parcours musée de Grenoble 2011 · agent liant tel le jaune d’oeuf. 4. ... (peinture des XVe et...

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1 - Parcours d’œuvres au musée de Grenoble Outil d’accompagnement pour l’enseignement de l’histoire des arts Ce document propose un choix d’œuvres issues de la collection du musée de Grenoble et considérées dans un cadre chronologique. Il présente, pour chaque période historique donnée, une ou plusieurs œuvres et en détaille certains éléments constitutifs, en les situant dans le temps et en utilisant quelques termes d’un vocabulaire spécifique. Chaque œuvre est associée à une œuvre musicale. Son but est d'aider à la préparation de séances de découverte des œuvres, dans la mesure du possible en privilégiant la rencontre directe au musée, ou en classe. Les images des œuvres peuvent être projetées en classe et photocopiées pour compléter la frise de la classe et / ou le cahier culturel de l’élève. Document réalisé avec le service des publics du musée de Grenoble Dany Philippe-Devaux (musée de Grenoble) Eve Feugier et Bernard Vendra (conseillers pédagogiques départementaux en arts visuels)

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Parcours d’œuvres au musée de Grenoble Outil d’accompagnement pour l’enseignement de

l’histoire des arts

Ce document propose un choix d’œuvres issues de la collection du musée de Grenoble et considérées dans un cadre chronologique. Il présente, pour chaque période historique donnée, une ou plusieurs œuvres et en détaille certains éléments constitutifs, en les situant dans le temps et en utilisant quelques termes d’un vocabulaire spécifique. Chaque œuvre est associée à une œuvre musicale. Son but est d'aider à la préparation de séances de découverte des œuvres, dans la mesure du possible en privilégiant la rencontre directe au musée, ou en classe. Les images des œuvres peuvent être projetées en classe et photocopiées pour compléter la frise de la classe et / ou le cahier culturel de l’élève.

Document réalisé avec le service des publics du musée de Grenoble Dany Philippe-Devaux (musée de Grenoble) Eve Feugier et Bernard Vendra (conseillers pédagogiques départementaux en arts visuels)

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A. Période historique : Le Moyen Âge (476 – 1492)

Domaine artistique : peinture Type : tempera sur bois Titre : Sainte Lucie Auteur : Jacopo Torriti Date : 1295 Dimensions : 170 x 64cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Sainte Lucie est le plus ancien tableau des collections italiennes du musée. Mosaïste et peintre, Jacopo Torriti est un des premiers artistes du XIIIe siècle qui, par l'originalité de sa conception, tend à dégager l'art italien de l'influence byzantine. Ce panneau est l'élément central d'un triptyque provenant de l'Église Santa Lucia in Selci à Rome. C'est sans aucun doute un ex-voto commandé par Angela Cerroni qui est représentée dans l'angle inférieur gauche du panneau.

Sainte Lucie était invoquée dans les cas de maladie des yeux : vierge et martyre, morte à Syracuse, elle est habituellement représentée tenant à la main un plateau portant ses yeux à la place de la lampe. Selon un épisode de la légende qui lui est attribuée, elle a adopté la religion chrétienne et se serait elle-même arrachée les yeux en signe de refus à son prétendant. Elle aurait alors miraculeusement recouvré la vue. Son nom évoque la lumière (Lucia, Luce, lux…).

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

La sainte, vêtue d'un costume impérial byzantin, tient une lampe allumée à la main. Quoique le traitement frontal de la sainte soit encore archaïque, les ondoiements dans les plis du manteau et le traitement des anges annoncent les développements plastiques qui seront amorcés au début du XIVe siècle. Jacopo Torriti peut être considéré comme l'un des artistes qui ont préfiguré la vision de Giotto.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- tempera sur panneau de bois - fond couvert de feuilles d'or - absence de perspective - absence d'expression - vision frontale, peu de modelé - artistes considérés comme des artisans (la formation se fait par apprentissage de 4 à 7 ans sur la base de la transmission de savoirs et de recettes traditionnels) - rôle du commanditaire, destination du panneau (clergé, noblesse et bourgeoisie…) - symbolique des échelles de tailles … (sacré/profane) Définitions: ex-voto: objet offert en remerciement à la suite d’un vœu exaucé ou d'une grâce obtenue tempera: procédé de peinture consistant à délayer des pigments en poudre additionnés d’un agent liant tel le jaune d’oeuf.

4. Oeuvre musicale de la même période :

Chant Grégorien Puer Natus Est, anonyme, entre 600 et 1200 : CD Ecoute que coûte 2

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B. Période historique : Les Temps modernes (1492-1789)

Domaine artistique : peinture Type : tempera et huile sur bois Titre : Saint Sébastien et Sainte Apolline Auteur : Le Pérugin, Pietro Vannucci dit, Date : entre 1503 et 1523 Dimensions : 172 x 96 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Le Pérugin travailla à Florence dans l'atelier de Verrochio. Dans les dernières années du XVe siècle, le jeune Raphaël fréquenta l'atelier de Pérugin qui fut son maître. Pérugin partage son activité entre Rome (fresque de la chapelle Sixtine, 1481), Florence (tableaux d'autels) et Pérouse. Il a surtout peint des tableaux religieux, multipliant madones élégantes et anges mélancoliques. En 1495, il reçoit la commande d'un retable pour le chœur de l'église des Augustins à Pérouse, mais la réalisation en fut retardée et l’œuvre devait rester inachevée à la mort de l’artiste. Le polyptique a été démembré en 1683. D'autres fragments se trouvent dans les musées de Toulouse, Pérouse, Lyon ainsi qu'au Louvre.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Panneau avec saint Sébastien à droite et une sainte identifiée comme étant sainte Apolline tenant des attributs (peinture des XVe et XVIe siècles) : un livre et des tenailles avec une dent, symbole de son martyre. Saint Sébastien, martyr romain du IIIe siècle dénoncé comme chrétien, fut transpercé de flèches mais survécut grâce aux soins d'Irène, que certains spécialistes identifient ici plutôt qu'Apolline. Tué lors des persécutions ordonnées par l'empereur Dioclétien, le corps de Sébastien fut jeté dans les égouts. Les peintres de la Renaissance en firent un de leurs thèmes de prédilection pour représenter le nu masculin. Saint Sébastien, légèrement déhanché, est présenté en contrapposto, posture empruntée aux statues antiques. L'espace est presque entièrement occupé par les figures des saints qui se découpent sur un paysage à peine esquissé. La ligne d'horizon située dans la partie supérieure de l'œuvre introduit la notion de perspective.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

