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L’ALIMENTATION ET L’AGRICULTURE Rome, 2001
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Rédaction, mise en page, graphiques et édition électronique: Groupe de l’édition
Division de l’information de la FAO
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© FAO 2001
ISBN 92-5-204560-0
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT iii
L es outils extrmement performants fournis ces dernires annes par la science et la technologie ont eu un impact pro- fond sur le secteur alimentaire et agricole dans le monde
entier. Des mthodes novatrices de production et de transformation ont rvolutionn de nombreux systmes traditionnels, et la capaci- t de la plante produire de la nourriture pour une population en expansion a volu un rythme sans prcdent.
Ces vnements se sont bien sr accompagns de changements radicaux dans lÕconomie et lÕorganisation sociale, ainsi que dans la gestion des ressources productives de la plante. CÕest notre rap- port mme avec la nature qui a t boulevers par les progrs tech- nologiques, qui nous permettent dsormais non seulement dÕobte- nir des amliorations gntiques grce la slection, mais de modi- fier des organismes vivants et de crer de nouvelles combinaisons gntiques pour obtenir des vgtaux, des animaux et des poissons plus rsistants et plus productifs. Il est normal que ces vnements suscitent presque invariablement des controverses et que lÕchange dÕarguments pour et contre leur mise en Ïuvre soit presque tou- jours intense, voire tendu.
Depuis plusieurs annes, le gnie gntique permet dÕobtenir des vgtaux possdant une rsistance inne aux ravageurs et tolrant les herbicides. Le gnie gntique a permis dÕobtenir des poissons croissance rapide et rsistant au froid, par exemple, et des vaccins moins chers et plus efficaces contre les maladies du btail, ainsi que des aliments pour animaux qui renforcent la capacit dÕabsorption des nutriments des animaux; et ses applications en foresterie sont tudies en vue dÕaccrotre les caractristiques utiles dÕarbres de plantation comme les peupliers. Les cultures gntiquement modi- fies, qui permettent de rduire lÕutilisation des insecticides, pour- raient avoir un effet positif sur lÕenvironnement et les cots de pro- duction des agriculteurs, mme sÕil est encore trop tt pour raliser des analyses ex post facto.
Reconnatre la contribution potentielle des produits gntique- ment modifis la production alimentaire mondiale ne signifie pas
Avant-propos
AVANT-PROPOSiv
ignorer les risques concernant la scurit sanitaire et les effets imprvisibles sur lÕenvironnement, dont les plus souvent cits sont le transfert redout de toxines ou dÕallergnes et les effets ngatifs non prvus sur les espces non vises. Cela ne veut pas dire non plus que lÕon ne tienne pas compte dÕventuelles consquences ngatives long terme, telles que la rduction de la biodiversit cause de la perte de cultures traditionnelles. En outre, les orga- nismes gntiquement modifis (OGM), comme toutes les nouvelles technologies, sont des instruments qui peuvent tre utiliss pour le meilleur et pour le pire, de mme quÕils peuvent tre grs dmo- cratiquement au profit des plus ncessiteux ou dtourns par des groupes spcifiques qui dtiennent le pouvoir politique, cono- mique et technologique. Dans le cas des OGM, on notera que les principaux bnficiaires ce jour sont les gros producteurs agricoles vivant pour la plupart dans des pays dvelopps. Pour que les avan- tages de ces technologies soient partags plus quitablement avec les pays en dveloppement et les agriculteurs pauvres en ressources, le systme actuel de droits de proprit intellectuelle et dÕobstacles similaires au transfert rapide des biotechnologies modernes doit tre modifi. Avant tout, la recherche doit tre oriente sur les pays et les agriculteurs dfavoriss et il faut trouver le moyen de garantir que les avantages dcoulant dÕune production accrue profitent aux pauvres et aux victimes de lÕinscurit alimentaire.
La mise au point dÕOGM est sans doute aujourdÕhui la question qui soulve lÕventail le plus large et le plus controvers de ques- tions dÕthique concernant lÕagriculture et lÕalimentation. Alors que le progrs scientifique nous donne des outils toujours plus puis- sants et cre des possibilits apparemment sans limites, nous devons exercer la plus grande prudence et examiner dÕun point de vue thique la faon dont ces possibilits devraient tre utilises. Les pays fabriquant des produits gntiquement modifis doivent disposer de rglements clairs et responsables et dÕun organe faisant autorit pour garantir que les risques sont analyss de manire scientifique et que toutes les mesures de scurit possibles sont prises, par le biais de tests raliss avant la diffusion des produits des biotechnologies et dÕun suivi attentif une fois ces produits dis- smins. Enfin, et surtout, les droits fondamentaux une alimenta- tion suffisante et une participation dmocratique au dbat et aux dcisions ventuelles concernant les nouvelles technologies doivent
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT v
tre appliqus, de mme que le droit un choix exerc en connais- sance de cause.
La collection FAO: Questions dÕthique est lÕune des nombreuses initiatives prises rcemment par lÕOrganisation pour sensibiliser lÕopinion et amliorer la comprhension gnrale des questions dÕthique alimentaire et agricole. La prsente publication, la deuxime de cette collection, a t rdige en vue de diffuser les connaissances actuelles sur les organismes gntiquement modi- fis, tant sur le plan de la scurit sanitaire des aliments et de la pro- tection de la sant des consommateurs que sur le plan de la conser- vation de lÕenvironnement. Une distinction est faite entre les OGM qui font lÕobjet dÕune diffusion commerciale, dont la plupart peu- vent dsormais tre considrs comme faisant partie de la chane de lÕoffre agroalimentaire, et ceux qui sont en cours de mise au point.
Les bases scientifiques et politiques de lÕexamen des questions et des dcisions prises en matire de produits gntiquement modifis voluent bien entendu aussi rapidement que les biotechnologies elles-mmes. En ce qui concerne la scurit sanitaire des aliments gntiquement modifis et leurs incidences sur la sant des consommateurs, la FAO continue souligner lÕimportance dÕune gestion prcise des risques et dÕune communication effective leur propos, tout en mettant en lumire, avec un certain optimisme, les possibilits quÕoffrent ces produits de rsoudre les principaux pro- blmes nutritionnels, voire de prvenir les problmes de scurit sanitaire des aliments avec des OGM mis au point cet effet.
Les biotechnologies modernes constituent un moyen de slection possible, mais pas obligatoire, et des tudes supplmentaires sont ncessaires pour valuer les risques et les avantages qui y sont asso- cis. En outre, la crdibilit des allgations faites leur sujet ne peut tre assure que si des prcautions conomiques, environnemen- tales et thiques sont prises. En dernier ressort, une fois pris en compte les considrations thiques fondamentales et les droits de lÕhomme mentionns ci-dessus, le dbat international et les dci- sions qui seront prises en ce qui concerne les OGM seront influen- cs par les consommateurs eux-mmes. Comme le montre cette publication, en exerant leur choix dÕacheter ou non un produit, les consommateurs dterminent en partie le succs ou lÕchec dÕun produit sur le march. SÕils rejettent un produit, les producteurs ne peuvent faire autrement que de ragir en consquence.
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AVANT-PROPOSvi
Le programme de la FAO en matire dÕthique est un domaine prioritaire pour une action interdisciplinaire dans toutes les divi- sions techniques et normatives. Vu le rle catalytique que la FAO joue en tant que forum neutre, jÕai bon espoir que les connaissances et lÕexprience dont nous disposons pour examiner cette question capitale stimuleront et orienteront correctement le dbat mondial de vaste porte et souvent difficile sur les questions dÕthique. ¥
Jacques Diouf Directeur gnral de la FAO
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Table des matires
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La gntique classique et les biotechnologies modernes emploient comme matires premires des gnes naturels. La conservation de la biodiversit est donc un grand problme mondial
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT 1
Dans la plupart des cultures, les gens ont mis au point de nombreuses biotechnologies quÕils conti- nuent dÕutiliser et dÕadapter. On sait que certaines
dÕentre elles telles que la manipulation de micro-orga- nismes en fermentation pour faire du pain, du vin ou de la pte de poisson, ou lÕutilisation de rnnine pour la fabrica-
tion du fromage, sont employes depuis des millnaires. Un important sous-secteur des biotechno- logies modernes est le gnie gntique, cÕest--dire le recours aux techniques modernes de la biologie molculaire pour manipuler le patrimoine gntique dÕun organisme en introduisant ou li- minant des gnes spcifiques. On appelle organisme gntiquement modifi (OGM), ou encore organisme vivant modifi (OVM) ou organisme transgnique, tout organisme vivant possdant une combinaison de matriel gntique indite, obtenue par recours la biotechnologie moderne1.
Les techniques classiques de slection vgtale et les biotechnologies modernes comprennent toutes deux certains ensembles dÕoutils qui ne peuvent fonctionner que si lÕon utilise comme matire premire des gnes qui existent lÕtat naturel. La prservation de la diversit biologique est donc importante pour lÕensemble de la plante. De nos jours, aucun pays ne peut se passer de ressources venues dÕailleurs. Cette interdpendance soulve diverses questions thiques concer- nant les droits des pauvres et des faibles profiter quitablement des avantages de la science, jouir dÕun accs quitable aux technologies et aux ressources gntiques, et avoir leur mot dire dans le dbat portant sur ces ressources. Ce sont l des questions importantes, tout comme celles qui concernent les mesures prendre; elles sont tudies dans dÕautres tribunes et font lÕobjet dÕautres publications.
Les zones tropicales sont celles qui possdent la plus grande diversit gntique agricole, mais les outils de la biotechnologie moderne appartiennent principalement des entreprises du secteur priv des zones tempres. Des particuliers et des entreprises utilisent ces outils pour cultiver des plantes ou fabriquer des produits, y compris des OMG, en vue de leur distribution commerciale. Les outils servant la production des OGM peuvent ventuellement permettre une adaptation plus prcise des gnotypes au milieu environnant, aux besoins nutritionnels et dittiques et aux prfrences des consommateurs. Mais les OGM augmentent-ils la quantit de denres alimentaires disponibles aujourdÕhui et les populations sous-alimentes peuvent-elles, grce eux, obtenir plus facilement des aliments plus nutritifs ou, au contraire, nÕont-ils servi jusquÕ prsent quÕ accrotre les bnfices des agriculteurs et les profits des grandes entreprises? Les questions dÕthique concernant les outils quÕutilisent les chercheurs pour crer des OGM pourraient porter principalement sur la faon de les utiliser pour quÕils contribuent davantage la scurit alimentaire, en particulier dans les pays impor- tateurs prsentant un dficit vivrier.
Introduction
1Cette définition de OVM est extraite du Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques, article 3, alinéa g). À l’alinéa i) de l’article 3, la «biotechnologie moderne» est définie comme «l’application de [techniques telles que]: a. techniques in vitro aux acides nucléiques, y compris la recombinaison de l’acide désoxyribonucléique (ADN) et l’introduction directe
d’acides nucléiques dans des cellules ou organites,ou b. la fusion cellulaire d’organismes n’appartenant pas à une même famille taxonomique, qui surmontent les barrières naturelles de la physiologie de la reproduction ou de la recombinaison et qui ne sont pas des techniques uti- lisées pour la reproduction et la sélection de type classique».
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INTRODUCTION2
2 Transgenic plants and world agriculture. Publié sous les auspices de The Royal Society of London. Juillet 2000. National Academy Press, Washington.
Certaines de ces questions concernent le caractre dÕexclusivit de la plupart des biotechnologies utilises aujourdÕhui pour produire des OGM. Dans un rapport publi rcemment 2, les acadmies nationales des sciences du Brsil, de la Chine, de lÕInde, du Mexique, du Royaume-Uni et des tats-Unis invitaient conjointement les entreprises prives et les institutions de recherche prendre des disposi- tions pour diffuser la technologie du gnie gntique auprs de scientifiques responsables afin de lutter contre la faim et dÕamliorer la scurit alimentaire dans les pays en dveloppement. Cette technologie fait actuellement lÕobjet de brevets et dÕaccords de licence qui imposent des conditions trs strictes.
