Quel avenir pour le Web et le numérique à l’heure de l’Anthropocène ?

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Quel avenir pour le Web et le numérique à l’heure de l’Anthropocène ? Ecole d’été UGA “Autour du 2°C” Alexandre Monnin UCA, Inria, I3S, Wimmics

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Quel avenir pour le Web et le numérique à l’heure de l’Anthropocène ?

Ecole d’été UGA “Autour du 2°C”

Alexandre Monnin

UCA, Inria, I3S, Wimmics

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Les dispositifs IoT

Selon les agences, les entreprises ou même les personnes

interrogées, les prévisions tablent sur 50 à 100 milliards

d’objets connectés à Internet d’ici 2050

Source : IBM

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Michael Walker, CEO of Apache Beam

Sauf que selon les spécialistes du chiffrage des données, il

devrait exister sur terre environ 1027 octets générés par les

réseaux de capteurs !

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Source : INTEL Intelligents Systems Framework

Dans une vision extrêmement « positive », on peut penser que le monde

ressemblera à peu près à ça :

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Quelques questions :

1) Automatisation et

emploi(s)

Les smart technologies +

l’IA = quelle modèle

économique ?

2) Ethique des robots

Etc.

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Pourtant, ce n’est Pas la question posée aujourd’hui !

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2030…

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Le numérique : énergie et ressources

Source : José Halloy (LIED)

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Source : José Halloy (LIED)

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ENERGIE

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Source : José Halloy (LIED)

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“The continuing rise of Si based semiconductors is perhaps the major technological fact of the past five or more decades. Silicon-based technology is a “general purpose technology” [Bresnahan and Trajtenberg (1995)] underlying much of the improvement in information storage, information transmission and computation since the 1960s and some have argued [Brynjolfsson and McAfee (2014)] that it is the most important general-purpose technology ever. From 1968 to 2005, the number of transistors sold for use has increased by 10^9; by 2005 there were more transistors used then printed text characters (Moore, 2006)! However, the industry revenue per transistor has fallen almost as dramatically (Moore, 2006) as has the amount of material needed make a transistor. Nonetheless, the usage of silicon has grown significantly since 1970. We find it has grown by 345% over this period but also find the growth is less than GDP growth (472% in the same period) and that much of the growth of Si usage is associated with non-electronic applications. This growth would be 10^5 (or more) times as high 2005 transistor used as much Si as one manufactured in 1968 showing the importance of the profound change in “materials efficiency” this technological domain.” Magee and Devezas (2017), A simple extension of dematerialization theory

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La loi de Moore postule le doublement du nombre de transistors intégrés dans les microprocesseurs tous les deux ans. La densification du nombre de transistors (et leur miniaturisation) rend compte de l’augmentation de la puissance de calcul des ordinateurs. La figure à gauche montre que les nombre de calculs réalisés par les ordinateurs a doublé tous les 1 an et demi entre 1975 et 2009.

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Source : "Silicon Quantum Integrated Circuits. Silicon-Germanium Heterostructure Devices: Basics and Realisations” E. Kasper and D. J. Paul Springer, Berlin, 2005

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Deuxième loi de Moore: les coûts explosent

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Les transistors actuels comptent, pour les plus avancés , à peine une douzaine d’atomes…

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RESSOURCES

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60% à 80% des éléments du tableau périodique

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Source : José Halloy (LIED)

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Extraction is often secondary…

Credits: José Halloy (LIED)

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… and costly!

Credits: José Halloy (LIED)

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Source : José Halloy (LIED)

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Fizaine, F. and Court, V. (2015) “Renewable electricity producing technologies and metal depletion: A sensitivity analysis using the EROI”, Ecological Economics, 110, pp. 106–118. doi: 10.1016/j.ecolecon.2014.12.001.

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De nouvelles vulnérabilités

• Le photovoltaïque est une énergie renouvelable qui nécessite du pétrole, du charbon et des matières premières non renouvelables…

• Les relations entre les métaux n’ont pas vraiment été factorisées : au niveau de l’extraction (facteur économique) comme de l’utilisation (les batteries dépendent du lithium et du cobalt…). Pour une exception, voir Fizaine: F. (2014) Analyses de la disponibilité économique des métaux rares dans le cadre de la transition énergétique. Université de Bourgogne, chapter 4, https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01127141/.

• Les tensions sur les matières premières constituent un enjeu géopolitique supplémentaire (guerres pour le pétrole / guerre pour les éléments du tableau périodique ?).

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Un contre-argument ?

« L’argument inductif » : dans le passé, la fin du pétrole a déjà été annoncée par les Cassandres. Pourtant, rien n’a confirmé cette vision malthusienne. Par conséquent, il n’y a là rien de nouveau sous le soleil. »

• Et pourtant : L’optimisation est contrecarrée par l’effet rebond et les limites physiques que nous atteignons désormais ;

• Et pourtant : La dématérialisation, comme effet attendu du progrès technologique et de l’optimisation, est contredite par les études qui lui opposent un contre-argument inductif à partir d’études s’étalant sur plusieurs dizaines d’années (Magee and Devezas 2017, A simple extension of dematerialization theory: Incorporation of technical progress and the rebound effect: “the major empirical finding reported here [is that] direct dematerialization due to technological progress will not occur”);

L’argument inductif s’avère au final être un contre-contre-argument…

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Quelles pistes de recherches ?