A la Renaissance : -la tempera est peu à peu remplacée par la peinture à l'huile, le bois par la toile - invention de la perspective, géométrie cachée, modelé ombre-lumière, références à l'Antiquité (colonnes, drapés) - "invention" du nu, (valeur héroïque du nu masculin), dissection (maîtrise de l'anatomie, voir Léonard de Vinci Canon de Vitruve) - idéal de beauté et d'harmonie : symétrie et proportions La personnalité de l'artiste moderne se dessine, il est désormais considéré comme un créateur, apparition de la signature. Définitions : - contrapposto : mot italien désignant l’attitude d’une figure appuyée sur une jambe, l’autre étant légèrement fléchie. Le contrapposto apparaît dans la sculpture grecque à la fin du IVe avant JC - retable : tableau peint et décoré que l’on place derrière un autel - modelé : relief des formes (dessin, sculpture,…)

4. Oeuvre musicale de la même période :

Josquin des Prés (1440-1521) Ave Maria : CD Ecoute que coûte 2.

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Domaine artistique : peinture Type : huile sur toile Titre : Saint Grégoire pape entouré de saints et de saintes Auteur : Pierre Paul Rubens Date : 1607 Dimensions : 477 x 288 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Rubens est l'homme de la transition entre la Renaissance et le XVIIe. Ce tableau, le plus grand format du musée, est l'œuvre majeure de la collection flamande. Commandée en 1606 par les Oratoriens de la Chiesa Nuova à Rome au jeune Rubens, qui séjournait alors en Italie, l’œuvre ne trouva jamais sa place sur le maître-autel. Le peintre en réalisa une seconde version, toujours visible dans l'église aujourd'hui, et déposa l'original sur le tombeau de sa mère à Anvers quelques années plus tard. Saisi par les commissaires français vers 1800, le tableau rejoignit la collection du musée en 1811.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Grégoire Ier, dit aussi Grégoire le Grand, fut pape de 590 à 604. Imposant au centre du tableau, il est entouré à droite par sainte Domitille, luxueusement vêtue, et par les saints Achille et Nérée. A gauche se tiennent saint Maurice en cuirasse de soldat romain, et saint Papien appuyé sur un bâton. La colombe blanche du Saint esprit survole la tête du vieil homme. L'architecture est proche d'un arc de triomphe en ruines, composé d'une voûte à caissons, encadrée de pilastres. Elle symbolise la fin des croyances païennes au profit de la religion chrétienne victorieuse en la personne de Grégoire, pape, et de la Vierge à l'Enfant, encadrés dans la partie supérieure. On voit déjà dans ce tableau les composantes baroques qui feront de Rubens, à tout juste 31 ans, le chef de file de l’école anversoise. Les coloris somptueux, inspirés de la peinture vénitienne, et les étoffes gonflées sont magnifiés par la qualité de la lumière ; les diagonales structurent la composition, animée par l’usage des courbes et des contre- courbes.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- rôle pédagogique des grands tableaux d'église au moment de la Contre-Réforme - débuts du Baroque :

- en architecture, profusion et richesse des formes - en sculpture et en peinture, mouvement, dynamisme, courbes et

diagonales, couleurs et lumière intenses (baroque rubénien), clair-obscur (baroque caravagesque)

- importance du mécénat - place de l'atelier et des assistants dans la carrière de Rubens - questions d'authenticité au XVIIe (participation parfois poussée des assistants à l'atelier)

Dans le nord de l’Europe, Rubens incarna plus superbement qu’aucun de ses devanciers le passage de l’âge de l’artisanat à celui de " l’artiste " noble, produisant une œuvre de l’esprit et dont l’activité participait des arts libéraux.

4. Oeuvre musicale de la même période :

Monteverdi Cantate Domino, motet 1620 : CD Ecoute que coûte 2

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Domaine artistique : peinture Type : huile sur toile Titre : Paysage pastoral ; Campagne romaine, effet du matin (ancien titre) Auteur : Le Lorrain (dit) Claude Gellée (patronyme) Date : 1644 Dimensions : 137 x 98cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Peint en 1644 pour un haut fonctionnaire parisien, le tableau du musée de Grenoble est un parfait exemple des paysages idéalisés inventés par l'artiste. Ces vues d'une très grande qualité connurent un immense succès et furent tant copiées que le peintre avait commencé dès 1636 son Liber veritatis. Ce recueil de plus de 500 dessins reprenait la composition de ses tableaux, leur date d'exécution et le nom de leur acquéreur, afin de dresser un inventaire complet de son œuvre authentique.

