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ENSAE ParisTech

Promotion 2012

David CAVAILLOLES

Stratégies de minimisation du

risque

Application à des contrats d’assurance-vie

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Résumé

MOTS-CLÉS :Marchés incomplets ; Couverture ; Créance contingente ; Unités decompte ; Garantie plancher ; Portefeuille réplicant ; Décomposition de Galtchouk-Kunita-Watanabe ; Stratégie dynamique ; Processus de coût.

Föllmer et Sondermann (1986) ont prouvé l'existence d'une unique stratégie risque-minimisante de couverture d'une créance contingente H. Thomas Möller (2001) aétendu ce résultat à des ux de paiement A, permettant de décrire des contratsd'assurance-vie en unités de compte avec garanties. Nous présentons ici ce cadrethéorique, en insistant sur la dualité des aléas (nancier et actuariel) telle qu'expri-mée par la décomposition de Galtchouk-Kunita-Watanabe. Puis nous l'appliquonsà l'étude d'un contrat d'assurance-vie en unités de compte avec garantie plancheret garantie décès. Nous décrivons en détail la stratégie optimale obtenue et nousétudions en particulier le rôle de la garantie plancher, que nous interprétons commeprix relatif des actifs. Nous confrontons ensuite cette stratégie dynamique avec unestratégie statique plus courante en assurance. A partir du calcul de plusieurs me-sures de risques, nous évaluons les gains, en terme de réduction du risque, à couvrirdynamiquement les contrats en unités de compte. Nous montrons nalement que lemodèle peut être rané par l'introduction de taux stochastiques de type Vasicek,avant de discuter de la mise en oeuvre pratique d'une couverture dynamique.

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Abstract

KEYWORDS : Incomplete markets ; Hedging ; Contingent claim ; Unit-linked ;Guaranteed minimum ; Replicating portfolio ; Galtchouk-Kunita-Watanabe decom-position ; Dynamic strategy ; Cost process.

Föllmer and Sondermann (1986) proved the existence of a unique risk-minimizinghedging strategy for a contingent claim H. Thomas Möller (2001) extended thisresult to a payment stream A, so that he can describe unit-linked life insurancecontracts with guarantees. We there present this theoretical framework and weinsist on the duality of risk (nancial and actuarial) as it appears in the Galtchouk-Kunita-Watanabe decomposition. Then we apply it to the study on a unit-linkedlife insurance contract with guaranteed minimum benet and guaranteed deathbenet. We precisely describe the optimal strategy we compute, and in particularthe role of the guarantee, that we interpret as the relative price of the assets. Welater compare the dynamic strategy with a more common static one. Several riskmeasures are computed in order to estimate the gains, in term of risk reduction,of dynamic hedging of unit-linked contracts. Finally, we show how to improve themodel by introducing Vasicek stochastic interest rates, and we discuss the practicalimplementation of a dynamic hedging.

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Table des matières

1 Présentation des produits étudiés et position du problème 61.1 Contrats en unités de compte avec garanties . . . . . . . . . . . . . . 6

1.1.1 Caractéristiques des contrats . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.1.2 Contrats stylisés étudiés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

1.2 Risques encourus par l'assureur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81.2.1 Risque de mortalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81.2.2 Risque de marché . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.3 Notion de couverture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

2 Théorie classique de la minimisation du risque 122.1 Rappels mathématiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122.2 Modélisation du marché . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142.3 Changement de mesure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

2.3.1 Choix d'une mesure sur l'espace nancier . . . . . . . . . . . 182.3.2 Choix d'une mesure sur l'espace de la mortalité . . . . . . . . 192.3.3 Mesure sur l'espace produit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

2.4 Résultats théoriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202.4.1 Cas où la mesure réelle est une mesure de martingale . . . . . 202.4.2 Cas général et minimisation locale . . . . . . . . . . . . . . . 23

3 Application à des contrats d'assurance-vie 253.1 Modélisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

3.1.1 Présentation et notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253.1.2 Résolution formelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

3.2 Calcul explicite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313.2.1 Couverture de N contrats d'assurance en cas de vie . . . . . . 313.2.2 Couverture d'un contrat d'assurance décès . . . . . . . . . . . 323.2.3 Couverture de N contrats d'assurance décès . . . . . . . . . . 333.2.4 Cas de l'assurance mixte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

3.3 Sur l'hypothèse d'orthogonalité des aléas . . . . . . . . . . . . . . . . 35

4 Analyse numérique et explication des résultats 374.1 Calibrage des paramètres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

4.1.1 Marché nancier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 374.1.2 Mortalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

4.2 Résultats numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414.2.1 Discrétisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414.2.2 Résultats graphiques et interprétations . . . . . . . . . . . . . 43

4.2.2.1 Assurance survie . . . . . . . . . . . . . . . . . . 434.2.2.2 Assurance décès . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 444.2.2.3 Assurance mixte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50

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TABLE DES MATIÈRES 3

5 Comparaison des approches statique et dynamique 515.1 Prol d'investissement des deux stratégies . . . . . . . . . . . . . . . 51

5.1.1 Présentation des stratégies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 515.1.2 Composition des deux portefeuilles . . . . . . . . . . . . . . . 52

5.2 Evaluation des coûts et calcul de la VaR . . . . . . . . . . . . . . . . 545.2.1 Tracé des coûts cumulés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 545.2.2 Mesures de risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

5.2.2.1 Calcul de la Value at Risk . . . . . . . . . . . . . . 565.2.2.2 Calculs d'Expected shortfall . . . . . . . . . . . . . 56

5.2.3 Caractéristiques du risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 575.2.3.1 Prol de la distribution des pertes . . . . . . . . . . 575.2.3.2 Sensibilité du risque aux diérents paramètres . . . 59

6 Modèle de taux stochastiques 626.1 Modèle de Vasicek . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

6.1.1 Processus d'Ornstein-Uhlenbeck . . . . . . . . . . . . . . . . 626.1.2 Prix d'un zéro-coupon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 646.1.3 Prix d'un call européen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 656.1.4 Avantages et inconvénients du modèle de Vasicek . . . . . . . 67

6.2 Minimisation du risque dans le cadre étendu . . . . . . . . . . . . . . 686.2.1 Support théorique : synthèse des résultats . . . . . . . . . . . 686.2.2 Calcul des formules explicites . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

7 Discussion sur l'intérêt et la mise en oeuvre de la méthode 717.1 Apports d'une gestion dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 717.2 Incidence des normes juridiques sur la gestion de portefeuille . . . . 727.3 Mise en oeuvre pratique d'une stratégie dynamique . . . . . . . . . . 737.4 Quelques mots sur le calcul du capital économique sous Solvabilité II 73

A Une démonstration mathématique 76

B Quelques fonctions R 79B.1 Tracé de la composition du portefeuille dynamique . . . . . . . . . . 79B.2 Calcul de VaR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81

C Table de mortalité INSEE 83

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Introduction

Lorsqu'une banque d'aaires crée un produit dérivé optionnel pour un client (uncall par exemple), elle utilise la prime versée par ce dernier pour couvrir ses en-gagements. Plus précisément, la banque choisit une stratégie d'investissement quilui assure de pouvoir honorer les versements contractuels prévus, quelle que soitl'évolution du cours des actifs. Il s'agit pour elle de couvrir ses créances en lesrépliquant, an de limiter le risque de devoir dégager des liquidités au-delà de laprime, et donc le risque d'insolvabilité.

Dans le domaine de l'assurance-vie, les contrats en unités de compte avec garantieplancher présentent une forte analogie avec les produits dérivés évoqués ci-dessous.Ils permettent en eet à l'assuré de proter d'un rendement adossé à celui de titresnanciers risqués (et donc potentiellement plus élevé que dans un contrat eneuros) mais de protéger son épargne en cas de mauvaise performance des marchés.La garantie joue le rôle du strike dans une option nancière.

Il existe cependant une diérence majeure entre les deux types de contrats : enassurance-vie, l'aléa de mortalité doit être pris en compte. En cas de décès pré-maturé de l'assuré, une somme sera ainsi versée à ses ayants-droit. La couvertured'un contrat d'assurance-vie fait donc face à deux aléas largement indépendants 1,à savoir le risque nancier et le risque de mortalité. De manière schématique, lesuctuations du cours des unités de compte et le décès éventuel d'assurés avant leterme du contrat inuent sur les versements que doit eectuer l'assureur.

L'indépendance de ces deux risques est au coeur du problème de couverture. Unecompagnie d'assurance-vie voulant couvrir un contrat ne pourra en eet recourirqu'à des produits nanciers, pour se prémunir contre un risque ayant pourtant unecomposante non-nancière. Formellement, il s'agira pour elle de répliquer un pro-duit dérivé sur un marché incomplet. La théorie des marchés incomplets montreque toute créance n'y est pas parfaitement réplicable, ou, autrement dit, qu'il yexiste un risque de non-couverture 2.

Contrairement au cas où le marché est complet, la prime initialement versé parl'assuré ne sut plus systématiquement à couvrir les engagements de l'assureur, cequi peut induire pour ce dernier un coût supplémentaire. Ainsi, les stratégies d'in-vestissement ne sont en général pas auto-nancées. La théorie de la minimisationdu risque repose sur un critère simple : le risque est mesuré comme la variance du

1. L'indépendance de ces deux risques n'est pas totale en pratique, notamment du fait del'existence des mécanismes de réassurance et de titrisation. L'hypothèse d'indépendance seratoutefois faite lors des développements calculatoires. Nous renvoyons à la section 3.3 pour uneétude plus détaillée de cette question.

2. Nous renvoyons au chapitre 1 pour une présentation heuristique plus détaillée de ces notions,et au chapitre 2 pour une dénition formalisée.

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TABLE DES MATIÈRES 5

coût restant à supporter par l'assureur. Minimiser le risque au sens de ce critèreest crucial pour l'assureur, puisque cela permet de limiter le risque d'insolvabilitérésultant d'une évolution défavorable des marchés ou de la mortalité.

Dans un premier temps (chapitres 1 à 3), nous développons la théorie de la mi-nimisation du risque et calculons la composition des portefeuilles de couvertureoptimaux, pour trois types de contrats stylisés. Ensuite (chapitres 4 et 5), nous ef-fectuons des simulations numériques de ces résultats, an d'en obtenir une meilleurecompréhension et d'évaluer leur apport en terme de réduction du risque, grâce aucalcul de mesures de risque et au tracé de prols de pertes. Enn (chapitres 6 et7) nous voyons comment les résultats peuvent être étendus et appliqués en pratique.

Signalons d'emblée que les stratégies optimales consistent en une gestion dynamiquede l'actif, avec de nombreuses réallocations au cours du temps. La problématiquesous-jacente à la minimisation du risque est donc d'évaluer dans quelle mesureune stratégie dynamique peut être meilleure (i.e. moins risquée) qu'une stratégiestatique d'apparence plus conservatrice. A ce titre nous plaçons dans une optique recherche en nous focalisant sur la méthode en elle même plus que sur sa com-patibilité avec le cadre réglementaire actuel.

La démarche que nous adoptons dans ce mémoire se fonde principalement sur lestravaux de Thomas Möller qui, le premier, a adapté la théorie de la minimisationdu risque à l'assurance. Dissipons toute ambiguïté en précisant que la plupart desrésultats théoriques (chapitre 3) ont été présentés dans ses travaux, éventuellementde manière assez lapidaire. Notre but est précisément de mieux comprendre cesrésultats et de les mettre en pratique an d'observer la gestion actif-passif qu'ilspréconisent de mettre en oeuvre, et de mesurer leur intérêt pratique pour l'assu-rance.

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Chapitre 1

Présentation des produits

étudiés et position du problème

Dans ce chapitre introductif, on approche le problème de manière purement heu-ristique, avec un formalisme minimal. Les diérentes notions exposées ici serontensuite reprises dans un cadre plus abstrait.

1.1 Contrats en unités de compte avec garanties

Ce mémoire se concentre sur la minimisation du risque de couverture de contratsd'assurance-vie en unités de compte avec garanties.

1.1.1 Caractéristiques des contrats

Cette étude vise à transposer au secteur de l'assurance des méthodes de couver-ture d'origine nancière. De telles techniques concernent donc au premier chef descontrats d'assurance ayant une composante nancière explicite, tels que les contratsd'assurance-vie en unités de compte. Les contrats en unités de compte (UC) sontdes contrats d'épargne dans lesquels le capital apporté par le souscripteur est in-vesti dans des actifs nanciers, et suit donc la même évolution. L'assuré porte alorsle risque nancier associé à ces placements.

An d'attirer une clientèle averse au risque mais désireuse d'obtenir de son épargneun rendement plus élevé que les produits classiques ne le permettent (épargne ré-glementée, assurance-vie en euros), les contrats en unités de compte peuvent se voiradjoindre une garantie plancher , assurant au souscripteur un capital minimalou une revalorisation minimale de son épargne. Les incertitudes actuelles sur lapossibilité d'une reprise économique durable dans les états de l'OCDE plaident enfaveur de ce type de contrat limitant les risques pour l'assuré tout en lui permettantde proter d'une éventuelle hausse des marchés.

Diverses autres garanties ont été proposées dans des contrats d'assurance-vie, commel'atteste le développement du marché des variable annuities, de type GMxB (Gua-ranteed Minimum Income/Death/Withdrawal/... Benet). Parmi ces garanties,nous retiendrons la garantie décès : si l'assuré décède avant l'échéance du contrat,un montant minimal est versé à ses ayants-droit. Celle-ci est particulièrement per-tinente dans le cadre de notre rapport, car elle repose sur un aléa non nancier, la

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CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES PRODUITS ÉTUDIÉS ET POSITION DU PROBLÈME7

mortalité. Nous étudierons précisément les diérences entre les deux sources d'aléa,et leurs implications en terme de risque pour l'assureur.

1.1.2 Contrats stylisés étudiés

Dans ce mémoire, nous étudierons un contrat d'épargne en unités de compte avecgarantie plancher et garantie décès. Lors de la modélisation d'un tel contrat nousnoterons g(T, ST ) = max

(ST ,Ke

δT)le paiement nal : à échéance, les unités de

compte sont réalisées à leur valeur de marché ST et versées à l'assuré avec un éven-tuel complément, l'assureur s'engageant à ce que le versement soit au moins égal àun minimum KeδT . K désigne ici la valeur initiale de la garantie, revalorisée à untaux garanti δ 1.

Si l'assuré décède avant la date T de n de contrat, la somme

g(t, St) = max(St,Ke

δt)

sera versée à ses ayants-droit. La garantie en cas de décès peut donc aussi s'inter-préter comme une garantie plancher, du point de vue de l'assureur : il est certainque chaque contrat impliquera un versement monétaire aux assurés, même en casde décès prématuré.

Remarque 1.1 Nous excluerons la possibilité de racheter le contrat (partiellementou totalement) avant terme. Notre propos est en eet de disjoindre un contratd'assurance-vie sous forme d'une partie liée à l'aléa nancier et d'une autre à l'aléade mortalité, et de voir dans quelle mesure une couverture nancière peut protégerl'assureur contre ces risques. L'ajout de la possibilité de rachat induirait un troi-sième aléa - partiellement corrélé à l'aléa nancier - et compliquerait inutilementl'étude. Le cadre développé ici pourrait toutefois être étendu au risque de rachat.

Remarque 1.2 Nous supposerons que le souscripteur du contrat verse une primeunique, en début de période, et ne peut augmenter son épargne une fois réalisé lepremier investissement.

An de mener à bien l'étude, nous décomposerons le contrat évoqué en deux par-ties :

1. Un contrat d'assurance survie avec garantie plancher, ne présentant pasde garantie décès. En cas de décès prématuré de l'assuré, l'assureur se voitdonc libéré de ses obligations et garde l'intégralité de la prime initialementperçue. Si l'assuré survit, il reçoit le montant mentionné ci-dessus.

2. Un contrat d'assurance décès avec garantie plancher. Dans ce contrat,si l'assuré décède durant la période de couverture (i.e. avant le terme ducontrat), les unités de compte sont liquidées et versées aux bénéciaires, dou-blées d'un éventuel complément monétaire permettant d'atteindre la valeurde la garantie plancher.

Les résultats obtenus sur ces deux contrats permettront ensuite de conclure direc-tement sur le contrat complet présentant les deux garanties. Par la suite, nousqualierons d'assurance mixte ce contrat.

1. Le paramètre δ représentera par exemple le taux d'ination.

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CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES PRODUITS ÉTUDIÉS ET POSITION DU PROBLÈME8

1.2 Risques encourus par l'assureur

Lorsque l'assureur devient partie à un contrat d'assurance, il accepte un transfertde risque en provenance de l'assuré, moyennant une prime. Ce risque est très faibledans le cas d'un contrat en unités de compte sans garantie - mais pas nul, pensonsau risque de liquidité en cas de rachat. L'ajout d'une garantie accroît par contre for-tement le risque pour l'assureur, qui ne peut plus se contenter de laisser faire lemarché : il s'agit pour lui de gérer le risque, c'est à dire de le mesurer et de le limiter.

Dans le cas de l'assurance-vie avec garantie décès - en l'absence de précisions, onconsidérera toujours qu'un tel contrat est assorti d'une garantie plancher -, l'assu-reur fait face à deux risques directement liés au contrat : le risque nancier et lerisque de mortalité (on exclut le risque opérationnel, le risque de liquidité, etc.).Il doit donc utiliser la prime à bon escient pour se protéger au mieux contre cesrisques.

1.2.1 Risque de mortalité

Lors du calcul de prime, l'assureur estime la mortalité de la population à assurer.En pratique, par son intensité - nombre total de décès - et sa temporalité - date desurvenance des décès au cours de la période de couverture -, la mortalité est sujetteà un fort aléa. Dans le modèle de mortalité qus nous choisirons, nous exclueronstout choc de mortalité exogène pour nous concentrer sur une mortalité dépendantuniquement de l'âge.

Pour les assurances survie et décès, le risque de mortalité peut être en partie mutua-lisé. Dans le premier cas, les primes liées aux contrats de personnes décédant avantéchéance serviront à nancer les versements aux survivants. A l'inverse, dans le casde la garantie décès, les primes des survivants permettent à l'assureur d'honorerses engagements envers les ayants-droit des personnes décédées. En considérant queles assurés ont des caractéristiques homogènes (ce que nous supposerons toujoursdans les applications numériques), il sut d'augmenter le nombre de contrat pourlimiter la variance du résultat.

L'assurance mixte est complètement diérente au regard du risque de mortalité.Le décès comme la survie de l'assuré entraînant un paiement par l'assureur, desurcroît de forme identique, la mortalité n'est plus à proprement parler un risque.Plus précisément, le seul risque est qu'un choc de mortalité 2 - positif ou négatif -intervienne à un moment défavorable à l'assureur, et amplie le risque de marché.Imaginons par exemple qu'un événement catastrophique augmente brutalement lamortalité alors que les marchés s'eondrent. L'assureur devra alors fournir le com-plément entre la valeur des actifs et la garantie plancher, et ce à un grand nombrede bénéciaires. Nous reviendrons plus en détail sur ce point ultérieurement.

1.2.2 Risque de marché

Le risque de marché découle de la uctuation du prix des actifs nanciers. Cerisque est particulièrement aigu pour l'assureur dans le cas d'un contrat en unités

2. Nous avons exclu les chocs de mortalité exogènes et considérons donc que la mortalité desindividus assurés est non corrélée. Mais cela n'empêche en rien un choc au sens statistique duterme, c'est à dire une déviation du nombre de décès eectivement observés à une date, parrapport à son espérance.

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CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES PRODUITS ÉTUDIÉS ET POSITION DU PROBLÈME9

de compte avec garantie plancher. En eet, si l'on ne tient pas compte de la mor-talité, l'assureur vendant un contrat versant max

(ST ,Ke

δT)à la date T vend en

fait un call de maturité T , de sous-jacent S et de strike K (à la revalorisation près).

Selon que le vendeur d'un call investit la prime en actions ou en obligations, ils'expose à un risque de marché à la baisse ou à la hausse des actions. Quoiquel'espérance de perte soit asymétrique pour un dérivé optionnel, il n'est pas raison-nable de parier sur l'évolution à la hausse du marché en ne tenant pas comptede l'évolution réelle des cours.

Dans le cas de l'assurance, la réglementation impose à l'assureur de détenir lessous-jacents des contrats en unités de compte auxquels il est partie (Art. R332-5du Code des assurances 3), ce qui le couvre contre une hausse de la valeur des actifs.Mais en cas de baisse du prix du sous-jacent, l'existence d'une garantie plancherinduit un risque important pour l'assureur - majoré, il est vrai, par N ×KeδT , cequi ne peut néanmoins être raisonnablement négligé.

1.3 Notion de couverture

Faisons ici abstraction des normes comptables et considérons le seul aspect nancierdu problème. Nous donnons une intuition des questions fondamentales auxquellesnous répondrons ultérieurement de manière plus formelle.

Remarque 1.3 Plus généralement, rappelons que ce mémoire a une orientation recherche . Il s'agit d'étudier une méthode relevant d'une optique assez diérentede la pratique courante en assurance, et de la confronter aux techniques plus habi-tuelles. Dans ce cadre, c'est avant tout l'intérêt intrinsèque de la stratégie proposéequi importe. Aussi la non prise en compte des normes comptables ne doit-elle pasêtre interprétée comme une négligence ou un raccourci, mais comme le moyen d'yporter un regard critique. La confrontation avec le réel sera toutefois menée auchapitre 7, où nous évoquerons les enseignements à court terme qui peuvent êtretirés de l'étude.

Un produit dérivé peut s'écrire et se comprendre comme une fonction du prix d'ac-tifs nanciers : c'est un contrat d'échange de ux monétaires, dont les montantsdépendent du cours des actifs. Considérons un ensemble d'actifs donnés (qui consti-tueront un marché ), et un produit dérivé de ces actifs. Il est alors possible, parune stratégie de portefeuille adaptée, de répliquer le produit dérivé, c'est à direde constituer une collection d'actifs dont la valeur évoluera comme le pay-o duproduit dérivé. Autrement dit, à partir d'un montant investi de manière adéquate,et sans apport d'argent passé l'instant initial, le paiement nal peut être honoréavec certitude. On dira alors que sur un marché complet, pour tout produit dérivéil existe une stratégie répliquante autonancée.

Pour illustrer ces concepts, plaçons nous dans le cadre élémentaire du modèle bi-nomial à une période 4. On suppose que le marché comprend deux actifs, l'un sansrisque, revalorisé en t = 1 au taux r (on posera R = 1 + r), et l'autre, noté S,valant S0 en t = 0. En t = 1, l'actif risqué vaut Su1 = u.S0 avec la probabilité p et

3. Voir section 7.2.4. Cet exemple s'inspire du polycopié du cours de calcul stochastique de Romuald ELIE à

l'ENSAE.