Une deuxime srie de questions dÕthique relatives la biotechnologie moderne concerne les consquences potentielles de lÕutilisation des OGM ou de toute autre technologie nouvelle pour intensifier la production de denres alimentaires dans le but dÕamliorer la scurit alimentaire. Suite
lÕexprience acquise lors de la rvolution verte il y a 40 ans, certains observateurs ont conclu que les varits dont le rendement tait influenc positivement par les intrants profitaient plus rapidement et de faon disproportionne aux agriculteurs les plus riches. Dans les zones disposant dÕune infrastructure adquate dans lesquelles la rvo- lution verte a t pratique, la commercialisation de la production a eu pour rsultat net dÕaccrotre la quantit et de rduire le prix des denres alimentaires, tandis que les secteurs moins favoriss accusent toujours un certain retard. La situation des femmes est une source de proccupa- tion particulire, tant donn quÕelles participent trs activement
lÕagriculture durable et la prparation de la nourriture pour leurs familles. Elles risquent de subir fortement les rpercussions conomiques et sociales entranes par la disparition des cultures tradi- tionnelles ou les modifications des modes dÕutilisation des terres, ainsi que par tout problme ven- tuel concernant la sant des membres de leurs familles.
La troisime et dernire srie de questions dÕthique lies lÕutilisation potentielle dÕOGM pour assurer la scurit alimentaire tient aux consquences imprvues des mesures prises. Ë mesure que les OGM pntreront dans les chanes dÕapprovisionnement de denres alimentaires et de fibres, ils se disperseront de plus en plus dans les cosystmes, y compris les cosystmes agricoles. Les exp- riences prcdentes concernant les bases gntiques vgtales et animales trop limites, les doses excessives dÕengrais et de pesticides, et les coulements de dchets provenant des units pratiquant un levage intensif, donnent penser que les impacts sur lÕenvironnement touchent dÕabord les fonctions de production des cosystmes agricoles avant de sÕtendre aux cosystmes environ- nants. En plus des modifications quÕils entranent dans la production agricole, ces impacts peuvent perturber dÕautres services utiles rendus par ces cosystmes tels que le pigeage du carbone et la correction des effets cotoxicologiques. Avant de passer lÕexamen du dbat mondial sur les OGM, qui porte dans une large mesure sur la scurit sanitaire des aliments et lÕenvironnement, il convient de noter que lÕon confond souvent les questions dcoulant de lÕapplication potentielle de la biotechnologie moderne en matire de scurit alimentaire et celles que pose la diffusion proprement dite des OGM sous forme de pro- duits par lÕentremise des chanes dÕapprovisionnement.
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LÕtat nutritionnel des femmes et de leur famille peut tre gravement compromis par la perte des cultures vivrires traditionnelles
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT 3
Diverses opinions sur les OGM (Exemples extraits des médias de langue anglaise)
La sécurité alimentaire ÇPour nourrir, dÕici lÕan 2050, 10,8 milliards dÕtres humains, nous devrons convertir 15 millions de miles carrs de forts vierges,
de zones naturelles et de terres marginales en terres arables exploites au moyen de produits agrochimiques. Les cultures gnti-
quement modifies offrent les meilleures possibilits de rgler les problmes futurs dcoulant de la ncessit de nourrir 5 mil-
liards de bouches supplmentaires au cours des 50 prochaines annes.È
Michael Wilson, Scottish Crops Research Institute, 1997
ÇCe qui menace le plus la scurit alimentaire sur la terre est la concentration de la chane alimentaire entre les mains de
quelques acteurs riches et puissantsÉ En cherchant ainsi contrler la chane alimentaire par la mise au point dÕorganismes
gntiquement modifis, ils risquent de devenir des fauteurs de famine au troisime millnaire.È
George Monbiot, , journaliste, Socialist Worker, 1999
Impact sur les pays en développement ÇSi les importations [de semences dÕOGM] É sont inutilement rglementes, les vritables perdants seront les pays en dvelop-
pement. Au lieu de tirer profit de dcennies de dcouvertes et de recherches, les gens de lÕAfrique et de lÕAsie du Sud-Est reste-
ront prisonniers dÕune technologie dpasse. Leurs pays risquent dÕen souffrir fortement pendant de longues annes. Il est
crucial quÕils rejettent la propagande des groupes extrmistes avant quÕil ne soit trop tard.È
Jimmy Carter, ancien Président des États-Unis, 1998
ÇIl y a encore des gens qui ont faim É mais ils ont faim parce quÕils nÕont pas dÕargent et non pas parce quÕil nÕy a pas de denres
alimentaires acheterÉ nous nÕadmettons pas que lÕon prenne faussement prtexte de notre pauvret pour se gagner lÕappui de
la population europenne.È
(En rponse un scientifique europen qui avait dclar: ÇCeux qui veulent quÕon interdise les OGM compromettent la situation des
populations affamesÈ.)
Tewolde Berhan Gebre Egziabher, Institute for Sustainable Development, Addis Abeba (Éthiopie), 1997
Nutrition ÇLa technologie gntique pourrait aussi amliorer la nutrition. Si les 250 millions dÕAsiatiques souffrant de malnutrition et se
nourrissant actuellement de riz pouvaient cultiver et consommer du riz gntiquement modifi contenant de la vitamine A et du
fer, lÕincidence de la carence en vitamine A É diminuerait, de mme que celle de lÕanmie.È
Robert Paarlberg dans Foreign Affairs, 2000
ÇCÕest un abus de confiance envers la population: les paysans asiatiques reoivent du riz dor gntiquement modifi (dont les
bienfaits nÕont pas t prouvs), et lÕÇorÈ tombe entre les mains des socits de biotechnologie.È
Rural Advancement Foundation International, 2000
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INTRODUCTION4
Au cours des dernires dcennies, la biotechnologie moderne a offert de nouvelles possibilits dans des secteurs trs varis, de lÕagriculture la production pharmaceutique, mais lÕampleur du dbat mondial sur les OGM est sans prcdent. Ce dbat, trs vif et parfois empreint dÕune forte char- ge affective, a polaris tant les scientifiques, les producteurs de denres alimentaires, les consomma- teurs et les groupes de dfense de lÕintrt public que les pouvoirs publics et les dcideurs.
Initialement trs localis, ce dbat a rapidement gagn toutes les rgions du monde. De ce fait, lÕin- trt quÕil suscite et le nombre de partisans et dÕadversaires de certaines options qui sÕy rattachent se sont fortement accrus Ð un point tel que, mme dans les journaux de diffusion locale, la publication dÕarticles sur les denres alimentaires gntiquement modifies est devenue presque banale (voir quelques exemples rcents dans lÕencadr p. 3).
Les diverses questions qui ont t souleves propos des OGM rvlent certains des problmes plus gnraux auxquels sont confrontes lÕagriculture 3, la, science, la technologie et la socit lÕheure actuelle. En tant que tribune intergouvernementale, il incombe la FAO dÕexaminer les questions concernant lÕalimentation, la nutrition et lÕagriculture, de dterminer comment promouvoir lÕquit et la justice, et dÕassurer la scurit alimentaire. La FAO facilite lÕchange dÕides et dÕopinions afin de promouvoir la scurit alimentaire, le dveloppement rural et la conservation des ressources naturelles dans le monde entier et, plus particulirement, dans les pays en dveloppement (en adop- tant une approche thique). En outre, la FAO fournit une assistance technique, principalement aux pays en dveloppement qui en sont membres. CÕest dans ce contexte quÕelle a un rle important jouer pour ce qui est dÕexaminer et dÕvaluer les diffrents points de vue qui constituent une part essentielle du dbat mondial sur les OGM.
Le prsent rapport 4 cherche claircir et examiner certains aspects de ces points de vue dans une optique thique. Son principal objectif est de mettre en relief le rle des considrations thiques en ce qui concerne lÕalimentation et lÕagriculture, aussi bien la lumire du dbat sur les OGM quÕen ce qui concerne la scurit alimentaire et lÕenvironnement. Il met aussi en vidence certaines mesures en vue de leur examen par la communaut internationale et le grand public. ¥
3 L’agriculture inclut la foresterie et les pêches; le présent rapport s’appuiera toutefois principalement sur la fonction de production alimen- taire de l’agriculture pour examiner les questions d’éthique liées à la mise au point et à l’utilisation des OGM., 4 Une version préliminaire de cette publication a servi de documentation au Groupe d’experts éminents en matière d’éthique alimentaire et agricole à sa première session en septembre 2000.
Objectifs du présent rapport
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT 5
Certains aspects thiques des OGM se situent dans le contexte du droit une alimentation suffisante, qui est driv de la Dclaration universelle des droits de lÕhomme. Lors du Sommet mondial de lÕalimentation de 1996, la Dclaration de Rome sur la scurit alimentaire mondiale et le Plan dÕaction du Sommet mondial de lÕalimentation ont raffirm le droit de chacun une alimentation suffisante. Le Comit des droits cono- miques, sociaux et culturels et la Commission des droits de lÕhomme des Nations Unies se sont penchs tous deux sur le droit lÕalimentation dans le cadre du suivi du Sommet mondial de lÕalimentation. Plus particulirement, les citations suivantes, qui portent sur le droit une alimentation suffisante, paraissent directement rattaches aux analyses des OGM figu- rant dans le prsent rapport.
Le Comit des droits conomiques, sociaux et culturels estime que le contenu essentiel du droit une nourriture suffisante comprend les lments suivants:
ÇLa disponibilit de nourriture exempte de substances nocives et acceptable dans une
culture dtermine, en quantit suffisante et dÕune qualit propre satisfaire les besoins
alimentaires de lÕindividu;
LÕaccessibilit ou possibilit dÕobtenir cette nourriture dÕune manire durable et qui
nÕentrave pas la jouissance des autres droits de lÕhomme.È
Observation générale 12, paragraphe 8
(E/C.12/1999/5)
Le rapporteur spcial de la Sous-Commission sur la promotion et la protection des droits de lÕhomme de la Commission des droits de lÕhomme des Nations Unies a dclar:
ÇLÕtat doit protger [la population] contre des tiers plus dominateurs ou plus agressifs
Ð des intrts conomiques plus puissants Ð par exemple contre la fraude, contre un
comportement contraire lÕthique dans le commerce et les relations contractuelles, et
contre la commercialisation et le dumping de produits dangereux. Cette fonction protec-
Les OGM et les droits de lÕhomme
Le droit à une alimentation suffisante
Le droit une nourriture adquate
implique lÕaccs des aliments nutritifs,
sains et acceptables sur le plan culturel
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LES OGM ET LES DROITS DE LÕHOMME6
trice de lÕtat, qui est largement assure, constitue lÕaspect le plus important de ses obli-
gations touchant les droits conomiques, sociaux et culturels, et est assimilable son
rle de protecteur des droits civils et politiques.È
(E/CN.4/Sub.2/1999/122)
DÕautres importants principes des droits de lÕhomme, qui pourraient avoir une incidence sur les OGM mais qui ne figurent toutefois pas dans la Dclaration universelle des droits de lÕhomme, sont les droits un choix clair et la participation dmocratique.
LÕexistence des OGM met en relief la question du droit un choix clair qui drive du concept thique de lÕautonomie des individus. Ce principe peut tre appliqu, par exemple, dans le dbat sur lÕtiquetage des produits alimentaires labors partir dÕOGM pour faire en sorte que les consommateurs sachent ce quÕils consomment et soient en mesure de prendre des dcisions en connaissance de cause. Le choix clair et les mesures qui en dcoulent prsupposent lÕaccs lÕin- formation et des ressources appropries. Les consommateurs nÕont pas tous accs dans les mmes conditions une information et des ressources leur permettant de prendre des dcisions en connaissance de cause propos des OGM. En particulier dans les pays en dveloppement, les gens trs pauvres (les femmes comme les hommes) peuvent ne pas disposer des renseignements les plus lmentaires pour prendre des dcisions qui peuvent avoir une incidence sur leur sant et leur capacit subvenir leurs propres besoins. Toute stratgie dÕinformation du public devrait inclure des mthodes appropries pour toucher les groupes les moins instruits, les plus pauvres et les plus dfavoriss afin quÕils puissent prendre des dcisions en fonction de leurs besoins.
