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Photo : travaux des élèves de l’école maternelle Jean-François Regnard à Dourdan Édito « La mission éducative de l’école maternelle comporte une première approche des outils de base de la connaissance, prépare les enfants aux apprentissages dispensés à l’école élé- mentaire et leur apprend les principes de la vie en société. » Ainsi définie par la loi d’orienta- tion et de programme pour l’avenir de l’école (avril 2005), la maternelle est tout à la fois un cycle, celui des apprentissages premiers, et la première étape du cycle des apprentissages fondamentaux réalisés à l’école élémentaire. Unique en Europe, la maternelle constitue la toute première expérience scolaire. Fré- quentée par presque tous les enfants durant au moins trois années, elle dispose depuis 2002 d’un programme qui structure les apprentissa- ges qui vont y être effectués. L’apprentissage du langage y tient une place prépondérante et est un instrument puissant du développement du jeune enfant. Ainsi, le passage progressif du langage d’accompagnement de l’action à celui de l’évocation, la familiarisation avec la langue de l’écrit, la découverte des réalités so- nores de la langue, les activités graphiques et les premiers essais d’écriture permettent l’ac- quisition chez l’enfant en fin d’école maternel- le des compétences attendues qui permettront à l’écolier entrant au cours préparatoire, guidé par l’action de son maître, conformément à la circulaire du 3 janvier 2006, d’effectuer un apprentissage sûr et rapide de la lecture. Marie-Louise TESTENOIRE Inspectrice d’académie sommaire sommaire septembre 2006 Les images à la page ....................................................................... p. 21 Pour une entrée en littérature dès le cycle 1 .......................... p. 22 Sur les chemins de l’orientation.................................................. p. 23 Des ateliers philosophiques en maternelle ............................... p. 24 Kidsmart : les TICE en maternelle ............................................. p. 25 Evitons les dérives ! ....................................................................... p. 26 La collation ....................................................................................... p. 27 L’écoute en réseau .......................................................................... p. 28 Les collections d’images ................................................................ p. 29 Le graphisme à l’école maternelle : but ou moyen ? ............... p. 30 La conscience phonologique .......................................................... p. 32 EPS au cycle 1 .................................................................................. p. 33 Enseigner l’oral à l’école maternelle ........................................... p. 34 A découvrir....................................................................................... p. 36 Interview .......................................................................................... p. 2 Les enjeux de l’école maternelle ................................................. p. 5 Les premiers apprentissages numériques ................................. p. 6 La pédagogie du langage à l’école maternelle ........................... p. 8 Evaluer en grande section............................................................. p. 10 Programmer - Différencier - Evaluer ........................................ p. 11 Vivre l’espace et la géométrie ! ................................................... p. 12 Eveiller aux sciences l’élève de grande section....................... p. 13 Apprendre à lire en maternelle ................................................... p. 14 Les aventures de Patafil, Tournesol et Vol-au-Vent............... p. 16 ASH : vraiment différent(s) ? .................................................... p. 17 Une meilleure reconnaissance des droits des personnes handicapées .......................................................... p. 18 Qu’est-ce qu’un SESSAD ?........................................................... p. 20

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Édito

« La mission éducative de l’école maternelle comporte une première approche des outils de base de la connaissance, prépare les enfants aux apprentissages dispensés à l’école élé-mentaire et leur apprend les principes de la vie en société. » Ainsi définie par la loi d’orienta-tion et de programme pour l’avenir de l’école (avril 2005), la maternelle est tout à la fois un cycle, celui des apprentissages premiers, et la première étape du cycle des apprentissages fondamentaux réalisés à l’école élémentaire.

Unique en Europe, la maternelle constitue la toute première expérience scolaire. Fré-quentée par presque tous les enfants durant au moins trois années, elle dispose depuis 2002 d’un programme qui structure les apprentissa-ges qui vont y être effectués. L’apprentissage du langage y tient une place prépondérante et est un instrument puissant du développement du jeune enfant. Ainsi, le passage progressif du langage d’accompagnement de l’action à celui de l’évocation, la familiarisation avec la langue de l’écrit, la découverte des réalités so-nores de la langue, les activités graphiques et les premiers essais d’écriture permettent l’ac-quisition chez l’enfant en fin d’école maternel-le des compétences attendues qui permettront à l’écolier entrant au cours préparatoire, guidé par l’action de son maître, conformément à la circulaire du 3 janvier 2006, d’effectuer un apprentissage sûr et rapide de la lecture.

Marie-Louise TESTENOIREInspectrice d’académie

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airesommaire

septembre 2006 

Les images à la page .......................................................................  p.  21Pour une entrée en littérature dès le cycle 1 ..........................  p. 22Sur les chemins de l’orientation ..................................................  p. 23Des ateliers philosophiques en maternelle ...............................  p. 24Kidsmart : les TICE en maternelle .............................................  p. 25Evitons les dérives ! .......................................................................  p. 26La collation .......................................................................................  p. 27L’écoute en réseau ..........................................................................  p. 28Les collections d’images ................................................................  p. 29Le graphisme à l’école maternelle : but ou moyen ? ...............  p. 30La conscience phonologique ..........................................................  p. 32EPS au cycle 1 ..................................................................................  p. 33Enseigner l’oral à l’école maternelle ...........................................  p. 34A découvrir .......................................................................................  p. 36

Interview ..........................................................................................  p.  2Les enjeux de l’école maternelle .................................................  p.  5Les premiers apprentissages numériques .................................  p.  6La pédagogie du langage à l’école maternelle ...........................  p.  8Evaluer en grande section .............................................................  p.  10Programmer - Différencier - Evaluer ........................................  p.  11Vivre l’espace et la géométrie ! ...................................................  p.  12Eveiller aux sciences l’élève de grande section .......................  p.  13Apprendre à lire en maternelle ...................................................  p.  14Les aventures de Patafil, Tournesol et Vol-au-Vent ...............  p.  16ASH : vraiment différent(s) ? ....................................................  p.  17Une meilleure reconnaissance des droits  des personnes handicapées ..........................................................  p.  18Qu’est-ce qu’un SESSAD ? ...........................................................  p. 20

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Véronique Boiron, maître de conférence en lettres à l’IUFM de Bordeaux, chercheure au DAESL, Bordeaux 2 et chercheure associée au LEAPE, Paris 5, spécialiste du langage, répond

à  nos  questions  concernant  les  activités  langagières  des  élèves  à l’école maternelle.

INTERVIEW

Pouvez-vous nous éclairer sur le rôle du langage ?

Le langage est en relation directe avec la pensée, l’esprit, l’intelligence et les représentations mentales. Nous sommes tous et en permanence, en langage : la « langue » est une cons-truction, le langage est ce qu’en font les hommes qui l’utilisent.

Dans le développement de l’enfant, la communication précède la réali-sation du langage et on sait depuis L. Vygotski et J. Bruner qu’il est un être, fondamentalement, sociale-ment, dialogique ; l’adulte lui prête la capacité de comprendre ce qui lui est dit et d’y répondre. Une jeune mère interprète les signes que lui envoie son bébé (sourires, grimaces, gestes, cris). L’enfant comprend très tôt que ce qu’il exprime entraîne des réac-tions chez l’autre. Ses capacités de compréhension sont supérieures à ses capacités de production, tout comme nous, comme c’est perceptible lors de l’apprentissage d’une nouvelle langue. La compréhension du langa-ge oral ou écrit précède généralement la production.

On peut différencier deux formes de langage :- le langage intériorisé qui est un dia-logue de soi à soi : quand on réfléchit, quand on lit, quand on pense à ce qu’on va écrire, quand on utilise des mots mentalement ;- le langage extériorisé lorsque l’acti-vité est parler ou écrire.

À l’école, on va développer l’exté-riorisation, les compétences langagiè-res orales des élèves pour les faire en-trer dans l’écrit. Le langage c’est dire, comprendre et réfléchir 1. Demander aux élèves de dire comment ils ont pro-cédé pour effectuer une tâche permet à l’enseignant d’accéder à leur « boîte noire » 2 et donc d’évaluer l’écart avec la commande initiale selon les prin-cipes suivants : interpréter ; valider ; mesurer l’écart. Cette verbalisation permet par exemple de comprendre comment les élèves interprètent les

consignes, d’avoir accès à ce qu’ils savent et de comprendre leurs straté-gies. C’est fondamental pour tous les élèves et plus encore pour les élèves qui rencontrent des difficultés avec les apprentissages scolaires. Prenons l’exemple d’une élève de moyenne section : l’enseignante a demandé de trier des blocs logiques. L’élève fait trois tas : un petit, un moyen, un grand. Ce n’est pas ce que la maî-tresse attend. Soit elle lui demande de recommencer mais alors l’enfant n’a pas plus d’appuis cognitifs pour refaire différemment, soit l’ensei-gnante lui demande d’expliquer com-ment elle a fait. L’élève indique alors qu’elle est allée à la piscine et a vu trois bassins… Ce qu’elle a fait n’est donc pas incongru : elle a interprété à partir de son expérience d’enfant de quatre ans ; c’est-à-dire que chaque enfant (et chaque adulte !) prélève du sens à partir de ce qu’il a déjà vu, déjà rencontré, déjà entendu, déjà ressenti. L’expérience des élèves de maternelle est très courte (3 à 5 ans de vie) et face aux activités scolaires, l’enfant s’ap-puie sur cette expérience pour inter-préter les demandes de l’école. Et ce sont les mises en mots des enfants qui nous permettent de savoir comment ils apprennent, comment ils compren-nent et ce qu’ils savent déjà.

À partir de ce que disent les élèves de ce qu’ils font (par exemple, trois tas = trois bassins), les enseignants peuvent reformuler leurs attentes, ajuster leur pratique et ce faisant, as-surer des apprentissages sur un mode explicite (l’enseignant et l’élève sa-vent et disent ce qu’ils font, pourquoi et comment ils le font).

La prise de parole est-elle suffi-sante pour développer les capaci-tés langagières des élèves ?

Non, ce sont les liens entre la pensée et le langage qui sont fondamentaux et qui sont en jeu.

À l’école, il existe deux dimensions langagières : le langage à apprendre et

Raoul Guinez a succédé à Yves Cristofari comme ins-pecteur d’académie adjoint. Philosophe de formation, con-seiller d’orientation durant sept ans en Seine-Saint-Denis puis à Paris, IEN dans le Val-d’Oise et les Hauts-de-Seine, en ZEP, il a ensuite exercé aux États-Unis et au Canada. Il a en effet assuré les fonc-tions d’inspecteur de l’Édu-cation nationale en résidence à Washington durant cinq an-nées en tant que responsable des écoles et établissements à programme français d’Amé-rique du Nord.

Comme inspecteur d’acadé-mie adjoint, il a notamment en charge la carte scolaire du second degré. Son expérience américaine l’aide dans la poursuite de la politique du dialogue de gestion entrepri-se dans l’Essonne, politique qui s’appuie sur la lecture des indicateurs et sur une analyse pédagogique partagée avec les chefs d’établissement. Une autre de ses missions est le suivi de l’ASH : carte scolaire des SEGPA, des UPI et suivi de la scolarité des élèves. Il s’est, en particulier, attelé au chantier « du handicap » en milieu ordinaire.

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le langage pour apprendre 3, celui des disciplines. Or, le langage de l’école : faire de la peinture, sortir en récréa-tion, passer aux toilettes, compter, observer, classer… est complète-ment inconnu pour certains élèves. Ainsi, faire de la peinture peut signi-fier pour certains mettre un tee-shirt trop grand ou se salir les mains !

Il faut donc prendre en compte deux pôles : le langage de l’élève et celui de l’enseignant. Celui-ci doit veiller à la précision des termes qu’il em-ploie : « Vous allez découper des mots et écrire une phrase. » devrait plutôt être formulé : « Vous allez dé-couper des étiquettes avec des mots et vous les collerez dans l’ordre pour que cela fasse une phrase : le chat dort sur le lit. ». C’est le langage de l’enseignant qui donne des appuis cognitifs aux élèves et assure les ap-prentissages.

Quelles sont, selon vous, les prin-cipales difficultés rencontrées à l’école maternelle ?

On sait qu’il existe de grandes diffé-rences entre les expériences vécues par les enfants. Certains ont reçu es-sentiellement des discours injonctifs familiaux, « Mange », « Ne fais pas ça… », alors que d’autres ont rencon-tré une grande quantité d’expériences langagières avec des interlocuteurs différents, certains enfants ont eux acquis une forme de langage proche de la forme écrite du langage et donc plus proche de la norme scolaire. On comprend aisément alors que pour certains jeunes élèves, la langue de l’école soit ressentie comme une langue étrangère dans sa forme, ses fonctions et ses enjeux. L’école, c’est très exotique pour certains enfants 4 !

Le système éducatif accentue ces inégalités en présupposant des ac-quisitions et des compétences an-térieures à l’entrée en maternelle. Pour aider les élèves en difficulté langagière, il faut continuellement se rappeler qu’ils sont confrontés pour la première fois à cette langue inhabituelle ou avoir à l’esprit cet écart.

En quoi les capacités langagiè-res permettent-elles d’accéder au statut d’élève ?

Pour accéder au statut d’élève, l’enfant doit comprendre ce que l’École (et non pas l’enseignant) attend de lui :- généraliser les expériences person-nelles rencontrées et les comparer avec celles des autres (adulte et pairs) ;- comprendre et mobiliser le langage des disciplines ;- réfléchir sur le monde et s’interro-ger à son sujet.En classe, cela peut se concrétiser par diverses attitudes et démarches :- les « rituels » deviennent des scé-narios, c’est-à-dire que la réponse d’un élève vaut pour tous, l’enfant comprend peu à peu qu’il est sollicité en tant qu’élève ; le groupe-classe se constitue ; on apprend à apprendre ; on découvre et on intègre les codes scolaires (langage, regard, consignes, lieux, outils) ;- les processus, les activités doivent être valorisés au détriment des tâches et des produits ;- les activités langagières (ateliers autour des albums ; situations pro-blèmes ; planification d’une tâche collective) doivent être régulières pour construire progressivement les enjeux de l’école et le changement de posture (passer d’enfant à élève) ;- la verbalisation des stratégies, des savoir-faire, des processus (comment tu as fait ? ; explique ce que tu as fait ; à ton avis ? ; qu’est-ce que tu en pen-ses ?) doit être sollicitée ; l’important n’est pas d’obtenir « la » bonne ré-ponse ;- l’élève ne doit pas être placé en si-tuation de deviner (désert cognitif) mais de reconnaître, d’organiser, de recontextualiser (appuis cognitifs) sa pensée, ses connaissances.

Le langage doit être utilisé pour as-surer la clarté cognitive nécessaire aux apprentissages, l’élève n’ap-prend pas seul ; ce n’est pas naturel

de compter, raconter, parler, com-prendre les histoires, cela s’apprend !

Que conseillez-vous aux ensei-gnants des écoles maternelles pour les aider dans leurs prati-ques quotidiennes ?

C’est le langage de l’adulte qui per-met aux élèves de construire des appuis cognitifs. L’enseignant doit parler des activités proposées, tout particulièrement avec les élèves en difficulté. Aujourd’hui on sait que pour ces élèves, il faut différer ou suspendre l’action car le fait d’agir masque l’activité intellectuelle.

Se donner comme objectif et comme visée qu’ils soient plus intelligents le soir en partant de l’école qu’en ar-rivant le matin est primordial. C’est une évolution des stratégies que l’on doit obtenir, ce qui implique d’ac-céder à la « boîte noire » de l’élève, c’est-à-dire :- écouter l’élève et donner de la va-leur à ses propos ; se dire non pas qu’il a « faux » mais qu’il apprend ;- lui demander comment il a pro-cédé ; dans ce questionnement méta-cognitif, il utilise son propre langage pour parler de son intelligence ; il fait découvrir sa logique ;- ne pas chercher à avoir « la bonne réponse » mais entendre toutes les propositions des élèves afin de dé-couvrir comment ils ont compris la demande, comment ils ont interprété la situation d’apprentissage : ils di-sent ce qu’ils savent et comment ils le savent, où ils en sont dans leurs apprentissages.

Dans les classes, les élèves en dif-ficulté sont souvent dans le désert cognitif : ils passent leur temps à essayer de deviner ce que veut l’en-seignant, ce qu’il attend d’eux ; pour-quoi ils sont là ; à quoi ça sert de faire ceci ou de le faire comme ça. Les dis-cours des élèves rendent compte de leur activité intellectuelle : le langage leur permet de construire des savoirs. Les enfants se construisent comme élèves : ils répondent, ils participent à la compréhension de la séquence, ils mobilisent des savoirs extérieurs en les recontextualisant. Concrète-ment, il est préférable de privilégier de véritables ateliers plutôt que des regroupements, pour résoudre à plu-sieurs des problèmes posés par des situations de la vie, par l’adulte (réa-

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entre les phrases écrites (par exem-ple, l’absence de connecteur entre les deux phrases : Il pleut. Le pique-ni-que est annulé ; Mathieu a perdu son doudou. Il ne veut plus partir.) alors que ces liens sont marqués à l’oral (« et puis » ; « ben tu sais… ») ;- ne maîtrisent pas suffisamment de savoirs pour comprendre un récit écrit (si l’enseignant raconte l’histoire avant de la lire, il peut alors apporter ces savoirs extérieurs au texte mais indispensables à sa compréhension).

Quelle place doit-on réserver à la littérature de jeunesse ? Pourquoi est-il si important de lire des his-toires aux élèves ?

Lire des histoires aux tout jeunes en-fants c’est leur donner accès à des expériences qu’ils ont rencontrées et à l’école la lecture d’albums donne alors lieu à des échanges qui permet-tent de comprendre que la plupart des expériences sont partagées (l’enfant construit alors la différence-ressem-blance avec les autres) et c’est don-ner accès à des expériences incon-nues (vivre dans un autre pays, avoir un petit frère quand on n’en a pas) et se construire à travers la compré-hension des expériences des autres (construire l’altérité).

Mais, comprendre des histoires écrites et comprendre le langage écrit est très difficile. L’élève se confronte aux anaphores, aux reprises lexicales, aux spécificités de la structure syn-taxique des énoncés écrits. Il est très utile et intéressant de raconter des histoires aux élèves mais dans ce cas il faudra éviter d’induire l’idée qu’il y a lecture. Par exemple on peut dire aux élèves : « Je vais vous raconter l’histoire qui est dans ce livre », pré-senter la couverture et laisser le livre fermé.

Il est essentiel que les élèves diffé-rencient clairement raconter et lire.

Lorsque l’enseignant lit une his-toire, il ne doit pas modifier ou sup-primer un seul mot de l’écrit. L’élève doit impérativement prendre cons-cience de la permanence de l’écrit ce qui ne sera pas le cas si celui-ci varie au gré des lectures.

Il est donc conseillé de raconter une histoire avant de la lire, c’est-à-dire d’utiliser le langage oral avant d’ora-liser l’écrit : Le Renard, il est rusé ! Le Renard est rusé ! En racontant une

histoire, l’enseignant utilise le langage oral, plus aisé à comprendre que le lan-gage écrit oralisé. Il fait donc un travail de compréhension inférentielle, par exemple : la galette, elle se fait manger parce que le renard, il est rusé !

C’est un signe de compréhension lorsque l’élève reconnaît l’histoire ra-contée dans sa forme écrite : c’est-à-dire qu’il est capable de rapprocher la forme écrite de la forme orale d’une même histoire. De nombreux travaux montrent aujourd’hui que compren-dre ne se fait ni « naturellement » ni seul : si le cerveau de l’enfant est « équipé » à la naissance, l’enfant a besoin des échanges avec les autres pour construire la cohérence, pour catégoriser, hiérarchiser, trier, relier les savoirs et développer des com-pétences. L’enfant est un véritable chercheur : il se pose sans cesse des questions sur lui-même (comment je pense, comment je sais), les autres, le monde qui l’entoure et il reconstruit en permanence ce qu’il sait plus ou moins partiellement. Pour ce faire, il dépend des échanges avec autrui car autrui lui donne accès à des savoirs et savoir-faire, à de nouvelles significa-tions, de nouveaux modes de pensée. Cette question de la compréhension du langage écrit est fondamentale et doit nous préoccuper dès l’école ma-ternelle : l’apprentissage systémati-que de la lecture (activité complexe qui ne se limite pas au décodage des mots) ne saurait constituer une rup-ture mais devrait s’appuyer sur les compétences acquises pendant trois ans par les élèves sur le langage écrit, et son enjeu est, sans nul doute, la compréhension des textes écrits par TOUS les élèves.

Propos recueillis par Annick VINOTlors de la conférence pédagogique

de Véronique BOIRONle 24 septembre 2005 à Dourdan

1. PROG.INRP, BRIGAUDIOT M., Apprentis-sages progressifs de l’écrit à l’école maternelle, Hachette, 2000.2. FIJALKOW J., Entrer dans l’écrit, Magnard, 1993.3. Voir également l’interview de Jean Hébrard, BLE91 n° 28, avril 2000.http://www.ac-versailles.fr/ia91/ressources/ble/pdf/28.pdf4. LAHIRE Bernard, Culture écrite et inégalités scolaires, Presses Universitaires de Lyon, 2000.5. GOIGOUX, R., Conférence in Les Actes du Forum Maternelle offre avenir, organisée par le SNUIPP, janvier 1998.

liser un dessin à plusieurs ; lire un message ; écrire une phrase ; réfléchir à plusieurs face à une situation-pro-blème, etc.). Il s’agit de différer l’ac-tion des élèves, de les amener à dire, formuler un projet, une stratégie, avant de faire 5 et ce faisant mobiliser le langage des apprentissages. Il est préférable de constituer des groupes homogènes particulièrement pour les « petits » ou les « non parleurs » qui ne peuvent trouver leur place au sein du grand groupe. Lors d’un atelier dirigé avec les « non parleurs », l’en-seignant utilisera des supports de lan-gage (albums avec texte ou sans tex-te, affiches, objets, jeux…) et posera des questions auxquelles il répondra lui-même, afin de montrer aux élèves ce qu’il attend d’eux et comment ils doivent faire. Il est important que les enseignants se disent au cours des séances que pour les élèves, c’est la première fois, qu’ils sont en décou-verte.

D’après vous pourquoi certains élèves rencontrent-ils autant de difficultés face à l’écrit ?

