Rencontrer Dieu dans sa Parole - ndbw.be · Ces nouveaux chrétiens sont un motif d’espérance....

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Rencontrer Dieu dans sa Parole Grandir dans la foi

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Rencontrer Dieudans sa Parole

Grandir dans la foiEditions Licap sprlrue Guimard 1 | 1040 Bruxelles | www.licap.beISBN 978-2-930472-20-1 NUR 700D/2008/0279/011€ 3.10

DÉCLARATIONS DES ÉVÊQUES DE BELGIQUENOUVELLE SERIE N° 37

Rencontrer Dieudans sa Parole

GRANDIR DANS LA FOI

Septembre 2008

Editions Licap sprl rue Guimard 1 | 1040 Bruxelles | www.licap.be

Projet et réalisation: [email protected]

Commandes: [email protected] | fax 02 509 97 34

D/2008/0279/011ISBN 978-2-930472-20-1NUR 700

Arcabas “Il leur ouvrit les Ecritures”

Dans une série de sept tableaux (1993-1994) (en quatrième de couverture), le peintre français Arcabas raconte l’itinéraire spirituel des pèlerins d’Emmaüs. Le 2ème tableau (en couverture) évoque le moment où Jésus leur révèle dans toutes les Ecritures ce qui, le concerne (Lc 24, 27). Sur un fond sombre, pareil à de la fonte, on aperçoit des lettres éparpillées. Au cœur de cette masse, une coulée d’or éclaire tout. La croix, nimbée de lumière, attire le regard et toutes les lettres comme un aimant…

Avec l’aimable autorisation de l’auteur, © SABAM Belgium 2008

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1. L’amour divin parvient à toucher le cœur humain de bien des façons. Certaines expériences peuvent parler de Dieu de manière surprenante et imprévue. Parfois, il arrive que notre monde laisse transparaître un amour qui nous dépasse et nous renouvelle. La Parole divine peut nous rejoindre par de multiples chemins. Pour les uns, c’est au cours d’une belle célébration qu’ils découvriront une facette de l’Évangile. D’autres seront inspirés par le sérieux d’une parole qui réorientera toute leur vie. D’autres encore seront intri-gués devant l’engagement d’un groupe de chrétiens. Le noyau de l’Évangile de Jésus est même parfois excellemment compris par des enfants. Il se peut aussi qu’un adulte se sente touché si intensément par Dieu, qu’il demande le baptême après un temps de rencontre et d’initiation. Ces nouveaux chrétiens sont un motif d’espérance. Même si, en comparaison avec des pays voisins, ils ne sont pas en-core nombreux chez nous, ils ont pourtant un message à adresser à ceux qui sont chrétiens de longue date: ils témoignent de ce que Dieu peut toucher un être humain.

2. En tant qu’évêques de Belgique, nous sommes reconnaissants envers toutes les personnes qui s’investissent avec amour dans l’annonce de la Parole de Dieu. Nous nous adressons ici à tous les chrétiens, aux catéchistes et aux professeurs de religion, aux reli-gieux et religieuses, apostoliques ou contemplatifs, aux agents ou travailleurs pastoraux, ainsi qu’aux diacres et aux prêtres. Tous, nous sommes appelés à témoigner de l’espérance qui est en nous (cf. 1 P 3,15). Telle est notre mission en tant qu’Église. Il nous incombe de transmettre l’Évangile, humblement mais résolument. Et cette Bon-ne Nouvelle, c’est que Dieu, pourtant si différent, est à la recherche des hommes et des femmes et qu’Il leur parle avec amour.Comment notre pastorale pourrait-elle faire place, plus encore, à cette Parole divine? C’est le thème de la présente lettre. Toute forme de catéchèse est un écho de sa Parole. Le mot lui-même le suggère: en grec, «katêkhô» signifi e faire résonner (echô) à partir

Introduction

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d’en haut (kata). C’est de là que vient le mot écho. Un catéchiste permet à la Parole à Dieu de résonner comme en écho. Et tel est bien le cœur de l’Évangile : Dieu a parlé, ne cesse de parler et sa Parole veut retentir aujourd’hui encore. Pour le croyant, il ne s’agit pas là d’un détail. C’est même essentiel. Dieu s’adresse à l’humanité, parfois même à travers des événements très ordinaires. Soucieux de notre bonheur, Il veut toucher nos cœurs et brûle de nous partager sa vie. Que notre Dieu parle: c’est une conviction qui traverse la Bible de part en part.

Voilà ce que nous souhaitons creuser au cours de la prochaine an-née pastorale. Ce faisant, nous sommes en communion avec l’Église universelle qui va centrer la prochaine année sur la Parole de Dieu et sur la fi gure de l’apôtre Paul. En outre, nous nous inscrivons dans le sillage de notre lettre pastorale Devenir adulte dans la foi. Car nous ne croyons pas en une théorie, une morale ou un livre, mais bien en un Vivant qui vient habiter parmi nous et qui nous parle.

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1| La merveille d’un Dieu qui parle

La parole révélatrice

3. Pendant les pénibles années du nazisme, un jeune enseignant très prometteur travaillait à la Faculté de Théologie de Berlin: Die-trich Bonhoeffer. Plein d’enthousiasme, il était de plus en plus ap-précié, non seulement en tant qu’enseignant, mais même comme catéchiste. Il ne se préoccupait pas seulement des intellectuels, mais aussi de gens très simples. Dans sa paroisse, on goûtait ses prédications. Et néanmoins quelque chose lui manquait.

A un certain moment, il vécut une sorte de conversion. Le théolo-gien se fait chrétien. Réticent à étaler des sentiments religieux, Die-trich Bonhoeffer n’a jamais dévoilé comment le retournement s’est exactement déroulé. Mais ce qui fut décisif, nous le savons par une lettre écrite à l’un de ses proches. Dans cette étrange confi dence, Bonhoeffer avouait:

«Je me suis précipité dans le travail d’une façon non chrétienne. Une folle ambition, remarquée par certains en moi, m’a rendu la vie diffi cile et m’a ravi l’amour et la confi ance de mes proches. Alors, je fus terriblement seul et livré à moi-même. Ce fut très grave.C’est alors que s’est produit en moi quelque chose qui a changé ma vie jusqu’aujourd’hui et l’a bouleversée. J’accédai pour la première fois à la Bible. Cela aussi est très diffi cile à dire. J’avais déjà beaucoup prêché, j’avais déjà une grande expérience variée de l’Église, j’en avais parlé et écrit - et pourtant je n’étais pas encore devenu un chrétien.Je le sais, j’ai autrefois fait de la cause de Jésus-Christ un avan-tage pour moi-même. Je demande à Dieu que cela ne se repro-duise plus jamais. De même, je n’avais encore jamais prié, ou si peu. Dans un tel état d’abandon, j’étais pourtant satisfait de ma personne. C’est de cela que la Bible m’a libéré et tout particuliè-rement le Sermon sur la Montagne. Alors, tout a changé»1.

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Appelés par la Parole de Dieu

4. C’est un miroir que nous tend ici Dietrich Bonhoeffer. On peut investir beaucoup dans la catéchèse. On peut parler et écrire sur l’Évangile. On peut célébrer et prêcher. Mais tout cela peut aussi être fait alors qu’on est loin de Dieu. Malgré son ardeur et sa scien-ce, Bonhoeffer dut avouer: «Je n’étais pas encore devenu chrétien». La grande mutation n’intervint que lorsqu’il découvrit la Parole vi-vante de Dieu dans les Écritures et que, pour la première fois, il apprit à y répondre par la prière.

Bien entendu, Bonhoeffer connaissait déjà l’Écriture. Théologien de formation, il avait commenté bien des passages bibliques. Mais, à l’évidence, il fallait qu’autre chose se passe. Il ne fut vraiment libéré de son isolement que par une rencontre d’un genre bien particulier: en lisant l’Écriture, il expérimente que c’était Dieu lui-même qui s’adresse à lui dans le texte. A ses yeux, la Bible n’était plus seule-ment une parole à propos de Dieu, mais aussi une Parole pronon-cée par Dieu lui-même.

Cela peut se comparer avec la lettre d’un être cher. On peut bien sûr la lire afi n d’y glaner des informations sur l’autre, mais en rédigeant sa lettre, le rédacteur cherche en réalité à toucher le cœur et à y pénétrer. C’est d’une telle présence qu’il s’agit.

5. Il nous est diffi cile de nous représenter Dieu de cette façon. Il paraît souvent si lointain. Il semble parfois muet. De nos jours, une parole divine semble être une bizarrerie (cf. 1 Sam. 3,1). Se pourrait-il que Dieu parle vraiment? Nous ne captons quand même pas des voix tombées du ciel! Nous sommes devenus réalistes et sceptiques. Et pourtant… L’expérience des convertis fait réfl échir: pour eux, ce n’est pas une fi ction que le Seigneur puisse s’adresser à des êtres humains. Ils en ont expérimenté la proximité. C’est ce qu’a vécu Paul, il y a quelque deux mille ans. Lors d’une de ses traques des chrétiens, une voix a retenti: «Saoul, Saoul, pourquoi me persécu-ter? « (Ac. 9,4). Cette identifi cation du Christ avec des hommes en

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détresse a réorienté toute sa vie. Madeleine Delbrêl, jeune athée très engagée socialement, a vécu une expérience analogue. Elle a capté la voix de Dieu, en pleine rue, à travers le cri des plus pauvres:

«Dieu en nous, c’est celui qui s’est, une fois pour toutes, identifi é à l’humanité, et tant qu’un homme manquera de quelque chose, c’est le Christ qui en manquera»2.

Rappelons-nous aussi la découverte qui s’abattit sur Augustin le-quel, après sa conversion, confessait à Dieu:

«Je t’ai aimée bien tard, Beauté si ancienne et si nouvelle,je t’ai aimée bien tard!

Mais voilà: tu étais au-dedans de moiquand j’étais au-dehors,et c’est au-dehors que je te cherchais.

Tu étais avec moi,et je n’étais pas avec toi

Tu m’as appelé, tu as crié,tu as vaincu ma surdité»3.

6. Se pourrait-il que Dieu veuille toujours nous parler? Serait-il vrai qu’Il murmure sa parole dans nos cœurs alors même que nous ne le remarquons pas? Quand les soucis et le stress nous aliènent, sa Parole nous pénétrerait-elle? Dieu serait-Il donc vraiment une per-sonne? Serait-il plus encore qu’une doctrine religieuse, une dona-tion de sens ou un principe moral? Tout cela fait évidemment partie de notre foi chrétienne, mais la source vive de cet ensemble, c’est l’expérience d’un Dieu qui vient à notre rencontre.

7. L’Écriture témoigne de ce que Dieu parle. C’est là que nous dé-couvrons comment Il s’adresse aux hommes et qu’Il continue à nous parler. Car la Bible est plus qu’une série de textes traitant de Dieu. Elle est plus qu’un document religieux comme en possèdent

Un Dieu qui appelle

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toutes les religions. Elle relate bien plus que la naissance de la foi. Tout cela, les Écritures le réalisent aussi, mais elles témoignent sur-tout d’un Dieu qui parle. L’Écriture est comme une lettre qui nous est adressée, un message du Seigneur, une invitation à mieux le connaître. Il arrive que la Parole de Dieu nous contrarie et qu’elle nous prenne à rebrousse-poil. Elle peut irriter et provoquer; et c’est parfois à contrecœur qu’il nous faut l’écouter. Voilà qui ne devrait pas nous étonner, car:

«Vivante, en effet, est la parole de Dieu, énergique et plus tran-chante qu’aucun glaive à double tranchant. Elle pénètre jusqu’à diviser âme et esprit» (He 4,12).

8. La Parole de Dieu résonne tout au long de l’histoire d’Israël. Quoi qu’il arrive au peuple et plus encore aux heures d’extrême détresse, il apparaît que Dieu n’est pas absent. Il s’approche. Le monde est son œuvre, et Il ne peut abandonner le produit de ses mains (cf. Ps. 138,8). C’est ce qui se manifeste au mieux en Jésus. En son Fils bien-aimé, devenu l’un des nôtres, Dieu nous a parlé avec une profondeur inégalée. Le début de l’épître aux Hébreux est impressionnant:

«Après avoir, à bien des reprises et de bien des manières, parlé autrefois aux pères dans les prophètes, Dieu, en la période fi nale où nous sommes, nous a parlé à nous en un Fils» (He 1,1).

