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VampireBrothers

DevarêvaitdequitterleMontanapourétudierl’histoiredel'artdansuneuniversitéprestigieuse;elledoitresteràMissoulapournepass’éloignerdesamère,gravementmalade.Devapensaitquecettenouvelleannéeuniversitaireseraitd’unebanalitésanségale;untueurensériesévissantdanslesparagesetlesagissementssuspectsdesameilleureamievontviteluifairerevoirsacopie.DevacroyaitavoirtrouvéenDanteunvéritableami;unseulregarddubeauTristanGrantetsavievaêtrebouleverséeàtoutjamais…Attiréemalgréelleparcesublimegarçondontellenesaitrien,lajoliejeunefillevatoutfairepouréchapperàlapassionquichercheàs’emparerd’elle.Carelleenestcertaine:cebeauvisageetcetteassuranceimplacabledissimulentquelquechose.Maisquandelledécouvreenfinsonsecret,ilestdéjàtroptard…

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Loveme(ifyoucan)

DamonLennox,milliardaire,tatouéettellementmystérieux,débarquedanslavierêvéed'Adèleetjettesondévolusurelle.LaFrançaisepensaitavoirdéjàtouchélejackpot:unnouveaudépartàSanFrancisco,unfiancébrillantetpleinauxas,unrestaurantfrançaisquicartonne,desemployésqu'elleconsidèrecommelafamillequ'ellen'apas.Maisl'attractionesttropforteetledangertropgrand.Adèleva-t-elletoutrisquer?Quecachelemilliardairetatoué?Qu'est-ilvraimentvenuchercher?Silavengeanceestunplatquisemangefroid,lapassion,elle,sedévoretantqu’elleestbrûlante.SavourezlanouvellesériedeFelicityStuart,quidonnepourlapremièrefoislaparoleàsesdeuxhérosdansunéchotroublant,gourmand,palpitant.

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Désire-moi!

LucieLerner,brillanteétudianteenarchitecture,estsélectionnéepourleprestigieuxconcoursGoldstein.Elles'envolepourMalteoùontlieulesépreuvesdequalification.Maislesémotions,levoyage,lachaleur...etlàvoilàquitombe,évanouie,danslesbrasd'unséduisantinconnu...quin'estautrequeChristopherLord,leparrainduconcours!Laravissantejeunefilleselaissera-t-elleenvoûterparlecharmemagnétiquedumilliardaire?SuccombezàlanouvellesagadeHannahTaylor,unesériedanslalignéedeCentfacettesdeMrDiamonds,oùunejeunefemmequiignoretoutdel'amourpartàlarencontredesondestin...

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CallmeBaby

EmmaGreenaencorefrappé!***"Multimilliardairerecherchenanny."***EndébarquantàLondresavecsasœurjumelle,Sidonies'attendaitàtoutsaufàdevenirlanounoudeBirdie,lapetitefillecapricieusedurichissimeEmmettRochester.LajeuneFrançaisevientdeperdresamère,sonnouveaupatronpleuresafemme,disparuedeuxansplustôtdansunviolentincendie.Cabossésparlavie,cesdeuxcœursmeurtrissesontendurcis.Leurcredo:pourneplussouffrir,ilsuffitdenerienressentir.Maisentreeux,l’attiranceestfataleetlacohabitations'annonce…explosive.Objectifnuméroun:nejamaiscéderenpremier.Objectifnumérodeux:nepastomberamoureux.Lequeldesdeuxflancheralepremier?

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BeautifulParadise

Solveigs'apprêteàvivreunnouveaudépart,directionlesBahamas,l'îledeCatIsland,oùsonexcentriquetantepossèdedeschambresd'hôtes.Soleil,plagedesablefinetpalmiers,c’estdanscecadreparadisiaquequeSolveigrencontrelemultimilliardaireWilliamBurton,etlecoupdefoudreestimmédiat!Ununiversmerveilleuxs'offrealorsàlajeuneParisienne.Seuleombreautableau,lemystérieuxjeunehommecachequelquechose,sonpasséesttrouble.Entreunirrépressibledésiretunimpalpabledanger,lajeunefilleacceptera-t-elledesuivrelebeauWilliam?A-t-elleseulementlechoix?DécouvrezlanouvellesériedeHeatherL.Powell,unesagaquivousemporteraauboutdumonde!

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LisaSwann

ADORE-MOI!

Volume8

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1.Dejustesse

Monmouvementsesuspendunedemi-secondeavantquejereprennemacourseversDayton.Laterreur me remplit d’une énergie inconnue. J’amortis sa chute dansmes bras, juste à temps pouréviterquesatêtepercutelesol.Jeleserrefortcontremoi.Sesyeuxécarquillésdesurpriseseriventauxmiens.Sesmainssontcrispéessursonflanc.

–Aïe,fait-il.Anna,çabrûle,çafaitmal.

Jebaisselesyeuxsursontee-shirtclair,soussaveste.Letissus’imbibeprogressivementdesang.Jen’osereleverlevêtementpourvoiràquelpointilesttouché.

–Dayton,resteavecmoi,murmuré-je,lagorgenouée.Neparspas.

Malgrél’agitationquisuitlecoupdefeu,Daytonetmoinoustrouvonsdansunebulleoùletempss’estarrêté.Danslapièce,çabougeviolemmentetdanstouslessens.

Quandjerelèvelatêtepourmefaireuneidéedecequ’ilsepasse,jevoisencoreunefoisSaskiavaldinguercontre lemuretsecognercontre lemêmeradiateurque laveille,quandellea tentédes’échapper.C’estl’Hispano,undestypesquinousaprisesenotage,quivientdelabalancerpourlaseconde fois. Je comprends auxmouvements des uns et des autres que Saskia a dû essayer de luisauterdessusenmêmetempsquelaprostituée,cellequiessayaitd’entrerdanslachambreavecsonclient.Toutesdeuxontbondiaveclamêmeférocité.

D’ailleurs,elleestaussidans lachambre,cettefille.Àgenoux.Elleadûêtrebousculée.«Jean-ClaudeVanDamme»,notresecondkidnappeur,n’estpluslà,etlesacavecl’argentnonplus.

L’Hispano pointe son pistolet tour à tour sur la prostituée et sur Saskia. C’est comme si jen’existaispas,commesijen’étaispaslà.Àvraidire,jenelâcheraisDaytonpourrienaumondeencetinstant.

Legangsterreculelentementverslaporterestéeouverte.Bizarrement,onn’entendplusunbruitsurlagaleriedel’hôtel.Leclientdelafilleadûsetirervitefaitenvoyantlegrabuge.

Onpeutfaireunecroixsurlapoliceetlespompiers,jesuppose…

Commelesdeuxtypesmel’ontbienfaitcomprendrehiersoir,lemotelestunrepèredejunkiesetdeprostituées.Autantdegensquin’ontpasenviedevoirdéboulerlesflicspourperturberleurspetitstrafics.J’imaginequetoutcepetitmondeadûdétalerdanstouslessensàladétonationducouptiré.

–Lapremièrequibougeseprenduneballe,balancel’Hispanoquireculetoujoursparl’embrasuredelaporte.

Dehors,devantlagalerie,lemoteurduvandanslequelnoussommesvenusjusqu’àAtlanticCity

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semetàvrombirdemanièrepasvraimentdiscrète.

L’Hispanofaitbrusquementvolte-faceet se ruevers le fourgon,puis j’entends lespneuscrissersurlegoudron.Franchement,onnevapasleurcouriraprès.L’urgenceestailleurs.AlorsqueSaskiasefrottelecrâneàdeuxmainsetquelajeuneprostituéeseremetsurpiedavecdifficulté,jememetsàhurler:

–Daytonestblessé!Ilfautappeleruneambulance!Vite!

Saskias’approchedenousàquatrepattes.Ellea l’air sonnée.Laprostituéechancelleégalementversnousets’accroupitpourvoirquelssontlesdégâts.

–Personneneviendra,dit-elle.Lesflicsneveulentpassavoircequ’ilsepasseici.Fautl’emmeneràl’hôpitaltoutdesuite.

Daytonafermélesyeuxetsarespirationestsaccadée.

Faitesqu’iltiennelecoup!Nelelaissezpasmourirdansmesbras!Pasaprèstoutcequ’ils’estpassé!Jamais!

Je fixe la jeune femme avec des yeux fous, sans savoir comment réagir. Jeme doute bien queresterlà,àserrermonhommedanslesbras,nevapaslesauver.

–C’esttonmec?medemandelafille.

Jehochelatête.

–Sit’asenviedelegarder,jeteconseilledeteremuerlesfesses,majolie,sinontuvaspouvoirluidire:«Bye,bye»…

LesmainsdeSaskiapalpentlespochesdujeandeDayton.

–Ilalesclésdelavoiture,dit-elled’unevoixfaible.

JerelèvelesyeuxversSaskia.Dusangluidégoulinesurlatempe,grossomodoaumêmeendroitquesablessured’hiersoir.

C’estuncauchemar!Faitesquejemeréveille!!

Daytongémitdansmesbras.Jemeréveilled’uncoupdemaparalysiedésespérée.

–Ilfautqu’onbouge!dis-je.Lesdeuxmecsarméssontpartis?demandé-jeàlafilleagenouilléeprèsdemoi.

Elleserendjusqu’àlaportepourjeteruncoupd’œil.

–Putain, lemotelestvidecommesic’était la findumonde! lance-t-elle.Votrevoiture,c’est lanoiregaréeenface?

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Saskiasecouelatête,incapabledeparler.

–Oui,c’estcelle-là!réponds-je.

Lafillerevientàcôtédenous.

–Ilfautquetunousconduisesàl’hôpital,dis-je.Onnesaitmêmepasoùonest.Cestypesnousontamenéesicihiersoir.Jesuisrestéecoincéedanscettechambretoutelanuit.

Lafillelèvelamaincommepourstoppermesparoles.

–Moinsj’ensais,mieuxjemeporte,dit-elle.O.K.,jevousaccompagne,maisvousmedébarquezavantl’hôpital.Jeneveuxpasêtremêléeàtoutça.

Saskiaserelèvedoucement.

–IlfautporterDaytonjusqu’àlavoiture,dis-je.

JemeredresseavecprécautionenmaintenantlatêtedeDaytonetmontreàlafillequ’elledoitleprendresousl’autrebras.Nouscommençonsàleporter,plutôtletraîner,verslaporte,pendantqueSaskiaprogresseenchancelantverslavoiture.

Dehors,eneffet,lemotelsembledésertédepuisdesannées.J’aidumalàcroirequej’aientenduautantd’activitélanuitpassée.Oh,ilrestebienquelquesdétritusplusfraisqueceuxquijonchaientleparkingetlagalerieavantnotrearrivée,maisjedoutequelapolicescientifiquesepenchesurleurexamen.C’estunendroitabandonnéoùn’importequoipeutsepassersansattirerl’intérêtdequiquecesoit.

Daytongémitunenouvellefoisetmoncœurseserre.

–Attends,ondoitmalleporter.Çaluifaitmal,dis-jeàlaprostituée.– Écoute, il faudrait un brancard pour faire ça bien, répond-elle. Là, l’urgence, c’est de filer à

l’hosto.

Jetranspireettrembledefroidenmêmetemps.Jemesensl’énergied’unegéante,prêteàpouvoirporterDaytonseule,maisj’ailesjambesquiflageolent.

Saskia est montée dans la voiture dans laquelle elle est venue avec Dayton. La fille et moiréussissons tant bien que mal à faire glisser Dayton sur la banquette arrière. Son tee-shirt estcarrémentimbibédesangquigouttesurtoutcequ’iltouche.Mesmainsensontpleines;jelesessuiesurlescuissesdemonjean.

LafillesedirigeverslecôtéconducteuretdélogeSaskiadederrièrelevolant.

Oui,çavautmieux.Paslapeined’avoirenplusunaccidentdevoiture!

Saskiaestàmoitiédanslesvapes.Malgrécela,toutsepassevite,presquesansparoles.C’estunevraiecoursecontrelamontre.Nousnenousparlonspresquepas,nousagissons,nousprenonsplace.

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Saskiaselaissetombercôtépassager;jemecaseàl’arrière,lebustedeDaytonrelevécontremoi.J’aienviedeleserrerdetoutesmesforces,maisjemeretiens.

Jeneteperdspas!Horsdequestion!Tienslecoup,monamour!

Commes’ilentendaitmespensées,ilsoulèvesoudainlespaupièresets’accrocheàmonregard.Jeluicaresselajoueetluisouris.

–Onvaàl’hôpital,murmuré-je.Tuvast’ensortir.Onvayarriver.

Jelistellementdeviedanssesyeuxgrismétalquejereprendsespoir.

– Je t’aime, Dayton, chuchoté-je,mon cœur battant à tout rompre, en gardantmamain chaudeposéesursajoueplusfroide.Excuse-moipourtoutcequej’aifait.

Ilparvientàémettreunfaible«Chut!»etmesouritavantderefermerlesyeux.Ildoitéconomisersesforces,aucontrairedemoiquidépenselesmiennessanscompterpourl’assurerdemonamour.

Gardel’espritclair,Anna!

Lavoiturerouledepuisdixminutesdéjà.Lafillenégociedesviragestrèsserrés,aufreinàmain.J’amortisleschocscontrelaportièredetoutmoncorps,maisçan’empêcheque,detempsàautre,matêtecognecontre lavitre. Je jetteuncoupd’œilàSaskiadont la têtedodelineet, régulièrement, jel’appellepournepasqu’ellepiquedunez.Elledoitêtreépuisée,et leschocsconsécutifsontdû lamalmener. La fille au volant est concentrée sur sa conduite, malgré la situation complètementahurissante.

Ahurissantepourmoi !Cette fille apeut-êtreautant l’habitudede cegenrede trucsquemoidefréquenterleshôtelsdeluxedepuisquelquesmois!

–Onestbientôtarrivés?demandé-jedoucementenluitouchantl’épaule.–Ouais,ouais,moinsdedixminutessiçaroulebien,dit-ellesansquitterlaroutedesyeux–ce

dontjeluisuisreconnaissante.Commentilva,tonmec?

Je baisse le regard sur Dayton. Sa respiration est moins saccadée, mais j’ai peur qu’il perdeconnaissance.

–Ilsaignebeaucoupmaisilrespire,réponds-jelagorgenouée.

Moinsdedixminutesplus tard,commeprévuparnotrechauffeur improvisé, lavoituresegaredevant l’entréedesurgences.Sansmarquerdepause, la filleserre le freinàmainetdescend.Puis,ellesepenchedansl’habitacleetmeditsimplement:

–Bonnechance!–Merci,luiréponds-jesansavoirletempsdeluidemandersonnom.

Jelavoiscourirsursestalonsamochésetdisparaîtreàlasortieduparking.

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***

Nous sommes aussitôt pris en charge.Dayton est conduit d’urgence au bloc et Saskia disparaîtdansunesalledesoins.Onm’annoncepeudetempsaprèsqu’ellevasubirdesexamens,notammentpour savoir si elle ne souffre pas d’un traumatisme crânien.Onme signifie aussi demanière trèssérieusequejenedoispasquitterleslieux.L’infirmièren’estpastrèsaimable.Visiblement,çanefaitplaisiràpersonnedeseretrouveravecunblesséparballeetdeuxFrançaisesdéboussolées.

Jem’installedanslasalled’attenteetmedemandeàquellesaucejevaismefairemangerparlesflics,aprèsavoirpasséunenuitséquestréepardespsychopathes.

Jetricoteavecmesdoigtsenmedemandantsurtoutcequejedoisraconter.Faut-ilquejeparledeJeff?Ildoitdéjàêtreassezdanslamerde…D’unautrecôté,sionenestlà,queSaskiaestsonnéeetqueDayton est au bloc, c’est quandmême beaucoup à cause de lui…Et puis, j’ai causé assez dedégâtsencachanttropsouventlavérité.

Jenedevraispasmesentircoupabledequoiquecesoit.Pourtant,c’estcequejeressens,commeunegaminepriseenfautequiestsurlepointdesefairepunir.

–MademoiselleClaudel?medemandeunevoixdefemme.

Je relève la tête vers une femme-policier en uniforme. Une dame qui pourrait être ma mèredéguiséepourlecarnaval.

Qu’est-cequ’onn’imaginepaspoursesentiràl’aise…

–Jesuisl’agentRooveretvoicimoncollègue,l’agentHogan,dit-elleenmedésignantl’hommequi l’accompagne et qui, étrangement, lui ressemble tellement qu’il pourrait être son frère. NoussommesvenusvousposerquelquesquestionsausujetdecequiestarrivéàM.Reeves.

Jedéglutis,prêteàpasserauxaveux.

Maisdequoi?!Jen’airienfait!

–Vousavezl’airfatiguée,continuelafemme.Vousvoulezuncafé?

Lesourirequ’ellem’adressealorsmeréconforte.J’inspireungrandcoupetsecouelatête.

–Oui,s’ilvousplaît,murmuré-je.

Quand l’agentHogan revient avecmon gobelet de café infect d’hôpital, l’agentRoover a eu letempsdememettreàl’aiseetdemefairecomprendrequ’elleestplutôtlàpourm’aideretpaspourmepasserlesmenottes.

Noustrouvonsunesalledesoinslibrepourdiscutertranquillement,etlesdeuxagentssortentleurscalepinspourprendredesnotes.

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Jedistout,enomettantquandmêmedesignalerquenousétionsaucourantdesmésaventuresdedettesdejeuxdeJeff.CommesiSaskia,Daytonetmoil’avionsapprislaveille…Cequiestenfaitunpeu le caspourDayton…Passons…Jen’évoquepasnonplus l’aidequenousa apportée la jeunefemmeprostituéedumotel.

Metaireetomettre,c’estmaspécialité!

Pourlecoup,jenevoispaspourquoijeluiattireraisdesennuisaveclapolicealorsqu’ellenousasortisdupétrin.

Quandl’AgentHoganmedemandesijepourraismeplieràl’exerciceduportrait-robotavecundeleursportraitistes,jelessurprendstouslesdeuxensortantunblocetuncrayondemabesaceetenleur dessinant, sommairement tout d’abord, puis de manière plus détaillée, le visage de noskidnappeurs.

