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REMFO N°13 Juin 2021 ISSN 2489-205X REMFO http://revues.imist.ma/?journal=REMFO&page=about 1 Revue D’Études en Management et Finance D’Organisation N°13 Juillet 2021 PERFORMANCE FINANCIÈRE BANCAIRE : UN ESSAI D’ANALYSE DANS LE CONTEXTE BANCAIRE MAROCAIN BANKING FINANCIAL PERFORMANCE: AN ANALYTICAL ESSAY IN THE MOROCCAN BANKING CONTEXT ALAMI YOUSSEF Enseignant chercheur Laboratoire de Recherche et d'Études en Finance, Audit et Gestion (LAREFAG ENCG Tanger) Université Abdelmalek Essaadi Email : [email protected] BOUGHABA SALWA Doctorante Laboratoire de Recherche et d'Études en Finance, Audit et Gestion (LAREFAG ENCG Tanger) Email : [email protected] EL IDRISSI ISSAM Doctorant Laboratoire de Recherche et d'Études en Finance, Audit et Gestion (LAREFAG ENCG Tanger) Email : [email protected]

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Revue D’Études en Management et Finance D’Organisation

N°13 Juillet 2021

PERFORMANCE FINANCIÈRE BANCAIRE : UN ESSAI D’ANALYSE

DANS LE CONTEXTE BANCAIRE MAROCAIN

BANKING FINANCIAL PERFORMANCE: AN ANALYTICAL ESSAY

IN THE MOROCCAN BANKING CONTEXT

ALAMI YOUSSEF

Enseignant chercheur

Laboratoire de Recherche et d'Études en Finance, Audit et Gestion

(LAREFAG – ENCG Tanger)

Université Abdelmalek Essaadi

Email : [email protected]

BOUGHABA SALWA

Doctorante

Laboratoire de Recherche et d'Études en Finance, Audit et Gestion

(LAREFAG – ENCG Tanger)

Email : [email protected]

EL IDRISSI ISSAM

Doctorant

Laboratoire de Recherche et d'Études en Finance, Audit et Gestion

(LAREFAG – ENCG Tanger)

Email : [email protected]

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Résumé

Dans la littérature financière plusieurs contributions ont étudié la performance bancaire et les

principaux indicateurs de son évaluation. En général, le but de chaque banque est de pouvoir

assurer une rentabilité pérenne dans un contexte de plus en plus caractérisé par des turbulences

économiques et financières. L’objectif du présent article est d’analyser l’évolution de la

performance financière de trois grandes banques marocaines, pour la période 2005-2018, en se

basant sur trois indicateurs fondamentaux à savoir : le ROE, le ROA et le coefficient

d’exploitation. Notre analyse fait ressortir l’existence d’un lien empirique de cause à effets entre

la performance financière des banques et la conjoncture économique nationale et internationale.

Mots clés : Performance, Banques, Mesures, Rentabilité, Covid-19.

Abstract

In the financial literature, the study of banking performance and the determination of the main

indicators for the evaluation of this concept, have been the subject of several works. In general,

the goal of each bank is to be able to ensure sustainable profitability in order to ensure its

survival, in a world full of economic and financial turmoil. The study’s aim is to analyze the

evolution of the financial performance of three Moroccan banks, for the period 2005-2018,

based on three main ratios: the ROE, the ROA, and the cost/income ratio. Our analysis reveals

an empirical causal link between banks' financial performance and domestic and global

economic conditions.

Key Words: Performance, Banks, Measures, Profitability, COVID-19.

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Introduction

Le concept « performance » en général et « performance bancaire » en particulier, ont fait

l’objet de différentes études et ont retenu l’intérêt de plusieurs chercheurs qui ont tenté de

répondre à de multiples questions relatives à la manière d’appréhender la performance bancaire

et surtout les indicateurs les plus fiables à utiliser pour la mesure de cette performance. Dans

une perspective d’analyse de la rentabilité bancaire dans le contexte marocain nous allons

présenter dans un premier temps, les caractéristiques et les spécificités de système bancaire

marocain. Ce dernier a fait preuve d’une résilience malgré son exposition aux différents facteurs

de risque, notamment durant la crise financière de 2008 et la crise sanitaire du Covid-19, ce qui

confirme sa solidité et sa capacité d’adaptation dans un environnement national et international

difficiles.

Le système bancaire marocain est également très régulé. À titre d’exemple, de nouvelles normes

prudentielles qui s’inscrivent dans le cadre du dispositif Bâle II, ont été mises en place en 2008,

renforçant ainsi l’environnement réglementaire qui régit cette activité. Dans ce sens, les

banques sont tenues de se doter d’un processus d’évaluation de l’adéquation des fonds propres

internes, ce qui nécessite une définition claire de la stratégie de la banque à l’égard des risques.

