l’examine à la fois sous

29 Cf. : Annexe 5.30 Les COE sont l’association des comités nationaux olympiques européens.

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l’angle économique (ce qui est déjà le cas) et sous l’angle social. La complexité de cettedernière approche réside dans le fait que les aspects sociaux du sport fondent sa spécificitéet permettent ne pas lui appliquer le traité de manière stricte. Si on englobe le social etl’économie avec un traitement identique, cela voudrait dire que les traités s’appliquent moinsà l’économie que ce qui a été établi jusqu’à présent (« l’exercice des sports ne relèvedu droit communautaire que dans la mesure où il constitue une activité économique ausens de l’article 2 »31). Cela rejoint donc l’idée d’un retrait de l’économie du sport, mais eninsistant simultanément sur une meilleure prise en compte de sa dimension sociale. Cetteperception a trouvé comme principal écho la notion de « règles du jeu sportives » qui, malgréla dimension économique des activités sportives fait primer le maintien de l’organisationdu sport et de ses fondements (encore une fois, sont souvent cités par les organisationssportives le volontariat, la structure dite en pyramide du sport, les règles du jeu comme lesdimensions du terrain, le rôle de l’arbitre, etc.).

2. Le dopage, une problématique emblématique du droit du sport :vers une autonomisation du domaine sportif ?

Le code du sport est révélateur, dans son appréhension du dopage, de la place prise par cephénomène. Les autorités publiques ont relayé par ce biais un certain nombre des attentesémanant des instances sportives.

2.1. De l’autonomie du droit du sport à l’autonomie du monde du sport…On observe une double évolution (De Silva, 2007) : le sport comme secteur économiquede plus en plus important, et en parallèle le développement d’un droit du sport largementautonome, concrétisé par l’adoption du code du sport par l’ordonnance n°2006-596 du 23mai 2006. Mais au-delà de ce texte, il semble que le contexte de cette codification soit lui-même empreint par la régulation du sport. Ce qui est remarquable, c’est que en France,le dopage est bien l’un des éléments forts de cette autonomisation du domaine sportifvia le droit. En témoigne la création, par la loi du 5 avril 2006, de l’Agence française delutte contre le dopage à laquelle furent associés des décrets d’application. Autre législationaccompagnant cette reconnaissance de jure du sport : la loi n°2006-1770 du 30 décembre2006 instaurant la possibilité pour les sociétés sportives de faire appel public à l’épargne,ce que Isabelle De Silva qualifie de « petite révolution culturelle pour le milieu sportif »32. Lesport reste largement du domaine du droit commun, privé et public dans la mesure où lesnormes juridiques qui le régissent ne lui sont pas toujours propres. Le droit des contrats, desassociations, voire le droit du travail et le droit commercial ne concernent pas seulementle sport. Par conséquent, le nouveau code du sport n’est pas exhaustif du droit du sportdont une large partie renvoie à d’autres domaines. Pourtant, il peut être qualifié de touche-à-tout, s’intéressant à une multitude de problématiques qui sont elles bien spécifiques ausport : le statut des fédérations sportives, la dérogation au principe de liberté contractuellepar le mécanisme d’assurance obligatoire qui s’impose aux licenciés de clubs sportifs, lerecrutement des sportifs qui déroge quant à lui en partie au droit du travail, le dopage, etc.

2.2. Le dopage, vecteur d’une prise en compte exclusive du sport 31 B.N.O. Walrave, L.J.N. Koch contre Association Union cycliste internationale, Koninklijke Nederlandsche Wielren Unie et FederaciónEspañola Ciclismo (CJCE, 12.12.74 Aff. C-36/74).32 DE SILVA, Isabelle. L’adoption du code du sport, consécration pour le droit du sport ?, AJDA n°30/2007, septembre 2007, p.1623

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A fortiori, le fait d’inclure le dopage dans les problématiques spécifiques du sport estsignificatif à deux niveaux. Tout d’abord, alors que le code dans son ensemble est l’héritierdirect de la loi n°84-610 du 16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la promotion desactivités physiques et sportives, les dispositions relatives à la lutte contre le dopage sontelles issues de lois autonomes dont le but était expressément de contrecarrer le dopagedans le sport. Il s’agit des lois n°89-432 du 28 juin 1989 et 99-223 du 23 mars 1999, quin’ont donc rien à voir avec la loi de 1984. Deuxième indice, et qui va dans le sens d’unereconnaissance du sport en tant que tel, permise par la lutte anti-dopage : les dispositionsde lutte anti-dopage ont précisément été retirées du code de la santé publique auquel ilappartenait selon l’ordonnance n°2000-548 du 15 juin 2000 et intégrées dans le code dusport. Cela semble clairement indiquer que les objectifs de santé publique, en l’occurrencela protection de la santé des sportifs et la dimension médicale inhérente à la problématiquedu doping, notamment l’établissement de la liste des procédés et substances prohibés, maisaussi l’habilitation des médecins pour exercer les contrôles sont relégués au second plan.Le premier impératif devient alors l’équité de la pratique sportive.

Le code du sport apporte un fondement de taille à la règle du jeu, dont le respectconstitue un principe fondamental du droit du sport, indépendamment de tout autre droitqui pourrait entrer en interaction avec lui. Cette approche est confirmée par les articlesL.212-1 et suivants qui rattachent certaines dispositions auparavant contenues dans le codede l’éducation, au code du sport. On a par exemple considéré que la règlementation d’uneactivité sportive repose sur des préoccupations de sécurité des participants, et que celadépasse le champ de l’éducation. A ce titre, la pratique sportive, qu’elle soit amateur ouprofessionnelle, repose sur un régime d’encadrement spécifique : des titres ou diplômessont requis pour les activités d’enseignement, d’animation ou d’entraînement d’une activitéphysique ou sportive, différents de ceux requis pour d’autres formes d’éducation. Cela fondebien une spécificité du sport dans le droit national, dont, on l’a vu, la lutte contre le dopageest, dans l’histoire récente, un des moteurs principaux.

3. L’UE : relai de ces attentes ?Après avoir identifié les besoins spécifiques des organisations sportives allant dans lesens d’une intervention des pouvoirs publics dans le sport, et l’importance de la législationnationale en la matière, il convient d’identifier si l’Union européenne peut, elle aussi, êtrevue comme un acteur pertinent dans le concert des intervenants. Si l’UE a indéniablementune longueur de retard dans la prise en compte du sport, certains domaines particuliersd’action, à l’instar du dopage, laissent entrevoir un possible rattrapage sectoriel (3.2.). Maisles bases restent fragiles (3.1).

3.1. La conception européenne du sport en question : l’exemple de l’AMALa conception européenne de l’Agence mondiale antidopage qui a été retenue la rendindépendante du CIO. Dès le départ, les Etats membres de l’Union européenne ont œuvréen ce sens. Comme a eu l’occasion de le souligner Colin Miègedans nos échanges decourriels, cette exigence s’est concrétisée largement dans sa composition (la moitié des 34membres de son conseil de fondation est désignée par le mouvement olympique, l’autremoitié par les gouvernements), différente du projet initial du CIO et qui permet aux Etats depeser de façon significative sur le fonctionnement de l’AMA. L’UE a ainsi trois représentantsà l’AMA. Cette composition paritaire a des effets sur les missions et le financement de

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l’agence. Pourtant, ce sont bien les Etats qui sont signataires et financeurs de l’AMA, lesrègles budgétaires européennes étant incompatibles avec celles de l’Agence en vue d’unecontribution directe. Ajoutons à cela que son siège se trouve à Montréal alors que plusieursvilles européennes s’étaient portées candidates et l’échec de Jean-François Lamour àsa présidence, et voici que le panorama s’assombrit nettement quant à une influenceeuropéenne déterminante au sein de l’AMA.

3.2. Les moyens d’action De quels leviers dispose l’UE pour satisfaire aux besoins du sport moderne ? La placegrandissante du sport est relayée par des politiques communautaires variées.

Une étude sur les politiques communautaires et leur impact sur le sport a permis demettre en lumière qu’au moins 20 Directions Générales de la Commission européennes’occupent d’actions ou de programmes ayant, plus ou moins directement, des voletssportifs33. La ‘‘valeur ajoutée’’ de l’action communautaire que les autorités sportives nesauraient nier consiste en l’appréhension large du sport par le biais d’autres politiques. Envoici quelques exemples :

- l’éducation et la formation professionnelle ;- la santé publique ;- la recherche scientifique et technologique- la protection des jeunes travailleurs ;- le tourisme ;- le sport et l’environnement ;- la fiscalité et le sport ;- le sport pour les personnes handicapées ;- la sécurité des installations sportives ;- la normalisation du matériel sportif ;- la libre circulation des équipements sportifs ;- les règles vétérinaires concernant les animaux et le sport.L’UE a aussi tenté d’apporter des réponses concrètes aux maux affectant le sport.

Concernant la violence et le racisme, la prévention du ‘‘hooliganisme’’ fait l’objet d’unecollaboration Conseil-Commission en s’appuyant sur le Titre VI du traité UE (dispositionsrelatives à la coopération policière et judiciaire en matière pénale). Dès 1998, unecommunication sur le Plan d’action de lutte contre le racisme34, inscrivait le sport figurecomme secteur offrant le plus de possibilités de développer des actions, relayé par undocument spécifique au football35.Le pendant de cet atout européen, c’est qu’il n’y a pasà l’heure actuelle de stratégie commune de la Commission qui engloberait le travail desdifférentes DG, et encore moins des Etats.

33 Etude «l ‘impact des activités communautaires dans le sport » réalisée par Coopers&Lybrand pour la Commission en 1993et mise à jour en 1995

34 Communication de la Commission, COM (98) 183/2, 25 mars 199835 « Eliminating Racism from football », un rapport de la Football Task Force soumis au Ministre des Sports britannique le

30 mars 1998

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

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Conclusion du chapitre L’UE permet donc de satisfaire en partie aux exigences du monde sportif. En s’imposantcomme autorité publique pertinente voire prégnante (dans la lutte antidopage). En arbitrantéventuellement entre les différents intérêts et acteurs, comme le CIO et l’Agence mondialeantidopage. Enfin, elle le fait en procurant une reconnaissance aux spécificités du sportpar une intervention modulée et modulable. Aux antipodes d’une vision économiste dusport qui a longtemps primé, le sport n’est plus enfermé dans le carcan des politiques dumarché commun ou de la concurrence, ses spécificités étant mieux reléguées par d’autresdomaines : santé, environnement, éducation, etc. Outre les politiques communautaires,la place grandissante du sport dans la société européenne est relayée par le contrôlede l’application du droit communautaire, œuvre surtout de la Cour de Justice desCommunautés européennes. Au titre des dangers potentiels figurent l’application des traitésau sport sans nuance qui reviendrait à nier les spécificités de ce domaine par rapport aureste du marché.

Chapitre 3 : Sport, dopage et droit communautaire :les limites d’une approche économique du sport

Le droit de la concurrence s’applique au secteur du sport dans la mesure où ladimension économique de cette activité est indéniable (HONORAT, 2007). En Europe, lavaleur ajoutée du sport-business s’élève à 407 milliards d’euros, ce qui représente pasmoins de 3,6% du produit intérieur brut de l’Union européenne, et ce secteur emploie enoutre 15 millions de personnes, qui correspondent à 5,4% du marché du travail des 27.Pourtant, la Cour de Justice des Communautés Européennes n’a affirmé que tardivementl’application des règles de concurrence au domaine du sport. Or, il s’agissait précisémentd’une affaire ayant trait au dopage : Meca-Medina et Majcen. Auparavant, il paraît importantde revenir sur d’autres arrêts de la Cour qui fondent la relation entre le sport et ledroit communautaire et jalonnent l’évolution de leur prise en compte mutuelle (1.). Eneffet,le traitement du dopage par le droit communautaire est apparu dans le sillage de laprise en compte d’autres questions relatives au sport (2.). Ainsi, l’Union européenne estintervenue dans la plupart des domaines touchant aux activités sportives. Pourtant, lestraités successifs sont restés jusqu’à aujourd’hui muets sur ces problématiques ; c’est enfait du côté des politiques communautaires36 et de la jurisprudence qu’il faut chercher lesfondements et définition d’une conciliation entre sport et droit communautaire.

1. L’incursion du droit communautaire dans le sport : l’approcheéconomique

Cela semble presque redondant d’affirmer que les Communautés économiqueseuropéennes ont pendant longtemps favorisé une entrée économique. Cette restriction quiconduit à omettre d’autres aspects de l’activité sportive était pourtant la seule possible étantdonné les compétences européennes et le champ d’application du droit communautaire

36 Cf. : supra, partie 1 - chapitre 2 : 3.

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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préexistant au traité de Maastricht instaurant une Union européenne. Pendant cette période,le sport a permis d’introduire un certain nombre de précédents touchant à la libre-circulationet à la concurrence (1.1.), à mettre en parallèle avec une politique sportive européennebalbutiante (1.2).

1.1. La conciliation entre sport et droit communautaire : l’évolution de lajurisprudence

1.1.1. Sport et principe de non-discrimination Tout a commencé pour ainsi dire avec l’arrêt Walrave et Koch, suivi de l’arrêt Dona, lesquelsvont permettre à la CJCE d’affirmer que le sport peut avoir, dans certains cas, le caractèred’une « activité économique ».

a- L’arrêt Walrave et Koch, une prise en compte précoce du sport par l’UE:Faits : Deux entraîneurs cyclistes néerlandais de demi-fond vont contester une

disposition du règlement de l’Union Cycliste Internationale qui imposait que le coureur et sonentraîneur soient de la même nationalité. La particularité de ce sport, appelé le « Stayers »,veut que le cycliste courre dans le sillage de la motocyclette conduite par son entraîneur.Walrave et Koch (prénoms) s’estimant victime de discrimination vont intenter une action àla fois contre l’Union Cycliste Internationale (UCI), mais également contre les fédérationscyclistes nationales des Pays-Bas et de l’Espagne. Ces trois instances du cyclisme vontsaisir le Tribunal d’Arrondissement d’Utrecht, qui va lui-même, le 15 mai 1974, saisir la Courde Justice des Communautés Européennes (CJCE) par une série questions préjudicielles,procédure permise par l’article 177 du Traité CEE. Ces questions portent sur l’interprétationde l’article 7 alinéa 1 et des articles 48 et 59 alinéa 1 du même traité CEE et une interprétationdu règlement du Conseil n°1612/68 (JO n° L 257 du 19 octobre 1968) et relatif à la librecirculation des travailleurs à l’intérieur des communautés.

Droit : B.N.O. Walrave, L.J.N. Koch contre Association Union cyclisteinternationale, Koninklijke Nederlandsche Wielren Unie et Federación EspañolaCiclismo (CJCE, 12.12.74 Aff. C-36/74)

Sur la question de l’applicabilité du droit communautaire dans le domaine du sport etdonc de sa compétence, la CJCE précise que le droit communautaire est applicable audomaine du sport uniquement lorsque celui-ci constitue une activité économique. Ce champest défini par l’article 2 du Traité. Il en découle que l’interdiction de discrimination fondée surla nationalité (articles 7, 48 et 59 du Traité CEE) ne s’applique pas à la formation d’équipessportives, notamment cette interdiction ne s’applique pas aux équipes nationales, dans lamesure où il s’agit d’une question intéressant uniquement le sport et étrangère à l’activitééconomique de l’article 2.

Sur l’étendue de l’application du droit communautaire, et en particulier de l’interdictionde discrimination fondée sur la nationalité, la Cour précise que l’obligation d’applicationconcerne non seulement les autorités publiques mais également les associations sportives,même de droit privé doivent s’y conformer quand elles règlementent le travail salarié (article48) et les prestations de service (article 59).

b-Affaire Doña :Faits : Un règlement de nature organique de la fédération de football italienne prévoit

que pour participer à des rencontres de niveau professionnel ou semi-professionnel, lesjoueurs doivent être affiliés à cette fédération. Or, cette affiliation n’est accordée qu’aux

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

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joueurs de nationalité italienne. M. Doña, de nationalité italienne, va néanmoins être chargépar un président de club italien de prospecter à l’étranger pour trouver des joueurs. Il va alorspublier une annonce dans un journal en Belgique. Par la suite, le président du club va refuserde rembourser à M. Doña les frais qu’il a engagé au nom du club, prétextant qu’il a agi seulet s’appuyant en outre sur les règles de la fédération de football italienne qui ne permettentpas d’aligner des joueurs étrangers. M. Doña va s’adresser au juge conciliateur de Rovigo,lequel, par une ordonnance du 7 février 1976, et selon la même procédure de questionspréjudicielles que dans l’affaire Walrave et Koch, va s’en remettre à la CJCE pour trancherde la compatibilité ou non de cette clause de nationalité avec le droit communautaire.

Droit : Affaire Doña c. Montero, (CJCE, 14.07.76, Aff. C. 13-76)Sur la question du droit d’effectuer une prestation en n’importe quel lieu de la

communauté, la Cour pose l’incompatibilité de toute règlementation ou pratique nationalequi réserverait aux seuls nationaux le droit de participer avec les articles 7, 48 à 51 et 59à 66 du Traité CEE.

Sur la question de l’application de ce droit de tous les ressortissants de la Communautéd’effecteur une prestation en n’importe quel lieu aux joueurs de football professionnels, cetteincompatibilité est de mise, sauf si on exclut des joueurs étrangers de la participation àcertains types de rencontres non pas pour des questions économiques, mais en raison dela nature spécifique desdites rencontres, à l’image des matchs entre équipes nationales.

Sur la sauvegarde du principe de non discrimination en raison de la nationalité, la CJCEpose que les articles 48, 59 alinéa 1 et 60 alinéa 3 du traité CEE ont un effet direct : ilssont applicables directement dans les juridictions des Etats membres et invocables devantelles par les particuliers.

c- Les prolongements en droit interne : Affaire Markakis c. ASBL Fédération RoyaleBelge des Sociétés de Basketball (FRBSB)

Faits : Un ressortissant grec, Antonios Markakis, conclut un contrat de travail d’unan avec un club de basket en Belgique. La fédération belge dispose dans son règlementd’un article précisant que les joueurs étrangers ne peuvent pas participer à des rencontresdans les divisions nationales et provinciales qui ont comme enjeu la promotion ou larelégation. Le club de M. Markakis, l’Union St. Joseph Quaregnon, va adresser unedemande d’autorisation à la fédération pour son alignement en tant que professionneldans des matchs de deuxième division belge, en s’appuyant sur le fait qu’il s’agisse d’unressortissant des communautés. En juin 1992, la fédération va s’y opposer, avec commebase du refus l’article 245 de son règlement. Markakis va s’adresser au Tribunal de premièreinstance de Bruxelles en invoquant le principe de non-discrimination liée à la nationalité etle règlement du Conseil n°1612/68 déjà utilisé dans Walrave et Koch.

Droit : Affaire Markakis c. ASBL Fédération Royale Belge des Sociétés deBasketball

(FRBSB), (Tribunal de première instance de Bruxelles, Belgique, 8 septembre1992)

Sur l’interdiction de discrimination du fait de la nationalité, le TPI de Bruxelles reprendet synthétise la jurisprudence de la CJCE dans les affaires Walrave et Doña. Le droitcommunautaire s’applique au sport dès lors que celui-ci constitue une activité économiqueau sens de l’article 2 ; c’est donc le cas pour un travailleur indépendant ou un prestatairede services. Markakis, joueur de basketball professionnel peut donc invoquer le Traité.L’article 7 ne permet par ailleurs pas de réserver aux seuls ressortissants d’un Etat membre

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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le droit de participer à des compétitions de niveau professionnel. Un tel règlement n’estenvisageable que pour des compétitions à caractère uniquement sportif et non économique.Ce n’est pa le cas des championnats nationaux et des matchs à enjeux (« montée etdescente »).

Sur la forme, cela confirme l’applicabilité directe de l’article 7 du Traité CEE dont lesdroits sont invocables par les particuliers qui peuvent les faire valoir en justice dans unEtat membre, en l’occurrence le TPI de Bruxelles. Mais toujours rien n’est dit sur la librecirculation des travailleurs, suite logique de ces affaires de discrimination fondée sur lanationalité.

1.1.2. Sport et libre-circulation des travailleurs :Après avoir envisagé la non-discrimination, la CJCE va confronter le sport à une des quatrelibertés fondamentales du marché commun : la libre-circulation des personnes, et ira mêmeplus loin avec celle des travailleurs. La pierre angulaire fut indéniablement l’arrêt Bosmande 1995, peut être d’avantage par son écho que par la solution juridique proposée sommetoute évidente aux vues des arrêts précédents.

a- L’affaire Jean-Marc Bosman :Faits : A l’expiration de son contrat avec le RFC Liège, à la fin de la saison 1989-1990,

le footballeur professionnel Jean-Marc Bosman se voit proposer un nouveau contrat d’un anavec un salaire réduit de ¾ par rapport au contrat initial, soit le salaire minimal autorisé par lafédération belge de football, l’URBSFA. Bosman va refuser de signer ce contrat et sera placésur la liste des transferts. Le club français de l’US Dunkerque convient alors d’une indemnitéde transfert pour acquérir le joueur, mais le RFC Liège qui doute de la solvabilité du clubdunkerquois ne va finalement pas faire de demande de certificat de transfert et donc bloquercelui-ci. Bosman va alors porter plainte devant la CJCE contre les règles de transfert et lesclauses étrangères établies par l’Union des associations européenne de football (UEFA) etla Fédération internationale de football association (FIFA). Il se pose comme travailleur ausens de l’article 39 du traité CEE et devrait donc être libre si son contrat expire. Selon lui,les règles des organisations sportives limitent sa liberté de choix quant à son lieu de travail,notamment en imposant des indemnités de transfert et en bloquant celui-ci. Il remet aussien cause la règle du « 3+2 » : le nombre de ressortissants de l’UE non-nationaux était limitéà trois par équipe, plus deux joueurs considérés comme assimilés si ayant joué dans lepays depuis cinq ans.

Droit : Union royale belge des sociétés de football association ASBL contreJean-Marc Bosman, Royal club liégeois SA contre Jean-Marc Bosman et autres etUnion des associations européennes de football (UEFA) contre Jean-Marc BosmanCJCE, 15.12.95, aff. C-415/93)

Sur la liberté de mouvement, la CJCE se fonde sur l’article 48 du Traité CEE pourgarantir le droit à la libre circulation au sein de l’UE. Elle pose que les droits de transfertsconstituent purement et simplement une entrave à l’accès d’un joueur au marché de l’emploid’un autre Etat membre. Ils contraignent la liberté de mouvement des travailleurs et sontdonc contraires au droit communautaire. Après expiration de son contrat, aucune indemnitéde transfert ne peut plus être demandée par le club d’origine d’un athlète professionnel àson club de destination situé dans un autre pays de l’UE.

Sur les quotas de joueurs, la Cour rend illégale la limitation du nombre de joueur del’Union européenne car cela constituerait une limitation des possibilités d’un joueur d’être

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

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employé dans un autre Etat membre. Les équipes de club à l’intérieur de l’UE peuventdésormais jouer avec un nombre illimité de ressortissants étrangers européens. Dès lasaison 1996-1997, l’UEFA a abolit les quotas pour les ressortissants des pays membresde l’UE.

b- L’affaire Malaja et l’extension des conclusions ‘’bosmaniennes’’ aux accordsd’association :

Faits : Aux vues de son règlement, la Fédération française de basket-ball(FFBB) rejette en juin 1998 la demande du RC Strasbourg qui désirait embaucher lajoueuse de nationalité polonaise Lilia Malaja car le club employait déjà deux joueusesextracommunautaires. Melle Malaja va alors introduire un recours auprès du Couradministrative de Strasbourg, puis auprès de la Cour administrative d’appel de Nancy.

Droit : Arrêt de la Cour administrative d’appel de Nancy du 3 février 2000, n°99NC00282

La décision de la Cour de Nancy, favorable à la joueuse, s’appuie sur un accordd’association entre l’UE et la Pologne du 16 décembre 1993, entré en vigueur en février1994. Cet accord, dans son article 37 fait référence à la libre circulation des travailleurs. Leparagraphe premier de cet article précise que : « les travailleurs de nationalité polonaise,employés légalement sur le territoire d’un Etat membre […] doivent être à l’abri de toutediscrimination fondée sur la nationalité […] en comparaison avec les nationaux de cet Etat ».(JO L 93/348)

Arrêt du Conseil d’Etat, 2002 :Suite au recours de la FFBB, la juridiction administrative suprême va être amenée

à statuer sur le cas Malaja. Le Conseil d’Etat va se baser sur les plusieurs éléments.Tout d’abord, la thèse de la Commission européenne selon laquelle les clauses de non-discrimination contenues dans les accords d’association étaient en opposition flagranteavec les règlements de certaines fédérations, une contradiction déjà soulevée devant l’ordrejuridique allemand37. D’autre part, et cette fois de manière implicite, le Conseil va faireréférence à une décision de la CJCE de 200238 dans laquelle la Cour avait rappelé que leparagraphe premier précité consacrait dans des termes clairs, précis et inconditionnels, unerègle d’égalité de traitement qui ne nécessite aucune mesure complémentaire d’application.Autrement direct, cette règle est d’application directe pour les particuliers qui peuventl’invoquer devant les juridictions nationales de tous les Etats membres. A partir de là, leConseil d’Etat qui est bien une juridiction nationale est compétent, et il va considérer cesaccords d’association comme partie intégrante de l’ordre juridique communautaire. Cettedécision revient à étendre le jurisprudence de l’arrêt Bosman aux pays signataires d’accordd’association avec l’UE. Notons que certains de ces pays, dont la Pologne, étant désormaismembres de l’UE de plein droit, cette question ne se pose plus pour eux.

c- L’affaire Kolpak : la CJCE confirme l’extension aux accords d’association :Faits : La fédération nationale de handball allemande, la Deutscher Handballbund

e.V., avait délivré à Mr Kolpak de nationalité slovaque, une licence faisant mentionde sa nationalité d’un pays tiers, l’excluant de fait de l’égalité de traitement dans lecadre du traité CE. Le gardien de but du club de deuxième division du TSV Östringene.V. Handball va demander la délivrance d’une licence sans cette mention propre auxressortissants des pays tiers. Selon lui, cette mention entraînerait des restrictions, alors

37 Arrêt 2/14 O 305/97 du Tribunal régional de Francfort-am-Main, 28/07/9738 Arrêt C-162/00 (Pokrzeptowicz-Meyer) de la CJCE, 29/01/02

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qu’il existait un accord d’association Communautés européennes-Slovaquie qui interdisaittoute discrimination. Son recours s’est fait devant une juridiction allemande qui va poserune question préjudicielle à la CJCE.

