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CONCURRENCE LA CGN INVITE LES SUISSES À SKIER EN FRANCE PAGE 7 JUSTIN TIMBERLAKE CONFIDENCE SUR LE DERNIER WOODY ALLEN PAGES 28-29 Don Arnold/Getty Images MERCREDI 31 JANVIER 2018 · N° 27 · FR. 3.40 (TVA 2.5% incluse) · France voisine 3.05 € · www.lematin.ch Maxime Schmid HOCKEY EN BATTANT LAUSANNE, GOTTÉRON FAIT UN PAS VERS LES PLAY-OFF PAGES 34-35 REPORTAGE AVEC LES EXPERTS SUISSES PAGES 2-5 JA 1000 Lausanne 1 Laurent Crottet Keystone/Anthony Anex CHASSEURS DE DRONES

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CONCURRENCE

LA CGN INVITELES SUISSES À SKIER EN FRANCEPAGE 7

JUSTIN TIMBERLAKE

CONFIDENCESUR LE DERNIERWOODY ALLENPAGES 28-29

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MERCREDI 31 JANVIER 2018 · N° 27 · FR. 3.40 (TVA 2.5% incluse) · France voisine 3.05 € · www.lematin.ch

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HOCKEY

EN BATTANT LAUSANNE, GOTTÉRON FAIT UN PAS VERS LES PLAY-OFFPAGES 34-35

REPORTAGE

AVEC LES

EXPERTS

SUISSES

PAGES 2-5

JA 1000 Lausanne 1

Laurent Crottet

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CHASSEURSDE DRONES

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«LES DRONES SONT UNE MENACE»

SÉCURITÉ Une société suisse s’est spécialisée dans la protection contre les engins volants. Aéroports, prisons, forces spéciales, ses clients sont nombreux.

Le bourdonnement stri-dent retentit à l’hori-zon. Immédiatement,un point rouge luit surl’écran de l’opérateur

assis à l’arrière du van noir parquédans la campagne zougoise. Grâceau radar, le spécialiste suit à latrace les évolutions du drone dansle ciel. Une fois la menace repérée,l’équipe de la société suisse de sé-curité Meritis a moins de deux mi-nutes pour l’intercepter. Si néces-saire, l’opération est même réali-sable en quatre secondes.Première étape, l’identifier grâceaux caméras installées sur le toitdu véhicule. «Nous zoomons surl’engin volant, cela nous permetnotamment de savoir s’il y a unecharge explosive dessus», expli-que Yann*, responsable du déve-

loppement pour l’entreprise. LeZurichois de 47 ans prend ensuitela décision de neutraliser l’intrus.Pour cela, plusieurs solutionss’offrent à lui. «Un drone utilisetrois fréquences, une pour le voltélécommandé, une pour envoyerles images au sol et un dernier si-gnal pour se repérer, le GPS. Avecnos antennes, nous pouvons choi-sir de brouiller les trois signaux ouseulement les deux premiers»,détaille l’ingénieur de formation.

Les conséquences ne seront pasles mêmes. «Si vous voulez lefaire descendre immédiatement,par exemple parce que vous avezpeur d’une collision aérienne avecun avion ou un hélicoptère, vouscoupez tout. L’appareil sera aveu-gle et il va atterrir en urgence»,précise Yann. À l’inverse, si le si-

gnal GPS n’est pas interrompu,l’engin volant va d’abord essayerde retrouver du réseau en prenantde l’altitude, puis va automati-quement revenir à son point dedépart. «Nous, si on veut savoiroù est le pilote, on le suit sur le ra-dar et on appelle la police ou l’ar-mée pour leur donner les coor-données.»

Un million de francs la minute

Si les hommes de Meritis chas-sent ainsi les drones, ce n’est paspour le sport. «Ce sont des me-naces pour les infrastructuressensibles. Les risques vont del’accident aux attaques terroris-tes en passant par l’espionnage»,affirme Yann. Zones militaires,centrales nucléaires, centres de

SUITE EN PAGE 4 $

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DES AIGLESANTIDRONEAux Pays-Bas,

la police a tenté

de dresser des aigles à

intercepter les drones.

Même si elle a décidé

en décembre d’aban-

donner un projet jugé

trop coûteux, d’autres

polices s’y intéressent

encore. Notamment

celle de Genève.