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CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES PRODUITS ÉTUDIÉS ET POSITION DU PROBLÈME10

Sd1 = d.S0 avec la probabilité (1 − p). Notons x le capital initial et ∆ le nombred'unités d'actif risqué achetées. Notons C1 la richesse en t = 1. On a

Cu1 = ∆Su1 + (x−∆S0)R

Cd1 = ∆Sd1 + (x−∆S0)R

Renversons le problème et considérons les valeurs Cu1 et Cd1 données : il s'agiratypiquement du paiement associé au produit dérivé, selon le prix en t = 1 del'action. Rappelons en eet que le produit dérivé est une fonction du prix desactifs. Il y a donc au moins autant de combinaisons des valeurs des actifs que devaleurs du dérivé. On peut alors résoudre le système en x et ∆

∆ =Cu1 − Cd1(u− d)S0

x =1

R

(R− du− d

Cu1 +u−Ru− d

Cd1

)

Ces deux grandeurs dénissent une stratégie : un montant total x investi dans lesdeux actifs selon la clef de répartition ∆. Cette stratégie réplique parfaitement ledérivé

(Cu1 , C

d1

): quel que soit l'état de la nature en t = 1, la valeur du portefeuille

sera exactement égale à celle du dérivé.

Pour trivial qu'il soit, cet exemple est essentiel pour visualiser les notions de marchécomplet et de stratégie autonancée. Intuitivement, tant que le nombre de sourcesd'aléa dont dépend le produit dérivé est inférieur ou égal au nombre d'actifs quel'on peut échanger (et qui ont donc un rôle d'outils pour le trader ou l'assureur),on peut inverser le système précédent et donc trouver une stratégie de réplication 5.On élimine ainsi tout le risque de marché, puisqu'on égalise la valeur du portefeuilleà celle de la créance indépendamment de l'état du monde dans lequel on se trouvenalement.

Imaginons maintenant que le produit dérivé soit adossé à deux sources d'aléas, parexemple le prix de deux actions, mais que le trader ne puisse échanger que l'unedes deux actions. Il est clair qu'il ne sera pas possible de constituer un portefeuillede couverture répliquant parfaitement le produit de dérivé : l'aléa lié à l'actif nonéchangeable ne pourra être pris en compte dans le portefeuille. Autrement dit, lavariation de valeur du dérivé liée à la variation de prix de l'actif non échangeablene peut pas être répliquée par la détention de l'autre actif. Dans ce cas, le marchéest incomplet et il n'est pas certain que le trader puisse honorer ses engagementsen n de période sans rajouter du cash à son portefeuille : il n'y a plus de stratégieautonancée.

En modiant légèrement cet exemple, on peut considérer le cas où la premièresource d'aléa (échangeable) est due à la variation du prix actifs nanciers (actions,obligations, etc.) et la seconde à la mortalité. Un contrat d'assurance-vie avec ga-rantie plancher peut être vu comme un produit dérivé sur ce grand marchécomposé de deux types d'aléas. Il ne pourra donc pas être couvert par une straté-gie de portefeuille autonancée.

5. Evidemment, le passage au cas continu pose des dicultés techniques et nécessite une théorieplus profonde.

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CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES PRODUITS ÉTUDIÉS ET POSITION DU PROBLÈME11

Cette carence dans la réplication incite à prendre en compte, dans une optiquede solvabilité, le risque de non-couverture : il s'agit de minimiser le montant decash à apporter en plus de la prime pour honorer ses versements aux assurés. Nousverrons ultérieurement un critère relativement simple de mesure de ce risque denon-couverture, et nous déterminerons la stratégie minimisant ce critère.

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Chapitre 2

Théorie classique de la

minimisation du risque

Dans ce chapitre, on donne les bases conceptuelles ainsi que les résultats fondamen-taux de la théorie nancière 1 de la minimisation du risque. Lorsque nous appli-querons ces résultats à des contrats d'assurance aux chapitres suivants, certainesdénitions seront légèrement modiées. Cette approche en deux temps doit per-mettre de mieux comprendre l'origine des résultats théoriques, et d'en donner uneinterprétation concrète.

2.1 Rappels mathématiques

Nous commençons par introduire des notions mathématiques et un formalisme quiseront utiles dans la suite de l'exposé. Nous nous contenterons des dénitions essen-tielles au raisonnement, sans rentrer dans des détails techniques qui alourdiraientinutilement le propos 2.

On se place dans un espace de probabilité (Ω, F, P ) et on se donne un horizonni T ∈ R?+. On considère une ltration F = (Ft)0≤t≤T , c'est à dire une famillecroissante (pour l'inclusion) de tribus : ∀s ≤ t,Fs ⊂ Ft. On supposera que cetteltration vérie les propriétés usuelles de continuité à droite (i.e. Ft = ∩s>tFs) etde complétude. Un espace de probabilités est dit complet si pour tout B ∈ F telque P (B) = 0, A ⊂ B implique que A ∈ F .

Dénition 2.1 Soit X = (Xt) un processus aléatoire. On dit que

(i) X est F-adapté si Xt est Ft-mesurable pour tout t ≥ 0

(ii) X est F-prévisible si Xt est Ft− -mesurable pour tout t ≥ 0, avecF0− = ∅,Ω

Ces deux notions seront au centre de la représentation mathématique du concept d' information disponible à une date donnée, et donc de la dénition de stratégiesd'investissement. En eet, dans un modèle classique à deux actifs, l'actif risqué serareprésenté par un processus adapté - on ne peut pas anticiper le cours d'une action,

1. Nous utiliserons indiéremment les termes de nancière ou de classique pour désignerla théorie de la minimisation du risque telle qu'elle est la plus souvent utilisée, par opposition àson application à l'assurance, nettement plus marginale.

2. Pour une présentation approfondie de ces notions, voir [9] et [11].

12

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE13

seulement le constater - alors que l'actif sans risque suivra un processus prévisible- sur une durée brève, son prix est donné par un taux court déterministe. Ainsi cesnotions permettent de traduire le fait qu'une stratégie de portefeuille est toujours en retard sur l'aléa, et doit donc prendre en compte ce risque intrinsèque.

Denition 2.2 Un temps d'arrêt ν est une variable aléatoire à valeurs positivestelle que

∀t ≥ 0, ν ≤ t ∈ FtPour un agent qui dispose de l'information décrite par la ltration F, les tempsd'arrêts sont les seuls temps aléatoires perceptibles. Il s'agit de la transposition dela notion de temps au cadre stochastique.

Dénition 2.3 Soit X = (Xt) un processus aléatoire sur l'espace probabilisé ltré(Ω, F,F, P ). On dit que X est une martingale si Xt est P -intégrable pour tout tet si

∀s ≤ t, E [Xt|Fs] = Xs

Si X est tel qu'il existe une suite de temps d'arrêts (Tt)t≥0 vériant Tt → +∞ P −p.s. quand t → +∞ et telle que toutes les variables arrêtées XTt = Xt∧Tt |t ≥ 0soient des martingales, on dit que X est une martingale locale.

Une martingale locale est donc un processus qui se comporte comme une martin-gale jusqu'à un certain rang , ce rang étant arbitrairement grand. Néanmoins, ilexiste des martingales locales qui ne sont pas des martingales : ce sont celles dontl'espérance n'est pas bornée. De tels processus sont divergents, mais présentent despropriétés intéressantes à distance nie.

On notera M l'ensemble des martingales intégrables et L l'ensemble des martin-gales locales démarrant à 0 en t = 0.

Dénition 2.4 Un processus stochastique (Xt) est dit càdlàg (continu à droite,limite à gauche) si

(i) lims→t,s>tXs = Xt P − p.s. : hypothèse de continuité à droite

(ii) ∃Xs− , lims→t,s<tXs = Xs− : existence d'une limite à gauche

Cette dénition décrit bien les uctuations d'une action, du point de vue de l'in-vestisseur : lorsqu'on choisit une stratégie pour la date t, on connaît le cours desactifs en t− mais on ignore leur valeur en t. Or un saut de valeur intervient en t :à nouveau, on retrouve l'idée selon laquelle l'investisseur est toujours en retard surl'incertain.

Denition 2.5 Une semi-martingale est un processus de la forme

X = X0 +A+M

avec X0 F-mesurable ni, A un processus à variation bornée et M ∈ L. Un proces-sus à variation bornée (At) est un processus càdlàg, F-adapté, vériant A0 = 0 ettel que t → At(ω) est à variation bornée (i.e. peut s'écrire comme la diérence dedeux processus croissants) sur [0;T ] P − p.s..

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE14

Les semi-martingales jouent un rôle important en théorie des probabilités car ellesconstituent la classe la plus large de fonctions pour lesquelles une intégrale stochas-tique peut être dénie.

Remarque 2.6 De manière plus imagée, on dit qu'un processus X est à variationbornée si chacune de ses trajectoires a une longueur nie i.e.

supΠn

∑|Xti −Xti−1

| < +∞

avec Πn une subdivision de [0;T ] et (ti) les points associés.

Dénition 2.7 Deux mesures P et P ? sont dites équivalentes si

∀A ∈ F , P (A) = 0⇔ P ?(A) = 0

Deux mesures équivalentes dièrent par le poids relatif qu'elles accordent aux évé-nements, mais aboutissent à la même partition en événements improbables ounon. Cette idée est à la base du principe de changement de mesure, auquel nousaurons largement recours.

Dénition 2.8 La mesure de martingale minimale Q associée à une P -semi-martingale X est la mesure de martingale telle que toute P -martingale locale or-thogonale àM (oùM est la martingale locale nulle en 0 intervenant dans la décom-position de X) soit aussi une Q-martingale locale. Cette mesure sera notée MMM,en l'absence d'ambiguïtés.

L'existence et l'unicité de la MMM ont été prouvées par Föllmer et Schweizer [1].Cette notion jouera un rôle central dans la suite de l'étude, car nous verrons quedans la classe des mesures martingales équivalentes à la mesure naturelle, elle estcelle qui déforme le moins le cours des actifs. Nous reviendrons plus en détailsur ce concept à la section 2.4.2.

2.2 Modélisation du marché

On commence par décrire un marché nancier en temps continu et introduire lesnotions fondamentales de la théorie de la minimisation du risque. Ces concepts sonttirés de l'article fondateur de Föllmer et Sondermann [2]. Le marché est composéde d actifs risqués , dont les processus de prix sont donnés par les variablesaléatoires Si = (Sit)0≤t≤T . Le prix du cash est noté S0 et on suppose qu'il est stric-tement positif. On peut alors passer aux prix relatifs Xi = Si/S0 pour i ∈ [|1; d|],avec Xt = (X1

t , X2t , . . . , X

dt ) le vecteur des prix relatifs à la date t. On supposera

que le processus X = (Xt) est de carré intégrable, F-adapté et continu.

Dénition 2.9 Une stratégie de portefeuille sera représentée par un coupleϕ = (ϑ, η) = (ϑt, ηt)0≤t≤T , où ϑ est le vecteur de dimension d des quantités investiesdans chacun des actifs risqués, et η désigne le montant de cash. On suppose que ϑest F-prévisible - ce qui traduit que l'on ne peut pas anticiper le cours des actions- et que η est F-adapté - le cash est un actif sans risque à court terme. La valeurdu portefeuille à la date t est donnée par

Vt = ϑtXt + ηt

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE15

Les gains de trading sont égaux à Gt(ϑ) =´ t

0ϑsdXs ; on supposera que X est une

semi-martingale, an que cette intégrale soit correctement dénie.

Remarque 2.10 En pratique, dans les applications numériques, on se placera dansle cas d = 1. Cela correspond au modèle de Black-Scholes classique décrivant unactif risqué et un actif sans risque.

Dénition 2.11 Une créance contingente est une variable aléatoire H, me-surable et de carré intégrable, qui décrit les paiements associés à un instrumentnancier. Une créance contingente purement nancière (i.e. un produit dérivé àsous-jacent nancier, une option sur actions par exemple) sera donc une variablealéatoire H ∈ L2(P,F).

Dans notre étude, H désignera typiquement la somme versée par l'assureur en casde décès de l'assuré à une date comprise entre 0 (date de la souscription du contratd'assurance-vie) et T (date d'expiration du contrat). Cette créance ne sera doncpas purement nancière, car liée à une source d'aléa d'origine non nancière, àsavoir la mortalité.

Considérons un contrat entre un vendeur - l'assureur - et un acheteur. Ce contratspécie un ux de paiements, représenté par un processus stochastique (At) quel'on supposera F-adapté, de carré intégrable et càdlàg. At est donc à valeurs dansR, et l'on conviendra qu'une valeur positive correspond au versement d'une sommed'argent à l'assuré par l'assureur. On peut par exemple prendre un contrat de laforme

At = −κ+ 1t≥TH

c'est à dire que le souscripteur acquitte une prime d'assurance κ à la date t = 0et que le bénéciaire reçoit un montant H à la date T . Il revient donc à l'assureurde couvrir au mieux ce processus, par une stratégie de portefeuille adéquate. Lavaleur de H peut être xée en termes réels dès le début du contrat, par exemplesi l'assureur garantit un taux. Néanmoins, nous étudierons ici des contrats où Hdépend de l'évolution du marché nancier, typiquement des contrats en unités decompte. Dans ce cas, le ux At dépendra de deux sources d'aléa : la durée de lavie (risque actuariel) et les uctuations des marchés d'actions (risque nancier).

La spécicité du problème est donc de couvrir avec des actifs nancier des actifs mixtes , à savoir des contrats d'assurance-vie. Formalisons cela davantage : lemarché nancier est représenté par un quadruplet Λf = (Ωf , F f ,Ff , P f ) et onpeut, de manière similaire, décrire l'aléa lié à la mortalité par un espace ltréΛa = (Ωa, F a,Fa, P a). Plus précisément, l'espace Λa décrit les caractéristiques dela population étudiée intéressantes pour l'assureur. Par exemple, Λa peut dé-crire, à chaque temps t, le nombre d'assurés encore en vie.

An de modéliser complètement le problème, on est donc conduit à travailler surl'espace produit

Λ = (Ω, F,F, P ) = Λf × Λa

avec Ω = Ωf ×Ωa, F = (F f ⊗F a)∨N , P = P f ⊗P a et F = Ft =(Fft ⊗Fat

)∨N

où N est la tribu engendrée par les ensembles P -négligeables

N = σA ⊂ Ω|∃B ∈ F f ⊗ F a, A ⊂ B etP (B) = 0

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE16

L'espace Λ est donc constitué de deux composantes supposées sans liens (i.e. dedeux espaces orthogonaux) : le marché nancier d'une part, où l'aléa est constituédes uctuations des prix des actifs, et la mortalité d'autre part, où l'aléa résulte dela survie ou du décès des assurés. Cet espace produit est le cadre adapté à la des-cription de variables aléatoires dérivant des deux sources d'aléa. En particulier, unproduit d'assurance-vie s'y représente naturellement : les prestations de l'assureursont déterminées d'une part par l'aléa nancier (variations des cours et garantiesplancher), d'autre part par le risque de mortalité (décès ou survie d'un assuré).

Dénition 2.12 Le processus de coût est la diérence entre la valeur du porte-feuille et les gains de trading, ou autrement dit le coût (cumulé) qu'a dû supporterle détenteur du portefeuille pour le constituer

Ct(ϕ) = Vt(ϕ)−ˆ t

0

ϑsdXs = Vt −Gt(ϑ)

Ainsi, à la date t = 0, l'assureur investit la somme C0(ϕ) dans un portefeuille decouverture, en partie nancé par la prime −A0 initialement perçue. VT désignela valeur nale du portefeuille. On s'intéressera donc aux stratégies ϕ telles queVT (ϕ) = H P − p.s. et on qualiera de telles stratégies de H-admissibles.

La notion de coût est fondamentale pour l'assureur, dans une optique de solvabilité.Le coût représente en eet le surcroît de liquidités que l'assureur doit dégager pourcouvrir ses engagements, au-delà des seules primes initialement perçues. Un coûtdurablement trop élevé peut traduire une sous-tarication du contrat. Plus problé-matique, une variance trop élevée du processus de coût met en évidence un risqued'insolvabilité de l'assureur. La technique de minimisation du risque quadratiquerésiduel que nous présentons prend précisément comme critère d'ecacité la ré-duction de la volatilité du coût à charge de l'assureur.

Dans le référentiel Solvabilité II, il convient d'estimer précisément la distribution ducoût, an d'évaluer - et de limiter - la probabilité de faillite (à un an) de l'assureur.Nous reviendrons sur ce point ultérieurement, en montrant comment une stratégiede minimisation du risque permet de dénir un portefeuille de réplication optimalen terme de coût. Nous verrons cependant que la réplication est par constructionimparfaite.

Dénition 2.13 Une stratégie est dite autonancée si sa fonction de coût estconstante, ou, de manière équivalente, si

∀t ∈ [0;T ] , Vt = V0 +

ˆ t

0

ϑsdXs = V0 +Gt(ϑ)

avec V0 la valeur initiale du portefeuille. Ainsi, une fois réalisé l'investissement ini-tial, nécessaire à la constitution du portefeuille, aucuns fonds supplémentaires neseront apportés.

Dans un marché complet, toute créance peut être atteinte (P −p.s) par une straté-gie autonancée, ne laissant - théoriquement - aucun risque à charge de l'assureur.En marché incomplet, cette propriété ne tient plus. On doit alors recourir à la no-tion, plus faible, de stratégie autonancée en moyenne.

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE17

Dénition 2.14 Une stratégie est autonancée en moyenne si son processusde coût est une martingale, soit notamment

∀s ≤ T, Cs = E [CT |Fs]

Ainsi, à chaque date, le coût total de la stratégie estimé selon l'information dispo-nible, a déjà été pris en compte et réglé. Une stratégie autonancée en moyennerépond donc au critère d'évaluation best estimate des passifs. Rappelons en eetque le CEIOPS dans le document QIS4 dénit le best estimate comme la moyennepondérée par leur probabilité des ux de trésorerie futurs, compte tenu de la va-leur temporelle de l'argent (valeur actuelle probable des ux de trésorerie futurs),déterminée à partir de la courbe des taux sans risque pertinente 3 .

Dénition 2.15 Une créance contingente H est dite atteignable s'il existe unestratégie autonancée (ϑ, η) telle que VT = H P − p.s. ou autrement dit si on peuttrouver une constante H0 telle que

H = H0 +

ˆ T

0

ϑsdXs p.s.

Un marché est complet lorsque toutes les créances contingentes sont atteignables.

Cela peut s'interpréter de la manière suivante : dans un marché complet, le seulaléa est celui lié à l'évolution du cours des actifs, ou, autrement dit, tout risquerepose uniquement sur une variation de la valeur des actions. Il est alors possiblede décomposer un risque en d facteurs de risques étant chacun intégralement dé-crit par la uctuation d'un seul actif. En détenant la bonne quantité de chaquerisque (i.e. le bon nombre, éventuellement négatif, de chaque actif), on construitun portefeuille évoluant similairement au risque considéré. Autrement dit, on peutparfaitement couvrir tout risque par un portefeuille adéquat.

Ainsi, dans un marché complet il est toujours possible de couvrir une créancecontingente avec le portefeuille

(ϑt, H0 +

ˆ t

0

ϑsdXs − ϑtXt)

où H0 est la valeur initiale du portefeuille. Ce résultat ne tient pas pour un marchéincomplet, où les créances ne sont pas toutes atteignables. Il est donc nécessairede dénir un critère d'évaluation permettant de trouver des bonnes stratégies pour couvrir au mieux (à défaut de parfaitement) des créances non-atteignables.

Le processus de risque est la variance du coût restant à supporter, condition-nellement à l'information disponible à la date t :

Rt(ϕ) = E[(CT (ϕ)− Ct(ϕ))2|Ft

], 0 ≤ t ≤ T

R mesure donc le risque de couverture restant à la charge de l'assureur.

L'enjeu de tous les développements ultérieurs sera de proposer une stratégie deportefeuille qui minimise ce processus de risque. Autrement dit, il s'agira de com-poser un portefeuille d'actifs qui permette de réduire les apports nanciers futurs,

3. CEIOPS, QIS4 Technical specications, TS.II.A.10, mars 2008.

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE18

et donc de garantir tant que faire se peut la solvabilité de l'assureur. L'idée sous-jacente est de répliquer la créance contingente, c'est à dire de détenir des actifs quiévoluent de la même manière, permettant de dissiper le risque d'accroissement desengagements de l'assureur.

Dénition 2.16 Une stratégie ϕ est risque-minimisante si ∀t ∈ [0;T ] , Rt(ϕ) ≤Rt(ϕ) P − p.s. pour tout prolongement admissible ϕ de ϕ à la date t.

Un prolongement admissible de ϕ à la date t est un processus qui coïncide avecϕ avant t et dont la valeur terminale est identique à celle de ϕ (i.e. est égale à H).Autrement dit :

1. ∀s ≤ t, ϑs = ϑs et ∀s ≤ t, ηs = ηs

2. VT (ϕ) = VT (ϕ) P − p.s.

Cette dénition est très naturelle : on cherche une stratégie dont la fonction derisque soit, à toute date, la plus petite possible. Néanmoins on peut remarquer quel'existence d'une telle stratégie n'a rien d'évident. Mathématiquement, cela revientà prouver que l'enveloppe convexe (inférieure) des processus de risque dénit lafonction de risque d'une stratégie de portefeuille, ou encore que l'ensemble admetun min pour la norme ||.||∞.

Remarque 2.17 Une stratégie autonancée est risque-minimisante : l'investisse-ment est entièrement fait à la date t = 0, et le risque est donc nul. Il n'y a aucuncoût supplémentaire pour l'assureur en cours de contrat.

2.3 Changement de mesure

Nous avons construit l'espace actuariel d'étude des contrats d'assurance-viecomme produit d'un espace nancier et d'un espace de mortalité. Sur cet espace,nous avons vu que la mesure P = P f ⊗ P a est le produit des mesures sur chacundes deux espaces. Nous discutons ici des diérentes mesures possibles.

2.3.1 Choix d'une mesure sur l'espace nancier

L'espace décrivant les uctuations des actifs nanciers est muni d'une mesure dite réelle ou historique . Sous cette mesure, il n'y a aucune raison que les cours desactions soient des martingales. En pratique, les actifs réels ne le sont d'ailleursjamais. Néanmoins, il est nécessaire de faire certaines hypothèses sur les propriétésmathématiques du processus représentant les actifs. Or la propriété martingale seprête particulièrement bien au calcul stochastique, et a une certaine cohérence pra-tique puisqu'elle correspond à un jeu équilibré (le coût est égal aux gains anticipés).

Pour réconcilier ces deux arguments, nous procéderons la plupart du temps à unchangement de mesure sur l'espace nancier. Nous supposerons que les actifs ne sontpas des martingales sous la mesure naturelle, et nous changerons de mesure pourmener à bien les développements calculatoires sous la mesure risque-neutre 4.

