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  • www.ondh.ma

    SÉMINAIRE SUR LA PROBLÉMATIQUE DE L’INCLUSION

    PAR LE LOGEMENT DES POPULATIONS

    PAUVRES ET VULNÉRABLES

    Synthèse

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    Sommaire

    Introduction 5

    Note introductive sur l’habitat social au Maroc. 7

    M. Abdellah Lehzam, Professeur à l’Institut National d’Aménagement et d’Urbanisme, Rabat

    Partie I : Points de vue institutionnel sur la question de l’Habitat social au Maroc 17

    1. L’expérience de la cour des comptes en matière d’évaluation des projets et

    programmes de l’habitat social. 19

    M. Mohamed Hadhoudi, Président de la troisième chambre de la Cour des comptes

    2. L’expérience du Ministère de l’Habitat et la Politique de la Ville en matière d’inclusion

    des ménages bénéficiaires des programmes d’habitat social. 27

    M. Mohamed Changui, Chef de division au Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville

    3. Inclusion sociale par le logement : programmes d’habitat social d’Al Omrane. 33

    M. Mohammed Jallal Directeur du Pôle Ingénierie et Développement social

    Partie II : Etudes de cas d’opérations de résorptions de l’habitat insalubre et des bidonvilles 35

    1. Intégration urbaine et sociale des ménages bénéficiaires des programmes de

    résorption des bidonvilles. 37

    M. Ikbal SAYAH, Directeur de Pôle à l’Observatoire National du Développement Humain

    2. Evaluation de l’impact social du Programme d’Appui à la Résorption de l’Habitat

    Insalubre et des Bidonvilles (PARHIB). 41

    M.Olivier Toutain, Architecte urbaniste

    3. Politiques de résorption des bidonvilles et intégration urbaine des populations :

    l’exemple du grand Casablanca. 45

    M. Abdelkader KAIOUA, Inspecteur régional de l’Urbanisme et de l’Aménagement du Territoire

    de la région Casablanca – Settat

    Partie III : Synthèse et recommandations du séminaire 63

    I. Synthèse des travaux du séminaire 65

    II. Recommandations du séminaire 74

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    Introduction

    Le contexte du séminaire

    En 2009, l’Observatoire National du Développement Humain lançait une étude consacrée à l’évaluation des effets des programmes de résorption des bidonvilles en termes d’inclusion sociale. Cette étude, lancée intervient à un moment où une politique de la ville était en cours d’initiation dans notre pays, a permis d’une part, de mettre en exergue les niveaux de contraintes et de dysfonctionnements qui affectent ces programmes et, de l’autre, d’apprécier les dynamiques de changement vécues par la population bénéficiaire ainsi que la contribution de l’action publique à l’amélioration de leurs conditions socio-économiques.

    Une synthèse de cette évaluation a été présentée le 27 mai 2015 au cours d’un atelier de travail durant lequel ont été abordés par un panel d’experts de la politique de l’habitat, les acquis et les limites des programmes de résorption des bidonvilles sous l’angle de l’inclusion sociale et de l’intégration urbaine des familles concernés.

    Cet atelier a été aussi l’occasion de soulever quelques problématiques clefs qui, si elles ne sont pas surmontées, risquent de compromettre l’amélioration de l’impact social et l’efficacité économique des opérations de résorption des bidonvilles.

    Aussi, a-t-il été convenu d’examiner ces problématiques au cours d’un séminaire destiné à jeter un regard croisé, avec les acteurs institutionnels, sur la question de l’inclusion urbaine des ménages pauvres et vulnérables dans le cadre de la stratégie déployée par les pouvoirs publics.

    A travers ce séminaire tenu le 15 Décembre 2015 au siège de l’ONDH, l’ONDH a souhaité créer des communautés d’intérêts et nourrir un débat de haut niveau sur la problématique de l’habitat des populations pauvres et vulnérables. L’objectif recherché par l’ONDH était aussi de formuler des propositions en vue d’améliorer l’inclusion de ces populations dans l’espace urbain.

    Au cours de ce séminaire, plusieurs questions ont structuré le débat, notamment :

    Quel est l’effectivité de l’impact socio-économique de la stratégie publique de lutte contre l’habitat insalubre ?

    Comment mesurer l’effort consenti par les pouvoirs publics pour améliorer les conditions d’habitat des ménages pauvres et vulnérables ? Cet effort est-il équitablement réparti entre les villes du Royaume et selon les différentes formes d’habitat rencontrées ? A contrario, comment améliorer son ciblage et sa distribution ?

    Comment améliorer les conditions d’accès (financier, etc.) des populations pauvres et vulnérables au logement décent ?

    Comment adapter l’approche sociale des opérations pour réduire l’exclusion liée au logement ?

    Comment appuyer la dimension politique du développement urbain ? Quel rôle assigner aux collectivités locales ?

    Comment adapter la stratégie d’intervention publique de lutte contre les bidonvilles dans le contexte nouveau d’élaboration d’une politique de la ville ? Quel rôle assigné alors à l’INDH ?

    Quel schéma de gouvernance multi-acteurs mettre en place pour assurer au mieux la territorialisation des programmes publics d’accès au logement ?

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    Les interventions des participants au séminaire, qui sont reproduites dans le présent document, ont été articulées autour de deux axes :

    Le point de vue des acteurs institutionnels responsables de la mise en œuvre et du suivi de la politique du logement social en particulier les opérations de résorption des bidonvilles.

    Le point de vue d’experts indépendants sur la stratégie actuelle et ses conséquences économiques et sociales à travers des études de cas.

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    Note introductive sur l’habitat social au Maroc M.Abdellah Lehzam, Professeur à l’Institut National

    d’Aménagement et d’Urbanisme, Rabat

    Introduction

    L’habitat social ou le logement social désigne un type de logement destiné à certaines catégories sociales qui n’ont pas les moyens économiques pour accéder à des logements normés, modernes et disponibles sur le marché. On parle dans ce cas, selon l’expression de Jean-François Tribillon1, de l’habitat social de droit composé des logements subventionnés par l’Etat et construits par des organismes publics ou privé, par rapport à l’habitat social de fait constitué de logements dans les bidonvilles, les anciennes médinas et les quartiers non réglementaires). C’est l’imbrication de ces deux types d’habitat social avec le reste des tissus urbains qui font l’originalité des villes marocaines qui, au demeurant, se caractérisent par une mixité sociale dans l’ensemble réussie. Ce résultat est obtenu grâce à une politique de logement de l’Etat qui combine, depuis plusieurs décennies, entre :

    La production de logements sociaux à travers l’aménagement des terrains (lotissements) et l’encouragement des promoteurs privés et publics à produire des logements neufs clé en main ;

    Et le rattrapage des déficits que connaît l’habitat social de fait, notamment les bidonvilles et les quartiers non réglementaires.

    Toutefois, le système d’aménagement urbain et de production formel de logements, même soutenu par les pouvoirs publics, reste dans l’incapacité de répondre aux besoins des ménages les plus pauvres qui, selon l’enquête logement 2012, constituent plus de la moitié des besoins annuels en logements. Cette situation fait que pour qu’un ménage pauvre puisse accéder à terme à un logement décent, il faut d’abord qu’il séjourne un certain nombre d’années dans un bidonville ou dans un quartier non réglementaire pour espérer, en tenant compte de la file d’attente, accéder à un logement normé.

    Cette note essaie de restituer comment cette dialectique habitat social de droit et habitat social de fait est traitée par les pouvoirs publics, tout en présentant ses résultats et en dégageant ses perspectives.

    I. Cadre et normes juridiques de la mixité sociale dans les villes marocaines

    L'inclusion sociale et spatiale des ménages pauvres et vulnérables par le logement est souvent évoquée par le terme de « mixité sociale ». De façon générale, la notion de mixité sociale désigne la cohabitation en un même lieu de personnes appartenant à des catégories socioprofessionnelles, des cultures, des nationalités, des ethnies et des tranches d'âge différentes.

    En matière d'habitat, la mixité sociale se traduit par des quartiers hétérogènes où vivent des personnes de niveaux de vie, de cultures et d'origines variées. Ce mélange peut s'apprécier à différentes échelles, au niveau de l'immeuble, d'un ensemble d'habitations, d'un quartier, etc. Ainsi, la mixité sociale est à la fois un état observé sur le terrain et un processus volontariste voulu par les pouvoirs publics.

    1 Sous le pseudonyme Joseph Roy, « Bref aperçu sur l’habitat social marocain » In « Habitat social au Maghreb et au Sénégal » ouvrage coordonné par J Le Tellier et Aziz Iraki, éd Le Harmattan et INAU, 2010

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    C’est un état dans le sens où des groupes sociaux aux caractéristiques diverses cohabitent de façon paisible et continue sur un même territoire (quartier, zone urbaine, ville). Mais c’est aussi un processus volontariste, du fait de l’intervention des pouvoirs publics afin d’avoir une répartition plus équilibrée des populations sur un même territoire.

    Au Maroc, la mixité sociale est plus un état de la configuration de l’espace urbain liée à la conjugaison de plusieurs facteurs (historiques, sociologiques, modalités d’accès au foncier urbain, modalités de production de logements, etc.) que l’effet d’une politique délibérée et réfléchie.

    Il n’existe pas de textes juridiques2 ou de normes imposées par la loi concernant la mixité sociale au niveau de l’habitat mais des pratiques qui restent indicatives. Elles se manifestent à travers les opérations de péréquation dans les lotissements publics et les pratiques de conception des documents d’urbanisme, notamment les plans d’aménagement.

    Ainsi, il n’existe aucune programmation quantitative normative3 des réalisations au niveau local qui tienne compte des besoins, sauf pour les opérations de résorption des bidonvilles ou de restructuration des quartiers non réglementaires celle sont pilotées par le ministère de l’habitat grâce au Fonds de Solidarité de l’Habitat (FSH) renommé récemment Fonds de Solidarité de l’Habitat et de l’Intégration Urbaine (FSHIU). Elles se font sur la base de conventions signées entre le ministère de l’habitat et les communes concernées. La maîtrise d’ouvrage des opérations de résorption ou de restructuration est confiée à l’établissement public Al Omrane.

