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Nantaises au travaildu xviiie siècle à nos joursDes indienneuses aux ingénieur(e)s

Château des ducs de Bretagne-Musée d’histoire de Nantes Coproduction Auran

L’exposition

CommissariatKrystel Gualdé, responsabledu service de la conservation du musée d’histoire de Nantes

assistée par

Anne Bouillé, chargée de recherche scientifique des collectionsRéjane Burki, régisseuse des œuvresPierre Chotard, responsable du service des expositions temporairesGaëlle David, documentaliste

Et toutes les équipes du musée d’histoire de Nantes, du Voyage à Nantes et de l’Auran

Scénographie/graphismeLaurence Chabot, scénographeNathalie Fonteneau et Clément Bacle / collectif AKT3

Le catalogue

RédactionKrystel Gualdé

Tatiana BouleauPatrick Paillouxde l’Auran

Coordination éditorialeÉvelyne Le Magadure

Conception, création, mise en pages, fabricationAurélien Armide

PhotogravureDominique Coutzac Atelier graphique TAG, Nantes

ImpressionLe Govic, Treillières Loire-Atlantique

Cet ouvrage a été réalisé à l’occasion de l’expositionNantaises au travail, du xviiie siècle à nos jours. Des indienneuses aux ingénieur(e)sprésentée par le musée d’histoire de Nantes avec la collaboration de l’Agence d’urbanisme de la région nantaise.

Prêteurs

Archives départementales de Loire-Atlantique, Nantes

Archives municipales de Nantes

Bibliothèque municipale de Nantes

Centre d’histoire du travail, Nantes

Collection « L’Adresse Musée de La Poste », Paris

Collections particulières

Communauté des Filles de la Sagesse, Saint-Laurent-sur-Sèvre

Congrégation des Sœurs de l’instruction chrétienne, Saint-Gildas-des-Bois

Lycée Guist’hau, Nantes

Lycée Vial, Nantes

Musée de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris

Musée départemental Dobrée, Nantes

Société O’Net

Le musée exprime sa gratitude à celles et ceux qui ont accepté de livrer leur témoignage dans le cadre de cette exposition. Qu’ils soient remerciés pour leur sincérité, leur honnêteté et leur courage.

Thierry Violland, Directeur général de l’Agence d'urbanisme de la région nantaise

Dire qu’en deux siècles le travail des femmes a considérablement évolué est une évidence. Les femmes ont toujours travaillé. Mais il est vrai qu’une des caractéristiques majeures de la seconde moitié du xxe siècle européen est certainement l’entrée massive des femmes sur le marché du travail (aujourd’hui le taux d’activité féminin est de 68 % contre 56 % en 1975). Et au-delà de ces chiffres, la nature même des emplois occupés par les femmes, comme par les hommes d’ailleurs, a profondément évolué.

Malgré les progrès considérables réalisés dans l’amélioration des conditions de travail, les inégalités entre les hommes et les femmes sont encore aujourd’hui une réalité : conciliation des temps, inégalités salariales, précarité de l’emploi, plafond de verre… sont des obstacles auxquels les femmes sont régulièrement confrontées.

Aussi, lorsque le musée d’histoire de Nantes nous a proposé de travailler sur ce sujet, l’équipe n’a pas hésité une seconde. L’Auran a donc apporté son expertise sur la période contemporaine en collaboration scientifique étroite avec le musée d’histoire de Nantes et l’association Nantes-Histoire : sont analysés les types d’emploi, les emplois occupés, les conditions de travail, la formation, les salaires, la garde d’enfants, la participation aux instances syndicales… des années 60 à nos jours, dans la métropole nantaise et dans les autres agglomérations françaises.

Ce partenariat s’est révélé particulièrement enrichissant pour l’Agence, à l’heure où elle coordonne le projet de territoire Ma Ville Demain destiné à dessiner la métropole nantaise à l’horizon 2030.Comprendre le passé est une absolue nécessité pour agir aujourd’hui et écrire l’avenir. Car beaucoup reste encore à faire, l’exposition le montre bien, pour que l’égalité entre les hommes et les femmes, au-delà d’être un principe reconnu par tous, devienne une réalité dans tous les domaines, et au quotidien. Nantaises au travail est une invitation à poursuivre ce mouvement qui nécessite réflexions, échanges et actions collectives.

Bonne lecture à toutes et tous,

Bertrand Guillet, Directeur du musée d’histoire de Nantes

Nantaises au travail… Fonder un projet dont le principe est la division par le genre et l’appliquer à une question sociale fondamentale au cœur de notre société, à savoir l’accès au travail, à la formation professionnelle et à l’ensemble des métiers sans restriction, hier mais aussi aujourd’hui, voilà la recherche dans laquelle le musée d’histoire de Nantes s’est engagé, et dont l’exposition restitue les conclusions au public.

La question demeure cruciale, elle est souvent débattue et fait l’objet d’un combat permanent où s’entrecroisent vérités et affabulations, constats et revendications, équité et discriminations. Aussi la nécessité de porter un regard juste et objectif sur la réalité du travail des femmes, particulièrement sur le territoire nantais, s’est-elle imposée au musée.

Cette nécessité est née avant tout d’un manque. Car le travail de synthèse effectué afin de raconter et d’exposer l’histoire de la ville et de ses habitants dans le musée d’histoire a dû laisser dans l’ombre de nombreux acteurs, faute d’espace ou de collections, mais aussi, parfois, en raison des choix qui ont guidé à notre insu la construction du propos, telles ces pesanteurs nous empêchant, au nom d’un équilibre scientifique ou de traditions muséographiques, de modifier les approches et les lectures.

C’est ce constat d’absence qui nourrit en grande partie, depuis l’ouverture du musée en 2007, la politique des expositions temporaires : interroger et mettre en perspective ces pans d’histoire et de mémoire ou ces acteurs oubliés dont l’héritage et l’actualité façonnent notre regard et nos pratiques. Nantaises au travail s’inscrit dans la suite de projets comme Nantais, qui sommes-nous ? et Nantais venus d’ailleurs, qui ont pour ambition de présenter la singularité, la richesse et la diversité des populations vivant aujourd’hui à Nantes.

Questionner une histoire, en comprendre les enjeux, y porter un regard objectif et lucide qui s’appuie sur les archives, les documents, les enregistrements sonores et filmés, fait partie de la méthodologie habituelle du musée. Pour mener ce travail, une collaboration passionnante a été initiée avec l’association Nantes-Histoire et son Atelier qui fut à l’origine du projet. Aussi, je remercie très sincèrement tous les membres de l’association qui, durant plusieurs années, ont accompagné le musée dans cette recherche, dépouillant patiemment l’ensemble des sources locales.

Mais l’enjeu était aussi de dépasser les « époques historiques » et de porter notre attention sur la situation des femmes au travail aujourd’hui. Je salue ici particulièrement une autre collaboration, unique, et que j’espère voir se renouveler, tant l’apport des études contemporaines vient nourrir et approfondir celles du temps passé. Grâce à elle nous proposons au visiteur un panorama complet du sujet, dénonçant des idées préconçues et affirmant des certitudes vérifiées. L’Agence d’urbanisme de la région nantaise (Auran) aura été ce partenaire remarquable !

Souhaitons que Nantaises au travail offre un regard nouveau sur les conditions professionnelles des Nantaises, hier et aujourd’hui ; qu’au-delà de ce constat à la fois brutal et plein d’espoir se poursuivent les combats visant à l’égalité citoyenne ; mais aussi que ce portrait éclaire, en négatif, un autre sujet : celui des Nantais au travail.

Sommaire

Des indienneuses aux ingénieur(e)s p. 14

En fragilité p. 23

En confiance p. 43

Au féminin p. 61

En carrière p. 73

À la chaîne p. 85

En colère p. 105

Au quotidien p. 116

Nantaise, qui es-tu ? p. 123

Chronologie p. 130Bibliographie p. 131

Nantaises au travail

L’histoire des femmes au travail est récente. Il n’y a pas si longtemps, une vingtaine d’années seulement, elle n’existait tout simplement pas… confondue dans l’histoire générale du travail qui donnait l’impression que dans ce domaine-là, au moins, il n’y avait pas eu de différence entre les deux sexes ; la question du travail des femmes ne semblait pas justifier de recherches dédiées.

Et pourtant... Pour nous qui sommes habitués à considérer toute histoire comme une évolution ou une révolution nous menant irrémédiablement vers ce que nous interprétons généralement comme un progrès, force est de constater que celui-ci ne toucha que très tard les femmes au travail.

Leur histoire est in-dissociable de celle de leur droit à accéder aux formations qualifiantes et  à  l ’enseignement supérieur, à disposer li-brement de leur salaire,

ou encore à occuper un emploi sans l’autorisation de leur mari. Or, ces acquis sont tous extrême-ment récents au regard de la part que les femmes prirent aux activités économiques à travers l’histoire. Quelques dates en témoignent : en France, la première Société pour l’enseignement professionnel des femmes fut fondée en 1862, les premiers lycées de jeunes filles datent des an-nées 1880, les femmes disposent librement de leurs revenus depuis 1907 et peuvent exercer une profession sans l’accord de leur mari seulement depuis 1965 ! On se rend compte du long chemin parcouru en un siècle, commencé bien avant que les unes et les autres se soient vu reconnaître la part qu’elles tenaient effectivement dans le monde du travail. Cela révèle aussi, par défaut, l’état de « non-droit » dans lequel jusque-là elles étaient maintenues.

Aujourd’hui, quel constat pouvons-nous faire ?

Le doute sur l’égalité entre les hommes et les femmes dans le monde du travail, souvent au centre de débats organisés sur les plateaux télévisés à l’approche du 8 mars (journée interna-tionale des femmes), est entretenu par les médias qui jouent de l’ambiguïté dans leur approche du sujet : tantôt une situation inacceptable qu’il convient de dénoncer, tantôt (et souvent en même temps) une « vraie fausse idée » qui perdure et n’est plus d’actualité… Ainsi, les propos oscillent, au gré des opportunités, jusqu’à finalement déconstruire tout discours cohérent.

À l’échelle nationale, l’Observatoire des inégalités pointe pourtant de véritables discriminations. En 2004, la fonction publique d’État, la fonction publique hospitalière et la fonction publique terri-toriale comptent 13 % de femmes dans les emplois de direction, contre 17 % dans le secteur privé.

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Des indienneuses aux ingénieur(e)s

Des indienneuses aux ingénieur(e)s

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Le « plafond de verre » [traduction du concept américain glass ceiling] n’est donc pas une illusion, loin s’en faut, et contre toute attente, c’est dans le secteur public, qui prône les valeurs d’égalité (notamment salariale) entre hommes et femmes, qu’il est le plus important. En 2006, selon les chiffres du même observatoire, les femmes françaises, à poste et expérience équivalents, gagnent 10 % de moins que leurs collègues masculins.

À cette « discrimination pure », ainsi qu’elle est dénommée dans les documents officiels, s’ajoutent d’autres éléments qui montrent les difficultés réelles que beaucoup de femmes au travail doivent affronter. Surreprésentées dans les emplois peu qualifiés, elles connaissent les conditions de travail les plus pénibles et touchent les salaires les plus faibles. Elles y subissent les horaires les plus contraignants (travail du dimanche, horaires morcelés ou atypiques, temps partiel imposé…) et ne peuvent harmoniser vie professionnelle et vie familiale. Les inégalités sala-riales, enfin, demeurent très fortes : plus d’une femme sur quatre touche un bas salaire, contre un homme sur dix.

Quant à l’égalité des hommes et des femmes à l’âge de la retraite… les mobilisations impor-tantes de 2010 à l’occasion des changements du statut des retraites en France ont révélé, là-aussi, une véritable discrimination.

Il est donc important, aujourd’hui, de faire un point sur l’histoire des femmes au travail et la réalité de leur situation actuelle. À l’échelle d’une agglomération comme Nantes, il s’agit aussi de vérifier la spécificité d’une situation : dans une ville qui reste en tête des hit-parades du « bien vivre », quelle a été et quelle est aujourd’hui la place des femmes au travail ?

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En fragilité

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Au xViiie siècle, à Nantes, la majorité des femmes qui travaillent exercent de « petits métiers » ou sont employées comme

domestiques. Faute d’accès aux formations qualifiantes, même dans l’industrie, elles restent une population active en marge de toute progression et connaissent souvent de grandes difficultés.

Parmi les plus fragiles, les marchandes ambulantes, comme les porteuses de pain ou les vendeuses de guenilles, les balayeuses et les musiciennes de rue n’ont aucune perspective professionnelle. Dépendantes du désir des acheteurs comme des aléas météorolo-giques, ce sont elles que l’on trouve le plus fréquemment à « l’asile », pour recevoir des soins, dans une situation d’extrême urgence.

Au xixe siècle encore, les ménagères, journalières, petites revendeuses, blan-chisseuses et couturières peuvent, dans la vieillesse, tomber dans l’indigence. Ainsi, en 1873, peut-on lire dans le rap-port concernant les personnes admises à l’asile Saint-Léonard, au sujet d’une cou-turière de 64 ans : « cette personne travaille un peu à la couture mais son gain ne lui permet pas de payer un loyer ». Travaillant à la tâche, ces femmes sont soumises à la commande et rien ne garantit le travail du lendemain. La misère n’épargne pas davan-tage les femmes jeunes, surtout lorsque, devenues veuves, elles assument seules la charge des enfants.

Les chiffres de 1901 montrent clairement la précarité des femmes. À cette date, 82 % des Nantaises qui travaillent exercent une pro-fession peu ou pas qualifiée. 29 % d’entre elles sont domestiques, 7 % journalières. Leurs conditions de travail ne s’améliorent que lentement et il leur est difficile de faire valoir leurs droits.

Souvent représentées par les artistes, on les retrouve au xixe et au début du xxe siècle sur des images illustrant les « métiers pitto-resques ». Elles deviennent alors « visibles » dans une société qui les tient à l’écart de toute promotion.

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Vieille marchande de marée Début du xxesiècle Coll. part.

En fragilité

La précarité

Nantaises au travail

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Qu’elles viennent de régions proches ou plus lointaines, la plupart des femmes qui exercent de petits métiers sont considérées comme des étrangères. Très jeunes, sans qualification et souvent analpha-bètes, elles sont venues chercher le moyen de subsister. Parmi elles, 80 % sont servantes ou domestiques. Les autres, notamment dans la deuxième moitié du xixe siècle, sont blanchisseuses, tailleuses, lingères ou deviennent fileuses dans les manufactures de textile. Leur niveau de vie est particulièrement précaire, d’autant que la coupure avec l’environnement familial constitue un élément de fragilité supplémentaire. Ainsi, Josepha Krakus, jeune Polonaise, née en 1920, est déclarée comme « bonne à tout faire » sur son titre de séjour en 1935. Elle travaille alors à Basse-indre. En 1990, 54 % des employées de maison sont d’origine étrangère.

