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Motifs des variétés analytiques rigides par Joseph AYOUB Institut für Mathematik, Universität Zürich, Winterthurerstr. 190, CH-8057 Zürich, Switzerland. CNRS, LAGA Université Paris 13, 99 avenue J.B. Clément, 93430 Villetaneuse, France. E-mail : [email protected]

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Motifs des variétés analytiques rigides

par Joseph AYOUB

Institut für Mathematik, Universität Zürich, Winterthurerstr. 190, CH-8057 Zürich, Switzerland.CNRS, LAGA Université Paris 13, 99 avenue J.B. Clément, 93430 Villetaneuse, France.E-mail : [email protected]

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Remerciements

Les recherches qui ont abouti à ce travail ont commencé vers la fin de mon doctorat effectué à l’IMJ (universitéde Paris 7). Elles ont été menées à bout durant mon séjour à l’IAS (Princeton) et ma première année au CNRS entant que chargé de recherche au LAGA (université de Paris 13). Je remercie les institutions ci-mentionnées pour leursupport.

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Introduction générale

Dans ce travail, j’étends la théorie des motifs, comme développée par Voevodsky [VSF00], et Morel et Voevodsky[MV99], au cadre de la géométrie analytique rigide sur un corps complet non archimédien. Certes, il s’agit en partied’adapter les techniques déjà existantes de la théorie des motifs des variétés algébriques et de les appliquer aux variétésanalytiques rigides. Mais, ce travail ne se résume pas à un simple décalque de la théorie de Morel et Voevodsky et à laconstruction de nouvelles catégories motiviques. Ainsi, je m’efforcerai dans cette introduction de mettre en évidencel’originalité du présent travail et de souligner les idées nouvelles qui, hélas, ont pu être noyées dans le style systématiquedu texte. Ensuite, j’esquisserai quelques applications possibles de cette théorie dont l’une sera developpée en détaildans un travail en cours [Ayo10].

Il existe deux approches modernes à la théorie des motifs des variétés algébriques. La première, d’un point devue logique mais pas historique, est l’approche homotopique de Morel et Voevodsky [MV99] dont résulte la catégoriehomotopique des k-schémas H(k) et sa version stable SH(k) (cf. [Jar00]). Elle est entièrement basée sur la théorie del’homotopie, via la machinerie des catégories de modèles, et, par conséquent, se prête moins aux «calculs». La seconde,est l’approche par les transferts de Voevodsky [VSF00] dont résulte la catégorie des motifs triangulés DM(k). Elle estplus géométrique et il est possible de décrire explicitement dans cette théorie les objets motiviques en termes de cyclesalgébriques. Toutefois, la seconde approche est limitée puisqu’elle ne permet pas de retrouver la K-théorie algébrique,contrairement à la première. Bien entendu, ces deux approches se comparent et il est instructif, et souvent pertinent,de comparer le lien entre SH(k) et DM(k) à celui entre SH, la catégorie homotopique stable des espaces topologiques,et D(Z), la catégorie dérivée de celle des Z-modules. Dans ce travail, je reprends les deux approches, homotopique etpar les transferts, dans le cadre de la géométrie rigide.

L’approche homotopique ou le premier chapitre

Soit k un corps complet non archimédien. On note k son anneau de valuation et k son corps résiduel.

Les ingrédients de la construction

Ici, les ingrédients de base sont les k-variétés rigides lisses, la topologie de Nisnevich en géométrie rigide et la boulede Tate. La première section du chapitre 1 est entièrement consacrée à des rappels de géométrie rigide. Elle ne contientaucun résultat original, et le lecteur familier avec les fondements de la géométrie rigide suivant Tate et Raynaud pourral’ignorer et passer à la suite.

Dans la section 1.2, j’introduis l’analogue de la topologie de Nisnevich pour les variétés analytiques rigides. Commeen géométrie algébrique, il s’agit d’une topologie intermédiaire entre la topologie étale, trop fine pour les théoriescohomologiques motiviques, et la topologie des recouvrements admissibles, trop grossière pour assurer la pureté. Unmorphisme étale f : Y // X de k-variétés rigides est un recouvrement de Nisnevich si pour tout point génériquep ∈ M(X) (cf. la définition 1.1.31) il existe q ∈ f−1(p) avec k(p) ' k(q). Étant donné un modèle formel X de X(cf. la définition 1.1.21), on peut associer à un recouvrement Nisnevich du k-schéma Xσ un recouvrement Nisnevichde X. Le théorème 1.2.10 fournit une réciproque : on obtient, à raffinement près, tout recouvrement Nisnevich de Xà partir d’un recouvrement Nisnevich de Xσ, pour un modèle X suffisamment fin. Ce résultat technique est fort utileet ramène en grande partie l’étude de la topologie de Nisnevich en géométrie rigide à celle de la toplogie de Nisnevichen géométrie algébrique. Notons aussi que le théorème 1.2.10 est propre à la topologie de Nisnevich : il est faux pourla topologie étale même pour X = Spm(k) (si, par exemple, la valuation de k est discrète).

L’autre résultat notable de la section 1.2 est le théorème 1.2.36. Il fournit des générateurs particulièrement simplesde la catégorie dérivée D(ShvNis(SmRig/k,Z)). (Ici, SmRig/k est le site Nisnevich des k-variétés analytiques rigideslisses, ShvNis(SmRig/k,Z) est la catégorie abélienne des faisceaux sur ce site et D(ShvNis(SmRig/k,Z)) est la catégoriedérivée de cette dernière.) Le théorème 1.2.36, en fait un cas particulier, affirme que D(ShvNis(SmRig/k,Z)) estengendrée, en tant que catégorie triangulée avec petites sommes, par les faisceaux représentés par des k-affinoïdes ayantpotentiellement bonne réduction. (Rappelons qu’un k-affinoïde X admet bonne réduction s’il possède un modèle formelX lisse sur k ; il admet potentiellement bonne réduction s’il acquiert bonne réduction après extension des scalaires àune extension finie de k.) Ce théorème nécessite que la valuation de k soit discrète et que k est de caractéristique nulle.Dans ce cas, on a k = k((π)), le corps des séries de Laurent en l’uniformisante π. Ce résultat est surprenant surtout,

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qu’en général, il est impossible de couvrir une variété rigide (même lisse) par des affinoïdes ayant potentiellement bonneréduction. De plus, il est propre à la géométrie rigide est n’admet pas d’analogue (non-vide) en géométrie algébrique.

La construction

Il n’est guère surprenant pour le lecteur familier avec la théorie de Morel et Voevodsky qu’il est possible deconstruire une catégorie homotopique stable RigSH(k) à partir du site Nisnevich des k-variétés rigides lisses muni del’intervalle B1

k, qui est la boule de Tate. J’explique les détails de cette construction dans les paragraphes 1.3.1 (versioninstable) et 1.3.3 (version stable) de la section 1.3. Les objets de RigSH(k) sont les motifs rigides. À toute k-variétérigide lisse V , il est associé un motif rigide M(V ). Je construis également un foncteur d’analytification :

(1) Rig∗ : SH(k) // RigSH(k)

qui étend le foncteur d’analytification usuel associant à un k-schéma lisse X la k-variété rigide lisse Xan (cf. §1.1.3).Plus précisément, on a un isomorphisme canonique Rig∗M(X) ' M(Xan) avec M(X) le motif (usuel) associé à X.

Dans le paragraphe 1.3.2, j’étudie les motifs rigides des analytifiés de certains k-schémas simples, les Qgeop (X, f).Ici, on suppose que k = k((π)) avec car(k) = 0. Étant donnés un k-schéma lisse X, une fonction inversible f ∈ Γ(X,O×)et un entier non-nul p ∈ N, on a Qgeop (X, f) = (X ⊗k k)[V ]/(V p − π · f). Du point de vue des familles paramétréespar le k-schéma Spec(k), la famille Qgeop (X, f) est quasi-constante. En fait, elle devient constante après extension desscalaires à k[π1/p]. Le théorème 1.3.11 affirme que le motif rigide M((Qgeop (X, f))an) associé à l’analytifié de Qgeop (X, f)

est isomorphe au motif rigide d’une k-variété rigide quasi-compacte Qrigp (X, f) définie comme étant la fibre génériquede la complétion formelle en la fibre spéciale du k-schéma (X ⊗k k)[V ]/(V p − π · f). Ce résultat technique, dontla preuve occupe la totalité du paragraphe 1.3.2, est néanmoins assez utile. Joint au le théorème 1.2.36 (dont il étaitquestion ci-dessus), il permet de montrer que l’image du foncteur (1) est dense dans RigSH(k), i.e., engendre lacatégorie triangulée avec petites sommes RigSH(k). Mieux encore, sachant que SH(k) est engendrée par les motifsdes k-schémas projectifs et lisses, on déduit aussitôt que RigSH(k) est engendrée par les motifs rigides des analytifésde tels k-schémas. On obtient au passage que tout objet compact de RigSH(k) est fortement dualisable.

Les résultats principaux

Les deux résultats principaux du chapitre 1 sont résumés dans la scholie 1.3.26. Ces résultats sont sans doute laraison d’être de ce chapitre, et même de tout ce travail.

Le premier résultat (cf. la première partie de la scholie 1.3.26) décrit complètement la catégorie RigSH(k), lorsquek = k((π)) et car(k) = 0, comme une sous-catégorie pleine de SH(Gmk), la catégorie homotopique stable des Gmk-schémas. Plus précisément, soit QUSH(k) ⊂ SH(Gmk) la sous-catégorie triangulée avec petites sommes engendréepar les motifs des Gmk-schémas Qgmp (X, f) =

X[V, T, T−1]/(V p − f · T )→ Spec(k[T, T−1])

. Ici, comme avant, X

est un k-schéma lisse, f ∈ Γ(X,O×) et p ∈ N − 0. Pour des raisons évidentes, QUSH(k) est appelée la catégoriedes variations quasi-unipotentes de motifs sur Gmk. Alors, la composition de

(2) QUSH(k) ⊂ SH(Gmk)π∗// SH(k)

Rig∗// RigSH(k)

est une équivalence de catégories. À ma connaissance, l’idée d’une telle équivalence est nouvelle et n’est jamais apparueauparavant dans la littérature, par exemple en théorie de Hodge.

La preuve que (2) est une équivalence de catégories est longue et difficile. Dans le paragraphe 1.3.4 je montrecomment obtenir cette équivalence à partir de deux autres énoncés, à savoir les théorèmes 1.3.37 et 1.3.38. Cetteréduction est basée sur les théorèmes 1.2.36 et 1.3.11 dont il était question plus haut. Dans ce même paragraphe, jedémontre le théorème 1.3.37. Ici, l’ingrédient clef est le théorème de chagement de base pour un morphisme projectifpour les catégories homotopiques stables des schémas (voir [Ayo07a, Ch. I] et l’appendice I.A). La preuve du théorème1.3.38 sera réléguée à la fin du chapitre 1. Elle repose sur l’existence d’un 2-foncteur homotopique stable (au sens de[Ayo07a, Ch. I]) sur Spec(k) qui étend convenablement la catégorie RigSH(k). La construction d’un tel 2-foncteurhomotopique stable occupe les quatre premiers paragraphes de la section 1.4. La preuve proprement dite du théorème1.3.38 est donnée au paragraphe 1.4.5.

L’équivalence de catégories (2) fournit à mon avis l’approche la plus naturelle à la théorie des motifs limites,analogues motiviques des structures de Hodge limites. Le lien avec mon approche précédente des foncteurs motifsproches fait l’objet de la seconde partie de la scholie 1.3.26. Il s’agit là du deuxième résultat principal du chapitre1, qui affirme que le foncteur motif proche Ψ : SH(k) // SH(k) défini dans [Ayo07a, Ch. IV] est naturellementisomorphe à la composition de

RigSH(k)(2)' QUSH(k) ⊂ SH(Gmk)

1∗// SH(k),

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avec 1 : Spec(k)→ Gmk la section unité. La preuve de cette comparaison se trouve dans §1.3.4.

L’approche par les transferts ou le deuxième chapitre

Comme avant, k est un corps complet non archimédien. On note k son anneau de valuation et k son corps résiduel.

Les ingrédients de la construction

Ici, l’ingrédient supplémentaire est la notion de correspondances finies en géométrie rigide. Il s’agit d’une extensiondirecte de la notion de correspondances finies entre k-schémas lisses. Le seul point qui mérite d’être noté ici concernela méthode que j’ai choisie. En effet, il existe (au moins) deux méthodes possibles. La première, celle de [VSF00],consiste à définir les correspondances finies entre deux variétés rigides X et Y à l’aide des sous-variétés de X×kYqui sont irréductibles, finies et surjectives sur une composante connexe de X. Ensuite, on définit la compositiondes correspondances finies à l’aide de la formule de multiplicité de Serre et on vérifie l’associativité. La secondeméthode, celle de [SV96], consiste à introduire les correspondances finies via la topologie fh. Plus précisément, lescorrespondances finies entre X et Y sont certains morphismes de préfaisceaux entre les fh-faisceaux associés auxpréfaisceaux X ⊗ Z et Y ⊗ Z. Cette deuxième méthode a le vertu de rendre obsolète la question de l’associativité dela composition.

Sans raison vraiment valable, j’ai choisi ici d’étendre la notion de correspondance finie à la géométrie rigide enutilisant la méthode de [SV96]. Ceci est l’objet des paragraphes 2.2.1 et 2.2.2 de la section 2.2. Une fois la constructionterminée, on obtient la catégorie RigCor(k) (ou sa version relative RigCor(B)). Les objets de cette catégorie sontles k-variétés rigides lisses et les flèches sont les correspondances finies. La catégorie des préfaisceaux additifs surRigCor(k) est notée RigPST(k) et ses objets sont appelés les préfaisceaux avec transferts sur SmRig/k.

Encore une fois, il n’est nullement surprenant qu’en utilisant la catégorie RigPST(k), la topologie Nisnevich etla boule de Tate, on puisse construire une catégorie RigDM(k), analogue rigide de la catégorie DM(k) des motifstriangulés de Voevodsky. Je décris la construction de cette catégorie seulement vers la fin du chapitre 2 (§2.5.1), mais,logiquement, cette construction aurait pu se faire juste après le paragraphe 2.2.2.

La fibre d’un préfaisceau invariant par homotopie

Le paragraphe 2.2.4 contient quelques résultats spécifiques concernant les préfaisceaux avec transferts invariantspar homotopie en géométrie rigide. Ces résultats jouent un rôle important dans la preuve du résultat principal duchapitre 2, à savoir le théorème 2.4.9. Bien entendu, un préfaisceau F sur SmRig/k est dit invariant par homotopie sile morphisme F (X) // F (B1

X) est un isomorphisme pour toute k-variété rigide lisse.Je commence d’abord par le théorème 2.2.49 dont je décris un cas particulier. Suppsons donnés un k-affinoïde

lisse B et deux B-affinoïdes lisses X et Y . Soit p ∈ M(B) un point générique de B. Il existe alors un isomorphismecanonique

(3) ColimU∈Flt(p)π0CorU (X×BU, Y ×BU) ' π0Cork(p)(Xp, Yp).

Ci-dessus, π0Cor(−,−) désigne le groupe des correspondances finies à homotopie près (cf. la définition 2.2.33), Flt(p)désigne le filtre des voisinages de p dans B, et (−)p désigne la fibre au dessus de p. La preuve du théorème 2.2.49occupe une grande partie du §2.2.4 et repose d’une manière essentielle sur le théorème de Popescu [Pop85, Pop86].(La validité de l’isomorphisme (3) suppose en fait quelques conditions techniques sur X, Y et p que je passe icisous-silence.) Il est important de noter que le théorème 2.2.49 est spécifique à la géométrie rigide. En effet, l’énoncéanalogue en géométrie algébrique est faux, déjà pour Y = GmB (exercice facile !).

Le théorème 2.2.49 est ensuite utilisé pour définir la fibre d’un préfaisceau avec transferts invariant par homotopie(cf. la définition 2.2.58). Je termine le paragraphe 2.2.4 avec le lemme 2.2.59 qui compare la cohomologie (pour lesrecouvrements admissibles) d’un préfaisceau avec transferts invariant par homotopie avec la cohomologie de sa fibre.

Construction de correspondances finies à homotopie près

Dans la section 2.3, j’adapte une partie du matériel dans [MVW06, Lect. 11 & 21]. La traduction dans le langagede la géométrie rigide est souvent délicate et non-triviale.

Soit B un k-affinoïde lisse et X une B-courbe affinoïde lisse. Suivant [MVW06], je définis la notion de bonnecompactification de X. Il s’agit d’un B-schéma projectif X de dimension relative 1, dans lequel X se plonge et telque le complémentaire de son image est contenu dans un ouvert Zariski qui est affine. Étant donnée une B-courbe Xmunie d’une bonne compactification X, je définis le groupe de Picard relatif PicX(X) (cf. la définition 2.3.6). C’estle groupe des classes d’isomorphismes de OX -modules inversibles munis d’une trivialisation sur un voisinage affinoïde

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(presque rationnel) de Xan −X. Ce groupe n’est pas invariant par homotopie. Il est donc naturel de considérer sonquotient PicB

1

X (X) défini par le coégalisateur de la double flèche

PicB1B×BX(B1

B×BX)1∗//

0∗// PicX(X).

(Cette étape est inutile en géométrie algébrique !) J’exhibe ensuite un isomorphisme canonique π0CorB(B,X) 'PicB

1

X (X) (cf. le théorème 2.3.12) dont l’analogue algébrique est bien connu dans la théorie de Voevodsky. Il en résultedeux méthodes de constructions de correspondances finies à homotopies près. Elle sont contenues respectivement dansles propositions 2.3.14 et 2.3.16. La première proposition est nouvelle et propre à la géométrie rigide alors que la secondeest l’analogue de [MVW06, Prop. 11.15]. D’ailleurs, je m’en sers, en calquant le preuve de [MVW06, Th. 21.6], pourdéduire le théorème 2.3.17 qui entraîne que certains recouvrements admissibles d’un ouvert affinoïde de (P1

k)an sontacycliques par rapport à tout préfaisceau avec transferts invariant par homotopie.

Le résultat principal

Le résultat principal du chapitre 2 admet un analogue algébrique bien connu dans la théorie de Voevodsky, àsavoir [MVW06, Th. 24.1]. Il affirme que si F est un préfaisceau avec transferts, (faiblement) surconvergent etinvariant par homotopie sur SmRig/k, il en est de même de ses préfaisceaux de cohomologie Hi

ra(−, F ) (cf. le théorème2.4.9 pour les conditions de validité du résultat). On en déduit aussitôt que la catégorie OHStr(k) des faisceaux avectransferts surconvergents et invariants par homotopie est une sous-catégorie abélienne stable par sous-objets, quotientset extensions de la catégorie de tous les faisceaux Nisnevich avec transferts.

Comme dans le cas algébrique, la preuve du théorème 2.4.9 se fait en deux étapes. La première étape est uneétude détaillée de la cohomologie des domaines affinoïdes de la boule de Tate à valeurs dans F , le préfaisceau avectransferts, (faiblement) surconvergent et invariant par homotopie sur SmRig/k. Le but de cette étude est de prouverque la restriction de F au petit site des domaines affinoïdes la boule de Tate est acyclique (cf. le théorème 2.4.2). Dansla seconde étape on démontre que

(4) Hira(X,F ) // Hi

ra(B1X , F )

est inversible en se ramenant au cas où X est le spectre d’un corps. Toutefois, il me semble assez juste de dire que lesarguments dans chacune de ces deux étapes diffèrent radicalement des arguments de Voevodsky. En effet, la topologiede la Boule de Tate étant bien plus complexe que la topologie de Zariski de la droite affine, la preuve du théorème2.4.2 est nettement plus pénible que celle du résultat analogue en géométrie algébrique. En effet, je suis amené à faireune preuve cas par cas basée sur le théorème 2.1.11. Par contre, la seconde étape, qui traite du morphisme (4), estnettement plus simple que l’étape correspondante en géométrie algébrique. Ceci est largement dû aux résultats duparagraphe 2.2.4, et notamment à l’existence d’un bon «foncteur fibre» pour les préfaisceaux invariants par homotopiequi de plus est cohomologiquement inerte (par le lemme 2.2.59).

La structure de la catégorie RigDM(k)

Comme c’est le cas en géométrie algébrique, on peut utiliser le théorème 2.4.9 pour mieux comprendre la structurede la catégorie triangulée RigDM(k) et de ses objets. J’ai entassé les conséquences de ce théorème dans le paragraphe2.5.2.

Une première conséquence est le théorème 2.5.32. Un cas particulier significatif de ce théorème affirme que le motifde l’analytifié Xan d’un k-schéma lisse est donné, à un quasi-isomorphisme de faisceaux près, par SingB1

· (Ztr(Xan)).Ce complexe est nul en degrés strictement négatifs et il est donné en degré n ≥ 0 par le faisceau Cork(∆n

rig×k−, Xan)

avec ∆nrig = Spm(kt0, . . . , tn/(1−

∑ni=0 ti)) est le n-ème simplexe rigide. Ce résultat permet en particulier d’expri-

mer les groupes homRigDM(k)(1,M(Xan)) en termes de cycles algébriques (ici, 1 = M(Spm(k)) est l’objet unité deRigDM(k)).

Une deuxième conséquence est la réalisation de la catégorie OHStr(k) comme le cœur d’une t-structure homoto-pique sur la catégorie RigDM(k). Ce résultat (cf. le corollaire 2.5.36 et le théorème 2.5.37) est beaucoup plus difficileque son analogue algébrique à cause de la propriété de surconvergence. Il repose en effet, d’une manière essentielle,sur le théorème 2.5.35 qui affirme que la catégorie RigDM(k) est compactement engendrée par les motifs rigides desanalytifiés des k-schémas projectifs et lisses.

Une troisième conséquence est le théorème de simplification (cf. le théorème 2.5.38). La preuve ici est largementcalquée sur celle de Voevodsky en géométrie algébrique.

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Déscrition en termes de motifs algébriques

On termine le chapitre 2 avec l’analogue avec transferts de la première partie de la scholie 1.3.26. Supposons,pour simplifier, que k = k((π)) avec car(k) = 0. On note (comme dans le chapitre 1) QUDM(k) ⊂ DM(Gmk) lasous-catégorie triangulée avec petites sommes compactement engendrée par les motifs des Gmk-schémas Qgmp (X, f).Ici, comme avant, X est un k-schéma lisse, f ∈ Γ(X,O×) et p ∈ N− 0. Alors, la composition de

(5) QUDM(k) ⊂ DM(Gmk)π∗// DM(k)

Rig∗// RigDM(k)

est une équivalence de catégories (cf. le théorème 2.5.54 pour un énoncé plus précis et plus général). Toutefois, lapreuve de ce résultat est beaucoup plus directe que la preuve du résultat analogue du chapitre 1. Une telle preuve estpossible grâce au théorème 2.5.32.

Quelques applications potentiellesJe termine cette introduction succincte par quelques applications potentielles.

K-théorie et cobordisme pour les variétés rigides

On peut utiliser la catégorie RigSH(k) pour attacher à une k-variété rigide lisse des groupes de K-théorie etde cobordisme. En effet, Voevodsky a construit un P1-spectre BGL, objet de la catégorie homotopique stable des k-schémas SH(k), qui représente la K-théorie algébrique des k-schémas lisses. En appliquant le foncteur d’analytificationRig∗ : SH(k) // RigSH(k) on obtient un objet BGLan de RigSH(k). On définit alors les groupes de K-théoried’une k-variété rigide lisse X en posant

(6) Ki(X) = homRigSH(k)(M(X),BGLan[i])

où M(X) est le motif, ou plutôt le type d’homotopie motivique stable, de la k-variété rigideX. De même en appliquant lefoncteur Rig∗ au spectre de cobordisme algébrique MGL, défini également par Voevodsky, on obtient un objet MGLan

de RigSH(k). Les groupes de cobordismes attachés à une k-variété rigide lisse X sont alors

(7) Ωi,j(X) = homRigSH(k)(M(X),MGLan[i](j)).

Lorsque k est d’égale caractéristique nulle et que sa valuation est discrète, il est possible de décrire les groupes deK-théorie et de cobordisme d’une k-variété rigide lisse X en termes des groupes de K-théorie ou de cobordisme decertains schémas sur le corps résiduel k de k apparaissant dans les réductions deX. Ceci est une conséquence immédiatede la scholie 1.3.26 qui permet de réaliser RigSH(k) comme une sous-catégorie pleine de SH(Gmk). En effet, il estfacile de voir que Ki(X) ' homSH(Gmk)(F

−1M(X),BGL[i]) et pareillement pour Ωi,j(X).De même, on peut attacher à une variété rigide lisse des groupes de cohomologie motivique. Ils sont définis par

(8) Hp(X, q) = homRigDM(k)(M(X),1[p](q))

avec 1 l’objet unité de RigDM(k) et M(X) le motif associé à X. Il est alors naturel de définir les groupes de Chowde X en posant

(9) CHd(X) = H2d(X,1(d)).

Toutefois, on ne dispose pas d’une description simple des groupes CHd(X) en termes de sous-variétés fermées de Xque pour d = 0 ou d = dim(X).

Application aux foncteur motifs proches

La motivation initiale de ce travail était l’étude du foncteur motif proche introduit dans [Ayo07a]. L’idée d’un lienentre la géométrie rigide et les motifs proches a commencé à germer suite à mes tentatives infructueuses de montrerque le foncteur motif proche (restreint aux motifs constructibles) est conservatif (voir [Ayo07b]).

Soit S = Spec(A) le spectre d’un anneau de valuation discrète d’égale caractéristique nulle. On note η = Spec(K)(resp. σ = Spec(k)) son point ouvert (resp. fermé). Soit X une K-variété projective et lisse. On voudrait étudierl’homomorphisme (et en particulier son noyau !)

(10) CHd(X) = homDM(K)(Z(d)[2d],M(X)) // homDM(k)(Z(d)[2d],ΨM(X)) 1

1. Strictement parlant, le foncteur Ψ n’est pas défini explicitement dans la littérature. Lorsqu’on travaille à coefficients rationnels, onpeut toutefois utiliser les équivalences de catégories SH(k)Q,+ ' DM(k)Q et SH(k)Q,+ ' DM(k)Q de Morel [Mor06] pour définir lefoncteur Ψ sur DM(k). On peut aussi utiliser le présent travail pour définir Ψ comme étant la composition de DM(k) → RigDM(k) 'QUDM(k) ⊂ DM(Gmk)

1∗→ DM(k).

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avec M(X) le motif de Voevodsky de X. Notons i et j les immersions de σ et η dans S. On dispose alors d’unetransformation naturelle i∗j∗ // Ψ et l’homomorphisme

(11) homDM(k)(Z(d)[2d], i∗j∗M(X)) // homDM(k)(Z(d)[2d],ΨM(X))

est facile à décrire en utilisant le triangle de monodromie (voir [Ayo07a]). Il reste donc à comprendre l’homomorphisme

(12) CHd(X) = homDM(K)(Z(d)[2d],M(X)) // homDM(k)(Z(d)[2d], i∗j∗M(X)) .

Dans ce travail, j’obtiens une description rigide-géométrique de l’homomorphisme ci-dessus. C’est la suivante.Le groupe de Chow des d-cycles dans X peut être réalisé comme le d-ième groupe d’homologie du complexe de

correspondances finies

(13) Cor((Gm, 1)∧d ×∆·, X)

avec ∆n = Spec(K[t0, . . . , tn]/(1 −∑ni=0 ti)). Rappelons que Cor((Gm, 1)∧d × Y,X) désigne le sous-groupe des cor-

respondances finies de Gmd × Y dans X qui s’annulent sur les hypersurfaces Gmi × 1 ×Gmj × Y ⊂ Gmd × Y pouri + j = d − 1. Supposons maintenant que K est complet. On peut former l’analogue rigide-analytique de (13). C’estle complexe

(14) Cor((∂B1, 1)∧d ×∆·rig, Xan)

avec ∂B1 le bord de la boule de Tate B1, ∆nrig = Spm(Kt0, . . . , tn/(1−

∑ni=0 ti)) et Xan la variété analytique rigide

associée à X. On dispose d’un morphisme naturel de complexes

(15) Cor((Gm, 1)∧d ×∆·, X) // Cor((∂B1, 1)∧d ×∆·rig, Xan)

induit par le foncteur d’analytification et les inclusions évidentes ∂B1 ⊂ Gman et ∆nrig ⊂ (∆n)an. Alors, (12) s’identifie

à l’homomorphisme induit par (15) sur les groupes d’homologie en degré d.

Groupes de Galois, groupes de décomposition et groupes d’inertie motiviques

Soit K un corps muni d’une valuation discrète v de corps résiduel k. On note G(K) le groupe de Galois de K.On peut associer à v un sous-groupe D(v) ⊂ G(K) défini à conjugaison près. C’est le groupe de décomposition dev. Il est muni d’une surjection D(v) // // G(k) de noyau le groupe d’inertie I(v) de v. J’expliquerai ici comment lathéorie des motifs rigides permet (d’une façon conjecturale, mais voir aussi [Ayo10]) d’étendre ces notions classiquesaux groupes de Galois motiviques, espérant ainsi convaincre le lecteur de la pertinence de cette nouvelle théorie.

Pour simplifier, je supposerai que K est de caractéristique nulle. Il est conjecturé qu’un groupe de Galois motiviqueG(K,σ) est canoniquement associé à tout plongement σ : K ⊂ C. Plus précisément, il devrait exister une t-structure,dite motivique, sur la catégorie triangulée DMct(K,Q) des motifs constructibles (ou encore géométriques) à coefficientsrationnels dont le cœur MM(K) est une catégorie tannakienne. Le plongement σ induit alors un foncteur fibre surMM(K) dont le pro-groupe algébrique d’automorphismes est G(K,σ).

On notera K le complété de K pour la valuation v. Pour simplifier, on supposera que le corps résiduel k est decaractéristique nulle et on fixe un plongement σ : k ⊂ C. Par le chapitre 2, on dispose d’une équivalence de catégoriesentre RigDM(K,Q) et une sous-catégorie QUDM(k,Q) de DM(Gmk,Q). Considérons la composée

(16) fv,σ : DM(K,Q)Rig∗// RigDM(K,Q) ' QUDM(k,Q) ⊂ DM(Gmk,Q)

1∗// DM(k,Q)

H∗σ// D(Q)

avec 1∗ le pull-back suivant la section unité de Gmk et H∗σ la réalisation de Betti associée au plongement σ. Alors, fv,σse restreint en un foncteur fibre de la catégorie tannakienne MM(K). Le pro-groupe algébrique des automorphismesde ce foncteur fibre sera noté G(K, v, σ). Par le formalisme tannakien, on dispose d’un isomorphisme non canoniquede pro-groupes algébriques

(17) G(K, v, σ)⊗Q Q ' G(K,σ)⊗Q Q.

Par ailleurs, il doit exister une t-structure motivique sur RigDMct(K,Q) dont le cœur RigMM(K) est unecatégorie tannakienne. Cette t-structure devrait correspondre via l’équivalence RigDM(K,Q) ' QUDM(k,Q) à larestriction de la t-structure motivique sur DMct(Gmk,Q). La composée

(18) f ′σ : RigDM(K,Q) ' QUDM(k,Q) ⊂ DM(Gmk,Q)1∗// DM(k,Q)

H∗σ// D(Q)

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xi

induit un foncteur fibre dont le pro-groupe algébrique d’automorphismes est noté Grig(K, σ). Le foncteur Rig∗, quel’on conjecture être exact, induit un morphisme de pro-groupes algébriques

(19) Grig(K, σ) // G(K, σ)

qui devrait être un monomorphisme. Il est alors naturel de noter D(v, σ) le pro-groupe algébrique Grig(K, σ) et del’appeler le groupe de décomposition motivique de v.

Par ailleurs, le foncteur d’image inverse DM(k,Q) // QUDM(k,Q) suivant la projection structurale de Gmk

sur Spec(k) induit un morphisme de pro-groupes algébriques

(20) D(v, σ) = Grig(K, σ) // G(k, σ)

qui devrait être une surjection. Le noyau de cette surjection sera noté I(v, σ). C’est le groupe de d’inertie motiviquede v.

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Table des matières

1 Motifs des variétés rigides analytiques I 11.1 Rappels et compléments de géométrie rigide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

1.1.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11.1.2 Algèbres affinoïdes et variétés rigides . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31.1.3 Le foncteur d’analytification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51.1.4 La fibre générique de Raynaud et les modèles formels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71.1.5 Points en géométrie rigide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111.1.6 Morphismes lisses et étales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151.1.7 Modèles semi-stables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251.2.1 Définition et propriétés basiques de la topologie de Nisnevich . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261.2.2 Carrés Nisnevich et propriété de Brown-Gersten . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 331.2.3 Engendrement par des k-affinoïdes à potentiellement bonne réduction . . . . . . . . . . . . . . 391.2.4 Topologies Nisnevich et foncteur d’analytification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 441.3.1 Construction et propriétés élémentaires : cas instable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 441.3.2 Motifs rigides de quelques variétés algébriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 471.3.3 Construction et propriétés élémentaires : cas stable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 531.3.4 Énoncé du résultat principal et réductions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 701.4.1 Les k-schémas rigides . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 701.4.2 La construction des dérivateurs RigSH(−) et FSH(−) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 721.4.3 L’axiome de localité pour RigSH(−) et FSH(−) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 761.4.4 Fin de la vérification des axiomes et quelques compléments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 831.4.5 Démonstration du théorème 1.3.38 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88

1.A Appendice : complément sur les opérations de Grothendieck dans le monde motivique . . . . . . . . . 91

2 Motifs des variétés rigides analytiques II 972.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97

2.1.1 Domaines de la droite affine et leur cohomologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 982.1.2 Préfaisceaux et faisceaux surconvergents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108

2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide . . . . . . . . . . . . . . . . 1162.2.1 Faisceaux fh et multiplicités d’intersection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1162.2.2 Les catégories de correspondances finies AfndCor(k) et RigCor(k) . . . . . . . . . . . . . . . 1232.2.3 Préfaisceaux avec transferts B1-invariants : propriétés élémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . 1282.2.4 Fibres d’un préfaisceau avec transferts B1-invariant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131

2.3 Invariance par homotopie et groupe de Picard relatif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1422.3.1 Groupe de Picard relatif et correspondances finies à homotopie près . . . . . . . . . . . . . . . 1422.3.2 Construction de correspondances à homotopie près . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148

2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergent et B1-invariant . . . . . . . . . 1532.4.1 Étude de la restriction au petit site de la boule de Tate . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1532.4.2 Invariance par homotopie de la cohomologie et applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1582.4.3 Exemples de préfaisceaux avec transferts, surconvergents et B1-invariants . . . . . . . . . . . . 161

2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1662.5.1 Construction de RigDM(k) et propriétés élémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1662.5.2 Motifs rigides des variétés algébriques et applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1752.5.3 Description en termes de motifs algébriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191

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xiv Table des matières

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Chapitre 1

Motifs des variétés rigides analytiques I :version sans transferts et lien avec lefoncteur motif proche

Introduction. — L’approche homotopique de la géométrie algébrique initiée par Morel et Voevodsky [MV99] setransporte à d’autres contextes (voir par exemple [Rio07]). Reste bien sûr à trouver des cadres particuliers où lathéorie générale nous donne une catégorie homotopique intéressante et utile. Dans ce chapitre, on montre que c’est lecas de la géométrie rigide. Contrairement à [MV99], on travaillera stablement puisqu’on a rien de particulier à diredans le cas instable. Faisons un bref aperçu du chapitre.

Étant donné que le présent travail s’adresse plutôt aux spécialistes des motifs qu’aux spécialistes de la géométrierigide, la première section de ce chapitre sera consacrée à des rappels et des compléments sur les variétés rigides.

Dans la deuxième section, on introduit l’analogue rigide de la topologie de Nisnevich (bien connue en géométriealgébrique). On établit ensuite les analogues rigides de quelques propriétés bien-connues de cette topologie. On terminela section par un résultat d’engendrement pour la catégorie dérivée des faisceaux Nisnevich sur le gros site lisse. Onmontre que cette catégorie est compactement engendrée par les faisceaux représentables par des affinoïdes à bonneréduction. Ce résultat, qui peut paraître surprenant, est particulier au monde rigide et n’admet pas d’analogue engéométrie algébrique.

Dans la troisième section, on définit les catégories homotopiques des variétés rigides. Il s’agit d’extension immédiatesdes définitions en géométrie algébrique. On explique ensuite le lien avec le foncteur motifs proches (construit dans[Ayo07a]) dans la scholie 1.3.26 qui sera démontrée à la fin de la quatrième section.

1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide

Dans cette section on reprend quelques notions de géométrie rigide en suivant [BGR84] et [FP04]. Quelquescompléments seront également donnés.

1.1.1 Généralités

Soit A un anneau commutatif. Une semi-norme (resp. une norme) sur A est une fonction |.| : A // R≥0

vérifiant les propriétés suivantes (pour (a, b) ∈ A2) :

1. |1| ≤ 1 et |0| = 0 (resp. |a| = 0⇔ a = 0),

2. |a.b| ≤ |a| × |b|,3. |a+ b| ≤ max(|a|, |b|).

Le couple (A, |.|) est appelé un anneau semi-normé (resp. normé). Si P ⊂ A est une partie de A, on note |B| l’imagede B par |.|. On a forcément |1| = 1 ou |A| = 0. Tout anneau A peut être muni de la norme triviale pour laquelle|A− 0| = 1.

On note A = a ∈ A, |a| ≤ 1 et A∨ = a ∈ A, |a| < 1. Il est clair que A est un sous-anneau semi-normé(resp. normé) de A et que A∨ est un idéal de A. L’anneau quotient A = A/A∨ est appelé l’anneau résiduel de lasemi-norme (resp. norme) |.|.

Notons deux constructions de semi-normes :

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2 Motifs des variétés rigides analytiques I

Exemple 1.1.1 — 1- Soient (A, |.|) un anneau semi-normé et p : A // // B un morphisme surjectif d’anneaux.On définit une semi-norme |.|p sur B en posant |b|p = infa∈p−1(b)|a|. C’est la semi-norme résiduelle sur B. LorsqueB = A/ ker |.| avec ker |.| = a ∈ A, |a| = 0, la semi-norme |.|p est alors une norme. Plus généralement, |.|p est unenorme si et seulement si l’idéal p−1(0) est fermé dans A (i.e., 0 appartient à l’adhérence de |a + p−1(0)| ⊂ R si etseulement si a ∈ p−1(0)).

2- Soient (B1, |.|) et (B2, |.|) deux anneaux semi-normés qui sont des A-algèbres pour un anneau A. On définit unesemi-norme sur l’anneau B1 ⊗A B2 en posant pour v ∈ B1 ⊗A B2

|v| = infsup|b11| × |b21|, . . . , |b1r| × |b2r|; v = b11 ⊗ b21 + · · ·+ b1r ⊗ b2r.

Une semi-norme |.| sur un anneau A est dite multiplicative lorsque l’égalité |a.b| = |a|.|b| est vérifiée pour tout(a, b) ∈ A2. Une valuation est une norme multiplicative. Si (k, |.|) est un corps valué, l’anneau k est un anneau devaluation de hauteur ≤ 1. Cette hauteur est nulle si et seulement si la valuation de k est triviale. On dit que lavaluation |.| est discrète lorsqu’elle est non triviale et que le sous-groupe |k×| ⊂ R×>0 est discret, i.e., de la forme αZ

pour un réel 0 < α < 1. On appelle alors uniformisante de k un élément π ∈ k∨ tel que |π| = α. C’est un générateurde l’idéal maximal k∨ ⊂ k.

Les algèbres ci-dessous jouent le rôle des algèbres de polynômes dans le cadre des anneaux semi-normés :

Definition 1.1.2 — Soit (A, |.|) un anneau semi-normé. Une série formelle en n variables T1, . . . , Tn :

f =∑

ν1,...,νn∈Naν1,...,νnT

ν11 . . . T νnn

est dite strictement convergente si |aν1,...,νn | → 0 lorsque ν1 + · · · + νn → ∞. L’ensemble des séries formelles stric-tement convergentes est noté AT1, . . . , Tn. C’est une sous A-algèbre de A[[T1, . . . , Tn]]. L’association f |f | =supν1,...,νn |aν1,...,νn | définit une semi-norme sur AT1, . . . , Tn appelée la semi-norme de Gauss (et qui est une normesi et seulement si |.| est une norme sur A).

Remarque 1.1.3 — On a clairement la formule (AT1, . . . , Tn) = AT1, . . . , Tn. De plus, l’anneau résiduel deAT1, . . . , Tn s’identifie canoniquement à l’algèbre de polynômes A[T1, . . . , Tn].

Une semi-norme |.| induit une pseudo-distance d sur A définie par d(a, b) = |a−b|. On en déduit alors une topologiesur A. Cette topologie est séparée (ou encore d est une distance) si et seulement si |.| est une norme.

Soient (A, |.|) et (B, |.|) deux anneaux semi-normés et f : A // B un morphisme d’anneaux. On dit que f estcontinu si l’application sous-jacente est continue pour les topologies induites par les normes. On dit que f est borné s’ilexiste une constante M ∈ R telle que |f(a)| ≤M.|a| pour tout a ∈ A. Il est clair qu’un morphisme borné est continu.Lorsque l’on peut prendre M = 1, on dit alors que f est contractant. On dit enfin que f est isométrique si l’égalité|f(a)| = |a| est toujours vérifiée.

L’anneau semi-normé (A, |.|) est dit complet lorsque l’espace métrique (A, d) vérifie le critère de Cauchy. Celarevient à dire qu’une série

∑n∈N an d’éléments de A converge si et seulement si limn→∞ |an| = 0. Étant donné un

anneau semi-normé (A, |.|), on appelle complétion de A, un anneau semi-normé complet (A, |.|) muni d’un morphisme

isométrique A // A d’image dense. On a le lemme suivant (voir [BGR84, Proposition 1.1.7/5 and 6]) :

Lemme 1.1.4 — Tout anneau normé (A, |.|) admet une complétion (A, |.|) unique à un isomorphisme unique près.De plus, on a |A| = |A|.

Demonstration Soit C(A) l’anneau des suites de Cauchy de A. Les éléments de C(A) sont donc des suites (an)n∈Ntelles que limn→∞ |an+1 − an| = 0. On définit une semi-norme sur C(A) en posant |(an)n∈N| = limm→∞ |am|. Cettelimite existe puisque ||an| − |am|| ≤ |an − am|. De plus, |(an)n∈N| ∈ |A|. En effet, si |(an)n∈N| = α > 0, il existe unentier N tel que |an+m − an| < α pour tout n ≥ N et m ≥ 0. Il vient que |an+m| = |an|. La suite des norme (|an|)nest donc stationnaire à partir de N .

L’anneau C(A) est complet (voir [BGR84, Proposition 1.1.7/5] pour les détails). On définit alors A comme étantle quotient de C(A) suivant l’idéal I(A) des suites de Cauchy de norme 0. L’anneau (A, |.|) est alors normé et complet.L’unicité est facile. En effet, tout morphisme isométrique f : A // B vers un anneau normé complet B, s’étend enun morphisme isométrique C(f) : C(A) // B qui à une suite de Cauchy (an)n∈N associe la limite de (f(an))n∈N.

Il est clair que C(f) s’annule sur l’idéal I(A). D’où un morphisme f : A // B . Si de plus, f(A) est dense dans B,f est bijective (car surjective et isométrique). c.q.f.d

Lorsque (A, |.|) est seulement semi-normé, on notera aussi (A, |.|) la complétion de A/ ker |.|. Si (B1, |.|) et (B2, |.|)sont deux anneaux semi-normés qui sont des A-algèbres pour un anneau A, on notera B1⊗AB2 le complété de B1⊗AB2

pour la semi-norme de l’exemple 1.1.1. On vérifie facilement le résultat suivant :

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 3

Proposition 1.1.5 — Soit (A, |.|) un anneau normé complet.1- L’anneau normé AT1, . . . , Tn est encore complet. De plus, il coïncide avec la complétion de son sous-anneau

A[T1, . . . , Tn].2- Le morphisme évident AT1, . . . , Tn ⊗A AS1, . . . , Sm // AT1, . . . , Tn, S1, . . . Sm induit un isomorphisme

AT1, . . . , Tn⊗AAS1, . . . , Sm ' AT1, . . . , Tn, S1, . . . Sm.

1.1.2 Algèbres affinoïdes et variétés rigides

On fixe un corps valué complet (k, |.|). Sauf mention explicite du contraire, on ne supposera pas la valuation de knon triviale. Lorsque la valuation de k est triviale, les notions développées correspondrons à des notions classiques degéométrie algébrique.

Rappelons qu’une k-algèbre de Banach est une k-algèbre A compète pour une norme |.|A telle que |a.f |A = |a|×|f |Aquelque soit (a, f) ∈ k ×A. Un exemple fondamental (pour nous) de k-algèbres de Banach est donné par la k-algèbrekT1, . . . , Tn munie de la norme de Gauss (qui est en fait une valuation). Cette algèbre est noethérienne et tous sesidéaux sont fermés. Si x ⊂ kT1, . . . , Tn est un idéal maximal, son corps résiduel k(x) est une extension finie de k. Lesanneaux de fonctions en géométrie rigide sont (localement) donnés par des k-algèbres de Banach particulières appeléesles k-algèbres affinoïdes :

Definition 1.1.6 — Une k-algèbre A est appelée une k-algèbre affinoïde s’il existe un morphisme surjectif dek-algèbres kT1, . . . , Tn // // A . Un tel morphisme est appelé une présentation de A.

Étant donnée une présentation p : kT1, . . . , Tn // // A d’une k-algèbre affinoïde A, on peut munir A de lanorme résiduelle |.|p (voir l’exemple 1.1.1). La k-algèbre A est alors de Banach pour cette norme. Bien que |.|p dépenddu choix de la présentation, la topologie induite par |.|p n’en dépend pas. Plus précisément, on montre que toutes lesnormes de Banach sur A sont équivalentes et qu’un morphisme abstrait entre k-algèbres affinoïdes est automatiquementborné pour tout choix de normes de Banach (voir [BGR84, Theorem 6.1.3/1]).

Remarque 1.1.7 — Soit une k-algèbre affinoïde A. Pour f ∈ A, on pose

|f |∞ = supx∈Spm(A)

|f(x)|

avec Spm(A) l’ensemble des idéaux maximaux de A et où les corps k(x) sont munis de l’unique valuation qui étendcelle de k (on utilise ici que les k(x) sont des extensions finies de k). D’après [BGR84, Lemma 6.2.1/1], |.|∞ est unesemi-norme sur A qui est une norme si et seulement si A est réduite. De plus, A est complète pour cette semi-norme.C’est la semi-norme infinie sur A. Tout morphisme u : A // A′ de k-algèbres affinoïdes est contractant pour lessemi-normes infinies. Lorsque A est la k-algèbre des séries strictement convergentes, la norme infinie coïncide avec lanorme de Gauss.

Étant donnés deux morphismes de k-algèbres affinoïdes A // Bi (avec i ∈ 1, 2), le complété B1⊗AB2 del’anneau B1⊗AB2 ne dépend pas du choix des normes de Banach sur les Bi. C’est une k-algèbre affinoïde qui de plusest la colimite du diagramme B1 Aoo // B2 dans la catégorie des k-algèbres affinoïdes.

Definition 1.1.8 — Soient A une k-algèbre affinoïde et f0, f1, . . . , fn ∈ A des éléments engendrant A commeidéal. On note D(f0|f1, . . . , fn) le sous-ensemble des x ∈ Spm(A) défini par les inégalités |f0(x)| ≥ |fi(x)| pour tout1 ≤ i ≤ n. Un tel ensemble est appelé un domaine rationnel.

L’ensemble D(f0|f1, . . . , fn) est en bijection canonique avec Spm(A〈f0|f1, . . . , fn〉) où A〈f0|f1, . . . , fn〉 est la k-algèbre affinoïde AT1, . . . , Tn/(f0T1 − f1, . . . , f0Tn − fn) (voir [FP04, Lemma 4.1.2]). Les domaines rationnels sontstables par intersections finies et vérifient la propriété de transitivité, i.e., un domaine rationnel de Spm(A〈f0|f1, . . . , fn〉)est un domaine rationnel de Spm(A). Un sous-ensemble D ⊂ Spm(A) est un domaine s’il existe un nombre fini dedomaines rationnels Di ⊂ Spm(A) tels que D = ∪iDi. Un sous-ensemble U ⊂ Spm(A) est un ouvert, s’il est uneréunion quelconque de domaines rationnels. On fait la définition suivante :

Definition 1.1.9 — 1- Soient A une k-algèbre affinoïde et f1, f2, . . . , fn ∈ A des éléments engendrant A commeidéal. La famille (

D(fi|f1, . . . , fi, . . . , fn) ⊂ Spm(A))i

est appelée le recouvrement standard associé à f1, f2, . . . , fn ∈ A.2- Soient U un ouvert de Spm(A) et R = (Ui ⊂ U)i∈I une famille d’ouverts de Spm(A) contenus dans U . On dit

que R est un recouvrement admissible de U si pour tout domaine rationnel, D = Spm(B) contenu dans U , la famille(Ui ∩D ⊂ D)i∈I peut être raffinée par un recouvrement standard de Spm(B).

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4 Motifs des variétés rigides analytiques I

3- On dit qu’un ouvert U de Spm(A) est admissible si pour tout morphisme de k-algèbres affinoïdes f : A // Bavec Spm(f)(Spm(B)) ⊂ U il existe un domaine D de Spm(A) contenu dans U et contenant Spm(f)(Spm(B)).

Exemple 1.1.10 — Soient A une k-algèbre affinoïde et D ⊂ Spm(A) un domaine. Une famille finie (Di ⊂ D)i∈Ide sous-domaines est un recouvrement admissible si et seulement si D = ∪iDi (voir [FP04, Lemma 4.2.4])

Definition 1.1.11 — Soit X un ensemble. Une G-topologie τX sur X est la donnée :(i) d’un sous-ensemble Ouv(X) ⊂ P(X) de l’ensemble des parties de X, stable par intersections et réunions finies

(avec la convention que la réunion de la famille vide est la partie vide et l’intersection de la famille vide est Xtout entier). Les éléments de Ouv(X) sont appelés les ouverts de τX .

(ii) d’une topologie de Grothendieck sur l’ensemble ordonné (par l’inclusion) Ouv(X) (vue comme une catégoriedirecte).

L’ensemble Spm(A) sera muni de la G-topologie suivante. On prendra Ouv(Spm(A)) l’ensemble des ouverts ad-missibles de Spm(A). La topologie sur Ouv(Spm(A)) est celle engendrée par les recouvrements admissibles entreouverts admissibles. Une application Spm(f), associée à un morphisme de k-algèbres affinoïdes f , est continue pources G-topologies. Notons Rat(Spm(A)) ⊂ Ouv(Spm(A)) le sous-ensemble des domaines rationnels de A. Si on mu-nit Rat(Spm(A)) de la topologie engendrée par les recouvrements standards, on obtient une équivalence de sitesOuv(Spm(A))

∼// Rat(Spm(A)) .

On montre (voir [FP04, Theorem 4.2.2]) qu’il existe un faisceau sur Rat(Spm(A)) qui à un domaine rationnelD(f0|f1, . . . , fn) associe l’algèbre A〈f0|f1, . . . , fn〉. C’est le faisceau structural qui sera noté O. On peut l’étendre d’unemanière unique en un faisceau de k-algèbres sur Ouv(Spm(A)) qu’on note encore O. On obtient ainsi un G-espaceannelé (Spm(A),O).

Definition 1.1.12 — Un k-affinoïde (ou encore une k-variété affinoïde) est un G-espace annelé isomorphe à(Spm(A),O) pour une certaine k-algèbre affinoïde A. Une k-variété rigide est un G-espace annelé qui est localementun k-affinoïde.

Un morphisme de G-espaces annelés est un morphisme de k-variétés rigides s’il est localement isomorphe à Spm(f)pour f un morphisme de k-algèbres affinoïdes.

Soient A une k-algèbre affinoïde et U ⊂ Spm(A) un ouvert admissible. Alors, (U,O|U ) est naturellement unek-variété rigide. Voici d’autre exemples simples :

Exemple 1.1.13 — 1- Le k-affinoïde Spm(kT) sera noté B1k ou aussi B1

k(o, 1). C’est la boule unité de Tate. Plusgénéralement, si r ∈

√|k×|, le sous-groupe divisible de R×>0 engendré par |k×|, on note B1

k(o, r) le spectre maximal dela k-algèbre affinoïde

kr−1.T =

f =

∑n∈N

anTn; lim

nrn|an| = 0

.

Si r1 ≤ r2, l’inclusion kr−12 T ⊂ kr−1

1 T induit un morphisme B1(o, r1) // B1(o, r2) qui est l’inclusion d’undomaine rationnel. Il est facile de voir que B1(o, r) représente le foncteur qui à un k-affinoïde U = Spm(A) associel’ensemble des f ∈ A tel que |f |∞ ≤ r. En particulier, B1(o, 1) est un k-affinoïde en anneaux.

2- Supposons que la valuation de k est non triviale. La droite affine analytique (A1k)an est définie comme l’union

∪n∈NB1k(o, |π|−n) avec π ∈ k∨ un scalaire non nul. Il est facile de voir que (A1

k)an représente le foncteur qui à une k-variété rigide U associe l’anneau des fonctions globales Γ(U,O). En particulier, (A1

k)an est un anneau dans la catégoriedes k-variétés rigides.

Exemple 1.1.14 — Soient X = Spm(A) une k-variété affinoïde, f ∈ A inversible et p ∈ N − 0. On définit unek-variété affinoïde B1

X(o, f1/p) par le spectre maximal de la k-algèbre affinoïde

(1.1) Af−1/pT =

f =

∑n∈N

anTn ∈ A[[T ]]; lim

n→∞|fnapn|∞ = 0

.

On pensera à B1X(o, f1/p) comme à une famille de boules paramétrée par X et de rayons donnés par la fonction

continue x ∈ X |f(x)|1/p. Pour montrer que (1.1) est bien une k-algèbre affinoïde, on peut supposer que f ∈ A.Dans ce cas, elle coïncide visiblement avec AT〈f |T p〉. Étant donnée une deuxième fonction inversible g ∈ A et undeuxième entier non nul q tels que 1 |g(x)|1/q ≤ |f(x)|1/p pour tout x ∈ X, on définit la couronne Cr1

X(o, g1/q, f1/p) =Spm(Af−1/pT〈T q|g〉). Lorsque f = g et p = q, on note simplement ∂B1

X(o, f1/p) cette couronne. On y penseracomme à la famille de cercles qui bordent la famille de boules B1

X(o, f1/p).

1. Cette condition n’est pas nécessaire pour la définition. Elle assure uniquement que les fibres de la couronne au dessus de X ne sontjamais vides.

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 5

Si X est une k-variétés rigide arbitraire et f, g ∈ Γ(X,O×), les constructions précédentes se recollent pour définirles k-variétés rigides B1

X(o, f1/p), Cr1X(o, g1/q, f1/p) et ∂B1

X(o, f1/p).

On note VarRig/k la catégorie des k-variétés rigides et Afnd/k ⊂ VarRig/k la sous-catégorie pleine des k-variétésaffinoïdes. Elle est équivalente à l’opposée de la catégorie des k-algèbres affinoïdes. La catégorie VarRig/k admet leslimites finies. On notera X×SY le produit fibré de deux k-variétés rigides X et Y au dessus d’une troisième S. Leproduit fibré de k-affinoïdes correspond au produit tensoriel complété des k-algèbres affinoïdes de fonctions.

Une k-variété rigide X est dite quasi-compacte lorsqu’elle est recouverte par un nombre fini de k-affinoïdes. Elle estdite quasi-séparée si elle admet un recouvrement admissible (Ui)i par des affinoïdes tels que Ui∩Uj soit quasi-compactepour tout (i, j).

Étant donnés une k-algèbre affinoïdeA et unA-moduleM , le préfaisceau qui à un domaine rationnel D(f0|f1, . . . , fn)associe M ⊗A A〈f0|f1, . . . , fn〉 est un faisceau 2 sur Rat(Spm(A)) que l’on note a(M) ainsi que son extension àOuv(Spm(A)).

Definition 1.1.15 — Soient (X,OX) une k-variété rigide et M un OX-module. On dit que M est quasi-cohérent(resp. cohérent) s’il existe un recouvrement admissible (Ui = Spm(Ai))i de X par des k-affinoïdes tel que M|Ui soitisomorphe à a(Mi) avec Mi un Ai-module (resp. de type fini).

Soit A est une k-algèbre affinoïde. On montre (voir [FP04, Theorem 4.5.2]) que le foncteur qui à un A-moduleM associe a(M) est une équivalence de catégories entre la catégorie des A-modules de type fini et celles des OSpm(A)-modules cohérents. L’assertion correspondante pour les modules quasi-cohérents est une question ouverte.

Definition 1.1.16 — Un morphisme Y // X de k-variétés rigides est appelé une immersion fermée s’ilexiste un recouvrement admissible (Ui = Spm(Ai))i de X tel que pour tout i le morphisme Y ×X Ui // Ui soit

isomorphe à Spm(Ai/Ii) // Spm(Ai) pour un idéal Ii ⊂ Ai.

Sous les conditions de la définition 1.1.16, les a(Ii) se recollent pour définir un idéal cohérent I ⊂ OX appelé l’idéalde l’immersion fermée. Souvent, on abusera en disant que Y est une sous-variété fermée de X. Comme en géométriealgébrique, on dit qu’un morphisme de k-variétés rigides f : Y // X est séparé si la diagonale Y // Y ×XYest une immersion fermée.

Definition 1.1.17 — Un morphisme j : W // X de k-variétés rigides est appelé une immersion ouvertes’il existe un ouvert admissible U ⊂ X contenant l’image de j tel que pour tout domaine D ⊂ U le morphismeW ×X D // D est inversible.

Il est immédiat de voir qu’une immersion ouverte qui est surjective sur les ensembles de points est forcément unisomorphisme.

1.1.3 Le foncteur d’analytification

Soit A une k-algèbre affinoïde. Une k-algèbre affinoïde B munie d’un morphisme de k-algèbres A // B estappelée une A-algèbre affinoïde. De même, une k-variété rigide X munie d’un morphisme vers Spm(A) sera appeléeune A-variété rigide. La catégorie des A-variétés rigides sera notée VarRig/A. De même, on note Sch/A la catégorie desA-schémas (où A est considéré comme un anneau abstrait). Dans ce paragraphe, nous allons construire un foncteurd’analytification

(1.2) Rig : Schtf/A // VarRig/A ,

qui à un A-schéma de type fini X associe une A-variété rigide Xan. Lorsque la valuation de k est triviale, ce foncteurest simplement l’inclusion de la sous-catégorie des k-schémas de type fini dans celle des k-schémas localement de typefini. On supposera donc dans la suite que la valuation de k est non triviale.

Soit X un A-schéma affine de type fini, on définit un préfaisceau han(X) sur VarRig/A par l’association : U ∈Ob(VarRig/A) homSch/A(Spec(Γ(U,O)), X). On a le lemme suivant :

Lemme 1.1.18 — Le préfaisceau han(X) est représentable.

2. Dans [FP04], on considère uniquement le cas où M est de type fini. Cette condition est superflue. En effet, M est la colimite filtrantede ses sous-modules de type fini et la topologie sur Rat(Spm(A)) est quasi-compacte de sorte qu’une colimite filtrante de faisceaux (prisedans la catégorie des préfaisceaux) est encore un faisceau.

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6 Motifs des variétés rigides analytiques I

Demonstration Soit i : X // AnSpec(A) = Spec(A[T1, . . . , Tn]) une immersion fermée d’idéal I ⊂ A[T1, . . . , Tn].

Le préfaisceau han(X) est le produit fibré de préfaisceaux

0

O(−)n∏i Pi//∏i O(−)

avec (Pi)i une famille génératrice finie de l’idéal I. Comme VarRig/A possède les produits fibrés, il suffit donc de traiterle cas de X = A1

Spec(A). On peut alors prendre Xan = (A1k)an×kSpm(A) avec (A1

k)an la droite analytique rigide del’exemple 1.1.13. c.q.f.d

Si X est seulement supposé de type fini sur A et U ∈ Ob(VarRig/A) on note han(X)(U) l’ensemble des morphismesde G-espaces annelés en A-algèbres qui sont localement de la forme Spm(C) // Spec(C) // Spec(B) pour B

une A-algèbre de type finie, C une A-algèbre affinoïde et B // C un morphisme de A-algèbres. On obtient ainsiun préfaisceau han(X). Lorsque X est affine, on retrouve bien le préfaisceau défini tout à l’heure.

Proposition 1.1.19 — Pour tout A-schéma de type fini X, le préfaisceau han(X) est représentable par uneA-variété rigide Xan.

Demonstration Supposons d’abord que X est séparé. Soit (Xi)i∈I un recouvrement Zariski de X par des ouvertsaffines. On définit une k-variété rigide Xan en recollant les Xan

i suivant (Xi ∩Xj)an. Il est immédiat de voir que Xan

représente le préfaisceau han(X).Lorsque X n’est plus supposé séparé, les intersections Xi∩Xj sont eux séparés puisque quasi-affines. On peut donc

encore définir Xan en recollant les Xani suivant (Xi ∩Xj)

an. La k-variété rigide ainsi obtenue représente le préfaisceauhan(X). c.q.f.d

L’association X Xan est fonctorielle puisqu’il en est ainsi de X han(X). D’où le foncteur (1.2). On vérifie faci-lement que le foncteur Rig commute à l’extension des scalaires suivant les morphismes A // A′ entre k-affinoïdes,i.e., on a un isomorphisme naturel (X⊗AA′)an ' Xan⊗AA′ en X ∈ Ob(Schtf/A). Notons également que Rig envoie lesimmersions fermées (resp. ouvertes) de A-schémas sur des immersions fermées (resp. ouvertes) de A-variétés rigides.

Soient X un A-schéma et U = Spm(B) un A-affinoïde. Nous allons construire une application

(1.3) homSch/A(Spec(B), X) // homVarRig/A(Spm(B), Xan) .

Remarquons pour cela que homSch/A(Spec(B), X) ' homSch/B(Spec(B), X ⊗A B) et homVarRig/A(Spm(B), Xan) 'homVarRig/B(Spm(B), Xan⊗Spm(A)Spm(B)) ' homVarRig/B(Spm(B), (X⊗AB)an). Il suffit donc de traiter le cas A = B.Dans ce cas, l’application recherchée s’obtient par fonctorialité de (−)an. Nous ignorons si le résultat ci-dessous estvrai sans l’hypothèse de séparation.

Proposition 1.1.20 — Soit X un A-schéma séparé. Pour tout A-affinoïde U = Spm(B), l’application (1.3) estbijective.

Demonstration Il suffit de traiter le cas A = B. Le fait que (1.3) est injective découle facilement du fait que lemorphisme de G-espaces Xan // X est fidèlement plat. On se concentre sur la surjectivité.

Soit j : X0 ⊂ X l’inclusion d’un ouvert affine de X. Le faisceau j∗O est alors quasi-cohérent puisque X est séparé.Soit s : U = Spm(A) // Xan une section du morphisme Xan // Spm(A) . Si Y = X −X0, alors Z = s−1(Y )

est un sous-affinoïde fermé de U défini par un idéal I ⊂ A. Soit h ∈ I et considérons la A-algèbre A(h) = A[T ]/hT − 1.On note R la OU -algèbre quasi-cohérente sur Spm(A) associé à A(h). On a alors R(U) = A(h).

Nous allons montrer qu’il existe un unique morphisme de G-espaces annelés f ′ : (U,R) // (X, j∗O) rendantcommutatif le carré

(U,R)f ′//

(X, j∗O)

(U,O)f// (X,O).

La question est locale en X et U . Soient donc D1 = Spm(F1), . . . , Dr = Spm(Fr) un recouvrement standard de Uet V1 = Spec(E1), . . . , Vr = Spec(Er) un recouvrement affine de X tels que le morphisme de G-espaces sous-jacent à

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 7

f envoie Di dans Vi. Il s’agit donc de montrer l’existence et l’unicité du morphisme f ′i de G-espaces annelés rendantcommutatif

(1.4) (Di,R|Di)f ′i//

(Vi, (j∗O)|Vi)

(Di,O)fi

// (Vi,O).

Ce qui revient au même de montrer l’existence et l’unicité du morphisme de A-algèbres θ′i rendant commutatif le carré

(1.5) (Fi)(h) Γ(Vi ∩X0,O)θ′ioo

Fi

OO

Ei.θi

oo

OO

L’unicité provient du fait que Vi ∩X0 est un ouvert affine de Vi. Montrons l’existence. Rappelons que l’on avait notéY le complémentaire de X0 dans X et Z son image inverse par f . On pose Yi = Y ∩ Vi et Zi = Z ∩Di. On obtientdonc un carré cartésien de A-schémas

Spec(Fi)− Zi //

Vi − Yi

Spec(Fi) // Vi.

D’où un morphisme Γ(Vi − Yi,O) // Γ(Spec(Fi)− Zi,O) . Comme h s’annule sur Zi, l’ouvert Zariski Spec((Fi)(h))

est contenu dans Spec(Fi)− Zi. On prendra alors pour θ′i la composée

Γ(Vi ∩X0,O) // Γ(Spec(Fi)− Zi,O) // (Fi)(h) .

La commutation du carré (1.5) est alors claire.Notons V(h) le sous-affinoïde fermée de U défini par l’idéal (h) ⊂ A. Comme conséquence de la discussion précé-

dente, on voit que le morphisme de A-variétés rigides U −V(h) // Xan0 est l’analytification d’un (unique) mor-

phisme de A-schémas Spec(A(h)) // X0 correspondant au morphisme de A-algèbres Γ(X, j∗O) // Γ(U,R)

induit par le morphisme de G-espaces annelés f ′.Il est aisé à partir de là de déduire la proposition. En effet, soit (Xi) un recouvrement affine de X et Ui = f−1(Xan

i ).Il existe un recouvrement admissible (U ′i) de U avec U ′i ⊂ Ui et U ′i = U − V(hi) pour des fonctions hi ∈ A. On a vuque le morphisme U ′i

// Xani était l’analytifié d’un unique morphisme de A-schémas Spec(A(hi))

// Xi . En

recollant ces morphismes, nous obtenons un morphisme de A-schémas Spec(A) // X dont l’analytifié est f . Laproposition est démontrée. c.q.f.d

1.1.4 La fibre générique de Raynaud et les modèles formelsLorsque la valuation de k est non triviale, on choisit π ∈ k∨ non nul. Si la valuation est triviale, on supposera

π = 0. On conviendra que dans un anneau, 0 n’est pas un diviseur de zéro.Une k-algèbre est dite topologiquement de type fini si elle est complète pour la topologie π-adique, i.e., A '

LimnA/A.πn et admet une présentation p : kT1, . . . , Tn // // A . Si de plus, on peut choisir p de noyau un idéal

de type fini, A sera dite topologiquement de présentation finie. Elle sera dite essentielle lorsque π n’est pas un diviseurde zéro dans A, i.e., le morphisme A // A[1/π] est injectif. C’est un fait non trivial (voir [BL93a, Proposition1.1] où “essentielle” est remplacé par “admissible”) que toute k-algèbre topologiquement de type fini et essentielle esttopologiquement de présentation finie. Étant donnée une k-algèbre topologiquement de type fini A, on notera Aesl’image de A // A[1/π] . C’est une k-algèbre essentielle (et donc topologiquement de présentation finie).

Ces notions s’étendent trivialement au cas des schémas formels. Un k-schéma formel de type fini (resp. de pré-sentation finie) est un schéma formel X quasi-compact et qui est localement donné par le spectre formel Spf(A) d’unek-algèbre topologiquement de type fini (resp. de présentation fini) A. On dira que X est essentiel si les k-algèbres Ale sont, i.e., s’il est plat sur k. On dispose d’une immersion fermée maximale Xes ⊂ X telle que Xes est essentiel.

Soit A une k-algèbre affinoïde munie d’une présentation p : kT1, . . . , Tn // // A . La k-algèbre A = a ∈A, |a|p ≤ 1 est un quotient de kT1, . . . , Tn. C’est donc une k-algèbre topologiquement de type finie. Il est clair

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8 Motifs des variétés rigides analytiques I

que A est essentielle et donc en fait topologiquement de présentation finie. On peut lui associer le k-schéma formelaffine Spf(A). Réciproquement, étant donné un k-schéma formel affine et de type fini X, la k-algèbre Γ(X,OX)⊗k kest une k-algèbre affinoïde et on peut lui associer le k-affinoïde Spm(Γ(X,OX)⊗k k) que l’on notera Xη. Il est facile devoir que si U est un ouvert Zariski de X, Uη est un domaine rationnel de Xη. On peut donc recoller cette constructionpour obtenir le foncteur de passage à la fibre générique de Raynaud (voir [Ray72])

(1.6) (−)η : SchFtf/k // VarRig/k ,

qui à un k-schéma formel de type fini X associe une k-variété rigide quasi-compacte et quasi-séparée Xη. Si X est un k-schéma formel, on notera |X| l’espace topologique sous-jacent. On dispose alors d’une application red : Xη // |X|

qui à un point x ∈ Xη associe l’image du morphisme de schéma formels Spf(k(x)) // X . On montre que lorsqueX est essentiel, cette application est surjective.

Definition 1.1.21 — Soit X une k-variété rigide (quasi-compacte et quasi-séparée). On appelle modèle deX, un k-schéma formel de type fini X muni d’un isomorphisme de k-variétés rigides X ' Xη. On note Mdl(X) lacatégorie des modèles de X et Mdles(X) sa sous-catégorie pleine formée des modèles essentiels.

Nous dirons qu’un modèle X′ ∈ Mdl(X) est plus fin que le modèle X s’il existe un morphisme X′ // X dansMdl(X).

Il est clair que l’inclusion Mdles(X) ⊂ Mdl(X) est cofinale. De plus, Mdles(X) est directe (i.e., équivalente à unensemble ordonné). Lorsque la valuation de k est triviale, Mdl(X) est équivalente à la catégorie finale (à un objetet un morphisme). Jusqu’à la fin de ce paragraphe, nous supposerons que la valuation de k est non triviale. On a laproposition suivante (voir [BL93a]) :

Proposition 1.1.22 — Soit X un modèle essentiel d’une k-variété rigide X. Tout éclatement X′ // X enun idéal ouvert et de type fini (dit éclatement admissible) est naturellement un modèle de X qui de plus est essentiel.

Demonstration Il s’agit de montrer que le morphisme évident X′η// Xη est inversible. On peut pour cela

supposer que X = Spf(A) est affine et que X′ est l’éclaté de l’idéal I = (f1, . . . , fn) ⊂ A. Comme cet idéal estsupposé ouvert, il existe un entier N ∈ N− 0 tel que πN ∈ (f1, . . . , fn).

Rappelons que l’éclaté X′ est le complété formel de Proj(⊕n∈N(I)n). Il admet donc le recouvrement standard parles Ui où

Ui = Spf

(Gr0

((⊕n∈N

(I)n

)[1

fi

])//(π)

).

(Rappelons que (−)//(π) = Limn∈N (−)/(πn) désigne la complétion formelle le long de l’idéal engendré par π.) Ondispose d’un morphisme surjectif évident

Bi = A[T1, . . . , Ti, . . . , Tn]/(fi.T1 − f1, . . . , fiTi − fi, . . . , fi.Tn − fn) // // Ci = Gr0[(⊕n∈N(I)n)[1/fi]] ,

qui associe fj/fi à Tj pour j 6= i. Notons Ji ⊂ Bi le noyau de ce morphisme. On a clairement Bi.f1+· · ·+Bi.fn = Bi.fi.Il vient que si l’on inverse π dans Bi la fonction fi devient inversible (puisque πN ∈ (f1, . . . , fn)). Le morphismeévident A[1/(π.fi)] // Bi[1/π] est donc inversible. Il en est de même de A[1/(π.fi)] // Ci[1/π] . Il vient queJi[1/π] = 0. Supposons un instant que Ji soit un idéal de type fini et achevons la preuve de la proposition. Il existealors un entier m tel que πm.Ji = 0. Le noyau de Bi//(π) // Ci//(π) est donné par Ji//(π) ' Ji. Il vient que(Bi//(π))es ' Ci//(π). Ceci montre que (Ui)η est canoniquement isomorphe à

Spm(AT1, . . . , Ti, . . . , Tn/(fi.T1 − f1, . . . , fiTi − fi, . . . , fi.Tn − fn)) = D(fi|f1, . . . , fi, . . . , fn).

De plus, (Ui∩Uj)η correspond à l’intersection des domaines rationnels D(fi|f1, . . . , fi, . . . , fn) et D(fj |f1, . . . , fj , . . . , fn).Étant donné que les D(fi|f1, . . . , fi, . . . , fn) recouvrent X, le résultat est maintenant clair.

Vérifions à présent que Ji est de type fini. Ceci revient à montrer que la A-algèbre Ci est de présentation finie. Il seraplus général de montrer que la A-algèbre graduée ⊕n∈N(I)n est de présentation finie. La k-algèbre (⊕n∈N(I)n)//(π)s’identifie la sous-algèbre

∏n∈N(I)n formée des séries

∑n∈N an.vn avec an ∈ k, vn ∈ (I)n et Limn|an| = 0. On

dispose donc d’une filtration naturelle F • sur (⊕n∈N(I)n)//(π) telle que F r est l’ensemble des séries avec an = 0pour 0 ≤ n ≤ r − 1. On retrouve l’algèbre (⊕n∈N(I)n) en prenant le graduée de cette filtration. Remarquons aussique (⊕n∈N(I)n)//(π) est topologiquement de présentation finie puisque essentielle et topologiquement de type fini.Considérons la présentation p : AT1, . . . , Tn // // (⊕n∈N(I)n)//(π) qui envoie Ti sur fi. Son noyau K est detype fini. Notons G• la filtration sur kT1, . . . , Tn telle que Gr est l’ensemble des séries strictement convergentes

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 9

∑ν1,...,νn

aν1,...,νnTν11 . . . T νnn avec aν1,...,νn = 0 si

∑ni=1 νi ≤ r− 1. Le morphisme p est clairement un morphisme strict

pour les filtrations F • et G•. En passant aux gradués, on obtient la présentation A[T1, . . . , Tn] // // ⊕n∈N(I)n denoyau ⊕r(K ∩Gr)/(K ∩Gr+1) qui est de type fini car K est de type fini. c.q.f.d

Remarque 1.1.23 — L’argument ci-dessus montre que tout recouvrement standard d’un k-affinoïde X correspondpar le foncteur de Raynaud au recouvrement standard affine d’un éclaté admissible d’un modèle affine de X. (voir[Ray72]).

Lemme 1.1.24 — Soient X et Y deux modèles d’une k-variété rigide quasi-compacte et séparée X. Il existe unmodèle Z qui est plus fin que X et Y.

Demonstration On se donne des recouvrements affines (Ui = Spf(Ai ))i et (Vj = Spf(Bj ))j de X et Y. On en déduitun recouvrement (Ui×kVj = Spf(Ai ⊗kBj ))i,j de X×kY.

Pour tout i et j, considérons l’idéal Iij de Ai⊗kBj correspondant au sous-affinoïde fermé (Ui×kV)η ∩∆(X) avec∆(X) la diagonale de X×kX. On pose alors Iij l’image inverse de Iij dans Ai ⊗kBj . Il est immédiat de voir que lesIij définissent un faisceau cohérent d’idéal sur le schéma formel X×kY correspondant à un sous-schéma formel ferméZ tel que Zη ' X. c.q.f.d

On montre facilement que la construction utilisée dans la preuve du lemme précédent est indépendante du choix desrecouvrements. On notera X∧Y le k-schéma formel Z. On peut penser à X∧Y comme étant l’adhérence schématiquedans X×kY de X immergé diagonalement dans X×kX ' (X×kY)η.

Corollaire 1.1.25 — Soit X une k-variété rigide séparée. La catégorie Mdl(X) est cofiltrante lorsqu’elle n’estpas vide.

Proposition 1.1.26 — Soit X = Spm(A) un k-affinoïde. On suppose fixée une norme résiduelle sur A. Soit Xun modèle de X. Il existe alors un idéal ouvert et de type fini de A dont l’éclaté dans Spf(A) est un modèle plus finque X.

Demonstration Soit Uα = Spf(Bα) un recouvrement Zariski de X par des k-schémas formels affines. Le recouvre-ment (Uα)η peut se raffiner par un recouvrement rationnel standard associé à g1, . . . , gn ∈ A. Notons Y l’éclaté deSpf(A) en l’idéal admissible (g1, . . . , gn) et considérons Z = X ∧ Y. On voit facilement que le k-schéma formel Z estaffine sur Y. On conclut alors par le lemme ci-dessous et le fait que la composée de deux éclatements admissibles estencore un éclatement admissible. c.q.f.d

Lemme 1.1.27 — Soit f : Y // X un morphisme affine de k-schémas formels essentiels. On suppose que fηest inversible. Alors, f est fini et il existe un idéal I ⊂ OX ouvert et de type fini dont l’éclaté est un modèle de Xηqui est plus fin que Y.

Demonstration On montre d’abord que f est fini. La question étant locale, on peut supposer que X = Spf(A) etY = Spf(B) avec A et B deux k-algèbres topologiques essentielles. On note e : A // B le morphisme dek-algèbres induit par f .

Soit une présentation p : AT1, . . . , Tn // // B . Comme A et B sont topologiquement de présentation finie,l’idéal I = p−1(0) est de type fini. Comme A = A[1/π] ' B = B[1/π], l’idéal I[1/π] est de la forme (T1−a1, . . . , Tn−an) avec ai ∈ A. Considérons le sous-schéma fermé Z de PnA = Proj(A[T0, . . . , Tn]) obtenu en prenant l’adhérenceschématique de la section [1 : a1 : . . . : an] définie au dessus de A. On dispose d’une factorisation de Spf(e) :

Spf(B)w// Z//(π) // Spf(A)

et plus précisément, Spf(B) s’identifie via w à l’intersection de Z//(π) avec l’ouvert standard Spf(AT1, . . . , Tn) dePnA//(π). Il suffira de montrer que w est un isomorphisme. En effet, si c’est le cas, Spf(B) sera un Spf(A)-schémaformel projectif et affine, donc forcément fini.

Si w était une immersion ouverte stricte, on peut trouver un point fermé s de l’espace topologique sous-jacent àZ//(π) qui ne soit pas dans l’image de w. Le point s est naturellement un point fermé du schéma Z. Comme Z[1/π]est dense dans Z, on peut trouver un point fermé x de Z[1/π] tel que x contient s. Le point x est alors forcémenten dehors de l’image de Spm(B). Ceci est une contradiction avec le fait que Yη ' (Z//(π))η ' Xη.

Passons à la seconde partie de l’énoncé. Soit (Ui)i∈I un recouvrement Zariski de X et supposons que Vi = Y×XUiest moins fin qu’un éclatement admissible de Ui de centre un idéal ouvert Ii ⊂ OUi de type fini. Par [EGA I’, 6.9.7],on peut construire des idéaux quasi-cohérents Ji ⊂ OU de type fini et ouverts tels que Ii = (Ji)|Ui . Il suffit alorsd’éclater successivement les idéaux Ji pour obtenir un modèle plus fin que Y. Ceci montre que la seconde partie del’énoncé est également locale. On peut donc supposer que X = Spf(A) et Y = Spf(B) avec B une A-algèbre finie.Soient b1, . . . , bn ∈ B des générateurs de la A-algèbre B. Il existe N ∈ N tel que πN .bi est l’image d’un élément

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10 Motifs des variétés rigides analytiques I

ai ∈ A. L’idéal (a1, . . . , an, πN ) ⊂ A est alors admissible et son éclaté est isomorphe à B. Ceci achève la preuve du

lemme. c.q.f.d

On en déduit immédiatement que tout morphisme de modèles essentiels est propre et surjectif.

Corollaire 1.1.28 — Soient X = Spm(A) un affinoïde et U un domaine de X. Pour tout modèle U0 de U , ilexiste un modèle X de X et un ouvert Zariski U ⊂ X tel que Uη ' U et U plus fin que U0.

Demonstration Il suffit de traiter le cas où U = Spm(B) est un domaine rationnel. On fixe une norme résiduelle surA. On suppose que B = A〈f1|f2, . . . , fm〉 avec fi ∈ A engendrant A comme idéal. Notons X1 l’éclaté de Spf(A) enl’idéal (f1, . . . , fn) ⊂ A. Le domaine rationnel U est la fibre générique de l’ouvert standard U1 ⊂ X1 correspondant àf1.

Par la proposition 1.1.26, il suffit de considérer le cas où U0 est l’éclaté de Spf(B) en un idéal admissible(g1, . . . , gn) ⊂ B. Par [EGA I’, 6.9.7], il existe un idéal ouvert de type fini I ⊂ OX1 tel que Γ(U1,I ) = (g1, . . . , gn).Il suffit alors de prendre pour X l’éclaté de I . c.q.f.d

Theoreme 1.1.29 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte et séparée. Alors :

(i) La catégorie Mdl(X) est cofiltrante (en particulier non vide).

(ii) Si U ⊂ X est un ouvert quasi-compact et U0 un modèle de U , il existe un modèle X ∈ Mdl(X) et un ouvertZariski U ⊂ X qui soit un modèle de U plus fin que U0.

Demonstration Le théorème est vrai dans le cas où X est un k-affinoïde.On suppose donné un recouvrement de X par deux ouverts quasi-compacts X1 et X2 avec X2 = Spm(A) un

k-affinoïde. On suppose que l’énoncé du théorème est vrai pour X1. On va le déduire pour X.Montrons d’abord que Mdl(X) est non vide. La première assertion découlera alors du corollaire 1.1.25. Notons

U = X1 ∩ X2. On suppose donnés un modèle X1 de X1 ainsi qu’un ouvert Zariski U1 ⊂ X1 qui est un modèle deU ⊂ X1. Par la proposition 1.1.26, il existe un éclatement admissible X2 de centre I ⊂ A et un ouvert U2 de X2

qui est un modèle de U ⊂ X2 plus fin que U1. Notons e : U2// U1 . C’est l’éclatement de l’idéal I.OU1 . Par

[EGA I’, 6.9.7], il existe un idéal ouvert de type fini J ⊂ OX1tel que J .OU1

= I.OU1. Ainsi, quitte à remplacer

X1 par l’éclaté de J , on peut supposer que U1 ' U2. Le schéma formel obtenu en recollant X1 et X2 le long del’isomorphisme U1 ' U2 est un modèle de X.

On montre la seconde assertion par la même méthode. Les détails sont laissés en exercice. Le théorème s’obtientalors par une récurrence facile sur le nombre de k-affinoïdes nécessaire pour couvrir X. c.q.f.d

Nous aurons besoin de la proposition suivante :

Proposition 1.1.30 — Soient S = Spm(A) un k-schéma formel et X un A-schéma séparé et de présentationfinie. Il existe une immersion ouverte canonique de Sη = Spm(A)-variétés rigides

(1.7) (X//(π))η // (X[1/π])an

qui est un isomorphisme si et seulement si toute composante irréductible de X qui est plate sur k est propre surSpec(A).

Demonstration L’hypothèse de séparabilité est probablement superflue. On construit d’abord l’immersion ouverte(1.7). Lorsque X est affine, cette flèche correspond au morphisme évident Γ(X,O)[1/π] // Γ(X//(π),O)[1/π] . Onutilise ici la définition de (X[1/π])an comme représentant du foncteur han(X[1/π]) (voir le lemme 1.1.18). Pour le cas gé-néral, on se donne un recouvrement (Xi)i de X par des ouverts affines. Les flèches (Xi//(π))η // (Xi[1/π])an se re-

collent suivant ((Xi ∩Xj)//(π))η // ((Xi ∩Xj)[1/π])an modulo les identifications ((Xi∩Xj)//(π))η ' (Xi//(π))η∩(Xj//(π))η et ((Xi ∩Xj)[1/π])an ' (Xi[1/π])an ∩ (Xj [1/π])an.

Le fait que (1.7) est une immersion ouverte se vérifie localement. Il suffit alors de traiter le cas de X = A1A qui

est trivial. Il reste à montrer le critère d’isomorphie de (1.7).Supposons d’abord que les composantes plates de X sont propres sur Spec(A). Comme (1.7) est une immersion

ouverte, il suffira de montrer qu’elle est surjective sur les points fermés. Soient l est une extension finie de k, etx : Spm(l)→ (X[1/π])an un point fermé. Ce point provient d’un morphisme de A-schémas x : Spec(l)→ (X[1/π]). Lacomposée Spec(l) // X // Spec(A) s’étend d’une manière unique en un morphisme Spec(l) // Spec(A) .Par le critère de propreté appliqué à la composante irréductible de X contenant x, le point x s’étend en x : Spec(l)→X. On en déduit un morphisme de schémas formels Spf(l) // X//(π) qui par passage à la fibre générique nousdonne un point x′ : Spm(l) → (X//(π))η. Le lecteur vérifiera facilement que x′ est envoyé sur x par (1.7). D’où lerésultat.

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 11

Réciproquement, supposons que (1.7) soit inversible. On va prouver que les composantes k-plates de X sontpropres sur Spec(A). Par [Nag62], on peut trouver une compactification j : X // X avec X dense dans X quiest propre sur Spec(A). Notons Z = X−X. Il suffit de montrer qu’aucun point fermé de Z n’est dans l’adhérence descomposantes plates de X. Supposons le contraire. Soit un point fermé x0 dans (X −X)/k∨ qui est dans l’adhérenced’une composante plate de X. Il existe donc morphisme x : Spec(l) // X avec l une extension finie de k tel que :

– la fibre générique x : Spec(l) // X est contenue dans X,

– la fibre spéciale Spec(l) // Spec(l) // X coïncide avec x0. En particulier, elle n’est pas contenue dansX.

Le point x fournit alors un point fermé de (X[1/π])an dont la fibre par (1.7) est vide. Ceci contredit l’hypothèse que(1.7) est inversible. c.q.f.d

1.1.5 Points en géométrie rigide

Comme dans le paragraphe précédent, π désignera un élément de k∨ qui est non nul lorsque la valuation de k estnon triviale. Étant donné un k-schéma formel X, on notera Xσ le k-schéma X/k∨.

Les points fermés d’une k-variété rigide ne suffisent pas pour décrire les propriétés locales. Il est naturel d’introduire(suivant [FP04, Chapter 7]) la notion suivante :

Definition 1.1.31 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte et séparée. On pose P(X) = LimX∈Mdl(X)Xσ

où la limite est prise dans la catégorie des espaces topologiques. On note red : X // P(X) l’application évidente.

Étant donnés p, q ∈ P(X), on écrit p ≺ q si p appartient à l’adhérence q du point q. L’ensemble des pointsmaximaux pour cette relation est noté M(X). Les éléments de M(X) seront appelés les points génériques de P(X).

Lorsque la valuation de k est triviale, on retrouve la notion habituelle des points d’un k-schéma de type fini.On supposera dans la suite du paragraphe que la valuation de k est non triviale. Lorsque U est un ouvert quasi-compact d’une k-variété rigide quasi-compacte et séparée X, le morphisme évident P(U) // P(X) est l’inclusiond’un ouvert de P(X). Ceci est une conséquence directe du théorème 1.1.29. On peut alors définir par recollement unespace topologique P(X) pour toute k-variété rigide. Notons également que si Y ⊂ X est une sous-variété fermée,P(Y ) est naturellement une partie fermée de P(X).

Proposition 1.1.32 — 1- Si x est un point fermé de X, alors red(x) est un point générique de P(X).2- Soient Y ⊂ X une sous-variété fermée et p ∈ P(X). Si p /∈ P(Y ), alors p ∩ P(Y ) = ∅.3- Un point p ∈ P(X) est contenu dans l’adhérence d’un unique point générique m(p). On obtient ainsi une

application m : P(X) // M(X) qui est une rétraction à l’inclusion évidente.

Demonstration Le premier point découle facilement du second. Soit p ∈ P(X) tel que p ∩ P(Y ) 6= ∅. Pour unmodèle X de X, on note pX l’image de p dans Xσ et ZX son adhérence. On note aussi YX l’adhérence schématiquede Y dans X. On a donc (YX)σ ∩ ZX 6= ∅ pour tout modèle X. Si p 6= P(Y ), il existe un modèle X tel que l’inclusion(YX)σ ∩ ZX ⊂ ZX est stricte. Quitte à remplacer X par un voisinage affine de pX, on peut se ramener au cas oùX = Spm(A) est un k-affinoïde et X = Spf(A) un schéma formel affine (une norme résiduelle étant choisie sur A).On a dans Spec(A) deux sous-schémas fermés ZX et Spec(A/I) avec I l’idéal du sous-schéma formel YX. Ce dernierétant essentiel, I est de type fini. Soit J ⊂ A un idéal de type fini ayant ZX pour lieu d’annulation. On peut supposerque J est ouvert de sorte que I + J est le centre admissible d’un éclatement X′ de X. Les transformées pures YX′ etZ ′X dans X′ sont disjointes par le lemme 1.1.33 ci-dessous. Or pX′ est forcément le point générique de Z ′X. Ceci est unecontradiction.

La dernière partie se démontre de la même manière. Soient en effet deux points p1 et p2 de P(X) tels que p1 ∩p2 6= ∅. Nous allons montrer que p1 ≺ p2 ou p2 ≺ p1. En effet, si ce n’était pas le cas, il existe un modèle X de Xtel que (Z1)X ∩ (Z2)X est un sous-schéma strict de (Zi)X pour i ∈ 1, 2 (où l’on a noté (Zi)X l’adhérence Zariskide (pi)X). On choisit un idéal ouvert et de type fini Ii ⊂ OX ayant pour lieu d’annulation la partie fermée (Zi)X.En éclatant l’idéal I1 + I2 on obtient (par le lemme 1.1.33) un modèle X′ avec (Z1)X′ ∩ (Z2)X′ = ∅. Ceci contreditl’hypothèse p1 ∩ p2 6= ∅. c.q.f.d

Lemme 1.1.33 — Soient X un schéma et I1,I2 ⊂ OX deux idéaux quasi-cohérents de type fini. Soit X ′ l’éclatéde I = I1 + I2 dans X. On note I ′i = (Ii.OX′).(I .OX′)−1 le transformé faible de Ii pour i ∈ 1, 2. On a alorsI ′1 + I ′2 = OX′ . En particulier, les transformés purs des supports de X/I1 et X/I2 sont disjoints dans X ′.

Soit X une k-variété rigide. Étant donné p ∈ P(X) on note Flt′(p) l’ensemble des ouverts admissibles U deX tel que p ∈ P(U). C’est un ensemble ordonné cofiltrant. De plus, le sous-ensemble de Flt(p) ⊂ Flt′(p) formédes ouverts affinoïdes est cofinal. On pose OX,p = ColimU∈Flt(p)Γ(U,O), OX,p = ColimU∈Flt(p)Γ(U,O) et O∨X,p =

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12 Motifs des variétés rigides analytiques I

ColimU∈Flt(p)Γ(U,O)∨ où les inclusions Γ(U,O)∨ ⊂ Γ(U,O) ⊂ Γ(U,O) sont définies à l’aide de la semi-norme infinie(voir la remarque 1.1.7). L’anneau OX,p possède une semi-norme définie par

(1.8) ‖f‖p = inf|f ′|∞; f ′ ∈ Γ(U,O), U ∈ Flt(p) et f ′ ∈ (Γ(U,O)→ OX,p)−1(f).

On note mp ⊂ OX,p l’idéal des f avec ‖f‖p = 0. On a clairement mp ⊂ O∨X,p ⊂ OX,p. On a (voir [FP04]) :

Proposition 1.1.34 — L’ anneau OX,p est local hensélien d’idéal maximal mp. De plus, ‖.‖p définit une valuationsur k(p) = OX,p/mp.

Demonstration On divise la preuve en deux parties.Partie A : Montrons que mp est l’unique idéal maximal de OX,p. Soit f ∈ OX,p et supposons que ‖f‖p > 0. On saitque |f ′|∞ ≥ ‖f‖p pour tout relèvement f ′ ∈ Γ(U,O) de f à U ∈ Flt(p). Soit λ ∈ |k| tel que 0 < λ < ‖f‖p. On peutécrire U comme la réunion de deux affinoïdes D(f ′|λ)∪D(λ|f ′). Étant donné que la norme infinie de la restriction def ′ à D(λ|f ′) est strictement inférieure à ‖f‖p, on déduit que D(λ|f ′) /∈ Flt(p). On a donc forcément D(f ′|λ) ∈ Flt(p).Mais la restriction de f ′ à D(f ′|λ) est inversible. Ceci montre que f est inversible.

Pour voir que ‖.‖p définit une valuation sur k(p) il suffit de montrer que ‖a‖p.‖a−1‖p = 1 pour a ∈ k(p) − 0.Soit g ∈ Γ(U,O) un relèvement de a à U ∈ Flt(p). Soient λ1 et λ2 dans

√|k×| tels que 0 < λ1 < ‖e‖p < λ2.

Alors, D(λ1|g) 6∈ Flt(p) et D(g|λ2) 6∈ Flt(p). On a donc forcément D(λ2|g|λ1) = D(λ2|g) ∩ D(g|λ1) ∈ Flt(p). Mais|g|D(λ2|g|λ1)|∞ ≤ λ2 et |g−1

|D(λ2|g|λ1)|∞ ≤ λ−11 . Ceci montre que ‖a‖p.‖a−1‖p ≤ λ2λ

−11 . En faisant tendre λ1 et λ2 vers

‖a‖p, on obtient l’inégalité ‖a‖p.‖a−1‖p ≤ 1. Or, ‖a‖p.‖a−1‖p ≥ ‖1‖p = 1. D’où le résultat recherché.Partie B : Montrons que OX,p est hensélien. On peut pour cela supposer X réduit quitte à le remplacer par Xred.Soit P ∈ OX,p[T ] et f une racine séparable de la réduction P ∈ k(p)[T ] de P . Il s’agit de relever f en une racine f deP . On peut supposer que ‖f‖p < 1 quitte à prendre P (aT ) à la place de P (T ) avec a ∈ k× un scalaire bien choisi.Comme P ′(f) est inversible, ‖P ′(f)‖p > 0. On fixe λ ∈ |k×| tel que 0 < λ < min(1, ‖P ′(f)‖p)

Le polynôme à deux variables P (S + T )− P (S)− P ′(S)T est divisible par T 2 puisqu’il admet une racine d’ordre2 en T = 0. Soit donc R(S, T ) ∈ OX,p[S, T ] tel que

(1.9) P (S + T ) = P (S) + P ′(S)T +R(S, T )T 2.

Soit M ≥ 1 un réel qui majore strictement les normes des coefficients de R(S, T ) et∂R

∂T(S, T ).

On fixe un relèvement arbitraire f0 ∈ OX,p de f . On peut trouver alors U ∈ Flt(p) tel que f0, P et R se relèventen f0, P et R dans Γ(U,O). Quitte à raffiner U , on peut supposer que :

1. |f0|∞ ≤ 1,2. pour tout x ∈ U , |P ′(f0)(x)| > λ,3. les normes infinies des coefficients de R sont majorées par M ,

4. |P (f0)|∞ <λ2

2M.

Quitte à raffiner U une deuxième fois (afin de se débarasser des composantes irréductibles ne contenant pas p), on aégalement la relation

(1.10) P (S + T ) = P (S) + P ′(S)T + R(S, T )T 2.

On considère alors la suite récurrente (de Newton) (fn)n∈N définie par

(1.11) fn+1 = fn −P (fn)

P ′(fn).

Notons qu’à priori, cette suite est à valeurs dans les fonctions méromorphes sur U puisque fn peut avoir des pôles.Montrons par récurrence les trois propriétés suivantes :(i) fn ∈ Γ(U,O) et |fn|∞ ≤ 1,(ii) pour tout x ∈ U , |P ′(fn)(x)|∞ ≥ λ,

(iii) |P (fn)|∞ ≤λ2

22nM.

Lorsque n = 0 les trois propriétés ci-dessus sont vraies. On suppose que ces propriétés sont prouvées pour n. Ilvient que fn+1 ∈ Γ(U,O) puisque P ′(fn) est inversible. Comme |P ′(fn)(x)| ≥ λ pour tout x ∈ U , on en déduit que

(1.12)

∣∣∣∣∣ Pn(fn)

P ′(fn)

∣∣∣∣∣∞

≤ λ

22nM.

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 13

Ceci montre que |fn+1|∞ ≤ 1. D’autre part, la formule (1.10) donne

(1.13) P (fn+1) = P

(fn −

P (fn)

P ′(fn)

)= R

(fn,−

P (fn)

P ′(fn)

)(P (fn)

P ′(fn)

)2

.

En utilisant (1.12) et |fn|∞ ≤ 1 on obtient la majoration

∣∣∣∣∣R(fn,−

Pn(fn)

P ′(fn)

)∣∣∣∣∣∞

≤M . Ce qui donne bien

(1.14) |P (fn+1)|∞ ≤M.

22n .M

)2

=λ2

22n+1 .M.

De la formule P ′(S + T ) =∂P

∂T(S + T ), on déduit

(1.15) P ′(S + T ) = P ′(S) + 2.R(S, T )T +∂R

∂T(S, T )T 2.

En remplaçant S par fn et T par − P (fn)

P ′(fn)on obtient la formule

(1.16) P ′(fn+1) = P ′

(fn −

P (fn)

P ′(fn)

)= P ′(fn)− 2R

(fn,−

P (fn)

P ′(fn)

)(P (fn)

P ′(fn)

)+∂R

∂T

(fn,−

P (fn)

P ′(fn)

)(P (fn)

P ′(fn)

)2

.

En tout point fermé x ∈ U , on a les minorations

(1.17)

∣∣∣∣∣2R(fn,−

P (fn)

P ′(fn)

)(P (fn)

P ′(fn)

)(x)

∣∣∣∣∣ ≤M λ

22nM≤ λ

2,

(1.18)

∣∣∣∣∣∣∂R∂T(fn,−

P (fn)

P ′(fn)

)(P (fn)

P ′(fn)

)2

(x)

∣∣∣∣∣∣ ≤M.

22nM

)2

≤ λ

2.

On en déduit que |P ′(fn+1)(x)| ≥ λ. Ceci achève la récurrence.

Il est facile maintenant de construire le relèvement f recherché. En effet, on a |fn+1 − fn|∞ ≤λ

22nM. Comme

Γ(U,O) est complet, la suite (fn) converge. Si f est une limite de cette suite. On a alors |P (f)|∞ = 0. Comme X aété supposé réduit, on a P (f) = 0. L’image f de f dans OX,p est donc une racine de P qui relève f . La propositionest démontrée. c.q.f.d

On a également :

Lemme 1.1.35 — Le sous-anneau k(p) = OX,p/mp de k(p) = OX,p/mp est un anneau de valuation de k(p). Si pest un point générique, alors k(p) coïncide avec l’anneau de valuation de la norme ‖.‖p définie par (1.8). Il est doncde hauteur 1 et son idéal maximal est k∨(p) = O∨X,p/mp.

Demonstration Soit f ∈ OX,p et f sa réduction dans k(p). Il s’agit de montrer que f ∈ k(p) ou f−1 ∈ k(p).Si f /∈ k(p), il est en particulier non nul, i.e., ‖f‖p > 0. Il existe donc U ∈ Flt(p) et un relèvement f de f qui estinversible. Le domaine rationnel D(f , 1) n’appartient pas à Flt(p) car si ce dernier est non vide, f ∈ Γ(D(f , 1),O). Ilvient que D(1|f) = D(f−1|1) ∈ Flt(p). Mais f−1 ∈ Γ(D(1, f),O). Ceci montre que f−1 ∈ k(p).

Soit q ⊂ k(p) un idéal premier non nul. Pour tout modèle X de X, on choisit un voisinage affine UX = Spf(AX)de pX. On dispose d’un morphisme AX

// OX,p . L’image inverse de l’idéal q définit un point qX dans Spec(AX)

qui appartient à UX. On obtient ainsi un point q = (qX)X∈Mdl(X) de P(X).Lorsque q est l’idéal maximal, on obtient le point p. On montre facilement que si q1 < q2 alors q2 ≺ q1 et q1 6= q2.

Ceci montre que k(p) est de hauteur 1 si p est générique, i.e., il y a un seul idéal premier non nul dans k(p). NotonsA = f ∈ k(p), ‖f‖p ≤ 1 l’anneau de valuation de la norme ‖.‖p. On a clairement k(p) ⊂ A. Comme k(p) et Asont tous les deux des anneaux de valuation de hauteur 1, ils sont forcément égaux.

Supposant toujours que p est générique, le fait que k(p) est de hauteur 1 montre que l’idéal maximal de k(p)est√k∨(p) (puisque k∨(p) est non nul). Mais par construction, k(p)/k∨(p) est isomorphe à la colimite des algèbres

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14 Motifs des variétés rigides analytiques I

réduites Γ(U,O)/Γ(U,O∨) pour U ∈ Flt(p). Elle est donc elle même réduite. Ceci prouve que√k∨(p) = k∨(p). Le

lemme est démontré. c.q.f.d

Proposition 1.1.36 — Soient X un k-affinoïde et p ∈ M(X) un point générique. Soient f0, f1, . . . , fn desgénérateurs de Γ(X,O) en tant qu’idéal. Alors, p ∈ M(D(f0|f1, . . . , fn)) si et seulement si ‖f0‖p ≥ ‖fi‖p pour tout1 ≤ i ≤ n.

Demonstration On suppose que X = Spm(A) avec A une k-algèbre affinoïde munie d’une norme résiduelle. Onpeut supposer que fi ∈ A. On note X l’éclaté de Spf(A) en l’idéal (f0, . . . , fn) ⊂ A. Dire que p ∈M(D(f0|f1, . . . , fn)

revient à dire qu’il existe une factorisation du morphisme évident A // k(p) :

A //

k(p)

A[t1, . . . , tn]/(f0t1 − f1, . . . , f0tn − fn).

66

Notons fi(p) l’image de fi dans k(p). Une telle factorisation existe si et seulement si fi(p)/f0(p) ∈ k(p). Par le lemme1.1.35 et l’hypothèse que p est générique, cela revient à dire que ‖f0‖p ≥ ‖fi‖p pour 1 ≤ i ≤ n. c.q.f.d

Corollaire 1.1.37 — Soit X une k-variété rigide, U ⊂ X un ouvert quasi-compact et p ∈ M(X) un pointgénérique. On suppose que p 6∈M(U). Alors, il existe V ∈ Flt(p) tel que U ∩ V = ∅.

Demonstration La question est locale en U et autour de p. On peut donc supposer que X = Spm(A) est unk-affinoïde et U = D(f0|f1, . . . , fn) est un domaine rationnel associé à des générateurs f0, f1, . . . , fn de A en tantqu’idéal. Par la propostion 1.1.36, la condition p 6∈M(U) entraîne l’existence d’un 1 ≤ i0 ≤ n tel que ‖f0‖p < ‖fi0‖p.Soit λ ∈

√|k×| tel que ‖f0‖p < λ < ‖fi0‖p. L’ouvert V = D(f0|λ) ∩D(λ|fi0) convient alors. c.q.f.d

On termine la sous-section avec le résultat ci-dessous.

Proposition 1.1.38 — Soit p ∈ M(X) un point générique. Alors, l’anneau OX,p est local hensélien d’idéalmaximal O∨X,p. De plus, on a un isomorphisme naturel k(p) = OX,p/O

∨X,p ' ColimXk(pX) avec pX l’image de p dans

Xσ pour X ∈ Mdl(X).

Demonstration L’anneau OX,p est local d’idéal maximal O∨X,p. En effet, soit f ∈ OX,p−O∨X,p et notons f sa classedans k(p). Comme f 6∈ mp, il admet un inverse f−1 dans OX,p. La classe f−1 de f−1 dans k(p) est l’inverse de f .Étant donné que f ∈ k(p)− k∨(p), son inverse est dans k(p). Ceci montre que f−1 ∈ OX,p (on utilise ici que l’idéalmp ⊂ OX,p est contenu dans le sous-anneau OX,p).

Montrons que OX,p est hensélien. Soit P ∈ OX,p[T ] un polynôme et f une racine simple de la réduction P ∈ k(p)[T ].Comme k(p) = ColimU∈Flt(p)Γ(U,O)/Γ(U,O∨), on peut supposer que P est l’image d’un polynôme Q ∈ Γ(U,O) etque la racine f provient d’une racine g de Q à valeurs Γ(U,O)/Γ(U,O∨). Comme (Γ(U,O),Γ(U,O∨)) est un couplehensélien, on peut relever g en une racine g ∈ Γ(U,O). L’image f ∈ OX,p de g est bien une racine de P .

Il reste à montrer la dernière assertion, i.e., à construire un isomorphisme OX,p/O∨X,p ' ColimXk(pX). On peut

pour cela supposer que X est un k-affinoïde réduit. Montrons que sous cette condition, les deux morphismes évidents

ColimX∈Mdl(X), pX∈U⊂X

Γ(U,O)/√

(π)(1)// ColimX∈Mdl(X), pX∈U⊂X

Γ(Uη,O)/Γ(Uη,O)∨(2)// ColimU∈Flt(p)

Γ(U,O)/Γ(U,O)∨

sont inversibles. Pour le morphisme (2), on remarque que le foncteur qui associe à un couple (X, pX ∈ U) l’ouvertadmissible Uη ∈ Flt(p) est cofinal par le théorème 1.1.29. Considérons maintenant le morphisme (1). Soit U ⊂ X unvoisinage affine de pX. La Γ(U,O)-algèbre Γ(Uη,O) est complète pour la topologie π-adique (en effet, elle est séparéepuisque Uη est un k-affinoïde réduit). Elle s’écrit donc comme une colimite filtrante de ses sous-Γ(U,O)-algèbrestopologiquement de type fini et essentielles. Il vient que Γ(Uη,O) ' ColimX′∈Mdl(X)/XΓ(U×XX

′,O). Le résultat estalors clair.

Il maintenant aisé de conclure. En effet, on dispose d’un morphisme évident

k(p) ' ColimX∈Mdl(X), pX∈U⊂X

Γ(U,O)/√

(π) // ColimX∈Mdl(X)

k(pX),

qui est clairement surjectif. Étant donné que le membre de gauche est un corps et que le membre de droite est nonnul, il s’agit bien d’un isomorphisme. c.q.f.d

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 15

1.1.6 Morphismes lisses et étalesUne grande partie de la discussion suivante garde un sens lorsque la valuation de k est triviale.

Definition 1.1.39 — Soient X une k-variété rigide et x un point fermé de X (ou plus généralement un pointde P(X)). On dit que X est régulier en x si l’anneau local OX,p est régulier. On dit que X est lisse en x si pour touteextension finie k ⊂ k′, X⊗kk′ est regulier en tout point x′ au dessus de x.

On dit que X est lisse (resp. régulier) s’il est lisse (resp. régulier) en tout ses points fermés. On note SmRig/k ⊂VarRig/k et SmAfnd/k ⊂ Afnd/k les sous-catégories pleines des k-variétés rigides lisses.

Si X = Spm(A) est régulier, alors l’anneau A est régulier au sens algébrique. En effet pour x ∈ Spm(A), on aAx ' OX,x (où l’on désigne par † le complété formel d’un anneau local † en son idéal maximal).

Comme en géométrie algébrique, la notion de lissité est intimement reliée à celle des différentielles. Étant donné unmorphisme f : Y // X de k-variétés rigides, on note Ωf le OY -module cohérent I∆/I 2

∆ avec I∆ l’idéal de l’im-mersion localement fermée ∆ : Y // Y ×XY . On dispose d’un morphisme de faisceaux abéliens d : OY // Ωf

qui est localement donné par df = f ⊗ 1 − 1 ⊗ f . Le morphisme d est une dérivation. Lorsque Y = XT1, . . . , Tnon montre que Ωf est un OY -module libre ayant pour base (dT1, . . . ,dTn). Étant donné un triangle commutatif dek-variétés rigides

Zs//

g''

Y

f

X

avec s une immersion fermée d’idéal Is et de faisceau normal Ns = Is/I 2s , on dispose d’une suite exacte de faisceaux

de OZ-modules

(1.19) Ns// s∗Ωf // Ωg // 0 .

On a le théorème suivant :

Theoreme 1.1.40 — Soit X = Spm(A) un k-affinoïde de dimension d en un point fermé x de X. Soientp : kT1, . . . , Tn // // A une présentation de A et f1, . . . , fm une famille de générateurs de l’idéal p−1(0). Lesconditions suivantes sont équivalentes :

1. X est lisse en x,2. dimk(x)

(ΩX/k ⊗A k(x)

)= d,

3. dimk(x)

(ΩX/k ⊗A k(x)

)≤ d,

4. rangk(x)

(∂(f1, . . . , fm)

∂(T1, . . . , Tn)(x)

)= n− d,

5. rangk(x)

(∂(f1, . . . , fm)

∂(T1, . . . , Tn)(x)

)≥ n− d.

Demonstration Notons I = p−1(0) de sorte que le faisceau normal de Spm(p) soit associé au A-module I/I2. Onnote mx l’idéal maximal de kT1, . . . , Tn définissant le point x.

On peut bien sûr supposer que x est un point rationnel quitte à remplacer k par k(x). Dans ce cas, X est lisse enx si et seulement si il est régulier en x ou encore, si et seulement si l’image de l’application linéaire

(1.20) I/I2 ⊗A k(x) // mx/m2x

est un sous k(x)-espace vectoriel de dimension supérieure ou égale à n− d (en fait forcément égale à n− d).La suite exacte (1.19) appliquée aux immersions x ⊂ Spm(A) ⊂ Spm(kT1, . . . , Tn) fournit un diagramme com-

mutatifA.f1 ⊕ · · · ⊕A.fm

(∂fj∂Ti

)i,j

''

I/I2 //

A.dT1 ⊕ · · · ⊕A.dTn //

ΩA/k //

0

0 // mx/m2x

∼// k(x).dT1 ⊕ · · · ⊕ k(x).dTn // Ωk(x)/k = 0.

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16 Motifs des variétés rigides analytiques I

Il vient que l’image de (1.20) est de dimension ≥ n − d si et seulement si la matrice Jacobienne(∂fj∂Ti

(x)

)ij

est de

rang ≥ n− d ce qui est vrai si et seulement si la dimension de ΩA/k ⊗A k(x) est ≤ d. c.q.f.d

On obtient alors les corollaires suivants :

Corollaire 1.1.41 — Si la k-variété rigide X est lisse au point x, il existe un voisinage ouvert U de x qui estlisse (i.e., la lissité est une propriété ouverte).

Demonstration En effet, comme X est régulier en x, il existe un voisinage affinoïde U = Spm(A) de x avec Anormal. En particulier, on peut supposer que X est partout de dimension d. Pour conclure, il suffit de remarquer quela propriété dimk(x)(ΩX/k ⊗ x) ≤ d est ouverte. c.q.f.d

Corollaire 1.1.42 — Soit X une k-variété rigide partout de dimension d. Les conditions suivantes sontéquivalentes :

1. X est lisse,

2. ΩX/k est localement libre de dimension d.

Supposons que X = Spm(A) est un k-affinoïde muni d’une présentation p : kT1, . . . , Tn // // A d’idéal p−1(0) =

(f1, . . . , fm). Alors, les deux conditions précédentes sont également équivalentes à :

3. La matrice Jacobienne∂(f1, . . . , fm)

∂(T1, . . . , Tn)est de rang n− d dans A.

Demonstration On peut bien sûr supposer que X = Spm(A) est un affinoïde. Si ΩA est un module projectif de rangd, alors Spm(A) est lisse en tous ses points fermés par le théorème 1.1.40. Toujours par le théorème 1.1.40, la matrice

Jacobienne∂(f1, . . . , fm)

∂(T1, . . . , Tn)est de rang n − d. Enfin, si l’on suppose que la matrice Jacobienne est de rang n − d, son

image est alors un module projectif de dimension n− d et son conoyau est projectif de dimension d. Par le diagrammede la preuve du théorème 1.1.40, ce conoyau est canoniquement isomorphe à ΩA/k. c.q.f.d

Corollaire 1.1.43 — Soit s : Y // X une immersion fermée entre deux k-variétés rigides lisses. On aalors une suite exacte courte

0 // Ns// s∗ΩX/k // ΩY/k // 0 .

En particulier, Ns est localement libre et la suite exacte est localement scindée.

Demonstration On peut supposer que Y = Spm(B) et X = Spm(A) sont des k-affinoïdes lisses de dimension puredY et dX . L’immersion s est alors donnée par un morphisme surjectif e : A // // B . Notons I le noyau de e. On aune suite exacte

I/I2 θ// ΩA/k ⊗A B // ΩB/k // 0 .

Il s’agit de montrer l’exactitude à gauche pour cette suite. Il existe un recouvrement admissible (Xi = Spm(Ai))ide X tel que ker(ΩAi/k ⊗Ai Bi → ΩBi/k) est libre (avec Bi = B⊗AAi). On peut donc supposer dans la suite queker(ΩA/k ⊗A B → ΩB/k) est libre de base (a1, . . . , ar) avec r = dX − dY . Soient f1, . . . , fr ∈ I tels que θ(fi) = ai etnotons I1 l’idéal (f1, . . . , fr). Il suffira de montrer que I1 = I au voisinage de Y .

Notons B1 = A/I1 et Y1 = Spm(B1). On a un morphisme surjectif B1// // B induisant une immersion fermée

Y ⊂ Y1. La suite exacteI1/I

21

// ΩA/k ⊗A B1// ΩB1/k

// 0

montre que ΩB1/k ⊗B1B ' ΩB/k. Ceci montre que en tout point fermé y ∈ Y , la k-variété rigide Y1 est lisse puisque

dimy(Y1) ≥ dimy(Y ) ≥ dimk(y)(ΩY/k ⊗OY k(y)). Il vient aussi que Y1 est de dimension dY en y. Ceci montre quel’inclusion Y ⊂ Y1 est un isomorphisme au voisinage de y. On a donc montrer que Y1 est une somme disjointeY1 = Y

∐Z. Le résultat est maintenant clair. c.q.f.d

Il est utile de définir une version relative de la lissité. On commence par rappeler la notion de platitude :

Definition 1.1.44 — Soit f : Y // X un morphisme de k-variétés rigides. On dit que f est plat s’il estlocalement isomorphe à Spm(u) avec u un morphisme plat de k-algèbres affinoïdes.

On montre que f est plat si et seulement si pour tout point fermé y ∈ Y le morphisme d’anneaux locaux

OX,f(x)// OY,y (ou encore OX,f(x)

// OY,y ) est plat. On en déduit facilement que la platitude est stablepar changement de base.

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 17

Definition 1.1.45 — Un morphisme f : Y // X de k-variétés rigides est lisse s’il est plat et si pour toutx ∈ X, la fibre f−1(x) est lisse sur k(x). On dit que f est étale si de plus les fibres non vides de f sont de dimensionnulle.

On peut généraliser le corollaire 1.1.43 aux morphismes lisses :

Lemme 1.1.46 — 1- Soit f un morphisme lisse de k-variétés rigides. Le faisceau cohérent Ωf est localementlibre.

2- Soit un triangle commutatif de k-variétés rigides

Ys//

g((

X

f

T

avec s une immersion fermée et f et g des morphismes lisses. On a alors une suite exacte courte de OY -modules

(1.21) 0 // Ns// s∗Ωf // Ωg // 0 .

Demonstration Pour la première partie du lemme, on peut supposer que f provient d’un morphisme de k-algèbresaffinoïdes A // B . On choisit une présentation p : AT1, . . . , Tn // // B de noyau I. On a une suite exacte deB-modules

(1.22) I/I2 // B.dT1 ⊕ · · · ⊕B.dTn // ΩB/A // 0 .

Comme f est plat, l’idéal I est plat en tant que A-module. On déduit que pour tout x ∈ Spm(A), le morphismeévident I ⊗A k(x) // I(B ⊗A k(x)) est inversible. De plus, l’image de I2 ⊗A k(x) // I ⊗A k(x) s’identifie viacet isomorphisme à I2(B ⊗A k(x)). On a donc un isomorphisme naturel

(I/I2)⊗A k(x)∼// I(B ⊗A k(x))/I2(B ⊗A k(x)) .

Un argument similaire montre que le morphisme évident ΩB/A ⊗A k(x) // ΩB⊗Ak(x)/k(x) est inversible. Ainsi, si

on applique −⊗A k(x) à la suite (1.22), on obtient (à isomorphisme près) la suite

0 // I(B ⊗A k(x))/I2(B ⊗A k(x)) // (B ⊗A k(x)).dT1 ⊕ · · · ⊕ (B ⊗A k(x)).dTn // ΩB⊗Ak(x)/k(x)// 0

qui est une suite exacte courte de modules localement libres par le corollaire 1.1.43. Il vient que pour tout y ∈ Spm(B),la suite déduite de (1.22) par application de −⊗B k(y) est une suite exacte courte.

