Role de la societe civile et la citoyenete de la societe civile et... · 2009. 7. 29. · Annuaire...

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Programme des subventions ROCARE pour la recherche en éducation / ERNWACA Research Grants Programme Edition 2008/ 2008 edition LE ROLE DE LA SOCIETE CIVILE DANS L’EDUCATION A LA CITOYENNETE AU TOGO Chercheurs/Researchers KOKODOKO Ayélé Yentineko, Doctorante en Anthropologie, Université de Lomé KOSSI Sénamé Dodzi, Doctorant en Sociologie, Université de Lomé SEWAVI KoKuvi Fiomegnon, Doctorant en Sociologie, Université de Lomé TEBIE Pézalowè, Doctorant en Sociologie, Université de Lomé Parrain/Mentor: Dr. Dzek Philippe AMEVIGBE Pays /Country TOGO Recherche financée par le Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Education (ROCARE) avec le soutien du projet Centre d’Excellence Régionale UEMOA et du Ministère des Affaires Etrangères des Pays Bas ---------------------------------------------------------- Research financed by Education Research Network for West and Central Africa (ERNWACA) With project support from UEMOA regional Centre of Excellence and the Ministry of Foreign Affairs of the Netherlands ROCARE / ERNWACA • Tel: (223) 20 21 16 12, Fax: (223) 20 21 21 15 • BP E 1854, Bamako, MALI Bénin • Burkina Faso • Cameroun • Centrafrique• Côte d’Ivoire • Gambia • Ghana • Guinée • Mali • Mauritanie • Nigeria • Niger • Sénégal • Sierra Leone • Togo www.rocare.org

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  • Programme des subventions ROCARE pour la recherche en éducation / ERNWACA Research Grants Programme

    Edition 2008/ 2008 edition

    LE ROLE DE LA SOCIETE CIVILE DANS

    L’EDUCATION A LA CITOYENNETE AU TOGO

    Chercheurs/Researchers

    • KOKODOKO Ayélé Yentineko, Doctorante en Anthropologie, Université de Lomé • KOSSI Sénamé Dodzi, Doctorant en Sociologie, Université de Lomé • SEWAVI KoKuvi Fiomegnon, Doctorant en Sociologie, Université de Lomé • TEBIE Pézalowè, Doctorant en Sociologie, Université de Lomé

    Parrain/Mentor: Dr. Dzek Philippe AMEVIGBE

    Pays /Country

    TOGO

    Recherche financée par le

    Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Edu cation (ROCARE)

    avec le soutien du projet Centre d’Excellence Régionale UEMOA

    et du Ministère des Affaires Etrangères des Pays Bas

    ---------------------------------------------------------- Research financed by

    Education Research Network for West and Central Afr ica (ERNWACA)

    With project support from UEMOA regional Centre of Excellence

    and the Ministry of Foreign Affairs of the Netherlands

    ROCARE / ERNWACA • Tel: (223) 20 21 16 12, Fax: (223) 20 21 21 15 • BP E 1854, Bamako, MALI Bénin • Burkina Faso • Cameroun • Centrafrique• Côte d’Ivoire • Gambia • Ghana • Guinée • Mali • Mauritanie • Nigeria •

    Niger • Sénégal • Sierra Leone • Togo www.rocare.org

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    Résumé exécutif

    L’état de déliquescence dans lequel se trouvent les structures socioéconomiques et les institutions politiques

    témoignent éloquemment de la crise dans laquelle est plongée la société togolaise depuis quelques décennies.

    Aussi, soulève-t-il plus que jamais la problématique de l’éducation à la citoyenneté active, celle-ci étant censée

    contribuer à l’émergence d’une véritable culture citoyenne, ferment d’un Etat de droit. Un certain nombre de

    problèmes sociaux posent actuellement des défis majeurs à la société togolaise à savoir, le désenchantement

    démocratique, la dislocation des liens sociaux, le repli des Togolais sur eux-mêmes, etc., et dont la résorption

    fait appel à l’action conjuguée des divers acteurs nationaux dont les OSC. Quel est alors le rôle des

    Organisations de la société civile dans l’émergence d’une éducation à la citoyenneté en matière de

    responsabilité, d’implication dans les affaires publiques, de la participation volontaire aux activités d’intérêt

    général, de la solidarité avec les autres membres de la communauté, de l’amour de la patrie et le respect des

    lois ? C’est à cette question que la présente étude a tenté de répondre.

    D’une manière générale, cette recherche a pour objectif de déterminer le rôle de la société civile dans

    l’éducation à la citoyenneté au Togo.

    La présente étude, menée exclusivement à Lomé où se concentrent l’essentiel des organisations de la société

    civile, a été réalisée aussi bien dans une approche quantitative que qualitative. Ainsi, avons-nous administré

    des questionnaires à un échantillon raisonné de 200 personnes et organisé des entretiens individuels avec des

    acteurs de 20 Organisations de la Société civile togolaise. Pour ce qui est de la collecte des données, elle a été

    réalisée à l’aide des techniques telles que la recherche documentaire, les enquêtes par questionnaire et les

    entretiens individuels. Les données issues de la recherche quantitative ont fait l’objet de vérification,

    d’apurement et de traitement à l’aide du logiciel de traitement statistique SPSS (Statistical Package for Social

    Sciences), alors que celles issues de la recherche qualitative ont été ordonnées et traitées d’une façon manuelle.

    A l’issue des recherches, il ressort que quatre rôles essentiels constituent le socle des interventions des OSC

    dans le cadre de l’éducation à la citoyenneté : le rôle de formation, le rôle d’information et de communication,

    le rôle de contrôle de l’action publique et de promotion de la culture de rendre compte et le rôle de plaidoyer.

    Toutefois, ces rôles et leurs effets sur les populations sont encore peu perceptibles, en raison des capacités

    techniques, organisationnelles et financières limités des OSC.

    En somme, le travail accompli par la société civile togolaise pour contribuer à la promotion de la culture

    citoyenne est certes encore peu perceptible mais encourageant. Il convient d’apporter un appui multiforme aux

    OSC actives dans ce domaine, afin de leur permettre de consolider leurs acquis et d’affirmer leur rôle de

    participation et d’éducation citoyennes et de contrôle de l’action publique.

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    Table des matières

    Titres Pages

    Résumé exécutif 2

    Acronymes 4

    Introduction 5

    Justification de l’étude 5

    Cadre théorique et conceptuel (définition des concepts, revue de littérature, les

    indicateurs de l’étude 7

    Méthodologie 15

    Les variables de l’étude 16

    Techniques et instruments de recherche 16

    Le traitement et l’analyse des données 17

    Résultats de l’étude 17

    Le rôle de formation 17

    Le rôle d’information et de communication des OSC 20

    Le rôle de contrôle de l’action publique et de promotion de la culture de rendre

    compte 22

    Le rôle de plaidoyer 23

    Analyse de la perception des actions menées par les OSC et des pratiques

    relatives à l’appropriation des valeurs liées à la citoyenneté 24

    Forces et faiblesses des actions menées 27

    Conclusion 29

    Recommandations 30

    Bibliographie 31

    Annexes 33

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    Acronymes

    APG Accord Politique Global

    CCOFT Conseil Consultatif des Femmes du Togo

    CDQ Comité de Développement de Quartier

    CNDH Commission Nationale des Droits de l’Homme

    CVD Comité Villageois de Développement

    FIDH Fédération Internationale des Droits l’Homme

    FONGTO Fédération des Organisations Non Gouvernementales du TOGO

    GF2D Groupe de Réflexion Femme Droit et Démocratie

    HCDH Haut Commissariat aux Droits de l’Homme

    LTDH Ligue Togolaise des Droits de l’Homme

    LIT Ligue des Indépendants pour la Transparence

    OTBG Observatoire Togolais de la Bonne Gouvernance

    ONG Organisations Non Gouvernementale

    OSC Organisations de la société civile

    PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement

    REFAMPT Réseau des Femmes Africaines Ministres et Parlementaires du Togo

    RTDS Radio Télévision Delta Santé

    TVT Télévision Togolaise

    UONGTO Union des Organisations Non Gouvernementales du TOGO

    WANEP West African Network for Peace Building

    WILDAF Women in Law and Developement

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    Introduction

    Embryonnaire jusqu’en 1990, la société civile togolaise a connu depuis cette date un développement notable

    par un foisonnement d’associations et d’Organisations Non Gouvernementales (ONG) suscitées et créées grâce

    aux « vents favorables » de la démocratisation. En 2005, un inventaire du PNUD avait permis de disposer d’un

    Annuaire électronique de plus de 300 ONG et associations, dans le but de les ouvrir à l’extérieur vers des

    partenariats plus efficaces, notamment en matière de mobilisation des ressources. Cinq types d’organisations

    sont généralement observables au Togo : les associations, les ONG, les groupes de presse, les centrales

    syndicales et les institutions religieuses ; elles ont chacune leurs structurations spécifiques et leurs activités

    couvrent tous les domaines de la vie économique, culturelle, religieuse, politique et sociale.

    Mais ces organisations (OSC), quoique n’arrivant pas encore à jouer pleinement leurs rôles d’acteurs

    privilégiés du développement économique, d’intermédiaires des populations, et de contrôle citoyen de l’action

    publique, ont néanmoins une mission capitale à assumer dans le processus d’édification de la nation togolaise.

    En effet, des facteurs exogènes ou endogènes comme la crise socio-politique ont contribué à développer chez

    les Togolais de mauvais réflexes tels que l’égoïsme, l’égocentrisme, la criminalité, l’engouement vers les biens

    mal acquis et bien d’autres maux.

    L’on peut se demander aujourd’hui d’où sont venues l’anarchie et l’avidité vers le pouvoir et qui ont tendance

    à rompre le respect envers l’autorité et la chose publique ? Une chose est sure, aujourd’hui, les intérêts

    personnels priment sur l’intérêt général, ce qui entraîne, la corruption, l’escroquerie et le mensonge politique.