D’ailleurs, la banque centrale veille de plus prêt à assurer la convergence du cadre réglementaire

bancaire marocain avec les standards internationaux.

L’objectif principal de cet article est d’analyser la performance financière des banques

marocaines à travers l’étude des principaux ratios les plus utilisés dans la littérature en la

matière. Pour ce faire, nous allons, dans un premier temps, présenter un cadrage conceptuel de

la notion de performance en sciences de gestion, tout en se focalisant sur le concept de la

performance financière et ses indicateurs de mesure les plus utilisés dans le milieu bancaire.

Dans un second plan, nous allons présenter et discuter les résultats de notre étude effectuée sur

les données des trois premières banques marocaines durant la période 2005-2018.

1. PRÉSENTATION DES INDICATEURS DE LA PERFORMANCE FINANCIÈRE

DANS LE SECTEUR BANCAIRE

Avant de passer en revue les principaux indicateurs de mesure de la performance financière

dans le contexte bancaire, nous allons présenter les contours de la notion de performance en

sciences de gestion.

1.1. Conceptualisation de la notion performance

Au niveau de la littérature, la notion de la performance n’est pas expliquée de la même manière

selon le positionnement des acteurs et leurs horizons temporels de référence. D’après Naulleau

et Rouach (2013), la performance peut être définie comme étant le rapport entre un résultat et

un périmètre de ressources affectées à l’obtention de ce résultat. Elle peut se mesurer aussi bien

à travers le résultat comptable net apporté à un périmètre de fonds propres correspondants, ou

en se basant sur la productivité d’un service de traitement des moyens de paiement.

En sciences de gestion, la performance représente une notion peu claire ; En effet, plusieurs

travaux ont traité ce concept, sans pour autant pouvoir proposer une définition complète et

universelle. Cependant, et malgré la diversité et la divergence des aspects traités, ces définitions

s’accordent sur quelques points communs. D’abord, un premier aspect présente la performance

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comme étant la réalisation des objectifs organisationnels (Doriath et Goujet, 2011) et explique

le degré de leur atteinte en termes de part de marché, taux de croissance, rentabilité et

innovations par rapport aux principaux concurrents. Ensuite, un deuxième aspect décrit la

performance comme l’amélioration du couple valeur/coût de l’entreprise. Elle dépend aussi des

mesures utilisées pour son évaluation et représente un ensemble de faits et implique la recherche

d’instruments ou d’indicateurs de mesure qui rendent ces faits mesurables. Enfin, la

performance a un aspect global d’où le concept de performance méta-organisationnelle (Hedfi-

Khayati et Zaouaoui, 2013).

Généralement, la notion de performance fait référence à un résultat, qui est mesuré sur une

échelle de proportion, d’intervalle, ordinal ou nominal, ou à l’évaluation subjective ou objective

d’un résultat qui est censé être la conséquence ou l’effet de quelque chose. Toutefois, comme

ce résultat est en principe un évènement passé, il peut également s’agir d’un évènement futur

attendu, de ce fait, la performance peut faire référence à un résultat réalisé ou attendu (Blanchot,

2006).

Dans le monde de l’entreprise, la performance peut être définie comme : « le résultat d’une

action, le succès de l’action, ou bien à partir des modes d’obtention du résultat ». De façon

générale, une entreprise est performante si elle génère de la valeur (Melchior, 2013). Pendant

longtemps, la performance a été assimilée à la minimisation ou la compression des coûts

toutefois, actuellement cette conception est insuffisante pour appréhender la performance de

l’organisation (Giraud et al., 2005).

Selon Bourguignon (1995, 1997), la notion de la performance peut être présentée selon trois

aspects :

• Performance « résultat » de l’action qui doit se rapprocher d’un objectif ou un référentiel.

Dans ce cas, la performance représente le niveau de réalisation des objectifs. Elle est le

résultat d’actions coordonnées et cohérentes entre elles qui ont mobilisé des moyens ;

• Performance « action » qui permet de distinguer la compétence de la performance réelle.

Dans ce cadre, la performance relève du processus et non du résultat ;

• Performance « succès » en prenant en considération le caractère plus ou moins ambitieux

de l’objectif fixé et des conditions d’appréciation de ce succès à travers un référentiel de

jugement d’évaluation.

Le tableau suivant présente une synthèse des définitions de l’une des notions les plus

polysémiques en sciences de gestion.

Tableau 1: Définitions de concept « performance »

Auteurs Définitions

Baird

1986

La performance est un processus et non un résultat qui apparaît à un moment dans le temps.

Corderont

(1989)

• Efficacité c’est de mesurer les résultats pour déterminer s'ils aident à atteindre les objectifs.

• Efficience c’est de mesurer les ressources pour déterminer si des quantités minimales sont

utilisées dans la production de ces extrants.