Appelons maintenant N = ker((I/I2)→ ⊕ni=1B.dTi) et K = coker(N → (I/I2)) de sorte qu’on a une suite exactecourte de B-modules

(1.23) 0 // K // B.dT1 ⊕ · · · ⊕B.dTn // ΩB/A // 0 .

Étant donné que (I/I2)⊗B k(y) // K ⊗B k(y) est surjectif, on voit que (1.23) est encore une suite exacte courte

après application de −⊗Bk(y) pour tout y ∈ Spm(B). Comme⊕ni=1B.dTi est libre, on déduit que Tor1B(ΩB/A, k(y)) = 0

pour tout point fermé y de Spec(B). Comme ΩB/A est de type fini, il est projectif.Pour la seconde partie du lemme, on appelle E le noyau de Ns

// s∗Ωf et K = Ns/E . On a alors deux suitesexactes courtes

0 // K // s∗Ωf // Ωg // 0 et 0 // E // Ns// K // 0 .

De la discussion ci-dessus, on déduit que K est localement libre et que Ns ⊗OY k(y) ' K ⊗OY k(y). Étant donnéque Tor1

OY (K , k(y)) = 0, on a forcément E ⊗OY k(y) = 0. Ceci étant vrai pour tout y ∈ Y , on déduit que E = 0. Lelemme est prouvé. c.q.f.d

On a le résultat suivant concernant les morphismes étales :

Theoreme 1.1.47 — Soit f : Y // X un morphisme de k-variétés rigides. Les conditions suivantes sontéquivalentes :

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18 Motifs des variétés rigides analytiques I

(i) f est étale,(ii) f est plat et Ωf = 0,

(iii) f et plat et Y // Y ×XY est une immersion ouverte,

(iv) Pour tout y ∈ Y , V = Spm(B) un voisinage affinoïde de y et U = Spm(A) un voisinage affinoïde de f(V ), la

A-algèbre B est isomorphe à AT1, . . . , Tn/(f1, . . . , fn) avec∂(f1, . . . , fn)

∂(T1, . . . , Tn)de rang n (i.e., inversible) dans B.

Demonstration Si f est étale, on a pour x ∈ X, (Ωf ) ⊗OX k(x) = Ωf−1(x) = 0. Ceci prouve que Ωf = 0. D’oùl’implication (i)⇒ (ii).

Montrons que (ii) ⇒ (iii). Si I∆ est l’idéal de l’inclusion Y ⊂ Y ×XY alors I 2∆ = I∆. Ainsi, en tout point

e ∈ Y ×XY , l’idéal I∆ ⊗OY ×XYOY ×XY,e est soit nul, soit égal à OY ×XY,e. Le résultat est donc clair. L’implication

(iii)⇒ (ii) est immédiate.Montrons que (iv)⇒ (i). On peut supposer que X = Spm(A) et Y = Spm(B). Pour montrer que f est étale en y,

il suffit de la faire après une extension finie de k. On peut donc supposer que k(y) = k(x) = k. Il suffira de montrer

que le morphisme Ax // By est étale. On verra même que c’est un isomorphisme. On peut supposer que y estenvoyée sur l’origine de Spm(AT1, . . . , Tn) par Spm(p). En d’autres termes, fi(0, . . . , 0) = 0 pour 1 ≤ i ≤ n. LaAx-algèbre By est donc donnée par A[[T1, . . . , Tn]]/(f1, . . . , fn). Il est alors clair que l’endomorphisme Ti fi est unautomorphisme de A[[T1, . . . , Tn]]. D’où le résultat.

Pour finir, il reste à voir que (ii)⇒ (iv). On se donne une présentation p : AT1, . . . , Tn // B avec I = p−1(0).La suite exacte (voir le lemme 1.1.46)

0 // I/I2 θ// B.dT1 ⊕ · · · ⊕B.dTn // Ωf // 0

montre que le morphisme θ est inversible. Soient des éléments f1, . . . , fn ∈ I tels que θ(fi) = dTi et notons I1 =

(f1, . . . , fn). Le morphisme I1/I21

// I/I2 est surjectif. Il vient que I = I1 + I2. Comme l’anneau AT1, . . . , Tnest noethérien, on a forcément I = I1 au voisinage de Spec(B), i.e., il existe g ∈ AT1, . . . , Tn tel que l’image de g dansB est inversible et Ig = (I1)g. Soit h ∈ AT1, . . . , Tn tel que gh est égal à 1 sur B. On peut supposer que la normeinfinie de h sur B est plus petite que 1. On définit alors une nouvelle présentation p′ : AT1, . . . , Tn, S // B enenvoyant S sur l’image de h dans B. Le noyau de p′ est clairement égal à (f1, . . . , fn, gS − 1). De plus, l’image de∂(f1, . . . , fn, gS − 1)

∂(T1, . . . , Tn, S)dans B est une matrice triangulaire supérieure avec des 1 sur la diagonale. c.q.f.d

Corollaire 1.1.48 — Soit un triangle commutatif de k-variétés rigides

Yf//

h((

X

g

T

Si h et g sont étales, il en est de même de f .

Demonstration Considérons le diagramme commutatif

Y //

id×f

(c)

X

Y ×TX //

pr2**

X×TXpr2

X

où le carré (c) est cartésien. Par le théorème 1.1.47, ∆ est une immersion ouverte. Il vient que id × f est égalementune immersion ouverte. Le résultat découle alors du fait que pr2 est étale et que f = pr2 (id× f). c.q.f.d

Corollaire 1.1.49 — Soit f : Y // X un morphisme de k-variétés rigides. Les deux conditions suivantessont équivalentes :

1. f est lisse.

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 19

2. Il existe des recouvrements admissibles (Yi)i∈I et (Xi)i∈I de Y et X tels que :– Yi ⊂ f−1(Xi),– le morphisme fi : Yi // Xi se factorise de la manière suivante :

Yie// Bnk ×kXi

pr2// Xi

avec e un morphisme étale.

Demonstration La seconde condition est clairement suffisante. Montrons qu’elle est nécessaire. On peut supposerque X = Spm(A) et Y = Spm(B) sont affinoïdes. Soit p : AT1, . . . , Tn // B une présentation de B. On noteI = p−1(0). On a la suite exacte courte de B-modules

0 // I/I2 α// BdT1 ⊕ · · · ⊕B.dTn // Ωf // 0 .

Comme Ωf est projectif, on déduit que I/I2 est aussi projectif.On peut trouver un recouvrement admissible (Yi = Spm(Bi))i de Y par des domaines rationnels tels que pour

chaque i, le sous-module α(I/I2) ⊗B Bi ⊂ Bi.dT1 ⊕ · · · ⊕ Bi.dTn soit libre et admet un supplémentaire librementengendré par une partie de dT1, . . . ,dTn. Fixons l’indice i et supposons que cette partie est dT1, . . . ,dTr pour uncertain r ≤ n. Le morphisme

(Bi.dT1 ⊕ . . . Bi.dTr)⊕ ((I/I2)⊗B Bi) // Bi.dT1 ⊕ · · · ⊕Bi.dTn

est donc inversible. Choisissons des éléments f ir+1, . . . , fin ∈ I engendrant librement (I/I2) ⊗B Bi. Soit enfin, Di =

Spm(AT1, . . . , Tn〈h0|h1, . . . , hm〉) un domaine rationnel contenant Yi comme une partie fermée. On obtient alors laprésentation suivante de la A-algèbre Bi :

Bi ' AT1, . . . , TrTr+1, . . . , Tn, S1, . . . , Sm/(f ir+1, . . . , fin, h0.S1 − h1, . . . , h0.Sm − hm).

On vérifie facilement que la matrice Jacobienne∂(f ir+1, . . . , f

in, h0.S1 − h1, . . . , h0.Sm − hm)

∂(Tr+1, . . . , Tn, S1, . . . , Sm)est bien inversible dans

Bi. Ceci montre que Bi est une AT1, . . . , Tr-algèbre étale. Le corollaire est prouvé. c.q.f.d

On a le lemme important suivant :

Lemme 1.1.50 — Soit e : Spm(B) // Spm(A) un morphisme étale de k-affinoïdes. On peut trouver uneprésentation

AT1, . . . , Tn/(P1, . . . , Pn)∼// B

avec Pi ∈ A[T1, . . . , Tn] des polynômes et∂(P1, . . . , Pn)

∂(T1, . . . , Tn)inversible dans B. De plus, il existe ε > 0 tel que pour tout

n-uplet (f1, . . . , fn) ∈ AT1, . . . , Tnn avec |fi − Pi| ≤ ε la A-algèbre AT1, . . . , Tn/(f1, . . . , fn) est isomorphe à B.

Demonstration Lorsque la norme de k est triviale, il n’y a rien à montrer. On suppose donc que la norme dek est non triviale et on fixe une norme de Banach sur A. La preuve du lemme est une application de la méthoded’approximation de Newton (voir aussi la preuve de la proposition 1.1.34). On commence par une discussion générale.Étape 1 : Soit C = AT1, . . . , Tn/(f1, . . . , fn) une A-algèbre affinoïde. On notera f = (f1, . . . , fn), T = (T1, . . . , Tn)et S = (S1, . . . , Sn) (un deuxième système d’indéterminées) que l’on considère comme des vecteurs. On peut écrire

(1.24) f(T + S) = f(T) + [Jf (T)](S) +∑

1≤i≤j≤n

Si.Sj .Di,jf (T,S),

avec Jf =∂(f1, . . . , fn)

∂(T1, . . . , Tn)la matrice Jacobienne et Di,j

f des séries strictement convergentes uniquement déterminées par

la condition Di,jf ∈ AT1, . . . , Tn, Sj , . . . , Sn. Supposons que Jf soit inversible dans C (donc C est étale sur A). Ceci

revient à dire qu’il existe des séries strictement convergentes g, w1, . . . , wn ∈ kT1, . . . , Tn telles que

(1.25) det(Jf (T)).g(T) = 1 +

n∑i=1

fi(T).wi(T).

Soient R une A-algèbre affinoïde (que l’on munie d’une norme résiduelle arbitraire pour laquelle A // R soitcontractante) et t0 = (t10, . . . , tn0) ∈ (R)n. On définit un système récurrent (de Newton) par la formule

(1.26) tr+1 = tr − [Jf (tr)−1](f(tr)).

On fixe un réel M > 1 tel que :

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20 Motifs des variétés rigides analytiques I

1. les séries strictement convergentes wi sont de normes Gauss strictement inférieures à M ,2. les coefficients des Di,j

f sont de normes de Gauss inférieures ou égales à M ,

3. la norme de Gauss de g et ceux des coefficients de la comatrice de Jf (T) sont majorées par√M .

Supposons que |fi(t0)| ≤ 1

2M3(pour 1 ≤ i ≤ n). Nous allons montrer par récurrence que :

(i) tr est bien défini et tr ∈ (R)n,

(ii) |fi(tr)| ≤1

22rM3pour 1 ≤ i ≤ n.

Lorsque r = 0, ces conditions sont clairement vérifiées. Supposons qu’elles le sont encore pour un entier r. Comme|wi| < M , on voit que |wi(tr).fi(tr)| < 1. Ainsi, 1+

∑ni=1 fi(tr).wi(tr) est inversible dans R et la norme de son inverse

est égale à 1. On déduit de (1.25) que det(Jf (tr)) est inversible et de norme égale à celle de g et donc majorée par√M .

Ceci prouve que Jf (tr) est inversible et que les normes des coefficients de Jf (tr)−1 sont majorées par M . Il vient donc

que Jf (tr)−1(f(tr)) = (e1(tr), . . . , en(tr)) = e(tr) est un vecteur dont tous les coefficients sont de normes inférieures

à1

22rM2. Ceci montre en particulier que tr+1 est défini et qu’il est à coefficients dans R.

Il reste à montrer la dernière inégalité. Pour cela, on utilise (1.24) pour avoir

f(tr+1) = f(tr − Jf (tr)−1f(tr)) = f(tr)− Jf (tr)Jf (tr)

−1f(tr) +∑

1≤i≤j≤n

ei(tr)ej(tr)Dijf (tr, e(tr))

=∑

1≤i≤j≤n

ei(tr)ej(tr)Dijf (tr, e(tr)).

Ceci montre que les normes des coefficients de tr+1 sont majorées par(

1

22r .M2

)2

.M =1

22r+1 .M3. D’où le cas r + 1

de la récurrence.On déduit donc que la suite (tr)r∈N converge vers un n-uplet t = (t1, . . . , tn) ∈ (R)n. Comme |fi(t1, . . . , tn)| = 0,

on déduit que fi(t1, . . . , tn) = 0. On obtient ainsi un morphisme de A-algèbres C // R qui à Ti associe ti.Étape 2 : On garde les notations de l’étape précédente. Soient f ′ = (f ′1, . . . , f

′n) ∈ AT1, . . . , Tnn et notons C ′ =

AT1, . . . , Tn/(f ′1, . . . , f ′n). On suppose les inégalités suivantes

(1.27) |fi − f ′i | ≤1

2.M3, |det(Jf )− det(Jf ′)| <

1√M

, |Di,jf −Di,j

f ′ | < M et |Com(Jf )− Com(Jf ′)| <√M,

(où la norme d’une matrice est le supremum des normes de ses entrées). Nous allons montrer que les A-algèbres C etC ′ sont isomorphes.

Montrons d’abord que Spm(C ′) est étale sur Spm(A), i.e., que la matrice Jacobienne Jf ′ est inversible dans C ′. Ilsuffit bien entendu de montrer que g.det(Jf ′) est inversible dans C ′. Étant donné que

|g.det(Jf )− g.det(Jf ′)| < 1,

il suffira de montrer que 1 +∑ni=1 fi(T).wi(T) est inversible dans C ′. Mais dans C ′, on a

1 +

n∑i=1

fi(T).wi(T) = 1 +

n∑i=1

(fi − f ′i)(T).wi(T) mod (f ′1, . . . , f′n).

Comme |fi − f ′i | < |wi|−1, la série de droite est bien inversible.

Notons t′i0 la classe de Ti dans C ′. On a |fi(t′10, . . . , t′n0)| = |(fi − f ′i)(t′10, . . . , t

′n0)| ≤ |fi − f ′i | ≤

1

2.M3. La suite

récurrente de l’étape précédente fournit donc des éléments t′i ∈ ATi, . . . , Tn/(f ′1, . . . , f ′n) tels que fi(t′1, . . . , t′n) = 0.Ceci fournit un morphisme surjectif de A-algèbres étales

(1.28) C =AT1, . . . , Tn

(f1, . . . , fn)// // C ′ =

AT1, . . . , Tn(f ′1, . . . , f

′n)

.

La surjectivité découle du fait que |t′i − t′i0| < 1.Réciproquement, notons ti0 la classe de Ti dans C. On a encore |f ′i(t10, . . . , tn0)| = |(f ′i − fi)(t10, . . . , tn0)| ≤

|fi − f ′i | ≤1

2.M3. Par l’étape précédente, le système

(1.29) tr+1 = tr − [Jf ′(tr)−1](f ′(tr))

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 21

converge vers une racine de l’équation f ′ = 0. En effet, on a les mêmes bornes sur les normes de det(Jf ′), Di,jf ′ ,

Com(Jf ′). De plus, par la discussion du début de la seconde étape, on peut écrire

det(Jf ′).g.(1 + ε)−1 = 1 +

n∑i=1

f ′i(T).wi(T)(1 + ε)−1

avec |ε| < 1 (on a plus précisément ε = det(Jf ′)−det(Jf ) +∑i(fi−f ′i).wi). On en déduit alors un morphisme surjectif

(1.30) C ′ =AT1, . . . , Tn

(f ′1, . . . , f′n)

// // C =AT1, . . . , Tn

(f1, . . . , fn).

Par le corollaire 1.1.48, le morphisme surjectif (1.28), identifie Spm(C ′) à une composante connexe de Spm(C). Demême, le morphisme 1.30 identifie Spm(C) à une composante connexe de Spm(C ′). On en déduit que les composées

Spm(C) // Spm(C ′) // Spm(C) et Spm(C ′) // Spm(C) // Spm(C ′)

sont des isomorphismes. Il vient que C et C ′ sont isomorphes en tant que A-algèbres.

Étape 3 : Revenons à l’énoncé du lemme. On peut supposer que notre A-algèbre B est égale à C. Étant donnéeque det(Jf ), Di,j

f et Com(Jf ) dépendent continûment de f , il existe ε > 0, tel que les conditions (1.27) sont vérifiéesdès que |f − f ′| < ε. Le résultat découle alors du fait que l’on peut choisir de tels f ′i dans le sous-anneau denseA[T1, . . . , Tn] ⊂ AT1, . . . , Tn. c.q.f.d

On appliquera le lemme précédent pour établir quelques propriétés importantes des morphismes étales entre k-variétés rigides quasi-compactes (voir [FP04, Proposition 8.1.2]) :

Proposition 1.1.51 — On suppose que la valuation de k est non triviale. Soit f : Y // X un morphismeétale de k-variétés rigides.

1- Soit q ∈ P(Y ) et notons p ∈ P(X) son image par e. Si q est un point générique, le morphisme OX,x // OY,y

est fini et étale. De plus, il existe un voisinage affinoïde V ∈ Flt(q) qui est un revêtement étale (i.e., fini et étale) surun voisinage affinoïde U ∈ Flt(p).

2- Il existe un recouvrement admissible (Xi)i∈I de X, des recouvrements admissibles (Yij)j∈Ji de Yi = Y ×XXi

ainsi que des triangles commutatifs

Yijuij//

''

Yij

fij

Xi

avec uij une immersion ouverte et fij un revêtement étale.

Demonstration Il suffit de traiter le cas où X = Spm(A) et Y = Spm(B) avec B = AT1, . . . , Tn/(P1, . . . , Pn) où

Pi sont des polynômes et Jac(P1, . . . , Pn) = det

(∂(P1, . . . , Pn)

∂(T1, . . . , Tn)

)inversible dans B. Considérons la A-algèbre de type

finieE = A[T1, . . . , Tn, U ]/(P1, . . . , Pn, Jac(P1, . . . , Pn).U − 1).

C’est une A-algèbre étale. De plus, Spm(B) est un ouvert admissible de Spec(E)an. Il existe un recouvrement Zariski(Spec(Ai))i de Spec(A) et des recouvrements Zariski (Spec(Eij))j de Spec(Ei) = Spec(E ×A Ai) tels que Eij est uneAi-algèbre étale élémentaire, i.e., de la forme (Ai[T ]/Pij(T ))[1/P ′ij(T ).Qij(T )] avec Pij un polynôme unitaire et Qijun polynôme quelconque. Quitte à remplacer X et Y par les ouverts admissibles de recouvrements admissibles, onpeut donc supposer que Spm(B) est un ouvert admissible de Spec(E)an avec E = (A[T ]/P (T ))[1/P ′(T )] une A-algèbreétale élémentaire (avec P unitaire). Notons alors E = A[T ]/P (T ). C’est une A-algèbre finie, donc un k-affinoïde. Ilest clair que Spm(B) est un domaine de Y = Spm(E). De plus, le lieu singulier de la A-variété rigide Y est le ferméZ d’équation P ′(T ) = 0 qui est disjoint de Spm(B).

Notons e : Spm(E) = Y // Spm(A) = X . Nous allons montrer les deux assertions ci-dessous.

(i) Soient F une partie de P(X) et V un domaine de Y tel que P(V ) contient la partie e−1(F ). Il existe un domaineU de X tel que F ⊂ P(U) et e−1(U) ⊂ V .

(ii) Soit p ∈ P(X) un point générique. Notons e−1(p) = q1, . . . , qr. Il existe des domaines affinoïdes Vi ∈ Flt(qi)tels que Vi ∩ Vj = ∅ si i 6= j.

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22 Motifs des variétés rigides analytiques I

Étant donné un modèle essentiel X de X, on choisit un modèle YX de Y , fini et plat sur X. Par le théorème deplatification de Raynaud (voir [GR71]) et le fait que E est une A-algèbre libre, on peut choisir X et YX aussi fins quel’on veut. On peut donc supposer que V est la fibre générique d’un ouvert Zariski V du schéma formel YX. Notons FX

l’image de F dans Xσ. Alors, l’image de e−1(F ) dans (YX)σ coïncide avec (YX → X)−1(FX). En effet, si p ∈ P(X),X′ ∈ Mdl(X) essentiel et plus fin que X et YX′ choisi plus fin que YX, la platitude du X-schéma formel YX entraîneque l’application (YX′ → X′)−1(pX′) // (YX → X)−1(pX) est surjective. Mais e−1(p) est la limite projective des

(YX′ → X′)−1(pX′). On déduit de ce qui précède que (YX → X)−1(FX) ⊂ Vσ. L’image de (YX)σ −Vσ par YX// X

est un fermé T de X disjoint de FX. L’ouvert U = (X− T )η convient clairement pour (i). La propriété (ii) découle ducorollaire 1.1.37 et du fait que les qi sont génériques.

On déduit des propriétés (i) et (ii) des isomorphismes

OY ,q1 × · · · × OY ,qr ' ColimV1∈Flt(q1),...,Vr∈Flt(qr)Γ(V1 ∪ · · · ∪ Vr,O) ' ColimU∈Flt(p)Γ(U ×X Y,O) ' OX,p ⊗A E.

En particulier, OY ,qi est une OX,p-algèbre finie. Cette algèbre est étale si qi ∈ P(Y −Z) et en particulier si qi ∈ P(Y ).Ceci montre que pour tout q ∈ P(Y ), il existe V ∈ Flt(q) et U ∈ Flt(e(q)) tel que V est un revêtement étale de U . Ona ainsi montré la première partie de l’énoncé.

Montrons la deuxième partie. Soit p ∈ M(X) un point générique et notons comme tout à l’heure q1, . . . , qr lafibre de p. Par la proposition 1.1.32, si qi ∈ P(Y − Z) on a qi ⊂ P(Y − Z). Il existe donc deux ouverts affinoïdes Veet Vs de Y tels que :

1. Ve ∩ Vs = ∅, Vs ∩ Y = ∅ et Ve ∩ Z = ∅,2. si qi ∈ P(Y − Z), alors Ve contient qi,3. si qi ∈ P(Z), alors Vs contient qi.Par la discussion ci-dessus, on peut trouver un voisinage U de p dans X tel que U×X Y est contenu dans Ve ∪ Vs.

On a donc une décomposition en somme directe U×X Y = We

∐Ws avec We ⊂ Ve et Ws ⊂ Vs. Par construction,

U ×X Y est un ouvert admissible de We. Comme U ×X Y est fini sur U , on déduit que We est aussi fini sur U . De plus,il est étale. Pour conclure, il suffit d’utiliser le fait que P(X) est compact, i.e., si (Ui)i∈I est une famille de domainesde X telle que ∪i∈I0P(Ui) = P(X), il existe une partie finie I0 ⊂ I, telle que ∪i∈I0P(Ui) = P(X). En effet, (Ui)i∈I0 estalors un recouvrement admissible de X. c.q.f.d

Remarque 1.1.52 — La preuve de la proposition 1.1.51 est inspirée de la preuve de [FP04, Proposition 8.1.2].Toutefois, l’argument présenté ici est plus complexe puisque nous nous sommes efforcés d’éviter un point qui nousa paru obscur dans loc cit. Il semble en effet qu’un “cercle vicieux” s’est introduit dans la preuve proposée dans[FP04] : la démonstration du point (1) de 8.1.2 utilise le lemme 8.1.3 qui lui repose implicitement sur le point (3) de8.1.2 affirmant que l’image d’un domaine rationnel par un morphisme étale est une réunion de domaines rationnels.Malheureusement, la preuve de 8.1.2(3) utilise 8.1.2(1).

Remarque 1.1.53 — La proposition 1.1.51 affirme que si f : Y // X est étale et y ∈ M(Y ), le morphismeOX,f(y)

// OY,y est fini et étale. On peut se demander si la généralisation suivante est vraie. Soit f : Y // X un

morphisme de k-affinoïdes tel que pour tout x ∈ X, la fibre f−1(x) = Y ×X x est finie. Comme en géométrie algébrique,on pourra appeler quasi-fini un tel morphisme. Soit y ∈ M(Y ). Est-il vrai que le morphisme OX,f(y)

// OY,y estfini ? Cette question semble intimement liée à une hypothétique version rigide du bien-connu théorème de Zariskiaffirmant qu’un morphisme quasi-fini de schémas peut se factoriser en une immersion ouverte suivie d’un morphismefini.

Corollaire 1.1.54 — On suppose que la valuation de k est non triviale. Soient f : Y // X un morphismeétale de variétés rigides quasi-compactes et Z ⊂ X une sous-variété rigide fermée. On suppose que Y ×XZ // Zadmet une section s. Il existe alors un voisinage ouvert quasi-compact Z ⊂ U ⊂ X et un diagramme commutatif

Y

f

Z //

s33

U

t

77

// X.

Demonstration Soit U un ouvert connexe de X. Lorsque U ∩Z 6= ∅, il existe au plus une section à Y ×XU // U

qui étend la section s : U ∩ Z // Y ×X(U ∩ Z) . Il suffit donc de construire t localement au voisinage de Z. Plusprécisément, si (Xi)i∈I est un recouvrement admissible de X par des k-variétés rigides quasi-compactes, il suffitde traiter le cas des morphismes étales Y ×XXi

// Xi et des fermés Z ∩ Xi ⊂ Xi. De même, soit (Yj)j∈J un

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1.1 Rappels et compléments de géométrie rigide 23

recouvrement admissible de Y par des k-variétés rigides quasi-compactes. On pose Zj = s−1(Yj). On choisit un ouvertquasi-compact de Xj ⊂ X tel que Xj ∩Z = Zj et on note Y ′j = Yj ∩f−1(Xj). Il suffit alors de prouver la conclusion ducorollaire pour les morphismes étales Y ′j

// Xj et Zj // Y ′j . Par la proposition 1.1.51, on peut donc supposer

que X est un k-affinoïde et que Y est un ouvert quasi-compact d’un revêtement étale f : Y // X . On peut mêmesupposer que f est lui-meme un revêtement étale. En effet, si on trouve un diagramme commutatif

Y

f

Z //

s

33

U

t

77

// X,

on peut prendre U = t−1(Y ) et t = t|U .Il est maintenant aisé de démontrer résultat recherché. En effet, posons T = Y ×XZ ⊂ Y . La section s fournit une

décomposition en somme disjointe T = Z∐T ′. Soient V et W deux ouverts quasi-compacts de Y tels que Z ⊂ V ,

T ′ ⊂ W et V ∩W = ∅. Pour construire de tels ouverts, on procède de la manière suivante. On fixe Z ⊂ V tel queV ∩ T ′ = ∅. Soient f1, . . . , fn des générateurs de l’idéal de définition du sous-affinoïde T ′. Alors, les fi ne s’annulentpas simultanément sur V . Comme V est quasi-compact, il existe ε ∈ |k×| tel que maxi=1,...,n(|fi(v)|) > ε pour toutpoint fermé v de V . Il suffit alors de prendre W = ∩ni=1DX(ε|fi).

Par la propriété (i) établie pendant la preuve de la proposition 1.1.51, il existe un ouvert quasi-compact U de Xcontenant Z et tel que f−1(U) ⊂ V . On prendra un tel U avec la propriété supplémentaire que toutes ses composantesconnexes rencontrent Z. On a donc une décomposition f−1(U) = E

∐F avec E = f−1(U) ∩ V et F = f−1(U) ∩W .

Alors, E est un revêtement étale de U . De plus, les fibres de E/U en z ∈ Z sont des singletons. Il vient que E/U estpartout de degré 1. On a ainsi montré que E ' U . c.q.f.d

Voici une deuxième application du lemme 1.1.50 :

Proposition 1.1.55 — Soit Y // X un morphisme lisse de k-variétés rigides. Il existe alors des recou-vrements admissibles (Yi = Spm(Bi))i et (Xi = Spm(Ai))i de Y et X avec f(Yi) ⊂ Xi ainsi que des modèles affinesYi = Spf(Bi ) // Xi = Spf(Ai ) tels que Bi est le complété formel (π-adique) d’une Ai -algèbre de présentationfinie.

Demonstration On écarte le cas trivial où k est muni de sa valuation triviale. Par le corollaire 1.1.49, on peutsupposer que notre morphisme est la composée

Y = Spm(B)e// Spm(AT1, . . . , Tr)

p// Spm(A) = X

avec e étale et p la projection canonique. La AT1, . . . , Tn-algèbre B admet une présentation

AT1, . . . , TnS1, . . . , Sm/f1, . . . , fm ' B,

avec∂(f1, . . . , fm)

∂(S1, . . . , Sm)inversible dans B. Par le lemme 1.1.50 on peut choisir les fi dans A[T1, . . . , Tn, S1, . . . , Sm]. Le

complété formel (π-adique) de la A-algèbre A[T1, . . . , Tn, S1, . . . , Sm]/(f1, . . . , fm) convient alors. c.q.f.d

La proposition ci-dessous est laissée en exercice.

Proposition 1.1.56 — 1- Soit f : Y // X un morphisme lisse (resp. étale) de k-schémas formels. Alors,fη est un morphisme lisse (resp. étale) de k-variétés rigides.

2- Soit A un k-affinoïde et f : Y // X un morphisme lisse (resp. étale) de A-schémas de type fini. Alors, fan

est un morphisme lisse (resp. étale) de A-variétés rigides.

Il est peut-être utile de rappeler qu’un morphisme de k-schémas formels f : Y // X est lisse (resp. étale) s’ilest plat et si fσ est lisse (resp. étale). Un théorème de Grothendieck (voir [EGA VI.4, Théorème 18.1.2]) affirme quela catégorie Et/X des X-schémas formels étales est équivalente à la catégorie Et/Xσ des Xσ-schémas étales.

1.1.7 Modèles semi-stablesDans ce paragraphe nous supposerons que la valuation de k est discrète (et donc non triviale). On fixe une

uniformisante π ∈ k∨. Pour simplifier, on supposera que k est d’égale caractéristique nulle. On fait la définitionsuivante (voir aussi [Ayo07a, Définition 3.3.33]) :

Definition 1.1.57 — Soient X un k-schéma formel de type fini et x un point de X. On dit que X est semi-stable(resp. globalement semi-stable) de type (a1, . . . , an) ∈ (N−0)n en x s’il existe un voisinage Nisnevich (resp. Zariski)x // U // X de x tels que :

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24 Motifs des variétés rigides analytiques I

1. U est affine, plat sur k et l’anneau Γ(U,O) est régulier,2. il existe n+ 1 sections u, t1, . . . , tn ∈ Γ(U,O) vérifiant :

(a) u est inversible et π = u.ta11 . . . tann ,

(b) pour tout 1 ≤ i ≤ n, le diviseur Di d’équation ti = 0 est lisse sur k et contient x,(c) la réunion des Di est un diviseur à croisements normaux.

Les diviseurs Di sont appelés les branches de X passant par x et les entiers ai leurs multiplicités. Si (a1, . . . , an) =(1, . . . , 1), on dit que X est strictement semi-stable en x. On dit que X est (resp. strictement, globalement) semi-stablelorsqu’il est (resp. strictement, globalement) semi-stable en tous ses points.

Remarque 1.1.58 — On garde les notations de la définition 1.1.57. Soit d = p.g.c.d.(a1, . . . , an). S’il existev ∈ Γ(U,O) avec vd = u, on peut alors choisir u = 1. En effet, on peut trouver (b1, . . . , bn) ∈ Zn tel que d =b1.a1 + · · ·+ bnan. On pose t′i = v−bi .ti. On a alors u.ta1

1 . . . tann = t′a11 . . . t′ann = π.

Notation 1.1.59 — Soit a = (a1, . . . , an) un n-uplet d’entiers. Si X (resp. X) est un k-schéma (resp. k-schémaformel) et f ∈ Γ(X,O) (resp. f ∈ Γ(X,O)) on pose

(1.31) StfX,a = X[T1, . . . , Tn]/(T a11 . . . T ann − f) (resp. StfX,a = XT1, . . . , Tn/(T a1

1 . . . T ann − f)).

De même, si X est une k-variété rigide et f ∈ Γ(X,O), on pose

(1.32) StfX,a = XT1, . . . , Tn/(T a11 . . . T ann − f).

Lorsqu’il n’y a pas risque de confusion, on notera simplement Stfa et Stfa .

Si X est k-schéma formel, on a un isomorphisme canonique de k-variétés rigides [StfX,a]η ' StfXη,a. De même, siX est un k-schéma, on a un isomorphisme canonique de k-schémas formels [StfX,a]//(π) ' StfX//(π),a.

Lorsque l’on prend pour X = Spf(k) et f l’uniformisante, le schéma formel Stπa est globalement semi-stable (detype (a1, . . . , an) au point o défini par les annulations T1 = · · · = Tn = 0). Plus généralement, si X est lisse sur k

et f ∈ Γ(X,O)× est inversible, le k-schéma formel Stf−1.π

X,a est globalement semi-stable. Le cas générique est celui où

X = Spf(kU,U−1) et f = U . On notera alors simplement StU−1π

a . Ces schémas formels sont importants en vue dela proposition suivante :

Proposition 1.1.60 — Soit X un k-schéma formel semi-stable (resp. globalement semi-stable) de type (a1, . . . , an)en un point x ∈ X.

1- Si les multiplicités ai sont premiers entre eux (i.e., p.g.c.d.(a1, . . . , an) = 1), on peut trouver un voisinageNisnevich (resp. Zariski) U de x et un morphisme lisse de k-schémas formels U // Stπa .

2- Dans le cas général, on peut trouver un voisinage Nisnevich (resp. Zariski) U de x[R,R−1] dans XR,R−1 etun morphisme lisse de k-schémas formels U // StU

−1πa .

Demonstration La preuve est celle de [Ayo07a, Proposition 3.3.39] avec la simplification qui vient du fait qu’ontravaille en égale caractéristique nulle.

Quitte à remplacer X par un voisinage Zariski (resp. Nisnevich) de x, on peut supposer que X = Spm(A) avec Aune k-algèbre régulière topologiquement de type finie et qu’il existe n + 1 sections u, t1, . . . , tn ∈ A comme dans ladéfinition 1.1.57.

Lorsque p.g.c.d.(a1, . . . , an) = 1, on peut supposer que u = 1 (par la remarque 1.1.58). Dans ce cas, on a unmorphisme évident de k-algèbres topologiques kT1, . . . , Tn/T a1

1 . . . T ann − π // A qui envoie l’indéterminée

Ti sur ti. Il suffit alors de montrer que le morphisme f : X // Stπa ainsi obtenu est lisse au voisinage de x. La

fibre en o = (0, . . . , 0) ∈ Stπa de f est donnée par t1 = · · · = tn = 0, i.e., est égale à l’intersection des branches qui estbien lisse. Pour conclure, il reste à voir que f est plat en x. On montrera pour cela que le morphisme induit sur lescomplétés

(1.33) (kT1, . . . , Tn/T a11 . . . T ann − π) //(T1, . . . , Tn) // (A)x//mx

est plat. Comme A est régulière, (A)x//mx est isomorphe à l’anneau de séries formelles k(x)[[z1, . . . , zr]]. On peutde plus supposer que zi est l’image de ti pour 1 ≤ i ≤ n. Le morphisme (1.33) s’identifie donc à

k[[T1, . . . , Tn]] // k(x)[[z1, . . . , zm]] Ti zi pour 1 ≤ i ≤ n.

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 25

La platitude de ce morphisme est claire.On passe maintenant au cas général. On pose u′ = u.R−a1 , t′1 = R.t1 et t′i = ti pour i ≥ 2. On a la relation

u′.t′a11 . . . t′ann = π. Considérons le morphisme de k-algèbres

kU,U−1, T1, . . . , Tn/U.T a11 . . . T ann − π // AR,R−1

qui envoie U sur u′ et Ti sur t′i. Montrons que le morphisme f : XR,R−1 // StU−1π

a ainsi obtenu est lisse au

voisinage de x[R,R−1]. La fibre de f au dessus du sous-schéma o[U,U−1] ⊂ StU−1π

a est

(1.34) Spec(A/(t1, . . . , tn)[R,R−1]) // Spec(k[U,U−1]) U u.R−a1 .

La k-algèbre A/(t1, . . . , tn) est lisse puisque égale à l’algèbre des fonctions de l’intersection des branches de X. Ilvient que (1.34) est lisse puisque plat (car sans torsion) et admet pour fibre au dessus de v ∈ k× le revêtement étaleSpec(A/(t1, . . . , tn)[R]/Ra1 − uv−1) de Spec(A/(t1, . . . , tn)).

Pour terminer, il reste à voir que f : XR,R−1 // StU−1π

a est plat au voisinage de x[R,R−1]. Il suffit deconsidérer le morphisme induit sur les complétés

(1.35)(kU,U−1, T1, . . . , Tn/U.T a1

1 . . . , T ann)//(T1, . . . , Tn) // (A)xR,R−1//mx

On peut identifier ce morphisme à

k[[T1, . . . , Tn]]U,U−1 // k(x)[[z1, . . . , zm]]R,R−1

qui envoie U sur u.R−a1 , T1 sur z1.R et Ti sur zi pour i ≥ 2. Il suffit donc de prouver que le morphisme horizontaldans le triangle commutatif

k[[T1]]U,U−1 // k(x)[[z1]]R,R−1

k[[T1]]

bb 55

est plat. Par le critère de platitude par fibres (voir [EGA VI.3, Théorème 11.3.10]), on est ramené à montrer que

k[U,U−1] // k(x)[R,R−1] est plat. Ceci est clair. c.q.f.d

Le résultat suivant utilise la résolution des singularités de Hironaka [Hiro64].

Proposition 1.1.61 — Tout k-affinoïde lisse X admet un modèle globalement semi-stable.

Demonstration On suppose que X = Spm(A). On applique la résolution des singularités de Hironaka au schémaexcellent de caractéristique nulle Spec(A) (une norme résiduelle étant choisie sur A). On obtient alors un A-schémaprojectif E // Spec(A) avec E régulier et E/(π) un diviseur à croisements normaux (non nécessairement réduit).Le complété formel E = E//(π) est alors un éclatement admissible de Spf(A) puisque le lieu singulier de A estcontenu dans Spec(A/π). Il vient que E est un modèle globalement semi-stable de X. c.q.f.d

1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide

À partir de maintenant, tous les schémas de type fini sur une base seront supposés quasi-projectifs. Tous les schémasformels et variétés rigides seront supposés séparés. On supposera également que les k-variétés rigides admettent unrecouvrement dénombrable (ceci est le cas des variétés analytiques rigides associées aux schémas de type fini sur unealgèbre affinoïde).

Dans cette section, on introduit l’analogue rigide de la topologie de Nisnevich [Nis89]. Comme pour les motifs engéométrie algébrique, cette topologie semble la plus appropriée pour nos besoins.

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26 Motifs des variétés rigides analytiques I

1.2.1 Définition et propriétés basiques de la topologie de NisnevichOn commence par une définition.

Definition 1.2.1 — Soit f : Y // X un morphisme étale de k-variétés rigides. On dit que f vérifie lapropriété de Nisnevich si pour toute extension (non nécessairement finie) de corps valués complets k ⊂ K, le morphismef⊗kK : Y ⊗kK // X⊗kK admet la propriété de relèvement à droite par rapport aux flèches ∅ // Spm(L) avec

L une extension finie de K. En d’autres termes, pour tout point fermé x ∈ X⊗kK, il existe un point fermé y ∈ Y ⊗kKtel que (f⊗kK)(y) = x et K(x) = K(y).

On peut reformuler cette propriété à l’aide des points génériques (voir la définition 1.1.31) :

Proposition 1.2.2 — Soit f : Y // X un morphisme étale de k-variétés rigides. Le morphisme f vérifiela propriété de Nisnevich si et seulement si pour tout point générique p ∈ M(X), il existe q ∈ M(Y ) tel que f(q) = pet k(p) = k(q).

Demonstration Notons q1, . . . , qn ∈ M(Y ) les points de la fibre f−1(p). Par la remarque 1.1.53, on sait que k(qi)est une extension finie séparable de k(p) (pour 1 ≤ i ≤ n). Par le lemme 1.1.35, k(p) (resp. k(qi)) est un anneaude valuation de k(p) (resp. k(qi)) de hauteur 1. Notons K (resp. Li) le complété de k(p) (resp. k(qi)) par rapport àcette valuation. Le corps k(p) (resp. k(qi)) est intégralement clos dans K (resp. Li) puisque k(p) (resp. k(qi)) esthensélien (par la proposition 1.1.38). Il vient que l’extension k(p) ⊂ k(qi) est triviale si et seulement si K ⊂ Li l’est.

Il suffit alors de remarquer que p induit un point fermé (en fait rationnel) pK ∈ X⊗kK et que la fibre de f⊗kK en pKs’identifie canoniquement à un ensemble de points fermés (q1)K , . . . , (qn)K dont les corps résiduels sont naturellementisomorphes à L1, . . . , Ln. L’implication directe est maintenant clair.

Réciproquement, étant donnée une extension de corps valués complets k ⊂ K et un point fermé x ∈ X⊗kK, ondéfinit un point générique px ∈ M(X) en prenant pour tout modèle X de X, l’image de red(x) par le morphismeévident X⊗kK // X . Si q ∈ M(Y ) est un point générique dans la fibre en px tel que k(px) = k(q), il induit unpoint fermé de Y ⊗kK au dessus de x ayant k(q)⊗k(px) K(x) ' K(x) pour corps résiduel. c.q.f.d

Remarque 1.2.3 — Soit f : Y // X un morphisme étale de k-variétés rigides. Soit q ∈ M(Y ) un pointgénérique tel que k(p) = k(q) avec p = f(q). Le morphisme OX,p // OY,q est alors inversible puisqu’il est fini,plat et non ramifié (voir la remarque 1.1.53) et qu’il induit un isomorphisme sur les corps résiduels. Il existe donc desvoisinages ouverts V ∈ Flt(q) et U ∈ Flt(p) tels que f(V ) = U et f|V : V // U inversible. On en déduit de laproposition précédente que f vérifie la propriété de Nisnevich si et seulement si en tout point p ∈M(X), il existe unouvert U ∈ Flt(p) et une section à f définie sur U

Y

f

U //

66

X.

Definition 1.2.4 — Soit X une k-variété rigide. Une famille R = ( Yi // X )i∈I de morphismes étales

de k-variétés rigides est appelée un recouvrement Nisnevich lorsque pour tout morphisme U // X avec U un k-affinoïde, la famille R×XU = ( Yi ×X U // U )i∈I se raffine par une famille finie ( Vj // U )j∈J de morphismes

étales avec Vj des k-affinoïdes et telle que∐j Vj

// U vérifie la propriété de Nisnevich.

Un recouvrement ouvert admissible est clairement un recouvrement Nisnevich. On a le lemme standard suivant :

Lemme 1.2.5 — La classe des recouvrements Nisnevich définit une prétopologie sur les catégories VarRig/k,Afnd/k, SmRig/k, SmAfnd/k, Et/X etc.

Demonstration Les morphismes étales sont quarrables. Soient R = ( Yi // X )i∈I un recouvrement Nisnevich et

R′ = ( Y ′i// X ′ )i∈I son pull-back suivant un morphisme X ′ // X . On se donne un morphisme U // X ′

avec U un k-affinoïde. La famille R′ ×X′ U s’identifie à R ×X U . Elle peut donc être raffinée par une famille finiede morphismes étales entre k-variétés affinoïdes telle que le coproduit des sources vérifie la propriété de Nisnevich audessus de U . Ceci montre que R′ est un recouvrement Nisnevich de X ′.

Soient R = ( Yi // X )i∈I et Pi = ( Zij // Yi )j∈Ji des recouvrements Nisnevich. Montrons que la famille

P = ( Zij // X )i∈I,j∈Ji est aussi un recouvrement Nisnevich. Soit U // X un morphisme de source un k-

affinoïde. Soit ( Ul // U )l∈K une famille finie de morphismes étales entre k-affinoïdes qui raffine R ×X U et telle

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 27

que∐l∈K Ul

// U vérifie la propriété de Nisnevich. Pour l ∈ K, on choisit une factorisation

Ul //

**

Yil ×X U

U

et on forme le pull-back Pil ×Yil Ul. Il existe alors des raffinements par des familles finies ( Vlr // Ul )r∈Rl de

morphismes étales entre k-affinoïdes telles que∐r Vlr

// Ul vérifient la propriété de Nisnevich. Il est alors clair

que la famille finie ( Vlr // U )l∈K,r∈Rl raffine ( Zij // X )i∈I,j∈Ji et que∐l,r Vlr

// U vérifie la propriété

de Nisnevich. c.q.f.d

Definition 1.2.6 — Les prétoplogies du lemme 1.2.5 engendrent des topologies sur VarRig/k, Afnd/k, SmRig/k,SmAfnd/k, Et/X etc, que l’on appellera les topologies de Nisnevich et que l’on notera Nis.

Étant donnée une k-variété rigide X, on notera Etqc/X ⊂ Et/X la sous-catégorie pleine formée des X-variétésétales dont les sources sont quasi-compactes. De même, on note VarRigqc/k ⊂ VarRig/k, SmRigqc/k ⊂ SmRig/k, etcles sous-catégories pleines formées des k-variétés rigides quasi-compactes. Le morphisme de sites

(Et/X,Nis) // (Etqc/X,Nis) , (VarRig/k,Nis) // (VarRigqc/k,Nis) et (SmRig/k,Nis) // (SmRigqc/k,Nis)

induisent des équivalences de topos.

Proposition 1.2.7 — Soient X un k-schéma formel de type fini et R = (ui : Ui // X )i∈I une famille demorphismes étales de k-schémas formels. Considérons les deux conditions suivantes :(i) la famille Rσ = ((ui)σ : (Ui)σ // Xσ )i∈I est un recouvrement Nisnevich du k-schéma Xσ.

(ii) la famille Rη = ((ui)η : (Ui)η // Xη )i∈I est un recouvrement Nisnevich de la k-variété rigide Xη.

On a alors l’implication (i) ⇒ (ii). Lorsque X est plat sur k, on a même une équivalence (i) ⇔ (ii).

Demonstration Montrons l’implication (i) ⇒ (ii). On peut supposer que la famille est finie (puisque Xσ est un k-schéma de type fini) et même réduite à un élément u : U // X (quitte à prendre le coproduit des sources). CommeUη et Xη sont quasi-compactes, il reste à vérifier la propriété de Nisnevich pour uη. Soit k ⊂ K une extension decorps valués complets. Le morphisme uη⊗kK : Uη⊗kK // Xη⊗kK s’identifie canoniquement à la fibre générique

du morphismes de K-schémas formels u⊗kK : U⊗kK // X⊗kK . La fibre spéciale (u⊗kK)σ s’identifieà uσ ⊗k K. Elle est donc encore un recouvrement Nisnevich de (X⊗kK)σ. Il vient que pour montrer que uη⊗kKpossède la propriété de relèvement à droite par rapport au morphismes ∅ // Spm(L) avec L une extension finiede K, il suffit de considérer le cas de k = K.

Soit x : Spm(l) → Xη un point fermé. C’est la fibre générique d’un morphisme de k-schémas formels x :

Spf(l) // X . Il suffit donc de trouver un relèvement

U

Spf(l) //

55

X

ou encore une section de a : U×XSpf(l) // Spf(l) . Étant donné que la catégorie des Spf(l)-schémas formels

étales est équivalente à celle des Spec(l)-schémas étales (voir [EGA VI.4, Théorème 18.1.2]), il suffit de trouver unesection à aσ : Uσ ×Xσ Spec(l) // Spec(l) . Ceci est possible puisque uσ est un recouvrement Nisnevich.

On passe à l’implication (ii) ⇒ (i). Comme Xη et les (Ui)η sont quasi-compacts, on peut encore supposer que R

est réduite à un élément u : U // X . Il s’agit de montrer que uσ est un recouvrement Nisnevich. Soit p un pointdu k-schéma Xσ. On peut trouver une extension de corps valués complets k ⊂ K telle que k(p) soit isomorphe à K.Trouver un relèvement dans le carré

∅ //

Spec(K)p// Xσ,

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28 Motifs des variétés rigides analytiques I

revient à trouver un relèvement du point fermé (en fait rationnel) dans la carré

∅ //

(U⊗kK)σ

Spec(K)p×idK

// (X⊗kK)σ.

Le morphisme (u⊗kK)η s’identifie canoniquement à uη⊗kK. C’est donc encore un recouvrement Nisnevich de variétésrigides. On est ainsi ramené à considérer uniquement le cas des points fermés de Xσ. Comme X est plat (donc essentiel)il existe un point fermé x : Spm(l) // Xη tel que p = red(x), i.e., est la fibre spéciale de x : Spf(l) // X .

Étant donné un relèvement r : Spm(l) // Uη , on déduit un relèvement de p en prenant (r)σ. c.q.f.d

Il est donc utile de faire la définition suivante :

Definition 1.2.8 — Soient X un k-schéma formel de type fini et R = (ui : Ui // X )i∈I une famillede morphismes étales de k-schémas formels. On dit que R est un recouvrement Nisnevich si la famille Rσ est unrecouvrement Nisnevich de k-schéma Xσ.

On vérifie facilement que la classe des recouvrements Nisnevich de schémas formels est une prétopologie sur SchF/kqui engendre la topologie de Nisnevich sur les k-schémas formels.

Proposition 1.2.9 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte et X un modèle de X. On dispose d’undiagramme de morphismes de sites

(Et/X,Nis)η// (Et/X,Nis) (Et/Xσ,Nis)

σ∼oo .

De plus, σ est un quasi-isomorphisme de sites (i.e., c’est une équivalence de catégories continue ainsi que son quasi-inverse).

Demonstration Les foncteurs de passage à la fibre générique et spéciale Et/X // Et/Xη et Et/X // Et/Xσ

commutent aux limites finies et préservent les recouvrements Nisnevich. Ils induisent donc des morphismes de sites.Le fait que σ est un quasi-isomorphisme de sites découle immédiatement de [EGA VI.4, Théorème 18.1.2]. c.q.f.d

Le théorème suivant affirme qu’on aurait pu définir la topologie de Nisnevich d’une k-varété rigide quasi-compacteà l’aide de la topologie Nisnevich de (tous) ses modèles formels.

Theoreme 1.2.10 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte et P = ( Ye // X )e∈E un recouvrement

Nisnevich de X. Il existe un modèle X et un recouvrement Nisnevich fini R = (ui : Ui // X )i∈I tels que Rη raffineP.

Demonstration On peut supposer que le recouvrement P = (fe : Ye // X )e∈E est formé d’un seul élément,

i.e., P = (f : Y // X ). En effet, si l’on sait raffiner (∐e Ye

// X ) par un recouvrement Nisnevich de la formeRη, la famille des composantes connexes des éléments de R convient (du moins si le modèle X est normal dans safibre générique).

Par la proposition 1.1.51 on peut remplacer X et Y par des recouvrements ouverts admissibles et supposer que Yest un domaine quasi-compact d’un revêtement étale f : Y // X . Étant donné un modèle Y // X de f avec Xet Y plats, il existe (par la technique de platification de Raynaud [GR71]) un éclatement admissible X′ // X telque (Y×XX

′)es // X′ est plat. Rappelons que (−)es désigne le plus gros sous-schéma formel plat d’un k-schémaformel. En particulier, on peut trouver des modèles plats quasi-finis (i.e., ouvert Zariski d’un schéma formel fini)Y // X de f aussi fin que l’on veut. On notera Mdlpqf (Y/X) la catégorie des modèles plats et quasi-finis de f .C’est une catégorie cofiltrante et les foncteurs but et source Mdlpqf (Y/X) // Mdl(X) et Mdlpqf (f) // Mdl(Y )

sont cofinaux. Les objets de Mdlpqf (Y/X) seront notés fYX : Y // X ou simplement Y/X.Pour fYX : Y // X ∈ Mdlpqf (Y/X), on note N(Y/X) le plus grand ouvert Zariski de X tel que N(Y/X)×Xf

YX :

N(Y/X)×XY // N(Y/X) se raffine en un recouvrement Nisnevich de N(Y/X). On note aussi Z(Y/X) ⊂ Xσ le fermé

complémentaire à N(Y/X). Si p est un point générique de Z(Y/X) et q ∈ (fYX)−1(p), l’une des propriétés suivantes estsatisfaite :

(i) fYX est ramifié en q,

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 29

(ii) l’extension k(p) ⊂ k(q) est non triviale.Supposons que la conclusion du théorème soit fausse. Alors, Z(Y/X) est non vide pour tout fYX ∈ Mdlpqf (Y/X). Nousallons obtenir une contradiction. On procède en plusieurs étapes.

Étape 1 : Soit e : fY′

X′// fYX une flèche de Mdlpqf (Y/X). Montrons que Z(Y′/X′) est envoyé dans Z(Y/X) par eσ

ou encore que e−1(N(Y/X)) ⊂ N(Y′/X′). On a un diagramme commutatif

Y′

fY′X′ ))

e

%%// Y×XX

′ e1//

Y

fYX

X′e// X.

Si p ∈ N(Y/X), il existe un q ∈ (fYX)−1(p) tel que fYX est étale en q et k(p) = k(q). Dans ce cas, fYX×XX′ est étale

en q′ ∈ e−11 (q) et k(p′) = k(q′) où p′ = [fYX×XX

′](q′). Comme Y′ est plat sur X′, le lemme 1.2.11 ci-dessous montreque Y′ // Y×XX

′ est un isomorphisme au dessus d’un voisinage de q′. Ceci montre que p′ ∈ N(Y′/X′) et donce−1(p) ⊂ N(Y′/X′).

Étape 2 : Soit X ∈ Mdl(X). Les parties eσ(Z(Y′/X′)) pour (fY′

X′ : Y′ // X′ , e : X′ // X ) ∈ Mdlpqf (Y/X)/Xforment une famille cofiltrante de parties fermées de Xσ (utiliser la première étape). Comme Xσ est un espace topologienoethérien, cette famille devient constante pour fY

X′ suffisamment fin. On note Z∞(X) la limite de cette famille.C’est donc une partie fermée non vide de Xσ. De plus, si e21 : X2

// X1 est un morphisme de modèles, on a(e21)σ(Z∞(X2)) = Z∞(X1).

Notons Z∞(X)gen l’ensemble des points génériques de Z∞(X) et soit p = (pX)X ∈ LimX∈Mdl(X)Z∞(X)gen ⊂ P(X).Si fYX : Y // X ∈ Mdlpqf (Y/X), alors tout point q ∈ (fYX)−1(pX) vérifie l’une des deux conditions (i) et (ii) (voir ledébut de la preuve). En effet, par construction il existe fY

X′ ∈ Mdlpqf (Y/X)/fYX et un point générique g de Z(Y′/X′)

au-dessus de pX. Soit h ∈ (fY′

X′)−1(g) qui est au-dessus de q. Supposons que fYX est non ramifié en q. Alors, fY

X′ estisomorphe au voisinage de h au changement de base de fYX suivant X′ // X (utiliser l’argument de la premièreétape et le lemme 1.2.11). En particulier fX′ est non ramifié en h. L’extension k(g) ⊂ k(h) est donc non triviale.Comme elle coïncide avec un facteur direct d’un changement de base de k(pX) ⊂ k(q), cette dernière est égalementnon-triviale.Étape 3 : Le point p = (pX)X construit dans l’étape précédente est générique. En effet, supposons le contraire et soitg = (gX)X∈Mdl(X) ∈ P(X) tel que p ∈ g (avec p 6= g). Notons G(X) ⊂ Xσ l’adhérence de gX (qui est donc une partiefermée irréductible). Pour X suffisamment fin, on a pX ∈ G(X) et gX 6= pX. Quitte à raffiner X on peut supposer qu’ilest le but de fYX ∈ Mdlpqf (Y/X) et que gX /∈ Z(Y/X). Il existe donc h ∈ (fYX)−1(gX) tel que fYX est non ramifié en het k(gX) = k(h)

Dans ce cas, on peut écrire l’image inverse (fYX)−1(G(X)) comme une réunion de deux fermés H ∪ L avec Hirréductible, birationnel et fini sur son image G(X). En éclatant un idéal ouvert de type fini et de cosupport contenudans H ∩ L, on obtient un modèle Y1 de Y tel que les transformés pures H1 et L1 de H et L sont disjoints (voir lelemme 1.1.33). En utilisant le théorème de platification de Raynaud (voir [GR71]) on peut construire un éclatementadmissible X′ // X tel que Y′ = (Y1×XX

′)es est plat sur X′ et le transformé pur H ′ de H1 est plat et birationnelsur son image dans X′ (donc isomorphe à cette image). On en déduit que Y′ est étale sur X′ au voisinage de H ′. Commel’image de H ′ par fY

X′ a pour point générique gX′ , elle coïncide avec G(X′). Ceci montre que G(X′) ⊂ N(Y′/X′). Ceciest en contradiction avec la condition pX′ ∈ G(X′).Étape 4 : Par la remarque 1.2.3, il existe q = (qY)Y ∈ f−1(p), un ouvert V ∈ Flt(q) et un ouvert U ∈ Flt(p) tels que fenvoie isomorphiquement V sur son image U . Soit fYX ∈ Mdlpqf (Y/X) tel que U (resp. V ) est la fibre générique d’unouvert Zariski U ⊂ X (resp. V ⊂ Y). Quitte à raffiner fYX, on peut supposer que l’isomorphisme f|V : V // U induitun isomorphisme (fYX)|V : V // U . Il vient que fYX est étale en qY et k(pX) = k(qY). Ceci montre pX ∈ N(Y/X).C’est la contradiction finale recherchée. Le théorème est démontré. c.q.f.d

Lemme 1.2.11 — Soit X une k-schéma formel de type fini et essentiel. Soit u : Z // Y un morphisme deX-schémas formels de présentation finie. On suppose que Y est étale sur X et que Z est plat sur X. Alors, Z est platsur Y. Si de plus uη est inversible, u est aussi inversible.

Demonstration Le Y-schéma Y×XZ est plat. Comme Y/X est étale, l’immersion diagonale Y // Y×XY est

ouverte. Il vient que le morphisme (u, id) : Z // Y×XZ est aussi une immersion ouverte. En particulier, il est plat.Il suffit alors de remarquer que u est la composée pr1 (u, id) où pr1 est la projection sur le premier facteur de Y×XZ.

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30 Motifs des variétés rigides analytiques I

Supposons maintenant que uη est inversible. Par le lemme 1.1.27, on sait que u est fini. Étant donné qu’il est plat,on peut supposer que Γ(Z,O) est une Γ(Y,O)-module libre. Puisque π ∈ Γ(Y,O) est non-diviseur de zéro, ce moduleest forcément de rang 1. Le résultat est maintenant clair. c.q.f.d

Considérons le site de Grothendieck LimX∈Mdl(X)(Et/X,Nis) limite projective des sites (Et/X,Nis) suivant la caté-gorie cofiltrante Mdl(X). La catégorie sous-jacente à LimX∈Mdl(X)(Et/X,Nis) est la colimite des catégories Et/X. Ainsi,les objets sont des morphismes étales de schémas formels (U/X) = ( U // X ) avec X ∈ Mdl(X) et les morphismes

hom((U′/X′), (U/X)) = ColimX′′→X×kX′∈Mdl(X)/X×kX′

homX′′(U′×X′X

′′,U×XX′′).

Le foncteur de passage à la fibre générique définit un foncteur ColimX∈Mdl(X)Et/X // Et/X . Ce foncteur est

pleinement fidèle. En effet, soient U/X et U′/X′ deux objets de la catégorie ColimX∈Mdl(X)Et/X. Quitte à raffiner lesmodèles, on peut supposer que X = X′, qu’il est plat sur k et que la fibre générique d’une composante connexe deU′ est une composante connexe de U ′. L’application homX(U′,U) // homX(U′η,Uη) est alors bijective. En effet,

si (U′i)i désignent les composantes connexes de U′, les éléments de homX(U′,U) sont en bijection canonique avec lesfamilles (Vi)i de composantes connexes de U′i×XU telles que la projection évidente Vi // U′i est inversible. Cet

ensemble s’identifie par passage à la fibre générique à l’ensemble des familles (Vi)i de composantes connexes de Ui×XUqui s’envoient isomorphiquement sur U ′i . Cet ensemble est en bijection canonique avec homX(U ′, U). La pleine fidélités’obtient alors par passage à la limite.

On note (Et/X)br l’image essentielle du foncteur ColimX∈Mdl(X)Et/X // Et/X . Les objets (U/X) de (Et/X)br

sont dit à bonne réduction. La topologie du site LimX∈Mdl(X)(Et/X,Nis) induit une topologie Nis sur (Et/X)br. On ale corollaire suivant du théorème 1.2.10 :

Corollaire 1.2.12 — Soit X une k-variété rigide. L’association :

(U/X) ∈ Ob(Etqc/X) ((Et/U)br,Nis)

est une P -structure sur (Etqc/X,Nis) au sens de [Ayo07a, Définition 4.4.57]. De plus, le site ((Et/U)br,Nis) estcanoniquement équivalent à LimU∈Mdl(U)(Et/U,Nis).

Demonstration La dernière assertion est mise pour mémoire. Soit U ′/U un objet de (Et/U)br. Il s’agit de raffinertout recouvrement Nisnevich Vi // U ′ de k-variétés rigides par la fibre générique d’un recouvrement Nisnevichd’un modèle de U ′. Ceci est possible par le théorème 1.2.10. c.q.f.d

On va utiliser le corollaire précédent pour décrire une famille conservative de points du topos ShvNis(Et/X). Onfait d’abord une définition.

Definition 1.2.13 — Soient X une k-variété rigide et y ∈ P(Y ) un point d’une X-variété rigide étale Yquasi-compacte (relativement à k). On note FltNis(y) la catégorie dont les objets sont les couples (U, u) avec U dans(Et/Y )br et u ∈ P(U) au-dessus de y tel que k(y) // k(u) induit un isomorphisme k(y) ' k(u) sur les corps

résiduels. Étant donné un préfaisceau F sur Et/X, on pose

(1.36) fNis,y(F ) = Colim(U,u)∈FltNis(y)

F (U).

La catégorie FltNis(y) est cofiltrante et sa sous-catégorie pleine, dont les objets sont les couples (U, u) avec Uconnexes, est cofinale et équivalente à un ensemble ordonné. Ceci sera clair après la preuve de la proposition ci-dessous.

Proposition 1.2.14 — Soit X une k-variété rigide. Le topos ShvNis(Et/X) possède une famille conservativede points donnés par les fNis,y avec y ∈ P(Y ) des points dans des X-variétés rigides étales et quasi-compactes Y .

Demonstration On peut supposer X quasi-compacte. Par le corollaire 1.2.12, il suffit de montrer que le toposShvNis((Et/X)br) possède une famille conservative de points donnés par la formule (1.36) où F est un faisceau Nisnevichsur (Et/X)br et y ∈ P(Y ) des points dans des X-variétés rigides étales Y dans (Et/X)br. On divise la preuve en deuxparties. Dans la première on démontre que fNis,y est exact et donc définit un point. Dans la seconde, on montre que lafamille de points ainsi obtenue est conservative.Première partie : On sait que ((Et/X)br,Nis) ' LimX∈Mdl(X)(Et/X,Nis). Pour X un modèle formel de X, le toposShvNis(Et/X,Nis) possède une famille conservative de points indicée par les points p ∈ Yσ pour Y des X-schémasformels étales. Au point p correspond le foncteur fibre

(1.37) F ∈ ShvNis(Et/X,Nis) (F )p = Colim(U,q)∈VY,ét(p)

F (U) = Colimp→U→Y

F (U)

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 31

où la colimite est prise selon la catégorie VY,ét(p) des voisinages étales de p dans Y. Rappelons qu’un objet (U, q) ∈VY,ét(p) est un couple formé d’un Y-schéma formel étale U et d’un point q ∈ Uσ au dessus de p tel que k(p) ' k(q).

Soient Y une X-variété rigide dans (Et/X)br et y = (pY)Y∈Mdl(Y ) ∈ P(Y ). On pose

VY (y) = ColimY∈Mdl(Y )VY,ét(pY).

Les objets de VY (y) sont les couples (U/Y, qU) avec Y un modèle formel de Y , U un Y-schéma formel étale et qU ∈ Uσun point au-dessus de pY tel que k(pY) ' k(qU). Étant donnés deux tels objets (U1/Y, qU1

) et (U2/Y, qU2), on a

homVY (y)((U1/Y, qU1), (U2/Y, qU2

)) = ColimY∈Mdl(Y )/Y1,Y2

homVY,ét(pY)

((U1×Y1

Y, qU1×pY1

pY), (U2×Y2Y, qU2

×pY2pY)).

La catégorie VY (y) est cofiltrante étant une colimite filtrante de catégories cofiltrantes. De plus, sa sous-catégoriepleine formée des couples (U/Y, qU) avec U connexe est cofinale et équivalente à un ensemble ordonné. On définit unfoncteur

(1.38) F ∈ ShvNis(ColimX∈Mdl(X)(Et/X)) Fy = Colim(U/Y,qU)∈VY (y)

F (U) = ColimpY→U→Y

F (U).

Montrons que (1.38) est un foncteur fibre, i.e., qu’il est exact. Il est clair que (1.38) commute aux limites finies.Montrons qu’il commute aux colimites. Remarquons pour cela que (1.38) garde un sens pour F un préfaisceau surColimX∈Mdl(X)(Et/X) et qu’il commute avec les colimites de préfaisceaux. Or, la colimite d’un système inductif defaisceaux est le faisceau associé à la colimite du même système inductif, calculée dans la catégorie des préfaisceaux. Ilsuffirait donc de montrer que le morphisme évident Fy // (aNis(F ))y est inversible. Ceci découle de la constructiondu foncteur aNis et du fait que pour tout recouvrement Nisnevich (Yi → Y)i∈I avec Y ∈ Mdl(Y ), il existe i0 ∈ I,qi0 ∈ (Yi0)σ au dessus de pY tel que k(qi0) = k(pY) (i.e., (Yi0/Y, qi0) ∈ VY (y)).

On dispose d’un foncteur VY (y) // FltNis(y) qui à un couple (U/Y, qU) associe le couple (U, u) avec U = Uη

et u = (qU ×pY pY′)Y′∈Mdl(Y )/Y. Comme pour l’équivalence (Et/X)br ' ColimX(Et/X), on montre que ce foncteur estune équivalence de catégories. De plus, le carré

VY (y) //

ColimX∈Mdl(X)(Et/X)

FltNis(y) // (Et/X)br,

commute. Ci-dessus, les foncteurs horizontaux sont les foncteurs d’oubli des points. Ainsi, modulo l’équivalence decatégories ShvNis((Et/X)br) ' ShvNis(LimXEt/X), le foncteur (1.38) correspond au foncteur fNis,y. C’est donc unpoint du topos ShvNis((Et/X)br).Deuxième partie : On vérifie ici que les fNis,y forment une famille conservative de points pour le site ((Et/X)br,Nis).Soit f : F // G un morphisme de faisceaux tel que fNis(f) est bijective pour tout point y ∈ P(Y ) dans uneX-variété rigide étale Y dans (Et/X)br. Il nous faut montrer que f est inversible.

Montrons d’abord que f est injectif. Soient a1, a2 ∈ F (Y ) tels que f(a1) = f(a2). Pour y ∈ P(Y ), les sections a1

et a2 sont identifiées dans fNis,y(F ). Il existe donc (U(y), u) ∈ FltNis(y) tel que (a1)|U(y) = (a2)|U(y). Or, par le lemme1.2.15, la famille (U(y)→ Y )y∈P(Y ) est un recouvrement Nisnevich. Comme F est un faisceau, on a a1 = a2.

Montrons que f est surjective (en tant que morphisme de préfaisceaux). Soit b ∈ G(Y ). Pour y ∈ P(Y ), l’imagede b dans fNis,y(G) possède un antécédent dans fNis,y(F ). Il existe donc (U(y), u) ∈ FltNis(y) et by ∈ F (U(y)) tel quef(by) = b|U(y). Étant donné que f est injective, on a (by1)|U(y1)∩U(y2) = (by2)|U(y1)∩U(y2) pour (y1, y2) ∈ P(Y )2. Parle lemme 1.2.15, la famille (U(y) → Y )y∈P(Y ) est un recouvrement Nisnevich. Comme F est un faisceau, il existeb′ ∈ F (Y ) tel que b′|U(y) = by. On a alors f(b′) = b puisque G est un faisceau et que cette égalité est vraie aprèsrestriction aux ouverts U(y). La proposition est démontrée. c.q.f.d

Lemme 1.2.15 — Soient Y une k-variété rigide quasi-compacte et R = ( Yi // Y )i∈I une famille demorphismes étales dans (Et/X)br. On suppose que pour tout y ∈ Yσ il existe i0 ∈ I et qi0 ∈ P(Yi0) tels que(Yi0 , qi0) ∈ FltNis(y). Alors, R est un recouvrement pour la topologie Nisnevich.

Demonstration Pour un modèle formel Y de Y , on note WY ⊂ Y le plus gros ouvert Zariski tel que R×Y (WY)ηest un recouvrement pour la topologie Nisnevich. On note ZY le complémentaire de WY. Si Y′ est un modèle plus finque Y, le morphisme ZY′

// ZY est surjectif. En effet, comme c’est un morphisme propre, son image est un ferméT ⊂ ZY. Étant donné que (Y − T )η ⊂ (Y′ − ZY′)η, on voit que R×Y (Y − T )η est un recouvrement Nisnevich. Par lamaximalité de WY on a forcément T = ZY.

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32 Motifs des variétés rigides analytiques I

On suppose par l’absurde que les fermés ZY sont non vides. Notons Z = LimYZY. C’est un fermé non vide de P(Y ).Soit z ∈ Z appartenant à la limite projective des ensembles des points génériques des ZY. Par hypothèse, il existei0 ∈ I et qi0 ∈ P(Yi0) tels que (Yi0 , qi0) ∈ FltNis(z). Soit Y un modèle formel de Y tel que Yi0 est la fibre générique d’unY-schéma formel étale Yi0 . L’image zY de z dans Yσ est un point générique de ZY. Comme Yi0 est un voisinage étalede zY, il existe un ouvert RY ⊂ ZY contenant zY et tel que Yi0 est un voisinage étale de RY. On pose W′Y = WY ∪RY

qu’on considère comme un ouvert du schéma formel Y. Montrons que R×Y (W′Y)η est un recouvrement Nisnévich. Ceciterminera la preuve du lemme par contradiction avec l’hypothèse de maximalité de WY.

Soit I0 ⊂ I un ensemble fini tel que (Yi×Y (WY)η)i∈I0 est un recouvrement Nisnevich de (WY)η. Soit Y′ // Yun éclatement admissible tel que les Yi sont les fibres génériques de Y′-schémas étales Y′i pour tout i ∈ I0. Par laproposition 1.2.7, (Y′i×YWY)i∈I0 est un recouvrement Nisnevich de Y′×YWY. D’autre part, Y′i0 = Y′×YYi0 est encoreun voisinage étale de la partie localement fermée Y′σ×Yσ R. Il vient que (Y′i×YW

′Y)i∈I0∪i0 est un recouvrement

Nisnevich du k-schéma formel Y′×YW′Y. D’où la contradiction recherchée. c.q.f.d

Le résultat suivant est un corollaire de la preuve de la propostion 1.2.14.

Corollaire 1.2.16 — Soit f : Y // X un morphisme de k-variétés rigides quasi-compactes. Soit y ∈ P(Y )

et notons x = f(y). Il existe un foncteur FltNis(x) // FltNis(y) qui à un couple (U, u) ∈ FltNis(x) associe le couple

(V, v) ∈ FltNis(y) avec V = Y ×XU et v ∈ P(V ) caractérisé par la propriété d’être envoyé sur u par V // U .Supposons maintenant que f est fini et notons f−1(x) = y1, . . . , yr. Pour (U, u) ∈ Flt(x) on note (V =

Y ×XU, vi) ∈ Flt(yi) son image par le foncteur ci-dessus. Pour U ∈ Flt(x) connexe et suffisamment fin, V admetune unique décomposition en somme disjointe V =

∐ri=1 Vi telle que Vi contient le point vi. De plus, l’association

(U, u) (Vi, vi) est cofinale dans FltNis(yi).

Demonstration Rappellons qu’on dispose d’une équivalence de catégories (Et/X)br ' ColimX(Et/X) et que modulocette équivalence, FltNis(x) s’identifie avec VX(x) = ColimXVX,ét((P(X) → Xσ)(x)) avec VX,ét((P(X) → Xσ)(x)) lacatégorie des voisinages étales de l’image de x dans X.

Lorsqu’on traduit l’énoncé du lemme en termes de voisinages étales dans des schémas formels, la première partiedevient évidente. La seconde découle immédiatement du fait que l’anneau Oh

X,p = Colimp→U→XΓ(U,O), où U parcourtla catégorie des voisinages étales d’un point p ∈ X, est hensélien. Les détails seront laissés aux lecteurs. c.q.f.d

Soit X un modèle d’une k-variété rigide X de type fini. On note ηX : ((Et/X)br,Nis) // (Et/X,Nis) le mor-phisme évident de sites. Notons le lemme suivant :

Lemme 1.2.17 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte et F un préfaisceau sur (Et/X)br à valeurs dansune catégorie cocomplète. Le morphisme évident

ColimX∈Mdl(X)(ηX)∗(ηX)∗F // F

est inversible.

Demonstration Soit (U/X) ∈ Ob((Et/X)br). Pour calculer [ColimX∈Mdl(X)(ηX)∗(ηX)∗F ](U) il suffit de prendre lacolimite suivant la sous-catégorie cofinale Mdl′(X) ⊂ Mdl(X) formée des modèles plats X pour lesquels il existe unX-schéma formel étale U de fibre générique U . Rappelons que

(1.39) (ηX)∗(ηX)∗F (U) = ColimU→Vη∈U\(Et/X)

F (Vη).

Lorsque X ∈ Mdl′(X), la catégorie U\(Et/X) admet alors U pour objet final de sorte que (1.39) se récrit simplement

(1.40) (ηX)∗(ηX)∗F (U) = F (Uη) = F (U).

D’où le résultat. c.q.f.d

Si X est une k-variété rigide (resp. X un k-schéma formel, X un k-schéma), on note HpNis(X,−) = RpΓNis(Et/X,−)

(resp. HpNis(X,−) = RpΓNis(Et/X,−), Hp

Nis(X,−) = RpΓNis(Et/X,−) ) le p-ème foncteur dérivé du foncteur sectionsglobales pour les faisceaux Nisnevich de groupes abéliens. On étend ces foncteurs de la manière habituelle aux catégoriesdes préfaisceaux en groupes abéliens en composant d’abord par le foncteur de faisceautisation. On a le théorème ci-dessous qui ramène le calcul de la cohomologie Nisnevich en géométrie rigide au calcul de la cohomologie Nisnevichen géométrie algébrique.

Theoreme 1.2.18 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte. Soit F un préfaisceau en groupes abéliens surEt/X. Il existe alors un isomorphisme canonique

(1.41) HpNis(X,F ) ' Colim

X∈Mdl(X)Hp

Nis(X, (ηX)∗F ) ' ColimX∈Mdl(X)

HpNis(Xσ, σ

∗(ηX)∗F )

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 33

pour tout p ∈ Z.

Demonstration Le deuxième isomorphisme dans (1.41) provient de l’isomorphisme de sites de la proposition 1.2.9.Notons e : (Et/X,Nis) // ((Et/X)br,Nis) le morphisme de sites défini par l’inclusion (Et/X)br ⊂ Et/X. Par le

corollaire 1.2.12, le foncteur e∗ est exact sur la catégorie des faisceaux en groupes abéliens. Il vient que le morphismeévident F // Re∗F est un quasi-isomorphisme. Il suffit donc de prouver que la flèche évidente

ColimX∈Mdl(X)

HpNis(X, (ηX)∗F ) // RpΓNis((Et/X)br, F )

est inversible. Comme le site ((Et/X)br,Nis) est naturellement équivalent à LimX∈Mdl(X)(Et/X,Nis) et que F 'ColimX∈Mdl(X)(ηX)∗(ηX)∗F , le résultat découle de [SGA 4, Exposé VI]. c.q.f.d

On déduit immédiatement le corollaire suivant de son correspondant en géométrie algébrique (voir [TT90, LemmeE.6.c]) :

Corollaire 1.2.19 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte. La dimension cohomologique du site(Et/X,Nis) est majorée par la dimension de Krull de X.

1.2.2 Carrés Nisnevich et propriété de Brown-GerstenLorsque la valuation de k est triviale, le lecteur vérifiera que les notions et résultats de cette sous-section corres-

pondent bien aux notions et résultats classiques en géométrie algébrique.

Definition 1.2.20 — Un carré commutatif (C) de k-variétés rigides quasi-compactes

(1.42) U ′u′//

f ′

X ′

f

Uu// X

est appelé un carré Nisnevich si les conditions suivantes sont satisfaites :(i) le carré (C) est cartésien,(ii) f est un morphisme étale et u une immersion ouverte,(iii) pour tout point fermé x ∈ X − U la fibre f−1(x) est réduite à un point x′ et k(x) = k(x′).

La classe des carrés Nisnevich est clairement stable par changement de base suivant les morphismes de k-variétésrigides quasi-compactes Y // X . Notons le lemme suivant :

Lemme 1.2.21 — On garde les notations de la définition 1.2.20. Sous les conditions (i) et (ii), la condition (iii)est équivalente à :

(iii’) le morphisme de k-variétés rigides X ′ − U ′ // X − U est inversible.

Demonstration L’implication (iii)⇒ (iii’) est claire. Pour l’implication (iii’)⇒ (iii) on supposera que la valuationde k est non-trivial (le cas de la valuation triviale est laissé en exercice). Les variétés rigides X − U et X ′ − U ′ sontnaturellement des ouverts admissibles de X et X ′. Il suffit donc de montrer que si Y ⊂ X est un ouvert admissiblequasi-compact et disjoint de U , le morphisme Y ′ = Y ×XX ′ // Y est inversible.

Ceci nous ramène à démontrer (iii’)⇒ (iii) dans le cas où U = ∅. L’immersion diagonal ∆f : X ′ // X ′×XX ′est ouverte puisque f est étale. La condition (iii) montre que ∆f est surjective sur les points fermés. Ceci montre que∆f est inversible. Comme f est plat, c’est forcément une immersion ouverte. La condition (iii) montre aussi que lemorphisme f est surjectif sur les points fermés. D’où le résultat. c.q.f.d

On en déduit du lemme précédent que la classe des carrés Nisnevich est stable par changement de base suivant lesextensions k ⊂ K de corps valués complets. Voici une autre conséquence :

Proposition 1.2.22 — On garde les notations de la définition 1.2.20. Si le carré (C) est Nisnevich, alors lecouple (u : U // X , f : X ′ // X ) est un recouvrement Nisnevich de X.

Demonstration En effet, soit p ∈M(X) un point générique. Si p est dans l’image de M(U) // M(X) , il existeun unique point générique q ∈ M(U) tel que p = u(q). De plus, on a k(p) = k(q). Si p n’est pas dans l’image deM(U) // M(X) il existe Y ∈ Flt(p) tel que Y ∩ U = ∅. Étant donné que Y ′ = Y ×XX ′ ' Y , il existe un uniqueq ∈M(Y ′) ⊂M(X ′) tel que f(q) = p. On a alors k(p) = k(q). c.q.f.d

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34 Motifs des variétés rigides analytiques I

Les recouvrements associés aux carrés Nisnevich par la proposition précédente sont appelés les recouvrementsNisnevich élémentaires.

Proposition 1.2.23 — Soit (C) un carré commutatif de k-schémas formels

(1.43) U′u′//

f ′

X′

f

Uu// X.

Si (Cσ) est un carré Nisnevich de k-schémas, (Cη) est un carré Nisnevich de k-variétés rigides quasi-compactes. Si Xest plat sur k, la réciproque est aussi vraie.

Demonstration Supposons que (Cσ) est un carré Nisnevich. Soit x = Spm(l) ∈ Xη un point fermé non contenudans Uη. On en déduit un morphisme de k-schémas formels x : Spf(l) // X dont l’image est un point fermé

de Xσ −Uσ. Il vient que le morphisme X′×XSpf(l) // Spf(l) est inversible puisqu’il est étale et sa fibre spéciale

inversible. En passant à la fibre générique, on déduit que f−1(x) est un singleton x′ et k(x) = k(x′).Réciproquement, soit p un point de Xσ −Uσ. Quitte à faire un changement de base suivant une extension de corps

valués complets k ⊂ K avec K ' k(p), on peut supposer que p est un point fermé de Xσ. Si X est plat, il existe unpoint fermé x = Spm(l) ∈ X tel que red(x) = p. Le point x est alors dans le complémentaire de U . Si (Cη) est un carréNisnevich on a alors X ′×Xx ' x. Il vient que X′×XSpf(l

) ' Spf(l). Il suffit alors de passer aux fibres spéciales pourobtenir le résultat recherché. c.q.f.d

Dans la suite, un carré (C) comme dans la proposition 1.2.23 est dit un carré Nisnevich si (Cσ) est un carréNisnevich. On a le théorème suivant :

Theoreme 1.2.24 — Supposons donné un carré Nisnevich (C) de k-variétés rigides quasi-compactes

(1.44) U ′u′//

f ′

X ′

f

Uu// X.

Il existe un ouvert quasi-compact X ′0 de X tel que si l’on pose U ′0 = U ′×X′X0, le carré (C0)

(1.45) U ′0u′0//

f ′0

X ′0

f0

Uu// X

est encore un carré Nisnevich qui de plus est isomorphe à la fibre générique d’un carré Nisnevich (C0) de k-schémasformels.

Demonstration On peut trouver un modèle (C) du carré (C)

(1.46) U′a′//

g′

X′

g

Ua// X

avec C cartésien, X plat, a une immersion ouverte et g plat (par [BL93b]).Par le théorème 1.2.10, on peut raffiner le recouvrement Nisnevich (u, f) par un recouvrement Rη avec R un

recouvrement Nisnevich d’un modèle de X. Ainsi, quitte à remplacer X par un modèle plus fin, on peut supposerqu’il existe un X-schéma formel étale V tel que h : V // X est un recouvrement Nisnevich et hη se factorise parX ′∐U // X . Quitte à raffiner X′, on obtient alors un triangle commutatif de k-schéma formels

V //

h((

X′∐

U

X.

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 35

Soit X′0 l’image de h−1(X′) par h. C’est un ouvert Zariski de X. Comme X′0 est plat sur X et que h−1(V) // X′0est surjectif, on déduit que X′0 est étale sur X. Il est également clair que (U/X,X′0/X) est un recouvrement Nisnevich.Le carré (C0)

(1.47) U′0a′0//

g′0

X′0

g

Ua// X

est un carré Nisnevich. Le théorème est démontré. c.q.f.d

Le reste de cette sous-section est consacré aux analogues rigides de quelques propriétés classiques de la topologieNisnevich en géométrie algébrique. Il y a deux façons d’obtenir ces propriétés : par voie directe en suivant de près lesdémonstrations dans le cas algébrique ; par voie indirecte en utilisant le corollaire 1.2.12 pour se ramener à l’énoncécorrespondant sur la fibre spéciale d’un modèle bien choisi. Nous avons préféré suivre la première voie.

Proposition 1.2.25 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte. Soit F un faisceau d’ensembles sur Etqc/X.Alors, F est un faisceau Nisnevich si et seulement si les deux conditions suivantes sont satisfaites :(i) F (∅) ' ∗ (où ∗ est un ensemble fixé à un élément),(ii) tout carré Nisnevich de X-variétés rigides dans Etqc/X

(1.48) V ′v′//

g′

Y ′

g

Vv// Y

induit un isomorphisme d’ensembles F (Y )∼// F (Y ′)×F (V ′) F (V ) . En d’autres termes, F transforme un

carré Nisnevich de Etqc/X en un carré cartésien d’ensembles.De plus, dans la conditon (ii) ci-dessus, on peut se restreindre aux carrés Nisnevich (1.48) provenant, par passage àla fibre générique de Raynaud, d’un carré Nisnevich de schémas formels de base un modèle essentiel Y de Y .

Demonstration Supposons d’abord que F est un faisceau Nisnevich. On a bien F (∅) = ∗ puisque le préfaisceauvide est une crible couvrante de la k-variété vide. D’autre part, étant donné un carré Nisnevich comme dans (ii), lafamille (g, v) est un recouvrement Nisnevich. On a alors une suite exacte d’ensembles

F (Y ) // F (V )× F (Y ′)(1)//

(2)// F (V ×Y V )× F (V ×Y Y ′)× F (Y ′ ×Y V )× F (Y ′ ×Y Y ′) .

La flèche (1) envoie (a, b) ∈ F (V ) × F (Y ′) sur (pr∗1(a), pr∗1(a), pr∗1(b), pr∗1(b)) alors que la flèche (2) envoie cet élé-ment sur (pr∗2(a), pr∗2(b), pr∗2(a), pr∗2(b)). Comme V est une immersion ouverte, les deux projections V ×Y V

//// V

sont égales. Ainsi, les premiers éléments dans les deux quadruplets ci-dessus sont toujours égaux. L’égalité entre lesdeuxièmes éléments est équivalente à l’égalité entre les troisièmes éléments. Montrons que l’égalité entre les quatrièmeséléments est automatique lorsque pr∗1(a) = pr∗2(b). En effet, on a Y ′ ×Y Y ′ = Y ′

∐Z avec Z ∈ Et/Y au dessus de V .

Il vient que les deux possibles images de b dans F (Z) coïncident avec l’unique image de a dans F (Z). Il suffit alorsd’utiliser que F (Y ′ ×Y Y ′) ' F (Y ′)× F (Z). On a ainsi montré que la suite

F (Y ) // F (V )× F (Y ′)//// F (Y ′ ×Y V )

est exacte. Ceci équivaut à dire que F (Y )∼// F (Y ′)×F (V ′) F (V ) est bijective. Les conditions (i) et (ii) sont donc

nécessaires.Pour la réciproque, on montre d’abord que F est séparé. Soient U/X un objet de Etqc/X et γ1, γ2 ∈ F (U) deux

sections qui coïncident sur un recouvrement de U . On peut supposer que U = X (et X quasi-compacte) et on note Rle recouvrement de X au dessus duquel γ1 et γ2 deviennent égales. Par le lemme 1.2.26 ci-dessous, il existe une suitecroissante d’ouverts (X0 ⊂ X1 ⊂ · · · ⊂ Xn = X) et des carrés Nisnevich (pour 0 ≤ i ≤ n− 1)

Y ′i+1//

Yi+1

Xi// Xi+1

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36 Motifs des variétés rigides analytiques I

tels que le recouvrement Nisnevich (X0, Y1, Y2, . . . Yn) raffine R. (Remarquons que la preuve du lemme 1.2.26 fournitdes carrés Nisnevich égaux aux fibres génériques de carrés Nisnevich de schémas formels.) Montrons par récurrence suri que (γ1)|Xi = (γ2)|Xi . Lorsque i = 0, ceci est clair. Supposons que le résultat est vrai pour i. On sait que (γ1)|Yi+1

=

(γ2)|Yi+1. Mais par (ii), la flèche F (Xi+1) // F (Xi)× F (Yi+1) est injective. Ceci montre que (γ1)|Xi+1

= (γ2)|Xi+1.

Maintenant que l’on sait que F est séparé, il suffira de montrer que `(F ) : F // LF est surjectif. On se ramènefacilement à considérer les sections aux dessus de X. Soit γ ∈ LF (X) et R un recouvrement au dessus duquel γ estdéfini. On peut supposer que R = (X0, Y1, Y2, . . . Yn) comme ci-dessus. On va montrer par récurrence sur i, qu’il existeγi ∈ F (Xi) qui est envoyé sur γ|Xi ∈ LF (Xi). Ceci est vrai pour i = 0. Supposons γi construite. Par hypothèse, ilexiste δ ∈ F (Yi+1) qui est envoyé sur γ|Yi+1

. Il vient que δ|Y ′i+1et (γi)|Y ′i+1

sont envoyés par `(F ) sur le même élémentγY ′i+1

. Ils sont donc égaux puisque F est séparé. On obtient l’élément γi+1 en prenant l’image inverse de (δ, γi) par la

bijection F (Xi+1)∼// F (Yi+1)×F (Y ′i+1) F (Xi) . c.q.f.d

Lemme 1.2.26 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte et séparée et R un recouvrement Nisnevich deX. Il existe alors une suite croissante d’ouverts (X0 ⊂ X1 ⊂ · · · ⊂ Xn = X) et des carrés Nisnevich (0 ≤ i ≤ n− 1)

Vi //

Yi+1

Xi// Xi+1

tels que le recouvrement Nisnevich (X0, Y1, . . . , Yn) raffine R.

Demonstration Par le théorème 1.2.10, on peut supposer que R est la fibre générique d’un recouvrement Nisnevichde k-schémas formels Q = ( Ui // X )i avec X un modèle plat de X. Il suffit alors de construire une suite croissante(X0 ⊂ · · · ⊂ Xn = X) d’ouverts du k-schéma formel X et des carrés Nisnevich

Vi //

Yi+1

Xi // Xi+1

tels que le recouvrement Q ×X Xr est raffiné par (X0,Y1, . . . ,Yr).On raisonne par récurrence en posant X−1 = ∅. Supposons Xi et Yi construits pour i < r. Soit Z le complémentaire

de Xr−1 dans X. Si Z est non vide, on choisit un point générique p de Z. Ce point admet un relèvement à Uα pour uncertain indice α. Il existe alors un voisinage Zariski Z0 de p dans Z et un triangle commutatif

Z0//

77

X

On pose Xr = Xr−1∪Z0. On prend alors pour Yr l’ouvert de Uα×XXr complémentaire du fermé F tel que Uα×XZ0 =Z0

∐F . Les propriétés recherchées sont évidentes. Le fait que X = Xn pour n suffisamment grand découle du fait que

la suite des Xr est strictement croissante et que X est noethérien. c.q.f.d

Corollaire 1.2.27 — Soit X une k-variété rigide. L’image d’un carré Nisnevich par le plongement de Yo-neda Etqc/X // ShvNis(Et/X) est un carré cartésien et cocartésien. La même propriété est vraie pour les carrésNisnevich de k-variétés rigides dans SmRigqc/k, VarRigqc/k, etc.

Demonstration Le foncteur Et/X // ShvNis(Et/X) commute aux limites finies. Il envoie donc un carré car-tésien sur un carré cartésien. Pour montrer qu’un carré Nisnevich est envoyé sur un carré cocartésien, on utilise lelemme de Yoneda et de la proposition 1.2.25. c.q.f.d

La proposition 1.2.25 admet une variante homotopique. Soit M une catégorie de modèles. On fait la définitionsuivante :

Definition 1.2.28 — On dit qu’un préfaisceau F sur Etqc/X à valeurs dans M admet la propriété de Brown-Gersten si F (∅/X) // ∗ est une équivalence faible et si F transforme un carré Nisnevich en un carré homotopi-quement cartésien.

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 37

On dit que F admet la propriété de Brown-Gersten restreinte lorsque F vérifie les conditions ci-dessus en serestreignant aux carrés Nisnevich égaux aux fibres génériques de carrés Nisnevich de schémas formels.

Remarque 1.2.29 — Le corollaire 1.2.32 ci-dessous affirme que, sous certaines hypothèses sur M, la propriété deBrown-Gersten est équivalente à sa version restreinte.

Pour simplifier, on supposera dans la suite que M est une catégorie de modèle stable (voir [Hov99] et aussi[Ayo07a, Définition 4.1.44]). En particulier, un carré de M est homotopiquement cartésien si et seulement si il esthomotopiquement cocartésien. Rappelons qu’un objet A ∈ Ob(M) est dit homotopiquement compact si le foncteurhomHo(M)(A[n],−) : M // Ens commute aux petites colimites filtrantes pour tout n ∈ Z. Étant donné unpréfaisceau F (sur Etqc/X, etc) à valeurs dans M, on note Π0(A,F ) le préfaisceau homHo(M)(A,F (−)) et ΠNis

0 (A,F )son faisceau Nisnevich associé. On a le théorème suivant dont la preuve est calquée sur celle de [BG73, Théorème 1’] :

Theoreme 1.2.30 — Soit F // G un morphisme dans PreShv(Etqc/X,M) tel que F et G possèdentla propriété de Brown-Gersten (resp. la propriété de Brown-Gersten restreinte). Soit A un objet homotopiquementcompact de M. On suppose que le morphisme ΠNis

0 (A,F [n]) // ΠNis0 (A,G[n]) est inversible pour tout n ∈ Z.

Alors, Π0(A,F [n]) // Π0(A,G[n]) est aussi inversible.

Demonstration Il suffit bien entendu de traiter le cas respé. En prenant la fibre homotopique de F // G , on seramène au cas G = ∗. Il s’agit alors de montrer que les préfaisceaux Π0(A,F [n]) sont nuls sachant que leurs faisceauxNisnevich associés sont nuls.

Soient (U1/X) et (U2/X) deux objets de Etqc/X. On déduit du carré homotopiquement cartésien

F (U1

∐U2/X) //

F (U1/X)

F (U2/X) // F (∅/X)

et de l’équivalence faible F (∅) ' ∗, un isomorphisme Π0(A,F [n])(U1

∐U2) ' Π0(A,F [n])(U1)⊕ Π0(A,F [n])(U2). Le

foncteur Π0(A,F ) est donc additif.Soit d ≥ 0 un entier. On considère la propriété (Pd) suivante. Soient n ∈ Z, U/X ∈ Ob(Etqc/X) et γ ∈

Π0(A,F [n])(U). Pour tout modèle plat U de U , il existe un ouvert Zariski U0 ⊂ U dont le complémentaire est decodimension plus grande que d et tel que γ|(U0)η = 0.

La propriété (P0) est vraie puisque l’on peut prendre pour U0 l’ouvert vide. Si d ≥ dim(X), la propriété (Pd)implique la trivialité des préfaisceaux Π0(A,F [n]). Pour conclure, il suffit de montrer l’implication (Pd)⇒ (Pd+1).

On fixe l’entier n ∈ Z et la classe γ comme ci-dessus. On peut supposer que U = X (et donc que X est quasi-compact). Soit X′ // X un morphisme de modèles plats. Supposons trouvé un ouvert X′0 ⊂ X′ tel que Z ′ = X′−X′0est de codimension ≥ d+1 et γ|(X′0)η = 0. Notons Z l’image de Z ′ dans X et X0 = X−Z. Il est clair que (X0)η ⊂ (X′0)η.Il vient que γ|(X0)η = 0. D’autre part, Z est de codimension ≥ d+ 1. Il suffit donc de prouver (Pd+1) pour les modèlessuffisamment fins.

Par le théorème 1.2.10, On peut donc supposer l’existence d’un recouvrement Nisnevich R = ( Ui // X )i telque γ s’annule sur les (Ui)η. Comme Π0(A,F [n]) est additif, on peut supposer que ce recouvrement est réduit à uneseule flèche U // X . Par l’hypothèse de récurrence, il existe un ouvert Zariski Xd dont le complémentaire Z estde codimension supérieure à d et tel que γ est nulle sur (Xd)η. Soit Z0 ⊂ Z un ouvert dense et s : Z0

// U unesection. On pose W = Xd ∪ Z0 et V = [U×XW]− F où F est le fermé tel que U×X Z = Z

∐F . Le fermé X−W est

alors de codimension plus grande que d+ 1. D’autre part, γ est nulle sur Vη et

Y //

V

Xd // W

est un carré Nisnevich (avec Y = V×WXd). La suite exacte

homHo(M)(A,F (Yη)[n− 1])∂// homHo(M)(A,F (Wη)[n]) // homHo(M)(A,F ((Xd)η)[n]⊕ F (Vη)[n])

fournit alors un élément α ∈ homHo(M)(A,F (Yη)[n− 1]) tel que ∂(α) = γ|Wη.

Appliquons la propriété (Pd) à α. Il existe alors un ouvert Yd de Y dont le complémentaire est de codimension plusgrande que d et tel que α|(Yd)η = 0. Notons T le complémentaire de Yd et T son adhérence dans V. La partie fermée

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38 Motifs des variétés rigides analytiques I

T − T s’envoie donc isomorphiquement sur son image S dans W. Comme S est de codimension plus grande que d+ 1dans W, on voit que le complémentaire de Xd+1 = W − S dans X est encore de codimension plus grande que d + 1.D’autre part, la carré

Y− T //

V− T

Xd // Xd+1

est encore de Nisnevich. Or, γ|(Xd+1)η est l’image de 0 = α|(Y−T )η par ∂. D’où la propriété (Pd+1). c.q.f.d

Soit M une catégorie de modèles. On dira qu’un objet A de M est homotopiquement compact si le foncteurhomHo(M)(A,−) commute aux colimites filtrantes. Nous adoptons une définition légèrement plus restrictive d’unecatégorie de coefficients (comparer avec [Ayo07a, Définition 4.4.23]) :

Definition 1.2.31 — Une catégorie de modèles M est appelée une catégorie de coefficients lorsqu’elle vérifieles propriétés suivantes :

(i) M est propre à gauche, présentable par cofibrations et stable,

(ii) Les équivalences faibles et les fibrations de M sont stables par coproduits finis et colimites filtrantes.

(iii) Il existe un ensemble E d’objets homotopiquement compacts de M qui engendre la catégorie triangulée avecsommes infinies Ho(M).

L’ensemble E sera fixé une fois pour toute. On supposera que tous les objets dans E sont cofibrants et que pour toutA ∈ E les objets Σ(A) ' A[+1] et Ω(A) ' A[−1] admettent des représentants dans E. On dira alors que (M,E) estune catégorie de coefficients.

Soit S l’une des catégories Etqc/X, Et/X, VarRig/k, SmRig/k, etc, munie de la topologie Nisnevich. Par [Ayo07a,Définition 4.4.33], on dispose sur les catégories PreShv(S,M) d’une structure de catégorie de modèles Nis-locale.Un morphisme K // L est une équivalence Nis-locale si et seulement si ΠNis

0 (A[n],K) // ΠNis0 (A[n], L) est

inversible pour n ∈ Z et A ∈ E. On a le corollaire suivant :

Corollaire 1.2.32 — Soit (M,E) une catégorie de coefficients et K un objet de PreShv(Etqc/X,M). Alors, Kest Nis-local si et seulement si il vérifie la propriété de Brown-Gersten (resp. la propriété de Brown-Gersten restreinte).En particulier, la propriété de Brown-Gersten est équivalente à sa version restreinte.

Demonstration La propriété de Brown-Gersten (resp. restreinte) est préservée par équivalences faibles de pré-faisceaux. Il en est de même de la propriété d’être Nis-local. On peut donc supposer K injectivement fibrant. Enparticulier, pour tout préfaisceau d’ensembles F , homM(F,K) est un objet fibrant de M. De même, étant donnéun monomorphisme de préfaisceaux d’ensembles F0

// F1 , la flèche homM(F1,K) // homM(F0,K) est unefibration.

Montrons donc qu’un préfaisceau K injectivement fibrant et Nis-local vérifie la propriété de Brown-Gersten. Si ∅désigne le préfaisceau vide et ∅/X la X-variété vide, le morphisme homM(∅/X,K) = K(∅/X) // homM(∅,K) = ∗est une équivalence faible puisque aNis(∅) ' aNis(∅/X). D’où la première propriété de la définition 1.2.28. Supposonsdonné un carré Nisnevich (C) de X-variétés étales quasi-compactes

V ′a′//

U ′

Va// U.

Montrons queK(C) est homotopiquement cartésien. Étant donné que a et a′ sont des monomorphismes de préfaisceauxd’ensembles, les flèches K(a) et K(a′) sont des fibrations entre objets fibrants. Il suffit donc de montrer que lemorphisme induit sur les fibres Fib(K(a)) // Fib(K(a′)) est une équivalence faible.

Considérons le carré cocartésien de préfaisceaux d’ensembles

V //

U

∗ // U/V.

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 39

Le foncteur homM(−,K) envoie une colimite de préfaisceaux d’ensembles sur une limite de M. On en déduit un carrécartésien dans M

K(U/V )

// K(U)

K(∗) // K(V )

à flèches verticales des fibrations entre objets fibrants de M. Le morphisme Fib(a) // Fib(K(U/V )→ K(∗)) est

donc une équivalence faible. Il en est de même de Fib(a′) // Fib(K(U ′/V ′)→ K(∗)) . On est donc ramené en fin

de compte à montrer que K(U/V ) // K(U ′/V ′) est une équivalence faible. Ceci découle de [Ayo07a, Proposition

4.4.39] et du fait que V ′/U ′ // V/U induit un isomorphisme sur les faisceaux Nisnevich associés (par le corollaire1.2.27).

Pour la réciproque, on considère le morphisme α : K // LocNisK où LocNis est le foncteur de localisationassocié à une localisation de Bousfield (voir [Ayo07a, Proposition 4.2.72]). Ce morphisme est une équivalence Nis-locale, i.e., induit un isomorphisme après application de ΠNis

0 (A[n],−) pour A ∈ E et n ∈ Z. Par le théorème 1.2.30,et le fait que LocNis(K) est Nis-fibrant, on déduit que α induit un isomorphisme sur Π0(A[n],−). Ceci montre que αest une équivalence faible de préfaisceaux. Le corollaire est prouvé. c.q.f.d

Notons le résultat technique suivant :

Proposition 1.2.33 — Soit (M,E) une catégorie de coefficients. La classe des préfaisceaux sur Etqc/X à valeursdans M vérifiant la propriété de Brown-Gersten est stable par colimites filtrantes.

Demonstration Les équivalences faibles de M sont stables par colimites filtrantes. Ceci découle immédiatementde la condition (iii) de la définition 1.2.31. Il suffit donc de considérer les colimites de préfaisceaux projectivementfibrants. Le résultat découle immédiatement du fait que les fibrations de M sont stables par colimites filtrantes et dela commutation des limites finies aux colimites filtrantes dans M. c.q.f.d

1.2.3 Engendrement par des k-affinoïdes à potentiellement bonne réduction

Soit S un site et C une categorie complète et cocomplète. Pour les notions concernant les préfaisceaux et les faisceauxsur S à valeurs dans C, le lecteur pourra consulter [Ayo07a, Section 4.4]. Étant donnés un préfaisceau d’ensembles Eet un préfaisceau F à valeurs dans C, on dispose d’un préfaisceau E ⊗ F à valeurs dans C (voir [Ayo07a, Définition4.4.2]). Rappelons aussi que pour A ∈ Ob(C) on note Acst le préfaisceau constant sur S de valeur A. On commencepar un résultat général :

Proposition 1.2.34 — Soit (M,E) une catégorie de coefficients (au sens de la définition 1.2.31). La catégorietriangulée HoNis(PreShv(SmRig/k,M)) est compactement engendrée (en tant que catégorie triangulée avec sommesinfinies) par les objets de la forme X ⊗Acst avec X une k-variété rigide quasi-compacte et lisse et A ∈ E.

Demonstration L’inclusion évidente SmRigqc/k ⊂ SmRig/k induit une équivalence de topos ShvNis(SmRig/k) 'ShvNis(SmRigqc/k) par [SGA 4, Éxposé III, Théorème 4.1]. Par [Ayo07a, Proposition 4.4.55], on a une équivalencede Quillen entre PreShv(SmRig/k,M) et PreShv(SmRigqc/k,M) munies des structures Nis-locales. Il suffit donc deprouver l’énoncé du lemme pour la catégorie triangulée (avec sommes infinies) HoNis(PreShv(SmRigqc/k,M)).

Montrons d’abord que les objets X ⊗Acst sont compacts. Il suffit plus généralement de montrer que le foncteur

(1.49) homHoNis(PreShv(SmRigqc/k,M))(X ⊗Acst,−) : PreShv(SmRigqc/k,M) // Ab

commute aux colimites filtrantes. En effet, ce foncteur transforme un coproduit fini en un coproduit fini de groupesabéliens. Or, un coproduit quelconque est la colimite filtrante de coproduits finis. Le foncteur (1.49) est isomorphe à

(1.50) homHo(M)(A,Γ(X,−)) : PreShv(SmRigqc/k,M)RΓ(X,−)

//Mhom(A,−)

// Ab .

Étant donné que A est homotopiquement compact, il suffit de montrer que RΓ(X,−) commute aux colimites filtrantesà une équivalence faible près.

Par définition, RΓ(X,K) est faiblement équivalent à Γ(X,Kf ) avec Kf un remplacement Nis-local de K. Parle corollaire 1.2.32, les préfaisceaux Nis-locaux sont exactement ceux qui vérifient la propriété de Brown-Gersten.Supposons donné un foncteur K : I // PreShv(SmRigqc/k,M) avec I une catégorie filtrante. Soit K // Kf

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40 Motifs des variétés rigides analytiques I

un remplacement Nis-fibrant de K. Par la proposition 1.2.33 on sait que ColimIKf vérifie la propriété de Brown-Gersten. D’autre part une colimite filtrante d’équivalences Nis-locales est une équivalence Nis-locale. On a alors leséquivalences faibles

HoColimIRΓ(X,K) ' ColimIΓ(X,Kf ) = Γ(X,ColimIKf ) ' RΓ(X,ColimIK).

Pour conclure, il reste à vérifier que la famille des foncteurs (1.49) détecte les équivalences faibles. Soit K // Lun morphisme de préfaisceaux induisant un isomorphisme après application des foncteurs (1.49) (donc aussi (1.50)).On peut supposer que K et L sont Nis-locaux. Par la condition (iii) de la définition 1.2.31 on déduit que pour toutek-variété rigide quasi-compacte et lisse X, K(X) // L(X) est une équivalence faible. Il vient que K // L estune équivalence faible de préfaisceaux. c.q.f.d

Dans la suite de cette sous-section, on supposera que la valuation de k est discrète et que le corps résiduel k estde caractéristique nulle. En particulier, k est d’égal caractéristique nulle et même isomorphe à k((π)). On ne restreintdonc pas la généralité en supposant que k = k((π)). Ceci permettra de voir Spec(k) et Spec(k) comme des k-schémaset donc de faire des changements de bases suivant les morphismes Spec(k) // Spec(k) et Spec(k) // Spec(k) .On introduit quelques notations.

Notation 1.2.35 — Soient X un k-schéma de type fini, f ∈ Γ(X,OX) et p ∈ N − 0. On définit un k-schémaQschp (X, f) = (X ×k k)[V ]/V p − f.π. On note alors Qforp (X, f) la complétion formelle de Qschp (X, f) en sa fibrespéciale. Enfin, Qrigp (X, f) désignera la fibre générique de Qforp (X, f).

Lorsque p = 1, ces schémas, schémas formels et variétés rigides ne dépendent pas de f . Ils seront simplement notésQsch(X), Qfor(X) et Qrig(X) respectivement.

Avec les notations 1.1.59, on a

(1.51) Qschp (X, f) = Stf.πX×kk,p, Qforp (X, f) = Stf.πX×kk//(π),p et Qrigp (X, f) = Stf.π(X×kk//(π))η,p

.

Le théorème principal de ce paragraphe est le suivant :

Theoreme 1.2.36 — Soit (M,E) une catégorie de coefficients (au sens de la définition 1.2.31). La catégorietriangulée HoNis(PreShv(SmRig/k,M)) est compactement engendrée (en tant que catégorie triangulée avec sommesinfinies) par les objets de la forme

(1.52) [Qrigp (X, f)]⊗Acst

avec p ∈ N− 0, X un k-schéma affine lisse, f ∈ Γ(X,O×) et A ∈ E.

On note T la sous-catégorie triangulée de HoNis(PreShv(SmRig/k,M)) stable par facteurs directs et engendréepar les objets de la forme (1.52). Par la proposition 1.2.34 il suffit de montrer que si X est une k-variété rigidequasi-compacte et lisse et A ∈ E, le préfaisceau X ⊗Acst est dans Ob(T). Notons d’abord le lemme :

Lemme 1.2.37 — Supposons donné un recouvrement fini (Ui)i∈I de X par des ouverts admissibles quasi-compacts.Pour ∅ 6= J ⊂ I, on note UJ = ∩j∈JUj. Pour A ∈ Ob(M), l’objet X ⊗ Acst appartient à la sous-catégorie trianguléeengendrée par Uj ⊗Acst, ∅ 6= J ⊂ I.

Demonstration On raisonne par récurrence sur le cardinal de I. Lorsque I est un singleton, il n’y a rien à montrer.Supposons que I = 1, 2. On a une suite de cofibrations de Mayer-Vietoris

(1.53) (U1 ∩ U2)⊗Acst // U1 ⊗Acst∐U2 ⊗Acst // X ⊗Acst .

En effet, le faisceau Nisnevich associé à la cofibre de la flèche de gauche est isomorphe au faisceau Nisnevich associéà X ⊗ Acst. Le triangle distingué déduit de (1.53), montre bien que X ⊗ Acst est dans la sous-catégorie trianguléeengendrée par U1 ⊗Acst, U2 ⊗Acst et (U1 ∩ U2)⊗Acst.

Soit i0 ∈ I et notons I ′ = I − i0. Les k-variétés rigides quasi-compactes V = ∪j∈I′Uj et V ∩ Ui0 = ∪j∈I′Uj ∩ Ui0se recouvrent par (Uj)j∈I′ et (Uj ∩ Ui0)j∈I′ respectivement. Par récurrence, on sait que V ⊗ A et (V ∩ Ui0)⊗ A sontdans la sous-catégorie engendrée par Uj ⊗A, ∅ 6= J ⊂ I. Pour conclure, il suffit d’appliquer le cas card(I) = 2 de larécurrence au recouvrement X = Ui0 ∪ V . c.q.f.d

Soient X une k-variété rigide quasi-compacte et lisse et A ∈ E. Montrons que X ⊗ Acst ∈ Ob(T). En utilisant lelemme 1.2.37 et la proposition 1.1.61, on se ramène à traiter le cas X = Xη avec X un k-schéma formel globalementsemi-stable. On raisonne par récurrence sur le nombre maximal de branches de X passant par un point. CommeX ⊗Acst est un facteur direct de (XR,R−1)⊗Acst, on peut supposer par la proposition 1.1.60 (quitte à appliquer

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 41

de nouveau le lemme 1.2.37) qu’il existe un morphisme étale f : X // StU−1π

a S1, . . . , Sr pour un certain n-uplet

a = (a1, . . . , an). Rappelons que StU−1.π

a est le spectre formel de kU,U−1, T1, . . . , Tn/(T a11 . . . T ann −U−1π). Notons

D1, . . . , Dn les branches de X d’équations respectives T1 = 0, . . . , Tn = 0. Soit C = D1 ∩ · · · ∩Dn leur intersection. Parl’hypothèse de récurrence, (X− C)η ⊗Acst est dans T. Il suffit donc de montrer que

Xη ⊗Acst(X− C)η ⊗Acst

= Cof((X− C)η ⊗Acst → Xη ⊗Acst) ∈ Ob(T).

Notons e0 : C // Spec(k[U,U−1, S1, . . . , Sr]) le morphisme étale obtenu en prenant la fibre de f au dessus de

l’intersection o[U,U−1, S1, . . . , Sn] des branches de StU−1π

a S1, . . . , Sr. En appliquant Qfor (voir les notations 1.2.35)

on obtient le morphisme étale Qfor(e0) : Qfor(C) // Spf(kU,U−1, S1, . . . , Sr) . Le changement de base suivant

le morphisme évident StU−1π

a// Spf(kU,U−1) nous donne un morphisme étale de k-schémas formels

(1.54) e : StU−1π

a ×kU,U−1Qfor(C) // StU

−1πa S1, . . . Sr .

Notons que par construction, e0 est la fibre de e au dessus de l’intersection des branches de StU−1π

a S1, . . . Sr.On forme le carré cartésien de k-schémas formels

Y1//

X

f

StU−1π

a ×kU,U−1 Qfor(C)

e// StU

−1πa S1, . . . Sr.

Par changement de base suivant o[U,U−1, S1, . . . , Sr] ⊂ StU−1π

a S1, . . . Sr, on obtient le carré cartésien

P //

C

e0

Ce0// o[U,U−1, S1, . . . , Sr].

Puisque e0 est étale, l’immersion diagonale de C dans P est ouverte et fermée. On a donc une décomposition en sommedisjointe P = C

∐P0. Soit Y l’ouvert Y1 − P0. On obtient ainsi deux carrés Nisnevich de k-schémas formels

Y− C //

Y

(StU−1π

a − o[U,U−1])×kU,U−1Qfor(C) // StU

−1πa ×kU,U−1Q

for(C)

Y− C //

Y

X− C // X.

Par le corollaire 1.2.27, les fibres génériques de ces carrés sont cocartésiens dans ShvNis(SmRig/k). On en déduit deséquivalences Nis-locales

[Xη ⊗A]

[(X− C)η ⊗A]' [Yη ⊗A]

[(Y− C)η ⊗A]'

[((StU

−1.πa )η×kU,U−1Q

rig(C))⊗A

][(

(StU−1πa − o[U,U−1])η×kU,U−1Qrig(C)

)⊗A

] .Ainsi sous l’hypothèse de récurrence, on a la chaîne d’équivalences

[Xη ⊗A] ∈ Ob(T)⇔ [Yη ⊗A] ∈ Ob(T)⇔[(

(StU−1π

a )×kU,U−1 Qrig(C)

)⊗A

]∈ Ob(T).

Appelons f ∈ Γ(C,O×) l’image de U−1 par le morphisme de k-algèbres k[U,U−1, S1, . . . , Sr] // Γ(C,O) induit

par e0. La k-variété rigide StU−1π

a ×kU,U−1Qrig(C) s’identifie avec la Qrig(C)-variété rigide Stf.πQrig(C),a. Ainsi, pour

terminer la preuve du théorème 1.2.36, il suffit de montrer le lemme suivant :

Lemme 1.2.38 — Soient X une k-variété rigide lisse, v ∈ Γ(X,O×) et a un n-uplet d’entiers non nuls. Soit enfinA ∈ Ob(M). Alors, l’objet StvX,a ⊗ Acst est dans la sous-catégorie triangulée de HoNis(PreShv(SmRig/k,M)) stablepar facteurs directs et engendrée par l’ensemble

(1.55)[

XU1, U−11 , . . . , Ur, U

−1r , R

(Rp − Um11 . . . Umrr v)

×kBn−rk

]⊗Acst; p ∈ N− 0, 0 ≤ r ≤ n et (mi)

ri=1 ∈ Zr

.

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42 Motifs des variétés rigides analytiques I

Demonstration On raisonne par récurrence sur la longueur n du n-uplet a. Lorsque n = 1, il n’y a rien à démontrer.On suppose donc n ≥ 2. On procède en deux étapes :Étape 1 : On veut se ramener au cas a = (p, . . . , p). On commence par une discussion générale. Soient b = (b1, . . . , bn)un n-uplet et 1 ≤ i < j ≤ n. Comme v est inversible, les sections Ti et Tj engendrent OXT1, . . . , Tn/(T b11 . . . T bnn −v)comme idéal. On peut donc considérer le recouvrement standard D(Ti|Tj) et D(Tj |Ti) de StvX,b. Par le triangle distinguéde Mayer-Vietoris

(D(Ti|Tj) ∩D(Tj |Ti))⊗Acst // D(Ti|Tj)⊗Acst ⊕D(Tj |Ti)⊗Acst // StvX,b ⊗Acst //

on déduit que D(Ti|Tj)⊗ Acst et D(Tj |Ti)⊗ Acst sont dans la sous-catégorie triangulée stable par facteurs directs etengendrée par StvX,b⊗Acst, (D(Ti|Tj)∩D(Tj |Ti))⊗Acst. Le k-variété rigide D(Ti|Tj) est le spectre de la OX -algèbreaffinoïde

OXT1, . . . , Tn(T b11 . . . T bnn − v)

Sj/(Ti.Sj − Tj) =OXT1, . . . , Ti, . . . , Tj−1, Sj , Tj+1, . . . , Tn

(T b11 . . . Tbi−1

i−1 Tbi+bji T

bi+1

i+1 . . . Tbj−1

j−1 Sbjj T

bj+1

j+1 . . . T bnn − v).

