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OliviaDean

DIVINEINSOLENCE

Volume3

ZROM_003

1.Lemanègedel'amour

Un pied devant l’autre. Et on recommence. J’avance et j’ai l’impression que je vais perdrel’équilibre.Jeviensdeplanterl’amourdemavieparSMS!Pourtanttoutsemblaitenfinsurlesrails.Je commençais à peine à le connaître véritablement, même si j’étais raide dingue de lui depuislongtemps!

Depuisledébut,quoi!

Son nom déjà : Alec Mendelssohn-Freeman. Son job : je redoutais qu’il soit gigolo mais endéfinitive, il est seulement PDG d’une multinationale et milliardaire. Ses origines qui le rendentirrésistible:samèreestamérindienne.

Tum’étonnes!

Mais après un week-end idyllique en Toscane où j’ai expérimenté, par ordre de priorité, lesorgasmesenchaînes,unevariantedela«poledance»entalonsaiguille,levoyageenjetprivé,unebaladeàchevaletlesspaghettinondéshydratés,Alecm’aencoreplantéeetadisparudemesradars.

Depuisquej’airencontrécetype,c’estcommesij’avaisembarquésurlesmontagnesrusses!

Dixjoursàpeineetjesuisdéjàpasséepartouteslesémotionsqueprocurelemanègedel’amour,alorsquej’aihorreurdelafoire.Maisqu’est-cequejenedétestepascematin,jemeledemande?Stop!Jeneveuxpluspenseràlui.C’estterminé.

Aïe !Ce n’est plus une partie de poker.Ça tourne au pouilleuxmassacreur, ce jeu débile où leperdantestpincéjusqu’ausang.

Allez ! J’aid’autrescentresd’intérêtquecemachod’Alec. J’aiunecarrièreàmeneretunbest-selleràécrire,moi!Saufqu’enplus,j’aiégarémoncahierdenotes!

Jenesaispascequej’aipuenfaire.Jeperdsvraimentlaboule!Jecroisquejevaispleurer.

Jepousselaportedu4piècesoùleséditionsWoolfontéludomicileetjesuisaussitôtsaisieàlagorgeparuneodeurdetabacmêléeàcelleducafénoir.Aude,mapatronne,estinstalléeàmaplace,danscetteespècedehallminusculequimesertdebureau.Ellefumeunecigarette,lespiedsposéssurma table. Quand elle me voit entrer, un large sourire fend son visage émacié et elle se met àapplaudir.

Qu’est-cequej’aifaitencore?

Je me demande si c’est un piège et je cherche quelle faute j’aurais bien pu commettre quandLouanesortdesonbureausansmêmemesalueretouvrel’uniquefenêtrepouraérer,furax.C’estsûr,j’aifaituneénormebourde!Sinon,pourquoicettepimbêchemelancerait-elleceregardassassin?

Parcequ’ellenepeutpasmesaquer,pardi!

–Bravo,mademoiselleGentillac!s’écrieAudeenselevantd’unbond,renversantaupassagelecendriersurmonfauteuil.Etmerde!Faudranettoyerça…

J’imaginequec’estmoiquivaism’ycoller?

Vous êtes une perle,ma petite Romane ! Je le savais ! continueAude sans prêter attention à lamauvaisehumeurdesonassociée.

–Qu’est-cequimevaut cet accueil ? demandé-je enmedétendant unpeu alors queLouanemefoudroielittéralementdesyeux.

–SarahAckerman!m’annonceAude,victorieuse.

Si aumoins je pouvais me pincer, çame ferait du bien.Me découvrirais-je quelques tendancesmasochistes?

–Figurez-vousqu’ellem’atéléphonéhiersoir,continue-t-elle.Enfin,cettenuit.Elleveuttravailleravec nous. Je ne sais pas ce que vous lui avez raconté vendredi, ma chère Romane, mais Mme

Ackermanest partantepourune série d’entretiens.On le tient, cebouquinqui vanous sortir de lapanade!

–C’estgénial!m’enthousiasmé-je.–Çava!Inutiledes’emballer,mecoupesèchementLouane.Rienn’estencoresigné.Etnerestez

pas plantée là comme un poireau. Vous voyez bien que c’est un véritable capharnaüm ici ! Vouscroyezqu’onalesmoyensdesepayerunefemmedeménage?

Assistanted’éditionetagentd’entretien.Cedoitêtreça,leposteévolutif…

Elle s’attendà ceque je répondemais jepréfèregarder le silence et obéir commeunbonpetitsoldat,histoiredel’exaspérer.Secrètement,j’exulte!Jesuistellementfièredemoi.Franchement,jenepensepasyêtrepourgrand-chosedans ladécisiondeSarahAckerman.Enrevanche,c’estbienmoilaresponsabledelafureurdeLouane.

Çamemetdubaumeaucœur.

–Faut-ilquejepasseaussil’aspirateur?demandé-jeavecunsourireaussifaussementsoumisquedémoniaque.

Commejel’avaissupposé,Louanedevientplusrougequ’uncamiondepompierets’apprêteàmehurlerdessusmaisAudes’exclame:

– Pas le temps ! Sarah Ackerman est en route avec son avocat pour discuter desmodalités ducontrat.Ilsvontarriverd’uneminuteàl’autre.

À l’idée de revoir cette femme, jeme sens faiblir de nouveau. Je repense àma visite éclair devendredietàlafaçondontjemesuisenfuiedechezelleendécouvrantlaphotod’elleetd’Alec.Direquej’aiprissatantepoursamaîtresse!

–Mescheveux,çava?medemandeAude,enmemontrantlepalmierjauneetfilassequ’elleasurlatête.

–Oui,trèsbien,réponds-je.

Onnepeutpastoujoursdirelavérité…

Onfrappedéjààlaporte.Jesursauteetmoncœurestprisdepalpitations,exactementcommesiAlecenpersonneallaitseprésenterdevantmoi!

–Attendezuneminute,murmureAude.Jevaisdansmonbureau,jenevoudraispasqu’ellepensequenousl’attendonscommeleMessie.

–Allezouvrir!s’exaspèreLouane,quimevoitfigéependantqu’elleréajustesajupe.

Je m’exécute et me trouve face à une Sarah Ackerman insoupçonnée en survêtement mauve,casquettejaunevisséesurlatêteetbâtonsdemarche,accompagnéed’unhomme…désagréablementfamilier!

Non,cen’estpassonentraîneurmaissonavocat.Quellehorreur:PauldeThyli!

Ilmefixe,l’airsurpris,puisreprendaussitôtsacontenance.Incapabledebouger,prisedesueursfroides,jemefige.Louaneseprécipiteversmoietlesinviteàrentrer.

Jenesaispasexactementcequ’ilsepasse.Audeestsortiedesonbureau,jecrois.Ellepépiedansun coin du hall. J’entends à peine ce qui se dit, tout entière aspirée par le bourdonnement demesoreilles.

C’estuncauchemar!

–RomaneGentillac!s’exclamel’avocatdeMmeAckermanensaisissantmamainpourlaserrer.Tunemereconnaispas?J’aitellementchangé?

Non,pasdutout.

Paul, lemeilleuramidemonfrèreWando,estexactement lemêmeque lorsque je l’aiperdudevue.Quelques ridesd’expression autourde sesyeux clairs tout auplus et les cheveuxplus courts,peut-être,sinonilalemêmesourirecarnassierqu’àl’époque.

Ettoujoursunetêtecertifiéede«salecon».

–Oui,biensûr,Paul, jemesouviens,réponds-jeenretirantmamainmoitedelasienne, toutenfaisantuneffortsurhumainpournepastrahirmonémotion.

–Vousvousconnaissez!s’émerveilleSarah.J’adorelescoïncidences.C’estunsigne!Untrèsbonsigne,qu’enpensez-vous,madameLussac?

–Assurément ! renchéritma patronne, ravie.Ce projetme semble démarrer sous lesmeilleursaugures.

–Nousnousconnaissonsdepuisuneéternité!N’est-cepas,Romy?lancePaulenmeglissantunclind’œilquimedégoûteinstantanémentetm’empêchederépondre.

Agacée sans doute que je lui vole la vedette pour la seconde fois depuismon arrivée, Louaneproposeenforçantunsourire:

–Bien,etsinouspassionsdanslasalledeconférences?

Uneanciennechambrede8m2avecunetabledecuisineetcinqchaises.Laissez-moirire,j’enaibesoin.

ToutespénètrentdanslapetitepièceattenantealorsquePauls’attardedansl’entrée.Jem’installeàmonbureauetallumemonordinateur,évitantdeluiparler.Ilmedévisagemaintenantsanslamoindreretenue.Jen’osepasleregarder,jeneveuxsurtoutpasqu’ilpuisses’enorgueillirdemontrouble.

–Toujourscraquantecommeunebellepomme,murmure-t-ilensepenchantversmoi.

S’ilpouvaits’étrangleravecunmorceau!Cequiestsûr,c’estquej’enaiunentraversdelagorgeet que je le lui cracherais bien à sa face d’enfoiré.Mais j’ai l’impression d’avoir dix-sept ans denouveauetd’êtresansdéfense.

–C’estparlàqueçasepasse,trouvé-jelaforcededirefroidementenmontrantlasallederéunion.–Biensûr.J’enperdraispresquemaconscienceprofessionnelle ! ironise-t-ilenallant rejoindre

lesautresavantdefermerlaportederrièrelui.

Quelledécouverte!PauldeThyliauneconscience.

Je tremble comme une feuille et tente de retrouver un semblant de sérénité quand jeme rendscomptequejen’aipasprisletempsdenettoyerlescendresqu’Audearenverséesunpeuplustôtsurmonfauteuil.

C’estbienunpantalonblancquej’aimiscematin?!

–Vouspouvezvenir,s’ilvousplaît?

Cette voix monocorde, défaite, c’est celle de Louane qui vient de rouvrir la porte. Elle doits’adresser à quelqu’un d’invisible, étant donné qu’elle ne me regarde pas. Mais elle insiste ensoupirant:

–MmeAckermantientàcequevoussoyezprésente,Romane.

Ok.Restonspromêmeavecunpantalonpourrietl’angoissedemetrouverdanslamêmepiècequecenuisiblePaul.

Je rentreà regretdans la salle, lesmainssurmonpostérieurpourcacher les tachesquidoivents’étalerenlonguestraînéesgrises,etm’assoissurlaseulechaiseencorelibre.Justeenfacedupou,lui-mêmeattabléprèsdeSarahAckerman.

Paul profite de la situation pour me détailler. Il me jette des coups d’œil tout en sortant desdocumentsdesonattaché-case.Monmalaisenefaitquecroîtreetjenepeuxm’empêcherdevérifier

quelesboutonsdemachemisesontbienfermésjusqu’enhaut.

– Bien, nous pouvons commencer, déclare Aude en prenant un ton professionnel que je ne luiconnaispas.Sicelavousconvient,madameAckerman,jeproposequeLouaneMarchandsechargedemenerlesentretiensetrédigevos«mémoires».Elleadéjàsuperviséplusieurspublications…

–Dontj’aiécritmoi-mêmelespréfaces,préciseLouane.Nouspouvonsorganiserdestranchesdetravail…

–Unepetiteminute, la coupeSarah. Jenedoutepasdevos compétences,MissMarchand,maisjusqu’àmaintenant,j’aitraitéavecMissGentillac.

Et…

Tous les regards se tournent vers moi. Celui de Sarah, brillant d’un feu étrangement bleu etdansant, celui dePaul,métallique et quimedonne l’envie soudainedeprendremes jambes àmoncou,etceuxd’AudeetdeLouane,circonspectspourl’une,meurtrierspourl’autre,stupéfaitspourlesdeux.

Ilsattendentcertainementuneréactiondemapartmaisjerestesidérée.Sarahmesourit,raviedeson effet, et affiche une décontraction qui me rappelle immédiatement son neveu. Au lieu derassembler mes forces pour sortir un mot intelligible, je cherche dans son visage une vagueressemblanceavecceluid’Alec.

Non.Paspincer!

Jemesensflattéemalgrémoi,d’autantqueLouanesedécomposeetj’assiste–nonsansplaisir–aucombatintérieurqu’elleselivreàelle-mêmepournepasexploser.Audefaitdesonmieuxpourcachersastupeurettirenerveusementsursacouette.

Paulcoulesurmoisonregardlibidineuxtoutencaressantseslèvresduboutdesonstylo.Non!Cen’estpaspossible!Mêmesij’adoreraisécrirecettebiographie,jenepeuxpastravailleravecuneclientedePauldeThily!

–Maisenfin,MlleGentillacn’estqu’assistante!faitremarquerLouane,mesoulageantdusilence,mêmesic’estpourdireunevacherie.