Lebas (1995)

La performance consiste à déployer et à bien gérer les composants du modèle causal qui conduisent

à la réalisation en temps opportun des objectifs énoncés dans les contraintes spécifiques à

l'entreprise et à la situation. Donc la performance n’est pas un concept qui se définit de façon

absolue. Elle appelle un jugement et une interprétation.

Neely et al.,

(1995)

La performance est l’efficience et l’efficacité d'une action délibérée

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Brasseul (1998) La performance se reflète à travers la capacité de l’entreprise à produire et à maîtriser ses coûts

Larcker et al.,

(1998)

La performance est un construit multidimensionnel qui ne peut pas être évalué sur la seule base

d’indicateurs financiers

Rolstadas

(1998)

La performance est une corrélation complexe entre sept critères de performance : efficacité,

efficience, qualité, productivité, qualité de vie au travail, innovation et rentabilité / capacité

budgétaire

Dwight (1999) La performance est le niveau auquel un objectif est atteint.

Hoffmann

(1999)

Le terme « performance » décrit une contribution évaluée à la réalisation des objectifs

organisationnels.

Hauber (2002) Le terme « performance » décrit la contribution de systèmes spécifiques (unités organisationnelles

de différentes tailles, employés et processus) pour obtenir et valider les objectifs d'une entreprise.

Wettstein

(2002)

La performance peut être comprise comme le degré de satisfaction des parties prenantes.

Krause (2005)

La performance se réfère au degré de réalisation des objectifs ou à la réalisation potentiellement

possible concernant les caractéristiques importantes d'une organisation pour les parties prenantes

concernées.

La performance est donc principalement spécifiée à travers un ensemble de critères

multidimensionnels.

Brulhart et al.,

(2010)

La performance se reflète à travers les atteintes des objectifs et à la recherche de l’efficacité dans

la réalisation des activités.

Ndao (2011) La performance se reflète à travers l’atteinte d’un résultat minimum ou acceptable ou à travers la

réduction de ce qui n’est pas désirable.

Source : élaboré par nos soins sur la base des analyses de Samsonowa (2012 ; p18) et Oubya (2016 ; p :17).

À la suite de cette réflexion, Bourguignon (2000) propose de définir la performance comme

étant : « la réalisation des objectifs organisationnels, quelles que soient la nature et la variété de

ces objectifs. Cette réalisation peut se comprendre au sens strict (résultat, aboutissement) ou au

sens large du processus qui mène au résultat (actions). La performance est multidimensionnelle,

à l’image des buts organisationnels, elle est subjective et dépend des référents choisis (buts et

cibles) ».

1.2. Revue de littérature sur la performance financière

La notion de la performance a longtemps été réduite à sa dimension financière qui consistait à

réaliser la rentabilité exigée par les actionnaires en rapport avec le chiffre d’affaires et la part

de marché (Dohou et Berland, 2007). La pérennité de l’entreprise dépendait exclusivement de

l’aspect financier. Les premières mesures de la performance globale d’une organisation ont été

construites à base d’éléments financiers. Dans la plupart des secteurs économiques, la

performance financière des organisations est un indicateur de leur bien-être et de leur raison

d’être, de la qualité de leur gestion, et de manière sous-jacente, de celle de la gouvernance. Elle

représente aussi un moyen de mesure de la profitabilité et de la bonne santé de chaque

organisation, et donc de ses chances de survie à moyen et long terme. C’est le cas

principalement du secteur bancaire dont la performance financière est le meilleur témoin de sa

santé et sa solidité.

Dans ce sens, nous avons choisi de travailler sur la performance financière des banques, en se

basant sur la littérature pour sélectionner les indicateurs financiers de la performance

convenables à la présente étude. Ainsi, nous nous sommes concentrés principalement sur la

performance des banques mesurée par les indicateurs de la rentabilité.

Selon Aburime (2009), l'importance de la rentabilité des banques peut être appréciée aux

niveaux micro et macro de l'économie. Au niveau micro, le profit constitue la source de

financement la moins chère pour une banque. Il ne s'agit pas seulement d'un résultat, mais aussi

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d'une nécessité pour les banques durant une période de concurrence croissante sur les marchés

financiers, car il est un signe et un signal de performance pour les actionnaires. Par conséquent,

l'objectif fondamental de toute direction de banque est de maximiser le profit, comme une

condition essentielle à la conduite des affaires.

En somme l’activité bancaire repose sur la recherche de la performance financière à travers la

prise de risque. Selon Nouy (1993), la rentabilité des établissements de crédit représente leurs

aptitudes à produire de leurs exploitations un excédent suffisant et indispensable pour la

continuité de leurs activités après la déduction des coûts nécessaires à cette exploitation. Selon

Arora (2012), la performance financière des banques est mesurée par des indicateurs financiers

car les banques sont des organisations à but lucratif. Généralement les banquiers utilisent les

mesures comme les indicateurs de profitabilité, d’efficience et de liquidité comme des mesures

de performance.