    Comme on peut le lire dans le Rapport CIVICUS (2006), « les vraies valeurs de tolérance, de non violence,

    d'honnêteté, de sens civique s'effritent au profit de la recherche d'intérêt personnel. La corruption est

    substantielle et gagne toutes les couches sociales. La violence s'installe dans les coeurs et prend des allures

    incontrôlées lors des échéances électorales. » (2006 : 9).

    Dans ce contexte, il échoit aux OSC un rôle important : œuvrer à l’émergence d’une culture citoyenne marquée

    par l’essor de la participation à la gestion de la chose publique. Il s’agit en fait pour elles de mettre en œuvre

    des actions visant la promotion d’une citoyenneté active.

    Comment s’y prennent-elles pour mener cette mission ? Quelle est la portée effective de leurs actions ? Quelle

    perception les divers acteurs ont de leur rôle ? Telles sont les questions auxquelles cette recherche s’est attelée

    à répondre.

    Ce rapport s’articule autour de quatre parties, notamment la justification, le cadre théorique et conceptuel, la

    méthodologie et les résultats de l’étude.

    I- Justification de l’étude

    Depuis l’avènement de la démocratie en construction dans les pays du sud, l’éducation à la culture citoyenne

    constitue un défi majeur pour les jeunes Etats africains. Et de l’avis des observateurs avisés de la scène socio-

    politique africaine, c’est justement le

    éficit de culture citoyenne qui est au fondement de la plupart des conflits qui ont secoué le continent au cours

    des deux dernières décennies. « L’esprit citoyen ou le sens civique, c’est la capacité à toute action, toute

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    réaction ou toute manifestation, individuelle ou non, revendicative ou non, dans le strict respect des règles de

    l’Etat de droit. » (Ouedraogo, 2004, P.17)

    En effet, l’histoire récente de l‘Afrique en général et du Togo en particulier a été jalonnée de conflits violents

    caractérisés par la folie meurtrière et destructrice des hommes. Et, plus d’un analyste soutiennent que ces

    situations sont largement imputables à la mauvaise gouvernance mais aussi à un déficit criard de culture de

    paix et de citoyenneté.

    Ces situations de crise témoignent très souvent de l’échec des politiques à asseoir une coexistence pacifique,

    une cohésion sociale durable. D’où de plus en plus, on s’oriente vers des modes participatifs de gestion des

    crises dont la spécificité est d’intégrer dans les processus de prévention des conflits ceux que les signataires de

    l’Accord de Lusaka sur le conflit en République Démocratique du Congo appellent « les forces vives de la

    nation ». Il s’agit justement de ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui la société civile.

    La société civile qui est un acteur consubstantiel de délégation des légitimités et de contre-pouvoir, y a ainsi

    une grande responsabilité tant elle devrait renforcer le niveau de culture et d’esprit citoyens aussi bien des

    populations et des gouvernants que de ses membres afin qu’ils puissent amplement jouer leur rôle d’éveil de

    conscience contre d’incessants comportements régressifs des différents acteurs.

    Malheureusement, l’expérience africaine en général et togolaise en particulier a trop de plomb dans l’aile pour

    décoller. Certes, les responsabilités sont largement partagées mais, par son statut d’éveil de conscience et de

    contre-pouvoir, la société civile nous semble plus concernée.

    En effet, la société civile pour remplir cette mission, le fait à partir des différentes organisations qui la

    composent à savoir les ONG, les syndicats, les institutions religieuses, les médias,… Les canaux traditionnels

    utilisés pour atteindre cet objectif sont les campagnes de sensibilisation, les séminaires de formation et les

    émissions à l’antenne. Seulement, la réalité sur le terrain semble être très loin des résultats auxquels on devrait

    s’attendre.

    Bien que beaucoup de formation aussi bien des formateurs que des acteurs locaux aient eu lieu et continuent au

    profit de ces différentes composantes1, on note l’expression d’un manque cruel d’esprit citoyen dans les propos

    et comportements des divers acteurs (leaders politiques, journalistes, religieux, responsables d’ONG de défense

    des droits humains, etc.) de la vie sociale et politique togolaise.

    Ainsi, quotidiennement, si ce ne sont pas des leaders politiques ou religieux tous démagogues aux propos

    violents et injurieux avec des journalistes pyromanes, ce sont des responsables d’ONG de défense des droits

    humains qui se lancent dans de véritables diatribes. Les uns à travers des campagnes de sensibilisations

    incendiaires et d’autres à travers des débats ou des éditoriaux violents dépourvus de toute considération éthique

    et civique soit à l’antenne, ou dans les colonnes des publications. Les interpellations répétées de la Haute

    Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication à l’endroit de certains de ces acteurs dont la dernière

    1 En effet dans le cadre du suivi du processus de renforcement de l’Etat de droit depuis 2000 et surtout à partir de 2004, beaucoup d’institutions comme les fondations Konrad Adenauer, Hans Seidel, Herbert Hulrich, le Pnud, les Ambassades des USA, d’Allemagne, ont beaucoup accompagné ce processus par des soutiens en formations des différents acteurs aussi bien sur le plan national que régional.

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    remonte au 19 février 20082, montre qu’il y a réellement un problème de culture civique chez les acteurs

    togolais.

    Dans une étude menée en 2003, des chercheurs de l’Université de Lomé ont mis en évidence chez les

    populations togolaises un niveau très bas d’appropriation des vertus civiques (GOEH AKUE, COULIBALY,

    sur Les défis de la société civile dans le développement du Togo 2003). Or comme le soutient Jean-Paul

    Willaine de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes de Paris, « les valeurs civiques que sont le sens de

    responsabilité, l’implication dans les affaires publiques, la participation volontaire aux activités d’intérêt

    général, la solidarité avec les autres membres de la communauté, l’amour de la patrie et le respect des lois,

    constituent les ferments du lien social et de la construction d’un Etat de droit, de justice et de paix. » (in Actes

    de Séminaires, Société civile, esprit citoyen et contrôle social, 2004, P49)

    En définitive, le déficit de culture citoyenne dans un pays où les ONG et les organes de presses se créent à un

    rythme fulgurant, suscite beaucoup d’inquiétudes. Quel est alors le rôle des Organisations de la société civile

    dans l’émergence d’une éducation à la citoyenneté en matière de responsabilité, d’implication dans les affaires

    publiques, de la participation volontaire aux activités d’intérêt général, de la solidarité avec les autres membres

    de la communauté, de l’amour de la patrie et le respect des lois ?

    La quête de réponse à cette question somme toute importante dans le processus d’édification de véritables

    Etats-nations constitue le facteur justificatif majeur de la présente étude. Car, un regard rétrospectif jeté sur

    l’univers de la recherche sociale au Togo, révèle qu’aucune étude ou presque ne s’est préoccupée de cette

    problématique. La présente recherche veut donc contribuer à combler ce vide en relevant le rôle effectif de la

    société civile à l’éducation citoyenne au Togo.

    Cette étude a pour objectif général de déterminer le rôle de la société civile dans l’éducation à la citoyenneté

    au Togo.

    Spécifiquement, l’étude vise à :

    - Identifier les efforts ou actions menées par les Organisations de la Société Civile togolaise dans la

    promotion des différents comportements citoyens ;

    - Identifier les forces et faiblesses des Organisations de la Société Civile en matière de promotion de la

    citoyenneté et de la paix ;

    - déterminer la perception que les Togolais ont des différents rôles joués par la société civile dans

    l’éducation à la citoyenneté ;

    - Proposer des approches de solution pour une appropriation effective de la notion de citoyenneté par

    les acteurs de la vie sociale, politique, culturelle, économique et politique togolaise.

    II. Cadre théorique et conceptuel

    Le cadre théorique et conceptuel met l’accent sur la définition des concepts liés à l’étude, la revue de littérature

    recensant les travaux et écrits pertinents sur le sujet et les indicateurs de la recherche.

    2.1. Définition des concepts

    - Citoyenneté

    2 Le Directeur de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication a ordonné la cessation de certains programmes radio et télé pour le manque d’éthique et de civisme des animateurs qui ont pourtant été interpellé à plusieurs reprises pour les mêmes injonctions.

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    Le concept de citoyenneté a son origine dans la Rome Antique et comporte des idées positives telles que la

    responsabilité, l’autonomie, la conscience et la réflexivité critique. En d’autres termes, l’esprit citoyen, c’est un

    état moral qui prédispose l’être humain à un certain nombre de valeurs telles que : l’implication active dans les

    affaires publiques, la participation volontaire aux activités d’intérêt général, la solidarité avec les autres

    membres de la communauté, l’amour de la patrie et le respect scrupuleux de ses lois.

    - Education à la citoyenneté

    Selon le dictionnaire universel francophone, L’éducation est « l’action de former, d’instruire quelqu’un » ou

    « l’action de développer les facultés morales, physiques et intellectuelles ».

    Pour Durkheim l’éducation a pour objectif « de susciter et de développer chez l’individu un certain nombre

    d’états physiques, intellectuels et moraux que réclame de lui et la société politique dans son ensemble et le

    milieu spécial auquel il est particulièrement destiné. » (Durkheim, L’éducation morale, Paris, PUF, 1963). Et

    justement l’esprit citoyen fait incontestablement partie de ces notions essentielles que la société réclame de

    l’individu qui s’y réfère.

    - Société civile

    « Composée de tous les citoyens constitués en différentes organisations que ceux-ci se sont donnés librement,

    en marge de l’Etat et de la famille, pour conférer davantage d’impact social, de rationalité, d’efficacité, à leurs

    actions et actes, dans la poursuite de leurs buts promotionnels, la société civile apparaît, selon le sociologue

    sénégalais Abdoulaye Niang, comme ce double de la société qui, dans un double processus d’auto-prise en

    charge et de contrôle sur l’Etat et le fonctionnement de la société se pose à la fois comme la police et le

    tribunal populaires de l’Etat, d’un côté, et le promoteur – réalisateur des projets que la société, à travers ses

    différentes composantes nourrit sur elle-même, de l’autre. »

    Les organisations de la société civile comprennent les Organisations non gouvernementales (ONG), les

    organisations de défense des droits humains, les syndicats, les associations professionnelles, les groupes de

    femmes, les communautés religieuses et les autorités coutumières, les organes de presse et les médias privés,

    etc.