L’agent Hogan émet un sifflement admiratif et sa collègue me remercie chaleureusement. Elleobservelesdeuxvisagesuncertaintemps,avantdedéclarer:

–Bon,commeça,évidemment,onnepeutêtreformel,maisonvarapprochervosportraitsdesfichiersdescriminelsdumilieudujeuetonverracequeçadonne,dit-elle.Cenesontpeut-êtrepasdesgarsd’icimaisjustedeshommesdemainembauchésparungrosbonnetlocal.Onvoustiendraaucourant.

Lesdeuxagentsrangentleurscalepinsets’apprêtentàprendrecongé.

–Onvousdemandederesterdanslecoinaumoinspendant24heures,ditl’agentRoover.Detoutefaçon,votreaminerisquepasdesortirdel’hôpitalcommeça.Onvadevoirprendresadépositionaussi.J’aicrucomprendrequesablessuren’étaitpasaussigravequ’elleenavaitl’air.

Une fois que les deux agents sont partis enme laissant un numéro où les joindre, « au cas oùcertainsdétailsmereviendraient»,jefileversl’accueilpourdemandersiDaytonestsortidublocetsijepeuxvoirSaskia.

– J’appelle le médecin, me répond l’infirmière qui, décidément, n’a pas l’air de m’avoir à labonne.

Je l’imagineen traindemeclasserdans lacatégorie :«PetiteFrançaiseàemmerdes»et jemeretiensdenepassoulignersonmanqued’amabilité.

– Je vous conduis à votre amie, me dit le médecin quand il arrive à l’accueil. On a fini lesexamens. Je vous rassure, nous n’avons décelé ni hémorragie, ni traumatisme. Nous avonssimplementprocédéàquelquespointsdesuturesursoncuirchevelu.

Saskiaest installéedansunechambre.Elleestaussi livideque lesdraps.Ellese tient lesbras lelongducorps,commeunegisante.Jen’aimepasvoirmonamie,sipleinedevied’habitude,avecdesairsdemourante.

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–Hé!Twinkle,çava!fait-elled’unepetitevoixmoqueuseenvoyantmatête.Jesuisjusteclaquée.C’estlecontrecoup,c’esttout.

Elleagitelesbras.

–Tuvois bien, pas de perfusions, pas d’appareils qui font bip-bip, continue-t-elle.Les flicsmelaissentpasserunebonnenuitetreviennentprendremadéclarationdemain.Onm’afaitdesexamens,ettoutvabien,justedesbleus.Onvaquandmêmemesurveillercettenuit,histoiredevoir.

Puisellesecouelatête,avecuneexpressionirritée.

– Jeff nous amis dans une bellemerde avec ses histoires, hein ? fait-elle.On aurait pu tous ypasser.Tuterendscompteàquionaeuaffaire?Cesontdevraisgangsters.S’ilsretrouventJeff…Merde,j’ailatrouille.Cestypessontcapablesdetout.Qu’est-cequ’ilsvontpouvoirluifaire?

Jelaserredansmesbrasenévitantdetouchersoncrâne.Ils’estprisassezdecoupscommeçaenl’espacedevingt-quatreheures.

Lemédecinnous laisse dans la chambre enm’indiquant qu’il reviendrame chercher pour allervoirDayton,quandcelui-ciseraremontédelasallederéveil.Ilprendtoutdemêmeletempsdemerassurerconcernantsonétat:l’interventions’estbiendérouléeetlediagnosticestplutôtrassurant.

Jem’assiedssurleborddulitdeSaskia,entenantlesmainsdemonamie.Dixminutesplustard,jemesenspartiretm’affaissercontreelle.Mespaupièressontlourdesetjem’endors,épuisée.

***

–J’aidormilongtemps?demandé-jequandSaskiameréveilledoucementenmetapotantlajoue.–Uneheureetdemie,untruccommeça,dit-elleenchangeantdeposition.Hormislefaitquej’ai

desfourmisdanslebras,onvientdemeprévenirquetupouvaisallervoirDayton.Euh,frotte-toiunpeulajoue,tuaslatracedesplisdel’oreiller.

Jepassedanslecabinetdetoilettedelachambrepourm’aspergerlafigured’eau.Sansmêmejeterun regardversmon reflet dans lemiroir, depeurde constater ledésastre, je filevers la salledesinfirmières.L’uned’ellesmeconduit aussitôt à lachambreoùDaytonaété installé.Elleme laissedevantlaporte,medemandedenepasrestertroplongtemps.J’évitedeluirépondrequejenecomptepasquittercethommedetoutlerestedemavieetjeluiprometssagementdenepaslefatiguer.

–Votreamiaeudelachance,voussavez,medit-elle.Laballeatraversésonflancdepartenpart,sans endommager d’organes vitaux. C’était impressionnant, mais pas grave. Ce sont surtout lesmusclesquiontétédéchirés.

–Euh,dites,fais-jeàl’infirmièreavantqu’elles’éloigne.Iln’yapersonnepourmonterlagardedevantsachambre?

Lajeunefemmes’arrêteetmesouritavecl’indulgencequ’onréserveauxgrossesimbéciles.

– Votre ami n’est pas un témoin sous protection, ni un gangster susceptible d’être victime de

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règlementsdecompte,n’est-cepas?Lapolicea jugéquecequ’ils’estpassérelevaitde l’incidentisoléetquevotreamin’avaitpasàcraindredereprésailles.Vouscroyezqu’ilsontraison?

Je secoue la tête comme l’abrutiequ’ellepenseque je suis, puis, le cœurbattant la chamade, jepoussedoucementlaportepourpénétrerdanslachambre.

Au contraire de Saskia,Dayton est sous perfusion et raccordé à desmachines qui font bip-bip.J’approcheàpetitspassilencieuxdeson lit. Ilporteuneblouseblanched’hôpital,sous laquelleondevineunbandagequiluienserrelebasdutorse.Jesoupire.Sapoitrinesesoulèverégulièrementetdoucement. Son profil élégamment dessiné semble paisible. Sa bouche fine n’est pas tendue. Sespaupièresnesontpascrispées.Debout,prèsdulit,jeposelamainsursonbrasnu.Ilouvrelentementlesyeuxetmesourit.

–Dayton,murmuré-jeenmepenchantpourl’embrasser.Commenttesens-tu?–Mieuxmaintenantquejetevois,chuchote-t-il.Jenesavaispastropcequ’ilt’étaitarrivé.Jecrois

quej’aiperduconnaissance.J’avaispeurquetusoisblesséetoiaussi.–Non, non, réponds-je. Je n’ai rien. J’étais juste terrifiée à l’idée de te perdre. Je neme serais

jamaispardonnédet’avoirattirédanscepiège.–Tun’yespourrien,Anna,dit-il.–Maissi,toutça,c’estmafaute,Dayton.Avecmamaniedetecacherdestrucs,j’aiencoremerdé,

ettuvoisoùtoutcelanousamenés.

Ilsecouetoutdoucementlatête.

–Tun’yespourrien,Anna,jet’assure.C’estàcausedeJeffquenousnoussommestousretrouvésdanscettesituation.Jem’enveuxdenepasm’êtrerenducompteavantdecequ’ilvivait,etjem’enveuxdet’avoirreprochéquelquechosedonttun’étaispasresponsable.

Leslarmesmemontentauxyeux.

–Dayton,j’aieutellementpeurdeteperdre.Jevoudraistellementquetumepardonnes.–Tun’asrienàtefairepardonner,machérie,medit-ilavecunsourireplustenducettefois,peut-

être à causede ladouleurde lablessure.Nous sommesenvie, c’est tout cequi compte.Tuas étéloyaleenversJeffetaussifranchequetupouvaisl’êtreavecmoi.Jeveuxjustequ’onoublietoutça.Onestenvie.Onestencoreensemble.

Samainserefermesurlamienne.Ilmeserrefort,commes’ilavaitpeurquejem’éloigneouquejedisparaisse.

–ResteavecmoiAnna,s’ilteplaît.Mêmesijem’endors.Tuasparléauxpoliciers?–Oui,réponds-je.Ilssontvenusm’interroger.Jeleuraitoutdit.–PourJeffaussi?

J’acquiesce.

–Detoutefaçon,ilvabienfalloirqu’ilrefassesurfaceunjour,dit-il.–Tuluienveux,n’est-cepas?demandé-je,peinéedecetteamitiéquirisquedevolerenéclats.

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–Unpeuoui,répondDayton.MaisjesaisqueJeffn’estpasletyped’hommeàfuiràtoutjamaissesresponsabilités.Ilreviendra,Anna,j’ensuissûr.Ilreviendraetilferaamendehonorablepourseserreurs.

–Etpourl’argent,Dayton?C’estunesacréesommequetuasperdue…–Ons’enfoutdel’argent,Anna,chuchote-t-ilencoreplusbas.Onestenvieettueslà.

Jem’assiedsauborddulitenprenantsoindenepaslebousculer,puisjemepenchesurlefrontdeDaytonpourl’embrasserdoucementplusieursfois.

–Monamour,monamour,murmuré-jeentrechaquebaiser.

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2.Toutvatropvite!

J’ai beau insister pour rester au chevet deDayton cette nuit, je ne suis visiblement pas dans lespetitspapiersdesinfirmières,quidoiventenavoirras-le-boldemevoirtraînerdanslescouloirsenpassantdelachambredemonamoureuxàcelledeSaskia.Jemedébrouilledonccommeunegrandepourmetrouverunhôtelpastroploindel’hôpital.

Lesoir,dansmachambre–quiestpourune foisassezconformeàceque j’aieu l’habitudedefréquenter avant de rencontrer Dayton –, jeme pose enfin et prends le temps de passer plusieurscoupsdefil.J’appellepluslonguementSummer,quej’avaisjusteprévenuedansl’après-midipourluiassurerquetoutallaitbien.Lajeunefilles’estréfugiéechezuneamiepoursoulagersonangoisse.

–TuessûrequeDaytonvabien,Anna?demande-t-elle.–Jesuisrestéeavecluitoutelajournée,Summer.Ilestfatiguéparl’opération,maisilvabien;je

telepromets.Jeveillesurlui.Ilestentredebonnesmains.

Ouais,lesinfirmièressontdevraischiensdegarde!

– Putain, quandmême, Anna, dit Summer. C’est n’importe quoi, ces derniers temps, Dayton ettoi…Entretoiet tescrisesdeje-ne-sais-quoiquifontflippertout lemonde,Daytonquicourtdanstouslessenspourretrouversamère…Voilàquevousvousretrouvezdansunehistoiredigned’unfilmdegangsters. Jesaispas tropsivousvous rendezcompteque je faisdesétudes…J’aibesoind’unenvironnementcalmeetsécurisant,moi!

Jerêve,elleestentraindem’engueuler!

Je comprendsque le cri du cœur et l’indignationdeSummerparlent d’autre chose.Dequelquechosequ’elleneveutpasclairementdire.Elleestinquièteetpréfères’offusqueretrâler,plutôtqued’avouerqu’ellesefaitdusouci.

–Summer,dis-jed’unevoixrassurante.Toutlemondevabienici.

Ausilencequisuit,jedevinequeSummerestémue.

–J’aieupeurpourvous,avoue-t-elleenfind’unevoixchevrotante.J’enaimarredesdramesdansmavie.J’aieupeurdevousperdretouslestrois,mêmeSaskia.

–Summer,quandtuserasunpeuplusâgée,tuterendrascomptequ’onnepeutpastoutmaîtriserdanslavie.Cequ’ilvientdesepasserestquandmêmeunpeuindépendantdenotrevolonté.C’estparamitié qu’on se retrouve dans cette histoire. Quand on aime des personnes, il peut arriver qu’onprennedegrosrisquespourelles.

Lemessageestpassé.Pudiquemaissincère.

–Ouaisbenquandmême, je trouvequevousdéconnezgrave tous lesdeux, soupire-t-ellepour

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détendrel’atmosphère.

Sadésinvolturemelaissesansvoix.

–Jen’aipasenvied’êtretouteseule,Anna.JevaisresterchezmacopineLola.TupeuxledireàDayton,s’ilteplaît?

–Biensûr,réponds-je.Jesupposequ’ilpréfèretesavoirentouréequetouteseuleentraindefairen’importequoiauNouveaumonde.

–N’importequoi?rigole-t-elle.C’esttoiquidisça!

Jecoupecourtàladiscussionavantdem’agacer,mêmesisaréactionmerassureetmefait,moiaussi,unpeurire.Jeprendsquandmêmeletempsdeluidemanderdepasseràl’appartpournourrirChurchilletchangersalitière.

–J’aipaslesclés,ronchonne-t-elle.–Pasbesoin.J’appellelagaleriedeSaskia;ilsdoiventavoirundouble.Tun’aurasqu’àpasserles

prendre.S’ilteplaît,Summer…

SuitunrapidecoupdefilauxReevespourleurapprendrequeDaytonesthospitaliséetlesrassurersursonétat.Kathyestpaniquée,maisj’entendsGrahamenarrière-fondquiluirappellequeleurfilsestgrandetque«siAnnateditquetoutvabien,Kathy,c’estquetoutvabien.».

Jepeuxcomptersurluipourapaiserlesangoissesdelamamanpaniquée.

J’appelleensuiteGauthierpourleteniraucourantdesdernièresmésaventuresdesesamiesetpourm’imprégnerunpeudesabonnehumeur.Jerécoltebienplusqueprévu.

–Rhooomaisonnepeutpasvouslaissertroisjourssansnouvelles,sansquevousnousécriviezun vrai polar à vous toutes seules, déclare-t-il. Il est temps que Lady Gogo arrive pour voussurveiller!

–Dis-moi,tuasuneidéedeladatedevotrevisite?demandé-je,enthousiasteàl’idéedelafutureproximitédemonmeilleurami.

–Ehbien,danscinqjours!–Cinqjours!Maispourquoitunem’aspasprévenueavant!m’exclamé-je.–Jet’aiditquec’étaitimminent,Anna,répondGauthier.Çaaétéplusrapidequeprévuparceque

Micha nous a dégoté des billets d’avion à un prix défiant toute concurrence et, comme ledéménagement va entraîner des frais que je n’avais pas vraiment anticipés, il n’y a pas de petiteséconomies.

Jesuisprisedecourtpar l’arrivéesoudainedeGauthiermais tellement ravie,que la joieprendrapidementledessus.

–J’essaieraid’êtrelàpourvousaccueillir,dis-je.J’espèrequenousseronsrentrésàNewYork!Etpasquestionquevousalliezàl’hôtel.Vousresterezàl’appartdeBrooklyn.J’aitellementhâtedetevoir, mon Gogo, et de rencontrer Micha, bien sûr. Rappelle-moi, c’est bien lui qui a de bellesfesses…

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Ladiscussioncontinuequelquesminutessurunmodeplaisantetrigolard.Jemesurprendsàmelâcheretàrireauxéclats.Certainementunemanièrepourmoidedécompresser.

Je repose leportable sur le litdemachambreetm’allongepourmedétendrevraiment.Malgrémoi,touslesévénementsdesdeuxderniersjoursrepassentdansmatête,commeunfilmenaccéléré,visionnéenboucle.

Tempsmort!

Et là, jeme rends compte que je n’ai pas appelé quelqu’un que j’ai vraiment envie d’entendrequandjesuisàcranetbouleversée.

Mum…

Jefilemedoucher,nettoiegrossièrementlestachesdesangsurmesvêtementsetmeglisseentrelesdrapsfraisdecelitanonymeoùjemesenssiseule.JecomposealorslenumérodemesparentsenFrance.Mamèredécrochepresqueaussitôt.

–Anna,machérie,jepensaisfortàtoidepuishiersoir,jem’inquiétaispresque.C’étaitplusfortquemoi.Tonpèreavaitbeaumedireque…

–Oh!Mum,soupiré-je,soulagée.

Jeluiracontetout,d’unevoixcalme,maisavecdessanglotsdanslagorge.Jesuissiheureusedepartageravecelle,demelaisserréconforter,desavoirqu’ellesentaitqu’ilm’arrivaitquelquechose,malgréleskilomètresquinousséparent.

Jemelaissebercerparsavoixetm’endors,richedetoutescesréconciliations.

***

Aumatin,jeretrouveleDaytonséduisantetsûrdeluiqu’ilm’avaitsembléavoirperdulaveille,quandjel’avaisdécouvertallongédanssachambred’hôpital.Ilestassissursonlitet,dèsquej’ouvrelaporte,ilsemetdeboutenm’adressantunsourireconquérant.

–Jet’attendais,medit-ilensetenantd’unemainaumontantdulit.– Hé ! Superman, ils t’ont mis de la kryptonite dans ta perf ou quoi ? ! m’exclamé-je en me

précipitantsurlui.Tuneveuxpast’asseoirplutôt?Çan’estpasunpeurapidepourselever?

Ilcèdeets’assoiesurlelit,maisc’estpourm’attirercontreluiplusconfortablement.

–J’aidéjàbienassezdesinfirmièrespourmefairelaleçon,grommelle-t-il.Ellesn’étaientmêmepascapablesdemedireoùtuavaispassélanuit,ettonportablenerépondpas.

–Non,j’aidûpasserpasmald’appelshiersoirquandjesuisalléeàl’hôtel,dis-je.Mabatterieestàplat.J’aiprévenuetrassurétoutlemonde.

Jegardesonvisageentremesmainsetjeluicaresselajouetoutenledévorantdesyeux.

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Ilestlà,ilvabien,ilestbeauetjel’aime…

Silebonheurpouvaittenirenuneseulephrase,ceseraitcelle-ci!

–TuasappeléAudreyaussi?medemande-t-il.

Ahmerde,jenel’aipasencoreintégréeautableau…

Devantmaminepenaude,Daytonajouteaussitôt:

–Hé!Necommencepasàculpabiliser,Anna.Ilvanousfalloirdutempspournoushabitueràsaprésencedansnotrevie.C’estnormalquetuaiesoublié.Jeleferaidanslajournée.

–J’aiappelémamère,dis-jecommepourm’excuser.

Ilmeserrefortcontrelui.

–Jesuiscontentquetul’aiesfait,memurmure-t-il.Onestentraindetoutmettreenplacepourunebellevie,nousdeux…Enfin,unefoisqu’onauraretrouvéJeff…

Onestsainsetsaufs,c’estvrai,maisjen’oubliepas,commeDayton,quenotreamiestonnesaitoù,nidansquelétat…

–Onauraitpunouspréparerunebellevieplustranquillement,réponds-jed’unevoixdouce.Unpeucommetoutlemonde.