D’après notre revue de littérature sur la performance financière des banques, nous avons pu

constater une forte présence des trois indicateurs financiers le Q de Tobin avec une présence de

15.56%, le Return on Equity avec une fraction élevée égale à 23.56% et une dominance du

Return on Assets avec 45.78% de fréquence d’utilisation.

Tableau 2: Utilisation des indicateurs financiers par les chercheurs dans le contexte bancaire

Auteurs Années

Q de

Tobin ROA ROE TSR BPA Autres Total

Adams 2012 100% 100%

Sbai et Meghouar 2017 50% 50% 100%

Belkebir et al., 2018 100% 100%

Hajer et Anis 2016 50% 50% 100%

Cyprian Onyekwere

et al., 2019 50% 50% 100%

Basuony et al., 2014 33,33% 33,33% 33,33% 100%

Abobakr 2017 50% 50% 100%

Zakaria et al., 2019 50% 50% 100%

Choi et Hassan 2005 20% 20% 20% 40% 100%

Önal 2019 33,33% 33,33% 33,33% 100%

Gulamhussen et

Guerreiro 2009 100% 100%

AlQudah et al., 2019 100% 100%

Alhassan et al., 2015 100% 100%

Zandi et al., 2020 100% 100%

Ben Bouheni 2016 50% 50% 100%

Total en pourcentage 15.56% 45.78% 23.56% 1.33% 0% 13.78% 100%

Source : élaboré par nos soins.

La rentabilité des banques, c’est-à-dire leur capacité à dégager des profits, représente l’objectif

visé par chaque banque. Cependant elle n’intéresse pas que les établissements et leurs

actionnaires ; elle revêt aussi un enjeu important pour la stabilité financière à moyen-long terme

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(Sienkiewicz, 2017). Le rôle intrinsèque des fonds propres est d’amortir les chocs financiers en

permettant l’absorption de pertes comptables de manière ponctuelle et l’enjeu actuel, dans un

contexte de durcissement réglementaire, est de dégager un niveau de rentabilité qui permet aux

banques d’accumuler les fonds propres nécessaires au maintien de leur activité.

Selon D. Sidibe (2018) le ROE traduit la santé financière de la banque et correspond à la part

des bénéfices reçus par les actionnaires. Une amélioration du ratio de la rentabilité des capitaux

propres peut provenir d’une faible capitalisation structurelle de la banque se traduisant par un

faible niveau des fonds propres. Donc une augmentation des capitaux peut affaiblir et diminuer

le ROE, c’est pour cela les dirigeants sont en mesure de garantir un rendement important pour

les actionnaires afin d’éviter une augmentation des capitaux propres. Malgré son utilité notable

au niveau du calcul de la performance financière des capitaux propres apportés à la banque, la

Banque Centrale Européenne adresse des critiques à l’utilisation de cet indicateur dans son

rapport « Beyond ROE – How To Measure Bank Performance » en 2010.

Ce rapport montre comment l’utilisation de ROE peut conduire à des résultats biaisés durant le

temps de la crise. Cette conclusion a été le résultat d’une étude faite sur 12 banques

internationales durant la période 2002 - 2010. En effet, cette étude montre que pendant la crise

des subprimes la médiane et la moyenne des ROE de l’échantillon sont éloignées de 98 l’une

de l’autre, sachant qu’avant la crise leurs évolutions étaient les mêmes, des évolutions typiques

et similaires, cette anomalie observée durant la crise indique la non pertinence de l’utilisation

de ce ratio sous ces circonstances précitées.

À ce titre, la rentabilité bancaire peut être appréciée par plusieurs approches dont, les plus

utilisées, sont le coefficient de rentabilité financière (ROE) et le coefficient de rentabilité des

actifs (ROA). Ces indicateurs permettent une première appréciation de la performance des

banques, en distinguant entre la performance économique et la performance financière. Même

si ces indicateurs montrent une insuffisance de mesure et offrent une vision simple et restrictive

(Saulquin et Maupetit, 2002), vu qu’ils se basent sur les bénéfices, s’attachent à la gestion des

résultats et ne prennent pas en compte l’évolution des cash-flows, ainsi que le coût du

financement.

L’approche de la rentabilité en milieu bancaire et financier est caractérisée par sa complexité et

son aspect multiforme (Rouach et Naulleau, 2016). La mesure de la rentabilité des activités

bancaires est particulièrement complexe suite à deux raisons. D’abord la multiplicité des axes

d’analyse de la rentabilité (entités, produits, activités, clients ou réseaux de distribution), ensuite

l’importance des charges de structure et de support à répartir sur les différents objets de coût.

Les trois principaux axes d’analyse de la rentabilité bancaire sont : les centres de profit, les

produits ou services, les clients ou les segments de la clientèle. Les systèmes de mesure de la

rentabilité sont très lourds. Il convient de contenir la complexité car les degrés de finesse

autorisés par les systèmes d’informations ne sont pas systématiquement pertinents, de

concevoir un système efficace de mesure des rentabilités.