    2.2. La revue de littérature

    2.2.1. L’évolution de la citoyenneté

    Le terme «citoyen» est largement galvaudé. Il est utilisé dans tous les discours qu'ils soient d'ordre politique,

    économique ou social. Il est demandé à tous les acteurs d'avoir un comportement citoyen. Mais souvent, celui-

    ci n'est pas réellement décrit et il nous semble opportun de définir la citoyenneté et le comportement citoyen.

    La citoyenneté est un legs de l'antiquité gréco-romaine qui fut remis au coeur des débats à la révolution

    française après plusieurs siècles d'oubli.

    À l'origine, le titre de citoyen est accordé aux notables et aux hommes libres des peuples soumis ou alliés à la

    Rome antique. Il y a dans ce concept une double logique :

    - une logique inclusive : puisque tout notable et homme libre a vocation à devenir citoyen,

    - une logique exclusive : les esclaves, les femmes, les affranchis ne pourront jamais devenir des citoyens.

    Il importe alors de savoir ce que recouvre la notion de citoyen. Trois éléments indépendants sont présents:

    - le terme citoyen est le nom individuel que se donnent les membres d'une même cité (Platon, Rousseau).

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    La citoyenneté ne peut donc se concevoir que lorsqu'il y a groupement d'individus. J.J. Rousseau précise qu’« à

    l’égard des associés ils prennent collectivement le nom de peuple, et s’appellent en particulier citoyens comme

    participant à l’autorité souveraine, et sujets comme soumis aux lois de l’Etat » (J.J. Rousseau, 1992 : 40). Il

    précise que «ces mots de sujets et de souverain sont des corrélations identiques dont l’idée se réunit sous le

    seul mot de citoyen ».

    - le terme citoyen n'est pas accordé à tous mais à une "élite". Il s'ensuit une parfaite indifférence à l'inégalité

    des statuts (entre citoyens et non-citoyens) et des richesses. (Thierry Leterre, 1997 : 3 -10).

    - le terme citoyen nécessite l'adhésion volontaire aux règles de la cité. Le citoyen est par nature un être libre qui

    "obéit avec liberté". (J.J. Rousseau, idem).

    La citoyenneté est donc l'espace public créé par le rassemblement des hommes. Le citoyen est celui qui prend

    sa place à l'intérieur de cet espace (Thierry Leterre, idem).

    Il est donc celui qui jouit des droits et s'acquitte des devoirs définis par les lois et les moeurs de la cité (G.

    Durozoi, A. Roussel, 1998). La citoyenneté est avant tout le résultat d'une intégration sociale, si bien que

    civiliser veut d'abord dire "rendre citoyen". Ainsi, le citoyen a pour principales vertus l'obéissance et la

    capacité à commander, car il est défini par sa participation à la justice et à la magistrature (Aristote, 1970 :

    167). C’est de cette participation que découlaient tous ses droits civils et politiques.

    Depuis la révolution française et la déclaration des droits de l'homme, la citoyenneté est la source du lien social

    : vivre ensemble, c'est être citoyen ensemble (Dominique Schnapper, 1997).

    Rousseau, dans le contrat social, indique que la légitimité du pouvoir politique ne repose ni sur la volonté

    divine, ni sur la force, mais sur un pacte d'association où chacun s'engage envers tous en renonçant à sa liberté

    individuelle naturelle au profit de la communauté qui lui assure en retour la dignité de citoyen c'est-à-dire

    l'égalité juridique et morale et la liberté civile. Cette idée est reprise dans la conception du citoyen «moderne»

    puisque «le citoyen, ce n’est pas l’individu réel avec ses faiblesses, son égoïsme, son aveuglement et ses

    enthousiasmes. C’est l’homme éclairé par la raison, parlant selon les impératifs de cette raison commune à

    tous, et, par conséquent, débarrassé des préjugés de classe et des soucis inhérents à sa condition économique,

    capable d’opiner sur la chose publique sans être dominé par son intérêt personnel, bref c’est une manière de

    saint laïc qui doit sa qualité de membre souverain –la Nation- à son désintéressement» (G. Burdeau,

    1976 :190).

    La citoyenneté est alors ouverte à tous ; le citoyen devient un individu abstrait, sans identification et sans

    qualification particulière (Schnapper). Il en résulte qu'il faut "quelque chose de plus que la citoyenneté pour

    faire un espace citoyen. Deux éléments peuvent alors apparaître comme inévitables et conflictuels :

    - la nation : elle est apparue comme l'organisation politique légitime et universelle qui permet de respecter

    l'autonomie des individus tout en symbolisant les valeurs d'égalité et de liberté (Schnapper).

    La nation est alors ouverte à tous les individus acceptant les règles d'un domaine public qui transcende tous les

    particularismes.

    - le marché : il se présente plus comme la réponse globale aux questions (désaffection voire méfiance à l'égard

    de l'engagement politique, abstention, montée de valeurs privées...) que les théories du pacte social ne

    pouvaient pas résoudre de manière totalement satisfaisante et opératoire (Pierre Rosanvallon). Le pacte social

  • 10

    garantit l'espace de la citoyenneté mais demande un engagement constant de ses acteurs. Le marché propose le

    jeu spontané et transparent des intérêts mis en oeuvre par le commerce.

    La citoyenneté se trouve dès lors concurrencée par le libéralisme économique. Il y aura donc un double

    dilemme : citoyenneté/nationalité ; citoyenneté/individu privé.

    La citoyenneté a une finalité, la socialisation. Mais, celle-ci est contrecarrée par une force concurrente à la

    politique, le marché. Elle est d’autant plus forte qu’il y a actuellement un désintérêt pour les questions

    politiques qui se traduit par une montée de l’abstentionnisme et s’ouvrir entre l’individu privé qui recherche sa

    satisfaction au travers de sa présence sur le marché et le citoyen qui a des devoirs vis-à-vis de la communauté

    et surtout des droits qu’il cherche à optimiser.

    La citoyenneté "moderne" est en perpétuelle expansion (cf. Turner) puisque selon Turner la quatrième vague

    d'extension actuellement en cours tend à donner des droits à la nature et à l'environnement.

    À ce stade, et pour le reste de cette recherche, le citoyen sera considéré comme un être libre qui jouit de ses

    droits civiques, qui a pour obligations de respecter les lois et les bonnes moeurs. En contrepartie, il dispose de

    la protection de l’Etat. Le comportement citoyen peut donc être défini comme le respect des lois et bonnes

    moeurs.

    2.2.2. Problématique de l’éducation à la citoyenneté

    Bien qu’elle ait été proclamée avec vigueur au lendemain de la souveraineté de chaque pays et inscrite même

    dans les constitutions, on n’a jamais songé que l’éducation à la citoyenneté requérait une place aussi

    importante dans les programmes éducatifs. De ce fait, elle a été oubliée jusqu’à ce qu’elle apparaisse comme

    une crise ; ce qui explique l’existence d’une rare revue littéraire consacrée à son sujet.

    Selon Yvonne Hébert & Alan Sears dans L'éducation à la citoyenneté, il se dégage incontestablement à

    l’échelle mondiale et en ce début du XXIe siècle le sentiment d'une crise. Il existe actuellement une

    perception fort répandue que la question de la citoyenneté est en crise. Aussi bien dans les jeunes démocraties

    des pays en voie de développement que celles qui sont établies depuis longtemps, les gens ont l'impression que

    la qualité de la citoyenneté démocratique est dangereusement faible et qu'il faut redresser la situation au moyen

    d'un programme d'éducation à la citoyenneté efficace. Ce sentiment de crise est manifeste tant dans les textes

    scientifiques que dans les médias populaires.

    Le « Civics Expert Group » en Australie a inventé à cet effet le terme de « déficit civique » pour décrire la

    notion de l'ignorance omniprésente des citoyennes et citoyens. Au Canada, l'Institut du Dominion fait faire des

    sondages réguliers qui démontrent l'ignorance des jeunes Canadiennes et Canadiens. Au Conseil de l'Europe,

    les responsables du Programme d'éducation à la citoyenneté démocratique collaborent avec les chercheurs et

    les éducateurs depuis 1996. Partout dans le monde, le sentiment qu'il y a crise est l'une des principales forces

    qui motivent les travaux de recherche et de développement dans le domaine de l'éducation à la citoyenneté.

    Pourtant, partout dans le monde, les éducateurs accordent généralement une faible priorité à l'éducation à la

    citoyenneté, quand bien même ils sont également convaincus de l'imminence d'une crise sur cette question.

    Dans la plupart des cas, comme il n'y a pas d'examen sur l'éducation à la citoyenneté en tant que matière

    scolaire, celle-ci reçoit nécessairement moins d'importance que les matières où les connaissances sont

    contrôlées par un examen.

  • 11

    D’aucuns diront que l'éducation à la citoyenneté doit être offerte dans le cadre du programme d'études sociales,

    conformément à la tradition anglophone (voir Wright et Sears, 1997; Wronski, 1987; Dufty et Cleverly, 1987),

    d’autres que, l'éducation à la citoyenneté n'est qu'une composante de l'histoire (Bliss, 1992; Granatstein, 1998).

    Dans la tradition francophone, c'est l'histoire qui sert de fondation à l'éducation à la citoyenneté (voir Laville,

    1996; Durocher, 1996; Richard, 1995).

    D'autres personnes encore estiment que l'éducation à la citoyenneté ne doit pas se limiter à une matière ou une

    discipline scolaire mais se répartir parmi plusieurs disciplines, les cours de langue et de littérature (Johnston,

    1997) par exemple, ou de géographie (Laurin et Klein, 1998; Laville et Dionne, 1996), ou encore s'insérer dans

    une démarche de lettres et de sciences humaines.