–Jecomprends,répondl’Américaine,toujoursaussicool.Tantpis,j’auraisadorétravailleravecWoolf,conclut-elle,détachée,enfaisantminedeselever.

Alecauraitpudirecegenredechose…C’estunpeucequ’ilafaitenmeplantantdevantchezmoiavecsacartedevisite…

–Unepetite seconde ! intervientAude,qui sembleêtreàdeuxdoigtsd’encolleruneà sachèreassociée. Nous pouvons discuter et trouver un arrangement. Personnellement, je ne vois pas lamoindreobjectionàcequeRomanemènecesentretiensetrédigelabiographiedeMmeAckerman.

–Jen’auraispasderéticencemoinonplussiMlleGentillacavaitlescompétences,maiscen’estpaslecas,souffleLouane,dévoilantdepetitesdentsparfaitesdansunsourirecrispé.

Jeluimontreraisbienmes«compétences»àcelle-là!

– Permettez-moi d’en douter, MissMarchand, intervient Sarah. Je pense au contraire que cettepetiteatouteslesqualitéspourlejob!

Jen’arrivepasàycroire!JesuisflattéeetjemeréjouisdeladéconvenuedeLouane,maisvoilàqu’ellesparlentdemoicommesij’étaisabsente.Jemedécideàintervenir:

–Jetiensàdirequejesuistrèshonoréeparcettemarquedeconfiance,madameAckerman.Ilestvraiquejenesuisqu’assistanteetquejen’aijamaisrédigédepréface,dis-je,faussementhumble,enfixantLouanedans lesyeux.En revanche, j’ai publiédes articlesdansdes revuesde sociologie etmêmeécritquelquesnouvelles.

– Il y a tout de même une différence entre rédiger deux ou trois paragraphes et écrire unebiographie,noteLouaneentapotantsurlatable.

–C’estRomanequimèneralesentretiens,déclareAude,clouantlebecàsacomparse.Ledébatestclos.Neresteplusqu’àréglerquelquesdétails.

ÉditionsWoolf:51%departspourAude,49%pourLouane!Lematchs’arrêtelà.

–Perfect!s’écrieMmeAckerman.JevoudraisparleravecMissGentillacen têteà têtesicelanevousdérangepas.

Audeselèveaussitôtetprietoutlemondedelasuivreàl’extérieur.Louanefaitpresquetombersachaise en se redressant et quitte la salle sansme regarder.Paulme fixe et unnouveaumalaisemeprendàlagorgemaisheureusement,ilsortluiaussi.

Jenesaispascequejedoisfaire.Saisircetteopportunitéincroyableourefusertoutsimplementcetteoffre?Paulestl’avocatdeSarah,jenepeuxpasenvisagerd’avoiraffaireàlui!Jenepeuxpasnonplusmedirequejevaistravailleraveclatanted’Alecalorsquenousavonsrompu.

Maisceseraitpeut-êtreuneoccasiondelerevoir…

Auxprisesavecmescontradictionsetexcédéequ’Alec traîneencoredansmatête–alorsquejedevraisêtretotalementconcentréesurmonavenirprofessionnel–,jemepincesifortqu’unpetitcridedouleurs’échappedemeslèvres.

–Toutvabien,mapetite?medemandeSarah,étonnée.–Oui.Trèsbien…

Jesuisjusteenpleineconfusion…

–Jetenaisàvousrendrececi,continueSarahensortantdesonsacàdosmoncahierdenotes.Vousl’avezoubliéchezmoivendredi.

Jemerappellemaintenant!J’aivulaphoto, jemesuis levéecommeunehystérique, j’aiouvertmonsac,yaifourréenquatrièmevitesseleslivresquejedevaisrécupéreretc’estsansdoutelàquemoncahieraglissé.

– Jedoisvousconfierque j’ai toutdévoré ! Je saisqueçane se faitpas…Mais çam’est égal.

Qu’est-cequec’estaujuste,unjournalintime?–Non,réponds-je,complètementsonnée.Cesontdesidéesjetéescommeça…–J’adorevotrestyle,mapetite,mecoupeSarah.C’estintelligent,c’estfin,c’estsansconcession.

Bref,vousavezdutalent!C’estpourçaquejeveuxquecesoitvousquirédigiezmabiographie.–Merci,balbutié-jeensentantmonterenmoiunejoietouteneuve.– Je ne veuxpas vous contraindre. J’accepterai de travailler avecWoolfmême si vous refusez.

Alorsnevousinquiétezpaspourvotrejob.J’aimislapressionsurvospatronnescarc’estcommeçaque çamarche. Je connais la vie, ça fait cinquante-cinq ans que je la pratique. Par contre, si vousacceptez, c’est maintenant ou jamais, et c’est à New York que ça se passe. Je dois rentrerimpérativementauxStatespourpréparermaprochaineexpéditionauPôle.NousferonslesentretienschezmoietjemettraiàvotredispositionunappartementdansManhattan.Qu’endites-vous?

Putain!Bordel!C’estgénial!

Je regardeSarahcomplètementabasourdie, lecœurbattant.Ellevientdemedireque j’avaisdutalent et qu’elleveutque j’écriveun livre àNewYork. Jen’aurais jamais espéréqu’un trucpareilm’arrive,passijeune!

Maisj’hésite…

Quoi?Jerefuseraisdevoirmonrêved’écritureseréaliseràcausedePaulquiressurgitdansmonexistencecommeundiablesortd’uneboîte?Iln’apasfaitassezdedégâtsdansmaviepeut-être?EtAlecestàNewYork…

Maisqu’est-cequejemeraconte!Çavapasbien!

Sijepars,c’estàlaconquêtedemoi-mêmeetcertainementpaspourreconquérircesalemacho.Ledestinmefaitsigneetj’aitropd’ambitionpourlaisserpassermachance.Madécisionestprise.JeregardeSarahdanslesyeux,luioffremonplusbeausourireet,d’untonferme,jeluidis:

–J’acceptevolontiers,madameAckerman.–Perfect!Demain,NewYorkestàvous,mapetite.

2.Çadécolle!

LatêtedeLouanequandSarahaannoncéraviequejel’accompagnaisàNewYorketqu’onpartaitle lendemain ! Je ne me lasse pas de ce souvenir. Elle est devenue verte sous son fond de teintporcelaineets’estaffaisséecommeunsoufflé.

EtAude qui n’avait qu’une hâte, que cette «ChèremadameAckerman », comme elle l’appelle,signelespapiers.Jeluisuisreconnaissantemêmesi jenemefaispasd’illusions.JesaisqueseulesonambitionpourWoolfaconvaincuAudedemelaisserpartir.

Hier, en sortant de la salle de réunion, j’avais une telle confiance qu’ilme semblait que j’avaisgrandi de 30 centimètres en quelques minutes. Paul me fixait toujours, croyant sans doutem’impressionner,maisj’aisoutenusonregardetc’estluiquiafiniparbaisserlesyeux.

Finalement,c’estmaplusgrandevictoire!

Mêmemaintenant,alorsquej’attendsd’embarquer,j’aidumalàcroirecequim’arrive.Inutiledepréciserquej’aiuséetabusédelatechniquedupincementdepuishier,pourmedirequejenerêvaispasetpourdétournermespenséesd’Alec.

Techniquenulle,inutiled’essayer.

Carenpréparantmesbagages,cherchantmonpasseporttoutenessayantd’expliquerl’affaireàJoet Lucas abasourdis, je n’ai pas cessé de penser à lui. Comme quoi les femmes ont vraiment uncerveaumultitâche!

Enfin,çadépendlesquelles,biensûr…

C’est sûrquecollaboreravecsa tantenevapasm’aideràm’arracherAlecducœur. Jemesuismêmedemandésicen’étaitpasluiquiavaitconvaincuSarahdem’engager!Jesaisquec’estencoreundéliredontj’ailesecret.Non!SarahAckermanm’aengagéeparcequej’aidutalent.

Quoi,prétentieuse?Non,jedopemaconfiance.

Jeparsversmondestin,j’ensuissûre.Etcequiestincroyable,c’estqueJomarcheverslesienenmêmetempsquemoi.Àcetteheure,elleestdéjàenvolpourKhartoumoùellevaprendreenchargela logistique d’uneONG. Et ce pauvre Lulu qui reste seul à Paris, à se demander comment il vaannonceràsonpèrequ’ilneserajamaistradermaiscuisinier.

–Vousmesemblezbiensongeuse,remarqueSarah.–Toutçaest tellement inattendu,vousmeconduisezvers l’inconnu,madameAckerman.Jesuis

toutexcitéeettellementreconnaissante!réponds-je.–Vous allez voir, vous allez adorer ça.N’allez pas vous imaginer que je sois charitable.Vous

n’avezriend’unoiseaudebasse-cour,vousêtesdelaracedesoiesmigratrices.J’ail’œil,faites-moi

confiance. Et par pitié, honey, appelez-moi Sarah ! Vos « madame Ackerman » me donnentl’impressiond’avoirmilleans.

Honey!

Quandnouspénétronsdansl’appareil,unfrissond’angoissemeparcourtdelatêteauxpieds.Jem’installeprèsdeSarahdanslesimmensesfauteuilsinclinablesdelaclasseaffairesetjemefaislaréflexionquec’estquandmêmebeaucoupmieuxquelaclasseéco.

Maisunpeumoinsbienquelejetprivé…Non,jen’aipaspenséàquij’aipensé!

–Jevaisvousexpliquercommentvasedéroulernotrecollaboration,m’annonceSarahquiadéjàenlevéseschaussuresetenfileungrospullenlaine.Vousêtestouteblanche!Vousn’avezpaspeurdel’avion,aumoins?

–Pasdutout!mens-je.– À partir de demain 9 heures, nous aurons deux semaines pour mener les entretiens. Vous

disposerezensuitededeuxmoispleinsàParispourrédigerlabiographieafinquelelivresortedébutnovembrepourresterdanslecadredelarentréelittéraire.Çacoïncideavecmonretourd’expé,ceseraun excellent coupde com’.Vous imaginezbienque jene serai pas joignable sur labanquise,continue-t-elleenmettantdeschaussettesdetrappeurquiluimontentjusqu’auxgenoux.

Ellem’inquiète.Est-cequ’ilvaaussifaire-40danslacabine?

–VousaurezdoncmonamieBrookecommeinterlocutrice.C’estellequivalideravostravaux.Jeluifaisentièrementconfiance,ellemeconnaîtmieuxquemoi-même.

–Trèsbien.Est-ceque…–Jevaisvouslaprésenterrapidement,oui.ElleestàNewYork.

J’avaisoubliéqu’onavaitdumalàenplaceruneavecelle…

–Quecesoit clair, continueSarah.Vousdevezécrireunportraitdemoi sansconcession. Jenesuispasunange,mapetite,j’aiunsalecaractère,jesuisterriblementbavarde,unbrinégocentriqueetjenem’encombrenidepréjugésnidemoralebien-pensante.

–Çame convient, réponds-je en crispantmes doigts sur les accoudoirs pendant que leBoeings’arrachedelapistedanslevrombissementtonitruantdesmoteurs.

Jeprofited’unsilencedeSarah,toutabsorbéeàregarderlesols’éloigner,pourposerlaquestionquimetaraudedepuislaveille:

–EtPauldeThylidanstoutça?A-t-ilundroitderegard?–Non, ce cher Paul ne s’occupe que de la partie contractuelle,me répond-elle, le nez collé au

hublot.

Ellesetourneensuiteversmoiavecunpetitsourireencoin,etajoute:

–Nevousinquiétezpas,honey,vousserezamenéeàlerevoiràlaparution.C’estunvieilamiouunancienamant?

Quoi!

–Ne répondezpas.Qu’est-ceque jevousdisais !Vouspourrez ajouter« indiscrète» à la liste.J’adoreleshistoiresd’amourcontrariées,c’estmoncôtéfleurbleue,quevoulez-vous?

Jepréfèrenepas relever sessous-entendusscabreux. Jen’aipas lamoindreenviedeme lancerdansdesexplications.C’estmoiquidoisrecueillirlesconfidencesdeSarah,pasl’inverse,etjem’enréjouis.Jesuisaumoinsrassuréesurunpoint:jen’auraipasaffaireàcetteorduredePaul.

–Vousvoulezunalcoolfort,mapetite?mepropose-t-elleenappelantl’hôtesse.–Non,merci.

À14heures,çanemeditriendutout…

Sarahtiredesonsacuneboîtedesomnifères,enjettedeuxdanssaboucheetfaitglisserletoutenavalantculsecl’intégralitédesongintonicbientassé.

–OnserevoitàNewYork,honey!melance-t-elle.

Ellesemetunbonnetsurlatêteetunmasquedesommeilsurlesyeuxavantd’inclinersonsiègeenpositioncouchée.