Avec le calcul des ratios, la notion de rentabilité prend toute sa signification puisqu’il va s’agir

de comparer les résultats à des moyens. On peut faire la distinction entre les ratios de rentabilité

d’exploitation et les ratios de rentabilité globale.

Le coefficient d’exploitation est un indicateur de rentabilité d’exploitation qui indique la part

de Produit Net Bancaire absorbée par les frais généraux (coûts fixes), qui reflète la marge

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dégagée par la banque sur l’ensemble de ses activités avec ses trois composantes (les intérêts,

les commissions et les plus ou moins-values), consommée par les frais généraux. Il est

déterminé à travers l’indicateur suivant :

Coefficient d’exploitation = Frais généraux / Produit Net Bancaire

C’est un ratio très significatif de la rigueur de la gestion de la banque et il est souvent calculé,

notamment dans une optique comparative. Un coefficient d’exploitation supérieur à 70% est

jugé élevé et inférieur à 65% convenable. Un ratio élevé signifie soit des frais généraux

excessifs compte tenu du volume des opérations réalisées, soit comme étant la conséquence

d’une contraction du produit net bancaire, à moyens inchangés. Les banques ont comme objectif

de réduire ce coefficient au maximum en adoptant une logique d’économie qui réduit toutes les

dépenses et notamment les dépenses liées au capital humains.

En ce qui concerne les mesures de la rentabilité globale on a deux ratios, qui d’ailleurs

entretiennent des interrelations, sont systématiquement calculés par les analystes et font l’objet

des comparaisons à savoir le ratio de (ROA) et celui de la rentabilité financière (ROE).

Premièrement le ROA est un ratio qui a pour objectif de mesurer l’efficacité avec laquelle les

actifs sont employés. Il donne une mesure de la performance de l’ensemble de la banque car il

prend en considération la totalité des moyens mis en œuvre et représente la capacité de la

banque à créer du profit à partir de sa base d’actifs. Plus ce ratio est élevé, plus la banque est

performante.

ROA= Résultat Net / Total Bilan

C’est le ratio le plus utilisé pour évaluer les performances d’un établissement de crédit. Mais

son interprétation doit être faite avec prudence car il est très influencé par la politique de

provisions de l’établissement de crédit puisque le Résultat Net incorpore le coût du risque et

que les actifs figurent nets de provisions dans le bilan bancaire.

Ensuite, le ROE est le plus utilisé par les analystes financiers et a inspiré les premiers ratios de

mesure de performance mis en place par les grandes entreprises. Il est défini comme la

possibilité d’une entreprise à rémunérer, à partir de son exploitation et d’une manière adéquate

et permanente les fonds propres, tout en assurant sa stabilité financière.

Il permet de calculer le rendement des Fonds Propres, de comparer les performances de

l’entreprise à la rentabilité attendue par les actionnaires, et d’apprécier son attractivité

financière. Ce ratio, appelé également coefficient de rentabilité et qui permet de mesurer la

rentabilité du capital investi on le calcule moyennant le ratio suivant :

ROE= Résultat Net/ Fonds Propres

Comme le ROA, cet indicateur est parmi les indicateurs comptables les plus appropriés pour

mesurer la performance financière des banques. L’inconvénient du ROE, c’est qu’il peut être

gonflé en augmentant le niveau du levier financier, car le ROE peut être une sortie de la relation

(ROA x multiplicateur de levier). Généralement il s’agit de la relation entre le ROE et le ROA

(Corinna et al., 2013 cités par Habis Almustafa, 2017).

2. LA STRUCTURE BILANCIELLE DES BANQUES ET LES CRISES

FINANCIERES

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Contrairement aux entreprises, le bilan d’une banque se caractérise par un recours massif à

l’endettement, à cause de la nature des activités bancaires, comme la création monétaire. Selon

Goddart et al., (2007) le canal du crédit joue un rôle essentiel dans la transmission de la politique

monétaire dans un monde où cette dernière est devenue l’instrument de stabilisation le plus

important. La santé financière de plusieurs pays dans le monde a été touchée par la crise des

subprimes, ce qui a amplifié les disparités économiques entre les pays, ceci peut être expliqué

par l’existence d’une forte asymétrie d’information et l’inefficacité de la réglementation

prudentielle à l’époque.

Plus encore, selon Badarau et Turcu (2014) la gestion active des bilans bancaires dans un

contexte de crise, semble constituer un facteur de propagation des difficultés, car une situation

financière des banques jugée fragile engendre une hausse des taux de financement des

entreprises, à cause d’un coût de financement externe plus élevé pour les banques.