    Par contre, en ce qui concerne les opérations d’habitat dit social (logements à 250 000 DH ou à 140 000 DH) qui bénéficient d’avantages fiscaux et de terrains équipés subventionnés (surtout dans les villes nouvelles) de la part de l’Etat, leur volume et leur localisation sont laissés à la discrétion des promoteurs (privés ou publics) et aux collectivités locales qui leur accordent souvent les permis de construire dans un cadre dérogatoire.

    Malgré cette absence de planification en amont, la politique de logement de l’Etat a contribué à homogénéiser la morphologie de l’habitat urbain et à améliorer les conditions de vie de la population urbaine dans le cadre d’une approche plus réparatrice qu’anticipative.

    Dans ce cadre, la politique du logement social au Maroc se caractérise par une constante, à savoir la lutte contre l’insalubrité urbaine. Par contre, la production de logements sociaux neufs a connu des changements dans le temps.

    II. Les deux grandes périodes de la production du logement social au Maroc

    Les deux grandes périodes à retenir en matière de production du logement social au Maroc sont les années 1970 jusqu’à la fin des 1990 et l’année 2000 jusqu'à nos jours. Durant la période antérieure, à savoir 1958-1971, l’Etat poursuivait au niveau urbain la même politique qui prévalait durant la période coloniale4. L’espace urbain était relativement négligé en faveur de la campagne où la politique de distribution des terres était intense.

    II.1. Les années 1970 jusqu'à la fin des années 1990

    Deux modalités d’intervention de l’Etat ont été alors mises en œuvre :

    L’Etat propriétaire – lotisseur, producteur de lots sociaux et de lots pour la classe moyenne par la réalisation de projets de lotissements et d’habitat qui regroupent des catégories socio- économiques de niveaux différents, notamment par le biais de la péréquation. Durant cette

    2 Récemment dans le projet de code de l’urbanisme, cette notion a été introduite de façon explicite dans les principes généraux du code (Article 5) et dans certains articles ayant rapport avec la rénovation urbaine (Article 155). 3 Pourcentage de logements sociaux à produire obligatoirement par région ou ville. 4 Abdellah Lehzam : « Le logement urbain au Maroc : Les ménages et l’Etat face à l’accès à la propriété et la location » Editions CCMLA, 1994, pp130-131

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    période, l’offre de terrains urbanisables par les pouvoirs publics était la forme dominante de production des logements neufs.

    La lutte contre l’habitat insalubre par le lancement de grandes opérations de restructuration et d’équipement des quartiers clandestins et des bidonvilles. Plusieurs quartiers qui hébergent actuellement des milliers de ménages sont issus de ces grandes opérations.

    Ces deux modalités d’intervention de l’Etat ont permis de produire de façon directe (offre de lots de terrains équipés) ou indirecte (restructuration et équipement des quartiers non réglementaires) plus des trois quarts de la production de logements au cours de la période considérée.

    II.2. De l’année 2000 jusqu'à nos jours

    Dans un contexte d’épuisement des réserves foncières de l’Etat, une division du travail s’est opérée entre l’Etat et les promoteurs immobiliers (privés, publics). Ainsi, les moyens financiers de l’Etat destinés aux logements sociaux sont orientés vers la mise à niveau urbaine, notamment le programme villes sans bidonvilles. Quant aux promoteurs, l’Etat leur confie la réalisation de logements sociaux clef en main en contrepartie de l’accès à des terrains subventionnés et de l’octroi d’exonérations fiscales.

    Ce qui caractérise cette période par rapport à la précédente, c’est que l’aide à l’habitat social devient de plus en plus explicite passant par des transferts fiscaux et par des aides implicites sous forme de terrains domaniaux aménagés destinés plus à des promoteurs qu’aux ménages bénéficiaires, comme c’était le cas auparavant.

    En s’appuyant sur les données et les études disponibles, il est opportun de nous interroger sur :

    Le bilan quantitatif de la production de logements sociaux neufs et de la résorption de l’habitat insalubre depuis le début des années 2000 ;

    Le bilan qualitatif des opérations de résorption de l’habitat insalubre du point de vue des bénéficiaires.

    III. Le bilan quantitatif de la production de logements sociaux neufs et de la résorption de l’habitat insalubre

    Ce bilan concerne d’une part, la production de logements sociaux neufs par les promoteurs immobiliers et d’autre part, la mise à niveau urbaine avec ses deux composantes, en l’occurrence la restructuration des quartiers non réglementaires et le programme "Villes sans bidonvilles".

    Dans le cadre de la production de logements sociaux neufs, L’Etat confie aux promoteurs immobiliers, sur la base de conventions, la réalisation de logements sociaux en contrepartie d’exonérations fiscales et de l’accès, pour certains, à des terrains subventionnés. Cette offre de terrains destinés aux promoteurs est assurée, en grande partie, grâce au développement de pôles urbains périphériques et de villes nouvelles sur des terrains domaniaux et collectifs.

    Quant à la mise à niveau urbaine, elle englobe aussi bien la lutte contre l’habitat insalubre (habitations en dur non réglementaires et bidonvilles) que la fourniture d’infrastructures urbaines (voirie, assainissement, équipements collectifs) à des zones construites en partie ou en totalité en dehors des règles de l’urbanisme. Cette mise à niveau urbaine se fait dans une optique de rattrapage pour combler les retards accumulés au niveau des tissus urbains et ce, sans récupérer les coûts de ces investissements auprès des bénéficiaires.

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    III.1. La production de logements sociaux neufs

    Au cours de la période 2002 et 2007, 89 conventions ont été signées pour la construction de 230 000 logements5 (seulement 50% des conventions ont été concrétisées, soit 132 000 logements). Au cours de la seconde phase 2008-2014, le nombre de conventions signées, y compris celles signées pour la réalisation des logements à faible VIT (140 000 DH et qui représentent 50 000 unités)6, est estimé à 736. Elles représentent 1 350 000 logements7.

    Tableau 1 : logements sociaux conventionnés et achevés au cours de la période 2002-2014

    Périodes Logement

    conventionnés Logements achevés

    Moyenne annuelle des logements achevés

    2002-2007 230 000 132 000 22 000

    2008-2014 1 350 000 190 000 27 142

    Total 2002-2014 1 507 000 322 000 24 769 Source : Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville

    Au total, on peut estimer le nombre de logements sociaux neufs achevés entre 2002 et fin juin 2014 à 322 000 logements, soit une moyenne annuelle de 24 769 logements.

    Les données relatives à la répartition régionale des logements achevés de 2002 à 2014 ne sont pas disponibles. Par contre, celles concernant les logements sociaux autorisés ou en cours d’autorisation et en chantier par région de 2010 à fin juin 2013 sont accessibles. Elles montrent que plus de la moitié (58%) du volume des logements est concentrée dans trois régions : le Grand Casablanca, Tanger-Tétouan et Rabat-Salé (voir graphique 1).

    Graphique 1 : Répartition par région des logements sociaux autorisés

    ou en cours d’autorisation et en chantier de 2010 à fin juin 2013

    Source : Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville

    5 Logements sociaux neufs à 200 000 DH 6 Fédération Nationale des Promoteurs Immobiliers (FNPI), « L’immobilier en chiffre », juin 2014 et MHPV, Evaluation décennale en matière d’habitat et la politique de la ville, 29 janvier 2015. 7 Logements sociaux neufs à 250 000 DH

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    Sachant que tous les promoteurs, sans exception, pratiquent la vente d’immeubles en état futur achèvement (VEFA)8 dès l’obtention de l’autorisation de construire, pratiquement tous les projets sont mis en vente sur le marché. Dans ces conditions, l’offre est deux fois supérieure à la production achevée disponible (voir tableau 1). Ainsi, l’offre actuelle de logements sociaux neufs comparativement à la période 2002-2007 est sans précédent. Ces projets, ajoutés à d’autres de moyen standing, ont saturé le marché. Actuellement, l’offre au niveau de ce segment est excédentaire, d’où des campagnes fréquentes de publicité de la part des grands promoteurs avec des rabais et des facilités de paiement consistantes. Certains promoteurs commencent même à transformer les terrains destinés initialement à la production de logements sociaux en lots de terrain pour l’habitat individuel destiné à la classe moyenne.

    III.2 La mise à niveau urbaine

    La mise à niveau urbaine concerne deux actions majeures : la restructuration des quartiers non réglementaires et le programme ville sans bidonvilles.

    La quantification de l’action publique au niveau de ces deux actions pose deux problèmes :

    Elle ne peut se faire en termes de nombre de logements produits mais seulement en termes de crédits débloqués et de ménages bénéficiaires.

    Elle souffre de l’absence de données détaillées sur la répartition géographique des crédits et des ménages bénéficiaires.

    C’est en tenant compte de ces deux biais que nous procédons à l’évaluation de ces deux programmes majeurs de la politique de logement social au Maroc.

    III.2.1 La restructuration des quartiers non réglementaires.

    Dans la perspective de la mise en place d’un développement urbain intégré, les pouvoirs publics ont incité les collectivités locales à concevoir des programmes pluriannuels basés, lors de leur montage, sur la participation de plusieurs institutions (collectivités locales, départements ministériels et établissements publics) sous forme de conventions. L’objectif de ces programmes est la mise à niveau des infrastructures communales, l’amélioration du cadre de vie des habitants, notamment dans les quartiers non réglementaires en dur. Entre 2002 et 2012, ce programme comptait 226 conventions bénéficiant d’une contribution du FSHIU9 à hauteur de 5,48 milliards de DH10 pour un coût global de 8,87 milliards de DH, représentant 62% de la participation de ce fonds11. La mise à niveau urbaine constitue le premier poste de dépenses du ministère chargé de l’habitat aussi bien en termes de budget qu’en termes de nombre de bénéficiaires12. Dans ce cadre, le ministère de l’Habitat se substitue aux collectivités locales pour réparer les effets de l’urbanisation non réglementaire sur des territoires qu’elles maitrisent mal.