On a donc un isomorphisme D(Ti|Tj) ' StvX,bij

avec bij = (b1, . . . , bi−1, bi + bj , bi+1, . . . , bn). De même, on a un

isomorphisme D(Tj |Ti) ' StvX,bjioù bji = (b1, . . . , bj−1, bi+bj , bj+1, . . . , bn). L’intersection D(Ti|Tj)∩D(Tj |Ti) coïncide

avec l’ouvert rationnel x ∈ D(Ti|Tj); |Tj/Ti(x)| = 1. Cette intersection est donc donnée par D(Ti|Tj)1/Sj. Sonalgèbre affinoïde est

OXSj , S−1j T1, . . . , Ti, . . . , Tj−1, Tj+1, . . . , Tn

(T b11 . . . Tbi−1

i−1 Tbi+bji T

bi+1

i+1 . . . Tbj−1

j−1 Tbj+1

j+1 . . . T bnn − S−bjj v).

On peut donc identifier D(Ti|Tj) ∩D(Tj |Ti) à StU−bj v

XU,U−1,c avec c = (b1, . . . , bi−1, bi + bj , bi+1, . . . , bj−1, bj+1, . . . , bn).

Par la récurrence sur la longueur n des n-uplets, on sait que pour m ∈ N − 0, StU−mvXU,U−1,c ⊗ Acst est dans lasous-catégorie triangulée stable par facteurs directs et engendrée par

(1.56)[

XU,U−1U1, U−11 , . . . , Ur, U

−1r , R

(Rp − Um11 . . . Umrr U−mv)

×kBn−1−rk

]⊗Acst; p ∈ N− 0, 0 ≤ r ≤ n− 1 et (mi)i ∈ Zr

.

Il vient que StvX,bji⊗Acst et StvX,bij ⊗Acst sont dans la sous-catégorie triangulée stable par facteurs directs et engendrée

par l’ensemble (1.55) auquel on adjoint le singleton StvX,b ⊗ Acst. Ainsi, si l’on connaît l’énoncé du lemme pourle n-uplet b, on le connaît aussi pour bji et bij . Or, on peut obtenir tout n-uplet a à partir d’un n-uplet constant enappliquant suffisamment de fois la construction b bji avec (i, j) bien choisi. Il nous reste donc à traiter le cas dun-uplet (p, . . . , p) pour conclure.Étape 2 : Considérons la k-variété rigide StvXTn,p

n−1

= XT1, . . . , Tn/(T p1 . . . Tpn−1 − v). La section Tn−1 engendre

OXT1, . . . , Tn/(T p1 . . . Tpn−1− v) comme idéal. On peut donc considérer le recouvrement standard de la variété rigide

StvXTn,pn−1

par les ouverts D(Tn−1|Tn) et D(Tn|Tn−1). On a :

– D(Tn−1|Tn) = Spm

(OXT1, . . . , TnT p1 . . . T

pn−1 − v

Sn/(SnTn−1 − Tn)

)= Spm

(OXT1, . . . , Tn−1, Sn

T p1 . . . Tpn−1 − v

)' StvXSn,p

n−1

,

– D(Tn|Tn−1) = Spm

(OXT1, . . . , TnSn−1

(T p1 . . . Tpn−1 − v, Sn−1Tn − Tn−1)

)= Spm

(OXT1, . . . , Tn−2, Sn−1, TnT p1 . . . T

pn−2S

pn−1T

pn − v

)' StvX,p

n

,

– D(Tn−1|Tn) ∩D(Tn|Tn−1) = Spm

(OXT1, . . . , Tn−1, Sn, S

−1n

T p1 . . . Tpn−1 − v

)' Stv

XSn,S−1n ,pn−1

.

On utilise alors l’hypothèse de récurrence et le triangle distingué de Mayer-Vietoris

(D(Tn−1|Tn) ∩D(Tn|Tn−1))⊗Acst // D(Tn−1|Tn)⊗Acst ⊕D(Tn|Tn−1)⊗Acst // StvXTn,pn−1

⊗Acst //

pour conclure. Le lemme est démontré. c.q.f.d

1.2.4 Topologies Nisnevich et foncteur d’analytification

Dans la sous-section 1.1.3, on a construit un foncteur d’analytification. L’analytification d’un recouvrement Nisne-vich est encore un recouvrement Nisnevich du fait du résultat plus précis suivant :

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1.2 La topologie de Nisnevich en géométrie rigide 43

Theoreme 1.2.39 — On suppose que la valuation de k est non triviale et on se donne une k-algèbre affinoïdeA. Soient X un A-schéma de type fini et R = (ui : Ui // X )i un recouvrement Nisnevich de X. La famille

Ran = (uani : Uan

i// Xan )i se raffine par un recouvrement ouvert admissible de Xan.

Demonstration On peut trouver une suite strictement croissante d’ouverts Zariski ∅ 6= X0 ⊂ · · · ⊂ Xn = X et descarrés Nisnevich

Vi //

Yi+1

Xi// Xi+1

tels que le recouvrement Nisnevich (X0 = Y0, Y1, . . . , Yn) raffine R. Démontrons par récurrence sur 0 ≤ r ≤ n que(Y an

0 , . . . , Y anr ) se raffine par un recouvrement ouvert admissible de Xan

r . Ceci étant évident pour r = 0, on supposeraque r > 0 et que le résultat est connu pour r − 1.

On fixe un recouvrement ouvert admissible (Pj)j∈J de Xanr−1 qui raffine le recouvrement (Y an

0 , . . . , Y anr−1). Soit

(Qt)t∈T un recouvrement ouvert admissible de Xanr par des k-affinoïdes. Notons Z = Xr −Xr−1 et Zt = Qt ∩ Zan.

Soit p ∈ P(Zt). L’anneau OQt,p est hensélien par la proposition 1.1.34. D’autre part, le morphisme évidentSpec(OQt,p)

// Xr envoie le point fermé de Spec(OQt,p) sur un point de Z. Il existe donc une unique factori-sation

Yr

Spec(OQt,p)//

66

Xr.

Le Xr-schéma Yr étant de présentation finie, on peut alors trouver Op ⊂ Qt un voisinage affinoïde de p et une flèchevp rendant commutatif

Qt×XanrY anr

//

Y anr

Op //

vp88

Qt // Xanr .

Étant donné que P(Zt) est quasi-compact, il existe un nombre fini de points p1, . . . , ps ∈ P(Zt) tels que Zt =(Op1 ∩ Z) ∪ · · · ∪ (Ops ∩ Z). Notons Dt = Op1 ∪ · · · ∪ Ops . Par l’unicité des factorisations, on obtient un morphismede Xan

r variétés rigides Dt// Y anr . Il est alors clair que la famille d’immersions ouvertes (Pj)j∈J

∐(Dt)t∈T raffine

(Y0, . . . , Yr). Pour terminer, il reste à voir que cette famille est un recouvrement admissible. Il suffit pour cela demontrer que la famille (Pj×XanQt)j

∐Dt est un recouvrement admissible de Qt. Ceci découle du lemme 1.2.40 ci-

dessous. c.q.f.d

Lemme 1.2.40 — Soient X un k-affinoïde et Z ⊂ X une variété fermée. On suppose donné un recouvrementouvert admissible U de X − Z et un domaine D ⊂ X contenant Z. Alors, U

∐D est un recouvrement admissible de

X.

Demonstration Soit X un modèle de X tel que D = Dη pour D un ouvert Zariski de X et Z = Zη pour Z unsous-schéma formel de D. Soit V l’ouvert X − Zσ. On a alors X = D ∪ Vη. Soit (V1, . . . , Vn) est un recouvrementadmissible de Vη qui raffine U ×XVη. Le recouvrement (V1, . . . , Vn, D) est alors admissible et raffine U

∐D. D’où le

résultat. c.q.f.d

On obtient immédiatement les deux corollaires suivants :

Corollaire 1.2.41 — Soient A une k-algèbre affinoïde et X un A-schéma de type fini. Le foncteur Rig :

Et/X // Et/Xan induit un morphisme de sites (Et/Xan,Nis) // (Et/X,Nis) .

Pour la notion de P -structures sur un site, le lecteur est renvoyé à [Ayo07a, Définition 4.4.57].

Corollaire 1.2.42 — Soit A une k-algèbre affinoïde. On munit le site (Sm/A,Nis) de sa P -structure étale qui àun A-schéma X associe le petit site (Et/X,Nis). De même, on munit le site (SmRig/A,Nis) de sa P -structure étale quià une A-variété rigide X associe le petit site (Et/X,Nis). Le foncteur d’analytification Rig : Sm/A // SmRig/A

induit alors un prémorphisme de sites (SmRig/A,Nis) // (Sm/A,Nis) compatible aux P -structures étales (au sensde [Ayo07a, Définition 4.4.59]).

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44 Motifs des variétés rigides analytiques I

Remarque 1.2.43 — Le foncteur continu Rig est en fait un morphisme de sites. Ce résultat utilise le théorème dePopescu (voir [Pop85, Pop86]). Étant donné que le corollaire 1.2.42 est suffisant pour les besoins de ce chapitre, onreportera la preuve de ce résultat au chapitre suivant (voir le lemme 2.5.23).

Notons également le résultat simple suivant :

Proposition 1.2.44 — Soit X un k-schéma de type fini et (C) un carré Nisnevich de X-schémas étales. Notons(Can) le carré de k-variétés rigides obtenu à partir de (C) en appliquant le foncteur d’analytification. L’image de (Can)par le plongement de Yoneda est un carré cartésien et cocartésien dans ShvNis(Et/X

an).Le même énoncé reste vrai pour les carrés Nisnevich dans Sch/k, Sm/A, etc (où A une k-algèbre affinoïde).

Demonstration Les plongements de Yoneda Et/X // ShvNis(Et/X) et Et/Xan // ShvNis(Et/Xan) seront

notés h. Le fait que h(Can) est cartésien découle de la commutation de h aux limites finies.Montrons que h(Can) est cocartésien. Le prémorphisme de sites Rig : (Et/Xan,Nis) // (Et/X,Nis) induit un

foncteur image inverse Rig∗ : ShvNis(Et/X) // ShvNis(Et/Xan) qui commute aux colimites. On a un isomorphisme

naturel Rig∗ h ' h Rig. Le résultat découle alors du fait que h(C) est cocartésien dans ShvNis(Et/X). Les autresvariantes se démontrent exactement de la même manière. c.q.f.d

1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigidesOn fixe une catégorie de coefficients (M,E) (voir la définition 1.2.31). On pourra prendre pour M la catégorie des

complexes de groupes abéliens, ou plus généralement des complexes de modules sur un anneau. On peut égalementprendre la catégorie des spectres SpectS1(∆opEns) ou celle des spectres symétriques SpectΣ

S1(∆opEns).

1.3.1 Construction et propriétés élémentaires : cas instableRappelons que l’on dispose d’une structure de modèles projective Nis-locale sur PreShv(SmRig/k,M) dont les

équivalences faibles sont les morphismes de préfaisceaux induisant des isomorphismes sur les faisceaux d’homotopiesΠNis

0 (A[n],−) pour n ∈ Z et A ∈ E. Étant donné que E est stable à homotopie près par suspension et cosuspension, ilsuffit en fait de prendre n = 0.

On localise cette structure de modèles suivant la classe B des flèches B1X ⊗Acst // X ⊗Acst avec X une

k-variété rigide lisse et A ∈ Ob(M). L’existence de cette localisation découle de la proposition suivante et du théorèmede localisation de Hirschhorn ([Hirs03] voir aussi [Ayo07a, Théorème 4.2.71]).

Proposition 1.3.1 — Soit α un cardinal suffisamment grand. On note Bα ⊂ B la sous-classe de B formée desflèches de buts α-accessibles. Soit K un objet projectivement Nis-fibrant de PreShv(SmRig/k,M). Alors, K est Bα-local si et seulement si le morphisme K // hom(B1

k,K) est une équivalence faible de préfaisceaux. En particulier,pour tout β ≥ α, K est Bβ-local si et seulement si il est Bα.

Demonstration On reprend l’argument de [Ayo07a, Proposition 4.5.11]. Dire que K est Bα-local, revient à direque l’application π0(X ⊗A,K) // π0(B1

X ⊗A,K) est bijective. Par adjonction, cela revient à demander que

π0(A,K(X)) // π0(A,K(B1X)) est bijective. Pour α suffisamment grand (tel que A[n] admet un représentant

α-accessible pour A ∈ E et n ∈ Z), ces applications sont bijectives si et seulement si K(X) // K(B1X) est une

équivalence faible. Ceci revient à dire que K // hom(B1k,K) est une équivalence faible de préfaisceaux. c.q.f.d

Definition 1.3.2 — La structure B1-localisée de la structure projective Nis-locale sur PreShv(SmRig/k,M) seranotée (WB1 ,Cof ,FibB1). Sa catégorie homotopique HoB1(PreShv(SmRig/k,M)) sera notée RigSHeff

M(k). Lorsque Mest la catégorie des spectres symétriques, on notera simplement RigSHeff(k). Lorsque M est la catégorie des complexesde groupes abéliens (resp. de Q-espaces vectoriels) on notera alors RigDAeff(k) (resp. RigDAeff

Q (k)) cette catégorie.

La catégorie de modèles que l’on vient d’introduire est stable puisque M a été supposée stable. Elle est égalementmonoïdale symétrique si M l’est.

Definition 1.3.3 — Supposons fixé un objet 1 de M (par exemple un objet unité pour la structure monoïdale siM est une catégorie de modèles monoïdale). On appelle alors motif effectif d’une k-variété rigide X l’objet X ⊗ 1cstconsidéré dans RigSHeff

M(k). D’une manière équivalente, le motif effectif de X est le B1-localisé de X ⊗1cst considérécomme un objet de HoNis(PreShv(SmRig/k,M)). Le motif effectif de X sera noté Meff(X) (ou encore Meff(X,1)).

On regroupe quelques exemples simples de B1-équivalences faibles dans la proposition ci-dessous (voir l’exemple1.1.14 pour les notations).

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 45

Proposition 1.3.4 — Soient X une k-variété rigide, f, g, h ∈ Γ(X,O×) et p, q, r ∈ N−0 tels que |g(x)|1/q ≤|h(x)|1/r ≤ |f(x)|1/p pour tout point fermé x de X. Soit E un préfaisceau sur SmRig/k à valeurs dans M. Lesmorphismes suivants sont des B1-équivalences faibles :

1. B1X(o, f1/p)⊗ E // X ⊗ E ,

2. ((A1k)an×kX)⊗ E // X ⊗ E ,

3. ∂B1X(o, h1/r)⊗ E // Cr1

X(o, g1/q, f1/p)⊗ E ,

4. ∂B1X(o, f1/p)⊗ E // ((Gmk)an×kX)⊗ E ,

5. ∂B1X(o, f1/p)⊗ E // (B1

X(o, f1/p)− o)⊗ E .

Demonstration Étant donné que les coproduits directs dans M préservent les équivalences faibles, on peut supposerque E est injectivement cofibrant (i.e., cofibrant terme à terme).

Considérons la première flèche. On traite d’abord le cas f = 1. Il suffit de montrer, pour tout préfaisceau B1-localK, que l’application

homHoNis(PreShv(SmRig/k,M))(X ⊗ E,K) // homHoNis(PreShv(SmRig/k,M))(B1X ⊗ E,K)

est bijective. Par adjonction, cette application s’identifie à

homHoNis(PreShv(SmRig/k,M))(X ⊗ E,K) // homHoNis(PreShv(SmRig/k,M))(X ⊗ E,hom(B1k,K)) .

Le résultat découle alors de la proposition 1.3.1. Revenons au cas général. On dispose d’une action par homothétiesm : B1

k⊗kB1X(o, f1/p) // B1

X(o, f1/p) de B1k sur B1

X(o, f1/p). La flèche m⊗ E fournit une homotopie entre l’iden-

tité de B1X(o, f1/p) ⊗ E et l’endomorphisme induit par le morphisme nul B1

X(o, f1/p) // oX // B1X(o, f1/p) .

On en déduit que ces deux flèches deviennent égales dans la catégorie homotopique montrant ainsi que oX ⊗ E :

X ⊗ E // B1X(o, f1/p)⊗ E est un inverse à gauche et à droite de la flèche qui nous préoccupe. Pour la deuxième

flèche, on raisonne de la même manière en utilisant l’action par homothétie m : B1k×k(A1

k)an // (A1k)an .

On considère maintenant la troisième flèche. On suppose d’abord que h = g et q = r. Le recouvrement admissiblede B1

X(o, f1/p) par B1X(o, g1/q) et Cr1

X(o, g1/q, f1/p) fournit le carré homotopiquement cocartésien (relativement à lastructure Nis-locale)

∂B1X(o, g1/q)⊗ E //

B1X(o, g1/q)⊗ E

Cr1X(o, g1/q, f1/p)⊗ E // B1

X(o, f1/p)⊗ E.

Le résultat découle alors du fait que la flèche verticale de droite est une B1-équivalence faible par la discussionprécédente. Le cas h = f et r = p, se déduit du cas précédent via les isomorphismes

(−)−1 : Cr1X(o, g1/q, f1/p) // Cr1

X(o, f−1/p, g−1/q) et (−)−1 : ∂B1X(o, f1/p) // ∂B1

X(o, f−1/p) .

Pour le cas général, on utilise le recouvrement admissible de Cr1X(o, g1/q, f1/p) par les couronnes Cr1

X(o, g1/q, h1/r) etCr1

X(o, h1/r, f1/p). On obtient alors un carré homotopiquement cocartésien (relativement à la structure Nis-locale)

∂B1X(o, h1/r)⊗ E

(1)//

(2)

Cr1X(o, g1/q, h1/r)⊗ E

Cr1X(o, h1/r, f1/p)⊗ E // Cr1

X(o, g1/q, f1/p)⊗ E

avec (1) et (2) des B1-équivalences faibles. Toutes les flèches du carré ci-dessus sont alors des B1-équivalences faibles.Pour la quatrième flèche, on utilise le fait que Colimn∈NCr1

X(o, |π|n, |π|−n)⊗ E // ((Gmk)an×kX)⊗ E estune équivalence Nis-locale et qu’une composition transfinie de cofibrations injectives B1-triviales est une cofibra-tion injective B1-triviale. La cinquième flèche se traite de la même manière en utilisant le recouvrement admissibleB1X(o, f1/p)− o = ColimnCr1

X(o, (πnf)1/p, f1/p). c.q.f.d

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46 Motifs des variétés rigides analytiques I

On note une conséquence qui sera utile plus tard.

Corollaire 1.3.5 — Soit E un préfaisceau sur SmRig/k à valeurs dans M. La flèche

[(Ank − o)//(π)]⊗ E // (Ank − o)an ⊗ E

est une B1-équivalence faible.

Demonstration On raisonne par récurrence sur n. Lorsque n = 1, on retrouve la quatrième flèche de la proposition1.3.4. Supposons n ≥ 2. On peut couvrir AnZ − o par les ouverts U = (An−1

Z − o)×Z A1Z et V = An−1

Z ×Z (A1Z − o) dont

l’intersection estW = (An−1Z −o)×Z (A1

Z−o). On obtient ainsi un morphisme de triangles distingués de Mayer-Vietoris

[Wk//(π)]η ⊗ E //

[Uk//(π)]η ⊗ E ⊕ [Vk//(π)]η ⊗ E //

[(Ank − o)//(π)]η ⊗ E //

W ank ⊗ E // Uan

k ⊗ E ⊕ V ank ⊗ E // (Ank − o)an ⊗ E // .

Les deux première flèches verticales sont inversibles dans HoB1(PreShv(SmRig/k,M)) par l’hypothèse de récurrence.D’où le résultat. c.q.f.d

Par le corollaire 1.2.42 et [Ayo07a, Théorème 4.4.60], on dispose d’une adjonction de Quillen relativement auxstructures Nis-locales projectives

(Rig∗,Rig∗) : PreShv(Sm/k,M) // PreShv(SmRig/k,M) .

On a la proposition suivante :

Proposition 1.3.6 — La paire (Rig∗,Rig∗) est une adjonction de Quillen lorsque l’on munit PreShv(Sm/k,M)de sa structure A1-localisée et PreShv(SmRig/k,M) de sa structure B1-localisée.

Demonstration Il suffit en effet de montrer que Rig∗ envoie les flèches de la forme A1X ⊗Acst // X ⊗Acst sur

des B1-équivalences faibles. On utilise pour cela la proposition 1.3.4. c.q.f.d

On peut aussi localiser la structure Nis-locale sur PreShv(SmRigqc/k,M) relativement à la classe Bqc des flèchesB1X ⊗Acst // X ⊗Acst avec X une k-variété rigide, quasi-compacte et lisse et A ∈ Ob(M). En effet, l’analogue de

la proposition 1.3.1 est encore valable. On obtient ainsi la structure B1-locale. Il est clair que PreShv(SmRigqc/k,M)et PreShv(SmRig/k,M), munies des structures B1-locales, sont Quillen-équivalentes. On a le résultat suivant.

Proposition 1.3.7 — Un préfaisceau K de PreShv(SmRigqc/k,M) est fibrant pour la structure projectiveB1-locale si et seulement si il vérifie les conditions suivantes :(i) pour toute k-variété rigide quasi-compacte et lisse X, K(X) est un objet fibrant de M,(ii) le préfaisceau K vérifie la propriété de Brown-Gersten (voir la définition 1.2.28),

(iii) pour toute k-variété rigide quasi-compacte et lisse X, le morphisme K(B1X) // K(X) est une équivalence

faible.En particulier, la classe des objets B1-fibrants dans PreShv(SmRigqc/k,M) est stable par colimites filtrantes.

Demonstration Les deux premières conditions affirment que K est projectivement fibrant pour la structure Nis-locale (voir le corollaire 1.2.32). Il reste à voir que K est B1-local si et seulement si il vérifie (iii). Ceci découleimmédiatement de la proposition 1.3.1 (en fait, de sa version pour les variétés rigides quasi-compactes). c.q.f.d

Corollaire 1.3.8 — La catégorie triangulée avec sommes infinies RigSHeffM(k) est compactement engendrée

par les objets de la forme X ⊗Acst avec X une k-variété rigide, quasi-compacte et lisse et A ∈ E.

Demonstration On montre d’abord que les objets X ⊗ Acst sont compacts. Il est plus général de montrer que lefoncteur

(1.57) homRigSHeffM (k)(X ⊗Acst,−) : PreShv(SmRigqc/k,M) // Ab

commute aux colimites filtrantes. Ce foncteur peut s’écrire comme la composée

(1.58) PreShv(SmRigqc/k,M)LocB1

// PreShv(SmRigqc/k,M)π0(A,Γ(X,−))

// Ens .

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 47

Par la proposition 1.3.7, la transformation naturelle ColimI LocB1// LocB1 ColimI induit des équivalences

faibles de préfaisceaux pour toute petite catégorie filtrante I. D’où le résultat recherché.Pour terminer, il reste à vérifier que la famille des foncteurs (1.57) détecte les B1-équivalences locales. Il suffit pour

cela de considérer les morphismes entres objets fibrants pour la structure B1-locale. Le résultat découle alors de lacondition (iii) de la définition 1.2.31. c.q.f.d

Lorsque k est d’égale caractéristique nulle et que sa valuation est discrète, on a le résultat plus précis :

Theoreme 1.3.9 — Supposons que k = k((π)) avec k un corps de caractéristique nulle. Avec les notations1.2.35, la catégorie triangulée avec sommes infinies RigSHeff

M(k) est compactement engendrée par les objets de laforme Qrigp (X, f)⊗Acst avec X un k-schéma lisse, f ∈ Γ(X,O×), p ∈ N− 0 et A ∈ E.

Demonstration Notons T ⊂ RigSHeffM(k) la sous-catégorie triangulée avec sommes infinies engendrée par les objets

de l’énoncé. En vue du corollaire 1.3.8, il suffit de montrer T = RigSHeffM(k). Le résultat découle alors du théorème

1.2.36 et du fait que le foncteur HoNis(PreShv(SmRig/k,M)) // RigSHeffM(k) est essentiellement surjectif (en

fait, est l’identité sur les objets). c.q.f.d

1.3.2 Motifs rigides de quelques variétés algébriquesOn choisit un objet 1 de M (par exemple, un objet unité pour la structure monoïdale si M est une catégorie de

modèles monoïdale). Étant donné un k-schéma lisse X, le motif rigide effectif de X est par définition le motif effectifde la variété rigide Xan (qui est donc un objet de RigSHeff

M(k)).Dans cette section, on suppose que la valuation de k est discrète et que k est de caractéristique nulle. On fixe

un isomorphisme k ' k((π)). Soient X un k-schéma, f ∈ Γ(X,O) et p un entier naturel non nul. On rappelle est oncomplète les notations 1.2.35 :

Notation 1.3.10 — On définit un k-schéma Qschp (X, f) = (X ×k k)[V ]/V p − f.π. On note alors Qforp (X, f) lacomplétion formelle de Qschp (X, f) en sa fibre spéciale et Qrigp (X, f) = Qfor(X, f)η la fibre générique de Qforp (X, f).On définit le k-schéma Qgeop (X, f) = Qschp (X, f)[1/π] et on note Qanp (X, f) = (Qgeop (X, f))an son analytifié. Par laproposition 1.1.30, on dispose d’une immersion ouverte Qrigp (X, f) ⊂ Qanp (X, f).

Lorsque p = 1, on notera simplement Qsch(X), Qfor(X), Qgeo(X), Qrig(X) et Qan(X).

Voici le résultat principal de cette sous-section :

Theoreme 1.3.11 — Soient X un k-schéma lisse, f ∈ Γ(X,O×) et p un entier naturel non nul. Pour tout pré-faisceau E sur SmRig/k à valeurs dans M, le morphisme Qrigp (X, f)⊗ E // Qanp (X, f)⊗ E est une B1-équivalence

faible.

On peut supposer que X est connexe (donc irréductible). On raisonne par récurrence sur la dimension de X. Oncommence par un lemme de dévissage.

Lemme 1.3.12 — Soit Y ⊂ X un sous-schéma fermé strict. On suppose que Y est lisse. Sous l’hypothèse derécurrence, les deux assertions suivantes sont équivalentes :

(i) Qrigp (X, f)⊗ E // Qanp (X, f)⊗ E est une B1-équivalence faible,

(ii) Qrigp (X − Y, f)⊗ E // Qanp (X − Y, f)⊗ E est une B1-équivalence faible.

Demonstration Notons U = X − Y . Nous allons montrer que le morphisme évident

(1.59) [Qrigp (X, f)⊗ E]/[Qrigp (U, f)⊗ E] // [Qanp (X, f)⊗ E]/[Qanp (U, f)⊗ E]

est une B1-équivalence faible. Cela suffit pour conclure puisqu’on dispose d’un morphisme de triangles distingués dansRigSHeff

M(k)

Qrigp (U, f)⊗ E //

Qrigp (X, f)⊗ E //

[Qrigp (X, f)⊗ E]/[Qrigp (U, f)⊗ E] //

Qanp (U, f)⊗ E // Qanp (X, f)⊗ E // [Qanp (X, f)⊗ E]/[Qanp (U, f)⊗ E] // .

On procède en deux étapes.

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48 Motifs des variétés rigides analytiques I

Étape 1 : Soit X = X1 ∩ X2 un recouvrement Zariski de X. Supposons que (1.59) est une B1-équivalence faiblelorsqu’on remplace X (resp. U) par X1, X2 et X12 = X1 ∩X2 (resp. U1 = X1 ∩ U , U2 = X2 ∩ U et U12 = U1 ∩ U2).Les suites de cofibrations de Mayer-Vietoris, fournissent un morphisme de triangles distingués dans RigSHeff

M(k)

Qrigp (X12, f)⊗ EQrigp (U12, f)⊗ E

//

Qrigp (X1, f)⊗ EQrigp (U1, f)⊗ E

⊕Qrigp (X2, f)⊗ EQrigp (U2, f)⊗ E

//

Qrigp (X, f)⊗ EQrigp (U, f)⊗ E

//

Qanp (X12, f)⊗ EQanp (U12, f)⊗ E

//Qanp (X1, f)⊗ EQanp (U1, f)⊗ E

⊕Qanp (X2, f)⊗ EQanp (U2, f)⊗ E

//Qanp (X, f)⊗ EQanp (U, f)⊗ E

//

montrant ainsi que (1.59) est aussi une équivalence faible.Plus généralement, soit (Xi)i∈I un recouvrement Zariski fini de X. Pour ∅ 6= J ⊂ I, on note XJ = ∩j∈JXj et

UJ = U ∩XJ . Supposons que (1.59) est une B1-équivalence faible lorsqu’on remplace X et U par XJ et UJ pour tout∅ 6= J ⊂ I. Alors, (1.59) est elle-même une B1-équivalence faible. En effet, si card(I) > 2, on choisit une partitionI = J

∐i0. Par récurrence sur le cardinal de I, on peut supposer que (1.59) est un B1-équivalence faible pour X

remplacé par ∪j∈JXj et ∪j∈J(Xj ∩ Xi0) et U remplacé par ∪j∈JUj et ∪j∈J(Uj ∩ Ui0). Il suffit alors d’appliquer ladiscussion précédente au recouvrement de X par les deux ouverts Xi0 et ∪j∈JXj .Étape 2 : Par l’étape précédente, le problème de savoir si (1.59) est une B1-équivalence faible est local en X. On peutdonc supposer qu’il existe un carré cartésien

Y //

X

An−dk

// An−dk×k Adk

où les flèches verticales sont des morphismes étales. On a bien entendu n = dim(X) et d = codimX(Y ). On peut écrireY ×An−d

k

Y = Y∐F . Si X ′ = X ×An−d

k

Y − F , on obtient deux carrés Nisnevich de k-schémas

(1.60) U ′ //

X ′

a

U // X

U ′ //

X ′

b

(Adk− o)×k Y // (Ad

k)×k Y.

Notons g = 1⊗f|Y la fonction inversible sur Adk×Y constante relativement à Y . La fonction inversible h =

f ag b

Γ(X ′,O×) vaut 1 sur Y . La fibre du X ′-schéma étale X ′[T ]/(T p − h) en Y ⊂ X ′ est donnée par Y [T ]/T p − 1 =Y∐Y [T ]/(T p−1 + · · ·+ T + 1). On a donc un carré Nisnevich

U ′′ //

X ′′

U ′ // X ′

avec X ′′ = X ′[T ]/(T p − h)− Y [T ]/(T p−1 + · · ·+ T + 1). En composant verticalement avec (1.60), on obtient les deuxcarrés Nisnevich

(1.61) U ′′ //

X ′′

a′

U // X

U ′′ //

X ′′

b′

(Adk− o)×k Y // (Ad

k)×k Y.

De plus, la fonction h′ =f a′

g b′∈ Γ(X ′′,O×) admet une racine p-ème que l’on notera l. On a alors un isomorphisme

Qschp (X ′′, f a′) = (X ′′ ×k k)[V1]/(V p1 − (f a′)π)∼// Qschp (X ′′, f b′) = (X ′′ ×k k)[V2]/(V p2 − (g b′)π)

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 49

qui consiste à identifier V1 avec l.V2. On en déduit des isomorphismes Q?p(X

′′, f a) ' Q?p(X

′′, g b) et Q?p(U

′′, f a) 'Q?p(U

′′, g b) pour ? ∈ rig, geo. On obtient deux carrés Nisnevich de k-variétés rigides (resp. de k-schémas)

Q?p(U

′′, f a) //

Q?p(X

′′, f a)

Q?p(U, f) // Q?

p(X, f)

Q?p(U

′′, f a) //

Q?p(X

′′, f a)

Q?p((Adk − o)×k Y, 1⊗ f|Y ) // Q?

p((Adk)×k Y, 1⊗ f|Y )

avec ? ∈ rig, geo respectivement. En utilisant la proposition 1.2.44 dans le cas respé, on obtient des équivalencesNis-locales

Q?p(X, f)⊗ E

Q?p(U, f)⊗ E

'Q?p(X

′′, f a′)⊗ EQ?p(U

′′, f a′)⊗ E'Q?p((Adk − o)×k Y, 1⊗ f|Y )⊗ EQ?p((Adk)×k Y, 1⊗ f|Y )⊗ E

.

pour ? ∈ rig, an. Il suffit donc de montrer que (1.59) est une B1-équivalence faible pour X = AdY et f constantrelativement à Y . Dans ce cas, la flèche (1.59) s’écrit

Qrigp (Y, f|Y )⊗ [Bdk ⊗ E/(Bdk − o)⊗ E] // Qanp (Y, f|Y )⊗ [Adk ⊗ E/(Adk − o)⊗ E] .

Le résultat découle maintenant de l’hypothèse de récurrence et du corollaire 1.3.5. c.q.f.d

En utilisant le lemme 1.3.12, il est aisé d’obtenir le théorème 1.3.11 dans le cas où f est constante. En effet, par larésolution des singularités de Hironaka [Hiro64], on peut trouver une compactification X ⊂ X avec X projectif et lisseet X−X un diviseur à croisements normaux. La fonction constante f s’étend alors à X. Écrivons X−X = D1∪· · ·∪Dn

avec Di irréductibles (donc lisses). Par le lemme 1.3.12, il suffit de traiter le cas de X−∪ni=2Di. Une récurrence simple,nous ramène à traiter le cas de X. Par la proposition 1.1.30, l’immersion ouverte Qrigp (X, f) ⊂ Qanp (X, f) est unisomorphisme. Il n’y a donc rien à démontrer dans ce cas.

À partir de maintenant, on supposera que f est non-constante. Le morphisme f : X // Gmk = Spec(k[T, T−1])

envoyant T sur f est donc plat (puisque X a été supposé irréductible). Par la résolution des singularités de Hironaka[Hiro64], on peut compactifier f en un morphisme projectif f : X // P1

ktels que :

1. X est un k-schéma projectif et lisse,2. le complémentaire de X dans X est un diviseur à croisements normaux.

On peut écrire X = f−1(Gmk)−E avec E un diviseur à croisement normaux. La fonction inversible f s’étend en unefonction inversible sur f−1(Gmk). Par le lemme 1.3.12, il suffit de traiter le cas de f−1(Gmk). En d’autres termes, onpeut supposer E = ∅, i.e., f : X // Gmk

est un morphisme projectif.

Considérons le k-schéma projectif W = [X×k k]×P1kC avec C // P1

k le normalisé de Gmk [V ]/(V p−T.π).

Notons h : W // P1k le morphisme évident. Remarquons les deux faits suivants :

(i) La k-variété rigide Qrigp (X, f) s’identifie à l’image inverse par (h//(π))η : [W//(π)]η // [P1k//(π)]η de l’ouvert

∂B1k = [Gmk//(π)]η.

(ii) La k-variété rigide Qanp (X, f) s’identifie à l’image inverse par (h[1/π])an : (W [1/π])an // (P1k)an de l’ouvert

(Gmk)an ⊂ (P1k)an.

Étant donné que W et P1k sont projectifs sur k, on a par la proposition 1.1.30, des isomorphismes canoniques

[W//(π)]η = (W [1/π])an et [P1k//(π)]η = (P1

k)an. On en déduit le fait suivant :

(ii’) La k-variété rigide Qanp (X, f) s’identifie à l’image inverse par (h//(π))η : [W//(π)]η // [P1k//(π)]η de l’ouvert

(Gmk)an ⊂ [P1k//(π)]η.

Le résultat recherché découlera alors du résultat plus général dans lequel on ne supposera pas que g : Y // P1k

est

projectif :

Proposition 1.3.13 — Soit g : Y // P1k

un morphisme de k-schémas avec Y lisse et g−1(o∐∞) un

diviseur à croisements normaux. Notons C // P1k le normalisé de P1

k dans Gmk [V ]/(V p − T.π), W le k-

schéma (Y ×k k)×P1kC et h : W // P1

k le morphisme évident. Pour tout préfaisceau E sur SmRig/k à valeursdans M, le morphisme

(1.62) [h//(π)]−1η (∂B1

k)⊗ E // [h//(π)]−1η (Gmk)an ⊗ E

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50 Motifs des variétés rigides analytiques I

est une B1-équivalence faible.

Considérons le recouvrement de l’ouvert (Gmk)an ⊂ (P1k)an par les deux boules épointées B1

k(o, 1)−o et B1k(∞, 1)−∞

qui s’intersectent en ∂B1k. On déduit ainsi un carré homotopiquement cocartésien pour la structure Nis-locale

[h//(π)]−1η (∂B1

k)⊗ E(1)

//

(2)

[h//(π)]−1η (B1

k(∞, 1)−∞)⊗ E

[h//(π)]−1η (B1

k(o, 1)− o)⊗ E // [h//(π)]−1η (Gmk)an ⊗ E.

Il suffira donc de démontrer que les flèches (1) et (2) sont des B1-équivalences faibles. Ceci nous ramène donc à l’énoncésuivant :

Proposition 1.3.14 — Soit f : X // A1k

un morphisme de k-schémas avec X lisse et f−1(o) un di-

viseur à croisements normaux. Considérons le k-affinoïde D = Spm(kT, V /(V p − a.T )) avec a ∈ k − 0. Lemorphisme D // Spm(kT) = B1

k est alors fini. Formons le k-affinoïde R = Qrig(X)×B1kD où le morphisme

Qrig(X) // B1k est Qrig(f) modulo l’identification Q(A1

k) = B1

k. Notons h : R // B1k le morphisme canonique.

Pour tout préfaisceau E sur SmRig/k à valeurs dans M, le morphisme

(1.63) h−1(∂B1k)⊗ E // h−1(B1

k − o)⊗ E

est une B1-équivalence faible.

Avant de se lancer dans la preuve, expliquons comment écrire le morphisme

(1.64) Can ×(P1k)an B1

k(?, 1) // B1k(?, 1)

(avec C comme dans la proposition 1.3.13 et ? ∈ o,∞) sous la forme d’un morphisme D // B1k comme dans

l’énoncé ci-dessus. Au voisinage de o, le morphisme (1.64) correspond au normalisé de la k-algèbre affinoïde kT danskT[T−1][V ]/V p−π.T . Ce normalisé est donc simplement kT[V ]/V p−π.T ' kT, V /(V p−π.T ). Au voisinage de∞, le morphisme (1.64) correspond au normalisé de kT dans kT[T−1][V ]/(V p − π.T−1) ' kT[T−1][V ′]/(V ′p −πp−1.T ) avec V ′ = π.V −1. Ce normalisé est donc isomorphe à kT, V /(V p − πp−1.T ).

Pour démontrer la proposition 1.3.14, notons que f : X // A1k

est à réduction semi-stable en o. On raisonne

alors par récurrence sur le nombre maximal de branches passant par un point de f−1(o). Lorsque ce nombre est nul,la fonction f se factorise par Gmk. On en déduit que h se factorise par ∂B1

k. Il vient que h−1(∂B1

k) = R = h−1(B1k) =

h−1(B1k−o). Il n’y a donc rien à démontrer dans ce cas. On suppose dans la suite que f−1(o) est non vide. On démontre

d’abord un lemme de dévissage.

Lemme 1.3.15 — 1- Soit (Xi)i un recouvrement Zariski de X et notons XJ = ∩j∈JXj pour ∅ 6= J ⊂ I. Il suffitde montrer la conclusion de la proposition 1.3.14 pour les XJ .

2- Supposons donné un carré Nisnevich de A1k-schémas

U ′ //

X ′

U // X.

On suppose que la conclusion de la proposition 1.3.14 est vraie pour U et U ′. Alors, la conclusion de la proposition1.3.14 est vraie pour X si et seulement si elle l’est pour X ′.

Demonstration Considérons d’abord le cas d’un recouvrement par deux ouverts X = X1 ∪ X2 et notons X12 =

X1 ∩ X2. On note RJ = Qrig(XJ)×B1kD et hJ : RJ // B1

k pour ∅ 6= J ⊂ 1, 2. On a alors un morphisme detriangles distingués de Mayer-Vietoris :

h−112 (∂B1

k) //

h−11 (∂B1

k)⊕ h−12 (∂B1

k) //

h−1(∂B1k) //

h−112 (B1

k − o) // h−11 (B1

k − o)⊕ h−12 (B1

k − o) // h−1(B1k − o) //

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 51

qui fournit le résultat recherché. Pour le cas général, on écrit I = J∐i0. On applique la récurrence à ∪j∈JXj et

∪j∈J(Xj ∩Xi0) et le cas précédent au recouvrement de X par Xi0 et ∪j∈JXj .On passe à la deuxième partie du lemme. NotonsR′ = Qrig(X ′)×B1

kD,RU = Qrig(U)×B1

kD etR′U = Qrig(U ′)×B1

kD.

On note aussi h′, hU et h′U les morphismes évidents vers B1k. Il suffira de montrer que les deux carrés

(h′U )−1(∂B1k)⊗ E //

h′−1(∂B1k)⊗ E

(hU )−1(∂B1k)⊗ E // h−1(∂B1

k)⊗ E

(h′U )−1(B1k − o)⊗ E //

h′−1(B1k − o)⊗ E

(hU )−1(B1k − o)⊗ E // h−1(B1

k − o)⊗ E

sont homotopiquement cocartésiens (pour la structure Nis-locale). Il suffit pour cela de montrer que les images par leplongement de Yoneda SmRig/k // ShvNis(SmRig/k) des carrés

(h′U )−1(∂B1k) //

h′−1(∂B1k)

(hU )−1(∂B1k) // h−1(∂B1

k)

(h′U )−1(B1k − o) //

h′−1(B1k − o)

(hU )−1(B1k − o) // h−1(B1

k − o)

sont cocartésiens. Le premier carré est un carré de Nisnevich. On peut donc appliquer le corollaire 1.2.27 pour conclure.Le second carré considéré dans ShvNis(SmRig/k) est l’image du carré Nisnevich

R′U//

R′

RU // R

considéré dans ShvNis(Et/R) par la composée de deux foncteurs qui sont des adjoints à gauche (et en particulier, quicommutent aux colimites)

ShvNis(Et/R)(1)// ShvNis(Et/h

−1(B1k − o))

(2)// ShvNis(SmRig/k) .

Le foncteur (1) est l’image inverse suivant le morphisme de sites (Et/h−1(B1k − o),Nis) // (Et/R,Nis) dont le

foncteur sous-jacent est h−1(B1k − o)×R−. Le foncteur (2) est l’image inverse suivant le prémorphisme de sites

(Et/h−1(B1k − o),Nis) // (SmRig/k,Nis) dont le foncteur sous-jacent est simplement la composée à droite par

le morphisme structural de la k-variété rigide h−1(B1k − o). c.q.f.d

Si la proposition 1.3.14 est démontrée pour X×kGmk on peut la déduire facilement pour X en utilisant le fait queles B1-équivalences faibles sont stables par retracts. Par le lemme précédent et la proposition 1.1.60 (et plus précisémentpar son analogue algébrique (voir [Ayo07a, Proposition 3.3.39])) on peut supposer l’existence d’un morphisme étalede A1

k= Spec(k[T ])-schémas

e : X // StU−1T

A1k[U,U−1],a

[S1, . . . , Sm] = Spec

(k[T,U, U−1, T1, . . . , Tn, S1, . . . , Sm]

(U.T a11 . . . T ann − T )

).

On procède alors comme pour la preuve du théorème 1.2.36. Notons C l’intersection des branches de X. On obtientun morphisme étale e0 : C // o[U,U−1, S1, . . . , Sm] . On forme alors le carré cartésien de morphismes étales

Y1//

X

StU−1T

a ×k[U,U−1] C// StU

−1Ta [S1, . . . , Sm]

et on définit Y = Y1 −P où P est le fermé complémentaire de la diagonale de C ×o[U,U−1,S1,...,Sm] C. On obtient ainsideux carrés Nisnevich

Y − C //

Y

(StU−1T

a − o[U,U−1])×k[U,U−1] C// StU

−1Ta ×k[U,U−1] C

Y − C //

Y

X − C // X.

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52 Motifs des variétés rigides analytiques I

En utilisant la récurrence sur le nombre de branches passant par un point de la fibre en o et la deuxième partiedu lemme 1.3.15, on voit qu’il suffit de traiter le cas du A1

k-schéma StU

−1Ta ×k[U,U−1] C. On notera dans la suite

ha : Ra // B1k le morphisme construit dans la proposition 1.3.14 dans le cas où X = StU

−1Ta ×k[U,U−1] C. On a le

lemme suivant :

Lemme 1.3.16 — Soit b = (b1, . . . , bn) un n-uplet. Supposons que la conclusion de la proposition 1.3.14 est vraiepour X = StU

−1Tb ×k[U,U−1] C. Alors, elle est également vraie pour X = StU

−1Tbji

×k[U,U−1] C avec bji le n-uplet obtenuà partir de b en remplaçant bj par bi + bj et en gardant le reste inchangé (avec 1 ≤ i 6= j ≤ n).

Demonstration On peut supposer que i < j. On éclate l’idéal (Ti, Tj) dans StU−1T

b ×k[U,U−1] C pour obtenir un

A1k-schéma E. Notons hE : RE // B1

k le morphisme obtenu en prenant X = E dans l’énoncé de la proposition1.3.14. On vérifie immédiatement que ha coïncide avec hE au dessus de B1

k − o. On en déduit des isomorphismescanoniques h−1

b (∂B1k) ' h−1

E (∂B1k) et h−1

b (B1k − o) ' h

−1E (B1

k − o).L’éclaté E admet un recouvrement de Zariski par StU

−1Tbji

×k[U,U−1]C et StU−1T

bij×k[U,U−1]C (voir [Ayo07a, Lemme

3.3.30]). Notons F l’intersection de ces deux ouverts. C’est un A1k-schéma semi-stable à n−1 branches. Par l’hypothèse

de récurrence, on connaît la proposition 1.3.14 pour F . Notons hF : RF // B1k le morphisme obtenu en prenant

X = F dans l’énoncé de cette proposition. On dispose d’un morphisme de triangles distingués de Mayer-Vietoris

h−1F (∂B1

k) //

h−1

bji(∂B1

k)⊕ h−1bij

(∂B1k) //

h−1b (∂B1

k) //

h−1F (B1

k − o) // h−1

bji(B1k − o)⊕ h

−1bij

(B1k − o) // h−1

b (B1k − o) //

où les deux flèches verticales extrêmes sont des isomorphismes dans RigSHeffM(k). On en déduit que la flèche médiane

est inversible. Le lemme est prouvé. c.q.f.d

Par le lemme 1.3.16, il suffit de considérer le cas où a = (q, . . . , q) = qnest constant. Le lemme ci-dessous nous

ramènera au cas où la longueur de a est égale à 1.

Lemme 1.3.17 — La conclusion de la proposition 1.3.14 est vraie pour le A1k-schéma StU

−1Tqn×k[U,U−1]C si n ≥ 2.

Demonstration Par la récurrence sur le nombre de branches passant par un point, on connaît la proposition 1.3.14pour X = StU

−1Tqn−1

×k[U,U−1] C[Tn]. Soit E l’éclaté de X en l’idéal (Tn−1, Tn). On connaît alors la proposition 1.3.14

pour E puisque Q(E)×B1kD // Q(X)×B1

kD est un isomorphisme au dessus de B1

k−o. Par [Ayo07a, Lemme 3.3.19],

E admet un recouvrement par deux ouverts dont l’un est isomorphe à X et l’autre isomorphe à StU−1T

qn

×k[U,U−1] C.

L’intersection de ces deux ouverts est isomorphe à StU−1T

qn−1

×k[U,U−1] C[Tn, T−1n ]. La deuxième partie du lemme 1.3.15

permet alors de conclure. c.q.f.d

Il nous reste donc à considérer le cas X = Spec(k[T,U, U−1, T1]/(UT q1 − T )) ×k[U,U−1] C. Un calcul facile montreque le k-affinoïde R est donné par

Spm

(kT,U, U−1, T1, V (UT q1 − T, V p − aT )

kU,U−1Qrig(C) = Spm

(kU,U−1, T1, V

(V p − aUT q1 )

kU,U−1Qrig(C).

Notons d = p.g.c.d.(p, q) et soit sp + tq = d une relation de Bezout. On vérifie facilement que la normalisée de lak-algèbre k[U,U−1, T1, V ]/(V p − aUT q1 ) est égale à k[U,U−1,W, S]/(W q − aU) où le morphisme

(1.65) k[U,U−1, T1, V ]/(V p − aUT q1 ) // k[U,U−1,W, S]/(W q − aU)

est donné par V Sq/dW s et T1 Sp/dW−t. Lorsqu’on inverse T1, le morphisme (1.65) admet un inverse donné parW V p/dT

−q/d1 et S T s1V

t. Montrons le lemme suivant :

Lemme 1.3.18 — La normalisée de la k-algèbre affinoïde kU,U−1, T1, V /(V p − aUT q1 ) est égale à

kU,U−1,W(W d − aU)

a−t/pS

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 53

avec V = Sq/dW s et T1 = Sp/dW−t.

Demonstration Par la discussion précédente, la normalisée de A =kU,U−1, T1, V

(V p − aUT q1 )est la A-algèbre A′ donnée

par(kU,U−1, T1, V

(V p − aUT q1 )

)⊗

k[U,U−1,T1,V ]

(V p−aUTq1 )

(k[U,U−1,W, S]

(W q − aU)

)=kU,U−1, T1, V V p − aUT q1

[W,S]/(W d−aU, Sp/d−T1Wt, Sq/d−VW−s).

Comme A′ est finie sur A, c’est encore une k-algèbre affinoïde. Ainsi, pour r1, r2 ∈ N suffisamment grand, l’algèbre A′admet la présentation suivante :

A′ =kU,U−1, T1, V, π

r1W,πr2S(V p − aUT q1 ,W d − aU, Sp/d − T1W t, Sq/d − VW−s)

.

De la relation W d− aU = 0, on déduit que l’on peut choisir r1 = 0. D’autre part, la relation V p− aUT q1 = 0 peut êtredéduites des trois autres. Il vient que

A′ =kU,U−1,W, T1, V, π

r2S(W d − aU, Sp/d − T1W t, Sq/d − VW−s)

' kU,U−1,W(W d − aU)

πr2S〈W t|Sp/d〉〈W−s|Sq/d〉

=kU,U−1,W

(W d − aU)πr2S〈W dt|Sp〉〈W−sd|Sq〉 =

kU,U−1,W(W d − aU)

πr2S〈at|Sp〉〈a−s|Sq〉

=kU,U−1,W

(W d − aU)πr2S〈atq|Spq〉〈a−sp|Spq〉 =

kU,U−1,W(W d − aU)

πr2S〈atq|Spq〉〈atq−1|Spq〉

=kU,U−1,W

(W d − aU)πr2S〈atq|Spq〉 =

kU,U−1,W(W d − aU)

a−t/pS.

Les deux dernières égalités viennent du fait que a ∈ k − 0 et que r2 est suffisamment grand. c.q.f.d

Appelons B le k-affinoïde Spm(kU,U−1,W/(W d − aU))×kU,U−1C et notons w ∈ Γ(B,O) la classe de W . Ona alors un morphisme fini

Ba−t/pS // Qrig(X)×B1kD

qui est un isomorphisme au dessus de B1k−o. Notons h′ : Ba−t/pS // B1

k le morphisme canonique. Il s’agit doncde prouver que

(1.66) h′−1(∂B1k)⊗ E // h′−1(B1 − o)⊗ E

est une B1-équivalence faible. Remarquons pour cela que l’image de T dans Γ(Ba−t/pS,O) est égale à U.Sp/dw−t.La norme de T en un point x de Ba−t/pS coïncide avec la norme de |S(x)||a|−t/p. Ainsi, l’image inverse de ∂B1 parh′ est le k-affinoïde ∂B1

B(o, at/p). Le morphisme (1.66) s’écrit donc

∂B1B(o, at/p)⊗ E // (B1

B(o, at/p)− o)⊗ E

Le résultat découle maintenant de la proposition 1.3.4. La preuve du théorème 1.3.11 est achevée.

1.3.3 Construction et propriétés élémentaires : cas stable

À partir de maintenant, on suppose que la catégorie de coefficients (M,E) est monoïdale symétrique et unitaire.On notera 1 son objet unité qu’on supposera dans E et donc cofibrant et homotopiquement compact. On fixe unremplacement projectivement cofibrant T de A1

Z ⊗ 1/GmZ ⊗ 1 = Cof(GmZ ⊗ 1→ A1Z ⊗ 1) dans PreShv(Sm/Z,M).

Pour des raisons techniques, on supposera même que T provient d’un remplacement cofibrant T ′ de A1Z ⊗ 1/GmZ ⊗ 1

dans PreShv(SmAf/Z,M) avec SmAf/Z ⊂ Sm/Z la sous-catégorie pleine des schémas affines et lisses sur Spec(Z).En d’autres termes, on fixe une équivalence faible T ′ // A1

Z ⊗ 1/GmZ ⊗ 1 dans PreShv(SmAf/Z,M) avec T ′

projectivement cofibrant et on pose T = a∗T ′ avec a le prémorphisme de sites munis des topologies grossières

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54 Motifs des variétés rigides analytiques I

Sm/Z // SmAf/Z . Pour vérifier que a∗T ′ // a∗(A1Z ⊗ 1/GmZ ⊗ 1) = A1

Z ⊗ 1/GmZ ⊗ 1 est une équivalencefaible, on procède de la manière suivante. Soit un carré commutatif dans PreShv(SmAf/Z,M)

Ac

//

B

GmZ ⊗ 1 // A1Z ⊗ 1

avec A projectivement cofibrant, c une cofibration projective et les flèches vertivales des équivalences faibles. Onpeut alors supposer que T ′ est la cofibre de c. Il vient que a∗T ′ est la cofibre de a∗(c). Le résultat s’obtient alorsen appliquant a∗ un carré ci-dessus et utilisant le fait que a∗ préserve les équivalences faibles entre préfaisceauxprojectivement cofibrants.

On note T an l’image de T dans PreShv(SmRig/k,M) par le foncteur image inverse associé à la composée desprémorphismes de sites SmRig/k // Sm/k // Sm/Z . L’argument ci-dessus, convenablement adapté, montreque T an est un remplacement projectivement cofibrant de (A1

k)an ⊗ 1/(Gmk)an ⊗ 1. La catégorie des (T an)-spectressymétriques SpectΣ

T an(PreShv(SmRig/k,M)) sera munie de sa structure projective stable déduite de la structureprojective B1-locale sur PreShv(SmRig/k,M). Pour la définition des catégories de spectres et la construction desstructures de modèles stables, le lecteur pourra consulter [Ayo07a, Section 4.3].

Definition 1.3.19 — On note RigSHM(k) la catégorie homotopique de SpectΣT an(PreShv(SmRig/k,M)).

C’est la catégorie homotopique stable des k-variétés rigides à coefficients dans M. Lorsque M est la catégorie desspectres symétriques, on note simplement RigSH(k). Lorsque M est la catégorie des complexes de groupes abéliens(resp. des Q-espaces vectoriels), on note RigDA(k) (resp. RigDAQ(k)).

La catégorie RigSHM(k) est une catégorie triangulée monoïdale symétrique (voir [Ayo07a, Théorème 4.3.76]).Par la proposition 1.3.6 et [Ayo07a, Lemme 4.3.34], on dispose d’une adjonction de Quillen

(1.67) (Rig∗,Rig∗) : SpectΣT (PreShv(Sm/k,M)) // SpectΣ

T an(PreShv(SmRig/k,M))

induisant un foncteur triangulé et monoïdal

(1.68) Rig∗ : SHM(k) // RigSHM(k) .

Considérons le foncteur cplη : Sm/k // SmRigqc/k qui à un k-schéma X associe la k-variété rigide quasi-compacte (X//(π))η. Notons T qc l’image inverse de T suivant la composée des prémorphismes de sites munis destopologies grossières

SmRigqc/kcplη// Sm/k // Sm/Z .

L’argument utilisé au début de la sous-section montre que T qc est un remplacement projectivement cofibrant de B1k ⊗

1cst/∂B1k⊗1cst dans PreShv(SmRigqc/k,M). On note aussi T qc l’image inverse de cet objet suivant le prémorphisme

de sites SmRig/k // SmRigqc/k . C’est un remplacement projectivement cofibrant de B1k ⊗ 1cst/∂B1

k ⊗ 1cst dans

PreShv(SmRig/k,M). On dispose d’une transformation naturelle cplfη// Rig (−)η induite par le morphisme

de la proposition 1.1.30. On a alors un carré commutatif de B1-équivalences faibles dans PreShv(SmRig/k,M) :

T qc∼B1

//

T an

B1k ⊗ 1cst

∂B1k ⊗ 1cst

//(A1

k)an ⊗ 1cst(Gmk)an ⊗ 1cst

.

Par [Ayo07a, Proposition 4.3.42], on déduit une suite d’équivalences de Quillen à gauche relativement aux structuresstables déduites des structures B1-locales

SpectΣT qc(PreShv(SmRigqc/k,M))

SpectΣT qc(PreShv(SmRig/k,M))

T an⊗Tqc−

SpectΣT an(PreShv(SmRig/k,M)).

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 55

La catégorie RigSHM(k) est donc équivalente à la catégorie homotopique de SpectΣT qc(PreShv(SmRigqc/k,M)).

Pour p ∈ N, le diagramme de foncteurs de Quillen à gauche

(1.69) PreShv(SmRigqc/k,M)Susp

Tqc//

SpectΣT qc(PreShv(SmRigqc/k,M))

SpectΣT qc(PreShv(SmRig/k,M))

T an⊗Tqc−

PreShv(SmRig/k,M)

SuspTqc

22

SuspTan

// SpectΣT an(PreShv(SmRig/k,M))

est commutatif à 2-isomorphismes près. L’intérêt de la catégorie de modèles SpectΣT qc(PreShv(SmRigqc/k,M)) vient

de la caractérisation suivante de ses objets fibrants :

Proposition 1.3.20 — Un T qc-spectre symétrique (En)n est fibrant pour la structure projective stable surSpectΣ

T qc(PreShv(SmRigqc/k,M)) déduite de la structure projective B1-locale sur PreShv(SmRigqc/k,M) si et seule-ment si les conditions suivantes sont satisfaites :

(i) pour toute k-variété rigide quasi-compacte et lisse X et tout n ∈ N, l’objet En(X) ∈ Ob(M) est fibrant,

(ii) pour tout n ∈ N, le préfaisceau En vérifie la propriété de Brown-Gersten (voir la définition 1.2.28),

(iii) pour toute k-variété rigide quasi-compacte et lisse X et tout n ∈ N, le morphisme En(B1X) // En(X) est

une équivalence faible de M,

(iv) pour tout n ∈ N, l’adjoint du morphisme d’assemblage En// Homg(T

qc,En+1) est une équivalence faible de

préfaisceaux.

En particulier, la classe des objets stablement B1-fibrants dans SpectΣT qc(PreShv(SmRigqc/k,M)) est stable par coli-

mites filtrantes.

Demonstration Seule la dernière assertion demande une preuve. En effet, il n’est pas tout à fait clair qu’unecolimite de Ω-spectres est encore un Ω-spectre puisque le foncteur Homg(T

qc,−) ne commute pas forcément auxcolimites filtrantes. Toutefois, il suffira qu’il y commute à équivalence faibles près de préfaisceaux. On est ainsi ramenéà vérifier que les foncteurs

homHo(PreShv(SmRigqc/k,M))(X ⊗ T qc,−) : PreShv(SmRigqc/k,M) // Ab

commutent aux colimites filtrantes pour toute k-variété rigide quasi-compacte et lisse X. Ceci découle immédiatementdu fait que T qc est faiblement équivalent à B1

k ⊗ 1cst/∂B1k ⊗ 1cst et que les colimites filtrantes sont exactes dans la

catégorie des groupes. c.q.f.d

Corollaire 1.3.21 — La catégorie triangulée avec sommes infinies RigSHM(k) est compactement engendréepar les objets de la forme SuspT an(X ⊗Acst) avec X une k-variété rigide quasi-compacte et lisse et A ∈ E.

Demonstration Par le diagramme (1.69), il est équivalent de montrer que la catégorie triangulée avec sommes infiniesRigSH′M(k) = HoB1−st(SpectΣ

T qc(PreShv(SmRigqc/k,M))) est compactement engendrée par les objets SuspT qc(X ⊗Acst). On commence d’abord par montrer que ces objets sont compacts. Il est plus général de montrer que le foncteur

(1.70) homRigSH′M(k)(SuspT qc(X ⊗Acst),−) : SpectΣT qc(PreShv(SmRigqc/k,M)) // Ab

commute aux colimites filtrantes. Ce foncteur est la composée

(1.71) SpectΣT qc(PreShv(SmRigqc/k,M))

LocB1−st// SpectΣ

T qc(PreShv(SmRigqc/k,M))

Evp

PreShv(SmRigqc/k,M)π0(A,Γ(X,−))

// Ens

où LocB1−st est un foncteur de remplacement stablement B1-fibrant. Par la proposition 1.3.7, la transformation na-turelle ColimI LocB1−st

// LocB1−st ColimI induit des équivalences faibles de préfaisceaux niveau par niveaupour toute petite catégorie filtrante I. D’où le résultat recherché.

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56 Motifs des variétés rigides analytiques I

Pour terminer, il reste à vérifier que la familles des foncteurs (1.70) détecte les B1-équivalences stables. Il suffitpour cela de considérer les morphismes entres spectres fibrants pour la structure stable B1-locale. Le résultat découlealors de la condition (iii) de la définition 1.2.31. c.q.f.d

Lorsque k est d’égale caractéristique nulle et que sa valuation est discrète, on a un résultat plus précis :

Theoreme 1.3.22 — Supposons que k = k((π)) avec k un corps de caractéristique nulle. Avec les notations1.2.35, la catégorie triangulée avec sommes infinies RigSHM(k) est compactement engendrée par les objets de laforme SuspT an(Qrigr (X, f)⊗Acst) avec X un k-schéma lisse, f ∈ Γ(X,O×), p ∈ N, r ∈ N− 0 et A ∈ E.

Demonstration Notons T ⊂ RigSHM(k) la sous-catégorie triangulée avec sommes infinies engendrée par les objetsde l’énoncé. En vue du corollaire 1.3.21, il suffit de montrer SuspT an(Y ⊗ Acst) ∈ Ob(T) pour toute k-variété rigide

quasi-compacte et lisse et p ∈ N. On utilise alors le foncteur triangulé SuspT an : RigSHeffM(k) // RigSHM(k) et le

théorème 1.2.36 pour conclure. c.q.f.d

Remarque 1.3.23 — L’objet Sus1T an(1cst)[2] sera noté 1(−1). Le produit tensoriel − ⊗ 1(−1) sera simplement

noté −(−1). On définit par récurrence les foncteurs −(−n) pour n ∈ N. Par [Ayo07a, Corollaire 4.3.72], on a unisomorphisme canonique SuspT an(−) ⊗ SusqT an(−) ' Susp+qT an (− ⊗ −). Les objets Susp(X ⊗ Acst) du corollaire 1.3.21s’écrivent donc (X ⊗ Acst)(−p)[−2p]. Il découle aussi de [Ayo07a, Théorème 4.3.38] que le foncteur −(−1) est uneautoéquivalence dont l’inverse est donné par (Σ0

T an(T an) ⊗ −)[−1]. Ceci permet donc de définir les −(n) pour toutn ∈ Z. Ces foncteurs sont appelés les twist de Tate.

1.3.4 Énoncé du résultat principal et réductionsDans cette sous-section, on reprend l’hypothèse k = k((π)) avec k un corps de caractéristique nulle. Pour énoncer

notre théorème, nous aurons besoin d’une notation et d’une définition :

Notation 1.3.24 — Soient X un k-schéma de type fini, r ∈ N − 0 et f ∈ Γ(X,O). On définit un Gmk-schémaQgmr (X, f) par le morphisme

(1.72) X[T, T−1, V ]/(V r − f.T ) // Spec(k[T, T−1]) = Gmk

Lorsque r = 1, ce Gmk-schéma ne dépend pas de f et sera simplement noté Qgm(X).

Definition 1.3.25 — On appelle QUSHM(k) la sous-catégorie triangulée de SHM(Gmk) stable par sommesinfinies et engendrée par les objets de la forme SuspT (Qgmr (X, f) ⊗ A) avec p ∈ N, r ∈ N − 0, X un k-schémalisse, f ∈ Γ(X,O×) et A ∈ E. Les objets de QUSHM(k) sont appelés les motifs quasi-unipotents de SHM(Gmk).On note G(k) ⊂ Ob(QUSHM(k)) l’ensemble des objets SuspT (Qgmr (X, f)⊗ A) comme ci-dessus. C’est un système degénérateurs compacts de QUSHM(k).

On note π : Spec(k) // Gmkle morphisme de schémas correspondant à la section π de k = k((π)). Voici le

résultat principal de ce chapitre :

SCHOLIE 1.3.26 — On suppose que k est le corps des séries de Laurent en π à coefficients dans le corps decaractéristique nulle k.

1- Le foncteur composée

(1.73) F : QUSHM(k) ⊂ SHM(Gmk)π∗// SHM(k)

Rig∗// RigSHM(k)

est une équivalence de catégories. Soit R : RigSHM(k)∼// QUSHM(k) un quasi-inverse à F.

2- Considérons le digramme de k-schémas : Spec(k)j// Spec(k) Spec(k)

ioo . Notons q : Gmk

// Spec(k)

la projection structurale et 1 sa section unité. Alors, la composée

(1.74) SHM(k)Rig∗// RigSHM(k)

R∼// QUSHM(k) ⊂ SHM(Gmk)

q∗// SHM(k)

s’identifie au foncteur χ = i∗j∗. De même, la composée

(1.75) SHM(k)Rig∗// RigSHM(k)

R∼// QUSHM(k) ⊂ SHM(Gmk)

1∗// SHM(k)

s’identifie au foncteur motifs proches Ψπ associé à l’uniformisante π (voir [Ayo07a, Définition 3.5.6]).

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 57

Remarque 1.3.27 — Dans [Ayo07a], nous avons considéré les foncteurs motifs proches au dessus des schémas detype fini sur des traits géométriques, i.e., ceux obtenus comme anneau local (pour la topologie Zariski ou Nisnevich) enun point de codimension 1 dans une variété algébrique normale. Dans l’appendice 1.A, nous montrons que le formalismedes cycles évanescents motiviques fonctionne tout aussi bien au dessus d’un anneau de valuation discrète complet etd’égale caractéristique nulle.

Notons le corollaire amusant suivant :

Corollaire 1.3.28 — Soit X un k-schéma lisse, f ∈ Γ(X,O×) et r ∈ N − 0. Le motif de Qgmr (X, f) (i.e.,le spectre Sus0

T (Qgmr (X, f) ⊗ 1cst) considéré comme un objet de la catégorie homotopique stable des Gmk-schémas)admet un dual fort dans SHM(Gmk).

Demonstration En effet, l’image par F de cet objet coïncide avec l’image de M(Qgeor (X, f)) = Sus0T (Qgeor (X, f)⊗

1cst) par le foncteur monoïdal Rig∗ (avec les notations 1.3.10). Par le lemme 1.3.29 ci-dessous, les motifs des shémaslisses sur un corps de caractéristique nulle admettent des duaux forts. Le résultat découle maintenant du fait que Fest une équivalence de catégories. c.q.f.d

Lemme 1.3.29 — Soit K un corps de caractéristique nulle. Soit M un objet de la sous-catégorie triangulée deSHM(K) engendrée par les motifs des K-schémas lisses ainsi que leurs twist de Tate. Alors M admet un dual fort.

Demonstration Ce résultat est du à J. Riou (voir [Riou05]) et été annoncé par V. Voevodsky. On donne ici unepreuve rapide reposant sur des résultats de [Ayo07a].

Par [Ayo07a, Proposition 2.2.27], on sait que la sous-catégorie triangulée engendrée par les motifs de K-schémaslisses et leurs twist coïncide avec la sous-catégorie triangulée engendrée par les f∗1X(n) pour X un K-schéma projectifet lisse, f son morphisme structural et n ∈ Z. Or, les objets admettant des duaux forts forment une sous-catégorietriangulée et monoïdale de SHM(k). Il suffit donc de montrer que si X est un K-schéma projectif et lisse de morphismestructural f , l’objet f∗1X admet un dual fort. Il suffira de construire un isomorphisme de foncteurs

Hom(f∗1X ,−) ' Hom(f∗1X ,1K)⊗−.

Comme f est projectif, on dispose d’un isomorphisme f! ' f∗ par [Ayo07a, Théorème 1.7.17]. On a la chaîned’isomorphismes naturels en A ∈ Ob(SHM(K)) :

Hom(f!1X , A) ' f∗Hom(1X , f!A) ' f!f

!A ' f!f!1X ⊗A ' f∗f !1X ⊗A ' Hom(f!1X ,1)⊗A.

Ci-dessus, nous avons utilisé l’isomorphisme de projection f#f∗A ' f#1X ⊗A modulo l’identification

f!f! = f#Th−1(Ωf )Th(Ωf )f∗ ' f#f

valable pour f lisse. Le lemme est démontré. c.q.f.d

Remarque 1.3.30 — La preuve du lemme 1.3.29 montre que pour tout schéma noethérien S et f : X // S unmorphisme projectif et lisse, l’objet f∗1X admet un dual fort dans SHM(S) qui n’est autre que le motif M(X) = f#1X

deX. Notons (suivant [Riou05]) SHparfM (S) la sous-catégorie triangulée engendrée par les motifs des S-schémas projec-

tifs et lisses, ainsi que leurs twist de Tate. Les objets de SHparfM (S) sont donc fortement dualisables. Réciproquement,

on peut se demander si tout objet fortement dualisable de SHM(S) est dans SHparfM (S). Notons que cela est vrai

lorsque S est le spectre d’un corps de caractéristique nulle (ou plus généralement, sous réserve de pouvoir résoudreles singularités) et Ho(M) compactement engendré par son objet unité 1. Le corollaire 1.3.28 nous semble "amusant"puisqu’il fournit des motifs dans SHM(Gmk) fortement dualisables et qui n’ont aucune raison apparente d’appartenirà SHparf

M (Gmk). C’est à notre connaissance, les premiers exemples de tels motifs.

Calculons l’image par F des générateurs de la catégorie triangulée QUSHM(k). Soient X un k-schéma lisse,f ∈ Γ(X,O×), r ∈ N− 0, p ∈ N et A ∈ E. L’objet F(SuspT (Qgmr (X, f)⊗Acst)) est donné par

(1.76) Rig∗π∗(SuspT (Qgmr (X, f)⊗Acst)) ' Rig∗(SuspT (Qgeor (X, f)⊗Acst) ' SuspT an(Qanr (X, f)⊗Acst).

D’autre part, l’immersion ouverte canonique Qrigr (X, f) // Qanr (X, f) induit un morphisme de T an-spectres sy-métriques

(1.77) SuspT an(Qrigr (X, f)⊗Acst) // SuspT an(Qanr (X, f)⊗Acst) .

Puisque SuspT an est un foncteur de Quillen à gauche, il préserve les B1-équivalences faibles entre préfaisceaux cofibrants.Il vient par le théorème 1.3.11, que (1.77) est une B1-équivalence faible niveau par niveau. On déduit alors parcomposition avec (1.76), un isomorphisme dans RigSHM(k)

(1.78) SuspT an(Qrigr (X, f)⊗Acst)∼// Rig∗π∗(SuspT (Qgmr (X, f)⊗Acst)) .

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58 Motifs des variétés rigides analytiques I

En utilisant le théorème 1.3.22, on obtient le lemme suivant :

Lemme 1.3.31 — Le foncteur F envoie le système de générateurs compacts G(k) de QUSHM(k) (voir la définition1.3.25) sur un système de générateurs compacts de RigSHM(k).

On est donc tenté d’appliquer le lemme suivant au foncteur F :

Lemme 1.3.32 — Soient T et T′ deux catégories triangulées avec sommes infinies, compactement engendrées etG un système de générateurs compacts de T. Pour qu’un foncteur triangulé F : T // T′ soit une équivalence decatégories, il faut et il suffit que les conditions suivantes soient satisfaites :(i) le foncteur F commute aux sommes,(ii) l’ensemble F (G) est un système de générateurs compacts de T′,

(iii) pour A,B ∈ G et n ∈ Z, l’homomorphisme homT(A,B[n]) // homT′(F (A), F (B)[n]) est inversible.

Demonstration Les conditions (i) à (iii) sont clairement nécessaires. Montrons qu’elles sont suffisantes. Pour A ∈ G,on note TA la sous-catégorie pleine de T formée des objets B tels que le morphisme

(1.79) homT(A,B[n]) // homT′(F (A), F (B)[n])

est bijectif. Il est clair que TA est une sous-catégorie triangulée. Elle contient G par (iii). Comme F commute auxsommes (par (i)) et que A et F (A) sont compacts (par (ii)) la sous-catégorie TA est stable par sommes. On en déduitque TA = T. En d’autres termes, pour tout A ∈ G et B ∈ Ob(T), l’homomorphisme (1.79) est inversible.

Étant donné B ∈ Ob(T), on note TB la sous-catégorie pleine de T formée des A rendant (1.79) inversible pour toutn ∈ Z. C’est une sous-catégorie triangulée de T, contenant G et stable par sommes infinies (on utilise encore une foisque F commute aux sommes). On en déduit que TB = T.

Nous avons donc montré que le foncteur F est pleinement fidèle. Ainsi, l’image essentielle F (T)ess de F (qui estéquivalente à T) s’identifie à une sous-catégorie triangulée de T′ stable par sommes infinies (puisque F commute auxsommes). Comme F (G) engendre T′, on en déduit que F (T)ess = T′. Le lemme est prouvé. c.q.f.d

Il est clair que le foncteur F commute aux sommes. Pour montrer qu’il est une équivalence de catégories, il fautdonc vérifier que les homomorphismes

(1.80) homSHM(Gmk)(SuspT (Qgmr (X, f)⊗Acst),SusqT (Qgms (Y, g)⊗Bcst))

homRigSHM(k)(F(SuspT (Qgmr (X, f)⊗Acst)),F(SusqT (Qgms (Y, g)⊗Bcst)))

sont bijectifs pour (p, q) ∈ N2, (s, t) ∈ (N − 0)2, (A,B) ∈ E2, X et Y des k-schémas affines lisses, f ∈ Γ(X,O×) etg ∈ Γ(Y,O×). On peut écrire SuspT (−) = (SuspT1cst)⊗Sus0

T (−) (voir [Ayo07a, Corollaire 4.3.72]). L’objet SuspT1cst =(Sus1

T1cst)⊗p est inversible pour la structure monoïdale sur SHM(−) (voir [Ayo07a, Théorème 4.3.38]). Étant donné

que F est un foncteur monoïdal, on voit que l’on peut supposer p = 0 ou q = 0 quitte à remplacer q par q− p si p ≤ qet p par p − q sinon. Supposons pour fixer les idées que q = 0. L’inverse pour la structure monoïdale de SuspT (1) estdonné par Sus0

T (T )⊗p. Rappelons que T est A1-équivalent à A1⊗1cst/Gm⊗1cst. Ainsi, quitte à remplacer Y par desk-schémas du type Y ×k Aik ×Gmj

kpour i+ j = p, on se ramène à considérer uniquement les homomorphismes

(1.81) homSHM(Gmk)(Sus0T (Qgmr (X, f)⊗Acst),Sus0

T (Qgms (Y, g)⊗Bcst))

homRigSHM(k)(F(Sus0T (Qgmr (X, f)⊗Acst)),F(Sus0

T (Qgms (Y, g)⊗Bcst))).

Dans la suite, et lorsque cela n’induit pas de confusions, on omettra de noter le foncteur Sus0T (−). On a le lemme

suivant :

Lemme 1.3.33 — Pour montrer la première partie de la scholie 1.3.26, i.e., que F est une équivalence decatégories, il suffit de montrer que (1.81) est un isomorphisme dans le cas où s divise r.

Demonstration Soit d un entier non nul. Considérons le Gmk-schéma Qgmrd (X[U,U−1], Urf). Ce schéma est donnépar :

X[T, T−1, U, U−1, V ]

(V rd − UrTf)=X[T, T−1, U, U−1, V,W ]

(W r − Tf, V d −WU)=X[T, T−1, V, V −1,W ]

(W r − Tf)' Qgmr (X, f)[V, V −1].

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 59

Dans les catégories homotopiques, Qgmr (X, f) ⊗ Acst est donc un facteur direct de Qgmrd (X[U,U−1], Urf) ⊗ Acst. Ilsuffit alors de prendre d = s pour conclure. c.q.f.d

L’intérêt du lemme 1.3.33 vient de la proposition suivante :

Proposition 1.3.34 — Considérons le diagramme commutatif de A1k

= Spec(k[T ])-schémas

Qgmr (X, f)j//

Qgmr (X, f)

Xi

oo

Gmk// A1k

ooo

avec Qgmr (X, f) = X[T, V ]/V r − f.T . C’est un diagramme à carrés cartésiens à nil-immersion près. Si s divise r, lacomposée

(1.82) homSHM(Gmk)(Qgmr (X, f)⊗Acst, Qgms (Y, g)⊗Bcst)

∼ (1)

homSHM(Qgmr (X,f))(Acst, [Qgms (Y, g)×Gmk

Qgmr (X, f)]⊗Bcst)

(2)

homSHM(X)(Acst, i∗j∗[Q

gms (Y, g)×Gmk

Qgmr (X, f)]⊗Bcst)

est inversible.

Demonstration L’isomorphisme (1) de (1.82) s’obtient via l’adjonction (pr#, pr∗) où pr est la projection de

Qgmr (X, f) sur Gmk. Il faut montrer que l’homomorphisme (2) de (1.82) est inversible.Notons d l’entier tel que r = sd. Le k-schéma Qgmr (X, f)×Gmk

Qgms (Y, g) est égal à

X ×k Y [T, T−1, V,W ]

(V ds − fT,W s − gT )=X ×k Y [V, V −1,W,W−1]

(gV ds − fW s)

'(X ×k Y [R]/(Rs − f

g)

)[V, V −1,W,W−1]/(V d −RW ) =

(X ×k Y [R]/(Rs − f

g)

)[V, V −1].

On note Z le k-schéma X ×k Y [R]/(Rd− (f/g)) et h la classe de R. On dispose d’un morphisme lisse évident pZX :

Z // X . Modulo les identifications Qgmr (X, f)×GmkQgmr (Y, g) = Z[V, V −1] et Qgmr (X, f) = X[T, T−1, V ]/(V p −

fT ) = X[V, V −1], la projection sur le premier facteur de Qgmr (X, f)×GmkQgmr (Y, g) est simplement

Z[V, V −1]pZX×id

// X[V, V −1] .

On a un diagramme cartésien de k-schémas

Z[V, V −1]j//

Z[V ]

Zi

oo

X[V, V −1]j// X[V ] X

ioo

où les flèches verticales sont toutes déduites de pZX . En particulier, elles sont lisses. Modulo les identifications précé-dentes, l’homomorphisme (2) de (1.82) s’écrit

(1.83) homSHM(X[V,V −1])(Acst, Z[V, V −1]⊗Bcst) // homSHM(X)(Acst, i∗j∗(Z[V, V −1]⊗Bcst)) .

Considérons le diagramme de X-schémas

X[V, V −1]j//

q**

X[V ]

p

Xi

oo

X.

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60 Motifs des variétés rigides analytiques I

L’adjonction (q∗, q∗) fournit un isomorphisme

(1.84) homSHM(X)(Acst, q∗(Z[V, V −1]⊗Bcst)) ' homSHM(X[V,V −1])(Acst, Z[V, V −1]⊗Bcst).

En composant (1.83) et (1.84), on obtient un homomorphisme

(1.85) homSHM(X)(Acst, q∗(Z[V, V −1]⊗Bcst)) // homSHM(X)(Acst, i∗j∗(Z[V, V −1]⊗Bcst)) .

Le lecteur vérifiera immédiatement que cet homomorphisme est induit par la composée des transformations naturellesq∗ ' p∗j∗ // p∗i∗i

∗j∗ // i∗j∗ . Or, la composée de ces 2-morphismes est inversible lorsqu’on l’applique à q∗,donc aussi à l’objet q∗(Z⊗Bcst) = Z[V, V −1]⊗Bcst ∈ Ob(SHM(X[V, V −1])). Pour une preuve de cela, le lecteur peutconsulter la fin de la démonstration du [Ayo07a, Lemme 3.4.10]. c.q.f.d

Remarque 1.3.35 — La proposition 1.3.34 reste vraie sans l’hypothèse que s divise r. Ceci est une conséquence de lascholie 1.3.26, (modulo les théorèmes 1.3.37 et 1.3.38 ci-dessous). Pour s’en convaincre, il suffit d’utiliser le diagrammecommutatif (1.107). Toutefois, nous n’avons pas réussi à fournir un argument direct pour le cas général où s ne divisepar r.

On voudrait une description analogue à celle donnée dans la proposition 1.3.34 du second membre de (1.81). Pourcela, nous aurons besoin d’une construction qui à première vue paraîtra peu naturelle.

Soit D : SmAfnd/k // Sch/k le foncteur qui à un k-affinoïde lisseX associe le k-schéma affine Spec(Γ(X,O)).On considérera D comme un diagramme de schémas (au sens de [Ayo07a, Définition 2.4.4]) et on utilisera les notationsde la section 2.4 de loc. cit. Bien entendu les schémas D(X) ne sont pas de type fini. Toutefois, ils sont normaux,topologiquement de présentation finie et donc noethériens (puisque k est de valuation discrète).

On note également Dη : SmAfnd/k // Sch/k le foncteur qui à un k-affinoïde X associe Spec(Γ(X,O)) et

Dσ : SmAfnd/k // Sch/k celui qui associe X = Spec

(Γ(X,O)

Γ(X,O∨)

). On a ainsi un diagramme dans la catégorie

DiaSch des diagrammes de schémas

(1.86) Dη

j//

D

u

Dσi

oo

kj// k k.

ioo

Rappelons (voir le début de [Ayo07a, Sous-section 4.5.1]) que Sm/D est la catégorie des couples (Y,X) avec Xun k-affinoïde lisse et Y un D(X)-schéma lisse. On dispose d’un foncteur “diagonal” évident

(1.87) diag : SmAfnd/k // Sm/D

qui à un k-affinoïde lisse X = Spm(A) associe le couple (id : Spec(A) = Spec(A), X). En composant avec les foncteurs

−×D Dη : Sm/D // Sm/Dη et −×DDσ : Sm/D // Sm/Dσ

on obtient deux autres foncteurs “diagonaux”

(1.88) diagη : SmAfnd/k // Sm/Dη et diagσ : SmAfnd/k // Sm/Dσ .

Les foncteurs (1.87) et (1.88) induisent par composition à gauche des foncteurs

(1.89) diag∗ : PreShv(Sm/D ,M) // PreShv(SmAfnd/k,M)

(1.90) diag∗η : PreShv(Sm/Dη,M) // PreShv(SmAfnd/k,M)

(1.91) diag∗σ : PreShv(Sm/Dσ,M) // PreShv(SmAfnd/k,M) .

On fera attention que contrairement aux notations choisies, diag∗, diag∗η et diag∗σ sont les images directes des pré-faisceaux suivant (1.87) et (1.88). En particulier, ils préservent les équivalences faibles de préfaisceaux ainsi que lesfibrations projectives.

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 61

Lemme 1.3.36 — 1- Soit K un préfaisceau sur Sm/k à valeurs dans une catégorie cocomplète. Notons r :SmAfnd/k ⊂ SmRig/k l’inclusion évidente. Il existe un isomorphisme naturel

(1.92) diag∗ηu∗ηK

∼// r∗Rig

∗K .

2- Soit L un préfaisceau sur SmAf/k à valeurs dans un catégorie cocomplète. On note a : SmAf/k // Sm/k

l’inclusion évidente et cplη : SmAf/k // SmAfnd/k le foncteur qui à X associe (X//(π))η. Il existe un isomor-phisme canonique

(1.93) diag∗u∗a∗L∼// cpl∗ηL .

Demonstration 1- Soit X = Spm(A) un k-affinoïde lisse. La restriction du préfaisceau u∗ηK à Sm/Dη(X) est l’imageinverse de K suivant le prémorphisme de sites (munis des topologies grossières) Sm/Dη(X) // Sm/k induit parla projection (uX)η. Il vient que

(1.94) [diag∗ηu∗ηK](X) = [(uX)∗ηK](Dη(X)) = Colim

Spec(A)→U∈Ob(Spec(A)\(Sm/k))K(U).

D’autre part, [r∗Rig∗K](X) = [Rig∗K](X) est donné par la colimite

(1.95) ColimSpm(A)→Uan ∈ Spm(A)\(Sm/k)

K(U).

L’identification entre (1.94) et (1.95) découle alors de la bijection hom(Spec(A), U) ' hom(Spm(A), Uan) (voir laproposition 1.1.20).

2- Soit X = Spm(A) un k-affinoïde lisse. La restriction du préfaisceau u∗a∗L à Sm/D(X) est l’image inverse de a∗L

suivant le prémorphisme de sites (munis des topologies grossières) Sm/D(X) // Sm/k induit par la projection(uX). Il vient que

(1.96) [diag∗u∗aL](X) = [(uX)∗aL](D(X)) = ColimSpec(A)→U∈Ob(Spec(A)\(SmAf/k))

L(U).

D’autre part, [cpl∗ηL](X) est donné par la colimite

(1.97) ColimSpm(A)→(U//π)η∈Ob(Spm(A)\(SmAf/k))

K(U).

L’identification entre (1.96) et (1.97) découle alors des bijections naturelles

hom(Spec(A), U) ' hom(Spf(A), U//π) ' hom(Spm(A), (U//π)η).

La première bijection provient de l’universalité de la complétion d’une k-algèbre. La seconde bijection découle du faitque (U//π) est affine, plat et normal sur k. En effet, un morphisme de k-algèbres affinoïdes respecte les sous-anneauxdes fonctions de norme infinie inférieure ou égale à 1. c.q.f.d

On dispose d’un isomorphisme de préfaisceaux d’ensembles B1k ' diag∗A1

D correspondant, pour un k-affinoïde lisseSpm(A), à l’identification

hom(Spm(A),B1k) = A = hom(Spec(A),A1

k).

Cet isomorphisme identifie le sous-préfaisceau ∂B1k ⊂ B1

k à diag∗GmD . On en déduit un isomorphisme de préfaisceauxà valeurs dans M :

B1k ⊗ 1cst

∂B1k ⊗ 1cst

' diag∗(

A1D ⊗ 1cst

GmD ⊗ 1cst

).

Cet isomorphisme n’est autre que (1.93) dans le cas L =A1k ⊗ 1cst

Gmk ⊗ 1cst. Comme diag∗ préserve les équivalences faibles

de préfaisceaux, on obtient une équivalence faible de préfaisceaux diag∗TD// B1k ⊗ 1cst/∂B1

k ⊗ 1cst . De plus,diag∗TD est projectivement cofibrant puisqu’il est isomorphe à cpl∗ηT

′k (où T = a∗T ′ avec T ′ le modèle cofibrant de

A1Z⊗1cst/GmZ⊗1cst dans PreShv(SmAf/Z,M) que l’on a fixé au début de la sous-section 1.3.3). En particulier, on

a clairement r∗diag∗TD ' r∗cpl∗ηT′ ' T qc.

On munit la catégorie PreShv(SmAfnd/k,M) de sa structure projective B1-locale obtenue par localisation deBousfield de la structure projective Nis-locale suivant la classe de flèches B1

U ⊗A // U ⊗A avec U un k-affinoïde

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62 Motifs des variétés rigides analytiques I

lisse et A ∈ Ob(M). Comme diag∗T est cofibrant, on peut munir SpectΣdiag∗T (PreShv(SmAfnd/k,M)) d’une structure

de modèles projective, B1-locale stable. La catégorie homotopique de cette catégorie de modèles est équivalente àRigSHM(k). En effet, on a une suite d’équivalences de Quillen à gauche

(1.98) SpectΣdiag∗T (PreShv(SmAfnd/k,M))

r∗

SpectΣT qc(PreShv(SmRig/k,M))

T an⊗Tqc−

SpectΣT an(PreShv(SmRig/k,M)).

On dispose d’un foncteur entre catégories de spectres

(1.99) diag∗ : SpectΣT (PreShv(Sm/D ,M)) // SpectΣ

diag∗T (PreShv(SmAfnd/k,M)) .

Ce foncteur préserve clairement les équivalences faibles entre préfaisceaux niveau par niveau. Étant donné que lesA1-équivalences stables entre objets stablement A1-fibrants sont des équivalences faibles de préfaisceaux niveau parniveau, on déduit l’existence d’un foncteur dérivé à droite (voir [Ayo07a, Proposition 4.1.22])

Rdiag∗ : SHM(D) ' HoA1−st

(SpectΣ

T (PreShv(Sm/D ,M)))

// Ho(SpectΣ

diag∗T (PreShv(SmAfnd/k,M))).

On peut maintenant énoncé le théorème suivant :

Theoreme 1.3.37 — La composée

(1.100) SHM(k)u∗η// SHM(Dη)

i∗i∗j∗// SHM(D)

Rdiag∗// Ho

(SpectΣ

diag∗T (PreShv(SmAfnd/k,M)))

se factorise par la sous-catégorie des objets stablement B1-locaux de Ho(SpectΣ

diag∗T (PreShv(SmAfnd/k,M))).

La sous-catégorie pleine des objets stablement B1-locaux est canoniquement équivalente à RigSHM(k) via la suited’équivalences de Quillen (1.98). Le théorème 1.3.37 fournit donc un foncteur L : SHM(k) // RigSHM(k) .

Soit E = (En)n∈N ∈ Ob(SpectΣ

T (PreShv(Sm/k,M)))un T -spectre symétrique projectivement cofibrant. Par le

lemme 1.3.36, on a un isomorphisme r∗Rig∗E ' diag∗ηu

∗ηE de r∗T

an = diag∗ηTDη -spectres symétriques. En utilisant,le morphisme évident diag∗TD

// diag∗ηTDη , on peut considérer r∗Rig∗E ' diag∗ηu

∗ηE comme un isomorphisme de

diag∗TD -spectres. D’autre part, on a un morphisme de T -spectres symétriques dans SHM(D)

Rj∗u∗ηE

// Ri∗Li∗Rj∗u

∗ηE .

On peut alors former la composée :

(1.101) r∗Rig∗E ' diag∗ηu

∗ηE

// Rdiag∗Rj∗u∗ηE

// Rdiag∗Ri∗Li∗Rj∗u

∗E .

C’est une flèche de Ho(SpectΣ

diag∗T (PreShv(SmAfnd/k,M))).

Theoreme 1.3.38 — Pour tout T -spectre symétrique E, la flèche (1.101) est une B1-équivalence stable.

Remarque 1.3.39 — Le dernier membre de (1.101) est stablement B1-local par le théorème 1.3.37. Ainsi, lethéorème 1.3.38 affirme que (1.101) est une B1-localisation stable de Rig∗E. On déduit un isomorphisme naturelθ : Rig∗E

∼// LE dans RigSHM(k). Ceci montre que le foncteur Rig∗ est canoniquement isomorphe à L.

La preuve du théorème 1.3.37 sera donnée dans cette sous-section. La preuve du théorème 1.3.38 nécessite mal-heureusement beaucoup plus de préliminaires techniques et ne sera donnée qu’à la fin de la section 1.4. Montronscomment déduire la scholie 1.3.26 des théorèmes 1.3.37 et 1.3.38.

Démonstration de la Scholie 1.3.26 On divise la preuve en plusieurs parties. Dans la première on montre queF est une équivalence.

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 63

Étape 1 : Rappelons que pour montrer que F est une équivalence de catégories il restait à voir que les homomorphismes(1.81) étaient inversibles pour s divisant r (voir le lemme 1.3.33).

Soit Sus0T (Qgms (Y, g)⊗Bcst) // E = (En)n∈N une cofibration projective stablement A1-triviale avec E stable-

ment A1-fibrant dans SpectΣT (PreShv(Sm/Gmk,M)). Soit Rig∗π∗E // F = (Fn)n∈N une cofibration projective

stablement B1-triviale avec F stablement B1-fibrant dans SpectΣT an(PreShv(SmRig/k,M)). La flèche (1.81) se définit

par application de π0(A,−) à la composée suivante (dans M)

(1.102) E0(Qgmr (X, f)) // Rig∗π∗E0(Qanr (X, f)) // F0(Qanr (X, f)) .

Il suffit donc de montrer que (1.102) est une équivalence faible. Étant donné que F0 est B1-fibrant, la flèche

(1.103) F0(Qanr (X, f))w.e.// F0(Qrigr (X, f))

est une équivalence faible par le théorème 1.3.11. Il suffira donc de prouver que la composée

(1.104) E0(Qgmr (X, f)) // Rig∗π∗E0(Qanr (X, f)) // F0(Qanr (X, f)) // F0(Qrigr (X, f))

est une équivalence faible. En utilisant le carré commutatif évident

Rig∗π∗E0(Qanr (X, f)) //

F0(Qanr (X, f))

Rig∗π∗E0(Qrigr (X, f)) // F0(Qrigr (X, f)),

on est ramené à considérer la composée

(1.105) E0(Qgmr (X, f)) // Rig∗π∗E0(Qanr (X, f)) // Rig∗π∗E0(Qrigr (X, f)) // F0(Qrigr (X, f)) .

Par les théorèmes 1.3.37 et 1.3.38, la dernière flèche dans la composée (1.105) ci-dessus est isomorphe dans Ho(M)à la composée suivante :

(1.106) Rig∗π∗E0(Qrigr (X, f)) '[(uQrigr (X,f))

∗ηπ∗E]

0(Dη(Qrigr (X, f)))

[Rj∗(uQrigr (X,f))

∗ηπ∗E]

0(D(Qrigr (X, f)))

[Ri∗Li

∗Rj∗(uQrigr (X,f))∗ηπ∗E]

0(D(Qrigr (X, f))).

Notons A = Γ(X,O). Le schéma D(Qrigr (X, f)) est le spectre de la k-algèbre(A⊗k k)[V ]

(V r − fπ)//(π). On le notera

Dr(X, f). On pose aussiDr(X, f) = Dη(Qrigr (X, f)) = Dr(X, f)[1/π]. On vérifie immédiatement que Dσ(Qrigr (X, f)) =X. On a un carré commutatif à carrés cartésiens

Dr(X, f)j//

Dr(X, f)

c

Xi

oo

Qgmr (X, f)j// Qgmr (X, f) X.

ioo

La flèche c du milieu correspond donc au spectre du morphisme de complétion en l’idéal de l’immersion i. Par le

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64 Motifs des variétés rigides analytiques I

corollaire 1.A.5, on sait que le 2-morphisme canonique i∗j∗ = cσi∗j∗ // i∗j∗c

∗η est inversible. Le diagramme

(1.107) E0(Qgmr (X, f)) //

(1)

--

Rig∗π∗E0(Qanr (X, f)) // Rig∗π∗E0(Qrigr (X, f))

[(uQrigr (X,f))

∗ηπ∗E]

0(Dr(X, f))

OO

[Li∗Rj∗

((E)|Qgmr (X,f)

)]0

(X)∼

//[Li∗Rj∗

((E)|Dr(X,f)

)]0

(X)

est clairement commutatif. Le résultat découle maintenant de la proposition 1.3.34 qui affirme que la flèche (1) dans lediagramme (1.107) est une équivalence faible (puisqu’elle induit un isomorphisme après application de π0(A,−) pourtout A ∈ Ob(M)).Étape 2 : On passe à la seconde partie de la scholie 1.3.26. Rappelons que SmAf/k désigne la sous-catégorie pleinede Sm/k formée des schémas affines. On note Q : SmAf/k // Sm/k le diagramme de k-schémas qui à X

fait associer Qsch(X). On pose alors Qη = Q ×k k et Qσ = Q ×k k. On dispose également d’un foncteur q :

SmAf/k // SmAfnd/k qui à un k-schéma X associe le k-affinoïde Qrig(X). On a alors un diagramme commutatifdans DiaSch à carrés cartésiens (à nil-immersion près)

Dη qj//

D q

c

Dσ qi

oo

j//

Q

v

Qσi

oo

kj

// k k.i

oo

Par le corollaire 1.A.5, on déduit un 2-isomorphisme i∗j∗ ' i∗j∗cη. Par le théorème de changement de base par unmorphisme lisse, on a également un 2-isomorphisme v∗σi

∗j∗ ' i∗j∗v∗η. On déduit que le morphisme canonique

v∗σi∗j∗

∼// i∗j∗w

∗η

est inversible.Appelons ∆ : SmAf/k // Sm/Qσ le foncteur qui à un k-schéma affine X associe (idX , X). On note ∆∗, le

foncteur qui à un préfaisceau sur Sm/Qσ associe sa composition à gauche par ∆. On obtient alors pour E dansSpectΣ

T (PreShv(Sm/k,M)) des isomorphismes naturels dans la catégorie homotopique

χ(E) = Li∗Rj∗(E) ' R∆∗v∗σLi∗Rj∗(E) ' R∆∗Li∗Rj∗Lw

∗η(E)

' Rq∗Rdiag∗σLi∗Rj∗Lu

∗η(E) ' Rq∗Rdiag∗Ri∗Li

∗Rj∗Lu∗η(E) ' Rq∗L(E).

où l’on a désigné q∗ le foncteur de composition à droite par q. Par les théorèmes 1.3.37 et 1.3.38, le spectre L(E) estcanoniquement isomorphe à Rig∗E ∈ RigSHM(k) (voir la remarque 1.3.39). Pour conclure, il suffit donc de montrerque Rq∗ coïncide avec le foncteur q∗ modulo l’équivalence de catégories QUSHM(k) ' RigSHM(k). Il faut doncexhiber un isomorphisme entre les deux composées

QUSHM(k)Rig∗π∗

// RigSHM(k)Rq∗// SHM(k) et QUSHM(k)

q∗// SHM(k) .

Soit E un T -spectre projectivement cofibrant et stablement B1-fibrant de SpectΣT (PreShv(Sm/Gmk,M)) qui appar-

tient à QUSHM(k). Soit Rig∗π∗E // F une cofibration stablement B1-triviale avec F stablement B1-fibrant. Pour

X un k-schéma affine, on considère la composée

En(Qgm(X)) // Rig∗π∗En(Qan(X)) // Fn(Qan(X)) // Fn(Qrig(X))

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 65

Ces flèches, s’organisent en un morphisme de T -spectres symétriques q∗E // q∗F . On obtient ainsi une transfor-mation naturelle

Rq∗ // Rq∗Rig∗π∗ .

Il reste à montrer que cette transformation naturelle est inversible. Pour cela , on lui applique la famille conservativedes foncteurs homSHM(k)(SuspT (X ⊗Acst),−) pour A ∈ E et X ∈ Ob(Sm/k). On retrouve alors l’application

homSHM(Gmk)(SuspT (Qgm(X)⊗A),E)

homRigSHM(k)(F(SuspT (Qgm(X)⊗A)),E)

homRigSHM(k)((SuspT (Qrig(X)⊗A)),E).

Le résultat découle maintenant du fait que F est une équivalence de catégories et du théorème 1.3.11.Étape 3 : Il nous reste à traiter la composée (1.75). Rappelons brièvement la construction du foncteur Ψπ. Ondispose d’un diagramme de Gmk-schémas lisses R indicé par ∆×N× (avec N× ordonné par l’opposée de la relation dedivisibilité). Pour la définition précise de R, voir [Ayo07a, Définition 3.5.3]. Pour (n, r) ∈ Ob(∆×N×) le Gmk-schémaR(n, r) est canoniquement isomorphe à

Gmk ×k (Gmk)npr1// Gmk

(−)r// Gmk.

C’est donc le Gmk-schéma Qgmr (Gmnk, 1). On note (θR, p∆×N×) la projection de R sur Gmk et (θR

π , p∆×N×) sonpull-back suivant π : Spec(k) // Gmk

.

Étant donné un T -spectre symétrique E ∈ Ob(SpectΣT (PreShv(Sm/k,M))) on a par définition (voir [Ayo07a,

Définition 3.5.6])

(1.108) Ψπ(E) = L(p∆×N×)#Li∗Rj∗R(θRπ )∗(θ

Rπ )∗(p∆×N×)∗E ' L(p∆×N×)#Li∗Rj∗[(R(θR

π )∗1cst)⊗ (p∆×N×)∗E].

L’isomorphisme dans (1.108), provient du fait que les objets Sus0T ((R(n, r)×Gmk

k)⊗1cst) sont fortement dualisables(par le lemme 1.3.29).

On peut voir [(R(θRπ )∗1cst) ⊗ (p∆×N×)∗E] comme un objet de SpectΣ

T (PreShv(Sm/k,HOM((∆ × N×)op,M))).Par la seconde étape de la preuve, on déduit un isomorphisme naturel

(1.109) Ψπ(E) ' L(p∆×N×)#Rq∗RRig∗[(R(θRπ )∗1cst)⊗ (p∆×N×)∗E]

' L(p∆×N×)#Rq∗((RRig∗(R(θR

π )∗1cst))⊗ (RRig∗(p∆×N×)∗E)).

Par le corollaire 1.A.4, on a un isomorphisme π∗(R(θR)∗1cst) ' (R(θRπ )∗1cst). Comme R est un quasi-inverse à Rig∗π∗,

on déduit un isomorphisme(RRig∗(R(θR

π )∗1cst)) ' (R(θR)∗1cst).

On a donc un isomorphisme naturel

(1.110) Ψπ(E) ' L(p∆×N×)#Rq∗((R(θR)∗1cst)⊗ (RRig∗(p∆×N×)∗E)

)' L(p∆×N×)#Rq∗

((R(θR)∗1cst)⊗ ((p∆×N×)∗RRig∗E)

).

Pour conclure, il reste à construire un isomorphisme entre 1∗ : QUSHM(k) // SHM(k) et le foncteur

Ψqu = (p∆×N×)#q∗(((θR)∗1cst)⊗ (p∆×N×)∗(−)

): QUSHM(k) // SHM(k) .

Remarquons au passage que Ψqu est isomorphe à la restriction de Ψid : SHM(Gmk) // SHM(k) à la sous-catégorie

QUSHM(k). En utilisant le 2-morphisme q∗ // q∗1∗1∗ ' 1∗ , on déduit un 2-morphisme

(1.111) Ψqu // (p∆×N×)#1∗(((θR)∗1cst)⊗ (p∆×N×)∗(−)

) ∼// (p∆×N×)#

((1∗(θR)∗1cst)⊗ (p∆×N×)∗1∗(−)

).

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66 Motifs des variétés rigides analytiques I

On forme le carré cartésien de diagrammes de schémas

R1//

(α,p∆×N× )

R

Spec(k)1// Gmk.

Le morphisme de changement de base nous donne alors une flèche 1∗(θR)∗1cst // α∗1cst . D’autre part, on vérifiefacilement que les morphismes

(1, . . . , 1) : Spec(k) // Gmn+1

k' R(n, r)

fournissent un morphisme de ∆× N×-diagrammes de k-schémas

u : (Spec(k),∆× N×) // (R1,∆× N×) .

On obtient alors une flèche α∗1cst // α∗u∗u∗1cst ' 1cst et donc en fin de compte une flèche 1∗(θR)∗1cst // 1cst .

En composant avec (1.111), on obtient la transformation naturelle

(1.112) σ : Ψqu // (p∆×N×)# ((p∆×N×)∗1∗(−)) ' 1∗ .

On montrera que σ est inversible dans une quatrième étape :

Étape 4 : Montrons d’abord que σ est inversible lorsqu’on l’applique à q∗. Le morphisme d’unité 1cst // (θR)∗1cst ,induit une transformation naturelle

q∗ ' q∗(p∆×N×)#q∗(p∆×N×)∗ // q∗(p∆×N×)#q∗(((θR)∗1cst)⊗ (p∆×N×)∗(−)) .

Il est clair que le morphisme 1cst // 1∗(θR)∗1cst est une section au morphisme 1∗(θR)∗1cst // 1cst qu’on autilisé pour construire σ. Ainsi, la composée

q∗ // Ψqu σ// 1∗

est le morphisme évident q∗ // 1∗ . Ceci montre que la composée

id // q∗q∗ // Ψquq∗ // 1∗q∗ ' id

est l’identité du foncteur identité. Le résultat découle alors du fait que id // q∗q∗ // Ψquq∗ est inversible (voir

[Ayo07a, Lemme 3.5.10]).Passons au cas général. Soit r ∈ N× et notons er : Gmk

// Gmkl’élévation à la puissance r. On dispose d’un

isomorphisme de diagrammes de Gmk-schémas entre

(er θR, p∆×N×) : R // Gmk

er// Gmk

et R (id∆ ×mr)

avec mr : N× → N× la multiplication par r. Par [Ayo07a, Proposition 3.5.9], on dispose d’un isomorphisme Ψqu e∗r 'Ψqu. On vérifie facilement que le carré

(1.113) Ψqu ∼//

Ψqu e∗r

1∗ 1 ' 1∗e∗r

est commutatif.Il est maintenant aisé de montrer que (1.112) est inversible. Il suffit en effet dévaluer sur les générateurs de

QUSHM(k). Soit E = SuspT (Qgmr (X, f) ⊗ Acst). Par le carré commutatif (1.113), on peut remplacer E par e∗rE =SuspT (Qgm(X[W ]/W r − f)⊗Acst). Cet objet est égal à q∗SuspT ((X[W ]/W r − f)⊗Acst). Or, on a montré que σq∗ estinversible. D’où le résultat. c.q.f.d

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 67

Dans le reste de cette sous-section, on se propose de montrer le théorème 1.3.37. Pour cela, nous aurons besoin d’uncritère de Nis-localité. Soit X une k-variété rigide. On note Etaf/X la sous-catégorie pleine des X-variétés rigides étales,qui sont des k-affinoïdes. Si X est un k-schéma formel, on note aussi Etaf/X la sous-catégorie pleine des X-schémasformels étales et affines sur k.

Lemme 1.3.40 — Soit X un k-affinoïde normal. Soit F un préfaisceau sur Etaf/X à valeurs dans une catégoriede coefficients (M,E). Pour que F soit Nis-local, il suffit que la propriété (P) ci-dessous soit satisfaite pour toutU ∈ Ob(Etaf/X) et U ∈ Mdl(U) projectif sur Spf(Γ(U,O)).

(P) : Le morphisme évident F (U) // RΓNis(U, F|U) est une équivalence faible,

avec F|U l’image directe de F suivant le prémorphisme de sites (Etaf/X,Nis) // (Etaf/U,Nis) donné par la fibregénérique de Raynaud.

Demonstration On pose X0 = Spf(Γ(X,O)). On note M la catégorie dont les objets sont les X0-schémas formelsessentiels U tels que Uη est étale sur X. On munit M de la topologie de Nisnevich (sur les schémas formels). On disposed’un foncteur α : M // Etqc/X qui à U associe Uη. Ce foncteur est continu et induit un prémorphisme de sites

α : (Etqc/X,Nis) // (M,Nis) .

Remarquons que α est en fait un morphisme de sites. En effet, M possède les limites projectives finies. Elles sontobtenues en prenant le schéma formel essentiel associé à la limite projective calculée dans la catégorie des X0-schémasformels. De plus α envoie ces limites projectives finies sur des limites projectives finies de X-variétés rigides étales.

Étant donné un préfaisceau H sur M on montre facilement qu’on a

(1.114) [α∗H](U) = ColimU∈Mdl(U)

H(U)

avec Mdl(U) la catégorie cofiltrante des modèles formels essentiels. En particulier, on voit que le morphisme de counitéα∗α∗ // id est inversible.

Soit G un préfaisceau sur Etqc/X à valeurs dansM. On choisit une cofibration projective Nis-triviale α∗G // H

avec H projectivement Nis-fibrant. Considérons alors le morphisme

(1.115) G ' α∗α∗G // α∗H .

On a les propriétés suivantes :(i) le morphisme (1.115) est une Nis-équivalence faible,(ii) α∗H est projectivement Nis-fibrant.

Le point (i) découle du fait que α∗ est un foncteur de Quillen à gauche pour les structures Nis-locales. Il préservedonc les cofibrations projectives Nis-triviales. Montrons (ii). Par (1.114) est la stabilité des objets fibrants de M parcolimites filtrantes, on sait que α∗H est projectivement fibrant. Il reste à voir qu’il est Nis-local. Soit U une X-variétéétale quasi-compacte et U un modèle formel de U (au dessus de X0). Étant donné un préfaisceau † sur Etqc/X (resp.M) on note †|U sa restriction à Et/U. De la formule (1.114), on déduit immédiatement

(1.116) (α∗H)|U = ColimU′→U∈Mdl(U)/U

(U′/U)∗H|U′

avec (U′/U)∗ le foncteur image directe induit par le morphisme de k-schémas formels U′ // U . Étant donné queles images directes, préservent les objets projectivement Nis-fibrants, on déduit que (U′/U)∗H|U est projectivementNis-fibrant. Il vient que (α∗H)|U est Nis-fibrant, puisque la classe des préfaisceaux projectivement Nis-fibrants eststable par colimites filtrantes. En particulier, (α∗H)|U vérifie la propriété de Brown-Gersten. Ceci montre que α∗Hvérifie la propriété de Brown-Gersten (restreinte). Il est donc Nis-fibrant par le corollaire 1.2.32.

On applique la discussion précédente à G = a∗F avec a : (Etqc/X,Nis) // (Etaf/X,Nis) l’équivalence de sites

donnée par l’inclusion évidente. On a un morphisme évident f : F // a∗α∗H . Par (ii), il suffira de montrer que f

est une équivalence faible de préfaisceaux. Par (1.114), on est ramené à montrer que le morphisme

F (U) // ColimU∈Mdl′(U)

H(U)

est une équivalence faible pour tout U = Spm(A) ∈ Ob(Etaf/X). Ci-dessus, on a noté Mdl′(U) la sous-catégoriecofiltrante de Mdl(U) formée des modèles projectives sur Spf(Γ(U,O)). Par (i) et (ii), on voit que H|U est un

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68 Motifs des variétés rigides analytiques I

remplacement projectivement Nis-fibrant de G|U. On a donc un isomorphisme RΓNis(U, FU) ' H(U) dans Ho(M).Par la propriété (P), on déduit que pour tout U ∈ Mdl′(U), la flèche F (U) // H(U) est une équivalence faible. Lerésultat découle alors de la stabilité des équivalences faibles de M par colimites filtrantes. c.q.f.d

Voici une façon plus détaillée de formuler le théorème 1.3.37 :

Theoreme 1.3.41 — Soit E un objet projectivement cofibrant de SpectΣT (PreShv(Sm/k)). Le diag∗T -spectre

symétrique F = Rdiag∗Ri∗Li∗Rj∗u

∗ηE vérifie les propriétés suivantes (avec p ∈ N) :

(i) Fp est Nis-fibrant en tant qu’objet de PreShv(SmAfnd/k,M),

(ii) le morphisme Fp // hom(B1k,Fp) est une équivalence faible de préfaisceaux,

(iii) l’adjoint du morphisme d’assemblage Fp // Homg(diag∗T,Fp+1) est une équivalence faible de préfaisceaux.

Demonstration On divise la preuve en trois parties. On démontre successivement les propriétés (i), (iii) et (ii).Étape 1 : Par construction, le diag∗T -spectre F est projectivement fibrant niveau par niveau. Ainsi, pour montrer queFp est Nis-fibrant, il reste à voir qu’il est Nis-local. Par le lemme 1.3.40, il faut montrer que la flèche

(1.117) Fp(X) // RΓNis(X, (Fp)|X)

est une équivalence faible pour tout k-affinoïde lisse X = Spm(A) et tout modèle essentiel X ∈ Mdl(X) projectif surSpf(A). Il existe un Spec(A)-schéma projectif p : P // Spec(A) tel que X est la complétion formelle de P ensa fibre spéciale.

Notons comme avant Etaf/P la catégorie des P -schémas étales affines sur k. La complétion formelle induit un fonc-teur Etaf/P // Etaf/X qui est clairement continu. On note cP : (Etaf/X,Nis) // (Etaf/P,Nis) le morphisme de

sites ainsi obtenu. Via l’isomorphisme Etaf/X ' Etaf/Xσ, ce morphisme de sites correspond à Etaf/Pσ // Etaf/P

induit par l’immersion fermée Pσ ⊂ P . On en déduit que (cP )∗ préserve les équivalences Nis-locales entre les t∅-faisceaux. Rappelons qu’un préfaisceau † sur Etaf/X est dit un t∅-faisceau si †(∅) ' ∗. Pour une preuve de cela, lelecteur trouvera tous les ingrédients nécessaires dans la preuve de la proposition 1.4.18 de la section 1.4 ci-dessous. Enremarquant que Fp(∅) est contractile, on est ramené à montrer que la composée

(1.118) Fp(X) // Γ(X, (Fp)|X) ' Γ(P, (cp)∗((Fp)|X)) // RΓNis(P, (cp)∗((Fp)|X))

est une équivalence faible. Pour cela, on va construire un isomorphisme

(1.119)([i∗i∗j∗(f

∗ηE)]p

)|Etaf/P

' (cp)∗((Fp)|X)

avec f : P // Spec(k) la projection structurale.

On note m : Etaf/P // SmAfnd/k le foncteur qui à Y/P associe (Y//π)η. On considère alors le diagramme de

schémas D m indicé par Etaf/P . On note diagP : Etaf/P // Sm/D m le foncteur diagonal qui à (Y/P ) associe(idSpec(Γ(Y,O)//π), (Y//π)η). On a alors la formule

(cp)∗((Fp)|X) ' diag∗P [m∗i∗i∗j∗u

∗ηE]p.

Notons I : Etaf/P // Sch/k le diagramme de schéma qui à U/P associe U . On a un diagramme commutatif àcarrés cartésiens (à nil-immersion près)

Dη mj//

D m

c

Dσ mi

oo

j//

v

I

v

Iσi

oo

Pηj

//

P

f

Pσi

oo

Spec(k)j// Spec(k) Spec(k)

ioo

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1.3 Les catégories B1-homotopiques des k-variétés rigides 69

où c correspond au spectre du morphisme de complétion formelle en l’idéal (π). On déduit du corollaire 1.A.5, unisomorphisme i∗j∗ ' c∗σi∗j∗ ' i∗j∗c∗η . On a alors la chaîne d’isomorphismes

m∗i∗i∗j∗u

∗ηE ' i∗i∗j∗c∗ηv∗ηf∗ηE ' i∗j∗v∗ηf∗ηE ' v∗σi

∗j∗f∗ηE

Le dernier isomorphisme, découle du fait que v est lisse argument par argument. On déduit immédiatement un iso-morphisme diag∗P [m∗i∗i

∗j∗u∗ηE]p ' ([i∗j∗f

∗ηE]p)Etaf/P . D’où l’isomorphisme (1.119). Cet isomorphisme est clairement

compatible aux morphismes de modèles. On déduit en particulier que la composée

Γ(Spec(A),

([i∗i∗j∗g

∗ηE]p

)|Etaf/Spec(A)

)// Γ(P,([i∗i∗j∗(f

∗ηE)]p

)|Etaf/P

)∼// RΓ

(P, (cp)∗((Fp)|X)

)coïncide avec la composée (1.118) (où l’on a noté g le morphisme structural du k-schéma Spec(A)). Pour terminer,il nous reste alors à montrer que le morphisme naturel

Γ(Spec(A),

([i∗i∗j∗g

∗ηE]p

)|Etaf/Spec(A)

)// RΓ

(P,([i∗i∗j∗(f

∗ηE)]p

)|Etaf/P

)est inversible. Il suffit plus généralement de montrer que

i∗i∗j∗g

∗ηE

// (pσ)∗i∗i∗j∗f

∗ηE

est inversible (avec p la projection de P sur Spec(A)). Ceci découle immédiatement du théorème de changement debase pour le morphisme projectif p (voir [Ayo07a, Corollaire 1.7.18]) et du fait que pη est un isomorphisme.

Étape 2 : Montrons que le morphisme

Fp // RHomg(diag∗TD ,Fp+1)

est une équivalence faible de préfaisceaux. Soit G = Ri∗Li∗Rj∗Lu

∗E de sorte que Rdiag∗G = F. On peut supposer queG est injectivement fibrant niveau par niveau. On a un diagramme commutatif

Fp // Homg(diag∗T,Fp+1) Homg

(B1k ⊗ 1cst

∂B1k ⊗ 1cst

,Fp+1

)w.e

oo

diag∗Gpw.e.// diag∗Homg(T,Gp+1)

(1)

OO

diag∗Homg

(A1

D ⊗ 1cstGmD ⊗ 1cst

,Gp+1

).

w.eoo

(1′)

OO

Il suffit donc de montrer que (1′) est une équivalence faible. Ceci revient à dire que pour tout k-affinoïde lisse Spm(A)et tout B ∈ E, l’application

π0

((A1

Spec(A),Spm(A))⊗Bcst(GmSpec(A),Spm(A))⊗Bcst

,Gp+1

)// π0

(B1A ⊗Bcst

∂B1A ⊗Bcst

,Fp+1

)

est bijective. En calculant le membre de droite, on se retrouve avec l’application

π0

((A1

Spec(A),Spm(A))⊗Bcst(GmSpec(A),Spm(A))⊗Bcst

,Gp+1

)// π0

((idSpec(AT),Spm(AT))⊗Bcst

(idSpec(AT,T−1),Spm(AT, T−1))⊗Bcst,Gp+1

).

