Simplement Lui

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Hugues. Mon meilleur ami. Lui et Moi. Moi et Lui. On se connaît. On ne se quitte pas. On ne se quittera pas. Il me connaît par coeur. Il sait ce que j'ai dans la tête. Pas besoin de parler. Parfois. On se comprend. C'est comme ça entre nous. Fusionnel. Une nuit, il est venu s'asseoir dans le lit avec moi. Il s'est endormi en parlant avec moi. J'ai rejoint Morphée aussi. Bien après. Au petit matin. Au réveil. Nous étions l'un contre l'autre. Les bras de l'un entourant ceux de l'autre. Je l'ai trouvé beau.

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Simplement luiVincent Koch

Roman

Éditions Textes Gais31 rue Bayen75017 Paris

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15h15

Les résultats tombent. Positif. Il est temps, au bout de la deuxième fois. 10,15. Ça la

fout mal pour un redoublant. Mes parents vont me chier dessus, encore ! Je m’en fous je me casse cette fois. Pas de retour en arrière possible. Effacer cette ville de merde. Ces souvenirs de merde. Adieu très cher pays. Je me casse. Je vois les autres. Ils pleurent. Ils crient. Quelle bande de cons ! Je les hais. Ils m’ont fait perdre Salomé et Hugues. Je les hais. Un an de gâché. Un an en moins. Je n’en pouvais plus. Ce soir je fais ma valise. Ce soir, je pars. Je vais respirer. Ailleurs. Loin. Très loin d’ici. Les oublier. Les écarter. Je vais reprendre une vie normale. Si c’est possible. Je n’y crois plus. On peut toujours essayer. Ou pas du tout.

On verra à 20 heures.

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20 heures

Je suis parti. Ils ont crié.J’ai crié.On s’est séparé.Tant mieux !

Demain je reviendrai.On pleurera.On repartira. Tant mieux.Vie banale.Vie de merde.Deux mois de vacances. Et je pars.Je pars. Je pars.Positive attitude.J’ai besoin de leur blé !

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Mais ce soir je suis là. Loin de là-bas. J’ai pris ma caisse. J’ai roulé. Je savais où aller. Je vais toujours là quand ça ne va pas. Pas très loin. Un cap. Un de plus sur la carte terrestre. Un bout de terre perdue dans la Manche. Petit Cap Fréhel. Petit mais majestueux. Je ne cherche pas plus loin. J’ai la clé de la case de mes vieux. Je leur ai piqué en partant. Nul !

Je ne mange pas quand je suis en colère. Je bois. Et ce soir je ne déroge pas à ma règle. Je bois. Deux bouteilles m’accompagnent. L’une d’alcool. Du Rhum. L’autre de jus de fruits. Orange. Je ne supporte pas l’alcool pur ! Minable.

Assis. Ici. Je regarde la mer. Je regarde l’horizon. Mon regard se perd dans les allées et venues de l’écume. Je tuerais si je ne me retenais pas. En choisissant mes cibles. Envie de sang qui coule, comme coule ma peine. Un besoin de vengeance. Récupérer ce qui m’a été volé. Récupérer l’Amour. Pourquoi ? Je ne sais pas ! J’ai tout perdu. Un jour. Un matin, je me suis levé, j’aurais préféré mourir dans mon lit. Ma peine ne me ferait pas souffrir autant. Je veux regarder devant. Je ne peux vivre que dans mon passé. Je n’avance plus. Je suis enlisé. Je vais bientôt me noyer dans ma merde.

Il y a un an, j’étais comme tout le monde. Pas plus bon, pas plus con. J’étais presque heureux. Si on peut l’être un jour. Je regar-dais l’avenir en souriant. Je me posais des questions. Pas plus que les autres. J’étais bizarrement seul. Salomé avait trop de pression avec le Bac. Je n’étais pas ménagé non plus. Qui m’aurait prédit que le même jour je perdrais tout ? Qui ? Elle voulait être seule. Je la laissais. Je ne suis pas un mec chiant. Juste un mec arran-geant. On dit que d’être trop gentil, ça vous perd. Je suis perdu à jamais. Hugues passait son temps avec son ballon de foot. Je ne lui en voulais pas. Je déteste le foot. Je le laissais. Je me laissais seul. Tout seul. Accompagné de ma mère. Ma sœur. Aussi. Personne

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d’alléchant. J’essayais de ne pas trop cogiter. Ne pas perdre le film. Deux mois plus tard, je serais avec Salomé et Hugues. Notre nou-velle vie. Notre nouvelle ville. Un nouveau départ.