    Enfin, il y a la part de ceux qui insistent qu'il faille chercher les rudiments d'une participation civique active

    dans la raison d'être et le code disciplinaire de l'école. Par conséquent, selon eux, le mandat d'assurer

    l'éducation à la citoyenneté appartient à l'ensemble de la collectivité scolaire (voir Berthelot, 1991).

    Il s'agit donc d'un débat complexe qui remet en question les objectifs généraux de la scolarisation, son

    organisation, les programmes d'études ainsi que les valeurs et les pratiques de l'enseignement et de

    l'apprentissage.

    2.2.3. Citoyenneté, Pluralisme culturel et cohésion sociale

    Les modèles d'ordre social ont pour but de trouver des moyens qui permettent aux êtres humains de vivre

    ensemble en paix et cela avec des ressources limitées. La citoyenneté en tant que modèle social doit regrouper

    les individus et les groupes de toutes les régions du pays de manière à contribuer à l'éclosion d'un état

    démocratique cohésif.

    Philippe PERRENOUD, dans Apprentissage de la citoyenneté… des bonnes intentions au curriculum caché

    pose un certain nombre de questions.

    Pour que l’apprentissage de la citoyenneté s’opère à l’école, au collège et au lycée, y a-t-il quelque chose à

    faire ? Avant de charger le programme de formation initiale et continue des enseignants de missions nouvelles,

    il trouve prudent de répondre à quelques questions qui s’interrogent à leur tour sur les finalités de l’école, les

    programmes, le rôle des enseignants, la transposition didactique au delà des savoirs.

    • La citoyenneté : de quel apprentissage parle-t-on ?

    S’agit-il d’apprendre qu’on appartient à une collectivité organisée, une cité ? Qu’on y a des droits et des

    devoirs ? Qu’on y soit lié aux autres membres par une loi commune, expression de la volonté de tous ? qu’il y

    a au-delà de la connaissance des valeurs communes, des lois et des institutions - instruction civique élémentaire

    - une obligation de solidarité, un contrat de coexistence pacifique, la recherche constante d’un juste équilibre

    entre liberté et responsabilité, autonomie et ingérence ? Est-ce tout cela, la citoyenneté ? De quoi parle-t-on au

    juste ?

    Pour Le Robert, la citoyenneté est “ la qualité de citoyen ”, ce dernier étant, “ dans l’antiquité, celui qui

    appartient à une cité, en reconnaît la juridiction, est habilité à jouir, sur son territoire, du droit de cité et est

    astreint aux devoirs correspondants ”. Dans les temps modernes, le sens évolue, le mot citoyen désigne une

    personne “ considérée comme personne civique ”, non plus au sens d’avant 1781 “ relatif au citoyen ” mais,

    plutôt compris en terme “ propre au bon citoyen ”.

  • 12

    L’hypothèse de la crise sociale est étayée par le discours ambiant sur l’affaiblissement du lien social, la

    violence urbaine, le racisme, le mal de vivre des banlieues. Loin d’être le rempart attendu, l’école serait elle-

    même gagnée par le désordre et la violence. Contre les analyses un peu courtes des media, les sciences sociales

    montrent que la violence des élèves est souvent une réponse malheureuse à l’état de la société qui les

    stigmatise (Debarbieux, 1990 ; Defrance 1992, 1993, Pain, 1992 ; Nizet et Herniaux, 1985).

    Dans le contexte des changements éducatifs du changement de siècle, il est possible d’identifier un ensemble

    de propositions et de lignes d’action de réforme en cours dans différents systèmes éducatifs nationaux, qui sont

    orientées par la prise de conscience des besoins signalés et par la volonté politique d’y trouver des réponses.

    Ces propositions et lignes d’action sont différentes selon les régions. Malheureusement, il semble que les pays

    où se concentre la pauvreté se contentent pour le moment de répéter l’expansion des structures éducatives et,

    dans une forte mesure, également des curriculums inventés en Occident pour les XIXe et XXe siècles, sans une

    conscience claire de leur inadéquation.

    Pire encore, nous rêvons aujourd’hui d’une citoyenneté librement assumée, sans endoctrinement. Durant

    longtemps, l’instruction civique s’est confondue avec l’intériorisation intensive et acritique de quelques

    principes moraux et le souci de développer un respect inconditionnel des institutions, du travail, de la famille,

    de la loi, s’accompagnant d’une identification à la patrie, d’une vision très nationaliste de l’histoire et de la

    géographie.

    Selon Yvonne Herbert & Alan Sears, il est facile d’affirmer que la citoyenneté est “ en chute libre ” ou “ en

    crise ” et qu’après s’être exclamé “ Mais que fait la police ? ”, on en vient à dire “ Mais que fait l’école ? ”. Il

    serait équitable de reconnaître que la conception de la citoyenneté a changé et a modifié aussi les moyens

    légitimes d’éduquer et d’instruire. Lorsque quelque chose semble “ se dégrader ”, demandons-nous toujours si

    la réalité a changé ou si nos attentes se sont élevées. Aujourd’hui, on stigmatise l’ignorance dans des sociétés

    où le niveau d’instruction est le plus élevé de l’histoire. Il se pourrait qu’en matière de citoyenneté aussi, nos

    attentes changent plus vite que les comportements, ce qui nous pousserait à voir une dégradation absolue là où

    elle est simplement relative.

    De là à rendre l’école responsable de cette dégradation, cette analyse semble un peu courte. La responsabilité

    de l’Etat une fois encore n’est-il pas l’agent régulateur de la société ?

    • Où apprend-on la citoyenneté et comment ?

    L’école n’est par un État dans l’État, même si on lui reconnaît une “ autonomie relative ”. On ne peut donc,

    sans autre forme de procès, lui imputer une éventuelle crise de l’éducation citoyenne.

    Charles Péguy écrivait en 1904 :

    « La crise de l’enseignement n’est pas une crise de l’enseignement ; les crises de l’enseignement ne sont

    [que] des crises de vie partielles, éminentes, qui annoncent et accusent des crises de la vie générale ; ou, si l’on

    veut, les crises de vie générales, les crises de vie sociales s’aggravent, se ramassent, culminent en crises de

    l’enseignement qui semblent particulières ou partielles mais qui en réalité sont totales parce qu’elles

    représentent le tout de la vie sociale ; c’est en effet à l’enseignement que les épreuves éternelles attendent,

    pour ainsi dire, les changeantes humanités ; quand une société ne peut pas enseigner, c’est que cette société ne

    peut pas s’enseigner ; c’est qu’elle a honte, c’est qu’elle a peur de s’enseigner elle-même ». ( Charles Péguy,

    Cahiers VI, II, Oeuvres en prose, La Pléiade II, p. 1390, cité par Jacques Julliard, dans Le Nouvel

    Observateur, n° 1357, 8-14 nov. 1990, p. 61).

  • 13

    Pourquoi demander à l’école d’être plus vertueuse que la société qu’elle exprime ? Ce n’est pas simplement

    injuste, c’est absurde.

    La thèse de Péguy souffre cependant d’une naïveté sociologique : la société n’est pas une personne, c’est

    un champ de forces contradictoires. Une société ne peut globalement avoir honte d’elle-même que si elle forme

    un bloc. Dans une société pluraliste coexistent toutes sortes de sentiments, de la pleine adhésion, plus ou moins

    désintéressée, à l’ordre établi, à la révolte vive. Chacun peut toutefois avoir honte de sa société ou pour sa

    société, ce qui ne le porte pas à transmettre ses valeurs dominantes. Une société pluraliste a nécessairement

    plus de mal à s’enseigner qu’une société monolithique.

    Ce que Péguy interprète comme une peur de s’enseigner est peut-être la simple rançon d’une valse-hésitation

    entre ces trois voies, dont aucune n’est satisfaisante :

    - la première parce qu’elle menace l’unité même de la société civile et prépare des guerres civiles ou des

    sécessions ;

    - la seconde parce qu’elle éloigne l’école d’une forme de neutralité à l’égard des valeurs et des idéologies

    diverses qui coexistent ;

    - la troisième parce qu’elle reste dans l’abstrait et ne prépare pas vraiment à affronter la complexité du monde.

    Une éducation civique engagée, quelle qu’en soit l’inspiration, est reçue comme un endoctrinement par une

    partie des familles…

    La grande peur qui rebute toute volonté à se pencher sur la question de l’éducation à la citoyenneté peut

    s’énoncer en termes du courage de l’autorité au pouvoir à affronter l’histoire avec toutes les injustices qu’elle a

    érigée et qui maintient le peuple dans l’ignorance. Alors, quand bien même la société éprouve la nécessité et la

    volonté d’éduquer la population à la culture citoyenne, elle aura fort à faire avec certaines réalités d’injustices

    qui, en maintenant fraîches des récessivités, rend impossible l’acceptation de la participation ressentie dans ce

    contexte comme un sacrifice qui n’en vaut pas la peine. C’est ce qui explique le fait que l’effort des

    organisations de la société civile ne porte pas assez. Ce n’est pas tant par ignorance uniquement mais beaucoup

    plus par non adhésion aux comportements politiques.

    Alors, les Etats africains sont ils réellement pour la socialisation politique de leur population ? Car, c’est elle

    qui concourt à la formation de bons citoyens. Si oui, ils devraient trouver des stratégies compatibles. Les

    processus de justice transitionnelle peuvent être à cet effet une voie possible car, censée apaiser, tolérer,

    appeler au consensus et réconcilier en renvoyant aux calendes grecques les contentieux pour répartir sur de

    nouvelles bases. C’est en ces termes que semble s’inscrire la problématique du rôle de la société civile dans

    l’éducation à la citoyenneté.

