Diplômes et emploi: une relation gagnant/gagnant? (Résultats d'enquête)
Musique et marque : le duo gagnant de la communication?
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Transcript of Musique et marque : le duo gagnant de la communication?
Université Pierre Mendès France IAE Grenoble site de Valence Master par alternance 2010-2011
Musique et marque : Le duo gagnant de la communication ?
DUSSERT Charlotte
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Le mémoire
Pour clore cette année d’alternance chez A-Music, j’ai choisi de développer un mémoire intitulé : « Musique
et marque, le duo gagnant de la communication ? ». L’objectif de ce dernier est de proposer une étude non
exhaustive de l’utilisation de la musique par les marques actuellement, afin de mieux comprendre en quoi
cet élément est influent pour la communication.
Le mémoire a aussi pour objectif d’offrir à l’équipe commerciale une meilleure connaissance de ce que
représente la musique pour les agences de communication et dans quel contexte cette dernière est utilisée.
Par ailleurs, j’ai toujours été personnellement intéressée par la relation entre musique et publicité / marque.
Ce mémoire est donc l’occasion d’enrichir mes connaissances sur ce sujet particulier et d’y porter un œil
d’autant plus attentif.
Le document suivant pourra avoir deux portées. Pour l’entreprise A-Music, c’est un outil pédagogique qui va
constituer une base de réflexion quant aux prochaines actions commerciales à mettre en place. Pour
l’étudiante que je suis, c’est un mémoire mettant en avant mes connaissances sur un sujet particulier que je
souhaite, à l’avenir, mettre à profit pour mes prochains employeurs.
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Musique et marque : Le duo gagnant de la communication ?
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Sommaire
Musique et marque : le duo gagnant de la communication ?
Glossaire 10
Introduction 12
I. L’élément musical en communication 14
1.1 Un outil riche et complexe 14
1.2 Le rôle du stimulus musical en publicité 17
1.3 Les conditions d’une bonne synchronisation 24
II. La musique en tant qu’outil marketing 27
2.1 L’élément musical comme moyen de segmentation 27
2.2 L’influence de la musique dans la construction de l’image de marque 29
2.3 L’importance de l’identité musicale à l’aube du marketing expérientiel 32
III. L’utilisation de la musique au-delà de la synchronisation publicitaire 35
3.1 Les marques soutiennent la création musicale 35
3.2 L’élément musical renforce le profil des marques sur Internet 38
3.3 Les enjeux de la profession dans les années à venir 41
Conclusion 44
Annexes 46
Annexe 1 Bibliographie 47
5
Glossaire
Tout d’abord, il est important de redéfinir certains termes qui apparaîtront dans les pages suivantes.
- Musique d’illustration : La musique d’illustration est celle que l’on retrouve pour, comme son nom l’indique, illustrer une image
ou un contenu audiovisuel. La musique d’illustration peut être libre de droit ou soumise à déclaration à la
SACEM (société des auteurs compositeurs de musique- France).
- Majors/ éditeur de musique :
Les éditeurs de musique, également appelés majors, sont des sociétés visant à promouvoir et
commercialiser des œuvres musicales. Pour la plupart, elles soutiennent la carrière d’artistes qui ont
signé un contrat avec eux.
Ex : Universal Music Publishing, EMI, Sony…
- Synchronisation publicitaire :
La synchronisation publicitaire est le fait d’ajouter à une image publicitaire une bande-son, originale ou
de catalogue. La synchronisation publicitaire est incontournable pour les campagnes de communication
télévisées, mais peut également intervenir sur Internet.
- NTIC :
Nouvelles technologies de l’information et de la communication. Le terme NTIC est apparu au début des
années 2000. Le terme englobe l’ensemble des technologies informatiques (Internet, mobile etc…) qui
ont contribué à un véritable changement de la société économique, sociale et culturelle.
- Co-branding :
Le co-branding consiste à associer deux (ou plusieurs) marques en vue de promouvoir et de
commercialiser un produit spécialement conçu. Ce procédé a pour objectif de valoriser les marques et
de faciliter la commercialisation du produit en question.
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- Neuro marketing :
Le neuro marketing est une méthode utilisant des outils d’études neuropsychologiques tels que l’IRM
pour évaluer le traitement cognitif d’un individu face à une campagne de communication.
- Implication en marketing :
Le concept d’implication en marketing est un facteur clé pour évaluer les réponses des consommateurs
face à une marque ou un produit. L’implication désigne le niveau d’intérêt que l’individu porte sur le
produit ou le service en question. L’implication joue un rôle déterminant dans le comportement du
consommateur, que ce soit pour ses décisions d’achat ou ses réactions face à une action de
communication.
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Introduction
Depuis les années 50, les publicitaires n’ont eu de cesse de lorgner vers le secteur musical pour enrichir,
illustrer ou simplement accompagner leurs créations. Pendant plus de 50 ans, le couple musique et publicité
s’est imposé dans le champ de la communication. Certains diront par hasard, d’autres par obligation, et
d’autres encore jugeront cette association comme une simple évidence. Nombreux sont les scientifiques ou
chercheurs qui se sont un jour intéressés de plus près à ce fameux tandem. Les études se sont multipliées
particulièrement dans les années 1980, période à laquelle l’engouement pour la musique et sa
démocratisation ont connu un certain essor. Cependant, les résultats de ces recherches s’accordent à dire
que la musique reste une variable complexe à étudier et les conclusions se sont, si non complémentées,
parfois opposées. Le sujet reste donc encore aujourd’hui ouvert à de nouvelles considérations.
La place de la musique en publicité demeure pourtant indéniable dans notre société actuelle. Si ce n’est
pour un positionnement extrêmement puriste, il est difficilement concevable d’imaginer une campagne
actuelle sans accompagnement musical. Les années 2000 et la naissance des NTIC a même amené le duo
musique et publicité à tendre vers une relation encore plus large, que l’on pourrait désormais qualifier
musique et marque. En effet, depuis une dizaine d’années, les marques ont tendance à s’engager plus
fortement envers le secteur musical, comme elles avaient pu le faire auparavant avec les célébrités
sportives. La musique est un domaine de plus en plus sollicité par les marques aujourd’hui. Émane alors la
question du « pourquoi ? ».
Dans une société d’ultra-consommation, la population a inexorablement appris au fil des années à éviter,
voir échapper, à l’afflux de messages publicitaires qui lui sont envoyés. Avec plus de 200 messages
publicitaires diffusés quotidiennement dans les grandes villes, les consommateurs se sont construit ce que
certains appellent une « carapace » anti-publicité. Pour les marques, cela signifie que la plupart des codes
publicitaires initiés dans les années 50 sont à revoir, sinon à jeter. En cela, la musique amène une réponse
alternative à ce manque d’attention délibérée des consommateurs et peut offrir à la marque un contexte
privilégié dans lequel elle pourra communiquer plus efficacement.
En conséquence, les agences de communication dédiées à la synchronisation publicitaire ou stratégie
musicale se sont multipliées depuis quelques années. Nouvelles venues sur le marché concurrentiel de la
publicité, ces dernières proposent à leurs clients un service spécialisé, au plus proche des tendances
actuelles. Les agences de marketing musical partent du principe que tout consommateur est sensible à la
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musique et facilement identifiable selon sa catégorie sociale, son âge, son groupe d’appartenance etc. En
effet, de récentes études (Millward Brown, brandamp study - 2007) ont démontré que, de tous les médias, la
musique est celui auquel les consommateurs sont les moins enclins à renoncer. Intégrée dans nos sociétés
depuis plusieurs siècles, la musique constitue un vecteur de communication fort pour les marques qui sont
prêtes à s’engager sur cette voie. Mais alors quelles sont les actions envisageables, les retombées possibles
et l’impact sur l’image pour une marque qui décide de développer une stratégie de communication faisant la
part belle à la musique ?
Pour répondre à cette question, nous reviendrons dans un premier temps sur les définitions et les théories
qui se sont intéressé à la paire musique et publicité, pour poser les bases de la prochaine réflexion. Ensuite,
nous aborderons l’influence de la musique en communication, notamment dans la construction de l’image de
marque. Enfin, nous étudierons les dernières actions menées par les marques vis-à-vis de la musique, et
quel impact cela peut signifier pour les différents secteurs concernés dans les années à venir.
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I Musique et communication, un état des lieux L’utilisation de la musique dans la communication aujourd’hui :
22%
18%15%
14%
13%11% 7%
Synchronisation publicitaire (TV)
Musique sur site internet
Ambiance musicale (magasins)
Sponsoring d'artistes
Evenementiel
Musique dans spot radio
Identité sonore (logo musical)
Source :Étude Sounds Like Branding, 2010
1.1 Un outil riche et complexe Lorsqu’il s’agit d’utiliser de la musique pour ses campagnes publicitaires, plusieurs options s’offrent à
l’agence ou à l’entreprise communicante. Le schéma ci-dessus nous montre comment les marques utilisent
la musique de nos jours et sur quels supports. Dans cette première partie, nous nous intéressons à la
musique produite ou utilisée par les marques essentiellement, ainsi nous ne discuterons que plus tard sur
les aspects d’évènementiel ou de sponsoring. Néanmoins, il nous semble intéressant de revenir ici sur les
opportunités musicales offertes aux marques pour agrémenter leurs contenus. La musique peut en effet être
utilisée de différentes manières via les méthodes de communication, selon les objectifs fixés par
l’annonceur.
En premier lieu, il convient de définir qu’est-ce que la musique et de quoi cette dernière est composée. Voici
une première liste non exhaustive des éléments à considérer pour mieux étudier et comprendre l’œuvre
musicale :
La mélodie
Premier élément clé de la musique, la mélodie comprend un ensemble de sons réunis dans une
composition. Une mélodie se construit autour d’un tempo, de hauteurs phoniques, selon les différents
instruments de musique qu’elle sollicite. C’est cet ensemble qui va donner à l’œuvre une certaine sensibilité
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et la classifier dans un genre musical particulier. La mélodie est le premier élément à traduire des émotions à
son public, en étant mélancolique, dynamique, joyeuse, nostalgique etc…
Les paroles
Les paroles d’une œuvre musicale correspondent au texte littéraire qui vient compléter à la mélodie. Les
paroles viennent ajouter une nouvelle lecture à l’œuvre, en explicitant ou renforçant les sentiments voulus
par l’auteur-compositeur. Cet élément n’est toutefois pas obligatoire.
Dans le champ de la communication, les paroles sont parfois assimilées aux travaux de conception-
rédaction. Ces derniers visent à rendre un slogan ou une accroche plus mémorisable grâce à l’utilisation
d’une très courte mélodie. Carglass et le dernier logo sonore LCL sont un bon exemple de cette particularité.
Lorsqu’il s’agit d’œuvres originales, les publicitaires portent une attention particulière à cette variable afin de
ne pas provoquer un contre-sens avec l’image et le message à transmettre, spécifiquement si la chanson
retenue est dans une langue étrangère.
Les éléments non verbaux
Les éléments non verbaux d’une œuvre musicale comprennent les caractéristiques propres à l’interprétation
de cette même œuvre. Parmi ces caractéristiques sont souvent citées le grain de la voix, l’élocution ou
encore l’intonation. Ces éléments peuvent venir renforcer le message ou la sensibilité de l’œuvre en y
apportant un axe de lecture singulier.