Geroges Gobet/AFP

REPORTAGE 3MERCREDI 31 JANVIER 2018 LE MATIN

BROUILLAGE

Pour neutraliser les intrusvolants, le fusil émet

un signal coupantles communications

de l’appareil, le forçantainsi à atterrir

ou à faire demi-tour.

PROTECTION À Cham (ZG), la société Meritis a développéun système antidrones existant tant en version portable (le fusil), mobile(le véhicule) ou fixe.

CHASSEURS DE DRONES

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REPORTAGE 4MERCREDI 31 JANVIER 2018LE MATIN

nes», détaille-t-il. Pour répondreà cette demande grandissante, denombreuses entreprises se lancentdans le domaine. «Désormais,c’est tendance de lutter contre lesdrones, nous avons beaucoup deconcurrents, mais en réalité ceuxqui sont véritablement sérieux etefficaces tiennent sur les doigtsd’une seule main», assure Mar-

nom», glisse-t-il, tout en obser-vant la démonstration qui suit soncours.

Dans tous les cas, le directeur deMeritis assure que le marché estaujourd’hui immense. «C’est unemenace de plus en plus impor-tante. Les troupes américaines enIrak et en Syrie recensent trenteincidents par semaine liés aux dro-

tés. L’ingénieur souligne égale-ment la possibilité d’ajouter descaméras infrarouges ou thermiquesau dispositif.

Pas une priorité en SuisseEt combien coûte une telle instal-lation? «Je ne sais pas si c’est clas-sifié…» hésite-t-il. Un peu àl’écart, son patron articule, lui, unnombre. «À l’achat, notre systèmecoûte au minimum un demi-mil-lion de francs. Cela peut grimperjusqu’à plusieurs millions, selonles options.» Marcel Thoma souli-gne que son entreprise est princi-palement active aux États-Unisainsi qu’au Moyen-Orient. Mais iln’en dira pas plus sur ses clients. Ilfaut dire que ce colonel de l’arméesuisse, qui a longtemps évoluédans le monde de la finance, aimela discrétion. «Nous travaillonsavec les forces spéciales de plu-sieurs pays mais nous n’allons pasle mettre en avant, ni donner leur

données, ambassades, prisons: lesclients potentiels de Meritis sontaussi nombreux que variés. «C’estégalement un enjeu importantpour les aéroports. Ils sont à la re-cherche de solutions parce que celaleur coûte une fortune d’interrom-pre le trafic aérien quand un dronepénètre là où il ne devrait pas.» ÀDubaï, par exemple, les pistes ontdû être plusieurs fois fermées parle passé. Coût de l’opération, unmillion de francs par minute.

«C’est classifié…»«Ce que nous offrons, c’est la pro-tection complète d’un périmètredéfini», confirme Marcel Thoma,directeur de Meritis. Justement, celundi, la démonstration à laquellenous assistons est organisée pourde potentiels nouveaux clients.«C’est la délégation d’un pays…»confie seulement celui qui a fondél’entreprise il y a dix-sept ans, re-fusant d’en dire plus. Attentive auxexplications de Yann, la demi-douzaine de personnes, rassembléeprès de l’écran géant accroché àl’arrière du van, s’intéresse de prèsau dispositif mis au point par la so-ciété suisse et constamment amé-lioré depuis quatre ans. Celui-ci

offre notamment la possibilité decréer un dôme de protection d’unpérimètre allant de 300 m à 10 km,dans lequel aucun drone ne peutpénétrer. Et si un engin indésirablese trouve déjà à l’intérieur, celui-cisera forcé à atterrir. Cette solutionest, par exemple, utilisée pour sé-curiser des lieux stratégiques, degrands événements ou, dans saversion mobile, des convois de per-sonnalités.

Le radar de Meritis, initialementconçu pour la détection desoiseaux, permet aussi de repérer undrone jusqu’à 3 kilomètres de dis-tance, le distinguant d’un volatilegrâce à la rotation de ses hélices.«Selon l’environnement, le radarpeut être remplacé par des pan-neaux acoustiques qui ont unemoins grande portée mais qui peu-vent détecter les appareils derrièreles arbres ou les murs, là où les on-des du radar ne vont pas», conti-nue Yann à l’intention de ses invi-

«DU TERRORISME À L’ESPIONN

CONTRÔLE La banquette

arrière du véhicule a été

transformée en un poste

de commande affichant

notamment les images

du radar et des caméras.