En 1648, à l'instigation du peintre Charles le Brun, l'Académie royale de peinture et de sculpture est instituée sous la protection de Mazarin. Hiérarchie très stricte, monopole de l'enseignement des arts de la peinture et de la sculpture :

- affirmer la primauté du dessin sur la couleur - approfondir l'étude du nu, de l'anatomie

- privilégier le travail en atelier par rapport au travail en plein air, sur le motif

- réaliser des œuvres "achevées" - imiter les anciens, imiter la nature

2. Ce qui est à repérer et analyser :

Dans ce Paysage pastoral, Claude Lorrain mêle réel et imaginaire. On reconnaît à droite, le temple de la Sybille et l'évocation du site de Tivoli avec sa cascade et au centre le Ponte Molle à cinq arches, appelé aussi Pont Milvio. Le peintre a étudié ces éléments dans la campagne romaine ; il les a ensuite recomposés dans l’atelier pour restituer l’image d’une nature idyllique dans laquelle l’homme trouve harmonieusement sa place. L’œuvre, baignée d'une lumière froide du matin, a un pendant, un paysage au soleil couchant conservé à Buckingham Palace à Londres. Ces deux toiles illustrent l'intérêt de Claude, comme l'appellent les anglais, pour le temps qui passe, la succession des jours et des saisons, ou encore pour la lumière et ses effets. Claude Lorrain avait acquis une maîtrise exceptionnelle des lois de la perspective atmosphérique , où l’illusion de la profondeur est rendue par l’utilisation de couleurs claires et froides à l’arrière-plan du tableau. Sa science de la couleur dans le rendu de l'espace et l'étude de la lumière, objet principal de son attention, lui confèrent une place de précurseur : Turner s’en inspirera deux siècles plus tard dans ses études atmosphériques. 1er plan : les bergers, le pin, la berge 2e : la rivière, le pont

3e : le temple, le bosquet d'arbres à gauche 4e : la bâtisse, la forêt autour 5e : le village sur la colline

6e : le ponte Molle et la tour 7e : la montagne mauve 8e : la montagne plus claire

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- perspective atmosphérique - classicisme : calme, rigueur, symétrie, harmonie… - référence à l'Antiquité, nature maîtrisée, idéal de perfection et de beauté.

4. Oeuvre musicale de la même période :

Jean-Sébastien Bach Concerto Brandebourgeois Fa M 1721 : CD Ecoute que coûte 2

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Domaine artistique : peinture Type : huile sur toile, Titre : Animaux, fleurs et fruits Auteur : François Desportes Date : 1717 Dimensions : 124 x 231 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Ce tableau a été commandé par le Régent Philippe d'Orléans à François Desportes, peintre spécialiste de natures mortes, de peintures animalières et de scènes de chasse, et particulièrement doué pour le rendu des matières. Au XVIIIe siècle, la vie artistique en France s’organise principalement autour du Salon et de l’Académie royale de peinture et de sculpture. Des idées nouvelles inspirées des Lumières provoquent cependant une envie de liberté. Les peintres ont de plus en plus recours à une clientèle privée, aristocrates et bourgeois, en plein développement. La peinture d'histoire occupe toujours une place prépondérante mais le portrait connaît un grand succès. La peinture de genre se développe, avec un intérêt marqué pour le paysage et la nature morte ; naît alors un véritable souci d’observation de la nature et de sa représentation. La hiérarchie des genres : 1. La peinture d’histoire : tableaux souvent de grande taille, à sujets mythologiques, religieux ou historiques 2. Le portrait : représentant des personnages importants du passé comme du présent 3. les scènes de genre : représentations généralement de petite taille de scènes de la vie quotidienne attachées aux personnes ordinaires 4. Le paysage 5. La nature morte

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Il s'agit ici d'une scène animalière dans laquelle l’observateur attentif peut également reconnaître une évocation des cinq sens. Le goût est ainsi représenté par les fruits, l'odorat par les roses et la truffe levée du chien à l'arrêt, le toucher par la texture de chaque matière et l'ouïe par la viole de gambe, le luth et les violons. Les allusions au sens de la vue se déchiffrent moins facilement. Au-delà du tableau que l’on regarde, un symbole de la vue se cache sur la queue du paon : il s'agit des ocelles qui sont aussi appelés des "yeux". Le livre ouvert, quant à lui, fait référence au goût pour la musique de la société cultivée à laquelle s’adressait ce tableau mais permet surtout de déchiffrer une partition et de lire le chant qui lui est associé. Témoin du goût pour l'opulence sous la Régence, cette toile est un assemblage apparemment désordonné d'animaux, de fleurs et de fruits. Les différentes parties sont cependant organisées avec un sens très sûr de la composition où triomphe l'emploi des diagonales. Ce tableau est une œuvre majeure de la collection du XVIIIe siècle. (Voir le pendant de ce tableau dans la collection du musée des Beaux arts de Lyon, Canard, faisan et fruits près d'une fontaine)

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- peinture animalière à tendance baroque, peinture décorative (dernière place dans la hiérarchie des genres) - importance des symboles profanes - reflet des loisirs d'une élite de la société - rendu réaliste des matières …

4. Oeuvres musicales de la même période :

Antonio Vivaldi Concerto pour viole d'amour 1720 Augustin de sainte Colombe Duo de violes env. 1700 : CD Ecoute que coûte

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C. Période historique : Le XIXe s (1789-1914)

Domaine artistique : peinture Type : triptyque ; huile sur toile Titre : Homère mendiant Auteur : Jean Jules Antoine Lecomte du Noüy Date : 1881 Dimensions : 236 x 382 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Une première version de ce triptyque a été exécutée par l'artiste en 1875, de petites dimensions (0,40 x 0,60) et avec de nombreuses variantes. Exposé au Salon de 1876, ce triptyque eut un grand succès. Le triptyque, utilisé au Moyen Age et à la Renaissance pour les tableaux religieux connaissait un succès au XIXe siècle. Après Homère en 1881, ce fut Victor Hugo qui inspira un autre grand polyptyque à Lecomte du Noüy en 1885.

Le prix de Rome sanctionne la fin des études des jeunes artistes. Il permet à ses titulaires de se rendre à l'Académie de France à Rome (1666) pour y parfaire leur formation.

