On y pense souvent

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Grégory Jarry ON Y PENSE SOUVENT Souvenirs d’Yvon Sanson, Jeannine Dejonghe, Françoise Cadiou, Denise Mulet, Jeanne Chatroussat, Michel Perrin, Évelyne Croissant et Thérèse Mauger

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À l’oc­ca­sion du festi­val de la bande dessi­née de Darné­tal, Grégory Jarry a passé une semaine à la maison de retraite et a recueilli les souve­nirs d’Yvon Sanson, Jean­nine Dejon­ghe, Françoise Cadiou, Denise Mulet, Jeanne Chatrous­sat, Michel Perrin, Évelyne Crois­sant et Thérèse Mauger. Édité avec l’aide de la ville de Darné­tal.

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Editions FLBLBISBN : 978-2-35761-061-3

Grégory JarryON Y PENSE SOUVENT

Souvenirs d’Yvon Sanson, Jeannine Dejonghe, Françoise Cadiou, Denise Mulet, Jeanne Chatroussat, Michel Perrin, Évelyne Croissant et Thérèse Mauger

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Huit romans-photos de Grégory Jarry

Souvenirs d’Yvon Sanson, Jeannine Dejonghe, Françoise Cadiou, Denise Mulet, Jeanne Chatroussat, Michel Perrin, Évelyne Croissant et Thérèse Mauger

ON Y PENSE SOUVENT

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(c) Editions FLBLB et Grégory Jarry 2013Editions FLBLB 1 rue Paul Verlaine 86000 Poitierswww.flblb.com

Illustration de dos de couverture tirée de La Gerbe, revue annuelle de création d’enfants coordonnée par Stéphane Chatroussat, n° 7, juin 1950, linogravure réalisée par Gérard Auvré, 14 ans.

Cet ouvrage a été réalisé en septembre 2013 à l’occasion du festival de la bande dessinée de Darnétal.

Publié avec l’aide de la ville de Darnétal

Remerciements : Amélie Hébert, Laurent Brixtel

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Oui, les Fresques de Darnétal c’est des pieces de théâtre avec des amateurs qui mettent en scène des histoires du patri-moine local, c’est très bien fait et instructif !

Oui alors il leur fallait des volontaires. Moi avant j’étais que spectateur.

Un jour à midi, il n’y avait plus de volontaire et Amélie m’a dit :

Comment je suis rentré au théâtre ? Les Fresques de Darnetal ça dure depuis très longtemps.

Yvon

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«Tu pourrais faire du théâtre toi ? T’es capable !»

«Je suis pas capable !» que je lui réponds.

«Bê si t’es capable !»

Avant comme rôle j’avais fait que Père Noël, je fais ça tout les ans ici à la Résidence et puis je me promène au centre ville.Tiens ici je suis en photo avec le maire.

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Alors pour les Fresques, j’ai dit oui, pourquoi pas, et je vais pour faire un essai.

Pour monter sur l’estrade, j’avais les pouet pouet, le gros trac ! Amelie m’avait dit :

« Le premier jour tu regardes pas les gens, tu regardes que les projecteurs.»

C’est ce que j’ai fait. C’est grâce à Amélie si j’ai pu y aller.

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Alors pour mon premier rôle, je faisais le poivrot.

Pour les répétitions, le met-teur en scène Jean-Marie avait mis de la vraie goutte, tout le monde buvait, tout le monde recrachait, mais pas moi !

Jean-Marie m’a dit «T’es un coriace toi !»

Parce que vous préférez la goutte ou le jus d’orange ?

Il veut tout savoir lui !

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Mon père travaillait à la filature de Badin. Ma mère nous avait abandonné. Je ne sais pas ce qu’elle faisait, elle nous a jamais causé.

On allait la voir des fois quand on avait faim, elle nous regardait comme ça, elle nous disait : «Allez hop, taillez-vous !»

Le maire de Borentin à l’époque, il nous appelait, mon frère et moi, il nous donnait deux gros bols de café et pis des tartines de pain dur.

Nous on se les enfilait et on rentrait chez nous.

Jeannine

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Vers la fin de la guerre les Américains étaient installés à Saint-Pierre-de-Varengeville dans des tentes de camping.

On y montait à pieds avec mon frère, pis on allait mettre la main sous la tente pour attraper des casse-croûtes. Après on se taillait aussitôt !

La deuxième fois, j’ai été prise, un Américain m’a attrapé la main pis y’en a un autre qui a contourné la tente. Ils parlaient quand même français.

Je pleurais, je tremblais, alors ils nous ont dit «tenez, prenez tout, mais ne revenez plus».On est plus revenu après !