–Maisonn’estpastoutlemonde,mesusurre-t-ilenmemordillantl’oreille.

Disdonc,jenesaispascequ’ilyadanssaperf!

Onfrappeàlaporteetlatêtedel’agentRooverpasseparl’embrasure.

–M.Reeves?dit-elle.Bonjour.Onpeutvousdérangerquelquesminutes?

Daytonacquiesceetlesdeuxagentspénètrentdanslachambreenmesaluantd’unsignedetête.Jem’installe dans le fauteuil près de la fenêtre, en attendant que la procédure suive son cours. Je lesécouteseprésenter,puisposeràDaytonlesmêmesquestionsqu’àmoi.Jesuisassezsatisfaitedenepas avoir omis quoi que ce soit dans ma déposition, car celle de Dayton est fidèle à ce que j’airaconté.

Lesagentsproduisent lesportraitsque j’aidessinés etDaytonconfirmequ’il s’agitbiendenosdeuxagresseurs.

–Bravo,Anna,dit-il.J’auraisétéincapabledelesdécrireaussiprécisément.– Enmême temps, j’ai passé la nuit avec ces types, réponds-je en rougissant aussitôt du sous-

entendumalvenuquipourraitêtreperçudansmespropos.–Jevoussouhaitedesnuitsplusagréables,intervientl’agentHoganenmesouriant.

L’agentRoover,quantàelle,estplusconcentréesursamission.

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– Nous allons enquêter, M. Reeves, déclare-t-elle. Il y a eu enlèvement, extorsion de fonds ettentative d’homicide. Nous recherchons activement vos agresseurs, mais nous ne pouvons vousretenir plus longtemps à Atlantic City. D’autant que j’ai appris de votre médecin que vous aviezdemandéàsignerunedéchargepourpouvoirsortirauplustôt.Vousmesemblezbienpressé.

J’écarquillelesyeuxenregardantDayton.

–JepréfèreeneffetrentreràNewYork,répondDayton.J’aiunesociétéàfairetourneret,d’aprèslemédecin,riennem’obligeàêtresuiviici.Jemepréoccuperaidemasantéchezmoi.

–Ilyaunechosequimechiffonnequandmême,poursuitl’agentRoover.Votreargent,jesupposequevousallezporterplaintepour…

–AgentRoover,lacoupeDayton.Jesuisvenudemonpleingrédonnercetargent.Ilétaitperdupour moi avant même qu’on me tire dessus. Je l’ai fait pour un ami dont on est toujours sansnouvelles.Cequim’importe,c’estdeleretrouveretd’êtreenvie.L’argentestaccessoire.

–Ils’agitdeplusde300000dollars!déclarel’agentHogan,aprèss’êtreéclaircilavoix.Cen’estpasunepetitesomme.

–Mavieetcelledemonamivalentbienplusquecettesomme,répondDayton.Etvouslesavezsans doute,mais je ne suis pas vraiment dans le besoin…Excusez-moi cette remarque,mais c’estjustepourrétablirlavaleurdecequiimporteetdecequiimportemoins.

–Malgré tout, je crois que, pour votre ami, vous devriez signaler sa disparition à la police devotreÉtat,M.Reeves, insiste l’agentRoover. Ilsse tournerontvers lesautoritéscompétentes. Ilyadesservicesfédérauxquis’occupentdesdisparitions.

Daytonsecontented’acquiescer.Danslebrefregardquenouséchangeons,jecomprendsqu’ilnevaenfairequ’àsatête,encoreunefois,maisc’estpeut-êtreaussiparcequ’ilsaitcequ’ilvautmieuxfairepoursonami?Jel’espère…

Concernantla«rançon»perdue,jereconnaisbienlàl’assuranceet l’honnêtetédemonhomme.Même si les deux agents ont l’air un peu perturbés, ils se rangent à l’avis deDayton et prennentcongé,aprèsavoiréchangécartesdevisiteetnumérosdetéléphonepourqueDaytonpuisseêtrejointpendantl’enquête.

–MlleClaudel,medit l’agentRooveravantdesortirdelachambre,vousavezétéenlevéeavecvotreamie.Nousvenonsdel’interrogeretelleneveutpasporterplainte.Qu’enest-ildevous?

Je nous imagine enfoncées jusqu’au cou dans un procès de série télévisée interminable etspectaculaire–toujoursmoncôté«J’enfaistrop»–,et,franchement,çamefoutlapétocheetnemedonnepasdutoutenvie.J’ail’intimeconvictionquecestypess’ensontbientirésavecl’argent,qu’ilsn’étaientquedesmalfratsdetroisièmezonequionteuchaudauxfessesetnetenterontcertainementpasderevenirdemanderdurab.

–JesuisdumêmeavisquemonamieetqueM.Reeves,réponds-jed’unevoixblanche.Jesuisenvie, j’aienvied’enprofiterautrementqu’enpourchassantces types.Ceciétant, jenepeuxêtrequerassuréequevousenquêtiezetjeresteraiàvotredispositionsivousavezbesoindemoi.

L’agentHoganémetunpetitclaquementdelangueétonnéetunrienironique.

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–Onn’entendpasçatouslesjours;jenesaispastropquoienpenser,dit-il.

Lesdeuxagentséchangentunregarddubitatif,avantdenousserrerlamainetdes’enaller.

–J’aieupeurqu’ilsdéterrentmonhistoiredepiratagedusitedeservicessociaux,meditDayton,aprèss’êtreassuréquelesdeuxflicss’étaientéloignés.C’estcon,hein?Jem’attendaisàcequeçaressorte.Jeffasansdoutedûfairelenécessaireàl’époquepourquemoncasiersoiteffacé…

–TunevaspassignalerladisparitiondeJeffsij’aibiencompris,hein?

Daytonsecouelatête.

–Sinousavonsétésurprisd’avoiraffaireàdevraisgangsters,destypesarméscapablesdetout,Anna,jecroissincèrementquecen’estpaslecasdeJeff.Luisavait.Jesuisconvaincuqu’ilamislesboutsetestensécuritéquelquepart.Évidemmentçam’angoisseetj’ailatrouillequ’ilsfinissentparleretrouver,mais,connaissantJeff,ilneseferapascoincercommeça.Cen’estpasundébutant;jepensequ’ilal’habitudedecemilieu.

Ilaraison;illeconnaîtsansdoutemieuxqueSaskiaetmoiréunies,mêmesinoussommestouspassésàcôtédesongrandsecretconcernantsonvicedujeu.

– C’est vrai alors, tu vas signer une décharge pour sortir aujourd’hui ? demandé-je en merapprochantpourposerlamainsursontorse.Tuessûrqueçavaaller?

–Onn’aaucuneraisondemoisirici,merépond-ildesonton«MrBusiness».J’aidemandéquel’hélicoviennenouschercherdirectementàl’hôpital.Onreparttouslestroiscetaprès-midi.Detoutefaçon,Saskianonplusnepeutplusresterenplace.Ellen’apasarrêtédesebaladertoutelanuitdanslescouloirsetelletapesurlesnerfsdesinfirmières,apparemment.

ÇadoitêtreuntrucdeFrançaise,ça…

– Mais ne t’inquiète pas, poursuit-il. J’ai prévu de travailler depuis le loft. Je peux mêmepoursuivremesrecherchespourretrouverJeff.Jenevaispascourirpartout.

J’enprofitealorspourluiannoncerl’arrivéedeGauthieretMichadansquelquesjoursetluifairepartdemonenviedelesaccueillirchezmoi,àBrooklyn.

–Vousallezêtreunpeuàl’étroit,non?dit-ilenm’attrapantparleshanchespourm’attirerentresesjambes,alorsqu’ilesttoujoursassissurlelit.Jeneseraispascontreunejoliefillequis’occupedemoiàdomicilepourmaconvalescence…

–M.Reeves,jesoupçonnelesinfirmièresd’avoirintroduitunesubstanceeuphorisantedansvotreperfusion,dis-jeavecunpetitsourire,avantdefilerretrouvermonamieSaskiadanssachambre.

***

Nousembarquonstouslestroisdansl’hélicoenmilieud’après-midi,directionManhattan.Saskiasembleavoiroubliétoutdesdernièresvingt-quatreheureséprouvantesqu’ellevientdepasser,mêmelacolèrequ’elleaexpriméeplustôtenversJeff,àdéfautd’inquiétudesurcequ’ilestdevenu.Ellea

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toutoubliéparcequec’estlapremièrefoisqu’elleprendl’hélico!Pendanttoutlevol,nosoreillesrésonnentdesexclamationsexcitéesdemacopine.DaytonmelancedesregardsamusésetjerisavecSaskia.

DupersonnelmédicalspécialisénousattendauPier6oùnousnousposons.Daytonesttransféréen fauteuil roulant jusqu’à une ambulance privée. Je l’embrasse tendrement avant qu’il gagne leNouveaumonde.LechauffeurdeDaytonvanousconduire,Saskiaetmoi,àBrooklyn.

–Çanet’ennuiepassijenevienspastoutdesuitejouerl’infirmière?dis-jeenmesentantunpeucoupable.

–RaccompagneSaskia,répondDayton.Nelalaissepastouteseule.Summerm’attendauloft.Tumerejoindrasdanslasoirée.Fais-moijustesavoirquandtuviens,quejet’envoielechauffeur.

–D’accordmais,justepoursavoir,tuessûrqueçanetedérangepasquejem’installeunpeucheztoi,letempsqueGauthiertrouveunappartàlouer?

Ilaunpetitsouriremalicieuxetm’ébouriffetendrementlescheveux.

–Ça te fiche la trouille, hein ? demande-t-il enmedévisageant avec attention.Cette installationchezmoi…c’estprovisoire,jesais.Tucroisqu’onvaréussiràcohabitertouslesdeux?

– Ça dépend combien de temps ça dure, réponds-je en souriant à mon tour. En tout cas, d’icil’arrivéedesgarçons,jeresteraiàBrooklynenjournée,siçateva.Ceseraplusfacilepourmoidetravaillerchezmoi.

Daytonnerépondpasvraiment.

–Àtoutàl’heure,moninfirmièresexy,dit-ilsimplement,avantdemonterdansl’ambulance.

Ouais,ehbien,faudraitvoiràvousménager,M.lepatient…

***

Dans la voiture qui nous ramène à Brooklyn, je songe aux allées et venues auxquelles je vaisdevoirmeplierlesprochainsjours.

–Tuasl’airsoucieux,Anna?medemandeSaskiaqui,elle,sembleraviederetrouvernospénates.–Pff!C’estjustelalogistiquedesprochainsjoursquimefaitpeur.– Hé ! Pas de quoi paniquer ! Je suis grande, tu sais, et je vais bien. Je n’ai pas besoin d’une

nounou,merétorque-t-elle.–Jem’inquiètepourJeff,lâché-jeenfin,commepourtestersapropreangoisse.

Saskiadétournelevisageverslavitre.

–JesuisencolèrecontreJeff,tusaisAnna,maisj’ail’impressionquec’estpluspouroublierquetoute cette histoire m’attriste et que je me fais malgré tout un sang d’encre pour lui. Je me sensimpuissante.

–DaytonpensequeJeffestterréquelquepartetqu’ilsaitàquiilaaffaire,dis-je.Iladitqu’ilallait

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entreprendredesrecherchesdesoncôté.

Saskiaseretourneversmoi,lesyeuxbrillantsdelarmes.

–Illeconnaîtmieuxquenous,déclare-t-elle,lavoixchevrotante.IlestsûrementmieuxéquipéetpluscompétentquenouspourpisterJeff,oùqu’ilsoit.

–LapolicenousaconseillédesignalerladisparitiondeJeff,poursuis-je.Sanssignalement,iln’yaurapasd’enquête.JecroisqueDaytonveutessayerdeleretrouverparlui-même,sanslancerleFBIàsarecherche…J’aicommel’impressionqu’ilsaitcequ’ilfait,Saskia.

Saskiaaunsouriretimidesursonvisagedésormaisluisantdelarmes.

–Bizarrement,j’aienviedefaireconfianceàtonmec,Anna,parcequejesaisqueJeffaconfianceenluiaussi,dit-elle.Jeveuxbienluilaisserquelquesjourspoursesrecherches,mêmesiçamepèse,que j’imagine Jeffdans lapiredes situations,mais ensuite, je signalerai ladisparitionde Jeff à lapolice.

J’acquiesceenserrantlamaindemonamie.

–Entoutcas,iln’estpasquestionquejetelaisseenplanaprèscequ‘ils’estpassé,Saskia.Etpuis,il fautpréparer l’arrivéedeGauthier etdeMicha, arranger l’appart, et j’ai aussiduboulot ! Jenepeuxpastoutlaissertomber.

***

Lestroisjoursquisuiventsontconformesàcequej’imaginais.J’ail’impressiondecourirtoutelajournée.Saskiatravailleàl’appart;jecroisqu’elleaunpeulesjetonsderetourneràl’ateliertoutdesuite.Jelacomprends.Aprèstout,nosdeuxkidnappeursl’attendaientlà-basdeuxjoursplustôt.

J’enchaînelesrendez-vouspourmonarticleetjebouclemesprojetsencours.Interviewsd’unpsy,d’uncréateurde site internetdepoker en ligne,mon reportage sur l’addictionau jeu s’enrichitdeplus en plus,même s’ilme reste toujours à trouver ce fichu témoignage pour remplacer celui deJeff…

Jeff…IlfautquejecontiennemonangoissepournepasamplifiercelledeSaskia.Jesaisque,dèsson retour,Daytonamisundesesemployéssur l’affaire,mais il leur fautdu temps.C’estcequeDaytonrépètechaquejouràSaskiaquandilsseparlentetqu’ilfaittoutpourlarassurer.

Onjouetousàcachernotreangoisseauxautres,àespérer…C’estépuisant…

Jen’arrivepasàtrouveruneseulesecondepourmonblog.Jemecontentedenoterdesidéespouramusermagalerievirtuelle:unépisodefaçonfilmdemafieux,deuxFrançaisesénervantesdansunhôpital américain,uneétudecomparativeethumoristiquedesderniershôtelsque j’ai fréquentés,ycomprislemotelmiteuxoùj’aiétéséquestrée,manuitavec«Jean-ClaudeVanDamme».Maisjenetrouvepasletempspourdéveloppertoutça,etçam’agace!

Lesoir,jemefaisconduireauNouveaumondeetm’endorsàmoitiédanslalimousine.Quandje

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retrouveDayton, c’est pluspourmeblottir contre lui et fermer lesyeuxquepour le soigner et lebichonner.

***

QuandGauthier etMicha débarquent à l’aéroport John F. Kennedy, c’est une Twinkle en petiteformequi les attend.Heureusement, ces retrouvailles avecmonmeilleur amim’insufflent trèsviteuneénergieetunenthousiasmequifrôlentl’hystérie.Jerisaumoindredesesbonsmots.Enmêmetemps,ilesttoutsurexcité,etnotretrioparisienadesairsderéunionsdevolaillessouscokeenpleinhalldesarrivées.

Je rencontre enfin Micha dont je ne connaissais que les fesses entraperçues au cours d’unecommunicationsurSkypeavecmonami.C’estun jeunehommediscretet frêle,aucorpsélancéetlégerdedanseur,auxlongscheveuxnouésenchignonethabillétoutenjaune.

Juste le temps de poser les bagages à Brooklyn et nous rejoignons Dayton – et Churchill,déménagédeforceàTriBeCa–auNouveaumonde.

–Nomdebleu!s’exclameGauthierdansuneimitationtrèsréussiedelabaronnedeRothschild,unefoisquenousnous installonsdans la limousineànotredisposition.Tuasdéniché lebonparti,Anna!

Jefaislagrimace.

–Tusaisquecen’estpaspourçaquejesuisaveclui,réponds-je.Etpuis,sachequelebonpartin’estpasrichequ’endollarsmaisenexpériencesinéditesaussi!

–Non,non,jeneveuxriensavoirdevosgalipettes,répondGauthierenagitantlesmains.–Maisnon,rétorqué-jeenrougissant.Jepensaisàtoutcequ’onvientdetraverser,avecDayton.

LesFeuxdel’Amour,àcôté,c’estducinémad’artetessai…

L’ambianceestvraimentdétendue,voirecomplètementdélirantedans la limousine, àcroirequeles douze heures de voyage, escale comprise, n’ont aucun effet sur Gauthier. J’oublie quej’appréhendeunpeudeprésentermonmeilleuramiàDaytonetleregardquecedernierporterasurlui.Bon, finalement, c’est au sujet de leurs réactions à tous les deux que jem’interroge. Pourtant,j’oublie toutçadans l’effervescenceet le rire, etnousdébarquonsauNouveaumondecommeunebandedegaminsbruyants.

Gauthier,quiadetrèsbonnesmanièresensociété–beaucoupmoinsdansl’intimitéqu’ilpartageavecsesamis!–,tendunemaintièdeetcourtoiseàDayton,maismonamoureuxleserred’embléedanssesbras.J’écarquilledegrandsyeuxdevantcetaccueilspontanédeDayton.Gauthierseraiditetjetteunregardpaniquédansmadirection.Jesouris.Monhommeestpleindesurprises!

–Jesuisravideterencontrer,Gauthier,luidit-ilavecsincérité.AnnanecessedemeparlerdutrioquevousformiezavecSaskiaàParis.JecroisqueNewYorkn’aqu’àbiensetenirmaintenantquevousêtesdenouveauréunis!

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GauthierestencorehésitantdevantladéclarationspontanéedeDayton,maisjedevine,àsesyeuxquipétillentlégèrement,queLadyGogon’estpasloindeprendreledessus…

Jesuistoutsourireàconvoiterduregardlesdeuxhommesdemavie.

Gauthierestdéjàmoinsàchevalsurlesmanièresauboutdequelquesverres.Nouspassonscettesoiréedebienvenueànousremémorerdesanecdotescomiquesdenotretriod’amis.Michasembledécouvrirunenouvelle facettedesonpetitamietSummerestauxangesaumilieudecebrouhahafestif. Je remarque avec plaisir combien la jeune fille a changé au contact de Saskia et de quellemanière admirative elle observemon amie. Visiblement, elle n’a plus l’air de nous en vouloir, àDaytonetàmoi,des«perturbations»quenousavonsfaitsubiràsavied’étudiantestudieuse…

Dayton, Churchill sur les genoux – ces deux-là se sont mutuellement adoptés, malgré la joliecouverturedepoils quemon chat anglais laisse sur le jeandemonhomme ! –, rit des pitreries deGauthierets’esclaffedenosaventurespassées.