4. Cette mesure n'est cependant pas unique en général, contrairement à ce que l'usage laisseentendre. Néanmoins l'unicité est vériée en marché complet, ce qui explique cet abus de langage.

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE19

Le changement de mesure induit une déformation des grandeurs sous-jacentes,puisque deux mesures équivalentes chargent les mêmes ensembles, mais avec despondérations diérentes. Parmi les changements de mesure martingale, il apparaîtjudicieux de choisir celui qui conserve le mieux la géométrie initiale. C'est l'intérêtde la notion de mesure de martingale minimale (MMM), que nous avons introduiteprécédemment.

La MMM conserve l'orthogonalité et donc la géométrie de la représentationinitiale. En un sens, c'est donc la mesure la moins déformante, et c'est celle quenous choisirons implicitement lorsque nous eectuerons un changement de mesure.Pour d'autres caractérisations de la MMM, voir par exemple [8].

2.3.2 Choix d'une mesure sur l'espace de la mortalité

Anticipons légèrement sur la présentation plus détaillée du modèle de mortalité. Onnote Nt le nombre de décès survenus à la date t. On verra que Nt peut revêtir unsens plus large, ce qui ne change pas les conclusions auxquelles nous allons aboutir.On suppose que ce processus admet une densité

E [dNt|Fat− ] = λtdt

et on dénit le processus de comptage compensé

Mt = Nt −ˆ t

0

λudu

Ainsi, λt représente un taux statistique de mortalité, et´ t

0λudu est le nombre

théorique de décès sur l'intervalle [0; t]. Le processus Mt mesure donc l'écart entrele nombre réel et le nombre anticipé de décès.

On peut montrer queM est une martingale (voir [3]). Pour un processus prévisibleh > −1 on dénit L par

dLt = Lt−htdMt

et L0 = 1. On obtient alors une nouvelle mesure Q dénie par

dQ

dP= LT

Le paramètre h quantie l'attitude à l'égard du risque de l'assureur : un coecienth > 0 traduit l'aversion au risque de l'assureur, alors que h < 0 décrit un assureurayant du goût pour le risque. Pour chaque h on obtient une mesure équivalente àla mesure naturelle.

Dans la suite de l'exposé, on retiendra l'hypothèse classique de neutralité de l'as-sureur à l'égard du risque 5, i.e. h = 0. Dans ce cas, on a L = 1 et on reste doncsous la mesure réelle sur l'espace de mortalité.

5. On parle ici de risque de mortalité. L'assureur n'est par contre pas neutre au risque demarché, ce qui justie qu'on doive changer de mesure sur l'espace nancier.

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE20

2.3.3 Mesure sur l'espace produit

Soit U la mesure (risque-neutre) choisie sur l'espace nancier. On peut alors dénirune nouvelle mesure P sur l'espace produit

dP

dP= UTLT

Notons S le processus de prix d'une action. S est, par construction, une martingalepour U . Sur l'espace produit on a

E [St|Fs] =E [StUTLT |Fs]E [UTLT |Fs]

=E [StUT |Fs]E [LT |Fs]E [UT |Fs]E [LT |Fs]

= EU [St|Fs] = Ss

donc S est une P -martingale.

En prenant L = 1 i.e. en supposant que l'assureur est neutre vis-à-vis du risque demortalité (mais pas nancier !), on étend donc la mesure risque-neutre nancière àl'espace produit actuariel .

2.4 Résultats théoriques

Dénition 2.18 La valeur intrinsèque d'une créance contingente H est le pro-cessus aléatoire

V ∗t = E [H|Ft] , 0 ≤ t ≤ T

Cette dénition exprime le principe selon lequel la valeur d'un actif est égale,sous l'hypothèse d'absence d'opportunités d'arbitrage, à l'espérance des versementsactualisés qu'il génère.

2.4.1 Cas où la mesure réelle est une mesure de martingale

Dans cette partie, on fait l'hypothèse fondamentale suivante : X est une martingalesous la mesure réelle P . Cette hypothèse, fréquente dans la littérature nancière,est utilisée pour donner une première présentation de la théorie. Nous verrons en-suite comment s'en passer.

Les théorèmes suivants sont énoncés par Föllmer et Sondermann [2], qui, les pre-miers, ont développé la théorie de la minimisation du risque pour la couverture decréances sur un marché incomplet.

Théorème 2.19 Le processus valeur intrinsèque admet une unique décompositionde Galtchouk-Kunita-Watanabe, i.e. s'écrit de manière unique sous la forme

V ∗t = V ∗0 +

ˆ t

0

ϑHs dXs + LHt

avec LHt une martingale de moyenne nulle orthogonale à X (i.e. XLH est une mar-tingale) et ϑH un processus F-prévisible.

Preuve Voir [5] pour l'énoncé et la démonstration originaux.

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE21

Cette décomposition (abrégée GKW par la suite) sépare la partie de l'aléa sur V ∗tliée aux uctuations nancières, des autres sources d'incertitudes. Cela suggère decouvrir par un portefeuille réplicant cette partie du risque purement nancière. Al'inverse, la décomposition dresse aussi les limites inhérentes à la transposition auxassurances des techniques nancières de réplication : tant que les marchés nan-ciers ne comportent pas de titres hybrides (de type longevity bonds), il est illusoired'imaginer couvir parfaitement une créance. Ce point doit impérativement êtrepris en compte lors de l'utilisation de portefeuilles réplicants, par exemple pourla détermination du capital économique sous Solvabilité II. Nous reviendrons pluslonguement sur les liens entre la minimisation du risque et les utilisations classiquesde replicating portfolios dans le dernier chapitre.

La décomposition GKW est intimement liée au problème de minimisation du risque,comme l'exprime le théorème suivant.

Théorème 2.20 Une stratégie ϕ = (ϑ, η) H-admissible minimise la variance ducoût total

V (CϕT ) = E[(CϕT − E(CϕT ))

2]

= E[(LHT)2]

si et seulement si ϑ = ϑH .

Preuve Soit ϕ = (ϑ, η) une stratégie H-admissible. Par dénition du coût, on a, enutilisant la décomposition GKW de V ∗

CT = VT −ˆ T

0

ϑsdXs

= V ∗T −ˆ T

0

ϑsdXs

= V ∗0 +

ˆ T

0

(ϑHs − ϑs)dXs + LHT

Puis, par orthogonalité de X et LH dans GKW,

E[(CϕT − E(CϕT ))

2]

= E

(ˆ T

0

(ϑHs − ϑs)dXs

)2+ E

[(LHT)2]

= E

[ˆ T

0

(ϑHs − ϑs)2d 〈X〉s

]+ E

[(LHT)2]

Par positivité de l'intégrale on obtient que la variance du coût nal est minimalesi et seulement si à toute date on a ϑHs = ϑs.

Si la valeur initiale du portefeuille est égale à la valeur intrinsèque initiale de lacréance (ce qui constitue une hypothèse standard), alors on a V (CϕT ) = Rϕ0 : ona donc un premier résultat de minimisation globale. Pour aller plus loin, il fautconsidérer les stratégies minimisant le risque globalement, mais aussi à toute date.En eet, on a déterminé la quantité optimale d'actions, mais la seule contrainte

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE22

sur l'actif sans risque est pour l'instant ηT = H − ϑHT XT6.

Prenons ainsi l'exemple d'une stratégie consistant à former un portefeuille d'actifsavec les ressources de départ (i.e. les primes), à gérer ce portefeuille sans entréeni sortie de capital le temps du contrat, puis, en t = T , à régler les créances auxassurés en réalisant le portefeuille, quitte à compléter par un apport de liquiditéssi la valeur nale de ce dernier est trop faible. Une telle stratégie, très intuitive, estH-admissible et autonancée jusqu'en T−. Elle minimise la variance du coût totalau sens du théorème précédent. Pourtant, elle n'est pas satisfaisante car elle faitpeser un lourd risque d'insolvabilité à l'échéance des contrats, les pertes latentesn'étant pas prises en compte avant la date T . Le critère de minimisation du risquepermet d'exclure une telle stratégie, comme l'exprime le théorème suivant : à toutedate, le cash est ajusté de sorte à égaliser la valeur du portefeuille à celle attenduede la créance en l'état de l'information, à savoir V ∗t .

Lemme 2.21

1. Une stratégie H-admissible et risque-minimisante est autonancée en moyenne.

2. Une stratégie ϕ est autonancée en moyenne si et seulement si son processusde valeur (Vt) est une martingale de carré intégrable.

Preuve 1. Soit ϕ = (ϑ, η) une stratégie H-admissible et risque-minimisante. Soientt0 ∈ [0;T ] et ϕ une stratégie dénie par

ϑt = ϑt, t ∈ [0;T ]

ηt = ηt, t < t0

ηt = Ct +´ t

0ϑsdXs − ϑtXt, t0 ≤ t ≤ T

avec Ct = E [CT |Ft]. On vérie que ϕ est un prolongement admissible de ϕ en t0.Par ailleurs, on a

CT − Ct0 = (CT − Ct0) +(Ct0 − Ct0

)d'où

E[(CT − Ct0)

2 |Ft0]

= E

[(CT − Ct0

)2

|Ft0]

+(Ct0 − Ct0

)2

Comme ϕ est risque-minimisante, on a nécessairement Ct0 = Ct0 P − p.s. t0 étantquelconque, on en déduit : ∀t ∈ [0;T ] , Ct = Ct = E [CT |Ft] i.e. (Ct) est une mar-tingale.

2. Immédiat car Ct(ϕ) = Vt(ϕ)−´ t

0ϑsdXs.

Théorème 2.22 Pour une créance contingente H donnée, il existe une uniquestratégie ϕ = (ϑ, η) H-admissible et risque-minimisante, donnée par

(ϑt, ηt) =(ϑHt , V

∗t − ϑHt Xt

), 0 ≤ t ≤ T

Le processus de risque associé est : Rt(ϕ) = E[(LHT − LHt

)2 |Ft].6. On rappelle que les stratégies considérées ici ne sont pas autonancées : on ne peut utiliser

de contrainte budgétaire pour calculer ηt.

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE23

Preuve Soit ϕ =(ϑHt , V

∗t − ϑHt Xt

). La valeur terminale d'un tel portefeuille est

V ∗T = E [HT |FT ] = H, et ϕ est donc H-admissible. Soit ϕ un prolongement admis-sible de ϕ à la date t. Alors son processus de coût vérie :

CϕT − Cϕt = VT − Vt −

ˆ T

t

ϑsdXs

= V ∗0 +

ˆ T

0

ϑHs dXs + LHT − Vt −ˆ T

t

ϑsdXs

= (V ∗t − Vt) +

ˆ T

t

(ϑHs − ϑs)dXs + (LHT − LHt )

Par suite, comme ϕ et ϕ coïncident sur [0, t], on obtient

E

[(CϕT − C

ϕt

)2

|Ft]

= E

[ˆ T

t

(ϑHs − ϑs)2d 〈X〉s |Ft

]+Rt(ϕ) + (V ∗t − Vt)

2

≥ Rt(ϕ)

Donc ϕ est risque-minimisante.

Il reste à prouver l'unicité d'une telle stratégie. Soit donc ϕ = (ϑ, η) une autrestratégie H-admissible et risque-minimisante. D'après le théorème précédent, on adéjà ∀t ∈ [0;T ] , ϑt = ϑt P −p.s.. Par ailleurs, d'après le lemme, ϕ est autonancéeen moyenne, et V est donc une martingale. Or, ϕ et ϕ étant H-admissibles, ona VT = H = VT P − p.s., et, par propriété des martingales, ∀t ∈ [0;T ] , Vt =Vt P − p.s..Par dénition de la valeur du portefeuille, il s'ensuit que ϕ et ϕ coïncident à toutedate.

Ce résultat présente une grande importance théorique. Associé à la décompositionde Galtchouk-Kunita-Watanabe, il illustre la dualité du risque auquel est confrontél'assureur : d'une part, le risque nancier, lié aux uctuations de X, et répliquépar la détention d'un portefeuille d'actions. D'autre part, un risque résiduel L, in-dépendant du risque nancier (ce qui, formellement, se traduit par l'orthogonalitédes martingales X et LH), et qui ne peut donc être parfaitement couvert par unestratégie de portefeuille. On verra qu'il s'agit d'un risque actuariel , c'est à direqu'il correspond aux facteurs de risques assurés 7.

Outre ses implications théoriques, le théorème sera utile pour calculer la straté-gie optimale : une fois obtenue la décomposition GKW, il est aisé, en vertu duthéorème, de déterminer le portefeuille risque-minimisant.

2.4.2 Cas général et minimisation locale

Si elle est couramment utilisée dans la littérature nancière, l'hypothèse que leprocessus de prix est une martingale pour la mesure de base est rarement vériéeen pratique. Il convient donc de se placer dans un cadre plus général, où l'on sup-pose seulement que la valeur des actifs est une semi-martingale sous la mesure réelle.

7. Hors garantie plancher, qui, elle, est nancière.

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CHAPITRE 2. THÉORIE CLASSIQUE DE LA MINIMISATION DU RISQUE24

Il y a alors essentiellement deux possibilités : changer de mesure, ou travailler sousla mesure réelle. Sous la première hypothèse, on peut résoudre le problème grâceà la théorie détaillée au paragraphe précédent, en calculant la décomposition deGaltchouk-Kunita-Watanabe pour une mesure risque-neutre, par exemple la MMM.

Si l'on veut rester sous la mesure réelle, il existe une décomposition analogue, diteFöllmer-Schweizer (pour plus de détails, voir [9]). A partir de cette décomposition,on peut trouver une stratégie dite localement risque-minimisante . Néanmoins,la théorie mathématique sous-jacente est assez lourde, et en tout état de cause,lorsque le processus valeur intrinsèque est continu, ces deux décompositions coïn-cident : il est alors équivalent de minimiser localement sous la mesure réelle ou deminimiser (globalement) sous une mesure risque-neutre.

La valeur du portefeuille est due à deux facteurs de risques : risque nancier (varia-tion du prix des actifs) et risque actuariel (décès d'un assuré). S'il est classique detravailler avec des prix continus, la mortalité est parfois modélisée par une fonctioncontinue, parfois par un processus par sauts. Dans un modèle terminal , où lesversements à l'assurés sont eectués en n de période, cela n'est pas un problème :la valeur du portefeuille est continue, et doit à la date T atteindre la valeur naled'un processus discontinu. Par contre, cela devient problématique dans un modèleoù les versements sont comptants , car la valeur du portefeuille est alors dis-continue. Lorsqu'un tel cas se présentera, nous choisirons la méthode consistant àchanger de mesure, plus simple pour obtenir des résultats numériques.

Le modèle à versements déportés en n de période est le plus classique, et découledirectement de la théorie nancière, où l'on cherche à couvrir un produit dérivéjusqu'à sa maturité. La transposition à l'actuariat est relativement simple (voir[6]) mais pas totalement satisfaisante : il est peu réaliste de modéliser ainsi desproduits d'assurance-vie, dont la maturité est souvent inconnue car dépendde la survie de l'assuré. On s'intéressera donc prioritairement à des modèles àversements comptants , dans lesquels l'assureur doit pouvoir faire face à sesengagements à toute date.

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Chapitre 3

Application à des contrats

d'assurance-vie

Dans ce chapitre on applique les méthodes de minimisation du risque à la cou-verture de contrats d'assurance-vie. Dans un tel contrat, le souscripteur paye desprimes selon un schéma pré-déterminé. En retour, le bénéciaire reçoit des sommesd'argent, soit après une certaine durée (rente viagère ou capital), soit après unévénement particulier (décès du souscripteur par exemple).

3.1 Modélisation

On étend le formalisme développé au chapitre 2 an de décrire la couverture decontrats d'assurance-vie sur un marché à deux actifs. On obtient des formules semi-explicites donnant la dynamique d'un portefeuille de couverture optimal.

3.1.1 Présentation et notations

On considère un marché nancier pourvu de deux actifs : un actif sans risque B etune action S. On se place dans le cadre du modèle de Black-Scholes, en faisant leshypothèses classiques suivantes : les actifs sont divisibles à l'inni le marché est parfaitement liquide la vente à découvert est autorisée les échanges sont exonérés de coûts de transaction on peut emprunter ou prêter au taux constant r il n'y a pas d'opportunités d'arbitrage l'action ne verse pas de dividendes pendant la période considérée

La dynamique des actifs est donnée par

dSt = ζ(t, St)Stdt+ σ(t, St)StdWt

dBt = r(t, St)Btdt

avec S0 > 0, B0 = 1, r borné et positif et σ strictement positif. On dénitles prix relatifs Xt = St/Bt et Yt = Bt/Bt = 1. On note G = (Gt), avecGt = σ (Bs, Ss)|s ≤ t∨σ A|P (A) = 0 : il s'agit de la tribu engendrée par (B,S)augmentée des ensembles de mesure nulle (on parlera de P -augmentation) .

25

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 26

On notera

θ =ζ − rσ

le ratio de Sharpe associé au marché, qui dénit le prix du risque .

Remarque 3.1 On peut montrer (voir [8]) que la mesure de martingale minimaleest donnée par l'exponentielle de Doleans du ratio de Sharpe, à savoir

dP ∗

dP= exp

(−ˆ T

0

θdWs −1

2

ˆ T

0

θ2ds

)

On travaillera donc implicitement sous cette mesure lorsque l'on choisira une me-sure de martingale (et qu'on parlera par abus de langage de la probabilitérisque-neutre). Notons que ce changement de mesure est classique 1 en nance : laMMM correspond au changement de mesure habituel .

Les uctuations démographiques sont représentées par un modèle markovien à plu-sieurs états. On considère l'ensemble J = 0, 1, . . . , J des états décrivant la si-tuation des assurés (typiquement, vivant ou décédé). Soit Z = (Zt) une chaîne deMarkov continue à droite à valeurs dans J et de distribution initiale (1, 0, . . . , 0).Cette dénition peut sembler abstraite ; en pratique nous utiliserons deux types demodèles. Pour décrire un contrat sur un seul individu, nous prendrons J = 0, 1,les deux états correspondant à la survie ou au décès de l'assuré. Pour décrire unportefeuille de n contrats, nous prendrons J = 0, 1, . . . , n, où l'indice désigneraalors le nombre de survivants à une date donnée.

On notera H = (Ht) la P -augmentation de la ltration naturelle de Z. H est doncl'espace de l'aléa lié à la mortalité (par opposition à l'aléa nancier). On supposeici que Z et (B,S) sont indépendants sous P .

Remarque 3.2 Cette hypothèse, qui peut sembler naturelle, suppose néanmoinsqu'on ne tienne pas compte de l'existence d'un marché de réassurance ni du mé-canisme de titrisation, ou encore de l'existence de titres hybrides. Sinon, l'assureurpeut transférer une part de ses créances, et donc une part de son risque actuariel,sous forme d'actif nancier. Le marché s'enrichit alors d'un troisième produit -nancier qui est dérivé du risque de mortalité. Dans ce cas, les risques nancier etactuariel ne sont plus indépendants.

Une fois dénis les espaces de probabilité liés aux deux sources de risques, on peutconstruire l'espace produit comme vu ci-dessus, et sur lequel on se placera désor-mais. En particulier, on aura F = (Ft) = ((Gt ⊗H) ∨N ).

On dénit par ailleurs un processus de comptage

N jkt = Card s|s ∈]0, t], Zs− = j, Zs = k

ainsi que l'indicatrice Ijt = 1Zt=j. On suppose qu'il existe des facteurs de tran-

sition λjkt = Ijt−µjkt avec µjkt des fonctions déterministes continues. On notera

pjk = P (Zs = k|Zt = j) les probabilités de transition associées au modèle de Mar-kov.

1. Il s'agit en fait d'une application directe du théorème de Girsanov.

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 27

Le processus N jkt compte le nombre de transitions de phase à une date donnée ;

dans notre étude, il s'agira du nombre de nouveaux décès enregistrés en t. L'indica-trice I représentera le nombre de survivants, et la densité µ mesurera la mortalité(en taux).

Nous étudierons deux catégories stylisées de contrats d'assurance-vie. Dans tousles cas, il s'agira de contrats en unités de compte avec garantie plancher. Commementionné précédemment, nous considérerons :- des contrats d'assurance décès, où le montant gjkt = gjk(t, St) est payé à la mortde l'assuré- des contrats fournissant un capital gjt = gj(t, St) en cas de survie de l'assuré.

Remarque 3.3 Le formalisme utilisé dans le second cas est également adapté à ladescription d'un contrat fournissant une rente au taux gjt = gj(t, St). Néanmoins,nous considérerons dans les applications numériques que tous les paiements sontdiérés en n de période, ce qui correspond au versement d'un capital. Cela per-mettra de comparer le cas d'un contrat avec versements intérmédiaires avec celuid'un contrat à versements uniques.

Un troisième contrat étudié sera l'assurance mixte , qui combine les deux ga-ranties précédentes. Nous verrons comment cette association se traduit mathéma-tiquement.

Par la suite, on supposera les fonctions g mesurables et telles que

supu∈[0,T ]

E∗[(B−1u g(u, Su)

)]< +∞

où E∗ désigne l'espérance sous la probabilité risque-neutre. Les prix actualisés sontdonc supposés mesurables.

On en déduit alors les processus de prix associés à ces contrats

F jk(t, St, u) =E∗[BtB

−1u gjk(u, Su)|Gt

]F j(t, St, u) =E∗

[BtB

−1u gj(u, Su)|Gt

]On fait l'hypothèse que les dérivées partielles des F par rapport à S sont unifor-mément bornées, i.e.

∃K ∈ R,∀(t, St, s), |∂F

∂S(t, St, s)| ≤ K

On se place dans le cas le plus général d'un contrat d'assurance mixte, fournissantun capital au décès de l'assuré, et une rente ou un capital en cas de survie de celui-ci.

Le ux de paiement brut versé par l'assureur s'écrit

dAt =∑j∈J

Ijt gjtdt+

∑j 6=k

gjkt dNjkt

Remarque 3.4 Dans le cas où gjt représente un capital et non une rente, la no-tation précédente est légèrement abusive car la fonction gjt est un pic de Dirac àla date T . En eet, aucun versement n'est eectué en cours de période, et tous les

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 28

paiements ont lieu à la date T . Cela n'est néanmoins pas gênant comme nous leverrons à la section suivante, et on peut intégrer la relation précédente.