Certaines femmes, n’ayant plus de moyen de subsistance, re-courent à la prostitution. Ainsi, dès la Révolution française, la ville de Nantes se dote d’une « maison de correction, pour y renfermer les filles et femmes convaincues de mauvaise vie… ». En 1808, les

Paul FleuryNantes, le marché aux fleurs du dimanche matinDébut du xxe siècle Archives municipales de Nantes

La prostitution

En fragilité

services de la préfecture de Loire-inférieure dénombrent trois cents « femmes publiques » à Nantes. Les maisons de femmes publiques se mettent alors en place, avec l’autorisation du pouvoir municipal. Mais la prostitution reste difficile à canaliser.

L’activité ne cesse de croître durant toute la première partie du xxe siècle. En 1919, il existe treize « maisons de tolérance » dans la ville, dans lesquelles vivent quatre-vingts femmes. Mais la prostitu-tion libre est bien supérieure : en 1918, cent soixante-trois femmes sont inscrites comme « prostituées » sur les registres du commis-sariat central de police. Dans les années 1930 et après la guerre, l’essentiel des maisons closes est situé dans le quartier du quai de la Fosse, rue des Trois-Matelots, rue d’Ancin et rue des Marins. Là encore, les artistes donnent une image trompeuse de la réalité… Dans les faits, c’est l’extrême misère, ajoutée à la coupure du milieu familial et du réseau social traditionnel, qui pousse les femmes à la prostitution.

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Robert Orceau Deux filles 1935-1936 Musée d’histoire de Nantes

Nantaises au travail

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Parmi les métiers exercés par les femmes, ceux des lavandières et des marchandes de poissons ont fréquemment inspiré les artistes, qui se sont plu à les représenter comme les figures pittoresques de leur époque, courbées sur le linge ou portant leurs paniers. La confrontation avec les photographies anciennes, lorsqu’elles existent, montre qu’il s’agit le plus souvent d’une image recom-posée, adoucie et « attendrie », qui ne dit rien de la pénibilité des tâches et des conditions du travail.

En 1813, Nantes compte quatre-vingt-onze « bateaux à laver » sur la Loire et sur l’Erdre. En 1842, ils ne sont plus que cinquante, plus grands et répondant à des normes de construction doréna-vant définies. On les nomme alors « bateaux-lavoirs ». En 1860, six cents à sept cents femmes y travaillent encore quotidiennement. Laveuses, blanchisseuses, lingères, journalières, elles effectuent un travail particulièrement pénible. C’est dans une eau parfois gelée qu’il faut mettre les mains, avant de la faire chauffer. Agenouillées, frottant et battant le linge sans relâche, le rinçant dans une eau claire qui peut être glacée, les lavandières s’usent à la tâche. Étendre le linge gorgé d’eau est une épreuve physique : il faut le porter puis le tordre, souvent avec l’aide d’une compagne, avant de le mettre à sécher. Les grands étendoirs des bords de l’Erdre donnent une idée de la quantité de linge traitée quotidiennement.

Encore six cent quarante-quatre en 1901, elles deviennent petit à petit moins nombreuses, tout comme les bateaux-lavoirs dont le nombre diminue au début du xxe siècle, du fait du développement des « bains-lavoirs », puis des buanderies dans les maisons bour-geoises. Il n’en reste plus que vingt-neuf sur l’Erdre en 1930, avant leur disparition complète après la guerre.

Dès la fin du xViie siècle, des règlements successifs visent à contrô-ler, autant que possible, l’activité des marchandes. D’après les or-donnances, les poissonnières « recèlent » le poisson et fixent des prix si élevés que des plaintes sont déposées par les habitants de la ville auprès de la municipalité. Les règlements portent à la fois sur les prix des poissons et sur l’organisation de leur vente.

Des métiers « féminins»

˃˃˃ Lavandières

˃˃˃ Marchandes et poissonnières

En fragilité

La question du prix des places au marché est déterminante. Déjà, au xViiie siècle, les textes administratifs indiquent que les marchandes ambulantes peuvent s’asseoir, sous certaines conditions, le jour de la foire, sans payer de place. Ainsi, en 1794, est-il écrit que « les petites marchandes de bonbons et les marchandes de fruits se tenant as-sises sur des chaises avec leurs paniers sans bancs ni tréteaux […] » peuvent s’installer « en file à chaque encoignure de la halle (neuve), tirant vers le quai […] ». Mais la mise en place d’un système de plus en plus coercitif, visant à rendre payantes les places de marché, pose de véritables problèmes aux plus pauvres. En 1810, le marché de la Poissonnerie, construit sur l’île Feydeau, devient le lieu de vente obli-gatoire. Là, durant toute la seconde moitié du xixe siècle et le début du xxe, les vendeuses de poissons organisent un marché trois fois par jour en été et deux fois par jour en hiver.

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Lavandières sur la passerelle d’un bateau-lavoir Première moitié du xxe siècle CHT de Nantes Coll. Me Gabory

Nantes, le quai de l’Hôpital Première moitié du xxe siècle Musée d’histoire de Nantes (pages suivantes)

Nantaises au travail

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Au xixe siècle, il existe entre trois cents et quatre cents femmes revendeuses ou marchandes de poissons à Nantes. En 1847, les marins pêcheurs s’opposent à une proposition de la municipalité qui veut mettre en place une vente à l’encan par des fonctionnaires, sous la responsabilité de commissaires-priseurs. Pour les pêcheurs, la lourdeur des opérations administratives préalables à la criée retarderait la vente et occasionnerait des pertes importantes. ils souhaitent le maintien des ventes par les poissonnières. Leur acti-vité professionnelle est donc maintenue mais le désir de contrôle n’en est pas moins accru.

À côté du marché réglementé subsistent, au xixe siècle et au dé-but du xxe siècle, des poissonnières ambulantes. Elles sont représen-tées portant la « câline » de Nantes, en tablier et le panier au bras, arpentant les rues pour proposer aux habitants le poisson pêché, le plus souvent, par leur mari. Cette tradition, qui perdure malgré les interdictions, témoigne d’une activité intense. En 1893, des procès-verbaux sont dressés à leur encontre ; il leur est notamment repro-ché de gêner la circulation.

Les femmes installées à la Poissonnerie se plaignent régulièrement de la concurrence des marchandes ambulantes, qui ne subissent pas les taxes municipales. Les conditions de travail des poisson-nières restent pénibles, car le marché n’est pas assez grand pour toutes les accueillir et les infrastructures demeurent sommaires. Les marchandises ne trouvent pas toujours de place sur les étals et sont souvent présentées à même le sol. En 1936, la criée municipale est transférée au Champ-de-Mars.

Considérées comme une catégorie à part, les marchandes de civelles ne font pas pour autant les grands bénéfices que l’on ima-ginerait aujourd’hui, où le cours de ce poisson atteint des sommes particulièrement élevées. Au xixe siècle, les civelles sont relative-ment communes et il faut les cuisiner en « pains de civelles » pour attirer les clients, ce qui ajoute un travail de préparation à celui de la vente.

Pour les marchandes, quelles qu’elles soient, l’avenir demeure donc incertain.

En fragilité

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La marchande de civelles Début du xxe siècle Coll. part.

Le marché de la Poissonnerie Avant 1930 Archives municipales de Nantes (pages suivantes)

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Nantaises au travail

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L. Zeytline La Poissonnerie à Nantes 1938 Musée d’histoire de Nantes

En fragilité

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G. Scheul Poissonnière nantaise Première moitié du xxe siècle Musée d’histoire de Nantes

Nantaises au travail

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Certains métiers, particulièrement précaires aux xViiie et xixe siècles, ont connu depuis une véritable évolution. C’est le cas, notamment, des nourrices.

Les premières nourrices exercent cette activité comme un travail d’appoint, à domicile, sans qualification particulière. Les enfants leur sont confiés très jeunes, parfois quelques jours après leur naissance, et pour plusieurs années. Au début du xixe siècle, les enfants accueillis peuvent être nombreux, s’ajoutant à ceux du couple, pour garantir des revenus plus conséquents. Les déclarations de décès effectuées par les « pères nourriciers » témoignent de la mortalité, alors importante, des enfants placés.

Dans la seconde moitié du xixe siècle, l’activité des nourrices fait l’objet de réglementations régulières, notamment après la loi du 23 décembre 1874 qui met sous l’autorité publique « tout enfant, âgé de moins de deux ans, qui est placé moyennant salaire, en nourrice, sevrage ou en garde, hors du domicile de ses parents […] », dans le but de « protéger sa vie et sa santé ». Les registres de 1879 à 1900 montrent que les nourrices sont plus d’une centaine à Nantes à cette époque.

À la fin du xixe siècle, les nourrices disposent d’un carnet, délivré à Nantes par les services municipaux, certifiant qu’elles peuvent exercer cette profession. Le règlement d’administration publique y est porté. On y trouve aussi des « notions élémentaires sur l’hygiène du premier âge » et les éléments obligatoires du suivi vaccinal. En 1920, c’est une femme, Mademoiselle Pouzin, qui occupe le poste de sous-directrice du bureau d’Hygiène, qui coordonne l’ensemble des services munici-paux chargés des gardes d’enfants.

La fonction se professionnalise peu à peu : si en 1964 la gardienne d’enfants doit demander un agrément à la mairie, à partir de 1977, elle ne peut exercer sans être agréée par la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales. Enfin, après 1992, une formation obliga-toire de soixante heures est imposée avant l’entrée en activité. Malgré cela, les revenus restent modestes dans la plupart des cas.

˃˃˃ Nourrices

En fragilité

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Avis de la ville de Nantes dans le livret de nourrice de Victoire Brochardxixe siècle Archives municipales de Nantes

Aujourd’hui ?Nantaises au travail

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Fragilité et précarité ont été le lot commun de beaucoup de femmes au travail depuis le xviiie siècle. Mais qu’en est-il aujourd’hui ? Les progrès accomplis n’ont pas achevé de gommer toutes les inégalités. Dans l’agglomération nantaise, le nombre de femmes actives a doublé dans les dernières quarante années. Cependant, si l’écart entre le nombre d’hommes et de femmes au chômage diminue, les emplois précaires sont davantage dévolus aux femmes, dont les salaires restent inférieurs à ceux des hommes.

Manifestation contre la précarité des emplois à Nantes21 mars 2006AFP, Franck Perry

En fragilité

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Les femmes ont toujours travaillé. Mais, si l’on comptait dans l’agglo-mération 60 600 femmes au tra-vail en 1968, leur nombre atteint 137 200 aujourd'hui, représentant désormais près de la moitié de la population active (49 %). Quel que soit l’âge, leur taux d’activité (68 %) se rapproche aujourd’hui de celui des hommes (74 %).

Pendant longtemps, les femmes ont eu plus de difficultés que les hommes à obtenir la recon-naissance d’un emploi. Mais la tendance semble s’être inversée dans l’agglomération : en 2011, le chômage y concerne davantage les hommes. Parmi les deman-deurs d’emploi de catégorie A, ils sont 12 264, pour seulement 11 583 femmes.Ces chiffres masquent cependant une autre réalité : la précarité de l’emploi touche davantage les femmes que les hommes, et 19 100 d’entre elles, contre 17 700 hommes, occupent un emploi temporaire (CDD, intérim, emploi aidé...) Si cette précarité touche indifféremment les deux sexes parmi les moins de 25 ans (dont plus de la moitié occupent un emploi temporaire), par la suite les femmes sont davan-tage concernées (13 % d’entre elles de 25 à 54 ans, contre 10 % des hommes). Au-delà de ce constat, hommes et femmes sont

sujets à des formes de précarité différentes : les femmes béné-ficient davantage de contrats à durée déterminée, alors que les hommes sont plus présents dans les emplois aidés, en intérim et en apprentissage. Toutefois plus de huit femmes sur dix sont en contrat à durée indéterminée ou titulaires de la fonction publique.

Cueillette du muguet CHT de Nantes, Hélène Cayeux

Nantaises au travail

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Les inégalités salariales, enfin, restent importantes. Sur le terri-toire de Nantes Métropole, tous âges et catégories socioprofes-sionnelles confondus, le salaire net mensuel moyen d’une femme est inférieur de 500 € à celui d’un homme. Cet écart se creuse avec l’âge : chez les moins de 25 ans il représente 90 €, alors que chez les 50-65 ans, il atteint 950 €. Ces dif-

férences de salaires varient égale-ment selon la catégorie sociopro-fessionnelle. Parmi les employés, là où les femmes sont les plus présentes, l’écart est faible avec 60 € par mois, alors qu’il s’élève à 230 € chez les professions inter-médiaires, 290 € chez les ouvriers, pour culminer à 800 € chez les cadres.

0

20 000

40 000

60 000

80 000

100 000

120 000

140 000

160 000

1968 1975 1982 1990 1999 Aujourd’hui

+ 124 % + 42 %

Hommes

Femmes

Lecture : le nombre de femmes actives (occupant un emploi ou au chômage) a progressé de 124 % depuis 1968. Source Insee-Auran.

Évolution du nombre d’actifs sur le territoire de Nantes Métropole

30 %17 %

10 % 6 %7 % 4 %

21 %33 %

3 % 4 %1 % 2 %

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes

15-24 ans 25-54 ans 55 ans et plus

48 % 49 %

87 % 89 % 92 % 94 %

Contrat à durée indéterminée outitulaire de la fonction publique

Contrat à durée déterminée

Autres (intérim, emplois aidés...)

En fragilité

41

0 €

500 €

1 000 €

1 500 €

2 000 €

2 500 €

3 000 €

3 500 €

4 000 €

moins de25 ans

25-29 ans 30-39 ans 40-49 ans 50-65 ans plus de65 ans

Hommes Femmes

Homme : 2 288 €

Femme : 1 783 €

* équivalent temps plein

Lecture : 87 % des femmes âgées de 25 à 54 ans sont en CDI ou titulaires de la fonction publique. Source Insee-Auran.

Lecture : les femmes âgées de 25 à 29 ans ont un salaire moyen d’environ 1 500 euros par mois. Source Insee-Auran.