L’historique de l’œuvre
Il apparaît enfin important de considérer le contexte de création d’une œuvre musicale pour mieux juger de
sa portée. L’œuvre musicale, comme toute création artistique est élaborée dans un contexte particulier,
incluant des variables à la fois sociale et humaine. En effet, l’historique de l’œuvre réunit l’époque de
création et la personnalité de l’auteur-compositeur lui-même. Ces deux données constituent une base
essentielle pour la compréhension de l’œuvre dans son ensemble.
Les caractéristiques musicologiques citées ci-dessus vont aider l’agence de communication dans son
orientation et sa sélection finale. La musique en communication peut être approchée selon quatre approches
différentes, selon les enjeux et objectifs de l’annonceur. Ce qui est généralement appelée « identité
musicale » d’une marque ou d’un produit correspond à un univers, un environnement développé par la
marque pour transmettre et renforcer son image. L’identité musicale peut alors être considérée comme une
empreinte sonore qui va appuyer le message délivré par l’annonceur. Pour cela, l’annonceur peut choisir de
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se construire une identité plus ou moins aboutie, en travaillant sur les composantes suivantes : le jingle, la
chanson commerciale, la chanson originale ou encore l’ambiance musicale.
Le jingle Le jingle est un élément musical très court, basé sur une mélodie accrocheuse et facile à retenir (dans le
meilleur des cas.). Également appelé logo sonore, il sert à interpeller le consommateur ou annoncer
l’apparition de la marque. En effet, en publicité TV, le jingle précède le plus souvent le logo visuel situé en fin
de spot. Le jingle a pour avantage de pouvoir se substituer au logo graphique dans les supports qui
n’accueillent pas de visuel, tels que la radio. En cette façon, la marque peut renforcer sa notoriété quel que
soit le support investi. Le logo sonore est aujourd’hui répandu et certaines marques se sont montrées
particulièrement efficaces dans la construction de leur jingle. Les exemples les plus flagrants se nomment
Dim, Intel Inside, ou encore RTL. Leurs logos sonores sont désormais connus de tous et ont aidé les
marques à renforcer leurs notoriétés.
L’ambiance musicale
L’ambiance musicale se retrouve en accompagnement d’autres éléments visuels associés à la marque sur le
long terme. Cette dernière va s’enrichir au fil du temps de chansons commerciales ou originales, mais elle
suivra toujours des critères et contraintes décidées par la marque auparavant. L’ambiance musicale va
construire et transmettre dans la durée un univers, une atmosphère spécialement orientée par l’annonceur.
On peut parler ici de sensibilité musicale, qui va aider à personnaliser la marque en lui attribuant des goûts
et un environnement musical particulier. La démarche tend à créer et renforcer un lien affectif entre la
marque et ses consommateurs potentiels.
La chanson commerciale
La chanson commerciale est choisie par l’annonceur parmi les catalogues commerciaux des majors. La
marque peut alors illustrer son contenu visuel de bande-son plus ou moins connue, ayant parfois déjà
remporté les faveurs du public (groupe ou personnalité célèbres). Les marques espèrent ainsi opérer un
transfert d’émotions positives entre la chanson utilisée et le produit présenté. Nous verrons dans la seconde
partie que cette option-là peut aussi contribuer au renforcement de l’image de la marque qui l’entreprend.
La chanson originale
En dernier lieu, l’annonceur peut s’orienter vers une composition originale. Celle-ci est créée à partir d’un
brief de communication explicitant les valeurs et les ambitions de la marque vis-à-vis du projet. L’œuvre
devra impérativement se rapprocher de ce brief et une fois créée, elle sera alors entièrement cédée à
l’entreprise.
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Ces définitions nous offrent une première compréhension des associations possibles entre musique et
marque. Certes, l’association entre les deux entités n’est pas récente, néanmoins cette dernière a
considérablement évolué sur les dix dernières années. Les annonceurs semblent se rapprocher du secteur
musical avec plus d’attention. Cependant, la sélection musicale apparaît bien souvent en phase finale du
brief de création. Le constat est évident quand il s’agit de synchronisation publicitaire. Les marques ont
encore tendance à favoriser le sens visuel plutôt que l’écoute. Lorsqu’il est question de publicité télévisée, la
musique est uniquement envisagée en tant que complément et choisie au cas par cas, ce qui n’inclut pas
d’identité musicale durable pour la marque. C’est sûrement la raison pour laquelle peu de marques ont
engagé de véritables stratégies musicales à ce jour. La dimension musicale en communication reste souvent
superflue et mériterait d’être optimisée. Dans ce sens, sept marques sur 10 (étude Heartbeats International-
2010) déclarent que la musique deviendra plus importante dans leur stratégie de communication à l’avenir.
Actuellement, la plupart des marques ne réalisent pas pleinement ce que la musique a à leur offrir. Selon
l’agence Sonic Branding, la création d’une identité musicale de marque peut :
- Être un outil stratégique intégré au marketing global de l’entreprise
- Assurer une cohérence entre l’utilisation musicale faite par la marque dans ses contenus
communicationnels
- Optimiser la communication de la marque envers ses interlocuteurs, à l’externe comme à l’interne en
proposant un message attractif
Comme toute action marketing, la musique doit être étudiée et considérée selon les objectifs et les cibles
des marques. Bien que plus complexe à approcher, la musique peut se révéler être un excellent levier en
termes de notoriété et d’image de marque lorsque celle-ci est correctement utilisée.
1.2 Le rôle du stimulus musical en publicité
Le rôle de la musique en publicité a attiré de nombreux chercheurs et fait naître de nombreuses études. Les
avancées récentes en neuro marketing ont particulièrement favorisé des nouvelles recherches à ce sujet. En
effet, ces sciences permettent aux chercheurs de mieux déterminer l’impact réel de la musique lorsque le
consommateur est face à la publicité. Le public reçoit une centaines de messages publicitaires par jour,
comment fait-il le tri ? Quelles sont les attributs publicitaires qui vont attirer son attention ? Quel processus
cognitif va-t-il engager pour mieux traiter l’information qui lui est donnée ? La musique est certes une
variable largement utilisée en publicité, de par sa capacité à attirer l’attention ou susciter des émotions.
Néanmoins, il est souvent difficile d’identifier un schéma universel quant à l’influence qu’aura cette dernière
sur le récepteur.
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Pour traiter une information, l’individu sollicite plusieurs canaux sensoriels et l’ouïe est le second sens le plus
utilisé après la vue. La musique peut ainsi jouer un rôle prédominant pour attirer l’attention du
consommateur. Le système nerveux d’une personne va être stimulé par la musique. En toute logique, plus
cette dernière sera jouée à un volume fort et présentera des caractéristiques innovantes, plus l’individu sera
amené à traiter ce stimulus de manière alerte. A l’opposé, une musique jouée à un volume sonore plus bas
aura tendance à apaiser l’individu : le stimulus étant moins agressif, le travail cognitif sera plus agréable pour
l’individu. En cela, la musique est souvent utilisée en communication pour élaborer un univers particulier en
construisant un climat émotionnel propre à la marque. Le rôle de la musique en publicité s’articule autour de
plusieurs concepts et approches.
Tout d’abord, la musique en communication est envisageable selon les différents objectifs fixés par
l’annonceur. De nombreux auteurs, tel que Jakobson, Petty, Cacioppo ou encore Julien se sont intéressés
au rôle et à la place de la musique dans une campagne publicitaire. De ces études est née une
catégorisation de la musique par fonctions, exposées ci-dessous.
Fonction affective
La musique vient exercer une fonction affective lorsqu’elle met en scène un artiste ou chanson déjà connue.
L’annonceur choisit cette option dans le but d’opérer un transfert affectif entre l’artiste et le produit. L’idée
générale de cette opération est qu’une musique déjà appréciée de la cible ou du grand public va favoriser
une attitude positive vis-à-vis du produit exposé. Cette fonction est toutefois à manipuler avec précaution. En
effet, certaines études ont évoqué le risque de son utilisation. Parce que le consommateur lie un lien affectif
avec une certaine musique, il peut juger comme négatif son exploitation pour promouvoir un produit ou une
marque. La fonction affective est peut-être en cela la variable la plus délicate à manipuler car ni l’annonceur
ni l’agence de communication peut au préalable contrôlées les réactions affectives des consommateurs
concernant la musique.
Fonction démarcative
La fonction démarcative a pour simple objectif de distinguer la publicité parmi les autres. La musique est
alors choisie pour sa capacité à attirer l’attention du consommateur. Cette dernière n’a pas été étudiée en
marketing car la musique, bien qu’éclectique, est aujourd’hui encore envisagée selon des codes propres au
produit ou domaine qu’elle va illustrer. Il est en effet peu probable d’imaginer une campagne pour une
grande marque de cosmétiques ou de parfums sélectionner une bande-son à partir d’un catalogue d’heavy
metal par exemple.
14
Fonction poïétique
L’illustration musicale est généralement envisagée pour soutenir une certaine idée du produit promu. En
cela, la fonction poïétique, également appelée fonction symbolique, est considérée comme l’une des
applications les plus courantes de la musique dans le domaine de la publicité. La musique est dans ce cas-là
sélectionnée et choisie selon des critères d’évocation. Elle aura pour objectif de transmettre des valeurs
spécifiques, visant à influencer les croyances et les attitudes des consommateurs vis-à-vis du produit et de
la marque.
Fonction implicative
La fonction implicative de la musique sera actionnée lorsque celle-ci sera utilisée pour renforcer l’impact du
message publicitaire présenté. Cette dernière implique que le message et sa musique puisse être répété et
attirer l’attention du consommateur sur le long terme. Cette fonction peut s’utiliser de deux manières : soit
elle fait appel à un travail de conception-rédaction (Juvamine et son fameux slogan dans les années 1990),
soit la campagne publicitaire va s’appuyer sur un thème très connu pour mieux attirer l’attention (AGF qui a
utilisé l’œuvre du Boléro de Ravel).
Fonction conative
La musique est un excellent moyen de communiquer envers une population ciblée. En effet, la musique peut
être utilisée pour cibler un certain type de consommateur, identifié au préalable par sa catégorie sociale, son
origine ethnique ou encore son groupe d’appartenance. Utilisée pour sa fonction conative, la musique prend
alors compte des populations ciblées par l’annonceur pour mieux les toucher. Certaines publicités mettent
ainsi en avant des caractéristiques musicales spécifiques pour s’adresser à un groupe déterminé.
Fonction d’injonction
La fonction d’injonction musicale s’appuie principalement sur un logo sonore. Ce dernier entame ou conclut
la publicité, tel un avertissement ou un rappel de la marque en question. Récemment, le logo musical de
Nespresso est utilisé pour cette fonction, puisqu’utilisé dans les premières secondes du spot publicitaire, il
annonce la présence de la marque.
Fonction décorative
La fonction décorative de la musique va être activée pour renforcer le message. La musique sera alors non
pas utilisée comme simple illustration, mais viendra directement jouer un rôle dans la compréhension du
message. L’origine géographique d’un produit peut être soutenue par la musique. Pour une campagne
portant sur des pâtes par exemple, la publicité s’appuiera sur une musique typée italienne (mandoline), ou
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pour promouvoir un whiskey fera appel à un son de cornemuse. La fonction décorative peut s’avérer efficace
dans certains cas, néanmoins elle reste à manipuler avec précaution pour éviter toute sorte de cliché trop
évident qui pourrait contrarier le public.