QuandilesttempspourmesamisderejoindreBrooklyn,c’estavecunpeudemélancoliequejeleursouhaitebonnenuit.Dèsquelesportesdel’ascenseurserefermentsureux,jemeréfugiedanslesbrasdeDaytonquim’étreinttendrement.

–C’estunebellesoirée,Anna,memurmure-t-ilenm’embrassantlescheveux.–Oui,jesuisheureuse.J’avaisunpeupeurquetunecomprennespasmonamitiéavecGauthier.–Jen’aipasàcomprendre,justeàaccueillirtonamiensachantqu’ilcomptebeaucouppourtoi.–Merci,Dayton,chuchoté-jeenfourrantmonmuseaucontresontorsepuissant.–Crois-tuquetupourraisêtreencoreplusheureuse,Anna?Enfin,cesoir,jeveuxdire…

Jerelèvelatêteenfronçantlessourcils,sansvraimentcomprendrelesensdesaquestion.

Parcequeplusheureuse,çasembledifficile,non?

Daytonacesouriremystérieuxetceregardacierdescoupspréparésendouce.Ilmeprendparlamainetm’entraînedanslecouloir.

–Viensvoir,medit-il.

Etjelesuissansrésister.

Ils’arrêtedevantuneportequidonne,d’aprèsmonsouvenir,surunepiècequisertdebibliothèqueetdesalledelecture.Enfinjecrois…

–Ouvre,medit-il,toujoursaveccesourireénigmatique.

J’obéis et découvre une pièce, de toute évidence, entièrement repeinte etmeublée de neuf, à lagrandebaievitréedetypeindustrieldonnantsurTriBeCa.Ilyaunetableàdessin,unbureau,letoutévidemment équipé en matériel en tous genres, informatique et arts plastiques. Une bibliothèquerichementgarniede livresd’artoccupe toutunmur.Uneméridienneen tissupourpreestdisposéeélégammentdansuncoin,assortied’unguéridondesign.

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– C’est pour ton « installation provisoire », Anna, me dit Dayton dans le creux du cou, en secollantdansmondosalorsquejecontemplebouchebéelapièce.Çan’apasététropdifficiledefaireçaendouce,vuque,cesderniersjours,tun’arrivaisquelesoiretcomplètementcrevée.

Jesecouelatête,abasourdie.

–Jenemesuisrenducomptederien,dis-jeavantdemeretournerpourfairefaceàDayton,toutcontrelui.Merci,monamour,oh!merci!C’estjustetrop!Çan’étaitpasnécessaire.

–Jevoulaisquetutesentesbien,répond-il,lesbraspassésdansmondos.Jesaisquetuavaispeur,commemoi,decettecohabitation…provisoire.Jeveuxqueçasepassebien,quetuaiestonespaceetquetunetesentespasdepassage…enfinprovisoirement,ajoute-t-ilensouriant.

–Tuestellementattentionné,réponds-je,avantdel’embrasservoluptueusement.–Çateplaît?demande-t-il.–Oui,beaucoup.«Beaucoup»,lemotestfaible.Jamaisunhommen’aétéaussisoucieuxdemonbien-être.Dayton

estcapabledesentircequivameplaire,avantmêmequeledésirm’effleure.Évidemmentqueçametoucheetmebouleverse.Jesuisamoureuse…

Sonétreintesefaitpluslangoureuseetcâline.Ilbougeseshanchescontremonventre.

– Que dirais-tu de t’installer sur ta méridienne pour en tester le confort ? me demande-t-il, lesouffleunpeupluscourt.

–C’est une proposition ? réponds-je en comprenant bien lemessage.Tu ne crois pas que c’estcontraireàtaconvalescence?

Ilpressesonbas-ventrecontremoi.Sondésirestincontestable.

–Jenecroispas,mesouffle-t-ildanslecou.Jecroismêmequec’estrecommandé.

Daytonenlacematailleetrapprocheencoreplussoncorpsdumien,commesic’estpossible.Puisilsemetàoscillerlentementetchantonned’unevoixdouceàmonoreille:«Flymetothemoon…».

Jefrissonne.

–Tutesouviens?medemande-t-ilenm’entraînantdansunedansesensuelle,collée-serrée.

Commentoublier…

Comment oublier ce soir où je l’ai rencontré ? J’avais les yeux pleins de lui. J’étais sous lecharme,envoûtéeettellementterrifiéeparcequ’ilpouvaitsepasser…etquejevoulaisqu’ilsepasse.

–TuterappelleslepontdesArts?continue-t-il,commes’ilsouhaitaitmefairerevivrecemomentavecprécision.

Je me souviens de ce moment où il m’a rapporté une brassée de roses achetées à un vendeurambulant,cetinstantconfusoùjel’aiembrassé,pudiquement,àlacommissuredeslèvres,nesachantpastropsij’allaisoserallerplusloin.

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– J’avais tellement enviede t’embrasser alors, poursuit-il comme s’il était dansma tête. J’avaisenviedeteserrerdansmesbrascommelà,maintenant.

Ses mains passent de mes reins au haut de mon dos, puis redescendent vers mes fesses, qu’ilenglobedanssespaumes.

–J’avaisenviedetetouchercommeça.

Marespirationpasseàlavitessesupérieure.

– Je me suis retenu de t’emmener dans la première chambre d’hôtel venue pour te dévêtircomplètementetteregarder,tecaresser.

Seslèvresfrôlentmoncou.Lachairdepoulecouvreaussitôtmapeau,dévalesurmapoitrineetfaitsetendremesseins.

–Tuimagines?murmure-t-il.

Pasbesoind’imaginer…Jesaiscequeçafaitquandtumetouches…

–Onvenait àpeinede se rencontrer.Ça faisait seulementquelquesheuresqu’on seconnaissait,susurre-t-il toujours. J’avais déjà envie de ta peau, de t’embrasser à pleine bouche, partout, dedécouvrircequetucachaissoustesvêtements…

Tout en évoquant à voix basse ces gestes qui éveillent enmoi autant de souvenirs érotiques denous, Dayton me fait reculer tout doucement vers la méridienne, en nous balançant doucementcommesinousétionstoujoursenrythmesurlamusiquequ’ilfredonnait.

–Alorstut’ensouviens?insiste-t-ilgentiment.

Jesuisperduedanslesimagesdenoscorps,detousnosébatsetnosplaisirs.C’estcequ’ilvoulaitenévoquantnotrerencontre,non?Quejemeperdedanslessensationsdecessouvenirspourqu’ilss’emparent,là,toutdesuite,demoi.

–Oui,soufflé-je.–Tuavaisenviedemoiaussi,Anna?–Oui,haleté-je.

Cesontlesmotsquiembrasentledésirenmoi.Direquej’aienviedeDayton,quej’aieuenviedeluidèslepremiersoir,dèslepremierregardquej’aiposésurlui,mêmesijen’osaispasycroire,tout ça appelle la faimet l’enviede soncorpsdans l’instant.Monventre se creusecontre lui,mesreinssecambrent,messeinspointentcontreson torse.C’estunautre langage ;cenesontplusdesmots,maismoncorpsparleàceluideDayton.Etlesienparlelemêmelangage.

– Jamais je n’aurais cru que ce serait si bon de faire l’amour avec toi, chuchote-t-il, avant deprendremonvisageentresesmains.

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Illelèveverslesien,m’entrouvreleslèvresduboutdesdoigts,puisvientcaressermabouchedesa langue. Sa salive réchauffemes lèvres tel un baume brûlant. Je soupire de plaisir en le sentants’immiscerprogressivementdansmaboucheets’ouvriràmalangue.Unfrissonparcourtmanuquetantnotrebaiserestélectrisant.

Alorsque jemecolleplus sauvagementà lui, il chancelle. Jem’accrocheà sesépaulespour leretenir.

–Çava?demandé-je,inquiète.Çan’estpassérieux,Dayton,avectablessure!

Unsourirevoracesedessinesurseslèvres,sespupillesétincelantdedésir.

–Ceseraitsous-estimermonimaginationsitucroisquejenevaispastrouverunmoyenpourtedonnerduplaisir…etenprendre.Jevaism’asseoir,attends.

Ilselaissetomberlentementsurlaméridienne.

–Mmm,elleestconfortable,dit-ild’unairenjôleur.

Jeluitienslamainpournepasperdrecontactaveclui.

–Tupeuxm’aider?medemande-t-ilendéboutonnantsachemise.

Jemepenchepourluienlever,avecdesgestesprécautionneux.Ilarboreencoreungrospansementsursonflanc.Jeposesachemisesurleboutdelaméridienne,etnousnousregardonsdeuxsecondesensilence.

–Etsitucontinuais,Anna?Jemesenscommeunprinceunpeuparesseuxsurcetteottomane…dit-ilavecunepetitemouesensuelle.

Àlevoir,commeça,torsenu,malgrésonpansement,lehautducorpsvisibletaillécommeceluid’unathlète,l’attachesolidedesoncouviril…

Moi,jeveuxbienserviràvieuntelprince…

Je me prends au jeu avec des airs de servante fidèle et soumise, le regard baissé, les gestesmesurés.Jem’agenouillelentementetdélasseseschaussuresquejerangesouslaméridienne.Puis,c’estautourdeschaussettesquejeremisedecôté.Meredressant,jedébouclesaceintureetdéfaislesboutonsdesonjean.Daytonsesoulèveunpeupourquejedescendelevêtement.J’enprofitepourluiretireraussisonboxer.Toujourslefrontbaissé,toujoursdocileetdoucedansmesmouvements,jesuisànouveauàgenouxausol,devantlui.

–Relèvelatête,Anna,dit-ild’unevoixquel’excitationrendencoreplusgrave.Regarde-moi.

J’obtempère.Sesyeuxsondentlesmiensunedemi-secondeetmeposentlesquestionssilencieusesquejecomprendsdésormais:«Est-cequejepeux?Est-cequetuasenviedejouer?Est-cequetuacceptesquejedirige?».

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Oui,OUI,lis-ledansmesyeux!

J’adorejoueravecDayton.Oseraussi.Jesaisquetoutnousestpermisparcequenousrespectonsl’autre.Nous voulons partager un plaisir intense et nous varions lamanière de l’atteindre. J’aimequandc’estsauvage,quandilmeprendavecardeur.J’aimeaussiladouceurdenosétreintes.J’aimequ’ilmedisecequejedoisfaire,etjelefaisenéprouvantunplaisiretuneexcitationquejen’avaisjamaisconnusavantlui.J’aimequand,aprèsnosjeux,nousnousretrouvonsdansl’apaisementetlescâlins.

Là,j’aienviedejouer,deluiobéir…

Je lève les yeux versDayton, nu sur laméridienne.Ce pourrait être un tableau demaître ; soncorpsesttellementsuperbe,pareilàceluidel’angedéchudeCabanel.Ilestàdemi-allongé,appuyécontre le dossier de l’ottomane, son érection se dresse sans hésiter, et c’est ça qu’il veut que jeregarde.

–Tuaimescequetuvois,Anna?

Je fixe son sexe dressé, son ventre tendu et je m’ouvre complètement aux sensations que cespectacleprovoque.

Marespirationestcourte;jesouffleparlabouche.Mesmamelonsmefontmaltantilssontdurset,entremescuisses,monsexesegonfleaussidedésir.Jesenslachaleurhumideserépandre.

–Oui,j’aimeça,chuchoté-je.

Ilexpirecommes’ilessayaitdesecontenir,luiaussi.

–Relève-toietdéshabille-toi,Anna,dit-il.Jeveuxtecontemplernue,toiaussi.

Jem’exécute en essayant de ne pas balancermes vêtements dans tous les sens tant j’ai faim ducontactdeDayton.Jeprendsmontempssanslequitterdesyeux.Ilaposéunemainsursonsexe,sansvraimentsecaresser, justepourensouligner la fermeté. J’aimeraisquecesoitmamainqui tiennesonmembredelasorte.

Jesuisenfinnuedevantlui,lesmainspudiquementcroiséessurmapoitrine.

–Moiaussi,j’aimecequejevois,murmure-t-il.J’aienviequ’onprennenotretemps.

Ils’installemieuxdansl’axedelaméridienne,jambesétendues.

–Vienssurmoi,m’ordonne-t-ilgentiment.

Savoixestrauque.Iln’yariend’autoritairedanssesordres.Celatientplusdel’invitation,deladirectiveattentionnée.

Jegrimpesurlaméridienneetmepositionneàquatrepattesau-dessusdelui,messeinsauniveaudesonsexequejesensbutercontremoi.Iln’apasbesoindem’endiredavantagepourquejesache

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dequellemanièrej’aienviedeletoucheretd’entrerencontactavecsapeau.J’abaissemonbusteversson corps et, lentement, je caresse son sexe dans la gorge creusée entremes seins. J’avance et jerecule,toujoursenappuisurmesmains,etjerouledesépaulespourquemesseinstouchentencoreetencoresonmembredressé,àlapeaudouceetveloutée.Daytontendlesbraspourmélangersesmainsàcejeudedoucesbousculades.Ilattrapesonsexeetlecolleàmoi,oubienilsaisitmesseinspourenéprouver la fermeté et en pince les bouts.Mon dos se creuse, mes lèvres s’entrouvrent. J’avanceautant qu’il le faut pour aller conquérir sa bouche et lécher sa langue qui m’attend. Avec délice,langoureusement.

Son érection estmaintenant coincée entre lui etmoi car j’ai rapprochémon ventre du sien, enprenantbiensoindenepaspesersurluiàcausedesablessure…

–Tuesexcitantecommeça,Anna,souffle-t-ilentremeslèvres.

Oui,j’imaginebienquemapositionfrôlel’indécence:àquatrepattes, ledoscreusé,lescuissesécartées,messeinssefrottantcontreletorsedemonamant…Jamaisjen’aiétécetteAnna-là.C’estluiquim’habilledecette indécence,mêmesi avec lui, cen’estplusde l’indécence,mais justeunedanseamoureuseetsensuelle.

Alorsquejem’écarteunpeudelui,mamainpartàlarecherchedesonsexequej’empoigne.Puisje reprendsmes lentsmouvementsdebalancier au-dessusde soncorps,mais, cette fois, en faisantglisser son érection sur les lèvres mouillées de mon sexe. Je m’ouvre à chaque passage sur sonmembre.Jelesensmeréchaufferdelabasedemavulveàlapointedemonclitoris.Jesuistellementmouilléequejelemouilleàmontour.Jesenslesangbattredanssonsexe,entremesdoigts.

Daytongémitchaquefoisquemonclitoriscaressesongland.Jelèvelesyeuxsursonvisage.Ilestentraind’observercequejefaisdelui,là,entrenosventres.Jebaissemonregardsurmamainquiletientetlebranlelentement.Lavisiondenossexessiprochesestterriblementélectrisante.Lefaitdeprendre le temps, alors qu’il crève d’être enmoi etmoi d’être prise, amplifiemon excitation. Jecomprends,là,queregarder,c’estdéjàprendreduplaisir,c’estseprojeterdanscequ’ilvasepasserensuite,quandilvamepénétrer.

J’appuiel’extrémitédesonsexeàl’entréedumienetjepoussedoucementcontre.Seulsonglandseloveenmoi.Jecessed’uncoupmonmouvementdebalancierpourroulerdubassinetancrersonmembreplusfermementàl’entréedemonsexe.

–Jenesaispascequetufais,Anna,maisc’estdélicieux…

Je lui souris, puis je reprendsmespetitespoussées sur son sexe, sans luipermettred’allerplusloin en moi. De légers à-coups sur son gland qui me donnent l’impression qu’il va me pénétrerentièrement,maisenn’allantjamaisplusloin.Jeresteenappuisurunemain,et,del’autre,j’attrapelabasedesonmembreetsestesticules.

Unrâles’élèvede lagorgedeDayton.Toujourscommesi je lemaintenaisenmoi,commes’ilétait finalement un sex-toydont j’usais àmaguise, j’amplifiemesmouvements sur son sexepourl’enfoncerplusprofondémentenmoi.

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–Anna,c’estcomplètementfoucequetufais…

Il parle pour tenter de se maîtriser. J’essaie moi aussi de me contenir, de m’empêcher dem’empalersursonmembrepourlesentirbattreaufonddemoi.

Lesrôlessesontinversés,etc’estboncommeçaaussi…

Oui,jecomprendsquec’estmoiquiaiprisledessus,maisànotremanièredouceetrespectueuse.Ilnemeditpluscequ’ilaimeraitquejefasse,maisj’oseimprovisersursoncorpsetfairecequimepasseparlatête.S’ilm’avaitdemandédeprendrel’initiative,j’enauraisétéincapable!Etpourtant,c’estlà,çaarrive;ils’abandonneàmesélans.

Toujoursaveclamêmelangueuretlesmêmesprécautions,jemeredressesurluietcoulisseavecdélicesursonsexepourl’enfouirtotalementenmoi.Illaisseéchapperunsoupiretposesesmainssurmescuissesouvertesdepartetd’autredesoncorps.Jeresteimmobilequelquessecondes,avantdetournersurlui,parmouvementslentsdubassin,commeunedanselasciveetlourded’attente.Enfaisantça,monsexes’épanouitautourdelabasedesonmembre.

Toujoursredressée,jereculedequelquescentimètrespourquemonclitorisappuiesursonpubis.Etjetourne,jevalselentement,jebalancemonbassin,jerouledeshanches.

Commec’estbon…

J’adore cette jouissance complète que je sens monter en moi quand nous faisons l’amour. Mesentirrempliedelui,desonérection,ouverteàsondésiretmefrottercontresachairchaudepourenvoûtermavulve.Lemouvementdemeshanches, laprésence immobile et solidede son sexeenmoi…

Jerejettelatêteenarrièreengémissantdoucement,aurythmedemahoulesurlui.LesmainsdeDaytonremontentjusqu’àmataille,qu’ilempoignepourm’appuyerplusfortementcontresonpubis.

–Donne-toiduplaisir,Anna,murmure-t-il.Tuestellementbellecommeça.

Jem’agrippeàsesavant-braspuissantsquejesenstendussousmesdoigts.

–J’aipeurdetefairemal,haleté-jeenbaissantlesyeuxsursonbeauvisage.