Le morceau de réception conditionne l'acceptation au sein de l'Académie royale de peinture et de sculpture (aucune sélection, ni par le rang social, ni par la filiation, ni par l'argent, ne régit son entrée). Les membres de l’académie, exposent, tous les deux ans, leurs œuvres au Louvre. Cette exposition, qui avait lieu dans le salon carré, prendra finalement le nom de Salon en 1667, organisé par l'Académie royale de peinture et de sculpture. Le peintre est devenu un artiste. L’Académie Royale de peinture et de sculpture fut supprimée par la Convention à la demande de David (août 1793) et c’est en 1796 que fut fondée l’Académie des Beaux-Arts.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Dans Homère mendiant, l'artiste a choisi la forme traditionnelle du triptyque pour traiter son sujet. La composition est symétrique, le panneau central qui représente Homère est complété à gauche et à droite de scènes inspirées de l'Iliade et l'Odyssée. L'image de la ville est dominée par l'Acropole. Les deux panneaux latéraux sont subtilement reliés au cadre par la reprise d'éléments architecturaux. Le dénuement statique d'Homère et l'allure hiératique de Pénélope s'opposent à la scène évoquant l'Iliade où le corps renversé d'Hector défunt est surmonté par la Vengeance divine qui s'avance en criant sous le regard des Dieux de l'Olympe. L'accumulation et la précision des détails, la lyre constituée d'une carapace de tortue et de deux cornes d'antilope, le sceptre de Priam et le médaillon gravé inspiré de monnaies hellénistiques, témoignent du goût de l'artiste pour les reconstitutions archéologiques.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

La peinture académique est produite sous l'influence de l'Académie de France à Rome L'académisme est caractérisé par : - un goût très fort pour les thèmes historiques, mythologiques et pour l'orientalisme -la perfection du fini des éléments représentés et les précisions historiques et archéologiques, conceptions à l'opposé de l'art moderne.

4. Oeuvre musicale de la même période :

Maurice Ravel Daphnis et Chloé, 1911 : CD Ecoute que coûte

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Domaine artistique : peinture Type : huile sur toile Titre : Lac en Ecosse après l'orage Auteur : Gustave Doré Date : 1875-78 Dimensions : 90 x 130 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

"Je suis mon propre rival, je dois effacer et tuer l'illustrateur afin qu'on ne parle de moi que comme peintre". C'est en ces termes que Gustave Doré regrette de n’avoir connu la gloire que par ses illustrations et non en tant que peintre. À sa mort, à l'âge de cinquante et un ans, il a en effet exécuté près de 200 tableaux, qui n'ont pas rencontré le succès mérité.

Lac en Écosse après l'orage est la première toile de l'artiste entrée dans un musée français de son vivant, grâce à un don.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Peint à la suite d'un séjour en Écosse, ce paysage s'organise en une vision tellurique de la nature : tout semble s'animer. Les brumes s'effilochent, laissant apparaître la roche rugueuse et mouillée. Les rayons lumineux se déplacent, jouant avec la couleur des mousses. La masse imposante de la montagne avance, se déplaçant comme un énorme animal. La touche est nerveuse ; ses épaisseurs imitent la dureté des rochers et le moelleux de la végétation. La palette, réduite à des tons froids, permet des contrastes marqués d'ombre et de lumière. L'utilisation d'un gris d'aspect métallique, donne au minéral une brillance humide. Perdus dans cette nature hostile, deux oiseaux planent au-dessus du lac, seules sources de vie. Tardivement attaché à une conception romantique du paysage, et bien qu'isolé dans cette veine, Gustave Doré a signé là un tableau unanimement reconnu comme un chef-d'œuvre.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

Quelques caractéristiques du Romantisme : - goût pour l’improvisation - contrastes colorés prononcés - trace du geste de l’artiste visible (touche) - communion avec la nature (sauvage et mystérieuse) - plongée dans l'inconscient, intérêt pour l'irrationnel - expression de sentiments intenses, goût pour la dramatisation

4. Oeuvre musicale de la même période :

Hector Berlioz Harold en Italie 1834 : CD Ecoute que coûte 2

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Domaine artistique : sculpture Type : marbre de Paros, traces de polychromie et d'or Titre : Phryné Auteur : James Pradier Date : 1845 Dimensions : 1,80 x 0,50 x 0,50 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Après les années passées à Rome, de 1813 à 1819, James Pradier s'affirme comme l'héritier des valeurs classiques. Le thème central de son œuvre reste la figure féminine. La Phryné de 1845 démontre brillamment sa capacité d'adaptation à la modernité à travers une sensualité proche de celle exprimée par les sculpteurs romantiques. Phryné est une courtisane grecque du IVe siècle av. J.C. A Athènes elle avait pour amants certains des hommes les plus distingués du moment, tels le sculpteur Praxitèle et le peintre Apelle. Célèbre pour ses tarifs élevés, elle réclamait selon le poète comique Machon, « une mine pour une nuit ». Accusée d'introduire une divinité étrangère à Athènes et par là-même de corrompre les jeunes femmes, elle fut défendue par l'orateur Hypéride, l'un de ses amants.

Selon Athénée, celui-ci, sentant la cause perdue, n'hésita pas à déchirer la tunique de Phryné, dévoilant sa poitrine et emportant ainsi la faveur du jury : Phryné fut acquittée et emportée en triomphe au temple d'Aphrodite.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Si le traitement de la draperie et des plissés reste néoclassique, l'attitude ambiguë de la courtisane à demi dénudée, ses formes pleines et suggestives témoignent d'un sensualisme et d'un réalisme puissants. L'emploi du marbre renforce la densité des formes et la rondeur des volumes et se prête à la souplesse des drapés dans un ensemble d'une grande élégance. Des traces de polychromie et d'or restent visibles, tandis que les marques d'assemblage sont dissimulées sous la cordelette qui retient la draperie. Cette œuvre à l'exécution impeccable répond au souci d'incarner la beauté idéale mêlée de pudeur et de réserve.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- valeurs classiques remises à l'honneur dans une veine préromantique - importance du marbre et proportions idéales - nu pudique, lisse et sans pilosité (à mettre en opposition avec L'Origine du monde de Courbet, peint en 1866) En même temps que l'Académisme, des artistes avant-gardistes se placent en opposition à ce système et essuient de nombreux refus au Salon officiel. A Paris se créent les premières galeries où le public peut circuler et acheter. En 1863, tant de toiles furent refusées au Salon (3000 sur 5000) que, dans un souci d'apaisement, Napoléon III autorisa l'ouverture d'un salon parallèle: le Salon des refusés dans le Palais de l’Industrie. Cette expérience ne fut pas renouvelée car ce fut un échec complet pour les artistes présents.