Fonction ludique
La musique en publicité peut également être utilisée à des fins ludiques. Celle-ci a l’avantage de pouvoir
transmettre des émotions et peut être composée dans le but de faire sourire. L’héritage du cinéma muet est
visible ici puisque la musique peut renforcer le caractère humoristique d’une mise en scène. Pour cela, les
compositeurs ou publicistes vont pouvoir jouer sur différents niveaux que sont l’instrumentation (effet big
band avec trompette pour une chute), l’arrangement (détourner une composition initiale), la répétition d’un
repère sonore, ou encore l’écriture en proposant une chanson comique.
Fonction mnémonique ou de reconnaissance
La fonction mnémonique a pour objectif de faire intervenir la musique comme une signature qui va faciliter la
reconnaissance de la marque. En pratique, cette fonction est exploitée lorsque la marque décide de
s’orienter vers une chanson originale qui va être reprise pour plusieurs campagnes. De cette manière,
l’annonceur souhaite associer durablement son produit avec une identité musicale forte qui va renforcer sa
notoriété et sa mémorisation.
Les différentes fonctions de la musique peuvent être activées lors d’une campagne publicitaire selon les
volontés de l’annonceur. Il n’est pas rare que la musique agisse sur deux niveaux, en exerçant à la fois sa
fonction démarcative et d’injonction par exemple. Cette courte catégorisation rappelle que l’élément musical
a réellement un rôle à jouer dans la publicité, particulièrement télévisée. Néanmoins, le caractère affectif qui
lie une musique à un consommateur reste difficile à prévoir. Si l’affection qu’un consommateur a pour une
musique peut se transférer sur un produit qui l’utilise pour sa promotion (fonction affective), il n’est pas rare
de voir le même consommateur réagir négativement face à l’exploitation de sa musique préférée dans un but
commercial. Les fonctions de la musique sont donc à prendre en considération, néanmoins l’efficacité
absolue de cette utilisation ne peut être entièrement vérifiée à priori.
Par ailleurs, l’efficacité de la musique en publicité a longuement été étudiée par plusieurs chercheurs. Bien
qu’étant un élément le plus souvent affectif, les études ont cherché à découvrir ce qui rendait cette variable
efficace, notamment en termes de persuasion. Pour cela, plusieurs modèles interviennent pour justifier la
place de la musique en publicité.
16
Selon le modèle AIDA (1898, Elmo Lewis), l’effet publicitaire s’élabore sur quatre étapes :
- Attirer l’ Attention
- Susciter l’Intérêt
- Créer du Désir
- Provoquer l’Action
A partir de ce modèle, nous pouvons considérer que la musique intervient favorablement pour la première
étape. Comme nous l’avons vu précédemment, la musique a cette capacité de pouvoir rendre une publicité
plus attractive, ou du moins plus remarquable. Cependant, pour une efficacité optimale, il serait
envisageable de retrouver cette même musique lors des quatre autres étapes du modèle. En effet, la
musique agit comme un premier stimulus dans la première étape, mais son rôle peut également être engagé
lors des étapes qui suivent. Le modèle AIDA ne considère la partie affective du récepteur face à la publicité
que dans sa troisième étape, liée au désir. Pour autant, en ce qui concerne la musique, nous avons vu,
notamment grâce aux fonctions précédemment citées, l’importance de cette variable et le rôle qu’elle peut
tenir lorsqu’il s’agit d’influencer l’attitude des consommateurs en s’appuyant sur un stimulus affectif. Il
apparait ainsi que le modèle AIDA, bien que reconnu à sa base, semble trop restrictif pour juger de
l’efficacité de l’élément musical en publicité.
Les études suivantes se sont plus souvent orientées sur la place de la musique en dehors du processus
créatif. Edelle (1988), suggère que « quelle que soit la manière dont la musique influence l’efficacité
publicitaire, certains facteurs sont déterminants pour la compréhension du processus de persuasion. » Ce
constat a pour conséquence de recentrer les études marketing sur le sujet vers des facteurs externes, liés à
l’individu et en particulier à son degré d’implication préalable vis-à-vis du produit. L’idée a depuis fait son
chemin.
En termes d’implication, le modèle ELM (Elaboration Likelihood Model), élaboré en 1986 par Petty Cacioppo
et Schuman fait figure de référence. Selon ce dernier, la musique aurait un impact moindre lorsque le
récepteur emprunte un chemin de cognition plus élaboré, appelé « route centrale ». Le modèle ELM suggère
que pour un individu à priori impliqué, la musique va interagir en temps qu’élément perturbateur puisqu’elle
va déconcentrer ce dernier vis-à-vis de l’information principale. Selon ces auteurs, l’efficacité publicitaire se
mesure à partir du travail cognitif effectué par l’individu, également appelé route de la persuasion. Le modèle
ELM présente deux issues : la route centrale et la route périphérique. Pour la première, le travail cognitif est
plus important puisque les individus sont impliqués et ont alors tendance à rechercher des informations
concrètes et vérifiables afin de conforter leurs prochains choix ou actes d’achat. En ce sens, les personnes
impliquées focalisent leur attention sur les arguments du message, et non sur sa mise en scène. L’efficacité
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de la musique est dans ce cas remise en doute car elle ne représente pas un apport informationnel
argumenté. A l’inverse, une personne peu impliquée va traiter le message via les éléments qui lui sont
associés. La musique fait partie de ses éléments d’illustration qui vont aider le récepteur à évaluer et traiter
l’information transmise par la publicité.
Le modèle suggère enfin que pour un changement de comportement durable, l’individu doit effectuer un
travail cognitif passant par la route centrale. Les éléments périphériques tels que la musique sont alors
considérés comme valides sur le court terme uniquement. Bien que très réputé dans son domaine, le
modèle ELM a subi de nombreuses critiques, notamment liées à la dichotomie de sa structure. Certains
chercheurs ont remis en cause le fait que l’information ne soit traitée que par une seule route, et qu’ainsi la
18
persuasion ne puisse emprunter qu’un seul chemin. C’est le cas de Chaiken qui en 1987 propose une
alternative avec son modèle HSM (Heuristic systematic model).
Le modèle de Chaiken met en avant la capacité des individus à traiter d’une même information de deux
façons différentes, selon le degré de volonté et la capacité de cognition de ces derniers. Dans ce modèle, le
traitement systèmatique peut être comparé à la route centrale proposée dans le modèle ELM. Ce dernier
prend en effet en compte le contenu du message afin de l’évaluer et enfin l’intégrer. Le traitement
heuristique quant à lui propose aux individus des éléments plus faciles à traiter, en s’appuyant par exemple
sur des systèmes de valeurs partagées (ex : ce qui n’est pas cher n’est pas de bonne qualité). Il s’apparente
en cela à la route périphérique décrite par Petty Cacioppo et Schuman dans le sens qu’il ne requière pas
19
d’effort cognitif considérable de la part du récepteur. Si les deux modèles présentés prouvent des
similitudes, il est néanmoins intéressant de souligner que pour Chaiken, les deux routes de persuasion
peuvent s’entrelacer. Les deux modes de traitement peuvent ainsi se complémenter pour élaborer le
jugement final du récepteur. En ce qui concerne l’élément musical donc, le modèle HSM lui accorde une
place plus importante puisqu’elle peut agir sur les deux traitements, systématiques et heuristiques.
Enfin, Batra et Ray (1985) proposent un autre modèle, celui des chemins alternatifs. Pour ces auteurs,
l’individu peut être influencé différemment par le message selon son niveau de motivation à traiter
l’information qu’on lui apporte. Dans ce modèle, plus l’individu est impliqué, plus il va s’intéresser à la qualité
des arguments diffusés dans la publicité. A contrario, si ce dernier n’est pas motivé, c’est plutôt la mise en
scène et son côté sympathique qui vont être traités. Ici encore, la musique est considérée comme un
élément périphérique qui va aider à attirer l’attention du consommateur. Dans le cadre d’une publicité
transformationnelle par exemple, mettant en avant des arguments faibles et prônant un univers fort plutôt
que des faits, l’élément musical va définitivement tenir un rôle prédominant.
Ces différents modèles s’accordent tous à dire que le rôle de la musique et son efficacité vont être dictés au
préalable par l’implication du consommateur qui recevra le message publicitaire. Le plus souvent, cet
élément agira sur l’attention portée au message mais ne va pas soutenir un effort cognitif important, ni
renforcer sur le long terme les attitudes des consommateurs par rapport à la marque.
1.3Les conditions d’une bonne synchronisation
La difficulté aujourd’hui n’est pas tant de démontrer l’effet de la musique mais plutôt de comprendre
comment cette variable peut être optimisée. En effet, si la musique possède une quelconque efficacité en
publicité, elle ne peut cependant pas être étudiée en tant que seule entité du message. Les études qui ayant
commencé à s’intéresser à la musique au départ ont toutes commise l’erreur de porter un regard restreint à
ce sujet. En effet, seule la variable musicale était étudiée. Dans les années 1990 cependant, les études sur
l’efficacité de la musique en publicité s’élargissent et intègrent un concept fondamental pour la suite : la
congruence musicale. Alpert et Alpert en 1991 sont les premiers à intervenir à son sujet, clamant que quelle
que soit son utilisation, la musique n’échappe pas à des codes et que l’efficacité du message publicitaire doit
être considérée à partir de ses éléments dans leur ensemble. Si l’élément musical renforce le message, elle
ne peut toutefois se substituer à l’information principale. La cohérence entre la teneur du message
publicitaire et l’illustration musicale est essentielle. Kellaris et Cox (1993) suggèrent que la congruence
musicale apparaît lorsque l’illustration sonore, purement instrumentale ou chantée, vient renforcer le
20
message central. Pour cela, la musique doit être envisagée selon les systèmes de représentation culturelle
partagés : en Occident par exemple, on aura tendance à attribuer à une situation triste une musique lente,
en mode mineur, de type classique (enterrement). Dans l’esprit collectif l’utilisation d’une musique de ce
genre ne s’accommoderait pas avec un produit vantant la joie de vivre et la vitalité par exemple. Il est donc
important de considérer à la fois le positionnement de la marque, son type de produit et le profil de son
consommateur avant de s’orienter sur un genre musical en particulier. La congruence musicale est d’autant
plus importante que les études menées en sa faveur (Alpert 1991 - Kellaris 1993 - Stewart & Furse 1986) ont
conclu à une meilleure mémorisation du message lorsque celui-ci est renforcé par une musique en accord
avec son propos. Il faut noter néanmoins que cette notion de congruence musicale peut être rejetée dans le
cadre où la musique serait envisagée dans sa fonction démarcative : dans cette situation, l’annonceur aura
tendance à privilégier une bande-son inattendue pour attirer l’attention du spectateur.
La musique, en tant qu’élément publicitaire, ne peut se détacher du message dans sa globalité. Les
illustrations musicales viennent en effet souligner ou renforcer un climat émotionnel souhaité par la marque.