En français, il existe une grande dif-férence entre les deux formes de lan-gage, l’oral et l’écrit. La grammaire de l’oral est fondamentalement diffé-rente de la grammaire de l’écrit. Pour certains élèves entendre du langage écrit équivaut à entendre une langue étrangère. C’est ainsi que ces élèves :- ne savent pas qu’un même objet peut porter deux noms : ce caillou est un silex ; une guitare est un instru-ment ;- ne savent pas que deux objets peu-vent porter le même nom (un moineau et une autruche sont des oiseaux) ;- ne comprennent pas les consignes dans leur forme écrite ;- ne comprennent pas les histoires qu’on leur lit ;- ne savent pas que pour lire il faut produire des sons avec les lettres qui sont écrites ;- ne comprennent pas qu’il existe une permanence de l’écrit ;- ne savent pas qu’on peut écrire ce qu’ils disent ;- ne comprennent pas les liens entre les mots d’un texte (par exemple le prince ; il ; lui ; ce beau jeune hom-me ; celui-ci ; ce dernier ; le fils du roi, etc.) ;- ne maîtrisent pas les liens implicites

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L’école maternelle : un peu d’histoire

• C’est en 1881, avec les lois Ferry, que les salles d’asile, créées à l’origine pour garder les enfants pauvres tout en les soustrayant « aux mauvaises influen-ces », se transforment en écoles mater-nelles. Les surveillantes deviennent peu à peu des institutrices et l’enseignement religieux disparaît.• L’absence de textes officiels durant de longues années n’a heureusement pas empêché l’école maternelle d’évoluer régulièrement sur le plan pédagogique. Pour disposer d’orientations explicites, il faut attendre un arrêté de 1977 qui in-dique que L’école maternelle française joue, ainsi, de nos jours, un triple rôle : éducatif, propédeutique et de gardien-nage. L’aspect « garderie » de l’école est toujours présent.• En 1986, un nouveau texte précise : L’objectif général de l’école maternelle est de développer toutes les possibilités de l’enfant, afin de lui permettre de for-mer sa personnalité et de lui donner les meilleures chances de réussir à l’école et dans la vie. L’école maternelle s’ac-corde là un rôle nouveau : permettre à chacun de trouver sa place dans une société alors en mouvement et en trans-formation.• La loi d’orientation de 1989 modifie considérablement l’école maternelle. L’apparition des cycles avec la grande section dans le cycle des apprentissa-ges fondamentaux et l’instauration des livrets d’évaluation influencent les en-seignements.• Les programmes de 1995 précisent que l’école maternelle est bien une école qui demande des apprentissages structurés et des contenus repérés. Elle doit éga-lement apprendre aux jeunes enfants à vivre ensemble et avec les adultes.• C’est ainsi qu’en une centaine d’années l’école maternelle a subi des évolutions importantes. Retenons-en une particu-lièrement : l’école maternelle a perdu peu à peu sa fonction de gardiennage pour devenir une école à part entière.• En 2002, les programmes insistent sur l’acquisition de connaissances et

LES ENJEUX DE L’ÉCOLE MATERNELLE

Enviée, dit-on, par le monde entier, notre école maternelle doit permettre à chaque enfant une première expérience scolaire réussie.

de compétences, placent le langage au cœur des apprentissages, mettent en avant le vivre ensemble et préconisent la réussite de tous dans le respect des individualités.

L’école maternelle : un lieu d’apprentissage

L’école maternelle est un lieu pour ins-truire, éduquer et apprendre. Certes, ces trois actions ne se situent pas au même niveau : instruire revient à l’enseignant, apprendre relève de l’élève et éduquer est une action conjointe entre l’enfant, sa famille et la communauté éducative.Il est indispensable que chacun assure ses fonctions.

L’enfant devient un élève apprenant. Il doit assumer l’absence de sa mère, faire preuve de curiosité tout en intégrant des règles collectives et des codes qui ne lui sont pas obligatoirement familiers. Ceci est essentiel pour l’acquisition d’une culture commune. Cet apprentissage passe nécessairement par des échanges oraux, dans le respect de chacun.

L’enseignant programme, organise et évalue les enseignements tout en pre-nant en compte le rythme d’acquisition des élèves ; il donne du sens aux ap-prentissages. La place de la langue est essentielle ; le dialogue didactique et les interactions entre les élèves facilitent la réussite des apprentissages.

La famille doit être éclairée sur les missions de l’école, son fonctionnement et les règles qui la régissent. Elle doit également être informée des contenus d’enseignement pour, entre autres, va-loriser les réussites de l’enfant et s’ap-proprier les livrets d’évaluation.

L’école maternelle : un lieu de dialogue

La liaison école-famille est devenue indispensable. Il est essentiel d’établir autour de l’enfant/élève une cohérence éducative qui passe obligatoirement par une compréhension et un respect mu-tuels du rôle de chacun. L’enseignant

doit se positionner en professionnel, garant des apprentissages, avec un re-gard positif sur l’élève, sans jugement de valeur.

Pour une communication réussie l’équipe pédagogique doit veiller au lan-gage utilisé et à la formulation du mes-sage à transmettre. Les fondements de l’Ecole de la République représentent une référence commune sur laquelle il convient de s’appuyer en cas de diver-gences culturelles et éducatives.

L’école maternelle : un lieu citoyen

Plus que jamais l’école doit transmettre les valeurs de la République, de la dé-mocratie et des droits de l’Homme. Le domaine d’activité vivre ensemble en-gage à cet enseignement mais la trans-versalité de ces valeurs doit être effecti-ve. L’enfant doit, tout en conservant son individualité, sentir son appartenance à un groupe régi par des règles clairement définies communes à tous, cela facili-tera son intégration dans la société.

Il est essentiel que toute la commu-nauté éducative ait une conduite modé-lisante fondée sur le respect et l’absence de jugement.

Pour conclure

L’école maternelle doit être un lieu d’apprentissage dans lequel les élèves se construisent et acquièrent des com-pétences, des connaissances, des va-leurs communes indispensables à une scolarité et une entrée dans la société réussies.

La réussite de tous, essentielle et prio-ritaire, doit mobiliser les équipes péda-gogiques dès l’école maternelle.

Annick VINOT,conseillère pédagogique

à Dourdan

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LES PREMIERS APPRENTISSAGES NUMÉRIQUES

Les compétences numériques précoces

La précocité de la discrimination per-ceptive globale des petites quantités est établie par diverses expériences (1)1, en particulier celles de K. Wynn, en 1992 : deux personnages sont pré-sentés sur la scène d’un castelet, puis masqués par un écran tandis que par une trappe, on en retire ou en ajoute un, l’écran se baisse, dévoilant un ou trois personnages au lieu des deux at-tendus. Par leur réaction de surprise devant les événements impossibles alors que l’événement conforme ne les trouble pas, les bébés montrent, dès quatre ou cinq mois, qu’ils per-çoivent que 1 et 1 ne font ni 1, ni 3 !

Dès 1982, R. Gelman, E. Spelke et P. Starkey (2) établissent la préco-cité de la discrimination perceptive de 3 contre 2 : les bébés de six à huit mois tournent plus fréquemment et plus longuement le regard vers celle de deux collections dont le nombre d’objets égale le nombre de coups de tambourin (coordination des percep-tions visuelle et auditive).

En 1999, il a été montré que cette capacité existe aussi chez les singes macaques : on met une à une des pommes dans deux boîtes opaques, sous leurs yeux mais à distance ; ils savent choisir celle qui contient le plus de pommes (3 contre 2, 4 contre 3, pas au-delà). De même, les enfants de deux ans, dans une variante de l’expérience de conservation piagé-tienne 2 savent, indépendamment des pièges perceptifs, choisir la rangée qui comprend plus de bonbons ! (3)

Les prémices du comptage ont été étudiées en 1982 par Gelman et Gallis-tel (2). Pour mener à bien un dénom-brement par comptage, il est nécessai-re de coordonner cinq principes :- ordre stable : toujours les mêmes mots dans le même ordre ;- adéquation unique : autant de dési-gnations orales que d’objets indexés ;- cardinalisation : le dernier mot

prononcé se rapporte à la collection toute entière ;- abstraction : chaque objet compte pour un, indépendamment des diffé-rences de taille ou de nature ;- indifférence de l’ordre d’indexa-tion : on peut compter dans un sens ou dans l’autre.

Par la mise en scène d’une marion-nette « qui apprend à compter ou qui fait des farces », il a été possible de tester séparément chacun des cinq principes, auprès d’enfants de trois ans, sur des séries allant jusqu’à vingt objets :- le comptage exact est reconnu dans 96 % des cas ;- le comptage erroné est détecté dans 85 % des cas ;- l’erreur est rectifiée dans 70 % des cas.

Il apparaît ainsi que le dénombre-ment par comptage est une tâche complexe mais que les difficultés rencontrées par les jeunes enfants résultent plus de la charge cognitive nécessaire à la coordination des cinq principes que de la non-maîtrise de ceux-ci, isolément.

La complexité de la tâche de comp-tage opposée à l’immédiateté de la perception globale peut conduire à réorienter des choix pédagogiques au cycle 1. D’ailleurs, les programmes de 2002 mettent en avant les objec-tifs suivants :- utiliser des procédures non numéri-ques pour comparer deux collections ou constituer une collection équiva-lente à une autre ;- reconnaître globalement et nommer de petites quantités (jusqu’à 3 ou 4) ou des collections organisées en con-figurations connues (configuration de doigts et constellations du dé) ;- résoudre de petits problèmes con-cernant de petites quantités et leurs variations en manipulant des objets réels, en utilisant les nombres pour décrire cette manipulation…Ils ne citent qu’ensuite :- connaître la comptine numérique

jusqu’à 30 au moins ;- l’utiliser pour dénombrer une col-lection ;- utiliser la file numérique pour re-connaître l’écriture chiffrée des nom-bres.

En résumé, soulignons que les en-fants témoignent très tôt de nombreu-ses compétences numériques. Ne possédant pas encore le langage qui permet de toutes les exprimer, ils ré-pondent en actes, en manipulant des objets ou en montrant leur surprise dans des situations concrètes pour lesquelles l’habillage ludique joue un grand rôle.

La dualité comptage-calcul

La notion de nombre prend sens lorsqu’on est amené à dire combien, à garder mémoire d’une quantité, à comparer deux collections, ou encore à garder mémoire du rang dans une série. Le nombre apparaît alors com-me un moyen très efficace, tant pour déjouer les pièges perceptifs que pour communiquer, prévoir, et vérifier (4).

Le comptage n’est nécessaire que si les quantités en présence dépassent ce qu’il est possible de percevoir glo-balement. Il permet l’apprentissage des mots nombres (comptine numé-rique), mais ne favorise ni une bonne représentation mentale des quantités, ni la mise en place des repères 5 et 10 si importants pour le calcul (5). Par les techniques actuelles d’imagerie cérébrale permettant d’analyser les bases neurales des fonctions cogni-tives complexes, on sait maintenant que la représentation mentale des quantités et les éléments du calcul additif sont stockés dans la région intra pariétale gauche dédiée au trai-tement spatial de l’information, en relation avec la mémoire visuelle (ré-gion occipitale droite), alors que la comptine numérique est en mémoire sémantique (région occipitale gauche

Les élèves de première année de cycle 3 sont encore nombreux à compter sur leurs doigts, alors qu’un objectif majeur du cycle 2 est l’accès au calcul. D’après les recherches les plus récentes en sciences cognitives, il semble possible, dès le cycle 1, de s’appuyer sur des compétences numéri-ques naturelles et précoces pour proposer des activités préparant l’accès au calcul.

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dédiée au langage). Ces diverses ré-gions cérébrales devront être sollici-tées conjointement lors des activités numériques afin que s’établissent et se densifient les connexions entre les mémoires spatiale, visuelle, kines-thésique et sémantique.

À ce stade de la réflexion, on voit qu’il serait loisible, dès la petite section, d’alterner les apprentissa-ges centrés sur la perception globale des petites quantités, prémices du « calcul visuel » et ceux centrés sur le comptage, l’étendue du domaine numérique croissant selon le tableau suivant :

Quelques suggestions d’activités

Les situations de vie de classe dé-veloppant les compétences numé-riques sont nombreuses : activités repères, comptines, jeux, situations problèmes. Ces dernières (6) sont des situations additives concrètes qui fondent les notions de somme et de différence par le mime et la mani-pulation d’objets réels que l’on peut déplacer, réorganiser, masquer. C’est le plus souvent par comptage que les situations sont traitées. Pour déve-lopper la perception globale et jeter les bases du « calcul visuel », il faut une « mise en scène » qui fasse obs-tacle au comptage ; R. Brissiaud (5) propose le masquage et les « cartons éclair ».

• En petite section, apprendre à met-tre le mot juste sur la perception glo-bale instantanée de deux ou de trois objets dessinés sur le «carton éclair» brièvement exposé, en faisant appel uniquement à la mémoire visuelle, sans comptage ! Apprend-on le nom des couleurs en énumérant celles de l’arc-en-ciel ? Ensuite, en variant la disposition de jetons qu’on masque et qu’on dévoile, voir (et retenir) que « 2 et 1, c’est 3 » ; puis faire de même pour 4 et mémoriser « 3 et 1 », « 2

et 2 ». Ceci peut être réinvesti lors des activités repères en considérant les étiquettes des absents, garçons et filles. On peut aussi utiliser les pre-mières pages de l’album à calculer (7) : les enfants utilisent spontané-ment les nombres pour décrire les images !

Parallèlement, on apprend des comp-tines traditionnelles qui vont jusqu’à 6, 9 ou 12. Ne pas faire compter de quantités inférieures à 5. Le compta-ge des présents donne l’occasion de fréquenter la comptine numérique et valorise son apprentissage. L’utilisa-tion de la marionnette « qui apprend à compter ou qui fait des farces » per-met d’alléger la charge cognitive que représente ce comptage.

Bibliographie

1. BIDEAUD, J. et LEHALLE, H., Le développement des activités nu-mériques chez l’enfant, Sciences cognitives, Hermès-Sciences, 2002.

2. GELMAN, R., Les bébés et le calcul, in La Recherche n°149, nov. 1983.

3. HOUDÉ, O., De la pensée du bébé à celle de l’enfant, l’exem-ple du nombre, Sciences humaines n°87, oct. 1998.

4. INRP, 1, 2, beaucoup… passion-nément !, Rencontres pédagogiques, cahier n°21.

5. BRISSIAUD, R., Comment les enfants apprennent à calculer, Retz, 2003.

6. ERMEL, Apprentissages numéri-ques, grande section, Hatier, 2001

7. BRISSIAUD, R., L’album à cal-culer, J’apprends les mathémati-ques, Retz, 1994 et 2003.

8. VALENTIN, D., Les livres à compter, Grand N n°52 (1992-93) et n°58 (1995-96) et du même auteur, Vive les livres à compter, in Math-école n°175, 1996.

Perception globale :« calcul visuel »

Comptine numérique :dénombrement

PS Sous 3, puis 4 Jusqu’à 5 ou 6

MS Sous 5, puis 6 Jusqu’à 10 ou 20

GS Sous 10, repère 5 Jusqu’à 30 au moins

CP Sous 20, repère 10 Jusqu’à 69 au moins

« L’accès au calcul et la recherche d’une continuité

GS-CP » feront l’objet d’un autre article dans le

numéro 39 de cette revue. Soyez au rendez-vous !

• En moyenne section, on apprend à montrer « d’un coup » des nombres sur ses doigts, la comptine « Voici ma main, elle a cinq doigts… » met en gestes « 3 et 2 », « 4 et 1 », éten-dant et renforçant les apprentissages développés avec les «cartons éclair» et les jeux de masquage, incluant 5 et le complément à 5. On pourrait ici parler de « calcul digital ».

Dans les jeux, on utilise souvent un dé : occulter la face 6 à l’aide d’une gommette, les constellations sont ainsi toutes affichables sur les doigts d’une seule main ; le masquage du dé après son lancer conduit à sa « lec-ture » globale. Lancer simultanément deux dés présentant les constellations 1, 2 et 3 permet le réinvestissement du « calcul visuel » et fait apparaître (1 fois sur 9, en moyenne) que « 3 et 3 font 6 » !

Parallèlement, le comptage s’affirme

jusqu’à 10, renforcé par la fréquenta-tion des Livres à compter (8). Il est en cours d’acquisition au-delà, avec par exemple, la marionnette qui compte les présents.

Georges PARET,professeur de mathématiques

à l’IUFM de Versailles, site d’Etiolles

1. Les chiffres indiqués en rose font référence à la bibliographie à la fin de l’article.2. Mehler et Bever, 1967.

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langage pour ces enfants-là se fait sur les formes à pronom « pour qu’il… ». Il s’agit, bien entendu, de ne pas bê-tifier en restant au niveau déjà atteint par les enfants.

Il convient donc de rechercher l’écho dans la zone proximale de développement de l’élève 1, la zone d’acquisition possible par l’enfant de l’âge considéré. Il ne faut pas cher-cher à tout prix à atteindre la forme aboutie, la plus correcte possible, car elle peut être incompréhensible aux enfants, trop éloignée de leur niveau de perception, de compréhension et encore plus de production. Il faut donc ajuster le niveau de langue uti-lisé aux capacités de chacun.

Une ou deux fois par semaine, un travail en petit groupe de langage peut être organisé avec un adulte complètement disponible pour ap-porter une aide spécifique à l’ap-prentissage des pronoms, des temps, des complexités telles que « pour que, où, lorsque, parce que… » ou encore améliorer l’articulation de toutes les formes syntaxiques.

Voici un exemple de contraste maxi-mal noté chez deux enfants de cinq ans, d’une même classe de grande section, après avoir écouté la cassette reçue dans le cadre d’une correspon-dance scolaire :- « Moi j’veux dire que quand on va aller chez les correspondants j’vais pouvoir faire du vélo parce qu’è m’dit sur la bande qu’è va m’prêter le sien, ma correspondante. »- « Moi i faire vu vélo. I dire ça. »

L’interaction aide l’enfant à construire son langage

Les interactions ne doivent pas se confondre avec les tactiques d’ani-mation développées, par exemple, en grand groupe, avec beaucoup d’élè-ves. Celles-ci visent surtout la quan-tité des émissions plutôt que la qua-lité des productions. En effet, il s’agit de faire parler le plus grand nombre d’élèves, d’obtenir la prise de parole de chacun.

L’examen de multiples enregistre-ments de situations de classe prouve que ce sont les tactiques de relances les plus légères, comme « Ah ! », « Ah bon ? », « Oui… », « Tu es sûr ? »… ou la reprise des derniers mots de l’enfant qui vient de parler, qui fonc-tionnent le mieux.

Ces deux pratiques augmentent le nombre d’orateurs, la quantité et la longueur des prises de parole, ainsi que leur autonomie.

Les appels à l’explicitation ou à la dénégation, quand l’enseignant fait semblant de ne pas comprendre, déclenchent souvent des flots de pa-role.

Il est préférable de privilégier des questions courtes et ouvertes pour inciter à continuer à raconter, expli-quer, argumenter.

Pour les élèves les plus timides, les moins armés du groupe, les types d’interactions les plus favorables sont la reprise ou la reformulation de ce qu’a dit l’élève par l’enseignant dans la langue orale adulte, suivi d’une relance de type « Et pourquoi ? » ou « C’est intéressant, et après ? », pour entretenir le moteur de la quantité.

Cette reprise ou feed-back ou feed-back en assistance ou écho de sa pro-duction permet d’accompagner l’élè-ve dans sa construction langagière.

Il faut veiller toutefois à ne pas trop académiser la phrase écho, sinon les enfants de quatre, cinq ans sont per-dus et cela ne leur apporte rien. Il faut se rappeler que la construction du

LA PÉDAGOGIE DU LANGAGE À L’ÉCOLE MATERNELLE

Philippe Boisseau a été instituteur, rééducateur, inspecteur de l’Éducation nationale et inspecteur professeur dans deux centres de formation. Sa longue pratique professionnelle, ses recherches universitaires l’ont conduit à élaborer une pédagogie du langage. Il nous a présenté ses travaux lors d’une conférence pédagogique.

En observant cet exemple, on note que :

- le premier écart porte sur l’emploi des pronoms, le deuxième élève ne dispose que d’un pronom sujet uni-que « i » ;

- le second écart concerne l’emploi des verbes, le deuxième élève n’em-ploie que des verbes à l’infinitif ;

- le troisième écart est relatif aux complexités qui enchâssent les phra-ses simples les unes dans les autres chez le premier élève qui utilise « que, parce que, quand », contraire-ment au second.

Il est à signaler que le second élève a pu considérablement réduire l’écart en fin d’année grâce à un travail spé-cifique en petit groupe.

Quatre objectifs prioritaires sont à poursuivre

• Aider l’élève à différencier les pro-nomsL’ordre d’émergence des pronoms en fonction de l’âge étant : il, elle, ils, el-les, je, tu, on et plus tardivement nous et vous.

• Aider l’élève à se construire et à maîtriser le système des temps des verbesIl est primordial de montrer le temps qui passe en s’aidant d’un planning photographique de la journée, par exemple. Tous les élèves pourront ainsi s’emparer du système tempo-rel : avant, maintenant, après.- À l’âge de trois ans, les enfants uti-lisent le présent, le passé composé et le futur construit avec le verbe aller.- Entre quatre et cinq ans, l’imparfait émerge.- À cinq ans et plus, apparaissent tous les futurs y compris le futur antérieur et le futur dans le futur.

• Aider l’élève à construire et à maî-triser des phrases syntaxiquement complexes

« Le langage est à la base des mécanismes

qui engendrent réussite ou échec scolaire »

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La montée en complexité amorcée en section de moyens se développe en section de grands puis à l’école élé-mentaire où elle constitue le phéno-mène majeur de la construction de la syntaxe chez l’enfant.

Une programmation 2 pour l’école maternelle a été élaborée à partir d’une enquête réalisée dans deux groupes scolaires de milieux très contrastés. En effet, on constate que les structures des phrases mises en œuvre par les enfants sont extrê-mement élémentaires, plus simples qu’on ne l’imagine spontanément et certaines formes que l’on croit sim-ples ne sont pratiquement jamais présentes dans leurs productions, ceci étant vrai d’un bout à l’autre de l’école primaire puisque les pourcen-tages ci-dessous restent pratiquement stables de la section de moyens au cours moyen :- 75 % de formes élémentaires « Ya un p’tit garçon. C’est le p’tit garçon. I fait du vélo. »- 20 % de détachements ; avec ajout d’un pronom en position sujet « Le petit garçon i fait du vélo. »- 3 % de présentations sous la forme de l’addition de deux phrases élé-mentaires « Y’a un petit garçon qui fait du vélo. »- 2 % de déclaratives simples ce qui correspond à la forme écrite souhai-tée « Le petit garçon fait du vélo. »

• Aider l’enfant à concentrer sa syntaxe, la rapprochant de la forme écrite aboutie, ce qui n’est pas prio-ritaire en maternelle. Cela revient à observer comment l’écrit finit par laisser sa trace dans l’oral (utilisation de phrases déclaratives simples).

Ce phénomène est très tardif et in-tervient au mieux au cycle 3. Il faut du temps pour que le phénomène d’imprégnation de ces tournures syn-taxiques vues à l’écrit, agisse.

Les élèves doivent acquérir de l’aisance dans le maniement des for-mes complexes car la concentration opère plutôt sur des structures com-plexes que sur des structures sim-ples.

La phase de complexification doit être bien acquise, bien intégrée. C’est la densité de phrases complexes qui est le plus gros travail des élèves entre la grande section et le cours moyen. Il convient de laisser mon-ter la phase de complexification, de

laire » affirme Laurence Lentin.Ce primat de la syntaxe est confor-

té : la syntaxe est motrice, a un rôle facilitateur mais le vocabulaire ne doit pas être négligé.Pour les élèves de trois ans, l’utili-sation d’albums échos s’avère fort utile. Ces albums sont réalisés à par-tir de photos d’élèves, dans des situa-tions observées en classe. Ils peuvent être écrits à la première ou troisième personne. Les mots et les verbes uti-lisés permettent de diversifier le vo-cabulaire. Il convient de s’appuyer sur des outils qui listent les mots les plus fréquents utilisés par les enfants. Ils sont de l’ordre de 750, pour les enfants de trois ans.