    8 La vente d’immeuble en état futur d’achèvement (VEFA) est issue du Dahir n° 1-02-309 du 25 rejeb 1423 (3 octobre 2002) portant promulgation de la loi n°44-00 complétant le dahir du 9 ramadan 1331 (12 août 1913) formant code des obligations et des contrats. (B.O. du 7 Novembre 2002). 9 Les prestations éligibles au financement du FSHIU sont énumérées comme suit : - Programme de restructuration des quartiers sous équipés ; - Programme de Réhabilitation de l’habitat menaçant ruine ; - Aménagement de la voirie interne des quartiers défavorisés ou sous équipés (aménagement ou rénovation) et revêtement des trottoirs ; - Aménagement de places publiques ou espaces verts de proximité situées au sein des quartiers ; - Aménagement de terrains de proximité internes aux quartiers, destinés à des activités sportives. 10 La différence entre ce chiffre (5.48 milliards de DH) et celui figurant dans le tableau (4.6 milliards de DH) réside dans le fait que le chiffre du ministère des Finances représente les sommes prévues qui font l’objet des conventions signées entre le Ministère de l’Habitat et les Collectivités Locales ; par contre, les sommes figurant dans le tableau sont celles effectivement dépensées. 11 Ministère de l’Economie et des Finances « Rapport sur les comptes du trésor » 2013, p 25. 12 Le nombre de bénéficiaire est élevé parce que ce qui est pris en compte c’est le quartier et des fois la ville entière et non pas le ménage pris individuellement comme c’est le cas dans le programme villes sans bidonvilles.

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    III.2.2 Le Programme "Ville sans Bidonvilles (VSB)"

    Le programme VSB prévu initialement pour 72 villes et 277.000 ménages résidant dans près de 1.000 bidonvilles, a été revu à la hausse au fur et à mesure de la réalisation du programme pour concerner on final 388 423 ménages dans 85 villes et centres urbains. Depuis le démarrage de ce programme en 2004 jusqu’à fin décembre 2014, les efforts accomplis ont permis à 248 659 familles de quitter leurs baraques. Ainsi, 52 villes ont été déclarées sans bidonvilles13. Au fur et à mesure que le programme se déroulait, son rendement devenait décroissant. Le coût de résorption d’une baraque était en effet de plus en plus élevé et ce, pour les raisons suivantes :

    Les bidonvilles qui subsistent, soit un stock de 140 000 ménages, sont constitués de bidonvilles très anciens enclavés au sein des grandes villes. Ils sont très difficiles à résorber à cause des exigences des habitants qui veulent bénéficier de lots de terrain et aides pour construire. Actuellement, il existe des milliers d’appartements inoccupés (environs 20 000 appartements) qui leur sont destinés mais qu’ils refusent.

    Les opérations de résorption des bidonvilles constituent un appel d’air, d’où une densification des bidonvilles existants et l’apparition d’autres à raison de 10 000 ménages par an14. Des études plus anciennes évoquent le chiffre de 40 000 unités d’habitat insalubre (15 000 baraques et 25 000 habitats non réglementaires) qui se créeraient annuellement15.

    IV. Le bilan qualitatif de la résorption de l’habitat insalubre et de la production de logements sociaux neufs

    Pour évaluer la politique du logement social de l’Etat à travers le point de vue des ménages à faible revenu, nous allons nous appuyer sur les études les plus récentes qui essaient de répondre à deux questions clefs. La première est relative au degré de satisfaction des ménages ayant bénéficié d’un logement dans le cadre du programme VSB. Quant à la seconde question, elle traite du degré d’accessibilité des logements sociaux neufs pour tous les ménages à faible revenu (résidant ou non dans un bidonville), présents et futurs.

    IV.1 Un niveau de satisfaction élevé des ménages bénéficiaires des opérations de résorption.

    Le niveau de satisfaction ou le non satisfaction de ménages a été observé dans trois récentes études : La première réalisée par l’ONDH, basée sur des enquêtes menées en 2010 auprès d’un

    échantillon de 2.160 ménages répartis sur douze sites d’accueil de la population bénéficiaire16. La deuxième étude, émanant du holding Al Omrane17 lancée en 2010. L’enquête sur le terrain

    s’est déroulée entre 2010 et 2012. Elle a concerné un échantillon de 1 500 ménages répartis dans sept opérations.

    La troisième étude, commandée en 2014 par le Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville en collaboration avec l’ONU Femmes18. L’enquête sur le terrain a concerné 5.851 ménages vivant auparavant dans les bidonvilles et qui ont bénéficié du programme VSB dans ses composantes aussi bien de relogement, de recasement ou de restructuration.

    13 La vie économique du 6 septembre 2014 p 20. MHPV, Evaluation décennale en matière d’habitat et la politique de la ville, 29 janvier

    2015. 14 Intervention du ministre de l’habitat et de la politique de la ville devant la chambre des représentants le mardi 3 juin 2014 cité par le

    journal « Assabah » du 6 juin 2014. 15 Ministère de l’Economie et des Finances « La nouvelle stratégie de logement au Maroc : Déclinaison des principaux axes et évaluation de

    leurs impacts », mai 2008. 16 Observatoire National du Développement Humain (ONDH), «Etude sur l’inclusion des ménages démunis par le logement»,2013 17 Al Omrane et AFD « Evaluation et impact du Programme d’appui à la résorption de l’habitat insalubre et des bidonvilles au Maroc »,

    auteurs, Olivier TOUTAIN, consultant Gret, et Virginie RACHMUHL, Gret, 2014 18 MHPV et ONU Femmes, «Enquête Nationale d’Evaluation d’Impacts des Programmes de Lutte contre l’Habitat Insalubre sur les

    Conditions de Vie des Ménages », 2016

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    Ces études montrent des aspects positifs, mais aussi des limites et incertitudes concernant le programme VSB. Pour les aspects positifs, on peut citer une amélioration certaine des conditions de logement des ménages. Plus de 80% des bénéficiaires sont satisfaits de l’emplacement du site du projet de recasement ou de relogement, des relations de voisinage, de l’amélioration des conditions d’habitation et de l’accès aux équipements de base dans le logement.

    Mais une partie des ménages interrogés, bien que relativement faible (moins du quart), est confrontée à une détérioration de ses conditions de vie, au bouleversement de son quotidien, à l’affaiblissement des liens sociaux et de sa capacité à s’insérer dans les nouveaux quartiers. Des critiques sont également formulées à l’égard des interventions publiques en matière d’équipements collectifs et d’infrastructures, dont la réalisation est étalée dans le temps par rapport aux besoins immédiats des habitants. IV.2 Des logements sociaux neufs inaccessibles pour les ménages à faible revenu

    Pour les ménages qui vont accéder pour la première fois à un logement aujourd’hui ou dans les années à venir, que ce soit comme propriétaire ou locataire, le nombre de logements à produire annuellement est estimé selon l’enquête logement 2012 du MHPV à 193 693 unités (voir tableau 2). 20% de ces unités seront destinées à résorber le déficit progressivement à l’horizon 2030 et les 80% restant sont liées à des besoins qui vont apparaître avec l’accroissement des ménages et le vieillissement du parc logement.

    Tableau 2 : Estimation des types des besoins en logements à l’horizon 2030

    Résorption du déficit

    en logements observé en 2016

    Logements à construire pour

    remplacer les veilles bâtisses

    Logements pour les ménages

    additionnels

    Ensemble des

    besoins

    Besoins à l’horizon 2030

    585 089 176 404 2 143 903 2 905 396

    Parts en % 20% 6% 74% 100%

    Moyenne annuelle des besoins

    39 005 11 760 142 927 193 693

    Source : MHPV, « Phase IV : synthèse des résultats de l'enquête logement, interprétation et élaboration d'une méthodologie d'évaluation du déficit et des besoins en logement », 2015.

    Actuellement, l’appareil de production et le secteur de la promotion immobilière privée et publique ont montré leur capacité à répondre aux besoins du marché en matière de logement. L’abondance des logements sociaux à 250 000 DH démontre amplement cette capacité. Le problème réside plutôt dans l’inadéquation entre l’offre sur le marché et la capacité financière des ménages. L’enquête nationale sur la demande en habitat et l’enquête logement 2012 du MHPV ont montré l’importance de cette inadéquation.

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    Graphe 2 : Répartition des demandeurs de logements selon leurs souhaits en matière de prix de logements

    Source : MHPV, Enquête nationale sur la demande de l’habitat, 2016

    Ainsi, 56% des ménages interrogés au niveau national (42 260 ménages en milieu urbain et 13 200 ménages en milieu rural) déclarent souhaiter acquérir des logements de moins de 250 000 DH ; 41% souhaite des logements dont le prix se situe entre 140 000 DH et 250 000 DH et 15% des logements de moins de 140 000 DH.

    L’enquête logement 2012 montre que près des 2/3 (64%) des besoins en logements à l’horizon 2030 doivent être satisfaits par des logements sociaux de 250 000 DH et moins, en particulier les logements de moins de 140 000 DH qui sont sensés répondre à la moitié (49%) des besoins futurs.

    Graphe 3 : Répartition des besoins annuels moyen en logement par type à l’horizon 2030

    Tableau 3 : Répartition des besoins en logement par type à l’horizon 2030

    Type de logement Besoins % Besoins annuels moyens

    Logement à 140 000 DH 1 415 930 49% 94 395

    Habitat social à 250 000 DH 424 078 15% 28 272

    Habitat économique 472 118 16% 31 475

    Habitat moyen standing 373 498 13% 24 900

    Habitat haut standing 219 771 8% 14 651

    Ensemble 2 905 395 100% 193 693

  • 15

    En procédant à la comparaison entre les besoins annuels moyens pour les logements sociaux par type et la production effective sur le marché, nous constatons que la production des logements sociaux à 250 000 DH est suffisante et est proche des besoins. Elle est même excédentaire dans certaines régions. Par contre, au niveau des logements sociaux à 140 000 DH, l’offre est largement en deçà des besoins comme il apparaît sur le graphe-4 ci-dessous.