De ce fait, la synchronisation publicitaire porte bien son nom puisqu’il s’agit bien d’ajouter une musique à
une mise en scène spécifique. Le sens donné à l’association entre les images et la musique, la cohérence
du message dans son ensemble sont des facteurs clés de réussite pour rester ancré dans la mémoire des
consommateurs ciblés.
L’élément musical reste donc à manipuler avec soin dans le domaine publicitaire. Néanmoins, les
nombreuses recherches menées à son sujet ont permis de dégager plusieurs lignes de conduite pour
optimiser l’utilisation de la musique.
La place de la musique dans le message
Dans tous les cas, consommateurs impliqués ou non, la musique va d’abord agir en tant qu’annonce pour
attirer l’attention du récepteur. Cette dernière prend d’autant plus de valeur lorsqu’elle est placée en début
ou en toute fin du message (logo sonore).
La structure de l’élément musical :
Pour les annonceurs, il s’agit là de trouver le bon équilibre. Une musique complexe induit un plus grand
effort cognitif de la part du récepteur et peut alors éloigner celui-ci du message central. Néanmoins, cette
structure là a tendance à retarder la lassitude des consommateurs vis-à-vis de la campagne publicitaire. En
effet, une musique de structure simple est attrayante et facilement mémorisable. Pourtant, elle ne sera
efficace que sur le court terme, les consommateurs se lassant très vite de ce qui leur apparaît répétitif. Pour
exemple, nous pouvons citer le slogan Juvamine dans les années 1990 ou encore l’identité sonore de
21
118 218 reprenant le générique de Véronique et Davina, qui certes ont été mémorisé par le public mais ont
fini par être totalement rejeté par lassitude.
L’équilibre entre les éléments publicitaires :
En publicité comme ailleurs, l’hyper stimulation sensorielle apparaît plus agaçante qu’elle n’est pertinente.
L’illustration musicale doit tenir compte de la densité du message publicitaire et des stimulus joués par les
autres éléments qu’elle accompagne. Une campagne riche en contenu, alliant faits établis, visuel élaboré et
musique complexe ne peut être traitée correctement par le consommateur. L’individu ne peut en effet pas
absorber toujours plus d’informations sensorielles. Au même titre que la congruence musicale, l’équilibre du
message repose sur une bonne harmonie entre les éléments exposés. Ainsi, si un message est fort
visuellement, il convient de l’illustrer avec une musique douce de façon à ne pas haranguer toutes les
capacités cognitives du récepteur (Brooker & Wheatley 1994).
La symbolique musicale
Le stimulus musical agit sur l’individu de manière connotative et évocatrice. A l’inverse d’un stimulus littéraire
qui aura tendance à poser des arguments forts, l’élément musical sera traité à partir d’heuristiques et de
l’émotion ressentie par le récepteur. En quelque sorte, la musique est également soumise à un décodage
par l’individu, en tant que porteuse de sens. Dans ses études en musicologie (1987), Scott note en effet
qu’une musique à tempo rapide accentue l’impression de vitesse et de puissance se dégageant d’une
publicité automobile. De la même manière, une musique classique, élaborée et prestigieuse, sera tout à fait
adaptée pour illustrer un produit de luxe.
En résumé, nous pouvons dire que les différentes études menées en la matière ont amené à valider l’impact
de la musique en publicité. Cette dernière semble avoir un impact en termes de comportement d’achat, de
représentation ou encore sur la mémorisation du message. Le rôle de l’identité musicale reste positif pour
les marques car elle transmet à la fois des valeurs tout en rendant le message plus attractif. Toutefois, de
part le caractère très affectif de la musique, cette variable sera traitée différemment par chacun des
individus. Le contrôle en amont est ainsi difficile, mais en s’attachant à mieux connaître les publics ciblés et
en dégageant des tendances sur des segments identifiés, l’élément musical devient un excellent vecteur de
communication.
22
II La musique en tant qu’outil marketing
Les considérations vis-à-vis de la musique dans les stratégies de communication actuelles
0%68 %
74 %76 %
97 %
La musique peutrenforcer l'image demarque
La musique estactivement utiliséedans les actionsmarketing
La musique va devenirde plus en plusimportante à l'avenir
La musique est un outilimportant pourconstruire une marquecohérente etdifférenciée
Source: Étude Sounds Like Branding, 2010
2.1 L’élément musical comme moyen de segmentation
L’élément musical en communication a pour avantage d’offrir à la marque un outil de segmentation. Le
domaine musical est très éclectique et permet aux marketers de piocher dans des styles ou genres
musicaux qui semblent correspondre aux goûts de leur public. L’impact n’est pas à négliger puisque
l’appréciation de la musique par la cible visée est un élément clé de l’efficacité publicitaire, notamment en
termes de mémorisation. Kron en 1994 constate que plus de 90% des annonces télévisées en France sont
accompagnées de musique. Les spécialistes de la communication l’ont ainsi bien compris, l’élément musical
a un rôle à jouer dans la diffusion du message. Le stimulus musical va intervenir comme un outil de
segmentation intéressant à exploiter dans les campagnes publicitaires. Cette dimension est en tout point liée
aux études concernant le comportement du consommateur. En effet, la musique peut aider la marque à
approcher son public. Selon l’âge, le sexe, ou encore la catégorie sociale, l’expérience musicale des
consommateurs va se construire différemment et renforcer la personnalité de l’individu en question. Les
individus considèrent leurs préférences musicales comme une partie intégrante de leur personnalité. De par
les différents groupes qu’il côtoie ou les influences qui l’entourent, chaque individu va se construire des
codes de références qui vont l’aider à appréhender les messages publicitaires. Plusieurs recherches se sont
ainsi attachées à délivrer des tendances sociologiques vis-à-vis des préférences musicales. Il apparaît par
23
exemple que 70% des cadres moyens et supérieurs se sont construits des collections musicales entre rock,
pop et folk, tandis que chez les ouvriers et les commerçants, ce genre musical n’est représenté qu’à 61 et
45% respectivement. Holbrook et Schindler (1989) ont constaté que les préférences musicales des individus
variaient selon leurs âges, mais également selon leurs évolutions sociales. Cattel et Suanders en 1954
associent les musiques populaires, bien rythmées et au tempo rapide à une personnalité dynamique et
enjouée. De la même façon, ils mettent également en avant le caractère féminin qui s’accorde plus
facilement avec une musique classique, aux notes rondes, jouée à un volume plus bas. D’un point de vue
marketing, ces études vont aider à sélectionner l’illustration musicale en fonction des préférences de la cible
visée. Cependant, il ne faut pas oublier le caractère idiosyncratique de la musique, faisant que chaque
individu va réagir d’une façon unique face à un morceau musical, selon ses goûts certes, mais également
selon ses expériences passées.
La musique en communication est le plus souvent utilisée pour intégrer le schéma d’un conditionnement
classique. En associant un produit avec une œuvre ou un style musical à priori apprécié de la cible, l’objectif
est de créer un transfert d’affection de la musique au produit présenté. Le conditionnement classique, étudié
par Pavlov, entend développer des attitudes particulières en associant une situation ou un produit avec un
stimulus particulier. Dans le cadre de la communication et la musique, cela revient à dire qu’associer une
musique appréciée du public, envers laquelle donc ce dernier a développé une attitude positive, aiderait in
fine à créer une attitude positive envers le produit présenté. Pour être opérationnel, ce conditionnement
classique nécessite évidemment une connaissance la plus précise possible des publics visés par le produit
ou la marque.
C’est en associant une musique particulière à un produit que le consommateur va être amené à reconnaître,
apprécier et enfin s’identifier au public de la marque qui annonce. En effet, si la musique diffusée avec le
spot publicitaire correspond à ses préférences musicales, l’individu va plus facilement reconnaître que le
produit présenté lui est adressé. Ce processus est appelé congruence personnelle. L’importance de la
congruence personnelle a été mise en avant par plusieurs études marketing (Sirgy 2000), comme étant un
élément sine qua none de l’efficacité publicitaire. Cette dernière est définie comme l’adéquation entre le
concept de soi ressenti par le consommateur et les valeurs exprimées dans le message publicitaire. De
même que le conditionnement classique, la congruence personnelle a pour objectif de favoriser les attitudes
positives du consommateur face au produit présenté. Comme il a été dit précédemment, une personne peut
considérer la musique comme une appartenance à un groupe défini et orienter son comportement en
fonction. Le consommateur est donc influencé par un certain style de musique et va en conséquence réagir
différemment selon les illustrations musicales incluses dans le message publicitaire. Les préférences
24
musicales de l’individu le positionnent socialement et l’amènent à accepter ou rejeter certains morceaux
musicaux. On imagine qu’un homme d’une soixantaine d’années, appartenant à une classe sociale
supérieure, soit peu réceptif à l’écoute d’une musique électronique ou urbaine, de style trance ou rap. Il est
donc important de considérer les préférences musicales des groupes sociaux et de proposer des illustrations
musicales en accord avec l’identité de l’audience ciblée et sa perception de la musique. Blair et Hatala en
1992 viennent renforcer l’importance de la congruence personnelle en démontrant qu’une publicité
accompagnée d’une musique rap est à priori associée à un stéréotype de consommateur de culture
africaine, populaire et jeune, portant des vêtements de sport. Si ce cliché correspond à l’image de soi du
récepteur du message, ce dernier sera alors plus facilement attiré et persuadé par la publicité. En cela,
l’élément musical en publicité peut venir renforcer l’impact du message en interpellant plus facilement les
populations visées.
2.2 L’influence de la musique dans la construction de l’image de marque En plus d’être un outil de segmentation comme nous l’avons vu ci-dessus, l’élément musical en publicité
vient aussi renforcer le positionnement du produit dans un premier temps, puis de la marque à plus grande
échelle. En effet, la musique a ce pouvoir de transmettre des émotions à ses auditeurs, qui en traduisent des
significations.
Selon l’étude de Bruner en 1990, les éléments musicaux peuvent être manipulés de manière à induire tel ou
tel sentiment dans l’œuvre finale. Sa catégorisation musicale nous permet d’identifier les caractéristiques de
la musique qui peuvent entrer en jeu et venir supporter la signification d’un message publicitaire. Le tableau
de Bruner présente six modalités propres à la composition musicale qui peuvent être considérées pour
25
conforter une émotion particulière. En cela, l’illustration musicale en publicité peut donc venir influencer le
consommateur dans sa perception finale du produit ou de la marque.
Si l’élément musical intervient dans la compréhension et l’assimilation du message publicitaire, il en devient
alors un élément clé, traité comme nous l’avons vu précédemment par une voie centrale, à l’instar du
message informationnel. Les études ont montré que la musique avait bien ce pouvoir de véhiculer des
significations, des symboles propres à la culture dans laquelle elle s’exerce. Là encore il est important de
préciser le rôle des représentations culturelles en cours, une mélodie n’ayant pas forcément la même
signification dans des sociétés occidentales ou asiatiques par exemple. Néanmoins, les recherches menées
à ce sujet tendent à concéder à l’illustration musicale publicitaire un effet non négligeable sur la perception et
la représentation finale du produit dans l’esprit du consommateur exposé à la dite publicité. Gallopel en
1998, démontre qu’une musique fortement connotée va introduire et générer des images spécifiques dans
l’esprit du consommateur. Au final, l’élément musical aura eu une influence significative sur la perception du
produit. Les exemples les plus courants font appel à la fonction poïétique de la musique, en introduisant par
exemple des rythmes africains pour accentuer l’origine d’un café ou encore une mélodie d’inspiration
asiatique pour promouvoir un certain type de riz. Dans la même optique, Spadling en 1994 étudie l’impact de
l’utilisation d’une musique réunissant guitare acoustique, basse et batterie sur la perception des
consommateurs, dans une publicité pour les produits laitiers. Les résultats de son étude confirment la portée
symbolique de l’élément musical, dans ce cas-ci la musique renvoyait les consommateurs à une image de
simplicité, d’authenticité et de pureté.
