Résultats clé sur les IFS et le jeu du chaos
Transcript of Résultats clé sur les IFS et le jeu du chaos
Pour en savoir un peu plus sur les fractales, les IFS et le jeu du chaos
Préparation de l’activité « Les fractales, des maths de toute beauté! »
Geneviève Savard, École de technologie supérieure
Septembre 2009
Présentation de l’activité ...................................................................................................................... 2 Machines à réductions multiples ou IFS .............................................................................................. 3
Propriétés des machines à réductions multiples (ou IFS) ........................................................ 5 Exemple classique de fractale : le Tapis de Sierpinski (1915) ................................................. 6 Exemple spectaculaire : la fougère de Barnsley (1988) ........................................................... 6
Description d’un IFS par matrices ou images .......................................................................... 7 Comment reproduire une image générée par un IFS inconnu ou une création de Dame Nature? ....... 8
Comment apporter des ajustements à une image? ................................................................. 13
Retrait d’une des transformations de l’IFS ............................................................................ 14
Brève description du programme IFS Construction Kit .................................................................... 15 Quelques raccourcis clavier ................................................................................................... 18 Qualité de l’image produite .................................................................................................... 19
Impression .............................................................................................................................. 20 Les fractales de l’activité ....................................................................................................... 21
Le jeu du chaos .................................................................................................................................. 26 Quelques faits importants sur le jeu du chaos ........................................................................ 27 Le jeu du chaos avec IFS Construction Kit ............................................................................ 30
Démonstration de 3 propriétés des IFS (pour matheux avertis!) ....................................................... 31 Bibliographie ...................................................................................................................................... 32
G. Savard 2 septembre 2009
Présentation de l’activité L’activité Les fractales, des maths de toute beauté! était d’abord destinée à des jeunes du
secondaire venus visiter l’ÉTS pour une journée d’activités scientifiques. Au fil des années, nous
avons constaté qu’en l’adaptant légèrement, elle pouvait aussi intéresser des cégépiens ou des
élèves de 6e année du primaire. Peu importe l’âge des participants, la présence de coanimateurs
qui connaissent un peu le logiciel utilisé (environ une heure ou deux de familiarisation) est
souhaitable. Ces coanimateurs sont en général des étudiants en génie et des professeurs de
sciences ou de mathématiques : aucune connaissance préalable sur les fractales n’est requise. Le
présent texte, destiné aux plus curieux, se veut un complément d’information sur les systèmes de
fonctions itérées (IFS) qui génèrent les fractales de l’activité, accompagné d’explications sur le
logiciel utilisé.
Déroulement de l’activité
• Accueil et brève présentation des fractales : 10 à 15 min.
Qu’est-ce qu’une fractale? Applications? Comment créer des fractales?
• Introduction au logiciel IFS Construction Kit : 5 min.
• Création de fractales par les jeunes en équipe de deux : 30 à 90 min.
G. Savard 3 septembre 2009
Machines à réductions multiples ou IFS
Tel un photocopieur, une machine à réductions multiples (Multiple Reduction Copy Machine ou MRCM)
crée une image de sortie à partir d’une image d’entrée. Cependant, elle reproduit l’image initiale en plus
petit et à plusieurs endroits sur la feuille. L’image qui en résulte est donc la superposition de contractions
possiblement déformées de l’image initiale (par des symétries, rotations ou étirements).
N.B. En mathématiques, on utilise la terminologie IFS, pour Iterated Function System (système de fonctions itérées)
plutôt que celle de machine à réductions multiples. La théorie des IFS fut développée par Jonh Hutchinson en 1981.
Exemple d’une machine à 3 contractions. On voit son effet sur différentes images initiales.
G. Savard 4 septembre 2009
En réintroduisant constamment l’image de sortie dans la machine à réductions multiples, on obtient une
suite d’images
Avec les pentagones :
G. Savard 5 septembre 2009
Propriétés des machines à réductions multiples (ou IFS)
L’observation des exemples précédents porte à croire que les IFS possèdent les caractéristiques suivantes.
1. Hormis la couleur, la suite d’images produite par la machine semble tendre vers la même image
limite quelque soit l’image initiale.