    Graphe 4 : Comparaison entre les besoins annuels moyens et la production annuelle moyenne de logements sociaux à 140 000 DH et 250 000 DH

    Ainsi, chaque année, environ 86 000 ménages, soit 44,4% des besoins annuels moyens, ne trouvent pas de réponse à leur besoin en logement au niveau du marché immobilier formel.

    Conclusion

    La politique du logement social au Maroc agit par le biais de deux systèmes parallèles, l’un marchand, subventionné par l’Etat (logement social neuf) et l’autre administré (la résorption des bidonvilles et mise à niveau urbaine).

    Ces deux systèmes de production de logements sociaux présentent les paradoxes suivants : La politique de logement et de mise à niveau urbaine a contribué à l’homogénéisation des

    espaces habités, ce qui a permis le renforcement de la mixité sociale, surtout au niveau des anciens quartiers non réglementaires. De même, la production massive de logements sociaux a répondu aux besoins des ménages modestes mais solvables en fonction des conditions du marché. L’offre de logements sociaux à 250 000 DH est actuellement supérieure à la demande dans pratiquement toutes les villes.

    Le modèle d’habitat social offert est très mal apprécié. Il se caractérise par une densité élevée avec tous les problèmes liés aux habitations collectives, en l’occurrence le mode de vie dans les immeubles (copropriété, densité et promiscuité élevées) et leur gestion au quotidien (difficultés de mise en place de syndics pour l’entretien des immeubles et leurs environnements) 19.

    Pour les ménages qui ne disposent ni d’un logement à monnayer dans le cadre d’une opération de résorption de l’habitat non réglementaire, ni de moyens financiers pour accéder à des logements sociaux, suivant les conditions du marché, ils se trouvent contraints, tôt ou tard, à s’adresser à une offre non réglementaire dont l’estimation varie d’une source à une autre(entre 33 000 unités par an pour le MUAT20 et 40 000 unités par an selon le CESE21 .

    19 Ce type d’habitat « le risque de poser des problèmes sociaux dans les années à venir. Ce risque est d’autant plus élevé que la population qui habite dans ces quartiers est modeste et se caractérise par un taux de chômage élevé notamment au niveau des jeunes » CESE, Rapport annuel 2013, pp 60-61. 20 MUAT, « Étude relative à l’élaboration de la Stratégie Nationale de Gestion du Foncier Mission 2 : Etat des lieux et diagnostic territorial » 2016, page 239. 21 Ministère de l’Economie et des Finances « La nouvelle stratégie de logement au Maroc : Déclinaison des principaux axes et évaluation de leurs impacts », mai 2008.

  • 16

    La politique du logement social reste une politique publique centralisée, sans aucune planification en amont. La répartition territoriale de la production des logements sociaux neufs est laissée à la discrétion des promoteurs immobiliers. Quant aux collectivités locales, elles ne jouent qu’un rôle marginal notamment dans le cadre des opérations de résorption des bidonvilles. C’est une politique à dominante urbaine sans aucune coordination avec les actions sur l’habitat rural22. De même, le locatif social est absent des radars de la politique de logement de l’Etat.

    En vue de mettre en place une politique publique de logement social plus inclusive, il est nécessaire, voir l’urgent, de répondre aux questions suivantes :

    Quelles sont les mesures à prendre pour réduire le coût des logements sociaux disponibles sur le marché ?

    Comment améliorer la solvabilité des populations pauvres et vulnérables pour leur permettre d’accéder à des logements sociaux décents ?

    Quel rôle doivent jouer les collectivités locales dans la planification et la réalisation des projets d’habitat social tous types confondus ?

    Pourquoi l’accès à la propriété est-elle la formule exclusive dans le logement social ? Pourquoi aucune expérience au niveau du locatif n’a-t-elle jamais été amorcée ? Que faire pour intégrer la question de l’habitat rural dans la politique de l’habitat social,

    sachant que l’habitat rural d’aujourd’hui est en partie le bidonville urbain de demain ?

    22 L’habitat rural est traité par différents départements ministériels et organismes publics (Equipement, ONE, ONEP, etc.) selon l’optique de la fourniture des infrastructures de base (eau, électricité, routes rurales, etc.).

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    Partie I : Points de vue institutionnel sur la question de l’habitat social au Maroc

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    1- L’expérience de la Cour des comptes en matière d’évaluation des projets et programmes de l’habitat social

    M. Mohamed Hadhoudi, Président de la troisième chambre de la Cour des comptes

    Introduction générale

    Le droit au logement est reconnu comme un droit social par les constitutions successives du Royaume du Maroc. Ainsi et depuis l’Indépendance, le Royaume a adopté plusieurs stratégies et politiques publiques visant à répondre aux besoins en logement des citoyens des couches défavorisées. Ces politiques publiques ont adopté diverses actions et formes de soutien à l’offre et à la demande en matière de logement.

    Néanmoins et en termes de résultats, la mise en œuvre de ces politiques n’est pas encore arrivée à éradiquer définitivement les multiples formes de l’habitat insalubre, comme les bidonvilles et les quartiers non réglementaires.

    C’est pour cette raison que les couches sociales défavorisées continuent de constituer une priorité majeure dans les programmes publics de l’habitat au niveau national et local. L’intervention publique est ainsi assurée principalement par les organismes publics de l’habitat et par d’autres moyens d’aides et de partenariat public-privé.

    La Cour des comptes et les Cours régionales des comptes ont réservé une partie importante de leurs programmes et travaux au contrôle et à l’évaluation des résultats des programmes et projets publics de l’habitat. Ces travaux ont concerné les ministères, les organismes sous tutelle et les organismes publics locaux. Ils ont aussi bien visé l’appréciation de l’utilisation des moyens et la réalisation des objectifs assignés que la formulation de suggestions susceptibles d’améliorer le rendement et l’efficacité des programmes et projets publics.

    La présente note a pour objectif d’aborder les principales constatations de la Cour et des Cours régionales des comptes ainsi que les recommandations qu’elles ont formulées.

    De la complexité de la mise en œuvre de la politique publique en matière d’habitat social

    La mise en œuvre des politiques en matière d’habitat social est relativement complexe. Elle est confrontée à plusieurs contraintes et obligations qui affectent leur performance et leur gouvernance.

    1. Les politiques publiques doivent observer l’équité entre tous les citoyens.

    Cette obligation conduit les pouvoirs et les opérateurs publics à étendre leurs interventions à tout le territoire national pour répondre à des demandes diversifiées et souvent dispersées.

    A ce titre, les opérations en matière d’habitat ont revêtu plusieurs formes. Il s’agit principalement de programmes nationaux comme Villes sans bidonvilles et les programme de logement social à 250.000 et 140.000 dirhams. Les opérations ont visé la restructuration et la réhabilitation des quartiers d’une part, le recasement et le relogement de populations, de l’autre. Elles ont également porté sur la réhabilitation de certaines médinas comme celles de Fès et de Casablanca.

    Cette contrainte implique la mobilisation de moyens importants pour permettre la mobilité de populations souvent réticentes. Elle nécessite la mise en place de modes de gouvernance performants et efficaces.

  • 20

    2. La mise en œuvre des politiques publiques implique l’intervention de plusieurs acteurs.

    Depuis l’Indépendance, les principaux acteurs en matière d’habitat social sont l’Etat et les organismes publics. Il s’agit des ministères, des établissements publics et des collectivités territoriales. Quant au secteur privé, son intervention est encouragée par différents moyens comme les avantages fiscaux et l’accès au foncier public à des prix préférentiels.

    Pour les ministères, le principal acteur est le ministère de l’habitat qui est chargé de l’élaboration et du suivi de la politique publique de l’habitat. Cependant, son action nécessite la coordination avec d’autres départements comme :

    L’urbanisme, qui a un rôle important dans la planification et l’extension de l’urbanisation ; L’intérieur, pour son rôle majeur dans le recensement des populations et l’encadrement des

    opérations d’attributions des logements ; Les finances, pour assurer et faciliter la disponibilité de la réserve foncière.

    S’agissant des établissements publics, plusieurs organismes sont identifiés. A titre d’exemple :

    Le Groupe Al Omrane et ses filiales. Cet opérateur a remplacé les établissements régionaux d’aménagement du territoire (ERAC)

    et d’autres établissements publics. Il a regroupé leurs capitaux fonciers et financiers. Les Agences urbaines. Leur rôle est d’assurer la cohérence d’ensemble de l’urbanisation et des extensions urbaines.

    A ce titre, elles s’occupent de l’instruction des dossiers des projets d’habitation et procèdent à la préparation de plans de restructuration des quartiers non réglementaires.

    Les collectivités territoriales. Par leur proximité aux citoyens, elles sont souvent le catalyseur de l’identification et du

    recensement des populations les plus défavorisées. Elles sont dans plusieurs cas l’initiateur de conventions passées avec les autorités habilitées. Elles contribuent au financement des projets.

    3. L’inclusion des populations dépend de plusieurs politiques publiques : le logement n’est qu’un pilier parmi d’autres.

    L’accès au logement ne suffit pas à lui seul pour garantir et développer l’inclusion sociale souhaitée. En effet, la consolidation et la durabilité de celle-ci sont confrontées à plusieurs autres défis.

    Parmi ces défis, figure le développement d’autres services sociaux en parallèle avec l’accession au logement, comme l’éducation, la santé, les équipements publics, les transports urbains, etc.

    A ce titre, la cohérence des actions des différents intervenants est capitale pour assurer et favoriser un environnement adapté et favorisant une meilleure cohésion sociale. La coordination des actions et des programmes transversaux ainsi que la mobilisation des moyens de financement au moment opportun constituent alors l’une des contraintes dont dépend le succès des programmes et projets publics. Elles sont requises à toutes les étapes, depuis la conception à la réalisation des projets et programmes, en passant par leur montage financier et technique.