Les conditions d’emploi des habitants de Nantes Métropole aujourd’hui selon l’âge

Salaire net moyen* des habitants de Nantes Métropole aujourd’hui selon l’âge

En confiance

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L’accès des filles aux formations professionnelles qualifiantes, ainsi qu’à l’enseignement secondaire et

supérieur, va considérablement transformer la situation des femmes au travail. Nombre de ces « enseignées », au cours du xixe siècle, deviendront à leur tour enseignantes.

Jusque-là, les petites filles et les jeunes filles n’avaient accès qu’à un enseignement limité, délivré par l’école primaire ou par les ou-vroirs, qui font leur apparition à Nantes dans les années 1840. La loi Camille Sée, en 1880, fait date en ouvrant l’enseignement secon-daire aux jeunes filles. Elle clôt une quinzaine d’années de débats qui ont vu s’affronter les partisans des devoirs fondamentaux de la femme à la maison et ceux de son émancipation. La loi met en place un enseignement spécialement conçu pour les filles, en collège et en lycée, mais sans accès au bac-calauréat, qui permet l’entrée dans les études supérieures. Certaines l’obtiendront pourtant, à force d’insistance auprès des recteurs qui leur laisseront passer l’examen.

Destinés à accueillir les fillettes de milieu modeste à partir de sept ans, pour leur dispenser un enseignement pratique leur per-mettant de trouver « de l’ouvrage », les ouvroirs étaient tenus par des religieuses. Celui de Nazareth, en 1845, comptait quarante-cinq élèves, toutes pensionnaires. L’enseignement y était dispensé par des « maîtresses d’ouvrage », le but étant de permettre aux élèves de « professer en qualité d’ouvrière ou être placées comme femmes de chambre ».

Ces institutions, d’abord peu nombreuses, se développèrent rapi-dement. En 1879, l’ouvroir de l’asile Saint-Joseph accueillait deux cent quarante et une élèves. L’institution dispensait aux meilleures d’entre elles des bons points échangés contre des vêtements, et apportait un secours alimentaire aux plus nécessiteuses. Au pro-gramme scolaire de l’école primaire s’ajoutaient « tous les travaux de lingerie, le blanchissage et le repassage du linge fin ». Les reve-nus du travail des élèves, durant leur apprentissage, bénéficiaient à

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En confiance

L’éducation des filles

˃˃˃ Les ouvroirs

Jeunes filles de l’école Vial (détail) Première moitié du xxe siècle Archives municipales de Nantes

Nantaises au travail

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l’ouvroir. Enfin, elles devaient lui donner, à la fin de leur apprentis-sage, « trois années de leur temps ». L’école, tenue par sept sœurs, employait dix-sept ouvrières.

Les ouvroirs connurent un véritable succès, mais à Nantes, l’accès des filles à l’enseignement fut particulièrement facilité par l’ouver-ture de deux établissements pionniers : l’« atelier-école » créé à l’ini-tiative d’Ange Guépin, en 1869, pour l’enseignement professionnel, puis, en 1882, le lycée de jeunes filles (le futur lycée Guist’hau). L’un comme l’autre se distinguèrent par la grande qualité des en-seignements dispensés.

Dans l’atelier-école, les jeunes filles recevaient un enseignement général, mais aussi technique et professionnel. L’initiative était remarquable par l’approche moderne qui consistait à développer un enseignement professionnel pour les femmes, prenant modèle sur la première école professionnelle de jeunes filles, créée à Paris en 1862, à l’initiative d’Élisa Lemonnier.

L’épouse d’Ange Guépin, Floresca, très impliquée dans la vie de l’école, écrivit vers 1870 : « nous nous sommes donné pour mis-sion de former partout où nous le pourrions des mères de famille intelligentes, des ouvrières capables de fournir au commerce des employées et à l’enseignement des institutrices sachant diriger les travaux manuels ». Elle maintint l’école à flot pendant dix ans après la mort de son époux en 1873, et n’en quitta la direction qu’en 1882.

Si les premiers enseignements portaient sur les arts industriels, le dessin et les travaux d’aiguille, un cours d’enseignement com-mercial fut mis en place dès 1887, attirant de plus en plus d’élèves. En 1899, l’école fut rebaptisée École pratique (généralement appe-lée école Vial, du nom d’un généreux donateur) et comptait deux cent vingt-trois élèves. Après la guerre, les sections commerciales se développèrent, l’établissement devint collège technique et for-ma de nombreuses jeunes femmes aux métiers de sténodactylo et d’aide-comptable. Devenu lycée et mixte, il se distingua dans la formation aux métiers du secteur tertiaire dans la seconde moitié du xxe siècle.

˃˃˃ L’atelier-école

En confiance

Deuxième lycée de jeunes filles ouvert en France, l’établissement nantais fait figure d’institution pionnière. Sa directrice, Élisa Bor-dillon, était une femme d’expérience. Ancienne directrice des cours professionnels de l’atelier-école, elle participa à la mise en place d’un enseignement de très grande qualité, dans les domaines tant litté-raire que scientifique et artistique, comme en témoignent les plâtres qui servaient de modèles au cours de dessin et les objets d’étude des classes scientifiques, dans les domaines de la biologie, de la science physique et de l’optique.

Durant tout le xixe siècle, les femmes sont nombreuses dans les domaines de la petite enfance et de l’éducation. À la fin du siècle, elles accèdent aux postes d’enseignantes et de directrices d’école. Elles peuvent désormais accomplir une carrière complète dans l’éducation, dans les classes maternelles, qui succèdent à partir

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Les enseignantes

Atelier de confection de 2e année à l’école Vial1920-1930 Archives municipales de Nantes (pages suivantes)

Eugène-Adolphe Disdéri Floresca Guépin (détail) 1865 Musée d’Orsay, Paris (c) RMN, G. Ojéda

˃˃˃ Le lycée

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Nantaises au travail

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de 1881 aux salles d’asile, comme dans les écoles et les lycées de jeunes filles. Elles représentent alors déjà 55 % du corps enseignant.

Au xixe siècle, la part prise par les congrégations religieuses est primordiale dans le réseau des salles d’asile. Réalisée à l’initia-tive de comités de patronage, dans un esprit de bienfaisance et de contrôle social, la première salle d’asile est créée à Nantes en janvier 1834, rue Sarrazin. Elle est suivie, un an plus tard, par une seconde salle, rue des Olivettes, puis une troisième, l’année d’après, dans le quartier des Salorges. Chaque salle accueille envi-ron cent cinquante enfants. Ils y reçoivent une instruction reli-gieuse et les bases de lecture, d’écriture et de calcul qui leur per-mettront d’intégrer l’école primaire. L’enseignement y est délivré par des « maîtresses ».

En 1835, la circulaire d’application de la loi Guizot sur l’enseigne-ment primaire demande aux préfets de multiplier les salles d’asile, qui préparent à l’école élémentaire. Dès l’année suivante, elles sont placées sous l’autorité de l’État et financées par les municipalités.

En 1842, celles des quartiers Saint-Similien, de la Madeleine et de l’Hermitage accueillent cinq cent quatre-vingts enfants. Tout le personnel est féminin, de la directrice aux maîtresses, des sur-veillantes à la « femme de peine ». L’enseignement s’appuie sur les matières principales des écoles élémentaires et sur le catéchisme.

En 1850, l’Association des salles d’asile, qui gère cinq institu-tions, interpelle le maire de Nantes pour demander la création d’une salle supplémentaire dans le quartier Saint-Clément. Des listes d’attente existent déjà ! Ce besoin croissant témoigne de l’implication des femmes dans le monde du travail et de la néces-sité, pour le développement économique général, de prendre en charge les enfants dès le plus jeune âge. Ainsi que l’écrit l’asso-ciation : « l’industrie réclame le temps de la femme de l’ouvrier. Le travail de tous les deux n’est que suffisant pour faire face aux besoins de la famille ». Ainsi, dans les grandes villes industrielles, en 1869, 60 % des mères déclarent une activité professionnelle.

Dans les asiles publics, le personnel en charge des enfants est strictement féminin après 1855, à la suite d’un décret interdisant la présence des hommes dans ces institutions. En 1881, toutes ces

˃˃˃ Des salles d’asile...

˃˃˃ ... aux classes maternelles

En confiance

classes prennent une nouvelle dénomination, déjà fixée en 1848 mais jusque-là peu usitée, celle de classes maternelles.

Moins bien considérées que les enseignantes des écoles primaires, les maîtresses des classes maternelles sont aussi moins bien payées, malgré des horaires beaucoup plus lourds (douze heures par jour en été) et des classes surchargées, qui peuvent compter jusqu’à une soixantaine d’élèves. Pourtant, depuis les lois Jules Ferry, en 1881, des changements importants sont intervenus : les maîtresses sont aidées par des femmes de service, ont des classes moins nom-breuses, et ne font plus que dix heures par jour en été.

L’asile de Beautour à Vertou Début du xxe siècle Coll. Congrégation des Sœurs de l’instruction chrétienne de Saint-Gildas-des-Bois

Le personnel de l’école Toutes-Aides à Nantes1937 Coll. Congrégation des Sœurs de l’instruction chrétienne de Saint-Gildas-des-Bois(pages suivantes)

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Nantaises au travail

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Dès le début du xixe siècle les femmes accèdent aux postes d’ins-titutrices dans les écoles primaires de filles, grâce au brevet de capa-cité de deuxième degré et à un certificat de moralité.

La coexistence d’institutions publiques et privées, très impor-tante dans l’Ouest de la France et dans la région nantaise, pose très tôt des problèmes. Il n’est pas rare, jusqu’à la fin de la Troi-sième République, que des cabales soient montées à l’encontre des instituteurs et institutrices laïques, accusés de maltraitance, de conduite immorale, voire soupçonnés de « folie ». Dans tous les cas, la demande des plaignants est de révoquer le personnel enseignant pour le remplacer par des religieuses.

Au milieu du xxe siècle, en dépit de l’interdiction d’enseigner édictée par la loi Combes de 1904 à l’encontre des congrégations, l’instruction est encore largement dispensée par les religieuses dans les institutions catholiques, comme à l’école Saint-Félix de Nantes, créée en 1847. Cette tendance disparaît cependant progressive-

Joséphine Marie Louise Ganachaud de l’Enfant-Jésus (1861-1944), directrice de l’asile de BeautourColl. Congrégation des Sœurs de l’instruction chrétienne de Saint-Gildas-des-Bois

En confiance

ment, et si les directions restent tenues par des sœurs, l’enseignement est délivré par des religieuses sécularisées, puis par des institutrices.

Ce n’est que sous la Troisième République que sont créées les écoles normales d’institutrices, permettant l’accès plus important des femmes à l’école primaire. Les institutrices sont 44 000 en 1900, 100 000 en 1939 et 250 000 à la fin du xxe siècle. Fonctionnaires depuis 1889, elles doivent attendre 1919 pour voir leurs rémunéra-tions alignées sur celles de leurs collègues masculins.

Le xxe siècle confirme le monde de l’enseignement comme un pôle majeur de concentration féminine, avec un chiffre, stable depuis les années 1970, de 76 %. Notons cependant que l’accès à l’enseignement supérieur et aux diplômes, notamment à l’agréga-tion, fut un long et difficile combat, qui ne s’acheva qu’en 1976. Au-jourd’hui, à l’université, parmi les personnes ayant atteint le grade de professeur, on ne dénombre que 13 % de femmes.

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Une classe primaire de l’école Toutes-Aides Avant 1914Coll. Congrégation des Sœurs de l’instruction chrétienne de Saint-Gildas-des-Bois

Nantaises au travail

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École normale d’institutrices de Nantes 1927 Coll. part.

En confiance

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Le personnel de l’école publique Louis Pergaud à Saint-Joseph-de-Porterie1982-1983 Coll. part.

Aujourd’hui ?Nantaises au travail

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La longue évolution de l’accès des filles à l’éducation les a menées progressivement vers les diplômes du secondaire et du supérieur, ainsi que massivement vers les carrières de l’enseignement. Cependant, si l’égalité est aujourd’hui pleinement installée à la fin du secondaire, force est de constater que des disparités subsistent aux niveaux les plus élevés, et selon les filières.

Nantes Métropole, Patrick Garçon

En confiance

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En quarante ans, le nombre de bachelières a été multiplié par neuf. Celui des femmes titulaires d’un diplôme d’enseignement supérieur l’a été par vingt-quatre. Si, en 1968, dans l’agglomération nantaise, 9 % seulement des femmes de plus de 25 ans possé-daient un baccalauréat, elles sont aujourd’hui 48 %. Dans le même temps, et particulièrement depuis la décennie 1990, la proportion des femmes titulaires d’un di-plôme d’enseignement supérieur est passée de 2 % à 30 %. Corréla-tivement, la part des femmes sans diplôme s’est fortement réduite.

Les hommes aussi ont vu s’élever leur niveau de formation, mais à un rythme moins soutenu (le nombre de bacheliers ou plus a été multiplié par cinq depuis 1968).

La proportion de diplômés des deux sexes varie selon le niveau d’études. En effet, si 52 % des bacheliers, dans l’agglomération, sont des ba-chelières (contre 40 % seu-lement dans les années 1960), le rapport s’inverse dans l’enseignement supé-rieur à partir du deuxième cycle : 47 % des titulaires d'un diplôme de deuxième ou de troisième cycle sont des femmes.

Par ailleurs, si les femmes accèdent désormais aux études supérieures dans des proportions comparables aux hommes, leurs orientations diffèrent sensible-ment. On observe en effet, dans la région des Pays-de-la-Loire, que les filles choisissent de préférence l’université, où elles sont même très largement majoritaires dans certaines filières : elles sont ainsi surreprésentées en lettres et en langues (80 % des nouveaux étu-diants de ces filières), en sciences humaines et sociales (72 %), ainsi qu’en économie et en droit (60 %). À l’inverse, elles sont moins présentes que les garçons dans les formations technologiques courtes de type IUT. De même, les écoles d’ingénieurs continuent d’attirer majoritairement des hommes.

Nantes Métropole, Patrick Garçon

Nantaises au travail

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Les diplômes ainsi obtenus sont-ils en adéquation avec les emplois offerts sur le marché du travail ? Dans l’agglomération nantaise, 39 % des femmes actives s’esti-ment surdiplômées par rapport au poste qu’elles occupent. Elles ont, en cela, une opinion comparable à celle des hommes. Ce sentiment varie toutefois selon leur catégo-rie socioprofessionnelle : 54 % des employées et 60 % des ouvrières l’expriment, mais seulement 16 % des femmes cadres.

Brevet des collèges ousans diplôme

CAP ou BEP

Baccalauréatou brevet professionnel

Diplômede l’enseignementsupérieur

0

20 000

40 000

60 000

80 000

100 000

120 000

1968 1975 1982 1990 1999 Aujourd’hui

- 36 %

+ 281 %+ 213 %

+ 2 340 %

Lecture : le nombre de femmes titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur a progressé de 2 340 % depuis 1968. Source Insee-Auran.