' SUITE DE LA PAGE 3UN IMPRESSIONNANT NETTOYEUR DU CIEL

BATTERIES ET ANTENNES

13 KILOS Pour être opérationnelle, l’arme doit être reliée à des antennes radio età des batteries placées dans le sac à dos de l’utilisateur. Poids de l’ensemble: plus de treize kilos.

FUSIL ANTIDRONE

LE SKYCLEANER Le nettoyeur du ciel a été assemblé par les équipes de Meritis à partir d’un fusil de tir de précision et du matériel radio.

>>

cel Thoma, précisant que la ré-putation de qualité et de fiabilitéhelvétique a été très importantepour le succès de son entreprise.

Paradoxalement, il remarqueque la protection contre les enginsvolants ne fait pas partie des priori-tés dans notre pays. «Nous avonsparfois été engagés pour des événe-ments importants, mais, en Suisse,les gens n’ont pas conscience desrisques parce que, pour le moment,il ne s’est rien passé. Ici, un dronesurvole une centrale nucléaire etpersonne ne s’inquiète», constate-t-il. Derrière lui, la démonstrationtouche à sa fin. Pour achever deconvaincre la mystérieuse déléga-tion, l’un des employés dégaine leSky Cleaner, la version portable deleur système. Avec ce fusil anti-drone futuriste, capable debrouiller le signal radio jusqu’à

4 km de distance, il braque l’enginvolant face à lui pour le forcer

à atterrir. «Le faisceau estassez large, il n’y a pas

vraiment besoin deviser mais il a un

côté impression-nant qui plaît auxclients», souritYann.

● TEXTE

FABIEN FEISSLI

[email protected]

● PHOTOS

LAURENT CROTTET

* Prénom d’emprunt,pour raisons de sécurité

REPORTAGE 5MERCREDI 31 JANVIER 2018 LE MATIN

AGE»

L'EXPERT

FRÉDÉRICESPOSITODirecteur de l’Observatoirede la sécurité à l’Université de Genève

Jacques Erard/UNIGE

gLes drones augmentent l’insécurité»Les drones représentent-ils vraiment une menace? Ils peuvent être utilisés

comme des armes surtout

dans des zones de conflit.

Par exemple, les terroristes

de Daech ont déjà eu recours

à des drones piégés, en Irak

notamment. Leur faible coût,

entre 150 et 1500 francs, les

rend d’autant plus attractifs.

Comme souvent, cela montre

que les éléments de loisirs

peuvent être pervertis

à d’autres fins.

À quel point sont-ils dange-reux? Pour l’instant, ils ont une

limitation technique qui est leur

taille. Ils ne vont pas occasion-

ner des dégâts comparables à

celui d’une bombe d’un missile.

Mais cela reste un outil intéres-

sant, mobile, léger, discret, et

qui a la particularité de pouvoir

être utilisé à distance, ce

qui limite les risques pour celui

qui le manie. C’est donc

une arme assez significa-

tive et capable d’augmen-

ter l’insécurité ambiante.

La Suisse est-elle prête à faire face à ce risque? Il est toujours difficile

d’évaluer un risque mais,

aujourd’hui, il me semble

maîtrisé. Tout d’abord, je pense

que la Suisse n’est pas aussi

exposée que le Moyen-Orient

ou certaines villes américaines.

De plus, ces derniers temps,

il y a eu une prise de conscience

de la problématique de la part

des autorités. En tout cas,

c’est une préoccupation

qui est intégrée par les forces

de l’ordre et les organisateurs

lors de la préparation des

grands événements en Suisse.

gNous travaillonsavec les forces

spéciales de plusieurs pays»

Marcel Thoma, fondateur de Meritis

DÉTECTION Sur le toit du véhicule,

le radar et le panneau acoustique

permettent de repérer

l’arrivée des drones.

DISTANCE DE TIR

4 KM Pour forcer les drones à atterrir, le fusil émet un signal brouillant leurs communications. Celui-ci a une portée de tir de 4 kilomètres.

CHASSEURS DE DRONES

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ck

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