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Témoins, indicateurs... médiateurs les sentiers Revue des professionnels des espaces naturels 19 juillet 2007 trimestriel • 9,5 les sentiers les sentiers Témoins, indicateurs... médiateurs

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Témoins, indicateurs... médiateursles sentiers

Revue des professionnels des espaces naturels19

juillet 2007

trimestriel • 9,5 €

les sentiersles sentiersTémoins, indicateurs... médiateurs

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juillet 2007• n° 19

Tarif des abonnements : 1 an (4 numéros) : 33,50 €ISSN N° 1637-9896 - Commission paritaire 0510 G 83179

3 ÉDITO La difficile construction du parcamazonien de Guyane.

4 DES MOTS POUR LE DIRE Principes de prévention, de participation, de responsabilité.

4 L’ÉCHO DES PROS • ACTUALITÉS

DOSSIER Les sentiersTÉMOINS, INDICATEURS… MÉDIATEURS

9 Un sentier ? Quoi de plus évident…10 Comprendre la fréquentation.

La recherche pour mieux gérer.11 Méthode pour reconstituer l’histoire

des sentiers.12 Agir ensemble. Savoir qui fait quoi

et pourquoi.13 Des résultats bien pratiques.15 Prendre en compte le temps et l’espace

pour mesurer la fréquentation desespaces naturels.

17 Connaître le rôle écologique des sentiers.

AMÉNAGEMENT•DÉVELOPPEMENT•TERRITOIRE

19 Les terrils miniers intègrent les espacesnaturels sensibles.

ÉTUDES • RECHERCHES20 Quelle Loire veut-on? Se donner

les mêmes références temporelles.21 Scientifiques et gestionnaires. Comment

rendre fructueuse leur collaboration?

ACCUEIL • FRÉQUENTATION

22 Journées sans voiture. Expérimentationsur la route des crêtes (PNR du Verdon).

sommairePhoto de couverture : © Christian Balais - PN VanoiseVallon du Clou, vue vers le glacier des Balmes.

[ Les propositions desujets d'articles àtraiter dans la revuesont à adresser à :[email protected]

Adresse du forum :http://www.espaces-naturels.fr/forum/forum.asp ? id = 5

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©Sylvain Golé - Inra

Évaluer la valeur alimentaired’une végétation

30

Une abbaye pour aimer les chauves-souris

INITIATIVES • PARTENAIRES

29 Le sauvetage de Grand-Mare. Mobilisationlocale autour d’un étang envasé.

MÉTHODES • TECHNIQUES

30 Évaluer la valeur alimentaire d’une végétation. La méthode Grenouilles’intéresse au point de vue des troupeaux.

32 Développer une photothèque numérique.Mode d’emploi appliqué en Vanoise.

34 Gestion des déchets sur l’espace littoral.Expérimentations en baie d’Audierne.

AILLEURS

36 Coopération franco-hongroise pour la biodiversité. D’égal à égal.

39 LECTEUR PENSEUR

42 PARUTIONS

43 L’AGENDA

24

Le dossier9

EN FORÊT, ENALPAGE OU AUBORD DE L’EAU,LES SENTIERSRÉPONDENT ÀTOUS NOSBESOINS, MÊME S’ILSSE SUCCÈDENTDANS LE TEMPS.

DROIT • POLICE DE LA NATURE

23 PNR Livradois Forez. Le préfet entérine les arrêtés municipaux interdisantla circulation des véhicules à moteur sur les sites fragiles.

PÉDAGOGIE • ANIMATION

24 Une abbaye pour aimer les chauves-souris.26 Un jeu de rôles assisté par ordinateur

comme support de médiation.

MANAGEMENT • MÉTIERS

28 Bénévoles handicapés. Comme les autres ?Réserve naturelle de Montenach.

© G. Guillouzouic - Commune de Clohars-Carnoet

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 3

CHEF DU BUREAU DES

PARCS NATIONAUX ET DES

RÉSERVES, DIRECTION DE LA NATURE

ET DES PAYSAGES AU

MINISTÈRE DE

L’ÉCOLOGIE, DU

DÉVELOPPEMENT ET DE

L’AMÉNAGEMENT

DURABLES.

>>> Mél : [email protected]

COLIN NIEL

éditorial

LES SALADES KUMARU POUSSENTSUR LES ROCHERS IMMERGÉS DES

RAPIDES. ELLES CONTRIBUENT ÀCASSER LE COURANT DANS LEUR

ENVIRONNEMENT IMMÉDIAT ETSERVENT D’ABRI CONTRE LES

PRÉDATEURS. ELLES CONSTITUENTUNE RÉSERVE D’ALIMENTS POUR

DIVERS PHYTOPHAGES INVERTÉBRÉSAINSI QUE POUR DE NOMBREUX

POISSONS. PARMI EUX, LE KUMARU :PAR SON RÉGIME ALIMENTAIRE

PRINCIPALEMENT HERBIVORE, ILCONCENTRE UNE FAIBLE QUANTITÉ

DE MÉTHYL-MERCURE,CONTRAIREMENT AUX ESPÈCES

CARNIVORES.

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DIRECTEUR DE LA PUBLICATIONYves Vérilhac

COMITÉ ÉDITORIALCoordination : Michelle Sabatier• Secrétariat : Gwénaëlle Arons• Rubriques : Actualités PascalDanneels, Laurence Boussand• Études, RecherchesEmmanuel Michau • Gestionpatrimoniale Valérie Fiers,Vincent Jollivet • Accueil,Fréquentation Lydiane Estève,Jean-Marie Petit, Anne Vourc'h• Pédagogie, Animation NicolasGérardin • Management,Métiers Monique Fabbro,Florence Lespine • Droit, Policede la nature Louis-Gérardd’Escrienne • Méthodes,Techniques BernardCommandré, Véronique Petit-Uzac • Initiatives, PartenairesCécile Birard, Bruno Mounier •Aménagement, Développement,Territoire Jean-Claude Bonnafé,Arnaud Callec, Jacques Plan,Paul Havet • Ailleurs ChristianPerennou.

RÉDACTIONDirectrice de la rédaction :Michelle SabatierRédactrice en chef : Moune Poli• Rédactrice graphiste : CamilleProsperi • Assistante graphiste:Vanina Bellini • Rédaction :Moune Poli • Joël Demasson•Correctrice : Magali FloriMediaterra Route Royale20600 Bastia Mél : [email protected]él. : 0495311221

ADMINISTRATION,ABONNEMENTSMediaterra Laetizia GiampietriRoute Royale - 20600 Bastia Tél. : 0495311221

ÉDITEUR AtenAtelier technique des espaces naturelsEnsam - 2 place Viala34060 Montpellier cedex 2Tél. : 0467043030

IMPRESSIONImprimerie Chirat744, rue de Sainte-Colombe42540 Saint-Just-la-Pendue

La difficile construction du parc amazonien de Guyane

Après quinze ans de négociation, le parc national amazonien de Guyane est enfincréé. De réunions à Cayenne avec les institutions jusqu’aux nombreusesrencontres sur le terrain avec les communautés d’habitants… pour l’équipe de la

mission pour la création du parc, cette dernière année aura été intense !Le sujet le plus controversé ? Le zonage (c’est-à-dire la délimitation de la zone classéeen cœur de parc) sur la commune de Maripasoula, lequel mêlait les positionscontradictoires d’habitants, d’ONG locales, nationales et internationales.Décembre 2005. Suite à la proposition de zonage de l’avant-projet, de nouvellesréunions ont lieu, sur le terrain, avec les chefs coutumiers amérindiens wayanas et lesautorités noires marrons alukus, pour expliquer les enjeux… une fois encore.Fin janvier 2006. Prises de positions écrites des chefs coutumiers.Les Wayanas demandent un cœur de parc plus grand à proximité de leurs villages. Aucontraire, le Gran Man Aluku de Maripasoula réclame que ce cœur soit très restreint etrepoussé à l’extrême sud de la Guyane. Quant à la commune de Maripasoula, elle donneson accord pour créer le parc sans prendre position sur le zonage.Opposition définitive entre communautés ? La mission retient surtout l’aspect positif : ils’agit de trois positions favorables au parc national. Elle se réjouit de cette conjonctureinespérée, en repensant aux réunions houleuses des mois précédents dans lesquelles onavait couru le risque de voir le parc se créer en excluant la commune de Maripasoula !Les travaux pouvaient donc continuer.Pour aboutir à un accord et trouver un équilibre acceptable par tous, il convenait detenir compte des relations complexes entre communautés. C’est ainsi qu’en avril 2006,une réunion aboutit à un accord sur un zonage final négocié : compromis entre lespositions des Alukus et des Wayanas.Organisée par la commune de Maripasoula, la rencontre aura volontairement lieu en paysamérindien, à une heure de pirogue : les organisateurs veulent limiter les risques depression et permettre l’expression de chacun.Tout aura été dit sur cette rencontre : mauvaises traductions, mauvaise explication,pression des Alukus, trop nombreux, sur les Wayanas. Mais nous étions là, les chefswayanas très largement représentés, les autorités coutumières alukus bien moinsnombreuses, et le résultat très clair. Le consensus ne fut pas « mou » : la réunion s’estsoldée par des applaudissements ! Des applaudissements qui, à cet instant, traduisaientune satisfaction devant ce zonage négocié. C’est ainsi, malgré les critiques, qu’il futproposé à l’enquête publique. Pourtant, si le zonage est acté par le décret de création,l’enjeu de la réussite du parc amazonien et de son efficacité pour la protection desmilieux reste à venir, avec notamment la négociation de la charte dans les cinq ans, etl’éventuelle extension du cœur de parc. L’avenir sera donc riche en concertations etdevra permettre l’émergence de ce parc de nouvelle génération. ■

© H. Griffit - Mission parc Guyane

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Des chauves-souris spécialisées dans la chasse aux passereaux migrateurs

Des chauves-souris de la péninsuleibérique font preuve decomportements alimentaires

insoupçonnés jusque-là : haut dans lesairs, elles mènent la chasse auxpassereaux en transit migratoirenocturne. Cette découverte majeure a étéfaite par une équipe de chercheurshispano-helvétique. Elle est développéedans la revue scientifique internationale àaccès libre PLoS ONE.Elle a tout d’abord attesté de l’existenced’un régime alimentaire strictementinsectivore en été, mixte au printemps etessentiellement carné (viande depassereau) en automne. Une proportionde viande d’oiseau plus importante enautomne qu’au printemps confortait

encore l’hypothèse :le passage automnaldes oiseaux est plusfourni car ce sont àla fois les parents etleur progéniture quivolent en directiondes quartiers d’hiverafricains. À l’opposé,au printemps, seulsreviennent lesindividus qui ontsurvécu à lamortalité hivernale.Selon le Pr. Arlettazdu département de la

biologie de la conservation de l’universitéde Berne, la capacité des noctulesgéantes de capturer les passereauxmigrateurs nocturnes du haut des airsapparaît unique dans l’ensemble durègne animal : « Bien sûr, on connaîtplusieurs espèces de chauves-souris quicapturent des vertébrés de petite taille ;mais celles-ci vivent toutes sous lestropiques et attrapent leurs proies surdes substrats, non dans les airs. Il y aaussi des espèces de faucons quifondent sur les passereaux migrateurs lelong des côtes méditerranéennes ouafricaines, mais elles sont exclusivementdiurnes. Enfin, les chouettes et leshiboux, prédateurs ailés nocturnes, necapturent jamais leurs proies dansl’espace aérien. En effet, les rapacesdiurnes n’ont pas de système sonar : lesproies sont détectées grâce aux bruitsqu’elles émettent en se déplaçant au solou dans le feuillage. » ■

>>> Prof. Raphaël Arlettaz - Biologie dela conservation, université de Berne.Mél : [email protected]

Principes de prévention,de participation,

de responsabilité

4 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

desmotspour le direchronique

● Scientifique

NOCTULEGÉANTE.

TITRE ORIGINALDE L’ARTICLE :«BATS’CONQUEST OF AFORMIDABLEFORAGINGNICHE :THE MYRIADS OFNOCTURNALLYMIGRATINGSONGBIRDS. »

LIRE SONINTÉGRALITÉSURWWW.PLOSONE.ORG

© Ana Popa

D’abord, le principe de prévention qui, bien sûr, ne doit pas attendre.Il s’agit en effet d’éviter la survenue des dommages liés aux risquesavérés d’atteinte à l’environnement, en agissant par priorité à la

source ou, à défaut, en limitant leur occurrence et leurs conséquences,avec des moyens humains et des dispositifs techniques et organisation-nels appropriés. La prévention est donc une action accompagnée de pré-vision, et ensemble elles peuvent concevoir et conforter la protection.Mais le principe de participation aussi ne peut que remonter toujoursplus «en amont» pour être opérant. Pour lui, le public doit être associéau processus d’élaboration des projets et des décisions publiques ayantune incidence sur l’environnement, et doit donc disposer de moyens d’ex-pression et d’intervention à chaque étape, ainsi que de recours une foisla décision prise. La participation ne se limite pas à l’accès aux informa-tions (y compris celles relatives aux substances et activités dangereuses),ni à la consultation ; elle suppose une formation de tout un chacun etdes processus itératifs de concertation suffisamment précoces avant ladécision et dans le suivi de son exécution.Enfin, le principe de responsabilité est précisément une réponse continueaux interpellations et exigences du contexte. Exprimé dans les normesinternationales et en droit français par le revers de la médaille, c’est leprincipe du pollueur-payeur, selon lequel les frais engagés pour prévenir,réduire ou combattre une pollution ou toute autre atteinte à l’environ-nement sont à la charge du responsable de cette pollution ou de cetteatteinte. La contribution de toute personne à la réparation des dommagesqu’elle cause ne saurait pour autant impliquer que la possibilité de payerpuisse lui donner le droit de polluer. En appeler à la responsabilité dèsque naît la conscience n’est donc pas seulement un principe de droit vis-à-vis de préjudices causés, mais tout autant un devoir positif, celui qu’atoute personne de prendre part à la préservation et à l’amélioration del’environnement.Il est heureux que l’intérêt porté à l’environnement ait conduit à ce queces «principes» initiaux soient reconnus, assez récemment… en 1995 auniveau législatif (article L. 110-1 du code de l’environnement), puis en2005 au niveau constitutionnel (articles 2, 3, 4 et 7 de la charte de l’environnement). Et dans les faits, ces commencements sont-ilsconstruits ? ■

>>> Mél : [email protected]

* Éric Binet est haut fonctionnaire chargé de la terminologie etde la néologie au ministère de l’Écologie, du développement etde l’aménagement durables.

Il en est des principes comme des commencements,c’est souvent après coup qu’ils sont identifiés etconstruits. Cependant, l’application de trois d’entreeux ne souffre aucun retard : les principes deprévention, de participation, de responsabilité.

Éric Binet*

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échodespros

Espaces naturels n°19 • juillet 2007 5

Service juridiqueDepuis fin mars 2007, le pôle

ressources de l’Aten a retrouvé un

service de veille et d’expertise

juridique. Les membres et

partenaires de l’Aten peuvent

adresser leurs consultations à la

nouvelle chargée de mission

juridique, Hélène Tripette,

docteure en droit de

l’environnement, spécialiste en

droit pénal et protection de la

faune et de la flore. Les

consultations doivent être

adressées par écrit, de préférence

par messagerie électronique. ■>>> Mél : [email protected]

● Utile

Le 10 janvier dernier, le Conseil d’État validait la circulaireOlin (6 septembre 2005) relative à la circulation des véhi-cules terrestres à moteur. Le texte, qui se limite à rappeler

les dispositions de la loi n° 91-2 du 3 janvier 1991, pose un prin-cipe général de l’interdiction de circulation en dehors des voieset chemins ouverts à la circulation publique (article L. 362-1 ducode de l’environnement). En l’absence de définition de «voieouverte à la circulation publique», la circulaire se réfère à la juris-prudence dominante. Elle utilise la notion de «voie carrossable»(chemin revêtu ou empierré permettant à un véhicule de tou-risme non 4x4 de circuler normalement) pour établir une pré-somption d’ouverture à la circulation ; excluant donc les sentiers,layons d’exploitation et autres chemins de terre, même praticablesen véhicule tout terrain.Diverses associations, adeptes des « loisirs verts», ont demandéau juge administratif d’annuler certaines dispositions de la cir-culaire et de ses annexes.Le Conseil d’État a jugé que la circulaire ne pouvait faire l’objetd’un recours en annulation (le recours contre une circulaire n’estadmis que si elle a un contenu « impératif » : qu’elle impose uncomportement déterminé ou qu’elle interprète des dispositions

législatives ou réglementaires en en méconnaissant le sens etla portée).Le Conseil d’État a annulé l’an-nexe 1 de la circulaire pour insuf-fisance de transcription desdispositions du code de la routerelatives à la conduite des quads.Le recours contre les autresannexes a été jugé irrecevable.En particulier, l’annexe 2 qui pré-cise les conditions de circulationdes véhicules à moteur dans lesespaces naturels et retient le cri-tère de la carrossabilité.Le Conseil d’État décide que cesdispositions n’ont ni pour objet nipour effet de porter atteinte à laliberté d’aller et venir ! ■Hélène Tripette - Aten

>>> Mél : [email protected]

Le Conseil d’État valideLa circulation des véhicules à moteur est interdite sur les voies non carrossables

© Vanina Bellini

L’UICN dresse un bilan critique sur la mise en œuvre par la France de sa stratégie

nationale pour la biodiversité1

Adoptée en février 2004, la stratégie nationale pour la biodiversité devraitcommencer à porter ses fruits. Le comité français de l’Union mondiale pourla nature dresse donc un bilan : sévère !… Il critique l’absence de portée

des dix plans d’actions prévus. Les mesures prises dans les plans agriculture etmer « ne sont pas assez significatives pour limiter les impacts importantsengendrés par des pratiques encore très productivistes ». Le plan d’action dédié àla mer doit encore faire beaucoup dans les domaines liés aux transports, à lapêche, à la recherche et à la formation. Quant au plan d’action infrastructures detransport, l’UICN regrette qu’il se limite essentiellement à des discussions. Parailleurs, l’UICN signale qu’elle n’a relevé aucune avancée sur le plan territoires caraucun comité de pilotage n’a été mis en place. Même remarque sur le planurbanisme : « le comité de pilotage est à ce jour fictif. » L’UICN déplore aussi que lamise en œuvre des trois plans forêts, outre-mer et recherche, validés enseptembre 2006, n’ait pas encore commencé. Et si le plan d’action international amis en œuvre plusieurs actions démonstratives dans le domaine de la biodiversité,comme le renouvellement du fonds français pour l’environnement mondial, ou latenue de la conférence «Biodiversité et coopération européenne audéveloppement », l’UICN recommande au ministère des Affaires étrangères derenforcer les moyens humains afin de concrétiser les autres actions annoncées.Heureusement le plan d’action patrimoine naturel compte plus de réalisations,essentiellement avec la création des espaces protégés. Ainsi le réseau françaisterrestre du réseau Natura 2000 couvre dorénavant plus de 12% du territoiremétropolitain.Si l’État est en cause, l’UICN dénonce également un manque de mobilisation de lapart des entreprises, des collectivités, des associations environnementales et dugrand public en considérant que le processus de mise en œuvre d’une stratégie etde plans d’action est resté confiné au domaine des services de l’État. ■

● Sévère

1. Dispositif d’action du gouvernementfrançais en faveur de la protection de lanature et du vivant. Il mobilise lesministères de l’Écologie, des Affairesétrangères, de l’Agriculture, del’Équipement, de l’Outre-mer et de laRecherche, ainsi que le secrétariatgénéral de la Mer et la délégationinterministérielle à l’Aménagement et lacompétitivité des territoires.

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● Forum des gestionnairesEspèces exotiques envahissantes : quoi de neuf?Le 13e forum des gestionnaires s’est tenu à Paris le 16 mars dernier.Communications et réflexions ont porté sur la lutte contre les espècesexotiques envahissantes.

CI-CONTRE,ARRACHAGE DE LA

JUSSIE A L’ETANG DUMEJEAN.

PLUS BAS, UNETORTUE DE FLORIDE,

ESPÈCEENVAHISSANTE QUI

MENACE NOTAMMENTLA CISTUDE.

échodespros

© G. Zapata - Maison de la nature de Lattes

6 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

contre l’ambroisie menée dans laréserve des Ramières. Après avoirtesté le pâturage estival par les ovinspour limiter la floraison de l’espèceen 2005 et 2006, la communauté decommunes du Val de Drôme a pourprojet, en 2007, d’élargir l’expérienceà plus grande échelle. Cette nouvelleexpérimentation est menée en parte-nariat avec la chambre d’agriculture,une association locale de défense despropriétaires et utilisateurs desramières (ADPUR) et le soutien de laDiren Rhône-Alpes. Elle doit préciserl’efficacité du pâturage de grandes sur-faces, étudier son impact sur le milieu,évaluer les problèmes zootechniqueset le coût de cette méthode. Une cin-quantaine d’hectares sur le site desRamières seront testés. Les moutonsseront gardés par un berger, selon uncahier des charges précis.Cette démarche commune et con-certée s’élargit aussi à la filière hor-ticole. Ainsi, la ville de Sète et leconservatoire botanique national médi-terranéen de Porquerolles ont travailléde concert pour une gestion durablede l’environnement. L’objectif quis’étend désormais à plusieurs conser-vatoires botaniques est de pallier la

commercialisation de plantes d’orne-ment à caractère invasif en orientantles horticulteurs vers des plantes plus« respectueuses» de l’environnement.La commune de Sète a établi une listed’espèces potentiellement envahis-santes pour le milieu naturel. Cettepolitique, appliquée à tous les espacesverts, a été intégrée dans la chartedes paysages et proposée commerecommandation dans les actes nota-riés et les permis de construire. Lepublic, lui aussi, est reconnu commeun acteur à part entière. Cette réalitéa été reprise par chaque intervenant :« Le public doit être investi dans tousles plans de lutte. L’information et lasensibilisation sont des vecteursessentiels et un budget spécifique doity être consacré. » Comment faire pourlutter contre l’ibis sacré quand le publicl’assimile à l’esprit du territoire ?Comment abattre des écureuils gris ouéviter que les tortues de Floride finis-sent leur jour dans la nature? Il y aencore beaucoup à faire. ■

Hélène Petit1. Robert Barbault est directeur du départe-ment Écologie et gestion de la biodiversité duMuséum national d’histoire naturelle.

Dans une salle archicomble, l’ora-teur prend la parole : «Dans unenature qui évolue, on ne peut

pas avoir une approche centrée surl’espèce. » Le ton est donné. RobertBarbault1 vient d’introduire les débats,le reste sera à l’avenant. Les gestion-naires savent désormais que luttercontre les espèces envahissantes etles invasions biologiques, c’est péné-trer au cœur de questions plus géné-rales de dynamique des systèmesécologiques.Alors, quoi de neuf? En ce qui concerneles méthodes de lutte, rien de vraimentnouveau. L’arrachage manuel ou méca-nique, l’empoisonnement, le piégeage,le tir… on connaît. La nouveautéconsiste plutôt dans l’approfondisse-ment de ces méthodes. Les gestion-naires les croisent, les mixent, tententde voir comment elles sont plus oumoins adaptées à un territoire précisou à une espèce donnée.Première constatation : aujourd’hui, lesgestionnaires inscrivent leurs actionsdans une dimension globale. Ainsi,dans l’île de La Réunion, le travail aporté sur la mise en place d’une stra-tégie de gestion des invasions biolo-giques. L’ONF a mené un contrôleraisonné et progressif des plantes exo-tiques avec une logique très opéra-tionnelle. Les stratégies de lutte ontintégré des actions en amont et en avaldes opérations de terrain : inventaireet hiérarchisation des plantes exo-tiques; cartographie; détermination deszones de lutte prioritaires et desméthodes de lutte ; restauration dumilieu naturel. Depuis 2002, une pro-cédure de détection précoce a été miseen place. Elle permet d’enregistrer lesobservations et d’intervenir rapidement.Autre évidence désormais acquise : lanécessité de travailler en partenariatavec tous les acteurs concernés.L’illustration sera donnée par la lutte

● Life+ nouveaux budgets

Le 27 mars dernier, le Parlement européen et la Commission européenne ont trouvé unaccord sur le programme Life+ pour la période 2007-2013. Le budget Life+ est de1,9 milliards d’euros (pour la période 2007-2013), soit une augmentation de 40 mil-

lions d’euros du budget prévisionnel • 78% de ce budget sera affecté aux projets dans lesétats membres de l’Union. La moitié au moins est ciblée dans le domaine «Nature et bio-diversité » • Les États de l’Union définiront des priorités nationales. Le volume des projetsretenus pour un État est déterminé en fonction de certains critères : population du pays etimportance du réseau Natura 2000. En outre, la Commission européenne s’assurera que15% des budgets alloués aux États sont destinés à des projets transnationaux.Une première programmation est envisagée avant la fin de l’année 2007. Les porteurs deprojets doivent – sans tarder – préparer leur dossier. ■>>> http://www.ecologie.gouv.fr/LIFE-Plus.html

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 7

échodespros

● ContraventionsLes étrangers aussi

Pistes interdites à la circulation,allumage de feux à moins de200 m d’un bois, divagation de

chien présentant un danger pour lespersonnes… Comme dans les autresdépartements, les infractions à lapolice de la nature sont relevées parles agents de l’Office national de lachasse et de la faune sauvage(ONCFS) qui utilisent des carnetstimbres-amendes pour verbaliser.Seulement, dans les Pyrénées-Orientales, département frontalier del’Espagne et de l’Andorre, il étaitfréquent que les contrevenantsétrangers « oublient » de payer leurscontraventions.Depuis quelques mois, l’ONCFS a doncobtenu de la trésorerie générale dePerpignan des carnets à souchesd’encaissement immédiat appelés pluscommunément carnets deconsignations. Pour détenir ce type decarnet, le service doit posséder unerégie des recettes avec la nominationd’un régisseur et d’un régisseursuppléant. Deux arrêtés préfectorauxont donc été pris pour cette doublecréation fin 2005. En parallèle, unlogiciel de traitement des timbres-amendes (WINAF) a été mis àdisposition de l’ONCFS. Il permet degérer la totalité des infractions(carnets roses et carnets deconsignations).Par ailleurs, ce problème du non-paiement des timbres-amendes par lesétrangers étant également récurrentsur les espaces protégés dudépartement, l’établissement a étéautorisé à ouvrir une sous-section«Réserves naturelles catalanes » avecnomination d’un préposé pour le dépôtdes chèques concernant les timbres-amendes dressés par les agentscommissionnés des réservesnaturelles.Les contrevenants étrangers nepeuvent donc plus, désormais, passerà travers les mailles du filet : soit ilspaient sur le champ le montant de lacontravention, soit ils n’ont pas cettesomme sur eux et sont conduits audistributeur le plus proche (qui estparfois assez loin !). ■Gilles Caffort - Office national de lachasse et de la faune sauvage

Police de la nature

Embauché depuis 2005 par le procureur de la République du palais de jus-tice de Grenoble, Jean-Michel Bône est ce qu’on nomme un médiateur del’environnement. Bien qu’une circulaire du ministère de la Justice encourage

à la création de tels postes, il est le seul en France à poursuivre cette mission.Pour Serge Samuel, procureur de la République, ce recours à la médiation entredans la mise en œuvre d’une politique pénale où l’environnement est une prioritéet dont le but est de prévenir le classement sans suite des procès-verbaux.C’est ainsi qu’à Grenoble, Pascale Girardon, vice-procureure, est spécifiquementchargée des questions d’environnement et d’urbanisme. Avec elle, Jean-MichelBône travaille en étroite collaboration. Elle décide si une plainte relève directe-ment de la justice ou s’il y a lieu d’entamer une procédure de médiation, ils endiscutent… « J’ai mis un an à accepter le poste, explique le médiateur. Il s’agitd’une lourde responsabilité et plutôt d’une charge bénévole puisque je suis défrayéà la hauteur de 37,68 euros par dossier. » Fils d’ouvrier, ancien fonctionnaire issudes Ponts et chaussée, «patron » du département de la police des eaux pendantquinze ans, l’homme estime qu’à la retraite il doit donner un peu de son temps.La tâche est militante, elle réclame cependant une compétence aiguë.Le bilan, lui, apparaît positif. Il s’agit d’éviter une lourde démarche de justicemais aussi d’obliger à la réparation. « Ce qui n’est pas toujours le cas dans lesprocédures de justice », souligne le médiateur. Jean-Michel Bône raconte com-ment il traite ses dossiers (une cinquantaine à ce jour) : «Dans un premier temps,je réunis les parties. Pas toujours. Je ne dois pas commettre d’impair psycho-logique. Je m’informe donc pour connaître les causes du conflit mais égalementles personnes que je vais recevoir. J’évalue… Je vis et j’exerce depuis quaranteans dans cette région, et je connais du monde. J’interroge… Sur les 532 mairesque compte le département, j’en connais 400.Lors de cette première phase, j’explique aux contrevenants en quoi il s’agit d’uneinfraction. Il faut faire comprendre aux gens la faute qu’ils ont commise. Je suisamené à expliquer, par exemple, quel est l’intérêt de la zone humide sur laquelleils ont construit. Je travaille avec la Frapna, le conseil général…La deuxième phase est technique, c’est pointu. Je suis en rapport avec les avo-cats, souvent internationaux ; il faut en imposer. Vous êtes seul ! Et vous devezapparaître compétent. Il en va de la crédibilité de la médiation.La médiation se solde par un procès-verbal de médiation. Les parties s’enga-gent, par exemple dans un cas récent, à la démolition d’une construction sanspermis dans une zone inondable. Jusqu’à ce jour, tous les engagements ont été

respectés, mais le médiateur doit donc – aussi – s’en-quérir du fait que le contrat est tenu. Dans notre dépar-tement, un problème récurrent est celui du comblementde zone humide en vue de construction. La médiationconsistera à exiger la création d’une autre zone humide

de même valeur que celle qui a été perdue. »À écouter le médiateur, on sent qu’il aime les gens.