Évolution du niveau d’études des femmes (de plus de 25 ans) habitant Nantes Métropole

En confiance

59

0

10 000

20 000

30 000

40 000

50 000

60 000

sansdiplôme

brevetdes collèges

ou certificat d’étudesprimaires

CAP ouBEP

baccalauréatou brevet

professionnel

Hommes Femmes

1er cyclede l’enseignement

supérieur

2e et3e cycles

de l’enseignementsupérieur

39 % 39 %

57 % 59 %

4 % 2 %

Femmes Hommes

Plutôtoui

Plutôtnon

Ne seprononce

pas

Plutôtoui

Plutôtnon

Ne seprononce

pas

Lecture : 28 000 hommes et 32 000 femmes ont comme diplôme le plus élevé le baccalauréat (ou le brevet professionnel). Source Insee-Auran.

Lecture : 39 % des femmes actives de l’agglomération nantaise considèrent que l’emploi qu’elles occupent est adapté à des personnes moins diplômées qu’elles. Source Enquête « Nouveaux regards sur nos modes de vie »-Auran.

Niveau d’études des habitants (de plus de 25 ans) de Nantes Métropole aujourd’hui

Diriez-vous de votre emploi qu’il est davantage adapté à des personnes moins diplômées que vous ?

Au féminin

3

il est traditionnellement acquis que les métiers féminins sont, par excellence, des métiers tournés vers autrui, qu’il s’agisse

de prendre en charge la petite enfance, l’éducation, la souffrance, la maladie, la vieillesse ou l’indigence. Il est vrai qu’aujourd’hui encore ces métiers regroupent une population active aux trois-quarts féminine. La pression exercée par la société sur les femmes n’est sans doute pas étrangère à ce déséquilibre, généralement expliqué par la notion de « vocation féminine » à s’occuper davantage des autres que de soi…

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Infirmières de l’hôpital Saint-Stanislas 1914-1918 Musée d’histoire de Nantes

Au féminin

Des hospitalières aux infirmières

Métier féminin s’il en est, celui d’infirmière trouve ses origines dans les rôles de garde-malades et d’aide aux plus démunis que remplissent, depuis le xViie siècle, les religieuses des congrégations nouvellement fondées. Les femmes qui prennent le voile concilient alors vie spirituelle et vie active.

Durant la Révolution française, à Nantes comme ailleurs, on tente de mettre sous l’autorité de person-nels laïques les institutions où sont délivrés les soins. Mais il n’est pas possible de maintenir ces structures sans recourir aux religieuses, que l’on retrouve dans les listes du personnel sous la dénomination « hospitalières ». Ainsi, en 1795, les hospices de Nantes emploient trente-six hospitalières et dix-sept infirmières. « On n’admettra aux concours que les veuves sans enfants et les femmes non ma-riées » : la prescription est révélatrice de l’esprit de sacrifice et de maternage que l’on attend de celles qui prétendent aux postes laïques… Dans les hospices civils, les hospitalières sont particuliè-rement bien rémunérées, notamment lorsque l’on compare leurs salaires à ceux des infirmières laïques. Mais ce statut privilégié est relatif : elles gagnent, à tâches égales, entre 25 et 30 % de moins que leurs collègues masculins…

Pendant tout le xixe siècle et la première partie du xxe, la pré-gnance des religieuses est importante et leur nombre ne cesse de croître régulièrement. En 1901, on ne dénombre encore à Nantes que cinquante-neuf infirmières laïques pour cent quatre-vingt-douze

Nantaises au travail

62

Hôpital Saint-Stanislas 1914 Musée d’histoire de Nantes

hospitalières. La laïcisation du métier est progressive, accompagnant la mise en place des structures de l’Assistance publique. En 1902, la loi contraint les préfets à ouvrir des écoles régionales pour la for-mation du personnel hospitalier. Entre 1900 et 1914, une vingtaine d’hôpitaux en France mettent en place des cours à son intention, dont celui de Nantes.

Durant la Première Guerre mondiale, Nantes se distingue par le nombre de ses hôpitaux. Sur les photographies, les infirmières, en uniforme, apparaissent aux côtés des blessés et des mutilés. Beau-coup d’entre elles, venues spontanément apporter leur aide dans les hôpitaux auxiliaires, ne disposent que d’une formation sommaire et délaissent la profession au retour de la paix.

Cependant, le premier conflit achève de donner ses lettres de no-blesse à la vocation de ces femmes. En 1922 le diplôme d’infirmière est créé et la profession est reconnue comme telle, même si dans les faits le diplôme ne devient obligatoire pour exercer dans les établis-sements publics et privés agréés qu’en 1938 !

Au féminin

63

Hôtel-Dieu, salle des élèves infirmières Première moitié du xxe siècle Coll. part.

Des visiteuses aux assistantes

sociales

Quant à la place des hommes, elle n’est pas sans poser question. Dès 1926, certaines filières leur sont interdites, comme la médecine des femmes, celle des enfants et la chirurgie. Cette ségrégation ne trouve son terme qu’en 1974, avec la mixité des concours de la fonction publique.

Les femmes prédominent très largement dans le domaine des soins infirmiers, les hommes se consacrant essentiellement à l’uni-vers psychiatrique. Aujourd’hui, en France, les femmes représentent 85 % des personnes employées dans les activités relatives à la santé humaine et 90 % de la profession infirmière.

Autre secteur largement féminin, les métiers de l’action sociale se distinguent rapidement comme particulièrement attractifs pour les jeunes femmes.

Là encore, l’activité trouve son origine dans les missions des congrégations religieuses. Aux xViiie et xixe siècles, on distingue deux catégories de « visiteuses » : les hospitalières (religieuses),

Pharmarcie de l’hôpital Saint-JacquesMilieu du xxe siècle Coll. part.

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Un laboratoire d’ophtalmologie1950-1960 Coll. part.

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Nantaises au travail

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qui se rendent au chevet des malades, et les dames patronnesses, issues de la bourgeoisie, qui pratiquent la charité en prodiguant des soins aux plus démunis. Avec l’obligation de créer, après 1902, dans chaque ville de plus de 20 000 habitants, un bureau d’hygiène, les dames patronnesses trouvent une mission de santé publique à la hauteur de leurs espérances et se regroupent en organisations charitables. Progressivement, leurs missions se spécialisent dans le domaine social.

En 1923 est fondée à Nantes une école d’infir-mières et d’assistantes so-ciales, toujours en activité cinquante ans plus tard… Pourtant, petit à petit, les métiers se précisent et se séparent, et le diplôme d’assistante sociale est créé en 1932.

D’abord orientées vers les secours aux personnes démunies, les assistantes sociales voient leurs zones de compétences s’élargir rapidement au monde de l’entreprise avant la Se-conde Guerre mondiale, puis dans les domaines des services publics : hôpitaux, sécurité sociale, allocations familiales, services admi-nistratifs… Le lien avec l’ori-gine religieuse de leur métier transparaît encore dans la tenue qu’elles portent lors de leur formation dans les an-nées 1940 et 1950, avant de disparaître complètement.

Au féminin

67

Promotion 1944 des assistantes sociales de Nantes Coll. part.

Bien que correctement rémunérée au regard des métiers dits « féminins », la profession n’attire toujours pas d’hommes ; ils sont moins de 5 % aujourd’hui, et souvent dans l’encadrement.

Dans l’agglomération nantaise, aujourd’hui, les femmes repré-sentent 79 % des personnes travaillant dans l’action sociale.

Aujourd’hui ?Nantaises au travail

68

Aujourd’hui comme hier, les femmes demeurent particulièrement repré-sentées dans certains secteurs d’activité comme l’enseignement, la santé ou le domaine social. Peu à peu, toutefois, l’éventail des métiers qu’elles exercent tend à s’élargir.

Nantes Métropole Patrick Garçon

Au féminin

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Malgré l’accroissement global du niveau de formation des femmes, le classement des métiers « au féminin » n’a guère évolué ces vingt-cinq dernières années. Arri-vent en tête les adjoints adminis-tratifs de la fonction publique et les secrétaires du secteur privé. Viennent ensuite les métiers liés à l’enfance et à l’éducation (assistante maternelle, professeur des écoles, professeur certifié ou agrégé), puis, en troisième place, ceux du secteur médico-social (infirmière, aide soignante).Il n’en reste pas moins que des progrès restent à accomplir en termes de diversité profession-nelle. En effet, si 50 % des femmes actives exercent aujourd’hui 57 métiers, la même proportion des hommes actifs se répartit sur un éventail de 154 métiers.

De fait, en vingt-cinq ans, les métiers qualifiés déjà dévolus aux femmes se sont davantage encore féminisés. Celles-ci sont de plus en plus souvent infirmières (3,2 % des femmes actives ayant un emploi en 2007, au lieu de 2,5 % en 1982) ou professeures des collèges et lycées (2,2 % au lieu de 1,8 %). En revanche, elles sont moins présentes dans le secteur du nettoyage professionnel, qui se technicise (1,8 % seulement en 2007, au lieu de 2,5 % en 1982). La proportion des femmes de

ménage ou aides à domicile reste à peu près constante (autour de 2,5 % de la population active ayant un emploi).L’élévation du niveau de diplôme semble donc influer davantage sur la qualification des femmes dans les secteurs d’activité où elles étaient traditionnellement présentes (éducation, médico-social) que sur l’ouverture vers d’autres secteurs, même si celle-ci est aujourd’hui perceptible.

Au début des années 1980, les dix métiers les plus « féminins » occupaient encore 35 % de la population active féminine ayant un emploi, contre seulement 29 % aujourd’hui. Car depuis vingt-cinq ans, les femmes ont commencé « timidement » à s’insérer dans des métiers et des secteurs d’activité jusqu’alors réservés aux hommes. Dans celui du bâtiment et de la construc-tion, par exemple, où les femmes n’occupaient en 1982 que des postes administratifs (secrétaire, comptable...), elles exercent au-jourd’hui une plus grande variété de fonctions (ouvrières, technico-commerciales, mais aussi d’enca-drement…)

Cette ouverture est également synonyme d’initiative. Alors qu’en 1982, dans l’agglomération, quasi-ment aucune femme ne dirigeait

Nantaises au travail

70

une entreprise de services de plus de cinquante salariés, elles sont aujourd’hui une quarantaine. De même, dans le commerce en pe-tite surface, le nombre de femmes chefs d’entreprise a été multiplié par trois, passant de 156 à 424, alors qu'il n’a que doublé pour les hommes, passant de 260 à 549.Enfin, le domaine de la recherche publique offre la progression la plus spectaculaire : le nombre de femmes y est passé, en vingt-cinq ans, de 20 à 410, grâce à l’éléva-tion importante de leurs niveaux de formation.

✓ en 1982 ✓ aujourd’hui

1,1 %

13,2 %

5,0 %0,1 %

6,8 %

2,5 %

18,4 %

5,7 %

56,6 %

Artisanes,commerçantes,chefs d’entrepriseAgricultrices

Cadres

Professionsintermédiaires

Ouvrières

Employées

30,9 %

15,8 %

43,9 %

Artisanes,commerçantes,chefs d’entrepriseAgricultrices

Cadres

Professionsintermédiaires

Ouvrières

Employées

Lecture : 56,6 % des femmes étaient employées en 1982. Aujourd’hui, elles sont 43,9 %. Source Insee-Auran

Les catégories socioprofessionnelles des actives occupées habitant Nantes Métropole

Au féminin

71

0 1 000 2 000 3 000 4 000 5 000

Secrétaires(secteurs public et privé)

Caissières de magasin

Agentes de servicehospitalier

Aides-soignantes

Professeuresde lʼenseignement secondaire

Aides à domicile,aides ménagères

Professeures des écoles

Infirmières

Assistantes maternelles

Adjointes administrativesde la fonction publique

0 1 000 2 000 3 000 4 000 5 000

Professeursde l'enseignement secondaire

Conducteurs routierset grands routiers

Adjoints administratifsde la fonction publique

Maçons qualifiés

Enseignantsde l’enseignement supérieur

Techniciens ettechnico-commerciaux

Cuisiniers et commis de cuisine

Conducteurs de véhicule routier ou de transport en commun

Agents civils de sécuritéet de surveillance

Ingénieurs et cadresen informatique

Lecture : aujourd’hui, dans l’agglomération, 4 000 femmes sont secrétaires. Source Insee-Auran.

Lecture : aujourd’hui, dans l’agglomération, 1 000 hommes sont professeurs dans l’enseignement supérieur. Source Insee-Auran.

Les 10 premiers métiers féminins aujourd’hui dans l’agglomération nantaise

Les 10 premiers métiers masculins aujourd’hui dans l’agglomération nantaise

En carrière

4

La notion de carrière est une notion complexe et évolutive.Faire carrière, pour une femme, n’a pas toujours signifié la

même chose au cours du xixe et du xxe siècle. À la fin du xixe siècle, le domaine de l’enseignement est le premier à offrir aux femmes des métiers de cadre, notamment aux postes de directrice d’école ou de lycée de jeunes filles. Mais au début du xxe siècle, pour la majo-rité des femmes, la notion de carrière n’est pas liée aux postes à res-ponsabilités : pour beaucoup, l’accès aux emplois de bureau ou à ceux de la vente en boutique, deux catégories de métiers jusque-là strictement réservés aux hommes, représente déjà une promotion. Plusieurs décennies sont encore nécessaires pour que les femmes embrassent en nombre les carrières de la médecine ou du droit.

L’ouverture des métiers du secrétariat a permis de conquérir de nouveaux espaces professionnels. Ainsi, et pour plusieurs générations successives, c’est bien une notion de « carrière » qui apparaît ici.

À Nantes, en 1901, six femmes exer-cent le métier de sténographe et une celui de dactylographe. En 1920, les jeunes femmes « rêvent toutes » d’accéder à un nouveau métier, celui de sténodactylo, si l’on en croit un article de presse locale, paru dans Le Populaire cette année-là. Les écoles s’ouvrent progressivement à Nantes et les jeunes filles en sont le plus souvent les seules élèves, comme aux cours profession-nels féminins de L’Union nantaise.

Pourtant, la pression sociale pour les maintenir au foyer subsiste. Ainsi peut-on lire en 1930, dans L’Écho de la Loire, que « la profession qui incombe à toute femme [est] celle de bonne maîtresse de mai-son ». Malgré cela, la demande de formation dans ces domaines s’intensifie. Dès 1935, des cours pratiques de dactylographie sont introduits au lycée Saint-Félix et bientôt dans de nombreux lycées de jeunes filles.