    2.2.4. La société civile : quelle analyse ?

    La notion de société civile tire ses racines des considérations philosophico-historiques des temps anciens. En

    effet, s’opposant diamétralement à la notion de société naturelle ou pré-moderne, la société civile se définit

    nominalement comme « une association d’individus humains reposant sur un contrat social dont les liens de

    réciprocité instituent un ordre économique et politique. Cette définition du dictionnaire Larousse dont se réfère

    le rapport de synthèse sur l’analyse des défis de la société civile dans le développement du Togo » (GOEH

    AKUE et COULIBALY, Décembre 2003) met en relief le caractère grégaire de la société civile. En outre, elle

    fait référence à la solidarité entre les membres mais ne précise pas clairement le degré et les différents niveaux

  • 14

    d’associations. La question se pose encore de savoir s’il s’agit d’une panoplie de mouvements intégrateurs dans

    une société en pleine mutation.

    Le premier acte politique de la société civile est généralement un acte politique au service de la paix sociale qui

    constitue la condition première de tout développement humain. Dominique Colas ne pense pas autrement

    quant il dit, à propos de l’Etat : « si aucune institution ne tient les hommes en respect, ils sont dans un état de

    guerre de tous contre tous qui interdit l’émergence des techniques, des arts, du savoir et ils sont dans des

    conditions favorables à celles des sauvages… » Renonçant à faire de la politique à plein temps afin de mieux

    se consacrer directement à l’amélioration des conditions matérielles d’existence, au progrès du savoir, au

    développement humain tout court, la société civile ne se détourne pas pour autant complètement de la politique

    et des affaires de l’Etat.

    C’est dans une large mesure, d’une part, de l’état d’avancement de la démocratie, lequel conditionne la nature

    et l’importance plus ou moins grande des entraves institutionnelles à l’accès par les citoyens à la jouissance

    effective des droits humains fondamentaux et, d’autre part, du degré d’attachement de ces mêmes citoyens à

    ceux-ci et à leurs libertés que dépend, en réaction, la vigueur plus ou moins grande des formes dominantes de

    lutte de la société civile dans un contexte socio-politique déterminé.

    La nature des buts poursuivis par la société civile, les formes dominantes d’expression de celle-ci, ainsi que les

    domaines où ces formes se manifestent le plus, sont variables d’une société à une autre, d’un groupe social à un

    autre et d’une époque à une autre.

    Déterminée par l’histoire mais aussi participant à la formation de celle-ci parce qu’action collective ayant

    toujours un impact sur le cours des choses là où elle a une existence forte, la société civile manifeste toujours

    une certaine singularité dans son mode d’existence, en rapport au contexte socio-historique du moment pour un

    peuple donné. Dans le 18 Brumaire, K. Marx campe bien cette situation dans ce passage : « les hommes font

    leur propre histoire mais ils ne la font pas arbitrairement dans les conditions choisies par eux mais dans les

    conditions directement données et héritées du passé ».

    Ainsi, Hegel parlera de société civile bourgeoise pour désigner cette partie de la société qui n’est ni la famille,

    ni l’Etat, qui s’intercale entre ces deux et qui se démarque dans son mode d’existence de la société féodale

    parce que justement elle est porteuse et annonciatrice dans sa pratique de la société même d’un autre projet de

    société, c’est-à-dire, en définitive, de rapports sociaux nouveaux lesquels fondés sur la liberté individuelle et le

    libre-échange devaient sonner le glas de l’ancienne société féodale et annoncer la société bourgeoise nouvelle.

    Cette société civile bourgeoise, en effet, comme dit Hegel : « est le champ de bataille de l’intérêt privé

    individuel de tous contre tous, de même c’est ici que le conflit de cet intérêt, avec les intérêts particuliers

    commune et de ceux-ci conjointement à celui-là avec les points de vue et les dispositions de l’Etat qui sont

    d’un ordre plus élevé, a son siège ».

    La société civile, loin d’inscrire son action dans une dynamique d’opposition par rapport à l’Etat, se conçoit

    plutôt ici comme un soutien de celui-ci, comme d’ailleurs le fait remarquer René Gallissot « La société civile

    dans son sens libéral de sphère des intérêts se situe en dessous mais non à l’écart, en soutien plutôt de la société

    politique ». L’Etat qui est le pivot de cette société politique assure, ici, la régulation du jeu contradictoire des

    intérêts individuels et/ou collectifs car entre lui et la société civile il n’y a pas un antagonisme d’intérêts mais

    plutôt une complicité et une continuité dans les représentations et les actions, la même idéologie libérale

  • 15

    partagée par tous les acteurs (ceux de la bourgeoisie en particulier) de cette nouvelle société montante

    conférant, en effet, à tous la même attitude d’acceptation de l’Etat, tel qu’il existe dans sa nature actuelle mais

    aussi dans ses fonctions de régulation.

    Par contre, selon K. Marx qui a traité des sociétés communautaires caractérisée par l’absence de l’Etat et

    fondées sur le principe de la communication des biens, la société civile est, dans un tel contexte, « la tribu (qui

    est) propriétaire de tous les biens « . Pour lui, la société civile existe depuis le communisme primitif et

    précéderait donc l’existence même de l’Etat, car « celle-ci (la société civile)… comprend l’ensemble des

    rapports sociaux économiques… (et) repose sur les exigences de la production de la vie matérielle de

    l’homme » ; elle se confond avec les actions collectives que développent les différents groupes sociaux en

    confrontation ou en alliance dans le jeu des rapports de classe, tels que ceux-ci sont déterminés par les rapports

    économiques et les contradictions d’intérêts qui s’y développent.

    Pour Gramsci, la société civile est perçue comme le « réseau complexe des fonctions éducatives et

    idéologiques, ce pourquoi la société est non seulement commandée mais encore dirigée » ! Elle est ce à quoi

    doivent rester attentifs les dirigeants d’un pays pour arriver à cerner les volontés collectives de ceux qu’ils

    veulent gouverner.

    La société civile est donc le lieu où doit se mener la conquête des consciences nouvelles pour le changement

    social et politique souhaité.

    2.3. Les indicateurs de l’étude :

    - Nombre de colloques, séminaires, forums, ateliers de formation organisés par les OSC ;

    - Le taux de participation aux initiatives de formation ou d’échange organisées par les OSC ;

    - La fréquence des actions de la société civile relatives à la citoyenneté ;

    - La fréquence des programmes d’éducation à la citoyenneté organisés par les médias ;

    - Le nombre d’OSC ayant des programmes d’éducation à la citoyenneté ;

    - Le niveau de compréhension des populations du concept de citoyenneté ;

    - Le degré d’engagement des acteurs en faveur de la promotion des notions de citoyenneté ;

    - La perception des enquêtés du concept de citoyenneté ;

    - La perception des acteurs externes du rôle de la société civile dans la consolidation de la citoyenneté

    III. Méthodologie

    La méthodologie retrace le type de recherche effectué, les caractéristiques de la population cible,

    l’échantillonnage, les limites de l’étude, les variables, les instruments et techniques de collecte des données, les

    techniques de traitement, d’analyse des données et d’interprétation des résultats.

    3.1- Le type de recherche

    La présente étude a été réalisée dans une approche qualitative.

    L’approche qualitative a permis de creuser davantage en vue de recueillir et d’analyser d’une façon

    approfondie, la perception, l’opinion et la compréhension de divers acteurs (universitaires, acteurs de la société

    civile, acteurs politiques, acteurs des médias) du rôle de la société civile dans l’éducation à la citoyenneté.

    Ceci nous a permis ainsi de susciter des idées, analyses et hypothèses pouvant aider à la compréhension et à

    l’analyse du sujet.

    3.2. La population cible

  • 16

    Il s’agit de l’ensemble des catégories d’individus concernées par la recherche et dont sera tiré l’échantillon.

    Dans notre cas précis, elle regroupe les acteurs de la société civile (ONG, Associations, Organisations

    religieuses, Médias…), les acteurs universitaires, les acteurs de la vie politique, sociale, économique et

    culturelle installés à Lomé où se concentre l’essentiel des activités des Organisations de la Société Civile.

    3.3. L’échantillonnage

    Ne pouvant pas interroger l’ensemble de la population cible (ce qui aurait été l’idéal), il s’est avéré nécessaire

    de déterminer un échantillon représentatif des diverses caractéristiques de la population cible. En raison des

    contraintes financières et temporelles, nous avons limité l’étude à Lomé où se concentrent l’essentiel des

    organisations de la société civile.

    Ainsi avons-nous interrogé un échantillon raisonné de 200 personnes sélectionnées dans différentes catégories

    de la vie sociale, économique, culturelle et politique togolaise.

    En outre, des entretiens individuels ont été réalisés avec des acteurs de 15 Organisations de la Société (6 ONG

    dont 1 Internationale oeuvrant dans le domaine des droits de l’homme, 5 Organes de la presse, 2 Organisations

    religieuses, 2 Organisations syndicales).

    3.4. Difficultés et limites de l’étude

    Les recherches qui ont permis la production du présent document ne se sont pas déroulées sans encombre.

    En effet, la première de ces difficultés est relative à l’insuffisance des sources de documentation qui nous

    auraient permis d’approfondir encore d’autres aspects de notre question de recherche.

    Ensuite, le contexte socio-politique qui prévaut dans notre pays a été aussi préjudiciable au bon déroulement de

    l’étude. En effet, la question de la citoyenneté est très sensible et suscite parfois la méfiance des enquêtés.

    En définitive, toutes ces difficultés ont pu être jugulées grâce à la motivation sans faille des chercheurs et aux

    conseils avisés du parrain scientifique de l’étude.

    3.5. Les variables de l’étude

    • Rôle : cette variable a pour composantes les rôles d’information, de communication, de

    sensibilisation, de contrôle de l’action sociale et politique ;

    • Citoyenneté : cette variable a pour composantes essentielles la responsabilité, l’autonomie, la

    conscience et la réflexivité critique, l’implication active dans les affaires publiques, la participation

    volontaire aux activités d’intérêt général, la solidarité avec les autres membres de la communauté,

    l’amour de la patrie et le respect scrupuleux des lois.

    • Education :

    L’éducation se présente sous plusieurs formes : nous avons l’éducation formelle (dispensée à l’école),

    l’éducation par la sensibilisation (communication sociale), les séminaires, les émissions-débats…etc.

    qui sont surtout le fait des Organisations de la Société Civile.