Qualité indispensable à cette mission délicate.Jean-Michel Bône aime à dire qu’il a reçu les

vœux de tel ou tel à qui il a dressé procès-verbal. Mais la tâche lui prend du temps.Il estime qu’il y travaille deux bonnes jour-nées par semaine. « Encore cinq ans etj’arrête », explique-t-il souriant…Enthousiasme et résultats patents, enpartant, il nous reste pourtant l’étrange

sentiment que la fonction repose surl’homme. ■ MP

>>> Mél : [email protected]

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«FAIRE DEL’ENVIRONNEMENT UNE

PRIORITÉ EN MATIÈRE DEPOLITIQUE PÉNALE. »

Un médiateur de l’environnement au tribunal de Grenoble

●Avant le premier bilan, officiellement prévu cet été,Espaces naturels sʼest entretenu avec Jean-Michel Bône,médiateur de lʼenvironnement, sur lʼintérêt de son mandat.

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8 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

échodesprosAires marines protégées

« L’agence est un instrument de cohérence»Nouvellement créée1, l’agence des aires marines protégées vise à coordonner la mise enœuvre de la stratégie nationale de protection de la biodiversité marine. Établissementpublic national à caractère administratif (EPA), il constitue le relais entre l’État et lesdifférents parcs marins. Il définit également la politique des aires marines protégées etassure la cohérence entre les parcs marins et les autres outils de protection marine. Ilfournit aussi les moyens en fonctionnement aux différents parcs naturels marins, met dupersonnel à disposition et leur attribue des moyens financiers. L’agence est placée sous latutelle du ministre chargé de la protection de la nature et du ministre chargé de la mer.

●Questions à

Pourquoi une seule structure pour toutesles aires marines protégées et pas autantde «parcs nationaux marins» : quelle estla plus-value de cette organisationdifférente de celle des parcs terrestres ?

La France compte onze millions dekilomètres carrés d’espacesmaritimes et de nombreux outilsexistent pour les protéger. Qu’onpense aux arrêtés de biotope, auxréserves naturelles en mer, aux sitesNatura 2000, aux parcs nationauxtype Port-Cros qui possèdent unespace maritime, ou encore auxparcs naturels marins à naître. Tousces outils de gestion correspondentchacun à un cas de figure, mais cedont nous avions besoin en Francec’est d’un instrument de mise encohérence comme c’est le cas auxÉtats-Unis ou au Canada. L’agencedes aires marines protégées seracet instrument de transversalité ; celieu où l’on réfléchit plusglobalement aux questions des airesmarines. Il ne s’agit pas d’uneorganisation différente de celle desparcs terrestres mais d’une réponseà une problématique différente : unemise en perspective des enjeux de lamer.Des groupes de travail sont d’ailleursen place pour identifier les endroitsoù les plus gros enjeux existent.Certes, on le sait déjà… un peu…mais nous devons dépasserl’intuition pour travailler avec desscientifiques sur une cartographieprécise afin d’identifier les lieuxnécessitant une protectionparticulière. L’œuvre de l’agencedépasse donc largement la mise enplace de nouvelles structures auxtravers des parcs marins d’Iroise, deMayotte ou de Méditerranée. Elleprépare également la politique des

aires marines françaises à l’écheloneuropéen.

L’agence privilégie la concertation.Pourquoi ne pas utiliser le pouvoirréglementaire pour décider du statut desaires marines protégées? Ne risque-t-onpas de perdre un temps précieux enpratiquant de la sorte ?

Après la concertation, il y a un tempspour la décision et celui-ci, bien sûr,est du ressort de l’État. Cependantcette forme de gouvernance possèdel’avantage de susciter l’adhésion etde développer l’idée d’un bien public.On pourrait avoir la tentation degagner du temps et passer en force,mais cela serait contre-productif. Il ya trop d’enjeux autour des espacesmarins, trop d’enjeux et beaucoupd’acteurs. D’autant qu’en France,l’État inquiète. Il est perçu commeune puissance régalienne. Certes ladécentralisation a changé un peu ladonne. Néanmoins, chez nous,l’intervention de l’État suscite descraintes et, du même coup, desrésistances. À ceux qui sont pressésil faut rappeler qu’un outil modernemet du temps à se mettre en place,rappelez-vous qu’il y a à peinecinquante ans, les femmes nevotaient pas…

Le plus difficile, sera la concertation avecles acteurs économiques locaux, avec lessportifs, ou entre services de l’État ?

Il n’y a pas de règle. Tout dépenddes territoires. Chacun a saspécificité, son histoire. Ce qui estsûr, c’est que la concertation reposesur des règles de transparence,d’écoute, d’échange… Elle nécessiteégalement un savoir-faire spécifiqueautour de la médiation. Ainsi,l’opérateur et le médiateur doiventêtre dissociés. Elle suppose aussiun certain esprit de finesse poursavoir à quel moment est venu letemps de la décision. L’agence desaires marines protégées vient d’êtrecréée, elle doit inventer sa manièrede vivre. ■

JéromeBignon

PRÉSIDENT

DE L’AGENCE

DES AIRES

MARINES

PROTÉGÉES.©

MT

- Pho

voir

LA RESSOURCE HALIEUTIQUE EST PLUS ABONDANTEDANS LES AIRES MARINES PROTÉGÉES.

1. Loi du 14 avril 2006.

■ Parc régional des Alpilles

Créé le 1er février 2007, c’est lecinquième parc naturel régional deProvence-Alpes-Côte d’Azur. Sa charteprend en compte la lutte contre lechangement climatique, la préservationde la biodiversité et des ressourcesnaturelles. Elle constitue un projet dedéveloppement valorisant les ressourceset les savoir-faire du territoire. Ellesoutient les activités traditionnelleslocales (oléiculture, viticulture, etc.), lasolidarité envers les personneshandicapées, la protection despaysages, le respect d’un mode de vie etla participation des habitants.

■ La réserve naturellenationale marine de la Réunion

Elle couvre 3500 ha, sur quarantekilomètres de littoral. Avec sesvingt kilomètres de barrière coraliennediscontinue isolant quatre formationsrécifales principales appelées lagons, laréserve intègre près de 80% dupatrimoine corallien de l’île (décret n° 2007-236 du 21 février 2007).

■ Grands sites : les collectivités s’unissent

Deux syndicats mixtes ont vu le jour enfévrier pour gérer respectivement leGrand site de Navacelles et celui deRocamadour. Ces créations visent àmieux gérer des sites qui accueillentplus d’un million de visiteurs par an. Le syndicat mixte de Rocamadour réunitavec égalité de voix, la région Midi-Pyrénées, le département du Lot (ilsparticipent à hauteur de 45% chacun) etla commune (10%). 15 millions d’eurossur quinze ans sont mobilisés autour detrois grands axes d’intervention : lagestion des déplacements, l’accueil et laréhabilitation du patrimoine.

■ Parc national amazonien de Guyane

Il n’a pas de façade maritime, maisl’événement est suffisamment rare poursaluer la parution du décret de créationdu parc amazonien de Guyane. D’unesurface totale de 3390000 ha, soncœur de parc compte 2030 000 haconstitués de forêts primaires. Cinqcommunes où résident plus de 7000personnes sont concernées. (Décret n° 2007-266 du 27 février 2007.)

■ Parc national de la Réunion

Ce neuvième parc national français a étécréé le 6 mars 2007. Le cœur del’espace protégé couvre 105000 ha, soit40% de la surface de l’île. Le parc estimplanté sur l’un des 34 points chaudsde la biodiversité mondiale et intègre l’undes volcans les plus actifs de la planète.

Nouveau dans le réseau

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 9

>>> Mél :[email protected]

parfois aussi choisi d’en abandonner, pour dissuaderles marcheurs et laisser le naturel reprendre sa place.Ainsi, en y réfléchissant un peu, le sentier apparaît nonseulement comme le médiateur de nos pratiques de lanature, mais aussi comme un intermédiaire entre tousceux que leur fréquentation concerne : les marcheurset les gestionnaires, on vient de le dire, mais aussi lesagriculteurs, les alpagistes, les promoteurs de la ran-donnée, les communes et les propriétaires, jusqu’auxdépartements qui ont désormais des compétences dansce domaine. À voir autant d’intérêts converger sur lui,le sentier méritait qu’on en étudie les caractères, lesimpacts, les usages et les formes de gestion.C’est l’objectif que se sont donnés un laboratoire derecherche, celui de l’institut de géographie alpine (uni-versité de Grenoble), et quelques espaces protégés dela région Rhône-Alpes (réserves naturelles de Haute-Savoie, parcs régionaux de Chartreuse et du Vercors,parc national des Écrins, réserve naturelle des gorgesde l’Ardèche) à la faveur d’un programme financé parle ministère de l’Environnement entre 1999 et 2003.Ainsi chercheurs et gestionnaires ont travailléensemble à l’identification des formes des sentiers, desusages, des impacts et des types de gestion, pour com-prendre d’abord, et pour mieux intervenir ensuite surleur gestion. Les textes qui suivent présentent quelquesrésultats de ces recherches et suggèrent aux gestion-naires différentes pistes – décidément, le sentier seprête à toutes les métaphores – pour en préciser lestatut dans la mission qui est la leur. ■BERNARD DEBARBIEUX - UNIVERSITÉ DE GENÈVE

JULIETTE VODINH - ASTERS

Un sentier ? Quoi de plus évident, ici en forêt, làen alpage, ailleurs au bord de l’eau. La trace noussemble partout familière, sinon naturelle. Certes,

elle est le produit des Hommes, même si parfois les ani-maux, à force de passages, marquent également le solde leurs propres cheminements. Mais cette trace nousvient généralement de fort loin, transmise sans motdire, par les générations passées ; de si loin qu’elle noussemble faire corps avec les milieux et les paysagesqu’elle traverse. Et pourtant…Pourtant, le sentier estbel est bien un artefact, une construction humaine quia été décidée, dont on décide encore régulièrement dela pérennité ou de la transformation. Le sentier est leproduit de nos intentions ; il répond à des besoins,même s’ils peuvent être variés et se succéder dans letemps. Mais la plupart des usagers l’oublient ou fontmine de le faire. Le sentier est là ; il guide les pas ; ilest l’intermédiaire tacite et bienveillant de la plupartde nos pratiques de la nature. À tel point qu’en che-minant, on pense rarement à ce qu’il est et à ce qu’ilreprésente. Par contre, les gestionnaires d’espaces pro-tégés et de sites touristiques savent bien ce qu’il en est.Ils ont appris à les identifier, à les hiérarchiser, à enouvrir de nouveaux et à entretenir les anciens. Ils ont

Identifier les formes de sentiers, leurs usages, leur impact ;comprendre pour mieux intervenir, tel était l’objectif poursuivi par deschercheurs et gestionnaires d’espaces protégés de la région Rhône-Alpes (réserves naturelles de Haute-Savoie, parcs régionaux deChartreuse et du Vercors, parc national des Écrins, réserve naturelledes gorges de l’Ardèche). Le programme était financé par leministère en charge l’environnement.

© Moune Poli

dossier

Témoins, indicateurs... médiateursles sentiersles sentiers

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10 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

Pour les gestionnaires, la rédaction d’un plan degestion est un moment d’intense réflexion. Celle-ci débute généralement par une longue séance où

chacun est convié à nourrir l’analyse. Les réserves deHaute-Savoie n’ont pas failli à la coutume. Dès les pre-miers échanges sur la fréquentation touristique,engagés avec le comité scientifique1, un thème estrevenu, récurrent : celui des sentiers. Or, qui dit sen-tier, dit réseau de sentiers, usagers des sentiers, gestiondes sentiers, et, bien sûr, évolution des usages et diver-sité des acteurs. À ce questionnement global, il fautajouter des interrogations liées à la spécificité des ter-ritoires, caractérisée ici par une fréquentation anciennedu fait de la proximité de grands centres touristiques(Chamonix, Samoëns) et de zones urbaines (Genève,Annecy).L’idée de développer une gestion cohérente d’un réseaude sentiers recouvrant six réserves de montagne a sembléséduisante. Mais la mise œuvre d’une telle propositionse révèle complexe : sans doute du fait de l’existence desix communes et de deux fortes intercommunalités !Aussi, avant d’envisager des mesures de gestion concertée,il était primordial de comprendre les représentations etles enjeux que chacun des acteurs attribue à l’objet sen-tier. D’autant que, sur ces territoires, Asters2, gestion-naire des réserves, n’intervient pas sur les sentiers.Toutes ces problématiques ont alors été portées auprèsde scientifiques. Ainsi est né un programme derecherche dont la particularité fut la collaboration, auquotidien, de chercheurs et gestionnaires.

RESITUER LES ENJEUX. Les chercheurs ont tout d’abordproposé d’explorer l’évolution historique des usages dessentiers et de leur mise en valeur. Ce travail a permisde découvrir que, de 1860 aux années 1960, l’évolutiondes sentiers a été gouvernée par l’accès aux ressourceséconomiques (agropastorale et forestière). Puis, l’essordu tourisme (1960) et la création des réserves (1970 à1980) ont suscité des projets d’aménagements (bali-sages, créations de sentier…). Enfin, les années 1980à 2000 ont vu la démultiplication des projets touris-tiques où le sentier devient une ressource, un outil devalorisation patrimoniale. Pour le gestionnaire garantde la découverte du patrimoine mais avant tout de saprotection et de sa valorisation, c’est l’émergence dequestions : « Faut-il limiter les projets de mise envaleur ?»Si Asters a peu de prise sur la gestion du réseau, sonexpertise est par ailleurs continuellement sollicitée surles questions de balisage, d’impact, d’éthique, ou sur lesorientations thématiques. Les résultats de ce programmelui ont permis de mettre en perspective les projets d’amé-nagement avec une vision globale du réseau, de son évo-lution, de son expansion et des dérives qui pouvaientsurvenir. Appuyant son argumentaire sur cette analyse,Asters a proposé, par exemple, une modification du tracéde la via alpina, et le non-balisage de certains itinérairespour préserver un vallon dont la tranquillité est parti-culièrement favorable à la faune.PARTAGER LES ANALYSES POUR DÉCIDER ENSEMBLE. Unautre axe du programme de recherche a porté sur laconcertation. En effet, les changements d’usages évo-

Comprendre la fréquentationLa recherche pour mieux gérer

Au centre des réflexions des gestionnaires : maîtriser la fréquentation etdu même coup la comprendre. Qui, quoi, où, pourquoi, quand, comment,depuis quand? Le comité scientifique des réserves de Haute-Savoie atransformé ce questionnement en objet de recherche. L’étude a fait l’objetd’une étroite collaboration entre chercheurs et gestionnaires. Commentces derniers se sont-ils saisi des résultats?

1. Les réserves naturellesde Haute-Savoie sontdotées d’un comitéscientifique nommé par lepréfet depuis 1978. Surcertaines thématiques, ilformalise lesquestionnements dugestionnaire en objet derecherche et participe à lamise en œuvre deprogrammes d’étude.

2. Agir pour la sauvegardedes territoires et desespaces remarquables ousensibles.

VÉRITABLE LIEU D’ÉCHANGEET DE COMMUNICATION, LESENTIER S’EST RÉVÉLÉL’ÉPICENTRE DE QUESTIONS,DONT LES RÉPONSESPOUVAIENT CONDITIONNERLES CHOIX DU PLAN DEGESTION À VENIR.

les sentiers

© L. Imberdis - PN Vanoise© A. Mignotte - Cipra France

Point d

e vue du

gestion

naire

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 11

dossier

décisions prises. Et, très concrètement d’exploiter lareconstitution de ce passé en vue de développer dessentiers à thème, de valoriser leur caractère patrimo-nial. Aujourd’hui, le résultat de l’étude, permet, auregard de la base de données couplée à un systèmed’informations géographiques (SIG) :- de percevoir les impacts d’une politique de gestionsur les milieux, les divers usages des sentiers ;- de constater l’augmentation des acteurs qui aména-gent et gèrent les sentiers, donc de développer des par-tenariats avec ces divers intervenants ;

qués précédemment occasionnent l’apparition de nou-veaux acteurs et, avec eux, de modalités d’interventionsociopolitiques et institutionnelles différentes. Sur leterrain, Asters, qui fait face à un foisonnement de par-tenaires et d’intérêts divers, doit donc pouvoir com-prendre ces acteurs afin de leur proposer son point devue et engager avec eux une gestion concertée (dansl’idéal, à l’échelle du réseau de sentiers).Pour mettre en place une telle stratégie et tenter demobiliser un panel croissant d’acteurs, il était impor-tant de savoir, comment chacun d’entre eux percevaitle réseau de sentier et quelles étaient ses logiques d’in-tervention. Une partie des quatre-vingts acteurs (à cestade, considérés comme objet d’étude et non commepartenaires) ont donc été audités. L’analyse de leursmodalités d’intervention a fait apparaître diverses ques-tions : celle du statut du sentier (bien commun, objetpublic ?), de l’appréhension du réseau (voie d’accès,outil de canalisation, source de perturbations, objetpatrimonial et identitaire, ressource économique…),des échelles d’intervention, des légitimités et conflitsentre protagonistes de la gestion.Si le programme apporte des éléments d’analyse, onpeut regretter que l’ensemble des acteurs n’ait pas étéclairement associé à la recherche dès les premièresphases du programme. C’est, aujourd’hui, un frein àl’appropriation des résultats.Les classiques enquêtes de fréquentation ayant été réa-lisées, la recherche est allée au-delà en travaillant surune approche spatio-temporelle des flux de fréquenta-tion. Ainsi, l’utilisation du logiciel CDV-TS System adébouché sur une représentation cartographique dyna-mique et innovante (voir article page 15). Cet outil desimulation permet d’adapter la gestion des flux, ouencore les outils d’information des visiteurs… Toutefois,il nécessite des compétences de programmation infor-matique et des moyens (temps) dont ne dispose pas legestionnaire. Pour que l’expérience soit reproductible,le logiciel demande à passer du stade expérimental austade opérationnel. C’est une vraie question d’ingénierie,qui ne relève ni des missions du gestionnaire ni du tempsde la recherche. Entre recherche et gestion, il existe unstade intermédiaire : celui de l’approche technique qu’ilconviendrait de mobiliser.

UN TRAVAIL PRÉCURSEUR. Asters a soumis aux scien-tifiques des questions liées à l’évolution des terri-toires et leurs enjeux. Elles sont un préalableindispensable à la compréhension d’un systèmecomplexe sur lequel personne ne s’était réellementinterrogé. En effet, face à une dynamique d’amé-nagements liée à un contexte économique et tou-ristique prégnant, il est important de prendre letemps de la réflexion et de resituer ces actionsdans leur contexte sociétal, face à l’objectif deconservation des milieux naturels protégés.On retiendra aussi que si les approches scienti-fiques et gestionnaires sont spécifiques, elles sontégalement complémentaires et leur collaborations’avère pertinente. La recherche s’intéresse ausystème et fournit une analyse de sa globalité etde sa diversité. Cette dimension est indispensableau gestionnaire pour construire ses orientations degestion du réseau de sentiers. Le gestionnaire, lui, doits’emparer des résultats et reste responsable de ses choix.Il faut aussi souligner que cette recherche a fait l’objetd’une publication spécifique. Cette formalisation desrésultats s’est avérée indispensable pour que les diffé-rents acteurs s’en saisissent. Cependant, on regretteraque cette appropriation se soit révélée difficile. Cecimalgré l’existence d’un document propre au site Arve-Giffre et de l’organisation d’une table ronde. La faibleparticipation peut être due à une association tardive desacteurs ou à un questionnement tropnovateur. En effet, le «sentier» mobiliseles acteurs sur des questions d’aménage-ment plus que sur une réflexion sur lesévolutions des sociétés de montagne etleurs incidences. Mais ce travail de coopé-ration est réellement précurseur et doittrouver un écho auprès des différentsacteurs de l’aménagement du territoire. ■JULIETTE VODINH

CHARGÉE DE MISSION SCIENTIFIQUE ASTERS

>>> Mél :[email protected]

Quelle que soit saculture, l’Homme sesent lié à la nature.

Or, pour la parcourir,le sentier constitueun lien privilégié ; le

sentier relie l’Hommeà son histoire…

Reste à connaîtrecelle-ci.

Reconstituer l’histoire des sentiers, c’est permettreaux gestionnaires de choisir les modes de gestionà venir en disposant d’une connaissance valori-

sable de ce qu’ils ont pu être par le passé.Dans les réserves naturelles Arve-Giffre en Haute-Savoie, Asters a cherché à retracer une évolution desréseaux de sentiers de 1860 à 2001. L’intérêt de ce ges-tionnaire était de pouvoir visualiser les logiques quiavaient présidé aux gestions antérieures afin d’adapterles futures logiques de développement et les intégreraux plans de gestion. Il souhaitait également disposerd’un outil de suivi des sentiers et soupeser l’impact des

Méthode pour reconstituer l’histoire des sentiers

▲ AU SOMMET DE LA DENTDE REZ. CE POINTCULMINANT DE L’ARDÈCHEMÉRIDIONALE OFFRE UNPANORAMA SUR LA VALLÉE DURHÔNE.

▼ POINT D’INFORMATION DESAINT-REMÈZE (ARDÈCHE).

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suite page 12 ● ● ●

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- d’identifier des séquences historiques de mise envaleur en fonction des usages ou des acteurs domi-nants qui interviennent sur les sentiers.La mise en œuvre de cette étude a commencé par l’in-ventaire des types de sources historiques mobilisables.Ensuite, après identification de ces références, leschercheurs les ont regroupées dans un tableau quiintègre leur localisation dans le SIG (cf. tableau ci-des-sous). Chaque document incorporé est décrit en fonc-tion de sa référence (colonne 1), son lieu d’archivage(col. 2), les critères de localisation définis, ici la réserve(col. 3), le secteur de la réserve (col. 4), le segment desentier (col. 5).Enfin, pour compléter cette identification, la base dedonnées prévoit un traitement de l’informationcontenue : source (col. 7), auteur (col. 8), type d’in-tervention (col. 10), date (col. 11).Ainsi posée, la structure de la base de données devientopérationnelle et peut être alimentée en permanenceà chaque fois qu’une intervention est effectuée ouqu’une information est identifiée sur un sentier donné.Sa construction est réalisable à partir d’un tableur.Dans le cas exposé, c’est le logiciel Excel qui a été uti-lisé en premier lieu. Puis, dans un second temps, c’estle logiciel Access qui a été retenu pour ses capacités àêtre couplé au SIG Mapinfo professional élaboré parAsters.Ce dispositif permet au gestionnaire d’organiser lesactions entreprises en consultant la base de donnéestout en visualisant les informations relatives au sen-tier concerné, identifié comme segment dans le SIG.Dès lors, l’acte de gestion s’accompagne d’une visiontransversale et intégrée du sentier dans l’espace et letemps.Le sentier devient ainsi un attribut de la mise envaleur des espaces qu’il traverse. Quant à l’outild’aide à la gestion qu’est la base de donnéescouplée au SIG, il permet de suivre et deconserver ce qu’a pu être le sentier pour enri-chir les conceptions de ce qu’on pourra enfaire demain. ■CHRISTOPHE LÉZINCHARGÉ DE DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL

>>> Mél : [email protected]

les sentiers

Les acteurs susceptibles de prendre part à la vie dessentiers sont suffisamment nombreux pour laisserplaner l’éventualité de conflits d’usage. Aussi, afin

d’agir dans le cadre d’une gestion concertée, lesréserves de Haute-Savoie, des gorges de l’Ardèche etdu parc national des Écrins ont voulu connaître lamotivation de chacun de ces acteurs et apprécier leurcohérence de pensée et d’action.En effet, les gestionnaires doivent faire face à deux dif-

ficultés majeures : trouver les arguments qui portent,en fonction des acteurs qui leur font face, mais

aussi mettre en place des stratégies d’actioncohérentes et ciblées liées aux moyens dont

ils disposent et aux acteurs avec lesquelsils s’associent. L’absence de stratégiepeut s’illustrer par le fait de réunir sys-tématiquement tous les acteurs sansréfléchir au bien-fondé de telle outelle participation, le risque étantd’aboutir à des discussions contre-productives, sans issue.Ces données fournies par l’étude

devaient donc permettre aux gestion-naires de comprendre les mécanismes

Savoir qui fait quoi

STAGED’OUVRIERSAU COLLETDE LAMADELEINE.

IDENTIFIANTS (exemple RN des Aiguilles rouges) INFORMATIONS CONTENUES

col. 1 col. 2 col. 3 col. 4 col. 5 col. 6 col. 7 col. 8 col. 9 col. 10 col. 11

Identification de la référence

(R + n°)

Lieud’archivage

Réservenaturelle

(RN)

Secteur RNCarte 2

Segment(s)de sentier

n°... Carte 3

Dénominationdu sentier Source Auteurs Intervenants

mentionnésType d’actionssur le sentier Date

R1

Archivescommunales

ChamonixMont-Blanc

Aiguillesrouges

Sud-Est (lac Blanc/Chéserys)

21 Index et lac Blanc

Registre dedélibérationde ChamonixMont-Blanc

Conseilmunicipal

SESTSC(entreprisede travauxpublics)

• Création d’unitinéraire nouveau

en altitude • Amélioration de l’accès ausecteur du lacBlanc depuis

l’Index

25/06/91

R2, etc. … … … … … … … … … …

Références mobilisables pour l’historicité des sentiers des réserves naturelles Arve-Giffre▼▼

Agir ensemblePour agir dans lecadre d’une gestionconcertée, il vautmieux connaître sesinterlocuteurs,acteurs du réseaudes sentiers.Chiche ! ont affirmédes gestionnaires deSavoie, des Écrins etde l’Ardèche.Protocole d’étude etdécouvertes…

MOUTONS EN PÂTURE PRÈS DUREFUGE DE L’ARPONT (73).