Pour des enfants de quatre ans, 1750 mots sont présentés dans « Le diction-naire/imagier 3 » du Père Castor.

Pour les cinq ans, 2500 mots, dans « Mon premier Larousse », Larousse des maternelles.

Propos recueillis par Martine LAGEAT-CHARTOL

lors de la conférence pédagogique de Philippe BOISSEAU,

le samedi 10 décembre 2005 à Brétigny-sur-Orge

1. VYGOTSKI L., Pensée et langage, éditions sociales, 1997.2. BOISSEAU, P., Introduction à la pédagogie du langage, maternelle, tome I, CRDP de Haute-Normandie, 1996.

ne pas éliminer trop vite les formes à pronoms ou les phrases avec « y’a… qui… ». Cela n’altère pas la capacité oratoire de l’individu et ces mots ont de l’importance pour aider à la cons-truction syntaxique. Il faut donc lais-ser du temps aux élèves avant de les aider à académiser le langage.

L’efficacité à l’oral est liée à la ca-pacité à mobiliser instantanément des complexités de langue. L’oral effica-ce est plus complexe et moins con-centré que l’écrit. À l’inverse, l’écrit efficace est moins complexe et plus concentré que l’oral. En effet, l’oral complexe prépare la compréhension du récepteur avec un effet persuasif.

Questions d’enseignants

Lors de la dictée à l’adulte, l’en-seignant doit-il respecter ce que disent les élèves à l’oral, ou doit-il tendre vers un écrit concentré aboutissant à la forme déclara-tive simple ?

Dans cette pratique, il s’agit de pro-duction d’écrit. L’enseignant va donc concentrer les structures mais sans le faire de façon sournoise, en ex-pliquant, chaque fois ce que l’on va faire, ce que l’on transforme. La dif-férence entre ce que l’on dit et ce que l’on écrit est à expliquer au fur et à mesure. Ainsi dans l’exemple ci-des-sous, on amènera les élèves à faire la différence entre oral et écrit :« Y’a un cavalier qui traverse la fo-rêt » deviendra « Un cavalier traver-se la forêt ».

Comment organiser les groupes de besoin ?

Il convient tout d’abord de motiver les élèves en choisissant des thèmes en rapport avec ce qu’ils aiment.

Des outils d’évaluation existent en ce qui concerne l’expression, la communication, la construction de la syntaxe, l’élaboration du lexique et la différenciation phonologique.

On privilégie une organisation par strates d’acquisitions.

Quelle est l’importance de l’ap-port lexical ?

« Tout progrès de la syntaxe est ef-ficace sur l’acquisition du vocabu-

Bibliographie

BOISSEAU, P., Enseigner la langue orale en maternelle, SCEREN, 2005.

BOISSEAU, P. et RAFFESTIN, A., L’évaluation de l’expression orale, les cahiers de l’évaluation formative à l’école élémentaire, CRDP de Haute-Normandie, 1989.

BOISSEAU, P., Introduction à la péda-gogie du langage, maternelle, tome I, CRDP de Haute-Normandie, 1996.

BOISSEAU, P., Introduction à la péda-gogie du langage, maternelle, tome II, CRDP de Haute-Normandie, 1997.

LENTIN, L., Apprendre à parler à l’en-fant de moins de 6 ans, OCDL/ESF, 1972.

LENTIN, L., Comment apprendre à parler à l’enfant, OCDL/ESF, 1973.

LENTIN, L. et BONNEL, P., Appren-dre à parler ; le rôle de l’école mater-nelle, PUF, 1985.

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ÉVALUER EN GRANDE SECTION

Le ministère met à la disposition des enseignants de grande section un grand nombre d’outils d’éva-luation accompagnés de conseils pédagogiques 1. Pourquoi évaluer ces jeunes élèves ?Pour quoi faire ?

En 2001, le ministère de l’Éducation nationale met à la disposition des en-seignants les premiers outils d’aide à l’évaluation. L’objectif général est très clair : porter une attention parti-culière à chaque élève.

Le dispositif est destiné à fournir aux enseignants :- une estimation des compétences de chaque élève tout au long de l’année scolaire ;- un point d’appui pour l’élaboration de progressions ;- des propositions de situations péda-gogiques pour aider les élèves à pro-gresser et pour prévenir d’éventuelles difficultés ;- un outil de repérage de certaines difficultés importantes pour permet-tre un dialogue avec les enseignants spécialisés des RASED 2 ;- un outil d’information qui pourra être transmis aux parents ;- une évaluation précise pouvant être transmise aux enseignants de CP dans le cadre de la liaison GS/CP, liaison réaffirmée dans le Plan de prévention contre l’illettrisme.

Cette évaluation est avant tout une prise d’information sur les acquis d’un élève, à un instant donné, pour mettre en œuvre des situations d’ap-prentissage adaptées aux besoins de chacun.

Cette évaluation diagnostique per-met de mesurer les progrès effectués par chaque élève, le chemin parcou-ru.

Il est à noter que des documents d’accompagnement et d’application des programmes tendent à étayer la mise en œuvre de ces évaluations.

Dans le département de l’Essonne

• Le groupe départemental TSA 3Un groupe de travail pluricatégoriel (médecin, inspecteur de l’Education nationale, conseiller pédagogique…) a proposé, dès la rentrée 2003, une sélection d’items issus des « évalua-

tions grande section », dans le but de repérer les élèves susceptibles de présenter un TSA (dysphasie…) 4.

La passation de cette série d’items présente un double intérêt :- c’est un outil d’aide au repérage des TSA et de liaison entre les médecins scolaires et les enseignants ;- c’est un outil permettant aux en-seignants de repérer les difficultés d’ordre pédagogique pouvant trou-ver des modalités de travail spécifi-ques et concertées au sein de l’école (groupes de besoin, interventions des membres du RASED 2…).

Ce dispositif départemental s’est étendu aux classes de CP en 2005-2006.

Grâce à l’émergence d’outils pro-fessionnels cohérents, les équipes enseignantes peuvent déterminer des modalités adaptées aux besoins des élèves dès la GS. Les compétences spécifiques de chacun rendent les ajustements pédagogiques efficients.

• Le groupe départemental « Éva-luations » 5

Au regard de tous ces outils, le sous-groupe de travail départemental « Évaluations » a élargi sa réflexion pour aider les équipes enseignantes à repérer et améliorer la compréhen-sion des éventuelles difficultés des élèves, à agir pour les prévenir.

Son objectif : proposer des protoco-les d’évaluation visant à repérer et à analyser les difficultés des élèves du cycle 2 pour cerner les priorités dès l’école maternelle.

Le groupe préconise des évaluations d’étape, non traduites statistique-ment, sélectionnées ou élaborées en fin de grande section, en milieu et en fin de cours préparatoire. Ces évalua-tions s’inscrivent dans une continuité par le filage de compétences évaluées identiques de la GS à la sixième. Une partie de la sélection prend appui sur les documents d’accompagnement Lire au CP 1 et 2 6.

Il est inutile de multiplier le nombre de passations au détriment du temps

que requiert tout apprentissage.Ces évaluations d’étape aident à la

constitution d’outils professionnels communs et permettent d’objectiver les réponses pédagogiques envisa-gées au sein du cycle, avec les en-seignants spécialisés et les ES.REP 7, par exemple.

Pour conclure

Evaluer pour ajuster au plus près, pour chaque élève, son enseigne-ment, pour assurer l’égalité des chan-ces et pour diagnostiquer des diffi-cultés spécifiques est un objectif que chaque enseignant doit poursuivre et cela dès l’école maternelle. En effet, elle est une école de plein exercice constituant le socle sur lequel s’éri-gent les apprentissages de l’école élémentaire.

Myriam ABITBOLconseillère pédagogique

à Sainte-Geneviève-des-Bois

1. Banque d’outils d’aide à l’évaluation diagnosti-que : http://www.banqoutils.education.gouv.fr/2. Réseau d’aides spécialisées aux élèves en diffi-culté.3. Trouble spécifique des apprentissages.4. Blé 36 : http://www.ac-versailles.fr/ia91/res-sources/ble/pdf/36.pdf 5. Groupe de travail émanant du GTI 91 « Évalua-tions CE1-CE2-6e ».6. Documents d’accompagnement Lire au CP 1 et 2, SCEREN-CNDP ou sur le site www.cndp.fr7. Enseignant supplémentaire en réseau d’éducation prioritaire

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PROGRAMMER – DIFFERENCIER - ÉVALUER

Une directrice d’école maternelle nous présente des outils de préparation efficaces et fonctionnels.

Périodes 1 2 3 4 5

Prêter sa voix à une marionnette

Connaître la façon dont ce personnage s’expri- me : voix, débit, vocabulai-re, syntaxe, expressions...

X X X X

Imiter le personnage en situation de restitution d’un dialogue connu et mémorisé

X X

Imiter le personnage en si-tuation de création d’un dia-logue simple à partir d’une trame donnée par l’adulte ou inventée par l’enfant (seul ou en groupe)

X X

Lorsque j’ai débuté, les mots progres-sion, programmation, compétence, diffé-renciation me paraissaient un peu « bar-bares ». Lorsque je me suis enfin posé la bonne question « Que dois-je apprendre aux élèves ? », il m’est apparu nécessaire de créer des outils de préparation effica-ces répondant à mes inquiétudes.

Des compétences à la programmation

Après avoir listé toutes les compétences de fin de cycle dans le but de réaliser ma programmation, j’étais sceptique quant à l’aspect fonctionnel de l’outil créé.

Il apparaissait indispensable de détailler ces compétences pour une plus grande efficacité. J’ai utilisé Travailler par cy-cles en mathématiques1 et Travailler par cycles en français2. Ces deux ouvrages proposent des compétences qui ne sont pas figées dans une programmation trop rigoureuse et qui peuvent être adaptées à toutes les classes.

Pour chaque compétence des program-mes, sont déclinées des compétences intermédiaires à faire acquérir progressi-vement aux élèves. Cette liste n’est pas exhaustive ; certaines peuvent être sup-

De la programmation à la différenciation

J’ai ensuite créé un second tableau en remplaçant la partie réservée aux périodes par une colonne pour chaque élève.

Lorsqu’une compétence est travaillée, elle est évaluée ; les résultats relevés au fur et à mesure permettent de connaître exactement le niveau des acquisitions de chacun.

Il m’est alors très facile de différencier le contenu d’enseignement car je repère im-médiatement les élèves qui ont acquis la compétence et ceux qui ne l’ont pas acquise. Je retravaille alors la compétence uniquement avec ceux qui en ont besoin ; les autres peuvent avancer sur la compétence suivante ou consolider leur maîtrise avec un niveau de difficulté supérieur.

De la différenciation au livret différencié

Il est souvent difficile de renseigner un livret d’évaluation classique qui ne comporte que les compétences de fin de cycle. Prenons l’exemple d’une classe de petite section. Les parents sont parfois peu informés de ce qu’apprend leur enfant. A la lecture du livret d’évaluation trimestriel, ils constatent une forme d’échec lorsqu’un grand nombre de compétences apparaissent comme « non ac-quises » alors que les acquisitions de l’élève ont évolué normalement.

Lorsque l’on travaille à partir des compé-tences intermédiaires, il est aisé de les inté-

grer au cahier de vie de chaque élève afin d’informer les familles du contenu d’en-seignement.

D’autre part, il est très simple d’utiliser le deuxième tableau, précisant la liste des élèves, et dans lequel ont été saisis les ré-sultats obtenus par chacun et grâce aux facilités technologiques qu’offrent les ta-bleurs, d’imprimer pour chaque élève, le livret d’évaluation avec les compétences intermédiaires travaillées.

Par exemple, période 1 :

Julie..

Prêter sa voix à une marionnette

Connaître la façon dont ce personnage s’expri- me : voix, débit, vocabulaire, syntaxe, expressions...

Acquis

Imiter le personnage en situation de restitution d’un dialogue connu et mémorisé

En cours d’acquisition

Imiter le personnage en si-tuation de création d’un dia-logue simple à partir d’une trame donnée par l’adulte ou inventée par l’enfant (seul ou en groupe)

En cours d’acquisition

Ainsi, il n’y a pas à se repencher sur le travail effectué un mois auparavant, il n’est plus question d’appréciations peu objectives et surtout on ne passe pas trois jours à remplir les livrets !

Cet outil est peut-être un peu long à construire, mais il fait gagner, au cours de l’année, un temps précieux. Le retour des familles est plutôt favorable ; les pa-rents sont ravis de savoir régulièrement ce qu’apprend leur enfant. La différencia-tion n’apparaît plus si compliquée et tant mieux, puisqu’elle est indispensable.

Valérie DE OLIVEIRA,directrice de l’école

maternelle de Sermaise

1. C. METTOUDI, A. YAÏCHE, Travailler par cy-cles en mathématiques, Hachette éducation, 2003.2. C. METTOUDI, A. YAÏCHE, Travailler par cy-cles en français, Hachette éducation, 2003.

En savoir plushttp://www.ac-versailles.fr/ia91/ressources/ble/annexes38.htm- compétences intermédiaires grande section, maîtrise de la langue.- compétences intermédiaires grande section, mathématiques.

primées ou ajoutées.Travailler à partir d’un livre n’étant

pas très aisé, j’ai décidé de créer un outil informatique. J’ai saisi toutes ces com-pétences intermédiaires dans un tableur. Pour développer cette programmation dans le temps, j’ai simplement ajouté à cette liste cinq colonnes correspondant aux cinq périodes de l’année. Il est très facile de modifier cette programmation en fonction de l’avancée du travail ou des projets ; il suffit de déplacer une croix.

Ces compétences sont souvent très dé-taillées ; il est donc très facile de trouver l’activité adéquate à proposer aux élèves

Par exemple :

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Les enjeux de la géométrie

Notre quotidien est rempli de sollici-tations qui nous renvoient à des con-naissances liées au domaine de la géo-métrie : lire une carte, repérer un trajet, mesurer des distances, évaluer des grandeurs, faire un plan…

Dès leur plus jeune âge, les élèves appréhendent l’espace à travers leurs découvertes motrices : monter, descen-dre, passer d’un endroit à un autre, se repérer dans l’école, courir longtemps pour aller plus loin, courir vite mais moins loin… Ils manipulent les objets avec une précision croissante : faire un puzzle, encastrer un cube dans un autre, construire une maison en lego, démonter et remonter un objet… C’est à travers ces expériences que se cons-truisent des représentations, des repé-rages, une familiarisation avec les for-mes et les grandeurs…

Le champ de ces expériences est pré-pondérant et trace déjà le chemin du raisonnement : chercher, essayer, tester, anticiper, justifier, prouver, valider…

Lismont et Rouche1 en font l’analyse suivante : « Assembler et construire sont des modalités d’une pensée géo-métrique qui se manifeste d’abord dans l’action. »

Il faut donc vivre la géométrie avec ses mains, sa tête, son corps et ce, dès la maternelle.

La géométrie à l’école maternelle

Les classes maternelles sont dotées de matériels pédagogiques : puzzles, jeux de constructions, blocs logiques, jeux d’encastrement, jeux de plateau avec déplacement sur échiquier, etc. Les connaissances sollicitées visent à la structuration de l’espace et plus parti-culièrement le « méso-espace2 ».

Au fur et à mesure que l’élève gran-dit, les manipulations disparaissent peu à peu au profit des activités papier/crayon/fichier. C’est l’espace feuille qui est alors privilégié, le « micro-es-pace3 ».

VIVRE L’ESPACE ET LA GÉOMÉTRIE !

La géométrie semble être la mal-aimée de l’enseignement des mathématiques. Pourtant, on s’ac-corde aujourd’hui à souligner le rôle fondamental de cet enseignement qui contribue à la formation de la pensée scientifique. Alors, comment aborder la géométrie dès la maternelle ?

Parfois, ces pratiques arrivent bien trop vite et sont données dans la pré-cipitation, c’est-à-dire sans activités de repérage, de mise en situation de recherche dont le sens est identifié. Pourtant, il est possible de poser des situations problématisées avec des objets mathématiques permettant de faire de la géométrie dès la mater-nelle.

Un outil intéressant

Le matériel Polydron4 se compose de polygones pouvant s’articuler pour réaliser des polyèdres.

C’est un matériel attractif et évolutif, facilement utilisable seul ou en grand groupe, à presque tous les niveaux de l’école primaire. Un inconvénient néanmoins : il est coûteux 5.

• Les élèves s’engagent dans des acti-vités ludiques d’assemblage, de cons-tructions, de destructions et de recons-tructions motivantes en elles-mêmes, en deux ou en trois dimensions. Pour créer un objet en 3D, ils réalisent des actions telles que tourner, retourner, pivoter, déplacer, superposer, ajuster. Ils vont ainsi opérer des va-et-vient es-pace/plan et concrétiser leur pensée par la réalisation d’un polyèdre.

• L’enseignant, par ses observations, ses interventions et ses suggestions, mène les élèves vers des activités de tri, de classement, vers des problèmes de construction, vers de nouveaux questionnements et de nouveaux pro-blèmes à résoudre.

• Les activités sont propices aux échanges entre pairs ou avec l’ensei-gnant. Les consignes introductives doivent être claires et précises à cha-que phase.L’appareil photo est un complément très utile. La photo permet de restituer un objet en 3D dans le plan et sous différents points de vue. C’est aussi la mémoire vivante de la classe et du tra-vail de recherche des élèves.

Quelques exemples de séances

- Découvrir et s’approprier le ma-tériel : plusieurs séances finalisées par une exposition, des tris de plus en plus pointus, suivant des critères mathématiques.- Réaliser un polyèdre sur plusieurs séances avec des variantes évoluti-ves ; réaliser un polyèdre différent de ceux exposés.- Décrire et nommer un polyèdre (cube, pyramide) par un jeu du por-trait, un jeu de Kim…- Nommer les polygones qui le cons-tituent (carré, triangle, rectangle, losange).- Distinguer un carré d’un triangle.- Utiliser les propriétés des polygo-nes.- Comparer des polyèdres : le plus haut, le plus long, le plus gros ou celui qui est fait avec le plus petit nombre de pièces, celui qui prend le plus ou le moins de place.- Utiliser un vocabulaire approprié.

Anne BERTOTTO,conseillère pédagogique à Morangis

1. LISMONT, L., ROUCHE, N., Construire et représenter. Un aspect de la géométrie de la ma-ternelle jusqu’à 18 ans, CREM, Nivelles, 1999, Belgique.2. BOULE, F., Espace et géométrie pour les enfants de trois à onze ans, CEDIC, 1979.Meso-espace : espace accessible à une vision glo-bale. Le sujet est à l’intérieur de l’espace ; il peut s’y déplacer pour observer selon différents points de vue (la classe, la cour de l’école).3.Micro-espace : espace proche du sujet. Il peut voir, toucher et déplacer les objets (la table de l’élève).Macro-espace : espace accessible seulement à des visions locales. Le sujet est à l’intérieur de l’es-pace et doit coordonner des informations partielles (le quartier, la ville, la Terre).4. Polydron est une marque déposée en vente dans divers établissements.5. Il est possible de mettre en place le même type de démarche avec des « Duplo » de base (4, 6, 8, 10 trous).

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ÉVEILLER AUX SCIENCES L’ÉLÈVE DE GRANDE SECTION

À l’école maternelle La Fontaine d’Athis-Mons, faire des sciences est une réalité qui implique élèves et enseignantes. Peut-on parler de démarche scientifique ou simplement d’éveil aux sciences ? Voici une mise en œuvre concrète pour approfondir cette question.

La mise en place d’un enseignement scientifique pour les classes de gran-de section s’est faite grâce à la colla-boration de l’équipe pédagogique au complet. L’implication des collègues de petite section, de l’animateur sou-tien REP et des enseignantes de gran-de section a permis l’encadrement de groupes réduits de douze élèves maximum. Ces petits effectifs favori-sent les expérimentations. Le maître peut répondre aux sollicitations des élèves chaque fois que cela est néces-saire et leur venir en aide individuel-lement.

La tâche de l’enseignant est d’éveiller la curiosité de l’enfant et de susciter son questionnement. Il doit savoir s’effacer, observer, relancer. Il doit toujours partir des représentations des élèves, sinon il court le risque d’être en décalage avec les attentes de l’élève en donnant les réponses à des questions qui n’ont même pas émergé.

Organisation

• Une enseignante est responsable du projet scientifique mis en place en concertation avec l’équipe. Elle se charge de l’achat du matériel (budget de l’école), de sa gestion (renouvel-lement et entretien), de la recherche documentaire, de l’élaboration et du contenu des séances et de la finalisa-tion du projet avec les élèves.• La mise en œuvre de séquences se fait sur six à sept séances de 45 à 60 minutes par semaine, avec le même groupe d’élèves. Ainsi tous les élèves de grande section sont partie prenan-te du projet à un moment donné de l’année.• La préparation et la mise en place du matériel utilisé lors des différen-tes séances d’apprentissage sont im-portantes. L’école dispose d’un lieu spécifique qui permet de centraliser le matériel, de stocker les jeux cons-truits par les élèves tout au long de l’année scolaire et de les conserver en bon état pour la fête de l’école.

• Un cahier d’expériences individuel permet de garder une trace des com-pétences travaillées lors des séances et des connaissances acquises en fin de séquence. Il contient des extraits de documents scientifiques, des sché-mas et des représentations de l’élève, des écrits rédigés collectivement à partir de dictées à l’adulte. On peut y faire référence à tout moment pour revenir sur un point déjà débattu, structurer ou consolider une notion précise. Le cahier d’expériences se construit et s’enrichit à chaque séan-ce. Il est aussi le support d’échanges avec le groupe classe et avec la fa-mille.

Déroulement

Un des domaines d’étude choisis est l’électricité. Ce travail est finalisé par la construction de jeux et l’animation d’un stand lors de la fête de l’école qui se déroule au mois de juin.

Lors de la conception des jeux, les élèves sont amenés à résoudre un pro-blème : comment valider les réponses données, de façon simple et rapide ? On peut faire intervenir un montage électrique classique grâce auquel l’ampoule s’allume si la réponse est correcte ; lorsque l’ampoule ne s’al-lume pas, on doit proposer une autre réponse.

Ce dispositif permet de mettre en place deux types de jeux : Questions-réponses 1 et La main qui tremble 2.

Les premières traces écrites des ex-périmentations apparaissent dans le cahier d’expériences ; elles sont lé-gendées et commentées après une ré-flexion menée collectivement par les élèves et l’enseignante.

Les élèves manipulent, observent, montent et démontent les éléments ou les circuits réalisés à chaque séan-ce. Ainsi des notions nouvelles s’affi-nent, des hypothèses sont confirmées ou invalidées à partir d’autres inves-tigations.

La démarche expérimentale favo-rise le travail de coopération entre les élèves car il faut bien être deux pour mettre bout à bout et manipu-ler les fils électriques, les ampoules, les douilles, les pinces à dénuder et autres outils. Elle permet à chaque élève de progresser dans son langage de communication : expliquer ce que l’on fait, décrire ce que l’on observe et argumenter pour convaincre son camarade.