4. Oeuvres musicales de la même période :

Wolfgang Amadeus Mozart Sonate piano et violon en mi K. 304 1778 Ludwig van Beethoven Sonate pour piano et violon n° 5, 1798 : CD Ecoute que coûte 2

10

Domaine artistique : peinture Type : huile sur toile Titre : Coin de l'étang de Giverny Auteur : Claude Monet Date : 1917 Dimensions : 117 x 83cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Cette toile a été donnée au musée par Claude Monet en 1923 pour, selon ses propres paroles, "encourager ce musée dans ses tendances modernes". Depuis 1884, l'artiste était installé à Giverny, petit village du Val de Seine, où il se passionnait pour l'aménagement de son jardin. En 1893 il avait agrandi sa parcelle et fait creuser le fameux étang aux nymphéas, terme scientifique désignant une variété de nénuphar blanc. Conçu comme un petit paradis, ce jardin d'eau comportait des plantes aquatiques variées: roseaux, iris, nénuphars... En 1895, le pont japonais vint compléter cet atelier en plein air.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

L’œuvre appartient à une série de quatre études consacrées à la rive nord-est de l'étang. L’artiste s’attache à dépeindre la végétation luxuriante et les effets de la lumière sur l'eau, à travers le rideau de saules. L'absence de ciel, la grande variété des touches et l'imbrication étroite des couleurs entre elles atténuent l'effet de profondeur et créent une sensation de mise à plat de l'espace. Claude Monet, au cours d'une carrière particulièrement longue, est certainement l'artiste qui a poussé le plus loin les limites de l'impressionnisme, au point d'être reconnu aujourd'hui comme un précurseur de l’abstraction gestuelle.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- 1874 : première exposition impressionniste Atmosphère de plus en plus hostile de la part des milieux officiels, Monet et ses amis forment un groupe et exposent dans leur propre salon pour la première fois. - liberté de l'artiste - langage plastique en lien avec la science (recherches sur la lumière et la couleur) et la modernité (sujets urbains et industrialisation) - importance de la photographie (cadrages) - influence de Monet dans l'art de la 2éme moitié du XXe (Abstraction gestuelle) …toiles All over des américains années 50 - développements de la série (voir Warhol dans les années 60), pratique liée à la science et à la production industrielle Naissance du marché de l'art moderne : Plus de visibilité, de publicité, d'achats, de contrats avec les marchands et les galeries (cf. Durand-Ruel), les peintres s'éloignent de Paris (Barbizon, Argenteuil, Giverny…) grâce au chemin de fer.

4. Oeuvre musicale de la même période :

Claude Debussy Arabesque, 1888 : CD Ecoute que coûte 2

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D. Période historique : Le XXe siècle et notre époque Domaine artistique : peinture Type : détrempe à la colle sur toile Titre : Intérieur aux aubergines Auteur : Henri Matisse Date : 1911 Dimensions : 212 x 246cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Ce tableau est le joyau de la collection du musée de Grenoble pour le XXe siècle. Il a été offert par la famille de l'artiste en 1922. Peint en 1911, il représente l'atelier que Matisse occupait alors à Collioure.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

L'espace est saturé de motifs décoratifs : des fleurs à cinq pétales couvrent le sol et le mur, des arabesques se déploient sur le paravent et la nappe. Des objets sont représentés sans volume en raison de l'absence d'effets lumineux. Ce sont les couleurs qui, par leurs contrastes, engendrent la lumière, répartie de façon égale dans tout l'espace. Matisse a utilisé la détrempe à la colle. Son aspect mat et sans épaisseur ôte toute matérialité aux éléments représentés. La fenêtre qui ouvre sur un paysage sans profondeur fait penser à un tableau placé au mur. Sur la table, l'assiette de pommes, la petite sculpture et le vase apparaissent dans une position stable, tandis que les aubergines semblent glisser vers le sol. Le miroir sur la gauche reflète des objets transformés, simplifiés, réduits à l'état de signes plastiques. Certains ont même disparu. Tous ces facteurs contribuent à faire de cet intérieur une surface plane, comparable à un tapis. Seule la cheminée offre une ébauche de profondeur, mais, placée contre le bord gauche du tableau, elle n'est pas montrée en entier. Des objets ont été habilement fondus dans ce décor : ils rappellent que Matisse était peintre, sculpteur et qu'il pratiquait également le dessin. Des cadres vides en attente de leur tableau sont ainsi accrochés au-dessus de la cheminée ; une petite sculpture dont le modèle a été exécuté par Matisse lui-même, repose sur la table, tandis qu'un carton à dessins vert patiente sagement contre le miroir.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- simplification des formes - mise à plat de l'espace - saturation de l'espace avec des motifs décoratifs - rapports d'égalité intérieur/extérieur - rôles de la couleur et de la ligne… L'artiste du XXe se place hors des traditions et des conventions.