Et en effet, Dieu parle. C’est ce qu’attestent les prophètes et, ul-timement, son Fils bien-aimé en qui a été prononcé le dernier mot. C’est bien pourquoi l’épître aux Hébreux affi rme fermement, de manière dense et concise: «Dieu a parlé». Il s’exprime. Il se fait connaître. C’est là une merveille inouïe: par amour, le Très-Haut nous fait participer à ce qu’Il est.

Passer de «chercher» à «être recherché»

9. En un sens, le fait que Dieu parle, rejoint un désir profondément humain. Toute personne aspire à aimer et être aimée, et Dieu ren-contre gratuitement cette quête d’amour. Ainsi nous est épargnée la pénible épreuve que serait une soif d’amour n’aboutissant qu’à

La Parole de Dieu

en Jésus

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un enfermement en nous-mêmes. C’est en effet, un danger qui me-nace réellement notre quête de spiritualité et de sens. D’ordinaire, la sphère religieuse est approchée à partir de nos souhaits person-nels et de nos habitudes de consommateurs. Nous lui appliquons spontanément le modèle de l’offre et de la demande, en partant de nos propres questions et besoins. Sur cette base, nous cherchons une offre qui nous convienne. Nous nous présentons comme des chercheurs de sens sur le marché des signifi cations et l’initiative ne peut venir que de nous.

Il arrive pourtant que, comme Augustin ou Madeleine Delbrêl, nous découvrions que ce qui est en cause, ce n’est pas seulement notre propre recherche, mais le fait qu’au contraire, c’est nous qui som-mes recherchés. Le «chercheur», ce n’est plus seulement moi, mais Quelqu’un d’autre.

10. C’est ce qu’a vécu récemment l’écrivain néerlandais Willem Jan Otten. En bon intellectuel qui se respecte, il se montra longtemps réservé face à la Bible et à la foi. Mais cela devait peu à peu évoluer. «Il y avait déjà quatre ou cinq ans que j’étais en recherche», confi e-t-il dans son journal. Le retournement ne fut pourtant pas dû au fait qu’il aurait fi nalement «trouvé». C’est le contraire qui arriva et, dans son journal, cela prend l’allure d’une confession:

«Ce que j’avais cherché,et que, dans ma quête, je pensais n’être qu’une chose,un objet que d’aventure je trouverais ,il s’avéra que c’était Toi.

Rien de commun avec une trouvaille.Mais une expérience de retournement.C’était moi que l’on cherchait.»4

Willem Jan Otten compare cet événement avec ce qu’il a vécu à la naissance de son fi ls. Car comment est-il devenu père? Ni uni-quement par ses seules forces, ni par la seule mise au monde d’un enfant. C’est le cri du nouveau-né qui l’a enjoint d’être père. «J’étais

«C’était moi qu’on

cherchait»

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le père recherché» et «l’enfant était en recherche», écrit-il. Et il poursuit par cet aveu: «L’enfant était en recherche, et ainsi en est-il aussi de Toi.»

La merveille de la paternité dépasse donc le simple engendrement. Willem Jan Otten ne devint vraiment père qu’au jour où un être vivant a fait irruption dans son univers et dans celui de sa femme. C’était le cri d’un enfant qui faisait appel à eux et qui leur deman-dait de le reconnaître et de l’accueillir.

C’est ainsi que Dieu se révèle et qu’Il pénètre notre univers. C’est ce que nous célébrons à Noël: Dieu se fait petit et vulnérable, se pré-sentant dans un homme comme nous. C’est avec une majestueuse sobriété que l’évangile de Jean décrit l’événement:

«Et le Verbe s’est fait chairet il a habité parmi nous» (Jn 1,14).

11. C’est Dieu qui prend l’initiative. Venu parmi nous, Il s’adresse à nous. Notre logique habituelle de l’offre et de la demande est mise sens dessus dessous. On n’en reste plus à notre propre quête humaine d’un sens. Mais aussi bonne soit celle-ci, c’est autre chose qui advient. Du cœur de nos questionnements humains, Dieu pro-nonce sa Parole qui appelle et sollicite une réponse.

A ce stade, c’est un aspect essentiel de l’Écriture que nous ren-controns. La foi dans le Dieu d’Israël et de Jésus ne se réduit pas à une donation de sens, ni à une construction élaborée par des cher-cheurs de signifi cation. C’est la proposition d’un sens insoupçonné, à qui veut bien s’y ouvrir. «Quelle incommensurable réserve de tré-sors que l’Ecriture Sainte!», s’écriait Edith Stein5. Croire, c’est alors répondre à une parole de Dieu. Comme l’écrit Paul: «La foi vient de la prédication» (Rm 10,17). Et en effet, la foi naît de l’écoute.

12. La plupart d’entre nous n’ont pas vécu une expérience de conversion comme celle d’Edith Stein ou de Dietrich Bonhoeffer. Ce n’est pas ainsi que nous sommes venus à la foi. Nous sommes

De : l’offre et

la demande, à :

l’appel et la réponse.

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croyants ‘par tradition’, au sens littéral et positif du terme: grâce à un enseignement et à une transmission. Mais cela n’empêche pas que, portés par la communauté ecclésiale, nous puissions connaître quelque chose d’analogue à ce qu’ils ont vécu. Ce sont souvent les chrétiens les plus simples qui perçoivent le mieux ce qu’est la relation au Dieu vivant. Même des enfants peuvent surprendre leur catéchiste par une réponse «naïve» et ce n’est pas un hasard si Jésus les propose en exemple (cf. Mt 18,3). Leur foi toute simple repose sur l’expérience, si limitée soit-elle, que Dieu est amour, qu’Il veut nous toucher et qu’Il se fait connaître à travers toutes sortes d’évé-nements. C’est là que Dieu prononce sa Parole. Et c’est la catéchèse qui s’en fait l’écho.

Pistes pour l’échange 1. Connaissez-vous un texte biblique, une icône, un chant, une anecdote ou une œuvre d’art, à travers lesquels la Parole de Dieu vous atteint? Essayez de partager cette expérience avec d’autres.

2. Comment feriez-vous comprendre à un jeune, garçon ou fi lle, que Dieu l’aime?

3. Avez-vous déjà pris conscience d’être interpellé lors d’une célébration? Donnez un exemple.

4. Vous est-il arrivé de ressentir la Parole de Dieu comme étant contrariante, irritante ou provocatrice? Comment réagissez-vous?

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2 | La parole de Dieu dans l’EcritureLa Bible

13. Dieu veut partager sa vie avec les hommes: voilà qui résonne comme un refrain dans les Écritures. L’expérience évoquée dans le premier chapitre, y est constamment présente. Mais l’Écriture est un livre ancien et étrange, et il n’est pas évident qu’on s’y sente à l’aise. Dans ce chapitre-ci, nous allons examiner comment sont nés les écrits bibliques et comment nous pouvons y avoir accès, afi n d’y cap-ter la voix de Dieu, y compris dans notre monde actuel. Nous allons plaider pour une lecture spirituelle parcourant trois étapes: le texte scripturaire est d’abord lu attentivement, puis vient la réfl exion et, enfi n, notre réponse par la prière et par une vie selon l’Évangile. Cette clef de lecture est étonnamment féconde et correspond en outre aux grandes étapes de la naissance de l’Écriture.

14. Mais d’abord une remarque liminaire: ce n’est pas d’aujourd’hui que date la diffi culté d’y voir clair dans les Écritures. Au temps de Jésus déjà, cela constituait un sérieux défi . Même un scribe qu’on peut pourtant considérer comme un expert, demande l’aide de Jésus. Nous connaissons tous sa question: «Quel est le premier de tous les commandements?» (Mc 12,28). Tout comme nous, ce bon connais-seur de la Bible s’interroge: «Quel est l’essentiel? De quoi s’agit-il dans les Écritures?» Nous connaissons aussi la réponse de Jésus: parmi les nombreuses prescriptions bibliques, Il relève infailliblement le pre-mier commandement:

«Écoute, Israël! Le Seigneur notre Dieu est le Seigneur un» (Dt. 6 4).

15. Dans l’Écriture, il est clair que tout dépend de l’écoute et de la disponibilité à la Parole. Car l’Écriture présente Quelqu’un de très par-ticulier. Jésus lui-même le dira : «Le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur !» (Mc 12,29). Il est unique. Et c’est bien pourquoi il faut l’écouter. Il prononce une parole d’amour et, en réponse, Il demande que cet amour soit réciproque.Cela nous paraît très étrange. Dieu peut-Il vraiment parler et s’adres-

Un premier commande-ment rebelle

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ser personnellement aux êtres humains? Ou n’est-ce qu’une «manière de parler»? Ne pouvons-nous relativiser quelque peu? Nos oreilles pourraient-elles capter des sons émis par Dieu? Mais comment alors Jésus peut-il convier le scribe à écouter la Parole unique de Dieu?

16. Face aux perplexités touchant le premier commandement, nous sommes parfois soulagés de voir que Jésus y ajoute un second: Il demande au scribe d’aimer le prochain (cf. Lv 19,18 et Mc 12,31). A première vue, l’amour du prochain est plus dans nos cordes. Ce n’est donc pas par hasard que nous considérons souvent la Bible comme un manuel de morale plutôt que comme le témoin de la Parole de Dieu. Mais il faut reconnaître que l’Écriture se limite alors à propo-ser des valeurs morales. Curieusement, elle n’aide plus à se mettre à l’écoute de Dieu.

Ces valeurs ne sont évidemment pas fausses, mais sont-elles le tout de l’Écriture? Pourquoi glissons-nous imperceptiblement le second commandement au-dessus du premier? Pourquoi dissocions-nous nos engagements de l’écoute et de l’accueil de l’amour divin? N’y aurait-il pas un grésillement sur la longueur d’onde biblique?

«Ecoute, Israël»

17. Pourquoi avons-nous parfois des diffi cultés avec l’Ecriture en général, et spécialement avec le premier commandement? Qu’est-ce que cela révèle? Pourquoi demande-t-on: «Écoute, Israël»? C’est que l’écoute n’est pas évidente. Écouter réellement quelqu’un signifi e lui prêter attention et lui consacrer du temps. C’est s’ouvrir à autrui et placer notre centre de gravité en dehors de nous-mêmes. «Faites donc attention à la manière dont vous écoutez», avertit Jésus (Lc 8, 18). Qui écoute attentivement, devient sensible aux profondeurs de la réalité, en même temps qu’il se dispose à la rencontre de l’autre.

18. Quand Moïse a reçu la Parole de Dieu, ce n’était pas de manière naturelle, comme si retentissait une voix venue des nuages. La Parole de Dieu ne s’appréhende pas comme une parole humaine. Du reste,

Le repli sur le second

commande-ment

Ouverture et attention

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dans la Bible, la traduction «Parole de Dieu» vise une réalité bien plus large que le son d’une voix. Derrière l’expression «Parole de Dieu» se trouve le terme hébreu dabar, qui ne signifi e pas seulement «parole», mais aussi «chose, affaire, action et histoire» (cf. Jr 1,1). Dieu peut donc aussi «parler» sans mots. Il s’adresse à l’homme dans sa création et dans les événements, non seulement dans des «lieux saints», mais tout au long de la vie ordinaire. Il arrive que l’appel divin résonne dans les crises de l’existence, dans le visage de l’opprimé, dans la faiblesse de personnes malades ou handicapées, dans le désir humain sinon même à travers le silence de ce qui ressemble à une absence. En tout ceci, c’est un message sans paroles qui est adressé à l’huma-nité.

19. Chose surprenante: c’est surtout à travers son histoire que le peuple d’Israël est entré en contact avec le Seigneur. Dieu y est ex-périmenté d’une manière bien particulière: non comme une vague énergie, mais comme un Dieu personnel. Ce qui a été vécu très in-tensément lors de la libération d’Égypte. Le peuple d’Abraham était devenu esclave de Pharaon, et les Égyptiens lui imposèrent «des chefs de corvée, pour le réduire par des travaux forcés» (Ex 1, 11). De manière inattendue, ce peuple sans défense fut libéré: telle est l’heureuse nouvelle qui résonne à travers la Bible tout entière. C’est l’événement décisif qu’on n’a cessé de raconter et qu’on a toujours reconnu au fi l de l’histoire.