Unsourirepresqueivresedessinesurseslèvres.

– Oh non, je t’assure, répond-il. Tu ne me fais pas mal, c’est tout le contraire ! Rien que teregarderfairedemoicequetuveuxmedonnedéjàenviedejouir.

J’accélèremonrythmesursonsexe,maisjem’immobilisepresqueaussitôt.

–Non,jevaistefairemal,attends,chuchoté-je.

JemerelèveenfaisantcoulisseravecdélicatesselesexedeDaytonhorsdemoi,puisjeprocèdeàundemi-tour,quejem’efforcederendreélégant,etjem’accroupis,dosàDayton,au-dessusdeson

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érection.

–Anna,qu’est-cequetufais?gémit-ilenposantimmédiatementsesmainssurmesfesses,qu’ilcaressed’aborddoucementavantdelesmalaxerplussauvagement.

Je reprendssonsexedansmamainet ledirigeversmavulve,curieusedecesexpérimentationsque notre intimité permet. Puis je m’appuie d’une main au demi-dossier de la méridienne et jem’empalesursonérection,plusfougueusementcettefois.J’aienviedeplus,deplusfortetdeplusvite.

J’oublierapidementlatensionetlabrûluredesmusclesdemescuissestantj’aienviedejouir.Jem’excite à la pensée que jemaîtrise ce qu’il est en train de se passer et que, peut-être,Dayton estsurprisdecequejeluifaisetdecequ’ilressent.

Il place sesmains sousmes fesses et accompagnemesmouvements sur lui. Jeme hausse, puism’abaissesur toute la longueurdesonmembre.Monsouffles’adapteaurythmedecesmontéesetdescentes.Une sortede rage animalemeprend, et jememets à aller et venir avec ardeur sur sonérection,tandisqu’ilaccroît,sesmainsmesoulevantplushaut,l’ampleurdemesalléesetvenues.Jel’entends haleter dans mon dos. Je projette dans mon esprit la vision qu’il doit avoir de moi,accroupiesurlui,croupeofferteetsonsexequidisparaît,puisréapparaîtentremescuissesouvertes.

–Oui,encore…bafouille-t-ilcommes’ilperdaitcomplètementlespédales.

Jenesaispastropoùj’ensuisnonplus,affoléeparleplaisirquimonte,lafureurdesonmembre,lafaimdévorantequienflammemonventreetmonsexe.Jelesenscogneraufonddemoi.Chaquefois,jemerapprochedel’orgasme.

Enfin,jebasculeenarrière,enappuisurmesmainsdepartetd’autredesontorse,lesseinstendusversleplafond,sansjamaistouchersonventre.Jeplielesgenouxpourl’engloutirdavantage.Ilestbrûlantdansmondos;sonsouffleesttorridesurmanuque.Jepoussedespetitscrisincontrôlés,quimontent en volume quand la main de Dayton passe sur mon pubis et que ses doigts se mettent àtournersurmonclitoris.Jecriesanscesserdem’empalersurlui.

–Jouis,jouis,lance-t-ild’unevoixfortedansmonoreille,pourencouragermongémissementdeplaisir.

Jesaisquec’estaussipourdéclenchersonorgasme,car luiéchappepresque immédiatementunrâlequifaitnaîtrelachairdepoulesurmanuque.

Commemajouissance,sonrâledureets’attardedansl’atmosphèredelapièce.Jeresteunmomentcrispéeau-dessusducorpsdeDayton,quimesoutientànouveau,sespaumesplacéesencoupesousmes fesses.Mais mes jambes se mettent à trembler. J’ai peur de m’écrouler sur son ventre et sablessure. Comme s’il sentait ma crainte, Dayton s’écarte un peu sur la méridienne et, en mesupportantdesesbras,mefaitbasculersur lecôté, le longdesoncorps. Jevisquelquessecondesinconfortablesd’acrobatie,avantdemeblottircontresontorsequisesoulèveencoreparsaccades.

–Pff,soupire-t-il.J’aicomplètementperdulespédales.

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Jecachemonmuseaucontresonépaule.Ilmefautaussiunpeudetempsavantdem’extirperdelapeaud’Annalasauvage.

–Tutecaches,Anna?

Jesecouelatêtesansrépondre,nisansreleverlevisagenonplus.

–Hé ! J’espère que tu n’es pas embarrassée par ce que tu viens de faire,me dit-il tendrement.C’étaitfollementexcitant.Dis-toiquetutesensassezenconfianceavecmoipourtelâcher.

Ilm’embrassesurlefront.

–Etj’aimeça,poursuit-il.Oh!çaoui!J’adoremême!

Jesouriscontresapeauenrespirantsonodeur.

–Moiaussi,chuchoté-je.

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3.Colocatairesimprovisés

Évidemment, le bon sens féminin prime sur l’empressement de l’homme.Dayton se réveille lelendemainensetenantleflanc;unpeudesangatranspercélepansement.

–Merde,jem’endoutais,Dayton.Onn’auraitputenirencorequelquesjours…ronchonné-jeencourantluichercherdescachetspourcalmerladouleur.

–Oh!Maisc’étaittellementbon,lance-t-ildansmondos.Franchement,Anna,c’étaitbon,non?

Ilritàmoitié,beaucoupmoinsinquietquemoi,quimesensenplusresponsabledesonétat.

Dédramatise,Anna!Tuvoisbienqu’ilprendçaduboncôté.

Oui,c’estvrai.Jemerappellecequ’iladitauxagentsRooveretHoganàAtlanticCityetqu’iln’acessé de me répéter depuis : « Nous sommes en vie, Anna. ». Je me le répète intérieurement enretournantdanslachambreavecunverred’eauetlescachets.Ilm’attendavecunlargesourire.

–Bonjour,infirmièreAnna,dit-ilavecunemouedeséducteur.

Jesecouelatêteenlevantlesyeuxauciel,puisj’éclatederireetm’assiedscontreluiaprèsqu’ilaavalésespilules.

–Net’inquiètepas,medit-ilencaressantmescheveux.Çava.Nesoispastendue.

C’estunpeudifficilequandmême.Cematin,jemeréveillechezluietilfautquejefassecommesic’étaitchezmoi.Unnouveaubureaum’attendàquelquesmètresdansl’appartement.Pourtant,cen’estpaschezmoi…Pasdedoute,jesuisunpeustressée.

–Faiscequetuasàfaire.Jevaisprendremontempspourmeleveretmemettreautravail.Undemespetitsgéniesdoitpassercematin;ilpenseavoiruneidéedel’endroitoùsetrouveJeff.J’attendsaussil’infirmière,lavraie,quidoitmerefairemonpansementplustard.

Je l’embrasse et l’abandonne dans le lit où il se réinstalle, certainement pour attendre que ladouleurpasse.

Je vaque àmes occupations. Jem’oblige à penser que c’est chezmoi,mais je tâtonne pourmepréparermonpetitdéjeuner,pourretrouverlescroquettesdeChurchill…L’espaceluxueuxetdesigndu loft de Dayton m’impressionne aussi, probablement. Je suis comme le chat, je cherche mesmarques,jelaisselesportesouvertes,jepassed’unepièceàl’autrepourmefaireuneidéedemonterritoire,monmugfumantàlamain.

Etpuis,soudain,unpetitcoupdefoliemeprendquandjecommenceàrangerdansledressinglesvêtementsquej’airapportéshierdansunegrossevalise.J’aidéjàdesaffairesici,cellesqueDaytonm’avaitachetéesàmasortied’hôpital,aprèsmacrisedetétanie.Jememetsàfouillerdedans,comme

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uneadoenpériodede soldes. Jechoisisdes sous-vêtementsun rien sexy,endentellenoire,que jelaisseentrevoirsousuntee-shirtfluideàlargeencolureencotonetlinnoir.J’enfileunjeandélavétaille basse, quime fait deshanchesde rêve. Il y amêmedes chaussures ! Je choisis unepairedebootsbassesstylewestern,encuirvieilli.Jemeregardedans lemiroir.Ouais, jevaisbienavec ledécor et jeme trouve pasmal. Jeme trouvemême… assez séduisante et je pousse la coquetteriejusqu’àmemaquillerunpeu,avantdefilerdansmonnouveaubureau.Là,jesorsd’unsaclematérielquej’aiapportéetquiseretrouveendoublonavecl’équipementdéjàmisenplaceparDayton.

J’enaitrop!Çadoitressembleràçad’êtreuneenfantgâtée…

Churchillm’observedepuislepasdelaporte.

–Benviens,mongros!luidis-je.Faiscommecheztoi,faiscommemoi…

Commepourmeconvaincre,luiaussisetapeunpetitmomentdefoliesurlaméridienne–meublesacré!Attentionlesgriffes!–,etjelerattrapevitefaitavantqu’ildécided’enfairesongrattoirdeprédilection. Je le pose d’autorité sur la table à dessin, et mon gros félin anglais admireparesseusementlavue,avantdes’affalersurundemesblocsàdessin.

C’estunpiège, ilcroitmegêner,mais je laisse toujoursunblocdont jenemeserspaspour luidonnerl’illusionqu’ilenvahitmonterritoire.

Commeuneécolièrelejourdelarentrée,jedisposemescrayons,mesblocssurlatable.J’allumemon nouvel ordinateur et ma tablette graphique… et je reste plantée comme une cruche pendantquelquessecondes.

–Iltemanquequelquechose?ditDaytondansmondos.

Jemeretourne,surprisedansmarêverie–ouplutôtmaparalysie.Ilsetientsurleseuildelapièce.

–Delamusiquepeut-être?fais-jesansvraimentsavoir.

Ils’avanceversmoisansavoirl’airdesouffrirdesablessure.Ilsembletoutdroitsortid’unepubpourCoca-ColaouLevis, tel qu’il est habillé en«MrRock», jean et chemiseunie assortie à sesyeux,bootslacéesencuirsouple.

Ilmeserredanssesbrasetmeparletoutdoucementcommeàuneenfant.

–C’est étrange de partager lemême espace pour se livrer à des activités qu’on a l’habitude defaireseulchacundanssoncoin,n’est-cepas?Pourmoiaussi,c’estbizarre,Anna.Jetesens,pasloindemoi.J’aienviedevenirtevoir,maisj’aiaussienviedefaireautrechoseetdemecontenterdetesentir,là…Hum!Çan’estpastrèsclair,maisçaprouvequec’estunpeuconfusaussipourmoi.

– Je ne l’aurais pas dit autrement, réponds-je, soulagée de ne pas être seule à patauger dansl’embarrasdelasituation.

–Onvaimproviser,O.K.?Jevaisbosserdansmonbureau,monhackernumberoneestarrivé.Tufermestaporte,situveux,outulalaissesouverte.KathydoitpasserdemainnormalementetAudreyaussi;çanousprometunejournéebienchargée.Justepourt’informer.

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Jehochelatête.

–Ouais,onvaimproviser,dis-je,convaincuequecettepetitediscussionm’afaitdubien.– En tout cas, niveau tenue vestimentaire, j’aime beaucoup comment tu improvises. Tu es

ravissante,Anna.Jeseraistentédechangernotreprogrammedelajournée,ajoute-t-ilavecunregardgourmand.

***

QuandDayton repassedenouveau la têteà laportedemonbureau,plusde troisheuressesontécouléessansquejem’ensoisrenducompte.

Commequoi!

–J’aidunouveau,medit-il.Ongrignoteuntruc?

Jeprendsalorsconsciencedelafaimquifaitgrondermonventredepuisunmoment.

MoiquicroyaisqueChurchillronflait…

JerejoinsDaytondanslacuisine.

–Onsefaitquoi?demandé-jeenétantétonnéedunatureletdelaspontanéitéqui,quelquesheuresplustôt,m’auraientparuinaccessibles.

Çalefait riredemevoirdébarquercommeça,avecdesallurescool«à laSummer»,maisenbeaucoupplussexy,rienqu’àvoirlamanièregourmandedontilmeregarde.

–Onpourraitsefairedestrucs,répond-il,maisjecrainsqueçaneremplissepasnosestomacs…Parcontre,j’aicommandédessushiscematin,pourqu’onn’aitrienàsepréparer.

Ilsortdesplateauxcopieusementgarnisdesushis,makisetautresCaliforniarolls,etlesposesurlebar.

Benc’estpaslemêmeservice,nilemêmerégimequ’àBrooklyn…maisjepréfèrecesconditionsdetravail!

Nousnousinstallonspournotre«grignotage»deluxe.Daytona l’airexcitédece«nouveau»qu’ilaàm’annoncer.

–OnaretrouvélapistedeJeffcematin,lâche-t-ilaprèsavoirenfournétroismakisd’affilée.

Jemanquedem’étrangler.

–Bon,lapisteremonteaulendemaindujouroùtul’asvupourladernièrefois,poursuitDayton.Maisçanousdonneuneidéedel’endroitoùilpeutêtre,c’est-à-direpasenvilleet,connaissantJeff,loindetoutecivilisation;cequimelaisseespérerqu’ilestensécurité.

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–C’estquoicettepiste?demandé-je.–Unretraitdansunguichetautomatique,ungrosmontantsurunenouvellecartedecréditqueje

neconnaissaispas.Legarsqui estvenubossercematinaeu l’idéedechercherd’autrescartesdecréditendéclinanttoutcequiétaitpossibleautourdunomdeJeff…Enfin,c’estpasclaircommeça,maisilsuffitd’ajouterjuste«M.»avantouintervertirlenometleprénomouencoredenemettrequel’initialeduprénometlenomenentier.

–O.K., fais-je en levant lamain parce qu’en effet, je ne suis plus. Je te fais confiance pour lamanièredefaire,maisilestoù,Jeff,selonceguichetautomatiqueoùilaretirél’argent?

–ÀGrandMarais,dansleMinnesota.Àquelquesencabluresdelafrontièrecanadienne.Enfait,auborddulacSupérieur.

–Jesupposequec’estunendroitassezstratégiquealors?demandé-je.Ilpeutêtren’importeoùauCanada,d’aprèscequ’onensait.Etmêmedelà,dansn’importequelautrepays,àpartirdumomentoùilaprisunvoldepuisleCanada,non?

–Jenecroispas,Anna.JeconnaisJeffetsonattachementpourlawildlife. Je l’imaginebienseplanquerauxfinsfondsdesbois,etçanedoitpasêtreleterraindeprédilectiondesgrosbrasquiluicourent après. De plus, c’est vraiment son secret, son goût pour la nature, s’y perdre et tout ça.Personnenesaitàpartmoi,enfinjecrois.

Jeleregardeenhaussantlessourcils;cequiveutdireengros:«Etsitudéveloppais?».

–Quandj’aifaitcesconneriesdepiratagedesite,ado,Jeffm’afaitlaleçon;O.K.,ilm’aremisdansledroitchemin.Ilm’aexpliquécommentjepouvaismeservirdemanièrelégaledemestalents.Il a aussi vu où je vivais, avec les Reeves. Il a compris que la nature, c’était un de nos pointscommuns.Ilm’aemmenéenviréesauvage,dustyledufilmDélivrance,sanslaviolenceévidemment.J’ai découvert ça de lui à cette époque. Je sens qu’il est parti se planquer là où on ne peut pas letrouver.

–Qu’est-cequ’onfaitalors?demandé-je,unmakiàmi-cheminentremonassietteetmabouche.–Déjà,tupeuxannonceràSaskiaqu’onauneidéedel’endroitoùilsecache,etoncontinuede

chercher des traces qu’il aurait laissées. Personnellement, ça confirme mes intuitions et ça mesoulageunpeu.Fais-moiconfiance,jenelâchepasl’affaire.

Je hoche la tête en espérant que les raisons qui poussent Dayton à « ne pas lâcher l’affaire »,commeildit, relèventde l’amitiéetnond’undésirdediresesquatrevéritésàJeff.Quoique l’unen’empêchepasl’autre.

–Moiaussi,j’aiduneuf,dis-jeenréalisantquelestroisheurespasséesdansmonbureaun’ontpasétéexemptesnonplusdenouvelles.J’airendez-vousaprès-demainchezOptiManetj’avouequejenesaispastropquoienpenser.

Ilinclinelatête,samanièreàluidemedemanderdedévelopperàmontour.

–Ehbien,poursuis-je,c’estmarédac’chefdeParis,ClaireCourtevelquim’aappeléepourfixerce rendez-vous.Elle a intégré les bureauxdu groupe américain ; ce qui est bien d’un certain côtéparce qu’on travaille ensemble depuis un petit moment, mais j’ai l’impression qu’elle me met lapressionetm’empêcheparfoisderéagircommej’enauraisenvie.Alorsque lepatrond’OptiMan,lui,aplutôtl’airdem’apprécier.

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–Tusaisenquoiconsistecerendez-vous?–Bennon,jen’ensaisrien.Letruc,c’estqueClaire,àsamanièrespeed,mefaittoujoursflipper.

Elledoitêtrepersuadéequec’est leseulmoyenpourquejesoisautop.Jecroisqu’ellese trompeparceque,ducoup,çamestresseplusqu’autrechose.Là,ellemeditqu’ilfautquejemeprépareàdubon,maisaussiàdumoinsbon.

–Etçat’inquiète?

Jehausselesépaules.

– Dès que j’ai raccroché, ça m’a boostée parce que je ne voulais pas angoisser. J’ai produitplusieurspagesbimensuellesd’avance,maisoui,j’angoisseunpeu.

Daytonsepenchesurlecomptoirpourserapprocherdemoiavecuneœilladecoquine.

–Jeconnaisunefaçondesedétendrequiesttrèsefficace,murmure-t-ild’unevoixdecrooner.– Ouais, efficace aussi pour rouvrir les blessures, réponds-je en souriant. Ton infirmière est

passéeterefairetonpansement?

Justeàpropos,onentendlasonneriedesportesdel’ascenseurquis’ouvrent.

–Quandonparleduloup,chuchote-t-il.

Unedameassez…massiveapparaîtàl’entréedusalon.Habilléedemanièrepratiqueetinforme,coifféepareillement,elleabeauarboreruneexpressionjoviale,unfrissondepeurdévalelelongdemondos.Daytonselèveavecunsourirecrispé.

–Commetuvois,jesuisentredebonnesmains,murmure-t-ilentresesdents,sanssedépartirdesonsourire.

–Jecomprendsquetufantasmessurlesinfirmières,réponds-jeencachantmabouchederrièremaserviette.