4. Oeuvre musicale de la même période :

Eric Satie Sur un vaisseau, 1913: CD Ecoute que coûte 2

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Domaine artistique : peinture Type : peinture à la colle sur toile Titre : Espace rythmé selon le plan Auteur : Albert Gleizes Date : 1920 Dimensions : 355,5 x 274, 5 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Le début des années 1920 représente une période charnière dans l'œuvre du peintre cubiste Albert Gleizes. Après trois années passées à New York, il opte pour une peinture ordonnant des figures géométriques en aplats, et publie un ouvrage important, Du Cubisme et des moyens de le comprendre. Il connaît alors sa première exposition individuelle et internationale à la galerie Der Sturm de Berlin. Donné au musée en 1927 sous le titre Espace rythmé selon le plan, ce tableau est en fait l'étude d'une peinture murale pour la Gare de Moscou qui ne fut jamais réalisée mais n'en demeure pas moins le projet le plus ambitieux d'Albert Gleizes dans ce domaine. Il existe des études préparatoires pour cette composition, de plus petites dimensions, au pochoir et au fusain.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Hormis les quatre silhouettes humaines et les deux motifs à carreaux qui rappellent les immeubles new-yorkais, le sujet de cette œuvre est un jeu abstrait de figures découpées, aux arêtes vives, faisant contraster angles et arcs de cercle qui se juxtaposent les unes aux autres autour d'un axe dominant. Chaque couleur, chaque plan trouve son correspondant au sein de la composition. Les couleurs, rigoureusement posées en aplats, gagnent en intensité chromatique et la palette s'enrichit d'une très grande variété de bleus, de verts, de jaunes, de gris et de noirs. La matité, due à la présence de tempera, conserve à ce projet toute sa fragilité et son aspect d'esquisse. Comme l'indique son titre, cette peinture met en évidence les possibilités dynamiques du plan. Le regard du spectateur est confronté à des cadences, à des répétitions, à des points de mesure. Il est sans cesse en mouvement et participe ainsi à ce rythme unificateur qui scande toute la surface de la toile et permet à ce vaste sujet de conserver son caractère synthétique et monumental.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- naissance du cubisme avec Picasso Les Demoiselles d'Avignon en 1907, rôle majeur de Picasso et Braque jusqu'en 1914 - influences du cubisme tout au long de la 1ère moitié du XXe - rôle des formes et de la couleur dans la peinture abstraite géométrique - rythme et cadences

4. Oeuvre musicale de la même période :

Scott Joplin Mapple leaf rag, 1899 : CD Ecoute que coûte 2

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Domaine artistique : peinture Type : huile sur toile Titre : Tourbillon Auteur : Frantisek Kupka Date : vers 1923-1924 Dimensions : 72,3 x 78,8 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Installé à Paris en 1896, Kupka s’inscrit à la Sorbonne pour suivre des cours de sciences naturelles qui l’amènent à s’intéresser entre autres à la déformation des objets immergés dans l’eau et aux recherches sur la couleur du chimiste Chevreul. Cet intérêt scientifique se traduit dans ses recherches plastiques par une stylisation des formes et de la couleur, un travail sur le mouvement qui le conduit progressivement vers l’abstraction. Il affirme alors : « L’art de la peinture consiste essentiellement à faire appel à la lecture des différentes combinaisons de signes plastiques, de lumière et de valeurs colorées. »

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Couleurs, formes et rythmes sont ainsi les composants essentiels de Tourbillon réalisé vers 1923-1924. Kupka compose son tableau à partir d’une opposition colorée, les teintes chaudes (rouge, jaune, orange et rose) placées au centre et les froides (vert et bleu) dans les angles et sur les côtés. Prenant la forme de carrés superposés et juxtaposés, traces issues de la brosse du peintre, les couleurs chaudes s’élèvent en ondulant suivant des dégradés (noir/rouge/rose/blanc ou rouge/orange/jaune/blanc). Par ce travail des formes, Kupka fragmente le développement, l’évolution de la couleur et obtient une vibration renforcée par la présence des couleurs froides. Les verts, bleus et blancs présents en alternance sous la forme de lignes incurvées composées de multiples petites touches, encerclent les chauds dégradés et investissent la surface de la toile jusqu’à la saturer. Les contrastes formels et colorés ainsi créés entraînent le spectateur dans une ronde sans fin, un tourbillon duquel le regard ne peut s’échapper.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- invention de l'art abstrait, deuxième révolution de l'histoire de l'art (la première est l'invention de la perspective à la Renaissance) Chacun des quatre artistes pionniers de l’abstraction, Kupka, Kandinsky, Malevitch et Mondrian, aboutit à sa propre formulation de l’abstraction, indépendamment des autres. Ils ont néanmoins franchi le seuil de l’abstraction à peu près au même moment, entre 1911 et 1917, simultanéité qui peut s’expliquer par des préoccupations communes. Ils avaient tous une pratique spirituelle ou ésotérique. Ils étaient aussi, pour certains d’entre eux, très attachés à la musique, le moins imitatif de tous les arts, qu’ils ont parfois pris comme modèle. Et, plus généralement, ils travaillaient dans un contexte culturel, en particulier scientifique avec l’apparition de la physique quantique et de la théorie de la relativité, où la notion de réalité devenait problématique. - la photographie et le cinéma ont également encouragé le passage à l'abstraction en tant que prise en compte des problématiques de la peinture comme sujet - abstraction proche à tendance lyrique

4. Oeuvre musicale de la même période :

Olivier Messiaen Quatuor pour la fin du temps, liturgie de cristal 1940: CD Ecoute que coûte 2

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Domaine artistique : peinture Type : huile sur fibrociment Titre : Composition n° 7, carré dans la section d'or Auteur : Jean Gorin Date : 1927 Dimensions : 0,51 x 0,51 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

D'origine modeste, Gorin découvre l'art moderne après la guerre. La lecture de l'ouvrage de Gleizes Du cubisme, paru en 1921, joue un rôle décisif dans son évolution artistique de même que sa découverte en 1926 des reproductions d'une composition néo-plastique de Mondrian. La recherche d'un langage universel, la quête d'unité et la revendication d'un art impersonnel qui animent les fondateurs du Néoplasticisme répondent parfaitement aux aspirations personnelles de Gorin, soucieux lui aussi de concilier éthique et esthétique.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Les principes du Néoplasticisme tels que Mondrian les définit en 1926 imprègnent totalement Composition n° 7, carré dans la section d'or. Le tableau est carré, construit à partir d'éléments purement plastiques, c'est-à-dire plans et couleurs. La surface est structurée par des lignes verticales et horizontales noires qui se coupent à angle droit et qui déterminent de grandes zones de non-couleur, le blanc et le gris et de plus petites zones de couleurs primaires, le jaune, le bleu et le rouge à la périphérie. Tous ces éléments sont mis en rapport dans une composition fondée sur la dissymétrie rendue dynamique par la disposition et l'importance respective des couleurs et des non-couleurs. Peint sur du fibrociment l'œuvre revêt un aspect mat et neutre tel que le revendique l'esthétique néo-plastique.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- invention de l'art abstrait, deuxième révolution de l'histoire de l'art (la première est l'invention de la perspective à la Renaissance) Chacun des quatre artistes pionniers de l’abstraction, Kupka, Kandinsky, Malevitch et Mondrian, aboutit à sa propre formulation de l’abstraction, indépendamment des autres. Ils ont néanmoins franchi le seuil de l’abstraction à peu près au même moment, entre 1911 et 1917, simultanéité qui peut s’expliquer par des préoccupations communes. Ils avaient tous une pratique spirituelle ou ésotérique. Ils étaient aussi, pour certains d’entre eux, très attachés à la musique, le moins imitatif de tous les arts, qu’ils ont parfois pris comme modèle. Et, plus généralement, ils travaillaient dans un contexte culturel, en particulier scientifique avec l’apparition de la physique quantique et de la théorie de la relativité, où la notion de réalité devenait problématique. - la photographie et le cinéma ont également encouragé le passage à l'abstraction en tant que prise en compte des problématiques de la peinture comme sujet. - abstraction géométrique