L’influence de la musique sur la construction de l’image de marque est d’autant plus importante lorsque cette
dernière apparait dans le cadre d’une publicité transformationnelle. Comme expliqué auparavant, dans les
publicités informationnelles demandant un plus grand effort cognitif et s’appuyant sur des faits concrets,
l’élément musical n’intervient que comme simple illustration. Il est ainsi très rare que ce dernier vienne
renforcer les attributs d’image développés dans le message. A l’inverse, la publicité dite transformationnelle
met en avant un univers, une expérience unique liée à la marque. Les arguments développés dans ce cadre
là jouent sur l’affectif plutôt que le rationnel, en conséquence l’élément musical tient une place de choix.
Pour exemple, le secteur de la parfumerie ne produit que des publicités transformationnelles : dans celles-ci
la musique est utilisée pour renforcer un univers de marque fortement identifié. Certaines de ces campagnes
se construisent autour de la musique uniquement, sans l’ajout d’un quelconque message ou baseline. Les
annonceurs attribuent ainsi à l’élément musical le rôle principal et s’appuient sur ce dernier pour renforcer
leur positionnement. La fonction symbolique de la musique trouve toute sa place dans les publicités
transformationnelles, à condition bien sûr que l’élément musical reste cohérent avec les images auxquelles il
est associé.
26
L’élément musical en publicité aide donc à véhiculer le positionnement du produit. Selon l’implication du
consommateur, la musique va remplir son rôle et contribuer à construire une certaine image de marque,
devenant un élément central du message et non plus périphérique. Parce qu’elle produit des réponses
émotionnelles, la musique est désormais envisagée par les marketers comme un élément particulièrement
pertinent. Cependant pour juger de son efficacité, une fois encore il est important de tenir compte de
l’approche affective du consommateur par rapport à cette même œuvre musicale. En 1992, Baumgartner
met en évidence le symbolisme de la musique du point de vue individuel du consommateur. Pour chacun
d’entre nous, une musique peut faire écho à des souvenirs propres ; la portée symbolique de la musique est
ainsi différente pour chacun des consommateurs. Parce qu’elle est appréciée des consommateurs, la
musique en général et certaines œuvres en particulier sont inévitablement associées à une expérience
affective personnelle, des souvenirs que les annonceurs ne peuvent à priori pas prévoir dans leur globalité.
En ce qui concerne la musique, il est commun d’identifier à la fois l’approche affective individuelle et
l’approche collective du symbolisme que celle-ci peut porter. Effectivement, si Baumgartner signale les
expériences personnelles des consommateurs, Scott lui fait état de signification culturellement partagée. Il
parle de sens référentiel qui selon les cultures dans lesquelles la musique va être employée, agit comme
une sorte d’heuristique. Il suggère en effet que le symbolisme musical soit un apprentissage culturel, dont le
consommateur va se servir pour construire ses prochains jugements. Scott considère alors les éléments
musicaux comme des heuristiques culturellement appris, dont l’interprétation est innée. La musique en
publicité peut ainsi être envisagée selon deux axes : l’un plus affectif et personnel qui se basera sur une
connaissance aigüe du consommateur ciblé, l’autre plus collectif qui utilisera les codes et les symboles
établis autour de la musique dans une culture préalablement identifiée. De ces études ressort l’importance
de connaître ses cibles et l’historique de l’œuvre sélectionnée. La marque Volvo dans les années 2000 avait
connu un échec cuisant pour l’une de ses campagnes publicitaires, mettant en avant son nouveau modèle
familial, au son de la symphonie ‘The Fountain’ du compositeur Clint Mansell, thème du film dramatique
Requiem for a dream (Aronofsky, 2001). Pour le public familier avec la bande originale du film d’Aronofsky, il
était inconcevable d’associer la sécurité du modèle et son côté familial avec cette musique-là. Ce n’est qu’un
exemple parmi tant d’autres des risques encourus par les annonceurs lorsque ces derniers font appel à des
mélodies préexistantes.
Face au risque que présente l’utilisation de la musique préexistante, les marques ont désormais tendance à
prendre les devants et se positionner en amont du processus créatif musical. L’objectif ici est de donner à la
marque les moyens de se différencier en proposant une musique exclusive et inattendue. Apple est la
marque experte en la matière. Les campagnes de la marque ont pris pour habitude de parier sur des artistes
méconnus du grand public, renforçant ainsi l’image de la marque comme un acteur sur les marchés les plus
27
créatifs. Les artistes associés, Feist ou Yaël Naïm entre autre, ont par la suite tous rencontré un succès
international. Le pari gagnant d’Apple à ce jeu là à été de s’associer en amont avec un artiste en voie de
reconnaissance et de le projeter sur la scène avant tout le monde afin que sa musique soit dorénavant un
repère annonciateur de la marque. Dans le même esprit, plusieurs grandes marques ont eu recours à la
collaboration musicale pour valoriser un positionnement et renforcer leurs valeurs de marque. L’un des outils
phares de cette stratégie musicale est la compilation musicale de marque. Heineken, Audi ou encore Cartier
ont opté pour ce produit, en proposant ainsi à leurs audiences privilégiées la découverte de nouveaux
artistes, renforçant ainsi l’expérience du consommateur avec la marque. Dernier succès en date, la
campagne de promotion du roadster Audi, visant un public féminin. Les leaders d’opinions et journalistes
influents pour ce produit ont tous reçu une compilation musicale spécialement créée par la marque,
contenant des œuvres originales exclusives, mettant en avant l’état d’esprit et les émotions provoquées par
la conduite du modèle en question. Les compilations de marques sont une des premières façons d’utiliser la
musique pour proposer aux consommateurs un contenu communicationnel attractif et ciblé. Certaines
marques vont aujourd’hui encore plus loin en s’attelant à offrir à leur public un contenu musical de plus en
plus exclusif. C’est le cas en France de l’opérateur mobile SFR qui en quelques années a réussi à imposer
son Studio Live SFR comme un lieu incontournable de la scène musicale parisienne. Que ce soit en tant
qu’illustration musicale ou comme véritable vecteur d’image, la musique est désormais considérée
globalement et de toute part par les annonceurs.
2.3 L’importance de l’identité musicale à l’aube du marketing expérientiel
Le marché économique actuel et sa compétition accrue ont amené les marques à envisager de nouveaux
avantages concurrentiels que les caractéristiques de leurs produits. Un produit innovant, même avec des
attributs différenciateurs, est désormais soumis à concurrence dans les mois qui suivent sa sortie. Dans ce
contexte, les grandes marques en particulier ne peuvent pas survivre en s’appuyant uniquement sur leur
seule capacité d’innovation. Parce que le marché et les consommateurs évoluent rapidement, il est
nécessaire pour les marques de se construire des attributs spécifiques qui les porteront sur le long terme.
L’enjeu pour les marques aujourd’hui est donc de trouver le moyen de faire évoluer leur communication
d’une argumentation fonctionnelle, relative aux attributs du produit en question, à une communication basée
sur les sentiments et l’émotion qui retiendra mieux l’affection des consommateurs ciblés. En cela, la musique
peut jouer un rôle prédominant. Par essence, la musique est un loisir fédérateur, dont les personnes aiment
discuter et partager avec leur entourage. C’est un média au potentiel affectif énorme, selon une étude 91%
du public occidental avoue ne pas envisager leur quotidien sans musique (Sounds like Branding – 2010).
C’est dire le poids que détient la musique dans les mœurs. L’aspect émotionnel souhaité par les marques
28
peut ainsi se construire via l’utilisation de la musique. Une identité ou un profil musical vient s’ajouter à
l’image de marque en complément de son identité graphique. L’élément émotionnel s’est doucement imposé
ces dix dernières années, de plus en plus d’entreprises s’étant interrogées sur l’avenir de leur relation
clients. Cela a mené à une certaine remise en question des modèles marketing habituels.
Le modèle des 4Ps de Kotler par exemple (1964), bien que fondé et respecté a été mis à mal par les
changements du 21ème siècle. Ce modèle, base du mix marketing produit- prix- distribution-communication,
demeure statique depuis plus de 50 ans. A l’heure actuelle, le modèle de Kotler devient restrictif pour la
plupart des marques évoluant sur un marché ultra-concurrentiel pour qui la fidélisation du consommateur est
devenue une priorité. Ces mêmes consommateurs ont aujourd’hui tendance à rechercher des marques
personnifiées, dans lesquelles ils peuvent se reconnaître et par conséquent adhérer à leurs valeurs. Ce n’est
plus seulement un produit qu’ils achètent, mais un système de valeurs, de représentation sociale. Depuis
quelques années, le domaine du marketing et de la communication a considérablement évolué. Comme
nous l’avons dit plus tôt, certains modèles de la vieille école du marketing sont alors mis de côté. Le
responsable de marque actuel utilise encore les mêmes stimuli qu’auparavant pour construire sa marque, à
savoir : un nom accrocheur, un logo différenciateur et des symboles forts reconnaissables, un personnage
ou une mascotte, ou encore une signature publicitaire. Ces éléments demeurent pertinents aujourd’hui.
Cependant, les marques ont aujourd’hui tendance à reconsidérer les éléments non visuels de leur
communication. Auparavant, l’ensemble des messages publicitaires était centralisé autour d’un visuel à
l’impact fort, pensé plus efficace pour attirer l’attention. Les changements des dernières années ont
encouragé les marques à reconsidérer l’élément musical, et de plus en plus se dotent désormais d’identité
sonore, voir olfactive. De cette nouvelle pensée est né le concept du marketing expérientiel- ou sensoriel. Ce
dernier a pour principe d’offrir au consommateur au-delà d’un produit, une véritable expérience. Pour les
marques contemporaines, le défi est dorénavant de créer un lien affectif avec leurs publics, en devenant en
quelque sorte une connaissance à laquelle le consommateur peut s’identifier et donc se lier. C’est en
personnifiant la marque au maximum que l’entreprise va tenter de créer une nouvelle relation affective avec
ses consommateurs. Le fondement du marketing expérientiel repose sur le postulat qu’un consommateur va
désormais s’orienter vers une marque en particulier pour répondre au besoin physiologique supérieur qu’est
l’accomplissement de soi (Maslow, 1943).