Après intégration, on obtient la formule du pay-o instantané

At = A0 +

ˆ t

0

B−1s dAs = A0 +

ˆ t

0

B−1s

∑j∈J

Ijsgjsds+∑k,k 6=j

gjks dNjks

Cette expression est tout à fait intuitive : à la date t, les ux ayant transité entrel'assureur et le bénéciaire sont égaux à la prime A0 initialement versée à laquelleon ajoute le règlement des prestations par l'assureur. Celles-ci sont de deux types :en cas de survie, versement de gjs (qui est une rente ou un capital) aux Ijs personnesy ayant droit ; en cas de décès, versement du montant gjks , dN jk

s étant la mesurede comptage du nombre de décès.

3.1.2 Résolution formelle

La résolution du modèle nécessite de modier quelque peu les dénitions donnéesdans la première partie : il faut ici tenir compte du fait que des versements d'ar-gent entre assuré et assureur peuvent intervenir à toute date. Si les changementsde notations sont mineurs, cela induit que la valeur du portefeuille n'est plus unprocessus continu, mais seulement càdlàg (toute transition de phase entraîne unversement et donc un saut dans la valeur du portefeuille). Nous transposons lesrésultats énoncés dans un cadre continu 2. Moyennant quelques adaptations, on ob-tient le même type de formules.

Nous avons noté At le ux de paiement versé par l'assureur (NB : ce ux est arith-métique, une valeur négative correspondant au versement d'une prime par l'assuré).Les dénitions de la première partie deviennent donc

1. Valeur du portefeuille : Vt(ϕ) = ϑtXt + ηt

2. Coût initial : C0(ϕ) = V0(ϕ) +A0

3. Coût cumulé : Ct(ϕ) = Vt(ϕ)−´ t

0ϑsdXs +At

4. Valeur intrinsèque : V ∗t = E [AT |Ft]

Ces notations reposent sur la convention suivante : la valeur du portefeuille à ladate t prend déjà en compte le paiement At eectué à la date t. En particulier,la valeur terminale du portefeuille correspond au montant restant une fois tous lesversements eectués par les deux parties. Cette valeur doit donc être nulle, ce quiimplique qu'on se restreigne aux stratégies 0-admissibles. En eet, nous nous pla-çons ici dans une logique de type Solvabilité II où l'on retient les valeurs des passifsbest estimate. Une valeur terminale négative présenterait des risques pour la solva-bilité de la compagnie d'assurance, obligée de combler l'insusance de couverture.Une valeur strictement positive paraît moins grave d'un point de vue prudentiel.Néanmoins, elle peut révéler une sur-tarication ou une trop grande prise de risques.

2. L'idée d'introduire des ux de paiement revient, à notre connaissance, à T.Möller. Voir [7]pour l'article original.

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 29

Dans la première partie, nous avons énoncé l'existence et l'unicité d'une stratégiede couverture risque-minimisante. Ce résultat subsiste en autorisant des paiementsà toute date, moyennant de très légères adaptations.

Lemme 3.5 Le processus valeur intrinsèque admet une unique décomposition deGaltchouk-Kunita-Watanabe, i.e. s'écrit de manière unique sous la forme

V ∗t = V ∗0 +

ˆ t

0

ϑAs dXs + LAt

avec LAt une martingale de moyenne nulle orthogonale à X (i.e. XLA est une mar-tingale) et ϑA un processus F-prévisible.

Preuve Simple changement de notation par rapport au théorème 2.19, an de signi-er qu'on prend ici un ux de paiement A et pas seulement un versement nal H.

Théorème 3.6 Pour un ux de paiement A donné, il existe une unique stratégierisque-minimisante 0-admissible, donnée par

(ϑt, ηt) =(ϑAt , V

∗t −At − ϑAt Xt

), 0 ≤ t ≤ T

le processus de risque associé est Rt(ϕ) = E∗[(LAT − LAt

)2 |Ft].Preuve La preuve du théorème 2.22 se transpose sans aucune diculté.

Ce théorème est cohérent avec le précédent : en prenant pour ux de paiement unversement à terme H, on retombe sur la stratégie énoncée plus haut, en se rap-pelant que la valeur du portefeuille est désormais donnée après que les paiementscorrespondants ont été eectués.

On peut calculer la valeur intrinsèque du processus de paiement

V ∗t =At + E [(AT −At)|Ft]

=At + E

ˆ T

t

B−1s

∑j∈J

Ijsgjsds+∑k,k 6=j

gjks dNjks

|Ft

=At +B−1t

∑j∈J

ˆ T

t

pZt,j(t, s)

F j(t, St, s) +∑k,k 6=j

µjks Fjk(t, St, s)

ds

=At +∑j∈J

Ijt Vj(t, St)B

−1t

où l'on a posé

V i(t, s) =∑j∈J

ˆ T

t

pij(t, s)

F j(t, St, s) +∑k,k 6=j

µjks Fjk(t, St, s)

ds

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 30

Ce calcul nous permet de réécrire la décomposition GKW sous une forme plus ex-plicite. Combinée au théorème, celle-ci nous révèle immédiatement la compositiondu portefeuille (localement) optimal.

Proposition 3.7 La décomposition de Galtchouk-Kunita-Watanabe de V ∗ estdonnée par

V ∗t = V ∗0 +

ˆ t

0

(∑i∈J

Iis−ϑis

)dXs +

∑k 6=j

ˆ t

0

ηjks dMjks .

avec

ϑit =∑j∈J

ˆ T

t

pij (t, s)

F js (t, St, s) +∑k,k 6=j

µjks Fjks (t, St, s)

ds

ηjkt =B−1t

(gjkt + V k (t, St)− V j (t, St)

)Preuve Voir Annexe A.

Cette décomposition semi-explicite est signicative : elle sépare la valeur du paie-ment en une partie déterministe et deux parties stochastiques. L'intégrale selondX correspond au risque pouvant être couvert par une stratégie de portefeuille.Au contraire, l'intégrale selon dM représente la part du risque qui ne peut êtredirectement couverte car elle repose sur un aléa démographique et non nancier.En particulier, une transition d'état (typiquement, le décès du souscripteur) induitune variation immédiate du coût pour l'assureur.

Théorème 3.8 L'unique stratégie de couverture 0-admissible risque-minimisanteassociée au ux de paiements A est donnée par

(ϑt, ηt) =

(∑i∈J

Iit−ϑit,∑i∈J

IitB−1t V i(t, St)−Xt

∑i∈J

Iit−ϑit

)

Preuve La décomposition GKW et le théorème précédent montrent que ϑt =∑i∈J I

it−ϑ

it. Par ailleurs, on sait que ηt = V ∗t −At−ϑAt Xt, ce qui permet d'obtenir

le résultat, grâce au calcul de V ∗t eectué précédemment.

On peut, en plus, déterminer la fonction de risque associée à cette stratégie optimale

Rt (ϕ) = E

ˆ T

t

∑k 6=j

ηjks dMjks

|Ft

= E

ˆ T

t

∑k 6=j

(ηjks)2λjks ds

|Ft

=∑i∈J

Iit

ˆ T

t

∑k 6=j

E[(ηjks)2 |Ft] pij (t, s)µjks ds

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 31

Nous interpréterons en détail cette stratégie à partir de simulations numériques,qui rendront beaucoup plus lisibles le résultat. Notons cependant d'emblée que laquantité d'actions optimale est la somme, pondérée par les eectifs de chaque état,des intégrandes intervenant dans la décomposition de Galtchouk-Kunita-Watanabe.Autrement dit, l'aléa sur la créance est partiellement dû à une fonction des coursboursiers, et la couverture optimale vise à répliquer exactement cette fonction.

3.2 Calcul explicite

On applique les résultats précédents à des contrats d'assurance survie et d'as-surance décès, où l'on supposera que le souscripteur verse une prime unique, à ladate t = 0.

3.2.1 Couverture de N contrats d'assurance en cas de vie

Dans un contrat d'assurance en cas de vie , un capital est versé à l'assuré àéchéance, s'il est encore en vie. Nous étudions ici un portefeuille de N tels contrats.Le problème de couverture de ces contrats est relativement simple, dans la mesureoù tous les versements interviennent à la même date, en n de période. Ainsi, l'as-sureur gère un capital constitué à la date t = 0, sans enregistrer de sorties de cash

jusqu'à échéance, où il honore ses engagements envers les assurés survivants. Le casde l'assurance décès, où les paiements interviennent à toute date, est plus délicatet sera traité dans la section suivante.

Le paiement associé au contrat en cas de survie peut s'écrireH = F 0(t, St, T )B−1T (N−

ZT ). En eet, le capital F 0 - fonction du prix St des actions - actualisé au taux rest versé aux (N − ZT ) survivants.

L'application du théorème 3.8 donne la composition du portefeuille de couvertureoptimal

ϑt = (N − Zt−)T−tpx+tF0s (t, St)

ηt = (N − Zt)T−tpx+tB−1t F 0(t, St)− ϑtSt

Remarque 3.9 On utilisera indiéremment les notations T−tpx+t et p00(t, T ) pourexprimer la probabilité de survie entre les dates t et T . Les individus étant initia-lement tous d'âge x, il n'y a pas d'ambiguïté.

Cette stratégie est conforme à l'intuition. Le cash sert de variable d'ajustement,étant donnés la valeur du portefeuille V ∗t et le nombre d'actions. Lorsqu'un assurédécède, la valeur anticipée du versement terminal s'en trouve réduite, et le porte-feuille peut donc être allégé (rappelons que l'objectif de la minimisation du risqueest d'atteindre une valeur terminale la plus proche de 0 possible). Cela se traduit,pour un décès à la date t par une réduction de la quantité d'obligations, puis parun rééquilibrage de la quantité relative d'obligations et d'actions en t+.

On rappelle qu'il est ici supposé qu'un capital est versé aux seuls survivants : le casplus réaliste d'une assurance mixte fournissant un capital en n de contrat maisgarantissant le versement d'une somme en cas de décès de l'assuré avant échéancedu contrat, sera traité ultérieurement. Il est néanmoins nécessaire de commencerpar traiter les deux cas extrêmes, l'assurance mixte se décomposant comme somme

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 32

d'une assurance décès et d'une assurance survie.

Appliquons ce résultat à un contrat avec garantie plancher, fournissant le paiementg0(T, ST ) = max

(ST ,Ke

δT). Dans un tel contrat, la somme perçue par le béné-

ciaire est directement liée aux performances du marché nancier, avec toutefoisune épargne minimum K garantie. La constante δ représente ici un taux de reva-lorisation (par exemple, le taux d'ination). On calcule la valeur actualisée d'untel contrat grâce à la formule de pricing d'un call dans le modèle de Black-Scholes(paramètres r, α et σ constants)

F 0(t, St) = E∗[e−r(T−t)

(KeδT +

(ST −KeδT

)+) |Ft]= KeδT e−r(T−t) + StΦ(d1(t))−KeδT e−r(T−t)Φ(d1(t)− σ

√T − t)

= Keδte−r(T−t)Φ(−d1(t) + σ√T − t) + StΦ(d1(t))

avec d1(t) =ln(

StKeδT

)+(r+σ2

2 )(T−t)σ√T−t .

Le théorème permet alors d'obtenir la composition du portefeuille risque-minimisant

ϑt = (N − Zt−)T−tpx+tΦ(d1(t))

ηt = (N − Zt)T−tpx+tKe−(r−δ)TΦ(−d1(t) + σ

√T − t)−

4 Zt T−tpx+tΦ(d1(t))St

3.2.2 Couverture d'un contrat d'assurance décès

On considère un contrat d'assurance décès. Le souscripteur verse une unique primeκ en t = 0 et le bénéciaire reçoit un versement au décès de l'assuré, si celui-ciintervient avant la date de n de garantie T . On est donc dans un modèle à deuxétats J = 0, 1, où la chaîne de Markov prend la valeur 0 tant que l'assuré estvivant, et 1 à son décès. Le théorème 3.8 donne là encore la composition optimale

ϑt = 1Tx≥t

ˆ T

tu−tpx+tµuF

01s (t, St)du

ηt = 1Tx>tB−1t

ˆ T

tu−tpx+tµuF

01(t, St)du

− 1Tx≥tXt

ˆ T

tu−tpx+tµuF

01s (t, St)du

On note x l'âge de l'assuré et Tx la date de son décès : on a N01t = 1Tx≤t. La

probabilité de survie entre t et u, sachant que l'assuré est vivant en t, est égale à

p00(t, u) = exp

(−ˆ u

t

µsds

)Pour un contrat d'assurance décès avec garantie plancher, on a g01(t, St) = max

(St,Ke

δt).

Le pricing d'un tel contrat s'eectue comme ci-dessus, en tenant compte du faitque les paiements ne sont pas nécessairement terminaux

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 33

F 01(t, St, u) = E∗[e−r(u−t)

(Keδu +

(Su −Keδu

)+) |Ft]= Keδue−r(u−t) + StΦ(d1(u))−Keδue−r(u−t)Φ(d1(u)− σ

√u− t)

= Keδue−r(u−t)Φ(−d1(u) + σ√u− t) + StΦ(d1(u))

avec d1(u) =ln(

StKeδu

)+(r+σ2

2 )(u−t)σ√u−t .

Le théorème permet alors d'obtenir la composition du portefeuille risque-minimisant

ϑt = 1Tx≥t

ˆ T

t

p00(t, u)µuΦ(d1(u))du

ηt = 1Tx>t

ˆ T

t

p00(t, u)µuKe−(r−δ)uΦ(−d1(u) + σ

√u− t)du−

1Tx=t

ˆ T

t

p00(t, u)µuΦ(d1(u))Xtdu

Le coût initial est nul si la prime κ versée par l'assuré est égale à la valeur initialedu portefeuille, soit

κ =

ˆ T

0

p00(0, u)µuF01(0, S0, u)du

Cette valeur de la prime est assez intuitive : la valeur moyenne versée par l'assu-reur à la date u est égale à la probabilité que l'individu survive jusqu'en u (doncp00(0, u)) et qu'il décède en u (donc µu), multipliée par le montant de la prestationversée à cette date, à savoir F 01(0, S0, u). On pourrait être étonné que cette formulene contienne pas de taux d'actualisation de la valeur des engagements. En réalité, ilfaut se souvenir que l'actualisation est déjà prise en compte dans la déterminationde la prestation de l'assureur F 01 : les ux monétaires sont en eet rapportés autaux d'intérêt.

3.2.3 Couverture de N contrats d'assurance décès

Etendons le résultat précédent à un portefeuille de N assurés, qu'on supposera tousd'âge x et d'espérance de vie i.i.d. d'intensité µ. On considère désormais l'espaced'états J = 0, 1, . . . , N où l'on est dans l'état j lorsqu'exactement j assurés sontdécédés. Les transitions possèdent la densité λjkt = Ijt 1k=j+1(N − j)µt.

On obtient nalement la composition du portefeuille

ϑt = (N − Zt−)

ˆ T

t

p(t, u)µuΦ(d1(u))du

ηt = (N − Zt)ˆ T

t

p(t, u)µuKe−(r−δ)uΦ(−d1(u) + σ

√u− t)du−

4Ztˆ T

t

p(t, u)µuΦ(d1(u))Xtdu

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 34

Ces formules étendent celles trouvées dans le cas d'un seul contrat de manièrenaturelle, les indicatrices de survie étant remplacées par le nombre de survivants.En prenant N = 1 on retrouve d'ailleurs l'énoncé précédent.

3.2.4 Cas de l'assurance mixte

L'assurance mixte correspond à l'association d'un contrat survie et d'un contrat décès . Il s'agit donc d'un contrat d'épargne en unités de compte avec garantieplancher, où l'épargne est garantie en cas de décès prématuré de l'assuré.

D'un point de vue mathématique, le théorème 3.8 et les formules donnant la valeurde ϑit et V

i(t, St) montrent que le portefeuille de couverture optimal est la sommedes portefeuilles obtenus précédemment

ϑt = (N − Zt−)

(ˆ T

t

p(t, u)µuΦ(d1(u))du+ p(t, T )Φ(d1(t))

)

ηt = (N − Zt)(ˆ T

t

p(t, u)µuKe−(r−δ)uΦ(−d1(u) + σ

√u− t)du

+ p(t, T )Ke−(r−δ)TΦ(−d1(t) + σ√T − t)

)−4Zt

(ˆ T

t

p(t, u)µuΦ(d1(u))Xtdu+ p(t, T )Φ(d1(t))St

)

Cette linéarité résulte du fait que les deux garanties (survie et décès) se com-pensent : le décès d'un assuré représente une charge au titre de la garantie décèsmais une plus-value au titre de la garantie survie, et vice-versa.

Intuitons les résultats graphiques liés à ces formules, avant de les obtenir parsimulation numérique au chapitre suivant. Les provisions liées à la garantie décèsont une tendance décroissante avec le temps : au fur et à mesure que le temps passe,le nombre attendu de décès restant à survenir décroît, nécessitant un portefeuillede couverture moins important. En eet, lorsque l'échéance des contrats approche,l'assureur anticipe qu'il n'aura à régler que de faibles prestations, et peut doncréduire ses positions de couverture.

Mais la perspective de verser des unités de compte aux survivants rend caduquecette stratégie : le surplus de couverture tiré d'une sous-mortalité est redistribuéaux assurés en n de période. Ainsi donc, on peut s'attendre à ce que la valeur duportefeuille reste constante en tendance, avec évidemment des uctuations liées àl'aléa nancier. Autrement dit, on peut conjecturer que la garantie mixte neutralisel'aléa de mortalité, la variation des versements au titre de l'une des garanties au re-gard du montant anticipé étant contrebalancée par une variation d'égale amplitudemais en sens inverse de l'autre garantie.

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 35

3.3 Sur l'hypothèse d'orthogonalité des aléas

Tout au long des calculs, nous avons fait l'hypothèse cruciale que les processusdécrivant le marché nancier étaient orthogonaux au processus de mortalité. Au-trement dit, le marché nancier ne capterait en rien la variation de mortalité dela population. Cette hypothèse semble cohérente en première approche et, en toutétat de cause, les objections que nous y apportons ci-dessous ne sauraient remettresérieusement en question les résultats précédents. Il est toutefois intéressant d'exa-miner les cas de violation de cette hypothèse.

On peut distinguer deux types de corrélation entre mortalité et actifs nanciers :

1. cause exogène : un événement exceptionnel inuence tout à la fois la mortalitéet le cours des actifs.

2. causalité : existence de titres nanciers liés à la mortalité.

Le premier cas correspond à un événement extrême, qui induit un pic de mortalitéet une chute des cours. On pensera par exemple à une catastrophe naturelle ouà un acte terroriste - d'ampleur majeure, pour avoir un impact signicatif sur letaux de décès de la population assurée - qui s'accompagnent généralement d'uneimportante baisse des indices boursiers.

Figure 3.1 Chute de l'indice Nikkei après le tsunami du 11 mars 2011. Source :

AFP

Le second argument contre l'indépendance des deux aléas est l'existence de titresnanciers capturant le risque de mortalité. Ceux-ci peuvent être de plusieurs types :

titres nanciers basés directement sur le risque de mortalité 3. Ainsi, les longevitybonds sont des obligations dont le coupon est indexé sur le nombre de survivantsau sein d'une population donnée. Ces instruments nanciers, fortement dévelop-pés depuis 2005 (épidémie de SRAS), font partie d'un ensemble plus vaste deproduits destinés à couvrir le risque lié à la durée de la vie (cat bonds, survivorswaps, etc.). Ils correspondent donc à un couplage particulièrement fort du risquede mortalité avec le risque nancier. Notons toutefois que ces titres visent plutôtla couverture contre des risques majeurs (catastrophe, épidémie, dérive im-prévue de l'espérance de vie) : ils ne permettent pas de capter des événements

3. Pour une étude approfondie de ces titres nanciers, voir par exemple le mémoire d'actuariatde Bourgeois B. et Pougnet G. (2008), Réassurance et techniques nancières de transfert derisque - l'exemple du mortality bond : une obligation indexée au risque de (sur)mortalité .

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CHAPITRE 3. APPLICATION À DES CONTRATS D'ASSURANCE-VIE 36

de mortalité avec la même nesse que doit le faire l'assureur, pour lequel chaquedécès est à prendre en compte.

émissions obligataires par des SPV dans le cadre d'opérations de titrisation des-tinées à exclure certains risques. Nous ne détaillerons pas le mécanisme de titri-sation, auquel l'actualité nancière a conféré une notoriété imprévue. Rappelonsseulement que le SPV (Special Purpose Vehicle) est une entité juridique ad-hoc

auquel l'assureur cède un portefeuille de créances, et qui se nance par émissionobligataire, ces titres secondaires portant la charge du risque transféré.

Néanmoins, le marché de ces titres reste relativement faible en volume (voir grapheci-dessous), et il paraît peu crédible que des assureurs achètent des titres adossésà la mortalité, alors même qu'ils sont susceptibles d'en émettre pour limiter cerisque. Par contre, l'existence de cet outil de réduction du risque de mortalité estfondamental pour l'assureur, mais cela relève d'une autre approche que celle de lacouverture nancière (puisqu'il y a transfert de risque).

Figure 3.2 Marché mondial des cat-bonds. Source : Aon Beneld Securities

Ainsi, la non-orthogonalité des aléas est bien réelle, mais susamment peu fré-quente - connée à certains produits nanciers ou à certaines situations exception-nelles - pour pouvoir être négligée dans notre étude.

Concluons toutefois par quelques mots sur la réassurance. Thomas Möller (dans[6]) a étudié l'incidence sur la stratégie de minimisation du risque de la possibilitéde se réassurer. De manière assez logique, il constate que le risque est minimisépour la situation extrême où la réassurance est totale. Autrement dit, l'assureurtransfère tout son risque au réassureur, le coût résiduel devenant nul de même quele processus de risque. Cela montre bien que le cadre de la minimisation du risqueest peu adapté aux cas de violation de l'hypothèse d'orthogonalité des aléas.

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Chapitre 4

Analyse numérique et

explication des résultats

Pour diérents types de contrats, nous avons obtenu la composition optimale (ausens de la minimisation du risque quadratique résiduel) d'un portefeuille de cou-verture composé d'actions et d'obligations et géré dynamiquement. Nous cherchonsdésormais à obtenir des résultats numériques, en calibrant les modèles précédents.Cela doit permettre de mieux comprendre comment l'assureur doit gérer ses actifsau sens de cette classe de stratégies.

4.1 Calibrage des paramètres

Le calcul explicite des formules obtenues nécessite de choisir des valeurs numé-riques pour les paramètres. Nous nous eorçons ici de déterminer des valeurs desparamètres cohérentes avec la réalité du marché. Ceci n'est toutefois pas un pointessentiel dans ce chapitre, puisque nous essayons de déterminer des tendances gra-phiques plus que de calculer précisément des valeurs numériques. Par contre, lechapitre suivant utilisera ces valeurs de paramètres pour estimer des mesures derisque, nécessitant donc des valeurs crédibles .