    4. La population cible préfère l’accès à la propriété mais sa contribution au financement demeure limitée.

    Comme il a été cité, la politique de l’habitat social vise à réduire les mauvaises conditions de logement de certaines catégories de la population qui sont l’une des grandes causes de leur exclusion sociale. Néanmoins, sa mise en œuvre se trouve encore menacée par deux facteurs.

  • 21

    Il s’agit de :

    La préférence accordée à l’accès à la propriété ;

    La faiblesse des revenus des ménages concernés.

    Ces deux défis ont amené les pouvoirs publics à diversifier l’offre de logements par différents moyens et actions comme la construction de logements, la restructuration des quartiers non réglementaires, le recasement, l’attribution des lots, les réhabilitations, etc.

    Mais, dans plusieurs situations, le problème du financement de ces actions a constitué un handicap à l’accès des populations défavorisées à un logement décent, au prix raisonnable et dans le délai imparti.

    En effet, les travaux de la Cour et des Cours régionales des comptes ont identifié de nombreux projets et programmes dont la réalisation n’était pas atteinte à cause de l’absence ou de la mobilisation tardive des contributions des populations cibles.

    5. L’action publique est caractérisée par l’urgence et la pression.

    L’action des pouvoirs publics en faveur des populations défavorisées se caractérise par l’urgence et la pression. Elle entend développer une offre suffisante, accessible et dans des délais relativement courts. Cette contrainte impose des projets et programmes soigneusement conçus et développés. Elle requiert un système de suivi et l’évaluation très rigoureux. Mais, dans les faits, l’insuffisance de l’information sur la performance des programmes et projets publics rend difficile la prise de décision pour la mise en œuvre des actions correctives.

    De l’expérience de la Cour et des Cours régionales des comptes en matière d’évaluation des programmes et projets publics de l’habitat social

    L’approche de la Cour et des Cours régionales des comptes en matière d’évaluation des programmes et des projets publics de l’habitat social est prévue par le Code des juridictions financières. Cette évaluation vise à apprécier la réalisation des objectifs assignés au regard des moyens utilisés.

    Les juridictions financières (Cour et Cours régionales des comptes) ont adopté une approche de proximité dans le choix des projets à évaluer et ont utilisé des ressources humaines ayant les qualifications techniques requises.

    Les travaux cités comme exemple reflètent et corroborent les difficultés évoquées dans la mise en œuvre des politiques de l’habitat social.

    1. Le fonds de solidarité habitat et intégration urbaine

    Le Fonds de solidarité à l’habitat et l’intégration urbaine (FSHIU) est un compte d’affectation spéciale créé par la loi de finances de 2002. Le FSHIU s’est engagé, durant la période 2002-2013, sur des subventions de 18,5 MMDH au profit de projets qui totalisent un montant de plus 47 MMDH. Ses ressources et emplois ont atteint respectivement 16.367,00 MDH et 14.388, 00 MDH. Les travaux de la Cour des comptes ont principalement souligné :

    L’éloignement du FSHIU de sa mission principale dans certaines régions

    Il est à rappeler que la mission du Fonds reste la contribution au financement des opérations afférentes aux projets d'habitat social et aux actions et programmes de résorption de l'habitat insalubre. Toutefois, la Cour des Comptes a constaté que 45% seulement des subventions débloquées ont été consacrées à cette mission (Programme Villes Sans Bidonvilles, logement militaire, fonds de garantie, programme concernant les Provinces du Sud). Le reste des subventions a essentiellement profité à d’autres catégories de projets, principalement mise à niveau urbaine.

  • 22

    Ce constat est encore plus accentué au niveau de certaines régions où les subventions du Fonds ont financé, presque exclusivement, les quartiers d’habitat non réglementaires et la mise à niveau urbaine, comme c’est le cas, notamment, des régions de l’Oriental (80% des dépenses), Tadla-Azilal (82%), et dans une moindre mesure de Chaouia-Ourdigha (62%) et de Taza-El Hoceima-Taounate (60%).

    Cet éloignement de la mission du Fonds est dû essentiellement à l’absence d’une stratégie d’intervention basée sur une identification locale des besoins, d’une pondération entre ses différents domaines d’invention et d’indicateurs d’évaluation, d’éligibilité et de priorisation des projets.

    Des disparités interrégionales importantes dans l’octroi des subventions

    Le recoupement entre les données sur la pauvreté et les subventions du Fonds au niveau régional révèle plusieurs incohérences dans les interventions du FSHIU au vu des données régionales en termes de pauvreté et d’inégalité. Ainsi, des régions comme Chaouia-Ourdigha, Doukkala-Abda ou Tadla Azila, ont bénéficié de moins de soutien du FSHIU que d’autres régions ayant des niveaux d’inégalité ou de pauvreté inférieurs ou similaires comme l’Oriental, Meknès-Tafilalet ou Marrakech-Tensift-Al Haouz. Aussi, une région comme Casablanca, qui abrite plus de 40% des bidonvilles au niveau national, a profité du même niveau de subventions du Fonds que d’autres régions qui ne connaissent pas ce problème avec la même acuité, comme l’Oriental.

    Par ailleurs, il y a lieu de noter que le nombre de bénéficiaires n’est pas nécessairement corrélé aux efforts financiers. En effet, certaines régions ont connu un nombre de bénéficiaires égal ou moins important que d’autres bien qu’elles aient reçu plus de fonds du FSHIU. C’est le cas, notamment, de la région du Grand Casablanca par rapport à Marrakech-Tensift-Al Haouz ou de la région Tanger-Tétouan par rapport à Sous Massa Draa. Cela peut s’expliquer par la nature des projets dominants engagés dans une région donnée. Les projets de restructuration des quartiers d’habitat insalubre, de par leur nature, sont caractérisés par un nombre important de bénéficiaires par rapport à ceux de recasement ou de relogement qui sont de surcroît plus coûteux. Or, les régions de Marrakech-Tensift-Al Haouz et de Tanger Tétouan ont bénéficié de plusieurs projets relevant de cette première catégorie.

    Glissement dans les programmes sociaux

    Selon une étude portant sur le glissement dans les projets sociaux, le taux de glissement concernant le programme de recasement au niveau national est de l’ordre de 22,1%. Ce taux relatif au relogement au même niveau est de 6,2%. Cette étude a également fait ressortir l’insatisfaction des bénéficiaires de ces programmes.

    Dotation des fonds de garantie de crédits au logement

    Le FSHIU a contribué entre 2004 et 2013, avec 600 MDH, aux fonds de garantie, soit 48% de leur dotation totale. Cependant, la part des garanties accordées au financement des logements acquis dans le cadre du programme Villes Sans Bidonvilles reste négligeable, soit moins de 50 prêts d’une valeur de 3,8 MDH.

    Retards importants dans le déblocage des subventions

    A fin 2013, 71% des subventions engagées au cours de la période sous revue ont été débloquées. La balance âgée des subventions engagées et non encore débloquées a montré que des engagements datant de 2002 à 2008 ne sont pas encore honorés.

  • 23

    Non-respect des dispositions légales relatives aux restitutions et absence d’audit et d’évaluation des opérations.

    Aucune opération financée par le FSHIU depuis sa création n’a fait l’objet de l’établissement formel d’un bilan de clôture faisant état des excédents ou des déficits définitifs de financement, et ce malgré le déblocage total des subventions prévues (plus de 300 opérations pour un montant cumulé de plus de 3,7 MMDH). La dernière tentative de clôture provisoire d’opérations date de 2008 où une convention a été établie entre le holding Al Omrane (HAO) et le ministère de l’Habitat pour la clôture de 117 opérations. Cette clôture s’est faite globalement avec compensation entre les soldes des opérations excédentaires et déficitaires.

    Par ailleurs, plusieurs subventions débloquées n’ont pas été utilisées tout en partie, qu’en totalité. Elles s’élèvent à 34,848 MDH.

    En outre, les programmes financés par le Fonds n’ont fait l’objet d’aucun audit ou contrôle de la part du Ministère ou du HAO et l’activité de l’Inspection générale du ministère relative à la gestion du Fonds reste particulièrement faible.

    Dépendance des projets de l’octroi des subventions du Fonds et risque d’insoutenabilité du rythme des engagements

    Les subventions du Fonds ne peuvent être considérées comme des subventions d’équilibre dans la mesure où la contribution moyenne du Fonds représente plus de 67% du coût d’un projet. Aussi, le nombre de projets ayant bénéficié d’un financement total de la part du Fonds s’élève à 320 projets d’un coût global de 5,442 MMDH. Ce fait a pour cause la faible contribution financière des autres partenaires publics. Par ailleurs, les engagements non couverts par des crédits disponibles a atteint plus de 5,2 MMDH. En effet, si l’engagement moyen du Fonds au cours de la période 2002-2013 est estimé à 1,54 MMDH par an, la moyenne des ventes en flux monétaires du ciment n’est que de 1,26 MMDH.

    2. La ville nouvelle Tamesna

    La réalisation de la ville nouvelle de Tamesna reflète le cas de l’intervention de plusieurs acteurs et la difficulté de coordination de leurs actions. En effet, elle devrait être assurée par l’intervention de plusieurs partenaires : La Société Al Omrane Tamesna qui est chargée du suivi des travaux d’aménagement primaires,

    du suivi des opérations de partenariat et de la réalisation de quelques opérations de lotissement et/ou de construction pour son propre compte ou pour le compte du holding Al Omrane ;

    Les départements ministériels, chargés de la réalisation des équipements publics ; Les partenaires privés pour la construction, dans le cadre de conventions de partenariats, de

    plus de 80% des logements prévus à Tamesna.

    En général, l’évaluation de la Cour des comptes des réalisations de la ville nouvelle a abouti aux conclusions suivantes :

    Engagements des partenaires publics

    A ce niveau et pour la valorisation de la ville nouvelle de Tamesna, un plan de morcellement a été approuvé en 2005. Il prévoit la réalisation de 118 équipements publics.