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Moi j’allais pas à l’école, j’étais trop faible, j’avais toujours le ventre vide et la tête me tournait. De toute façon c’était pas obli-gatoire. Mon frère m’apprenait à écrire, il me disait, «ma chérie viens voir, papa ça s’écrit comme ça, maman ça s’écrit comme ça.»

Normalement mon frère aurait dû mourir de la sclérose en plaque qu’il avait attrapée. Mais un jour, il avait 44 ans, il conduisait le camion de son patron, il a eu un accident, une barre de fer lui a percé l’oeil et il est mort sur le coup. Les assurances ont embêté ma belle-soeur, parce qu’il aurait pas dû travailler avec la maladie qu’il avait.

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Mon père devait tout seul nourrir 5 per-sonnes : sa mère, lui et ses trois enfants.

Après le boulot, il allait ramasser des patates dans une ferme pour nous nourir. Mon père ne buvait pas, ne fumait pas, il est mort à 54 ans.

Après sa mort, le conseil de famille a décidé de me placer chez les soeurs, ils ne voulaient pas me prendre avec eux, ils disaient que j’étais trop maigre et que j’allais bientôt crever.

Là-bas j’ai été brodeuse jusqu’à mes 18 ans, je faisais les habits des Frères, aussi des nappes, des taies, des draps que les Soeurs vendaient.

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À 18 ans, j’ai voulu fonder une famille, prendre mon indépen-dance. Les soeurs m’ont dit : «La porte est grande ouverte» et je suis partie rien dans les mains rien dans les poches, à 18 ans je me suis retrouvée dehors. J’ai couché dans la rue, j’ai mangé dans les poubelles, ma propre soeur n’a pas voulu me recevoir.

Souvent j’y repense à tout ça.

J’y repense souvent.

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L’année dernière, c’était mon anniversaire et mon fils, qui bosse dans la publicité, je lui ai dit :

«Je fêterai bien mes 80 ans, j’ai envie de les fêter !».

Mon fils revient avec la plaquette, je me dis je vais en envoyer une à tous les gens que je connais, à tous mes amis et viendra qui veut. J’ai été rechercher des amis de mes 20 ans, des gens que j’avais perdus de vue, je me disais, je vais avoir 25 / 30 personnes en tout, et vous savez combien qu’on était ?

Françoise

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75 !! Ah ben je m’at-tendais pas à ça !

On fêtait ça dans l’écurie du Poney Club de ma fille, qui tient le Poney Club de Darnétal.

J’avais fait faire une pièce montée, y’avait des bougies, des petits oiseaux dessus.

On a mangé, on a dansé, on s’est assis dans la paille, j’avais pas fait de fête comme ça depuis mes 50 ans.

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J’ai été gâtée, on m’a offert un voyage en Autriche, je voulais voir la transhu-mance, les vaches avec les cloches et les chalets fleuris.

Bon ben je vais aller retrouver mon chien, il m’attend dans la voiture !

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En juin 1940, j’ai 8 ans et demi. J’habite à Dieppe avec ma famille.

Avant ça en 28, mon père s’en va faire son régiment à Dieppe, un soir de 14 juillet, mon père et ma mère dansent devant la statue de Duquenne, six mois après ils se marient ! Mon père devait se marier avec une autre fille, alors il mettra 15 ans à revenir dans le Calvados.

A cause du danger des bombar-dements, le maire de Dieppe avait décidé de séparer les familles, les femmes et les enfants devaient quitter la ville et les hommes rester. Mais mon père a dit, pas question qu’on nous sépare. Il est allé revoir sa mère pour lui demander si toute la famille pouvait venir, la grand-mère tombe des nues, heureuse de retrouver son fils ! Par contre le grand-père était mort.

La grand-mère a voulu rentrer à Dieppe avec mon père pour nous connaître. Grande, rousse, cheveux nattés enroulés sur les oreilles, nous on arrive de l’école, on voit cette dame, papa dit, c’est votre grand-mère, on était tout heureux mais grand-mère a pas tenu une semaine à cause des bombardements, elle nous a proposé d’aller habiter chez elle à Orbec-en-Auge dans la maison du frère de mon père, qui à ce moment-là était prisonnier dans un stalag en Allemangne.

Denise

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Sur la photo la première c’est ma grand-mère, après c’est moi puis ma mère, les petits c’est mes frères et soeurs...

Mais je vais pas y arriver à vous la raconter mon histoire si je continue comme ça !

Reprenons. On est en juin 40, j’ai 8 ans et demi, c’est l’exode.

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Avec une autre famille, on s’en va faire 25 km à pieds, avec deux balladeuses à poisson, 5 enfants, les autres ils ont 8 enfants.

Je me croyais comme dans le début de «Jeux interdits», à chaque fois que je vois ce film, je me dis que René Clément a vécu une journée comme ça tellement c’est réaliste.