4.1.1 Marché nancier

Nous nous sommes placés dans le cadre du modèle de Black-Scholes, avec desparamètres constants. En univers risque-neutre - ce qui est notre cas, puisqu'ona changé de mesure pour avoir un processus de prix martingale - il nous sut deconnaître le taux sans risque et la volatilité de l'action. La notion de taux sansrisque semble aujourd'hui de plus en plus théorique 1. Nous retiendrons ici les tauxdes obligations d'état françaises : ces placements sont à la fois peu risqués (malgrédes tensions évidentes) comparés aux actions, et très liquides (contrairement auxplacements immobiliers), ce qui est nécessaire pour satisfaire les hypothèses dumodèle.

1. Pour une discussion plus approfondie sur la notion de taux sans risque, voir par exempleHULL J. (2010) Gestion des risques et institutions nancières, Pearson, 144-145.

37

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS38

Figure 4.1 Taux OAT 10 ans. Source : direction du Trésor

Pour les calculs, nous retiendrons le taux

r = 3%

La volatilité historique connaît des uctuations très fortes, comme le montre legraphe ci-dessous. Ainsi par exemple, la crise des dettes souveraines, particulière-ment exacerbée n 2011 (dégradation de la plupart des notes des pays de l'OCDE,réformes structurelles de grande ampleur), s'est accompagnée d'un fort accrois-sement de la volatilité des marchés d'actions. A l'inverse, les plans de sauvetageconsécutifs à la crise de 2008 et la perspective d'une reprise modérée avaient faitchuter la volatilité des cours.

Figure 4.2 Volatilité du CAC 40 depuis septembre 2010. Source : abcbourse.com

Dans notre étude, nous retiendrons plusieurs taux de volatilité, an de prendre encompte les diverses situations que peut rencontrer l'assureur. En eet, les contratsd'assurance-vie ont en général une durée susamment longue pour couvrir un cycleéconomique et donc devoir faire face à une conjoncture évolutive. Nous retiendronstrois niveaux de volatilité : 15% - niveau particulièrement bas, minorant les volati-lités récemment observées -, 25% - niveau moyen observé en 2011 - et 40% - niveau

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS39

correspondant à un pic, ou à un portefeuille d'actions moins diversié que le CAC,par exemple une seule action. Pour le tracé des graphes, nous retiendrons la valeurintermédiaire

σ = 25%

A partir de ces paramètres, nous pourrons modéliser le marché en prenant S0 =B0 = 1 et en simulant informatiquement un brownien (nous reviendrons sur leproblème de la discrétisation).

4.1.2 Mortalité

Dans le modèle, les individus considérés ont tous le même âge x (on prendra x = 45ans pour les applications). L'intensité de la mortalité (encore appelée taux instan-tané de mortalité) sera approchée par le modèle de Gompertz-Makeham 2

µx = A+Bcx

Ce modèle est en eet susamment simple pour ne pas engendrer de complicationscalculatoires supplémentaires, tout en décrivant assez précisément la tendance de la mortalité. Or dans cette étude, on cherche à décrire les caractéristiques styli-sées des phénomènes étudiés an de comprendre le fonctionnement de la stratégiede minimisation du risque, plus qu'à mener des calculs susamment précis pourservir de base à des estimations de risque et de fonds propres requis.

De surcroît, la stratégie optimale est davantage sensible à des uctuations des coursdes actifs qu'à l'aléa de mortalité. Comme nous l'avons signalé précédemment, lacouverture d'un contrat d'assurance mixte (i.e. assurance-vie avec garantie dé-cès) est en eet relativement neutre à l'aléa de mortalité, car le décès et la survie del'assuré entraînent tous deux un paiement : seule la date change, et donc le coursdes actifs lors du versement.

On note lx le nombre de personnes atteignant l'âge x et px = lx+1

lxla probablité de

survie. On a

µx = lim4x→0

lx−lx+4x4x

lx= − d

dx(ln lx)

Cela permet d'écrire lx = ke−Axe−Bcx

ln c (avec k une constante d'intégration) puis

lx = ksxgcx

en posant

s = e−A

g = e−Bln c

.

On obtient donc1

px=

lxlx+1

=1

sgcx−cx+1

Enn, on pose

αx = ln

(1px

)a = (c− 1) ln

(1g

)b = ln s

, ce qui nous mène à l'équation

ln (αx + b) = ln a+ x ln c

2. Pour une présentation de quelques modèles de mortalité, voirwww.actu.ucl.ac.be/sta/devolder/assvie120061.ppt.

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS40

Cette formule permet d'estimer les coecients a et c par régression linéaire (mé-thode des moindres carrés ordinaires) de x sur ln (αx + b), en xant b, considérécomme une constante dans une premier temps. On choisit ensuite b de sorte à maxi-miser le coecient d'ajustement R2 de la régression précédente. Pour localiser lesextrema de la fonction R2 = f(b), on prend d'abord un pas d'échantillonnage rela-tivement grand et un intervalle très large, de sorte à obtenir une première visualisa-tion de la distribution des R2. On zoome ensuite sur les sous-intevalles semblantcontenant un maximum (un seul intervalle en pratique, à droite de − infx αx), desorte à obtenir des résultats plus précis.

Notons que cette méthode est imparfaite : l'observation graphique de la distribu-tion des R2 estimés ne sut pas à exclure avec certitude que certains intervallescontiennent un maximum. La tendance décroissante du nuage de point ne permetpas, en eet, de conclure sans équivoque à l'absence d'un point haut situé entredeux points de calculs. Toutefois, en se souvenant que b = ln s = −A, on peut secontenter de chercher des b négatifs. Cela revient d'ailleurs à faire prévaloir le mo-dèle (et donc sa signication sous-jacente) sur le calcul : on exclut que b puisse êtrepositif, car dans la genèse du modèle, le coecient A exprime une probabilité dedécéder de manière accidentelle, et doit donc être (strictement) positif. Le fait quele modèle de Gompertz-Makeham donne parfois des A négatifs prouve une faiblesseintrinsèque au modèle, ou une trop grande volatilité des données.

Même avec une méthode graphique, trouver une approximation du coecient bmaximisant le R2 n'est cependant pas immédiat. En eet, lorsqu'on eectue la ré-gression précédente pour une série de valeurs de b, on constate que le R2 s'accroîtà mesure que b se rapproche de −αx, auquel cas le logarithme n'est plus dénipour toutes les valeurs de x . Il faut donc faire un choix entre garder toutes lesobservations (donc tous les αx), ou en supprimer pour pouvoir choisir un b pluspetit et donc obtenir un meilleur coecient d'ajustement. Autrement dit, il fautdéterminer si l'on accorde plus de crédit aux données (empiriques mais stochas-tiques) ou au modèle.

On choisit ici de supprimer les 20 premières tranches d'âge, à partir de deux prin-cipes concurrents. D'une part, il est peu gênant de ne pas prendre en compte lesâges les plus bas alors qu'on cherche à modéliser des contrats d'assurance-vie, plu-tôt orientés vers un public plus âgé. Ainsi, d'après la FFSA, en 2007, seuls 15%des souscripteurs avaient moins de 30 ans 3. En poussant la logique jusqu'au bout,on commencerait l'interpolation à l'âge x = 45 ans, celui utilisé dans les applica-tions numériques. Mais en réduisant la plage d'âge, on s'éloigne du modèle pourse fonder davantage sur les données : en prenant en compte moins de données, onest davantage sujet au risque de volatilité, la présence d'un point incohérent ouimprobable étant moins lissée dans la régression. D'où notre choix, intermédiaire,de ne garder que les âges supérieurs à 20 ans.

La régression est eectuée sur les données de mortalité de l'INSEE pour 2007-2009 4. On obtient, pour b = −0, 0002901 la valeur des paramètres suivante

3. Source : www.sa.fr/.4. Source : www.insee.fr/. Voir la reproduction de la table à l'Annexe C.

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS41

paramètre valeur estimée

ln a −11, 26ln c 0, 09609

où ln a correspond à la constante de la régression. Le coecient d'ajustement obtenuvaut R2 = 0, 9947. Cela nous permet de remonter aux valeurs des paramètresinitiaux : A = − ln s = −b = 0, 0002901 et B = a

c−1 ln c = 0, 00001227. D'où lafonction de Gompertz-Makeham ajustée, que nous utiliserons lors des applicationsnumériques

µx = 0, 0002901 + 0, 00001227× 1, 100858x

4.2 Résultats numériques

4.2.1 Discrétisation

On partitionne la durée T en n intervalles de temps de même longueur. Le pas detemps est donc 4t = T

n . La dynamique de l'action est donnée par la formule deBlack-Scholes discrétisée

Sk = exp

(r − 1

2σ2

)k4 t+

k∑j=1

σ√4tεj

avec ε1, . . . , εn des tirages indépendants selon une loi normale N (0, 1). On peutainsi tracer la simulation du marché, avec des actifs démarrant à la valeur 1 ent = 0 et évoluant sur une durée de 8 ans. L'obligation est représentée par lacourbe bleue, l'action par la courbe rouge. On en déduit la dynamique deX = S/B avec Bt = exp (rt).

Remarque 4.1 L'aspect linéaire, et non exponentiel, du prol de l'obligationtient au fait que la période considérée est relativement courte, et que l'on obtientdonc le début de la courbe.

Figure 4.3 Simulation du cours d'une action et d'une obligation

Les graphes ci-dessous illustrent des simulations des cours de l'action pour dié-rentes valeurs de la volatilité σ. L'intérêt de ces graphes est de montrer qu'une

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS42

modication de la valeur des paramètres a un eet sur le résultat obtenu, maisque celui-ci peut être atténué voire compensé par l'aléa inhérent à la modélisation.Ainsi, si la volatilité tirée du premier graphe est clairement la moindre, il est plusdélicat de distinguer les deuxième et troisième simulations de manière évidente parsimple lecture graphique.

Figure 4.4 Allure du prix d'une action pour diérentes volatilités

Il faudra tenir compte de cela lors des modélisations ultérieures, faisant intervenirl'aléa à diérents niveaux : certaines modications des paramètres seront diciles àdéceler, et, inversement, de grandes uctuations entre modélisations obtenues avecles mêmes paramètres seront parfois observées, sans comporter d'élément explicatifparticulier. Les calculs de mesure de risque (VaR, Expected shortfall) permettrontde réduire cet aléa de tirage.

De même, on évalue la dynamique de la population à partir de la fonction de mor-talité de Gompertz-Makeham obtenue précédemment. Partant d'une population deN individus de même âge, on calcule, à chaque date de notre partition de discré-tisation, leur probabilité de survie. On tire ensuite N − Zt−1 (i.e. le nombre desurvivants avant la date t) valeurs aléatoires dans [0; 1] et on compte le nombre deces valeurs inférieures à la probabilité de survie. La valeur obtenue donne le nombrede survivants à la date t. Prenant une population initiale de N = 1000 individusâgés de x = 45 ans et assurés sur une période T = 8 ans, on obtient, pour unediscrétisation en n = 1000 intervalles, la courbe de décroissance de la populationsuivante

Figure 4.5 Décroissance de la population assurée

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS43

4.2.2 Résultats graphiques et interprétations

On peut désormais évaluer la composition du portefeuille de couverture. Pour cefaire, on évalue numériquement les formules trouvées au chapitre précédent, pourtoute date k ×4t, k ∈ [|0;n|]. On obtient les résultat suivants, pour la valeur desparamètres N = 1000 individus, n = 100 points de discrétisation, T = 8 ans dedurée de la couverture, x = 45 ans d'âge initial des assurés, r = 3% le taux sansrisque, σ = 25% la volatilité des actions, K = 1 la garantie plancher (on rappelleque la valeur initiale des actifs est normalisée à 1) et δ = 2% l'ination.

4.2.2.1 Assurance survie

On suppose que l'assureur est partie à N contrats d'assurance survie de mo-dalités identiques, décrites ci-dessus. L'assureur verse à la date T le montantg(T, ST ) = max

(ST ,Ke

δT)à chacun des survivants. Une simulation des formules

donnant la composition du portefeuille de couverture optimal donne le résultatsuivant

Figure 4.6 Composition du portefeuille de couverture optimal - cas survie

Ce graphe permet d'énoncer plusieurs faits stylisés pour décrire la stratégieassociée (une étude plus approfondie sera menée à la section suivante dans le casde l'assurance décès) :

Les quantités d'actions et d'obligations évoluent symétriquement, par rapportà une droite légèrement oblique. Cela s'explique par l'idée même de couverture

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS44

dynamique : à valeur constante du portefeuille, un rebalancement des quantitésd'actifs est eectué en fonction des cours. Nous verrons ultérieurement que lagarantie plancher K est l'élément fondamental de cette gestion dynamique duportefeuille. Selon que le cours des action est au-dessus ou en-dessous de cette va-leur barrière , le portefeuille comporte respectivement plus ou moins d'actions.

L'amplitude des variations de la quantité d'actions est fortement corrélée aucours des actions, comme le montre le graphe ci-dessous, où le cours des actionsest représenté en noir (après changement d'échelle) :

Figure 4.7 Liens entre le cours des actions et la quantité détenue - cas survie

Enn, on constate que lorsqu'on arrive en n de contrat (i.e. au voisinage de t =T ), le portefeuille se polarise vers un seul type actif (obligation ou action). Cecipeut s'expliquer par la forme du pay-o, qui montre que le bénéciaire reçoit soitune action, soit du cash pour un montantK. En fonction de l'évolution des cours,l'assureur constituera un portefeuille à-même de satisfaire ses engagements. Làencore, nous détaillerons ce point dans la section suivante.

4.2.2.2 Assurance décès

Le portefeuille de couverture des N contrats d'assurance décès a la compositiondynamique suivante :

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS45

Figure 4.8 Composition du portefeuille de couverture optimal - cas décès

Cette simulation appelle d'emblée plusieurs commentaires. On constate tout d'abordque les quantités d'actions et d'obligations coïncident à l'instant initial et à l'ins-tant nal. Concernant la date t = T , il est normal que le nombre d'actifs tombeà zéro : dans notre modèle, on cherche à avoir une valeur de portefeuille la pluspetite possible (en valeur absolue) une fois que les versements aux bénéciaires ontété eectués. Il n'y a pas contre pas d'explication immédiate au fait que les quanti-tés initiales soient identiques. Nous verrons ultérieurement que ce point s'éclaircitlorsque l'on modie la valeur de la garantie plancher.

L'autre fait majeur est que les deux courbes semblent symétriques par rapport àune droite oblique. Là encore, l'oblicité traduit le règlement progressif des contrats.Au fur et à mesure du temps, des assurés décèdent et la valeur du portefeuille estprogressivement réduite de ces montants. La symétrie traduit le fait qu'à valeurconstante du portefeuille, les uctuations dans la quantité d'un des actifs doiventse doubler de uctuations identiques (mais en sens inverse) du nombre détenu del'autre actif.

Pour mieux comprendre les résultats obtenus, on se place dans diérents cas par-ticuliers

Valeur de la garantie plancherOn obtient les simulations suivantes pour diérentes valeurs du montant plan-

cher. On prend des garanties constantes, en s'aranchissant d'un coecient de ré-évaluation en exp(δt) : cela ne nuit pas aux interprétations et simplie la démarche.Dans les gures ci-dessous, la courbe bleue correspond à la quantité d'actions, la

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS46

courbe rouge à la quantité d'actif sans risque.

Figure 4.9 Incidence de la garantie plancher sur la gestion du portefeuille

Ces graphiques montrent l'inuence majeure des garanties plancher sur la stratégiesuivie. En l'absence de garantie, il est optimal d'investir intégralement en actions, cequi est parfaitement logique étant donné que les contrats sont indexés sur le coursdes actions. A l'inverse, pour des garanties particulièrement élevées - les valeurs

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS47

sont résolument irréalistes, mais servent à mieux comprendre le fonctionnement dela stratégie - aucune action n'est échangée. Là encore, cela est intuitif : si la ga-rantie est hors de portée du cours des actions, elle n'est pas réplicable. Investir enactions s'apparenterait alors à spéculer sur la hausse des cours, mais ne réduiraitpas le risque de couverture. Cela conrme la pertinence du critère de minimisationdu risque résiduel quadratique.

Par ailleurs, la valeur K = 1 joue un rôle de pivôt. C'est à ce niveau que les straté-gies combinent le mieux actions et obligations, alors qu'elles se polarisent vers unseul type d'actif lorsque K s'éloigne de 1. De surcroît, le mix d'actifs est le pluséquilibré en début de période, le portefeuille deventant mono-actif en n de période(d'autant plus rapidement que K est loin de 1).

Le rôle central de la valeur K = 1 tient au fait qu'on a pris une valeur initiale desactifs de 1, et que, aux intérêts prêts, l'obligation stationne à 1. Ainsi, pour unegarantie de 1, le payo est de la forme max(St, 1) : cette fonction est réplicable parune action lorsqu'elle est strictement supérieure à 1, et par une obligation sur sesintervalles stationnaires. Le graphe suivant illustre en noir, la fonction à répliquer,en considérant que la garantie évolue au taux sans risque.

Figure 4.10 Paiement associé au contrat

La polarisation en n de période vers un portefeuille mono-actif est plus dicileà expliquer. Développons l'argument avancé précédemment à propos des garantiesplancher. Pour une garantie nulle, il est optimal de détenir uniquement des actions.En eet, quel que soit leur cours, elles répliquent parfaitement la partie nancière dela créance. Par contre, le cash est plus coûteux : si le cours de l'action est inférieurà la valeur de l'obligation, détenir cette dernière revient à sur-couvrir la créance,par un portefeuille trop cher. Si le cours de l'action est supérieur à celui de l'obliga-tion, le spread doit être comblé par un apport de capital au portefeuille, ce qui estégalement coûteux. De manière symétrique, une garantie plancher élevée incite à

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS48

couvrir la créance par des obligations, la couverture par actions étant plus onéreuse.

Ainsi, la garantie plancher peut s'interpréter comme le prix relatif (sous la proba-bilité risque-neutre) de l'action par rapport à l'obligation. Plus K est élevé et plusil est coûteux, et donc risqué, de choisir des actions pour composer son portefeuillede couverture. Or nous avons retenu comme critère la minimisation du risque, ouencore la minimisation du risque résiduel. Il s'agit donc de minimiser deux facteursde coût : le coût de non couverture (qui impose d'apporter au portefeuille le mon-tant manquant) et le coût de couverture (la valeur du portfeuille).

On peut désormais expliquer le phénomène observé : en début de période, le risquede non couverture est supérieur au coût de couverture, car les décès anticipés sontnombreux et donc potentiellement coûteux. A l'inverse, en n de période, l'essentieldes versements ont été eectués, et il devient onéreux pour l'assureur de détenir unportefeuille excessivement volumineux au regard du faible nombre attendu de décèsrestant à survenir. L'assureur cherche donc à réduire le coût de son portefeuille,et, pour ce faire, il le spécialise dans l'actif le moins cher (au sens de la garantieplancher).

Autrement dit, quand K s'éloigne de 1, le prix de la diversication s'accroît rela-tivement au risque de non couverture, ce dernier étant positivement corrélé à lapolarisation en un seul type d'actif. Ainsi, détenir des actifs variés permet de faireface à un risque très incertain, mais est peu utile pour répliquer une créance dontle prol est relativement bien connu.

Remarque importante Les résultats de ce chapitre sont essentiellement des in-terprétations de graphes, reposant sur des simulations numériques d'événementsstochastiques. Ce genre de réalisation comporte un vice intrinsèque, caractéristiqued'ailleurs des sciences expérimentales en général, et rappelle qu'une expérience per-met de conjecturer et éventuellement d'inrmer, mais pas de démontrer. Assuronscependant le lecteur que les simulations graphiques ont chacune été réalisées ungrand nombre de fois (pour justement être convaincu du résultat), même si cerapport ne contient qu'une illustration de chacune d'entre elles, choisie pour êtretopique sans être caricaturale.

Inuence de la survenance d'un décèsDavantage que les graphes, ce sont les formules décrivant le portefeuille optimal

qui permettent d'analyser l'impact d'un décès sur la gestion des actifs. Un décèsintervenant à la date t se traduit par une variation immédiate de la quantité d'obli-gations, permettant de procéder au paiement de la somme due. Dans un secondtemps, en t+ , la quantité d'actions est réduite de

´ Ttp(t, u)µuΦ(d1(u))du (en

supposant que les décès ne peuvent être simultanés).

En écrivant que−4 Zt = (n− Zt)− (n− Zt−)

on constate que simultanément la quantité d'obligations augmente de cette mêmevaleur

´ Ttp(t, u)µuΦ(d1(u))du , ce qui assure l'équilibre du portefeuille.

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS49

Réaction aux uctuations de marchéPour comprendre l'inuence des cours boursiers sur la composition du porte-

feuille de couverture, on eectue une simulation en traçant sur le même grapheles données habituelles (quantité d'actions en bleu, d'obligations en rouge) et en yajoutant, après changement d'échelle, le cours de l'action (ligne noire).

Figure 4.11 Liens entre le cours des actions et la quantité détenue - cas décès

Quoiqu'assez chargé, ce graphique montre très clairement que la quantité d'ac-tions détenue en portefeuille réplique les uctuations du cours de l'action. En nde période, la quantité d'actions tend toutefois vers zéro et les deux courbes sedécorrèlent : comme vu précédemment, le risque devient faible pour l'assureur enn de contrat, puisque peu de décès interviendront avant expiration du contrat (onrappelle qu'on a supposé les variables de mortalité indépendantes, excluant toutphénomène de mortalité collective, tel qu'une catastrophe naturelle majeure parexemple).

Par ailleurs, il est important de noter que la stratégie réagit aux uctuations dumarché de manière continue, et non par à-coups. On pourrait en eet s'attendre àce que la composition du portefeuille évolue seulement en cas de franchissement duseuil garanti K par le cours des actions (i.e. uniquement des obligations si S < K,et uniquement des actions dès que S > K). Au contraire, la gestion est ici lissée :une hausse du prix des actions entraîne une hausse parallèle de la proportion d'ac-tions détenue, et réciproquement.

On retrouve ici le fait que la minimisation du risque prend en compte toute l'in-formation disponible et règle d'oce tous les coûts futurs anticipés. Une tendancehaussière des actions implique un coût futur potentiellement élevé en cas de dé-tention d'obligations, pour peu que le cours excède nalement K. Mais dans tousles cas, cette hausse se traduit par l'achat d'actions, permettant de faire face à unaccroissement durable du prix des action.

Valeur initiale des actifsJusqu'à présent nous avons supposé que S0 = B0 = 1. Le relâchement de cette

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CHAPITRE 4. ANALYSE NUMÉRIQUE ET EXPLICATION DES RÉSULTATS50

hypothèse ne pose pas de diculté supplémentaire. Intuitivement, passé l'instantinitial l'hypothèse ne tient plus, et il sut de décaler l'origine des temps pourobtenir le comportement avec des valeurs initiales diérentes. Les tracés graphiquesconrment cela : avec des valeurs des actifs ne coïncidant pas à l'instant initial, lesquantités détenues ne sont plus égales, la préférence étant donnée à l'actif le pluscoûteux.