Dayton disparaît – survivra-t-il ? ! – dans le couloir avec l’infirmière, et je débarrasse notredéjeuner avant de retourner travailler,monChurchill sous le bras. Il fait également partie demonenvironnementdetravail!

***

Finalement, ça passe vite et ça se passe bien entre nous. Une fois l’angoisse exprimée, nousprenonsnosmarquessansomettredenousrappelerrégulièrementquetoutcelaest«provisoire»!Provisoire, d’accord, mais super agréable quand même – agréable comme de travailler, avec detempsentemps,enfondsonore,monhommequigrattesaguitare…Jepourraismêmem’aventureràimaginerquelavieàdeux,siondécidedenepassesatisfairedu«provisoire»,estpossible…Bon,ilmemanque justemesamisquinesontqu’àquelqueskilomètresetquisontpour lemoment trèsoccupésentrevisitesd’appartementsetpréparationd’expos.Il faut le tempsquetoutçasemetteenplace.

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L’élément nouveau demeure Summer, qui va et vient dans mon bureau pour se poser sur laméridienne–laméridienne,bordel…–etmelâchernaturellementlesinterrogationsdesonâge,sansvraimentattendrequej’yrépondemaisjustequejesoisdispo;cequejenesuispastoujours.

–Non,franchement,Anna,tucroisquec’estgravesijechangedecursusencoursd’année?Parcequelà,j’ail’impressionquejefaisfausse-route,tuvois.Mêmesij’aimelapsycho,jesensquej’aienviedem’éclaterailleurs.

Je relève la tête de ce que je suis en train de dessiner auxmots «m’éclater ailleurs », avec laconvictionquejenedoispeut-êtrepaspasseràcôtédecequ’elleaàmediresijeveuxqu’onévited’éventuelsdéboiresàvenir.Jetendsl’oreillepoursituerDaytondansleloft.Jel’entendsjouerdelaguitaredanslesalon.

O.K.,écoute,Anna,paslechoix…

–Ettuveuxfairequoialors,Summer?–Dudesign,dupaysagisme,jesensquec’estmontruc.

Hum!JesensquesesviréesavecSaskial’ontvisiblemententhousiasmée,etjelacomprends,maisj’ai25ans,quelquesannéesdeplusqueSummer,etunpeuplusdesagesse,ilmesemble,untoutpetitpeu.

–Riennet’empêchedetestertonenviesurquelquesprojetsavecSaskiasansarrêtertesétudesdepsycho. Laisse passer l’année et tu verras, non ? Et puis, parles-en à Dayton, s’il te plaît, ça leconcerneaussi.

Summerselèved’uncoupcommesimaréponsenelasatisfaisaitpas.

– Je vais appeler Saskia, déclare-t-elle en se dirigeant vers ma table à dessin pour prendreChurchillquiyestaffalé.

–Hé!Qu’est-cequetufaisavecmonchat,Summer?

Moncollèguedetravail,oh!

–Jel’emmènechezmoi,jeluifaisvoirdupays.Ilsefaitchierici…lance-t-elle,avantdesortirdemonbureau.

Voilà,Summerestpasséeetellesebarreavecunepartiedemonenvironnementdetravail.Mais,finalement, jedois le reconnaître,c’estassezplaisantdefairepartiedece toutoùchacunvitàsonrythme.Çan’estpassidifférentdemavieavecSaskia.Jedoisfaireattentiondenepasyprendretropgoût,vuquec’estprovisoire…

***

La cohabitation est tellement idyllique qu’on n’aurait pas rêvé de meilleures conditions pouraccueillirlesdeuxmèresdeDayton,quiviennentveillersurlasantédeleurfils.

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Kathyarrivelapremière.Ellen’estpastropfatiguéeparsontrajet–Daytonl’afaitvenirenhélico–,maisplutôtparl’effervescenceetlebruitdelaville.Elledébarqueauloftavecdessacsremplisdevictuailles etgourmandises faitesmaison, commeunevraiemamangâteau.Dayton fourre sonnezdans les sacs avec l’avidité d’un gamin, en poussant des «Miam, miam » puérils. Kathy est auxanges!

Ils prennent le temps de se retrouver, et jeme joins à eux avec plaisir, avant la rencontre tantattendueentreKathyetAudrey.Cettedernière,quandellesortdel’ascenseur,alaboucheentrouverteetlesyeuxécarquillésdesurprise.

Daytonselèvepouralleràsarencontre,etelleleserreaffectueusementdanssesbras.

–MonDieu, Dayton, dit-elle en tenant fièrement son fils devant elle. Tout ça est à toi ? C’estincroyable!Jesuistellementheureusedecequejevoisetdécouvredetoi.TuasappelécetendroitleNouveaumonde,c’estça?

Daytonhochelatête.

–Oui,jesais,çaadedrôlesderésonances,n’est-cepas?LeNouveauroyaume,pourlasecte,etici,leNouveaumonde…dit-il.

–Ça veut dire que tu as gardé en toi ton histoire, sans le savoir et sans vraiment la connaître,répond-elleeninclinantlatêteavecuneexpressionapaisante.

Puiselle se tourneversKathyetmoi,dans lapartie salon. Jem’avancepour la saluer,puisellesouritàKathy.

–Jecroisquevousêteslafemmequejeneremercieraijamaisassezdetoutemavie,dit-elleavecbeaucoupd’émotion.

Lesdeuxfemmesserapprochentpours’étreindrenaturellement.

–JesuisheureusequeDaytonvousaitretrouvée,Audrey,confieKathy,leslarmesauxyeux.

Lesdeuxfemmessemettentàconversertrèsspontanément,avecl’envied’ensavoirplusl’unesurl’autre.Kathyestraviedeparlerdecesannéesqu’elleapartagéesavecDayton,etAudreyréagitavecémotion, rire ou larmes, aux anecdotes de l’enfance inconnue de son fils. Assis en face des deuxfemmes,nouslesobservonsavectendresse.Daytonserrefortmamain.Jepourraismesentirgênéed’assisteràcetterencontre,finalementassezintime,maisl’amourquis’endégage,lebonheuretlajoie,toutçam’enveloppeetmefaitdubien.

– J’aiparlé àmonmari, dit brusquementAudreyen se tournantversDayton.Maintenantque tum’asretrouvée,quejepeuxtevoir,jeneveuxplusriencacherdemonhistoire.

–Commentaréagivotreépoux?demandé-jeenconstatantqueDayton,ému,estsansvoix.–Ils’estsentitrahitoutd’abord,commeçaarrivesouventquandondévoileunsecretlongtemps

caché.

J’éprouveunpetitpincementenrepensantàcesentimentdontj’aimoiaussifaitl’expérienceàla

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découvertedemonfrèredécédé.

–Etpuisilaécoutécequej’avaisàluidire,poursuitAudrey.L’histoiredemafamillequej’avaistue ou transformée, parce que c’était trop demauvais souvenirs. Et il a compris. Il a vu combienj’étaisheureuseetquejevoulaispartagercettejoieaveclui.

Kathyposelamainsurlebrasd’Audreyets’adresseàelled’unevoixdouceetmesurée:

–Audrey?Nepensez-vouspasqu’ilfaudraitalorstoutdiredevotrehistoireoudumoinstoutdireàDaytondesonhistoire?

Uninstant,Audreyal’airperdue.

–Jeveuxdireparlà,continueKathy,queceseraitbiendedévoileràDaytonl’identitédesonpère,pourquetoutlemondesoitenpaix,pourqu’ilcessedechercheretdes’interroger.S’ilvousplaît,Audrey…

Audreybaisselatête.

–Quandj’aiappriscequ’ilétaitarrivéàDayton,enfinl’agression,j’aidécidéquej’allaisluidireeneffetquiétaitsonpère,toutensachantquelmalaussicelapourraitluifaire.

Ellerelèvelatêteverssonfils.

–Tuveuxsavoir,Dayton?Tuessûr?demande-t-elle.

Daytonmelâchelamainets’avancesurlebordducanapépourserapprocherd’Audrey.

–Oui,dis-moi,dit-ild’unevoixrocailleuse.

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4.Desurpriseensurprise

Audrey prend une profonde inspiration avant de plonger le regard dans celui de Dayton avecl’intentionpalpabledemaintenirlecontactvisuel,letempsdesaconfession.

–Ils’appelaitJack.C’étaitlechefdelacommunauté,decettesortedesecte,Dayton.

Daytonse laisseallercontre ledossierducanapéensoupirantexagérément. Il relève lesbrasetposesesmainssurl’arrièredesoncrâne.Jenesaiscommentinterprétercetteattitude:est-ilsoulagédesavoirouseprépare-t-iltoutsimplementàlasuitedelaconfession?

–Jeneconnaispassonnom,poursuitAudrey.Jenesuismêmepascertainequecesoitsonvraiprénom.JackpourraitêtrelediminutifdeJackson,John,den’importequoi…maisc’estluitonpère.Jenetecachepasquetaconceptionn’arieneuàvoiravecunehistoired’amourquiseseraitpasséeentrenous.Non,rienàvoir,fait-elleensecouantlatête.C’étaituntyran,rassurantparfois,terrifiantsouvent. Ilvoulait juste laisserune trace,marquerceuxqui entraientdans songroupe. Ily avait letatouagepourtoutlemonde,pourleshommes,desbrimadesetpourlesfemmes…ilfallaitqu’illespossède.Toutes.Parfoisjusqu’àcequ’ellesportentunenfantdelui.Commes’ildésiraitàtoutprixquecepouvoirqu’ilavaitsurnousserépète,jenesaispastrop.Ilnousmaintenaitsoussonemprise,c’estindéniable.Ilavaitlecharismed’ungourou,etnousavionsbesoindequelqu’unquiveillesurnousetnousguide.

Kathyjetteuncoupd’œilàsonfilspours’assurerqu’ilestbiencalmeetpasaccablé.Jetiensfortlamaindemonhommepournepasqu’ils’emballeetpèteunplomb,commejel’aidéjàvufaire.EtKathy,imitantmongeste,prendlamaind’Audreypourlasoutenir.

–Jen’aimaispascethomme,Dayton,dit-elle,dessanglotsdanslavoixetleslèvrestremblantes.Jedétestaisqu’ilmetouche,maisc’estarrivé,jesuistombéeenceinte.Audébut,j’aiessayédenierlagrossesse;c’étaithorriblepourmoideporterunenfantdecethommecruel…etpuis…jet’aisentibougerenmoi,bafouille-t-elleenportantlesmainsàsonventre.Etçaatoutchangé.Tun’étaispasl’enfantdeJack,tuétaismonenfant…Àpartirdecemoment-là, j’aidécouvertenmoiuneréserved’amour que je n’avais jamais imaginée. Je t’ai protégé dans mon ventre, j’ai prié pour quel’accouchementsedéroulebienet,mêmeensuite,alorsquelesenfantsétaientélevésensembleaveclaformelle interdiction de nouer des liens forts avec leurs mères, nous avions tous les deux desmoments rien qu’à nous, hors des règles, en cachette, mais tellement forts. Tu m’appelais :« Maman ». Tu savais que c’était possible dans ces moments-là ; tu étais tellement intelligent,tellement curieux.Tu savaisquand il fallait se taire,mais çane t’empêchaitpas, je le sais, d’avoirsouventpeur.

J’aileslarmesauxyeux.Daytonhochelatêtedoucement.

–Oui, j’aieupeur,dit-il.Jemesouviensdecettepeuretaussidespunitions.Descrisdesautresenfantsquipleuraient.Cetype,Jack,monpère,ilcriaitbeaucoupsurnous,non?

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–Lesenfantsnel’intéressaientpas;pasquandilsétaientpetitsdumoins,parcequ’ilfallaitqu’ons’occupe d’eux, qu’on en prenne soin. C’est plus tard, quand ils commençaient à parler qu’ilsdevenaient dignes d’intérêt. Il pouvait alors les manipuler, leur apprendre la parole du Nouveauroyaume,qu’ilrépandaitdéjàparminous.Commentveux-tuqu’unenfantsedéveloppebiendansuntelenvironnement,sansfoyer,sansparentsaimants…

Ellesecouelatête,désolée,abattueparcesréminiscences.

–Ilyaeu,entrenous,desmomentsdegrâce,dit-elle.Tusavaisquiteprotégeait;jeprenaisdesrisquesetjen’étaispaslaseule.CeRobquit’adonnésonjournal,ilneveutpeut-êtrepasl’avouer,nienentendreparler,maisilétaitprésent,ilfaisaitbarrière.C’estaveclui,entreautres,quetuasapprisà jouer de la guitare. Très tôt, tu as su trouver quelque chose qui te différenciait et te protégeait.Quandjevoiscequetuesdevenu,entourécommetul’asétépartesparentsadoptifs,jesuiscontentedeconstaterquetuassumettreàprofitcetteforcequej’aisentieentoi.

Kathyprendlesdeuxmainsd’Audreydanslessiennes.Audreyfixesonfilssansciller.

– Voilà, tu sais qui sont tes vrais parents, Dayton, dit-elle d’une voix calme. Autant tu peux àprésent compter surmoi pour être là, si tu le souhaites, autant je ne suis pas certaine que ce soitindispensablequeturencontrestonpère;s’ilestencorevivant,d’ailleurs,oùqu’ilsetrouve.

Je dévisageDaytonqui restemuet.À ses sourcils froncés et son regard plus sombre, je devinequ’ilréfléchit.

Oui,prendsletempsdetaréponse,monamour…

Ils’éclaircitlavoixavantdeparler:

–Mercidem’avoirenfinrévélémonascendance,dit-ilsuruntonquimesemblesincère.Jemesens plus complet,même si je sais à présent qu’une partie demoi, dema personnalité et demonhéritage,n’a riendeplaisant.C’est àmoidedécider, peut-êtrepasmaintenant,maisplus tard sansdoute,sijesouhaiteallerjusqu’auboutdemaquête.

Ilestdifficileensuitedereprendrelecoursdeladiscussionlégèrequiaprécédécesrévélations.Noustâtonnonstousavecembarras.Daytonsembleperdudanssespensées,malgrésavolontédenerien en laisser paraître, etAudrey adumal à sortir de ses souvenirs sordides et de sa confession.Kathynousproposedegoûteràunedestourtesauxfruitsqu’elleaconfectionnées.

Summer, tel un deus ex machina, débarque avec son naturel habituel pour nous sauver de lapesanteurde l’atmosphère.Elle tientChurchill sous lebras,visiblement ravide se faire trimballerdanstoutleNouveaumonde.

–Jecroisqu’ilafaim;iln’arrêtepasdemiauler,melance-t-elleaprèsavoirembrasséKathy,puisqu’onl’aitprésentéeàAudrey.

–Non,ilteparle,Summer.Ilteditdestrucs,réponds-jeavecunsourireamusé.–Ilmeditpeut-êtrequ’ilafaim,dit-elleensedirigeantverslacuisine.–Ettoi,tuasfaim,machérie?demandeKathyenluicoupantunepartdetourte.

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***

Ilfautdépasserlarévélationdel’identitédupèredeDayton.Luioccuperl’espritestlameilleuresolution.Lesoir-même,toutelabandedugroupedes3PointsCircledébarqueauloftpourundînerimprovisé – toujours dans le genre d’improvisation haut de gamme propre à la vie de Dayton.Gauthier,MichaetSaskiasejoignentànous.

Lesmembres du groupe ont tous une vie bien à eux, un « vrai métier » comme ils disent. Ilsparaissenttoujoursheureuxdeseretrouverpourcesparenthèsesmusicalesetamicales,quecesoitenrépèteouenconcert.Lapassiondelamusiquelesunit.Commelesvraisamis,ilsn’ontpasbesoindesevoirtouslesjourspourêtreprofondémentsoudés.

J’observeavecunregardcurieuxtoutcepetitmondesemélangeretdélayerlatensiondel’après-midi.

Saskia est moins inquiète depuis que je lui ai communiqué l’intuition de Dayton concernant ladisparitiondeJeff,etjeremarquequeleséchangesqu’elleaavecJulian,lebassistedugroupe–sonamantparisiendequelquesnuitsquandmême!–demeurentamicauxetsanséquivoque.

Gauthier etMicha, par leur présencenouvelle, apportent un souffle de fraîcheur à la soirée.Legroupese lancedansunbœufauquelse jointGauthierdansunchantpseudo-lyriquerockquinousfaittousrireauxlarmes.Michanousgratifiedeladémonstrationdesestalentsdedanseur.

Hum!Oui,ilaeneffetdebellesfessesmusclées…

Les deuxmères deDayton paraissent étourdies par tout ce brouhaha joyeux, et Summer est aucombledubonheur.

Je jette de temps à autre des coups d’œil àmon amoureux, pourm’assurer qu’il ne fait pas ledingueavecsablessureetquesabonnehumeurn’estpasforcée.Maisnon…ilal’airdeplanersurunpetitnuage,àvoirlesourireenfantinqu’ilm’adressequandilremarquequejel’observe.

Àunmoment,Saskiam’entraîneàl’écart.

–Jenevoudraispascasserl’ambiance,medit-elle,maisj’aieudesnouvellesdel’agentCooperaujourd’hui.Ellevoulaitm’informerdel’évolutiondel’enquêtesurnoskidnappeurs.Apparemment,cenesontpasdesgarsd’AtlanticCity.Elleafaitpassertesportraits-robotsàlapolicedeNewYorketaubureaufédéral.

Jelafixesansriendire.

–Pourquoinem’a-t-ellepasappelée,ouDaytond’ailleurs?réponds-jeenfin.–Enfait,ellevoulaitsavoirsionavaitsignalé ladisparitiondeJeff.Çaaideraitdans l’enquête,

puisqu’onneveutpasporterplaintepourkidnappingetlereste.Elleapréférés’adresseràlapetiteamie de Jeff plutôt qu’àDayton ou à toi. Elle n’est pas stupide, tu sais ; elle a bien compris queDaytoncomptaitfairesapropreenquêteetqu’ilenalesressources.

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Jehochelatête.Jesensvenirlasuiteet,d’avance,jenepeuxqu’êtred’accordavecSaskia.

–JelaisseencoreunejournéeàDayton,continue-t-elle.Demainsoir,jesignaleladisparitiondeJeff.Jen’enpeuxplusdenepassavoir.Pluslesjourspassent,moinsjecroisqu’ilvaleretrouver.Jesuisdésolée,Anna.