Et le panneau, lorsqu’on vous le met en pleine figure, ça fait mal. Très mal. J’ai encore mal. Je ne l’ai pas eu. Pas de Bac. Dès le premier tour. Rien vu venir. Pas compris. Rien compris. Je ne vois pas Salomé. Je ne comprends pas. On s’était pourtant donné rendez-vous. Ici. Maintenant. Devant les listes. Pour se soutenir. Mais elle n’est pas là. Hugues essaye tant bien que mal de suppor-ter mon épaule. Je suis abasourdi. Je me demande où je suis. Le téléphone dans ma poche n’a de cesse de vibrer. Je ne peux m’en saisir. J’ai mal. Je commence à avoir envie de gerber. Ça monte. Je vais m’écrouler. Où est Salomé ? Je veux la voir. Maintenant. Je veux qu’elle me prenne dans ses bras. Qu’elle me serre. Qu’elle me dise qu’elle m’aime, que rien ne changera, que nous deux c’est pour toujours. Je veux la voir. Je crois que mes yeux coulent. Je ne sais plus. Je ne sens plus mon corps. Je vais m’asseoir. C’est plus sain. Je m’écroule sur le banc. J’ai pris une claque. Ce n’est rien. Tout va aller mieux dans quelques minutes. Je souffle. Laissez-moi de l’air. Pourquoi Salomé n’est pas là ?

La voici. La voici. Je la vois venir vers moi. Elle m’a retrouvé. Mon ange. Mon bébé. Dis-moi que j’ai rêvé, que je ne suis pas si nul que le prétend la liste. Dis-moi que je vais partir avec toi. Dis-moi ! Dis-moi quelque chose ! Pourquoi tu ne dis rien ? Pourquoi nous sommes seuls ? Pourquoi les murs du lycée se sont effon-drés ? Tu me prends la main. Je veux entendre le son de ta voix. Je veux te prendre dans mes bras. Serre-moi fort. Je souffre. Je ne rêve pas. C’est ça ?!? Oui ! Visiblement ! Tant pis. Et puis le sol se dérobe. Je perds définitivement pied. Je m’écroule dans le néant. Intersidéral. Attrape-moi. Rattrape-moi ! Je t’entends bafouiller des

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mots. Nous deux. Fini. Plus possible. Distance. Ici. Là-bas. Plus possible. Toi. Ondes. Plus. Fini. Pleure pas. Sois fort. Heureux. Un jour. Je t’ai aim… ! Je m’effondre. Je m’évanouis. Je suffoque. Néant. Sombre.

Je suis allongé à terre. Mon souffle. Je le sens, ralenti. Que se passe-t-il ? Où suis-je ? Que se passe-t-il ? Pourquoi ma tête me fait mal ? Pourquoi je ne peux pas parler ? Pourquoi ? Quoi ? On me tapote le visage. Je suis aspiré vers la réalité. J’ai la tête dans les vapes. Je n’entends pas tout. Une tonne de coton tapisse mon conduit auditif. J’essaie de remettre de l’ordre. Mais dans quoi ? Je me souviens. Pas de Bac. Fini entre nous. Pas de vie nouvelle. Cela me revient. Doucement. Je sens la douleur se saisir de mon ventre. Ça brûle. De plus en plus. Vite. J’étouffe. Je convulse. J’expulse. Je me répands sur mes soutiens. Ça gicle. Je me vide. Ça soulage. Je respire. On me soutient. Toujours. On m’allonge. Des gens. Des têtes. On me regarde. On parle. Je ne comprends rien. Vais-je mourir ? Et pourquoi pas ? Ça ferait moins mal. Ça ne pourrait pas être pire. Pas pire. Que cela. Que tout cela. On tam-bourine dans mes tempes. C’est mon pouls. Arrête-toi s’il te plaît. Laisse-moi partir. Ici. Maintenant. De suite. Devant elle. Devant la liste. Devant Lui. Laissez-moi partir ! Je ne veux plus respirer. Je ne veux plus vivre. Il ne veut pas s’arrêter. Je souffre. Je brûle. Laissez-moi. Je pleure.