Le droit la participation dmocratique correspond la ncessit de justice et dÕquit qui sont le souci majeur en ce qui concerne les dcisions relatives aux OGM. Les principes de justice peuvent inclure lÕgalit entre les sexes, les besoins de chacun, la transparence, la responsabilit et lÕexis- tence de procdures justes et dmocratiques. Les jeunes, hommes et femmes, en particulier ceux qui sont pauvres et dnus de tout pouvoir sont peu duqus et nÕont pas les moyens dÕintervenir dans la vie de la socit pour influencer les dcisions concernant les OGM. Il faut leur donner toutes les possibilits de participer au dbat relatif lÕimpact des OGM sur leur vie et leurs moyens de subsistance, ainsi quÕaux avantages que ces organismes pourraient ventuellement apporter. Ils devraient avoir le droit de choisir le produit qui pourrait leur tre utile. Un fait proc- cupant est que les gnrations futures nÕauront pas pu se faire entendre ni voter propos des dci- sions concernant les OGM, ce qui veut dire quÕil faut trouver des faons de veiller ce que leurs intrts soient pris en considration. Nous devons faire en sorte que les gnrations futures puis- sent satisfaire leurs besoins spcifiques, y compris ceux qui dcouleront de changements imprvi- sibles touchant lÕenvironnement. ¥
Le droit à la participation démocratique
Le droit à un choix éclairé
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT 7
La scurit des aliments, lÕenvironnement et les OGM sont lis dans lÕesprit des consommateurs qui, par leurs achats, influenceront de faon dter-
minante les dcisions relatives lÕavenir de cette technolo- gie. On peut regrouper plusieurs proccupations des consommateurs dans les six catgories suivantes:
Scurit sanitaire des aliments. Les proccupations des consommateurs propos des OGM concernent principale- ment la scurit sanitaire des aliments. tant donn les
problmes poss par certaines denres alimentaires non transgniques, comme les questions des allergnes, des rsidus de pesticides, des contaminants microbiologiques et, ces derniers temps, de lÕencphalopathie spongiforme bovine (ESB) (la maladie dite Çde la vache folleÈ) et des mala- dies quivalentes qui frappent les tres humains, les consommateurs ont parfois des doutes au sujet de la scurit sanitaire des denres alimentaires produites en utilisant les nouvelles technolo- gies. Les mthodes auxquelles recourent les pouvoirs publics pour assurer la scurit des OGM sont discutes dans la section Analyse du risque, p. 14.
Impact sur lÕenvironnement. Une autre proccupation du public est la possibilit que les OGM per- turbent lÕquilibre de la nature. Les OGM sont des produits non traditionnels dont la dissmination peut forcer un ajustement des cosystmes qui ne correspondra pas ncessairement aux objectifs recherchs. Certains craignent galement que des croisements avec des populations sauvages nÕen- tranent une ÇpollutionÈ gntique. Une autre question, qui sÕapplique galement aux organismes non gntiquement modifis, est de savoir si les tests de prdissmination (surtout sÕils sont limits des essais en laboratoire ou des modlisations par ordinateur) constituent une protection appro- prie pour lÕenvironnement ou si un suivi ultrieur est galement ncessaire. LÕampleur du suivi postdissmination ncessaire pour protger les cosystmes, surtout en ce qui concerne les espces ayant une longue dure de vie comme les arbres forestiers, devient une question thique autant quÕune question technique. LÕtat actuel des connaissances au sujet de lÕimpact des OGM sur lÕenvi- ronnement est pass en revue dans la section Les OGM et lÕenvironnement, p. 19.
Risques et avantages perus. Quand ils dterminent leur opinion propos des OGM, les consom- mateurs comparent les avantages que leur parat apporter la nouvelle technologie aux risques quÕelle leur semble entraner. tant donn que pratiquement aucun OGM vgtal ou animal actuellement ou bientt disponible ne prsente des avantages vidents pour les consommateurs, ils se demandent pourquoi ils devraient assumer les risques ventuels. On dit que ce sont les consommateurs qui prennent les risques alors que les producteurs (ou les fournisseurs ou les entreprises) en tirent les avantages. Les mthodes scientifiques utilises pour valuer les risques, ainsi que leurs rapports avec la gestion et la communication des risques, sont discuts dans la sec- tion Les OGM et la sant humaine, p. 14.
Questions cls tudier dÕun point de vue thique
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QUESTIONS CLS Ë TUDIER DÕUN POINT DE VUE THIQUE8
Transparence. Il est dans lÕintrt lgitime et dans le droit des consommateurs dÕobtenir des ren- seignements concernant les OGM utiliss dans lÕagriculture. Il sÕagit dÕabord de rglementer com- ment diffuser lÕinformation pertinente et communiquer les risques connexes de faon transparente. LÕanalyse scientifique des risques cherche permettre aux experts de prendre des dcisions pour rduire le plus possible les dangers auxquels pourraient tre exposs le systme dÕapprovisionnement alimentaire et lÕenvironnement. Toutefois, les consommateurs peuvent sou- haiter galement davantage de transparence pour protger leur droit ne se prononcer quÕen connaissance de cause. Un moyen souvent mentionn de protger ces droits est lÕtiquetage des produits, quÕils soient ou non transgniques. Le consentement clair et lÕtiquetage sont discuts dans la section concernant Les OGM et la sant humaine, p. 14.
Responsabilisation. Les consommateurs peuvent souhaiter participer davantage aux dbats locaux, nationaux et internationaux et donner leur avis sur la politique suivre. Le public nÕa actuellement accs quÕ trs peu de tribunes o discuter de la vaste gamme des questions lies aux OGM. De ce fait, ceux qui sÕintressent particulirement un aspect des OGM, par exemple leur impact sur lÕenvironnement, peuvent logiquement chercher faire valoir leurs proccupations dans une tribune constitue une autre fin, par exemple lÕtude de lÕtiquetage. LÕune des ques- tions connexes est de savoir comment assurer la transparence des activits du secteur priv devant les tribunes publiques et, par consquent, comment forcer les organismes des secteurs public et priv rendre compte de leurs activits.
quit. JusquÕ prsent, lÕutilisation des OGM dans lÕagriculture a surtout t axe sur la rduction des cots au niveau de lÕexploitation agricole, principalement dans les pays en dveloppement. Chaque socit possde des normes thiques qui reconnaissent lÕimportance de faire en sorte que ceux qui ne peuvent pas satisfaire leurs besoins alimentaires fondamentaux aient accs des moyens appropris pour y parvenir. LÕanalyse thique peut examiner dans quelle mesure les soci- ts, les collectivits et les particuliers sÕacquittent de leur responsabilit morale de veiller ce que la croissance conomique ne se traduise pas par lÕexistence dÕun cart toujours croissant entre les pauvres (majoritaires) et les nantis (peu nombreux). SÕils sont intgrs de faon approprie avec dÕautres technologies aux fins de la production de denres alimentaires et dÕautres produits et ser- vices agricoles, les OGM peuvent, au mme titre que dÕautres biotechnologies, contribuer de faon importante satisfaire lÕavenir les besoins de la population humaine. Se pose alors avec acuit la question de savoir si lÕon peut orienter le dveloppement et lÕutilisation des OGM dans lÕagricultu- re vers lÕamlioration de la nutrition et de la sant des consommateurs pauvres, en particulier dans les pays en dveloppement. ¥
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Le systme de production et de distribution agricole peut tre considr comme une chane dÕapprovi- sionnement (voir figure): i) les transformateurs et
les dtaillants acheminent les produits des producteurs aux consommateurs; ii) les publicitaires, les militants, les membres de groupes de pression et les mdias cherchent influencer les dcisions qui sont prises chacune des tapes de la chane dÕapprovisionnement; iii) les organismes publics de rglementation valuent les risques, tablissent des rgles et en vrifient lÕapplication; iv) les producteurs de denres alimentaires, de poisson, de fibres et de produits forestiers
achtent des intrants tels que des graines, du matriel vgtal, des produits agrochimiques, des engrais, des aliments pour animaux, des agents de fermentation et de lÕquipement; et v) les OGM parviennent au public par lÕentremise des marchs. Les consommateurs Ð cÕest--dire, en ralit, tous les habitants de la plante, y compris les gnrations futures Ð sont galement directement concerns.
Les OGM dans la chane dÕapprovisionnement alimentaire
Source: Adapté de Economic impacts of genetically modified crops on the agrifood sector: a synthesis. Document de travail de la Direction générale de l’agricultu- re de la Commission européenne. Les recherches effectuées pour ce document de travail ont pris fin le 31 mars 2000.
Les OGM dans la chaîne alimentaire
FOURNISSEURS D'INTRANTS
Produits dérivés d'OGM
• Évaluation du risque, évaluation des options et gestion du risque
• Lignes directrices • Suivi et étiquetage
• Communication du risque
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LES OGM DANS LA CHAëNE DÕAPPROVISIONNEMENT ALIMENTAIRE10
Il est impossible de ne pas tenir compte des choix que font les consommateurs sur le march: ils ne sont pas obligs dÕacheter quelque chose sÕils dcident de ne pas le faire. SÕils nÕachtent pas un produit, celui-ci cessera simplement dÕtre fabriqu. tant donn que, dans certains pays, de nom- breux consommateurs refusent dÕacheter les OGM actuels, les producteurs de plantes transg- niques repensent les dcisions quÕils ont prises en matire de production, et lÕindustrie agroalimentaire se restructure rapidement et modifie mme ses priorits de recherche et de dve- loppement pour tenir compte de cette raction.
Les consommateurs peuvent toutefois exprimer leurs points de vue ou leurs prfrences ailleurs que sur le march. Ils peuvent dsirer avoir plus directement leur mot dire sur la faon dont leur alimentation est produite, mais, dans le monde entier, leur lieu de rsidence et de travail est de plus en plus souvent loign des endroits o leurs denres alimentaires sont cultives et transformes. Comme ils ne sont donc pas associs directement au processus de production, il se peut que leurs points de vue sur le systme agroalimentaire et ses produits ne soient gure pris en considration.
Outils et techniques utilisés par les fournisseurs d’intrants agricoles La plupart des mthodologies et des produits intermdiaires utiliss pour lÕlaboration dÕOGM, par exemple les empreintes molculaires et les technologies de transformation, sont actuellement protgs par des droits de proprit intellectuelle dtenus par le secteur priv. Par consquent, il est plus difficile pour les chercheurs du secteur public, en particulier dans les pays en dveloppement, dÕavoir accs ces pro- duits et mthodologies, ce qui limite leur capacit mettre au point des varits amliores de plantes ou dÕanimaux, y compris des OGM qui
pourraient contribuer surmonter les problmes particuliers auxquels est confronte la production locale ou nationale. La situation actuelle tend donc accrotre lÕcart entre les socits les plus riches et les plus pauvres.
Ces dernires annes, un nombre croissant de produits labors partir dÕOGM ont t mis au point et offerts aux consommateurs. Les tableaux 1 et 2 prsentent quelques-uns des OGM agri- coles disponibles sur le march ou en cours de dveloppement.
OGM contenant des toxines de Bacillus thuringiensis pour lutter contre les insectes Certaines des premires modifications gntiques de plantes ont port sur la protection contre les insectes afin de rduire les cots de production des agriculteurs. Les OGM rsistant aux insectes ont t prsents comme un moyen de tuer certains ravageurs et de rduire les applications dÕin- secticides synthtiques conventionnels. Depuis plus de 50 ans, on utilise des formulations conte- nant la bactrie productrice de toxines Bacillus thuringiensis (Bt) que lÕon pulvrise comme les insecticides agricoles conventionnels pour tuer les insectes phytophages. Les tudes relatives lÕinnocuit de Bt pour les tres humains nÕont rvl aucun effet nocif pour la sant.
OGM déjà commercialisés ou en cours de développement
Des fraises poussant -10 oC, grce lÕinsertion dÕun gne producteur dÕantigel provenant de la plie rouge
J. ESQ U
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Ë la fin des annes 80, les scientifiques ont commenc transfrer dans des plantes cultives les gnes qui produisent les toxines insecticides dans Bt. Leur intention tait de faire en sorte que cette toxine soit produite par toutes les cellules de ces OGM. Des varits de plantes transgniques Bt sont aujourdÕhui cultives sur plus de 5 millions dÕhectares. Aucun effort nÕa t fait pour accrotre le taux de croissance ou le rendement potentiel de ces varits, mais les agriculteurs les ont accueillies chaleureusement puisquÕelles devaient permettre de mieux lutter contre les insectes et de rduire leurs cots. Toutefois, aux tats-Unis, lÕimpact de lÕutilisation de ces OGM contenant des toxines de Bt sur les rendements et sur le nombre dÕapplications dÕinsecticides conventionnels a prsent dÕimportantes variations dÕun endroit lÕautre et dÕune anne lÕautre, qui tenaient en
TABLEAU 1 Quelques OGM actuellement disponibles
OGM Modification Source du gène Objet de la modification Principaux génétique génétique bénéficiaires
Maïs Résistance Bacillus Réduction des dégâts Agriculteurs aux insectes thuringiensis causés par les insectes
Soja Tolérance Streptomyces Élimination plus efficace Agriculteurs aux herbicides spp des plantes adventices
Coton Résistance Bacillus Réduction des dégâts Agriculteurs aux insectes thuringiensis causés par les insectes
Escherichia Production de chymosine Vaches Utilisation dans Transformateurs et coli K 12 ou de rennine la fabrication du fromage consommateurs
Œillets Altération de la couleur Freesia Production de variétés Détaillants et différentes de fleurs consommateurs
TABLEAU 2 Quelques OGM en cours de développement
OGM Modification Source du gène Objet de la modification Principaux génétique génétique bénéficiaires
Raisins Résistance Bacillus Lutte contre Agriculteurs aux insectes thuringiensis les insectes
Tilapia Hormone Plie arctique/ Accroissement de Pisciculteurs de croissance saumon l’efficacité de croissance
Peupliers Tolérance aux Streptomyces Simplification de la lutte Gestionnaires herbicides spp. contre les plantes forestiers
adventices
Eucalyptus Modification de la Pinus sp. Production de pâte Gestionnaires forestiers composition de la lignine et de papier et industrie du papier
Riz Expression de Jonquille Oligo-élément ajouté Consommateurs bêta-carotène Erwina présentant une carence
en vitamine ADC
Mouton Expression d’un H. sapiens Lait enrichi Consommateurs anticorps dans le lait
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partie aux diffrences entre lÕeffet prvu de ces varits sur les parasites cibls et les rsultats rels obtenus sur le terrain. Certaines de ces diffrences taient dues une distribution irrgulire de la toxine lÕintrieur des plantes durant leur croissance, dÕautres taient dues aux variations dans les populations de parasites cibls et non cibls, ou encore lÕaccumulation de toxines dans les insectes phytophages, ce qui accroissait la mortalit des prdateurs et des parasites consommant ces insectes.