Il sera donc plus général de montrer que si Y = Spec(R) est un k-schéma affine, l’application

(1.120) π0

((Spec(A ⊗k R),Spm(A))⊗Bcst,Gp+1

)

π0

((Spec(A ⊗k R//(π)),Spf(A ⊗k R//(π))η ⊗Bcst,Gp+1

)

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70 Motifs des variétés rigides analytiques I

est bijective. On forme pour cela le diagramme commutatif

Spec(A ⊗k R//(π))[1/π]j//

Spec(A ⊗k R//(π))

c

Spec(A⊗k R)i

oo

Spec(A ⊗k R)[1/π]j

// Spec(A ⊗k R) Spec(A⊗k R).i

oo

La flèche (1.120) s’écrit alors

homSHM(Spec(A⊗kR))(Bcst,Ri∗Li∗Rj∗E|Spec(A⊗kR)[1/π])

homSHM(Spec(A⊗kR//(π)))(Bcst,Ri∗Li∗Rj∗c

∗ηE|Spec(A⊗kR)[1/π]).

Le résultat découle maintenant de l’isomorphisme i∗j∗ = c∗σi∗j∗ ' i∗j∗c∗η (voir le corollaire 1.A.5).

Étape 3 : Il reste à montrer que les Fp sont B1-locaux, i.e., que

(1.121) Fp // hom(B1k,Fp)

est une équivalence faible de préfaisceaux. Soit G comme dans l’étape précédente de sorte que Fp = diag∗Gp. L’éva-luation en un k-affinoïde X = Spm(A) du morphisme (1.121) est

Gp(Spec(A), X) // Gp(Spec(A

T), XT) .

On peut factoriser cette flèche de la manière suivante

Gp(Spec(A), X)

(1)// Gp(Spec(A

[T ]), X)(2)// Gp(Spec(A

T), XT) .

La flèche (1) est une équivalence faible du fait que Gp est A1-fibrant. Soit B ∈ E. Remarquons que si on appliqueπ0(B,−) à la flèche (2) ci-dessus on retrouve (1.120) dans le cas R = k[T ]. On a montré dans l’étape précédente que(1.120) était bijective pour tout B ∈ E. Ceci montre que (2) est une équivalence faible. Ceci achève la preuve duthéorème 1.3.41. c.q.f.d

1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−)Dans cette section de nature plus technique, nous allons construire un 2-foncteur RigSHM(−) à valeurs dans les

catégories triangulées. Ce 2-foncteur sera défini sur des k-schémas rigides (voir la définition 1.4.1 ci-dessous). Onappliquera ensuite le résultat principal de [Ayo07a, Chapitre 1] à la restriction de RigSHM(−) aux k-schémas pourdémontrer le théorème 1.3.38.

1.4.1 Les k-schémas rigidesOn reprend les hypothèses générales suivantes : k est un corps complet pour une norme non-archimedienne et

π ∈ k∨ qu’on supposera non nul si la valuation de k est non triviale. On fait la définition suivante :

Definition 1.4.1 — Un k-schéma rigide est un triplet X = (X,X, j) avec X une k-variété rigide, X un k-schéma formel de type fini et j : Xη // X une immersion ouverte. On omettra souvent l’immersion j et on notera

simplement X = (X,X).

Un morphisme X = (X,X) // X′

= (X ′,X′) de k-schémas rigides est un couple (X ′ → X,X′ → X) forméd’un morphisme de k-variétés rigides et d’un morphisme de k-schémas formels tel que le carré

X′ηj′//

X ′

Xηj// X

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 71

commute. On note SchRig/k la catégorie des k-schémas rigides.

Remarque 1.4.2 — On dipose de deux foncteurs d’oubli de SchRig/k dans VarRig/k et SchF/k. Le premier, (−)η :

SchRig/k // VarRig/k , sera appelé le foncteur fibre générique. Le second, (−)//π : SchRig/k // SchF/k ,

sera appelé le foncteur de complétion formelle. Étant donné un k-schéma rigide X = (X,X), on a donc X = Xη etX = X//π ainsi qu’une immersion ouverte naturelle jX : (X//π)η // Xη .

La catégorie SchRig/k admet les limites finies et les foncteurs d’oublie y commutent. On notera †1׆2†3 le produitfibré dans la catégorie des k-schémas rigides. Étant donné un k-schéma rigide X, on appelle X-schéma rigide unmorphisme de SchRig/k de but X. On note SchRig/X la catégorie des X-schémas rigides.

Exemple 1.4.3 — Voici les exemples fondamentaux de k-schémas rigides :1- Étant donné un k-schémas formel X, le triplet (Xη,X, idXη ) est un k-schéma rigide que l’on note encore X.

On obtient ainsi un foncteur pleinement fidèle SchF/k // SchRig/k .

2- Étant donné une k-variété rigide X, le triplet (X, ∅, ∅) est un k-schéma rigide que l’on note encore X. Onobtient ainsi un foncteur pleinement fidèle VarRig/k // SchRig/k .

3- Soit X = Spf(A) un k-schéma formel affine. Étant donné un A-schéma de type fini X, on définit le X-schémarigide Xan par le triplet ((X[1/π])an, (X//π)η, jX) avec jX l’immersion ouverte canonique de la proposition 1.1.30. On

obtient ainsi un foncteur Rig : Schtf/A // SchRig/X . On vérifie immédiatement que Xan//π est canoniquementisomorphe à X//π.

Un morphisme X′

// X de k-schémas rigides est dit lisse (resp. étale, une immersion ouverte) si les deux

morphismes X′η

// Xη et X′//π // X//π sont lisses (resp. étales, des immersions ouvertes). (Lorsque k

n’est pas noethérien on fera attention que le morphisme X′//π // X//π ci-dessus doit être topologiquement de

présentation finie.) Étant donné un k-schéma rigide X, on note SmRig/X la sous-catégorie pleine de SchRig/X forméedes X-schémas rigides lisses. On note de même Et/X la sous-catégorie pleine des X-schémas rigides étales. On vérifieimmédiatement que les trois foncteurs de l’exemple 1.4.3 préservent les morphismes lisses et étales.

Definition 1.4.4 — Soit X un k-schéma rigide. Une famille R = ( U i // X )i∈I de morphismes étales est

un recouvrement Nisnevich si les deux familles ( (U i)η // Xη )i∈I et ( U i//π // X//π )i∈I sont des recouvrementsNisnevich.

Un exemple simple mais important de recouvrements Nisnevich d’un k-schéma rigide X = (X,Xη) est donné parles deux immersions ouvertes (X, ∅)→ X et (Xη,X)→ X.

La classe des recouvrements Nisnevich de k-schémas rigides définit une prétopologie sur les catégories Et/X,SmRig/X, SchRig/X, etc. Les topologies associées seront appelées les topologies de Nisnevich et seront désignées parNis.

Definition 1.4.5 — Un morphisme i : Z // X de k-schémas rigides est une immersion fermée s’il vérifieles conditions suivantes :

1. iη : Zη // Xη est une immersion fermée de variétés rigides,

2. i//π : Z//π // X//π est une immersion fermée de schémas formels,

3. Le morphisme évident (Z//π)η // Zη ∩ (X//π)η est un isomorphisme.

Dans la suite, on abusera en disant que Z est un sous-k-schéma rigide fermé de X.

La troisième condition ci-dessus affirme simplement que le carré de variétés rigides

(Z//π)ηi//π//

jZ

(X//π)η

jX

Zηiη

// Xη

est cartésien.

Remarque 1.4.6 — Si X est un k-schéma formel, il y a une bijection entre les sous-k-schémas formels fermés deX et les sous-k-schémas rigides fermés de (Xη,X) donnée par Z (Zη,Z). De même, si X est une k-variété rigide

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72 Motifs des variétés rigides analytiques I

l’application Z (Z, ∅) induit une bijection entre les sous-k-variétés rigides fermées de X et les sous-k-schémasrigides fermés de (X, ∅). On montre enfin qu’une immersion fermée de k-schémas de type fini i : Z // X induitune immersion fermée de k-schémas rigides ian : Zan // Xan .

Étant donné une immersion fermée de k-schémas rigides i : Z // X le couple (Xη − Zη,X//π − Z//π) estnaturellement un k-schéma rigide qu’on notera X −Z et qu’on appellera le compémentaire de Z dans X. On disposeégalement d’une immersion ouverte j : X − Z // X .

1.4.2 La construction des dérivateurs RigSH(−) et FSH(−)On appelle Dia la catégorie des catégories essentiellement petites. On considèrera uniquement la structure de 1-

catégorie sur Dia, i.e., on n’utilisera pas les transformations naturelles entre 1-morphismes de Dia. La définition suivanteest l’analogue de [Ayo07a, Définition 2.4.4] pour les k-schémas rigides (resp. formels) :

Definition 1.4.7 — On appelle diagramme de k-schémas rigides (resp. formels), un foncteur covariant F :

I // SchRig/k (resp. F : I // SchF/k ) de source une catégorie essentiellement petite.

Un 1-morphisme (G , J) // (F , I) (resp. (G , J) // (F , I) ) entre diagrammes de k-schémas rigides (resp.

formels) est la donnée d’un foncteur α : J // I et d’une transformation naturelle f : G // F α (resp.

f : G // F α ). En d’autres termes, c’est une face

I

J

SchRig/k

α++

G

33

F

uf

(resp.

I

J

SchF/k

α++

G

33

F

uf

)

dans la 2-catégorie des catégories. On appelle DiaSchRig/k (resp. DiaSchF/k) la catégorie dont les objets sont lesdiagrammes de k-schémas rigides (resp. formels) et les morphismes comme ci-dessus.

Remarque 1.4.8 — On définit les 2-morphismes entre 1-morphismes de diagrammes de k-schémas rigides (resp.formels) comme dans [Ayo07a, Définition 2.4.4]. Toutefois, nous n’aurons à considérer que les structures de 1-catégoriessur les 2-catégories DiaSchRig/k et DiaSchF/k.

Étant donné un diagramme de k-schémas rigides (resp. formels) (F , I) (resp. (F , I)), on note SmRig/F (resp.SmF/F ) la catégorie dont les objets sont les couples (U, i) (resp. (U, i)) avec i ∈ Ob(I) et U (resp. U) un F (i)-schémarigide lisse (resp. F (i)-schéma formel lisse).

On suppose donnée une catégorie cocomplète C. Soit (f, α) un morphisme de diagrammes de k-schémas rigides(resp. formels) comme dans la définition 1.4.7. On définit un foncteur

(f, α)∗ : PreShv(SmRig/F ,C) // PreShv(SmRig/G ,C)

(resp. (f, α)∗ : PreShv(SmF/F ,C) // PreShv(SmF/G ,C) )

par la composée f∗ α∗ où f∗ est l’image inverse suivant le foncteur (U/F (α(j)), j) (U ×F(α(j)) G (j), j) et α∗ lefoncteur de composition à gauche par (U/F (α(j)), j) (U/F (α(j)), α(j)). On fait de même pour le cas respé. Ona la proposition suivante qui se démontre de la même façon que [Ayo07a, Propositions 4.5.3 et 4.5.4] :

Proposition 1.4.9 — 1- L’association (f, α) (f, α)∗ s’étend naturellement en un 2-foncteur

PreShv(SmRig/(−),C) : DiaSchRig/k // Cat .

Il en est de même pour le cas réspé.2- Si (f, α) est lisse argument par argument, le foncteur (f, α)∗ admet un adjoint à gauche que l’on note (f, α)#.

Lorsque C est complète, (f, α)∗ admet un adjoint à droite que l’on note (f, α)∗.

Soit F un diagramme de k-schémas rigides. En appliquant le foncteur (−)//π, on déduit un diagramme de k-schémas formels F//π. Le foncteur (−)//π induit alors un foncteur cpl : SmRig/F // SmF/(F//π) . D’autre part,

on dispose d’un plongement pleinement fidèle P : SmF/(F//π) // SmRig/F qui consiste à regarder un k-schéma

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 73

formel comme un k-schéma rigide de la manière évidente. On vérifie immédiatement que les foncteurs (P, cpl) formentun couple de foncteurs adjoints.

On note (cpl∗, cpl∗) et (P∗,P∗) les foncteurs images inverses et images directes sur les préfaisceaux induits par cplet P. On a alors une adjonction (P∗, cpl∗) et donc un isomorphisme canonique cpl∗ ' P∗. Notons le lemme :

Lemme 1.4.10 — Soit (f, α) : (G , J) // (F , I) un morphisme de diagrammes de k-schémas rigides. On note

(f , α) : (G //π, J) // (F//π, I) le morphisme obtenu en appliquant le foncteur cplf. On a alors un carré commutatifà un 2-isomorphisme près

PreShv(SmRig/(F , I),C)cpl∗

P∗

//

(f,α)∗

PreShv(SmF/(F//π, I),C)

(f ,α)∗

PreShv(SmRig/(G , J),C)cpl∗

P∗

// PreShv(SmF/(G //π, J),C).

Soit (B′,K) un diagramme de k-schémas formels affines. On note (B,K) le diagramme de k-schémas donnépar l ∈ K Spec(Γ(B′(l),O)). Soit (F , I) un diagramme de k-schémas muni d’un morphisme de diagrammes(p, γ) : (F , I) // (B,K) tel que p(i) est de type fini pour tout i ∈ I. On dira simplement que (F , I) est de typefini sur (B,K) (ou encore sur (B′,K)).

En appliquant le foncteur d’analytification, on déduit une diagramme de k-schémas rigides (F an, I) et un foncteurRig : Sm/F // SmRig/F an . On note Rig∗ le foncteur image inverse sur les préfaisceaux. En appliquant le foncteur

de complétion formelle, on déduit un diagramme (F//π, I) et un foncteur cpl : Sm/F // SmF/(F//π) . On notecplf∗ le foncteur image inverse sur les préfaisceaux. On a un isomorphisme canonique cpl ' cpl Rig induisant lesisomorphismes cpl∗ ' cpl∗ Rig∗ ' P∗ Rig∗. Notons le lemme :

Lemme 1.4.11 — Soit (f, α) : (G , J) // (F , I) un morphisme de diagrammes de schémas de type finie au

dessus de (B,K). On note (fan, α) : (G an, J) // (F an, I) le morphisme obtenu en appliquant le foncteur Rig. Ona alors un carré commutatif à un 2-isomorphisme près

PreShv(Sm/(F , I),C)Rig∗

//

(f,α)∗

PreShv(SmRig/(F an, I),C)

(fan,α)∗

PreShv(Sm/(G , J),C)Rig∗

// PreShv(SmRig/(G an, J),C).

On peut munir la catégorie PreShv(SmRig/F ,M) (resp. PreShv(SmF/F ,M)) de trois structures de modèles(voir [Ayo07a, Définitions 4.4.15 et 4.5.8]) :

(i) la structure projective (W,Cofproj ,Fibproj), où les fibrations sont données argument par argument,(ii) la structure injective (W,Cof inj ,Fibinj), où les cofibrations sont données argument par argument,(iii) la structure semi-projective (W,Cofs−pr,Fibs−pr), où les cofibrations sont les flèches qui deviennent des cofi-

brations projectives après restriction à SmRig/F (i) (resp. SmF/F (i)) pour tout i ∈ Ob(I).

Munissons la catégorie SmRig/F (resp. SmF/F ) de sa topologie de Nisnevich. On peut localiser les trois structuresde modèles ci-dessus relativement aux équivalence Nis-locales (voir [Ayo07a, Définition 4.4.33]). On obtient alors lestrois structures Nis-locales :

(i) la structure projective Nis-locale (WNis,Cofproj ,Fibproj−Nis),(ii) la structure injective Nis-locale (WNis,Cof inj ,Fibinj−Nis),(iii) la structure semi-projective Nis-locale (WNis,Cofs−pr,Fibs−pr−Nis).

Notons B1k le k-schéma rigide (Spm(kt),Spf(kt)) et B1

X= B1

k×kX pour tout k-schéma rigide X. La géné-ralisation évidente de la proposition 1.3.1, montre qu’on peut localiser ces trois structures suivant la classe B desmorphismes (B1

U, i)⊗Acst // (U, i)⊗Acst (resp. (B1

U, i)⊗Acst // (U, i)⊗Acst ) avec i ∈ Ob(I), U (resp. U)

un F (i)-schéma rigide lisse (resp. F (i)-schéma formel lisse) et A ∈ Ob(M). On obtient ainsi les trois structures demodèles :

(i) la structure projective B1-locale (WB1 ,Cofproj ,Fibproj−B1),

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74 Motifs des variétés rigides analytiques I

(ii) la structure injective B1-locale (WB1 ,Cof inj ,Fibinj−B1),(iii) la structure semi-projective B1-locale (WB1 ,Cofs−pr,Fibs−pr−B1).On fait la définition suivante :

Definition 1.4.12 — La catégorie homotopique des trois structures B1-locales ci-dessus, sera notée RigSHeffM(F )

(resp. FSHeffM(F )). C’est la catégorie homotopique effective des k-schémas rigides (resp. formels) au dessus de F

(resp. F ) à coefficients dans M.

On a le théorème suivant dont la preuve est la même que celle de [Ayo07a, Théorème 4.5.14] :

Theoreme 1.4.13 — Soit (f, α) un 1-morphisme de diagrammes de k-schémas rigides (resp. formels).1- On a, relativement aux structures semi-projectives, deux adjonctions de Quillen :– ((f, α)∗, (f, α)∗),– (f#, f

∗) lorsque f est cartésien et lisse argument par argument.2- On a, relativement aux structures projectives, trois adjonctions de Quillen :– (f∗, f∗),– (α#, α

∗),– ((f, α)#, (f, α)∗) lorsque (f, α) est lisse argument par argument.3- Enfin, (α∗, α∗) est une adjonction de Quillen relativement aux structures injectives.

Demonstration On commence par les structures Nis-locales. Le cas des structures projectives découle immédiate-ment de [Ayo07a, Théorème 4.4.60]. L’assertion concernant la structure injective, est claire puisque α∗ préserve lescofibrations injectives et les cofibrations injectives Nis-triviales. On se concentre donc sur les structures semi-projectives.Le foncteur (f, α)∗ préserve les cofibrations semi-projectives et les cofibrations semi-projectives Nis-triviales. En effet,il suffit de vérifier cela dans le cas où I et J sont la catégorie finale e. Le résultat découle alors du cas projectif. Lemême raisonnement s’applique au foncteur f#. Pour plus de détails, le lecteur peut consulter la preuve de [Ayo07a,Théorème 4.5.10].

Pour terminer, il reste à vérifier que nos foncteurs de Quillen à gauche passent à la B1-localisation, i.e., qu’ilenvoient les flèches de B sur des B1-équivalences faibles. Ceci se démontre exactement comme dans la preuve de[Ayo07a, Théorème 4.5.14]. c.q.f.d

On a également le résultat ci-dessous dont la preuve est laissée en exercice.

Proposition 1.4.14 — 1- Soit F un diagramme de k-schémas rigides. Les foncteurs

cpl∗ : PreShv(SmRig/F ,M) // PreShv(SmF/(F//π),M)

P∗ : PreShv(SmF/(F//π),M) // PreShv(SmRig/F ,M)

sont de Quillen à gauche relativement aux structures projectives et semi-projectives.2- Soit F un diagramme de k-schémas de type fini au-dessus d’un diagramme de k-schémas formels affines. Le

foncteurRig∗ : PreShv(Sm/F ,M) // PreShv(SmRig/F an,M)

est de Quillen à gauche relativement aux structures projectives et semi-projectives.

Dans la sous-section 1.3.3, nous avons fixé un remplacement cofibrant T deA1

Z ⊗ 1cstGmZ ⊗ 1cst

dans PreShv(Sm/Z,M).

On note T an (resp. T for) l’image inverse de T par la composée des foncteurs images inverses

PreShv(Sm/Z,M) // PreShv(Sm/k,M)Rig∗// PreShv(SmRig/k,M) // PreShv(SmRig/F ,M)

(resp. PreShv(Sm/Z,M) // PreShv(Sm/k,M)[−//π]∗

// PreShv(SmF/k,M) // PreShv(SmF/F ,M) ).

On vérifie immédiatement que T an (resp. T for) est un remplacement semi-projectivement cofibrant de(A1

k)an ⊗ 1cst

(Gmk)an ⊗ 1cst(resp.

B1k ⊗ 1cst

∂B1k ⊗ 1cst

). En effet, il suffit de remarquer queA1

Z ⊗ 1cstGmZ ⊗ 1cst

est faiblement équivalent à la cofibre homotopique

de GmZ ⊗ 1cst // A1Z ⊗ 1cst puisque cette dernière est une cofibration injective.

On pose alors pour un diagramme de k-schémas rigides (resp. formels) F (resp. F )

M(F ) = SpectΣT an(PreShv(SmRig/F ,M)) (resp. M(F ) = SpectΣ

T for(PreShv(SmF/F ,M))).

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 75

Bien que l’objet T an (resp. T for) est seulement semi-projectivement cofibrant, le foncteur T an⊗− (resp. T for⊗−) estun foncteur de Quillen à gauche pour les structures projectives (voir [Ayo07a, Lemme 4.5.20]). On peut alors munirM(F ) (resp. M(F )) de sa structure de modèle projective stable déduite de l’une de ces structures B1-locales. Onobtient ainsi trois structures de modèles sur M(F ) (resp. M(F )) :

(i) la structure projective B1-locale stable (WB1−st,Cofproj ,Fibproj−B1−st),

(ii) la structure injective B1-locale stable (WB1−st,Cof inj ,Fibinj−B1−st),

(iii) la structure semi-projective B1-locale stable (WB1−st,Cofs−pr,Fibs−pr−B1−st).

On fait la définition suivante :

Definition 1.4.15 — La catégorie homotopique des trois structures B1-locales stables ci-dessus sera notéeRigSHM(F ) (resp. FSHM(F )). C’est la catégorie homotopique stable des k-schémas rigides (resp. formels) audessus de F (resp. F ) à coefficients dans M.

Le résultat ci-dessous découle du théorème 1.4.13 et de [Ayo07a, Lemme 4.3.34]. Notons toutefois que pour lecas des opérations f#, on utilise la formule de projection f#(f∗T ⊗ −) ' T ⊗ f# pour étendre le foncteur f# auxcatégories des spectres.

Theoreme 1.4.16 — Soit (f, α) un 1-morphisme de diagrammes de k-schémas rigides (resp. formels).1- On a, relativement aux structures projectives stables déduites des structures semi-projectives B1-locales sur les

préfaisceaux, deux adjonctions de Quillen :– ((f, α)∗, (f, α)∗),– (f#, f

∗) lorsque f est cartésien et lisse argument par argument.2- On a, relativement aux structures projectives stables déduites des structures semi-projectives B1-locales sur les

préfaisceaux, trois adjonctions de Quillen :– (f∗, f∗),– (α#, α

∗),– ((f, α)#, (f, α)∗) lorsque (f, α) est lisse argument par argument.3- Enfin, (α∗, α∗) est une adjonction de Quillen relativement aux structures projectives stables déduites des struc-

tures injectives B1-locales sur les préfaisceaux.

La première partie de la proposition 1.4.9, montre que M(−) s’étend naturellement en un 2-foncteur contravariantqui à (f, α) associe (f, α)∗. Par le théorème 1.4.16, on obtient ainsi deux 2-foncteurs contravariants

RigSHM : DiaRigSch/k // TR et FSHM : DiaSchF/k // TR .

De plus, pour tout morphisme de diagrammes de k-schémas rigides (resp. formels) (f, α), le foncteur (f, α)∗ possèdeun adjoint à droite (f, α)∗. Lorsque f est lisse argument par argument, (f, α)∗ possède aussi un adjoint à gauche(f, α)#. On déduit de la proposition 1.4.14 le résultat suivant :

Proposition 1.4.17 — 1- Soit F un diagramme de k-schémas rigides. Les foncteurs

cpl∗ : SpectΣT an(PreShv(SmRig/F ,M)) // SpectΣ

T for(PreShv(SmF/(F//π),M))

P∗ : SpectΣT for(PreShv(SmF/(F//π),M)) // SpectΣ

T an(PreShv(SmRig/F ,M))

sont de Quillen à gauche relativement aux structures projectives stables déduites des structures projectives et semi-projectives.

2- Soit F un diagramme de k-schémas de présentation finie sur un diagramme de k-schémas formels affines. Lefoncteur

Rig∗ : SpectΣT (PreShv(Sm/F ,M)) // SpectΣ

T an(PreShv(SmRig/F an,M))

est de Quillen à gauche relativement aux structures projectives stables déduites des structures projectives et semi-projectives.

On en déduit alors des foncteurs

(1.122) Rig∗ : SHM(F ) // RigSHM(F an) , cpl∗ : RigSHM(F ) // FSHM(F//π)

et P∗ : FSHM(F//π) // RigSHM(F ) .

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76 Motifs des variétés rigides analytiques I

On a encore un isomorphisme naturel cpl∗ ' P∗ et des carrés commutatifs à 2-isomorphisme près

(1.123) RigSHM(F , I)cpl∗

//

(f,α)∗

FSHM(F//π, I)

(f ,α)∗

RigSHM(G , J)cpl∗

// FSHM(G //π, J)

SHM(F , I)Rig∗

//

(f,α)∗

RigSHM(F an, I)

(fan,α)∗

SHM(G , J)Rig∗

// RigSHM(G an, J).

1.4.3 L’axiome de localité pour RigSH(−) et FSH(−)Étant donné un k-schéma rigide X (resp. formel X), on note t∅ la topologie sur SmRig/X (resp. SmF/X) engendrée

par la crible ∅ → ∅/X (resp. ∅ → ∅/X) avec ∅ le préfaisceau vide et ∅/X (resp. ∅/X) le préfaisceau représenté par leschéma rigide (resp. formel) vide. Un préfaisceau F sur SmRig/X (resp. SmF/X) à valeurs dans une catégorie complèteet cocomplète C est un t∅-faisceau si et seulement si F (∅/X) (resp. F (∅/X)) est un objet final. Le faisceautisé at∅F dupréfaisceau F est donné par

at∅F (U/X) =

F (U/X) si U/X 6' ∅/X,∗ si U/X ' ∅/X.

La formule analogue est également vraie dans le cas respé. Lorsque C est pointée, l’inclusion

Shvt∅(SmRig/X,C) ⊂ PreShv(SmRig/X,C) (resp. Shvt∅(SmF/X,C) ⊂ PreShv(SmF/X,C))

admet un adjoint à droite b. Il est donné par bF (U/X) = F (U/X)×F (∅/X) ∗. Il en est de même dans le cas respé.

Proposition 1.4.18 — Soit i : Z // X une immersion fermée de k-schémas rigides. Le foncteur i∗ :

Shvt∅(SmRig/Z,M) // Shvt∅(SmRig/X,M) est de Quillen à gauche relativement aux structures injectives Nis-

locales et B1-locales. L’énoncé analogue pour les immersions fermées de k-schémas formels est également vrai.

Demonstration Le foncteur i∗ : PreShv(SmRig/Z,M) // PreShv(SmRig/X,M) admet un adjoint à droite

i! qui à un préfaisceau H sur SmRig/X associe le préfaisceau i!H donné par

i!H : (V → Z) ∈ SmRig/Z LimU×XZ→V ∈(SmRig/X)/V

H(U).

On déduit que le foncteur i∗ : Shvt∅(SmRig/Z,M) // Shvt∅(SmRig/X,M) admet un adjoint à droite donné par

b i! inc. On le notera encore i!.Les cofibrations de la structure injective sur Shvt∅(−,M) sont les t∅-faisceautisations des cofibrations injectives

de préfaisceaux. C’est donc exactement les morphismes de t∅-faisceaux H // K tels que H(U) // K(U) est

une cofibration pour tout X-schéma rigide lisse U . De même, un morphisme de t∅-faisceaux f : H // K est uneéquivalence faible si et seulement si f(U) est une équivalence faible pour tout X-schéma rigide U .

On déduit immédiatement que le foncteur i∗ : Shvt∅(SmRig/Z,M) // Shvt∅(SmRig/X,M) préserve les co-fibrations injectives et les équivalences faibles de la structure (W,Cof inj ,Fibinj). C’est donc bien un foncteur deQuillen à gauche.

Montrons que i∗ envoie les équivalences Nis-locales sur des équivalences Nis-locales. Soit u : H // K uneéquivalence Nis-locale de Shvt∅(SmRig/Z,M). Soient n ∈ Z et A ∈ E. On a un carré commutatif

i∗Π0(A[−n], H) // i∗Π0(A[−n],K)

Π0(A[−n], i∗H) // Π0(A[−n], i∗K).

Il faut donc prouver que aNisi∗Π0(A[−n], H) // aNisi∗Π0(A[−n],K) est inversible. Le résulat découle immédiate-ment de la commutation aNis i∗ ' i∗ aNis pour les t∅-faisceaux d’ensembles (voir le lemme 1.4.19 ci-dessous).

Pour montrer que i∗ préserve les B1-équivalences faibles, il suffit de montrer que Li∗ envoie les flèches de laforme B1

V⊗A // V ⊗A (avec A ∈ Ob(M) et V un Z-schéma rigide lisse) sur des B1-équivalences faibles. Par la

discussion précédente, on sait que i∗ se dérive trivialement. Il faut donc montrer que

p : i∗(B1V⊗Acst) // i∗(V ⊗Acst)

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 77

est une B1-équivalence faible. La flèche p admet une section s (induite par le zero de B1k). Il suffit donc de montrer que

l’identité de i∗(B1V⊗Acst) est B1-homotope à la flèche s p. On obtient une telle homotopie en prenant la composée

i∗B1X⊗ (B1

V⊗Acst) // i∗(B1

Z)⊗ i∗(B1

V⊗Acst) i∗((B1

Z×ZB1

Z×ZV )⊗Acst)

m// i∗((B1

Z×ZV )⊗Acst)

avec m la flèche induite par la multiplication du k schéma rigide en anneaux B1k .

Le cas des k-schémas formels se traite de la même manière. c.q.f.d

Lemme 1.4.19 — Soit i : Z // X (resp. i : Z // X ) une immersion fermée de k-schémas rigides (resp.formels). La transformation naturelle aNis i∗ // i∗ aNis est inversible lorsqu’elle est évaluée sur les t∅-faisceauxd’ensembles.

Demonstration On traite seulement le cas non-respé. Soit F un préfaisceau d’ensembles sur SmRig/Z et U unX-schéma rigide lisse. On a (avec les notations de [SGA 4])

L(i∗F )(U) = Colim(Ui→U)i∈CovNis(U)

Eq

∏i

F (U i×XZ) ////

∏i,j

F ((U i×UU j)×XZ)

où la colimite est prise celon la catégorie cofiltrante CovNis(U) des familles (U i → U)i de morphismes étales qui sontcouvrantes pour la topologie de Nisnevich.

Le foncteur évident CovNis(U) // CovNis(U×XZ) qui à une famille (U i → U)i associe la famille (U i×XZ →U×ZU) est cofinal dès que U×XZ est non vide 3. En effet, soit (V j → U×XZ)i une famille couvrante pour la topologiede Nisnevich (l’ensemble indexant est donc non vide). Quitte à raffiner la famille en question, on peut supposer qu’ilexiste pour tout j un U -schéma rigide étale U j tel que V j = U j×XZ. (Pour montrer cela, on peut se ramenerau cas des k-variétés rigides et des k-schémas formels en utilisant le recouvrement U = Uη ∪ U//π.) La famille(U j → U)j

∐(U − U×XZ) → U est alors un Nis-recouvrement de U dont la restriction à U×XZ raffine notre

recouvrement de départ (puisque ∅ = (U −U×XZ)×XZ → Z se factorise par tous les V j et qu’il y en a au moins un).Il vient que lorsque U×XZ est non vide, L(i∗F )(U) est isomorphe à

Colim(V j→U×XZ)i∈Cov(U×XZ)

Eq

∏i

F (V i)////

∏i,j

F (V i×U×XZV j)

= LF (U×XZ).

D’autre part, pour F un t∅-faisceau, on évidement L(i∗F )(U) = ∗ pour U×XZ ' ∅/Z. Ceci donne L(i∗F ) ' i∗LF etdonc également un isomorphisme aNis(i∗F ) ' i∗aNisF . On laisse aux lecteurs le soin de vérifier que cet isomorphismecoïncide avec l’isomorphisme canonique de l’énoncé. c.q.f.d

On suppose donné au diagramme dans RigSch/k (resp. SchF/k)

Uj// X Z

ioo (resp. U

j// X Z

ioo )

avec i une immersion fermée et j l’immersion ouverte complémentaire. Soit F un t∅-faisceau sur SmRig/X (resp.SmF/X) à valeurs dans M. Le carré de t∅-faisceaux

(1.124) j#j∗F //

F

∗ // i∗i∗F

commute. En effet, toute flèche de j#j∗F vers i∗i∗F est nulle puisqu’elle correspond par adjonction à une flèche versj∗i∗i

∗F = ∗. (On utilise ici qu’on travaille dans la catégorie des t∅-faisceaux.) On a le théorème suivant :

Theoreme 1.4.20 — Soit F un t∅-faisceau projectivement cofibrant. Le carré (1.124) est homotopiquementcocartésien relativement à la structure de modèles B1-locale.

Il s’agit d’adapter la preuve de [MV99, §3.2, Theorem 2.21]. On suivera toutefois le traitement de [Ayo07a,Théorème 4.5.36]. On se ramène par l’analogue de [Ayo07a, Lemme 4.5.37] au cas F = at∅(X

′ ⊗ Acst) (resp. F =

3. Lorsque U est non vide et que U×XZ est vide, ce foncteur est bien entendu non cofinal !

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78 Motifs des variétés rigides analytiques I

at∅(X′ ⊗ Acst)) avec X

′(resp. X′) un X-schéma rigide lisse (resp. X-schéma formel lisse). En adaptant [Ayo07a,

Lemma 4.5.41] au cas des schémas rigides (esp. formels), on se ramène à montrer que le carré commutatif

U′ ⊗Acst //

X′ ⊗Acst

U ⊗Acst // (i∗Z′)⊗Acst

(resp. U′ ⊗Acst //

X′ ⊗Acst

U⊗Acst // (i∗Z′)⊗Acst)

est homotopiquement cocartésien. En d’autres termes, il faut montrer que le morphisme

[X′∐

U′ U ]⊗Acst // (i∗Z

′)⊗Acst (resp. [X′

∐U′ U]⊗Acst // (i∗Z

′)⊗Acst )

est une B1-équivalence faible. En utilisant [Ayo07a, Corollaire 4.5.40], on se ramène à prouver la proposition ci-dessous.

Proposition 1.4.21 — 1- Soit X′un X-schéma rigide lisse et s : Z // X

′ une section partielle définie surle fermé Z. On note TX′,s le préfaisceau d’ensembles sur SmRig/X défini par

TX′,s(P ) =

homX(P ,X

′)×homZ(P ×XZ,X

′×XZ) ∗ si P ×XZ 6= ∅,∗ si P ×XZ = ∅.

Ci-dessus, l’ensemble homZ(P ×XZ,X′×XZ) est pointé par la composée P ×XZ // Z

s// X′×XZ . Alors, la

flèche TX′,s ⊗Acst // X ⊗Acst est une B1-équivalence faible.

2- Soit X′ un X-schéma formel lisse et s : Z // X′ une section partielle définie sur Z. On note TX′,s lepréfaisceau d’ensembles sur SmF/X défini par

TX′,s(P) =

homX(P,X′)×homZ(P×XZ,X′×XZ) ∗ si P×XZ 6= ∅,

∗ si P×XZ = ∅.

Ci-dessus, l’ensemble homZ(P×XZ,X′×XZ) est pointé par la composée P×XZ // Z

s// X′×XZ . Alors, la flèche

TX′,s ⊗Acst // X⊗Acst est une B1-équivalence faible.

Demonstration On traite uniquement le cas des k-schémas rigides. Le cas des k-schémas formels est plus simple.On procède en trois étapes.

Étape 1 : Soit (ui : Xi// X )i∈I un recouvrement pour la topologie Nisnevich du k-schéma rigide X. On note

X′i, Zi, si, etc les pull-back de X

′, Z, s, etc suivant ui. Le préfaisceau u∗i TX′,s s’identifie canoniquement à TXi,si . Par

le lemme 1.4.22 ci-dessous, il suffit de démontrer la proposition pour chaque Xi. On peut donc supposer les conditionsci-dessous satisfaites.(i) X et Z sont tous les deux des k-schémas formels affines ou des k-affinoïdes (modulo les plongement pleinement

fidèles de l’exemple 1.4.3).

(ii) Lorsque Z est un k-schéma formel affine, s : Z // X′ admet un voisinage qui est un k-schéma formel affine.

De plus, le faisceau normal de l’immersion s : Z // X′×XZ est libre.

(iii) Lorsque Z est un k-affinoïde, s : Z // X′ admet un voisinage qui est un k-affinoïde. De plus, le faisceau

normal de l’immersion s : Z // X′×XZ est libre.

En effet, en utilisant le recouvrement canonique X = Xη ∪ X//π on se ramène immédiatement au cas où X est unk-schéma formel affine ou un k-affinoïde. Pour déduire (i) on utilise la remarque 1.4.6. Les assertions (ii) et (iii) sontégalement faciles.

Étape 2 : Soient X′′

// X′ un morphisme étale et s, s′ des sections patielles définies sur Z rendant commutatif le

triangle

Zs′//

s&&

X′′

X′.

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 79

On en déduit un morphisme de préfaisceaux

(1.125) TX′′,s′// TX′,s .

On montrera qu’il induit un isomorphisme sur les faisceaux Nisnevich associés. Soit Y un X-schéma rigide lisse. Toutrecouvrement Nisnevich R de Y se raffine par un recouvrement R1

∐R2 avec R1 un recouvrement Nisnevich de la

k-variété rigide Y η = Y et R2 un recouvrement Nisnevich du k-schéma formel Y //π = Y. Il suffit donc de montrerqu’après faisceautisation, les restrictions de (1.125) suivant les inclusions évidentes Et/Y ⊂ Et/Y ⊂ SmRig/X etEt/Y ⊂ Et/Y ⊂ SmRig/X sont des isomorphismes. On traite les cas de Et/Y et Et/Y séparément.

Cas 1 : On suppose que Y = (Y, ∅) avec Y un k-affinoïde. On peut supposer aussi que la valuation de k est nontriviale puisque le deuxième cas s’appliquera au cas de la valuation triviale. On montrera que la restriction de (1.125)à Ouv(Y ) devient inversible après faisceautisation pour la topologie des recouvrements admissibles. Il suffit alors devérifier que les fibres de (1.125) sont inversibles pour tous les points p ∈ P(Y ), i.e., que l’application

(1.126) ColimV ∈Flt(p)

TX′′,s′(V ) // ColimV ∈Flt(p)

TX′,s(V )

est bijective. Lorsque p /∈ P(Y ×XZ), il existe V ∈ Flt(p) tel que V ×XZ = ∅. Dans ce cas, les deux membres de (1.126)sont des singletons.

Supposons donc que p ∈ P(Y ×XZ). Soit X′0 un voisinage ouvert de s dans X

′. Pour tout V ∈ Flt(p) et

a ∈ TX′,s(V ) il existe V0 ∈ Flt(p) contenu dans V tel que a|V0∈ TX′0,s

(V0). Il vient que ColimV ∈Flt(p)TX′,s(V ) 'ColimV ∈Flt(p)TX′0,s

(V ). La même discussion d’applique à X′′. On peut donc remplacer X

′′et X

′par des voisinages

ouverts de s et s′. En particulier, on peut supposer qu’ils sont des k-affinoïdes qu’on notera X ′ et X ′′ respectivement.Étant donné que X ′′ // X ′ est étale, on peut trouver un voisinage ouvert X ′′0 de s′ tel que X ′′0

// X ′ est uneimmersion ouverte (par le corollaire 1.1.54). Ceci nous ramène au cas trivial où X ′′ = X ′.

Cas 2 : On suppose que Y = (Yη,Y) avec Y un k-schéma formel affine. Il suffit de vérifier que les fibres sontinversibles pour une famille conservative de points du site Nisnevich Et/Y. Une telle famille est donnée par les pointsy ∈ Yσ étant donnée l’isomorphisme de sites Et/Y ' Et/Yσ. Soit donc y ∈ Yσ. Il s’agit de montrer que l’application

(1.127) Colimy→V→Y

TX′′,s′(V) // Colimy→V→Y

TX′,s(V)

est bijective (avec V parcourant les voisinages étales de y ∈ Y). Lorsque y 6∈ Zσ les deux membres ci-dessus sont dessingletons. On supposera donc dans la suite que y ∈ Zσ.

On définit une application inverse à (1.127) de la manière suivante. Soit f : V // X′ un morphisme de X-

schémas rigides tel que le triangle

V×XZf×XZ

//

X′×XZ

Zs

::

commutate. Le carré ci-dessous est aussi commutatif :

V×XZ //

V

Z // X′′

// X′.

Ceci donne une section partielle V×XZ // U×X′X′′ du morphisme étale V×X′X

′′// V . Quitte à remplacer

V par un voisinage étale plus fin de y (rappelons que y ∈ Zσ), cette section se prolonge uniquement à V. On note

rf : V // V×X′X′′ le morphisme ainsi obtenu. On définit alors f ′ par la composée : V

rf// V×X′X

′′// X′′ .

On vérifie aisément que l’association f f ′ est bien un inverse à droite et à gauche de (1.127).

Étape 3 : Par l’étape précédente, on peut remplacer X′par un voisinage Nisnevich de s. En utilisant la première étape,

on peut alors supposer que X′est un k-schéma formel affine (resp. un k-affinoïde) selon le type de Z. Toujours par

la première étape, le faisceau normal Ns de l’immersion s : Z // X′×XZ Soit (a1, . . . an) ∈ O(X ′) un relèvement

d’une base de Ns. Dans le cas respé, on multiplie les ai par une puissance convenable de π de sorte que |ai|∞ ≤ 1

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80 Motifs des variétés rigides analytiques I

pour tout 1 ≤ i ≤ n. On peut alors considèrer le morphisme X′

// Bnk×X . Ce morphisme est étale au voisinage

de la section s. Par la seconde étape, on peut donc supposer que X′est Bn

Xet s la section nulle au dessus de Z. On

conclut alors comme dans l’étape 3 de la preuve de [Ayo07a, Proposition 4.5.42]. c.q.f.d

Le lemme suivant a été utilisé dans la preuve de la proposition 1.4.21 ci-dessus.

Lemme 1.4.22 — Soient X un k-schéma rigide et u : U // X un morphisme lisse couvrant pour la topologieNis. Le foncteur

u∗ : PreShv(SmRig/X,M) // PreShv(SmRig/U,M)

préserve et détecte les B1-équivalences faibles. L’énoncé correspondant pour les k-schémas formels est également vrai.

Demonstration Rappelons que u∗ ' (cu)∗ avec cu le foncteur de composition à gauche par u. Le fait que (cu)∗préserve les équivalences Nis-locales est clair. Pour montrer que (cu)∗ détecte les équivalences Nis-locales, il suffitde remarquer que (cu)∗ commute au foncteur de faisceautisation et qu’un morphisme de faisceaux d’ensembles a :

H // K sur SmRig/X est un isomorphisme si et seulement si u∗(a) est un isomorphisme (car u est couvrante).Soit f : H // K une flèche de PreShv(SmRig/X,M). On suppose que u∗(f) est une B1-équivalence faible.

Comme u∗ est de Quillen à gauche pour la structure projective B1-locale, on peut supposer que H et K sont fibrantspour la structure (WB1 ,Cofproj ,Fibproj−B1). Comme u∗ est de Quillen à droite relativement à cette structure, ondéduit que u∗(f) est une B1-équivalence faible entre objets B1-fibrants. C’est donc une équivalence Nis-locale. Cecimontre que f est aussi une équivalence Nis-locale. c.q.f.d

Voici quelques corollaires de la proposition 1.4.21 :

Corollaire 1.4.23 — Soit i : Z // X (resp. i : Z // X ) une immersion fermée de k-schémas

rigides (resp. formels). La counité i∗i∗ // id de l’adjonction (i∗, i∗) : RigSHeffM(X) // RigSHeff

M(Z) (resp.

(i∗, i∗) : FSHeffM(X) // FSHeff

M(Z) ) est inverible.

Demonstration On traite uniquement la cas des schémas rigides. Les foncteurs i∗ et i∗ commutent aux sommesinfinies (puisque dérivés de foncteurs de Quillen à gauche). Il suffit donc de montrer que le morphisme des counité estinversible après évaluation en les générateurs compacts de RigSHeff

M(Z). Il s’agit alors de montrer que le morphisme

(1.128) Li∗i∗at∅(Z′ ⊗Acst) // at∅(Z

′ ⊗Acst)

est une B1-équivalence faible pour tout Z ′ quasi-compact et lisse sur Z. La question est locale sur Z′. Plus précisément,

si (Z′i)i∈I est un recouvrement ouvert fini de Z

′par des k-schémas rigides quasi-compacts, il suffira de montrer que

(1.128) est une B1-équivalence faible pour les ∩i∈JZj avec ∅ 6= J ⊂ I.Comme en géométrie algébrique, on montre que tout Z-schéma rigide lisse est localement (pour la topologie

usuelle) un pull-back d’un X-schéma rigide lisse. On peut donc supposer qu’il existe un X-schéma rigide lisse X′tel

que Z′

= X′×XZ. Par la proposition 1.4.21, i∗at∅(Z

′ ⊗Acst) est B1-équivalent au cône du morphisme

at∅((X′×X(X − Z))⊗Acst) // at∅(X

′ ⊗Acst) .

Étant donné que les deux t∅-faisceaux ci-dessus sont projectivement cofibrants, on déduit que Li∗i∗at∅(Z′ ⊗ Acst) est

isomorphe au cône de

at∅((Z′×X(X − Z))⊗Acst) // at∅(Z

′ ⊗Acst) .

Mais le schéma rigide Z′×X(X − Z) est vide. D’où le résultat recherché. c.q.f.d

Corollaire 1.4.24 — Soit X un k-schéma formel et notons i : Xσ // X l’immersion fermée de sa fibre

spéciale. Le foncteur i∗ : FSHeffM(X) // FSHeff

M(Xσ) = SHeffM(Xσ) est une équivalence de catégories.

Demonstration Le complémentaire de Xσ dans X est vide. On déduit de la proposition 1.4.21 que le morphismed’unité id // i∗i

∗ est inversible. D’autre part, le corollaire 1.4.23 affirme que la counité i∗i∗ // id est inversible.D’où le résultat. c.q.f.d

Remarque 1.4.25 — Soit X un k-schéma formel. On définit un foncteur P : SHeffM(Xσ) // RigSHeff

M(Xη) parla composée

SHeffM(Xσ)

i∗∼// FSHeff

M(X)j∗P∗

// RigSHeffM(Xη) .

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 81

Contrairement à la composée

SHeffM(Xσ)

i∗// RigSHeff

M(X)j∗// RigSHeff

M(Xη)

(avec j l’inclusion de Xη dans X vu comme un k-schéma rigide) le foncteur P n’est pas nul. De plus, si M est unecatégorie de modèles monoïdale et unitaire, P est monoïdal et unitaire (et donc envoie 1Xσ sur 1Xη ) comme il découlefacilement du corollaire 1.4.24.

Dans le reste de cette sous-section, on établit les analogues stables des résultats précédents. Soit X (resp. X)un k-schéma rigide (resp. formel). Le foncteur at∅ : PreShv(SmRig/X,M) // Shvt∅(SmRig/X,M) (resp. at∅ :

PreShv(SmF/X,M) // Shvt∅(SmF/X,M) ) est une équivalence de Quillen à gauche relativement aux structures

B1-locales. Il induit donc une équivalence de Quillen à gauche

at∅ : SpectΣT an(PreShv(SmRig/X,M)) // SpectΣ

at∅ (T an)(Shvt∅(SmRig/X,M))

(resp. at∅ : SpectΣT for(PreShv(SmF/X,M)) // SpectΣ

at∅ (T for)(Shvt∅(SmF/X,M)) ).

Pour une immersion fermée i : Z // X (resp. i : Z // X ) on dispose d’une transformation naturelle

(1.129) T an ⊗ i∗(−) // i∗(Tan ⊗−) (resp. T for ⊗ i∗(−) // i∗(T

for ⊗−) )

qui induit le prolongement i∗ : SpectΣT an(PreShv(SmRig/Z,M)) // SpectΣ

T an(PreShv(SmRig/X,M)) (resp. i∗ :

SpectΣT for(PreShv(SmF/Z,M)) // SpectΣ

T for(PreShv(SmF/X,M)) ). Le lecteur vérifiera facilement que (1.129)induit une transformation naturelle

(1.130) at∅(Tan)⊗ i∗(−) // i∗(at∅(T

an)⊗−) (resp. at∅(Tfor)⊗ i∗(−) // i∗(at∅(T

for)⊗−) )

où le produit tensoriel est pris dans la catégorie des t∅-faisceaux. On obtient de plus un carré commutatif de catégories

SpectΣat∅ (T an)(Shvt∅(SmRig/Z,M))

i∗//

_

SpectΣat∅ (T an)(Shvt∅(SmRig/X,M))

_

SpectΣT an(PreShv(SmRig/Z,M))

i∗// SpectΣ

T an(PreShv(SmRig/X,M))

où les flèches verticales sont les inclusions évidentes (qui sont donc des équivalences de Quillen à droite). On a égalementle carré commutatif analogue pour les k-schémas formels. Notons le théorème suivant :

Theoreme 1.4.26 — 1- Soit i : Z // X une immersion fermée de k-schémas rigides. Le foncteur

(1.131) i∗ : SpectΣat∅ (T an)(Shvt∅(SmRig/Z,M)) // SpectΣ

at∅ (T an)(Shvt∅(SmRig/X,M))

est de Quillen à gauche relativement aux structures injectives stables sur les spectres déduites des structures injectivesB1-locales (WB1 ,Cof inj ,Fibinj−B1) sur les catégories de t∅-faisceaux.

2- Soit i : Z // X une immersion fermée de k-schémas formels. Le foncteur

(1.132) i∗ : SpectΣat∅ (T for)(Shvt∅(SmF/Z,M)) // SpectΣ

at∅ (T for)(Shvt∅(Sm/X,M))

est de Quillen à gauche relativement aux structures injectives stables sur les spectres déduites des structures injectivesB1-locales (WB1 ,Cof inj ,Fibinj−B1) sur les catégories de t∅-faisceaux.

Demonstration On traite seulement le cas des k-schémas rigides. Le foncteur (1.131) admet un adjoint à droite(voir le lemme 1.4.27 ci-dessous). Le fait que (1.131) préserve les cofibrations injectives et les cofibrations injectivesB1-triviales niveau par niveau découle de la proposition 1.4.18. Il reste à voir que (1.131) envoie les flèches de la

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82 Motifs des variétés rigides analytiques I

forme ωpK (voir [Ayo07a, Sous-section 4.3.2]) sur des B1-équivalences stables pour tout K ∈ Ob(Shvt∅(SmRig/Z,M))injectivement cofibrant et p ∈ N. On dipose d’un carré commutatif

Susp+1at∅ (T an),Σ(at∅(T

an)⊗ i∗K)ωpi∗K

//

Suspat∅ (T an),Σ(i∗K)

i∗Susp+1at∅ (T an),Σ(at∅(T

an)⊗K)i∗ω

pK// i∗Suspat∅ (T an),Σ(K).

Il suffira de montrer que les flèches verticales sont des B1-équivalences faibles niveau par niveau. On se ramène ainsià montrer que les morphismes

(1.133) at∅((Tan)⊗r)⊗ i∗K // i∗(at∅((T

an)⊗r)⊗K)

sont des B1-équivalences faibles. Notons j l’immersion ouverte complémentaire. Le couple de foncteurs (Li∗, j∗) estconservatif par le théorème 1.4.20. Il suffit donc de prouver que(1.134)j∗[at∅((T

an)⊗r)⊗ i∗K] // j∗[i∗(at∅((Tan)⊗r)⊗K)] et Li∗[at∅((T

an)⊗r)⊗ i∗K] // Li∗[i∗(at∅((Tan)⊗r)⊗K)]

sont inversibles dans RigSHeffM(−). La flèche de gauche est l’unique flèche entre objets nuls puisque j∗i∗ = 0. Pour la

seconde flèche, on considère le carré commutatif

Li∗[at∅((Tan)⊗r)⊗ i∗K] //

Li∗[i∗(at∅((Tan)⊗r)⊗K)]

at∅((Tan)⊗r)⊗ Li∗i∗K // at∅((T

an)⊗r)⊗K.

Le résultat découle alors du fait que la counité de (Li∗, i∗) est inversible par le corollaire 1.4.23. c.q.f.d

Lemme 1.4.27 — On garde les hypothèses du théorème 1.4.26. Le foncteur (1.131) (resp. (1.132)) admet unadjoint à droite.

Demonstration Soit E un at∅(Tan)-spectre symétrique à valeurs dans Shvt∅(SmRig/X,M). On définit une suite

symétrique (Fn)n∈N à valeurs dans Shvt∅(SmRig/Z,M) par

(1.135) Fn = Eq

(∏k∈N

Homg(at∅(Tan)⊗k, i!Ek+n) //

//

∏l∈N

Homg(at∅(Tan)⊗l, i!Homg(at∅(T

an),El+1+n))

)

où Σn opère sur Fn par les restrictions suivant 1×Σn ⊂ Σm ×Σn ⊂ Σm+n de l’action de Σm+n sur Em+n. Les deuxflèches de (1.135) sont données par l’adjoint du morphisme d’assemblage du at∅(T

an)-spectre E et par la composée

Homg(at∅(Tan)⊗k, i!(−)) ' Homg(at∅(T

an)⊗k−1,Homg(at∅(Tan), i!(−)))

Homg(at∅(Tan)⊗k−1, i!Homg(at∅(T

an),−)).

On vérifie facilement que le produit des flèches

Fn // Homg(at∅(Tan)⊗k, i!Ek+n) ' Homg(at∅(T

an),Homg(at∅(Tan)⊗k−1, i!Ek−1+1+n))

se factorise par le sous-objet Homg(at∅(Tan),Fn+1). On obtient ainsi un at∅(T

an)-spectre symétrique F. Le lecteurvérifiera que le foncteur hom(i∗(−),E) est représenté par F. c.q.f.d

On déduit maintenant l’axiome de localité pour les catégories RigSHM(−) et FSHM(−).

Corollaire 1.4.28 — Soient i : Z // X (resp. i : Z // X ) une immersion fermée de k-schémasrigides (resp. formels) et j l’immersion ouverte complémentaire. Le couple de foncteurs (Li∗, j∗) est conservative surRigSHM(X) (resp. FSHM(X)). De plus, le morphisme de counité Li∗Ri∗ // id est inversible.

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 83

Demonstration Comme d’habitude, on traite le cas des schémas rigides et on laisse aux lecteurs le soin d’adap-ter l’argument au cas des schémas formels. Soit E est un at∅(T

an)-spectre projectivement cofibrant à valeurs dansShvt∅(SmRig/X,M). Le carré commutatif

(1.136) j#j∗E //

E

∗ // i∗i∗E

est homotopiquement cocartésien niveau par niveau. Comme i∗ préserve les B1-équivalences stables, il se dérive tri-vialement. On déduit ainsi un 2-triangle distingué dans RigSHM(X) :

(1.137) Lj#j∗ // id // Ri∗Li

∗ // .

Ceci montre que le couple de foncteurs (Li∗, j∗) est conservatif. La seconde assertion découle de son analogue instable(et du fait que i∗ se dérive trivialement). c.q.f.d

Corollaire 1.4.29 — Soit X un k-schéma formel et notons i : Xσ // X l’immersion fermée de sa fibre

spéciale. Le foncteur i∗ : FSHM(X) // FSHM(Xσ) = SHeffM(Xσ) est une équivalence de catégories.

Demonstration Le complémentaire de Xσ dans X étant vide, on déduit que le morphisme d’unité id // i∗i∗ est

inversible. Par le corollaire 1.4.28 la counité i∗i∗ // id est également inversible. D’où le résultat. c.q.f.d

Remarque 1.4.30 — Soit X un k-schéma formel. Comme dans la remarque 1.4.25 on définit un foncteur P :

SHM(Xσ) // RigSHM(Xη) par la composée

SHM(Xσ)i∗∼// FSHM(X)

j∗P∗// RigSHM(Xη) .

C’est un foncteur monoïdal unitaire (en particulier, non nul).

1.4.4 Fin de la vérification des axiomes et quelques compléments

Dans cette sous-section, on démontre quelques résultats utiles pour la preuve du théorème 1.3.38 qui sera donnéedans la sous-section suivante.

Lemme 1.4.31 — Soit X un k-schéma rigide. Alors RigSHM(X) est compactement engendrée par les objetsde la forme SuspT an(U ⊗ Acst) avec p ∈ N, A ∈ E et U un X-schéma rigide quasi-compact (i.e., Uη est une k-variétérigide quasi-compacte). L’énoncé analogue pour la catégorie instable RigSHeff

M(X) est également vrai.

Demonstration Notons SmRigqc/X la catégorie desX-schémas rigides lisses et quasi-compacts. On a une équivalencede sites (SmRig/X,Nis)

∼// (SmRigqc/X,Nis) . Remarquons d’autre part qu’un préfaisceau projectivement fibrant

F sur SmRigqc/X est Nis-local si et seulement si ses restrictions à SmRigqc/Xη et SmF/(X//π) sont Nis-locaux (i.e.,vérifient la propriété de Brown-Gersten) et si pour tout X-schéma rigide lisse U , le carré

F (U) //

F (Uη)

F (U//π) // F ((U//π)η)

est homotopiquement cartésien. On en déduit que les préfaisceaux projectivement Nis-fibrants sur SmRigqc/X sontstables par colimites filtrantes.

À partir de là, il est facile de se convaincre que les T qc-spectres de préfaisceaux sur SmRigqc/X stablement B1-fibrants sont stables par colimites filtrantes. Ceci montre que les objets SuspT qc(U ⊗ Acst) (avec p, A et U commedans l’énoncé) sont compacts. Qu’ils forment une famille conservative dans RigSHM(X) est facile. Le lemme découlemaintenant de l’équivalence de catégories RigSHM(X) ' HoB1−st(SpectΣ

T qc(PreShv(SmRigqc/X,M))). c.q.f.d

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84 Motifs des variétés rigides analytiques I

Lemme 1.4.32 — Soit un carré cartésien de k-schémas rigides

Y′ g′

//

f ′

X′

f

Yg// X.

On suppose que f est lisse. Alors le 2-morphisme d’échange f ′#g′∗ // g∗f# est inversible (où les opérations sont

prises entre les catégories RigSHeffM(−) ou RigSHM(−)).

Demonstration Il suffit de montrer que le morphisme d’échange est inversible après évaluation sur les générateursSuspT ((U

′ → X′)⊗Acst) avec U

′quasi-compact, lisse sur X

′, p ∈ N et A ∈ E. Mais on a

f ′#g′∗SuspT ((U

′ → X′)⊗Acst) ' f ′#SuspT ((U

′×X′Y′ → Y

′)⊗Acst) = SuspT ((U

′×X′Y′ → Y )⊗Acst)

et g∗f#SuspT ((U′ → X

′)⊗Acst) ' g∗SuspT ((U

′ → X)⊗Acst) ' SuspT ((U′×XY → Y )⊗Acst).

Le lecteur vérifiera facilement que modulo les isomorphismes ci-dessus, le morphisme d’échange est induit par l’iso-morphisme de transitivité du produit fibré U

′×XY ' U′×X′Y

′. c.q.f.d

Theoreme 1.4.33 — Soit X = Spf(A) un k-schéma formel affine. Le 2-foncteur contravariant

RigSHM((−)an) : Sch/A // TR

qui à un A-schéma quasi-projectif X associe la catégorie triangulée RigSHM(Xan) est un 2-foncteur homotopiquestable au sens de [Ayo07a, Définition 1.4.1].

Demonstration Il s’agit de vérifier les axiomes 1 à 6 de loc. cit.. L’axiome 1 est trivial. Les axiomes 2 et 4 sontcontenus dans le théorème 1.4.16 et le corollaire 1.4.28. L’axiome 3 découle du lemme 1.4.32. Pour les axiomes 5 et 6,le lecteur est prié d’adapter les preuves de [Ayo07a, Proposition 4.5.49 et Corollaire 4.5.51]. c.q.f.d

En particulier, pour f un morphisme de A-schémas quasi-projectifs, on dispose des opérations (fan)! et (fan)!. Demême, le théorème de changement de base pour un morphisme projectif est valable dans RigSHM(−) pour l’analytifiéd’un carré cartésien de A-schémas quasi-projectifs (et dont les flèches verticales sont des morphismes projectifs).

Definition 1.4.34 — Soient S un schéma, H1 et H2 deux 2-foncteurs homotopiques stables de domaine lacatégorie des S-schémas quasi-projectifs. Rappelons qu’un 1-morphisme de 2-foncteurs Θ : H1

// H2 est la donnée :

(i) pour tout S-schéma quasi-projectif X, d’un foncteur triangulé ΘX : H1(X) // H2(X) ,

(ii) pour tout morphisme de S-schémas quasi-projectifs f : Y // X , d’un 2-isomorphisme

αf : f∗ ΘX∼// ΘY f∗

compatible avec les 2-isomorphismes de connexions de la manière usuelle.

Étant donné Θ comme ci-dessus, on déduit par adjonction une transformation naturelle βf : ΘX f∗ // f∗ ΘY .Lorsque f est lisse on obtient par adjonction à partir de α−1

f une transformation naturelle γf : f# ΘY// ΘX f# .

On dit que Θ est un prémorphisme de 2-foncteurs homotopiques stables lorsque les γ? sont inversibles. On dit que Θest un morphisme de 2-foncteurs homotopiques stables si les β? et γ? sont inversibles.

On a le lemme suivant :

Lemme 1.4.35 — Soit Spf(A) un k-schéma affine. La famille des foncteurs

Rig∗ : SHM(X) // RigSHM(Xan)

pour X un Spec(A0)-schéma quasi-projectif, s’étend naturellement en un prémorphisme de 2-foncteurs homotopiquesstables de SHM(−) vers RigSHM((−)an).

Demonstration Les transformations naturelles (fan)∗Rig∗ ' Rig∗f∗ proviennent des carrés de droite dans (1.123).Montrons que γf est inversible pour f : Y // X lisse. Étant donné que Rig∗ et f# commutent aux sommes

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 85

infinies, il suffit de montrer que f#Rig∗ // Rig∗f# est inversible après évaluation sur des générateurs compacts deSHM(Y ). Soit donc V un Y -schéma lisse, B ∈ E et p ∈ N. On a

fan# Rig∗SuspT ((V → Y )⊗Bcst) = fan

# SuspT an((V an → Y an)⊗Bcst) = SuspT an((V an → Xan)⊗Bcst)

et Rig∗f#SuspT ((V → Y )⊗Bcst) = Rig∗SuspT ((V → X)⊗Bcst) = SuspT an((V an → Xan)⊗Bcst).On laisse aux lecteurs le soin de se convaincre que, modulo ces identifications, γf est l’dentité. c.q.f.d

On verra plus loin que Rig∗ est en fait un morphisme de 2-foncteurs homotopiques stables. Pour l’instant, nous allonsdériver quelques propriétés des prémorphismes de 2-foncteurs homotopiques stables. On fixe donc un prémorphismeΘ : H1

// H2 comme dans la définition 1.4.34. Dans la suite, on notera Θ à la place de ΘX lorsque cela n’induitpas de confusions. Notons le lemme suivant :

Lemme 1.4.36 — Soit i : Z // X une immersion fermée de S-schémas quasi-projectifs. La transformationnaturelle

βi : Θ i∗ // i∗ Θ

est inversible.

Demonstration Notons j : U // X l’immersion ouverte complémentaire. Par l’axiome de localité, il suffirait demontrer que i∗βi et j∗βi sont inversibles. Pour le premier 2-morphisme on utilise le carré commutatif

i∗Θi∗ //

i∗i∗Θ

Θi∗i∗ // Θ

et le fait que la couinté de (i∗, i∗) est inversible. Pour le second 2-morphisme, on remarque que j∗Θi∗ ' Θj∗i∗ ' 0 etj∗i∗Θ ' 0. Le lemme est démontré. c.q.f.d

Soit M un OX -module localement libre sur un S-schéma quasi-projectif X. On lui associe l’équivalence de ThomTh(M ) = p#s∗ avec p : V(M ) // X la projection du fibré vectoriel associé à M et s la section nulle. Du lemme1.4.36 ci-dessus, on déduit un isomorphisme canonique Th(M ) Θ ' Θ Th(M ) donné par la composée

p#s∗Θβ−1s

∼// p#Θs∗

γp

∼// Θp#s∗ .

Étant donné que Th(M ) est une équivalence de quasi-inverse Th−1(M ) = s!p∗ (voir [Ayo07a, Théorème 1.5.7]), ona aussi un isomorphisme canonique Th−1(M ) Θ ' Θ Th−1(M ).

Proposition 1.4.37 — Il existe une unique famille de 2-isomorphismes

δf : f! Θ∼// Θ f!

indicée par les morphismes de S-schémas quasi-projectifs f : Y // X et vérifiant les propriétés ci-dessous.1. Les δf sont compatibles à la composition des S-morphismes.2. Pour une immersion fermée i, on a δi = β−1

i modulo l’identification i! = i∗.3. Lorsque f est lisse, δf est donnée par la composée

(1.138) f#Th−1(Ωf )Θ∼// f#ΘTh(Ωf )

∼// Θf#Th(Ωf ) .

Demonstration L’unicité est claire puisque tout morphisme de S-schémas quasi-projectifs se factorise par uneimmersion fermée suivie d’un morphisme lisse.

Soit f un morphisme de S-schémas projectifs et f = p s une factorisation de f en une immersion fermée et unmorphisme lisse. On a alors un 2-isomorphisme de connexion f! ' p! s! qui permet de définir δf = (δps!) (p!δs) avecδs et δp comme dans l’énoncé. Il s’agit de montrer que δf est indépendente de la factorisation f = p s.

Soit f = q t une autre factorisation de f en une immersion fermée suivie d’un morphisme lisse. On se ramèneimmédiatement au cas où il existe un diagramme commutatif

• t// •

q//

d

• s// •

p// •

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86 Motifs des variétés rigides analytiques I

avec d lisse. Il est facile de voir que (1.138) définit des 2-isomorphismes compatibles à la composition des morphismeslisses. Il suffirait donc de montrer la commutation du diagramme

d!t!Θ∼//

d!Θt!∼// Θd!t!

s!Θ∼

// Θs!.

On forme le diagramme commutatif

• t′//

t

""•

d′

s′// •

d

• s// •

ayant son carré cartésien. Par construction, δ? pour ? lisse et β?′ vérifient une compatibilité pour le morphismed’échange du type Ex!∗. On est donc ramené à montrer une compatibilité avec le 2-isomorphisme de pureté (en fait,celui obtenu par adjonction de l’isomorphisme de pureté de [Ayo07a, Théorème 1.6.19]), i.e., que le carré

Th(Nt′)ΘΠ//

t′∗d′#Θ

ΘTh(Nt′)Π// t′∗d

′#Θ.

est commutatif. Le lecteur trouvera trouvera suffisamment d’éléments pour prouver la commutation du carré ci-dessusdans la preuve de [Ayo07a, Théorème 2.3.31]. c.q.f.d

Lemme 1.4.38 — Soit un carré cartésien de S-schémas quasi-projectifs

Y′ g′

//

f ′

X′

f

Yg// X.

On a un diagramme commutatifg∗f!Θ

∼//

g∗Θf!∼// Θg∗f!

f ′! g′∗Θ

∼// f ′! Θg

′∗ // Θf ′! g′∗.

Demonstration On se ramène aux cas où f est une immersion fermée ou un morphisme lisse. La commutation dudiagramme se vérifie facilement dans ces deux cas. c.q.f.d

Corollaire 1.4.39 — Soit f un morphisme de S-schémas quasi-projectifs. On a un diagramme commutatif

f! Θ∼//

Θ f!

f∗ Θ Θ f∗oo

où les 2-morphismes verticaux sont donnés par [Ayo07a, Définition 1.7.1]. En particulier, lorsque f est projectif, βfest inversible.

Demonstration En effet, la définition des 2-morphismes f!// f∗ ne fait apparaître que des 2-isomorphismes

de connexions et des 2-morphismes d’échange de type Ex∗! obtenus par adjonction des Ex∗! . La commutation dudiagramme de l’énoncé découle alors du lemme 1.4.38. Les détails sont laissés aux lecteurs. Pour la dernière assertion,on utilise que f!

// f∗ est un 2-isomorphisme pour f projectif (par [Ayo07a, Théorème 1.7.17]). c.q.f.d

Le corollaire 1.4.39 est suffisant pour les besoins de la preuve du théorème 1.3.38. Toutefois, nous n’avons pasrésisté à inclure le résultat suivant, qui ne sera donc pas utilisé dans la suite :

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 87

Theoreme 1.4.40 — On suppose que k est de caractéristique nulle. Soit A un k-affinoïde. Le prémorphisme

Rig∗ : SHM(−) // RigSHM((−)an)

est un morphisme du 2-foncteurs homotopiques stables sur Sch/A. En d’autres termes, les foncteurs Rig∗ commutentaux quatre opérations f∗, f∗ , f! et f ! pour f un morphisme de A-schémas quasi-projectifs.

Demonstration On sait que Rig∗ est un prémorphisme de 2-foncteurs homotopiques stables. Par le corollaire 1.4.39,il reste à montrer que βj est inversible avec j : U // X une immersion ouverte. Notons i : Y // X l’immersionfermée complémentaire.

On déduit par adjonction de β−1i un 2-morphisme ξi : Rig∗ i! // (ian)! Rig∗ . Pour que βj soit inversible,

il suffirait que ξi soit inversible. En effet, de l’axiome de localité, on déduit que la paire (i!, j∗) est conservative.Comme la counité j∗j∗

∼// id est inversible, on voit que le 2-morphisme j∗βj est inversible. D’autre part, on a

(ian)!jan∗ Rig∗ = 0 et, si ξi était inversible, (ian)!Rig∗j∗ ' Rig∗i!j∗ = 0, i.e., i!βj serait le morphisme nul entre les

1-morphismes nuls (et en particulier inversible).Les foncteurs Rig∗, i! et (ian)! commutent aux sommes infinies (pour i! et (ian)!, on peut utiliser le fait que leurs

adjoints à gauche i∗ et ian∗ préservent les objets compacts). Il suffit donc de montrer que ξi est inversible lorsqu’on

l’évalue sur des générateurs compacts de SHM(X). Comme k est supposé de caractéristique nulle, on dispose de larésolution des singularités de Hironaka pour les A-schémas de type fini (A étant excellent). Par [Ayo07a, Proposition2.2.27], la catégorie SHM(X) est compactement engendrée par les objets de la forme g∗(SuspT (Bcst)) avec p ∈ N, B ∈ E

et g : X ′ // X un A-morphisme vérifiant les propriétés suivantes :– g est projectif,– X ′ est régulier et connexe,– g−1(Z) est soit X ′ tout entier, soit un diviseur à croisements normaux.

Fixons g, B et p comme ci-dessus. On forme le carré cartésien

Y ′i′//

g′

X ′

g

Yi// X.

On a un diagramme commutatif exprimant la compatibilité de ξ? et β? avec l’isomorphisme d’échange de type Ex!∗ :

(ian)!Rig∗g∗ξi

//

βg ∼

Rig∗i!g∗∼

// Rig∗g′∗i′!

(ian)!gan∗ Rig∗

∼// g′an∗ (i′an)!Rig∗ // g′an

∗ Rig∗i′!.

Ainsi, il suffit de montrer que ξi′ évalué en l’objet SuspT (Bcst) ∈ Ob(SHM(X ′)) est inversible. En d’autres termes, onpeut supposer que Y ⊂ X est un diviseur à croisements normaux (le cas Y = X étant trivial) et qu’on cherche àmontrer que

Rig∗i!SuspT (Bcst) // (ian)!Rig∗SuspT (Bcst)

est inversible. Par une récurrence sur le nombre de composantes irréductibles de Y , on se ramène au cas où Y est unsous-schéma régulier. D’autre part, la question est locale pour la topologie de Nisnevich sur le schéma X. On peutdonc supposer qu’il existe un carré cartésien

Yi//

q

X

p

oo// Adk

avec o la section nulle et p un morphisme régulier. En utilisant le corollaire 1.A.4 (et le triangle de localité re-liant i! et j∗) on déduit que i!SuspT (Bcst) = i!p∗SuspT (Bcst) ' q∗o!SuspT (Bcst). De même, on a (ian)!SuspT an(Bcst) '(qan)∗(oan)!SuspT an(Bcst). On est donc ramené au cas où i est la section nulle d’un fibré vectoriel sur k. On retrouvealors l’isomorphisme de commutation avec l’équivalence de Thom inverse Th−1(k⊕d). D’où le résultat.

Pour terminer, il reste à montrer que Rig∗ commute aux opérations f !. On déduit par adjonction de δf un 2-morphsime ξf : Rig∗f ! // (fan)!Rig∗ . Remarquons que pour une immersion fermée i, on retrouve bien le ξi de toutà l’heure. Pour vérifier que ξf est inversible, on factorise f par une immersion fermée suivie d’un morphisme lisse. Onvient de traiter le cas des immersions fermées. Lorsque f est lisse, on utilise la formule f ! = Th−1(Ωf )f∗ et on vérifiede ξf est la composée de αf et l’isomorphisme de commutation avec l’équivalence de Thom inverse. c.q.f.d

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88 Motifs des variétés rigides analytiques I

1.4.5 Démonstration du théorème 1.3.38Soit (F , I) un diagramme de k-schémas rigides. On a le diagramme suivant à carrés cartésiens

(F η, I)j//

(fη,pI)

(F , I)

(f,pI)

(Fσ, I)i

oo

(fσ,pI)

Spm(k) // Spf(k) Spec(k).oo

On définit un foncteur

(1.139) χf : RigSHM(F η)j∗// RigSHM(F )

i∗// RigSHM(Fσ) = SHM(Fσ) .

Étant donné un diagramme commutatif à carrés cartésiens

(G η, J)j//

(gη,α)

(G , J)

(g,α)

(G σ, J)i

oo

(gσ,α)

(F η, I)j//

(fη,pI)

(F , I)

(f,pI)

(Fσ, I)i

oo

(fσ,pI)

Spm(k) // Spf(k) Spec(k).oo

on déduit une transformation naturelle αg : g∗σχf// χfgg

∗σ . Les α? vérifient une compatibilité évidente avec la

composition des morphismes de diagrammes de k-schémas rigides comme dans [Ayo07a, Définition 3.1.1]. Lorsqueg est lisse, αg est inversible par le théorème de changement de base par un morphisme lisse (qui découle du lemme1.4.32). Par adjonction, on dispose aussi d’un morphisme βg : χfgη∗

// gσ∗χgf . On a la proposition :

Proposition 1.4.41 — Soit X = Spf(A) un k-schéma formel affine. Alors χ définit un système de spécialisationau sens de [Ayo07a, Définition 3.1.1] de base

η = Spec(A[1/π])j// B = Spec(A) σ = Xσ

ioo

dans le 2-foncteur homotopique stable RigSHM((−)an) : Sch/A // TR . De même, χ Rig∗ définit un systèmede spécialisation sur SHM(−) restreint aux B-schémas quasi-projectifs.

Demonstration En effet, X est la structure de spécialisation canonique de base (B, j, i) (voir [Ayo07a, 3.1.4]).Pour χ Rig∗ on utilise le corollaire 1.4.39 (appliqué à Θ = Rig∗). c.q.f.d

Le lemme ci-dessous est évident :

Lemme 1.4.42 — Soit (F , I) un diagramme de k-schémas de type fini au-dessus d’un diagramme de k-schémas formels affines. Notons (f, pI) la projection de (F , I) sur Spec(k). On a alors une transformation naturelleχf // χfan Rig∗ . La famille de ces transformations naturelles pour les k-schémas quasi-projectifs définit un

morphisme de systèmes de spécialisation.

Dans la suite de cette sous-section, nous montrerons le théorème 1.3.38. Reppelons d’abord son énoncé. Soit D lediagramme de k-schémas indicé par la catégorie des k-affinoïdes lisses et qui à Spm(A) associe Spec(A). On formele diagramme commutatif à carrés cartésiens

j//

D

u

Dσi

oo

kj// k k.

ioo

Étant donné un objet E de SpectΣT (PreShv(Sm/k,M)) le théorème 1.3.38 affirme que le morphisme naturel (de la

catégorie Ho(SpectΣdiag∗T (PreShv(SmAfnd/k,M))))

(1.140) r∗Rig∗E // Rdiag∗Ri∗Li

∗Rj∗uηE = diag∗i∗χuuηE

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1.4 Le 2-foncteur homotopique stable RigSH(−) 89

est une B1-équivalence stable, du moins lorsque k = k((π)) avec k de caractéristique nulle. Dans la suite, on mentionneraexplicitement quand cette hypothèse sur k nous sera utile.

On dispose d’un foncteur Rig : Sm/D // SmRig/Dan induit par le foncteur d’analytification. Remarquons queDan est simplement le diagramme de k-schémas rigides qui à X = Spm(A) associe Spf(A) considéré comme unk-schéma rigide. On dispose d’un foncteur Rig∗ : SHM(D) // RigSHM(Dan) et d’une transformation naturelle

χu// χuan Rig∗ (voir le lemme 1.4.42). Considérons la composée

(1.141) r∗Rig∗E // diag∗i∗χuuηE // diag∗i∗χuanRig∗uηE .

On a la proposition suivante :

Proposition 1.4.43 — La composée (1.141) est une B1-équivalence stable.

Demonstration Il est facile de voir qu’on dispose d’un carré commutatif

r∗Rig∗E //

diag∗i∗χuu∗ηE

diag∗i∗χuan(uanη )∗Rig∗E

∼// diag∗i∗χuanRig∗u∗ηE.

Il sera donc plus générale de montrer que la composée

(1.142) r∗F ' diag∗η(uanη )∗F // diag∗ian

∗ (ian)∗jan∗ (uan

η )∗F

est une B1-équivalence stable pour tout objet F de SpectΣT an(PreShv(SmRig/k,M)). (Dans (1.142), diag désigne

le foncteur SmAfnd/k // SmRig/Dan qui à X = Spm(A) associe le couple (Spf(A),Spf(A)) dont les élémentssont considérés commes de k-schémas rigides.) Du corollaire 1.4.29, on déduit facilement que le foncteur ian

∗ (ian)∗ estisomorphe à cpl∗cpl

∗ ' cpl∗P∗. Il suffit donc de montrer que la composée

(1.143) r∗F ' diag∗η(uanη )∗F // Rdiag∗Rcpl∗RP∗Rj

an∗ (uan

η )∗F

est une B1-équivalence stable (la fèche étant induite par l’unité de l’adjonction (P∗, cpl∗)). Supposons que F eststablement B1-local. Comme Dan

η est lisse argument par argument sur k, (uanη )∗F est encore stablement B1-local. Pour

un k-affinoïde lisse X = Spm(A), on a alors :

[diag∗cpl∗P∗jan∗ (uan

η )∗Fn](X) = [cpl∗P∗jan∗ (uan

η )∗Fn](idSpf(A),Spm(A)) = [P∗jan∗ (uan

η )∗Fn](idSpf(A),Spf(A))

= [jan∗ (uan

η )∗Fn](idSpf(A),Spf(A)) = [(uanη )∗Fn](idSpm(A),Spm(A)) = Fn(Spm(A)).

On vérifie facilement que modulo cette identification, le morphisme (1.143) est l’identité. c.q.f.d

Notons le lemme suivant :

Lemme 1.4.44 — On suppose ici que k = k((π)) avec k de caractéristique nulle. Pour montrer le théorème 1.3.38,il suffit de montrer que le morphisme de systèmes de spécialisations χ // χ Rig∗ de SHM(−) : Sch/k // TR

est inversible.

Demonstration On suppose que le morphisme de systèmes de spécialisations de l’énoncé est inversible et on dé-montre le théorème 1.3.38. Par la proposition 1.4.43 il reste à voir que le morphisme

(1.144) diag∗i∗i∗j∗u

∗ηE

// diag∗ian∗ (ian)∗jan

∗ Rig∗u∗ηE

est une B1-équivalence stable. On montrera plus précisément que c’est une équivalence faible de préfaisceaux niveaupar niveau. La source de (1.144) est stablement B1-fibrante par le théorème 1.3.37. Il en est de même du but de (1.144)puisque cette dernière admet une section. Par le théorème 1.2.36, il suffirait de montrer que

[diag∗i∗i∗j∗u

∗ηE]p(Q

rigr (X, f)) // [diag∗ian

∗ (ian)∗jan∗ Rig∗u∗ηE]p(Q

rigr (X, f))

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90 Motifs des variétés rigides analytiques I

est une équivalence faible pour tout k-schéma lisse X, f ∈ Γ(X,O×), r ∈ N − 0 et p ∈ N. Il est donc plus généralde montrer que la transformation naturelle évidente

SHM(k) //

Rig∗

SHM(Dη(Qrigr (X, f)))j∗

//

SHM(D(Qrigr (X, f)))i∗

// SHM(X)

RigSHM(k) // RigSHM(Qrigr (X, f))jan∗// RigSHM(Dan(Qrigr (X, f)))

(ian)∗// RigSHM(X)

est inversible. Reprenons les notations 1.3.10 et formons les diagrammes commutatifs à carrés cartésiens (à nil-immersion près)

Dη(Qrigr (X, f))j//

D(Qrigr (X, f))

c

Xi

oo

Qgeor (X, f)j

//

Qschr (X, f)

f

Xi

oo

kj

// k ki

oo

Qrigr (X, f)jan

//

c′η

Qforr (X, f)

c′

Xian

oo

Qanr (X, f)jan

//

fanη

(Qschr (X, f))an

fan

Xianoo

kjan

// k k.ian

oo

Par le corollaire 1.A.5, on a un isomorphisme χf ' c∗σχf ' c∗ηχfc. De même, en remarquant que c′ est une immersionouverte, on a χfan ' c′∗σ χfan ' c′∗η χfanc′ . On voit donc, qu’il suffit de montrer que la transformation naturelle évidente

SHM(Qgeor (X, f))j∗

//

Rig∗

SHM(Qschr (X, f))i∗

//

SHM(X)

RigSHM(Qanr (X, f))jan∗// RigSHM((Qschr (X, f))an)

(ian)∗// RigSHM(X)

est inversible. Le lemme est démontré. c.q.f.d

On garde l’hypothèse k = k((π)) avec k de caractéristique nulle. Par [Ayo07a, Théorème 3.3.45], pour vérifierqu’un morphisme de systèmes de spécialisations au dessus de B = Spec(k) est inversible, il suffit de l’évaluer enAcst ∈ SHM(Qgeor (k[U,U−1], U)). On le fera plus généralement pour les k-schémas Qgeor (X, f). Soit Y un X-schémalisse. Notons p : Qschr (Y, f) // Qschr (X, f) . C’est un morphisme lisse. Pour montrer que

(i∗j∗Acst)p(Y ) // ((ian)∗jan∗ Rig∗Acst)p(Y )

est une équivalence faible, il suffit de montrer que

(p∗σi∗j∗Acst)p(Y ) // ((pan

σ )∗(ian)∗jan∗ Rig∗Acst)p(Y )

en est une. En utilisant les isomorphisme p∗σχ ' χp∗η et (panσ )∗χ ' χ(pan

η )∗, on se ramène à montrer le lemme suivant :

Lemme 1.4.45 — On suppose que k = k((π)) avec k de caractéristique nulle. Soient X un k-schéma lisse,f ∈ Γ(X,O×), r ∈ N− 0 et p ∈ N. Considérons le diagramme

Qgeor (X, f)j// Qschr (X, f) X

ioo .

Alors, le morphisme [Li∗Rj∗Sus0T (Acst)]p(X) // [L(ian)∗Rjan

∗ Rig∗Sus0T (Acst)]p(X) est inversible dans Ho(M).

Demonstration On reprend notre diagramme de k-schémas D et son analytifié Dan. Par la proposition 1.4.43, lacomposée

r∗Rig∗Sus0T (Acst) // diag∗Ri∗Li

∗Rj∗u∗ηSus0

T (Acst) // diag∗Rian∗ L(ian)∗Rjan

∗ Rig∗u∗ηSus0T (Acst)

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1.A Appendice : complément sur les opérations de Grothendieck dans le monde motivique 91

est une B1-équivalence stable. Il vient que l’homomorphisme

(1.145) homRigSHM(k)(SuspT an(Qanr (X, p)⊗Bcst),Sus0T an(Acst))

homRigSHM(k)(SuspT an(Qanr (X, p)⊗Bcst),diag∗Ri∗Li∗Rj∗u

∗ηSus0

T (Acst))

homHo(M)(B, [Li∗Rj∗Sus0

T (Acst)]p(X)

est injectif pour tout k-schéma lisse X, f ∈ Γ(X,O×), r ∈ N− 0, p ∈ N et B ∈ Ob(M). D’autre part, la composée

homRigSHM(k)(SuspT an(Qanr (X, p)⊗Bcst),Sus0T an(Acst))

homRigSHM(k)(SuspT an(Qanr (X, p)⊗Bcst),diag∗Ri∗Li∗Rj∗u

∗ηSus0

T (Acst))

homHo(M)(B, [Li∗Rj∗Sus0

T (Acst)]p(X))

homHo(M)(B, [L(ian)∗Rjan∗ Rig∗Sus0

T (Acst)]p(X))

s’identifie à la composée (1.141) qui est inversible. Pour démontrer le lemme, il suffirait de montrer que (1.145) admetune section. Mais par la proposition 1.3.34, la composée

homSHM(Gmk)(SuspT (Qgmr (X, p)⊗Bcst),Sus0T (Acst))

homRigSHM(k)(SuspT an(Qanr (X, p)⊗Bcst),Sus0T an(Acst))

homRigSHM(k)(SuspT an(Qanr (X, p)⊗Bcst),diag∗Ri∗Li∗Rj∗u

∗ηSus0

T (Acst))

homHo(M)(Bcst, [Li∗Rj∗Sus0

T (Acst)]p(X))

est inversible. Le lemme est démontré. c.q.f.d

1.A Appendice : complément sur les opérations de Grothendieck dans lemonde motivique

Le but de cet appendice est d’étendre certaines propriétés des opérations f∗ pour des morphismes f qui ne sontpas supposés de type fini. On fixe une catégorie de coefficients M (voir la définiton 1.2.31).

Étant donné un schéma X, la catégorie SHeffM(X) est la catégorie homotopique de PreShv(Sm/X,M) munie de

sa structure projective A1-locale. Rappelons que la structure A1-locale est obtenue en localisant la structure Nis-locale suivant les flèches A1

U ⊗Acst // U ⊗Acst avec A ∈ E et U un X-schéma lisse de type fini (voir [Ayo07a,Définition 4.5.12]). De même lorsque M est monoïdale symétrique, la catégorie SHM(X) est la catégorie homotopiquede SpectΣ

T (PreShv(Sm/X,M)) munie de sa structure projective A1-locale stable (voir [Ayo07a, Définition 4.5.21]).Étant donné un morphisme de schémas f : Y // X on dispose de deux adjonctions de Quillen (voir [Ayo07a,Théorèmes 4.5.14 et 4.5.23])

(f∗, f∗) : PreShv(Sm/X,M) // PreShv(Sm/Y,M)

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92 Motifs des variétés rigides analytiques I

et (f∗, f∗) : SpectΣT (PreShv(Sm/X,M)) // SpectΣ

T (PreShv(Sm/Y,M))

qui induisent des couples de foncteurs adjoints (Lf∗,Rf∗) de SHeffM(X) et SHM(X) vers SHeff

M(Y ) et SHM(Y ) res-pectivement. Pour les énoncés portant uniquement sur les catégories homotopiques, on notera simplement f∗ et f∗à la place de Lf∗ et Rf∗. Contrairement aux opérations f#, f! et f !, les foncteurs f∗ et f∗ existent sans hypothèsesde finitude (ou de quasi-projectivité) sur le morphisme de schémas f . Les résultats de cet appendice reposent sur laproposition ci-dessous.

Proposition 1.A.1 — Soit I une petite catégorie cofiltrante et (Xi)i∈I un pro-objet dans la catégorie des schémas.On suppose que les Xi sont noethériens, de dimension de Krull finie et que les morphismes fj→i : Xj

// Xi sontaffines pour toutes les flèches j → i dans I. En particulier, la limite projective X = Limi∈IXi existe dans la catégoriedes schémas. On supposera alors que X est noethérien, de dimension de Krull finie et on notera f∞→i : X // Xi

le morphisme canonique pour i ∈ I.Soient i0 ∈ I et M et N deux objets de SHM(Xi0). Lorsque M est compact, l’homomorphisme

Colimj∈I/i0

homSHM(Xj)(f∗j→i0M,f∗j→i0N) // homSHM(X)(f

∗∞→i0M,f∗∞→i0N)

est bijectif. L’énoncé correspondant pour les catégories instables SHeffM(−) est également vrai.

Demonstration On traite uniquement le cas stable (le cas effective étant plus simple). Le foncteur d’oubli I/i0 → Iest cofiltrant de sorte que X = Limj∈I/i0Xj . Ainsi, on peut remplacer I par I/i0. On peut donc supposer que I possèdeun objet final 0 ∈ I et queM et N sont dans SHM(X0). Étant donné queM est compact et que les colimites filtrantessont exactes dans la catégorie des groupes abéliens, on se ramène immédiatement au cas où M = SuspT (Y0 ⊗ Acst)avec Y0 un X0-schéma lisse, p ∈ N et A ∈ E. On choisit enfin un T -spectre symétrique projectivement cofibrantN = (Nn)n∈N qui représente N .

On peut considérer le pro-schéma (Xi)i∈I comme un diagramme de schémas (X, I) (où l’on pose X(i) = Xi).On note π : (X, I) // X0 la projection évidente. On a alors un π∗T -spectre symétrique π∗N qui est un objet de

SpectΣT (PreShv(Sm/(X, I),M)). Pour i ∈ I, on a i∗(π∗N) = f∗i→0N (où l’on note par i le morphisme de diagrammes

de schémas (Xi, e) // (X, I) qui est l’identité sur Xi).

On choisit maintenant une cofibration projective stablement A1-triviale π∗N // R avec R stablement A1-fibrant. Pour tout i ∈ I, le morphisme évident f∗i→0N

// i∗R est une cofibration stablement A1-triviale et i∗R

est stablement A1-fibrant. En particulier, on a des isomorphismes

(1.146) homSHM(Xi)(f∗i→0M,f∗i→0N) ' π0(SuspT (Y0 ×X0 Xi ⊗Acst), i∗R) ' π0(A, i∗Rp(Y0 ×X0 Xi)).

D’autre part, pour une flèche j → i dans I, on a un morphisme de spectres f∗j→ii∗R // j∗R . C’est une A1-

équivalence stable comme il découle immédiatement de la propriété 2 de 3 appliquée à la suite

f∗j→0Nw.e.//

w.e.

''

f∗j→ii∗R // j∗R .

Pour voir que f∗j→0N = f∗j→if∗i→0N

// f∗j→ii∗R est une A1-équivalence stable, on utilise que f∗j→i est un foncteur

de Quillen à gauche et donc préserve les A1-équivalences stables entre spectres projectivement cofibrants. Pour touteflèche j → i dans I, on dispose d’un carré commutatif

(1.147) homSHM(Xi)(f∗i→0M,f∗i→0N) oo

∼//

π0(A, i∗Rp(Y0 ×X0 Xi))

homSHM(Xj)(f∗j→0M,f∗j→0N) oo

∼// π0(A, j∗Rp(Y0 ×X0 Xj)).

Considérons maintenant le T -spectre symétrique R = Colimi∈If∗∞→ii

∗R. Montrons que le morphisme évident

f∗∞→0N// R est une A1-équivalence stable. On sait que pour chaque i ∈ I, le morphisme f∗∞→0N

// f∗∞→ii∗R

est une cofibration stablement A1-triviale puisque f∗∞→i est un foncteur de Quillen à gauche. Il suffit donc de montrerque le foncteur

ColimI : HOM(I,SpectΣT (PreShv(Sm/X,M))) // SpectΣ

T (PreShv(Sm/X,M))

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1.A Appendice : complément sur les opérations de Grothendieck dans le monde motivique 93

préserve les A1-équivalences stables. Étant donné que dans M, une colimite filtrante d’équivalences faibles est une équi-valence faible (voir la définition 1.2.31), on déduit immédiatement que ColimI préserve les équivalences faibles de pré-faisceaux niveau par niveau. Il suffit alors de montrer que ColimI préserve les A1-équivalences stables entre objets cofi-brants. Ceci est clair puisque ColimI est un foncteur de Quillen à gauche (lorsque HOM(I,SpectΣ

T (PreShv(Sm/X,M)))est munie de sa structure projective déduite de la structure projective A1-locale stable).

Montrons aussi que R est un T -spectre stablement A1-fibrant. On vérifie d’abord qu’il est A1-fibrant niveau parniveau. Soient p ∈ N et Y un X-schéma lisse. Il existe (voir le lemme 1.A.2 ci-dessous) i ∈ I et Yi un Xi-schéma lissetels que Y = Yi ×Xi X. On a par définition,

Rp(Y ) = Colimj∈I, Y→U ∈Y \(Sm/Xj)

Rp(U, j).

Étant donné un morphisme de Xj-schémas a : Y // U il existe l ∈ I et une factorisation

Y //

a

&&

Yi ×Xi Xl// U .

Il vient que le foncteur qui associe à j ∈ I/i le couple (j, Y → Yi ×Xi Xj) est cofinal. On déduit la formule

(1.148) Rp(Y ) = Colimj∈I/ij∗Rp(Yj→i)

avec Yj→i = Yi ×Xi Xj . Étant donné que les objets fibrants de M sont stables par colimites filtrantes, on déduit queles Rp sont des préfaisceaux projectivement fibrants. Vérifions qu’ils sont Nis-locaux. Comme X est noethérien dedimension de Krull finie, il suffira de vérifier la propriété de Brown-Gersten pour Rp. Soit Y = Yi×XiX un X-schémalisse comme ci-dessus. Soit

V ′ //

Y ′

V // Y

un carré Nisnevich. Par le lemme 1.A.2 ci-dessous, quitte à raffiner l’indice i, on peut supposer que ce carré provientpar changement de base suivant f∞→i d’un carré Nisnevich

V ′i//

Y ′i

Vi // Yi.

Les carrésj∗Rp(Yj→i) //

j∗Rp(Y′j→i)

j∗Rp(Vj→i) // j∗Rp(V′j→i)

sont homotopiquement cartésiens pour tout j ∈ I/i. Or dans une catégorie de coefficients, une colimite filtrante decarrés homotopiquement cartésiens est un carré homotopiquement cartésien. L’égalité (1.148) montre alors que le carré

Rp(Y ) //

Rp(Y′)

Rp(V ) // Rp(V′)

est homotopiquement cartésien.Le fait que Rp est A1-local s’obtient de la même manière. En effet, pour Y = Y ×Xi X un X-schéma lisse, on

a pour tout j ∈ I/i une équivalence faible j∗Rp(Yj→i) // j∗Rp(A1Yj→i

) . En utilisant (1.148) et la commutation

des équivalences faibles aux colimites filtrantes, on obtient que Rp(Y ) // Rp(A1Y ) est une équivalence faible. Il

reste à voir que R est un ΩT -spectre. Soit Y = Yi ×Xi X un X-schéma lisse. Pour tout j ∈ I/i, le morphisme

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94 Motifs des variétés rigides analytiques I

j∗Rp(Yj→i) // Hom(T, j∗Rp+1)(Yj→i) est une équivalence faible. En passant à la colimite et en utilisant que Test homotopiquement compact (ce qui découle de l’hypothèse que 1 est homotopiquement compact), on trouve que

Rp(Y ) // Hom(T, Rp)(Y ) est une équivalence faible.Il est maintenant aisé de prouver la proposition. En effet, par la discussion précédente, on a

homSHM(X)(f∗∞→0M,f∗∞→0N) ' π0(SuspT (Y0 ×X0

X ⊗Acst), R) ' π0(A, Rp(Y0 ×X0X)).

Mais par (1.148), on aπ0(A, Rp(Y0 ×X0 X)) ' Colimi∈Iπ0(A, i∗Rp(Y0 ×X0 Xi)).

Par (1.146), le i-ème terme de la colimite ci-dessus s’identifie à homSHM(Xi)(f∗i→0M,f∗i→0N). La proposition est

démontrée. c.q.f.d

Lemme 1.A.2 — Soit (Xi)i∈I un pro-schéma avec Xi quasi-compact et les morphismes de transitions fj→i :

Xj// Xi affines pour toute flèche j → i dans I. Notons X = Limi∈IXi. Soit Y un X-schéma de présentation

fini. Il existe alors i ∈ I et un Xi-schéma de présentation fini Yi tels que Y ' Yi ×Xi X. De plus, si Y est lisse (resp.étale), on peut trouver j ∈ I/i tel que Yi ×Xi Xj est lisse (resp. étale).Demonstration La première assertion est démontrée dans [EGA VI.3, Théorème 8.8.2]. Montrons la seconde asser-tion (on traitera uniquement le cas non-respé). On peut supposer que les Xi sont affines. Étant donné un recouvrementZariski de Y , on peut supposer qu’il provient d’un recouvrement Zariski de Yi (quitte à raffiner l’indice i). Ainsi, laquestion est locale et on peut supposer que Y = (X[t1, . . . , tn, s]/P (s))[1/P ′(s)] avec P un polynôme unitaire à coeffi-cients dans Γ(X,OX)[t1, . . . , tn]. Quitte à raffiner i, on peut supposer que P provient de Pi ∈ Γ(Xi,OXi)[t1, . . . , tn] etque P ′i (s) est inversible dans Γ(Xi,OXi)[t1, . . . , tn, s]/Pi(s). Par [EGA VI.3, Théorème 8.8.2] on peut supposer queYi = (Xi[t1, . . . , tn, s]/Pi(s))[1/P

′i (s)] (quitte à raffiner i). Le lemme est démontré. c.q.f.d

On dérive maintenant quelques corollaires utiles de la proposition 1.A.1.

Corollaire 1.A.3 — Gardons les notations de la proposition 1.A.1. SoitM un objet compact de SHM(X) (resp.SHeff

M(X)). Il existe alors i ∈ I et un objet compact M0 de SHM(Xi) (resp. SHeffM(Xi)) tels que M soit isomorphe

à f∗∞→iM0. De plus, la sous-catégorie SHctM(X) (resp. SHeff,ct

M (X)) des objets compacts (appelés aussi constructiblesdans [Ayo07a]) est équivalente à la 2-colimite des SHct

M(Xi) (resp. SHeff,ctM (Xi)).

Demonstration La seconde assertion découle formellement de la première et de la proposition 1.A.1. On montreradonc uniquement la première assertion et on se restreint au cas stable. Tout objet compact M s’obtient par unesuccession de cônes de morphismes

SuspT (Y ⊗Acst) // †

à partir de l’objet nul. On raisonnera alors par récurrence sur le nombre d’étapes nécessaires. On peut donc supposerque M est le cône d’un morphisme

(1.149) SuspT (Y ⊗Acst) // f∗∞→iN .

Par le lemme 1.A.2, on peut supposer que Y = Yi×XiX (quitte à raffiner i). Par la proposition 1.A.1, on peut supposerque (1.149) provient par application de f∗∞→i d’un morphisme

SuspT (Yi ⊗Acst) // N .

On prend alors pour M0 le cône du morphisme ci-dessus. c.q.f.d

Corollaire 1.A.4 — Soit un carré cartésien

Y ′

f ′

g′// X ′

f

Yg// X

de schémas noethériens de dimension de Krull finie. On suppose que g est régulier. Alors le morphisme de changementde base g∗f∗ // f ′∗g

′∗ (entre opérations sur SHM(−) ou SHeffM(−)) est inversible.

Demonstration On traite uniquement le cas stable. Par localité pour la topologie de Zariski, on se ramène immé-diatement au cas où Y et X sont affines. Étant donné que SHM(Y ) est compactement engendrée, il suffit de montrerque pour tout M ∈ Ob(SHM(Y )) compact et tout N ∈ Ob(SHM(X ′)), l’homomorphisme

(1.150) homSHM(Y )(M, g∗f∗N) // homSHM(Y )(M,f ′∗g′∗N) ' homSHM(Y ′)(f

′∗M, g′∗N)

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1.A Appendice : complément sur les opérations de Grothendieck dans le monde motivique 95

est inversible.Par le théorème de Popescu (voir [Pop85, Pop86]), Y est la limite projective cofiltrante de X-schémas affines et

lisses : Y = Limi∈IYi. On forme les carrés cartésiens

Y ′i

f ′i

g′i// X ′

f

Yigi// X.

Étant donné queM est compact, il existe (par le corollaire 1.A.3) i0 ∈ I etM0 ∈ Ob(SHctM(Yi0)) tels queM ' g∗∞→i0M0

(où l’on note g∞→i : X // Xi le morphisme évident). Par la proposition 1.A.1, on peut identifier l’homomorphisme(1.150) avec

Colimj∈I/i0 homSHM(Yj)(g∗j→i0M0, g

∗j f∗N) // Colimj∈I/i0 homSHM(Yj)(g

∗j→i0M0, f

′j∗g′∗j N).

En effet, on a carré commutatif

Colimj∈I/i0 homSHM(Y ′j )(f′∗j g∗j→i0M0, g

′∗j N)

∼//

homSHM(Y ′)(f′∗M, g′∗N)

Colimj∈I/i0 homSHM(Y ′j )(g∗j→i0M0, f

′j∗g′∗j N) // homSHM(Y ′)(M,f ′∗g

′∗N)

avec les flèches verticales inversibles. Le résultat découle maintenant du théorème de changement de base par unmorphisme lisse. c.q.f.d

Un cas particulier du corollaire ci-dessus à été utilisée à plusieurs reprises dans ce chapitre :

Corollaire 1.A.5 — Soient k un corps et π une indéterminée. On note B = Spec(k[π]), η = Spec(k[π, π−1]) ⊂ Bet σ = B−η = Spec(k). Soient A une k[π]-algèbre de type fini et A = A//(π) son complété π-adic. On note X = Spec(A)et X = Spec(A). On forme la diagramme commutatif à carrés cartésiens

j//

X

c

Xσi

oo

j//

X

f

Xσi

oo

η // B σoo

On note f = f c. On pose χf = i∗j∗ et χf = i∗j∗ (voir [Ayo07a, Exemple 3.1.4]). Le morphisme de changement debase

χf // χfc∗η

est inversible.

On peut utiliser les résultats précédents pour étendre le formalisme des cycles évanescents au cas où la base est unanneau de valuation discrète, complet et d’égale caractéristique nulle.

Soient k un corps de caractéristique nulle, k = k[[π]] et k = k((π)). Soit f : X // A1k

un morphisme de schémas

(non nécessairement de type fini). Dans [Ayo07a, Définition 3.5.6] nous avons défini les foncteurs motif proche Ψf

lorsque f est quasi-projectif. Cette définition admet encore un sens pour f quelconque. On la rappelle brièvement ici.On dispose d’un diagramme de k-schémas (R,∆×N×) (avec N× ordonné par l’opposée de la relation de divisibilité)et d’un morphisme (θR, p∆×N×) : R // Gmk

. On note Rf le pull-back de R suivant fη : Xη// Gmk

et

(θRf , p∆×N×) sa projection sur Xη. On a alors

Ψf (−) = Lp∆×N×Li∗Rj∗(θ

Rf )∗(θ

Rf )∗(p∆×N×)∗(−).

On a le résultat suivant :

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96 Motifs des variétés rigides analytiques I

Proposition 1.A.6 — Soit f : X = Spec(A) // A1k

un A1k-schéma affine de type fini. On note A = A//(π)

et X = Spec(A). On forme le diagramme à carrés cartésiens

j//

X

c

Xσi

oo

j// X Xσ

ioo

On pose aussi f = f c. Alors le morphisme Ψf// Ψfc

∗η est inversible.

Demonstration On décompose le morphisme en question en une composée de morphismes d’échange. Le résultatdécoule alors immédiatement du corollaire 1.A.4. c.q.f.d

Remarque 1.A.7 — On notera Ψπ : SHM(k) // SHM(k) le foncteur motif proche déduit du morphisme

π : Spec(k) // A1k . On a par la proposition ci-dessus Ψπ1 ' 1 et plus généralement Ψπ1/n1 ' 1⊕n. À partir de

là, on peut reprendre les arguments de [Ayo07a, Section 3.5] et montrer que Ψπ préserve les objets compacts, qu’ilest monoïdal et qu’il commute à la dualité. On ne reprendra pas ici l’étude menée dans loc. cit. étant donné que cespropriétés résultent immédiatement de la scholie 1.3.26.

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Chapitre 2

Motifs des variétés rigides analytiques II :étude cohomologique des préfaisceaux avectransferts, surconvergents et invariants parhomotopie

Introduction. — Dans ce chapitre, on verra que la théorie des préfaisceaux avec transferts invariants par homotopiede Voevodsky admet un analogue tout aussi riche en géométrie rigide. Après quelques rappels de géométrie rigide,notamment autour de la notion de surconvergence, on définit les correspondances finies entre variétés rigides lisses eton introduit les préfaisceaux avec transferts. Un paragraphe est ensuite consacré à la notion de fibre d’un préfaisceauavec transferts invariant par homotopie. Cette notion est propre à la géométrie rigide et jouera un rôle techniqueimportant dans la preuve du résultat principal du chapitre.

Suivant l’approche de Voevodsky en géométrie algébrique, on fait le lien entre les groupes de correspondances finiesà valeurs dans une courbe lisse et le groupe de Picard relatif de cette même courbe. Ceci nous permettra de construiredes correspondances finies définies à homotopie près mais forts utiles dans l’étude cohomologique des préfaisceauxavec transferts surconvergents et invariants par homotopie. En effet, dans la quatrième section de ce chapitre, cescorrespondances finies seront utilisées pour montrer que la restriction d’un tel préfaisceau au petit site des ouverts deB1k est un faisceau acyclique pour la topologie des recouvrements admissibles. La preuve de ce résultat est en partie

inspirée de la preuve du résultat correspondant en géométrie algébrique. Toutefois, étant donné que la topologie dela boule de Tate B1

k est plus complexe que celle de la droite affine A1k, la preuve est nécessairement plus compliquée.

Notons également que l’hypothèse de surconvergence est crutiale et nécessaire pour la validité dudit résultat.Dans la sous-section 2.4.2, on démontre le résultat principal de ce chapitre, à savoir l’invariance par homotopie de

la cohomologie d’un préfaisceau avec transferts surconvergent et invariant par homotopie. Ici, notre approche divergenettement de celle de Voevodsky. On utilisera uniquement des propriétés spéciales à la topologie des recouvrementsadmissibles ainsi que les résultats techniques de la sous-section 2.2.4 pour ramener le problème à l’acyclicité au dessusdes boules de Tate. Notons également que notre résultat principal est valable pour des préfaisceaux avec transfertssurconvergents et invariants par homotopie sur les variétés rigides lisses au dessus d’une base lisse quelconque. Ceci estcurieux puisqu’en géométrie algébrique on construit facilement des exemples de préfaisceaux avec transferts invariantspar homotopie sur les schémas lisses au dessus d’une courbe lisse mais dont la cohomologie n’est pas invariante parhomotopie.

Dans la dernière section, on introduit la catégorie triangulée RigDMeff(k) des motifs des variétés rigides. Cettecatégorie est le cadre naturel pour les objets considérés dans ce chapitre. En montrera en effet que les faisceauxavec transferts surconvergents et invariants par homotopie sont les objets du cœur d’une t-structure naturelle surRigDMeff(k). On utilisera également notre résultat principal pour identifier certains groupes de morphismes danscette catégorie avec l’homologie de certains complexes de cycles à la Suslin. On établira également un théorème desimplification à la Voevodsky. On termine ce chapitre par une variante avec transferts de la première partie de lascholie 1.3.26 du chapitre précédent.

2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie)

Dans cette section, on rassemble quelques résultats de géométrie rigide qui nous seront utiles dans la suite duchapitre. On commence d’abord par une description des domaines affinoïdes de la droite affine et on donne un critère

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98 Motifs des variétés rigides analytiques II

pour que la cohomologie d’un tel domaine à valeurs dans un faisceau soit nulle en degrés strictement positifs. Onrappelle ensuite la notion de surconvergence qui jouera un rôle crucial dans la suite.

2.1.1 Domaines de la droite affine et leur cohomologie

Soient k un corps complet pour une norme non-archimédienne supposée non triviale et π ∈ k∨−0. On cherche àdécrire les ouverts quasi-compacts de (A1

k)an. Supposons d’abord que k est algébriquement clos. L’ensemble des pointsfermés de (A1

k)an s’identifie alors à l’ensemble A1(k) = k des points k-rationnels. Cet ensemble est naturellementun espace métrique complet, la distance entre deux éléments a, b ∈ k étant donnée par |a − b|. Pour λ ∈ |k×|, onnotera B1

k(a, λ) = b ∈ k ; |a − b| ≤ λ et B1k(a, λ) = b ∈ k ; |a − b| < λ qu’on regardera comme des ouverts

admissibles de (A1k)an (et donc munis de structures de variétés rigides). Notons que B1

k(a, λ) est en fait un k-affinoïde.Plus généralement, étant donnés o, x1, . . . , xm ∈ k et R, r1, . . . , rm ∈ |k×|, l’ensemble z ∈ k ; |o− z| ≤ R , |x1 − z| >r1 , . . . , |xm − z| > rm est l’ensemble des points k-rationnels d’un ouvert affinoïde de (A1

k)an qu’on notera

(2.1) B1k(o,R)−

m⋃i=1

B1k(xi, ri)

.

Notons le résultat facile ci-dessous.

Lemme 2.1.1 — Supposons que l’ouvert affinoïde (2.1) est non vide. Alors, il est connexe et quitte à modifier lescentres o, x1, . . . , xm et les rayons R, r1, . . . , rm on peut supposer qu’on a les conditions suivantes :

(i) ri ≤ |o− xi| ≤ R,(ii) |xi − xj | ≥ min(ri, rj) pour i 6= j.

Ces conditions entraînent que B1k(xi, ri)

∩ B1k(xj , rj) = ∅ pour i 6= j. Ceci justifie l’écriture

(2.2) B1k(o,R)−

m∐i=1

B1k(xi, ri)

au lieu de (2.1).

Demonstration Si l’ouvert affinoïde (2.1) est non vide, on peut supposer qu’il contient le centre o de la boule deTate B1

k(o,R). On a alors ri ≤ |xi − o| pour tout 1 ≤ i ≤ m.On peut bien sûr se débarasser dans (2.1) des i tels que B1

k(xi, ri)∩B1

k(o,R) = ∅. En utilisant l’inégalité triangulaireultramétrique, on obtient alors B1

k(xi, ri) ⊂ B1

k(o,R). Donc |o− xi| ≤ R.Si B1

k(xi, ri) ∩ B1

k(xj , rj) 6= ∅, alors l’une des deux boules contient l’autre (utiliser l’inégalité ultramétrique). On

peut donc supposer que B1k(xi, ri)

∩ B1k(xj , rj)

= ∅ si i 6= j. En d’autres termes, |xi − xj | ≥ max(ri, rj).Il nous reste à montrer que l’ouvert (2.1) est connexe. On notera D cet ouvert et on suppose que les conditions (i)

et (ii) sont satisfaites. Quitte à faire un changement de variables affines, on peut supposer que o = 0 et R = 1. Soienta1, . . . , am ∈ k× tels que |ai| = ri. L’anneau A des fonctions analytiques sur (2.1) est

A =kt, s1, . . . , sm

(s1(t− x1)− a1, . . . , sm(t− xm)− am).

Quitte à renuméroter les boules B1k(xi, ri)

, on peut supposer que |ai| = 1 pour 1 ≤ i ≤ p et |ai| < 1 pour p+ 1 ≤ i ≤p+ q = m. On voit alors que l’anneau résiduel A est donné par

A =k[t, (t− x1)−1, . . . , (t− xp)−1, sp+1, . . . , sp+q]

(sp+1(t− xp+1), . . . , sp+q(t− xp+q)).

Il est facile de voir que Spec(A) est connexe. Ceci entraîne que (2.1) est connexe. c.q.f.d

Le résultat suivant est proposé en exercice dans [FP04]. Pour la comodité du lecteur on inclut une preuve ici.

Proposition 2.1.2 — On suppose que k est algébriquement clos. Tout ouvert quasi-compact et connexe (enparticulier non vide) de (A1

k)an est de la forme (2.1).

Demonstration On appellera provisoirement ouvert standard un ouvert de (A1k)an qui peut s’écrire comme une

union finie et disjointe d’ouverts de la forme (2.1). Il s’agit donc de montrer que tout ouvert quasi-compact de (A1k)an

est standard. On procède en plusieurs étapes.Étape 1 : La classe des ouverts standards est stable par intersections et unions finies.

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 99

En effet, soient D et D′ deux ouverts standards. On peut supposer que D et D′ sont connexes (et donc non vides).On peut alors écrire

(2.3) D = B1k(o,R)−

m⋃i=1

B1k(xi, ri)

et D′ = B1k(o′, R′)−

n⋃j=1

B1k(x′j , r

′j).

Lorsque D ∩D′ = ∅ il n’y a rien à montrer. Sinon, soit o′′ ∈ D ∩D′(k) 6= ∅. Alors, on peut remplacer dans (2.3) lescentres o et o′ par o′′. Par symmétrie, on peut supposer que R ≤ R′′. Il vient que

D ∩D′ = B1k(o′′, R)−

(m⋃i=1

B1k(xi, ri)

)⋃ n⋃j=1

B1k(x′j , r

′j)

.

D’où le résultat pour D ∩D′. De même, on a

D ∩D′ = B1k(o′′, R′)−

⋃i,j

(B1k(xi, ri) ∩ B1

k(x′j , r′j)).

La stabilité par unions découle alors du fait que si B1k(xi, ri) ∩ B1

k(x′j , r′j) 6= ∅ on a forcément B1

k(xi, ri) ⊂ B1k(x′j , r

′j)

ou B1k(x′j , r

′j) ⊂ B1

k(xi, ri).

Étape 2 : Soient D un ouvert standard et f ∈ Γ(D,O). Alors D(1|f) et D(f |1) sont des ouverts standards.On peut supposer que D = B1

k(o,R)−∐mi=1 B1

k(xi, ri) comme dans le lemme 2.1.1. Si g ∈ Γ(D,O) avec |g| < 1, ona D(1|f + g) = D(1|f) et D(f + g|1) = D(f |1). Or, le sous-anneau k[t − o, 1

t−x1, . . . , 1

t−xm ] ⊂ Γ(D,O) est dense. Onpeut donc supposer que f est une fraction rationnelle. Comme k est algébriquement clos, on peut écrire

f(t) = u.

s∏i=1

(t− ai)ni

où u ∈ k×, ai ∈ k et ni ∈ Z (avec de plus, ai ∈ x1, . . . , xm si ni < 0). On raisonne par récurrence sur s. On peutsupposer que les ni sont tous non nuls et |ai−aj | 6= 0 si i 6= j. Lorsque s = 1, le résultat est vrai. En effet si n1 > 0, ona D(1|f) = D∩B1

k(a1, |u|−1/n1) et D(f |1) = D−B1k(a1, |u|−1/n1). Lorsque n1 < 0, on a D(f |1) = D∩B1

k(a1, |u|−1/n1)et D(1|f) = D − B1

k(a1, |u|−1/n1).Supposons maintenant que s ≥ 2 et notons λ = |a1 − a2| > 0. On considère les trois affinoïdes :– U0 = z ; |o− z| ≤ R, |a1 − z| ≥ λ, |a2 − z| ≥ λ,– U1 = z ; |o− z| ≤ R, |a1 − z| = λ,– U2 = z ; |o− z| ≤ R, |a2 − z| = λ.

C’est clairement des ouverts standards de (A1k)an. On a de plus U0 ∪U1 ∪U2 = B1

k(o,R). En effet, soit z ∈ B1k(o,R). Si

|a1− z| > λ alors |a2− z| = |a1− z| > λ et z ∈ U0. Si |a1− z| = λ alors z ∈ U1. Enfin, si |a1− z| < λ alors |a2− z| = λet z ∈ U2.