En conclusion

Dans ces moments importants de manipulations et de réalisations de montages avec le droit à l’erreur, les élèves acquièrent un savoir-faire (couper, dénuder, visser, serrer, etc.) en même temps qu’ils s’approprient de nouvelles connaissances. Ils dé-veloppent leur curiosité et aussi leur sens critique, ils font preuve d’initia-tive et de comportement citoyen en gérant la maintenance des jeux mis à leur disposition dans les classes en fin d’année scolaire.

La fête de l’école, moment fort pour les élèves, a donné une dimension supplémentaire à ce projet avec le partage de moments privilégiés avec les familles.

Éveiller l’élève, valoriser l’enfant et construire le futur citoyen, voilà trois finalités que ce travail autour des sciences nous a permis d’atteindre.

Sylvie MAILLARD et Monique MARTEAU,

enseignantes à l’école maternelle La Fontaine d’Athis-Mons

1. Jeu consistant à associer une réponse à une ques-tion, lorsque l’association est validée une ampoule s’allume (ou un signal sonore retentit).2. Jeu consistant à faire circuler un anneau sur un fil de fer tordu. Lorsque l’anneau touche le fil un signal sonore retentit.

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APPRENDRE À LIRE… LA PLACE DE LA GRANDE SECTION

Apprendre à lire est un acte long et complexe qui recouvre une série de démarches indispensables. Un conseiller pédagogique nous présente différentes pistes concrètes à explorer, en référence aux documents d’accompagnement des programmes, « Le langage à l’école maternelle ».

En maternelle, selon le vécu culturel et social des élèves, selon le moment, se-lon la situation, selon ses propres choix pédagogiques, l’enseignant peut privi-légier indifféremment l’un ou l’autre des aspects de l’apprentissage de la lecture (recherche de sens, identifica-tion, anticipation, déchiffrement,…), mais surtout, sans occulter ou oublier les autres. Il se doit de proposer des si-tuations ouvertes, multiples et variées permettant à chaque élève de découvrir la multiplicité de ses possibilités d’ap-prentissage, la variété des entrées dans le monde de l’écrit. Par une action in-dividualisée et des situations différen-ciées ensuite, il doit l’accompagner à choisir librement son propre chemin et à construire lui-même son savoir-lire, par la découverte du sens et progressi-vement du mécanisme du code.

Cette rencontre avec l’écrit dans un milieu stimulant et son utilisation dans des activités quotidiennes variées, fon-dées sur le plaisir ou le besoin de com-muniquer, vont permettre à l’élève, par sa prise de conscience de l’acte de lire, de découvrir et développer ses capa-cités de lecteur dans des situations de réception ou de production autonome d’écrits individuels. Il confirmera ainsi son entrée dans l’apprentissage de la lecture.

Faire de la classe un milieu riche d’écrits

Pour le petit enfant, l’écrit existe comme objet visuel du monde. L’éco-le maternelle favorise la compré-hension de sa nature spécifique ; elle provoque la rencontre avec des « sup-ports d’écrits » variés, avec des tex-tes qui ont des finalités et des formes différentes…/…elle construit chez les élèves des attitudes de « chercheurs de sens »…/… (p66) 1

• Des écrits « utiles », pour gérer le temps et l’espace, pour bien vivre en-sembleDes petites phrases clés, écrites en script et placées dans la classe sans dessin ni pictogramme :« Chut… Dans la bibliothèque, je ne fais pas de bruit. » « Dans la cuisine, on joue à 4. » « Après la peinture, je me lave les mains. » etc.

• Des écrits « outils », pour travailler, pour se souvenir, pour communiquer

- Des listes de mots illustrés ou ac-compagnés de dessins ou pictogram-mes qui ont avant tout une fonction d’outils, comme les imagiers ou les modes d’emploi illustrés. Leur but est de confectionner un « vivier » de vocabulaire suffisamment important sans pour autant « noyer » les élèves dans un bain d’écrits trop large qui rendrait son utilisation impossible : tableau des consignes, répertoire de signes graphiques, « trombinos-cope » de la classe, etc.

- Des étiquettes sur le matériel de rangement des différents outils disponibles pour les activités quoti-diennes : pinceaux, craies, etc.

- Des outils pour communiquer, prévoir, se souvenir, organiser, pla-nifier, utilisés au quotidien pour gé-rer l’espace et le temps : listes d’élè-ves, calendrier, emploi du temps, etc.

- Des écrits pour garder trace et se souvenir, se complétant au fil du temps : recettes, affiches, courriers reçus, textes produits en classe…

• Des écrits « culturels », pour le plaisir de lire et d’écouterUne bibliothèque de classe riche et utilisée au quotidien : contes, histoi-res, albums, documentaires, etc.

Utiliser sans cesse ces écrits, les faire vivre

Les élèves découvrent dans un premier temps que l’écrit est une trace qui peut être convertie en langage oral : qu’il s’agisse de mots affichés…/… ou de messages qu’il faut transmettre aux parents, les signes peuvent être décodés, le maître en donne la preuve en permanence…/…cette découverte de la nature de l’écrit conduit les élèves à prendre conscience qu’il y a un message, un sens dans tout écrit. (p. 66)

Pour être porteurs de sens et facteurs d’apprentissages, ces écrits doivent vivre et être utiles. Mémoire col-lective et commune de la classe, ils sont outils indispensables, preuves du message ayant du sens, garants de la permanence de l’écrit, à condition toutefois d’être utilisés au quotidien dans des situations correspondant à un besoin ou un désir réel. A chaque occasion (respect des règles, choix de matériel, conduite de projet,…), la lecture des écrits correspondants et utiles est faite soit par l’enseignant, soit par l’élève.

D’autres activités ou jeux condui-sent les élèves à utiliser ces écrits de manière autonome.

- Des fichiers « Je décore avec… » « Je fais les courses… » « Je cuisi-ne… » etc. : des fiches sur lesquelles sont écrites des consignes portant sur le choix des graphismes, couleurs ou scripteurs, des listes de courses du coin épicerie, etc.

- Des coloriages prétexte à lire « Je lis pour colorier… » : les zones sont marquées du nom de la couleur de-mandée.

- Des poésies dont le texte est tron-qué « Il manque des mots… » : les

Pour apprendre, l’élève doit confé-rer du sens à ce qu’il fait ; s’il sait ce qu’il fait, ce pourquoi il le fait, l’élève est conscient de son appren-tissage, il « s’apprend »…

Pour apprendre, l’élève doit résou-dre des problèmes authentiques ; s’il fait « pour de vrai », s’il se décons-truit pour se reconstruire, l’élève est acteur de son apprentissage, il « s’apprend »….

L’enseignant doit être un gestion-naire des apprentissages de l’élève ; s’il organise des situations problé-matisées et finalisées, s’il favorise les conditions de l’apprentissage, l’élève « s’apprend »…

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mots manquants sont disponibles dans les écrits de la classe.

Ainsi, quotidiennement, au cours d’activités de classe ou de groupe restreint, phases de systématisation et de mise en commun des savoirs, les élèves sont amenés à interroger ces écrits authentiques et nécessaires à la vie quotidienne. Ils sont également invités à dire et partager leur expé-rience de l’écrit, à expliciter leurs stratégies, à s’approprier éventuelle-ment celles des autres.

Qu’elles soient individuelles ou collectives, menées de manière autonome ou avec l’aide de l’en-seignant, ces situations de lecture ont pour objectif la sollicitation et l’utilisation des écrits dispo-nibles. Elles visent également la prise de conscience par l’élève des premières grandes caractéris-tiques de l’écrit et le développe-ment de premières compétences de lecteur.

Donner du sens à de nouveaux écrits

Dès l’école maternelle, les enfants rencontrent des écrits dont ils vont progressivement découvrir la fonc-tion et le fonctionnement, d’abord parce que le maître y a recours et en donne lecture, ensuite en en faisant une exploration avec leurs propres moyens. (p67)La prise de conscience de la seg-mentation de l’écrit en mots séparés les uns des autres, segmentation qui ne correspond pas au découpage de l’oral, est une étape essentielle dans l’appréhension de l’écrit. L’objectif n’est pas en soi de faire retenir des mots mais de faire construire le prin-cipe de correspondance. (p 98)…le maître, en montrant de la main les mots d’un texte qu’il lit à haute voix, renforce la liaison entre les mots écrits et les unités correspon-dantes de la chaîne orale. (p98)

La fréquentation régulière des nom-breux écrits de la classe permet à la majorité des élèves de les connaître et de les utiliser. Capables de retrou-ver des mots, ils doivent maintenant

prendre conscience qu’ils peuvent, à l’aide de ces écrits connus, agir seuls sur des écrits nouveaux et inconnus pour en dégager le sens.

Voici quelques exemples.- Le mot mystère : un mot nouveau issu du bagage de la classe est affi-ché chaque matin ; les élèves doivent le retrouver.- L’histoire mystère : une phrase nommée « histoire », constituée de mots issus des écrits de la classe est présentée sur des étiquettes carton-nées de grand format. Les élèves s’essaient à retrouver et à lire l’his-toire du jour.Au cours de l’année, on travaille progressivement sur :• des phrases simples, identiques à celles de la classe ;• des histoires difficiles, différentes de celles déjà rencontrées mais tou-jours constituées avec les mots issus des écrits utilisés fréquemment, sor-te de panachage des phrases types de la classe ;• des histoires plus difficiles incluant des mots prélevés dans des écrits moins usuels, dans des lieux dif-férents, dans des textes plus longs (poésies, recettes,…) ou encore dans les livres de la bibliothèque.

Une différenciation peut être envi-sagée pour les élèves plus perfor-mants :- Le message secret : enveloppe no-minative contenant un message indi-vidualisé à lire tout seul ;- La devinette du jour : phrase ins-crite au tableau et suivie d’une ques-tion ;- Le tagagné : question inscrite au tableau, dont la réponse, à chercher dans un livre de la bibliothèque est à écrire sur un bulletin.

Ainsi, l’élève comprend et utilise le recours aux écrits disponibles et con-nus pour y puiser les éléments né-cessaires à la réception de nouveaux écrits. Il apprend à décontextualiser puis recontextualiser pour donner du sens.

Produire des écrits de façon autonome

« Les ressemblances à l’oral et à l’écrit, les dits du maître sur son ac-tivité d’écriture permettent aux en-fants de comprendre que les rapports entre oral et écrit sont régis par un code.…/…plusieurs apprentissages s’installent : ceux qui fondent des attitudes réfléchies de lecteur, ceux qui concernent la compréhension des textes, ceux qui fixent les premiers acquis en matière de code. (p. 66)

La production d’écrits est une situa-tion d’énonciation qui présente des particularités par rapport aux situa-tions langagières vécues par l’enfant jusqu’alors. Pouvoir dire quelque chose à quelqu’un qui n’est pas pré-sent (le destinataire de l’écrit) et se faire comprendre suppose de donner suffisamment d’éléments pour rendre explicite le message. En ce sens, le langage à produire en vue d’un écrit s’apparente au langage d’évoca-tion…/… (p. 74)

Permettre aux élèves de produire de l’écrit avant d’avoir acquis la norme orthographique, même si les produc-tions ne répondent pas à nos critères habituels de lisibilité, stimule des in-terrogations sur le fonctionnement de l’écrit et, en même temps, renseigne sur leurs savoirs et leurs représenta-tions. (p100)

• L’atelier de production d’écrits « Je fais des histoires… »Préparation matérielle :- étiquettes de petit format où sont imprimés en script les mots connus et les plus fréquemment utilisés dans les écrits de la classe ;- casiers ou petits tiroirs dans lesquels sont entreposées ces étiquettes photo-copiées en grande quantité et rangées par ordre alphabétique avec le mot « modèle » sur la face du tiroir ;- feuilles sur lesquelles sont tracés des rails de largeur équivalente à celle des étiquettes-mots proposées, pour faci-liter l’alignement et le collage ;

Lire, c’est un acte vrai de commu-nication, motivé par le besoin et le plaisir.Lire, c’est rechercher pour le com-prendre, le sens d’un message écrit.Lire, activité de réception, est étroitement lié à écrire, activité de production.Lire est un acte qui a commencé bien avant l’école.

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LES AVENTURES DE PATAFIL, TOURNESOL ET VOL-AU-VENT

1. Qu’apprend-on à l’école maternelle ? Programmes 2002, Sceren/CNDP, 2002, p.113.

- bandelettes vierges, de même lar-geur que les étiquettes, pour « écri-re » les mots extérieurs au bagage disponible ;- boulettes de pâte adhésive reposi-tionnable pour permettre aux élèves de construire, déconstruire et — re-construire leurs « histoires » et de se déplacer avec leur feuille, sans dom-mage ;- colle, pour fixer « l’histoire » termi-née et validée par la lecture à l’ensei-gnant ;- cahier individuel enfin, pour collec-ter l’ensemble de ses productions.

Déroulement :- L’élève anticipe tout ou en partie ce qu’il veut produire, il crée ou imagine approximativement et mentalement une « histoire » qui a du sens dans le but de la transmettre.- Il la reconstitue à l’aide des mots

dont il a besoin en les cherchant dans les écrits connus, en les décontextua-lisant dans ces écrits pour les recon-textualiser dans son propre écrit. Il utilise l’écrit des autres, l’écrit com-mun pour « fabriquer » un écrit indi-viduel et singulier. « J’ai besoin du mot « livre », je sais qu’il est dans la bibliothèque, je le repère dans l’écrit connu, je le cherche dans les tiroirs, je vérifie éventuellement par compa-raison, je le place sur ma feuille. ». Si l’étiquette-mot est absente des ca-siers, l’élève « copie » lui-même le mot dont il a besoin, « fabriquant » ainsi sa propre étiquette. Si le mot re-cherché n’est pas dans la classe, on l’aide à l’écrire, par une approche du code.- Une fois terminée, « l’histoire » est lue soit par l’élève, soit par l’ensei-gnant. La réaction immédiate (rire pour une histoire drôle, crainte pour

une histoire qui fait peur,…) est déjà pour l’élève la confirmation de la por-tée de son action et de son pouvoir sur l’écrit. L’étonnement ou l’incom-préhension sont aussi éventuellement la preuve que « l’histoire » n’est pas recevable. L’élève prend alors réel-lement conscience de ses erreurs et peut, par le sens ou par une première approche du code, rectifier à loisir les étiquettes placées provisoirement.- Enfin, l’écrit validé par le maître est collé définitivement.

Jacky DELARGE,conseiller pédagogique en EPS

à Brunoy

1. Les textes présentés en « rose, italique » sont extraits des documents d’accompagnement des programmes, Le langage à l’école maternelle, Sceren/CNDP, 2006.

Les différentes activités physiques font vivre aux enfants de l’école maternelle des « expériences corporelles » particulières. Les intentions poursuivies, les sensations et les émotions éprouvées sont différentes selon les types de milieux et d’espaces dans lesquels elles sont rencontrées 1… »

C’est en partant de ces recommandations institutionnelles que les enseignants de l’USEP 91 ont organisé des activités motrices s’appuyant sur une histoire inventée.

SUR LES CHEMINS DE LA GYMNASTIQUE

L’USEP 91 propose des ateliers permettant aux élèves de se déplacer, tourner et voler. Les activités s’ap-puient sur une histoire relatant les aventures de trois personnages Patafil, Tournesol et Vol-au-Vent.

Chaque atelier, induisant une activité motrice est présenté à partir d’un extrait des aventures de ces

trois héros et comporte une fiche technique spécifique. Dès leur arrivée, les élèves s’assoient près du texte que l’adulte va leur lire. Puis, à tour de rôle, ils réalisent les activités demandées et proposent des réponses motri-ces adaptées.

La durée d’évolution d’un groupe sur un atelier ne dépasse pas huit minutes. Ensuite, les élèves se ras-

semblent et sur un extrait musical, se déplacent en direction d’un nouvel atelier. Ils évoluent ainsi sur huit ateliers. À la fin des activités, tous les élèves se retrouvent pour écouter la fin de l’histoire. Celle-ci est remise à chaque enseignant en fin

de rencontre.

(Suite page 23)•••

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ASH : VRAIMENT DIFFÉRENT(S) ?

Enseigner dans le « spécialisé » signifie devoir exercer dans une pluralité d’établissements, être confronté à divers handicaps. Comment dans ce contexte particulier, guider les élèves dans leurs apprentissages ?

L’enseignant rencontre des enfants ayant des histoires douloureuses, des parcours chaotiques, des échecs répé-tés. Ses partenaires sont nombreux, d’horizons professionnels bien diffé-rents du sien. Le paysage s’annonce donc complexe1 et le voyage2 ma-laisé.

Sept axes de réflexion nous parais-sent définir le cadre de travail de l’enseignant spécialisé.

L’enfant dans sa globalité

Le besoin de toute personne handica-pée est d’abord d’être vue sous l’an-gle de sa personne non sous celui du handicap, autrement dit sous l’angle de ses potentialités, de ses ressour-ces, non de ses difficultés.

Rappelons la parabole indienne : Quatre aveugles rencontrent un ani-mal ; chacun en touche une partie. Le premier prétend avoir touché une très grande feuille, le second une colonne, le troisième une jarre, le dernier un serpent. Voilà ce que devient un élé-phant quand on considère son oreille, sa patte, son ventre et sa trompe sé-parément.

Ce n’est pas le symptôme qui doit être premier car il risque de nous entraîner dans la confusion, c’est la personne.

Le respect et l’éthique

Notre devoir d’éducation ne s’ac-compagne d’aucun devoir de l’autre à notre égard. Nous avons tout à met-tre en œuvre pour permettre les ap-prentissages. Mais force est de faire avec ce petit autre : nul ne peut être contraint à apprendre.

La clinique de l’observation

« Tout est langage » cette image de Françoise Dolto nous rappelle que nous devons être à l’écoute de cha-que élève. Nous devons tenter de sai-sir ce qu’il nous dit au travers de ses actes et de sa parole. L’observation

doit nous guider dans la compréhen-sion de ses stratégies d’apprentissage et nous devons en faire un élément constitutif de son projet personnel de scolarisation.

Le droit à la réussite, à l’évaluation

C’est le sens profond des program-mes de 2002 et de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances. L’élève doit pouvoir mesu-rer chacun de ses progrès pour éva-luer le trajet qu’il lui reste à parcourir en se référant à son projet personna-lisé de scolarisation.

Le projet personnel de scolarisation

C’est un plan de travail à mettre en œuvre pour répondre aux besoins particuliers de chaque élève. D’une façon générale, les enfants porteurs de handicap présentent des profils dysharmoniques : ils peuvent être très performants dans certains domaines et très en difficulté dans d’autres. Dès lors il s’agit de travailler, à leur niveau, dans chacune des sphères af-fective, sociale, cognitive et instru-mentale3.

Ce projet personnel de scolarisation s’inscrit dans le projet de groupe in-séré dans le projet d’école. Cela si-gnifie que l’enseignant doit croiser plusieurs réalités : l’individu, le grou-pe classe, l’école ou l’établissement. Certes il est long ce chemin qui mène au projet nous dit Voltaire. Mais nous ne voyageons pas seuls.

L’espace partenarial

Le tout premier partenaire, inutile de le rappeler, est l’élève lui-même. Ce-pendant n’oublions pas sa famille et toute personne à ses côtés qui l’aident à être capable d’apprendre : « l’en-fant humain doit devenir ce qu’il doit être » 4. L’éducation est le fait de chacun des partenaires. En outre,

cette pluralité des approches protège du dogmatisme.

Les apprentissages

Les élèves en situation de handicap n’ont pas, ou ont assez peu accès à la symbolisation : vérité ou postulat ? Dès lors, que signifie apprendre ? L’enseignant doit rester très vigilant pour mobiliser ses élèves et faire émerger leur point de vue, leur pen-sée.

Le projet doit être construit avec souplesse ; des réajustements sont toujours nécessaires. Le travail sur les stratégies d’apprentissage reste le point d’ancrage pour tous. C’est bien là le point commun à toute pédago-gie.

En conclusion

Ce voyage est-il navigation à vue ? Certainement pas. Un enfant particu-lier nous est confié, dans toutes ses di-mensions, « l’enfant apprenant, mais aussi l’enfant désirant, se socialisant, pensant ». Gageons alors que notre modeste contribution lui permette un parcours aujourd’hui insoupçonné « d’un enfant allant devenant »5.

Catherine FOUCAULT,Marie-Ange JOURDAN,

conseillères pédagogiquesde la circonscription ASH2

1. MORIN, Edgar, Méthode, Ethique, Seuil, 2004.2. SEKNADJE-ASKENASI, José, Elèves en diffi-culté : les aides spécialisées à dominantes pédago-giques, CNEFEI.3. BONJOUR, Pierre, LAPEYRE, Michèle, Inté-gration scolaire des enfants à besoins spécifiques, Eres, 2000.4. REBOUL, Olivier, La philosophie de l’éduca-tion, PUF 9e édition, 2001.5. DOLTO, Françoise, Tout est langage, articles et conférences 3, Gallimard 1995.

Dossier

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UNE MEILLEURE RECONNAISSANCE DES DROITSDES PERSONNES HANDICAPÉES

La loi du 11 février 2005 1, « pour l’égalité des droits et des chances, pour la participation et la ci-toyenneté des personnes handicapées » et les décrets d’application parus à ce jour renforcent les droits des personnes en situation de handicap et notamment ceux relatifs à l’obligation scolaire.

La précédente loi datant de 1975 ne mentionnait pas l’obligation scolaire mais seulement l’obligation d’éduca-tion.

Cette nouvelle loi est fondée sur des principes généraux de non-discrimi-nation. Elle s’organise autour de trois principes clés :- garantir aux personnes handicapées le libre choix de leur projet de vie grâce à la compensation des consé-quences de leur handicap et à un re-venu d’existence favorisant une vie autonome digne ;- permettre une participation effecti-ve des personnes handicapées à la vie sociale grâce à l’organisation de la cité autour du principe d’accessibilité généralisé, qu’il s’agisse de l’école, de l’emploi, des transports...;- placer la personne handicapée au centre des dispositifs qui la concer-nent en substituant une logique de service à une logique administrative. À ce titre est créée une Maison dépar-tementale des personnes handicapées qui constitue un « guichet unique » associé à une logique de proximité.

Une nouvelle architecture institutionnelle

• La Maison départementale des personnes handicapées (MDPH)Une MDPH est créée dans chaque département. Elle est placée sous la tutelle administrative et financière du président du conseil général. Elle est administrée par une commission exécutive qui exerce des missions d’accueil, d’information, d’accom-pagnement et de conseil des person-nes handicapées et de leur famille. Ainsi, la loi pose clairement le prin-cipe que toute personne handicapée et sa famille doivent pouvoir, en un même lieu, accéder à l’ensemble de leurs droits. Il ne doit pas s’agir d’un lieu virtuel mais bien d’un lieu phy-sique permettant de répondre à cet objectif. Dorénavant, la logique d’un

« guichet unique » s’associe à celle de proximité.

Ainsi, cette MDPH est l’organe cen-tral dans la gestion du service public local du handicap. Par ailleurs, elle met en place et organise le fonction-nement de plusieurs instances.