Droit : Kolpak c. Deutscher Handballbund (CJCE, 08.05.03, C-63/99)Sur la question de l’applicabilité directe, la Cour établit que le principe de non-

discrimination en raison de la nationalité contenu dans l’accord d’association CE-Slovaquieest directement invocable par les ressortissants slovaques devant les juridictions nationalesde l’Etat membre d’accueil.

Sur la restriction de la possibilité d’accès à certaines rencontres, la CJCE y voitune discrimination prohibée par l’accord, ce qui confirme le jugement Malaja à l’échelleeuropéenne.

Sur la différence entre libre-circulation et non-discrimination, une clarification estapportée. La libre-circulation est un acquis communautaire, depuis Bosman, pour lestravailleurs ressortissants des Etats membres. Il ne s’applique aux Etats signatairesd’accords d’association que dans la mesure où un ressortissant d’un pays tiers signatairepossède un titre de séjour et un permis de travail valable. Le principe de non-discriminationne concerne pas ici les règles relatives au marché de l’emploi qui relèvent de la compétencenationale, mais s’applique uniquement quand le ressortissant slovaque, en l’occurrence, estdéjà employé légalement sur le territoire d’un Etat membre.

d- L’affaire Simutenkov : les accords de partenariat et de coopération entrent dans legiron de la libre-circulation :

Faits : Un règlement de la fédération espagnole de football limitait le nombre de joueursextracommunautaires pouvant être employé simultanément. Employé par le DeportivoTenerif, le joueur professionnel russe Igor Simutenkov était donc titulaire d’une licence decette fédération spécifique aux joueurs non-communautaires ni ressortissants de l’EEE.Mr Simutenkov va alors invoquer l’accord de partenariat et de coopération Communautéseuropéennes-Fédération de Russie qui contient dans son article 23, une clause de non-discrimination. A ce titre, il va demander la délivrance d’une licence de type joueurcommunautaire, mais la Fédération va refuser. Il porte alors l’affaire devant une juridictionnationale espagnole, qui va là aussi poser une question préjudicielle à la CJCE.

Droit : Igor Simutenkov c. Ministerio di Educacion y Cultura, Real federacionEspanola de Futbol (CJCE, 12.04.05, C-265-03)

Sur le principe de non-discrimination, la Cour a affirmé, suivant les conclusions del’avocat général, que d’une part, l’accord de partenariat est d’effet direct, et que, d’autrepart, il existe un droit à l’égalité de traitement en termes de conditions de travail pour touttravailleur russe employé légalement dans l’UE.

Sur la portée du principe, celui-ci est considérablement élargi, puisque la CJCEl’applique à un accord de coopération, qui, contrairement aux accords d’associations aveclas PECO, n’a pas vocation à aboutir à l’adhésion de la Russie à l’UE.

1.2. La politique sportive européenne : base juridique, objectifs etréalisations

1.2.1. Un manque de sécurité juridique

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Aujourd’hui, le sport ne dispose pas de base juridique spécifique, autrement dit il n’estmentionné explicitement par aucun article des traités. La jurisprudence et l’action desinstitutions européennes permettent néanmoins de le rattacher à plusieurs autres domainespour lesquels l’UE a compétence selon le traité de Rome, instituant la Communautéeuropéenne :

∙ les articles 39 à 55 concernant la libre circulation des personnes, services etcapitaux ;

∙ les articles 81 à 89 concernant la politique de la concurrence ;∙ les articles 149, 150, 151 et 152, concernant respectivement l’éducation, la formation

professionnelle, la culture et la santé publique.

A travers ces politiques, ce sont surtout les aspects économiques du sport qui sont visés parle traité de Rome. Ce ne sera qu’à partir du milieu des années 1990, une volonté politiquemarquée tendant à une reconnaissance du rôle plus large joué par le sport va voir le jour.

1.2.2. Des objectifs aux réalisations, une dimension économiquecontraignante pour le sport La prédominance des aspects économiques du sport reflétés par la jurisprudence ne doitpas faire oublier les dimensions sociale, culturelle ou encore éducative du sport.

Les arrêts de la CJCE ont été relayés par les autres institutions. La libre circulationdes travailleurs a été l’objet de plusieurs réserves adressées par la Commission à laFIFA suite à l’arrêt Bosman. Ce n’est qu’en 2001 qu’un accord a été trouvé entre l’UEFA,les représentants des footballeurs professionnels (FIFPro), la FIFA et la Commission, quiprévoit l’alignement du système de transferts sur le droit européen tout en prenant en comptela spécificité du football. La politique de la concurrence a, de son côté, conduit à considérerles fédérations sportives comme de véritables entreprises relevant du champ d’applicationdes règles dites ‘’antitrust’’. C’est là aussi la Commission qui veille au respect de cesrègles et traite des plaintes déposées par les particuliers. Les aides d’Etat constituent iciun angle d’attaque privilégié sur lequel la Commission est souvent appelée à se prononcer.En résumé, le champ d’application du traité concerne les organisations sportives à troisniveaux principaux :

- La prohibition des mesures équivalant à des ententes ;- La prohibition des abus de position dominante ;- Le contrôle des aides publiques.

2. Les spécificités du sport ou l’éloignement du tout économiqueLa jurisprudence de la CJCE dont l’arrêt Bosman a constitué le point d’orgue a remisen cause certains règlements des fédérations sportives qui étaient contraires au droitcommunautaire. L’ambiguïté qui en ressort veut que la dimension sportive des activités desfédérations ne soit pas soumise au droit communautaire, alors même que dès lors que cesmêmes activités revêtent un caractère économique elles sont soumises aux principes delibre-circulation et de concurrence non-faussée tels qu’appréhendés par les traités.

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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2.1. Du rejet de la notion d'exception sportive...

2.1.1. Le sport, une activité économique particulièreLa notion d’ « exception sportive » qui voudrait l’exemption du sport de l’application desrègles du traité a fait long feu, en partie parce qu’elle entretenait une sorte de « malentendu »entre ses promoteurs (Miège, 2006)39. D’un côté, les ministres des sports, au premier rangdesquels la France dont on a présenté l’organisation interventionniste en matière de sport,ont œuvré au nom de l’éthique et des valeurs du sport, notamment lors de leur rencontreà Paderborn en juin 1999. Marie-George Buffet a ainsi put déclarer en mars 1999 que :«l’application au sport des règles communautaires de concurrence s’avère incompatibleavec la préservation de l’éthique sportive ». D’un autre côté, les fédérations ont vu dans cettenotion d’exception le moyen de préserver leur autonomie, a fortiori la FIFA sous l’impulsionde son président Joseph Blatter et l’UEFA qui ont formulé des demandes auprès de laCommission et des ministres des sports visant à modifier l’arrêt Bosman, sous couvert d’unevision que l’on pourrait qualifiée de libérale du sport et de son économie.

2.1.2. Pas d’exemption générale à l’application du droit communautaire Pourtant, la Commission va nier ce concept d’exception. Certes l’application du droitcommunautaire est très limitée puisqu’elle ne concerne que la dimension économique desactivités sportives, mais dès lors que les fédérations se sont engagées sciemment dansune logique du marché et en ont profité financièrement, voire l’ont alimenté, il est normalqu’elles se plient à ces règles (Simon, 2001). L'idée que le sport puisse être exempté dudroit de l'Union européenne est somme toute désuète.

2.2.….à la notion de spécificités, nécessaires et plurielles Si on nie l'exemption totale, il faut dès lors trouver une conciliation entre sport et droitcommunautaire, un aménagement qui s'appuie sur les particularités du sport au regard desautres activités.

2.2.1. Des exemptions ponctuelles au droit communautaire, fondements du« modèle sportif européen » Même dans sa dimension économique, le sport peut bénéficier d'exemptions ponctuelles,accordées en général par la Commission. Cela signifie que bien souvent les autoritéssportives ont revu leurs règlements parfois anticoncurrentiels et dans le même temps laCommission va faire preuve de souplesse dans l'application des traités. En France, le casle plus significatif concerne les aides d'Etat sanctionnées par le droit communautaire maisdont l'article 87 du traité CE prévoit qu'elles soient soumises à autorisation. Des dispositionscontenues dans les décrets d'application de la loi Buffet prévoyaient des aides verséespar les collectivités locales aux clubs professionnels; il a été nécessaire d'obtenir l'aval dela Commission avant la publication de ces décrets40. Alors que l'impression laissée parla jurisprudence décrite plus haut et la non-prise en compte du sport par les traités étaitcelle d'un flou juridique, la Commission s'est saisie du problème en tentant d'instaurer unecertaine sécurité en la matière.

39 Cf. : Document en ligne: http://www.cees-europe.fr/fr/etudes/revue9/r9a11.pdf 40 Décision de la Commission n°118/2000 du 25 avril 2001, Aide aux clubs sportifs professionnels, JOCE n°C333, 28 novembre2001, p. 6 : http://europa.eu.int/eurlex/ pri/en/oj/dat/2001/c_333/c_33320011128en00060008.pdf

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L'aspect économique de l'activité sportive à défaut de se soustraire au droiteuropéen, peut utiliser les dispositions les plus avantageuses du traité qui permettent desaménagements aux principes de libre-circulation et de concurrence.

Le sport revêt également, comme la jurisprudence va en témoigner, une dimension non-économique, reconnue par les textes. En premier lieu, il convient de citer une déclarationannexée au traité d'Amsterdam :

« L’importance du sport, et en particulier son rôle de ferment de l’identitéet de trait d’union entre les peuples. Elle invite dès lors les institutions del’Union européenne à consulter les organes représentant les milieux sportifslorsque des questions importantes ayant trait au sport sont concernées. A cetégard, il convient de tenir tout spécialement compte des particularités du sportamateur.»41

De « particularités » à « spécificités » il n'y a qu'un pas...encore faut-il oser le franchir,car cette déclaration est par nature sans portée juridique. Suivra la Déclaration relativeaux caractéristiques spécifiques du sport et à ses fonctions sociales en Europe devantêtre prises en compte dans la mise en œuvre des politiques communes, publié en margedu Sommet européen de Nice (décembre 2000) qui tente de recadrer cette notion despécificités.

Le premier texte significatif émanant de la Commission européenne prônant lareconnaissance de telles spécificités est un document de travail intitulé « Evolutionetperspectives de l’action communautaire dans le sport »42qui donne une première définitionde contenu à la notion qui nous intéresse en invoquant ses fonctions éducative, sociale,culturelle, de santé publique et ludique. Un modèle sportif donc, doublé d'un volet européen,telle fut l'idée de la Commission en invoquant le concept de « modèle sportif européen »dans un document en date de 1999. Qu'est-ce qui fonde sa différenciation notamment d'avecun suppose modèle nord-américain? (Pons, 2001). Son organisation pyramidale entre lesdifférents niveaux, du sport professionnel aux amateurs, renforcée par le système dit depromotion-relégation qui donne un sens autre qu'économique aux résultats obtenus sur leterrain. Par opposition, les grandes ligues américaines (NBA, NHL, NFL, MLB) sont ferméeset la draft permet d'effectuer des rééquilibrages. En Europe, il y a une relation de proximitétrès forte entre les collectivités territoriales et les clubs amateurs; aux Etats-Unis, le sportest organisé surtout au niveau scolaire pour les jeunes.

Le rapport d'Helsinki anticipant le sommet européen du second semestre 1999 seprononce contre certaines dérives du sport qui remettraient en cause ses fonctionséducatives et sociales: commercialisation et dopage sont explicitement visés.

Une autre définition a été mise en exergue par le commissaire Monti en février 2001qui souligne comme spécificité l'interdépendance entre compétiteurs dans le sport ; lacompétition sportive se distingue radicalement de la compétition économique en généraldans le sens où chacun a besoin de l'autre, il n'y a pas de monopole possible puisquele championnat par exemple se fait nécessairement à plusieurs (Miège, 2001a). Attentionnéanmoins au vocable d' « élimination », lors des Coupes notamment.

2.2.2. Une acception de « spécificités » relayée par la jurisprudence 41 Déclaration n° 29 relative au sport, Traité d'Amsterdam, in JOCE n° C 340, 10 novembre 1997

42 Document de travail des services de la Commission, DG X, Bruxelles, 29 septembre 1998 : http://ec.europa.eu/sport/action_sports/historique/docs/doc_evol_fr.pdf

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

42 Kelbel Camille - 2008

Il convient d'analyser les éléments de jurisprudence pour en dégager l'approche en termesde spécificités faite par la CJCE.

a- L’affaire Deliège : de la libre circulation des personnes à la libre circulation desservices :

Faits : Christelle Deliège, une judokate affiliée à la fédération belge de son sport,accuse celle-ci de l’empêcher de participer à certaines compétitions. Sa non-sélection dansl’équipe nationale serait contraire à la libre-circulation de l’article 39du traité CE. Elle va saisirle Tribunal de première instance de Namur qui va lui-même poser une question préjudicielleà la Cour. : «Le fait d'imposer à un athlète professionnel ou semi-professionnel ou candidat àune activité professionnelle ou semi-professionnelle d'être en possession d'une autorisationde sa fédération pour pouvoir s'aligner dans une compétition internationale qui n'opposepas des équipes nationales, est-il ou non contraire au traité de Rome et notamment auxarticles 59, 85 et 86 de ce traité?»

Droit : Christelle Deliège c. Ligue francophone de judo et disciplines associéesASBL, Ligue belge de judo ASBL, Union européenne de judo (CJCE, 11.04.07,aff.jointes C-51/96 et C-191/97)

Sur le caractère économique de l’activité, la CJCE note que même si Melle Deliègepratique le judo en amateur, elle peut être considérée comme une entreprise et les revenusqu’elle perçoit fondent le caractère économique de son activité et la placent donc dans lechamp d’application du traité CE.

Sur le fond, même en matière économique, les autorités sportives bénéficient d’unecertaine autonomie quant à la fixation des règles sportives. En l’espèce, la Cour reconnaîtla possibilité pour les fédérations de l’obligation d’affiliation des sportifs à ces fédérations,lesquelles délivrent les autorisations de participation aux tournois et limitent le nombrede participants, dans la mesure où les critères de sélection sont non-économiques. Unnombre illimité de participants rendrait en effet sportivement impossible l’organisation descompétitions internationales.

b- L’affaire Lehtonen :Faits : La Fédération belge de basketball interdit à un basketteur professionnel

finlandais, Jyri Lehtonen, de participer aux derniers matchs de la saison car son transfertvers un club belge a eu lieu après la date limite de mutations. M Lehtonen va contester cerefus comme contraire à l’article 39 sur la liberté de circulation.

Droit : Jyri Lehtonen & Castores Canada Dry Namur-Braine c. FédérationRoyale Belge des Sociétés de Basketball ASBL (CJCE, 13.04.00, aff. C-176/96)

Sur la restriction à la libre-circulation, la CJCE a admis qu’il y avait des raisonssportives suffisantes (et non économiques) pour justifier ces restrictions. De telles règlessont nécessaires pour minimiser les effets distorsifs sur le championnat, en empêchantles joueurs d’un championnat, une fois celui-ci terminé, d’offrir leur service dans un autrechampionnat toujours en cours.

La Cour reconnaît avec Deliège et Lehtonen pour la première fois qu’un motif liéspécifiquement au sport est suffisant pour justifier une entrave à la libre circulation despersonnes (THILL, 2000). L’objectif d’assurer la régularité des compétitions devient uneraison supérieure d’intérêt général qui, selon cette jurisprudence, est susceptible de justifierde telles entraves.

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

Kelbel Camille - 2008 43

Les affaires de l’ère post-Bosman ont montré que la Commission a établi certainscritères pour baser son intervention pour réguler le sport ou au contraire pour affirmerl’autonomie des autorités sportives. Ainsi, les règles de nature purement sportives sontclairement excluent du champ d’application du traité et donc de l’appréciation de leuropportunité par la CJCE, même si ces règles peuvent affecter économiquement certainssportifs. Pour cela, les autorités sportives doivent justifier du caractère raisonnable,nécessaire et proportionné pour leur préserver leur sport des règles qu’ils imposent. Demême s’ils sont en mesure de justifier que ces règles promeuvent la solidarité et les valeurssociales, ils peuvent espérer être exempté de l’application stricte du principe de concurrencelibre et non faussée.

2.2.3. Vers une définition de la nature spécifique du sport La désignation de « spécificités » recoupe plusieurs bases de définition qui sont utiliséespar les différents acteurs :

a- Les domaines non-économiques de l’activité sportive :Sont évoquées soit les fonctions sociales, éducatives et culturelles (Déclaration

annexée au traité de Nice) soit ses fonctions éducative, sociale, culturelle, de santé publiqueet ludique (« Evolution etperspectives de l’action communautaire dans le sport », voir supra).Définition politique qui, on le verra, est souvent utilisée comme justification à une interventionde l'UE et est par conséquent peu crédible ici. Relevons néanmoins la diversité étonnantede ses fonctions, dont peu d'autres activités peuvent se targuer.

b- L'incertitude sur l'issue de la compétition et l'égalité des concurrents devant la règlesportive :

Sur le premier point, on note en tant que spectateurs la prise de position en faveur del'outsider et l'intérêt que cela suscite, comme ce fut le cas pour la Turquie et la Russie auxderniers championnats d'Europe. Cet exemple montre aussi que le modèle sportif européenne correspond pas dans son cadre à l'UE, mais d'avantage en l'occurrence à celui définitpar l'UEFA.

Le second point, l'égalité des candidats est mise en place par les fédérations, en voiciquelques exemples : la division en catégories d'âge (poussins, benjamins, minimes, etc.),les handicaps de points en tre équipes de niveaux différents lors des épreuves de Coupede France (basket), les catégories de poids (judo, lutte, etc.)

c- La notion de « règles du jeu » :Invoquer les « règles du jeu » revient à préserver l'autonomie des fédérations

dans l'organisation des compétitions à tous niveaux. Chaque fédération est une autoritécompétente dans son sport pour établir les règlements.

3. Exemplification : la place du dopage en droit de la concurrence.Le dopage est revenu au premier plan des préoccupations des organisations sportives. Sesimplications économiques n’ont pas manqué d’attirer l’attention de l’Union européenne.

3.1. L’approche économique du dopage est réductrice

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

44 Kelbel Camille - 2008

Les outils offerts par le modèle néo-classique tel que étendu à l’ensemble descomportements humains (Becker, 1964, 1968) peuvent servir de base à l’appréhension duphénomène du dopage sous l’angle économique (Bourg, 2000a, 2000b).

3.1.1. Le modèle de l’homo œconomicus dopé En particulier, il s’agit d’analyser la rationalité du sportif qui se dope sans omettre de mettreen exergue les limites de ce comportement. Ainsi, cette supposée rationalité repose surun ensemble d’hypothèses qui délimitent le champ de l’analyse de Jean-François Bourg.Tout d’abord, le sportif est professionnel, et par extension cette profession est exclusive.Ensuite, le dopage consiste au « recours à des aides artificielles interdites afin de pousserl’organisme à des niveaux de performance qu’il n’aurait pas pu atteindre naturellement »43.Troisièmement, il y a un choix entre la prise de tels produits avec risque de sanctionsen cas de contrôle et la non-prise qui réduit la capacité potentielle de l’athlète. Enfin, lecontexte est celui de la concurrence, le risque chômage est élevé face à l’entrée sur lemarché de jeunes sportifs, de sportifs étrangers, à plus forte raison européens44, auquel ilfaut ajouter les risques liés à d’éventuelles blessures et problèmes de santé, très réducteursde perspectives de carrière. Cette dernière hypothèse mérite d’ores et déjà d’être analyséeà l’aune d’un autre type de problèmes de santé, celui des effets supposé du ‘’doping’’ surla santé. On aboutit à une approche du dopage en termes microéconomiques, laquellerepose largement sur la notion de rationalité : une utilisation optimale des ressources parles individus en prenant en compte les contraintes auxquelles ils sont soumis. Le modèle deJean-François Bourg est donc basé essentiellement sur un calcul de type coûts-avantages,qui fait que « l’athlète opère en permanence un calcul économique qui lui permet d’arbitrerentre des choix contradictoires »45. Ces choix sont notamment intérêt personnel versusmorale, court versus long terme, biens immédiats versus biens futurs. On arrive de manièrethéorique à une équation qui peut aussi intégrer les variantes ‘’valeurs morales’’ et ‘’risquepour la santé future du dopé’’, formalisée de la manière suivante :

AN = B – I – R – (pc.vs)AvecAN: avantage net retire de l’acte de dopageB : rendement (brut)I : investissement de l’acte de dopage (on pense ici à la préparation et à la réalisation)R : valeur des revenus abandonnés à l’occasion de l’acte de dopagepc : probabilité d’être condamnée telle que perçue par le sportifvs : montant de la sanction liée à l’acte (pas forcément que valeur financière)L’intérêt intrinsèque de ce modèle est de montrer clairement les variations liées au choix

du sportif, autrement dit son comportement en fonction de l’avantage net qu’il retire de l’actede se doper. Dans un second temps, il permet d’appréhender les choix de politiques de luttecontre le dopage.

3.1.2. Une entrée possible de la lutte contre le dopage 43 BOURG Jean-François. Art. « Le dopage », Encyclopaedia Universalis, CD Rom, version 5, Paris, 1999.44 Voir à ce propos l’arrêt de la CJCE Bosman, supra.45 BOURG Jean-François. Dopage : y a-t-il une explication économique ? Problèmes économiques n°2.687, novembre 2000, p.30.

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Partie 1. Le dopage, aux fondements de l'intervention européenne dans le sport

Kelbel Camille - 2008 45

Cette approche microéconomique a ainsi pour intérêt de nous introduire au casse-tête dela lutte anti-dopage. Le rendement brut dépend entre autres de la rémunération offertelors de la compétition, et des particularités de la compétition qui peut requérir des qualitésdiverses et variées, plus ou moins compatibles avec les substances dopantes disponiblespour l’athlète. Ce rendement brut est donc en partie fixé dans les règlements sportifs etpar les autorités. A l’inverse, les autorités de lutte anti-dopage ne pèsent pas suffisammentsur l’autre plateau de la balance de l’équation présentée ci-dessus. Concernant lesinvestissements qui représentent les coûts du dopage pour le sportif, une répression dutrafic insuffisante signifie que se sont surtout l’approvisionnement, la fabrication et les coûtsde transaction qui pèsent sur le futur dopé ; les régulateurs, notamment les pouvoirs publicsperdent la main du contrôle des coûts. Autre facteur aggravant qui augmente l’avantage netretiré du recours au dopage : la rémunération que l’on pourrait qualifiée d’exponentiellementdécroissante. Seuls les tout meilleurs vont bénéficier d’une rémunération importante, etainsi, les sportifs se dopant n’abandonnent en définitive qu’un revenu très bas, celui qu’ilsauraient gagné sans se doper (R) ayant une valeur faible. Les institutions sportives peuventet doivent agir sur la redistribution. Surtout, ce sont les probabilités d’être contrôlé et la« valeur » de la sanction qui sont le plus liées à l’efficacité des autorités compétentes,quoique subsiste dans la décision de se doper, la perception personnelle de ces facteurs-risque. Ainsi, les pouvoirs publics et les institutions sportives, dans le cadre de la lutte anti-dopage, peuvent se donner les moyens d’agir sur l’ensemble des déterminants de l’actede dopage : son rendement brut, son coût, la valeur des revenus légaux abandonnés, laprobabilité d’être contrôlé et l’échelle de sanctions associée. Pour ce faire, il leur faut dansle même temps minimiser des facteurs qu’ils contrôlent peu ou proue : l’adéquation desubstances avec la physiologie de tel ou tel sportif, les coûts de fabrication et d’informationdu trafic de produits dopants, les perceptions individuelles.

3.1.3. Les limites de l’approché purement économique du dopage Pourtant, le modèle du dopé homo oeconomicus est réducteur. En termes de chiffrage enpremier lieu, il semble difficile de déterminer les revenus futurs, les risques effectifs desanction et encore moins les risques d’atteinte à la santé à l’échelle de toute une vie.

Autre critique, très répandue d’une approche en termes de choix rationnels : il s’agitd’une idéologie du calculateur individuel qui passe sous silence les objectifs et les valeursnon-économiques. L’individualisme méthodologique concevrait le phénomène du dopagecomme une agrégation de comportements individuels de sportifs guidés par le calcul coût-profit, alors que dans le monde du sport, des structures et règles préexistent aux acteurs,et ont une influence indéniable sur leurs comportements.

Le dopage peut d’ailleurs être analysé comme une conduite d’évitement aux règles dujeu, lesquelles règles sont bien les fondements de l’activité sportive, et excluent la dimensionéconomique (Carrier, 1998). La sociologie du dopage et de sa perception, ainsi que laquestion des valeurs dans le sport méritent donc d’être prises en considération.

3.2. La jurisprudence récente touchant au dopage L’aboutissement de la jurisprudence en matière de sport concerne une affaire ayant trait audopage : le cas Meca-Medina et Majcen.

Faits : David Meca-Medina et Igor Majcen sont deux sportifs professionnels ayantété contrôlé positifs à la nandrolone lors de la Coupe du Monde 1999 de natation longuedistance, où ils avaient obtenu la première et deuxième place. La fédération internationale

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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de natation, en application du Code antidopage a suspendu les athlètes pour une duréede quatre ans. Le Tribunal arbitral du sport a par a suite abaissé la sanction à deux ansseulement. Mais en 2001, MM. Meca-Medina et Majcen vont porter plainte auprès de laCommission : ils estiment que les règles antidopage du CIO sont incompatibles avec ledroit communautaire de la concurrence et notamment la libre prestation de services. LaCommission va cependant rejeter la plainte en août 2002. Les requérants vont alors setourner vers le Tribunal de première instance des communautés européennes. Par un arrêtdu 30 septembre 2004, le TPI rejette le recours au motif que les règles antidopage ne sesituent pas dans le champ d’application du droit communautaire de la concurrence et dela libre prestation des services. Dans ces circonstances, le pourvoi devant la CJCE avaitpour but de faire reconnaître une erreur de droit commise par le Tribunal susnommé et uneannulation de la décision de la Commission de 2002.