Dans les années cinquante puis soixante-dix, les jeunes femmes qui souhaitent une réorientation professionnelle s’inscrivent aux cours Pigier et à l’institut Scheiddeger, qui délivrent des cours du soir. Pour beaucoup d’entre elles, de milieu modeste, ces formations constituent une véritable porte de sortie.

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Cours de dactylographie au lycée Saint-Félix (détail) 1950-1960 Coll. Congrégation des Sœurs de l’instruction chrétienne de Saint-Gildas-des-Bois

En carrière

Le secrétariat

Nantaises au travail

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Le cours pratique du lycée Saint-Félix 1935 Coll. Congrégation des Sœurs de l’instruction chrétienne de Saint-Gildas-des-Bois

Si dans les années 1970 les futures secrétaires apprennent encore à taper sur des machines, dix ans plus tard, l’informatique révolu-tionne leur univers, et les formations continues se multiplient pour leur permettre de s’adapter aux évolutions technologiques. À l’ère du courrier électronique, des téléconférences, des réunions en ligne, les secrétaires, devenues « assistantes de direction », doivent faire face à un véritable défi : l’adaptation constante à leurs outils de travail. Si les dactylographes et les opératrices de saisie sont main-tenant rares, les emplois de secrétaires demeurent nombreux. ils ne constituent plus, pour autant, des carrières en tant que telles depuis les années 1990, car la promotion est rare et les salaires restent modestes.

Secrétaires à l’office municipal de placementPremière moitié du xxe siècle Archives municipales de Nantes (pages suivantes)

En carrière

75

Aujourd’hui, la notion de carrière s’apparente davantage à l’ac-cès aux domaines essentiellement réservés aux hommes. Mais les changements, indéniables, ne se sont pas produits sans rencontrer d’obstacles.

En France, la première bachelière, Julie-Victoire Daubié, n’ob-tient son diplôme qu’en 1861, et il faut attendre 1875 pour que Madeleine Brès accède au titre de docteur en médecine, faisant, elle aussi, figure de pionnière. Devenir médecin, se doter d’une spécia-lité, accéder à l’internat des hôpitaux publics et à la direction des services, est un combat durant la deuxième moitié du xixe siècle. Jusqu’en 1866, les femmes n’ont pas le droit de s’inscrire à la facul-té de médecine. Les premières inscriptions sont timides. Pourtant, dès l’année qui suit la nomination de Madeleine Brès, en 1876, une Nantaise, Franceline Ribard, ancienne interne des hôpitaux

de Nantes, est reçue « docteur en médecine » à la faculté de Paris. Bien qu’elle oriente sa carrière vers les domaines jusque-là strictement réservés aux femmes (maladies des femmes, des enfants et ophtalmologie), Franceline Ribard est une exception pour son époque. Elle exerce à Nantes de 1877 à 1880.

De ces exceptions à la norme, il a fallu un siècle. Aujourd’hui, les femmes représentent 65 % des inscrits

à la faculté de médecine de Nantes. Si celles qui accèdent à des postes haut placés parlent encore souvent de la dif-ficulté qu’elles rencontrent à être reconnues par leurs collègues masculins, les femmes ne sont pas pour autant tenues à l’écart des postes à responsabilités. À Nantes, fait remarquable, c’est une femme, Christiane Coudrier, qui est directrice générale du centre hospitalier universitaire.

D’autres domaines ne furent pas faciles à conquérir. Ce-lui du droit a été incontestablement l’un des plus résistants pendant longtemps à toute féminisation, les jeunes filles n’étant autorisées à étudier le droit qu’à partir de 1884 ! Pourtant, aujourd’hui, dans l’agglomération nantaise,

La médecine

Le combat continue...

Nantaises au travail

78

Page de titre de la thèse de Franceline Ribard 1876BIU Santé, Paris

En carrière

70 % des personnes employées dans la justice sont des femmes, et elles représentent la moitié des avocats au barreau de Nantes. Si on les rencontre essentiellement dans le domaine du droit de la famille, elles ne sont pas absentes du droit des finances ou de celui des affaires.

La possibilité d’exercer des professions libérales a permis aux femmes d’organiser leur vie professionnelle et leur vie familiale à leur convenance, et de les concilier autant que possible. C’est dans cette catégorie professionnelle que l’on rencontre la grande majo-rité de celles qui travaillent à « temps partiel choisi ».

Enfin, les grandes écoles se distinguent encore plus tar-divement que tout autre secteur par la ségrégation de leur recrutement. Polytechnique n’ouvre ses portes aux femmes qu’en 1972 et l’École militaire supérieure de Saint-Cyr ne les admet qu’en 1983 !

Le combat continue !il y a bien eu une révolution au xxe siècle, mais celle-ci n’est pas

encore achevée… Certains s’y emploient cependant.À Nantes, l’espace Simone de Beauvoir, lieu associatif pour le

droit des femmes à l’égalité, l’autonomie, la dignité, la solidarité et la citoyenneté, a institué le prix Marguerite Thibert, du nom de celle qui combattit toute sa vie pour l’égalité des chances entre hommes et femmes, notamment après 1926 au sein du Bureau international du travail. Ce prix récompense chaque année une femme engagée dans un secteur professionnel traditionnellement masculin.

79

Aujourd’hui ?Nantaises au travail

80

Les choses ont bien changé depuis l’explosion émancipatrice des métiers du secrétariat dans la première moitié du xxe siècle. Faire carrière, aujourd’hui, pour une femme, c’est essentiellement gravir les échelons, et ce n’est plus seulement l’affaire de quelques pionnières. Néanmoins, si la part des femmes cadres a considérablement augmenté, il reste encore du chemin à parcourir avant qu’elles ne trouvent pleinement leur juste place parmi leurs pairs.

Nantes Métropole, Patrick Garçon

En carrière

81

L’ascension des femmes cadres est fulgurante : une femme pour cinq hommes en 1968, une pour deux aujourd’hui. Dans l’agglomé-ration nantaise, leur nombre a été multiplié par onze en quarante ans (passant de 1 700 en 1968 à 19 200 aujourd’hui), alors que le nombre des hommes cadres a seulement quadruplé (de 7 800 en 1968 à 34 500 aujourd’hui). Cependant, le fossé persiste entre les hommes et les femmes dans ces fonctions. Même si la tendance actuelle confirme que les femmes de l’agglomération sont de plus en plus nombreuses à y accéder, les hommes restent majoritaires à ces postes (25 % des actifs, pour seule-ment 15 % des actives).

À niveau de diplôme égal, les hommes sont plus souvent cadres que les femmes : dans la métropole nan-taise, ce sont les hommes qui accèdent majoritaire-ment aux emplois à res-ponsabilité lorsqu’ils sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur (68 % d’entre eux, contre seulement 50 % des femmes).Inversement, seule-ment 13 % d’entre elles ont un diplôme inférieur ou égal au bac, soit 8 points de moins que les

hommes dans la même situation. Ainsi, si certaines femmes se voient confier des postes d’encadrement avec un diplôme inférieur au bac, elles demeurent moins nombreuses que les hommes à y parvenir. L’iné-galité est encore accentuée par le degré d’exigence lors des recrute-ments.

Les disparités de salaire sont frap-pantes, et les femmes qui accè-dent aux postes à responsabilité, notamment de cadres, gagnent en moyenne 800 € de moins chaque mois que les hommes dans l’agglo-mération. Leur salaire net moyen (2 960 €) les place en cinquième position, soit au niveau de la moyenne, sur l’échelle des dix pre-mières agglomérations françaises, et reste très inférieur à celui des cadres parisiennes (3 860 €).

Nantes Métropole, Patrick Garçon

Nantaises au travail

82

0

5 000

10 000

15 000

20 000

25 000

30 000

35 000

40 000

1968 1975 1982 1990 1999 Aujourd’hui

Hommes Femmes

4 %

2 %

6 %

3 %

11 %

9 %

17 %

14 %

62 %

72 %

0 % 20 % 40 % 60 % 80 % 100 %

Hommescadres

Femmescadres Brevet des

collèges ou sans diplôme

CAP ou BEP

1er cyclede l’enseignement supérieur

Baccalauréatou brevet professionnel

2e ou 3e cyclede l’enseignement supérieur

.

Lecture : aujourd’hui, près de 35 000 hommes et de 20 000 femmes sont cadres. Source Insee-Auran.

Lecture : 72 % des femmes cadres ont un diplôme de 2e ou de 3e cycle de l’enseignement supérieur. Source Insee-Auran.

Évolution du nombre de cadres dans l’agglomération nantaise

Répartition selon le niveau d’études des cadres dans l’agglomération nantaise aujourd’hui

En carrière

83

2 650€ 2 700€ 2 750€ 2 800€ 2 850€ 2 900€ 2 950€ 3 000€ 3 050€ 3 100€ 3 150€

Bordeaux

Toulon

LilleStrasbourg

RouenToulouse

Moyenne des10 agglomérations

NantesLyon

MarseilleNice

Agglomérations :

Paris : 3 859 €* équivalent temps plein

Lecture : les femmes cadres qui résident dans l’agglomération nantaise ont un salaire moyen de 2 960 euros par mois. Source Insee-DADS 2008-Auran.

Lecture : 50 % des femmes de l’agglomération qui ont un diplôme de 2e ou de 3e cycle de l’enseignement supérieur sont cadres. Source Insee-Auran.

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %

Artisans,commerçants,

chefs d'entreprises

Cadres Professionsintermédiaires

Employés Ouvriers

Hommes Femmes

Agriculteurs

Répartition par catégorie socioprofessionnelle des personnes titulaires d’un diplôme de 2e ou de 3e cycle de l’enseignement supérieur

Salaire net mensuel moyen* des femmes cadres en 2008 dans les 10 premières agglomérations françaises

À la chaîne

5

Les femmes ont participé très tôt aux activités industrielles et ne sont pas passées à côté des grandes révolutions économiques des

deux siècles derniers. Dès le xViiie siècle, les Nantaises sont nom-breuses dans les manufactures de la ville, puis dans l’agroalimentaire et la métallurgie. Généralement affectées aux tâches les plus pénibles, sans formation, elles restent tenues à l’écart de toute progression.Au début du xxe siècle, plus du tiers d’entre elles sont ouvrières dans les usines. La Première Guerre mondiale, qui les fait accéder à des emplois jusque-là réservés aux hommes, marque une évo-lution, même si beaucoup perdront ensuite les postes à responsa-bilité occupés pendant le conflit. La mécanisation redistribue les tâches. D’abord spécificité de l’industrie, le travail « à la chaîne » s’étend, dès les années 1920, à certaines activités tertiaires.

Secteur traditionnel de la main-d’œuvre féminine, le textile a toujours employé des femmes pour les opérations de filage et de tissage. Au xViiie siècle, la mise en place des grandes manufactures de toiles imprimées nantaises a trans-formé l’activité, qui se faisait souvent au domicile, en activité industrielle. Le département de la Loire-inférieure compte ainsi près de 2 000 fileuses, réunies dans des ateliers ou travaillant à domicile pour les manufactures.

Mais les femmes, dont le travail va connaître d’importants chan-gements avec la mécanisation du filage et du tissage, sont aussi présentes à d’autres postes, moins traditionnels. Ainsi, dès 1790, Louis Favre aîné, à la tête d’une des principales manufactures de Nantes, Petitpierre, déclare employer 4 300 ouvriers, dont 1 600 pinceauteuses. Appelées aussi pinceleuses, celles-ci rehaussent au pinceau certaines toiles polychromes, notamment en posant le bleu indigo. Ce travail sans qualification, fastidieux et mal rémunéré, est en outre toxique, car le bleu indigo contient du sulfure d’arsenic.

N’appartenant pas à l’élite des indienneries, composée des colo-ristes et des dessinateurs-graveurs, les femmes ont des difficultés à voir leurs compétences reconnues, et doivent faire face à l’opposition

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Femme sur une presse de l’usine Guillouard (détail)Seconde moitié du xxe siècleCHT de Nantes Coll. UD CGT 44Hélène Cayeux

À la chaîne

Le textile

˃˃˃ Les indiennes

Nantaises au travail

86

de leurs collègues masculins. Les imprimeurs des fabriques d’in-diennes n’écrivent-ils pas en 1787 : « Vous devez sentir qu’il n’est pas convenable que les femmes travaillent, tandis que beaucoup d’ouvriers, même chargés de famille, se trouvent sans ouvrage. » Perçues comme des concurrentes, elles sont reléguées aux tâches les moins bien rémunérées, quand elles ne sont pas tout simplement exclues de l’entreprise.

Au xixe siècle, alors que l’impression au rouleau de cuivre a rem-placé celle à la planche de bois, les femmes, qui avaient connu une certaine promotion en accédant aux postes d’impression des cou-leurs, se voient définitivement écartées de ces tâches. L’entreprise applique donc une hiérarchie très stricte des fonctions.

Les manufactures d’indiennes disparaissent progressivement dans la première moitié du xixe siècle.

La généralisation de la machine à coudre, après 1860, marque un tournant. Les cadences s’accélèrent et le travail est de plus en plus souvent payé à la pièce. À la fin du siècle, les ouvrières du textile nantais sont payées en moyenne 1,50 francs à 2 francs de moins par jour que les ouvriers des autres secteurs. Dans la confection également, le rapport des salaires varie fréquemment du simple au double.

Même pendant la Première Guerre mondiale, les inégalités sa-lariales demeurent. En 1914, à Nantes, les femmes qui travaillent dans les ateliers de confection militaire sont moins bien payées que dans les ateliers traditionnels. Elles s’en plaignent auprès du maire, ajoutant que l’ouvrière, qui ne gagne plus qu’un franc par jour, est, en plus, « obligée de fournir son fil ».

Le textile est resté un secteur important de l’agglomération nan-taise jusque dans les années 1990. Essentiellement féminin, il est l’une des branches les plus fermées à l’évolution professionnelle. Les ouvrières y sont soumises à des cadences de plus en plus soutenues, à des pressions aussi, travaillant à la tâche le plus souvent et devant se battre pour obtenir le Smic. Il n’est pas rare que l’ouvrière, en-trée au Smic à la coupe, finisse avec le même salaire à une tâche sans plus de qualification. Si la polyvalence est mise en avant, l’évo-lution de carrière n’y est pas associée. Le secteur subit de plein fouet la crise qui toucha toute la confection française et les fermetures

˃˃˃ La confection

À la chaîne

d’entreprises furent nombreuses entre 1990 et 2005 à Nantes et dans l’agglomération.