    • La perception des acteurs : la perception que ceux-ci ont de la notion de citoyenneté, des actions

    réalisées, de leurs propres rôles.

    3.6. Techniques et instruments recherche

    3.6.1. L’analyse documentaire

  • 17

    Il a été question ci de faire une analyse de contenu des documents recueillis aussi bien dans les bibliothèques,

    sur le Web que dans les institutions ciblées.

    3.6.2. Les entretiens individuels

    Les entretiens individuels ont été organisés à l’intention des acteurs de la société civile à l’aide de guides

    d’entretien semi structurés élaborés à cet effet à chaque catégorie spécifique.

    3.6.3. La formation des enquêteurs

    Une session de formation a été organisée à l’intention des chercheurs de l’équipe en vue de leur permettre de

    s’imprégner de la méthodologie de la recherche et des outils de la collecte.

    3.6.4. La collecte des données sur le terrain

    Il a été question de recueillir des données auprès de l’échantillon à l’aide des outils produits à cet effet

    notamment les guides d’entretien et les grilles de lecture.

    La collecte des données a été faite par les membres de l’équipe de recherche repartis en deux groupes.

    Lors des entretiens, il y a un modérateur pour animer les discussions et un preneur de notes. A la fin de chaque

    entretien, une réunion de synthèse est organisée.

    Eventuellement, certains entretiens ont fait l’objet d’enregistrement. Ici aussi une réunion de synthèse est

    organisée en vue de transcrire les données enregistrées et de rédiger un rapport d’entretien.

    3.7. Le traitement et l’analyse des données

    Les données issues de la recherche quantitative ont fait l’objet de vérification, d’apurement et de traitement à

    l’aide du logiciel de traitement statistique SPSS (Statistical Package for Social Sciences).

    Les données qualitatives quant à elles ont été ordonnées et traitées d’une façon manuelle. L’analyse des

    données qualitatives a consisté à les mettre en ordre, à dégager les tendances, à organiser tout le contenu en

    catégories et thèmes descriptifs, à trouver les significations aux tendances, à expliquer les thèmes descriptifs

    puis à déterminer les liens ou les interactions entre eux. Elle a conduit à une présentation descriptive des

    actions groupées par domaines d’intervention. Les principes de cette méthode sont l’extraction et la

    hiérarchisation des thèmes ou des messages clés tels qu’exprimés par les participants, la comparaison des

    messages ou thèmes dans différents groupes et l’illustration des messages dans le but de refléter la perception

    exprimée par la population cible.

    L’interprétation a été réalisée en se servant des indicateurs de quantité et de qualité prédéterminés

    IV. Résultats de l’étude

    Les résultats de l’étude s’articulent autour de cinq points, notamment le rôle de formation, d’information et de

    communication, contrôle de l’action public et de promotion de la culture de rendre compte, et enfin du rôle de

    plaidoyer, et de la perception des actions menées par les OSC.

    4.1. Le rôle de formation

    La problématique de la citoyenneté n’a pris une importance de taille dans le débat politique togolais que suite

    aux violences électorales de 2005. C’est donc par rapport à ce contexte de crise que le Togo, de concert avec le

    système des Nations-Unies, a amorcé une politique de promotion de la culture de la non violence et de la paix.

  • 18

    Concernant spécifiquement le programme d’éducation à la citoyenneté, on peut distinguer comme acteurs

    principaux : les organisations de la société civile œuvrant pour la défense des droits humains et des libertés, les

    médias et journalistes et les organisations religieuses. Les organismes techniques (du système des Nations

    Unies pour la plupart) et les ONG internationales constituent la première vague de formateurs des citoyens à la

    citoyenneté. Ils interviennent souvent en appui et accompagnement aux actions des OSC, dans l’exécution de

    certains programmes établis par l’Etat, dans le renforcement de leurs capacités.

    Ainsi, dans le cadre des renforcements de capacité des différents acteurs sociopolitiques sur la culture de la

    bonne gouvernance portant sur la lutte contre la corruption et les exigences de transparence de la gestion des

    biens publics, le PNUD a donné plusieurs sessions de formation aussi bien au gouvernement, au parlement

    qu’aux cadres des différentes administrations dans le but de renforcer la cohésion nationale.

    En ce sens, le PNUD a financé un certain nombre de projets au Togo, notamment le Projet d’Enregistrement et

    d’Appui au Cycle Electoral du Togo (PEACE) couvrant Avril 2007 à Mars 2008. Ce projet a permis de former

    les membres des partis politiques sur la non violence et la tolérance ainsi que les observateurs nationaux.

    Un autre Projet intitulé « Appui à la Consolidation de la Paix » a couvert la période de mai à décembre 2008 et

    a permis d’appuyer le Ministère des Droits de l’Homme et de Consolidation de la Démocratie (MDHCD) dans

    l’élaboration de "la Stratégie nationale de consolidation de la Démocratie et de la Paix pour le

    développement au Togo". Le but était d’accompagner les institutions de la République dont le

    fonctionnement normal participe à la consolidation de la paix et de la démocratie grâce à l’instauration d’une

    plus grande confiance du citoyen, de la société civile et des partis politiques, grâce à la transparence dans la

    gestion et le fonctionnement efficient des systèmes de contrôle du fonctionnement de l’Etat.

    Pour sa part, le HCDH-TOGO a organisé la semaine précédant les élections législatives du 14 octobre 2007,

    une rencontre avec les journalistes de la presse publique et privée pour les inviter à plus de responsabilité dans

    l’exercice de leur profession. La rencontre avait pour objectif d’informer et sensibiliser les journalistes sur

    leurs droits et devoirs en matière de promotion et de protection des droits de l’Homme.

    Aussi, le HCDH a-t-il recruté en 2007 un Consultant Média pour la mise en oeuvre d’un Programme

    d’éducation et de formation aux Droits de l’Homme par les médias. La mise en oeuvre de ce programme

    d’éducation et de formation aux Droits de l’Homme par les médias répondait aux normes de la Communication

    pour le Changement de Comportement (CCC).

    Par ailleurs, l’initiative d’un processus vérité et réconciliation au Togo, procède d’un renforcement de la

    campagne de lutte contre la violence et l’impunité lancée en juillet 2007 par le HCDH.

    Enfin, initiée par le Haut commissariat des Nations unies aux Droits de l’homme (HCDH) et grâce à l'appui

    financier de certains partenaires comme l'Union européenne (UE) et l'Organisation Internationale de la

    Francophonie (OIF), les consultations nationales de mars à mai 2008 ont permis de recueillir les opinions des

    Togolais sur la nature et les prérogatives de la Commission Vérité Justice et Réconciliation prévue par l’APG.

    Ces consultations nationales constituent la première démarche dans la mise en place de cette Commission

    vérité et réconciliation. Il appartiendra donc au peuple de se prononcer, afin d'éviter les frustrations", a

    expliqué un ministre.

  • 19

    Dans cette meme optique, au cours du séminaire intitulé Quelle commission Vérité-Réconciliation pour le

    Togo ? organisé en juillet 2008, la LTDH a eu à instruire les ONG, les parlementaires et les partis politiques

    sur les différentes figures de justice transitionnelle et les commissions Vérité-Justice-Réconciliation.

    La fondation Konrad Adenauer quant à elle, après avoir formé les formateurs nationaux sur l’esprit citoyen au

    sessions annuelles de 2003 à Ouagadougou et 2004 à Kpalimé, a également formé les jeunes des partis

    politiques en avril 2008 à Brother Home et en juillet 2008 au Césal sur les subsidiarités telles que la culture de

    la non violence, la tolérance, l’équité, etc.

    Les OSC viennent en deuxième position et sont les plus concernées pour la formation du grand public. A cet

    effet, les organisations de défenses des droits et des libertés entre autres, la LTHD, l’ONG COPED en

    partenariat avec le PNUD, la CNSC, le WANEP, CCOFT, Amnesty international, etc., ont organisé diverses

    sessions de formation.

    Dans le cadre de sa mission qui est la promotion de la paix, le WANEP (West African Network for Peace

    building) a organisé des ateliers de réflexion sur la promotion de la culture de non violence et de la paix. Son

    action a accru les capacités de participation de la société civile au dialogue national. Sous son initiative, la

    CODEL a été initiée en vue de l’observation des élections législatives de 2007. Au cours de ce programme,

    510 observateurs dont 400 Togolais ont été formés et déployés sur le terrain. Sous son programme d’éducation

    à la paix, quatre ateliers ont été organisés au cours du mois de novembre 2007 pour les associations de jeunes

    dont 510 jeunes des syndicats et partis politiques. Dans le cadre de la citoyenneté, ils exécutent un programme

    de formation à deux volées : le premier, Engagement citoyen et politique des jeunes et le second, Elite et

    responsabilité des jeunes. Des ateliers d’échange des acteurs de la vie socioéconomique et politique ont été

    également organisés d’avril 2005 à avril 2008 par le WANEP sur les avancées faites en matière de démocratie

    et la non violence.

    La CNSC de son coté a initié en 2006 le programme Undef (Programme d’actions communes pour

    l’information, la participation citoyenne et le renforcement de la société civile togolaise) qui vise à créer les

    conditions d’une participation dynamique et efficiente des citoyens et du Togo au processus démocratique et à

    la gouvernance locale.

    On ne saurait négliger l’action des ONG féminines telles que le WILDAF, le GF2D et le CCOFT qui

    participent pour beaucoup dans l’émancipation et la promotion du statut juridique de la femme par leur action

    de formation des pairs éducateurs et des para juristes, qui par devoir de restitution, constituent les principaux

    relais au sein des groupements et associations. Ces groupements et associations, à leur tour, au truchement de

    campagnes de sensibilisation ou visites, transmettent le message à la base.

    Le GF2D, dans ce sillage forme des animateurs et des animatrices d’éducation civique dans le cadre de leur

    programme de reconnaissance de la femme togolaise.