20. Des siècles plus tard, lorsque le peuple fut déporté, les prophètes ne cessèrent de rappeler la sortie d’Égypte. C’est non seulement de leur propre initiative, mais animés par le Saint Esprit, qu’ils pénétrè-rent plus profondément l’événement de jadis (cf. 2 P 1,21). L’exode ne se réduisait pas à une lutte de libération; mais c’est tout autre chose que Dieu avait voulu signifi er: un passage - une pascha - vers un nouveau pays où devaient régner la paix et la justice. C’est dans cette terre promise que les Hébreux pourront vivre unis au Seigneur. C’est là aussi qu’ils pourront discerner un signe de son amour pour les peuples. Mais entretemps, cette alliance fut rompue en raison de l’infi délité du peuple (cf. Os 1,2). C’est pourquoi, au bord des fl eu-

La sortie de la

maison de servitude

Sur les rives de Babylone

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ves de Babylone, les prophètes prièrent pour un nouvel exode (cf. Es 43,18) et pour une «nouvelle alliance» (Jr 31,33).

21. Des siècles plus tard, cette attente fut comblée en Jésus-Christ. Il se fait baptiser dans le Jourdain au seuil de la terre promise, l’en-droit même par où le peuple avait pénétré dans le pays en venant d’Égypte. L’exode d’antan redevenait actuel. Le ciel de Dieu s’ouvre et l’Esprit descend sur Jésus (cf. Mt 3,16). Par tout ce qu’Il dit et tout ce qu’Il fait, Jésus libère les hommes et les femmes de ces maisons de servitude que sont la maladie et l’isolement, la mort et le péché. Il est clair désormais que chacun peut inaugurer un nouvel avenir avec Lui. Celui qui ne compte pas aux yeux des autres, est désormais délivré et éveillé à la vie. Mais il y a plus encore: c’est Jésus lui-même qui est fi nalement rejeté et condamné. C’est pourtant alors qu’advient l’exode divin le plus merveilleux, un accomplissement qui dépasse l’entendement et que les disciples eux-mêmes eurent peine à for-muler: en Jésus crucifi é, c’est Dieu qui a traversé la mort incognito. Sa fragile force d’aimer s’y révèle plus forte que la mort (cf. Ac 8,6). Dieu «est apparu à ceux qui se trouvent dans les ténèbres et l’ombre de la mort» (Lc 1,79). Car la résurrection est le passage de la mort à la vie. Non seulement pour Jésus, mais pour quiconque L’écoute et veut Lui appartenir, ainsi que pour tous ceux qui reçoivent le baptême en vue de mener une vie nouvelle dans son Esprit. Une vie qui accueille l’amour divin et lui répond, vie à la suite de Jésus, soulevée par un amour sans mesure envers le prochain.

22. Nous rejoignons ainsi le fi l rouge des Écritures. Car aussi variés que soient les textes, ils sont globalement et profondément cohérents: du début à la fi n, c’est un appel divin qui y résonne, celui d’un Dieu qui libère tous les êtres humains des ténèbres et de la mort. Il tient à partager la vie avec ses créatures, et Il espère que sa voix trouvera bien quelque part un bon accueil. Il convoque un peuple pour en faire le partenaire de son alliance. Dieu veut rencontrer les êtres humains et être cher-ché par eux. Il désire ce qu’il y a de plus personnel et de plus humain: aimer et être aimé. C’est le premier commandement en toutes lettres:

«Écoute, Israël! Le Seigneur notre Dieu est le Seigneur un. Tu

La nouvelle alliance

Le fi l rouge

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aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton être, de toute ta force» (Dt 6,4-5).

Qui écoute cet appel, vivra autrement. Il pénétrera dans un monde nouveau. A la suite du Christ, Il ne pourra faire autrement que d’aimer son prochain, aussi imparfait soit-il. Vivre ainsi le second commande-ment deviendra le prolongement concret de l’écoute de la Parole.

Une histoire parlante

23. Comme nous l’avons déjà dit, la Bible demeure un livre étrange et déconcertant. Plus encore: le fait que Dieu parle, reste curieux et troublant. Que s’est-il passé au juste quand des hommes reconnurent les traces de Dieu dans leur histoire?

qLa Parole de Dieu est associée à un événement bien particulier. Rappelons-nous l’histoire d’Israël. Le peuple expérimente la proxi-mité de Dieu à l’occasion de la sortie d’Égypte. Des siècles plus tard, c’est un nouvel exode que vivent les disciples à travers tout ce que dit et fait le Christ. On a relu et réinterprété ces événe-ments de jadis, jusqu’à en articuler les diverses facettes, car «lire» signifi e rassembler.

qPar la suite, Israël et la jeune Église se sont arrêtés sur ces expé-riences. On les creuse et on réfl échit l’histoire, y reconnaissant une révélation divine. Ce ne fut jamais aisé. On ridiculisait les prophè-tes qui prétendaient déchiffrer la Parole de Dieu, on se moquait d’eux (cf. Jr 20,7). Amos fut expulsé du lieu saint à cause de ses réfl exions critiques (cf. Am 7,12) tandis qu’Élie dut se cacher parce que le roi en voulait à sa vie (cf 1 R 17,3). Cela n’alla pas mieux au temps de Jésus. Si ses disciples vivaient tout de près, ils n’en restaient pas moins «lents à comprendre» (cf Mc 8,17). «Vous avez des yeux: ne voyez-vous pas? Vous avez des oreilles: n’entendez-vous pas?» (Mc 8, 18).

qQui ouvre quand même les yeux et les oreilles pour y découvrir

Relire ses expériences

Réfl échir ses expériences

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la Parole de Dieu, doit encore y acquiescer. Avec des hauts et des bas, on répond alors à la voix par laquelle on se sait interpellé. Cette réponse se traduit dans la prière et dans un style de vie marqué par l’amour du prochain. Car Dieu ne veut pas d’une rela-tion qui n’engagerait point. Il veut renouveler le monde et laisser transparaître en notre amour sa véritable identité.

24. A l’origine, tout n’était pas écrit. Dans la culture orale de cette époque, les mêmes récits étaient constamment répétés, avec le souci récurrent de rester très fi dèle aux expériences originelles. C’est à par-tir de celles-ci qu’on interprétait les nouveaux événements, lus et réfl échis dans un cadre identique. Enfi n, on se les appropriait dans les célébrations liturgiques et dans la manière de vivre.

Ce que les Écritures nous disent de la sortie d’Égypte et de la résur-rection de Jésus, ne doit pas être conçu comme autant de récits his-toriques minutieux. Il ne s’agit pas de reportages journalistiques. Sans cesse retransmise, la narration se situe toujours à plusieurs niveaux. Chaque fois, sa formulation est colorée par de nouvelles expériences. Une telle approche est à même de guérir les chrétiens obsédés par la quête du texte le plus primitif. Bien sûr, il a dû exister une forme originelle du récit de l’exode, forme d’abord orale puis écrite. Mais nous ne disposons plus de la toute première version. Ce qui n’a rien d’étonnant, puisque le récit fut constamment réactualisé, enrichi et approfondi au fi l de nouvelles expériences dans lesquelles on recon-naissait la voix de Dieu.

25. Jusqu’à ce jour, c’est ainsi que sont lus les textes de l’Écriture, sur-tout dans la liturgie et plus spécialement au cours de la veillée pasca-le. Ce n’est pas pour rien qu’on y trouve tant de lectures. Tout comme dans la synagogue juive, nous vivons cette grande fête comme si nous étions nous-mêmes sortis d’Égypte et comme si nous avions échappé à la mort avec le Christ. Cela se reproduit chaque fois que nous y som-mes ouverts. Avec toute la communauté, nous nous associons à ce qui arriva jadis et qui ne cesse d’advenir: la libération par Dieu et l’alliance avec Lui. Au cours de la veillée pascale, nous traversons nous aussi la

Prier à partir de

l’expérience

Un seul récit à plusieurs

niveaux

Pâques nous advient

18

mer des roseaux, dans l’oubli et la perte de nous-mêmes. Nous che-minons dans le désert jusqu’à la terre promise au-delà du Jourdain. Avec Israël, nous retombons dans le doute et l’incroyance. Avec les prophètes, nous expérimentons à nouveau l’assistance divine à travers menaces et promesses. Avec le Christ, nous passons de la mort à la vie. Ce n’est pas là rêverie, mais réalité sainte.

Tout cela ressort le plus clairement lorsqu’à Pâques, une paroisse a le bonheur de pouvoir accueillir de nouveaux chrétiens. Un baptême d’enfants ou d’adultes peut aussi avoir lieu à d’autres moments; mais il est moins aisé alors de vivre le sacrement dans toute sa profondeur. A Pâques, l’immersion dans l’eau actualise la résurrection du Christ. Celle-ci devient alors aussi notre affaire, puisqu’avec les baptisés et leurs parrains et marraines, nous renouvelons nos promesses de bap-tême. Avec eux et avec le Seigneur ressuscité nous pouvons désor-mais vivre en hommes et femmes ressuscités.

La lecture spirituelle de l’Ecriture

26. Comment lire l’Écriture pour y découvrir la Parole de Dieu? Tout simplement en abordant la Bible en fonction de son intention:

«Face aux livres de la sainte Écriture, on est obligé de les lire et de les comprendre dans le même esprit que celui qui les fi t naître»6.

Pour pouvoir comprendre spirituellement les Écritures, nous de-vons les accueillir dans la foi, sans y plaquer nos propres schémas mentaux. Car la Bible se présente non seulement comme «une pa-role d’homme» (1Th 2,13) - ce qu’elle est indubitablement - mais aussi comme «inspirée de Dieu» (2 Tm 3,16). Ceci admis, on peut lire le texte de manière purement profane, comme on lirait un li-vre d’histoire ou une œuvre littéraire. Mais alors, on ne saisit pas encore en plénitude ce que demande la Bible. L’Écriture demande à être approchée dans la prière, en commençant éventuellement par une invocation à l’Esprit divin. Car c’est Lui qui a inspiré les écrivains et qui, à présent, nous ouvre les Écritures (cf. Lc 24,32).

Invoquer l’Esprit

19

27. La lecture priante de la Bible, que nous visons ici, exige une cer-taine qualité d’écoute, ce qui nous pose un problème épineux. Nous devons avouer, en effet, que nous y arrivons diffi cilement par nous-mêmes. Il n’est déjà pas facile d’écouter une personne en faisant abs-traction de nos préjugés. Il est bien plus diffi cile encore de s’ouvrir à quelqu’un qu’on ne voit pas, mais qui se fait pourtant connaître. Lorsque nous prions, nous sommes tentés de dire: «Écoute, Seigneur, ton serviteur parle» au lieu de:

«Parle, Seigneur, ton serviteur écoute» (1 S 3,9).

Notre prière ressemble souvent à celle de Job qui, s’adressant à Dieu, proclame carrément:

«Écoute-moi… à moi la parole, je vais t’interroger et tu m’instrui-ras» (Jb 42,4).

Ne pourrions-nous pas plutôt nous retrouver dans la prière de Salo-mon, qui demandait au Seigneur:

«Il te faudra donner à ton serviteur un cœur qui écoute…» (1 R 3,9).

28. C’est seulement parce que leur cœur était à l’écoute que certains ont pu découvrir la présence de Dieu. Dans l’histoire d’Israël et de Jé-sus, cela ne fut pas sans peine: il fallut un long processus de lecture, de réfl exion et de prière. En réalité, l’Écriture veut nous permettre cette même découverte au cœur de notre propre histoire et de notre vie personnelle. Il s’agit de reprendre cette triple démarche lorsque nous ouvrons l’Écriture, seul ou avec d’autres, en nous laissant guider par ces trois simples questions:

Que dit le texte?Que dit Dieu à travers le texte?Quelle est ma réponse à Dieu?

C’est l’ancienne méthode, dûment éprouvée, de la lectio divina que nous souhaitons développer à présent.

1. Lire 2. Réfl échir

3. Prier

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Lire

29. L’Écriture exige d’abord une lecture (lectio) attentive et ac-cueillante de ce qui y est consigné. Dans notre culture visuelle, voilà qui demande un effort persévérant. Nous ne lisons généralement pas beaucoup et, lorsque nous lisons, c’est souvent en hâte et en diago-nale. Mais la Bible n’a rien du journal matinal dont on parcourt rapi-dement les titres. Elle demande temps et patience. Il faut la lire et la relire. Ce n’est pas un hasard si Jésus compare la Parole de Dieu à une semence qui doit lentement plonger ses racines dans la bonne terre (cf. Lc 8,11). Cela ne peut advenir qu’à des hommes «qui entendent la parole dans un cœur loyal et bon, qui la retiennent et portent du fruit à force de persévérance» (Lc 8,15).