Jen’aijamaisvupersonnes’endormiraussivite!Elleamislepaquet,maisquandmême!Ilnemeresteplusqu’àregarderunfilm.Çam’éviterad’écoutertouslesbruitsétrangesdelacarlingue.

Je commande finalement une coupe de champagne pour fêtermon succès et, un casque sur lesoreilles,jemelaisseentraînerdanslestribulationshilarantesdeWoodyAllen.

Benoui,jel’adore!Unnévroséquiaréussi,çam’encourage…

DeuxheuresdevolécouléesetSarahdorttoujoursàpoingsfermés.Unstewardtrèsaffablevientme demander si j’ai besoin de quelque chose. J’ai l’impression que si j’exigeais un bain au laitd’ânesse,làtoutdesuite,ilmerépondraitquec’estpossible.Jemecontentedequelquesjournauxetd’un«théblancparfuméàlabrumederose».

Moinonplus,jenesaispascequec’est…

JefeuilletteleNewYorkTimesetuncoupdepoignarddanslapoitrinemefaitredresserlesiège.Unarticleannonce:«UneperteinestimablepourMendelssohnComputers».C’estlaboîted’Alec!Ilestquestiondusuicidedudirecteurfinancierenpostedepuisvingtans.UncertainPeterSantorro.

Suitunbrefhistorique.GeorgesMendelssohn,uninformaticienvisionnaired’origineirlandaise,acréél’entreprisedanslesannéessoixante-dix.Quaranteansplustard,lapetitestructureestdevenueunemultinationaleavecdesramificationssurtouslescontinents.

En2013,àlamortdeGeorges,sonpetit-filsAlecestéluàlatêtedel’entrepriseàl’unanimitéparle conseil d’administration alors qu’il n’avait que vingt-six ans. Depuis son arrivée,Mendelssohn

Computersseraitenpassededamerlepionauxdeuxplusgrandsnomsduhigh-tech.

Unephotoenbusted’Alecillustrelespropos.Encostumecravate,ilesttoutaussisexyqu’enT-shirtetvieuxjean.Ilmefixedepuislejournal.Unechaleurmemonteauvisage,suivied’ungrandfroidsaisissant.

Enmoinsd’unesecondes’évanouissenttousmeseffortspourlechasserdemonesprit.Jefermelesyeuxetlefilmdenotrerencontreànotrerupturepassesousmespaupièresclosesenaccéléré.Jeregrette instantanémentde l’avoirplaqué.Et si Joavait raison?Si j’étais trop impulsive?SicettehistoireavecBethn’étaitqueragots?

Jecommenceàfaiblir.MesouvenirdesesSMSironiques!

Je poursuisma lecture,même si je feraismieux de fermer le journal,mais je ne résiste pas àl’envie d’en apprendre plus. Le journaliste s’interroge sur les candidats susceptibles de remplacerPeterSantorro.

PlusieursnomssontévoquésmaisceluideSamMendelssohn,ledemi-frèreaînéd’Alec,revientàplusieurs reprises. Problème : Sam est marié avec Abby Young Carlson, la fille unique du richebanquier,etadéjàdehautesresponsabilitésdanslabanqueappartenantàsonbeau-père.

C’estunesaga!

Jemedemandesoudains’iln’yauraitpasunlienentrelecoupdefilqu’ilareçuenToscaneetlaterriblenouvelledusuicidedeSantorro.Jecherchedansl’articleundétailquipourraitmerenseigneret çamatche ! Santorro estmort quand nous étions en Italie.Cela explique son changement d’étatsoudain,sonmutismeetmêmesafuiteprécipitée.Çan’arienàvoiravecunefemmemaisavecundeuiletunecriseprofessionnelle!

C’estgénial!Enfin,onsecomprend…

Jem’enveuxd’avoirfaitdecetteaffaireunehistoirepersonnelle.MesSMSlesoupçonnantd’êtredéjàencoupleavecBethontdûl’énerveretmefairepasserpouruneemmerdeusequiluicherchedespouxalorsqu’ilvitunmomenttragique!

Réfléchissonsvitemaisbien.Ledestinm’offreunechancedemerattraper.Ilestévidentqu’AlecestàNewYork.Ilfautquej’essaiedelerevoiràtoutprix,neserait-cequepourm’excuser.

Doucement!Ça,onverra…

Jecommenceàmesentircoupable.Jedétesteça!Pourmedétendre,jeprendsdesnouvellesdesstars en feuilletant un magazine. Kim Kardashian s’est encore fait gonfler les fesses, LeonardoDiCaprioesttoujourscélibataireetj’aitoutapprisdelatechniqueinfailliblepoursefaireunœildebiche au liner. Mais je me tétanise en découvrant deux photos qui me donnent envie de sauterimmédiatementdel’appareil!

L’une représente Alec et Beth se tenant la main sur un tapis rouge. Elle, d’une blondeur

insupportable, vêtued’une robenoire endentelle quimet envaleur ses seinsgénéreux, le regardeénamourée.Lui,dansunsmokingdontlenœudpapillonestnégligemmentdétaché,luisouritdesesdentséclatantes.

Jevaiscrever.Maisd’abord,jevaissouffrirbeaucoupendétaillantladeuxièmeimage.

Moi, Romane Gentillac, dans ma robe rouge pourrie, sandales ridicules aux pieds, le visagedéforméparunegrimacehideuse,tentederésisteràAlecquimetientfermementparlebras.Laseulechosequimeconsole,c’estquemescheveuxdissimulentenpartiemafigureetqueluinonplusn’estpasàsonavantage!

Ilalabouchetoutetordue,bienfait!

Jemesouviens,c’était samedimatinà lagalerie.Alec insistaitpourque je sorteboireunverreavecluietjefaisaisdelarésistance.Maisquiapriscettephoto?Lephotographequinousaparlé,évidemment.Celuiqu’Alecs’estétonnéderencontreràParis.Ilavaitdûenleverleflash,jen’airienremarqué.

C’estquoidéjàsonnomàcetteenflure?

Maislepire,c’estencorelapetitephraseenguisedecommentaire:«AlecMendelssohnenpleineruptureavecuneillustreinconnuesansintérêtrevientàsastardurock,sonuniqueamour.»

Jesuisvexée,triste,furieuse,pleinededoutesetmonorgueilvientd’enprendreunsacrécoup.Cetorchonvientdem’humilierpubliquement.

Personnenepeutmereconnaîtremaismoi,jesais!

Etsicejournaldisaitvrai?SicetteBethétaitvraimentleseulamourd’Alec?Moncœurseserretellementquej’ailasensationqu’ilseflétritdansmapoitrine.Jefourreletabloïdaufonddemonsacettoutenmepinçantlamain,j’essaiedesangloterensilence.

***

Nous venons d’atterrir et l’avion roule sur la piste pour rejoindre la passerelle. Sarah dorttoujours.Ellevabienfinirparseréveiller,j’espère!Finalement,j’airéussiàsomnolerunpeuetçam’afaitdubien.Jesuisencoresouslecoupdel’émotiondecesphotosmaishorsdequestiondemelaisserdémoraliserparcesbêtises.

Jesuisvenuetoutpéter!

LeBoeingsetraînetoujoursàdeuxàl’heuresurlapiste.JemedemandesiJoestarrivéeàbonport,elleaussi.Pourpatienter,commelesautresvoyageurs,jerallumemonportableetluienvoieunSMS:

[Hey!«Magicalgirl»!StatuedelaLibertéenlignedemire!Enfin,presque.Soisprudenteet,surtout,donne-moidetesnouvelles.Bisous.]

Maintenant,unpetitcoucouàmonLulu:

[Toutestok.Jeviensd’atterrir.J’espèrequetuneferaspastropdebêtisessanstesdeuxnounousd’enfer.PS:Souviens-toiquelemojiton’estpasunantidépresseur!Bizz.]

JemedemandeparfoissiLucasn’apasétégénétiquementmodifiépourtaperdesmessagesàcetteallure!J’aidéjàlaréponse:

[T’inkietpaspourmoi.JeVm’OQP.Alorsprêtepourlaruéeversl’Or,belette?]

Pendantmesétudes,j’avaisprisl’optionécriturecunéiforme.C’estpourçaquejepeuxdéchiffrercertainsSMSdeLucas.

[Yes!Àmoil’AmericanDream!Bisous,monLulu.]

JepourraisaussienvoyerunSMSàmesparents,jeneleuraipasditquejepartais.Maisjepréfèreéviterleursondesnégatives.Jelescontacteraiplustardquandj’auraisavancédanslarédaction,justepourleurprouverqu’ilsavaienttortdenepascroireenmoi.

Tiens?UnSMSennuméromasqué…

[Etlebeloiseauadéployésesailes…]

Cen’estpaslestyledeJo,c’estsûr!Alec,peut-être?Satanteluiaurait-elleparlédemoi?Maispourquoicenumérocaché? J’espère seulementquecen’estpasPaul !Sarah luiaurait-elledonnémonnuméro?Bon,inutiledemestresseràpeinearrivée,onverrabien.

Sarahseredressesoudaincommeunressort,enbâillant.

–OnestencoreàParis!s’exclame-t-elle.Maisilmesemblaitqu’onavaitdécollé…

Jenevaispasm’ennuyer!

***

Un taxi nous dépose devant un immeuble en plein cœur de Manhattan où Sarah met à madispositionunstudiopendantmonséjour.Jesuisémerveilléeetémueparcettevillegigantesquequisedresseversleciel.Jem’engouffreàsasuiteentrelesvitresd’unegrandeportetambour.JebataillequelquessecondesavecmavaliseàroulettesquandSarahs’ensaisit.

–Ahnon,vousmemettezmalàl’aise,madameAckerman!m’indigné-jeencourantderrièreelle,versundesnombreuxascenseurs.

–Nefaitespasvotresainte-nitouche,j’aihorreurdeça!Etnem’appelezplusmadameAckerman.Encoreunefoisetjevousréexpédied’oùvousvenez.D’iciunmoisjevaisdevoirtraînerquarante-cinqkilos sur laglace, jepeuxbien faire rouler cette choseminuscule.Vousvoyagez léger,dites-moi!

–Jenesuispasvraimentune folledushopping,avoué-jealorsquenousmontonsàunevitesse

supersoniqueversle59eétage.–Cen’estpasgrave,vousêteslàpourécrire,paspourlaFashionWeek!

J’admiresonbonsens!

–Vousvoilàchezvous,honey ! s’exclame-t-elleenm’invitantà rentrer.Cen’estpas trèsgrandmaisc’est fonctionnel.Le lit, le coincuisine, la salledebainset lebureau justeen facede labaievitrée.Sivouspréférezledéplacercontreunmur,àvotreguise!

Pourquoi ferais-jeça?!J’ai l’EmpireStateBuildingsous lenez, l’océanjustederrièreet lecielpar-dessuscommeunepromessed’avenir.Merde!JesuisàNewYork!

–Merci!madame…Heu,Sarah,pardon!C’estparfait.–Onsemetautravaildèsdemainmatin!Jepréfèrequelesentretienssedéroulentchezmoi,c’est

àdeuxpas,etj’adorecuisinerenpapotant.

Ehbenvoilà!Jenevaispasyéchapperàcetœildebarracuda«cruou»…

–Pourcommencer,continue-t-elleens’asseyantdevantlebureaupourgriffonnerquelquechosed’illisiblesurunpapier,vousvenezdînercesoiràlamaison,voicimonadresse.JevousprésenteraiBrooke,autantquevouslarencontrieztoutdesuitepuisquevousallezêtreamenéesàcollaborer.20h30,çavousva?

–Oui,trèsbien,réponds-jeenétouffantunbâillement.–Cool!Commeça,jevousprésenteraiaussimesneveux!s’écrie-t-elleensortant.

Dessentimentscontradictoiressedéchaînentsousmoncrâne.Jem’agite,vérifiemon téléphone,relis l’étrange SMS que j’ai reçu dans l’avion. Est-ce Alec ? L’idée de le revoir me porte àl’enthousiasme!Etàlacrainte…

Ethop!Uneexpéditionpunitivecontremamain…Demain,promis,j’arrête!

Jemelaissetombersurlelit,lesbrasencroix,monportabledanslamain.Ilestévidentquemondésirdelerevoirestintactsij’enjugeparmespalpitationscardiaques.Pasdepanique.Ilfautjustequejerassemblemesesprits!

Il faut aussi que j’assumemabourde : je l’ai quandmêmeplanté alors qu’il est en pleine criseprofessionnelle.Mais j’ai l’imaged’AlecetdecetteBeth imprimée sur la rétine.Ce serapeut-êtrel’occasiondenousexpliquer.

UnSMS!