Autre industrie particulièrement féminisée dès sa création, la manufacture des tabacs ouvre à Nantes des ateliers provisoires en 1857. Le nouveau bâtiment, après 1865, accueille au plus fort de son activité près de 2 000 salariés, dont plus de 90 % de femmes. La société de secours mutuel, mise en place en 1858, et la crèche, ouverte en 1861, y sont de véritables avantages sociaux. En se do-tant d’une crèche, la manufacture est particulièrement prompte à comprendre l’intérêt d’une telle structure pour une entreprise qui emploie essentiellement de la main-d’œuvre féminine. Le budget est tripartite, pris en charge par l’État, la ville et les ouvrières, dont les cotisations constituent un tiers du budget global. L’avantage, réel, ne doit cependant pas masquer d’autres réalités : les ouvrières, bien que sociétaires de la société de secours mutuel, ne reçoivent aucune indemnité journalière lors des accouchements ou des arrêts liés à leur grossesse…

87

Atelier de réparation de sous-vêtements pour l’armée1918 ou 1919Archives municipales de Nantes Archives de guerre américaines

La manufacture des tabacs

Nantaises au travail

88

Les photographies prises en 1927 dans les différents ateliers montrent l’importance numérique et stratégique des femmes dans l’entreprise. Mis à part les ateliers d’ajustage et de réparation, on les rencontre partout, dans les ateliers de préparation générale, sur les machines à cigares, dans les ateliers de robage, de capage, de paquetage, d’emboîtage… Elles constituent l’essentiel du personnel ouvrier, mais on les trouve aussi parmi les cadres techniques. Enfin, elles sont aussi nombreuses que les hommes parmi les membres du bureau syndical, un bel exemple de parité !

En 1974, la manufacture des tabacs ferme ses portes à Nantes. Désormais, c’est à Carquefou que les « cigarières », comme elles se nomment encore entre elles, trouvent un nouveau lieu de travail.

Atelier de groupage de cigarettes (détail) 1927 CHT de Nantes Coll. Me Philippeau

Crèche de la manufacture des tabacs (détail) 1927 CHT de Nantes Coll. Me Philippeau

À la chaîne

Dans les industries agroalimentaires aussi les femmes sont nom-breuses. Au xixe siècle, même si la plupart occupent des postes peu qualifiés, elles ne sont pas « que » des petites mains dans l’entre-prise. Elles sont présentes, en nombre et en qualité, dans les biscui-teries, les conserveries et les confiseries, notamment chez LU, BN, Amieux ou Saupiquet…

Les ouvrières qui travaillent au début du xxe siècle pour Lefèvre-Utile et la Biscuiterie nantaise sont essentiellement cantonnées à des tâches de mise en boîtes des biscuits, mais certaines occupent aussi des postes plus techniques et généralement considérés comme masculins. C’est le cas des femmes qui travaillent au sertissage des boîtes tin (ill. p. 1), ces grandes boîtes métalliques qui contiendront

89

˃˃˃ Les biscuiteries

L’agroalimentaire

Nantaises au travail

92

les biscuits. Avec la mécanisation, les femmes sont, au milieu des années 1950, à tous les postes de la production, devant les machines à récupérer les jaunes d’œufs, comme devant la ligne de fabrication des biscuits ou des emballages.

Dans les conserveries, la main-d’œuvre est souvent féminine, d’origine rurale ou côtière. L’activité est saisonnière et une par-tie des tâches peut être effectuée à domicile, comme l’équeutage ou l’éboutage de certains légumes, jusqu’au milieu du xxe siècle. Dans l’entreprise Amieux, qui emploie des femmes depuis le dé-but de ses activités, elles représentent 85 % du personnel en 1950, car les tâches restent essentiellement manuelles. Mais elles ne sont plus que 70 % dix ans plus tard, du fait de la mécanisation, car les tâches traditionnellement féminines sont désormais effectuées par des machines conduites par des hommes. Les conditions de travail, malgré une amélioration entre le début du siècle et les années 1960, demeurent particulièrement dures : il faut gagner sa

Albert Brenet Chaîne d’emballage de l’usine LU 1955Musée d’histoire de Nantes

˃˃˃ Les conserveries

Le personnel de l’usine LU 1907 Musée d’histoire de Nantes (pages précédentes)

À la chaîne

vie en six mois au maximum et donner satisfaction si l’on veut être réemployé l’année suivante.

Nantes, qui se distingue par l’importance de ses conserveries, voit se développer de grandes entreprises de ferblanterie au xixe siècle. Les femmes y travaillent à la chaîne, dans les ateliers de sertissage et de mise en caisses. Là encore, elles occupent les emplois les moins qualifiés et perçoivent des revenus inférieurs à ceux des hommes. Ainsi, chez J. J. Carnaud, en 1890, un soudeur-boîtier peut gagner 4,90 francs par jour, un ajusteur 4 francs, quand une ouvrière gagne en moyenne, pour la même journée de dix heures, 1 franc. Les femmes n’accèdent qu’après 1936 au grade d’ouvrière spécialisée.

Pendant la Première Guerre mondiale, les femmes remplacent les hommes aux postes qu’ils occupaient jusque-là. Dans la métal-lurgie, elles fabriquent armes et munitions, comme aux forges de Basse-indre.

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Les contrôleuses d’obus aux forges de Basse-Indre 1914-1918 Coll. part. (pages suivantes)

La ferblanterie et la métallurgie

G. FayAmieux-FrèresSardines et toutes conserves 1899Musée d’histoire de Nantes

Nantaises au travail

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Chaîne de sertissage de l’usine J. J. Carnaud, rue de la Marseillaise Milieu du xxe siècle CHT de Nantes Coll J. J. Carnaud/ Métal Box

Après la guerre, les besoins croissants de main-d’œuvre dans la métallurgie sont comblés par l’arrivée massive d’étrangers. À Basse-indre et à Couëron, où s’est implantée depuis la deuxième moitié du xixe siècle une industrie métallurgique, les ouvrières viennent en grande partie de Pologne, mais aussi d’Espagne et d’Italie. Sans qualification à leur arrivée, elles sont d’anciennes ouvrières agricoles ou de simples ménagères qui ont suivi leur mari. Elles travailleront toutes, à un moment ou à un autre, pour l’entreprise J. J. Carnaud, alternant périodes d’activité et de chômage.

C’est en 1927 que les premières équipes à la chaîne démarrent dans les usines du groupe J. J. Carnaud installées à Chantenay. Le sertissage des boîtes est alors mécanisé et remplace la soudure telle qu’elle existait à la fin du xixe siècle. La diminution des besoins en main-d’œuvre touche désormais de plein fouet les ouvrières qui occupaient ces postes.

À la chaîne

97

Enfin, les femmes travaillent massivement dans le secteur tertiaire. Contrairement à ce que l’on pense généralement, dans bien des cas, elles y exercent aussi des emplois « à la chaîne », effectuant des tâches répétitives, séquencées, soumises à des cadences soutenues.

Le cas des standardistes en est un exemple. Dans les grands cen-traux téléphoniques, dès les années 1920, elles sont organisées en « brigades » afin d’assurer la continuité du service. Pour des rai-sons budgétaires, l’État décide de n’employer que des femmes à ces postes, certain de trouver là une population active meilleur mar-ché... Assises sur des tabourets, les téléphonistes assurent la relation des abonnés entre eux, encadrées par des surveillantes qui orga-nisent leur travail et veillent à son bon déroulement. Le rythme est intense, les gestes répétitifs, les horaires contraignants avec des amplitudes importantes, très tôt le matin et tard le soir. Ce n’est que progressivement, après 1969 et l’automatisation du téléphone, que ces postes disparaissent.

Il en est de même dans le secteur des chèques postaux, dont l’acti-vité s’intensifie dans les années 1960. Les femmes doivent traiter quotidiennement des milliers d’opérations financières. Après 1963, l’informatisation devient dans ce secteur un élément primordial de développement. Le centre des chèques postaux de Nantes est alors à la pointe du progrès : la parcellisation des tâches devient priori-taire, les cadences, vite infernales, notamment aux postes de saisie et de vérification des documents qui s’apparentent à un travail à la chaîne. Les possibilités de promotion sont quasiment nulles pour les jeunes femmes, qui viennent grossir les rangs de celles que l’on appelle, dans les années 1970, les « OS de la paperasse » !

Les employées attendent « l’électronique » avec impatience et méfiance à la fois, espérant voir les cadences se réduire sans être complètement asservies à la machine. À Nantes, dans les années 1980, le personnel est insuffisant pour mener à bien toutes les opé-rations. Les tensions sont importantes et les maladies profession-nelles, comme les dépressions, sont nombreuses au sein des équipes. Des tentatives de suicide sont déjà enregistrées.

Le secteur tertiaire

Nantaises au travail

98

À la chaîne

99

Le centre des chèques postaux à Nantes 1967 Musée de la Poste, Paris

Aujourd’hui ?Nantaises au travail

100

Si les ouvrières ont fourni une abondante main-d’œuvre à l’industrie nantaise dès le xviiie siècle et plus encore depuis le xixe, le profil des femmes dans le secteur industriel s’est largement transformé au cours des trois dernières décennies. Ainsi, aujourd'hui, le territoire de l’agglomération emploie dans ce secteur 5 800 femmes, principalement dans l’agroalimentaire et dans la fabrication de biens intermédiaires. Pourtant elles y occupent surtout des postes administratifs et technico-commerciaux, et à peine un quart d’entre elles sont ouvrières.

Nantes Métropole, Patrick Garçon

À la chaîne

101

Depuis trente ans, le phénomène de désindustrialisation a touché la France comme l’ensemble des économies développées : l’industrie a perdu 36 % de ses effectifs depuis 1982. Le bassin d’emploi nantais n’a pas échappé à ce phénomène massif, et les emplois industriels y ont chuté dans des proportions identiques, un peu moins toutefois pour les femmes (- 34 %) que pour les hommes (- 37 %). L’agglomération nantaise conserve néanmoins une part d’emplois industriels parmi les plus fortes de France (11,2 % des emplois), devancée seulement par les agglo-mérations de Toulouse et de Lyon.Dans le même temps, la proportion d’ouvrières dans l’industrie a forte-ment diminué (de 50 % en 1982 à 24 % au-jourd’hui), alors qu'elles devenaient techni-ciennes et agentes de maîtrise (7 % seulement en 1982, mais 32 % aujourd’hui), ou cadres et ingénieures. Ces deux tendances inverses s’ob-servent aussi chez les hommes, mais avec une plus faible amplitude. L’effet de la désindus-trialisation, qui a touché principalement les sec-

teurs traditionnellement féminins (textile et confection, pharmacie et cosmétiques), explique pour une part ce phénomène. Mais sur-tout, mieux formées, les femmes ont quitté les chaînes de produc-tion pour occuper des postes plus qualifiés.

Les externalisations récentes des fonctions de vente et d’adminis-tration opérées par les entreprises industrielles expliquent aussi, pour partie, la baisse des effectifs

Nantes Métropole, Patrick Garçon

Nantaises au travail

102

féminins. Un certain nombre a basculé de la production vers les services. Mais que ce soit ici ou là, la présence des femmes dans l’industrie devrait se conforter, et notamment dans les secteurs innovants exigeant des emplois qualifiés. En outre, elles devraient être plus épargnées par les délocalisations, qui touchent plus souvent les métiers à moindre valeur ajoutée.

Enfin, si le nombre d’ouvrières a baissé, le travail à la chaîne n’en a pas pour autant disparu. Les femmes occupent encore aujourd’hui de nombreux emplois aux tâches répétitives, telles les 2 050 caissières de l’aggloméra-tion, suivies de très loin par leurs 130 homologues masculins…

✓ en 1982 ✓ aujourd’hui

31,9 %

31,8 %

8,5 %

0,2 %

24,4 %

49,6 %

38,0 %

7,1 %

5,1 % 3,4 %

Ouvrières

Ouvrières

PersonnelsadministratifsPersonnels

administratifs

Techniciennes,agentes de

maîtrise

Techniciennes,agentes de

maîtrise

Cadres,ingénieures

Cadres,ingénieures

Chefs d’entrepriseChefs d’entreprise

Lecture : 49,6 % des femmes qui travaillaient dans l’industrie en 1982 étaient ouvrières, aujourd’hui elles représentent 24,4 % des femmes de l’industrie. Source Insee-Auran.

Les métiers des femmes dans l’industrie sur le territoire de Nantes Métropole

À la chaîne

103

Hommes Femmes

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

Chefsd'entreprise

Cadres,ingénieurs

Techniciens,agents demaîtrise

Personnelsadministratifs

Ouvriers

Lecture : parmi l’ensemble des hommes qui travaillent dans le secteur industriel, 24 % sont cadres ou ingénieurs. Source Insee-Auran.

Répartition des actifs sur le territoire de Nantes Métropole dans les métiers de l’industrie aujourd’hui

En colère

6

« il n’y a pas de grève de femmes ! » Cette idée commune qui laisserait penser que les femmes ne savent pas s’orga-

niser et aboutir à un combat solidaire contre leurs employeurs est aujourd’hui battue en brèche par de nombreux mouvements sociaux, aussi bien dans les domaines de la santé, du social, de l’enseignement que dans ceux de l’industrie et des services. Bien entendu les femmes ont participé aux grandes grèves de 1955, 1968, 1986 qui ont marqué l’histoire nantaise, aux côtés de leurs époux d’abord, puis au premier rang de la lutte. Elles ont, à Nantes, mené seules de durs combats, souvent exemplaires.

Parmi ceux-ci, les grèves et luttes des employées des chèques postaux de Nantes sont remarquables, aussi bien dans les grands conflits des années 1960 que dans ceux des an-nées 1970. Partis des centres parisiens, les mou-vements s’étendent rapidement à tous les grands centres situés en province. Par leur revendica-tion sur les questions liées aux inégalités entre hommes et femmes, ou aux conditions générales de travail, « les filles des chèques postaux » ont obtenu de véritables avancées.