12 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

● ● ● suite de la page 11

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>>> Des préalables à la gestion concertée

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la paro

le à

Juliette VodinhChargée de mission scientifique (Asters)réserves naturelles de Haute-Savoie

et pourquoi

de l’action collective, d’établir des priorités, de savoiravec qui travailler dans les différents cas de figure d’unegestion concertée.

Une méthodologie de terrainL’étude a débuté par une analyse croisée tenant comptepour chacun des acteurs, de quatre critères : statut juri-dique, compétences d’intervention, légitimité, échellesd’intervention.- Le statut juridique. Il a permis de distinguer servicescentraux et déconcentrés de l’État, collectivités locales,associations, établissements publics à caractère indus-triel et commercial, établissements publics à caractèreadministratif, services de sécurité civile, propriétairesfonciers privés, entreprises privées…- Les compétences d’intervention. Déterminées en sebasant sur les statuts de chacun, ces compétences ontété décomposées en termes de conception, création,aménagement et entretien, règles d’utilisation des lieux.Par ailleurs, les moyens utilisés pour les exercer(humains, financiers, juridiques, techniques) ont éga-lement donné lieu à analyse.- La légitimité. Le distinguo entre compétences et légi-timité permet de différencier la reconnaissance juri-dique du bien-fondé des interventions d’un acteur (lacompétence) et la reconnaissance sociale et politique(la légitimité). Un acteur peut ainsi disposer de com-pétences reconnues par la loi et souffrir d’un manquede légitimité du point de vue de ses détracteurs.- Les échelles d’intervention. Celles-ci sont locale, dépar-tementale, régionale, nationale, internationale.Le recueil d’information a été effectué à partir d’ob-servations in situ (réunions de travail, séances de négo-ciation, d’interventions sur le terrain…), dans le cadred’opérations spécifiques ou à la faveur d’un diagnosticglobal. Le rendu du travail se décline sous la forme detypologies d’acteurs (qui pense quoi, comment, où, en fonction de quoi ?) et d’un panorama du systèmed’acteurs (qui fait quoi, avec qui ?).

dossier

Espaces naturels n°19 • juillet 2007 13

suite page 14 ● ● ●

© Joël Blanchemain - PN Vanoise Des résultats bien pratiques”Vous avez mené un travail autour du réseau des sentiers pour connaître les acteursconcernés, les flux de fréquentation, l’impact écologique… Pourriez-vous préciseren quoi cette recherche a modifié vos choix de gestion ?

Nous n’avons pas fini de mesurer toutes les retombées de cette étude, mais je peux vousdonner quelques exemples. Il y a quelques années, nous pensions que la création, l’amé-nagement, le balisage, la conception de sentiers à thèmes, pouvaient s’envisager à l’échellede l’ensemble des réserves de montagne (massif Arve-Giffre). Le fait que le territoire soitaussi grand que le parc national suisse ne nous gênait pas. Nous pensions pouvoir déve-lopper une logique de réseau! Aujourd’hui, compte tenu du nombre important des per-sonnes qui interviennent, nous avons donc revu notre stratégie. Nous œuvrerons à l’échelleintercommunale ou communale, au cas par cas, et notre rôle consiste à assurer de la cohé-rence entre les territoires, tout en harmonisant les plans de gestion des réserves et lesdocuments d’objectifs Natura 2000.

D’autres exemples ?

Beaucoup d’autres. Nous avons pris conscience du rôle important des services commu-naux chargés de l’entretien des sentiers et de leur savoir-faire. Or, celui-ci est très diffé-rent d’une commune à une autre. À Chamonix par exemple, le service sentier existedepuis plus de cinquante ans. Ailleurs, la gestion peut être moins élaborée et la demanded’expertise se fait sentir. Nous en avons fait un axe d’action et nous proposons la contri-bution d’un expert. Ses compétences concernent la conception et l’intégration des sen-tiers dans le milieu naturel ainsi que les aménagements adaptés au milieu montagnard.

Comment la mesure des flux de fréquentation vous a-t-elle été utile ?

Dorénavant, nous pouvons nous appuyer sur des chiffres, des faits. Cette informationbrute constitue un élément de référence objective, loin des idées reçues et des ressentisde chacun. Cela se révèle primordial pendant les échanges organisés, les réunions… Celapermet, aussi, de relativiser certaines idées et de mettre certaines réflexions en pers-pective. Quand vous mettez en évidence que le territoire des réserves naturelles est deuxfois plus fréquenté que la zone centrale du parc national de la Vanoise, cela change ladonne lors des discussions. Cette étude de la fréquentation a aussi des retombées pra-tiques. Nous avons progressé sur les méthodes de comptages. En expérimentant le comp-tage par tapis, nous avons constaté qu’il n’était pas fiable sur les terrains de montagne.Ces données intéressent l’ensemble des gestionnaires.

Qu’avez-vous découvert sur le rôle écologique des sentiers ?

En termes d’impact, on ne peut pas dire qu’on ait fait de grandes découvertes. Enrevanche, l’étude nous a conduits à nous interroger et à interpeller nos partenaires surleurs comportements de gestion. Ainsi, on a pu mettre en évidence qu’en milieu fores-tier les bordures des sentiers constituent des zones ouvertes et fleuries qui se révèlentimportantes pour l’entomofaune. Ainsi, dans trois des neuf réserves, les bordures de cer-tains sentiers sont fauchées sur une largeur de deux mètres. Ce fauchage répondrait àune demande d’entretien, de propreté des touristes. La question se pose alors : la demandeest-elle si forte que cela ? Doit-on forcément y répondre ? Cette pratique est sujette àdiscussions et révèle la pression d’aménagement qui s’exerce sur ces territoires. Làencore, une gestion concertée est indispensable. ■RECUEILLI PAR MOUNE POLI

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14 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

les sentiers

S’il ne s’agit pas à proprement parler de découvertes,cette mise à plat s’est avérée précieuse pour le ges-tionnaire qui manque de telles informations. Elles luipermettent, en effet, de choisir les acteurs prioritairesavec lesquels il doit travailler en fonction du type deconcertation ou de décision à prendre. Cette connais-sance l’autorise notamment à établir un plan de concer-tation, à planifier les réunions ou le temps de travail.Par ailleurs, le fait d’avoir analysé précisément la cohé-rence interne et les objectifs de ses partenaires, apportesérénité et efficacité. Le gestionnaire perçoit claire-ment les enjeux et peut anticiper sur la manière dontchacun va agir et réagir. Les arguments sont plus ciblés,plus précis, ils suscitent le dialogue avec l’autre.

Repérer la diversité des représentations…

Un des résultats de l’étude est d’avoir mis en évidenceque la cohérence des acteurs dépend d’une appréhen-sion différente du réseau de sentiers. Pour les uns oules autres, ce peut être :• une voie d’accès, condition d’exercice de la liberté dedéplacement et support de sensibilisation à l’environ-nement • un outil de canalisation des flux et de contrôlede la fréquentation • une source de perturbation éco-logique • un objet patrimonial et identitaire • une res-source économique.On remarquera tout de même que ces appréhensionsdifférentes peuvent se combiner. Selon les projets, selonles contextes, selon ses intérêts à court ou à long terme,un même acteur (individuel ou collectif) peut mobiliserle réseau de sentiers de diverses manières. Celui-cipeut, par exemple, être appréhendé comme une voied’accès et une ressource économique dans le cas d’unprojet de valorisation touristique du territoire, puiscomme une source de perturbation écologique et de faitcomme un outil de canalisation des flux et de contrôle

de la fréquentation si sa motivation est de préserver unterritoire de toute intervention dommageable pour lepatrimoine naturel.

… et les convergences d’actionL’étude s’est aussi penchée sur les modalités d’actionscollectives de gestion concertée : comment, où et pour-quoi les acteurs agissent-ils ensemble au service dessentiers ?En dissociant trois principales modalités d’action, lechercheur a voulu donner au gestionnaire des outilspour formaliser les stratégies qui s’offrent à lui et ainsimieux cibler les modalités de sa propre action. On peutainsi observer des actions s’inscrivant différemmentdans une logique de gestion et d’intervention courantes,d’autres dans une logique d’observation et, d’autresencore, dans une logique de planification.• Une logique de gestion et d’intervention courantes.Actes simples, fondés sur la confiance mutuelle etl’échange de services, d’informations. Ces actions sonttoujours propices aux rapprochements d’acteursengagés dans une démarche de gestion respectueusedu multi-usages, à l’exemple de l’édition conjointed’une plaquette d’information par la fédération dépar-tementale des chasseurs de l’Ardèche et le comité dela randonnée non motorisée. Officielles pour certaines,tacites et coutumières pour d’autres, ces formes decoopération sont en phase d’institutionnalisation etfont l’objet d’une logique de planification. C’est le casdu réseau de sentiers de découverte du parc nationaldes Écrins dont la gestion est planifiée, à l’échelle duparc dans un schéma directeur, et par secteur dans lecadre de conventions tripartites de gestion passées entrele parc, l’ONF et les communes concernées.• Une logique d’observation. C’est le cas de l’observa-toire développé dans le cadre du comité scientifiquedes réserves naturelles de Haute-Savoie. Celui-ci a pourambition d’être un outil de diagnostic des territoiresmontagnards et de leurs évolutions. Il prend en comptetoutes les activités s’exerçant sur le territoire (chasse,pêche, randonnée, alpinisme, sylviculture, pastora-lisme…). Les réseaux de sentiers sont de fait une cléde lecture transversale de ces activités. Par cet obser-vatoire, les acteurs sont inscrits dans une dimensionmulti-usages génératrice d’une conscience collective.• Une logique de planification. C’est la modalité d’ac-tion collective la plus suivie. Elle a été encouragée dansles espaces protégés à partir des années 90 avec le déve-loppement des plans de gestion. Les chemins y tien-nent une place importante et la participation desacteurs du territoire est indispensable à la rédaction deces plans. Il en est de même pour la rédaction des docu-ments d’objectifs des sites Natura 2000. Cette logiqueplanificatrice passe également par les plans départe-mentaux des itinéraires de promenade et de randonnée,puis plus récemment avec le développement des plansdépartementaux des espaces, sites et itinéraires denature.On retiendra qu’en donnant une meilleure connais-sance des acteurs aux gestionnaires, ce travail leur apermis d’améliorer l’acceptation locale de l’espace pro-tégé en faisant comprendre ses objectifs et intérêts pourle territoire d’un point de vue tant écologique que socialet économique. ■ALEXANDRE MIGNOTTE - CIPRA FRANCE

>>> Mél : [email protected]

● ● ● suite de la page 13

Articulations entre les principauxacteurs desréserves naturellesArve-Giffre

Les indications entreparenthèses sont lesfonctions de chaqueacteur sur les sentiers.

Source : Mignotte 2003, d’après Romanet 2000

RANDONNEURS SURLA FACE EST DU ROCMERLET.

© Christophe Gotti - PN Vanoise

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Connaître la fréquentation d’un réseau de sentierssuppose de concevoir un outil spécifique dontles objectifs et fonctionnalités dépendent des

enjeux déterminés par le gestionnaire. Il s’agit derépondre à des questions d’apparence basique maispour lesquelles très peu d’informations précises – voireaucune – ne sont disponibles : «Qui, où, quand, faitquoi et pourquoi ?» La mesure de la fréquentation tou-ristico-sportive renvoie alors, certes à des individus et despratiques, mais aussi au temps et à l’espace. Cette fré-quentation s’évalue en effet en fonction d’itinéraires etde logiques de déplacements-stationnements.

Compter, qualifier, localiserLe protocole mis en place durant les étés 2000 et 2001(les réserves naturelles des Aiguilles rouges et de Passyont constitué les principaux terrains d’étude) distinguetrois grandes phases de travail. Il cherche à combinerquantification (en termes de flux), spatialisation (entermes d’itinéraires et de pratiques) et qualification(en termes de caractères, de motivations, de percep-tion, de temporalités) de la fréquentation des sentiers 1.La première phase du protocole a consisté en un tra-vail de comptage permettant d’estimer le nombre devisiteurs en certains points du réseau. Des tapis sen-sibles au passage d’une personne furent installés surles sites d’études. Des comptages visuels furent réaliséspour compléter ou redresser les données obtenues àpartir des appareils.La seconde phase, plus conséquente, a pris la formed’une enquête combinant un questionnaire et une sortede carnet de bord, tous deux soumis aux visiteurs, surles sentiers ou au retour de balade. Le questionnaireporte sur le profil des visiteurs et sur leurs motivationset représentations de leur pratique des espaces protégés.Le carnet de bord se présente sous la forme d’un tableau(voir page 16) dans lequel sont renseignés les activités,périodes ou moments durant lesquels elles se dérou-lent. Il est agrémenté d’une carte du réseau de sentier.On peut alors rendre compte du déplacement (daté etspatialisé) et des activités (c’est-à-dire de l’emploi dutemps) de la personne interrogée.De loin la plus conséquente, la troisième phase futaussi la plus expérimentale. Il s’est agi d’articuler lesinformations propres aux emplois du temps et de l’es-pace des enquêtés avec les réponses aux questionsconcernant leurs profils, motivations et pratiques.Un outil informatique de cartographie dynamique2 (voir

1. Des recherches identiquesont été menées dans laréserve naturelle des gorgesde l’Ardèche et dans le parcnational des Écrins (site del’Alpe de Villar d’Arène). Destravaux complémentaires ontété conduits à titreexploratoire dans les PNR dela Chartreuse et du Vercors.

2. Cartographic datavizualisation for time-spaceData – CDV-TS System.3. Ces parcours sont souventconnus empiriquement. Ilsdonnent lieu à unquestionnement récurrentdans les enquêtes.

Il y a des choses que l’on sait, d’instinct : « Tel sentier est trèsfréquenté, tel autre l’est moins. » Mais ce que l’on connaît moins,c’est le type de fréquentation : quel âge ont les randonneurs? Que font-ils sur ces sentiers ? À quelle heure? En quelle saison?

pour mesurer la fréquentation des espaces naturels

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CDV-TSSystem permet à l’utilisateur d’ex-plorer les données sur les itiné-

raires des randonneurs dans un environnement infor-matique dynamique. L’utilisateur peut modifier la sélection des variables :types de randonneurs, types de journées, types de motivations (typolo-gies issues du traitement statistique préalable) ; et visualiser les circuitseffectués dans l’espace considéré. La carte produite représente, grâce àun dégradé de couleurs et une variation d’épaisseur de trait, l’intensitéde passage sur les différentes portions du réseau. Une sélection tem-porelle peut aussi être réalisée sur le corpus des itinéraires, permettant,par exemple, la visualisation de cartes à des instants successifs ou biensur des périodes de la journée. Lorsque l’on cartographie la fréquenta-tion sur l’ensemble de la journée, il est possible de rendre compte del’évolution de cette fréquentation sur chaque portion de réseau en réali-sant des graphiques où sont représentés l’intensité de fréquentation enordonnée et le temps en abscisse. ■

Quel logiciel pour exploiter lesdonnées?

encadré) a alors permis de visualiser cette combinaisonet de mettre en évidence des types de cheminement ou«patterns d’itinéraire3 ». Ainsi, la cartographie page 16illustre une simulation de trois itinéraires : les itiné-raires traversés, les itinéraires aller-retour, les itinérairescircuits.La simulation des cheminements des randonneurspermet également de visualiser les rythmes et lesséquences temporelles significatives de l’utilisation duréseau de sentiers, à l’échelle d’une journée parexemple. On a ainsi remarqué que dans les Aiguillesrouges, les portions du réseau qui relient les portes d’en-trée au lac Blanc sont très fréquentées dans la matinéeet qu’une portion d’itinéraire continue à être assez fré-quentée entre 12h et 14h (l’accès tardif, pour une courterandonnée, est possible grâce au téléphérique).L’analyse des budgets-temps alloués à la randonnée estégalement possible. Ici, la majeure partie des randon-nées débutent entre 9 h et 11h et se terminent entre15h et 17h. Les départs plus précoces sont le fait depersonnes ayant un but autre que la randonnée elle-même : il s’agit essentiellement d’alpinistes dans lesAiguilles rouges.Un autre intérêt de cette combinaison méthodologiquetient au fait que l’on puisse, grâce aux types de don-nées recueillies, tester des hypothèses sur les formes

suite page 16 ● ● ●

Espaces naturels n°19 • juillet 2007 15

Prendre en compte le temps et l’espace

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16 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

les sentiersde pratiques et l’utilisation du réseau par les visiteurs.Les simulations montrent que les variables commel’âge ou bien le type d’accompagnement sont les plusdiscriminantes. La présence d’enfants parmi les per-sonnes accompagnantes est une variable très explica-tive du choix du cheminement ainsi que de la duréede la randonnée. Dans les Aiguilles rouges, les per-sonnes accompagnées d’enfants sont plus concentrées(en comparaison des personnes sans enfant) sur lesparties du réseau accessibles par les téléphériques etpermettant la réalisation de randonnées relativementcourtes dans le temps.

Délicat et complexeLa mesure de la fréquentation touristico-sportive enespaces naturels est toujours délicate et complexe. Elledemande un investissement matériel, humain et finan-cier important, mais elle peut apporter des informationsd’une grande utilité aux gestionnaires. À conditioncependant que ces informations soient produites enfonction de leurs besoins et qu’elles aillent au-delà d’unesimple photographie dont l’utilité est souvent limitée.Trop d’institutions ont des informations sur la fré-quentation dont elles ne savent pas quoi faire, parcequ’elles n’ont pas défini d’objectifs préalables.L’observation de la fréquentation permet ainsi : d’or-donner des données dans un modèle relativementsimple, d’explorer facilement ces données et de for-muler des requêtes dans une interface conviviale, devisualiser les trajectoires des individus dans l’espace etdans le temps, d’être un support de communicationpour matérialiser les réflexions d’acteurs autour de laproblématique de la fréquentation.Cependant, pour passer de l’aide à la réflexion versl’aide à la décision, il convient de mettre l’accent surl’appropriation des méthodes et outils par les ges-tionnaires. Il faut donc encore les ajuster, les réviser,et certainement les améliorer. ■

ALEXANDRE MIGNOTTE - CIPRA FRANCE

SONIA CHARDONNEL - LABORATOIRE TERRITOIRES

0 à 55 à 10

10 à 1515 à 2020 à 25

25 à 3030 à 4040 à 5050 et +

Col des Montets

Tré-le-Champ

Lac Blanc

FlégèreIndex

Les Deviets

Lac du Fouet

Sectiondu grandbalcon sud

LES HISTOGRAMMES CORRESPONDENT À LADISTRIBUTION DU NOMBRE DE RANDONNEURSSUR LE TRONÇON ENTRE 8 H ET 18 H.

Après avoir écouté le récit de la journée de balade d’un usager : « Je suis parti de l’Indexvers 9h. À 10h30, j’ai fait une pause un petit quart d’heure pour boire un coup, prendredes photos, admirer le paysage. Ensuite, je suis reparti pour arriver au lac vers 11h30.Là, j’ai pique-niqué tranquillement avant de repartir vers 13h30. Je ne me suis pas arrêtéà la descente, je voulais prendre la benne avant 16h. Je crois qu’il était 15h30 quand jesuis arrivé à la Flégère » ; l’enquêteur dessine l’itinéraire sur la carte. Ensuite, il remplit letableau ci-dessus, en fonction des codes associés.

>>> Mél : [email protected]

100 DÉPLACEMENTS

101 - marche102 - course à pied

103 - alpinisme104 - VTT

105 - autre200 STATIONNEMENTS

201 - pique-nique202 - boire

203 - refuge204 - contemplation205 - photographie

206 - repos207 - baignade

208 - jeu209 - autre (commentaires)

Codage d’une journée de balade

Patterns d’itinéraires sur le site du lac Blanc

NOMBRE DE RANDONNEURS PAR TRONÇON

À QUELLE HEURE ? QUE FAITES-VOUS ? COMMENTAIRES

9h Départ 101 …

10h30 202 - 204 - 205 …

10h45 101 …

11h30 201 …

13h30 101 …

15h30 Retour …

Itinéraires circuits

Itinéraires traversées

Itinéraires aller-retour

● ● ● suite de la page 15

Les itinéraires en traverséeconcernent 7,6% des randonneursenquêtés. Le trajet majoritairement

concerné par ce pattern démarrede la gare d’arrivée du téléphériquede la Flégère au sud pour arriver au

col des Montets au nord, enpassant par le lac Blanc.

Les itinéraires en allers-retoursconcernent 36,4% des

randonneurs. Les trajetsprincipalement concernés par ce

pattern démarrent de la gared’arrivée de la Flégère au sud et du

col des Montets au nord, pour serejoindre au lac Blanc en milieu de

journée. Les graphes relatifs auxdeux points de départ et d’arrivée

de randonnées, montrentclairement un profil à « deux

bosses » : la première correspondau pic du matin, la seconde à celui

de la fin d’après-midi. La gare del’Index (sud-ouest) fonctionne

également selon cette logique maisdans des proportions moindres.

Les itinéraires en circuitsconcernent près d’un randonneursur deux (49,7%). Les principalesboucles réalisées se rejoignent enmilieu de journée au lac Blanc. La

première, et la plus fréquentée,démarre à l’Index pour revenir à lagare de la Flégère, qui permet de

rejoindre la vallée. On voitclairement que l’Index fonctionnecomme point d’entrée au réseau,

alors qu’il n’est pas du tout rejointen fin de journée. La seconde

boucle montre le site de Tré-le-Champ pour départ principal et lecol des Montets pour arrivée. Les

observations réalisées et lesdiscussions avec les visiteurs

montrent que le passage délicat àproximité de l’Aiguillette

d’Argentière est préféré dans lesens de la montée.

DANS LE CERCLE : SÉCURISATIOND’ITINÉRAIRE DANS UN PASSAGE ABRUPT.

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 17

tableau ci-dessous). Ils ont également basé leurs travauxsur le concept de métapopulations 1 pour savoir à quellesfonctions d’habitat, de conduit, de filtre, de puits, répon-daient le réseau de sentiers.Partant des problématiques écologiques propres àchacun des sites, des protocoles ont été mis en place.Ils visaient à mettre en évidence les effets directs etindirects de l’existence du sentier.- Les effets directs sont liés à la fréquentation du sen-tier et au piétinement : dégradation du couvert végétalet perturbations de la composition et de la diversité dela faune du sol.- Les effets indirects touchent à la structure et à l’uti-lisation des sentiers. Le sentier joue-t-il, ou non, uneffet lisière2 ? Quelle est son incidence sur la flore des

Problématique de recherche en fonction des sites d’étude

dossier

Site Statuts deprotection

Fréquentationestimée Objectifs de la recherche Outils

biologiques

Mont MézencArdèche

Haute-Loire

Réservebiologiquedomaniale

Espacenaturel

sensibleZNIEFF

Site classéPNR

50000 personnesONF, 1999

Dynamique de disparition de la végétation avec le piétinement Végétation

Recherche d’un effet lisière lié au sentier Végétation

Modifications biologiques du sol sousl’effet du piétinement Pédofaune

Modifications écologiques liées à lafréquentation et à la gestion du site Lichens

Gorges de l’Ardèche

Réservenaturelle

15000personnes

Mai à septembre

MignotteFranchini

2003

Dynamique de disparition de lavégétation avec le piétinement Végétation

Recherche d’un effet conduit lié ausentier en milieu forestier Lépidoptères

Recherche des effets filtre ou barrièrelié au sentier en milieu forestier Carabes

Aiguilles rouges Haute-Savoie

Réservenaturelle

137200été 2001

Détente consultants

Recherche d’un effet lisière lié au sentier Végétation

Connaître le rôle écologique des sentiers

▼▼ Certes, le très grand nombre de facteurs impliqués

dans les modifications de dynamiques écologiquesrend illusoire une analyse de l’ensemble des com-

posantes biologiques d’un réseau de sentiers. Des étudesont cependant été réalisées dans les réserves naturellesdes Aiguilles rouges et des gorges de l’Ardèche, ainsi quedans la réserve biologique domaniale du mont Mézencqui nous éclairent sur l’impact écologique des sentiers.Elles nous renseignent à la fois sur l’état et le niveaude perturbation des écosystèmes fréquentés et, égale-ment, sur les fonctions des sentiers en termes de corridor écologique (voir schéma «Fonctions des corri-dors», page suivante), c’est-à-dire comme espace sus-ceptible d’orienter les déplacements des individus, deréguler les flux et de structurer les populations animaleset végétales.Pour effectuer ce travail, les chercheurs ont pris encompte des bio-indicateurs (outils biologiques, voir

Modification des écosystèmes et rôle de corridor biologique

suite page 18 ● ● ●

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Un réseau de sentier modifie l’état du milieu sur son propre linéaire. Il génère desmodifications physiques et intervient sur des processus de dynamiques depopulations. Il est également susceptible de modifier la structure des paysages etla connectivité des habitats. Pour toutes ces raisons, il mérite d’être davantagepris en compte dans la gestion des espaces protégés.

Comme le laisseapparaître le tableau en

bas de page, les objectifsde la recherche ont varié

en fonction des sites. Lesprotocoles ont consisté endes relevés de végétationlinéaires ou en quadrats

selon des transectsperpendiculaires aux

sentiers.L’identification et le

dénombrement de la faunedu sol ont été faits à partird’échantillons prélevés le

long d’un transecttraversant un sentier.

Les relevés lichéniquesont été opérés selon la

méthode de Braün-Blanquet qui consiste àrelever sur une parcellehomogène les espèces

végétales par strates(arborée, arbustive,

herbacée) et d’y associerdes indices d’abondance-

dominance (de 0 à 5). Cesrelevés ont ensuite été

comparés entre zones àhaute et bassefréquentation.

Un inventaire des papillonsa été réalisé sur le sentier

des gorges de l’Ardèche,selon la méthode de

chasse à vue.L’identification du

peuplement de carabes, lacaractérisation de son

habitat et de sesperturbations a été initiée

par l’installation debatteries de neufs pièges

Barber (gobelets enfoncésdans le sol), sur le sentieret à l’extérieur de celui-ci.

© Damien Hémeray - PN Vanoise

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les sentiers

18 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

▼▼

lichens? A-t-il un effet « filtre», un effet «conduit» dansun contexte de corridor écologique (cf. encart ci-des-sous) ? Pour répondre, les scientifiques se sont inté-ressés aux populations de certains insectes forestiers etaux déplacements des papillons diurnes. Les protocolesd’études ont varié selon les sites, ils ont consisté en desrelevés croisés de végétation et en inventaires par obser-vation ou par batterie de pièges (voir tableau et légende).