[Jeveillesurtoi,mapetiteRomy…Prendsgardedenepastebrûlerlesailes.]«Romy!»Plusdedoutepossible!Leseulàm’appelerainsi,c’estPaul.Jejettemontéléphonesur

lebureaucommes’ilétaitcontaminéetmeprécipiteverslasalledebains.Jeressensuneenviefolledemerécurer.J’étaissûrequecetenfoiréallaittenterquelquechosetôtoutardpourmedéstabiliser.

Jelaisselejettièdedeladouchecoulersurmanuquedouloureuseetjeregarde,lesyeuxembués,

l’eausefaireaspirerinexorablementparlesiphon.Horsdequestiondefairecommeelle.Personnenepourram’entraînervers le fondetcertainementpasceminusquiestparvenuà se faireappeler«maître».

JenesaispascommentAlecvaréagirenmevoyant.Ilnefautpasnonplusquejemefassetropd’illusions. Il n’a pas cherché àme reconquérir.C’est sans doutemieux commeça. Je ne vais pasm’enchaîner le cœur à un hommequi est peut-être en couple et père d’un jeune enfant. Je préfèresouffrirlemartyreetresterdigneplutôtqued’avoirdesmiettesdetempsentemps.

Claustrophobe, amoureuse éperdue peut-être, mais courageuse et éprise de liberté, RomaneGentillac.Qu’onseledise!

3.Retrouvaillesausommet

Quand je sonneà laportedeSarah,audernierétaged’une tourquiencompte102, jen’ai rienperdudemavolontémartialemaisjen’enmènepaslargeàl’idéederevoirAlec.Jesaisquejesuisméconnaissablesurlaphotodumagazine,maisj’ail’impressionquetoutlemondevas’écrierenmevoyant:«C’estelle!»

Paranoavecça!

Sarahm’ouvreelle-mêmelaporte,toutsourire.Enlavoyantdanssacombinaisonsarouelblancheet ses tongs, je me sens déplacée dans mon tailleur strict de secrétaire acariâtre. Ne sachant quemettre,j’aienfilécequej’avaisemportédeplusclassique:lamêmetenuequelorsdenotrepremièreentrevue.Heureusement,jen’aipluslaveste:Alecnemel’atoujourspasrendueetn’estpasprèsdelefaire.

Je lui ai suggéréde lagarder.Unemanière élégantede lui dire qu’il pouvait se lamettreoù jepense…Çayest,j’aihonte.

–Honey!J’avaispeurquevousvoussoyezperdue!Entrezdonc.

Le ventre noué par le stress, je pénètre dans l’immense appartement-terrasse en faisant demonmieuxpour garder la tête haute et l’allure altière. Je regrette d’avoir tiré autant surmon chignon,maisqu’est-cequim’apris?J’ail’impressionquemesyeuxmeremontentjusqu’auxtempes!

C’est pas si mal, au moins je peux voir sur les côtés. Si Alec est dans un coin, je devrais lerepérer…

Àmongrandétonnement,ladécon’arienàvoiraveccelledel’hôtelparticulierparisien.Ici,quedu mobilier moderne, des lignes épurées, des couleurs froides et quelques toiles monochromesd’artistescontemporains.Letoutenveloppépar lesnotesdepianopaisiblesd’unairdeSatieetdeslumièrestamisées.

–Romane,venezpariciquejevousprésente!

J’aipeurdevoirAlecsedresserdevantmoid’unesecondeàl’autre.J’ail’impressiondésagréablede me tasser et que le sol se dérobe sous mes pieds. Ah non ! C’est juste que mes escarpinss’enfoncentdansl’épaisselaineblanchedelamoquette.

–Sarahm’atellementparlédevous!s’exclameunefemmeinconnue.Elleest intarissable,voussavez.

Ouf!Cen’estpaslui.Oudevrais-jedire:Merde!C’estqui,cettebombalatina?

–Brooke,Romane!Romane,Brooke,fanfaronneSarahenfaisantlesprésentations.

–Jesuisravieàl’idéedetravailleravecvous,meditlasomptueusecréature.

Etenplusondiraitquesavoixveloutéesorttoutdroitdelaradio…

–J’ensuistrèscontente,moiaussi,réponds-jeencachantmastupeur.

Ilfautdirequ’ilyadequoi!Jenesaispaspourquoi,jem’étaisimaginéquel’amiedeSarahétaitune vieille dame un peu extravagante avec de grosses lunettes. J’étais loin du compte. La petitequarantaine,vêtued’unerobejaunevaporeuse,évaséesurlesépaules,seslongscheveuxnoirslissés,Brookeressembleraitplutôtà…

UncroisementréussientrePenélopeCruzetMonicaBellucci!

– Quelle merveilleuse idée vous avez eue là, une biographie de cette énergumène ! s’amuseBrookeenmetendantuncocktail.

Etsympa,avecça…Maispourquoiçam’énervetant?

Dire que j’aurais pu être sexy moi aussi si je n’avais pas intentionnellement laissé à Paris lesvêtementsqu’Alecm’aoffertsenToscane.Ettoutçaparorgueil!

Ça se confirme : je suis jalouse ! C’est FINI ! Il faut que je me le dise comment pour lecomprendre?

J’aibeauregarderpartoutdanslesalon,pointdesalemachoirrésistibleàl’horizon.Seulementuncoupleprèsde labaievitrée.Ledemi-frèred’Alec, sansdoute, et son épouse.La femme s’avanceversmoi,souriante,pourmesaluer,etl’hommelasuitsanslâchersonportabledesyeux.Euxaussisontentenuedécontractée.

Décidément,jesuislaseuledéguiséeenpingouin!

–VoiciSam,monneveu,etsafemmeAbby.JevousprésenteRomane,dontjevousaiparlétoutàl’heure,continueSarah.

Jefaistoutàl’enversmoi,jerencontrelafamilleaprèslarupture…

–Bonjour,mesaluefroidementSamenmeregardantàpeinealorsquejecherchevainementdanscegrandblondunpeu fade, aux traits sévèreset irréguliers,unevague ressemblanceavecAlec leMagnétique.

–Bonjour,raviedevous…

Maisilnemelaissepasletempsderécitermapetiteleçondepolitesse.Ilsedétournedemoisanslamoindreexcuseetsortsurlaterrassearboréepourrépondreautéléphone.

Questionune:est-cequece typeseraitunconnard?Questiondeux:oùest ledemi-frèredececonnard?Jen’enpeuxplusd’attendre!

–Veuillezpardonnermonmari, s’excuseAbbyd’unepetitevoix fluette. Il attenduncoupde fil

important,ilnes’estpasrenducompte.–Nevousinquiétezpas,ilesttoutexcusé,larassuré-jeensouriant.

Mêmepasenrêve!

Je n’aurais jamais imaginé que l’héritière d’une grande banque américaine puisse ressembler àcettepetiteblondegracile,bohèmechic,enjupeàvolants,unfoulardnouédanslescheveux.Elleoseàpeinemeregardermaisjedistinguelebleuintensedesonregardquejedevineanxieux.

–C’estSam,ilestcommeça,ilnefautpasseformaliser,temporiseSarah.–Oups!s’écrieBrooke.J’allaisoublierlepouletaufour.Jereviens!

MaisonestchezSarahouchezBrooke?Jenecomprendsrien…

–Vousverrez,NewYorkest trèsagréable l’été,m’assureAbbyalorsquesonmari revientversnous,dédaigneux.NoussommesrentrésdeParisdimanche,n’est-cepas,monchéri?demande-t-elleàSamd’unevoixenfantinetoutens’accrochantàsonbras.

–Oui, soupire-t-il en sedégageantd’ungestebrusquede l’étreintede sa femmedont le regards’embrumeaussitôt.

Le comportement sans égard de ce type et surtout l’air désemparé de son épouse me mettentvraimentmalàl’aise.Etchoseincroyable,mêmeSarahal’airgêné.J’ail’impressionfurtivedelesconnaîtremaisc’estjustequ’ilsdoiventmerappelermonfrèreetsacompagne…

Ehoui,monfrèreestaussiunsalecon.Jerêveouc’estl’interphone?!

–Ah,voilàmonautreneveu!s’exclameSarahenallantappuyersurlebouton.

Encoreuncoupaucœurcommecelui-làetjenedonnepascherdemapeau!

Je vais devoir affronter Alec d’ici deuxminutes !Moi, j’aurais besoin d’une heure pour fairebaissermatensionartérielle.SarahrevientversnoustandisqueSamluilanceunregardassassin.

–Tunem’avaispasditqu’ilseraitlà,siffle-t-ilentrelesdents.–J’aioublié!rétorque-t-elleenriant.Luinonplusnes’attendpasàvoustrouvertousici.

Ilnesaitdoncpasquejesuislà!

–Quellebonneidée!s’écrieAbbyavecunrirenerveuxtoutenguettantd’unairinquietsonmariducoindel’œil.

Samn’avaitriendesympathiquemaismaintenantilsemblecarrémentfurax.Dansunmouvementd’humeursombre,ilquitteprécipitammentnotrepetitgroupe,Abbysurlestalons,pourrejoindrelaterrasse.

VisiblementilneveutpasvoirAlec,cequin’estpasmoncas!Mevoilàagitéeintérieurementparlesventsbrûlantsdel’impatience.Sarahmeditquelquechosemaisjenel’écouteplus.Commentle

pourrais-je?

EtsiAlecétaitaccompagnédeBeth?!

Je fixe la porte d’entrée, à la limite dumalaise.Le temps est devenu fou, les secondes s’étirentcommedesélastiquesettirentdangereusementsurlesressortsdemoncœurquandenfinAlecpénètredansl’appartement.

Seul !Enfin,pas toutà fait, unearméed’anges l’accompagneet chante sagloireéternellepourmonplusgrandravissement.

Sarah se précipite pour l’accueillir alors que s’efface enmoi toute pensée belliqueuse. Je resteseule au milieu de la pièce, mon verre à la main, incapable de détourner mes yeux de la visionsurnaturelled’unAlecplusbeauencorequedansmonsouvenir.

Jel’aiquittéilyadeuxjoursàpeinemaisçam’aparutrèslong!

Enjean,T-shirtetvestedecostume,ilembrassechaleureusementsatantepuisenseredressantilmedécouvre,stupéfait.Aprèsunbrefétonnement,sesprunellessombress’embrasent,unfeudejoieetdeplaisiréclairesonregardetm’enflammed’unespoirardent.

–J’aiimproviséunepetitefêteenl’honneurdemoninvitée,l’informeSarahenl’entraînantversmoi.Tunelesaispasmaistachèretantevafairel’objetd’unebiographie,etc’estcettepetitefrenchyquival’écrire!JeteprésenteRomane.Romane,voiciAlec,monpetitneveuchéri.Enfin,façondeparler!Cequ’ilestgrand!

–Mademoiselle,mesalueAlec,faisantminedenepasmeconnaîtretoutenplantantsesyeuxdanslesmiens.

–Raviedevousrencontrer,murmuré-je,totalementrenversée,enluitendantunemaintremblante.–Ah!Brookem’appelleàlacuisine,reprendSarah.Pardon,elledoitsebattreaveclepoulet,il

n’estpeut-êtrepasmort!plaisante-t-elleenriantauxéclats.JevousconfieàAl,honey,jerevienstoutdesuite.

Prenezvotretemps…

–Tuestenace,hein?meglisseAlecencaressantmesdoigts.–Oui,réflexionfaite, je tiensbeaucoupàmaveste,répliqué-jed’unevoixsourdesansle lâcher

desyeux.Jen’aipashésitéàsauterdansunavionpourlarécupérer.–ElleestàParis!Moiaussi,jemesuissurprisàtenirbeaucoupàlamienne.Jen’aipasarrêtéd’y

penser.Tul’asgardée,j’espère?–Oui,elleestaufonddemonplacard.–Onva êtreobligésde se revoir, alors. J’en suis désolé, conclut-il enme fixant avecune telle

ardeurquej’ailaconfirmationquec’estbienàmoiqu’iltientetnonpasàsonvêtement.

J’aimebienêtresûre…

Jepréfèreretirerprudemmentmamaindelasienneetm’éloignerunpeuavantquejenecommettel’acteinconsidérédeluiroulerunpatinaubeaumilieudusalondetantine!Certes,BrookeetSarah

sontàlacuisineentrainderéglersoncompteàlavolaille,maisl’affreuxSametlapauvreAbbysonttoujourssurlaterrasse…

Jenevoudraispasavoirl’airdecequejesuis:unefollefurieuse!

–Alec,jesuisdésolée,commencé-je.J’aiapprispourlesuicidedetoncollaborateuretj’imaginequetuavaisd’autreschatsàfouetterquederépondreàmesquestionsdefouineuseoudepenseràmerendremaveste!