30. On ne peut vraiment lire un texte que si l’on cherche à le com-prendre le mieux possible. La lecture croyante pour laquelle nous plaidons, ne rompt pas avec l’exégèse historico-critique, laquelle nous est d’une aide précieuse. Elle nous apprend, par exemple, quelle est la forme littéraire du texte, car on ne lit pas une parabole comme on parcourt une lettre. Les sciences bibliques soulignent aussi l’ap-port propre de l’écrivain d’une part, de sa communauté de l’autre. L’évangile de Jean propose un autre regard que celui de Marc, et ces divers points de vue s’enrichissent mutuellement.

Pour lire correctement un texte biblique, on ne peut pas ignorer son contexte. Notre lecture est souvent trop étroite ou trop sélective. Chacun sait qu’on ne découpe pas une lettre d’amour en petites tranches et qu’on ne peut en isoler à son gré, telle ou telle petite phrase. Ce genre de lettre doit être lu intégralement, de préférence avec les lettres précédentes en mémoire. Il n’en va pas autrement avec un texte biblique. On ne peut bien sûr jamais comprendre l’Écri-ture de a à z; mais néanmoins chaque lecture requiert un minimum de mise en perspective. Notre regard s’élargit déjà beaucoup quand nous nous laissons guider par la variété que propose un lectionnaire pour chaque jour, ou par la lecture continue d’un livre biblique.

Il nous arrive de ne lire une péricope que comme la pieuse illustra-

Que dit le texte?

21

tion d’un thème prédéfi ni. C’est ne pas prendre vraiment au sérieux l’Écriture, en même temps qu’un refus de nous laisser remettre en question. L’idéal est une lecture sans préjugés, comme si nous décou-vrions le texte pour la première fois.

Réfl échir

31. Une lecture croyante s’ouvre à la réfl exion (meditatio). C’est pres-que spontanément qu’en lisant, on essaie de pénétrer plus profondé-ment dans le texte: on cherche à comprendre et à s’y retrouver. On s’enquiert des liens avec d’autres textes scripturaires. On découvre en Jésus la réalisation des promesses faites à Israël. On repère l’interven-tion de Dieu et son alliance tout au long de l’Écriture. C’est pourquoi, aussi étrange que cela paraisse, c’est par elle-même que la Bible s’ex-plique le mieux. C’est alors que nous trouvons peu à peu le fi l rouge qui unifi e les Écritures. Il s’agit moins ici d’érudition, que de goûter la présence de Dieu, pour «voir et apprécier» son alliance (cf. Ps 34,9).

32. Pour rendre cette approche possible, il faut lire et relire le texte de l’Écriture. Les Pères de l’Église appelaient cela «ruminer», in-diquant par là qu’on tente de s’approprier toujours plus le texte jusqu’à ce qu’il livre enfi n sa saveur. Un verset peut tout à coup nous frapper et nous toucher au cœur. Plus encore: un mot qui hier ne nous disait rien, peut aujourd’hui nous ouvrir les yeux et nous guider toute la journée.

C’est alors qu’un pont est jeté entre la Bible et notre vie. Les nom-breuses joies et blessures de notre époque et de notre histoire per-sonnelle sont ainsi tirées de leur isolement, et elles sont situées dans un contexte plus large. Les voilà touchées par le Christ. Au cours de sa vie de libérateur, Il n’a cessé d’acquiescer au bien, tandis que dans sa mort rédemptrice, Il a assumé notre détresse. Par sa résur-rection, il a ouvert une brèche vers un renouveau et une libération. Une telle expérience nous est donnée en partage, au moins en par-tie, non point dans de pieuses pensées, mais dans la réalité de la vie.

Que dit Dieu dans le texte?

22

Prier

33. Jusqu’ici, on a lu et réfl échi. Dans la première phase, on s’est de-mandé: «Que dit le texte ?» On s’est ensuite interrogé sur ce «que dit Dieu dans le texte «. Une dernière question se pose à présent: «Quelle est ma réponse à Dieu?» Lire et réfl échir exigeaient d’écouter avec le cœur: c’était donc déjà une sorte de prière. Mais avec notre réponse à Dieu, nous accédons plus explicitement au niveau de prière (ora-tio). Dans ce qui va suivre, les évêques tiennent à rester modestes. Car nous abordons ici la relation intime de chacun avec le Seigneur, un domaine où nul ne peut dicter quoi que ce soit, ni mettre ses propres expériences en exergue.

34. A propos de la prière comme contact entre Dieu et un individu, nous ne pouvons donc pas dire grand-chose. Mais faut-il se taire pour autant? L’Écriture elle-même aborde le sujet, et elle nous met sur la bonne voie. Qu’on relise par exemple l’hymne de Marie. Nous y relevons une grande quantité d’images bibliques: l’Ancien Testa-ment y est constamment cité. Le Magnifi cat nous apprend qu’on peut prier Dieu en s’appropriant les paroles de l’Écriture. Un simple exemple: Marie chante joyeusement:

«Il a jeté les puissants à bas de leurs trônes et il a élevé les humbles» (Lc 1,52).

Elle reprend là ce qui a été maintes fois écrit au sujet de la «sortie de la maison de servitude» (cf. Ex 20,2), à propos du fait que «le Seigneur a culbuté les trônes des princes» (Si 10,14), ou encore dans l’appel «l’élé-vation de ce qui est bas» (Ez 21,31). Déjà lus et travaillés, ces textes sont à présent conservés dans le cœur (cf. Lc 2,51) et ils nourrissent désormais la prière. Ils deviennent comme autant de réponses aux grandes œuvres de Dieu. On peut faire la même remarque à propos des hymnes de Zacharie ou de Siméon.

35. Abordée de cette manière, l’Écriture peut être très importante pour notre prière. On peut aussi, bien sûr, rédiger ses propres méditations ou rechercher soit des exercices de piété, soit des textes inspirateurs. Mais on peut aussi tout simplement prendre l’Écriture en mains, en

Plaidoyer pour

une prière biblique

Quelle est ma réponse

à Dieu?

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faire une lecture pénétrante, y fi xer son cœur et, dans la prière, lui apporter une réponse. Par nous-mêmes, nous ne savons pas comment prier (cf. Rm 8,26), mais, nous assure Paul, l’Esprit intercédera en notre faveur. A travers la lecture spirituelle ou lectio divina, c’est l’Écriture elle-même qui nous met dans la bouche les mots de la prière. Il suffi t alors de lire ces mots, d’y réfl échir et d’y répondre.

36. Notre réponse à Dieu revêtira toujours une tonalité particulière. Après la lecture et la réfl exion peuvent surgir le remerciement ou la louange, mais aussi la supplication ou la plainte. On n’échappera pas non plus à l’aridité ou à la désolation. Mais ce vide lui-même prend un sens, car il nous rappelle que nous ne sommes pas maîtres de la présence divine. Il arrive aussi que la prière biblique, succédant à la lecture et à la réfl exion, prenne la forme d’une halte silencieuse auprès du Seigneur. Un peu comme des amoureux qui ont marché ensemble et qui se sont raconté bien des choses, fi nissent pas s’asseoir côte à côte et à ne plus se parler qu’avec les yeux et le cœur.

Boire à la source

37. Un des plus grands mérites du concile Vatican II, est d’avoir réappris à l’Église, l’écoute de l’Écriture. En ce domaine, un retour aux sources était absolument nécessaire. Durant des siècles, l’accès à l’Écriture a été rendu particulièrement diffi cile. Cette situation malheureuse ar-rive peu à peu à son terme. Le document conciliaire sur la révélation nomme l’Écriture le «fondement permanent» de la théologie, mais aussi «le point d’appui et la force vitale» des chrétiens, «le coeur de leur foi, la nourriture de leur âme, la source pure et intarissable de leur vie spirituelle»7. Les Pères conciliaires affi rmaient que tous les fi dèles, et pas seulement les prêtres, les diacres ou les catéchistes,

«doivent, par une lecture spirituelle assidue et par une étude ap-profondie s’attacher aux Écritures (…). Qu’ils se rappellent aussi que la prière doit aller de pair avec la lecture de la Sainte Écriture, pour que s’établisse le dialogue entre Dieu et l’homme, car ‘nous Lui parlons quand nous prions, mais nous L’écoutons quand nous lisons les oracles divins’»8.

Retour au fondement

biblique

24

38. Il est donc clair que la parole biblique ne vise pas à faire de l’archéologie mais, au contraire, à inaugurer une nouvelle histoire. Lorsque nous lisons les Écritures avec un cœur sensible, nous nous ouvrons à Quelqu’un qui nous rejoint et qui s’adresse à nous. Mais, comme dans toute relation, voilà qui requiert une attention soute-nue et une patience persévérante. Le grand défi consistera à se fami-liariser avec la tradition d’un peuple qui a appris à connaître Dieu au fi l de son histoire. Tout comme dans une relation humaine, une telle attention ne peut qu’ébranler la personne: elle va peu à peu régler sa vie sur Celui qui se donne à connaître. L’Écriture est tout-à-fait formelle sur ce point:

«Soyez les réalisateurs de la parole, et pas seulement des auditeurs qui s’abuseraient eux-mêmes» (Jc 1,22).

39. Jésus nous demande d’écouter la Parole de Dieu et de la mettre en pratique (cf. Lc 8,21). Nous entrons alors dans la nouvelle famille de Jésus, et nous devenons pour Lui des frères et des sœurs (cf. Mt 12,50). On peut alors dire que «la parole de Dieu… est à l’œuvre en vous, les croyants» (1 Th 2,13). Cette Parole de Dieu, révélatrice d’un amour démesuré, exige donc d’être vécue dans la pratique. Elle est alors capable de nous ouvrir des perspectives nouvelles pour les choix auxquels nous sommes confrontés. Elle nous enseigne à «vivre dans le temps présent» (cf. Tt 2,12). Elle fait de nous des pionniers de la justice et de la paix. Elle nous éduque à aimer dans l’Esprit de Jésus et elle nous ouvre les yeux sur ce qu’il y a de saint au cœur même de la vie quotidienne. En ce sens, l’Écriture est non seulement une école de prière, mais aussi une école de vie.

40. A ce propos, nous aurions beaucoup à apprendre des hommes et des femmes tout simples qui se laissent interpeller par l’Écriture. Dans des paroisses et des communautés au sein des jeunes Églises, en dehors de l’Europe, il arrive parfois que des illettrés comprennent très exactement les Écritures pour la simple raison que, lors de leurs rencontres, ils se mettent ensemble à l’écoute de la Parole avec un cœur disponible. Devons-nous pour autant tourner le dos à l’exégèse moderne? Au contraire. Car la foi ne peut exister sans la raison. Mais

La mise en pratique

de la Parole

25

même si l’on s’adonne à une lecture critique, il convient de garder confi ance dans la Parole de Dieu. En principe, intelligence et sen-sibilité peuvent sûrement s’accorder et se féconder l’une l’autre. La question fut posée de manière percutante par un des pionniers de la science biblique: quand Érasme publia son édition critique moderne de l’évangile de Matthieu, il conjura ses lecteurs d’approcher le livre biblique avec un cœur disponible:

«Que celui qui veut lire avec fruit, lise avec modération, qu’il lise non pas négligemment comme une quelconque histoire humaine qui ne le concerne en rien, mais avec avidité, avec attention, avec assiduité. En pieux disciple de Jésus, qu’il suive tous ses pas, qu’il examine ce qu’il fait, devine et recherche, qu’il examine chacune de ses actions, et il découvrira dans ces Ecritures toutes simples et sans ornement le conseil ineffable de la sagesse céleste.

Et il n’y a rien dans ce Livre qui ne concerne pas chacun d’entre nous. Il n’y a rien qu’on ne fasse chaque jour dans notre vie, de manière plus cachée, mais plus vraie.

C’est le Christ qui naît en nous et les Hérode ne manquent pas qui s’efforcent de tuer le tendre enfant encore au sein. Il grandit et progresse dans les degrés de la vie. Il guérit tous les gens de maladie, si du moins on implore avec confi ance son secours. Il ne repousse pas les lépreux, il ne repousse pas les démoniaques, ni ceux qui sont rendus impurs par un fl ux de sang, ni les aveugles, ni les boiteux. Il n’y a aucun vice de l’âme qui soit aussi horri-ble, aussi inguérissable qu’il ne l’enlève, si nous lui disons de tout cœur: Jésus, fi ls de David, aie pitié. Ainsi que: Seigneur si tu le veux, tu peux nous guérir. Bien plus, il ressuscite les morts à la vie. Il enseigne, il effraye, il menace, il caresse, il console.