Comme dans le cas des varits offrant une rsistance aux insectes obtenue par les mthodes de slection conventionnelles, les agriculteurs devraient grer les varits transgniques en utilisant un systme de gestion intgre de la lutte contre les ravageurs et de la production conu en fonction des principes de lÕcologie afin de tenir compte des variations fondamentales. En Amrique du Nord, on estime aujourdÕhui gnralement que ces varits ont rduit les frais de lutte contre les ravageurs. On recommande de les utiliser en mme temps que des stratgies de gestion de la rsistance des plantes htes afin de ralentir lÕvolution des ravageurs pouvant les utiliser comme nourriture.
Les OGM pour les transformateurs de denrées alimentaires et les détaillants Les transformateurs de denres alimentaires et les dtaillants souhaitent aussi vivement rduire leurs cots et profiter des avantages potentiels de la biotechnologie. Comme le montre lÕencadr, des tomates transgniques ont t conues pour offrir des options supplmentaires aux transfor- mateurs et aux dtaillants, mais elles nÕont gure eu de succs sur le march des lgumes frais.
OGM mis au point à l’intention des intermédiaires de la chaîne d’approvisionnement alimentaire: les tomates Flavr Savr
La marque de tomate Flavr Savr a t le premier produit alimentaire transgnique offert aux consommateurs sur le
march des produits frais. Ces tomates avaient t gntiquement modifies pour retarder leur mrissement et
pouvaient donc se conserver plus longtemps. Calgene, aux tats-Unis, a distribu cette marque de tomate transg-
nique en 1994.
Ce produit indit tait cens offrir de multiples avantages aux producteurs de tomate en:
¥ permettant de disposer de plus de temps pour le transport;
¥ permettant la pratique de la cueillette mcanique en infligeant peu de meurtrissures aux fruits;
¥ proposant aux consommateurs une tomate mrie sur pied, la diffrence de celles qui sont cueillies encore
vertes et doivent tre arroses dÕthylne pour mrir.
Depuis 1996, les tomates Flavr Savr ont t retires du march des produits frais aux tats-Unis. La manipula-
tion du gne de mrissement avait apparemment eu des consquences imprvues telle quÕune peau molle, un got
trange et des changements dans la composition de la tomate, qui cotait aussi plus cher que les tomates non trans-
gniques.
Les tomates The Flavr Savr sont encore populaires auprs des transformateurs. Leur dure de vie plus longue
offre plus de souplesse pour lÕexpdition et lÕentreposage entre le champ et lÕusine de traitement.
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Le cas de la tomate Flavr Savr montre quel point les dtaillants sont sensibles lÕopinion des consommateurs quand ils sont proches dÕeux. Les proccupations relatives la confiance des consommateurs peuvent lÕemporter sur les avantages court terme quÕun transformateur pour- rait obtenir en utilisant des ingrdients drivs dÕOGM. Si le public a lÕimpression que les aliments transgniques sont dangereux ou portent prjudice lÕenvironnement et rejette donc certains pro- duits, les entreprises peuvent refuser les OGM. Ë lÕheure actuelle, dans le secteur de lÕalimenta- tion, certaines entreprises importantes ont retir de leurs produits les ingrdients drivs dÕOGM parce quÕelles craignent que les consommateurs les rejettent. Les changements intervenant dans la demande dÕingrdients drivs dÕOGM de la part des transformateurs et des dtaillants se rper- cutent en amont de la chane dÕapprovisionnement alimentaire et influencent les agriculteurs au moment de dcider sÕils doivent ou non cultiver des OGM.
Les poissons et les animaux d’élevage transgéniques sont encore absents de la chaîne d’approvisionnement alimentaire Aprs certains problmes initiaux, le dveloppement et la commercialisation des cultures transg- niques ont connu une croissance considrable, mais les produits drivs dÕanimaux dÕlevage transgniques ne sont pas encore prsents dans les grands systmes de production alimentaire. Plus de 50 transgnes diffrents ont t insrs exprimentalement dans des animaux dÕlevage, mais cela reste un exercice trs difficile qui ne se pratique pas aussi couramment que pour les plantes. Les premires recherches portant sur les animaux dÕlevage transgniques ont galement t accompagnes de certaines perturbations physiologiques, notamment une rduction de la capacit de reproduction. Ces expriences ont soulev des problmes thiques concernant le bien- tre des animaux, ce qui a encore rduit lÕintrt des consommateurs.
JusquÕ prsent, lÕide que des denres alimentaires puissent provenir dÕanimaux transg- niques nÕa pas t bien accepte par les consommateurs. Il ressort constamment des enqutes que le public est mieux dispos lÕgard des plantes transgniques que des animaux transgniques. LÕexprimentation avec des animaux et leur altration suscitent davantage de rticences et ont des rpercussions ventuelles de plus grande ampleur. Diverses cultures et religions limitent ou inter- disent la consommation de certains aliments dÕorigine animale. Le public semble toutefois plus enclin consommer par voie orale ou sous forme dÕinjection des produits pharmaceutiques pro- venant dÕanimaux transgniques.
Des recherches effectues sur des poissons transgniques ont donn dÕexcellents rsultats, mais aucun poisson ainsi modifi nÕa t commercialis. Il sÕagit, dans la plupart des cas, dÕespces dÕlevage auxquelles on a insr des gnes rgissant la production des hormones de croissance, pour accrotre le taux de croissance et le rendement de ces poissons. Diverses questions thiques ont t souleves propos du bien-tre de ces poissons transgniques et de leur impact sur lÕenvi- ronnement, mais certains affirment galement que ces poissons ont de nombreux attributs en com- mun avec les gnotypes et les espces de poisson exognes slectionns selon les mthodes conventionnelles, et lÕexprience a prouv quÕon peut ainsi accrotre la production dÕanimaux aquatiques sans rencontrer dÕopposition de la part du public. ¥
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Une grande confusion rgne pro- pos des risques que les OGM posent pour la scurit alimentaire et lÕenvi- ronnement. Les organismes de rgle- mentation laborent leurs normes dÕaprs les valuations scientifiques des risques. Beaucoup sont dÕavis que la prise de dcisions fonde sur des critres scientifiques est la seule faon objective de dfinir la politique adopter dans un monde o il existe une grande diversit dÕopinions, de valeurs et dÕintrts. LÕanalyse du risque comporte trois lments: lÕvaluation du risque, la gestion du risque et la com- munication du risque.
Évaluation du risque Dans le contexte de la scurit sanitaire des aliments, le risque inclut deux lments: i) le danger potentiel, un facteur intrinsque (par exemple un agent biologique, chimique ou physique prsent dans une denre alimentaire ou lÕtat de cette denre susceptible de porter prjudice la sant) qui indique les dgts que pourrait causer un vnement donn; et ii) la probabilit que cet vnement se produise. Ainsi, pour ce qui est des substances chimiques, on considre que le risque est le dan- ger potentiel x la probabilit dÕexposition; dans le cas de la quarantaine, cÕest lÕventuel domma- ge pouvant tre inflig par le ravageur x la probabilit dÕintroduction, etc.
LÕvaluation du risque est un processus fond sur des donnes scientifiques comportant les tapes suivantes: i) lÕidentification du danger potentiel; ii) la caractrisation de ce danger; iii) lÕvaluation de lÕexposition; et iv) la caractrisation du risque. Les dangers potentiels, et leur probabilit de concrtisation, sont donc tudis ainsi, et des modles sont labors pour prvoir le risque. Ces pr- visions peuvent aussi tre vrifies ultrieurement, par exemple au moyen dÕtudes statistiques (pidmiologiques).
Les deux composantes du risque prsentent un degr dÕincertitude faisant lÕobjet de nombreux dbats. Par exemple, on peut se demander si les mthodologies utilises pour estimer le risque rela- tif dÕautres facteurs connexes (prsence de rsidus de pesticide dans les denres alimentaires et introduction de ravageurs) ont une valeur prdictive suffisante pour les OGM. La composante de lÕanalyse du risque concernant le danger potentiel fait, en particulier, lÕobjet dÕun examen attentif.
Les OGM et la sant humaine
Analyse du risque
que leurs aliments sont sains et nourrissants
FA O
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Gestion du risque et analyse des options La gestion du risque 5, qui est distincte de lÕvaluation du risque, consiste examiner les diff- rentes mesures pouvant tre prises en consultation avec toutes les parties intresses, tout en tenant compte de lÕvaluation du risque et autres facteurs pertinents pour la protection de la sant des consommateurs, et pour la promotion de pratiques commerciales quitables de mme que, le cas chant, en slectionnant les options appropries en matire de prvention et de contrle.
Le danger pour lÕenvironnement est probablement moins facile quantifier que le danger pour la sant. Il porte galement sur un bien commun plutt que sur un bien priv (la sant). Dans les deux cas, seule une exprience long terme pourra dterminer si lÕvaluation et la gestion du risque ont donn de bons rsultats. Quand une stratgie de gestion du risque approprie est appli- que des problmes environnementaux, et non pas des problmes concernant la scurit sani- taire, il faut commencer par dcrire un problme ainsi que les buts, les objectifs et les valeurs qui guident la recherche de la solution ce problme. On procde alors une analyse des options pour envisager le plus grand nombre possible de solutions, ce qui permet de crer de nouvelles options ou combinaisons dÕoptions au lieu de rduire le champ de lÕanalyse. Quand on peut comparer les avantages et les inconvnients dÕune vaste gamme de solutions envisageables, il est davantage possible dÕassurer la pleine participation de la socit concerne.
Communication du risque La communication du risque est lÕchange interactif dÕinformations et dÕides entre les valua- teurs, les gestionnaires du risque, les consommateurs, lÕindustrie, la communaut universitaire et dÕautres parties intresses par lÕentremise du processus dÕanalyse du risque. LÕchange dÕinfor- mations concerne les facteurs lis au risque, ainsi que les faons dont celui-ci est peru, et inclut la prsentation des conclusions de lÕvaluation du risque et lÕexplication des raisons sur lesquelles sont fondes les dcisions en matire de gestion du risque. La communication tablie avec le public au sujet du risque doit absolument venir de sources crdibles et inspirant confiance.
Les aliments sont des mlanges complexes de composs caractriss par la grande diversit de leur composition et de leur valeur nutritionnelle. Les priorits varient, mais la scurit sanitaire des aliments proccupe les consommateurs de tous les pays. Ils aimeraient tre srs que les pro- duits transgniques commercialiss ont t tests de faon adquate et contrls pour assurer leur scurit et pour dceler les problmes ds quÕils surviennent. tant donn la complexit des pro- duits alimentaires, on continue de penser que la recherche sur la scurit sanitaire des aliments transgniques est plus difficile que les tudes sur leurs composantes comme les pesticides, les pro- duits pharmaceutiques, les substances chimiques industrielles et les additifs alimentaires. Les pays discutent des normes applicables aux OGM et des faons dÕassurer leur scurit dans le cadre
Sécurité des aliments génétiquement modifiés
5 Source: Rapport de la 23e session de la Commission du Codex Alimentarius , Rome, 28 juin - 3 juillet 1999.
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Division de l’information de la FAO
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ISBN 92-5-204560-0
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L es outils extrmement performants fournis ces dernires annes par la science et la technologie ont eu un impact pro- fond sur le secteur alimentaire et agricole dans le monde
entier. Des mthodes novatrices de production et de transformation ont rvolutionn de nombreux systmes traditionnels, et la capaci- t de la plante produire de la nourriture pour une population en expansion a volu un rythme sans prcdent.