Par la première étape, il suffirait de montrer que D(1|f)∩Ui et D(f |1)∩Ui sont standards pour 0 ≤ i ≤ 2. NotonsDi = D ∩ Ui. On remarque alors que sur D0, f a partout la même norme que

g0(t) = u.(t− a1)n1+n2

s∏i=3

(t− ai)ni .

En effet, pour t ∈ U1(k) on a |t−a1| = |t−a2|. On déduit que D(1|f)∩U0 et D(f |1)∩U0 sont standards par l’hypothèsede récurrence.

De même sur D1, f a partout la même norme que

g1(t) = u1

s∏i=2

(t− ai)ni

avec u1 un scalaire de norme λn1 |u|. On déduit que D(1|f) ∩ U1 et D(f |1) ∩ U1 sont standards par l’hypothèse derécurrence. Le cas de D(1|f) ∩ U2 et D(f |1) ∩ U2 s’obtient par symétrie.Étape 3 : Fin de la preuve.

Tout ouvert quasi-compact de A1k est contenu dans un boule de Tate B1

k(o,R) avec R suffisamment grand. Enfaisant un changement de variables affines, on peut supposer que o = 0 et R = 1. Les domaines de B1

k = B1k(o, 1) sont

des unions finies de domaines rationnels. Par la première étape, il suffirait de montrer que

DB1k(f0|f1, . . . , fn)

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100 Motifs des variétés rigides analytiques II

est un ouvert standard pour f0, . . . , fn ∈ kt engendrant kt en tant qu’idéal.Par hypothèse, on peut trouver g0, . . . , gn ∈ kt tels que

(2.4)n∑i=0

figi = 1.

Notons M = maxi(|gi|) et m = 12M

−1. On déduit de (2.4) que maxi|fi(x)| > m pour tout x ∈ B1(k). Considérons lerecouvrement

B1k = DB1

k(m|f0)

⋃DB1

k(f0|m).

On a DB1k(f0|f1, . . . , fn)∩DB1

k(m|f0) = ∅ puisqu’un point x dans cette intersection vérifiera les inégalités contradictoires

m ≤ |f0(x)| ≤ |fi(x)| et maxi|fi(x)| > m. Notons D = DB1k(f0|m). C’est un ouvert standard sur lequel f0 est inversible.

On a alors

DB1k(f0|f1, . . . , fn) = DD(f0|f1, . . . , fn) = DD(1|f−1

0 f1, . . . , f−10 fn) =

n⋃i=1

DD(1|f−10 fi).

Par la seconde étape, on sait que chacun des DD(1|f−10 fi) est un ouvert standard. Par la première étape, une intersection

finie d’ouverts standards est un ouvert standard. La proposition est démontrée. c.q.f.d

Revenons maintenant au cas général où k n’est plus supposé algébriquement clos. Pour o, x1, . . . , xm ∈ A1(k) etR, r1, . . . , rm ∈

√|k×|, on dispose encore des domaines affinoïdes

(2.5) B1k(o,R)−

m⋃i=1

B1k(xi, ri)

.

Le lemme 2.1.1 reste vrai pour k non algébriquement clos. Toutefois, les domaines (2.5) ne suffisent plus pour décriretous les ouverts quasi-compacts de (A1

k)an. On a tout de même :

Corollaire 2.1.3 — Soit D ⊂ (A1k)an un ouvert quasi-compact. Il existe une extension finie galoisienne (et

donc séparable), telle que

(2.6) D⊗kl =∐α∈I

B1l (oα, Rα)−

∐β∈Jα

B1l (xβ , rβ)

avec oα, xβ ∈ A1(l) et Rα, rβ ∈

√|k×| vérifiant :

(i) |oα − oα′ | > max(Rα, Rα′) pour α 6= α′,(ii) rβ ≤ |oα − xβ | ≤ Rα pour β ∈ Jα,(iii) |xβ − xβ′ | ≥ max(rβ , rβ′) pour β 6= β′.Supposons de plus que D est connexe. Alors tous les rayons Rα sont égaux et le groupe de Galois de l/k permutetransitivement les boules de Tate B1

l (oα, Rα).

Demonstration Notons k le complété de la clôture algébrique de k. Par la proposition 2.1.2 et le lemme 2.1.1, onpeut écrire

(2.7) D⊗kk =∐α∈I

B1k(oα, Rα)−

∐β∈Jα

B1k(xβ , rβ)

avec les propriétés (i) à (iii) de l’énoncé. La clôture séparable de k est dense dans k. On peut donc supposer que lesoα et les xβ ont leurs coordonnées dans une extension finie séparable et galoisienne l/k. On a donc l’égalité (2.7) aprèschangement de base suivant l ⊂ k. Le résultat découle du fait que les domaines de (A1

l )an sont déterminés par les

points fermés (et donc aussi par les points k-rationnels). La dernière assertion est claire. c.q.f.d

Le corollaire 2.1.3 décrit tous les ouverts quasi-compacts de (A1k)an. En effet, par descente galoisienne, se donner

un ouvert quasi-compact D ⊂ (A1k)an revient à se donner un ouvert quasi-compact D′ ⊂ (A1

l )an invariant par l’action

de Gal(l/k) (avec l/k une extension galoisienne). Lorsque k est d’égale caractéristique nulle, on a une description plusprécise des ouverts quasi-compacts de (A1

k)an :

Proposition 2.1.4 — Supposons que k est d’égale caractéristique nulle et soit D ⊂ (A1k)an un ouvert quasi-

compact et connexe (en particulier non vide).

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 101

1- Il existe alors un point fermé o ∈ D et une rétraction D // o = Spm(k(o)) . En particulier, si D est géomé-triquement connexe, il admet un point rationnel.

2- Supposons que D possède un point k-rationnel o ∈ D(k). Il existe alors une extension finie galoisienne l/k degroupe de Galois G telle que

D⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I

B1l (xi, ri)

avec xi ∈ A1(l), R, ri ∈√|k×| vérifiant les conditions suivantes :

(a) ri ≤ |o− xi| ≤ R,(b) |xi − xj | ≥ max(ri, rj) si i 6= j,(c) l’action de G sur l = A1(l) stabilise l’ensemble xi ; i ∈ I.

Demonstration 1- On traite d’abord la première partie de l’énoncé. Par le corollaire 2.1.3, on peut trouver uneextension finie séparable l1/k telle que

D⊗kl1 =∐α∈I

B1l1(oα, Rα)−

∐β∈Jα

B1l1(xβ , rβ)

avec les centres et les rayons vérifiant les conditions (i) à (iii) dudit corollaire. On peut également supposer l1/kgaloisienne de groupe de Galois G1 et que les rayons sont dans |l×1 |.

Comme D est connexe, G1 permute transitivement les boules B1l1

(oα, Rα). Étant donné que G1 opère sur A1(l1)par des isométries, on déduit que tous les Rα sont égaux. On notera R leur valeur commune. Pour α ∈ I, on noteraStabG1

(α) le stabilisateur de α dans G1. On fixe δ ∈ I et on pose

o′δ =1

|StabG1(δ)|

∑g∈StabG1

(δ)

g.oδ.

Alors o′δ ∈ B1l1

(oδ, R) comme on déduit des inégalités

|o′δ − oδ| =

∣∣∣∣∣∣ 1

|StabG1(δ)|∑

g∈StabG1(δ)

g.oδ − oδ

∣∣∣∣∣∣ ≤ maxg∈StabG1(δ)|g.oδ − oδ| ≤ R.

La première inégalité ci-dessus utilise que la norme d’un nombre rationnel non nul est égale à 1 lorsque k est d’égalecaractéristique nulle.

Pour β ∈ Jδ, on note yβ = xβ −∑

16=g∈StabG1(δ)(oδ − g.xβ). Étant donné que |oδ − g.xβ | ≤ R, on déduit que

yβ ∈ B1k(oδ, R). Par le lemme 2.1.5 ci-dessous, on aurait pu supposer que |oδ − yβ | = Rα pour tout β ∈ Jδ. (On utilise

le fait que R ∈ |l×1 | pour se ramener par une homothétie au cas R = 1.) Sous cette hypothèse, o′δ est un point de D(l1).En effet, on a les égalités (puisque k est d’égale caractéristique nulle)

|o′δ − xβ | =

∣∣∣∣∣∣ 1

|StabG1(δ)|

∑g∈StabG1

(δ)

g.oδ − xβ

∣∣∣∣∣∣ =

∣∣∣∣∣∣∑

g∈StabG1(δ)

oδ − g.xβ

∣∣∣∣∣∣ =

∣∣∣∣∣∣oδ −xβ − ∑

16=g∈StabG1(δ)

oδ − g.xβ

∣∣∣∣∣∣ = R.

Il est maintenant facile d’obtenir la première partie de la proposition. Notons l = lStabG1

(δ)1 le sous-corps des inva-

riants par StabG1(δ). Par construction, o′δ est un point l-rationnel de D. Le morphisme évident B1

l (o′δ, R) // (A1

k)an

est l’inclusion d’un domaine quasi-compact. Pour vérifier cela, on peut étendre les scalaires suivant l’extension l1/k.On retrouve alors le morphisme∐

σ:l→l1

B1l1(σ(o′δ), R) =

∐g∈G1/StabG1

(δ)

B1l1(g.o′δ, R) =

∐α

B1l1(oα, R) // (A1

l1)an.

Étant donné que |oα− oα′ | > R si α 6= α′, notre morphisme est bien une inclusion. On voit également que D est inclusdans B1

l (o′δ, R). Ceci donne immédiatement la rétraction souhaitée.

2- On utilise la même méthode que pour la première partie. Il existe une extension finie galoisienne l/k de groupede Galois G telle que

(2.8) D⊗kl = B1l (o,R)−

(∐i∈I

B1l (xi, ri)

)

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102 Motifs des variétés rigides analytiques II

avec R, ri ∈√|k×| et o, xi ∈ A1(l) = l vérifiant les conditions du corollaire 2.1.3, i.e., les conditions (a) et (b) de

l’énoncé. Il reste à vérifier (c).L’action de G sur A1

l stabilise la partie∐i∈I B1

l (xi, ri). Ainsi, pour g ∈ G et i ∈ I, il existe (un unique) g(i) ∈ I

tel que |gxi − xg(i)| < rg(i). On obtient ainsi une action de G sur l’ensemble I. On a aussi ri = rg(i) pour tout i ∈ I.On fixe e ∈ I et on pose

x′e =1

|StabG(e)|∑

g∈StabG(e)

g.xe.

On a alors (puisque k est d’égale caractéristique nulle)

|x′e − xe| =

∣∣∣∣∣∣ 1

|StabG(e)|∑

g∈StabG(e)

(g.xe − xe)

∣∣∣∣∣∣ ≤ maxg∈StabG(e)|g.xe − xe| < re.

Pour i ∈ I, il existe g ∈ G tel que i = g.e. Alors x′i = g.x′e est indépendant du choix de g. On a encore |x′i − xi| < ri.On peut alors écrire

X⊗kl = B1l (o,R)−

(∐i∈I

B1l (x′i, ri)

).

Par construction, G stabilise l’ensemble x′i ; i ∈ I. La proposition est démontrée. c.q.f.d

Lemme 2.1.5 — On suppose que le corps résiduel de k est infini. Pour tout a1, . . . , ar ∈ B1(k), il existe b ∈ B1(k)tel que |b− ai| = 1 pour tout 1 ≤ i ≤ r.

Demonstration Il s’agit de montrer que le k-affinoïde D = B1k −

⋃i B1

k(ai, 1) admet un point rationnel. Par lelemme 2.1.1, on peut supposer que |ai − aj | = 1 pour i 6= j. On voit alors que D est la fibre générique du k-schémaformel à bonne réduction D = Spf(k[t, 1

t−a1, . . . , 1

t−ar ]//(π)). La fibre spéciale de ce schéma formel est un ouvert nonvide de A1

k. Comme k est infini, Dσ possède des points k-rationnels. Comme D est lisse sur k, on peut relever un

point k-rationnel de Dσ en un point k-rationnel de D = Dη. c.q.f.d

Remarque 2.1.6 — Lorsque la caractéristique résiduelle de k est positive, la conclusion de la proposition 2.1.4 estfausse en général. En effet, on peut construire un ouvert affinoïde Y ⊂ (A1

k)an et une extension galoisienne l/k avecY ⊗kl ' B1

k(z,R) et tels que Y n’admet aucun point k-rationnel.

Dans la suite de cette sous-section, on étudiera la cohomologie de Čech des ouverts quasi-compacts de (A1k)an. On

rappelle d’abord quelques notions classiques.

Definition 2.1.7 — Soit F un préfaisceau de groupes abéliens sur une catégorie C admettant des produits fibrés.Soit R = (Ui → X)i∈I une famille de flèches dans C. On dit que F est acyclique pour R (ou simplement R-acyclique)si l’augmentation évidente F (X) // C∗F (R) avec C∗F (R) le complexe de Čech∏

i

F (Ui) //

∏i1,i2∈I

F (Ui1 ×X Ui2) // . . . //

∏i1,...,in∈I

F (Ui1 ×X · · · ×X Uin) // . . .

,est un quasi-isomorphisme. En d’autres termes, C∗F (R) est acyclique sauf en degré zero et son premier groupe decohomologie est canoniquement isomorphe à F (X).

Il est facile de voir que tout préfaisceau F est R-acyclique dès que Ui → X est inversible pour un indice i ∈ I (ondira dans ce cas que la famille R est scindée). Les deux lemmes suivants sont bien connus :

Lemme 2.1.8 — Soit F un préfaisceau de groupes abéliens sur une catégorie C admettant des produits fibrés.Soient R = (Ui → X)i∈I et P = (Vj → X)j∈J deux familles de morphismes dans C. Supposons que F est

1. P-acyclique,2. (R ×X (Vj1 ×X · · · ×X Vjn))-acyclique pour tout j1, . . . , jn ∈ J ,3. (P ×X (Ui1 ×X · · · ×X Uin))-acyclique pour tout i1, . . . , in ∈ I.

Alors, F est également R-acyclique.

Demonstration De la troisième condition, on déduit une suite exacte de complexes de groupes abéliens

0 // C∗F (R) //

∏j1∈J

C∗F (R ×X Vj1) // . . . //

∏j1,...,jn∈J

C∗F (R ×X (Vj1 ×X · · · ×X Vjn)) // . . .

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 103

Étant donné que F est (R ×X (Vj1 ×X · · · ×X Vjn))-acyclique, on obtient un isomorphisme, dans la catégorie dérivéedes groupes abéliens, entre C∗F (R) et C∗F (P) ' F . D’où le résultat. c.q.f.d

Lemme 2.1.9 — Soit F un préfaisceau de groupes abéliens sur une catégorie C admettant des produits fibrés. SoitR = (Ui → X)i∈I une famille de flèches dans C telle que :

– I est un ensemble fini totalement ordonné,– pour i ∈ I, le morphisme diagonal Ui → Ui ×X Ui est inversible.

Alors le complexe de Čech C∗F (R) est quasi-isomorphe à son sous-complexe borné C ′∗F (R) donné par∏i∈I

F (Ui) //

∏i<j∈I

F (Ui ×X Uj) // . . . //

∏i1<i2<···<in∈I

F (Ui1 ×X · · · ×X Uin) // . . .

.Demonstration Ce lemme se démontre par la même méthode que le lemme précédent. Lorsque R ×X V est scindé(i.e., contient un isomorphisme), le complexe C ′∗F (R ×X V ) est quasi-isomorphe à F (V ). On en déduit facilement que

0 // C∗F (R) //

∏i∈I

C∗F (R ×X Ui) //

∏i<j∈I

C∗F (R ×X (Ui ×X Uj)) // . . .

est une suite exacte de complexes. De même, les complexes C∗F (R ×X (Ui1 ×X · · · ×X Uin)) sont quasi-isomorphes àF (Ui1 ×X · · · ×X Uin). Ceci fournit un inverse à l’inclusion évidente C ′∗F (R) ⊂ C∗F (R) (dans la catégorie dérivée desgroupes abéliens). c.q.f.d

Étant donné une k-variété rigide X, on notera Ouvqc(X) l’ensemble ordonné des ouverts quasi-compacts de Xmunie de la topologie des recouvrements admissibles, que l’on notera ra.

Proposition 2.1.10 — Soient X un k-affinoïde et F un préfaisceau de groupes abéliens sur Ouvqc(X). Onsuppose les deux conditions ci-dessous :

(i) F (∅) = 0,(ii) pour U et V des ouverts quasi-compacts de X,

0 // F (U ∪ V ) // F (U)⊕ F (V ) // F (U ∩ V ) // 0

est une suite exacte courte.

Alors F est un faisceau pour la topologie des recouvrements admissibles et Hira(U,F ) = 0 pour tout i > 0 et U ∈

Ouvqc(X).

Demonstration Si l’on regarde F comme un objet de la catégorie de modèles des préfaisceaux à valeurs dans lescomplexes de groupes abéliens, la condition (ii) se traduit en disant que F envoie un carré

U ∩ V //

U

V // U ∪ V

sur un carré homotopiquement cartésien. Ainsi, F vérifie la propriété de Grown-Gersten (voir définition 1.2.28) rela-tivement à la topologie des recouvrements admissibles sur Ouvqc(X). Les preuves du théorème 1.2.30 et du corollaire1.2.32 s’appliquent sans changements importants au cas de la topologie des recouvrements admissibles. On en déduitque le préfaisceau F est projectivement ra-fibrant. En d’autres termes, F est un faisceau et Hi

ra(U,F ) = 0 pourU ∈ Ouvqc(X) et i > 0. c.q.f.d

On revient maintenant au cas de la variété rigide (A1k)an. Nous allons décrire trois types de recouvrements admis-

sibles qui permetteront de détecter les préfaisceaux ra-fibrants sur Ouvqc((A1k)an).

Soient W ⊂ (A1k)an un ouvert quasi-compact connexe et l/k une extension galoisienne de groupe de Galois G telle

que

W ⊗kl =∐α∈I

B1l (oα, R)−

∐β∈Jα

B1l (xβ , rβ)

avec R, rβ ∈

√|k×| et oα, xβ ∈ A1(l) comme dans le corollaire 2.1.3. On relaxera toutefois l’hypothèse sur les oα en

supposant seulement que |oα − xβ | ≤ R pour β ∈ Iα. En particulier, on n’exclut pas la possibilité d’avoir oα = xβpour un certain β ∈ Jα. On dira que l/k est une extension trivialisante pour W .

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104 Motifs des variétés rigides analytiques II

On note J =∐α∈I Jα. Comme G permute les boules fermées B1

l (oα, R) et les boules ouvertes B1l (xβ , rβ), on

déduit une action de G sur les ensembles I et J . La connexité de W entraîne que l’action de G sur I est transitive.Pour α ∈ I et g ∈ G, on a g.Jα = Jg.α. En particulier, le cardinal de Jα est indépendant de α ∈ I. On le notera t(W ).Les boules ouvertes B1

l (xβ , rβ) seront appelées les trous de W (au dessus de l/k). Elles sont au nombre de t(W ) · |I|(qui est indépendant de l’extension galoisienne trivialisante l/k).

Recouvrements du premier type : On suppose ici que t(W ) ≥ 2. On fixe γ ∈ J et on pose d = minγ 6=β∈J |xγ −xβ | ≤ R.(La dernière inégalité provient du fait que t(W ) ≥ 2.) On note J(γ) = G.γ l’orbite galoisienne de γ et Jα(γ) = Jα∩J(γ).

Les ouverts affinoïdes de (A1l )

an

⋃α∈I,β∈Jα(γ)

B1l (xβ , d) et

∐α∈I

B1l (oα, R)−

∐β∈Jα(γ)

B1l (xβ , d)

sont stables par G et définissent par descente galoisienne des ouverts affinoïdes D1(γ) et D2(γ) de (A1

k)an. On notealors Wi(γ) = W ∩Di(γ) et RI

W,γ = (Wi(γ) ⊂W )i=1,2.On peut décrire plus explicitement les ouverts Wi. Notons pour cela J(γ) le quotient de J(γ) par la relation

d’équivalence β ∼ β′ ⇔ |xβ − xβ′ | ≤ d. Pour δ ∈ J(γ) on choisit β ∈ δ et on pose xδ = xβ . On a alors

W1⊗kl =∐

δ∈J(γ)

B1l (xδ, d)−

∐β∈δ

B1l (xβ , rβ)

et W2⊗kl =∐α∈I

B1l (oα, R)−

∐β∈Jα−Jα(γ)

B1l (xβ , rβ)

∐ ∐β∈Jα(γ)

B1l (xβ , d)

.

Recouvrements du deuxième type : On suppose ici que t(W ) ≥ 1. On fixe γ ∈ J et λ ∈√|k×| tels que λ < R et

|xγ − xβ | 6= λ pour tout β ∈ J . On note encore J(γ) l’orbite galoisienne de γ et Jα(γ) son intersection avec Jα.Les ouverts affinoïdes de (A1

l )an

⋃α∈I,β∈Jα(γ)

B1l (xβ , λ) et

∐α∈I

B1l (oα, R)−

⋃β∈Jα(γ)

B1l (xβ , λ)

sont stables par G et définissent par descente galoisienne des ouverts affinoïdes D1(γ, λ) et D2(γ, λ) de (A1

k)an. Onnote alors Wi(γ, λ) = W ∩Di(γ, λ) et RII

W,γ,λ = (Wi(γ, λ) ⊂W )i=1,2.On peut décrire plus explicitement les ouverts Wi(γ, λ). Considérons pour cela la relation d’équivalence sur J(γ)

telle que β ∼ β′ ⇔ |xβ − xβ′ | ≤ λ ⇔ |xβ − xβ′ | < λ. Cette relation d’équivalence est compatible à l’action de G.On obtient donc une action de G sur le quotient Jλ(γ) = J(γ)/ ∼. De même, si β ∼ β′ alors β et β′ sont dans unemême partie Jα(γ). On déduit alors une partition naturelle Jλ(γ) =

∐α∈I J

λα(γ). On fixe un système de représentants

Jλ(γ)→ J(γ) et on notera xδ = xβ avec β le représentant de la classe δ ∈ Jλ(γ). On a alors

W1(γ, λ)⊗kl =∐

δ∈Jλ(γ)

B1l (xδ, λ)−

∐β∈δ

B1l (xβ , rβ)

et W2(γ, λ)⊗kl =∐α∈I

B1l (oα, R)−

∐β∈Jα−Jα(λ)

B1l (xβ , rβ)

∐ ∐δ∈Jλα(γ)

B1l (xγ , λ)

.

Recouvrements du troisième type : On ne fait aucune hypothèse sur t(W ). Toutefois, ce recouvrement dépendera del’extension l/k via le choix d’un point z0 ∈ D(l). Soit ε ∈

√|k×| tel que ε < |z0 − xβ | pour β ∈ J et ε < |z0 − g.z0|

pour g ∈ G avec z0 6= g.z0. Les deux ouverts affinoïdes de (A1l )

an

∐z∈G.z0

B1l (z, ε) et

∐α∈I

B1l (oα, R)−

∐z∈G.z0∩B1

l (oα,R)

B1l (z, ε)

sont invariants par G et définissent par descente galoisienne des ouverts affinoïdes D1(z0, ε) et D2(z0, ε) de (A1

k)an. Onpose Wi(z0, ε) = W ∩Di(z0, ε) et RIII

z0,ε = (Wi(z0, ε) ⊂W )i=1,2.

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 105

La description explicite des ouverts Wi(z0, ε) est la suivante :

W1(z0, ε)⊗kl = D1(z0, ε)⊗kl =∐

z∈G.z0

B1l (z, ε)

et W2(z0, ε)⊗kl =∐α∈I

B1l (oα, R)−

∐β∈Iα

B1l (xβ , rβ)

∐ ∐z∈G.z0∩B1

l (oα,R)

B1l (z, ε)

.

On peut maintenant enoncer notre critère.

Theoreme 2.1.11 — Soit F un préfaisceau sur Ouvqc((A1k)an). On suppose les conditions suivantes satisfaites :

(a) F (∅) = 0 et F (D1 ∪D2) ' F (D1)⊕ F (D2) pour D1, D2 ∈ Ouvqc((A1k)an) avec D1 ∩D2 = ∅,

(b) F est acyclique pour les recouvrements du type I, II, et III comme ci-dessus.

Alors, F est un faisceau pour la topologie des recouvrements admissibles et Hira(D,F ) = 0 pour tout ouvert quasi-

compact D et i > 0.

Demonstration Soit F un préfaisceau de groupes abéliens vérifiant (a) et (b). Nous allons montrer qu’il vérifieaussi les propriétés (i) et (ii) de la proposition 2.1.10. La propriété (i) découle de (a). Seule la propriété (ii) demandeune preuve. Étant donnés deux ouverts quasi-compacts U et V de (A1

k)an, on notera MV(U, V ) le complexe de Mayer-Vietoris

0 // F (U ∪ V ) // F (U)⊕ F (V ) // F (U ∩ V ) // 0 .

Il s’agit de montrer que MV(U, V ) est acyclique, ce qui revient à dire que F est acyclique pour le recouvrement(U ⊂ U ∪ V , V ⊂ U ∪ V ). On procède en plusieurs étapes.Étape 1 : On suppose que U = U1

∐U2

∐. . .∐Un. Montrons la propriété suivante. Pour que MV(U, V ) soit acyclique,

il suffit que les complexes MV(Ui, Ui+1 ∪ · · · ∪ Un ∪ V ) soient acycliques pour tout 1 ≤ i ≤ n.Par récurrence, on se ramène immédiatement au cas où n = 2. De l’acyclicité de MV(U2, V ) (et de la propriété

(a)), on déduit une suite exacte de complexes

0 // MV(U1, U2 ∪ V )) // MV(U1

∐U2, V ) // MV(U1, U2 ∩ V ) // 0 .

De l’acyclicité de MV(U1, U2 ∪ V ) (et de la propriété (a)) on obtient l’acyclicité de MV(U, V ).Par la proriété ci-dessus, on peut supposer U connexe. Écrivons V =

∐r+si=1 Vi avec Vi connexe, Vi ∩ U 6= ∅ lorsque

1 ≤ i ≤ s et Vi ∩ U = ∅ lorsque s+ 1 ≤ i ≤ s+ r. Par (a), on a MV(U, V ) = MV(U,∐si=1 Vi)⊕MV(∅,

∐s+ri=s+1 Vi). Il

suffit donc de considérer le cas où toutes les composantes connexes de V rencontrent U . Par la propriété ci-dessus (eten remarquant que U ∪ Vi ∪ · · · ∪ Vs est encore connexe), on voit qu’on peut également supposer V connexe. Enfin, siU ∩ V = ∅, MV(U, V ) est acyclique par (a). On peut donc supposer que U ∩ V 6= ∅, i.e., U ∪ V connexe.Étape 2 : On suppose maintenant que U , V et U ∪ V sont connexes. Soit l/k une extension galoisienne de groupe deGalois G telle que

U⊗kl =∐a∈A

(B1l (ua, R)−

∐b∈Ba

B1l (xb, rb)

)et V ⊗kl =

∐c∈C

(B1l (vc, S)−

∐e∈Ec

B1l (ye, se)

).

Comme d’habitude, on suppose que |ua − xb| ≤ R pour b ∈ Ba et que |ub − ub′ | ≥ max(rb, rb′) si b 6= b′. Onsuppose de même les conditions correspondantes pour V . Le groupe G opère sur les ensembles A, C, B =

∐a∈ABa et

E =∐c∈C Ec. Les actions sur A et C sont transitives, comme il découle de la connexité de U et V .

Par symétrie, on peut supposer que R ≥ S. Comme U ∩ V est non vide, on voit que chaque boule B1l (vc, S)

est incluse dans une unique boule B1l (ua, R). Ceci fournit une application G-équivariante C // A (qui est donc

forcément surjective). Pour a ∈ A, on note Ca la fibre de cette application en a de sorte que C =∐a∈A Ca. L’hypothèse

R ≥ S et U ∩ V 6= ∅ entraîne que

(U ∪ V )⊗kl =∐a∈A

(B1l (ua, R)−

∐h∈Ha

B1l (zh,mh)

).

Notons que pour h ∈ H, il existe un unique b ∈ B tel que B1l (zh,mh) est contenue dans B1

l (xb, rb). Ceci fournit

une application G-équivariante θ : H // B . De même, notons H ′ ⊂ H l’ensemble des h tels que B1l (zh,mh) ⊂∐

c∈C B1l (vc, S). Alors, pour tout h ∈ H ′, il existe un unique e ∈ E tel que B1

l (zh,mh) est contenue dans B1l (ye, se)

.

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106 Motifs des variétés rigides analytiques II

Ceci fournit une application G-équivariante θ′ : H ′ // E . Remarquons aussi qu’on dispose d’une décompositionH ′ =

∐c∈C H

′c (telle que h ∈ H ′c si et seulement si B1

l (zh.mh) ⊂ B1l (vc, S)) et que Ha ∩H ′ =

∐c∈Ca H

′c.

Étape 3 : Dans cette étape, on se ramène au cas où θ et θ′ sont surjectives, i.e., pour tout b ∈ B (resp. e ∈ E) il existeau moins un indice h ∈ H tel que B1

l (zh,mh) est contenue dans B1l (xb, rb)

(resp. B1l (ye, se)

).Pour fixer les idées, on se concentre sur le cas de θ. On procède de la manière suivante. Soit b0 ∈ B tel que

B1l (xb0 , rb0) ne contient aucune des boules ouvertes B1

l (zh,mh). Il vient que B1l (xb0 , rb0) ⊂ ((U ∪ V )⊗kl) et donc

forcément B1l (xb0 , rb0) ⊂ V ⊗kl. Soit ε ∈

√|k×| suffisamment petit. Considérons le recouvrement de U ∪ V par les

ouverts affinoïdes D1 et D2 définis par

D1⊗kl =∐

b∈G.b0

B1l (xb, ε) et D2⊗kl = (U ∪ V )⊗kl −

∐b∈G.b0

B1l (xb, ε)

.

C’est un recouvrement de U ∪ V du troisième type. On sait donc que MV(D1, D2) est acyclique. Remarquons d’autrepart que D1 ∩U = ∅, D1 ⊂ V et U ⊂ D2. En utilisant le lemme 2.1.8, on voit que l’acyclicité de MV(U, V ) découle del’acyclicité de MV(U ∩D2, V ∩D2) et MV(V ∩D1, V ∩D2). Pour le second complexe, on remarque que

V = (V ∩D1)⋃

(V ∩D2)

est lui aussi un recouvrement du troisième type. Ceci nous ramène donc à traiter le cas de U ′ = U ∩D2 et V ′ = V ∩D2.En itérant cette construction pour U et V , on obtient la propriété recherchée.

Étape 4 : À partir de maintenant, on suppose qu’on a des surjections θ : H // // B et θ′ : H ′ // // E et onraisonnera par récurrence sur le cardinal de H. Lorsque H est vide, B est vide et on obtient V ⊂ U . Il n’y a donc rienà montrer dans ce cas. De même, on peut écarter le cas H ′ vide (ou d’une manière équivalente, E vide) qui entraineégalement que V ⊂ U .

Lorsque Ha est un singleton, Ba est aussi un singleton et H ' B ' A. Comme G opère transitivement sur A, ilopère aussi transitivement sur H. Puisque H ′ ⊂ H est non vide et stable par l’action de G, on a forcément H ′ = H.La relation Ha = Ha ∩H ′ =

∐c∈Ca H

′c montre que Ca et H ′c sont aussi des singletons. La surjectivité de H ′ // E

entraine que les Ec sont aussi des singletons. Il vient que H = H ′ ' E ' C ' A. Quitte à changer les positions descentres ua, on peut donc écrire

U⊗kl =∐a∈A

(B1l (ua, R)− B1

l (ua, r)) , V ⊗kl =

∐a∈A

(B1l (ua, S)− B1

l (ua, s))

et (U ∪ V )⊗kl =∐a∈A

(B1l (ua, R)− B1

l (ua,min(r, s))).

Lorsque s ≥ r, U = U ∪ V et il n’y a rien à montrer. On suppose donc que s < r. Notons V ′ l’ouvert affinoïde tel que

V ′⊗kl =∐a∈A

(B1l (ua, r)− B1

l (ua, s))

On a U ∪ V = U ∪ V ′ et V ′ ⊂ V (on utilise la connexité de U ∪ V pour voir que S ≥ r). Le recouvrement(U ⊂ U ∪ V , V ′ ⊂ U ∪ V ) est du deuxième type. Si V ′ = V , l’acyclicité de MV(U, V ) est garantie par l’énoncé.Lorsque V ′ 6= V (i.e., S > r), on remarque que (U ∪ V ⊂ V , V ′ ⊂ V ) est également du second type et on applique lelemme 2.1.8, pour conclure.Étape 5 : À partir de maintenant, on suppose que Ha possède au moins deux éléments (et H ′ 6= ∅). Quitte à modifierles centres xb et ye, on peut supposer que

xb ; b ∈ B⋃ye ; e ∈ E ⊂ zh ; h ∈ H.

Dans cette étape, on fixe h0 ∈ Ha et on suppose qu’il existe h1, h2 ∈ Ha tels que 0 < |zh0− zh1

| < |zh0− zh2

| ≤ R.On fixe alors λ ∈

√|k×| tel que |zh0 − zh1 | < λ < |zh0 − zh1 | et λ différent de tous les |zh′ − zh′′ | avec h′, h′′ ∈ Ha. En

particulier, λ sera différent de tous les |xb − xb′ | et |ye − ye′ |.On considère alors les ouverts quasi-compacts D1 et D2 tels que

D1⊗kl =⋃

h∈G.h0

B1l (zh, λ) et D2⊗kl =

∐a∈A

(B1l (ua, R)−

⋃h∈G.h0∩Ha

B1l (zh, λ)

).

Alors (Di ∩ U ⊂ U)i=1,2, (Di ∩ V ⊂ V )i=1,2 et (Di ∩ (U ∪ V ) ⊂ (U ∪ V ))i=1,2 sont des recouvrements du deuxièmetype. Par la condition (b) de l’énoncé, F est acyclique pour ces recouvrements.

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 107

Par le lemme 2.1.8, il suffira de montrer que F est acyclique pour les trois recouvrements suivants :

(2.9) D1 = (D1 ∩ U)⋃

(D1 ∩ V ) , D2 = (D2 ∩ U)⋃

(D2 ∩ V ) et D1 ∩D2 = (D1 ∩D2 ∩ U)⋃

(D1 ∩D2 ∩ V ).

On commence par le dernier recouvrement. Comme λ est différent de tous les |zh′ − zh′′ |, on a deux possibilités–(B1l (zh0 , λ)− B1

l (zh0 , λ))⊂(U⊗kl

),

–(B1l (zh0

, λ)− B1l (zh0

, λ))⋂ (

U⊗kl)

= ∅.De même, on a les deux possibilités suivantes

–(B1l (zh0 , λ)− B1

l (zh0 , λ))⊂(V ⊗kl

),

–(B1l (zh0

, λ)− B1l (zh0

, λ))⋂ (

V ⊗kl)

= ∅.(La première ne pouvant se produire que lorsque h0 ∈ H ′.) On déduit de là que le dernier recouvrement de (2.9) estscindé (i.e., contient un isomorphisme).

Pour les deux premiers, recouvrements de (2.9), on remarque que :– Di ∩ (U ∪ V ) possède strictement moins de trous que U ∩ V ,– SiDi∩U (resp.Di∩V ) est non vide, il est connexe et chacun de ses trous est contenu dans un trou deDi∩(U∪V ).

On peut alors appliquer la récurrence sur le cardinal de H pour conclure.Étape 6 : Pour terminer, il nous reste à traiter le cas où la valeur de |zh − zh′ | est indépendente de h 6= h′ dans Ha.On notera d cette valeur. On considère le recouvrement du premier type de U ∪ V par les ouverts U ′ et V ′ tels que

U ′⊗kl =∐a∈A

(B1l (ua, R)−

∐h∈H

B1l (zh, d)

)et V ′⊗kl =

∐a∈A

(B1l (za, d)−

∐h∈Ha

B1l (zh,mh)

),

avec za l’un des zh pour h ∈ Ha. On vérifie aussitôt que tous les recouvrements ci-dessous

U = (U ∩ U ′)⋃

(U ∩ V ′) , V = (V ∩ U ′)⋃

(V ∩ V ′) et U ∩ V = (U ∩ V ∩ U ′)⋃

(U ∩ V ∩ V ′)

sont scindés ou du premier type. Par le lemmme 2.1.8, il suffira de montrer que F est acyclique pour les recouvrements

U ′ = (U ′ ∩ U)⋃

(U ′ ∩ V ) et V ′ = (V ′ ∩ U)⋃

(V ′ ∩ V ).

On vérifie facilement que les recouvrements ci-dessus sont scindés ou du deuxième type. Ceci achève la preuve duthéorème. c.q.f.d

On termine cette sous-section par une description plus sympathique des recouvrements du premier et deuxièmetype dans le cas où k est algébriquement clos, ou d’égale caractéristique nulle.

Lemme 2.1.12 — On suppose que k est d’égale caractéristique nulle ou algébriquement clos. Soient W ⊂ (A1k)an

un ouvert quasi-compact admettant un point rationnel o ∈W (k) et l/k une extension galoisienne de groupe de GaloisG telle que

W ⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I

B1l (xi, ri)

.

On supposera satisfaites les conditions (a), (b) et (c) de la proposition 2.1.4. (Notez que lorsque k est algébriquementclos, l = k, G = 1 et la conditions (c) est vide.)

1- On suppose que |I| ≥ 2 et on choisit i0 ∈ I. On note d = minj 6=i0 |xi0 − xj | et I0 = G.i0, l’orbite galoisienne dei0. Soient W1 et W2 les ouverts affinoïdes de (A1

k)an tels que

W1⊗kl =⋃i∈I0

B1l (xi, d) et W2⊗kl = B1

l (o,R)−

( ∐i∈I−I0

B1l (xi, ri)

∐∐

i∈I0

B1l (xi, d)

).

Alors RI = (Wi ⊂W )i=1,2 est un recouvrement du premier type et tous les recouvrements du premier type s’obtiennentainsi.

2- On suppose que |I| ≥ 1 et on fixe i0 ∈ I. On note I0 = G.i0, l’orbite galoisienne de i0. Soit λ ∈√|k×|, avec

λ < R et λ 6= |xi − xj | pour (i, j) ∈ I2. Soient W1 et W2 les ouverts affinoïdes de (A1k)an tels que

W1⊗kl =⋃i∈I0

B1l (xi, λ) et W2⊗kl = B1

l (o,R)−

( ∐i∈I−I0

B1l (xi, ri)

⋃ ⋃

i∈I0

B1l (xi, λ)

).

Alors RII = (Wi ⊂ W )i=1,2 est un recouvrement du deuxième type et tous les recouvrements du deuxième types’obtiennent ainsi.

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108 Motifs des variétés rigides analytiques II

2.1.2 Préfaisceaux et faisceaux surconvergentsSoient k un corps complet pour une norme non-achimedienne qu’on supposera non-triviale et π ∈ k∨ − 0. Dans

cette sous-section, on étudie la notion de surconvergence en géométrie rigide qui est basée sur la relation d’intérioritéentre les ouverts d’une variété rigide. Toutes nos variétés rigides seront implicitement supposées séparées (bien quesouvent, cette hypothèse est superflue ou peut être remplacée par l’hypothèse de quasi-séparabilité).

Proposition 2.1.13 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte et U, V ⊂ X des ouverts quasi-compactsde X. Les conditions suivantes sont équivalentes :

(i) Il existe un ouvert quasi-compact W ⊂ X tel que X = V ∪W et U ∩W = ∅,(ii) Il existe des modèles formels X, U et V de X, U et V tels que :

– U et V sont des ouverts Zariski de X,– Vσ contient l’adhérence de Uσ dans Xσ.

(iii) L’adhérence de P(U) dans P(X) est contenue dans P(V ).(iv) Pour tout p ∈ P(U), l’adhérence de p dans P(X) est contenue dans P(V ).

Lorsque l’une des quatre conditions ci-dessus est satisfaites (et donc aussi les trois autres), nous dirons que U est dansl’intérieur de V relativement à X et on écrit U bX V .

Demonstration On montre d’abord l’équivalence (i) ⇔ (ii). Soient X, U et V des modèles vérifiant (i). On prendalors W = [X− (Uσ)]η. Réciproquement, soit W comme dans (ii). Soit X un modèle plat suffisamment fin de sorte queU , V et W soient les fibres génériques d’ouverts Zariski U, V et W de X. Alors, U∩W = ∅ puisqu’il est plat sur k etque sa fibre générique est vide. Il vient que (Uσ) ∩W = ∅. Comme X = U ∪W, on a forcément (Uσ) ⊂ V.

Pour l’implication (i) ⇒ (iii), on prend X, U et V comme dans (i). Pour X′ plus fin que X, notons U′ = X′×XU etV′×XV. On a alors (U′σ) ⊂ V′σ. En passant à la limite suivant les X′ plus fin que X, on obtient que P(U) ⊂ P(V ).

L’implication (iii)⇒ (iv) est claire. Pour terminer, il reste à montrer que (iv)⇒ (i). Soit X un modèle suffisammentfin de sorte que U et V soient les fibres génériques d’ouverts U, V ⊂ X. On supposera aussi que X est plat sur k.Soient g1, . . . , gn les points génériques de Uσ. L’application P(U) // Uσ est surjective. On peut donc trouver des

points gi ∈ P(U) qui s’envoient sur les gi. Par (iv) on sait que gi ⊂ P(V ). Il vient que l’image de gi // Xσ ,

qui n’est autre que gi, est contenue dans Vσ. Comme (Uσ) = ∪igi, on a la propriété (i). c.q.f.d

La condition (iii) ci-dessus garde un sens sans l’hypothèse de quasi-compacité sur X, U ou V . Ainsi, l’écritureU bX V portera en général sur la condition (iii). On regroupe quelques propriétés de permanence dans le lemmesuivant.

Lemme 2.1.14 — Soient U et V deux ouverts admissibles d’une k-variété rigide X.1- Supposons que U bX V . Alors, pour tout morphisme Y // X de k-variétés rigides, on a U×XY bY V ×XY .2- Soient (Xi)i∈I un recouvrement admissible de X. Alors, U bX V si et seulement si pour tout i ∈ I, on a

U×XXi bXi V ×XXi.

Demonstration La première assertion découle des inclusions

P(U×XY ) ⊂ (P(Y )→ P(X))−1(P(U)) ⊂ (P(Y )→ P(X))−1(P(V )) = P(V ×XY ).

La seconde assertion découle du fait que la famille (P(Xi))i∈I est un recouvrement ouvert de P(X). c.q.f.d

Proposition 2.1.15 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte. Soient U et V deux ouverts quasi-compactsde X tels que U ∩ V = ∅. Il existe alors un ouvert quasi-compact U ′ de X tel que U bX U ′ et U ′ ∩ V = ∅.

Demonstration Soit X un modèle suffisamment fin de X de sorte que U et V sont les fibres génériques de sous-schémas formels ouverts U et V de X avec U ∩ V = ∅. Alors Z = (Uσ) ∩ (Vσ) est un sous-schéma fermé de Xσ partoutde codimension plus grande que 1 dans (Uσ) et (Vσ).

Soient I et J des idéaux de type fini ayant pour cosupport (Uσ) et (Vσ) respectivement. Soit X′ l’éclaté de I +Jdans X. Étant donné que le centre de l’éclatement est disjoint de U et V, ces derniers sont naturellement des ouvertsde X′ qu’on notera U′ et V′ pour éviter les confusions. Les adhérences (U′σ) et (V′σ) s’identifient aux transformés puresde (Uσ) et (Vσ). Par le lemme 1.1.33, (U′σ) ∩ (V′σ) = ∅. Il vient que l’ouvert U ′ = [X′ − (V′σ)]η convient. c.q.f.d

La proposition suivante illustre la relation d’intériorité dans le cas concret des ouverts rationnels.

Proposition 2.1.16 — Soient X un k-affinoïde, U un ouvert quasi-compact de X et f0, . . . , fn ∈ Γ(X,O)engendrant Γ(X,O) comme idéal. Pour que DX(f0|f1, . . . , fn) bX U il faut et il suffit qu’il existe λ ∈

√|k×| avec

λ > 1 et tel que DX(λ.f0|f1. . . . , fn) ⊂ U . En particulier, on a

(2.10) DX(f0|f1, . . . , fn) bX DX(λ.f0|f1. . . . , fn).

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 109

Demonstration On montre d’abord (2.10). Soit ε ∈√|k×| suffisamment petit de sorte que λε < maxi=0,...,n|fi(x)|

pour tout x ∈ X. Alors, DX(ε|f0) ∩DX(λ.f0|f1. . . . , fn) = ∅. Il suffit donc de vérifier que

DX(f0|f1, . . . , fn) bDX(ε|f0) DX(λ.f0|f1. . . . , fn).

On peut ainsi supposer que f0 est inversible sur X. On pose gi = f−10 fi. Il s’agit alors de montrer que

DX(1|g1, . . . , gn) =

n⋂i=1

DX(1|gi) bX DX(λ|g1. . . . , gn) =

n⋂i=1

DX(λ|gi).

Il suffit donc de prouver que DX(1|g) bX DX(λ|g) pour g ∈ Γ(X,O). Mais X = DX(λ|g) ∪ DX(g|λ) et DX(g|λ) ∩DX(1|g) = ∅. D’où le résultat.

On suppose maintenant que DX(f0|f1, . . . , fn) bX U . Soit W ⊂ X un ouvert quasi-compact tel que X = W ∪ Uet W ∩DX(f0|f1, . . . , fn) = ∅. Il existe alors λ ∈

√|k×| avec λ > 1 et tel que maxi=1,...,n|fi(x)| > λ|f0(x)| pour tout

x ∈W . Il vient que W ∩DX(λf0|f1, . . . , fn) = ∅. On a alors forcément DX(λf0|f1, . . . , fn) ⊂ U . c.q.f.d

Corollaire 2.1.17 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte, U et W deux ouverts quasi-compacts deX tels que U bX W . Il existe alors un ouvert quasi-compact V de X tel que U bX V et V bX W .

Demonstration La question est locale surX. On peut donc supposer queX est un k-affinoïde. De même, si U = ∪i∈Iest un recouvrement admissible fini et Ui bX Vi bX W , alors U bX ∪i∈IVi bX W . On peut donc supposer que U estun domaine rationnel de X. Le résultat découle alors immédiatement de la proposition 2.1.16. c.q.f.d

Corollaire 2.1.18 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte, U ⊂ X un ouvert quasi-compact etq ∈ P(X) un point générique. On suppose que q 6∈ P(U). Il existe alors un ouvert quasi-compact V de X tel queU bX V et q 6∈ P(V ).

Demonstration La question est locale en X et U . On peut donc supposer que X est un k-affinoïde et U =DX(f0|f1, . . . , fn) avec f0, . . . , fn engendrant Γ(X,O) en tant qu’idéal. Rappelons que k(q) désigne le complété dek(q) suivant la valuation de hauteur 1 correspondante au sous-anneau de valuation k(q) ⊂ k(q). Le point génériqueq ∈ P(X) définit un point fermé q dans X⊗kk(q). Dire que q 6∈ U revient à dire que q 6∈ U⊗kk(q). Il vient que |f0(q)| <|fi(q)| pour au moins un indice 1 ≤ i ≤ n. Ceci montre que q 6∈ DX⊗kk(q)(λ.f0|f1, . . . , fn) avec λ ∈

√|k(q)×| ∩ ]1,+∞[

suffisamment proche de 1. Lorsqu’en plus λ ∈√|k×|, on obtient que q 6∈ P(DX(λ.f0|f1, . . . , fn)). Le résultat découle

maintenant de la proposition 2.1.16. c.q.f.d

Corollaire 2.1.19 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte, q ∈ P(X) un point générique et V un ouvertquasi-compact de X tel que q ⊂ P(V ). Il existe un ouvert quasi-compact U de X tel que U bX V et q ⊂ P(U).

Demonstration En effet, comme q ⊂ P(V ), il existe un ouvert quasi-compact W de X tel que X = V ∪W etq 6∈ P(W ). Par le corollaire 2.1.18 ci-dessus, on peut trouver W bX W ′ tel que q 6∈ P(W ′). Il existe donc un ouvertquasi-compact U ′ de X tel que U ′ ∪W ′ = X et U ′ ∩W = ∅. On a donc q ∈ U ′ et U ′ bX V . Par le corollaire 2.1.17,on peut trouver U ′ bX U bX V . Comme q ∈ P(U ′), on a q ⊂ P(U). c.q.f.d

Étant donnée une k-variété rigide X et U ∈ Ouvqc(X), on note VX(U) l’ensemble des V ∈ Ouvqc(X) tels queU bX V . S’il est non vide (par exemple, si X est lui-même quasi-compacte), l’ensemble VX(U) est cofiltrant puisquestable par intersections finies (d’une famille non vide d’ouverts).

Definition 2.1.20 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte et F un préfaisceau sur Ouvqc(X) (à valeursdans une catégorie complète et cocomplète C). On dit que F est surconvergent lorsque le morphisme évident

ColimV ∈VX(U)

F (V ) // F (U)

est inversible pour tout U ∈ Ouvqc(X). Si de plus F est un faisceau pour la topologie des recouvrements admissibles,on parlera alors de faisceaux surconvergents.

On notera OPreShv(Ouvqc(X),C) (resp. OShvra(Ouvqc(X),C)) la sous-catégorie pleine des préfaisceaux (resp.faisceaux) surconvergents à valeurs dans C.

La définition ci-dessus garde un sens pour X non nécessairement quasi-compacte. Toutefois, nous utiliserons unedéfinition légèrement différente qui sera mieux adaptée à nos besoins. Nous dirons qu’un préfaisceau F sur Ouvqc(X)est surconvergent si la restriction de F à Ouvqc(U) est un préfaisceau surconvergent pour tout U ∈ Ouvqc(U) (au sensde la définition 2.1.20). Le lemme ci-dessous assure qu’on retrouve la notion de surconvergence de départ lorsque lavariété X est quasi-compacte.

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110 Motifs des variétés rigides analytiques II

Lemme 2.1.21 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte et F un préfaisceau surconvergent sur Ouvqc(X).Soit Y ⊂ X un ouvert quasi-compact de X. Alors, la restriction F|Y de F à Ouvqc(Y ) est un préfaisceau surconvergent.

Demonstration Soit U un ouvert quasi-compact de Y . On a

ColimV ∈VY (U)F (V ) ' ColimV ∈VY (U)ColimW∈VX(V )F (W ).

Si V ∈ VY (U) et W ∈ VX(V ) alors W ∈ VX(U). Réciproquement, soit W ∈ VX(U). Par le corollaire 2.1.17, il existeun ouvert W0 ∈ VX(U) avec W0 bX W . Alors W0 ∩ Y ∈ VY (U) et W0 ∩ Y bX W . Il vient que

ColimV ∈VY (U)F (V ) ' ColimW∈VX(U)F (U) = F (U).

Le lemme est démontré. c.q.f.d

On aura également besoin d’une notion de surconvergence plus faible mais plus facile à vérifier en pratique. Étantdonnée une k-variété rigide, on note Ouvaf(X) le sous-ensemble de Ouvqc(X) formé des ouverts affinoïdes.

Definition 2.1.22 — Soient X une k-variété rigide et F un préfaisceau sur Ouvaf(X). On dit que F estfaiblement surconvergent si pour tout U ∈ Ouvaf(X) et f0, f1, . . . , fn engendrant Γ(U,O) comme idéal, le morphismenaturel

Colimλ∈√|k×|, λ>1

F (DU (λf0|f1, . . . , fn)) // F (DU (f0|f1, . . . , fn))

est inversible.Un préfaisceau F sur Ouvqc(X) est dit faiblement surconvergent si sa restriction à Ouvaf(X) est un préfaisceau

faiblement surconvergent.

De la proposition 2.1.16, on déduit qu’un préfaisceau surconvergent sur Ouvqc(X) est un préfaisceau faiblementsurconvergent. Cette implication est stricte en générale. Toutefois, on verra plus loin qu’un ra-faisceau faiblementsurconvergent sur Ouvqc(X) est automatiquement surconvergent.

Proposition 2.1.23 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte. Soit C une catégorie complète, cocomplèteet où les colimites filtrantes sont exactes. L’inclusion de OPreShv(Ouvqc(X),C) dans PreShv(Ouvqc(X),C) admetun adjoint à droite

ovX : PreShv(Ouvqc(X),C) // OPreShv(Ouvqc(X),C)

qui à un préfaisceau F associe le préfaisceau surconvergent ovX(F ) donné par

(2.11) ovX(F )(U) = ColimV ∈VX(U)

F (V ) pour U ∈ Ouvqc(X).

De plus, le foncteur ovX est exact.

Demonstration Il est clair que (2.11) définit un préfaisceau sur Ouvqc(X). En effet, si U ′ ⊂ U , on a une inclusionVX(U) ⊂ VX(U ′) qui fournit le morphisme de restriction ovX(F )(U) // ovX(F )(U ′) .

Montrons que ov(F ) est surconvergent. Soit U un ouvert quasi-compact de X. On a

ColimV ∈VX(U) ovX(F )(V ) = ColimV ∈VX(U)ColimW∈VX(V )F (W ).

Par le corollaire 2.1.17 pour tout W ∈ VX(U), il existe V ∈ VX(U) tel que W ∈ VX(V ). Il vient que

ColimV ∈VX(U) ovX(F )(V ) = ColimW∈VX(U)F (W ) = ovX(F )(U).

Le fait que ovX est exact est clair puisque sa définition ne fait apparaître que des colimites filtrantes. Il reste à mon-trer que ovX est l’adjoint à droite de l’inclusion évidente inc. Pour un préfaisceau F sur Ouvqc(X) et U ∈ Ouvqc(X), ondispose de flèches naturelles ovX(F )(U) = ColimV ∈VX(U)F (V ) // F (U) qui fournissent un morphisme de préfais-

ceaux ovX(F ) // F et donc une transformation naturelle δ : inc ovX // id . D’autre part, si G est préfaisceausurconvergent sur Ouvqc(X), on a ovX(G) = G, ce qui fournit une transformation naturelle inversible η : id ' ovXinc.Le lecteur vérifiera immédiatement que η et δ définissent un couple de foncteurs adjoints (inc, ovX). La propositionest démontrée. c.q.f.d

Pour étudier le foncteur ovX , on aura besoin de quelques résultats de cofinalité pour les ensembles VX(U).

Lemme 2.1.24 — Soient X une k-variété rigide quasi-compacte et U ∈ Ouvqc(X). Soit (Ui)i∈I un recouvrementfini de U par des ouverts quasi-compacts. Alors l’application∏

i∈IVX(Ui) // VX(U)

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 111

qui à (Vi)i∈I associe ∪i∈IVi est cofinale.

Demonstration C’est évident puisque l’application en question est surjective. En effet, si V ∈ VX(U) alors V ∈V (Ui) pour tout i ∈ I. c.q.f.d

Lemme 2.1.25 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte. Soient (Ui)i∈I une famille finie d’ouverts quasi-compacts. Alors, l’application ∏

i∈IVX(Ui) // VX

(⋂i∈I

Ui

)qui à (Vi)i∈I associe ∩i∈IVi est cofinale.

Demonstration Par récurrence on se ramène au cas où I = 1, 2. Soit U1∩U2 bX V et choisissons W ∈ Ouvqc(X)tel que W ∩ (U1 ∩ U2) = ∅ et W ∪ V = X. Comme (W ∩ U1) ∩ (W ∩ U2) = ∅, il existe par la proposition 2.1.15 desouverts quasi-compacts V ′i ⊂ W tels que (W ∩ Ui) bW V ′i et V ′1 ∩ V ′2 = ∅. On pose alors Vi = V ′i ∪ V . On a bienVi ∈ VX(Ui) et V1 ∩ V2 = V . c.q.f.d

Lemme 2.1.26 — Soient X une k-variété rigide quasi-compact, Y , U et Q des ouverts quasi-compacts de X. Onsuppose que Q ⊂ Y et Y ∩U bY Q. Il existe alors un ouvert quasi-compact W dans X tel que U bX W et Y ∩W ⊂ Q.En d’autre termes, l’application VX(U) // VY (Y ∩ U) , qui à U bX W associe Y ∩W , est cofinale.

Demonstration Soit N un ouvert quasi-compact de Y tel que Y = N ∪Q et N ∩ (Y ∩U) = ∅. Comme N ⊂ Y , on aégalement N ∩U = ∅. Par la proposition 2.1.15, il existe W ∈ VX(U) tel que W ∩N = ∅. On a forcément W ∩Y ⊂ V .Le lemme est démontré. c.q.f.d

Proposition 2.1.27 — Soit f : X ′ // X un morphisme de k-variétés rigides quasi-compactes. Soit U unouvert quasi-compact de X et notons U ′ = X ′×XU . L’application évidente VX(U) // VX′(U ′) , qui à U bX V

associe X ′×XV , est cofinale.

Demonstration Soit (X ′i)i∈I un recouvrement admissible fini de X ′. On note fi : X ′i// X la restriction de f à

X ′i et U ′i = U ′ ∩X ′i. Étant donné V ′ ∈ VX′(U ′), on note V ′i = X ′i ∩ V ∈ VX′i(U′i). Supposons le lemme démontré pour

fi. Il existe alors Vi ∈ VX(X) tels que f−1i (Vi) ⊂ V ′i . Alors V = ∪i∈IVi convient pour f .

On peut donc supposer que X ′ est un k-affinoïde et que f(X ′) est contenu dans un ouvert affinoïde W ⊂ X. Ilsuffit de traiter le cas X ′ // W . En effet, la conclusion du lemme est stable par composition des morphismes devariétés rigides quasi-compactes. D’autre part, le cas des immersions ouvertes est traité dans le lemme 2.1.26.

Dans la suite, on suppose que X et X ′ sont des k-affinoïde. La question étant locale en U , on peut supposer queU = DX(f0|f1, . . . , fn) avec f0, . . . , fn engendrant Γ(X,O) comme idéal. Le résultat découle alors de la proposition2.1.16 et du fait que X ′×XDX(λ.f0|f1, . . . , fn) ' DX′(λ.f0|f1, . . . , fn). c.q.f.d

Proposition 2.1.28 — Soient X une k-variété rigide et F un ra-faisceau sur Ouvqc(X) à valeurs dans unecatégorie C complète, cocomplète et où les colimites filtrantes sont exactes. On suppose qu’il existe un recouvrementadmissible (Xi)i∈I de X tel que la restriction F|Xi de F à Ouvqc(Xi) est un faisceau surconvergent. Alors F est unfaisceau surconvergent.

Demonstration On peut supposer que X est quasi-compacte et que les ouverts Xi sont quasi-compacts. On peutaussi supposer que I est fini. Soit U un ouvert quasi-compact de X et montrons que le morphisme évident

ColimV ∈VX(U)

F (V ) // F (U)

est inversible. Comme F est un ra-faisceau, la flèche ci-dessus s’identifie

ColimV ∈VX(U)

Eq

∏i∈I

F (V ∩Xi)////

∏i,j∈I

F (V ∩Xi ∩Xj)

// Eq

∏i∈I

F (U ∩Xi)////

∏i,j∈I

F (U ∩Xi ∩Xj)

.

Étant donné que les colimites filtrantes sont exactes dans C, il suffit de montrer que

ColimV ∈VX(U)

F (V ∩Xi) // F (U ∩Xi) et ColimV ∈VX(U)

F (V ∩Xi ∩Xj) // F (U ∩Xi ∩Xj)

sont inversibles. Par le lemme 2.1.26, les flèches ci-dessus s’identifient à

ColimQ∈VXi (U∩Xi)

F (Q) // F (U ∩Xi) et ColimR∈VXi∩Xj (U∩Xi∩Xj)

F (R) // F (U ∩Xi ∩Xj).

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112 Motifs des variétés rigides analytiques II

Ces flèches sont inversibles puisque F|Xi et F|Xi∩Xj sont des faisceaux surconvergents. c.q.f.d

Proposition 2.1.29 — Soit X une k-variété rigide. On considère des préfaisceaux sur Ouvqc(X) à valeurs dansune catégorie C complète, cocomplète et où les colimites filtrantes sont exactes.

1- Supposons que X est quasi-compactes. Le foncteur ovX préserve les ra-faisceaux.2- Supposons que C possède une famille de foncteurs C // Ens coreprésentables, qui commutent aux colimites

filtrantes et qui détectent les isomorphismes. Soit F est un préfaisceau faiblement surconvergent sur Ouvqc(X). Alors,ara(F ) est un faisceau surconvergent.

Demonstration 1- Supposons que F est un ra-faisceau et montrons que ovX(F ) est encore un ra-faisceau. Soit(Ui)i∈I un recouvrement admissible de U ∈ Ouvqc(X) (avec I un ensemble fini). Il s’agit de montrer que le morphismeévident

(2.12) ov(F )(U) // Eq

∏i∈I

ov(F )(Ui)////

∏i,j∈I

ov(F )(Ui ∩ Uj)

est inversible.

Par le lemme 2.1.24, on a ov(F )(U) = Colim(Vi)i∈I∈∏i∈I VX(Ui)F (∪i∈IVi). De même, par le lemme 2.1.25, on a

ov(F )(Ui ∩ Uj) = Colim(Vi,Vj)∈VX(Ui)×VX(Uj)F (Vi ∩ Vj). Comme les colimites filtrantes sont exactes dans C, la flèche(2.12) s’identifie à

Colim(Vi)i∈I∈

∏i∈I VX(Ui)

F (∪i∈IVi) // Colim(Vi)i∈I∈

∏i∈I VX(Ui)

Eq

∏i∈I

F (Vi)////

∏i,j∈I

F (Vi ∩ Vj)

.

Comme F est un faisceau, F (∪iVi) est isomorphe à l’égalisateur de la double flèche∏i F (Vi)

////

∏i,j F (Vi ∩ Vj).

Ceci démontre la première partie de la proposition.2- Supposons maintenant que F est un préfaisceau faiblement surconvergent et montrons que le faisceau associé

ara(F ) est surconvergent. Par la proposition 2.1.28, on peut supposer que X est un k-affinoïde. L’hypothèse sur C

nous ramène au cas des préfaisceaux d’ensembles. On divisera la preuve en trois étapes.Étape 1 : Il suffira de montrer que le morphisme évident

(2.13) ovX(ara(F )) // ara(F )

est inversible. Par la discussion ci-dessus, ovX(ara(F )) est encore un faisceau. Il suffit donc de vérifier que (2.13) induitdes isomorphismes sur les fibres en tout p ∈ P(X).

Soit p ∈ P(X). Comme ovX(ara(F )) est surconvergent, on a

ovX(ara(F ))p = ColimU∈Flt(p)

ov(ara(F ))(U) ' ColimU∈Flt(p)

ColimV ∈VX(U)

ara(F )(V ).

Notons q ∈ P(X) l’unique point générique tel que p ∈ q. Pour un ouvert quasi-compact V de X, les deux conditionsci-dessous sont équivalentes.(i) Il existe U ∈ Flt(p) tel que U bX V ,(ii) q ⊂ P(V ).

L’implication (i)⇒ (ii) est claire puisque q ∈ P(U) et que P(U) ⊂ P(V ). Réciproquement, supposons que q ⊂ P(V ).Par le corollaire 2.1.19, il existe U ∈ Flt(p) tel que U bX V . On déduit de là que le morphisme évident

(2.14) Colimq⊂P(V )

ara(F )(V )∼// ovX(ara(F ))p

est inversible.Étape 2 : Montrons que le morphisme évident

(2.15) Colimq⊂P(V )

F (V ) // Colimq⊂P(V )

ara(F )(V )

est inversible. On montrera qu’il est injectif et surjectif.Soit V un ouvert quasi-compact de X tel que q ⊂ P(V ). Quitte à rétrécir V , on peut supposer qu’il est un k-

affinoïde. En effet, si U = DX(f0|f1, . . . , fn) est un domaine rationnel de X tel que q ∈ P(U) et λ ∈√|k×| avec λ > 1,

on a q ⊂ P(V ) avec V = DX(λ.f0|f1, . . . , fn). De plus, cette construction fournit un système cofiltrant de voisinages

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 113

de q. Soient a1, a2 ∈ F (V ) deux sections de F au dessus de V . On suppose que les images de a1 et a2 dans le butde (2.15) coïncident. On peut donc supposer qu’il existe V0 ⊂ V avec q ∈ P(V0) et tel que (a1)|V0

= (a2)|V0. Quitte à

raffiner V0, on peut supposer que c’est un domaine rationnel de V . Comme F est supposé faiblement surconvergent,il existe V0 bV V1 tel que (a1)|V1

= (a2)|V1. Puisque q ⊂ P(V ), on a aussi q ⊂ P(V1). Mais alors, a1 et a2 ont la

même image dans la source de (2.15). D’où l’injectivité.Pour la surjectivité de (2.15) on fixe c ∈ ara(F )(V ) une section sur un ouvert affinoïde V de X tel que q ⊂ P(V ).

On peut trouver un domaine rationnel V0 ⊂ V tel que q ∈ P(V0) et c|V0est l’image par F // ara(F ) d’une section

d ∈ F (V0). Comme F est faiblement surconvergent, on peut trouver V0 bV V1 et une section e ∈ F (V1) telle quee|V0

= d.Ainsi, quitte à remplacer V par V1, on peut supposer qu’il existe une section e ∈ F (V ) telle que c|V0

est l’image dee|V0

par F // ara(F ) . Soit r ∈ q et montrons que c et l’image de e dans ara(F ) sont égales au voisinage de r.Ceci terminera la preuve de la surjectivité. Il existe un ouvert affinoïde W de V tel que r ∈ P(W ) et c|W est l’imaged’une section f ∈ F (W ). Comme c et e coïncident au voisinage de q, il existe un domaine rationnel W0 de W tel queq ∈ P(W0) et f|W0

= e|W0. Par la faible surconvergence de F , il existe W0 bW W1 tel que cette égalité a lieu sur W1.

Ainsi, quitte à raffiner W ∈ Flt(r), on a f|W = e|W . Ceci montre que l’image de e dans ara(F ) coïncide avec c auvoisinage de r. D’où le résutat.Étape 3 : Par l’étape précédente et l’isomorphisme (2.14), on voit que le morphisme évident

(2.16) Colimq⊂P(V )

F (V )∼// ovX(ara(F ))p

est inversible. Le carré suivantColimq⊂P(V )

F (V )∼//

ovX(ara(F ))p

ColimU∈Flt(p)F (U)∼

// ara(F )p

commute. Il nous reste donc à montrer que le morphisme

(2.17) Colimq⊂P(V )

F (V ) // ColimU∈Flt(p)

F (U)

est inversible. Par la première étape de la preuve de la seconde partie de l’énoncé, la source de (2.17) s’identifie à

ColimU∈Flt(p)

ColimV ∈VX(U)

F (V ).

Comme F est faiblement surconvergent, (2.17) est bien inversible. La proposition est démontrée. c.q.f.d

La preuve précédente met en évidence une propriété importante des faisceaux surconvergents, qu’on dégage dansle corollaire ci-dessous.

Corollaire 2.1.30 — Les faisceaux et les préfaisceaux sont supposés à valeurs dans une catégorie C vérifiantl’hypothèse de la seconde partie de la proposition 2.1.29. Soient X une k-variété rigide et f : F // G un morphismede préfaisceaux surconvergents sur Ouvqc(X). Pour que le morphisme ara(f) : ara(F ) // ara(G) soit inversible, il

faut et il suffit que pour tout point générique p ∈ P(X), fp : Fp // Gp soit inversible.

Demonstration On peut supposer que C est la catégorie des ensembles. et que X est quasi-compacte. Soit p ∈ P(X)et notons q ∈ P(X) le point générique tel que p ∈ q. Nous allons montrer que si F est surconvergent, Fp ' Fqnaturellement. Ceci entraîne immédiatement le lemme. On a les isomorphismes naturels (en F surconvergent)

Fq = ColimU∈Flt(q)F (U) ' ColimU∈Flt(q)ColimV ∈VX(U)F (V ) ' Colimq⊂P(V )F (V )

' ColimU∈Flt(p)ColimV ∈VX(U)F (V ) ' ColimU∈Flt(p)F (U) = Fp.

Ci-dessus, nous avons utilisé l’équivalence (i) ⇔ (ii) prouvée dans la première étape de la preuve de la seconde partiede le proposition 2.1.29. c.q.f.d

Voici un autre corollaire important de la proposition 2.1.29.

Proposition 2.1.31 — Supposons que C vérifie l’hypothèse de la seconde partie de la proposition 2.1.29 et soitX une k-variété rigide quasi-compacte.

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114 Motifs des variétés rigides analytiques II

Alors, OShvra(Ouvqc(X),C) est complète et cocomplète et le foncteur d’inclusion

OShvra(Ouvqc(X),C) ⊂ Shvra(Ouvqc(X),C)

commute aux limites finies et colimites quelconques. De même, le foncteur

ovX : Shvra(Ouvqc(X),C) // OShvra(Ouvqc(X),C)

commute aux limites et colimites quelconques.

Demonstration Soit (Fi)i∈I un système projectif de faisceaux surconvergents. Alors LimiFi est un faisceau. Par laproposition 2.1.29, ovXLimiFi est un faisceau surconvergent. Il est facile de voir qu’il représente la limite projectif de(Fi)i∈I dans OShvra(Ouvqc(X),C).

De même, soit (Fi)i∈I est un système inductif de faisceaux surconvergents. Alors, la colimite des Fi dans la catégoriedes préfaisceaux est un préfaisceau surconvergent. Par la proposition 2.1.29, araColimiFi est un faisceau surconvergent.Il représente clairement la colimite de (Fi)i∈I dans OShvra(Ouvqc(X),C).

Pour les autres assertions, on utilise les descriptions ci-dessus des limites et colimites dans OShvra(Ouvqc(X),C),le fait que ovX est un adjoint à droite à l’inclusion évidente et le fait qu’une limite finie de préfaisceaux surconvergentset un préfaisceau surconvergent. c.q.f.d

Pour la suite, on aura besoin d’une version homotopique de la notion de surconvergence que l’on introduit dans lelemme ci-dessous.

Lemme 2.1.32 — Soient X une k-variété rigide et F un préfaisceau sur Ouvqc(X) à valeurs dans une catégoriede coefficients M (voir la définition 1.2.31). Les deux conditions suivantes sont équivalentes.

(i) Pour tout A ∈ E, le préfaisceau d’ensembles U homHo(M)(A,F (U)) est surconvergent.

(ii) Pour tout Y ∈ Ouvqc(X) et U ∈ Ouvqc(Y ), le morphisme

ColimV ∈VY (U)

F (V ) // F (U)

est une équivalence faible.

Lorsque ces conditions sont satisfaites, nous dirons que F est homotopiquement surconvergent.

Demonstration L’implication (ii)⇒ (i) découle du fait que homHo(M)(A,−) commute aux colimites filtrantes pourA ∈ E. L’implication (i) ⇒ (ii) découle du fait que la famille

(homHo(M)(A,−)

)A∈E est conservative sur Ho(M) et

que les colimites filtrantes préservent les équivalences faibles. c.q.f.d

Soit X une k-variété rigide. On dit qu’un préfaisceau F sur Etqc/X est surconvergent (resp. faiblement sur-convergent, homotopiquement surconvergent) si la restriction de F à Ouvqc(U) possède cette propriété pour toutU ∈ Etqc/X. On a le résultat suivant.

Proposition 2.1.33 — 1- Soit F un préfaisceau sur Etqc/X à valeurs dans une catégorie C complète, cocomplèteet où les colimites filrantes sont exactes. On suppose que F est surconvergent et qu’il est un faisceau pour la topologiedes recouvrements admissibles. Alors, F est aussi un faisceau pour la topologie Nisnevich.

2- Soit F un préfaisceau sur Etqc/X à valeurs dans une catégorie de coefficients M . On suppose que F esthomotopiquement surconvergent et qu’il vérifie la propriété de Brown-Gersten pour la topologie des recouvrementsadmissibles. Alors, F vérifie aussi la propriété de Brown-Gersten pour topologie Nisnevich.

Demonstration On peut supposer la k-variété X quasi-compacte. Soit un carré Nisnevich dans Etqc/X

(2.18) V ′ //

Y ′

e

Vj// Y

avec e étale et j une immersion ouverte. On a Y ′− V ′ ' Y − V . Étant donné W ∈ VY (V ), on forme le carré cartésien

(2.19) W ′ //

Y ′

e

W // Y.

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2.1 Rappels et compléments de géométrie rigide (deuxième partie) 115

Comme F est surconvergent (resp. homotopiquement surconvergent), ColimW∈VY (V )F (W ) // F (V ) est un isomor-

phisme (resp. une équivalence faible). Par la proposition 2.1.27, ColimW∈VY (V )F (W ′) // F (V ′) est également un

isomorphisme (resp. une équivalence faible). Il suffit donc de vérifier que F envoie le carré (2.19) sur un carré cartésiendans C (resp. homotopiquement cartésien dans M). On utilise ci-dessus que les colimites filtrantes sont exactes (resp.préservent les équivalences faibles).

Comme V bY W , on peut trouver un ouvert quasi-compact U dans Y tel que W ∪ U = Y et V ∩ U = ∅. Enparticulier, U ′ = Y ′×Y U ' U . Ainsi, le recouvrement (W ⊂ Y, U ⊂ Y ) est plus fin que le recouvrement Nisnevich(W ⊂ Y, Y ′ → Y ). Il suffit donc que F envoie les carrés

U ∩W //

U

W // Y

et U ′ ∩W ′ //

U ′

W ′ // Y ′

sur des carrés cartésiens (resp. homotopiquement cartésiens). D’où le résultat. c.q.f.d

Lemme 2.1.34 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte et F un préfaisceau sur Ouvqc(X) à valeursdans un catégorie de coefficients M. On suppose que F vérifie la propriété de Brown-Gersten pour la topologie desrecouvrements admissibles. Alors, il est en de même de ovX(F ).

Demonstration Soient U et V des ouverts quasi-compacts de X. Il s’agit de montrer que le carré

ovX(F )(U ∪ V ) //

ovX(F )(U)

ovX(F )(V ) // ovX(F )(U ∩ V )

est homotopiquement cartésien. Par les lemmes 2.1.24 et 2.1.25, ce carré est la colimite filtrante suivant (U ′, V ′) ∈VX(U)× VX(V ) des carrés

F (U ′ ∪ V ′) //

F (U ′)

F (V ′) // F (U ′ ∩ V ′).

Le résultat découle du fait que les colimites filtrantes dans M préservent les équivalences faibles (et donc les carréshomotopiquement cartésiens, puisque ces derniers sont exactement les carrés homotopiquement cocartésiens par lastabilité de M). c.q.f.d

On retiendra le résultat suivant :

Proposition 2.1.35 — Soit X une k-variété rigide.1- Soit F un complexe de préfaisceaux de groupes abéliens sur Ouvqc(X). On suppose que F est faiblement sur-

convergent. Alors, les préfaisceaux d’hypercohomologie Hira(−, F ) sont surconvergents pour tout i ∈ Z.

2- Soit F un complexe de préfaisceaux de groupes abéliens sur Etqc/X. On suppose que F est faiblement surcon-vergent. Le morphisme évident Hi

ra(U,F ) // HiNis(U,F ) est inversible pour tout i ∈ Z et U ∈ Etqc/X.

Demonstration 1- On peut supposer que X est quasi-compact. On peut remplacer F par ara(F ), puisque ce dernierest surconvergent. En d’autres termes, on peut supposer que F est un ra-faisceau.

Soit F // I une quasi-isomorphisme de complexes de ra-faisceaux avec I un complexe fibrant de ra-faisceaux.Alors, I vérifie la propriété de Brown-Gersten. Par la proposition 2.1.31, le foncteur ovX est exact sur les ra-faisceaux.Il vient que

F ' ovX(F ) // ovX(I)

est encore un quasi-isomorphisme de ra-faisceaux. Par le lemme 2.1.34, ovX(I) vérifie encore la propriété de Brown-Gersten. On a donc des isomorphismes Hi

ra(U,F ) ' Hi(Γ(U, ovX(I))). D’où le résultat.2- Comme tout à l’heure, on peut supposer que F est un ra-faisceau (puisque ara(F ) est un ra-faisceau sur-

convergent sur Etqc/X). Soit F // I· un quasi-isomorphisme de complexes de ra-faisceaux avec I fibrant. Enparticulier, I vérifie la propriété de Brown-Gersten pour la topologie des recouvrements admissibles. Par la premièrepartie de la preuve, I est homotopiquement surconvergent. On déduit de la proposition 2.1.33 que F vérifie la propriétéde Brown-Gersten pour les carrés Nisnevich. Il vient que Hi

Nis(U,F ) = Hi(Γ(U, I)) = Hira(U,F ). La proposition est

prouvée. c.q.f.d

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116 Motifs des variétés rigides analytiques II

2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrierigide

Dans cette section, on introduit la notion de correspondances finies en géométrie rigide. Il s’agit d’une extensiondirecte de la notion correspondante en géométrie algébrique (voir [VSF00]). On fixe un corps k complet pour unevaluation non-archimédienne (qu’on ne supposera pas non-triviale). Sauf mention du contraire, nos k-variétés rigidesseront supposées dénombrables à l’infini, i.e., union croissante d’une famille dénombrable de k-variétés rigides quasi-compactes.

2.2.1 Faisceaux fh et multiplicités d’intersection

En géométrie algébrique, les correspondances finies apparaissent naturellement lorsqu’on considère la topologie fh(voir 1 [SV96]). Ce point de vue facilite la vérification de certaines propriétés notamment l’associativité de la composi-tion. De plus, il fournit beaucoup d’exemples de préfaisceaux avec transferts. Ainsi, nous avons choisit d’introduire lescorrespondances finies en géométrie rigides via les faisceaux fh. Nous suiverons de près l’article [SV96] en l’adoptantau contexte des variétés rigides.

Definition 2.2.1 — La topologie fh sur Afnd/k est la topologie associée à la prétopologie formée des familles(fi : Yi // X )i∈I telles que I est un ensemble fini et ∪ifi :

∐i∈I Yi

// X est un morphisme fini et surjectifsur les ensembles des points fermés.

Étant donné un k-affinoïde X, le morphisme de normalisation X ′ // X est un recouvrement fh. Ainsi, siNorAfnd/k ⊂ Afnd/k désigne la sous-catégorie pleine des k-affinoïdes normaux, le prémorphisme de sites

(NorAfnd/k, fh) // (Afnd/k, fh)

induit une équivalence de topos par [SGA 4]. On fera attention que la topologie fh sur NorAfnd/k ne provient pasd’une prétopologie étant donné que les morphismes finis et surjectifs ne sont pas quarrables dans NorAfnd/k. Un sous-préfaisceau H du préfaisceau représenté par X ∈ Ob(NorAfnd/k) est une crible fh-couvrante si pour tout fh-faisceaud’ensembles F sur Afnd/k, l’application

homPreShv(NorAfnd/k)(X, inc∗(F )) // homPreShv(NorAfnd/k)(H, inc∗(F ))

est bijective (avec inc le foncteur d’inclusion de NorAfnd/k dans Afnd/k). Suivant [SV96], on fait la définition :

Definition 2.2.2 — Un morphisme de k-affinoïdes f : Y = Spm(B) // X = Spm(A) est un revêtementpseudo-galoisien si les conditions suivantes sont vérifiées :

(i) X et Y sont intègres et f est fini et surjectif,(ii) l’extension finie k(A) ⊂ k(B) est pseudo-galoisienne de groupe de Galois G,(iii) le sous-annneau B ⊂ k(B) est invariant par l’action de G sur k(B).

Il est clair que sous les conditions de la définition 2.2.2, le morphisme évident Aut(Y/X)op // G est inversible.Notons également que la condition (iii) est automatique lorsque Y est normal. Notons le résultat suivant :

Lemme 2.2.3 — Soit f : Y // X un revêtement pseudo-galoisien de k-affinoïdes avec X normal. Alors, pourtout point fermé x ∈ X, l’action de Aut(Y/X) sur la fibre f−1(x) est transitive.

Plus généralement, si X ′ // X est un morphisme de k-affinoïdes avec X ′ intègre, le groupe Aut(Y/X) permutetransitivement les composantes irréductibles de Y ′ = Y ×X X ′.

Demonstration Notons A = Γ(X,O) et B = Γ(Y,O). Alors, B est une A-algèbre finie munie de l’action deG = Aut(Y/X)op = Gal(k(B)/k(A)). La A-algèbre BG est finie et génériquement totalement inséparable. CommeA est normale, BG est totalement inséparable sur A. En particulier, les idéaux premiers de A sont en bijection avecceux de BG. On peut donc supposer que A = BG. Par [Bou64], si p est un idéal premier de BG, le groupe G opèretransitivement sur l’ensemble des idéaux premiers q ⊂ B tels que p = q ∩BG. D’où la première assertion du lemme.

Pour la seconde assertion, on choisit deux composantes irréductibles distinctes Y ′1 et Y ′2 de Y ′. On peut supposerque Y ′1 domine X ′. Soit y2 un point fermé de Y ′2 appartenant au lieu régulier de Y ′red (en particulier, n’appartenantpas à Y ′1). Comme Y ′1 se surjecte sur X ′, on peut trouver un point fermé y1 de Y ′1 admettant la même image que y2

1. Dans loc. sit., les auteurs montrent qu’un faisceau pour la topologie qfh admet naturellement des transferts. Toutefois, leur argumentn’utilise que les propriétés d’une topologie moins fine, à savoir la topologie fh engendrée par les familles surjectives de morphismes finis

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 117

dans X ′. Par la première partie du lemme, il existe σ ∈ Aut(R/X) tel que σ(y2) = y1. En particulier, y1 appartientégalement au lieu régulier de Y ′red. Comme y1 ∈ Y ′1 ∩ σ(Y ′2), on a forcément Y ′1 = σ(Y ′2). c.q.f.d

On en déduit la proposition suivante :

Proposition 2.2.4 — Soit F un fh-faisceau sur Afnd/k (resp. NorAfnd/k) à valeurs dans un catégorie complèteet cocomplète C. Soit f : Y // X un revêtement pseudo-galoisien avec X un k-affinoïde normal (resp. avec X etY des k-affinoïdes normaux). Alors, le morphisme évident

F (X)∼// F (Y )Aut(Y/X)

est inversible.

Demonstration Il suffit de traiter le cas non-respé. En effet, un fh-faisceau sur NorAfnd/k est la restriction d’unfh-faisceau sur Afnd/k, vue l’équivalence de topos

Shvfh(Afnd/k)∼// Shvfh(NorAfnd/k) .

Considérons la familles des morphismes (id, g) : Y // Y ×X Y indicés par g ∈ Aut(Y/X). Le morphisme

∪g∈Aut(Y/X)(id, g) :∐

g∈Aut(Y/X)

Y // Y ×XY

est fini et surjectif sur les points fermés par le lemme 2.2.3. La famille ((id, g) : Y // Y ×X Y )g∈Aut(Y/X) est donc

un recouvrement fh. Il vient que le morphisme F (Y ×XY ) //∏g∈Aut(Y/X) F (Y ) est un monomorphisme. On en

déduit que la suiteF (X) // F (Y )

////

∏g∈Aut(Y/X)

F (Y )

est exacte. D’où le résultat. c.q.f.d

Lorsqu’on se restreind aux k-affinoïdes normaux, on obtient la caractérisation suivante des faisceaux fh :

Corollaire 2.2.5 — Soit F un préfaisceau d’ensembles sur NorAfnd/k. Alors, F est un fh-faisceau si etseulement si il vérifie les deux conditions suivantes :

(i) F (∅/k) = ∗ et le morphisme évident F (X1

∐X2)

∼// F (X1)× F (X2) est inversible (pour tout k-affinoïdes

normaux X1 et X2).

(ii) Si f : Y // X est un revêtement pseudo-galoisien entre deux k-affinoïdes normaux, le morphisme évident

F (X)∼// F (Y )Aut(Y/X) est inversible.

Demonstration Les conditions sont nécessaires par la proposition 2.2.4. Montrons qu’elles suffisent. On note inc :NorAfnd/k ⊂ Afnd/k le foncteur d’inclusion. Soit F un préfaisceau sur NorAfnd/k vérifiant les conditions de l’énoncé.On montrera que le morphisme canonique F // inc∗afhinc∗(F ) est inversible (où l’on note inc∗ le foncteur imageinverse sur les préfaisceaux suivant le foncteur inc).

Soit X un k-affinoïde normal et connexe (donc non vide). Il faut montrer que le morphisme

(2.20) F (X) // ColimX′→X fini et surjectif

eq (inc∗(F )sep(X′) //

// inc∗(F )sep(X′ ×X X ′))

est inversible (avec (†)sep le préfaisceau séparé associé à un préfaisceau †). En effet, le membre de droite de (2.20) estsimplement la formule donnant les sections du faisceau associé à un préfaisceau séparé sur un site engendré par uneprétopologie (voir [SGA 4]). Étant donné que les revêtements pseudo-galoisiens deX par des k-affinoides normaux sontcofinaux dans la catégories des revêtements fh, on peut supposer que X ′/X est pseudo-galoisien avec X ′ normal. Enreprenant le raisonnement dans la preuve de la proposition 2.2.4, on voit que pour X ′/X pseudo-galoisien, l’égalisateurdans (2.20) est simplement (inc∗(F )sep(X

′))Aut(X′/X). Pour terminer, il reste donc à montrer que pour X ′ normal, lemorphisme évident F (X ′) // inc∗(F )sep(X

′) est inversible.

Le morphisme évident F (X ′) // inc∗(F )(X ′) est inversible. En effet, c’est le cas pour F représentable, et cettepropriété est stable par colimites arbitraires. Il reste à voir que le passage aux préfaisceaux séparés ne change pasles sections de inc∗(F ) au dessus de X ′. Il faut donc montrer que pour tout fh-recouvrement (fi : Y ′i

// X ′ )i∈I ,

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118 Motifs des variétés rigides analytiques II

le morphisme F (X ′) = inc∗(F )(X ′) //∏i∈I inc∗(F )(Y ′i ) est injectif. On peut raffiner notre recouvrement par un

revêtement pseudo-galoisien Y ′/X ′ avec Y ′ normal. Il s’agit alors de montrer l’injectivité de F (X ′) // F (Y ′) .Cela découle de la condition (ii) de l’énoncé. c.q.f.d

Soit V une k-varété rigide. On note Z(V ) le préfaisceau sur Afnd/k qui à un k-affinoide X associe Z(homk(X,V )).C’est le préfaisceau de Z-modules libres sur le préfaiseau d’ensembles représenté par V . On note aussi Zfh(V ) lefh-faisceau associé à Z(V ).

Proposition 2.2.6 — Soit V une k-variété rigide séparée. Pour X un k-affinoïde normal, le groupe Zfh(V )(X) =Γ(X,Zfh(V )) est naturellement isomorphe au Z-module librement engendré par l’ensemble des sous-variétés rigidesintègres Z ⊂ X×kV telles que la projection évidente Z // X est finie et surjective.

Demonstration Le préfaisceau Z(V ) est séparé. En effet, si (fi : Yi // X )i∈I est un recouvrement fh, le

morphisme ∪ifi :∐i∈I Yi

// X est surjectif. Il vient que l’application homk(X,V ) //∏i homk(Yi, V ) est

injective.Soit X un k-affinoïde normal. Comme Z(V ) est séparé, on a (par la preuve du corollaire 2.2.5)

Zfh(V )(X) = ColimY→X pseudo-galoisien

Z(homk(Y, V ))Aut(Y/X).

On note, comme de coutume, homk(Y, V )/Aut(Y/X) l’ensemble des orbites de l’action de Aut(Y/X) sur homk(Y, V ).On vérifie aisément que l’application

Z(

homk(Y, V )

Aut(Y/X)

)// Z(homk(Y, V ))Aut(Y/X),

qui à une obite O ∈ homk(Y, V )/Aut(Y/X) associe la somme∑f∈O f , est bijective. On obtient donc

Zfh(V )(X) = ColimY→X pseudo-galoisien

Z(

homk(Y, V )

Aut(Y/X)

)= Z

(Colim

Y→X pseudo-galoisien

homk(Y, V )

Aut(Y/X)

).

On note sv0(X,V ) l’ensemble des sous-variétés rigides de X×kV qui sont intègres, finies et surjectives sur X. Étantdonné un revêtement pseudo-galoisien c : Y // X et un morphisme f : Y // V , on note Z(c, f) ⊂ X×kVl’image du morphisme fini (c, f) : Y // X×kV . (Notons qu’on utilise que V est séparée pour obtenir que (c, f)

est fini.) C’est un élément de sv0(X,V ). Si σ ∈ Aut(Y/X), on a Z(c, f σ) = Z(c, f). Ainsi, l’application Z(−,−) :

homk(Y, V ) // sv0(X,V ) se factorise par homk(Y, V )/Aut(Y,X). On déduit alors une application

ColimY→X pseudo-galoisien

homk(Y, V )

Aut(Y/X)// sv0(X,V ).

Il suffira donc de montrer que cette application est bijective.On montre d’abord la surjectivité. Soit Z ⊂ X×kV une sous-variété rigide intègre, finie et surjective sur X. Soit

Y/X un revêtement pseudo-galoisien qui domine Z/X. On dispose donc d’un diagramme commutatif

Y

f

c

Z //

V

X.

On a alors Z = Z(c, f).Pour l’injectivité, on considère des revêtements pseudo-galoisiens ci : Yi // X et des morphismes de k-variétés

rigides fi : Yi // V (pour i ∈ 1, 2). On suppose que Z(c1, f1) = Z(c2, f2). On peut trouver un revêtement

pseudo-galoisien c : Y // X qui domine c1 et c2. Soient d1 : Y // Y1 et d2 : Y // Y2 des morphismesde X-affinoïdes. Étant donné que fi et fi di ont même classe dans ColimX′/X homk(X ′, V )/Aut(X ′/X), on peutsupposer que Y1 = Y2 = Y . Notons Z = Z(c, f1) = Z(c, f2). On note ei : Y // Z l’unique morphisme fini etsurjectif qui factorise (c, fi). L’action de Aut(Y/X) sur homX(Y,Z) est transitive. Il existe donc σ ∈ Aut(Y,X) tel

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 119

que e2 = e1 σ. On déduit que f2 = f1 σ. Ceci montre que f1 et f2 ont même classe dans homk(Y, V )/Aut(Y/X).L’injectivité est démontrée. c.q.f.d

Étant donnée une extension finie de corps L/K, on note [L : K]sep le degré de la sous-extension séparable maximaleet [L : K]isp celui de la sous-extension totalement inséparable maximale. On a donc [L : K] = [L : K]sep.[L : K]isp.

Proposition 2.2.7 — Soit F un fh-faisceau de groupes abéliens sur Afnd/k. Soit f : Y // X un morphismefini surjectif entre k-affinoïdes intègres avec X normal. On choisit un revêtement pseudo-galoisien g : R // Xtel que homX(R, Y ) est non vide (par exemple le normalisé de X dans la clôture pseudo-galoisienne de l’extensionk(Y )/k(X)). Étant donné a ∈ F (Y ), on note Trf (a) ou encore TrY/X(a) l’unique élément de F (X) dont la restrictionà F (R) est donnée par

(2.21)

[k(Y ) : k(X)]isp∑

σ∈homX(R,Y )

F (σ)(a)

∈ F (R)Aut(R/X)

L’élément Trf (a) est alors indépendant du choix du revêtement pseudo-galoisien g. On obtient ainsi un morphismecanonique de groupes abéliens Trf : F (Y ) // F (X) qu’on appelle le morphisme trace.

Demonstration Il faut juste montrer l’indépendance du choix de g. Soit h : P // X un deuxième revêtementpseudo-galoisien avec homX(P, Y ) 6= ∅. On se ramène immédiatement au cas homX(P,R) 6= ∅ et on fixe t : P // R

un X-morphisme. Notons provisoirement Trgf (a) et Trhf (a) les traces de a calculées à l’aide de g et h respectivement.

Étant donné que F (X) // F (R)F (t)// F (P ) sont injectifs, il suffit de montrer l’égalité (Trgf (a))|P = (Trhf (a))|P

dans F (P ). Il s’agit donc de comparer les deux éléments

F (t)

[k(Y ) : k(X)]isp∑

σ∈homX(R,Y )

F (σ)(a)

et

[k(Y ) : k(X)]isp∑

σ∈homX(P,Y )

F (σ)(a)

.

Le résultat découle du fait que l’application (−) t : homX(R, Y ) // homX(P, Y ) est bijective. c.q.f.d

Soit f : Y // X un morphisme fini surjectif de k-affinoïdes intègres avec X normal. Soit g : R // X

un revêtement pseudo-galoisien tel que homX(R, Y ) 6= ∅. Soit enfin s : X ′ // X un morphisme quelconquede k-affinoïdes avec X ′ normal. Par le lemme 2.2.3, le groupe Aut(R/X) agit transitivement sur les composantesirréductibles de R′ = R ×X X ′. On en fixe une : R′0 ⊂ R′ et on note g′0 : R′0

// X ′ le mophisme évident.C’est un revêtement pseudo-galoisien. L’ensemble des composantes irréductible de R′ est naturellement paramétrépar Aut(R/X)/StabAut(R/X)(R

′0) via σStabAut(R/X)(R

′0) σ(R′0). On note Y ′i , i ∈ I l’ensemble des composantes

irréductibles de Y ′ = Y ×XX ′. Pour i ∈ I, le morphisme f ′i : Y ′i// X ′ est fini surjectif (étant donné que Y ′i est

l’image d’une composante irréductible de R′).Considérons le carré commutatif

R′0t′0//

g′0

R

g

X ′s// X.

Soit F un fh-faisceau de groupes abéliens sur Afnd/k. Pour a ∈ F (Y ), on a les égalités

F (g′0)F (s)Trf (a) = F (t′0)F (g)Trf (a) = [k(Y ) : k(X)]ispF (t′0)∑

σ∈homX(R,Y )

F (σ)(a)

= [k(Y ) : k(X)]isp∑

σ∈homX(R,Y )

F (σt′0)(a).(2.22)

Considérons l’application

m : homX(R, Y ) //∐i∈I homX′(R

′0, Y

′i )

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120 Motifs des variétés rigides analytiques II

qui à σ ∈ homX(R, Y ) associe l’unique morphisme R′0 → Y ′i(σ) rendant commutatif le carré

R′0t′0//

R

σ

Y ′i(σ)

s′i(σ)// Y.

Cette application est surjective. Ses fibres forment une partition de homX(R, Y ). L’expression (2.22) se réecrit

[k(Y ) : k(X)]isp∑i∈I

∑σ′i∈homX′ (R

′0,Y′i )

∑σ∈m−1(σ′i)

F (σt′0)(a)

= [k(Y ) : k(X)]isp∑i∈I

∑σ′i∈homX′ (R

′0,Y′i )

|m−1(σ′i)|F (σ′i)F (s′i)(a).(2.23)

Le lemme suivant, calcule les cardinaux des fibres de l’application m.

Lemme 2.2.8 — Soit σ′i : R′0// Y ′i un X ′-morphisme. Alors, on a

(2.24) |m−1(σ′i)| =[k(Y ) : k(X)]sep.li[k(Y ′i ) : k(X ′)]sep.l

avec l le nombre de composantes irréductibles de R′ et li celui des composantes irréductibles de R′ dont l’image par unσ ∈ homX(R, Y ) est Y ′i . De plus, |m−1(σ′i)| (et donc aussi li) ne dépend que de i.

Demonstration Le groupe StabAut(R/X)(R′0) agit sur les ensembles homX(R, Y ) et

∐i∈I homX′(R

′0, Y

′i ) par com-

position à gauche et le morphisme m est StabAut(R/X)(R′0)-équivariant. De plus, l’action de StabAut(R/X)(R

′0) sur

homX′(R′0, Y

′i ) est transitive. On en déduit que les fibres des éléments de homX′(R

′0, Yi) ont le même cardinal qu’on

notera mi. On a clairement

mi =|hom

(i)X (R, Y )|

|homX′(R′0, Y′i )|

où hom(i)X (R, Y ) = m−1 (homX′(R

′0, Y

′i )) est l’ensemble des σ ∈ homX(R, Y ) tels que σ(R′0) = Y ′i .

On fixe un X-morphisme σ : R // Y tel que σ(R′0) = Y ′i . Notons H ⊂ Aut(R/X) l’ensemble des τ tels queσ(τ(R′0)) = Y ′i . On a bien sûr StabAut(R/X)(R

′0) ⊂ H et H est stable par composition à droite par les éléments de

StabAut(R/X)(R′0). Le quotient H/StabAut(R/X)(R

′0) s’identifie à l’ensemble de composantes irréductibles de R′ qui

s’envoient sur Y ′i par σ via l’association τStabAut(R/X)(R′0) τ(R′0). On a donc

li =|H|

|StabAut(R/X)(R′0)|.

Il vient que σ H ' Aut(R/Y )\H ⊂ homX(R, Y ) est de cardinal

|StabAut(R/X)(R′0)|.li

|Aut(R/Y )|=|Aut(R/X)|.li|Aut(R/Y )|.l

=[k(Y ) : k(X)]sep.li

l.

Étant donné que Aut(R/X) agit transitivement sur homX(R, Y ), on voit que hom(i)X (R, Y ) = σ H. On déduit en fin

de compte que

mi =[k(Y ) : k(X)]sep.li[k(Y ′i ) : k(X ′)]sep.l

.

Le lemme est démontré. c.q.f.d

Muni du lemme 2.2.8, on voit que l’expression (2.23) est égale à

[k(Y ) : k(X)]isp∑i∈I

[k(Y ) : k(X)]sep.li[k(Y ′i ) : k(X ′)]sep.l

∑σ′i∈homX′ (R

′0,Y′i )

F (σ′i)F (s′i)(a)

=∑i∈I

[k(Y ) : k(X)]isp.[k(Y ) : k(X)]sep.li[k(Y ′i ) : k(X ′)]isp.[k(Y ′i ) : k(X ′)]sep.l

[k(Y ′i ) : k(X ′)]isp.∑

σ′i∈homX′ (R′0,Y′i )

F (σ′i)F (s′i)(a)

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 121

=∑i∈I

[k(Y ) : k(X)].li[k(Y ′i ) : k(X ′)].l

[k(Y ′i ) : k(X ′)]isp.∑

σ′i∈homX′ (R′0,Y′i )

F (σ′i)F (s′i)(a)

= F (g′0)

∑i∈I

[k(Y ) : k(X)].li[k(Y ′i ) : k(X ′)].l

TrY ′i /X′(F (s′i)(a)).

On fera attention que les coefficients ni =[k(Y ) : k(X)].li[k(Y ′i ) : k(X ′)].l

sont à priori dans Z[1/p] avec p la caracteristique ex-

ponentielle de k. Ainsi, l’égalité ci-dessus n’a de sens qu’après multiplication par le p.p.c.m. des dénominateurs desrepésentants irréductibles des rationnels ni. Étant donné que F (g′0) est injectif, on a montré :

Theoreme 2.2.9 — Soit un carré cartésien de k-affinoïdes

Y ′

f ′

s′// Y

f

X ′s// X

avec f fini et surjectif, Y intègre, X et X ′ normaux et connexes. On note Y ′i , i ∈ I l’ensemble des composantesirréductibles de Y ′, f ′i et s′i les restrictions de f ′ et s′ à Y ′i . Il existe alors une unique famille (ni)i∈I ∈ (Z[1/p])I telleque pour tout fh-faisceau de groupes abéliens F et tout entier naturel r tel que les pr.ni sont dans Z, on a

prF (s) Trf =∑i∈I

(prni)Trf ′i F (s′i).

Demonstration L’existence est claire par le calcul précédent. Pour l’unicité, on prend F = Zfh(Y ) et l’élémenta = TrY/X(idY ) ∈ Zfh(Y )(X). On a alors prs∗a =

∑i∈I(p

rni)TrY ′i /X′(s′i). Il suffit alors de montrer que les élé-

ments TrY ′i /X′i(s′i) sont linéairement indépendants dans Zfh(Y )(X ′). Modulo l’identification de la proposition 2.2.6,

TrY ′i /X′i(s′i) est égal à Y ′i vue comme sous-variété rigide de X ′×kY . Mais Zfh(Y )(X ′) est librement engendré par les

sous-variétés rigides de X ′×kY , intègres, finies et surjectives sur X ′. c.q.f.d

Definition 2.2.10 — Le nombre ni défini ci-dessus est appelé la multiplicité galoisienne de la composante Y ′i .On le notera aussi n(Y ′i ), nf (Y ′i ) ou nY/X(Y ′i ) si confusion est possible.

Corollaire 2.2.11 — On suppose donné un diagramme cartésien de k-affinoïdes

Y ′′t′//

f ′′

Y ′s′//

f ′

Y

f

X ′′t// X ′

s// X

avec Y intègre, X, X ′ et X ′′ normaux. Soit Y ′′0 une composante irréductible de Y ′′. On note Y ′i ; i ∈ I0 l’ensembledes composantes irréductibles de Y ′ telles que Y ′′0 ⊂ Y ′i ×X′ X ′′. On a alors la relation

nY/X(Y ′′0 ) =∑i∈I0

nY/X(Y ′i )nY ′i /X′(Y′′0 ).

Demonstration Ceci découle immédiatement de l’unicité dans le théorème 2.2.9. c.q.f.d

Lorsque X est lisse, les multiplicités galoisiennes coïncident avec les multiplicités de Serre (voir [Ser65]) :

Proposition 2.2.12 — On garde les notations et les hypothèses du théorème 2.2.9. On suppose de plus queX est lisse. Notons A = Γ(X,O), B = Γ(Y,O), A′ = Γ(X ′,O), B′ = Γ(Y ′,O) et pi ⊂ B′ l’idéal premier (minimal)définissant Y ′i . On a alors la formule

(2.25) nf (Y ′i ) =

∞∑r=0

(−1)r lgB′pi

(TorrA(A′, B)⊗B′ B′pi

).

En particluier, nf (Y ′i ) est un entier (strictement positif).

Demonstration On note provisoirement n′i = n′Y/X(Y ′i ) les nombres donnés par la formule (2.25). On procède endeux étapes.

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122 Motifs des variétés rigides analytiques II

Étape 1 : On veut se ramener au cas où Y ′ est irréductible. Soit t : X ′′ // X ′ un morphisme dominant de k-affinoïdes avec X ′′ intègre et k(X ′) ⊂ k(X ′′) une extension séparable. Reprenons les notations du corollaire 2.2.11.L’ensemble I0 est un singleton correspondant à l’image Y ′0 de Y ′′0 dans Y ′. On a les égalités nY/X(Y ′′0 ) = nY/X(Y ′0)et n′Y/X(Y ′′0 ) = n′Y/X(Y ′0). Il suffit donc de montrer la proposition en remplaçant X ′ par X ′′. En prenant X ′′ un X ′-affinoïde suffisamment fin, on peut supposer que X ′ est régulier et que Y ′ est une somme disjointe de ses composantesirréductibles qui sont régulières et totalement inséparables sur X ′.

Quitte à remplacer X ′ par un ouvert affinoïde non vide, on peut trouver un carré cartésien

X ′ // E

e

X ′ // X

tel que :– E est un k-affinoïde étale sur X,– E ×X Y est une somme disjointe

∐i∈I Fi telle que (Fi ×E X ′)red = X ′i.

En utilisant une deuxième fois le corollaire 2.2.11, on est ramené à traiter le cas du carré cartésien (à nil-immersionprès)

Y ′i//

Fi

X ′ // E.

On peut donc supposer que I est un singleton.Étape 2 : Par l’étape précédente, on peut supposer que Y ′ est irréductible. Avec les notations de la page 120, on adonc li = l et la multiplicité galoisienne de Y ′ est simplement

n(Y ′) =[k(Y ) : k(X)]

[k(Y ′) : k(X ′)].

Soit P• // B une résolution projective du A-module de type fini B. Comme l’anneau A est régulier, on peutsupposer que P• est borné. La caractéristique d’Euler-Poincaré de P•⊗A k(p) est indépendante du point p ∈ Spec(A).On en déduit les égalités suivantes

[k(Y ) : k(X)] =

∞∑r=0

(−1)r lgk(A′)

(TorrA(A′, B)⊗B′ B′p

)= [k(Y ′) : k(X ′)]n′(Y ′)

avec p le radical de B′. La proposition est démontrée. c.q.f.d

On aura besoin de généraliser le théorème 2.2.9 à des changements de bases par des morphismes d’affinoïdes définissur des corps différents. Notons Afnd//k la catégorie dont les objets sont les couples (X,K) avec K/k une extensionde corps normés complets et X un K-affinoïde. Un morphisme (Y,L) // (X,K) est la donnée d’une inclusion

K ⊂ L (compatible aux normes) et d’un morphisme de L-affinoïdes Y // X⊗KL . Cette catégorie est munie de latopologie fh de la manière évidente. Un préfaisceau F sur Afnd//k est un fh-faisceau si la restriction de F à Afnd/Kest un fh-faisceau pour toute extension k ⊂ K de corps normés complets. En particulier, on dispose des morphismestraces pour les fh-faisceaux de groupes abéliens. On a :

Theoreme 2.2.13 — Soit un carré cartésien dans Afnd//k

(Y ′, L)

f ′

s′// (Y,K)

f

(X ′, L)s// (X,K)

avec f fini et surjectif, Y intègre, X et X ′ normaux et connexes. On note Y ′i , i ∈ I l’ensemble des composantesirréductibles de Y ′, f ′i et s′i les restrictions de f ′ et s′ à Y ′i . Il existe alors une unique famille (ni)i∈I ∈ (Z[1/p])I telleque pour tout fh-faisceau de groupes abéliens F et tout entier naturel r tel que les pr.ni sont dans Z, on a

prF (s) Trf =∑i∈I

(prni)Trf ′i F (s′i).

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 123

Le nombre ni est appelé la multiplicité galoisienne de la composante Y ′i et on le notera n(Y ′i ) (ou nY/X(Y ′i )). Cesmultiplicités galoisiennes vérifient une formule d’associativité comme dans le corollaire 2.2.11. De plus, si X estrégulier les ni sont des entiers naturels qui sont donnés par la formule de Serre comme dans la proposition 2.2.12.

Demonstration La preuve du théorème 2.2.9 se transporte sans modifications au cas des fh-faisceaux sur Afnd//k.Il en est de même de la preuve du corollaire 2.2.11 et de la proposition 2.2.12. c.q.f.d

2.2.2 Les catégories de correspondances finies AfndCor(k) et RigCor(k)

Soit V une k-variété rigide séparée. Étant donné un k-affinoïde normal et connexe X, on note Ztr(V )(X) ⊂Zfh(V )(X) le sous-groupe engendré par les éléments de la forme Trf (a) avec f : X ′ // X un morphisme finisurjectif, X ′ intègre et a ∈ homk(X ′, V ). Lorsque X n’est pas supposé connexe, on notera Ztr(V )(X) la somme directe⊕i∈IZtr(V )(Xi) où Xi; i ∈ I désigne l’ensemble des composantes connexes de X. Notons Z(f, a) l’image dans X×kVdu morphisme fini (f, a) : X ′ // X×kV . Par la définition du morphisme trace, on a

Trf (a) = [k(X ′) : k(Z(f, a))][k(Z(f, a)) : k(X)]isp Z(f, a).

Il vient que Ztr(V )(X) ⊗Z Z[1/p] = Zfh(V )(X) ⊗Z Z[1/p] avec p la caractéristique exponentielle de k. On déduitégalement :

Lemme 2.2.14 — Le groupe Ztr(V )(X) est librement engendré par l’ensemble des TrX′/X(a) avec X ′ unesous-variété fermée de X×kV , intègre, finie et surjective sur une composante connexe de X, et a la composée

X ′ ⊂ X×kVpr2// V .

Soit Y // X un morphisme de k-affinoïdes avec X lisse. Par la proposition 2.2.12, le morphisme de restric-tion Zfh(V )(X) // Zfh(V )(Y ) envoie Ztr(V )(X) dans Ztr(V )(Y ). On obtient ainsi un préfaisceau Ztr(V ) sur lacatégorie SmAfnd/k qui est un sous-préfaisceau de la restriction Zfh(V )|Sm de Zfh(V ) à SmAfnd/k.

Remarque 2.2.15 — Par le lemme 2.2.14, Ztr(V )(X) est isomorphe à Zfh(V )(X). En effet, les deux groupes sontlibrement engendrés par deux ensembles en bijection. On fera attention que cet isomorphisme n’est pas donné parl’inclusion évidente. De plus, il n’est pas fonctoriel en X lisse.

On note Zfh(Afnd/k) la sous-catégorie pleine de Shvfh(Afnd/k,Z −mod) ayant pour objets les Zfh(X) pour Xun k-affinoïde.

Lemme 2.2.16 — On obtient une sous-catégorie de Zfh(Afnd/k) en prenant pour objets les Zfh(X) avec X unk-affinoïde lisse et pour morphismes de Zfh(X) vers Zfh(Y ) le sous-groupe Ztr(Y )(X) ⊂ Zfh(Y )(X).

Demonstration Il s’agit de montrer que les sous-groupes Ztr(Y )(X) ⊂ Zfh(Y )(X) = hom(Zfh(X), Zfh(Y )) sontstables par composition. On prend trois k-affinoïdes lisses et connexes X, Y et Z. On considère un diagramme dek-affinoïdes

X ′

a!!

f

Y ′

g

b

X Y Z

avec X ′ et Y ′ intègres, f et g finis et surjectifs. Il s’agit de montrer que Trg(b) Trf (a) est dans Ztr(Z)(X). On peutpour cela supposer que X ′ et Y ′ sont normaux.

On a Trg(b)Trf (a) = Trf (a∗Trg(b)), où a∗ désigne le morphisme de restriction suivant a sur les préfaisceaux. Parle théorème 2.2.9 et la proposition 2.2.12, a∗Trg(b) est une combinaison linéaire à coefficients entiers de Trgi(b ai) oùTi; i ∈ I est l’ensembles des composantes irréductibles de X ′ ×Y Y ′, gi la projection de Ti sur X ′ et ai celle de Tisur Y ′. Le résultat découle maintenant de la formule facile Trf Trgi = Trfgi . c.q.f.d

Definition 2.2.17 — On note AfndCor(k) la sous-catégorie (non-pleine) de Zfh(Afnd/k) ayant pour objetsles Zfh(X) avec X un k-affinoïde lisse et pour groupes de morphismes

(2.26) Cor(X,Y ) = Ztr(Y )(X) ⊂ Zfh(Y )(X) = homZfh(Afnd/k)(Zfh(X),Zfh(Y )).

Les objets de AfndCor(k) seront notés Ztr(X). C’est clairement une catégorie additive. La somme directe est donnéepar Ztr(X)⊕Ztr(Y ) = Ztr(X

∐Y ). C’est aussi une catégorie monoïdale symétrique et unitaire pour le produit tensoriel

défini par Ztr(X)⊗ Ztr(Y ) = Ztr(X×kY ).Étant donnée une catégorie abélienne A. On notera AfndPST(k,A) la catégorie des foncteurs additifs contrava-

riants de AfndCor(k) à valeurs dans A. Les objets de cette catégorie seront appelés des préfaisceaux avec transfers àvaleurs dans A. Lorsque A est la catégorie des groupes abéliens on écrit simplement AfndPST(k).

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124 Motifs des variétés rigides analytiques II

Remarque 2.2.18 — La catégorie AfndCor(k) admet la description plus concrète suivante. Les objets deAfndCor(k) sont les k-affinoïdes lisses X qu’on notera Ztr(X). Pour X et Y deux k-affinoïdes lisses, le groupede morphismes homAfndCor(k)(Ztr(X),Ztr(Y )) est le groupe abélien Cor(X,Y ) librement engendré par l’ensembledes sous-affinoïdes intègres Z de X×kY qui sont finis et surjectifs sur une composante connexe de X. Enfin, la compo-sition est donnée par la formule de Serre. La construction de AfndCor(k) comme une sous-catégorie de Zfh(Afnd/k)nous dispense de la vérification de l’associativité de la composition.

Proposition 2.2.19 — Soit k ⊂ K une extension de corps normés complets. Le foncteur évident

(2.27) Ztr(Afnd/k) // Ztr(Afnd/K)

envoie AfndCor(k) dans AfndCor(K).

Demonstration Le foncteur évident (2.27) est la restriction au fh-faisceaux repésentables du foncteur image inversesuivant le morphisme de sites (Afnd/K, fh) // (Afnd/k, fh) . Il est clair que (2.27) envoie les objets de AfndCor(k)

sur des objets de AfndCor(K). D’autre part, considérons une flèche Trf (a) dans AfndCor(k) avec f : X ′ // X

fini surjectif et X ′ intègre et a : X ′ // Y . Soient Z une composante connexe de X⊗kK et Z ′ = Z⊗XX ′. NotonsZ ′i, i ∈ I l’ensemble des composantes irréductibles de Z ′. Par le théorème 2.2.13, l’image de Trf (a) dans

homZfh(Afnd/K)(Zfh(Z),Zfh(Y ⊗kK)) = homZfh(Afnd//k)(Zfh(Z,K),Zfh(Y, k))

est donnée par∑i∈I nX′/X(Z ′i).TrZ′i/Z(a (Z ′i → X ′)). Comme X est régulier, les nX′/X(Z ′i) sont des entiers. La

proposition est démontrée. c.q.f.d

Notation 2.2.20 — Soit X un k-affinoïde lisse et V une k-variété rigide séparée. A partir de maintenant, onidentifiera le groupe Ztr(V )(X) avec le groupe Cor(X,V ) librement engendré par l’ensemble des sous-variétés intègresde X×kV finies et surjectives sur une composante connexe de X. Les éléments de Cor(X,V ) sont appelés les cor-respondances finies de X dans V . Si Z ⊂ X×kV est une sous-variété intègre, finie et surjective sur X, on notera[Z] sa classe dans Cor(X,V ). Les générateurs naturels de Cor(X,V ), i.e., les [Z] comme ci-dessus, sont appelées lescorrespondances finies élémentaires de X dans V .

Definition 2.2.21 — Un élément a ∈ Cor(X,V ) est dit effectif s’il peut s’écrire comme une combinaisonlinéaire de sous-variétés fermées à coefficients dans N. On note Cor+(X,V ) le monoïde des correspondances finieseffectives. Étant donnée une correspondance effective a =

∑ri=1 ni[Z] avec ni > 0, on note I (a) =

∏ri=1 I (Z)ni (avec

I (Z) l’idéal des fonctions qui s’annulent sur Z). C’est un l’idéal de OX×kV .

Une k-variété rigide W est irréductible si elle n’est pas l’union de deux sous-variétés fermées strictes et non-vides.Cela revient à dire que le normalisé de W est connexe. Un idéal (ou plus correctement, un faisceau cohérent d’idéaux)I ⊂ OW est dit premier si la sous-variété V(I) est réduite et irréductible.

Reprenons les notations de la défnition 2.2.21. La connaissance de I (a) permet de retrouver la correspondanceeffective a de la manière suivante. Notons pi; i ∈ I l’ensemble des idéaux premiers de OX×kV contenant I (a) etminimaux pour cette propriété. On a alors a =

∑i∈I m(pi)[V(pi)] avec m(pi) le plus grand entier n ∈ N tel que

I (a) ⊂ pni . Ce fait sera utile dans la preuve de la proposition suivante :

Proposition 2.2.22 — Soit V une k-variété rigide séparée. Le préfaisceau Ztr(V ) défini sur SmAfnd/k est unfaisceau pour la topologie étale.

Demonstration Rappelons que la topologie étale sur SmAfnd/k est engendrée par la prétopologie formée des fa-milles finies de morphismes étales de k-affinoïdes (fi : Ui // U )i∈I tels que

∐i∈I Ui

// U est surjectif sur les

ensembles de points fermés. On procède en deux étapes. On montre d’abord que le préfaisceau Ztr(V ) est séparé.

Étape 1 : Soient u : U // X un morphisme étale surjectif entre k-affinoïdes lisses et a ∈ Ztr(V )(X). On supposeraque X est connexe. Écrivons a = a+ − a− avec a+ et a− effectifs de support Z+ et Z− n’ayant aucune composanteirréductible en commun, i.e., Z+ ∩Z− est de dimension strictement inférieure à celle de X. Supposons que a+ est nonnul, i.e., Z+ non vide. Comme u est surjectif, (Z+)×XU est non vide. De plus, il n’a aucune composante irréductibleen commun avec (Z−)×XU . Comme (Z±)×XU est le support de u∗(a±), on voit que u∗(a+) 6= u∗(a−). Il vient queu∗(a) est non nul.