Il a ses Scribes et ses Pharisiens qui Lui tendent des embûches. Et puisse-t-il n’avoir que deux Anne et Caïphe ! Il a ses Iscariotes qui vendraient un sang innocent pour de l’argent. Il ne manque ni Pilate, ni la troupe qui l’a fl agellé, conspué et crucifi é.Entre-temps, il a également son petit troupeau qui dépend de lui.

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Il a ceux qui disent: Seigneur à qui irions-nous, tu possèdes les paroles de vie éternelle»9.

Quiconque aborde ainsi l’Écriture y retrouve sa propre expérience de croyant. Il lit le texte avec attention. Il réfl échit à ce que Dieu vou-drait lui dire aujourd’hui. Enfi n, il prie et répond ainsi à ce que Dieu lui dit: un pont est jeté entre la Bible et la vie.

Pistes pour l’échange

1. Où et quand lisez-vous l’Écriture? Qu’est-ce qui vous y parle? Que trouvez-vous étrange?

2. Essayez de formuler avec vos propres mots ce que signifi e: «Écoute Israël».

3. Qu’est-ce qui vous semble important pour lire les Écritures avec un cœur disponible?

4. Quelles possibilités voyez-vous, dans votre famille ou en groupe, pour lire l’Écriture, la méditer et conclure en priant?

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3| Appelés et rassemblésLa Parole dans l’Eglise

41. Il y a quelque temps s’est déroulé un congrès sur l’évangélisa-tion, qui étudiait la place de l’Église dans une grande ville. Un des moments les plus impressionnants eut lieu pendant l’eucharistie de Toussaint. La première lecture, tirée de l’Apocalypse, fut «lue» par un aveugle. Lors d’un congrès placé sous la consigne «Viens et vois», on fut frappé par le fait que, sous les yeux de millions de spectateurs branchés sur l’eurovision, c’était un aveugle qui, la tête haute, «li-sait» le texte d’un voyant. Ses doigts couraient agilement sur le texte braille de l’Apocalypse. Les yeux fermés, il faisait revivre cette grande vision d’hommes en vêtements blancs, rassemblés de toutes races, tribus, peuples et langues. Ils venaient tous de la grande épreuve mais confessaient joyeusement, tous ensemble: «Le salut est à notre Dieu» (Ap 7,10).

Cette image biblique révèle ce qu’est la communauté ecclésiale. Elle dévoile aussi la raison ultime pour laquelle Dieu se dit. Dieu est un Dieu qui parle, parce qu’Il est un Dieu des hommes, et qu’il veut ras-sembler tout le monde. Son Église n’est pas un groupe issu d’une seule nation. Elle est convoquée depuis les horizons les plus divers. Ce sont des êtres humains, souvent incompris et persécutés, qui se sentent enfi n proches du Christ et qui louent le Père pour ses grandes œuvres.

42. Cette vision de l’Église qu’un aveugle a «lue» avec une telle convic-tion, il est rare que nos yeux d’hommes modernes puissent la déchif-frer. Mais en l’occurrence, oserions-nous demander qui est vraiment aveugle (cf. Mc, 8 18)? Nous ne considérons en général l’Église que comme une structure ou un fardeau. Et de fait, elle n’est souvent que bien trop humaine. Mais pourquoi sommes-nous aveugles quand il s’agit de son mystère le plus profond? L’Église n’est-elle pas cette communauté appelée et rassemblée par Dieu? N’a-t-Il pas libéré son peuple de la maison d’esclavage, puis rappelé le Christ à la vie

L’Église, pierre d’achoppement

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pour dire à l’homme en recherche: «Venez et vous verrez» (Jn 1,39)?

Dieu, l’Eglise et l’Esprit

43. Notre société moderne est marquée par une grande soif de sens et de points de repère. Mais ce ne sont pas des rêveries fumeuses ou de vaines promesses qui aideront les personnes en recherche. Pour les aider effi cacement, il faut du concret. Et c’est ici que réapparaît la singularité de Dieu et du salut qu’Il propose. Notre Dieu reste fi dèle à notre terre; et Sa Parole libératrice, loin de planer au-dessus de nos misères, se révèle jusqu’au cœur de la mort. C’est bien ainsi qu’Israël a relu et réfl échi sa propre histoire: Dieu est descendu pour délivrer son peuple (cf. Ex 3,8). Dieu marche avec son peuple à travers la mer des roseaux et le désert, pour le conduire vers un nouveau pays. En Jésus, et jusqu’à la mort, ce Dieu se fait l’un des nôtres pour nous conduire à la vie.

44. La Parole ne peut se concrétiser sans un peuple de chair et de sang, appelé par Dieu. Le mot lui-même le dit: l’Église est une ekklè-sia, au sens littéral: une communauté appelée et rassemblée. Ce sont des hommes qui ont accueilli la Parole de Dieu et qui y ont répondu. Ils peuvent désormais partager sa vie et témoigner de son amour pour tous, spécialement pour ceux qui souffrent d’oppression, de pauvreté, de maladie et de méconnaissance. Tout cela exige un espa-ce bien concret, une manière particulière de vivre, une communauté croyante, bref une Église.

Nos yeux d’hommes modernes considèrent souvent tout cela avec un certain scepticisme. Cela évoque pour nous un traitement préfé-rentiel et donc une discrimination injuste. Si Dieu doit s’associer une Église, rejette-t-Il pour autant ceux qui n’en sont pas? S’Il appelle et choisit certaines personnes, fait-Il fi du principe d’égalité? Pointerait-t-Il aussi le doigt vers les autres hommes et leurs religions?

45. Ces questions sont particulièrement importantes dans notre so-ciété multiculturelle. Mais notre Dieu est-Il vraiment aussi sectaire?

L’amour divin

est concret

Dieu sait attendre

29

La Bible ne dit-elle pas que Dieu débute très discrètement en un lieu, mais dans le but de se révéler à toute l’humanité, sans jamais préten-dre imposer son amour? Cela même le détruirait, car «l’amour prend patience» (1 Co 13,4). Le Tout-puissant en est réduit à attendre que les êtres humains L’accueillent et que leurs yeux s’ouvrent à sa pré-sence. Ce qui peut prendre beaucoup de temps. C’est ainsi que les Écritures ont grandi à petits pas: des êtres humains se sont mis à lire, à réfl échir et à accueillir les événements. En passant par des hauts et des bas, c’est bien là qu’ils ont appris à comprendre la Parole divine.

C’est ainsi qu’est née l’Église, groupe de personnes devenues sensi-bles à l’amour immérité de Dieu. C’est pourquoi l’Église est présente dès l’Israël ancien. Elle naît aussitôt que des personnes répondent à la voix de Dieu. C’est alors que prend vie la communauté de Dieu, son peuple, son Eglise, son ekklèsia, un mot fréquent dans l’Ancien Testament.

46. En un sens, la communauté ecclésiale précède l’Écriture. C’est en effet au sein du peuple de Dieu que sont nés les livres bibliques. Car c’est ce peuple qui, au fi l d’un long processus, a veillé à la com-position et à la sélection de ces textes, dont certains sont devenus normatifs à partir de la liturgie et de la prière communautaire. C’est pourquoi ils ont été écrits et transmis. D’autres textes furent écartés parce que non pertinents, trompeurs ou franchement erronés. Cela a commencé dans l’Israël ancien, puis ce processus s’est poursuivi dans la communauté chrétienne. Celle-ci a relu les textes anciens à la lu-mière des événements récemment survenus lors de la venue de Jésus en qui on voyait la réalisation, si longtemps attendue, de ce qui avait été écrit. De la Genèse à l’Apocalypse, c’est le peuple de Dieu qui est à la source des Écritures.

47. Le contraire est tout aussi vrai: les Écritures sont à la source de l’Église. Elles donnent la parole à un Dieu qui appelle l’Église à la vie. Comme nous l’avons déjà remarqué dans la vision de l’Apocalypse, l’Église n’est pas limitée à une nation. Elle est formée de toutes les nations et langues. Dieu ne cesse de rassembler son peuple et Il ne se

L’Église engendre l’Écriture

La Bible engendre

des croyants

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lasse pas d’appeler les hommes en perdition ou en détresse. C’est ce qui arrive lorsqu’Ils laissent germer la Parole, telle une semence dans une bonne terre (cf. Lc 8,8). L’Église est donc convoquée, dès lors que les Écritures peuvent déployer leur action. D’ailleurs:

«Dans les Saints Livres, en effet, le Père qui est aux cieux vient avec tendresse au-devant de ses fi ls et entre en conversation avec eux»10.

48. Tout ceci ne peut occulter le rôle de l’Esprit divin, à savoir de l’amour de Dieu en nous. C’est cet Esprit qui, depuis Abraham, a ren-du le peuple réceptif à Dieu. Ainsi naquit l’Écriture. Et c’est encore ce même Esprit qui fait naître la foi, dès lors que notre cœur est touché par une parole.

Plus nous sommes ouverts à l’Esprit de Dieu et plus nous grandissons dans l’unité à l’écoute de la Parole, plus nous chercherons à créer l’unité dans nos paroisses et les diocèses. Mais c’est encore plus vrai pour l’unité entre les Églises et tous ceux qui portent le nom de chré-tiens. Il n’y a pas de doute que:

«Les paroles divines sont… des instruments insignes entre les mains puissantes de Dieu pour obtenir cette unité que le Sauveur offre à tous les hommes»11.

L’annonce, interpellation de Dieu

49. La première tâche de la communauté chrétienne est de faire partager son expérience de la Bonne Nouvelle. Car c’est bien d’un heureux message qu’il s’agit: «Le salut est à notre Dieu» (Ap 7,10) et «tous les confi ns de la terre» doivent le voir (cf. Es 52,10). Telle est la vocation de l’Église de toujours: faire en sorte que les êtres humains expérimentent que Dieu les sauve.

50. Mais pour ce faire, il faut à l’Église un style de vie authentique, des célébrations parlantes et une annonce courageuse. Commen-çons par ce dernier point: comment témoigner de Dieu en des temps

Unis dans l’Esprit divin

Pour une annonce biblique

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où l’on n’est plus chrétien de naissance? Qu’est-ce qui peut inspirer la catéchèse? Un grand mérite du concile Vatican II est d’avoir fait concevoir l’annonce de manière plus biblique. C’est une heureuse évolution car où le salut divin s’exprime-t-il mieux que dans le récit biblique? C’est pourquoi nous sommes heureux et reconnaissants de ce que la catéchèse s’ouvre toujours davantage à l’Écriture. La caté-chèse mérite alors bien son nom: elle fait écho à la Parole de Dieu.

Lorsque résonne la Parole divine, elle a vraiment quelque chose à nous dire, et ce depuis l’origine, quand les récits bibliques furent transmis et écrits. Mais est-ce encore vrai aujourd’hui? La Parole de Dieu peut-elle toucher le cœur humain? Notre annonce peut-elle mettre en lumière la cohérence et la beauté de la foi? Peut-elle nous acheminer vers l’action?

Se laisser guider par le récit

51. Prenons par exemple, la parabole du père et de ses deux fi ls (cf. Lc 15, 11-32). Au premier abord, nous nous disons: «Je connais déjà cette histoire du fi ls prodigue». Mais avons-nous lu le récit en profondeur? Laissons-nous Dieu nous parler à travers lui? Si nous lui permettons sans préjugés de nous imprégner, si en outre, nous prenons vraiment le temps d’une lecture aidée par un bon commentaire et si enfi n nous faisons une place pour la réfl exion et la prière, Jésus nous introduira dans un monde inhabituel: celui d’un jeune homme qui vole de ses propres ailes pour pénétrer dans le vaste monde. Il dilapide son héri-tage et se heurte à des obstacles successifs. La famine règne dans son lointain pays et, pour survivre, il lui faut garder les porcs. Il se retrouve totalement seul, coupé du domicile paternel comme de son peuple. Il est affamé, car même s’il avait pu surmonter son dégoût pour la nourriture porcine, personne ne lui en donnait.