  • 24

    Pour ce faire, une convention cadre a été signée entre le ministère de l’Habitat (Al Omrane) et cinq départements ministériels. Les engagements des différents signataires de cette convention n’ont pas été entièrement honorés. Ainsi, sur les 118 équipements prévus, seuls 20 équipements ont été réalisés au 31/12/2014. Les exemples suivants illustrent les difficultés rencontrées pour la réalisation de cette ville nouvelle :

    Sur les trois routes qui devraient être réalisées entre 2007 et 2010 (RR403 Tamesna-Témara, RP 4018 Tamesna-Avenue Ennakhil Rabat et la RP 4022 Tamesna-Autoroute via Ain Atiq), seule la RP 4022 est réalisée.

    Concernant les établissements scolaires, la convention cadre prévoit la mobilisation entre 2007 et 2010 par le ministère chargé de l’éducation nationale, des fonds nécessaires pour l’acquisition des terrains réservés à leur construction (43 Lots) et la réalisation de 12 établissements (4 écoles, 6 collèges et 2 lycées) qui devraient être opérationnels à la fin de l’année 2012. Toutefois, il a été constaté que seuls six terrains sur les 43 réservés aux établissements scolaires, ont été effectivement acquis et que seuls sept établissements ont été réalisés (3 écoles, 2 collèges et 2 lycées) dont cinq sont fonctionnels.

    L’engagement du ministère de la Santé porte sur la réalisation, entre 2007 et 2010, de trois centres de santé, trois logements de fonction et un hôpital de 45 lits. Il s’est également engager à assurer l’équipement et le fonctionnement de toutes les unités construites. Cependant, il a été constaté qu’un seul centre de santé est à ce jour réalisé. Il n’a été cédé au domaine qu’en date du 06 mars 2013.

    Pour les mosquées, le ministère des Habous et des Affaires islamiques s’est engagé à construire, en 2007 et 2008, la grande mosquée du vendredi. Au moment de l’évaluation, cette mosquée était encore non fonctionnelle.

    Le partenariat public-privé

    Pour la réalisation de la ville nouvelle de Tamesna, les promoteurs privés ont été impliqués dans le cadre du partenariat public-privé. 57 conventions ont été conclues avec 16 grands promoteurs (réalisant 200 à 1000 logements par an), 25 petits promoteurs (moins de 100 logements par an) et 14 coopératives. Ces conventions visent la réalisation de 51095 unités de logement dont 18659 logements sociaux et 6148 unités de relogement. Il a été également prévu la construction et la livraison gratuite de 28 équipements publics.

    L’examen de la situation des réalisations au 31/12/2014 en termes de partenariat, a permis de constater que, parmi ces 57 conventions, seulement cinq (5) ont été exécutées et achevées. La situation des autres conventions se résume comme suit :

    Cinq (5) conventions sont en contentieux. Elles concernent une assiette foncière de 93,20ha. Le taux de réalisation globale de ces conventions n’a pas dépassé 15% au 31/12/2014.

    Cinq (5) conventions ont été résiliées à l’amiable avant leur commencement. Ces résiliations se traduisent par l’annulation d’un programme de construction de 923 unités dont 508 logements sociaux et 127 logements de relogement.

    47 conventions sont encore en cours d’exécution, bien que leurs délais d’exécution soient dépassés.

    Concernant le logement social, il a été relevé que sur les 18659 unités de logement social prévues, 10977 unités ont réalisées, soit un taux de réalisation de 58,83%. Quant au taux de réalisation des logements destinés au relogement, il est de 19,39% (1192 unités réalisées sur les 6148 prévues). De plus, le nombre des unités attribuées aux bénéficiaires du programme de relogement ne dépasse pas 370 unités sur les 1192 unités achevées, soit un taux de relogement de 6,02% par rapport aux 6148 ménages prévus.

    Quant aux équipements publics, 6 unités ont été réalisées contre 28 prévues par les conventions, soit un taux de réalisation ne dépassant pas 21,43%.

  • 25

    3. La Société Al Omrane Casablanca (SAC)

    L’appréciation et l’évaluation des réalisations de cet organisme public ont montré que la rareté et la cherté du foncier dans la région de Casablanca font de ce facteur de production un risque majeur. Les opérations de l’habitat social dépendent de la disponibilité du foncier public.

    L’évaluation a mis en relief plusieurs difficultés concernant le programme VSB par les programmes d’habitat social.

    Le programme Villes sans Bidonvilles

    Des impacts négatifs du au retard dans la mise en place d’un cadre d’intervention

    Le programme Ville sans Bidonvilles (VSB) du Grand Casablanca souffre d’une insuffisance majeure qu’on traduit par l’absence d’un contrat ville cadre qui fixe des objectifs, arrête des échéanciers, délimite les responsabilités des parties prenantes et alloue les ressources nécessaires en conséquence. Ce cadre est d’autant plus nécessaire que la ville connait de nombreux problèmes d’habitat et d’urbanisme (bidonvilles, habitat insalubre, forte demande, habitat menaçant ruine, manque d’équipements, etc.) et que plusieurs intervenants publics existent sans que leurs efforts soient nécessairement convergents et harmonisés (communes, sociétés publiques, agence urbaine, etc.). Néanmoins, une tentative pour remédier à cette situation a été entamée en 2011 avec la mise en place de conventions cadres entre les différents intervenants.

    Le programme VSB qui concerne dans sa plus grande partie (95%) la wilaya du grand Casablanca, est composé de trois sous-programmes couvrant la période 2004-2012 et bénéficiant à 98000 ménages.

    Ces programmes concernent, en plus de la Société Al Omrane Casablanca, plusieurs autres opérateurs dont notamment Idmaj, l’Agence Urbaine de Casablanca et Dyar Al Mansour. Leurs réalisations connaissent un retard avec un taux de réalisation ne dépassant pas les 35% à fin août 2013. Ce retard est amplifié notamment en raison de l’actualisation du nombre de ménages qui est revu à la hausse en passant d’un total de 98.000 à 111.057 ménages.

    Des efforts considérables mais limités par la rareté du foncier

    La quotepart de la Société Al Omrane Casablanca dans ces programmes est de l’ordre de 74.037 ménages dont 56.697 à Casablanca. A fin septembre 2013, 42.659 ménages, soit 58% des engagements, ont été traités. Toutefois, la SAC n’a pas encore identifié le foncier nécessaire à la résolution d’environ 10.300 des ménages traités, ce qui risque de retarder et de compliquer encore la mise en œuvre de son programme VSB.

    Des subventions publiques importantes mais non encore mobilisées

    Les subventions de l’Etat prévues au profit du programme VSB s’élèvent à 1993,47 MDH, dont 81% proviennent du Fonds Spécial pour l’Habitat (FSH) et 19% du Budget général de l’Etat (BGE). Les subventions prévues par le FSH sont mobilisées à hauteur de 58% alors que celles du BGE ne le sont pas encore, ce qui impacte l’état d’avancement des programmes destinataires.

    Pour la ville de Casablanca seule, les subventions du FSH prévues sont de l’ordre de 1210 MDH dont 715,91 MDH mobilisées, soit 58%. Les subventions du budget général prévues, mais non encore mobilisées, s’élèvent à 274 MDH.

    Il convient de noter qu’à fin avril 2013, seule la ville de Bouznika a été déclarée comme ville sans bidonvilles. Des villes comme Deroua, Settat, Brouj, Sidi Bennour, qui auraient dû être déclarées en 2008 comme VSB, ne le sont pas encore. Quant à la ville de Mohammedia, son contrat ville avait pour objectif de la déclarer comme VSB en 2010. Or, cet est objectif n’est toujours pas atteint.

  • 26

    Les programmes d’habitat social

    Deux programmes ont été examinés, en l’occurrence le programme de logements à faible valeur immobilière totale (FVIT) de 140.000,00 DH et le programme de logements à 250.000,00 DH. Les cadres incitatifs de ces deux programmes ont été définis respectivement par la loi de finances de l’année 2008 et celle de l’année 2010.

    Des réalisations modestes par rapport aux engagements et des risques de glissement

    Logements à 140000 DH

    Dans le cadre de ce programme, la société s’est engagée à réaliser, dans son ressort territorial, 15.685 logements FVIT. Toutefois, les réalisations effectives de ce type de produits demeurent faibles et ne répondent pas aux objectifs escomptés. En effet, les unités recensées dans les achèvements ne dépassent pas 617 unités réparties sur les années 2010, 2011 et 2012, soit un taux de réalisation de moins de 4 %.

    Logements à 250000 DH

    La SAC n’a disposé d’un plan d’action pluriannuel relatif à ce programme qu’à partir de l’année 2011, avec la mise en place du plan d’action 2011-2014 qui vise la production de 11.064 unités dont 7204 en partenariat.

    Pour ce qui est des réalisations, il a été constaté, durant la période 2007-2012, que :

    Sur ce segment, le nombre d’unités réalisées n’a pas dépassé 2.005 unités sociales et 1.253 unités de relogement (opérations entrant dans le cadre des VSB) pendant toute la période.

    Contrairement aux prévisions fixant comme objectif de produire 2.312 unités pour la seule année 2012, il n’en a été réalisé que 1049, soit un taux de réalisation de 45%.

    Par ailleurs, l’un des risques majeurs auquel sont confrontés ces deux programmes d’habitat social et qui menace de compromettre l’atteinte de leurs objectifs est le glissement dans la population cible.

    En effet, la majorité des opérations réalisées dans ce cadre l’ont été à travers des partenariats conclus avec des promoteurs privés. La SAC ne dispose pas de garanties réelles permettant de s’assurer que les unités produites ont bénéficié à la population cible. Ainsi et malgré le droit de contrôle et cadrage prévu par les conventions de partenariat, la SAC ne procède pas au contrôle du respect des conditions d’éligibilité des acquéreurs finaux destinataires des produits de ces programmes. En plus, elle ne communique pas à ses partenaires la liste des bénéficiaires visés par ces opérations comme elle n’intègre pas ces bénéficiaires dans sa base de données commerciale. Cette situation est observée dans le programme de Mohammedia par exemple.