Étape 2 : Soit u : U // X un recouvrement étale entre k-affinoïdes lisses (avec X supposé connexe). On se donnea ∈ Ztr(V )(U) dans l’égalisateur de la double flèche

(2.28) Ztr(V )(U)//// Ztr(V )(U×XU) .

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 125

Écrivons a = a+ − a− avec a+ et a− effectifs de supports Z+ et Z− tels que Z+ ∩ Z− est de dimension strictementinférieure à celle de X. L’image de a± par chacun des homomorphismes de (2.28) est effectif et de support n’ayantaucune composante irréductible en commun avec le support de l’image de a∓. Il vient que a+ et a− sont dans le noyaude la double flèche (2.28). On peut donc supposer que a est effectif.

Considérons l’idéal I (a) ⊂ OU×kV . On a alors pr∗1I (a) = pr∗2I (a) avec pri : (U×XU)×kV // U×kVles projections évidentes. Par descente fidèlement plate, il existe un unique idéal cohérent J ⊂ OX×kV tel queu∗J = I (a). Rappelons brièvement la construction de J . Le noyau de la double flèche OU×kV

//// OU×kU×kV

(dans la catégorie des OV -faisceaux) est isomorphe à OX×kV . En effet, comme u est étale est surjectif, il suffit de

vérifier cela apès changement de base suivant U×kV // X×kV , i.e., on se ramène au cas où u admet une section.L’assertion dans ce cas est un exercice facile. On définit J comme le noyau de la double flèche I (a)

//// OU×kU×kV .

C’est bien un idéal de OX×kV . On vérifie que u∗J = I (a) de la manière usuelle. Il est également facile de voir queJ est un idéal cohérent.

Pour terminer, on considère le cycle c =∑i∈I miV(pi) avec pi; i ∈ I l’ensemble des idéaux premiers contenant

J et minimaux pour cette propriété et mi le plus grand entier tel que J ⊂ pmii . La vérification que u∗(c) = a estimmédiate. c.q.f.d

Rappelons qu’on a une équivalence de catégories Shvra(SmRig/k) ' Shvra(SmAfnd/k). On peut donc prolongerd’une manière unique Ztr(V ) en un faisceau pour la topologie des recouvrements admissibles sur SmRig/k. On noteencore Ztr(V ) ce prolongement. C’est un faisceau pour la topologie étale.

Proposition 2.2.23 — On suppose que la valuation de k est non triviale. Soit V une k-variété rigide et( Vi // V )i∈I un recouvrement ouvert admissible de V . Alors, le complexe de Čech

. . . //⊕

(i1,...,in)∈In Ztr(Vi1 ∩ · · · ∩ Vin) // . . . //⊕

i∈I Ztr(Vi) // Ztr(V ) // 0

est acyclique en tant que complexe de faisceaux pour la topologie des recouvrements admissibles.

Demonstration Soient X un k-affinoïde lisse et x ∈ P(X) un point de X. Il s’agit de montrer que le complexe degroupes abéliens(2.29)⊕(i1,...,in)∈In

ColimU∈Flt(x)

Ztr(Vi1 ∩· · ·∩Vin)(U) // . . . //

⊕i∈I

ColimU∈Flt(x)

Ztr(Vi)(U) // ColimU∈Flt(x)

Ztr(V )(U) // 0

est acyclique.Soient W une k-variété rigide et w ∈ P(W ). On note Zwtr(W )(U) le sous-groupe de Ztr(W )(U) engendré par les

sous-variétés (c, f) : Z ⊂ U×kW intègres, finies et surjectives sur U et telles que pour tout z ∈ c−1(x), on a f(z) = w.On a clairement une inclusion ⊕w∈P(W )Zwtr(W )(U) ⊂ Ztr(W )(U). Motrons qu’on a

(2.30)⊕

w∈P(W )

ColimU∈Flt(x)

Zwtr(W )(U) ' ColimU∈Flt(x)

Ztr(W )(U).

Étant donnée que les colimites filtrantes préservent les inclusions, on montrera qu’un élément de ColimU∈Flt(x)Ztr(W )(U)s’écrit comme une somme d’éléments de ColimU∈Flt(x)Zwtr(W )(U) pour w ∈ P(W ) bien choisis. On peut prendre pourtel élément, la classe (dans la colimite) d’une sous-variété Z ⊂ U×kW intègre, finie et surjective sur U ∈ Flt(x). Par laproposition 1.1.34, on sait que ColimU ′∈Flt(x)Γ(U ′,O) est un anneau local hensélien. On peut donc trouver U ′ ∈ Flt(x)

tel que Z ′ = Z×UU ′ est une somme disjointe Z ′ =∐j∈J Z

′j telle que si c′j : Z ′j

// U ′ est la projection évidente,

(c′j)−1(x) est réduit à un seul point z′j . Notons wj l’image de z′j par le morphisme évident f ′j : Z ′j

// W . On a

clairement [Z ′j ] ∈ Zwjtr (W )(U ′). D’où l’identification (2.30).Il est maintenant aisé de déduire le résultat recherché. En effet, pour v ∈ P(V ) notons A(v) le groupe abélien

ColimU∈Flt(x)Zvtr(V )(U). Le complexe (2.29) s’écrit alors

⊕(i1,...,in)∈In

⊕v∈P(Vi1∩···∩Vin )

A(v)

// . . . //

⊕i∈I

⊕v∈P(Vi)

A(v)

//

⊕v∈P(V )

A(v)

// 0 .

Le complexe ci-dessus est la somme directe suivant v ∈ P(V ) de ⊕(i1,...,in)∈I(v)n

Z // . . . //

⊕i∈I(v)

Z // Z

⊗ZA(v)

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126 Motifs des variétés rigides analytiques II

avec I(v) ⊂ I l’ensemble des i ∈ I tels que v ∈ Vi. Le résultat découle alors du fait que I(v) est non vide. c.q.f.d

Corollaire 2.2.24 — On suppose que la valuation de k est non-triviale. Soit F un préfaisceau avec transfertssur SmAfnd/k (i.e., un objet de AfndPST(k)). Il existe alors une unique structure de préfaisceaux avec transferts surara(F ) telle que le morphisme évident F // ara(F ) est un morphisme de préfaisceaux avec transferts.

Demonstration L’unicité est facile et sera laissée en exercice. Soit F un préfaisceau avec transferts sur SmAfnd/k.On note comme de coutume Fsep (resp. ara(F )) le préfaisceau séparé (resp. le ra-faisceau) associé à F . Les préfaisceauxFsep et ara(F ) sont clairement additifs, mais n’ont pas a priori des structures de préfaisceaux avec transferts. Il s’agitde construire une telle structure. On divise la preuve en deux parties.Étape 1 : On montre d’abord que Fsep admet des transferts. Il suffit pour cela de montrer que le noyau de F // Fsep

est un sous-préfaisceau avec transferts de F , i.e., stable par l’action des correpondances.Soient f : U // V une correspondance finie entre deux k-affinoïdes lisses et a ∈ F (V ) une section qui devient

nulle dans Fsep(a). Il s’agit de montrer que f∗(a) est nulle dans Fsep(U). Soit (Vj)j∈J un recouvrement admissible finide V tel que a|Vj = 0 pour tout j ∈ J . Par la proposition 2.2.23, il existe un recouvrement admissible fini (Ui)i∈I deU par des k-affinoïdes, et des correspondances finies fij : Ui // Vj telles que le carré

∐i∈I Ui

∑i,j fij

//∐j∈J Vj

Uf

// V

commutent. Pour i ∈ I, on a f∗(a)|Ui =∑j∈J f

∗ij(a|Vj ) = 0. D’où le résultat.

Étape 2 : On traite maintenant le cas du ra-faisceau associé. Pour cela, nous allons donner une deuxième constructiondu faisceau associé à F qui sera automatiquement un préfaisceau avec transferts.

Soit U un k-affinoïde lisse et R = (Ui)i∈I un recouvrement ouvert admissible de U par des k-affinoïdes. On note

aR : S(R) = Coker(⊕

(i,j)∈I2 Ztr(Ui ∩ Uj)→⊕

i∈I Ztr(Ui))

// Ztr(U) = B(R) .

Étant donné un préfaisceau F , on note Φ(F ) le préfaisceau séparé associé à la somme amalgamée⊕R;S(R)→F S(R) //

⊕R aR

F

⊕R;S(R)→F B(R).

On dipose d’un morphisme évident F // Φ(F ) . On pose alors Φ∞(F ) la colimite de la N-suite

F // Φ(F ) // Φ2(F ) // . . . // Φn(F ) // . . .

Comme S(R) est un préfaisceau avec transferts de présentation finie, Φ∞(F ) possède la propriété de relèvementpar rapport aux morphismes aR. De plus, il est séparé puisqu’une colimite filtrante de préfaisceaux séparés est unpréfaisceau séparé. On a donc montré que Φ(F ) est un faisceau pour la topologie des recouvrements ouverts admissibles.Pour voir que Φ(F ) est bien le faisceau associé à F , il suffit de remarquer que aR induit des isomorphismes sur lesfaisceaux associés. Enfin, par construction les Φn(F ) (et donc Φ∞(F )) sont des préfaisceaux avec transferts. c.q.f.d

Definition 2.2.25 — La sous-catégorie pleine de AfndPST(k) formée des préfaisceaux avec transferts F dontla restriction à SmAfnd/k est un faisceau pour la topologie des recouvrements admissibles, sera notée AfndStrra(k).Les objets de cette catégorie seront appelés les ra-faisceaux avec transferts.

Lorsque V est une k-variété rigide séparée, Ztr(V ) est un objet de AfndStrra(k). Par le corollaire 2.2.24, l’inclusionAfndStrra(k) ⊂ AfndPST(k) possède un adjoint à gauche

atrra : AfndPST(k) // AfndStrra(k).

Corollaire 2.2.26 — Soient X et Y deux k-variétés rigides lisses et séparées. Alors le groupe Ztr(Y )(X)s’identifie au groupe homAfndPST(k)(Ztr(X),Ztr(Y )).

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 127

Demonstration LorsqueX est un k-affinoïde, l’assertion découle du lemme de Yoneda. Soit (Xi)i∈I un recouvrementde X par des ouverts affinoïdes. Comme X est séparé, Xi∩Xj est un affinoïde pour tout (i, j) ∈ I2. Par la proposition2.2.23, Ztr(X) s’identifie au conoyau de⊕

i,j∈I Ztr(Xi ∩Xj) //⊕

i∈I Ztr(Xi)

dans la catégorie des faisceaux avec transferts. Par la proposition 2.2.22, Ztr(Y ) est un faisceau avec transferts. Legroupe homAfndPST(k)(Ztr(X),Ztr(Y )) s’identifie alors à l’égalisateur de la double flèche∏

i∈I homAfndPST(k)(Ztr(Xi),Ztr(Y ))////

∏i,j∈I homAfndPST(k)(Ztr(Xi ∩Xj),Ztr(Y )) .

Cette double flèche n’est autre que∏i∈I Ztr(Y )(Xi)

////

∏i,j∈I Ztr(Y )(Xi ∩Xj) .

Il suffit d’utiliser une deuxième fois la proposition 2.2.22 pour conclure. c.q.f.d

Ceci permet de définir :

Definition 2.2.27 — La catégorie RigCor(k) est la sous-catégorie pleine de AfndPST(k) dont les objetssont les Ztr(X) avec X une k-variété rigide lisse et séparée. Pour X et Y deux varétés rigides lisses et séparées, legroupe des morphismes de Ztr(X) dans Ztr(Y ) est donné par Cor(X,Y ) = Ztr(Y )(X). C’est une catégorie additiveet monoïdale symétrique.

Étant donnée une catégorie abélienne A. On notera RigPST(k,A) la catégorie des foncteurs additives contrava-riants de RigCor(k) à valeurs dans A. Les objets de ces catégories seront appelés des préfaisceaux avec transfers surSmRig/k à valeurs dans A. Lorsque A est la catégorie des groupes abéliens on écrit simplement RigPST(k).

La sous-catégorie pleine de RigPST(k) formée des préfaisceaux avec transferts dont la restriction à SmRig/kest un faisceau pour la topologie des recouvrements ouverts admissibles, est notée RigStrra(k). Cette catégorie estéquivalente à AfndStrra(k). On a le diagramme de catégories

SmAfnd/k //

AfndCor(k) //

AfndPST(k)

// AfndStrra(k)oo

SmRig/k // RigCor(k) // RigPST(K)

OO

// RigStrra(k).oo

OO

Soient B une k-variété rigide, X et Y deux B-variétés rigides. On suppose que X et Y sont lisses sur k. On noteCorB(X,Y ) le sous-groupe de Cor(X,Y ) formé des correspondances finies α vérifiant la condition suivante. Pour toutU ⊂ X un ouvert affinoïde, α|U est une combinaison linéaire de correspondances élémentaires [T ] avec T contenue dansU×BY ⊂ U×kY . Étant donnée une troisième B-variété rigide Z lisse sur k, la composition des correspondances finiesCor(X,Y )⊗Cor(Y,Z) // Cor(X,Z) envoie CorB(X,Y )⊗CorB(Y,Z) dans CorB(X,Z). Pour vérifier cela, on

peut supposer que X et Y sont des k-affinoïdes (utiliser la proposition 2.2.23). Étant données deux correspondancesfinies α : X // Y et β : Y // Z de support T ⊂ X×BY et S ⊂ Y ×BZ, le support de β α est contenu dansl’image de T ×Y S dans X×kZ. Mais le morphisme T ×Y S // X×kZ se factorise

T ×Y S // (X×BY )×Y (Y ×BZ) ' X×BY ×BZ // X×BZ ⊂ X×kZ .

On peut donc faire la définition suivante.

Definition 2.2.28 — Soit B une k-variété rigide. On note RigCor′(B) (resp. AfndCor′(B)) la catégorie dontles objets sont les B-variétés rigides (resp. les B-affinoïdes) lisses sur k et les morphismes données par CorB(−,−).Lorsque B est lisse, on note aussi RigCor(B) (resp. AfndCor(B)) la sous-catégorie pleine de RigCor′(B) (resp.AfndCor′(B)) formée des B-variétés lisses.

Soit B une k-variété rigide lisse. On fixe une sous-catégorie pleine V ⊂ SmRig/B stable par coproduits finis. Onnote Cor(V ) la sous-catégorie pleine de RigCor(B) dont les objets sont ceux de V . C’est une sous-catégorie additive.On fait la définition :

Definition 2.2.29 — Un préfaisceau avec transferts F sur V à valeurs dans une catégorie abélienne A est unfoncteur additif

F : Cor(V )op // A .

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128 Motifs des variétés rigides analytiques II

La catégorie des préfaisceaux avec transferts sur V à valeurs dans A est notée PreStr(V ,A). Lorsque A est la catégoriedes groupes abéliens, on notera simplement PreStr(V ).

On reservera la notation RigPST(B,A) (resp. AfndPST(B,A)) pour la catégorie PreStr(SmRig/B,A) (resp.PreStr(SmAfnd/B,A)). On a le lemme facile suivant :

Lemme 2.2.30 — La catégorie PreStr(V ,A) est abélienne. Elle est de Grothendieck lorsque A l’est.

2.2.3 Préfaisceaux avec transferts B1-invariants : propriétés élémentairesSoit B une k-variété rigide. Suivant [VSF00], on fait la définition suivante.

Definition 2.2.31 — Soient X et Y deux B-variétés rigides lisses sur k et α, β ∈ CorB(X,Y ). On dit que αest B1-homotope (ou simplement homotope) à β s’il existe γ ∈ CorB(B1

X , Y ) telle que α = γ s0 et β = γ s1 avecs0, s1 : X // B1

X les sections nulle et unité. La correspondance γ est appelée une homotopie de α à β. On écriraα ∼B1 β pour dire que α est B1-homotope à β.

On a le lemme facile suivant.

Lemme 2.2.32 — La relation de B1-homotopie est une relation d’équivalence compatible à l’addition et à lacomposition des correspondances finies.

Demonstration On garde les notations de la définition 2.2.31. On a clairement α ∼B1 α. En effet, il suffit de prendreγ = pα avec p : B1

X// X la projection canonique. Si γ est une homotopie de α à β, on obtient une homotopie de

β à α en prenant γ τ avec τ : B1X

// B1X un endomorphisme qui échange les sections nulle et unité (par exemple

l’involution de Xt qui envoie t sur 1− t). Enfin, si γ est une homotopie de α vers β et ψ une homotopie de β vers δ,on obtient une homotopie de α vers δ en prenant γ + ψ − β p. La compatibilité avec l’addition des correspondancesfinies et leur composition est claire. c.q.f.d

Definition 2.2.33 — Pour X et Y deux B-variétés rigides lisses sur k, le quotient CorB(X,Y )/ ∼B1 seranoté π0CorB(X,Y ). C’est le groupe des correspondances finies à homotopie près. La catégorie obtenue de RigCor(B)(resp. AfndCor(B), RigCor′(B) et AfndCor′(B)) en quotientant les groupes de morphismes par la relation deB1-homotopie sera notée π0RigCor(B) (resp. π0AfndCor(B), etc).

On peut également définir des groupes supérieurs de correspondances finies πiCorB(X,Y ) en utilisant le k-affinoïde

cosimplicial ∆·rig avec ∆nrig = Spm

(kt0, . . . , tn1−

∑ni=0 ti

)pour n ∈ N.

Definition 2.2.34 — Soient B une k-variété rigide, X et Y deux B-variétés rigides lisses sur k. On noteCorB(X,Y )· le complexe simplicial CorB(∆·rig×kX,Y ). Les groupes d’homologies Hi(CorB(X,Y )) seront notésπiCorB(X,Y ).

Il est clair que le π0Cor(−,−) de la définition 2.2.33 est le même que celui de la définition 2.2.34. La propositionci-dessus est un cas particulier de la proposition 2.2.43 où l’on prend K· le préfaisceau Cor(−, Y ) placé en degré nul.Le lecteur vérifiera que la preuve de 2.2.43 ne dépend pas de la proposition 2.2.35.

Proposition 2.2.35 — Soient X et Y des B-variétés rigides lisses sur k. Pour tout i ∈ N, le morphisme

πiCorB(X,Y )∼// πiCorB(B1

X , Y ) ,

de composition à gauche avec B1X

// X , est inversible.

Dans la suite, on fixe une sous-catégorie pleine V ⊂ SmRig/B stable par coproduits finis. On suppose de plus queV contient la boule de Tate B1

B et qu’elle est stable par produits directs finis (i.e., produits fibrés au dessus de B).

Definition 2.2.36 — Soit F un préfaisceau avec transferts sur V à valeurs dans une catégorie abélienne A.On dit que F est invariant par homotopie (ou simplement B1-invariant) si pour tout X ∈ Ob(V ), le morphisme

F (X) // F (B1X) ,

induit par la projection évidente, est inversible. On notera PreStrB1(V ,A) ⊂ PreStr(V ,A) la sous-catégorie pleinedont les objets sont les préfaisceaux avec transferts invariants par homotopie.

La définition 2.2.36 garde un sens pour des préfaisceaux sans transferts sur V . On parlera alors de préfaisceauxB1-invariants. Les résultats de cette section, portant sur les préfaisceaux avec transferts, se généralisent facilement aucas des préfaisceaux additifs de groupes abéliens sur V .

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 129

Proposition 2.2.37 — Pour une k-variété rigide X ∈ Ob(V ), notons s0 et s1 les sections nulle et unité dela boule de Tate relative p : B1

X// X . Soit F un préfaisceau avec transferts sur V à valeurs dans une catégorie

abélienne A. Les deux conditions ci-dessous sont équivalentes.

(i) F est invariant par homotopie.

(ii) Pour tout X ∈ Ob(V ), les deux flèches F (s0), F (s1) : F (B1X) // F (X) sont égales.

Demonstration Les deux flèches F (s0) et F (s1) sont des sections de la flèche F (p). Lorsque F est invariant parhomotopie F (p) est inversible et F (s0) = F (p)−1 = F (s1). Ceci prouve l’implication (i)⇒ (ii).

Pour montrer l’implication réciproque, on utilsera la structure d’objets en anneaux sur B1k. Notons en effet

µ : B1k×kB1

k// B1k

la multiplication de B1k. Pour X ∈ Ob(V ), considérons le diagramme commutatif

B1k×kX

s1

**

id

((

B1k×B1

k×kXµ// B1k×kX.

B1k×kX

s0

44

0×idX

55

La condition (ii) appliquée à la variété rigide B1k×kX montre que l’identité de F (B1

k×kX) est égale à F (0 × idX) =F ((s0 p) × idX) = F (p × idX) F (s0 × idX). Étant donné que p s0 = idB1 , on a montré que F (s0 × idX) est uninverse à droite et à gauche de F (p× idX). c.q.f.d

Soit F un préfaisceau avec transferts sur V à valeurs dans une catégorie abélienne A. Pour une variété rigide Xdans V , on notera hom(X,F ) le préfaisceau sur V défini par hom(X,F )(U) = F (X×BU) pour tout U ∈ Ob(V ). Pourf : X // Y un morphisme de variétés rigides de V , on notera f∗ : hom(Y, F ) // hom(X,F ) le morphisme depréfaisceaux avec transferts déduit de f .

Definition 2.2.38 — Soit F un préfaisceau avec transferts sur V à valeurs dans une catégorie abélienne A.On pose

hB1

0 (F ) = CoKer (s∗0 − s∗1 : hom(B1B , F ) // F ).

On obtient ainsi un endofoncteur hB1

0 de PreStr(V ,A). Le préfaisceau hB1

0 (F ) est appelé, en vue du corollaire 2.2.39,le préfaisceau B1-invariant associé à F .

Corollaire 2.2.39 — Soit F un préfaisceau avec transferts sur V à valeurs dans une catégorie abélienne A.Le préfaisceau hB

1

0 (F ) est B1-invariant. De plus le foncteur

hB1

0 (−) : PreStr(V ,A) // PreStrB1(V ,A)

est naturellement un adjoint à gauche du foncteur d’inclusion.

Demonstration L’invariance par homotopie de hB1

0 (F ) est un cas particulier de la proposition 2.2.43 où l’on prendn = 0 et K· le préfaisceau F placé en degré nul. On peut également la démontrer directement. On vérifiera la condition(ii) de la proposition 2.2.37 pour hB

1

0 (F ), i.e., que la flèche

s∗1 − s∗0 : hom(B1B , h

B1

0 (F )) // hB1

0 (F )

est nulle. Étant donné que hB1

0 (F ) est un quotient de F , il suffira de montrer que la composée

hom(B1B , F )

s∗1−s∗0

// F // hB1

0 (F )

est nulle. Mais, hB1

0 (F ) a été défini comme le conoyau de la première flèche ci-dessus.

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130 Motifs des variétés rigides analytiques II

Pour montrer que hB1

0 (−) est adjoint à gauche de l’inclusion, on utilise que si H est un préfaisceau B1-invariant, le

morphisme canonique H∼// hB

1

0 (H) est inversible. c.q.f.d

On notera π0Cor(V ) la sous-catégorie pleine de π0RigCor(B) admettant Ob(V ) pour objets. On a alors :

Proposition 2.2.40 — Soit F un préfaisceau avec transferts sur V à valeurs dans une catégorie abélienne A.Les deux conditions suivantes sont équivalentes.

(i) F est invariant par homotopie.

(ii) Le foncteur F se factorise à travers π0Cor(V ), i.e., il existe un foncteur additif F ′ : π0Cor(V )op // A etun isomorphisme F ' F ′ (Cor(V )→ π0Cor(V )).

Ainsi, PreStrB1(V ) est canoniquement isomorphe à la catégorie HOM⊕(π0Cor(V )op,A) des foncteurs additifs contra-variants de π0Cor(V ) dans A.

Demonstration Supposons que F est invariant par homotopie. Il s’agit de montrer, pour X et Y dans V , quel’action des correspondances

CorB(X,Y ) // homA(F (Y ), F (X))

se factorise par π0CorB(X,Y ). Soient α, β ∈ CorB(X,Y ) et γ ∈ CorB(B1X , Y ) une homotopie de α à β. On a alors

les égalitésF (α) = F (γ s0) = F (s0) F (γ) = F (s1) F (γ) = F (γ s1) = F (β).

D’où l’implication (i)⇒ (ii).Réciproquement, supposons que F se factorise par π0Cor(V ). Soit U une B-variété rigide dans V . Il suffit, compte

tenu de la proposition 2.2.37, de montrer que F (s0) = F (s1) avec s0, s1 : U // B1k×kU les sections nulle et unité.

Mais, les deux correspondances finies s0, s1 ∈ CorB(U,B1U ) sont homotopes via l’identité de B1

U . c.q.f.d

La définition ci-dessous généralise la construction du préfaisceau B1-invariant aux complexes de préfaisceaux.

Definition 2.2.41 — Soit K = K· un complexe de préfaisceaux avec transferts sur V à valeurs dans A. Le

complexe simple associé à l’objet simplicial en complexes hom(∆·rig,K) sera noté SingB1

· (K). C’est le complexe dechaînes rigides à valeurs dans K.

Remarque 2.2.42 — Soient A une catégorie admettant des coproduits dénombrables et n ∈∆ K·(n) un objetsimplicial dans la catégorie des complexes de A. Le complexe simple S(K) associé à K·(−) est le complexe simpleassocié à K vue comme double complexe. Ainsi, S(K)n =

∐(a,m)∈Z×N; a+m=nKa(m). En particulier, le foncteur S

commute aux colimites.

Proposition 2.2.43 — Soit K = K· un complexe de préfaisceaux avec transferts. Pour tout n ∈ N, le préfaisceaud’homologie Hn(SingB1

(K)) est invariant par homotopie.

Demonstration C’est bien entendu la même preuve que dans le cas algébrique (voir par exemple [VSF00]). On lareprend pour la commodité du lecteur. On montrera que les deux morphismes d’objets simpliciaux

(2.31) s∗0, s∗1 : hom(B1,hom(∆·rig,K)) // hom(∆·rig,K)

sont simplicialement homotopes. Ceci suffit par la proposition 2.2.37 et le fait que le complexe simple associé transformeles homotopies simpliciales en homotopies entre morphismes de complexes. On peut réecrire les deux morphismes (2.31)

(2.32) s∗0, s∗1 : hom(B1×∆·rig,K) // hom(∆·rig,K) .

Il suffit donc de montrer que les deux morphismes d’objets cosimpliciaux en k-variétés rigides

(2.33) s0, s1 : ∆·rig // B1×∆·rigsont simplicialement cohomotopes. Pour cela, on identifiera B1 avec ∆1

rig. Une telle cohomotopie est la donnée pourtout a : n→ 1 d’un morphisme h(a) : ∆n

rig// ∆1

rig ×∆nrig tel que :

– h(0 : n→ 1) = d01 × id et h(1 : n→ 1) = d1

1 × id,

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 131

– pour c : m→ n, le carré suivant

∆mrig

h(a)//

c

∆1rig×k∆m

rig

id×c

∆nrig

h(ac)// ∆1

rig×k∆nrig

commute.On construira un tel h avec h(a) des applications affines. Par le lemme 2.2.44 ci-dessous, une application affineh(a) : ∆n

rig// ∆1

rig×k∆nrig est uniquement déterminée par les images des n + 1 sommets de ∆n

rig. Les sommets

de ∆nrig sont paramétrés par les flèches 0→ n. On prendra alors pour h(a) l’application qui au sommet image de ∆0

rig

par ∆rig(e : 0→ n) associe l’image de

∆0rig

(∆rig(ae),∆rig(e))// ∆1

rig×k∆nrig .

Il est alors clair que h définit une cohomotopie. c.q.f.d

Un affinoïde X muni d’une action simplement transitive de Bmk (considéré comme foncteur en groupes pour l’addi-tion) est appelé un espace affine rigide. Le choix d’un point de X définit un isomorphisme X ' Bmk . Étant donné deuxespaces affines rigides (X,Bmk ) et (Y,Bnk ), on appelle application affine (à ne pas confondre avec morphisme affine) ladonnée d’un morphisme de B1-modules l : Bmk // Bnk et d’un morphisme équivariant f : X // Y . On vérifiefacilement que l est uniquement déterminé par f . On dira donc que f est un morphisme affine, s’il existe l commeci-dessus.

Lemme 2.2.44 — Soient (X,Bmk ) et (Y,Bnk ) deux espaces affines. On suppose donnés des points fermés, k-rationels x0, . . . , xm de X et y0, . . . , ym de Y . On suppose que la famille (−−→x0xi ∈ Bmk (Spm(k)) = (k)m)1≤i≤m est unebase du k-module libre (k)m. Il existe alors une unique application linéaire f : X // Y telle que f(xi) = yi pour0 ≤ i ≤ m.

Demonstration On peut supposer que X = Bmk = Spm(kt1, . . . , tm) et Y = Bnk = Spm(ks1, . . . , sn) et que x0

et y0 sont définis par t1 = · · · = tm = 0 et s1 = · · · = sn = 0. Alors, les coordonnés des xi pour 1 ≤ i ≤ m définissentune matrice inversible à valeurs dans k. Cette matrice définit un automorphisme du B1

k-module Bmk . On peut doncsupposer que xi est défini par tj = 0 si i 6= j et ti = 1. Si yi = (s1− ai1, . . . , sn− an,i on prendra pour f le morphismedonné au niveau des algèbres par l’association sj

∑mi=1 ajiti. Les vérifications sont standards et sont laissés aux

lecteurs. c.q.f.d

2.2.4 Fibres d’un préfaisceau avec transferts B1-invariantSoit F un préfaisceau avec transferts invariant par homotopie au dessus d’une k-variété rigide lisse B. Étant donné

un point générique p dans B (satisfaisant à une condition technique), on montrera dans cette section comment définirun préfaisceau avec transferts Fp sur une sous-catégorie pleine des k(p)-affinoïdes lisses. Le préfaisceau Fp est ce qu’onappellera la fibre de F en p. La condition que F est invariant par homotopie, jouera un rôle crutial. On commence parune définition.

Definition 2.2.45 — Soient B un k-affinoïde et p ∈ P(B) un point de B. On appelle AfndCor(B, p) (resp.SmAfnd/(B, p)) la colimite des catégories AfndCor(U) (resp. SmAfnd/U) suivant U ∈ Flt(p). Concrètement, les objetsde cette catégorie sont des couples (X,U) avec U ∈ Flt(p) et X un U -affinoïde lisse. Un tel objet sera simplement notéZtr(X/U) (resp. X/U). Étant donnés deux tels objets Ztr(X/U) et Ztr(Y/V ) (resp. (X/U) et (Y/V )), on a

homAfndCor(B,p)(Ztr(X/U),Ztr(Y/V )) = ColimW∈Flt(p), W⊂U∩V

CorW (X×UW,Y ×VW )

(resp. homSmAfnd/(B,p)(X/U, Y/V ) = ColimW∈Flt(p), W⊂U∩V

homSmAfnd/W (X×UW,Y ×VW )).

On notera simplement CorB,p(X/U, Y/V ) le groupe ci-dessus. Un foncteur additif F : AfndCor(B, p)op // Ab

est appelé un préfaisceau avec transferts sur SmAfnd/(B, p). Ces préfaisceaux avec transferts forment une catégorieabélienne qu’on notera AfndPST(B, p).

Remarque 2.2.46 — Gardons les notations de la définition précédente. On vérifie immédiatement que l’identité deX induit un isomorphisme entre X/U et X/B dans SmAfnd/(B, p). Ainsi, dans la suite on identifiera SmAfnd/(B, p)et AfndCor(B, p) avec leurs sous-catégories pleines formées des objets de la forme X/B.

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132 Motifs des variétés rigides analytiques II

D’autre part, si X/B et Y/B sont deux objets de SmAfnd/(B, p), on dispose d’un isomorphisme évident

CorB,p(X/B, Y/B) = ColimW∈Flt(p)

CorB(X×BW,Y ).

En effet, on vérifie immédiatement que CorW (X×BW,Y ×BW ) = CorB(X×BW,Y ) étant donné que

(X×BW )×W (Y ×BW ) = (X×BW )×BY.

Le résultat suivant est une évidence. Il admet bien entendu une version sans transferts.

Lemme 2.2.47 — Soient B un k-affinoïde lisse et p ∈ P(B). Soit F un préfaiceau avec transferts sur SmAfnd/B.On définit un préfaisceau avec transferts F(B,p) sur SmAfnd/(B, p) en posant

F(B,p)(X/B) = ColimU∈Flt(p)

F (X×BU)

pour X un B-affinoïde lisse. Le préfaisceau F(B,p) est appelé la préfibre de F en p.

Soient X/B et Y/B des B-affinoïdes lisses. On définit π0CorB,p(X/B, Y/B) comme étant le coégalisateur de ladouble flèche

CorB,p(B1X/B, Y/B)

0∗//

1∗//CorB,p(X/B, Y/B) .

On a des identifications évidentes

π0CorB,p(X/B, Y/B) = ColimU∈Flt(p)

π0CorU (X×BU, Y ×BU) = ColimU∈Flt(p)

π0CorB(X×BU, Y ).

De plus, les éléments de π0CorB,p(−,−) sont les flèches de la catégorie additive π0AfndCor(B, p) colimite desπ0AfndCor(W ) suivant W ∈ Flt(p).

Le groupe π0CorB,p(X/B, Y/B) est le premier groupe d’homologie du complexe CorB,p(∆·rig×kX/B, Y/B) qui

est noté CorB,p(X/B, Y/B)· et dont le i-ème groupe d’homologie est noté πiCorB,p(X/B, Y/B). Il est clair queCorB,p(X/B, Y/B) (resp. πiCorB,p(X/B, Y/B)) est la colimite des CorB(X×BU, Y ) (resp. πiCorB(X×BU, Y ))suivant U ∈ Flt(p).

Par la proposition 1.1.34 on dispose d’une valuation naturelle ‖.‖p sur le corps résiduel k(p) = OB,p/mp. Onnote k(p) le complété de k(p) pour cette norme et p = Spm(k(p)). On dispose d’un foncteur de changement de baseSmAfnd/(B, p) // SmAfnd/p qui à X/B associe le k(p)-affinoïde lisse Xp = X×B p (égal par définition au spectre

maximal de la k(p)-algèbre affinoïde Γ(X,O)⊗Γ(B,O)k(p)). Ce foncteur s’étend aux catégories des correspondancesfinies comme le montre la proposition ci-dessous.

Proposition 2.2.48 — On dispose d’un foncteur naturel φB,p : AfndCor(B, p) // AfndCor(p) qui envoieZtr(X/B) sur Ztr(Xp) et qui fait commuter le carré

SmAfnd/(B, p) // _

SmAfnd/p _

AfndCor(B, p) // AfndCor(p).

Les foncteurs φB,p sont caractérisés par les trois propriétés suivantes.

(i) Soit k ⊂ k′ une extension de corps normés complets. Notons B′ = B×kk′ et soit p′ ∈ M(B′) au dessus de p.Alors le carré

AfndCor(B, p) //

AfndCor(p)

AfndCor(B′, p′) // AfndCor(p′)

commute modulo les isomorphismes d’associativité du produit fibré (les foncteurs varticaux étant ceux déduits dela proposition 2.2.19).

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 133

(ii) Si C ⊂ B est un sous-affinoïde localement fermé de B contenant p et lisse sur k, le triangle

AfndCor(B, p)

**

// AfndCor(C, p)

AfndCor(p)

est commutatif modulo l’isomorphisme d’associativité du produit fibré (pour X un B-affinoïde lisse, le foncteurhorizontal envoie une correspondance finie de X dans Y sur la composée à gauche avec l’inclusion X×BC ⊂ Xque l’on factorise par l’inclusion Y ×BC ⊂ Y ).

(iii) Supposons que l’idéal maximal mB,p ⊂ OB,p est nul. Soient X/B et Y/B deux B-affinoïdes lisses et U ∈Flt(p). Soit α ∈ CorB,p(X/B, Y/B) une correspondance finie égale à la classe d’un sous-affinoïde fermé Z ⊂(X×BU)×BY , intègre, fini et surjectif sur X×BU . L’image de α par ce foncteur est égale à la classe du sous-affinoïde fermé (non nécessairemet intègre) Zp = Z×B p, i.e., à

∑i[(Zp)i] avec (Zp)i les composantes irréductibles

du p-affinoïde Zp.

Demonstration En utilisant la propriété (i) on peut se ramener au cas où p est un point fermé rationnel sur k. Eneffet, il suffit d’étendre les scalaire suivant k ⊂ k(p). Le cas où p est un point fermé découle alors de (ii). La propriété(iii) se vérifie alors immédiatement. L’unicité est claire. c.q.f.d

Par la proposition précédente, on déduit pour X/B et Y/B dans SmAfnd/(B, p) un morphisme de complexes

(2.34) CorB,p(X/B, Y/B) // Corp(Xp, Yp) .

Le résultat principal de cette sous-section affirme que (2.34) est un quasi-isomorphisme sous certaines conditionstechniques.

Theoreme 2.2.49 — Soient X/B et Y/B deux B-affinoïdes lisses. On suppose que p ∈ P(B) est un pointgénérique. On suppose également que les conditions ci-dessous sont satisfaites.

(i) Il existe un sous-affinoïde localement fermé C ⊂ B contenant p, lisse sur k et tel que OC,p // k(p) estinversible (i.e., l’idéal maximal mC,p ⊂ OC,p est nul).

(ii) Il existe des morphismes étales de B-variétés rigides X // BmB et Y // BnB .

Alors, le morphisme de complexes (2.34) est un quasi-isomorphisme.

Demonstration On divise la preuve en deux parties. Dans la première, on utilise (i) et (ii) pour se ramener au casoù mB,p = 0. Ce cas sera traité dans la deuxième partie.Partie A : Réduction au cas mB,p = 0. Quitte à remplacer B par un voisinage affinoïde de p, on peut supposer que Cest un sous-affinoïde fermé de B et qu’il existe un carré cartésien

C //

B

Bck // Bck×kBdk

où les flèches verticales sont étales et la flèche horizontale inférieure est déduite de la section nulle de Bdk. Par le lemme2.2.51, il existe ε ∈ |k×| et un carré cartésien

C×kBdk(o, ε)jε

//

B

Bck×kBdk(o, ε) // Bck×kBdk.

D’autre part, on a par (ii) des carrés commutatifs

X //

B

Bm+ck ×kBd // Bck×kBd

Y //

B

Bn+ck ×kBd // Bck×kBd

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134 Motifs des variétés rigides analytiques II

où les morphismes verticaux sont étales. On note X0 = X×BC et Y0×BC. En utilisant la propriété de fonctorialitédans le lemme 2.2.51, on obtient deux carrés cartésiens

X0×kBdk(o, ε) //

X

C×kBdk(o, ε) // B.

Y0×kBdk(o, ε) //

Y

C×kBdk(o, ε) // B.

Étant donné qu’on peut remplacer B par n’importe quel voisinage affinoïde de p, on voit par la discussion précédentequ’il suffit de traiter le cas où B = BdC , X = BdX0

, Y = BdY0et p = o × q avec q ∈ P(C) un point générique vérifiant

mC,q = 0. On a dans ce cas un isomorphisme

CorB,p(X,Y ) ' ColimV ∈Flt(q) et λ∈|k×|, λ<1

CorBdC(o,λ)(BdX0×CV(o, λ),BdY0

(o, λ)).

En effet, le lemme 2.2.52 affirme que les ouverts de la forme BdV (o, λ) avec V ∈ Flt(q) et λ ∈ |k×| forment unsous-ensemble cofinal de Flt(p). Le morphisme (2.34) se factorise de la manière suivante :

ColimV ∈Flt(q), λ∈|k×|, λ<1

CorBdC(o,λ)(BdX0×CV(o, λ),BdY0

(o, λ)) // ColimV ∈Flt(q)

CorC(X0×CV, Y0) // Corq((X0)q, (Y0)q).

Pour se ramener au cas mB,p = 0, il nous reste à voir que

(2.35) CorBdC(o,λ)(BdX0×CV(o, λ),BdY0

) // CorC(X0×CV, Y0)

sont des quasi-isomorphismes (remarquer que X0/C et Y0/C vérifient l’hypothèse (ii)). Remarquons pour cela queCorBdC(o,λ)(BdX0×CV

(o, λ),BdY0) = CorC(Bd

X0×CV, Y0) et que modulo cette identification, (2.35) est le morphisme de

composition à gauche par la section nulle de Bd(o, λ). Le résultat découle maintenant de la proposition 2.2.43.Partie B : Cas où mB,p = 0. On note A = Γ(B,O) et D = Γ(Y,O) qu’on munit de leur norme infinie. Par (ii),on dispose d’un morphisme étale de k-algèbres affinoïdes At1, . . . , tn // D . Par le lemme 1.1.50, il existe uneprésentation

D ' At1, . . . , tn, tn+1, . . . , tn+p(f1, . . . , fp)

avec fj ∈ A[t1, . . . , tn+p] pour 1 ≤ j ≤ n. Il existe donc une A-algèbre de type fini E et une immersion ouverteY // Spec(E)an . Dans la suite dans la preuve, on utilisera (ii) uniquement à travers l’existence de cette immersionouverte.

Pour W ∈ Flt(p), on pose CnW = Γ((∆nrig×kX)×BW,O). De même, on pose Cn = Γ((∆n

rig×kX)p,O). Les algèbresCnW et Cn seront aussi munies de leurs normes infinies. L’hypothèse mB,p = 0, implique que pour tout W ∈ Flt(p), laCnW -algèbre Cn est régulière. Ceci se vérifie aisément en regardant les anneaux locaux formels. Il vient par le théorèmede Popescu [Pop85, Pop86] que Cn est la colimite filtrante des ses sous-CnW -algèbres lisses et de type fini.

Notons P = Spec(E) et identifions Y à son image dans P an. Étant donné un B-affinoïde lisse Q, on noteraCorYB(Q,P ) le groupe abélien librement engendré par l’ensemble des sous-schémas fermés Z ⊂ Spec(Γ(Q,O) ⊗A E)intègres, finis et surjectifs sur Spec(Γ(Q,O)) et qui vérifient la condition suivante. La A-algèbre Γ(Z,O) est affinoïdepuisque finie sur Γ(Q,O). On note Zan le B-affinoïde Spm(Γ(Z,O)). Par la proposition 1.1.20, le morphisme de A-schémas Z // P équivaut à la donnée d’un morphisme de B-variétés rigides Zan // P an . Alors, [Z] est dansCorYB(Q,P ) si et seulement si l’image de Zan dans P an est contenue dans Y . Il est clair que l’association Z Zan

fournit un homomorphisme bijectif

(2.36) CorYB(Q,P ) ' CorB(Q,Y ).

De même, étant donné un k(p)-affinoïde lisse R, on notera CorYB(R,P ) le groupe abélien librement engendré parl’ensemble des sous-schémas fermés Z ⊂ Spec(Γ(R,O)⊗A E) intègres, finis et surjectifs sur Spec(Γ(R,O)) et qui véri-fient la condition suivante. La k(p)-algèbre Γ(Z,O) est affinoïde puisque finie sur Γ(R,O). On note Zan le k(p)-affinoïde

Spm(Γ(Z,O)). Le morphisme de A-schémas Z // P équivaut à un morphisme de k(p)-schémas Z // P ⊗k k(p)

qui équivaut (par la proposition 1.1.20) à un morphisme de k(p)-variétés rigides Zan // P an⊗kk(p) . On demande

alors que l’image de ce dernier morphisme soit contenue dans Y ⊗kk(p). L’association Z Zan fournit un homomor-phisme bijectif

(2.37) CorYB(R,P ) ' Corp(R, Yp).

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 135

Remarquons également que les isomorphismes (2.36) et (2.37) sont naturels en Q et R (où pour CorYB(−, P ) onprend le pull-back des cycles relatifs sur des schémas noethériens réguliers). Avec ces notations, on est ramené à prouverque

(2.38) ColimW∈Flt(p)CorYB((∆·rig×kX)×BW,P ) // CorYB((∆·rig×kX)p , P )

est un quasi-isomorphisme. On divise la preuve en deux sous-parties.Sous-partie B.1 : On montre d’abord que (2.38) induit des homomorphismes surjectifs sur les groupes d’homologieen degré n ∈ N. On fixe α ∈ CorYB((∆n

rig×kX)p, P ) une correspondance finie définissant un cycle dans le complexe

simplicial CorYB((∆·rig×kX)p , P ), i.e., pour 0 ≤ i ≤ n on a α dn,i = 0 avec dn,i : (∆n−1rig ×kX)p ⊂ (∆n

rig×kX)pl’inclusion de la face d’équation ti = 0.

Comme P est un B-schéma de type fini, il existe par le théorème de Popescu une sous-CnB-algèbre lisse detype fini H ⊂ Cn et une correspondance finie α′ ∈ CorSpec(A)(Spec(H), P ) telle que α est égale à la composée

Spec(Cn) // Spec(H)α′// Spec(P ) . Quitte à raffiner H, on peut également supposer que α′ (Spec(H/ti) ⊂

Spec(H)) = 0 pour 0 ≤ i ≤ n.Notons Spec(G) ⊂ Spec(H ⊗A E) le support de α′ (avec G un quotient réduit de H ⊗A E). Alors G est une

H-algèbre finie. On pose G′ = (G ⊗H Cn)red. C’est une Cn-algèbre affinoïde finie et Spec(G′) est le support de α.Comme α est dans CorYB((∆n

rig×kX)p, P ) le morphisme Spm(G′) // (P an)p se factorise par l’ouvert affinoïde Yp.Choisissons R ⊂ Spec(G)an un domaine affinoïde contenu dans l’image inverse Spec(G)an ×P an Y de Y et tel que

Rp contient l’image de Spm(G′). Ceci est clairement possible puisque (Spec(G)an ×P an Y )p contient Spm(G′) et queSpec(G)an ×P an Y est une union croissante d’une N-suite d’ouverts affinoïdes. On définit alors T ⊂ Spec(H)an commeétant le plus grand domaine affinoïde tel que T ⊗H G soit contenu dans R. Plus précisément, on construit T de lamanière suivante. Notons (Spec(Gi))i∈I les composantes irréductibles de Spec(G). On sait que Spec(Gi) est intègre,fini et surjectif sur Spec(H). Soit Gi la normalisation de Gi dans une clôture galoisienne de l’extension k(Gi)/k(H).Posons alors R′i = ∩g∈Aut(Gi/H)g(R ⊗G Gi). C’est un ouvert affinoïde invariant par Aut(Gi/H). Il existe alors ununique domaine affinoïde Ti tel que Ti ⊗H Gi = R′i. On prend T = ∩iTi.

Il est immédiat d’après la construction précédente que Tp contient l’image de (∆nrig×kX)p dans (Spec(H)an)p.

On pose alors α′′ la composée de α′ avec Spec(Γ(T,O)) // Spec(H) . Par construction, α′′ est un élément de

CorYB(T, P ) = CorB(T, Y ). De plus la composée de α′′ avec les inclusions T/(ti = 0) ⊂ T est nulle pour 0 ≤ i ≤ n.On a donc construit un ∆n

rig×kX-affinoïde lisse T muni d’une section, après extension des scalaires à k(p),

s : (∆nrig×kX)p // Tp

ainsi qu’une correspondance finie α′′ ∈ CorB(T, Y ) telle que (α′′)p s = α et α (T/ti ⊂ T ) = 0 pour 0 ≤ i ≤ n.Par le lemme 2.2.53 ci-dessous, on peut supposer que T = Bdk×k(∆n

rig×kX) = ∆nrig×kBdX . Via l’identifica-

tion précédente, on peut voir α′′ comme un cycle du complexe simplicial CorB(BdX , Y ). Si s0 est la section nullede Bdk, on voit que α est homotope à (α′′ s0)p. En effet, considérons le morphisme de Xp-variétés rigides h :

(∆n+1rig ×kX)p // (∆n×kBdX)p donné sur les †-points (où † est une Xp-variété rigide) par la formule

h(t0, . . . , tn+1) = (t0 + t1, t2, . . . , tn+1, t0 · (s0)p(t0 + t1, t2, . . . , tn+1) + t1 · s(t0 + t1, t2, . . . , tn+1)).

Il est alors immédiat que (α′′)p h est une homologie entre (α′′)p s et (α′′ s0)p. La surjectivité est établie.Sous-partie B.2 : On montre maintenant que (2.38) induit des homomorphismes injectifs sur les groupes d’homologieen degré n ∈ N.

Soit α ∈ CorYB(∆nrig×kX,P ) une correspondance finie définissant un cycle, i.e., α dn,i = 0 pour 0 ≤ i ≤ n. On

suppose qu’il existe une correspondance finie β ∈ CorYB((∆n+1rig ×kX,P )p , P ) telle que β dn+1,0 = αp et β dn+1,i = 0

pour 1 ≤ i ≤ n+ 1.Par le théorème de Popescu, on peut trouver une sous-Cn+1

B -algèbre lisse de type fini H ⊂ Cn+1 et une cor-

respondance finie β′ ∈ CorB(Spec(H), P ) telles que la composée Spec(Cn+1) // Spec(H)β′// P soit égale à

β. Quitte à raffiner H, on peut supposer que β′ (Spec(H/t0) ⊂ Spec(H)) = α (Spec(H/t0) → Spec(CnB)) etβ′ (Spec(H/ti) ⊂ Spec(H)) = 0 pour 1 ≤ i ≤ n+ 1.

Comme dans l’étape précédente, on peut trouver un ouvert affinoïde T ⊂ Spec(H)an tel que Tp contient (∆n+1rig ×X)p

et la restriction de (β′)an à T se factorise par Y . On note β′′ ∈ CorB(T, Y ) la correspondance ainsi obtenue. Parconstruction, on a

(2.39) β′′ (T/t0 ⊂ T ) = α (T/t0 → ∆nrig×kX)

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136 Motifs des variétés rigides analytiques II

et β′′ (T/ti ⊂ T ) = 0 pour 1 ≤ i ≤ n+ 1.On applique alors le lemme 2.2.53 ci-dessus. On peut donc supposer que T = Bdk×(∆n+1

rig ×kX) que l’on identifieavec ∆n+1

rig ×BdX . Notons s0 la section nulle de BdX et posons β′′′ = β′′ s0. Alors β′′′ dn+1,i = 0 pour 1 ≤ i ≤ n+ 1.D’autre part, la relation (2.39) montre que β′′′ dn+1,0 = α. Ceci montre que α est homologue à zéro. Le théorèmeest démontré. c.q.f.d

Remarque 2.2.50 — La preuve du théorème 2.2.49 n’utilise aucun résultat particulier sur les correspondancesfinies. On peut facilement l’adapter pour montrer que le morphisme de complexes

Z[homAfnd/(B,p)(∆

·rig×kX/B, Y/B)

]// Z[homAfnd/p(∆

·rig×kXp, Yp)

]est un quasi-isomorphisme (toujours sous les hypothèses (i) et (ii)).

Dans la preuve du théorème 2.2.49 nous avons utilisé quelques lemmes de géométrie rigide. Il s’agit des lemmes2.2.51, 2.2.52 et 2.2.53.

Lemme 2.2.51 — Soient U et V des k-variétés rigides quasi-compactes. On suppose donné un morphisme étalee : V // U×kBnk . On note o le centre de Bnk , Z = V ×Bnk o et e0 : Z // U le morphisme évident. Pour ε ∈ |k×|

suffisamment petit, il existe un unique morphisme jε : Z×kBnk (o, ε) // V rendant commutatif le carré

(2.40) Z×kBnk (o, ε)jε

//

e0×id

V

e

U×kBnk (o, ε) // U×kBnk .

De plus, le morphisme jε est une immersion ouverte et le carré ci-dessus est cartésien.Le morphisme jε est fonctoriel au sens suivant. Supposons donné un carré commutatif

V ′g

//

e′

V

e

U ′×kBnkf×id

// U×kBnk

avec e et e′ étales. Notons j′ε : Z ′×kBnk (o, ε) // V ′ le morphisme associé à e′ comme ci-dessus. Alors, le carrésuivant commute

(2.41) Z ′×kBnk (o, ε)g0×id

//

j′ε

Z×kBnk (o, ε)

V ′g

// V.

Demonstration On construit d’abord le morphisme jε. On pose W = V ×UZ. On a un morphisme diagonalZ // W . Le diagramme

Z

V Woo // Z×kBnk

commute et ses flèches horizontales sont étales. Par le corollaire 1.1.54 (et le lemme 2.2.52 ci-dessous), il existe pourε ∈ |k×| suffisamment petit un morphisme Z×kBnk (o, ε) // W rendant commutatif le diagramme

W

Z //

11

Z×kBnk (o, ε) //

33

Z×kBnk .

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 137

Considérons la composéejε : Z×kBnk (o, ε) // W // V .

Par construction, le diagrammeW

Z×kBnk (o, ε) //

e0×id

33

Z×kBnk

V

eyy

U×kBnk (o, ε) // U×kBnk

commute. Il vient que jε rend commutatif le carré (2.40). Pour montrer l’unicité de jε, on remarque que c’est unmorphisme de U×kBnk -variétés rigides étales. Un tel morphisme est uniquement déterminé par ses fibres au dessus deU×ko (puisque Z×ko rencontre toutes les composantes connexes de Z×kBnk (o, ε)).

Montrons que jε est une immersion ouverte (quitte peut-être à prendre un ε plus petit). Étant donné que le triangle

Z×kBnk (o, ε)

Z //

77

V

commute, une deuxième application du corollaire 1.1.54 montre qu’il existe un voisinage quasi-compactQ ⊂ Z×kBnk (o, ε)de Z tel que la composée

Q // Z×kBnk (o, ε) // V

est une immersion ouverte. Par le lemme 2.2.52, on peut trouver 0 < ε′ < ε avec ε′ ∈ |k×| et tel que Z×kBnk (o, ε′) ⊂Z×kBnk (o, ε) est contenu dans Q. D’où le résultat.

On montre maintenant que (2.40) est cartésien. On dispose d’une immersion ouverte Z×kBnk (o, ε) ⊂ V ×BnkBnk (o, ε).

La famille des V ×BnkBnk (o, ε) est cofinale parmi les voisinages quasi-compacts de Z dans V . On peut donc trouver

0 < ε′ < ε dans |k×| tel que V ×BnkBnk (o, ε′) est contenu dans jε(Z×kBnk (o, ε)). On a alors immédiatement Z×kBnk (o, ε′) '

V ×BnkBnk (o, ε′).

Pour terminer, il reste à voir que le carré (2.41) commute. Comme (2.40) est cartésien, la fonctorialité du produitfibré fournit un morphisme a : Z ′×kBnk (o, ε) // Z×kBnk (o, ε) faisant commuter le diagramme

U ′×kBnk (o, ε)

Z ′×kBnk (o, ε) //oo

a

V ′

U×kBnk (o, ε) Z×kBnk (o, ε) //oo V

Comme Z ′×kBnk (o, ε) et Z×kBnk (o, ε) sont étales sur U ′×kBnk (o, ε) et U×kBnk (o, ε), il existe au plus un morphisme ainduisant le morphisme g0 : Z ′ // Z . Comme g0× id convient, on a forcément a = g0× id. Ceci termine la preuvedu lemme. c.q.f.d

Lemme 2.2.52 — Soit X une k-variété rigide quasi-compacte. Soit U ⊂ X×kBnk un ouvert quasi-compact etnotons Z = U ∩ (X×ko) ⊂ X. Pour ε ∈ |k×| suffisamment petit, on a Z×kBnk (o, ε) ⊂ U .

Demonstration La question est locale en X et U . On peut donc supposer que X est un k-affinoïde et que U est undomaine rationnel DBnX (f0|f1, . . . , fn) défini par f0, . . . , fn engendrant Γ(X,O)t1, . . . , tn en tant qu’idéal. Écrivonspour 0 ≤ i ≤ n :

fi =∑

ν=(ν1,...,νn)∈Nnfνi t

ν11 . . . tνnn ,

avec fνi ∈ Γ(X,O). On fixe M ∈ |k×| tel que |fνi |∞ < M et ε1 ∈ |k×| tel que ε1 < max0≤i≤n|fi(x)| pour tout x ∈ BnX .Montrons que ε convient dès que ε < min(1, ε1/M). Pour simplifier, on note f0

i = f(0,...,0)i . Pour tout x ∈ BnX(o, ε),

on a les inégalités

|fi(x)− f0i (x)| ≤ ε1 , ε1 < max0≤i≤n|fi(x)| et ε1 < max0≤i≤n|f0

i (x)|.

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138 Motifs des variétés rigides analytiques II

Pour la dernière inégalité, on peut supposer que x ∈ X×ko. Elle devient alors un cas particulier de l’avant dernièreinégalité. On en déduit immédiatement que

DBnX(o,ε)(f0|f1, . . . , fn) = DBnX(o,ε)(f00 |f0

1 , . . . , f0n) = DX(f0

0 |f01 , . . . , f

0n)×kBnk (o, ε).

Le lemme est démontré. c.q.f.d

Le lemme suivant est une adaptation à la géométrie rigide d’un lemme de [Pop86].

Lemme 2.2.53 — Soient B un k-affinoïde lisse et p ∈ P(B) un point générique tel que mB,p = 0. Soient X unB-affinoïde lisse et T un X-affinoïde lisse. On suppose que T admet une section s au dessus de p

Xps// Tp // Xp .

Il existe alors U ∈ Flt(p) et des diagrammes commutatifs

BnX×BUr//

))

T

X

BnXp

rp

Xps//

s′88

Tp // Xp

avec r lisse et où les morphismes non nommés sont les morphismes évidents.

Demonstration Le OT -module ΩT/X est projectif (puisque T est lisse sur X et qu’il est affinoïde). Il existe doncun isomorphisme

ΩT/X ⊕N ' OaT ,

avec N un OT -module projectif. Ainsi, quitte à remplacer le couple (T, s) par (T1, 0 s) avec T1 un voisinage affinoïdede la section nulle de Spec(Γ(T,⊕∞i=1SymiN ))an, on peut supposer que ΩT/X est libre de rang n.

Choisissons une présentation Γ(X,O)t1, . . . , tn+m // // Γ(T,O) et notons I son noyau. On obtient alors unesuite exacte courte de Γ(T,O)-modules projectifs

0 // I/I2 // ⊕n+mi=1 Γ(T,O).dti

θ// ΩT/X // 0.

Comme ΩT/X est supposé libre, il existe une famille (ωj)j=1,...,n dans ⊕n+mi=1 Γ(T,O).dti dont l’image par θ forme une

base de ΩT/X . Écrivons

ωj =

n+m∑i=1

fijdti , fij ∈ Γ(T,O).

Soient fij ∈ Γ(Xp,O) les restrictions des fij à Xp suivant la section s. Pour un réel ε > 0, on choisit gεij ∈ColimU∈Flt(p)Γ(X×BU,O) tel que ‖gεij − fij‖∞ ≤ ε (où ‖.‖∞ désigne la norme infinie par rapport à Xp). L’exis-tence des gεij est assurée du fait que l’image de ColimU∈Flt(p)Γ(X×BU,O) dans Γ(Xp,O) est dense. On choisit enfinUε ∈ Flt(p) tel que gεij soient définis sur X×BUε.

Posons ωεj =∑n+mi=1 gεijdti. On choisit une base B = (e1, . . . , en) du OT -module libre ΩT/X . Il existe alors

une matrice Mε ∈ Matn,n(Γ(T ×BUε,O)) telle que Mε(ej) = θ(ωεj) pour 1 ≤ j ≤ n. Pour η ∈√|k×|, on pose

Tε,η = DT (det(Mε)|η). Pour ε et η suffisament petits, la section s se factorise à travers (Tε,η)p. En effet, soitM ∈ Matn,n(Γ(T,O)) la matrice telle que M(ej) = θ(ωj). Notons M ∈ Matn,n(Γ(Xp,O)) sa restriction à Xp suivantla section s. On sait que M est inversible et que

M = Limε→0+

Mε.

Il suffit alors de prendre η < minx∈Xp |det(M)(x)| et ε de sorte que |det(Mε)− det(M)| < η.Dans la suite, on remplace X par X×BUε et T par Tε,η. Quitte à faire un changement Γ(X,O)-linéaire de variables

(t1, . . . , tn+m) (t′1, . . . , t′n+m), on peut aussi supposer que (θ(ti))i=1,...,n forme une base de ΩT/X . En effet, les formes

différentielles ωεj sont à coefficients dans Γ(X,O). On obtient en fin de compte que la composée

Γ(X,O)t1, . . . , tn // Γ(X,O)t1, . . . , tn+m // Γ(T,O)

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 139

est un morphisme étale de k-algèbres affinoïdes. On a donc trouvé une factorisation

Te//

''

BnX

X

avec e un morphisme étale.Considérons maintenant le morphisme ep s : Xp

// BnXp . On note aj ∈ Γ(Xp,O) la restriction de tj suivant

le morphisme ep s. Par le corollaire 1.1.54, on sait qu’il existe λ ∈√|k×| et un relèvement t :

Xps

//

(a1,...,an)

Tp

ep

B1Xp

(a1, λ)×Xp . . . ×XpB1Xp

(an, λ) //

t

22

BnXp .

Quitte à remplacer X par X×BU avec U ∈ Flt(p), on peut trouver b1, . . . , bn ∈ Γ(X,O) tels que ‖bj − aj‖∞ < λ pourtout 1 ≤ j ≤ n. Il est alors clair que B1

Xp(ai, λ) = B1

Xp(bi, λ). On applique maintenant le lemme 2.2.54 ci-dessous au

morphisme étale obtenu par changement de base de e suivant l’inclusion B1X(b1, λ)×X . . . ×XB1

X(bn, λ) ⊂ BnX . Quitteà remplacer X par X×BU avec U ∈ Flt(p), il existe donc un morphisme s′ faisant commuter

T

e

B1X(b1, λ)×X . . . ×XB1

X(bn, λ) //

s′22

BnX

et tel que s′p = t. Ceci termine la preuve du lemme. c.q.f.d

Lemme 2.2.54 — Soient B un k-affinoïde lisse, p ∈ P(B) un point générique tel que mB,p = 0. Soit e : E // Xun morphisme étale de B-affinoïdes lisses. On suppose que ep admet une section t. Il existe alors U ∈ Flt(p) et unesection s à e×BU telle que sp = t.

Demonstration Par le théorème 1.1.47, on peut trouver une présentation

E =Xt1, . . . , tn(f1, . . . , fn)

avec Jac(f1, . . . , fn) inversible sur E. Le morphisme t correspond à un morphisme de Γ(Xp,O)-algèbres affinoïdes

θ :Γ(Xp,O)t1, . . . , tn

(f1, . . . , fn)// Γ(Xp,O).

Il suffira de montrer que θ(ti) ∈ Γ(X×BU,O) ⊂ Γ(Xp,O) avec U ∈ Flt(p) suffisamment petit.Pour ε > 0, on choisit Uε ∈ Flt(p) et aεi ∈ Γ(X×BUε,O) avec |(aεi)Xp − θ(ti)|∞ ≤ ε (où ‖.‖∞ désigne la norme

infinie sur Xp). Par le lemme 2.2.55 ci-dessous, il existe W ∈ Flt(p) suffisamment fin et contenu dans Uε tel que|(aεi)|X×BW |∞ ≤ 1. Par ailleurs, quitte à raffiner ε et W on peut rendre les normes

|fi(aε1, . . . , aεn)|X×BW |∞ ∈ R>0

aussi petites que l’on veut. Par la première partie de la preuve du lemme 1.1.50, on sait alors que la suite récurrentede Newton appliquée à (aε1, . . . , a

εn) converge dans Γ(X×BW,O). Il est également facile de se convaincre que la limite

de cette suite dans Γ(Xp,O) n’est autre que (θ(t1), . . . , θ(tn)). Ceci termine la preuve du lemme. c.q.f.d

Le lemme qui suit, est l’unique endroit où l’hypothèse p générique est explicitement utilisée dans la preuve duthéorème 2.2.49. Bien entendu, cette hypothèse est essentielle pour la validité dudit théorème. En effet, sa preuverepose sur le lemme 2.2.53 qui dépend du lemme 2.2.54 qui à son tour dépend du lemme 2.2.55.

Lemme 2.2.55 — Soit B un k-affinoïde et p ∈ P(B) un point générique. (On ne fait aucune hypothèse sur mp.)Soient X une B-variété rigide lisse et quasi-compacte et f ∈ Γ(X,O). On suppose que |f|Xp |∞ ≤ 1. Alors, il existeW ∈ Flt(p) tel que |f|X×BW |∞ ≤ 1.

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140 Motifs des variétés rigides analytiques II

Demonstration L’hypothèse de lissité de la B-variété rigide X est probablement superflue. Toutefois, elle permettrade simplifier la démonstration. Elle sera utilisée pour traiter la cas où |f|Xp |∞ < 1. En effet, dans ce cas on aDX(f |1)p = ∅. Comme X est lisse (plat aurait suffit) sur B, l’image de DX(f |1) dans B est un ouvert quasi-compactU tel que p 6∈ P(U). Comme p est générique, on peut trouver W ∈ Flt(p) tel que W ∩U = ∅ (voir le corollaire 2.1.18).Mais alors, X×BW ∩ DX(f |1) = ∅. Ceci montre que f est de norme strictement plus petite que 1 en tout point deX×BW .

Revenons au cas général. Soit B un modèle formel essentiel de B et X un modèle formel essentiel de X. Par lethéorème de platification de Raynaud, on peut supposer que X est plat sur B. La question est locale en X et B. Onpeut donc supposer que X et B sont des k-schémas formels affines.

Rappelons que k(p) contient un anneau de valuation k(p) donné par k(p) =(ColimU/B,Uη∈Flt(p)Γ(U,O)

)/mp.

Considérons la k(p)-algèbreR =

(ColimU/B,Uη∈Flt(p)Γ((X×BU),O)

)/mp.

Étant donné que p est générique, le lemme 1.1.35 affirme que k(p) est l’anneau de valuation de la norme ‖.‖p. Il vientque l’anneau de valuation du corps k(p) est le complété formel k(p)//(π) = k(p). On déduit immédiatement queXp = Spf(R//(π)) est un modèle formel du k(p)-affinoïde Xp.

Rappelons que par hypothèse, |f|Xp |∞ = 1. On déduit du lemme 1.1.27 que f est entier sur Γ(Xp,O). Soit unerelation

fn + an−1fn−1 + · · ·+ a0 = 0

avec ai ∈ R//(π) = Γ(Xp,O). On munit la k(p)-algèbre affinoïde (R//π)[1/π] de la norme |.| déduite de celle adiquede R//π. Soit N ∈ N tel que |πNf i| < 1 pour 1 ≤ i ≤ n−1. On peut trouver bi ∈ R, ci ∈ R//(π) tel que ai = bi+πNci.Il vient que

|(fn + bn−1fn−1 + · · ·+ b0)|Xp | = |π

N ||(cn−1fn−1 + · · ·+ c0)Xp | < 1.

Par la discussion du début de la preuve, on peut trouver un B-schéma formel W tel que W = Wη est dans Flt(p), bise relèvent en des b′i ∈ Γ(X×BW,O) et la norme infinie de fn + b′n−1f

n−1 + · · ·+ b′0 sur W est strictement inférieureà 1. Il vient que fn + b′n−1f

n−1 + · · · + b′0 est entier sur Γ(X×BW,O) (par le lemme 1.1.27) et donc f est entier surΓ(X×BW,O).

Cela entraîne que f est de norme plus petite que 1 en tout point fermé x de X×BW . En effet, f(x) est dans k(x)puisqu’il est entier sur k(x) et que ce dernier est normal. Le lemme est démontré. c.q.f.d

Étant donné un B-affinoïde lisse, on notera SmAfnd[/B (resp. AfndCor[(B)) la sous-catégorie pleine de SmAfnd/B

(resp. AfndCor(B)) formée des B-affinoïdes X pour lesquels il existe des morphismes étales X // BmB . On définit

alors SmAfnd[/(B, p) (resp. AfndCor[(B, p)) par la colimite usuelle. On déduit du théorème 2.2.49 le corollairesuivant :

Corollaire 2.2.56 — Soient B un k-affinoïde lisse et p ∈ P(B) un point générique. On suppose qu’il existeC ⊂ B un sous-affinoïde localement fermé, contenant p, lisse sur k et tel que mC,p = 0. Le foncteur

π0φB,p : π0AfndCor[(B, p) // π0AfndCor[/k(p)

est une équivalence de catégories.

Demonstration Le théorème 2.2.49 montre que ce foncteur est pleinement fidèle. Montrons qu’il est essentiellementsurjectif. Soit Y un k(p)-affinoïde admettant un morphisme étale e : Y // Bn

k(p). Par le lemme 1.1.50 on peut

supposer que

Y = Spm

(k(p)t1, . . . , tn, tn+1, · · · tn+p

(f1, . . . , fp)

)avec f1, . . . , fn dans k(p)[t1, . . . , tn+p]. Pour 1 ≤ i ≤ n, on fixe un relèvement gi ∈ OB,p[t1, . . . , tn+p] de fi. SoitU ∈ Flt(p) un affinoïde sur lequel les gi sont définis. On pose alors X = Ut1, . . . , tn+p/(f1, . . . , fp). Quitte à rétrécirU , on peut supposer que X est lisse. On a clairement Y = Xp. Le corollaire est démontré. c.q.f.d

Le théorème suivant, mis à part la dernière assertion, est une conséquence immédiate du corollaire 2.2.56 :

Theoreme 2.2.57 — Soient B un k-affinoïde lisse et p ∈ P(B) un point générique. On suppose qu’il existeC ⊂ B un sous-affinoïde localement fermé, contenant p, lisse sur k et tel que mC,p = 0.

Soit F un préfaisceau avec transferts invariant par homotopie sur SmAfnd[/B. Il existe alors un préfaisceauavec transferts invariant par homotopie Fp sur SmAfnd[/k(p) et un isomorphisme naturel F(B,p) ' Fp φB,p (avec

φB,p : AfndCor[(B, p) // AfndCor[(k(p)) le foncteur de la proposition 2.2.48). De plus, le préfaisceau Fp est

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2.2 Correspondances finies et préfaisceaux avec transferts en géométrie rigide 141

caractérisé par la propriété universelle suivante. Pour tout préfaisceau avec transferts invariant par homotopie G surSmAfnd[/k(p) on a hom(Fp, G) = hom(F(B,p), G φB,p).

Demonstration Comme F(B,p) est invariant par homotopie, c’est un foncteur contravariant de π0AfndCor[(B, p)dans la catégorie des groupes abéliens. Par le corollaire 2.2.56, π0φB,p est une équivalence de catégorie. On définit alorsFp = F(B,p) (π0φB,p)

−1 avec (π0φB,p)−1 un quasi-inverse à π0φB,p. L’existence d’un isomorphisme F(B,p) ' Fp φB,p

naturel en F est clair. L’égalité hom(Fp, G) = hom(F(B,p), G φB,p) découle du fait que l’association (φB,p)∗ : G

G φB,p est une équivalence de catégories de PreStrB1

(SmAfnd[/(B, p)) dans PreStrB1

(SmAfnd[/k(p)). c.q.f.d

Definition 2.2.58 — Avec les notations et hypothèses du théorème 2.2.57, le préfaisceau Fp est appelée la fibrede F en p ∈M(B).

On termine avec un résultat technique qui jouera un rôle important dans l’étude cohomologique des préfaisceauxavec transferts invariants par homotopie menée dans la section 2.4.

Lemme 2.2.59 — Soient B un k-affinoïde lisse et p ∈ P(B) un point générique. On suppose qu’il existe C ⊂ B unsous-affinoïde localement fermé, contenant p, lisse sur k et tel que mC,p = 0. Soient F un préfaisceau avec transfertssur SmAfnd[/B et X un B-affinoïde lisse dans SmAfnd[/B. Pour tout i ∈ N, il existe un isomorphisme canonique

ColimU∈Flt(p)

Hira(X×BU,F ) ' Hi

ra(Xp, Fp).

Demonstration La ra-cohomologie des variétés quasi-compactes commute aux colimites filtrantes. On déduit quele morphisme évident

ColimU∈Flt(p)

Hira(X×BU,F ) // Colim

U∈Flt(p)Hi(X×BU,F(B,p))

est inversible. (Ci-dessus, on voit F(B,p) comme un préfaisceaux sur le petit site des ouverts affinoïdes de X×BU enposant F(B,p)(Y ) = F(B,p)(Y/B).) Il s’agit de construire un isomorphisme naturel

ColimU∈Flt(p)

Hira(X×BU,F(B,p)) ' Hi

ra(Xp, Fp).

Rappelons queφB,p : SmAfnd[/(B, p) // SmAfnd[/k(p)

est le foncteur qui à X/B associe Xp. On note (φB,p)∗ le foncteur image directe sur les préfaisceaux. Par le théorème2.2.57, on a F(B,P ) ' (φB,p)∗Fp. Il est donc plus général de montrer que le morphisme évident

Hira(X×BU, (φB,p)∗K) // Hi

ra(Xp,K)

est inversible pour tout t∅-faisceau de groupes abéliens K sur SmAfnd[/k(p). Rappelons que la topologie t∅ est lamoins fine telle que la famille vide est un recouvrement de la variété vide et qu’un t∅-faisceau K est simplement unpréfaisceau tel que K(∅) = 0.

Quitte à remplacer X par X×BU on peut supposer que U = B. Le problème dépend uniquement des petits sitesdes domaines rationnels de X et Xp. Notons donc

φ : Rat(X) // Rat(Xp)

le foncteur qui à un domaine rationnel Y ⊂ X associe Yp. Il est plus général de montrer que pour tout t∅-faisceau degroupes abéliens K sur Rat(Xp), on a un isomorphisme canonique

Hira(X,φ∗K) ' Hi

ra(Xp,K).

Soit K // I· une équivalence ra-locale avec I un complexe projectivement ra-fibrant. On peut supposer que Iest un t∅-faisceau quitte à le remplacer par son t∅-faisceau associé. On a Hi

ra(Xp,K) = Hi(I(Xp)). Étant donné que φdéfini un morphisme de sites

φ : (Rat(Xp), ra) // (Rat(X), ra) ,

le foncteur φ∗ est un foncteur de Quillen à droite relativement aux structures projectives ra-locales. Il vient que φ∗(I)est un complexe projectivement ra-fibrant de t∅-faisceaux. Pour terminer, il suffit de montrer que

φ∗(K) // φ∗(I)

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142 Motifs des variétés rigides analytiques II

est encore une équivalence ra-locale. Pour cela, il suffirait que φ∗ commute aux foncteurs de faisceautisation restreintsaux t∅-faisceaux, i.e., si E est un t∅-faisceau, le morphisme évident

(2.42) araφ∗(E) // φ∗ara(E)

est inversible. Soit Y ⊂ X un ouvert rationnel. Montrons que (2.42) induit un isomorphisme sur les sections au dessusde Y . Supposons d’abord que Yp = ∅. On a alors φ∗(E)(Y ) = E(∅) = 0 puisque E est t∅-faisceau. Il vient quearaφ∗(E)(Y ) = 0. De même, on a φ∗ara(E)(Y ) = ara(E)(∅) = 0. Le résultat est donc clair dans ce cas.

Supposons maintenant que Yp 6= ∅. On montrera que tout recouvrement admissible de Yp se raffine par la fibreen p d’un recouvrement admissible de Y . Comme Yp est non vide, tout recouvrement admissible se raffine par unrecouvrement standard R = (DYp(fi|f1, . . . , fn))1≤i≤n avec f1, . . . , fn engendrant Γ(Yp,O) en tant qu’idéal. On peutremplacer les fonctions fi par des fonctions gi avec les normes infinies |fi − gi|∞ suffisamment petites sans changer lerecouvrement R. Étant donné que l’image de

ColimU∈Flt(p)

Γ(Y ×BU,O) // Γ(Yp,O)

est dense, on peut supposer que les fi sont les images dans Γ(Yp,O) de fi ∈ Γ(Y ×BU,O) avec U ∈ Flt(p) un domainerationnel. Quitte à raffiner U , on peut même supposer que f1, . . . , fn engendrent Γ(Y ×BU,O). Soient V1, . . . , Vr desdomaines rationnels de B tels que p 6∈ P(Vj) et B = U ∪V1 ∪ · · · ∪Vr. Notons R′ le recouvrement de X par les ouverts

DY (fi|f1, . . . , fn) pour 1 ≤ i ≤ n et Y ×BVj pour 1 ≤ j ≤ r.

Il est clair que R′p raffine R. En effet, pour 1 ≤ j ≤ r, on a (Y ×BVj)p = ∅ et la flèche ∅ // Yp se factorise partoutes les flèches de R (et il y en a au moins une puisque Yp est non vide).

En utilisant la construction explicite du ra-faisceau associé à E, on obtient aisément un isomorphisme canoniquearaφ∗(E)(Y ) ' φ∗ara(E)(Y ). Les détails sont laissés aux lecteurs. c.q.f.d

2.3 Invariance par homotopie et groupe de Picard relatifOn fixe un corps k complet non-archimedian pour une valuation que l’on ne suppose pas non-triviale. Étant

données une k-variété rigide B et deux B-variétés rigides X et Y lisses sur k, nous avons défini dans la sectionprécédente le groupe CorB(X,Y ). On s’intéresse dans cette section au cas où B est un k-affinoïde lisse et Y une B-courbe affinoïde admettant une "bonne compactification". Comme en géométrie algébrique (voir [VSF00]), on verradans cette situation, que π0CorB(X,Y ) admet une description faisant intervenir des fibrés en droites munis d’unetrivialisation à l’infini.

2.3.1 Groupe de Picard relatif et correspondances finies à homotopie prèsSoit B un k-affinoïde. Dans la suite, l’expression B-schéma sera synonyme de Spec(Γ(B,O))-schéma. Nous aurons

besoin de dégager la propriété suivante.

Definition 2.3.1 — Soient B un k-affinoïde et X un B-schéma de type fini. Soit U ⊂ Xan un ouvert affinoïde.On dit que U est un ouvert presque-rationnel s’il existe un ouvert Zariski affine X0 ⊂ X tel que Xan

0 contient U etΓ(X0,O) // Γ(U,O) est d’image dense.

Résumons quelques propriétés faciles des domaines presque-rationnels dans le lemme suivant :

Lemme 2.3.2 — Soient B un k-affinoïde, X un B-schéma de type fini (séparé) et U, U ′ ⊂ Xan deux ouvertsaffinoïdes presque-rationnels. Alors U∩U ′ est également presque-rationnel. De même, si B′ // B est un morphismede k-affinoïdes, U×BB′ est un ouvert presque-rationnel de (X ×Spec(Γ(B,O)) Spec(Γ(B′,O)))an.

Demonstration Si X0, X′0 ⊂ X sont des ouverts Zariski vérifiant les propriétés requises pour U et U ′, alors X0∩X ′0

vérifie les propriétés requises pour U ∩ U ′. La seconde assertion est tout aussi facile. c.q.f.d

Étant donné un schéma noethérien S, on appelle S-courbe un S-schéma plat dont les fibres sont des schémaspartout de dimension 1. De même, étant donnée une k-variété rigide B, on appelle B-courbe rigide une B-variétérigide plate dont les fibres sont partout de dimension 1.

Definition 2.3.3 — Soient B un k-affinoïde lisse et X une B-courbe affinoïde lisse (sur B). Une immersionouverte j : X // Xan avec X un B-schéma projectif et réduit est une bonne compactification de X si l’imagede j est dense pour la topologie de Zariski (i.e., il n’existe pas de sous-schémas fermés stricts de X dont l’analytifié

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2.3 Invariance par homotopie et groupe de Picard relatif 143

contient l’image de j) et s’il existe un ouvert affinoïde presque-rationnel U de Xan tel que Xan = j(X) ∪ U . On diraaussi par abus de langage que X est une bonne compactification de X.

On pensera à l’ouvert U de la définition précédente comme étant un voisinage affinoïde de Xan − j(X) (munie desa structure de sous-variété rigide ouverte de Xan). On a le lemme suivant :

Lemme 2.3.4 — Soient B un k-affinoïde lisse, X une B-courbe lisse et X une bonne compactification de X.1- Soit b ∈ B un point fermé. Alors Xb est partout de dimension 1 et Ub ⊂ Xan

b est Zariski-dense.2- Supposons donné un morphisme de k-affinoïdes e : B′ // B avec B′ lisse sur k. Alors, le B′-schéma projectif

X ′ =(X ×Spec(Γ(B,O)) Spec(Γ(B′,O))

)red

est une bonne compactification de la B′-courbe lisse X ′ = X×BB′.

Demonstration La variété rigide Xanb est recouverte par deux ouverts affinoïdes Xb et Ub. Soit P une composante

irréductible de Xb. Comme X est dense dans Xan, le B-schéma X est génériquement une courbe. Par la semi-continuitéde la dimension des fibres, P est de dimension plus grande que 1. Il vient que P an ∩ Xb 6= ∅. En effet, dans le cascontraire on aura P an ⊂ Ub. C’est donc un k(b)-affinoïde. Ceci est impossible puisque P est projectif et de dimensionnon nulle. Comme P an ∩Xb est un ouvert affinoide non-vide de P an on voit que P est de dimension 1. Ceci montre lapremière partie du lemme.

La seconde partie du lemme est maintenant claire. En effet, X ′ ⊂ X ′an est Zariski dense, puisqu’il est Zariskidense sur les fibres. Soit U un voisinage affinoïde presque-rationnel de Xan −X. Alors U ′ = U×BB′ est un voisinageaffinoide de X ′an −X ′. Il est presque-rationnel par la deuxième assertion du lemme 2.3.2. c.q.f.d

Definition 2.3.5 — Soient B un k-affinoïde lisse, X une B-courbe affinoïde lisse et X une bonne compactificationde X. On définit un groupoïde PICX(X) de la manière suivante. Les objets de PICX(X) sont les triplets (L , U, t)

avec L un OX-module inversible, U ⊂ Xan un voisinage affinoïde presque-rationnel de Xan−X et t : OU∼// L|U

une trivialisation. Une flèche (L , U, t) → (L ′, U ′, t′) est un isomorphisme L∼→ L ′ rendant commutatif le carré de

modules cohérents sur U ∩ U ′

OU∩U ′t|U∩U′

// L|U∩U ′

OU∩U ′t′|U∩U′

// L ′|U∩U ′ .

La catégorie PICX(X) est naturellement une catégorie monoïdale symmétrique et unitaire pour le produit tensoriel

(2.43) (L , U, t)⊗ (L ′, U ′, t′) = (L ⊗L ′, U ∩ U ′, t|U∩U ′ ⊗ t′|U∩U ′)

et l’objet unité (OX , U, id) avec U n’importe quel voisinage affinoïde presque rationnel de Xan − X. On appelleraPICX(X) le groupoïde de Picard relatif (à X) de X.

Definition 2.3.6 — Gardons les hypothèses de la définition précédente. On appelle PicX(X) l’ensemble descomposantes connexes ou encore des classes d’isomorphismes du groupoïde PICX(X). Le produit tensoriel (2.43)définit une structure de groupe commutatif sur PicX(X). Ce groupe est appelé le groupe de Picard relatif (à X) de X.

Nous aurons besoin de dégager quelques propriétés de fonctorialité des groupes de Picard relatifs.Supposons donné un morphisme de k-affinoïdes e : B′ // B avec B′ lisse. La B′-courbe lisse X ′ = X×BB′

admet une bonne compactification donnée par X ′ =(X ×Spec(Γ(B,O)) Spec(Γ(B′,O))

)red

. On définit un foncteur e∗ :

PICX(X) // PICX′(X′) en associant à (L , U, t) le triplet (L ′ = L ⊗Γ(B,O) Γ(B′,O), U ′ = U×BB′, t′ = t|U ′). Ce

foncteur est monoïdal symmétrique. Il induit donc un morphisme de groupes abéliens e∗ : PicX(X) // PicX′(X′) .

On vérifie immédiatement que l’association B′ PicX′(X′) définit un foncteur contravariant (i.e., un préfaisceau) sur

la catégorie des B-affinoïdes lisses sur k.D’autre part, soit Y ⊂ Xan un ouvert affinoïde lisse sur B et contenant X. On note j : X ⊂ Y l’inclusion évidente.

Alors, Y est aussi une B-courbe affinoïde lisse et X est une bonne compactification de Y . Tout objet (L , U, t) dePICX(X) est aussi un objet de PICX(Y ). On déduit alors un morphisme évident j∗ : PicX(X) // PicX(Y ) .Remarquons enfin, que pour B′ comme ci-dessus, on a un diagramme commutatif

PicX(X)j∗//

e∗

PicX(Y )

e∗

PicX′(X′)

j′∗// PicX′(Y

′)

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144 Motifs des variétés rigides analytiques II

avec Y ′ = Y ×BB′ et j′ le changement de base de j suivant e.

Definition 2.3.7 — Soient B un k-affinoïde lisse, X une B-courbe affinoïde lisse et X une bonne compactificationde X. On définit le groupe PicB

1

X (X) comme étant le coégalisateur de la double flèche

PicXT(XT)s∗1//

s∗0

// PicX(X) ,

avec XT = X⊗Γ(B,O)Γ(B,O)T, s0 et s1 les morphismes induits par les sections nulle et unité de B1k = Spm(kT).

Le groupe PicB1

X (X) est le groupe de Picard relatif rendu B1-invariant.

Soit Y ⊂ Xan un ouvert affinoïde lisse sur B, contenant X et notons j : X ⊂ Y l’inclusion évidente. Il est clair que

le morphisme j∗ sur les groupes de Picard relatifs induit un morphisme j∗ : PicB1

X (X) // PicB1

X (Y ) sur les groupesde Picard relatifs rendus B1-invariants.

L’étape suivante consiste à établir un lien entre les groupes de Picard relatifs et les groupes de correspondancesfinies. On a la proposition suivante.

Proposition 2.3.8 — Soient B un k-affinoïde lisse, X une B-courbe affinoïde lisse et X une bonne compacti-fication de X. Il existe un unique morphisme de groupes abéliens

(2.44) c` : CorB(B,X) // PicX(X)

tel que pour Z ⊂ X = B×BX une correspondance finie élémentaire (i.e., un sous-affinoïde intègre, fermé, fini etsurjectif sur B), c`([Z]) est la classe de (I , U, t) avec :

1. U un voisinage affinoïde presque rationnel de Xan −X ne rencontrant pas Z,2. I ⊂ OX est un idéal inversible vérifiant I|X = I (Z) (avec I (Z) l’idéal de définition de Z) et I|U = OU ,3. t est l’inverse de l’identification I|U = OU (induite par l’inclusion de l’idéal I dans OX).

Demonstration L’unicité de c` est claire. En effet, si (I ′, U ′, t′) est un autre triplet vérifiant les conditions del’énoncé, alors I = I ′ puisque ces deux idéaux coïncident sur les ouverts affinoïdes X et U ∩ U ′ qui forment unrecouvrement admissible de Xan. De plus, les trivialisations t et t′ sont clairement égales sur U ∩ U ′.

Montrons l’existence d’un tel morphisme. Étant donné que CorB(B,X) est librement engendré par l’ensemble descorrespondances finies élémentaires Z ⊂ X, il suffit de montrer l’existence d’un triplet (I , U, t) vérifiant les conditionsde l’énoncé. Comme Z est finie sur B, c’est l’analytfié du B-schéma fini Zalg = Spec(Γ(Z,O)). On déduit que la

composée Z // Xj// Xan est l’analytification d’un unique morphisme de B-schémas Zalg // X (voir la

proposition 1.1.20) qui de plus, est une immersion fermée. On identifiera alors Zalg à un sous-schéma fermé de X.Notons I (Zalg) ⊂ OX l’idéal de définition de Zalg. Étant donné que Zalg est de codimension 1 et contenu dans le lieulisse de X, on déduit que I (Zalg) ⊂ OX est un idéal inversible. On a clairement, I (Zalg)|X = I (Z). Pour terminer,il reste à construire un voisinage affinoïde presque-rationnel U de Xan−X ne rencontrant pas Z. En effet, on prendraalors (I (Zalg), U, 1) avec 1 la section unité de Γ(U,I (Zalg)) = Γ(U,O). On construira l’ouvert U dans la propositionci-dessous. c.q.f.d

Proposition 2.3.9 — Soient B un k-affinoïde lisse, X une B-courbe affinoïde lisse et X une bonne compacti-fication de X. Soit Z ⊂ X = B×BX une correspondance finie élémentaire de B dans X. Il existe alors un voisinageaffinoïde presque-rationnel U de Xan −X tel que U ∩ Z = ∅.

Demonstration Soit V n’importe quel voisinage affinoïde presque-rationnel de Xan − X (il en existe puisque Xest une bonne compactification de X) et notons ZV = Z ∩ V . C’est un sous-affinoïde fermé défini par un idéalinversible I ⊂ Γ(V,O) = A (puisque ZV est contenu dans le lieu lisse de V ). Considérons la sous-A-algèbre de type finiF = ∪n∈NI−n ⊂ k(A). Il est clair que Spec(F ) est un ouvert affine de Spec(A). De plus, Spec(F )an contient Xan −Xet est disjoint de Z. Toutefois, Spec(F )an n’est pas un affinoïde en général.

Soient a1, . . . , an des générateurs de l’idéal fractionnaire I−1 ⊂ k(A). Pour α ∈ |k×|, on définit une norme sur Fen posant pour x ∈ F

|x| = min|mi1,...,in |αi1+···+in ; x =∑

i1,...,in

mi1...inai11 . . . ainn ,

où le minimum est pris sur toutes les représentations possibles de x comme polynôme en (a1, . . . , an). On note Fα lecomplété de F par rapport à cette norme. Il est clair que Fα est une k-algèbre affinoïde, naturellement présentée parkα−1t1, . . . , α

−1tn. Étant donné que Spec(F )an ∩ Z = ∅, on déduit que Spm(Fα) ∩ Z = ∅. Pour terminer, il reste àvérifier les deux points suivants :

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2.3 Invariance par homotopie et groupe de Picard relatif 145

1. Le k-affinoïde Spm(Fα) est un domaine presque-rationnel de Xan.2. Pour α suffisament grand, Spm(Fα) est un voisinage de Xan −X = V − (X ∩ V ).Pour voir que Spm(Fα) est un domaine presque-rationnel, on choisit Y ⊂ X un ouvert Zariski affine tel que V ⊂ Y an

et Γ(Y,O) dense dans Γ(V,O). Avec les notations, de la preuve de la proposition 2.3.8, l’idéal J = Γ(Y,I (Zalg)) estinversible et JΓ(V,O) = I. On pose X0 = Spec(∪∞n=0J

−n). C’est un ouvert affine de Y qui contient Spm(Fα). De plus,il est clair que ∪∞n=0J

−n est dense dans ∪∞n=0I−n qui lui est dense dans Fα.

Pour la deuxième propriété, i.e., que Spm(Fα) contient V −(V ∩X), on peut raisonner localement sur V . SoitW ⊂ Vun ouvert affinoïde sur lequel I−1 = (ai) pour un certain indice i. On pose alors f = a−1, le générateur de Γ(W,O)I.Il est clair que Spm(Fα) ∩W contient le domaine x ∈ W ; |f(x)| ≥ α−1. Ainsi, pour que Spm(Fα) ∩W contienneW − (W ∩X), il suffira que W − (W ∩X) ⊂ x ∈W ; |f(x)| ≥ α−1 ou encore que x ∈W ; |f(x)| ≤ α−1 ⊂W ∩X.Étant donné que W/(f) = x ∈W ; f(x) = 0 ⊂W ∩X, le résultat découle du lemme ci-dessous. c.q.f.d

Lemme 2.3.10 — Soient X = Spm(A) un k-affinoïde, a ∈ A et U ⊂ Spm(A) un domaine contenant Z =Spm(A/(a)). Il existe alors ε ∈ |k×| tel que D(ε|a) ⊂ U .

Demonstration La question est locale sur X dans le sens que si Di est un recouvrement admissible de X par desouverts affinoïdes et si D(εi|a) ∩Di ⊂ U ∩Di, alors ε = min(εi) convient. On peut écrire U comme une réunion finiede domaines rationnels de X

U =

n⋃i=1

D(f(i)0 |f

(i)1 , . . . , f (i)

m )

avec (f(i)0 , . . . , f

(i)m ) un système de générateurs de l’idéal A. On raisonnera par récurrence sur l’entier n. Le cas n = 0

(i.e., U = Z = ∅) est vide.Soit 0 < η < minx∈X(max0≤j≤m|f (1)

j (x)|) un élément de |k×| et considérons le recouvrement X = D(η|f (1)0 ) ∪

D(f(1)0 |η). On a clairement D(η|f (1)

0 ) ∩ D(f(1)0 |f

(1)1 , . . . , f

(1)m ) = ∅. Il vient que D(η|f (1)

0 ) ∩ U est une réunion de n− 1

domaines rationels. Par l’hypothèse de récurrence on se ramène à traiter le cas de D(f(1)0 |η). On peut donc supposer que

f(1)0 est inversible. Le même raisonnement permet de supposer que tous les f (i)

0 sont inversibles. Posons g(i)j = f

(i)j /f

(i)0 .

On a alors

U =

n⋃i=1

D(1|g(i)1 , . . . , g(i)

m ) =

n⋃i=1

m⋂j=1

D(1|g(i)j )

=⋂

α:[[1,n]]→[[1,m]]

(n⋃i=1

D(1|g(i)α(i))

).

Il suffit alors de traiter le cas de chacun des domaines Uα = ∪ni=1D(1|g(i)α(i)). En d’autres termes, on peut supposer que

U = ∪ni=1D(1|gi) avec gi ∈ A.En considérant le recouvrement X = D(1|gi)∩D(gi|1) et en remarquant que U ∩D(1, gi) = D(1, gi), on voit qu’on

peut remplacer X par D(gi|1). On peut donc supposer qu’en tout point (fermé) x de X et pour tout i ∈ [[1, n]], on a|gi(x)| ≥ 1. On pose alors hi = g−1

i ∈ A. L’ouvert U est alors la réunion ∪ni=1x ∈ X; |hi(x)| = 1. Étant donné queZ ⊂ U , on voit que les classes hi ∈ A/(a) des hi engendrent l’idéal A/a. On peut donc trouver une relation

n∑i=1

bihi = 1 + ac avec c, bi ∈ A.

Quitte à remplacer X par D(ε|a) avec ε < |c|−1∞ , on peut supposer que 1 + ac est inversible. Quitte à remplacer bi par

bi(1 + ac)−1, on peut supposer quen∑i=1

bihi = 1 avec bi ∈ A.

On peut alors considérer le recouvrement admissible D(hi|h1, . . . , hn) de X. Étant donné que D(hi|h1, . . . , hn) ∩U = x ∈ X; |hi(x)| = 1 on se ramène ainsi à supposer que n = 1. En d’autres termes, on peut supposer queU = x ∈ X; |h(x)| = 1 avec h ∈ A.

Dire que Z ⊂ U revient à dire que la classe h de h dans A/a admet un norme infinie égale à 1, i.e., que h estinversible dans (A/a) (relativement à la norme infinie sur Z). On peut supposer que a ∈ A (relativement à la normeinfinie sur X) quitte à remplacer X par D(1|a). Le morphisme évident A/(a) // (A/(a)) est entier (comme ildécoule facilement du lemme 1.1.27). En particulier, h−1 ∈ (A/(a)) satisfait à une équation polynomiale à coefficientsdans A/(a). Il existe donc un polynôme unitaire P ∈ A/(a)[T ] tel que P (h−1) = 0. On en déduit un polynômeunitaire P ∈ A[T ] tel que P (h−1) = al avec l ∈ A. Quitte à remplacer X par D(ε|a) avec ε < |l|−1

∞ , on peut supposerque |al|∞ ≤ 1, i.e., que P (h−1) ∈ A. Étant donné que A est normal dans A, on déduit que h−1 ∈ A. Dans ce cas,X = U et la conclusion du lemme est claire. c.q.f.d

On a la propriété suivante de naturalité du morphisme c` défini dans la proposition 2.3.8.

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146 Motifs des variétés rigides analytiques II

Lemme 2.3.11 — Soit e : B′ // B un morphisme de k-affinoïdes lisses sur k. On note X ′ = X×BB′ muniede sa bonne compactification X ′ =

(X ⊗Γ(B,O) Γ(B′,O)

)red

. Le diagramme

CorB(B,X)c`

//

−e

PicX(X)

CorB(B′, X) CorB′(B′, X ′)

c`// PicX′(X

′)

est commutatif.

Demonstration Soit Z ⊂ X = B×BX une correspondance finie élémentaire et montrons que l’image de [Z] par lesdeux composées possibles coïncident. Soit (I , U, t) comme dans l’énoncé de la proposition 2.3.8. Alors, l’image de [Z]par la composée

CorB(B,X)c`// PicX(X) // PicX′(X

′)

est la classe d’isomorphisme de (I ′, U ′, t′) avec I ′ = I ⊗OX OX′ , U ′ = U×BB′ et t′ la trivialisation évidente donnéepar l’inverse de l’égalité I ′|U ′ = OU ′ . Remarquons aussi que I ′ est naturellement un idéal inversible de OX′ . En effet,le morphisme évident

I ⊗OX OX′// OX′

est non nul sur toutes les composantes irréductibles de X ′. Il est donc injectif.L’image de [Z] par le morphisme CorB(B,X) // CorB(B′, X) est donnée par la formule de Serre. Si (Z ′α)α∈I

désigne la famille des composantes irréductible de Z ′ = Z×BB′ et ηα le point générique de Z ′α, on a

(2.45) [Z] e =∑α∈I

( ∞∑i=0

(−1)ilgOZ′,ηαToriOB (OB′ ,OZ)⊗OZ′ OZ′,ηα

)[Zi].

La suite exacte courte 0 // I|X // OX // OZ // 0 fournit une suite exacte longue

. . . // Tor1OB (OB′ ,OZ) // I ′|X′

// OX′ // OZ′ // 0 .

Étant donné que I|X et OX sont plats sur B, on a ToriOB (OB′ ,I|X) = ToriOB (OB′ ,OX) = 0 pour i > 0. On déduitque ToriOB (OB′ ,OZ) = 0 pour i > 0 (lorsque i = 1, on utilise l’inclusion I ′|X′ ⊂ OX′). La formule (2.45) se simplifiealors pour donner

(2.46) [Z] e =∑α∈I

(lgOZ′,ηα

OZ′,ηα

)[Zi].

Étant donné que Z ′ ∩ U ′ = ∅, on déduit que Z ′α ∩ U ′ = ∅. Il vient que l’image de [Z] par la composée

CorB(B,X) // CorB′(B′, X ′) // PicX′(X

′)

est donnée par la somme ∑α∈I

(lgOZ′,ηα

OZ′,ηα

)[(I ′α, U

′, t′α)]

avec I ′α ⊂ OX′ un idéal inversible, dont la restriction à X ′ est l’idéal de définition de Z ′α et qui vérifie (I ′α)|U ′ = OU ′ .La trivialisation t′α est alors l’inverse de cet égalité. Pour conclure, il suffit donc de montrer qu’on a l’égalité d’idéauxfractionnaires

I ′ =∏α∈I

(I ′α)µα avec µα = lgOZ′,ηαOZ′,ηα .

On peut vérifier cette égalité après restriction à X ′ puisque tous les idéaux ci-dessus sont à cosupport dans X ′. Cetteégalité n’est autre que le décomposition d’un idéal divisoriel en produit d’idéaux premiers de codimension 1 dansl’anneau normal Γ(X ′,O). Le lemme est démontré. c.q.f.d

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2.3 Invariance par homotopie et groupe de Picard relatif 147

Du lemme 2.3.11, on déduit un morphisme naturel c` : π0CorB(B,X) // PicB1

X (X) induit par le morphismede double-flèches

CorBT(BT, XT)s∗0

//

s∗1//

c`

CorB(B,X)

c`

PicXT(XT)s∗0

//

s∗1//PicX(X).

Le théorème suivant est le résultat principal de cette sous-section.

Theoreme 2.3.12 — Soit B un k-affinoïde lisse, X une B-courbe affinoïde lisse et X une bonne compactification

de X. L’homomorphisme c` : π0CorB(B,X)∼// PicB

1

X (X) est inversible.

Demonstration On procède en trois étapes.Étape 1 : Nous allons d’abord définir un morphisme PicX(X) // π0CorB(B,X) . Soient (L , U, t) un objet dePICX(X) et V un ouvert affine de X tel que U ⊂ V an et Γ(V,O) ⊂ Γ(U,O) est dense. Un tel ouvert existe puisque Uest un ouvert presque-rationnel de Xan.

Soit (g1, . . . , gn) ∈ Γ(V,L )n un système de générateurs du OV -module L|V et munissons Γ(U,L ) de la normerésiduelle ‖.‖ induite de la norme infinie sur Γ(U,O) via la présentation

(g1, . . . , gn) : Γ(U,O)⊕n // // Γ(U,L ) .

Par définition, on a

‖h‖ = inf

maxi=1,...,n|ai|∞; h =

n∑i=1

aigi

pour h ∈ Γ(U,L ).

Pour voir que ‖.‖ est une norme (et pas seulement une semi-norme), on prend h ∈ Γ(U,L ) − 0 et x ∈ U avech(x) 6= 0. On pose η = maxi=1,...,n|gi(x)/h(x)|. Étant donné que les gi engendrent Γ(U,L ), on a η > 0. Il est alorsclair que ‖h‖ ≥ η−1.

Le morphisme Γ(V,L ) // Γ(U,L ) est d’image dense (relativement à la norme ‖.‖). La trivialisation t, induitune section t ∈ Γ(U,L ). On pose m = maxi=1,...,n|gi/t|∞, où l’on considère gi/t comme un élément de Γ(U,O). Soits ∈ Γ(V,L ) tel que ‖t − s‖ < m−1. Alors s est inversible sur U . En effet, on peut écrire t − s =

∑ni=1 aigi avec

m|ai|∞ < 1. On a alors pour x ∈ U

∣∣∣st(x)∣∣∣ ≥ 1−

∣∣∣∣ t− st (x)

∣∣∣∣ ≥ 1−∣∣∣∣ t− st

∣∣∣∣∞

= 1−

∣∣∣∣∣n∑i=1

ai(gi/t)

∣∣∣∣∣∞

≥ 1−maxi=1,...,n(|ai|∞)m > 0.

Notons V0 ⊂ V le plus grand ouvert Zariski au-dessus duquel s est inversible. La discussion précédente montreque V an

0 contient U . On définit une correspondance finie Cycl(s) de la manière suivante. Soit Zi; i ∈ I l’ensembledes composantes irréductibles de X − V0. Les Zan

i ⊂ Xan sont contenus dans l’ouvert affinoïde X et sont intègres,finis et surjectifs sur B. On pose alors Cycl(s) =

∑i∈I ni[Z

ani ] ∈ CorB(B,X) avec ni l’ordre du pole de s au point

générique de Zi. Plus précisément, si (πZi = 0) est une équation locale de Zi, l’entier relatif ni est tel que πniZis est unisomorphisme au voisinage du point générique de Zi.

La classe de Cycl(s) dans π0CorB(B,X) ne dépend pas du choix de l’approximation s. En effet, soit s′ ∈ Γ(V,L )

avec |s′ − t| < m. Considérons alors la section Ts′ + (1 − T )s ∈ Γ(V T,L ). On a encore∣∣∣∣Ts′ + (1− T )s

t(x)

∣∣∣∣ > 0

pour tout x ∈ U . On peut donc considérer Cycl(Ts′ − (T − 1)s) ∈ CorBT(BT, BT) qui fournit clairement uneB1-homotopie de Cycl(s) à Cycl(s′). On déduit de même que Cycl(s) ∈ π0(B,X) ne dépend pas du choix du systèmede générateurs (g1, . . . , gn) puisqu’un autre système induira une norme équivalente sur Γ(U,L ).

On a donc associé à un objet (L , U, t) de PICX(X) une classe canonique dans π0CorB(B,X) que l’on noteraCycl(L , U, t). Cette classe ne dépend que de la classe d’isomorphisme de l’objet (L , U, t). On a de plus la relation

(2.47) Cycl((L , U, t)⊗ (L ′, U ′, t′)) = Cycl((L ⊗L ′, U ∩ U ′, tU∩U ′ .t′U∩U ′) = Cycl(L , U, t) + Cycl(L ′, U ′, t′).

En effet, on peut supposer que U = U ′. Gardons les notations de la construction de Cycl(L , U, t) = Cycl(s) etchoisissons un système de générateurs (g′1, . . . , g

′n′) ∈ Γ(V,L ′)n

′(resp. (g′′1 , . . . , g

′′n′′) ∈ Γ(V,L ⊗L ′)n

′′). Notons ‖.‖′

(resp. ‖.‖′′) la norme résiduelle sur Γ(U,L ′) (resp. Γ(U,L ⊗L ′)) déduite du système (g′i′)1≤i′≤n′ (resp. (g′′i′′)1≤i′′≤n′′).

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148 Motifs des variétés rigides analytiques II

Posons m′ = maxi′=1,...,n′ |g′i/t|∞ et m′′ = max1≤i′′≤n′′ |g′′i /tt′|∞. Soit aussi M ≥ max(1, ‖t‖, ‖t′‖′). On choisit dessection s et s′ dans Γ(V,L ) et Γ(V,L ′) telles que max(‖t− s‖, ‖t′ − s′′) < M−1min(m,m′,m′′). Alors

‖t⊗ t′ − s⊗ s′‖′′ = ‖(t− s)⊗ t′ + s⊗ (t′ − s′)‖′′ ≤ max(‖t− s‖.‖t′‖′, ‖s‖.‖t′ − s′‖′) ≤ m′′.

On peut donc approximer t ⊗ t′ par s ⊗ s′. Mais on a clairement la relation Cycl(s ⊗ s′) = Cycl(s) + Cycl(s′). D’oùl’égalité (2.47). Ceci montre que Cycl induit un homomorphisme de groupes abéliens

(2.48) Cycl : PicX(X) // π0CorB(B,X).

Étape 2 : Le morphsime (2.48) est un morphisme de préfaisceaux sur les B-affinoïdes lisses sur k. Plus précisément, siB′ // B est un morphisme de k-affinoïdes avec B′ lisse sur k, on a un diagramme commutatif

PicX(X) //

π0CorB(B,X)

PicX′(X′) // π0CorB′(B

′, X ′) π0CorB(B′, X ′)

(où l’on a utilisé les notations du lemme 2.3.11). En effet, soit (L , U, t) un objet de PICX(X) et V ⊂ X un ouvertZariski tel que U ⊂ V an et Γ(V,O) ⊂ Γ(U,O) dense. On a Cycl(L , U, t) = Cycl(s) avec s ∈ Γ(V,L ) dans un voisinagesuffisament petit de t ∈ Γ(U,L ) (relativement à la norme résiduelle sur Γ(U,L ) induite par un système de générateurs(g1, . . . , gn) (voir l’étape précédente)). Notons L ′ = L ⊗B B′. Le morphisme Γ(U,L ) // Γ(U ′,L ′) est continusi l’on munit Γ(U ′,L ′) de la norme résiduelle induite par le système de générateurs (g1, . . . , gn). On peut supposerque Cycl(L ⊗B B′, U ′, t′) = Cycl(s′) où s′ est l’image de s dans Γ(V ′,L ′). Il s’agit dans ce cas de montrer l’égalitéCycl(s) e = Cycl(s′) entre cycles sur X ′.

On a vu au cours de la preuve du lemme 2.3.11 que la formule de Serre pour les pull-back des correspondances finiesde CorB(B,X) ne fait intervenir que les multiplicités géométriques à savoir les nombres lgZ′,ηαOZ′,ηα . Le résultatdécoule alors immédiatement de la définition de Cycl(s) et Cycl(s′).

Étape 3 : On déduit de l’étape précédente un morphisme PicB1

X (X) // π0CorB(B,X) . Pour conclure, on montreraque ce morphisme fournit un inverse à gauche et à droite du morphisme c` de l’énoncé.

Soit Z ⊂ B×BX = X une correspondance finie élémentaire. On sait que c`([Z]) est donnée par (I , U, t) commedans la proposition 2.3.8. Dans ce cas, t provient d’un voisinage Zariski de Xan −X. Par construction, Cycl(c`([Z]))est la classe de Cycl(t) = [Z].

Réciproquement, partons d’un objet (L , U, t) de PICX(X). Soit s ∈ Γ(V,L ) comme dans la première étapede la preuve. On a clairement c`(Cycl(s)) = (L , U, s). Il s’agit donc de montrer que (L , U, t) = (L , U, s) dans

PicB1

X (X). Considérons la section Ts + (1 − T )t ∈ Γ(UT,L ). En choisissant∣∣∣∣ t− st

∣∣∣∣∞

< 1, on a pour x ∈ U ,∣∣∣∣Ts(x) + (1− T )t(x)

t(x)

∣∣∣∣ > 0. On conclut que Ts+ (1− T )t est une trivialisation de L sur UT. On a construit ainsi

une B1-homotopie de (L , U, t) à (L , U, s). Le théorème est démontré. c.q.f.d

2.3.2 Construction de correspondances à homotopie prèsDans cette sous-section, on utilisera l’isomorphisme du théorème 2.3.12 pour construire des correspondances finies

à homotopie près entre ouverts affinoïdes de (P1k)an. On dispose de trois points canoniques de P1

k, à savoir 0 = [1 : 0],1 = [1, 1] et ∞ = [0 : 1]. On identifie A1

k = Spec(k[t]) avec P1k − ∞ de la manière usuelle.

Soient V ⊂ X ⊂ (P1k)an des ouverts affinoïdes. Lorsque V est contenu dans l’intérieur de X relativement à (P1

k)an

on écrira simplement V b X à la place de V b(P1k)an X (voir la proposition 2.1.13). On aura besoin du lemme suivant.

Lemme 2.3.13 — Tous les ouverts affinoïdes de (P1k)an sont presque-rationnels.

Demonstration Soit U un ouvert affinoïde (P1k)an. On montrera que U est presque-rationnel en deux étapes.

Étape 1 : Soit l/k une extension finie galoisienne de groupe de Galois G. Supposons que U⊗kl est presque-rationneldans (P1

l )an et déduisons le résultat pour U .

Soit V ′1 ⊂ (P1l )

an un ouvert Zariski affine tel que V ′an1 contient U⊗kl et Γ(V ′1 ,O) // Γ(U,O) est d’image dense.

On pose V ′ = ∩g∈G gV ′1 . Alors, U⊗kl ⊂ V ′an et Γ(V ′,O) // Γ(U,O) est d’image dense. Comme V ′ est invariant

par l’action de G, il existe un ouvert affine V ⊂ P1k tel que V ′ = V ⊗kl. On a clairement U ⊂ V an. Nous allons montrer

que Γ(V,O) // Γ(U,O) est d’image dense.

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2.3 Invariance par homotopie et groupe de Picard relatif 149

Soit f ∈ Γ(U,O). Comme l/k est une extension séparable, le morphisme trace

tr : Γ(U⊗kl,O) // Γ(U,O) ,

qui à a ∈ Γ(U⊗kl,O) associe∑g∈G a g−1, est surjectif. Soit a ∈ Γ(U⊗kl,O) tel que f =

∑g∈G a g−1. Soit ε > 0

et aε ∈ Γ(V ⊗kl,O) tel que |a− aε| ≤ ε. On pose fε =∑g∈G aε g−1 ∈ Γ(V,O). L’inégalité triangulaire ultramétrique

nous donne |f − fε| ≤ ε. Ceci montre que l’image de Γ(V,O) est dense dans Γ(U,O).Étape 2 : Par l’étape précédente, on peut remplacer U par U⊗kl. Comme U est un k-affinoïde, il existe des pointsfermés dans Pan

k −U à corps résiduels séparés sur k. Quitte à étendre les scalaires et composer par un automorphismede la droite projective, on peut supposer que U ⊂ (A1

k)an. De même, par le corollaire 2.1.3, on peut supposer que

U =∐α∈I

B1k(oα, Rα)−

∐β∈Jα

B1k(xβ , rβ)

avec |oα− oα′ | > max(Rα, Rα′) si α 6= α′, |oα− xβ | ≤ Rα si β ∈ Jα et |xβ − xβ′ | ≥ max(rβ , rβ′) si β 6= β′ dans Jα. Onnote J =

∐α Jα.

Notons o le centre de A1k et soit R ∈

√|k×| suffisamment grand de sorte que U est contenu dans B1

k(o,R). On pose

V = B1k(o,R)−

∐β∈J

B1k(xβ , rβ) W =

∐α∈I

B1k(oα, Rα).

On a clairement U = V ∩W . Il suffit donc de montrer que V et W sont presque-rationnels.On peut écrire V = ∩β∈JVβ avec Vβ = (B1

k(o,R)−B1k(xβ , rβ)). Mais chacun des Vβ est presque-rationnel. En effet,

il est contenu dans l’analytifié de l’ouvert Zariski A1k − xβ est la k-algèbre k[t, (t− xβ)−1] est dense dans Γ(Vβ ,O).

Pour montrer que W est presque rationnel, on vérifiera que k[t] est dense dans Γ(W,O). On raisonnera parrécurrence sur le cardinal de I. Lorsque I est un singleton, il n’y a rien à montrer. On suppose que I contient au moinsdeux éléments. On note m = minα 6=α′ |oα − oα′ | et on suppose que ce minimum est atteint par le couple (γ, γ′) ∈ I2.

On note W ′ = W ∪ B1k(oγ ,m). Alors W ′ est encore une union disjointe de boules de Tate. Toutefois, W ′ contient

strictement moins de composantes connexes que W . Par l’hypothèse de récurrence, k[t] ⊂ Γ(W ′,O) est dense. NotonsW ′0 = B1

k(oγ ,m) la composante connexe deW ′ contenant oγ etW ′1 = W ′−W ′0. Alors, Γ(W ′,O) = Γ(W ′0,O)×Γ(W ′1,O).Notons aussi Wi = W ′i ∩W pour i ∈ 0, 1. On a de même Γ(W,O) = Γ(W0,O) × Γ(W1,O). Comme W ′1 = W1, ilsuffirait de montrer que Γ(W ′0,O) ⊂ Γ(W0,O) est dense. Comme k[t] est dense dans Γ(W ′0,O), il suffirait de montrerque k[t] est dense dans Γ(W0,O).

Lorsque W0 est strictement incluse dans W , on peut utiliser l’hypothèse de récurrence pour conclure. LorsqueW = W0, on a forcément |oα − oα′ | = m pour tout α 6= α′. Il nous reste donc à traiter ce cas. Soit λ ∈

√|k×| tel que

λ < m et λ > Rα pour tout α ∈ I. On pose T =∐α∈I B1

k(oα, λ). Alors T est le domaine rationnel de B1k(o,R) défini

par l’inéquation ∣∣∣∣∣∏α∈I

(t− oα)

∣∣∣∣∣ ≤ λ.m|I|−1.

Son anneau des fonction est alorskR−1t, (λ.m|I|−1)−1z

z −∏α∈I(t− oα)

.

Il est donc clair que le sous-anneau k[t, z]/(z−∏α∈I(t− oα)) ' k[t] est dense dans Γ(T,O). Pour terminer, il suffit de

remarquer que Γ(T,O) est dense dans Γ(W,O) puisque le sous-anneau Γ(B1k(oα, λ),O) est dense dans Γ(B1

k(oα, Rα),O)pour tout α ∈ I. Le lemme est démontré. c.q.f.d

Proposition 2.3.14 — Soient X ⊂ (P1k)an − 0 un ouvert affinoïde, f ∈ Γ(X,O) et r ∈

√|k×|. On suppose

qu’il existe une rétraction q : DX(r|f) // (X/(f))red à l’inclusion (X/(f))red ⊂ DX(r|f) dont les fibres sont desboules de Tate. On suppose aussi que DX(r|f) b X. Alors, l’inclusion DX(f |r) ⊂ DX(f |r′) induit un isomorphismedans π0RigCor(k) pour tout r′ ∈

√|k×| avec r′ ≤ r.