Droit : David Meca-Medina et Igor Majcen c. Commission européenne (CJCE,18.07.06, C-519/04 P)

Sur l’application du droit communautaire au sport, la Cour a rappelé alors que lesport relève du droit communautaire dès lors qu’il constitue une activité économique, il estétranger à ces obligations s’il n’en possède pas. Ce qui signifie que, dans ce dernier cas, lalibre circulation des services et des personnes ne s’applique pas. Par contre, pour ces règlesayant trait au sport sans dimension économique et auxquelles on ne peut pas opposer lalibre circulation des personnes et des services ne se retrouve pas ipso facto exempté dudroit de la concurrence européen.

Sur la décision du Tribunal de première instance, donc, celui-ci n’a pas vérifié laconformité de la règlementation antidopage au droit communautaire de la concurrence, cequi constitue une erreur de droit. La CJCE annule par là l’arrêt du TPI.

Sur les sanctions prévues par le CIO, la CJCE admet que la règlementation antidopagepeut fausser potentiellement la concurrence. Mais ces règlementations sont conformes autraité CE dès lors qu’elles sont limitées à ce qui est nécessaire au bon fonctionnement dela manifestation sportive, ce qui était le cas lors de la Coupe du Monde 1999 de natationlongue distance. La règlementation incriminée n’était, aux dires de la Cour, aucunementdisproportionnée. La Cour rejette ainsi le recours qui visait à l’annulation de la décision dela Commission européenne.

Conclusion du chapitre et de la partie« L’UE comporte des dangers et des opportunités pour le sport européen. Elle a un aspectnégatif si les institutions européennes appliquent sans nuance les traités au sport. » (DeKepper, 2000). Si le sport, ne peut être exempté totalement du droit communautaire, toutela complexité du problème réside dans le tracé de la frontière entre, d’une part, ses aspectséconomiques entrant dans le champ du droit de la concurrence et de la libre-circulation, et,d’autre part, ses spécificités qui en sont exonérées. Entre les deux, le sable mouvant de lajurisprudence récente brouille les pistes de définition de cette spécificité sportive.

Les aspects positifs sont à trouver dans des initiatives ponctuelles et récentes desinstitutions européennes qui contribuent à la promotion du sport en Europe et dans lemonde en répondant de manière ponctuelle aux demandes émanant du monde sportif. Unaboutissement possible serait de faire de la spécificité du sport une obligation juridique.

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Partie 2. Le ''modèle sportif européen'' à l'épreuve du dopage

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Partie 2. Le ''modèle sportif européen'' àl'épreuve du dopage

Chapitre 1 : La lutte anti-dopage a bien négocié levirage des exceptions aux règles communautaires :vers une approche élargie du sport

La compétence sport, cela constitue notre hypothèse, se construit dans son interaction avecdes compétences européennes préexistantes, en s’appuyant sur des activités précises etmotrices, notamment la lutte antidopage. Après avoir envisagé les limites d’une approchepurement économique qui a longtemps dominé la vision européenne du sport, nous verronsici quelles autres pistes ont été développées, permettant d’élargir la base d’intervention.Si la reconnaissance de l'existence de règles du jeu a certes ouvert la voie à une relationad hoc sport/UE, elle tend à exclure l'UE de la régulation des activités sportives. Afin dereprendre la main sur le sport, l'Europe va être amenée à s'appuyer sur ses compétencesdans d'autres domaines proches des préoccupations du mouvement sportif, ce qui revientà s’impliquer davantage dans la dynamique du « modèle sportif européen ».

1. Les fondements d’une politique sportive européenne dynamique La dimension économique des activités sportives a permise à l’Union européenne des’inscrire en faux contre toute dérogation générale à l’application du droit communautaire.Elle a donc choisi la voie d’une analyse au cas-par-cas (ceux de la CJCE) comme modede régulation. Malgré l’absence de compétence, ce tâtonnement juridique lui a permis, àl’échelle de ces trente dernières années, de saisir toute l’envergure de la problématiquesportive. Si l’UE dispose de moyens d’action conséquents46, se pose la question de leurmise en œuvre par les institutions (1.1.), à travers les grandes politiques européennes (1.2).

1.1. Les institutions européennes marquent des points Le sport s’est peu à peu imposé comme un domaine incontournable au niveau européenet y est de plus en plus envisagé, non pas seulement comme une activité économiquemais de plus en plus comme facteur d’intégration et d’identité. L’action de la Commission

après le Rapport d’Helsinki est particulièrement révélatrice à ce niveau 47 . La mise en place46 Cf. : supra, partie 1 – chapitre 2 : 3.2.47 Voir à ce propos DELMAS, Corinne. Expertise et nouvelles méthodes d’élaboration des politiques publiques européennes. Le casdes politiques européennes du sport. AFSP/ Groupe Europe, journée d’études du 8 novembre 2001, 21p, qui consacre une grandepartie de son développement à la DG X.

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

48 Kelbel Camille - 2008

d’une unité Sport au sein de la Direction générale éducation et culture a eu pour vocationla coordination de projets sportifs, en particulier dans le cadre de l’Année Européenne del’Education par le Sport (AEES), dont les modalités seront évoquées plus loin dans cetravail. Le sport semble avoir particulièrement bénéficié de la mise en place d'une Unioneuropéenne et des fameux trois piliers qui ont, depuis Maastricht, constitués un supplémentaux Communautés européennes. Le pilier justice et affaires intérieure (JAI) est ainsi devenule lieu d'une coopération poussée entre Commission et Conseil en matière de prévention dela violence dans les stades. Seule exception notoire, le cantonnement progressif du sportau sein de la Commission à une seule direction générale pourrait être interprété comme unerestriction apportée à son caractère multidimensionnel (auparavant, comme nous l’avonssouligné, 20 DG traitaient d’affaires liées au sport). Pourtant, non seulement la DG éducationet culture regroupe la plupart des domaines liés au sport, mais par ailleurs cela revient àconsidérer de plus en plus le sport comme un domaine européen à part entière.

Bien que le Conseil n'ait pas à ce jour de groupe de travail permanent à ce sujet, lespropositions émanant de le Commission sont débattues au sein de groupes ad hoc, puisrelayées dans une des neuf formations du Conseil. Pour mémoire, il s’agit des formationsaffaires générales-relations extérieures, affaires économiques et financières (ECOFIN),justice-affaires intérieures, emploi-politique sociale-santé et consommateurs, compétitivité(marché intérieur, industrie, recherche), transport, télécommunications-énergie, agriculture-pêche, environnement, éducation-jeunesse-culture. Il est évident que certaines formationssont plus à même de traiter du sport, et que dans d’autres la question est peu voire prouabordée. Ce fonctionnement implique quoi qu’il en soit que le sport ne soit pas considéré entant que tel, mais est basé sur une approche via des domaines larges pour lesquels l'Unioneuropéenne a une compétence reconnue.

Le Parlement européen reproduit ce schéma en abordant les questions sportivesnon pas toujours dans la même commission parlementaire, mais au contraire dansdes commissions différentes selon le sujet précis abordé. Toutefois, il existe bien unecommission parlementaire intitulée « Culture, Jeunesse, Education, Médias et Sports »,organe privilégié de telles discussions, ainsi que, de manière informelle, un intergroupeparlementaire sur les sports.

Les institutions européennes tendent à rejoindre l'approche du sport faite par les Etatsmembres, dont la plupart n'ont pas de ministère propre au sport, mais inscrivent celui-ci dansun portefeuille ministériel plus large ; en France, alors que le sport a longtemps constituéun ministère à part entière, il est désormais rattaché à la Santé.

1.2. La politique sportive dans la roue de grandes politiques européennes A défaut d’envisager le sport en tant que tel, celui-ci s’inscrit dans des politiquesdynamiques. Le sport profite en quelque sorte de l’aspiration de certains domaines pourlesquels l’UE a une compétence plus formellement établie.

Le constat selon lequel le sport est présent partout, jumelé avec une extension desprérogatives européennes qui touchent de plus en plus de domaines, rend inévitable laconfrontation entre sport et UE. A défaut d’une confrontation frontale qui consisterait pourl’UE à prendre en compte directement le sport, ce dernier va être décliné dans un grandnombre de politiques européennes. Certains programmes renommées (FSE, URBAN,INTERREG) vont participer à rendre plus visible le sport comme domaine d’action pertinent.

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Partie 2. Le ''modèle sportif européen'' à l'épreuve du dopage

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Une brochure du CNOSF liste les programmes de l'UE ouvrant des possibilités desubventions à des projets sportifs48:

« Aucun programme de promotion du sport n'existe en tant que tel. [...] Il reste toutefoispossible à l’heure actuelle de trouver des financements en présentant un projet sportifpoursuivant parallèlement des objectifs communautaires. De nombreux programmes desubvention sont ainsi ouverts à ces « projets sportifs » et trouvent à s’y appliquer. »

Les programmes européens ouverts au sport recoupent une large part des domainesde compétence de l'UE.

48 Les programmes de subventions de l'Union européenne et les « projets sport », brochure d'information, CNOSF/Bureau deliaison du sport, Bruxelles, janvier 2007 : http://nordpasdecalais.franceolympique.com/nordpasdecalais/fichiers/File/703.pdf

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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Politiqueseuropéennes

Volets despolitiques PIC

49 et/ou objectifsprioritaires

Exemples concrets d'application

Objectif 1 Palais Omnisports en Guyane (structurepour jeunes dans quartier défavorisé)

Régions enretard dedéveloppementObjectif 2 Du ski sur un terril (reconversion friche

minière)Objectif 3 Mission Sport-Insertion-Emploi du CROS de

Franche-ComtéPolitiqueeuropéennepour l’emploi EQUAL Programme d’identification des

compétences dans l’animation, le sport, lesocial

Développementrural

LEADER+ Handi voile

Coopérationentre régionsde l’UE

INTERREG III Une pratique de pleine nature sans frontière(circuit de VTT traversant la frontière franco-allemande)

PolitiqueRégionale

Zonesurbaines encrise

URBAN II Ilôt Velten (terrain multisport pour les jeunesdans un quartier défavorisé de Marseille)

Education etFormation

- Comenius -Erasmus -Leonardo, etc.

Métier rugbyman (production d'un référentieleuropéen de compétences)

Formationinformelle(jeunesse /citoyennetéeuropéenne)

- Servicevolontaireeuropéen -Jeunessepour l'Europe -Animateurssocio-éducatifset systèmesd'appui

Échange entre l'Office municipal deRonchin (Nord-Pas-de-Calais) et la villede Tirnaveni (Roumanie) autour du thème"sport, dopage et alimentation"

Education,Formation etCulture

Culture Culture 2007 Evènements sportifs organises autour duthème de la diversité

Emploi etsolidaritésociale

- PROGRESS -FSE

Chômeurs dans les clubs (cotisationréduite)

AffairesSociales

Dialoguesocial

- Projet « Row the BoaT » (partenairessociaux dans le sport)

EnvironnementLIFE + - Plan d’actionpour l’environnement(PAE) -Programme-cadre pourl’innovation et lacompétitivité

Formations de directeurs de golf à l’écologie

Santé - Protection des consommateurs - Santé publiqueRechercheetDéveloppement

7e Programme cadrecommunautaire en matière deRecherche et Développement(PCRD)

CAFDIS (action concertée en matière de lalutte contre le dopage dans le sport)

Coopérationet relationsextérieures

Lacoopération àpartir de 2007

- IEVP -ICDCE - IPA -Instrument destabilité

Campagne contre le SIDA à l’occasion de laCoupe d'Afrique des Nations de football

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Partie 2. Le ''modèle sportif européen'' à l'épreuve du dopage

Kelbel Camille - 2008 51

Afin de compléter ce panorama, précisons que dans certains cas, des projets sportifss'appuient sur plusieurs politiques de manière simultanée. Lors des Etats Généraux del'Europe du 21 juin dernier a ainsi été évoquée la relation sport/société civile avec commeproposition concrète le développement du jumelage entre clubs comme prolongement dujumelage entre les villes. Cela concernerait en effet plusieurs politiques européennes,au premier plan desquelles les affaires sociales mais aussi l'éducation. Thierry PHILIP,président de l'Agence Pour l'Education par le Sport a suggéré à cette occasion la mise enplace d'échanges de type Erasmus destinés aux sportifs, la mobilité de l’encadrement/desentraîneurs, ou la formation des jeunes supporters.

2. Les angles d’attaque privilégiés de la politique sportive européenneSi la compétence sport se construit dans son interaction avec des compétenceseuropéennes préexistantes, elle le fait en s’appuyant sur des activités précises et motrices(2.1), notamment la lutte anti-dopage comme politique de santé publique (2.2.).

2.1. L’éducation et le socialLa Déclaration sur les spécificités du sport issue du Conseil européen de Nice reconnaîtaux fédérations un rôle éducatif et social à travers l’organisation des compétitions, maisdans le même temps doit s’opérer une redistribution vers les clubs locaux et à des sportsdifférents50. L’économie du sport et ses aspects éducatifs et sociaux s’entremêlent donclargement (Buffet, 2001). Ils se combinent dans l’acception du sport qui est faite par l’Europe.

L’idée selon laquelle le sport promeut des valeurs sociétales comme la loyauté dansla compétition ou l’esprit d’équipe justifie la place du sport dans les politiques sociales.Concrètement, le sport est souvent utilisé comme outil d’intégration sociale de personnesdéfavorisées. La construction d’équipements sportifs, comme l’Ilôt Velten dans les quartiersNord de Marseille ou l’organisation de compétitions sont des initiatives notoires à cet égard.Des exemples ont été développé hors UE qui recoupent bien cette idée (une Coupe duMonde des sans-abri a été organisée en 2006 en Afrique du Sud).

Les liens entre sport et éducation sont également ténus et mis en avant par le biaisde l’action européenne dans le domaine de l’éducation par le sport. L’initiative la plusmédiatisée fut sans doute l’Année européenne de l’Education par le Sport de 2004, établiepar une décision du Parlement et du Conseil51. La collaboration entre établissementsd’enseignements et organisations sportives, financée par l’UE à hauteur de 12,3 millionsd’euros a permise :

- une campagne d’information sur la valeur éducative du sport ;- l’organisation de rencontre et de manifestations sportives ;- la mise en place de 161 projets dont 10 rassemblant plus de 8 pays européens.L'Europe en est donc venue à considérer le sport comme un enjeu d'éducation

et culturel, mais les aspects économiques restent encore prégnants. En témoigne quele principal outil européen d’intervention, les subventions, relève bien du droit de laconcurrence.

50 Cf. : Annexe 6.51 Décision n°291/2003 du 6 février 2003

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2.2. La santé publique La compétence de l’UE en matière de santé se fonde sur l’article 152 du traité CE : «laCommunauté complète l’action des Etats membres en vue de réduire les effets nocifsde la drogue sur la santé, y compris par l’information et la prévention ». La politiquecommunautaire de prévention contre le dopage intervient donc en renfort de l’action desEtats membres. Alors qu’il est impossible à l’UE de produire des actes législatifs surles sport en tant que tel, une directive émanant du processus de codécision Parlement-Conseil instaurant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain a bienété adoptée dès 200152. Elle vise à renforcer l’information sur les médicaments qui sontsusceptibles de contenir un principe actif pouvant induire une réaction positive lors d’uncontrôle antidopage. D’autres textes de loi européens ont eu un impact indirect sur le sport.Une directive du 12 juin 1989 prévoyait entre autres une surveillance médicale des risquesliés au travail qui pourrait s’appliquer aux sportifs professionnels53. Ou encore une directivedu 22 juin 1994 concernant la protection des jeunes au travail. Elle instaurait des mesuresvisant à prévenir leur exploitation économique, ainsi que toute activité susceptible de nuireà leur sécurité, leur santé et leur développement54.

Pour en revenir au dopage, il se présente comme figure de proue de la politique sportiveeuropéenne rénovée. C’est tout l’intérêt du cas Meca-Medina qui, tout en réaffirmantla dimension purement sportive, celle des règles du jeu et de l'éthique sportive (en neremettant pas en cause les règlements du CIO), a été l’occasion pour la CJCE d’affirmer sacompétence santé, ne se contentant pas de juger d’une affaire de concurrence. Bien quecette approche, notamment l’expertise sur la nandrolone, ait peut-être été maladroite, il estsignificatif qu’un cas de dopage serve de canevas à l’action européenne en matière de sport.

Conclusion du chapitre Le sport est symptomatique de toute implication européenne : au départ marquéuniquement par sa prise en compte économique grâce au traité instaurant les communautéseuropéennes, il a été petit-à-petit relié à des politiques publiques plus spécifiques. Lapolitique européenne du sport s’appuie donc sur la compétence communautaire dansd’autres domaines, dont la santé publique constitue un exemple privilégié. Peut-êtredavantage que les domaines du social et de l’éducation marqués par des initiativesponctuelles et éphémères (AEES). Le sport, plus qu’une activité économique régulée parle droit de la concurrence devient donc un enjeu de santé publique, à défaut d’être unecompétence en tant que tel. La lutte antidopage participe grandement de cette approchedynamique et élargie du sport par l’Europe.

52 Directive 2001/83 CE, in JOCE n° L 311, 28 novembre 2001.53 Directive 89/391/CEE du Conseil, article 14, in JOCE n° L 128, 29 juin 1989.54 Directive 94/33/CE du Conseil, in JOCE n° L 216, 20 août 1994.

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Chapitre 2 : La lutte anti-dopage, pivot de la politiquesportive européenne

Les différentes institutions européennes se sont impliquées dans la politique sportive à desdegrés variés. La lutte contre le dopage à montré une implication particulière du Conseil, duParlement européen et de la Commission, dans une série de textes à portée politique55. Latraduction en actions de ces déclarations et autres résolutions pose problème en l’absencede compétence européenne en matière de sport. Si une action coordonnée n’allait pasde soi au départ (1.), l’entrée de la santé publique et du dopage ont cependant permisl’aboutissement d’initiatives communautaires d’envergure (2.).

1. Une lutte antidopage européenne basée sur la coopération La coopération en matière de sport européen peut être envisagée selon deux modalitésprincipales : une entente entre Etats et UE d’une part, et, d’autre part, une entente entre l’UEet les organisations sportives. C’est uniquement dans la réunion de ces deux conditions quel’UE peut s’enorgueillir du rôle d’intermédiaire de la politique sportive. La lutte antidopagea en partie permis cette coordination originale, mais le chemin fut tortueux. D’abord, parceque le monde du sport est avare de ses prérogatives (1.1). Ensuite, parce que la prisede conscience du problème du dopage s’est faite progressivement (1.2), ne révélant quetardivement la nécessité d’une action coordonnée (1.3).

1.1. L’intervention publique, défi pour la préservation des valeurs du sportLa prise en compte du dopage dans sa dimension purement éthique en fait une affairepropre au sport et à son organisation. Le monde du sport a en effet toujours revendiqué lesvaleurs particulières du sport comme une des spécificités dont il serait le garant (Lapouble,2001). Or, en cas de spécificité avérée, les autorités publiques se sont tenues en retrait.C’est bien ce qui a justifié la décision de la Cour de Justice des Communautés européennesdans les affaires Deliège et Lehtonen.56 Une intervention publique, étatique ou européennedans la question éthique du dopage peut donc, aux vues de ces éléments être interprétéecomme une violation de l’autonomie des instances sportives.

Cependant, l’Union européenne, comme l’Etat avant lui, en choisissant une approchedifférente vont prendre à revers la question des valeurs du sport, en posant la santépublique comme ‘‘dimension parallèle’’ à l’éthique sportive. Cela va permettre des politiquesinterventionnistes dont la France reste l’exemple le plus prégnant. Le suivi médicaldes sportifs motivé par des préoccupations sanitaires et morales sera instauré suite àl’étatisation du sport par le Régime de Vichy57. La première législation spécifique contre ledopage sera d’ailleurs adoptée en France et en Belgique en 1965.

1.2. Des initiatives en ordre dispersé…

55 Cf. : supra, partie 1 - chapitre 1 : 1.2.56 Cf : supra, partie 1 – chapitre 3 : 2.2.

57 Voir par exemple SILANCE, Luc. Lex Sportiva, Le sport et le droit civil. Notes de cours, 44p. http://www.institut-idef.org/IMG/doc/SILANCE.doc .

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Jusqu’à la fin de la décennie 1990, l’UE va peu s’impliquer directement dans la lutte contrele dopage. Les autres acteurs, à fortiori le CIO, le Conseil de l’Europe et les Etats membresvont développer des actions non-coordonnées.

1.2.1. Les impulsions du CIO Le Comité international olympique va se saisir de la question dès 1961 en instaurant unecommission médicale chargée d’établir une liste des produits interdits. Les Jeux olympiquesde Mexico en 1968 seront l’occasion des premiers contrôles antidopage du CIO. Il faudraensuite près de vingt ans pour voir naître la Charte olympique contre le dopage dans lesport, justifiée autant par des préoccupations d’éthique que par la santé des athlètes. Cequi ouvre une brèche à l’intervention publique. La coopération internationale est promuedans la mesure où la Charte reconnaît des responsabilités partagées dans la lutte contrele dopage, notamment concernant la prévention qui passe par l’éducation et la recherchescientifique. Par contre des missions différentes sont incombées aux organisations sportives(harmonisation des règlements des différentes fédérations, contrôles antidopage, etc.) etaux gouvernements (laboratoires d’analyse, contrôle du trafic de produits dopants). Lepassage des scandales aux affaires matérialisé par l’affaire Festina et correspondantà un perte de contrôle de l’instance sportive sur le sujet du fait de la judiciarisationet de la médiatisation croissantes (Duret, 2004) va conduire le CIO à organiser uneconférence mondiale sur le sujet, qui aura lieu du 2 au 4 février 1999 et réunira desreprésentants du mouvement sportif, des gouvernements, de l’UE, du Conseil de l’Europe

et de l’UNESCO. Un nouveau code antidopage sera promulgué le 1er janvier 2000, symboled’une collaboration renforcée entre les différents acteurs précités. La déclaration finale decette conférence préconisait également l’institution d’une agence internationale de luttecontre le dopage.

1.2.2. Le Conseil de l’Europe sur la ligne de départ de la collaboration En l’absence de compétence de l’UE, c’est l’autre instance de coopération régionale, leConseil de l’Europe, qui va intervenir à maintes reprises dans la lutte contre le dopage. En1963 déjà, un colloque organisé sous l’égide de la commission « Education physique, sport,plein-air » avait tenté de procurer une définition universelle du dopage (Lapouble, op.cit.).Seule une volonté de persuasion du mouvement sportif est invoquée par l’Assembléeparlementaire dans une résolution de 196758. Nous sommes encore bien loin d’une vraievelléité coopérative. L’aspect médical du sport de compétition et la dimension préventivede la lutte contre le dopage seront évoqués dans une résolution de 197059. Suivront deuxrecommandations du comité des ministres60, la première encourageant la coordinationinternationale, et la seconde instaurant la fameuse Charte européenne contre le dopagedans le sport. Un aboutissement significatif qui s’intéresse à la fois au mouvement sportif endemandant la mise en place de règlementations, et aux Etats membres, pour l’applicationdes législations en la matière. La collaboration est envisagée sous différents aspects :

- entre les Etats et les organisations sportives en vue d’harmoniser règlements etprocédures et en plaçant les textes du CIO comme référence ;

58 Résolution sur le doping des athlètes, n°(67)12, 29 juin 1967.59 Résolution concernant des recommandations relatives aux aspects médicaux des actions sportives, n°(70)7, 7 mars 1970.60 Recommandations n° R (79)8, 20 avril 1979 et n°R (84), 25 septembre 1984.

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- une collaboration internationale contre les trafics de produits dopants et la facilitationdes contrôles internationaux.

Ces contrôles feront l’objet d’une recommandation ultérieure en 1988, notamment surleur mise en place sans prévis et hors compétition61. La Convention du 16 novembre 1989contre le dopage est une convention internationale unique en son genre, héritée de ceprocessus.

1.2.3. Une lutte, plusieurs modèles d’interventionL’extrême diversité des structures nationales du sport a pendant toute cette période trouvéun écho dans la lutte contre le dopage. Même parmi les adhérents à la Conventiondu Conseil de Strasbourg, une étude à démontré les contrastes d’approche politique dudopage62. Dans certains pays, les pouvoirs publics constituent les intervenants principauxde la lutte, matérialisée par une loi spécifique, la mention du dopage dans une loi plusgénérale sur le sport. Les gouvernements français, belges ou polonais ont de la sorte pris lamain sur la lutte nationale contre le dopage. Dans d’autres Etats, comme l’Autriche, l’Irlandeou les Pays-Bas, l’intervention est mixte, partagée entre pouvoirs publics et organisationssportives. Enfin, les organisations sportives interviennent à titre principal en Allemagne, auRoyaume-Uni, en Suisse, etc. A noter que la création d’une agence nationale antidopageou le vote d’une loi antidopage répressive peut entraîner des changements soudains declassement. La solution à cet éparpillement a consisté dans un premier temps à la mise enplace d’accords régionaux intergouvernementaux63.

La collaboration dans la lutte antidopage qui a prévalu au travers des initiativesdésordonnées des différentes autorités avant de se formaliser dans une véritablecoopération.

1.3. … à une intervention coordonnée dans la lutte contre le dopage L’émergence au premier plan d’instances internationales va correspondre à la mise en placeprogressive d’une action antidopage marquée par la coordination.

1.3.1. L’aboutissement des initiatives européennes du Conseil de l’Europe La Convention du 16 novembre 1989 marquera les débuts de la coordination étatique. Outreune définition du dopage64, elle prévoit des mécanismes de coopération spécifiques selonl’idée qu’une plus grande collaboration permettra de meilleurs résultats dans la lutte contrele dopage. Au titre de ces mécanismes, on trouve :

- l’adoption d’une liste formalisée des produits interdits, celle du CIO, par les Etatssignataires ;

61 Recommandation n° R (88)12, 21 juin 1988.62 Législations nationales et réglementations sur le dopage, étude commandée par le Comité pour le développement des sports duConseil de l’Europe, Clearing House, 1999.63 Voir par exemple la Convention nordique contre le dopage, entre le Danemark, la Finlande, l’Islande, la Norvège et la Suèdede 1986 ou encore l’International Anti-Doping Agreement (IADA) entre l’Australie, le Canada, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, leRoyaume-Uni, la Suède et les Pays-Bas de 1990.64 « L’administration aux sportifs ou l’usage par ces derniers de classes pharmacologiques d’agents de dopage ou de méthodesde dopage. »

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- la création dans chaque pays d’un organe spécifique de lutte contre le dopage ;- la mise en place d’un groupe de suivi en charge de réaliser des études et de proposer

des adaptations des différents textes existants. Ce dernier a émis depuis sa création unesérie de recommandations notamment en termes d’harmonisation des sanctions entre payset entre disciplines sportives ;

- l’internationalisation de la coopération en intégrant des Etats non-européens, telsl’Australie et le Canada, adhérents à la Convention, ce qui en fait un instrument de luttecontre le dopage au niveau mondial.