Huguette Thibaud, ancienne syndicaliste de la CFDT, se sou-vient d’avoir connu l’union syndicale et remporté des combats. Elle l’évoque lors d’un témoignage filmé en 2010 :

« J’ai travaillé aux chèques postaux et j’ai passé les concours après […] il y avait deux concours d’inspecteur : le concours des hommes et le concours des femmes, et pour le concours des hommes, il y avait beaucoup de places, alors on s’est battues pour qu’il y ait un seul concours… et on a obtenu gain de cause, cela a été un combat des organisations syndicales […] »

Elle raconte aussi les conditions de travail qui favorisent les patho-logies graves et les maladies mentales, constatées dès le milieu des années 1950 et confirmées par les études scientifiques menées dans les années 1960 sur la fatigue industrielle. L’une de ces études, réali-sée par Pierrette Sartin, chargée de mission au commissariat géné-ral du plan d’équipement et de la productivité, signale un surcroît

105

Roger Rousselot Nicole Le Brizault 45e congrès de l’UD CGT de Loire-Atlantique dans la salle du Champ-de-Mars 1973 CHT de Nantes Coll. UD CGT 44

En colère

Les chèques postaux

Nantaises au travail

106

de décès dans certaines professions, dont les employés des chèques postaux. Pierrette Sartin écrit alors : « Dans la mécanographie, le mal est tel que le personnel est impossible à reclasser après quelques années de travail, souvent moins de dix ans ».

« On a été un trio (de femmes), à la CFDT, on a été les premières à dire « non » […] cela n’a pas toujours été facile […] il y avait énormément de crises de nerfs, de dépressions […] il y a eu des tentatives de suicides, à l’hôtel des postes des chèques postaux […] il y en a une qui s’est ratée (en se jetant par la fenêtre), elle est revenue mais elle était ensuite une grande handicapée […] »

Enfin, elle évoque la question du temps libre et du samedi de repos, acquis en 1968 :

« On y croyait au syndicalisme et pour celles qui s’y donnaient à fond,

Manifestation de femmes soutenant leurs maris grévistes, rue du Roi-Albert 1955 CHT de Nantes

En colère

107

dans la vie, comme moi, on a sacrifié autre chose […] On s’est battues pour le samedi libre pendant au moins cinq ans […] à la distribution, ils nous disaient que ce n’était pas possible […] quand on l’a décroché après la grève de 68, on était fières de nous ! »

Autres combats, tout aussi forts et devenus des symboles pour l’in-dustrie textile nantaise, ceux des « filles de Chantelle », des années 1970 aux années 2000, ont laissé des traces dans la mémoire locale. Si les premières luttes, en 1974 et 1981, visaient essentiellement à augmenter les salaires, très faibles, et à améliorer les conditions de travail, les conflits des années 1990 et 2000, beaucoup plus durs, ten-tèrent de s’opposer à la délocalisation de l’entreprise et à deux plans sociaux successifs.

Les chèques postaux à Nantes Années 1980 Centre d’histoire sociale de Loire- Atlantique, CGT-PTT

Les filles de Chantelle

Nantaises au travail

108

Annie Guyomarc’h, syndicaliste CGT, se souvient, en 2011 :

« En 74-75, […] on s’est battues pour les conditions de travail, parce que les filles, à la machine, elles avaient des temps qui étaient très serrés, elles n’arri-vaient pas à faire leur activité et en plus il y avait souvent des avertissements, parce qu’elles n’avaient pas la qualité ou elles n’atteignaient pas leur rendement […] les filles n’en pouvaient plus, il y avait des crises de nerfs, des dépressions […] cela ne pouvait plus durer […] à un moment donné, on a dit stop, et les filles se sont arrêtées de travailler […] Tout ce que l’on a obtenu, on l’a eu grâce à la lutte : le respect, l’amélioration des conditions de travail, le treizième mois, la dignité […] Si on n’avait pas été solidaires, toutes ensemble, on n’aurait jamais pu faire échec à cette direction. »

« En 81, notre lutte est devenue très populaire […] on s’est bien battues car avant [la lutte], le minimum garanti était en-dessous du Smic […] c’étaient vraiment des petits salaires, et là, on a obtenu que le minimum garanti soit au moins le Smic. »

« En 95, Chantelle a annoncé le projet de fermeture du site de Saint-Herblain, […] on était toutes très abattues […] on a multiplié les ini-tiatives : manifestations dans la ville, défilés, distribution de tracts […] Chantelle a été obligé de garder des gens ; une quarantaine de personnes

L’occupation de l’usine Chantelle 1994 CHT de Nantes Coll. UD CFDT 44

En colère

109

Manifestation des ouvrières de Chantelle, place du Commerce 1980-1981 CHT de Nantes

[…] c’est dur la séparation […] c’était une famille presque […] c’est une vie entière ! [...] Forcément ça pleurait, parce que c’était fort […] Il y en a vingt-deux qui ont retrouvé du travail […] mais très peu ont trouvé du tra-vail stable […] Après 95, je suis tombée malade, il y a beaucoup de filles qui sont tombées malades d’un cancer […] je pense que le surmenage, le stress, c’est quand même des chocs psychologiques […] »

« En 2005, deuxième coup, je me suis dit : ce n’est pas possible de vivre un deuxième plan social ! On a quand même eu une lutte d’un an, à trente […] on avait toujours autant de soutien des gens, de la population […] mais on était quand même petit par rapport à eux [Chantelle]. La mairie nous a dédié une rue : la rue des Filles-de-Chantelle, c’est une reconnais-sance tout de même de notre lutte, de femmes, persévérantes […] »

Le site fut fermé, malgré tout.

À ces conflits qui ont pris une valeur de symbole au niveau local mais aussi national, il convient d’ajouter ceux, récents, des infir-mières, des sages-femmes et de l’ensemble des personnels hospita-liers, essentiellement féminins… Enfin, il faut prendre conscience de la part croissante des femmes dans les syndicats aujourd’hui.

L’occupation de l’usine Chantelle Noël 1981 (au centre, Annie Guyomarc’h) CHT de Nantes Coll. UD CGT 44Hélène Cayeux (pages suivantes)

Aujourd’hui ?Nantaises au travail

112

Malgré la part très active prise par les femmes dans les durs conflits de la seconde moitié du xxe siècle, les syndicats restent encore des organisations mixtes à dominante masculine. Cependant, la place des femmes y a fortement progressé dans la période récente.

Manifestation des magistrats à Nantes 10 février 2011 AFP, Frank Perry

En colère

113

Même si le taux d’activité féminin s’est fortement accru ces dernières années, seulement 6 % des femmes au travail sont syndiquées aujourd’hui en France, selon l’Insee. Elles n’étaient toutefois que 2 % en 2006.Leur taux de syndicalisation tend à se rapprocher de plus en plus de celui des hommes (8 % d'entre eux sont syndiqués), sans compter qu’elles représentent désormais la majorité des nouvelles adhésions.En revanche, la représentation des femmes dans les instances de décision des syndicats et leur place en tant que responsables restent plus faible. Alors qu’elles représentent « 30 à 40 % des effectifs syndiqués, on passe en général, dès que l’on monte dans la hiérarchie syndicale, à un taux qui descend autour de 20 % voire en dessous ». (Alternatives écono-miques, septembre 2011)Une enquête sur les pratiques et les modes de vie des habitants, réalisée par l’Auran en 2010 au-près de 4 000 ménages représen-tatifs de Nantes Métropole, rend compte de pratiques syndicales différenciées des femmes selon leur âge, leur catégorie sociopro-fessionnelle, leurs revenus ou encore leur situation familiale.Elle révèle notamment que les femmes de plus de 35 ans sont plus souvent syndiquées que les plus jeunes.

On observe d’autre part une sur-représentation des cadres parmi les femmes syndiquées, alors qu’inversement, les employées sont sous-représentées.

Par ailleurs, il apparaît que la proportion de femmes syndiquées progresse en fonction des revenus du ménage. On remarque également que plus les femmes ont des enfants, plus elles sont syndiquées.

Manifestation des sages-femmes à Nantes 26 avril 2011 AFP, Philippe Desmazes

Nantaises au travail

114

L’investissement syndical des femmes est plus important dans les entreprises de plus de cent salariés (57 % y sont syndiquées), ainsi que dans les entreprises publiques.

Après avoir interrogé quelques syndicats professionnels de salariés et d’employeurs en Loire-Atlantique, il ressort que les principales motivations d’adhé-sion sont la défense des droits, la cohésion sociale, la réduction des inégalités, la préservation des acquis sociaux, les revendications sociales (salaires, formation, retraite, précarisation du travail, carrières et congé parental…)

A contrario, les femmes appré-hendent de retrouver dans les organisations syndicales les mêmes difficultés que celles auxquelles elles sont confron-tées dans le monde du travail en général. Par ailleurs, les propos recueillis ont également pointé le coût d’adhésion, ainsi que le côté « masculin » de la culture syndi-cale comme frein à l’engagement syndical. Ces constats corroborent les résultats des enquêtes menées sur la place des femmes dans les syndicats au niveau européen.

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

Moins de 25 ans De 25 à 34 ans De 35 à 49 ans 50 ans et plus

Femmes syndiquées Ensemble des femmes actives

Lecture : parmi l’ensemble des femmes syndiquées dans l’agglomération nantaise, 47 % ont entre 35 et 49 ans. Source Enquête « Nouveaux regards sur nos modes de vie »-Auran.

Répartition des femmes syndiquées, ou l’ayant été, et des femmes actives selon l’âge aujourd’hui

En colère

115

Femmes syndiquées Ensemble des femmes actives

0 %

10 %

20 %

30 %

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50 %

Artisanes,commerçantes,

chefs d'entreprises

Cadres Professionsintermédiaires

Employées OuvrièresAgricultrices

Femmes syndiquées Ensemble des femmes actives

0 %

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20 %

30 %

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50 %

60 %

70 %

moins de 625 €par mois et par UC

de 625 à 1 167 €par mois et par UC

de 1 168 à 2 500 €par mois et par UC

plus de 2 500 €par mois et par UC

Femmes syndiquées Ensemble des femmes actives

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

aucun enfant 1 enfant 2 enfants 3 enfants 4 enfants etplus

Répartition des femmes syndiquées, ou l’ayant été, et des femmes actives selon leur catégorie socioprofessionnelle aujourd’hui

selon leur niveau de revenu

selon le nombre d’enfants

UC= unité de consommation

Au quotidien

Nantaises au travail

116

La difficulté de concilier le rôle de mère de famille avec une activité professionnelle est apparue avec acuité à l’occasion de l’industrialisation au xixe siècle. Les initiatives diverses prises à Nantes à cette époque pour organiser la garde des enfants témoignent d’une prise de conscience de cet enjeu. Conscience éveillée autant, du reste, par un souci d’efficacité économique que par des préoccupations sociales, mais il n’empêche : les salles d’asile pour la garde des jeunes enfants se multiplient, sans parvenir à absorber les listes d’attente. Des entreprises se dotent d’une crèche pour leurs ouvrières : ainsi les Brasseries nantaises en 1830, la manufacture des tabacs en 1861, ou la conserverie Amieux en 1920. Souvent, d’ailleurs, la présence d’une crèche est précisément l’argument qui attire les ouvrières dans l’entreprise, et cela parfois jusqu’au milieu du xxe siècle, notamment à la manufacture des tabacs. Plus récemment, l’explosion du métier d’infirmière au xxe siècle a engendré une difficulté inhérente à cette profession (même si d’autres n’en sont pas exemptes) : leurs horaires décalés, incompatibles avec la garde de leurs enfants avant ou après l’école, contraignent trop souvent les mères à recourir à des solutions précaires et coûteuses, les conduisant, parfois, à renoncer à un emploi.Mais qu’en est-il aujourd’hui, alors que les modes de garde des enfants se sont multipliés et diversifiés, souvent structurés en réseaux sous l’égide des collectivités

territoriales ? Est-il pour autant facile d’être à la fois femme active et mère de famille ? À quel degré la maternité conditionne-t-elle les choix professionnels ? Touche-t-elle toutes les femmes quelle que soit la catégorie professionnelle ou la catégorie sociale ?

Nantaises au travail

116

Aujourd’hui, parmi les 138 000 femmes actives dans l’agglomération, 77 000 sont mères de famille avec enfant(s) à charge. 19 % d’entre elles sont à la tête d’une famille monopa-rentale et 81 % vivent en couple.L’exercice d’une activité profession-nelle reste dépendant du nombre d’enfants. Quand elles vivent en couple, plus le nombre d’enfants aug-mente, moins les femmes travaillent : le taux d’activité des femmes avec un enfant est de 77 % et se réduit à 44 % lorsqu’elles ont plus de trois enfants.

Quel que soit le nombre d’enfants au sein du couple, le taux d’activité des hommes est nettement plus élevé que celui des femmes.

Lecture : 74 % des femmes qui vivent en couple et qui ont deux enfants sont actives (les 26 % restantes sont inactives : femmes au foyer, en formation...)Source Insee-Auran.

Permanente syndicale Alain Guillard, 2010

7

Au quotidien

117117

Hommes Femmes

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

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80 %

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100 %

Famillesmonoparentales

Couples avec1 enfant

Couples avec2 enfants

Couples avec3 enfants

Couples avec4 enfants et plus

Taux d’activité sur le territoire de Nantes Métropole selon le nombre d’enfants aujourd’hui

Nantaises au travail

118

Quand elles ont plus de trois enfants, 93 % des femmes cadres travaillent, contre 85 % des femmes employées.

Les femmes mères de famille connaissent des situations d’em-ploi diverses selon le nombre d’enfants et leur catégorie socio-professionnelle. Quel que soit le nombre d’en-fants, le taux de chômage des femmes employées est supérieur à celui des femmes cadres. Cette différence est encore plus mar-quée chez les familles monopa-rentales, où le taux de chômage des employées est trois fois supérieur à celui des cadres.Il apparaît donc qu’à partir d’un certain nombre d’enfants,

il devient moins facile pour certaines catégories d’avoir une activité professionnelle. Cela renvoie notamment à la ques-tion des modes de garde des enfants, tant en termes de coût que d’horaires d’ouverture des structures de garde.

Cadres Employées

Famillesmonoparentales

Couples avec1 enfant

Couples avec2 enfants

Couples avec3 enfants

Couples avec4 enfants et plus

0 %

5 %

10 %

15 %

20 %

25 %

Lecture : 10 % des femmes employées qui vivent en couple et ont un enfant sont au chômage. Source Insee-Auran.

Cadres et employées : taux de chômage des femmes selon le nombre d’enfants sur le territoire de Nantes Métropole

Au quotidien

119

Chez les mères de famille qui travaillent, le recours au temps partiel est fréquent.

Si les femmes qui travaillent à temps partiel sont particu-lièrement nombreuses dans l’agglomération nantaise (34 % des femmes actives), ce taux est plus important chez les mères de famille (41 %). Toutefois, des disparités appa-raissent en fonction de la catégorie socioprofessionnelle : le temps partiel concerne plus particulièrement les mères employées que les mères cadres, et ce quel que soit le nombre d’enfants. La moitié des mères employées qui ont plus de deux enfants sont à temps partiel.