Les effets repérésMême quand l’impact du piétinement est restreint aulinéaire du sentier, la gestion du réseau et du compor-tement des usagers nécessite une réflexion et une atten-tion particulière. Quelques enseignements de l’étudenous amènent à observer :• Dynamique de végétation. Le piétinement entraîneglobalement une régression du couvert végétal.Cependant, selon l’intensité du passage, il permet defavoriser des espèces de bordure, de zones ouvertes, les-quelles sont moins compétitives. Dans les gorges del’Ardèche, l’étude laisse apparaître des modificationsimportantes dans les zones ouvertes (les seules acces-sibles au passage) : des zones d’érosion et de ravinementqui se perpétuent plusieurs années. Mais la divagationdans ces zones (landes rases, pelouses subalpines,pelouses calcaires karstiques, parcours substeppiques,formations herbeuses sèches…), hors du linéaire dusentier, augmente la surface de perturbation. La diver-sité végétale s’en trouve diminuée et la surface d’habitatfragmentée.Sur le site du mont Mézenc, après onze jours d’utili-sation du sentier-test (détournement de l’itinérairehabituel sur une dizaine de mètres), on a assisté à unediminution de 72 % du recouvrement végétal sur lenouveau linéaire. Après quinze jours, la disparitionétait quasi totale.• Effet lisière généré par le sentier. Celui-là n’a pas étéclairement mis en évidence sur le mont Mézenc, et uni-quement ponctuellement dans les Aiguilles rouges. Plus

que le sentier lui-même, ce sont les facteurs de milieux(édaphiques, climatiques, géologiques, topographiques)qui paraissent dicter la répartition des espèces.• Rôle de barrière, de conduit ou d’habitat du sentier.Suivant les espèces, le sentier joue le rôle de barrière,de conduit ou d’habitat. Ainsi, pour celles qui ne volentque peu ou pas (notamment en forêt), les sentiers dimi-nuent la surface utile dont ils ont besoin, et réduisentleurs capacités migratoires. Certaines espèces l’utili-sent comme ressource, telle la cicindèle champêtre quichasse habilement le long des chemins sablonneux.• Effet du piétinement sur la faune du sol. Il est mani-feste. Au mont Mézenc, les analyses ont montré uneélimination de la faune du sol par compaction de laterre: mêmes microscopiques, les organismes ont besoind’air et d’eau, disponibles dans les macropores (voirtableau ci-dessous).• Impact sur la flore lichénique. Au mont Mézenc, lagestion du site, et le déplacement de supports (croix oudalle), les coupes d’arbres, les reboisements, l’aména-gement des parkings, l’ouverture de sentiers, entraînedes modifications de composition ou de structure de laflore lichénique.Enfin, l’étude s’est penchée sur l’analyse d’images satel-liques réalisées sur le secteur du lac Blanc. Une carto-graphie de la végétation a été réalisée. Elle s’appuie surla typologie «Corine Biotope». Elle est issue de traite-ments de photographies aériennes au 1/17000e et dedonnées de terrain. La superposition de cette carte etde celle du réseau de sentiers permet de faire ressortirles zones à risques potentiels. Le degré de fragilité etd’impact possible sur les milieux traversés est défini etvérifié lors de prospections de terrains.Ces éléments rassemblés, la question d’une stratégie degestion des sentiers reste posée. ■SÉBASTIEN FRANCHINI - DOCTEUR EN ÉCOLOGIE

ALEXANDRE MIGNOTTE - CIPRA FRANCE

>>> Mél : [email protected]

1. Métapopulation.Ensemble de sous-populationsinterconnectées, au moinstransitoirement, pourpermettre les phénomènesde dispersion, de migrationet de (re)colonisation. Cesphénomènes sontessentiels à la survie de lapopulation. Le nombred’individus la composantdoit être suffisant.

2. On parle d’effet lisièrepour les biotopes situésentre deux milieux différentsqui présentent de par cettesituation une plus granderichesse biologique.

Témoin Sentier

Chélicérates Acariens 5022 357

Chélicérates

Chilopodes 102 0

Diplopodes 10 0

Symphyles 45 0

Insectes

Protoures 125 0Diploures 62 0

Arthropléones 4190 7Symphypléones 117 20

Diptères S 15 10

Larvesd’insectes

Coléoptèrescarnivores 62 0

Coléoptèresphytophages 550 0

Diptères 142 0

e TOTAL 10442 394

Relevés de la faune du sol en zonetémoin et sous sentier (Mt Mézenc).

● ● ● suite de la page 17

Appréhendés comme des lieuxd’échange, les corridors bio-logiques créent des liaisons

fonctionnelles entre éléments dupaysage utilisés par une espèce(ou un groupe) et réduisent l’iso-lement de ses populations. Ce fai-sant, ils permettent l’augmentationdes effectifs, le brassage géné-tique et les probabilités de (re)colo-nisation. Par voie de retour, leurseffets peuvent être négatifs : aug-mentation de l’exposition auxpathogènes, prédateurs (trouéesdans une haie) ou compétiteurs(espèces envahissantes) et auxperturbations physico-chimiques.Une déstabilisation génétique(perte d’adaptation locale) est éga-lement possible.En savoir plus : voir aussi Espacesnaturels n° 14 - avril 2006.

Fonctions des corridors

LICHEN CRUSTACÉSUR UN ROCHER ALPIN.

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aménagementdéveloppementterritoire

Les terrils miniers d’intérêt avec la présence de micropyredélicat, oseille en écusson, épervière deBauhin, scrofulaire des chiens, de galéopsisà feuilles étroites et d’inule visqueuse, bienloin de leurs aires naturelles d’origine. À cesplantes se joignent de nombreuses espècesthermophiles régionales et quelques exo-tiques apportées par les échanges commer-ciaux ou les troupes militaires duCommonwealth qui ont stationné en régionlors des derniers conflits mondiaux.Devant ce surprenant patrimoine, la région,les départements du Nord, du Pas-de-Calaiset l’association des communes minières ontsigné une convention avec l’établissementpublic foncier (EPF) du Nord et du Pas-de-Calais. Ils l’ont mandaté pour acheter lesbiens de l’entreprise Terril SA, filiale d’ex-ploitation des Charbonnages de France,avant qu’ils soient vendus à des privés etéchappent aux stratégies des collectivités.Une bonne partie de ce patrimoine naturel,composé de friches minières à forte biodi-versité, a intégré les éspaces naturels sen-sibles des départements du Nord et duPas-de-Calais. Le département du Nord s’estaussi rendu propriétaire (ou est gestion-naire) de plus d’une dizaine de sites miniersqui totalisent près de 800 hectares de naturebien originale.Avant leur transfert, et avec l’assistance éco-logique des services espaces naturels sen-sibles, l’établissement public foncier2 aprocédé à une remise en état et une miseen sécurité des friches minières là où celasemblait nécessaire. Il a également restaurédes habitats steppiques, ou encore créé desdépressions humides à crapauds calamites

>>> Départements du Nord et du Pas-de-Calais

intègrent les espaces naturels sensibles

Depuis le Nord-Pas-de-Calais, lachaîne des terrils s’étire sur plus decent vingt-cinq kilomètres jusqu’au

Borinage belge. Plusieurs centaines de col-lines noires s’élèvent ainsi pour témoignerde l’extraction du charbon pendant plus dedeux siècles.Aujourd’hui, la majorité d’entre elles est (oua été) réexploitée1. Mais les autres? La ques-tion intéresse les acteurs de la protectiondes espaces naturels car la nature minéraleet drainante des matériaux qui les compo-sent, leur couleur noire et leur relief en fontdes biotopes bien à part. Formés de maté-riaux secs, plus ou moins acides, plus oumoins instables et se réchauffant rapidementavec les rayonnements solaires, les terrilsapportent des éléments de biodiversité dansun Nord aux terres plutôt calcaires, au climathumide et aux températures modérées : denombreuses espèces thermophiles (desdunes ou des régions méditerranéennes) s’yrencontrent.Les terrils accueillent ainsi des espèces ani-males prestigieuses, souvent inconnues enrégion, ou en situation défavorable deconservation dans leurs milieux naturelsd’origine, comme les alouette lulu, engou-levent d’Europe, lézard des murailles, cra-paud calamite, alyte accoucheur… Ilsabritent également les populations mon-diales les plus septentrionales de pélodytesponctués, espèce franco-ibérique quiremonte dans le Nord à la faveur de biotopesplus chauds. La flore, elle aussi, est digne

TERRIL DE LA FOSSE LEDOUX À CONDÉ-SUR-L’ESCAUT REQUALIFIÉE.

1. Riches decharbon maltrié, schistesnoirs etschistesrouges, lesterrils ont faitl’objet d’uneréexploitation.2. Dans lecadre definancementsde l’anciencontrat dePlan et defondseuropéens.3. Avec l’aidedel’établissementpublic foncier.

CRAPAUDSCALAMITES.

et des roselières sur les bords d’étangs d’af-faissements miniers. Ces travaux ont permisà certains terrils de devenir des maillonsforts d’un réseau écologique dans le bassinminier. Ils accueillent également une cer-taine biodiversité ordinaire dans un Nordtrès industriel, à la population nombreuseet à l’agriculture performante.La requalification entreprise n’a pas exclul’Homme: les terrils miniers situés à proxi-mité des zones densément urbaniséesconstituent des espaces de promenade pourles nombreux habitants. Les terrils présen-tent ainsi de véritables réservoirs de biodi-versité accessibles au public. C’est le cas duterril des Argales (commune de Rieulay,140 ha) ou de Chabaud-Latour et de la fosseLedoux (Condé-sur-l’Escaut, 350 ha).Aujourd’hui, le département du Nord envi-sage3 de poursuivre les acquisitions foncières.Il souhaite conforter les «cœurs de nature»que constituent les terrils. En aliénant desespaces à proximité, il souhaite assurer unefonctionnalité écologique à ces écosystèmes,aujourd’hui isolés les uns des autres. ■GUILLAUME LEMOINECONSEIL GÉNÉRAL DU NORD

>>> Mél : [email protected]

NATURE FORTEMENT MINÉRALE(SCHISTES ET GRÈS) DES SITES MINIERS.

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 19

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écologieéc

olog

iede la conservation

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Le paysage fluvial de la Loire est dominépar les îles. Le plus long fleuve deFrance souffre de deux maux chro-

niques : l’incision et la végétalisation de sonlit. Pour faire face à ces problèmes envi-ronnementaux, les gestionnaires de laréserve naturelle nationale du Val-de-Loireont fait appel à des géomorphologues envi-ronnementalistes du laboratoire de géogra-phie physique de Meudon (LGP-CNRS) quiy ont vu un intérêt immédiat. La Loiremoyenne constitue en effet un terrain per-mettant de comprendre le fonctionnementde l’hydrosystème et la dynamique des îles.Les gestionnaires voulaient, d’une part,comprendre l’évolution hydro-géomorpho-logique précise de ce secteur ligérien afin,d’autre part, de cibler des sites d’interven-tion prioritaires correspondant aux exi-gences du plan de gestion de la réserve (larestauration du fonctionnement des brassecondaires constitue un de ces volets prio-ritaires au titre du plan Loire 1994-2006).Pour le gestionnaire qui cherche à rétablirle fonctionnement d’un écosystème, la ques-tion récurrente se pose en ces termes : àquelle époque doit-il se référer ? En effet,les milieux remarquables aujourd’hui(pelouses sur sable, prairies mésophiles, boi-

Quelle Loire veut-on?

sements alluviaux) le seront-ils toujours àmoyen et long terme ? Pour répondre,l’étude prend en compte les échelles detemps différentes, courte pour les gestion-naires, plus longue pour les scientifiques.Elle apporte ainsi des clés de compréhen-sion du fonctionnement des milieux allu-viaux afin de générer des actions concrètessur le terrain.En pratique, il a tout d’abord fallu connaîtrel’état antérieur de la Loire. L’analyse decartes anciennes et d’images aériennes surun pas de temps de 150 ans laisse apparaîtreune quasi-absence des îles au 19e siècle (11en 1850 contre 120 aujourd’hui), une forêtalluviale très réduite (quelques hectarescontre 585 actuellement), un large chenalunique (600 m en moyenne contre 250 maujourd’hui). Un tel changements’expliquepar l’évolution hydro-climatique. On noteque toutes les crues des 20e et 21e sièclessont restées très en dessous des niveauxenregistrés jusqu’en 1866. Par ailleurs, les

facteurs socio-économiques ont un poidsaussi lourd que la disparition des grandescrues. En effet, à la fin du 19e siècle, l’arrêtnet de la navigation a entraîné un abandonde l’entretien du lit du fleuve : adieu bali-sage, curage, destruction d’îles gênantes,coupes rases, enlèvement des débris ligneux,entretien du chemin de halage ! La végéta-tion pionnière, jusqu’alors fortementcontrôlée, recolonise les énormes quantitésd’alluvions que la Loire avait déposées lorsde ses grandes crues historiques (1846, 1856,1866). La première génération d’îles pritforme dès le début du 20e siècle. Le déve-loppement de forêts alluviales et le vieillis-sement des cortèges floristiques sont laréponse à une dynamique hydrologique affai-blie et à l’abandon du lit par les sociétéslocales. Rien ne pourra plus renverser cetteévolution au cours du 20e siècle. Bien aucontraire, les rares pratiques agro-pastoralesdans le lit ligérien prennent fin au milieu du20e siècle : les cultures abandonnent les terresles plus fréquemment inondées, ce qui privele lit mineur de ses dernières formes d’en-tretien par les sociétés riveraines. Ainsi, lesgéomorphologues considèrent les îlescomme les formes fluviales de réponse duréajustement du fleuve.Les milieux naturels étaient donc plus diver-sifiés en 1960 qu’aujourd’hui. L’évolution dutapis végétal en l’absence d’événementhydrologique structurant et de toute per-turbation anthropique directe a conduit àune réduction drastique des milieux ouverts(pelouses sur sable sec, prairies mésophiles,essentiellement) et au remplacement de lasaulaie blanche par une forêt mixte boistendre -bois dur, puis par la chênaie-frênaie-ormaie.Cette étude fait donc apparaître le caractèretransitoire de certains milieux naturels quidoivent être pourtant maintenus au titre desdirectives européennes. Le paradoxe est

À quelle époque se réfère-t-on pour estimer si l’état actuel du fleuveest victime ou pas d’une érosion de biodiversité ? Les milieuxremarquables aujourd’hui le seront-ils toujours à moyen et longterme? Comment prend-on en compte le réajustement historique dufleuve? Pour répondre à ces questions, il convenait de rapprocherles échelles temporelles d’analyse des scientifiques etgestionnaires, et de se mettre d’accord sur un système deréférences temporelles.

Se donner les mêmes références temporelles

étudesrecherches de laconservation

Dans le cadre de sa politique Espaces naturels sensibles, le conseil généralde l’Isère a créé un pôle départemental de recherche sur la biodiversité : « Ilest nécessaire d’aider les chercheurs qui travaillent sur ces questions et de

les inciter à se mettre en relation avec les gestionnaires d’espaces naturels pro-tégés» souligne Catherine Brette, présidente du pôle et conseillère générale.Depuis sa création en 2004, dix-sept projets ont été financés et un budget de80000 euros est prévu chaque année. Toutes ces recherches doivent être réali-sées sur l’un des 98 sites du réseau des espaces naturels protégés de l’Isère.Autre critère de sélection : l’approche pluridisciplinaire. C’est sur cet argument parexemple, qu’a été retenue l’étude menée par Pierre le Quéau, sociologue, et BenoîtDodelin, entomologiste, qui s’intéressent à la perception de la forêt vieillissantepar le public.La majeure partie des propositions de recherche concerne des aspects métho-dologiques. C’est le cas d’une recherche proposée par Irène Till et traitant du suivide l’orchidée des castors (Epipactis fibri) sur l’espace naturel sensible de Gerbey,qui pourra être ensuite mise en œuvre par le gestionnaire. La nouveauté de cepôle est aussi de proposer une journée de restitution de ces travaux de rechercheet contribuer ainsi à la création d’un nouveau réseau d’échange en faveur de labiodiversité. ■ Arnaud Callec - Conseil général de l’Isère>>> Mél : [email protected]

L’Isère finance les chercheurs pour la biodiversité

20 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 21

Le gestionnaire soulève des questionstransversales et nombreuses (trop,selon le chercheur). Il escompte des

réponses concrètes et des solutions à courtterme, alors que le pas de temps des travauxde recherche est bien plus long que celuiqu’il viserait. Le scientifique voit dans cesquestionnements une manne passionnantede nouvelles problématiques.Toutefois, l’approche pluridisciplinaire estencore peu valorisée et, pour être reconnu,le chercheur a l’obligation de publier dansdes revues spécialisées et de valoriser sestravaux auprès d’autres laboratoires. Cefonctionnement, propre à la recherche, estpeu propice à une vulgarisation des résul-tats des travaux et à la transmission de don-nées auprès d’acteurs de terrain.Si le gestionnaire confond parfois recherchesappliquée et fondamentale, le chercheur,lui, se situe en marge des exigences d’effi-cience du professionnel de terrain. Enrevanche, la maîtrise foncière ou d’usageque le gestionnaire peut garantir dans letemps aux sites d’expérimentation et l’aidetechnique qu’il peut fournir au chercheurlui sont précieuses.Dans le cadre du programme Loire nature,le rapprochement entre chercheurs et ges-tionnaires est souvent né de collaborationsponctuelles, lesquelles se sont développéesdurant la première phase du programme(1993-1998) et consolidées au cours de laseconde phase (2002-2006). Parallèlement,l’existence d’une action scientifique trans-versale (depuis 2002) a permis d’initier desrencontres thématiques, des formations,

Scientifiques et gestionnaires

écologieconservation

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LA LOIRE AU 21E SIÈCLE.

1. Le programme Loire nature est coordonné par laFédération des conservatoires d’espaces naturels et misen œuvre par dix-neuf structures sur le bassin, enparticulier les conservatoires régionaux d’espacesnaturels, le WWF-France, la Ligue pour la protection desoiseaux, la Frapna Loire et l’Office national de la chasseet de la faune sauvage.Le recueil d’expériences Loire nature est en ligne sur lesite du programme (p. 118 - 124) : www.loirenature.org. Voir aussi : Espaces naturels n°16 - octobre 2006.

SÉMINAIRE SURLES OUTILSSCIENTIFIQUESLOIRE NATUREEN 2005.SORTIE SUR LATOURBIÈREDES DAUGES(LIMOUSIN),SITE DE TÊTEDE BASSINLIGÉRIEN.

grand et n’est pas forcément justifiable parles gestionnaires.Un autre aspect de la recherche montre quela durée et l’intensité des crues enregistréesdepuis le 20e siècle n’ont pas empêché lavégétalisation active du lit et la chenalisa-tion unique de la Loire moyenne qui se des-sine pour le 21e siècle. Une action forte desgestionnaires semble donc inéluctable pourrépondre aux objectifs du plan de gestion etdes directives européennes en matière demilieux naturels alluviaux.L’intervention des chercheurs permet alorsde cibler des actions de préservation et derestauration des milieux. Par exemple, lesplus petites îles, d’une taille-seuil inférieureà 4000 m2, sont potentiellement érodables.De ce fait, elles présentent un intérêt réeldans la recharge sédimentaire du fleuve. Leschenaux secondaires tendent à se colmater,il est encore possible d’aider le fleuve enfavorisant les écoulements dans ces annexeshydrauliques. Des reconnexions de brassecondaires par l’aval sont ainsi expérimen-tées dans la réserve naturelle.Le programme Loire nature consacre unegrande part à la mise en application des résul-tats issus des multiples travaux scientifiquesmenés aujourd’hui dans le bassin-versant dela Loire. Ce n’est qu’en poursuivant ces col-laborations pluridisciplinaires que la gestiondes milieux naturels, en particulier alluviaux,sera plus adaptée, efficace et… durable. ■STÉPHANE GRIVEL

UNIVERSITÉ PARIS 8 ET LABORATOIRE

DE GÉOGRAPHIE PHYSIQUE CNRS UMR 8591

>>> Mél : [email protected]

Comment rendre fructueuse leur collaboration?Depuis 1993, le programme Loire nature1 est propice à la collaboration entrechercheurs et gestionnaires. Ce rapprochement a nécessité d’identifier leursattentes respectives et de favoriser les échanges inter-réseaux.

des réseaux de discussion où gestionnaireset chercheurs échangent sur leurs préoc-cupations et trouvent un langage commun.Cette action, associée à une démarche decentre de ressources sur le patrimoinenaturel et les zones humides alluviales, apermis d’identifier les acteurs de la gestionet de la connaissance du bassin de la Loire,de créer du lien avec les chercheurs et defavoriser les rencontres inter-réseaux.Chercheurs et gestionnaires se sont doncentendus sur des modalités de collabora-tion basées sur le bénéfice mutuel. Pour legestionnaire, il consiste à trouver desréponses à ses requêtes ; pour le chercheur,à bénéficier d’une aide technique ou àtrouver une plus-value à ses travaux,notamment à voir ses objets de recherchesous un jour nouveau. Par exemple, celuid’une approche intégrant les scienceshumaines et les sciences de l’ingénieur et abordant des thèmes d’actualité tel lechangement climatique.Les liens entre recherche et préoccupationdes gestionnaires devraient s’accentuerdans le cadre du nouveau Plan Loire 2007-2013. L’organisation de nouvelles ren-contres et l’accompagnement du montagede projets conjoints engagés depuis le débutd’année y contribuent déjà. ■AURÉLIE VANDEN-EEDECHARGÉE DE MISSION SCIENTIFIQUE LOIRE NATUREFÉDÉRATION DES CONSERVATOIRES D’ESPACES NATURELS

>>> Mél : [email protected]

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22 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

de visiteurs attendus et, pour cel,a à prendreen compte les comptages routiers.Les automobilistes se présentant aux bar-rières sont accueillis par des bénévolesexpliquant le sens de la journée et sondéroulement. Les réactions sont alors trèsdiverses. Cependant, après explications, ungrand nombre de visiteurs accepte de jouerle jeu. Une communication ciblée estd’ailleurs menée afin qu’ils soient informésde la spécificité de la journée avant d’ar-river sur place. Il convient de limiter l’effetde surprise !Pour aider à l’acceptation du système, desanimations – balades accompagnées, lec-tures de paysage… – sont proposées.Lors de la première expérimentation, lanavette est gratuite. Cependant, lors dudeuxième test, une participation d’un euroest demandée pour la journée et, en 2006,le tarif est porté à trois euros. Ce tarif, plusréaliste, correspond au prix coûtant du

transport. Par ailleurs, les animations orga-nisées lors du premier test ne sont pasrenouvelées, car elles contribuent à iden-tifier la journée comme un événement festifet non comme une expérimentation. Deplus, il est difficile d’envisager leur péren-nisation dans le cadre du projet global.Les navettes effectuent des rotations toutesles quinze à trente minutes. À bord, un ani-mateur informe, guide et commente ;chacun est libre de descendre à l’un desquinze arrêts facultatifs signalés, de déam-buler, puis de remonter dans une navettesuivante.En 2006, le système se modifie puisquechaque navette effectue d’office trois arrêtsde cinq minutes, répondant ainsi à la pré-occupation spontanée d’irréductiblespressés souhaitant faire la boucle dans lemême véhicule.Si ces journées provoquent une circulationsupplémentaire dans le village, elles amè-nent aussi des visiteurs dans les commerceset à l’espace d’interprétation de la maisondes gorges. Le temps de visite sur le site futd’ailleurs de trois heures en moyenne, aulieu d’une heure habituellement.Afin de compléter le vécu et les observa-tions directes, une enquête a été faiteauprès des visiteurs : une majorité acceptel’idée d’abandonner sa voiture le temps del’excursion, et de contribuer financière-ment à ce service de qualité…La logistique testée fonctionne et l’adhé-sion du public est acquise, mais le projetdoit être affiné et sa faisabilité doit encoreêtre étudiée. Un travail spécifique d’écoutemené auprès de la population a permisd’entendre les différents avis. Il a montréla nécessité de mieux informer le publicsur les fondements de ce projet de valori-sation touristique. ■PIERRE CARTIERPARC NATUREL RÉGIONAL DU VERDON

>>> Mél : [email protected]

Tous les jours, dans les gorges duVerdon, entre 500 et 1000 véhiculesindividuels se pressent pour parcourir

la route des crêtes. En septembre 2003 et2004, puis en juillet 2006, c’est-à-dire enpériode de plus forte affluence, quatre jour-nées expérimentales sont alors successive-ment organisées. Leur objectif : des journéessans voiture. Un arrêté du conseil généralferme la route (départementale) aux véhi-cules individuels à moteur et la route descrêtes ne devient accessible que par navette,mise en place pour l’occasion, ou par desmoyens non motorisés.Pour l’organisation, un groupe de travailréunit élus et acteurs locaux concernés ouvolontaires. Ses préoccupations sont d’abordmatérielles : où garer les voitures des visi-teurs et situer le point d’accueil ? Quelleinformation développer? Combien de bus etde rotations mettre en place? Pour répondre,la première étape consiste à connaître le flux

Journées sans voiture>>> Parc naturel régional du Verdon

Expérimentation sur la route des crêtes

accueilfréquentation

”Michèle Bizot-Gastaldi maire de La-Palud-sur-Verdon

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le à

Dans les gorges du Verdon, l’opération Grand site vise à mieux gérer l’afflux de visiteurs. Elleconcerne le périmètre du site classé (7820 hectares) et ses abords proches soit sept communes.Afin d’alimenter la réflexion vers une réorganisation de l’accueil, la commune de La-Palud-sur-Verdonet le parc ont expérimenté des journées sans voiture sur la route des crêtes.

”Ces journées font partie d’un projet global d’aménagement et de valorisationde la route des crêtes. Le constat d’un fonctionnement insatisfaisant quantà l’image du site, à la satisfaction du public et aux retombées

économiques locales nous a conduits à réfléchir à un autre mode de visite depuisle village, point de départ de la route. Notre réflexion vise à éloigner les zones destationnement, à favoriser une visite plus confortable et sécurisée, et à rendreaux paysages une certaine «virginité». Les visiteurs ont été satisfaits. Enrevanche, il a été plus difficile de gérer les autres usages de la route des crêtes,en particulier l’accès aux sites d’escalade. Il faut aussi convaincre la populationlocale que le village a tout à gagner à un mode de fonctionnement différent del’actuel. Aujourd’hui, après la dernière expérience et devant certaines réactionshostiles, nous avons décidé d’élargir le groupe de travail aux habitantsvolontaires. Ces expériences doivent être comprises dans le cadre d’uneamélioration de la gestion touristique des gorges, prenant en compte lesquestions de la circulation et du stationnement. Il est également nécessaire deréaliser des aménagements ou de mettre en place une signalisation desbelvédères par exemple, pour crédibiliser le projet. À mon sens, il est préférablede satisfaire pleinement l’attente des visiteurs, même si ce n’est pas tous, plutôtque de continuer à laisser circuler n’importe comment une foule de personnesqui ne manifestent que peu d’intérêt pour le site. ■

© A. Robert - PNR Verdon © P. Cartier - PNR Verdon

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droitpolicede lanature

Espaces naturels n°19 • juillet 2007 23

Le préfet entérine les arrêtés municipaux

En 1992, le parc naturel régionalLivradois Forez recrute un chargé demission Espaces naturels sensibles afin

de suivre l’évolution des pratiques risquantde modifier les milieux les plus fragiles deson territoire. Le premier travail de ce tech-nicien consiste à rassembler les élémentsd’état des lieux qui peuvent permettre d’éta-blir des priorités dans les zones où l’usagede véhicules à moteur avait déjà créé de nom-breux dégâts. La cartographie du zonage desHautes-Chaumes du Forez, site embléma-tique voué au pastoralisme, est alors pré-sentée aux maires de six communescontiguës, accompagnée d’un projet d’arrêtémunicipal s’appuyant sur l’article L. 2213-4du code général des collectivités territoriales(à l’époque code des communes)1.Sur cette base, une phase de concertationavec les utilisateurs du site est entamée.Celle-ci s’avère difficile : les enjeux de pré-servation ne sont pas toujours évidents àintégrer, surtout pour les usagers de loisirs.Certaines assemblées refusent même, pure-ment et simplement, le dialogue.Pourtant, suite à cette période de négocia-tion, des arrêtés tenant compte aumaximum des remarques de chacun desélus et des groupes rencontrés sont fina-lisés. Signés par les maires, ils définissentun zonage concerté et sont complétés parl’installation d’une signalétique appropriée.Cent cinquante-neuf ensembles sont ainsiimplantés qui comprennent un panneaude police de type B7B (voir photo), accom-pagné d’une cartographie et de la copie del’arrêté. Une plaquette de sensibilisationest également diffusée.Dès la première saison estivale «sous régle-mentation», les bergers des estives consta-tent une très nette diminution des activitésde loisirs motorisés sur les hautesChaumes. Cependant, le matériel de signa-létique fait l’objet de nombreux actes devandalisme et, le premier automne venu,le parc est obligé d’intervenir pour main-tenir ces éléments, indispensables à laconnaissance de la législation et à uneéventuelle répression par les personnelsassermentés.Une telle procédure rencontre quelques dif-

documents d’objectifs prévoient en effetune maîtrise des flux des véhicules àmoteur. Cependant, l’application stricte dela loi nécessiterait pour chaque communede ces territoires d’exception la créationd’une cartographie retraçant leurs voiesclassées ouvertes ou non à la circulation desvéhicules à moteur. Une telle pratique sup-poserait de s’appuyer sur un maximumd’outils d’inventaire des richesses natu-relles et bien sûr, sur la connaissance desactivités essentielles des habitants et desvisiteurs.Il s’agit là d’un travail important touchantun sujet sensible. Aussi, doit-il prendre encompte un grand nombre de paramètreset privilégier, avant tout, la protection des

milieux naturels, indispensables à la bio-diversité. Approuvée par les conseils

municipaux, cette cartographie per-mettrait de clarifier la position descollectivités par rapport aux loisirsmotorisés, lors de manifestations oude simples randonnées. ■

DOMINIQUE DAURIATPARC NATUREL RÉGIONAL LIVRADOIS FOREZ

>>> Mél :[email protected]

ficultés. La principale relève de la pressionsubie par les maires en prise directe avecdes administrés, lesquels peuvent aller jus-qu’à demander la diminution des zonages,voire l’annulation des arrêtés. Le parc, avecle soutien de la Diren Auvergne, sollicitealors fortement le préfet, afin qu’il « trans-forme» les six arrêtés municipaux en unseul arrêté préfectoral, comme le prévoitl’article L. 2215-3 du code général des col-lectivités territoriales. En décembre 2001,le représentant de l’État entérine cettesolution et signe son arrêté.En dehors du secteur des Hautes-Chaumesdes monts du Forez, le parc accompagneactuellement plusieurs communes confron-tées à une fréquentation de véhicules àmoteurs dans des sites sensibles, certainsappartenant au réseau Natura 2000. Les

>>> Parc naturel régional Livradois Forez

interdisant la circulation des véhicules à moteur sur les sites fragiles

1. En effet, la loi Lalonde de 1991a opéré une modification du codedes communes (remplacé depuis1996 par le code général descollectivités territoriales) pourdonner aux maires et aux préfets lapossibilité d’instituer uneréglementation locale plus sévère que leprincipe général d’interdiction posé par l’articleL. 362-1 du code de l’environnement.