Analogie avec le bol : peu importe la position initiale de la bille, celle-ci se stabilisera toujours à la même
position dans le bol. Pour un IFS, l’image initiale correspond à la bille bleue et l’image limite correspond à la
position rouge; la position finale (en rouge) ne dépend que de la forme du bol et non de la position initiale de la
bille. Certains récipients originaux peuvent avoir 2 « creux », deux positions d’équilibre. Ce n’est jamais le cas
pour un IFS. L’unique image limite est appelée « attracteur », une terminologie provenant de la théorie des
systèmes dynamiques.
2. L’image limite, notons-la L, est invariante sous l’action de la machine : quand on donne L comme
entrée à la machine, celle-ci nous retourne exactement la même image à la sortie.
3. L’image limite L est autosimilaire : chaque partie de l’image ressemble à l’image globale.
Il s’agit donc d’une fractale.
Ces observations ne sont pas trompeuses. On peut démontrer rigoureusement chacune des trois propriétés
(voir page 31).
L L
G. Savard 6 septembre 2009
Exemple classique de fractale : le Tapis de Sierpinski (1915)
À chaque étape, trois contractions de l’image précédente sont imprimées. À l’époque, le processus
itératif de « fabrication » du tapis n’était pas vu sous l’angle des IFS. On le décrivait par retraits
successifs : à chaque étape, on découpe un triangle au centre de chacun des petits triangles de l’étape
précédente.
Exemple spectaculaire : la fougère de Barnsley (1988)
En 1988, avec sa fameuse image de fougère produite par un IFS à 4 transformations, Michael Barnsley1
popularisa les IFS en montrant qu’ils ne produisent pas que des aberrations mathématiques comme le
tapis de Sierpinski (1915) ou l’ensemble de Cantor (1884) et que plusieurs permettent de modéliser les
œuvres de Dame Nature!
1 Fractals everywhere, Michael Barnsley, Academic Press, 1988.
G. Savard 7 septembre 2009
Description d’un IFS par matrices ou images
Pour décrire une machine à réductions multiples, il suffit de préciser chacune des contractions utilisées (au
moins 2). Chaque contraction peut-être décrite par 6 nombres. En effet, chaque contraction est une
transformation affine2 du plan et son effet sur un point P=(x, y) peut être décrit à l’aide de matrices par
( )a b x e
w Pc d y f
.
La matrice a b
Ac d
code la combinaison des rotations, réflexions et homothéties caractérisant la
transformation. Elle doit correspondre à une contraction du plan (son déterminant doit donc être inférieur
à 1). Le vecteur (e f) code la partie translation de cette transformation.
Le logiciel IFS Construction Kit offre la possibilité d’entrer directement les valeurs des coefficients a à e.
Mais pour ceux qui ne connaissent pas les matrices, il est possible de décrire les transformations
souhaitées autrement : il suffit de dessiner un polygone initial (en pointillé sur l’image ci-dessous) et son
image après transformation. Le logiciel déterminera lui-même les coefficients correspondants.
2 Nous ne considérerons ici que des IFS à transformations affines. On appelle flame IFS des fractales obtenues par
des fonctions non linéaires. Nous n’en discutons pas dans ce texte.
G. Savard 8 septembre 2009
Comment reproduire une image générée par un IFS inconnu ou une création de Dame Nature?
Quel est le nombre minimal de transformations requises pour générer l’image? Comment déterminer
précisément ces transformations? Voilà précisément le défi lancé lors de l’activité. En effet, les
participants auront d’abord à reproduire des fractales données. Cependant, des copies réduites de l’image
initiale sur acétate seront fournies, ce qui facilitera beaucoup la tâche. L’idée est de découvrir la structure
autosimilaire de l’image. Les exemples suivants indiquent une façon de procéder.
Exemple 1 : reproduction d’une image générée par un IFS inconnu
1. On crée un polygone initial inspiré de l’image à reproduire. On peut utiliser n’importe quel type de
polygone mais il sera plus facile de travailler avec un polygone semblable à l’image à recréer. Cette
étape est déjà effectuée pour les premières fractales de l’activité : on a tracé le triangle équilatéral
sur la figure et on a reproduit des copies contractées de la figure sur du papier transparent.
2. On tente de reproduire l’image de départ avec des copies réduites de l’image initiale. La première
chose à déterminer est le nombre minimal de copies requises (3 pour cet exemple).
G. Savard 9 septembre 2009
3. On décrit au logiciel les transformations requises. Pour ce faire, on observe les positions relatives des
petits triangles par rapport au gros triangle que l’on a tracé sur l’image.
On s’arme de patience pour ajuster les transformations en observant l’IFS produit par un logiciel3.