Dix minutes. Arrivée des pompiers. On m’allonge. Sur un brancard. On me calme. Oxygène. Je respire encore. Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi dois-je devoir affronter la vie encore ? Dites-le-moi. Je suis transporté. Sirènes hurlantes. Des lumières m’éblouissent. Dernière lueur. S’il vous plaît. Rien qu’une fois. Une seule. Je sombre. Enfin.

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Je me réveille deux heures plus tard. Vide. Je ne peux parler. Je vois ma mère pleurer. Mon père n’est pas là. Ça change ! Ma sœur est plus loin. J’observe. Je ne suis pas mort. Merde ! Dommage. Faudra faire avec ! Visiblement. Ma mère se jette sur moi. Elle voit mes yeux ouverts et pleure encore plus. Je ne comprends pas pourquoi, elle aurait pu au moins se sentir soulagée de ce qui m’arrive. Les choses ne sont pas simples avec eux. Je m’en veux. Je leur en veux. Je vois une infirmière, un médecin, des blouses blanches qui m’entourent. Je déteste les blouses blanches. Je panique. Je suis over.

Je suis resté deux jours dans cette chambre. On m’a tout passé au peigne fin. J’ai eu droit au scanner et autres radiologies de même type. On m’a ausculté de toutes parts. Et pour finir on en a conclu que j’allais bien, mais que mon corps avait répondu à un trop-plein de stress emmagasiné. C’est certainement vrai. La vérité. Je n’ai pas supporté tout cela. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Je n’ai pas vu Salomé une seule fois à l’hôpital. Je ne l’ai pas revue après non plus. Visiblement, elle m’avait effacé de sa vie. Effacé un an de vie. Comme ça. D’un coup d’un seul. Sans autres questions. Sans autres réponses. Out ! Je ne suis plus dans sa vie, elle n’est plus dans la mienne. Il faudra s’habituer. C’est comme ça, c’est la vie, mon vieux ! Que ça te plaise ou non, tu n’as pas ton mot à dire. Tu fermes ta gueule et tu avances. Mais là je ne veux pas avancer, je ne veux plus. Je ne peux plus. J’aurais préféré autre chose. Mais je ne choisis pas. Les médecins m’ont remis sur pied, ils ont fait leur job. Tant mieux, ils ne seront pas venus bosser pour rien au moins.

Heureusement que Hugues a été là, avec moi. Je l’ai vu ces deux jours dans cette chambre blanche. Il m’a remis sur pied. Il venait rire avec moi. Pour me détendre. Pour me changer les idées. Et

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Dieu sait à quel point je suis têtu dans ma vie. Dans mon esprit. Dans mon âme. On discutait. Pas besoin de psy à la noix. Mon meilleur ami est tout ce que j’ai de plus grand ici. Il me connaît par cœur. Il sait ce que j’ai dans la tête. Pas besoin de parler, par-fois. On se comprend. C’est comme ça entre nous. Fusionnel.