Le soir de cette journée, on arrive à Saint-Denis-des-Monts, on est crevé, on pense qu’à dormir.

Le maire dit qu’il y a une ferme abandonnée, des gens qui avaient peur ont fui, et il nous propose la ferme à condition de traire les vaches tous les jours. On accepte.

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Quelques jour après, on joue dans la cours de la ferme, les treize enfants. On entend du bruits dans un bâtiment, on ouvre et là, y’a plein de poules !

On avait jamais vu ça nous des poules, on connaissait que les poissons ! On fait peur aux poules pour les faire sortir, les poules sortent, et là, des oeufs, des oeufs, des oeufs !!!

On les mets dans nos juppes les filles et on les ramène à nos mères. «Où c’est que vous avez trouvé tout ça ?» disent-elles méfiantes !

«Dans la haie» «Bon on va faire des omelettes !» Ma mère cassent les oeufs. «Oh bê y’a un filet de sang qu’est-ce que c’est que ça ?»

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Ma mère en casse un autre puis un autre, puis elle me dit : «Où vous les avez trouvé vos oeufs ? Pas dans la haie ?»«Non, là-bas...»

En fait c’était un poulailler. Et les poules couvaient. Nous on y connaissaient rien. Cette histoire nous fait encore rire aujourd’hui, dans les repas de famille, d’avoir voulu manger des poulets même pas nés !

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Après la guerre, j’ai entendu parler de Célestin Freinet. J’ai assisté à une série de conférence qu’il donnait à Nice pour nous apprendre sa pédagogie, qui était révolutionnaire. Il nous plaçait dans des classes comme des enfants, il nous mettait à leur place pour qu’on com-prenne bien ce que c’était qu’un élève. Freinet nous parlait de ses projets, il avait créé l’École Moderne, il voulait répandre ses idées.

Freinet était végétarien et il en faisait aussi de la pro-pagande, pendant le stage c’était obligatoire d’être végétarien !

On était plusieurs couples à faire le stage, on s’était fait des amis, on dormait par terre dans l’école.

La pédagogie Freinet part de l’enfant, pas de l’enseignant. On de-mande aux enfants d’écrire un petit texte sur quelque chose qui leur a plu. On lit les textes à haute voix, ensuite on choisit ensemble un texte, on l’écrit au tableau pour le corriger, et les enfants l’impriment dans notre journal, qui s’appelait le Vent de Caux.On avait acheté une presse avec nos propre deniers. Quand on faisait texte libre, chacun écrivait son texte, ensuite on le composait avec les petites lettres en plomb, les gosses prenaient l’habitude de lire à l’envers, puis on l’imprimait sur notre petite imprimerie.

Jeanne

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La pédagogie Freinet part de l’enfant, pas de l’enseignant. On de-mande aux enfants d’écrire un petit texte sur quelque chose qui leur a plu. On lit les textes à haute voix, ensuite on choisit ensemble un texte, on l’écrit au tableau pour le corriger, et les enfants l’impriment dans notre journal, qui s’appelait le Vent de Caux.On avait acheté une presse avec nos propre deniers. Quand on faisait texte libre, chacun écrivait son texte, ensuite on le composait avec les petites lettres en plomb, les gosses prenaient l’habitude de lire à l’envers, puis on l’imprimait sur notre petite imprimerie.

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Avec cette pédagogie, les enfants aiment l’école, on n’a pas de problèmes de discipline. Parfois ils ne voulaient pas aller en récréa-tions ! En plus des textes qu’ils écrivaient, ils correspondaient avec une autre école.

Mon mari Stéphane est mort en 2004. Il faisait aussi des conférences sur la pédagogie Frei-net, il avait énormément d’ascendant sur les autres, les gens le sui-vaient sans problème !

Lui il avait des élèves plus grands que moi, de 9 à 11 ans. Il leur faisait faire des conférences à leur camarades, pour leur expliquer des choses qu’ils aimaient. Une fois il y en avait un qui faisait du violoncelle, il en a fait dans la classe et ça leur avait beaucoup plu.

Stéphane Chatroussat

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Linogravure de Jeanne Chatroussat, 1951

« Nous développons au plus haut point l’esprit de tolérance. Les corres-pondants des enfants peuvent être catholiques, protestants, athées... À partir du moment où tu sais, mon enfant, que d’autres pensent autre-ment que toi et qu’ils sont pourtant respectables, tu as gravi un des plus beaux échelons qui mènent à la morale la plus pure. Devant tous les problèmes de la vie, tu garderas une vue objective des faits, tu déve-lopperas ton sens des responsabilités et ton esprit d’initiative. Tu sauras faire le premier pas, tu seras devenu un Homme ».