1.3.2. L’UE entre dans la danse Nous avons déjà envisagé les contributions des différentes institutions dans la lutteantidopage65. Rappelons que la première résolution du Conseil à l’égard d’ « une actioncommunautaire de lutte contre le dopage, y compris l’abus de médicaments, dans lesactivités sportives » date de 199066. Si la Commission, le Parlement, le Conseil donc, et plusrécemment la CJCE ont abordé la problématique du dopage, il est intéressant de relever qued’autres instances à vocation consultative ont-elles aussi été à l’origine d’une coopérationélargie.

En septembre 1999, le Comité des Régions souligne la fonction sociale du sport et lefait que dans la lutte antidopage « la coordination et l’harmonisation sont nécessaires »67,ce qui reposerait essentiellement sur l’harmonisation des politiques de santé. Ce mêmecomité sera amené à se prononcer sur le plan d’appui communautaire, en marge de l’avisdu Comité économique et social68.

La Commission va être amenée à solliciter un comité consultatif indépendant, enl’occurrence le Groupe européen d’éthique (GEE) sur ces questions. Plusieurs difficultésont été relevées :

- la définition universelle du dopage qui fait défaut ;- l’exhaustivité et l’actualisation des listes de substances et méthodes interdites ;- le paradoxe entre recherche exacerbée de performance sportive et volonté de lutte

contre le dopage.L’originalité de l’analyse du GEE réside dans sa vision de l’éthique qui, en plus de la

loyauté dans le sport, inclut la santé des sportifs. A partir de là, l’instance consultative a émisdes recommandations précises portant sur l’organisation de conférences, le contrôle de lasanté des athlètes, une directive sur la santé des jeunes sportifs, le tout en collaborationavec le mouvement sportif. Au niveau interne, il s’agirait de créer un laboratoire européenservant de référence pour coordonner le réseau de laboratoires nationaux, ou encored’accroître la coopération policière et judiciaire.

65 Cf. : supra, partie 1 - chapitre 1 : 1.66 Résolution n°91/C 170/01, in JOCE n° C 329, 31 décembre 1990.

67 Avis du Comité des régions n° 37/99, 16 septembre 1999.68 Voir respectivement JOCE C 317, 6 novembre 2000, p.63-66 et JOCE C 204, 18 juillet 2000, p.45-50.

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A l’occasion des Etats Généraux de l’Europe, Emine Bokhurst, eurodéputénéerlandaise a ainsi avancé que la lutte antidopage était : « un bon exemple pointant versplus de coopération européenne »69.

1.3.3. L’AMA, tout un programme basé sur la coordination L’instauration de l’Agence mondiale antidopage, le 10 novembre 1999, a sans doute pousséun peu plus les gouvernements dans leurs tentatives de coordination, voire d’harmonisationpossible de leurs positions respectives. En effet, les impératifs d’indépendance et d’efficacitébasés sur un fonctionnement qui laisse une grande place aux Etats (la moitié desreprésentants étant issus des gouvernements, l’autre moitié revenant au mouvementsportif), leur offre une opportunité sans précédent de s’entendre dan la lutte contre ledopage. Une volonté matérialisée par la création d’un Comité consultatif internationalintergouvernemental au Sommet de Sydney (14-17 novembre 1999). Le 13 janvier 2000a marqué la première réunion de travail de l’AMA et l’établissement de ses missionsprioritaires dont l’accréditation des laboratoires, le partenariat en matière de recherche etsurtout l’harmonisation des différentes règles des Etats et organisations sportives, pointclé de la coordination internationale. Cette internationalisation de la problématique de lacoopération est bien reflétée par l’exemple du passeport sportif médical.

Juridiquement, l’AMA apparaît également comme un modèle abouti de coopération.Association de droit privé suisse dont le siège est au Canada (Montréal), elle regroupesdes organisations de type gouvernemental (UE, Conseil de l’Europe, gouvernements) et lesreprésentants du monde sportif.

La lutte antidopage révèle la nécessité de la coordination, un aspect que ne sauraienttrop ignorer les autres problématiques sportives (violence, racisme, professionnalisation).Les interventions publiques et privées à cet égard ont permis le passage d’actions isoléesde la part des Etats et des organisations sportives à une politique sportive antidopage mieuxunifiée et chapeautée par l’AMA et l’UE.

2. L’action communautaire, une injection de sang neuf pour la luttecontre le dopage

L’intervention de l’Union européenne a constitué à plus d’un titre un tournant dans la luttecontre le dopage. D’abord, parce qu’elle coïncide avec l’émergence de l’Agence mondialeantidopage comme acteur de tout premier plan (2.1.). Ensuite, parce que son effort demobilisation a permis de dépasser le cadre de la santé publique qui lui avait servi de point dedépart (2.2.). La lutte antidopage européenne se construit désormais dans son interactionavec une multitude de domaines.

2.1. L’Union européenne, leader institutionnel de l’Agence mondialeantidopage

2.1.1. L’intervention de l’UE dans la création de l’AMAL'UE est intervenue de manière forte à tous les stades de l’édification de l'Agence mondialeantidopage.

69 « A good example that there should be more European cooperation »

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En amont, le Conseil européen de Vienne peut être vu comme insufflateur. Dèsdécembre 1998, les Chefs d'Etat et de gouvernement des 15 ont su saisir l'occasion demanifester leur préoccupation face au phénomène du dopage et appeler à une mobilisationà leur niveau, celui de l'UE, mais aussi entre la Commission, les Etats membres et lesorganisations sportives internationales. Cette concertation devait conduire à une revue desmesures de lutte antidopage en passant par une coordination des politiques nationales.La Commission va alors rédiger un plan d'appui communautaire en deux volets : mesuresexistantes et propositions d'actions. Ce dernier point revient à élaborer une stratégie delutte contre le dopage en envisageant comme point d'appui la participation de l'Unionà la fondation de l'AMA, qui interviendra le 10 novembre 1999. Au moment de saconstitution, les Etats membres et la Commission européenne se sont prononcés pour descompétences étendues de l’Agence. Elle a ainsi été en charge de l’élaboration du Codemondial antidopage (2003) en remplacement du code médical olympique du CIO. Desprocédures disciplinaires communes ont été pensées dans le même temps. L’extension deses compétences, éloignée de la vision du CIO et promue par l’UE se reflète également dansla responsabilité de l’AMA d’accréditation des laboratoires de contrôle, d’harmonisation destests de dépistage et de contrôle hors compétitions.

Dans son fonctionnement, au titre de la première année, la Commission va verser2 millions d'euros de contribution répartis entre trois programmes distincts de l'Agence :le programme d'éducation par Internet, le passeport pour athlètes (permettent l'accès àl'information sur la lutte antidopage et à leur dossier personnel) et les activités de l'AMA dansson rôle d'observateur indépendant des événements sportifs. Ce dernier programme a étéparticulièrement important et s'est concrétisé par l'observation des JO de Sydney en termesde conformité des procédures antidopage usitées avec le Code antidopage du mouvementolympique (à partir de 2003, la base de travail deviendra le code mondial antidopage).Ce soutien financier n'a été d'abord que complémentaire, l'UE refusant de participer aufinancement du budget global en raison d'un incompatibilité des règles budgétaires. Lesubterfuge a donc consisté, en une contribution directe par les Etats membres ou via uncompte spécial dans le cadre du Conseil de l'Europe.

Dans son suivi, les ministres européens des sports évoquent de façon récurrente ledopage et l'AMA au cours de réunions informelles. En février 2003, ils ont ainsi concluà la nécessité de rendre le Code mondial antidopage de l'Agence contraignant pour lesinstances et les organisations sportives quel que soit le niveau considéré, en anticipant ainsisur son approbation même qui n'interviendra qu'en mars de la même année. Ils ont parailleurs renouvelé l'idée d'une coopération plus poussée UE/Conseil de l'Europe/Unesco. Enmars 2003, au cours de la Conférence mondiale sur le dopage, les Etats membres avaienttous indiqué leur intention de signer une déclaration intergouvernementale qui les engageaitexpressément à appliquer le Code antidopage au plus tard en 2006.

2.1.2. L’UE, premier contributeur financierSi le financement de l’Agence mondiale antidopage a dans un premier temps été prisen charge intégralement par le Comité international olympique, un système paritaire

mouvement sportif/gouvernements a été instauré dès la 1er janvier 2002 ce qui apporte unegarantie de plus grande indépendance vis-à-vis du CIO. Un Comité consultatif internationalde lutte contre le dopage dans le sport s’est réuni en mai 2001 afin de s’accorder sur lescontributions. Au titre des financements gouvernementaux, qui rappelons-le représentent50% du budget total, l’Europe en finance 47,5%, soit près de la moitié. Pour indication,en 2002, cela a représenté 21,2 millions d’euros. Les Etats membres de l’UE sont en

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charge de 72,5% de ces 47,5%, le reste incombant à des Etats non membres de l’Union(27,5%). Attention toutefois il n’y a pas de financement communautaire mais es Etatsmembres individuellement, car les statuts de l’Agence et son fonctionnement budgétairene le permettent pas : « concernant la participation de la Commission à l’AMA ainsi queson financement […] les règles budgétaires de la Communauté et celles de l’Agence sontincompatibles »70.

2.2. Une mobilisation des instruments en faveur de la lutte antidopage

2.2.1. L’instrument financier, nerf de la guerre contre le dopage La mise en œuvre du Plan d’appui communautaire à la lutte contre le dopage, présentépar la Commission en décembre 1999, a nécessité le déblocage d’un budget voté par leParlement pour l’année 2000, à hauteur de 5 millions d’euros pour deux ans. Les 32 projetspilotes entrepris étaient destinés plus particulièrement à :

- la mise en œuvre de campagnes contre le dopage dans le sport;- l’harmonisation des législations nationales;- l’harmonisation des modalités de contrôle sur tout le territoire européen;- la réalisation d’études sur les conséquences du dopage sur la santé.Ces projets ont été dirigés par des autorités publiques, des universités ou écoles, des

clubs ou associations. Un exemple de projet, l'étude comparative «Dopingbekämpfung inkommerziell geführten Fitnessstudios»71, s'est intéressée aux dopage dans les centres defitness à caractère commercial, sous l'égide du ministère de l'Intérieur de Basse-Saxe enAllemagne.

Cet effort répond dans une large mesure au rôle que l’UE compte jouer dans la lutteinternationale contre le dopage, perçue comme un enjeu des relations internationales,notamment face aux Etats-Unis. En 2002, la Commission européenne a embrayé sur lacoopération internationale en organisant un séminaire euro-méditerranéen regroupant lesreprésentants des pays et des organisations sportives internationales de la zone, puis enparticipant au Pérou à une rencontre réunissant les ministres des sports de onze paysd’Amérique latine.

2.2.2. Des initiatives dans le domaine de la recherche La recherche sur les substances dopantes, tant au niveau des méthodes de détection(face aux techniques de pointe utilisées par les dopés) que des répercussions du dopagesur la santé est un élément clé de la lutte antidopage. L’Union européenne a dans cetteperspective élaborée en 1998 et 1999 un projet d’étude commun avec le CIO, HARDOP,qui avait pour objet d’harmoniser les méthodes et les mesures de lutte contre le dopage

dans le sport72. Par la suite, le 5ème programme cadre de recherche et de développement

70 Communication de la commission au Conseil, COM (2000) 220 final, du 6 juin 200271 Cette étude qui inclut des données de plusieurs Etats membres est consultable dans sa version allemande sur le site :

http://europa.eu.int/comm/sport/action_sports/dopage/call2000/2000-c116-24_de.pdf72 Commission Européenne, Direction Générale XII (Science, Recherche et Développement), Harmonisation des méthodes et desmesures de lutte contre le dopage dans le sport (HARDOP), Rapport final projet SMT4-1998-6530, EUR 19076, 1999, 60p. URL:http://ec.europa.eu/research/smt/hardop-fr.pdf

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technologique à permis le développement de deux programmes thématiques ayant trait audopage. Il s’agissait des programmes intitulés ‘‘ Qualité de la vie’’ et ‘‘Croissance compétitiveet durable’’ permettant de soutenir les laboratoires de contrôles accrédités par le CIO,mais aussi de certifier les contrôles. En effet, auparavant, un certain nombre de contrôles

étaient invalidés pur vice de procédure. Toujours au titre de ce 5ème programme-cadre,la CAFDIS (action concertée en matière de lutte contre le dopage dans le sport) visantla création d’un réseau pour le rassemblement d’information, constitue un projet phare del’action cofinancée par la Commission et le CIO. D’autres projets ponctuels ont par ailleursété développés dans le cadre de cette coopération : un projet de formation des techniciensde ces mêmes laboratoires sur la détection du dopage sportif qui avait clairement pourobjectif de renforcer les contrôles lors des JO d’Athènes de 2004, et un projet-pilote dedéveloppement d’une méthode de détection grâce aux hormones de croissance. Dans lemême temps, le programme-cadre de recherche de la Commission 2002-2006 retenaitcomme thème le dopage sportif.

2.2.3. Les programmes antidopage éducatifs Après avoir envisagé le dopage comme sous-domaine de l’action européenne en matièrede santé, il est significatif de constater que cette problématique recoupe d’autres aspectsenvisagés comme vecteurs de la politique sportive dans son ensemble. La lutte antidopage,en partant de la compétence santé, s’inscrit aussi désormais dans d’autres domainescomme l’éducation, la formation professionnelle et la jeunesse. Avec respectivement lesprogrammes Socrates, Leonardo da Vinci et « Jeunesse » dans lesquels on retrouve desactions de formation, d’information et de prévention liés au dopage et donc financés parl’UE. On peut très bien imaginer des stages européens à l’AMA ou au CIO.

2.2.4. Les programmes de coopération policière, judiciaire et douanière, versun élargissement des horizons de la lutte a- La coopération de l’UE avec les Etats membres :

L’architecture en trois piliers introduite par le traité de Maastricht, permet, au titre du

3ème pilier, d’envisager une coopération européenne en matière policière, judiciaire etpénale pour combattre les trafics transfrontaliers de produits illégaux dopants à l’intérieurde l’espace européen.

« L’action en commun dans le domaine de la coopération judiciaire en matièrepénale vise entre autres à […] adopter progressivement des règles minimalesrelatives aux éléments constitutifs des infractions pénales et aux sanctionsapplicables dans les domaines de la criminalité organisée, du terrorisme et dutrafic de drogue.»73

Autre élément de cette coopération, la mise en place par la Commission d’un groupe desuivi qui comprend des représentants des Etats membres et des organisations sportives.Le but poursuivi est l’échange d’informations, l’évaluation des progrès de la lutte contre ledopage coordonnée, et l’amélioration en termes de sécurité juridique autour des sanctionsdes fédérations, souvent disparates.

b- La coopération de l’UE avec les autorités sportives :73 Traité sur l’Union européenne tel que modifié par le traité de Nice, Titre VI : dispositions relatives à la coopération

policière et judiciaire en matière pénale, article 31.

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Les ministres des sports se sont également réunis avec les représentants dumouvement olympique et des grandes fédérations en mars 2002 afin de dégager des pistesd’amélioration de leur coopération avant les échéances olympiques grecques (Athènes,2004) et italiennes (Turin, 2006). En l’absence de compétence européenne a priori dansle sport et la lutte antidopage, la coopération semble donc un moyen d’accès pertinent surlequel l’UE est appelée à s’appuyer.

Conclusion du chapitre La lutte antidopage a su emprunter la plupart des chemins d’accès offerts par l’Unioneuropéenne au sport. L’exemple d’une telle politique, à la fois ‘‘touche-à-tout’’ et multiformepermet d’entrevoir ce que sera le futur de la politique sportive européenne, et l’absence dereconnaissance juridique spécifique n’apparaît dès lors plus comme une fatalité. Elle permetd’envisager la pérennité d’une collaboration sur un pied d’égalité avec les organisationssportives. L’UE agit alors comme un mécanisme de sauvegarde précieux des compétencesde chacun grâce à son poids dans l’AMA et aux projets connexes dont elle est à l’origine.L’intervention publique à l’échelle européenne en matière de dopage a considérablementchangé la donne et établi un nouvel équilibre entre Etats et monde sportif. La question quise pose est désormais celle de la soutenabilité de cette configuration.

Chapitre 3: La politique sportive européenne, quelbilan?

L'action de l'Union européenne dans le sport est encore largement vue par les organisationssportives comme une intrusion. Il ne saurait en être autrement de la lutte antidopage. A labase de cette perception, on retrouve largement les implications qu'à eu la jurisprudence,contrebalancée par la spécificité sportive européenne qui a justifié une intervention plusmesurée de l’Europe dans le sport. Trente-quatre ans se sont écoulés depuis l’affaireWalrave, treize depuis Bosman, le temps est peut-être venu d’analyser avec un peu de reculles conséquences d’une interaction sport/UE unique en son genre. Au fil des évolutionssuccessives, l’UE s’est imposée comme une réalité bien palpable pour le mouvement sportif(1.). Dans le même ‘‘chrono’’, le sport a offert aux instituions européennes un challengepolitique de taille (2.).

1 . Bilan sportif de la politique européenne Les aspects négatifs et positifs de l’intervention de l’UE dans le sport s’entremêlent dansla vision qu’en ont les organisations sportives (1.1.). La lutte antidopage a permis auxinstitutions européennes de redorer leur blason sportif aux moyens d’actions consensuelles(1.2.).

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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1.1. Revue des apports et critiques de l’intervention européenne dans lesport

1.1.1. Une entrée en matière délicateLe fait que le sport soit resté si longtemps en dehors de la compétence communautaire aune explication partagée. Si les Etats ont conservé parfois jalousement cette prérogative,les organisations sportives ne sont pas en reste. L’UE est dès lors restée en retrait deces ‘‘domaines protégés’’ en respectant par là-même «l’autonomie de la vie associative engénéral et dans le domaine du sport en particulier »74.

L’organisation du sport sur un plan national et international a constitué un obstaclesupplémentaire. Dans les Etats membres, les structures sont souvent complexes et varientgrandement d’un Etat à l’autre. A l’international, le mouvement sportif est dominé par leComité international olympique et les grandes fédérations. Il est peu organisé selon desschémas européens, à l’exception de quelques sports ayant un ancrage spécifique auniveau du vieux continent. C’est le cas du football, étant donné le retentissement de la Liguedes Champions organisée par l’UEFA, et du rugby avec le Tournoi des Six Nations. Or, dansces deux cas, l’organisation sportive ne recoupe pas les frontières de l’Union européenne.Ce manque d’adéquation exclu d’emblée d’envisager l’UE comme cadre exhaustif d’analysedes politiques sportives européennes. Quand l’UE a tenté de s’improviser organisationsportive, ses initiatives ont eu peu d’écho : qui a entendu parler du Festival Olympique dela jeunesse européenne ?

1.1.2. Un contrepoids à l’autonomie du mouvement sportif ?L’intervention de l’UE dans le sport a soulevé de nombreuses questions. Cela est d’autantplus vrai dans les cas d’opposition frontale avec les grandes organisations, pour lesquellesl’arrêt Bosman a sonné le glas de leur autonomie. Un constat à nuancer.

A partir de la saison 1996-1997, l’UEFA a aboli ses quotas pour les ressortissantscommunautaires, ce qui a eu pour conséquence une explosion littérale du marché destransferts et une internationalisation des grands championnats européens. En supprimantles indemnités de transfert en fin de contrat, l’affaire Bosman a par ailleurs pu mettredans une situation difficile certains clubs ayant peu de spectateurs et dont ces indemnitésreprésentaient la principale source de revenu. La situation financière difficile qui toucheparticulièrement les clubs européens a été chiffrée à hauteur de 7 milliards d’euros de déficiten 200475.

On a observé à la suite de l’arrêt Bosman une augmentation significative du nombrede plaintes à la DG concurrence de la Commission européenne (Honorat, 2007), etconsécutivement s’est posée la question de la nature particulière du sport. C’est à ce titrepar réaction aux dérives supposées, introduites par la jurisprudence communautaire, qu’estapparu le concept d’‘‘exception sportive’’ qui revient à nier que les traités s’appliquent ausport. Les autorités communautaires vont-elles parler de ‘’spécificités’’ du sport qui consisteà ne pas l’assimiler à une activité économique ordinaire. Cette nuance permettra in finede conserver le lien entre sport et union européenne, dans la mesure où l’économie estaux fondements de l’intégration européenne. Le jugement de 1995 a donc été un vecteurd’intégration européenne. Il a permis de dessiner les contours du modèle sportif européen

74 Communication de la Commission européenne, « La Communauté européenne et le sport », SEC, (91) 1438, 31 juillet 199175 Kicker Sportmagazin, Nr. 6/3.Woche, 12 janvier 2004

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Partie 2. Le ''modèle sportif européen'' à l'épreuve du dopage

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sans contredire la jurisprudence et en définissant plus clairement ce qui, dans le sport,relève du droit communautaire. Une clarification cruciale pour les organisations sportivesappelées à édicter leurs règlements.

L’Union européenne peut être vue littéralement comme une bouée de sauvetagede la cohésion des mouvements sportifs. Les fédérations conservent un rôle essentielde redistribution dans le processus de financiarisation du sport et la Déclaration sur lesspécificités du sport issue du Conseil européen de Nice leur reconnaît un rôle éducatifet social à travers l’organisation des compétitions (Buffet, 2001). L’économie du sport etses aspects éducatifs et sociaux s’entremêlent donc largement. Ils se combinent dansl’acception du sport qui est faite par l’Europe et promue par le mouvement sportif. Sil’application du droit communautaire est reconnue par les fédérations qui y ont adaptéleurs règlements, elle a cependant eu des répercussions d’ampleur sur le monde sportifeuropéen. Les actes normatifs émanant de l’UE sont allés au-delà de la question de la librecirculation, et ont dans certains cas remis en question le fonctionnement, les structures etle financement du sport. C’est le cas par exemple de l’harmonisation des loteries et jeux dehasard sportifs, qui menace le financement de pans entiers du sport européen. Ou encoredes fédérations qui, en tant qu’organisateurs exclusifs des compétitions se retrouvent seulsoffreurs sur le marché de la retransmission audiovisuelle, et si on s’en tient à une applicationstricte du droit communautaire de la concurrence, pourraient être accusées d’abus deposition dominante (Gunther, Roskis, 2001).

Le mouvement sportif tient encore à l’idée que « le sport forme un tout et qu’uneapplication stricte du droit communautaire remett[r]ait en cause son organisation, sesstructures et certains de ses fondements (le volontariat, le caractère d’utilité publique, sastructure pyramidale, du club vers la fédération, etc.). » (De Kepper, 2001), alors que l’UEa depuis longtemps dépecé le sport entre dimension économique d’une part et spécificitésde l’autre.

1.1.3. Bruxelles est devenu un lieu pertinent de lobbying sportif Les grandes organisations sportives se de plus en plus présentes sur la place de Bruxelles, àl’image de l’UEFA qui possède des bureaux à Bruxelles (son siège étant en Suisse), et dontle président, Michel Platini, est souvent amené à commenter les décisions européennes76

concernant son sport. De même, le bureau de liaison des Comités olympiques européens àBruxelles semble s’inscrire dans un schéma traditionnel de représentation des intérêts surla place de Bruxelles. Cette présence lui permettrait de mieux comprendre les mécanismesparticuliers des politiques européennes et ses acteurs, de tenir les COE informés desinitiatives les concernant en temps réel, d’obtenir une aide financière ponctuelle, de seplacer par rapport à d’autres intervenants (bureaux bruxellois de l’UEFA), voire mêmed’influer sur les décisions prises et de promouvoir le sport dans les politiques européennes.L’UE offre de nouvelles possibilités de développement et de financement au sport grâce àses programmes variés, une vraie opportunité pour le monde sportif qui s’est dépêché surplace pour mieux la saisir.

1.2. Bilan sportif de la lutte antidopage

76 Voir à ce propos le compte-rendu de la rencontre de Brest dans le cadre de la présidence française de l’UE avec Jean-PierreJouyet, Secrétaire d’Etat aux affaires européennes, communiqué aux médias de l’UEFA n°103, 14 juillet 2008 http://www.uefa.com/multimediafiles/download/pressrelease/uefa/uefamedia/73/21/98/732198_download.pdf

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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Exemple particulier d’intervention européenne dans le sport, la lutte antidopage a sutirer profit de sa situation charnière entre plusieurs problématiques, certaines relevant del’organisation sportive, d’autres d’instances publiques parmi lesquelles l’Union européenne.

1.2.1. Une collaboration difficileSelon Colin Miège, la lutte antidopage constitue globalement un atout pour le monde dusport, qui ne peut continuer de voir les affaires de dopage nuire à la fois à l’image du sportde haut niveau et à la santé des athlètes de tous âges.

Le mouvement sportif a soutenu les avancées de l’UE dans la lutte contre le dopagevia ses objectifs de santé publique. Il est clair que les organisations sportives n’ayant pasde compétence en matière de santé se sont retrouvées dépourvues dans leur confrontationavec celle-ci. Dans ce contexte, toute intervention publique était souhaitable, mais le niveausupranational a prévalu étant donné l’ampleur du phénomène. Le timing (1998) ayant faitpencher la balance du côté de l’UE aux dépens d’une AMA qui n’en était encore qu’à sesbalbutiements.

Par contre, sur les questions d’éthiques sportive opposant la loyauté à la tricherie, lesorganisations sportives ont fait preuve d’une certaine frilosité. La dimension économiquedes activités sportives étant devenue un concept assez étendu avec l’affaire Meca-Medina,le mouvement sportif a de plus en plus de craintes quant à l’intrusion de l’UE dans ce quirelevait auparavant de ses spécificités. C’est peut être pour cela que la demande de sécuritéjuridique émanant des organisations sportives se fait pressante, pour sceller dans les textesl’état actuel et par crainte d’un empiètement plus important sur ses prérogatives dans le futur.Reste que les règles antidopage des fédérations ont une finalité exclusivement sportivereconnue par la jurisprudence susnommée, ce qui a quelque chose de réconfortant pourle monde sportif.