4. Oeuvre musicale de la même période :

Arnold Schoenberg Pièce pour piano 1923: CD Ecoute que coûte 2

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Domaine artistique : peinture Type : huile sur toile Titre : La forêt Auteur : Max Ernst Date : 1927 Dimensions :100 x 80 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

En 1925, à Pornic, Max Ernst découvre par hasard le processus du frottage à l'aide d'une feuille de papier posée sur un vieux plancher et frottée à la mine de graphite. Selon ce principe élargi à la peinture, les toiles, placées sur des surfaces aux reliefs variés, sont recouvertes de pigment étalé au couteau, laissant apparaître les configurations du dessous (grillages, ficelles, bois...) par grattage. La Forêt datée de 1927, a été élaborée selon cette technique.

2. Ce qui est à repérer et analyser :

Dans ce tableau, Max Ernst montre la forêt comme une palissade impénétrable. Cette œuvre appartient à une longue série de plus de quatre-vingts exemplaires réalisés en 1927-28. Sous le pigment noir raclé au couteau affleure le motif en relief des veines du bois ainsi que les entrelacs obtenus par des ficelles posées entre les planches et la toile. Les couleurs (vert, rouge et jaune-orangé) ont été appliquées au préalable, créant par transparence de riches effets de texture. Le bleu du ciel dans la partie supérieure a été rajouté en dernier, Max Ernst ayant eu recours pour cela à la technique traditionnelle du pinceau. Le disque lunaire, dont la position en avant et en arrière des arbres constitue une aberration visuelle, confère à l'ensemble un caractère hallucinatoire que l'artiste est parvenu à obtenir tout au long de son œuvre, introduisant le spectateur dans le monde de l'inconscient et de ses mystères.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

"Surréalisme, n.m., automatisme pur, par lequel on se propose d'exprimer soit verbalement, soit de toute autre façon, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l'absence de tout contrôle exercé par la raison en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale". Premier Manifeste du Surréalisme (1924) définition d'André Breton. (La peinture surréaliste a pourtant existé sans être toujours automatique). - inventivité, imaginaire, poésie, emploi de techniques originales, prise en compte du hasard ... comptent parmi les valeurs qui caractérisent la production surréaliste dans le domaine du dessin, de la peinture et de la sculpture. - rêve et exploration de l'inconscient à l'origine d'images nouvelles. Indissociable de Freud et de l'invention de la psychanalyse. - en littérature, importance des mots, jeux, poésie… (Prévert avec les mots-valises, cadavre exquis…)

4. Oeuvre musicale de la même période

Alban Berg Concerto pour violon, 1935 : CD Ecoute que coûte 2

Voir aussi le cinéma de Buñuel.

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Domaine artistique : sculpture Type : acier inoxydable Titre : Sphère-trames Auteur : François Morellet Date : 1972 Dimensions : diam. 245 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

En 1960, François Morellet crée avec cinq autres artistes une forme de création collective dans le Groupe de Recherches d'Art Visuel (G.R.A.V.). Au cours de cette période, il abandonne pratiquement la peinture au profit de l'acier inoxydable, des ampoules électriques, des flashs, des néons… le tout activable, déclenchable, modifiable. Avec la superposition de lignes inclinées selon des angles variables, il applique le principe de la trame sur le plan du tableau. Dès 1962, ce principe, adapté au volume, donne naissance à la première Sphère-trames réalisée à l'aide de tubes d'aluminium soudés.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Cette œuvre est une reproduction de l'original, d'un diamètre supérieur, exécutée en acier inoxydable. Formée d'éléments standards assemblés selon une structure orthogonale, elle transfère dans l'espace le principe de la perturbation optique. Suspendue, pouvant être animée d'une rotation, elle offre au regard une multiplicité de points de vue liés aux interférences des lignes entre elles.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- utilisation de matériaux industriels, non nobles (importance de Marcel Duchamp et de ses Ready made) - sculpture comme objet suspendu, transparent, mobile, sans socle … opposée à la définition traditionnelle - dimension du temps de l'œuvre (durée de la rotation comme 4ème dimension) - remise en question de l'inspiration de l'artiste (œuvre produite par l'industrie ou par recours au hasard dans d'autres œuvres) ) - réception de l'œuvre comme expérience visuelle, l'œuvre questionne notre manière de percevoir (expérience optique et cinétique)

4. Oeuvre musicale de la même période :

Terry Riley In C, 1964 : CD Ecoute que coûte 2

17

Domaine artistique : peinture Type : encre sérigraphique et acrylique sur toile Titre : Jackie Auteur : Andy Warhol Date : 1963 Dimensions : 50.8 x 40.6 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Figure majeure du Pop Art américain, Andy Warhol est considéré au plan international comme un des plus grands artistes de la deuxième moitié du XXe siècle. En 1962, il adopte un procédé mécanique d'application sérigraphique sur toile qui permet l'élaboration de séries dont le motif est répété plusieurs fois (bouteilles de Coca-Cola, soupes Campbell, portraits de Marilyn Monroe…), à partir de photographies glanées dans la presse à grande diffusion.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