PANNEAUDE POLICEDE TYPEB7B.

Depuis bientôt quinze ans, le parc naturel régional Livradois Forez travaille sur la problématique dela circulation des véhicules à moteur dans les espaces naturels. Son but : protéger les sites les plusvulnérables de son territoire. Cette longue démarche a abouti à la rédaction d’arrêtés municipauxensuite repris par un arrêté préfectoral.

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24 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

Chaque année, entre six et sept mille personnes visitent le site abbatial deSaint-Maurice (ancienne abbaye cistercienne) dans le Finistère. Beaucoupparmi elles viennent pour observer des chauves-souris allaitant leurs petits.Aboutissement insolite d’un projet de restauration, démarré il y a dix ans.

Pour réaliser le chantier, une fenêtre de tirest possible en hiver. En effet, pendant lestrois mois les plus froids de l’année, lesgrands rhinolophes quittent le logis pours’installer dans des cavités où humidité ettempérature sont constantes. Cette périoded’absence sera mise à profit et, en avril 1998,les chauves-souris reviennent. Elles trou-vent un gîte plus confortable – moins decourants d’airs, moins de lumière –, lesfenêtres occultées aux trois quarts, et lesaccès sont aménagés à leur intention.Comme dans toutes les histoires, les annéespassent et, en 2001, la seconde tranche detravaux est programmée. L’aménagementdu bâtiment doit permettre l’accueil des

visiteurs. L’abbaye cistercienne étant riched’histoires et d’Histoire, un espace muséo-graphié est également envisagé.Premières études, premier constat : le logisest le seul bâtiment qui puisse recevoir untel équipement. Joëlle Furic, l’architecte,projette donc six pièces sur son plan ; seulescinq seront accessibles au public. Lesgrands rhinolophes auront accès privé augrenier.Mais le chantier doit durer plus d’un an ;hors de question de l’interrompre ou d’en-traver le travail des entreprises. La protec-tion des chauves-souris se pose alors,autrement mais à nouveau. Comment nepas les déranger ? D’autant que de juin à

Février 1997, une équipe d’architecteset de gestionnaires visite l’abbaye cis-tercienne de Saint-Maurice. Mais

l’heure n’est ni à l’émotion, ni aux questionssur l’origine du site. Plus technique, la visiteprépare le prochain chantier. Le conserva-toire du littoral, propriétaire du domainedepuis six ans, a décidé de sa réhabilitationet, après une première période visant à fixerles axes de restauration des boisements etdu parc, le moment est venu de programmerles travaux. La couverture du bâtimentconstituera la première étape du chantier.Dans le groupe, les discussions vont bontrain et l’équipée se dirige vers le logis del’abbé, un solide bâtiment du 18e siècle ins-crit à l’inventaire supplémentaire desmonuments historiques. Dans le grenier,protégé provisoirement des intempériespar quelques bâches, il fait noir. Pas assezpourtant pour ne pas percevoir nettementune colonie de chauves-souris. Ons’étonne, on prend note, on commente.Personne ce jour-là, ne se doute pourtantqu’un pan de l’avenir du bâtiment est entrain de se sceller.Quelques jours plus tard, des spécialistes sontconviés à se rendre sur place. Leur verdict :il s’agit de grands rhinolophes. Classée dansl’inventaire de la faune menacée de France,l’espèce figure aux annexes II et IV de la direc-tive Habitat et II de la convention de Berne.Elle nécessite une protection stricte.Les travaux de toiture ne sont pas remis encause mais il convient d’opérer sansdéranger les chiroptères.Architecte, architecte des bâtiments deFrance et entreprises se concertent pourdéfinir une sorte de cahier des charges : res-taurer le bâtiment à la bonne période, avecdes produits peu nocifs pour les mammi-fères, leur réserver un espace et leur assurerla possibilité d’accès.

Une abbaye pour aimer les chauves-souris

• En saison : après-midi avec les rhinolophes.• Les Nuits de la chauve-souris (sept fois l’été 2007).

• Pour les petits : «À la découverte de la chauve-souris »• Pour les primaires : «La vie des chauves-souris »,

«La vie d’une colonie de chauves-souris : environnement,relations alimentaires et organisation» (basé sur le

programme de 6e).

Programme des visites© G. Guillouzouic

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pédagogieanimation

Espaces naturels n°19 • juillet 2007 25

Gwenael GuillouzouicGARDE DU LITTORAL

Depuis le début des travaux, Gwenael Guillouzouic porte cetteidée saugrenue : des gens vont venir à l’abbaye pour voir leschauves-souris. Simple technicien (comme il le dit lui-même), iln’est pas tout de suite entendu. Pourtant, fort de l’expertise duterrain, il est convaincu. L’écoute du public est son domaine.

Un autre regard

août, les femelles sont en période de par-turition et d’élevage des jeunes.La solution est tout d’abord technique.Pour répondre au besoin d’obscurité, le gre-nier est isolé par une cloison sèche. Unplancher en sapin, doublé d’une isolationthermique et phonique en isochanvre, estégalement construit. Les passages de câblesdans le grenier ont eu lieu au moment oùle lieu était naturellement déserté de sesoccupants.Une chose est sûre, à ce stade, les grandsrhinolophes font partie du projet. On faitavec eux, on parle d’eux. Le handicap deleur présence devient même une sorte demotivation supplémentaire pour lesouvriers acquis à leur cause. On en discute,on apprend à les connaître, on découvreque, malgré le bruit des marteaux-piqueursou des tronçonneuses, les chiroptères res-tent fidèles à leur logis. Malgré les craintes,« reviendra, ne reviendra pas ?», nos amisreviennent. Car ce sont devenus nos amis.Les choses auraient pu s’arrêter là. Chacunchez soi. Mais certaines pensées mûrissentsûrement. Alors que le cabinet Musenscèneétudie le concept muséographique, l’idéegerme dans la tête de l’agent au contact dupublic: pourquoi, puisque les chauves-sourissont un centre d’intérêt pour les visiteurs(voir article ci-contre), ne pas consacrer unesalle aux habitants du lieu? Malgré quelquesréticences, l’idée fait son chemin. Oui, c’estpossible. Oui, c’est financièrement conce-vable. Oui, les solutions techniques exis-tent. Il est alors envisagé d’installer descaméras infrarouges dans le grenier pourfilmer les mammifères en direct sans lesdéranger. L’entreprise nécessite de visiterun site déjà équipé en Normandie. Ellepasse aussi par l’invitation d’un chiropté-rologue utilisant cette technique. Et, en2003, le Conservatoire du littoral motive lafondation EDF à financer ce projet original.C’est parti…La solution adoptée consiste en l’installa-tion de caméras infrarouges dans le gre-nier, et en l’aménagement d’une pièce de30 m2 en observatoire (juste sous le gre-nier) avec des écrans de contrôle. C’est cettedernière qui recevra le public. Si le systèmeest autonome (les visiteurs regardent seuls),il est possible pour le gestionnaire/anima-teur de manipuler les caméras, de zoomernotamment et, bien sûr, de commenter lescomportements en direct.En mars 2004, la première caméra et sonillumination infrarouge sont installées.Le 1eravril, un petit groupe de chauve-sourisinvestit le grenier et se prête aux premiersenregistrements d’images.Depuis, le public se presse. En 2006, ce sont6 500 personnes payantes dont 850 engroupe (170 scolaires) qui ont fréquenté l’ob-

servatoire. Lors des Nuits de la chauve-souris, chaque séance réunit entre quatre-vingts et cent personnes, sur réservation. Ausoir, le public a alors l’occasion de regarderles rhinolophes se réveiller, puis l’animateurprojette des séquences enregistrées afin d’ap-porter des éléments d’information sur l’ana-tomie et la biologie de l’espèce.Désormais, 130 séquences, classées parcatégorie (comportement, reproduction,

anatomie…), sont disponibles pour les ani-mations et conférences, dont une rareséquence de naissance, des contractions jus-qu’à la consommation du placenta.Les moines cisterciens se sont peut-être faitvoler la vedette, mais ils n’y trouvent rienà redire : l’esprit des lieux est sauf. ■GWENAEL GUILLOUZOUICGARDE DU LITTORAL

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DÉBUT D’UNE NUIT DE LA CHAUVE-SOURIS.

”Entretien

L’idée première était d’inventer un espacemuséographique sur la vie des moines au 12e et 13e siècle et, finalement, vousconcevez un observatoire à chauve-souris.Le parcours est pour le moins étrange. Àquel moment l’idée a-t-elle germé?

Il faut d’abord remettre les choses à leur justeplace. L’espace muséographique consacre deuxsalles aux moines cisterciens, ainsi qu’une vidéode quinze minutes. Ils n’ont donc pas étéoubliés. Cependant, c’est vrai, nombre de visi-teurs viennent spécifiquement pour les chiro-ptères : des grands-parents qui amènent leurspetits-enfants, c’est chose courante.Pour moi, l’idée a assez vite pris la forme d’uneévidence. Dès qu’il s’est agi de l’espace muséo-graphique, j’ai plaidé pour les chauves-souris.J’étais le seul au début. Mais, j’avais un atoutmaître que n’avait pas, par exemple, le muséo-graphe : j’étais en contact direct avec le publicet j’avais ressenti son intérêt pour le sujet. Ainsi,par exemple, pendant des visites guidées, lorsquenous passions devant le logis (à l’époque, iln’était pas question d’y entrer), je parlais tou-jours de notre colonie de rhinolophes. Et,comme il n’y avait rien à voir, je prenais un livreavec moi et je montrais des images. Les gensmanifestaient toujours une réelle curiosité. À telpoint que sur une heure de visite, il n’était pasrare de passer un quart d’heure au jeu des ques-tions-réponses sur les chauves-souris.Quelquefois, j’étais bien obligé d’admettre : « Jene peux pas répondre. » Alors, je me suis mis àchercher et à faire chercher le muséographe. Jevoulais savoir, moi aussi, « qu’est-ce qu’ellesfichent dans ce grenier ?». Tout ce que je voyaisc’était un tas de crottes, des animaux qui sor-tent le soir et qui s’affolent dès qu’on entre dans

le logis. J’ai découvert que des chercheurs lesobservaient dans le noir avec des caméras infra-rouges. Mais comme je n’étais pas expert, justetechnicien, il n’a pas été aisé de convaincre.

Ce fut long?

Il fallait déjà être sûr que les chauves-sourisreviennent après les travaux. On a commencé àévoquer le sujet en 2001 mais le chantier n’étaitpas fini. La question se posait : vont-elles revenir?En 2002, elles sont revenues, en 2003 aussi.C’était donc possible.

Comment avez-vous fait pour fairereconnaître la pertinence du projet ?

Je me suis tout d’abord rendu en Normandiepour rencontrer l’équipe de chiroptérologuesqui observaient les chauves-souris. Certes, leurlieu n’était pas ouvert au public mais la tech-nique devait bien être la même. Ensuite, j’aiconvaincu ma hiérarchie de les faire venir pourrencontrer les élus. Je crois que c’est pendant lerepas avec le chiroptérologue et le cinéaste ani-malier que tout s’est joué. Un élu a été convaincu.Et puis, comme une bonne idée c’est une idéesimple, ça a marché.

Aujourd’hui, qu’est-ce qui vous satisfait leplus ?

J’ai vu la magie s’opérer ! On montre aux gens,ce qu’il y a là, juste au-dessus de leur tête.Quand, avec la télécommande de la caméra, vouszoomez sur un rhinolophe en train d’allaiterson petit, il y a une part d’émerveillement. C’estdu direct. Et puis, tous ces gens qui viennentvoir les chauves-souris s’intéressent aussi aufilm et à l’exposition qui dévoilent la vie desmoines. Cela marche dans l’autre sens. ■RECUEILLI PAR MOUNE POLI

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26 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

pédagogieanimation

ButorStar ! Ce jeu de rôles assisté parordinateur est conçu pour former lesétudiants à la gestion concertée des

espaces naturels. Il est également employécomme support de réflexion collective avecles usagers pour une gestion durable deleur marais. Il a été mis au point1 dans lecadre d’un projet Life nature, destiné à amé-liorer la gestion des roselières pour laconservation du butor étoilé, un héronmenacé à l’échelle européenne. Le jeu viseà favoriser la prise de conscience : 1) des interdépendances biologiques ethydrologiques et de leurs dynamiques à dif-férentes échelles spatio-temporelles, 2) des aspects technico-économiques etsocioculturels des différents usages desroselières, 3) de l’intérêt et des limites de la concer-tation pour la gestion des espaces naturels.Un modèle multi-agents, développé à partirde travaux pluridisciplinaires, permet desimuler les effets à court et long terme dela gestion d’une roselière résultant des déci-sions prises par des éleveurs, récoltants deroseau, pêcheurs, chasseurs et naturalistes.Ce modèle repose sur une représentationspatiale d’une zone humide, archétypeconstitué d’un paysage virtuel divisé endeux propriétés, l’une privée, l’autre com-munale, toutes deux interdépendantes d’unpoint de vue hydrologique. Chaque pro-priété est divisée en huit unités de gestion.Celles-ci peuvent être endiguées par lesjoueurs (2 à 12) s’ils souhaitent s’affran-chir des contraintes hydrauliques du voisi-nage. Différents profils saisonniers degestion de l’eau sont proposés aux joueurs,plusieurs étant plus particulièrementadaptés à un usage de la zone humide. Lesdécisions d’utilisation du sol et de gestionde l’eau sont prises par les joueurs auniveau de la propriété et des unités de ges-tion. Ces décisions sont le résultat d’unenégociation entre les différents joueurs. Ellessont intégrées dans le simulateur par lemaître de jeu. Leurs effets sur l’occupation

systèmes écologiques et sociaux.Cet outil peut également être utilisé, dansle cadre d’une approche de modélisationd’accompagnement, comme un outil de dia-logue entre les usagers d’une zone humideafin de favoriser la concertation multi-acteurs en élargissant la vision des partici-pants, en affinant leur compréhension duterritoire et de sa dynamique.LA GESTION CONCERTÉE DE L’ÉTANG DEVENDRES. L’étang de Vendres est situé dansla basse plaine de l’Aude. L’étang et sesabords font l’objet de nombreux usagessocio-économiques. Il en a résulté des inté-rêts divergents dans la gestion hydrauliqueet une dégradation générale de la roselière.Un plan de gestion a été mis en place en2003 par le syndicat mixte de la basse valléede l’Aude. Un comité de pilotage rassem-blant des représentants des usagers décidedésormais de la gestion du site.Organisées par le syndicat, deux séances dejeu de rôles ont eu lieu en 2006 avec douzeusagers de l’étang. L’objectif était deconforter le travail de concertation. Lesenquêtes et le débriefing qui ont suivichaque partie ont montré que les joueursont sensiblement amélioré leurs connais-sances sur la gestion de l’eau et sur l’évo-lution écologique de la roselière sous leseffets des activités humaines (voir schéma).Les deux tiers des joueurs déclarent quecette expérience a modifié leur façon de voirle fonctionnement des marais et de consi-dérer les relations humaines. Après troissemaines, ils sont 66 % à considérer quecette expérience va modifier leurs actionsau niveau personnel et professionnel. Àl’unanimité, ils considèrent que cette expé-rience a amélioré leur capacité à participer

1. ButorStara été mis aupoint parune équipedechercheursissus duCNRS, de laTour duValat, duCirad, del’Inra et despédagoguesdes maraisdu Vigueirat.

Jouer et s’investir, s’investir pour comprendre. Le procédépédagogique était déjà connu. Mais là, ça se corse. Ce jeu de rôleassisté par ordinateur s’adresse à un public d’adultes. Ils jouentavant que d’entrer en médiation. Et ça marche !Élaborer pour des problématiques de roselières et de butor étoilé,le jeu peut certes se décliner, pour d’autres situations.

du sol, sur la présence et la distribution spa-tiale des canards, des passereaux et héronspaludicoles sont simulés par l’ordinateur. Demême, les coûts et gains des différentsjoueurs sont automatiquement calculés.ÉDUCATION AU TERRITOIRE. Le jeu de rôlesa été utilisé dans le cadre de formations ini-tiales et continues avec des étudiants detoute discipline et de tous niveaux, avec deslycéens et des professionnels de l’environ-nement. Les objectifs pédagogiques pour-suivis lors de la mise en œuvre du jeu sontd’ordre notionnel (acquisition de connais-sances), méthodologique (acquisition desavoir-faire) et comportemental (acquisi-tion de savoir-être). Ces séances de jeu per-mettent d’impliquer les joueurs dans uneréflexion sur les dynamiques complexes,procurant ainsi un support et un cadre pourexplorer les connaissances nécessaires pourcomprendre les principales relations decause à effet qui prennent place dans les

comme support de médiationUn jeu de rôles assisté par ordinateur

”SÉANCE DE JEU AVEC DES ÉTUDIANTSEN GESTION DE L’ESPACE RURAL(PHOTO 1) ET DES USAGERS DE L’ÉTANG (PHOTO 2 PAGE DE DROITE).

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Évaluation de la connaissance du fonctionnementde la roselière, avant et après la séance de jeu

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Bonnes réponses avant après

© R. Mathevet - CNRS Cefe

Source : R. Mathevet - CNRS Cefe

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 27

>>> Mél : [email protected]

”Serge EstaqueMembre de la société de chasse communale de Vendres

Je suis chasseur, je suis garde, piégeur, le jeu m’a aidé àdiscuter et comprendre les problèmes de tout le monde. C’étaitquand même un jeu, mais derrière c’était la réalité et des

après-midi comme ça, ça aide. Ça m’a mis devant des réalités queje n’avais pas analysées. Le problème de la chasse c’est unechose, mais là on a parlé d’élevage, de pâturage, de protection desoiseaux. On peut discuter quand on a un avis différent etrechercher du positif. Pour une bonne gestion, il faut qu’il y ait toutce travail, un seul ne peut plus gérer seul. Personnellement jepense que la dame avec qui j’ai joué a peut-être une autre vue dumonde de la chasse que ce qu’elle avait avant, comme moi j’ai uneautre vue des mondes des protecteurs. On peut aller loin dans ladiscussion, ça me dit que j’ai raison de me tourner vers ledialogue. ■

A PARTICIPÉ À UNE SÉANCE DE JEU DE RÔLESORGANISÉE AVEC LE SYNDICAT MIXTE.

aux projets collectifs concernant la gestionet l’aménagement des espaces naturels etsont prêts à jouer à nouveau.Notre approche sur l’étang de Vendres nerésout pas un problème particulier maisconstitue plutôt une démarche pour aug-menter la capacité des acteurs à adopterdes modes d’interactions favorables à unegestion adaptative du territoire. Après avoirtesté la mise en œuvre du jeu de rôles enformation et dans ce contexte de concer-tation avancée, il s’agira dans les prochainsmois d’expérimenter cette démarche dansun contexte plus conflictuel. ■RAPHAËL MATHEVET - CEFE-CNRS

Dans le cadre de mon travail, je suisamené à communiquer et négocierau quotidien, que ce soit avec mon

équipe ou les partenaires que sont lesagriculteurs, les élus, les naturalistes, leschasseurs. Ce module m’a beaucoupintéressé parce que l’on retrouve ce quel’on a besoin de faire au quotidien.L’intérêt du jeu de rôles, c’est que l’onsort de sa peau de protecteur de lanature pour se mettre dans celle duchasseur ou de l’agriculteur, et on se meteffectivement à la place de l’autre, on seprend vite au jeu. Le simulateur permetde voir et d’apprécier les conséquencesde ses décisions, et on apprend que cen’est pas simple de prendre une décisioncollective. Quelles en seront lesconséquences pour soi, pour les autres,pour la nature? Là, on voit parfaitement,sans risque véritable, que l’on peut êtreruiné, que l’on peut nuire à des espècesou d’autres usagers. C’est la vie réelle.Prendre tout en compte pour trouver lavoie la meilleure pour tous, je pense quele jeu et son débriefing sont parfaits pourréfléchir à ça. ■

A PARTICIPÉ AU PROGRAMME INTERREG RELATIFAU GYPAÈTE BARBU. LORS DU MODULE DEFORMATION À LA NÉGOCIATION ET À LA GESTIONCONCERTÉE DES ESPACES NATURELS, LE JEU DERÔLES A ÉTÉ UTILISÉ.”la p

arole à

1. Deschercheurs duCirad, duCemagref, del’Inra, duCNRS.

2. PourCompanionModelling.

Vous parlez de démarche de modélisation, le logiciel ButorStar s’inscrit dans unedémarche plus globale, de quoi s’agit-il exactement ?

Un collectif de chercheurs1 a formalisé une démarche d’accompagnement du processusde prise de décision (approche ComMod)2. Le principe est de développer des modèlesde simulation ou jeu de rôles intégrant différents points de vue d’acteurs et de les uti-liser comme des plateformes d’apprentissage collectif. Les acteurs peuvent participerà la construction des modèles pour améliorer leur pertinence et évaluer des scénarios.Les principaux objectifs sont de faciliter le dialogue, l’apprentissage et la prise de déci-sion collective au sein d’un travail de recherche-action interdisciplinaire.

Cela signifie que ce type de démarche assistée par ordinateur peut être reproduitpour d’autres milieux, d’autres situations, d’autres espèces?Cette approche et ce type d’outils ont été développés dans d’autres contextes. Mescollègues traitent, par exemple, des relations entre élevage, foresterie et conserva-tion de la nature sur le Causse Méjan ; des interactions tourisme, élevage et biodi-versité sur l’île d’Ouessant ; du tourisme, élevage et qualité de l’eau en Corse. Ilss’intéressent à la gestion de bassin-versant, la dégradation des terres et l’accès au créditen Thaïlande ; à la gestion collective d’un périmètre irrigué au Sénégalet bien d’autresexpériences.

Y a-t-il des risques ou des limites éthiques à cette utilisation de l’informatique?

Le collectif de chercheurs s’est penché sur la question. Il définit une charte, un cadredéontologique pour le processus de modélisation et l’usage de ce type d’outils. Eneffet, les relations de pouvoir entre acteurs sont à prendre en compte dans le dia-logue. Il faut éviter, par exemple, de favoriser les acteurs les plus puissants au détri-ment des plus faibles. Afin de répondre aux questionnements sur les impactssociologiques de la démarche, notre projet sur Vendres développe une méthodologied’évaluation des effets de l’approche ComMod à partir d’une trentaine de terrainsd’étude.

Concrètement, un gestionnaire intéressé par l’utilisation d’un tel outil peut-ils’adresser à vous? Comment doit-il s’y prendre ?

Il peut être judicieux de consulter notre site http://www.commod.org. On y trouveratoutes les informations relatives à notre démarche, nos cas d’étude et nos formations.Après, il suffit de nous contacter par mél et en fonction des problématiques abordéeset des objectifs, vous serez orienté vers des collègues spécialisés sur la gestion socialede l’eau, la gestion de la biodiversité, la gestion agro-pastorale, la gestion des conflitsou la concertation… ■

Raphaël MathevetCHERCHEUR AU CNRS ET CONCEPTEUR AVEC D’AUTRES CHERCHEURS

DU JEU DE RÔLES ASSISTÉ PAR ORDINATEUR BUTORSTAR

Toute une démarche

”Entretien

© R. Mathevet - CNRS Cefe

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Christian CouloumyChef de secteur au parc national des Écrins

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POUR L’ÉQUIPE SOIGNANTE, MONTENACH EST UN LIEU DECONVIVIALITÉ. C’EST AUSSI UN MOMENT PRIVILÉGIÉ

D’OBSERVATION DES PATIENTS HORS DES MURS DU CENTRED’ACCUEIL THÉRAPEUTIQUE. CHAQUE MÈTRE CARRÉNETTOYÉ EST UNE VICTOIRE SUR LA MALADIE. ET LEREPAS EST UN MOMENT D’ÉCHANGE ET DE PARTAGE.