4.2.2.3 Assurance mixte

L'assurance mixte correspond à la combinaison des deux contrats étudiés précé-demment. On obtient ce type de graphe

Figure 4.12 Composition du portefeuille de couverture optimal - cas mixte

L'allure des courbes appelle peu de nouveaux commentaires : on retrouve commeattendu une combinaison des deux prols précédents. Plus précisément, ce grapheressemble beaucoup à celui obtenu pour l'assurance survie , ce qui est tout à faitnormal puisque la garantie survie coûte beaucoup plus cher que l'assurance décès,étant donné le nombre de décès relativement faible.

Ainsi donc, les remarques précédemment formulées tiennent toujours, et on a doncune description pratique assez avancée de la stratégie. En résumé, il s'agit d'acheter haut, vendre bas , la garantie plancher représentant un prix relatif etdonc une échelle de mesure des notions de haut et bas .

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Chapitre 5

Comparaison des approches

statique et dynamique

Ce chapitre est consacré à la comparaison de la stratégie dynamique (dans le casde l'assurance décès) obtenue précédemment avec une stratégie statique plus naïve.On étudie ici la pratique des deux stratégies, mais aussi leurs implications enterme de risque.

Remarque 5.1 Dans ce chapitre, on se concentre sur la couverture d'un contratd'assurance décès, car c'est le plus sensible à l'aléa de mortalité.

5.1 Prol d'investissement des deux stratégies

5.1.1 Présentation des stratégies

La stratégie dynamique a été largement décrite précédemment. Elle consiste, syn-thétiquement, à acheter des actions (ou, plus généralement, des unités de compte)lorsque leur cours excède la valeur de la garantie, et, inversement, à acheter desactifs sans risque lorsque la valeur des actions devient inférieure au plancher de ga-rantie. Une stratégie est dite statique lorsqu'elle ne comporte pas de réajustementsdu portefeuille, passé l'investissement initial (approche de type buy and hold ).On supposera que l'intégralité des primes est investie en actions. Cette composi-tion de portefeuille sera maintenue inchangée en l'absence de décès d'un assuré.Les cours boursiers n'auront donc aucune inuence, contrairement à la stratégiedynamique.

Dans notre modèle statique, le montant des primes sera pris égal au montant op-timal obtenu par minimisation du risque. Ainsi, les deux stratégies comporterontle même investissement initial, an de pouvoir mener des comparaisons. Lors dudécès d'un assuré, une action est vendue an de régler les prestations dues. Si lecours de l'action est inférieur à la valeur de la garantie à cette date, la diérenceest apportée en cash. De même, si une surmortalité conduit à un nombre de décèssupérieur au nombre initial d'actions, les prestations sont réglées par apport decash (pas de vente à découvert).

La comparaison de ces stratégies est fondamentale. La pratique traditionnelle de l'assurance s'apparente en eet à une stratégie statique, où les obligations en

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE52

particulier sont conservées jusqu'à leur terme, la règlementation incitant de manièregénérale les assureurs à ne pas liquider leurs actifs prématurément (voir chapitre7). Or s'il est naturel de limiter les activités spéculatives menées par les compa-gnies d'assurance pour protéger les assurés, la gestion dynamique telle que nousl'étudions relève de la couverture, ce qui diére radicalement, au moins dans l'inspi-ration. Il est donc important d'évaluer dans quelle mesure une stratégie dynamiquepeut être moins risquée qu'une stratégie plus conservatrice .

Remarque 5.2 Force est toutefois de reconnaître que la séparation entre activi-tés de spéculation et de couverture est parfois ténue, voire virtuelle. De grandesbanques ont ainsi subi de fortes pertes du fait de traders assignés à des activitésde couverture mais prenant des positions spéculatives 1. Nous reviendrons sur cesproblèmes au chapitre 7, mais il est important de se remémorer d'emblée que lesstratégies de couverture dynamique présentent un risque de dérive vers la spécula-tion, ce qui impose que leur mise en place se fasse dans un cadre opérationnel trèsrigoureux.

Intuitivement, la stratégie risque-minimisante est plus coûteuse en moyenne mais li-mite les pertes extrêmes. En eet, nous avons vu qu'elle consistait - de manière sim-pliée - à acheter des actions lorsque le cours de celles-ci augmente, et à les revendreen cas de baisse de leur prix. Cette stratégie engendre donc des coûts nombreuxmais faibles : chaque ajustement du portefeuille peut entraîner une moins-value,mais celle-ci est faible (sauf valeur extrême du brownien de prix) car la réaction dugestionnaire est rapide.

Par contre, une telle stratégie doit être ecace face au risque de perte extrême. Eneet, outre l'aléa de mortalité, qui est évacué dans le cas de l'assurance mixte, lerisque repose sur le cours des actions. Deux risques antagonistes existent : détenirdes actions dont la valeur s'eondre, et détenir des obligations alors que le cours desactions (et donc le montant dû aux assurés) progresse fortement. Or un ajustementdynamique du portefeuille permet de faire face (avec une latence irréductible) à cesdeux risques, puisque la quantité d'actions détenues réplique le cours de celles-ci.Les calculs numériques suivants visent à formaliser cette intuition.

5.1.2 Composition des deux portefeuilles

Nous avons montré précédemment que la prime versée initialement par l'assuré dansla stratégie dynamique devait, pour éviter tout investissement supplémentaire à ladate t = 0, être égale à

κ =

ˆ T

0

p00(0, u)µuF01(0, S0, u)du

Le montant initialement investi est donc de N × κ.

En simulant la composition des portefeuilles statique et dynamique on obtient cetype de résultat

1. Au moment où nous écrivons ces lignes, il semble que les pertes extrêmes révélées par JPMorgan le 10/05/12 soient dues aux positions spéculatives prises sur des CDS par un trader

assigné à la couverture du risque de défaut.

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE53

Figure 5.1 Quantité d'actions et apport de cash

La courbe bleue représente la quantité d'actions détenues dans la stratégie dyna-mique : on retrouve le prols obtenu précédemment, avec une tendance décroissanteet un aplatissement en n de période. La courbe rouge représente le nombre d'ac-tions détenues dans la stratégie statique. Conformément à la description de cettestratégie, toutes les primes sont investies en actions et à chaque décès une actionest vendue. Enn, la courbe noire représente les apports en cash dans la stratégiestatique.

On observe deux types de pics : dans l'intervalle [0; 6] toutes les actions n'ont pasété liquidées, et les apports de cash viennent en complément de la vente d'actions,lorsque la valeur de celles-ci est inférieure à la garantie plancher, et donc insu-sante à la couverture des engagements de l'assureur. Au-delà de la date t = 6 ans,il ne reste plus d'actions en portefeuille. Lorsqu'un décès survient, l'assureur estalors contraint d'honorer ses engagements par apport intégral de cash.

On constate d'emblée que cette stratégie statique est peu prudente : si la valeurdes actions diminue alors qu'il en reste encore en portefeuille, la valeur liquidativede celles-ci sera trop faible au regard de la garantie. A l'inverse, une fois le stockd'actions épuisé (ce qui arrive si la mortalité est plus forte que prévu), l'assureurpeut se retrouver dans une situation nancière délicate si la valeur des actionsdevient élevée. Le calcul de mesures de risques à la section suivante permet demesures l'écart de risque entre les deux stratégies.

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE54

5.2 Evaluation des coûts et calcul de la VaR

5.2.1 Tracé des coûts cumulés

On dénit le coût cumulé comme l'ensemble des apports en capital réalisés parl'assureur passé l'investissement intial. Ces montants peuvent servir à acheter desactifs, ou à régler des prestations à l'assuré. De manière équivalente, on peut écrire

Ccumule(t) = Vt(ϕ)−ˆ t

0

ϑsdXs +At

ce qui signie que le coût cumulé est la somme de la valeur du portefeuille et desmontants déjà réglés, auxquels on retranche l'investissement initial et les gains detrading.

Dans la stratégie statique, il n'y a pas d'achat d'actions après l'instant initial. Lecoût est donc égal aux apports de cash. Pour calculer le coût de la stratégie dyna-mique, on peut écrire (en passant en temps discret)

C(t+ 1) =Ccumule(t+ 1)− Ccumule(t)=Vt+1 − Vt − ϑt(Xt+1 −Xt) + [N(t+ 1)−N(t)]×max(K,St+1)

= (ϑt+1 − ϑt)Xt+1 + (ηt+1 − ηt) + [N(t+ 1)−N(t)]×max(K,St+1)

avec N(t) le nombre total de décès enregistrés à la date t.

En eectuant de nombreuses simulations, on obtient presque toujours le type deprols suivant, où la courbe bleue représente le prol de coût de la stratégie statiqueet la courbe rouge le prol associé à la stratégie dynamique

Figure 5.2 Prols de coûts - cas favorable à la stratégie statique

Dans ces deux types de prols, la stratégie statique fonctionne très bien : le nombreinitial d'actions et leur valeur sont susants pour couvrir les engagements de l'assu-reur, celui-ci n'ayant donc pas besoins d'eectuer d'investissement supplémentaire.

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE55

Le coût statique est donc logiquement nul.

La stratégie dynamique produit des résultats plus contratés : l'idée d'acheter hautet vendre bas les actifs conduit à de nombreux réajustements de portefeuille.Celà peut induire des moins-values coûteuses pour l'assureur (premier graphique).A l'inverse, le second graphique illustre les gains importants que peut fournir lastratégie dynamique. Ceux-ci sont particulièrement forts en n de période. Consta-tant que le nombre de décès est faible au regard des prévisions, l'assureur liquideprogressivement son portefeuille de couverture et enregistre d'importants bénéces.

Ce cas de gure où la stratégie statique ne coûte rien est toutefois très particulier.Il correspond à une mortalité inférieure aux prévisions, et donc à un coup dechance pour l'assureur. Le surcoût éventuel de la stratégie dynamique est ainsià relativiser : l'objectif d'une stratégie de couverture n'est en eet pas de gagnerbeaucoup dans certains cas de gures, mais de limiter les pertes dans le plus grandnombre de cas !

Figure 5.3 Prols de coûts - cas défavorable à la stratégie statique

Dans ces deux simulations, la stratégie statique engendre un coût, soit dès le début(baisse des marchés d'action), soit en cours de période. Face à celà, la stratégiedynamique est toujours volatile, mais produit des résultats contrastés. Dans lapremière simulation, les variations dynamiques sont beaucoup plus faibles que lesvariations statiques. Cela traduit bien l'idée évoquée précédemment, selon laquelleune stratégie de couverture préfère des pertes répétées mais de faible montant, plu-tôt qu'une unique perte éventuellement très grave.

Enn, le graphique de droite illustre la surréaction de la stratégie dynamique auxcours des actifs, ce qui peut conduire à des achats d'actions dans des conditionsdéfavorables. Néanmoins, le coût est fortement réduit en n de stratégie, l'excédentde couverture étant progressivement liquidé.

Ces graphiques permettent de visualiser diérents comportements des deux straté-gies. Il convient dorénavant de quantier la probabilité d'occurence de ces diérentsscénarios, ce que nous faisons à travers le calcul de mesures de risque.

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE56

5.2.2 Mesures de risque

On se focalise sur deux mesures de risque : la VaR, pour sa large utilisation pratique(notamment sous Solvabilité II) et l'Expected shortfall, qui apporte un complémentd'information intéressant.

5.2.2.1 Calcul de la Value at Risk

Pour calculer la VaR associée à chaque stratégie, on simule un grand nombre descénarios. Pour chaque scénario, on calcule le prol de coût et on sélectionne lavaleur maximale. On ne se focalise donc pas sur le coût terminal mais sur le coûtcumulé courant. Pour chaque stratégie on obtient donc un vecteur des coûts maxi-maux. Après avoir trié ces vecteurs, on sélectionne l'élément situé à la positioncorrespondant au seuil de conance choisi. Ainsi, la VaR à 95% sur un échantillonde 1000 tirages sera estimée par la 950-ème plus grande valeur.

Des simulations numériques donnent les résultats suivants

seuil de la VaR 75% 95% 99,5% 99,5%nombre de simulations 400 1 000 1 000 2000

VaR stratégie dynamique 4,26 8,76 13,52 12,13VaR stratégie statique 5,14 9,49 18,29 15,04

Remarque 5.3 Pour le quantile X = 99, 5% on a eectué une estimation à 2000tirages, an d'avoir des données plus précises sur la queue de distribution. En serapprochant des extrêmes on a en eet moins de données (en supposant un com-portement approximativement normal), les calculs étant donc moins ables.

Quoiqu'il en soit, les estimations concordent pour montrer que la VaR est plusfaible pour la stratégie dynamique. Cela est tout à fait fondamental : en optant pourune gestion dynamique de l'actif, on arrive à réduire signicativement le risque de grande perte. De surcroît, les calculs de VaR pour diérents fractiles montrentque la réduction du risque se fait au niveau des pertes extrêmes (X = 99, 5%)mais aussi de pertes plus courantes (X = 75%). Ainsi donc, la méthode dynamiqueconstitue une amélioration substantielle de la gestion actif-passif.

Pour les quatre simulations précédentes, on peut calculer le pourcentage de réduc-tion de la VaR statique induit par une stratégie dynamique

seuil de la VaR 75% 95% 99,5% 99,5%réduction de la VaR (en %) 17% 7,7% 26% 19%

Cela conrme la forte réduction de VaR obtenue par une gestion dynamique.

5.2.2.2 Calculs d'Expected shortfall

L'expected shortfall 2, noté ES et parfois appelé VaR conditionnelle ou TailValue at Risk, mesure la perte moyenne au-delà du seuil déterminé par la VaR.Formellement on dénit

ES = E[perte|perte > V aRX%]

2. Le terme d'expected shortfall désigne diérents concepts suivant les auteurs. Nous en don-nons une dénition formalisée an de lever toute ambiguïté.

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE57

Cette notion est complémentaire de la VaR, en ce qu'elle ore une image plus pré-cise du prol de pertes extrêmes i.e. excédant la VaR. L'ES est en eet moinssensible que la VaR aux valeurs extrêmes, puisque le passage à la moyenne di-lue les éventuels points incohérents. On calcule l'ES pour les mêmes seuils queprécédemment, avec 1000 tirages.

seuil de la VaR 75% 95% 99,5%ES stratégie dynamique 7,03 10,74 14,90ES stratégie statique 7,46 10,92 16,55réduction de l'ES 5,7% 1,5% 9,9%

Ces valeurs de l'expected shortfall sont cohérentes avec les VaR calculées précé-demment. Tout d'abord, la méthode dynamique est unanimement meilleure. C'esttoutefois au niveau des valeurs extrêmes que le gain est le plus substantiel, avec unmontant de perte extrême réduit de quasiment 10%.

5.2.3 Caractéristiques du risque

Après avoir calculé deux mesures de risques, on cherche à mieux comprendre lesrésultats obtenus, et à tester leur sensibilité aux paramètres du modèle.

5.2.3.1 Prol de la distribution des pertes

Les calculs précédents montrent globalement une réduction signicative du risquepar l'utilisation d'une stratégie dynamique. Les valeurs obtenues au seuil de perteX = 95% sont néanmoins étranges : la réduction du risque y est nettement plusfaible qu'à des seuils plus bas (X = 75%) ou plus élevés (X = 99, 5%). Pour mieuxcomprendre ce phénomène on trace la distribution des pertes.

Figure 5.4 Distribution des pertes pour les deux stratégies

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE58

Ce graphe représente les valeurs de pertes obtenues pour chacune des stratégies,rangées par ordre croissant. La stratégie statique est représentée par les rondsrouges, et la stratégie dynamique par les bleus. Ces représentations ont été obte-nues à partir de 2000 tirages.

On remarque tout d'abord que les courbes ont une tendance exponentielle : la trèsgrande majorité des tirages est associée à un coût modéré - disons inférieur à10 sur l'échelle de valeur utilisée, ce qui représente environ 95% des tirages. Aucontraire, les quelques tirages restants sont associés à des coûts bien plus grands,atteignant 26 pour la stratégie statique.

On est donc amené à décomposer les courbes en deux parties. La première repré-sente les 95% des tirages les plus favorables, et il est dicile d'y tirer des conclu-sions probantes : les deux stratégies y sont très proches et tantôt meilleures l'uneet l'autre. On peut toutefois proposer une analyse plus ne. Cette première partiesemble en eet pouvoir se décomposer en 3 sous-parties :

1. La première sous-partie, couvrant grossièrement les 300 premières observa-tions, voit les deux courbes coïncider et valoir 0. Ces simulations corres-pondent au cas le plus favorable, où les ressources initiales sont susantespour mener à bien les stratégies sans apport de capital (autrement dit, lesstratégies sont alors autonancées).

2. La seconde sous-partie correspond à l'intervalle de tirages [|300; 750|]. Pources tirages, la stratégie statique est légèrement meilleure que la stratégie dy-namique. Comme nous l'avons évoqué précédemment, ce cas de gure est celuioù, alors qu'une couverture statique aurait su par chance , la couverturedynamique engendre des coûts de trading inutiles . Ces moins-values sontcependant relativement faibles, bien qu'éventuellement nombreuses.

3. La dernière sous-partie s'étend sur le reste du premier intervalle (i.e. approxi-mativement [|750; 1900|]). Les deux stratégies y demeurent proches en termede pertes, mais l'ordre s'inverse, la stratégie dynamique devenant meilleure.Cela correspond au moment où les pertes de marché dues aux nombreusestransactions sont compensées par le moindre risque de ne pouvoir honorer sesengagements à cause de la garantie plancher.

La deuxième partie des courbes correspond aux 50 ou 100 dernières observations.Elle est marquée par un accroissement très brutal des coûts imprévus supportéspar l'assureur. On peut qualier de tels scénarios d' extrêmes . Or il est très clairque dans ces simulations, la stratégie dynamique induit des pertes nettement pluslimitées que la stratégie statique. Alors que la stratégie dynamique voit ses pertescantonnées entre les indices 13 et 17 sur ce segment, la stratégie statique compteplusieurs occurences supérieures à 17, dont l'une atteint plus de 26.

Ainsi, ces tracés conrment l'intuition que l'on avait sur les avantages et inconvé-nients d'une stratégie dynamique, coûteuse en moyenne mais ayant un écart typede perte resserré. On constate toutefois que la queue de distribution est composéede très peu de valeurs ce qui soulève des doutes sur la pertinence des calculs menésprécédemment. Pour conrmer ceux-ci, on eectue un nouveau calcul de VaR maisbasé cette fois-ci sur un échantillon de 10000 tirages. Les résultats sont consignésdans le tableau suivant.

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE59

seuil de la VaR 75% 90% 95% 99% 99,5% 99,9%VaR stratégie dynamique 4,39 6,93 8,67 12,12 13,44 16,84VaR stratégie statique 5,06 7,63 9,15 12,27 14,17 23,47réduction de la VaR 13% 9% 5% 1% 5% 28%

On retrouve un prol en U . Pour mieux comprendre ces valeurs, on trace leprol des 10% d'observations les plus coûteuses :

Figure 5.5 Distribution des 10% des pires pertes sur 10000 tirages

Ce graphe est cohérent avec le précédent, et en conrme l'enseignement principal :c'est pour limiter les pertes extrêmes que la stratégie dynamique devient vraimentpertinente, auquel cas elle apporte une réduction du risque très substantielle.

5.2.3.2 Sensibilité du risque aux diérents paramètres

Jusqu'à présent nous avons gardé le même jeu de valeurs des paramètres lors desdéveloppements numériques. Nous faisons ici varier les paramètres.

Inuence de la volatilitéOn a évoqué précédemment trois scénarios de volatilité : σ = 15%, σ = 25% et

σ = 40%. La VaR à 25% ayant été déjà calculée, on examine les deux autres cas.

seuil de la VaR 95% 99% 99,5% 99,9%σ = 15% VaR stratégie dynamique 8,48 11,15 12,18 15,08

VaR stratégie statique 8,05 12,11 15,15 20,15

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE60

seuil de la VaR 95% 99% 99,5% 99,9%σ = 40% VaR stratégie dynamique 9,63 15,00 16,37 18,38

VaR stratégie statique 11,19 14,72 16,00 21,05

Au-delà du calcul de VaR, la distribution des pertes montre que la stratégie dyna-mique est beaucoup plus intéressante en période de haute volatilité. Cette conclu-sion ne vaut d'ailleurs pas seulement pour les pertes extrêmes : globalement, leprol dynamique est moins risqué que le prol statique, lorsque la volatilité estélevée. Au contraire, pour une volatilité faible, la stratégie dynamique est déce-vante, et sert uniquement à limiter les pertes extrêmes (ce qui est déjà un atoutintéressant).

Remarquons que ce constat n'était pas évident a priori. L'eet de l'augmentation dela volatilité est en eet ambivalent : d'un côté cela induit un surcroît d'incertitude,qui peut être utilement limité par la stratégie dynamique. Mais à l'inverse, deforts mouvements du cours des actions amènent à sur-couvrir , en procédant àde nombreux échanges d'actifs alors que cela n'est pas nécessaire. Les simulationsmontre que le premier eet l'emporte sur le second.

σ = 15% σ = 40%

Figure 5.6 Incidence de la sensibilité sur la distribution des pertes

Inuence de la garantie plancherAu chapitre précédent, on avait montré l'importance du choix de la garantie

plancher K sur le déroulement de la stratégie. En particulier, on avait mis en évi-dence le rôle central de la valeur K = 1. On étudie ici l'impact d'une variation dela valeur de la garantie, en considérant les cas K = 0, 8 et K = 1, 2.

seuil de la VaR 95% 99% 99,5% 99,9%K = 0, 8 VaR stratégie dynamique 8,72 12,39 13,40 16,42

VaR stratégie statique 7,32 13,19 17,09 20,51

seuil de la VaR 95% 99% 99,5% 99,9%K = 1, 2 VaR stratégie dynamique 9,99 14,09 15,21 17,24

VaR stratégie statique 11,74 14,41 15,39 17,60

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CHAPITRE 5. COMPARAISON DES APPROCHES STATIQUE ET DYNAMIQUE61

Les calculs de VaR semblent contre-intuitifs : pour K = 0, 8 la réduction de risquesemble être meilleure que pour K = 1, 2, alors que c'est justement lorsque la ga-rantie est élevée qu'il est coûteux de détenir des actions plutôt que des obligations.Les graphes ci-dessous tempèrent toutefois ce jugement. On y constate que globale-ment, la stratégie dynamique est la meilleure, et que l'écart entre les deux stratégiesest plus grand lorsque K est plus élevé.