C’est la faim qui le fait réfl échir. En danger de mort, il décide de rega-gner la maison paternelle et d’y gagner sa vie comme ouvrier journa-lier. Mais dès qu’il aperçoit son fi ls au loin, voilà que le père se précipite à sa rencontre, se jette à son cou et l’embrasse avec fougue. Il passe l’éponge sur le passé et on recommence à zéro. Bien que le jeune

Un homme avait

deux fi ls

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homme ait rompu les ponts avec sa famille, le père lui offre le plus bel habit de fête, une tenue réservée à l’invité d’honneur aux grandes occasions (cf. Gn 41,42). De plus, il lui passe un anneau au doigt. A l’époque, c’était généralement un sceau qui conférait la responsabilité d’une entreprise (cf. 1 M 6,15). Le jeune homme reçoit des sandales, tout comme un seigneur. Et en guise de bienvenue, le père fait tuer un veau pour faire une fête agrémentée de chants et de danses. C’est qu’il est ravi de ce que son fi ls qui était mort soit de nouveau vivant. Celui qui était perdu, est retrouvé.

52. On peut se poser la question: «Tout cela n’est-t-il pas trop beau?» ou: «Y a-t-il encore une justice?» On peut comprendre que le père soit heureux. Mais n’exagère-t-il pas? Qui peut lui garantir que le jeune homme ne va pas de nouveau gaspiller ses nouvelles chances? Le ca-pital familial est déjà en assez mauvais état. A présent, pourquoi gére-rait-il mieux ce qu’il en reste? Dès que le fi ls aîné est mis au courant, il se fâche. Il est très différent de son frère: à l’en croire, il est irréprocha-ble, travailleur, ponctuel et serviable. Pourquoi un jeune dévoyé qui a brûlé une partie du capital, devrait-il être placé à la tête de l’entreprise familiale, alors qu’il ne manque pas de successeur fi able? Pour le fi ls aîné, c’est une gifl e et, pour la fi rme, la faillite! Il ne mettra naturelle-ment pas les pieds dans la salle des fêtes.

La réaction du fi ls aîné est aussi celle de l’entourage de Jésus. Le récit les fait mousser. L’accueil réservé au cadet est à ce point dispropor-tionné qu’il suscite l’irritation. C’est exagéré! Pourquoi jeter par-des-sus bord des règles qui ont fait leurs preuves? Pourquoi ridiculiser le dévouement de certains? Jésus scandalise à dessein pour que le récit nous ébranle. C’est la condition pour que nous qui sommes convain-cus d’être justes (cf. Lc 18,9), puissions entendre cette Parole de Dieu qui dit: «Mon enfant, toi, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi» (Lc 15,31).

53. Cette parabole propose une vision étonnamment profonde de ce qu’est l’amour divin, sans prétendre ni moraliser ni endoctriner. Une parabole de Jésus n’est pas une enveloppe contenant un message.

Scandale et défi

Dieu nous touche par la

parole de Jésus

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Les comparaisons ne sont pas l’emballage pédagogique d’une leçon religieuse ou morale. Non! Car Jésus veut toucher les cœurs. Et pour ce faire, il nous plonge dans un récit déconcertant qui nous éloigne de notre univers ordinaire. C’est précisément ce dépaysement qui nous ouvre à la nouveauté. Si le dénouement peut nous ébranler, c’est pourtant par là que Dieu peut se faire tout proche de nous.

Il n’est pas surprenant que l’évangéliste relève que Jésus «ne leur parlait pas sans parabole» (Mc 4,34). A travers ces étonnants récits, c’était Dieu lui-même qui prenait la parole avec une vigueur inouïe, comme le montrent les réactions. Les gardes envoyés par les grands prêtres et les Pharisiens pour arrêter Jésus, revinrent les mains vides et durent avouer: «Jamais homme n’a parlé comme cet homme» (Jn 7,46). Voilà «un enseignement nouveau, plein d’autorité» (Mc 1,27). Certains abandonnèrent tout pour suivre cet étrange rabbi. D’autres se sentaient si indignés qu’ils allaient le lui faire payer en le clouant sur une croix.

Une catéchèse d’initiation

54. L’Écriture doit être lue en fonction de son intention: comme un témoignage de l’amour divin et comme un texte qui appelle non seu-lement à la lecture, mais à la réfl exion et à la prière. Tout cela ne pourrait-il pas enrichir notre annonce? La Bible est tellement plus qu’une série d’exemples destinés à étayer nos thèmes préférés. Si elle ne servait qu’à illustrer une conviction morale ou religieuse, l’Écri-ture serait vite source d’ennui, car elle serait alors dépouillée de son secret: Dieu nous aime tant qu’Il veut se donner lui-même! Il désire nous toucher et parler avec nous, comme un ami à un ami, «comme on se parle d’homme à homme» (Ex. 33,11). Tel est le sens profond de la Parole de Dieu: elle ne propose pas d’abord un contenu religieux ou un appel moral, mais une Personne qui partage notre vie. Les Pères conciliaires l’ont formulé de manière percutante:

«Le Dieu invisible s’adresse aux hommes dans son immense amour ainsi qu’à des amis, il s’entretient avec eux pour les inviter et les admettre à partager sa propre vie»12.

Témoin de l’amour

divin

34

55. Tel est le cœur de la Bonne Nouvelle. Mais on ne peut pas prou-ver la bonté de ce message. Il faut d’abord pouvoir l’éprouver. Des passages diffi ciles peuvent alors s’éclairer d’une lumière nouvelle. Car il n’existe bien sûr aucune formule magique pour rendre sou-dain limpides des textes parfois âgés de vingt-cinq siècles. Mais nous sommes aidés par l’exégèse qui en décrit l’arrière-fond et nous four-nit de précieuses explications. Elle nous fait accéder à l’expérience qu’évoquent les textes.

56. A ce propos, il ne faut pas réfl échir uniquement en fonction des enfants ou des adultes qui suivent une catéchèse. Ce qui a été dit vaut pour tout le monde, y compris pour les catéchistes. Notre foi n’est pas un contenu doctrinal que des spécialistes devraient trans-mettre à des ignorants. Notre vie durant, nous resterons tous des élèves. Nul n’est chrétien sans une initiation permanente. C’est par ce biais que l’Esprit ne cesse de construire la communauté ecclésiale et que le Seigneur nous rassemble. C’est ainsi qu’Il s’adresse à nous et qu’Il se donne un peuple qui soit signe pour toute l’humanité.

La liturgie, Parole de Dieu en action

57. Dans les célébrations, une Parole divine nous rejoint, qui touche le cœur des croyants et les appelle à en vivre. La Parole de Dieu est agissante dans la liturgie, comme le dit le mot lui-même. Ici encore, nous avons affaire à un terme grec bien plus suggestif que nous ne le pensons: le suffi xe de «liturgie» est -urgie, comme dans le mot métallurgie (le traitement des métaux). Dans la liturgie, il s’agit d’une action (ergon) qui advient au peuple (laos) et à laquelle celui-ci parti-cipe. Cette action a tout à voir avec la Parole de Dieu. Elle ne retourne pas à Dieu sans porter du fruit et avant d’avoir produit ce qui Lui plaît (cf. Is 55,11).

La Parole de Dieu agit excellemment au sein d’une communauté réu-nie pour la liturgie. On doit la laisser résonner et la méditer en silence. Il faut l’accueillir en chantant et se l’approprier par des gestes. Il s’agit

Des mots ouverts

à l’expérience

Des paroles effi caces

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de permettre au rite de nous renouveler et de nous recréer. Si on veut pénétrer profondément la Bible, il ne suffi t pas de suivre une caté-chèse. Pour comprendre les Écritures, il faut en vivre pratiquement, ce que la liturgie réalise de manière unique. L’Ecriture y est comme un poisson dans l’eau. Elle n’y est pas seulement expliquée, mais vécue.

La Parole se réalise

58. Nous avons déjà évoqué la veillée pascale, au cours de laquelle nous voyons défi ler un cortège de lectures auxquelles nous som-mes conviés à nous associer de grand cœur. La Parole divine, assez puissante pour tout créer, poursuit encore son œuvre créatrice pen-dant la nuit de Pâques. Une fois encore résonne l’histoire de la sor-tie d’Égypte, à laquelle nous pouvons participer. On nous raconte le retour de l’exil et, avec Israël, c’est un cœur nouveau et un esprit nouveau qui nous sont donnés. Paul nous parle du baptême grâce auquel nous naissons à une vie nouvelle. Et lorsque retentit l’évangile de la résurrection du Christ, il y va fi nalement de notre résurrection à tous. Jamais l’Église ne propose autant de récits que cette nuit-là. Mais dans tous ces textes, il n’est question que de l’histoire du peu-ple de Dieu, appelé des ténèbres à la lumière de Pâques. Et chaque fois, l’Église ose prétendre que tout cela se reproduit au cours de cette même nuit. Au fi l de toutes les lectures, c’est le même message: «Cette nuit de Pâques est la nuit de l’exode et de la résurrection. Cette eau du baptême est l’eau par laquelle nos ancêtres furent sauvés de la puissance de l’Égypte. C’est la même eau au-dessus de laquelle, au début, l’Esprit planait lorsque la création fut tirée du chaos. C’est l’eau dans laquelle les disciples du baptême sont immergés et avec laquelle nous renouvelons nos promesses pour vivre dans l’alliance de Dieu. Ce pain sur l’autel est le même pain sur lequel Jésus a dit: «Prenez et mangez. Ceci est mon corps» (Mt 26, 26).»

59. Ces textes bibliques proposent infi niment plus que le simple rap-pel d’événements du passé. Ils intègrent celui-ci à l’intérieur du pré-sent et le réactualisent pour ceux qui écoutent avec un cœur dispo-nible. Voilà pourquoi c’est par un psaume et une prière qu’on réagit aux lectures de la veillée pascale. Dans le chapitre précédent, nous

L’événement de la nuit

pascale

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rappelions cette structure décisive qu’est la lecture, la réfl exion et la prière. Le dialogue entre Dieu et l’être humain constitue le cœur de l’Écriture, et nous y participons tous grâce à cette représentation sacrée qu’est la liturgie.

60. Cela se réalise aussi à chaque célébration dominicale. Le jour du Seigneur, nous participons au passage du Christ de la mort à la vie, et nous sommes tirés des ténèbres et de la mort. L’Esprit vient habiter nos cœurs pour nous constituer en peuple de Dieu. Chaque diman-che, Jésus redit à sa communauté: «Il me faut aujourd’hui demeurer dans ta maison» (Lc 19,5). Il se tient à la porte et Il frappe. Si nous entendons sa voix et que nous lui ouvrons, Il entre et s’assied à notre table (cf. Ap 3,20). C’est un bien grand mystère que ces anciennes paroles puissent se réaliser pour nous.

61. Cette actualisation permanente est une constante depuis la Ge-nèse jusqu’à l’Apocalypse, car Dieu veut toujours se rapprocher de son peuple. La Parole de l’Écriture cherche sans cesse à déployer sa force dans l’aujourd’hui. «Voici maintenant le moment tout à fait fa-vorable. Voici maintenant le jour du salut» (2 Co 6,2). Cela ne se passe pas d’un coup de baguette magique. Il faut attention, disponibilité et foi.

«Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas vos cœurs» (He 3, 7-8).

Pour disposer nos cœurs à cet Évangile, nous pouvons faire brûler de l’encens et des cierges, nous mettre debout, chanter «Alléluia» et saluer le Christ par l’invocation: «Gloire à Toi, ô Christ». Il n’est pas exagéré que d’affi rmer:

«(Le Christ) est là présent dans sa parole, car c’est lui qui parle tandis qu’on lit dans l’Église les Saintes Écritures»13.

L’importance de la liturgie de la Parole

62. Nous devrions peut-être nous éduquer à reconnaître plus en-core la puissante effi cacité des lectures du dimanche. A l’ambon, c’est avec le Seigneur que nous entrons en contact. « Parole de Dieu», dit le

Le premier jour de

la semaine

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lecteur après chaque lecture, et nous répondons à juste titre: «Nous rendons grâce à Dieu». Le Dieu vivant veut nous nourrir tant à la table de la Parole qu’à celle du Pain. Nous devons vénérer «les divines Écritures… comme le Corps même du Seigneur»14. Dès lors, le mot «communion» ne doit pas seulement évoquer l’hostie, car nous ne communions pas seulement au pain, mais aussi à la parole. La Parole de Dieu, son Amour, veut habiter parmi nous. Il nous faut assimiler la Parole comme une nourriture. Pensons au voyant de Patmos qui a pris et mangé le livre (cf. Ap 10,10). «Tes paroles, je les dévorais», disait Jérémie. «Ta parole m’a réjoui, m’a rendu profondément heureux» (Jr 15,16). Origène, un Père de l’Église, était particulièrement exigeant quant au soin à accorder à la liturgie de la Parole:

«Voyez si vous concevez, si vous retenez les paroles divines. Vous savez avec quelle précaution respectueuse vous gardez le corps du Seigneur lorsqu’il vous est remis, de peur qu’il n’en tombe quelque miette. Que si, lorsqu’il s’agit de Son corps, vous apportez à juste titre tant de précaution, pourquoi voudriez-vous que la négligence de la Parole de Dieu mérite un moindre châtiment que celle de Son corps»15.