• La Commission des droits et de l’autonomie des personnes handica-pées (CDAPH)La CDAPH prend les décisions re-latives à l’ensemble des droits de la personne en matière d’attribution des prestations financières et d’orientation scolaire. Cette nouvelle commission poursuit l’élaboration du parcours de toute personne handicapée et rend ainsi cadu-ques les compé-tences anciennes de la CDES 2 et de la COTOREP 3. Elle a pour mission d’at-tribuer la carte d’in-validité, de verser les différentes pres-tations spécialisées qui comprennent des compensations financières, tech-niques et humai-nes ainsi que la prestation de com-pensation du handicap (PCH). Par ailleurs, c’est elle, dorénavant, qui décide de l’orientation scolaire des élèves vers les établissements spécialisés et les dispositifs d’inté-gration CLIS 4 et UPI 5. Quatre types de scolarisation sont mentionnés dans les textes en vigueur : dans l’école de référence, dans un dispositif collec-tif de l’Éducation nationale, dans les établissements spécialisés et parfois à domicile.

La CDAPH est l’instance unique de décision ouvrant les droits des per-sonnes handicapées en matière de prestations financières, d’orientation scolaire et de parcours de formation.

• L’équipe pluridisciplinaire d’éva-luationL’équipe pluridisciplinaire d’évalua-tion apprécie les besoins de compen-sation de la personne handicapée et son incapacité permanente. Pour con-duire cette évaluation, elle s’appuie notamment sur les observations rela-tives aux compétences et aux besoins de l’« enfant-élève » réalisées par les membres de l’équipe de suivi de

la scolarisation. À l’issue de cette analyse, elle élabore un plan de compensation

dont fait par-tie le projet personnalisé de scolarisa-tion (le PPS) pour l’élève h a n d i c a p é

qu’elle pré-sente en CDAPH. Celui-ci définit les

moda l i t é s d e déroulement de la

scolarité et les actions pédagogiques, psychologi-

ques, éducatives, sociales, médicales et paramédicales répondant aux besoins par-ticuliers de l’élève. Les pa-

rents sont étroitement associés à l’élaboration du projet personnalisé de scolarisation ainsi qu’à la décision prise en accord avec la CDAPH. À défaut d’accord, des procédures de conciliation sont mises en œuvre, sans préjudice du droit de recours des parents. • L’équipe de suivi de la scolarisa-tionL’équipe de suivi de la scolarisation est composée de professionnels de terrain. Elle concourt à la mise en œuvre du PPS. Elle assure le suivi du projet dans les classes et les éta-blissements spécialisés et peut le cas

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échéant, proposer des adaptations à la CDAPH.

Un enseignant spécialisé, membre de cette équipe, exerce les fonctions de « référent » auprès de chacun des élèves handicapés afin d’assurer, sur l’ensemble du parcours de formation, la permanence des relations avec l’élève, ses parents et l’équipe éduca-tive de l’école.

Ainsi, les instances et les modalités d’orientation et de suivi de la scola-rité des élèves handicapés s’en trou-vent fondamentalement modifiées.

Cette nouvelle architecture fait dis-paraître les compétences des ancien-nes CCPE 6.

Un droit nouveau à la scolarité pour tous les enfants 

handicapés 

• Une nouvelle réglementationLa loi du 11 février 2005 dans son ar-ticle 19 édicte une nouvelle règle de scolarisation :

« Tout enfant, tout adolescent pré-sentant un handicap ou un trouble invalidant de la santé est inscrit dans l’école ou dans l’établissement [spé-cialisé]… le plus proche de son do-micile, qui constitue son établisse-ment de référence. »

Ainsi, le parcours de formation de l’élève handicapé s’effectue désor-mais en priorité en milieu ordinaire, dans son établissement scolaire de référence ou dans un établissement spécialisé (et parfois pour des pério-des transitoires, au domicile). Dans ce dernier cas, sa scolarité se déroule au sein d’une unité d’enseignement, identifiée par un projet pédagogique s’intégrant au projet de l’établisse-ment. Il peut aussi partager sa scola-rité dans cette unité et dans une école ordinaire proche. Les modalités de sa scolarité sont définies dans son projet personnalisé de scolarisation ou dans son projet d’accueil individualisé si les aménagements peuvent être ap-portés par l’école sans qu’il soit né-cessaire de passer par la CDAPH.

Il s’agit véritablement d’une révolu-tion car dorénavant les enfants handi-capés qui étaient scolarisés jusque-là à titre subsidiaire, le sont aujourd’hui à titre principal. Ils se voient recon-naître le droit à une véritable exis-tence scolaire par le biais du premier acte fondateur de toute scolarité qui

est celui de l’inscription dans l’école de leur quartier.

De l’exception nous passons à la règle.

• De nouvelles perspectives Cette nouvelle reconnaissance scolai-re, pour tous les enfants handicapés va avoir des conséquences culturel-les, éducatives et sociales importan-tes. L’Éducation nationale se trouve au premier rang des acteurs qui vont contribuer à ces évolutions.

L’école de la République s’en trouve grandie par le formidable défi lancé à l’ensemble de ses acteurs. L’existen-ce de ce droit nouveau s’inscrit aussi dans la priorité nationale de l’égalité des chances pour tous.

Cette obligation de réussite de cha-cun s’accompagne d’un concept défi-ni par la loi : le projet personnalisé de scolarisation de l’enfant. Ce dernier prend en compte les besoins spéci-fiques de l’enfant handicapé pour le conduire vers cette réussite scolaire. En effet, c’est un être considéré en développement comme chacun et non pas carencé a priori, dont les conduites se construisent à partir de ses déficiences ou handicaps. On ne raisonne pas en terme de constat de retard mais en terme de réussite sco-laire.

À l’heure actuelle, de nombreux en-seignants accueillent déjà des élèves handicapés dans leur classe. Cette in-tégration scolaire réussie atteste de la part des acteurs, de leur volonté, ca-pacités et compétences mises en œu-vre pour répondre aux besoins spéci-fiques de ces élèves. Par ailleurs, ces équipes témoignent de l’importance de la qualité et richesse des relations humaines qui se nouent, au sein de l’entité scolaire, grâce à la présence de ces enfants.

L’école n’a plus à redouter ou à craindre la gestion de la grande hété-rogénéité de ses élèves.

• Le champ de l’adaptationPar ailleurs, la loi permet de distin-guer plus nettement le champ de l’adaptation de celui du handicap. En effet, les orientations pour le second degré concernant la difficulté scolai-re grave et persistante sont désormais décidées par une nouvelle commis-sion appelée la Commission départe-mentale d’orientation pour les ensei-gnements adaptés (CDOEA) qui rend

caduques les compétences de la CCSD 7. Elle a compé-tence pour orienter les élèves en EREA 8, LEA 9 et SEGPA 10.

Pour le premier degré les RASED 11

restent en place pour répondre à la difficulté scolaire et contribuent à l’élaboration des projets personnali-sés de réussite éducative (PPRE). Ce nouveau droit de scolarisation présente un progrès majeur incon-testable. Cependant, pour certains, sa mise en œuvre peut paraître difficile. Outre la nécessité de rechercher l’at-tribution de moyens supplémentaires ou le développement de formations nouvelles, c’est un véritable change-ment des mentalités qui doit s’opérer accompagné d’un travail sur l’exer-cice de la citoyenneté pour aboutir à un « vivre ensemble » nouveau.

N’oublions jamais que ces enfants handicapés ne sont pas des enfants comme les autres ; comme les autres ce sont des enfants.

Jean-François PINON-DAVIDIEN, ASH 2

1. La loi et les décrets d’application se trouvent sur le site : http://www.education.gouv.fr/

2. CDES : Commission départementale de l’éduca-tion spécialisée.

3. COTOREP : Commission technique d’orienta-tion et de reclassement professionnel.

4. CLIS : Classe d’intégration scolaire (1er degré).

5. UPI : Unité pédagogique d’intégration (2e de-gré).

6. CCPE : Commission de circonscription préélé-mentaire.

7. CCSD : Commission de circonscription pour le second degré.

8. EREA : Etablissement régional d’enseignement adapté.

9. LEA : Lycée d’enseignement adapté.

10. SEGPA : Section d’enseignement général et professionnel adapté.

11. RASED : Réseau d’aides spécialisées aux élè-ves en difficulté.

Voir égalementLa scolarisation en situation de

handicap, BLÉ91 n°36 :

www.ac-versailles.fr/ia91/ressour-

ces/ble/pdf/36.pdf

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QU’EST-CE QU’UN SESSAD ?

Le Service d’éducation spécialisé et de soins à domicile présente une approche singulière. Gérard Lamesa et Jean-Pierre Picard nous renseignent sur les spécificités et les missions de cette struc-ture d’aide à l’intégration scolaire…

Le SESSAD s’adresse à des adoles-cents et à des jeunes adultes se trouvant, malgré des potentialités intellectuelles et cognitives préservées, engagés dans un processus handicapant qui nécessite le recours à des actions conjuguées et à un accompagnement personnalisé.

Les spécificités d’action du SESSAD

Sa mission consiste à :- favoriser le maintien des intéressés dans leur famille ;- favoriser leur maintien ou préparer leur accueil en écoles et établissements scolaires, dans des dispositifs ordinai-res ou adaptés.

La spécificité du SESSAD est de se saisir de l’espace social ordinaire.

Soutenu par un accompagnement in-terdisciplinaire, articulé autour des in-terventions thérapeutiques, éducatives et pédagogiques, il tente d’élucider et de contrecarrer les processus d’exclu-sions de l’école et de la famille dont l’adolescent est à la fois la cause et la victime.

Le SESSAD intervient pour que les liens ne soient pas distendus, rompus, mais plutôt retravaillés, consolidés au moment où leur fragilisation s’amor-ce.

Mais il s’agit également de dépasser les représentations classiques que l’on peut en avoir, en offrant :- un service en « amont » (prévention, une prise en charge moins lourde) ;- un service de « suite » (postcure, sor-tie de dispositif spécialisé).

Le SESSAD développe une dimension authentiquement spécifique et compé-tente en matière de traitement des dif-ficultés psychologiques qui produisent la symptomatique comportementale.

Soutenir l’adolescent lors de sa con-frontation au monde passe par le sou-tien relationnel et psychothérapeutique dans la découverte de lui-même et de ses potentialités.

Les parents sont associés, replacés dans leurs prérogatives et amenés à

dégager des axes de progression per-sonnels vis-à-vis de la situation qui les fait souffrir. A ce niveau le travail avec les parents, l’école et les espaces de loisirs est primordial.C’est le lien avec les différents parte-naires (Education nationale, Justice, secteur psychiatrique, aide sociale à l’enfance…) associé au triptyque (thé-rapeutique, éducatif, pédagogique) qui donne sens et efficacité à l’action du SESSAD.

Gérard LAMESA, directeur des SESSADde l’institut thérapeutique éducatif

et pédagogique de ClairvalJean-Pierre PICARD, directeur du SESSAD

de Sainte-Geneviève-des-Bois

repenser le rapport entre leur enfant et son environnement.

Le SESSAD et l’école

Le rapport aux apprentissages s’attache à diminuer les phobies scolaires des élèves par une réassurance personnelle possible grâce à une pédagogie indivi-duelle de reprise de confiance en soi.

Le rôle d’un enseignant est avant tout d’aider un élève à développer ses capa-cités, à traiter les informations, à orga-niser ses connaissances, à réfléchir et à apprendre ; celui de l’enseignant du SESSAD est du même ordre. Toutefois, il se trouve face à des adolescents qui manifestent des troubles du comporte-ment et qui ont un rapport aux savoirs et à l’école particulièrement difficile, chaotique. Pour pouvoir apprendre, il faut entretenir un rapport de confiance aux représentants du cadre, à la deman-de scolaire, à l’autre d’une manière gé-nérale et à soi en particulier.

C’est autour de ces points que l’ensei-gnant du SESSAD doit justement agir. Plus qu’un travail de soutien, il a pour tâche essentielle de restaurer les liens que le jeune entretient avec l’école et les savoirs.

Membre à part entière de l’équipe du SESSAD, mais aussi de l’institution scolaire, l’enseignant a de ce point de vue un rôle clé : celui d’un accompa-gnateur scolaire qui redonne à ces jeu-nes un peu du goût d’apprendre.

Le rapport aux autres s’expérimente au travers d’activités éducatives conçues comme des médiations relationnelles qui produisent de la réflexion et de la distanciation.

Ces espaces d’action, de parole et de réflexion conduisent l’adolescent à s’interroger et par leurs effets conju-gués font naître chez lui la possibilité d’investir un travail sur lui-même.

C’est par l’expérimentation éduca-tive, les rééducations orthophoniques et psychomotrices, les prises en charge scolaires et les espaces psychothéra-peutiques que les adolescents peuvent

Pour en savoir plus :

Décret n° 2005-11 du 6 janvier 2005 fixant les conditions techniques d’orga-nisation et de fonctionnement des insti-tuts thérapeutiques, éducatifs et pédago-giques.

AIRE (association des instituts de réédu-cation), Intégration scolaire et insertion socioprofessionnelle, les éditions du Champ social, 2001.

ARAPI/CNEFEI, Enfants et adoles-cents atteints d’autisme : scolariser pour intégrer, éditions du centre natio-nal de Suresnes, 2000.

BOIMARE, S., L’enfant et la peur d’apprendre, Dunod, 1999.

GILLIG, Jean-Marie, Les classes inté-grées pour enfant trisomiques, Dunod, 1999.

RONDOLA, M./DESPOUX-GARBAYE, A.-M., Une expérience d’intégration de deux jeunes trisomiques dans une section BP restauration en lycée professionnel (Blanquefort). In La formation profession-nelle des jeunes présentant un handicap mental. – Séminaire national

UNAPEI, La scolarisation des enfants et des adolescents handicapés mentaux et ses spécificités. (2 tomes), Unapei, (Etudes et actes), 1999.

WEYL, Roger, Mobilisation en réseau : l’exemple d’un SESSAD, PUF, 2000.

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LES IMAGES À LA PAGE

Quel est le rôle des images dans la compréhension des albums de jeunesse ? Catherine Falvert, conseillère pédagogique départementale en arts visuels nous propose de privilégier une « entrée dans les albums » par les images.

S’il est un lieu où l’album illustré occupe une place privilégiée, c’est bien l’école maternelle. Mais parado-xalement, dans l’usage pédagogique que nous en faisons, nous privilé-gions l’histoire racontée par le texte sans explorer toutes les richesses de l’image. Durant des siècles, le texte était premier et les images venaient l’enluminer, « l’illustrer ». Les ima-ges étaient alors souvent redondantes. Aujourd’hui, le travail « en couple » d’auteur et d’illustrateur et l’avène-ment des auteurs-illustrateurs ont modifié les données du problème et obligent le lecteur à construire son histoire en prenant des indices à la fois dans le texte et dans l’image.Prenons deux exemples :- Léo Lionni dont les textes sont par-fois simplistes alors que l’image, qui n’est pas sans rappeler la peinture abstraite, est très polysémique ;- Philippe Corentin qui s’amuse à brouiller les pistes du lecteur en fai-sant se contredire texte et image, comme dans Plouf.

Étudier les images

Pour quoi faire ?• Pour formuler des hypothèses sur une histoire que l’enfant se fabrique. La confrontation des élèves devant une image pouvant donner des indi-ces différents sur le sens de la narra-tion permet un débat dans la classe, qui rappelle celui qui existe en face des « textes résistants ».• Pour reconnaître les outils et tech-niques employés par les illustrateurs : aquarelles, encres, crayons, collage, aquaforte 1, gravure sur cuivre, pho-tographie, lithographie… Les com-parer avec celles utilisées par les ar-tistes, en regardant des reproductions et les ranger ensemble dans le musée de classe. Les élèves sont très perspi-caces pour reconnaître les médiums, les outils, les supports utilisés par tel ou tel illustrateur. Citons l’exemple d’élèves de grande section, procé-dant à la découverte des images d’un

Comment faire ?Tout simplement !• En cachant tous les indices textuels et en invitant les élèves à regarder les couvertures. Celles-ci donnent des informations sur la technique graphi-que, caractéristique de l’unité de l’al-bum. Dans Le voyage d’Oregon de Rascal, illustré par Joos, l’utilisation mixte des fonds aquarellés et des pas-tels rappelle la palette de Van Gogh, d’ailleurs cité dans le texte. La cou-verture, plan cinématographique sur les personnages qui traversent un im-mense champ de blé, est en contraste complet avec le début de l’histoire et permet une émission d’hypothèses sur les personnages et sur leur quête.• En comparant les couvertures des différentes versions du même ouvra-ge, par exemple les Trois petits co-chons, qui donnent des informations sur les différentes morales possibles de l’histoire.• En repérant les éléments récurrents, dans un réseau d’albums d’un même auteur. Ainsi, avec Anthony Browne, on peut rentrer dans un univers sym-bolique peuplé de gorilles et de tissus écossais (qui lui rappellent son père), de bananes (dont il raffole) et de ciels (qu’il emprunte volontairement à Magritte).

En conclusion

Si la lecture des illustrations peut susciter des activités passionnantes à l’école maternelle, cette rencontre avec des objets culturels se doit d’être présente aussi à l’école élémentaire. On ne saurait penser que des enfants lecteurs pourraient se passer des ima-ges pour saisir les subtilités des al-bums.

Catherine FALVERT,conseillère pédagogique départementale

en arts visuels

1. Un aquafortiste est un graveur à l’eau forte.

album d’Eric Carle, qui ont reconnu l’auteur grâce à la technique em-ployée et à la palette chromatique, dès la page de garde.• Pour prendre, inventorier et réutili-ser la variété des supports employés (papier, carton, bois, toile…). Les lieux culturels proposent de plus en plus des expositions d’originaux, comme celle consacrée en novem-bre 2005 à Claude Ponti, à la média-thèque George Sand de Palaiseau.• Pour découvrir les citations d’œu-vres d’art utilisées par les illustra-teurs, par exemple le rappel du Dé-jeuner sur l’herbe de Manet dans Chien Bleu de Nadja ou celui des Nymphéas de Monet dans Le voyage de grand-père d’Alen Say.• Pour enrichir le vocabulaire spé-

cifique des arts plastiques et notam-ment les notions de cadrage, de point de vue, de traitement de l’espace (champ/hors champ)…• Pour comprendre comment le choix des couleurs, la taille des illustra-tions mais aussi les expressions des personnages ont un impact sur l’effet ressenti et permettent l’expression de ses émotions.• Pour repérer comment les personna-ges, selon leur taille, leur point de vue (face, profil, dos…) entrent ou non en communication avec le lecteur.

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tains élèves ne saisiront pas la situa-tion si on n’attire pas leur attention sur cet indice. Et puis, selon que le livre appartient ou non à une série, est-ce le même personnage que l’on retrouve, Petit ours brun, Charlotte, Zaza, Petit bond et bien d’autres, ou s’agit-il d’un autre petit ours, d’une autre petite fille, d’une autre gre-nouille ? Plus complexe encore, qui parle et se désigne en disant je ? Qui est désigné par les mots il ou elle ? Les significations dont sont porteuses l’image ou la langue ne peuvent être décryptées sans apprentissage.

• Le repérage de la cohérence du récit : dans les premiers albums abordés (la plupart des imagiers par exemple), les illustrations se succè-dent, mais elles pourraient apparaî-tre dans un ordre différent. À partir

POUR UNE ENTRÉE EN LITTÉRATURE DÈS LE CYCLE 1

L’album a depuis longtemps sa place à l’école maternelle. Pourtant le mot « littérature » était absent des programmes 1 jusqu’à 2002. Selon ces derniers textes, il convient d’aborder dès trois ans « les grands thèmes de la littérature orale, les albums de littérature de jeunesse ». Il s’agit « d’installer

une première culture littéraire ».

Pourquoi des apprentissages littéraires dès la maternelle ?

Dans le contexte de la prévention de l’illettrisme, il est nécessaire de pro-céder à une acculturation au monde de l’écrit 2. Dès le cycle 1, les élèves qui n’en ont pas l’occasion dans leur famille doivent en très peu de temps prendre conscience de ce que ces ac-tivités étranges, lire et écrire, peuvent avoir d’intéressant pour eux. Sans l’élaboration progressive d’un projet de lecteur, de représentations justes sur ce qu’est l’acte de lire 3, nos élè-ves n’entreront pas dans les appren-tissages fondamentaux.

La fréquentation des ouvrages lit-téraires s’insère dans une démarche pédagogique souple de façon à éviter leur dénaturation. Il est important que les élèves aient l’occasion d’expéri-menter l’investissement affectif dans des personnages, dans une histoire, qui contribueront à la construction de soi. Mais la dimension cognitive de cette projection est très importante elle aussi : ce sont ces représentations mentales qui permettent à la fiction d’exister.

Par la richesse des histoires, des images, des émotions, l’approche de la littérature en classe est un moyen précieux de gagner les élèves à la lec-ture, même ceux qui n’en sont encore qu’à une pratique très approximative de la langue orale. Une importante majorité d’enseignants de l’école maternelle est déjà acquise à l’idée que lire une histoire à haute voix est une occasion de faire progresser la maîtrise de la langue des élè-ves. Cette lecture offerte peut constituer un moment très précieux, si l’heure choisie permet une attention véri-table. On peut démultiplier son impact en organisant entre les élèves des échan-ges visant non seulement le partage des émotions, mais aussi la compréhension, tout particulièrement à travers le

rappel de récit 4. Si l’on mène des projets d’écriture à l’aide de dictées à l’adulte, on rapproche l’élève en-core un peu plus de la vraie langue de l’écrit 5 en même temps qu’on lui permet de s’approprier cette culture. Ainsi, à l’école de Saint Maurice-Montcouronne, la lecture en réseau d’ouvrages d’Olga Lecaye a débou-ché sur la création d’une nouvelle histoire où vont se rencontrer le lapin de tel album, l’écureuil de tel autre… On peut aussi choisir des livres qui obéissent à une véritable progres-sion, de façon à construire pas à pas, à travers différents « parcours », les repères culturels nécessaires à d’autres lectures.

Quels apprentissages convient-il de mener ?

• La construction de la notion de personnage : sa représenta-tion iconographique est la pre-mière étape. Quand on passe d’une page à l’autre de Cali-nours va faire ses courses 6, tous les enfants ne sont pas à même de comprendre spontanément que ce n’est pas un deuxième ours qui est représenté, mais le même personnage. Dans C’est sûr, il viendra 7, dont le héros (un petit cochon) ne se distingue de sa maman que par son bonnet, cer-

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••• Retrouvons les aventures de Patafil, Tournesol et Vol-au-Vent…

SUR LES CHEMINS DE L’ORIENTATION

L’USEP 91 propose aux élèves une activité d’orientation intitulée « À la re-cherche de Vol-au-Vent ». Celle-ci dure de 1h à 1h30 dans une forêt peu acci-dentée comportant un carrefour d’où partent cinq circuits différents mesurant entre 300 m et 500 m.

Patafil et Tournesol accueillent les groupes d’élèves et leur demandent de les aider à retrouver Vol-au-Vent qui a disparu. Les deux personnages envoient ainsi les élèves sur un des parcours en quête d’un indice. A leur retour, la ré-ponse au problème posé sur le chemin est vérifiée et un autre parcours est proposé.

Au départ des chemins, est accroché un panneau présentant des indications liées à l’histoire imaginée.

Chaque chemin emprunté permet aux élèves de développer des compétences spécifiques par le biais d’activités ludiques.

Indication finaleÀ l’aide de la photo mystère, trouve le chemin pour découvrir Vol-au-Vent ; le numéro secret que tu as retenu t’indique le nombre de rubans blancs que tu dois compter sur le chemin avant de tourner et là, le renard te montre la bonne direction.