Lui et Moi. Moi et Lui. On se connaît. On ne se quitte pas. On ne se quittera pas. Il m’a accompagné après. On a passé nos vacances ensemble. On est partis que tous les deux à la mer. Un camping un peu pourri. Mais un peu de liberté. Mes parents ne voulaient pas. Tant pis. Ils ont été convaincus par mon ange gar-dien et les siens. Le grand air. Ça ne pouvait que me faire du bien. Les parents de Hugues ont un bungalow dans ce camping. Ils nous l’ont laissé, dix jours. De quoi respirer. Oublier Salomé. Oublier le Bac. Oublier les échecs. Ne penser qu’à reprendre un nouveau chemin. Un peu de fête. Un peu d’excès. Histoire de nettoyer son esprit. Des filles. Il y en avait. Quelques-unes. Un coup tiré rapi-dement une nuit, à la belle étoile sur une plage. Romantique. Mon cul. C’était nul, et plein de sable. Celui qui rêve de faire l’amour sur une plage, ne sait pas à quel point ce n’est pas pratique. Et ça pique. Et puis, on s’est refermé sur nous. J’ai replongé un matin. Je me suis levé. L’esprit dans les chaussettes. Salomé était venue perturber mes rêves. Je n’ai pas apprécié. Le plongeon. Je n’ai pas voulu quitter mon lit. Il ne m’a pas laissé.

Chaque moment. Chaque instant il était là. Il a essayé de me sortir. Je l’ai suivi. Délaissement de nos nouveaux amis. Il n’y avait plus que lui et moi. Il était attentionné. Pansait chacune de mes plaies intérieures. On aurait cru qu’il eût donné sa vie pour sauver la mienne. Je me suis perdu. Je ne savais plus qui était quoi. Quoi était qui. Je voguais percutant sans cesse les bords accidentés de mon intérieur.

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Chaque nuit, je cauchemardais. Réveil. Cris. Sueur. Hugues se levait, venait me voir, essayait de me calmer. Même ma mère n’aurait pas pu être aussi prévenante à mon égard. Il essuyait mon front. Me retenait dans ses bras. Il a fini par accompagner mes rêves. Fatigué, une nuit, il est venu s’asseoir dans le lit avec moi. Il s’est endormi en parlant avec moi. J’ai rejoint Morphée aussi. Bien après. Au petit matin. Au réveil. Nous étions l’un contre l’autre. Les bras de l’un entourant ceux de l’autre. Je l’ai trouvé beau. Je lui ai dit merci. Et un je t’aime est parti. Seul. Non voulu. C’est vrai que je l’aime. Il est plus qu’un frère. Je n’en ai pas. Plus qu’un père. Le mien n’est jamais là. C’est pas difficile de le rem-placer. Il est plus que tout. Il m’a regardé. Sereinement. Il m’a dit. « Je t’aime aussi, Gros Nul. » Il ne l’avait pas mal pris. Il était tou-jours là. Pas d’ambiguïté. Il a compris mon message. Tant mieux. On s’est dérobé. Décacheté. Avec nos érections matinales. On avait l’air de deux homos. Pas nous. Putain.

J’ai rien compris. J’ai rien vu venir. Juré. Pas de prévisions à ce sujet. Ce n’était pas moi. Jusqu’à ce matin. Jusqu’à ce « je t’aime ». Je ne savais rien. Jamais je n’aurais osé. Non. Je ne voulais pas. Avant. Quelques attirances. Comme tout le monde. Et puis. Là. Je crois que c’est net. J’ai compris autre chose. Je ne suis pas celui que j’ai prétendu être tout ce temps. Je ne sais plus qui je suis. Qui j’aime. Qui je dois aimer. Qui je n’ai pas le droit d’aimer. Qui ? Quoi ? Comment ?

Pourquoi ?Je n’ai pas voulu m’appesantir davantage. Les choses doivent

être comme elles sont. Même si on ne les accepte pas. Je ne les accepte pas. Ni avant. Ni même à ce moment. Comment pouvais-je aimer mon double ? Un garçon ! Moi qui venais de passer un an avec une fille. Pourquoi ? Tout était écrit ? Rien n’était hasard ?

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C’est pour cela que Salomé est partie ? L’ai-je aimée, seulement ? Je ne sais plus. Je n’en sais toujours rien ! Aimerai-je encore une fille un jour ? Pas de réponse ! Jamais ! Alors quoi ? Que devais-je faire ? Avouer ou me taire ? Parler ? Ou crever ?