1.2.2. Une certaine osmose dans la perception du problème et de ses enjeux L’équité des compétitions sportives est un objectif autant sinon plus important que la santépublique dans la vision du monde sportif. Elle fonde la relation UE-autorités sportives quin’a pas lieu d’être si seule la santé est considérée puisque les fédérations et le CIO n’ontpas de compétence en la matière. En insistant trop sur les problèmes de santé liés audopage, la question de la tricherie a été souvent reléguée au second plan. Pour ColinMiège le monde du sport ne peut continuer à voir les affaires de dopage « ravager l’imagedu sport ». Pour Michel Audran77, le premier argument de la lutte antidopage est de nepas fausser la compétition, la protection de la santé venant en deuxième. Le rejet dudopage comme artifice a comme fondement l’égalité « naturelle » (Ehrenberg, 1991) lors descompétitions, une égalité basée sur l’idée de corps biologique sans aide médicamenteuse.Ce « monde d’artifices » vers lequel tendrait le sport-spectacle est analysé par AntoineVayer, ancien entraîneur de Festina et directeur d’AlternatiV, une cellule de recherche surla performance78 :

« Mais au fond, on meurt d’envie de choisir le mal. Pour notre moral de juillet [lesperformances du Tour de France] et contre la morale du sport. Comment résisterau bon sens populaire ? 1) C’est un problème de société, tout le monde en prend,

77 Ces deux entretiens ont été réalisés par voie électronique. Colin Miège répondait à la question des apports pour le monde du sportde l’intervention européenne. Michel Audran à celle de savoir si l’objectif de la lutte antidopage était purement sportif.78 Libération, samedi 1er juillet 2006, Antoine Vayer p.19 : Roue Libre « On meurt d’envie de choisir le mal »

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Partie 2. Le ''modèle sportif européen'' à l'épreuve du dopage

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pourquoi seuls les cyclistes n’auraient pas le droit ? [ certains sports comme letennis sont en effet accusé de laxisme dans les contrôles] 2) « Tous dopés, maisà dopage égal c’est bien le meilleur champion qui gagne. » 3) « Impossible defaire tant d’efforts sans se doper, c’est même mauvais pour la santé. » 4) « Sansperformances records il n’y a pas de spectacle. »

Cette vision du sport comme spectacle voire même comme produit commercial est relayéedans l’analyse économique du dopage :

« La lutte contre le dopage à travers les contrôles n’a pas pour objet, totalementillusoire, d’éradiquer cette pratique. Elle a pour but de crédibiliser la compétition,et, pour ce faire, de veiller à une stricte égalité des concurrents garante del’incertitude du spectacle et de sa commercialisation » (Bourg, 2000).

La lutte contre le dopage serait ainsi directement liée à des intérêts économiques. Unenuance mérite d’être apportée pour le Tour de France où cela se traduirait essentiellementen une lutte contre la chute d’audience, puisque le cyclisme reste un sport largement gratuitpour le grand public (pas de ticket d’entrée, diffusion sur France Télévisions) et donc peucommercialisable.

2. Bilan politique de la l’intervention européenne dans le sport :L'UE, n’est plus un outsider de la politique sportive. Alors que ces premières interventionsrelevaient pour l’essentiel de la déclaration politique, une action plus concrète a pu êtredéveloppée sur fond de coopération, mais également en vase clos grâce à une approcheoriginale de la question du dopage (2.1.). Néanmoins, la prégnance des Etats et du niveauinternational contraignent l’UE à une échappée solitaire (2.2.).

2.1. Une action volontariste

2.1.1. Le rôle moteur de l’UE auprès de l’AMA donne une certaine légitimité àune politique sportive européenne La création de l'AMA est largement considérée comme un succès de la part desspécialistes79. Son existence même est plutôt une réussite car il était devenu nécessairequ’une coordination puisse être établie de manière forte au niveau international.Si on se réfère à la situation qui prévalait avant sa création, les « initiativesdésordonnées » (Lapouble, 2001) n’ont pas pu établir de définition acceptée par tous,et encore moins s’accorder sur la formalisation de la liste des substances interdites. Lesaccords intergouvernementaux régionaux (Convention nordique, IADA, Convention desEtats Baltes contre le dopage), étape intermédiaire dans la collaboration, ont eu le méritede recentrer le problème sur les questions du contrôle et d’harmonisation des procédures.Ils ont aussi permis libérer les Etats du carcan de leur ligne politique en mêlant paysinterventionnistes avec pays à présence forte des organisations sportives.

Structure, organisation et fonctionnement de l’AMA participent également de saréussite, en particulier le fait qu’elle ne soit pas entièrement dans les mains du CIO et desfédérations internationales, ce qui n’allait pas de soi au départ. L’UE a obtenu un troisièmeposte de représentant au sein du Conseil de Fondation de l’AMA.

79 Entretien avec Colin Miège.

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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Le suivi fait par l’Union européenne dans la lutte contre le dopage est un autre argumentallant dans le sens de la dynamique positive enclenchée par Bruxelles. La question de laprévention et de la lutte contre le dopage est inscrite de façon régulière à l’agenda desréunions informelles biannuelles des ministres européens chargés des sports, en particulierdepuis l’année 1999. Si un bémol peut être mis du fait de l’absence de droit positif enmatière de sport, l’informalité permet par contre un échange plus libre de points de vue dansl’élaboration des actions communes, non sous-tendu par le décompte des voix qui dominehabituellement le Conseil.

2.1.2. L’UE, à la pointe des évolutions de la prise en compte du dopage En envisageant le dopage comme un problème de santé publique, sa prise en comptes’oriente sur les phases de préparation et de suivi médical des sportifs (Buffet, 2001). Parconséquent, les actions de luttes contre le dopage telle que conçue par l’UE trouveraientleur raison d’être en marge des événements sportifs (contrôle hors compétition, mais surtoutprévention). A l’inverse, une action ciblée sur l’éthique sportive qui a longtemps prévaludans le monde du sport se concentrerait sur le moment de la compétition. Au niveauétatique, la volonté des pouvoirs publics s’était déjà orientée vers les aspects sanitaires etde prévention. En témoigne la création des antennes médicales ou encore l’omniprésencedu Ministère de la santé dans le débat actuel. Une préoccupation largement relayée auniveau européen avec les demandes de laboratoire européen de référence pour gérer leréseau de laboratoires de l’espace des 27.

2.1.3. Enjeux : Les fondements d'une action européenne en matière de luttecontre le dopageUne pléiade d'éléments semble conforter les initiatives européennes. A l'échelle de ces dixdernières années, ils permettent d'appréhender les changements de perception intervenusdans la lignée de l'action de l'Union dans la lutte contre le dopage. L'Europe a su réorienterle débat et se présenter comme un acteur incontournable de politique sportive.

Le rôle de l'Europe dans la lutte antidopage a en premier lieu eu des répercussionssur le mode de fonctionnement et les structures de l’Agence mondiale antidopage.Cet argument est facilement justifiable aux vues de la contribution financière des Etatseuropéens au budget global de l'Agence (47,5%), doublé des contributions par programmesfinancées par l'UE ou le Conseil de l'Europe. En prolongement, on peut noter qu'une grandepart des contrôles est effectuée sur le territoire européen ou encore que la plupart deslaboratoires se situent également sur le vieux continent. En termes organisationnels, troisreprésentants des Etats membres (les représentants des sports au niveau ministériel de laRépublique tchèque, la Slovénie et la France à l'heure actuelle) font partie du Conseil defondation de l'AMA, ainsi que deux représentants du Conseil de l'Europe.

En second lieu, les législations nationales semblent impropres à lutter efficacementcontre ces pratiques, ce qui a conduit les institutions européennes et les ministres des sportsa adopter un certain nombre de résolutions prônant un renforcement de la coopération auxéchelles européenne et internationale. Si la dimension internationale de la lutte antidopagesemble la plus pertinente et si « la lutte contre le dopage ne peut être efficace que si elles’enracine dans un débat international » (Buffet, 2001), cela ne saurait les Etats et l’Unioneuropéenne à un rôle de simples financeurs. L’UE peut constituer à cet égard un véritabletremplin ; elle procure un cadre d'expérimentation pour une harmonisation des législationsnationales, avec deux perspectives:

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Partie 2. Le ''modèle sportif européen'' à l'épreuve du dopage

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- une vraie coordination entre les 27 Etats membres ;- une harmonisation plus étendue géographiquement et in fine à l'échelle mondiale,

surtout concernant les contrôles et les sanctions disciplinaires.Cette évolution a été jalonnée par la multitude des scandales internationaux dont

les plus médiatisés ont sans doute concerné le cyclisme (largement le plus cité commesport touché par le dopage dans les réponses au questionnaire). L'affaire Festina est unbon exemple du phénomène d'internationalisation, la voiture d'assistance transportant lesproduits dopants ayant été interceptée à la frontière franco-belge.

2.2. Le spectre persistant de la lanterne rouge

2.2.1. Le risque de relégation comme acteur politique de deuxième division La lutte antidopage, comme le sport en général n’entrant pas dans les compétencesdirectes de l’Union européenne, elle reste donc pour l’essentiel de la compétence desEtats membres. C’est l’application du principe de subsidiarité tel qu’introduit par le traité deMaastricht (TUE). Si l’UE peut tenter de coordonner les politiques des Etats membres, ilne s’agit en aucun d’harmoniser les législations nationales, ni même d’établir une directivecommunautaire dans ce domaine. Les Etats gardent la mainmise sur la politique sportive,l’UE n’intervenant qu’en second lieu. De fait, il n’existe pas d’autorité ou d’organe de luttecontre le dopage au niveau européen. L’UE fait donc face à la possibilité de se retrouver,derrière les 27 Etats membres, en queue de peloton dans la lutte contre le dopage.

2.2.2. Le débat sur l'existence d'une conception européenne du dopage L’échec de la candidature européenne de Jean-François Lamour à la présidence de l’AMApour succéder à Richard Pound, qu’il convient ici de développer plus en détail, a pu être vucomme un revers à l’affirmation d’une conception européenne à la lutte contre le dopage.Cette péripétie reflète surtout les luttes d’influence autour de l’AMA. Déjà à l’origine, l’Unioneuropéenne avait cru pouvoir prendre la tête de la lutte contre le dopage au niveau mondial.L’échec de la bataille du siège de l’AMA, implanté finalement sur le continent américain etnon sur celui de l’Union européenne, faute d’une candidature européenne unique montraitque l’UE était encore incapable de parler d’une seule voie sur ces questions et doncd’affirmer une conception européenne en matière de lutte contre le dopage. Le retraitultérieur de la candidature de M. Lamour, ancien champion olympique et ministre des Sportstendrait à confirmer cette hypothèse. Pourtant, la France a une position traditionnellementtrès interventionniste en matière de dopage, comme dans le domaine du sport en général,et on ne peut exclure que ceci ait pu desservir la candidature Lamour, notamment auprèsd’instances ou de pays enclins à moins de dirigisme.

Les luttes d’influence au sein de l’AMA posent la question de la défense de la visioneuropéenne du problème du dopage. Alors que le Conseil de fondation de l’AMA est basésur une représentation paritaire des gouvernements et du mouvement sportif, le Comitéexécutif compte une majorité de membres issus du CIO. L’UE a à plusieurs reprisesmanifesté son souhait d’avoir un représentant supplémentaire dans cet organe aux vuesde sa participation financière (seul le ministre des sports danois représente une autoritépublique européenne au sein du Comité exécutif).

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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Conclusion du chapitre et de la partie La vision portée par le monde sportif sur l’intervention européenne dans le sport restemarquée par une certaine méfiance. Le dopage constitue dans ce contexte une bonneillustration de ce que pourrait être l’ ‘‘entente cordiale’’ entre le mouvement sportif et lesautorités publiques qui se partagent les deux volets de la lutte, respectivement les aspectséthiques et sanitaires.

La lutte anti-dopage permet une prise en compte du sport par les institutionseuropéennes au-delà de sa dimension économique et donc du droit de la concurrence.Si elle sonne avant tout comme une préoccupation de santé publique, les programmeseuropéens ayant trait à la problématique du dopage s’inscrivent dans des compétenceseuropéennes de plus en plus variées.

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Partie 3. Perspectives de l’action communautaire dans le sport

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Partie 3. Perspectives de l’actioncommunautaire dans le sport

Chapitre 1 : Les limites intrinsèques de la lutte anti-dopage européenne : un sprint final assez décevant…

La reconnaissance du sport par les textes européens peut-être envisagé sous deuxmodalités : celui des spécificités du sport, tel que prôné par les organisations sportiveset qui limiterait de jure l’intervention européenne, et celui d’une compétence européenneenfin reconnue. Jusqu’à présent, les déclarations et résolutions à cet égard n’ont eu qu’uneportée politique. Seule la reconnaissance par un texte de nature conventionnelle, autrementdit un traité, permettrait d’ancrer l’action européenne en matière de sport dans le droit, cequi a été fortement retardé sinon compromis par les échecs successifs de la ‘‘Constitutioneuropéenne’’ et du traité de Lisbonne et nuit à la mise en œuvre d’actions concrètes (1.).Dans le même temps, la jurisprudence récente apparaît ambiguë quant à ses conséquences(2.).

1. …des textes qui appuient le sport uniquement sur la son rôlesociétal et la santé publique

Dans le traité de Lisbonne, le sport est, avec la politique de l’espace, le seuldomaine nouveau de compétence européenne, mais il ne s’agit que d’une compétencecomplémentaire ou d’appui (1.1.). En 2007, le travail de la Commission a abouti au LivreBlanc sur le Sport : cet instrument politique et global met en avant d’une part les évolutionséconomiques et sociales dans le domaine du sport (notamment, la place toujours plusimportante de l’argent) et d’autre part les discriminations dans le sport professionnel (1.2.).

1.1. Le Traité de Lisbonne procure une compétence limitée à l’UE

1.1.1. Un rôle renforcé de l’UE dans le sport…Le Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TECE) évoquait expressément pourla première fois le rôle éducatif et social du sport. La « Constitution européenne» prévoyaitainsi dans son article III-282 que :

« L'Union contribue à la promotion des enjeux européens du sport, tout en tenantcompte de ses spécificités, de ses structures fondées sur le volontariat ainsi quede sa fonction sociale et éducative. L'action de l'Union vise […] à développerla dimension européenne du sport, en promouvant l'équité et l'ouverture dansles compétitions sportives et la coopération entre les organismes responsables

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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du sport, ainsi qu'en protégeant l'intégrité physique et morale des sportifs,notamment des jeunes sportifs. »80

Était également encouragée la coopération d’une part avec les organisations internationaleset notamment le Conseil de l’Europe, et d’autre part avec les pays tiers. Cette compétencejuridique en matière de sport est reproduite dans l’article 149 du Traité sur le fonctionnementde l’Union européenne tel que modifié par le Traité de Lisbonne (TL)81. Elle procure doncune base juridique spécifique qui n’existait pas jusqu’à présent.

1.1.2. … qui reste en retrait des États membres Le Traité de Lisbonne, tout comme le projet de Traité établissant une Constitution pourl’Europe avant lui, ne confère à l’UE qu’une compétence complémentaire ou d’appui : lesEtats membres demeurent entièrement compétents, l’UE peut mener des actions d’appuiaux politiques nationales ou de coordination afin de refléter la dimension européennede ces problématiques et en excluant toute harmonisation. Le sport ne devient donc enaucune sorte une grande politique européenne qui impliquent une compétence exclusive(par exemple l’union douanière, la politique commerciale commune, la concurrence) ouplus souvent partagée (par exemple l’environnement, les transports, la protection desconsommateurs), mais demeure un « sous-domaine » (avec l’éducation, la formationprofessionnelle et la jeunesse) de compétence pour lequel l’UE ne joue qu’on rôlesecondaire. Cela reflète juridiquement l’absence parfois criante de consensus entre lesEtats membres. Le Traité de Lisbonne vise à un renforcement de la coordination et à ladéfinition d’actions communes, mais n’envisage donc pas l’harmonisation des législationsnationales existantes. Sur certains points précis d’ailleurs, certains États n’ont pas légiféréindividuellement ce qui est un pré-requis pourtant indispensable à une position européenne.In fine, les États, avec ou sans le TL, continuent de jouer un rôle prédominant.

« 3. l’Union et les Etats membres favorisent la coopération avec les pays tierset les organisations internationales compétentes en matière d’éducation etde sport, et en particulier avec le Conseil de l’Europe. 4. Pour contribuer àla réalisation des objectifs visés au présent article, le Parlement européenet le Conseil, statuant: - statuant conformément à la procédure législativeordinaire et après consultation du Comité économique et social et du Comitédes régions, adoptent des actions d’encouragement, à l’exclusion de touteharmonisation des dispositions législatives et réglementaires des Etatsmembres, - le Conseil adopte, sur proposition sur proposition de la Commission,des recommandations. »82

L’adoption du traité de Lisbonne, en attribuant de nouvelles compétences à l’UE par rapportaux traités actuels, était censée ouvrir la voie à une politique sportive « plus ambitieuse etmieux coordonnée »83. Ces deux aspects sont largement reflétés dans la lutte antidopage

80 Article III-282, Chapitre V : Domaines où l'union peut décider de mener une action de coordination, de complément

ou d'appui, Section 5 : Éducation, Jeunesse, Sport et Formation professionnelle du TECE, in JOUE 2004/C 310/01, 16

décembre 200481 Article 149, Titre 11 : Education, Formation professionnelle, Jeunesse et Sports, du Traité sur le fonctionnement de l’Unioneuropéenne (ancien Traité instituant la Communauté européenne), in JOUE C 115/49, 9 mai 200882 Ibid.83 Entretien avec Colin Miège.

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Partie 3. Perspectives de l’action communautaire dans le sport

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qui a permis de révéler la nécessité d’une action supranationale coordonnée et a contrariol’insuffisance de la pratique qui consistait à juxtaposer des mesures nationales. Or, l’UEpeut permettre une telle coordination supranationale à condition qu’elle s’appuie sur sacompétence forte dans d’autres domaines, en l’occurrence la santé publique.

1.1.3. Le mouvement sportif largement favorable au nouvel équilibre maisla poutre est glissante Au niveau international, le CIO via son Président Jacques Rogge, voit avec le traité deLisbonne une véritable avancée dans le sens de l’édification d’ne base juridique au sportdans l’UE. La référence qui y est faite concernant la spécificité du sport devrait permettreun renforcement du rôle du sport sur le vieux continent, doublé de son éloignement d’uneconception purement économique. Le TL met en valeur la dimension volontaire du sport, le« terrain sportif » promeut les aspects éducatifs et sociaux de l’activité physique sur lesquelsles organisations sportives s’appuient largement. Un communiqué de presse en ce sens aété publié, analysant le sport ni plus ni moins comme le plus important mouvement social ausein de l’UE. Avancée historique aussi aux dires de la FIFA qui, rappelons-le a longtempsmilité au nom de l’exception sportive avant de se rabattre sur la notion de particularitésdu sport et aurait souhaité modifier cet article du traité. Même constat au G-14, l’instancedes grands clubs de football professionnel européens, l’Union des ligues européennes debasket-ball (ULEB) et le Groupe Club Handball qui soulignent là aussi la sécurité juridiqueintroduite en plaçant les divers acteurs sportifs (fédérations, clubs, athlètes, etc.) face-à-face avec le droit européen, et en créant un équilibre entre tous ces intérêts.

Au niveau européen, l’European non-governmental sports organisation (ENGSO),regroupant les organisations nationales olympiques des pays européens et lesconfédérations nationales reconnaît la nécessité d’un soutien, d’une coordination voire d’uncomplément aux politiques sportives des Etats membres. Le TL est indissociable du LivreBlanc pour une aide notamment financière au sport.

Au niveau national, il est peu clair de savoir si les organisations sportives veulent plusd’Europe pour contrecarrer l’apanage des Etats ayant parfois tendance à empiéter sur leurautonomie et leur organisation, ou comme l’affirme la Fédération allemande des sports(DSB), souhaitent la reconnaissance des rôles éducatif, social, culturel, de santé publiqueet d’intégration joués par le sport. Le traité ouvre ainsi la voie à la réalisation des actionsinscrites dans le Livre Blanc, sans que la compétence totale des Etats membres soit remiseen question.

1.2. Le Livre Blanc sur le Sport : apports et limites

1.2.1. Les prémices du Livre Blanc : des initiatives en ordre dispersé La Commission a eu fort à faire à la suite de l’arrêt Bosman suite à de nombreusesplaintes qui lui ont été déposées. S’en est dégagé une régulation du « marché sportif »qui n’a de cesse d’évoluer et où s’entrecroisent jurisprudence et déclarations des autoritéssportives. Les principales questions adressées et tranchées par Bruxelles ont porté sur lestransferts de joueurs et l’indemnisation des clubs formateurs, les subventions des centresde formation, etc. Ces demandes émanant surtout du mouvement sportif ont semble-t-ilpoussé la Commission à s’investir davantage et en particulier en gravant dans le marbre uncertain nombre de principes. Voire d’aller plus loin et d’y ajouter des propositions d’actionsconcrètes, d’où le Livre Blanc.

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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La première pierre à l’édifice de la nouvelle sécurité juridique du sport, qui anticipede la publication du Livre Blanc fut un rapport du Parlement intitulé « l’avenir du footballprofessionnel en Europe »84. Deux remarques sur ce texte. Premièrement, un rapportsectoriel ne permet pas de généraliser : les problématiques du football professionnel sonttrès spécifiques. En témoigne la demande d’une certification européenne pour les agentsde joueurs ou encore le contrôle des paris sportifs, qui n’existe pas dans beaucoup d’autressports et surtout pas dans le sport amateur. Deuxièmement pourtant, et pour prendre lecontre-pied de la première remarque, ce genre d’idées tendent à la mise en place de règlesjuridiques plus claires et font intervenir potentiellement plusieurs acteurs institutionnels(Conseil de l’Europe, UE) en les poussant à s’impliquer davantage sur les questionssportives.

1.2.2. Le Livre Blanc ou le nouvel élan des politiques sportives européennes L’affirmation nuancée de la soumission du sport au droit de l’Union européenne a trouvé unautre écho dans le Livre Blanc sur le Sport, publié par la Commission européenne le 11 juillet200785, et véritable pierre angulaire de l’intervention de l’UE dans le sport. Il s’agit d’uneorientation stratégique relativement affinée quant aux principaux enjeux du sport, et relayéepar une série de mesures pour lesquelles l’institution du Berlaymont pourrait intervenir. Afortiori, c’est le plan d’action « Pierre de Coubertin » qui détaille ces programmes d’actions.

Ce que le l’Union européenne peut apporter dans la lutte antidopage est ainsi beaucoupplus détaillé que dans tout autre texte européen touchant au sport. « S’unir pour lutter contrele dopage » est l’objet des propositions 4 et 5 du texte de la Commission.

« 4. Les services des Etats membres chargés de faire respecter la législation(gardes-frontières, police nationale et locale, douanes, etc.), les laboratoiresaccrédités par l’Agence mondiale antidopage (AMA) et INTERPOL pourraientdévelopper des partenariats dont la finalité serait l’échange d’informations sur lesnouvelles substances dopantes et les pratiques de dopage en temps utile et demanière sûre. L’UE pourrait soutenir ces efforts en organisant des formations eten suscitant des collaborations entre les centres de formation pour les membresdes servies chargés de faire respecter la législation. » « 5. La Commission joueraun rôle de médiateur, par exemple en facilitant la mise en place d’un réseaurassemblant les organisations nationales de lute contre le dopage des Etatsmembres. »

En termes de déclaration politique, la Commission se prononce donc clairement pour unemeilleure coordination qui peut être déclinée ainsi :

- positions communes Conseil de l’Europe/AMA/UNESCO/UE ;- échanges d’informations et de bonnes pratiques entre tous les niveaux ;- meilleure application de la Convention de l’UNESCO.En termes de santé publique, la Commission privilégie une approche par les risques.

Il s’agit de mieux informer les sportifs dès leur plus jeune âge des effets sur la santé dessubstances dopantes. Si le sport est de plus en plus relié à des préoccupations d’éducation,de formation professionnelle ou encore de santé publique, l’UE oriente la lutte antidopage

84 Rapport n° 2006/2130 (INI) sur l’avenir du football professionnel en Europe, Parlement européen, commission parlementairede la culture et de l’éducation, 13 février 2007.85 Communiqué de la Commission, CE n° IP/07/1066, 11 juillet 2007

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dans une direction originale en rapprochant le trafic de substances dopantes du trafic dedrogues illégales.

Ce texte a permis d’ancrer dans le droit une politique sportive européenne rénovée,le seul texte tangible depuis l’échec du TECE et jusqu’à aujourd’hui, en l’absence de laratification du traité de Lisbonne.

1.2.3. Le Livre Blanc sur le sport : vers un dialogue sportif européenLe Livre Blanc définit la mise en œuvre concrète de la coordination en instaurant un dialoguesportif européen structuré selon deux axes. Le premier concerne les différentes autoritéssportives compétentes au niveau européen et l’Union européenne, largement incarnée à ceniveau par la Commission, et le second les Etats-membres entre eux et avec la Commission.

Concernant la consultation des instances sportives, la Commission souhaite procurerune « plateforme » de discussion associant les fédérations sportives européennes, « lesorganismes de tutelle européens du sport »(COE, EPC), et les organismes nationaux(comités olympiques et paralympiques nationaux), mais aussi les partenaires sociaux, lesorganes du Conseil de l’Europe et de l’ONU chargés du sport (UNESCO, OMS). Le point 49du White Paper explore deux modalités d’échange : annuellement, les forums européensdu sport, et ponctuellement des discussions thématiques avec certains intervenants.

La coopération avec les Etats membres, objet des points 51 et 52, se base sur lesréunions informelles des ministres et des sports et la programmation continue qui définitles priorités de la discussion. Instaurée en 2004, elle devra être renforcée et inclure lescomptes-rendus de la Commission sur le plan d’action « Pierre de Coubertin ».