Par conséquent, ceci conduit à une baisse du niveau d’investissement sur le plan macro-

économique, car un affaiblissement de la santé financière des banques déclenche une crise

économique de financement, puisque les banques jouent un rôle déterminant dans le

financement des économies grâce aux dépôts des épargnants. Cependant, la crise du Covid-19

n'a pas pesé lourdement sur le secteur bancaire marocain, grâce aux provisions confortables qui

permettent aux banques de faire face aux conséquences de cette pandémie, en contribuant

significativement à l’alimentation du Fonds de gestion de la pandémie « Covid-19 », par une

enveloppe globale de 3.32 MMDH (Alami et El Idrissi, 2021).

Selon Sidibe (2018) la comptabilité bancaire se diffère de la comptabilité des entreprises en

raison de la sensibilité de l’activité bancaire. La structuration bilancielle des banques dévoile

une présence intensive de l’endettement au niveau de leurs capitaux propres. Dans le même

sens Boussaada (2012) confirme que les banques se distinguent des autres firmes par un niveau

important d’endettement. La problématique qui se pose entre les rouages du passif et d’actif du

bilan, c’est que le passif est constitué principalement des dépôts des clients et qui doivent être

disponibles suite à la demande des dépositaires tandis que les actifs sont en général sous forme

de crédits à moyen et long terme.

La raison derrière le retrait des dépôts par les créanciers de la banque peut voir le jour à cause

d’une information sur la qualité des actifs de la banque ou par une perte de confiance dans le

système bancaire d’un pays. La détention des actifs non liquides avec l’émission des passifs

liquides constitue le défi majeur de la santé financière des banques, car ceci peut conduire par

la suite à une crise de liquidité.

Selon Alami et Semmaa (2011) évoquent que pour renforcer la stabilité du secteur bancaire,

Bâle III a introduit en 2010 des mesures prudentielles telles que :

• L’augmentation du niveau et de la qualité des fonds propres ;

• Un renforcement des exigences pour la couverture de certains risques ;

• Une surveillance de la liquidité harmonisée avec l’instauration de deux ratios de

liquidité, l’un à court terme, l’autre à moyen terme…

L’assurance-dépôts constitue un moyen efficace pour prévenir les pertes bancaires et empêcher

les banques individuelles d’affecter la grande économie grâce à la prévention des paniques

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bancaires, car l’absence de cette assurance peut transmettre aux déposants un signal

d’apparition du risque d’aléa moral ex-post (Sidibe, 2018).

3. MESURE DE LA RENTABILITE BANCAIRE EN CONTEXTE MAROCAIN :

PRESENTATION ET DISCUSSION

Pour la présentation et l’analyse de la performance financière des trois groupes bancaires

marocains ; nous allons d’abord, énoncer la méthodologie adoptée pour ensuite, présenter et

discuter les résultats empiriques de notre étude.

3.1. Aspects méthodologiques

La présente étude a portée sur les trois principales banques marocaines et les données utilisées

sont relatives à la période 2005 à 2018, soit au total 42 observations pour chacune des trois

variables retenues dans la présente analyse. Les banques en question sont : Attijariwafa Bank,

la Banque Centrale Populaire et la Banque Marocaine du Commerce Extérieur (actuelle Bank

of Africa). L’importance de ces banques dans le paysage bancaire marocain réside dans leurs

parts respectives dans le volume total des actifs, des dépôts et des crédits qui avoisine les 65%

de l’ensemble du secteur bancaire national. Il est important de noter que notre panel de données

est constitué à partir des documents des rapports d’activité publiés par les banques objets de

notre analyse et des données de la banque centrale.

3.2. Aperçu sur le paysage bancaire marocain

L’objectif de cette section est de justifier les perspectives de notre analyse en décrivant le poids

important des trois groupes bancaires constituant l’échantillon objet de l’étude.

Le secteur bancaire marocain comprend, à fin 2018, un nombre de 86 établissements, répartis

entre 24 banques (avec cinq banques participatives), 28 sociétés de financement, 6 Banques

offshore, 13 associations de micro-crédit et 10 établissements de paiements spécialisés dans

l’intermédiation en matière de transfert de fonds, en plus de la Caisse de Dépôt et de Gestion et

de la Caisse Centrale de Garantie.

Tableau 3: Évolution du nombre d'établissements du secteur bancaire

2014 2015 2016 2017 2018

Banques 4 19 19 19 19 19

• Banques à capital majoritairement étranger 7 7 7 7 7

• Banques à capital majoritairement public 5 5 5 5 5

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Banques participatives - - - 5 5

Sociétés de financement 34 34 33 32 28

Banques offshore 6 6 6 6 6

Établissement de paiement 10 10 10 9 13

Autres établissements 15 15 15 15 15

Total 84 84 83 86 86

Source : Rapport de la supervision bancaire de 2018 (BKAM).