–Nelesoispas,Saskia,jecomprends,réponds-jeenposantlamainsurlebrasdemonamie.JesaisqueDaytonmettoutesonénergiedanssesrecherchesetqu’ilestinquiet,commetoi,maisilfautqu’onenfinisseaveccetteangoissedenepassavoircequ’ilestarrivéàJeff.

Lasoiréeaniméesepoursuittard.Lanuitestcourteavantmonrendez-vouschezOptiManmais,fortheureusement,exemptedecauchemarshantésparlasilhouettedeJack,lepèreavérédeDayton.

***

ClaireCourtevelvientmechercheràl’accueild’OptiManoùjemeprésentelematinà11heures.Premierréflexehabituel,ellemedétailledespiedsàlatêteavecunepetitemouequisignifie:«Peutmieuxfaire…».J’ail’habitudeavecelle,jelaissecouler.Jamaisjeneporterailestailleursstrictsetgriffés qu’elle arbore en toutes circonstances. Et je neme présente pas à un entretien d’embauchepourunpostedespeakerine;jedessineetj’écris,moi!Donc,c’estpantalonentoileenduitenoireettee-shirt et veste en cuir. La seule fantaisie que je me suis permise cematin, ce sont ces bottinesrougescloutéesàtalonshautsquej’aitrouvéesaufonddemanouvellegarde-robe.Çamedonneunpeudehauteur.

Iln’empêchequejen’enmènepaslarge.MonbosschezOptiMan,lemonsieurquim’aàlabonnejusqu’à présent et dans les petits papiers duquel il vautmieux rester, nous attend dans son bureauavec…leresponsableduservicejuridique!

Çadoitàvoiraveclamauvaisenouvelle,ça…

Après lesprésentationsde rigueur, il nous invite ànous installer confortablementpour la suite,prendmêmeletempsdenousfaireapporteruncafé.Mestalonscommencentdéjààperdrequelquescentimètres.

–Onadesemmerdes,Anna,medit-ild’unbloc.

Jehausselessourcilsavecunetêted’ahurie.J’attendsquelecouperettombe.

–JevousaiditcequejepensaisdevotrearticlesurBradTravies,hein,continue-t-il.Trèsbien,trèsoriginal,etlui-mêmeadonnésonaccordsuiteàvotredernièrerencontre.

JesupposequelesmenacesdeDaytonysontcertainementpluspourquelquechosequemontalentdejournaliste…

–On a eu de bons retours suite à la parution, je ne reviens pas là-dessus,Anna.On a juste unproblèmeavecBradTravies.

–Maisvousvenezdedirequ’ilavaitdonnésonaccord,dis-jesousleregardautoritairedeClaire

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quidoitpenserquejenedoisparlerquelorsqu’ellem’yautorise.–Oui, c’est vrai, répond le boss.Mais ça ne l’a pas empêchéde nous adresser un courrier par

l’intermédiairedesonavocat.

Ohmygod…

Là,jenedisrien,aurisquedebredouillerlamentablement.

–Ilnousreprocheaposteriorilefaitdeprésenterdeluiuneimagedirigéeetfausse,uniquementparcequeledessinn’estpasaussiobjectifquelaphotographie.

Jenepeuxm’empêcherdem’esclaffer.

–C’estpourça?!m’exclamé-je,incrédule.Justepourça?Maisilavulescroquisquej’aifaitsdelui,non?Iladonnésonaccordpourl’articleintégral!

Lebosssecouelatêted’unairagacé.

–Oui,oui,Anna,onestd’accord,maiscetypeaunfortpotentieldenuisance.Ilpeutdécider,s’illesouhaite,denousdescendredanslapresse, l’autrepresse.C’estunefigurecharismatique,ilserasuivi.

–O.K.,maisqu’est-cequejepeuxyfairemaintenantquel’articleestparu?demandé-jeavecungestedesmainsexprimanttoutemaconfusionetmonimpuissance.

– Finalement, ce qu’il demande est simple, intervientClaire. Il demande que tu écrives un texteexprimant que ton point de vue d’illustratrice est subjectif, que l’image que tu donnes de lui estimplicitementtronquéeoubiaisée,oucequetuveuxsituneveuxpasdirequ’elleestfausse,etdoncquecetraitementdel’imagenepeutêtreconsidérécommejournalistique,maisseulementartistique.

Jevaismedécrocherlatêteàforcedelasecouerd’exaspération.Toutcelaestabsurde.

–Ilesthorsdequestionquejefasseça!m’exclamé-jeenmeredressantdansmonfauteuil.

Clairemefusilleduregard,avantd’adresseraubossunregardquiveutcertainementdirequ’ellevadompterlefauveenragéquejesuisdevenue.

–Pasquestion!insisté-jeenhaussantleton.D’abordparcequeceseraitreniermonintégritédejournaliste. Je ne vais pas bafouer mes méthodes alors qu’elles sont justes et respectueuses despersonnesquej’interviewe.

Commesij’enavaisfaitdestonnesdecegenred’interviews…Aprèstout,ons’enfout!

–Ensuite,parcequecen’estpaspourdesraisonsd’éthiquejournalistiqueoudepréservationdel’imagequecemonsieurs’acharnesurmontravailetparricochetsurOptiMan…

Lesyeuxdestroispersonnesprésentesdanslebureausonttousrivéssurmoienpleindéballagedevérité.

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–Maisbienparcequ’ils’estpointéàpoildansmachambre,aucoursdemonséjouràMiamichezlui,etquejen’aipascédéàsesavancesplusqu’explicites,poursuis-je.Enfin,jenesaispasvraimentsic’estpourçaouparcequejeluiaiditquej’étaislesbienne,alorsqu’ilm’avuembrassermonpetitcopainàl’aéroport…

Claire fait unedrôle de tête, un sourcil en haut, l’autre enbas, la bouchede travers et les yeuxcomme des calots. Le directeur juridique exhibe un petit sourire rigolard, et mon boss, les brascroisés,réfléchitcertainementplusvitequejeparle.

–Sanscompterqu’il adenouveau tenté sachancedemanière supergrossière lorsde la soiréequ’il a passée à New York et où je me suis rendue à votre demande, conclus-je en insistant sur«votre»…

–Avez-vouscédécettefois?nepeuts’empêcherdedemanderledirecteurjuridique.

Àmontourdefairelesgrosyeux!

–Non,hurlé-jepresque,toujourspas!Et,unefoisencore,j’aieulachancequemonamidébarqueaubonmoment,aveclesbonsmotspourdissuadercetombeurhollywoodiendemetomberdessusjustement!

Ouf!J’aicruquejen’auraisjamaisassezdesouffle…

Clairedéglutit,maisnetrouverienàdireensuite.C’estleboss,calmeetfroid,unbossquoi,quiprendlaparole:

–Notreservicejuridiquevadoncrépondreàl’avocatdeM.Traviesquenoussoutiendronsnotrejournalisteaucasoùelledécideraitdedéposerplaintepourharcèlementsexuelcontresonclient.

Euhnon…jeneportedéjàpasplaintequandonmekidnappe…Parpitié,lapaix!

J’ouvrelabouche,maislebossmefaittaired’ungestedelamain.

– Je suppose que cela suffira pour calmer les attentes deM. Travies, et, au cas où vous auriezd’autres arguments, ceux par exemple que votre petit ami aurait fait jouer pour vous sortir de cemauvaispas,jesuistoutprêtàlesentendreetàlesgarderenatoutscachéssiTraviespersistedanssadémarche.S’iladesexigences,noussommesendroitdeformulerlesnôtresaussi.Souhaiteriez-vousunelettred’excusedesapart,Anna?

Jesuisabasourdieparsonphlegmeetsoncalme.

–Euhnon…bafouillé-je.–Parcontre,vousalleztoutdemêmeécrirecetextedontnousparlionstoutàl’heure,survotre

pointdevuedejournaliste-illustratrice.

Maisnon!

Re-tentatived’ouvrirlabouchedemapart,re-gestedelamainduboss.

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–Si!Vousallezl’écrire.Etc’estlàqu’onenarriveàlabonnenouvelledontClairevousapeut-êtreparlée,continueleboss.Nouspensionsutilisercetexte,enformedelettred’excuseindirecteàcefouteurdemerde,pourprésenterunenouvelledirectionéditorialequenoussouhaiterionsdonnerànosinterviewsexclusives.

Mesépaulesmepèsentd’uncoup.Jenecomprends rienà l’enchaînementdes idéesquimesontexposées.Jenesaissi jedoisencoremedéfendre,m’offusquer…Clairesepencheversmoietmetapotelamain.

– Bois un verre d’eau, Anna. Calme-toi et écoute, dit-elle d’une voix sèche mais presquematernelle.

Jefaiscommeonmeditdefaireetjemeréinstalleplusposémentdanslefauteuil.

– Voilà comment je vois les choses, Anna, me dit le boss, les yeux dans les yeux, style « Pasd’entourloupe».Moi,j’aimebiencegenredepapier.J’aimececôtéperso,intime,original,etjenesuis pas le seul. Les lecteurs adhèrent. Ça change des interviews standardisées avec portraitsphotoshopés.C’estduvrai,ça,merde!

O.K.,cool,jesuisd’accord…

–C’estClairequim’asuggérél’idée,etj’aivraimentenviedeluifaireconfiancesurcecoup,devousfaireconfianceàtouteslesdeux,poursuitleBoss.

JejetteunregarddubitatifversClaire,maiselleestsuspendueauxlèvresduboss.

–Vousallezmemonteruneéquipedejournalistespolyvalentscommevous,Anna!Clairevavousdonneruncoupdemain.Onvamettreàvotredispositionunbureauici,voussortir lesfichiersdenos pigistes et illustrateurs. Libre à vous de nous en dégoter de nouveaux ; je me fie à votrejugement!Letruc,c’estdeviserévidemmentdespersonnalitésunpeuhautdegamme,pasforcémentbling-bling,maisaprèstout,pourquoipasdespersonnalitésquel’authenticitéintéresse.Jepeuxdéjàvousassurerqu’onnevapasrencontrerbeaucoupderefus.Voilàunbonmoyenpoureuxdefaireparlerd’euxetdemanièreintelligente.J’aidéjàunenouvellepistepourvous:uncoupled’écrivainsquirésidentàBrooklyn,trèsenvue,trèsintello,vousvoyez.

Ildoitcroirequejemesuistransforméeenstatuedecirecarilmefixeensilenceaprèscettetiradeàlaquellejenerépondspas.J’ailatêteinclinéesurlecôté,commesijerêvaisd’untrucquin’arienàvoir,assezagréable,bienqueperturbant.

–Reprendsunpeud’eau,Anna,meditClaireenmetapotantdenouveaulamain.

J’obéis.Çavaunpeumieux.

–Alors,vousêtespartante,Anna?medemandelebossensefrottantlesmains,unlargesourireauxlèvres.

Commentrefuserunetelleproposition!

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Leretournementdesituationopéréencoursderendez-vousvautbienlesplusgrandesmontagnesrussesdumonde,maismaintenantquemerevoilàlespiedssurterre,biendroitedansmesbottinesàtalons, je me lève et je lance un « Yes Sir ! », qui provoque un regard atterré de la part de marédactriceenchef.

***

Clairemeraccompagneàlasortiedel’immeublequihébergelegroupedepresse.Jesaisquejel’agaceunpeuavecmesréactionsimprévisibles,maisj’aibiensentiqu’ellecroyaitenmoi.Cequ‘ilvientdesepassermeleprouve.Elleasutransformeruneattaquecontremontravailenatoutpourmoi;etpourelleaussi,biensûr…Maisc’estdebonneguerre.

–Jefaislepointaveclesressourceshumainespourobtenirlefichierdespigistesetillustrateurs,et on se met au boulot ensuite, me dit-elle, très business mais en me serrant tout de mêmeamicalementlebras.Et…bravo,Anna.

Je la remercie sincèrement et m’en vais d’un pas léger, rebondissant même sur les trottoirsencombrésdeManhattan, tout en ayant l’impressiondeplaner àquelques centimètres au-dessusdel’asphalte.

Chouette…Lepied…Labellevie…

Je rallumemon portable qui semet aussitôt à afficher un nombre incongru d’appels provenantd’unnuméroinconnu.Etpasdemessage…

Jefixemonécranenmedemandantsijedoisrecontacterl’anonymetimidequin’apaslaissédemessage,quandletéléphonesemetàsonnerenaffichantlenuméroinconnuenquestion.

–Oui?fais-je.–Anna?C’estJeff.–Jeff?Maisoùétais-tu?!Çava?Tum’appellesd’où,là?Qu’est-cequec’estquecenuméro?

J’enchaînelesquestionsà touteallure,craignantqu’ilmefileentre lesdoigtsunenouvellefois,maisilinterromptbrutalementlefildemoninterrogatoire.

–Peu importe,Anna. Je viens de passer à l’appartement deBrooklyn et Saskia n’y était pas. Jepensaisbienqu’elleseraitàl’atelier,dit-ild’untonbrusque.Maistoi,t’esoù?

– Je suis àManhattan pour un rendez-vous de boulot et, pour tout te dire, j’habite chezDaytondepuistroisjours.Mais,vas-tumedireoùtuavaisdisparu,Jeff?!

Iléludeunenouvellefoismaquestion.

–Anna,quiestcetypequim’aouvertàmoitiéàpoilchezvous?CegrandFrançais,là,c’estlenouveaumecdeSaskia?demande-t-ild’unevoixirritéequicachemalsacolère.

–Euh,jecroisquetuasrencontréGauthier,maisc’estplutôtnotremeilleurami,tuvois.J’espèrequetunel’aspasbousculéjusteparcequeturéapparaisetquetuesjaloux…

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Pasletempsdefinirmaphrase…

–Tuveuxquej’imaginequoiquandjeviensvoirmacopineetqu’àlaplace,jetrouveuntypeàmoitiéàpoildanssonappart…

–Hé!Jeff,attendsuneseconde,s’ilteplaît,dis-jeenluicoupantlesiffletàmontour.D’abordtutecalmes.Jenesaistoujourspasoùtuétais,àcroirequeturefusesdemerépondre.Jeterappellequetu as disparu dans la nature depuis des jours.On était tousmorts d’inquiétude et tu ne sais pas lamoitiédesemmerdesqu’onaeuesàcausedetoi.Jet’aimebien,jesuiscontentequetusoisenvieetderetour,maistuchangesdeton!,dis-jeeninsistantlourdementsurlesmots.

Courtsilenceauboutdufil.

–Excuse-moi,Anna.Oui,j’aiapprisqueDaytonaétéblessé.

Jenecherchepasàsavoircommentill’aappris,parcequemaintenantquejeletiens–presque–,jen’aipasl’intentiondelelâcher.

–Écoute,Jeff,ilfautqueturacontestoutàDayton,etàSaskiaaussibiensûr.Ilsontquandmêmefailliylaisserleurpeau.

–Saskia,jeveuxbien,là,toutdesuite.Ilfautquejelavoie,j’enaibesoin,Anna.Dayton,après,situleveuxbien;ilfautd’abordqu’onenparleensemble.

Grrr,jevaisencoredevoircacherdestrucs,maispasplusdequelquesheurescettefois!

–Bon,Jeff.Voilàcequ’onfait:tupasseschercherSaskiaàl’atelierettularamènesàl’appart.Jevousyretrouve.Attention,situtouchesàuncheveudemonGauthier,jetejureque…

–Anna,c’estbondet’entendre.–Oui,moiaussi,jesuiscontentedetesavoirenvie,Jeff.Jefaisvite.

Qu’est-cequejedisaisdéjà?Chouette?Lepied?Labellevie?Detouteévidence,jenesuispasencoresortiedesproblèmes…

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5.Etmoi,danstoutça?

Cen’estpasl’heureidéalepourretourneràBrooklynentaxi.Jem’engouffredanslemétronew-yorkais.Sijepouvaispédalerpourfaireaccélérerlesrames,jeleferais…

Ilyadumondequim’attendàl’appartquandjedébouleenfin,àboutdesouffle.PassélesétreintesamicalesavecJeff,jeprendsletempsdejaugerl’atmosphèreetd’évaluerlamargedemanœuvres.

Toutd’abord,Gauthierestenunseulmorceauetpasesquinté.Ilestencoreunpeuraideetcrispé,mais je lesenspleindebonnevolontépour fairecopain-copainavec l’amoureuxdeSaskia. Il fautbien admettre que ça ne doit pas être simple pourGauthier de trouver sympathique ce type qui adisparu dans la nature pendant plusieurs jours, sans prévenir, ni donner de nouvelles, et qui aprovoquélekidnappingdesesdeuxmeilleuresamies…

–Michan’estpaslà?demandé-je.–Non,répondGauthierensirotantsonDarjeelingbrûlant.Ilestàlacompagniededanse.Etpour

êtrehonnête,jenesuispasmécontentqu’ilsoitabsent.Commentdire…c’estunpeumouvementéetbrouillon,notrearrivéeàNewYork.

C’estpleinde tact,c’estduGauthier toutcraché,maisçaveutbiendirecequeça impliqueplusgrossièrement : « C’est un peu le bordel dans votre vie, les filles, non ? ». Et il n’a pas tort.Cependant, je trouvequ’ilfaitdeseffortsavecJeff,quialuimêmel’airencoretrèsembarrassédeleurpremièreconfrontation.

SaskiaestemmêléecommeunelianeaucorpsplutôtmusclédeJeff.Ilssonttouslesdeuxinstalléssurlecanapé.

–Bon, je croisqu’onabesoinque tunousexpliques,dis-je enm’asseyant faceà eux,Gauthierétantdeboutderrièremoi.Tuétaisoù?

–D’aprèscequem’aditSaskia,Daytonaeu labonne intuition, répondJeff. J’étais làoùonnepouvaitpasmetrouver,loindetout.Terrécommeunebête.Jenesuispasfierd’avoirfuicommeça.Jesuistombébienbas;j’aimêmepenséenfinir.Jevousledisparcequejevousfaisconfiance,j’aibucommeuntroupendantplusieursjours,ànepluspouvoirtenirdebout.Puisjemesuisréveilléàunmomentdecettetransedémenteetjesuisallémetremperdansl’eauglacéedulacSupérieur.J’aipris ladécisiond’affronter.J’aiappriscequ’ilétaitarrivéàAtlanticCityparceque j’ai recontactémescréanciers.Ilss’attendentàdegrossesemmerdes,maisilsontrécupéréleurargent,etpoureux,c’estleprincipal.