Remarque. La technique décrite ici pour créer des images fractales provient directement du Collage
Theorem démontré par Barnsley en 1985. Voir page 96 de Fractals Everywhere.
3 Nous utilisons le logiciel gratuit IFS Construction Kit.
G. Savard 10 septembre 2009
Exemple 2 : reproduction d’une création de Dame Nature.
1. On crée un polygone initial (en pointillé sur l’image de gauche) inspiré de l’image à reproduire, une
fougère4 dans le cas présent. On peut utiliser n’importe quel type de polygone mais il sera plus facile
de travailler avec un polygone semblable à l’image à recréer.
2. On tente de reproduire l’image de départ avec des copies réduites du polygone. La première chose à
déterminer est le nombre minimal de copies requises (4 pour la fougère).
3. On s’arme de patience pour ajuster les transformations en observant l’IFS produit par un logiciel5.
4 Cette image de fougère provient de l’adresse : www.naturepixel.com/feuille_fougere_1.jpg
5 La fougère sur fond bleu a été produite avec le logiciel IFS Construction Kit.
A. Une copie pour la
feuille inférieure
gauche B. Une copie pour la
feuille inférieure droite
située légèrement plus
haut sur la tige.
C. Une copie faiblement
contractée pour le reste de la
feuille.
D. Une copie très contractée et comprimée
horizontalement pour la tige.
G. Savard 11 septembre 2009
Exemple 3. On peut travailler avec un polygone initial très complexe calqué sur l’image à reproduire.
Avec deux copies contractées et bien positionnées, on recrée l’image de départ.
Il est parfois plus facile de travailler avec des polygones très simples comme des triangles ou des
rectangles. Attention! On ne doit plus tenter de recouvrir le polygone de départ (en pointillé) mais
simplement penser aux transformations que les copies réduites de l’image initiale doivent subir afin de la
recréer.
copie réduite
copie réduite et pivotée Deux copies réduites, pivotées
et repositionnées pour couvrir le
polygone initial
Deux copies
réduites, pivotées et
repositionnées, non
pas pour couvrir le
polygone initial mais
pour recréer l’image
elle-même.
G. Savard 12 septembre 2009
Voici l’IFS de la fougère de l’exemple 2 présenté avec différents polygones initiaux très simples.
G. Savard 13 septembre 2009
Comment apporter des ajustements à une image?
J’aimerais modifier l’image de fougère de la page précédente :
grossir ses feuilles et laisser plus d’espace entre elles,
faire subir une réflexion aux feuilles de droite pour qu’elles pointent vers le haut.
J’ajuste donc les copies du polygone initial en conséquence.
Je diminue la taille du triangle supérieure pour espacer les feuilles.
J’augmente la taille des triangles correspondants aux feuilles inférieures.
J’effectue une réflexion sur le triangle de la feuille inférieure droite (le L permet
de constater cette réflexion). Remarquez que toutes les feuilles de droite de la
fougère subissent cette réflexion!
J’ajuste la tige par essais et erreurs.
Je souhaite maintenant que les feuilles de gauche et de droite soient plus symétriques.
Pour cela, je reproduis le triangle de la feuille de gauche et je lui fais subir une réflexion.
G. Savard 14 septembre 2009
Effet du retrait d’une des transformations de l’IFS
Quelle conséquence aurait la disparition de la transformation illustrée par le triangle
inférieur droit? On peut imaginer que l’image sera la même, à l’exception de la feuille
inférieure droite qui disparaîtra. Vérifions cette hypothèse.
En retirant la transformation
donnée par le triangle inférieur
droit, les moitiés droites de toutes
les feuilles, sous-feuilles et sous-
sous-feuilles disparaissent.
Ceci est dû à la propriété
d’autosimilitude que possèdent
les images générées par des IFS.
G. Savard 15 septembre 2009
Brève description du programme IFS Construction Kit
Avant de démarrer le programme, il est essentiel de reconfigurer le symbole du séparateur
décimal6. Pour commencer, il est très utile d’ajouter la fenêtre Preview qui donne un aperçu de
l’image en temps réel (Menu Design).
Dans le menu Draw, on voit qu’il y a 2 façons de tracer l’image :
1. Random : génère l’image plus rapidement (voir section sur le jeu du chaos pour en savoir
plus). Nous utiliserons ce mode pour la création de fractales.