Bravo!Jemesuisexcusée,maisj’aitoujoursenviedel’embrasser…

–Non,c’estmoiquisuisdésolé,merépond-ilenfuyantmonregard.J’auraisdûm’expliquermaisjenesuispas trèscausantdanscescas-là.Etpuis,continue-t-ilenglissantnégligemmentunemaindanslapochedesonjean,àvraidire,jen’aijamaiseudevesteàrendreàpersonne.

Est-cequ’ilestentraindemedirequec’estlapremièrefoisqu’ilestamoureux?Etquec’estdemoi!?

Jemesenssoudainpousserdesailes, jesuis légère, légère!Jemebalancedanslesairs,bercéepar ce qu’Alec vient de m’avouer. Et dire qu’il y a dix minutes, je redoutais que tout soit fini !Décidément,aveclui,onpeuts’attendreàtout.Avecmoiaussi,apparemment!

–Jenem’attendaispasàtecroiseraussivite,s’étonneAlec,soudainplusfroidàlavuedeSam,deretourdanslesalon.

–Moinonplus,répond-ilsèchementsansmêmelesaluer.–Alec!s’écrieAbbyensautantaucoudesonbeau-frère.

Elle jette tout demême un regard apeuré à sonmari qui va s’asseoir dans le canapé, le visagerésolumentfermé.

L’ambiancepesantemefaitaussitôtredescendresurterre.BrookeetSarahreviennentdelacuisineet ilme semble que Sarah force un peu la bonne humeur pour détendre l’atmosphère. Je ne peuxm’empêcherdeguetter laréactiond’Alecquandlabruneincendiaire l’embrasseàsontour.Jesuisrassurée,iln’apaslesyeuxquiluisortentdelatêteenlavoyant.

– Comment va la vieille Europe, Al ? lui demande Brooke qui, en lui donnant ce petit nom,confirmequ’ilsseconnaissentbien.

– Envoûtante, comme d’habitude, rétorque-t-il en me coulant un regard discret qui me faitcomprendrequejelesuistoutautant.

Waouh!

–Tuauraisdûyrester,danscecas,lâcheSamd’untonglacial.–Toujoursaussiaimable,àcequejevois,ironiseAlecensouriantaveccetteassurancedésinvolte

qui le rend irrésistible. Tume diras, avecWall Street qui dégringole, c’est rassurant de voir quecertainesvaleursrestentstables,mêmetonagressivité…

–Cen’estpasdutoutcequeSamvoulaitdire,s’empresseAbby,deplusenpluspaniquée.Ilest

raviquetusoisparminous.N’est-cepas,chéri?–C’estexactementcequejevoulaisdire.Arrêtedepenseràmaplace,tun’enaspaslescapacités.

Occupe-toidecequiteregarde,tamanucureparexemple!

J’aidéjàentenduçaquelquepart.Çayest!

Je saispourquoi j’ai l’impressionde les connaître, jene les ai jamaisvusmais leurvoixm’estfamilière.C’estlecouplequej’aisurprisentraindesedisputersamedidernieràlagalerie!Jesuissûrequec’étaiteux!

Tout lemondeestextrêmementgêné.MêmeSarahne trouve rienàdire.LapauvreAbbyestauborddeslarmesetaulieudesedéfendrecontrecesombreconnard,ellebaisselatêteetsondesessandales.

–Oh!J’aichoquémademoiselle,menargueSamalorsquejemesurprendsàlefixeravecdégoût.– Désolée de vous décevoir mais pas vraiment. Je ne suis plus impressionnée par les clichés

machistes. Trop banal, je préfère l’exceptionnel, répliqué-je en faisant de mon mieux pour mecontenirtandisquejesensAlecsurdescharbonsardents.

–Ilafalluquetunousdégotesuneféministe,Sarah!meprovoque-t-ilenmetoisantavecunairdemépris.Vousêteslanouvellesecrétaire,c’estça?

–Pasdutout,Sam.Romaneestauteure,répliqueaussitôtSarah,trèsagacée.–Encoreuntrucdenana!segaussel’impudent.–Çasuffit,Sam,intervientAlecenprenantmadéfense.– Non, laissez ! le coupé-je. Puisque vous semblez vous intéresser à mon CV, je suis aussi

sociologue et anthropologue à mes heures. C’est à ce dernier titre en définitive que vousm’impressionneriezdavantage.Jepensaisquel’hommedeNeandertalavaitdisparu,maisquenenni,ilestàNewYork!Grâceàvous,aveccettedécouverte,jepeuxbriguerunprixNobel!ÇaseraitduplusbeleffetsurmonCV.Qu’enpensez-vous?

Si,si,jeviensdedireça!

Alec me lance un regard admiratif qui me fait fondre tandis que Sarah et Brooke retiennentdifficilementunrire.L’espaced’uninstant,j’aieupeurd’êtrealléetroploin,maisjenepouvaisplusmetaire.Seule,Abbys’isoledanssoncoin.

–Qu’as-tuàdirepourtadéfense,Sam?renchéritAlec,deplusenplusprovocateur.–OndiraitqueGeronimoveutdéterrerlahachedeguerre?

SamattaquecarrémentAlecsursesoriginesamérindiennes!Quelsalaud!

–Pasdeçachezmoi!s’interposeSarah,horsd’elle.–Alorsnejouepaslesentremetteuses!luirépliqueSam.–Jeproposequenouspassionsàtable!s’exclamesoudainBrookecommepourfairediversion.

NoustrinqueronsàlacollaborationdeRomaneetSarah.–Etàlafamille!soupireSamensedirigeantversl’immensetableenverreoùlescouvertssont

déjàmis.

SametAlecontaumoinsunpointcommun:l’ironie.J’espèrequelaressemblances’arrêtelà!

***

On ne peut pas dire que le dîner soit agréable. Sam est infect, il rabroue sa pauvre épouse dèsqu’elleoseouvrirlabouche,soupireaussitôtquesondemi-frèreprendlaparoleetiln’aimeriendecequeBrookeapréparé.Pourtant,jepasselaplusbellesoiréedemavie!Alecestassisenfacedemoi,medévoredesyeuxetjesensqu’iln’attendqu’unechose:qu’onseretrouveseuls!

Commentlesautrespeuvent-ilsnepass’enrendrecompte?!

Je finis même par ne plus entendre les réflexions humiliantes de Sam envers son épouse quis’excuse en permanence à sa place. Toutm’est indifférent à partAlec. Je suis tellement heureuse,amoureuseetfollededésirqu’iln’yaplusdeplaceenmoipourd’autresémotions!

JeneressenspasnonplusunétonnementparticulierquandSarahetBrookes’embrassentàpleinebouche.MystèreBrookerésolu!

–Honey!s’exclamesoudainSarah,affolée,enfixantmamaintorturée,toujoursrougeetquelquepeuenflée.Vousvousêtesblessée?!

–Non!Cen’estrien,réponds-je,extrêmementgênée,enfuyantleregardd’Alec.–Voussavez,Romane,j’aiunexcellentdermato,jepeuxvousyconduiresivouslesouhaitez.

Sammanifesteostensiblementsonennuidevantcespréoccupationsde«bonnesfemmes».

–Non!insisté-je.Toutvabien…C’estunemauvaisehabitudequej’aiprise…enfin,c’eststupide!–Jeconnaisça,ditBrooke.J’aiarrêtédefumerl’annéedernièreetj’avaisl’oreilletouterouge,je

tiraisdessusdèsquejepensaisàunecigarette!–Oui,moic’estpareil!confié-je,tropheureusedeconstaterquejenesuispaslaseulecintréeà

avoirdetellespratiques,jemepinceàchaquefoisquejepenseà…–Àquoi?demande«Al»enmeregardantavecunsourireencoin,l’œilpétillant.

Cethommeestunattentatàlapudeurambulant!

–Àmonportable!C’estcommeuneaddiction,c’estterrible,terminé-je,honteuse.–C’estdifficiledesedéconnecter.VousêtesplutôtcoupdefilouSMS?continueAlecensouriant

ducoindeslèvres.–Çadépend,réponds-je.

J’aichaud!

PendantqueBrooke,AbbyetSarahdissertentsurlesméfaitsdescellulaires,jemenoiedanslesprunelles dorées d’Alec. Et hop !Me voilà déjà nue dans ses bras à suffoquer de plaisir sous sesbaisersardents,maisuncrivientmetirerbrusquementdemadélicieuserêverie.

–Merde !Tunepeuxpas faireattention !hurleSamendirectiond’Abby toutense levantd’unbond.Tunefaisvraimentquedesconneries!

Abbyvientderenversermalencontreusementsonverredevinsur le jeandesonmari.Sousnosregards contrits, elle éclate en sanglots avant d’attraper sa serviette et d’éponger fébrilement lesdégâtssurlanappe.

– Pardon ! Je suis désolée ! pleure-t-elle en suivant son ignoble époux à travers la pièce pournettoyeraussisonpantalon.

–Çasuffit!s’énerve-t-ilenlarepoussantalorsqu’Alecs’estdéjàlevépours’interposerentresondemi-frèreetsabelle-sœur.

–Tuferaismieuxdepartir,luiconseilleAlecd’unevoixblanche,àdeuxdoigtsdeluidécocherunuppercut.

–Net’inquiètepas,jemetire!J’aiassezvutagueule!

Etilquittel’appartement.Abbys’excuseencoreunefoisetpartelleaussi.Ellelesuitcommeunbon chien humilié, la tête basse, exactement comme je l’ai vue le faire samedi dernier. La ported’entréeclaqueetmefaitsursauter.

–Romane,jesuisdésoléedevousavoirimposéça,sedésoleSarah.–Ilfallaits’endouter,darling,luireprochegentimentBrooke.TusaisbiencommentestSam!–Tuasraison,reconnaîtSarah.Jenesaispaspourquoijem’entête.–Allez,cen’estpassigrave, la rassureAlecen laprenantdanssesbras.Tucroyaisbienfaire,

commed’habitude!Tuesuneoptimiste.Après-demain,c’estlasoiréedelancementdusitemusicaldeMendelssohn.SametAbbyserontnécessairementprésents,tuaurasunenouvellechancedenousréunir,s’amuse-t-il.Vousêtesconviée,vousaussi,meglisse-t-ilaupassage.

–S’ilteplaît,monchéri,est-cequetupourraisraccompagnerRomanechezelle?demandeSarah.Jen’enpeuxplus,jevaisallermecoucher.

Envoilàuneidéequ’elleestbonne!

***

Pendantquenousroulonsdanslesgrandesavenuesilluminées,jesavourelesilencedélicieuxqui,loin de nous séparer comme la dernière fois, lorsque nous sommes rentrés deToscane, nous unitdanslajoiedesretrouvailles.AlecconduitsaPeugeot403decollection,accoudénonchalammentàlafenêtreouverte.

Exactement la même voiture que celle du légendaire inspecteur Colombo ! J’adore l’inspecteurColombo…

Lesmainsposéessagementsurlesgenoux,triturantunboutdemajupe,jeregardeendoucesescheveux voleter autour de son visage. Une mèche brune danse sur son front et semble suivre lerythmedesbattementsdemoncœur.

–Aumoins,tuasfaitlaconnaissancedemondemi-frère!lance-t-ilsoudain.Jedoisdirequetum’asbeaucoupimpressionnéquandtul’asremisàsaplace.

–Jemesuislaisséemporter,j’aipeurd’avoirenveniméleschoses.Cen’estvraimentpas…–Tongenre,jesais!

Iléclatederireenmelançantuncoupd’œilcomplicequinefaitqu’aggravermespalpitations.

–Monintention!terminé-jeensouriant.Cessedetemoquerdemoi.–Je te taquine,c’est tout…Tun’esresponsablederien,Samt’aprovoqué intentionnellement. Il

adoreblesserceuxquiluisemblentvulnérables,lesmettreenporte-à-faux.C’estsafaçond’exister,commetouslesfaibles,maisavectoi,ilesttombésurunos!

Avecunpeudechairquandmême…

– En vérité, ce n’est pas la première fois que je les croise et j’avais déjà vu Sam à l’œuvre.Entendu,devrais-jedire.Ilsétaientàlagaleriesamedidernier,non?

–Absolument!EncoreuneidéedeSarah,quitentetoutpournousrapprocher.SametAbbyétaientàParispouraffairesetelles’estdébrouilléepourquenousnousrencontrions«parhasard»…Ellesavaitquej’allaisàl’expoetelleademandéàSamd’yconduireunevieilleamieàelle.Tusais,macliente,ladameblondeaveclaquelletum’asvuàlagalerie,quandtupensaisquej’étaisgigolo.

Ahnon!Jenepeuxpasreconnaîtretoutesmesbourdesdanslamêmesoirée!

–Jenevoispasdutoutdequoituparles,réponds-jeencachantmonvisageentremesmains.–Netecachepas,ceseraitdommage,murmure-t-ilalorsquenoussommesarrêtésàunfeurouge.