K = 0, 8 K = 1, 2

Figure 5.7 Incidence de la garantie plancher sur la distribution des pertes

Cette tendance est conrmée par le tracé ci-dessous qui correspond au cas (extrême)K = 3, corroborant l'hypothèse selon laquelle le bénéce d'une stratégie dynamiqueest d'autant plus prononcé que la garantie plancher est haute.

Figure 5.8 Distribution des pertes pour K=3

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Chapitre 6

Modèle de taux stochastiques

Jusqu'à maintenant, nous avons analysé le marché nancier dans le cadre du modèlede Black-Scholes. Nous présentons ici une transposition des résultats précédents àun modèle de taux stochastiques. Il s'agit tout d'abord de décrire de manière plusréaliste l'aléa nancier (dans une période de fortes tensions obligataires), mais ausside montrer que les résultats obtenus constituent une base , pouvant faire l'objetde diverses améliorations.

6.1 Modèle de Vasicek

Le modèle de taux stochastiques de Vasicek sera utilisé dans ce chapitre, car ilconstitue une bonne première approche de ce type de modèles. Nous commençonspar en étudier certaines propriétés essentielles, pour ensuite insérer ces résultatsdans le modèle de minimisation du risque élaboré précédemment.

6.1.1 Processus d'Ornstein-Uhlenbeck

Dans le modèle de Vasicek (1977), le taux court instantané r est stochastique etsuit un processus d'Ornstein-Uhlenbeck. Sous une mesure risque-neutre Q on a

drt = κ (θ − rt) dt+ δdW2,t

r(0) = r0

avec κ, δ et θ des constantes positives sous la mesure réelle. Par ailleurs on écrira

dSt = ζ(t, St)Stdt+ σ(t, St)StdW1,t

et on notera ρ le coecient de corrélation entre les browniens W1,t et W2,t, quel'on supposera constant.

Donnons une brève interprétation du processus de taux. θ représente le taux d'in-térêt moyen, et κ la vitesse de retour à la moyenne : si r < θ, l'expression κ (θ − rt) est positive et la tendance est à la hausse si r > θ, le taux est supérieur à sa valeur moyenne et tend à diminuer

Ainsi, le processus subit des déviations aléatoires (partie brownienne), mais est ra-mené en permanence vers sa valeur moyenne. Ceci semble assez cohérent avec lesuctuations de taux historiquement observées, et peut s'analyser en termes réels .D'un point de vue macroéconomique, le taux d'intérêt s'interprète comme le prix

62

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CHAPITRE 6. MODÈLE DE TAUX STOCHASTIQUES 63

de la monnaie qui en égalise l'ore et la demande. Les caractéristiques structurellesde l'économie en déterminent la valeur de long terme. A court terme, des uctua-tions sont observées et dépendent de l'action de la banque centrale, qui xe les tauxdirecteurs. A moyen terme ce sont l'économie réelle et les marchés qui déterminentles taux.

L'équation diérentielle stochastique vériée par r peut s'intégrer. Posons pour celaYt = rte

κt. Le lemme d'Itô donne

dYt = κrteκt + eκtdrt

= κrteκt + eκtκ (θ − rt) dt+ eκtδdW2,t

= eκtκθdt+ eκtδdW2,t

En intégrant cette relation entre 0 et t on obtient

rteκt = r0 + κθ

ˆ t

0

eκsds+ δ

ˆ t

0

eκsdW2,s

= r0 + θ(eκt − 1

)+ δ

ˆ t

0

eκsdW2,s

D'où l'expression intégrale de rt

rt = r0e−κt + θ

(1− e−κt

)+ δ

ˆ t

0

e−κ(t−s)dW2,s

An de visualiser ces résultats, on eectue une simulation numérique, ce qui né-cessite de discrétiser le modèle. Le processus de taux conditionnel, i.e. le processusde rt sachant rs avec 0 < s < t, est gaussien. On obtient son espérance et sa va-riance grâce aux propriétés du mouvement brownien et de l'intégrale stochastique(propriété d'isométrie d'Itô). Il vient

E [rt|Fs] = rse−κ(t−s) + θ

(1− e−κ(t−s)

)V [rt|Fs] =

δ2

(1− e−2κ(t−s)

)

On obtient alors la discrétisation suivante

rt+4t = E [rt+4t|Ft] +√V [rt+4t|Ft]εt+4t

= rte−κ4t + θ

(1− e−κ4t

)+ δ

√1− e−2κ4t

2κεt+4t

avec les εt+4t tirés indépendamment selon une loi normale N (0, 1).

On peut alors eectuer une simulation sur une période T = 8 ans, en prenant untaux initial r0 = 4%, une tendance de long terme θ = 3%, une vitesse de retour àla moyenne κ = 1% et un bruit δ = 0, 5%

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CHAPITRE 6. MODÈLE DE TAUX STOCHASTIQUES 64

Figure 6.1 Simulation d'un taux d'intérêt Ornstein-Uhlenbeck

6.1.2 Prix d'un zéro-coupon

Le prix à la date t = 0 d'un zéro-coupon de maturité T est

P0 (T ) = EQ[e−´ T0rtdt]

On calculeˆ T

0

rtdt = θT + (r0 − θ)ˆ T

0

e−κtdt+ δ

ˆ T

0

ˆ t

0

e−κ(t−u)dW2,u

= θT + (r0 − θ)1− e−κT

κ+ δ

ˆ T

0

ˆ t

0

e−κ(t−u)dW2,u

Posons Yt =´ t

0eκudW2,u et calculons-en la diérentielle par la formule d'Itô

d(e−κtYt

)= e−κtdYt − κe−κtYtdt = dW2,t − κe−κtYtdt

On en déduit, par intégrationˆ T

0

κe−κtˆ t

0

eκudW2,udt = W2,t − e−κtYt =

ˆ T

0

(1− e−κ(T−t)

)dW2,t

Et nalement, en injectant dans la relation calculée précédemmentˆ T

0

rtdt = θT + (r0 − θ) Λ (T ) + δ

ˆ T

0

Λ (T − t)W2,t

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CHAPITRE 6. MODÈLE DE TAUX STOCHASTIQUES 65

avec

Λ (t) =1− e−κt

κ

On en déduit

ˆ T

0

rtdt ∼ N

(θT + (r0 − θ) Λ (T ) , δ2

ˆ T

0

Λ (t)2dt

)

D'où, par transformation de Laplace, le prix du zéro coupon à l'instant initial et àla date t

P0 (T ) = exp

[−θT − (r0 − θ) Λ (T ) +

δ2

2

ˆ T

0

Λ (s)2ds

]

Pt (T ) = exp

[−θ (T − t)− (rt − θ) Λ (T − t) +

δ2

2

ˆ T

t

Λ (s)2ds

]

6.1.3 Prix d'un call européen

On cherche la valeur (actualisée) d'un call européen de maturité T , de sous-jacentS et de strike K

V0 = EQ

[exp

(−ˆ T

0

rtdt

)max (ST −K, 0) |F0

]

Pour ce faire on utilise une démarche présentée par Yong-Jin Kim (voir [4]), en serestreignant ici au cas où la volatilité de l'action est constante. Le cours de l'actionvérie

St = S0 exp

(ˆ t

0

(rs −

σ2

2

)ds+

ˆ t

0

σdW1,s

)et le taux d'intérêt s'intègre, comme vu précédemment, en

rt = r0e−κt + θ

(1− e−κt

)+ δ

ˆ t

0

e−κ(t−s)dW2,s

Posons ZT = (ST −K) exp(−´ T

0rsds

). On obtient

ZT =S0 exp

(−σ

2T

2+X1T

)−K exp (−B (T )−X2T )

avec

B (T ) =

ˆ T

0

(r0e−κt + θ

(1− e−κt

))dt

X1T =

ˆ T

0

σdW1,s

X2T =δ

κ

ˆ T

0

(1− e−κ(T−s)

)dW2,s

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CHAPITRE 6. MODÈLE DE TAUX STOCHASTIQUES 66

Posons maintenantΣT11 = σ2T

ΣT22 = δ2

ˆ T

0

(ˆ T

s

e−κtdt

)2

e2κsds =δ2

κ2

ˆ T

0

(1− e−κ(T−s)

)2

ds

ΣT12 = δσρ

ˆ T

0

(ˆ T

s

e−κtdt

)eκsds =

δσρ

κ

ˆ T

0

(1− e−κ(T−s)

)ds

Les propriétés de l'intégrale stochastique permettent alors d'écrire(X1T

X2T

)∼ N

[(00

),

(ΣT11 ΣT12

ΣT12 ΣT22

)]

L'option est dans la monnaie pour ZT ≥ 0 ou, de manière équivalente, si

X1T +X2T ≥1

2ΣT11 −B(T ) + ln

(K

S0

)On notera C(T ) = 1

2ΣT11 −B(T ) + ln(KS0

). Calculons alors la valeur du call

V0 = EQ [max (ZT , 0) |F0]

= EQ[S0 exp

(X1T −

X1T

2

)1X1T+X2T≥C(T )|F0

]− EQ

[K exp (−X2T −B(T )) 1X1T+X2T≥C(T )|F0

]

Lemme 6.1 Soit x ∼ N2 (µ,Σ) avec N2 la loi normale bivariée. Soient a un vecteurde dimension 2 et b et c des scalaires. Notons φ2 la densité de la loi N2 (µ,Σ), et Φla fonction de répartition d'une gaussienne. Alors on a la relation 1

¨(1,−b)x≥c

exp (a′x)φ2 (x) dx = exp

(a′µ+

1

2a′Σa

(1,−b) (µ+ Σa)− c√(1,−b)′ Σ (1,−b)

En prenant a = (1, 0)

′, b = −1 et c = C(T ) et en posant x = (X1T , X2T )′ on

obtient

E[exp (X1T ) 1X1T+X2T≥C(T )|F0

]=

¨X1T+X2T≥C(T )

exp (X1T )φ2 (x) dx

=

¨(1,−b)x≥c

exp (a′x)φ2 (x) dx

= exp

(ΣT11

2

[ΣT11 + ΣT12 − C(T )√

D

]1. Pour l'énoncé original et la démonstration, voir KUNITOMO N. et TAKAHASHI A. (1992)

Pricing average options, Japan Financial Review 14, 1-19.

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CHAPITRE 6. MODÈLE DE TAUX STOCHASTIQUES 67

avec D = ΣT11 + 2ΣT12 + ΣT22. En faisant le même calcul pour la deuxième partie del'expression de V0 mais en prenant cette fois-ci a = (0,−1)

′ on obtient nalement

V0 = S0Φ (d1)−KP (0, T ) Φ (d2)

où l'on a posé

P (0, T ) = exp

(ΣT22

2−B (T )

)d1 =

ΣT11 + ΣT12 − C(T )√D

d2 = d1 −√D

Ainsi donc on obtient une valeur du call de forme similaire à celle obtenue dans lecadre du modèle de Black-Scholes. Ce calcul nous permettra d'obtenir la formule duportefeuille de couverture optimal avec taux stochastique, à condition de modierlégèrement les notations, puisqu'on considérera une option à couvrir entre t et u etnon plus entre 0 et T .

6.1.4 Avantages et inconvénients du modèle de Vasicek

Le modèle de Vasicek donne une description du comportement des taux courts plusréaliste que les modèles à taux constants (Black-Scholes). La gure ci-dessous rap-pelle en eet les fortes uctuations auxquelles sont soumis ces taux. Comme nousétudions des contrats de maturité assez élevée (T = 8 ans) il semble important derelâcher l'hypothèse de taux constants.

Figure 6.2 Taux Euribor 3 mois. Source : lesechos.fr

Le modèle ore par ailleurs une certaine facilité de manipulation : distributionsgaussiennes, formule explicite pour le prix d'un zéro-coupon, facilité de simulation,etc. Dans notre cas, il s'agit donc d'un bon compromis par rapport au modèle dé-terministe. Nous verrons en eet que le cadre théorique développé précédemmentaccepte d'être étendu à des taux stochastiques.

Rappelons toutefois certains inconvénients du modèle de Vasicek :

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CHAPITRE 6. MODÈLE DE TAUX STOCHASTIQUES 68

les taux courts peuvent être négatifs (contrairement au modèle Cox-Ingersoll-Ross)

dicile à paramétrer aux valeurs de marché (contrairement au modèle de Hull-White)

6.2 Minimisation du risque dans le cadre étendu

Pour intégrer des taux stochastiques, on raisonne en deux temps. Nous reprenonsd'abord les grandes étapes de la démonstration dans le cas déterministe pour mon-trer qu'elles restent valables dans le cas stochastique. Dans un second temps, laformule du prix d'un call sous Vasicek est utilisée pour calculer les portefeuillesoptimaux.

6.2.1 Support théorique : synthèse des résultats

Les formules présentées à la section 3.2 se transposent au cas stochastique. Pourle montrer, reprenons schématiquement les grands axes de l'obtention d'une formeexplicite de la stratégie de minimisation du risque. Nous nous dispenserons ici derentrer dans le détail des calculs, pour limiter les redondances. Une étude minu-tieuse montre néanmoins que la prise en compte de taux stochastiques ne pose pasde problème dans les raisonnements tenus.

Etape 1 : Dénition du marché et changement de mesureOn considère un marché composé d'une action et d'un actif sans risque , celui-

ci reposant sur un processus de taux stochastique. On change ensuite de mesurede probabilité, en passant en univers risque-neutre pour l'aléa nancier. Sous cettemesure, les actifs sont des martingales, et les taux courts sont donnés par le pro-cessus d'Ornstein-Uhlenbeck étudié précédemment. L'espace de mortalité n'est, lui,évidemment pas modié.

Etape 2 : Flux de paiementLes paiements associés aux deux contrats de base s'écrivent toujours

F jk(t, St, u) = E∗[BtB

−1u gjk(u, Su)|Gt

]F j(t, St, u) = E∗

[BtB

−1u gj(u, Su)|Gt

]L'expression de Bt est changée mais les expressions précédentes tiennent. Le paie-ment At dû à l'assuré a donc toujours la même expression.

Etape 3 : Formules théoriques : décomposition GKW et portefeuille op-timalLa décomposition de GKW est une propriété générale des martingales. L'expres-

sion

V ∗t = V ∗0 +

ˆ t

0

ϑAs dXs + LAt

ne dépend pas du modèle de taux utilisé : la forme diérentielle dXs prend encompte les uctuations du taux.

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CHAPITRE 6. MODÈLE DE TAUX STOCHASTIQUES 69

De même, l'existence et l'unicité d'une stratégie 0-admissible risque-minimisantedonnée par

(ϑt, ηt) =(ϑAt , V

∗t −At − ϑAt Xt

), 0 ≤ t ≤ T

se démontre sans aucune adaptation.

Etape 4 : Théorème fondamental : portefeuille optimalLa pierre angulaire de la théorie élaborée au chapitre 3 est l'obtention d'une

formule semi-explicite pour le portefeuille optimal

(ϑt, ηt) =

(∑i∈J

Iit−ϑit,∑i∈J

IitB−1t V i(t, St)−Xt

∑i∈J

Iit−ϑit

)avec

ϑit =∑j∈J

ˆ T

t

pij (t, s)

F js (t, St, s) +∑k,k 6=j

µjks Fjks (t, St, s)

ds

V i(t, s) =∑j∈J

ˆ T

t

pij(t, s)

F j(t, St, s) +∑k,k 6=j

µjks Fjk(t, St, s)

ds

Nous ne reprendrons pas le détail de la preuve, assez technique, laissée en annexe.On constate toutefois qu'aucune étape ne nécessite d'avoir des taux constants.Plus précisément, les seuls problèmes pourraient venir des étapes où l'on diérenciedes fonctions de B, puisque des éléments browniens supplémentaires risqueraientd'apparaître. En réalité, le lemme d'Itô indique que

d(B−1t F (t, St, u)

)= Fs (t, St, u) dXt

Les calculs de diérentielles ne sont donc pas modiés. Les autres étapes (intégra-tion, inversion d'intégrales, etc.) ne posent pas de dicultés.

Etape 5 : Portefeuilles optimaux pour les diérents contratsLa dernière étape du raisonnement consiste à rendre plus explicites les formules

précédentes en y substituant les paramètres retenus pour la mortalité. On aboutità la composition du portefeuille optimal suivante, dans le cas de l'assurance décès

ϑt = 1Tx≥t

ˆ T

tu−tpx+tµuF

01s (t, St)du

ηt = 1Tx>tB−1t

ˆ T

tu−tpx+tµuF

01(t, St)du− 1Tx≥tXt

ˆ T

tu−tpx+tµuF

01s (t, St)du

On constate que l'aléa de taux est pris en compte dans les expressions F 01s (t, St) et

B−1t F 01(t, St) : là non plus, il n'y a pas de modications. Il en est de même dans

le cas de l'assurance survie.

Ainsi, on constate que les étapes du raisonnement mené avec des taux constantss'adaptent en fait directement à un modèle de taux stochastiques. La formule duportefeuille optimal ci-dessus peut donc servir de base de travail pour notre cadre étendu .

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CHAPITRE 6. MODÈLE DE TAUX STOCHASTIQUES 70

6.2.2 Calcul des formules explicites

An d'évaluer la composition du portefeuille de couverture, on calcule F 0(t, St)dans le modèle de Vasicek, grâce aux formules de prix d'un zéro-coupon et d'uncall. Dans le cas de l'assurance décès on calcule

F 01(t, St, u) = E∗[e−´ utrsds

(Keδu +

(Su −Keδu

)+) |Ft]= KeδuPt(u) + Vt

(u,Keδu

)avec Pt(u) le prix en t d'un zéro-coupon de maturité u et Vt

(u,Keδu

)le prix en t

d'un call de maturité u et de strike Keδu. En substituant les formules précédem-ment obtenues, on parvient donc à une expression exxplicite de F 01(t, St, u) puisdu portefeuille de couverture optimal. La même méthode fonctionne évidemmentpour les autres contrats.

Ainsi, nous avons montré que les résultats obtenus dans un cadre assez restrictifpouvaient s'étendre relativement simplement. D'autres modèles de taux pourraientbien sûr être choisis et, plus généralement, de nombreuses améliorations proposéesdans la littérature nancière pourraient être incorporées au modèle.

S'il est peu utile d'apporter de telles complications dans le cadre de notre étude,qui vise à décrire une méthode de couverture et non à l'implémenter en pratique,celles-ci prendraient leur sens en cas de mise en place eective.

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Chapitre 7

Discussion sur l'intérêt et la

mise en oeuvre de la méthode

Dans les chapitres précédents, nous avons décrit la stratégie optimale en termede minimisation du risque, et quantié les apports d'une telle méthode en com-paraison d'une stratégie passive plus naïve. Dans ce chapitre, nous discutons dela faisabilité d'une telle stratégie, au regard notamment des normes comptables etprudentielles. Nous évoquons des applications potentielles des résultats obtenus, etfaisons le lien avec des approches plus courantes des portefeuilles de réplication .

7.1 Apports d'une gestion dynamique

Aux chapitres 4 et 5, nous avons simulé les résultats théoriques obtenus. La conclu-sion principale est que la stratégie dynamique est quasi-systématiquement meilleureque la stratégie statique. Autrement dit, pour un niveau de primes donné, lemontant de cash supplémentaire à apporter pour honorer ses engagements est enmoyenne plus faible pour la stratégie dynamique. Nous avons par ailleurs observéque l'amplitude de la réduction de risque ainsi permise dépend fortement du seuilde risque retenu. Pour les risques extrêmes - le 1% des pertes les plus lourdes -, laméthode dynamique permet une réduction de coût très signicative (de l'ordre de25%).

Toutefois, il est sans doute possible d'obtenir des résultats encore meilleurs. Rappe-lons nous que le critère de minimisation du risque traite symétriquement les perteset les gains, puisqu'on cherche à minimiser le carré du coût résiduel

Rt(ϕ) = E[(CT (ϕ)− Ct(ϕ))2|Ft

], 0 ≤ t ≤ T

Du point de vue de ce critère, il est aussi défavorable d'avoir un surplus stricte-ment positif en n de période (par exemple parce que la prime initiale était tropforte au regard du risque réel), que d'enregistrer une perte du même montant. Celanous a conduit à choisir un montant de prime initiale rendant symétrique le coût -algébrique - nal, et donc à sous-tarifer les contrats.

Ce point de vue n'a rien d'absurde, et s'apparente en fait au calcul de prime pureen assurance dommages. La prime pure est en eet égale à l'espérance de perte, et

71

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CHAPITRE 7. DISCUSSION SUR L'INTÉRÊT ET LAMISE EN OEUVRE DE LAMÉTHODE72

traite donc symétriquement les risques de sous-tarication (engendrant un risquede faillite) et de sur-tarication (source de manque de compétitivité). La méthodeemployée fournit donc une estimation fair value du passif de l'assureur.

En pratique, des chargements devraient être ajoutés à la valeur trouvée, suivant leprincipe de la prime commerciale. Ils permettraient de couvrir les moins values detrading aérentes à la couverture dynamique.

7.2 Incidence des normes juridiques sur la gestion

de portefeuille

Nous avons calculé la stratégie optimale sans tenir compte des normes comptables,en nous plaçant dans une optique de gestion nancière assez éloignée des réalités del'assurance. En pratique, la faisabilité d'une telle stratégie de trading dynamiquese heurte à la réglementation, à plusieurs niveaux.

Le code des assurances dispose :Art. R332-5 Les provisions mathématiques des contrats d'assurance sur la vie ou

de capitalisation à capital variable, dans lesquels la somme assurée est déterminée

par rapport à une valeur de référence, doivent être représentées à l'actif du bilan

par des placements entrant dans la composition de cette valeur de référence et dans

les proportions xées par ladite composition.

Autrement dit, l'assureur doit détenir les unités de compte visées par les contratsqu'il vend. En cas de baisse du cours des actifs, il ne pourra pas les liquider, quandbien même il serait préférable de les échanger contre des actifs sans risque.

Par ailleurs, le mécanisme de mise en réserve des plus-values obligataires dans laréserve de capitalisation limite les échanges possibles. En cas de liquidation avantterme des obligations, la plus-value doit en eet être mise en réserve, ne pouvantpas être réinvestie en couverture.

Notons par contre que la méthode proposée se dispense de produits dérivés, contrai-rement à d'autres approches 1, ce qui permet de s'aranchir d'une contrainte régle-mentaire particulièrement forte.

Il convient aussi de séparer normes comptables et normes prudentielles. Si lesnormes comptables sont peu adaptées à une gestion dynamique de l'actif, celle-ciest en harmonie avec l'optique prudentielle. En préconisant d'anticiper une baissemarquée des actifs, quitte à engendrer une faible moins-value à cette occasion, lastratégie dynamique permet en eet de limiter les pertes extrêmes, comme nousl'avons vu au chapitre 5. Le référentiel Solvabilité II va d'ailleurs dans ce sens, enexigeant des limitations prudentielles fondées sur la VaR à 99, 5% : il s'agit biend'une logique de résultats plus que de moyens, nécessitant le contrôle et la gestiondes pertes extrêmes.