2. Deterministic : permet de bien voir l’effet « Machine à réductions multiples », une
réduction à la fois. Voir image de la page suivante.
Ce menu permet aussi de modifier l’image initiale, les couleurs, d’afficher les points fixes des
transformations, d’effectuer des zooms…
Avant de tracer l’image, on efface la précédente avec Draw/Clear.
Pour débuter l’affichage de l’image, on peut utiliser le bouton « Play » de la barre du haut. Et, en
mode d’affichage « Random », on appuie sur le bouton « Stop » pour arrêter les calculs.
6 Pour cela, aller dans Démarrer/Paramètres/Panneau de configuration/Options régionales et
linguistiques/Options régionales, bouton Personnaliser, case Symbole décimal : entrer un point plutôt que la
virgule proposée. Cette modification sera apportée à tous les postes de travail avant l’activité. L’oubli de
cette modification entraîne un mauvais fonctionnement des zooms.
G. Savard 16 septembre 2009
Le mode Deterministic permet de bien voir l’effet « Machine à réductions multiples ».
G. Savard 17 septembre 2009
Menu Design
1. Use Initial Polygon : permet de changer le polygone initial subissant les
transformations. Comme nous l’avons observé à la page 5, cela n’a aucune
influence sur le résultat final. Mais il est plus naturel de travailler avec une forme
évoquant mieux l’image fractale à atteindre.
2. Pour modifier une transformation, il faut d’abord sélectionner le triangle
correspondant avec la souris, puis, avec le bouton de droite ou le menu Design, lui
appliquer une rotation, un étirement, une translation, etc. Mais il est plus efficace
d’utiliser les raccourcis clavier.
G. Savard 18 septembre 2009
Quelques raccourcis clavier
Étirement : Ctrl E ou on sélectionne
un des points du cadre et on étire
avec la souris
(un point « non coin » produira un
étirement unidirectionnel).
Pour conserver les proportions de la
figure : Ctrl S (scale)
ou Shift + souris pour ajuster le coin.
Rotation : Ctrl R, puis on entre le
nombre de degrés ou Ctrl + souris
pour pivoter le coin.
« Sheer » : en cliquant sur Ctrl + un
des côtés noirs latéraux (et non sur un
coin).
Translation : On glisse le triangle avec
la souris en le sélectionnant n’importe
où sauf sur le cadre.
Réflexion horizontale : Ctrl H
Réflexion verticale : Ctrl L
Nouvelle transformation : Ctrl N
Dupliquer une transformation : Ctrl U.
G. Savard 19 septembre 2009
Qualité de l’image produite
Pour générer la plus belle image possible le plus rapidement possible, il est important que la
probabilité associée à chaque transformation soit proportionnelle à l’aire de la figure qui la définit
(voir section sur le jeu du chaos). Après avoir modifié les figures des transformations, ou en avoir
changé le nombre, il faut donc penser à cliquer sur l’option Proportionnal
Probabilities du Menu Code. On peut aussi modifier la probabilité dans la fenêtre IFS,
en s’assurant que la somme des probabilités est 1.
G. Savard 20 septembre 2009
Impression
Pour imprimer : Print dans le menu File, puis on précise la fenêtre à imprimer. La résolution
est un peu décevante. On peut aussi Copier-Coller l’image dans un fichier Word puis la rétrécir
pour diminuer la taille des points, ce qui produira une plus belle image. Ceci permet aussi de
placer plusieurs images sur une seule feuille, ce qui économisera papier et temps d’attente. Avant
d’imprimer, il vaut mieux attendre qu’un grand nombre de points soient tracés (voir case au bas de
la fenêtre Fractal).
nombre
de points
tracés
G. Savard 21 septembre 2009
Les fractales de l’activité
Avant de regarder les pages qui suivent, je vous conseille d’essayer de retrouver les
transformations vous-même à l’aide du matériel dont disposeront les participants. Voici les
formes à recréer.
G. Savard 22 septembre 2009
Dentelle
Attention! Ici, l’orientation de la figure initiale n’est pas conservée : les spirales frisent vers la droite sur la
reproduction mais vers la gauche sur l’image de départ. Pourquoi? Remarquez le L tracé sur chaque petit carré : il
permet de distinguer les réflexions et de mieux percevoir les rotations. Dans l’image ci-dessus, les deux
transformations font subir une rotation de 45 degrés en sens horaire au carré initial. Dans l’image ci-dessous, les
rotations sont effectuées dans le sens antihoraire. Notez l’impact sur le sens des spirales.