Il est à noter que les 19 banques comptent seulement huit banques dites universelles, à savoir :

Attijariwafa Bank, BCP, BMCE, BMCI, CAM, CDM, CIH, et SGMB, dont 6 cotées à la Bourse

des Valeurs de Casablanca. Notons que les banques étrangères sont largement présentes dans

le tour de table des banques privées, en tête, PNB Paribas, Société Générale France, Crédit

Agricole SA détiennent au 31 décembre 2019, respectivement la majorité du capital de la

BMCI, de la SGMB et de CDM avec des parts respectives de 66.73%, 57.57% et de 78.7%.

Dans la zone offshore de Tanger, les banques disposent en début de 2019 de 5 filiales et une

succursale, sans changement par rapport aux années précédentes.

À l’étranger les banques marocaines détiennent 45 filiales, 15 succursales présentes dans 35

pays dont 27 en Afriques, 7 en Europe et une en Asie. Au total les banques marocaines disposent

de plus de 1427 agences bancaires.

Le réseau bancaire a connu un développement notable ces dernières années, le nombre total des

agences a dépassé le seuil de 6503 agences au début de 2019 avec plus de 7289 guichets

automatiques bancaires.

À fin 2018, le nombre des comptes bancaires a ralenti avec une chute de 1,7% par rapport à

2017, en ce qui concerne la concentration du total actifs pour les 6 banques cotées à la BVC.

Trois banques à savoir la BCP, AWB et la BMCE occupent les premières places en termes de

volume d’actif total consolidé sur la période entre 2013 et 2019.

D’après la figure ci-dessous, nous pouvons dire qu’il y a trois banques dominantes en matière

de taille et où le total actif consolidé selon les normes IAS/IFRS pendant la période allant de

2013 à 2019, avec plus de 87% du total des actifs consolidés appartiennent aux trois banques

leaders du secteur bancaire, sachant que AWB reste la première en matière du total de l’actif

consolidé durant la période entre 2013 et 2019.

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Figure 1: Évolution de l'actif total consolidé des banques cotées au Maroc en milliers de

dirhams

Source : élaborée par nos soins.

Les géants du secteur bancaire marocain ont pu réaliser une performance importante durant les

années entre 2017 et 2019, ont octroyant près de 62,2% de l’ensemble des crédits en 2019 après

avoir réalisé une part significative en 2017 de l’ordre de 64,1%. En effet, la figure ci-après

présente une synthèse des récentes réalisations du trio BCP, AWB et BMCE.

Figure 2: Total-actif, Dépôts et Crédits octroyés des trois grandes banques marocaines

Source : élaborée par nos soins à la base du rapport annuel de supervision bancaire, BKAM 2019

3.3. Résultats de l’analyse descriptive

Avant la présentation des principales évolutions en termes des indicateurs comptables de

rentabilités, il est nécessaire de présenter les statistiques descriptives des trois mesures de

performance financière.

236696756,0 247243077,0279421620,0

305922878,0 313343867,0295547393,0 295547393,0

385579553,0 401843640,0 411078692,0428766067,0

475660126,0509925715,0

532601713,0

290298955,0309629736,0

328828716,0351711435,0

383545335,0 396589730,0431428255,0

2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019

CDM BMCE BMCI Attijariwafa Bank CIH BCP

0.6

5%

0.6

4%

0.6

3%

0.6

6%

65

%

64

%

0.6

4%

0.6

4%

0.6

2%

2 0 1 7 2 0 1 8 2 0 1 9

Total actif dépôts crédits octroyés

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Tableau 4: Statistiques descriptives des mesures de performance

Variables Obs Moyenne Écart Type Min Max

ROE 42 15.4916 % 0.043544 0.731 % 22.7 %

ROA 42 1.15595 % 0.0028441 0.049 % 0.169 %

Coefficient

d’exploitation 42 47.81119 % 0.0613905 38.7 % 59.4 %

Source : Calculs des auteurs (Stata 16).

Le calcul des indicateurs de performance pour les trois banques, nous a permis d’élaborer les

graphiques suivants que nous allons exploiter pour étudier l’évolution de leur performance

financière en se basant sur les principaux ratios à savoir : le ROE, le ROA et le coefficient

d’exploitation bancaire.

D’après le graphique ci-après, on constate que l’évolution du ROE des trois banques étudiées

suit les événements de la conjoncture économique internationale. Ainsi, on remarque une

diminution de ce ratio à partir de l’année 2007, suite à l’amplification de la crise financière née

de l’effondrement du marché américain des prêts hypothécaires à risque, et dont les effets se

sont propagés à l’échelle internationale, d’une façon rapide et conséquente.

Figure 3: Évolution du ROE des banques étudiées entre 2005 et 2018

Le retour graduel de la confiance dans les marchés financiers après ces turbulences n’a

commencé qu’à partir de 2010 grâce aux mesures exceptionnelles prises par les gouvernements

et les banques centrales, et qui ont facilité l’amélioration et la reprise de l’activité économique

mondiale. Dans ce cadre, la Banque Centrale du Maroc a également mis en place une série de

mesures afin d’améliorer le niveau de surveillance prudentielle exercée sur le secteur bancaire.