Ces vnements se sont bien sr accompagns de changements radicaux dans lÕconomie et lÕorganisation sociale, ainsi que dans la gestion des ressources productives de la plante. CÕest notre rap- port mme avec la nature qui a t boulevers par les progrs tech- nologiques, qui nous permettent dsormais non seulement dÕobte- nir des amliorations gntiques grce la slection, mais de modi- fier des organismes vivants et de crer de nouvelles combinaisons gntiques pour obtenir des vgtaux, des animaux et des poissons plus rsistants et plus productifs. Il est normal que ces vnements suscitent presque invariablement des controverses et que lÕchange dÕarguments pour et contre leur mise en Ïuvre soit presque tou- jours intense, voire tendu.
Depuis plusieurs annes, le gnie gntique permet dÕobtenir des vgtaux possdant une rsistance inne aux ravageurs et tolrant les herbicides. Le gnie gntique a permis dÕobtenir des poissons croissance rapide et rsistant au froid, par exemple, et des vaccins moins chers et plus efficaces contre les maladies du btail, ainsi que des aliments pour animaux qui renforcent la capacit dÕabsorption des nutriments des animaux; et ses applications en foresterie sont tudies en vue dÕaccrotre les caractristiques utiles dÕarbres de plantation comme les peupliers. Les cultures gntiquement modi- fies, qui permettent de rduire lÕutilisation des insecticides, pour- raient avoir un effet positif sur lÕenvironnement et les cots de pro- duction des agriculteurs, mme sÕil est encore trop tt pour raliser des analyses ex post facto.
Reconnatre la contribution potentielle des produits gntique- ment modifis la production alimentaire mondiale ne signifie pas
Avant-propos
AVANT-PROPOSiv
ignorer les risques concernant la scurit sanitaire et les effets imprvisibles sur lÕenvironnement, dont les plus souvent cits sont le transfert redout de toxines ou dÕallergnes et les effets ngatifs non prvus sur les espces non vises. Cela ne veut pas dire non plus que lÕon ne tienne pas compte dÕventuelles consquences ngatives long terme, telles que la rduction de la biodiversit cause de la perte de cultures traditionnelles. En outre, les orga- nismes gntiquement modifis (OGM), comme toutes les nouvelles technologies, sont des instruments qui peuvent tre utiliss pour le meilleur et pour le pire, de mme quÕils peuvent tre grs dmo- cratiquement au profit des plus ncessiteux ou dtourns par des groupes spcifiques qui dtiennent le pouvoir politique, cono- mique et technologique. Dans le cas des OGM, on notera que les principaux bnficiaires ce jour sont les gros producteurs agricoles vivant pour la plupart dans des pays dvelopps. Pour que les avan- tages de ces technologies soient partags plus quitablement avec les pays en dveloppement et les agriculteurs pauvres en ressources, le systme actuel de droits de proprit intellectuelle et dÕobstacles similaires au transfert rapide des biotechnologies modernes doit tre modifi. Avant tout, la recherche doit tre oriente sur les pays et les agriculteurs dfavoriss et il faut trouver le moyen de garantir que les avantages dcoulant dÕune production accrue profitent aux pauvres et aux victimes de lÕinscurit alimentaire.
La mise au point dÕOGM est sans doute aujourdÕhui la question qui soulve lÕventail le plus large et le plus controvers de ques- tions dÕthique concernant lÕagriculture et lÕalimentation. Alors que le progrs scientifique nous donne des outils toujours plus puis- sants et cre des possibilits apparemment sans limites, nous devons exercer la plus grande prudence et examiner dÕun point de vue thique la faon dont ces possibilits devraient tre utilises. Les pays fabriquant des produits gntiquement modifis doivent disposer de rglements clairs et responsables et dÕun organe faisant autorit pour garantir que les risques sont analyss de manire scientifique et que toutes les mesures de scurit possibles sont prises, par le biais de tests raliss avant la diffusion des produits des biotechnologies et dÕun suivi attentif une fois ces produits dis- smins. Enfin, et surtout, les droits fondamentaux une alimenta- tion suffisante et une participation dmocratique au dbat et aux dcisions ventuelles concernant les nouvelles technologies doivent
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT v
tre appliqus, de mme que le droit un choix exerc en connais- sance de cause.
La collection FAO: Questions dÕthique est lÕune des nombreuses initiatives prises rcemment par lÕOrganisation pour sensibiliser lÕopinion et amliorer la comprhension gnrale des questions dÕthique alimentaire et agricole. La prsente publication, la deuxime de cette collection, a t rdige en vue de diffuser les connaissances actuelles sur les organismes gntiquement modi- fis, tant sur le plan de la scurit sanitaire des aliments et de la pro- tection de la sant des consommateurs que sur le plan de la conser- vation de lÕenvironnement. Une distinction est faite entre les OGM qui font lÕobjet dÕune diffusion commerciale, dont la plupart peu- vent dsormais tre considrs comme faisant partie de la chane de lÕoffre agroalimentaire, et ceux qui sont en cours de mise au point.
Les bases scientifiques et politiques de lÕexamen des questions et des dcisions prises en matire de produits gntiquement modifis voluent bien entendu aussi rapidement que les biotechnologies elles-mmes. En ce qui concerne la scurit sanitaire des aliments gntiquement modifis et leurs incidences sur la sant des consommateurs, la FAO continue souligner lÕimportance dÕune gestion prcise des risques et dÕune communication effective leur propos, tout en mettant en lumire, avec un certain optimisme, les possibilits quÕoffrent ces produits de rsoudre les principaux pro- blmes nutritionnels, voire de prvenir les problmes de scurit sanitaire des aliments avec des OGM mis au point cet effet.
Les biotechnologies modernes constituent un moyen de slection possible, mais pas obligatoire, et des tudes supplmentaires sont ncessaires pour valuer les risques et les avantages qui y sont asso- cis. En outre, la crdibilit des allgations faites leur sujet ne peut tre assure que si des prcautions conomiques, environnemen- tales et thiques sont prises. En dernier ressort, une fois pris en compte les considrations thiques fondamentales et les droits de lÕhomme mentionns ci-dessus, le dbat international et les dci- sions qui seront prises en ce qui concerne les OGM seront influen- cs par les consommateurs eux-mmes. Comme le montre cette publication, en exerant leur choix dÕacheter ou non un produit, les consommateurs dterminent en partie le succs ou lÕchec dÕun produit sur le march. SÕils rejettent un produit, les producteurs ne peuvent faire autrement que de ragir en consquence.
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AVANT-PROPOSvi
Le programme de la FAO en matire dÕthique est un domaine prioritaire pour une action interdisciplinaire dans toutes les divi- sions techniques et normatives. Vu le rle catalytique que la FAO joue en tant que forum neutre, jÕai bon espoir que les connaissances et lÕexprience dont nous disposons pour examiner cette question capitale stimuleront et orienteront correctement le dbat mondial de vaste porte et souvent difficile sur les questions dÕthique. ¥
Jacques Diouf Directeur gnral de la FAO
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Table des matires
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La gntique classique et les biotechnologies modernes emploient comme matires premires des gnes naturels. La conservation de la biodiversit est donc un grand problme mondial
FA O
/11735/A . O
D O
U L
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT 1
Dans la plupart des cultures, les gens ont mis au point de nombreuses biotechnologies quÕils conti- nuent dÕutiliser et dÕadapter. On sait que certaines
dÕentre elles telles que la manipulation de micro-orga- nismes en fermentation pour faire du pain, du vin ou de la pte de poisson, ou lÕutilisation de rnnine pour la fabrica-
tion du fromage, sont employes depuis des millnaires. Un important sous-secteur des biotechno- logies modernes est le gnie gntique, cÕest--dire le recours aux techniques modernes de la biologie molculaire pour manipuler le patrimoine gntique dÕun organisme en introduisant ou li- minant des gnes spcifiques. On appelle organisme gntiquement modifi (OGM), ou encore organisme vivant modifi (OVM) ou organisme transgnique, tout organisme vivant possdant une combinaison de matriel gntique indite, obtenue par recours la biotechnologie moderne1.
Les techniques classiques de slection vgtale et les biotechnologies modernes comprennent toutes deux certains ensembles dÕoutils qui ne peuvent fonctionner que si lÕon utilise comme matire premire des gnes qui existent lÕtat naturel. La prservation de la diversit biologique est donc importante pour lÕensemble de la plante. De nos jours, aucun pays ne peut se passer de ressources venues dÕailleurs. Cette interdpendance soulve diverses questions thiques concer- nant les droits des pauvres et des faibles profiter quitablement des avantages de la science, jouir dÕun accs quitable aux technologies et aux ressources gntiques, et avoir leur mot dire dans le dbat portant sur ces ressources. Ce sont l des questions importantes, tout comme celles qui concernent les mesures prendre; elles sont tudies dans dÕautres tribunes et font lÕobjet dÕautres publications.
Les zones tropicales sont celles qui possdent la plus grande diversit gntique agricole, mais les outils de la biotechnologie moderne appartiennent principalement des entreprises du secteur priv des zones tempres. Des particuliers et des entreprises utilisent ces outils pour cultiver des plantes ou fabriquer des produits, y compris des OMG, en vue de leur distribution commerciale. Les outils servant la production des OGM peuvent ventuellement permettre une adaptation plus prcise des gnotypes au milieu environnant, aux besoins nutritionnels et dittiques et aux prfrences des consommateurs. Mais les OGM augmentent-ils la quantit de denres alimentaires disponibles aujourdÕhui et les populations sous-alimentes peuvent-elles, grce eux, obtenir plus facilement des aliments plus nutritifs ou, au contraire, nÕont-ils servi jusquÕ prsent quÕ accrotre les bnfices des agriculteurs et les profits des grandes entreprises? Les questions dÕthique concernant les outils quÕutilisent les chercheurs pour crer des OGM pourraient porter principalement sur la faon de les utiliser pour quÕils contribuent davantage la scurit alimentaire, en particulier dans les pays impor- tateurs prsentant un dficit vivrier.
Introduction
1Cette définition de OVM est extraite du Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques, article 3, alinéa g). À l’alinéa i) de l’article 3, la «biotechnologie moderne» est définie comme «l’application de [techniques telles que]: a. techniques in vitro aux acides nucléiques, y compris la recombinaison de l’acide désoxyribonucléique (ADN) et l’introduction directe
d’acides nucléiques dans des cellules ou organites,ou b. la fusion cellulaire d’organismes n’appartenant pas à une même famille taxonomique, qui surmontent les barrières naturelles de la physiologie de la reproduction ou de la recombinaison et qui ne sont pas des techniques uti- lisées pour la reproduction et la sélection de type classique».
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INTRODUCTION2
2 Transgenic plants and world agriculture. Publié sous les auspices de The Royal Society of London. Juillet 2000. National Academy Press, Washington.
Certaines de ces questions concernent le caractre dÕexclusivit de la plupart des biotechnologies utilises aujourdÕhui pour produire des OGM. Dans un rapport publi rcemment 2, les acadmies nationales des sciences du Brsil, de la Chine, de lÕInde, du Mexique, du Royaume-Uni et des tats-Unis invitaient conjointement les entreprises prives et les institutions de recherche prendre des disposi- tions pour diffuser la technologie du gnie gntique auprs de scientifiques responsables afin de lutter contre la faim et dÕamliorer la scurit alimentaire dans les pays en dveloppement. Cette technologie fait actuellement lÕobjet de brevets et dÕaccords de licence qui imposent des conditions trs strictes.
Une deuxime srie de questions dÕthique relatives la biotechnologie moderne concerne les consquences potentielles de lÕutilisation des OGM ou de toute autre technologie nouvelle pour intensifier la production de denres alimentaires dans le but dÕamliorer la scurit alimentaire. Suite
lÕexprience acquise lors de la rvolution verte il y a 40 ans, certains observateurs ont conclu que les varits dont le rendement tait influenc positivement par les intrants profitaient plus rapidement et de faon disproportionne aux agriculteurs les plus riches. Dans les zones disposant dÕune infrastructure adquate dans lesquelles la rvo- lution verte a t pratique, la commercialisation de la production a eu pour rsultat net dÕaccrotre la quantit et de rduire le prix des denres alimentaires, tandis que les secteurs moins favoriss accusent toujours un certain retard. La situation des femmes est une source de proccupa- tion particulire, tant donn quÕelles participent trs activement
lÕagriculture durable et la prparation de la nourriture pour leurs familles. Elles risquent de subir fortement les rpercussions conomiques et sociales entranes par la disparition des cultures tradi- tionnelles ou les modifications des modes dÕutilisation des terres, ainsi que par tout problme ven- tuel concernant la sant des membres de leurs familles.