Les personnes handicapées sont des gens comme les autres. Il suffit de les intégrer dans les équipes de travail pour qu’ellestrouvent leur place. Certes. Ce spécialiste rappelle, pourtant, quec’est un peu plus compliqué que ça.

questions sur l’encadrement, sur la manièred’expliquer, ou d’interdire certaines choses. Nousavons fonctionné à l’instinct. Aujourd’hui, alorsque ces chantiers volontaires se sont multipliés,je mesure que nous ne connaissions rien de laréalité de ces personnes. Heureusement, nousavons su rester dans notre rôle d’encadrementtechnique, nous ne nous sommes pas pris pourdes soignants.Dès le début, les rôles ont été clairs : nous expli-quons le travail à faire, nous donnons lesconsignes, ce sont les infirmiers qui attribuentles tâches à telle ou telle personne en fonctionde la connaissance qu’ils ont de ces gens. Il nefaut pas négliger le fait que les malades psy-chiatriques connaissent des états psychiqueschangeants. Nous ne sommes pas formés pourles connaître. Un matin alors que le chantierdémarrait, nous avons montré aux bénévoles àquel endroit, il était prévu d’allumer le feu ; sansplus de vigilance. Sans penser que l’un d’euxcraquerait immédiatement l’allumette. Résultat,le feu s’est étendu à la pelouse. Il a fallu appelerles pompiers. Cela a éveillé des angoisses chez

Comme les autres?Au début, il y a juste eu le hasard. Une soirée

autour du bar comme il s’en organise régu-lièrement au centre d’accueil thérapeu-

tique à temps partiel. «L’équipe soignante m’ademandé d’organiser une conférence sur lesmilieux naturels de Lorraine. J’ai répondu pré-sent. » Pierre Wernain se rappelle cet instantcomme une intimité vécue avec une vingtained’adultes handicapés qui n’en finissaient plusd’être intéressés… Au point, les jours qui suivent,de programmer une visite guidée de la réserve.Sur le terrain, l’un rédige l’article pour leurjournal interne, les autres posent des questions,regardent, reformulent : se plaisent dans ceslieux. Ça se voit. C’est certain. Le contact avecles soignants se resserre, lui aussi. Quelquessemaines plus tard, une demande parvient à laréserve naturelle de Montenach : «Accepteriez-vous un groupe de stagiaires pour donner uncoup de main en chantier ?» Pourquoi non? Lesgestionnaires acceptent. Un coup de cœur, celane se refuse pas.Après coup, Pierre Wernain soupèse leur partd’inconscience. «Pour nous, c’était des gens nor-maux, différents mais normaux. Le premierchantier s’est déroulé en hiver. Une dizaine depersonnes sont restées quatre jours. Il a plupresque tout le temps. On ne s’est pas posé de

certains malades. Ce jour-là, nous nous sommesinterrogés, avec les soignants, sur la poursuitede l’expérience et sur les bénéfices qu’en reti-raient les personnes. Et là, nous avons découverttout un monde. La balance a très vite penché ducôté de l’intérêt à poursuivre. La discussion amis en lumière l’augmentation de l’autonomie,l’apprentissage de la vie en groupe, la recon-naissance de leur entourage, la considérationqui leur est apportée, la valorisation d’eux-mêmes et la responsabilité.Dès les premiers jours, les stagiaires nousl’avaient dit : ils trouvaient la tâche fatigante,mais ils étaient contents d’être dehors et d’ef-fectuer un vrai travail. D’ailleurs, lors des jour-nées portes ouvertes de la réserve, certainsviennent avec leur famille pour leur montrer lerésultat de leur travail. Alors oui, cela vaut lecoup. Mais cela demande du temps et de lapatience. Au début, il a fallu tout expliquer : com-ment travailler, comment tenir un râteau cor-rectement… Mais depuis cinq ans, les plusanciens sont devenus autonomes, à tel pointqu’ils participent à la formation des nouveauxarrivants. On peut même dire que la réserve entire des bénéfices. Et que, sans ces personnesnous ne pourrions pas effectuer certaines tâches.L’an dernier, nous avons changé une rampe enbois sur tout un côté d’un pont en une demi-heure. Nous n’aurions pas été aussi vite avec desprofessionnels. Aussi, si quelquefois, le travailn’est pas fait comme on aurait voulu, on laisse.On réexpliquera la prochaine fois ! D’ailleurs, lestâches ont évolué au fil du temps. Au début, onne faisait que du ratissage, parce que c’était uneaction simple. Maintenant, on gère… Même lefeu !» ■MOUNE POLI

”Entretien

Pierre WernainCONSERVATEUR DE LA RÉSERVE

NATURELLE DE MONTENACH

Le centre d’accueil thérapeutique à temps partiel Van Gogh de Metz accueilledes patients adultes, isolés et souffrant de pathologies psychiatriquesstabilisées. Les patients choisissent de prendre part aux activités

proposées, tels les ateliers cuisines, arts plastiques… mais aussi les chantiersnature sur la réserve naturelle nationale de Montenach. Le premier chantier a été organisé en 2000. Depuis, une équipe de dix patientsencadrée par deux infirmières vient tous les quinze jours à Montenach pourparticiper aux travaux de gestion et à l’entretien du sentier de découverte. Pourdes raisons de sécurité, les patients n’utilisent pas de matériel thermique, ilsratissent l’herbe et ramassent les branches préalablement coupées.Un soin tout particulier est porté à la valorisation du travail accomplit. Desexpositions sont organisées, des articles paraissent dans la presse locale écriteet télévisée. En 2006, les participants ont reçu le prix Jean-Roland pour uneaction exemplaire en lien avec une réserve naturelle. ■

>>> Mél : [email protected]

En savoir plus

Une longue histoire

28 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

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La commune de Sainte-Opportune-la-Mare(Eure) tire son nom d’un étang naturel,connu depuis des siècles. Située en

contrebas du plateau du Roumois, dans lemarais Vernier, la Grand-Mare y souligne l’an-cien tracé d’un méandre abandonné par le fleuvevoici 70000 ans !Pendant des siècles, cette mare, qui couvreencore cent hectares en 1820, est le siège d’uneactivité intense de récolte de roseau, de chasse,de pêche et occupe le devant de la scène de l’ac-tivité locale.Depuis la fin des années 50, elle est devenue unebelle alanguie. Les acteurs locaux sont passés àautre chose : la pétrochimie et la constructionautomobile ont détourné les forces vives des vil-lages vers la rive droite et seuls quelques raresanciens évoquent encore les pêches quasi mira-culeuses au brochet, les stationnements hiver-naux de milliers de sarcelles d’hiver, les bottesde roseaux coupées à la sape au cœur de l’hiver.

Une petite mer d’AralLa présence constante de cet étang dans le pay-sage fait passer inaperçue sa mutation, lenteaux yeux des hommes, mais cependant rapideà l’échelle temporelle d’un grand marais. Si laprotection acquise en 1956 en tant que réservede chasse et de faune sauvage la protège de l’ex-térieur, elle ne la prémunit d’aucune manièred’une eutrophisation1 (aux causes anthropiquesmultiples et croisées) qui la ronge doucementmais très sûrement.L’envasement en résultant fait passer cette cléde voûte du système hydraulique de la premièretourbière française à une lame d’eau sur-chauffée en été que même les résistantes carpesdéserteront !Dans le même temps, les roselières périphé-riques, et chaque jour plus embroussaillées,rétrécissent le plan d’eau qui ne couvre plusque cinquante hectares au début des années 90.Le réveil survient en 1992 où un séminaire orga-nisé par le parc naturel régional et l’Officenational de la chasse et de la faune sauvagepermet un premier rapprochement entre habitants et scientifiques.

Mobilisation locale autour d’un étang envasé

Mais le partage d’une culture commune n’estpas facile et plusieurs obstacles se dressent.Pour certains, il vaut mieux laisser faire lanature (il s’agit pourtant d’une dégradationd’origine anthropique). D’autres récusent unapport technique ou scientifique « venant de laville» ; d’autres encore s’insurgent devant descoûts de restauration que l’on pressent (à justetitre) pharaoniques.

Restaurer le lien culturelLa mission principale du parc, maître d’ouvragede la restauration de l’étang, consiste donc, àcôté de l’élaboration d’un argumentaire tech-nique et scientifique, indispensable en particu-

lier pour l’obtention des financements et desautorisations nécessaires, à obtenir des habi-tants qu’ils s’engagent pour la sauvegarde deleur étang. Cette réappropriation progressiveest rendue possible par la forte implication duchargé de mission : réunions avec chasseurs etpêcheurs, avec les propriétaires riverains, lesélus locaux, implication de la presse locale,séminaire de restitution…Chaque phase du projet constitue alors un pré-texte pour réunir, expliquer, partager et finale-ment, restaurer, le lien culturel, voire affectif,entre les habitants et l’étang.Les partenaires financiers, sans lesquels rien nepeut se faire, sont également conviés sur placeafin de prendre la mesure, à la fois de la valeurpatrimoniale de la Grand-Mare, mais aussi del’urgence qu’il y a à lancer une restauration.Le classement, ressenti comme un brin autori-taire, par l’État, en zone de protection spécialeau titre de la directive Oiseaux contribue dans unpremier temps à complexifier les relations ; maisle parc a retourné ce qui apparaissait commecontrainte en faisant valoir que l’État devraitcontribuer (par une participation financière) auretour vers un bon état de conservation.

Dans la duréeAvec 125000 m3 de vase extraits, des ouvrageshydrauliques refaits à neuf, un règlement d’eaumodernisé, des roselières en voie de restaurationpar des contrats Natura 2000, des curages d’ac-compagnements sur des annexes hydrauliques, unsuivi scientifique en place, l’opération, qui n’estpas encore achevée, rencontre aujourd’hui lesuccès. Du constat aux réalisations substantielles,il aura fallu quinze années de persévérance dansles relations humaines et de ténacité sur les ques-tions techniques pour surmonter les inévitablesdifficultés surgissant dans ce type de dossier. ■THIERRY LECOMTE - PARC NATUREL RÉGIONAL

DES BOUCLES DE LA SEINE NORMANDE

>>> Mél :[email protected]

1. Du grec eu- : « bien, vrai » et trophein :« nourrir », l’eutrophisation désigne ledéséquilibre qui résulte d’un apport excessifde nutriments. (Wikipédia)

>>> Marais Vernier (Eure)

Le sauvetage de Grand-Mare

Espaces naturels n°19 • juillet 2007 29

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1 & 3 • PELLETEUSE SUR L’ÉTANG. 2 • VUE AÉRIENNE DE LA GRAND-MARE.

PRISE D’UN BROCHET LORSD’UNE PÊCHE SCIENTIFIQUE.

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30 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

méthodestechniques

Elle fait suite à plusieurs années d’observationdu comportement alimentaire de troupeaux debrebis dans des élevages de Rhône-Alpes. Ce suivirapproché laisse apparaître que dans des parcsclôturés sur pelouses et landes très embrous-saillées, les ruminants domestiques apprécientcertaines formes de diversité alimentaire.Au-delà de l’appétence relative des espèces végé-tales, c’est surtout la diversité de format desplantes (le gros et le petit) que les brebis utili-sent pour se constituer des régimes de quantitéet qualité très satisfaisantes.Pour assurer à la brebis d’être bien repue chaquesoir, le gestionnaire doit donc, jusqu’aux der-niers jours, veiller à ce que la végétation offrela possibilité de prélever des prises alimentaires(ou bouchées) de grosses masses. Il s’agit géné-ralement d’herbes hautes en touffe, de feuillagesou de tiges de broussailles.Par ailleurs, il doit s’inquiéter du fait que ladiversité des formats de plantes comestibles soitspatialement organisée en mosaïques assez fines,afin de permettre à chaque brebis d’alternerrégulièrement en cours de repas des phases deconsommation de petites, puis de grosses prisesalimentaires, toutes les dix minutes environ.Ceci garantit la stabilité de son ingestion à unbon niveau, malgré la variabilité des ressourcesdu parc.

La méthode GrenouilleCes observations ont permis d’élaborer uneméthode d’évaluation de la valeur alimentaired’une végétation : la méthode Grenouille (elledoit son nom à la forme évoquée par le schémaqui la représente). Grenouille procède en cinqétapes (voir ci-contre).

◗ Les temps 1 et 2 sont des temps d’obser-vation à réaliser avant chaque utilisation duparc. En parcourant de grandes diagonalesdans le parc, le gestionnaire doit repérer les

Comment évaluer la valeur alimentaire d’une végétation composite? Sur lessites, faut-il inclure les herbes pailleuses, lianes, arbustes et feuillages

d’arbres? La méthode Grenouille permet de répondre à ces questions etd’aider à la gestion de troupeaux ovins en parcs clôturés.

Broussailles et feuillages ont alors lamême valeur que cailloux et sol nu : leurprésence diminue la valeur pastoralecalculée. Voilà qui est contradictoireavec les observations empiriques d’éle-veurs ou de gestionnaires de sites. Enréalité, des troupeaux d’herbivoresconsomment volontiers des mélangesd’herbes et de broussailles, ces der-nières contribuent même, parfois signi-

ficativement, aux régimes quotidiens.Devant ces difficultés, on peut considérer

une autre méthode d’évaluation : le réfé-rentiel pastoral parcellaire (RPP). Celui-ci

introduit les notions de saison et de niveaud’utilisation du site. Conçu à partir d’un inven-taire des pratiques pastorales dans le sud de laFrance, le RPP propose des modes d’utilisationdifférenciés pour les pelouses, les landes et lessous-bois. En fonction du type de végétation, del’espèce animale et du type de productionattendue, le RPP spécifie les saisons et lesniveaux d’utilisation à enchaîner au cours d’unemême année, dans un parc clôturé. L’unité demesure étant des journées brebis par hectare(j.b/ha), le RPP préconise par exemple la suc-cession de 150 j.b/ha en fin d’hiver, suivi de 250en plein printemps et, éventuellement, 140 àl’automne. Ce référentiel, plus affiné, devait êtrecomplété par un outil de diagnostic permettantde mieux anticiper l’impact du pâturage auregard des objectifs de gestion. Il devait, surtout,être complété par des critères permettant dedécider de l’entrée et de la sortie du troupeaude chaque parc.Mise en place par l’Institut national de larecherche agronomique, la méthode Grenouilleapporte un nouveau regard : elle permet defaire un diagnostic amont de la valeur dupâturage en tenant compte du point devue de l’herbivore face à des végétationscomposites.

Évaluer la valeur alimentaire d’une végétationLa méthode Grenouille s’intéresse au point de vue des troupeaux

© M. Meuret - Inra

Pour maintenir ou restaurer des habitats,nombre de gestionnaires privilégientl’usage du pâturage par des troupeaux

domestiques. Cet outil permet notamment demieux maîtriser la dynamique d’espèces végé-tales dominantes, donc l’excès d’embrous-saillement. Cependant, pour décider desmodalités de mise en œuvre, il convient d’éva-luer le pâturage offert au troupeau : sera-t-ilsuffisant en quantité et en qualité ?Les méthodes d’évaluation actuelles sont sou-vent insuffisantes. De plus, elles sont fréquem-ment utilisées de manière inadéquate.Ainsi, la méthode de la valeur pastorale (VP) nepermet pas de qualifier les végétations compo-sites. Conçue à l’origine pour les prairies natu-relles du nord de l’Europe, puis adaptée auxpelouses, la valeur pastorale ne considère queles espèces herbacées. De plus, en additionnantles valeurs individuelles des espèces, elle ometde considérer le comportement des troupeaux.Or, ceux-là broutent successivement les diffé-rents organes des espèces végétales (feuilles,tiges, fleurs ou fruits), et ce sont les interactionsalimentaires qui confèrent une valeur alimen-taire propre aux mosaïques végétales.Pire, lorsque les lianes, arbustes et feuillagesd’arbres sont comptabilisés pour calculer la VP,ils sont affectés d’une note égale à zéro !

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 31

aliments disponibles. Il est nécessaire de s’ap-procher des plantes, de les palper avec les mainset parfois de simuler un prélèvement pour anti-ciper si l’animal pourra prélever des grosses oudes petites prises alimentaires. Dans les notesqu’il prendra, le gestionnaire s’attachera à dis-tinguer l’accessibilité de chacun des organes desplantes. Il attribuera ainsi chacun des organes àl’un des cinq aliments de la méthode Grenouille.L’enjeu principal consiste à évaluer l’équilibreentre le Gros (les compartiments de gauche surle schéma) et le Petit (à droite). L’aliment indis-pensable est le Gros permanent, qui doit être suf-fisamment abondant pour que le troupeau puissel’utiliser régulièrement jusqu’aux derniers jours.◗ L’étape 3 est un temps d’ajustement, à conce-voir lorsqu’un déséquilibre entre le Gros et lePetit est constaté. Le gestionnaire du site et dutroupeau peut alors envisager de changer lasaison d’utilisation initialement prévue, d’ajusterle tracé des clôtures, ou bien d’intervenir trèsponctuellement avec des moyens mécaniques.◗ Enfin, les deux dernières étapes (4 et 5) consis-tent à piloter assez finement la conduite du trou-peau en parc. Le recours au référentiel pastoralparcellaire (RPP) est d’ailleurs très utile pourprogrammer le nombre de jours d’utilisation(étape 4). En revanche, le repérage des plantescontribuant au Gros-permanent (G2) permetd’identifier avec aisance quel est le bon momentpour sortir les animaux du parc (étape 5).Parmi les avantages de la méthode Grenouille,on comptera encore le fait que ce mode de dia-gnostic et de décisions d’interventions encourageles troupeaux domestiques à développer leurscompétences comportementales spontanées. Lesherbes pailleuses et broussailles s’en trouventrevalorisées, contribuant à une forme de « bio-diversité alimentaire » fonctionnelle. Le pointde vue des troupeaux d’herbivores nous incite àla préserver, en évitant les débroussaillages systématiques qui détruisent la fonctionnalitéalimentaire de leur milieu. ■CYRIL AGREIL ET MICHEL MEURETINRA-SAD, UR 767 ÉCODÉVELOPPEMENT

>>> Mél : [email protected]

• La méthode Grenouille a fait l’objetd’une publication complète dans la

revue Fourrages (2004, n°180 p. 467-481). Disponible auprès des auteurs.

• Le référentiel pastoral parcellaire estune mallette de 412 fiches éditée par

l’institut de l’Élevage (1999).

En savoir plus

L’ESPACE DOIT ÊTRE ORGANISÉ DE TELLE MANIÈREQUE CHAQUE BREBIS PUISSE ALTERNER DE PETITES

PUIS DE GROSSES PRISES ALIMENTAIRES TOUTESLES DIX MINUTES ENVIRON.

PLANTES DONT LE FORMAT PERMET DE FAIRE DU GROS. À VALEUR NUTRITIVE ÉGALE DE L’ALIMENT, BROUTER 10 MNSUR DU FEUILLAGE À GROSSES BOUCHÉES (12 G/MN)CORRESPOND CHEZ LA BREBIS OU LA CHÈVRE À 30 MNSUR DE L’HERBE FEUILLUE EN PRAIRIE (4 G/MN).© G.Bonnier (éd. Belin), Paris, 1990

© M. Meuret - Inra

Source : C. Ageil - M. Meuret - Inra

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photle format standard est l’Ascii tabulé.Passé ce stade, le choix technique touchealors à l’image : quel format d’enregistre-ment et quelle taille privilégier ? En effet,la définition de l’image (nombre total depixels) doit être suffisante pour répondreaux exploitations attendues. Mais il y a descompromis à trouver entre la qualitérecherchée et les volumes de mémoirenécessaires pour le stockage. En Vanoise,nous numérisons nos ektas en 21 x31,5 cmpour une résolution de 300 dpi, ce quidonne des images de 9,4 millions de pixels,largement suffisant pour la plupart des uti-lisations1. Nos scans sont conservés au

format tiff (avec compression LZW,non destructrice). D’autres formatsde fichiers permettent de réduireconsidérablement la taille des fichierssans trop altérer l’image; c’est le casdu jpeg, en qualité 8 à 12.L’indexation constitue alors la troi-sième phase du travail, elle réclameune grande rigueur car l’ordinateur

LA DIFFICULTÉ EST DE NE PAS SE LAISSER SUBMERGER PARDES FLOTS D’IMAGES DIVERSES ET VARIÉES, TANT EN

CONTENU QU’EN QUALITÉ TECHNIQUE OU EN FORMAT DEFICHIER. AUSSI, EN COROLLAIRE, LA PREMIÈRE RÈGLE EST

QUE TOUTE PHOTO DOIT ÊTRE LÉGENDÉE PAR SON AUTEUR.

32 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

méthodestechniques

Ce qui est renversant avec la photo-thèque numérique, c’est qu’ellechange radicalement notre façon de

rechercher des images. Avant, il fallait partirà leur recherche, fouiller dans les tiroirs,ou bien défaire le stock de CD-Rom.Maintenant, les photos viennent à nous.Quelques clics, et voilà des planches prêtespour notre choix final. Facile !…Facile ? Comme toujours, cette simplicitéapparente résulte d’un important travail :sélection, légendage, référencement,indexation. Et d’abord, le choix du logicielsupport : monoposte ou solution tout web?Le choix d’une solution technique est eneffet primordial. Il conditionne l’efficiencede la base de données et l’évolution pos-sible de celle-ci. Choisir son progiciel sup-pose de se poser quelques « bonnes »questions : qu’attendons-nous de notre fondsd’images? Quelle exploitation? Qui en aural’accès et avec quelle liberté ?…Dans le cas de la Vanoise, la photothèquedevait d’une part être accessible à seséquipes de terrain, éloignées du siège, etd’autre part s’ouvrir au public professionnel

http://phototheque.vanoise.com

En savoir plus

CETTE PHOTOGRAPHIE PARLECLAIREMENT À QUI LA REGARDE :ON Y RECONNAÎT, SANSAMBIGUÏTÉ, UN GARDE-MONITEUR DE PARC NATIONAL(UNIFORME BIEN IDENTIFIABLE)OBSERVANT AUX JUMELLES(DONC DANS LE CADRE DE SONTRAVAIL, ACTIVITÉ DESURVEILLANCE OU DE SUIVISCIENTIFIQUE). L’ARRIÈRE-PLANSITUE IMMÉDIATEMENT LASCÈNE EN HAUTE MONTAGNE,PLUTÔT À L’AUTOMNE. LALUMIÈRE QUI A ÉTÉSOIGNEUSEMENT CHOISIE FAITPARTIE INTÉGRANTE DE LACOMPOSITION, POUR UNÉQUILIBRE DES MASSESSATISFAISANT POUR L’ŒIL. LEPERSONNAGE PRINCIPAL DE LASCÈNE EST FLÉCHÉ PARL’AGENCEMENT DES LIGNES, ONNE PEUT PAS LE RATER !

sans qu’il doive se déplacer. L’option prisefut celle de la solution web, qui a transformél’interface de la photothèque en un site deconsultation et vente en ligne. Avantagesupplémentaire de ce système : aucun logiciel à installer, ce dernier étant localiséchez l’hébergeur du site (qui en est aussi ledéveloppeur).Il convient aussi de s’assurer que toutes lesdonnées de la photothèque numérique sontà tout moment exportables vers un autrelogiciel (au cas où celui utilisé deviendraitobsolète). Il est alors utile de se souvenir que

Développer une photothèque numérique

PAS SPÉCIALEMENT DOCUMENTAIRE ETPUREMENT GRAPHIQUE, L’IMAGE CI-DESSUS EST

DIFFICILE À CLASSER. QUASI MONOCHROME,ELLE JOUE SUR LES EFFETS DE MATIÈRE :

PRESQUE DE L’ART ABSTRAIT. À SECONDE VUEON REMARQUE UNE TRACE DE LIÈVRE ALLANT

ET VENANT. CET ÉLÉMENT VISUEL DÉLIMITE LEPREMIER TIERS DE L’IMAGE, C’EST AUSSIL’AMORCE D’UNE HISTOIRE NATURELLE À

RACONTER…

Mode d’emploi appliqué dans le parc national de la Vanoise

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 33

ne pense pas, il ne peut proposer que cequ’on lui a introduit. Chaque photographiedoit donc être associée à des mots clés quien décrivent le contenu. La liste de cestermes, normalisés et hiérarchisés en arbo-rescence, est arrêtée de manière formelle.Ces mots clés constituent le thésaurus de laphotothèque.En Vanoise, l’auteur légende sa photo avecprécision et une exigence particulière estattendue de lui afin qu’il renseigne sonimage de manière exhaustive (sujet, action,contexte, arrière-plan, lieu, coordonnéesGPS, date, signature…). Cette légende estintégrée dans les métadonnées du fichier.Le documentaliste intervient ensuite pourattacher les mots clés à l’image. Pour cela,il se réfère d’une part à l’aspect visuel,d’autre part à la légende.L’indexation, rigoureuse, doit également êtrehomogène d’une image à une autre ; cettecohérence garantissant la pertinence desréponses aux futures requêtes.Attention à ne pas se laisser submerger pardes flots d’images diverses et variées, tant encontenu qu’en qualité technique ou enformat de fichier. Un choix s’impose enamont sur les images à indexer dans la base !Il en va de la qualité de notre fonds. Refuseraussi toute image non légendée !Si le numérique permet beaucoup de sou-plesse, ses supports sont en même tempstrès volatils et fragiles. Certaines précau-tions doivent donc être prises. Ainsi, uneversion identifiée comme « originale» doitêtre précieusement conservée sous formebrute (sans aucune correction ni retouche)afin de garder intact tout son potentiel (celadit, de récentes applications logicielles per-mettent d’associer des variantes, des cor-rections, sans altérer le fichier original). Lessauvegardes doivent être dupliquées, voire«tripliquées» (et datées) sur des supports dedifférentes natures. S’assurer en outre de lapérennité des formats de fichiers et envi-sager d’éventuelles conversions (les supportsd’archivages ne sont pas éternels du tout).Et puis, comme toujours, rester en veille !S’informer de l’évolution technologique(logiciels, formats de fichiers) afin de faireen sorte que nos images actuelles soientencore lisibles dans cinq, dix, trente ans…Ceci peut supposer des conversions pério-diques des fichiers vers d’autres formats plusmodernes. ■PATRICK FOLLIETPARC NATIONAL DE LA VANOISE

>>> Mél :[email protected]

1. Par comparaison, nos reflex numériquesactuels produisent des images de dixmillions de pixels, soit sensiblement lamême chose.

Patrick FollietPHOTOGRAPHE ET RESPONSABLE DE LA PHOTOTHÈQUE

DU PARC NATIONAL DE LA VANOISE

À vous entendre, réaliserune photothèque, c’estrestreindre le nombre de

clichés afin de ne pas se laisser submergerpar un flot d’images. Comment effectuez-vousces choix ? Avez-vous défini une ligne édito-riale pour savoir d’emblée si telle ou telle photodoit entrer dans la base?Nous n’avons pas arrêté de ligne écrite, figée…une sorte de référent qui nous permettrait dejuger avec une objectivité impartiale. Notreligne, comme vous dites, est directement opé-rationnelle. La photothèque sert à illustrernos publications et également nos actionsd’information et animations. Les photos rete-nues doivent donc aller dans le sens d’unecertaine exhaustivité. Dans les faits, nousconstatons que cette ligne est évolutive. Eneffet, plus nous avons d’images, plus la baseest consultée et plus des besoins nouveauxapparaissent. Nous devons donc compléternos choix.

Cela signifie que votre index des mots clésévolue constamment ?

Pas dans ses grandes rubriques, mais il s’af-fine et est complété semaine après semaine.Nous traitons des espèces animales et végé-tales, des différents milieux écologiques. Nousessayons d’avoir des photos de tous les sites,les paysages, le patrimoine culturel. Ensuite,nous devons pouvoir illustrer les actions, lesréalisations du parc, avec évidemment desimages du personnel dans son activité quoti-dienne, les gardes-moniteurs, les chargés demission. On essaie également de faire desimages des activités économiques pratiquéessur le territoire : tourisme, agriculture. Montravail consiste aussi à recenser les manques,à savoir les sujets qu’on m’a demandés et surlesquels je n’ai pas pu proposer d’images. Noustentons de les combler en priorité.

Y a-t-il des images que vous ne retiendrezjamais ?

Difficile. Il faut bien sûr éliminer les groséchecs techniques. Les photos ratées : cellesqui ont de gros défauts d’exposition, qui sontfloues, bougées. Mais là encore, je nuance unpeu : quelquefois, il faut se faire violence et

garder des images même moches, simplementparce qu’elles ont valeur de témoignage etqu’elles sont les seules à illustrer un événe-ment, un état du paysage : le recul des glacierspar exemple.Mais là encore, les choses doivent être évolu-tives. Quand on monte sa photothèque oubien qu’on développe une nouvelle théma-tique, on peut se permettre d’être un peu pluslâche sur les exigences de qualité, afin d’avoirrapidement une bonne couverture. Mais,ensuite, il faut tirer le niveau vers le haut.Cela signifie que lorsque de meilleures imagesarrivent, de surcroît plus récentes, il faut éli-miner du fonds d’autres photos moins bonnes.C’est un travail très délicat d’éliminer défini-tivement des images et cela réclame beau-coup de temps.