G. Savard 23 septembre 2009
Fougère (difficile !)
Ici, j’ai d’abord défini un nouveau polygone initial dans la fenêtre Design. Je l’ai nommé
Triangle_rectangle.gon et il pourra être réutilisé (Design / Load Initial Polygon).
Procédure pour tracer un polygone de départ.
Design Initial Polygon
Cliquer pour afficher premier sommet puis les subséquents.
L pour lever le crayon (pour aller marquer l’angle droit par exemple)
Q pour quitter après avoir tracé le dernier sommet.
Quatre copies du triangle sont requises (dont une très dégénérée pour la tige). Un des triangles
doit subir une réflexion (feuille de droite).
Patience pour ajuster la tige! La fenêtre Preview est utile…
Pour ajuster rapidement les couleurs, on clique sur les petits carrés de couleur de la fenêtre IFS.
G. Savard 24 septembre 2009
Hexagone de Sierpinski
ou
G. Savard 25 septembre 2009
Feuille d’érable (tout un défi!)
G. Savard 26 septembre 2009
Le jeu du chaos
On fixe un point de départ Z0 et trois (ou n) points de référence de couleurs distinctes. À chaque
étape, une des trois couleurs est choisie au hasard. On trace alors le point situé à mi-chemin entre
le carré de la couleur choisie et le point précédent. Au fil du temps, les points apparaissent au
hasard des couleurs choisies, semblant d’abord créer un nuage de points aléatoires. Mais quand
leur nombre est suffisamment grand, on commence à percevoir une structure dans le nuage : le
processus converge vers le tapis de Sierpinski! L’ordre surgit du Chaos…
…
Avec un point de départ différent :
Z0 Z1
Z1
Z2
Z3
Z4
Z1
Z2
Z0
G. Savard 27 septembre 2009
Un jeu du chaos plus compliqué : on ajoute des rotations, des symétries, des étirements… à chaque
étape, une des transformations est choisie au hasard et elle effectuée sur le dernier point tracé.
Quelques faits importants sur le jeu du chaos
1. Cette façon de générer le tapis de Sierpinski ou tout autre IFS est beaucoup plus rapide que la
procédure déterministe de la machine à réductions multiples.
2. Le jeu du chaos revient en fait à choisir un point de départ dans le plan et à lui appliquer
aléatoirement une des transformations générant le tapis de Sierpinski (ou tout autre IFS). Le dé
qui décide laquelle des transformations sera appliquée peut être biaisé ou non.
3. En calibrant le dé de façon à ce que la probabilité de choisir une transformation soit
proportionnelle à l’aire du triangle qui la définit7, le jeu du chaos produit beaucoup plus
rapidement l’image limite. (Mais est-ce la meilleure façon d’ajuster les probabilités? Cela reste
un problème ouvert.) Pour le tapis de Sierpinski, chacune des trois contractions est
équiprobable. Pour la fougère, il est très important d’ajuster les probabilités pour obtenir
une belle image.
Voici les images produites en ajustant ou non les probabilités (chacune comportant 187 000 points).
7 La probabilité doit donc être proportionnelle au déterminant de la matrice A de la transformation, exception
faite du cas où ce déterminant est nul comme celui de la tige de la fougère, auquel cas la probabilité est fixée à une
petite valeur e.
Z0
G. Savard 28 septembre 2009
4. Si le point de départ du processus appartient au « vrai » tapis de Sierpinski, ou en général à
l’image limite L, alors tous les points générés par le jeu du chaos appartiendront eux-aussi à
l’image limite. (En effet, si le point P appartient à L, alors les trois points formant T(P)
appartiennent aussi à L car L est invariante par T.)
5. Par contre, si le point de départ z0 n’appartient pas au tapis (à L), alors aucun des points générés
par le jeu ne sera situé sur le tapis : ils seront situés de plus en plus près de vrais points du tapis
sans jamais le toucher (près au sens de la distance de Hausdorff, voir page 31).
6. Pour démontrer que le jeu du chaos réussit à produire le tapis de Sierpinski (ou toute autre
image limite) avec autant de précision que l’on veut, c’est-à-dire que chaque point du vrai tapis
est approché par un point de la suite avec une distance inférieure à une marge e donnée, on
introduit la notion d’adressage8.