Lorsque les élèves ont trouvé Vol-au-Vent à l’aide des indices collectés, celle-ci les félicite et leur remet un souvenir. Chaque classe repart également avec un exemplaire de l’histoire.

Les aventures de Patafil, Tournesol et Vol-au-Vent ne sont pas terminées ; une nouvelle histoire Sur les chemins de l’athlétisme est en préparation.

USEP 91École Levasseur à Evry

[email protected]

Les différents chemins en « o » Compétences développées Panneau « indicateur »

Le chemin des photos

Restituer à un autre moment et en un autre lieu la position des éléments repérés sur une photo.

Observe bien les détails de cha-cune des photos et dirige-toi dans la forêt grâce à chacune d’elles. Au bout du parcours, tu décou-vriras la photo mystère qui te permettra de trouver le sentier qui te mènera à Vol-au-Vent.

Le chemin des gros animauxAnticiper et organiser son dé-placement (latéralité…).

Sois sans crainte, suis le chemin du sanglier, du chevreuil et du renard en regardant bien dans quelle direction ils se dirigent. Au bout du chemin, emporte le dernier renard. Il est si malin qu’il t’aidera dans quelque temps à découvrir Vol-au-Vent.

Le chemin des oiseauxDévelopper ses compétences visuelles et auditives.Décentrer le regard.

Leurs chants animent ici et là les feuillages du matin jusqu’au soir. Lève la tête et découvre-les dans les arbres. Retiens bien leurs chants. Tout à l’heure, tu les imi-teras devant Vol-au-Vent.

Le chemin des numérosUtiliser sa mémoire.Repérer les éléments mathé-matiques pour se déplacer.

Vol-au-Vent est une originale. Elle a écrit des numéros sur des feuilles d’arbres. Au bout du chemin, retiens bien le dernier, il te sera utile dans ta recherche de Vol-au-Vent.

Le chemin des pinceauxUtiliser sa mémoire pour se déplacer à partir d’un code donné.

En suivant le chemin des pin-ceaux, retrouve les couleurs des habits de Vol-au-Vent. Surtout ne te trompe pas, Vol-au-Vent serait très déçue !

du moment où il y a une succession d’étapes dans un certain ordre, le lecteur doit construire mentalement l’idée d’une continuité et d’un en-chaînement qui fait sens. Le passage d’une pièce à l’autre de la maison dans Bonsoir, lune 8, d’un moment à l’autre de la journée d’Olivia 9, d’une proie à l’autre dans Le ver dodu 10 est le résultat d’une élaboration com-plexe, s’appuyant sur l’expérience et la transformant à travers des « scéna-rios » qui seront autant d’appuis pour la compréhension d’autres histoires du même type et de récits peu à peu plus complexes.

• La mise en interaction de ces deux faces de l’apprentissage : s’interro-ger ensemble sur ce qui motive telle ou telle action du personnage est une clé précieuse. Par exemple, pourquoi Babaji 11 donne-t-il ses beaux vête-ments aux tigres ? Pourquoi ceux-ci se battent-ils ? Pourquoi la taupe gar-de-t-elle des cailloux dans son petit coffre 12 ? Sans perception de la cau-salité, la compréhension de la dyna-mique du récit échappe.

Loin de priver la littérature de ses charmes, construire par les échanges la compréhension d’une partie des histoires entendues peut en démulti-plier les effets. Il ne s’agit pas seu-lement de donner aux élèves le goût, mais aussi les moyens de lire.

Joëlle THEBAULT,professeure de lettres modernes

à l’IUFM de Versailles, site d’Etiolles

1. À l’exception de ceux de Jules Ferry en 1882.2. Lire au CP 2, enseigner la lecture et prévenir les difficultés, CNDP, novembre 2004.3.Voir les écrits de Gérard Chauveau.4.Voir Le rappel de récit, BLÉ 91 n°32, novem-bre 2002 http://www.ac-versailles.fr/IA91/ressour-ces/ble/pdf/32.pdf5. Apprentissages progressifs de l’écrit à l’école maternelle, PROG INRP, coordonné par M. Bri-gaudiot, 2000.6. Calinours va faire ses courses, A. Broutin, F. Stehr, École des loisirs, 1987.7. C’est sûr, il viendra !, E. Jadoul, C. Pineur, Éco-le des loisirs, 2005.8. Bonsoir, lune, M. Wise Brown, C. Hurd, École des loisirs, 1981.9. Olivia, I. Falconer, Seuil, 2000.10. Le beau ver dodu, N. Van Laan, M. Russo, École des loisirs, 1990.11. Le grand courage de petit Babaji, H. Banner-man, Bayard jeunesse, 1996.12. Cric-Crac, Rascal, École des loisirs, 1999.

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DES ATELIERS PHILOSOPHIQUES EN MATERNELLE

La philosophie a-t-elle sa place en maternelle ? Y a-t-il un âge pour philosopher ? Comment peut-on s’y prendre avec de jeunes élèves ? Anne-Marie Saysithideth nous fait partager son expérience.

Il s’agit tout d’abord d’un moment de réflexion pour mettre en mots sa pensée. Le langage permet de prendre conscien-ce que la pensée existe.

Il s’agit aussi de développer l’esprit cri-tique des élèves, de les inciter à se poser des questions et à les discuter collective-ment. Seules la réflexion et la discussion sur des questions universelles sont inté-ressantes ; on ne cherche pas à produire, ni à avoir raison.

Selon Michel Tozzi, philosopher c’est :- mettre en question, douter, donc pro-blématiser ;- savoir de quoi on parle, définir le con-tenu des notions utilisées, partir des re-présentations du concept donc concep-tualiser ;- justifier, faire des objections pertinen-tes aux idées d’autrui, répondre à ces objections, prendre position donc argu-menter.

Intérêt et objectifs de  ces ateliers

Le premier objectif est que tous les élè-ves osent prendre la parole devant les autres, sachant que ceux qui n’en ont pas pris l’habitude à l’école maternelle auront plus de mal à le faire plus tard.

Puisqu’il n’y a pas de bonnes ni de mauvaises réponses, toutes seront en-tendues et acceptées. Ainsi, chaque élè-ve prendra progressivement confiance en lui et osera s’exprimer.

Le deuxième objectif est qu’ils ap-prennent à argumenter. Pour cela, il faut insister sur les moments de problémati-sation, afin que l’argumentation réponde réellement à la question.

Les discussions philosophiques ont donc un grand intérêt pour l’éducation à la citoyenneté. L’écoute de l’autre per-met de découvrir qu’il n’y a pas obliga-toirement une seule et bonne réponse, que l’on n’est pas obligé d’être du même avis et que l’on peut discuter sans être dépendant de l’approbation de ses pairs.

Mise en place de ces ateliers

Ces ateliers s’adressent aux élèves de grande section et à ceux de moyenne section qui le souhaitent et ont lieu une fois par semaine, trente minutes en dé-but d’après-midi.

L’enseignant peut profiter d’un temps de décloisonnement (chorale, sieste…) pour mettre en place un atelier philoso-phique avec un groupe de sept ou huit élèves ; chaque école doit trouver sa propre organisation.

Plusieurs fois dans l’année, il est per-tinent de scinder la classe en trois grou-pes : petits, moyens ou grands parleurs, notamment pour permettre aux petits parleurs de prendre plus facilement la parole.

Lors de ces ateliers, les élèves sont dis-posés en arc de cercle et la séance est enregistrée. Le micro circule, soit à la de-mande d’un élève qui lève le doigt, soit systématiquement d’un élève à l’autre, sans pour autant qu’il ait l’obligation de parler.

L’enseignant pose une question du type : Qu’est-ce qu’une grande person-ne ? Doit-on toujours obéir ? A quoi ça sert de grandir ?

Cette question peut venir suite à un événement particulier, à la lecture d’un

album, ou sans aucune raison. Au début de la séance, l’enseignant introduit lui-même la question. Dans la deuxième moitié de l’année, la question pourra venir des élèves, mais l’adulte se char-gera de la problématisation.

L’enseignant organise le débat, guide la réflexion, sans jamais donner son point de vue, en posant ce genre de questions : Comment le sais-tu ? Pour-quoi dis-tu cela ? Qu’est-ce que vous en pensez ? Êtes-vous d’accord avec ce qu’il dit ?

L’enregistrement peut être réécouté partiellement en fin de séance et libre-ment en autonomie. Un point qui n’a pas été suffisamment approfondi pourra être repris.

L’enseignant garde la transcription pour son évaluation personnelle. Bien évidemment, celle-ci ne porte pas sur la qualité de la réponse mais sur le nombre de prises de parole, d’argumentations et d’essais de conceptualisation et aussi sur l’évolution du type d’argumentation.

En conclusion

Ces temps de parole donnés régulière-ment aux élèves permettent de renforcer la maîtrise de l’oral et tout particulière-ment de s’exercer à l’argumentation. Ils sont aussi nécessaires pour la construc-tion de la personnalité et de la confiance en soi des futurs citoyens que sont nos élèves.

Anne-Marie SAYSITHIDETH,PEMF à l’école primaire

Simone Soumierde Saint-Maurice-Montcouronne

Ce qui est proposé ici s’inscrit dans la lignée des travaux de Michel Tozzi 1, pour lequel le guidage par le maître est essentiel. Il peut intervenir à des niveaux divers dans les échanges, avec comme finalité d’apprendre aux élèves à débattre démocratiquement, d’apprendre à philosopher (conceptualiser, argumenter, problématiser) avec une grande vigilance sur les capacités cognitives attendues. Cela diffère de l’atelier des « préalables philosophiques » (ou atelier de l’AGSAS 2) de Jacques Lévine, psychanalyste qui travaille aux conditions de possibilités psy-chiques pour constituer chez l’enfant une pensée autonome. Pendant une durée de dix minutes, le groupe des enfants est invité à penser un « grand » problème humain posé par le maître, à partir d’une remarque d’enfant. Essentiel : le maître reste silencieux, permettant à chacun, en présence de ses pairs, de trouver un cadre pour penser et parler, sans « bonne réponse » attendue, ni compétences scolaires recherchées. Cela sera enregistré, puis réécouté et commenté par les élèves.

Jean-Charles PETTIER, professeur de philosophie, docteur en sciences de l’éducation, IUFM de Créteil

1. http://pratiquesphilo.free.fr/ 2. Association des groupes de soutien au soutien http://agsas.free.fr/

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KIDSMART : LES TICE EN MATERNELLE

1. Brevet informatique et internet : http://www.ac-versailles.fr/pedagogi/ressources91/b2i/index.htm 2. Technologies de l’information et de la commu-nication pour l’enseignement. 3. Descriptif du projet : http://www2.educnet.educa-tion.fr/sections/primaire/usages_primaire/primtice4551/kidsmart4. Base PrimTICE http://primtice.education.fr/search/index.php 5. Professeur ressource en informatique. 6. http://www.tice91.ac-versailles.fr/kidsmart/ 7. http://www.abuledu.org/article.php3?id_article=80&logiciel= Kidistb 8.http://www.ac-rouen.fr/ia76/primtice/kidsmart1.htm

Un exemple concret

• La mise en œuvre du projetÀ l’école de Saint-Maurice-Montcouron-ne, les enseignantes de grande section ont souhaité redynamiser et varier l’utilisa-tion de l’abécédaire de la classe, un album réalisé par les élèves en début d’année. À l’aide du logiciel de création multimédia Kidistb 7, elles ont pu créer un livre in-teractif consultable sur l’ordinateur et le mettre à la disposition des élèves.• Le fonctionnement de l’outilL’abécédaire interactif se présente sous la forme d’un livre dont on peut tourner les pages en cliquant sur une flèche. Sur chaque page est inscrite une lettre avec les différentes écritures : script, capitale, cursive, en majuscule et minuscule. Les élèves ont créé toutes les pages « papier » numérisées qui ont servi de base à la créa-tion multimédia.Trois photos d’élèves ou d’enseignantes sont présentes sur chaque page ; au passa-ge de la souris sur une photo, une propo-sition sonore du nom de la lettre est faite, chacune enregistrée par les élèves. Il y a toujours deux propositions erronées et une proposition exacte.L’élève sélectionne la proposition qu’il pense être la bonne et vérifie sa réponse en cliquant sur la photo correspondante. Un message sonore annonce si la réponse est juste ou non.• L’organisation de la classeLors d’une première phase, l’abécédai-re interactif a été présenté à la classe.

Ce travail, conduit par une enseignante avec un petit groupe d’élèves, a permis de découvrir l’outil et de se familiariser avec son utilisation.Dans un second temps, des situations de tutorat ont été mises en place : des élèves « experts » ont guidé les plus « novices » afin de les accompagner dans leur appren-tissage.Dans la dernière phase, tous les élèves uti-lisent l’abécédaire de façon autonome.• L’intérêt de ce type d’outilIl est constaté dans les classes à divers titres.- L’aspect ludique de l’abécédaire inte-ractif est un facteur de motivation impor-tant.- Les élèves travaillent spontanément la maîtrise de la langue « Connaître le nom des lettres de l’alphabet », tout en déve-loppant certaines compétences du B2i.- Ils ont toute possibilité de tâtonner, de faire et refaire.- L’abécédaire interactif respecte toujours la démarche et le rythme d’apprentissage de chacun.- La médiation à l’apprentissage prend des formes variées puisque les élèves tra-vaillent successivement avec l’enseignan-te, avec des pairs et individuellement.- Lorsque la maîtrise est suffisante, les élèves peuvent s’exercer en toute autono-mie à différents moments de la journée.Cependant l’utilisation de l’abécédaire interactif n’empêche pas les élèves de venir consulter l’album abécédaire sous sa forme papier, toujours présent dans la bibliothèque.

Un partenariat récent

Depuis deux ans, la fondation IBM, en partenariat avec le ministère de l’Édu-cation nationale 3 met à la disposition d’écoles maternelles volontaires, des stations informatiques complètes : PC, imprimante, logiciels et meuble sé-curisé adapté aux jeunes enfants. Les enseignants s’engagent en contrepartie à produire des scénarios pédagogiques décrivant leurs pratiques TICE. Ces scénarios sont mutualisés sur la base nationale PrimTICE 4.

Le département de l’Essonne a ob-tenu deux dotations, soit vingt sept stations réparties sur neuf écoles. Les enseignants, qui n’étaient pas tous à l’aise avec l’outil informatique, ont été accompagnés dans leurs projets par un PRI 5 et ont bénéficié de temps d’échanges et de mutualisation.

Un site départemental 6 rend compte de l’avancée du projet dans l’Esson-ne. Les scénarios produits ont mis en œuvre l’image numérique, la création multimédia et les logiciels Edmark fournis avec la station.

Les constats, les prolongements

Le bilan de ces deux années d’expéri-mentation Kidsmart est globalement positif.- Des équipements complets sont mis à disposition des classes, permettant ainsi aux enseignants de pratiquer les TICE et de les intégrer à leur ensei-gnement.- Un site départemental et un site na-tional sont créés afin de mutualiser les expériences. Ce volet est très im-portant car il permet aux enseignants d’échanger leurs pratiques, de s’ap-puyer sur des réalisations déjà expé-rimentées, de se les approprier, de les faire évoluer en fonction de leurs projets et de leurs besoins.On peut citer l’exemple d’un scé-nario concernant quelques logiciels Edmark fournis avec les stations Kidsmart. Il comporte des grilles de passage et des fiches d’auto-évalua-tion pour les élèves 8. C’est un outil particulièrement bien conçu, exploi-table sans aucune modification, pour un gain de temps considérable.

Étendre l’expérimentation à un plus grand nombre de classes pourrait être un accélérateur de la pratique des TICE à l’école maternelle.Renforcer l’accompagnement des enseignants se lançant dans de tels projets ne pourrait qu’inciter un plus grand nombre à tenter l’aventure.

Sylvia ELIE-AUZE, PEMF à l’école primaire Simone Soumier

de Saint-Maurice-MontcouronneDidier DAMET et Patricia LEROSIER,professeurs ressources en informatique

Le B2i 1 dès la maternelle, vous n’y pensez pas ! Et pourtant les pratiques TICE 2 se répandent de plus en plus dès le cycle 1 ; l’expérimentation Kidsmart en est la preuve.

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ÉVITONS LES DÉRIVES !

L’école maternelle est un « lieu social, lieu aménagé, lieu structuré qui aide tous les enfants qu’elle accueille à se poser comme personne, à se situer comme élève » 1.

Les programmes de 2002 précisent que « l’école maternelle a pour mis-sion d’aider chaque enfant à grandir, à conquérir son autonomie et à ac-quérir des attitudes et des compéten-ces qui permettent de construire des apprentissages fondamentaux ».

Les apports de la psychologie font admettre aujourd’hui qu’un certain niveau de développement est néces-saire pour apprendre, mais aussi que les apprentissages favorisent le déve-loppement : il ne faut donc pas trop anticiper, ni différer jusqu’à une ma-turité idéale.

Les apprentissages

• Il est important que les enfants com-prennent ce qu’ils sont en train d’ap-prendre 2 et que l’enseignant explicite très clairement, dès la petite section, ce qu’on a à faire, pourquoi on le fait, ce qu’on apprend en le faisant.• Les activités proposées doivent être variées, diverses, toutes importantes. Elles sont au service des apprentissa-ges avant tout et doivent avoir du sens.• Les photocopies et « la profusion d’exercices vides de sens 3 » sont à évi-ter. « Dans tous les cas, l’utilisation de situations réelles (avec des objets courants, du matériel spécifique, des jeux) doit être préférée aux exercices formels proposés par écrit 4 ».• Le jeu tient une place importante mais cela n’exclut ni la rigueur, ni l’effort.• Les apprentissages sont prévus, or-ganisés, évalués par l’enseignant.Cette pédagogie se développe dans des projets motivants, des situations concrètes pour les jeunes élèves.

Les temps éducatifs et les temps pédagogiques

L’école maternelle a des horaires bien définis par le règlement dépar-temental.aAccueils et sortiesLes accueils ne doivent pas dépas-ser vingt minutes. Les parents sont prévenus dès le début de l’année de l’heure de fermeture des portes. Bien

informés du rôle de l’école, ils n’en sont que plus respectueux, dans l’in-térêt de leurs enfants.aRécréationsElles sont situées au milieu de la demi-journée pour représenter une véritable coupure entre deux mo-ments d’apprentissage.

Elles ne doivent pas excéder trente minutes, habillages et déplacements compris. Le besoin de détente est évi-dent, mais les récréations prolongées sont souvent génératrices d’accidents.aPassages aux toilettesUne éducation à l’autonomie est né-cessaire pour les plus jeunes mais ne justifie pas un déplacement en grand nombre. Tous les enfants n’ont pas les mêmes besoins aux mêmes mo-ments. Il est préférable de donner la possibilité aux élèves d’aller aux toilettes en fonction des besoins bio-logiques, cette noble finalité devant évidemment prendre en compte les contextes particuliers et l’organisa-tion des lieux, des écoles.aDéplacementsApprendre à se déplacer ensemble dans le calme ne suppose pas obli-gatoirement l’utilisation du « petit train » qui est peu adapté à la motri-cité des jeunes enfants.aSieste et relaxationPour les plus jeunes enfants, la sieste correspond à un besoin physiologi-que nécessaire, imposé par le rythme de l’école. Le réveil est échelonné, suivant le rythme de chacun et se fait dans le calme.

Immédiatement après la sieste la récréation n’est pas nécessaire ; bien reposés, les enfants sont plus récep-tifs aux apprentissages.

Les élèves de moyenne et de grande section ne peuvent se voir imposer une sieste ou une relaxation qui raccourcit inutilement les temps d’apprentissa-ges, même et surtout en REP.

Des activités calmes, nécessitant moins de concentration peuvent être prévues dans l’emploi du temps pour pallier une éventuelle fatigue.aCollation 5Depuis quelques années déjà, le mi-

nistère de la Santé insiste sur l’équi-libre alimentaire dès le plus jeune âge et fait un sort à la traditionnelle col-lation de 10h, essentiellement basée sur des sucreries.

Il est préférable de proposer un fruit ou un morceau de pain, au moment de l’accueil à 8h20 aux « petits » qui arrivent à l’école l’estomac vide.

Il faut penser, été comme hiver, à leur faire boire de l’eau régulièrement dans la journée. C’est une bonne ha-bitude à prendre !aRôle de l’ATSEM 6

Les ATSEM participent à la commu-nauté éducative 7 et peuvent être as-sociées aux temps de concertation de l’équipe, sous l’autorité du directeur.

Leur rôle auprès des jeunes élèves est complémentaire à celui de l’en-seignant. Elles ont des missions édu-catives et matérielles. Elles peuvent animer des activités particulières sous la responsabilité de l’enseignant de la classe mais ne peuvent se subs-tituer à lui.

L’école maternelle n’est pas obliga-toire mais elle constitue un atout pour la réussite scolaire ultérieure des élè-ves. La confiance en soi, le désir et le goût de savoir, la curiosité, le plaisir de venir à l’école pour apprendre y sont développés.

À nous, enseignants d’école mater-nelle d’être vigilants.

Rolande DELORD-LASSUS, directrice de l’école maternelle d’application

les Meillottes à Soisy-sur-Seine

1. GIOUX A. M., membre du conseil scientifique de l’AGIEM, Première école, premiers enjeux, Hachette 2000.2. Voir l’article Les groupes de couleur à l’école maternelle, BLÉ n°18, mars 1997 http://www.ac-versailles.fr/IA91/ressources/ble/pdf/18.pdf3. Rapport FERRIER, Améliorer l’efficacité de l’école primaire, 1998.4. Qu’apprend-on à l’école maternelle ? Pro-grammes 2002, Scéren/CNDP, 2002, p.62.5. Voir l’article La collation de J. Haize, page suivante.6. Voir l’article Les ATSEM : qui sont-elles ? Que font-elles ?, BLÉ n°24, janvier 1999 www.ac-ver-sailles.fr/IA91/ressources/ble/pdf/24.pdf 7. Décret n°92-850 du 28 /08/92.

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LA COLLATION

Le moment de la collation est inscrit dans de nombreux emplois du temps des classes maternelles. Il y est identifié en tant que moment éducatif permettant de développer les compétences du vivre ensemble. Mais depuis quelques années, des enseignants et des chercheurs conduisent une réflexion sur son intérêt et son organisation.

La collation est traditionnellement proposée en milieu de matinée juste avant la récréation. Les parents, à tour de rôle, sont chargés d’appor-ter les ingrédients nécessaires. Il est plus facile pour eux d’apporter des paquets de gâteaux que des laitages ou des fruits ; cette obligation peut constituer une contrainte financière pour certaines familles qui n’osent cependant pas se dédire.

Les constats actuels

Dans notre pays, la majorité des en-fants ne souffre pas de la faim. Au contraire, les cas d’obésité augmen-tent considérablement, passant de 5 % en 1980 à 16 % en 2000 1.

Pour beaucoup d’élèves, cette col-lation représente un cinquième repas placé trop près de l’heure du déjeu-ner. Les gâteaux apportent un taux élevé de graisse et de sucre, de plus ils développent l’appétence pour le sucré.

Curieusement, des enquêtes auprès des familles ont montré que bien sou-vent, la collation n’existait pas dans les habitudes familiales.