La troisime et dernire srie de questions dÕthique lies lÕutilisation potentielle dÕOGM pour assurer la scurit alimentaire tient aux consquences imprvues des mesures prises. Ë mesure que les OGM pntreront dans les chanes dÕapprovisionnement de denres alimentaires et de fibres, ils se disperseront de plus en plus dans les cosystmes, y compris les cosystmes agricoles. Les exp- riences prcdentes concernant les bases gntiques vgtales et animales trop limites, les doses excessives dÕengrais et de pesticides, et les coulements de dchets provenant des units pratiquant un levage intensif, donnent penser que les impacts sur lÕenvironnement touchent dÕabord les fonctions de production des cosystmes agricoles avant de sÕtendre aux cosystmes environ- nants. En plus des modifications quÕils entranent dans la production agricole, ces impacts peuvent perturber dÕautres services utiles rendus par ces cosystmes tels que le pigeage du carbone et la correction des effets cotoxicologiques. Avant de passer lÕexamen du dbat mondial sur les OGM, qui porte dans une large mesure sur la scurit sanitaire des aliments et lÕenvironnement, il convient de noter que lÕon confond souvent les questions dcoulant de lÕapplication potentielle de la biotechnologie moderne en matire de scurit alimentaire et celles que pose la diffusion proprement dite des OGM sous forme de pro- duits par lÕentremise des chanes dÕapprovisionnement.
FA O
LL
LÕtat nutritionnel des femmes et de leur famille peut tre gravement compromis par la perte des cultures vivrires traditionnelles
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT 3
Diverses opinions sur les OGM (Exemples extraits des médias de langue anglaise)
La sécurité alimentaire ÇPour nourrir, dÕici lÕan 2050, 10,8 milliards dÕtres humains, nous devrons convertir 15 millions de miles carrs de forts vierges,
de zones naturelles et de terres marginales en terres arables exploites au moyen de produits agrochimiques. Les cultures gnti-
quement modifies offrent les meilleures possibilits de rgler les problmes futurs dcoulant de la ncessit de nourrir 5 mil-
liards de bouches supplmentaires au cours des 50 prochaines annes.È
Michael Wilson, Scottish Crops Research Institute, 1997
ÇCe qui menace le plus la scurit alimentaire sur la terre est la concentration de la chane alimentaire entre les mains de
quelques acteurs riches et puissantsÉ En cherchant ainsi contrler la chane alimentaire par la mise au point dÕorganismes
gntiquement modifis, ils risquent de devenir des fauteurs de famine au troisime millnaire.È
George Monbiot, , journaliste, Socialist Worker, 1999
Impact sur les pays en développement ÇSi les importations [de semences dÕOGM] É sont inutilement rglementes, les vritables perdants seront les pays en dvelop-
pement. Au lieu de tirer profit de dcennies de dcouvertes et de recherches, les gens de lÕAfrique et de lÕAsie du Sud-Est reste-
ront prisonniers dÕune technologie dpasse. Leurs pays risquent dÕen souffrir fortement pendant de longues annes. Il est
crucial quÕils rejettent la propagande des groupes extrmistes avant quÕil ne soit trop tard.È
Jimmy Carter, ancien Président des États-Unis, 1998
ÇIl y a encore des gens qui ont faim É mais ils ont faim parce quÕils nÕont pas dÕargent et non pas parce quÕil nÕy a pas de denres
alimentaires acheterÉ nous nÕadmettons pas que lÕon prenne faussement prtexte de notre pauvret pour se gagner lÕappui de
la population europenne.È
(En rponse un scientifique europen qui avait dclar: ÇCeux qui veulent quÕon interdise les OGM compromettent la situation des
populations affamesÈ.)
Tewolde Berhan Gebre Egziabher, Institute for Sustainable Development, Addis Abeba (Éthiopie), 1997
Nutrition ÇLa technologie gntique pourrait aussi amliorer la nutrition. Si les 250 millions dÕAsiatiques souffrant de malnutrition et se
nourrissant actuellement de riz pouvaient cultiver et consommer du riz gntiquement modifi contenant de la vitamine A et du
fer, lÕincidence de la carence en vitamine A É diminuerait, de mme que celle de lÕanmie.È
Robert Paarlberg dans Foreign Affairs, 2000
ÇCÕest un abus de confiance envers la population: les paysans asiatiques reoivent du riz dor gntiquement modifi (dont les
bienfaits nÕont pas t prouvs), et lÕÇorÈ tombe entre les mains des socits de biotechnologie.È
Rural Advancement Foundation International, 2000
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INTRODUCTION4
Au cours des dernires dcennies, la biotechnologie moderne a offert de nouvelles possibilits dans des secteurs trs varis, de lÕagriculture la production pharmaceutique, mais lÕampleur du dbat mondial sur les OGM est sans prcdent. Ce dbat, trs vif et parfois empreint dÕune forte char- ge affective, a polaris tant les scientifiques, les producteurs de denres alimentaires, les consomma- teurs et les groupes de dfense de lÕintrt public que les pouvoirs publics et les dcideurs.
Initialement trs localis, ce dbat a rapidement gagn toutes les rgions du monde. De ce fait, lÕin- trt quÕil suscite et le nombre de partisans et dÕadversaires de certaines options qui sÕy rattachent se sont fortement accrus Ð un point tel que, mme dans les journaux de diffusion locale, la publication dÕarticles sur les denres alimentaires gntiquement modifies est devenue presque banale (voir quelques exemples rcents dans lÕencadr p. 3).
Les diverses questions qui ont t souleves propos des OGM rvlent certains des problmes plus gnraux auxquels sont confrontes lÕagriculture 3, la, science, la technologie et la socit lÕheure actuelle. En tant que tribune intergouvernementale, il incombe la FAO dÕexaminer les questions concernant lÕalimentation, la nutrition et lÕagriculture, de dterminer comment promouvoir lÕquit et la justice, et dÕassurer la scurit alimentaire. La FAO facilite lÕchange dÕides et dÕopinions afin de promouvoir la scurit alimentaire, le dveloppement rural et la conservation des ressources naturelles dans le monde entier et, plus particulirement, dans les pays en dveloppement (en adop- tant une approche thique). En outre, la FAO fournit une assistance technique, principalement aux pays en dveloppement qui en sont membres. CÕest dans ce contexte quÕelle a un rle important jouer pour ce qui est dÕexaminer et dÕvaluer les diffrents points de vue qui constituent une part essentielle du dbat mondial sur les OGM.
Le prsent rapport 4 cherche claircir et examiner certains aspects de ces points de vue dans une optique thique. Son principal objectif est de mettre en relief le rle des considrations thiques en ce qui concerne lÕalimentation et lÕagriculture, aussi bien la lumire du dbat sur les OGM quÕen ce qui concerne la scurit alimentaire et lÕenvironnement. Il met aussi en vidence certaines mesures en vue de leur examen par la communaut internationale et le grand public. ¥
3 L’agriculture inclut la foresterie et les pêches; le présent rapport s’appuiera toutefois principalement sur la fonction de production alimen- taire de l’agriculture pour examiner les questions d’éthique liées à la mise au point et à l’utilisation des OGM., 4 Une version préliminaire de cette publication a servi de documentation au Groupe d’experts éminents en matière d’éthique alimentaire et agricole à sa première session en septembre 2000.
Objectifs du présent rapport
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Certains aspects thiques des OGM se situent dans le contexte du droit une alimentation suffisante, qui est driv de la Dclaration universelle des droits de lÕhomme. Lors du Sommet mondial de lÕalimentation de 1996, la Dclaration de Rome sur la scurit alimentaire mondiale et le Plan dÕaction du Sommet mondial de lÕalimentation ont raffirm le droit de chacun une alimentation suffisante. Le Comit des droits cono- miques, sociaux et culturels et la Commission des droits de lÕhomme des Nations Unies se sont penchs tous deux sur le droit lÕalimentation dans le cadre du suivi du Sommet mondial de lÕalimentation. Plus particulirement, les citations suivantes, qui portent sur le droit une alimentation suffisante, paraissent directement rattaches aux analyses des OGM figu- rant dans le prsent rapport.
Le Comit des droits conomiques, sociaux et culturels estime que le contenu essentiel du droit une nourriture suffisante comprend les lments suivants:
ÇLa disponibilit de nourriture exempte de substances nocives et acceptable dans une
culture dtermine, en quantit suffisante et dÕune qualit propre satisfaire les besoins
alimentaires de lÕindividu;
LÕaccessibilit ou possibilit dÕobtenir cette nourriture dÕune manire durable et qui
nÕentrave pas la jouissance des autres droits de lÕhomme.È
Observation générale 12, paragraphe 8
(E/C.12/1999/5)
Le rapporteur spcial de la Sous-Commission sur la promotion et la protection des droits de lÕhomme de la Commission des droits de lÕhomme des Nations Unies a dclar:
ÇLÕtat doit protger [la population] contre des tiers plus dominateurs ou plus agressifs
Ð des intrts conomiques plus puissants Ð par exemple contre la fraude, contre un
comportement contraire lÕthique dans le commerce et les relations contractuelles, et
contre la commercialisation et le dumping de produits dangereux. Cette fonction protec-
Les OGM et les droits de lÕhomme
Le droit à une alimentation suffisante
Le droit une nourriture adquate
implique lÕaccs des aliments nutritifs,
sains et acceptables sur le plan culturel
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LES OGM ET LES DROITS DE LÕHOMME6
trice de lÕtat, qui est largement assure, constitue lÕaspect le plus important de ses obli-
gations touchant les droits conomiques, sociaux et culturels, et est assimilable son
rle de protecteur des droits civils et politiques.È
(E/CN.4/Sub.2/1999/122)
DÕautres importants principes des droits de lÕhomme, qui pourraient avoir une incidence sur les OGM mais qui ne figurent toutefois pas dans la Dclaration universelle des droits de lÕhomme, sont les droits un choix clair et la participation dmocratique.
LÕexistence des OGM met en relief la question du droit un choix clair qui drive du concept thique de lÕautonomie des individus. Ce principe peut tre appliqu, par exemple, dans le dbat sur lÕtiquetage des produits alimentaires labors partir dÕOGM pour faire en sorte que les consommateurs sachent ce quÕils consomment et soient en mesure de prendre des dcisions en connaissance de cause. Le choix clair et les mesures qui en dcoulent prsupposent lÕaccs lÕin- formation et des ressources appropries. Les consommateurs nÕont pas tous accs dans les mmes conditions une information et des ressources leur permettant de prendre des dcisions en connaissance de cause propos des OGM. En particulier dans les pays en dveloppement, les gens trs pauvres (les femmes comme les hommes) peuvent ne pas disposer des renseignements les plus lmentaires pour prendre des dcisions qui peuvent avoir une incidence sur leur sant et leur capacit subvenir leurs propres besoins. Toute stratgie dÕinformation du public devrait inclure des mthodes appropries pour toucher les groupes les moins instruits, les plus pauvres et les plus dfavoriss afin quÕils puissent prendre des dcisions en fonction de leurs besoins.