• Spintronique ?(basée sur des photons)

• Ordinateur quantique ?

• Biomimétisme/neuromorphisme (sensible machines) ?

• De nouvelles architectures (calcul adiabatique - réinscriptible) ? De nouvelles logiques ? De nouveaux langages ?

• De nouveaux matériaux (base carbonne pour les microprocesseurs) ?

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“I implore my audience: Study physics. Help invent new kinds of nanodevices with high adiabatic energy coefficients. Design, build, and empirically test high-quality ballistic oscillators, interacting with quasi-static logical states, driving adiabatic transitions between them. Systematically find and eliminate sources of dissipation in your prototypes, one by one. Extend your designs to larger and larger scales of complexity, with larger and larger logic blocks ever more tightly and precisely synchronized. Design fully-reversible architectures, languages, and algorithms.” “Approaching the Physical Limits of Computing”, Michael P. Frank

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Actuellement ?

• Conception dualiste de l’informatique (algorithmes, formalismes, etc.). L’informatique comme science est coupée de la physique (rejoint les mathématiques)

• Turing : “From the point of view of the mathematician being digital should be of greater interest than that of being electronic” (Lecture to the London Mathematical Societ on 20 February 1947).

J’ai également volé cette citation à José Halloy

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Où la recherche se dirige-t-elle? (après l’effondrement)

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Le numérique : les surcoûts d’un monde “idéal”

Crédits : Brian Cantwell Smith

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Crédits : Brian Cantwell Smith

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“It is this ability to ceaselessly cleanup after its own noise that so powerfully enables computers to seemingly sever their dependency on physical processes that underlie processing, storage, and connectivity. Yet the physical characteristics of a resource (be it computation, storage, or networking) cannot simply be transcended, and noise can only be conquered at the expense of other resources. For example, manufacturers must design electronic circuits using a voltage differential between 0 and 1 broad enough to fight off interference by galactic cosmic rays (“single event effects”), at the cost of increased power consumption (May & Woods, 1979); error-correcting codes, widely used to protect against transmission interference, result in both data expansion (and thus, reduced capacity) and increased processing load. In the latter case, designers will choose among different codes according to both the expected profile of the noise (frequency, intensity), and the resource trade-offs. Once again, then, independence from the material can only be obtained at the costs of certain trade-offs.”

Jean-François Blanchette (2011), “A material history of bits”

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Le « sandwich de la digitalité »

Support/réalisation physique

Abstraction numérique (discrète)

Contrôle du bruit (augmentation de la consommation d’énergie/codes de correction d’erreurs) Peut en retour détériorer la

fiabilité du périphérique de stockage

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Et le Web dans tout ça ?

• On peut imaginer un Web sans Internet (y compris un Web sémantique). Low tech ou « mixed tech ». Cf. l’initiative « downscaling the Web »

• Cf. aussi les systèmes mesh qui permettent de connecter des réseaux d’ordinateurs localement.

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Ex. https://www.w3.org/community/wwca/

Passer du Web We Want au Web We Can Afford. Suppose une bonne connaissance du Web. Pas forcément un Web éternel, ni décarbonné, mais un Web de transition

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• Bien sûr, il faut aussi éviter toute fascination malsaine pour l’effondrement (“collapse-porn effect”) et d’envisager les catastrophes comme des opportunités au service de l’innovation.

• Pour ce faire, les courants de la collapse informatics et du post-colonial computing (cf. par ex. Philip, Irani and Dourish (2012) ‘Postcolonial Computing: A Tactical Survey’, Science, Technology & Human Values, 37(1)) devraient rapidement converger.

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Différentes visions du futur et du Web

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Conclusion(s)

• Nous avons encore les moyens de faire du « high tech » ou, mieux, de la recherche, pour quelques temps : à quoi allons-nous employer ces moyens au cours de cet intervalle ?

• Et, corrélativement, à quoi n’allons-nous pas employer ces moyens ? Le designer Tony Fry nous enjoint à éviter le « defuturing ». Mais il faut aussi activement dé-futurer les futurs et les projets insoutenables.

Sortir du paradigme linéaire de la durabilité (en matière de croissance comme de développement). Tout ceci suppose d’investir la question de la temporalité.

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• Les futurs : multiples et asynchrones

• L’avenir synchronise les futurs divergents

• Nos révolutions sont temporaires

• Fin du progrès linéaire et cumulatif

• Nos technologies/infrastructures/moyens de recherche ne sont pas durables mais sont là : à quoi les employer avant que les effets du nouvel âge (l’Anthropocène) ne se fassent complètement sentir ?

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• Renoncer à nos visions d’un avenir tout-numérique au XXIe siècle ;

• Se préparer à vivre dans les ruines du numérique - que nous produisons ;

• Penser un avenir cyberpunk, entre « high tech », « low tech », alter-tech (permaculture ?), ruines, etc. ;

• C’est déjà le cas en vérité : “The future is already here — it's just not very evenly distributed” (William Gibson). Ce n’est pas seulement vrai du progrès mais aussi de l’effondrement.

• Se poser la question « que faire des moyens actuels ? », « quels modèles encourager/décourager ? »

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"It’s not climate change – it’s everything change"

(Margaret Atwood)

"The starting point is demand reduction. Turn it off."

(Tony Fry)

Dernière citation volée à José Halloy!