    L’INADES-Formation a également initié en janvier 2009 un projet de production et de diffusion de manuels

    d’éducation civique dans le cadre de son programme d’appui à la gouvernance et à la citoyenneté.

    Ces différents acteurs organisent le plus souvent sur les ondes des débats autour de différents thèmes à l’ordre

    du jour de leur agenda.

    Amnesty international dans le cadre de son programme d'éducation à la citoyenneté mène différentes actions

    entre autres, les campagnes Stop à la violence contre les femmes, des écoles plus sures: un droit pour toutes les

  • 20

    jeunes filles, les droits humains comme moteur de changement en matière de respect des lois. Stop a

    l’impunité. Ces projets sont exécutés au travers de panels de discussion, conférences débats, formations

    publiques et aussi dans les groupes de réflexion thématiques et, également dans la production de bulletin

    d’informations entre autre Dzéna et Echos d’AI.

    L’action des ONG de développement est à relever. En effet l’ONG APED a organisé en janvier 2008 un atelier

    national sur le projet renforcement des capacités professionnelles de la société civile en vue de l’élaboration

    d’un plan d’action stratégique des OSC en vue de la culture de l’excellence et le professionnalisme.

    Une autre action de formation est le renforcement des capacités des CVD et CDQ sur l’utilisation des fora pour

    sensibiliser les populations au cours des campagnes de communications sociales.

    Comme tel, ce sont le plus souvent des séminaires ateliers, des émissions débats, et des forums qui constituent

    les canaux usités par les OSC pour divulguer leur message.

    Toutefois, ces actions qui paraissent multiformes, sont peu nombreuses à l’échelle nationale, limitant ainsi les

    impacts dans les zones urbaines.

    4.2. Le rôle d’information et de communication des OSC

    Les investigations menées dans le cadre de la présente recherche ont permis de relever un certain nombre

    d’initiatives conduites par des ONG soucieuses du niveau peu reluisant des indicateurs de base liés à la

    citoyenneté, notamment la participation, la responsabilité, le respect des lois, le patriotisme, etc.

    En effet, de plus en plus et ce depuis quelques années, on peut remarquer l’organisation de forums, des

    manifestations de célébration des journées Internationales, par des Institutions telles que HCDH, WANEP,

    Amnesty International, la Commission Nationale Justice et Paix, GF2D, WILDAF, la LTDH, avec pour seul et

    véritable but d’informer le peuple sur l’état de la question des droits de la personne, et sur l’existence des textes

    régissant ses droits, mais aussi ses devoirs. C’est le cas des journées de la paix organisées par WANEP dans les

    écoles,des Droits de l’homme, de la journée de la femme, des droits des enfants, du réfugié, etc. célébrées à

    coups de campagnes médiatiques.

    La question de la participation politique a aussi constitué un champ d’intervention privilégié de certaines OSC

    qui se sont essentiellement illustrées lors des échéances électorales en vue d’inciter les populations, entre-

    temps très déçues par les tournures que prennent souvent les dénouements des processus électoraux, à honorer

    leur responsabilité citoyenne de participation. C’est le cas par exemple du projet PEACE financé en 2007 par le

    PNUD et qui a permis d’appuyer les OSC à organiser des campagnes de sensibilisation, par le truchement des

    médias, des caravanes, des manifestations folkloriques et autres, pour amener les populations à s’inscrire sur

    les listes électorales, mais aussi à adopter des comportements de non-violence dans le règlement des

    contentieux. Et pour une fois au Togo, les élections législatives de cette année (2007) n’ont souffert d’aucune

    violence, d’aucune contestation ou d’actes d’incivisme majeur : destruction de biens publics, vandalisme, etc.

    Les consultations Nationales organisées par le HCDH en 2008 et qui ont abouti aux travaux de mise en place

    de la Commission Vérité Justice et Réconciliation ont été aussi un véritable canal d’information des

    populations sur la question des droits de l’homme dans le pays et des mécanismes de justice transitionnelle qui

    doivent répondre aux besoins de justice à laquelle aspirent les togolais victimes de comportements inciviques

    lors des échéances électorales des années 2005.

  • 21

    Aussi, plusieurs associations locales ou organisations de la société civile ont-elles initié des manifestations

    pour la promotion de la paix. En effet, selon Togo presse du 12/01/2005 p.3, l’Association des Femmes pour la

    Paix a appelé ses membres et tous les togolais épris de paix à prier à cet effet. La même initiative est prise aussi

    par Femmes, Droit et Développement en Afrique section du Togo, (Guide pour la prise en charge des victimes

    du harcèlement sexuel en milieux scolaire, universitaire et sur les lieux d’apprentissage, 2004).

    Notons qu’étant les principaux canaux de diffusion, les radios et télévisions ne sont pas restées en marge et

    font montre de dynamisme en proposant aux populations des émissions éducatives relatives à la citoyenneté.

    Le but étant de faire assimiler aux populations les valeurs de droits et devoirs d’un bon citoyen. Nous pouvons

    donner en exemple: la radio Nostalgie avec l’émission « Podium des électeurs diffusée en 2005 en vue

    d’éclairer et d’instruire les électeurs, nutoményadzodzo qui porte sur toutes les questions sociopolitiques,

    économiques et culturelles. Sur les mêmes questions, NaNa FM diffuse l’émission Emeneko ; la TV7 dans le

    programme 7/7 fait avec ses invités, un passage en revue des questions de l’actualité politique économique et

    sociale. Dans la même lignée, la chaîne LCF oraganise les émissions sans détour et Zanududu, cette dernière

    s’intéressant particulièrement au phénomène de la corruption, de même que la radio Zéphyr dans Ensemble et

    c’est pas clair.

    La Télévision nationale (TVT) propose : le plateau de la semaine et au cœur de la nation, qui portent

    également sur toutes les questions d’actualité.

    On ne saurait passer sous silence les actions des acteurs organisés à la base, les leaders d’opinion, les Comités

    Villageois de Développement (CVD), les Comités de Développement de Quartier (CDQ) dont le rôle est loin

    d’être insignifiant en matière d’éducation à la citoyenneté. Ils constituent généralement des relais efficaces des

    informations des ONG vers les populations à la base. C’est le cas des jeunes leaders venant de toutes les

    régions et préfectures du Togo, formés par le HCDH et WANEP-Togo en 2006 sur la citoyenneté et la non

    violence, et qui ont eu pour rôle de relayer les messages éducatifs reçus lors de leur formation auprès de leurs

    pairs dans leurs milieux de provenance, soit à travers la paire-éduccation, soit à travers les ateliers

    communautaires, etc. D’ailleurs, la plupart des actions de sensibilisation organisées par les ONG dans les

    différentes localités du Togo s’appuient sur les leaders d’opinion et les CVD, ce qui leur donne plus de chance

    de toucher quantitativement et qualitativement les masses populaires.

    En outre, à travers leurs rapports d’activité, certaines organisations non seulement informent les masses

    populaires, mais aussi dénoncent des comportements qui constituent un déni à la citoyenneté. Il en est ainsi par

    exemple des rapports annuels publiés par Amnesty International, Transparency International, etc., de concert

    avec leurs sections locales ou partenaires en l’occurrence Amnesty Internationale branche Togo et dans une

    certaine mesure la LIT (Ligue des Indépendants pour la Transparence), les rapports de la CNDH, et de la

    LTDH. Ces rapports annuels permettent d’informer les populations sur la situation des droits de l’homme au

    Togo, les violations, de même que sur les questions relatives a la gestion des affaires publiques, la corruption

    (qui est la manifestation d’un déficit d’esprit citoyen), tout en invitant les acteurs de ces différents faits à des

    changements de comportement et à plus de civisme.

    Sentinelle de la gestion politique, économique et sociale, la société civile avec son indépendance, sa diversité,

    son dynamisme participe à la dénonciation de tout dérapage au sein de la Cité. C’est là une nécessité et il y a

  • 22

    lieu de favoriser une meilleure gouvernance en exigeant des actions multiformes concernant l’information et la

    communication.

    En outre, dans un autre registre, l’ONG Les Amis de la Terre a mis en œuvre, à la suite de PACIPE, une

    importante campagne de sensibilisation sur la protection de l’environnement. Il s’agit essentiellement de spots

    télévisés devant servir à inculquer aux citoyens les bons comportements liés à la préservation d’un

    environnement propre et durable. Les affiches, pancartes, dépliants avec des messages évocateurs constituent

    également des instruments privilégiés pour instruire les populations. Le CCOFT a en ce sens élaboré un

    dépliant portant sur le thème de la décentralisation á l’intention des groupes de femmes.

    En clair, de nombreuses campagnes sociales de courte durée s’appuient sur des activités d’information et de

    communication, mais ces interventions épisodiques n’apparaissent pas être en mesure de créer une masse

    critique susceptible de provoquer des changements sociaux importants et durables.

    En définitive, même si leurs actions ne sont pas encore assez visibles, les OSC jouent un rôle très important

    dans l’émergence de la bonne gouvernance qui constitue l’un des indicateurs majeurs de la culture citoyenne.

    4.3. Le rôle de contrôle de l’action publique et de promotion de la culture de rendre compte

    Très sensibles au caractère vertical qui marque le développement au Togo en matière de prise de décisions,

    certaines organisations de la société civile sont favorables à toute stratégie pouvant œuvrer pour une plus

    grande implication des bénéficiaires. Il s’agit notamment des Organisations Non gouvernementales :

    FONGTO, GF2D, IPS-NEPAD-Coordination Nationale du Togo, UCJG INADES-Formation ; des structures

    d’Etat comme les Affaires Sociales, le Ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation. (Plus précisément la

    direction de la décentralisation).

    Les efforts que déploie la société civile sont ceux qui se font dans le sens d’impliquer les bénéficiaires dans la

    gestion des œuvres de leur développement. A cet effet, certains initiateurs de projet estiment que conduire

    progressivement la société civile à comprendre la nécessité “de demander de compte à rendre” est un chemin

    assez long.

    En ce qui concerne les sociétés privées, les données sont presque les mêmes ; aucune structure n’est mise en

    place pour faciliter l’implication de la société civile dans la gestion des sociétés privées.