Enfin, il n’est pas rare que certains élèves soient allergiques et ne puis-sent pas goûter à ce qui est offert ; ils doivent alors se contenter d’un ersatz en regardant leurs camarades se dé-lecter d’un gâteau au chocolat.

L’Agence française de sécurité sani-taire des aliments a été saisie de cette question 2 ; on peut trouver sur son site un texte de réponse. Celui-ci prend en compte tous les arguments posi-tifs ou négatifs et cela sans prendre une position catégorique. L’AFSSA souligne que « Les habitudes alimen-taires acquises au cours de l’enfance et de l’adolescence ont une influence majeure sur les comportements ul-térieurs. ». Elle ajoute « On assiste depuis quelques décennies à une dé-structuration du rythme alimentaire dans le milieu scolaire notamment à l’école maternelle avec l’instaura-

tion d’un véritable moment de prise alimentaire supplémentaire baptisée « collation »…». Elle souligne le fait que la collation offerte par l’école risque de conforter les parents dans l’idée qu’il n’est pas nécessaire que leur enfant prenne un petit déjeuner puisque l’école va y pourvoir. Enfin, offrir des aliments tentants tels que les gâteaux peut conduire les enfants à manger alors qu’ils ne ressentent pas la sensation de faim. Ce trouble risque de conduire au grignotage gé-nérateur de surpoids.

Les initiatives du ministère de l’Éducation nationale

En janvier 2001, une première cir-culaire parue au bulletin officiel 3 et relative à la sécurité des aliments dé-cline les démarches à mettre en œu-vre dans les écoles pour garantir la sécurité alimentaire des élèves.

En janvier 2002, un texte complé-mentaire 4 traite plus particulièrement des règles à respecter dans la classe au moment des goûters ou des fêtes. On peut y lire les précautions à pren-dre lors de la fabrication des produits dans les familles ou à l’école, les conditions requises pour leur conser-vation, leur transport, leur stockage et leur consommation. Un tableau présente des exemples de produits à privilégier ou au contraire à éviter.

En 2004, le ministère a signé une convention avec l’Institut national de recherches agronomique pour dé-velopper des actions d’éducation et d’enseignement.

Les pistes expérimentées

Certaines écoles ont tenté de pallier les inconvénients tout en prenant en compte le fait que les jeunes enfants, réveillés tôt, ont du mal à prendre un petit déjeuner ; ils arrivent à l’école le ventre vide. Ces écoles proposent un self-service au moment de l’accueil ; des plateaux sont mis à la disposition des élèves sous la surveillance d’une

ATSEM 5 pour éviter certains abus. Il ne s’agit pas d’une ration alimentaire en supplément et il n’y a donc plus de collation dans la matinée.

D’autres écoles, dans le souci d’une éducation à la santé, choisissent de faire goûter de nouvelles saveurs en proposant des fruits, des compotes, des fromages pour éduquer le goût et amener les élèves à savourer du salé ou du moins sucré.

D’autres encore ont franchi le pas en informant les familles qu’il n’y aurait plus de collation et curieuse-ment cette suppression n’a pas sou-levé beaucoup d’objections. Les en-fants apprennent peu à peu à prendre leur petit déjeuner à la maison.

La collation ne doit pas être un mo-ment ritualisé qui perd tout objectif éducatif mais elle doit entrer dans un véritable projet construit et réfléchi.

Joëlle HAIZEconseillère pédagogique à Palaiseau

1. Résultats de l’étude OBEPI 3 commandée par l’Office national d’évaluation des politiques de santé en 2005.2. http://www.afssa.fr/Ftp/Afssa/22354-22355.pdf3. BO spécial n° 9 du 28 janvier 2001.4. BO n° 2 du 10 janvier 2002.5. Agent territorial spécialisé des écoles maternel-les. Voir aussi l’article Les ATSEM, BLÉ 91 n° 24 http://www.ac-versailles.fr/IA91/ressources/ble/pdf/24.pdf

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L’ÉCOUTE EN RESEAU

Proposer une écoute en réseau, c’est faire entendre successivement différentes œuvres sélection-nées et organisées pour préciser et enrichir la culture musicale.

Trois principes de départ

• Attiser la curiositéDes plages d’écoute musicale mettent les élèves en situation d’entendre des émissions so-nores. « Ouïr » est inévitable mais comment s’assurer que les élèves « écoutent » ?

Si au fil des semaines les œuvres proposent des « surprises sonores » et des « retrou-vailles » (phrases mélodiques, motifs rythmiques, éléments musicaux), les élèves vont être interpellés et de récepteurs passifs vont devenir attentifs et actifs.• Puiser dans l’expérience personnelleLors de l’écoute des morceaux, l’élève va puiser dans son expérience personnelle pour met-tre en résonance ce qu’il écoute avec son vécu antérieur. Cette attitude culturelle contribue à « apprendre à raisonner ».• Construire des savoirsLa confrontation aux autres, et l’échange autour de la diversité des éléments perçus ou ressentis, permet de mettre en question ses représentations pour les faire évoluer et acquérir des compétences.

La démarche proposée

Tous les élèves ne sont pas égaux quant à leur capacité à se référer à leur vécu, il faut créer un patrimoine commun minimum au sein du groupe classe.

Voici un exemple concret qui devra être adapté à chaque classe. Le réseau d’écoute sera constitué de trois versions très différentes de la chanson Frère Jacques.

Les séances journalières d’écoute sont prévues à l’emploi du temps, dès la petite section. Leur durée peut aller de trois minutes (le 1er jour) à une vingtaine de minutes pour les écou-

tes suivies d’échanges. Le même élément du réseau sera écouté tous les jours de la semaine.

• « Frère Jacques n°1 », Gustav Mahler, 1ère symphonie (Titan), début du 3e mouvement

Instrumental (pas de voix).

Ostinato aux timbales (« tambour » de l’orchestre symphonique), marquant une pulsation très

lente sur deux notes alternées.

Canon instrumental, dans le registre grave de l’orchestre.

Mélodie légèrement modifiée.

• « Frère Jacques n°2 », Triocéphale, Chansons d’enfance couleur jazz, Enfance & Musique

Introduction : simple canon chanté en français.

Interruption du chant par un ostinato instrumental et vocal, plus complexe que dans le N°1,

reprenant certaines paroles de la chanson.

Rythme légèrement modifié (en contre-temps).

Registre plus étendu (grave – aigu) que dans le n°1.

• « Frère Jacques n°3 », Chantal Grosleziat, Comptines et berceuses du baobab, Didier Jeunesse

(livre CD)

Introduction instrumentale (kora, xylophone, contrebasse, triangle, chimes).

Ostinato instrumental « double » (xylophone, contrebasse).

Chanson en sängo (Centrafrique), avec un simple jeu d’imitation (canon interrompu).

Ruissellements à la kora.

• Séance 1 : « Simple » écoute de l’œuvre sans discussion organisée.• Séance 2 : Ecoute du morceau suivie d’un échange.

Les élèves savent que l’écoute sera suivie d’un débat sur les impressions, les sentiments ou sur les premiers éléments musicaux caractéristiques repérés.

Les réponses peuvent être d’ordre figuratif ou émotionnel. Elles sont listées puis affi-chées.

Des relances ouvertes peuvent alterner avec des questions plus fermées, afin que chacun puisse s’exprimer, (ex : Triste ou joyeux ?, Quels personnages ?, Quels lieux ?).• Séance 3 : Recherche des éléments musicaux à l’origine des ressentis.

Après une relecture de l’affichage de la veille, nouvelle écoute en recherchant ce qui dans la musique suscite des images fi-guratives et émotives : tempo (lent/rapide), registre (grave/aigu), nuances (fort/doux), contrastes ou continuité, voix/instruments, répétitions, présence d’un ostinato, d’un bourdon…

L’affichage est progressivement complé-té, les éléments musicaux concrets mis en regard avec les ressentis. Les réponses sont validées par le groupe et complétées par un apport lexical spécifique (ex : « Le boum-boum répété » devient un « ostinato »…).• Séance 4 : Ecoute archivage.

Rappel de tout ce qui a été écrit et der-nière écoute du morceau.

Les semaines suivantes, les autres élé-ments du réseau sont écoutés selon le même déroulement en renvoyant les élèves à des remarques déjà faites sur les autres morceaux (points communs, différences). La mise en réseau se fait donc peu à peu, des liens se tissent entre les œuvres et leurs éléments musicaux, à la manière de ce qui se pratique en lecture d’albums en réseau1.

L’appropriation des découvertes musica-les est renforcée dans le cadre des activi-tés de production. Par exemple, les diffé-rents types d’ostinato découverts à travers l’écoute des trois éléments du réseau Frère Jacques pourront donner lieu à la création d’un ostinato destiné à accompagner une autre chanson connue.

Les traces écrites des apprentissages (no-tions, lexique…) seront conservées ; les élèves pourront s’y référer :• affichages collectifs par réseau, mémoire du travail des séances ;• cahier d’écoute musicale contenant des textes collectifs ou individuels, des illus-trations, des photos ;• coin écoute avec accès aux morceaux écoutés.

L’écoute en réseau participe à l’élabora-tion d’une culture personnelle fondée sur l’expression de soi et l’écoute de l’autre2.

Frédéric NAËL,conseiller pédagogique départemental

en éducation musicale

1. DEVANNE, B., Lire & écrire : des apprentissa-ges culturels, Armand Colin, 1996.2. Pour en savoir plus : Ouvrons leur les oreilles, le bain musical, Bernard Biz, BLE91 n°14, mars 1996.

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LES COLLECTIONS D’IMAGES

Nous connaissons tous l’intérêt des enfants pour les images qu’ils aiment collectionner, enfouir dans leur poche ou leur cartable après les avoir pliées en quatre... Les programmes nous pro-posent d’exploiter  cet  engouement  avec  une  visée d’éducation du  regard et dans  le but d’un  

  apprentissage culturel.

L’image devient alors un trésor, soit pour ce qu’elle représente (cen-tre d’intérêt), soit en fonction de sa provenance (donnée par quelqu’un qu’on aime).

Comment s’organiser ?

Comment concrètement passer de l’image froissée au fond de la poche à une collection structurée et porteu-se de sens ?

Comment maîtriser également l’af-flux d’images de toutes sortes qui ris-que d’en découler ?Voici quelques pistes pratiques de mise en œuvre.

Il y a deux sortes de collections.• La collection de classe, en partie fournie par l’enseignant, s’enrichit au fur et à mesure de l’année. Elle com-porte deux volets distincts : les images générales et les reproductions d’œu-vres d’art. Ce classement se fait avec les élèves qui peuvent également four-nir des documents ; il amène à réflé-chir sur les critères qui permettent de dire qu’un objet est une œuvre d’art.

• La collection personnelle peut être lancée après avoir demandé aux élèves de rechercher des documents sur un sujet précis (par exemple, des portraits pour un travail en arts plastiques).

Le problème du classement des documents pour des consultations ultérieures peut être résolu de façon simple et peu coûteuse : un ou deux grands bacs en plastique, dans les-quels les images sont séparées par de grands intercalaires en carton fort. La collection de chaque élève trouve sa place entre deux intercalaires ; elle est facilement manipulable.

Chaque image ou série d’images est glissée dans une pochette plastique transparente, sur une feuille carton-née blanche qui en assure la rigidité. Ce fond blanc, qui met l’image en valeur et la « sacralise » aux yeux de l’élève, comporte au dos la dictée à l’adulte élaborée à partir de cette

image (pourquoi l’élève l’a choisie, ce qu’elle représente pour lui…). Collection et production d’écrits sont étroitement liées.

La mise en place, par les élèves, de nouvelles images dans leur collection et la dictée à l’adulte qui l’accompa-gne peuvent se faire au moment de l’accueil, avec un atelier autonome permanent comportant le matériel nécessaire. Ce moment devient alors un temps réel d’apprentissage.

Comment utiliser ces collections ?

Cette façon de procéder permet d’ex-traire facilement une image pour la regarder ou pour travailler avec elle ; elle favorise les échanges entre élèves qui discutent de leur collection.

Il faut fixer quelques règles au dé-part :- on peut emprunter une image à con-dition d’en demander l’autorisation au propriétaire et de la remettre à la bonne place ;- les images ne doivent pas être sor-ties de leur pochette, ce qui encoura-ge les parents à confier des photos.

Cette collection prend naturelle-ment place dans la bibliothèque, car elle doit être consultable librement en tant que documentation et support de langage oral.

Il est souhaitable de prévenir les parents de la mise en place de cette collection et de ces modalités, afin de renforcer leur participation.

Pour enrichir les propositions des élèves, on peut installer dans la classe un coin « images », avec différentes revues à découper. L’évolution des choix des élèves se fait naturellement au fur et à mesure de l’avancement du projet.

Pour faire vivre ces collections, de nouvelles responsabilités peuvent être instaurées au sein de la classe. Chaque matin un élève a la possibilité :- de choisir une œuvre d’art de la col-lection de classe, de l’accrocher dans

un endroit réservé, le petit musée et d’expliquer son choix ;- de choisir une image dans la collec-tion d’un autre élève, en confrontant les raisons de son choix à celle de son camarade.

Les élèves peuvent également re-chercher des images sur un sujet don-né pour un travail en arts plastiques ou à partir d’un documentaire.

Par petits groupes, on peut organiser des jeux de lecture d’images à partir de ces collections en regroupant des images :- correspondant à un sujet donné ;- possédant une couleur ou un élé-ment donné ;- évoquant un sentiment (tristesse…) ou une impression (mouvement…).

Les élèves peuvent aussi regrouper librement des images et se justifier ensuite, chercher celles qui se com-plètent, celles qui s’opposent…

Cette lecture se complexifiera au fur et à mesure, suivant l’âge des élèves.

En conclusion

Ces collections favorisent la prise de parole de chacun, l’interaction entre élèves, sans passage obligatoire par la parole de l’adulte. Elles enrichis-sent leur monde intérieur d’images personnelles.

Elles mettent en jeu des compéten-ces très diverses dans le domaine du langage oral par les échanges qu’el-les suscitent, du langage écrit par la dictée à l’adulte.

Elles permettent par la suite de tra-vailler sur la transformation des ima-ges, sur leur relation avec les travaux effectués dans la classe et deviennent pour les élèves et l’enseignant une source d’idées et de trouvailles, une motivation pour aller plus loin dans la démarche créatrice en arts plastiques.

Catherine HERNANDEZ,conseillère pédagogique

à Savigny-sur-Orge

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LE GRAPHISME À L’ÉCOLE MATERNELLE : BUT OU MOYEN ?

Le fruit de la réflexion menée dans cet article porte à valoriser le graphisme sans le réduire simple-ment à un entraînement préparatoire aux activités d’écriture.

De quel graphisme parle-t-on ?

Les programmes définissent l’acti-vité graphique au travers de gestes et de motifs. Le geste permet l’enchaî-nement de traces, de courbes, de li-gnes simples rythmées et organisées. L’appropriation de l’acte graphique se traduit par une intention. L’élève devient conscient de ce qu’il produit par écrit ; petit à petit il anticipe ses gestes, projette des tracés et construit des motifs qu’il peut montrer, expli-quer, afficher. Il devient un créateur de formes d’autant plus imaginatif que l’enseignant va en permanence verbaliser pour relancer individuel-lement et collectivement les initiati-ves.

Quelles activités mettre en œuvre ?

L’appropriation par l’élève de l’acte graphique se fait-elle simplement par un travail de reproduction de signes simples comme une suite de ronds, de traits obliques ou de vagues ? Cela semble insuffisant. Il ne faut donc pas réduire ces activités à des contraintes imposées par l’adulte car le graphis-me c’est aussi une forme d’expres-sion, d’art, que l’on peut expliquer, communiquer. La verbalisation des activités permet de donner sens aux productions.

L’élève peut ainsi se comporter comme « un explorateur, un créateur de formes » lors :- de la « décoration » de poésies ou de chants (et non leur illustration) ;- de l’élaboration de frises avec des motifs alternés (formes et couleurs) ou avec un même motif répété, le motif étant déjà un agencement de traces simples ;- de la variation graphique autour d’une ou plusieurs gommettes, de pliages, de coulures d’encre, etc. ;- du remplissage avec des motifs sim-ples de rosaces tracées, de grilles…

Toutes ces mises en œuvre méritent d’être anticipées par leur « chef d’or-

chestre », l’enseignant. Elles n’en se-ront ainsi que mieux valorisées.

Le geste graphique, quelle progression ?

Monter – descendre – tourner dans un sens – enchaîner – s’arrêter – faire des boucles, des traits horizontaux, des vagues… Il ne s’agit pas de tra-vailler systématiquement et séparé-ment chacune de ces actions mais bien de rester dans la complexité en les associant, afin que l’élève trouve le geste le mieux adapté et le plus efficace dans une situation donnée. En effet, concevoir une progression uniquement fondée sur ces éléments n’est pas opérationnel à moyen et long terme.

Le degré de maturité de l’élève, la précision des gestes en allant du geste spontané au geste intentionnel, la conduite d’un tracé à grandes am-plitudes jusqu’au tracé minutieux ou réduit, la maîtrise de l’utilisation de scripteurs de plus en plus fins sont des actes essentiels. Ils sont confor-tés par le travail du corps dans les activités de motricité fine (les jeux d’emboîtement, la pâte à modeler, le découpage, le collage…), mais aussi dans l’espace lors de l’enseignement de l’éducation physique et sportive. Laisser des traces à l’extérieur dans le sable, faire tourner un ruban, des-siner un signe dans le dos d’un ca-marade qui doit ensuite le reproduire sont autant d’activités qui permettent de travailler des sensations, des re-présentations de gestes, de signes.

Ce faisceau d’activités permet ainsi une intériorisation et une maturité du geste indispensables aux activités d’écriture.

Le choix des outils scripteurs et leur tenue doivent viser une mobilisation

de la « position » : la pince avec l’in-dex et le pouce, le support avec le majeur. Une vigilance de tous les ins-tants est nécessaire. Toutes les occa-sions sont à saisir, devant les élèves, pour écrire en verbalisant son geste.

Enfin, les supports et leurs orien-tations sont également des variables essentielles pour permettre aux élè-ves de maîtriser le geste graphique. Les grandes pistes graphiques ver-ticales, voire des tableaux toujours accessibles et adaptés à la taille des élèves, sont à valoriser. Ils of-frent un espace de dessin, de gra-phisme et d’écri-ture proche, mo-tivant, laissant des traces éphémères où les essais et les erreurs ne sont pas pénalisants.

Voici quelques conseils :- utiliser des feu-tres simples spé-cifiques au gra-phisme et qui ne servent que pour cette activité ;- verbaliser les pro-ductions :« Comment as-tu fait pour… ? »- construire des affiches collec-tives référentes dans la classe au fur et à mesure des découvertes des élèves ;

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- mettre en place un classeur réfé-rent ou classeur d’idées regroupant les motifs les plus intéressants ; à la fin de l’année tous les élèves, quel que soit le niveau de leur production, auront un de leurs travaux graphiques dans cet outil collectif.

Le graphisme au service de l’écriture ?

Écrire suppose une maîtrise des ges-tes indissociable des apprentissages linguistiques. L’écriture met en jeu cinq activités simultanées : des acti-vités motrices, visuelles et occulo-manuelles qui sont communes au graphisme et des activités mentales et linguistiques qui sont plus spéci-fiques à l’écriture. Lors de la décou-verte progressive du code alphabéti-que, des compétences particulières sont développées.

L’écriture renvoie au mot, à sa re-connaissance, à sa reproduction, mais elle est indissociable du sens et du pouvoir des mots, des phrases, des textes. Ecrire, ce n’est pas seulement reproduire des signes dans un certain ordre ; écrire, c’est surtout produire du sens. Les élèves doivent donc sa-voir ce qu’ils écrivent, sinon ils ne sont que de simples copistes.

Pour communiquer, les élèves peu-vent être amenés à produire des écrits. Pour répondre à ce besoin d’écrire, on peut manipuler des étiquettes por-teuses de sens, mais on peut aussi utiliser des capitales d’imprimerie. Le passage à l’écriture cursive de-mandera du temps. En effet cela sup-pose que l’élève sache enchaîner des tracés spécifiques en respectant notre orientation culturelle, de gauche à droite, de bas en haut.

Les activités graphiques ont un rôle essentiel. Il ne faut pas oublier, comme le précisent les programmes, qu’apprendre à écrire, c’est faire un long parcours qui débute tout juste à l’école maternelle et se prolonge tout au long de l’école…

Quelques pistes pour l’élaboration d’une progression

1. Construire le geste moteur, per-mettre aux élèves de passer du geste spontané à un geste anticipé, réfléchi et maîtrisé :autiliser différentes échelles ;autiliser des articulations segmen-taires différentes ;aagir sur la pression de l’outil scrip-teur ;ase diriger progressivement vers une motricité fine ;arelier les activités graphiques à celles du domaine « agir et s’expri-mer avec son corps ».

2. Réaliser des activités graphiques permettant le passage d’un tracé à grande amplitude à un tracé minu-tieux, d’abord sur une grande surface puis sur des surfaces de plus en plus réduites et normées :autiliser les premiers acquis dans les activités de poterie, tissage, dé-coration d’objets créés, pâte à mode-ler ;apermettre l’enchaînement de li-gnes continues, brisées, discontinues, rectilignes, courbes ;aalterner les couleurs.Au cours de ces activités :autiliser des scripteurs de plus en plus fins et précis : le doigt, la plume d’oiseau, le morceau de bois ;aviser la fluidité et la lisibilité de l’écriture (levée minimale du crayon) avec des éléments extérieurs codifiés tels que le pinceau, le crayon à pa-pier, le feutre en agissant sur divers paramètres comme l’alternance des couleurs…as’appuyer sur une verbalisation des trajectoires pour donner tout son sens au graphisme dirigé ; la copie permet de mémoriser des graphies par le re-cours au modèle.

3. Permettre la découverte du code alphabétique :arecourir à l’écriture en lettres ca-pitales en travaillant avec les pré-noms ;

amettre en place progressivement les premières règles de la communi-cation écrite ;aintroduire l’écriture cursive d’a-bord sur une ligne, puis entre deux lignes.

Bernard CALVET et Patrice GOURDET,

conseillers pédagogiques à Viry-Chatillon

Pour un apprentissage réussi :s pratiquer quotidiennement le dessin libre et d’observation ;s s’entraîner à enchaîner des li-gnes simples, rectilignes, cour-bes, continues ou discontinues ;s tenir correctement les outils ;s construire un répertoire de ges-tes simples de l’écriture, le sens du tracé étant indiqué par une flèche ;s comprendre qu’écrire sert à communiquer, ce qui implique des tracés conformes à la norme et lisibles pour être compris.

L’enseignant doit effectuer un contrôle attentif lors des pre-miers essais d’écriture et veiller à la verbalisation.

Bibliographie

CALMY, G., Espace et graphisme, Nathan, 1981.

LURÇAT, L., L’activité graphique à l’école maternelle, ESF éditions, 1980.

Education enfantine, n°1054, Du dessin à l’écriture, novembre 2003.

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LA CONSCIENCE PHONOLOGIQUE

L’une des difficultés de l’apprentissage de la lecture réside dans le fait que les consti-tuants phonétiques du langage sont difficilement perceptibles pour le jeune enfant. »1 Catherine Combalier explique pourquoi et propose quelques pistes pour aider les élèves.