Le droit la participation dmocratique correspond la ncessit de justice et dÕquit qui sont le souci majeur en ce qui concerne les dcisions relatives aux OGM. Les principes de justice peuvent inclure lÕgalit entre les sexes, les besoins de chacun, la transparence, la responsabilit et lÕexis- tence de procdures justes et dmocratiques. Les jeunes, hommes et femmes, en particulier ceux qui sont pauvres et dnus de tout pouvoir sont peu duqus et nÕont pas les moyens dÕintervenir dans la vie de la socit pour influencer les dcisions concernant les OGM. Il faut leur donner toutes les possibilits de participer au dbat relatif lÕimpact des OGM sur leur vie et leurs moyens de subsistance, ainsi quÕaux avantages que ces organismes pourraient ventuellement apporter. Ils devraient avoir le droit de choisir le produit qui pourrait leur tre utile. Un fait proc- cupant est que les gnrations futures nÕauront pas pu se faire entendre ni voter propos des dci- sions concernant les OGM, ce qui veut dire quÕil faut trouver des faons de veiller ce que leurs intrts soient pris en considration. Nous devons faire en sorte que les gnrations futures puis- sent satisfaire leurs besoins spcifiques, y compris ceux qui dcouleront de changements imprvi- sibles touchant lÕenvironnement. ¥
Le droit à la participation démocratique
Le droit à un choix éclairé
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La scurit des aliments, lÕenvironnement et les OGM sont lis dans lÕesprit des consommateurs qui, par leurs achats, influenceront de faon dter-
minante les dcisions relatives lÕavenir de cette technolo- gie. On peut regrouper plusieurs proccupations des consommateurs dans les six catgories suivantes:
Scurit sanitaire des aliments. Les proccupations des consommateurs propos des OGM concernent principale- ment la scurit sanitaire des aliments. tant donn les
problmes poss par certaines denres alimentaires non transgniques, comme les questions des allergnes, des rsidus de pesticides, des contaminants microbiologiques et, ces derniers temps, de lÕencphalopathie spongiforme bovine (ESB) (la maladie dite Çde la vache folleÈ) et des mala- dies quivalentes qui frappent les tres humains, les consommateurs ont parfois des doutes au sujet de la scurit sanitaire des denres alimentaires produites en utilisant les nouvelles technolo- gies. Les mthodes auxquelles recourent les pouvoirs publics pour assurer la scurit des OGM sont discutes dans la section Analyse du risque, p. 14.
Impact sur lÕenvironnement. Une autre proccupation du public est la possibilit que les OGM per- turbent lÕquilibre de la nature. Les OGM sont des produits non traditionnels dont la dissmination peut forcer un ajustement des cosystmes qui ne correspondra pas ncessairement aux objectifs recherchs. Certains craignent galement que des croisements avec des populations sauvages nÕen- tranent une ÇpollutionÈ gntique. Une autre question, qui sÕapplique galement aux organismes non gntiquement modifis, est de savoir si les tests de prdissmination (surtout sÕils sont limits des essais en laboratoire ou des modlisations par ordinateur) constituent une protection appro- prie pour lÕenvironnement ou si un suivi ultrieur est galement ncessaire. LÕampleur du suivi postdissmination ncessaire pour protger les cosystmes, surtout en ce qui concerne les espces ayant une longue dure de vie comme les arbres forestiers, devient une question thique autant quÕune question technique. LÕtat actuel des connaissances au sujet de lÕimpact des OGM sur lÕenvi- ronnement est pass en revue dans la section Les OGM et lÕenvironnement, p. 19.
Risques et avantages perus. Quand ils dterminent leur opinion propos des OGM, les consom- mateurs comparent les avantages que leur parat apporter la nouvelle technologie aux risques quÕelle leur semble entraner. tant donn que pratiquement aucun OGM vgtal ou animal actuellement ou bientt disponible ne prsente des avantages vidents pour les consommateurs, ils se demandent pourquoi ils devraient assumer les risques ventuels. On dit que ce sont les consommateurs qui prennent les risques alors que les producteurs (ou les fournisseurs ou les entreprises) en tirent les avantages. Les mthodes scientifiques utilises pour valuer les risques, ainsi que leurs rapports avec la gestion et la communication des risques, sont discuts dans la sec- tion Les OGM et la sant humaine, p. 14.
Questions cls tudier dÕun point de vue thique
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QUESTIONS CLS Ë TUDIER DÕUN POINT DE VUE THIQUE8
Transparence. Il est dans lÕintrt lgitime et dans le droit des consommateurs dÕobtenir des ren- seignements concernant les OGM utiliss dans lÕagriculture. Il sÕagit dÕabord de rglementer com- ment diffuser lÕinformation pertinente et communiquer les risques connexes de faon transparente. LÕanalyse scientifique des risques cherche permettre aux experts de prendre des dcisions pour rduire le plus possible les dangers auxquels pourraient tre exposs le systme dÕapprovisionnement alimentaire et lÕenvironnement. Toutefois, les consommateurs peuvent sou- haiter galement davantage de transparence pour protger leur droit ne se prononcer quÕen connaissance de cause. Un moyen souvent mentionn de protger ces droits est lÕtiquetage des produits, quÕils soient ou non transgniques. Le consentement clair et lÕtiquetage sont discuts dans la section concernant Les OGM et la sant humaine, p. 14.
Responsabilisation. Les consommateurs peuvent souhaiter participer davantage aux dbats locaux, nationaux et internationaux et donner leur avis sur la politique suivre. Le public nÕa actuellement accs quÕ trs peu de tribunes o discuter de la vaste gamme des questions lies aux OGM. De ce fait, ceux qui sÕintressent particulirement un aspect des OGM, par exemple leur impact sur lÕenvironnement, peuvent logiquement chercher faire valoir leurs proccupations dans une tribune constitue une autre fin, par exemple lÕtude de lÕtiquetage. LÕune des ques- tions connexes est de savoir comment assurer la transparence des activits du secteur priv devant les tribunes publiques et, par consquent, comment forcer les organismes des secteurs public et priv rendre compte de leurs activits.
quit. JusquÕ prsent, lÕutilisation des OGM dans lÕagriculture a surtout t axe sur la rduction des cots au niveau de lÕexploitation agricole, principalement dans les pays en dveloppement. Chaque socit possde des normes thiques qui reconnaissent lÕimportance de faire en sorte que ceux qui ne peuvent pas satisfaire leurs besoins alimentaires fondamentaux aient accs des moyens appropris pour y parvenir. LÕanalyse thique peut examiner dans quelle mesure les soci- ts, les collectivits et les particuliers sÕacquittent de leur responsabilit morale de veiller ce que la croissance conomique ne se traduise pas par lÕexistence dÕun cart toujours croissant entre les pauvres (majoritaires) et les nantis (peu nombreux). SÕils sont intgrs de faon approprie avec dÕautres technologies aux fins de la production de denres alimentaires et dÕautres produits et ser- vices agricoles, les OGM peuvent, au mme titre que dÕautres biotechnologies, contribuer de faon importante satisfaire lÕavenir les besoins de la population humaine. Se pose alors avec acuit la question de savoir si lÕon peut orienter le dveloppement et lÕutilisation des OGM dans lÕagricultu- re vers lÕamlioration de la nutrition et de la sant des consommateurs pauvres, en particulier dans les pays en dveloppement. ¥
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT 9
Le systme de production et de distribution agricole peut tre considr comme une chane dÕapprovi- sionnement (voir figure): i) les transformateurs et
les dtaillants acheminent les produits des producteurs aux consommateurs; ii) les publicitaires, les militants, les membres de groupes de pression et les mdias cherchent influencer les dcisions qui sont prises chacune des tapes de la chane dÕapprovisionnement; iii) les organismes publics de rglementation valuent les risques, tablissent des rgles et en vrifient lÕapplication; iv) les producteurs de denres alimentaires, de poisson, de fibres et de produits forestiers
achtent des intrants tels que des graines, du matriel vgtal, des produits agrochimiques, des engrais, des aliments pour animaux, des agents de fermentation et de lÕquipement; et v) les OGM parviennent au public par lÕentremise des marchs. Les consommateurs Ð cÕest--dire, en ralit, tous les habitants de la plante, y compris les gnrations futures Ð sont galement directement concerns.
Les OGM dans la chane dÕapprovisionnement alimentaire
Source: Adapté de Economic impacts of genetically modified crops on the agrifood sector: a synthesis. Document de travail de la Direction générale de l’agricultu- re de la Commission européenne. Les recherches effectuées pour ce document de travail ont pris fin le 31 mars 2000.
Les OGM dans la chaîne alimentaire
FOURNISSEURS D'INTRANTS
Produits dérivés d'OGM
• Évaluation du risque, évaluation des options et gestion du risque
• Lignes directrices • Suivi et étiquetage
• Communication du risque
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LES OGM DANS LA CHAëNE DÕAPPROVISIONNEMENT ALIMENTAIRE10
Il est impossible de ne pas tenir compte des choix que font les consommateurs sur le march: ils ne sont pas obligs dÕacheter quelque chose sÕils dcident de ne pas le faire. SÕils nÕachtent pas un produit, celui-ci cessera simplement dÕtre fabriqu. tant donn que, dans certains pays, de nom- breux consommateurs refusent dÕacheter les OGM actuels, les producteurs de plantes transg- niques repensent les dcisions quÕils ont prises en matire de production, et lÕindustrie agroalimentaire se restructure rapidement et modifie mme ses priorits de recherche et de dve- loppement pour tenir compte de cette raction.
Les consommateurs peuvent toutefois exprimer leurs points de vue ou leurs prfrences ailleurs que sur le march. Ils peuvent dsirer avoir plus directement leur mot dire sur la faon dont leur alimentation est produite, mais, dans le monde entier, leur lieu de rsidence et de travail est de plus en plus souvent loign des endroits o leurs denres alimentaires sont cultives et transformes. Comme ils ne sont donc pas associs directement au processus de production, il se peut que leurs points de vue sur le systme agroalimentaire et ses produits ne soient gure pris en considration.
Outils et techniques utilisés par les fournisseurs d’intrants agricoles La plupart des mthodologies et des produits intermdiaires utiliss pour lÕlaboration dÕOGM, par exemple les empreintes molculaires et les technologies de transformation, sont actuellement protgs par des droits de proprit intellectuelle dtenus par le secteur priv. Par consquent, il est plus difficile pour les chercheurs du secteur public, en particulier dans les pays en dveloppement, dÕavoir accs ces pro- duits et mthodologies, ce qui limite leur capacit mettre au point des varits amliores de plantes ou dÕanimaux, y compris des OGM qui
pourraient contribuer surmonter les problmes particuliers auxquels est confronte la production locale ou nationale. La situation actuelle tend donc accrotre lÕcart entre les socits les plus riches et les plus pauvres.
Ces dernires annes, un nombre croissant de produits labors partir dÕOGM ont t mis au point et offerts aux consommateurs. Les tableaux 1 et 2 prsentent quelques-uns des OGM agri- coles disponibles sur le march ou en cours de dveloppement.
OGM contenant des toxines de Bacillus thuringiensis pour lutter contre les insectes Certaines des premires modifications gntiques de plantes ont port sur la protection contre les insectes afin de rduire les cots de production des agriculteurs. Les OGM rsistant aux insectes ont t prsents comme un moyen de tuer certains ravageurs et de rduire les applications dÕin- secticides synthtiques conventionnels. Depuis plus de 50 ans, on utilise des formulations conte- nant la bactrie productrice de toxines Bacillus thuringiensis (Bt) que lÕon pulvrise comme les insecticides agricoles conventionnels pour tuer les insectes phytophages. Les tudes relatives lÕinnocuit de Bt pour les tres humains nÕont rvl aucun effet nocif pour la sant.
OGM déjà commercialisés ou en cours de développement
Des fraises poussant -10 oC, grce lÕinsertion dÕun gne producteur dÕantigel provenant de la plie rouge
J. ESQ U
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LES ORGANISMES GNTIQUEMENT MODIFIS: LES CONSOMMATEURS, LA SCURIT DES ALIMENTS ET LÕENVIRONNEMENT 11
Ë la fin des annes 80, les scientifiques ont commenc transfrer dans des plantes cultives les gnes qui produisent les toxines insecticides dans Bt. Leur intention tait de faire en sorte que cette toxine soit produite par toutes les cellules de ces OGM. Des varits de plantes transgniques Bt sont aujourdÕhui cultives sur plus de 5 millions dÕhectares. Aucun effort nÕa t fait pour accrotre le taux de croissance ou le rendement potentiel de ces varits, mais les agriculteurs les ont accueillies chaleureusement puisquÕelles devaient permettre de mieux lutter contre les insectes et de rduire leurs cots. Toutefois, aux tats-Unis, lÕimpact de lÕutilisation de ces OGM contenant des toxines de Bt sur les rendements et sur le nombre dÕapplications dÕinsecticides conventionnels a prsent dÕimportantes variations dÕun endroit lÕautre et dÕune anne lÕautre, qui tenaient en
TABLEAU 1 Quelques OGM actuellement disponibles
OGM Modification Source du gène Objet de la modification Principaux génétique génétique bénéficiaires
Maïs Résistance Bacillus Réduction des dégâts Agriculteurs aux insectes thuringiensis causés par les insectes
Soja Tolérance Streptomyces Élimination plus efficace Agriculteurs aux herbicides spp des plantes adventices
Coton Résistance Bacillus Réduction des dégâts Agriculteurs aux insectes thuringiensis causés par les insectes
Escherichia Production de chymosine Vaches Utilisation dans Transformateurs et coli K 12 ou de rennine la fabrication du fromage consommateurs
Œillets Altération de la couleur Freesia Production de variétés Détaillants et différentes de fleurs consommateurs
TABLEAU 2 Quelques OGM en cours de développement
OGM Modification Source du gène Objet de la modification Principaux génétique génétique bénéficiaires
Raisins Résistance Bacillus Lutte contre Agriculteurs aux insectes thuringiensis les insectes
Tilapia Hormone Plie arctique/ Accroissement de Pisciculteurs de croissance saumon l’efficacité de croissance
Peupliers Tolérance aux Streptomyces Simplification de la lutte Gestionnaires herbicides spp. contre les plantes forestiers
adventices
Eucalyptus Modification de la Pinus sp. Production de pâte Gestionnaires forestiers composition de la lignine et de papier et industrie du papier
Riz Expression de Jonquille Oligo-élément ajouté Consommateurs bêta-carotène Erwina présentant une carence
en vitamine ADC
Mouton Expression d’un H. sapiens Lait enrichi Consommateurs anticorps dans le lait
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LES OGM DANS LA CHAëNE DÕAPPROVISIONNEMENT ALIMENTAIRE12
partie aux diffrences entre lÕeffet prvu de ces varits sur les parasites cibls et les rsultats rels obtenus sur le terrain. Certaines de ces diffrences taient dues une distribution irrgulire de la toxine lÕintrieur des plantes durant leur croissance, dÕautres taient dues aux variations dans les populations de parasites cibls et non cibls, ou encore lÕaccumulation de toxines dans les insectes phytophages, ce qui accroissait la mortalit des prdateurs et des parasites consommant ces insectes.