Partant de ce constat, de nouvelles approches marketing ont été envisagées. A l’heure actuelle, plusieurs
entreprises s’accordent à dire que la fidélisation de la clientèle s’opère par de nouvelles voies. Les critères à
prendre en compte peuvent désormais être : l’émotion, l’expérience, l’engagement ou encore l’exclusivité
qu’amène le produit à son acheteur. Ces mêmes éléments sont la clé d’une identité musicale réussie. En
effet, l’identité musicale correspond à une méthode de communication par l’émotion. Pour ce qui est de
29
l’expérience, de l’engagement ou encore de l’exclusivité, ce sont encore des critères que les marques
actuelles considèrent de plus en plus activement. En proposant un contenu musical spécifique, identitaire, et
même exclusif, les marques sont en train de se rapprocher d’un public qui s’était éloigné face à la publicité
ordinaire. Cette nouvelle approche tend à prendre avec d’autant plus de considération les attentes et les
perceptions des consommateurs. Lorsqu’une entreprise opte pour un marketing expérientiel, elle doit au
préalable se demander qui elle est et quelles sont ses valeurs pour en dégager un profil de marque distinctif
et pertinent. En s’appropriant une personnalité, la marque peut alors actionner de nombreux nouveaux outi ls
tels que la musique pour créer du lien avec son public, Ainsi, l’élément musical prend de plus en plus de
place de nos jours. En plus d’améliorer la mémorisation du message, la musique peut jouer un rôle
déterminant dans la construction de l’image de marque. Si la majorité des entreprises ont encore tendance à
privilégier une communication visuelle, la communication expérientielle ou sensorielle a néanmoins un bel
avenir devant elle.
30
III L’utilisation de la musique au-delà de la synchronisation publicitaire Le rôle de la musique dans les stratégies de communication à venir
41%
27%
20%
12 % Constuire une image de marquedurable
Se différencier des concurrents
Renforcer la fidélité des cibles
Encourager les ventes
Source: Étude Sounds Like Branding, 2010
3.1 Les marques soutiennent la création musicale
A l’instar des célébrités sportives qui ont fait le bonheur des publicistes dans les années 1990, le secteur
musical et ses artistes ont séduit les marques et la communication à partir des années 2000. L’élément
musical est à ce jour mieux considéré par les marketers et son utilisation peut aujourd’hui intervenir en
amont du processus créatif. Comme nous l’avons vu précédemment, la musique a cet avantage de véhiculer
de nombreux symboles et peut aider une marque à valoriser son image de marque. Pour ce faire, de
nombreuses marques ont choisi d’opter pour une stratégie d’association entre leur produit et un groupe ou
artiste identifié. La relation musique et marque a sans aucun doute bénéficié d’une crise des secteurs en
question, amenant les annonceurs et les éditeurs de musique à chercher des réponses collectives aux
enjeux respectifs de leurs professions. Tandis que la communication souffre d’un large désintérêt, voir d’un
total rejet, des publics vis-à-vis des méthodes publicitaires traditionnelles, l’industrie musicale quant à elle
pâtit depuis une dizaine d’années de l’émergence des formats numériques et du téléchargement en ligne,
légal on non. Dans un tel contexte, marque et musique en sont venues à se rencontrer et tentent de définir
de nouveaux modèles économiques bénéfiques pour tous.
En conséquence, les annonceurs envisagent des stratégies d’associations. Le principe consiste à connecter
son audience à la marque via l’utilisation d’un artiste ou d’un groupe, de manière à mettre en avant les
valeurs et le public de la marque en question. Certaines marques peuvent ainsi s’engager auprès d’artistes
identifiés ou d’un genre musical en particulier afin de renforcer leur image. L’association peut se fonder sur
des classiques musicaux (rock, composition classique, jazz…) ou jouer la carte de la nouveauté en
31
proposant un tremplin pour les jeunes artistes. Bien que la première solution ait été la plus utilisée ces
dernières années (crise du secteur oblige, les annonceurs se sont réfugiés vers des standards musicaux,
assurés de leurs succès), la seconde alternative semble trouver preneur chez de nombreux annonceurs.
Exemple phare, la marque Apple qui a fait de sa stratégie d’association musicale une signature depuis
bientôt quatre ans. La campagne lancée en 2008 pour son MacBook s’illustrait d’une chanson de l’artiste
israélienne Yaël Naim, à l’époque inconnue des playlists radiophoniques. La marque comme l’artiste ont
bénéficié d’un succès commun par la suite. Lors de ses campagnes suivantes, Apple a souhaité continuer
dans cette optique, en favorisant à chaque fois des artistes encore méconnus du grand public. En misant sur
de jeunes artistes et sur une association musicale exclusive, la marque s’est construit un réel atout de
communication, renforçant son image en devenant la marque de référence pour dénicher les talents. Le
jeune talent représente un avantage évident pour les marques qui n’ont pas à négocier des contrats à la
hauteur des rock-stars édités chez les gros labels. Par ailleurs, la marque bénéficie du même coup d’une
image jeune et dynamique, en accord avec les publics les plus souvent visés.
A priori, les stratégies d’association musicale semblent convenir à tous puisqu’annonceurs, éditeurs mais
aussi artistes semblent y trouver une sortie de secours aux difficultés de leurs marchés respectifs. Le
marketing musical progresse ainsi de plus en plus : des artistes viennent composer pour des marques, les
marques soutiennent la promotion des artistes et les majors trouvent bien entendu un tremplin efficace pour
redynamiser un secteur en perte de vitesse. La synchronisation publicitaire a alors de beaux jours devant
elle. Par ailleurs, une étude menée par l’agence The Matching Room en 2010 montre que le segment des
15-35 ans est très friand de ces associations entre marque et musique. La tendance s’est développée à
grande échelle ces dernières années, avec de nombreuses plateformes sur la toile dédiées à mettre en
contact les marques avec des artistes. Fanatic.fm ou encore 1brand1band.com font figure de modèle et
proposent une association plus facile entre le secteur musical et publicitaire. A partir de ces sites, les
marques sont amenées à sponsoriser les artistes qui semblent porteur de leurs valeurs. Le succès se
construit petit à petit, ces plateformes ayant été créées en 2010 pour la plupart, le concept prend son envol
peu à peu mais promet de belles associations.
Par ailleurs, certaines marques poussent leur engagement musical encore plus loin, en tentant d’amener du
contenu toujours plus exclusif à leurs audiences. Pour cela, les annonceurs optent pour des stratégies
musicales dites d’exploration. Une stratégie d’exploration musicale a pour objectif d’amener au public des
contenus musicaux toujours plus riches et novateurs, de façon à positionner la marque comme partenaire et
prescripteur musical privilégié. Les stratégies d’exploration prévoient plusieurs options pour les marques,
comme soutenir la carrière d’un groupe ou artiste identifié, ou encore organiser des compétitions musicales
mettant en avant les jeunes talents. Ce volet évènementiel s’est largement développé ces dernières années.
32
La marque de rhum Bacardi en a fait une action de communication annuelle aux Etats-Unis, en organisant
chaque été un festival mettant en avant les artistes découverts par la marque. En France, ce sont les
marques d’opérateur mobile SFR ou encore de prêt-à-porter Diesel qui ont toutes deux monté des
évènements à vocation de tremplin musical. Organisé en amont sur internet pour ensuite conclure sur un
évènement concert, les marques proposent ainsi une action de communication personnalisée, sûre de
toucher une population cible de plus en plus large. L’évènementiel musical est pour les marques
l’opportunité de véhiculer leurs valeurs à grande échelle et proposer du contenu exclusif qui va logiquement
attirer le plus grand nombre. La musique étant un élément fédérateur, les marques sont assurées de réunir
un public autour de leurs communications. Dernier succès en date, la marque Coca-Cola qui a invité une
poignée d’internautes privilégiés à venir assister et collaborer à la composition du prochain titre du groupe de
pop Maroon 5. La marque américaine a une longue tradition en termes de marketing musical et renforce une
fois de plus son positionnement auprès de son public. Dans une démarche de marketing expérientiel de plus
en plus forte, les grandes marques poussent l’exclusivité au premier rang des actions de communication.
Pour certains annonceurs, le marketing musical va plus loin qu’une simple synchronisation ou association.
En quête de contenus exclusifs, certaines marques ont désormais tendance à abandonner les librairies
musicales des majors pour se concentrer sur une production originale réalisée en interne. Il ne s’agit plus
alors de trouver la prochaine œuvre qui accompagnera la campagne publicitaire, mais d’encourager la
création musicale sur le long terme en attribuant à la marque le statut même de label musical. En France, ce
sont les enseignes Nature et Découvertes ou Zadig et Voltaire qui s’essaient, avec succès, à l’édition
musicale. A l’échelle internationale, Starbucks ou encore Converse ont investi le secteur en éditant leurs
propres artistes via leurs labels respectifs Hear Music et le Rubber Tracks Studio de Converse récemment
inauguré à New York. C’est mener un marketing musical à son apogée que de créer son propre label
musical, et pourtant les avantages sont nombreux et peu négligeables pour une marque engagée sur le long
terme. En effet, si l’on considère le marketing expérientiel comme le prochain modèle à suivre pour les
grandes marques, la création d’un label assure l’exclusivité des contenus musicaux, la valorisation de
l’image, la concrétisation des valeurs de la marque, et en conséquence attire l’intérêt du public. De plus,
l’édition interne permet aux marques de renforcer leurs empreintes musicales en diffusant les œuvres sur les
lieux de vente de la marque (Starbucks, Nature et Découvertes). C’est une logique de marketing global qui
est ainsi engagée et permet à la marque de se différencier d’autant plus de ses concurrents en maitrisant la
promotion et la diffusion de ce qui fait à grande échelle son identité musicale. Ces actions se multiplient
d’autant plus qu’elles sont soutenues par l’émergence de nouveaux canaux de communication, tels que les
réseaux sociaux.
33
3.2 L’élément musical renforce le profil des marques sur Internet
Les méthodes et outils du champ de la communication ont été considérablement modifiés ces dernières
années avec l’apparition dans un premier temps des NTIC, puis enfin le développement des réseaux
sociaux. A l’heure actuelle, les individus ne communiquent et ne s’informent plus de la même façon qu’il y a
dix ans, leurs comportements de consommateurs ainsi que leurs décisions d’achat ne suivent plus les
schémas établis par le marketing datant des années 1960. Les années 1990 plus particulièrement ont
engendré un rejet considérable de toute forme de publicité outrancière, 75 % des consommateurs avouant
éviter les messages publicitaires au maximum (étude par Heartbeats International 2010). Les annonceurs
aujourd’hui doivent faire face à des consommateurs critiques, avisés, à la recherche d’informations crédibles
et vérifiables. Face à ces nouvelles habitudes, les marques n’ont plus le monopole du discours publicitaire.
Les individus eux-mêmes jouent désormais plus que jamais un rôle dans la construction comme la
destruction d’une marque ou d’un produit. La communication telle qu’elle a été construite par le modèle de
Shannon dans les années 40 a perdu une certaine crédibilité, dans un monde où les personnes restent
connectées au reste du monde en permanence. L’émetteur n’est plus le seul maître de la diffusion du
message, ou du moins les marques ne sont plus les seules à pouvoir intervenir activement sur le contenu
des messages la concernant. Dans ce contexte, les règles de communication ont quelque peu évolué et
tendent à offrir aux marques un nouvel espace d’expression, quelque peu différent des chemins empruntés
jusqu’alors. Les réseaux sociaux ont eu un effet incontestable sur les changements de comportements des
consommateurs, leur émergence et leur impact ayant pris de cours la plupart des annonceurs. Le plus
célèbre d’entre eux, Facebook, représenterait le quatrième pays le plus peuplé si sa communauté était
réunie sous un drapeau. La moitié des consommateurs occidentaux avouent tenir compte des commentaires
et des informations circulant sur leur réseau avant de décider d’un achat. Les consommateurs actuels
passent du temps sur ces réseaux et sur Internet en général, plus qu’ils ne le consacrent à regarder la
télévision. Si ce dernier média tenait le monopole de l’information et de la communication il y a encore une
dizaine d’années, la situation a bel et bien changé et demandé au secteur publicitaire de s’y adapter.