Ces résultats sont confirmés par les indicateurs d’activité et de rentabilité des banques

marocaines, calculés sur base social par Bank Al Maghrib. Dans ce sens, le ROE a passé de

20,6% en 2007 à seulement 15,5% en 2008, puis à 14,5% en 2009. Malgré ceci, Attijariwafa

Bank a confirmé sa résilience comme en atteste ses propres indicateurs.

0.15%

0.20%

0.08%

0%

5%

10%

15%

20%

25%

2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 2020

AWB BMCE BCP

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À partir de 2014, on remarque que le ROE des trois banques a commencé à baisser. Cette

diminution du rythme de l’activité bancaire traduit le ralentissement de la croissance

économique du pays dont le PIB est passé à 2,4% contre 4,7% en 2013. Toutefois, une légère

progression a été remarquée pendant les exercices suivants, grâce à la progression modérée du

résultat net du groupe et des fonds propres des banques.

Les mêmes constats sont aussi valables pour le deuxième ratio de rentabilité (ROA). En général,

on constate que ces trois banques affichent une rentabilité satisfaisante, et ceci grâce à leur

modèle d’activité diversifié au niveau sectoriel et géographique.

Figure 4: Évolution du ROA des banques étudiées entre 2005 et 2018

À ce niveau, pour le contexte marocain il y a lieu de souligner que Bank Al-Maghrib joue un

rôle important dans la préservation de la résilience du secteur bancaire et ce, en se montrant

attentif aux effets de la conjoncture économique sur les bilans des banques et en maintenant

une surveillance rapprochée des risques de crédit et de concentration, notamment après l’impact

de la crise financière mondiale de 2008 sur l’activité bancaire.

En ce qui concerne l’analyse du coefficient d’exploitation de ces trois banques, on constate que

ce ratio, qui permet de mesurer la part des gains réalisés par une banque au regard de ses coûts

fixes, a eu généralement tendance à baisser de quelques points ces dernières années. Ces

résultats sont principalement dus à l’évolution du Produit Net Bancaire et à la maîtrise des

charges d’exploitation notamment le coût de la masse salariale.

0.01%

0.01%0.01%

0.00%

0.00%

0.00%

0.01%

0.01%

0.01%

0.01%

0.01%

0.02%

0.02%

2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 2020

AWB BMCE BCP

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Figure 5: Évolution du Coefficient d’exploitation des banques étudiées entre 2005 et 2018

Les ratios financiers, que nous avons pris en compte, sont généralement significatifs, selon la

norme en vigueur au niveau international : le ROA est dans la majorité des cas supérieur à 1, le

ROE est supérieur à 15% saut pour le cas de la BCP où il a connu une chute à partir de 2009.

Tandis que pour le coefficient d’exploitation ou encore le ratio de rentabilité d’exploitation, il

est généralement inférieur à 65%, ce qui est conforme à la norme internationale. Il en ressort

que la solidité financière de ces trois groupes bancaires marocains est assez acceptable et

répond, en grande partie, aux exigences prévalues au niveau international.

Conclusion

L’objectif de ce travail est de présenter les indicateurs de la performance financière des banques

en se basant sur la littérature, ainsi que l’analyse cette performance auprès des trois premières

grandes banques marocaines en l’occurrence : Attijariwafa Bank, Bank of Africa et la Banque

Centrale Populaire.

L’analyse a été menée sur les données couvrant la période de 2005 à 2018, et en prenant en

considération trois indicateurs : le ROE, le ROA et le coefficient d’exploitation. Ces ratios ont

été choisis à la lumière de la revue de littérature. Notre étude a démontré que la performance

financière des banques est liée à la conjonction entre les choix stratégiques de diversifications

et l’évolution de la conjoncture économique nationale et internationale.

Cependant, et à l’instar de toutes les études, ce travail a plusieurs limites. Plusieurs points non

explorés, ou non pris en considération, peuvent représenter des pistes de recherches

intéressantes pour les travaux ultérieurs, dont on peut citer :

• La prise en compte de toutes les banques marocaines dans notre étude afin d’étendre le

champ de notre étude, vu que nous nous sommes contentés d’analyser les résultats des trois

grands groupes bancaires du pays ;

• L’intégration des déterminants de la performance financière dans notre étude empirique afin

de pouvoir réaliser une analyse plus complète tels que la taille de la banque, la liquidité ou

la capitalisation ;

0.39%

0.54%

0.46%

30%

35%

40%

45%

50%

55%

60%

65%

2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 2020

AWB BMCE BCP

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• La comparaison avec la performance financière des banques d’autres pays dans le but

d’avoir une idée sur les spécificités de chaque contexte.

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