Jetressailleettournelesyeuxverslui.Danslapénombre,sesprunellesbrûlentd’undésirtendrequimebouleverse.Jemedemandesicen’estpaslemomentdetenteruneapprochemaislefeupasseauvertetildémarreaussitôt.

–Jenem’étaispastrompé,tuesvraimenttalentueuse,sinonjamaisSarahnet’auraitengagée.Jetefélicite,honey!s’amuse-t-il,imitantlavoixdesatante.

–Merci!– Tu vois ce building des années trente ? dit-il soudain. C’est là que j’habite. Juste à côté du

Metropolitan.

Etonnes’arrêtepas?!Maisjeneveuxpasdormirseule.Jeneveuxpasdormirdutout!

–Ettoi,qu’est-cequetufaisaisàlagalerie?demandé-jebrusquementpourchangerdesujet,depeurqu’ilnesaisisseencoremespenséescommeleweek-enddernier.

–C’estunpeulongmaisensubstance,j’aimebeaucoupl’arttribal.Pourlesvendeurs,jesuisuncollectionneur,maisj’achèteseulementdanslebutderendreauxtribuscequileuraétévolé.C’estmalheureusementsouventlecas.Ettoi?Àpartmesuivre,qu’est-cequetufaisaislà?

–J’accompagnaisunami,rétorqué-jeenignorantsaremarque.–Levaletdepique?demandeAlec,lavoixlégèrementtroubléeparundoutetenace.–Lucas.Moncolocataire.–Tuhabitesavecungarçon?s’inquiète-t-ilenmanquantderentrerdans l’arrièred’unevoiture

arrêtéedevantnous.–Etavecunefille,aussi!ajouté-jepourlerassureravantdemerendrecomptequejenefaisque

m’enfoncer.

Ilvacroirequejesuisdéjàencouple…àtrois!

–Enfait,cesontmesdeuxmeilleursamis.Onseconnaîtdepuislelycée…–Ah!Tum’asfaitpeur,avoueAlec.Ettonamis’intéresseauxCheyennes?–Non!Passpécialement,ils’intéressesurtoutàlacuisine,àlafêteetauxgarçons,précisé-jeafin

de lever tout malentendu. Il était venu chercher un calumet pour offrir à son père dans l’espoird’éviteruneguerreterrible!

–Ilavubeaucoupdewesterns!s’exclame-t-il,délicieusementironique.Etill’aacheté?–Oui!Jel’aimêmefumé!répliqué-jefièrement.–J’espèrepourluiquecen’estpasunobjetvolé.Qu’ilaaumoinsunefacture.Ilrisquedegros

ennuissicen’estpaslecas.

CeseraituncomblequeLucasoffreuncalumetdelapaixvoléàsonpère!

–Tupermets?IlfautquejeluienvoieunSMS,m’excusé-jeenlecomposantdéjàalorsqu’Alecstoppelavoituredevantl’entréedemonimmeuble.

–Jet’enprie.Jenevoudraispasquetuabîmestabellemainenlatorturantànouveau,merépond-ilencoupantlecontact.

– Et voilà ! C’est envoyé, dis-je comme une idiote alors qu’il me fixe et qu’un trac terribles’emparedemoi.

–Alorscommeça,pourrésisteràlatentationtutepinces?

Nonjenerêvepas,ilaposésamainsurmanuque!

– Je me demande si je ne devrais pas en faire autant pour résister à l’envie irrépressible det’embrasser?mechuchote-t-ilensepenchantversmoi.

Ses lèvres courent dans mon cou puis s’emparent des miennes avec une fougue impatiente. Jel’enlaceetjem’entendsdireentredeuxsoupirs:

–Jen’airienàboiremaisjet’ensupplie,monteprendreundernierverre…

J’ignore comment nous parvenons à dire bonsoir au gardien, comment nous pouvons attendrel’ascenseursansperdrenotrecontrôle.Alecmefrôledangereusementledosavecsamainet jemesens comme une allumette sur le point de s’embraser. Dans quelques minutes nous allons fairel’amouretl’idéequ’ilmeprennemefaitpresquepiafferd’impatience.

Commeunepouliche!OhmyGod!

– Est-ce que tu as des préservatifs ? murmuré-je soudain dans un souffle, en priant qu’il merépondeparl’affirmative.

–Oui.– Comment ?! m’indigné-je en tournant vers lui un regard affolé contredisant mon premier

souhait.–Jenesuispasunmoine!pouffeAlec,lesyeuxrivéssurlesportesquis’ouvrentenfinavantde

mepousserlittéralementdanslacabine.

Parchance,Alecn’ariendemonastique,eneffet,etsurtout,noussommesseuls!Ilsejettesurmoi

etj’appuiecommejepeuxsurlenumérodel’étagealorsqu’ilmeplaquecontrelacloison.Seslèvrescharnuess’abattentaussitôtsurlesmiennes.

Jel’enlace,j’enfouismesmainsfébrilesdanssescheveuxetrepoussenerveusementsavestesurseslargesépaulessanspourautantparveniràl’enlever.Noslanguessetrouventetsemélangentdansdessoupirsrauquestandisquesesdoigtsredécouvrentmonvisage.Pendantunpetitinstant,l’idéemetraversequeluiaussiaeupeurdemeperdre.

Alecquittemabouchepourm’embrasser lesyeux, le front,alorsque jeglissemesmainsentrenoscorpsserréspoursentirsespectorauxsoussonT-shirt.Cettesensationdécuplemondésir,monbaisersefaitplusardentetilyrépondaveclamêmefougueenseplaquantdavantagecontremoi.

Folledeconvoitise,etencoresousl’effetdumanque,jedescendsverssonsexeetmesdoigtsserefermentsur labossequienflesonpantalon.Alec, totalementexcitéparmongeste,passesamainsousmonchemisierets’emparedemapoitrinesousladentellesansabandonnermeslèvres.

Nousprenonstoujoursdelahauteur.Jesenssonsexedurcirencoresouslatoiledesonjeanetjecommence à le caresser, accentuant la pression demes doigts sur son érection.Alec est tellementexcitéqu’il fait sauter lesboutonsdemonchemisier qui tombent au sol dansun tintement joyeux,dévoilantmon soutien-gorge. Il se baisse,m’enlevant le plaisir de sentir sonpénis enfler sousmamain,maissabouchevientseposersurmesseinstendusetpresquedouloureuxpourm’apaiser.

Je m’abandonne au plaisir des morsures délicates de ses dents sur mes tétons, pendant qu’ilremontema juped’ungesteprompt.Sesdoigtspétrissent lachairdemesfesses, je l’encouragedemessoupirs.Seslèvresdescendentmaintenantsurmonventre,goûtantmapeau,lamordillant,cequimeporteaux limitesde l’extase.J’étendsmesbrassur lescôtésafindesavourersonétreinteetdem’offrircomplètementàluiquand,soudain,unpetitrebond,etl’ascenseurs’arrêteenpleinemontée.

Merde!J’aiappuyésurleboutonquibloquelamachine!

–Onestcoincés!m’affolé-je.–Chut!souffleAlec,avantdeseredresseretdemefairetaireparunbaiserrenversantquiale

pouvoirdecalmermonangoissemaisquinefaitqu’augmenternotrepassion.

J’ai rencontré Alec coincée dans un ascenseur alors que je le suppliais de me tirer de là.Maintenantjevaisfairel’amouravecluibloquéeentredeuxétagesetjeneveuxsurtoutpassortirdelacabine!

Siça,cen’estpasdelathérapiecomportementale…

JepassemesmainssoussavesteetsonT-shirt.Sapeauestincroyablementdouce,unpeumoitedetranspiration. Ce contact, l’odeur musquée de son corps déchaînent en moi une pulsion animalequ’Alecressentaussitôtetquidéclenchesoninstinctdedominant.

Ilglissesesdoigtsdansmonchignonécrouléetrelèvemonvisageverslesienavantdeplantersesyeuxaufonddesmiens.Colléàmoi,sonsexedeplusenplusdurcontremonbas-ventre,ilmefixeavecunetelleintensitéquejepourraisjouiruniquementparsonregard.

Samainlibreseposesurmoncou.Mesentiràsamercidécuplemondésiret,lesbrastoujoursencroix,lajuperemontéesurleshanches,j’onduledubassincontresonpénisenscrutantinsolemmentses prunelles dorées pour le provoquer et l’inviter à poursuivre. Ses doigts descendent sur mapoitrine,libérantaupassagemesseins.

Monamantmesembletout-puissant.Jedécidelibrementetpourmaplusgrandejoiedemelivreràluiletempsdenosjeuxcharnels.Mesoumettreàsavolontéetsavourerencoreleplaisir,commeenToscane,êtresoussonempriseenivrante.

Neriensubir,choisiretjouirlibrementdemeschoix.C’estunbonprogramme.

Alec pince délicatement mes tétons, m’arrachant un petit cri délicieusement douloureux, etcontinuededescendresamainsurmonventresansmelâcherduregard.Ilrepousseladentellefinede mon string et, quand il découvre mon sexe humide, un gémissement sauvage de satisfactions’échappedeseslèvresentrouvertes.

Ilcaressemonclitoris,letitillepourm’affolerunpeuplus,mefaisantsoupireretmetendre.Sespupillesdilatéesrendentsonregardplussombreetfascinant.J’enrouleunejambeautourdesataille,sonpoidssurmoimemaintientenéquilibrequandilmepénètredesesdoigts.

Mesmainssecrispentcontrelaparoidelacabinetandisqu’ilmedécouvre,qu’ilm’exploredansun geste tantôt lent tantôt plus vif, alors que je l’accompagne en basculant mon bassin. Je senstoujourssouslatoiledesonpantalonsonsexebandé,Alecm’embrasselecouengrognant,insinuesalanguedansmonoreille,jusqu’àcequel’orgasmem’inonde.

Jesuffoque,matêtesemetàtourneretjetremble,commeélectrifiée,quandunlonggémissementquejenepeuxretenirjaillitmalgrémoiduplusprofonddemonêtre.Alecvientplaquersamainsurmaboucheafind’étouffercecripuisretiresesdoigtsdemonvagin.

Ilme fixeunmomentalorsque jemords lachair tendredesapaumeenbaissant lespaupières,comblée.Monamantirrésistiblecaressetendrementmonvisage,mescheveuxpuis,sansquejem’yattende,ilmeretournecontrelegrandmiroirquiornel’unedescloisons.

Lecontactfroiddelaglacesurmesseinsmefaittressaillir.J’ouvrelesyeuxetjevoissonrefletderrièremoi.Nosregardss’accrochentunenouvellefois.Lentement,jeposelesmainssurlaglace.Nos respirationshaletantesenvahissent l’espaceclospendantqu’il faitglissermonstring,prend letempsdeme le retireret remonte le longdemescuissesen léchantmapeaualorsque j’écarte lesjambes.

Maîtrede luibienqu’à l’évidencefollementexcité.Je leregarde, impudiqueetofferte,chercherquelque chose dans la poche intérieure de sa veste. Il en sort un préservatif dont il déchirel’emballaged’uncoupdedentpuisdéfaitsaceinture.Sonpantalonetsonboxertombentàsespieds.

Moncorpspourtant apaisépar la jouissance s’embrase aussitôt à cettevue et l’impatiencede lesentiraufonddemois’emparedetoutemachair.Jemecambreetsoupiresans le lâcherdesyeuxpendantqu’ilmetlacapotesursonsexedressé.

–Prends-moi!lesupplié-je,n’ytenantplus.–Chut!souffle-t-ilencorepourtouteréponse,m’affolantdavantage,avantdes’approcherdemoi

etdemecaresserdoucementlesfessescommepourmefairelanguir.

Alec,magnifique,flattedoucementmacroupe,mesreinspuismesaisitparleshanches.Jepasseunbrasdansmondos,prendssonsexedansmamainet,toutenlefixantdanslemiroir,l’amèneàmepénétrer.Ilentreenmoiengémissantdeplaisiretbasculelatêteenarrièresanslâchermonbassin.

Sondouxvaetvientmeremplitdebonheurmaislacertitudequejel’avaisperdu,encoreprésenteilyaquelquesheuresàpeine,mefaitenvouloirplusencore.J’imposeunrythmesoutenuànotreunioncharnelleenondulant.Sonsexemetranspercedansdesmouvementsdeplusenplusrapides.

–Tuvasmefairejouirtroptôt!soupire-t-ilenseretenant.–Jeveuxquetuviennestoutdesuite!réponds-je.

Encouragéparmademande,Alecaugmenteencorel’intensitédesescoupsdereins.

Jegémis, aubordd’unnouvel orgasme,mais il continue àmeprendre sans faillir. Il retient sajouissance, lespaupières closes,un rictusdedouleur etdeplaisir sur levisageavantde se laisserallerenmoidansunrâleprofond.Jelesuisaussitôt,noscorpsetnoscœursexultentensemble.