L’adresse d’un point correspond à la liste infinie de
transformations qu’a subies l’image de départ pour
aboutir à ce point. (Certains points possèdent deux
adresses distinctes, ce qui n’arrive jamais si les
transformations sont totalement disjointes.)
Une adresse finie de longueur n correspond non pas à
un point, mais à une région (un petit triangle dans
l’exemple ci-contre) dont l’adresse de l’ensemble des
points est identique pour les n premières positions. Par
exemple, tous les points du tapis compris dans le
triangle noir ont une adresse débutant par (23).
L’ensemble des 27 adresses de l’approximation du
tapis ci-contre forme un arbre ternaire. Si le générateur
de nombres aléatoires est vraiment aléatoire (!) toutes
les adresses de longueur 3 seront visitées à plus ou moins long terme par le jeu du chaos. Si un
défaut dans sa programmation entraîne qu’une des combinaisons n’apparaît jamais, il manquera
alors un point dans l’image, c’est-à-dire que certains points du vrai tapis ne seront pas
approchés suffisamment par l’approximation.
8 Voir chapitre 6.2 du livre Chaos and Fractals de Peitgen, Jürgens & Saupe.
De façon plus rigoureuse, c’est la suite d’images
E0, E1, E2, …
obtenues en laissant tomber les premiers points générés
par le jeu,
E0 = {zo, z1, z2, z3, z4, …}
E1 = {z1, z2, z3, z4, …}
E2 = {z2, z3, z4, …}
qui converge vers l’image finale L, en ce sens que la
distance de Hausdorff entre les images de la suite et L
tend vers 0.
333
132 231
323
232
233
223
221 222
23333...
333
132 231
323
232
233
223
221 222
23333...
1 2
3
Z1
Z2
Z0
G. Savard 29 septembre 2009
2
333
132
113 211
321
332
3
3
233
223
2
2
122
11
312
3
La figure ci-contre illustre l’exemple du point
de départ 132 qui subit d’abord la transforma-
tion 1. Sa nouvelle adresse à 4 chiffres serait
1132, mais si l’on s’en tient à une
approximation de « niveau 3 », on laisse
tomber le chiffre de droite pour obtenir 113.
Puis, le jeu du chaos choisit la transformation 2,
ce qui génère le point d’adresse 211. Ainsi de
suite! On peut voir la suite des adresses à 3
chiffres ainsi généré comme un long ruban sur
lequel se déplace une fenêtre de largeur 3.
…3 1 2 2 3 3 2 1 1 3 2
132, 113, 211, 321, 332, 233, 223, 122, 312, …
7. Concernant la lenteur des zooms. Une des fonctions intéressantes du logiciel utilisé est celle
qui permet d’agrandir une partie de l’image : elle permet de mieux comprendre la propriété
d’autosimilitude des fractales. Cependant, plus on agrandit une image, plus le logiciel met de
temps à la produire. En fait, il ne peut se limiter aux calculs des points situés dans la fenêtre
voulue : il doit générer de nombreux points de l’image globale pour n’afficher que ceux situés
dans la fenêtre voulue. « Each of these algorithms provides a global construction which
generates points distributed across the whole fractal. If a small area of the fractal is being
drawn, many of these points will fall outside of the screen boundaries. This makes zooming
into an IFS construction normally impractical. Where a high degree of detail is required in a
small area of the fractal, local construction methods based on calculating forward orbits and the
fate of individual points may be more efficient (although no software for solving IFS does
this). » Wikipédia9
9 http://en.wikipedia.org/wiki/Iterated_function_system
3
1 2
G. Savard 30 septembre 2009
Le jeu du chaos avec IFS Construction Kit
Pour afficher un point à la fois :
1. Draw/Turn Trace On (voir case du bas de la fenêtre Fractal : "Trace On.")
2. Draw/Fixed Points pour afficher les points fixes.
3. Ctrl + clic bouton de droite pour fixer le point de départ du jeu (point noir).
4. Espace pour choisir une des transformations au hasard et afficher le nouveau point (voir # de
la transformation dans case du bas). Si Trace/Color Dots est activé, alors la couleur du
nouveau point sera celle qui est associée à la transformation choisie. Pour choisir soi-même la
transformation à effectuer, il suffit d’entrer son numéro sur le clavier.
G. Savard 31 septembre 2009
Démonstration de 3 propriétés des IFS (pour matheux avertis!)