À l’inverse, y a-t-il des images qu’il fautabsolument garder ?

En général, toutes celles qui témoignent. Unephoto de bouquetin pourra toujours être rem-placée par une plus belle, jamais la photo d’unancien garde-moniteur.

Quand on regarde votre site internet, onremarque qu’il a aussi de belles images.Des vues qui font vibrer, tout simplement.Comment les classez-vous?

J’aime aussi retenir des images qui n’ont pasun caractère documentaire marqué mais quidégagent une ambiance, qui présentent unelumière particulière par exemple. En Vanoise,la photographie est utilisée dans le cadre de nosactions de sensibilisation. Nous avons à fairepasser l’idée qu’hors des sommets prestigieuxet la faune emblématique, d’autres chosesvalent la peine. Certaines images de natureordinaire, réalisées avec des lumières extraor-dinaires ou des angles de vue inattendus, peu-vent transcender le sujet et le faire découvrirsous un autre angle. Le choix de l’imagerépond, bien sûr, à certains critères techniquesde cadrage, de composition mais, cela dit, iln’y a pas de définition absolue. Sinon, on neverrait que des bonnes photos, non? Heureu-sement qu’il reste une part de subjectivité etde créativité aux photographes! ■RECUEILLI PAR MOUNE POLI

● Entretien Choisir, toujours

CHOIX DE PLANCHES D’IMAGES ENRÉPONSE À UNE REQUÊTE CLIENT.

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34 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

zone humide. Cette expérimentation2 a vule jour à l’automne 2005 sur un secteuroù la pelouse dunaire est inondée chaquehiver.La difficulté réside dans le choix de l’em-placement de pose et dans la résistance del’aménagement. Afin que le filet puisseendurer la pression du courant et ne pasêtre piégé par les sédiments, il a été équipéde flotteurs lui permettant de rester à fleurd’eau. Des filets dériveurs ont égalementété installés. Après quelques mois, le filetavait effectivement résisté au courant.Cependant, la force du courant avaitentraîné de nombreux déchets sous la sur-face (et donc sous le filet). Pour pallier cesdifficultés, le filet devrait prochainementêtre alourdi afin qu’il se maintienne entredeux eaux.Une deuxième expérimentation consiste enla pose d’un filet grillagé sur cordondunaire. Inspirée des filets brise-vent uti-lisés contre l’érosion, cette seconde tech-nique installe (verticalement sur la dune)un grillage à poules à grande maille(50 cm). Outre l’efficacité de l’installation,il convenait de mesurer son intégrationdans le paysage.

l’Espace jeunes, les scouts et éclaireurs de France participent régulièrement et sefidélisent d’année en année.L’opération sert également des objectifsd’insertion. Dès les premières collectes, unpartenariat avec les CAT de la région a étémis en place. Une trentaine de personnessouffrant d’un handicap d’origine mentaley participent, ce qui a d’ailleurs conduit àmoduler fréquence, localisation, durée etpériode des opérations (notamment, éviterles mois d’hiver) afin de prendre en compteles différentes formes de handicaps. Lebilan s’avère relativement positif et l’effi-cacité de ces personnes est aujourd’huiavérée. L’équipe gestionnaire a égalementinitié une mise en réseau des acteurs (ycompris les CAT) et des rencontres régu-lières sur le thème des déchets.

PréventionAutre volet : l’action préventive, notam-ment ciblée sur les macrodéchets. Depuisdeux ans, les gardes du littoral expéri-mentent la pose de filets piégeur.Constatant que la majorité des déchets flot-tent, une première technique consiste enla pose d’un filet de pêche en surface d’une

Filets, emballages, bidons, plastiques,fûts… La situation géographique dela baie d’Audierne favorise l’accumu-

lation de déchets de toute nature. Aussi,dès sa création en 2000, le syndicat inter-communal à vocation unique (Sivu) de labaie d’Audierne a développé une stratégiepour gérer les déchets sur les 516 ha dedunes, pelouses dunaires et marais litto-raux dont il a la charge1. Soucieux d’unecertaine éthique, sa démarche privilégiel’utilisation de méthodes douces et la valo-risation des déchets par le tri sélectif. Leprogramme s’articule autour d’actions dif-férenciées, selon les catégories de déchets.

ActionAfin d’éliminer les déchets d’échouage, huità dix journées de chantier sont organiséeschaque année. Ces opérations de ramas-sage manuel réunissent des volontaires quiévoluent en formation « de tirailleur »,autrement dit : en ligne. L’évacuation dessacs, vers les parkings puis vers la déchet-terie, est effectuée soit par un attelage dechevaux de trait, soit par un quad atteléd’une remorque. Le tri sélectif des verres,plastiques recyclables, plastiques non recy-clables, cordages… s’effectue en mêmetemps que le ramassage. Chaque année, cesont douze mètres cubes de cordages etfilets qui sont ramassés ; et deux à troismètres cubes de déchets qui sont triés lorsde chaque collecte.L’opération est l’occasion d’échanger avec lepublic et le sensibiliser à la durée de vie desdéchets et aux «bons» gestes quotidiens.L’annonce de ces journées est effectuée parvoie de presse ou par affichage en mairie,cependant, un effort tout particulier est faiten direction des acteurs locaux. C’est ainsique les centres d’aide par le travail (CAT),

Des déchets parsèment l’espace littoral. En baie d’Audierne (Finistère sud), le syndicatintercommunal à vocation unique, gestionnaire de terrains du Conservatoire du littoral, a lancédiverses initiatives visant à traiter la question. Il a aussi intégré un réseau d’acteurs européenspartageant les mêmes préoccupations. Pour l’heure, la quantité de déchets ne faiblit pas, mais uneprise de conscience des usagers est amorcée.

Expérimentations en baie d’Audierne

>>> Mél : [email protected]

Gestion des déchets sur l’espace littoral© Sivu de la baie d’Audierne

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6. VISITE SCOLAIRE (PROGRAMME D’ANIMATION - MAISONDE LA BAIE D’AUDIERGNE). • 7. MÉGOTIER COMPOSÉD’UNE POUBELLE ET D’UN DISTRIBUTEUR DE CENDRIERS.

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 35

Plus concluante, cette tech-nique a limité la présence desdéchets à une zone de tamaris.En revanche, la présence dupublic et son comportementparfois incivique (dégradationgratuite du filet) ont constituéune difficulté. Ce type d’actiondoit être accompagné d’unecommunication ciblée pourune meilleure compréhensionde la gestion en place.Plus globalement, le bilan deces tests conduit à conclurequ’il ne peut s’agir que d’amé-nagements d’appoint, amo-vibles. Ils ont pour but dediminuer la superficie des col-lectes manuelles (qui reste l’al-ternative la plus efficace). Surla dune, les gestionnaires étu-dient un système de filets facileà implanter (et à enlever), pou-vant être mis en place à la veillede coups de vent annoncés. Lesimpératifs : des mailles larges (type filet depêche) ; un montage en moins d’une heure;une fixation sur des piquets amovibles (àla manière des clôtures temporaires dis-posées pour couper des parcelles en pâtu-rage). Fourni en rouleaux, il doit être facileà dérouler, permettant d’équiper tempo-rairement de grandes zones totalementdépourvues d’obstacles.

FréquentationPapiers, cartons, emballages, verres, la fré-quentation du site génère aussi des déchetsdont la gestion relève d’une compétencede la communauté de communes; laquelle,d’ailleurs, a implanté des conteneurs sur lesparkings. En complément, le Sivu a, depuis2006, installé des collecteurs permanentsen divers lieux du site. Éloignés des accèsparking et plage, ils n’ont pas pour but deservir aux déchets de fréquentation. Ilsvisent, en complément des collectesmanuelles, à inciter au ramassage desdéchets d’échouage. Le résultat est trèsconcluant : les usagers de la baie d’Audiernes’impliquent, se réappropriant ainsi leurterritoire. Ainsi, par exemple, cinq collec-teurs de 1 m3 chacun représentant 22 m3

de déchets sont remplis pendant les moisd’hiver (d’octobre à mars).Une autre opération de proximité entre,

elle, dans une lutte contre la présence despetits déchets sur la plage. Depuis mainte-nant trois ans, chaque année, 4000 mégo-tiers sont mis à la disposition du public.Ces mégotiers sont fabriqués à partir deboîtes Tetra Pak récupérées et nettoyées pardes scolaires3. Les travailleurs des CAT lestransforment ensuite en cendriers de plage.La distribution est assurée par le Sivu et pardes jeunes volontaires. Cette action de sen-sibilisation se prolonge avec les Espacesjeunes de Plomeur et de Penmarc’h qui ontnotamment créé des slogans et des tracts.D’apparence limitée, ces initiatives confè-rent un effet positif à long terme, sur lecomportement des utilisateurs du site.

Mutualisation du travail de terrainMalgré les efforts déployés, l’actionsemble avoir atteint des limites(notamment en ce qui concerne lesdéchets d’échouages). Pour allerplus loin et disposer d’informationssur la nature du déchet et son com-portement, les gestionnaires de labaie d’Audierne se sont portés volon-taires pour faire partie du réseaueuropéen Ospar. Piloté par la Suède,ce projet centralise des informationssur les pollutions marines. Les don-nées sont collectées par des infor-mateurs de différents pays de la côteatlantique qui, quatre fois par an,comptabilisent les déchets sur centmètres de plage. La France adhèreà ce réseau depuis 2005 et la baied’Audierne est l’un de ses premierssites expérimentaux4.Ayant découvert les potentialités dece travail en réseau, le Sivu de labaie d’Audierne a alors décidé de

pousser plus loin. Il a notamment établiune coopération avec deux districts anglais(Torridge et North Devon). Ainsi, depuis unan, les gestionnaires des trois sites ontinitié une étude visant à mieux connaîtreles déchets. Ils l’ont conçue en trois volets :des relevés de terrain, une analyse de cesrelevés, l’expérimentation de nouvellesméthodes de lutte. La phase de relevés deterrain a été entamée au début de l’année2006. Elle a été précédée de la définitiond’un protocole commun (méthodologie,plage de référence, fréquence de prélève-ment, grille de relevés). Aujourd’hui, l’ana-lyse des données est en cours. L’objectif estde connaître avec précision la catégoried’usagers à sensibiliser (pêcheurs, com-merce, plaisance…). Les premières actionsdoivent être mises en place à partir de septembre 2007. ■GRÉGORY THOMAS - SÉBASTIEN BERGUEGARDES DU LITTORAL - SIVU DE LA BAIE D’AUDIERNE

1. Le site est réparti sur sept communes dont quatre se sont regroupées au sein d’un syndicatintercommunal à vocation unique : Penmarc’h, Plomeur, St-Jean Trolimon et Tréguennec. La gestionest assurée pour le compte du Conservatoire du littoral, propriétaire du site.

2. Cette expérimentation a été effectuée en collaboration avec le centre de documentation, derecherches et d’expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux (Cedre).

3. Ils participent à l’opération « lait à l’école » initiée par la société Tetra Pak.

4. C’est en décembre 2005 que le ministère de l’Environnement décide de participer au projet Ospar.Il charge le centre de documentation, de recherches et d’expérimentation sur les pollutionsaccidentelles des eaux d’en être le correspondant national.

méthodestechniques

© Sivu de la baie d’Audiergne

1. CONTENEUR À DÉCHETS. • 2 & 3. COLLECTES MANUELLES DE DÉCHETSSUR UN MILIEU DUNAIRE, PUIS ÉVACUATION ÀL’AIDE D’UN ATTELAGE DE CHEVAUX DE TRAIT.

4 & 5. FILETS PIÉGEURS DE MACRO-DÉCHETS. LA PHOTO 4REPRÉSENTE UN FILET TERRESTRE AVANT LA SAISON DESPLUIES. LA PHOTO 5 MONTRE UN FILET AVEC FLOTTEURSINSTALLÉ SUR UNE ZONE HUMIDE ACTIVE.

4

5

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les Pays baltes et en Hongrie, y voitd’autres enseignements, lesquels peuventavoir valeur de conseils.

Les conditions préalablesCe qui fonde un partenariat, c’est l’ob-jectif que l’on veut atteindre ensemble etla manière dont chacun met ses compé-tences propres au service de l’objectifcommun. Truisme ? Certes non, ceténoncé signifie, en clair, que la réussited’une coopération repose le plus sûre-ment sur le partage des objectifs. Dans lecas présent, c’est bien l’objet du pro-gramme et donc la mise en œuvre d’unréseau de fondations pour la biodiversitéen Hongrie qui a été porteur. En effet,cette initiative ne reposait sur aucune col-laboration passée ou aucun vécu anté-rieur. Le partenariat est né d’unerencontre informelle entre les présidentsde la fondation Zöld Folyosò et de laFédération des conservatoires d’espacesnaturels. Et, lorsque le Fonds françaispour l’environnement mondial a demandéd’étudier la faisabilité de programmes decoopération avec les pays d’Europe cen-trale et orientale, c’est tout naturellementque les gestionnaires français se sont rap-prochés de leur contact en Hongrie.L’objectif partagé, les similitudes entre lesorganismes et leurs modes d’intervention,la faisabilité du programme associant cinq

D’égal à égal

Àl’instar de la plupart des paysd’Europe centrale et orientale, laHongrie a su préserver une large

part de son patrimoine naturelexceptionnel. Du moins jusqu’en 1989,quand le mode d’utilisation des sols etla vocation militaire de vastes zonespermettaient leur protection. Mais,depuis, le processus de redistribution etde privatisation des terres engendredes effets dommageables sur leshabitats naturels et les espèces hôtes.Du reste, afin de limiter l’inflationfoncière, la loi interdit l’achat de terrespar des étrangers durant sept ans àcompter de janvier 2004, dated’adhésion à l’Union européenne.Dans les années 90, la préservation dupatrimoine naturel passait par lamaîtrise du foncier. Ainsi, la législationhongroise n’autorise l’achat de terresagricoles qu’à des collectivités localesou à des fondations publiques agrééespar l’État. Plusieurs fondations ont alorsvu le jour. Elles regroupent communes,ONG et individus impliqués dans laconservation du patrimoine naturel.Cependant ces initiatives, souventlocales, manquaient souvent decohérence, de coordination et toujoursde moyens.C’est dans ce contexte que laFédération des conservatoiresd’espaces naturels, associée à cinqfondations publiques hongroises, aproposé au Fonds français pourl’environnement mondial un projetcontribuant à préserver les éléments debiodiversité remarquable en Hongrie etleurs habitats (grande outarde, aigleimpérial, butor étoilé, pygargue à queueblanche, loutre, souslik…).Coopération bilatérale franco-hongroise,ce projet (2001-2008) vise à :1. renforcer et coordonner l’action decinq fondations publiques1 ; 2. ébaucher le premier réseau hongroisde protection de la nature ;3. préparer l’adhésion de la Hongrie àl’Union européenne par l’intégration del’acquis communautaire enenvironnement. ■

Jolie leçon de respect ! Voici ce que lesFrançais ont retenu de l’allocution deLàszlò Haraszthy, sous-secrétaire

d’État à l’Environnement hongrois, alorsqu’il s’exprimait devant le comité de pilo-tage du programme franco-hongrois pourla biodiversité. La scène se déroulait enjanvier 2005. Alors qu’on s’attendait, légi-timement, à ce que l’hôte officiel salue lacoopération franco-hongroise engagéedepuis 2001, il débuta son discours enprésentant les nombreux autres partena-riats internationaux dans lesquels laHongrie est impliquée. La réunion s’ou-vrait donc en resituant la coopérationfranco-hongroise à son juste niveau : unpartenariat parmi d’autres.Ce n’est qu’une anecdote, elle marquecependant l’état d’esprit qui doit prévaloirpour toute coopération : deux pays colla-borent sur un pied d’égalité, ici à la pré-servation du patrimoine naturel del’Union européenne. Et le soutien finan-cier apporté par la France n’y change rien :respect mutuel et reconnaissance réci-proque sont les deux ingrédients de based’un partenariat international.Est-ce là la seule clé pour réussir unecoopération internationale ?La Fédération des conservatoires d’es-paces naturels (FCEN), qui s’est consti-tuée une expérience modeste à travers sescoopérations en Bulgarie, Slovénie, dans

Coopération franco-hongroise pour la biodiversité

36 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

Vers un premier réseau

hongrois de protection

de la nature

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 37

acteurs hongrois crédibles ont été lesbases de cette alliance. Le respect, lareconnaissance réciproque et la confianceentre les partenaires ont fait le reste.

La relation humaineUne fois les grands principes actés, le par-tenariat doit être mis en œuvre de façonconcrète, et satisfaisante pour chacun. Àce stade, il convient d’être vigilant sur lesmodalités et les attendus du partenariatau risque d’anéantir toute perspective decollaboration fructueuse. Plusieurs pointsdoivent retenir l’attention. Et, tout

d’abord, l’importance de l’animation duprojet. En effet, un partenariat bilatéralse construit – avant tout – sur un binômed’animateurs (français et hongrois) dis-posant de compétences techniquesrequises mais, également, de qualitéshumaines.Importance du relationnel : le mot estlancé. Il s’agit là d’un critère subjectif etqualitatif qui est pourtant primordial. Onnotera, par exemple, que dans la présenteexpérience, ces professionnels ont changéen cours de collaboration sans que le pro-gramme en subisse de contrecoup. La

qualité relationnelle développée en amonta pu subsister après leur départ. Dans cetéchange, d’ailleurs, ce binôme a été ren-forcé par des binômes de bénévoles, les-quels ont permis de tisser, davantageencore, la toile relationnelle. En effet,quelles que soient la solidité initiale dupartenariat et la justesse des règles éta-blies, le jeu partenarial dépend du com-portement de chacun des partenaires. Lesrègles ne suffisent pas à sécuriser un dis-positif, à garantir son succès et à anticipertoutes les situations.La qualité du dialogue entre les anima-teurs du partenariat, dans un cadre nonhiérarchique, est fondamentale pour laqualité du copilotage de l’action au-delà duseul rôle d’interlocuteur privilégié et d’in-terface entre les structures impliquées.

La question de la langue commune

Dans un contexte international, la ques-tion linguistique se pose généralement et,à défaut de parler la langue du partenaire,la maîtrise de l’anglais est rapidementincontournable. Cependant, la pratiquedes deux langues confère un avantage évi-dent. Ainsi, le suivi de ce programme a étéconfié à la vice-présidente de la Fédérationdes conservatoires. En effet, celle-ci étant

1.FondationsBihar,HortobàgyPro Vértes,Tiszatàj,ZöldFolyosò.

Les évolutions politiques survenues en Hongrie depuis 1989 ont ouvert la voie auxinitiatives individuelles et associatives en matière de protection de la nature. Dans ce

contexte, une coopération franco-hongroise pour la biodiversité a vu le jour. Le projet(2001-2008) doit contribuer à préserver les éléments de biodiversité remarquable en Hongrie

en coordonnant l’action de cinq fondations publiques. Il ambitionne également de préparer l’adhésionde la Hongrie à l’Union européenne par l’intégration de l’acquis communautaire en environnement.

1. LE SOUSLIK EST UNE ESPÈCE EMBLÉMATIQUE DES PLAINES HONGROISES, ET UNE PROIE DE L’AIGLE IMPÉRIAL.2. SENTIER DE DÉCOUVERTE AMÉNAGÉ SUR LE SITE DE PETESMALOM DE LA FONDATION ZÖLD FOLYOSÒ. 3. LES BASES DU PARTENARIAT SONT LA COMPRÉHENSION ET LE PARTAGE DES ENJEUX ET OBJECTIFS.

suite page 38 ● ● ●

Le projet a été mis en œuvre dans le cadre du volet biodiversité du pro-gramme d’action du Fonds français pour l’environnement mondial. LeFFEM est un fonds public créé en 1994 par le gouvernement français.

Il favorise la protection de l’environnement mondial dans des projets de déve-loppement durable. Il subventionne des projets visant la préservation desgrands équilibres de notre planète concernant : la biodiversité, les change-ments climatiques, les eaux internationales, la désertification et la dégra-dation des terres, les polluants organiques persistants (POPs), la couched’ozone stratosphérique. En matière de biodiversité, le FFEM favorise laconservation des espèces et des espaces, l’usage traditionnel des res-sources naturelles par les populations, une exploitation durable des res-sources. Les projets doivent tenir compte des populations locales afin deles impliquer dans la protection de leur environnement et les faire bénéfi-cier des avantages correspondants. Depuis 1994, le FFEM a financé 78 pro-jets de biodiversité dans plus de quarante pays, principalement en Afrique,pour 76 millions d’euros. ■

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Le cadre du programme

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38 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

ailleurs

● ● ● suite de la page 37

d’origine hongroise, sa connaissance dela langue, des contextes historique et poli-tique a grandement facilité la perceptiondu contexte national et le rapprochementdes partenaires. Aujourd’hui, les échangesse font indifféremment en anglais, en hon-grois ou en français selon l’aptitude desinterlocuteurs.Les suivis comptables et financiers consti-tuent également un volet majeur de lamise en œuvre et du rendu d’un pro-gramme. Là encore, la connaissance de lalangue du pays (les factures ne sont pasen anglais) et des règles nationales envigueur (TVA, charges employeurs, règlesdes marchés…) constituent des atoutsmaîtres. C’est pourquoi, le partenairefrançais s’est associé à un bureau d’ex-pertise comptable hongrois, en charge dela certification des recettes et desdépenses des fondations partenaires. Lecabinet comptable a également joué lerôle de conseil auprès des fondations pourleur permettre de s’adapter aux règles duFonds français pour l’environnementmondial. Le choix de s’appuyer sur descompétences nationales s’est avéré béné-fique aux deux parties dans le suivi et lagestion de ce programme.

GouvernanceLa question de la gouvernance se posealors. Jusqu’où doit-elle être formalisée ?Dans le cas de ce programme franco-hon-grois, le choix a été fait d’une forte for-malisation. Le fait de se mettre d’accordsur les règles et compétences devait per-mettre d’avancer plus vite et d’anticiperd’éventuels malentendus.Des contrats et des conventions bilatéralesont donc été mis en place ainsi qu’uncomité de pilotage rassemblant les opéra-teurs du programme, le Fonds françaispour l’environnement mondial et les auto-rités des deux pays. Le rôle de ce comitéest clairement défini et ses compétencesvalidées par les parties. Il suit l’avancementdes actions et valide les programmes detravail annuels et les bilans d’activités.La Fédération des conservatoires joue lerôle d’interface entre le ministère del’Écologie français, le Fonds français pourl’environnement mondial et les fondations.Le partenariat entre la FCEN et les cinqfondations hongroises s’entretient égale-ment au moyen de rencontres annuelles :réunions du comité de pilotage, visites desites… Ainsi, en septembre 2007, à l’occa-sion d’une venue en France d’une déléga-tion hongroise, des jumelages entreconservatoires d’espaces naturels et fon-dations sont prévus.

Les moyens financiers alloués au programme sont significatifs puis-qu’ils atteignent près de trois millions d’euros, dont 38% proviennentdu Fonds français pour l’environnement mondial et 25% du ministère

de l’Environnement hongrois. Le budget est complété par des contributionsprivées, de l’autofinancement et surtout par les fonds du second pilier dela politique agricole commune (MAE, 20%) auxquels les fondations sontéligibles. ■

Le partenariat,ça marche…

Le projet s’achève dans deux ans et il restebeaucoup à faire. Néanmoins, il affichedes résultats significatifs qui se tradui-sent par des investissements structurantstels que l’aménagement de bâtimentsadministratifs ou de deux écofermes, l’ac-quisition de matériel d’exploitation dessites, l’acquisition de zones stratégiquespour la conservation, la préservation deraces rustiques (vaches grises, brebisracka, porcs mangalica…)… Le projet aégalement accompagné la création, en2005, du premier parc naturel hongroisdans la région du Vértes en associant lesvingt communes concernées. Les cinqfondations possèdent et gèrent aujour-d’hui plus de 5500 ha et emploient plusde quarante personnes. Et puis, aussi, lesactions menées possèdent une forte valeurdémonstrative vis-à-vis du public et dumonde agricole dans un contexte forte-ment marqué par l’entrée dans l’Unioneuropéenne et la politique agricole com-mune. L’exemplarité de la gestion exten-sive pratiquée par les fondations proposeune alternative réaliste et économique-ment viable à l’agriculture intensive.L’approche économique développée parchaque fondation repose sur le dévelop-pement des productions traditionnelles(bétail, pisciculture…) et l’écotourisme à

des fins d’autofinancement des actions deconservation. Les retombées sont encoremodestes mais les tentatives de la fonda-tion Zöld Folyosò de développer un tou-risme ornithologique, halieutique etéquestre ouvre des perspectives réelles(6000 visiteurs/an) et contribue à revita-liser cette vaste zone d’étangs en déprise.Le projet aura permis aux fondations deprofessionnaliser leur fonctionnement etd’asseoir leur ancrage territorial ainsi queleur crédibilité. Ces cinq fondations ayantconstruit des habitudes de travail encommun sont, plus qu’hier, des acteursdu développement rural et de la préser-vation du patrimoine naturel en Hongrie.Aussi, s’il est un autre enseignement àretenir, ce serait celui-là : le partenariat nese décrète pas, il se construit progressi-vement. Ce sont les échanges et les col-laborations à venir qui nous diront si cettedémarche va survivre au programme quil’a engendrée. ■MARC MAURYCHEF DE PROJETS - FÉDÉRATION DES CONSERVATOIRESD’ESPACES NATURELS

>>> Mél :[email protected]

UNE DES AMBITIONS DU PROJET CONSISTE EN LA CONSERVATION DES RACESRUSTIQUES TELLES LES VACHES GRISES.