1.2.4. Un développement incertain Le Livre Blanc constitue une sorte de programme mais sa mise en œuvre répond à desconditions non-encore remplies. L’approbation définitive du traité de Lisbonne est le premierélément à prendre en compte. En l’absence de ratification des 27, on en reste au traitéde Nice dans le corps duquel le sport n’a pas de base juridique propre. Cela ne veut pasdire que rien n’est entrepris depuis 2000, bien au contraire. Mais dans ce cas, celui de lanon-ratification, la politique sportive de l’Union repose sur une volonté politique partagéedes Etats, ce qui est indéniablement beaucoup plus ambigu qu’une position commune auConseil.

Les actions entreprises depuis la fin des années 199086 donnent une idée de ce quipeut être entrepris même sans traité conférant une compétence à l’UE. Pourtant, le LivreBlanc laissait entrevoir la possibilité de prolonger ces projets et, nerf de la guerre, de lesfinancer directement. Uniquement pour la lutte contre le dopage, ces actions ont concernéla recherche sur les substances dopantes, la santé publique, les programmes d’échangessur la question du dopage, et la coopération policière, judiciaire et douanière. On l’a vu, l’UEest forcée de se rattacher à des compétences autres pour toucher le sport.

Le Livre Blanc en l’absence de compétence de l’UE et même dans l’hypothèse d’unecompétence complémentaire et d’appui reste un texte à portée politique. Il a été élaboréavec les organisations sportives, ce qui ne veut pas dire qu’elles en aient saisi la portéepotentielle. En insistant sur la coordination entre niveaux, le rôle des clubs et du sportamateur, l’impression d’ensemble retirée de la lecture de ce texte est celle d’un nouveléquilibremoins dépendant des fédérations et des équipes nationales. A ce titre, rappelons

86 Cf. : supra, partie 2 – chapitre 2

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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que la lutte antidopage telle que conçue dans le White Paper repose sur l’informationaux jeunes sportifs sur le terrain, les laboratoires ou la coopération internationale (AMA,INTERPOL, UE), et non pas sur les fédérations internationales dont il n’est pas fait mentionici.

La Commission, élément de droit communautaire n’est pas une instance législative.Le Livre Blanc correspond à son pouvoir d’initiative, mais nécessite d’être relayé par lesacteurs de la codécision, Conseil et Parlement. Ce dernier a eu l’occasion de s’exprimeraprès la publication de la Commission, notamment dans une résolution en mai 2008.

« Dopage : Le Parlement exige des mesures résolues de la part des Étatsmembres dans ce domaine et attend une harmonisation du cadre juridiqueainsi que la définition d’une position commune de l’Union vis-à-vis de l'Agencemondiale antidopage, de l'UNESCO et du Conseil de l'Europe en la matière.Il appelle les États membres à criminaliser le trafic de substances dopantesillégales, au même titre que le trafic de drogues et à combattre activementle dopage en évitant les calendriers excessivement chargés qui mettent lesathlètes sous pression. Pour lutter contre le dopage, le Parlement préconise lerenforcement des contrôles, de la recherche et des tests, un suivi permanentconfié à des médecins indépendants et des mesures de prévention ainsi quela formation des athlètes. Il faut en outre que les clubs professionnels et lesorganisations sportives adoptent, à leur niveau, des déclarations dans lesquelleselles s'engagent à lutter fermement contre le dopage. C’est dans ce contexte quele Parlement réclame un plan spécifique de lutte contre le dopage comportant uncalendrier d’actions, et ce, dans la perspective des Jeux olympiques de Londres,en 2012. La Plénière invite en outre les États membres à garantir une meilleureinformation et une meilleure éducation des jeunes participant à des compétitionssportives en ce qui concerne les substances dopantes et leurs effets sur lasanté. » 87

Cette résolution reprend en les développant les apports du Livre Blanc et du traité deLisbonne. Quelques éléments novateurs néanmoins :

- les calendriers sportifs, souvent considérés comme « règle du jeu », ont uneimplication en termes de dopage ce qui justifie une intervention européenne ;

- le rôle de clubs pro et des organisations sportives auxquels est faite une quasi-injonction d’intervenir alors que du fait de leur autonomie et du développement de lacompétence d’autres instances (AFLD, AMA, etc.) sont restés en retrait jusqu’à présent ;

- une vision de long terme permettant de mettre en place un plan d’action ciblé sur ledopage.

2…de la jurisprudence, qui se révèle ambiguë Le sport est devenu une affaire de droit. Cette judiciarisation se retrouve dans les plaintesportées devant les tribunaux de tous niveaux. Récemment, le cas Oulmers, a fait coulébeaucoup d’encre quant à une possible « nouvelle affaire Bosman » (2.1). Mais c’est surtout

87 Résolution non-législative T6-0198/2008, in Dossier de la commission parlementaire CULT/6/55895 n°2007/2261(INI),

Parlement européen, 8 mai 2008.

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Partie 3. Perspectives de l’action communautaire dans le sport

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la CJCE qui a été confrontée à un challenge de taille auquel elle a proposé une solutioncritiquée et critiquable (1.2.).

2.1. Les nouveaux défis sportifs de la CJCE L’absence de critères précis définis par le droit européen, qu’il s’agisse des traités, desrèglements et directives ou même la jurisprudence, quant aux « règles sportives » et doncau champ d’application de ce droit au sport pose de manière particulièrement aiguë depuisBosman, la question de l’insécurité juridique. L’enthousiasme apparent du mouvementsportif tel que décrit à la suite de la signature du traité de Lisbonne ne saurait trop masquerles difficultés à venir de la Cour de Justice des communautés européennes. Avec le risqueque l’approche au cas-pas-cas devienne une prise en compte purement aléatoire.

La CJCE est par ailleurs largement confrontée à la question de l’équilibre entre lesacteurs du monde sportif et des intérêts diversifiés en jeu. La prééminence de fait desfédérations et des équipes nationales sur les clubs, a par exemple été remise en causerécemment par l’affaire Oulmers, encore peu connue du grand public (aucun répondantdu questionnaire n’a cité cette affaire). Majid Oulmers, joueur marocain du club belgede Charleroi, a été blessé lors d’une rencontre amicale avec sa sélection nationale.L’indisponibilité du joueur a conduit le Sporting Charleroi à réclamer des dommages etintérêts à la FIFA s’élevant à environ 600 000 euros. Le G-14 soutient largement l’initiative,les grands clubs européens ayant depuis longtemps dénoncé la FIFA , qui lors des grandescompétitions internationales utilise des joueurs (les compétitions internationales sontprioritaires, les calendriers s’organisant autour d’elles et les joueurs obligés d’y participer)et ce de manière gratuite (les joueurs étant rémunérés par les clubs). Le G-14 accusedonc la fédération internationale d’abus de position dominante ou de restriction illicite deconcurrence. Il demande une indemnisation des clubs lors des rencontres internationaleset estime à 860 millions d’euros la mise à disposition des joueurs ces dix dernièresannées. Le tribunal de commerce de Charleroi à qui avait été adressée la plainte a saisila CJCE. La FIFA a très récemment demandé un arrangement à l’amiable duquel devraitbénéficier largement le club de Charleroi mais qui évite un jugement de fond sur le droitcommunautaire. Surtout l’indemnisation des clubs montre que les sélections nationales nesont exclues de l’approche toute économique du sport. Des questions sur lesquelles la Courde Luxembourg devra bien un jour ou l’autre se pencher.

2.2. Perspective jurisprudentielle post-Meca-Medina

Dans l'affaire Meca-Medina et Majcen88, la Cour de Justice des Communautés européennesa eu l'occasion d'approfondir sa définition de ce qu'est une « règle sportive » qui n'entrepas dans le champ d'application du traité, et dont les instances du sport peuvent donc seprévaloir sans risquer d'être sanctionnées par le droit communautaire. Etant donné quele dopage est communément associé à de la triche et que l'expertise en la matière estessentiellement du fait des organisations sportives elles-mêmes, les règles antidopagesemblent de prime abord inhérentes à la compétition sportive et à son organisation. Commedans les cas Deliège et Lehtonen, il semblerait que l’objectif premier soit d’assurer larégularité des compétitions.

2.2.1. L’infirmation de la décision du tribunal de première instance

88 Cf. : supra, partie 1 – chapitre 3 : 3.3.

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Le tribunal de première instance avait somme toute confirmé la jurisprudence précédenteen l’appliquant au cas du dopage. Il avait considéré que les règles sportives, dont lesrègles antidopage ne relavaient pas de l’appréciation de la CJCE ni même d’ailleurs de laCommission mais davantage des instances sportives.

« Il semble quelque peu absurde de demander à la Commission européennede juger si l’exclusion d’un nageur coupable d’avoir absorbé une substanceprohibée constitue ou non une restriction appréciable de la concurrence sur unmarché donné et contrevient ainsi au droit communautaire de la concurrence.De même, il y avait quelque chose d’irréel dans la plainte de Christelle Deliègearguant que la décision de la Fédération belge de judo de ne pas la sélectionneren équipe nationale enfreignait son droit à la «libre prestation des services»au sens du Traité CE. Mais, une fois encore, les avocats n’ont pas manquéd’imagination. »(Infantino, 2006)

Devant la CJCE, l’avocat général Léger a eu l’occasion d’invoquer le côté accessoire desaspects économiques des règles antidopage pour lesquelles ce sont les aspects éthiquesqui prédominent. Il a suivi le TPI en précisant que la question de la proportionnalité ne sepose même pas puisque il ne s’agit pas en l’occurrence de la règlementation d’un marchédont on serait amené à examiner les effets.

La décision de la CJCE du 18 juillet 2006 a pourtant, de par sa formulation sensiblementmodifié ce qui précède, en stipulant que : «si l’activité sportive en cause entre dans le champd’application du traité, les conditions de son exercice sont alors soumises à l’ensemble desobligations qui résultent des différentes dispositions du traité»89. Il est encore prématuréde commenter cette affirmation, mais plusieurs remarques sont déjà susceptibles d’êtreapportées au débat sur le futur de la prise en compte du sport par l’UE à partir de cetteformule très large. Tout d’abord, la condition posée (« si l’activité sportive entre dans lechamp d’application du traité ») semble aller dans le sens d’une prise en compte quasi-systématique : chaque activité sportive entre à première vue d’une manière ou d’une autredans le cadre du traité. Cela concerne le sport professionnel, voire même le sport amateur90.

Autre originalité de la décision du 18 juillet 2006, la séparation des problématiques delibre-circulation et de concurrence. L’arrêt Meca, dans son point 42, prévoit qu’une règleconsidérée comme sportive dans le cadre de la libre circulation ne l’est pas forcément auregard du droit de la concurrence. Alors que le TPI considérait lui qu’une règle sportive nonéconomique, c’est-à-dire non soumise aux règles de libre circulation, s’exonérait égalementdu droit de la concurrence. Un règle sportive pourrait ne pas enfreindre l’article 2 du traitéCE qui ne s’impose pas à elle tout en violant les articles 81 ou 82 de ce même traité.Cette confusion permet néanmoins d’introduire les critères d’objectivité (les restrictionsapportées par telle ou telle règle sont-elles nécessaires pour atteindre ses objectifs ?) et deproportionnalité (les restrictions sont elles-limitées à ce qui est nécessaire pour assurer lebon déroulement de la compétition sportive ?) héritées du droit de la concurrence.

2.2.2. Une interprétation large Ensuite, ce n’est pas l’activité à proprement parler qui est soumise aux obligations des traitésmais les conditions de l’exercice de cette activité sportive. Gianni Infantino relève ainsi

89 David Meca-Medina et Igor Majcen c. Commission européenne (CJCE, 18.07.06, C-519/04 P, point 28)90 Voir à ce propos le communiqué de presse de la Commission IP/04/1222, sur une discrimination du gouvernement espagnol

en matière d’accès à des événements sportifs amateurs.

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qu’une règle sportive quelconque pourrait très bien être qualifiée de condition d’exerciced’une activité sportive et donc être soumise au droit de la concurrence ou à la librecirculation. Jusqu’à présent dans la jurisprudence, ces conditions d’exercice ont plutôtconcerné les règles d’accès à l’activité sportive économique et non point les règles dujeu. On se rappelle que les arrêts Walrave et Koch, Dona, Bosman, Deliège et Lehtonens’intéressaient à l’impact sur l’emploi de certaines règles des fédérations. Les plaignantsont invoqué principalement le fait que certaines mesures réduisaient l’accès à un emploirémunéré. Cette interprétation des « conditions d’exercice » en tant qu’accès à l’emploiouvre une perspective différente et plus limitée. Elle signifierait que la Cour appelle l’UEà s’interroger uniquement sur l’emploi dans le secteur sportif, et non pas sur les règlesdu jeu à proprement parler (dimension des terrains, organisation des championnats, etc.).Cette affirmation de la CJCE recoupe aussi un certain nombre de questions d’actualités. Ondéveloppera ici surtout l’affaire Oulmers qui s’intéresse à la mise à disposition des joueurspar les clubs pour les rencontres internationales. Cette règle est sportive et non pas unecondition d’exercice puisqu’elle vise essentiellement à produire des compétitions équitablesentre les équipes nationales qui ont le choix de sélectionner parmi l’ensemble des nationaux.Cette règle na saurait trop être considérée comme une entrave à l’emploi et échapperaitdonc aux obligations des traités CE. La CJCE s’ouvre la voie pour plus de précisions aumoment où la FIFA et le G-14 s’orientent vers l’idée d’une rémunération quasi-systématiquedes clubs (4000 euros par joueur et par jour lors du dernier Euro).

2.2.3. Le risque d'activisme judiciaire Les règles sportives deviennent un critère juridique encore plus flou, ce qui risque deconduire à une certaine insécurité juridique. La CJCE n’a pas saisi l’occasion de clarifierla portée et la nature des « règles sportives », ni au contraire n’a explicité la dimensionéconomique du sport à laquelle s'applique le droit communautaire. Elle a fixé ce queles juristes appellent un critère juridique indéterminé, « les conditions de son exercice »,qui semble avoir vocation à engendrer un nombre croissant d’actions en justice sur despoints de droit seulement très sensiblement différents pourtant. Cette inflation juridiquerisque d’être bien supérieure à la période post-Bosman puisque tous les critères établisà l’époque sont susceptibles d’être revus aujourd’hui, à la lumière de ces conditionsd’exercice. On peut très bien imaginer que des domaines nouveaux vont entrer dansle champ d’application du droit communautaire, mais comme on ne sait pas lesquels,chacun va être en mesure de tester son critère personnel au regard surtout du droit de laconcurrence. En effet, les formulations de la Cour font qu’il est difficile à présent d’identifierles règles sportives totalement exclues du champ d’application des traités : tout ou presqueredevient contestable.

De plus, toutes les règles et pratiques sportives vont pouvoir être contestées au nomdu droit de la concurrence comme ayant un caractère disproportionné ou non limité à ce quiest inhérent au bon déroulement des compétitions sportives.

En fait, la Cour de Luxembourg aurait mal apprécié la portée de ses déclarations, etva être amenée, qu’elle y soit intéressée ou non, à examiner une pléiade d’argumentationsde ce genre. La Commission voit de même sa tâche compliquée puisque des actionsauparavant considérées comme infondées devront être considérées désormais à l’aune dece nouveau droit de la concurrence sportif.

2.2.4. Vers une compétence européenne marquée par l’incertitude…

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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Tout ce qui empêche une personne de travailler dans le secteur sportif peut être assimiléà une condition d’exercice d’une activité sportive, tels les paris, le truquage de matchs oumême le dopage ; dès lors les mesures disciplinaires associées jusqu’ici purement sportivespourraient être considérées plus en avant par les instances communautaires. Le problèmemajeur est que en garantissant la libre participation des sportifs et leur accès à l’emploi,la CJCE va être amenée à envisager également la libre participation des clubs qui estaussi l’exercice d’une activité sportive. Cela reviendrait à dire que les communautés vonts’immiscer dans l’organisation des championnats, ce qui reste peu probable.

A long terme et sans en avoir eu forcément l’intention, la tendance lourde sembleannoncer un transfert progressif de compétences des instances sportives vers les autoritéseuropéennes, et ce même pour certaines règles pourtant considérées comme purementsportives. Dans l’arrêt Meca-Medina , la CJCE ne se contente en effet pas de définir le critèrejuridique des « conditions d’exercice d’une activité sportive », mais va jusqu’à examinerl’impact du dopage, à savoir ici de la nandrolone, ainsi qu’à examiner la production de cettesubstance. La question de savoir si la nandrolone peut être produite par le corps humain(ce qui dédouanerait les sportifs incriminés de prise illégale de cette substance) n’a qu’unrapport lointain avec le droit de la concurrence, et avait déjà été examinée par le Tribunalarbitral du sport (TAS), a priori plus compétent en la matière. La CJCE s’est largement isoléeen ne se référant ni au TAS ni même aux autorités sportives dans le domaine de la luttecontre le dopage.

L’arrêt Meca-Medina prend en quelque sorte le contre-pied d’un contexte politique fortmarqué par la reconnaissance progressive et quasi-aboutie des spécificités du sport, de lacoopération, et de l’affirmation de l’autonomie des instances sportives.

Conclusion du chapitre Le traité de Lisbonne aurait permis une mise en œuvre du Livre Blanc qui en reste doncà l’état de programme. Les dispositions déjà entreprises continueront d’être appliquéesvoire développées en se basant sur la coopération fragile des Etats membres. L’approcheoriginale de la Commission en matière de lutte contre le dopage, orientée sur la préventionet l’information a fait long feu.

Pendant ce temps, les dérives financières du sport n’en finissent pas de tisser lesrelations entre clubs et fédérations. De son côté, la Cour de Justice des Communautéseuropéennes s’est engagée dans une voie périlleuse en ré explorant tangiblement ladimension économique des activités sportives. Une revue tardive qui noircit les perspectivesde sécurité juridique du sport.

Chapitre 2 : Un potentiel offensif à travailler :l’extension de la politique anti-dopage

La politique antidopage n’est qu’un prétexte censé ouvrir la voie à une prise en compte parl’UE de la multitude des problématiques liées au sport. Ce n’est qu’à cette condition que l’on

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pourra parler de politique publique du sport en Europe. Après avoir envisagé respectivementles attentes émanant du monde du sport et le bilan de l’intervention européenne en lamatière91, il s’agira dans ce chapitre de donner des pistes de développements susceptiblesd’influer sur l’organisation du sport. Après avoir vu dans quelle mesure la lutte antidopage apermise d’autres interventions dans des domaines connexes (1.), nous envisagerons deuxdes problématiques majeures auxquelles sera confronté le sport dans les prochains moiset qui appellent une réponse européenne (2.).

1. Des domaines d’action revisités La prise en compte d’autres domaines en marge de la lutte anti-dopage est nécessaire dèslors qu’une politique ne saurait se résumer à un seul dossier. Le dopage peut ainsi êtreperçu comme insufflateur d’une action d’envergure, mais cela nécessite en amont un succèsdans le combat contre le dopage (1.). L’action entreprise à ce titre pourrait également êtretransposée à d’autres problématiques actuelles et futures du sport (2.).

1.1. La politique anti-dopage est insuffisante en elle-même La réussite de la lutte antidopage est toute relative et d’autres actions peuvent encore êtreentreprises dans ce sens. L’UE doit encore faire ses preuves, et ce, on l’a vu avec l’arrêtde la CJCE Meca-Medina, de manière plus explicite et moins controversée. Les effets de lalutte antidopage sont à mesurer sur le long terme. Les efforts sont encore considérés commeplutôt insatisfaisants (64,7% des réponses au questionnaire), voire tout à faits insatisfaisants(23,5%). Le Livre blanc fournit à cet égard des exemples concrets d’application commel’instauration d’un groupe de travail sur le dopage avec les Etats membres. Une meilleureformation des instances policières pour prévenir le trafic de stupéfiants et plus précisémentde produits dopants est une autre piste qui mérite d’être développée.

Surtout, une politique sportive ambitieuse ne saurait se résumer à un domaine aussiprécis, et ce que le dopage a permis doit pouvoir s’appliquer à d’autres problématiques. Or,dans le sillage de cette lutte se sont développées des challenges avec lesquels l’UE pourraitbien avoir à se confronter. En premier lieu, la définition des règles du jeu, et par extension dela dimension purement sportive par opposition à économique, qui sous-tend ses relationsavec les organisations sportives. La lutte antidopage européenne a pu résonner comme unempiètement sur les domaines d’autonomie du monde sportif, mais il ne faut pas oublier qu’ily a eu une demande d’intervention publique de leur part. L’UE s’est infiltrée dans un créneaulaissé vacant par les Etats en s’appuyant sur la dimension transfrontière du problème. Ensecond lieu, la structure particulière de l’AMA telle que modelée par l’Union et la coordinationmulti-niveaux qui en découle (organisations sportives, gouvernements nationaux) place l’UEcomme intermédiaire privilégié des politiques sportives.

Affirmer que les succès de la lutte antidopage européenne ont ouvert la voie à unemeilleure prise en compte d’autres questions intéressant le sport par l’UE est donc unpeu prématuré. Les autres sous-domaines du sport ne se sont pas développés dans leurdimension européenne que grâce au modèle inspirateur de la lutte antidopage. Ils sontdavantage passés de l’ombre (ils étaient moins exposés et médiatisés) à la lumière desagendas européens.

91 Cf. : supra, partie 1 – chapitre 2 et partie 2 – chapitre 2. Au lieu de regrouper d’une part la vision du sport et de l’autre celledes institutions européennes, il a paru plus judicieux de s’appuyer sur une approche dynamique actions (partie 1) – bilan (partie 2)– perspectives (partie 3) qui recoupe les deux dimensions.

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1.2. L’équation à plusieurs inconnues des politiques sportives Le problème du dopage ne doit pas faire oublier les autres maux qui touchent le sport,notamment la violence et le racisme. Le Parlement européen a ainsi adopté une Résolutioncontre le racisme en 2004, puis en 2006 une déclaration invitant très concrètement l’UEFAà donner la possibilité aux arbitres selon des règles claires, d’interrompre un match en casde survenue d’incidents racistes dans les stades.

Autre challenge de taille, la professionnalisation croissante du sport et les enjeuxéconomiques soulevés. Le Parlement européen a organisé en mai 2006 une auditionpublique commune à quatre de ses commissions sur le thème : « Le football professionnel,marché ou communauté ? ». A suivi un rapport d’initiative sur l’avenir du footballprofessionnel92. Comme pour le dopage, il est fait état d’un manque de sécurité juridique etde l’incertitude quant aux décisions de la CJCE. Les avancées possibles dans ce domaineconcernent :

- la formation des jeunes ;- l’introduction d’un système de contrôle des coûts (le sport professionnel étant marqué

par une instabilité financière et un déséquilibre entre clubs) ;

2. Les nouveaux enjeux Deux nouvelles problématiques sont apparues ces derniers mois qui remettent en questionl’organisation et les structures du sport. Le « 6+5 » initié par la FIFA et dont le systèmede quotas rentre en contradiction flagrante avec l’arrêt Bosman, en son temps maintes foiscritiqué par la fédération internationale (2.1.). Le contrôle de gestion, ensuite, qui apparaîtcomme une solution possible face aux dérives financières dans le sport (2.2.).

2.1. Le « 6+5 », nouveau cheval de bataille entre fédérations et UE La problématique des quotas est revenue à l’ordre du jour avec des modalités différentes.Colin Miège a pu ainsi résumer la situation lors des Etats généraux de l’Europe93 :

« Le sport professionnel est très internationalisé, la référence nationale aquasiment disparu, cela étant d’autant plus vrai depuis l’arrêt Bosman etl’interdiction des quotas de joueurs. Ici, le droit communautaire est peut être allétrop loin en faisant éclater les repères nationaux. Si un élément d’identification apu disparaître, la FIFA tente aujourd’hui de réintroduire des quotas de nationalité,sous la forme du « 6+5 », c’est-à-dire six joueurs nationaux, cinq joueursétrangers par équipe. Une autre possibilité consisterait en des quotas de joueursformés dans le club [ce qui correspondrait à l’idée du premier contrat avec le clubformateur soutenue par l’UEFA]. »

Cette initiative des fédérations internationales, contraire aux principes du droitcommunautaire, a immédiatement provoqué la réaction des instances européennes. Leprésident du PE, Hans-Gert Pöttering, a rencontré la 5 juin 2008, Sepp Blatter et MichelPlatini. Il est clair qu’à première vue le 6+5 s’oppose au principe de libre circulation des

92 Résolution du Parlement européen sur l’avenir du football professionnel en Europe, 2006/2130(INI), 29 mars 200793 Cf. : Annexe 5.

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travailleurs, tel qu’établi par l’arrêt Bosman. Pourtant, il restaurerait une identité locale etnationale aux clubs de tous niveaux et les encouragerait à investir dans la formation desjeunes joueurs au lieu de compter uniquement sur l’achat de joueurs formés ailleurs. Laréticence de Bruxelles s’adresse d’ailleurs moins au home-grown rule de l’UEFA, instaurantun minimum de joueurs issus du centre de formation du club mais sans quotas de nationalité.Il est improbable que la FIFA prenne le risque juridique d’implémenter son système au nomdes spécificités du sport, bien qu’est déjà été mis en place un calendrier (4+7 en 2010-2011,5+6 en 2011-2012 et enfin 6+5 en 2013-2014).

2.2. Vers une DNCG européenne ?La mise en place d’une structure européenne ayant les attributions de la Direction nationaledu contrôle de gestion procurerait un outil d’harmonisation en matière financière à l’UE.Cette volonté émane en particulier du Secrétaire d’Etat français aux Sports, BernardLaporte, qui en décembre dernier déclarait : « sous la présidence de la France à l'UnionEuropéenne dès le 1er juillet 2008, notre volonté en terme de sport est de créer une DNCGeuropéenne effectivement pour faire en sorte que tout le monde soit au diapason ».

Au niveau national, la DNCG est en effet l’organisme chargé de la surveillance descomptes des clubs de football professionnel. Il s’agit en fait d’une des directions de la Ligueprofessionnelle de football.

Conclusion du chapitre Le sport, depuis le Traité de Rome, entretient une relation ambiguë avec le droitcommunautaire. S’il a permis à la CJCE d’introduire des précédents notamment enmatière de libre-circulation, au cœur des quatre libertés fondamentales qui régissent lemarché commun, et d’affirmer le principe de concurrence libre et non-faussée, il sembleraitnéanmoins que ce soit davantage l’UE qui influence le sport que l’inverse. Cela ne rime pasforcément avec une inertie des instances sportives qui cherchent à reprendre la main surcertains dossiers sensibles au nom des spécificités du sport.