Les mères de famille monopa-rentale ont moins recours au temps partiel que celles qui vivent en couple.

À l’échelle nationale, l’Insee estime que parmi l’ensemble des actifs travaillant à temps partiel, deux tiers déclarent que c’est un « choix » et l’autre tiers qu’il est « subi ».

Cadres Employées

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

Famillesmonoparentales

Couples avec1 enfant

Couples avec2 enfants

Couples avec3 enfants

Couples avec4 enfants et plus

Lecture : lorsqu’elles vivent en couple et ont trois enfants, 61 % des femmes employées travaillent à temps partiel. Source Insee-Auran.

Cadres et employées : part des femmes qui travaillent aujourd’hui à temps partiel selon le nombre d’enfants sur le territoire de Nantes Métropole

Nantaises au travail

120

L’accueil des enfants comme la clé d’un accès à l’emploi pour tous les parents ?

Ces différents constats mettent en évidence la forte corrélation entre la situation de la cellule familiale et l’accès des femmes à l’emploi. Dans ce contexte, la question de la garde d’enfant apparaît centrale dans l’enjeu de l’accès pour tous à l’emploi.Aujourd’hui, les modes de vie (famille monoparentale, recomposée…) et les modes de travail (temps plein ou partiel, horaires atypiques, horaires décalés…) sont plus complexes et diversifiés qu’auparavant. La question des modes de garde en est d’autant plus difficile à résoudre. Les modes d’accueil des enfants se doivent d’être facilités, divers et accessibles financièrement pour offrir aux familles des solutions sur mesure et ainsi limiter les freins à l’emploi des femmes.

L’accès à un mode d’accueil ou comment lever un frein à l’emploi ?

Une évaluation pour mieux appréhender le « parcours du combattant » des parents dans l’accès aux modes de garde a été conduite par la Ville de Nantes en partenariat avec Nantes Métropole, la Caisse d’allocations familiales, le Conseil général. À partir de cette enquête, notamment auprès des professionnels de la petite enfance et du champ de l’insertion professionnelle et sociale et de parents (usagers de structures petite enfance, ou en parcours d’insertion professionnelle), une typologie des besoins et difficultés rencontrés par les familles a été réalisée. Elle montre la complexité des réponses à organiser.

Pour l’essentiel, les situations les plus complexes sont celles de familles monoparentales en situation de précarité. Mais s’y trouvent aussi les travailleurs de nombreuses familles d’emplois et de métiers (cadres et professions intermédiaires, commerce, ménage, restauration...) qui impliquent des horaires étendus en soirée,

Au quotidien

121

Assistante maternelle Alain Guillard, 2010

et des couples dont les deux membres sont en activité.En dehors de cas particuliers où la question de la mobilité (moyen ou temps de transport) est le frein essentiel au maintien ou à l’accès à l’emploi, la question de l’accueil de l’enfant constitue la difficulté majeure pour les ménages concernés. Ainsi, notamment à la suite d’une formation, elle motive le renoncement à l’offre d’emploi, engendre l’abandon d’études ou d’emplois, impose des réductions de temps de

travail ou des réorientations de carrière.Jusqu’à l’identification d’une solution d’accueil, les personnes rencontrées sont en situation d’inquiétude permanente, renforcée par le sentiment de se trouver dans un cercle vicieux : il leur faut justifier d’une occupation pour obtenir un mode de garde alors même qu’il leur faut s’assurer d’avoir un mode de garde pour accepter un emploi ou une formation.

Nantaises au travail

?

Nantaise, qui es-tu ?

123

J’ai 39 ans en moyenne. Plus souvent que mes com-pagnes des grandes agglomérations françaises, je vis en couple, avec ou sans enfants, et je suis plus rare-ment qu’elles mère d’une famille monoparentale. Ici, parmi mes amies, une sur dix vit seule.

Peu de mes amies sont sans aucun diplôme. Sur dix d’entre elles, deux ont un CAP ou un BEP, deux encore ont obtenu un baccalauréat ou un brevet professionnel, quatre enfin sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur.

Je suis employée. La moitié de mes amies occupent un emploi de cadre ou exercent une profession intermédiaire. Je travaille dans le secteur tertiaire, en particulier dans les commerces, les transports ou les services.

Une de mes amies sur trois travaille à temps partiel. Nous sommes plus souvent dans ce cas que les femmes des autres grandes agglomérations. Huit de mes amies sur dix bénéfi-cient d’un contrat à durée indéterminée ou travaillent dans la fonction publique. Nous exerçons moins souvent des pro-fessions indépendantes qu’à Paris ou dans les aggloméra-tions du Sud de la France.

À temps plein, mon salaire net mensuel moyen est de 1 780 euros, ce qui le situe en quatrième position parmi ceux des dix plus grandes agglomérations françaises, hors Paris. Cadre, je gagne en moyenne 2 960 euros par mois, j’en perçois 1 240 si je suis ouvrière.

123

Nantaise, qui es-tu ?

Nantaises au travail

124

˃˃˃ La famille

39 ans

38 ans

39 ans

39 ans 39 ans

39 ans

39 ans

38 ans 40 ans 41 ans

Lille

Toulouse

Bordeaux

Nantes

Lyon

Strasbourg

Marseille

Toulon

Nice

Agglomérations

Paris

Rouen

40 ans

62 %

61 %

61 %

46 % 58 %

58 %

57 %

55% 54 % 57 %

Lille

Toulouse

Bordeaux

Nantes

Lyon

Strasbourg

Marseille

Toulon

Nice

Agglomérations

Paris

Rouen

57 %

10 premières agglomérations

0%

5%

10%

15%

20%

25%

Lyonnaise

Marseilla

ise

Strasbourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Rouennaise

Toulonnaise

Paris : 10 %

10 premières agglomérations

0%

5%

10%

15%

20%

25%

Lyonnaise

Marseilla

ise

Strasb

ourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Rouennaise

Toulonnaise

Paris : 31 %

Lecture : 10 % des Nantaises qui travaillent sont mères d'une famille monoparentale. Source Insee-Auran.

Lecture : 58 % des Bordelaises qui travaillent vivent en couple (avec ou sans enfants). Source Insee-Auran.

Âge moyen des femmes activesPart des femmes actives qui vivent en couple (avec ou sans enfants)

Part des femmes actives mères d’une famille monoparentale

Part des femmes actives vivant seules

Nantaise, qui es-tu ?

125

˃˃˃ La formation

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %Brevet des collèges ou sans diplôme

Lyonnais

e

Marseilla

ise

Strasb

ourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Toulonnaise

Paris : 34 %

Lyonnaise

Marseilla

ise

Strasb

ourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Toulonnaise

Paris : 35 %

Lyonnais

e

Marseilla

ise

Strasb

ourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Toulonnaise

Paris : 14 %

Lyonnais

e

Marseilla

ise

Strasb

ourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Toulonnaise

Paris : 17 %

CAP ou BEP

Baccalauréat ou brevet professionnel Diplôme de l’enseignement supérieur

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

Rouennaise

Rouennaise

Rouennaise

Rouennaise

Lecture : 22 % des femmes de l'agglomération nantaise qui travaillent ont comme diplôme le plus élevé un CAP ou un BEP. Source Insee-Auran.

Niveau d’études le plus élevé des femmes actives aujourd’hui10 premières agglomérations

Nantaises au travail

126

Nantaises au travail

126

˃˃˃ L’activité professionnelle

92 %

92 %

92 %

92 % 92 %

93 %

89 %

91% 94 % 93 %

Lille

Toulouse

Bordeaux

Nantes

Lyon

Strasbourg

Marseille

Toulon

Nice

Agglomérations

Paris

Rouen

94 %

16 %

15 %

13 %

24 % 17 %

16 %

18 %

21% 15 % 13 %

Lille

Toulouse

Bordeaux

Nantes

Lyon

Strasbourg

Marseille

Toulon

Nice

Agglomérations

Paris

Rouen

10 %

44 %

44 %

47 %

39 % 43 %

46 %

42 %

40 % 46 % 49 %

Lille

Toulouse

Bordeaux

Nantes

Lyon

Strasbourg

Marseille

Toulon

Nice

Agglomérations

Paris

Rouen

52 %

Lecture : 16 % des Bordelaises sont cadres. Source Insee-Auran.

Part des femmes actives dans le secteur tertiaire

Part des femmes cadres Part des femmes employées

Nantaise, qui es-tu ?

127127

˃˃˃ Les conditions de travail

83 %

84 %

82 %

88 % 83 %

83 %

83 %

82 % 84 % 86 %

Lille

Toulouse

Bordeaux

Nantes

Lyon

Strasbourg

Marseille

Toulon

Nice

Agglomérations

Paris

Rouen

84 %

6,7 %

5,5 %

6,8 %

8,4 % 6,2 %

7,2 %

6,3 %

7,7 % 8,2 % 9,7 %

Lille

Toulouse

Bordeaux

Nantes

Lyon

Strasbourg

Marseille

Toulon

Nice

Agglomérations

Paris

Rouen

8,9 %

Lecture : 34 % des Nantaises travaillent à temps partiel. Source Insee-Auran.

0 %

5 %

10 %

15 %

20 %

25 %

30 %

35 %

40 %

Agglomération :

Lyonnaise

Marseilla

ise

Strasb

ourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Toulonnaise

Paris : 21 %

Rouennaise

Part des femmes en CDI ou titulaires de la fonction publique

Part des femmes non salariées

Part des femmes qui travaillent à temps partiel

128

˃˃˃ Les salaires

1 780 €

1 740 €

1 720 €

2 590 € 1 740 €

1 740 €

1 840 €

1 810 € 1 780 €

1 650 €

1 760 €

Lille

Toulouse

Bordeaux

Nantes

Lyon

Strasbourg

Marseille

Toulon

Nice

Agglomérations

Paris

Rouen

* équivalent temps plein

Cadres

Lyonnais

e

Marseilla

ise

Strasb

ourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Toulonnaise

RouennaiseAgglomération :

Paris : 3 860 €

Lyonnais

e

Marseilla

ise

Strasb

ourgeoise

Nantaise

Toulousaine

Niçoise

Lilloise

Bordelaise

Toulonnaise

Rouennaise

Paris : 1 350 €

Ouvrières

* équivalent temps plein

1 000 €

1 400 €

1 800 €

2 600 €

3 000 €

3 400 €

2 200 €

1 000 €

1 400 €

1 800 €

2 600 €

3 000 €

3 400 €

2 200 €

Lecture : la Toulonnaise cadre a un salaire net moyen de 3 040 euros par mois. Source Insee-Auran.

Nantaises au travail

Lecture : la Lyonnaise a un salaire net moyen (équivalent temps plein) de 1 840 euros par mois. Source Insee-DADS 2008-Auran.

Salaire net mensuel moyen* des femmes en 2008

Salaire net mensuel moyen* des femmes :

Chronologie

1804 : l’autorisation du mari est nécessaire pour exercer une profession.

1826 : création, à Paris, de la première salle d’asile.

1861 : Julie-Victoire Daubié est la première femme bachelière.

1862 : Élisa Lemonnier fonde la Société pour l’enseignement professionnel des femmes.

1862 : à Nantes, ouverture de l’école primaire supérieure de jeunes filles.

1869 : à Nantes, Ange Guépin, Floresca Guépin et Prosper Vial créent un atelier-école pour jeunes filles.

1875 : Madeleine Brès, première femme française docteur en médecine.

1877 : premières « dames du télégraphe ».

1880 : lois Camille Sée – création des lycées de jeunes filles.

1881 : les écoles maternelles remplacent les salles d’asile.

1882 : à Nantes, ouverture du lycée de jeunes filles, deuxième en France (futur lycée Guist’hau).

1892 : interdiction du travail de nuit pour les femmes. La Poste recrute ses premières guichetières.

1896 : à Nantes, ouverture de l’école pratique de commerce et d’industrie pour jeunes filles (future école Vial).

1899 : création du syndicat des sténodactylos.

1900 : Jeanne Chauvin, première femme avocate.

1907 : les femmes disposent librement de leurs revenus. Elles participent aux élections des prud’hommes.

1910 : les enseignantes ont droit à un congé maternité.

1913 : le congé maternité est étendu aux ouvrières.

1919 : le salaire des institutrices est aligné sur celui des instituteurs.

1922 : le diplôme d’infirmière est créé.

1924 : les filles et les garçons bénéficient du même enseignement secondaire.

1946 : affirmation du droit à l’égalité des salaires.

1965 : les femmes peuvent exercer un métier sans l’accord de leur mari.

1972 : l’École polytechnique est ouverte aux filles.

1981 : Yvette Chassagne, première préfète.

2006 : charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale.

2011 : décret relatif à la mise en œuvre des obligations des entreprises pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

130

Bibliographie

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Alternatives économiques, « Le temps des femmes », Hors-série poche n°51, septembre 2011.

Baudelot Christian et Establet Roger, Allez les filles !, Paris, Seuil, 1992.

Coenen-HutHer Josette, L’égalité professionnelle entre hommes et femmes : une gageure, Paris, L’Harmattan, 2010.

Corbé isabelle et Garçon Patrick, vies quotidiennes à l’hôpital pour enfants de Nantes, Nantes, Droit de regard, 2002.

F comme Femmes à Nantes. Femmes de Nantes, guide édité par la Mairie de Nantes en 2003.

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Achevé d’imprimer sur les presses de l’imprimerie Le Govic, Treillières (Loire-Atlantique), en décembre 2011

sur les papiersSAVILE ROW PLAIN camel

OIKOS (fsc)et

DiscoverMe Neblina

composé en Baskerville Old, Baskerville, et Calibri

© Château des ducs de Bretagne-Musée d’histoire de NantesISBN 978-2-906519-28-2 (ouvrage non destiné à la vente)

Illustrations >>>

p. 1: Ouvrière de l’usine LU au sertissage d’une tin box, début du xxe siècle, archives départementales de Loire-Atlantique

p. 11: Cours de dactylographie à l’école Saint-Félix, seconde moitié du xxe siècle, Congrégation des Sœurs de l’instruction chrétienne, Saint-Gildas-des-Bois

p. 12-13 : Ouvrières de la BN sur une chaîne d’emballage de biscuits caséinés, années 1940, musée d’histoire de Nantes

p.16-17 : Patrick Garçon, Les p’tites mains, Nantes Métropolep. 19 : Cours de confection à l’école Vial à Nantes, 1920-1930, archives municipales de Nantes

p. 21 : Magasinière, Alain Guillard, 2010

Pour les autres illustrations, la légende et la localisation sont indiquées au plus près de l’image.