Jeneveuxpasqu’ilseretire,jeserrelesmusclesdemonsexeautourdesonpénistandisqu’ilsepencheversmoietdéposedesbaiserstendressurmanuqueencaressantmesseins.Jesenssonsexedevenirmoinsvigoureuxets’échapperdemesentraillesbrûlantes.Jetentedeleretenir.Machairestrassasiéemaismonâmeledésireencore.

Etilmesemblebienquecen’estpasprèsdemepasser…

Entre deux baisers et quelques rires, nous nous rhabillons à la va-vite comme des adolescentsaprèsunegrossebêtise.Alecremetl’ascenseurenroute.Jecherchelesclésdel’appartementaufonddemonsac,une idée fixeen tête.Dèsquenousauronspassé laportedu studio, je comptebien lepousseràcommettreencoreetencorelafauteoriginelle.

Quellebonneidéeelleaeue,cetteÈve!

Nouscouronsdanslecouloirvide,riantcommedesfous.Jetienscontremapoitrinemonsacàmainpourmedissimuler.Jenepeuxplusfermermonchemisieriln’aplusdeboutons!Enenfonçantnerveusementlaclédanslaserrure,jedemandesoudainàAlec:

–Est-cequetuasencoredespréservatifs?!–C’estunpiège?merépond-ilensecollantderrièremoipourquejesentesanouvellevigueur

durcirsonsexe.–Tuenas,ouiounon?!m’énervé-je,follededésir.–Oui…–Parfait!

Etcombien?Maischut!Jeparletrop…

4.Soiréedegalaoucatastrophe?

–Tuesdéjàréveillée?s’étonneAlecenmeserrantcontrelui.

Comment luidireque jen’aipasfermél’œil,depeurqu’ilnesesauveencoreunefoispendantmonsommeil?Jesavouremonpremiermatind’Amériqueencaressantsontorsenuàlalumièredujourquiselèvesurl’EmpireStateBuilding.

–Ledécalagehoraire,sansdoute,supposé-jeendéposantunbaisersurseslèvres.–Moi,j’aienfindormicommeunbébé!Çanem’étaitplusarrivédepuisquejeteconnais,avoue-

t-ilenmebasculantparsurprisesoussoncorpschaud.Sais-tu,canaille,quetum’asvolémesnuits?Etlejour,jeluttepourtechasserdemonesprit!Crois-tuvraimentquejen’aiequeçaàfaire?

Ilblottitsonvisagedansmoncou.

–Ehbien,nelefaispasalors!répliqué-jecommeuneévidenceenentourantdemesjambessonbassin.Oùestleproblème?

–Jesuisobligé!soupire-t-ilensedégageantdoucementavantdeselaissertombersurl’oreiller.C’estparcequejetiensàtoiquejedoistefuir,maisjen’enaipaslaforce!

–Tuplaisantes,pasvrai?demandé-jeenmeredressantpourlefixerd’unœilamusé.–Non,pasdutout,Romane,merépond-ild’unairtorturé,lesyeuxbrillantsd’unelueurinconnue.–Maispourquoi?!–Non,s’ilteplaît,jen’aipasenviedeparlerdeça…Vienslà!mesupplie-t-ilenm’attirantsur

lui.

Ok.J’aicompris,lesjournauxdisentvrai!Iln’estpaslibre!

–Attendsunpeu,monsieurAlecMendelssohn-Freeman !m’emporté-jeen sautantdu lit. Je suispeut-êtrepénible,c’estfortpossible,maisdis-moiaumoinssiçaaquelquechoseàvoiraveccetteBeth?

Accoudéaumatelas,ilmeregardem’énervertouteseule.Lesmainssurleshanches,nuecommeun ver dans la lumière franche du studio, je suis sur des charbons ardents et il semble à la foissubjuguéetamusé.

–Alors là, rien à voir ! m’assure-t-il en balayantmes soupçons d’un revers demain avant detendresonbrasversmoi.

J’esquiveetsautesurmonsacàmainposésurlebureauetsorsl’affreuxjournal.Cetorchonoùma grimace est imprimée pour l’éternité à côté du sourire glamour de la sublime chanteuse desStrangeDays.

–Cen’estpasmongenredecoucheravecdeshommesmariésoupresque!Jesaisbienquecesfeuilles de choux sont spécialisées dans le mensonge, mais tu comprends quand même que je

m’interroge.C’estpourçaquetuveuxmefuir?pleurniché-jeenvenantmerasseoirprèsdelui.Iln’yapasdefuméesansfeu!

Etvoilà!Fallaitbienquej’aligneunproverbeàlanoix!Justeenpleinemontéedramatique!

–Jesuisdésolédetemêleràcesragots,Romane.Cenesontquedesconneries.Entoutcas,onaunesalegueulesurlaphoto!remarque-t-ilenriant.

Çayest,ilm’énerve!

D’autantquelaseulechosequisemblevraimentlepréoccuper,l’urgence,cen’estpasdemedireune bonne fois pour toutes qui est cette fille pour lui, non ! Il veut connaître l’identité duphotographe!

Ilesttellementsexydanslesdrapsendésordreentraind’examinerl’horriblephoto…

Jenevaisquandmêmepas insister.J’aidéjàfaitsuffisammentdedégâtsetonseconnaîtdepuismoinsdequinzejours!Ilmeditqu’ilnecherchepasàmefuiràcausedeBeth,jesuistoutedisposéeàlecroire…Cequejenevoudraissurtoutpas,c’estqu’ilveuillemefuiràcausedemoi.

Etdemonfichucaractère!

–C’estsansdouteletypequetum’asprésentéàlagaleriesamedidernier,supposé-je.–FranckHarper!s’exclameAlec. Ilassurequ’ilnefrayepasavec lapresseàscandalemaisça

confirme mes doutes. C’est lui qui me flashe partout depuis quelque temps ! Je vais appeler sarédaction et lui dire ce que je pense de ses manières. Maintenant, passons aux choses sérieuses,s’enflamme-t-ilenjetantlejournalavantdemerenversersurlelit.

–Encoreunedernièrequestion!soupiré-jetandisquejerésistedifficilementàsesbaiserssurmesépaules.

– Tu ne lâches jamais l’affaire, toi ? me taquine-t-il sans pour autant interrompre son voyageminutieuxsurmapeau.

–CommeColombo!Ilatoujoursunedernièrequestion…–Jet’écoute,memurmure-t-ilenglissantsalanguedansmonnombril.–Jesuissérieuse!Ilfautquejesache,insisté-jeenleforçantàmeregarder.Est-cequetuasune

histoired’amouravecBethcommeleprétendlepapieretest-cequesonfils…Enfin,tuvois?–Çafaitdeuxquestions,note-t-il,lesyeuxpétillants.–Bon,ehbienrépondsàlapremière!trépigné-je.–Non!–Quoi,non?Tuneveuxpasrépondre!–Non!Jen’aijamaiseud’histoired’amouravecBeth!précise-t-ilenriant.–C’estvrai?m’enthousiasmé-je,enfindélivréedemesdoutes.DoncçaveutdirequeDany,lefils

deBeth,n’estpas…–Stop ! crie-t-il en quittant le lit d’un bond. J’ai un vrai problème,moi !Rien à voir avec ces

bêtises.Jen’aiplusdepréservatifsetjerêvedetefairel’amour!

Maisc’estunecatastrophe!

–J’aibienl’impressionqueni toinimoinetenonsànouséloignerl’undel’autre,continue-t-ilaprèsunsilenceenpassantnerveusementsamaindanssescheveux.

–Raviedetel’entendredire!–Couvre-toi,s’ilteplaît,souffle-t-ilensetournantverslafenêtrepourcommenceràserhabiller.

Est-cequetuprendslapilule?–Oui,murmuré-jed’unepetitevoix.

Contrel’acné!

–Tuveuxbienquenous fassionsun testVIH?medemande-t-il, commeéberluépar saproprepropositionenboutonnantsachemise.Onalesrésultatsdèslelendemain.Lecentrededépistageestjusteenbas.Çateva?

–Oui, bien sûr, assuré-je sur lemême tonmécanique en dissimulantma joie face à la preuveévidentequ’ilveutunerelationexclusive.

–Bon!Ilfautquejemesauve,j’aiunboulotdedingue,dit-ilsoudainenenfilantsaveste.

Maisqu’est-cequ’ilfait!Ilpart?!

–Tunem’embrassespas?!m’affolé-jetandisqu’iladéjàlamainsurlapoignée.–Troprisqué!J’aipeurdenepasrésister.Onsevoitdemainàlasoirée.–Demainsoir!Maisc’estdansuneéternité!

C’estquoiceclack?Laportequivientdeserefermerderrièreluioumesnerfsquilâchent?Jen’aijamaisétéaussipresséedefaireuneprisedesang!

***

[Sorsdemacervelleetlibère-moidetescharmes,Aphrodite.J’aiduboulot,c’estdusérieux.Est-cequetuportesuneculotteouunstring?]

Depuisqu’Alecs’estenfuihiermatin,iln’apascessédem’envoyerdesSMSdecegenre,oùilmesuppliede ledésenvoûter,maisquise terminentsystématiquementparunpointd’interrogation.Unpetithameçonauqueljemordsavecunplaisirextrême.EtjecontinuedelefairedansletaxiquimeconduitdansunrestaurantfaceàEllisIsland,oùSarahm’attendpourdéjeuner.Jenevoisriendelaville,lenezcolléàmonportable.

Jeferaidutourismeplustard…Pourl’instantjerépondsà«Al».

[Nil’unenil’autre,etjen’aipaslamoindreintentiondetedélivrerdetonmal.]

Commejem’endoutais,travailleravecSarahn’estpasdetoutrepos,maisc’estpassionnant.Hiersoir,aprèsnotrepremierentretien, j’aidécidéd’abandonner laprisedenotes.Elleparle trop!J’aiachetéundictaphone.

Savieestunroman.J’aienfinuneidéequitientlaroute.

Ellem’ad’abordparlédesonpère,Edouard,unmarchandd’artfrançaisd’originejuive,réfugié

enAmériqueavecsafamillepourfuirlespersécutionsnazies.Desamère,Mary,unefilledepasteurévangélisteduMinnesotadontlejeuneEdesttombéfouamoureux!

Ensuite,ellem’aracontésonenfanceentrelaFranceetlesEtats-Unis.Unepériodegrisemalgrél’argentcarfilleuniqueentredesparentsstrictsetbourrésdeprincipes.Àdixans,elles’enflammaitpour les récits d’aventuremais on avait tracé un chemin bien différent pour elle. L’attendaient lesmondanités,unfuturmarisoporifiqueetdesenfantsbiendressés.Maisàquatorzeans,elleétaitdéjàamoureusedesavoisineetserêvaitexploratrice!

Bref, lesseulsmomentsoùelleétaitheureuse,c’estquandelleétaitchezGeorgesetEsther,sononcleetsatantedeNewYork.Etlà,çadevientencorepluspassionnantcarEstherAckerman,épouseMendelssohn,n’estautrequelagrand-mèred’Alec.Unegrandeuniversitaire,toujoursrévoltée,librepenseuseethumaniste.

«Elleétaitcapabledecolèresmonumentalesmaisçafinissaittoujoursenauto-dérision.»Tiens,tiens…

Je suis très professionnelle et attentive à tous les propos de Sarahmais je dois avouer que j’aiadoréqu’ellemeparledeses joiesenfantinesaveclepèred’Alec,soncousin.J’ai l’impressiondemieuxleconnaîtreetjen’aipaseubesoindeposerdesquestionspoursatisfairemacuriosité.Sarahest intarissable.Ellem’ad’ailleursconfiéqu’elleconsidèresonneveu–quin’estpasvraimentsonneveumaissonpetit-cousin–commesonfils.

«Voussavez,lejeunehommequivousaraccompagnéehiersoir?»Oui,oui,jevoistrèsbien.

C’estainsique j’aiapprisque l’hôtelparticulierde laplacedesVosgesappartenaitàAlec. Il l’aachetépoursagrand-mèreàlamortdeGeorges,afinqu’ellepuisseretournersurlesterresdesonenfance. La vieille dame n’avait jamais oublié sa patrie et elle a élevé son petit-fils dans la puretraditionfrançaise.Malheureusement,elleestmortedechagrinquelquesmoisaprèssonmari.

«Maintenant,ilneluiresteplusquemoi.»J’aifailliajouter:«Jesuislà,maintenant!».

Quandj’aidemandéoùétaientlesparentsd’Alec,elleasoupiré,s’estassombrieetm’aseulementrépondu:

–Unehistoiretragique,jen’aipaslecourage…

Ellem’aensuitefaitboireunemixtureàbasedepâtedesoja,decitronetd’huiledefoiedemorueabsolumentinfecte.