    Enfin, il y a lieu de préciser que l’objectif en matière d’habitat social de ces deux programmes sociaux n’est pas encore concrétisé du fait que plusieurs opérations n’étaient pas encore achevées. A titre d’exemple, aucun bénéficiaire n’a pu accéder à la propriété effective d’un logement dans la région d’El Jadida.

    Conclusion

    Au total, il convient de souligner qu’à l’issue de ses nombreux travaux d’évaluation des projets et programmes en matière d’habitat social (au niveau national et local), la Cour des comptes a notamment rappelé que la mise en œuvre de cette politique publique induit une demande de pilotage de plus en plus forte et nécessite une clarification dans les missions et les responsabilités de tous les acteurs. Elle doit mettre la satisfaction des populations défavorisées au centre de ses préoccupations par la production de logements décents réunissant toutes les conditions de bien-être des citoyens.

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    2. L’expérience du Ministère de l’Habitat et la Politique de la Ville en matière d’inclusion des ménages bénéficiaires des programmes d’habitat social

    M. Mohamed Changui, Chef de division au Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville

    Introduction

    Le Maroc a toujours considéré la lutte contre l’habitat insalubre comme l’une des priorités nationales. Il a initié, depuis son Indépendance, plusieurs stratégies et programmes d’intervention, en passant depuis le début des années 1990 de la politique des lotissements, des opérations intégrées et des programmes spéciaux de lutte contre l’habitat insalubre à de nouvelles stratégies d’intervention axes sur la lutte contre l’habitat insalubre et la promotion de l’habitat social parmi les priorités nationales et ce,…

    Aperçu historique sur les interventions du MHPV

    La stratégie de résorption de l’habitat insalubre durant les années 90 a été marquée essentiellement par la mise en place d'une politique conventionnelle associant les moyens de l’Etat à ceux des organismes publics et des populations concernées, et ayant pour objectif de faciliter l'exécution d'un important programme de lutte contre l'habitat insalubre comportant deux principales composantes : la résorption des bidonvilles et la restructuration de l'habitat sous-équipé. Ce programme visait l’intégration de près de 100.000 ménages.

    Cependant, malgré une palette riche en modes d’intervention en vue de la résorption des bidonvilles qui a permis d’atteindre, ponctuellement, certains résultats remarquables, la problématique des bidonvilles est demeurée, au moins jusqu’à la fin des années 1990, encore entière tant en nombre de bidonvilles qu’en complexité de résorption, notamment dans les grandes villes.

    Aussi, à la fin des années 90, le département de l'Habitat a été appelé à définir des méthodes d'intervention plus adaptées aux possibilités d'épargne des ménages à ressources limitées, de développer de nouveaux mécanismes d'intervention, notamment à travers la promotion d'une politique foncière, et le développement de nouvelles synergies en matière de lutte contre l'habitat insalubre.

    L’évaluation des interventions passées en matière de lutte contre l’habitat insalubre, a permis de souligner que la performance de ces interventions a été limitée par différents dysfonctionnements liés aux contraintes de financement, à la rigidité réglementaire et à la programmation des projets, à l’insuffisance de la maîtrise du foncier au préalable du lancement des programmes, etc.

    Cette situation a conduit à une révision des stratégies adoptées, l’ouverture de nombreux chantiers de réformes et la définition de programmes innovants et plus volontaristes en mesure de répondre aux besoins de résorption et de prévention de l’habitat insalubre, de promotion de l’habitat social et d’anticipation du développement urbain.

    A- La nouvelle approche inclusive en matière de lutte contre l’habitat insalubre et la promotion de l’habitat social

    En application des orientations du Discours Royal d’ouverture de la première année de la 7ème législature, érigeant l’habitat social parmi les quatre priorités nationales, le programme gouvernemental a arrêté une nouvelle stratégie d’actions visant à augmenter le rythme de production en vue d’atteindre l’objectif de 100.000 logements sociaux par an et à œuvrer à l’éradication progressive de l’habitat insalubre. A cet effet, les pouvoirs publics ont procédé à la mise en place de plusieurs chantiers de réforme visant à assurer une meilleure adéquation de l’offre et de la demande et à promouvoir l’habitat social. Ces chantiers se sont articulés d’une part, sur les aspects

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    fonciers, fiscaux et financiers, et d’autre part, sur la réforme du secteur public de l’habitat et l’accroissement de ses capacités d’intervention. Parallèlement à ces réformes, le gouvernement a également donné une nouvelle impulsion aux programmes publics d’habitat qui ont un impact direct sur la promotion de l’habitat social et la résorption de l’habitat insalubre.

    Cette nouvelle approche se base sur trois fondements :

    L’arrêt de la prolifération de l’habitat insalubre à travers notamment l’accélération du rythme de résorption des bidonvilles et la diversification de l’offre de logement concurrentiels à l’habitat informel ;

    Le traitement de l’existant à travers la participation effective des collectivités locales, du secteur privé et des autres acteurs locaux concernés ;

    L’adoption d’une politique préventive et de promotion de l’habitat social.

    Afin de concrétiser la stratégie de cette politique adoptée en matière de lutte contre l’habitat insalubre et promouvoir le logement social pour prévenir la résurgence de l’habitat insalubre, plusieurs outils innovants ont été adoptés, dont notamment :

    La mobilisation du foncier public

    Il s’agit d’un axe majeur de la politique du Gouvernement en matière de promotion de l'habitat social et de lutte contre toute forme de l’habitat insalubre, de création de villes nouvelles et l’ouverture à l’urbanisation de nouveaux pôles urbains. En effet, les objectifs assignés à cette mobilisation visent, entre autres, à favoriser l’accès des opérateurs aux terrains, dynamiser le patrimoine foncier de l’Etat et améliorer l’offre foncière publique en terrains viabilisés tout en stimulant l’investissement privé à s’orienter vers la réalisation du logement social. Le total des terrains publics mobilisés à ce jour est de 8723 ha.

    La mobilisation des ressources financières durables

    Pour financer les opérations de résorption de l’habitat insalubre et lutter contre la pauvreté urbaine, un "Fonds Solidarité Habitat" a été créé et institué en 2002 en remplacement du Fonds Social de l’Habitat créé en 1984. Son but est de permettre aux ménages à faibles revenu d’accéder à un logement décent. Ce fonds, actuellement dénommé "Fonds Solidarité Habitat et Intégration Urbaine" (FSHIU), a vu ses emplois s’élargir aux financements d’opérations afférentes aux projets intégrés s’inscrivant dans le cadre de la politique de la ville.

    Depuis la création de ce fonds en 2002 jusqu’à fin 2015, le Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville a engagé 837 convention de financement pour une contribution globale du fonds de 27,16 MMDH. Les engagements et les dépenses du FSHIU pour la même période ont profité à plus d’un million de bénéficiaires.

    La mise en place des fonds de garantie pour le renforcement de l’accès au financement du logement

    La facilitation de l’accès au financement du logement, particulièrement des ménages à revenu modeste et irrégulier, a constitué l’un des principaux instruments de la politique publique en matière d’habitat. C’est dans ce cadre que l’Etat a mis en place en 2003 le Fonds de garantie pour les populations à revenu modeste et/ou irrégulier (Fogarim), dénommé actuellement « Damane Assakane ».

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    La création du Fond a visé un double objectif :

    (i) La sécurisation des banques afin de les inciter à s’impliquer davantage dans le financement du logement social ;

    (ii) L’appui aux populations à revenu modeste et/ou non régulier afin de leur faciliter l’accès au crédit bancaire à des conditions avantageuses.

    A fin 2015, la garantie Fogarim et Fogarim –VSB- a bénéficié à 125 512 emprunteurs pour un montant global de 19,37 MMDH.

    La réforme institutionnelle

    En 2003, une réforme institutionnelle majeure s'est opérée, marquée par le groupement des 10 opérateurs publics de l'Habitat (7 ERAC, ANHI, SNEC et Attacharouk) en un seul groupe d'aménagement Al Omrane. Cette refonte institutionnelle et de mise à niveau visait à corriger les dysfonctionnements qui caractérisaient la gestion de ces opérateurs, à développer de nouvelles synergies dans leurs actions, à mettre en cohérence les interventions publiques en matière d’habitat et à relever le défi de l'habitat social et de la mise à niveau urbaine.

    La restructuration des opérateurs publics de l’Habitat s’inscrit également dans le but de la mise à niveau du secteur, en particulier les actions de lotissement, d’aménagement et de résorption de l’habitat insalubre. Cette restructuration a eu un impact positif sur l'accélération du rythme de réalisation des programmes, en particulier le programme Villes sans bidonvilles.

    Les réformes juridique et réglementaire et l’encadrement technique du secteur

    L’Etat a mené une réforme de son système juridique pour mieux encadrer le secteur, y encourager l’investissement et faciliter l’accès au logement des citoyens appartenant aux différentes couches sociales. Cette réforme a été traduite par l’élaboration de plusieurs projets de lois.

    Le Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville œuvre toujours à l’encadrement technique du secteur de la construction en vue d’améliorer le processus de production du logement au niveau de la sécurité, de la qualité et de la durabilité. Il veille à assainir l'environnement dans lequel exercent les professionnels par un ensemble de chantiers qui répondent aux besoins ressentis au niveau technique et réglementaire, notamment la réforme et la modernisation de l’arsenal juridique et technique.

    Or, l’ampleur du besoin en logements nécessite d’importants moyens de production et interpelle tous les opérateurs immobiliers. C’est la raison pour laquelle les autorités publiques associent, aujourd’hui plus que jamais, les promoteurs du secteur privé dans l’objectif d’accélérer le rythme de production, de diversifier la gamme des produits offerts, d’encadrer et de développer la filière.