Demonstration Il est facile de voir que le morphisme q est unique. De plus, si r′ ≤ r, la restriction de q à DX(r′|f)

fournit une rétraction q : DX(r′|f) // (X/(f))red dont les fibres sont encore des boules de Tate. Pour voir cela,

on peut supposer que k est algébriquement clos. Dans ce cas, DX(r′|f) est isomorphe à B1k×k(X/(f))red et on peut

supposer que l’immersion (X/(f))red ⊂ DX(r′|f) correspond à la section nulle. Dans ce cas, la restriction de f àDX(r|f) correspond modulo cet isomorphisme à une série de la forme tn.g(t) avec n une fonction de (X/(f))red àvaleurs dans N − 0 et g(t) ∈ Γ(B1

k×k(X/(f))red,O) = Γ((X/(f))red,O)t inversible. Mais alors la norme de g(t)

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150 Motifs des variétés rigides analytiques II

est constante et égale à r. On déduit alors un isomorphisme entre DX(r′|f) et B1(X/(f))red

(o, (r′/r)1/n). On divisera lapreuve de la proposition en trois parties.Partie 1 : D’après le lemme 2.3.13, tout ouvert affinoïde de (P1

k)an est presque-rationnel. Il vient que P1k est une bonne

compactification de X, DX(f |r) et DX(f |r′). En effet, on a

X⋃U = DX(f |r)

⋃(DX(r|f)

∐U)

= DX(f |r′)⋃(

DX(r′|f)∐

U)

= (P1k)an

avec U un voisinage affinoïde de (P1k)an − X disjoint de DX(r|f). Notons j : DX(f |r) // DX(f |r′) l’inclusion

évidente. Il s’agit de construire une correspondance finie

α ∈ Cor(DX(f |r′),DX(f |r)) = CorDX(f |r′)(DX(f |r′),DX(f |r′)×kDX(f |r))

qui soit un inverse à j à homotopie près. On dispose d’un diagramme commutatif

π0CorDX(f |r)(DX(f |r),DX(f |r)×kDX(f |r)

)∼c`

// PicB1

DX(f |r)×kP1k

(DX(f |r)×kDX(f |r)

)

π0CorDX(f |r′)(DX(f |r′),DX(f |r′)×kDX(f |r)

)∼c`//

j−

j∗

OO

PicB1

DX(f |r′)×kP1k

(DX(f |r′)×kDX(f |r)

)j∗

j∗

OO

π0CorDX(f |r′)(DX(f |r′),DX(f |r′)×kDX(f |r′)

)∼c`// PicB

1

DX(f |r′)×kP1k

(DX(f |r′)×kDX(f |r′)

).

Les homomorphismes c` sont inversibles par le théorème 2.3.12. Dire que α est un inverse à j à homotopie près revient àdire que j∗(α) = [idDX(f |r)] et αj = [idDX(f |r′)]. Il suffit alors de construire β ∈ PicB

1

DX(f |r′)×kP1k(DX(f |r′)×kDX(f |r))

tel que j∗(β) = c`[idDX(f |r)] et j∗(β) = c`[idDX(f |r′)].Partie 2 : Soit r′′ ∈ r, r′. Nous allons décrire un représentant de l’image de l’identité de DX(f |r′′) par c`. On note ∆la diagonale de P1

k ×k P1k et I ⊂ OP1

k×kP1kson idéal de définition. Par la proposition 2.3.9, il existe un ouvert affinoïde

V ⊂ X×kU presque-rationnel dans X×k(P1k)an, contenant X×k((P1

k)an − X) et disjoint de ∆an ∩ (X×k(P1k)an). On

note V (r′′) = DX(f |r′′)×XV = (DX(f |r′′)×k(P1k)an) ∩ V .

On note a ∈ Γ((X/(f))red,O) l’image de t dans (Γ(X,O)/(f))red. On note également t1 et t2 les coordon-nées canoniques sur le premier et second facteur de DX(f |r′′)×kDX(r′′|f). En utilisant la retraction de l’énoncé,on peut restreindre la section a à l’affinoïde DX(f |r′′)×kDX(r′′|f). On définit alors un domaine affinoïde E(r′′) ⊂DX(f |r′′)×kDX(r′′|f) par la condition |t1 − t2| = |t1 − a|.

Remarquons que E(r′′) ne rencontre pas la diagonale ∆. En effet, si (t1, t2) ∈ ∆ ∩ E(r′′), on a t1 = t2 = a. Maison a aussi que |f(t1)| ≥ r′′ ce qui est impossible vu que f(a) = 0. Vérifions aussi que E(r′′) contient DX(f |r′′)×k(X−DX(f |r′′)). Pour cela, on peut supposer que k est algébriquement clos. Posons u(x) = maxt∈DX(r′′|f)x |t − a(x)| pourx ∈ (X/(f))red(k) et DX(r′′|f)x la fibre de la rétraction q : DX(r′′|f) // (X/(f))red au point x. On peut alorsidentifier DX(r′′|f) avec ∪x∈X/(f)B1

k(x, u(x)) et t, |f(t)| < r′′ à ∪x∈X/(f)B1k(x, u(x)). Remarquons aussi qu’on a

|x − y| > u(x) pour tout x, y ∈ X/(f) distincts. Ainsi, les conditions |f(t1)| ≥ r′′ et |f(t2)| < r′′ impliquent que|t1 − x| ≥ u(x) > |t2 − x| et donc |t1 − t2| = |t1 − x|.

On déduit de là que V (r′′)∐E(r′′) est un voisinage presque-rationnel de DX(f |r′′)×k((P1

k)an − DX(f |r′′)) nerencontrant pas ∆. Ainsi, c`[idDX(f |r′′)] est représenté par le triplet

(2.49)(I|DX(f |r′′)×kP1

k, V (r′′)

∐E(r′′), 1

)avec 1 ∈ Γ(V (r′′)

∐E(r′′),I ) = Γ(V (r′′)

∐E(r′′),O) la section unité.

Partie 3 : Nous allons déformer à homotopie près le représentant (2.49) de c`[idDX(f |r′′)]. On considère pour cela letriplet

(2.50)(I|B1

k×kDX(f |r′′)×kP1k, (B1

k×kV (r′′))∐

E′(r′′), 1∐

s)

avec E′(r′′) ⊂ B1k×kE(r′′) le domaine affinoïde défini |t1 − a− t0(t2 − a)| = |t1 − a| avec t0 la coordonnée de B1

k. Onprendra pour s la section

s =t1 − t2

t1 − a− t0(t2 − a).

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2.3 Invariance par homotopie et groupe de Picard relatif 151

La section s est bien définie sur E′(r′′) puisque |t1 − a− t0(t2 − 1)| = |t1 − a| ≥ r′′. Il est également clair que s est ungénérateur de l’idéal I au dessus de E′(r′′). Vérifions que E′(r′′) est un voisinage affinoïde de B1×kDX(f |r′′)×k(X−DX(f |r′′)). On peut pour cela supposer que k est algébriquement clos et on raisonne comme dans la partie précédente.Les conditions |f(t1)| ≥ r′′ et |f(t2)| < r′′ impliquent que |t1 − x| > |t2 − x|. Il vient que |t1 − t2| = |t1 − x| =|t1 − x− t0(t2 − x)|. D’où le résultat.

En spécialisant en t0 = 0 et t0 = 1, on voit que (2.50) fournit une homotopie entre (2.49) et

(2.51)(I|DX(f |r′′)×kP1

k, V (r′′)

∐E(r′′), 1

∐g)

avec g =t1 − t2t1 − a

∈ Γ(E(r′′),I ). On pose maintenant β la classe du triplet

(I|DX(f |r′)×kP1

k, V (r′)

∐F, 1

∐g)

avec F = DX(f |r′)×kDX(r|f). Il s’agit bien d’un objet de PICDX(f |r′)×kP1k(DX(f |r′)×kDX(f |r)). En effet, g est un

générateur de I|F . On a en fin de compte les égalités suivantes

j∗(β) = j∗(I|DX(f |r′)×kP1

k, V (r′)

∐F, 1

∐g)

=(I|DX(f |r)×kP1

k, V (r)

∐E(r), 1

∐g)

= c`[idDX(f |r)]

j∗(β) = j∗

(I|DX(f |r′)×kP1

k, V (r′)

∐F, 1

∐g)

=(I|DX(f |r′)×kP1

k, V (r′)

∐E(r′), 1

∐g)

= c`[idDX(f |r′)]

dans les groupes de Picard relatifs rendus B1-invariants. La proposition est démontrée. c.q.f.d

Definition 2.3.15 — Soient X0 ⊂ X ⊂ (P1k)an des ouverts affinoïdes. On dit que l’ouvert affinoïde X0 est large

dans X, et on écrit X0 @ X, s’il existe un ouvert affinoïde V b X tel que X = X0 ∪ V .

On continue avec la proposition suivante :

Proposition 2.3.16 — Soient X ⊂ (P1k)an un ouvert affinoïde et X0 @ X un ouvert affinoïde large dans X.

On suppose qu’il existe un 0-cycle dans P1k de degré 1 et à support disjoint de X. Alors, l’inclusion X0 ⊂ X admet

une section dans π0RigCor(k)

X // X0 _

X.

Plus précisément, soit V b X tel que X = X0 ∪ V et notons I (∆) l’idéal de définition du graphe ∆ ⊂ X×k(P1k)an de

l’inclusion X ⊂ (P1k)an. Alors, une trivialisation de I (∆) au dessus de X×kV détermine une telle section.

Demonstration Notons j l’inclusion de X0 dans X. On dispose d’un diagramme commutatif de groupes abéliens

π0Cor(X,X0)

j−

π0CorX(X,X×kX0) ∼c`//

j−

PicB1

X×k(P1k)an(X×kX0)

j∗

π0Cor(X,X) π0CorX(X,X×kX) ∼c`// PicB

1

X×k(P1k)an(X×kX).

Il s’agit de construire une correspondance finie α ∈ π0CorX(X,X×kX0) telle que j α = [idX ]. Il suffit pour cela deconstruire β ∈ PicB

1

X×k(P1k)an(X×kX0) tel que j∗(β) = c`[idX ].

Soit U ⊂ (P1k)an un ouvert affinoïde tel que (P1

k)an = X ∪U et V ∩U = ∅. Soit U ′ ⊂ X×kU un voisinage affinoïdede (X×(P1

k)an) − (X×kX) ne rencontrant pas la diagonale ∆ ⊂ X×kX. Alors c`[idX ] est représentée par le triplet(I (∆), U ′, 1). Étant donné que U ∩ V = ∅, on déduit que U ′ ∩ (X×kV ) = ∅. Si t : OX×kV

∼// I (∆)|X×kV est

une trivialisation, on obtient un objet (I (∆), X×kV∐U ′, t

∐1) de PICX×k(P1

k)an(X×kX0). La classe β de cet objetconviendra clairement. Ainsi, pour conclure il reste à vérifier l’existence de tels trivialisations. Il suffit pour cela de voirque I (∆)|X×kX est un OX×kX -module libre (de rang 1). Ceci est assuré par la condition que P1

k admet un 0-cycle dedegré 1 et à support disjoint de X. c.q.f.d

Le théorème suivant est l’analogue rigide de [MVW06, Lemma 22.4] :

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152 Motifs des variétés rigides analytiques II

Theoreme 2.3.17 — Soit X ⊂ (P1k)an un ouvert affinoïde tel que P1

k possède un 0-cycle de degré 1 et à supportdisjoint de X. Soient X0, Y ⊂ X des ouverts affinoïdes tels que X = X0 ∪ Y . On pose Y0 = X0 ∩ Y . On suppose queX0 @ X et Y0 @ Y . Alors le complexe de Mayer-Vietoris

(2.52) Y0// X0 ⊕ Y // X

est contractile dans π0RigCor(k).

Demonstration La preuve consiste à construire une homotopie (simpliciale) explicite entre l’identité et le morphismenul. Cette homotopie aura la forme

Y0

(−i1i2

)// X0 ⊕ Y

(j1 j2)//

(p b)

X

(a0

)

Y0 (−i1i2

) // X0 ⊕ Y(j1 j2)

// X

avec i1, i2, j1 et j2 les inclusions évidentes et a, b et p des correspondances finies à homotopie près qui seront définiesci-dessous. Les relations à vérifier sont (en notations matricielles) les suivantes :(

j1 j2)( a

0

)= 1 ,

(a0

)(j1 j2

)+

(−i1i2

)(p b

)=

(1 00 1

)et

(p b

)( −i1i2

)= 1.

Elles s’écrivent respectivement

j1 a = 1 ,

(a j1 − i1 p a j2 − i1 b

i2 p i2 b

)=

(1 00 1

)et − p i1 + b i2 = 1.

On prendra pour a la section construite dans la proposition 2.3.16. Rappelons la construction de a. Soient V b Xun ouvert affinoïde tel que X = X0 ∪ V , U ⊂ (P1

k)an un voisinage affinoïde de (P1k)an − X tel que U ∩ V = ∅

et U ′ ⊂ X×kU un voisinage affinoïde de (X×k(P1k)an) − (X×kX) disjoint de la diagonale ∆ ⊂ X×kX. Soit enfin

t : OX×kV∼// I (∆)|X×kV une trivialisation locale de l’idéal du graphe de l’immersion de X dans (P1

k)an. On pose

alorsa = c`−1(I (∆), X×kV

∐U ′, t

∐1).

Remarquons que Y −Y0 = X−X0 ⊂ V . Par hypothèse, on a Y0 @ Y . Ainsi, quitte à remplacer V par un voisinageaffinoïde de Y − Y0 contenu dans l’intérieur de Y , on peut supposer que V b Y0. Fixons W ⊂ (P1

k)an un ouvertaffinoïde tel que (P1

k)an = Y ∩W et V ∩W = ∅. Soit W ′ ⊂ Y ×kW un voisinage affinoïde de (Y ×k(P1k)an)− (Y ×kY )

ne rencontrant pas ∆. On pose alors

b = c`−1(I (∆)|Y ×k(P1k)an , Y ×kV

∐W ′, t|Y ×kV

∐1).

Pour ces choix de a et b, le carré

Y

j2

b// Y0

i1

Xa// X0

commute. En effet, les deux composées possibles correspondent modulo la bijection c` à la classe d’isomorphisme dutriplet (I (∆)|Y ×k(P1

k)an , Y ×kV∐Y ×XU ′, t|Y ×kV

∐1).

On a donc les relations j1 a = 1, i2 b = 1 et a j2 − i1 b = 0. Il nous reste à construire une correspondancefinie p telle que

i2 p = 0 , i1 p = a j1 − 1 et p i1 = b i2 − 1.

Les deux dernières relations se traduisent par la commutation du diagramme suivant

(2.53) Y0bi2−1

//

i1

Y0

i1

X0 aj1−1//

p

33

X0.

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2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergent et B1-invariant 153

Pour construire un tel p, on calculera d’abord l’image des correspondances a j1−1 et b i2−1 dans les groupes dePicard relatifs. On a c`(a j1) = (I (∆)|X0×k(P1

k)an , X0×kV∐X0×XU ′, t|X0×kV

∐1). Soit V ′ ⊂ X0×kV un voisinage

affinoïde de (X0×kX)− (X0×kX0) évitant I (∆). Alors I (∆) admet une trivialisation canonique au dessus de V ′ eton peut voir t|V ′ comme une fonction inversible sur V ′. On obtient

c`(a j1 − 1) = (O, V ′∐

X0×XU ′, t|V ′∐

1) = (O, V ′∐

X0×kW, t|V ′∐

1).

Un calcul similaire montre que

c`(b i2 − 1) = (O, Y0×X0V ′∐

Y0×YW ′, t|Y0×X0V ′

∐1) = (O, Y0×X0

V ′∐

Y0×kW, t|Y0×X0V ′

∐1).

On prendra alors pour p la correspondance finie c`−1(O, V ′∐X0×kW, t|V ′

∐1). La commutation du diagramme (2.53)

est alors claire, ainsi que la relation i2 p = 0. c.q.f.d

2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergentet B1-invariant

Dans cette section on montre le théorème principal de ce chapitre, i.e., l’invariance par homotopie des préfaisceauxde cohomologie d’un préfaisceau avec transferts faiblement surconvergent et invariant par homotopie. Malheureuse-ment, lorsque le corps résiduel de k est de caractéristique positive, on aura à supposer que ce préfaisceaux est à valeursdans les Q-espaces vectoriels. Nous ignorons si cette hypothèse est nécessaire pour la validité du théorème. Rappelonsla notion de faible surconvergence (qui garde son sens pour un préfaisceau sans transferts) :

Definition 2.4.1 — Soient B une k-variété rigide lisse et V ⊂ SmAfnd/B une sous-catégorie pleine stablepar coproduits finis et par passage aux ouverts affinoïdes. Soit F un préfaisceau avec transferts sur V . On dit que Fest faiblement surconvergent s’il vérifie la propriété suivante. Pour X un B-affinoïde lisse dans V et f0, f1, . . . , fnengendrant Γ(X,O) comme idéal, le morphisme évident

(2.54) Colimλ∈√|k×|, λ>1

F (DX(λf0|f1, . . . , fn)) // F (DX(f0|f1, . . . , fn))

est inversible.

En d’autre termes, un préfaisceau faiblement surconvergent sur V est simplement un préfaisceau dont la restrictionau petit site Ouvaf(X) des ouverts affinoïdes de X est un préfaisceau faiblement surconvergent pour tout X ∈ Ob(V )(voir la définition 2.1.22). Dans toute cette section, k désigne un corps complet pour une valuation non-archimédiennesupposée non-triviale.

2.4.1 Étude de la restriction au petit site de la boule de TateDans cette sous-section, on fixe une sous-catégorie pleine V ⊂ SmAfnd/k stable par produits et coproduits directs

finis et par passage aux ouverts affinoïdes. On suppose aussi que V contient la boule unité de Tate ainsi que les spectresdes extensions finies et séparables de k. Rappelons que Cor(V ) désigne la sous-catégorie pleine de RigCor(k) telleque Ob(Cor(V )) = Ob(V ). Le lecteur ne perdra rien à supposer V égale à SmAfnd/k ou SmAfnd[/k. Le but de cettesous-section est d’établir le résultat suivant :

Theoreme 2.4.2 — Soit F un préfaisceau avec transferts, faiblement surconvergent et invariant par homotopiesur V . On suppose que l’une des deux hypothèses suivantes est satisfaite :(A) Le corps résiduel de k est de caractéristique nulle.(B) F est un préfaisceau de Q-espaces vectoriels.Alors, la restriction de F au petit site des ouverts affinoïdes de (A1

k)an est un faisceau qui de plus est acyclique. End’autres termes, pour X un ouvert affinoïde de (A1

k)an, on a H0ra(X,F ) = F (X) et Hi

ra(X,F ) = 0 pour i > 0.

La preuve de ce théorème occupera la présente sous-section. La condition (B) sera utilisée via le lemme ci-dessousainsi que son corollaire.

Lemme 2.4.3 — Soit F un préfaisceau avec transferts sur V à valeurs dans la catégorie des Q-espaces vectoriels.Soit l/k une extension finie galoisienne de groupe de Galois G. Pour tout X ∈ Ob(V ), le morphisme évident

(2.55) F (X) // F (X⊗kl)G

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154 Motifs des variétés rigides analytiques II

est inversible.

Demonstration Notons p : X×kl // X et r la transposée du graphe de p vue comme une correspondance finieélémentaire. On a alors p r = [l : k]id et r p =

∑g∈G g. Notons a la restriction de F (r) à F (X⊗kl)G. Alors

a

[l : k]: F (X⊗kl)G // F (X)

est un inverse à droite et à gauche de (2.55). c.q.f.d

Le foncteur (−)G étant exact sur la catégorie de Q[G]-modules, on obtient immédiatement :

Corollaire 2.4.4 — Soit F un préfaisceau avec transferts sur V à valeurs dans la catégorie des Q-espacesvectoriels. Soient U et V des ouverts affinoïdes de X tels que X = U ∪ V . On suppose qu’il existe une extensiongaloisienne l/k telle que F est acyclique pour le recouvrement (U⊗kl, V ⊗kl) de X⊗kl. Alors F est acyclique pour lerecouvrement (U, V ) de X.

Soient X ⊂ (A1k)an un ouvert affinoïde et X = U ∪ V un recouvrement admissible de X. Pour un préfaisceau avec

transferts F sur V , on note MVF (U, V ) le complexe de Mayer-Vietoris

0 // F (U ∪ V ) // F (U)⊕ F (V ) // F (U ∩ V ) // 0 .

Par le théorème 2.1.11, on est ramené à montrer que les hypothèses du théorème 2.4.2 entrainent que MVF (U, V ) estacyclique pour (U, V ) un recouvrement du type I, II ou III d’un ouvert affinoïde connexe X ⊂ (A1

k)an. Si k′/k désignele corps des constantes de X, on peut voir X comme un ouvert affinoïde de (A1

k′). Quitte à remplacer k par k′ et Fpar sa restriction aux k′-affinoïdes qui sont dans V , on peut supposer que X est géométriquement connexe (i.e., resteconnexe après tout changement de base suivant une extension finie séparable de k).

On utilisera le lemme ci-dessous pour traiter le cas des recouvrements du premier type.

Lemme 2.4.5 — On reprend les hypothèses du théorème 2.4.2. Soient X ⊂ (A1k)an un ouvert affinoïde géométri-

quement connexe et l/k une extension galoisienne de groupe de Galois G telle que

X⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I

B1l (xi, ri)

avec ri ≤ |o−xi| ≤ R et |xi−xj | ≥ max(ri, rj) pour i 6= j. On fixe i0 ∈ I et on note d = mini 6=i0 |xi−xi0 | et I0 = G.i0.Soit D ⊂ (A1

k)an l’ouvert affinoïde tel que

D⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I0

B1l (xi, d).

Alors, le morphisme F (X) // F (X ∩D) est inversible.

Demonstration Lorsque ri0 = d, il n’y a rien à montrer. On supposera dans la suite que ri0 < d. Pour λ ∈√|k×|

avec ri0 ≤ λ < d, on note D(λ) l’ouvert affinoïde tel que

D(λ)⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I0

B1l (xi, λ).

On a X ⊂ D(ri0) et D bD(ri0 ) D(λ) lorsque ri0 ≤ λ < d. Comme F est faiblement surconvergent, il suffira de montrerque F (X) = F (X ∩D(ri0)) // F (X ∩D(λ)) est inversible.

Soit Y ⊂ (A1k)an l’ouvert affinoïde tel que

Y ⊗kl = (X⊗kl)⋃(⋃

i∈I0

B1l (xi, d)

)= B1

l (o,R)−∐

i∈I−I0

B1l (xi, ri)

.

Notons f(t) =∏i∈I0(t− xi) et ξ =

(∏i 6=i′ |xi − xi′ |

)1/|I0|. Alors,

(X ∩D(λ))⊗kl = DY ⊗kl(f |λξ)

pour ri0 ≤ λ < d.

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2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergent et B1-invariant 155

Supposons d’abord que k est d’égale caractéristique nulle. Par la proposition 2.1.4, on peut supposer que Glaisse invariant l’ensemble xi; i ∈ I. Il vient que f ∈ Γ(Y,O) et on a X ∩ D(λ) = DY (f |λξ). Remarquons queDY (λξ|f)⊗kl =

∐i∈I0 Bl(xi, λ). On dispose donc d’une rétraction q : DY (λξ|f) // Y/(f) ayant pour fibres des

boules de Tate. D’autre part, pour ri0 ≤ λ < λ′ < d, on a X ∩ D(λ) b X ∩ D(λ′). Il vient que DY (f |λξ) b Y . Onpeut donc appliquer la proposition 2.3.14 pour conclure que DY (f |λξ) ⊂ DY (f |ri0ξ) induit un isomorphisme dansπ0Cor(V ).

Suppsons maintenant que F est un préfaisceau de Q-espaces vectoriels. Par le lemme 2.4.3, il suffirait de montrerque le morphisme

F (DY ⊗kl(f |ri0ξ))// F (DY ⊗kl(f |λξ))

est inversible. On dispose clairement d’une rétraction DY ⊗kl(λξ|f) // (Y ⊗kl)/(f) à fibres des boules de Tate. De

plus, DY ⊗kl(λξ|f) b Y . La proposition 2.3.14 permet encore une fois de conclure. c.q.f.d

Proposition 2.4.6 — Reprenons les hypothèses du théorème 2.4.2. Alors, F est acyclique pour les recouvrementsdu premier type.

Demonstration Soit X un ouvert affinoïde de (A1k)an qu’on supposera géométriquement connexe. Soit l/k une

extension galoisienne de groupe de Galois G telle que

X⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I

B1l (xi, ri)

avec ri ≤ |o− xi| ≤ R et |xi − xj | ≥ max(ri, rj) pour i 6= j. Soit i0 ∈ I et notons d et I0 comme dans le lemme 2.4.5.Soient D et D′ les ouverts affinoïdes de (A1

k)an tels que

D⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I0

B1l (xi, d) et D′⊗kl =

⋃i∈I0

B1l (xi, d).

Le complexe de Mayer-Vietoris MVF (X ∩D,X ∩D′) est le cône du morphisme de complexes

[0 // F (X) //

F (X ∩D)

// 0]

[0 // F (X ∩D′) // F (X ∩D ∩D′) // 0].

Par le lemme 2.4.5, F (X) // F (X ∩D) est inversible. Il suffit donc que F (X ∩D′) // F (X ∩D ∩D′) soitinversible.

On pose Y = X ∩D′. On a

Y ⊗kl =∐δ∈I0

(B1l (xδ, d)−

∐i∈δ

B1l (xi, ri)

)et (Y ∩D)⊗kl =

∐δ∈I0

(B1l (xδ, d)−

∐i∈δ

B1l (xi, d)

).

Ci-dessus, I0 désigne le quotient de I0 par la relation d’équivalence i ∼ j ⇔ |xi − xj | ≤ d et xδ = xi pour un choix dei ∈ δ. Fixons δ0 ∈ I0 et notons k′ = lStabG(δ0). Alors, k′ s’identifie canoniquement au corps des constantes de Y . On aalors

Y ⊗k′ l = B1l (xδ0 , d)−

∐i∈δ0

B1l (xi, ri)

et (Y ∩D)⊗k′ l = B1l (xδ0 , d)−

∐i∈δ0

B1l (xi, d).

Le résultat recherché découle encore une fois du lemme 2.4.5. c.q.f.d

La proposition suivante est à la base de l’acyclicité pour les recouvrements du second et troisième type.

Proposition 2.4.7 — Soit X ⊂ (P1k)an − ∞ un ouvert affinoïde. On suppose donnés un ouvert affinoïde

X ′ ⊂ (P1k)an −∞ contenant X, une fonction f ∈ Γ(X ′,O) et un scalaire λ ∈

√|k×| tels que :

1. DX(λ|f |λ) b X et DX′(λ|f) b X ′,

2. il existe une rétraction q : DX′(λ|f) // (X ′/(f))red à l’inclusion évidente (X ′/(f))red ⊂ DX′(λ|f) ayantpour fibres des boules de Tate,

3. il existe un scalaire λ′ ∈√|k×| avec λ′ < λ et tel que DX(f |λ′) = DX′(f |λ′).

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156 Motifs des variétés rigides analytiques II

Alors, pour F un préfaisceau avec transferts, faiblement surconvergent et invariant par homotopie sur V ,

(2.56) 0 // F (X) // F (DX(λ|f))⊕ F (DX(f |λ)) // F (DX(λ|f |λ)) // 0

est une suite exacte courte.

Demonstration Lorsque DX(λ|f |λ) = ∅, il n’y a rien à montrer. En effet, dans ce cas X = DX(λ|f)∐

DX(f |λ) eton utilise le fait que F est additif pour conclure. On supposera dans la suite que DX(λ|f |λ) 6= ∅. Étant donné que Fest surconvergent et que les colimites filtrantes sont exactes, il suffit de montrer que la suite

(2.57) 0 // F (X) // F (DX(λ|f))⊕ F (DX(f |λ2/µ)) // F (DX(λ|f |λ2/µ)) // 0

est excate pour µ ∈√|k×| avec µ > λ et ε = µ− λ suffisamment petit. On montrera pour cela que le complexe

(2.58) 0 // DX(λ|f |λ2/µ) // DX(λ|f)⊕DX(f |λ2/µ) // X // 0

est contractile dans π0RigCor(k). On divise la preuve de ceci en trois étapes.Étape 1 : Dans la suite, on supposera que ε est suffisamment petit de sorte que DX(µ|f |λ2/µ) b X. Ceci est bienpossible. En effet, le corollaire 2.1.17 montre l’existence d’un ouvert quasi-compact Q tel que DX(λ|f |λ) b Q b X. Ona en particulier DX(λ|f |λ) bX Q. Comme DX(λ|f |λ) est le domaine rationnel DX(λf |f2, λ2), la proposition 2.1.16montre l’existence de γ ∈

√|k×| avec γ > 1 et tel que DX(γλf |f2, λ2) = DX(γλ|f |γ−1λ) ⊂ Q. D’où le résultat.

On peut également supposer que ε est suffisamment petit de sorte que q est la restriction à DX′(λ|f) d’unerétraction DX′(µ|f) // (X ′/(f))red ayant pour fibres des boules de Tate. Pour vérifier cela, on peut supposer quek est algébriquement clos. Dans ce cas, DX′(λ|f) =

∐x∈X′/(f) B1

k(x, u(x)) avec u(x) ∈ |k×| tels que |x−y| > u(x) pourx, y ∈ X ′/(f) des points distincts. Comme DX′(λ|f) b X ′, on peut trouver pour x ∈ X ′/(f) des réels u′(x) ∈ |k×|avec u′(x) > u(x), vérifiant encore |x − y| > u′(x) pour x et y distincts et tels que

∐x∈X′/(f) B1

k(x, u′(x)) ⊂ X ′.On a clairement DX(λ|f) bX′

∐x∈X′/(f) B1

k(x, u′(x)). Par la proposition 2.1.16, il existe γ ∈ |k×| avec γ > 1 et telque DX(γλ|f) ⊂

∐x∈X′/(f) B1

k(x, u′(x)). Pour de tels γ, on dispose d’une rétraction DX(γλ|f) // (X/(f))red quiprolonge q. Montrons que les fibres de ce prolongement sont des boules de Tate.

Pour x ∈ X/(f) on peut écrire f(t) = (t−x)nxgx(t) avec gx(t) inversible B1k(x, u′(x)). La norme |gx(t)| est constante

sur B1k(x, u′(x)) de valeur αx = |gx(x)|. On a alors DX(γλ|f) =

∐x∈X/(f) B1

k(x, u′′(x)) avec u′′(x) = (γλα−1x )1/nx =

γ1/nxu(x). Le résultat recherché est maintenant clair.Étape 2 : On supposera dans la suite que ε est suffisamment petit de sorte que les propriétés de l’étape précédentesoient satisfaites. On supposera aussi que λ′ < λ2/µ < λ de sorte que DX(f |λ2/µ) = DX′(f |λ2/µ) (voir la troisièmepropriété de l’énoncé).

On choisit µ′ ∈√|k×| tel que λ < µ′ < µ. On pose X0 = DX(f |µ′)

∐DX(λ|f) et Y = DX(µ|f |λ2/µ). On

a alors X = X0 ∪ Y et le recouvrement (X0 ⊂ X,Y ⊂ X) vérifie les conditions du théorème 2.3.17. En effet,on a clairement X0 @ X puisque Y b X. De même, si l’on pose Y0 = X0 ∩ Y , on a Y0 @ Y . En effet, on a Y0 =DX(µ|f |µ′)

∐DX(λ|f |λ2/µ) et donc Y = Y0∪DX(µ′|f |λ). Il suffit donc de montrer que DX(µ′|f |λ) b DX(µ|f |λ2/µ) =

Y . Comme DX(µ|f |λ2/µ) b X ′, il suffit de vérifier que DX(µ′|f |λ) bX′ DX(µ|f |λ2/µ). On a plus précisémentDX(µ′|f |λ2/µ′) bX′ DX(µ|f |λ2/µ). Ceci découle immédiatement de la proposition 2.1.16 et des égalités

DX(µ′|f |λ2/µ′) = DX′(µ′|f |λ2/µ′) = DX′(µ

′f |f2, λ2) et DX(µ|f |λ2/µ) = DX′(µ|f |λ2/µ) = DX′(µf |f2, λ2).

Le théorème 2.3.17 fournit maintenant la contractibilité dans π0RigCor(k) du complexe

(2.59) 0 // DX(µ|f |µ′)⊕DX(λ|f |λ2/µ)A// DX(µ|f |λ2/µ)⊕DX(f |µ′)⊕DX(λ|f)

C// X // 0

avec

A =

−a1 −b1a2 00 b3

et C =(c1 c2 c3

)où a1, a2, b1, b3, c1, c2 et c3 sont les inclusions évidentes.Étape 3 : Considérons le diagramme commutatif

0 // DX(µ|f |µ′)⊕DX(λ|f |λ2/µ)A

//

E

DX(µ|f |λ2/µ)⊕DX(f |µ′)⊕DX(λ|f)C//

R

X // 0

0 // DX(µ|f |λ2/µ)⊕DX(λ|f |λ2/µ)A′// DX(µ|f |λ2/µ)⊕DX(f |λ2/µ)⊕DX(λ|f)

C′// X // 0

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2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergent et B1-invariant 157

avec

A′ =

−id −b′1a′2 00 b′3

, C ′ =(c′1 c′2 c′3

), E =

(e 00 id

)et R =

id 0 00 r 00 0 id

où a′2, b

′1, b′3, c′1, c′2, c′3, e et r sont les inclusions évidentes. Le complexe • A′

// • C′// • est homotopiquement

équivalent au complexe (2.58). Ainsi, pour terminer la preuve de la proposition 2.4.7, il suffira (compte tenu de ladeuxième étape) de montrer que E et R sont des isomorphismes dans π0RigCor(k). Ceci revient à dire que les deuxinclusions évidentes

(2.60) e : DX(µ|f |µ′) ⊂ DX(µ|f |λ2/µ) et r : DX(f |µ′) ⊂ DX(f |λ2/µ)

induisent des isomorphismes dans π0RigCor(k). Ceci découle de la proposition 2.3.14 appliquée aux affinoïdes X ′ etDX′(µ|f). En effet, on a les égalités

DX(f |µ′) = DX′(f |µ′), DX(f |λ2/µ) = DX′(f |λ2/µ), DX(µ|f |µ′) = DX′(µ|f |µ′) et DX(µ|f |λ2/µ) = DX′(µ|f |λ2/µ).

La proposition est démontrée. c.q.f.d

Corollaire 2.4.8 — On reprend les hypothèses du théorème 2.4.2. Alors, F est acyclique pour les recouvrementsdu deuxième type.

Demonstration Soit X ⊂ (P1k)an − ∞ un ouvert affinoïde qu’on suppose géométriquement connexe. Soit l/k une

extension galoisienne de groupe de Galois G telle que

X⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I

B1l (xi, ri)

avec ri ≤ |o−xi| ≤ R et |xi−xj | ≥ max(ri, rj) pour i 6= j. Soient i0 ∈ I et λ ∈√|k×| tels que λ < R et λ 6= |xi0 −xj |

pour tout j 6= i0. Notons I0 = G.i0 l’orbite galoisienne de i0. On définit des ouverts affinoïdes D1 et D2 par

D1⊗kl =⋃i∈I0

B1l (xi, λ) et D2⊗kl = B1

l (o,R)−⋃i∈I0

B1l (xi, λ).

On considère la relation d’équivalence sur I0 définie par i ∼ i′ ⇔ |xi − xi′ | ≤ λ ⇔ |xi − xi′ | < λ. On note I0l’ensemble des classes d’équivalences pour cette relation. Pour δ ∈ I0, on pose xδ = xi pour un choix de i ∈ δ. Alors,

D1⊗kl =∐δ∈I0

B1l (xδ, λ) et D2⊗kl = B1

l (o,R)−∐δ∈I0

B1l (xδ, λ).

A partir de maintenant on divise la preuve selon qu’on suppose l’hypothèse (A) ou (B).Sous l’hypothèse (A) : Lorsque k est d’égale caractéristique nulle, on peut supposer queG laisse invariant o et l’ensemblexi, i ∈ I. Pour δ ∈ I0, on pose

xδ =1

|δ|∑i∈δ

xi.

On vérifie comme dans la preuve de la proposition 2.1.4 que

D1⊗kl =∐δ∈I0

B1l (xδ, λ) et D2⊗kl = B1

l (o,R)−∐δ∈I0

B1l (xδ, λ).

De plus, G permute les xδ. Ainsi, f(t) =∏δ∈Io(t− xδ) est un polynôme à coefficients dans k. De plus, on a clairement

D1 = DB1k(o,R)(ν|f) et D2 = DB1

k(o,R)(f |ν)

avec ν = λ(∏

δ 6=δ0 |xδ − xδ′ |)1/|I0|

. Notons X ′ = X ∪D1. Vérifions les propriétés suivantes :

(i) DX(ν|f |ν) = D1 ∩D2 b X,(ii) DX′(ν|f) = D1 b X ′,

(iii) il existe une retraction DX′(ν|f) = D1// X ′/(f) dont les fibres sont des boules de Tate,

(iv) pour ν′ < ν suffisamment proche de ν, on a DX(f |ν′) = DX′(f |ν′).

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158 Motifs des variétés rigides analytiques II

Les propriétés (i) et (ii) s’écrivent après changement de base à l :∐δ∈I0

B1l (xδ, λ)− B1

l (xδ, λ) b B1l (o,R)−

∐i∈I

B1l (xi, ri)

et∐δ∈I0

B1l (xδ, λ) b B1

l (o,R)−∐

i∈I−I0

B1l (xi, ri)

.

Mais, pour ξ ∈√|k×| avec ξ > 1 et ξ − 1 suffisamment petit, on a∐

δ∈I0

B1l (xδ, λξ)− B1

l (xδ, λξ−1) ⊂ B1

l (o,R)−∐i∈I

B1l (xi, ri)

et∐δ∈I0

B1l (xδ, λξ) ⊂ B1

l (o,R)−∐

i∈I−I0

B1l (xi, ri)

.

Il vient que (i) et (ii) sont vraies. La propriété (iii) est évidente par construction de f . La propriété (iv) découle du faitque DX′(f |ν′) ∩

∐i∈I0 B

1k(xi, ri) = ∅ pour ν′ suffisamment proche de ν. On peut maintenant appliquer la proposition

2.4.7 pour conclure.Sous l’hypothèse (B) : Lorsque F est un préfaisceau de Q-espaces vectoriels, il suffit de montrer que F est acycliquepour le recouvrement (X⊗kl) = ((X ∩D1)⊗kl) ∪ ((X ∩D2)⊗kl).

On pose g =∏δ∈I0(t− xδ) et ν = λ

(∏δ 6=δ0 |xδ − xδ′ |

)1/|I0|. On a alors,

(X ∩D1)⊗kl = DX⊗kl(ν|g) et (X ∩D1)⊗kl = DX⊗kl(g|ν).

On pose comme avant X ′ = X ∪D1. On vérifie comme ci-dessus les propriétés suivantes :

(i) DX⊗kl(ν|g|ν) = (D1 ∩D2)⊗kl b X⊗kl,

(ii) DX′⊗kl(ν|g) = D1⊗kl b X ′⊗kl,

(iii) il existe une retraction DX′⊗kl(ν|f) = D1⊗kl // (X ′⊗kl)/(g) dont les fibres sont des boules de Tate,

(iv) pour ν′ < ν suffisamment proche de ν, on a DX⊗kl(g|ν′) = DX′⊗kl(g|ν

′).

On peut encore une fois appliquer la proposition 2.4.7 pour conclure. c.q.f.d

Il reste à vérifier que F est acyclique pour les recouvrements du troisième type si F est un préfaisceau avec transferts,faiblement surconvergent et invariant par homotopie. Soit X ⊂ (A1

k)an un ouvert affinoïde géométriquement connexe.Soit l/k une extension galoisienne de groupe de Galois G telle que

X⊗kl = B1l (o,R)−

∐i∈I

B1l (xi, ri)

avec ri ≤ |o − xi| ≤ R et |xi − xj | ≥ max(ri, rj) pour i 6= j. Soit z0 ∈ X(l) et ε ∈√|k×| strictement plus petit que

|z0 − xi| pour i ∈ I et |z0 − g.z0| pour g ∈ G avec g.z0 6= z0. Soient X1 et X2 les ouverts de X tels que

X1⊗kl =∐

z∈G.z0

B1l (z, ε) et X2⊗kl = X⊗kl −

∐z∈G.z0

B1l (z, ε)

.

Notons f(t) =∏z∈G.z0(t−z). C’est un polynôme à coefficients dans k. On pose aussi ε′ = ε

(∏z 6=z′∈G.z0 |z − z

′|)1/|G.z0|

.Alors X1 = DX(ε′|f) et X2 = DX(f |ε′). Les hypothèses de la proposition 2.4.7 sont vérifiées avec X = X ′. Il vientque F est acyclique pour le recouvrement (Xi ⊂ X)i=1, 2. Ceci termine la preuve du théorème 2.4.2.

2.4.2 Invariance par homotopie de la cohomologie et applications

Dans cette sous-section on montre le théorème ci-dessous, analogue rigide-analytique d’un théorème de Voevodsky(voir [MVW06, Theorem 13.8]).

Theoreme 2.4.9 — Soit B une k-variété rigide lisse et F un préfaisceau avec transferts sur SmAfnd/B faiblementsurconvergent et invariant par homotopie. On suppose l’une des deux hypothèses suivantes :

(a) le corps k est d’égale caractéristique nulle,

(b) F est un préfaisceau de Q-espaces vectoriels.

Alors pour tout i ∈ N, le préfaisceau de cohomologie Hira(−, F ) est invariant par homotopie et le morphisme évident

Hira(−, F ) // Hi

Nis(−, F ) est inversible. En particulier, le faisceau ara(F ) = aNis(F ) associé à F est un faisceauNisnevich avec transferts surconvergent et invariant par homotopie.

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2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergent et B1-invariant 159

Demonstration Le fait que Hira(−, F ) // Hi

Nis(−, F ) est un isomorphisme est mis pour mémoire puisqu’il dé-coule de la proposition 2.1.35. (Le lecteur consciencieux remarquera que cette proposition ne s’applique pas directementpuisque F est uniquement défini sur des affinoïdes. Pour contourner cette difficulté, on considère ara(F ) qui est na-turellement un faisceau surconvergent sur SmRigqc/B et on utilise que Hi

τ (U,F ) ' Hiτ (U, ara(F )) (où τ ∈ ra,Nis)

pour tout B-affinoïde lisse U .) Retenons au passage que la proposition 2.1.35 entraîne également que les préfaisceauxHira(−, F ) sont faiblement surconvergents (en utilisant la même astuce consistant à considérer ara(F ) comme un

faisceau sur SmRigqc/B).Montrons que Hi

ra(−, F ) est invariant par homotopie. Soit X un B-affinoïde lisse et montrons que le morphisme

(2.61) Hira(X,F ) // Hi

ra(B1X , F )

est inversible. Quitte à remplacer F par sa restriction à SmAfnd/X, on peut supposer que B = X.La projection évidente p : B1

X// X induit un morphisme de sites

p : (Ouvaf(B1X), ra) // (Ouvaf(X), ra)

qui à un ouvert affinoïde U de X associe p−1(U) = B1U . Notons F|X et F|B1

Xles restrictions de F à Ouvaf(X) et

Ouvaf(B1X). Soit F|B1

X

// I· un remplacement projectivement ra-fibrant, i.e., une équivalence ra-locale avec I·un complexe de préfaisceaux projectivement ra-fibrant. Comme p∗ est un foncteur de Quillen à droite relativementaux structures projectives ra-locales, le complexe p∗(I·) est encore projectivement ra-fibrant. Pour montrer que (2.61)est inversible, il suffira donc de montrer que le morphisme de complexes de préfaisceaux sur (Ouvaf(X), ra)

(2.62) F|X // p∗(I·)

est une équivalence ra-locale. Rappelons que cela signifie que (2.62) induit des isomorphismes sur les ra-faisceauxassociés aux préfaisceaux de cohomologie.

On a vu au début de la preuve que les préfaisceaux de cohomologie Hi(I·) = Hira(−, F )|B1

Xsont faiblement

surconvergents sur Ouvaf(B1X). On déduit que les Hi(p∗(I·)) sont faiblement surconvergents sur Ouvaf(X). Étant

donné que F|X est lui aussi faiblement surconvergent, il suffit de vérifier que (2.62) induit des quasi-isomorphismessur les fibres aux points génériques de X (utiliser pour cela le corollaire 2.1.30). On est donc ramené à montrer lespropriétés suivantes pour tout point générique x ∈M(X) :

(i) Le morphisme ColimU∈Flt(x)H0ra(U,F ) // ColimU∈Flt(x)H

0ra(B1

U , F ) est inversible.

(ii) Le groupe ColimU∈Flt(x)Hira(B1

U , F ) est nul pour i > 0.

Quitte à remplacer X par un voisinage de x, on peut supposer qu’il existe un sous-affinoïde fermé C ⊂ X tel quex ∈M(C) et mC,x = 0. Quitte à rétrécir X autour de x, on peut supposer que C est un affinoïde régulier. Lorsque k estde caractéristique nulle, C est lisse. Lorsque k est de caractéristique p > 0, on peut trouver une extension totalementinséparable l/k telle que C ′ = (C⊗kl)red est lisse sur k. Le lemme 2.4.10 (et l’hypothèse (b)) affirme qu’il existe unpréfaisceau avec transferts F ′ sur SmAfnd/X⊗kl tel que F = (l/k)∗(F

′).Les morphismes finis surjectifs totalement inséparables entre affinoïdes intègres induisent des isomorphismes sur les

G-espaces sous-jacents. On déduit que F ′ est surconvergent et invariant par homotopie. Si on note x′ l’unique antécédentde x par X⊗kl // X , on a une bijection Flt(x) ' Flt(x′) et des isomorphismes Hi

ra(B1U , F ) ' Hi

ra(B1U⊗kl

, F ′) pourU ∈ Flt(p). On peut donc remplacer X par X⊗kl, x par x′ et F par F ′ dans les conditions (i) et (ii).

Par la discussion précédente, on peut supposer qu’il existe un sous-affinoïde lisse C ⊂ X contenant x et telque mC,x = 0. Comme F est invariant par homotopie, le lemme 2.2.59 montre que les conditions (i) et (ii) sontrespectivement équivalentes à :

(i’) Le morphisme H0ra(x, Fx) // H0

ra(B1x, Fx) est inversible.

(ii’) Le groupe Hira(B1

k(x), Fx) est nul pour i > 0.

Ci-dessus, Fx est la fibre en x de la restriction de F à SmAfnd[/X (voir le théorème 2.2.57). C’est un préfaisceau avectransferts invariant par homotopie sur la sous-catégorie SmAfnd[/k(x).

Montrons que Fx est faiblement surconvergent. Soient Z dans SmAfnd[/k(x) et f0, f1, . . . , fn des générateurs deΓ(Z,O) en tant qu’idéal. Le domaine rationnel DZ(f0|f1, . . . , fn) ne change pas si on remplace les fi par des fonctionsgi avec les normes |fi − gi| suffisamment petites. On peut trouver un X-schéma lisse Y tel que Yx ' Z (par la preuve

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160 Motifs des variétés rigides analytiques II

du corollaire 2.2.56). Quitte à remplacer Y par Y ×XU avec U ∈ Flt(x), on peut supposer que (f0, . . . , fn) est l’imaged’un système de générateurs (f0, . . . , fn) de Γ(Y,O) en tant qu’idéal. On a alors

Fx(DZ(f0|f1, . . . , fn)) ' ColimU∈Flt(x)

F (DX×XU (f0|f1, . . . , fn))

' ColimU∈Flt(x)

Colimλ∈√|k×|, λ>1

F (DX×XU (λf0|f1, . . . , fn)) ' Colimλ∈√|k×|, λ>1

Fx(DZ(λf0|f1, . . . , fn)).

Ceci prouve que Fx est bien faiblement surconvergent. Les points (i’) et (ii’) découlent maintenant du théorème 2.4.2.Ceci achève la preuve du théorème. c.q.f.d

Dans le cas algébrique, le résultat ci-dessous est du indépendamment à Morel et à Suslin. Toutefois, aucun desdeux mathématiciens n’a publié sa preuve.

Lemme 2.4.10 — On note p la caractéristique exponentielle de k. Soit B un k-affinoïde lisse. Soit l/k uneextension finie totalement inséparable. Le foncteur

(2.63) − ⊗kl : AfndCor(B)⊗Z Z[1/p] // AfndCor(B⊗kl)⊗Z Z[1/p]

est une équivalence de catégories. En particulier, si p est inversible dans Λ, le foncteur

(2.64) (l/k)∗ : AfndPST(B,Λ) // AfndPST(B⊗kl,Λ) ,

qui à un préfaisceau avec transferts F associe F (−⊗kl), est une équivalence de catégories.

Demonstration Soit s ∈ N tel que [l : k] = ps. Le foncteur (2.63) est pleinement fidèle. En effet, soient X et Y desB-affinoïdes lisses et montrons que l’homomorphisme

(2.65) CorB(X,Y )⊗Z Z[1/p] // CorB⊗kl(X⊗kl, Y ⊗kl)⊗Z Z[1/p]

est bijectif. Considérons le morphisme fini surjectif et totalement inséparable

e : (X⊗kl)×(B⊗kl)(Y ⊗kl) ' (X×BY )⊗kl // X×BY .

L’association T e(T ) est une bijection de l’ensemble des sous-affinoïdes fermés intègres de (X⊗kl)×B⊗kl(Y ⊗kl)sur l’ensemble des sous-affinoïdes fermés intègres de X×BY . De plus, cette bijection préserve la propriété d’étre finiet surjectif sur le premier facteur. Il vient que CorB(X,Y ) et CorB⊗kl(X⊗kl, Y ⊗kl) ont des bases canoniquementisomorphes. Exprimons (2.65) dans ces bases. Soit T ⊂ (X⊗kl)×B⊗kl(Y ⊗kl) un sous-affinoïde intègre, fini et surjectifsur le premier facteur. Notons Z = e(T ). Le morphisme T // Z est fini, surjectif et totalement inséparable. Notonsps(T ) son degré générique. Alors, T = (Z⊗kl)red et la multiplicité de T est égale à ps−s(T ). Il vient que (2.65) envoie[Z] sur ps−s(T )[T ]. D’où le résultat.

Il reste à voir que (2.63) est essentiellement surjectif. Notons A = Γ(B,O). Soit Y un B⊗kl-affinoïde lisse qu’onsupposera connexe. On choisit une présentation Y = Spm(A⊗klt1, . . . , tn/(g1, . . . , gm)). La matrice jacobienne

∂(g1, . . . , gm)

∂(t1, . . . , tn)

est de rang n− dim(Y ) en tout point fermé de Y . Comme l/k est une extension finie totalement inséparable, il exister ∈ N tel que ap

r ∈ k pour tout a ∈ l. On note fi ∈ A[[t1, . . . , tn]] l’unique série formelle telle que

fi(tpr

1 , . . . , tpr

n ) = gi(t1, . . . , tr)pr .

Les coefficients de fi sont les puissances pr-ème des coefficients de gi. Il vient que fi ∈ At1, . . . , tn.On note X = Spm(At1, . . . , tn/(f1, . . . , fr)). Il existe un unique morphisme de B⊗kl-affinoïdes

θ : Y // X⊗kl

tel que la classe de ti dans Γ(X⊗kl,O) est envoyée sur la classe de tpr

i dans Γ(Y,O). En effet, la série fj(t1, . . . , tn)

nulle dans Γ(X⊗kl,O) est envoyée par θ sur la série fj(tpr

1 , . . . , tpr

n ) = gj(t1, . . . , tn)pr

nulle dans Γ(Y,O). On a uncarré commutatif

Y //

θ

BnB⊗kl

ρ

X⊗kl // BnB⊗kl

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2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergent et B1-invariant 161

avec ρ : Bnl // Bnl le morphisme qui envoie la fonction ti sur tpr

i . On a Y ' [(X⊗kl)×Bnl ,ρBnl ]red. Il vient que θ est

un morphisme fini, surjectif et totalement inséparable.Soit x ∈ X⊗kl un point fermé. On peut trouver y ∈ Y tel que x = θ(y). On vérifie facilement la relation

∂(f1, . . . , fm)

∂(t1, . . . , tn)(x) =

(∂(g1, . . . , gm)

∂(t1, . . . , tn)(y)

)pr.

Il vient que∂(f1, . . . , fm)

∂(t1, . . . , tn)(x) est de rang n− dim(X). Ceci montre que X est un B-affinoïde lisse.

Pour terminer, on montre que θ induit un isomorphisme dans AfndCor(B⊗kl) ⊗Z Z[1/p]. On a vu que θ est unmorphisme fini, surjectif et totalement inséparable. Notons pu son degré générique. Soit τ la transposée du graphe deθ vu comme correspondance finie élémentaire. Un calcul facile montre que θ τ = puidY et τ θ = puidX⊗kl. Le lemmeest démontré. c.q.f.d

Faisons la définition suivante.

Definition 2.4.11 — Soit B une k-variété rigide lisse. Étant donné un anneau (non nécessairement commutatif)Λ, on note OStr(B,Λ) la sous-catégorie pleine de AfndStrra(B,Λ) dont les objets sont les faisceaux avec transfertssurconvergents. On note aussi OHStr(B,Λ) ⊂ OStr(B,Λ) la sous-catégorie pleine formée des faisceaux invariantspar homotopie. Lorsque Λ = Z, on note simplement OStr(B) et OHStr(B) ces catégories.

Les objets de OStr(B,Λ) sont aussi des faisceaux pour la topologie Nisnevich. Ceci explique l’absence de l’indice radans la notation. La catégorie OStr(B,Λ) est abélienne, cocomplète et stable par limites finies. Le foncteur d’inclusionOStr(B,Λ) ⊂ AfndStrra(B,Λ) commute aux petites colimites et aux limites finies.

Corollaire 2.4.12 — Soit B une k-variété rigide lisse. Supposons que l’une des deux hypothèses suivantes estsatisfaite(a) k est d’egale caractéristique nulle,(b) Λ est une Q-algèbre.

Alors, OHStr(B,Λ) est une sous-catégorie abélienne de OStr(B,Λ) stable par sous-objets, quotients et extensions.De plus, l’inclusion évidente admet un adjoint à gauche

atrra hB1

0 : OStr(B,Λ) // OHStr(B,Λ)

qui à F associe le ra-faisceau associé à hB1

0 (F ).

Demonstration Le préfaisceau avec transferts hB1

0 (F ) est surconvergent et invariant par homotopie. Par le théo-rème 2.4.9, le faisceau avec transferts atrra(hB

1

0 (F )) est surconvergent et invariant par homotopie. Il est donc dansOHStr(B,Λ). Le fait qu’il coreprésente la restriction de homOStr(B,Λ)(F,−) à OHStr(B,Λ) est clair. Ceci prouvel’existence de l’adjoint à gauche.

Il est évident que OHStr(B,Λ) est stable par sous-objets (pris dans OStr(B,Λ)). En effet, la propriété d’invariancepar homotopie est stable par sous-objets. Pour voir que OHStr(B,Λ) est stable par quotients on utilise encore unefois que atrra préserve l’invariance par homotopie pour les préfaisceaux avec transferts surconvergents.

Il reste à vérifier la stabilité par extensions. Supposons donnée une suite exacte courte dans OStr(B,Λ)

0 // F // H // G // 0

avec F et G invariants par homotopie. L’invariance par homotopie pour H découle du lemme des cinq et du théorème2.4.9 qui affirme que le préfaisceau H1

ra(−, F ) est invariant par homotopie. c.q.f.d

Remarque 2.4.13 — On verra plus tard que la catégorie OHStrNis(k,Λ) est le cœur d’une t-structure homotopiquesur une catégorie triangulée de motifs associés aux k-variétés rigides.

2.4.3 Exemples de préfaisceaux avec transferts, surconvergents et B1-invariantsNous avons vu que les préfaisceaux avec transferts faiblement surconvergents et B1-invariants se comportent bien

par rapport à la topologie des recouvrements admissibles. Ils sont pour cela les analogues rigides des préfaisceaux avectransferts A1-invariants, objets fondamentaux dans la théorie de Voevodsky des motifs triangulés.

Pour obtenir des exemples de préfaisceaux avec transferts faiblement surconvergents et B1-invariants il suffit d’ap-pliquer le foncteur hB

1

0 à des préfaisceaux avec transferts faiblement surconvergents. Malheureusement, il n’est pasclair qu’on dispose d’assez de préfaisceaux faiblement surconvergents sur SmAfnd/k. Étant donnée une k-variété ri-gide lisse X, le préfaisceau Ztr(X) n’est pas faiblement surconvergent dès que dim(X) > 0. Pour voir cela, on peut

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162 Motifs des variétés rigides analytiques II

supposer que X admet un point rationnel x dans une composante connexe de dimension n > 0 (quitte à remplacer kpar une extension finie séparable). Comme X est lisse, le point x possède un voisinage ouvert isomorphe à Bnk . Soientf1, . . . , fn ∈ Γ(Bnk ,O) = kt1, . . . , tn tels que :

– |fi|∞ < 1,– fi =

∑ν=(ν1,...,νn)∈Nn a

(i)ν tν avec (λν1+···+νn |a(i)

ν |)ν∈Nn non bornée pour tout λ > 1.Considérons alors le morphisme φ : Bnk // X égal à la composée

Bnk(f1,...,fn)

// Bnk ⊂ X .

Alors, φ ∈ Ztr(X)(Bnk ) ne s’étend à aucune boule de rayon strictement plus grand que 1. En effet, supposons qu’ilexiste une extension φ′ : Bnk (o, λ) // X de φ avec λ > 1 dans

√|k×|. Quitte à remplacer λ par un scalaire plus

proche de 1, on peut supposer que φ′ se factorise par Bnk (puisque l’image de φ est contenue dans l’intérieur de Bnk ).Il est facile de voir que φ′ est forcément un morphisme (et pas seulement une correspondance finie). L’existence de φ′implique que fi ∈ Γ(Bnk (o, λ),O) ce qui contredit la seconde condition sur les fi.

Dans cette sous-section on démontre le théorème suivant qui fournit beaucoup d’exemples de préfaisceaux avectransferts faiblement surconvergents et B1-invariants.

Theoreme 2.4.14 — Soient D un k-affinoïde lisse et X un D-schéma lisse de type fini. Alors, le préfaisceaud’homologie Hn SingB1

· (Ztr(Xan)) est un préfaisceau avec transferts faiblement surconvergent et invariant par homotopiesur SmAfnd/D.

Le fait que Hn SingB1

· (Ztr(Xan)) est B1-invariant est mis pour mémoir (voir en effet la proposition 2.2.43). Lecontenu du théorème est la surconvergence faible de ce préfaisceau. La preuve de 2.4.14 repose sur un résultat d’ap-proximation dont la preuve utilise les mêmes techniques que celle du théorème 2.2.49. Nous aurons besoin de quelquespréliminaires avant de pouvoir énoncer le résultat d’approximation nécessaire.

Dans la suite, on fixe B = Spm(A) un k-affinoïde lisse. On suppose donné un sous-anneau noethérien, régulieret dense A0 ⊂ A tel que A est une A0-algèbre régulière. Par le théorème de Popescu [Pop85, Pop86], A est unecolimite filtrante des ses sous-A0-algèbres de type fini et lisses. On note B0 = Spec(A0) et V (B/B0) la catégorie desvoisinages étales affines de B dans B0, i.e., des B0-schémas étales affines munis d’un point à valeurs dans la A0-algèbreA. L’opposé de l’ensemble ordonné (par l’inclusion) des sous-A0-algèbres étales de type fini de A s’identifie à unesous-catégorie pleine et cofinale de V (B/B0) via le spectre "spectre associé".

Definition 2.4.15 — Pour n ∈ N, on pose V n(B/B0) = V (∆nrig,B/∆

nB0

). Étant donné un A0-schéma de typefini X0, on dispose d’un complexe simplicial CorB0

(V (B/B0), X0) défini de la manière suivante. Pour n ∈ N, on a

CorB0(V (B/B0), X0)n = Colim

U∈V n(B/B0)CorB0

(U,X0).

Étant donnée une flèche a : n → m dans ∆, on dipose d’un foncteur V m(B/B0) → V n(B/B0) qui à U associeU ×∆m

B0∆nB0

. La composition à gauche par la projection sur le premier facteur U ×∆mB0

∆nB0

// U induit un

morphisme

CorB0(V (B/B0), X0)m = Colim

U∈V m(B/B0)CorB0

(U,X0)a∗// ColimU ′∈V n(B/B0)

CorB0(U ′, X0) = CorB0

(V (B/B0), X0)n.

On vérifie aisément que a∗ est compatible à la composition et qu’on a bien un complexe simplicial.

Notons aussi CorB0(B,X0) le complexe simplicial donné en degré n par

CorB0(B,X0)n = CorB0

(Spec

(At0, . . . , tn(1−

∑ni=0 ti)

), X0

)et ayant pour faces et dégénérescences les morphismes évidents. Ce complexe s’identifie naturellement à CorB(B,Xan)avec X = X0 ⊗A0

A. On dispose par ailleurs d’un morphisme de complexes simpliciaux

(2.66) CorB0(V (B/B0), X0) // CorB0

(B,X0)

obtenu par composition à gauche avec les morphismes Spec(At0, . . . , tn/(1−∑ni=0 ti))

// U pour U ∈ V n(B/B0).On a le théorème suivant.

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2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergent et B1-invariant 163

Theoreme 2.4.16 — Le morphisme de complexes (2.66) est un quasi-isomorphisme.

Demonstration On note A(n) = At0, . . . , tn/(1−∑ni=0 ti) et A

(n)0 = A0[t0, . . . , tn]/(1−

∑ni=0 ti). La A

(n)0 -algèbre

A(n) est régulière. Par le théorème de Popescu [Pop85, Pop86], elle est égale à la colimite filtrante de ses sous-A(n)0 -

algèbres lisses de type fini.La preuve est divisée en deux parties. On montre que (2.66) induit des surjections et des injections sur les groupes

d’homologie.Partie 1 : surjectité. Soit α ∈ CorB0(Spec(A(n)), X0) une correspondance finie définissant un cycle dans le complexesimplicial CorB0

(B,X0), i.e., α dn,i = 0 pour 0 ≤ i ≤ n (avec dn,i : Spec(A(n−1)) // Spec(A(n)) la face

correspondante à l’équation ti = 0). Par le théorème de Popescu [Pop85, Pop86], on peut trouver une sous-A(n)0 -

algèbre lisse et de type fini E0 ⊂ A(n) et une correspondance finie α′ ∈ CorB0(Spec(E0), X0) telles que α = α′

(Spec(A(n)) → Spec(E0)). Quitte à raffiner E0, on peut supposer que α′ (Spec(E0/ti) → Spec(E0)) = 0 pour0 ≤ i ≤ n.

Par le lemme 2.4.17 ci-dessous, il existe une E0-algèbre lisse E′0 munie d’un morphisme de E0-algèbres E′0 // A(n)

et d’un morphisme étale de A(n)0 -algèbres A

(n)0 [s1, . . . , sr] // E′0 . Notons que E′0 n’est pas nécessairement une sous-

algèbre de A(n). On pose α′′ = α′ (Spec(E′0)→ Spec(E0)). On a encore que α′′ (Spec(E′0/ti)→ Spec(E′0)) = 0 pour0 ≤ i ≤ n.

Notons fi ∈ A(n) l’image des si par la composée A(n)0 [s1, . . . , sr] // E′0

// A(n) . Pour ε > 0 choisissons

f εi ∈ A(n)0 tels que |fi − f εi |∞ ≤ ε (la norme infinie étant prise dans la k-algèbre affinoïde A(n)). Ceci est possible

puisque l’anneau A(n)0 est dense dans A(n). Formons un carré cartésien

U ε

// Spec(E′0)

Spec(A(n)0 )

(fε1 ,...,fεr )// Spec(A

(n)0 [s1, . . . , sr]).

Alors U ε est étale sur Spec(A(n)0 ). Montrons que pour ε suffisamment petit, U ε est naturellement un voisinage étale

de ∆nrig,B dans ∆n

B , i.e., qu’il existe un morphisme de Spec(A(n)0 )-schémas Spec(A(n)) // U ε .

En effet, notons E′ = E′0⊗A(n)0A(n). Par le corollaire 1.1.54, il existe pour ε ∈ |k×| suffisamment petit un diagramme

commutatifSpm(A(n)) //

(f1,...,fr)

(Spec(E′))an

B1A(n)(f1, ε)⊗A(n) . . . ⊗A(n)B1

A(n)(fr, ε) //

u

11

(Spec(A(n)[s1, . . . , sr]))an.

Pour un tel ε, on déduit alors un triangle commutatif

Spec(E′0)an

Spm(A(n))(fε1 ,...,f

εr )//

22

(Spec(A(n)[s1, . . . , sr]))an,

et donc une section au morphisme étale U ε ⊗A

(n)0

A(n) // Spec(A(n)) . Cette section équivaut à la donnée d’un

morphisme de Spec(A(n)0 )-schémas Spec(A(n)) // U ε .

Notons maintenant αε = α′′ (U ε → Spec(E′0)). La classe de αε dans CorB0(V (B/B0), X0)n est par construction

un cycle dans le complexe simplicial CorB0(V (B/B0), X0). Pour terminer, il reste à voir que l’image de αε dans

CorB0(B,X0) est homologue à α. Pour cela, considérons β = (α′′)anu. C’est une correspondance finie de Br

A(n)(f, ε) =

B1A(n)(f1, ε)⊗A(n) . . . ⊗A(n)B1

A(n)(fr, ε) dans Xan qui est un cycle dans le complexe CorB(BrA(n)(f, ε), X

an). De plus,α = β(f1, . . . , fr) alors que l’image de αε dans CorB0

(B,X0) ' CorB(B,Xan) est égale à β(f ε1 , . . . , f εr ). Considérons

le morphisme h : Spm(A(n+1)) // BrA(n)(f, ε) donné sur les †-points (où † est une B-variété rigide) par

h(t0, . . . , tn+1) = ((t0 · fi(t0 + t1, t2, . . . , tn) + t1 · f εi (t0 + t1, t2, . . . , tn))1≤i≤r, t0 + t1, t2, . . . , tn+1) .

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164 Motifs des variétés rigides analytiques II

Il est facile de voir que β h est une homologie entre β (f1, . . . , fr) et β (f ε1 , . . . , fεr ). La surjectivité est prouvée.

Partie 2 : injectivité. On procède de la même manière que pour la surjectivité. Soit α ∈ CorB0(U,X0) avec U ∈

V n(B/B0) définissant un cycle du complexe simplicial CorB0(V (B/B0), X0). Quitte à raffiner U , on peut supposer

que α (U/ti ⊂ U) = 0 pour 0 ≤ i ≤ n. On suppose qu’il existe une correspondance finie β ∈ CorB0(B,X0)n+1 telle

que :

(a) β dn+1,i = 0 pour 1 ≤ i ≤ n+ 1,

(b) β dn+1,0 = α (Spec(A(n))→ U).

Soient E0 ⊂ A(n+1) une sous-A(n+1)0 -algèbre lisse de type fini et β′ ∈ CorB0(Spec(E0), X0) telle que β =

β′ (Spec(A(n+1)) → Spec(E0)). Quitte à raffiner E0, on peut supposer que E0/t0 ⊂ A(n+1)/t0 ' A(n) contientl’image de Γ(U,O) dans A(n). On dispose alors d’un morphisme Spec(E0/t0) // U qui factorise le morphisme

Spec(A(n)) // U . Quitte à raffiner E0 d’avantage, on peut supposer que

(a’) β′ (Spec(E0/ti) ⊂ Spec(E0)) = 0 pour 1 ≤ i ≤ n+ 1,

(b’) β′ (Spec(E0/t0) ⊂ Spec(E0)) = α (Spec(E0/t0)→ U).

Par le lemme 2.4.17, il existe une E0-algèbre lisse E′0 munie d’un morphisme de E0-algèbres E′0// A(n+1) et

d’un morphisme étale de A(n+1)0 -algèbres A

(n+1)0 [s1, . . . , sr] // E′0 . Notons que E′0 n’est pas nécessairement une

sous-algèbre de A(n+1). On pose β′′ = β′ (Spec(E′0)→ Spec(E0)). On a par construction :

(a”) β′′ (Spec(E′0/ti)→ Spec(E′0)) = 0 pour 1 ≤ i ≤ n+ 1,

(b”) β′′ (Spec(E′0/t0)→ Spec(E′0)) = α (Spec(E′0/t0)→ U).

Notons fi l’image de si dans A(n+1). Pour ε > 0, on choisit f εi ∈ A(n+1)0 avec |fi− f εi |∞ ≤ ε (la norme infinie étant

prise dans la k-algèbre affinoïde A(n+1)). On forme un carré cartésien

U ε

// Spec(E′0)

Spec(A(n+1)0 )

(fε1 ,...,fεr )// Spec(A

(n+1)0 [s1, . . . , sr]).

Par la première partie de la preuve, on sait que pour ε suffisamment petit il existe un morphisme de Spec(A(n)0 )-schémas

Spec(A(n)) // U ε . Pour un tel ε, β′′ (U ε → Spec(E′0)) définit un élément β′′′ ∈ CorB0(V (B/B0), X0)n+1. Par

construction, β′′′ dn+1,i = 0 pour 1 ≤ i ≤ n + 1 alors que β′′′ dn+1,0 = α. Ceci prouve l’injectivité et donc lethéorème. c.q.f.d

Le lemme suivant est tiré de [Pop86]. Pour la commodité du lecteur, nous reproduisons la preuve ici.

Lemme 2.4.17 — On suppose donné un triangle commutatif d’anneaux

E // A

A0

OO GG

avec E une A0-algèbre lisse de type fini, A une k-algèbre affinoïde et A0 un sous-anneau noethérien dense de A. Ilexiste alors une E-algèbre lisse de type fini E′ et un diagramme commutatif

E′

A0[s1, . . . , sr]

e44

E //

OO

A

A0

OO GGgg

avec e un morphisme étale.

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2.4 Cohomologie Nisnevich d’un préfaisceau avec transferts, surconvergent et B1-invariant 165

Demonstration On se ramène facilement au cas où le E-module des différentielles relatives ΩE/A0est libre de rang

r. On se donne une présentation p : A0[t1, . . . , tn] // // E et on note I = p−1(0) son idéal. On obtient alors une suiteexacte courte de E-modules

0 // I/I2 // ⊕ni=1Edtiθ// ΩE/A0

// 0 .

Comme ΩE/A0est libre, il existe une matrice (fij)1≤i≤n; 1≤j≤r ∈ En×r telle que (θ(

∑ni=1 fijdti))1≤j≤r forme une

base de ΩE/A0. On pose ωj =

∑ni=1 fijdti. Pour tout réel ε > 0, on choisit une matrice (f εij)1≤i≤n; 1≤j≤r ∈ An×r0 telle

que |f εij − fij |∞ ≤ ε (la norme infinie étant prise dans la k-algèbre affinoïde A). On pose ωεj =∑ni=1 f

εijdti.

Soit M ε ∈ Matr×r(E) la matrice telle que

M εθ(ωj) = θ(ωεj) pour 1 ≤ j ≤ r.

Pour ε suffisamment petit, l’image de la matrice M ε dans Matr×r(A) est inversible. Pour un tel ε, le morphismeE // A se factorise par la A0-algèbre lisse E[det(M ε)−1]. On peut donc supposer que M ε est inversible. End’autres termes, (θ(ωεj))1≤j≤r forme une base de ΩE/A0

.Or, les ωεj sont à coefficients dans A0. Quitte à faire une transformation A0-linéaire des coordonnées (ti)1≤i≤n, on

peut supposer que (θ(dtj))1≤j≤r est une base de ΩE/A0. Il est alors clair que la composée

A0[t1, . . . , tr] // A0[t1, . . . , tn] // // E

est étale. Le lemme est démontré. c.q.f.d

On termine la sous-section en montrant comment déduire le théorème 2.4.14 du théorème 2.4.16. Soient U unD-affinoïde lisse et f0, f1, . . . , fn des générateurs de Γ(U,O) en tant qu’idéal. Il s’agit de prouver que le morphisme

Colimλ∈√|k×|, λ>1

HnSingB1

(Ztr(Xan))(DU (λf0|f1, . . . , fn)) // HnSingB1

(Ztr(Xan))(DU (f0|f1, . . . , fn))

est inversible.Pour λ ≥ 1, notons Bλ = DU (λf0|f1, . . . , fn) et Aλ = Γ(Bλ,O). La sous-algèbre Aλ ⊂ A1 est dense. Fixons un

λ0 > 1 et posons A0 = Aλ0et B0 = Spec(A0). Dans la suite, on prendra toujours 1 < λ ≤ λ0.

Par le théorème 2.4.16, on a des quasi-isomorphismes

CorB0(V (Bλ/B0), X ×Γ(D,O) B0)

q. iso// CorBλ(Bλ, X

an×DBλ) = SingB1

· (Ztr(Xan))(Bλ).

Il suffit donc de montrer que le morphisme de complexes

(2.67) Colimλ∈√|k×|, λ>1

CorB0(V (Bλ/B0), X ×Γ(D,O) B0) // CorB0

(V (B1/B0), X ×Γ(D,O) B0)

est un quasi-isomorphisme. Le lemme ci-dessous montre que (2.67) est en fait inversible.

Lemme 2.4.18 — On garde les notations ci-dessus. Soit E // B0 un morphisme étale de schémas. Supposons

qu’il existe un morphisme de Ban0 -variétés rigides B1

// Ean . Il existe alors λ > 1 et un morphisme de Ban0 -variétés

rigides Bλ // Ean .

Demonstration On peut supposer que E = Spec(A0[t1, . . . , tn]/(P1, . . . , Pn)) avec Pi ∈ A0[t1, . . . , tn] tel queJac(P1, · · ·Pn) est inversible sur E. Par hypothèse, on dispose d’un morphisme de A0-algèbres

θ : A0[t1, . . . , tn]/(P1, . . . , Pn) // A1 .

Nous allons montrer que pour λ suffisamment proche de 1, on a θ(ti) ∈ Aλ. Ceci prouvera le lemme.Quitte à remplacer les ti par des multiples bien choisis, on peut supposer que |θ(ti)|∞ < 1 (la norme infinie étant

prise dans A1). Pour ε > 0 on peut trouver λ > 1 et aεi ∈ Aλ tels que |aεi |∞ ≤ 1 et |θ(ti)−aεi |∞ ≤ ε (les normes infiniesétant prises sur Bλ et B1 respectivement).

En prenant que ε et λ− 1 suffisamment petits, on peut rendre les normes |Pi(aε1, . . . , aεn)|∞ arbitrairement petites(la norme infinie étant prise sur Bλ). Par la première partie de la preuve du lemme 1.1.50, la suite récurrente deNewton appliquée à (aε1, . . . , a

εn) converge dans Bλ vers une solution du système (Pi(t1, . . . , tn) = 0)1≤i≤n. L’image de

cette solution dans B1 doit coïncider avec θ(ti)1≤i≤n. On déduit que θ(ti) ∈ Bλ. Le lemme est prouvé. c.q.f.d

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166 Motifs des variétés rigides analytiques II

2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides

Dans cette section, on définit les analogues rigides analytiques des catégories des motifs mixtes DMeff(k) et DM(k)de Voevodsky. Elles seront notées RigDMeff(k) et RigDM(k) respectivement. La construction de ces catégories estformelle et ne dépend que des propriétés élémentaires des correspondances finies et des préfaisceaux avec transfertsdévelopées à la section 2.2. Toutefois, la description des groupes d’homomorphismes entre certains motifs rigides entermes de complexes de cycles à la Suslin, ou d’une manière équivalente, la déscription des modèles B1-locaux decertains motifs utilise d’une manière essentielle les résultats plus élaborés de la section 2.4.

2.5.1 Construction de RigDM(k) et propriétés élémentaires

Soit k un corps complet pour une norme non-archimédienne qu’on ne supposera pas non triviale. Comme engéométrie algébrique, nous utiliserons la topologie de Nisnevich pour la construction des catégories des motifs rigidesau dessus de k. Nous aurons besoin des variantes Nisnevich de la proposition 2.2.23 et de son corollaire 2.2.24.

Proposition 2.5.1 — Soient B une k-variété rigide, Y une B-variété rigide et (fi : Yi // Y )i∈I unrecouvrement Nisnevich par des morphismes étales. Le complexe

(2.68) . . . //

⊕(i1,...,in)∈In

Ztr(Yi1×Y . . . ×Y Yin) // . . . //

⊕i∈I

Ztr(Yi) // Ztr(Y ) // 0

est acyclique en tant que complexe de faisceaux Nisnevich sur la catégorie (SmRig/k)/B des B-variétés rigides lissessur k.

Demonstration On pose Y ′ =∐i∈I Yi. On note "

n

Y Y′ le produit fibré au dessus de Y de n copies de Y ′. On a

Y = "0Y Y′ et on convient que "

n

Y Y′ = ∅ pour n < 0. On désignera par Ztr("·Y Y ′) le complexe de l’énoncé. Soit

x ∈ P(X) un point d’une B-variété rigide X lisse et quasi-compacte sur k. On montrera que la fibre (pour la topologieNisnevich) de Ztr("·Y Y ′) en x est acyclique. Ceci achèvera la preuve de la proposition. En effet, par la proposition1.2.14, ces points forment une famille conservative de foncteurs fibres pour le topos Nisnevich des B-variétés rigideslisses sur k.

Rappelons (voir la définition 1.2.13) que FltNis(x) désigne la catégorie dont les objets sont les couples (U, u) avecU une X-variété rigide étale dans (Et/X)br et u ∈ P(U) au dessus de x tel que k(x) ' k(u). C’est une catégoriecofiltrante. La fibre Nisnevich de Ztr("·Y Y ′) en x ∈ P(X) s’écrit

(2.69) [ . . . // Colim(U,u)∈FltNis(x)

CorB(U, "n

Y Y′) // . . . ].

Soient (U, u) ∈ FltNis(x) et Z ⊂ U×BY une sous-variété rigide fermée finie sur U . Pour W une Y -variété rigide,on note CorZB(U,W ) ⊂ CorB(U,W ) le sous-groupe des correspondances finies aux supports contenus dans le ferméZ×YW ⊂ U×BW . Le groupe CorB(U,W ) est une union filtrante des CorZB(U,W ) lorsque Z parcourt l’ensembledes sous-variétés rigides fermées de U×BY finies sur U . En effet, si a ∈ CorB(U,W ) de support T ⊂ U×BW , lemorphisme T // U×BY est propre puisque T est fini sur U . Son image est un fermé Z tel que a ∈ CorZB(U,W ).Le complexe (2.69) s’écrit alors

(2.70) [ . . . // Colim(U,u)∈FltNis(x), Z⊂U×BY

CorZB(U, "n

Y Y′) // . . . ].

On montrera que le complexe

(2.71) [ . . . // Colim(U,u)∈FltNis(x)/(U0,u0)

CorZ0×U0

U

B (U, "n

Y Y′) // . . . ]

est acyclique pour Z0 ⊂ U0×BY fixé. Par le corollaire 1.2.16, quitte à raffiner U0, on peut supposer que Z0 =∐α∈S Z

α0

avec :

1. la fibre en u0 du morphisme Zα0// U0 contient un seul point zα0 ,

2. il existe un foncteur cofinal FltNis(u0) // FltNis(zα0 ) qui à (U, u) associe (V, v) avec V = Zα0 ×U0

U .

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 167

Ainsi, quitte à raffiner d’avantage U0, on peut supposer qu’il existe un morphisme s0 rendant commutatif

Y ′

Z0

s077

// Y.

On fixe maintenant (U, u) ∈ FltNis(x) dominant (U0, u0). On note Z = Z0×U0U et s la restriction de s0 à Z. On noteaussi Z ′ = Y ′×Y Z. Le morphisme s induit une section Z // Z ′ qu’on appellera encore s. Nous allons montrerque le complexe CorZB(U, "·Y Y ′) ' CorU (U, "·ZZ ′) est acyclique. On note

hn : CorU (U, "n

ZZ′) // CorU (U, "

n+1

Z Z ′)

l’homomorphisme qui à une correspondance finie α associe sa composée à droite avec le morphisme

(s× id) : "n

ZZ′ ' Z×Z("

n

ZZ′) // Z ′×Z("

n

ZZ′) ' "

n+1

Z Z ′ .

On vérifie immédiatement que les hn fournissent une homotopie de l’identité de CorU (U, "·ZZ ′) vers le morphismenul. La proposition est démontrée. c.q.f.d

Remarque 2.5.2 — La variante étale de la proposition 2.5.1 est encore vraie. On peut facilement adapter la preuveprésentée ci-dessus au cas de la topologie étale. Lorsque la valuation de k est non-triviale, on peut également l’adapterau cas de la topologie des recouvrements admissibles, obtenant ainsi une preuve de la proposition 2.2.23 légèrementdifférente de celle donnée à la section 2.2.

Soit B une k-variété rigide lisse et V ⊂ SmRig/B une sous-catégorie pleine vérifiant les propriétés suivantes :

(i) V contient les classes d’isomorphisme de tous ses objets. Elle est stable par coproduit direct fini et par produitdirect (i.e., produit fibré au dessus de B) fini.

(ii) Si X est une B-variété rigide lisse, il existe un recouvrement admissible (Xi)i∈I de X par des ouverts affinoïdesappartenant à Ob(V ).

(iii) Si X est une B-variété rigide lisse appartenant à V et si U ⊂ X est un ouvert affinoïde de X, alors U appartientà V .

(iv) Si U ⊂ (P1k)an est un domaine affinoïde, alors U×kB est dans V .

Dans la suite, le symbole τ désignera l’une des deux topologies usuelles, celle des recouvrements admissibles ou cellede Nisnevich. On supposera que

τ ∈ ra,Nis lorsque la norme de k est non triviale,τ = Nis lorsque la valuation de k est triviale.

On munit V de la topologie τ .

Corollaire 2.5.3 — Soit F un préfaisceau avec transferts sur V . Il existe une unique structure de préfais-ceaux avec transferts sur aτ (F ) tel que le morphisme évident F // aτ (F ) soit un morphisme de préfaisceaux avectransferts.

Demonstration Il est facile d’adapter la preuve du corollaire 2.2.24 au cas plus général du corollaire 2.5.3. Bienentendu, lorsque τ = Nis, on utilisera la propositon 2.5.1 au lieu de la proposition 2.2.23. c.q.f.d

Remarque 2.5.4 — On note atrτ le foncteur qui à un préfaisceau avec transferts F sur V associe le faisceau aτ (F )qu’on munit de sa structure de τ -faisceaux avec transferts du corollaire 2.5.3. Le foncteur

atrτ : PreStr(V ) // Strτ (V )

est un adjoint à gauche de l’inclusion évidente. Ceci est une conséquence immédiate de la preuve du corollaire 2.2.24.

On fixe un anneau de coefficients Λ que l’on supposera commutatif. La catégorie PreStr(V ,Λ) des préfaisceauxavec transferts de Λ-modules est une catégorie abélienne de Grothendieck. Il en est de même de la catégorie Strτ (V ,Λ)des τ -faisceaux avec transferts de Λ-modules. Dans la suite et sauf mention du contraire, un préfaisceau avec transfertssera implicitement supposé défini sur V et à valeurs dans la catégorie des Λ-modules. Pour X ∈ V , on notera Λtr(X)le préfaisceau avec transferts représenté par X (i.e., tel que Λtr(X)(Y ) = CorB(Y,X) ⊗Z Λ pour tout Y ∈ Ob(V )).

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168 Motifs des variétés rigides analytiques II

C’est un objet projectif de PreStr(V ,Λ) qui donc admet suffisamment de projectifs. On dispose de deux structuresde modèles Quillen-équivalentes sur Compl(PreStr(V ,Λ)) dont les équivalences faibles sont les quasi-isomorphismesde préfaisceaux.

Lemme 2.5.5 — Notons W la classe des quasi-isomorphismes de complexes de préfaisceaux avec transferts.1- Soient Cof inj la classe des monomorphismes de complexes de préfaisceaux avec transferts et Fibinj celle des

morphismes ayant la propriété de relèvement à droite par rapport aux flèches dans W ∩ Cof inj. Alors le triplet(W,Cof inj ,Fibinj) est une structure de modèles sur Compl(PreStr(V ,Λ)) appelée la structure injective.

2- Notons Fibproj la classe des épimorphismes de complexes de préfaisceaux avec transferts et Cofproj celle desmorphismes ayant la propriété de relèvement à gauche par rapport aux flèches dans W ∩ Fibproj. Alors le triplet(W,Cofproj ,Fibproj) est une structure de modèles sur Compl(PreStr(V ,Λ)) appelée la structure projective.

Demonstration L’existence de la structure injective découle du théorème de Joyal valable pour une catégorieabélienne de Grothendieck (voir [Joy84]). On peut prouver l’existence de la structure projective sur PreStr(V ,Λ)comme pour les catégories des préfaisceaux de complexes de Λ-modules (voir par exemple la preuve de [Ayo07a,Proposition 4.4.16]). c.q.f.d

Les catégories de modèles du lemme 2.5.5 sont présentables par cofibrations au sens de [Ayo07a, Définition 4.2.39].La catégorie homotopique Ho(Compl(PreStr(V ,Λ))) est la catégorie dérivée D(PreStr(V ,Λ)) de la catégorie abé-lienne des préfaisceaux avec transferts.

Definition 2.5.6 — Soit F· un complexe de préfaisceaux avec transferts. Pour n ∈ Z, on note Hτn(F ) le

τ -faisceau associé au préfaisceau d’homologie Hn(F ).1- Un morphisme A· // B· de complexes de préfaisceaux avec transferts est une équivalence τ -locale, si le

morphisme Hτn(A) // Hτ

n(B) est inversible pour tout n ∈ Z. On note Wτ la classe des équivalences τ -locales.

2- Un complexe K· de préfaisceaux avec transferts est τ -local si pour tout A· // B· dans Wτ , le morphisme

homD(PreStr(V ,Λ))(B,K)∼// homD(PreStr(V ,Λ))(A,K)

est bijectif.

Theoreme 2.5.7 — Les localisations de Bousfield des structures injective et projective sur Compl(PreStr(V ,Λ))suivant la classe des équivalences τ -locales existent. De plus, Wτ est exactement la classe des équivalences faibles desstructures localisées. Ces structures seront notées (Wτ ,Cof inj ,Fibτ−inj) et (Wτ ,Cofproj ,Fibτ−proj).

Demonstration Soit α un cardinal suffisamment grand. On supposera que α est plus grand que le cardinal d’unepetite catégorie équivalente à Cor(V ) et que Compl(PreStr(V ,Λ)) munie de sa structure injective est α-présentablepar cofibrations. On prend alors un cardinal β comme dans [Ayo07a, Proposition 4.2.41], i.e., qui est de la forme 2ν

et qui est plus grand que le cardinal d’une petite catégorie équivalente à la sous-catégorie des objets α-accessibles deCompl(PreStr(V ,Λ)).

On note Rβ la classe des monomorphismes de complexes de préfaisceaux avec transferts de buts β-accessibles quisont des équivalences τ -locales. La classe Rβ est essentiellement petite. Par le théorème de Hirschhorn (voir [Ayo07a,Théorème 4.2.71]), les localisations de Bousfield des structures injective et projective suivant Rβ existent. On noteWRβ

la classe des équivalences faibles de la structure Rβ-localisée. Il suffira de montrer que WRβ= Wτ .

Dans la suite, on travaillera exclusivement avec les structures injectives. Montrons d’abord l’inclusion WRβ⊂Wτ .

Notons LocRβle foncteur de Rβ-localisation (voir [Ayo07a, Proposition 4.2.72]). Soit f : K· // L· une Rβ-

équivalence faible. On a un carré commutatif

K· lK//

f

LocRβ(K)

LocRβ(f)

L· lL// LocRβ

(L),

où LocRβ(f) est une équivalence faible de préfaisceaux, lK et lL sont dans Cell(∇∞(Rβ) ∪ (W ∩ Cof inj)). Comme

Wτ est stable par colimites filtrantes et Wτ ∩Cof inj par co-changements de base, on déduit que lK et lL sont dansWτ . Il vient que f est une équivalence τ -locale puisque Wτ possède la propriété 2 de 3 dans la composition.

Montrons que Wτ ⊂ WRβ. Soit f : K· // L· une équivalence τ -locale et montrons qu’elle est une Rβ-

équivalence faible. On peut supposer que f est un monomorphisme puisque f s’écrit comme la composée d’un mo-nomorphisme suivi d’une équivalence faible. On note Sub(f) l’ensemble des sous-flèches de f (i.e., des sous-objets de

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 169

la flèche f considérée comme objet de la catégorie HOM(1,PreShv(V ,Λ))). On notera Subτ (f) ⊂ Sub(f) le sous-ensemble des sous-flèches qui sont des équivalences τ -locales. On désignera par Subβ(f) et Subτβ(f) les sous-ensemblesde Sub(f) et Subτ (f) formés des sous-flèches de buts β-accessibles. La preuve de [Ayo07a, Lemme 4.4.32] montre éga-lement que l’inclusion Subτβ(f) ⊂ Subβ(f) est cofinale. Notons que les éléments de Subτβ(f) sont des Rβ-équivalencesfaibles.

Pour conclure, on choisit une sous-flèche g : K· // M· de f qui est une Rβ-équivalence faible et qui est

maximale pour cette propriété. Une telle sous-flèche existe par le lemme de Zorn. Supposons par l’absurde queM· ( L·.On a un diagramme d’ensembles ordonnés

(2.72) Subτβ(f)

Subτβ(g)

Subβ(f) // Subβ(g)

où les flèches verticales sont les inclusions évidentes et la flèche horizontale associe à une sous-flèche f0 de f , la sous-flèche g0 = g ∩ f0 de g. Par [Ayo07a, Lemme 4.2.4], la limite projective de (2.72) est cofinale dans Subβ(f). On peutdonc trouver une sous-flèche f0 de f de but β-accessible, non contenue dans g et telle que f0 et g0 = f0 ∩ g sont deséquivalences τ -locales et donc des Rα-équivalences faibles. On déduit que g′ = g ∪ f0 = g

∐g0f0 est également une

Rβ-équivalence faible. Ceci contredit la maximalité de g. D’où le résultat. c.q.f.d

Les catégories de modèles τ -localisées du théorème 2.5.7 sont présentables par cofibrations (cette propriété étantconservée par localisation de Bousfield suivant un ensemble de flèches). On notera Hoτ (Compl(PreStr(V ,Λ))) lacatégorie homotopique des structures τ -localisées. C’est une catégorie triangulée. On montrera qu’elle est indépendante(à équivalences triangulées près) du choix de V . Pour cela, on utilisera la catégorie des τ -faisceaux avec transferts.Étant donné que Strτ (V ,Λ) est une catégorie abélienne de Grothendieck, on a :

Lemme 2.5.8 — Notons W la classe de quasi-isomorphismes de complexes de faisceaux avec transferts et Cofcelle des monomorphismes. On pose Fib = RLP(W ∩ Cof). Le triplet (W,Cof ,Fib) est une structure de modèlessur Compl(Strτ (V ,Λ)).

La catégorie homotopique Ho(Compl(Strτ (V ,Λ))) est la catégorie dérivée D(Strτ (V ,Λ)) de la catégorie abé-lienne des τ -faisceaux avec transferts. Si V ′ ⊂ SmRig/B est une autre sous-catégorie pleine vérifiant les conditions(i) à (iv) de la page 167, on a une équivalence de catégories Strτ (V ,Λ) ' Strτ (V ′,Λ) canonique. On en déduit uneéquivalence de catégories triangulées D(Strτ (V ,Λ)) ' D(Strτ (V ′,Λ)). On a par ailleurs,

Proposition 2.5.9 — Le foncteur atrτ : Compl(PreStr(V ,Λ)) // Compl(Strτ (V ,Λ)) est une équivalencede Quillen à gauche lorsqu’on munit Compl(PreStr(V ,Λ)) de l’une de ses structures τ -localisées.

Demonstration Le foncteur atrτ est exact. Il préserve donc les monomorphismes, i.e., les cofibrations injectives.D’autre part, atrτ (f) est un quasi-isomorphisme si et seulement si f est une équivalence τ -locale. Il vient que atrτ estun foncteur de Quillen à gauche et que Latrτ ' atrτ est conservatif.

Notons inc l’adjoint à droite de atrτ . Étant donné que atrτ se dérive trivialement, le morphisme de counité δ :

Latrτ Rinc∼// id est inversible. D’autre part, si l’on applique Latrτ au morphisme d’unité η : id // Rinc Latrτ

on obtient l’isomorphisme inverse de δ appliqué à Latrτ . Comme le foncteur Latrτ est conservatif, le morphisme d’unitéest inversible. La proposition est prouvée. c.q.f.d

Un carré cartésien de variétés rigides quasi-compactes

(2.73) V //

Y

e

Uu// X

est un carré τ -distingué s’il vérifie les propriétés suivantes :

1. u est une immersion ouverte.

2. e est étale (resp. une immersion ouverte) pour τ = Nis (resp. τ = ra).

3. Si Z // X est un morphisme de k-variétés rigides quasi-compactes tel que U×XZ = ∅, le morphismee×XZ : Y ×XZ

∼// Z est inversible.

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170 Motifs des variétés rigides analytiques II

Rappelons la définition suivant :

Definition 2.5.10 — Soit K· un complexe de préfaisceaux avec transferts sur la catégorie SmRigqc/B des B-variétés rigides lisses quasi-compactes (relativement à k). On dit que K· vérifie la propriété de Brown-Gersten pourla topologie τ si pour tout carré τ -distingué de B-variétés lisses quasi-compactes (2.73), le carré de complexes deΛ-modules

K·(X) //

K·(U)

K·(Y ) // K·(V )

est homotopiquement cartésien (et donc aussi cocartésien).

La propriété de Brown-Gersten ne dépend que de la classe d’isomorphisme de K· dans D(PreStr(SmRigqc/B,Λ)).Elle est stable par petits produits et petits coproduits. Elle vérifie également la propriété 2 de 3 dans les trianglesdistingués. En effet, c’est le cas pour les carrés homotopiquement cartésiens et cocartésiens. On a le résultat suivant :

Proposition 2.5.11 — Soit a : K· // L· un morphisme de complexes de préfaisceaux avec transferts sur

SmRigqc/B. Supposons que a est une équivalence τ -locale et que K· et L· vérifient la propriété de Brown-Gerstenpour la topologie τ . Alors, a est un quasi-isomorphisme de préfaisceaux avec transferts.

Demonstration La proposition découle immédiatement de sa version sans transferts pour les petits sites, i.e., duthéorème 1.2.30. Ce théorème traite uniquement le cas de la topologie Nisnevich, mais le cas de la topologie desrecouvrements admissibles n’est guère plus difficile. c.q.f.d

Theoreme 2.5.12 — Un complexe K· de préfaisceaux avec transferts sur SmRigqc/B est τ -local si et seulementsi il vérifie la propriété de Brown-Gersten pour la topologie τ .

Demonstration Si K· est τ -local, il vérifie la propriété de Brown-Gersten. En effet, étant donné un carré τ -distinguéde B-variétés lisses quasi-compactes (2.73), le carré de τ -faisceaux

(2.74) Λtr(V ) //

Λtr(Y )

Λtr(U) // Λtr(X)

est cartésien (et donc aussi cocartésien) par la proposition 2.5.1. En effet, on montre que le complexe simple associéà (2.74) est quasi-isomorphe au Λtr(−) du complexe de Čech du recouvrement (U → X,Y → X). Il vient que lemorphisme de complexes

(2.75) [Λtr(V )→ Λtr(Y )] // [Λtr(U)→ Λtr(X)]

est une équivalence τ -locale. Comme K· est τ -local, on obtient que

Cone(K(X)→ K(U)) // Cone(K(Y )→ K(V ))

est un quasi-isomorphisme. D’où le résultat.On suppose que K· vérifie la propriété de Brown-Gersten pour la topologie τ . Montrons que K· est τ -local. On

choisit pour cela une cofibration τ -triviale f : K· // L· avec L· un complexe τ -local. Il suffit de montrer que f

est un quasi-isomorphisme de complexes de préfaisceaux. Mais, f est une équivalence τ -locale et L· vérifie la propriétéde Brown-Gersten (par la première partie de la preuve). La proposition 2.5.11 permet de conclure. c.q.f.d

On déduit du théorème précédent qu’un complexe de préfaisceaux avec transferts K· est projectivement τ -fibrant(i.e., fibrant pour la structure projective τ -localisée) si et seulement si il vérifie la propriété de Brown-Gersten.

Corollaire 2.5.13 — Les localisations de Bousfield suivant la classe des équivalences τ -locales des structuresde modèles injective et projective sur Compl(PreStr(SmRigqc/B,Λ)) coïncident avec les localistions de Bousfieldsuivant la classe des morphismes Λtr(Y )/Λtr(V )[n] // Λtr(X)/Λtr(U)[n] (avec n ∈ Z) obtenus à partir des carrésτ -distingués (2.73).

Corollaire 2.5.14 — Soit K· un complexe de préfaisceaux avec transferts sur V . Pour X dans V , le morphismecanonique

(2.76) H0τ (X,K·) ∼

// homHoτ (Compl(PreStr(V ,Λ)))(Λtr(X),K·)

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 171

est inversible. En particulier, le préfaisceau d’hypercohomologie H0τ (−,K·) est naturellement un préfaisceau avec trans-

ferts sur V .

Demonstration On peut supposer que V = SmRig/B. En effet, l’hypercohomologie dépend uniquement du τ -faisceau associé à K· et ce dernier est naturellement défini sur SmRig/B. De même, Hoτ (Compl(PreStr(V ,Λ))) nedépend pas, à équivalence près, du choix de V .

Soit K· // L· une équivalence τ -locale avec L· un complexe de préfaisceaux avec transferts τ -local. Les deux

membres de (2.76) ne changent pas si l’on remplace K· par L·. On peut donc supposer que K· est τ -local.Pour X une B-variété rigide lisse, on note K|X la restriction de K au petit site (Et/X, τ). Soit r : K|X // I

un équivalence τ -local avec I· un complexe de préfaisceaux τ -local sur le petit site Et/X. Il s’agit de monter que r estune équivalence faible.

Supposons d’abord que X est quasi-compacte. Par le théorème 2.5.12, K· vérifie la propriété de Brown-Gerstenpour la topologie τ . De même, par le corollaire 1.2.32 (ou sa variante pour la topologie des recouvrements admissibles)I· vérifie la propriété de Brown-Gersten pour la topologie τ . Le résultat découle alors du théorème 1.2.30.

Pour le cas général, on écrit X comme une union croissante X = ∪n∈NXn avec Xn des ouverts quasi-compacts deX. On a Λtr(X) ' ColimnΛtr(Xn) dans la catégorie des τ -faisceaux avec transferts. Comme K· est τ -local, K·(X) estquasi-isomorphe à la limite homotopique des K·(Xn). De même, I·(X) est quasi-isomorphe à la limite homotopiquedes I·(Xn). D’où le résultat. c.q.f.d

La troisième étape consiste à localiser par rapport aux B1-équivalences faibles.

Definition 2.5.15 — On note (WB1−τ ,Cof inj ,FibB1−τ−inj) et (WB1−τ ,Cofproj ,FibB1−τ−proj) les structuresde modèles (B1, τ)-locales sur Compl(PreStr(V ,Λ)) obtenues par localisation de Bousfield suivant la classe desmorphismes Λtr(B1

X)[n] // Λtr(X)[n] avec n ∈ Z et X ∈ Ob(V ) des structures τ -locales. On pose

RigDMeffτ (B,Λ) = Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))[(WB1−τ )−1].

C’est la catégorie des motifs mixtes des variétés rigides. Lorsque τ = Nis, on parlera simplement de structures B1-locales et on note RigDMeff(B,Λ) la catégorie homotopique.

La catégorie RigDMeffτ (B,Λ) est équivalente aux catégories homotopiques HoB1−τ (Compl(PreStr(V ,Λ))) des

structures B1-locales sur les catégories Compl(PreStr(V ,Λ)). On a aussi une structure B1-locale (WB1 ,Cof ,FibB1)sur Compl(Strτ (V ,Λ)) égale à la localisation de Bousfield suivant la même classe utilisée dans la définition 2.5.15.La catégorie homotopique de cette structure est également équivalente à RigDMeff

τ (B,Λ).

Definition 2.5.16 — Le motif effectif d’une B-variété rigide lisse X est le préfaisceau avec transferts Λtr(X)placé en degré zero et considéré comme un objet de RigDMeff(B,Λ). On le notera Meff(X).

Le lemme suivant est une évidence.

Lemme 2.5.17 — Soit K· un complexe de préfaisceaux avec transferts sur V projectivement τ -fibrant. Alors K·est B1-local si et seulement si K·(X) // K·(B1

X) est un quasi-isomorphisme pour tout X dans V .

Avant de passer à la dernière étape de la construction faisons une liste de quelques adjonctions de Quillen utiles.On dispose d’un foncteur évident d’oubli de transferts otr : PreStr(V ,Λ) // PreShv⊕(V ,Λ) à valeurs dans lacatégorie des préfaisceaux additifs sur V . Ce foncteur admet un adjoint à gauche atr, qu’on appellera foncteur d’ajoutdes transferts. Il est construit de la manière suivante. Soit F un foncteur additif de Λ-modules sur V . On peut voir Fcomme un foncteur additif Λ-linéaire

F : Λ(V )op //Mod(Λ)

où Λ(V ) est la catégorie additive ayant même objets que V et tel que homΛ(V )(X,Y ) est le Λ-module libre surl’ensembles des morphismes de B-variétés rigides d’une composante connexe de X vers Y . On note Λ(V )/F la catégoriedont les objets sont les couples (X, a) avec X ∈ V et a ∈ F (X). Une flèche f : (Y, b) → (X, a) est un élémentf ∈ homΛ(V )(Y,X) tel que b = f∗(a).

Lemme 2.5.18 — Soit F un préfaisceau additif sur V à valeurs dans la catégorie des Λ-modules. Le foncteurhomPreShv(V ,Λ)(F, otr(−)) est coreprésenté par

(2.77) atr(F ) = Colim(X,a)∈Λ(V )/F

Λtr(X)

(la colimite étant prise dans la catégorie des préfaisceaux avec transferts). Le foncteur otr admet donc un adjoint àgauche donné sur les objets par (2.77).

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172 Motifs des variétés rigides analytiques II

Demonstration Soit H un préfaisceau avec transferts de Λ-modules. Se donner un morphisme de préfaisceaux avectransferts de atr(F ) dans H revient à se donner une famille d’éléments h(X,a) ∈ H(X) pour (X, a) ∈ Λ(V )/F telleque pour tout f ∈ homΛ(V )(Y,X) on a f∗h(X,a) = hY,f∗(a). La donnée d’une telle famille est équivalente à la donnéed’un morphisme de préfaisceaux additifs de Λ-modules de F vers otr(H). c.q.f.d

Le foncteur atr commute aux colimites. Sa restriction à Λ(V ) (vue comme une sous-catégorie de PreShv⊕(V ,Λ)via le plongement de Yoneda) coïncide avec l’inclusion évidente Λ(V ) ⊂ Cor(V ) (modulo le plongement de Yoneda).De plus, atr est déterminé (à un unique isomorphisme près) par ces deux propriétés.

Proposition 2.5.19 — Le foncteur atr : Compl(PreShv(V ,Λ)) // Compl(PreStr(V ,Λ)) est de Quillenà gauche lorsqu’on munit la source et le but des structures projectives, projectives τ -locales ou projectives (B1, τ)-locales.On dispose en particulier d’un foncteur triangulé

Latr : RigDAeffτ (B,Λ) // RigDMeff

τ (B,Λ)

qu’on notera simplement atr lorsque cela n’induit pas le lecteur en erreur.

Demonstration L’adjonction (atr, otr) est de Quillen relativement aux structures projectives non localisées. Eneffet, otr préserve les épimorphismes et les quasi-isomorphismes puisqu’il est exact.

Montrons que cette adjonction passe à la localisation par les équivalences τ -locales. Il suffit pour cela de mon-trer que otr préserve les objets τ -locaux. Soit K· un complexe de préfaisceaux avec transferts τ -local. Soit u :

otr(K·) // I· une équivalence τ -locale avec I· un complexe de préfaisceaux additifs τ -local. Montrons que u

est un quasi-isomorphisme. Soit X une B-variété rigide dans V . Par le corollaire 2.5.14, on dipose (pour i ∈ Z) d’unisomorphisme naturel Hi(K·(X)) ' H−iτ (X,K·). De même, on a Hi(I·(X)) ' H−iτ (X, otr(K)). En effet, les petitssites (Et/X, τ) avec X ∈ V forment une P -structure sur le site (V , τ). Il vient que Hi(K·(X)) ' Hi(I·(X)). D’où lerésultat. Le passage de la τ -localisation à la (B1, τ)-localisation est immédiat et sera laissé aux lecteurs. c.q.f.d

Supposons que B est un k-affinoïde lisse. Rappelons qu’on dispose d’un foncteur Rig : Sm/B // SmRig/B qui à

un B-schéma lisse de type fini X associe la B-variété rigide Xan. On note également Rig : Cor(B) // RigCor(B)

le foncteur additif qui à une B-correspondance finie élémentaire Z ⊂ X ×B Y entre deux B-schémas lisses X et Yassocie la correspondance finie Zan ⊂ Xan×BY an. Le carré

Sm/BRig

//

SmRig/B

Cor(B)Rig// RigCor(B)

est clairement commutatif. Étant donné un préfaisceau avec transferts G sur SmRig/B, on pose Rig∗(G) = G Rig. Lefoncteur Rig∗ possède un adjoint à gauche

(2.78) Rig∗ : PreStr(Sm/B,Λ) // PreStr(SmRig/B,Λ) .

En effet, si F est un préfaisceau avec transferts sur Sm/B, la preuve du lemme 2.5.18 convenablement adaptée montreque

(2.79) Rig∗F = Colim(X,a)∈Cor(B,Λ)/F

Λtr(Xan)

coreprésente homPreStr(Sm/B,Λ)(F,Rig∗(−)). Ci-dessus, Cor(B,Λ) = Cor(B) ⊗Z Λ et Cor(B,Λ)/F est la catégoriedont les objets sont les couples (X, a) avec X un B-schéma lisse et a ∈ F (X). Une flèche (Y, b) → (X, a) est unecorrespondance finie f ∈ CorB(Y,X)⊗Z Λ telle que b = f∗(a). De même, on dispose d’un adjoint à gauche

(2.80) Rig∗ : PreShv⊕(Sm/B,Λ) // PreShv⊕(SmRig/B,Λ)

donné par une formule analogue à (2.79), où Cor(B,Λ) est remplacé par Λ(Sm/B) et Λtr(Xan) par Λ(Xan).

Lemme 2.5.20 — Notons inc : AfndCor(B) ⊂ RigCor(B) l’inclusion évidente et inc∗ le foncteur de compo-sition à gauche par inc. Alors, la composée

inc∗ Rig∗ : PreStr(Sm/B,Λ) // PreStr(SmAfnd/B,Λ)

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 173

est un foncteur exact.

Demonstration Pour X un B-affinoïde lisse, on note L (X) l’ensemble des sous-Γ(B,O)-algèbres lisses de typefini de Γ(X,O). Par le théorème de Popescu [Pop85, Pop86], L (X) est un ensemble ordonné filtrant et Γ(X,O) =ColimM∈L (X)M . Soit F un préfaisceau avec transferts sur Sm/B. On pose

θ(F )(X) = ColimM∈L (X)

F (Spec(M)).

Supposons donnée une correspondance finie α ∈ CorB(Y,X) ⊗Z Λ entre deux B-affinoïdes lisses et un élément a ∈θ(F )(X). Nous allons définir un élément α∗(a) ∈ θ(F )(Y ). On suppose que a est égale à la classe de a0 ∈ F (Spec(M0))pour un certain M0 ∈ L (X). Il existe alors N0 ∈ L (Y ) et α0 ∈ CorB(Spec(N0),Spec(M0)) faisant commuter le carré

Spec(Γ(Y,O))α//

Spec(Γ(X,O))

Spec(N0)α0

// Spec(M0).

On vérifie immédiatement que la classe de α∗0(a0) dans θ(F )(Y ) est indépendante des choix de A0, a0 et B0. C’est notreélément α∗(a). Cette action des correspondances finies est compatible à la composition et fait de θ(F ) un préfaisceauavec transferts sur SmAfnd/B.

Étant donné un préfaisceau avec transferts F sur Sm/B, on construit un morphisme

r : θ(F ) // inc∗ Rig∗(F )

de la manière suivante. Soit U un B-affinoïde lisse et s ∈ θ(F )(U) représenté par s0 ∈ F (Spec(M0)) pour M0 ∈ L (U).Le couple (Spec(M0), s0) ∈ Cor(B,Λ)/F et le morphisme U // Spec(M0)an déduit de l’inclusion M0 ⊂ Γ(U,O)

définissent une section r(s) dans Rig∗(F )(U) = Colim(X,a)∈Cor(B,Λ)/FCorB(U,Xan)⊗Z Λ. Il est immédiat de voir quer est un morphisme de préfaisceaux avec transferts et qu’il est naturel en F .

Nous allons montrer que r est inversible. Ceci achèvera la preuve du lemme puisque θ est clairement exact. Commeθ et inc∗ Rig∗ commutent aux colimites, il suffit de montrer que r est inversible après évaluation en F = Λtr(X) avecX un B-schéma lisse. Mais pour U un B-affinoïde lisse, on a par la proposition 1.1.20

ColimM∈L (U)

CorB(Spec(M), X) ' CorB(Spec(Γ(U,O)), X) ' CorB(U,Xan).

Ceci termine la preuve du lemme. c.q.f.d

Remarque 2.5.21 — L’analogue du lemme précédent pour les préfaisceaux additifs est également valable et sedémontre de la même manière en identifiant inc∗ Rig∗ avec le foncteur θ. Cette identification montre d’ailleurs quele carré

PreStr(Sm/B,Λ)otr

//

inc∗Rig∗

PreShv⊕(Sm/B,Λ)

inc∗Rig∗

PreStr(SmAfnd/B,Λ)otr// PreShv⊕(SmAfnd/B,Λ)

commute à un isomorphisme canonique près.

Supposons maintenant que G est un τ -faisceau avec transferts sur SmRig/B. En utilisant le théorème 1.2.39, onvoit que Rig∗G est un faisceau Nisnevich. On a donc un foncteur

Rig∗ : Strτ (SmRig/B,Λ) // StrNis(Sm/B,Λ) .

Ce foncteur possède un adjoint à gauche qui à un faisceau Nisnevich avec transferts F associe le τ -faisceau atrτ Rig∗(F ).

On note encore Rig∗ cet adjoint. Bien entendu, on dispose également des variantes sans transferts de ces foncteurs.

Corollaire 2.5.22 — Le foncteur Rig∗ : StrNis(Sm/B,Λ) // Strτ (SmRig/B,Λ) est exact.

Demonstration Comme Rig∗ est un adjoint à gauche, il commute aux colimites. Il s’agit de montrer que Rig∗

commute aux limites finies. Modulo l’equivalence de catégories Strτ (SmAfnd/B,Λ) ' Strτ (SmRig/B), le foncteur del’énoncé est la composée

StrNis(Sm/B,Λ) // PreStr(Sm/B,Λ)inc∗Rig∗

// PreStr(SmAfnd/B,Λ)atrτ// Strτ (SmAfnd/B,Λ) .

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174 Motifs des variétés rigides analytiques II

Le premier foncteur commute aux limites puisqu’il est adjoint à droite du foncteur atrNis. Le troisième foncteur estexact, puisqu’il en est ainsi du foncteur faisceau associé. Enfin, le foncteur inc∗ Rig∗ est exact par le lemme 2.5.20.D’où le résultat. c.q.f.d

Les mêmes considérations permettent de démontrer le résultat suivant, qui toutefois ne sera pas utilisé dans lasuite et dont la preuve est laissée en exercice :

Lemme 2.5.23 — Le couple de foncteurs adjoints (Rig∗,Rig∗) : ShvNis(Sm/B) // Shvτ (SmRig/B) est unmorphisme de topos, i.e., le foncteur Rig∗ est exact.

On peut maintenant démontrer le résultat suivant :

Theoreme 2.5.24 — On suppose que B est un k-affinoïde lisse. Le foncteur

(2.81) Rig∗ : Compl(PreStr(Sm/B,Λ)) // Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))

est de Quillen à gauche lorsque les catégories ci-dessus sont munies des structures suivantes :

1. les structures projectives sur la source et le but,

2. la structure projective Nis-locale sur la source et la structure projective τ -locale sur le but,

3. la structure projective A1-locale sur la source et la structure projective (B1, τ)-locale sur le but.

En particulier, on dispose d’un couple de foncteurs adjoints

(Rig∗,Rig∗) : DMeff(B,Λ) // RigDMeffτ (B,Λ) .

Demonstration Le foncteur Rig∗ est un foncteur de Quillen relativement aux structures projectives non localisées.En effet, Rig∗ préserve clairement les quasi-isomorphismes et les surjections entre complexes de préfaisceaux avectransferts.

Pour montrer que Rig∗ est de Quillen à gauche relativement aux structures Nis-locale et τ -locale, il suffit demontrer que le foncteur dérivé à gauche LRig∗ envoie les équivalences Nis-locales sur des équivalences τ -locales. Soitf : A· // B· une équivalence Nis-locale entre complexes de préfaisceaux avec transferts sur Sm/B projectivement

cofibrants. Pour montrer que Rig∗(f) est une équivalence τ -locale, il suffit de vérifier que aτRig∗(f) ' aτRig

∗(aNisf)est un quasi-isomorphisme. Ceci découle du corollaire 2.5.22.

Pour terminer, il reste à montrer que LRig∗ envoie le morphisme Λtr(X)0// Λtr(A1

X) sur une équivalence B1-

locale pour tout B-schéma lisse X. En d’autres termes, il s’agit de montrer que Λtr(Xan) // Λtr((A1

X)an) est

une équivalence B1-locale. La multiplication B1k×(A1

X)an // (A1X)an induit une B1-homotopie entre l’identité de

(A1X)an et 0 p avec p est la projection de (A1

X)an sur Xan. Ceci montre que p est l’inverse à B1-homotopie près de 0.Le théorème est démontré. c.q.f.d

La proposition ci-dessous découle immédiatement du corollaire 2.5.22.

Proposition 2.5.25 — On suppose que B est un k-affinoïde lisse. Le foncteur

(2.82) Rig∗ : Compl(StrNis(Sm/B,Λ)) // Compl(Strτ (SmRig/B,Λ))

est de Quillen à gauche lorsque les catégories ci-dessus sont munies des structures suivantes :

1. les structures injectives sur la source et le but,

2. la structure injective A1-locale sur la source et la structure injective (B1, τ)-locale sur le but.

La catégorie PreStr(V ,Λ) est une catégorie monoïdale symétrique et unitaire. Étant donnés deux préfaisceauxavec transferts F et G, on a par définition

F ⊗tr G = ColimU∈Cor(V )/F, V ∈Cor(V )/G

Λtr(U×BV ).

Un objet unité est donné par Λtr(idB). On a le lemme suivant :

Lemme 2.5.26 — La catégorie de modèles (Compl(PreStr(V ,Λ)),WB1−τ ,Cofproj ,FibB1−τ−proj) munie de sastructure monoïdale est une catégorie de modèles monoïdale (voir [Ayo07a, Définition 4.1.57]).

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 175

On note T (ou TB s’il y a une confusion possible) le conoyau de la section unité Λtr(idB) // Λtr(GmanB ) . C’est

un objet projectivement cofibrant puisque facteur direct de Λtr(GmanB ).

Definition 2.5.27 — On note MT (V ,Λ) la catégorie SpectTΣ(Compl(PreStr(V ,Λ))) munie de sa structurede modèles stable (WB1−τ−st,Cofproj ,FibB1−τ−st−proj) déduite de la structure projective B1-locale. On note

RigDMτ (B,Λ) = HoB1−τ−st(MT (SmRig/B,Λ)) = MT (SmRig/B,Λ)[(WB1−τ−st)−1].

C’est aussi, à équivalence près, la catégorie homotopique de MT (V ,Λ). Lorsque τ = Nis, on notera égalementRigDM(B,Λ) cette catégorie.

La catégorie MT (V ,Λ) est encore une catégorie monoïdale symétrique par [Ayo07a, Théorème 4.3.76]. Il vientque RigDMτ (B,Λ) est une catégorie triangulée monoïdale symétrique. On dispose du foncteur de suspension infinie

Sus0T : Compl(PreStr(V ,Λ)) // MT (SmRig/B,Λ)

qui à un complexe de préfaisceaux avec transferts K associe le T -spectre symétrique (T⊗trn ⊗tr K)n∈N. Ce foncteur

est de Quillen à gauche relativement aux structures projectives. Il est également monoïdal. On a donc un foncteurtriangulé monoïdal

Sus0T : RigDMeff

τ (B) // RigDMτ (B) .

De plus, Sus0T (T ) est un objet inversible dans RigDMτ (B,Λ) (comme il découle de [Ayo07a, Théorème 4.3.38]).

Definition 2.5.28 — Le motif d’une B-variété rigide lisse X est le T -spectre symétrique Sus0T (Λtr(X)) considéré

comme un objet de RigDM(B,Λ). On le notera M(X).