Maisantioxydante…

Jemedemandesicette«terriblehistoire»estenlienaveclecomportementcontradictoired’Alec.Cettemanièrequ’iladetoutdonneravantdesereprendre.Cettefragilitéquej’aientrevuehiermatinauréveil.Quelleestcetteblessuremystérieusequilepousseàmefuir?

VoilàquejereçoisdesSMSencascades!Bon,lepremierestdeLucas…Ilaprissontemps.

[Avais perdumon téléphone et exam’ de chinois : un carnage ! J’attends toujours la facture ducalumet.Stresssic’estunobjetvolé…L’aidéjàoffertàmonpèrequil’adoremaisjeneluiaipasditquej’arrêtaisl’école.PasdenewsdeJo.Lesboules!Bizzz,MissAmerica!]

LesSMSsuivantsproviennenttousdumêmeexpéditeuretcen’estmalheureusementpasceluiquej’espérais.Quatremessages au numéromasqué s’alignent, odieusementmalsains les uns après lesautres:

[Bonnejournée,Romy!][Travaillebien,matourterelle.][Tellementfierdetoi!][Jeveille…]

Je suis d’accord,Lulu, les boules !Pasdenouvelles de Jo etPaulmeharcèle ! Je commenceàflippersérieusement.

Maisensortantdutaxi,monsmartphonem’annoncequej’aireçuunmailetc’estJo!Unenvoigroupéqui s’adresse autant àLucas etmoiqu’àAna, samère : «Le réseau coupe enpermanencealorsjefaisvite.Toutvabien,enfinpourmoidumoins,mêmesijen’étaispasvraimentpréparéeàça…Nevousinquiétezpas,jesuislàoùjedoisêtre…Jepenseàvousetjevousaime.VotreJo.»

Leportabledanslesmains,jerestedémunieenrelisantcesquelqueslignessobresdontlespointsde suspensionendisentdavantageque lesmots.Soudain, je lève la tête et je suis subjuguéepar legigantismedeMissLibertysursonîlequidressesonflambeaulibérateurau-dessusdelamer.

Etpeut-êtredeshommes…Cen’estpaslemomentdephilosopher,RomaneGentillac.Auboulot!

***

–Quelestvotregroupesanguin,honey?medemandeSarahalorsquejem’installeenfaced’elleàlaterrassedurestaurant.

–O+,réponds-je,unpeusurprise.– Parfait ! Commemoi. Les protéines sont tout à fait recommandées pour nous, les donneurs

universels.Vousaimezlesfruitsdemer,j’espère?

Bof!Etenparlantdemollusques,jeluidemanderaisbienpourquoiellefaitbosserPaul,maisjenelaconnaispasassez.

–J’adorelescrustacés!affirmé-je.–Vousêtesresplendissante.NewYorkvousréussit!

Votreneveu,surtout…

JeposemondictaphonesurlatableetenregistreSarahquisauteducoqàl’ânetoutengobantseshuîtres.Jel’écoutemeracontersapremièrerencontreavecunourspolaireetcommentelleafaillidevenirlasecondeépoused’unprincesaoudien.Elleétaittombéeamoureusedesapremièrefemme.

Jerisauxlarmesenluiconcédantquec’estunebonneraisonquandjereçoisunnouveauSMS.Jem’excuseetnepeuxm’empêcherdeleconsulter.C’estAlec:

[TestVIHnégatif…]–Pardon,jedoisrépondre,c’est…macousine,m’excusé-jeenrougissant.[Idem…]–EllevitenFrance?medemandeSarah.–Qui?Non,enAuvergne!Enfinouidonc…

Pffff!

–C’estvotreboy-friend!s’exclame-t-elle.Vousavezreçuunautremessage,enfin,lisez-le!VousallezbientôtleretrouveràParis,rassurez-le.C’estPaul?

Pitié!

[Attends-moicesoiraprèslasoiréedevantl’entréedeservice.Jenevaispastelaisserdormirdelanuit,çat’apprendraàmerendredingue.]

J’ailefeuauxjouesetj’aidumalàrespirer…

–Honey ! s’écrieSarah,épouvantée.Vousvoilàécarlateetvoussuffoquez !MyGod,vousêtesallergiqueàl’iode!

–Non!Toutvabien,Sarah,larassuré-jeavantqu’ellen’appellelessecours.C’estjusteuncoupdechaud.

***

Enfindejournée,Alecm’afaitlivrerunerobefourreauensoierouge,largementéchancréesurlesépaulesetfenduesuruncôté.Aupaquetétaitjointunmotécritdesamain:

«J’imaginequetuasdûbrûlerlesaffairesquejet’aioffertesenToscane,alorsacceptecegestetoutàfaitintéressé.Jeveuxquetuportescettetenuedansl’uniqueobjectifdetel’ôtermoi-même!»

Çam’a remiseen formecar j’avaisunpetitcoupdebarre. J’aimêmeréussiunecoiffureultra-glamour.Jenesaispascommentj’aifait!

Quandj’arriveàlasoiréeaccompagnéedeBrookeetdeSarah,jesuissurdescharbonsardents.Alecsetrouveàl’entréepouraccueillirlesinvités.Ilsaluesatanteetsacompagnequientrentensuitedanslehalldel’hôteloùsedéroulelafête.

Jefrissonneenm’approchantdelui,lecœurbattantetlesjambesencotoncommesijelevoyaispourlapremièrefois,puisluitendslamain.Ilrestestupéfaitenmedécouvrant,cheveuxsouplesetœildebichedansmarobeaffolante.

Àterme,jevoudraissurpasserDitaVonTeese.

–Jenesaispascommentjevaispouvoirfairemondiscourssanspasserd’abordsousunedouchefroide,memurmure-t-il,lesprunellesembrasées,endesserrantdiscrètementlenœudpapillondesonsmoking.

–C’esttoiquil’asvoulu,réponds-je.Moi,jeseraivenueenjean…–Jenesuispassûrqueçaauraitchangéquelquechose,malheureusement.Jesuisperdu!soupire-

t-ilenpassantsamainsursabarbenaissante.–Comptesurmoipourtetrouver!répliqué-jed’unevoixsensuelle.

Je lui lance un regard incendiaire avant de retirermamain, à regret, en voyant arriver Sam etAbby.

Je suis étonnée qu’ils soient là après l’esclandre d’avant-hier. Il n’a honte de rien ! Égal à lui-même,Samnous ignore tandisqu’Abby,gênée,nous faitungestede lamainensuivant sonmari,avantdes’arrêterunpeuplusloinpourembrasserSarahetBrooke.

–Àtoutàl’heure,meditAlecalorsquejem’apprêteàrejoindrelesautres.

Ilchangebrusquementd’expression.

FranckHarper, le photographe qui nous a piégés à Paris, s’apprête à entrer dans la salle.Alecs’interpose, l’empêchantdepasser. Je reste ! J’ai tropenviedevoirceblaireau remisenplaceparmonhomme.

C’estuncostaud!

Alec lui donne une espèce d’accolade en l’entourant de son bras et se penche pour lui parler.Brooke,SarahetAbbyfixentlascène,unpeuinquiètes.Sanssedépartirdesonsourire,Alreconduitlenabotverslasortiemaisj’arriveàentendrecequ’illuidit:

–Jem’enfousdetonaccréditation,Harper!Tudégages.Tusaistrèsbiendequoijeparle.Jetetrouveencoredansmespattesettoiettonappareilphoto,jevousécrasecommedesmoustiques.

Bravo!Vapleurersurletrottoir,misérable!

Jerentredanslasalleaumomentoùlepublicnombreuxsemetàapplaudir.Bethvientdefairesonentréesurscèneaccompagnéedesesmusiciens.C’estconfirmé,c’estuncanon.Aleclarejointavecunpetitgarçonbrunàquiildonnelamain,etmoncœurseserreenlesvoyanttouslestroiscommeunevraiefamille.

Iln’yarienentreeux.Stop!Qu’est-cequ’ilmefaut?UntestdepaternitéaprèsleVIH?

–Ilestcute,cepetitDany!C’estlefilsdeBeth,m’expliqueBrooke.Alecl’adore.

Ilaimelesenfants,moiaussi.Parfait!

– Ils ont formé les StrangeDays ensemble quand ils étaient au lycée, continueBrooke pendantqu’Aleccommencesaprésentation.

–Monneveusait tout faire, renchéritSarahenbaissant lavoix.Musicien,compositeur, c’estungéniedel’informatiqueetdelafinance,etenplusilestbeau!Pasvraiqu’ilestbeau?medemande-t-ellesoudain.

–Pasmal,bafouillé-je.–Etilesttoujoursseul,soupireBrooke.Toutçaàcausedecettesalehistoire…

Maisquellehistoire?Quelqu’unvamedirequelquechose?

Mais pas maintenant. La lumière baisse, Alec et Dany descendent de scène alors qu’explose labatterieetqueBethcommenceàchanter.Onentendsoudainunfracasplusfortencore,lesenceintesprèsduplateautombentausol,faisantstoppernetlamusiquealorsquedesgenscrientdestupeur.

OùestAlec?Jenelevoisplus!

C’estlapanique.Unefemmemontesurl’estradeenpoussantBethquiveutl’arrêter.Lasécuritéseprécipitesurscèneettentedemaîtriserl’inconnuerousse,maisellesedébatetfaittombermicrosetbatterie, ce qui rajoute au chaos général. Les gens commencent à fuir, de peur d’un attentat. LesStrangeDayssesauvent.Lafemmehurle:

–AlecMendelsshonestunescroc!Monmari lesavait.C’est luiqui l’apousséausuicide.Ilestpirequ’unassassin!

–Maisquiestcettefolle?s’insurgeSarah.Jevaislacalmer!–Cen’estpaslemoment,luifaitremarquerBrookealorsqu’AbbyetSamserapprochentdenous.–Qu’est-cequisepasse?demandeAbby,consternée.

Lalumièreserallumeetjenepeuxqueremarquerlevisagefroid,presquesatisfaitdeSam.

–Escroc!Assassin!continuedecrier laroussealorsquelesagentsdesécurité l’évacuentsansménagement.

JechercheAlec,affoléeetl’aperçoisenfin.Aumilieudelacohueetdesmurmuresinterrogatifs,ilest figé dans un coin du hall et fixe la femme hystérique. Seul. Comme nous, il a l’air de ne pascomprendrecequisepasse.

Jevoudraisaller le rejoindremaiscomment faire sanséveiller les soupçons?D’autantquedesjournalistes,camérasetappareilsphotoaupoing,affluentautourdeluienleharcelantdequestions.Les flashes crépitent sur son visage décomposé et il reste de marbre, silencieux. Impuissante, jedétournelesyeuxdesondésarroiquimebriselecœur.

–Maisc’estlafemmedeSantorro!s’exclameSarahenlavoyantpasserprèsdenous.

Santorro?Ledirecteurfinancier.L’articleduNewYorkTimes!

D’autresjournalistesseruentsurelle,nouspoussantsansménagementaupassage.

–AlecMendelssohn-Freemandétournaitdesfondsetmonmarilesavait!poursuit-elle,fébrile,ens’adressant aux caméras. Peter Santorro s’est suicidémais ce qui l’a poussé à le faire, ce sont les

pressionsinsupportablesqueMendelssohnfaisaitpesersurlui.Honte!Hontesurlui!

Brooke retient Sarah comme elle peut. Abby reste sidérée, se tourne égarée vers sonmari quidemeureglacial,nemanifestantpaslamoindrecompassionenversquiconque.

Surtoutpaspoursondemi-frère.

JenepeuxpaslaisserAlecseuldanscetteépreuve.Aprèstout,jemefousdesphotographesetdesragots, et je ne crois pas un instant ce que dit cette folle furieuse. Je me retourne pour aller lerejoindremaisAlecn’estpluslà.J’aibeaulechercherpartoutdanslasalle,jeneletrouvepas.

Ilaencoredisparu!

Àsuivre,nemanquezpasleprochainépisode.

Egalementdisponible:

Toutça,c’estlafauteduchat!

Toutça,c'estlafauteduchat!JedevaisresteràSanFranciscoquelquessemainesseulement,letempsd'uneexpositiondephotos.MaisPrince,cemauditfélin,atoutfichuparterre!Prince,etsurtoutsonpropriétaire:Jason,lebeau,séduisant,irrésistiblechanteurdeGolden.Unaimantàproblèmes!Legenred'hommequejefuissansmeretourner,d'ordinaire.Seulement,jen'aijamaissurésisteràundéfi…Surtoutquandcelui-ciestaussisexyqueJason.Alors,lesproblèmes,j’enfaismonaffaire.Quitteàjetermoncœurettoutesmesconvictionsdanslabalance!

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Avril2016

ISBN9791025730881