Des éléments de définition

Lorsque l’élève apprend à lire, il doit comprendre le principe alphabétique. Le plus souvent, à une unité graphique correspond une unité phonique. Autre-ment dit, les mots parlés sont représen-tés à l’écrit par la transcription de leur composition phonologique.

La conscience phonologique est la conscience que les mots sont compo-sés d’unités abstraites et structurées, entre autres les phonèmes2. Elle permet des activités de réflexion et de mani-pulation sur la langue qui devient un objet d’étude à observer et manipuler. Les habiletés phonologiques sont des compétences qui permettent de traiter les « sons » élémentaires de la langue (syllabes, rimes, phonèmes) et de les combiner.

Des études scientifiques

Certaines recherches ont montré une corrélation entre le niveau de conscien-ce phonologique des élèves et l’appren-tissage de la lecture. D’autres ont mis en évidence qu’un entraînement de la conscience phonologique avant d’ap-prendre à lire permet d’améliorer les performances en lecture.

Michel Zorman3 a montré qu’un en-traînement phonologique régulier, en petit groupe, des élèves de grande sec-tion repérés lors d’un pré-test comme ayant les plus faibles capacités méta-phonologiques leur permettait de faire des progrès significativement supé-rieurs à ceux des élèves qui n’en béné-ficiaient pas.

Les élèves ont été évalués sur des épreuves de manipulation phonologi-que :- compter les syllabes d’un mot ;- enlever l’une des trois syllabes d’un mot et dire ce qui reste ;- retrouver parmi trois mots celui qui ne commence pas par le même « bruit » que le mot-cible ;- identifier le phonème initial de huit mots en le prononçant ;- trouver parmi trois mots celui qui ne commence pas par le même « bruit »

consonne que le mot cible ;- supprimer le premier « bruit » du mot et dire ce qui reste.

Des perspectives pédagogiques

Il convient d’organiser les activités de la classe pour favoriser le développe-ment des compétences phonologiques de l’élève dès le cycle 1 et tout au long du cycle 2 en respectant quelques prin-cipes. Il faut permettre à l’élève de :- déplacer son attention des aspects sémantiques de la langue (le sens des mots) vers ses réalités sonores. On peut, à cet effet, réaliser des jeux sur la prosodie4 des mots, sur leur classe-ment en fonction de leur longueur, un mot long pouvant désigner un objet de petite taille tel que coccinelle ;- catégoriser certaines unités phonolo-giques, les regrouper, les comparer en leur proposant de fabriquer des mots-valises, des jeux d’assonances avec ou sans intrus… ;- réaliser des manipulations phonolo-giques.

Concernant ce troisième axe, une progression doit porter sur plusieurs aspects : les unités linguistiques et leur positionnement, la nature du lexique et les opérations intellectuelles à mobili-ser.

Il a été établi que la syllabe est la pre-mière unité phonologique disponible. L’ordre de développement semble être le suivant : la syllabe, la rime, l’attaque, le phonème. À cette progression portant sur la nature des unités linguistiques, il faut ajouter une progression relative à leur position dans le mot en position ini-tiale, finale et enfin interne. Par ailleurs, le lexique manipulé doit être, dans un premier temps, issu du registre familier de l’enfant. Pour commencer, on peut utiliser les prénoms des enfants qui sont des mots isolés et isolables, connus et facilement reconnus. Enfin, il convient d’alterner des tâches de manipulation de types différents : tâches de compa-raison, de catégorisation et de transfor-mation des éléments phonologiques. Citons quelques exemples : dénombrer, segmenter, fusionner, effacer, ajouter,

associer, substituer, inverser…Ces activités spécifiques à la grande

section de l’école maternelle se prépa-rent bien en amont lorsqu’on propose aux élèves de petite section d’écouter attentivement et de manière sélective le monde sonore (reconnaissance des bruits familiers, devinettes sonores, écoute musicale active…).

Catherine COMBALIER,conseillère pédagogique

à Savigny-sur-Orge

1. Qu’apprend-on à l’école maternelle, Program-mes 2002, Sceren/CNDP, 2002, p. 82.2. Le phonème est un élément sonore de la langue, le français oral comporte 36 phonèmes ([a], [u], [p], [k], etc.).3. ZORMAN, M., Évaluation de la conscience pho-nologique et entraînement des capacités phonolo-giques en grande section de maternelle, Rééduca-tion orthophonique n°197, 1999, pp. 139-157.4. Ensemble des éléments phoniques qui caractéri-sent le langage parlé : intonation affective, accent tonique, montée mélodique, etc.5. www.banqoutils.education.gouv.fr/6. http://www.bienlire.education.fr/

Quelques références

Parmi bien d’autres, les outils sui-vants peuvent aider efficacement les enseignants :

• Évaluation et aide aux apprentis-sages en grande section de mater-nelle et en cours préparatoire5 ;

• Les documents d’accompagne-ment Lire au CP 1 repérer les dif-ficultés pour agir et Lire au CP 2 enseigner la lecture et prévenir les difficultés ;

• Phono. Développer les compé-tences phonologiques en Grande Section et début de CP. S. Cèbe, R. Goigoux, J.-L. Paour, Hatier, 2004, à utiliser avec l’imagier ;

• Entraînement phonologique - prélec-teurs, M. Jacquier-Roux, M. Zorman, Editions de La Cigale, nouvelle édition juin 2002 ;

• Conscience phonologique, B. Stanké, Chenelière/Mc Graw Hill, 2000.• Les nombreux articles parus sur le site bienlire6.

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EPS AU CYCLE 1

Le domaine de connaissances et de compétences « agir et s’exprimer avec son corps » construit par des conduites motrices ne peut pas se dé-douaner d’une communauté d’obli-gations qui concerne également tous les domaines d’apprentissages.

Quelles obligations ?

• Le projet personnel de transforma-tion de l’élèveChaque élève a besoin de se construi-re un projet personnel de transforma-tion qui est souvent symbolique chez les plus jeunes : « Je vais devenir un lutteur ou un athlète. Je vais m’en-voler jusqu’au ciel… Je vais grimper plus haut que l’armoire… »

Ce projet ambitieux provoque de la jubilation, de la curiosité. Il motive l’élève à consentir des efforts pour s’approprier des compétences per-sonnelles nouvelles dans un disposi-tif commun.

• Le projet d’appropriation culturellePour que les élèves s’approprient de nouvelles compétences, l’enseignant doit construire avec eux un projet d’appropriation culturelle de l’AP-SA1, clair et structuré :- identifier les pratiques sociales de l’activité et les adapter à des élèves de cycle 1, notamment en utilisant des verbes d’action ;- identifier la spécificité de l’activité pour construire les situations d’ap-prentissages ;- déterminer l’organisation de la pé-riode et sa finalisation.

• La différenciation des propositions motricesLes conduites motrices sollicitées sont souvent trop contraignantes dans leur forme, empêchant une appropriation personnelle des obstacles. Pour être sources d’apprentissage, elles doi-vent être ouvertes et différenciées :- donner la possibilité de ne pas fai-re mais d’observer les pairs pour se

construire de premières représentations de ce qui est possible et de ce qui est attendu, en toute sécurité affective car sans prise de risque ;- différencier les possibilités de faire en permettant aux élèves. de faire et refaire la même action à l’identique sur le même dispositif, tant que le besoin s’en fait sentir ;. d’essayer en enfilade tous les dispositifs pour vivre toutes les actions consti-tutives de l’activité ;. de choisir différentes stratégies pour développer leurs propres réponses mo-trices ;- diversifier le matériel proposé et les consignes énoncées, prévoir et proposer différents niveaux de difficulté afin de présenter de réels problèmes à résoudre pour chaque élève dans un dispositif commun, dans une progression du grand débutant à l’expert.

Ces obligations doivent s’inscrire dans un temps suffisamment long et régulier pour que chaque élève bénéficie d’un apprentissage tenant compte de ses sin-gularités d’apprenant, identifie et apprécie les effets de ses actions propres au sein de l’activité collective.

Structurer les apprentissages moteurs, les identifier, en mesurer les effets et les nommer, les mettre en relation et les évoquer à distance de la pratique elle-même, feront l’objet de propositions spécifiques de la part de l’enseignant.

Quelles propositions ?

• Dans la séance de pratique, le bilan d’étape permet d’observer certaines actions, de les commenter dans leur légitimité par rapport à l’activité support et de les nommer. Il est préférable de placer ce temps aux deux tiers de la pra-tique, car après avoir observé, les élèves souhaitent s’essayer à ces actions.

• En classe, un certain nombre de dispositifs sont mis en place :- une séance de présentation générale de l’activité en amont de la première séance de pratique, pour faire formuler les représentations, les souvenirs et

Un exemple, concernant la compétence « s’équilibrer » dans le cadre des apprentissages gymniques :- Proposer en parallèle différents matériels pour marcher en équilibre sur un chemin sans épaisseur mais étroit, construit à partir de bandes de vieilles nattes de repos ; marcher en équilibre sur un banc ; marcher en équilibre sur une poutre basse ; marcher en équilibre sur une poutre plus haute.- Proposer des consignes complémentaires pour continuer à différencier les apprentissages : marcher en avant, en arrière ; marcher et changer de sens à mi-chemin ; marcher et s’arrêter pour produire une posture à différentes hauteurs par rapport au support ; enchaîner une entrée sur l’engin, deux marches différentes, une posture et une sortie d’engin...- Relancer par d’autres consignes la motricité au regard de la logique de l’activité : produire des déplacements et des actions esthétiques, originales et virtuoses puis enchaîner plusieurs actions dans un ensemble construit reproductible.Dans ce dispositif, les critères de progrès proposés aux élèves sont des élé-ments identifiables, quantifiables et évaluables.

Des élèves en action qui manipulent des objets et se confrontent à du matériel sont perçus comme des élèves en cours d’apprentissage. Ils agissent certes, ils expérimentent c’est fondamental, mais apprennent-ils autant que nous le souhaiterions ?

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ENSEIGNER L’ORAL A L’ÉCOLE MATERNELLE

Le  langage  est  une  fonction  naturelle  de  l’être  humain  1». Alors, apprendre à parler à l’école maternelle, pourquoi ? Comment ?

Que disent les programmes ?

Les programmes de 2002 font du lan-gage oral l’objectif prioritaire, l’axe majeur des activités de l’école mater-nelle confirmant que « l’école mater-nelle est d’abord l’école de la paro- le »2 . En effet, sur les quatre domaines du « Langage au cœur des apprentissages », trois concernent l’oral.

Le rôle de l’école maternelle est de pourvoir à l’enrichissement du lexique, de mettre l’accent sur la construction pro-gressive de la syntaxe, d’aider à la cons-truction du langage d’évocation. Cette capacité d’évocation doit être développée dans le cadre de dialogues, puis dans le cadre de véritables discussions suscitées et accompagnées par l’enseignant dans le but de faire acquérir aux jeunes élèves les règles d’un échange verbal organisé, condition nécessaire pour la réussite des apprentissages ultérieurs.

Ils affirment fortement la dimension transversale des apprentissages langa-giers. C’est à travers les cinq domaines d’activité de l’école maternelle que l’en-fant va apprendre à pratiquer les multiples usages et fonctions du langage.

Enfin, la priorité porte sur l’acquisition de compétences réparties dans trois do-maines, dont les composantes observables vont permettre d’évaluer les niveaux d’ac-quisition (voir tableau page suivante).

Ils précisent aussi que l’évaluation re-pose sur une observation quotidienne qui a pour fonction essentielle de permettre à l’enseignant de contrôler l’efficacité des situations programmées à partir de l’ana-lyse des besoins des élèves.

Quelles sont les situations possibles ?

Pour faire acquérir effectivement les compétences langagières, il convient de travailler l’oral en tant que tel et de pro-grammer des situations didactiques bien définies avec rigueur.• Les situations liées à la vie quotidienne de la classe : l’accueil, le passage aux toilettes, la récréation, le bilan de jour-née… intègrent les moments informels de

«

relation duelle qui sont importants. C’est dans ce contexte plus souple que certains élèves vont essayer de communiquer avec l’adulte, en particulier en petite section. • Les situations liées aux différen-tes phases des séances d’apprentis- sage : la mise en situation, l’exploration collective du savoir mis en jeu, la synthè-se réalisées généralement en grand groupe sont propices au démarrage, à la régula-tion ou au bilan d’un projet ou d’un ate-lier, aux échanges sur l’interprétation des consignes, au débat sur des problèmes liés à la réalisation des tâches, à la formulation des savoirs nouveaux…

Lorsque les situations langagières pro-posées sont authentiques, elles offrent l’intérêt de placer tous les élèves au cœur du processus de communication ; ils sont tous des récepteurs vrais, même s’ils ne prennent pas la parole. Mais en aucun cas, elles ne peuvent constituer la seule occa-sion d’entraînement des compétences lan-gagières.• Les situations langagières program-mées, organisées - en groupe classe : travail à partir d’une couverture d’album, description des élé-ments constitutifs, émission d’hypothèses sur le contenu de l’histoire…- en petits groupes d’élèves à be-soins spécifiques : travail à partir d’un jeu permettant l’acquisition de voca-bulaire ; travail à partir d’un album « écho » enrichissant la syntaxe ou facili-tant la maîtrise d’un lexique précis.

Bibliographie... quelques pistesBOISSEAU, P., Enseigner l’oral à l’école maternelle, CRDP Rouen, 2005.

CECCALDI, M., Pratiques langagiè-res en maternelle, CRDP Aix-Mar-seille, 2002.

KIRADY, G., La maternelle, école de la parole, CRDP Pays de Loire, 2002.

FLORIN, A, Parler ensemble à la ma-ternelle, Ellipses, 1995.

1. HEBRARD, J.2. BO HS n°8 du 21 octobre 1999 http://www.education.gouv.fr/bo/1999/hs8/texte.htm

les connaissances des élèves puis con-fronter ces éléments à des documents va-riés (photos, vidéos, illustrations…) qui représentent l’activité et enfin se mettre d’accord sur les actions attendues au re-gard de la logique de l’activité ;- des allers et retours entre ces premières informations et celles qui émergent de la pratique ; c’est l’occasion de construire et d’utiliser un lexique spécifique ;- l’archivage des actions et groupes d’actions développés lors des séances de pratique pour constituer un fonds de propositions d’actions et mener avec les élèves un travail sur les niveaux de dif-ficulté ; ces niveaux établis par la classe permettent des évaluations individuelles au cours des séances et amènent les élè-ves à développer leurs compétences.- le classeur ou le cahier d’EPS ou de « pratique physique et sportive » pour conserver une trace des temps vécus en EPS, des connaissances culturelles acquises, des progrès effectués indivi-duellement et par le groupe classe sous la forme d’un document à partager avec les familles.

Pour conclure

Cette démarche peut sembler difficile, pourtant elle se construit au fil de la pra-tique professionnelle. Elle est par ailleurs la garantie d’une mise en réseau des ap-prentissages si nous nous obligeons à ne composer avec les obligations que pour privilégier la pratique.

Danièle ALLEMANconseillère pédagogique en EPS

à Orsay

1. Activité physique sportive et artistique.

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Un outil au service de l’enseignement et de l’évaluation

COMPÉTENCES LES INDICATEURS POUR L’OBSERVATION ET L’ÉVALUATION

Domaine de la communication

Répondre aux sollicitations de l’adulte en se fai-sant comprendre dès la fin de la première année de scolarité (à trois ou quatre ans)

- Répondre de façon gestuelle- Répondre verbalement en utilisant des mots-phrases - Répondre verbalement en utilisant des groupes de mots compréhensibles (prononcia-tion, articulation, lexique)- Répondre par des phrases simples correctes (lexique, syntaxe… adaptés) - Répondre par des phrases complexes- Répondre par une succession de phrases (lexique, syntaxe… adaptés)

Prendre l’initiative d’un échange et le conduire au-delà de la première réponse

- S’exprimer sans avoir été sollicité- S’exprimer en attendant une réponse- S’exprimer en poursuivant l’échange

Participer à un échange collectif en acceptant d’écouter autrui, en attendant son tour de parole et en restant dans le propos de l’échange

- Ecouter l’adulte et/ou ses camarades- Prendre la parole à son tour- Rester dans le propos de l’échange- Montrer qu’on tient compte des propos d’autrui

Domaine du langage d’accompagnement de l’action (langage en situation)

Comprendre les consignes ordinaires de la classe

- Exécuter une consigne simple - Exécuter une consigne complexe- Connaître le lexique adéquat- Reformuler la consigne donnée- Dire si la consigne est respectée- Inventer des consignes

Dire ce que l’on fait ou ce que fait un camarade (dans une activité, un atelier…)

- Verbaliser une action simple- Verbaliser des actions successives - Verbaliser des actions simultanées

Prêter sa voix à une marionnette

- Imiter le personnage (« un loup »…) en utilisant ses propres mots - Imiter le personnage en reprenant des formules empruntées à des histoires connues - Imiter le personnage de façon expressive en tenant compte de ses caractéristiques- Imaginer différents dialogues pour divers personnages

Domaine du langage d’évocation

Rappeler en se faisant comprendre un événement qui a été vécu collectivement (sortie, activité sco-laire, incident)

- Rappeler un élément d’un évènement vécu récemment en restant le plus fidèle possible- Rappeler plusieurs éléments d’un évènement vécu récemment en restant le plus fidèle possible - Rappeler une succession d’éléments d’un évènement vécu récemment en respectant l’ordre chronologique - Rappeler des événements plus lointains, successifs ou simultanés

Comprendre une histoire adaptée à son âge et le manifester en reformulant dans ses propres mots la trame narrative de l’histoire

- Reformuler un des éléments de la trame narrative- Reformuler plusieurs éléments de la trame narrative - Reformuler plusieurs éléments de la trame narrative en respectant la chronologie - Reformuler la totalité de la trame narrative

Identifier les personnages d’une histoire, les caractériser physiquement et moralement, les dessiner

- Reconnaître et nommer un personnage - Reconnaître et nommer plusieurs personnages- Reconnaître et nommer le personnage principal - Reconnaître et nommer les personnages principaux- Décrire physiquement ce (ou ces) personnage(s)- Décrire moralement ce (ou ces) personnage(s) en rapport avec leur comportement - Désigner et nommer ces personnages de différentes façons- Les comparer entre eux - Les comparer avec des personnages issus d’autres histoires

Brigitte PRECHEUR, PEMF à l’IUFM d’Etiolles

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BERDONNEAU, Catherine, Mathématiques actives pour les tout-petits, Hachette, 2005Cet ouvrage présente des situations d’apprentissages mathémati-ques dès l’âge de deux ans. Les contenus mathématiques aborda-bles en petite section sont répartis en quatre parties : développe-ment de la pensée logique ; structuration de l’espace et découverte de la géométrie ; domaine numérique ; grandeurs, repérage et ap-proche de la mesure. Les situations répondent à la diversité des besoins des élèves et soulignent l’importance de la manipulation.

BRIQUET-DUHAZE, Sophie, Différencier sa pédagogie à l’éco-le maternelle MS et GS, Bordas, 2005La différenciation pédagogique en maternelle a pour objectif de répondre à l’hétérogénéité des élèves, de lutter contre l’échec scolaire, de développer le désir d’apprendre et l’autonomie. Cet ouvrage présente le mode de fonctionnement de différents ateliers en pédagogie différenciée : rituels, langage, graphisme, écriture, lecture, arts plastiques…

SIMONPOLI, Jean-François, Nouveaux ateliers de langage en maternelle, Hachette, 2005Des fiches de mise en situation sont proposées à travers quatre ob-jectifs : parler pour être ; parler pour mettre en mots l’expérience ; parler pour faire varier les formes ; parler pour construire le sens. L’auteur présente aussi des outils d’observation, de préparation, des fiches d’évaluation et des propositions de programmation.

PILLOT, Jacqueline, Enseigner à l’école maternelle. Quelles pratiques pour quels enjeux ?, ESF, 2004L’enjeu de l’école maternelle, c’est de donner du sens à l’école. Pour aider l’enseignant dans cette tâche, l’auteure synthétise ici son expérience d’enseignante et ses recherches en sciences de l’éducation et psychologie de l’enfant. L’ouvrage présente les no-tions théoriques qui sont résumées dans des encarts et contient des fiches méthodologiques.

Publication gratuite

ISSN N°1269-4010ISBN N° 2-86637-457-6

Directrice de la publicationMarie-Louise TESTENOIRE, inspectrice d’académie

Directrice de la rédactionHélène OUANAS, inspectrice de l’Éducation nationale

auprès de l’inspectrice d’académieDirecteur d’édition

Patrick MORISI, directeur du CDDP de l’Essonne

Rédactrice en chefMartine LAGEAT, inspectrice de l’Éducation nationale

Comité de rédaction

Pierre ALDEGUER, directeur d’écoleBernard CALVET, conseiller pédagogique

Didier DAMET, professeur ressource en informatiqueRolande DELORD-LASSUS,

directrice d’école d’applicationJean-François GEY, directeur d’IMPROJoëlle HAIZE, conseillère pédagogique

Michèle PELLOUX, coordonnatrice REPNadine PETIT, inspectrice de l’Éducation nationale

Jean-François PINON-DAVID, inspecteur de l’Éducation nationale

Geneviève RANC, inspectrice de l’Éducation nationaleDanielle RODA, professeure des écoles honoraireJoëlle THEBAULT, professeure d’IUFM en lettres

modernes Carole TISSET, maître de conférence

CoordinationMarie-José BOURNELLE, documentaliste au CDDP

Annick VINOT, conseillère pédagogique

Maquette et mise en pageAnne CLUZEL-MARTIN, maquettiste au CDDP

IllustrationsPatrice GOURDET, conseiller pédagogique

CorrectionSylviane CHAULEY, professeure des écoles

ImprimerieTAAG

91350 Grigny

Mise sous pliLes élèves de l’IMPRO R. Lecherbonnier

de Palaiseau

BLÉ 91est disponiblesur le site de l’inspection académique :

http://www.ac-versailles.fr/IA91/ressources/ble/ble91.htm

Pour toute correspondance :BLÉ 91

Inspection de l’Éducation nationaleÉcole Louise Michel10, rue L. Armand

91220 BRÉTIGNY-SUR-ORGETél : 01 60 84 29 43 – Fax : 01 60 85 02 81

[email protected]

À DÉCOUVRIR

Ces  ouvrages  sont  en  prêt  au  CDDP  d’ÉVRY  et  au CLDP de Massy. Les bases documentaires d’Évry et de Massy sont consultables sur le site du CDDP : 

  http://www.crdp.ac-versailles.fr/cddp91/mediatheque/media.html

Documents d’accompagnement des programmes

Pour une scolarisation réussie des tout-petits, SCEREN, 2003

Le langage à l’école maternelle, SCEREN, 2006

Mathématiques, cycle 2, SCEREN, 2002

Enseigner les sciences à l’école (cycles 1 et 2), SCEREN, 2002

Découvrir le monde, cycle 2, SCEREN, 2003

Découvrir le monde à l’école maternelle- le vivant, la matière, les objets, SCE-REN, 2005

La sensibilité, l’imagination, la création - école maternelle. Education artisti-que - école élémentaire, SCEREN, 2003

Marie-José BOURNELLEdocumentaliste au CDDP d’Évry