–Daytonméritevraimentquetuluiparles,interviens-jeaveclafermeintentiondenepaslelaisserfuirencoreunefois.

Ilbaisselatête,l’aircontrit.

–Jesais,fait-il.Jevaislefaire.

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–Là,toutdesuite,insisté-je.

Ilsecouelatête.

–C’estplusfacilepourmoidevousenparlerd’abordparcequevoussaviezavantDaytonquelétaitmonproblèmedejeu,avoue-t-il.C’estunesortedepréparationavantlegrandsaut.

Ilessaiedesourire,maisçasonnefaux.

–TupensesqueDaytonestd’attaque,Anna?medemande-t-il.Jeveuxdire,physiquement.

Trèsrapidement,quelquesimagesdeDaytonaucoursdesderniersjourssemettentàdéfilerdansmatête,certainesdécentesetd’autresinterditesauxmoinsde18ans.

–Oui,ilestd’attaque,réponds-je.Tusais,ils’estquandmêmepassépasmaldetrucspendanttadisparition,Jeff.Daytonaretrouvésamèreetilconnaîtdepuishierl’identitédesonpère.Onnepeutpas dire qu’il est super calme. Il est assez chamboulé par tous ces événements. Il faut qu’il fasseattention,c’esttout.Pasquestionquevousenveniezauxmainsparexemple…

Jeffsecouelatêtecommesijeracontaisn’importequoi.Jemedoutebienqu’évidemment,Jeffn’apasçaen tête,maisc’est sanscompter la fureur imprévisibledont j’aiété témoinchezDaytoncesdernierstemps.

–Jeveuxqu’on règleça, Jeff,qu’onyaillemaintenant,poursuis-je. JeneveuxpascacherpluslongtempsàDaytonquetuesderetour.Jet’avaisdonnémaparoledegardertonsecretet,pourfinir,j’aifailliperdrel’hommequej’aime.

JeffembrasseaffectueusementSaskia,inspireungrandcoupetselèveducanapé.

–O.K.,onyva,dit-il.

***

Lesportesde l’ascenseur s’ouvrent et je suis aubordde la crise cardiaque. Je retiens Jeff dansl’entrée.JeveuxallervoiroùsetrouveDayton,s’ilestseulouavecSummer.Enfin,jeveuxavoiruneidéedel’ambiance…

Jepasse la têtedans sonbureau-salledemusiqueet ledécouvreen trainde jouerde laguitare,casque sur les oreilles, regard rivé sur le logiciel hyper-incompréhensible qu’il utilise pour samusique.Ilnenousapasentenduarriver.Jem’approchedoucementetluitouchel’épaule,avantdedéposerunbaiserdanssoncou.Lesourirequ’ilm’adresseenseretournantmeremplitdelamêmechaleuramoureusequechaquefoisquenousnousretrouvons,malgrémonappréhensiondelascèneàvenir.

–Anna,jecroyaisquetuallaism’appelerensortantdetonrendez-vous,dit-il,surprismaisavecunbeausourire.

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Ilposesaguitaresursonstandetôtesoncasque.Sesyeuxgrisbleurappellentuncield’étésansnuages.Quandilserelève,j’inspireuneboufféedesonparfumenvoûtant.

–Tuasl’airbizarre,medit-ilenfronçantlessourcils,sesmainsdepartetd’autredemonvisage.Çava?

Allez,plonge,Anna!

–Jeffestlà,dis-jesimplement.

Sourcilsplusfroncés,regardplusfoncé.Daytoninclinelatête.Alorsj’ajoute:

–Ilestlà,danslesalon.Ilm’aappeléequandjesuissortiedemonrendez-vouschezOptiMan.Jel’airetrouvéàl’appartavecSaskiaetjel’aitoutdesuiteramenéici.

Voilà,ouf!Commeça,jesuisau-dessusdetoutsoupçondecachotteries!

Jerespireàpeine.Jeledévisage.Ilpassesesmainssursonbeauvisageet,quandilréapparaît,sestraits sont plus marqués. Il inspire par le nez ; ses narines sont pincées et ses mâchoires plussaillantes.

–O.K.,onyva,dit-ilsurlemêmetonqueJeff,àpeineuneheureplustôt.

Çasonnecommel’entréededeuxadversairessurlering…

***

Daytons’avancedanslesalonetJeff,deboutdevantlabaievitrée,seretourne.Lesdeuxamissontcertainement heureuxde se revoir,mais toutes les péripéties et tous les secrets accumulés entre ladisparitiondeJeffetcesretrouvailleslesempêchentd’exprimerlibrementleursoulagementetleurjoie.

–Jeff,faitsimplementDaytonenguisedesalut.–Dayton,répondJeff.–Tuveuxboirequelquechose?Unebière,unsoda?demandeDaytoncommepourgagnerdu

temps.–Unsoda,çairatrèsbien,répondJeffquis’installesurlecanapépendantqueDaytonvachercher

laboisson.

Ilrevientetdéposeverreetbouteillesurlatablebasse,avantdes’asseoirfaceàJeff.Jemeposediscrètementnonloind’eux,surlequi-vive.

–Excuse-moi,faitJeffd’unevoixenrouéeparl’émotion.Dayton,jesuisdésoléd’êtreàl’originede toutes lesemmerdesque tuasdûgérercesderniers joursparmafaute. J’auraisdûaffronter lasituationetnepasmedéfilercommejel’aifait.

–Ettuétaisoù?demandeDayton.–Làoùtuasdevinéquej’étais,làoùj’aimedisparaître.

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Daytonhochelatêtesansparler.Cesilencepèsependantquelquessecondesinsupportables,avantqueDaytonreprennelaparole.

–Cen’estpas tantparceque tuas fuique jemesuissenti trahioublessé, Jeff,dit-il,maisbienparce que tu m’as caché un problème que tu as depuis des années. J’ai l’impression d’avoir ététrompé,d’avoirfréquentéunhommequim’aleurrésurcequ’ilétait.Tun’espasn’importequipourmoi,tuesmonmeilleurami.Jetefaisaisconfiance.J’aidumalàencaisserça.

–Jecomprends,Dayton,maisj’avaisl’impressiond’avoirdesdevoirsenverstoi,répondJeff.Jet’ai sorti du pétrin il y a quelques années parce que tu avais fait des conneries. Jeme voyaismalt’avoueràquelpoint,moiaussi,jepouvaisdéconner.Jecroisquej’avaispeurdeperdretaconfiance,justement.

Sadernièrephraserestesuspendueenl’aircommes’ils’agissaitd’unequestion.Daytontordleslèvrespouréviterderéagiràcettedouloureusephrase.AlorsJeffcontinue:

–J’avaistoutsouscontrôle,oudumoinsjelecroyais.Commecelanesevoyaitpasdel’extérieur,jecroyaisquejepouvaislenier.Çan’arrivaitpas,çan’étaitpasgrave…

–Jusqu’aumomentoùçal’aété,intervientDayton.Etpasquepourtoi.PourAnna,pourSaskiaetpourmoiaussi.Commentas-tupuoublierqueldangercegenrede…jenesaismêmepascommentparlerdeça…

–Dépendance?proposé-jed’unepetitevoix.

Jesuisunpeuspécialistedusujetencemoment,non?

Daytonhochelatête.

–Commentas-tupuoubliercequecegenrededépendancepeutimpliquerdedangereux,Jeff?Tun’espasunmarginal,tuesdanslavieconcrète,tuasdesresponsabilités,tuexcellesdanstonboulot,pournepasdirequ’onteconsidèrecommelemeilleur.J’avoue,ajoute-t-ilensemoquantunpeudelui-même,j’aitoujourscruquetuétaisinfaillible,droit,honnête,intègre…

ChaquemotqueDaytonprononcepourdécrireJeffestcommeunpoignardplantédanslecœurdeson ami. Jeff blêmit. Je me tords les mains tant je compatis à sa douleur.Mais, Dayton a besoind’exprimersadéception,etça,jelecomprends.

Surtoutqu’illefaitdanslecalme…

–Jeffestenvie,Dayton,murmuré-je,commesicettenotiond’êtreenvieétaitcelledontilfallaitserappelerentoutecirconstanceaprèstoutcequenousvenonsdetraverser.

Daytonaunpetitsourireentendu;ilasaisioùjevoulaisenvenir.Iltendlamainversmoipourquejemerapprocheetjem’asseyeprèsdelui,samaintoujoursdanslamienne.

–Oui,soupire-t-ilavantdeleverlesyeuxverssonami.Oui,heureusement,Jeffestenvie.

Je crois qu’il faudra se contenter pour l’instant de cette expressionde soulagement, à défaut dedémonstrationdejoie.

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–Jeterembourseraicequetuasperdudansl’affairepourmesortirdecettehistoire…pourvoussauveraussi,ditJeff.

– Je me fous de l’argent, Jeff, et tu le sais, répond Dayton. Ce n’est que de l’argent. Ce quicomptait,c’étaitAnnaetSaskia…ettoi,tesortirdelamerde.

Ilsecouelatête.

–J’auraiseubesoindetaprésence,tusais,poursuitDaytonenplongeantlesyeuxdansceuxdesonami. J’ai traversé des moments difficiles ; ton soutien aurait été rassurant. Au lieu de quoi, tonmensongeetsesimplicationssontvenuss’ajouteràdessituationsdéjàcomplexesàgérer.

–Annam’aracontépourtesparentsnaturels,ditJeff.Jesuisdésolédenepasavoirétélà…–Oui,onpeutdirequetuaschoisilemauvaistiming,s’esclaffeDaytonavecironie.– Je n’ai rien choisi, Dayton, je n’ai rienmaîtrisé ; ce qui est pire, déclare Jeff.Mais, je suis

heureux d’apprendre que tu as retrouvé ta mère et que vous semblez tous les deux désireuxd’apprendreàvousconnaître.

–Iln’yavaitpasquemoi,Jeff,tusais,continueDayton.IlyaDayCool,desgensquicomptentsurtoi.Jemesuisretrouvésubmergé;çan’étaitpasprévuquejegèreçatoutseul.J’ailaisséenplancequej’aimais,lamusique,etj’aimêmefaillirejeterAnna…Tun’aspasidéedesdégâtsquiauraientpuêtrecauséspartoninconséquence…

–Putain,jesais,Dayton!ditJeffd’unevoixforteenseprenantlatêteàdeuxmains.Jesaisquej’aimerdé.J’aipeurdenejamaisêtrecapablederéparerlemalquej’aifait.

JejetteunregardaffoléàDayton.Jen’aipasenviequ’illaisseJeffs’embourberdanscettepeurd’avoirperdunotreconfianceàjamais.Maisleregarddemonhommeestclair,ilsaitcequ’ilfait.

– Tum’as appris qu’on pouvait se rattraper, Jeff, ditDayton d’une voix calme, sans animosité.Qu’onnerestaitpasfigédansdesactesrépréhensibles,qu’onpouvaitdépassertoutça,qu’onpouvaittrouverlepotentielensoi.

JeffrelèvelatêteetfixeDayton.IlsaitdequoiparleDayton,decetteépoqueoùJeffaremisdansledroitcheminunadolescentbourrédetalentmaisturbulent.Lesrôless’inversent,avechumilité.Jecroisquej’ai,sousmesyeux,uneidéedel’amitiéfortequi liecesdeuxhommes.Leregardqu’ilséchangentn’apasbesoindemotssurl’instant.C’estunesortedepacte.

–Jeneferaipascommesiriennes’étaitpassé,assureJeff.Jenereprendspasmaviel’airderien.Jesaisquelleserreursj’aicommises,etlemalaussi…àSaskia,àAnnaetàtoi.Jenetourneraipasledosàmesresponsabilités.

Daytonadresseenfinàsonamiunsourireplusdétendu.

–Jesaisquejepeuxencoreavoirconfianceentoi,luiassure-t-il.–Tupeuxcomptersurmoi,Dayton.Jenevaispasmedéfilerunenouvellefois.Jevaismeprendre

enmain.

Dayton secoue la tête et son sourire est plus franc. Je sens circuler entre les deux hommes lecourantchaleureuxetfrancdel’amitiévirileretrouvée.

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–J’aidécidédesuivreunecureetdemesoigner,continueJeff. Jevais intégrerdesgroupesdeparole, voir un psy… enfin faire tout ce qu’il faut pour dépasser mon problème. Cela va medemanderdutemps,Dayton,pourentreprendretoutça.Jenevaispaspouvoirgérertoutdefront.JevaisdevoirmeretirertemporairementdeDayCool.

Quoi?!MaisDaytonvientjustedeluidirequ’ilnepouvaitpastoutgérertoutseul.

Daytonestaussisurprisquemoi.Ilseredressesurlecanapéetsesdoigtssontplusrigidesentrelesmiens.

–C’est ladernière faveurque je tedemanderai, ajoute Jeff.Laisse-moiquelquesmoispourmeremettred’aplomb.

–TuesentraindemedirequetuteretiresdeDayCoolpourunepériodeindéterminéeetquetunesaispasquandtureprendrastesfonctions,c’estça?demandeDayton.

Jefflefixesansrépondre.Etlà,cequejecraignaisarrive:Daytonlaisseexplosersonémotion.

–Putain,Jeff, tudéconnes, là?!J’aidoublémontempsdetravailpourpalliertonabsence.Moiaussi, j’aibesoindemeposer.Onestdeuxdanscetteboîte ; c’était ledealdedépart.Cetteboîteabesoindetoipourtourner.J’aibesoindetoi!Aprèstoutcequ’ilvientdesepasser,jenemesenspaslaforcedecontinueràjonglerdanstouslessens.

Daytons’estlevé;jenesaispasquoifaire.Jeposealorsunemainsursonbraspourl’apaiser.Jeffn’apasbronché.IlaffrontelacolèreetledésarroideDaytonsansfrémir,parcequeDaytonn’estpasjustefurieux,ilestsurtoutperdu.

–Cen’estpascommesitun’étaispasbienentouréchezDayCool,Dayton,déclare-t-ilcalmement.Il n’y a pas qu’en moi que tu peux avoir confiance, question boulot. Tu as su choisir des genscompétents;tupeuxdéléguerett’appuyersureux.

Malgrésonairestomaqué,DaytonsemblefrappéparlefonddevéritédesparolesdeJeff.

–C’esttropfacile,Jeff!balance-t-iltoutdemême.–Non, ça ne l’est pas, rétorque son ami.Ça n’est pas facile, comme tu dis, de se retirer d’une

affaire qu’on a bâtie ensemble,même si c’est temporairement. Je ne suis pas indispensable ; tu tedébrouillestrèsbienpourmenerlesaffaires,Dayton.Merde,tupeuxtefaireconfianceaussi!

Jeneveuxpas intervenir,c’est leuraffairede touteévidence.Malgré tout,moiaussi, j’aimeraiscrieràDaytonqu’ilpeutsefieràsescapacités.Jel’aimetellement,jelesenscapabledetout.Jeffaraison,etonsenttoutelamaturitédesonâgedanssespropos.

–IlyaRuby,dansnosbureauxdePaloAlto,poursuitJeff.Çafaitunmomentqu’onpensequ’ellevanousquitterparcequ’ellea lescompétencespouravoirplusdes responsabilités,non?Tupeuxt’appuyersurelle.Jepeuxt’assurerqu’ellenevapaslaisserpassersachance,nitedécevoir.

Onadépassélesujettrèssensibledel’amitié.Cesdeux-làsontentraindeparlerboulot,etilss’yconnaissent.MêmesiDaytonestprofondémentremuéparcequ’ilsepasseentreJeffetlui,ilsemet

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viteenmodebusiness.J’aimeçachezlui,cettefaçonqu’iladegarderlatêtefroideetderéfléchirvite.Lesmainsposéessurleshanches,sonvisageplussérieuxquesexy–maissi,sexymalgrétout…–,ilfixeJeffpendantquelquessecondes,avantderépondre.

–Onparledetemporaire,quandmême,hein?demande-t-ilàJeff.

Cedernierhochelatête.

–O.K.,alorstuasraisonpourRubyetPaloAlto.

Jesoupiredesoulagement.Ouf!Onsortdusacdenœuds.

–Bien,faitJeff.Jecroisquetun’aspasàt’inquiéter.Jenedisparaispasnonplus,pascettefois.–J’espère,répliqueDayton.Bon,onvafairecommeçaalors.JevaisalleràPaloAlto.Ilmefaut

justetrouveroùlogerlà-bas.PlutôtàSanFranciscod’ailleurs.

Oùloger?SanFrancisco?Maisc’estlacôteouest,ça,non?

–Çateplaît,SanFrancisco,Anna?medemande-t-ilensuiteensetournantversmoi,d’unevoixplutôtneutre,commes’ilmedemandaitdechoisirlacouleurd’unevoiture.

Commentça?!Jefaispartiedudéménagement?

Il est encore un peu tendu, crispé par la discussion, mais surtout il a ce ton autoritaire etcatégorique de « Mr Business » que je trouve très sexy, quand je ne suis pas concernée par lesdécisionsqu’ilprend.

Jelefixesanssavoirquoirépondre,laboucheentrouverte,abasourdie.

–Ondéménage àSanFrancisco ! dit-il, toujours sur ce ton catégorique, commepourme fairecomprendrecequej’aidéjàcompris.

Hé!Jen’aipasmonmotàdire?!

–Mais…bafouillé-je,sansréussiràexprimertoutcequisebousculedansmatête.

Mesamis?MavieàNewYork?Cenouveauboulotquelebossd’OptiManvientdemeproposeretquiconfirmelelancementd’unecarrièrepleinedepromesses?Jen’aimêmepaseuletempsd’enparleràDayton…

–Alorsçaroule!conclutDaytonquidétournesonregarddemonexpressionhébétéepourfairefaceàJeff.Maispasquestionquetudisparaissesencoreunefois!Nenousrefaispasuncoupcommeça.

Jeffselève,etlesdeuxamis,aprèss’êtredévisagésuninstant,selaissentenfinalleràuneétreinteamicalequiexprimetoutelajoiedeleursretrouvailles.

Moncœurseserre.

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Sousmesyeux,Daytonet Jeffsonten traindescellermonavenirsansmêmem’avoirdemandémonavis.

Àsuivre,nemanquezpasleprochainépisode.

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