Jeanne et Stéphane Chatroussatextrait d’un article paru dans Défense de l’homme, novembre 1948

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Pendant la guerre d’Algérie, j’étais dans l’infanterie, je suis parti en septembre 1959.

On était en poste en petite Kabylie, cent bonhommes pour surveiller des Arabes qui avaient été déplacés et regroupés, il y en avaient là-dedans qui étaient des Fellouzes.

Dans le camp de regroupement, pas de barbelés, les Arabes pouvaient aller où ils voulaient, sauf dans les zones interdites, et nous, on les surveillaient.

Michel

J’avais 20 ans.

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Un jour, un lieutenant part en opération, il tire sur un gars, il lui file des balles de mitraillette dans le dos, le mec avait les tripes à l’air. Le lieutenant pas trop courageux nous est revenu au poste et il nous a envoyé chercher le gars. On y est allé, on l’a rame-né, un autre Fellouze avait eu le temps de lui mettre son turban autour du bide. Le gars a tenu trois jours et il est mort.

Les légionnaires dans notre poste ils utili-saient la gégène. Sur les hommes comme sur les femmes. Des fois, ils déshabillaient une femme, ils l’enduisaient de confiture, les guêpes se jetaient dessus et la laissait à moitié morte. La Légion ils avaient leur bordel qui les suivaient partout où ils allaient.

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La nuit j’avais du mal à dormir, on avait peur, on avait le pisto-let mitrailleur au pied du lit

Une fois, y’avait trois Arabes avec nous, dans notre poste, des appelés français mais arabes, je sais pas ce qui m’a pris, j’en ai traité un de Fellouze.

Il est venu sur moi, il m’a mis son PM sur la gorge, j’ai eu une de ces trouilles.

Après le Capitaine, un ancien d’Indochine, m’a mis deux baffes. Hé ouais, c’était comme ça.

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J’aimais pas l’armée. J’aurais voulu aller à Madagascar ou en Allemagne, mais ils m’ont envoyé en Algérie.

Si j’y étais pas allé, j’aurais été mieux, c’est sûr.

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Évelyne

A l’époque beaucoup de gens payaient en liquide, des gros paquets de billets.

On mettait l’argent dans des saccoches marron en cuir, avec des cadenas, nous on avait la clé, la banque aussi.

Les vendeurs passaient prendre l’argent et le déposait dans les banques rue Jeanne d’Arc.

En 66, j’étais secrétaire au garage Fiat à Mont-Riboudet.

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On vendait du haut de gamme ! La 850 Spider décapo-table, la 2300, c’était de la grosse grosse voiture.

Et pis y’avait la toute petite, la 500, qu’on appelait le pot de yahourt !

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Des fois, on fermait, tout était prêt pour la débauche, la caisse était faîte, et puis un monsieur costard-cra-vate venait pour se faire livrer sa voiture à ce moment-là ! On était pas super contentes, fallait se mettre à son service, ça nous faisait pas débaucher tôt !

Notre patron était sympa, c’était un patron qui tra-vaillait, qui savait ce que c’était le travail. Des fois il nous mettait le garage à disposition, pour les anniver-saires par exemple, on mettait des grandes tables et puis on faisait la fête !

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L’avenue Mont-Riboudet, c’était des pavés. En mai 68, y’avait les manifestants qui passaient et puis des casseurs. Nous on faisait pas grève, on se sentait pas concerné. J’avais 17 ans à l’époque, je me sentais pas concernée.

Quand on les entendaient arriver, les manifestants avec les banderolles et tout, on se cachait sous les bureaux, parce que sinon, s’ils avaient vu de l’activité, ils auraient cassé les vitrines ! Y’a Peugeot qu’avait été cassé, Ford aussi avait été cassé, nous on y a échappé.

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Je suis née en 33 à Deauvlle, ainée d’une famille de onze enfants.

Mes parents avaient des bêtes, des vaches, des moutons, enfin au début ils avaient des moutons.

Thérèse

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Au moment du débarquement, j’ai vu un Alle-mand se faire tuer sous mes yeux par les Amé-ricains. Quand ils sont arrivés, on était dans une étable à veaux, à cause des bombardements.

Heureusement qu’on était plus dans la maison parce qu’une bombe est tombée juste à côté, elle a détruit un mur et un tas de cailloux est tombé sur les lits.

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Les Américains étaient dans les champs tout autour, je me souviens, c’étaient des Noirs, ils étaient sur les terrains de mes parents, j’avais jamais vu des Noirs, j’avais plutôt peur, c’était les premiers temps que les Noirs venaient en France.

Je me rappelle, une bombe était tombée, elle avait tué une bête, un éclat d’obus.

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On l’a enterrée dans le trou qu’avait fait la bombe.

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Achevé d’imprimé par Copie Plus à Rouen en septembre 2013ISBN : 978-2-35761-061-3

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