Revenons aux propriétés des IFS observées à la page 5. Leur démonstration repose sur plusieurs notions
d’analyse. En voici les grandes lignes (détails dans les ouvrages 1 ou 8 de la bibliographie).
1 et 2. La suite d’images produite par la machine tend vers la même image limite quelle que soit
l’image initiale. De plus, l’image limite L est invariante sous l’action de la machine. Ceci est une conséquence du fameux théorème du point fixe de Banach (1922) : toute contraction f d’un
espace métrique complet admet un unique point fixe (et ce point fixe est la limite de toute suite d’itérations (a0=x, a1=f(a0), a2=f(a1), …).
Ici, la machine effectuant les 3 copies contractées et déformées constitue elle-même une transformation
T (appelée opérateur de Hutchinson).
1 2
:
C ( ) ( ) ... ( )n
T E E
f C f C f C
T
T
T
… =
a0 T
a1 T
a2 T
… = L
Cette transformation est une contraction de l’espace métrique E dont les éléments sont les sous-
ensembles compacts du plan (les images en noir et blanc) et où la distance entre deux éléments est la
distance de Hausdorff10
. L’image L est le point fixe de cette contraction.
Remarque. Le théorème du point fixe permet aussi, en prime, de déterminer à quelle « vitesse »
la suite d’itérations (a0=x, a1=f(a0), a2=f(a1), …) tend vers sa limite a , c’est-
à-dire d’établir le nombre n d’itérations requises pour que la distance entre an et a soit
inférieure à une distance donnée. Pour cela, il suffit de connaître le facteur de contraction c
de la transformation f ainsi que la distance entre a0 et a1 :
0 1( , ) ( , )1
n
n
cd a a d a a
c
d( , )
2
1
c
c d( , ).
Dans le cas de la transformation de Hutchinson T définie par les contractions f1 à fn de facteur
c1 à cn, le facteur c de T est le maximum des ci.
3. L’image limite L est autosimilaire : chaque partie de l’image ressemble à l’image globale.
Puisque l’image L est invariante par la transformation T, L est donc « égale » à la superposition de
plusieurs copies réduites et déformées d’elle-même. D’où son autosimilitude.
1 2( ) ( ) ( ) ... ( )nL T L f L f L f L
10
La distance de Hausdorff entre les images A et B est l’infimum des r tels que A est dans le r-voisinage de B et
vice-versa ou, plus simplement, la distance maximale entre un point de A et le point le plus proche de B et vice-
versa.
G. Savard 32 septembre 2009
Bibliographie
1. Michael Barnsley, Fractals Everywhere, Academic Press Inc. 1988. QA614.86.B37
2. Robert L. Devaney, Chaos in the Classroom, Boston University. 1995. Disponible à
l’adresse http://math.bu.edu/DYSYS/chaos-game/chaos-game.html Le site Web de ce
professeur contient aussi des applets Java ainsi que de nombreux articles « sérieux »
concernant les systèmes dynamiques et le chaos : http://math.bu.edu/people/bob/
3. Peitgen, Jurgens et saupe, Chaos and Fractals – New Frontiers of Science, Springer-
Verlag (New York). 1992. QA614.86.P43
4. Larry Riddle, IFS Construction Kit – version compilée le 17 janvier 2008, logiciel
gratuit disponible à l’adresse http://ecademy.agnesscott.edu/~lriddle/ifskit/
5. Wikipedia : http://en.wikipedia.org/wiki/Iterated_function_system
Pour en savoir plus... La notion de fractale est intimement liée à la théorie du Chaos. Voici un livre très intéressant
qui raconte la jeune histoire de cette nouvelle science.
6. « La théorie du Chaos, vers une nouvelle science » de James Gleick chez Flammarion.
1989.
Sur un ton plus léger mais très instructif, une bande dessinée!
7. « Les fractals, les chroniques de Rose Polymath », par Ian Stewart, collection Les
bandes dessinées scientifiques aux Éditions Berlin. ISBN 2-7011-0446-7. PN6149S84
Finalement, sur un ton plus mathématique, une grosse bible contenant des centaines
d’équations et de belles images.
8. « Chaos and Fractals, New Frontiers of Science » par Peitgen, Jurgens et Saupe chez
Springer-Verlag. ISBN 0-387-97903-4. QA 614.86 P45.
Si vous avez des questions ou des commentaires concernant l’activité, passez me
voir ou écrivez-moi : [email protected]