    Si la stratégie du partenariat public-privé dénote, en effet, d’un besoin de complémentarité entre les deux secteurs de la promotion immobilière, elle témoigne aussi d’une certaine évolution dans leur rapprochement. B- Programmes de lutte contre l’habitat insalubre et promotion de l’habitat social

    1- Inclusion des ménages bidonvillois à travers le programme « villes sans bidonvilles » (PVSB)

    La résorption des bidonvilles étant la composante essentielle de la lutte contre l’habitat insalubre, le gouvernement marocain en a fait la priorité dans le domaine du développement social, de la lutte contre la pauvreté et de l’exclusion en milieu urbain en lançant en 2004 le programme national "Villes sans bidonvilles" (VSB).

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    Ce programme vise l’éradication de l’ensemble des bidonvilles, soit 388.400 ménages (chiffre actualisé au fur et à mesure de la réalisation du programme) dans 85 villes et centres urbains, avec un investissement d’environ 32 MMDH, dont 10 MMDH de subventions de l’Etat, soit 30%. Les 70% restants sont répartis entre les recettes de péréquation des opérations (54%) et les contributions des ménages bénéficiaires (16%).

    L’approche du programme VSB adopte l'échelle de la ville comme unité de programmation, pour une intervention globale et intégrée, et se base sur un cadre contractuel entre l'Etat, les Collectivités locales et les opérateurs. Les contrats «Ville sans bidonvilles» ainsi que les différents types de conventions forment le cadre institutionnel et fonctionnel des interventions des partenaires et des opérateurs.

    Trois modes de résorption sont privilégiés : la restructuration, le relogement et le recasement. L’intervention s’élabore dans un cadre partenarial où chaque partenaire, selon la spécificité du territoire, a une mission clairement définie. La mise en œuvre des engagements contractuels, la coordination et le suivi sont assurés par des instances de gouvernance, en l’occurrence le comité national de suivi, le comité régional de coordination et le comité provincial d’identification et de mise en œuvre.

    A fin 2015, 53 des 85 villes concernées ont été déclarées sans bidonvilles et plus de 1 300 000 habitants ont vu leurs conditions d'habitat s'améliorer. Le nombre total des ménages qui sont concernés par des projets de mise en chantier (achevés ou en cours d’exécution) est de l’ordre de 82%.

    Par ailleurs, l’inclusion des ménages des bidonvilles se manifestent clairement à travers :

    a- La pertinence de la stratégie d’intervention qui est clairement définie, fondée sur le partage des responsabilités et la mobilisation des outils de mise en œuvre. Dans chaque ville, le programme est adapté selon les conditions locales. Les solutions sont identifiées selon les particularités locales et en fonction des situations sociales des ménages.

    b- Les changements observés dans le cadre de vie des ménages, comme en témoignent les chiffres suivants : 97,5% des ménages bénéficiaires ont exprimé un sentiment de stabilité dans les logements

    acquis à travers le programme « villes sans bidonvilles » ;

    84% des bénéficiaires ont exprimé leur satisfaction quant à l’emplacement du site du projet de recasement ou de relogement ;

    92,7% des bénéficiaires sont satisfaits à l’égard des relations de voisinage ;

    Les logements se caractérisent par des murs en briques (97,5%), un toit en béton (96,3%) et un sol en mosaïque carrelage (52 %) ou en ciment (48%).

    c- Une nette amélioration dans l’accès aux équipements de base dans le logement, avec : Un taux d’équipement des logements de 98,3% pour la cuisine, 98,8% pour les toilettes et

    44% pour les douches ou salles de bain ;

    Un taux de raccordement des logements de 85,5% (22,3%) pour les réseaux d’eau potable, 93,4% (33%) pour l’électricité et 92,8% (19,5%) pour l’assainissement liquide ;

    92,7% (55,4%) des ménages qui bénéficient du service de collecte des ordures ménagères ;

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    d- Une baisse de la pauvreté monétaire et de l’inégalité ainsi qu’une stabilité du chômage : Les ménages ont enregistré une baisse de la pauvreté par rapport à la situation où ils vivaient

    dans les bidonvilles, passant de 48,7 à 28,3%.

    Les autres indices de pauvreté ont presque chuté de la moitié : l’Indice de la Population de la Pauvreté (IPP) est passé de 17,8% à 8,3% et celui de la sévérité de la pauvreté de 9% à 3,4%.

    Les inégalités entre les bénéficiaires ont diminué. L’indice de Gini a baissé de 0,404 à 0,326.

    Le taux de chômage a sensiblement baissé entre les deux situations, passant de 27,3 à 23,5%.

    e- Une nette amélioration dans l’accès à la propriété avec documents : Le taux des ménages propriétaires de leurs logements a doublé, passant de 44,4% à 92,5%

    (de 46,1% à 91,3% pour les ménages dont le chef est un homme et de 36,1% à 93,2% pour les ménages dont le chef est une femme).

    Le taux de ménages disposant de documents prouvant la propriété a presque triplé, passant de 32,0% à 87,7%.

    2- Inclusion des quartiers de l’habitat menaçant ruine

    En ce qui concerne l’habitat menaçant ruine et les tissus anciens, des programmes d’intervention pour sécuriser et améliorer les conditions d’habitat des ménages qui y résident ainsi que de ceux sinistrés suite à des catastrophes naturelles ont été élaborés et mis en œuvre. Selon le recensement du ministère de l’Intérieur (novembre 2012), 43.697 constructions menaçaient ruine.

    Le ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville a élaboré plusieurs programmes pour protéger et mettre en valeur le patrimoine dans les anciennes médinas, ksours et kasbahs. Un programme prioritaire dont 7 projets initiés en 2013 ciblant 9068 constructions a permis l’amélioration des conditions d’habitat de 23 370 ménages. En 2014, 11 villes ont été programmées dans le cadre de ce programme et le reliquat est programmé en 2015-2016 dans un cadre conventionnel.

    3- Inclusion des quartiers de l’habitat non réglementaire

    En matière de mise à niveau urbaine et d’intervention dans les quartiers sous équipés, la stratégie d'intervention dans les Quartiers non Réglementaires (QNR) est fondée sur une double démarche : la première consiste à endiguer le phénomène et à le régulariser en l'intégrant comme forme d'urbanisation, alors que la seconde repose sur une démarche préventive qui s'appuie sur un aménagement foncier ambitieux et adapté aux couches des populations clientes de l'HNR.

    L’objectif recherché est de généraliser l’accès aux équipements de base et d’améliorer le cadre bâti et la qualité des espaces urbains dans les villes par la réalisation en particuliers, d’opérations de restructuration et d’équipement en infrastructures de base.

    Pour la période 2002-2014, 495 conventions ont été signées. Elles visent la restructuration des quartiers d’habitat sous équipés et la mise à niveau urbaine. Elles concernent 1.093.000 ménages avec une subvention totale de 11,82 Milliards DH.

    4- Intervention dans le cadre de la politique de la ville La politique de la ville trouve ses fondements dans la nouvelle Constitution du Royaume qui consacre les principes de participation, de pluralisme et de liberté, d’égalité des chances et de justice sociale. Elle s’inscrit également dans le cadre des engagements déclinés dans le programme gouvernemental tel qu’il a été adopté en 2012.

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    C’est une politique publique qui vise à développer des villes inclusives, productives, solidaires et durables. C’est aussi une politique interministérielle, intégrée, multi-partenariale, contractuelle et participative.

    Sur le plan opérationnel, il a été procédé à l’identification de 88 projets, dont 32 conventionnés et 56 en cours d’étude, la mise en œuvre des plans d’appui et de développement des villes nouvelles de Tamesna et Tamensourt ainsi qu’à l’élaboration du plan de développement de la ville de Chrafat.

    5- Promotion de l’habitat social

    La production du logement social a toujours constitué une préoccupation constante de l’Etat et un enjeu majeur du secteur immobilier. Cette préoccupation est due aux tentatives de résorption du déficit en logements accusé par le Maroc. En témoigne l’intérêt qu’à lui ont accordé les différentes stratégies adoptées jusqu’à nos jours dans ce domaine.

    Ainsi, pour faire accéder les ménages particulièrement à revenu faible et moyen à un logement décent et en adéquation avec leur pouvoir d’achat, plusieurs programmes d’habitat social ont été conçus. Ils ont bénéficié de plusieurs avantages sur le plan foncier, fiscal et financier.

    a- Logement à faible valeur immobilière (Logement à 140.000 DH)

    L’objectif assigné depuis la création de ce programme en 2008 était la mise en place d’un nouveau produit d’habitat social à faible valeur immobilière au profit des ménages les plus démunis dont le revenu est inférieur ou égal à 2 fois le SMIG ou le SMAG. Les promoteurs immobiliers qui s’engagent dans la réalisation de ce type de logement bénéficient d’exonérations fiscales et peuvent profiter, auprès des sociétés filiales du Groupe Al Omrane, de terrains étatiques équipés et cédés et ce, dans un cadre partenarial public-privé.

    En matière de bilan, à fin décembre 2015, le nombre de logements autorisés a dépassé les 52.480 unités, dont 35.061 ont été achevés.

    b- Logement social à 250.000 DH

    L’année 2010 a connu un tournant sans précédent dans l’encouragement de l’offre en logements sociaux par la mise en place du dispositif relatif au programme de logements sociaux à 250.000 DH. Ce dispositif fut créé sur les Hautes Instructions de SM Le Roi, afin de relancer l’investissement dans ce type de logement, vu son impact majeur et stratégique sur l’économie nationale, tant sur le plan macro que micro-économique et au regard de ses effets d’entrainement sur les autres secteurs. C’est ainsi que le gouvernement a mis en œuvre un ensemble de mesures visant à promouvoir l’investissement dans ce type de logement en accordant aux promoteurs immobiliers des exonérations fiscales, tout en soutenant le pouvoir d’achat des ménages par l’octroi d’une aide directe sous forme d’un versement du montant de la TVA du logement acquis.

    Le nombre des promoteurs immobiliers engagés dans la réalisation des projets de logements sociaux à travers plusieurs villes du Royaume est conséquent. En effet, depuis la signature de la première convention le 08 avril 2010 et jusqu’à fin décembre 2015, 905 conventions ont été signées portant sur la réalisation de