L’objet T est B1-équivalent au conoyau T qc de la section unité Λtr(idB) // Λtr(∂B1B) . On déduit que le

foncteur homRigDMeffτ (B)(T,−) commute aux colimites filtrantes dans Compl(PreStr(SmRig/B,Λ)). Par ailleurs, la

permutation (123) ∈ Σ3 opère par l’identité sur T⊗tr3 dans RigDMeff

τ (B). Ceci découle par exemple de la propriétécorrespondante en géométrie algébrique et du fait que Rig∗ est un foncteur de Quillen à gauche. Par [Ayo07a, Théorème4.3.79], le foncteur

(−⊗1 Σ) : SpectT (Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))) // SpectΣT (Compl(PreStr(SmRig/B,Λ)))

est une équivalence de Quillen à gauche relativement aux structures projectives (B1, τ)-locales stables. On peut alorsappliquer [Ayo07a, Théorème 4.3.61] pour obtenir le résultat suivant :

Proposition 2.5.29 — Soient A et B deux objets de RigDMeffτ (B). Le morphisme évident

Colimn∈N

homRigDMeffτ (B)(T

⊗n ⊗A, T⊗n ⊗B) // homRigDMτ (B)(Sus0T (A),Sus0

T (B))

est inversible.

En utilisant [Ayo07a, Proposition 4.3.57], on obtient les versions stables des foncteurs de Quillen à gauche de laproposition 2.5.19 et du théorème 2.5.24. On laissera aux lecteurs le soin de lister ces adjonctions de Quillen. En raisonde son importance, on note uniquement :

Lemme 2.5.30 — Le foncteur Rig∗ : MT (Sm/B,Λ) // MT (SmRig/B,Λ) est de Quillen à gauche lorsqu’onmunit la source de sa structure projective A1-locale stable et le but de sa structure projective (B1, τ)-stable. On par-ticulier, on a un foncteur triangulé et monoïdal Rig∗ : DM(B,Λ) // RigDMτ (B,Λ) qui envoie le motif d’unB-schéma lisse X sur le motif de la B-variété rigide Xan.

2.5.2 Motifs rigides des variétés algébriques et applicationsSoit k un corps complet pour une valuation non-archimédienne qu’on supposera non-triviale. On fixe π ∈ k∨−0.

On utilisera les résultats de la section 2.4 pour étudier les catégories RigDMeff(k,Λ) et RigDM(k,Λ). On montrerasous-certaines conditions techniques, l’existence d’une t-structure homotopique et la propriété de simplification qui setraduit en la pleine fidélité du foncteur de suspension infinie Sus0

T : RigDMeff(k,Λ) // RigDM(k,Λ) .

Le foncteur SingB1

· (−) a été introduit dans la définition 2.2.41. On a le lemme suivant.

Lemme 2.5.31 — Soient B une k-variété rigide lisse et K· un complexe de préfaisceaux avec transferts sur

SmRig/B. Alors, le morphisme évident K· // SingB1

· (K) est une B1-équivalence faible.

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176 Motifs des variétés rigides analytiques II

Demonstration Munissons la catégorie HOM(∆op,Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))) de sa structure projective dé-duite de la structure (B1, τ)-locale sur Compl(PreStr(SmRig/B,Λ)). On dispose d’une adjonction de Quillen

(p#, p∗) : HOM(∆op,Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))) // Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))

avec p∗ le foncteur qui à un objet † associe l’objet simplicialement constant p∗(†) de valeur †, i.e., tel que p∗(†)(n) = †pour tout n ∈ N.

Notons M· l’objet simplicial dans la catégorie des complexes de préfaisceaux avec transferts qui à n associe le

complexe M·(n) = hom(∆nrig×kB,K·). Rappelons que SingB1

· (K) est le complexe simple associé à M·. Par unrésultat standard, on a un isomorphisme canonique dans la catégorie dérivée des complexes de préfaisceaux avectransferts :

SingB1

· (K) ' Lp#M·.De même, on a K· ' Lp#p

∗(K) puisque ∆ admet un objet final. De plus, modulo ces identifications, le morphismede l’énoncé correspond à l’image par Lp# du morphisme évident p∗K· // M· .

Pour conclure, il suffit de montrer que K· // M·(n) est une B1-équivalence faible pour tout n ∈ N. On

montrera que a : K· // hom(BnB ,K·) admet un inverse à B1-homotopie près. Notons b : hom(BnB ,K·) // K·le morphisme induit par la section nulle de BnB . Il est clair que b a = id. On a par ailleurs une B1-homotopie h entrea b et l’identité :

h : Λtr(B1B)⊗tr hom(BnB ,K·) // hom(BnB ,K·)

déduite via l’adjonction (Λtr(B1B)⊗tr −,hom(B1

B ,−)) du morphisme

hom(BnB ,K·)hom(m,−)

// hom(B1B×BBnB ,K·) ,

avec m l’action par homothétie de B1B sur BnB . Le lemme est démontré. c.q.f.d

Le théorème clef, sur lequel reposeront tous les résultats de ce paragraphe est le suivant.

Theoreme 2.5.32 — Supposons que k est d’égale caractéristique nulle ou que Λ est une Q-algèbre. Soient B unk-affinoïde lisse et K· un complexe de préfaisceaux avec transferts sur Sm/B.

1- Le morphisme Rig∗(K) // SingB1

· (Rig∗(K)) est une B1-équivalence faible et le complexe SingB1

· (Rig∗(K)),

vu comme un objet deHoτ (Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))) ' D(Strτ (SmRig/B,Λ)),

est B1-local. Il en découle qu’un remplacement τ -fibrant (SingB1

· (Rig∗(K)))τ−fib de SingB1

· (Rig∗(K)) est un remplace-ment (B1, τ)-fibrant de Rig∗(K).

2- Soient U1, . . . , Ur ⊂ (A1k)an des ouverts affinoïdes et posons U = U1×k . . . ×kUr. Le morphisme

Hom(Λtr(U×kB),SingB1

· (Rig∗(K))) // Hom(Λtr(U×kB), (SingB1

· (Rig∗(K)))τ−fib)

est une équivalence τ -locale de complexes de préfaisceaux avec transferts.

Demonstration Le fait que Rig∗(K) // SingB1

· (Rig∗(K)) est une B1-équivalence faible est mis pour mémoire

(voir le lemme 2.5.31). On divise la preuve du théorème en trois parties. Les deux premières traitent le cas particulieroù K· est un préfaisceau avec transferts représentable par un B-schéma lisse. La troisième est une réduction du casgénéral à ce cas particulier.Partie A : Ici on établit la première partie de l’énoncé pour K· le préfaisceau Λtr(X) placé en degré zero avec X un

B-schéma lisse. Il s’agit de montrer que SingB1

· (Λtr(Xan)) est B1-local dans la catégorie homotopique de la structure

τ -locale.On peut écrire ce complexe comme la limite homotopique (dans la catégorie dérivée des préfaisceaux avec transferts)

de ses tronqués τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)). Soit V un B-affinoïde lisse de dimension d. Le petit site (Et/V, τ) étant de

dimension cohomologie plus petite que d, le morphisme

Γ(V, (τ≤n+1SingB1

· (Λtr(Xan)))τ−fib) // Γ(V, (τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)))τ−fib)

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 177

induit des isomorphismes sur l’homologie en degrés plus petits que n− d. On déduit immédiatement que

Holimn∈Nτ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)) // Holimn∈N(τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)))τ−fib

est une équivalence τ -locale. Il vient que SingB1

· (Λtr(Xan)) est également la limite homotopique de ses tronqués

τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)) dans la catégorie homotopique de la structure τ -locale Hoτ (Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))).

La propriété d’être B1-local est stable par limites homotopiques. Il suffit donc de montrer que τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan))

est B1-local. Par ailleurs, la propriété d’être B1-local vérifie la propriété 2 de 3 dans les triangles distingués. Une induc-tion facile nous ramène alors à montrer que le préfaisceau d’homologie F = Hn(SingB1

· (Λ(Xan))) est B1-local (toujoursdans la catégorie homotopique de la structure τ -locale). Ceci équivaut à dire que les préfaisceaux de cohomologieHiτ (−, F ) sont invariants par homotopie. Le résultat découle alors des théorèmes 2.4.9 et 2.4.14.

Partie B : On passe à la seconde partie du théorème toujours pour K· = Λtr(X). Montrons qu’il suffit de vérifier quele morphisme de complexes

(2.83) hom(U×kB, τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan))) // hom(U×kB, (τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)))τ−fib)

est une équivalence τ -locale pour tout n ∈ N. Soit V un B-affinoïde lisse de dimension plus petite que d. En remarquantque hom(U×kB, τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan))) ' τ≤nhom(U×kB, SingB1

· (Λtr(Xan))) on déduit comme dans la première partie

de la preuve que

Γ(V, (hom(U×kB, τ≤n+1SingB1

· (Λtr(Xan))))τ−fib) // Γ(V, (hom(U×kB, τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan))))τ−fib)

induit des isomorphismes sur l’homologie en degrés plus petits que n− d. On déduit immédiatement que

HoLimn∈Nhom(U×kB, τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan))) // HoLimn∈N(hom(U×kB, τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan))))τ−fib

est une équivalence τ -locale. En d’autres termes, hom(U×kB, SingB1

· (Λtr(Xan))) est la limite homotopique, calculée

par rapport à la structure τ -locale, des hom(U×kB, τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan))). De même,

Holimn∈Nτ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)) // Holimn∈N(τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)))τ−fib

est une équivalence τ -locale. Ceci entraine que HoLimn∈N(τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)))τ−fib est un remplacement τ -fibrant

de SingB1

· (Λtr(Xan)). On déduit donc que hom(U×kB, (SingB1

· (Λtr(Xan)))τ−fib) est la limite homotopique, calculée

par rapport à la structure τ -locale, des hom(U×kB, (τ≤nSingB1

· (Λtr(Xan)))τ−fib). La réduction souhaitée découle

maintenant du fait que la limite homotopique calculée par rapport à la structure τ -locale préserve les équivalenceτ -locales.

Montrons que (2.83) est une équivalence τ -locale. Une récurrence facile, utilisant la propriété 2 de 3 dans lestriangles distingués de complexes de préfaisceaux avec transferts, nous ramène à montrer que

hom(U×kB,F ) // hom(U×kB, (F )τ−fib)

est une équivalence τ -locale avec F = Hn(SingB1

· (Λtr(Xan)). Ceci revient à dire que le τ -faisceau associé à

Giτ : V ∈ SmAfnd/B Hiτ (U×kV, F )

est isomorphe à aτ (F ) pour i = 0 et nul pour i > 0. Par le théorème 2.4.14, F est un préfaisceau avec trans-ferts faiblement surconvergent et invariant par homotopie. Par la proposition 2.1.35, on sait que Gira = GiNis sontdes préfaisceaux faiblement surconvergents. Pour conclure, il suffit de montrer que ColimW∈Flt(v)H

0ra(U×kW,F ) '

ColimW∈Flt(v)F (U×kW ) et ColimW∈Flt(v)Hira(U×kW,F ) = 0 pour i > 0 avec v ∈ M(V ) un point générique d’un

B-affinoïde lisse V .Par le lemme 2.2.59, la colimite ColimW∈Flt(v)H

ira(U×kW,F ) = 0 s’identifie avec Hi

ra(U×kk(v), Fv) avec Fv la fibrede F en v. (On utilisera le lemme 2.4.10 pour se ramener au cas où il existe une sous-variété rigide localement ferméeZ ⊂ V lisse sur k, contenant v et tel que mC,v = 0.) Le résultat recherché découle maintenant du théorème 2.4.2 parune induction facile sur le nombre r de facteurs dans U .Partie C : Notons T la sous-catégorie triangulée de D(PreStr(Sm/B,Λ)) dont les objets sont les complexes depréfaisceaux avec transferts K· tels que :

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178 Motifs des variétés rigides analytiques II

– SingB1

· LRig∗(K) est B1-local dans Hoτ (Compl(PreStr(SmRig/B,Λ))).

– hom(U×kB, SingB1

· LRig∗(K)) // hom(U×kB, (SingB1

· LRig∗(K))τ−loc) est une équivalence τ -locale.

Il est clair que T est une sous-catégorie triangulée de D(PreStr(Sm/B,Λ)). Elle est stable par sommes infinies.En effet, les foncteurs SingB1

· , hom(U×kB,−) et (−)τ−loc commutent aux sommes infinies. Par les deux premièresparties de la preuve, on sait que Λtr(X) ∈ Ob(T) pour tout B-schéma lisse X. On déduit immédiatement que T =D(PreStr(Sm/B,Λ)).

Pour passer de LRig∗(K) à Rig∗(K) on utilise que le morphisme évident LRig∗K // Rig∗K induit un quasi-isomorphisme après restriction à SmAfnd/B, puisque inc∗ Rig∗ est exact par le lemme 2.5.20. c.q.f.d

Le résultat ci-dessous est une conséquence immédiate du théorème 2.5.32.

Corollaire 2.5.33 — Soient B un k-affinoïde lisse et X un B-schéma lisse. Soient U1, . . . , Ur des ouvertsaffinoïdes de (A1

k)an. On pose U = U1×k . . . ×kUr. Pour i ∈ N, le groupe homRigDMeff (B)(Meff(U×kB)[i],Meff(Xan))

est canoniquement isomorphe à HiΓ(U×kB, SingB1

· (Λtr(Xan))) = Hi(CorB(U×kB,Xan)⊗Z Λ).

Soit X une k-variété rigide quasi-compacte. Rappelons qu’on dit que X admet bonne réduction si X possède unmodèle formel lisse sur k. On dit que X admet potentiellement bonne réduction s’il existe une extension finie séparablel/k telle que X⊗kl admet bonne réduction en tant que l-variété rigide. On a le théorème suivant.

Theoreme 2.5.34 — On suppose que Λ est une Q-algèbre. La catégorie HoNis(Compl(PreStr(SmRig/k,Λ)))(et donc aussi RigDMeff(k,Λ)) est compactement engendrée (en tant que catégorie triangulée avec petites sommes)par les objets Λtr(X) avec X une k-variété rigide quasi-compacte admettant potentiellement bonne réduction.

Demonstration La catégorie triangulée avec sommes infinies HoNis(Compl(PreStr(SmRig/k,Λ))) est compac-tement engendrée par les Λtr(†) avec † des k-variétés rigides quasi-compactes. Il s’agit de montrer qu’on peut serestreindre aux † admettant potentiellement bonne réduction. On notera provisoirement T(k) la sous-catégorie trian-gulée avec sommes infinies engendrée par les Λtr(†) avec † admettant potentiellement bonne réduction. On montreraque si U est une k-variété rigide quasi-compacte et lisse, on a Λtr(U) ∈ Ob(T(k)). On divise la preuve en plusieursétapes.Étape 1 : On suppose dans cette étape que k est de caractéristique p > 0. Soit k′/k une extension finie totalementinséparable. Par le lemme 2.4.10, le foncteur

−⊗k k′ : AfndCor(k)⊗ Λ // AfndCor(k′)⊗ Λ

est une équivalence de catégories. On en déduit une équivalence de catégories

((k′/k)∗, (k′/k)∗) : HoNis(Compl(PreStr(SmRig/k,Λ)))∼// HoNis(Compl(PreStr(SmRig/k′,Λ))) .

Montrons que l’équivalence ci-dessus se restreint en une équivalence de catégories T(k) ' T(k′). Seule l’essentiellesurjectivité demande une preuve.

Soit X ′ une k′-variété rigide quasi-compacte admettant potentiellement bonne réduction et montrons que Λtr(X′)

est dans l’image de T(k) par (k′/k)∗. On ne restreint pas la généralité en supposant X ′ connexe. Il existe une extensionfinie séparable l′/k′ telle que Y ′ = X ′⊗k′ l′ admet bonne réduction en tant que l′-variété rigide. Notons Y ′/k′ la variétérigide Y ′ considérée comme une k′-variété rigide. On note t la transposée du morphisme évident p : Y ′/k′ // X ′ .Alors, p t = [l′ : k′]idX′ . Ceci montre que Λtr(X

′) est un facteur direct de Λtr(Y′/k). Il suffit donc de montrer que

Λtr(Y′/k) est dans l’image de T(k) par (k′/k)∗.

Soit Y′ un modèle formel de Y ′ lisse sur l′. Soit (Y′i)i∈I un recouvrement fini ouvert de Y′ par des schémas formelsaffines. De la proposition 2.5.1, on déduit immédiatement que Λtr(Y

′) est dans la sous-catégorie tringulée engendréepar les Λtr((Y

′J)η) avec ∅ 6= J ⊂ I et Y′J = ∩j∈JY′j . Étant donné que les Y′J sont affines et lisses, on peut supposer que

Y est un schéma formel affine.Soit l/k une extension finie séparable telle que l′ = l⊗kk′. Alors l′ est finie et totalement inséparable sur l. Il

existe donc r > 0 telle que apr ∈ l pour tout a ∈ l′. Choisissons une présentation

Y′ = Spf

(l′t1, . . . , tn(g1, . . . , gm)

)avec gi ∈ l′t1, . . . , tn. Comme Y′ est lisse, la matrice jacobienne

∂(g1, . . . , gm)

∂(t1, . . . , tn)est de rang n−dim(Y ) en tout point

de Y′. On définit fi ∈ lt1, . . . , tn par la relation fi(tpr

1 , . . . , tpr

n ) = gi(t1, . . . , tn)pr

. On pose alors

Y = Spf

(lt1, . . . , tn(f1, . . . , fm)

).

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 179

C’est un l-schéma formel lisse. Il est donc clair que Y = Yη est un k-schéma formel admettant potentiellement bonneréduction. Par construction on dispose d’un morphisme fini, totalement inséparable e : Y ′ // Y ⊗kk′ . Il vient quee : Λtr(Y

′) // Λtr(Y ⊗kk′) est inversible, son inverse étant donné par un multiple de la transposée de e. Pour plusde détails, le lecteur pourra s’inspirer de la preuve du lemme 2.4.10.Étape 2 : Rappelons que U est une k-variété rigide lisse et quasi-compacte et qu’on doit démontrer que Λtr(U) ∈Ob(T(k)). On raisonne par induction sur la dimension de U . Lorsque cette dimension est nulle, il n’y a rien à montrerpuisque toute variété rigide étale sur k admet potentiellement bonne réduction. Dans cette étape, on démontre unrésultat préliminaire.

Soit V ⊂ U une sous-variété fermée de U de codimension partout non nulle. Montrons (sous l’hypothèse derécurrence) que Λtr(U/U − V ) = Λtr(U)/Λtr(U − V ) est dans T(k). On raisonne pour cela par induction sur ladimension de V , le résultat étant trivialement vrai pour V vide. On supposera dans la suite que V est non vide (etdonc U de dimenion au moins 1).

Lorsque k est de caractéristique nulle, le lieu singulier de V est partout de codimension non nul. Lorsque kest de caractéristique p > 0, il existe une extension finie totalement inséparable k′/k telle que le lieu singulier deV ′ = (V ×kk′)red est partout de codimension non nulle. Notons U ′ = U×kk′. Par la première étape de la preuve, ilsuffira de montrer que Λtr(U

′/U ′ − V ′) ∈ T(k′). On peut donc supposer dans les deux cas que le lieu singulier Vsingde V est de dimension strictement plus petite que V .

On dispose d’un triangle distingué

Λtr(U − Vsing/U − V ) // Λtr(U/U − V ) // Λtr(U/U − Vsing) // Λtr(U − Vsing/U − V )[+1] .

Par induction, on sait que Λtr(U/U − Vsing) est dans T(k). Il suffira donc de montrer que

F = Λtr(U − Vsing)/Λtr((U − Vsing)− (V − Vsing))

est dans T(k). Soit (Ui)i∈I un recouvrement admissible de U − Vsing par des ouverts affinoïdes. Il est facile de voir,en utilisant la proposition 2.5.1, que F est dans la sous-catégorie triangulée avec sommes infinies engendrée par lesΛtr(UJ/UJ − VJ) avec J ⊂ I fini et non vide, UJ = ∩i∈JUi et VJ = V ∩ UJ .

La discussion précédente nous ramène au cas où U est un k-affinoïde lisse et V ⊂ U un sous-affinoïde fermé lisse.Quitte à choisir le recouvrement (Ui)i∈I ci-dessus suffisamment fin, on peut également supposer qu’il existe un carrécartésien

V //

U

e

Bck × o // Bc+dk

avec e étale et o la section nulle de Bdk. Par le lemme 2.2.51, il existe un triangle commutatif

BdVj

V //

o88

U

avec j une immersion ouverte. Le morphisme

j : Λtr(BdV /BdV − V ) // Λtr(U/U − V )

est une équivalence ra-locale. Il suffit donc de traiter le cas de U = BdV . Remarquons par ailleurs que Λtr(BdV /BdV −V ) 'Λtr(Bdk/Bdk − o)L⊗trΛtr(V ). Or, T(k) est stable par le produit tensoriel dérivé −L⊗tr−. Il suffira donc de vérifier queΛtr(Bdk/Bdk − o) est dans T(k). Comme Bdk admet bonne réduction, il nous reste à montrer que Λtr(Bdk − 0) ∈ T(k).

La k-variété rigide Bdk − o est recouverte par les ouverts Br−1k ×k(B1

k − o)×kBd−rk avec 1 ≤ r ≤ d. Les intersections

multiples de ces ouverts sont isomorphes à des produits de s copies de B1k et d − s copies de B1

k − o. On se ramèneainsi à montrer que Λtr(B1

k − o) ∈ T(k). Or, le morphisme évident

Λtr(B1k/B1

k − o) // Λtr((P1k)an/(P1)an − o)

est une équivalence ra-locale. Mais Λtr((P1k)an) ∈ T(k) puisque (P1

k)an admet bonne réduction. De même Λtr((P1k)an−

o) ' Λtr((A1k)an) est dans T(k) puisque le morphisme évident

Colimλ∈|k×|Λtr(B1k(o, λ)) // Λtr((A1

k)an)

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180 Motifs des variétés rigides analytiques II

est une équivalence ra-locale et que B1k(o, λ) ' B1

k(0, 1) admet bonne réduction. D’où le résultat recherché.Étape 3 : Rappelons une dernière fois qu’on cherche à montrer que Λtr(U) est dans T(k) avec U une k-variété rigidequasi-compacte et lisse.

Étant donné un recouvrement admissible (Ui)i∈I de U avec I fini et Ui des ouverts quasi-compacts, la proposition2.5.1 montre que Λtr(U) est dans la sous-catégorie triangulée engendrée par les Λtr(UJ) avec ∅ 6= J ⊂ I et UJ = ∩j∈JUj .Par le corollaire 1.1.55, on peut donc supposer qu’il existe un k-schéma X de présentation finie tel que U est un ouvertaffinoïde de [X//(π)]η. On peut même supposer que U = [X//(π)]η. En effet, il existe un idéal de type fini I ⊂ OXcontenant une puissance de π et tel que U est la fibre générique d’un ouvert Zariski U de [X ′//(π)]η avec X ′ l’éclatéde I dans X. Il suffit alors de remplacer X par X ′ − Uσ.

On ne restreint pas la généralité en supposant que U est connexe, ce qui entraîne que la fibre spéciale Xσ de X estconnexe. Comme U est lisse et connexe, on peut quitte à remplacer X par un voisinage de sa fibre spéciale supposerque X[1/π] est lisse et connexe. Par le théorème de platification de Raynaud, on peut supposer que X est plat surk. Il vient alors que X est intègre. Par [Ber99, Lemma 9.2], il existe un carré commutatif de k-schémas plats deprésentation finie

Ye

//

f

X

Spec(l) // Spec(k)

avec l/k une extension finie et tel que les conditions ci-dessous sont vérifiées.1. Y est intègre et Y [1/π] est lisse sur l.2. e est projectif, dominant et fini en tout point d’un ouvert non vide (et donc dense) de Y .3. f se factorise de la manière suivante

(2.84) Y = Ydfd−1

// Yd−1// . . . // Y1

f0// Y0 = Spec(l)

où les morphismes fr : Yr+1// Yr sont, localement pour la topologie de Zariski sur Yr et Yr+1, une composée

Spec(E)(1)// Spec(A[u, v]/uv − a) // Spec(A)

avec (1) étale et a ∈ A.Par la première étape de la preuve, il suffit de montrer que Λtr(U⊗kk′) ∈ Ob(T(k′)) avec k′/k une extension finie

totalement inséparable. En remplaçant X par X ⊗k k′ et Y par (Y ⊗k k′)red avec k′/k bien choisie, on peut supposerque l’extension l/k ci-dessus est séparable. En particulier, [Y//(π)]η est alors une k-variété rigide quasi-compacte etlisse.

Soit Z ⊂ X un fermé de codimension non nulle tel que Y −e−1(Z) est fini au dessus de X−Z. On pose T = e−1(Z).Par l’étape précédente, on a Λtr(U) = Λtr([X//(π)]η) ∈ Ob(T(k)) si et seulement si Λtr([X//(π)]η − [Z//(π)]η) ∈Ob(T(k)). Or, le morphisme

e′ : [Y//(π)]η − [T//(π)]η // [X//(π)]η − [Z//(π)]η

est fini surjectif. Il vient que Λtr([X//(π)]η − [Z//(π)]η) est un facteur direct de Λtr([Y//(π)]η − [T//(π)]η). En effet, site′ est la transposée de e′, on a e′ te′ = deg(e′)id. Or, par l’étape précédente, Λtr([Y//(π)]η − [T//(π)]η) ∈ Ob(T(k))si et seulement si Λtr([Y//(π)]η) ∈ Ob(T(k)).

Pour terminer la preuve, il nous reste donc à prouver que Λtr([Y//(π)]η) ∈ Ob(T(k)). On raisonne par inductionsur le cardinal de l’ensemble S ⊂ [[0, d− 1]] des s tels que fs n’est pas lisse. Lorsque S est vide, Y est lisse sur l. Lak-variété rigide [Y//(π)]η admet donc potentiellement bonne réduction. Dans la suite, on suppose que I est non vide.

Notons m = max(S) de sorte que Y = Yd // Ym+1 est lisse. Si (Yi)i∈I est un recouvrement Zariski de Y , laproposition 2.5.1 montre que Λtr([Y//(π)]η) est dans la sous-catégorie triangulée engendrée par les Λtr([YJ//(π)]η) avec∅ 6= J ⊂ I et YJ = ∩j∈JYj . On peut donc supposer qu’il existe un triangle commutatif

Y(1)//

''

Ad−1−mYm+1

Ym+1

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 181

avec (1) étale. En remplaçant la suite (2.84) par

Y // Ad−1−mYm

// Ad−2−mYm

// . . . // Ym // Ym−1// . . . // Y0 ,

on peut supposer que m = d−1, i.e., que fd−1 : Yd // Yd−1 est non lisse. En utilisant encore une fois la proposition2.5.1, on peut supposer qu’il existe un triangle commutatif

Y(2)//

fr−1**

Yd−1[u, v]/(uv − a)

Yd−1

avec a ∈ Γ(Yd−1,O) et (2) un morphisme étale. On peut aussi supposer que Yd et Yd−1 sont affines. Notons Z =Yd−1/(a) ' (Yd−1[u, v]/(uv − a))/(u, v). Formons le carré cartésien

E //

Yd

Z // Yd−1[u, v]/(uv − a).

Alors, E est étale sur Z. Comme Z est affine, on peut relever les équations d’une présentation de E par m équationsà m inconnues pour obtenir un Yd−1-schéma étale F et un carré cartésien

E //

F

Z // Yd−1.

On pose alors Y ′ = F [u, v]/(uv − a) et Y ′′ = (Y ×Yd−1F ) − C où C est le complémentaire de la diagonale dans

E ×Z E ' E ×Yd−1F ⊂ Y ×Yd−1

F . On alors deux carrés distingués Nisnevich

Y ′′ − E

// Y ′′

Y − E // Y,

Y ′′ − E

// Y ′′

Y ′ − E // Y ′.

Étant donné que Y −E, Y ′−E et Y ′′−E sont lisses sur Yd−1, l’hypothèse de récurrence assure que Λtr([(Y −E)//(π)]η),Λtr([(Y

′ − E)//(π)]η) et Λtr([(Y′′ − E)//(π)]η) sont dans T(k). Or, les morphismes

Λtr([Y′′//(π)]η)

Λtr([(Y ′′ − E)//(π)]η)//

Λtr([Y//(π)]η)

Λtr([(Y − E)//(π)]η)et

Λtr([Y′′//(π)]η)

Λtr([(Y ′′ − E)//(π)]η)//

Λtr([Y′//(π)]η)

Λtr([(Y ′ − E)//(π)]η)

sont des équivalences Nis-locales. On voit donc qu’il suffit de montrer que Λtr([Y′//(π)]η) est dans T(k).

Étape 4 : La troisième étape nous ramène au cas où U = Pu, v/(uv− a) avec P un k-affinoïde lisse et a ∈ Γ(P,O).On se ramène d’abord au cas où a est inversible. Pour cela, on note Z = P/(a) et V = U/(a). Par la deuxième étape

de la preuve, il suffit de montrer que Λtr(U −V ) est dans T(k). Soit (Pi)i∈I un recouvrement admissible de P −Z pardes ouverts affinoïdes. Par la proposition 2.5.1, Λtr(U − V ) est dans la sous-catégorie triangulée avec sommes infiniesengendrée par les Λtr(PJu, v/(uv − a)) avec J ⊂ I fini, non vide et Pj = ∩j∈JPj . D’où la réduction recherchée.

Dans la suite, on suppose donc que a est inversible. Le k-affinoïde U = Pu, v/(uv−a) s’identifie alors au domainerationnel DPt(t|a) ⊂ Pt. Le morphisme

Λtr(DPt(t|a))

Λtr(DPt(a|t|a))//

Λtr(Pt)Λtr(DPt(a|t))

est une équivalence ra-locale. Par l’hypothèse de récurrence sur la dimension de U , Λtr(Pt) ' Λtr(B1k) ⊗tr Λtr(P )

est dans T(k). D’autre part, on dispose d’un isomorphisme DPt(a|t) ' Pt qui est donné sur les fonctions part a−1t. On en déduit que Λtr(DPt(a|t)) ∈ Ob(T(k)). Pour terminer, on remarque qu’on a un isomorphisme

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182 Motifs des variétés rigides analytiques II

DP (t)(a|t|a) ' DPt(1|t|1) = ∂B1P donné sur les fonctions par t a−1t. Or, ∂B1

k admet bonne réduction. Il vient queΛtr(∂B1

P ) ' Λtr(∂B1k) ⊗tr Λtr(P ) est dans T(k) par l’hypothèse de récurrence sur la dimension de U . Ceci achève la

preuve du théorème. c.q.f.d

Dans la suite, la topologie Nisnevich sera privilégiée à cause du théorème 2.5.34. On notera RigDMeff(k) etRigDM(k) au lieu de RigDMeff

Nis(k) et RigDMNis(k). Le théorème suivant nous permettera de déduire du théorème2.5.32 des informations sur tous les objets de RigDMeff(k).

Theoreme 2.5.35 — On supposera que l’une des deux conditions suivantes est satisfaite :

(a) k est d’égale caractéristique nulle et sa valuation est discrète,

(b) Λ est une Q-algèbre.

Alors, la catégorie RigDMeff(k,Λ) est compactement engendrée, en tant que catégorie triangulée avec petites sommes,par les motifs Meff(Xan) avec X des k-schémas projectifs et lisses.

Demonstration L’objet Meff(Xan) est compact lorsque X est projectif et lisse puisqu’alors la k-variété rigide Xan

est quasi-compacte. Il reste à prouver que ces objets engendrent RigDMeff(k,Λ).Supposons d’abord que k est d’égal caractéristique nulle et que sa valuation est discrète. La catégorie triangulée

avec sommes infinies RigDMeff(k,Λ) est alors engendrée par les motifs Meff(Xan) avec X des k-variétés rigides lisses.Ceci découle immédiatement des théorèmes 1.3.9 et 1.3.11 et de l’existence d’un foncteur triangulé

Latr : RigDAeff(k,Λ) // RigDMeff(k,Λ)

qui envoie le motif sans transferts d’une k-variété rigide lisse sur le motif avec transferts de la même k-variété rigide. Ilreste à voir qu’on peut se restreindre aux schémas X projectifs. Ceci découle du fait bien connu que DMeff(k,Λ) estengendrée par les motifs des k-variétés projectives et lisses (ce fait étant également valide pour un corps k arbitrairelorsque Λ est une Q-algèbre).

On supposera donc dans le suite que Λ est une Q-algèbre. On note provisoirement T(k) ⊂ RigDMeff(k,Λ)la sous-catégorie triangulée avec petites sommes engendrée par les Meff(Xan) avec X des k-schémas projectifs etlisses. C’est donc aussi la sous-catégorie triangulée avec petites sommes engendrée par l’image du foncteur Rig∗ :

DMeff(k,Λ) // RigDMeff(k,Λ) . Par le théorème 2.5.34, il suffit de montrer Meff(U) est dans T(k) pour toutek-variété rigide U quasi-compacte, lisse et admettant potentiellement bonne réduction. On raisonnera par récurrencesur la dimension de U qu’on supposera connexe.

Soit l/k une extension fini séparable. Étant donné que Λ est une Q-algèbre, Λtr(U) est un facteur direct deΛtr(U⊗kl). Il suffit donc de montrer que Meff(U⊗kl) ∈ Ob(T(k)). Par ailleurs, le foncteur (l/k)∗ possède un adjoint àgauche

(l/k)# : RigDMeff(l) // RigDMeff(k) .

Le foncteur (l/k)# envoie le motif Meff(Y ) d’une l-variété rigide lisse Y sur le motif Meff(Y/k) de Y vue commek-variété rigide. Ce foncteur envoie donc T(l) dans T(k). Il suffirait alors de montrer que Meff(U⊗kl/l) est dans T(l).

Par ailleurs, si k′/k est une extension fini totalement inséparable, on a un carré commutatif à un isomorphismenaturel près

DMeff(k,Λ)Rig∗

//

(k′/k)∗

RigDMeff(k,Λ)

(k′/k)∗

DMeff(k′,Λ)Rig∗// RigDMeff(k′,Λ),

où les foncteurs verticaux sont des équivalences de catégories. Étant donné que T(k) et T(k′) sont engendrées par lesimages de DMeff(k,Λ) et DMeff(k′,Λ), on déduit que (k′/k)∗ induit une équivalence de catégories entre T(k) et T(k′).Il suffit donc de montrer que Meff(U⊗kk′) ∈ Ob(T(k′)).

La discussion précédente nous donne la liberté de remplacer U par U⊗kl avec l/k une extension finie quelconque.On s’en servira à plusieurs reprises tout au long de la preuve. Une première application nous ramène au cas où Uadmet bonne réduction sur k. On fixe dans la suite un modèle formel U de U lisse sur k. On divise la preuve deMeff(Uη) ∈ Ob(T(k)) en plusieurs étapes. La première étape est une réduction au cas où la valuation de k est discrète.Étape 1 : Soit (Ui)i∈I est un recouvrement ouvert de U avec I fini. Le motif Meff(U) est dans la sous-catégorietriangulée de RigDMeff(k,Λ) engendrée par Meff((UJ)η) avec ∅ 6= J ⊂ I et UJ = ∩j∈JUj . On peut donc supposerque U est affine et qu’il existe un morphisme étale de k-schémas formels

e : U // Spf(kt1, . . . , tn)

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 183

avec n la dimension de U .Soit k0 ⊂ k un sous-corps fermé de k tel que k0 est un anneau de valuation discrète et k0 ' k. Par [EGA VI.4,

Théorème 18.1.2], le morphisme étale eσ : Uσ // Spec(k[t1, . . . , tn]) s’étend d’une manière unique en un morphismeétale

e0 : U0// Spf(k0t1, . . . , tn) .

De plus, U est canoniquement isomorphe à U0⊗k0k (en tant que Spf(kt1, . . . , tn)-schémas formels).

On dispose d’un foncteur (k/k0)∗ : RigDMeff(k0,Λ) // RigDMeff(k,Λ) qui envoie T(k0) dans T(k). Il suffitalors de montrer que Meff((U0)η) est dans T(k0). Ceci nous ramène au cas où la valuation de k est discrète.Étape 2 : À partir de maintenant et jusqu’à la fin de la preuve, nous supposerons que la valuation de k est discrète.Soit Z ⊂ Uσ un sous-schéma fermé, partout de codimension non nulle. Dans cette étape, on montrera (sous l’hypothèsede récurrence sur la dimension de U) que l’objet Meff(Uη/(U− Z)η) = Λtr(Uη/(U− Z)η) est dans T(k). On raisonnepar récurrence sur la dimension de Z, le résultat étant évident lorsque Z est vide.

Supposons que Z est non vide. Il existe une extension finie et séparable l/k telle que l/k est totalement inséparableet le lieu singulier de (Z⊗k l)red est partout de codimension non nulle. Il est facile de voir que le motif Meff(Uη/(U−Z)η)est un facteur direct de

(l/k)#(l/k)∗Meff

(Uη

(U− Z)η

)= (l/k)#Meff

((U⊗k l)η

(U⊗k l − (Z ⊗k l)red)η

).

On peut donc supposer que le lieu singulier Zsing ⊂ Z de Z est partout de codimension non nulle. Le triangle distingué

Meff((U− Zsing)η/(U− Z)η) // Meff((U)η/(U− Z)η) // Meff((U)η/(U− Zsing)η) //

et l’hypothèse de récurrence sur dim(Z) nous ramènent au cas où Z est lisse dans Uσ. Étant donné un recouvrementouvert fini (Ui)i∈I de U, le motif Meff(Uη/(U−Z)η) est dans la sous-catégorie triangulée de RigDMeff(k,Λ) engendréepar Meff((UJ)η/(UJ −ZJ)η) avec ∅ 6= J ⊂ I, UJ = ∩j∈JUj et ZJ = Z ∩ (UJ)σ. On peut donc supposer qu’il existe unmorphisme étale

e : U // Spf(kt1, . . . , tn)

tel que Z = e−1σ (Spec(k[t1, . . . , tn−d])) avec Spec(k[t1, . . . , tn−d]) identifié au sous-schéma fermé de Spec(k[t1, . . . , tn])

défini par les équations tn−d+1 = · · · = tn = 0. On pose alors Z = e−1(Spf(kt1, . . . , tn−d)). On a ainsi un carrécartésien de k-schémas formels

Z //

U

Spf(kt1, . . . , tn−d) // Spf(kt1, . . . , tn).

Soit V1 le produit fibré U×kt1,...,tn−dZ où l’on considère U comme un Spf(kt1, . . . , tn−d)-schéma formel viala composée

Ue// Spf(kt1, . . . , tn)

p// Spf(kt1, . . . , tn−d)

avec p la projection sur les premiers n − d facteurs. Le k-schéma formel V1 contient le sous-schéma formel ferméZ×kt1,...,tn−dZ ' ∆

∐E avec ∆ ' Z la diagonale et E son complémentaire. On pose alors V = V1−Eσ pour obtenir

les deux carrés Nisnevich de k-schémas formels

V− Zσ //

V

U− Zσ // U,

V− Zσ //

V

Z×k(Spf(ktn−d+1, . . . , tn)− o) // Z×kSpf(ktn−d+1, . . . , tn).

On déduit un isomorphisme dans RigDMeff(k,Λ)

Meff

((U)η

(Uη − Z)η

)' Meff(Zη)L⊗trMeff

(Bdk

Bdk − o

).

Or, Meff(Bdk/Bdk − o) ' Meff((Adk)an/(Adk − o)an) est clairement dans T(k). La conclusion recherchée découle alors del’hypothèse de récurrence sur dim(U) et de la stabilité de T(k) par le produit tensoriel dérivé.

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184 Motifs des variétés rigides analytiques II

Étape 3 : Rappelons qu’on cherche à démontrer que Meff(Uη) ∈ Ob(T(k)) avec U un k-schéma formel lisse. On peutsupposer qu’il existe un morphisme étale

e : U // Spf(kt1, . . . , tn) .

Par [EGA VI.4, Théorème 18.1.2], on peut trouver une présentation de U :

U ' Spf

(kt1, . . . , tn, u1, . . . , ur

(f1, . . . , fr)

)avec fi ∈ k[t1, . . . , tn, u1, . . . , ur] et

∂(f1, . . . , fr)

∂(u1, . . . , ur)est invesible sur U. On X0 le plus grand ouvert de

Spec

(k[t1, . . . , tn, u1, . . . , ur]

(f1, . . . , fr)

)étale sur Ank = Spec(k[t1, . . . , tn]) On note X le normalisé de X0 dans Pnk (où X0 est considéré comme un Pnk -schémavia la composée X0

// Ank // Pnk ). Par construction, X est un k-schéma projectif, normal et U s’identifieà un ouvert du schéma formel X//(π). Quitte à remplacer X par sa composante connexe contenant U, on peut lesupposer intègre.

Par de Jong [dJon96, Theorem 6.5], il existe les données suivantes :1. une extension finie l/k,2. un l-schéma projectif et intègre Y à réduction semi-stable de type (1, . . . , 1) , i.e., localement pour la topologie

de Zariski, Y est étale au dessus de l[t0, . . . , tn]/(t0 . . . td − θ) avec 0 ≤ d ≤ n et θ ∈ l∨ une uniformisante.3. un morphisme projectif et dominant f : Y // X fini en tout point d’un ouvert non vide de Y .

Quitte à remplacer U, X et Y par U⊗k l, X ⊗k l et une composante irréductible de (Y ⊗k l)red on peut supposerque l = k, i.e., que Y est semi-stable de type (1, . . . , 1) sur k. On notera π au lieu de θ l’uniformisante de k.

Notons D la composante irréductible de Xσ contenant Uσ. Soit E une composante irréductible de Yσ telle queD = f(E). Le morphisme E // D est dominant et fini en tout point d’un ouvert non vide de E. Soit D1 ⊂ Dun ouvert non vide, contenu dans Uσ et tel que E1 = f−1(D1) est contenu dans l’ouvert de lissité du k-schéma Yet le morphisme f1 : E1

// D1 est fini. Notons E1 et D1 les complétés formels de Y et X en les sous-schémaslocalements fermés E1 et D1. Notons encore f1 : E1

// D1 le morphisme évident. C’est un morphisme fini etsurjectif entre deux k-schémas formels lisses et intègres.

Par la deuxième étape de la preuve, Meff(Uη) ∈ Ob(T(k)) si et seulement si Meff((D1)η) ∈ Ob(T(k)). D’autre part,Meff((D1)η) est un facteur direct de Meff((E1)η). En effet, on a (f1)η t(f1)η = deg(f1)id. Il suffit donc de montrerque Meff((E1)η) ∈ T(k).

La discussion précédente, nous ramène au cas où U est un ouvert lisse du complété π-adique X//(π) d’un k-schémaprojectif X à réduction semi-stable de type (1, . . . , 1). Notons X0 le lieu lisse de X. Alors, U est un ouvert dense d’unecomposante connexe de X0//(π). Par la deuxième étape de la preuve, il suffirait de montrer que Meff([X0//(π)]η) ∈Ob(T(k)). Dans l’étape qui suit, on montrera que Meff([X//(π)]η/[X

0//(π)]η) ∈ Ob(T(k)). Ceci terminera la preuve duthéorème puisque [X//(π)]η ' (X[1/π])an par la proposition 1.1.30.Étape 4 : Soit X un k-schéma formel de dimension n = dim(U) et à réduction semi-stable de type (1, . . . , 1), i.e.,localement pour la topologie de Zariski, X est étale au dessus de Spf(kt0, . . . , tn/t0 . . . td − π) avec 0 ≤ d ≤ n. Onnote X0 le lieu lisse de X. On montrera dans cette dernière étape que Meff(Xη/X

0η) est dans T(k). On raisonne par

récurrence sur le nombre maximal de branches passant par un point de Xσ. Ce nombre sera noté s(X). Rappelons quepour x ∈ Xσ, le nombre de branches passants par x est le plus petit entier 1 ≤ s ≤ n+ 1 tel que x admet un voisinageouvert étale au dessus de Spf(kt0, . . . , tn/t0 . . . ts−1− π). L’ouvert X0 est exactement le lieu des points par lesquelspasse une seule branche. Ainsi, lorsque s(X) = 1, on a X = X0 de sorte qu’il n’y a rien à démontrer. On supposeradans la suite que s(X) ≥ 2.

La question étant locale pour la topologie de Zariski sur X, on peut supposer qu’il existe un morphisme étale

e : X // Spf(kt0, . . . , tn/t0 . . . td − π)

avec d = s(X) − 1 ≥ 1. Notons Z le sous-schéma fermé de Xσ défini par les équations t0 = · · · = td = 0. Il estétale sur Spec(k[td+1, . . . , tn]). C’est donc la fibre spéciale d’un k-schéma formel Z étale sur Spf(ktd+1, . . . , tn) par[EGA VI.4, Théorème 18.1.2].

L’argument de la page 40, qui d’ailleurs se simplifie un peu dans le cas de la réduction semi-stable de type (1, . . . , 1),fournit une équivalence Nis-locale

Λtr

(Xη

(X− Z)η

)' Λtr(Zη)L⊗trΛtr

(Spf(kt0, . . . , td/(t0 . . . td − π))η

(Spf(kt0, . . . , td/(t0 . . . td − π))− o)η

).

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 185

Ceci montre que Meff(Xη/(X − Z)η) est dans T(k). En effet, l’hypothèse de récurrence sur la dimension de U assureque Meff(Zη) ∈ Ob(T(k)). Il reste donc à voir que

Meff

(Spf(kt0, . . . , td/(t0 . . . td − π))η

(Spf(kt0, . . . , td/(t0 . . . td − π))− o)η

)∈ Ob(T(k)).

Le lemme 1.2.38 (valable pour k non nécessairement d’égale caractéristique nulle) et l’existence du foncteur trianguléLatr : RigDAeff(k,Λ) // RigDMeff(k,Λ) nous ramène à montrer que

Meff(Spm(kt1, . . . , tn, t−11 , . . . , t−1

s )) ∈ Ob(T(k))

pour 0 ≤ s ≤ n. Mais Meff(∂Bsk×kBn−sk ) est isomorphe à Meff((Gms

k)an). D’où notre assertion.Il est maintenant facile de conclure. En effet, on a un triangle distingué dans RigDMeff(k,Λ) :

Meff((X− Z)η/X0η) // Meff(Xη/X

0η) // Meff(Xη/(X− Z)η) // Meff((X− Z)η/X

0η)[+1].

Comme Meff(Xη/(X−Z)η) ∈ Ob(T(k)), il suffit de montrer que Meff((X−Z)η/X0η) est dans T(k). Or, s(X−Z) = s(X)−1.

L’hypothèse de récurrence sur s(X) permet de conclure. La preuve du théorème est terminée. c.q.f.d

On déduit du théorème précèdant une caractérisation sympathique des objets B1-locaux dans la catégorie dérivéedes faisceaux Nisnevich avec transferts.

Corollaire 2.5.36 — On garde les hypothèses du théorème 2.5.35. Un complexe de faisceaux avec transferts K·est B1-local en tant qu’objet de D(StrNis(SmAfnd/k,Λ)) si et seulement si ses faisceaux d’homologie sont surconvergentset B1-invariants, i.e., Hn(K) ∈ OHStr(k,Λ). En particulier, RigDMeff(k,Λ) est équivalente à la sous-catégoriepleine de D(StrNis(SmAfnd/k,Λ)) dont les objets sont les complexes de faisceaux avec transferts ayant leurs faisceauxd’homologie surconvergents et B1-invariants.

Demonstration Montrons que la condition est suffisante. Si V est un k-affinoïde lisse de dimension d, le morphismeΓ(V, (τ≤n+1K)fib) // Γ(V, (τ≤nK)fib) induit des isomorphismes sur l’homologie en degrés plus petits que n − d.

Il vient que K // Limn∈N(τ≤nK)fib est un quasi-isomorphisme de complexes de faisceaux avec transferts. En

d’autres termes, K est la limite homotopique de ses tronqués τ≤nK. Or, la propriété d’être B1-local est stable parlimites homotopiques. Il suffit donc de montrer que les τ≤nK sont B1-locaux.

D’autre part, τ≤nK = Colimm∈N τ≥−m(τ≤nK). Or, la propriété d’être B1-local est stable par colimites filtrantes(puisqu’il en est ainsi de la propriété de Brown-Gersten). On est donc ramené à montrer que τ≥−m(τ≤nK) est B1-local. Une récurrence facile nous ramène à montrer que les faisceaux d’homologie F = Hn(K) sont B1-locaux pourtout n ∈ Z. Cela revient à dire que les préfaisceaux de cohomologie Hi

Nis(−, F ) sont invariants par homotopie. Cecidécoule du théorème 2.4.9.

Montrons que la condition est nécessaire. On sait que RigDMeff(k,Λ) est équivalente à la sous-catégorie trianguléeTB1 ⊂ D(StrNis(SmAfnd/k,Λ)) des objets B1-locaux. Notons T′B1 ⊂ D(StrNis(SmAfnd/k,Λ)) la sous-catégorie pleinedont les objets sont les complexes de faisceaux avec transferts K· tels que Hn(K) sont surconvergents et B1-invariants.Il faut prouver que TB1 ⊂ T′B1 .

La catégorie T′B1 est stable par petites sommes. C’est aussi une sous-catégorie triangulée. En effet, elle est clairementstable par les foncteurs de suspension et cosuspension. Par ailleurs, supposons donné un triangle distingué dansD(StrNis(SmAfnd/k,Λ))

A′ // A // A′′ // A′[+1]

avec A′ et A′′ dans T′B1 . Alors, A est dans T′B1 . Pour montrer cela, on considère la suite exacte de faisceaux Nisnevich

(2.85) Hn+1(A′′)a// Hn(A′) // Hn(A) // Hn(A′′)

b// Hn−1(A′).

Le faisceau Hn(A) est alors surconvergent. En effet, c’est un extension de deux faisceaux surconvergents, à savoir leconoyau de a et le noyau de b. Il vient que (2.85) est une suite exacte dans OStr(k,Λ). Par le corollaire 2.4.12, ondéduit que Hn(A) ∈ OHStr(k,Λ).

On note LocB1 le foncteur B1-localisation (voir [Ayo07a, Proposition 4.2.72]). Par le théorème 2.5.35, TB1 est lasous-catégorie triangulée avec sommes infinies engendrée par les LocB1(Λtr(X

an)) avec X des k-schémas projectifset lisses. Il suffirait donc de prouver que LocB1(Λtr(X

an)) ∈ Ob(T′B1). Par le théorème 2.5.32, LocB1(Λtr(Xan)) est

quasi-isomorphe à SingB1

· (Λtr(Xan)). Par le théorème 2.4.14, les faisceaux d’homologie de SingB1

· (Λtr(Xan)) sont

surconvergents et invariants par homotopie. Le corollaire est prouvé. c.q.f.d

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186 Motifs des variétés rigides analytiques II

Le corollaire précédent entraîne que la propriété d’être B1-local est préservée par les foncteurs de troncationsrelativement à la t-structure usuelle sur la catégorie dérivée des faisceaux avec transferts. On déduit alors le résultatci-dessous.

Theoreme 2.5.37 — On supposera que l’une des deux conditions suivantes est satisfaite :

(a) k est d’égale caractéristique nulle et sa valuation est discrète,(b) Λ est une Q-algèbre.

Il existe une unique t-structure sur RigDMeff(k,Λ) qui rend t-exact le foncteur (pleinement fidèle) de B1-localisation

LocB1 : RigDMeff(k,Λ) // D(StrNis(SmAfnd/k,Λ)) .

Cette t-structure sera appelée la t-structure homotopique. Elle est engendrée (au sens de [Ayo07a, Définition 2.1.71])par les Meff(U) avec U des k-affinoïdes lisses. Son coeur est naturellement équivalent à la catégorie OHStr(k,Λ).

Demonstration Seule la l’engendrement de la t-structure homotopiques par les Meff(U) demande une preuve. SoitK· un complexe de préfaisceaux avec transferts B1-fibrant. Il s’agit de montrer que les deux assertions suivantes sontéquivalentes.

(i) K· est dans RigDMeff(k)<0 = RigDMeff(k)⋂

D<0(StrNis(SmRig/k,Λ)).(ii) homRigDMeff (k)(M(U)[n],K) = 0 pour tout n ∈ N et tout k-affinoïde lisse U .

Comme K· est B1-fibrant, on a homRigDMeff (k)(M(U)[n],K) = Hn(Γ(U,K)). Or, Hn(K) est le faisceau Nisnevichassocié au préfaisceau U Hn(Γ(U,K)). Ceci montre que (ii) ⇒ (i). Pour voir que (i) ⇒ (ii), on choisit un isomor-phisme K· ' I· dans D(StrNis(SmRig/k,Λ)) avec I· un complexe d’injectifs tel que In = 0 pour n ≥ 0. Comme I·est encore B1-fibrant, on a homRigDMeff (k)(M(U)[n],K) = Hn(Γ(U, I·)) = 0 pour n ≥ 0. c.q.f.d

On passe maintenant au théorème de simplification (cancellation theorem) dont la version algébrique, due à Voe-vodsky, est bien connue (voir [VSF00, Voe02]). On rappelle que T = Λtr(Gman

k , 1). Le théorème de simplifications’énonce alors :

Theoreme 2.5.38 — On supposera que l’une des deux conditions suivantes est satisfaite :

(a) k est d’égale caractéristique nulle et sa valuation est discrète,(b) Λ est une Q-algèbre.

Soient M et N deux objets de RigDMeff(k,Λ). L’homomorphisme évident

(2.86) homRigDMeff (k,Λ)(M,N)∼// homRigDMeff (k,Λ)(T ⊗tr M,T ⊗tr N)

est bijectif.

Par adjonction, on a hom(T ⊗tr M,T ⊗tr N) ' hom(M,Homg(T, T ⊗tr N)) et modulo cette identification, lemorphisme (2.86) est induit par le morphisme d’unité N // Homg(T, T ⊗tr N) . Par le lemme de Yoneda, on

déduit la reformulation suivante du théorème précédent.

Theoreme 2.5.39 — On garde les hypothèses du théorème 2.5.38. Soit K un objet de RigDMeff(k,Λ). Lemorphisme d’unité K

∼// Homg(T, T ⊗tr K) est inversible.

Nous allons adapter la méthode de [Voe02] au cadre de la géométrie rigide. Pour λ ∈√|k×| avec λ > 1, on

note Crk(λ) l’ouvert affinoïde de Gmank dont les points rationnels dans une extension finie l/k sont les a ∈ l× avec

λ−1 ≤ |a| ≤ λ. C’est donc la couronne de grand rayon λ et de petit rayon λ−1. On pose CrB(λ) = Crk(λ)×kB pourtoute k-variété rigide B. On note alors (CrB(λ), 1) la B-variété rigide pointée par la section unité. On obtiendra lethéorème 2.5.39 comme conséquence de la proposition suivante.

Proposition 2.5.40 — Soient B une k-variété rigide lisse, X une B-variété rigide lisse et λ, ν ∈√|k×| avec

ν > λ > 1. On dispose d’un morphisme de préfaisceaux avec transferts sur SmAfnd/B

(2.87) δ : Λtr(X) // Hom (Λtr(CrB(λ), 1), Λtr(CrB(ν), 1)⊗tr Λtr(X)) ,

qui à une correspondance finie α ∈ CorB(†, X) associe la correspondance finie Graph(i)⊗α avec i : CrB(λ) ⊂ CrB(ν)

l’inclusion évidente. Lorsqu’on applique le foncteur SingB1

· à (2.87), on obtient un quasi-isomorphisme de préfaisceauxavec transferts sur SmAfnd/B.

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 187

On obtiendra la proposition 2.5.40 à la suite de plusieurs lemmes. Nous allons d’abord construire une rétractionau morphisme (2.87). On utilisera pour cela le résultat suivant :

Lemme 2.5.41 — Soit n ∈ N tel que λn > ν et notons en : Crk(λ) // Crk(λn) le morphisme d’élévation à

la puissance n. Soient U un B-affinoïde lisse et Z ⊂ CrU (λ)×BCrX(ν) un sous-affinoïde, intègre, fini et surjectif surCrU (λ). Notons p : CrU (λ)×BCrX(λn) // Crk(λ)×kCrk(λn) la projection évidente et considérons Z comme unsous-affinoïde fermé de CrU (λ)×BCrX(λn) (en l’indentifiant avec son image par l’inclusion évidente). Alors, toutesles composantes irréductibles de l’intersection Z ∩ p−1(Graph(en)) sont finies et surjectives sur U .

Demonstration Le fermé p−1(Graph(en)) est défini par l’annulation de la fonction t2−tn1 avec t1 et t2 les coordonnéesde Crk(λ) et Crk(λn). On déduit que Z ∩ p−1(Graph(en)) est partout de dimension dim(Z) − 1 = dim(U). Il suffiradonc de montrer que Z ∩ p−1(Graph(en)) est fini sur U . Or, Z ∩ p−1(Graph(en)) est contenu dans

(CrU (λ)×BCrX(ν))⋂p−1(Graph(en)) = p−1((Crk(λ)×kCrk(ν))

⋂Graph(en)) ⊂ p−1(Crk(ν1/n)×kCrk(ν)).

On en déduit que l’image du morphisme fini Z ∩ p−1(Graph(en)) // CrU (λ) est contenue dans CrU (ν1/n). Lelemme 2.5.42 ci-dessous permet alors de conclure. c.q.f.d

Lemme 2.5.42 — Soient λ, λ′ ∈√|k×| avec 1 < λ′ < λ. Soient U un k-affinoïde et T ⊂ CrU (λ) un sous-affinoïde

fermé. On suppose que T est contenu dans CrU (λ′). Alors T est fini sur U .

Demonstration On identifie Crk(λ) à un ouvert affinoïde de (P1k)an de la manière usuelle. On a un recouvrement

admissible(P1k)an = Crk(λ)

⋃B1k(o, λ−1)

⋃B1k(∞, λ−1)

avec o = [1 : 0] et ∞ = [0 : 1]. Remarquons que Crk(λ′)⋂

(B1k(o, λ−1)

∐B1k(∞, λ−1)) = ∅. Identifions T avec son

image dans (P1U )an. L’hypothèse de l’énoncé entraîne que T

⋂(B1U (o, λ−1)

∐B1U (∞, λ−1)) = ∅. Il vient que T est un

fermé de (P1U )an. La projection T // U est donc un morphisme projectif. Comme T et U sont des k-affinoïdes, T

est fini sur U . c.q.f.d

Soit Z = Spm(A) un k-affinoïde intègre et f ∈ k(A). On note Div(f) le diviseur associé à f . C’est une combinaisonlinéaire de sous-affinoïdes fermés et intègres de Z. Lorsque f ∈ A, ce diviseur est effectif.

Definition 2.5.43 — Gardons les notations de la proposition 2.5.40 et soit U un B-affinoïde lisse. Soit n ∈ Ntel que λn > ν. On définit un homomorphisme

φn : CorB(CrU (λ),CrX(ν)) // CorB(U,X)

en spécifiant les images des générateurs de la manière suivante. Notons t1 et t2 les coordonnées de Crk(λ) et Crk(ν).Soit Z ⊂ CrU (λ)×BCrX(ν) un sous-affinoïde intègre, fini et surjectif sur CrU (λ). Par le lemme 2.5.41, toutes lescomposantes irréductibles du support du cycle Div((t2 − tn1 )|Z) sont finies et surjectives sur U . On pose alors

φn([Z]) = q∗(Div((t2 − tn1 )|Z))

avec q : CrU (λ)×BCrX(ν) // U×BX la projection évidente et q∗ l’application image directe des cycles à supportpropre sur U×BX.

On a le lemme suivant :

Lemme 2.5.44 — Gardons les notations de la définition 2.5.43. Le morphisme φn définit un morphisme depréfaisceaux avec transferts sur SmAfnd/B

(2.88) φn : Homg(Λtr(CrB(λ)),Λtr(CrX(ν))) // Λtr(X) .

Demonstration Il faut vérifier que φn est compatible à l’action des correspondances finies. Soient U , V deuxB-affinoïdes lisses, α ∈ CorB(U, V ) et β ∈ CorB(CrV (λ),CrX(ν)). Il faut prouver l’égalité

φn(β) α = φn(β (idCrk(λ) ⊗ α)).

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188 Motifs des variétés rigides analytiques II

On peut supposer que α = [T ] et β = [Z] sont des correspondances finies élémentaires. On forme le diagramme ayantson carré cartésien

R //

Z

// CrX(ν)

CrT (λ) //

CrV (λ)

CrU (λ).

Notons Ri, i ∈ I l’ensemble des composantes irréductibles de R et ni la multiplicité de Serre de Ri. Notons f =(t2 − tn1 )|Z et gi = f|Ri . On a (dans le groupe librement engendré par les fermés intègres de R)

(T → V )∗Div(f) = (CrT (λ)→ CrV (λ))∗Div(f) =∑i∈I

niDiv(gi)

avec (T → V )∗ et (CrT (λ)→ CrV (λ))∗ les pull-back des cycles définis à l’aide des multiplicités de Serre. On en déduitque

φn([Z]) [T ] = (R→ U×BX)∗((T → V )∗Div(f)) =∑i∈I

ni(Ri → U×BX)∗Div(gi) = φn([Z] [CrT (λ)]).

Le lemme est démontré. c.q.f.d

Soit µ ∈√|k×| avec µ > 1. On note c1 la composée Crk(µ) // Spm(k)

1// Crk(µ) . On a clairement c1

c1 = c1, de sorte que c1 : Λtr(CrY (µ)) // Λtr(CrY (µ)) est un projecteur dans la catégorie des préfaisceaux avectransferts sur SmAfnd/B pour toute B-variété rigide lisse Y . Le préfaisceau avec transferts Λtr(CrY (µ), 1Y ) s’identifieà l’image du projecteur complémentaire d1 = id− c1 : Λtr(CrY (µ)) // Λtr(CrY (µ)) . Le projecteur d1 se factorisealors de la manière suivante

Λtr(CrY (µ))m// Λtr(CrY (µ), 1Y )

n// Λtr(CrY (µ)).

On notera δ : Λtr(X) // Homg(Λtr(CrB(λ)),Λtr(CrX(ν))) le morphisme évident déduit de l’unité de l’adjonc-

tion et de l’inclusion Crk(λ) ⊂ Crk(ν). Ce morphisme est lié au morphisme δ de la proposition 2.5.40 par les deuxdiagrammes commutatifs

Λtr(X)δ

//

δ

Homg(Λtr(CrB(λ), 1B),Λtr(CrX(ν), 1X))

Hom(m,id)

Homg(Λtr(CrB(λ)),Λtr(CrX(ν)))Hom(id,m)

// Homg(Λtr(CrB(λ)),Λtr(CrX(ν), 1X)),

Λtr(X)δ

//

δ

Homg(Λtr(CrB(λ), 1B),Λtr(CrX(ν), 1X))

Hom(id,n)

Homg(Λtr(CrB(λ)),Λtr(CrX(ν)))Hom(n,id)

// Homg(Λtr(CrB(λ), 1B),Λtr(CrX(ν))).

Lemme 2.5.45 — On a les égalités φn Hom(id, d1) δ = φn Hom(d1, id) δ = φn Hom(d1, d1) δ = −id.

Demonstration Soit U un B-affinoïde lisse et Z ⊂ U×BX, intègre, fini et surjectif sur U . Il s’agit de calculer

(2.89) φn([Graph(i)×kZ])− φn([Graph(c1 i)×kZ]) = φn([Graph(i)×kZ])− φn([Graph(i c1)×kZ]).

Notons comme ci-dessus t1 et t2 les paramètres de Crk(λ) et Crk(λn). La restriction de (t2 − tn1 ) suivant l’immersiondiagonale Crk(λ) ⊂ Crk(λ)×kCrk(λ) est égale à t1 − tn1 . La restriction de la même fonction suivant (id, i u) est égaleà 1− tn1 . Or, Div(t1 − tn1 ) = [Crk(λ)/(t1 − tn1 )]⊗ [Z] et Div(1− tn1 ) = [Crk(λ)/(t1 − tn1 )]⊗ [Z]. Il vient que (2.89) estégale à

(2.90) dimk(Γ(Crk(λ),O)/(t1 − tn1 ))[Z]− dimk(Γ(Crk(λ),O)/(1− tn1 ))[Z].

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 189

Or, la dimension (en tant que k-espace vectoriel) de la k-algèbre finie Γ(Crk(λ),O)/t1 − tn1 est n − 1 puisque t1 estinversible. D’autre part, le degré de Γ(Crk(λ),O)/1− tn1 est n. On déduit que (2.90) est simplement (n−1)[Z]−n[Z] =−[Z]. Le lemme est démontré. c.q.f.d

Corollaire 2.5.46 — On a la relation φn Hom(m,n) δ = −id.

Demonstration Ceci découle immédiatement des égalités

Hom(m,n) δ = Hom(id, n) Hom(m, id) δ = Hom(id, n) Hom(id,m) δ = Hom(id, d1) δ

et du lemme 2.5.45. c.q.f.d

Vu le corollaire 2.5.46, on prouvera de la proposition 2.5.40, en montrant que SingB1

(δ φn Hom(m,n)) esthomotope à −id. Par (la preuve de) la proposition 2.2.43, il suffira de construire une B1-homotopie (à droite)

Homg(Λtr(CrB(λ), 1B),Λtr(CrX(ν), 1X)) // Homg(Λtr(B1B)⊗tr Λtr(CrB(λ), 1B),Λtr(CrX(ν), 1X))

entre δ φn Hom(m,n) et −id. Étant donné que Hom(n,m) (resp. Hom(m,n)) est un épimorphisme (resp. monomor-phisme) scindé, il suffira de construire une B1-homotopie (à droite)

h : Homg(Λtr(CrB(λ)),Λtr(CrX(λ))) // Homg(Λtr(B1B×BCrB(λ)),Λtr(CrX(λ)))

entreHom(m,n) (δ φn Hom(m,n)) Hom(n,m) = Hom(id, d1) δ φn Hom(d1, d1)

et Hom(m,n) (−id) Hom(n,m) = −Hom(d1, d1).

Notons Cr2k(µ) = Crk(µ)×kCrk(µ) et Cr2

†(µ) = Cr2k(µ)×k†. Soit τ la permutation des facteurs de Cr2

k(µ). On noterad′1 le projecteur d1⊗id : Λtr(Cr2

B(µ)) // Λtr(Cr2B(µ)) . On dispose d’un deuxième projecteur d′′1 = id⊗d1 = τd′1τ .

On notera r = d′1 d′′1 = d′′1 d′1 = d1 ⊗ d1. On dispose d’un morphisme de préfaisceaux avec transferts

δ′ : Homg(Λtr(CrB(λ)),Λtr(CrX(ν))) // Homg(Λtr(Cr2B(λ)),Λtr(Cr2

X(ν)))

qui à une correspondance finie γ ∈ CorB(CrU (λ),CrX(ν)) associe i⊗ γ avec i : Crk(λ) ⊂ Crk(ν) l’inclusion évidente.On dispose également d’un morphisme de préfaisceaux avec transferts

φ′n : Homg(Λtr(Cr2B(λ)),Λtr(Cr2

X(ν))) // Homg(Λtr(CrB(λ)),Λtr(CrX(ν)))

qui à une correspondance finie γ ∈ CorB(Cr2U (λ),Cr2

X(ν)) = CorB(CrCrU (λ)(λ),CrCrX(ν)(ν)) associe φn(γ). Le lemme2.5.45 montre que φ′n Hom(d′1, d

′1) δ′ = −id. On en déduit immédiatement que

φ′n Hom(r, r) δ′ = φ′n Hom(d′1, d′1) δ′ Hom(d1, d1) = −Hom(d1, d1).

On a par ailleurs le lemme suivant :

Lemme 2.5.47 — On a la relation φ′n Hom(τ, τ) Hom(r, r) δ′ = Hom(id, d1) δ φn Hom(d1, d1).

Demonstration Soient U un B-affinoïde lisse et α ∈ CorB(CrU (λ),CrX(ν)). On a

Hom(r, r) δ′(α) = (i− c1 i)⊗ (α− c1 α− α c1 + c1 α c1).

Étant données des correspondances finies β ∈ CorB(CrU (λ),CrX(ν)) et γ ∈ Cork(Crk(λ),Crk(ν)), on a la formule

φ′n Hom(τ, τ)(γ ⊗ β) = γ ⊗ φn(β).

Il vient que

φ′n Hom(τ, τ) Hom(r, r) δ′(α) = (i− c1 i)⊗ (φn(α− c1 α− α c1 + c1 α c1))

= Hom(id, d1) δ φn Hom(d1, d1)(α).

Le lemme est démontré. c.q.f.d

Par la discussion précédente, la proposition 2.5.40 découlera de l’existence d’une B1-homotopie entre les composées

φ′n Hom(r, r) δ′ et φ′n Hom(τ, τ) Hom(r, r) δ′.

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190 Motifs des variétés rigides analytiques II

Étant donné que r τ = τ r, il suffit de montrer que Hom(r τ, r τ) et Hom(r, r) sont B1-homotopes. Ceci découleradu lemme ci-dessous.

Lemme 2.5.48 — Les correspondances finies r τ et −r ∈ Cork(Cr2k(µ),Cr2

k(µ)) sont B1-homotopes (avec µ > 1

dans√|k×|).

Demonstration Pour µ′ > µ, l’inclusion Crk(µ) ⊂ Crk(µ′) induit un isomorphisme dans π0RigCor(k). Cecidécoule facilement de la proposition 2.3.14 qu’on applique aux inclusions des couronnes Crk(µ) ⊂ Crk(µ′−1, µ) etCrk(µ′−1, µ) ⊂ Crk(µ′−1, µ′). Pour la deuxième inclusion, on peut faire le changement de variables x x−1 pour seramener à l’inclusion Crk(µ−1, µ′) ⊂ Crk(µ′−1, µ′). Il suffit donc de montrer que la correspondance finie

α : Cr2k(µ) // Cr2

k(µ6)

donnée par α(x, y) = (x, y) + (y, x)− (xy, 1)− (1, xy) est homotope à zéro (remarquer que r (xy, 1) = r (1, xy) = 0).Notons β ∈ Cork(Cr2

k(µ),Cr2k(µ3)) la correspondance finie donnée par β(x, y) = (x, y)+(y, x). Un calcul facile montre

qu’elle est égale à la composée

Cr2k(µ)

f// Crk(µ2)×kB1

k(o, µ)γ// Cr2

k(µ3)

avec f le morphisme défini par f(x, y) = (xy, x + y) et γ la correspondance finie définie de la manière suivante.Notons p, s, t1 et t2 les coordonnées de Crk(µ2), B1

k(o, µ), Crk(µ3) et Crk(µ3). Soit x une indéterminée. Considéronsle diagramme

Crk(µ2)×B1k(o, µ)[x]/(x2 − sx+ p)

u//

e

Cr2k(µ3)

Crk(µ2)×kB1k(o, µ)

avec u le morphisme défini sur les anneaux de fonctions par u∗(t1) = x et u∗(t2) = s− x = px−1. Alors γ = u te.Notons u : Cr2

k(µ) // Cr2k(µ2) le morphisme donné par u(x, y) = (xy, 1). On dispose d’un diagramme commu-

tatif dans π0RigCor(k)

Cr2k(µ)

u

f// Crk(µ2)×kB1

k(o, µ)γ//

Cr2k(µ3)

Cr2k(µ2)

f// Crk(µ4)×kB1

k(o, µ2)γ// Cr2

k(µ6)

où les flèches verticales non-nommées sont les inclusions évidentes (inversibles dans π0RigCor(k)). En d’autres termes,le carré

Cr2k(µ)

β//

u

Cr2k(µ3)

i∼

Cr2k(µ2)

β// Cr2

k(µ6)

commute. Mais il est clair que α = i β − β u. Le lemme est démontré. c.q.f.d

Éxpliquons à présent comment déduire le théorème 2.5.39 de la proposition 2.5.40. L’inclusion évidente Crk(λ) ⊂Gman

k induit un isomorphisme Λtr(Crk(λ), 1) ⊂ Λtr(Gmank , 1) = T dans RigDMeff(k,Λ). Il suffira donc de montrer

que

(2.91) K // RHomg(Λtr(Crk(λ), 1),Λtr(Gmank , 1)L⊗trK)

est inversible. La sous-catégorie pleine de RigDMeff(k,Λ) formée des objets K rendant (2.91) inversible est unesous-catégorie triangulée stable par sommes infinies. Par le théorème 2.5.35, il suffirait de montrer que

Λtr(Xan) // Homg(Λtr(Crk(λ), 1), (Λtr(Gman

k , 1)⊗tr Λtr(Xan))B1−Nis−fib)

est inversible dans RigDMeff(k,Λ) pour tout k-schéma lisse X. Par le théorème 2.5.32, un remplacement (B1,Nis)-fibrant de Λtr((GmX)an, 1Xan) est donné par un remplacement Nis-fibrant de SingB1

· (Λtr((GmX)an, 1Xan)). De plus,le morphisme

Homg(Λtr(Crk(λ), 1),SingB1

· (Λtr((GmX)an, 1Xan))) // Homg(Λtr(Crk(λ), 1), (SingB1

· (Λtr((GmX)an, 1Xan)))Nis−fib)

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 191

est une équivalence Nis-locale. On en déduit que le morphisme évident

Homg(Λtr(Crk(λ), 1),SingB1

· (Λtr((GmX)an, 1Xan))) // Homg(Λtr(Crk(λ), 1), (Λtr((GmX)an, 1Xan))B1−Nis−fib)

est une équivalence Nis-locale. Il suffirait donc de prouver que

Λtr(Xan) // Homg(Λtr(Crk(λ), 1),SingB1

· (Λtr((GmX)an, 1Xan)))

est une (B1,Nis)-équivalence faible. On a un carré commutatif

Λtr(Xan) //

(1)

Homg(Λtr(Crk(λ), 1),SingB1

· (Λtr((GmX)an, 1Xan)))

SingB1

· (Λtr(Xan))

(2)// SingB1

· (Homg(Λtr(Crk(λ), 1),Λtr((GmX)an, 1Xan))).

Le morphisme (1) est une B1-équivalence faible par le lemme 2.5.31. D’autre part, la flèche (2) est la colimite filtrantequand ν ∈

√|k×| tend vers l’infini des morphismes

SingB1

· (Λtr(Xan)) // SingB1

· (Homg(Λtr(Crk(λ), 1),Λtr((CrXan(ν), 1Xan)))

qui sont des quasi-isomorphismes par la proposition 2.5.40. D’où le résultat recherché.Le corollaire ci-dessous est une conséquence immédiate du théorème de simplification 2.5.38 et de la proposition

2.5.29 :

Corollaire 2.5.49 — On supposera que l’une des deux conditions suivantes est satisfaite :(a) k est d’égale caractéristique nulle et sa valuation est discrète,(b) Λ est une Q-algèbre.

Alors, le foncteur de suspension infinie RigDMeff(k,Λ) // RigDM(k,Λ) est pleinement fidèle.

2.5.3 Description en termes de motifs algébriquesComme avant, k est un corps complet pour une valuation non archimedienne, non triviale et π ∈ k∨ est un scalaire

non nul. Dans cette sous-section on décrit certaines sous-catégories triangulées de RigDMeff(k,Λ) en termes de sous-catégories triangulées de motifs algébriques sur certains k-schémas. Le résultat le plus complet dans cette directionest l’analogue avec transferts de la première partie de la scholie 1.3.26. Là encore, la validité de ce résultat nécessitel’hypothèse que k est d’égale caractéristique nulle et que sa valuation est discrète. Un résultat partiel valable pour kplus général sera établi plus loin dans la sous-section.

Definition 2.5.50 — Soit k un corps de caractéristique nulle. On appelle QUDM(k,Λ) ⊂ DM(Gmk,Λ) lasous-catégorie triangulée avec sommes infinies engendrée par les motifs M(Qgmr (X, f))(n) avec n ∈ Z, r ∈ N−0, Xun k-schéma lisse, f ∈ Γ(X,O×) et Qgmr (X, f) = X[T, T−1, V ]/(V r−f.T ) vu comme Gmk = Spec(k[T, T−1])-schéma.

Le premier théorème de cette sous-section, s’énonce alors :

Theoreme 2.5.51 — Supposons que k = k((π)) est le corps des séries de Laurent en π à coefficients dans uncorps de caractéristique nulle k. La composée

(2.92) F : QUDM(k,Λ) ⊂ DM(Gmk,Λ)π∗// DM(k,Λ)

Rig∗// RigDM(k,Λ)

est une équivalence de catégories.

Demonstration On prouvera ce théorème en se ramenant à la première partie de la scholie 1.3.26. On utiliserapour cela le couple de foncteurs adjoints (atr, otr), d’ajout et d’oubli des transferts. Étant donné un schéma noethérienS, rappelons que DA(S,Λ) désigne la catégorie homotopique des S-schémas lisses à coefficients dans la catégorie descomplexes de Λ-modules. On notera QUDA(k,Λ) ⊂ DA(Gmk,Λ) la sous-catégorie triangulée stable par sommesinfinies et engendrée par les SuspT (Qgmr (X, f)⊗Λ) avec (p, r) ∈ N2, X des k-schémas lisses et f ∈ Γ(X,O×). La scholie1.3.26 affirme que la composée

(2.93) F : QUDA(k,Λ) ⊂ DA(Gmk,Λ)π∗// DA(k,Λ)

Rig∗// RigDA(k,Λ)

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192 Motifs des variétés rigides analytiques II

est une équivalence de catégories. On dispose par ailleurs d’un carré commutatif à un isomorphisme canonique près

QUDA(k,Λ)F//

Latr

RigDA(k,Λ)

Latr

QUDM(k,Λ)F// RigDM(k,Λ).

Le foncteur Latr de gauche (resp. de droite) envoie un système de générateurs compacts de QUDA(k,Λ) (resp.RigDA(k,Λ)) sur un système de générateurs compacts de QUDM(k,Λ) (resp. RigDM(k,Λ)). Comme (2.93) estune équivalence de catégories, on déduit que (2.92) envoie un système de générateurs compacts de QUDM(k,Λ) surun système de générateurs compacts de RigDM(k,Λ).

Par le lemme 1.3.32, il est suffisant de prouver que l’homomorphisme

homDM(Gmk,Λ)(A,B) // homRigDM(k,Λ)(F(A),F(B))

est bijectif pour A = Latr(A0) et B = Latr(B0) avec A0 et B0 des objets compacts de la sous-catégorie triangu-lée QUDA(k,Λ) ⊂ DA(Gmk,Λ). Par le corollaire 1.3.28, tout objet compact K de QUDA(k,Λ) admet un dualfort K∨. Étant donné que Latr est un foncteur monoïdal symétrique, Latr(B

∨0 ) est un dual fort de Latr(B

∨0 ). De

même, F(atr(B∨0 )) est un dual fort de F(atr(B0)). En prenant C0 = A0 ⊗ B∨0 , on voit qu’il suffit de prouver que

l’homomorphismehomDM(Gmk,Λ)(C,1) // homRigDM(k,Λ)(F(C),F(1))

est bijectif pour C = Latr(C0) avec C0 un objet compact de QUDA(k,Λ). Considérons pour cela le diagrammecommutatif

homDM(Gmk,Λ)(C,1)

// homRigDM(k,Λ)(F(C),F(1))

homDA(Gmk,Λ)(C0,Rotr(1))(a)// homRigDA(k,Λ)(F(C0),F(Rotr1))

(b)// homRigDA(k,Λ)(F(C0),Rotr(F(1))).

Les isomorphismes verticaux sont déduits de l’adjonction (Latr,Rotr). L’homomorphisme (b) est donné par la transfor-mation naturelle F Rotr // // Rotr F obtenue par adjonction de l’isomorphisme de commutation FLatr ' LatrF.Cette transformation naturelle est inversible par le lemme 2.5.52 ci-dessous (remarquer que F(†) = LRig∗ Lπ∗(†) etutiliser successivement la première puis la deuxième partie dudit lemme).

Pour terminer, il nous reste donc à montrer que l’homomorphisme (a) est inversible. Compte tenu de la scholie1.3.26, il suffira de vérifier que Rotr(1) est dans QUDA(k,Λ). Or, par le lemme 2.5.52 ci-dessous, on dispose d’un iso-morphisme Rotr(Lq

∗E) ' Lq∗Rotr(E) avec q : Gmk// Spec(k) la projection évidente et E un objet de DA(k,Λ).

Mais l’image de Lq∗ est clairement contenue dans la sous-catégorie QUDA(k,Λ). Le théorème est démontré. c.q.f.d

Le lemme suivant a servi dans la preuve du théorème précédent.

Lemme 2.5.52 — 1- Soit f : Y // X un morphisme régulier (i.e., plat à fibres géométriques régulières) entreschémas noethériens réguliers et de dimension de Krull finie. La transformation naturelle Lf∗ Rotr

∼// Rotr Lf∗

entre foncteurs de DM(X,Λ) dans DA(Y,Λ) est inversible.2- La transformation naturelle LRig∗ Rotr

∼// Rotr LRig∗ entre foncteurs de DM(k,Λ) dans RigDA(k,Λ)

est inversible.

Demonstration 1- L’hypothèse X régulier est probablement superflue. On la suppose ici pour avoir une descriptionexplicite des correspondances finies entre des X-schémas lisses ou des Y -schémas lisses.

Supposons d’abord que f est un morphisme de type fini. C’est donc un morphisme lisse. Les foncteurs Lf∗ admettentalors des adjoints à gauche Lf#. (Voir [Ayo07a, Section 4.5] pour les motifs sans transferts. Le cas des motifs avectransferts se traite de la même manière.) Le foncteur Lf# envoie le motif (resp. le motif avec transferts) d’un Y -schémalisse Y ′ sur le motif (resp. le motif avec transferts) de Y ′ considéré comme un X-schéma lisse. Par construction, cesfoncteurs commutent à l’ajout des transferts, i.e., on a un isomorphisme canonique Lf# Latr ' Latr Lf#. Paradjonction, on obtient un isomorphisme Lf∗ Rotr ' Rotr Lf∗. On vérifie aisément que cet isomorphisme est latransformation naturelle de l’énoncé (i.e., celle déduite de l’isomorphisme Lf∗ Latr ' Latr Lf∗).

Revenons au cas général. En utilisant la localité pour la topologie de Zariski sur X et Y ainsi que le cas desimmersions ouvertes, on se ramène à supposer que X et Y sont des schémas affines. Par le théorème de Popescu

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 193

[Pop85, Pop86], Y est une limite projective filtrante Y = Limi∈IYi de X-schémas lisses affines Yi. Soit K unobjet de DM(X,Λ). Pour montrer que Lf∗ Rotr(K) // Rotr Lf∗(K) est inversible, il suffit de vérifier quel’homomorphisme

homDA(Y,Λ)(A, Lf∗ Rotr(K)) // homDA(Y,Λ)(A,Rotr Lf∗(K))

est bijectif pour tout A = L(Y → Yi)∗(Ai) avec i ∈ I et Ai un objet compact de DA(Yi,Λ). On a un carré commutatif

homDA(Yj ,Λ)(L(Yj → Yi)∗Ai, L(Yj → X)∗RotrK)

∼//

homDM(Yj ,Λ)(L(Yj → Yi)∗Ai,RotrL(Yj → X)∗K)

homDA(Y,Λ)(L(Y → Yi)∗Ai, L(Y → X)∗RotrK) // homDM(Y,Λ)(L(Y → Yi)

∗Ai,RotrL(Y → X)∗K)

où la flèche horizontale supérieure est inversible puisque Yj est lisse sur X.Par la proposition 1.A.1, l’homomorphisme évident

Colimj∈I/i

homDA(Yj ,Λ)(L(Yj → Yi)∗Ai, L(Yj → X)∗RotrK) // homDA(Y,Λ)(L(Y → Yi)

∗Ai, L(Y → X)∗RotrK)

est bijectif. Pour terminer la preuve de la première partie du lemme, il suffira de montrer que l’homomorphisme

Colimj∈I/i

homDM(Yj ,Λ)(L(Yj → Yi)∗Ai,RotrL(Yj → X)∗K) // homDM(Y,Λ)(L(Y → Yi)

∗Ai,RotrL(Y → X)∗K)

est également bijectif. Par l’adjonction (Latr,Rotr) cet homomorphisme s’identifie à

Colimj∈I/i

homDM(Yj ,Λ)(L(Yj → Yi)∗LatrAi, L(Yj → X)∗K) // homDM(Y,Λ)(L(Y → Yi)

∗LatrAi, L(Y → X)∗K).

Le résultat recherché découle alors de l’analogue avec transferts de la proposition 1.A.1. Cet analogue se démontre enadaptant la preuve de ladite proposition. Les détails sont laissés aux lecteurs.

2- Passons maintenant à la seconde partie du lemme. Exceptionnellement, nous noterons T tr le préfaisceau avectransferts Λtr(Gmk, 1) pour le distinguer de T = Λ(Gmk, 1). Il suffit de montrer que LRig∗ Rotr

∼// Rotr LRig∗

est inversible après évaluation sur les générateurs compacts de DM(k,Λ), à savoir les SuspT tr (Λtr(X)) avec p ∈ N et Xdes k-schémas lisses. (Utiliser pour cela que les foncteurs Rotr commutent aux sommes infinies puisque leurs adjointsà gauches Latr préservent les objets compacts.) Or, les foncteurs Rotr commutent aux twists de Tate négatifs. Il suffitdonc de montrer que

LRig∗ Rotr(Sus0TΛtr(X))

∼// Rotr LRig∗(Sus0

TΛtr(X))

est inversible pour tout k-schéma lisse X. On travaillera désormais avec les T -spectres et les T tr-spectres non symé-triques. On dispose d’un carré commutatif

LRig∗ Rotr(Sus0TΛtr(X)) //

Rotr LRig∗(Sus0TΛtr(X))

LRig∗ Rotr

(SingA1

· ((T tr)⊗trn ⊗tr Λtr(X))n∈N

)// Rotr

(SingB1

· ((T an,tr)⊗trn ⊗tr Λtr(X

an))n∈N

)où l’on note T an,tr = Λtr(Gman

k , 1) pour le distinguer de T an = Λ(Gmank , 1). Le fait que les flèches verticales sont

inversibles dans RigDA(k,Λ) découle du lemme 2.5.31 (et de sa version algébrique).Le T tr-spectre SingA1

· ((T tr)⊗trn ⊗tr Λtr(X))n∈N est un ΩT tr -spectre A1-local niveau par niveau (par rapport à la

structure Nis-locale sur les complexes de préfaisceaux avec transferts). Ceci découle de l’analogue algébrique du théo-rème 2.5.32 et du théorème de simplification de Voevodsky [Voe02]. De même, le T an,tr-spectre SingB1

· ((T an,tr)⊗trn⊗tr

Λtr(Xan))n∈N est un ΩT an,tr -spectre B1-local niveau par niveau (par rapport à la structure Nis-locale sur les complexes

de préfaisceaux avec transferts). Ceci découle des théorèmes 2.5.32 et 2.5.39. Ainsi, un remplacement Nis-fibrant niveaupar niveau

(SingA1

· ((T tr)⊗trn ⊗tr Λtr(X))Nis−fib)n∈N (resp. (SingB1

· ((T an,tr)⊗trn ⊗tr Λtr(X

an))Nis−fib)n∈N)

est un remplacement stablement (A1,Nis)-fibrant (resp. (B1,Nis)-fibrant) de Sus0T trΛtr(X) (resp. Sus0

T an,trΛtr(Xan)).

Étant donné que les foncteurs otr préservent les équivalences Nis-locales, on est ramené à montrer que le morphisme

LRig∗(

otr

(SingA1

· ((T tr)⊗trn ⊗tr Λtr(X))n∈N

))// otr

(SingB1

· ((T an,tr)⊗trn ⊗tr Λtr(X

an))n∈N

)

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194 Motifs des variétés rigides analytiques II

est inversible dans RigDA(k,Λ).Remarquons maintenant que otr SingA1

· = SingA1

· otr et otr SingB1

· = SingB1

· otr. De plus, toutes les versions,algébriques ou rigides, avec ou sans transferts, du lemme 2.5.31 sont vraies et se démontrent de la même manière. Ilest donc suffisant de prouver que

LRig∗(otr((Ttr)⊗

trn ⊗tr Λtr(X))n∈N) // otr((Tan,tr)⊗

trn ⊗tr Λtr(Xan))n∈N

est une équivalence Nis-locale niveau par niveau (avec LRig∗ le foncteur dérivé à gauche relativement aux structuresprojectives non-localisées). En remarquant que T tr est un facteur direct de Λtr(Gmk), il est suffisant de prouver que

LRig∗(otr(Λtr(X))) // otr(Λtr(Xan))

est une équivalence Nis-locale. Ceci découle facilement du fait que le foncteur

Rig∗ : ShvNis(Sm/k,Λ) // ShvNis(SmRig/k,Λ)

est exact et commute aux foncteurs d’oubli des transferts (voir la remarque 2.5.21). Le lemme est démontré. c.q.f.d

Pour continuer, on aura besoin d’introduire quelques nouvelles sous-catégories.

Definition 2.5.53 — 1- On note RigDMeff,br(k,Λ) ⊂ RigDMeff(k,Λ) la sous-catégorie triangulée avec sommesinfinies engendrée par les motifs des k-affinoïdes lisses admettant bonne réduction. On note aussi RigDMbr(k,Λ) ⊂RigDM(k,Λ) la sous-catégorie triangulée avec sommes infinies engendrée par les motifs des k-affinoïdes lisses admet-tant bonne réduction ainsi que leurs twists de Tate négatifs.

2- On note UnDMeff(k,Λ) ⊂ DMeff(Gmnk,Λ) la sous-catégorie triangulée avec sommes infinies engendrée par les

motifs des Gmnk-schémas constants, i.e., isomorphes à une projection X ×k Gmn

k// Gmn

kavec X un k-schéma

lisse. On note aussi UnDM(k,Λ) ⊂ DM(Gmnk,Λ) la sous-catégorie triangulée avec sommes infinies engendrée par les

motifs des Gmnk-schémas constants ainsi que leurs twists de Tate négatifs.

Voici le deuxième théorème principal de cette sous-section.

Theoreme 2.5.54 — On suppose les deux conditions suivantes satisfaites :(a) k est d’égale caractéristique et |k×| est un groupe abélien libre de rang fini,(b) Λ est une Q-algèbre.

On fixe une rétraction k ⊂ k et on choisit des scalaires π1, . . . , πn ∈ k tels que (|π1|, . . . , |πn|) est une base du Z-module|k×|. La composée

(2.94) F : UnDMeff(k,Λ) ⊂ DMeff(Gmnk,Λ)

(π1,...,πn)∗// DMeff(k,Λ)

Rig∗// RigDMeff(k,Λ)

(2.95) (resp. F : UnDM(k,Λ) ⊂ DM(Gmnk,Λ)

(π1,...,πn)∗// DM(k,Λ)

Rig∗// RigDM(k,Λ) )

est pleinement fidèle et induit une équivalence de catégories entre UnDMeff(k,Λ) et RigDMeff,br(k,Λ) (resp. entreUnDM(k,Λ) et RigDMbr(k,Λ)).

La preuve du théorème 2.5.54 occupera l’essentiel du reste de la sous-section. On note π le n-uplet (π1, . . . , πn).Soit X un k-schéma lisse. On note dorénavant Qn(X) le Gmn

k-schéma constant X ×k Gmn

k. La k-variété rigide

quasi-compacte [(X ×k k)//(π)]η sera notée Qrig(X). La k-variété rigide (X ×k k)an sera notée Qan(X). On disposed’une immersion ouverte canonique Qrig(X) ⊂ Qan(X).

Lemme 2.5.55 — 1- La sous-catégorie RigDMeff,br(k,Λ) (resp. RigDMbr(k,Λ)) est compactement engendréepar les motifs des k-variétés rigides Qrig(X) avec X des k-schémas lisses (resp. ainsi que leurs twists de Tate négatifs).

2- Soit X un k-schéma lisse. L’inclusion évidente Λtr(Qrig(X)) // Λtr(Q

an(X)) est une (B1,Nis)-équivalencefaible.

Demonstration 1- Il suffit de traiter le cas effectif. Notons T ⊂ RigDMeff(k,Λ) la sous-catégorie triangulée stablepar sommes infinies et engendrée par les Meff(Qrig(X)). Il est clair que Qrig(X) admet bonne réduction. On a doncT ⊂ RigDMeff,br(k,Λ). Pour montrer qu’il y a égalité, il faut vérifier que Meff(U) ∈ Ob(T) pour toute k-variété rigideà bonne réduction U .

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 195

Soit U un modèle formel de U lisse sur k. Si (Ui)i∈I est un recouvrement ouvert fini, Meff(U) appartient à lasous-catégorie triangulée engendrée par les Meff((UJ)η) avec ∅ 6= J ⊂ I et UJ = ∩j∈JUj . Il suffit donc de traiter le casoù il existe un morphisme étale de k-schémas formels U // Bdk . Dans ce cas, U est canoniquement isomorphe

(en tant que Bdk -schéma formel) à (Uσ ⊗k k)//(π). On en déduit que U est isomorphe à Qrig(Uσ). D’où la premièrepartie du lemme.

2- On dispose de deux foncteurs θ1, θ2 : DMeff(k,Λ) // RigDMeff(k,Λ) qui, pour un k-schéma lisse X,envoient l’objet Λtr(X) sur θ1(Λtr(X)) = Λtr(Q

rig(X)) et θ2(Λtr(X)) = Λtr(Qan(X)) respectivement. Les immersions

ouvertes Qrig(†) ⊂ Qan(†) fournissent une transformation naturelle θ1// θ2 . Il s’agit de montrer qu’elle est

inversible. Or, DMeff(k,Λ) est compactement engendrée par les motifs des k-schémas projectifs et lisses. Pour de telsschémas X, l’immersion ouverte Qrig(X) ⊂ Qan(X) est un isomorphisme. D’où le résultat recherché. c.q.f.d

Si X est un k-schéma lisse, le foncteur F envoie le motif de Qn(X) sur le motif de Qan(X) qui, par la seconde partiedu lemme 2.5.55, est isomorphe au motif de Qrig(X). On déduit que (2.94) et (2.95) se factorisent par des foncteurs

F′ : UnDMeff(k,Λ) // RigDMeff,br(k,Λ) et F′ : UnDM(k,Λ) // RigDMbr(k,Λ) .

Il s’agit de montrer que ces foncteurs sont des équivalences de catégories. La première partie du lemme 2.5.55 montreque les images des foncteurs F′ engendrent les catégories triangulées avec sommes infinies RigDMeff,br(k,Λ) etRigDMbr(k,Λ). Par le lemme 1.3.32, il est suffisant de vérifier que les homomorphismes

homDMeff (Gmnk,Λ)(p

∗(A), p∗(B)) // homRigDMeff (k,Λ)(F(p∗(A)),F(p∗(B)))

et homDM(Gmnk,Λ)(p

∗(A), p∗(B)) // homRigDM(k,Λ)(F(p∗(A)),F(p∗(B)))

sont bijectifs avec A et B des objets compacts de DMeff(k,Λ) ou DM(k,Λ), et p est la projection structurale duk-schéma Gmn

ksur Spec(k).

On dispose d’un carré commutatif à un isomorphisme canonique près

(2.96) UnDMeff(k,Λ)F//

Sus0T

RigDMeff(k,Λ)

Sus0T

UnDM(k,Λ)F// RigDM(k,Λ).

Par le corollaire 2.5.49, le foncteur Sus0T : RigDMeff(k,Λ) // RigDM(k,Λ) est pleinement fidèle. De même, on

sait que Sus0T : DMeff(k,Λ) // DM(k,Λ) est pleinement fidèle. Or, on a des isomorphismes canoniques

homDMeff (Gmnk,Λ)(M

eff(Qn(X)),Meff(Qn(Y ))[i]) ' homDMeff (k,Λ)(Meff(Qn(X)/k),Meff(Y )[i])

et homDM(Gmnk,Λ)(M(Qn(X)),M(Qn(Y ))[i]) ' homDM(k,Λ)(M(Qn(X)/k),M(Y )[i])

pour tous k-schémas lisses X et Y , et tout i ∈ Z. Il vient que l’homomorphisme

homDMeff (Gmnk,Λ)(M

eff(Qn(X)),Meff(Qn(Y ))[i]) // homDM(Gmnk,Λ)(M(Qn(X)),M(Qn(Y ))[i])

est bijectif. On en déduit la pleine fidélité de Sus0T : UnDMeff(k,Λ) // UnDM(k,Λ) en reprenant le même

raisonnement utilisé dans la preuve du lemme 1.3.32. Il suffit donc de traiter le cas stable.Tout objet compact de DM(k,Λ) admet un dual fort. Il est donc suffisant de montrer que l’homomorphisme

homDM(Gmnk,Λ)(1, p

∗C) // homRigDM(k,Λ)(1,F(p∗C))

est bijectif pour tout objet compact C de DM(k,Λ). Comme C est compact, il existe r ∈ N tel que C(r) ' Sus0T (K)

avec K un objet compact de DMeff(k,Λ). En utilisant le fait que 1(r)[r] est facteur direct du motif de Gmrket la

pleine fidélité des foncteurs verticaux de (2.96), on voit que le théorème 2.5.54 découle de l’énoncé suivant :

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196 Motifs des variétés rigides analytiques II

Proposition 2.5.56 — Soient r ∈ N et K· un complexe de préfaisceaux avec transferts sur Sm/k. L’homomor-phisme canonique

homDMeff (Gmnk,Λ)(M

eff(Qn(Gmrk)), p∗(K)) // homRigDMeff (k,Λ)(M

eff(Qrig(Gmrk)),F(p∗(K)))

est bijectif.

On peut supposer que K· est projectivement cofibrant et (A1,Nis)-fibrant. Par adjonction, on a un isomorphisme

homDMeff (Gmnk,Λ)(M

eff(Qn(Gmrk)), p∗(K)) ' homDMeff (k,Λ)(M

eff(Qn(Gmrk)),K) ' H0Γ(Qn(Gmr

k),K·).

Notons également que Γ(Qn(Gmrk),K·) est quasi-isomorphe à Γ(Qn(Gmr

k),SingA1

· (K)) étant donné que K· est A1-local. Puisque Qrig(Gmr

k) = ∂Brk, le corollaire 2.5.33 fournit un isomorphisme canonique

H0(Γ(Qrig(Gmrk),SingB1

· (Rig∗(π)∗p∗K)))∼// homRigDMeff (k,Λ)(M

eff(Qrig(Gmrk)),F(p∗(K))) .

La proposition 2.5.56 découle donc du résultat suivant :

Proposition 2.5.57 — Soient X un k-schéma affine et lisse et K· un complexe de préfaisceaux avec transfertssur Sm/k. Supposons que K· est projectivement cofibrant et Nis-fibrant. Alors, le morphisme

(2.97) Γ(Qn(X),SingA1

· (K)) // Γ(Qrig(X),SingB1

· (Rig∗π∗p∗(K)))

est un quasi-isomorphisme.

Pour Y un k-schéma affine et lisse on note V (Qrig(Y )/Qn(Y )) la catégorie cofiltrante des voisinages étales deQrig(Y ) dans Qn(Y ). Rappelons qu’un objet de V (Qrig(Y )/Qn(Y )) est un couple (U, j) formé d’un Qn(Y )-schémaétale U muni d’un morphisme j : Qrig(Y ) // (U ×Gmn

kSpec(k))an de Qan(Y )-variétés rigides. Étant donné un

préfaisceau F sur Sm/k, on pose

F (V (Qrig(Y )/Qn(Y ))) = Colim(U,j)∈V (Qrig(Y )/Qn(Y ))

F (U).

Si K· est complexe de préfaisceaux avec transferts projectivement cofibrant, le morphisme

(2.98) Tot(K·(V (Qrig(∆·X)/Qn(∆·X)))) // Tot((Rig∗π∗p∗(K·))(Qrig(∆·X)))

est un quasi-isomorphisme. En effet, K· étant projectivement cofibrant, il est facteur direct d’une colimite filtrantede complexes homologiquement bornés inférieurement et qui en chaque degré sont donnés par une somme directe depréfaisceaux avec transferts représentables (par des k-schémas lisses). Il suffit donc de traiter le cas K· = Λtr(W )

(avec W un k-schéma lisse). Mais alors, le morphisme (2.98) s’écrit simplement

CorQn(X)(V (Qrig(∆·X)/Qn(∆·X)), Qn(X ×k W )) // CorQrig(X)(Qrig(∆·X), Qrig(X)×kQan(W )) .

Le morphisme ci-dessus est un quasi-isomorphisme par le théorème 2.4.16. On a ainsi montré que la proposition 2.5.57découle de l’énoncé suivant :

Proposition 2.5.58 — Soient X un k-schéma affine et lisse et K· un complexe de préfaisceaux avec transfertssur Sm/k, projectivement cofibrant et Nis-fibrant. Le morphisme de complexes

(2.99) Tot(K·(Qn(∆·X))) // Tot(K·(V (Qrig(∆·X)/Qn(∆·X))))

est un quasi-isomorphisme.Pour établir la proposition 2.5.58, nous aurons besoin de quelques préliminaires. On note M ⊂ Zn le sous-monoïde

des n-uplets d’entiers relatifs a = (a1, . . . , an) tels que |πa| = |πa11 . . . πann | ≤ 1. On a clairement M ∩ (−M) = 0 et

M ∪ (−M) = Zn avec (−M) = a ∈ Zn, (−a) ∈M. En particulier, M contient une base de Zn.On note E l’ensemble des sous-monoïdes E ⊂ M qui peuvent être engendrés par une famille (a1, . . . an) formant

une base du Z-module libre Zn. Cet ensemble est non vide. On l’ordonne par la relation d’inclusion. On a le lemmesuivant :

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 197

Lemme 2.5.59 — Soit E ⊂ M un sous-monoïde de type fini (i.e., engendré par un nombre fini d’éléments deM). Il existe alors E′ ∈ E tel que E ⊂ E′. En particulier, l’ensemble E est filtrant.

Demonstration Quitte à élargir E, on peut supposer qu’il contient une base du Z-module Zn. On peut aussi supposerque n.a ∈ E entraîne que a ∈ E pour tout n ∈ N− 0 et a ∈ Zn. On note k[E] la k-algèbre du monoïde E. CommeE est de type fini, c’est une k-algèbre commutative de type fini. L’inclusion k[E] ⊂ k[Zn] ' k[T1, T

−11 , . . . , Tn, T

−1n ]

fournit une immersion ouvertej : Gmn

k// Spec(k[E]) .

C’est une immersion toroïdale au sens de [Mum73]. Elle correspond au polyèdre rationnel convexe N ⊂ Rn donnépar

N = x = (x1, . . . , xn) ∈ Rn, (x, a) ≥ 0 pour tout a ∈ E.

Ci-dessus, (−,−) désigne le produit scalaire usuel sur Rn. On a alors E = Zn ∩N∨ avec

N∨ = b = (b1, . . . , bn) ∈ Rn, (x, b) ≥ 0 pour tout x ∈ N.

Par [Mum73], il existe une décomposition finie en polyèdres rationnels convexes Nαα∈I de N telle que les Nαsont de la forme R≥0eα,1 + · · ·+ R≥0eα,r avec (eα,1, . . . , eα,rα) les rα premiers éléments d’une base du Z-module Zn.À la décomposition Nαα∈I correspond une immersion toroïdale j′ : Gmn

k// X et un triangle commutatif

X

e

Gmnk

j//

j′44

Spec(k[E])

avec e un morphisme propre. Le schéma X est recouvert par les ouverts Xα = Spec(k[Zn ∩N∨α ]).Comme E est un sous-monoïde de M , le point π s’étend en un k-point Spec(k) // Spec(k[E]) . Étant donné

que k est un anneau de valuation, il existe un morphisme r faisant commuter le triangle

X

e

Spec(k) //

r

33

Spec(k[E]).

Comme k est local, il existe α0 ∈ I tel que r se factorise par Xα0 = Spec(k[Zn ∩N∨α0]). On vérifie que α0 est l’unique

indice tel que Nα0contient le vecteur (log|π1|, . . . , log|πn|). En particulier, Nα0

n’est pas contenu dans aucun hyperplande Rn. On en déduit que E′ = Zn ∩N∨α0

⊂ M est un sous-monoïde contenant E et engendré par une base de Zn. Lelemme est démontré. c.q.f.d

La k-algèbre k[M ] est une sous-algèbre dense de k. Elle coïncide avec k(π1, . . . , πn)∩ k. Par le lemme précédent,Spec(k[M ]) est la limite projective filtrante des espaces affines Spec(k[E]) pour E ∈ E. On note QE = Spec(k[E])et HE le complémentaire de Gmn

kdans QE . Étant donné un k-schéma lisse Y , on pose QE(Y ) = TE ×k Y et

HE(Y ) = HE ×k Y . Alors, Qn(Y ) est un ouvert de QE(Y ) et HE(Y ) est le fermé complémentaire.Soit Y un k-schéma et E ∈ E. On note VE(Y ) la catégorie cofiltrante des voisinages étales de HE(Y ) dans QE(Y ).

On définit un foncteurVE(Y ) // V (Qrig(Y )/Qn(Y ))

en associant à un voisinage étale HE(Y ) // V // QE(Y ) le Qn(Y )-schéma étale V ×QE(Y ) Qn(Y ) pointé par

la composéeQrig(Y ) ⊂ [(V ⊗k[E] k

)//(π)]η // (V ⊗k[E] k)an .

Ces foncteurs induisent clairement un foncteur

(2.100) ColimE∈EVE(Y ) // V (Qrig(Y )/Qn(Y ))

avec ColimE∈EVE(Y ) la 2-colimite des VE(Y ), i.e., la catégorie dont les objets sont les couples (E, V ) avec E ∈ E etV ∈ VE(Y ).

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198 Motifs des variétés rigides analytiques II

Lemme 2.5.60 — Le foncteur (2.100) est cofinal.

Demonstration Soit (U, j) un objet de V (Qrig(Y )/Qn(Y )). Il s’agit de le raffiner par le pull-back suivant Qn(Y ) ⊂QE(Y ) d’un voisinage étale de HE(Y ) dans QE(Y ) pour un certain E ∈ E. On peut pour cela supposer que U estaffine et on choisit une présentation

U =Qn(Y )[u1, . . . , um]

(P1, . . . , Pm)

telle que la matrice jacobienne(∂Pj∂ui

)i,j

soit inversible sur U .

Par hypothèse, on dispose d’une solution (f1, . . . , fm) ∈ Γ(Qrig(Y ),O)n au système d’équations (Pj = 0)1≤j≤m.De plus, la matrice (

∂Pj∂ui

(f1, . . . , fm)

)1≤i,j≤m

admet un inverse N ∈ Matm×m(Γ(Qrig(Y ),O)). Étant donné que le sous-anneau Γ(Qn(Y ),O) ⊂ Γ(Qrig(Y ),O) estdense, on peut trouver pour tout réel ε > 0 des éléments f εi ∈ Γ(Qn(Y ),O) tels que :

1. |fi − f εi | ≤ ε,2. |Pj(f ε1 , . . . , f εm)| ≤ ε,

3.(∂Pj∂ui

(f ε1 , . . . , fεm))

1≤i,j≤mest inversible dans Matm×m(Γ(Qrig(Y ),O)).

On pose alors, P εj = Pj(u1 + f ε1 , . . . , um + f εm). On a encore U ' Qn(Y )[u1, . . . , um]/(P ε1 , . . . , Pεm). Des propriétés

précédentes, on déduit immédiatement :

2’. |P εj (0, . . . , 0)| ≤ ε,

3’.(∂P εj∂ui

(0, . . . , 0))

1≤i,j≤mest inversible dans Matm×m(Γ(Qrig(Y ),O)).

En utilisant encore une fois que le sous-anneau Γ(Qn(Y ),O) ⊂ Γ(Qrig(Y ),O) est dense, on peut trouver N ε ∈Matm×m(Γ(Qn(Y ),O)) telle que ∣∣∣∣(∂P εj∂ui

(0, . . . , 0)

)N ε − idn

∣∣∣∣ ≤ ε.(Ci-dessus, la norme d’une matrice est le supremum des normes de ses coefficients.) Notons gε = det(N ε) et posonsRεj = P εj N ε. Alors

U ′ =Qn(Y )[u1, . . . , um, s]

(Rε1, . . . , Rεm, sg

ε − 1).

est naturellement un ouvert de U tel que Qrig(Y ) // (U ×Gmnkk)an se factorise à travers (U ′ ×Gmn

kk)an. Il suffit

donc de montrer que U ′ est dans l’image essentielle de (2.100).On peut écrire Rεj = uj+Q

εj+S

εj avec Qεj affine, de norme infinie plus petite que ε et Rεj n’ayant que des monômes de

degrés plus grand que 2. Lorsque ε tend vers zero, le polynôme Rεj tend vers Pj(u1 +f1, . . . , um+fm)N (où, rappelonsle, N est l’inverse de la matrice jacobienne évaluée en (f1, . . . , fn)). Il existe donc λ > 0 tel que |Sεj | = |Rεj − uj | ≤ λ

pour tout ε suffisamment petit. On pose T ε,rj = π−r1 Qεj(πr1u1, . . . , π

r1un). Lorsque λ|πr1| < 1 et ε < πr1, le polynôme

T ε,rj est à coefficients dans l’anneau Γ(Qrig(Y ),O) = Γ(Y ⊗k k//(π),O). Or, T ε,rj est également à coefficients dansΓ(Qn(Y ),O). On déduit que T ε,rj est à coefficients dans Γ(Y,O)⊗k k[M ]. Par le lemme 2.5.59, il existe E1 ∈ E tel queles T ε,rj sont à coefficients dans Γ(QE1(Y ),O) pour tout 1 ≤ j ≤ m.

On peut trouver a(ε) ∈ Zn tel que hε = πa(ε)gε est de norme infinie égale à 1 sur Qrig(Y ). Puisque hε estinversible dans Γ(Qrig(Y ),O) et que l’affinoïde Qrig(Y ) admet bonne réduction, la fonction hε est inversible dansΓ(Qrig(Y ),O). Par ailleurs, hε est dans Γ(Qrig(Y ),O) ∩ Γ(Qn(Y ),O). Quitte à élargir E1, on peut donc supposerque hε ∈ Γ(QE1(Y ),O).

Le polynôme T ε,rj est congru à uj modulo l’idéal k∨. De même, la réduction de hε modulo k∨ est inversible. Il vientque le QE1(Y )-schéma

QE1(Y )[u1, . . . , un, s′]

(T ε,r1 , . . . , T ε,rm , s′hε − 1)

est un voisinage étale du fermé Y ⊂ QE1(Y ) défini par l’annulation de tous les monômes e pour e ∈ E1 − 0.Soit (a1, . . . an) une base de Zn qui engendre le monoïde E1. Quitte à permuter les vecteurs, on peut supposer que|πa1 | = mini=1,...,n|πai |. On note alors E le monoïde engendré par la base (a1, a2− a1, . . . , an− a1) de Zn. Il vient que

V =QE(Y )[u1, . . . , un, s

′]

(T ε,N1 , . . . , T ε,Nm , s′hε − 1)

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2.5 La catégorie RigDM(k) des motifs des variétés rigides 199

est un voisinage étale de HE(Y ) dans Y puisque HE(Y ) est l’image inverse de Y ⊂ QE1(Y ) suivant le morphismeQE(Y ) // QE1(Y ) . Par construction, le pull-back de V par Qn(Y ) ⊂ QE(Y ) est canoniquement isomorphe à U ′.Le lemme est démontré. c.q.f.d

On peut maintenant achever la preuve de la proposition 2.5.58 et donc du théorème 2.5.54. Par le lemme 2.5.60,on a un isomorphisme canonique

ColimE∈ETot(K·(VE(∆·X)×QE(X) Qn(X))) ' Tot(K·(V (Qrig(∆·X)/Qn(∆·X)))).

Il suffit donc de montrer que

(2.101) Tot(K·(Qn(∆·X))) // Tot(K·(VE(∆·X)×QE(X) Qn(X)))

est un quasi-isomorphisme pour tout E ∈ E.Pour Y un k-schéma affine et lisse, on notera V ′E(Y ) ⊂ VE(Y ) la sous-catégorie cofiltrante dont les objets sont les

voisinages étales V de HE(Y ) ⊂ QE(Y ) tels que V ×QE(Y ) HE(Y ) ' HE(Y ). Si V ∈ V ′E(Y ), le carré

V ×QE(Y ) Qn(Y ) //

V

Qn(Y ) // QE(Y )

est un carré distingué pour la topologie Nisnevich. Comme K· est Nis-fibrant, il vérifie la propriété de Brown-Gersten.Le carré

K·(QE(Y )) //

K·(Qn(Y ))

K·(V ) // K·(V ×QE(Y ) Qn(Y ))

est donc homotopiquement cartésien et cocartésien. On déduit immédiatement que

Tot(K·(QE(∆·X))) //

Tot(K·(Qn(∆·X)))

Tot(K·(VE(∆·X))) // Tot(K·(VE(∆·X)×QE(X) Qn(X)))

est homotopiquement cartésien et cocartésien. Il est donc suffisant de prouver que le morphisme de complexes

(2.102) Tot(K·(QE(∆·X))) // Tot(K·(VE(∆·X)))

est un quasi-isomorphisme pour E ∈ E.

Par la proposition 2.2.43, le morphisme évident Tot(K·(∆·X)) // Tot(K·(QE(∆·X))) , induit par les projections

QE(†) // † , est un quasi-isomorphisme. Il suffit donc de prouver que

(2.103) p : Tot(K·(∆·X)) // Tot(K·(VE(∆·X)))

est un quasi-isomorphisme. On dispose d’une retraction

(2.104) s : Tot(K·(VE(∆·X))) // Tot(K·(∆·X))

induite par les immersions fermées † ⊂ VE(†) (où VE(†) est considéré comme un pro-schéma) définies par l’annulationdes monômes e pour e ∈ E − 0. Il suffit donc de montrer que p s est homotope à l’identité.

Remarquons pour cela que les sections nulle et unité de A1 induisent deux morphismes

Tot(K·(VE(A1k×k ∆·X)))

1∗//

0∗// Tot(K·(VE(∆·X))).

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200 Motifs des variétés rigides analytiques II

Ces deux morphismes sont simplicialement homotopes comme le montre la proposition 2.2.43 appliquée au préfaisceaude complexes qui à un k-schéma affine Y associe K·(VE(Y )). Par ailleurs, on dispose d’une action par homothétie

m : Spec(k[E])×k A1k

// Spec(k[E]) .

Cette action induit un morphisme de k-schémas

m : QE(A1k×k Y ) // QE(Y )

qui envoie HE(A1k×k Y ) dans HE(Y ). On déduit un foncteur m? : VE(Y ) // VE(A1

k×k Y ) qui à un voisinage

étale V de HE(Y ) dans QE(Y ) associe V ×QE(Y ),m QE(A1k×k Y ). Le foncteur m? induit alors un morphisme de

complexes

m∗ : Tot(K·(VE(∆·X))) // Tot(K·(VE(A1k×k ∆·X))) .

On vérifie immédiatement que m∗ 1∗ = id et m∗ 0∗ = p s. D’où le résultat recherché.

Remarque 2.5.61 — Le théorème 2.5.54 permet en théorie de "calculer" les groupes de morphismes entre n’importequels objets compacts A et B de RigDM(k,Λ). En effet, par le théorème 2.5.34, il existe une extension finie galoisiennel/k telle que (l/k)∗A et (l/k)∗B sont dans RigDMbr(l,Λ). Le Λ-module homRigDMbr(k,Λ)(A,B) s’identifie au sous-module des invariants pour l’action de Gal(l/k) sur homRigDM(l,Λ)((l/k)∗A, (l/k)∗B). D’autre part, le théorème 2.5.54permet d’identifier homRigDM(l,Λ)((l/k)∗A, (l/k)∗B) à un groupe de morphismes dans DM(Gmn

l,Λ).

Nous conjecturons que le théorème 2.5.54 admet une version en inégale caractéristique. Plus précisément :

Conjecture 2.5.62 — Soit k un corps complet pour une valuation non archimedienne non triviale. On supposeque Λ est une Q-algèbre. On suppose aussi que k est d’inégale caractéristique et que |k×| est un Z-module libre de rangn. Il existe alors une équivalence de catégories entre RigDMbr(k,Λ) et UnDM(k,Λ).

Il est important de noter qu’en inégale caractéristique, l’absence d’une rétraction à l’épimorphisme k // // krend difficile la construction d’un foncteur candidat pour l’équivalence de catégories conjecturée ci-dessus.

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