Dieu veut toucher notre cœur par l’Écriture. C’est ce que fi t le Sei-gneur ressuscité avec les disciples d’Emmaüs: alors qu’ils étaient tout troublés, il leur expliqua ce qui Le concernait dans l’Écriture et ainsi leurs yeux s’ouvrirent lors de la fraction du pain (cf. Lc 24, 13-35).

63.Parce qu’il a élargi l’accès aux Écritures, nous sommes particu-lièrement redevables au ressourcement opéré par le concile Vatican II. Par le renouveau liturgique, les Pères conciliaires ont voulu «pro-mouvoir ce goût savoureux et vivant de la Sainte Écriture»16. Grâce à un découpage bien étudié des lectures, ils nous ont fait partager la richesse de l’Écriture et de ses passages les plus importants. Lors de l’eucharistie dominicale, nous entendons environ cinq cents textes différents, soit trois fois plus que jadis. Pour que cette richesse soit diffusée, encore faut-il que les lectures soient correctement procla-mées par le lecteur. C’est là une tâche dont on ne peut sous-estimer l’importance.

Un riche choix

de lectures

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Il est vrai que tous les textes ne sont pas également faciles; mais cela ne devrait pas nous tenter de les éliminer purement et simplement. Il ne s’agit pas de quelque chose d’accessoire, «car ne pas connaître l’Écriture, c’est ne pas connaître le Christ»17. Pour ressourcer notre foi, nous ne devons pas moins nous familiariser avec la Parole de Dieu, mais justement nous y attacher plus encore, même si cette familiarité ne nous oblige pas à comprendre le moindre détail. Il est d’ailleurs bien diffi cile de juger à la place d’autrui si tel ou tel texte est trop compliqué. Ce sont parfois les chrétiens les plus simples qui s’y montrent le plus sensibles. N’oublions pas que Jésus a fulminé contre ceux qui barraient aux autres l’accès à la Parole:

«Malheureux êtes-vous, légistes, vous qui avez pris la clef de la connaissance: vous n’êtes pas entrés vous-mêmes, et ceux qui voulaient entrer, vous les en avez empêchés» (Lc 11,52).

64. Pour introduire les fi dèles à un passage diffi cile de l’Écriture, l’ho-mélie peut naturellement beaucoup aider. Si nous voulons compren-dre cette prise de parole délicate, un exemple suggestif nous est pro-posé par Jésus dans la synagogue de Nazareth. Au cours de la liturgie de la parole, on lisait alors, dans Isaïe, le passage où le prophète évo-que la bonne nouvelle annoncée aux pauvres, la liberté promise aux prisonniers et la lumière rendue aux aveugles (cf. Is 61,1). Au terme de la lecture, Jésus dit:

«Aujourd’hui, cette écriture est accomplie pour vous qui l’entendez» (Lc 4,21).

Cette forme d’actualisation peut se réaliser dans chaque homélie. Après avoir personnellement lu, réfl échi et prié, celui qui fait l’homé-lie oriente davantage encore vers le présent. Il aide les auditeurs à se laisser toucher par Dieu dans leur situation particulière. Tout comme le pain est rompu et partagé après la grande prière d’action de grâ-ces, ainsi la Parole est-elle rompue afi n que la communauté puisse la goûter et la digérer.

Il ne s’agit pas de fournir des explications sophistiquées ou de sa-vantes moralisations. Non! L’homélie est une parole qui, avec amour

La venue de Dieu

à travers l’homélie

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et sollicitude, rapproche l’Écriture des auditeurs. C’est un travail exi-geant, car il requiert du prédicateur qu’il ait d’abord profondément assimilé les lectures grâce une étude sérieuse, une lecture croyante, la réfl exion et la prière. On peut dire d’ailleurs que:

«C’est un prédicateur creux de la Parole de Dieu, que celui qui ne l’écoute pas dans son cœur»18 .

La diaconie: voyez comme ils s’aiment

65. Il est naturellement essentiel pour notre foi que nous nous ouvrions à la Parole grâce aux célébrations et à l’annonce, mais «la foi qui n’aurait pas d’œuvres est morte dans son isolement» (Jc 2,17). C’est sur cette effi cacité concrète de la Parole de Dieu que nous vou-lons centrer notre attention pour terminer.

La Parole de Dieu, chaque dimanche

66. Peut-être le dimanche offre-t-il des chances insoupçonnées pour qui veut vivre effectivement sa foi. Et que signifi erait notre rassem-blement autour de la Parole du Christ et de son Pain, si ce jour ne différait en rien des autres jours?

Si la Parole de Dieu nous rejoint dans l’eucharistie, elle devrait mar-quer toujours plus notre vie concrète. C’est bien là le sens profond du dimanche: nous faire participer à la vie nouvelle en Jésus-Christ. L’idéal serait que non seulement nous la célébrions dans la liturgie, mais qu’elle prenne corps dans une journée marquée par l’amitié et la fraternité. Un jour de repos et de ressourcement, de fête et de joie. Un exemple frappant nous est fourni par l’Ancien Testament: devant les exilés revenus dans leur patrie, le scribe Esdras fait une lecture des Écritures et en éclaire le sens. Remué par une prise de parole si pre-nante, le peuple fond en larmes. Et c’est alors que retentit cette parole libératrice:

«Ce jour-ci est consacré au Seigneur, votre Dieu. Ne soyez pas dans le deuil et ne pleurez pas!(...) Allez, mangez de bons plats, buvez d’ex-cellentes boissons, et faites porter des portions à celui qui n’a rien pu

Plaidoyer pour

le dimanche

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préparer; car ce jour-ci est consacré au Seigneur. Ne soyez pas dans la peine, car la joie du Seigneur, voilà votre force!» (Ne 8, 9-10).

La Parole de Dieu n’est pas seulement proclamée, réfl échie et accueillie, mais elle doit changer la vie du croyant et lui apporter espérance et joie. C’est ici que l’Église doit se montrer pratique. En tant que peuple de Dieu, elle est une communauté de chair et de sang, une commu-nauté au sein de laquelle la Parole ne peut rester lettre morte.

67. Nous touchons ici un des grands défi s lancés aujourd’hui à no-tre compréhension de la Parole de Dieu. Ce qu’Il a à nous adresser, ce sont des mots d’amour et d’intimité. Il désire susciter une solidarité qui rénove et parachève la création. Mais parfois, cela ne se remarque malheureusement pas beaucoup. De plus en plus souvent, la foi est re-foulée dans une sphère purement spirituelle et privée, à mille lieues de la vie réelle. C’est devenu un trait général de notre culture occidentale, un trait qui marque les chrétiens bien plus qu’ils ne le pensent. Bien souvent la foi ne parvient à imprégner qu’un petit segment de la vie. Des sept jours de la semaine, il ne reste que trois quarts d’heure le di-manche pour ce que nous nommons «la foi». La Parole de Dieu retentit encore au cours de l’eucharistie dominicale, mais il faut une grande créativité pour la reconnaître et l’incarner dans la vie quotidienne. De-puis longtemps déjà, la vie professionnelle est devenue un monde à part, avec ses règles et ses lois propres. Il en va de même pour le temps libre, l’économie, l’éducation, la politique et pratiquement tous les do-maines importants de l’existence. Pourtant, si la Parole de Dieu devait être coupée de la vie, elle risquerait de se dessécher. Elle perdrait le contact avec le monde et ses activités.

68. Comment la Parole de Dieu peut-elle être reconnue, même dans ce contexte diffi cile? C’est justement dans l’existence de chaque jour qu’il nous faut rester reliés plus encore à ce Dieu qui nous parle. Pour parvenir à capter cette Parole dans la vie quotidienne, la prière n’est vraiment pas un luxe inutile. Certains chrétiens peuvent fort heu-reusement s’appuyer sur la prière des heures et sur la lecture quoti-dienne de l’Écriture.

La Parole de Dieu tout

au long de la semaine

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Nous nous réjouissons de ce qu’ici ou là, il existe des cercles bibli-ques et des groupes de prière. Il est de plus en plus fréquent que les réunions de personnes engagées dans la pastorale s’ouvrent sur une lecture et une prière à partir de l’Écriture. Mais pour la majorité des fi dèles, l’eucharistie dominicale reste pratiquement la seule occasion d’un contact avec la Bible. La Parole de Dieu y est lue, expliquée et accueillie dans la prière. La fi délité à la rencontre dominicale n’est donc vraiment pas accessoire. «Sans dimanche, nous ne pouvons pas vivre», disaient les chrétiens persécutés qui, au quatrième siècle, se voyaient accusés de participer à l’eucharistie, malgré les ordres de l’empereur romain. Ces paroles sont profondément vraies: sans di-manche et sans partage de la Parole et du Pain, nous ne pouvons rester vraiment chrétiens.

Une Parole non extérieure au monde

69. Même si cela contredit un des traits de notre société, la Parole accueillie dans les célébrations et dans la prière doit imprégner la vie concrète. La Parole de Dieu ne se laisse pas enfermer dans la caté-chèse ou la liturgie. Elle doit demeurer active chez le croyant (cf. 1 Th 2,13). Elle ne tolère pas que nous l’écoutions sans la prendre à cœur (cf. Jn 12,47). Il faut «que la parole du Seigneur poursuive sa course» (2 Th 3,1) dans notre histoire concrète. C’est là qu’elle devient «une lumière pour mon sentier» (Ps 119,105).

A la lumière de l’Écriture, le monde peut laisser transparaître la pré-sence de Dieu. Nous pouvons découvrir son visage dans sa création (cf. Rm 1,20), même dans les moments de souffrance et de douleur. La terre sur laquelle nous vivons et travaillons reste donc «une ter-re sainte» (Ex 3,5). Ce qui est arrivé à Moïse et à Jésus, se continue aujourd’hui encore. Même dans notre monde moderne, l’Esprit divin reste actif: Il rompt les liens asservissants et Il apporte un surprenant renouveau (cf. 2 Co 3,17).

70. Particulièrement suggestifs à cet égard sont les saints connus et inconnus. Ils se laissent entièrement toucher par l’amour divin et ils savent, avec imagination et créativité, susciter un cadre dans lequel

Les saints, exégètes en actes

Dieu reste fi dèle

à notre terre

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l’Évangile peut à nouveau être compris. On peut comparer leur ac-tion au travail de l’exégète en quête du contexte historique d’une pa-role évangélique. C’est ce que fait aussi le saint, mais par des actions concrètes. C’est par sa vie que, à une époque précise, le saint ouvre un espace dans lequel Jésus peut être compris.

Frères et sœurs les uns des autres

71. Un premier effet concret de la Parole de Dieu, c’est l’unité et l’amour qui croissent chez ceux qui l’écoutent et l’accueillent de tout cœur. Notre amour est une réponse bien réelle à la Parole aimante de Dieu. «Si Dieu nous a aimés ainsi, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres» (1 Jn 4,11). Nous revenons ainsi au deuxième commandement de l’Écriture. Loin d’être seulement une philanthropie horizontale, l’amour du prochain s’enracine directement dans l’amour d’un Dieu qui appelle à lui répondre. «Comme je vous ai aimés, dit Jésus, aimez-vous les uns les autres» (Jn 13,34).

N’oublions pas que c’est l’amour vécu dans la première Église, qui a ouvert les yeux de nombreuses personnes, fort impressionnées par le style de vie inspiré par l’Évangile. En des temps troublés, une alterna-tive était offerte, qui aidait les personnes en recherche à compren-dre le sens de la prédication évangélique. Comment la faire accepter autrement? Comment faire admettre que le Très-Haut «qui habite une lumière inaccessible» (1 Tm 6,16), soit aussi «amour» (cf. 1 Jn 4,8)? Que nous, les hommes, puissions devenir ses enfants (cf. Rm 8,14)? Com-ment faire rayonner cette merveille qu’est la foi? Comment, sinon par une manière fraternelle de vivre (cf. Mt 23,8)?