    L’éducation des populations est très limitée et n’est pas orientée dans le sens d’attirer leur attention sur la

    gestion des sociétés privées. D’après certains, « l’on vient de commencer à demander des comptes aux sociétés

    publiques et comment peut-on en demander aux sociétés privées dont les fonds sont considérés comme

    privés ? ».

    Les initiatives de certaines ONG et Associations s’évertuent à amener progressivement les populations à

    l’information sur leur droit dans le suivi des actions qui se mènent en leur faveur.

    L’Union Chrétienne de jeunes gens est une ONG Chrétienne qui, dans ses principes, s’évertue à éduquer la

    population bénéficiaire de ses services dans le domaine de la responsabilité participative.

    Une formation en cascades conduit progressivement toutes les couches sociales à se sentir parties intégrantes

    de leur propre développement. La formation débouche, selon les programmations, à la constitution des comités

    de gestion décentralisés, capables de rende compte de leurs actes et de réclamer des comptes aux élus. L’UCJG

    a la particularité d’avoir initié une culture de rendre compte aux bénéficiaires de ses prestations.

  • 23

    INADES Formation initie une stratégie de développement participatif avec la méthode MARP qui met en

    interface les gouvernants et les gouvernés. La MARP qui est une méthode active de recherche participative

    constitue un socle privilégié pour INADES FORMATION. Elle permet par conséquent aux bénéficiaires de

    réclamer des comptes aux élus qui ont aussi conscience de l’impératif de rendre des comptes pour les projets

    qui leur sont confiés.

    LaGF2D s’emploie à organiser des rencontres pour amener les femmes de toutes les régions du Togo à vivre

    leur citoyenneté. Cette initiative a pour objectifs d’Initier la femme à l’audition interne et externe, et a mener

    les responsables de projets à accepter de rendre compte.

    En définitive, il faut faire remarquer que la société civile est encore au seuil d’une démarche embryonnaire en

    matière de CCAP, même si certaines actions novatrices et pertinentes sont à déceler çà et là, en l’occurrence,

    l’OTBG, la COPED, qui à travers les tables rondes, les séminaires et les ateliers de réflexion contribuent à

    jouer ce rôle de contrôle citoyen de l’action publique et d’invitation des gouvernants à rendre compte de leur

    gestion.

    4.4. Le rôle de plaidoyer

    Le concept de citoyenneté suppose l’amour de la patrie et une ardeur à la servir. En ce sens, l’idée force est que

    la socialisation suppose comme valeurs essentielles l’implication a la gestion transparente des affaires et un

    engagement politique.

    Depuis sa création, la société civile intervient de façon importante dans la vie politique togolaise, car, supposée

    proche du peuple, elle constitue le meilleur moyen pour le gouvernement de répondre aux besoins des citoyens

    et vice versa. Elle est de ce fait formellement invité à présenter des suggestions pour une bonne conduite des

    affaires. Plusieurs évènements témoignent de cette participation certes timide mais efficace sur certains

    points : la conférence nationale souveraine, la signature des 22 engagements en 2004, l’accord politique

    globale, les consultations nationales, et plus récemment son rôle dans le processus de création d’une

    commission justice, vérité, réconciliation.

    Le Togo fait partie des nations qui ont démontré de l’efficacité de la mobilisation de la société civile quand

    l’intérêt général de la cité est menacé. L’histoire révèle qu’à la veille des indépendances, les associations de

    l’époque comprenant l’urgence de mieux s’organiser face au colonisateur en ville comme dans les zones

    rurales se sont rassemblées sous le mot d’ordre de la solidarité en dehors de la famille face à un patron ou

    groupes de patrons. Ainsi sont nés les mouvements syndicaux organisés par décret du 7 Août 1944 instituant

    les syndicats professionnels sur les territoires coloniaux, promulgué au Togo le 03 octobre 1944 (JOTT ; No.

    470).

    Ces groupes organisés étaient appelés forces nationalistes et syndicalistes et oeuvraient au côté de la classe

    politique.

    Dans son document « Rapport de conférence sur la Société Civile au Togo : Définition du concept et état des

    lieux les professeurs N’buéké Adovi GOEH AKUE et B. COULIBALY affirment que :

    « Les actions des syndicats furent déterminantes dans la marche du Togo vers l’indépendance, en particulier

    la grève générale, décrétée les 27, 28 et 29 décembre 1957 pour réclamer la dissolution de l’Assemblée

    territoriale de l’époque et l’organisation de nouvelles consultations transparentes, sous la supervision de

    l’ONU. C’est celles-ci qui eurent lieu le 27 avril 1958 et annoncèrent le choix du Togo pour l’indépendance.

  • 24

    D’ailleurs le secrétaire général des syndicalistes devait être nommé dans le premier gouvernement comme

    ministre du travail ».

    Des résultats des actions de plaidoyer de la société civile togolaise, nous pouvons noter les recommandations

    issues des assises du forum social (13 au 17 mars 2007) demandant la réduction des prix du carburant, la

    révision de l’indice salarial, l’augmentation de la durée du travail et la fixation de l’âge d’admission à la

    retraite à 60 ans.

    Notons aussi que dans un contexte de crise permanente, les vraies valeurs de tolérance, de non violence,

    d'honnêteté, de sens civique ont disparu. Cela a entraîné divers maux au chapitre desquels nous citons : la

    corruption, le népotisme, le grand banditisme qui, ayant gagné toutes les couches sociales, et, gangrené la

    population, font prendre aux togolais des attitudes revanchardes lors des échéances électorales. Cet état de fait

    a poussé des voix à s'élever dans les OSC pour prévenir le pire; c'est pourquoi tout le peuple a salué le

    démarrage des dialogues sociales et politiques tripartites. Généralement, ce sont les ONG internationales

    surtout qui font ces activités de lobbying auprès de l’état. Mais elles sont très peu nombreuses au Togo. Nous

    pourrons citer en exemple des actions communes engagées par Plan Togo et l’UNICEF, WAO Afrique dans le

    cadre du vote de la loi interdisant la traite des enfants au Togo et de la sortie du nouveau code de protection

    des enfants au Togo.

    L’agenda des OSC en matière de plaidoyer n’étant pas très fourni, il s’avère important de préciser que, si au

    Togo, la loi 1901 autorise les OSC à exercer des activités de plaidoyer, le déficit technique ne permet guère a la

    majorité de ces OSC d’engager des actions de cette envergure avec des alliances stratégiques. Aussi, face à la

    rigidité du système en place, les organisations de la société civile hésitent à engager des actions de plaidoyer.

    Selon l’indice de Bertelsman Transformation, le Campus de l’Université de Lomé est sous surveillance

    constante du Gouvernement. Aucun mouvement d’opposition ne peut voir le jour et se développer sans que ses

    leaders ne soient identifiés comme dangereux pour le régime en place.

    Force est aussi de constater que bon nombre de ces OSC manquent de compétence en matière de plaidoyer et

    vivent dans une sorte de léthargie. Cependant on peut signaler en 2003 la tenue d’une campagne de plaidoyer

    pour faciliter la scolarisation de la jeune fille auprès des députés par certaines ONG et associations.

    Une autre limite est la quasi absence de dialogue des OSC avec l’Etat. En effet, l’état cherche seulement à

    discuter avec un petit groupe d’OSC, sur une base de sujets ad hoc. Il s’agit des fédérations et réseaux d’ONG

    et d’Associations pour la participation à l’élaboration des politiques sectorielles par exemple pour la jeunesse,

    la femme ainsi que de certaines ONG choisies sur une base thématique : Environnement, Santé, Sida, etc.

    Nous devons également préciser que l’univers politique togolais ne permet pas un dialogue avec la société

    civile, en témoignent les pressions que subissent les OSC de la part des autorités de relais que sont les préfets

    lors de leurs rencontres partenariales.

    Néanmoins, dans la recherche de solutions à la crise togolaise, certaines OSC, notamment les confessions

    religieuses, les ONG et Associations, les syndicats etc. ont été sollicités par les hautes autorités de l’Etat pour

    apporter leur contribution pour la réconciliation nationale. Ce qui donne des ouvertures à saisir en vue de

    renforcer le dialogue entre l’Etat et la société civile.

  • 25

    4.5. Analyse de la perception des actions menées par les OSC et des pratiques relatives à l’appropriation

    des valeurs liées à la citoyenneté

    Une importante mesure de l’état et du rôle de la société civile réside dans l’impact qu’elle a sur la vie des gens

    et sur la société toute entière. En effet, il semble exister un fossé entre les OSC et la population et, il est clair

    que la population dans son ensemble fait une mauvaise lecture du concept de citoyenneté. En effet, des

    investigations, il ressort que les togolais éprouvent une certaine difficulté à définir le concept de citoyenneté. A

    coté de ceux qui en ont une idée générale et qui la conçoivent comme « le sentiment d’appartenance à la cité,

    l’engagement en tant que citoyen remplissant ses devoirs envers son pays, la volonté de tout patriote à faire

    évoluer son pays, le sentiment de responsabilité pour le développement de la société », se trouvent ceux pour

    qui citoyenneté rime avec le droit du peuple à vivre pleinement négligeant ainsi le paramètre du devoir que

    couvre ce concept.

    Le rôle d’éducation à la citoyenneté, qui échoit donc à la société civile, ne semble pas être totalement rempli.

    Ceci renvoie à la question de l’existence de cette dernière dans l’entendement des Togolais. En effet, les

    réponses sont mitigées quand on parle d’une société civile togolaise et du rôle qu’elle joue dans la vie

    nationale. Sa crédibilité même est remise en cause par les enquêtés. Pour certains, la société civile n’est

    qu’une représentation des ONG et associations locales, un regroupement des organisations existant sur le

    territoire ayant pour vocation d’apporter un soutien aux populations vulnérables. Cela est certes vrai mais une

    telle opinion révèle l’ignorance du pouvoir d’action réelle de la société civile en tant que for