1. Il est parfois envisagé d'échanger des options calibrées sur la garantie plancher, ce qui est enpratique très dicilement faisable, étant donné la spécicité et la longue maturité de tels produits,et, partant, leur manque de liquidité.

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CHAPITRE 7. DISCUSSION SUR L'INTÉRÊT ET LAMISE EN OEUVRE DE LAMÉTHODE73

7.3 Mise en oeuvre pratique d'une stratégie dyna-

mique

Nous avons vu que la réglementation des échanges d'obligations visait à encouragerla détention à terme de ces actifs, plutôt que leur vente prématurée. Ce problèmepeut être limité en optant pour une solution intermédiaire : un ajustement régulierdu portefeuille, mais à des intervalles de temps raisonnables (une fois par moispar exemple, et non chaque jour ou à chaque décès d'un assuré). Il serait alorspossible de limiter les coûts liés à une gestion trop dynamique, tout en prenant encompte les grandes tendances des cours des actifs. On pourrait envisager d'adapterla fréquence d'ajustement du portefeuille à l'état du marché : en période de tension,avec une forte volatilité (et une forte corrélation) des prix actifs, les ajustementsseraient plus fréquents, alors que la gestion serait quelque peu relachée lors du re-tour à l'accalmie.

Le problème de la détention des unités de compte des contrats est le plus épi-neux, car il bride la gestion actif-passif en empêchant une couverture dynamiquedes engagements de l'assureur. En tout état de cause, l'étude a montré l'inuencemajeure de la garantie plancher sur les risques de perte pour l'assureur. Ceci inviteà provisionner précautionneusement ces garanties, puisqu'une chute du cours desactifs engendre mécaniquement un coût pour des contrats en unités de compte donton aurait tort d'estimer qu'ils transfèrent tout le risque à l'assuré.

Il est important de noter que les résultats de l'étude montrent qu'une gestion conservatrice des actifs n'est pas nécessairement plus prudente qu'une gestionplus dynamique, où les actifs sont davantages des outils de couverture que desplacements de liquidités.

7.4 Quelques mots sur le calcul du capital écono-

mique sous Solvabilité II

Terminons ce chapitre sur la mise en pratique des portefeuilles réplicants, parquelques mots sur l'utilisation, beaucoup plus répandue, des replicating portfolios

dans la détermination du capital éonomique sous Solvabilité II 2.

L'idée centrale est de déterminer un portefeuille d'actifs courants , simples à va-loriser (actions, obligations, dérivés vanille, etc.), dont le comportement est prochede celui de l'élément de passif à valoriser. Il sut alors de projeter la valeur duportefeuille - d'où la nécessité d'avoir des actifs valorisables par formule fermée oupar méthode numérique peu coûteuse en calcul - pour obtenir une évaluation dupassif.

Plus précisément, les ux monétaires associés au passif sont estimés puis actualiséspour obtenir leur present value. La sélection des instruments nanciers se fait alorspar une régression de type MCO, la distance entre les cash-ows du passif etdu portefeuille étant minimisée. Cette méthode est sous-tendue par le fait que les

2. Cetta approche des replicating portfolios fait l'objet de nombreux mémoires d'actuariat.Voir par exemple le travail de Amaro F. et Camon S. (2011), Enjeux, contraintes, limites etalternatives à travers l'utilisation des portefeuilles répliquants dans le cadre de Solvabilité II ,chapitre 4.

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CHAPITRE 7. DISCUSSION SUR L'INTÉRÊT ET LAMISE EN OEUVRE DE LAMÉTHODE74

garanties d'un contrat d'assurance-vie sont assimilables à des options nancières.

Cependant, l'étude que nous avons menée montre qu'une stratégie de replicating

portfolio ne permet pas de couvrir des garanties décès, ou, plus généralement, desgaranties non nancières. L'indépendance entre le cours des actifs et la mortalitérend en eet vaine la recherche d'un actif répliquant la mortalité de la populationassurée 3.

Par ailleurs, si elles ont un but et une méthodologie diérents, les deux techniques deréplication ne sont pas totalement étrangères l'une à l'autre, puisque dans les deuxcas il s'agit d'imiter un passif grâce à des actifs nanciers. La diérence tientd'une part à ce que nous ne passons pas par l'utilisation de produits dérivés, maisdirectement par les actifs de base (actions, obligations) dont ils dérivent. D'autrepart, le calcul de la décomposition explicite de Galtchouk-Kunita-Watanabe quenous avons mené pour plusieurs types de contrats, fait apparaître directement lerôle de ces actifs de base dans la garantie : il n'y a dans ce cas pas lieu d'utiliserdes méthodes économétriques de régression.

3. Voir notre discussion sur le sujet de l'orthogonalité entre les deux types d'aléas à la section3.3.

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Bilan de l'étude

Au cours de ce mémoire, nous avons rappelé les fondements théoriques de la minimi-sation du risque, et obtenu les formules de composition du portefeuille de couvertureoptimal pour trois contrats stylisés. Nous avons ensuite donné une interprétationnourrie de ces formules, grâce à de nombreuses simulations, et sommes parvenusà la conclusion que la minimisation du risque préconisait d'acheter haut, vendrebas , en répliquant le cours de l'actif risqué. A cette occasion nous avons soulignéle rôle central de la garantie plancher, et en avons donné une interprétation enterme de prix relatif des actifs. Grâce à des calculs de mesures de risque et au tracéde prols de pertes, nous sommes arrivés à la conclusion qu'une gestion actif-passifdynamique permettait de réduire signicativement le risque de non-couverture, no-tamment concernant les pertes extrêmes.

La critique la plus forte que l'on puisse opposer à ces résultats est leur inadéqua-tion avec les normes régissant le secteur de l'assurance, qui rend caduque leur miseen place, bien que certains enseignements puissent toutefois être conservés. L'es-prit de la réglementation est en eet de détenir les unités de compte des contratsd'assurance-vie, et de constituer une provision en cas d'évolution du marché indui-sant une activation de la garantie plancher. A cet égard, nos résultats suggèrent defaire évoluer la provision en tenant compte de la valeur des unités de compte, quitteà eectuer des ajustements à intervalles de temps assez espacés. Quoiqu'il en soit,il nous semble utile de mener plus avant les travaux exposés ici 4, an de conrmerl'intérêt d'une gestion dynamique voire d'ouvrir une réexion sur l'adéquation desrègles en vigueur.

Des pistes à explorer pour poursuivre la réexion nous semblent être : résoudre le modèle théorique avec trois actifs : une action, une obligation et unactif sans risque

introduire des coûts de transaction pour limiter la fréquence de réallocation d'ac-tifs, ou autoriser les échanges seulement à dates xes

implémenter un modèle nancier plus achevé, avec notamment des taux et desvolatilités stochastiques

mener des calculs de mesure de risque plus précis (ce qui nécessite d'optimiser lecode)

prendre en compte les cas de violation de l'hypothèse d'orthogonalité (réassu-rance, mortality bonds, etc.)

4. Au cours de nos recherches bibliographiques, il nous est apparu que cette approche de laminimisation du risque était peu abordée par la littérature, et totalement absente des mémoiresd'actuariat que nous avons consultés.

75

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Annexe A

Une démonstration

mathématique

Au théorème 3.7, nous avons donné la forme générale de la décomposition deGaltchouk-Kunita-Watanabe d'un processus de valeur intrinsèque associé à unecréance contingente sur une garantie mixte survie/décès. Nous donnons ici la dé-monstration de cette assertion.

Proposition La décomposition de Galtchouk-Kunita-Watanabe de V ∗ est donnéepar

V ∗t = V ∗0 +

ˆ t

0

(∑i∈J

Iis−ϑis

)dXs +

∑k 6=j

ˆ t

0

ηjks dMjks .

avec

ϑit =∑j∈J

ˆ T

t

pij (t, s)

F j (t, St, s) +∑k,k 6=j

µjks Fjk(t, St, s)

ds

ηjkt =B−1t

(gjkt + V k (t, St)− V j (t, St)

)

Preuve On pose V i(t, s) =∑j∈J´ TtpZt,j(t, s)

(F j(t, St, s) +

∑k,k 6=j µ

jks F

jk(t, St, s))ds.

Pour i ∈ J et 0 ≤ t ≤ s ≤ T , on pose

Y i,st =∑j∈J

pij(t, s)B−1t

F j (t, St, s) +∑k,k 6=j

µjks Fjk(t, St, s)

On diérencie Y i,st sous la forme dY i,st = αi,st dt + βi,st dXt. Grâce aux équationsdiérentielles rétrogrades de Kolmogorov

d

dtpi,j(t, s) =

∑k,k 6=i

µikt (pij(t, s)− pkj(t, s))

76

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ANNEXE A. UNE DÉMONSTRATION MATHÉMATIQUE 77

on obtient

αi,st =∑k,k 6=i

µikt

(Y i,st − Y k,st

)

βi,st =∑j∈J

pij(t, s)

F jS (t, St, s) +∑k,k 6=j

µjks FjkS (t, St, s)

La forme intégrale de Y s'écrit

Y i,st = Y i,s0 +

ˆ t

0

αi,sτ dτ +

ˆ t

0

βi,sτ dXτ

On a donc

B−1t V i(t, St) =

ˆ T

t

Y i,st ds

=

ˆ T

0

(Y i,s0 +

ˆ t

0

1τ≤sαi,sτ dτ +

ˆ t

0

1τ≤sβi,sτ dXτ

)ds

−ˆ t

0

(Y i,s0 +

ˆ s

0

αi,sτ dτ +

ˆ s

0

βi,sτ dXτ

)ds

=

ˆ T

0

Y i,s0 ds−ˆ t

0

Y i,ss ds+

ˆ T

0

ˆ t

0

1τ≤sαi,sτ dτds

+

ˆ T

0

ˆ t

0

1τ≤sβi,sτ dXτds

Or, par construction, on a

ˆ T

0

Y i,s0 ds = V i (0, S0)

et ˆ t

0

Y i,ss ds =

ˆ t

0

B−1s

gis +∑k,k 6=i

µiks giks

ds

Les fonctions α sont mesurables et on aˆ T

0

ˆ t

0

1τ≤s|αi,sτ |dτds < +∞

Le théorème de Fubini permet donc d'inverser les intégrales

ˆ T

0

ˆ t

0

1τ≤sαi,sτ dτds =

ˆ t

0

ˆ T

τ

αi,sτ dsdτ

=

ˆ t

0

∑k,k 6=i

µikτ B−1τ

(V i (τ, Sτ )− V k (τ, Sτ )

) dτ

On fait de même pour la seconde intégrale, en utilisant le théorème de Fubini pourles intégrales stochastiques

ˆ T

0

ˆ t

0

1τ≤sβi,sτ dXτds =

ˆ t

0

ˆ T

τ

βi,sτ dsdXτ =

ˆ t

0

ϑiτdXτ

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ANNEXE A. UNE DÉMONSTRATION MATHÉMATIQUE 78

On obtient donc

B−1t V i (t, St) = V i (0, S0) +

ˆ t

0

ϑiτdXτ −ˆ t

0

B−1τ giτ +

∑k,k 6=i

µikτ ηikτ

Remarquons maintenant que

dIit =∑k,k 6=i

(dNki

t − dN ikt

)On diérencie alors V ∗, obtenant

dV ∗t = dAt +∑i∈J

Iit−d(B−1t V i (t, St)

)+∑i∈J

B−1t− V

i(t−, St−

)dIit

=B−1t

∑i∈J

Iitgitdt+∑k,k 6=i

gikt dNikt

−∑i∈J

Iit−

B−1t git +

∑k,k 6=i

µikt ηikt

dt

+∑i∈J

Iit−ϑitdXt +

∑k 6=i

B−1t

(V k (t, St)− V i (t, St)

)dN ik

t

On obtient ainsi l'expression voulue en intégrant. Par ailleurs, on avait supposé

supu∈[0,T ]

E∗[(B−1u g(u, Su)

)]< +∞

Cela permet d'armer que gj , gjk et V j sont des martingales de carré intégrable.De même, l'intégrale par rapport à X est une martingale de carré intégrable car ona supposé que les dérivées partielles de F par rapport à S étaient bornées. Comme,par hypothèses, X et M sont orthogonales, la décomposition obtenue est bien ladécomposition de Galtchouk-Kunita-Watanabe.

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Annexe B

Quelques fonctions R

On donne ici les lignes de codes associées aux principales fonctions qui ont étéutilisées (seul le logiciel R a été utilisé).

B.1 Tracé de la composition du portefeuille dyna-

mique

# La fonction mu décrit la mortalité de la population (loi de Gompertz-Makeham)> mu <- function(x)function(s)0.0002901 + 0.00001227 * 1.100858 ^ (x + s)

# La fonction p permet de calculer la probabilité de survivre t années à x ans> p <- function(t, x)function(u)exp(-integrate(mu(x), t, u)$value)

# Les fonctions d1, f1, f2 et f3 sont des auxiliaires de calcul, pour simplier# le programme principal> d1 <- function(S, K, d, t, r, sig)function(u)(log(S/(K*exp(d*u))) + (r + (sig^2)/2)*(u-t))/(sig*sqrt(u-t))

> f1 <- function(S, K, d, x, t, r, sig)function(u)p(t,x)(u)*mu(x)(u)*pnorm(d1(S, K, d, t, r, sig)(u))

> f2 <- function(S, K, d, x, t, r, sig)function(u)p(t, x)(u)*mu(x)(u)*K*exp((d - r)*u)*pnorm(-d1(S, K, d, t, r, sig)(u) + sig*sqrt(u- t))

79

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ANNEXE B. QUELQUES FONCTIONS R 80

> f3 <- function(S, K, d, x, t, r, sig, B)function(u)p(t, x)(u)*mu(x)(u)*pnorm(d1(S, K, d, t, r, sig)(u))*(S/B)

# Les deux fonctions suivantes calculent la quantité de chaque actif en portefeuille> action <- function(n, T, sig, r)S = rep(1, n + 1)W = rep(0, n + 1)eps = rnorm(n, mean = 0, sd = 1)pas = T/nfor (i in 1 : n)W[i + 1] <- W[i] + sig*sqrt(pas)*eps[i]for (i in 1 : n)S[i + 1] <- exp((r - 0.5*sig^2)*i*pas + W[i + 1])S

> obligation <- function(n, T, r)B = rep(1, n + 1)pas = T/nfor (i in 1 : n)B[i + 1] <- exp(r*i*pas)B

# Population simule la décroissance de l'eectif assuré> population <- function(N, n, T, x)pop = rep(N, n + 2)pas = T/nfor (i in 1 : n)a = 0p = exp(-pas*(mu(x)(i*pas)))for (j in 1 : pop[i + 1])q <- runif(1, 0, 1)if (q<p) a = a+1pop[i+2] <- apop

# La fonction portefeuille eectue le tracé des graphes> Portefeuille <- function(N, n, T, x, r, sig, K, d)nact = rep(0, n + 1)nobl = rep(0, n + 1)S = action (n, T, sig, r)

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ANNEXE B. QUELQUES FONCTIONS R 81

B = obligation(n, T, r)pop = population(N, n, T, x)temps = seq(0, T, length = n + 1)pas = T/nfor(i in 0 : n)t = i*pasnact[i + 1] = (pop[i + 1])*integrate(f1(S[i + 1], K, d, x, t, r, sig), t, T)$valuenobl[i + 1] = (pop[i + 2])*integrate(f2(S[i + 1], K, d, x, t, r, sig), t, T) $value -(pop[i + 1] - pop[i + 2])* integrate(f3(S[i + 1], K, d, x, t, r, sig, B[i + 1]), t, T)$valueplot(temps, nact, type = "l", ylim = range(c(nact, nobl)), xlab = "temps (enannées)", ylab = "nombre d'actifs", main = "K=1")lines(temps, nact, col = "blue")lines(temps, nobl, col = "red")

> Portefeuille(1000,100,8,45,0.03,0.25,1,0.02)

B.2 Calcul de VaR

# On modie la fonction portefeuille pour qu'elle calcule les coûts des stratégies> Portefeuille <- function(N, n, T, x, r, sig, K, d)nact = rep(0, n + 1)nactstat = rep(0, n + 1)nobl = rep(0, n + 1)cash = rep(0, n + 1)valeur = rep(0, n + 1)valeurstat = rep(0, n + 1)S = action (n, T, sig, r)B = obligation(n, T, r)pop = population(N, n, T, x)temps = seq(0, T, length = n + 1)pas = T/nplancher = rep(0, n + 1)

for(i in 1 : (n + 1))plancher[i] = K*exp(d*(i - 1)*pas)

for(i in 0 : n)t = i*pasnact[i + 1] = ( pop[i + 1])*integrate(f1(S[i + 1], K, d, x, t, r, sig), t, T)$valuenobl[i + 1] = (pop[i + 2])*integrate(f2(S[i + 1], K, d, x, t, r, sig), t, T) $value -(pop[i + 1] - pop[i + 2])* integrate(f3(S[i + 1], K, d, x, t, r, sig, B[i + 1]), t, T)$value

for(i in 1 : (n + 1))valeur[i] = (nobl[i] + nact[i]*S[i])

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ANNEXE B. QUELQUES FONCTIONS R 82

prime = valeur[1]nactstat[1] = primecash[1] = 0

for(i in 2 : (n + 1))nactstat[i] = max(0, nactstat[1] + pop[i + 1] - N)cash[i] = max(0, plancher[i] - S[i])*(nactstat[i - 1] - nactstat[i]) + S[i]*(pop[i] - pop[i+ 1] - nactstat[i - 1] + nactstat[i])

coutstat = rep(0, n + 1)for(i in 1 : n)coutstat[i + 1] = coutstat[i] + cash[i]

cout = rep(0, n + 1)for(i in 1 :n)cout[i + 1] = cout [i] + (nact[i + 1] - nact[i])*S[i + 1] + (nobl[i + 1] - nobl[i]) -(pop[i + 1] - pop[i])*max(plancher[i], S[t + 1])

a = max(cout)b = max(coutstat)c(a,b)

# On obtient la VaR par extraction du coût de rang voulu> VaR <- function(N, n, T, x, r, sig, K, d, p)a = rep(0, p)b = rep(0, p)for (i in 1 : p)

c = Portefeuille(N, n, T, x, r, sig, K, d)a[i] = c[1]b[i] = c[2]

a = sort(a)b = sort(b)x = oor(p*0.95)d = a[x]f = b[x]c(d,f)

> VaR(1000,100,8,45,0.03,0.25,1,0.02,1000)

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Annexe C

Table de mortalité INSEE

âge x S(x) Q(x) E(x) âge x S(x) Q(x) E(x) âge x S(x) Q(x) E(x)

0 100 000 383 80,89 33 98 515 75 48,85 66 86 023 1 086 19,66

1 99 617 32 80,20 34 98 441 83 47,89 67 85 089 1 149 18,87

2 99 584 21 79,22 35 98 359 89 46,93 68 84 112 1 261 18,09

3 99 564 16 78,24 36 98 272 100 45,97 69 83 051 1 364 17,31

4 99 548 12 77,25 37 98 174 105 45,02 70 81 918 1 474 16,54

5 99 536 10 76,26 38 98 070 116 44,06 71 80 711 1 614 15,78

6 99 526 10 75,27 39 97 956 125 43,11 72 79 408 1 778 15,03

7 99 516 8 74,27 40 97 834 139 42,17 73 77 996 1 952 14,30

8 99 508 9 73,28 41 97 697 154 41,23 74 76 474 2 167 13,57

9 99 499 8 72,29 42 97 547 171 40,29 75 74 817 2 395 12,86

10 99 491 8 71,29 43 97 380 183 39,36 76 73 025 2 668 12,16

11 99 483 9 70,30 44 97 201 209 38,43 77 71 076 2 957 11,48

12 99 474 10 69,30 45 96 999 228 37,51 78 68 974 3 324 10,82

13 99 464 11 68,31 46 96 777 248 36,59 79 66 682 3 729 10,17

14 99 453 15 67,32 47 96 537 276 35,68 80 64 195 4 187 9,55

15 99 438 19 66,33 48 96 271 307 34,78 81 61 507 4 707 8,94

16 99 419 25 65,34 49 95 975 343 33,89 82 58 612 5 295 8,36

17 99 394 32 64,36 50 95 645 371 33,00 83 55 508 5 949 7,80

18 99 362 42 63,38 51 95 290 414 32,12 84 52 206 6 721 7,26

19 99 320 45 62,40 52 94 896 444 31,25 85 48 697 7 678 6,75

20 99 275 49 61,43 53 94 475 478 30,39 86 44 959 8 616 6,27

21 99 226 53 60,46 54 94 024 510 29,53 87 41 085 9 755 5,81

22 99 174 52 59,49 55 93 544 552 28,68 88 37 077 10 988 5,39

23 99 122 57 58,53 56 93 027 585 27,84 89 33 003 12 230 4,99

24 99 066 56 57,56 57 92 483 627 27,00 90 28 967 13 563 4,62

25 99 010 57 56,59 58 91 903 658 26,17 91 25 038 15 322 4,26

26 98 953 61 55,62 59 91 299 691 25,34 92 21 202 16 922 3,94

27 98 893 60 54,66 60 90 668 739 24,51 93 17 614 18 871 3,64

28 98 834 62 53,69 61 89 998 781 23,69 94 14 290 21 037 3,37

29 98 773 62 52,72 62 89 295 839 22,87 95 11 284 22 892 3,14

30 98 712 62 51,75 63 88 546 904 22,06 96 8 701 25 018 2,92

31 98 651 66 50,79 64 87 746 952 21,26 97 6 524 27 003 2,73

32 98 586 72 49,82 65 86 911 1 022 20,46 98 4 762 29 616 2,56

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ANNEXE C. TABLE DE MORTALITÉ INSEE 84

Pour le paramétrage de la fonction de Gompertz-Makeham, on a utilisé les donnéesde mortalité publiées par l'INSEE pour la période 2007-2009 (table moyenne surtrois ans). Le tableau ci-dessus reprend ces données, pour la catégorie Ensemble ,c'est à dire se rapportant à la mortalité de toute la population, hommes et femmes.La table est dressée pour une population initiale de 100000 individus à la naissance.

Les notations standard suivantes sont utilisées :S(x) : nombre de survivants à l'âge xQ(x) : quotient de mortalité pour 100000 survivants à l'âge xE(x) : espérance de vie à l'âge x

Champ : France, territoire au 31 décembre 2009Source : Insee, statistiques de l'état civil et estimations de populationRéférence originale : TABLEAU 68 - TABLE DE MORTALITÉ DES ANNÉES2007 - 2009. Données provisoires arrêtées à n mars 2011.

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