Mon état léthargique ne s’est pas amélioré des tonnes. J’ai succombé à la tentation de ne pas vouloir affronter le monde. Enfermé sur moi-même. Bien dans le creux des bras de Hugues. On a fini par rentrer. Il était fatigué. Chez mes parents. Il m’a fallu retrouver un semblant de vie. Finalement le camping avait eu des bons et surtout des mauvais côtés. Ici, je n’ai pas eu le choix. Ma mère ne m’a pas laissé le choix. Hugues est venu me voir tous les jours. Tous les jours on était l’un avec l’autre. Jamais l’un sans l’autre. Seuls. Dans un environnement familier. Mes crises se sont calmées. Pas tout de suite. Progressivement. On est sortis. On a fait du sport. On a fait mille choses. J’ai survécu pour m’accrocher à lui. Ne rien lui dire. Ne pas tout gâcher. Mais ne pas le lâcher. Je me contentais de son amour amical. Fraternel. Je suivais ce fil. Pour le moment. Je le suivais. Lui.

Mais le bonheur n’a qu’un temps. Un seul temps. Mon bonheur s’est achevé. Début septembre. Retour à la case bahut. Hugues s’est envolé. En direction des bancs de la fac. Ici. Je me retrou-vais seul. Je ne connais personne. Tout le monde me montrait du doigt comme le redoublant de la classe. Le nul. La tare. Je ne parle à personne. Personne ne me parle. Ambiance à revendre. Le soir. De retour chez moi. Il faut que je me farcisse ma sœur, et ses crises. Mon père, et ses absences. Ma mère, et ses manies. Je les laisse. Ils me font chier. Je ne supporte plus rien. Je ne veux plus leur parler. J’essaie de me mettre au boulot. J’essaie. Je n’y arrive pas. Je me terre sur mon lit. Je m’enracine. No communication. Or Communication breakdown. Chaque jour ressemble au précédent.

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C’est une misère. Ma misère. On n’est pas seulement pauvre en monnaie, n’est-ce pas ? Ma douleur ce n’est pas l’argent. Ma dou-leur, ce sont les autres. Ceux que je voudrais avoir avec moi. Ceux que je voudrais pouvoir aimer. Tranquillement. Ceux qui ne sont plus là. Ironie de mon sort, ils ne sont même pas morts. Parfois. Je préférerais. Au moins…

Début octobre. Voyant que mon état allait de pis en pis, des personnes se sont alertées. Tout s’est enchaîné très rapidement. Trop. À mon goût. J’aurais voulu qu’on me foute la paix. Mais le système est ainsi fait. Vous ne pouvez pas être mal en solitaire. Il faut toujours être accompagné. Que vaut le proverbe : mieux vaut être seul que mal accompagné ? Infirmière. CPE. Prof prin-cipal. Psychologue. La totale. J’avais vu tout le monde. Tout le monde m’a vu. On m’a obligé à parler. Pour quoi faire ? Parler résoudrait-il tout ? Je ne savais pas ! Alors j’ai parlé. De choses et d’autres. Salomé. Le Bac. Mes échecs. Hugues. Son amitié. Mon manque de lui. Et comme je ne voulais pas en toucher mot. La question est venue : « Avez-vous éprouvé des sentiments amou-reux pour cet ami ? » Pourquoi me poser la question. La réponse est déjà écrite. OUI ! Et alors ?

Alors il y a eu des comptes rendus me concernant. Dépression. Non sans rire ! Je suis dépressif. Eau de jouvence. J’ai le droit à ma dose d’antidépresseur journalière. Hugues n’est plus là. Il ne rentre pas tous les week-ends. Il me manque. On se téléphone. Mais ce n’est plus pareil. Je le sens bien. Distant. C’est ce qu’il est. Je m’interroge. Ma psy me demande de ne pas me torturer. Il y a bientôt vingt ans que je me torture. Qu’est-ce qu’elle croit ? Que je vais arrêter en deux jours ? Foutaises ! Je la vois tous les deux jours ouvrables. Cool ! Le lycée me fait une faveur. Je n’assiste plus à tous les cours. Je suis dispensé pour ma prise en charge

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