Fédération des conservatoires d’espacesnaturels • Tél. : 0238245500site : www.enf-conservatoires.org

En savoir plus

Côté finances

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lecteurpenseur

En refermant le dossier sur lemécénat du numéro 18 d’Espacesnaturels, le lecteur pourra se réjouir

de l’existence de partenariats entre lemonde économique et écologique.Cependant, l’intervention de ClaudeDautrey, du parc national des Écrins, estla seule à émettre de fortes réservesmorales. Cela pourrait donnerl’impression que la méfiance est uncombat d’arrière-garde et que la seulequestion est désormais celle ducomment faire. Aussi, puisque ClaudeDautrey a eu le courage de leverquelques lièvres, poursuivons-les, quitteà égarer Espaces naturels dans leschemins du militantisme, une fois n’estpas coutume.Il est exact que les réactions contre lemécénat sont souvent affectives : il y aurabien quelque écologiste pour dénoncer lacitation de Francis Bouygues, le «pape dubéton», en début de dossier, ou la miseen exergue du groupe Total en pleinprocès pour marée noire. La réflexion defond sur les limites du «mecénature» nedoit pas s’arrêter là.Pour commencer, n’oublions pas lajeune histoire française de la protectionde la nature, d’un demi-siècle à peine.Nos espaces naturels sont, pour laplupart, le résultat d’une actionmilitante : une autoroute déviée au profitd’un marais, une extraction de tourbestoppée, une unité touristique nouvellerepoussée… De tels exemples sontlégion. Des centaines de professionnelsdoivent leur poste d’aujourd’hui à desmilliers de militants d’hier. Respect.Il ne faudrait pas omettre, non plus, queces combats initiaux ont aussi participéà la prise de conscience des entreprisesen faveur de l’environnement.Aussi on peut s’interroger : quel poidsaurait, demain, une association quiaurait perdu beaucoup de ses adhérentsdu fait d’une certaine « compromission »?Or, on aurait tort de penser que tous lescombats sont derrière nous, que lelittoral et les montagnes sont à l’abri.S’il semblait plus facile de créer desespaces protégés dans des espacesagricoles en déprise ces quinzedernières années, ce ne sera sûrementpas le cas demain avec la raréfaction del’eau potable, de légitimes besoins delogements comme le vivent aujourd’huinos voisins espagnols, ou une demandeénergétique croissante. Déjà nousentendons à nouveau parler de toutl’intérêt des microcentraleshydroélectriques ou des agrocarburants.Et puis ne soyons pas prétentieux : s’ilne s’agissait que d’efficacité, certainesentreprises n’auraient pas forcémentbesoin des gestionnaires d’espacesnaturels pour conduire des actions

efficaces avec les moyens financiersdont elles disposent, et lescompétences internes ou externesdisponibles sur le marché (ce qui n’étaitpas le cas dans les années 70-80).Ne soyons donc pas dupes non plus desrapports de force : dans les conflitsd’intérêts à venir, celui des espacesnaturels risque de n’avoir que peu depoids. Le cycle perpétuel qui mène ducombat à la gestion puis de la gestionau combat n’a heureusement pas deraison de s’arrêter. Un autre aspect dela spécificité française, c’est que lesONG et autres gestionnairesinstitutionnels sont parfois déconnectésdu monde de l’entreprise et n’ont pastoujours une bonne perception desréalités économiques. Ils ont doncsouvent tendance à sous-estimer lescapacités notamment financières deleurs interlocuteurs, et la valeur de cequ’eux-mêmes représentent.Souhaitons, par exemple, que lesquelques entreprises citées en modèledans Espaces naturels renvoientl’ascenseur en abonnant quelquesmilliers de leurs professionnels. Unegoutte d’eau budgétaire, des poignéesde bonnes pratiques de gestion, uneacculturation de leur encadrement pourune entreprise, et un bol d’air pour notrepresse spécialisée…La protection des milieux ahistoriquement été en France publique etjacobine. La décentralisation et unecertaine forme de privatisation sont parconséquent une véritable révolutionculturelle. Il est donc normal quecertains s’interrogent sur :- la pérennité des moyens privés face àdes besoins de gestion dans le longterme ;- la nécessaire indépendance desressources pour les gestionnaires ;- les nouvelles compétitions entregestionnaires pour accéder aux fonds,voire la compétition entre les entreprisespour s’accaparer les meilleurspartenariats.Le mécénat n’est ni la panacée ni ladamnation pour les deux parties. Biensouvent, les gestionnaires y font appeldans un simple réflexe de recherche demoyens. Puis ils découvrent d’autresintérêts à travailler avec les entrepriseset c’est tant mieux. Continuons donc…mais sans fausse naïveté. Ce quinécessite pour les gestionnaires demieux connaître le monde desentreprises, de développer leurscapacités de négociation, et de ne pasbrader leur patrimoine qui est,rappelons-le… inestimable. ■

YVES VERILHAC - DIRECTEUR DE L’ATEN

naturellement?Le mécenat

oui, je m’abonne

Espaces naturels n°19 • juillet 2007 39

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DOMINIQUE LEGRAIN, INSPECTEUR GÉNÉRAL AU MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT ET DE L’AMÉNAGEMENT DURABLES,A REMIS RÉCEMMENT UN RAPPORT À NELLY OLIN, SUR LE MÉCÉNAT ENVIRONNEMENTAL1. IL Y FORMULE UN CERTAIN NOMBRE DE PROPOSITIONS DE

NATURE À ÉTABLIR UNE RELATION ENTRE LES ACTEURS DE L’ENVIRONNEMENT ET LES ENTREPRISES ET À METTRE LE MINISTÈRE AU CŒUR DE CETTE

POLITIQUE. IL PRÉCONISE ÉGALEMENT DE SE DÉFAIRE DE QUELQUES IDÉES FAUSSES. PARMI CELLES-CI :

40 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

lecteurpenseur

LE MÉCÉNAT FAVORISE LE DÉSENGAGEMENT DE

L’ÉTAT. Cette affirmation est sansfondement. Dans la majorité des cas, le

mécénat fait émerger de nouvelles aspirations,de nouvelles pratiques, de nouvelles

solidarités. Or, face à l’expression de nouvellesdemandes sociales, les pouvoirs publics sontcontraints de s’engager à plus ou moins long terme.Dans de nombreuses occasions, l’entreprise mécènejoue le rôle d’innovateur social.L’affirmation selon laquelle le mécénat favorise ledésengagement de l’État procède d’une vision figéede la société et d’une volonté de cloisonner le rôledes acteurs qui interviennent dans la vie collective.Cette vision statique s’accompagne souvent dusouhait, parfois inavoué, de renforcer le rôle del’État, censé être le seul acteur en mesure dereprésenter l’intérêt général. Dans la réalité, lesactions conduites par les acteurs économiques etsociaux et celles conduites par les acteurs publicsinter-réagissent en permanence. Le mécénat est unaiguillon des politiques publiques, qui diversifie les

initiatives et favorise le travail de proximité desporteurs de projets.LE MÉCÉNAT N’EST QUE « LA DANSEUSE DU PRÉSIDENT ».Au départ, le mécénat a été porté par des chefsd’entreprises qui ont, de leur propre initiative,introduit cette pratique au sein de leur activité

industrielle ou commerciale. Ce fut le cas pour PaulRicard qui a développé le mécénat dans son groupe,en fonction de son attachement à la protection dumilieu marin. Dans ce cas comme dans d’autres, ils’agissait pour le responsable de l’entreprise dedonner une identité à sa société fondée sur desvaleurs éthiques. Pour autant, ce type decomportement ne peut pas être assimilé auxcaprices du président. Il s’agit de choix qui sont,ultérieurement, partagés avec les salariés du groupe.Actuellement, dans la très grande majorité des cas,les opérations de mécénat se décident, année aprèsannée, de façon collective, avec les équipes

dirigeantes, et, dans certains cas, aprèsconsultation des salariés.LE MÉCÉNAT SERT D’ALIBI AUX ENTREPRISES QUI

VEULENT SE DONNER BONNE CONSCIENCE. Pour uneentreprise polluante, le mécénat en faveur del’environnement est un mécénat à risque. Il prête

le flanc à toutes les critiques de manipulation, decynisme. Le mécénat a pour vertu d’engager lacrédibilité, l’image, la notoriété de l’entreprise quil’intègre dans son activité. L’entreprise se fixe unenjeu stratégique qui est entendu par les salariés,souvent sensibles aux causes de protection de

l’environnement. À moyen et long terme, le doublelangage n’est jamais très productif. En s’engageantdans un mécénat en faveur de l’environnement, lesmagasins E. Leclerc ne font qu’accompagner unestratégie d’entreprise qui, pour avoir ses justificationscommerciales, doit avoir aussi une cohérence avec laconduite des activités du groupe, sous peine decontre-performances. Le mécénat est pour l’entrepriseun processus qui engage ses dirigeants, mobilise lessalariés, participe à la communication du groupe et àla fidélisation de la clientèle. Il façonne la cultured’entreprise et peut difficilement constituer unevariable d’ajustement en cas de crise.Pour être plus précis, le mécénat de la fondation Totaln’a jamais constitué une circonstance atténuante auregard de la responsabilité éventuelle du groupe vis-à-vis de la justice, pas plus qu’il n’a servi decirconstance atténuante pour les élus bretons. Lajustice se moque du mécénat. Les victimes des

marées noires également.UN MÉCÉNAT NE PEUT ÊTRE VERTUEUX QUE S’IL

S’EFFECTUE SANS CONTREPARTIE POUR LE MÉCÈNE.Une ambiguïté existe sur la naturedésintéressée ou non du mécénat. On entend

souvent dire qu’une entreprise qui chercherait àobtenir une contrepartie de son geste« philanthropique » n’agirait plus dans le cadre d’uneopération de mécénat mais comme un sponsor. Laconfusion est renforcée par la définition juridique dumécénat qui considère qu’il s’agit d’un soutienmatériel apporté « sans contrepartie directe ».Absence de contreparties directes sous-entendpossibilités de contreparties indirectes. Le tout est des’entendre sur les définitions. Par absence decontrepartie directe, le législateur veut dire que sil’entreprise est autorisée à communiquer sur sonmécénat, il lui est interdit de communiquer sur sesmarques commerciales dans le cadre d’opérations demécénat. C’est là que réside la différence avec leparrainage. Il n’en reste pas moins que le mécénatd’entreprise bénéficie de contreparties sonnantes ettrébuchantes, grâce aux avantages fiscaux qui lui sontattachés. Il est donc préférable d’abandonnerdéfinitivement l’idée que le mécénat devrait setraduire par un don anonyme, sans publicité, sanscontreparties, sans évaluation. ■

DOMINIQUE LEGRAINMINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT ET DE L’AMÉNAGEMENT DURABLE

>>> Mél : [email protected]

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1. Voir aussiEspacesnaturelsnuméro 18 -avril 2007.

La France vit de son économieet se méfie de ses entreprises

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Espaces naturels n°19 • juillet 2007 41

Aujourd’hui, 1er avril 2007, je fais ce pas important, magique et dou-loureux, qui m’intronise dans le club des retraités, des « gramoun »ici, à la Réunion. J’ai, bien sûr, un grand pincement de cœur sur le

chemin des parcs nationaux, gravi depuis trente-trois ans.Je ressens aussi le besoin de dire un grand merci à tous ceux (les humbles,les oubliés et ceux plus illustres ou gradés, mais qui tiennent tous une grandeplace dans mon cœur et mon esprit) qui m’ont aidé, m’ont appris, m’ontbousculé, m’ont accompagné durant ces années.Au-delà de ma famille, mes enfants et mes grands amis, je veux dire un grandmerci à tous ceux que j’ai côtoyés professionnellement depuis le 4 avril 1974.[…] Je leur suis redevable d’une grande partie du chemin parcouru, à pro-mouvoir la conservation, la valorisation de la nature.Notre histoire fourmille d’anecdotes, de joies, de difficultés que nous racon-tons à nos petits-enfants.Nous avons été les pion-niers, les bâtisseurs, etnous avons partagé cettejoie et cette ambition decréer réellement sur le ter-rain, le parc national desÉcrins. J’ai un sentimentprofond d’avoir partagéavec cette populationrurale montagnarde lesvaleurs du travail, del’âpreté de la tâche et durespect des autres. […]Puis en 2001, […] j’ai faitle grand saut, celui qui mefaisait passer du parcnational des Écrins à lamission de création du parc national de la Réunion. Loin de mes Alpes, dema famille, de tous ceux qui me sont chers, dans une terra incognita, j’aidécouvert de nouveaux collègues et partenaires. Avec Jacques, mon nouveauchef, nous avons fait un premier tandem, et il a bien fallu que je me metteassidûment au clavier de l’ordinateur. C’est qu’avec Jacques, je partage lesinnombrables taches : le courrier, le budget, la comptabilité, les réunions avecles élus, les administrations, et bien sûr le réseau, secret, fermé, des scien-tifiques de La Réunion. Changer dans son parcours professionnel de fonctionet de cadre géographique, de partenaires et de collègues, c’est formateur,et très enrichissant, ne soyons pas frileux, osons nous remettre en cause.Ah ! Ça n’a pas été facile de pénétrer ce réseau, mais il y a toujours quelquepart une étincelle de chance. […] Et puis l’équipe s’est enrichie, créolisée,féminisée, et je peux affirmer que j’ai vécu six années […] de jouissance intel-lectuelle, de travail intense, de discussions animées et avancées dans la nuittropicale. Oui, nous avons connu des moments intenses de joies partagées,d’inquiétude, jamais de doute, et voilà que le 5 mars 2007, ce neuvième parcest créé, et demain, c’est le premier conseil scientifique. […]Je peux donc tranquillement retourner à mon Ubaye, la vallée de mes ancêtres,à mes montagnes, mes amis retrouvés, à ma famille qui s’est réduite durantmon éloignement. Je vais retrouver les vieux chemins et sentiers de mon-tagne et de l’amitié. Mais je reviendrais à la Réunion […], retrouver la partiede moi qui reste sur cette île-volcan, où la nature vierge existe encore, retrouverles sourires et l’accueil des gens des Hauts, et poursuivre avec eux mes dis-cussions. Il m’arrivera encore de les faire répéter et de m’entendre dire «Biensûr zoreil. » ■ LUCIEN TRON - RETRAITÉ, ANCIEN CHARGÉ DE MISSION PATRIMOINE À LA MISSION

POUR LA CRÉATION DU PARC NATIONAL DE LA RÉUNION

à l’édificeMa pierre

Il est toujours étonnant de regarder en arrière. Celapermet de mieux gérer l’avenir, de corriger leserreurs et de conserver l’espoir et la motivation.

Ainsi, j’étais invité le 4 octobre 2006 aux cérémoniesmarquant les vingt ans de la réserve naturelle de l’îlede la Platière au bord du Rhône en Isère, Loire etArdèche.Dans la grande salle des fêtes de Péage-de-Roussillon, l’association des amis de la réservenaturelle avait organisé une exposition remarquabled’artistes amateurs locaux consacrée au fleuve roi età ses richesses. Quelle belle idée de demander auxélèves et aux habitants d’exprimer leurs émotions etleurs sentiments sur les derniers lambeaux de naturesauvage de la vallée du Rhône !Il y avait foule ce jour-là. Non point la foule dechasseurs, d’agriculteurs et de pêcheurs qui, il y avingt-deux ans, manifestaient bruyamment dans lesrues du village en conspuant Guy Flacher, lenaturaliste qui avait osé lancer cette idée de réserve.Non, il y avait le sous-préfet, qui avait tenu à écrire unbeau discours, deux maires ne tarissant pas d’élogessur le travail accompli, un représentant des pêcheursse félicitant de la collaboration avec la réserve. Mêmeun technicien de la DDAF avait envoyé un message dereconnaissance et d’amitié. Et la présidente del’association des amis de la réserve n’en revenait pasde tant de sollicitudes et de remerciements.Ayant connu, avec Guy Flacher et Yves Vérilhac, lesréunions d’enfer pour présenter le projet, lesinvectives et l’inertie des élus locaux de l’époque, jeméditais sur cette évolution des esprits. Certes GuyFlacher et son légendaire sens du dialogue avaitréussi, avec l’équipe de la réserve dirigée par BernardPont, à associer les utilisateurs du milieu à la gestiondu site. Petit à petit, ceux-ci se sont rendu compte del’intérêt de la formule pour préserver ce qui leur tenaità cœur. Venus en contestataires, ils ont écouté etcompris, puis ils sont devenus collaborateurs etacteurs. Aujourd’hui, ce sont des défenseurs de laréserve.Voilà qui nous rassure. Même quand les prémicessont longues et difficiles, si nous savons cultiver ledialogue et l’écoute, si nous parvenons à associer lesélus locaux, les bénévoles et le grand public, noussommes certains de réussir.En peu de temps, le projet qu’il fallait combattredevient celui qui nous unit, celui qui est positif,concret et qui embellit notre vie. En acceptantd’abandonner nos certitudes de scientifiques au profitdu dialogue et de la pédagogie, en restant ouverts etsouriants, nous réussirons à réconcilier les hommeset la nature. C’est la leçon que Guy Flacher, trop tôtdisparu, nous a laissée en souvenir. ■

JEAN-FRANÇOIS NOBLETCONSEILLER TECHNIQUE ENVIRONNEMENT AU CONSEIL GÉNÉRAL DE L’ISÈRE

>>> http://ecologienoblet.free.fr

changent…Car le monde et les temps

CIRQUE DE MAFATE, LE CŒUR HABITÉ DU PARC,DE L’ÎLE. LES HOMMES AU CŒUR DE LA NATURE.

© Lucien Tron

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PARUTIONS

42 Espaces naturels n°19 • juillet 2007

● Sociologie●Espaces verts● Natura 2000

● Juridique

● L’âme des lieux

● Devoir de mémoire

que porté par deshommes. Avec plusd’attention, on nemanquera pas, alors, depercevoir la diversité desorigines, des cultures,des compétences. 136pages pour beaucoupd’humilité et un devoir demémoire. Deux tomessont déjà parus dans lamême série : 1921-1971,la construction (tome 1)et Trois générationsracontent (tome 2).

MARIE-CHRISTINE MICHEELS

ET ISABELLE MAUZ • 136 PAGES • REVUE DE

GÉOGRAPHIE ALPINE - PARC

NATIONAL DE LA VANOISE •19 EUROS.

Histoire et mémoires du parc national de la VanoiseCurriculum et photo, ilssont tous là, celles etceux qui ont fait le parcnational de la Vanoise.Initiateurs, agents deterrain et du siège,hôtesses d’accueil,gardiens de refuge,membres du conseild’administration et ducomité scientifique… lestémoignages de près desix cents personnes ysont regroupés. S’il s’agitd’un hommage, cespages cachent une autreleçon : tout projet n’existe

La construction duréseau Natura 2000en FranceComment se constitue leréseau Natura 2000 enFrance? Des directiveseuropéennes à leur miseen œuvre territorialisée,l’ouvrage rend comptedes modalités de l’actioncollective. Il engage uneréflexion sociologique àtravers les controverses,accords et médiationsobservés dans lesscènes locales ets’interroge pluslargement sur l’impactsociopolitique de l’actionpublique territorialiséequi se réclame dudéveloppement durable…COORDONNÉ PAR FLORENCE

PINTON • 249 PAGES • LA DOCUMENTATION

FRANÇAISE • 39 EUROS.

La gestion harmoniquedans les parcsdépartementaux de laSeine-Saint-Denis de1990 à 2005Depuis quinze ans, la Seine-St-Deniss’attache à concilieraccueil du public etpréservation desécosystèmes : telle est lagestion harmonique. Synthèse de ces annéesde travail, l’ouvrageexpose la démarchesuivie pour cette gestion.Il dresse ensuite un bilandes expérimentations parmilieu naturel (friches,prairies…). Enfin, ilaborde l’aspecttechnique sous forme defiches pratiques. Onapprend par exemplecomment aménager etentretenir les milieuxhumides.CÉLINE DUBREUIL • 144PAGES • BIOTOPE ÉDITIONS •25 EUROS.

Voir grandTrente-deux. Trente-deuxgrands sites de Francevictimes de leur notoriétéet menacés par lafréquentation touristique.L’ambition de ce livre estd’appuyer la politique enfaveur des Grands sites.La première partie nousinvite à une promenadeen leur cœur et présenteles enjeux et moyens deleur préservation. Dansla seconde partie, lepoète Kenneth Whiteapporte son regard surce qu’est aujourd’hui untel espace…JACQUES MAIGNE ET KENNETH

WHITE • 80 PAGES • ACTES

SUD - RÉSEAU DES GRANDS

SITES DE FRANCE • 9 EUROS.

● Éducation

La symphonie animaleDu chimpanzé àl’éléphant en passant parla cigale, les animauxutilisent le son pour sedéfendre, se reproduireou s’organiser ensociété. Comment ? Àcette question répond celivre. Vivant etaccessible, le texte estenrichi d’anecdotes et dedessins. Un DVDl’accompagne et met enscène les animaux-musiciens d’unesymphonie involontaire.Pour comprendre que lessons animaliers ont lemême objet que lelangage humain…ANTONIO FISCHETTI.ILLUSTRATIONS HONORÉ • 142 PAGES + 1 DVD • ARTE

ÉDITIONS/VUIBERT • 20 EUROS.

Pratique du droit de l’environnementCe guide apporte les centréponses fondamentalesen matière de droit del’environnement afin deréussir, étape par étape,la réalisation d’un projetd’aménagement oud’équipement. Destinéaux collectivités, servicesdéconcentrés de l’État,industriels mais aussiassociations etparticuliers, il permetd’appréhender les risquespotentiels auxquelss’expose un projet. Faciled’accès, il est à jour desdernières évolutionsjurisprudentielles et destextes récemment parus.N. BAILLON, N. NAHMIAS ET

E. SACKSICK • 476 PAGES • LE MONITEUR • 42 EUROS.

Gestion stratégique des écosystèmes dufleuve SénégalLes conventionsinternationales constituentun outil majeur de l’actionpublique en matièred’environnement. Prenantexemple de la vallée dufleuve Sénégal, ce livreanalyse les dispositifs degestion environnementalede quatre États (Sénégal,Guinée, Mali, Mauritanie),et pose la question del’efficacité et de ladurabilité des actions – etinactions – dedéveloppement publicinternationales.MAYA LEROY • 624 PAGES • L’HARMATTAN • 49 EUROS.

● Gestion● Botanique

Atlas de la flored’AuvergneDestiné à tous ceux quiveulent participer à lapréservation de labiodiversité végétale, cetatlas présente lecontexte régionald’Auvergne (géographie,géologie…). Des fichesillustrées par des cartes,photos ou dessins,répertorient près de3800 espèces. Il dresseaussi un bilan floristiquegénéral et termine par unindex détaillé desespèces.P. ANTONETTI, E. BRUGEL,F. KESSLER, J.-P. BARBE ET

M. TORT • 984 PAGES • CONSERVATOIRE BOTANIQUE DU

MASSIF CENTRAL • 60 EUROS.

Petite histoire dumouvement écolo en FranceDe Rousseau et sonromantisme, en passantpar le commandantCousteau, la naissancedu parti des Verts etjusqu’à Nicolas Hulot, cetouvrage nous livre endétail l’histoire de lapensée écologiste. Ilretrace la lenteprogression despréoccupationsenvironnementalesdepuis ses origines. Ilidentifie par exemple,mai 1968 comme ungrand accoucheur del’écologie politique etdate sa percée à 1988.Pour tous…ROGER CANS • 320 PAGES • DELACHAUX ET NIESTLÉ •19 EUROS.

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l’AGENDA

Espaces naturels n°19 • juillet 2007 43

Le jardin de l’espaceObjectif : Terre durable

Cette BD mêle enquêtepolicière et

préoccupationsenvironnementales.

Un meutre est commis,alors le professeur Mac

Geiger se rend dansl’espace avec des

hommes politiques et desscientifiques de

l’organisation mondialede l’environnement. Leur

mission : analyser lesmenaces auxquelles la

planète est confrontée…

Cet ouvrage fait partied’une collection

accessible à partir deonze ans. L’Inra, Météo

France et le Cnes ypartagent leurs

compétences et nousprésentent une vision

plus large de la gestiondurable de la planète.

>>> V. LE QUÉRÉ-CADY ET

J. ARNOULD - INRA

ÉDITIONS/QUAE - 48 PAGES -13 EUROS.

COUP DE CŒUR

Le corps a son propre langage. Voix, gestes,regards et postures peuvent servir maisaussi desservir nos propos. Cet ouvrage

examine les relations entre le corps et les émo-tions, entre les gestes et la parole. Quels sontles impacts de l’image corporelle ? Faut-ilcontenir ses gestes en parlant ? Commentdétecte-t-on le mensonge? Autant de questionsauxquelles répond Guy Barrier en analysant dif-férentes situations médiatiques ou profession-nelles. Véritable outil d’autoformation et deperfectionnement, cet ouvrage est constitué detrois parties pour comprendre les enjeux et maî-triser la méthodologie, mettre en pratique ets’entraîner grâce à des exercices corrigés, etenfin approfondir. Un outil de formation qu’ap-précieront les gestionnaires dans le cadre deleurs missions de concertation.>>> Guy Barrier • 192 pages • ESF éditeur •23 euros.

La communicationCONCERTATION

non verbale

Rivières vivantes - Big Jump15 juillet - 15 heuresLe même jour, à la même heure,partout en Europe, les gens vontplonger dans les rivières. Ilsdémontreront leur volonté deretrouver des rivières propres etvivantes et de faire appliquer ladirective cadre sur l’Eau.◗ www.rivernet.org/bigjump/welcomef.htm

Comportements, changer d’èrejusqu’au 12 août - ParisExposition à la Cité des sciences.Que puis-je faire, au quotidien,pour améliorer et préserverl’environnement tout enconservant ma qualité de vie?◗ [email protected] www.cite-sciences.fr

Bâti agricole et paysages13 - 14 septembre-La Châtre (36)Ces rencontres professionnellesaborderont les questions degestion du paysage bocager enFrance, en particulier lavalorisation des haies commematières premières d’énergie.◗ [email protected]

Agriculture et espaces protégés alpins14 septembre - AutricheOrganisée par le réseau alpin desespaces protégés, cetterencontre traitera des bonnespratiques Natura 2000. Elle sedéroulera dans le parc nationalHohe Tauern.◗ www.alparc.org

Sciences, action et biodiversité18 au 20 septembre - Florac (48)Ce colloque est l’occasion d’unerencontre entre chercheurs,

APPEL À PROJETS CONSOMMATION ET PRODUCTION DURABLE

Le ministère de l’Écologie et l’Ademe sont engagés dans leprojet européen ERA-NET SKEP (Scientific knowledge forenvironmental protection) http://www.ecologie.gouv.fr/SKEP.html

Dans ce cadre, un premier appel à proposition de recherche au niveaueuropéen est lancé depuis le 4 juin 2007 sur le thème de la consommation et de laproduction durables (clôture en septembre, sélection des propositions en décembre,début des travaux en janvier 2008). Deux axes de recherche sont proposés pour destravaux exploratoires d’une durée maximum de douze mois : • Évaluer les impactsenvironnementaux transnationaux des biens et des services consommés et/ou produitsen Europe tout au long de leur cycle de vie dans l’espace européen et en dehors decelui-ci • Évaluer les interactions entre les réglementations environnementales, enparticulier européennes, et les mécanismes de marché, en ce qui concerne l’efficacitédes ressources dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. En savoir plus :>>> http://www.ecologie.gouv.fr/appel-a-propositions-de-recherche,7895.html Mél : [email protected] ou [email protected]

● Naturaliste

Les oiseaux par la couleurConçu idéalement pourles débutants, convenantparfaitement auxéducateurs, ce guideaborde l’identificationdes oiseaux par leurcaractère le plus visible :leurs couleurs. 184espèces sont d’abordclassées par type desilhouettes. Chaqueoiseau fait ensuitel’objet d’une fichetechnique détaillée,illustrée par une photo etun dessin. Pour toutconnaître des oiseauxcommuns en France eten Europe de l’Ouest.MARC DUQUET.ILLUSTRATIONS ALBAN

LAROUSSE ET FRANÇOIS

DESBORDES • 222 PAGES • DELACHAUX ET NIESTLÉ •19,95 EUROS.

© MT - Phovoir

acteurs de la conservation,formateurs et citoyens. L’entréepar l’action demande en effet,une large mobilisation tant sur leplan des disciplines scientifiquesque sur celui des acteurs de lasociété. Organisé par MontpellierSupAgro associé au parc nationaldes Cévennes, Man andbiosphere, l’Institut français de labiodiversité.◗ Tél. : 0466656565www.supagro.fr

Tourbières20 & 21 septembre - ChamroussePremières rencontres sur laconservation des tourbières desAlpes, le jeudi se déroulera ensalle. Le vendredi sera consacré àla découverte.◗ Conservatoire des espacesnaturels de l’Isè[email protected]

Colloque international sur l’utilisation de la tourbe8 au 11 octobre - Lamoura (Jura)Ce colloque organisé par le pôlerelais tourbières aborderal’utilisation de la tourbe enhorticulture et la réhabilitationdes tourbières aprèsexploitation.◗ www.pole-tourbieres.org

Changement climatique18 & 19 octobre - ItalieCette conférence sur l’intégrationdu changement climatique dansles plans de gestion des espacesprotégés aura lieu dans le parcnational du Stelvio. Organisé parle réseau alpins des espacesprotégés.◗ www.alparc.org

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