Chapitre 3 : Le sport et l’UE dans la dynamiqued’approfondissement, des enrichissements mutuels

L’intérêt d’une lutte européenne contre le phénomène du dopage ne va toujours pasde soi. Cela est largement reflété par les réponses au questionnaire, les enquêtésprivilégiant le niveau international (29,4%) ou local (23,5%) pour raisons respectivementd’internationalisation du sport et de relation de proximité. Les instances internationales dela lutte antidopage elle-même ont longtemps été réticentes, à l’image de l’ancien présidentde l’AMA, Richard Pound, qui lors de la proposition de création d’une agence européennea déclaré : « Ce n’est pas une bonne idée. Le problème du dopage est mondial et doit donc

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être traité à cette échelle. »94 L’émergence de l’UE comme cadre pertinent d’analyse n’estpas sans poser la question de son aura (1.). Pourtant, à y regarder de plus près, l’interventioneuropéenne en matière de dopage a profité tout autant au monde du sport dans sa quêtede reconnaissance des spécificités du sport (2.) qu’à l’Union européenne comme domained’approfondissement (3.).

1. Perspectives de la lutte contre le dopage : vers un problème publiceuropéen ?

Si le sport est un phénomène de société, alors le dopage est indéniablement un problèmede société. Pour aller plus loin dans la lutte antidopage, l’Europe a besoin de s’affirmer àlong terme comme acteur de premier plan (1.1.). Elle doit surtout ne pas négliger les aspectsignorés voire cachés de la lutte (1.2.).

1.1. La naissance d’un géant des politiques sportives ?Le dopage a pendant longtemps revêtu une dimension européenne. Cette idée futparadoxalement le fait des ligues nord-américaines qui niaient l’existence du dopage dansleur sport sur leur continent, qu’il s’agisse, du hockey, du basket-ball ou du base-ball.L’affaire Balco a montré que cette limitation géographique du phénomène était peu crédible.Mais le football américain et sa tolérance bien connue du dopage par opposition au cyclismeeuropéen (l’UCI et l’organisation du Tour de France n’hésitant pas à disqualifier un vainqueurdopé) font que l’Europe et non pas l’Amérique du Nord est un espace pertinent de lalutte contre le dopage. D’autant plus que Lance Armstrong et Floyd Landis étaient, eux,américains.

On a vu que l’Union européenne était un niveau possible de conception et decoordination des politiques de lutte contre le dopage. Elle devient désormais un espacepertinent voire incontournable. La nouvelle dimension européenne du dopage concernedonc davantage le rôle moteur de l’Union européenne dans la coordination au niveausupranational, et à long terme une harmonisation globale est envisageable.

1.2. Le dopage n’est pas responsable de tous les maux Au-delà du mouvement sportif, la construction du dopage comme problème public et parextension problème public européen démontre les relations fortes existantes entre le sport etla santé. Bien que la compétence européenne quoique limitée en matière sportive dépendelargement, comme nous avons put le voir tout au long de ce mémoire, de son implicationdans les questions de santé publique, attention toutefois à ne pas négliger d’autres élémentssous-jacents. Il n’y a pas que le dopage pour nuire à la santé des athlètes. Si l’activitéphysique est bénéfique à la santé humaine, le sport intensif est lui néfaste, ce qui estsouvent occulté par une focalisation des reproches sur les pratiques dopantes95. Or, la santédes sportifs notamment professionnels est mise à mal par les entrainements répétitifs etles compétitions fréquentes (risque de tendinites, de blessures, etc.), l’effort physique etpsychologique nécessaire.

94 Le Monde, mardi 13 novembre 2007, p.18 : Dopage, « Continuer à se battre contre les tricheurs ».95 Voir à ce sujet l’article de BRISSONNEAU, Christophe et LE NOE, Olivier. Construction d’un problème public autour du dopageet reconnaissance d’une spécialité médicale, Sociologie du travail, n°48, 2006, p. 487-508 qui détaille l’évolution de la professionmédicale en parallèle de celle des techniques de dopage.

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Si cela concerne surtout le sport professionnel, les centres de formation pour les jeunessont aussi touchés. En Chine, l’entraînement des jeunes gymnastes se fait dès l’âge detrois ans, avec des répercussions morphologiques certaines. Il y aurait donc une « méprisequi voudrait que le champion sportif incarne la santé (et donc la forme) et que le dopagesoit, à ce titre, ce qui pourrait le détruire » (Queval, 2001). Le dopage est donc venu àl’agenda des politiques publiques grâce à une interprétation quelque peu simplificatrice quivoudrait l’envisager comme l’ennemi numéro un de la santé publique en omettant d’autresphénomènes. L’UE en s’intéressant au sport par le biais de l’éducation et de la formation,et non point seulement de la santé, pourrait permettre une approche du dopage nondéconnectée des abus liés à la recherche de performance. En prolongement, la lutte contreles tricheurs est encore un aspect peu visible de l’action de l’UE qui intervient surtout au nomde la santé publique. L’entrée économique pourrait être privilégiée, la commercialisation dusport étant un moyen comme un autre de s’immiscer dans la lutte contre le dopage.

2. L’Europe fait progresser le sport et le conforte dans sesspécificités

En guise d’introduction à cette partie, il n’est pas inutile de rappeler les principauxtraits du modèle sportif européen : l’organisation pyramidale des fédérations dont lesclubs constituent la base, la solidarité entre sport amateur et sport professionnel,la prépondérance de l’amateurisme. En l’absence de politique sportive reconnue, lesspécificités du sport peuvent relayées au niveau européen par la coordination entreinstances sportives et institutions (2.1.). Si d’autres domaines du ressort de l’UE peuventservir de tuteur, les initiatives directes se multiplient, à l’image du forum sportif européen(2.2).

2.1. Peut-on aboutir à une véritable gouvernance dans le sport ?Nous retiendrons comme définition de la gouvernance, les mécanismes de régulation«informels, non gouvernementaux, par lesquels des personnes, des organisations agissent,satisfont des besoins et atteignent des objectifs » (Lequesne, 1999).

Face au morcellement des acteurs et des intérêts, l’Union européenne sembleparticulièrement bien placée pour impulser une telle réflexion. Pour illustrer ce propos,soulignons l’initiative européenne de réunir les comités olympiques européens (COE) et laFédération internationale de l’automobile (FIA) qui ont produit une déclaration de principesde bonne gouvernance pour les autorités sportives. Ces principes ont commencé à êtreintégrés par le mouvement sportif notamment à travers la réforme du CIO. Par ailleurs,Jacques Rogge96 a eu l’occasion de rappeler que les gouvernements européens ont liéla reconnaissance de la spécificité du sport à une amélioration de la gouvernance dansles sports, afin de promouvoir le sport au niveau européen mais aussi de défendre lesintérêts du monde sportif, comme annoncé par les Déclarations successives d’Amsterdamet de Nice. La gouvernance dans le sport européen nécessite donc également que lesinstitutions européennes protègent les instances sportives lorsque le droit européen estappliqué au sport. A condition bien sûr que ces instances sportives remplissent certainscritères de transparence et de démocratie. Or, à l’heure actuelle, suite à l’arrêt de la CJCEMeca-Medina et Majcen et les plaintes qui ne manqueront pas d’être adressées tant à la

96 Intervention de Jacques ROGGE, Président du CIO au Xème Forum Européen du sport, sur le thème : « L’UE et le sport:les défis de l’intégration européenne », 2001.

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CJCE qu’à la Commission envers les fédérations, les autorités sportives sont encore à larecherche d’une sécurité juridique qui leur fait défaut en droit communautaire. La principaleprotection faite au sport est à trouver dans les traités ; bien qu’en l’absence de ratificationdu traité de Lisbonne, le sport n’ait pas de base juridique propre, Emine BOZKURT, députéeeuropéenne et membre de la Commission Education et Culture du Parlement européen asouligné à l’occasion des Etats généraux de l’Europe que l’ensemble des droits de l’Hommeprésents dans le traité actuel s’appliquent bien au sport, ce qui n’est pas négligeable.

2.2. Des initiatives qui laissent entrevoir le futur du modèle sportif européenCertains clubs sportifs sont particulièrement actifs dans le domaine social, notamment leFC Twente (Pays-Bas, NDLR), Charlton Athletic (Angleterre), Schalke 04 (Allemagne) ouencore le FC Barcelone (Espagne). Emine Bokhurst, rapporteur de la Commission Emploi etAffaires sociales du Parlement européen relève à ce titre la participation du FC Barcelone aun programme : « Comment battre le racisme dans le sport ? ». Dans cette perspective auralieu le 20 et 21 novembre prochains une rencontre sur le thème «Le sport et la diversité » àl’Université Marc Bloch de Strasbourg. Tout ceci anticipe de l’application du Livre Blanc quiavait pris une position politique en affirmant la nécessité d’une redistribution.

Bien qu’il n’existe pas de politique sportive européenne en tant que telle, la Commissions’est efforcée d’appliquer les spécificités du sport dans plusieurs politiques de son ressortvoire par des initiatives directes, qui peuvent être analysées comme de véritables politiquespubliques du sport. Le Forum sportif européen a à cet égard constitué une transitiondans l’acception faite par les citoyens du sport européen. Au départ le sport était utilisédavantage comme un outil de communication des valeurs communautaires à destination ducitoyen européen et le forum abritait les relations UE-CIO. La forme actuelle est désormaisaxée sur la représentation et défend donc une conception différente de la démocratie enregroupant les confédérations du sport, les représentants des Ministères en charge dusport des Etats membres, des pays candidats, les Fédérations sportives européenneset internationales ainsi que les représentants du sport pour handicapés. Parallèlementla dimension économique a peu à peu lâcher du lest et permis l’affirmation du sportmultidimensionnel et notamment de ses aspects sociaux et donc d’intégration.

3. Le sport est un vecteur possible d’intégration européenne Le sport recoupe toutes les grandes questions que s’est posée et se pose encore l’UEdans sa dynamique d’approfondissement : celle de la coordination versus l’harmonisationdes politiques publiques, celle de la démocratie, dans ses modalités représentative etparticipative ou encore celle de la place de l’économie (3.1.). La correspondance des valeurseuropéennes et sportives (3.2.) permet de comprendre dans quelle mesure leur interactionparticipe du mouvement d’intégration de l’Europe (3.2.).

3.1. Vers une politique sportive européenne globale ?Bien que« la politique européenne du sport reste largement à concevoir » (Barrau, 1999)et que des législations voire des approches différentes par les gouvernements des payseuropéens empêchent à l’heure actuelle de concevoir le sport comme politique sectorielleen tant que telle, les institutions de l’Union européenne s’impliquent de plus en plus dans cedomaine. On l’a vu avec le dopage, où une mobilisation touche-à-tout de l’UE s’est mise enplace : des ressources financières sont allouées, mais dans le même temps l’UE fait valoir

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sont expertise (au sein de la DG Education et Culture notamment) et produit des textesallant de la déclaration de principes à la règlementation. Pour couronner le tout, un cadregénéral d’action a été défini pour le sport, dont le Livre Blanc et le plan d’action Pierre deCoubertin constituent les pierres angulaires. Du sport comme problème public européen aux«politiques publiques européennes du sport », le pas semble avoir vocation à être franchitrès prochainement. On aboutirait ainsi à ce que Friedberg appelle un « ordre local » :

« [un] construit politique relativement autonome qui opère à son niveau larégulation des conflits entre les intéressés, et qui assure l’articulation etl’ajustement de leurs intérêts et de leurs buts individuels entre eux ainsi qu’à desintérêts et à des buts collectifs » (Friedberg, 1993).

L’intervention de l’UE dans le sport semble faire l’unanimité ou presque tant que celle-ci resteencadrée par les gouvernements et respecte l’autonomie des autorités sportives. La luttecontre le dopage a certes permis de tester les possibilités d’action sur un domaine précis,mais elle a in fine révélé les limites actuelles d’une telle politique97. La reconnaissance desspécificités du sport a été ébranlée et nécessite un nouveau cadrage européen. La CJCEs’y étant brûlé les ailes avec l’affaire Meca, la Commission et le Conseil sont peut-être lesplus à même de reprendre ce flambeau.

3.2. Le sport, reflet des valeurs européennes ?

3.2.1. La question du supplément d’âme de l’UE et sa réponse sportive Avant même l’attribution des Jeux Olympiques à Pékin et jusqu’à aujourd’hui, la ville aété au moins autant évoqué pour l’organisation des compétitions sportives que pour despréoccupations diverses indirectement liées à cet événement : les droits de l’Homme,l’environnement. Il est dès lors très difficile de dissocier le sport d’autres problématiqueséminemment politiques, les interrogations principales portant sur la présence de tel ou telchef d’Etat (ou du Président de l’Union européenne) à la cérémonie d’ouverture ou encoresur l’opportunité de changement d’image conférée au pays organisateur via cette attribution.Les valeurs de l’olympisme, sans préjuger de l’autonomie du CIO, sont indéniablementproches d’un certain modèle politique occidental et on ne peut faire l’économie d’une rapidecomparaison avec les valeurs de l’UE contenues dans les traités et dans la Charte des droitsfondamentaux (dignité humaine, liberté, égalité, solidarité)98. L’esprit olympique et l’espritdes fondateurs et autres constructeurs de l’Union européenne présente une ressemblancefrappante qui laisse augurer de positions proches et convergentes. Par conséquent, lapromotion de l’idéal olympique et sportif pourrait s’avérer un moyen détourné efficace pourpromouvoir les valeurs de l’Union européenne toute entière.

Concernant la question de l’entente entre les peuples, le sport est appelé à jouer unrôle dans les relations extérieures et la politique de développement de l’UE. La cultureétant le volet le plus concrétisé des accords Euro-méditerranéens, le sport peut contribuersignificativement à ce titre à la politique extérieure de l’Union européenne. Le sport fournitdes exemples foisonnants de promotion de la paix, qui n’ont pas échappé au Conseileuropéen de Nice. Celui-ci s’est ainsi appuyé sur la Déclaration du Millénaire de l’ONU

97 Voir à ce sujet le document de Gianni Infantino, directeur des services juridiques de l’UEFA : « Meca-Medina : un pas en arrièrepour le modèle sportif européen et la spécificité du sport ?», 2006.98 Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 2000/C 364/01, in JOCE C 364/1, 18 février 2000.

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relative à la promotion de la paix et de la compréhension mutuelle grâce au sport et enparticulier à la trêve olympique99.

De manière générale les grandes décisions du processus d’intégration européennesont également d’un intérêt crucial pour le monde du sport. En premier lieu, le traité deLisbonne, on l’a vu tend à une reconnaissance du sport en tant que tel mais la compétenceeuropéenne en la matière limite fortement sa prise en compte effective. En second lieu,la question de l’élargissement aux PECO aurait pu mettre à mal le modèle sportif del’Europe puisqu’étaient intégré des Etats dont certains sportivement prégnants mais avecdes différences d’organisation substantielles, là aussi liées à leur régime politique. LaHongrie avait fini devant la France au classement des médailles à Barcelone en 1992,la Roumanie deuxième des JO à Los Angeles, la Pologne, la Bulgarie et la RépubliqueTchèque étant souvent en bonne position. Cette problématique avait déjà été entrevue àune échelle bien moindre avec la réunification allemande, la RDA devançant régulièrementla RFA au nombre de médailles. Cela nous amène immanquablement une fois de plus àévoquer la question du dopage qui a souvent été considéré comme pratique courante dansl’Europe de l’Est communiste.

Le sport véhicule pourtant des valeurs qui sont largement acceptées de la part desEtats membres et des candidats à l’adhésion. Cela justifie l’affirmation de Jacques Roggeselon laquelle « il serait trop restrictif de limiter le rôle de l’UE dans le sport à celui d’un chiende garde de l’application du traité aux sports »100. L’intervention de l’UE concerne surtout lesport dans sa dimension transfrontalière alors que les niveaux locaux (clubs) et nationaux(équipes nationales, fédérations) restent prégnants.

3.2.2. Sport et citoyenneté européenne Lors des Etats généraux de l’Europe, l’atelier-débat intitulé ‘‘Sport et citoyennetéeuropéenne’’ témoigne si besoin est de la dimension d’intégration du sport comme fermentd’identité, la citoyenneté étant souvent perçus comme un véritable aboutissement duprocessus d’intégration. Marie-Claire Restoux à a cette occasion posé la question desavoir comment, avec quels moyens et à quelle échéance l’attachement au sport et à sesvaleurs contribue-t-il à renforcer la citoyenneté européenne. Le fait d’être dans une équipequi concoure contre d’autres n’est pas incompatible avec un sentiment d’appartenanceà un ensemble d’Etats. Si le sentiment d’appartenance nationale prime sur le sentimentd’appartenance à l’Europe, l’un ne va pourtant pas sans l’autre.Le sport se pose donc enoutil de rassemblement international et sur lequel on peut travailler au niveau européen.Premièrement, l’identification européenne passe par des actes. Par exemple, pour lecitoyen-spectateur du sport, la comptabilisation des médailles européennes peut êtreun moyen. Il existe également un Festival Olympique de la jeunesse européenne qu’ilfaudrait relancer. Les commentaires des journalistes pourraient aussi avoir un rôle lorsdes rencontres internationales. S’ils n’hésitent pas à se placer du côté de la France,pourquoi ne le feraient-ils pas quant une équipe européenne autre rencontre une équipeextracommunautaire ? Tout cela nécessite cependant un processus particulièrement long.Au titre des propositions figurent la mise en place de programmes de jeunesse et

99 « Nous demandons instamment à tous les Etats membres d’observer la trêve olympique, individuellement et collectivement,dans le présent et à l’avenir, et de soutenir les efforts que le Comité international olympique déploie pour promouvoir la paix et lacompréhension entre les hommes par le sport et l’idéal olympique ». ONU, Déclaration du Millénaire, partie II, 8 septembre 2000.

100 “it would be far to restrictive to limit the EU role in sports to that of a distant watchdog of the application of the Treaty tosports”, Jacques ROGGE, op. cit.

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de programmes sportifs et une redéfinition du rôle des fédérations sportives dans lerenforcement de la citoyenneté européenne basée sur l’idée que chaque acteur du sport aun rôle à jouer. « La citoyenneté européenne doit se construire par le sport, pour le sportet autour du sport. » Deuxièmement, l’identification européenne se construit autour desévénements partagés. Jonathan Hill observe le renforcement des liens entre Etats, illustrépar les scènes festives entre Turcs et Croates à Vienne en juin dernier. Au niveau de l’UE etplus largement des pays de l’UEFA pour le football, de plus en plus de personnes regardentles mêmes manifestations sportives (La Ligue des Champions les mardis et mercredis soirsà 20h45), ce qui avec le temps pourrait créer quelque chose de commun.

3.3. Une extension sans limites ?

3.3.1. Les théories de l’intégration revisitées Le sport tel qu’appréhendé par les politiques européennes semble fédérer autour de luil’ensemble des acteurs du monde sportif, avec quelques heurts mineurs. Il offre aussi « àl’intégration européenne un thème mobilisateur et fédérateur » (Delmas, 2001) basé sur undouble discours :

- le discours humaniste, le sport étant vu comme ferment d’identité et jouant un rôled’intégration sociale ;

- le discours des dangers qui pointe les problèmes du sport (annexion par des enjeuxéconomiques privés, dopage, racisme, etc.).

Corinne Delmas analyse cette extension de compétences communautaires qui s’estfait progressivement depuis les débuts de la construction européenne (a fortiori depuisl’arrêt Walrave de 1974) et de manière prévisible (Bosman n’étant après tout que la suitelogique des événements précédents) comme un exemple du spill over, le fameux « effetd’engrenage »101 au cœur des théories néo-institutionnalistes de l’intégration européenne(Haas, E.B., 1958). Si on s’appuie au contraire sur les théories intergouvernementalistes,on peut souligner que les Etats ont gardé la main sur les politiques sportives d’envergure.Néanmoins, le sport illustre le rôle du droit dans l’intégration européenne (Lequesne, 1995 :274) dans la mesure où le droit européen, qu’il s’agisse de l’expertise juridique de laCommission ou des arrêts de la CJCE a été déterminant dans la production d’une politiquesportive européenne.

Les initiatives européennes en matière de sport découlent d’abord largement d’unengrenage sectoriel. Autrement dit, l’Europe s’est appuyée sur des domaines où elle avaitune compétence plus étendue pour intervenir dans le sport. Dans le même temps les acteursd’autres domaines, notamment la santé, l’éducation et la formation ont poussé pour uneintervention européenne dans des domaines connexes dont le sport faisait partie. Celareflète assez bien la dynamique d’intégration européenne dans son ensemble : l’unionpolitique de l’Europe s’est largement assise sur ses bases économiques héritées du traitéde Rome et même auparavant de la CECA. Les groupes d’intérêts et les gouvernements ontvoulu reproduire ce qui avait été fait pour le charbon et l’acier à d’autres secteurs. Cela laissedonc entrevoir la perspective d’une union sportive de l’Europe selon le même schéma. Lesport qui n’a dans un premier temps que été considéré dans sa dimension économique parl’UE, s’est ensuite vu rattaché aux politiques sociales et d’éducation-formation et de santéavec la perspective de devenir une politique à part entière.

101 DELMAS, Corinne. Op.cit.

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3.3.2. Défis et opportunités de la marchandisation du sport On a vu que d’une part la notion de citoyenneté européenne qui correspond au passagedes Communautés européennes à l’UE a permis d’envisager le sport dans une dimensionsociale et culturelle. D’un autre côté, les évolutions du sport professionnel doubléd’activités économiques connexes (droits de diffusion, équipementiers sportifs, activitésd’enseignement et d’entraînement de moins en moins bénévoles) ont irrémédiablementancré le sport dans le champ économique, ce qui justifie sa prise en compte par le droitcommunautaire. Le développement du sport en Europe a aussi montré les décalages entreles régulations et structures qui existaient et la réalité de la sphère économique dès lors quedes agents économiques ont décelé des intérêts commerciaux au sport, mettant en péril lacohésion même du mouvement sportif. Le paradoxe à résoudre pour le mouvement sportifconsiste en ceci que l’approche économique du sport est à la fois source de dangers (lesfédérations voient leurs règlements contestés devant la Commission et la CJCE notamment)et d’opportunités (les organisations sportives bénéficient des retombées financières dusport-spectacle).

La prise de conscience de l’intérêt d’une politique commune du sport s’est recentrée surun double constat ayant trait à la marchandisation du sport. Le vent nouveau venu de l’Est aamené les acteurs, institutions européennes et autorités sportives à repenser les argumentsen faveur d’une politique sportive européenne suite à la chute du bloc communiste et à plusforte raison avec l’élargissement de 2004. Face à « de[s] sportifs et […] athlètes prêts à sevendre à tout âge et éventuellement dès le berceau sur n’importe quel marché » (V. Andreff,intervention au Forum « L’union européenne et le sport » - Assemblée nationale, 2000),seule la dimension européenne paraît pertinente. Aujourd’hui, la montée en puissancesportive de la Chine pourrait insuffler une politique bien plus ambitieuse. L’autre constatd’impuissance concerne les dérives économiques du sport qui pourraient empiéter sur sesdimensions sociales et culturelles :

L'inflation des droits de retransmission, la progression du dopage, l'essor du commercedes jeunes sportifs mineurs constituent autant de danger de voir remettre en causeles valeurs sociales et éducatives du modèle sportif européen. Fort heureusement, lacoopération européenne a déjà trouvé son efficacité dans la lutte contre le dopage et laprotection de la santé des sportifs.102

Conclusion du chapitre et de la partie L’idée d’un « modèle sportif européen » de plus en plus palpable. Conjuguée à celle d’uneintégration européenne ‘‘dopée’’ par le sport, cette perspective laisse entrevoir de beauxjours à une politique sportive européenne.

Le sport est progressivement devenu un modèle pour s'interroger sur les politiquespubliques européennes, dans la mesure où il cumule les impératifs de représentativité, decollaboration et le concept moderne de gouvernance.

102 Allocution de Raymond Forni, Président de l’Assemblée Nationale lors de l’Ouverture du Forum « L’union européenne etle sport », 7 juin 2000.

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Conclusion générale

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Conclusion générale

Depuis la fin des années 1990, les interactions entre Union européenne et sport se sontmultipliés au point qu’il est devenu difficile de nier les apports réciproques, du sport pour laconstruction européenne d’une part, et de l’Europe pour le mouvement sportif, d’autre part.La Commission européenne, surtout sous l’ère Redding (Commissaire européen chargéede l’éducation, la culture, la jeunesse, les médias et les sports entre 1999 et 2004) et laCour de Justice des communautés européennes comptent parmi les institutions qui ontle plus influé en faveur d’un changement de perception de l’activité sportive par l’Europe,qui était et demeure toujours en partie dominé par les aspects économiques. Alors quela place du sport dans les politiques de l’UE devrait logiquement refléter son importanceau sein de la société européenne, il est notable que le sport soit encore largement sous-représenté dans les actions entreprises par les institutions bruxelloises, et n’ait pas acquisla dimension d’autres politiques comme la culture, l’éducation et la jeunesse ou encore lasanté. L’explication principale à ce déficit d’initiatives européennes réside dans les lacunesdes textes européens en la matière, au premier rang desquels les traités. Les déclarationsde principes et autres Livre Blanc ne sauraient trop aboutir à des actions concrètes enl’absence de base juridique consacrant une compétence européenne dans le domaine dusport. L’UE a néanmoins eu le mérite d’explorer des raccourcis avant de tomber dansl’impasse, ou du moins sur le ralentisseur qu’ont constitué les ‘‘non’’ français et néerlandaisau traité établissant une Constitution pour l’Europe, puis irlandais au traité de Lisbonne.Il faudra encore patienter pour entendre résonner la Neuvième symphonie de Beethoven,hymne européen, lors des rencontre internationales.