Comme dans le cas des varits offrant une rsistance aux insectes obtenue par les mthodes de slection conventionnelles, les agriculteurs devraient grer les varits transgniques en utilisant un systme de gestion intgre de la lutte contre les ravageurs et de la production conu en fonction des principes de lÕcologie afin de tenir compte des variations fondamentales. En Amrique du Nord, on estime aujourdÕhui gnralement que ces varits ont rduit les frais de lutte contre les ravageurs. On recommande de les utiliser en mme temps que des stratgies de gestion de la rsistance des plantes htes afin de ralentir lÕvolution des ravageurs pouvant les utiliser comme nourriture.
Les OGM pour les transformateurs de denrées alimentaires et les détaillants Les transformateurs de denres alimentaires et les dtaillants souhaitent aussi vivement rduire leurs cots et profiter des avantages potentiels de la biotechnologie. Comme le montre lÕencadr, des tomates transgniques ont t conues pour offrir des options supplmentaires aux transfor- mateurs et aux dtaillants, mais elles nÕont gure eu de succs sur le march des lgumes frais.
OGM mis au point à l’intention des intermédiaires de la chaîne d’approvisionnement alimentaire: les tomates Flavr Savr
La marque de tomate Flavr Savr a t le premier produit alimentaire transgnique offert aux consommateurs sur le
march des produits frais. Ces tomates avaient t gntiquement modifies pour retarder leur mrissement et
pouvaient donc se conserver plus longtemps. Calgene, aux tats-Unis, a distribu cette marque de tomate transg-
nique en 1994.
Ce produit indit tait cens offrir de multiples avantages aux producteurs de tomate en:
¥ permettant de disposer de plus de temps pour le transport;
¥ permettant la pratique de la cueillette mcanique en infligeant peu de meurtrissures aux fruits;
¥ proposant aux consommateurs une tomate mrie sur pied, la diffrence de celles qui sont cueillies encore
vertes et doivent tre arroses dÕthylne pour mrir.
Depuis 1996, les tomates Flavr Savr ont t retires du march des produits frais aux tats-Unis. La manipula-
tion du gne de mrissement avait apparemment eu des consquences imprvues telle quÕune peau molle, un got
trange et des changements dans la composition de la tomate, qui cotait aussi plus cher que les tomates non trans-
gniques.
Les tomates The Flavr Savr sont encore populaires auprs des transformateurs. Leur dure de vie plus longue
offre plus de souplesse pour lÕexpdition et lÕentreposage entre le champ et lÕusine de traitement.
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Le cas de la tomate Flavr Savr montre quel point les dtaillants sont sensibles lÕopinion des consommateurs quand ils sont proches dÕeux. Les proccupations relatives la confiance des consommateurs peuvent lÕemporter sur les avantages court terme quÕun transformateur pour- rait obtenir en utilisant des ingrdients drivs dÕOGM. Si le public a lÕimpression que les aliments transgniques sont dangereux ou portent prjudice lÕenvironnement et rejette donc certains pro- duits, les entreprises peuvent refuser les OGM. Ë lÕheure actuelle, dans le secteur de lÕalimenta- tion, certaines entreprises importantes ont retir de leurs produits les ingrdients drivs dÕOGM parce quÕelles craignent que les consommateurs les rejettent. Les changements intervenant dans la demande dÕingrdients drivs dÕOGM de la part des transformateurs et des dtaillants se rper- cutent en amont de la chane dÕapprovisionnement alimentaire et influencent les agriculteurs au moment de dcider sÕils doivent ou non cultiver des OGM.
Les poissons et les animaux d’élevage transgéniques sont encore absents de la chaîne d’approvisionnement alimentaire Aprs certains problmes initiaux, le dveloppement et la commercialisation des cultures transg- niques ont connu une croissance considrable, mais les produits drivs dÕanimaux dÕlevage transgniques ne sont pas encore prsents dans les grands systmes de production alimentaire. Plus de 50 transgnes diffrents ont t insrs exprimentalement dans des animaux dÕlevage, mais cela reste un exercice trs difficile qui ne se pratique pas aussi couramment que pour les plantes. Les premires recherches portant sur les animaux dÕlevage transgniques ont galement t accompagnes de certaines perturbations physiologiques, notamment une rduction de la capacit de reproduction. Ces expriences ont soulev des problmes thiques concernant le bien- tre des animaux, ce qui a encore rduit lÕintrt des consommateurs.
JusquÕ prsent, lÕide que des denres alimentaires puissent provenir dÕanimaux transg- niques nÕa pas t bien accepte par les consommateurs. Il ressort constamment des enqutes que le public est mieux dispos lÕgard des plantes transgniques que des animaux transgniques. LÕexprimentation avec des animaux et leur altration suscitent davantage de rticences et ont des rpercussions ventuelles de plus grande ampleur. Diverses cultures et religions limitent ou inter- disent la consommation de certains aliments dÕorigine animale. Le public semble toutefois plus enclin consommer par voie orale ou sous forme dÕinjection des produits pharmaceutiques pro- venant dÕanimaux transgniques.
Des recherches effectues sur des poissons transgniques ont donn dÕexcellents rsultats, mais aucun poisson ainsi modifi nÕa t commercialis. Il sÕagit, dans la plupart des cas, dÕespces dÕlevage auxquelles on a insr des gnes rgissant la production des hormones de croissance, pour accrotre le taux de croissance et le rendement de ces poissons. Diverses questions thiques ont t souleves propos du bien-tre de ces poissons transgniques et de leur impact sur lÕenvi- ronnement, mais certains affirment galement que ces poissons ont de nombreux attributs en com- mun avec les gnotypes et les espces de poisson exognes slectionns selon les mthodes conventionnelles, et lÕexprience a prouv quÕon peut ainsi accrotre la production dÕanimaux aquatiques sans rencontrer dÕopposition de la part du public. ¥
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Une grande confusion rgne pro- pos des risques que les OGM posent pour la scurit alimentaire et lÕenvi- ronnement. Les organismes de rgle- mentation laborent leurs normes dÕaprs les valuations scientifiques des risques. Beaucoup sont dÕavis que la prise de dcisions fonde sur des critres scientifiques est la seule faon objective de dfinir la politique adopter dans un monde o il existe une grande diversit dÕopinions, de valeurs et dÕintrts. LÕanalyse du risque comporte trois lments: lÕvaluation du risque, la gestion du risque et la com- munication du risque.
Évaluation du risque Dans le contexte de la scurit sanitaire des aliments, le risque inclut deux lments: i) le danger potentiel, un facteur intrinsque (par exemple un agent biologique, chimique ou physique prsent dans une denre alimentaire ou lÕtat de cette denre susceptible de porter prjudice la sant) qui indique les dgts que pourrait causer un vnement donn; et ii) la probabilit que cet vnement se produise. Ainsi, pour ce qui est des substances chimiques, on considre que le risque est le dan- ger potentiel x la probabilit dÕexposition; dans le cas de la quarantaine, cÕest lÕventuel domma- ge pouvant tre inflig par le ravageur x la probabilit dÕintroduction, etc.
LÕvaluation du risque est un processus fond sur des donnes scientifiques comportant les tapes suivantes: i) lÕidentification du danger potentiel; ii) la caractrisation de ce danger; iii) lÕvaluation de lÕexposition; et iv) la caractrisation du risque. Les dangers potentiels, et leur probabilit de concrtisation, sont donc tudis ainsi, et des modles sont labors pour prvoir le risque. Ces pr- visions peuvent aussi tre vrifies ultrieurement, par exemple au moyen dÕtudes statistiques (pidmiologiques).
Les deux composantes du risque prsentent un degr dÕincertitude faisant lÕobjet de nombreux dbats. Par exemple, on peut se demander si les mthodologies utilises pour estimer le risque rela- tif dÕautres facteurs connexes (prsence de rsidus de pesticide dans les denres alimentaires et introduction de ravageurs) ont une valeur prdictive suffisante pour les OGM. La composante de lÕanalyse du risque concernant le danger potentiel fait, en particulier, lÕobjet dÕun examen attentif.
Les OGM et la sant humaine
Analyse du risque
que leurs aliments sont sains et nourrissants
FA O
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Gestion du risque et analyse des options La gestion du risque 5, qui est distincte de lÕvaluation du risque, consiste examiner les diff- rentes mesures pouvant tre prises en consultation avec toutes les parties intresses, tout en tenant compte de lÕvaluation du risque et autres facteurs pertinents pour la protection de la sant des consommateurs, et pour la promotion de pratiques commerciales quitables de mme que, le cas chant, en slectionnant les options appropries en matire de prvention et de contrle.
Le danger pour lÕenvironnement est probablement moins facile quantifier que le danger pour la sant. Il porte galement sur un bien commun plutt que sur un bien priv (la sant). Dans les deux cas, seule une exprience long terme pourra dterminer si lÕvaluation et la gestion du risque ont donn de bons rsultats. Quand une stratgie de gestion du risque approprie est appli- que des problmes environnementaux, et non pas des problmes concernant la scurit sani- taire, il faut commencer par dcrire un problme ainsi que les buts, les objectifs et les valeurs qui guident la recherche de la solution ce problme. On procde alors une analyse des options pour envisager le plus grand nombre possible de solutions, ce qui permet de crer de nouvelles options ou combinaisons dÕoptions au lieu de rduire le champ de lÕanalyse. Quand on peut comparer les avantages et les inconvnients dÕune vaste gamme de solutions envisageables, il est davantage possible dÕassurer la pleine participation de la socit concerne.
Communication du risque La communication du risque est lÕchange interactif dÕinformations et dÕides entre les valua- teurs, les gestionnaires du risque, les consommateurs, lÕindustrie, la communaut universitaire et dÕautres parties intresses par lÕentremise du processus dÕanalyse du risque. LÕchange dÕinfor- mations concerne les facteurs lis au risque, ainsi que les faons dont celui-ci est peru, et inclut la prsentation des conclusions de lÕvaluation du risque et lÕexplication des raisons sur lesquelles sont fondes les dcisions en matire de gestion du risque. La communication tablie avec le public au sujet du risque doit absolument venir de sources crdibles et inspirant confiance.
Les aliments sont des mlanges complexes de composs caractriss par la grande diversit de leur composition et de leur valeur nutritionnelle. Les priorits varient, mais la scurit sanitaire des aliments proccupe les consommateurs de tous les pays. Ils aimeraient tre srs que les pro- duits transgniques commercialiss ont t tests de faon adquate et contrls pour assurer leur scurit et pour dceler les problmes ds quÕils surviennent. tant donn la complexit des pro- duits alimentaires, on continue de penser que la recherche sur la scurit sanitaire des aliments transgniques est plus difficile que les tudes sur leurs composantes comme les pesticides, les pro- duits pharmaceutiques, les substances chimiques industrielles et les additifs alimentaires. Les pays discutent des normes applicables aux OGM et des faons dÕassurer leur scurit dans le cadre
Sécurité des aliments génétiquement modifiés
5 Source: Rapport de la 23e session de la Commission du Codex Alimentarius , Rome, 28 juin - 3 juillet 1999.
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