Il apparaît clairement chez Paul que tout ceci n’a rien de romantique. Dans sa prison, l’apôtre a rencontré Onésime, un esclave fugitif, et il a su le gagner à la foi chrétienne. Il le renvoie ensuite chez son maî-tre Philémon. Paul s’identifi e tellement avec ce nouveau chrétien en diffi culté, qu’il propose de dédommager le maître des pertes causées par l’évasion d’Onésime. Mais à Philémon, déjà chrétien, il recom-mande d’accueillir cet homme comme un frère et non plus comme esclave. Puisqu’il est chrétien, Philémon est purement et simplement

Un repère vivant

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tenu de témoigner d’un amour fraternel bien concret (cf. Phm 15).

72. Quand nous lisons l’Écriture sans a priori, nous sommes frappés par ses appels à l’amour fraternel entre croyants. La Bible est étonnam-ment concrète: elle demande que les chrétiens «s’aiment les uns les autres» (Jn 13,34), qu’ils persévèrent dans l’amour mutuel (cf. 1 Th 3,12) et qu’ils aiment leurs frères (cf. 1 P 2,17). Paul le dit très clairement: «Par l’amour, mettez-vous au service les uns des autres», et il ajoute: «Car la loi tout entière trouve son accomplissement en cette unique parole: «Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Ga 5, 13-14).

Solidaires avec les personnes en diffi culté

73. Bien sûr, cet amour n’enferme pas les chrétiens dans un ghetto. Tout comme Dieu qui en est la source, l’amour tend à déborder et à se répandre. C’est le deuxième fruit de la Parole de Dieu. Autant que de fraternité, l’Église a besoin de solidarité: elle doit être un si-gne, aussi humble soit-il, de l’amour inimaginable de Dieu pour toute l’humanité. Nous ne devons pas négliger ce vaste intérêt pour ceux «du dehors». Même s’il est vrai qu’en période de grandes mutations, l’Église risque de se centrer sur ses problèmes internes. Aussi sérieux que soient ces derniers, il y a, en dehors de l’Église, une énorme ma-jorité de non-chrétiens à qui l’Évangile est prioritairement destiné. Il nous faut redécouvrir cette ouverture missionnaire.

Notre mission vers l’extérieur est étroitement liée au style de vie vécu à l’intérieur de l’Église. Même si elle a des hauts et des bas, une com-munauté qui vit l’amour est déjà un signe pour qui est en recherche. Le fait même d’une vie chrétienne est déjà un signal en soi: «une belle conduite» (1 P 2,12) dans laquelle Dieu se révèle, parfois sans parole, à qui ignore la foi. Aussi restreinte et limitée soit-elle, une commu-nauté de frères et de sœurs unis par une même amitié, est déjà une richesse qui rayonne sur son entourage. La paroisse de demain ne doit-elle pas devenir une communauté chaleureuse, où les personnes puissent se sentir chez elles? Comment pourrions-nous dire: «Venez et vous verrez» (Jn 1,39) si ne transparaissait presque rien du style de vie chrétien?

Le prochain est plus proche

qu’on ne le croit

Comme une source

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74. La vie selon l’Évangile ne cherche évidemment pas à attirer l’at-tention. La main gauche n’a pas à savoir ce que fait la droite (cf. Mt 6,3). Mais l’Église n’existe pas pour elle-même; elle est là pour le monde. C’est là qu’elle doit être un signe, un sacrement d’un amour divin sans mesure. Sa vocation n’est pas de se préserver mais d’être prophétique. Car «Dieu notre Sauveur (…) veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité» (1 Tm, 2, 3-4).

75. Les chrétiens ne peuvent pas rester inertes face à la peine d’une l’humanité blessée. Nous partageons «les joies et les espoirs, les tris-tesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent»19. Il nous faut donc être à l’écoute de la voix des hommes et des femmes en détresse. «Celui qui a des oreilles, qu’il entende ce que l’Esprit dit aux Églises» (Ap 2,7). Car c’est là aussi que Dieu parle, et cette Parole-là exige également une lecture atten-tive, une réfl exion et une prière en vue d’un discernement adéquat. Une telle sensibilité nous apprend à relire le présent à la lumière de la Bible, en même temps qu’elle nous incite à la sympathie et à la solidarité. Ce n’est qu’ainsi que la Bonne Nouvelle du Christ peut être annoncée. Et nous ne ferons alors rien d’autre que ce qu’a accompli Jésus lui-même: dire Dieu en agissant (cf. Jn 1,18).

Pistes pour l’échange

1. Comment la catéchèse pourrait-elle davantage encore permettre à Dieu de nous parler? 2. Qu’est-ce qui vous frappe le plus dans la liturgie de la Parole? Avec quoi est-ce en lien? Et comment cela pourrait-il être développé plus encore?

3. Le texte plaide en faveur du dimanche. D’après vous, que pourrait-on faire dans votre paroisse, votre communauté ou votre famille?

La Parole de Dieu

à travers le cri des hommes

et des femmes

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4. Donnez quelques exemples d’une vie prophétiquement évangélique.

5. Comment la diaconie pourrait-elle s’inspirer davantage de l’Écriture?

76. Concluons. Que ce soit par la catéchèse, les célébrations ou la manière concrète de vivre, il faut nous laisser toucher par cette mer-veille qu’est un Dieu qui parle et qui nous aime sans mesure. Si cela nous tient à cœur, ce n’est pas seulement pour notre propre profi t, mais aussi pour celui de la multitude qui ignore le Christ.

Pas plus que les années précédentes, nous ne plaidons en faveur de toutes sortes de nouveaux projets. Il ne s’agit pas d’abord d’en faire encore plus. Mais dans tout ce que nous réalisons déjà, nous pouvons nous ressourcer par le contact avec la Parole de Dieu. Celle-ci peut résonner dans la catéchèse et toucher les cœurs lors des célébra-tions. Elle peut se concrétiser dans la vie fraternelle entre croyants et dans la solidarité avec les personnes en détresse. C’est ainsi que notre communauté chrétienne devient une Bible vivante et un signe pour son entourage. Tel est notre ardent souhait pour cette nouvelle année pastorale. Notre Église deviendra alors aussi missionnaire que le sont les Écritures elles-mêmes. Elle répondra alors à sa vocation:

«Une lettre du Christ (…) écrite non avec de l’encre, mais avec l’Esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierre, mais sur des tables de chair, sur vos cœurs» (2 Co 3,3).

Les évêques de BelgiqueSeptembre 2008

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Notes

1 D. BONHOEFFER, Lettre à Elisabeth Zinn, le 27 janvier 1936, dans F. SCHLINGENSIEPEN, Dietrich Bonhoeffer 1906-1945. Une biographie. Paris, Salvator, 2005, p. 122.2 M. DELBREL, Le moine et le nagneau (Œuvres complètes, 4). Mon-trouge, Nouvelle Cité, 2006, p. 186.3 AUGUSTIN, Confessions, X, 27,38 (trad. P. de Labriolle ) (PL 32,795).4 W.J. OTTEN, De bedoeling van verbeelding. Zomerdagboek. Amster-dam, De Prom, 2003, pp.19-21 (traduction).5 E. STEIN, Lettre de Sr Thérèse-Bénédicte à Mère Petra Brüning o.s.u., le 23 juin 1935 (Lettre 399), dans Edith Stein - Gesamtausgabe, 3, 142 (traduction).6 GUILLAUME DE SAINT-THIERRY, Lettre aux frères du Mont-Dieu, 121 (coll. Sources chrétiennes, 223). Trad. de J. Dechanet. Paris, Cerf, 1976, p. 239.7 VATICAN II, Constitution dogmatique sur la révélation (Dei Verbum), n° 24 et 21.8 Ibidem, n° 25. La citation provient d’AMBROISE, De offi ciis ministro-rum, 1, 20,88 (PL 16,50).9 ERASME, Exhortation à la lecture de l’évangile (Notulae Erasmianae, V,1). Traduit par J.F. Cottier et A. Vanautgaerden, s.j.. Brepols et Musée de la Maison d’Erasme, 2005, pp. 80-85.10 Dei Verbum, n° 21.11 VATICAN II, Décret sur l’œcuménisme (Unitatis redintegratio), `n° 21.12 Dei Verbum, n° 2.13 VATICAN II, Constitution sur la sainte liturgie (Sacrosanctum Concilium), n° 7.14 Cf. Dei Verbum, n° 21.15 ORIGÈNE, Homélies sur l’Exode, 13,3 (Coll. Sources chrétiennes, 16). Trad. P. Fortier. Paris, Cerf, 1947, p. 263.16 Sacrosanctum Concilium, n° 24.17 JÉRÔME, Commentaire sur Isaïe, prologue (PL 24,17).18 AUGUSTIN, Sermon 179,1 (PL 38,966).19 VATICAN II, Constitution pastorale sur l’Eglise dans le monde de ce temps (Gaudium et spes), n° 1.

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Table des matières

Introduction 31 | La merveille d’un Dieu qui parle.

La parole révélatrice 5Appelés par la Parole de Dieu 6Passer de «chercher» à «être recherché» 8Pistes pour l’échange 112 | La parole de Dieu dans l’Ecriture.

La Bible 12«Écoute Israël» 13Une histoire parlante 16Lecture spirituelle de l’Ecriture 18

Lire 20Réfl échir 21Prier 22

Boire a la source 23Pistes pour l’échange 263 | Appelés et rassemblés.

La Parole dans l’Eglise 27Dieu, l’Eglise en l’Esprit 28L’annonce, interpellation de Dieu 30

Se laisser guider par le récit 31Une catéchèse d’initiation 33

La Liturgie, Parole de Dieu en action 34La Parole se réalise 35L’importance de la liturgie de la Parole 36

La diaconie: voyez comme ils s’aiment 39La Parole de Dieu, chaque dimanche 39Une Parole non extérieure au monde 41Frères et sœurs les uns des autres 42Solidaires avec les personnes en diffi culté 43

Pistes pour l’échange 45Notes 46Table de matières 47 Autre publications 48

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Dans la série Déclarations des évêques de Belgique sont déjà parus:

1. La vocation de l’Europe (épuisé)

Construire l’Europe (commentaire) (épuisé) 2. Pour la défense des plus faibles (épuisé) 3. L’onction des malades (épuisé) 4. Célébrer l’eucharistie aujourd’hui (épuisé) 5. Désarmer pour survivre 0,24 € 6. L’année de l’enfant 0,12 € 7. Le renouveau charismatique (épuisé) 8. Responsabilité des chrétiens vis-à-vis de l’Europe d’aujourd’hui et de demain 0,24 € 9. Les chrétiens et la crise Commentaire sur les chrétiens et la crise 2,72 €10. L’année Internationale des Personnes Handicapées (épuisé)11. A l’écoute de Notre-Dame 0,40 € 12. Désarmer pour construire la paix 0,37 €13. Pour la visite du Pape Jean-Paul II (épuisé)14. Une Nouvelle Evangélisation 0,25 €15. Une Année de la Famille 0,30 €16. Centenaire de la mort du Père Damien 0,30 €17. La canonisation de Frère Mutien-Marie 0,30 €18. La loi relative à l’interruption de grossesse 0,61 €19. La vie religieuse 0,35 € Document de travail 1,24 €20. Rerum Novarum 0,35 €21. L’accompagnement des malades à l’approche de la mort 0,45 €22. Migrants et réfugiés parmi nous 0,74 €23. En route vers l’an 2000 0,62 €24. Au souffl e de l’Esprit, vers l’an 2000 1,24 €25. Dieu, notre Père, que ton Règne vienne! 0,99 €26. Choisir le mariage 0,99 €27. L’An 2000: Année du Jubilé 1,36 €28. L’envoi des chrétiens dans le monde 1,49 €29. Envoyés pour servir. Année de la diaconie 3,00 € L’école catholique au début du 21e siècle 0,35 €

Die Katholische Schule zu Beginn des 21 Jahrhunderts 0,35 €30. Envoyés pour annoncer 3,70 €31. Appelés à célébrer 3,00 €32. Guide pratique 1,20 €33. Seigneur apprends-nous à prier 3,00 € Guide pratique 6,00 €34. Devenir adulte dans la foi 3,00 € La catechèse dans la vie de l’Eglise35. Ne savez-vous donc pas interpréter les signes des temps? 3,00 €36. Grandir dans la foi 1,25 € Note de travail à propos de la déclaration devenir adulte dans la foi

Rencontrer Dieudans sa Parole

Grandir dans la foiEditions Licap sprlrue Guimard 1 | 1040 Bruxelles | www.licap.beISBN 978-2-930472-20-1 NUR 700D/2008/0279/011€ 3.10