Et si les marques investissent si intensément les réseaux sociaux actuellement, c’est bien sûr parce que ces
derniers se sont également transformés en mine d’or pour quiconque les manipule de manière efficace. Les
réseaux sociaux ont en effet amené les marques à revoir leurs codes du marketing, et à s’interroger sur un
schéma de communication les mettant à égalité avec leurs consommateurs. Le contexte économique fait
qu’aujourd’hui l’enjeu n’est plus seulement d’attirer l’attention mais également de devenir un interlocuteur
privilégié de l’individu. Sur les réseaux sociaux, les annonceurs ne cherchent plus seulement des potentiels
consommateurs, mais de vrais Fans. L’objectif pour la marque est alors de proposer un profil plus humain,
attractif et auquel une personne peut s’identifier, au-delà de la relation vendeur-acheteur. Lorsque le
34
consommateur est conquis, tout son réseau est informé et la marque bénéficie d’un bouche à oreille d’autant
plus important. Pour réussir sa communication sur les réseaux sociaux, une marque doit respecter les
principes de base qui régissent les relations humaines dans leur généralité : un discours ouvert- signe
d’honnêteté, des conversations cohérentes – transmettant des valeurs assumées, et enfin des interactions
pertinentes- symbole de respect envers les interlocuteurs. Il s’agit ici de rendre la marque accessible, en lui
attribuant une vraie personnalité qui l’aide à créer des liens avec un public qui lui ressemble. Les réseaux
sociaux ont en conséquence amené les marques à personnifier au maximum leurs contenus et leurs images.
C’est cette même image qui va être considérée lorsque la marque va souhaiter attribuer un profil musical à
son produit. Comme il l’a été expliqué auparavant, la musique est un élément fédérateur qui, valorisé sur les
réseaux sociaux, va supporter les objectifs de la marque en lui conférant une dimension et un intérêt
particulier pour les internautes. Avec l’émergence des NTIC, les marques ont accédé à un espace privilégié
pour mettre en avant leur image. Conscients de la portée de la musique, les marketers ont ainsi envisagé
des actions de plus en plus nombreuses mettant en scène l’élément musical sur ces nouvelles plateformes.
Les initiatives relatives au secteur musical ont été multipliées avec l’apparition des réseaux sociaux. Les
budgets auparavant consacrés vers les campagnes télévisées ont petit à petit été redirigés vers l’espace
web. L’élément musical tient une place considérable sur le web dans son ensemble et les réseaux sociaux
n’ont fait que décupler sa présence. Le modèle des 4E (émotion, expérience, engagement et exclusivité)
évoqué par le marketing expérientiel prend ici toute son ampleur lorsqu’il s’agit de promouvoir ou de
communiquer à travers la musique. L’élément musical agit comme un renforcement de la personnalité de la
marque sur le réseau, donnant une information supplémentaire aux internautes pour considérer et évaluer la
marque en question. L’association à la musique pour une marque va automatiquement attirer l’attention de
consommateurs généralement friands de découvertes musicales. Cette même association, qu’elle soit
purement commerciale et temporaire (synchronisation publictaire par exemple), ou engagée sur le long
terme (parrainage- sponsoring), va favoriser le trafic et les conversations autour de la marque. Les
différentes plateformes dédiées à la musique sur Internet ne manquent pas, et chacune d’entre elles peut
être envisagée selon les objectifs de la marque. Napster, MySpace, Last Fm (équivalent américain de
Deezer en France), ou encore Spotify connaissent toutes un succès non négligeable sur la toile, démontrant
l’importance attribuée à la musique sur Internet par les consommateurs. On considère actuellement que
deux internautes sur cinq présents sur les réseaux sociaux ont intégré un élément musical à leur profil.
Preuve de cet engouement, le réseau social Twitter, strictement rédactionnel à la base, offre désormais à
ses abonnés plus de vingt services et applications musicales pour agrémenter leurs contenus. Les
opportunités liant musique et réseaux sociaux sont donc nombreuses et les marques les plus actives sur ces
réseaux privilégient désormais des contenus musicaux pour mettre en avant leurs positionnements.
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Comme nous l’avons vu plus haut, la présence des marques sur les réseaux sociaux peut se résumer à trois
objectifs simples du marketing : augmenter la notoriété de la marque et de ses produits, valoriser ses valeurs
et son image, et enfin fidéliser ses consommateurs sur le long terme. En cela, les réseaux sociaux ne sont
pas si différents que les outils de communication classiques, néanmoins la présence de l’élément musical
apparait ici inévitable. Les orientations et choix musicaux de la marque vont venir dans ce contexte valider
les attributs du produit et encourager la personnification de la marque. A l’inverse des stratégies musicales
précédemment étudiées, les réseaux sociaux demandent une approche quelque peu différente de l’élément
musical pour les marques. Tout d’abord, de par la précision des données démographiques disponibles sur
ces réseaux, il convient pour la marque de proposer des contenus ciblés et d’éviter à tout prix l’effet grand
public. Cela n’empêche pas pour autant l’annonceur de mener différentes campagnes envers des
populations différentes, tant que ces dernières restent cohérentes. La dissonance sur le web est un facteur
d’échec inéluctable. Par ailleurs, il est recommandé aux marques de s’engager activement auprès des
populations, en offrant entre autres des contenus exclusifs. Pour cela, de nombreuses marques adoptent ce
qui est désormais appelée une stratégie d’intégration. Cette dernière consiste, comme son nom l’indique, à
intégrer une création musicale et faire en sorte que le réseau se réunisse autour de cette dernière. En
lançant des partenariats avec des artistes présents sur My Space, Band Page ou encore SoundCloud, les
marques bénéficient d’une porte d’entrée vers une communauté quelquefois réticente au caractère intrusif
des annonceurs sur Internet.
Cette stratégie est particulièrement payante lorsqu’elle vise des communautés d’artistes ou de fans, comme
le prouve l’exemple d’Intel devenu cas d’école. La marque informatique, durant l’année 2007 décide
d’investir les réseaux sociaux pour promouvoir un nouveau logiciel destiné aux ingénieurs du son, amateurs
comme professionnels. La marque a ainsi identifié des groupes d’influence au sein de ses consommateurs
potentiels et reconnu qu’en s’adressant à ces groupes en particulier, elle pouvait augmenter la demande
pour son dernier produit. Intel lance alors une plate-forme digitale nommée Intel Powers Music, en tant que
nouvelle communauté du réseau MySpace. Chaque membre de la communauté dispose d’un lecteur de
musique personnel lui permettant de diffuser quatre titres. Pour les internautes déjà membres de la
communauté Intel, la marque offre la présentation d’un cinquième titre, ainsi que des conseils de
professionnels du secteur musical, devenant ainsi une vraie valeur ajoutée sur le réseau. Non seulement
Intel réussit à intéresser les artistes, elle souhaite également impliquer leurs fans. C’est pourquoi la marque
lance quelques mois après le réseau Intel Super Group où les internautes dans leur ensemble sont appelés
à venir proposer des illustrations pour les pochettes des albums, suggérer des noms de scènes ou encore
commenter les dernières versions des titres présentées. La campagne Intel est ainsi devenue l’une des plus
marquantes jamais réalisées à ce jour sur les réseaux sociaux, réunissant au total plus de 42 000 personnes
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de tout pays autour du projet et 6 millions de pages consultées. A la suite de cette campagne, plus de
19 000 groupes ou artistes avait ajouté la marque Intel en tant qu’amie sur leurs réseaux. Cet exemple
prouve l’influence des réseaux sociaux et la portée que peuvent avoir ces derniers pour les stratégies de
communication à venir. Le cas Intel vient également soutenir l’influence de la musique et son impact sur ces
nouveaux réseaux. Nous avons déjà évoqué les avantages et l’aptitude de la musique à fédérer et à
véhiculer des valeurs : ajoutée à la puissance des réseaux sociaux, les marques ont ici un terrain de jeu
propice pour développer des actions de communication ciblées et pertinentes qui trouveront un impact
considérable en termes d’image et de notoriété.
3.3 Les enjeux de la profession dans les années à venir
L’émergence des réseaux sociaux a sans nul doute redonné un coup de fouet à l’utilisation de la musique
par les marques. Au vu des précédents constats, l’élément musical semble devenir un atout privilégié des
marques qui s’orientent vers une communication de plus en plus personnifiée. En conséquence, les agences
de communication spécialisées dans le marketing musical se développent, à l’instar des désormais connues
Créaminal et Bonus Track. Parce que trouver la bonne musique et l’exploiter correctement n’est pas une
chose innée, les marques pour la plupart font appel à ces spécialistes. Bien que l’efficacité de l’illustration
musicale sur les ventes d’un produit soit encore difficile à mesurer, l’impact d’une synchronisation réussie en
termes d’image et de visibilité est indéniable. Depuis une dizaine d’années, annonceurs, éditeurs de
musique et professionnels de la communication se sont rapprochés pour réfléchir ensemble à des
combinaisons avantageuses pour chacun d’entre eux. Alors que les annonceurs bénéficient d’une meilleure
image de marque, les artistes profitent d’un tremplin médiatique porteur et les éditeurs de musique y
trouvent une solution face à la crise du disque qui touche leur activité. A priori, le trio semble fait pour durer.
Toutefois, il est intéressant de remarquer qu’une particularité nationale s’applique en France comme nulle
part ailleurs. Si les pays anglo-saxons, Etats-Unis en tête, ont depuis longtemps saisi l’avantage d’une
association musicale, les annonceurs francophones peuvent encore faire face à une réticence du public
français qui voit en cette activité un asservissement de la création musicale. Il est vrai qu’en France plus
qu’ailleurs, l’association entre annonceurs et communauté artistique quelle qu’elle soit n’est pas toujours vue
d’un bon œil. Cependant, malgré quelques réfractaires, musique et marque semblent avoir trouvé au fil des
années un terrain d’entente profitable pour les deux camps. Les marques peuvent par ailleurs développer de
nouvelles stratégies musicales, allant plus loin que la synchronisation, pour convaincre leurs audiences de
leurs engagements sincères auprès du secteur musical. Que ce soit par des évènementiels, des concerts,
du sponsoring, des publicités télévisées ou encore des campagnes de communication globale à l’instar de
Coca-Cola et K’naan pour la coupe du monde 2010, le secteur musical a évolué de telle façon qu’il est
37
désormais possible et lucratif pour les marques de s’en rapprocher et de mettre en place des actions
uniques en termes de capital d’image.
Poussant encore plus loin leurs engagements auprès du secteur musical, nous avons vu que certaines
marques avaient monté leurs propres labels de musique. Du point de vue de l’annonceur, ces studios
personnalisés sont indéniablement un attribut valorisant pour communiquer une image de marque. A
l’inverse, cette tendance à internaliser au maximum la production et l’identité musicale soulève quelques
interrogations quant à l’avenir des agences de communication spécialisées dans cet outil. Ces dernières
peuvent en effet s’inquiéter des nouvelles relations que construisent les marques avec les artistes puisque
ces dernières ne nécessitent plus d’intermédiaires. Le risque de voir l’élément musical géré à la source (aka
par les annonceurs labels) peut devenir une inquiétude pour ces agences spécialisées.