La série consacrée à Jackie Kennedy a été réalisée dans les semaines qui suivirent l'assassinat du président Kennedy. Elle s'appuie sur les deux temps de l'événement : avant et après le drame. Avant, c'est l'image rayonnante de Jackie arrivant à Dallas, vêtue de son célèbre tailleur rose. Après, c'est Jackie en deuil durant la cérémonie des funérailles. Plus encore que l'image de l'épouse endeuillée, c'est l'image de Jackie souriante qui a valeur de symbole ici. À l'instar des portraits de Marilyn, Warhol crée une forme de vanité moderne où l'on peut lire, par-delà la beauté, la gloire ou le bonheur, les naufrages et les drames à venir.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- société de consommation, travail sériel - art comme une activité industrielle, artiste comme une machine - délégation de l'acte créateur à d'autres personnes (rejoint l'atelier de Rubens… qui a fait quoi?) pose des questions d'authenticité - Warhol visionnaire d'une société "people", thèmes d'actualité - importance d'une culture populaire (BD, publicité, cinéma…) - notion de temps (longueur des films Kiss, Sleep…dont la durée se confond avec la vie) - œuvre à double sens : vie et mort, Eros et Thanatos, bonheur et désastre…

4. Oeuvres musicales de la même période :

Cathy Berberian Stripsodie, 1966

The Velvet Underground I’m waiting for the man 1967 : CD Ecoute que coûte 2

18

Domaine artistique : peinture Type : polyptique ; huile sur toile Titre : Peinture, 222x628 cm, avril 1985 Auteur : Pierre Soulages Date : 1985 Dimensions : 222 x 628 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

Pierre Soulages explore la richesse et les ressources du noir depuis le milieu des années 1940. A partir de 1978 et dans les années suivantes, il approfondit sa démarche et réalise des peintures qui engendrent à la fois l'opacité de toute la surface et sa mutation en lumière. Le noir envahit l'espace et devient sa couleur de prédilection avec deux ensembles, les mono-pigmentaires, constitués d'un noir unique, et les bi-pigmentaires dans lesquels apparaît une autre couleur, le plus souvent en petites surfaces.

2. Ce qui est à repérer et analyser :

Peinture, 222 x 628 cm, avril 1985 appartient à la série des polyptyques mono-pigmentaires dont les deux tiers des œuvres sont de très grandes dimensions, toujours indiquées dans le titre, ainsi que la date d'exécution. Le noir d'ivoire est étalé en pâte épaisse à l'aide de brosses fabriquées par l'artiste, en larges gestes verticaux, horizontaux ou obliques. Il en résulte des bandes de stries qui parfois se croisent, dont la texture accroche, module et renvoie la lumière, provoquant des effets variables selon la nature de l'éclairage et le déplacement du spectateur. La juxtaposition des quatre panneaux est organisée par la continuité de certaines bandes striées qui, par leur recouvrement et leur orientation oblique, dynamisent la surface et rythment la composition. Le noir utilisé par l'artiste, qu'il nomme "outrenoir", n'est pas une non-couleur mais fonctionne comme la somme de toutes les couleurs : les variations chromatiques qui en résultent éloignent cette œuvre du principe de monochrome absolu.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- place du monochrome dans l'art du XXe siècle (Malevitch, art minimal américain) - invariants plastiques (matière, couleur, facture, lumière, composition..) toujours présents - monochrome comme icône du XXe - prise en compte de l'espace et de la lumière, pose la question de la place de l'œuvre

4. Oeuvre musicale de la même période :

Edgar Varese Density 21,5 1947 : CD Ecoute que coûte 2

19

Domaine artistique : œuvre en 3 dimensions Type : installation avec de la lumière, photographies, ampoules et fils électriques Titre : Monument Auteur : Christian Boltanski Date : 1985 Dimensions : 260 x 1100 cm

1. Ce qui est à savoir pour situer l’œuvre (repères artistiques, culturels, historiques, géographiques)

En 1973, Boltanski réalise une œuvre dans un C.E.S. de Dijon, à partir de quatre cents photographies d'élèves de l'établissement. Les images, agrandies, placées sous verre et encadrées de fer blanc, sont accrochées dans le hall d'entrée du collège. En 1985, l'artiste reprend une centaine de ces portraits d'enfants pour créer un ensemble d'œuvres intitulées Monuments. Les tirages sont resserrés sur les visages et bordés de bandes de papier de Noël, photographié et découpé.

2. Ce qui est à repérer et à analyser :

Conçue comme un triptyque et éclairée d'ampoules peu puissantes, cette œuvre entretient un fort rapport au sacré. L'aspect pauvre et bricolé de l'ensemble en accentue le caractère émouvant. L'artiste reconnaît qu'il a mêlé des rites et des traditions religieuses d'origines diverses : icônes byzantines illuminées de cierges, fête juive des lumières, célébrations catholiques… Il illustre ainsi l'enfance comme la première forme de vie qui meurt en nous. Comme souvent, Boltanski allie le dérisoire et le sacré, le merveilleux et le banal, l'humour et le tragique pour susciter l'émotion.

3. Quelques notions pour caractériser l’œuvre :

- mémoire individuelle ("mythologie individuelle", la vie comme œuvre, Boltanski, Messager, Le Gac…) - mémoire collective (l'Histoire : guerres, religions, Shoah) - multitude de matériaux utilisés : photographies, ampoules, carton, boîtes à biscuits (voir la série Réserve des suisses morts) - référence à l'histoire de l'art (Moyen Age, triptyques, icônes, feuille d'or, lumière, architecture religieuse) - la photographie comme souvenir, trace d'une existence …

4. Oeuvre musicale de la même période :

Bernard Parmegiani La Création du monde 1984 : CD Ecoute que coûte 2