Concernant l’hypothèse de départ, son affirmation doit être nuancée. La lutte contrele dopage semble à l’heure actuelle illustrer au mieux la construction d’un problèmepublic à l’échelle européenne, et l’élaboration d’une politique publique européenne dusport. Son premier atout a été de se ménager une place au soleil parmi les intervenantstrès emblématiques du milieu : l’Agence mondiale antidopage dont la présidence fut untemps convoité par Jean-François Lamour, le CIO de Jacques Rogge, les fédérationsinternationales dominées par MM. Blatter et Platini, le Conseil de l’Europe (historiquementle premier intervenant européen), le niveau ministériel avec le Secrétariat d’Etat de BernardLaporte, l’Agence française de lutte contre le dopage. En second lieu, la lutte européenneantidopage s’est appuyée sur un double dialogue qui s’est avéré particulièrement constructifà long terme, avec les Etats membres, mais aussi et surtout avec les autorités sportives,ce qui équivaut à une reconnaissance de leur légitimité et de leur autonomie allant dans lesens d’une meilleure prise en compte des « spécificités » du sport. Avec, en ligne de mire,la reconversion du « modèle sportif européen ». De là à brandir le dopage comme étendarddu succès de la politique sportive européenne il n’y a qu’un pas…encore faut-il oser lefranchir. Or, la lutte contre le dopage est un combat de longue haleine (le Tour de France2008 a encore révélé avec Moises Duenas et Ricardo Ricco sont lot de scandales, les JeuxOlympiques pourraient bien aussi voir tomber certains athlètes de leur piédestal en formede podium olympique) et dominé par une vision manichéenne de plus en plus questionnée.En outre, en s’engageant dans la lutte contre la tricherie au nom de la santé publique,l’Union européenne a d’une certaine façon dopé artificiellement ses compétences ; elles’est servie d’autres politiques connexes (encore une fois, l’éducation-formation, la culture,

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le social, la santé) pour justifier son intervention. Même si cela devrait in fine débouchersur une compétence sport, celle-ci restera très limitée. Enfin, la lutte contre le dopageest insuffisante pour parler d’une politique sportive européenne face à l’inflation des mauxaffectant le sport moderne. Alors que la dimension économique du sport a, depuis l’originede la relation sport-UE, été privilégiée, l’extension du sport professionnel et des intérêtscommerciaux qui lui sont liés semble constituer une équation politico-économique de plusen plus insoluble. Les problèmes de racisme et de violence dont les stades anglais et italiensconstituent des témoins privilégiés semblent constituer la nouvelle draft des institutionseuropéennes. Les messages forts envoyés par le Parlement à coup de résolutions ouencore les encouragements à la coopération policière lors des rencontres internationalessont autant d’éléments qui laissent présager que la tortue (la prise en compte des problèmesde violence étant intervenue tardivement et de manière plutôt timorée au départ) pourraitbien rattraper le lièvre (la lutte antidopage, dont les effets tardent à se faire sentir).

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Annexes

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Annexes

Annexe 1 : La place de l’Europe dans le sport mondial,travail de recherche

Si on prend les tableaux des médailles des olympiades à l’échelle de ces 40 dernièresannées, ce qui est d’abord frappant c’est que de plus en plus de pays sont représentés, cequi devrait donc rimer avec un déclin relatif des « anciens » pays. C’est ce que j’ai voulumontrer pour les 15 pays de l’UE d’avant 2004.

De multiples limites aux graphiques sont apparues au cours de lors élaboration.D’abord, l’URSS a boycotté les jeux de Los Angeles, ce qui a offert des opportunités auxeuropéens, d’où le ‘’pic’’ de médailles en 1984. D’autre part, avant la réunification, je n’ai prisen considération évidemment que la RFA, et donc à Barcelone on a un apport significatif demédailles pour l’UE qui nous vient notamment des sportifs de l’ex-RDA. Enfin, le graphiquepour les JO d’hiver n’est pas très révélateur.

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L’explication d’ensemble, c’est tout simplement le fait que les sports dits d’hiver sontpeu accessibles aux nouveaux pays concurrents qui participent davantage aux JO d’été.Notamment, les pays d’Afrique ou d’Asie du Sud-est, où pour des raisons géographiques(zones intertropicales, peu de neige), culturelles, ou même d’infrastructures, n’ont pasdéveloppés des stations de ski, etc.

En conclusion, seule l’évolution à court terme pour les jeux olympiques d’été semblepertinente pour démontrer non pas véritablement un déclin mais plus un tassement desrésultats sportifs. Le petit point rouge représente l’Europe des 25.

Autre problème : les JO ne sont pas forcément parlants pour définir la valeur d’un paysdans tel ou tel sport. Par exemple, le football est un peu délaissé comme sport olympique,alors même qu’avec 4 pays européens sur 4 en demi-finale de la dernière Coupe du Monde,le football européen ne s’est jamais aussi bien porté.

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Annexes

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Annexe 2 : Liste des interdictions 2008

Annexe 3 : Questionnaire et analyse des réponsesC.KELBEL - IEP de Lyon – juin 2008

[email protected] questionnaire anonyme a pour but d’aider à la rédaction d’un mémoire touchant au

sport. Il comporte 9 questions. La durée estimée de réponse est de 10 minutes.Questionnaire :

1. Selon vous, quel est le principal problème affectant le sport aujourd’hui ?

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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□ la violence□ le dopage□ l’annexion du sport professionnel par des intérêts économique privés□ autre, précisez : …………………………………2. Quels événements sportifs suivez-vous plus particulièrement parmi ceux

proposés ? (hiérarchisez vos choix de 1 à 6 et précisez le cas échéant le ou les sportsconcernés)

1. Equipe nationale : les compétitions mondiales (Coupe/championnats du monde defootball, Coupe Davis, Ligue mondiale de volley-ball, JO, etc.)

La(es)quelle(s) :……………………………………2. Equipe nationale : les compétitions européennes (Championnat d’Europe de football/

Euro, Tournoi des Six Nations, Championnat d’Europe de basket, etc.)La(es)quelle(s) :……………………………………3. Equipe de club ou sport individuel : les compétitions mondiales (Coupe du Monde

des clubs, tournois du Grand Chelem, Tour de France, Formule 1, meetings internationauxd’athlétisme, etc.)

La(es)quelle(s) :……………………………………4. Equipe de club ou sport individuel : les compétitions européennes (Champions

League, Coupe de l’UEFA, H Cup, Euroligue, etc.)La(es)quelle(s) :……………………………………5. Equipe de club ou sport individuel :

les compétitions nationales (Ligue 1, Top 14, Championnat de France, Coupes nationales)La(es)quelle(s) :……………………………………6. Equipe de club ou sport individuel : les championnats étrangers (Calcio/Liga/

Bundesliga/Premier League, NBA, NHL, NFL, NASCAR, etc.)La(es)quelle(s) :……………………………………

Ordonnez 6 réponses.

3. Quel est, selon vous, le niveau le plus pertinent pour traiter des maux quiaffectent le sport ?

□ le niveau local (les clubs)□ le niveau national (les fédérations nationales, les ministères concernés, etc.)□ le niveau européen (les fédérations européennes -UEFA, ULEB, etc.-, l’UE, le Conseil

de l’Europe)□ le niveau international (fédérations internationales –FIFA-, CIO, etc.)Pourquoi ?................................................................4. Quel événement récent vous a le plus interloqué ?□ Le contrôle positif à la testostérone de Floyd Landis, vainqueur du Tour de France

2006□ Les montants des transferts de certains joueurs lors du dernier MERCATO

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Annexes

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□ La banderole lors de la finale de la Coupe de la Ligue 2008□ Autre, précisez :□ Je n’ai pas entendu parler de ces affaires5. Même question :□ L’affaire Ouadou□ L’affaire Balco□ L’affaire Oulmers□ Je n’ai pas entendu parler de ces affaires6. Quel sport est selon vous le plus touché par le phénomène du dopage ?……………………………………………………7. Vous qualifieriez la lutte anti-dopage de :□ Tout à fait satisfaisante□ Plutôt satisfaisante□ Plutôt insatisfaisante□ Tout à fait insatisfaisante8. Connaissez des pratiques et produits dopants ? Si oui, lesquels ?

……………………………………………………..……………………………………………………..9. Connaissez-vous des acteurs de la lutte contre le dopage ? Si oui, lesquels ?…………………………………………………….……………………………………………………A propos du questionnaire…Méthode d’élaboration :La première question présente trois des principaux maux touchant au sport tels

qu'identifiés par de nombreux ouvrages (voir par exemple Miège, 2001b) : le dopage,la violence/le racisme et l'annexion par des intérêts économiques privés. La place del'économie dans le sport est bien une problématique européenne puisque la CJCE a affirmédans Walrave et Koch que le droit communautaire ne s'appliquait au sport que dans lamesure où il constitue une activité économique. Les questions 4 et 5 testent également lavision des problèmes touchant le sport par des cas concrets. La question 4 propose dechoisir entre trois affaires très médiatisées et explicitées dans les propositions de réponse,voire d'en ajouter une quatrième, ce qui permet réellement de voir une fois encore quel mauxdu sport est le plus grave aux vues des répondants. Ce questionnaire permet simplementune approche en termes de perception. Il a été diffusé par listes mails mais devant le peude réponses obtenues (20), il semble difficile de généraliser sur cette base. Par contre,l’échantillon est assez représentatif : certains répondants affirment s’intéresser au sport,d’autres non, plusieurs classes d’âge sont représentées, etc. Il s’agirait donc d’obtenirdavantage de réponses pour conclure de manière plus tranchée sur la vision du problèmedu dopage.

Résultats :

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Les enquêtés qui ont répondu "le dopage" à la première question sont 35,3%, contreseulement 23,5% à avoir répondu "Le contrôle positif de Floyd Landis" à la question 4.Pour ceux cumulant ces deux réponses, le dopage est clairement l'enjeu n°1 des politiquessportives. Avoir répondu "le dopage" puis "l'affaire de la banderole" ou "le montant destransferts" témoigne au contraire d'un écart de perception entre les problèmes généraux etles affaires concrètes. La question 5 a une double visée : elle permet, via des propositionsmoins médiatisées qu'auparavant d'isoler des répondants les plus "experts", et pour ceux-ci, elle joue le même rôle que les questions 1 et 5 en proposant là aussi un choix entredopage, violence/racisme et annexion par des intérêts économiques privés dans des ordresdifférents.

17,6% des enquêtés pensent que le niveau européen est le plus à même de réagir. Lavision dominante est celle de la nécessité d'une régulation internationale (29,4%), souventjustifiée par les disparités entre pays et l’internationalisation du sport, et le niveau local(23,5%) grâce à la relation de proximité qui permet de « prendre le problème à la racine ».

Les sports les plus cités comme les plus touchés par le dopage sont le cyclisme etl'athlétisme.

Les enquêtés citent très souvent l'EPO, la testostérone, les transfusions sanguinescomme produits et pratiques dopants, or les principaux scandales ayant trait à ces produitsont précisément touché le cyclisme et l'athlétisme. Les acteurs de la lutte antidopage sontassez mal connus, deux réponses pour l’AFLD et une pour l’AMA tout de même.

La lutte antidopage est qualifiée de plutôt insatisfaisante dans 64,7% desquestionnaires et de tout à fait insatisfaisante dans 23,5% des cas.

Annexe 4 : Les contrôles anti-dopage de l’AFLD(1997-2006)

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Annexes

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Annexe 5 : Compte-rendu de l’atelier-débats ‘’Sport etcitoyenneté européenne’’, EGE

Lyon, 21 juin 2008Etats Généraux de l’EuropeCompte-rendu de l’Atelier-débats :Sport et citoyenneté européenne(Romain Claudel, Camille Kelbel)Intervenants :Thierry PHILIP : Maire d’arrondissement de Lyon et Vice-président de la Région Rhône-

Alpes délégué à la santé et au sportAndrzej ROGULSKI : Commission européenne, Unité sport de la DG éducation et

culture

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

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Laurent THIEULE : Directeur de la communication du Comité des Régions et Présidentde l’Association « Sport et Citoyenneté »

Jonathan HILL : Directeur des bureaux bruxellois de l’UEFAMarie-Claire RESTOUX : Championne olympique de judo (1996), ancien conseiller de

Président de la République Jacques ChiracEmine BOZKURT : Députée européenne, Membre de la Commission Education et

Culture du Parlement européenColin MIEGE : Administrateur civil et scientifiquePhilippe DOUCET : Journaliste Canal+ (modérateur)Etats Généraux de l’EuropeCompte-rendu de l’atelier-débats :Sport et citoyenneté européenneInterventions :Philippe DOUCET s’interroge sur une éventuelle perte d’identité nationale dans le sport,

à l’image du club de football d’Arsenal qui ne compte aucun joueur anglais dans ses rangs.Ainsi, le sport n’est-il pas le reflet d’une véritable intégration européenne ? Il s’adresse toutd’abord à Colin MIEGE en ce qui concerne le rapport entre sport et citoyenneté.

Colin MIEGE revient tout d’abord sur le mot de « citoyenneté » comme porteur d’espoir.La citoyenneté constituerait donc un apport mais serait en même temps problématique. Enparticulier, au regard de l’Union européenne, il rappelle les principaux éléments de cadragequi constituent la relation entre sport et citoyenneté. Cette association apparaît comme unélément ancien du débat.

Le constat selon lequel le sport constitue l’une des dernières passions nationales,semble rendre difficile le dépassement de ce niveau national et contraindre l’existencedes pratiques sportives au niveau local, régional et national, mais pas européen. Cetteaffirmation met en exergue les paradoxes du « modèle sportif européen » :

Le sport professionnel est très internationalisé, la référence nationale a quasimentdisparu, cela étant d’autant plus vrai depuis l’arrêt Bosman et l’interdiction des quotasde joueurs. Ici, le droit communautaire est peut être allé trop loin en faisant éclater lesrepères nationaux. Si un élément d’identification a pu disparaître, la FIFA tente aujourd’huide réintroduire des quotas de nationalité, sous la forme du « 6+5 », c’est-à-dire 6 joueursnationaux, 5 joueurs étrangers par équipe. Une autre possibilité consisterait en des quotasde joueurs formés dans le club.

Le sport amateur voit subsister des règlementations fédérales empêchant les sportifsamateurs étrangers de participer aux compétitions de leur pays d’accueil, ce qui s’inscriten contradiction flagrante avec cette internationalisation du sport professionnel, et surtoutcontre le principe de libre-circulation et les droits sociaux qui lui sont attachés.

Andrzej ROGULSKI relève que dans le traité de Lisbonne, le sport est, avec la politiquede l’espace, le seul domaine nouveau de compétence européenne. En 2007, le travailde la Commission a abouti au Livre Blanc sur le Sport : cet instrument politique et globalmet en avant d’une part les évolutions économiques et sociales dans le domaine du sport(notamment, la place toujours plus importante de l’argent) et d’autre part les discriminationsdans le sport professionnel. (Le Livre Blanc sur le Sport de 2007 constitue l’aboutissementdu travail de la Commission, un travail orienté notamment contre les discriminations dans le

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Annexes

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sport professionnel.) L’exception la plus notable se situe au niveau des équipes nationales,pour lesquelles la Commission, mais aussi la CJCE et le Parlement européen reconnaissentla possibilité de discrimination fondée sur la nationalité comme spécificité du sport. A cetégard, il est clair que certains acteurs du mondesportif se sont engouffrés dans la brèche des« spécificités » et ont essayé d’utiliser l’Union européenne pour servir leurs intérêts propres.

Actuellement, cependant, il n’existe pas de politique sportive européenne en tantque telle, ce qui n’empêche pas la Commission d’appliquer les spécificités du sport dansplusieurs politiques de son ressort. Des initiatives ont aussi été prises directement par laCommission.

Ex. : Forum sportif européen.Emine BOZKURT, au sein du Parlement européen, a été amenée à étudier le Livre

Blanc sur le Sport. Le but de celui-ci a clairement été de lister les problèmes liés au sport(racisme, violence…) et de renforcer la notion de « spécificités » du sport, qui permet enpartie de résoudre ces problèmes. Les valeurs du sport (appartenance à une équipe, fair-play, respect des règles du jeu et de l’autre, discipline, bénévolat) sont à mettre en parallèleavec le concept de citoyenneté.

A ce titre, Mme BOZKURT, en tant que rapporteur de la Commission Emploi etAffaires sociales du Parlement européen, a pu constater que certains clubs sportifs étaientparticulièrement actifs dans le domaine social, notamment le FC Twente (Pays-Bas, NDLR),Charlton Athletic, Schalke 04, FC Barcelone.

Ex. : La participation du FC Barcelone a un programme : « Comment battre le racismedans le sport ? »

Enfin, il est à noter que les fonds sociaux européens sont aussi à disposition du sportdans certaines conditions. Mme Bozkurt souhaite que les projets sportifs soient pris encompte dans les projets sociaux européens.

En prolongement de la question de l’intégration sociale, Thierry PHILIP invoque laquestion de l’éducation par le sport. Cette relation sport-éducation se base selon lui surdes règles, l’application de ces règles (le fair-play) et les questions rattachées à ces règles(l’éthique). L’Agence Pour l’Education par le Sport relaye un certain nombre de suggestionsqui vont au-delà du Livre Blanc.

Propositions : échanges de type Erasmus destiné aux sportifs, jumelage de clubs et nonpas seulement de villes, mobilité de l’encadrement/ des entraîneurs, formation des jeunessupporters, championnats intercontinentaux.

Dans cette perspective aura lieu le 20 et 21 novembre prochains une rencontre sur lethème «Le sport et la diversité » à l’Université Marc Bloch de Strasbourg.

Le sport revêt deux aspects bien distincts :Le sport business, outil de communication pour les villes et les régions, une

problématique qui se cristallise autour des droits de retransmission audiovisuels. A noterque le sport européen est à cet égard plus libéral que le sport américain.

Le sport, outil d’éducation et de culture est une question plus large, qui intéressebeaucoup plus de monde.

Jonathan HILL relève que l’intervention des autorités publiques, notammenteuropéennes dans le sport a abouti à un dialogue, contraire à l’idée de départ des grandesfédérations qui se croyaient hors-la-loi. Il y a eu ainsi un changement d’attitude de l’UEFA

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qui a cherché un partenariat avec les institutions européennes. A l’origine de cette évolution,on trouve :

Le besoin de recourir aux autorités/institutions publiques pour réguler certainsproblèmes (pragmatisme de l’UEFA)

Ex. : La lutte contre le racisme, problème qui se pose en des termes différents selonles pays.

Le besoin d’équilibre entre de nombreux acteurs et intérêts : fédérations, clubs, etc.Le besoin d’une reconnaissance des spécificités du sport par les autorités.Marie-Claire RESTOUX s’intéresse à la fois à l’attachement au sport et à ses valeurs et

à la question de savoir comment, avec quels moyens et à quelle échéance le sport contribue-t-il à renforcer la citoyenneté européenne.Il faut d’abord avoir un sentiment d’appartenancenationale avant d’avoir un sentiment d’appartenance à l’Europe, l’un ne va pas sansl’autre.Le sport se pose donc en outil de rassemblement international et sur lequel on peuttravailler au niveau européen.

Propositions :- Mise en place de programmes nécessaire, passe par des programmes de jeunesse

et des programmes sportifs.- Redéfinir le rôle des fédérations sportives dans le renforcement de la citoyenneté

européenne.Chaque acteur du sport a un rôle à jouer. La citoyenneté européenne doit se construire

par le sport, pour le sport et autour du sport.Questions :L’Union européenne peut-elle jouer un rôle de régulateur entre les fédérations

sportives et des droits télévisés, les médias tendant à diffuser toujours les mêmessports ?

Philippe DOUCET : Il existe environ 4,000 sports, certains sont très peu relayés parles médias.

Andrzej ROGULSKI : Non, les Etats sont responsables des relations entre lesfédérations et des relations commerciales en ce qui concerne la diffusion audiovisuelle desévénements sportifs.

Mais, le Livre Blanc prend cependant une position politique en affirmant la nécessitéd’une redistribution. La Commission se prononce alors même que l’UE n’a pas compétenceen la matière.

Emine BOZKURT : Il existe des loteries à but non-lucratif aux Pays-Bas, en Franceet en Allemagne qui financent le sport amateur. Or, ces loteries risquent de disparaître etde compromettre ce financement. Dans ce contexte, le rôle de la Commission européenneest de voir ce qui peut être fait, d’anticiper les conséquences de la libre-circulation et dela libéralisation.

Andrzej ROGULSKI : Il existe une étude commission sur les mécanismes definancement du sport de masse et du sport amateur.

Comment le citoyen simple spectateur du sport peut-il se sentir citoyen européenpar ce biais ?

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Annexes

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Marie-Claire RESTOUX : L’identification européenne passe par des actes. Parexemple, la comptabilisation des médailles européennes peut être un moyen, ou encoreil existe un Festival Olympique de la jeunesse européenne. Autre moyen de renforcer lesentiment d’appartenance à l’UE : les commentaires des journalistes. Mme RESTOUXinsiste sur la longueur du processus.

Jonathan HILL : L’exemple du football est particulièrement parlant pour montrer lerenforcement des liens entre Etats. Ainsi, pendant l’Euro 2008, il y a eu des scènes festivesentre Turcs et Croates à Vienne. De manière générale, tout le monde regarde les mêmesévénements : de plus en plus de personnes regardent la Ligue des Champions le mardi etle mercredi à 20h45. Avec le temps, cela peut créer quelque chose de commun.

Comment relayer les « valeurs communes » du sport alors que celui-ci secaractérise avant tout par sa dimension compétitive ?

Marie-Claire RESTOUX : L’originalité de la compétition sportive réside dans le faitqu’elle nécessite d’autres concurrents pour exister. Le fait d’être dans une équipe quiconcoure contre d’autres n’est pas incompatible avec un sentiment d’appartenance à unensemble d’Etats (l’UE, NDLR).

Colin MIEGE : Le sport rassemble ou divise. Historiquement, il a parfois été un vecteurde nationalisme. Aujourd’hui, il existe une légère baisse de l’implication des instancesnationales pour laisser une certaine marge de manœuvre à l’Union européenne. Mais danstous les cas, le blocage politique actuel de l’Europe ne le permettrait pas. Le rôle respectifdes Etats et des fédérations pose la question de la légitimité de chacun des acteurs ; or,l’UE n’a aucune légitimité en matière sportive pour l’instant.

En quoi l’UE intervient-elle dans la lutte anti-dopage, problème majeur s’il en estdu sport aujourd’hui et alors que le traitement de la question diffère d’un sport àl’autre ?

Andrzej ROGULSKI : Le dopage est une question mondiale, traitée notamment par lacoopération entre gouvernements et fédérations au sein de l’Agence mondiale antidopage.Il s’agit d’une agence privée, avec des compétences limitées mais reconnue par uneConvention internationale dans le cadre de l’UNESCO. Au niveau européen, le Livre Blancdéveloppe des exemples concrets de ce qui devrait être réalisé : la mise en place d’ungroupe de travail sur le dopage avec les Etats membres concernés ou encore l’améliorationde la formation des instances policières pour prévenir le trafic de produits dopants.

Emine BOZKURT : La lutte contre le dopage constitue un assez bon exemple de lanécéssité d’une plus grande coopération au niveau européen. Le sport est en effet undomaine où il y a une possibilité de valeur ajoutée ; l’UE peut apporter quelque chose. Enl’absence de ratification du traité de Lisbonne, il n’y a pas de base juridique pour le sport,mais tous les droits fondamentaux des traité précédents s’appliquent au sport qui est ainsiprotégé. Le problème du dopage ne doit pas faire oublier les autres maux qui touchentle sport, notamment la violence et le racisme. Le Parlement européen a ainsi adopté uneRésolution contre le racisme en 2004.

Perspective post-Bosman : se sent-on plus européen en regardant des joueurslocaux formés au club ou des joueurs étrangers transférés ?

Jonathan HILL : L’exemple d’Eric Cantona, star en Grande-Bretagne, montre quel’attachement à un joueur ne dépend pas de sa nationalité. Cela sous-tend l’idée que lejoueur perd sa nationalité quand il revêt le maillot du club. Dans 5 ou 10 ans, on aura unrésultat plus clair sur l’attitude des supporters vis-à-vis des transferts.

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Emine BOZKURT : On peut supporter deux équipes à la fois, c’est le cas souvent pourles binationaux. Il est donc possible aussi de soutenir plusieurs équipes européennes. Laquestion des transferts et de la formation soulève le problème du trafic des jeunes joueurs.

Jonathan HILL : Michel Platini tient beaucoup à l’idée du premier contrat avec le clubformateur. Il y a aussi la proposition de la FIFA du « 6+5 ».

N’y a-t-il pas des progrès à faire concernant les commentaires de certainsjournalistes sportifs ?

Philippe DOUCET : L’aspect médiatique est loin d’être négligeable et il est vrai quecertaines « coutumes de bistro » ont tendance à se perpétuer dans le monde des journalistessportifs.

Annexe 6 : Exemple de redistribution (UEFA)

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Annexes

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Source : UEFA, Financial report 2006/2007http://www.uefa.com/newsfiles/651628.pdf

Liste des abréviations

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Annexes

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AMA(D) Agence mondiale antidopageCE Communautés européennesCEE Communautés économiques européennesCIO Comité international olympiqueCJCE Cour de Justice des Communautés européennesCNOSF Comité national olympique et sportif françaisCOE Comités olympiques européensDG Direction générale (Commission européenne)DNCG Direction nationale du contrôle de gestionEPC Comité paralympique européenFEDER Fonds européen de développement régionalFFBB Fédération française de basket-ballFFF Fédération française de footballFIA Fédération internationale de l’automobileFIBA Fédération internationale de basket-ballFIFA Fédération internationale de football associationGEE Groupe européen d’éthiqueJOCE Journal officiel des Communautés européennesJORF Journal officiel de la République françaiseNBA National Basketball AssociationNFL National Football LeagueNHL National Hockey LeaguePE Parlement européenTAS Tribunal arbitral du sportTECE Traité établissant une Constitution pour l’EuropeTL Traité de LisbonneTraité CE Traité instituant les Communautés européennesTraité UE Traité sur l’Union européenneUCI Union cycliste internationaleTUE Traité sur l’Union européenneUE Union européenneUEFA Union of European football associationsULEB Union des Ligues européennes de basket-ballUNESCO L’organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la cultureURBSFA Union royale belge des sociétés de football association

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Vers une compétence européenne en matière de sport ?

106 Kelbel Camille - 2008

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- EUR-Lex : http://eur-lex.europa.eu/fr/index.htm

- Portail de l’Union européenne : http://europa.eu/index_fr.htm