Néanmoins, cette inquiétude reste relative lorsque l’on fait un constat des besoins et demandes actuelles du
marché. Si les marques n’auraient à priori pas besoin des agences pour entrer en contact avec les labels, la
complexité de l’élément musical et son environnement requièrent encore de l’expertise. En France
particulièrement, où les annonceurs entament tout juste des stratégies de marketing expérientiel ou musical,
l’agence se situe ici comme un interlocuteur privilégié pour ne pas risquer de lancer des actions obsolètes.
De plus, le secteur musical, dans l’hexagone comme à l’international, est régi par des lois strictes relatives
aux droits d’auteur et nécessite en cela d’être considéré avec professionnalisme. C’est désormais le lot de
toute agence de marketing musical que de connaître ces législations et construire des stratégies en
conséquence. Le droit musical étant différent selon les territoires et les pays, il est encore difficile pour les
annonceurs de gérer toutes les procédures en interne. Par ailleurs, si les marques sont désireuses d’investir
le secteur musical, beaucoup se posent encore la question de la rentabilité et la valeur d’un tel
investissement. L’agence de communication dispose encore ici d’outils spécialisés et professionnels qui vont
soutenir la stratégie à long terme des annonceurs : étude d’image, taux de trafic, impact et résumé de l’e-
réputation etc. C’est également aux agences qu’incombent la responsabilité de l’efficacité de l’action, à partir
d’études de marché segmentées et d’outils adaptés aux profils de consommateurs ciblés. Le marketing
musical nécessite une collaboration de tiers comme peut-être nulle autre méthode de marketing : il s’agit ici
de réunir les bons partenaires pour travailler à la fois à l’image de la marque, l’augmentation de ses ventes,
la notoriété de l’artiste et l’adhésion des communautés musicales dans leur ensemble. Sur le territoire
français, ce dernier point a pris du recul par rapport au marché anglophone. L’association entre musique et
marque doit encore se justifier aux yeux du grand public et ne pas être perçue comme un simple
arrangement lucratif pour les deux parties. Pour encourager l’adhésion du public, les agences de
communication musicale ont désormais en tête certains facteurs clés de réussite, à savoir :
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- Proposer des contenus pertinents et engager une stratégie cohérente avec les consommateurs
ciblés,
- Engager la marque sur le long terme auprès du secteur musical,
- Et enfin, privilégier l’exclusivité des contenus et des moyens de diffusion.
Les agences de communication de marketing musical ont en cela un vrai rôle à jouer pour professionnaliser
les pratiques et encourager la créativité des annonceurs. La situation doit ainsi être envisagée sous l’angle
d’une association durable qui mettra en avant tous les acteurs concernés. Si la musique est un outil puissant
pour attirer l’attention et favoriser une image positive, l’environnement actuel fait qu’elle peut être aujourd’hui
bien plus. De par leurs expertises et leurs activités, les agences de communication en marketing musical
peuvent proposer aux marques des stratégies de plus en plus innovantes et pertinentes pour soutenir
l’engagement de ces dernières auprès d’un secteur dont le consommateur est ici loin de se désintéresser.
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Conclusion
Depuis les années 40, la musique a toujours été un élément utilisé pour rendre les campagnes de
communication plus attractives. Grâce à ses nombreuses fonctions, l’élément musical était le plus souvent
utilisé pour attirer l’attention du consommateur vers le produit présenté et espérer une meilleure
mémorisation de la campagne dans son ensemble. L’association entre la musique et la publicité ne date pas
d’hier et pourtant, elle suscite toujours autant d’intérêt. Parmi les différentes études menées quant à son
efficacité, les recherches ont su démontré que l’élément musical en publicité était bel et bien porteur en
termes d’appel, de mémorisation ou encore de persuasion. Si les caractéristiques musicales sont complexes
et requièrent d’être manipulées avec précaution, leurs impacts sur l’image de marque et leurs empreintes
dans l’esprit du consommateur font de la musique une composante très pertinente pour les annonceurs.
Ces derniers ont cependant eu tendance pendant de longues années à ne considérer l’élément musical
qu’en tant que simple illustration, ignorant de ce fait la portée symbolique de celui-ci. De fait, les recherches
en musique se sont longtemps concentrées sur l’utilisation et la manipulation de la musique dans les spots
télévisées. En pratique, les marques restent peu nombreuses à optimiser l’utilisation de la musique en
dehors de la synchronisation publicitaire. Néanmoins, ces dernières années ont montré plusieurs exemples
réussis de marques s’engageant envers le secteur musical de façon cohérente et bénéfique pour les publics
concernés.
Cette nouvelle tendance n’est bien sûr pas fortuite et vient répondre à la crise connue par le secteur
publicitaire depuis la fin des années 1990. Avec l’émergence des NTIC et une certaine lassitude des
techniques publicitaires usées depuis plus de 60 ans, le consommateur a considérablement revu son
comportement face aux campagnes de communication en général et aux marques en particulier. L’ensemble
du secteur de la communication traditionnelle qui comprend les grands médias a fait face à des
consommateurs de plus en plus avisés, capables de décoder et donc de remettre en cause les stratégies
publicitaires, au détriment de l’efficacité de ces dernières. En conséquence, les annonceurs eux-mêmes ont
dû repenser leurs méthodes et leurs actions. La considération exponentielle de la musique dans les
stratégies globales s’est développée en même temps que les individus réévaluaient leurs rapports aux
marques.
Depuis les années 2000, les sociétés ont eu tendance à évoluer vers des modes de consommation plus
affectifs, en réponse à l’hyper concurrence développée lors des années précédentes. Pour les marques il
s’agit ainsi de prouver aux consommateurs que son produit apporte plus que celui de son voisin, à peu de
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choses près identique. Les marques jouent désormais sur l’aspect personnel et affectif de leurs images.
L’élément musical intervient alors efficacement sur ce nouveau modèle marketing, visant à satisfaire le
consommateur non plus par un produit mais plutôt par des valeurs. La musique détient en effet ce pouvoir
plus que nul autre média, de transmettre des émotions et fédérer autour de symboles communs. Les
grandes marques l’ont bien compris et tentent aujourd’hui de plus en plus de stratégies musicales, avec pour
objectif de se rapprocher d’une clientèle ciblée dans un premier temps mais aussi de travailler sur une image
de marque et une fidélisation de leurs audiences cohérentes sur le long terme.
Il y a encore quelques années, la synchronisation publicitaire était la principale utilisation de la musique et
cette dernière était sélectionnée en fin de processus créatif, au cas par cas. Néanmoins le modèle s’est
avéré restrictif. Les changements et bouleversements du marché de la communication ces dernières années
ont amené les marques à réviser leurs approches musicales et valorisé la création de véritables identités
musicales. Cette identité pousse la marque à se différencier sur un secteur toujours plus compétitif, en
apportant au consommateur une nouvelle lecture de la marque, basée sur des éléments affectifs,
esthétiques ou encore symboliques. L’identité musicale de marque est un concept allant de concert avec le
développement du marketing expérientiel, les deux ayant pour principe de démarquer les marques grâce à
des actions originales, émotionnelles et surtout exclusives. Nombreux sont les récents exemples qui ont
favorisé l’implication des marques envers le secteur musical et ont remporté un succès considérable. Le
tandem musique et marque est ainsi relancé. Preuve des opportunités de cette association, les agences
spécialisées dans le marketing musical n’ont eu de cesse de se développer depuis dix ans. La musique est
devenue un outil de plus en plus pertinent aux yeux des marques : s’agit-il alors d’un vague effet de mode ou
d’un réel enjeu marketing ? Les nombreuses réussites évoquant la mise en valeur d’une marque à travers la
musique semblent désormais positionner le duo dans les considérations marketing de premier ordre.
41
Annexes
Annexe 1. Bibliographie et ressources
42
Annexe 1
Bibliographie- Ressources Ouvrages
LUSENSKY Jakob, Sounds Like Branding, Norstedts Publishing, Finlande, édité en Mars 2010 Thèses
GALAN Jean-Philippe, Musique et réponses à la publicité : effets caractéristiques de la préférence et la
congruence musicales, IAE Toulouse, 2003. Disponible sur :
http://www.afm-marketing.org/rubriques/recherche_resultats.php#RAM GALLOPEL Karine, Influence de la musique publicitaire sur la formation de l’image de marque : une étude empirique, IAE Rennes, 2000. Disponible sur : http://www.afm-marketing.org/rubriques/detailColloqueMR.php?id=2022 Cours VONK, STEENFAT,EJLERSTEN,STOORVOGEL, SAARELA, Université de Lund : Breaking the silence, a managerial approach for companies to realize their audio potential TAGG Philip, Université de Liverpool: Introductory notes to the semiotics of Music Articles parus dans la presse
CARLO Anne-Lise, La musique affermit les marques, Stratégies Magazine, 2008, n°1517 CARLO Anne-Lise, Les têtes chercheuses musicales, Stratégies Magazine, 2009, n°1549
CARLO Anne-Lise, Marques et musique à l’âge de raison, Stratégies Magazine, 2010 n°1574
CARLO Anne-Lise, Tubes de pub, Stratégies Magazine, 2009, n°1570 CHARPENTIER Aurélie, Marque & musique, le duo gagnant?, Marketing Magazine, 2007, n°118
CHARPENTIER Aurélie, Marque et musique, un duo apprécié du consommateur Marketing Magazine, 2008, n°127
GALAN Jean-Philippe, Musique de publicité : une approche expérientielle
revue RAM 1999
43
GALLOPEL Karine, Contributions affective et symbolique de la musique publicitaire : une étude empirique
revue RAM 2000
GOMY Pierre, L’utilisation de la musique dans la communication publicitaire : un état de l’art , revue RAM,
1995
GOUDEY Alain, Stratégies de communication sonore de la marque : bilan et perspectives de l’utilisation de l’identité musicale de marque Décisions Marketing, 2009, n°52(
SIGNOURET Muriel, Les chanteurs et les marques vont de concert, Stratégies Magazine, 2008, n° 1487
Webographie Articles parus sur le web
Les marques jouent les producteurs
Par Aurélien Sooukian, disponible via :
http://www.marketing-professionnel.fr/tribune-libre/marques-maisons-de-disques-producteurs.html
SXSW Panel: Brands as the new labels Heartbeats International Newsletter, 23 Mars 2011
New service connects bands and brands
Heartbeats International Newsletter, 10 Février 2011
Sites internet
Brandchannel
http://www.brandchannel.com/
Brand-m.biz
http://www.brand-m.biz/
Heartbeats International
http://www.heartbeats.fm/
The Matching Room
http://www.the-matching-room.com/
Creaminal
http://www.creaminal.com/
44
Midem 2011
http://www.midem.com/
Blogs Alain Goudey http://alain.goudey.eu/ Vincent Rouzé, sur musicm.fr http://rouzev.free.fr/ Heartbeats International http://www.soundslikebranding.com/
Sacem
http://www.sacem.fr